ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de l'environnement et du développement durable
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 3 avril 2012
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour, chers collègues.
Je souhaite à chacun de vous ainsi qu’à nos témoins la bienvenue à la 29e séance du Comité permanent de l'environnement et du développement durable.
Nous accueillons aujourd'hui MM. Hummel et Young afin qu'ils nous communiquent certains renseignements pendant que nous élaborons notre plan de conservation national.
Avant d'entendre les témoins, j'aimerais annoncer la bonne nouvelle, à savoir que le financement a été autorisé, à condition que la Chambre l'approuve. Il doit maintenant faire l'objet d'un vote à la Chambre.
Ce sont donc d'excellentes nouvelles.
Des voix: Bravo!
Une voix: Bien fait.
Une voix: Bravo.
Une voix: Bon travail.
Le président: Toutefois, une condition a été imposée. Bien entendu, il y a eu le célèbre combat de boxe, lequel a représenté une bonne façon de recueillir des fonds. Pour le prochain combat, Mme Leslie et Rempel ont convenu de s’affronter dans le ring.
Des voix: Oh, oh!
Le président: C’est la condition qui a été imposée. Par conséquent, nous nous avons hâte qu’il ait lieu.
Bienvenue, MM. Young et Hummel.
Je pense que nous allons commencer par M. Hummel.
Vous disposez de 10 minutes. Vous pouvez y aller.
Merci, monsieur le président. Je vous remercie d'avoir invité des représentants de l’Entente sur la forêt boréale canadienne à comparaître devant vous aujourd'hui afin de contribuer à votre étude sur l'élaboration d'un plan de conservation national pour le Canada.
De nombreux aspects de ce plan mériteraient d'être commentés mais, comme je dispose seulement de 10 minutes, j'ai décidé de mettre l'accent sur deux d'entre eux. Premièrement, nous pensons que les initiatives de conservation qui figurent dans ce plan devraient contribuer tant à l'économie qu’à l'écologie de notre pays. Deuxièmement, nous souhaitons que la direction et la mise en oeuvre de cette initiative ne relèvent pas uniquement du gouvernement fédéral et que ce dernier partage plutôt ces responsabilités avec les autres, en particulier avec le secteur privé, les organisations non gouvernementales, les provinces et les dirigeants autochtones.
Pour vous aider à comprendre pourquoi ces deux questions sont prioritaires pour nous, permettez-moi d'abord de dire quelques mots à propos de l’EFBC.
Cette entente a été signée officiellement en mai 2010 – notre deuxième anniversaire aura donc lieu le mois prochain. L’entente s’applique à 75 millions d’hectares de forêt, soit 80 p. 100 des forêts boréales du Canada octroyées par contrat. Par conséquent, elle est de loin l’entente de conservation de forêts la plus importante du monde, et elle est absolument propre au Canada. Elle regroupe 23 des plus importantes entreprises forestières du Canada, qui sont membres de l’Association des produits forestiers du Canada, l’APFC, et neuf ONG de premier plan. Avant la signature de cette entente, ces deux camps s’affrontaient depuis des dizaines d’années.
Ensemble, ces signataires ont convenu de prendre un certain nombre de mesures, dont les suivantes: reporter les activités industrielles qui devaient se dérouler sur près de 30 millions d’hectares afin de donner aux gens le temps d’élaborer des plans pour protéger le caribou des bois; mettre un terme aux hostilités manifestées sur le marché international; appliquer les meilleures pratiques d’aménagement forestier sur la partie de la forêt qui sera exploitée; et, ce qui importe le plus, travailler plus souvent ensemble que séparément.
Bien que les trois premiers objectifs de notre entente portant sur la conservation aient grandement attiré l’attention du public, les objectifs 5 et 6 ayant trait à l’économie sont tout aussi importants. Ces derniers visent à produire les résultats suivants, que je cite mot pour mot:
une prospérité plus grande pour le secteur forestier canadien et les collectivités qui en dépendent;
la reconnaissance, par les marchés (clients, investisseurs et consommateurs), de l’EFBC et de son application d’une manière qui avantage manifestement les membres de l’APFC et leurs produits tirés de la forêt boréale.
Je tiens à faire valoir que les protecteurs de l’environnement canadien et le plan de conservation canadien doivent être en mesure de protéger la biodiversité tout en favorisant la prospérité économique. En fait, il est beaucoup plus facile de faire progresser l’un de ces objectifs si l’on ne cesse jamais de prêter attention à l’autre. De plus, sur le plan pratique, il est toujours plus difficile, voire impossible, de convaincre les gouvernements de prendre des mesures de conservation s’ils croient que de telles mesures entraîneront une perte économique nette.
Les environnementalistes aiment bien demander que ceux qui tirent parti du développement économique tiennent compte des conséquences environnementales de leurs activités et ce, avec raison. Je crois que, maintenant, la plupart des entreprises le font soit parce qu’elles n’ont pas le choix, soit parce que cela fait vraiment partie de la culture de leur organisation, soit pour les deux raisons. Toutefois, l’EFBC assure également l’inverse, à savoir qu’on tentera sincèrement de s’assurer que les initiatives environnementales apporteront des avantages économiques — parce que ce n’est pas un péché de vouloir un emploi. Les bûcherons, les mineurs, les agriculteurs, les chasseurs et les pêcheurs commerciaux ne sont pas des incarnations du diable sur le plan environnemental. Au contraire, ces gens devraient être les alliés naturels des protecteurs de l’environnement, parce que leur gagne-pain dépend de l’approche adoptée pour garantir la conservation ou la durabilité à long terme des ressources naturelles qui assurent leur subsistance. On devrait se servir du fait qu’ils ont intérêt à ce que les ressources subsistent pour les motiver à participer à leur conservation.
Par conséquent, nous, les participants à l’EFBC, recommandons que le plan de conservation national repose sur des principes tant économiques qu’écologiques. Nous croyons que notre entente montre concrètement que cet équilibre peut être réalisé — en collaborant activement plutôt qu’en se lançant mutuellement des grenades médiatiques à distance. Ce n’est pas facile, mais c’est possible.
En outre, non seulement la plupart des propositions de conservation devraient rapporter des avantages économiques quantifiables, mais elles en rapportent effectivement, ce que reconnaissent maintenant les entreprises canadiennes de premier plan ainsi que les décideurs gouvernementaux. Bien entendu, il est essentiel d’estimer correctement la valeur des services écologiques chaque fois qu’on compare les coûts aux avantages.
Ces principes s’appliquent évidemment aux terres et aux plans d’eau canadiens exploités, lesquels représentent une importante priorité pour l’EFBC et pour un plan de conservation national. Ces zones aménagées peuvent et doivent apporter une contribution non négligeable à la conservation de la biodiversité.
Cela étant dit, veuillez noter que l’EFBC met également l’accent sur les zones protégées, tout comme tout plan national devrait le faire, en particulier au Canada, parce que notre pays est rapidement en trait de devenir l’une des dernières réserves naturelles mondiales vraiment sauvages, dont nous sommes tous originaires au bout du compte
Je prédis que les dirigeants, qui ont prévu cela au cours de la présente décennie et qui ont pris des mesures pour conserver dans leur état naturel de vastes espaces représentatifs de notre pays, seront perçus par les générations futures comme les protecteurs de ressources purement canadiennes qui sont devenues rares à l’échelle mondiale.
Je prédis en plus que la nature aura non seulement une extrême valeur culturelle et spirituelle, mais aussi une valeur économique considérable qui dépassera de loin tout ce qu’on prévoit en ce moment. Appelez-le l’avantage concurrentiel naturel du Canada, si vous voulez. Il sera tout aussi important que nos ressources industrielles.
Si vous me permettez d’ajouter une note personnelle, je dirais que, dans le cadre du programme de conservation de notre pays, j’ai eu le privilège de collaborer avec le gouvernement et le premier ministre actuels et que des zones terrestres et aquatiques protégées ont été élargies substantiellement partout au Canada. Certaines de ces extensions ont été annoncées par M. Harper lui-même, comme celle du parc national Hahanni ainsi que l’établissement d’une aire marine nationale de conservation d’un million d’hectares dans la partie occidentale du lac Supérieur, soit la réserve d’eau douce la plus importante du monde.
Le présent gouvernement a également soustrait à des fins de conservation le plus grand terrain de l’histoire du Canada, soit quelque 10 millions d’hectares de forêt surtout boréale situés autour du Grand Lac des Esclaves. J’espère que le plan de conservation national continuera sur cette lancée.
La plupart de ces initiatives ont été menées par des Premières nations, dont les traités et les droits constitutionnels doivent être respectés au moyen d’un plan national. Les mesures de conservation devraient être défendues par les gens qu’elles touchent le plus et non imposées, car leur imposition débouche seulement sur du ressentiment et sur le sentiment de ne pas être parties prenantes aux initiatives. Après tout, il s’agit de leur territoire et, plus que toute autre personne, ils devraient pouvoir bénéficier de ces mesures tant sur le plan culturel que sur le plan économique. Par conséquent, nous, les participants à l’EFBC, nous nous efforçons de travailler en collaboration avec les communautés autochtones, peu importe où nos projets se déroulent.
Je vais maintenant conclure en parlant brièvement du deuxième argument majeur de mon exposé, notamment le partage de la direction.
Au cours des 30 dernières années, les initiatives de conservation les plus inspirantes et les plus productives n’ont pas été imaginées ou dirigées par des gouvernements, mais plutôt par des organisations non gouvernementales. En voici quelques exemples: le Plan nord-américain de gestion de la sauvagine de 1,5 milliard de dollars qui a été dirigé par Canards illimités Canada; la campagne sur les espaces menacés menée par le WWF, qui a donné naissance à plus d’un millier de nouvelles réserves et qui a eu pour effet de doubler la superficie protégée au Canada; le Programme de conservation des zones naturelles que Conservation de la nature Canada a pris l’initiative d’organiser et qui permet d’acquérir des terrains privés; et, à mon avis, l’Entente sur la forêt boréale du Canada qui a été mise en oeuvre par l’APFC et des ONG qui se sont dissociées de leurs pairs pour procéder différemment.
Je ne dis pas que les gouvernements n’ont pas été et ne continuent pas d’être indispensables à la réussite de toutes ces initiatives, parce qu’ils le sont assurément. Après tout, les gouvernements ont le pouvoir de disposer de plus de 90 p. 100 des terres et des eaux de notre pays. De plus, ils peuvent grandement influencer ce qui se passe sur les terrains privés. Mais la vision initiale, l’ambition, l’enthousiasme et le capital intellectuel — en d’autres termes la direction — requis pour mettre en oeuvre ces initiatives transformatrices ne provenaient pas du gouvernement.
Pour être franc, les gens concernés ont décidé de ne pas passer les 10 prochaines années à se plaindre simplement du manque d’initiative des gouvernements, mais plutôt d’assumer la direction des projets en partenariat avec les gouvernements. Cette approche à l’égard de la direction peut capter l’attention du public d’une manière que les initiatives menées uniquement par les gouvernements ont du mal à imiter. Elle peut également apporter des ressources financières considérables, des compétences techniques, des capacités de promotion, un réseau de communication ainsi que l’agilité et la crédibilité supérieures des tiers qui ne sont pas habituellement à la disposition des gouvernements.
Nous disons souvent que la conservation est un projet trop vaste pour être entrepris seul, mais nous tenons rarement compte de ce fait. Certes, il est important que chaque partie joue son rôle et assume ses responsabilités, y compris le gouvernement fédéral. Si vous souhaitez vraiment avoir un effet bénéfique, je vous exhorte à partager la responsabilité d’élaborer et de mettre en oeuvre un plan de conservation national pour le Canada. En faisant cela, vous ne mobiliserez pas les autres simplement par courtoisie; vous ferez participer les gens qui devraient être expressément responsables de son succès…
En tenant ces audiences et en organisant une rencontre avec le ministre Kent dans le cadre de la table ronde multipartite initiale, vous nous donnez toutes les raisons de croire que c’est ce que vous voulez faire. Nous, les participants à l’EFBC, avons hâte de contribuer comme nous le pouvons à l’élaboration constructive d’un plan de conservation national efficace.
Merci. C’est avec plaisir que je répondrai à toutes les questions que les membres du comité pourraient avoir.
Merci, monsieur Hummel.
Ensuite, nous allons entendre l’Association nationale de foresterie autochtone.
Monsieur Young, vous avez jusqu’à dix minutes pour donner votre exposé.
Merci, monsieur le président.
J’aimerais remercier le comité permanent de nous avoir invités à contribuer à l’étude concernant l’élaboration d’un plan de conservation national, que je dénommerai ensuite « PCN ». Harry Bombay, le directeur exécutif de l’Association nationale de foresterie autochtone, l’ANFA, m’a chargé de vous transmettre ses excuses.
Je m’appelle Bradley Young, et je suis le conseiller principal de la politique de l’ANFA. De plus, je suis membre de la Nation des Cris de Opaskwayak située dans le Nord du Manitoba.
J'aimerais également reconnaître le territoire traditionnel de la Nation algonquine, Kichi Sipi Aski, qu’on appelle aussi la région d’Ottawa.
Premièrement, voici quelques renseignements généraux sur l’ANFA. L’association est une organisation non gouvernementale dirigée par des Premières nations qui est axée sur la recherche et sur des activités de défense des droits dans le secteur forestier. Nous préconisons des cadres politiques qui respecteront les droits, les valeurs et les intérêts des peuples autochtones et qui entraîneront un partage plus équitable des bénéfices engendrés par les vastes ressources forestières du territoire que nous appelons le Canada.
Compte tenu des réalités économiques, cela suppose de plus en plus qu’il faudra repenser le vaste secteur forestier et, depuis un certain temps, il est clair que la conservation devra faire partie de cette initiative, en particulier dans le contexte de l’engagement des Premières nations.
D’après ce que nous avons observé jusqu’à maintenant, les Premières nations qui vivent dans la forêt envisagent cette question dans le cadre d’une intendance des forêts, ce qui sous-entend des activités économiques ainsi que des activités de conservation.
Alors que la lutte contre le changement climatique, le développement économique, la durabilité et diverses visions de prospérité convergent vers le même terrain boisé, si les personnes appropriées se rencontraient et produisaient un PCN bien pensé, bien débattu et bien financé, celui-ci pourrait assurer la coordination des activités.
Compte tenu du fait que, selon la Constitution, le gouvernement fédéral est responsable des « Indiens et des terres réservées pour les Indiens » et que la plupart des collectivités des Premières nations sont établies dans nos forêts, on devrait créer en priorité les conditions requises pour que les Autochtones puissent connaître un développement économique axé sur la forêt. Le nouveau Cadre fédéral pour le développement économique des Autochtones ne tient pas compte de cet aspect. Alors que le PCN se concrétise et risque d’avoir des répercussions sur le territoire forestier des Autochtones et sur les terres qui leur ont été cédées en vertu d’un traité, il faudrait éviter que ces éléments soient contrôlés de la même manière, en particulier si l’on tient compte du statut actuel et futur du Canada à l’égard de diverses conventions internationales ayant force exécutoire et portant sur l’environnement, le développement, la diversité biologique, les droits de la personne et les droits des peuples autochtones.
Par exemple, l’article 8 de la Convention sur la diversité biologique stipule que chaque nation doit désigner des zones protégées, après avoir consulté les peuples autochtones et obtenu leur consentement, et doit partager avec eux tout avantage découlant de toute activité connexe.
Qu’ont fait les Premières nations en matière d’intendance des forêts qui témoigne de leur engagement précoce à l’égard de la conservation?
En 2007, l’ANFA a calculé que les Premières nations géraient au total 5,5 millions d’hectares de terrain, y compris des réserves fédérales et des terres provinciales détenues par les Premières nations en vertu de droits de tenure forestière. Lorsqu’on prend cela en considération et qu’on y ajoute les gains réalisés grâce à des approches novatrices en matière de conservation, il devient apparent que de vastes terrains supplémentaires se sont ajoutés aux territoires traditionnels des Premières nations. Prenez deux des initiatives d’intendance et de conservation des forêts les plus emblématiques de la dernière décennie: la forêt pluviale de Great Bear, en Colombie-Britannique, qui compte 6,4 millions d’hectares; et l’initiative Pimachiowin Aki au Manitoba et en Ontario, qui englobe 4,3 millions d’hectares. Grâce à ces efforts, 10,7 millions d’hectares de terres forestières gérées ou cogérées par les Premières nations sont venus s’ajouter aux autres depuis que nous avons mené notre étude en 2007.
Par conséquent, en 2012, les terres gérées par les Premières nations totalisent 16,2 millions d’hectares, soit une hausse substantielle de 294 p. 100. Cela équivaut à 162 000 kilomètres carrés, soit à peu près la superficie de l’Irlande et combinée à celle de l’Écosse.
Il est clair que les initiatives de conservation menées par les Premières nations ont fait avancer les pratiques durables d’aménagement des forêts en apportant des modifications aux activités actuelles de développement des forêts et des ressources naturelles. On adapte les activités forestières traditionnelles afin qu’elles respectent les intérêts des Autochtones, et on accorde la priorité aux fragiles utilisations biologiques, spirituelles et traditionnelles. Bien que des non-Autochtones aient leur mot à dire dans la planification et l’aménagement de ces zones, ces activités sont négociées par des représentants autochtones et garanties par un financement durable généré par des fiducies contrôlées par des Premières nations.
Une telle approche en matière de conservation réduit au minimum le risque de créer des réfugiés de la conservation, c’est-à-dire des Autochtones ou des citoyens locaux qui sont expulsés de leur terre d’origine vers de nouveaux parcs fortifiés ou qui y ont un accès restreint parce que celle-ci doit être protégée.
De notre point de vue, l'idée de « protéger le milieu sauvage à tout prix » n'est pas une politique saine. De nombreux anciens partout dans le monde considèrent l'approche de la forteresse de la conservation comme le fait de « protéger la terre jusqu'à la mort ». Pourquoi? Retirez les peuples autochtones de l'équation et ou bien le territoire s'atrophie pour se retrouver dans un état moins dynamique du point de vue écologique ou bien il est subjugué par diverses pratiques non durables.
En fait, depuis que les premiers parcs d'exclusion ont été créés il y a 120 ans en vertu de l'approche de la forteresse de conservation, la biodiversité ou le rendement écologique, ou les deux, ont effectivement décliné dans ces régions, comparativement aux résultats écologiques obtenus par la méthode autochtone traditionnelle avant la délimitation. C'est un fait empirique, scientifique et historique que les pratiques autochtones de gestion des terres ont, tout compte fait, entraîné la protection, avec la cohabitation et l'utilisation autochtones, de plus de 95 p. 100 des derniers points névralgiques de biodiversité dans le monde.
Pour revenir à l'économie qui, au Canada, est liée dans une grande mesure à l'interaction entre les humains et les ressources naturelles dans la forêt, les Premières nations ont encore une fois mis à jour cette sensibilité ancienne. Par exemple, la Whitefeather Forest Initiative en Ontario comprend une entreprise forestière bioéconomique innovatrice et établit également la responsabilité des Premières nations en matière de gestion de la forêt, y compris de nombreux sites sensibles déterminés par les détenteurs du savoir traditionnel autochtone.
Sur une base nationale plus étendue, de nombreuses autres collectivités produisent et prévoient exploiter la valeur des services écologiques assurés sur leurs terres boisées traditionnelles. Cela comprend l'échange des droits d'émission de carbone, le stockage et l'approvisionnement en eau et diverses entreprises fondées sur un capital de biodiversité riche et intact. De plus, les marchés pour les produits forestiers non ligneux, comme le sirop d'érable, le riz sauvage et un nombre croissant de spécialités et de remèdes à base de plantes médicinales, continuent de se développer, quoique lentement. Derniers, mais non les moindres, la chasse, la pêche et le trappage dans la forêt continuent de jouer un rôle emblématique dans la plupart des collectivités et jouissent des protections constitutionnelles.
Compte tenu de la pression à la baisse croissante sur les entreprises forestières traditionnelles et de ces gains importants provenant des initiatives de conservation régionales, il est clair que les Premières nations investissant du temps et des ressources limitées dans le développement du secteur forestier ont, devant elles, des voies distinctes qu'elles peuvent emprunter lorsqu'elles analysent les initiatives potentielles dans la forêt. Le développement économique stratégique, la gestion de la conservation complémentaire, les activités traditionnelles et les partenariats de mise en oeuvre semblent constituer la trajectoire générale de cette voie prometteuse. Certaines poursuivent toutes ces voies, d'autres font des agencements et d'autres, encore, se concentrent sur une seule activité.
De plus, il y a d'autres croisements en matière de coordination et d'applicabilité. Compte tenu des projections dans le domaine du développement des autres ressources naturelles au cours des prochaines décennies, qui s'élèvent à plus de 500 milliards de dollars, des pressions convergentes importantes sont apparentes. La plus grande partie de ce développement aura lieu dans la forêt, mais ne touchera pas nécessairement la foresterie comme telle. Les Premières nations sont engagées activement sur de multiples fronts, dans de nombreux projets prévus ou en cours, que ce soit au niveau de l'évaluation, de la négociation, de la contestation, de la proposition, de la modification et de la participation, en plus d'étudier les initiatives de conservation autochtones.
Ainsi, il existe un chevauchement du champ de vision, encore une fois, qui a lieu principalement dans les forêts du Canada — la caractéristique qui nous définit au plan national et notre trésor reconnu internationalement.
En réponse à cette situation, nous sommes en train d'élaborer une carte nationale du développement des ressources naturelles des Premières nations pour fournir un contexte et une portée à cette situation dynamique. Elle sera fondée sur la même excellence utilitaire que celle de nos rapports sur les tenures forestières au Canada, mises à jour pour tenir compte des réalités numériques actuelles.
Dans cet espace, bien qu'il ne soit pas aussi visible que certains autres secteurs, le secteur forestier autochtone est un important segment de l'économie où les peuples autochtones sont en train d'acquérir de l'importance. Grâce aux règlements en matière de revendications territoriales et à l'accès accru aux tenures forestières provinciales, les peuples autochtones ont maintenant accès à des ressources forestières sur un territoire substantiel de plus de 16,2 millions d'hectares de terre par le biais de plus de 300 règlements sui generis comportant un volume combiné de plus de 14 millions de mètres cubes de possibilité annuelle de coupe.
Nous ne récoltons qu'environ le tiers de ce volume. Nous prétendons que de nouveaux marchés doivent être ouverts, appuyés au niveau sectoriel et que des investissements doivent être faits pour partager la prospérité ici. Il est important d'ajouter qu'il n'est pas nécessaire que ces thèmes soient en conflit avec la conservation. Progressivement, d'après beaucoup de gens, ils peuvent se soutenir mutuellement sous une éthique d'intendance des Premières nations.
En terminant, pour promouvoir le plan de conservation national, nous estimons que des développements et des investissements en matière de politiques et de programmes sont nécessaires dans les domaines suivants: secteur forestier autochtone, y compris l'étude d'arrangements novateurs en matière de conservation; et les dialogues des Premières nations au niveau national avec la participation des organismes, des dirigeants et des spécialistes sectoriels du niveau national, provincial et territorial, et communautaire.
Merci beaucoup. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Merci, monsieur Young.
Nous allons maintenant commencer notre tour de questions de sept minutes. Nous aurons quatre intervenants pour vous.
Nous allons commencer par M. Woodworth; vous avez sept minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie nos témoins de leur présence ici aujourd'hui. Il s'agit d'un sujet très important. J'ai été très intéressé par tout ce que vous aviez à dire au sujet de la façon de concilier les objectifs en matière d'économie et de conservation que nous partageons tous.
J'aimerais adresser la plupart de mes questions à M. Hummel. J'ai deux grandes catégories de questions. La première vise simplement à obtenir un peu plus d'information sur l'Entente sur la forêt boréale canadienne et la seconde vise à obtenir des renseignements au sujet de stratégies particulières, si c'est possible.
Étant donné que je n'ai que sept minutes, je vais essayer de poser des questions brèves pour lesquelles il est possible de donner une réponse courte, en commençant par la suivante: dans quelles provinces s'applique l'Entente sur la forêt boréale canadienne?
Elle s'applique dans toutes les provinces dans lesquelles on trouve la forêt boréale, ce qui veut dire toutes les provinces sauf la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard. Nous avons des projets ciblés en Alberta, au Manitoba et en Saskatchewan, de grands projets pilotes en Ontario et un grand projet pilote au Québec. Ce sont des priorités pour nous, mais nous avons du travail en cours dans toutes ces provinces.
Merci.
Votre témoignage parlait de l'Association des produits forestiers du Canada et de certaines organisations environnementales. Pouvez-vous me dire si l'Entente sur la forêt boréale canadienne prévoit une supervision quelconque en ce qui a trait aux activités minières, aux activités touristiques ou aux activités qui ne sont pas liées à ce que je considérerais comme les produits forestiers traditionnels?
Je suis désolé. Voulez-vous savoir si nous incluons les activités touristiques et les activités minières dans notre perspective?
Je suppose que la réponse courte, c'est que ces activités ne sont pas des priorités pour nous. Nous nous intéressons aux forêts et à la gestion forestière, mais avant que nous puissions offrir au gouvernement une forme quelconque d'entente globale ou que nous puissions lui faire des propositions auxquelles il est vraisemblable qu'il donne suite, nous devons être en mesure de démontrer que nous avons pris en considération toutes les activités qui se déroulent dans la forêt. Cela comprend évidemment les activités autochtones. Cela comprend souvent les activités touristiques. Cela comprend moins souvent les activités minières.
Alors, si un promoteur voulait entreprendre un projet minier à l'intérieur d'une forêt que vous gérez, est-ce que votre organisme participerait ou est-ce que cette participation outrepasserait votre mandat?
Nous n'aurions rien à dire sur la question de savoir si ce projet peut ou non aller de l'avant, mais en parlant au gouvernement des plans de conservation et des plans de gestion pour la région, nous aurions certainement à prendre en considération les activités minières. Cela comprend les activités pétrolières et gazières. Par exemple, dans certaines régions de l'Alberta où nous travaillons, les activités énergétiques constituent l'activité dominante dans la forêt.
Très bien.
Vous avez parlé de la participation des Autochtones. Parmi ces neufs ONG compte-t-on des groupes autochtones? Ou comment obtenez-vous la participation des collectivités autochtones dans votre travail?
Aucune d'entre elles n'est un groupe autochtone, mais certaines d'entre elles embauchent des Autochtones et la totalité d'entre elles travaillent en étroite collaboration avec les peuples autochtones.
Très bien.
Comment choisit-on le territoire qui relèvera de l'Entente sur la forêt boréale canadienne?
Il s'agit de la somme totale des unités d'aménagement forestier relevant de la gestion des entreprises membres de l'Association des produits forestiers du Canada.
M. Stephen Woodworth: Je comprends.
M. Monte Hummel: Nous parlons ici de la forêt boréale octroyée par contrat aux membres.
Très bien. Merci.
Pouvez-vous me donner un exemple, disons, du programme d'aménagement le plus précis qui décrirait la mise en oeuvre réelle de l'entente?
Certainement. Nous travaillons sur un programme dans le nord-est de l'Ontario en ce moment, par exemple, où nous retrouvons des intérêts et des collectivités des Premières nations, ainsi qu'une utilisation et un territoire traditionnels. Le caribou des bois est présent dans ce territoire. Il y a deux sociétés forestières qui possèdent des plans d'aménagement forestier de très grande envergure pour les forêts qu'elles récoltent à des fins commerciales. Nous parlons d'environ 2 à 3 millions d'hectares. C'est une très grande superficie.
En travaillant avec les sociétés et avec les collectivités, notre défi a été de présenter un plan qui respecte les besoins du caribou des bois, qui respecte les aspirations des collectivités qui vivent sur ce territoire et, également, qui permet de répondre aux besoins des sociétés forestières concernées en matière de volume de bois récolté.
Nous avons proposé une approche par zone, ce qui est nouveau. La province a une approche qui correspond à une sorte de coupe en mosaïque. Nous avons proposé une approche par zone où la forêt intacte est laissée intacte et où la partie déjà perturbée fait l'objet d'une gestion plus intensive. Je veux insister sur le fait que ce genre de réflexion, de négociation et de discussion avec les sociétés et les collectivités doit donner des résultats non seulement du point de vue de la conservation, mais également du point de vue des mètres cubes dont les scieries ont besoin et des utilisations traditionnelles des collectivités. Il s'agit d'une approche différente, que nous soumettons au gouvernement en disant que nous pensons que nous pouvons respecter les exigences du gouvernement en matière de gestion à long terme dans cette région. Nous respectons vos objectifs globaux, mais grâce à des discussions avec les sociétés, les collectivités et d'autres intérêts, nous pensons que nous avons une manière différente d'y parvenir. Souvent la situation est polarisée et les gens sont montés les uns contre les autres. Ce que nous essayons de faire, c'est d'offrir une solution au gouvernement. Il appartient au gouvernement de décider s'il l'accepte et s'il lui donnera suite.
En ce qui concerne la stratégie précise que vous avez mentionnée pour le caribou des bois, avez-vous réussi à établir un consensus?
Nous pensons avoir établi un consensus entre certaines des parties. En fait, nous discutons toujours de quelque chose que nous n'avons pas encore mis sur la table — nous sommes encore en train de mettre tout cela ensemble —, mais nous sommes très près du but. Tout indique que cela se réalisera.
Cela fait intervenir beaucoup de travail technique, de modélisation, de régimes de perturbation et d'analyses de l'approvisionnement en bois. Il s'agit d'un travail très technique. Je suis un forestier de formation et cela est très utile. Permettez-moi de le formuler de cette manière.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie également messieurs les témoins.
Je m'adresse à M. Young pour commencer, étant donné que M. Hummel a eu l'honneur de répondre aux premières questions. Par ailleurs, monsieur Hummel, vous pourrez répondre à ma question par la suite.
Comme vous le savez, la conférence des partis signataires de la Convention sur la diversité biologique fait état de 17 p. 100 de conservation pour les zones terrestres et de 10 p. 100 pour les zones marines. Présentement, on est seulement à 10 p. 100 pour les zones terrestres et à 1 p. 100 pour les zones marines au Canada.
Selon vous, quels devraient être les objectifs du Canada? L'objectif devrait-il être de 20 p. 100, d'ici à 2020? Quels devraient être les objectifs pour les zones terrestres et les zones marines?
[Traduction]
Merci de la question.
En termes de réponses techniques précises, je n'ai pas de chiffres auxquels je peux faire référence. Ce qui devrait arriver, c'est que les Premières nations au niveau local, les nations au niveau régional et les groupes techniques plus vastes des Premières nations qui devraient parler au nom des territoires où ces pourcentages devraient être mis en oeuvre devraient pouvoir participer à un processus vraiment rigoureux qui est, je dirais, codirigé en partie par elles. Plutôt que de travailler en collaboration avec les Premières nations, les divers gouvernements du pays devraient parler avec elles de gouvernement à gouvernement.
Les autres intervenants comme les ONGE ou les groupes de réflexion pourraient ensuite apporter leur contribution par des conseils techniques spécialisés. Étant donné que nous parlons de mettre de côté, de conserver et, essentiellement, d'établir le régime de gestion et d'exploitation opérationnelle de ces territoires à un niveau très élevé, un niveau exécutoire internationalement, il faudrait examiner de très près la rigueur de la participation, de l'engagement et de l'investissement à cet égard.
[Français]
Je vais vous arrêter ici, monsieur Young, et je m'en excuse.
Je vais poursuivre en vous adressant une autre question. L'Initiative boréale canadienne propose de protéger 50 p. 100 des aires protégées de la forêt boréale.
Qu'en pensez-vous? Quel est votre point de vue à ce sujet?
[Traduction]
Nous avons entendu les divers chiffres et, encore une fois, je n'ai rien, et rien n'a été fourni à l'ANFA pour étayer quoi que ce soit dans ces discussions. En termes d'objectif global de 50 p. 100, il y a plusieurs façons de plumer ce canard, pour ainsi dire.
Encore une fois, je voudrais vous mettre en garde; lorsque vous parlez essentiellement de déterminer le type de développement et les types d'activités qui peuvent être entrepris sur les terres traditionnelles des Premières nations… les gens ne vont pas déménager de leur territoire dans un proche avenir. Une position de chef de file pour ces collectivités et pour les personnes touchées, les titulaires de droits, devait être mise en place immédiatement pour éplucher le chiffre en question, que ce soit 5, 10, 17 ou 50 p. 100. Ces communautés et les voix représentatives doivent être dans une position de chef de file, de gouvernement à gouvernement, qui se prononce sur ces questions.
[Français]
Je vais revenir à vous plus tard.
J'aimerais juste demander à M. Hummel s'il convient de la proportion de 20 p. 100, par exemple, des terres protégées, ou du moins s'il est favorable au fait de suivre les objectifs de la Convention sur la diversité biologique.
Croyez-vous qu'il devrait être indiqué quelque part que le gouvernement du Canada devrait avoir des engagements fermes et absolus en ce qui concerne le pourcentage?
[Traduction]
Je suis bien au fait de cette question du pourcentage et je pense que c'est quelque chose d'un peu artificiel. En fait, je suis d'accord avec beaucoup de choses qu'a dites Bradley. Je pense que le pourcentage de ce qui est conservé ou protégé devrait être le résultat de quelque chose d'autre. Je pense que la clé, ce n'est pas uniquement la quantité, mais la qualité de ce que nous protégeons ou conservons.
J'ai dirigé la campagne sur les espaces menacés. Son objectif était d'établir un système représentatif des aires protégées au Canada représentant toutes les régions naturelles du pays. Durant les années 1990, on dénombrait 486 régions naturelles au Canada. L'idée était simplement d'avoir des échantillons de base représentatifs de notre mosaïque naturelle. C'est un objectif écologique; ce n'est pas un objectif en pourcentage. Alors, je dirais qu'il faut avoir un objectif écologique et un objectif culturel pour travailler avec les Premières nations, et laissons le pourcentage s'établir là où il s'établira.
J'ai également été un des fondateurs du cadre boréal, qui a proposé ce chiffre de 50 p. 100. Je dirais que lorsque les collectivités sont laissées à elles-mêmes, et que les chiffres ne sont pas chuchotés à l'oreille par les grands groupes écologistes, les gros gouvernements ou les grosses sociétés, elles ont eu tendance à protéger environ 50 p. 100 de leur territoire, de leur propre choix. Alors, ces 50 p. 100 ont effectivement un précédent historique.
[Français]
Je vous remercie beaucoup. Pardonnez-moi de vous bousculer un peu, mais mon temps est limité.
J'aurais juste une petite question qui s'adresse à vous deux. Je commence par M. Young.
Devrait-on, dans le plan de conservation national, se soucier des changements climatiques, de la lutte contre les changements climatiques? Cela devrait-il faire partie de ce plan de conservation national?
[Traduction]
Je dirais que cela ne devrait pas se limiter aux changements climatiques, comme je l'ai dit dans mon exposé. Je pense qu'il y a une convergence de questions touchant le territoire qui doivent être prises en considération. Ces questions sont les changements climatiques, le développement économique et les différents secteurs qui participeront à ce développement économique. Il y a également les différentes populations et les mouvements migratoires en termes de migration urbaine ou rurale. Il y a tellement de choses là-dedans. Il y a tellement de complexité que je crois que nous avons vraiment besoin d'objectifs réalisables, fonctionnels en termes de modèle écologique, en termes de Premières nations, en termes de modèle de base des droits respectueux et en termes des autres aspects et acteurs au gouvernement et dans la société qui recherchent la prospérité et le développement économique. Ensuite, je suppose qu'il s'agit de se retrousser les manches et de se mettre au travail.
Pour moi, la seule allusion au plan de conservation national, c'était dans le discours du Trône et ensuite, dans certaines communications préliminaires qui circulent.
Merci, monsieur le président.
Merci à nos témoins.
Je voulais parler un peu de toute la question que vous avez abordée tous les deux, à savoir la croissance économique et la conservation fonctionnant ensemble, côte à côte, et qu'il y a une différenciation. Monsieur Young, vous en avez un peu parlé également. Nous avons toujours cette idée des aires de conservation comme un ensemble de lignes sur une carte autour d'un certain endroit et où on dit que vous pouvez faire ceci, mais pas cela. Comment voyez-vous l'intégration de ces deux éléments, le fait qu'ils travaillent ensemble d'une manière réelle? Donnez-nous simplement un exemple de la façon dont vous les verriez fonctionner ensemble.
D'accord. Merci de votre question.
Concernant les études écologiques traditionnelles, je pense que les communautés autochtones qui habitent ici depuis des temps immémoriaux tendent à établir les zones où ils pratiquent certaines activités. Ils tiennent compte ensuite d'autres considérations.
Je sais par expérience qu'au lieu de délimiter des zones particulières, les gens du Nord du Manitoba collaboraient avec les gestionnaires forestiers locaux, l'entreprise et son contremaître de la communauté ainsi que les sous-traitants. Les activités se déroulaient simplement en dehors des zones sensibles, et la gestion se faisait à l'aide des gens sur le terrain.
En 2012, les choses ont évolué et des ententes ont été conclues. Il y a des objectifs de rendement définis de manière juridique. Je pense que c'est ce qui doit arriver. Il faut d'abord connaître les liens de la communauté avec les terres traditionnelles pour lui parler des occasions qui se présentent.
Dans ma région, nous avons un accord contraignant avec Tolko relatif à une unité d'aménagement forestier. Les entrepreneurs, les sylviculteurs et les planteurs d'arbres ont du mal à garder leur travail. Les gens s'intéressent aux mines qui pourraient être exploitées, mais ils chassent, ils pêchent et ils trappent. Ils aiment l'aspect spirituel des lieux et entretiennent des liens avec les terres traditionnelles.
Voilà comment il faut s'y prendre, selon moi. C'est très pénible pour la communauté. Les ministères responsables ont besoin de beaucoup de ressources et de bonne foi, n'est-ce pas?
Merci.
Monsieur Hummel, vous avez dit dans votre exposé que les forestiers et les pêcheurs étaient par nature des protecteurs de l'environnement. Pour revenir à ce que M. Young vient de dire, vous avez parlé de la façon dont ces gens pouvaient travailler avec la communauté.
Pouvez-vous simplement préciser un peu comment ces deux alliés naturels peuvent collaborer de manière efficace concernant le plan de conservation?
À mon avis, les aspirations des gens s'expriment souvent dans un plan d'utilisation des terres. Je pense que c'est ce dont Bradley parlait aussi.
Un plan d'utilisation des terres doit selon moi refléter l'avenir que les résidants veulent et tenir compte forcément de la conservation et du développement économique. On peut y arriver en établissant des zones et des exigences ou des règles à respecter, mais le plan doit traduire le point de vue et les souhaits des gens locaux.
Je suis convaincu que la conservation n'aura pas la faveur des gens, à moins qu'elle les serve sur le plan économique et culturel. Je suis d'accord pour dire qu'on ne peut pas forcer ceux qui habitent sur place.
La prise en compte à la fois de l'économie et de la conservation constitue la seule option.
Concernant les plans et le pourcentage des aires de conservation, etc., j'imagine que nous avons aussi tendance à établir un parallèle entre la taille des zones et l'importance de notre réussite, si on veut.
Vous pourrez répondre, mais il semble que vous avez tous les deux indiqué que la taille des zones n'était pas ce qui importait le plus. Compte tenu des discussions avec les témoins précédents, je dirais même qu'il faut sensibiliser les citadins aux aires de conservation ou les amener sur place.
Avez-vous des suggestions à cet égard? D'après moi, c'est essentiel que les jeunes de la ville comprennent mieux ce qu'est la conservation.
Vous pourriez répondre brièvement tous les deux.
Vous venez d'aborder une question cruciale, non seulement pour la population en général, mais aussi pour les Autochtones qui sont coupés des terres, de la culture et des enseignements traditionnels, des aînés et des langues autochtones et de la conscience et du bon état d'esprit venant de l'observation d'un cours d'eau, de l'air pur et de l'espace libre.
Je pense que la sensibilisation des citadins, pas seulement des Autochtones, à la véritable source de prospérité, à l'air pur émis par les arbres et à tous les écoservices dont nous profitons sera un aspect essentiel du plan de conservation national.
Mais je ne veux pas prendre trop de temps.
Monte, allez-y.
J'ai grandi dans la forêt du Nord-Ouest de l'Ontario. Je consacre beaucoup de temps à rappeler à mes collègues de l'environnement comment les choses vont se passer dans le Nord s'ils s'y prennent d'une certaine façon.
Je fais partie des deux groupes et je suis conscient de l'écart culturel dont vous avez parlé. Je ne suis pas certain de quelle façon on peut combler cet écart. Au lieu de se blâmer mutuellement et de jeter de l'huile sur le feu, il faut expliquer calmement aux gens du Nord, de la campagne ou des régions côtières la mentalité des citadins, et vice-versa. Le Canada est très diversifié, mais ça peut causer des divisions.
Le parc de la Rouge aménagé dans le Grand Toronto représente une occasion formidable d'amener les élèves se promener, au moins une journée, pour avoir une idée de ce dont nous parlons.
Merci, monsieur le président.
Si vous le permettez, ne devions-nous pas recevoir quatre témoins, aujourd'hui?
Quelqu'un peut-il m'éclairer? J'espère qu'ils viendront à une autre séance.
Nous devions en effet accueillir quatre groupes de témoins, mais un groupe nous a indiqué ce matin qu'il ne pourrait pas se présenter et, juste avant la séance, un autre a dit qu'il n'était pas disponible.
J'aimerais entendre ces groupes. Merci.
Merci à vous deux.
Monsieur Young, j'ai remarqué que vous preniez des notes, lorsque M. Woodworth posait des questions à M. Hummel. Voulez-vous nous faire part de certains commentaires?
D'accord, c'est tout ce que je voulais savoir.
Je n'ai pas très bien compris ce que vous disiez concernant le forum économique autochtone. Pouvez-vous donner des précisions sur ce qu'il ne reflète pas, sur son état actuel et sur la façon dont il pourrait s'améliorer?
Étant donné que 80 p. 100 des Autochtones vivent dans la forêt et qu'il existe des liens entre la prospérité, les mesures pour réduire la pauvreté, l'assiette fiscale et la santé de l'économie rurale, nous espérions profiter d'investissements plus importants et que des fonds soient destinés exclusivement à la foresterie autochtone. Il semble malheureusement qu'on nous a oubliés.
Le directeur général, qui s'est fait opérer pour des problèmes de dos, m'a dit d'insister là-dessus et de laisser savoir qu'il n'y avait pas de temps à perdre.
On peut toujours réparer ses erreurs, non? On peut envisager la foresterie autochtone sous l'angle de l'économie ou de la conservation. C'est ce qui en fait un secteur unique et très large. Bien des options s'offrent à nous pour atteindre les objectifs liés à la forêt.
Merci, monsieur Young.
Que nous recommandez-vous? Soyez le plus clair possible pour que nous en parlions dans le rapport.
Il faut parler des fonds consacrés à la foresterie autochtone. C'est important que les Premières nations à la campagne soient prospères et qu'elles participent à l'économie canadienne, au lieu d'être perçues comme un fardeau.
Faisons en sorte que les Autochtones soient prospères eux aussi.
Merci.
Vous avez ensuite parlé de l'article 8 sur la biodiversité et dit que la participation et le consentement des Autochtones étaient nécessaires. Pouvez-vous parler de ce qu'il en est à l'heure actuelle et de ce qu'il faudrait faire?
Je répète que les recommandations précises nous sont plus utiles.
Nous n'avons pas beaucoup de ressources juridiques à Ottawa, mais la Convention sur la diversité biologique ratifiée par le Canada contient des articles contraignants à l'échelle internationale qui ont un effet direct sur le plan de conservation national. Le consentement, la participation et le partage équitable des bénéfices sont mis de l'avant de façon très claire dans la convention.
Je pense qu'il faut élaborer le plan de conservation avec soin pour qu'il en tienne compte. On ne peut pas y échapper, car la convention est contraignante au niveau international. Mais on ne doit pas s'en inquiéter. Comme Monte l'a dit, les négociations respectueuses et équitables avec les Autochtones permettent souvent d'aller très rapidement au-delà des positions adoptées... pour discuter des intérêts mutuels et du développement qui profitent à tous.
Il faut élaborer un plan de conservation national qui tient compte des alinéas a) et j) de l'article 8.
Vous avez fait mention des réfugiés de la conservation. Pouvez-vous parler de ce qui est arrivé et de ce qu'il faut faire pour prévenir une telle situation?
Veuillez présenter une recommandation très précise.
C'est un sujet très vaste et une partie de l'histoire méconnue de bien des Canadiens. Je suis chanceux, dans la mesure où j'ai fait des études supérieures et j'ai vécu, j'ai joué, j'ai prié, j'ai tout fait dans les montagnes de l'Alberta.
La création des parcs nationaux vers la fin du 19e siècle était un litige majeur avec les Autochtones des plaines du Nord. Je parle des territoires visés par les traités 6, 7 et 8. Présentement, il y a aussi les Premières nations de la Colombie-Britannique. Les terres autochtones utilisées à des fins médicinales, traditionnelles et spirituelles et pour la chasse ont été converties en parcs du jour au lendemain. Les Autochtones en sont exclus et sont poursuivis en justice s'ils y vont. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'ils en ont souffert.
Diverses contestations judiciaires ont été déposées et diverses activités militantes ont eu lieu au fil des ans. Je pense notamment au parc national de Jasper, parce que j'y ai travaillé. On cherche activement à nouer de nouveaux liens.
Il faut d'abord être conscient de l'histoire et tenir de bonnes discussions pour ensuite investir des ressources et vouloir faire les choses différemment.
Merci.
Votre temps est écoulé. Nous allons maintenant entreprendre la deuxième série de questions de cinq minutes, en commençant par Mme Leslie.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci aussi à nos deux témoins. Ce fut très intéressant. J'ai bien aimé entendre vos témoignages.
Ma première question s'adresse à M. Hummel. J'ai été frappée par votre idée de partager le leadership. Vous nous avez dit que les ONG avaient des idées brillantes et innovatrices. J'aimerais que vous nous en parliez un peu plus, à savoir comment on pourrait tirer profit de ces innovations qui voient le jour sur le terrain.
Comment pourrions-nous soutenir ces initiatives? Faudrait-il financer des programmes avec des groupes qui essaient des choses nouvelles? Certaines vont donner des résultats, d'autres pas. Les meilleures vont se démarquer du lot, j'imagine. Quelle serait la meilleure façon de soutenir ces innovations?
C'est une façon de faire. Je vous recommanderais peut-être de faire de l'élaboration du plan un exercice commun, en mettant à contribution différents intervenants. Il n'est pas nécessaire d'en inviter des milliers.
Les personnes prenant part au processus devraient représenter la dizaine de secteurs d'intérêt concernés, et le tout ne devrait pas être orchestré uniquement par le gouvernement. Je pense qu'il faut mettre en place un comité — et je déteste dire cela —pour s'en occuper. À mon avis, il faut que ce soit le produit d'un esprit plus grand que celui du gouvernement seul.
Vous avez tous les deux parlé de consultation, mais de manière différente. Certains font peu de cas du processus de consultation et n'y ont recours que pour régler les derniers détails. Mais je pense qu'il y a une grande différence entre ce genre de consultation et une consultation pertinente, qui permet réellement d'aller chercher ce qui se fait de mieux sur le terrain.
Je suis certain que Bradley aura des commentaires à formuler à ce sujet. Les consultations, l'engagement, les demandes de soutien: ce sont toutes des idées passives.
Je me tiens vraiment occupé dans la vallée du Mackenzie. Vous ne m'entendrez jamais dire que les conservationnistes veulent protéger les remparts. En fait, les conservationnistes appuient le chef de Fort Good Hope, qui veut protéger les remparts. Ces initiatives doivent être dirigées par ceux qui vont en subir les conséquences. C'est une façon de collaborer à l'élaboration des initiatives. Il ne suffit pas de chercher à collaborer avec eux après-coup, parce qu'il est souvent trop tard à ce moment-là. Les gens se disent alors « si on avait participé au processus, les choses auraient été faites différemment ».
Il y a des gens à l'extérieur du gouvernement qui peuvent apporter une réelle énergie positive aux projets. Ils peuvent travailler avec vous à l'élaboration et à la rédaction même d'une proposition, et vous aider à obtenir l'appui de tous ceux qui pourront faire du projet une réussite. C'est ainsi que je vois les choses. Il ne s'agit pas que d'une simple consultation. Je ne parle pas d'engagement non plus... Il ne suffit pas de solliciter les commentaires des gens quand tout est terminé. Il faut plutôt aller les chercher dès le début, pour que l'élaboration du plan soit un exercice commun.
Monsieur Young, est-ce ce à quoi vous faisiez référence? Vous avez employé le terme « consultation », mais peut-être qu'il faudrait en trouver un autre plus approprié.
Oui et non. Je pense que l'intention et la dynamique de travail dont a parlé Monte sont correctes en général. L'aspect juridique des conventions internationales et des traités, l'établissement d'un libre consentement éclairé et préalable, et l'obtention d'un consentement en fonction de la Convention sur la diversité biologique, sont des choses qui vont faire monter d'un cran la nature officielle du processus et nécessiteront une participation aux premières étapes de la planification.
Je sais que toutes les Premières nations, qu'on parle des collectivités ou des organismes provinciaux-territoriaux et des organisations gouvernementales des Premières nations, prennent les conventions internationales très au sérieux. On surveille entre autres le Projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones des Nations Unies — en fait, la déclaration n'est plus à l'état de projet, puisqu'elle a été ratifiée par l'Assemblée générale —, de même que d'autres conventions. Toutes les parties veulent pouvoir finalement dire au gouvernement du Canada « travaillons ensemble ». C'est ce qu'elles souhaitent et elles sont prêtes à faire leur part.
On peut aussi y aller une collectivité à la fois. Les chefs de ces collectivités sont les signataires des droits en question. Ils vont aussi avoir leur propre point de vue sur le sujet. Il faudra tenir compte de tout cela et procéder avec beaucoup de rigueur.
Pour revenir à la consultation, monsieur Hummel, j'aimerais que vous me disiez rapidement quels principes vous avez utilisés pour rapprocher ces deux factions en guerre, pour reprendre votre expression, dans l'élaboration de l'entente. Pourriez-vous nous parler brièvement de ces principes et nous dire comment ils pourraient nous aider à produire un plan national de conservation?
Je vais essayer.
Une chose qui a eu pour effet de nous rapprocher, c'est qu'il n'était plus possible de maintenir le statu quo. C'était carrément épuisant. Les deux parties ne pouvaient en tirer que le pire des deux mondes. On finit par se dire qu'on ne peut plus continuer ainsi.
Sur une note un peu plus positive, je pense que nous avons vu, avec un peu de recul, qu'il était possible de trouver un terrain d'entente. Il est possible de couper des portions de la forêt boréale pour favoriser le développement économique, tout en veillant à la conservation. Il était possible de conjuguer les deux. Des hommes d'État des deux clans ont un jour affirmé qu'il était temps de déposer les armes et de tenter de parvenir à un compromis. Je ne peux pas vraiment être plus précis que cela.
On reconnaît donc qu'il faut chercher l'équilibre entre la gérance environnementale rigoureuse et la croissance économique.
Il s'agit d'un compromis entre les intérêts de chacun.
Un bon négociateur sait écouter l'autre partie et tente le plus possible d'arriver à une entente. Il n'est pas question de croiser les bras et de rester campé sur ses positions sans faire preuve d'ouverture. Si les gens arrivent à se mettre à la place des autres...
J'ai pris part à des exercices où les conservationnistes devaient préparer les propositions liées au développement économique, et les représentants des intérêts économiques devaient préparer les propositions liées à la conservation.
Voilà qui est bien.
J'ai maintenant une question pour M. Young. Vous avez parlé brièvement de l'importance des liens à établir avec le milieu urbain, un sujet que nous avons aussi abordé avec d'autres témoins. C'est un aspect qui semble tous nous intéresser. Vous avez indiqué qu'il fallait tenir compte dans le Plan de conservation national du fossé à combler pour rétablir la connexion entre la nature et les membres des Premières nations vivant en milieu urbain.
Je vous laisse donc un peu de temps pour préciser vos pensées à ce sujet et peut-être nous fournir quelques exemples de programmes qui fonctionnent bien auprès de cette communauté. Il est possible que certains principes guidant ces programmes puissent être étendus à plus grande échelle pour desservir un bassin diversifié de clientèles urbaines.
Le premier exemple qui vient à l'esprit est celui de l'Initiative des centres urbains polyvalents pour les jeunes autochtones. En Alberta, j'ai siégé au sein de l'un des comités de sélection établis pour cette initiative gérée par le ministère du Patrimoine canadien. Nous formulions des conseils quant à l'utilisation des fonds pour les différents programmes culturels en milieu urbain.
Cet objectif de connectivité était justement l'un de nos grands défis. Les programmes étaient conçus pour un déploiement en secteur urbain, mais on souhaitait établir la connexion entre ces jeunes et la nature, leurs racines et leurs cultures traditionnelles.
C'est là qu'il y a une lacune dans la conception et la prestation des programmes. Il faut parvenir à établir ce lien en canalisant de façon positive l'énergie des jeunes pour qu'ils puissent se réapproprier ce territoire. Pour les jeunes de nos grands centres urbains, cet exercice a une forte résonance spirituelle, culturelle et historique.
S'agit-il d'un nouveau programme? Je l'ignore. Au fil des ans, l'ANFA a déployé certains efforts du côté professionnel des choses auprès des forestiers et de différents techniciens en ressources naturelles afin de rétablir cette connexion dans une perspective opérationnelle.
Mais il y a aussi tout l'aspect culturel qui doit être intégré à ces efforts. Cet élément doit être pris en compte dans nos programmes touchant les parcs nationaux, car il n'en existe aucun à ma connaissance qui prévoit d'aller chercher les jeunes dans les centres urbains pour les amener, par exemple, à Jasper.
Vous parlez de ce fossé. Pouvez-vous nous exposer brièvement quelques-unes des difficultés à surmonter pour le combler?
On a besoin de ressources, de gens pour faire le travail et d'un cadre à plus long terme, car ces jeunes ont subi un choc traumatique intergénérationnel. Il faudra donc un certain temps pour renverser la situation et rétablir cette connexion avec leur assise territoriale. Ce n'est pas simplement une affaire d'un an ou deux. Cela doit faire partie des objectifs à long terme.
Merci, monsieur le président.
Merci de votre présentation.
Monsieur Young, pouvez-vous nous expliquer les efforts et les progrès faits par les Premières nations jusqu'à maintenant en ce qui concerne le plan de conservation national? L'association nationale a mentionné, par téléphone, une carte expliquant leurs progrès. Pouvez-vous nous en dire davantage?
[Traduction]
Il n'y a pas encore vraiment eu de travail technique sur le Plan de conservation national. Il en a été question auparavant; on en a parlé dans le discours du Trône; et nous voilà en train d'en discuter au Comité de l'environnement et du développement durable. L'assise territoriale peut servir en quelque sorte de point d'ancrage pour toutes les décisions stratégiques prises à Ottawa pour le Canada. Lorsqu'il se produit quelque chose, c'est toujours sur une base territoriale quelconque.
En réfléchissant au rôle que nous pourrions jouer dans la présente initiative, nous avons misé sur l'excellent travail technique que nous avons réalisé au milieu des années 2000 pour cartographier les terres gérées par les Premières nations — surtout en vertu de concessions forestières provinciales ou territoriales — et fournir des mesures permettant d'établir que l'assise territoriale était bel et bien utilisée de façon tout à fait appropriée. Il y a effectivement de l'exploitation forestière et de la sylviculture, mais bien d'autres activités également.
Nous pouvons maintenant aussi considérer toutes les activités de conservation qui ont été réalisées. On pense notamment à la forêt pluviale de Great Bear et au projet Pimachiowin Aki. Il y a aussi un parc régional où une initiative de conservation est menée avec le concours des Premières nations, mais aussi certains projets de mise en valeur du potentiel minier. Il en va de même pour certains projets d'exploitation pétrolière et gazière et différents autres projets se déroulant sur cette base territoriale. Le tableau est véritablement national, car le plan de conservation aura sans doute un effet dans tous ces secteurs.
Nous voulons témoigner de la présence des Premières nations parallèlement à toutes les autres empreintes marquant cette assise territoriale, puis laisser les parties en cause faire le meilleur usage possible de ces connaissances techniques.
Voilà qui fait deux minutes et demie. Vous avez le temps pour une autre question.
[Français]
De quelle façon voudriez-vous que le gouvernement intègre les Premières nations dans son plan national?
[Traduction]
Il faudra s'entendre au sujet des paramètres légaux entourant le consentement libre, préalable et informé, et j'ai bon espoir qu'on y parviendra.
Je pense que toutes les parties en cause sont de bonne foi. Tous souhaitent des actions un peu plus proactives sur le terrain, et cet esprit de bonne volonté m'apparaît fort encourageant.
Dans ce contexte, je peux seulement vous conseiller de concevoir le plan de concert avec les Premières nations. Il faudra faire montre d'énormément de rigueur en maintenant cette volonté de mener à bien cet important travail. C'est ainsi que nous pourrons bonifier l'image nationale et internationale du Canada et fournir une base de prospérité vraiment solide, non seulement du point de vue économique, mais également dans une perspective écologique, culturelle et spirituelle — tous les grands objectifs préconisés par M. Hummel et les autres participants que je connais ici.
[Français]
Monsieur Hummel, l'Entente sur la forêt boréale canadienne existe depuis deux ans déjà. Avez-vous des exemples concrets d'avantages qui en ont découlé?
[Traduction]
Oui.
Avec le soutien des citoyens, l'industrie et le milieu de la conservation ont formulé des recommandations à l'intention des gouvernements de l'Alberta, de la Saskatchewan, de l'Ontario et du Canada concernant la conservation du caribou des bois. J'insiste sur le fait qu'il s'agissait de recommandations conjointes. Il ne faut pas oublier que c'est un enjeu qui a tendance à diviser les gens. Alors, il est vraiment significatif de pouvoir soumettre des recommandations sur la conservation de cette espèce avec le soutien de deux factions auparavant en conflit.
Le deuxième anniversaire de l'entente sera marqué par des plans plus cohésifs concernant les zones protégées proposées ainsi que des plans d'action à l'égard des projets pilotes de grande envergure qui ont été menés au Canada au cours des deux dernières années, avec l'appui encore une fois de l'ensemble des citoyens concernés. Je crois donc que cette possibilité de formuler conjointement des recommandations est un aspect important et tout à fait unique; c'est une contribution dont nous sommes fiers.
Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins d'aujourd'hui pour leurs exposés très instructifs.
J'aurais d'abord une brève question pour M. Young concernant la WhiteFeather Forest Initiative en Ontario. Pourriez-vous nous en parler un peu plus en détail et nous dire d'où vient le financement de cette initiative?
L'initiative est réalisée dans le nord-ouest ontarien, principalement autour des terres ancestrales de la Première nation Pikangikum, et s'étend vers l'ouest jusqu'à l'est de la région des lacs au Manitoba.
Je n'ai pas les détails en main, mais c'est un consortium réunissant six ou sept Premières nations qui assure la bonne marche de cette initiative en partenariat avec les ministères provinciaux du Manitoba et de l'Ontario, Parcs Canada à l'échelon fédéral et l'instance internationale responsable de la désignation des sites du patrimoine mondial de l'UNESCO. Selon les critères de réussite qu'on nous a inculqués, il y a tout lieu de se demander à première vue comment diable on parviendra à maintenir le cap, mais c'est pourtant bel et bien le cas.
Faute de pouvoir consulter les accords intervenus, je ne saurais vous dire quelle est la formule exacte de financement établissant la contribution des différentes parties en cause. Je sais qu'il y a eu des investissements consentis par les provinces, tant au Manitoba qu'en Ontario, et j'imagine qu'il y a tout au moins une contribution sous forme de temps de travail du personnel dans le cas de Parcs Canada et de l'unité décisionnelle de l'UNESCO.
Je crois qu'il y a eu du financement fédéral. Je devrais me renseigner à ce sujet et en informer le comité.
Merci pour ces informations.
J'ai une question pour M. Hummel concernant la place de la protection des zones urbaines dans le Plan de conservation national. Avec une superficie de 6 000 hectares, soit 15 fois plus que Central Park à New York, le parc de la Rouge à Toronto devrait devenir le plus grand parc urbain au monde. Pas moins de 7 millions de personnes auront moins d'une heure de route à faire pour le visiter.
Il y a toutefois un aspect moins réjouissant. Depuis 2006-2007, le nombre de visiteurs dans les parcs fauniques, marins et historiques du Canada a chuté de 7 p. 100. Cette baisse atteint même 12 p. 100 en Ontario et au Québec. J'ai une question d'ordre général qui est peut-être un peu facile. Est-ce que le Plan de conservation national devrait viser à créer des liens entre les Canadiens des milieux urbains et la nature?
Ces parcs urbains comme Stanley Park, Central Park et Pleasant Point à Halifax sont considérés comme des signes de grande clairvoyance. Ils sont le fruit d'une excellente idée de départ. Il est aussi très clair que si personne n'avait eu cette idée pour que ces espaces soient protégés, on n'y trouverait pas de parcs aujourd'hui. Cela illustre bien ce que je disais quant à la valeur rétrospective de ces éléments qui est beaucoup plus manifeste que celle qu'on leur attribuait à l'époque.
L'Entente sur la forêt boréale canadienne ne s'applique pas à ces parcs urbains. Nous nous intéressons aux environnements boréaux. Je note que l'un des objectifs du Plan de conservation national est de créer un lien entre les Canadiens et la nature. La plupart d'entre nous habitons dans des villes; c'est le cas pour 50 p. 100 des Autochtones et 80 p. 100 de l'ensemble des Canadiens.
Permettez-moi de changer un peu de sujet. Au début de votre exposé, vous avez parlé de la prise en compte des considérations économiques et des retombées. M. Young a mentionné le développement économique stratégique. Je présume que vous parliez tous les deux un peu de la même chose.
Monsieur Young, quels types d'activités économiques intégreriez-vous dans les territoires utilisables?
Monsieur Hummel, pourriez-vous nous dire de quel ordre sont les aspects économiques que vous aviez à l'esprit?
Pour ce qui est des considérations économiques dans une perspective stratégique, je dirais que tous les secteurs de mise en valeur des ressources naturelles seront touchés. Je crois que des possibilités formidables s'offrent aux Premières nations si elles sont en mesure de mettre en place des plans d'aménagement du territoire appropriés correspondant à leurs priorités. Elles interviendront dans tous les secteurs en fonction de ces priorités et prendront elles-mêmes les décisions qui s'imposent.
C'est simplement un commentaire d'ordre général sur ce qu'on a été en mesure d'observer. Toutes les possibilités seront envisagées, mais les Premières nations devront d'abord préciser leurs priorités. Elles doivent se donner les bases nécessaires pour pouvoir traiter d'égal à égal avec les gouvernements.
Je vais passer directement au tableau final. Si des gens ont un parc comme voisin arrière, peu importe qu'ils habitent en région éloignée ou non, j'aimerais les entendre dire qu'ils trouvent ça formidable. Ils en profitent; ils l'utilisent. Le parc attire des visiteurs et ils en récoltent les retombées. Lorsqu'on fait de l'exploitation forestière dans une approche de conservation, j'aime entendre les gens dire qu'ils apprécient la démarche, qu'ils en sont fiers. Ils ne prennent pas à la légère les critiques à cet égard, parce qu'ils sont convaincus de la pertinence de cette approche de conservation de nos ressources naturelles et qu'ils en tirent des avantages.
S'ils ne s'investissent pas dans le processus et s'ils n'ont rien à en tirer, il devient très difficile pour eux de développer ce sentiment d'appartenance et de fierté qui les incite à défendre la démarche et à veiller à ce qu'elle continue.
Je veux remercier nos témoins pour leur présence aujourd'hui. Votre contribution a été fort utile et nous guidera certes dans la production de notre rapport à la fin de cette étude.
J'aimerais vous citer un rapport publié en 2003 par la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie. Après avoir consulté des centaines de témoins concernant la conservation au Canada, la Table ronde a formulé une vingtaine de recommandations. C'est la deuxième de ces recommandations que je veux porter à votre attention:
La Table ronde reconnaît que les autorités fédérales, provinciales, territoriales et autochtones exigent un aménagement intégré du territoire pour s'assurer que les décisions en matière de conservation soient prises en même temps que les décisions relatives aux grands travaux de développement industriel ou avant.
Monsieur Young, pourriez-vous nous dire brièvement si vous êtes favorable à cette recommandation et ce que vous en pensez?
Oui, j'y suis tout à fait favorable. La conservation et la mise en valeur des ressources ne sont possibles que si les intérêts de tous sont pris en compte. Les Premières nations devraient être au coeur de ce débat.
Monsieur Hummel, soit dit en passant, j'ai été fort impressionnée de constater que vous avez consacré votre vie à la défense de l'environnement. Je sais que vous avez parlé de l'importance de conjuguer intérêts économiques et préoccupations environnementales, alors j'aimerais savoir ce que vous pensez de cette recommandation.
J'ai participé à l'étude en question dans laquelle est enchâssé le principe de la conservation d'abord. Suivant ce principe, il est nécessaire d'établir dès le départ les objectifs de conservation visés lorsqu'une décision de développement économique est prise, car ce ne sera plus possible par la suite. Par exemple, il faut offrir aux collectivités la chance de désigner et de protéger les zones importantes à leurs yeux avant d'ouvrir la porte au développement industriel, qu'il s'agisse d'extraction de diamant, d'exploitation pétrolière et gazière ou de foresterie.
Je tiens à souligner que ce principe de la conservation d'abord ne signifie pas que c'est le seul élément à considérer. Mais il y a certains parcours qu'il faut ainsi jalonner avant le départ, car il est trop tard une fois que le trajet est enclenché. Cela fait partie de ce qu'on appelle l'aménagement du territoire.
Je sais que mon temps s'écoule rapidement, alors j'aimerais remercier nos témoins pour leur contribution d'aujourd'hui. Nous nous inspirerons certes de vos témoignages pour formuler nos recommandations.
Nous savons que ce comité a déjà étudié la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Les coupures dont a été victime l'Agence canadienne d'évaluation environnementale n'ont pas manqué d'inquiéter mes commettants et commettantes. À la suite du budget de la semaine dernière, nous sommes extrêmement préoccupés au vu des compressions dans le secteur de l'environnement, notamment celles touchant la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie, alors...
Un instant, s'il vous plaît.
Je voudrais encourager Mme Liu à ne pas s'écarter du sujet de notre étude. Nous ne sommes pas ici pour parler du budget. Nous traitons du Plan de conservation national.
Mes commentaires devaient servir de préambule à une motion que je souhaite soumettre au comité, mais je vous remercie pour votre rappel.
Le mois dernier, Environnement Canada a décidé de prêter...
Dan Wicklum était fonctionnaire à Environnement Canada et vient d'être nommé directeur général de l'Alliance pour l'innovation dans les sables bitumineux. Mes commettants s'interrogent, car ils voudraient une réelle séparation des pouvoirs.
J'aimerais donc soumettre une motion au comité. Elle se lit comme suit:
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le comité entende Dan Wicklum, directeur général de l'Alliance pour l'innovation dans les sables bitumineux, au plus tard le jeudi 5 avril 2012.
Si cette motion est recevable, j'aimerais en faire la proposition.
La motion est recevable, mais nous avons l'habitude de traiter de toutes les questions touchant les travaux du comité à huis clos.
Un rappel au Règlement de M. Woodworth.
Je déteste intervenir de la sorte alors que vous venez de déclarer cette motion recevable, mais n'avons-nous pas des règles concernant les avis de motion? A-t-on donné préavis de cette motion avant...
Concernant ce rappel au Règlement, je peux vous assurer que le préavis a été suffisant.
S'il n'y a pas d'autre rappel au Règlement, je vais suspendre la séance et nous allons poursuivre... La motion est recevable, mais nous devons en débattre à huis clos.
Je voudrais une précision, monsieur le président.
Je sais qu'il a toujours été d'usage de discuter de ces questions à huis clos, mais je ne crois pas que ce soit nécessaire s'il y a consentement unanime pour agir autrement.
Un instant.
Pour répondre à Mme Leslie, ce n'est pas une question de consentement unanime. Il faut qu'une motion soit présentée. Comme il y a déjà une motion à l'étude, il s'agirait d'une motion dilatoire qui ne pourrait pas faire l'objet d'un débat. Quelqu'un présenterait une motion et nous la mettrions aux voix pour déterminer si nous passons à huis clos ou si nous poursuivons notre séance publique. La tradition veut que les questions touchant les travaux du comité soient examinées à huis clos, ce qui fait que nous romprions avec cette tradition en continuant notre séance publique. Mais si c'est ce que vous souhaitez faire, c'est le comité qui décide.
Il faudrait maintenant que quelqu'un présente une motion pour que nous discutions de la question en séance publique.
Un rappel au Règlement?
Je me demandais si Mme Liu serait disposée à reporter sa motion à la fin de la séance de manière à ce que nous puissions continuer à discuter avec nos témoins. Certains d'entre nous avons encore des questions à leur poser.
Un instant, s'il vous plaît.
[Note de la rédaction: inaudible]..., comme elle a déjà présenté sa motion et que celle-ci est recevable, il faudrait le consentement unanime du comité pour en reporter l'examen. Est-ce que j'ai le consentement unanime...
Non. J'ai déjà dit que c'était une motion dilatoire ne pouvant faire l'objet d'un débat. Nous allons maintenant mettre la motion aux voix pour déterminer si nous allons poursuivre à huis clos.
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