:
Bonjour. Je m'appelle Rick Bates et je représente la Fédération canadienne de la faune. Je suis accompagné de David Browne, notre directeur de la conservation.
J'aimerais remercier le comité de nous avoir invités à témoigner. Premièrement, je voudrais féliciter le gouvernement d'avoir saisi l'occasion de créer un plan de conservation pour le Canada. Le plan offre certainement la possibilité de laisser à tous les Canadiens un héritage durable au chapitre de l'aménagement intégré du territoire ainsi qu'un capital naturel sain et productif qui contribue à la prospérité économique et au bien-être des collectivités. Je vous souhaite la meilleure des chances dans votre travail.
Pendant mon exposé, je vais aborder trois aspects: le premier se rapporte à votre question sur les priorités en matière de conservation; le deuxième traite de l'objectif proposé qui consiste à rapprocher les Canadiens de la nature; enfin, le troisième porte sur la question du comité en ce qui concerne les priorités de mise en oeuvre.
Pour ce qui est de la question sur les priorités en matière de conservation, la société canadienne a de nombreux défis à relever, notamment la nécessité d'une planification exhaustive de l'aménagement des aires marines et des bassins hydrologiques, la nécessité de s'occuper des espèces en péril et de la fragmentation des habitats et la nécessité de relier les habitats terrestres. L'aspect le plus important sur lequel nous devons nous pencher est peut-être, étant donné le peu de temps dont nous disposons aujourd'hui, que dans le cadre du plan de conservation national, on reconnaisse l'existence de nombreux problèmes relatifs aux écosystèmes aquatiques — tant en eau douce qu'en milieu marin — et propose des solutions globales pour les régler. Pour obtenir un bon aperçu des problèmes que l'on observe dans nos trois océans et des recommandations sur les façons d'y remédier, j'invite le comité à étudier le récent rapport du Comité d'experts de la Société royale du Canada, et intitulé Le maintien de la biodiversité marine au Canada, qui a été publié en février 2012.
Quant à la conservation des habitats terrestres, nous croyons comprendre que le besoin le plus pressant concerne les zones développées, que l'on appelle le territoire exploité. Pour atteindre tous les objectifs en la matière, il faudra faire preuve de créativité, recourir à un large éventail d'outils et s'assurer la participation de l'ensemble de la société. Plus précisément, nous préconisons la créativité ainsi que la création et l'application de mécanismes axés sur le marché tels que les crédits d'impôt pour les Canadiens qui agissent dans le bien commun; par exemple, les agriculteurs qui laissent une bande tampon pour la filtration de l'eau de ruissellement près des plans d'eau importants, des programmes de compensation écologique visant à favoriser la conservation d'importants espaces naturels pour pallier la destruction ou la dégradation d'autres zones et des programmes incitatifs pour favoriser l'adoption plus rapide de pratiques exemplaires en matière d'aménagement du territoire.
Par rapport à l'objectif de rapprocher les Canadiens de la nature, un des défis consiste à inciter les Canadiens à discuter davantage des compromis nécessaires entre la croissance industrielle et la conservation. Actuellement, le débat public est extrêmement polarisé, évidemment, entre ceux qui sont contre « contre » et ceux qui sont « pour ». De ce fait, on ne reconnaît pas qu'il est nécessaire de faire des compromis lorsqu'il est question de conservation ou de développement industriel. Cette polarisation envenime le conflit et rend la prise de décision plus lente et difficile. Il existe des outils pour orienter les discussions quant aux choix sur la façon de le faire. Ces outils proposent aux Canadiens des choix par rapport à l’ampleur et au genre de répercussions liées à l’industrie et sur l’incidence de ces choix sur le capital naturel et le PIB du pays.
À notre avis, un des meilleurs outils permettant de telles décisions et communications intégrées est l’adoption de modèles de planification de l’utilisation du territoire qui permettent de connaître rapidement et clairement les effets possibles des changements prévus sur un large éventail d’indicateurs importants pour la société, tels que l’emploi, le PIB et les effets sur le capital naturel, notamment la qualité de l’eau, la qualité de l’air et l’abondance et le genre des espèces sauvages.
D’importants processus d’aménagement du territoire comme ceux-là présentent de nombreux avantages, notamment un examen précis des effets cumulatifs des divers projets de développement de sorte que les décisions seront prises en tenant compte des effets des projets, tant le projet proposé lui-même que les autres projets existants et prévus par rapport au bassin hydrologique, par exemple. Offrir une perspective régionale et s’entendre sur les répercussions acceptables dans les différents secteurs peut aussi accélérer le processus décisionnel et permettre la prise de meilleures décisions. Une fois terminés, ils peuvent aider à coordonner les actions des Canadiens.
L’objectif de rapprocher les Canadiens de la nature doit aussi permettre de relever des défis. Il faut renforcer les concepts de durabilité et les programmes d’enseignement; offrir davantage d’occasions de participer à des activités de plein air et d’acquérir des connaissances; améliorer l’accès aux espaces naturels en milieu urbain.
Pour ce qui est de votre question sur les priorités de mise en oeuvre, le Canada accuse un important retard par rapport à son engagement public de créer des aires de conservation. C’est vrai pour le milieu terrestre, mais encore plus pour les aires aquatiques.
Nous sommes conscients qu’il est difficile de satisfaire aux besoins des nombreux groupes d’intérêts en cause, mais ce n’est pas plus complexe que l’approbation d’un important projet de développement industriel comme le pipeline. Nous comprenons que le rôle du gouvernement consiste à rendre des décisions sur les projets industriels dans les deux ans et nous sommes d’avis qu’un plan de conservation national devrait inclure un engagement semblable visant à accélérer le calendrier relatif à la création d’aires de conservation de sorte que ces décisions soient aussi prises dans les deux ans.
Un plan de conservation national pourrait permettre d’orienter et de coordonner les actions dans l’ensemble de la société. Un engagement ferme du gouvernement fédéral serait un pas important à cet égard. Pour qu’on puisse y parvenir, nous espérons qu’aux échelons supérieurs, c’est-à-dire au Cabinet du premier ministre, au Conseil privé, au Bureau de gestion de grands projets ou un autre organisme d’intégration puissant, on s’appropriera et on défendra le plan.
En conclusion, la Fondation canadienne de la faune espère pouvoir continuer de participer à la création et à l’orientation du plan, de même que de s’engager à le mettre en oeuvre au fil du temps, avec d’autres intervenants.
Merci.
:
Merci beaucoup. C’est un privilège et un honneur pour moi d’être invité à parler aujourd’hui de la création d’un plan de conservation national pour le Canada.
Depuis sa fondation en 1939, Nature Canada inculque aux Canadiens le respect de la nature, l’appréciation de ses merveilles et la volonté d’agir pour la défendre. Tout a commencé lorsque notre fondateur, Reginald Whittemore, a lancé un magazine, Canadian Nature, en hommage à sa défunte épouse, Mabel Frances, éducatrice et amante de la nature. Au fil du temps, le magazine a amené des naturalistes à se mobiliser dans chaque province et territoire. Ces personnes ont uni leurs efforts pour bâtir et maintenir une société naturaliste, où chaque Canadien se sent intimement lié à la nature.
Aujourd’hui, Nature Canada, porte-parole national des naturalistes, poursuit ses efforts pour bâtir une société naturaliste et c’est dans cet esprit que je suis heureux de me joindre à vous aujourd’hui.
La première question que vous nous avez demandé d'étudier consistait à savoir quelle serait la raison d'être d'un plan de conservation national.
Souvent, on décrit le Canada en utilisant des termes superlatifs. On dit qu’il a les plus longs fleuves, les plus grands lacs, le plus de forêts et de terres humides contiguës, qu’on y observe des migrations fauniques importantes et qu’il a des richesses minérales et énergétiques inépuisables. Pensez-y: 20 p. 100 des étendues sauvages de la planète, 20 p. 100 des réserves d’eau douce du monde et 30 p. 100 de la forêt boréale se trouvent à l’intérieur de nos frontières.
Beaucoup de Canadiens en tirent directement ou indirectement leur subsistance et beaucoup d’autres sont amateurs d’activités en plein air. Pourtant, les Canadiens semblent s’éloigner de plus en plus de la nature, même au moment où les pressions sur l’environnement s’accentuent. Des espèces animales disparaissent, nos habitats forestiers et herbagers sont de plus en plus morcelés et les zones septentrionales sont menacées par les changements climatiques rapides. Nos liens concrets avec la nature et le plein air sont en déclin. Donc, même si on dit souvent que le Canada est un pays où la nature est reine et que cela fait partie de notre identité nationale, c’est une chose qu’il ne faudrait jamais tenir pour acquise. Nous croyons que le but du plan de conservation national devrait être de créer et de renforcer une éthique qui privilégie la nature en incitant et en motivant les Canadiens à valoriser et à protéger les milieux naturels.
La deuxième question que vous nous avez demandé d'étudier consistait à savoir quels devraient être les objectifs d'un plan de conservation national.
Le plan de conservation national devrait surtout servir à canaliser, dans un esprit de collaboration, les efforts de tous les secteurs de la société.
Premièrement, il faut trouver des façons nouvelles et inspirantes de sensibiliser les gens à l’importance de la nature pour tous les Canadiens, surtout les jeunes. Nous avons besoin d’une brigade jeunesse nationale vouée à la conservation et d’autres programmes comme Mon passeport parcs, qui amène 400 000 élèves de huitième année à s’intéresser à nos parcs nationaux, si précieux.
Deuxièmement, il importe de faire appel à la responsabilité sociale et environnementale des entreprises pour les inciter à exceller dans le domaine de la conservation de la nature. Il faut reconnaître le travail de sociétés comme General Motors — qui s’est donnée comme objectif, d’ici 2020, de conserver les habitats fauniques situés près de ses installations, partout dans le monde — et TransCanada, qui consacre des millions de dollars à la désignation et à la conservation d’habitats fauniques importants, en collaboration avec les naturalistes. Il y en a beaucoup d'autres.
De plus, il faut trouver des façons novatrices de financer la conservation de la nature au Canada et envisager la création d’un fonds pour la nature pour soutenir, à l’échelle locale, l’intendance des sites naturels.
Ensuite, il faut créer, à partir d’un système de gestion de données existant comme NatureServe, un mécanisme de communication des renseignements qui fournit des données précises et accessibles au public sur l’état des milieux naturels au Canada.
Il faut agir à l’échelle mondiale. L’air, l’eau et la faune, qui sont peut-être les mieux représentés par nos oiseaux migrateurs, traversent librement la frontière de notre pays. Le plan de conservation national doit traduire nos engagements et nos obligations en vertu des conventions internationales que nous avons signées, notamment la Convention sur la diversité biologique et la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs.
Le troisième point à l'étude consistait à savoir quels principes directeurs devraient régir un plan de conservation national.
Nous en avons cerné trois: l'inclusion, le partenariat et la continuité.
Qu'est-ce que l'inclusion? Nous avons tous intérêt à ce que l’environnement soit sain et équilibré. Nous profitons tous des nombreux services fournis par la nature. Toutes les régions du pays et tous les intervenants devraient et doivent participer à l’élaboration d’un plan de conservation national.
Pour ce qui est des partenariats, les pressions qui menacent l’environnement sont trop complexes et l’étendue du champ d’action dans le domaine de la conservation de la nature est trop vaste pour être abordées sans une concertation entre les Canadiens, les ONG, l’industrie, les intellectuels et le gouvernement, notamment. Le travail doit être coordonné. Les efforts doivent être synchronisés et les apprentissages partagés entre des partenaires tendant vers un but commun.
Quant à la continuité, elle est absolument essentielle. Nous devons avoir pour point de départ le travail qui se fait déjà pour conserver les milieux naturels au Canada. Il y a déjà des légions de bénévoles qui travaillent directement à la conservation de la nature. Par exemple, des bénévoles adoptent d’importants sites qu’ils transforment en réserve de protection de la biodiversité, en collaboration avec les collectivités locales. De nombreux Canadiens consacrent déjà du temps à la protection et à la gestion de leur environnement. Certains y ont consacré toute leur vie. Poussons plus loin le travail qu’ils accomplissent déjà.
Quatrièmement, vous nous avez demandé de réfléchir aux priorités d’un plan de conservation national. Nous avons beaucoup travaillé sur cette question, parce qu’il y en avait littéralement des dizaines. Nous les avons réduites à environ six.
D’abord, il faut sensibiliser les gens, surtout les enfants, à la nature, notamment en ce qui a trait à la faune, aux zones protégées et aux multiples façons dont la nature contribue à notre bien-être. Il s'agit de bâtir une société naturaliste.
Ensuite, il faut veiller à ce qu’aucune espèce ne disparaisse et à ce que les grandes routes migratoires sont sécurisées. Il faut s’assurer que les facteurs de la disparition et du déclin de certaines espèces sont identifiés et que leurs effets sont atténués pour qu’aucune autre espèce ne soit menacée.
Troisièmement, il faut viser à protéger 20 p. 100 des milieux terrestres et marins du Canada, c’est-à-dire dépasser les objectifs de Aichi fixés dans la Convention sur la diversité biologique, notamment en faisant pression pour que la Stratégie pour les parcs nationaux soit complétée. Ce n’est pas tout: il importe que les réserves nationales de faune et les refuges d’oiseaux migrateurs, qui contribuent beaucoup à la biodiversité du Canada et qui sont pourtant pratiquement inconnus des Canadiens, soient davantage reconnus.
Quatrièmement, maintenir et améliorer la législation environnementale existante pour qu’elle contribue efficacement à la conservation de la nature.
Cinquièmement, il faut, de toute évidence, assurer la qualité des grands réseaux fluviaux, lacs et aquifères du Canada, ce dont on entend rarement parler.
Enfin, par rapport aux priorités, léguons une tradition de leadership en matière d'environnement. Faisons du Canada un chef de file mondial de la conservation de la nature en satisfaisant et en allant au-delà de nos obligations en vertu des conventions internationales sur la préservation de la nature, comme la CDB, la Convention sur la diversité biologique. Guidons et aidons les pays qui ont les mêmes objectifs de conservation que nous, mais qui sont moins bien équipés que nous pour les atteindre.
Quant au cinquième point, c'est-à-dire ce qui devrait être mis en oeuvre en priorité dans un plan de conservation national, il faudrait trouver des façons efficaces et peu coûteuses de faire participer tous les Canadiens, notamment en mettant à contribution les réseaux déjà en place.
Deuxièmement, améliorer la communication, la participation et la coopération entre les autorités, y compris entre les différents ministères de tous les ordres de gouvernement. Tous ont un rôle à jouer pour atteindre les objectifs nationaux de conservation du Canada et tous devraient avoir leur mot à dire à cet égard.
Assurons-nous d'inclure dès le début les Premières nations et les organismes gouvernementaux autochtones dans tous les pourparlers.
Enfin, des groupes de travail pertinents et équilibrés d’intervenants de tous les secteurs de la société canadienne devraient être réunis pour superviser les plans de conservation dans les régions d’intérêt sur le plan écologique, comme les écozones ou les écorégions.
Le dernier point que vous nous avez demandé d’examiner est la formule de consultation que le ministre devrait envisager pour l’élaboration d’un plan de conservation national. En quelque sorte, nous avons examiné cet aspect d’un point de vue interne. Plutôt que de réfléchir au processus de consultation comme tel, nous nous sommes demandé ce que Nature Canada pourrait apporter au processus. J’aimerais simplement vous parler d’une initiative qui a été appuyée par le gouvernement fédéral et qui pourrait servir de base aux discussions à venir.
En 2007, le gouvernement fédéral a fourni 1 million de dollars pour des consultations parmi les plus vastes jamais entreprises dans le milieu des naturalistes au Canada, consultations qui ont débouché sur la Stratégie du Réseau canadien de la nature, dont vous avez un exemplaire. Essentiellement, l’objectif de la stratégie est de créer une alliance inclusive de tous les amateurs et passionnés de la nature.
Le Réseau a trois objectifs précis. D’abord, protéger la nature au Canada à tous les niveaux, y compris les espèces, habitats, écosystèmes et sites naturels. Ensuite, rapprocher tous les Canadiens de la nature et promouvoir une éthique de la nature. Enfin, donner à tous les intervenants du Réseau les moyens d’agir en améliorant la communication, en éliminant les chevauchements et en accroissant les capacités locales.
Dirigé par Nature Canada, le réseau a beaucoup contribué à la science, à la conservation sur le terrain, aux effets positifs sur l'élaboration des politiques fédérales, provinciales et municipales et à la diffusion d'information sur la nature. Le réseau, qui compte des centaines d'organismes et plus de 60 000 membres dévoués, offre une tribune unique pour faciliter le dialogue sur le plan de conservation de la nature.
En conclusion, sachez que nous sommes très enthousiastes à l'idée de ce projet, que nous sommes conscients du défi à relever et que nous avons hâte de motiver les Canadiens à participer à un plan de conservation national afin de bâtir une société naturaliste.
Merci.
Je vous remercie, monsieur le président, de nous permettre de nous adresser au comité aujourd'hui dans le cadre de son étude sur l'élaboration d'un plan de conservation national.
Je m'appelle John Lounds et je suis président et chef de la direction de Conservation de la nature Canada. Je suis accompagné de mes collègues Michael Bradstreet, vice-président, Conservation,
[Français]
et Nathalie Zinger, notre vice-présidente pour le Québec.
[Traduction]
Conservation de la nature Canada est un organisme caritatif national sans but lucratif. Depuis 50 ans, nous travaillons avec les Canadiens à préserver les zones naturelles les plus importantes au Canada.
Nous applaudissons donc vos efforts pour élaborer un plan national de conservation pour les 50 prochaines années, un plan visant à promouvoir les objectifs de conservation et à rapprocher les Canadiens de la nature.
Aujourd'hui, nous aimerions faire des suggestions au comité dans trois domaines clés. D’abord, le plan peut et doit positionner le Canada comme un chef de file en matière de conservation, afin qu'il occupe le podium mondial, pour ainsi dire, au chapitre des eaux et terres conservées. Ensuite, nous vous encourageons à élaborer un plan commun qui tiendra compte des gestes de tous les Canadiens pour la nature et les mettra en valeur. Enfin, nous recommandons que ce plan mobilise le secteur privé en faveur de la conservation et qu'il prône des solutions de conservation qui favorisent le progrès économique responsable.
Comme l'a si bien dit le premier ministre Stephen Harper lorsqu’il a annoncé le programme de conservation des zones naturelles du gouvernement du Canada en partenariat avec Conservation de la nature Canada, en 2007: « Les grands espaces sont au coeur de l’identité canadienne. » Nous ne saurions mieux dire.
Le Canada est le deuxième pays en superficie au monde. Nous possédons plus de 20 p. 100 de la faune mondiale, 20 p. 100 de l'eau douce, 24 p. 100 des zones humides, et un pourcentage encore plus élevé des zones forestières, arctiques et maritimes vierges. Tous ces habitats abritent une immense variété d'espèces animales et végétales, en plus de fournir des services écologiques essentiels, comme la séquestration du carbone et le stockage et la filtration de l’eau.
Les services écologiques assurés par les forêts, marais et prairies du Canada bénéficient à l’ensemble de la planète. Nos tourbières boréales, par exemple, refroidissent le climat de façon appréciable.
Les écologistes s’entendent pour dire que pas moins de 30 à 50 p. 100 des terres devraient être protégées partout dans le monde afin que l'on puisse conserver la biodiversité et assurer le maintien des services écologiques. Mais on est encore très loin de cet objectif.
En vertu de la Convention sur la diversité biologique, le Canada et d’autres pays signataires se sont engagés à viser un objectif national de 17 p. 100 de zones protégées ou, et je le souligne, d'autres mesures efficaces de conservation locales, d’ici 2020. Nous estimons que le Canada peut et doit atteindre cet objectif d’ici 2017, année du 150e anniversaire du Canada, et le dépasser d’ici 2020.
En effet, s'il dépasse la cible actuelle, le Canada figurera en tête de peloton sur la scène internationale pour ce qui est de la superficie conservée, qui serait supérieure à celles de la France, de l’Espagne, de l’Allemagne et du Royaume-Uni combinées.
Le Canada peut et doit occuper le podium en matière de conservation. Et nous sommes probablement plus à même de le faire que n’importe quel autre pays, car nous avons la chance de posséder un patrimoine naturel encore essentiellement intact, du point de vue géographique et culturel.
Deuxièmement, un plan commun repose sur l'appréciation de nos accomplissements. Le Canada, selon les normes internationales, protège déjà plus de 10 p. 100 de sa masse terrestre, ou environ un million de kilomètres carrés. Mais ce chiffre est une sous-estimation de la réalité. Étonnamment, le Canada n’a jamais tenu compte des nombreux efforts de conservation des Canadiens ordinaires. Pensons donc aux personnes, aux communautés, aux groupes de conservation, aux organismes, aux entreprises et aux Premières nations qui ont déjà réussi à protéger la nature, les aires naturelles, les espaces verts et la faune. Par exemple, ne figurent pas dans ce chiffre de 10 p. 100: les terres des offices de protection du sud de l’Ontario; les pâturages communautaires des prairies canadiennes; les terres détenues et conservées par Conservation de la nature Canada, Canards Illimités Canada, et plus de 150 autres fiducies foncières locales et régionales; les terres conservées sous l’égide des revendications territoriales Nunatsiavut et Dehcho; les régions septentrionales qui seront conservées grâce au Plan Nord du Québec et à la Loi de 2010 sur le Grand Nord de l’Ontario; et la vallée de la rivière Flathead et la forêt pluviale de Great Bear de la Colombie-Britannique.
Un plan national de conservation doit être doté d’un système cohérent pour contrôler et tenir compte de tous ces gestes de conservation sur les terres publiques et privées. Il faudrait au moins savoir où nous en sommes, afin de savoir où nous nous dirigeons.
Enfin, un bon plan national de conservation permettra de trouver des moyens de faire participer les collectivités canadiennes et le secteur privé à la conservation, ce qui rapprochera les Canadiens de la nature.
Notre expérience nous montre que grâce à nos 45 000 commanditaires et centaines de partenaires scientifiques et de conservation, nous savons que la collaboration est essentielle à la conservation.
Une approche scientifique nous a permis de nous concentrer sur les zones ayant des valeurs de biodiversité élevées et d’y protéger plus de 2,6 millions d’acres, soit l’équivalent de 100 terrains de football — sans compter les zones des buts — par jour durant 50 ans. Notre personnel vit et travaille dans les collectivités, souvent dans des territoires exploités, et cherche à obtenir des engagements de conservation volontaires et à trouver des solutions gagnantes pour les familles, les entreprises et la nature.
Les Canadiens jouissent de nos terres conservées, où ils peuvent se livrer à la randonnée, à la pêche, à l’observation de la nature, à la chasse ou à toutes sortes d’autres activités, sous réserve des besoins de conservation de chaque zone naturelle. Nous demandons donc au comité d'inclure les trois concepts suivants dans son plan, afin de mobiliser le secteur privé.
Premièrement, les partenariats public-privé. Ces partenariats font progresser la conservation partout au Canada, car ils exploitent pleinement les investissements du secteur privé et les dons pour donner des résultats de conservation très concrets.
Notre expérience avec le programme de conservation des zones naturelles ces cinq dernières années en témoigne: plus de 800 000 acres de terre ont été remis à des fins de conservation par des vendeurs et donateurs convaincus dans chaque province du Canada. Ces terres recouvrent tout le spectre des habitats canadiens et, ensemble, abritent plus de 117 espèces en péril. Dans le cadre du programme, chaque dollar fédéral investi a été abondé pour presque deux dollars par des fonds et des dons du secteur privé, ce qui fait trois dollars pour la conservation par dollar fédéral investi.
Deuxièmement, nous recommandons des outils et incitatifs novateurs accessibles à tous les Canadiens pour favoriser la conservation du territoire exploité. Un grand nombre de zones officiellement protégées sont entourées de terres naturelles moins réglementées, mais qui pourraient être conservées pour peu qu’on en donne les moyens aux propriétaires fonciers.
Par exemple, des programmes d’incitatifs sur l’impôt foncier, de dons écologiques, d'engagements de servitudes — le réseau québécois de réserves naturelles privées — et de planification environnementale des fermes favorisent déjà l'intendance privée. Mais ce n’est pas suffisant. Il faut d’autres programmes.
Par exemple : l’autorisation de morceler des terrains à des fins de conservation, offrir des allégements fiscaux pour les terres conservées, octroyer des terres de rechange pour celles conservées, et ce, à tous les niveaux de gouvernement, offrir des services d’arbitrage pour résoudre les différends en matière d’accords de conservation (plutôt que de passer par la procédure judiciaire), encourager l’offre de biens et services écologiques par les fermes, et autoriser le don écologique de terres prévues à des fins de développement. Et comme il s’agirait d’un plan commun, un grand nombre de ces mesures exigerait la participation des administrations provinciales.
Finalement, nous demandons au comité d’étudier le potentiel d’un programme de crédits ou de compensation pour la biodiversité, parfois appelé réserve d'habitat.
L’économie du Canada a jusqu’ici reposé sur l'exploitation de nos ressources naturelles. Comment pouvons-nous montrer l’exemple à la fois en matière de conservation et d'exploitation des ressources naturelles? Le concept de crédits pour la biodiversité, ou réserve d'habitat, serait une solution intéressante.
Les plans de compensation pour la biodiversité sont un moyen pour le secteur industriel de contribuer à la protection et à la conservation de l’environnement en plus ou dans le cadre des exigences réglementaires visant à éviter, atténuer ou compenser l’incidence environnementale d’un projet de développement. Tout comme les municipalités imposent des conditions aux constructeurs, par exemple de prévoir des aires ouvertes au public, le fédéral pourrait adopter une approche semblable en ce qui concerne les pipelines, les sites miniers, ou même les empreintes d'hydrocarbures.
Jusqu’ici, les mesures d’évitement ou d’atténuation des incidences environnementales ont été axées sur le site d'exploitation, sans égard à la qualité ou à l’importance de la zone naturelle environnante. Alors que les mesures d’évitement ou d’atténuation des incidences environnementales se limitent au projet même, les crédits ou mesures de compensation pour la biodiversité peuvent être plus souples. Comme ils peuvent être employés pour assurer la conservation de sites naturels identifiés prioritaires où qu’ils se trouvent au Canada, ils peuvent optimiser la conservation de la biodiversité ou la production de services écologiques à l’échelle nationale.
En conclusion, nous osons espérer un plan national de conservation qui se fondera sur une vision commune pour guider le Canada dans la conservation de nos eaux et de nos terres. Nous serions heureux de continuer ce dialogue avec le comité.
À Conservation de la nature Canada, nous aimons dire que nous produisons des résultats sur lesquels on peut marcher. J’invite les membres du comité à venir marcher avec nous, à visiter nos projets sur le terrain et à rencontrer des Canadiens qui veillent sur leurs terres depuis des générations et qui nous font participer à leur rêve.
Je vous invite à examiner davantage notre travail. Nous avons apporté de la documentation sur le plan de conservation des aires naturelles, le rapport annuel de Conservation de la nature Canada, ainsi qu'une carte indiquant où divers projets du plan ont été mis sur pied au cours des cinq dernières années.
Nous souhaitons mettre en garde le comité contre la tentation de trop en faire. Essayez simplement d'obtenir d'excellents résultats pour quelques éléments importants: faites du Canada un chef de file international en matière de conservation; mesurez et consignez systématiquement les efforts de conservation canadiens, tant du côté public que privé; adoptez des mécanismes novateurs et améliorez les mécanismes existants pour faire participer le secteur privé à la conservation, comme les partenariats public-privé, les outils et incitatifs de conservation améliorés et les crédits pour la biodiversité.
Le 150e anniversaire du Canada approche à grands pas. Soulignons l’année 2017 en établissant un plan qui permettra de préserver, voire de bonifier, la nature du Canada pour son 300e anniversaire.
Merci.