:
Monsieur le président, membres du comité et députés, bonjour.
Au nom de mes collègues de VIA Rail Canada, j'ai le plaisir de vous entretenir aujourd'hui au sujet de nos actions, des progrès que nous enregistrons continuellement et de l'ensemble de notre bilan en matière de sécurité.
[Traduction]
La sécurité est l’élément le plus fondamental de notre exploitation. Notre passion pour le déplacement par train et pour le développement de l’industrie du transport ferroviaire voyageurs est intimement liée à l’engagement que nous avons pris d’atténuer les risques, d’améliorer notre rendement et de démontrer à nos clients et au public que le transport ferroviaire est fiable et qu’il constitue le moyen de déplacement le plus sécuritaire au Canada.
Sous tous ces aspects, notre rendement de ces cinq dernières années a été excellent. Ma collègue Jean vous présentera un aperçu de notre plan d’action sur la sécurité. Ensuite, Denis vous expliquera que tout ce que nous faisons repose sur notre solide culture de la sécurité et sur nos excellentes pratiques de gouvernance. Denis vous parlera aussi brièvement des initiatives et des investissements qui ont contribué à l’amélioration de notre rendement.
Permettez-moi de nous présenter et de vous décrire en quelques mots le milieu opérationnel particulier dans lequel nous surveillons la sécurité. Près de quatre millions de passagers voyagent chaque année dans l’un de nos trains qui parcourent les 12 500 kilomètres de notre réseau. Nous effectuons 500 départs par semaine vers des centaines de destinations, autant vers des régions éloignées telles que Churchill et Prince Rupert que sur notre corridor très apprécié qui relie Québec à Windsor.
Nous avons aussi deux trains qui relient l’Est à l’Ouest du pays sur de longues distances: l’Océan et le Canadien.
[Français]
Nos trains traversent 450 communautés. De plus, des milliers de traverses, de passages à niveaux, de ponts et de tunnels se rendent là où parfois seul un train peut accéder, et ce, dans des conditions climatiques souvent capricieuses.
[Traduction]
Le contexte de notre exploitation est spécial pour deux raisons: d’abord, parce que notre réseau s’étend à travers les particularités géographiques et les paysages variés de notre pays; ensuite, parce que 98 % des voies ferrées que nous utilisons appartiennent à l’industrie du transport des marchandises. VIA n’est propriétaire que de 255 kilomètres — entre Coteau et Smiths Falls — des voies ferrées sur lesquelles nous roulons. Nous sommes donc obligés d’atténuer les risques liés à notre exploitation sans être propriétaires des voies ferrées sur lesquelles nous nous déplaçons. Nous devons partager la responsabilité de la prévention, suivre la surveillance et gérer les risques. Malgré ces difficultés, il est aujourd’hui moins dangereux de voyager en train que quand j’ai commencé ma carrière il y a 36 ans.
Je vais maintenant passer la parole à Jean Tierney qui nous présentera les points saillants de nos programmes de sécurité.
Bonjour.
En partie, notre système de gestion de sécurité, le SGS, repose sur des principes fondamentaux qui nous ont permis de créer et de maintenir une excellente et solide culture de la sécurité. Tous nos employés participent à l’application de notre système de gestion de sécurité. Autant nos employés syndiqués que nos cadres y participent pleinement.
Ce système décrit clairement les responsabilités de tous les directeurs de la sécurité. Nous savons ainsi qui fait quoi et qui assume quelles responsabilités. Il favorise la sûreté, la sécurité et la santé de tous nos employés, de nos passagers et du grand public. Il nous aide à respecter les exigences de toutes les lois et de tous les règlements qui s’y appliquent, et même à en faire plus que ce qu’on exige de nous.
Ce système nous sert également de cadre pour établir des objectifs et des cibles et pour planifier et mesurer notre rendement dans le domaine de la sécurité.
Notre structure repose avant tout sur des politiques organisationnelles et sur des normes de SGS en matière de surveillance. Ensuite, nous orientons cette structure sur l’établissement annuel d’un plan de sécurité organisationnel que nous mettons sur pied dans toute l’entreprise. Les régions établissent aussi des plans afin que tous les employés connaissent bien leurs rôles et la contribution qu’ils apportent au succès global du système. Puis nous produisons des listes de vérification et des outils de travail et autres pour faciliter l’accomplissement des tâches quotidiennes. Nous définissons clairement nos attentes et nous les mettons sur pied dans le cadre de divers programmes et initiatives. Et puis le cycle continue, et tout recommence.
Comment surveillons-nous le rendement? Nous le faisons chaque jour, chaque semaine, chaque mois, chaque trimestre et chaque année en examinant divers rapports et documents sur le rendement en matière de sécurité. Nous déterminons ainsi les tendances, ce qui nous permet de mener des évaluations des risques pour les aborder avant qu’ils ne se concrétisent.
Comment tout cela développe-t-il notre culture de la sécurité? La première chose est que VIA Rail avait déjà mis sur pied son SGS, notre système de gestion de sécurité, un an avant qu’il ne devienne une exigence réglementaire. Nous avons reconnu la valeur d’un tel système et nous avons collaboré de près avec nos partenaires des organismes de réglementation qui nous ont aidés à concevoir et à mettre en œuvre ce système de gestion de sécurité.
C’est ce qui rend notre culture différente. On le constate dans l’esprit de leadership dont fait preuve notre président-directeur général quand il préside les réunions mensuelles sur la sécurité. Nous avons investi en priorité de grandes sommes d’argent pour améliorer notre infrastructure, notre équipement et nos différents systèmes ainsi que nos technologies afin de rehausser plus encore notre rendement. Cette concentration continuelle sur la gestion du risque et du rendement ainsi que sur nos partenariats avec les syndicats, avec les collectivités et avec les organismes de réglementation est un travail collectif, et nous sommes très reconnaissants de tout le soutien que nous avons reçu.
Si vous me permettez, je vais vous citer deux passages publiés sur notre culture de la sécurité par des sources de l’extérieur. Le premier est un énoncé prononcé pendant l’examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire:
Parmi de grandes compagnies ferroviaires, VIA Rail a respecté le système SGS et s’est enraciné d’une culture de la sécurité. Le Panel a aussi noté que VIA Rail prend la gestion de la sécurité au sérieux en rendant cet aspect important pour tous les employés.
Nous discutons de cela chaque jour. L’autre citation provient d’un tiers venu vérifier la résilience de notre système de gestion de sécurité. Il a observé que notre culture de la sécurité est profondément ancrée dans notre organisme. Ce n’est pas un objectif facile à atteindre, alors nous sommes convaincus de ne pas avoir fait tous ces efforts pour rien.
J’invite mon collègue Denis à vous donner quelques détails sur certaines des initiatives de sécurité qui nous ont aidés.
[Français]
Des incidents qui sont survenus, comme celui de l'été dernier dans la région de Lac-Mégantic, nous amènent à repenser nos façons de faire. Ils nous amènent aussi à éviter qu'on fasse preuve d'une tolérance trop élevée par rapport aux risques.
Depuis plusieurs années, il existe chez VIA Rail une véritable culture de sécurité où tout un chacun se sent concerné.
[Traduction]
J’ai surtout travaillé dans le domaine des ressources humaines. J’ai passé la plus grande partie de ma carrière dans les ressources humaines. L’un des aspects principaux de ma profession est non seulement de veiller à ce que les employés respectent les règlements, mais à ce que nous développions une culture de la sécurité. Il est facile de dire que nous avons une culture de la sécurité, mais pour l’intégrer à l’organisme il faut des années. Il faut que tous, surtout les cadres, s’y dévouent profondément.
[Français]
Nous avons ainsi pu être proactifs dans l'adoption de mesures visant à prévenir une tragédie, comme celle de Lac-Mégantic, avant qu'elle ne survienne.
[Traduction]
Par exemple, avant les événements de Lac-Mégantic, nous ne laissions jamais de trains sans surveillance sur la ligne principale ou sur une voie d’évitement. Deux mécaniciens de locomotive prennent charge de chaque train dès le début de son parcours. C’est une pratique que nous appliquons depuis la fondation de notre organisme. Chaque locomotive est maintenant dotée d’une caméra qui filme l’extérieur, et nous venons de mettre à l’essai quelques enregistreurs de conversation.
La majeure partie des accidents sont causés, malheureusement, par une erreur humaine. Nous consacrons beaucoup de temps à la formation, à la gestion du rendement, au mentorat, à l’encadrement, etc., pour qu’il y ait moins d’erreurs humaines dans tout l’organisme. Mais il est crucial que nous continuions à investir dans la technologie, qui non seulement nous aidera à mener de bonnes enquêtes à la suite d’un incident, mais surtout et avant tout, qui facilite la tâche des mécaniciens de locomotive. À l’heure actuelle, nous examinons plusieurs technologies qui, nous le pensons, nous aideront à avancer à grands pas dans cette direction.
Nous sommes résolus à resserrer plus encore nos normes de sécurité. Grâce aux plans d’action économique du gouvernement du Canada, nous avons investi 80 millions de dollars pour apporter diverses améliorations à notre infrastructure, pour modifier nos procédures afin qu’elles soient plus efficientes et pour acquérir de nouvelles technologies.
Ainsi, nous avons resserré nos normes de maintenance sur les locomotives afin qu’elles correspondent au niveau international le plus élevé. Nous avons apporté d’innombrables améliorations telles que des clôtures de sécurité, une meilleure signalisation, la modernisation des passages à niveau, une éducation ciblée du public. De notre infrastructure, nous avons fermé 70 passages à niveau privés au cours de ces trois dernières années. Ils se trouvaient sur des fermes et dans des parcs et plusieurs d’entre eux n’étaient pas protégés. Nous parlons à tous les propriétaires fonciers pour les encourager à demander une subvention de Transports Canada afin de fermer les passages à niveau qui se trouvent sur leurs propriétés.
Dernièrement, nous avons commencé à installer des systèmes de télémétrie et des GPS dans nos trains. Ils nous fournissent déjà des données précieuses sur la conduite des trains qui nous aideront non seulement à réduire la consommation de carburant, mais surtout à améliorer la sécurité. Grâce à cette combinaison de télémétrie, de communication sans fil et de technologie GPS, nous développons notre propre forme de conduite des trains assistée par ordinateur. Nous visons ainsi à aider le mécanicien de locomotive quand il doit effectuer des tâches critiques et à réduire le taux d’erreur humaine, comme je l’ai dit plus tôt.
[Français]
Je vous donne un dernier exemple.
De concert avec les comités locaux de santé et sécurité ainsi qu'avec la Conférence ferroviaire Teamsters Canada, dont je salue la présence aujourd'hui, VIA Rail a contribué à l'identification partout au pays de nombreuses zones parmi les plus à risque afin de mieux prévenir le potentiel élevé d'incidents.
[Traduction]
Nous avons également étendu et intégré notre culture de la sécurité dans une approche globale fondée sur le risque. VIA Rail est maintenant profondément engagé à la gestion des risques d’accidents, des passages à niveau, des incidents dus à l’intrusion. VIA Rail est tellement axé sur sa culture de la sécurité qu’en plus d’appliquer un SGS solide et efficace, la direction et le conseil d’administration de VIA Rail ont décidé de placer le risque au sommet de la liste des priorités de l’organisme.
[Français]
Ce sont autant de décisions et d'interventions qui ont servi à rehausser la sécurité dans l'ensemble de nos opérations. L'effet combiné des initiatives précédemment décrites aura permis à VIA Rail d'enregistrer en 2013 son meilleur rendement sécuritaire.
Il y a eu, au cours de 2009, 3,6 incidents par millions de milles impliquant nos trains. En 2013, seulement 1,3 incident par millions de milles fut enregistré. Cela veut dire que, sur l'ensemble de notre réseau, on parle de huit incidents pour l'ensemble de l'année. Cela représente une diminution de 64 % par rapport à 2009.
Ce bilan plus positif existe parce que nous cherchons chaque jour à prévenir les accidents. La raison d'être de toute notre intervention est de ne compter aucune victime ou blessé grave, sinon le moins possible.
Autre résultat encourageant en 2013, nous avons dénombré presque la moitié moins d'incidents survenus à des traverses et à des passages à niveau qu'en 2009. Présentons les choses autrement: nous avons sauvé des vies et nous aimerions faire mieux encore.
La raison principale est que la prévention et la gestion de nos systèmes de sécurité ne s'effectuent que par l'établissement de partenariats solides avec des intervenants tout aussi dévoués. La feuille de route enviable que nous affichons aujourd'hui fut réalisée grâce à notre leadership et à des collaborations soutenues bien établies, tant internes qu'externes.
:
Merci, monsieur le président et membres du comité, d’avoir invité Unifor à présenter le point de vue de notre syndicat sur l’avenir de la sécurité ferroviaire au Canada dans le cadre du transport de matières dangereuses et sur les systèmes de gestion de sécurité, ou SGS.
Je me présente; je m’appelle Jerry Dias et je suis le président national d’Unifor. J’ai avec moi aujourd’hui Brian Stevens, directeur national du Secteur ferroviaire.
Unifor est un nouveau syndicat canadien fondé pendant le week-end de la Fête du travail 2013 en fusionnant les anciens syndicats TCA-Canada et CEP. Unifor est le plus grand syndicat du secteur privé. Il compte plus de 300 000 membres qui travaillent dans au moins 20 secteurs de l’économie, ce qui comprend tous les niveaux de la chaîne de valeur économique, soit les ressources, la manufacture, le transport ainsi que les services privés et publics.
Nous représentons près de 85 000 membres qui travaillent dans le secteur fédéral du transport aérien, marin, routier et celui des télécommunications ainsi que le secteur qui intéresse ce comité, et qui regroupe un peu plus de 12 000 membres qui travaillent pour les chemins de fer. Nos membres ont pour tâches de mener des inspections de sécurité et de maintenance, de réparer tous les wagons de voyageurs et de marchandises ainsi que les locomotives de compagnies ferroviaires de catégorie 1, de VIA Rail et de plusieurs transporteurs régionaux.
Dans le cas du transport de matières dangereuses, il y a des poteaux de buts tout au long de l’assiette des rails de chaque changement réglementaire, et la catastrophe du 7 juillet 2013 à Lac-Mégantic a tragiquement coûté 47 vies. Ce désastre a éprouvé la force et la résilience non seulement de ces familles et de cette collectivité, mais de tout notre pays. Le public a perdu confiance en cette industrie et envers le régime de réglementation. On ne considère plus que le cadre réglementaire qui régit Transports Canada vise l’intérêt du public, mais plutôt les observateurs et les vérificateurs de l’industrie.
L’arrêté qu’a signé le ministre le 26 décembre 2013 sur les trains et sur les équipes laissés sans surveillance a produit un grand nombre de nouvelles règles. Nous ne considérons pas cela comme la fin du parcours, mais comme la première d’un grand nombre d’étapes à entreprendre pour améliorer la sécurité ferroviaire et, surtout, pour regagner la confiance du public.
Outre l’examen de l’inclinaison des pentes sur lesquelles on peut laisser les trains sans surveillance, voici ce qui améliorerait la sécurité ferroviaire et ce qui viserait l’intérêt du public.
Reclasser le pétrole brut transporté dans des wagons-citerne en fonction de sa volatilité.
Comme mesure provisoire, interdire immédiatement le transport dans des wagons-citerne de spécification DOT-111A que l’on n’a pas modifiés conformément à la nouvelle norme CPC-1232. Nous nous attendons à ce que le rapport du BST présente des recommandations précises sur les normes à appliquer aux wagons-citerne.
Réduire la vitesse des trains qui transportent des matières dangereuses quand ils traversent des municipalités.
Veiller à ce qu’un mécanicien qualifié inspecte tout l’équipement de la locomotive et des wagons de marchandises avant de laisser un train sans surveillance. Transports Canada devrait se charger d’octroyer une licence d’inspecteur de TMD aux mécaniciens ou aux techniciens de wagons qui ont accumulé quatre années ou 8 000 heures de métier.
Veiller à ce que tous les trains, surtout ceux qui transportent des matières dangereuses, subissent une inspection visuelle de sécurité et de maintenance tous les 1 600 kilomètres, effectuée par des mécaniciens de wagons qualifiés.
Maintenant, le SGS est un ensemble de processus explicites conçus pour intégrer les préoccupations liées à la sécurité à la prise de décisions, à la planification et aux activités opérationnelles. Tous les chemins de fer que réglemente le gouvernement fédéral doivent avoir mis en oeuvre un SGS. À la suite de la modification récente de la Loi sur la sécurité ferroviaire, on a créé un groupe de travail sur la réglementation chargé d’établir de nouvelles règles sur le SGS. Ces règles comprendront de nouvelles dispositions nommant les directeurs responsables et accroissant la participation des employés à l’élaboration du SGS. Nous sommes particulièrement satisfaits de constater que l’industrie protège enfin les employés dénonciateurs.
Mais ce qui nous inquiète, c’est que l’industrie est de plus en plus convaincue que les processus d’évaluation et de maîtrise des risques sont fiables et qu’ils soutiennent sans conditions la mise en oeuvre de changements opérationnels. Le processus d’évaluation incite parfois l’organisme à changer d’avis et à intégrer le risque dans ses processus de planification et de prise de décisions. Toutefois, nous savons d’expérience que l’industrie détermine d’avance des changements à apporter et que son évaluation du risque ne constitue qu’un rapport de plus à insérer au dossier. Nous n’avons encore jamais vu une entreprise dire à la suite d’une évaluation du risque: « Oh! Nous n’allons pas faire cela, c’est bien trop dangereux! »
En vertu du régime en vigueur, les évaluations du risque du SGS demeurent confidentiels, et ceci à la demande de l’industrie. Le public ne saura jamais de quels facteurs l’industrie a tenu compte en décidant des changements opérationnels à apporter dans l’intérêt du public.
On ne s’étonne donc pas de voir des collectivités et des dirigeants communautaires comme le maire Nenshi de Calgary perdre confiance en l’industrie. Selon nous, les évaluations du risque ne représentent rien de plus qu’une lentille à travers laquelle les entreprises sont obligées de regarder quand elles envisagent d’apporter des changements opérationnels. Ces évaluations n’ont que très peu d’influence sur leurs décisions d’apporter des changements opérationnels dans l’intérêt des intervenants.
L’industrie semble également convaincue que l’évaluation des risques menée dans le cadre du SGS remplace adéquatement la hiérarchie des mécanismes de contrôle de la santé et de la sécurité en milieu de travail. Elle se trompe. Il faut comprendre que l’approche de santé et sécurité en milieu de travail est très différente de ce que vise une hiérarchie d’élimination des dangers. Il s’agit ici de prévenir.
L’exploitation sécuritaire des chemins de fer doit viser une seule chose: la sécurité. Il faut donc avant tout reconnaître les dangers, faire des efforts exceptionnels pour les éliminer et pour prévenir les dangers futurs, et non élaborer des mesures administratives qui visent à trouver des moyens de vivre ou de mourir avec les risques en ignorant les dangers.
Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
:
Je tiens à remercier le comité de m’avoir invité à me présenter devant vous.
Tout d’abord, je suis psychologue organisationnel. J’étudie la culture de la sécurité depuis 20 ans, donc je suis très heureux de constater l’importance que vous accordez à la culture de la sécurité dans votre processus d’examen.
J’ai travaillé avec tout un éventail d’industries pour lesquelles la sécurité est critique, comme les domaines de l’exploitation pétrolière et gazière en mer, des produits pétrochimiques, de la puissance nucléaire, de la construction, des transports. J’enseigne présentement la culture de la sécurité au CN. J’ai aussi participé à la rédaction du document politique que l’Office national de l’énergie vient de publier sur la culture de la sécurité et qui s’appliquera au transport par pipelines.
Je pense que si nous parlons de culture de la sécurité — et plusieurs témoins ont déjà mentionné cela — il faut que nous définissions ce terme. Pour moi, il s’agit d’attitudes, de valeurs, de normes et de croyances que partagent les membres d’un groupe particulier au sujet du risque et de la sécurité.
Le concept de la culture de la sécurité existe depuis plus d’un quart de siècle. Il tire son origine de la catastrophe nucléaire de Chernobyl. On peut considérer la culture de la sécurité comme le cœur et l’âme du système de gestion de sécurité d’un organisme, car elle fournit l’énergie et la motivation nécessaires pour concrétiser ce système de gestion de sécurité. La culture de la sécurité détermine l’intensité avec laquelle un organisme vit son système de gestion de sécurité qui, lui, définit la manière dont l’organisme maîtrisera les dangers. Pour les maîtriser efficacement, l’organisme doit mettre en oeuvre des mécanismes de contrôle. La culture de la sécurité détermine dans quel degré on appliquera ces mécanismes de contrôle. Par conséquent, pour que le système de gestion de sécurité soit efficace, il faut établir dans l’organisme une culture de la sécurité positive. Cela ne signifie pas nécessairement qu’un système de gestion de sécurité produit une culture de la sécurité positive. En réalité, il faut établir une culture de la sécurité pour que le système de gestion de sécurité fonctionne avec l’efficacité prévue.
Il existe différents modèles et cadres de culture de la sécurité qui se chevauchent très souvent. La plupart de ces modèles tiennent compte de la majorité des aspects importants tels que l’engagement des hauts cadres de l’organisme. Bien des gens, surtout des personnes comme moi, ont consacré beaucoup de temps et d’efforts en discussions visant à déterminer lequel de ces modèles est le meilleur ou quel modèle est meilleur qu’un autre. Ces débats ne se sont généralement pas avérés bien utiles. La plupart des modèles sont acceptables et tiennent compte des thèmes et des concepts principaux. Nous devrions donc passer moins de temps à débattre de la valeur des différents modèles et en choisir un qui soit efficace dans notre contexte afin de le mettre en oeuvre.
Il existe de très nombreux cadres différents. Celui que l’industrie ferroviaire a adopté et développé est bon, mais il est différent des autres.
Je pense qu’il est aussi important de déterminer les raisons pour lesquelles la culture de la sécurité est importante. Nous avons de bonnes preuves liant la culture de la sécurité à d’importants résultats en matière de sécurité. De nombreuses études ont démontré le lien entre la culture de perception de la sécurité chez les employés et les taux de blessures dans l’organisme pour lequel ils travaillent. On a également démontré qu’il existe un lien entre les dangers qui menacent la culture de la sécurité et les grandes catastrophes telles que celle de la plateforme Deepwater Horizon et celle de Chernobyl que j’ai mentionnée plus tôt.
Les résultats d’études menées récemment dans l’industrie nucléaire des États-Unis. relient la perception qu’ont les employés de la culture de la sécurité à l’état des centrales nucléaires, et cela constitue l’indicateur principal du niveau de sécurité dans une centrale nucléaire. De bonnes preuves soutiennent le fait que la culture de la sécurité est liée à d’importants résultats en matière de sécurité, quelle que soit la manière dont vous la conceviez et dont vous la mesuriez.
Mais je pense qu’il est important que nous nous concentrions un peu sur ce que les organismes devraient faire au sujet de la culture de la sécurité. Si je me trouvais parmi les hauts dirigeants d’une entreprise où la sécurité est critique, je m’efforcerais de me faire une idée globale précise de notre culture de la sécurité, ce qui comprend ses points forts et ses faiblesses. Je voudrais savoir si nous avons établi des processus actifs pour développer une culture de la sécurité positive et quel est le succès de ces processus dans la pratique. Je voudrais aussi savoir quel rôle je devrais jouer et dans quel degré mes rapports directs favorisent une culture de la sécurité positive. Les entreprises dans lesquelles la sécurité est critique devraient adopter une approche systématique favorisant une culture de la sécurité positive. Il s’agit ici d’un processus à améliorer continuellement et qui repose sur une vision claire de la culture positive désirée, sur une définition précise des rôles que des groupes clés comme celui des gestionnaires doivent assumer, sur les activités particulières à mettre sur pied pour favoriser la culture désirée ainsi que sur des évaluations continuelles de cette culture de la sécurité, sur des vérifications et sur des examens des programmes.
Quand on parle de culture de sécurité, on s’attarde souvent beaucoup à l’évaluation de la culture. Différents outils et méthodes peuvent être employés, et la majorité du travail réalisé depuis 20 ans l'a été dans ce domaine.
L’évaluation peut être très utile quand il s’agit d’identifier les forces et les faiblesses susceptibles de guider les actions d’amélioration. On se concentre trop souvent sur l’évaluation de la culture de sécurité et pas assez sur les améliorations. On croit naïvement que, dès qu’on mesure quelque chose, ça veut dire par définition qu’on peut l’améliorer ou le changer, mais c’est rarement le cas. Savoir qu’il pleut ne nous avance si l’on ne sait pas comment arrêter la pluie, ce qu’on ne sait pas faire.
Évaluer pour évaluer ne nous apporte rien et peut même être néfaste. Il est donc important que les évaluations de la culture de sécurité soient uniquement effectuées dans le cadre d’une stratégie d’amélioration. Les organisations ne devraient pas faire d’évaluations de la culture de sécurité à moins d’avoir l’intention d’améliorer le résultat de l’évaluation.
C’est tout ce que j’avais à dire. Si vous avez des questions, je serai ravi d’y répondre.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de leur présence parmi nous aujourd'hui. Il est très important pour nous de savoir ce qui se passe sur le terrain.
Je vais m'adresser d'abord aux représentants de VIA Rail.
J'adore votre service et je le trouve très important. J'ai souvent l'occasion d'utiliser le train et j'aimerais le faire davantage. En toute franchise, on se sent en sécurité quand on est à bord de vos trains. J'aimerais que VIA Rail puisse offrir encore plus de services et que les gens utilisent davantage le train qui est, comme vous l'avez dit, une façon humaine de voyager. De plus, c'est bon pour l'environnement.
Vous avez aussi parlé d'infrastructures. Compte tenu de la privatisation du secteur ferroviaire, on constate souvent que ce n'est pas VIA Rail qui est propriétaire des rails. Vous dépendez donc des compagnies qui en sont les propriétaires. Il est déjà arrivé que des compagnies aient fait leurs propres inspections et que VIA Rail leur ait dit que leurs rails n'étaient pas assez sécuritaires pour les passagers et qu'ils n'allaient pas les emprunter.
Prenons l'exemple de la voie entre Miramichi et Bathurst. Comme vous le savez, il y a une portion qui ne fonctionne pas, de sorte que le service passagers est problématique. Il y a aussi la voie entre Moncton et Edmundston qui, pour sa part, exigerait plus d'investissements en infrastructure puisqu'il n'y a pas de gare, entre autres.
Quel est le problème relatif à ces rails? Pourquoi ne peut-on pas les utiliser pour le service de passagers?
:
Je vais répondre à cette question, si vous le voulez bien.
Pour ce qui est du SGS dans notre secteur, il y a deux façons de voir les choses.
Tout d’abord il y a l’aspect de santé et sécurité au travail en vertu de la partie II du code. Ces évaluations et le SGS sont motivés par une hiérarchie d’élimination des risques.
En vertu de la Loi sur la sécurité ferroviaire par contre, ces évaluations du risque visent à introduire un risque acceptable. Lorsqu’on voit une série de changements opérationnels qui sont instaurés et que certains ne sont pas de notre avis et de l’avis du syndicat, dans l’intérêt du public, c’est préoccupant, car le public n’est pas conscient de ce que vont être ces changements à cause du passage de trains dans leurs collectivités.
Les changements pourraient bel et bien être sûrs et raisonnables, ou peut-être pas, mais il n’y a pas moyen d’avoir de consultation avec ces collectivités. Si le régime ne s’ouvre pas pour apporter de la transparence à ces collectivités, il faudrait alors, au minimum, rendre publics les évaluations du risque et les documents de la compagnie ferroviaire, à un moment donné.
:
Nous sommes conscients que les problèmes des derniers mois à ces passages ont importuné les résidents d’Ottawa. Nous le comprenons. Mais sachez qu’à aucun moment leur sécurité n’a été compromise, car le mécanisme par défaut est sûr, la barrière se ferme.
Afin de tenter d’apaiser les préoccupations des gens, nous avons instauré un protocole de communication avec la Ville d’Ottawa pour nous assurer que, lorsqu’un événement a lieu, l’information soit communiquée rapidement. Nous avons également du personnel sur place dans certains cas.
Une fois de plus, il n’y avait pas de danger immédiat, car s’il y a un problème de circuit, la barrière se ferme pour assurer la sécurité du passage à niveau. Nous continuons à travailler avec les fournisseurs, les fabricants, et une tierce partie qui… Nous attendons un rapport préliminaire qui nous sera communiqué demain, pour voir quelles sont les recommandations qui permettraient d’améliorer la fiabilité.
:
Avez-vous lu le rapport du vérificateur général du Canada sur la sécurité ferroviaire? Est-ce que votre conseil d’administration l’a lu? Est-ce que vos juristes ont lu le rapport?
Monsieur Dias, vous et vos collègues du syndicat avez-vous été saisis des détails des recommandations qui y figurent?
La raison pour laquelle je vous pose cette question est simple. Nous avons eu une série de témoins qui sont venus nous dire qu’il y a des systèmes de gestion de la sécurité qui entrent en jeu. Il y a sans aucun doute une forte culture de la sécurité à VIA Rail, ainsi que, semble-t-il, au CN ou au CP. Cependant, quand j’ai demandé au vice-président du CN cette semaine s’il avait été saisi de ce rapport, il m’a répondu: « Ce n’est pas à moi… » — incroyable — « … de m’inquiéter de savoir si le l’organisme de réglementation reçoit assez d’argent pour réglementer. »
Pouvez-vous nous dire si vous avez lu le rapport? Parce que malgré tout ce que vous dites dans votre exposé, je crois que les Canadiens vont croire le vérificateur général avant de croire quelqu’un d’autre. Ils croiront le vérificateur général si son opinion diffère de ce que dit VIA Rail, le CN, le CP ou le mouvement syndical. Je vous demande si vous avez été saisis des conclusions de ce rapport.
C’est très sérieux. Dans quelle mesure êtes-vous conscient de ce qui se passe ici au niveau des manquements de Transports Canada.
:
Mais la principale conclusion de ce rapport du vérificateur général est que Transports Canada n’est pas en mesure de dire si le système de gestion de la sécurité est effectivement en place et offre la protection nécessaire. C’est très simple. Les conclusions de l’audit sont claires.
En l’espace de trois ans, VIA Rail a transporté 4 millions de passagers par an sans jamais être soumise à une vérification détaillée de Transports Canada. Seuls 25 % des audits nécessaires pour assurer la sécurité du transport ferroviaire privé, d’après Transports Canada, ont été effectués.
Donc, l’organisme de réglementation, Transports Canada, doit faire pression sur VIA Rail, le CN et le CP, mais doit aussi faire son travail. Si vous examinez ce rapport, le détail de ce qui se passe est effarant. On ne peut pas passer ça sous silence. Tout est là, noir sur blanc. C’est tellement sérieux que, lors de sa comparution, le vérificateur général a dit qu’il allait réexaminer la question à nouveau pour voir s’il y a eu des améliorations.
Avez-vous porté ça au niveau de votre conseil d’administration? Avez-vous vu qu’il n’y a que neuf inspecteurs alors qu’il en faudrait 20? Avez-vous vu que seulement 25 % des vérifications ont été effectuées? Avez-vous vu qu’ils ne peuvent pas vraiment dire qu’il y a un SGS digne de ce nom en place?
Que doivent en penser les passagers de VIA Rail? Que doivent en penser les employés syndiqués d’Unifor?
Monsieur Dias, pouvez-vous nous aider à comprendre?
:
Permettez-moi de rappeler ceci M. Dias, avant qu’il n'intervienne, je cite: « les plans de travail sont vagues au niveau des échéances pour le suivi du progrès sur d’importantes questions sécuritaires ».
Il manque d’importantes informations. Nous n’avons pas les évaluations de risques des sociétés ferroviaires fédérales. Nous n’avons pas l’information sur les tronçons de lignes utilisés pour transporter des matières dangereuses. Nous n’avons pas l’information sur l’état des ponts ferroviaires. Nous n’avons pas de données financières concernant les compagnies ferroviaires fédérales détenues par des capitaux privés, car ce n’est pas public.
Le processus de vérification du SGS pour chaque chemin de fer fédéral exige trois ans. Quatorze vérifications ont été effectuées en trois années fiscales; soit 26 % de ce qui avait été exigé. VIA Rail n’a pas été soumis à une vérification en trois ans. Le cadre de la vérification est très limité.
En conclusion, ces résultats indiquent que Transports Canada n’est pas en mesure d’assurer que les compagnies ferroviaires fédérales ont mis en oeuvre les systèmes de gestion de la sécurité adéquats et efficaces. Le rapport indique que même la méthodologie utilisée pour déterminer les inspections est erronée.
Et ça continue. Qu’est-ce que l’on doit faire de ça? Comment les Canadiens peuvent-ils croire ce que vous dites à la suite de cette évaluation objective et définitive?
:
Merci monsieur le président.
Merci à nos témoins d’être ici aujourd’hui.
Monsieur Dias, permettez-moi de faire publiquement ce que j’ai fait en aparté avant le début de notre séance, je voudrais vous féliciter personnellement pour votre élection à la tête d’Unifor. Tous nos voeux vous accompagnent dans vos efforts.
Pour clarifier certaines choses que M. McGuinty vient d’exprimer officiellement, si on remonte au rapport du comité consultatif indépendant sur le transport ferroviaire de 2007, concernant les systèmes de gestion de la sécurité, le comité avait suggéré que, pour atteindre le summum en matière de système de gestion de la sécurité, il fallait augmenter le nombre de vérifications tout en réduisant le nombre d’inspections.
Je ne suis pas sûr que qui que ce soit, notamment les Canadiens, soit rassuré si les inspections étaient remplacées par des vérifications du système. Même si on écoute les conseils du vérificateur général sur la nécessité d’effectuer davantage de vérifications, le nombre d’inspections traditionnelles est passé à 30 000 par an alors qu’on en faisait auparavant autour de 20 000. Nous pensons qu’il est important de ne pas éliminer des inspections simplement pour augmenter les vérifications. Nous entendons donc bien la correction du vérificateur général.
Monsieur Fleming, je reviens à vos remarques sur la culture de la sécurité… J’ai travaillé pour Chrysler il y a longtemps et ils avaient cinq éléments de mesure: la sécurité, la qualité, le temps de livraison, le coût et le moral. Si vous parliez aux ouvriers à l’usine, ils vous auraient dit que, d’après eux, le moral était la dernière priorité, mais si ça avait été porté au premier rang, tous les autres aspects auraient été améliorés dans la chaîne.
Pouvez-vous nous parler de l’importance d’avoir des employés qui se sentent en sécurité dans l’environnement et comment ils peuvent participer à faire avancer la culture de la sécurité dans la société? Ou bien, quels sont les freins à cela?
Notre axe principal pour éduquer les municipalités, c'est par le biais de l'Opération Gareautrain, nous faisons de la sensibilisation lors de différents événements communautaires et dans les écoles. En fait, nous travaillons aussi en étroite collaboration avec nos partenaires américains, pour trouver de nouveaux axes, de nouvelles approches pour que des volontaires aillent faire de la prévention pour sensibiliser les gens à la sécurité ferroviaire. Nous faisons partie du conseil d'administration et du comité d'orientation, des comités d'examen des programmes. Nous sommes sur tous les fronts.
Quand nous avons réussi à fermer tous ces passages à niveau, nous avons été frappés aux portes des gens vivant le long des voies pour les sensibiliser et leur parler du programme de Transports Canada. Si vous êtes prêts à fermer ce passage à niveau, cela sera plus sûr et vous recevrez un peu d'argent.
Nous faisons tout notre possible. Nous sommes un petit groupe, mais nous sommes sur tous les fronts.
:
Comme je l'ai dit plus tôt, nous avons investi ces deux dernières années plus de 80 millions de dollars pour améliorer la sécurité de notre propre infrastructure. Grâce au plan d'action économique, une partie de cet argent a été investi pour garantir que tous les passages à niveau publics sur notre infrastructure sont équipés des technologies les plus modernes. Ils sont donc entièrement protégés avec des barrières et des avertisseurs lumineux.
Nous investissons aussi dans ce que nous appelons le SCC, ou système de commande centralisée de la circulation, pour qu'il n'y ait pas de zones d'ombre sur notre propre infrastructure. Donc toute l'infrastructure est équipée de signalisation. Nous avons aussi réparé de nombreux ponts, etc., mais je crois que la réponse principale, c'est tout le travail que nous avons fait sur notre infrastructure pour garantir que tous les passages à niveau, tous ceux qui sont ouverts au public, soient entièrement protégés. Je crois que c'est la principale réponse.
Je voudrais ajouter quelque chose à ce que Jean a dit concernant le travail avec les collectivités. Nous responsabilisons les mécaniciens qui circulent tous les jours sur le réseau dans tout le pays. Nous avons lancé un programme avec eux, très singulier je crois, par lequel ils signalent chaque jour à leur responsable du comité local s'ils voient une clôture brisée, une situation à proximité de la route qui pourrait constituer un risque pour des contrevenants qui traverseraient.
Chaque mois, Steve et moi participons à une conférence téléphonique et les responsables nous rendent compte des cas qui ont attiré l'attention des mécaniciens. Nous allons ensuite dans les communautés, à la police, à l'école, etc. et nous les informons de la situation et essayons de travailler avec la communauté pour réduire ou éliminer le problème. Cela a été fait dans tout le pays.
Merci beaucoup d’être venus aujourd’hui. Vos témoignages m’ont beaucoup intéressée.
Comme vous le savez, nous avons entamé cet examen à cause de certains incidents. À titre de membre de ce comité et de Canadienne observant toutes ces choses, je pense que le grand public a été très surpris de voir quelles étaient les lacunes en matière de sécurité dans les systèmes ferroviaires.
Je suis sociologue et j’ai étudié des collectivités dans tout le Canada. Évidemment, nous reconnaissons que ces collectivités se sont développées autour du système ferroviaire, des rails, des arrêts et tout ce genre de choses. Bien entendu, le système ferroviaire est une partie importante de l’histoire du Canada.
Combien de travaux ont été accomplis, selon vous, non seulement pour l’examen que nous menons, mais disons au cours de ces 5, 10 ou 20 dernières années, pour recueillir de l’information et pour examiner sérieusement tout le système ferroviaire et ce que nous pourrions faire pour le protéger? Ou est-ce que rien ne s’est fait, et actuellement nous ne faisons que réagir à une situation problématique?
M. Del Bosco pourrait peut-être répondre à cette question.
Comme j’ai plusieurs questions à vous poser, je vais vous demander de me répondre aussi brièvement que possible.
Ce que vous me dites alors, c’est que pendant plus de 100 ans nous n’avons pas mené, disons tous les 10 ans, un examen de la sécurité de tout le système ferroviaire au Canada. Nous ne sommes pas en mesure de dire: Regardez, il y a cette collectivité, des mauvaises pratiques aux croisements dans un quartier où vivent des familles, où il y a d'autres facteurs de risque. Le système ferroviaire surveillait ou menait ce type d’évaluations des risques à la sécurité, ce qui fait que l'on ne mène pas d’examen annuel ou autre.
Vous me dites qu’il n’y a rien de ce genre qui a été établi?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur Fleming, dans votre exposé, vous avez fait un commentaire que j'ai trouvé très intéressant. Vous avez dit que si vous étiez gestionnaire, vous ne vous demanderiez pas quelle méthode utiliser, mais plutôt comment cela fonctionne, comment on en fait la promotion et l'évaluation, quels sont les objectifs et comment évaluer les forces et les faiblesses. J'ai trouvé cela très pertinent.
J'aimerais qu'un représentant de VIA Rail réponde à ces questions. Vous avez beaucoup insisté sur le fait que les normes de VIA Rail étaient supérieures à la réglementation en vigueur. Par soi-même, on ne fait pas tellement d'autocritique. On ne se demande pas quelles sont nos faiblesses, ni comment on peut les surmonter. Quand on ne sait pas quelles sont nos faiblesses, on ne peut pas les surmonter. Pouvez-vous répondre à ces questions?
:
Je vais répondre à votre question avec plaisir et je vais vous donner un exemple qui est très d'actualité.
Nous avons 23 comités locaux de santé et sécurité partout au pays. Chacun de ces comités est composé à part égale de membres syndiqués et de membres de la gestion. Ces comités se réunissent chaque mois pour faire le bilan à propos de ce qui s'est passé dans leur milieu. Chaque mois, un procès-verbal de ces réunions est produit et il nous est envoyé. Nous le lisons chaque mois.
Chaque mois, nous tenons des réunions avec l'ensemble de nos gestionnaires qui nous rapportent des situations ayant été portées à leur attention au cours du mois. Nous examinons avec eux les meilleures façons d'améliorer les méthodes utilisées. Cette semaine, tous les gens coresponsables des comités locaux de santé et sécurité de tout le pays sont invités à participer à une conférence annuelle à Montréal. Nous aurons le plaisir d'accueillir M. Dias, qui ouvrira la session avec Steve Del Bosco.
Comme l'a dit M. Fleming, au cours de cette réunion, nous aurons l'occasion d'évaluer notre culture de sécurité avec les membres des comités locaux de santé et sécurité patronaux-syndicaux. À la suite de cette réunion, des objectifs en matière de sécurité seront établis, tant par la partie syndicale que patronale. Tous les trois mois, lors des réunions de ces comités, des rapports devront être déposés sur le suivi de ces objectifs.
:
Je suis très heureux que vous me donniez l'occasion de répondre à cette question.
L'erreur humaine est la cause principale des accidents, mais cela ne veut pas dire que l'employé est la cause de l'accident. En tant que direction, nous devons fournir à l'employé de la formation, de l'équipement adéquat et faire une bonne évaluation des risques, afin que ce dernier évolue dans un environnement sécuritaire. Oui, l'erreur humaine est la principale cause des accidents, mais ce n'est pas la personne qui l'est nécessairement.
En ce moment, nous implantons de nouvelles technologies pour réduire le nombre d'accidents. De concert avec nos partenaires syndicaux de la TCRC , nous passons beaucoup de temps à déterminer quels facteurs humains permettraient de réduire le nombre d'accidents à bord des trains.
L’industrie se fie beaucoup trop à la technologie, et je le dis souvent, la technologie n’a pas fait ses preuves. Comme exemple, je vous citerai le train au charbon qui va de Sparwood en Colombie-Britannique jusqu’à la côte et retour.
Nous inspectons la sécurité de ce train à divers endroits. Le CP a réussi à convaincre Transports Canada de l’exempter de plusieurs règles d’inspection de sécurité et de la règle sur l’essai no 1 des freins à air parce que selon le CP, nous avons cette technologie. Un essai a été effectué à six mois, et la technologie s’est avérée efficace à 83 %. Avec des inspecteurs sur le terrain, nous avons une efficacité de 100 %. L’exemption énonçait que cela assurerait la sécurité des chemins de fer et que cela servirait aussi l’intérêt du public.
L’efficacité est passée de 100 % quand nos mécaniciens effectuaient la maintenance et l’inspection de la sécurité à 83 %. Ce système est en place depuis 18 mois, et il est évident que l’efficacité a diminué. Elle a diminué de 83 % à presque 60 %. Mais nos mécaniciens se rendent encore sur le terrain.
On se fie aussi beaucoup trop aux détecteurs de défaut de roue, les DDR, les détecteurs de boîtes chaudes et les détecteurs de roue froide, qui sont des outils qui doivent aider nos mécaniciens, et non les remplacer.
Le CN a installé des systèmes de détection en voie à peu près tous les 12 à 15 milles. Le CP les a placés entre 15 et 20, et ils disent que c’est la meilleure chose au monde. Nous avons encore des pannes de palier, de jantes fissurées, de pièces traînantes, et ces défaillances seraient dépistées au cours d’une inspection de sécurité à un endroit ou un autre. Mais on a éliminé la plupart d’entre elles. C’est pourquoi nous vous disons qu’il faudrait effectuer une inspection de maintenance de sécurité au moins tous les 1 600 kilomètres, comme ça nous saurions que ces wagons se déplacent en toute sécurité d’un endroit à un autre.
On se fie beaucoup trop à la technologie, et je crains que cela ne fasse qu’augmenter. Les chemins de fer disent qu’ils ne vont pas réparer des wagons qui ne leur appartiennent pas. Ils tirent leurs profits en déplaçant des wagons et non en les réparant, et c’est la mentalité qui dirige cette technologie.
:
Merci, monsieur le président.
Un témoin nous a parlé des systèmes de gestion de sécurité, les SGS. Il est évident qu’il y a des règlements, nous savons que c’est important et que les systèmes de gestion de sécurité s’ajoutent à ces règlements. Quelqu’un a affirmé que dans bien des cas, les systèmes de gestion de sécurité n’ont pas encore atteint leur maturité. Je sais que quand on regarde VIA Rail, le CN, le CP ou peut-être de plus grandes sociétés, leurs systèmes de gestion de sécurité se trouvent peut-être à un stade différent.
Les systèmes de gestion de sécurité suivent-ils un processus de maturation? À quoi ressemblerait-il, et quelles disparités devrions-nous examiner entre les différentes sociétés de chemins de fer?
Qui pourrait me répondre? Peut-être vous, monsieur Fleming.
:
Je pense qu’il est vrai que l’approche des organismes face au système de gestion de sécurité se développe avec le temps. Quand vous passez d’un régime normatif à un système de gestion de sécurité axé sur les objectifs, la transition est toujours difficile.
Si l’on parle de maturité, en 2000 j’ai conçu quelque chose appelé le modèle de maturité de la culture de la sécurité, qui décrivait ce processus. On l’a utilisé dans le cadre de l’examen précédent de la Loi sur les chemins de fer. Pour que votre système de gestion de sécurité soit efficace, il faut qu’il soit soutenu par une culture de sécurité mûre. À mesure que ce processus évolue, alors votre système de gestion de sécurité devient plus efficace.
Au bas de l’échelle d’une culture de la sécurité se trouve ce que nous appelons une culture pathologique où les organismes ne se soucient pas de la sécurité. Ils se concentrent sur les moyens de contourner les règles et de ne pas les respecter et bien évidemment, cette culture n’est pas bonne pour la sécurité. Plus on remonte l’échelle, plus les organismes vivent dans leurs systèmes et dépassent les exigences et les règles, qui deviennent alors très efficaces et sécuritaires. Il est important de comprendre qu’en réalité, la maturité de la culture soutient l’efficacité des systèmes de gestion de sécurité.
Il arrive souvent que vous ayez deux entreprises qui, sur papier, ont le même système de gestion mais qui produisent des résultats très différents, et c’est à cause de la faiblesse de leur culture de soutien. La maturité de la culture est plus importante que la maturité de la documentation du système.
L’autre chose dont je tiens compte est le fait qu’un système de gestion de sécurité doit être adopté par les employeurs et les employés, par la direction, par toute l’organisation. Je sais qu’il faut se préoccuper de certaines choses, comme une certaine façon de penser à ce propos. Bon nombre d’entre nous n’aiment pas le changement, même s’il est bon. Nous faisons les choses d’une certaine façon et nous voulons continuer à les faire ainsi.
Vous avez dit que surveiller le rendement et examiner les tendances et les évaluations des risques, c'est une chose. Mais en réalité, passer à la prochaine étape et agir pour améliorer les choses, est-ce que les gens résistent à cela, et comment affaiblir cette résistance à un changement qui apporterait une amélioration?
:
Je vous remercie, monsieur le président.
Je voudrais revenir au rapport du vérificateur général et sur la question de la capacité humaine, les problèmes de capacité au sein du ministère. Voici ce que le Vérificateur général avait à dire, et ça contraste fortement avec certaines choses que j'entends.
En premier lieu, le vérificateur général a dit qu'en 2009 Transports Canada estimait avoir besoin de 20 vérificateurs de système pour vérifier chaque chemin de fer une fois tous les trois ans. Le vérificateur général a ensuite dit que le ministère avait 10 inspecteurs qualifiés, désormais avec la charge de travail accrue de la supervision de 39 chemins de fer non fédéral supplémentaires. Il a poursuivi en disant que Transports Canada ne sait pas si les inspecteurs composant son effectif actuel — croyez-le ou non — « possèdent les capacités et les compétences requises » pour accomplir leur travail.
Le vérificateur général a affirmé, et je cite: « Les inspecteurs et les gestionnaires n’ont pas reçu une formation en temps opportun. » Il ajoute que Transports Canada ne peut même pas garantir que les inspecteurs sont objectifs et indépendants, que ceux-ci proviennent pour la plupart de compagnies ferroviaires sous régime fédéra. Qu'est-ce que les Canadiens doivent conclure de ce rapport très dur, très détaillé, sur l'état de la sécurité ferroviaire? VIA Rail, comme je l'ai déjà mentionné — et j'aimerais bien que VIA Rail réagisse à cela — n'a pas fait l'objet d'une seule vérification au cours de trois exercices financiers successifs et transporte pourtant quatre millions de passagers par année.
Je ne suis pas grand admirateur des Républicains américains, mais s'il est une attitude qui nous vient des États-Unis que j'aime bien, c'est « faire confiance mais vérifier ». En bout de ligne, la plupart des Canadiens croient que l'ultime responsabilité de la sécurité ferroviaire appartient au gouvernement fédéral, et ne repose pas sur un partenariat entre réglementateur et réglementé, matérialisé dans les SGS, pas sur l'entreprise réglementée, pas sur VIA Rail, ni sur le CN, ni sur le CP, ni sur aucune autre compagnie de chemin de fer. Je pense que la plupart des Canadiens croient que c'est au gouvernement du Canada qu'il incombe de réglementer les chemins de fer et d'assurer la sécurité ferroviaire.
Qu'est-ce que les Canadiens doivent retenir de ce rapport circonstancié, objectif, indépendant?
Peut-être pouvons-nous commencer par VIA Rail.
J'ai trouvé intéressant, évidemment, d'avoir pris connaissance du point de vue des différents organismes. Existe-t-il un fonds pour la sécurité réservé au réseau ferroviaire, auquel les communautés contribuent? Si elles font des aménagements qui empiètent sur les rails, et ainsi de suite, tous doivent s'organiser et financer leur part des choses. Ou est-ce trop utopiste de penser ainsi parce que ça ne se réalisera jamais?
Il me semble qu'il y a de grandes initiatives, certaines très distinctes, qui se produisent; comme on peut le constater dans vos graphiques, il y a eu une amélioration sur le plan de la sécurité, ce qui est une excellente chose. Toutefois, il semble y avoir un certain nombre de lacunes que vous avez fait ressortir aujourd'hui, et je vous en remercie grandement. J'encourage vivement chacun d'entre vous de retourner à la planche à dessin et de nous présenter… parce que nous prenons cette étude très au sérieux. Nous voulons voir des résultats, des propositions et de solides recommandations, susceptibles d'être mises en oeuvre. Alors, je vous en prie, retournez à vos travaux — car il y a toujours ici des contraintes de temps — et présentez-nous quelque chose par écrit pour que nous puissions examiner de façon plus approfondie et développer certaines des idées que vous avez exprimées aujourd'hui.
Il semble y avoir un réel écart entre les propriétaires des wagons et les gens qui ont soulevé certains problèmes, comme MM. Dias et Stevens l'ont tous deux dit. Les inspections se produisent, mais elles n'ont pas de suivi, ou alors que tel ou tel, parce qu'il n'en est pas propriétaire, ne verra pas à la sécurité ou à la réparation de ces wagons. Il semble y avoir un système détendu en place, mais, en définitive, il n'y a personne qui répare ces wagons. Ou il n'y a pas assez d'argent pour les réparer parce qu'ils sont en location. Ou encore un tel est utilisateur du réseau ferroviaire, mais n'en est pas propriétaire. Quant aux traverses et aux rails eux-mêmes, la voie ferrée passe par des communautés qui veulent y avoir accès, et à qui ça sera de le payer?
Les acteurs sont nombreux dans cette industrie. Je dirais, pour élargir le concept de McGuinty, qu'il ne s'agit pas en réalité seulement de chemins de fer et de syndicats. C'est une situation où les communautés et les propriétaires doivent examiner l'ensemble de l'infrastructure afin de déceler où se trouvent les faiblesses et où des améliorations peuvent être apportées. Diriez-vous que c'est juste?
:
Permettez-moi de faire un rapprochement. Je viens de participer à un règlement de conflit de travail dans le port de Vancouver, où on trouve 180 propriétaires, 1 200 ou 1 300 camionneurs non syndiqués, 350 camionneurs syndiqués, le gouvernement provincial, le gouvernement fédéral et l'administration du port de Vancouver. Maintenant, tâchez de trouver une solution.
Tout comme nous le faisons ici, nous avons passé beaucoup de temps à déterminer qui est propriétaire de ceci et de cela, qui est responsable de quoi. Si vous cherchez vraiment à résoudre les nombreux problèmes, il faut garder présent à l'esprit combien les choses ont changé depuis 20 ans. Vous passez beaucoup de temps à parler des communautés, comme il se doit d'ailleurs, mais vous devez également comprendre qu'à la suite de la déréglementation et de la privatisation, bon nombre des lignes de chemin de fer qui contournaient les communautés ont été supprimées par le truchement de contractions, laissant comme seule option de traverser le centre-ville.
Nous pouvons parler de la façon dont les communautés se construisent autour du chemin de fer, mais en raison d'une évolution qui a amené les chemins de fer qui desservaient le pays à desservir les communautés qui contribuent à leur rentabilité, beaucoup des solutions qui avaient été adoptées ne sont plus en place. Vous devez donc examiner cet aspect également.