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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de la santé


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 10 février 2003




¹ 1535
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.))
V         Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.)
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne)
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Yolande Thibeault
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Judy Darcy (présidente nationale, Syndicat canadien de la fonction publique)

¹ 1540
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Judy Darcy
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Judy Darcy
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Maude Barlow (présidente, Conseil des Canadiens)
V         Mme Elaine Johnston (directrice, secrétariat à la santé, Assemblée des Premières nations)
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Elaine Johnston
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Elaine Johnston
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Maude Barlow

¹ 1545
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Kathleen Connors (Présidente, Coalition canadienne de la santé)
V         M. Michael McBane (Coordonnateur national, Coalition canadienne de la santé)

¹ 1550
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Judy Darcy

¹ 1555

º 1600
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Barb Byers (vice-présidente exécutive, Congrès du travail du Canada)

º 1605
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne)
V         Mme Elaine Johnston
V         M. Rob Merrifield
V         Mme Elaine Johnston
V         M. Rob Merrifield
V         Mme Elaine Johnston
V         M. Rob Merrifield
V         Mme Elaine Johnston

º 1610
V         M. Rob Merrifield
V         Mme Elaine Johnston
V         M. Rob Merrifield
V         Mme Elaine Johnston
V         M. Rob Merrifield
V         Mme Kathleen Connors

º 1615
V         M. Rob Merrifield
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Rob Merrifield
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Rob Merrifield
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Rob Merrifield
V         M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ)

º 1620
V         Claude Généreux (secrétaire-trésorier national, Syndicat canadien de la fonction publique)
V         M. Claude Généreux (secrétaire-trésorier national, Syndicat canadien de la fonction publique)
V         M. Réal Ménard
V         Claude Généreux
V         M. Réal Ménard
V         Claude Généreux
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.)

º 1625
V         Mme Judy Darcy
V         M. Jeannot Castonguay
V         M. Michael McBane
V         M. Jeannot Castonguay
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)

º 1630
V         M. Réal Ménard
V         M. Svend Robinson
V         Mme Kathleen Connors
V         M. Michael McBane
V         M. Svend Robinson
V         M. Anil Naidoo (agent de campagne, Conseil des Canadiens)

º 1635
V         M. Svend Robinson
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Svend Robinson
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Svend Robinson
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Yolande Thibeault
V         M. Michael McBane
V         Mme Maude Barlow
V         Mme Judy Darcy
V         Mme Yolande Thibeault
V         M. Michael McBane
V         Mme Judy Darcy

º 1640
V         Mme Yolande Thibeault
V         Mme Judy Darcy
V         Mme Yolande Thibeault
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Carol Skelton
V         Mme Kathleen Connors

º 1645
V         Mme Carol Skelton
V         Mme Kathleen Connors
V         Mme Carol Skelton
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Réal Ménard
V         M. Claude Généreux

º 1650
V         M. Réal Ménard
V         M. Claude Généreux
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.)
V         M. Michael McBane
V         Mme Carolyn Bennett
V         M. Michael McBane

º 1655
V         Mme Carolyn Bennett
V         Mme Elaine Johnston
V         Mme Maude Barlow

» 1700
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Svend Robinson
V         Mme Judy Darcy
V         M. Michael McBane

» 1705
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.)
V         Mme Elaine Johnston
V         Mme Barb Byers

» 1710
V         Mme Kathleen Connors
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne)
V         M. Michael McBane

» 1715
V         M. Claude Généreux
V         Mme Barb Byers
V         Mme Elaine Johnston
V         Mme Barb Byers

» 1720
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Svend Robinson
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         M. Svend Robinson
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)
V         Mme Carolyn Bennett
V         Mme Barb Byers
V         Mme Carolyn Bennett
V         Mme Judy Darcy
V         Le vice-président (M. Stan Dromisky)










CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 019 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 10 février 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le vice-président (M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.

    Avant que nous ne commencions, je tiens à remercier les représentants des cinq organismes qui comparaissent non seulement parce qu'ils sont ici mais aussi du fait de leur participation active à notre société démocratique.

    Comme vous le savez, la démocratie est une chose relative. Tout dépend de la participation de chaque membre de la société. Dieu merci, nous avons des gens qui représentent des organismes comme les vôtres, qui font leur travail pour aider le pays à élaborer des politiques et à choisir les bonnes orientations pour les années à venir. Merci beaucoup d'être là.

    Nous allons suivre un ordre précis. Pour commencer, le Comité permanent de la santé a reçu deux motions de Carol Skelton. En avez-vous tous reçu copie, au moins de la première? Oui.

[Français]

+-

    Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Monsieur le président, je propose que la motion soit déposée.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Très bien. L'étude de la motion est reportée à une séance ultérieure.

+-

    Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Pourquoi?

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Il n'y a pas de débat sur une motion de cette nature.

    Ceux qui sont pour le report de l'étude de la première motion, veuillez l'indiquer.

    Un témoin: Pouvons-nous voter?

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): J'aimerais que vous puissiez voter, parce que notre ordre du jour est très chargé aujourd'hui.

    (La motion est adoptée.)

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): La deuxième motion de Carol Skelton porte que le comité convoque immédiatement une réunion sur les besoins spéciaux des collectivités éloignées et du Nord en matière de santé et, notamment, sur les besoins liés à leurs exigences particulières de financement.

[Français]

+-

    Mme Yolande Thibeault: Monsieur le président, je propose que cette motion soit également déposée.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci. Qui est pour?

    (La motion est adoptée.)

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Nous allons poursuivre en suivant la liste que vous avez reçue.

    Nous allons demander au représentant du Syndicat canadien de la fonction publique de présenter son exposé.

+-

    Mme Judy Darcy (présidente nationale, Syndicat canadien de la fonction publique): Nous avons en fait changé l'ordre de comparution et je vais demander à Mme Maude Barlow de commencer, si vous le voulez bien.

¹  +-(1540)  

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Très bien. Dites-moi dans quel ordre vous parlerez.

    Madame Darcy, vous viendrez en deuxième?

    Je veux simplement connaître l'ordre.

+-

    Mme Judy Darcy: Mme Barlow dira quelques mots et présentera Elaine Johnston, de l'Assemblée des premières nations. Nous reviendrons ensuite à Maude Barlow, puis nous passerons à Mike McBane, de la Coalition canadienne de la santé, puis ce sera mon tour, puis celui de Barb Byers, du Congrès du travail du Canada.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): J'oublierai sans doute cet ordre, aussi veuillez me le rappeler.

+-

    Mme Judy Darcy: Nous ferons comme vous voulez, nous sommes heureux de donner suite.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Très bien, vous pouvez commencer. Chaque organisme a cinq minutes. Après les exposés, nous passerons aux questions et réponses.

    Veuillez commencer.

+-

    Mme Maude Barlow (présidente, Conseil des Canadiens): Merci beaucoup.

    Je suis Maude Barlow, du Conseil des Canadiens. Nous sommes des représentants de ceux qui ont organisé le sommet populaire sur les soins de santé de la fin de semaine dernière, un merveilleux événement. Nous avons choisi de donner d'abord la parole à Elaine Johnston, de l'Assemblée des premières nations, pour montrer notre appui aux Premières nations et à leurs préoccupations au sujet de la rencontre des premiers ministres.

    Elaine, allez-y.

+-

    Mme Elaine Johnston (directrice, secrétariat à la santé, Assemblée des Premières nations): Merci.

    Je veux tout d'abord reconnaître que nous sommes ici sur le territoire traditionnel des Algonquins et j'aimerais vous remercier, honorables députés, d'écouter mon exposé.

    Je remercie mes collègues de m'accorder l'honneur de parler en premier.

    Je suis une Ojibway Potawatomi de la nation de Serpent River. Je suis infirmière autorisée et directrice de la santé pour l'Assemblée des premières nations.

    J'ai travaillé dans divers milieux, le milieu hospitalier, le milieu communautaire, et j'ai travaillé sur la qualité de l'air et de l'eau. Je suis aussi une bénéficiaire du régime de soins de santé, par suite d'une mauvaise chute, en novembre dernier.

    Je suis ici pour vous dire que le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones de 1996, dans son volume 3 sur la santé et la guérison, disait un peu la même chose que les recommandations du rapport Romanow.

    Nous sommes déçus que l'APN n'ait pas été invitée à la conférence des premiers ministres. Il se serait agi d'une bonne occasion de manifester un respect mutuel et la reconnaissance de l'immense responsabilité des divers gouvernements envers le sort des peuples autochtones du Canada.

    Notre état de santé est semblable à celui des habitants du tiers monde et le statu quo n 'est plus acceptable.

    Nous étions prêts à dire comment nous pourrions participer pleinement à la recherche de solutions positives, pour des résultats positifs en matière de santé, et nous étions prêts à le faire.

    Les recommandations du rapport de Roy Romanow sur un accord-cadre ont suscité notre curiosité. Maintenant que l'accord non signé mentionne le Conseil canadien de la santé, nous exhortons les gouvernements à prévoir la participation des Premières nations.

    Le nord de toutes les provinces a les mêmes préoccupations que le Nunavut, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest. Un vol de Fort Severn, dans le nord de l'Ontario, prend environ trois ou quatre heures, selon la destination. L'hôpital le plus proche, pour des services spécialisés, est celui de Thunder Bay ou de Winnipeg.

    En 2001, les dépenses moyennes par Canadien ont été de 2 405 $. Pour les Autochtones, c'était 3 307 $ pour les soins hospitaliers, les soins médicaux, la prévention et les autres services de santé offerts par les provinces. Pourquoi ces chiffres sont-ils plus élevés? Parce que la pauvreté est mauvaise pour la santé et fait augmenter les coûts. En outre, le coût de la prestation des services de santé dans les régions éloignées est plus élevé.

    La Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits dépense environ 1,3 milliard de dollars, le gros de ses fonds étant consacré à des programmes de santé communautaire et le reste, à des prestations de santé pour services non assurés et environ 2 p. 100, pour les hôpitaux.

    En n'étant pas à la conférence des premiers ministre, nous ne pouvons formuler nombre de nos questions et préoccupations. Encore une fois, on prend des décisions pour nous. La privatisation des soins de santé nous préoccupe aussi beaucoup, puisque notre accès aux services de santé est déjà difficile.

    Nous sommes en faveur de la reconnaissance des soins de santé comme droit de la personne. J'exhorte le Comité permanent de la santé à écouter nos membres et notre comité des chefs sur la santé.

    Merci et j'ai hâte de poursuivre le dialogue avec vous.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci beaucoup, Elaine. Vous nous avez montré un rapport. Pourriez-vous en remettre une copie au greffier, afin que nous en disposions tous?

+-

    Mme Elaine Johnston: Volontiers.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci beaucoup.

+-

    Mme Elaine Johnston: Je donne de nouveau la parole à Maude Barlow.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Maude, vous avez la parole.

+-

    Mme Maude Barlow: Merci beaucoup. Au nom du Conseil des Canadiens, je tiens à exprimer notre préoccupation au sujet de la rencontre des premiers ministres de la semaine dernière. Il est important de rappeler que tous nos groupes représentent ensemble des millions de Canadiens et que nous sommes donc ici au nom de beaucoup de membres.

    Nous estimons que la Commission Romanow s'est exprimée très clairement dans son rapport au gouvernement fédéral et que ceux qui ont témoigné à la Commission Romanow se sont aussi clairement exprimés au sujet de leur position et que les sondages sont aussi très clairs: les Canadiens ne veulent pas de soins de santé à but lucratif dans leur pays et craignent de perdre leur régime d'assurance-maladie qu'on fait mourir à petit feu. Nous sommes par ailleurs très déçus qu'à la conférence des premiers ministres de la semaine dernière, il n'y ait pas eu de discussion sur les soins de santé à but lucratif, qu'aucun mécanisme ne soit prévu pour faire un suivi de la situation ou la limiter, de quelque façon que ce soit. Au lieu d'assister à une expansion du régime public de soins de santé, nous constatons que beaucoup d'argent est canalisé vers un régime qui fait la promotion des soins de santé privés.

    Tous nos organismes sont aussi fortement préoccupés du fait que les règles des accords commerciaux en vigueur, comme l'ALENA, notamment la disposition sur le traitement national, et l'exemption pour les soins de santé, ne seront valides que si nous avons un système de soins de santé exclusivement public et à but non lucratif. À mesure qu'il évolue vers un régime commercial et à but lucratif, les dispositions de l'ALENA sur le traitement national prévoient qu'il faudra permettre à des sociétés américaines de s'installer au Canada, non seulement pour assurer une présence commerciale, mais aussi pour exiger un financement égal à celui qui est accordé aux établissements de santé canadiens.

    Nous avons aussi de graves préoccupations au sujet de l'expansion des soins de santé en vertu de l'Accord général sur le commerce des services, ou GATS, et dans la zone de libre-échange des Amériques, qui sont des accords sur les services—à tout le moins, la ZLEA comporte un nouvel accord sur les services et le GATS en est un. Nous avons déjà mis sur la table du GATS l'assurance-maladie et nous craignons fort que les premiers ministres n'en aient pas parlé à leur rencontre.

    Nous nous préoccupons aussi de l'absence de discussions ou d'accord sur les raisons pour lesquelles les médicaments prescrits sont si coûteux au Canada, soit les droits de monopole par brevet accordés aux sociétés pharmaceutiques transnationales. On consacre des fonds pour les médicaments prescrits à coût prohibitif, mais il s'agit de l'argent des contribuables qui sert à procurer des profits colossaux à ces sociétés transnationales.

    Nous sommes donc préoccupés par ce qui ne se trouve pas dans l'accord et tenons vraiment à ce que ces questions soient soulevées à la prochaine rencontre des ministres, qui portera sur les détails de l'accord. Évidemment, nous craignons que le Conseil de la santé n'ait aucune responsabilité s'il ne peut traiter de ces questions, s'il traite les symptômes plutôt que le problème.

    En terminant, nous sommes collectivement fort préoccupés par le fait qu'en ne traitant pas de ces questions clés, la rencontre des premiers ministres ait creusé davantage le déficit démocratique au Canada et élargi le fossé croissant entre l'élite politique du pays et la grande majorité des Canadiens qui rejettent les soins de santé à but lucratif.

    Merci.

¹  +-(1545)  

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Qui vient après? Michael McBane?

+-

    Mme Kathleen Connors (Présidente, Coalition canadienne de la santé): Je m'appelle Kathleen Connors. Je suis présidente de la Coalition canadienne de la santé qui m'a désignée en raison de mon rôle de présidente de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et d'infirmiers. Mike McBane fera un bref exposé, mais je pense qu'il est important pour le comité de savoir qu'aujourd'hui, dans cette pièce, je suis heureuse d'être accompagnée de représentants des infirmières de l'Île-du-Prince-Édouard jusqu'à la Colombie-Britannique. Nous sommes solidaires avec les autres témoins assis ici, au sujet de la santé, parce que c'est pour nous notre vie et notre gagne-pain.

    La question des déterminants sociaux de la santé mérite une attention qu'elle n'aura peut-être pas. Dans l'intérêt de la santé, on ne saurait faire fi de ces questions. J'espère que vous voudrez parler de cela aussi, parce que le logement, la pauvreté, la sécurité alimentaire et la paix sont des questions qui ont un effet indirect sur la santé des Canadiens.

    Mais je laisse d'abord Mike parler d'une question plus précise.

+-

    M. Michael McBane (Coordonnateur national, Coalition canadienne de la santé): Merci, Kathleen.

    J'aimerais illustrer l'importance de la propriété en matière de soins de santé puisque le gouvernement, notamment par la voix de la ministre de la Santé, prétend que tant que le financement est public, peu importe qui est propriétaire des établissements de santé. De plus, l'Alliance canadienne nous dit que cela n'a pas d'importance, tant qu'on obtient des soins de santé de qualité. Examinons les faits.

    Les Canadiens ont été époustouflés d'apprendre qu'on était prêt à dépenser tant d'argent sans restriction pour les établissements de santé à but lucratif et de propriété privée. À mon avis, c'est en partie en raison de l'accord conclu entre le gouvernement de l'Alberta et le gouvernement fédéral, en 1996, selon lequel parmi les 12 principes, il y a celui selon lequel il faut «garantir un rôle important au secteur privé dans les soins de santé, à l'intérieur comme à l'extérieur du régime de financement public». Dans cet accord secret, un autre principe prévoit qu'il y aura des «mesures pour augmenter les possibilités pour le secteur privé d'offrir des services dans le cadre du budget du payeur unique».

    C'est peut-être ce qui explique que l'accord soit muet sur les restrictions relatives aux services à but lucratif.

    Le deuxième document dont je veux vous parler, c'est le rapport annuel au Parlement sur l'application de la Loi canadienne sur la santé. Je l'ai photocopié pour les députés.

    C'est disponible en anglais et en français.

    Les députés ont-ils tous copie de cet extrait?

    Vous verrez qu'en réponse à la question sur l'argent consacré aux établissements à but lucratif...je vous ai donné l'extrait correspondant à la province de l'Ontario, mais c'est la même chose pour toutes les provinces. Quelle est la réponse? Quelle est la réponse donnée par le ministre à vous, au Parlement, aux Canadiens, aux représentants...: «non disponible». Pour chaque catégorie, pour chaque province: «non disponible». C'est un manquement au devoir législatif. Si les chiffres ne sont pas disponibles, si nous ne savons pas combien de profits sont réalisés et où va cet argent, il ne faudrait pas y envoyer d'argent du tout.

    La troisième question que je veux soulever, au sujet de la propriété des établissements de santé, c'est que le taux de mortalité est plus élevé dans les hôpitaux à but lucratif. C'est un fait prouvé par une équipe de chercheurs médicaux canadiens et divulgué dans le Journal de l'Association médicale canadienne. Voilà une preuve irréfutable de l'importance de la propriété des établissements de santé.

    Le porte-parole de l'Alliance en matière de santé reconnaîtra mon quatrième document, ayant travaillé auprès des autorités régionales de la santé en Alberta. C'est un exemple fourni par la Calgary Regional Health Authority, dont plusieurs membres sont propriétaires et dirigeants d'établissements de soins de santé à but lucratif, d'hôpitaux à but lucratif et de cliniques à but lucratif. Ces établissements sont gérés par des médecins qui ont des postes d'autorité à la régie régionale de la santé. Savez-vous comment on appelle ça? Un conflit d'intérêts. Voilà pourquoi il importe de savoir qui offre les soins de santé.

    J'ai encore un exemple à vous donner brièvement, qui vient de l'Ontario. L'entrepreneur qui a obtenu le contrat pour la construction d'un hôpital privé à Ottawa était l'un des principaux donateurs pour la campagne électorale du ministre ontarien et du premier ministre ontarien. On pourrait parler de trafic d'influence.

    L'exemple suivant vient aussi de l'Ontario. J'ai ici une lettre, que je n'ai pu faire distribuer parce qu'elle n'est pas encore traduite, d'une société albertaine propriétaire de presque tous les centres de services de laboratoire de l'Ontario. Cette entreprise a envoyé des lettres dans l'est de l'Ontario, à Rockland, à Cumberland et à d'autres petites collectivités. Elle affirmait qu'à moins que ces collectivités lui obtiennent des profits de 25 p. 100, elles perdraient leurs cliniques de radiographie. Pour les garder, il fallait que la municipalité subventionne l'entreprise. Cette entreprise a ensuite fermé ses cliniques dans l'est de l'Ontario, dans des collectivités où il n'y a pas de transport en commun.

    Le gouvernement de l'Ontario dit qu'il s'agit là d'une approche innovatrice en matière de santé. Moi, j'appelle ça de l'extorsion. Si vous regardez dans le dictionnaire, vous verrez que c'est exactement ce qu'ils font.

    Quand un élu, à la Chambre des communes, dit aux Canadiens que la propriété n'a pas d'importance, je me rappelle ce que disait Suzuki: «ils sont soit stupides, soit menteurs».

    Je m'arrête ici. Nous n'avons pas beaucoup de temps, mais je tiens à dire qu'avec l'accord sur la santé, il n'y aura jamais suffisamment d'argent si vous ouvrez la porte aux escroqueries actuelles des entreprises et que les premiers ministres en faveur de la privatisation réservent au financement public. Merci.

¹  +-(1550)  

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci beaucoup, Michael.

    Suivant.

+-

    Mme Judy Darcy: Je m'appelle Judy Darcy. Je suis la présidente nationale du Syndicat canadien de la fonction publique, le syndicat le plus important du Canada, avec 527 000 membres dont 180 000 travailleurs de la santé, dont beaucoup sont ici aujourd'hui. Nous sommes venus à Ottawa pour le Sommet populaire. Je suis aussi accompagnée de Claude Généreux, notre secrétaire-trésorier national, ancien président de la Fédération des affaires sociales de la SCFP au Québec pour les travailleurs de la santé et militant à la Coalition solidarité santé. S'il y a des questions concernant nos propos et le Québec, il sera heureux d'y répondre.

    Quand j'étais ici le soir de la réunion des premiers ministres, nous étions tous très excités à la lecture du document avec les médias. La première chose qui nous a frappés, c'est qu'il y avait dans le texte trois mots qui manquaient et trois mots de trop. Je crois qu'à la page 2 du document, quand on traite des nouveaux programmes innovateurs créés en vertu de cet accord, il est dit «à leur discrétion», à propos des provinces qui ont le rôle de décider à quoi va ressembler cette entente et comment elle va être appliquée. Les trois mots fondamentaux qui manquaient étaient les mots «à but non lucratif». C'est très préoccupant pour nous, parce qu'à cause des coupures draconiennes du gouvernement fédéral ces dix dernières années et d'un penchant idéologique de plusieurs provinces de ce pays, la privatisation se répand comme une traînée de poudre au Canada. Il n'y a rien, absolument rien dans cette entente—accord, marché, arrangement, peu importe le nom que vous lui donnez—qui va freiner cette tendance à la privatisation. À l'inverse, nous pensons qu'elle va plutôt l'intensifier.

    Déjà, à travers le pays, chaque semaine un nouvel hôpital P3 ouvre ses portes—«partenariat public-privé». Ils poussent comme des champignons, et l'on fait valoir que peu importe celui qui possède l'hôpital, l'important ce sont les services qui sont fournis, que ce débat ne se résume finalement qu'à une question de brique et de mortier. Eh bien, il reste que la plupart de ces partenariats publics-privés, qui sont des contrats de location sur 25, 30, 40 ou même 60 ans, sont construits, possédés, gérés, entretenus, etc., et financés par le secteur privé.

    On les appelle des expériences, des projets pilotes. Mais il reste qu'il y a déjà énormément de preuves au Canada et ailleurs qui montrent qu'un modèle P3 des soins de santé mine la qualité des soins.

    Une étude détaillée sur le sujet a été faite par Lewis Auerbach, ancien directeur des opérations de vérification du Bureau du vérificateur général. Nous en avons des exemplaires pour vous tous. Nous avons aussi un exemplaire de la documentation technique préparée par notre syndicat pour la Commission Romanow au sujet des partenariats publics-privés.

    Ce qu'il faut savoir sur les partenariats publics-privés, selon l'expérience du Royaume-Uni, c'est qu'étant donné que les coûts d'emprunt sont plus importants pour le secteur privé que pour le secteur public, que vous devez dégager une marge bénéficiaire, qu'il y a des dépassements des coûts de construction, etc., les coûts sont donc plus élevés. Ces coûts doivent être récupérés des soins directs, et en moyenne, dans les hôpitaux PFI ou hôpitaux «private finance initiative» du Royaume-Uni, que l'on appelle P3 au Canada, le personnel, les lits et les services ont été réduits de 25 à 30 p. 100. Pourtant, les gouvernements provinciaux—l'Alberta, l'Ontario, la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick qui y songe fortement—disent que c'est la tendance de l'avenir, et l'entente qui a été conclue la semaine dernière ne fait rien pour l'arrêter.

    Il faut l'arrêter. Le gouvernement fédéral doit agir. Certains de ces gouvernements provinciaux disent que ce qui est important, c'est le financement public, et non la prestation publique. On dit également que ce qui est important, ce sont les «services essentiels», pas les services de soutien. On utilise les expressions «services hôteliers» ou «services hospitaliers» ou encore «services auxiliaires», pour décrire les tâches de beaucoup de nos membres, qu'ils travaillent à la restauration, à la blanchisserie, au nettoyage ou à l'entretien.

    Je veux aussi vous parler de plusieurs études importantes: D'abord, un examen des études sur le lien entre le nettoyage et les infections contractées dans les hôpitaux, et une autre étude, Do Comparisons between Hospital Support Workers and Hospitality Workers Make Sense? Ces deux études montrent très clairement—et nous seront heureux de vous fournir plus d'information à ce sujet—que le fait que les salles d'opération soient stériles a une incidence sur la qualité des soins. Le fait que les gens qui travaillent au service de blanchisserie sachent que les draps des salles d'opérations doivent être séparés des draps des salles d'hôpitaux, des uniformes, etc., et qu'il y a des vérifications précises à faire est également important. Il y a une façon particulière de procéder. Beaucoup d'études prouvent que cela n'a pas de sens d'adjuger ce travail au plus bas soumissionnaire du point de vue de la sûreté et de la qualité des soins. C'est insensé également de créer une économie à faible salaire en renvoyant les travailleurs de la santé et en les remplaçant par un contingent de travailleurs à temps partiel.

¹  +-(1555)  

    Nous savons aussi que plus les gouvernements provinciaux procéderont à la privatisation et à la désassurance, plus les questions d'assurance-maladie et de prestations de maladie seront soulevées aux tables de négociation partout au Canada. Aux États-Unis, la grande majorité des conflits de travail et des grèves sont directement liés aux questions qui découlent de l'assurance-maladie. C'est une tendance qui se manifeste de plus en plus au Canada et qui s'accentuera si on ne s'attaque pas à la privatisation.

    Essentiellement, nous voulons vous dire que les premiers ministres fédéral et provinciaux n'ont pas été à la hauteur. Ils n'ont pas été à la hauteur parce qu'ils se sont attaqués uniquement aux questions de compétence et de financement. Il est vrai que la question du financement est tout à fait critique, mais ce qui ressort du rapport Romanow, c'est l'importance de la reddition de comptes et d'un système public. C'est sur ces sujets-là que les premiers ministres auraient dû se mettre d'accord, et pourtant ce n'est pas ce qui c'est produit.

    Pour revenir à ce que vous avez dit au début au sujet de la démocratie, monsieur, nos membres, ainsi que les personnes qui ont participé au sommet populaire, pensent que le gouvernement du Canada et les premiers ministres provinciaux n'ont pas vraiment écouté les Canadiens. Il faut s'attendre à ce qu'il y ait de plus en plus de mobilisation au pays, y compris chez les travailleurs de la santé, car nous sommes bien décidés à avoir un système de santé qui réponde réellement aux besoins des Canadiens et cela signifie un système de santé public et non à but lucratif.

º  +-(1600)  

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci infiniment, Judy.

    Je pense qu'il y a une dernière personne qui veut prendre la parole.

+-

    Mme Barb Byers (vice-présidente exécutive, Congrès du travail du Canada): Bonjour. Je m'appelle Barbara Byers, et je suis vice-présidente exécutive du Congrès du travail du Canada. Nous regroupons 2,5 millions de membres canadiens, ainsi que leurs familles.

    Je me suis installée à Ottawa récemment. Je suis originaire de la Saskatchewan, province qui a fait don au Canada de notre régime d'assurance-maladie. J'avais 11 ans à l'époque de la grève des médecins, donc ça vous donne une idée de mon âge. Bien que ma famille n'ait pas eu de sympathies politiques particulières, nous avons très bien compris les avantages d'un régime d'assurance-maladie pour notre famille et pour les autres familles de notre quartier.

    Je pense que les personnes qui se sont regroupées dans les années 60, d'abord dans ma province puis dans les autres régions du Canada, avaient une véritable vision et ont fait preuve d'un immense courage. Elles ont également été prêtes à courir des risques pour la santé des citoyens canadiens.

    Je ne crois pas qu'on puisse dire la même chose pour l'année 2003. La semaine dernière, le gouvernement fédéral aurait pu assurer l'avenir de notre régime d'assurance-maladie. Il disposait de l'argent nécessaire, était appuyé par la grande majorité des citoyens et jouissait du pouvoir inhérent à tout gouvernement national. Malheureusement, et c'est triste pour les Canadiens, le gouvernement fédéral manque de volonté politique et n'a pas fait preuve du leadership essentiel aux grandes actions, comme celles qu'on a connues dans les années 60. Par conséquent, et cela a été mentionné cet après-midi, l'intégrité et la viabilité de notre régime d'assurance-maladie sont dans une situation précaire.

    Comme on l'a fait remarquer, un sommet populaire a été organisé. Nous étions plus de 400 personnes des quatre coins du Canada et étions quelque peu démoralisés par les événements de la semaine. En effet, la réunion des premiers ministres ne s'était pas déroulée comme nous l'aurions souhaité, les recommandations du rapport Romanow n'ayant pas été suffisamment suivies, notamment. Tommy Douglas, qui aimait citer Robbie Burns, aurait sans doute réagi en disant: «Nous nous sommes allongés brièvement pour que s'écoule notre sang, puis nous avons repris la bataille».

    Vous avez débuté la séance en parlant de la démocratie et de la participation des citoyens. Eh bien, je peux vous affirmer que notre déprime n'a duré que 24 heures. Les participants de la conférence ont ensuite décidé que ça ne servait à rien d'être démoralisés et qu'il fallait plutôt se fâcher et passer à l'action. Je pense que la démocratie va se manifester un peu partout au Canada.

    Les participants au sommet ont décidé de se reconsacrer pleinement à la démocratie, au régime d'assurance-maladie et de s'engager, notamment au sein de leurs organisations, à agir au niveau fédéral, provincial, municipal et patronal. Nous allons démontrer clairement au patronat que notre régime d'assurance-maladie lui permet de jouir d'avantages économiques certains. Vous allez constater une certaine évolution de la situation. Les discussions ont toujours lieu, mais les organisations nationales, provinciales et locales se sont mises d'accord pour travailler conjointement afin d'atteindre leurs objectifs.

    Nous nous sommes également réengagés à soutenir les Autochtones et les groupes exclus dans le domaine de la santé. Nous nous sommes engagés à veiller à la reddition de comptes et à la transparence, ce qui veut dire que nous allons nous attaquer aux prestataires de soins de santé à but lucratif pour montrer les services qu'ils offrent et les profits qu'ils récoltent et comment ce type de système n'est pas avantageux pour ceux qui ont besoin de soins.

    Nous allons également nous attaquer à la réforme du système de santé et aux soins à domicile. Si vous êtes incapables de suivre les recommandations faites par Roy en matière de soins à domicile et d'assurance-médicaments—oui, nous sommes conscients qu'on en débat, mais les détails n'ont pas été dévoilés—alors nous allons revenir à notre position initiale qui en demande davantage que ce qui figure même dans le rapport Romanow.

    Pour ce qui est de l'assurance-médicaments, il faudra une volonté politique pour s'attaquer aux fabricants de médicaments brevetés et s'assurer, comme on l'a fait remarquer, que les citoyens peuvent se payer les médicaments dont ils ont besoin. Nous nous sommes également engagés à nouveau à l'amélioration des soins de santé primaires.

    Comme Maude l'a déjà dit ici, nous nous sommes engagés à lutter contre tout accord commercial qui mettrait en péril le système de soins de santé au Canada et ailleurs dans le monde, et à soutenir la démocratie et l'action communautaire.

    Les Canadiens n'ont cessé de répéter tout cela à Roy Romanow. Nous pensons que son rapport reflète les besoins des Canadiens. Nous voulons que tous les députés ici présents, les partis qu'ils représentent et les hommes politiques provinciaux de par le pays sachent que les Canadiens vont se manifester dans les jours, semaines et mois à venir.

    Merci.

º  +-(1605)  

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci beaucoup, Barbara.

    Nous allons maintenant poursuivre selon notre modèle habituel de questions et réponses. Nous commençons normalement par la loyale opposition. Qui va commencer?

    Rob, allez-y. Vous avez 10 minutes. Qu'est-ce que cela veut dire exactement? S'il a un très long préambule qui dure six minutes, ou sept ou huit minutes, cela veut dire que vous, ou n'importe quel autre membre du groupe de témoins, n'aurez plus que deux minutes pour répondre à la question, ou trois ou quatre minutes, selon le cas.

    Je demanderais donc aux membres du comité d'être le plus bref possible dans leurs préambules. Il m'apparaît plus important d'entendre les réponses de nos témoins que d'écouter vos préambules. Sur ce, vous avez la parole.

+-

    M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Voici donc ce que je vous propose. Je vais poser des questions brèves pour que vous puissiez répondre brièvement, ce qui nous permettra de poser le plus de questions possible. C'est ce que vous voulez, n'est-ce pas?

    Commençons par les dirigeants des territoires. Elaine, votre présence ici m'impressionne. J'ai trouvé très intéressante et intrigante la réaction qu'ils ont eue à l'accord de la semaine dernière, parce qu'au moins, eux se sont levés et ont quitté la table, conscients que c'était une mauvaise affaire pour eux, et ont refusé d'avoir quoi que ce soit à voir avec cela.

    Je comprends certes vos observations pour ce qui est de reconnaître le caractère différent des territoires et la situation spéciale des soins de santé là-bas. Je me demande quel chiffre les dirigeants avaient en tête, en dollars. Vous devez avoir une petite idée du montant, en dollars, que les premiers ministres des territoires auraient été prêts à accepter. Où en sommes-nous là-dessus? Est-ce simplement que l'on ne reconnaît pas le problème, ou bien avez-vous à l'esprit un chiffre précis, en dollars?

+-

    Mme Elaine Johnston: Je peux vous dire que la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits dépense déjà 1,3 milliard de dollars, mais ce qui se passe...

+-

    M. Rob Merrifield: Pardon, qu'avez-vous dit?

+-

    Mme Elaine Johnston: La Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits, qui dispense les soins de santé aux Premières nations et aux Inuits, a un budget de 1,3 milliard de dollars. Ils s'attendent à enregistrer un déficit de 150 millions de dollars cette année, de 285 millions de dollars pour la prochaine année financière et de 350 millions de dollars l'année suivante.

    Par ailleurs, ils ont détourné une partie de l'argent qui avait été réservé aux enfants dans le discours du Trône pour absorber le déficit.

    Le problème, à mes yeux, c'est qu'à moins d'avoir un financement durable, nous sommes dans la même situation que les provinces, si je peux m'exprimer ainsi, pour ce qui est du financement durable fondé sur un montant de base. Ensuite, nous pourrons commencer à aider à réformer le système.

    La tâche qu'on nous avait confiée, avant même que Roy Romanow soit chargé de faire son rapport et avant même Kirby, c'était le renouvellement de la santé. Le problème auquel s'est attaqué Santé Canada, c'était toute la question de la durabilité. En quelque sorte, on enlevait de l'argent à l'un pour le donner à l'autre. Tel était notre défi.

    Je sais qu'il a été fait mention dans l'accord d'une somme de 1,3 milliard de dollars. Il y a eu beaucoup de confusion quant à ce que cela veut dire exactement, parce que l'on utilise l'expression «peuple autochtone». Nous ne savons pas si cet argent serait consacré au financement durable ou bien à des programmes ciblés. Il y a beaucoup de questions sans réponse au sujet de cette somme de 1,3 milliard de dollars.

    Si je devais vous donner un montant en dollars, je dirais qu'il faudrait probablement envisager un financement durable pour absorber les déficits existants, et qu'il faut aussi se pencher sur la réforme de la santé.

+-

    M. Rob Merrifield: Combien pour cela?

+-

    Mme Elaine Johnston: Je dirais 750 millions de dollars. Ensuite, il faut prévoir de l'argent pour la réforme de la santé, parce qu'il y avait des sommes consacrées à la réforme de la santé dans chaque province.

    Il est intéressant de constater que dans l'accord, on dit que l'on s'occupera des besoins des peuples autochtones grâce au fonds pour la réforme de la santé, mais si on lit plus loin, on dit que cet argent sera versé aux provinces. Je ne sais donc pas exactement comment cela va se faire.

+-

    M. Rob Merrifield: Il y avait beaucoup de flou dans les chiffres. Donnez-moi votre chiffre pour la réforme.

+-

    Mme Elaine Johnston: Pour la réforme que nous envisagions, je crois qu'il faudrait près de 1,5 milliard de dollars, approximativement, en plus du financement durable.

º  +-(1610)  

+-

    M. Rob Merrifield: C'est donc 1,5 milliard de dollars, pour les territoires seulement.

+-

    Mme Elaine Johnston: Non, c'est pour les Premières nations et les Inuits.

+-

    M. Rob Merrifield: Je vois, les Premières nations.

+-

    Mme Elaine Johnston: Pour ce qui est des territoires, je ne peux pas parler en leur nom et préciser le montant qu'ils cherchaient à obtenir. Si je dis que dans la partie septentrionale des provinces, la problématique est la même que pour les gouvernements territoriaux du Yukon et du Nunavut, c'est parce que j'ai travaillé dans le nord-ouest de l'Ontario. À Fort Severn, qui est la localité située le plus au nord en Ontario, ils ont les mêmes problèmes à cause de l'éloignement. Ils doivent se rendre à Sioux Lookout pour aller à l'hôpital. Ensuite, à partir de là, pour des services très spécialisés, ils doivent prendre l'avion pour Thunder Bay ou Winnipeg.

+-

    M. Rob Merrifield: Oui, et nous avons été très étonnés qu'ils aient quitté la table et que l'on n'ait pas reconnu les éléments que vous venez de décrire. Mais nous n'allons pas régler la question ici, et il faut espérer que nous serons en mesure de le faire, ou que le premier ministre s'attaquera à cette problématique au cours des prochaines réunions.

    Je voudrais que les témoins m'aident à faire le point sur la situation dans le domaine des médicaments. On sait qu'un régime pour atténuer l'effet catastrophique du prix des médicaments a été élaboré dans le cadre de l'accord, pour tenir compte de la différence dans le coût des services de santé, à cause du coût prohibitif de certains médicaments et de certaines thérapies, coût qui ne fera qu'augmenter. Je pense que personne n'a d'objection à cela, sinon que certaines provinces offrent déjà un tel service, dans certaines limites, dépendant de la province. Toutefois, de 10 à 13 p. 100 des Canadiens n'ont absolument aucun régime d'assurance-médicaments. Ce problème n'a pas été abordé par Romanow. Il n'a pas été réglé dans l'accord.

    Votre préoccupation, si j'ai bien compris, ou en tout cas ce que vous avez exprimé comme groupe de témoins, c'est qu'il nous faut des médicaments meilleur marché, ce qui peut exiger que l'on conteste la loi sur les brevets—je suppose que c'est là où vous vouliez en venir—et que nous devons nous efforcer de faciliter l'accès aux médicaments pour que chacun puisse en profiter.

    Il y a quelque chose qui me trouble dans tout cela, et j'en ai d'ailleurs parlé à M. Romanow, à savoir qu'au Canada, nous avons un nombre alarmant de décès causés par l'abus non pas de drogues illégales, mais de médicaments d'ordonnance. J'espère que vous vous ferez les champions de cette cause tout autant que d'autres, pour que l'on se penche sur le problème des gens qui meurent à cause de médicaments d'ordonnance. Il faut absolument tenir compte du revers de la médaille, quand nous avons 30 p. 100 de nos personnes âgées qui ont développé une accoutumance aux médicaments d'ordonnance, et 20 p. 100 de la population dans son ensemble.

    En fait, Kathleen a même dit que nous devons voir plus large et ne pas nous contenter de gérer la crise dans les soins de santé. Je voudrais votre point de vue là-dessus. Il n'en a pas été fait mention dans votre exposé, mais avez-vous réfléchi à l'autre aspect de la question?

+-

    Mme Kathleen Connors: Rob, peut-être pourriez-vous jeter un coup d'oeil au mémoire que la Coalition canadienne de la santé a présenté à M. Romanow parce qu'il y est beaucoup question des pratiques de prescription justement. Jusqu'ici, ce sont les médecins qui prescrivent la plupart des produits pharmaceutiques au Canada, même si certaines infirmières praticiennes peuvent en prescrire certains. Il y a donc le problème des pratiques de prescription et on y aborde aussi la question des médecins qui se trouvent souvent aveuglés et prescrivent des nouveaux médicaments plus coûteux alors qu'un médicament plus ancien et non breveté a le même effet thérapeutique. On parle de cela et on parle de la nécessité de mieux informer la population quant aux médicaments qu'elle consomme; de voir ce que l'on peut faire avec les praticiens; des relations dans les protocoles concernant les médicaments parce qu'un médicament peut avoir des effets secondaires et une incidence sur la façon dont un autre médicament agit dans le cadre d'un traitement.

    Les questions d'utilisation des médicaments, la protection des brevets, l'établissement du coût en fonction du produit de référence et l'examen par les gouvernements canadiens, fédéral et provinciaux, des programmes de médicaments qui existent en Australie et en Nouvelle-Zélande doivent être examinés parce qu'il y a des pays qui ont bien mieux réussi que le nôtre à offrir des produits pharmaceutiques de façon plus économique à leur population. L'autre chose, c'est le courage politique, comme au Brésil et en Inde, qui consiste à refuser de protéger pendant 20 ans les produits brevetés, en vertu d'obligations commerciales, comme le disait Maude.

    Il y a des tas de problèmes. La Coalition canadienne de la santé et certainement le SCFP, le Congrès du travail du Canada, le CNFU ont tous soulevé nombre de ces questions et vous ont donné...

º  +-(1615)  

+-

    M. Rob Merrifield: Je n'ai pas beaucoup de temps et je ne sais pas combien il m'en reste.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Une minute.

+-

    M. Rob Merrifield: J'en resterai donc là. Je crois que nous avons convenu qu'il y a deux côtés de la médaille. J'espère que lorsque vous défendez un meilleur accès aux médicaments et à des médicaments meilleur marché, vous contestez aussi l'abus de médicaments que l'on constate aujourd'hui, parce qu'il faut considérer les deux côtés. Si on touche à l'un sans toucher à l'autre, cela va provoquer énormément de problèmes encore plus graves que ce que nous connaissons actuellement quant à l'abus des médicaments sur ordonnance. Je comprends donc ce que vous dites et tout ce que je veux c'est vous faire prendre conscience de cela.

    Vous dites en fait que vous êtes tous d'accord avec Romanow et vous défendez son rapport. Or il y a eu plusieurs rapports. En fait, le gouvernement a dépensé 243 millions de dollars simplement pour étudier les soins de santé au cours de la dernière décennie, nous n'aurons donc pas besoin de beaucoup plus de rapports. Néanmoins, c'est un rapport très important. Kirby aussi et les autres également.

    Si nous...

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci beaucoup.

    Nous allons maintenant passer à M. Ménard.

+-

    M. Rob Merrifield: De toute façon, ils n'allaient pas répondre.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Non, mais vous disiez quelque chose, vous ne posiez pas de question.

+-

    M. Rob Merrifield: J'allais justement en poser une.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Pour ma part, je crois beaucoup à l'importance d'un système public et universel. Je pense que dans ma propre province--je ne parle jamais du Québec comme d'une province, mais je le fais maintenant pour faciliter la compréhension des faits--des initiatives très intéressantes ont été prises. Au cours des prochains mois, j'aimerais me pencher surtout sur la question du coût des médicaments.

    Mercredi, je vais présenter une motion à mes collègues. Quand on vient du Québec, la question n'est pas facile à aborder, étant donné la polémique entourant l'industrie des médicaments d'origine. Toutefois, je ne partage pas le point de vue selon lequel l'analyse de ce dossier n'est pas compatible avec une remise en cause de la propriété intellectuelle.

    Le Canada, comme vous le savez, est membre de l'OMC. Il a signé l'accord sur l'ADPIC. Selon moi, il ne faut pas aborder ce volet en se disant qu'on va remettre en cause la période de 20 ans; ça serait un coup d'épée dans l'eau. Par contre, il y a des questions à considérer.

    On pourrait étudier le rôle du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés; j'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet. Nous comparons-nous avec les pays appropriés? Certains disent qu'on devrait se comparer à l'Australie. Vous avez aussi donné l'exemple de la Nouvelle-Zélande. Quelque chose peut être fait à cet égard.

    À mon avis, le fond du problème est que Santé Canada ne fait pas son travail. Il n'est pas normal que des autorisations de recherche soit données et que l'on permette d'introduire sur le marché des médicaments qui n'ont pas de nouvelles valeurs thérapeutiques. Voilà le problème.

    Saviez-vous que cette année, pour la première fois au Canada, le coût des médicaments est supérieur à la rémunération totale de tous les médecins? Selon moi, Santé Canada est responsable en partie de ce phénomène. Je peux comprendre qu'un investissement dans la recherche qui se chiffre à 700 millions de dollars ne peut se récupérer en deux ans. Par contre, je m'attends à ce que les médicaments qui sont autorisés par Santé Canada et par la suite mis sur le marché soient de nouveaux médicaments. Or, les études que je lis depuis deux ans sur le sujet me donnent à penser que ce n'est pas le cas.

    Le travail à accomplir doit être fait de façon collégiale. Je souhaite donc que ce comité étudie la question du coût des médicaments dans son ensemble. On ne pourra le faire en remettant en question la propriété intellectuelle, étant donné qu'il existe un concept qui s'appelle le droit et un autre qui porte le nom de conventions internationales. En outre, au Québec, l'idée ne passerait jamais.

    Cependant, s'il existe des façons originales et novatrices de rendre les médicaments moins coûteux et plus accessibles qu'ils ne le sont présentement, on pourra, à mon avis, unir nos efforts.

    Ensuite--et je termine avec cela--je peux comprendre que vous endossiez le rapport Romanow, mais jamais le Bloc Québécois ne pourra souscrire à un rapport qui donne plus de pouvoirs au gouvernement central dans un domaine de compétence qui n'est pas le sien. Ces considérations seront toujours présentes à notre esprit. En ce qui me concerne, je suis entièrement d'accord pour qu'il y ait au Canada anglais un régime d'assurance-médicaments. Au Québec, comme vous le savez, un tel régime existe depuis 1996. Ça ne date pas d'hier.

    Bref, c'était les idées dont je voulais vous faire part. Croyez-vous qu'il s'agisse là de bonnes pistes pouvant mener à un débat intelligent sur le coût des médicaments?

º  +-(1620)  

+-

    Claude Généreux (secrétaire-trésorier national, Syndicat canadien de la fonction publique):

    Il y a plusieurs aspects à la question et on n'a pas beaucoup de temps.

    M. Réal Ménard: Mais le président est très généreux.

    Des voix: Ah, ah!

+-

    M. Claude Généreux (secrétaire-trésorier national, Syndicat canadien de la fonction publique):

    Je vais quand même essayer d'y répondre, d'aller droit au but.

    On vous a mentionné effectivement dans nos présentations que plusieurs régimes existaient à l'extérieur du Canada. Bien sûr, vous avez mentionné que le gouvernement québécois s'était doté d'un tel régime, qui n'est pas parfait, mais il s'est doté d'un régime. Vous avez déclaré aussi qu'on ne pouvait pas toucher à la propriété intellectuelle, que ça ne passerait pas au Québec. Je vous dirais respectueusement que nous sommes en désaccord.

+-

    M. Réal Ménard: Pourquoi?

+-

    Claude Généreux:

    Il faut s'y adresser de la même façon que M. Lewis, au nom de l'ONU, l'Organisation des Nations Unies, tente de faire des percées majeures en Afrique, non seulement en Afrique du Sud, mais dans tout le continent africain, de la même façon que la Chine impose une négociation aux différentes compagnies qui ont un brevet et qui ont la propriété tant intellectuelle que commerciale de ces médicaments-là, qui ont été brevetés, bien sûr, selon des conventions.

+-

    M. Réal Ménard: La Chine n'a pas signé l'ADPIC.

+-

    Claude Généreux:

    Ce que je voulais dire par là, c'est qu'il y a moyen, tant en Chine que sur le continent africain, de discuter, s'il y a une volonté politique et sociale de faire face aux problèmes. Pour la propriété intellectuelle, effectivement, ça implique un coût énorme et excessif. Si le problème est excessif au niveau financier, ce n'est pas dû à la consommation individuelle, comme l'a suggéré plus tôt dans sa déclaration l'honorable député qui vous a précédé. On n'est pas des dope addicts au Canada. On n'est pas des drogués qui consomment trop.

    Il y a un problème d'ordonnance. Ce ne sont pas les citoyens et citoyennes, individuellement, qui se prescrivent les médicaments. Il y a une éducation des médecins et des compagnies à faire. J'essaie de répondre rapidement, mais il y a tellement de sous-questions dans vos questions... Il est possible de remettre en question le régime actuel de propriété intellectuelle. Il ne s'agit pas de le renier, mais de le revoir, de le corriger pour que ça soit moins cher. Oui, nous sommes d'accord qu'il y a des médicaments qui sont mis en marché sans avoir fait leurs preuves aux niveaux clinique et thérapeutique. En plus de coûter cher, cela a aussi un effet néfaste sur la santé. D'ailleurs, de nombreuses études américaines et canadiennes sur ce sujet démontrent que cela a même entraîné des décès.

    Le New England Journal of Medecine publiait dernièrement d'ailleurs une étude assez approfondie sur le sujet. Il y aurait lieu, en effet, de dompter ce consortium de compagnies, comme on dompte une bête sauvage. De fait, ce sont des bêtes sauvages qui ne sont pas en cage, qui n'ont pas été domptées du tout. Il doit y avoir une volonté gouvernementale de légiférer et de réglementer plus spécifiquement le régime de médicaments, et ce, mieux que ça ne l'est à l'heure actuelle. Au Québec, il y a certes un régime de médicaments, mais là aussi, il y a beaucoup d'améliorations à apporter.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci beaucoup, Claude.

    D'autres personnes aimeraient réagir aux sujets évoqués par Réal.

    Nous allons nous en tenir strictement à l'horaire pour la première ronde, et nous serons plus souples à la deuxième. Par souci de justice envers tous les membres du comité, nous devons nous en tenir à notre horaire, comme le précisent nos règles.

    Nous allons maintenant passer à un membre du Parti libéral. Quelqu'un a-t-il une question?

    Monsieur Castonguay.

[Français]

+-

    M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.): Merci, monsieur le président.

    On sait que dans l'entente, beaucoup de détails seront à venir. On a parlé, entre autres, de cibler certaines sommes d'argent plus spécifiquement sur les soins de première ligne, les soins à domicile et également sur la couverture de coûts catastrophiques. Évidemment, il y a eu des objections à ça, mais finalement, il semble que les gens se soient entendus. Je pense que c'est un pas dans la bonne direction et j'aimerais avoir votre opinion là-dessus.

    Lorsqu'on va dans ce sens-là, devrait-il, selon vous, y avoir des règles à l'échelle pancanadienne ou devrait-on quand même respecter les différentes juridictions provinciales et avoir des programmes qui sont équivalents? On entend les deux sons de cloche. À un moment donné, les gens nous disent que le programme doit être égal pour tous les Canadiens.  Évidemment, lorsqu'on parle aux provinces, elles nous disent qu'on doit respecter les juridictions provinciales, qu'on peut avoir des programmes équivalents. Quelle est votre réflexion là-dessus, à la suite de votre fin de semaine? Vous avez sûrement, j'imagine, discuté de ces différents aspects-là et de ces différentes inquiétudes. J'aimerais que vous puissiez partager vos opinions avec notre comité et que vous nous fassiez part des conclusions auxquelles vous en êtes arrivés suite à vos rencontres.

º  +-(1625)  

[Traduction]

+-

    Mme Judy Darcy: Je voudrais vous parler simplement pour commencer des soins à domicile, d'autres s'attaqueront peut-être aux autres questions.

    Roy Romanow a recommandé un programme national, public, à but non lucratif de soins à domicile et que la Loi canadienne sur la santé soit modifiée dans ce sens. L'arrangement, l'entente, l'accord, peu importe le nom qu'on lui donne, indique que le programme de soins à domicile sera laissé à la discrétion des provinces.

    Nous estimons que ce devrait être un programme plus global qui n'englobe pas simplement les soins palliatifs et les soins après soins intensifs, alors que c'est presque exclusivement ce dont il est question. D'autres services de soutien permettent aux personnes âgées de rester chez elles beaucoup plus longtemps et d'être indépendantes. C'est mieux pour leur qualité de vie et leur santé mentale et cela coûte moins cher au système que de les faire déménager dans des établissements de soins de longue durée.

    Il y a donc beaucoup de choses qui manquent dans la définition de ce qui sera financé, mais le problème fondamental est qu'il devrait s'agir d'un programme public à but non lucratif de soins à domicile. Sinon, nous avons déjà vu que cela présentera d'énormes problèmes.

    Il y a des tas de programmes différents dans certaines localités de l'Ontario depuis quelques années et certains marchent mieux que d'autres. Mais le modèle que le gouvernement ontarien a présenté et sur lequel il insiste, repose sur des appels d'offres. C'est coordonné par ce qu'on appelle les CCAC (centres d'accès à des soins prolongés) auxquels le gouvernement provincial ordonne clairement de changer régulièrement de fournisseurs de services suite à des appels d'offres. Cela signifie en général des bénéfices, mais pas des soins de meilleure qualité.

    On a tous les détails voulus sur des expériences qui ont été menées, par exemple à Windsor en Ontario. Les infirmières de l'Ordre de Victoria pendant des années ont assuré des services de soins à domicile de haute qualité aux personnes âgées de Windsor. Puis, parce qu'on a décidé de réviser le contrat, parce que quelqu'un a dit qu'il pouvait le faire à moindre coût, des gens qui servaient ainsi les personnes âgées depuis des années ont été remerciés parce qu'une autre agence pouvait le faire à moindre coût, mais pas mieux. Ce n'est pas mieux pour les personnes âgées et ce n'est pas meilleur marché à long terme non plus. C'est ce à quoi aboutit un modèle à but lucratif.

    Cela veut dire qu'il y a davantage de privatisation dans le système de santé public parce que les gens sont renvoyés de l'hôpital plus malades et plus rapidement. Il y a ainsi plus de gens qui ont besoin de soins à domicile et le système se privatise de plus en plus. Il y a une différence entre un système public et un système à but lucratif.

[Français]

+-

    M. Jeannot Castonguay: Ce point-là, je l'ai très bien compris. Vous nous le dites pour la deuxième fois aujourd'hui.

    Maintenant, lorsque nous parlons avec les provinces, elles nous disent de ne pas nous inquiéter, de leur envoyer l'argent et qu'elles s'occuperont de gérer les soins de santé. Ce que je voulais savoir finalement, c'est si vous croyez qu'on devrait avoir un programme qui soit le même dans toutes les provinces.

    Si on prend les soins à domicile, par exemple, est-ce que le programme devrait être le même dans toutes les provinces, à l'échelle du pays, ou est-ce qu'il y a de la place pour que chacune des provinces ait un programme équivalent? Ça fait quand même partie du débat. On ne peut pas fermer les yeux et dire aux provinces d'aller chez le diable. Il y a quand même une juridiction qu'il faut respecter, je crois. Dans vos discussions, qu'est-ce que vous avez conclu là-dessus?

[Traduction]

+-

    M. Michael McBane: Je voudrais intervenir à ce sujet car je crois que les Canadiens commencent à en avoir assez des questions de compétence entre les provinces et le gouvernement fédéral lorsqu'il s'agit d'avoir accès aux soins dont ils ont besoin. La Constitution de notre grand pays, le Canada, stipule qu'il existe un pouvoir de dépenser fédéral. C'est constitutionnel et l'on utilise ce pouvoir que si l'on impose une norme nationale.

    Donc, les gouvernements d'autres provinces qui prétendent que l'on s'ingère dans leur champ de compétence lorsqu'on établit des normes nationales pour des dépenses fédérales se trompent, en fait. Le pouvoir de dépenser fédéral est un pouvoir constitutionnel et on ne peut y recourir s'il n'y a pas de normes nationales. Il est évident que nos organisations souhaitent des normes nationales pour les soins à domicile. Il nous faut des normes nationales pour les soins à long terme. Il nous faut des normes nationales à tous égards.

    Cela ne veut pas dire que l'on dicte à une province la façon d'offrir ces services mais que toutes les provinces, y compris le Québec, partagent les mêmes valeurs, défendent les mêmes principes et en ont assez que le gouvernement québécois joue le jeu des champs de compétence. La société civile tient aux valeurs que défend Romanow et à la notion de normes nationales. C'est ce que veulent les Canadiens.

    Alors allons-y, collaborons à tous les niveaux et arrêtons de jouer au football avec les champs de compétence.

[Français]

+-

    M. Jeannot Castonguay: Alors, si je comprends bien...

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Gardez ça pour plus tard.

    Très bien, nous allons maintenant passer au NPD et à Svend Robinson.

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

    C'est ma première séance en tant que porte-parole en matière de santé et je suis ravi d'être ici. J'ai beaucoup de choses à apprendre et je suis impatient de participer aux travaux du comité.

º  +-(1630)  

[Français]

    J'aimerais accueillir tous les témoins. Je m'excuse de n'avoir pas pu être ici au début, mais j'avais une réunion avec le ministre de la Justice sur la question de la propagande haineuse, et c'était prévu depuis longtemps. J'ai été très content d'entendre mon ami M. Ménard suggérer la possibilité d'une étude sur la question de l'accès aux médicaments, mais franchement, je suis en profond désaccord avec lui lorsqu'il suggère qu'on ne peut pas toucher au régime de propriété intellectuelle et au règlement. Par exemple, mon collègue, au Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, avait proposé une étude du règlement, et c'est justement le Bloc québécois qui avait bloqué ça. Alors, ça ne me surprend pas qu'ils reçoivent beaucoup de subventions des grandes entreprises pharmaceutiques au Québec.

+-

    M. Réal Ménard: Mais vous en recevez des banques, monsieur Robinson.

[Traduction]

+-

    M. Svend Robinson: Pas au niveau fédéral.

    Ma question s'adresse à un des témoins qui a mis l'accent en particulier sur la question de la prestation de soins à but lucratif, c'est-à-dire privée.

    Une des choses qui inquiètent certains d'entre nous est le fait que nous ne sommes toujours pas capables de savoir dans quelle mesure ce genre de prestation est déjà réalité, dans quelle mesure ce phénomène éventuel affaiblit le régime de soins de santé public à but non lucratif.

    Les témoins pourraient-ils nous en dire davantage sur les difficultés actuelles, aggravées par le fait que l'accord, l'entente, peu importe le nom qu'on lui donne, ne prévoit absolument rien à cet égard. À moins que quelque chose ne m'ait échappé, l'accord ne prévoit rien sur l'obligation de rendre compte. Je n'y ai rien trouvé non plus concernant l'accès à l'information, c'est-à-dire les renseignements que les Canadiens sont en droit d'obtenir sur la distribution des fonds et sur les sommes versées au secteur privé, à but lucratif.

    En réponse à une question posée au premier ministre à la Chambre des communes aujourd'hui, on nous a dit que l'accord respectait les cinq principes de la Loi canadienne sur la santé si bien que nous devrions nous contenter de cela, n'est-ce pas?

    Quel est votre sentiment à cet égard, plus particulièrement, que pouvez-vous répondre à ceux qui veulent pouvoir être renseignés sur l'argent dépensé dans le secteur privé, à but lucratif?

+-

    Mme Kathleen Connors: D'emblée, à en juger par les paramètres annexés à l'entente, l'accord, quel que soit le nom, il n'y aurait rien qui exigerait que les provinces rendent des comptes sur la façon dont ces deniers publics sont dépensés. On aurait très bien pu le préciser. C'est une chose qui ne s'y trouve pas. Le groupe que je représente va exiger que ces repères soient inclus.

    Un peu plus tôt, Mike a déploré qu'on n'ait pas précisé les critères du contenu du rapport annuel exigés selon les dispositions de la Loi canadienne sur la santé. La loi impose une responsabilité quant à la fourniture de ces renseignements de sorte que nous demandons au gouvernement fédéral de se prévaloir du pouvoir que lui confère la loi, pour que soient fournis ces renseignements, pour que les données comptables soient disponibles, afin que les décisions soient fondées sur des preuves, des connaissances, sur la gestion optimale de l'argent du public.

+-

    M. Michael McBane: J'ajouterais ceci à ce qu'a dit Kathleen. Quand une administration publique de soins de santé signe un contrat avec une société privée, propriétaire d'actionnaires, ces contrats sont secrets de sorte qu'on ne sait pas quelle somme la transaction représente. Les livres ne sont pas ouverts. Les Canadiens souhaitent une transparence et une reddition de comptes. Si un contrat est signé avec une société privée, inutile de songer à cela. La loi ne contraint pas les sociétés à ouvrir leurs livres.

    Ainsi, nous ne savons pas ce que contiennent les contrats privés en Alberta. Nous ne savons rien des cliniques privées offrant des services d'IRM, nous ne savons pas quelles sont les ententes avec les médecins. Tout est secret. Le contrôle des normes médicales nous échappe, la reddition publique de comptes nous échappe aussi. Ces installations privées, propriété d'actionnaires, ne font pas l'objet de vérification et elles prêtent le flanc à des fraudes inouïes.

+-

    M. Svend Robinson: J'ai une autre question, si...

+-

    M. Anil Naidoo (agent de campagne, Conseil des Canadiens): Merci, monsieur le président et merci de votre question, honorable député.

    Je suis du Conseil des Canadiens et je souhaite ajouter quelque chose à ce qu'ont dit les autres témoins. Comme on a pu le constater, tout ce qui concerne les sociétés baigne dans le plus grand secret et cela est vrai assurément pour ce qui est des médicaments car ils ne font pas l'objet d'un véritable examen par les pairs. Ainsi, surgissent toutes sortes de difficultés en ce qui concerne l'efficacité de nouveaux médicaments.

    Il y a d'autre part la question des hôpitaux P3 dont Mike a parlé. Je pense que nous nous préparons à faire l'expérience d'une comptabilité farfelue du style Enron qui va influencer notre secteur des soins de santé. Qu'on songe à ce qui s'est passé il y a quelques années au Centre de santé King à Toronto. Il nous faut une véritable transparence, c'est-à-dire une obligation de rendre compte au public, et cela crève les yeux. Or, l'accord ne prévoit rien à cet égard.

º  +-(1635)  

+-

    M. Svend Robinson: Me permettez-vous une autre question, monsieur le président?

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Désolé, mais les partis d'opposition n'ont droit qu'à cinq minutes. Seule l'opposition de Sa Majesté obtient 10 minutes.

    Des voix: Oh, oh!

+-

    M. Svend Robinson: J'invoque le Règlement, monsieur le président, je veux bien comprendre que je suis nouvellement arrivé au comité, mais j'ai siégé à un grand nombre de comités parlementaires, et c'est la première fois en 24 ans qu'on accorde moins de temps à certains membres d'un comité qu'à d'autres.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): La diversité enrichit la vie.

+-

    M. Svend Robinson: Le comité en a-t-il fait une motion officielle suivie d'une mise aux voix? Les membres du comité devraient tous avoir autant de temps pour interroger les témoins.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Nous pourrions en rediscuter plus tard, mais cette façon de faire est bien établie à notre comité. Comme c'est ainsi que nous fonctionnons depuis déjà quelque temps, nous allons continuer.

    Madame Thibeault, vous avez cinq minutes.

[Français]

+-

    Mme Yolande Thibeault: Merci, monsieur le président. Bonjour, messieurs et mesdames.

    Monsieur McBane, j'aimerais relever une chose que vous avez dite en passant dans votre présentation. Vous avez parlé d'une étude qui démontrerait que dans les institutions privées, il y aurait un taux de mortalité plus élevé que dans les institutions publiques. Est-ce que l'étude identifie des raisons pour une telle situation?

+-

    M. Michael McBane: Oui, il y a plusieurs raisons, mais une raison très fondamentale et très claire, c'est que ces hôpitaux-là ont moins de professionnels qui y travaillent, c'est-à-dire que les patients ne reçoivent pas assez de soins.

[Traduction]

    La raison principale qui expliquerait ce taux de mortalité plus élevé, dans les hôpitaux privés des États-Unis, c'est que les investisseurs réduisent le budget consacré à leur masse salariale, qui est élevée, puisqu'elle sert à payer médecins, infirmières et autres techniciens. Il a été démontré que les hôpitaux privés n'ont pas suffisamment de personnel, ce qui met en danger la vie des patients.

+-

    Mme Maude Barlow: On ne parle pas ici d'une simple étude, mais plutôt d'une méta-analyse de toutes les études effectuées sur la différence entre les taux de mortalité dans les hôpitaux à but lucratif par rapport aux hôpitaux à but non lucratif. Il ne s'agit donc pas d'une simple étude, mais d'une méta-analyse scientifique.

+-

    Mme Judy Darcy: Nous pouvons vous en faire tenir copie si vous le souhaitez.

[Français]

+-

    Mme Yolande Thibeault: C'est ce que j'avais demandé, si vous pouviez nous donner le titre de l'étude pour qu'on puisse la lire nous-mêmes.

    Alors, ce que vous nous dites, monsieur McBane, c'est que dans les cliniques privées, il y aurait moins de personnel hospitalier que dans une institution de l'État. C'est ce que vous nous dites.

[Traduction]

+-

    M. Michael McBane: Oui. Vous trouverez notre étude, menée par le Dr P.J. Devereaux, à notre site Web, à l'adresse medicare.ca.

    Il y a aussi une autre raison à ces taux de mortalité plus élevés, outre la diminution de personnel: en effet, dans les centres de dialyse des cliniques à but lucratif, on ne change pas les filtres assez souvent et on ne transfère pas les patients en vue d'une greffe suffisamment vite étant donné que ces cliniques font plus d'argent avec le traitement de la dialyse qu'avec des greffes. Cette cause de mortalité plus élevée a été documentée non seulement dans les hôpitaux mais aussi dans les cliniques à but lucratif. Vous trouverez ces deux études sur notre site Web.

+-

    Mme Judy Darcy: Dans le même ordre d'idées, j'ai expliqué plus tôt qu'il y avait un lien entre les taux de mortalité et les réductions dans le personnel faisant le nettoyage et la prévention des infections. Des études sont également disponibles là-dessus et démontrent qu'aux États-Unis, là où il y a eu une réduction de 25 p. 100 dans le personnel hospitalier s'occupant du ménage, du nettoyage et de la prévention des infections, une incidence plus élevée de mortalité en avait résulté. C'est particulièrement vrai depuis l'arrivée des «super bibittes» dont on parle beaucoup dans les médias, c'est-à-dire de ces microbes qui sont immunisés à toutes sortes de médicaments déjà sur le marché. On a constaté une augmentation très rapide de ces microbes, ce qui explique que lorsqu'une institution n'a pas suffisamment de personnel domestique ou de prévention des infections, l'incidence des infections augmente, de même que le nombre de mortalités.

º  +-(1640)  

[Français]

+-

    Mme Yolande Thibeault: Est-ce que vous nous dites que ce phénomène-là n'est pas encore arrivé chez nous?

[Traduction]

+-

    Mme Judy Darcy: Je dis que les grandes études portant là-dessus ont été faites aux États-Unis, parce que c'est là que se trouve une prédominance des hôpitaux à but lucratif et que c'est là que nous pouvons faire une comparaison. C'est aussi dans ce pays qu'on a constaté une diminution importante du personnel chargé de la prévention des infections, par exemple. Nous avons déjà des résultats et ce que nous disons, c'est que nous n'avons pas besoin de tenter l'expérience ici, puisque les preuves existent ailleurs. Nous n'avons pas besoin d'autres preuves. Une démonstration pourrait nous coûter des vies, et ce n'est pas la peine d'essayer.

[Français]

+-

    Mme Yolande Thibeault: Merci beaucoup. J'ai bien hâte de voir l'étude dont parle M. McBane. Merci.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci beaucoup.

    Nous commençons maintenant un deuxième tour de questions avec Mme Skelton, je crois.

+-

    Mme Carol Skelton: Merci beaucoup.

    Je viens de la Saskatchewan et j'en suis très fière. Je me rappelle comme si c'était hier une grève de médecins qui avait eu lieu quand ma tante attendait des jumeaux.

    Je m'inquiète moi aussi énormément de nos infirmières et de notre personnel hospitalier, et je sais que dans ma province on a de la difficulté à embaucher des infirmières et d'autre personnel de qualité. Nos infirmières sont fatiguées, épuisées et on leur fait la vie dure. N'a-t-on pas fait d'études sur la situation? Pourquoi n'a-t-on pas discuté dans l'accord des professionnels de la santé et des travailleurs de la santé? Avez-vous des suggestions à nous faire sur la façon dont nous pourrions nous pencher sur la situation?

+-

    Mme Kathleen Connors: Je suis heureuse de pouvoir vous en parler du point de vue des infirmières. En 2001-2002, le Comité consultatif canadien sur les soins infirmiers a entrepris une longue étude d'une année au cours de laquelle on a entendu des recommandations de la part des gouvernements fédéral et provinciaux, d'employeurs, de syndicats infirmiers, de centres de formation en soins infirmiers et de dirigeants des infirmières. L'étude a abouti à un rapport, le rapport final du Comité consultatif canadien sur les soins infirmiers, qui comprenait 51 recommandations portant sur toutes sortes de choses dont le maintien en poste et le recrutement de nouveaux infirmiers.

    Lorsque les ministres de la Santé du gouvernement fédéral, des provinces et des territoires se sont réunis, on a mentionné mais pas officiellement le rapport. Or, à titre de prestataires des soins de santé, nous avons été extrêmement déçus de constater que dans l'accord de février dernier, on ne mentionnait aucunement l'obligation de mettre en oeuvre les recommandations du CCCSI.

    On ne parle pas ici uniquement des infirmières; on parle aussi des médecins, des techniciens et des technologues. Il s'agit ici d'avoir un nombre suffisant de gens formés pour répondre aux besoins diététiques et pour assurer les services de lavage et l'entretien nécessaire. Après tout, il s'agit de soins nécessaires pour maintenir en vie des gens. Il nous revient donc d'aller chercher les meilleurs praticiens et les plus brillants.

    Outre le rapport du comité consultatif, Santé Canada et DRHC ont entrepris des études sectorielles conjointes pour voir ce qui se passait du côté des médecins et des infirmières, notamment des infirmières autorisées, des infirmières auxiliaires autorisées et des infirmières psychiatriques autorisées. Je crois qu'il y a aussi une autre étude sectorielle qui se penche sur le cas des techniciens et des technologues. Il y a du travail qui se fait actuellement, puisque certains se penchent sur les différents secteurs de la santé.

    Nous sommes très inquiets de voir que l'on ne mentionne aucunement ce travail effectué en dépit de toutes les idées qui ont été proposées pour résoudre les problèmes et de constater que l'on ne mentionne ni budgets ni conditions.

    Après tout, l'accord porte sur une réforme des soins primaires. Comment peut-on parler d'une véritable réforme prônant une équipe multidisciplinaire de fournisseurs de soins de santé si l'on n'a pas au départ un nombre suffisant de praticiens? Il nous faut quand même des gens pour travailler dans les hôpitaux, car on ne peut tout de même pas fermer tous les hôpitaux du Canada.

º  +-(1645)  

+-

    Mme Carol Skelton: À votre avis, pourquoi ne l'a-t-on pas inclus?

+-

    Mme Kathleen Connors: Nous avions songé notamment à avoir recours au fonds d'assurance-emploi qui présente un énorme excédent. Le Congrès du travail du Canada a d'ailleurs proposé un projet pilote en matière de santé prônant d'avoir recours à ces fonds pour aider les prestataires à obtenir la formation suffisante pour devenir des fournisseurs de soins de santé. Or cette proposition ne semble avoir abouti nulle part. Pourquoi n'a-t-on pas jugé l'idée bonne? Il a également été recommandé de garder dans le système les infirmières et les autres fournisseurs de soins de santé en adoptant, par exemple, le modèle néo-brunswickois. En effet, dans les conventions collectives de la province, on a négocié la possibilité pour les infirmières qui approchaient de l'âge de la retraite de travailler à temps partiel tout en contribuant avec leur employeur à leur fonds de pension comme si elles étaient à temps plein. Autrement dit, plutôt que de perdre ces infirmières du jour au lendemain, on réussit à les garder plus longtemps, ce qui ne nuit en rien à leur pension et leur permet éventuellement d'avoir un revenu suffisant pour se retirer de la vie active en toute dignité. Pourquoi n'a-t-on pas adopté ce type de mesures? À mon avis, c'est par manque de volonté politique et manque d'engagement à l'égard de tous ceux qui oeuvrent dans le système de santé.

+-

    Mme Carol Skelton: Merci.

    Est-ce qu'il me reste du temps?

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Lors du prochain tour de table.

    Nous allons passer à Réal.

[Français]

+-

    M. Réal Ménard: Je vais devoir partir à 17 heures parce que je dois faire un discours à la Chambre.

    En tout respect, monsieur McBane, je vous dirai que l'Assemblée nationale a voté une résolution et que jamais on n'acceptera qu'il y ait des normes nationales dans le domaine de la santé. On est tout à fait d'accord qu'il y ait de l'imputabilité. Vous savez d'ailleurs qu'il y a, à l'Assemblée nationale, différents mécanismes d'imputabilité.

    Je veux revenir à la question des débats sur l'industrie pharmaceutique. Je vous mets en garde. Ce débat doit se faire, et je suis prêt à le faire pour le Bloc. Je vais prendre mes distances face au commentaire de M. Robinson quant aux sources de financement. Ce qui est certain, c'est que ce n'est pas un film de cow-boys. Ce ne sont pas les méchantes industries pharmaceutiques contre les consommateurs. Il faut des médicaments, et il y a un arrimage à faire entre les deux. Il y a un discours critique à développer et il y a des façons originales de faire ce débat, mais ce n'est pas un film de cow-boys. Il faut faire attention, parce que quand on veut polariser le débat de manière à ne pas y mettre les nuances nécessaires, on perd de la crédibilité. Je suis sûr que ce n'est pas ce que vous voulez faire. Le NPD, qui recueille 8 p. 100 des intentions de vote, tient un discours centralisateur, et ce n'est pas à cela que nous voulons nous associer. Nous voulons nous associer à des façons renouvelées de tenir le discours, et je suis sûr que chacun d'entre vous peut faire une contribution à cet égard.

    Quand on regarde le rôle du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, le rôle de Santé-Canada et l'expertise de différentes fédérations professionnelles, on voit qu'il y a moyen de faire ce débat. Mais ce n'est pas vrai qu'on va pouvoir faire complètement abstraction des traités ou de ce qui existe au niveau de la législation sur la propriété intellectuelle. Ce n'est pas vrai. Le cas de l'Afrique du Sud est différent. On peut être membre de l'OMC sans avoir signé l'Accord sur les ADPIC, mais quand on a signé cet accord, on a un certain nombre d'obligations. Ce n'est pas vrai qu'on peut faire abstraction de cela.

+-

    M. Claude Généreux: C'est un sujet fort intéressant, mais je n'en parlerai pas parce qu'on manque de temps.

    M. Réal Ménard: On ira manger ensemble.

    M. Claude Généreux: Nous ne nions pas la propriété. Pour que les choses soient claires, je dirai ce que le Sommet populaire pense des relations entre le Québec et le reste du Canada. Le Sommet populaire représente l'ensemble de la population sur le territoire du Canada, y compris la population québécoise.

    Au sommet, nous avions un éventail très représentatif de la population québécoise. Il y avait des organismes représentant des bénévoles du réseau de la santé et des services sociaux, des organismes représentant toutes sortes d'organismes sans but lucratif, des organismes représentant les bénéficiaires des différents services de santé et services sociaux, des représentants de ceux qui livrent les services de santé et les services sociaux, ainsi que de toutes les centrales syndicales.

    L'ensemble de la coalition parle d'une seule voix. Nous disons que oui, il y a de la place pour que le Québec puisse vivre autrement ses aspirations et les gérer autrement, mais il ne fait aucun doute qu'historiquement et même conjoncturellement, la population québécoise a les mêmes aspirations que la population du Canada. Elle veut avoir un régime qui soit géré publiquement. Elle veut non seulement qu'il y ait de l'argent, mais aussi que le régime soit sous contrôle public. Nous voulons être très clairs: la coalition ne nie pas ce droit au Québec.

    Cependant, je dirai d'une façon non partisane que si le gouvernement québécois veut établir sa compétence, il faut aussi qu'il l'exerce. À ce sujet, la coalition fait bien respectueusement une suggestion au gouvernement québécois: si le Québec veut exercer cette juridiction, il doit l'enchâsser dans une loi québécoise qui ressemble à la loi canadienne. Il faudrait élargir et moderniser la loi de manière à ce qu'elle intègre non seulement le régime d'assurance-maladie qui existe déjà, mais également le régime de soins de longue durée dont on parlé plus tôt. On pourrait instituer un tel régime.

    Ce n'est pas du tout en contradiction avec notre vision, mais il faut exercer cette compétence. Lors d'un sondage Polara d'il y a deux semaines, la population québécoise disait qu'elle souhaitait que le système de santé public soit maintenu et revigoré.

º  +-(1650)  

+-

    M. Réal Ménard: Mais on s'entend pour dire que ce ne sont pas des normes nationales.

+-

    M. Claude Généreux: Quand on parle des aspirations, on parle de standards. Est-ce que c'est la même chose? Non. On parle d'équivalences, ce qui ne veut pas dire la même chose. On ne parle pas de choses qui sont exactement pareilles, mais d'équivalences. Il faut que ça se ressemble et que ce soit transférable. Si je suis malade aujourd'hui, à Ottawa et que j'ai ma carte d'assurance-maladie du Québec, je dois être en mesure de me faire soigner gratuitement ici même à Ottawa, en Ontario. Il faut qu'il y ait des standards qui se ressemblent, qui puissent se mesurer et qui soient équivalents. Le sommet ne voit aucune objection à ce que le gouvernement québécois puisse exercer son champ de compétence, mais il doit l'exercer. À ce jour, il y a des déclarations de principes, mais il n'y a aucune loi québécoise ressemblant de près ou de loin à loi canadienne, qui enchâsse le fait qu'il y a un financement, mais aussi une livraison de services publics, une propriété publique pour le bénéfice de la population.

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci infiniment.

    Madame Bennett.

+-

    Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Je vais poser quelques questions très précises sur les médicaments et la privatisation. Pourquoi considérons-nous que les fabricants de médicaments génériques ne sont pas des sociétés privées et qu'il ne faut pas s'intéresser à leur comptabilité? J'ai pourtant l'impression que ces sociétés brassent des chiffres d'affaire importants. La semaine dernière, nous avons été désagréablement surpris par la problématique de l'insuline de porc et de boeuf.

    J'ai cru comprendre que dans 90 p. 100 des cas, aucun médicament générique n'est créé après l'expiration des brevets des médicaments brevetés. Il est plus avantageux de breveter un médicament qui a de fortes chances de bien se vendre que de créer une version générique d'un médicament à portée restreinte.

    Pour ce qui est des prochaines étapes, on dit que le soleil est le meilleur désinfectant qui soit, alors étant donné les fonds publics considérables qui sont versés aux sociétés privées, quel moyen nous permettrait de savoir comment ces sommes sont dépensées? Peu importe qu'il s'agisse d'un fournisseur de soins à domicile ou autre. Pour qu'une société puisse traiter avec le gouvernement, il faut qu'elle divulgue à ce dernier ses données financières en mettant en évidence les profits réalisés. Apparemment, certains fabricants de médicaments génériques vendent leurs produits aux États-Unis à des prix nettement inférieurs à ceux pratiqués au Canada parce que là-bas ils ont des concurrents. Je m'intéresse toujours à la dichotomie bons méchants. À but lucratif, ça veut bien dire ce que ça veut dire, et nous devrions savoir comment sont dépensés nos fonds publics.

    Est-ce que vous avez des statistiques là-dessus?

+-

    M. Michael McBane: Madame Bennett, nous sommes d'accord, toutes les sociétés devraient être mises sur le même pied. Elles ont des comptes à rendre à leurs actionnaires en matière de rentabilité et ne s'intéressent donc pas nécessairement à l'intérêt public en matière de santé.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Il s'agit de sociétés privées qui n'ont par définition pas d'actionnaires. Elles ne doivent même pas produire de rapport annuel.

+-

    M. Michael McBane: Nous voulons que davantage de produits génériques soient disponibles. Mais cela ne veut pas dire que prendre des arrangements spéciaux avec les fabricants de médicaments génériques leur permettant de court-circuiter la transparence ou de pratiquer des prix irresponsables ou encore de lésiner sur la sécurité en offrant des médicaments potentiellement nocifs.

    Les médicaments génériques devraient être davantage disponibles et achetés en vrac. Il existe beaucoup de médicaments qui ont des équivalents génériques. D'après le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, 92 p. 100 des nouveaux médicaments ne présenteraient aucune amélioration thérapeutique—aucune. Par conséquent, on devrait avoir recours aux médicaments génériques plus souvent parce que les médicaments plus chers des grandes compagnies pharmaceutiques ne présentent aucun avantage.

    La situation réelle a été décrite par des gens comme M. Arnold Relman, qui est l'auteur d'un article récent paru dans The American Prospect en décembre 2002. Dans cette histoire, il y a les bons et les méchants. Les grandes compagnies pharmaceutiques n'innovent pas. Il n'y a pratiquement pas de nouveaux produits chimiques qui s'annoncent, d'après les experts. Les sociétés qui innovent le font grâce aux fonds publics pour la recherche. Et quels bénéfices peuvent-elles espérer? Un rendement du capital investi de 30 p. 100. C'est du pillage.

º  +-(1655)  

+-

    Mme Carolyn Bennett: Mais le problème le plus important relatif au coût des médicaments au Canada ne découle-t-il pas du fait que les médecins prescrivent un médicament très cher contre l'hypertension au lieu de prescrire un diurétique doux ou des macrolides pour soigner une angine streptococcique? Pour essayer de contrer la hausse spectaculaire des prix des médicaments, nous devons agir sur le front des ordonnances.

    Voilà pourquoi je soutenais l'idée d'un conseil sur la santé qui nous permettrait d'examiner ce qu'on entend par administration publique et de comprendre comment fonctionnerait un tel système. On pourrait alors voir qui consomme les médicaments, combien de personnes prennent des médicaments incompatibles et combien de décès ont été causés par notre façon de faire.

    Si nous nous attaquons uniquement à la modification progressive et aux autres questions qui ont été soulevées, on ne pourra pas résoudre le véritable problème, à savoir quelles maladies peuvent être traitées sans médicament, comment mieux traiter les maladies.

+-

    Mme Elaine Johnston: Puis-je répondre?

    Le gouvernement fédéral offre des services de santé non assurés aux Premières nations et aux Inuits. Vous dites que ce sont les médecins qui prescrivent les médicaments les plus chers. Mais Santé Canada n'accepte pas les médicaments les plus chers et préfère avoir recours aux médicaments génériques. Le critère le plus important n'est pas l'efficacité du produit mais plutôt son coût. Quand on parle d'efficacité, c'est à cela qu'ils se réfèrent. Pour nous, les critères les plus importants sont l'innocuité et l'adéquation entre la maladie et le médicament utilisé.

    Il existe une dichotomie. Vous avez parlé de mécanismes de reddition de comptes. Pour ce qui est du conseil sur la santé et de l'accord, le conseil va-t-il devoir rendre des comptes? L'accord n'est pas très substantiel, et je trouve ça inquiétant. Il faut qu'on se penche davantage sur cette question de reddition de comptes du conseil sur la santé.

+-

    Mme Maude Barlow: On s'entend tous sur le fait que les sociétés à but lucratif génèrent des profits et que les données financières de ces sociétés doivent être disponibles. Je rajouterais deux aspects, par contre. Premièrement, cela ne change rien au fait que nous devons amoindrir le pouvoir des grandes compagnies pharmaceutiques transnationales, ces compagnies étant toujours très puissantes. Elles disposent de toutes sortes de moyens. Elles peuvent faire perdurer les procédures juridiques intentées contre les fabricants de médicaments génériques pendant deux ans, et pendant ce temps les médicaments génériques ne sont pas écoulés, même si elles savent pertinemment qu'elles vont perdre parce que les 20 ans de vie de leur brevet sont écoulés. Elles se permettent de dépenser des sommes folles en services juridiques parce que ça en vaut la peine. Au bout du compte, ce sont les citoyens canadiens qui sont pénalisés.

    C'est dommage que notre ami du Bloc ne soit pas ici parce que je voudrais revenir à l'idée qu'il est impossible de rouvrir le dossier sur l'ADPIC, soit l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce. Il s'agit d'une des questions les plus controversées qui va être soulevée lors de la réunion de l'OMC, qui aura lieu à Cancun, au Mexique, cet automne.

    Tous les pays africains, de plus en plus de pays d'Amérique latine et certains pays asiatiques demandent que soit rouvert le dossier sur l'ADPIC pour que soit étudiée la durée de vie de 20 ans des brevets. Ce n'est pas simplement pour gérer des situations catastrophiques, comme le sida. Il s'agit de tout remanier.

    Je reviens tout juste du Brésil. Le nouveau premier ministre ou président ne voudra pas, de son propre chef, rouvrir le dossier de l'ADPIC dans le cadre de la ZLEA. On aimerait que le Canada arrête de soutenir inconditionnellement les compagnies pharmaceutiques et la position américaine dans ces négociations commerciales.

    Cette notion que le dossier de l'ADPIC est intouchable est erronée; j'aimerais que cela figure clairement dans le compte rendu. Au contraire, beaucoup de pressions se font sentir pour que soit renégocié cet accord.

»  +-(1700)  

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci.

    Svend Robinson.

+-

    M. Svend Robinson: Merci beaucoup, monsieur le président.

    Au sujet des médicaments, je suis très heureux que Maude Barlow ait dit ce qu'elle a dit au sujet de l'accord ADPIC. J'étais à Doha, comme elle, et elle se souvient sans doute que c'est là une question qui soulevait toute une controverse et de grandes préoccupations. À vrai dire, j'ai trouvé honteux que certains des pays les plus pauvres doivent supplier et implorer les pays riches simplement pour qu'ils acceptent le principe selon lequel la santé publique doit primer sur les bénéfices des sociétés pharmaceutiques. C'était vraiment incroyable.

    La question devrait faire l'objet d'un débat plus large, mais je n'arrive absolument pas à comprendre pourquoi les participants au sommet et nos esprits les plus progressistes n'arrivent pas à aller plus loin et à dire qu'il faut en quelque sorte rouvrir l'accord ADPIC, etc. S'il y a un domaine où le secteur public devrait jouer un rôle actif, c'est bien celui des produits pharmaceutiques.

    Nous devons commencer à examiner très sérieusement le rôle du secteur public et à demander à nos meilleurs talents scientifiques et à d'autres qui oeuvrent dans ce domaine, de travailler ensemble à la création d'une société pharmaceutique de propriété publique qui ne cherche pas avant tout à gagner autant d'argent que possible dans le monde.

    C'est là quelque chose qu'on aurait dû faire il y a longtemps, à la lumière des niveaux obscènes qu'atteignent les bénéfices des multinationales pharmaceutiques, de ce que coûtent leurs activités de marketing, de l'argent qu'elles gaspillent pour des médicaments qui auront, tout au plus, un effet marginal et du fait qu'elles refusent, dans bien des cas, de financer la recherche pour mettre au point des médicaments qui ne peuvent aider que les pauvres. La maladie du sommeil en Afrique en est l'exemple classique.

    Je recommanderais respectueusement aux groupes qui sont représentés ici aujourd'hui d'aller un peu plus loin et de dire: écoutez, c'est un secteur où les Canadiens ont le droit d'exercer leur droit de propriété et d'en tirer un bénéfice.

    Mais pour ce qui est de ma question, puisque nous n'avons que cinq minutes, je me demande si vous pourriez simplement nous en dire un peu plus sur les services diagnostiques. C'est là un autre domaine où le secteur privé à but lucratif attend avec impatience d'investir et où il a déjà investi dans bien des cas.

    Romanow a recommandé clairement qu'une modification soit apportée à la Loi canadienne sur la santé, si j'ai bien compris, afin que les services diagnostiques soient inclus dans le cadre des services visés par cette loi pour être visés par les mesures d'application, du moins en théorie, car l'application des dispositions existantes par l'actuel gouvernement laissent à désirer.

    Un des témoins voudrait-il bien se prononcer sur l'importance d'élargir en fait la portée de la Loi canadienne sur la santé pour y inclure les services diagnostiques?

+-

    Mme Judy Darcy: S'il y a un élément de leur accord où les premiers ministres ont déformé la pensée de Romanow, c'est bien le rejet de son principe fondamental selon lequel la prestation sans but lucratif est essentielle à l'avenir des soins de santé. Ce principe, il ne l'a pas énoncé pour des raisons idéologiques. Nous connaissons tous M. Romanow. Nous savons que c'est un homme très pragmatique. Il a insisté pour que toutes ses constations s'appuient des faits. Il a répété à maintes reprises que les soins devaient à tout prix être assurés par des mécanismes publics. Pourtant, tous les premiers ministres ont parlé du financement public, mais ils n'ont rien dit de la prestation des soins par des mécanismes publics.

    En disant que les services devaient être assurés par le secteur public, il signalait que tous ces nouveaux programmes—l'expansion et la modernisation de notre programme de soins à domicile, les services diagnostiques, le programme national de soins à domicile, le programme national d'assurance-médicaments et même le programme limité d'assurance-médicaments pour les maladies catastrophiques—devaient être inclus dans la Loi canadienne sur la santé. Il signalait ainsi qu'ils devaient être visés par les principes de la Loi canadienne sur la santé, qu'il devait s'agir de services publics sans but lucratif.

    Le Globe and Mail avait parfaitement raison. Le matin de la conférence des premiers ministres, il titrait «Le sans but lucratif mis au rancart». On peut conclure à l'existence d'un silence concerté parmi les premiers ministres et les médias de notre pays sur cette question. Personne n'en parle. Nous l'avons clamé haut et fort à la rencontre des premiers ministres et aux journalistes après la rencontre, mais pourtant on n'a presque rien dit de cette question. Ils ont ainsi manqué à leur devoir envers les Canadiens.

    L'opinion des Canadiens à ce sujet ne laisse absolument aucun doute. Les résultats d'un sondage que nous avions effectué auprès des membres du SCFP ont été publiés il y a environ deux semaines, juste avant la rencontre des premiers ministres. D'après ce sondage, 95 p. 100 des Canadiens estiment qu'il faudrait une bien meilleure reddition de comptes des fonds octroyés pour la santé; 92 p. 100 sont d'avis que les gouvernements devraient rendre compte de chaque dollar fédéral et provincial octroyé pour la santé; et 77 p. 100 d'entre eux disent que les fonds publics ne devraient en aucun cas aller aux services à but lucratif. Tous les premiers ministres n'en ont pas fait mention dans leurs déclarations.

+-

    M. Michael McBane: J'aimerais simplement faire une observation au sujet du secteur diagnostic. Nous savons que le gouvernement de l'Ontario a l'intention d'ouvrir 25 cliniques privées de scanographie, de tomographie et d'IRM. Le problème, c'est que ces cliniques privées vont dépeupler les hôpitaux publics de leurs radiologistes. Au bout de deux ans et demi, elles auront une marge bénéficiaire de un million de dollars chacune.

    Il y a un entrepreneur albertain qui fait du recrutement parmi les médecins de notre système public. Le ministre de la Santé de l'Ontario lui a dit: «Vous n'avez rien à craindre, j'ai ici dans ma poche les contrats dont vous aurez besoin.» On fait maintenant des gorges chaudes du feu vert du gouvernement fédéral.

    On va saboter ainsi notre système public de soins de santé avec notre argent. Nous ne sommes donc pas rassurés par ce que disent nos élus fédéraux, car le système public DRM et de diagnostics se trouvera cannibalisé. Romanow a dit que, si l'on injecte des fonds publics dans le secteur privé au lieu de les injecter dans le secteur public, on se trouvera à cannibaliser le système public des soins de santé au Canada. Voilà ce que l'Ontario s'apprête à faire.

»  +-(1705)  

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Merci beaucoup.

    Madame Scherrer.

[Français]

+-

    Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je voudrais aborder un sujet qui est tout à fait différent de celui qu'on a abordé jusqu'à maintenant.

    À la conférence des premiers ministres, j'ai surtout entendu des premiers ministres qui venaient demander des sous pour combler des besoins déjà existants, des besoins en matière d'équipement et de ressources humaines. Je n'ai pas entendu les premiers ministres parler, entre autres, du profil des Canadiens, de notre jeunesse canadienne et de la prévention. Les statistiques nous démontrent actuellement que nos jeunes Canadiens et Canadiennes sont très obèses et très sédentaires et ont des problèmes à peu près à tous les niveaux. J'aurais beaucoup aimé entendre dire qu'on investissait beaucoup dans la prévention. On sait que la prévention est un moyen très important de réduire les coûts.

    Il y a un volet dans lequel on investissait davantage au niveau de la prévention, mais je n'ai pas beaucoup entendu parler d'investissements au niveau de la nutrition et de programmes d'activité physique. J'aimerais savoir où le sommet se situe à cet égard. Comment encouragez-vous la prévention? Actuellement, on parle de maladies et non de santé. J'ai l'impression que si on n'investit pas dans la prévention de façon très musclée, on va manquer notre coup dans les années à venir. Les besoins actuels vont croître sans arrêt. Si on n'établit pas un programme de prévention dès maintenant et que des gens comme vous ne se lèvent pas pour dire qu'à partir de maintenant, il va falloir investir dans la prévention au niveau de notre jeunesse, on va manquer notre coup et on ne réussira jamais à réduire ou à contrôler les coûts de santé.

[Traduction]

+-

    Mme Elaine Johnston: Je peux vous dire qu'il a été question, tout d'abord, du fait que la promotion de la santé et la prévention étaient absentes des déterminants de la santé. C'est pourtant là un élément absolument essentiel de toute tentative de réforme du système des soins de santé.

    Je sais que l'Assemblée des premières nations, qui était là pour témoigner devant la Commission Romanow en même temps que nous, a parlé d'un modèle du mieux-être. M. Romanow n'a inclus dans son rapport que deux recommandations concernant l'accord-cadre et les partenariats. Il n' a pas vraiment fait mention du modèle du mieux-être que nous lui avions présenté et qui, comme vous l'avez dit, est axé sur la promotion de la santé et la prévention.

    Ce qui me préoccupe à propos de l'accord qui a été conclu, c'est qu'il se concentre sur ces domaines clés, et qu'il ne s'agit pas d'une véritable réforme de la santé. Il s'agit davantage d'argent et d'investissement dans certains programmes ciblés, ou plutôt dans certains domaines. Je ne veux même pas dire que ce sont des programmes. Je sais que nous avons discuté de cela au forum de l'Association canadienne de la santé publique qui a eu lieu en fin de semaine. Nous avons discuté de l'absence de la dimension promotion et prévention et de la façon de l'inclure. Les premiers ministres ont effectivement parlé d'argent et de certains domaines en particulier; c'est donc là quelque chose qui nous inquiète, énormément, et nous pensons qu'il faudrait certainement chercher à inclure cette dimension.

+-

    Mme Barb Byers: Moi aussi, j'ai quelque chose à dire à ce sujet.

    Au sommet qui a eu lieu en fin de semaine, nous nous sommes certainement attaqués de front à ces questions, comme l'a dit Elaine, mais nous avons aussi soulevé des préoccupations relatives à la pauvreté, à l'eau potable et à l'itinérance.

    S'il y a un sujet dont on aurait pu discuter davantage, c'est celui de la santé et de la sécurité, parce qu'il s'agit de prévention. Quand on cherche à prévenir les blessures au travail, on contribue ainsi à améliorer le système. L'argent qui est consacré à l'indemnisation des accidents du travail... Encore là, nous avons un système, celui des régimes d'indemnisation des accidents du travail dans tout le pays, où l'on fait énormément appel aux services à but lucratif. Les régimes sont prêts à payer pour que leurs travailleurs puissent passer avant les autres dans la file d'attente. Certains pourraient trouver contradictoire que les dirigeants syndicaux s'opposent à ce que les travailleurs passent devant les autres dans la file d'attente, mais il n'y a pas de contradiction à nos yeux, car nous pensons qu'il devrait y avoir une seule file d'attente pour tout le monde et, encore là, que tout le monde ait le même accès à des soins de qualité. Les régimes d'indemnisation des accidents du travail se trouvent en fait à nuire au système, si bien qu'il y a tout cela qui entre en ligne de compte.

»  +-(1710)  

+-

    Mme Kathleen Connors: Comme je l'ai dit à une réunion précédente aujourd'hui, en ce qui concerne les déterminants sociaux de la santé et les dépenses pour les soins de santé, les gouvernements ont le choix. Ils peuvent dépenser l'argent en amont et contribuer au mieux-être des gens, de façon à ce qu'ils n'aient pas besoin de soins hospitaliers, médicaux, infirmiers ou de techniciens, ou bien ils peuvent mettre l'argent dans le système. Ainsi, tout l'argent qui est consacré, par exemple, à assurer aux gens un logement convenable, de l'eau potable, un environnement paisible, etc., se traduira par des économies de millions et de milliards de dollars pour le système des soins actifs. Nous aurions ainsi l'argent nécessaire pour que les aînés puissent continuer à vivre de façon autonome grâce aux services à domicile, qui pourraient comprendre les services de quelqu'un qui irait faire leurs provisions, qui pelletterait leur entrée de cour et qui leur apporterait le soutien dont ils ont besoin pour éviter d'être placés dans des établissements. Il nous faut simplement amener les hommes et les femmes politiques à cerner les vraies questions et à fixer les priorités à bon escient.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Monsieur Lunney.

+-

    M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Je veux élargir le dialogue et aller un petit peu plus loin encore peut-être, même si l'on a fait allusion à certaines des questions que je veux soulever. Ce que je souhaite, c'est une véritable réforme des soins de santé. Je veux m'assurer que les Canadiens en aient pour leur argent quand il s'agit de dépenser pour la santé.

    Comme l'a dit Kathleen tout à l'heure, en ce qui concerne l'efficacité de l'approvisionnement en médicaments, il y a peut-être d'autres modèles qui pourraient nous permettre d'optimiser l'utilisation des fonds publics.

    Les Canadiens ne devraient-ils pas avoir accès à toutes les options, et peut-être aux meilleures solutions possibles? Sur ce plan-là, on s'inquiète beaucoup du fait que notre système de prestation des soins de santé s'est développé sans avoir eu à faire preuve d'efficacité ou d'efficience. Nombre des procédures qu'on applique aujourd'hui affichent un bilan lamentable, et nous avons connu de grandes déceptions à ce chapitre.

    Quelqu'un ici a parlé du silence qui entoure les médicaments, par exemple, et leur efficacité, et la question de l'examen par les pairs au regard des renseignements exclusifs sur les médicaments, des brevets, etc. Il y a eu de grandes déceptions, comme l'hormonothérapie, qui avait été recommandée pendant bien des années. Les femmes s'étaient laissées emportées par l'enthousiasme qu'elle suscitait. On y a consacré des sommes considérables alors que les résultats se sont révélés très médiocres, et n'étaient pas du tout ce à quoi on s'attendait. Il en est de même des anti-arythmisants, qu'on vient de mettre au rancart parce qu'ils ne donnent pas les résultats escomptés.

    Et s'il y avait d'autres types d'interventions qui seraient plus efficaces? Le mieux-être et la prévention, par exemple? Quelles mesures pourrait-on prendre à ce chapitre? Et si les vitamines et les nutriments s'avéraient plus efficients que les médicaments pour traiter bien des maladies? Je songe notamment au traitement par chélation intraveineuse des personnes qui ont des problèmes cardiaques, qui pourrait nous faire économiser bien des millions de dollars. Je songe aussi au traitement chiropratique des douleurs lombaires. M. Romanow y a fait allusion, mais n'a pas pu en faire un examen approfondi.

    A propos de la réforme des soins primaires, quel pourrait être le rôle, par exemple, des chiropraticiens dans le traitement des troubles neuromusculosquelettiques? Pour le seul traitement des douleurs lombaires, les économistes spécialisés dans les soins de santé estiment que nous pourrions économiser jusqu'à 2 milliards de dollars par an, si nous options simplement pour un nouveau modèle de prestation des soins.

    Il y a une pénurie de professionnels de la santé. Mais n'y aurait-il pas d'autres professionnels, qui ont été jusqu'à maintenant écartés du système, qui pourraient assurer des soins très efficaces si on leur en donnait la possibilité? Comment faire entrer cette possibilité dans le débat sur les soins de santé primaires?

    Voilà ce à quoi je vous invite à réfléchir. Je voudrais réorienter un petit peu la discussion. Je me demande si les témoins auraient quelque chose à apporter au dialogue sur ces questions.

+-

    M. Michael McBane: Je pense que vous avez posé d'excellentes questions. On a également demandé pourquoi la prévention n'avait pas reçu plus d'attention. Je dirais que c'est notamment parce que, dans notre société, les valeurs économiques l'emportent sur d'autres objectifs sociaux. Un incitatif économique pervers stimule les secteurs alimentaire, pharmaceutique et chimique de sorte que la gestion de la maladie devient une activité très lucrative. Faire la promotion de la santé ne rapporte pas.

    Quiconque a pour but de gagner de l'argent ne s'emploiera pas à empêcher les gens de devenir malades. Voilà ce qui m'inquiète. Par exemple, la ministre de la Santé vient d'annoncer que d'ici un mois environ on tiendra un sommet sur le mieux-être. Je parie qu'elle y invitera des représentants des secteurs alimentaire et pharmaceutique qui s'emploient à vendre des produits bourrés d'additifs, etc., qui rendent nos enfants malades.

    Nous devons revoir nos priorités. Que voulons-nous? Que les gens soient en bonne santé ou vendre des produits chimiques? Le pouvoir des grandes sociétés qui fabriquent ces produits empêchent l'offre de traitements plus efficaces, plus sûrs, une médecine beaucoup plus holistique.

»  +-(1715)  

+-

    M. Claude Généreux: Monsieur McBane, il n'y a pas de problème. Au contraire. Par exemple, nous serions enchantés que les sages-femmes soient intégrées au système général de soins de santé. Il n'y a pas de difficulté à ce sujet mais cela ne veut pas dire que tout est permis.

    Vous avez parlé d'efficacité. Nous avons eu la possibilité de comparer la chirurgie de la cataracte que l'on pratique à Edmonton et à Calgary, en Alberta. Quand les interventions étaient faites dans le secteur public, l'efficacité et l'efficience étaient bien supérieures, sur le plan du temps d'attente. Et le résultat obtenu était bien supérieur à Edmonton, dans le système public qu'à Calgary, dans le système privé. Nous avons donc un repère qui nous permet de voir ce qui fonctionne le mieux. En l'occurrence, c'était nettement le système public.

    Encore une fois, nous ne voyons pas d'inconvénients à tenir compte de ces facteurs-là et le sommet, la coalition, ne voit pas d'inconvénients à avoir recours à des chiropracteurs dans certains cas précis, ou à des sages-femmes, ou à d'autres praticiens. Nous avons manqué de temps pour en discuter mais nous pouvons très bien poursuivre la discussion car il reste bien des choses à dire.

+-

    Mme Barb Byers: Elaine voudrait faire une remarque, et j'ajouterai quelque chose également.

+-

    Mme Elaine Johnston: J'ai dit que les représentants des Premières nations se sont occupés, bien avant Romanow et Kirby, de la réforme des soins de santé.

    Ils nous ont demandé de les aider à améliorer la situation car ils se heurtaient à des obstacles, et je pense que cet accord ne change rien. Nous l'avons toujours su, c'est l'argent qui est la pierre d'achoppement. Toute discussion sur la réforme des soins de santé était paralysée quand on demandait quelle somme était nécessaire à la Direction des soins de santé des Premières nations et des Inuits pour maintenir les programmes existants. Les provinces tiennent la même discussion.

    Voici ce que nous nous demandons: comment revenir à de véritables discussions sur les réformes en matière de santé? Pour les Premières nations, cela a toujours été l'essentiel. Nous n'avons pas assez de professionnels de la santé. C'est un fait. Pendant des années, nous avons dû compter sur des représentants de santé communautaire parce que nous ne pouvions pas obtenir d'infirmières. Nous n'avons pas assez de médecins. Comment remédier à cela? Vous posez une question que nous nous posons depuis des années. Le problème est que la crise est perpétuelle. Comment revenir à un débat sur une véritable réforme des soins de santé? Je pense que vous posez une question très importante. Nous nous la posons nous-mêmes.

+-

    Mme Barb Byers: Je voudrais donner ici l'exemple d'un véritable programme de prévention qui a donné des résultats. Malheureusement, ce programme a été abandonné parce que le souci de réaliser des bénéfices l'a emporté. Nous n'en avons pas parlé ici. Il s'agit du régime d'assurance dentaire pour les enfants. M. Skelton s'en souvient sûrement. Il y avait en Saskatchewan un régime d'assurance dentaire et les soins étaient dispensés par le secteur privé. Des infirmières dentaires se rendaient dans les écoles et les parents pouvaient faire examiner leurs enfants par ces infirmières sur place. Le régime couvrait les enfants de l'âge de 5 ans à l'âge de 16 ans. Entre 16 ans et 18 ans, les enfants pouvaient consulter le dentiste de leur choix et le régime payait les honoraires. Ce régime a été maintenu du début des années 70 au début des années 80.

    Les dentistes du secteur privé ont fait des pressions auprès du gouvernement Devine pour qu'on supprime ce régime d'assurance dentaire à l'intention des enfants car non seulement ils ne pouvaient pas compter sur les enfants comme patients entre 5 ans et 16 ans mais, à partir de l'âge de 16 ans, quand ils allaient chez le dentiste, les enfants ayant de bonnes dents, sans caries ou autres besoins, ce n'étaient pas très payant pour les dentistes. C'est la réalité.

    Il y a eu une levée de boucliers quand le gouvernement Devine a abandonné le programme. Comme l'a dit Michael, les valeurs économiques ont supplanté la prévention nécessaire. Cela a nui énormément aux familles rurales, parce que dès lors, les parents devaient se soucier d'aller chercher leurs enfants à l'école pour les emmener chez le dentiste, alors que ce n'était pas le cas auparavant. C'était très difficile.

    C'était un véritable programme de prévention. J'avais oublié cela jusqu'à ce que Carolyn soulève toute la question de la santé dentaire un peu plus tôt. Il faut dire que nous pouvons compter sur de très bons programmes de prévention quand nous le voulons, et ils donnent des résultats. Mais il ne faut pas laisser les intérêts économiques prendre le dessus.

»  -(1720)  

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Monsieur Robinson.

+-

    M. Svend Robinson: Je suis membre du comité depuis peu et je voudrais qu'on me donne une précision quant aux règles qui régissent les avis de motion. Je voudrais donner avis d'une motion que j'ai l'intention de présenter dans les meilleurs délais, selon laquelle le comité exhorte le gouvernement à appuyer la création d'un fonds pour les soins de santé dans le nord comme l'ont réclamé les trois premiers ministres des territoires, fonds qui sera alimenté à la demande des premiers ministres. Je pense que c'est M. Merrifield qui tout à l'heure a demandé quelle somme cela représenterait. Il s'agirait de 60 à 70 millions de dollars. C'est infime par rapport au total. Cela représente 0,5 p. 100 des sommes que le gouvernement fédéral a promis récemment à l'occasion de l'accord sur la santé . Je voudrais donner avis de cette motion dès maintenant. Je ne sais pas quand je pourrai la proposer. Y a-t-il un délai de 48 heures imposé?

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): Oui. Il faut un préavis de 48 heures.

+-

    M. Svend Robinson: Très bien. J'ai donné avis de la motion. Je vais en remettre le texte au greffier.

+-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): D'accord.

    Y a-t-il des questions du côté libéral? Une brève question?

+-

    Mme Carolyn Bennett: Oui. Mais ce sera une vaste et longue question.

    À supposer que sur le plan fédéral-provincial, il y ait des normes nationales et un conseil de la santé où l'on pourrait travailler en collaboration et où le gouvernement fédéral pourrait exposer les problèmes que représente la santé des Autochtones, des militaires, des services pénitenciers et des anciens combattants. Comment envisagez-vous une telle mise en oeuvre? La Loi canadienne sur la santé a été difficile à appliquer parce que personne ne veut priver de fonds une province pauvre qui ne serait pas à la hauteur. Est-ce que l'on va à l'avenir faire de la récupération auprès des provinces?

+-

    Mme Barb Byers: Il le faut. Quant à la loi, je vous répondrai en vous demandant si vous voulez vraiment appliquer cette loi.

+-

    Mme Carolyn Bennett: Évidemment, il faut la carotte et le bâton. Je pense qu'il nous faut garder le bâton, pour faire peur, dans l'espoir de ne jamais l'utiliser. Si j'ai compris ce que vous avez dit, le fait de ne pas l'utiliser trop souvent porte à croire qu'il ne sera jamais utilisé.

    Sera-t-il possible que le système offre des incitatifs, les provinces innovatrices recevant des sommes supplémentaires, parce qu'elles offrent des régimes dentaires, une façon de mesurer les résultats, ou d'écourter les listes d'attente ? À une conférence annuelle—et c'est l'un de mes grands rêves—nous pourrions signaler les pratiques exemplaires en présence des premiers ministres, et l'on pourrait féliciter ceux qui ont fait preuve d'excellence.

+-

    Mme Judy Darcy: Assurément. Si le gouvernement fédéral croyait qu'il faudrait avoir à l'échelle nationale un programme public de soins à domicile, il aurait pu dire au Manitoba, qui offre un tel programme, public, sans but lucratif depuis nombre d'années, qu'il souhaite lui donner un appui particulier destiné à encourager de telles initiatives. On pourrait encourager les projets pilotes et les modèles, absolument. Mais le gouvernement fédéral aurait pu également imposé des sanctions aux provinces qui ne respectaient pas la loi.

    Il est scandaleux qu'au Canada on ait laissé une province, et puis une autre, multiplier les hôpitaux privés, les cliniques privées, supprimer les services couverts, alors que le gouvernement fédéral n'a pas bronché. L'attitude était la suivante: «Ce que l'on ne voit pas ne fait pas mal». Le gouvernement fédéral n' a rien fait. C'est un peu comme jouer du violon pendant que Rome brûle.

    Le gouvernement fédéral est compétent en matière fiscale...

-

    Le vice-président (M. Stan Dromisky): La séance est terminée.

    Avant de prendre congé de nos témoins, je voudrais signaler aux membres du comité que nous nous réunirons mercredi de 15 h 30 à 17 heures pour étudier le projet de loi C-260. Ensuite, entre 17 heures et 17 h 30, j'espère que nous réussirons à déterminer, sans trop de peine, notre programme de travail pour les deux ou trois prochaines années. Cela vous va-t-il? Soyez présents.

    Je remercie nos témoins. Croyez-le ou non, vous avez certainement influencer les gens ici présents. Les membres du comité sont extrêmement engagés et je pense que tous ont été très sensibles aux problèmes que vous avez exposés. Merci d'être venus.

    La séance est levée.