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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 4 avril 1995

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA SOMATOTROPINE BOVINE

LES LANGUES OFFICIELLES

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'AGRICULTURE

    M. Chrétien (Frontenac) 11448
    M. Chrétien (Frontenac) 11453
    M. Hill (Prince George-Peace River) 11454
    M. Chrétien (Frontenac) 11463
    M. Chrétien (Frontenac) 11464
    M. Chrétien (Frontenac) 11468
    M. Leroux (Shefford) 11469
    M. Chrétien (Frontenac) 11472
    M. Chrétien (Frontenac) 11474
    M. Chrétien (Frontenac) 11477

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

L'ANNIVERSAIRE DU JOUR DE LA VICTOIRE EN EUROPE

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LA CROSSE

LES SOINS DE SANTÉ

L'ALLEMAGNE

LE CAPORAL NEIL BERNARD MCKINNON

LA JOURNÉE DES DROITS DES RÉFUGIÉS

LES PÊCHES

    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 11479

LE CENTRE CULTUREL DE HARBOURFRONT

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER

LES LIBÉRAUX DE L'ONTARIO

LE DROIT À L'ÉGALITÉ

LE PROJET HYDRO-ÉLECTRIQUE DE SAINTE-MARGUERITE

LES SOINS DE SANTÉ

LA SEMAINE NATIONALE DES SOINS PRÉHOSPITALIERS D'URGENCE

LE SERVICE D'ASSISTANCE CANADIEN AUX ORGANISMES

L'AGRICULTURE

QUESTIONS ORALES

LE FINANCEMENT DES PROGRAMMES SOCIAUX

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11482
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11482
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11482

LES PÊCHES

    M. Bernier (Gaspé) 11483
    M. Bernier (Gaspé) 11483

LES SOINS DE SANTÉ

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 11484
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11484
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 11484
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11484

LES SOINS DE SANTÉ

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

    Mme Gagnon (Québec) 11485
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11485
    Mme Gagnon (Québec) 11485
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11485

LES SOINS DE SANTÉ

    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 11485
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 11485

L'ACHAT D'HÉLICOPTÈRES EH-101

LA FONCTION PUBLIQUE

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 11486

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11487
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 11487
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11487

LE BURUNDI

LES CRIMINELS DE GUERRE

LE COMMERCE INTERNATIONAL

L'HÉPATITE C

EXPO 2005

LE BUDGET

    M. Martin (LaSalle-Émard) 11489

L'AGRICULTURE

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'AGRICULTURE

    Reprise de l'étude de la motion 11490
    M. Chrétien (Frontenac) 11491
    M. Chrétien (Frontenac) 11495

LA LOI SUR LES ARMES À FEU

PROJET DE LOI C-68-AVIS DE MOTION CONCERNANT L'ATTRIBUTION DE TEMPS

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'AGRICULTURE

    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 11497
    M. Chrétien (Frontenac) 11502
    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 11506

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LOI SUR LE JOUR D'EXPRESSION NATIONALE DE SOLIDARITÉ À L'ÉGARD DES AUTOCHTONES DU CANADA

    Projet de loi C-244. Motion de deuxième lecture 11509

SUSPENSION DE LA SÉANCE

    Suspension de la séance à 18 h 24 11517

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 18 h 28 11517

MOTION D'AJOURNEMENT

LE COMMERCE INTERNATIONAL

LA SANTÉ

LE PROGRAMME STRATÉGIE JEUNESSE


11447


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 4 avril 1995


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à deux pétitions.

* * *

[Traduction]

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions. La première a trait aux droits de la personne et est signée par 50 personnes de ma circonscription, Cambridge.

Les pétitionnaires prient humblement le Parlement de ne pas modifier le Code des droits de la personne, la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations entre personnes de même sexe ou l'homosexualité.

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président,la deuxième pétition, concernant la somatotrophine bovine,est signée par environ 25 électeurs de ma circonscription,Cambridge.

Les pétitionnaires craignent de boire du lait produit par des vaches traitées à la somatotrophine bovine (BST), parce que ce produit est reconnu comme un danger pour la santé tant des humains que des bovins. Ils prient le Parlement d'interdire l'utilisation de BST et de ne pas accepter de produits laitiers venant de pays où les éleveurs en font usage.

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter deux pétitions qui m'ont été envoyées par des électeurs de ma circonscription, Comox-Alberni.

La première pétition porte 97 signatures. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter une loi prévoyant la tenue d'un référendum exécutoire sur la pertinence, pour le gouvernement et la population du Canada, d'avoir deux langues officielles, l'anglais et le français.

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition est signée par 209 personnes qui demandent au Parlement d'étendre immédiatement aux enfants à naître la protection actuellement conférée aux êtres humains par le Code criminel.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous répondons aujourd'hui à la question no 143.

[Texte]

Question no 143-M. White (North Vancouver):

Relativement au programme d'assurance-chômage, ces cinq dernières années, a) combien de cas de fraude ont-ils été signalés chaque année, b) combien de fraudeurs ont-ils été reconnus coupables chaque année, et c) quelle proportion du nombre total des réclamations les fraudes représentent-elles?

11448

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, la réponse est la suivante:





[Traduction]

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


11448

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'AGRICULTURE

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ) propose:

Que la Chambre dénonce le gouvernement pour avoir réduit de 19 p. 100 le budget général du ministère de l'Agriculture, de 30 p. 100 le subside laitier, et pour avoir transformé les subventions au transport des céréales en subventions directes aux agriculteurs de l'Ouest, permettant à ces derniers de se diversifier et de concurrencer de façon déloyale les agriculteurs de l'Est du Canada.
-Monsieur le Président, il me fait grand plaisir ce matin, à titre de porte-parole en matière d'agriculture et d'agroalimentaire, de débuter cette journée de l'opposition officielle sur les questions agricoles, car pour nous du Bloc québécois il est primordial d'accorder à ces questions tout l'intérêt qu'elles méritent.

(1010)

Par les coupures qu'il met en branle, le fédéral a récemment donné l'impression que le secteur agricole est un domaine de second ordre.

Je voudrais remercier mes collègues qui ont accepté d'intervenir aujourd'hui tout au long de cette journée de l'opposition officielle sur l'agriculture. On entendra tout au long de cette journée les députés de Joliette, de Champlain, de Mégantic-Compton-Stanstead, de Shefford, de Matapédia-Matane, de Kamouraska-Rivière-de-Loup, de Lotbinière et de Québec-Est.

Vous avez remarqué, monsieur le Président, qu'à l'exception du député de Québec-Est, ce sont tous des élus représentant des circonscriptions où on rencontre un fort pourcentage de producteurs agricoles et également des productions très diversifiées, si bien que si vous vous donnez la peine de bien écouter chacun de ces discours, vous serez un fin connaisseur, à la fin de cette journée, sur l'agriculture canadienne, mais surtout sur l'agriculture québécoise.

Alors, avec la motion que nous amenons aujourd'hui, en cette Chambre, et que vous venez tout juste de lire, nous souhaitons dénoncer fortement les coupures que le gouvernement s'apprête à effectuer sur le dos de nos agriculteurs. En plus de sabrer dans le secteur agricole, le fédéral coupe à la hache, sans faire preuve d'aucun discernement.

Je me permets de relire, mot à mot, la motion que l'opposition officielle a présentée en cette Chambre: «Que la Chambre dénonce le gouvernement pour avoir réduit de 19 p. 100 le budget général du ministère de l'Agriculture, de 30 p. 100 le subside laitier. . .» Ici, on frappe en plein visage les producteurs du Québec qui sont très nombreux, plus de 12 000. «. . .et pour avoir transformé les subventions au transport des céréales en subventions directes aux agriculteurs de l'Ouest, permettant à ces derniers de se diversifier et de concurrencer de façon déloyale les agriculteurs de l'Est du Canada.» . . .et, bien entendu, les agriculteurs du Québec.

Ce que nous dénonçons, ce ne sont pas seulement les coupures, mais bien le manque de vision à long terme du gouvernement libéral pour ce secteur. Je vois ici, en face de moi, le ministre de l'Agriculture, que je salue et que j'invite à passer toute la journée en cette Chambre afin de voir ce que les élus québécois pensent de son dernier budget et de sa vision sur l'agriculture québécoise et canadienne. Tout ce qu'il réussit à faire, c'est de la distorsion au marché, avec des mesures compensatoires malhabiles.

On dirait bien qu'un vent d'inquiétude souffle dans le camp fédéraliste. On tente, en effet, de cibler la clientèle agricole en agitant l'épouvantail des catastrophes qui risquent de nous tomber sur la tête lorsque le Québec sera souverain. Nous profiterons donc de l'occasion pour remettre les pendules à l'heure, comme on le dit si bien chez nous, au Québec.

De tous les spectres agités par les fédéralistes, celui des quotas laitiers est de loin celui que l'on sort le plus souvent des boules à mites pour effrayer la classe agricole. Tout dernièrement, dans le journal La Terre de chez nous et dans le quotidien La Presse, un docteur en agronomie dressait tout un tableau des malheurs qui guettent les agriculteurs dans un Québec souverain.

(1015)

Toujours dans La Presse, un éditorialiste expliquait pour sa part comment il était dangereux de devenir souverain lorsque notre système de gestion de l'offre allait voler en éclat dans un Québec, au lendemain d'un référendum positif.

Le Conseil pour l'unité canadienne, lui, fait carrément des quotas de lait la pierre angulaire de sa politique de peur pour le secteur agricole. Advenant la séparation du Québec, disait-il, le Québec perdrait immédiatement, pas demain, pas après demain,


11449

immédiatement-ça frappe plus, ça fait plus peur-, ses quotas de vente de lait au Canada.

Voyons donc, est-ce vraiment cela la stratégie du camp du non? Ce qu'il faut comprendre de ce discours fédéraliste, c'est qu'il dénote un manque flagrant de connaissances de l'industrie laitière canadienne et québécoise.

Dire que la souveraineté serait une catastrophe pour l'industrie laitière québécoise démontre surtout que les fédéralistes n'ont aucune autre prise pour inquiéter et faire peur à nos agriculteurs. Le mythe le plus fréquemment entendu, c'est que le Québec perdrait la moitié, ou même plus-ça frappe encore plus-, de son quota de lait de transformation, ce qui entraînerait la fermeture de nombreuses fermes laitières au Québec. Ce raisonnement alarmiste est basé sur la proportion du marché canadien approvisionné par le Québec. Le Québec, on le sait, détient 48 p. 100 des quotas de lait de transformation, alors que nous représentons, il faut bien le dire aussi, 25 p. 100 de la population canadienne. Or, j'ai dans les gradins ici, en face de moi, plusieurs agriculteurs du Québec qui se sont donnés la peine de venir nous entendre.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Vu que c'est une journée de l'opposition et que le porte-parole en matière d'agriculture commence le débat, je demanderais simplement à la Chambre de maintenir quand même l'esprit de débat auquel nous adhérons en tout temps. Même s'il n'y a pas de règles spécifiques concernant la mention de certaines personnes dans une tribune ou autre, je demanderais la coopération de tous les députés des deux côtés de la Chambre sur un sujet très important qu'est l'agriculture et qui touche tous nos Canadiens et Canadiennes.

M. Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, j'aquiesce volontiers à vos remarques, et je soulignerai que je me joins toujours à la Présidence lorsqu'on salue, juste derrière moi, des hauts dignitaires.

Cette affirmation que je viens de faire, juste avant votre intervention, revient à dire que les ponts entre le Québec et le Canada seraient coupés, advenant un référendum positif. Les échanges commerciaux entre le Québec et le Canada dépassent-écoutez bien cela, mes amis d'en face-80 milliards de dollars par année. Cette intégration économique justifie à elle seule la nécessité de maintenir un espace économique Canada-Québec ou Québec-Canada. Prendre le cas des quotas de lait et l'isoler pour démonter que le Québec serait perdant pour ses exportations, mais non l'inverse, relève de la plus pure fiction commerciale.

(1020)

Les producteurs laitiers québécois assument un rôle de leadership dans le système de gestion de l'offre actuel. Avec ses 48 p. 100 de quota de lait de transformation, le Québec est le plus important fournisseur de produits laitiers pour l'ensemble du Canada. À titre d'exemple, savez-vous, mes amis, que 40 p. 100 des fromages canadiens consommés par le reste du Canada proviennent du Québec? C'est avec cette réalité en tête que nous devons envisager l'avenir.

Bientôt, nous aurons à prendre une décision en ce qui concerne l'avenir du Québec. Je crois fermement que peu importe les choix qui seront faits, il est dans l'intérêt tant du reste du Canada que du Québec de coopérer, afin de préserver le dynamisme de notre industrie agricole. Une preuve bien concrète et bien actuelle, prouvant hors de tout doute que cette coopération dépasse largement le cadre politique, nous a été donnée le mercredi 29 mars dernier. Cela ne fait pas des siècles, cela ne fait même pas une semaine. Les producteurs laitiers du Québec et du Canada ont signé une entente de principe qui intègre la commercialisation du lait de transformation et de consommation dans six provinces de l'Est. Ici, je voudrais vous nommer les provinces: le Manitoba, l'Ontario, le Québec, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard. Je dois vous rappeler que Terre-Neuve ne fait pas partie du système de gestion de l'offre.

On vient de signer une entente, qui a donc comme principe de créer un marché commun entre ces six provinces et cela signifie, pour ces six provinces, que les producteurs recevront le même prix pour leur lait et généreront un quota commun. Voyez-vous, une autre injustice s'était glissée depuis nombre d'années. Un producteur agricole qui avait un quota de lait de transformation vendait son lait jusqu'à 10 p. 100 moins cher que le lait de consommation. Si on avait écrit sur le front d'une vache: «Demain matin, tu donneras du lait de consommation et tu rapporteras à ton propriétaire 10 p. 100 de plus», et que sur le front d'une autre, on avait écrit: «Toi, demain matin, tu vas donner du lait de transformation», cette dernière aurait été moins rentable.

Alors, cette iniquité, dans moins de 18 mois, sera chose du passé. On a connu cette distorsion, et ce n'était pas en Amérique centrale, ce n'était pas en Afrique centrale, mais ici, au Québec. On avait deux prix différents pour le même lait, selon qu'il s'agit de lait de transformation ou de consommation. Regrouper ces six provinces représente 85 p. 100 du quota canadien de lait de transformation. Cette intégration leur permettra de mettre en place un système unique de commercialisation du lait. À moyen terme, il est même possible d'entrevoir l'élimination des barrières interprovinciales pour l'approvisionnement en lait.

La leçon qu'il nous faut tirer de cet accord est que même en pleine année référendaire, les producteurs laitiers du Canada démontrent l'importance de procéder à une intégration économique avec le Québec. Pourquoi prendraient-ils le risque de procéder immédiatement à ce genre d'entente? Sûrement parce qu'ils savent qu'au lendemain d'un oui au référendum, le Canada maintiendrait une union économique avec le Québec pour protéger ses propres intérêts.

(1025)

La preuve est faite, la réalité économique l'emporte sur l'émotivité.

Une autre question d'importance que soulèvent les fédéralistes, c'est le sort qui sera réservé au tarif douanier avec les États-Unis. Lors de la renégociation de l'ALENA, les États-Unis essaieront probablement d'obtenir plus que ce qu'ils ont déjà aujourd'hui, ce qui n'est pas différent de ce qui se passe actuellement. Et tout comme le fait le Canada actuellement, le Québec rétorquera que les tarifs douaniers sont protégés par le GATT, ce que le ministre de l'Agriculture nous répète chaque fois qu'on intervient en cette Chambre pour l'interroger sur les négociations du sucre, pour l'interroger sur les exportations de blé, pour l'interroger sur les différends tarifaires que les États-Unis ont soulevés au lendemain du Jour de l'An. Alors, le même ministre nous dit toujours: «Les accords du GATT ont préséance sur l'ALENA.» Alors si c'est vrai pour lui, cela devrait être vrai pour le Québec.


11450

La véritable menace pour l'industrie laitière et pour l'agriculture québécoise ne provient aucunement de l'éventuelle souveraineté du Québec; elle provient du gouvernement fédéral d'en face, parce qu'il néglige de plus en plus l'agriculture québécoise et, notamment, l'industrie laitière. Elle provient du manque de planification du gouvernement d'en face et du manque d'équité surtout des mesures budgétaires prônées par le gouvernement libéral.

Dans le secteur laitier, le 28 février dernier fut un jour extrêmement triste pour les producteurs laitiers du Québéc et de l'Ontario. Le ministre des Finances annonçait, lors du dépôt de son Budget, une réduction de 30 p. 100 sur deux ans à la subvention fédérale pour le lait de transformation. Puisque les producteurs laitiers du Québec produisent à eux seuls 48 p. 100 du quota de lait de transformation, il est clair que ce sont eux qui sont les plus injustement touchés.

Monsieur le Président, je ne voudrais pas me servir d'un accessoire, mais ici, en Ontario, il y a une revue, un journal agricole qui a pour nom Farm and Country. C'est le pendant, l'équivalent de La Terre de chez nous au Québec. Tous les agriculteurs feuillettent du moins, si on ne lit pas de la première à la dernière page, ce journal de la première à la dernière page. Sur la première page, cette semaine, on voit une caricature nous laissant voir une très belle vache Holstein avec un agriculteur assis sur un petit banc, qui ressemble étrangement à notre ministre des Finances. Il est en train de traire sa vache Holstein. Le seau est vide. Le pis est très cicatrisé. On presse le trayon et il sort seulement qu'une goutte de lait. C'est ça la vision de ce gouvernement envers les producteurs laitiers.

Également, la semaine dernière, le président de l'UPA au Québec, M. Laurent Pellerin, que je salue ici en cette Chambre, un grand défenseur des agriculteurs québécois, évaluait la coupure de 30 p. 100 au subside versé pour le lait de transformation à l'équivalent de 4 485 $ dans deux ans. Je voudrais prendre quelques secondes pour vous expliquer son calcul. J'aimerais aussi que le ministre de l'Agriculture soit très attentif parce que je lui rappelle ceci.

(1030)

À la suite de ces coupures aux producteurs laitiers, il n'a aucune compensation financière, contrairement à ce qu'il a fait pour les producteurs de blé et de céréales dans l'Ouest où on donnera 1,6 milliard non imposable, ce qui est l'équivalent de 2,2 milliards. Au Québec et en Ontario, rien, zéro.

Voyez-vous, un producteur laitier qui produit 2 500 hectolitres de lait par année et qui achète, pour nourrir ses vaches, son troupeau, 71 tonnes de moulée par année, parce qu'on a également coupé le subside de l'aide au transport des céréales fourragères, vous savez cela, dans le bloc de l'Est. Les Maritimes seront dûrement touchées par cela. La subvention sur 2 500 hectolitres est coupée de 5,43 $ par hectolitre, multiplié par 2 500, soit 5,43 $ moins 30 p. 100, ce qui donne 1,51 $.

Vous, les agriculteurs laitiers, à partir de maintenant, pour chaque hectolitre que vous allez produire, vous serez coupés de 15 p. 100 cette année et 15 p. 100 l'an prochain, ce qui fait 30 p. 100. L'an prochain, sur chaque hectolitre vous serez coupés de 1,51 $ l'hectolitre. Si vous produisez 2 500 hectolitres par année vous serez coupés de 3 775 $.

À cela il faut ajouter la coupure appliquée au transport des céréales fourragères. On évalue à 10 $ la tonne l'augmentation que vous devrez assumer. Vous devez faire votre part, vous aussi, pour les erreurs passées de ces gouvernements qui se sont succédés ici et qui ont accumulé des déficits monstrueux. Si vous achetez 71 tonnes à 10 $ la tonne, cela fait 710 $ que vous devez ajouter au montant de 3 775 $. Vous allez contribuer pour un montant de 4 485 $ pour réduire ce déficit.

Ce qui va se produire, vous le savez très bien, au mois d'août, les producteurs laitiers vont se présenter devant la Commission canadienne du lait pour réclamer une augmentation du prix de leur lait, et j'espère qu'on va la leur accorder. Les producteurs laitiers ne sont pas des imbéciles. Ils n'ont pas à subir une perte aussi importante de revenu. La Commission canadienne du lait va leur accorder une augmentation, je l'espère, pour respecter l'augmentation du coût de la vie, les pertes encourues.

Résultat, les consommateurs, vous paierez le lait en poudre, le beurre, le fromage, le yogourt, la crème glacée beaucoup plus cher. On appelle cela des taxes déguisées. Justement, dans la revue dont je vous parlais tout à l'heure, Farm and Country de l'Ontario, on évalue à 56 $ par vache la contribution que chaque producteur laitier doit faire pour éponger ce déficit.

Mais c'est étonnant que pas un député libéral ne se soit levé dans cette Chambre pour dénoncer les 328 000 voyages en avion. On a vu cela dans le journal la semaine dernière, ces voyages occasionnent tout près d'un milliard de dollars de dépenses, en frais de voyage. J'ai l'article de journal ici sous la main: 328 000 voyages par avion entre les mois d'avril 1993 et mars 1994, ce qui a entraîné pour le contribuable une dépense de 275 millions pour faire voyager nos militaires et nos hauts fonctionnaires, notamment les fonctionnaires du ministère des Transports.

Je termine là-dessus et j'invite les producteurs laitiers, de l'Ontario et du Québec notamment, à bien regarder le supplice que ce gouvernement leur imposera d'ici les 24 prochains mois.

(1035)

[Traduction]

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de pouvoir participer au débat sur le budget fédéral de 1995, et en particulier sur l'impact de ce budget sur l'agriculture et l'agroalimentaire.

Il va sans dire que je ne suis absolument pas d'accord sur les conclusions tirées jusqu'ici dans ce débat par le député de Frontenac. À mon avis, son analyse est incomplète, tout à fait négative dans son approche et, malgré tout le respect que je dois au député, elle est fausse.

En défendant ses objectifs de toute évidence séparatistes, il veut semer la discorde en faisant preuve d'étroitesse d'esprit et de parti pris. Il cherche à dresser région contre région, province contre province et agriculteur contre agriculteur. Il est vraiment triste de voir une approche aussi destructrice mais, venant du Bloc québécois, ce n'est pas étonnant. L'objectif des bloquistes n'est pas de travailler à la construction de notre pays mais, au contraire, à sa démolition. Je ne suis donc pas étonné de la motion présentée aujourd'hui par le Bloc.

Ce qui est peut-être surprenant, c'est la similarité d'approche entre le Bloc québécois et le NPD. Il y a deux semaines, le NPD et le Bloc québécois ont formé à la Chambre une alliance assez


11451

bizarre afin de retarder l'adoption d'une importante mesure législative proposée par le gouvernement afin de restaurer les services de chemin de fer. Avant de changer d'idée et de revenir sur sa position, le NPD a prêté main-forte au Bloc québécois, l'aidant à faire inutilement du tort à toute l'économie canadienne, en particulier au secteur agricole.

Il aurait suffi d'un peu plus de 48 heures pour mettre fin à la grève du rail et restaurer les services. Cependant, le Bloc nous en a empêchés et le NPD l'a aidé à faire du tort au Canada. La grève du rail a duré plus d'une semaine, un retard qui a coûté très cher.

Rien que dans l'industrie céréalière, cette semaine perdue a représenté, au titre des ventes de céréales, une perte de recettes de l'ordre de 100 millions de dollars, sans compter que le retard causé par le Bloc québécois et le NPD a nui à la réputation mondiale du Canada en tant que fournisseur agricole et agroalimentaire fiable. Il est vraiment impossible de comprendre pourquoi le NPD accorderait une certaine crédibilité au Bloc en l'aidant à retarder l'adoption d'une mesure législative destinée à mettre fin à la grève du rail.

La grève du rail n'est pas le seul exemple de la similarité d'approche entre le NPD et le BQ. Leurs approches sont également similaires en ce qui concerne l'analyse du budget fédéral qui est l'objet de la motion d'aujourd'hui. Ces deux partis, qui n'ont ni la moindre vision nationale ni le moindre engagement sérieux envers le Canada dans son ensemble, font de la basse politique pour diviser les régions. Chacun à sa manière veut faire valoir ses idées et prétend à tort que sa région est lésée et que l'autre bénéficie d'un avantage injustifié.

Les députés bloquistes crient à l'injustice envers le Québec et s'en prennent à l'ouest du Canada. Quant aux députés néo-démocrates, ils prétendent que l'Ouest est victime d'injustice et ils s'en prennent au Québec. Les deux partis sont complètement dans l'erreur.

En réalité, le budget fédéral de 1994 a été bien accueilli partout au Canada et cela pour trois raisons. D'abord, parce qu'il déclenche une attaque véritable et concertée contre le problème horrible de la dette et du déficit du gouvernement. Le budget est réaliste. Il n'a rien de factice. Il met réellement et définitivement le gouvernement sur la voie qui lui permettra d'atteindre ses objectifs de réduction du déficit, comme nous l'avons promis en 1993, dans le programme énoncé dans notre livre rouge. Grâce à ce budget, nous remplissons les engagements pris pendant la dernière campagne électorale. Nous allons faire passer le déficit annuel sous la barre des 3 p. 100 du produit intérieur brut en trois exercices.

(1040)

Quant au problème de la dette, nous en avons hérité à notre arrivée au pouvoir en novembre 1993. Le Canada avait alors un déficit annuel supérieur à 40 milliards de dollars, soit environ 6 p. 100 de son produit intérieur brut. Il faut noter que, dans l'ensemble de l'économie canadienne, le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire compte pour environ 8 p. 100 du PIB. Le déficit, qui correspondait à environ 6 p. 100 du PIB, accaparait les trois quarts de la valeur économique de tout le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire.

À notre arrivée, le total de la dette accumulée du fédéral dépassait les 500 milliards de dollars. Les frais d'intérêt approchaient les 45 ou même 50 milliards de dollars par an. Autrement dit, à eux seuls, les intérêts coûtaient 850 millions de dollars par semaine ou 120 millions de dollars par jour. D'ailleurs, en additionnant les revenus nets de tous les agriculteurs canadiens pendant les dix prochaines années, nous aurions juste assez d'argent pour acquitter les intérêts sur la dette nationale d'une année. Cela donne un idée de l'ampleur du problème. Ce dernier est énorme et exige une solution urgente et c'est précisément ce que fait le dernier budget en proposant une solution rapide et décisive.

Nous avons agi. Nous avons atteint et dépassé les objectifs de réduction du déficit que nous nous sommes fixés pour 1993-1994. Nous avons fait de même pour 1994-1995. Nous allons continuer à atteindre nos objectifs concernant le déficit en 1995-1996 et en 1996-1997. Nous ramènerons le déficit à moins de 3 p. 100 du produit intérieur brut en trois exercices financiers, comme nous avons promis de le faire. À compter de 1996, pour la première fois depuis longtemps, la dette du Canada-non seulement le déficit, mais notre dette totale exprimée en pourcentage de notre PIB-commencera à diminuer.

Il est vrai que le budget est un remède de cheval. Oui, il est dur. Cependant, les Canadiens l'appuient parce qu'ils savent qu'il est nécessaire pour régler l'horrible problème de la dette et du déficit dont le gouvernement a hérité.

La deuxième raison qui explique le soutien général obtenu par le budget, c'est qu'il est juste et équilibré. Le gouvernement s'est efforcé de traiter tous les secteurs et toutes les régions de la même manière. Le budget est également dur pour toutes les régions.

Le budget contient deux types de mesures de lutte contre le déficit. D'une part, nous avons réduit les dépenses générales du gouvernement et, d'autre part, nous avons accru ses recettes. Pour chaque dollar de nouvelles recettes, nous avons réduit les dépenses de près de sept dollars. Bien sûr, cela correspond à ce que les Canadiens nous ont dit de faire, c'est-à-dire mettre l'accent sur la réduction des dépenses.

Lorsque nous additionnons les répercussions de toutes les mesures budgétaires, soit les compressions de dépenses et les hausses de recettes, et que nous analysons comment elles se répartissent sur le territoire, nous constatons qu'elles correspondent étroitement, dans chaque région, au pourcentage de la population nationale et au pourcentage du total des dépenses fédérales. Les écarts d'une région à l'autre ne sont que de quelques points de pourcentage, aussi peut-on dire que le fardeau est réparti de façon juste et équilibrée.

Quant à l'agriculture, mon ministère ne s'est pas vu imposer de fardeau supplémentaire. En 1994-1995, notre budget était de 2,1 milliards de dollars. Ce budget sera réduit de 405 millions de dollars au cours des trois prochaines années, pour s'établir finalement à 1,7 milliards de dollars. Cela représente des compressions de 19 p. 100, ce qui correspond exactement à la moyenne des compressions pour l'ensemble du gouvernement. La plupart des portefeuilles économiques du gouvernement ont vu leur budget réduit de plus de 19 p. 100, et la plupart des portefeuilles sociaux ont vu le leur réduit de moins de 19 p. 100, tandis que le budget de l'État, globalement, a été réduit de 19 p. 100 en


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moyenne. La réduction du budget du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire correspond donc exactement à la moyenne. Nous avons fait notre part, ni plus ni moins, dans la lutte cruciale contre le déficit.

(1045)

Certains soutiennent qu'une fois ajoutées aux réductions directes du budget de l'Agriculture celles du budget des Transports ayant une incidence sur l'agriculture, la proportion de toutes les compressions budgétaires liées au secteur agricole dépasse la moyenne de 19 p. 100. Ce calcul est trompeur, car il ne tient pas compte du programme transitoire mis en place dans le budget pour contrebalancer les répercussions des changements en matière de transport. Quand on rajoute ces mesures transitoires à l'équation pour les trois prochaines années, comme il faut le faire pour établir une comparaison juste, on constate que l'incidence sur l'agriculture correspond effectivement à la moyenne de 19 p. 100. L'équilibre est globalement juste.

Au sein du ministère de l'Agriculture, nous nous sommes également efforcés de maintenir un équilibre interne. En ce qui a trait aux coûts relatifs au personnel, par exemple, nous allons réduire nos effectifs d'un peu plus de 2 000 postes. Cela représente une réduction de 18 p. 100, qui correspond à peu de chose près aux compressions budgétaires globales de 19 p. 100 imposées au ministère.

On peut en dire autant à propos des différents programmes de dépenses du ministère. Prenons par exemple nos programmes de soutien du revenu. Nous avons deux grands programmes de ce genre à Agriculture et Agroalimentaire Canada. Il s'agit, d'une part, du programme de subventions à l'industrie laitière, qui intéresse surtout l'est du Canada, et, d'autre part, de notre programme de sécurité du revenu agricole, qui intéresse surtout l'ouest du pays. Les deux sont réduits du même montant, soit 30 p. 100. Il y a donc équité et équilibre entre l'Est et l'Ouest, d'un secteur agricole à l'autre et dans l'industrie de l'agriculture en général, comparativement à d'autres secteurs de l'économie.

C'est la deuxième raison pour laquelle le budget a été approuvé par la vaste majorité des Canadiens; c'est à cause de son équité.

La troisième raison, c'est que nous avons lié la dure réalité de la diminution des subventions de l'État dans tous les domaines à un programme proactif de renouvellement, de restructuration et d'innovation pour faciliter la transition de l'ancienne économie à la nouvelle et mieux préparer un secteur comme l'agriculture et l'agroalimentaire à soutenir la concurrence internationale.

Tous les agriculteurs du pays, qu'ils viennent de l'Est ou de l'Ouest, sont d'accord sur un point: ils ne veulent pas vraiment de subventions. Ils veulent avoir accès à des conditions de marché équitables et à des prix raisonnables pour gagner leur vie.

C'est pourquoi nous mettons davantage l'accent sur le développement des marchés et le commerce. Dans le cadre de notre budget réduit, une proportion des fonds plus grande que jamais auparavant sera consacrée à la conquête, au maintien et à l'expansion de nouveaux marchés. De même, au chapitre de la recherche, qui constitue le moyen par lequel le Canada peut rester à l'avant-garde mondiale, nous avons trouvé un moyen créatif d'épargner nos précieux impôts tout en augmentant-et je dis bien en augmentant-les investissements canadiens dans la recherche et le développement agricoles.

Nous allons faire quelque 50 millions de dollars d'économies dans les frais généraux et l'infrastructure de recherche d'ici trois ans ou quelque. Parallèlement, nous allons injecter jusqu'à 70 millions de dollars dans la recherche par l'entremise de coentreprises avec nos partenaires du secteur privé. Nous allons le faire dans le cadre d'une nouvelle initiative appelée Projet de co-investissement pour la recherche en agriculture, lequel a d'ailleurs été fort bien accueilli jusqu'à maintenant par le secteur agricole, même s'il est très nouveau.

Dans le domaine de l'inspection, nous allons maintenir la réputation du Canada, qui est reconnu pour avoir le meilleur système d'inspection agricole du monde, et réaliser aussi des économies. Nous ferons cela en réduisant les coûts, en évitant certains d'entre eux, en en partageant d'autres de même qu'en adoptant une technologie novatrice et en supprimant les chevauchements et les doubles emplois inutiles entre les ministères et les différents paliers de gouvernement.

(1050)

Je suis heureux de dire que tous mes homologues provinciaux travaillent d'arrache-pied avec moi pour élaborer un système national d'inspection des aliments qui soit de premier ordre, le meilleur du monde et extrêmement rentable.

Nous avons aussi réorienté une partie de nos économies budgétaires vers une série de fonds d'adaptation et de développement rural qui aideront à effectuer certains changements sectoriels qui doivent être faits à la suite du budget et pour que soient mises à profit les perspectives économiques de demain.

Ainsi, il existe un fonds dont le but est de faciliter les changements devant être apportés dans le cadre du Programme d'aide au transport des céréales fourragères. Le secrétaire d'État responsable de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire tient actuellement des consultations afin de déterminer comment ce fonds peut être le mieux utilisé dans les régions du pays qui ne produisent pas de céréales fourragères et qui ont bénéficié jusqu'à maintenant du Programme d'aide au transport des céréales fourragères.

Au chapitre des mesures de protection agricole, notre budget de dépenses global prévoit une série de fonds d'innovationet d'adaptation qui seront établis selon les priorités et lespréférences exprimées par les différents secteurs agricoles et les provinces.

L'idée d'un fonds d'innovation ou d'adaptation est envisagée à un moment où, par exemple, d'anciennes mesures de protection comme le programme tripartite de stabilisation prennent fin progressivement et où de nouvelles mesures de protection sont élaborées, comme c'est le cas actuellement en Saskatchewan.

Parmi les autres mesures que nous avons prises dans cette optique et qui concernent le programme laitier, mis à part les réductions de subventions prévues parallèlement à la diminution des mesures de protection visant les autres secteurs, nous avons prévu dans le budget de tenir des consultations avec l'industrie laitière canadienne afin de trouver les meilleures façons d'utiliser, dans l'avenir, les sommes qui resteront au titre des subventions, pour améliorer la compétitivité de l'industrie. Je sais que les représentants de l'industrie laitière de notre pays, y compris


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ceux du Québec, se livrent actuellement à une profonde réflexion sur cette question.

En matière d'adaptation et d'innovation, un autre exemple concerne les programmes de subventions qui visent le transport des marchandises dans la région de l'Atlantique et des Maritimes et dont le budget prévoit l'élimination; des mesures de transition sont toutefois prévues relativement à ces programmes et elles relèvent bien entendu de mon collègue, le ministre des Transports.

Outre ces mesures de financement particulières, nous avons aussi prévu un fonds général de développement rural et d'adaptation de 60 millions de dollars par année pour l'ensemble du secteur agricole canadien. Ce fonds servira à améliorer l'accès à des capitaux destinés au développement, les ressources humaines des milieux ruraux canadiens, la sécurité dans les exploitations agricoles, les innovations ainsi que les infrastructures rurales et à compenser certaines des répercussions de la réforme des transports sur les régions.

Permettez-moi de parler brièvement de cet aspect de la motion d'opposition dont nous sommes saisis aujourd'hui et qui porte sur la réforme dans le domaine du transport du grain de l'Ouest. Là encore, après avoir versé des subventions pendant 98 ans, on met en oeuvre un programme pour faciliter la transition. Bien entendu, ces mesures de transition sont temporaires, comme toutes les mesures d'adaptation. Cependant, elles restent dans le cadre de ce que la Coalition québécoise sur le transport du grain de l'Ouest juge acceptable. Il est intéressant de noter que le député de Frontenac, qui est intervenu plus tôt, a oublié de mentionner ce fait qui montre une certaine cohérence dans tout le pays quand on tient compte de certains principes.

Les avantages de la réforme du transport dans l'ouest du pays viennent non pas du maintien de subventions sous une forme ou une autre, puisqu'on va mettre un terme à ces subventions, mais bien de l'établissement d'un nouveau régime de tarifs-marchandises supprimant toute discrimination à l'endroit des produits d'une plus grande valeur, des produits à valeur ajoutée, ainsi que de la diversification et de la croissance économique.

La principale différence entre notre approche et celle du Bloc québécois, comme nous avons pu le constater jusqu'à maintenant dans le cadre du débat d'aujourd'hui, c'est que les membres du Bloc ont tendance à se raccrocher au passé. Ils ont l'air d'avoir peur de l'avenir. À la lumière des nombreuses rencontres que j'ai eues au cours des 17 derniers mois, à titre de ministre de l'Agriculture, je ne pense pas que ce point de vue soit représentatif de celui des Québécois.

(1055)

Je viens de revenir d'une mission commerciale dans tous les pays d'Amérique du Sud avec des représentants du secteur canadien de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Nous nous sommes rendus au Chili, en Argentine et au Brésil. Ma délégation de gens du secteur privé comprenait un échantillon très large de représentants du secteur agricole du Québec. Ces Québécois étaient parmi les plus ouverts et les plus dynamiques pour chercher de nouveaux débouchés, élargir leurs horizons et se tourner vers l'avenir avec optimisme et vigueur. Ils ne semblaient pas avoir cette attitude négative que reflètent aujourd'hui les observations des députés du Bloc.

Par exemple, ils parlaient de débouchés pour l'industrie du porc et ne s'inquiétaient pas de la réforme du transport dans l'ouest du pays. Ils ne craignaient pas qu'une région obtienne certains avantages aux dépens d'une autre ou qu'une région fasse les frais de certaines initiatives entreprises dans une autre. De concert avec leurs collègues canadiens de tout le pays, ils cherchaient à élargir leurs horizons, à accroître leur part du marché, à créer des débouchés commerciaux, puis à faire en sorte que nous vendions plus et mieux sur les marchés du monde, plutôt que de craindre qu'un groupe obtienne quelque chose au détriment d'un autre.

Si nous adoptons cette attitude défaitiste, négative et égocentrique, nous finirons par être perdants. L'avenir du Canada dépend de notre capacité d'élargir nos horizons, de nous ouvrir sur le monde et de nous attaquer au marché mondial en étant persuadés que nous, Canadiens, avons dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire les meilleurs produits du monde à vendre.

Nous pouvons compter sur les agriculteurs les plus productifs et les plus efficients du monde pour fournir ces produits. Nous avons un secteur de transformation extrêmement dynamique. Nous sommes en mesure d'exceller dans le domaine du commerce international et de la commercialisation de nos produits, et nous n'avons pas à craindre qu'un marché se rétrécisse parce qu'un autre s'élargit. Nous devons étendre nos marchés partout. Nous nous en sortirons beaucoup mieux dans le nouveau climat d'échanges qui se profile.

C'est cette attitude d'optimisme que nous devons avoir, si nous voulons, au Québec et ailleurs au Canada, nous attaquer au monde entier et sortir gagnants.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, je tiens à remercier chaleureusement le ministre de l'Agriculture, malgré son horaire très chargé, de participer aujourd'hui en cette Chambre au débat portant sur l'agriculture.

Cependant, je voudrais rappeler à l'honorable ministre de l'Agriculture qu'il y a au Québec, qu'il y a au Canada et particulièrement dans cette Chambre une nouvelle dynamique. Moi, je me rappelle dans les années 1968-1970, jusqu'en 1984, aux élections fédérales de 1984, au Québec on se retrouvait dans cette Chambre avec 74 députés libéraux, un seul conservateur, mon ami Roch LaSalle. Personne ne dénonçait les iniquités. Cela fait mal au ministre de l'Agriculture.

Monsieur le Président, est-ce vouloir monter l'Ouest contre l'Est? Est-ce que c'est vouloir monter les Maritimes contre le Québec? Lorsqu'on se lève en Chambre, nous les députés du Bloc québécois, des représentants du Québec, et qu'on dit par exemple qu'en 1993 le Québec a reçu 372 millions du budget de trois milliards du ministère de l'Agriculture, cela représente 12,4 p. 100, 12,4 p. 100, même pas un huitième du budget de ce


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ministère. Pourtant, les impôts des Québécois comptent pour 23 p. 100 du Budget total.

Est-ce que c'est vouloir monter l'Ouest contre le Québec, lorsqu'on dénonce des iniquités? Les 74 députés libéraux ne se levaient pas en cette Chambre pour les dénoncer.

Lorsque je fais mon travail aujourd'hui et que j'affirme haut et fort qu'en 1980 le Québec a reçu 300 millions de dollars des dépenses fédérales en agriculture, comparativement à un milliard pour l'Ouest, et qu'en 1987 le Québec a reçu 410 millions comparativement à plus de quatre milliards pour l'Ouest.

(1100)

Les députés libéraux, il y en a environ 18 présentement, le nouveau député de Brome-Missisquoi, quand se lèvera-t-il pour défendre les producteurs agricoles de Brome-Missisquoi? Jamais. Est-ce que c'est vouloir monter les Maritimes contre le Québec que d'affirmer en cette Chambre, que de 1980 à 1987, les dépenses fédérales en agriculture se sont accrues six fois moins vite au Québec que dans le reste du Canada?

Des iniquités, on peut en citer à coeur de journée. J'aimerais que le ministre de l'Agriculture traite les producteurs agricoles québécois de la même façon qu'il traite les producteurs agricoles dans son coin de pays, dans l'Ouest.

[Traduction]

M. Goodale: Monsieur le Président, je suis très heureux d'avoir l'occasion de répondre à cette question parce qu'elle dénote une certaine méprise à propos de la nature de l'agriculture chez nous.

Dans l'Ouest, le secteur agricole est dominé par des industries à vocation exportatrice, comme celles des céréales et du boeuf. Ces industries doivent évidemment soutenir la concurrence sur les marchés mondiaux. Les niveaux de dépenses évoqués dans la question qui vient de m'être posée étaient des niveaux de dépenses fixés en réaction à des distorsions du commerce international.

Ainsi, lorsque les Américains ont mis en oeuvre leur programme de subventions à l'exportation, les prix des céréales se sont effondrés et le gouvernement du Canada a dû réagir. À cause de ces distorsions du commerce international, le gouvernement du Canada a accru le niveau de dépenses affectées à son industrie céréalière afin d'atténuer les effets de ces phénomènes.

Dans l'Est, l'agriculture est un peu plus diversifiée et davantage dominée par des industries nationales régies par un système national de gestion de l'offre. Grâce à ce système, les secteurs agricoles de l'Est sont généralement protégés contre les fluctuations de la conjoncture internationale et ne sont pas confrontés, comme les secteurs de l'Ouest, aux distorsions du commerce international. Il est toujours un peu risqué de comparer des chiffres parce que nous sommes en présence de deux systèmes qui ne sont pas directement comparables et le résultat de la comparaison risque d'être trompeur.

S'il veut établir une comparaison entre les montants que le gouvernement du Canada a versés dans l'Ouest pour l'agriculture et ceux qu'il a versés dans l'Est toujours pour l'agriculture, le député doit tenir compte des milliards de dollars que les agriculteurs du centre et de l'est du Canada ont retirés du fait qu'ils étaient régis par le système de gestion de l'offre.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Monsieur le Président, tout d'abord, je voudrais dire au ministre que j'ai porté une attention particulière aux propos qu'il a tenus aujourd'hui et que je les ai trouvés très intéressants. Je suis d'accord avec certaines des choses qu'il a dites, surtout avec son évaluation de ce qui s'est produit au cours du débat sur le conflit dans le secteur des chemins de fer et de la façon dont les néo-démocrates et les bloquistes, par leurs agissements, ont nui aux intérêts de tous les Canadiens, y compris à ceux du Québec que le Bloc prétend représenter.

J'ai moi aussi trouvé très troublant de voir le NPD, dont la plupart des députés viennent de la Saskatchewan, agir comme il l'a fait. À mon avis, il n'a pas défendu les meilleurs intérêts des producteurs et des habitants de cette province.

Je suis d'accord avec certaines des choses que le ministre a dites aujourd'hui. Je voudrais faire quelques commentaires sur la façon dont il évalue la dette du Canada et la nécessité de régler le problème de la dette au moyen de réductions des dépenses. Il s'agit là d'un secteur dans lequel le Parti réformiste montre l'exemple depuis sa création, en 1987. En fait, c'est ce qui a motivé la création de notre parti et ce qui a incité les gens à écouter notre message et à se rallier à notre cause.

(1105)

Nous reconnaissons que des réductions s'imposent. Nous ne sommes pas contre cela. En fait, nous ferions des réductions beaucoup plus importantes. Nous avons déjà expliqué en détail où nous ferions ces réductions, pas seulement au ministère de l'Agriculture et dans le secteur des subventions à l'agriculture, mais à tous les niveaux des dépenses du gouvernement.

Après avoir entendu les commentaires du ministre, je trouve plutôt paradoxal que le gouvernement libéral ait soudainement découvert les avantages de se doter d'un système commercial libre et ouvert et d'essayer de conquérir des marchés étrangers. C'est ce même parti qui s'opposait à l'accord de libre-échange et qui a critiqué fortement le libre-échange alors que le Parti réformiste était fortement en faveur de l'idée d'un accord de libre-échange non seulement avec les États-Unis mais aussi avec d'autres pays, étant donné les avantages que cela entraînerait pour l'économie canadienne.

Je trouve paradoxal que les libéraux aient la mémoire aussi courte non seulement en ce qui concerne le libre-échange et les avantages qu'il présente, surtout pour le secteur de l'agriculture mais aussi pour tous les autres secteurs de notre économie, mais aussi quand il s'agit de reconnaître que c'est le Parti libéral qui, par ses dépenses, nous a conduit à ce déficit. Je me rappelle très bien qu'en 1984, les conservateurs sont arrivés au pouvoir avec un mandat très clair. Ils ont toujours dit qu'ils avaient hérité du problème du déficit. Nous entendons la même chose aujourd'hui.


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La question que je voudrais poser au ministre concerne une préoccupation dont m'ont fait part des céréaliculteurs de ma région. Moi-même, je. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Nous avons si peu de temps et si nous voulons que le ministre puisse répondre, ce que je lui demanderais d'ailleurs de faire brièvement, le député doit poser sa question.

M. Hill (Prince George-Peace River): Monsieur le Président, j'y arrivais justement.

En ce qui concerne les paiements liés à la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, la préoccupation la plus fréquemment exprimée vient de ce que les producteurs ont compris que les sommes seraient surtout versées aux propriétaires de terres. Dans la région que j'ai l'honneur de représenter, un pourcentage important des terres, non pas la majorité, mais une bonne partie, appartient à des étrangers. Par votre intermédiaire, monsieur le Président, je demande au ministre. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Je prie le ministre de bien vouloir répondre brièvement.

M. Goodale: Monsieur le Président, je sais que le temps file, mais il me faudrait beaucoup plus que les quelques minutes dont je dispose maintenant pour vraiment répondre à cette question.

Nous avons précisé dans le budget que le paiement de 1,6 milliard de dollars serait versé aux propriétaires de terres agricoles pour qu'il soit possible de profiter entièrement du traitement de l'impôt sur les gains en capital et pour diverses autres raisons. Nous avons aussi mentionné que cette règle était souple et que nous étions prêts à entendre tous les commentaires des agriculteurs et des organisations agricoles quant à leurs préférences à ce sujet.

Les consultations auprès des agriculteurs et des organisations agricoles se déroulent depuis deux ou trois semaines. Je prévois qu'elles se termineront bientôt, probablement cette semaine. J'espère être en mesure de répondre plus précisément à cette question après cette semaine.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de répondre à la motion du Bloc concernant l'équité des réductions en agriculture.

Je ferai d'abord un survol des compressions des dépenses agricoles, puis des observations générales à ce sujet. Je poserai ensuite des questions au ministre de l'Agriculture au sujet de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest et les paiements effectués en vertu de la loi, puis je l'interrogerai au sujet de l'efficience du système de transport ferroviaire. Aussi, je parlerai des réductions concernant la gestion de l'offre et je les comparerai aux compressions dans d'autres secteurs de l'agriculture. Enfin, je traiterai de certaines lacunes générales du budget qui feront sentir leurs effets sur tous les Canadiens, mais qui toucheront lourdement les agriculteurs, si le gouvernement ne fait rien de plus pour équilibrer le budget dans un délai déterminé.

Je voudrais d'abord lire la motion présentée par le Bloc:

Que la Chambre dénonce le gouvernement pour avoir réduit de 19 p. 100 le budget général du ministère de l'Agriculture, de 30 p. 100 le subside laitier, et pour avoir transformé les subventions au transport des céréales en subventions directes aux agriculteurs de l'Ouest, permettant à ces derniers de se diversifier et de concurrencer de façon déloyale les agriculteurs de l'Est du Canada.
(1110)

Cette motion montre que les députés du Bloc ne font pas une évaluation juste du budget, en particulier en ce qui concerne l'agriculture. Je parlerai d'abord des compressions qui frappent l'agriculture et j'aborderai ensuite certaines comparaisons.

Le budget montre bien que le gouvernement libéral a imposé aux agriculteurs une part trop grande des réductions générales. Je ne veux pas dire par là que les réductions auraient dû être réparties en pourcentages égaux ente les divers secteurs de dépenses, mais que toutes les compressions imposées à l'agriculture sont injustes quand on les compare à celles qui frappent les autres secteurs de dépenses fédérales et le ministère de l'Agriculture même. Je vais vous le prouver par les chiffres.

Au ministère de l'Agriculture, les dépenses vont être réduites au total d'environ 20 p. 100 sur les trois prochaines années. Le total des fonds disponibles pour 1994-1995 était approximativement de 2,1 milliards de dollars. La réduction de 20 p. 100 prévue dans le budget libéral signifie que le ministère de l'Agriculture va voir son budget réduit de 445 millions de dollars.

En résumé, les contributions fédérales aux programmes de sécurité du revenu vont être réduites d'environ 30 p. 100. Ces programmes s'appliquent à l'ensemble du pays. Les contributions fédérales servent à financer les programmes de sécurité du revenu dans l'Ouest, le Centre et les Maritimes. Il va y avoir une augmentation du montant des frais d'utilisation partout au Canada.

Les subventions versées aux producteurs laitiers, d'environ 217 millions de dollars par an, vont être réduites de 30 p. 100 sur deux ans, à raison de 15 p. 100 par an. Elles seront ramenées à environ 160 millions de dollars après la troisième année. Les fonds consacrés à la recherche ont été substantiellement réduits. Ces fonds sont bien sûr répartis dans tout le pays.

Un autre secteur important de dépense a également été éliminé, je veux parler de la subvention du Nid-de-Corbeau qui représentait 560 millions de dollars par an et qui, même si cette subvention ne fait pas partie du budget de l'Agriculture, touche les agriculteurs. C'est la réduction la plus importante qu'ait eu à subir l'agriculture dans ce budget. Ajoutons à cela que les subventions au transport versées aux agriculteurs en vertu de la Loi sur les subventions au transport des marchandises de la Région atlantique et de la Loi sur les taux de transport des marchandises dans les Provinces maritimes ont été réduites d'environ 99 millions de dollars. À l'origine, la réduction de ces subventions devait s'appliquer jusqu'au 1er juillet 1995, mais l'application de cette mesure a été prolongée.

Quand on regarde le résumé des réductions prévues, on constate que 660 millions des compressions que devra subir le secteur agricole proviennent de la réduction, au ministère des Transports, des subventions versées aux agriculteurs en vertu de la


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LTGO-l'ancienne subvention du Nid-de-Corbeau-, de la Loi sur les subventions au transport des marchandises de la Région atlantique et de la Loi sur les taux de transport des marchandises dans les Provinces maritimes. Des compressions de 445 millions de dollars exercées au ministère de l'Agriculture s'ajoutent à cela. Le budget entraîne donc des coupes totales de $1,1 milliard, dans le secteur de l'agriculture.

J'ai entendu, plus tôt, le ministre de l'Agriculture expliquer que ces compressions sont du même ordre que celles exercées par le gouvernement fédéral dans d'autres secteurs. C'est absolument faux. En fait, la balance a penché lourdement contre le secteur de l'agriculture. J'ai l'impression qu'avec des coupes semblables dans d'autres secteurs de compétence fédérale, on serait parvenu à présenter un budget équilibré en février. Nous jouirions en outre de tous les avantages que présente l'adoption d'une cible précise dans l'élaboration d'un budget équilibré.

(1115)

Ensemble, les compressions imposées aux ministères de l'Agriculture et des Transports dans ce budget représentent une réduction d'environ 40 p. 100 du total des dépenses dans le secteur agricole, ce qui est totalement disproportionné par rapport à d'autres secteurs de dépenses fédéraux. Ce budget prévoit une réduction de près de 50 p. 100 des paiements directs versés aux agriculteurs.

Comment les réductions imposées aux agriculteurs en vertu de ce budget se comparent-elles à celles exercées au ministère lui-même? Voilà un point intéressant que le député bloquiste a soulevé aujourd'hui. Il signale que les agriculteurs ont vu leurs subventions réduites de près de 50 p. 100, si l'on tient compte des paiements directs et des paiements faits aux sociétés ferroviaires à leur intention, des modifications à la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, de la réduction de l'aide au transport des céréales fourragères, etc. Tous ces paiements réunis représentent une réduction de 50 p. 100 pour les agriculteurs, contre des coupes d'environ 20 p. 100 au sein du ministère lui-même.

Les agriculteurs de ma circonscription et de tout le Canada considèrent que c'est inacceptable. En général, ils savent bien qu'ils doivent accepter des compressions, étant donné l'état catastrophique des finances du pays. Ils assument leur part de responsabilité, mais n'acceptent pas le fait que ces compressions n'ont pas été réparties également entre les fonds pour les agriculteurs et le fonctionnement du ministère. Des compressions de 20 p. 100 au ministère contre des compressions de 50 p. 100 dans les paiements faits aux agriculteurs, ce n'est pas équilibré.

Je ne dis pas que ces réductions n'auraient pas dû être faites. Je dis que les compressions imposées aux agriculteurs et celles qu'on a exercées au sein du ministère auraient dû être mieux équilibrées, et que la répartition aurait dû être plus juste à l'échelle du pays.

Dans leur motion, les bloquistes soutiennent que les coupes sont injustes et certaines mesures compensatoires favorisent l'ouest du Canada. Je voudrais m'arrêter un peu là-dessus pour expliquer que les coupes sont injustement sévères pour l'ouest du Canada. Je ne voudrais pas provoquer une dispute entre l'ouest et le centre du Canada, mais simplement expliquer les mesures budgétaires. Un peu plus tard, je traiterai des véritables difficultés auxquelles est confrontée l'industrie soumise à la gestion de l'offre au Canada. Des temps difficiles s'annoncent encore pour cette industrie et je m'inquiète pour les agriculteurs qui y participent. Toutefois, je reviendrai sur la question plus tard.

Une de mes principales préoccupations concernant la manière dont les coupes prévues par ce budget seraient effectuées, c'est qu'on ne donne pas aux agriculteurs la période de transition dont ils ont besoin, surtout en ce qui concerne la subvention versée aux termes de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, la subvention du Nid-de-Corbeau. Par exemple, du jour au lendemain, on élimine la subvention accordée aux agriculteurs qui louent des terres. Pour la récolte ensemencée cette année, les agriculteurs n'auront pas droit à la subvention d'environ 15 $ la tonne pour le tarif marchandises, qui est versée en leur nom aux sociétés ferroviaires.

Au cours des deux prochains mois, on demandera aux agriculteurs qui ensemencent leurs terres d'assumer des frais additionnels pouvant atteindre jusqu'à 35 $ l'acre. D'une façon générale, les frais additionnels seront de 15 $ l'acre, ce qui représente quand même une lourde charge à assumer pour des agriculteurs qui ne bénéficient d'aucune période de transition ni d'aucune mesure compensatoire. Pour les agriculteurs qui louent des terres, le budget ne prévoit aucune compensation.

Les mesures compensatoires qui sont prévues s'adressent uniquement aux propriétaires de terres agricoles, à l'exception des agriculteurs qui louent des terres de la Société du crédit agricole, qui leur transmettra les paiements. Cependant, d'une façon générale, les propriétaires de terres agricoles devront immédiatement assumer des frais additionnels sans recevoir de compensation.

Est-ce que les députés bloquistes jugent que cette situation injuste favorise l'ouest du Canada? D'autres préoccupations ne proviennent pas tant de la façon dont les compressions ont été faites, mais de certaines mesures qui n'ont pas été prises pour que le système devienne plus efficace.

(1120)

Un nombre limité seulement d'abandons de lignes de chemin de fer seront autorisés et nous n'avons pas d'idée exacte des lignes qui le seront.

Quant à l'attribution des wagons, les ministres de l'Agriculture et des Transports ont déclaré que le système actuel, qui repose sur des données historiques, serait conservé, du moins pour l'instant. Le maintien des vieilles attributions empêchera de faire les changements qui seraient nécessaires pour que le système ferroviaire devienne plus efficace.

Le gouvernement continuera d'être le seul patron de la Commission canadienne du blé. Depuis des années, je soutiens qu'il faut confier aux agriculteurs la responsabilité du fonctionnement de cet organisme. Les agriculteurs paient la totalité de ses frais de fonctionnement. Pourquoi le gouvernement fédéral dicte-t-il encore sa volonté à la Commission canadienne du blé? Il ne le devrait pas. Les agriculteurs canadiens devraient être les seuls responsables des orientations de la commission et ils devraient seuls décider ce qu'ils veulent faire de cet organisme et comment ils veulent le structurer. Rien de tel n'est prévu dans la loi.


11457

Il y a une autre chose qui n'est pas prévue dans la mesure législative, mais qui est d'une extrême importance. C'est une loi empêchant les arrêts de travail dans la manutention et le transport des céréales. Encore ce matin, à la Chambre des communes, j'en ai vu beaucoup pointer des doigts accusateurs. J'ai vu le ministre de l'Agriculture montrer du doigt le Bloc et le NPD en leur attribuant la responsabilité de la grève du rail.

Je vois les choses un peu différemment. Je reconnais que le Bloc et le NPD ont effectivement paralysé l'adoption de la loi de retour au travail. Je n'arrive vraiment pas à comprendre pourquoi. Ils n'auraient pas dû le faire, mais ils l'ont fait. Examinons le problème et remontons un peu en arrière. Si les libéraux avaient fait leur travail, nous n'aurions jamais eu à déplorer de perturbation dans le système de manutention et de transport du grain.

Depuis le débat qui a mis fin au lock-out des manutentionnaires de grain en février de l'année dernière, le Parti réformiste a réclamé-et je l'ai fait personnellement-une loi susceptible de mettre fin aux arrêts de travail dans le système de manutention et de transport du grain. C'était il y a plus d'un an.

Tout au long de cette année-là, les réformistes n'ont cessé de mettre le gouvernement en garde contre la répétition d'arrêts de travail. Il était évident que cela se reproduirait cette année. Il n'y avait pas de convention collective en vigueur pour plusieurs groupes, syndicats et patrons, selon leur secteur d'activité, et notamment dans le transport ferroviaire. Aucune n'avait été signée. Des grèves étaient donc à prévoir.

Quand les libéraux rejettent la responsabilité de la grève sur les bloquistes et les néo-démocrates, ils ne disent en fait que la moitié de la vérité. L'autre moitié, c'est que les libéraux auraient pu prévenir ces arrêts de travail, comme les réformistes les avaient exhortés à le faire, mais ils n'ont pas tenu compte de nos exhortations. Voilà à qui revient vraiment la responsabilité de cette perturbation du système, et j'invite les Canadiens à le reconnaître.

Je voudrais maintenant parler de la façon dont seront versés les paiements prévus dans le budget en rapport avec le transport du grain de l'Ouest, l'industrie laitière et le reste. En ce qui concerne tout d'abord le transport du grain de l'Ouest, les bloquistes semblent avoir pris pour cible dans leur motion le programme de compensation de 1,6 milliard de dollars. Il leur paraît injuste. Or, les agriculteurs bénéficiaient auparavant du tarif du Nid-de-Corbeau, qui a été remplacé par la subvention au transport du grain de l'Ouest vers les ports. Ce tarif a été en vigueur durant près d'un siècle. À certains moments, cette subvention s'est élevée à 900 millions de dollars par année. Il s'agit d'une subvention extraordinairement importante. Elle a été réduite récemment à un montant annuel d'environ 550 millions de dollars, pour l'année dernière, et c'est d'après ce montant qu'on a établi le programme de compensation de 1,6 milliard de dollars.

(1125)

Voyons maintenant comment seront distribués les paiements de compensation pour l'élimination de la subvention. Le programme s'adresse uniquement aux propriétaires de terres agricoles. Les agriculteurs qui louent des terres ne bénéficieront d'aucun paiement de compensation ni d'aucun délai d'élimination de la subvention. Ce programme n'accorde donc qu'une très brève période de transition aux agriculteurs qui en dépendent. À la suite de la suppression de la subvention, les producteurs auront à supporter un coût supplémentaire très élevé pour faire acheminer leur grain vers les ports terminaux.

Un fonds de transition de 300 millions de dollars est également prévu pour aider les agriculteurs à faire face à l'élimination de la subvention. Nous ne savons pas comment ces sommes seront dépensées, et cette incertitude n'est vraiment pas facile à accepter pour les agriculteurs. Ce sera difficile non seulement pour les céréaliculteurs, mais aussi pour les producteurs et les transformateurs de luzerne qui bénéficiaient de cette subvention.

L'aide au transport des céréales fourragères sera aussi entièrement supprimée. La date d'abord annoncée dans le budget a été reportée récemment. Un montant de 326 millions de dollars est actuellement disponible pour un programme d'adaptation concernant l'aide au transport des céréales fourragères. Ces indemnités seront offertes aux agriculteurs des Maritimes et de certaines régions du Québec, tout comme les paiements de 1,6 milliard de dollars mis à la disposition des agriculteurs de l'ouest du Canada.

Comment ces réductions visant les subventions consenties aux termes de la LTGO et l'aide au transport des céréales fourragères se comparent-elles à celles qui touchent l'industrie laitière? La subvention aux producteurs de lait sera réduite de 15 p. 100 par année pendant deux ans. Ce montant peut toutefois être transféré au consommateur, et l'on a d'ailleurs annoncé que les coûts supplémentaires lui seraient effectivement transférés. J'ai certaines inquiétudes à ce sujet.

Les gens dans l'industrie assujettie à la gestion de l'offre auront de la difficulté à faire face aux changements qui se produiront à ce chapitre. Ceux-ci résulteront d'une concurrence accrue qui viendra peut-être des États-Unis. Cela va se produire. À mon avis, cela ne fait pas l'ombre d'un doute. Je ne puis pas dire avec exactitude quand ni comment, mais je sais que cela va arriver.

En ce qui concerne la gestion de l'offre, le Parti réformiste estime que les agriculteurs devraient avoir le droit de fonctionner ensemble comme ils le font dans le cadre des systèmes de gestion de l'offre. En 1990, je faisais partie du groupe de travail réformiste qui a élaboré la première politique agricole de notre parti. Nous avions alors signalé que la gestion de l'offre s'orientait vers un système plus compétitif. Nous avons dit que le gouvernement ne devrait pas cacher cela aux producteurs laitiers et aux autres agriculteurs assujettis à la gestion de l'offre. Nous avions alors reconnu la nécessité pour le gouvernement de se montrer très honnête à ce sujet.

J'ai constaté que, depuis six ou sept ans, les gouvernements n'ont pas vraiment dit aux agriculteurs assujettis à la gestion de l'offre ce qu'il en était de leurs systèmes ni comment ils seront soumis à une plus grande concurrence dans l'avenir. Les gouvernements ont vraiment rendu un mauvais service aux producteurs soumis à la gestion de l'offre en n'étant pas francs et honnêtes. Si vraiment le Bloc doute de cette tendance vers une plus grande compétition dans le secteur soumis à la gestion de l'offre, je l'invite à prendre note de certains faits montrant que les producteurs de ce secteur seront aux prises avec une concurrence accrue dans l'avenir.

(1130)

Je ne dis pas que c'est un changement qui me plaît. Je sais que cela ne sera pas facile pour ces producteurs. Mais c'est inévitable. Il ne faut pas le cacher aux producteurs laitiers et aux autres producteurs soumis à la gestion de l'offre.


11458

En l'an 2000, il y aura d'autres négociations au niveau du GATT. En vertu des dispositions tarifaires actuelles, les producteurs des secteurs soumis à la gestion de l'offre sont bien protégés. Par suite des négociations du GATT vers l'an 2000, les droits de douane diminueront rapidement et les producteurs laitiers américains et d'autres agriculteurs soumis à la gestion de l'offre auront davantage accès aux marchés canadiens.

Cependant, il se tiendra d'autres négociations plus pressantes qui auront pour effet d'exposer le secteur soumis à la gestion de l'offre à une plus grande concurrence. Il s'agit des nouvelles négociations de l'ALENA. Bill Clinton et Jean Chrétien ont annoncé que le Chili fera partie de l'ALENA d'ici quatre ans. Il y aura donc d'autres négociations dans le cadre de l'ALENA d'ici quatre ans.

Je voudrais demander aux députés du Bloc s'ils estiment qu'il y a une probabilité réaliste, une probabilité de plus de 50 p. 100 que ces nouvelles négociations de l'ALENA n'incluront pas un accès accru au marché canadien pour les agriculteurs américains soumis à la gestion de l'offre. Je crois que la réponse est non. Il est certain qu'ils auront un accès accru au marché canadien.

Je ne pense pas que les Américains signeront un nouvel accord qui comprendra le Chili à moins qu'ils obtiennent un accès accru aux marchés canadiens. Je ne dis pas que c'est ce que je veux. Je dis simplement ce qui va arriver, à mon avis. Il y a une très forte probabilité que c'est ce qui va arriver.

Tout politicien qui prétend que cela ne va pas arriver prive en fait les agriculteurs intéressés d'une période de transition dont ils ont désespérément besoin pour faire face à cette situation très difficile. Les agriculteurs soumis à la gestion de l'offre vont en effet avoir beaucoup de difficulté.

Au lieu de prendre une journée à la Chambre pour débattre de l'iniquité relative des réductions pour l'Est ou l'Ouest, le Québec ou le reste du Canada, il serait beaucoup plus productif de discuter des moyens à prendre pour aider les producteurs soumis à la gestion de l'offre, si cela est possible, à faire la transition vers un marché plus concurrentiel.

C'est une question qui est trop importante pour que la Chambre n'en parle pas. Dans l'avenir, j'ai hâte que le Bloc utilise une journée consacrée à l'opposition pour traiter de cette question. J'estime que ce serait bien plus utile pour les producteurs laitiers et autres agriculteurs soumis à la gestion de l'offre.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le discours de mon collègue qui souhaite que, la prochaine fois, le Bloc fasse une journée sur l'agriculture qui portera sur certains autres aspects. Nous, du Bloc, on a la prétention d'être le parti d'opposition qui a amené le sujet de l'agriculture deux fois depuis un an lors d'une journée de l'opposition. Si le Parti réformiste veut le faire, il peut lui aussi consacrer ses journées d'opposition à ce sujet.

Je pense qu'on pourrait s'entendre et se rejoindre sur le phénomène suivant. Dans les budgets des dépenses pour l'année 1995-1996, on prévoit une diminution d'effectifs de 429 emplois au ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire au niveau des activités de recherche et de développement. Les ressources humaines passeront de 3 454 à 3 015 personnes.

(1135)

On sait que les emplois en recherche et développement sont des emplois qui préparent l'avenir, mais ils sont aussi des emplois d'avenir, parce qu'on retrouve là des gens qui ont soit une formation universitaire, soit une formation technique, soit une formation plus pratique, mais qui aident une industrie à se développer, à prendre sa place dans l'avenir.

J'aimerais savoir du député du Parti réformiste s'il partage mon opinion, qui est celle aussi de la Fédération canadienne du mouton. Cette dernière dit que le gouvernement du Canada abandonne sans raison une production en plein développement, parce que le Canada a décidé d'enlever le tapis sous les pieds des producteurs de moutons, en abolissant toute intervention en recherche et développement dans cette industrie, dans l'industrive ovine, de telle façon qu'on se retrouve avec une production qui, dans la compétition mondiale actuelle, avec la globalisation des marchés, ne bénéficie plus d'aucun soutien, en termes de développement et d'amélioration de ses produits.

Est-ce que le député du Parti réformiste trouve que cette économie de bouts de chandelles du ministère de l'Agriculture est un bon choix? Ne serait-il pas préférable de ne pas couper les dépenses en recherche et développement et à tout le moins laisser ces outils au Québec et aux autres provinces, afin qu'elles puissent développer leur agriculture, plutôt que de se retirer du domaine après X années d'encouragement et dire à un secteur entier de production agricole qu'il n'aura plus l'appui du gouvernement fédéral? Cela ne paraît-il pas être une décision inacceptable et est-ce que le Bloc n'a pas raison d'amener ce sujet en Chambre?

[Traduction]

M. Benoit: Monsieur le Président, j'ai également reçu la lettre des producteurs ovins qui disent s'inquiéter de la réduction du budget de la recherche dans leur industrie. J'ai reçu cette lettre hier et j'ai hâte de consulter les producteurs pour savoir précisément ce qui arrive à la recherche dans leur secteur d'activité.

Quant à ce que disait le député, à savoir que les réductions ne sont pas acceptables, les impératifs budgétaires les ont rendues nécessaires. La plupart des agriculteurs avec lesquels je me suis entretenu ont reconnu, quoique à contrecoeur, que les réductions qui frappent leur industrie sont injustes, mais indispensables si nous voulons régler notre grave situation financière. Je répète cependant que les réductions directes n'ont pas été réparties équitablement entre les agriculteurs et le ministère. Elles ne l'ont pas davantage été à la grandeur du pays.

Les agriculteurs déplorent surtout que les compressions budgétaires ne vont pas assez loin et qu'aucune échéance n'a été fixée pour l'élimination du déficit. Voyons quelles pourront être les conséquencdes pour les agriculteurs. J'ai trouvé très préoccu-


11459

pantes les observations du député concernant les réductions, car ces réductions étaient nécessaires et il faudra en apporter d'autres encore. J'espère néanmoins que les prochaines compressions frapperont d'autres secteurs de dépenses fédérales pour qu'elles soient réparties plus équitablement.

Le budget ne va pas assez loin et les versements d'intérêts seront passés de 39 milliards de dollars, au moment où les libéraux sont arrivés au pouvoir, à 51 milliards par année, à la fin de la période de projections budgétaires actuelle de trois ans. Il s'agit là d'intérêts sur la dette seulement. Les contribuables devront donc débourser 12 milliards de plus pour payer les intérêts sur la dette. Le budget libéral fera augmenter la dette de 24 milliards par année, sans compter les frais d'intérêts qui augmentent sans cesse.

Où allons-nous trouver l'argent nécessaire pour payer les intérêts toujours croissants sur la dette? Ce sont les contribuables qui paieront la note et les deniers publics sont insuffisants pour absorber un accroissement des paiements d'intérêts. Ainsi, les augmentations d'impôt ne sont pas une solution. On devra donc effectuer des compressions ailleurs pour couvrir ces paiements.

J'encourage le gouvernement à prendre des mesures, au cours des cinq ou six prochains mois, et à présenter un autre budget qui ira encore plus loin et qui établira une date bien précise à partir de laquelle on devrait avoir réussi à éliminer le déficit. Je l'invite à agir en ce sens. Cependant, faute d'une date précise, les agriculteurs devront subir une augmentation des frais d'intérêt, car ce déficit permanent exerce des pressions à la hausse sur les taux d'intérêt. Il sera difficile pour les agriculteurs d'emprunter, car les prêteurs hésiteront à délier les cordons de la bourse. Nos programmes sociaux continueront d'être menacés.

(1140)

Non seulement on demande aux agriculteurs de supporter une plus grande part des coûts, mais on fait peser une menace réelle sur les programmes sociaux, notamment les pensions, les soins de santé et d'autres programmes dont nous dépendons et que nous souhaitons conserver.

Je ne pense pas qu'on puisse qualifier de mesquine n'importe laquelle de ces compressions. En fait, le gouvernement doit aller encore plus loin dans un avenir rapproché, faute de quoi les Canadiens s'apercevront que, même si les dernières compressions budgétaires leur ont fait mal, ce n'est rien à côté de ce qui les attend, si on ne sabre pas davantage les dépenses maintenant.

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai pas pu entendre la première partie de l'intervention du député, mais j'ai prêté une oreille attentive à la deuxième partie de son discours qui était consacrée à la gestion de l'offre. Il a dit que, à son avis, la gestion de l'offre n'en avait plus que pour quelques années.

Je vois qu'un des ministres qui ont participé aux négociations sur ce dossier vient de quitter la salle. Cependant, j'aimerais savoir sur quoi le député s'appuie pour affirmer que la gestion de l'offre disparaîtra d'ici peu ou est sur le point de disparaître, alors que, à ce qu'il me semble, nous avons mené une série de négociations couronnées de succès dans le cadre du GATT et que la gestion de l'offre jouit d'une solide protection.

Le député peut-il me dire sur quoi il se fonde pour affirmer cela?

M. Benoit: Monsieur le Président, je serais heureux de répondre à la question du député.

Je m'appuie sur trois grands arguments. Le premier argument a été bien développé par l'avocat qui représente la Fédération canadienne des producteurs de lait dans sa campagne qui visait à empêcher les produits américains d'envahir notre marché. On prétend, bien sûr, que le GATT a la priorité sur l'ALENA au chapitre de la gestion de l'offre. L'avocat qui représente les producteurs de lait du Canada a dit ceci: «Messieurs, redoublez de prudence. Les Américains font valoir un argument très valable: l'ALENA a la priorité sur le GATT.»

Que le député me comprenne bien, cet avocat, qui représente la Fédération canadienne des producteurs de lait, et non pas les Américains, a dit que l'heure était grave et qu'il valait mieux s'attendre à ce que l'arbitre décide que l'ALENA avait priorité sur le GATT. En ce cas, les jours de notre système de gestion de l'offre, dans sa forme actuelle, sont assurément comptés.

L'autre menace qui plane sur notre système de gestion de l'offre, ce sont les négociations menées dans le cadre de l'ALENA en vue de faire entrer le Chili dans cette grande famille. Notre premier ministre et le président des États-Unis ont déclaré que, d'ici dix ans, le Chili aurait adhéré à l'ALENA. Lorsque cela se produira et que ces négociations auront lieu, j'imagine que les Américains exigeront que les secteurs régis par la gestion de l'offre s'ouvrent à leurs produits. Telle est la deuxième menace réelle qui plane sur la gestion de l'offre.

La troisième menace prend la forme des nouvelles négociations du GATT qui débuteront en l'an 2000. Je crains que ces nouvelles négociations n'aboutissent à un rapide abaissement des tarifs qui protègent le secteur de la gestion de l'offre.

Je ne dis pas cela de gaîté de coeur aux agriculteurs régis par la gestion de l'offre, car je sais qu'il s'agit là d'une vive préoccupation et d'un problème réel pour eux, mais je ne veux rien cacher. Je veux être honnête avec eux et leur dire la franche vérité: «Je crois que c'est ce qui va se produire. Soyez prêts à tout instant à faire face à ce changement profond.»

[Français]

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, lorsque l'opposition a choisi ce thème de l'agriculture pour une journée dédiée à l'opposition et surtout de parler de coupures budgétaires, ce n'est pas parce que, en soi, on a quelque chose contre les coupures budgétaires quand il faut en faire.

Tous les Canadiens, à la grandeur du Canada, y compris ceux du Québec, bien sûr, sont conscients que l'état de l'économie actuelle, celle que nous avons héritée des derniers gouvernements, libéral et conservateur, fait en sorte qu'il faille couper.


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(1145)

Sauf que lorsque les contribuables acceptent de se serrer la ceinture, ils veulent en même temps comprendre pourquoi ils le font et à quoi vont servir les coupures qu'on leur impose.

Comme représentant du Bloc québécois dans un comté très agricole du Québec, chez nous, les cultivateurs, les agriculteurs, les producteurs laitiers se posent aussi ces questions: Le sacrifice qu'on me demande de faire aujourd'hui, à quoi va-t-il servir? Quelles sont les intentions du gouvernement? Quelle planification le gouvernement a-t-il prévue lorsqu'il fait des coupures dans mon domaine plutôt que dans un autre? Est-ce que le gouvernement veut faire en sorte de rétablir la situation afin que nous soyons plus compétitifs les uns avec les autres au Canada? Est-ce que le gouvernement veut faire en sorte de nous couper temporairement pour mieux nous aider sur un moyen terme, de telle sorte que l'agriculture québécoise et canadienne soit plus compétitive avec l'étranger? Est-ce que le gouvernement, par contre, a tout simplement décidé qu'il faut couper pour payer la dette, peu importe où on va couper, l'important c'est de faire l'opération coupure?

Il n'y a personne, aucun citoyen, qui, dans de telles situations, va accepter de faire un tel sacrifice.

Je m'excuse, monsieur le Président, j'aurais dû vous annoncer au début de mon allocution qu'à partir de mon intervention, et les orateurs qui vont me suivre vont partager leur temps en deux.

Je disais donc que c'est la façon dont ces coupures sont faites qui nous apparaît d'abord comme une certaine iniquité dans la façon d'avoir procédé. En effet, le gouvernement annonce l'élimination de la subvention annuelle de 560 millions pour le Nid-de-Corbeau et, d'autres l'ont dit avant moi mais je pense qu'il n'est pas inutile de le répéter, cette subvention s'applique surtout aux fermiers de l'Ouest et leur permet d'avoir des prix avantageux pour le transport du grain. Toutefois, pour aider les agriculteurs à encaisser la disparition de cette subvention, le ministre des Finances a prévu de leur accorder 1,6 milliard en compensation des pertes en valeur foncière de leur propriété, de même qu'un milliard en garantie de crédit pour l'achat de céréales, et un autre montant de 300 millions leur sera versé sur cinq ans à titre de mesure de transition.

On pourrait être satisfait d'une mesure comme celle-là. On peut dire: Tant mieux pour eux, les coupures ne leur feront pas trop mal, on coupe à une place et on leur en donne à l'autre. Là où cela fait mal c'est lorsque les producteurs québécois se comparent aux autres et constatent qu'ils n'ont pas un traitement équitable. Pensons aux producteurs laitiers. Le ministre des Finances diminue de 30 p. 100 en deux ans les subventions aux producteurs de lait, soit des coupures de 70 millions sur un budget actuellement de 300 millions. Ceci sans aucune compensation financière pour aider les producteurs du Québec à encaisser de dures compressions.

Dans le cas des gens de l'Ouest, on les plaint et on trouve qu'ils font pitié, on leur donne une compensation. Dans le cas de ceux du Québec on dit: Vous êtes habitués à souffrir, vous êtes habitués à avoir la couenne dure, on ne vous donne rien, débrouillez-vous.

Le gouvernement distribue 2,2 milliards en subventions aux fermiers de l'Ouest qui vont, en grande majorité, récupérer leurs pertes alors qu'il ne donne absolument rien en compensation des coupures qui affectent principalement les fermiers québécois.

Est-ce qu'on peut parler d'un Budget équitable devant un cas de favoritisme aussi évident? Je ne pense pas. Les conséquences de ces mesures inéquitables risquent de faire très mal aux agriculteurs québécois.

La Fédération des producteurs de lait du Québec soulève qu'avec cette généreuse compensation, les agriculteurs de l'Ouest pourront facilement concurrencer les fermiers québécois qui, eux, seront occupés à observer les coupures. Est-ce que c'est le but? C'est la question que j'ai posée au début.

(1150)

Est-ce qu'on peut faire en sorte qu'il y ait des fermiers qui soient plus favorisés que d'autres au Canada? Est-ce qu'on veut spécialiser les productions? Est-ce qu'on veut spécialiser les cultures? Si on veut les spécialiser, il faudrait peut-être le dire. Peut-être que cela rendrait les gens plus compétitifs. Mais si on spécialise à la fois sur une même production, dans l'Ouest et dans l'Est, on met les Canadiens en concurrence l'un avec l'autre.

Peut-être que dans une situation différente, peut-être qu'après un référendum gagnant, la situation pourrait être celle-là. Et ça pourrait devenir une saine compétition, mais ce ne serait pas payer deux fois pour les mêmes contribuables. Chaque contribuable québécois paierait pour favoriser ses produits et chaque contribuable, dans le reste du Canada, paierait pour favoriser ses produits. Le Québec est capable de relever ce défi; non pas payer en même temps pour développer ses produits et ceux de l'Ouest. C'est là que l'iniquité est inacceptable.

On pourrait parler des producteurs de porcs du Québec aussi qui risquent d'être principalement touchés par ces subventions. On a récompensé l'Ouest et ceci crée un déséquilibre sur les marchés agricoles qui coûtera cher aux fermiers québécois. La réduction de 30 p. 100 des subventions est d'autant plus inéquitable qu'elle cible le lait de transformation dit industriel. Or, les producteurs québécois seront tout spécialement touchés, puisqu'ils produisent plus de 47 p. 100 du lait industriel canadien.

On revient toujours à la même question. Que veut-on faire avec le sacrifice que l'on demande aux Québécois? Quarante-sept pour cent de la production est faite au Québec, et on leur demande, sans aucune compensation, de produire et de maintenir une rentabilité. Veut-on en réalité aider l'industrie laitière à moyen et à long terme ou veut-on plutôt lui amener de la concurrence de la part des autre provinces du pays?

Une voix: Bonne question.

M. Laurin: Un autre aspect dont il faut absolument parler, ce sont les coupures. C'est un autre domaine de l'agriculture qui est fortement touché par le Budget Martin, malgré les engagements pris dans le livre rouge du gouvernement fédéral de ne pas couper les dépenses en matière de recherche et de développement. Pourtant, le Budget Martin sabre de façon draconienne dans les dépenses de recherche et développement.

Au ministère de l'Agriculture, un orateur précédent l'a dit lui aussi, les budgets de recherche seront coupés de 11 p. 100 au


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cours des trois prochaines années. Sept centres de recherche, dont deux au Québec, seront fermés. La fermeture du centre de La Pocatière, entre autres, occasionnera la perte de 30 emplois et fera économiser 1,5 million de dollars, tandis qu'en fermant la ferme de L'Assomption, on coupera 19 emplois et on économisera 1,3 million de dollars.

Pourtant, la recherche est l'ingrédient le plus important en matière de développement de l'emploi, de développement de l'agriculture, de la production animale. Que penserait-on d'un fermier qui, pour couper ses dépenses, dirait demain matin: Je n'achète plus de graines de semence. Il aurait coupé probablement dans toutes ses dépenses, mais, en même temps, il aurait coupé aussi tous ses revenus.

Quand on coupe dans la recherche et le développement, c'est ce que l'on fait. On continue de produire avec des méthodes qui, finalement, finissent par être périmées, on ne pense pas à l'avenir et on fait en sorte que nos produits deviennent non compétitifs, parce qu'étant désuets, la production fait en sorte qu'on ne peut plus les produire à moindre coût.

Une voix: C'est un manque de vision.

M. Laurin: Tout cela est la planification dont je parlais au début de mon exposé. C'est ce qui manque au gouvernement. On n'a pas coupé parce qu'on avait planifié où on s'en allait, on a coupé tout simplement parce qu'il fallait couper.

(1155)

Pour vous donner un exemple de coupure aveugle, je désire revenir sur le cas de la ferme de L'Assomption, dans mon comté, où on faisait beaucoup de recherche et de développement, où on était arrivé à un moment où on avait développé en horticulture, par exemple, de nouveaux produits dont le marché est prêt à s'accaparer, qui deviendraient rentables, devenant ainsi de la recherche appliquée. On a coupé, pourtant.

On a construit à L'Assomption une ferme neuve au coût de 3,5 millions de dollars. On l'a inaugurée l'automne passé. Et cette année, on décide de la fermer en envoyant chez eux 19 employés. Que va-t-on faire des équipements? On ne le sait pas encore. Est-ce cela, la planification du gouvernement? Est-ce ce que le gouvernement entend faire avec les ressources les plus rentables de ce qu'on peut trouver au Québec en recherche et développement? Si c'est cela, le Bloc québécois ne peut pas être d'accord avec cette façon de traiter les agriculteurs québécois. Et cela sera démontré amplement après moi, par d'autres orateurs du Bloc qui en parleront.

Il n'est pas possible qu'on tolère une telle situation. C'est pourquoi nous nous levons en la dénonçant haut et fort.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, le député a parlé d'une perte d'emplois, surtout dans le secteur de la recherche.

Tout le monde s'inquiète de la perte d'emplois dans le secteur de la recherche. Nous connaissons tous l'importance de la recherche. C'est, en fait, l'une des priorités dont le Parti réformiste a parlé dans son budget et dans les documents précédents qui concernaient le budget.

Je partage la philosophie libérale à l'égard de la recherche. J'estime que l'approche que les libéraux préconisent face à la recherche, du moins en paroles, est la meilleure, à savoir qu'il faudrait mieux cibler la recherche, qu'il faudrait conclure plus de partenariats avec le secteur privé afin de pouvoir utiliser conjointement l'argent des contribuables et l'argent des entreprises privées pour former des partenariats et ainsi mettre fin à certains chevauchements dans la recherche et dépenser de façon plus judicieuse les fonds consacrés à la recherche, qu'il faudrait faire jouer un rôle plus important aux entreprises privées dans le ciblage de la recherche pour que la recherche soit faite dans les secteurs qui sont le plus susceptibles de rapporter aux entreprises et de les améliorer. Dans ce cas-ci, il est question de l'agri-culture.

Je partage la philosophie libérale à l'égard de la recherche. Bien entendu, la perte d'emplois dans le secteur de la recherche m'inquiète aussi. Nous n'avons pas les moyens de perdre la recherche. Nous pourrions même faire mieux avec les fonds que nous y consacrons.

Même si je partage son inquiétude à propos de la perte d'emplois, je voudrais que le député me donne son point de vue sur la perte d'emplois que vont entraîner les réductions insuffisantes que ce gouvernement a faites. Autrement dit, il n'y a pas de cible précise dans ce budget. Étant donné l'absence de cible précise, les entreprises n'auront pas le climat dont elles ont besoin pour prendre de l'expansion. Cela ne favorisera pas non plus la création d'entreprises. Par conséquent, il y aura moins d'emplois dans l'avenir et, chose certaine, les emplois qui. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Je voudrais prendre la parole ici pour parler du dilemme dans lequel se trouve la présidence.

[Français]

Nous avons un sujet de grande importance. Un grand nombre de députés, des deux côtés de la Chambre, de tous les partis, ont déjà indiqué qu'ils voulaient participer à ce débat. Si nous allons partager notre temps de parole de 20 minutes en deux périodes de 10 minutes, chacune suivie d'une période de questions et commentaires de 5 minutes, je demanderais à tous les participants de tous les partis de bien s'en tenir à ce que leurs questions soient simples, directes et courtes pour qu'on puisse permettre à celui ou à celle qui vient de livrer son discours de répondre adéquatement à la question importante qu'on soulève du député. Cette remarque s'adresse à tout le monde. Je souhaite que nous puissions procéder de cette façon.

J'accorde la parole à l'honorable député de Joliette.

M. Laurin: Monsieur le Président, je vais faire une réponse courte, si vous pouvez m'indiquer le temps qu'il me reste. Une minute. Il va falloir que ce soit court.

Ce que j'ai voulu dire quand j'ai parlé de L'Assomption pour donner un exemple du manque de planification du gouvernement, c'est qu'une semaine avant la fermeture, ces gens-là ne savaient pas qu'on allait fermer la ferme expérimentale.


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(1200)

Six mois avant la fermeture, on inaugurait, en coupant le ruban, un bâtiment neuf d'une valeur de 3 500 000 $. Pourtant, il ne s'agissait que d'un budget de fonctionnement d'environ 1,3 million de dollars par année. Il ne s'agissait pas de coupures exorbitantes, ce n'était pas un budget exorbitant qui, pourtant, était très productif, donnait des résultats très intéressants. Cette ferme était sur le point, justement, de conclure des ententes avec l'industrie privée. On n'a pas tenu compte de cela, on a dit qu'il fallait couper. Et je ne serais pas surpris que la cible visée eut été celle de Saint-Jean-sur-Richelieu, et qu'on ne l'ait pas fait parce que la fermeture du collège militaire était déjà bien assez.

Alors, on n'a pas voulu ajouter la ferme expérimentale de Saint-Jean, mais on en a choisi deux autres ailleurs. On s'est dit que tout le monde allait être satisfait et qu'on pouvait couper. Monsieur le Président, c'est ce que nous voulons dénoncer.

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur la motion de l'opposition présentée par mon collègue de Frontenac. Au Québec, il se crée, depuis la tenue des États généraux du monde rural, en février 1991, et dans la foulée du Sommet sur l'agriculture de juin 1992, une dynamique incitant les forces vives du milieu rural et du secteur agroalimentaire à converger vers un même but, soit la conquête des marchés. Ici, je reprends l'expression utilisée par le président de l'Union des producteurs agricoles de l'époque, M. Jacques Proulx, «la conquête des marchés», parce qu'elle illustre bien cette vision qui anime le secteur agroalimentaire chez nous.

Les intervenants québécois veulent reconquérir les marchés locaux et pénétrer les marchés extérieurs. À cet effet, un des outils privilégiés par la filière agroalimentaire lors du sommet de Trois-Rivières est d'accentuer l'effort de recherche, de développement et de transfert technologique s'inscrivant dans l'orientation stratégique de la conquête des marchés. Par le Budget Martin, le gouvernement libéral vient sabrer la recherche et le développement, entraînant ainsi la fermeture de deux stations de recherche au Québec, celle de La Pocatière et celle de L'Assomption.

Encore une fois, le gouvernement fédéral fait des coupures de façon unilatérale et sans tenir compte d'un consensus émanant du milieu. Le secteur agroalimentaire québécois concentre des efforts pour s'adapter aux défis de cette fin de siècle et il compte sur toutes ces composantes pour réussir. Les centres de recherche sont un outil appréciable.

Les producteurs de lait du Québec ont su tirer profit et mettre à contribution les résultats de recherche et de développement émanant de diverses sources, dans le but d'augmenter la productivité de leur troupeau, ce qui leur a fort bien réussi. À preuve, le cheptel québécois est parmi les plus productifs au Canada et il se classe honorablement au niveau international.

Cet exemple illustre bien comment les agriculteurs québécois ont optimisé les retombées de la recherche et du développement et les ont intégrées à leur pratique quotidienne. C'est l'ensemble du milieu rural qui bénéficie de ces retombées, qui assurent aussi son maintien.

Dans un autre ordre d'idée, j'aimerais attirer l'attention de mes collègues sur les compressions budgétaires qui s'exercent à la direction générale de la production et de l'inspection des aliments et concernant l'application du plan d'agencement des activités d'Agriculture Canada. Les abattoirs reconnus par le gouvernement fédéral ont l'obligation, depuis le 1er avril 1995, de défrayer une partie des coûts d'inspection des aliments. Ces entreprises ont, préalablement à leur accréditation, à se conformer aux normes canadiennes s'appliquant sur l'aménagement des lieux d'abattage et d'entreposage, et par la suite, au maintien de leur salubrité.

Donc, ce sont là des investissements importants, particulièrement pour les petites entreprises à milieu rural, qui ne peuvent profiter d'économies d'échelle et de la proximité d'un volume de marché suffisant. L'imposition de frais pour l'inspection des viandes est préjudiciable pour les petits abattoirs et par surcroît, elle va pénaliser les municipalités rurales où l'on retrouve ces entreprises. Le gouvernement prône la création d'emplois et adopte des mesures qui mettent en péril des emplois. À titre d'exemple, dans mon comté, deux entreprises auront à surmonter ce nouveau fardeau ou à fermer leurs portes. C'est une cinquantaine d'emplois qui sont menacés.

(1205)

Dans une lettre que j'ai reçue dernièrement à cet effet, le ministre de l'Agriculture favorise le dialogue et la collaboration afin de trouver avec les intervenants sectoriels nationaux des options à privilégier concernant le partage des coûts, la restructuration des programmes et la modification de la prestation des services.

Est-ce que le ministre n'aurait pas dû attendre de trouver, en concertation avec les intervenants, des solutions avant d'appliquer une tarification, et comment considérera-t-il les dédoublements de services, particulièrement entre le ministère de l'Agriculture du Québec et Agriculture Canada quant au service d'inspection?

Lors des États généraux du monde rural, l'ensemble des intervenants québécois souhaitait un rééquilibrage des pouvoirs politiques du haut vers le bas. Fort de cette volonté populaire, le ministre pourrait en profiter pour mettre fin aux dédoublements dans ce secteur et garantir aux Québécois et aux Québécoises qu'ils n'auront qu'à financer un seul service d'inspection et qui sera impartial parce qu'entièrement administré par l'État.

Mon comté étant constitué d'espaces agricoles et forestiers, j'aimerais aborder l'impact du retrait fédéral dans le financement de travaux en forêt privée. Dans le comté de Champlain seulement, l'exploitation de la forêt privée procure de l'emploi à plusieurs centaines de personnes directement et autant indirectement. Également, plusieurs municipalités retirent des taxes foncières grâce aux aménagements et à la plus-value apportés aux boisés privés.

En 1992-1993, au Québec, le financement fédéral en forêt privée générait 71 millions de dollars de chiffre d'affaires pour les entreprises et les exploitants, 30 millions de dollars en salaires et 12 millions de dollars en taxes et impôts retournant dans les


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coffres du gouvernement. On peut donc considérer l'intervention publique en forêt privée comme un investissement.

Chaque million de dollars investi en forêt privée crée de 40 à 50 emplois. Par comparaison, le programme national d'infrastructure ne génère que l'équivalent de 10 emplois-année pour chaque millions de dollars investi.

Le Bloc québécois demande un transfert aux provinces des fonds fédéraux, de même que des responsabilités attenantes, ce qui devrait mieux servir l'intérêt des producteurs et des travailleurs forestiers.

En conclusion, j'invite ardemment le gouvernement fédéral à cesser la duplication de services et à remettre les pouvoirs et les budgets aux provinces qui ont su s'organiser et se doter de services équivalents, et qui répondent davantage aux préoccupations et aux besoins de la population.

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, je voudrais féliciter mon collègue et voisin du comté de Champlain de l'excellent exposé qu'il a fait concernant l'agriculture. ll a soulevé un point qui m'intéresse particulièrement, celui de l'inspection. J'ai entendu parler de la question et cela est pire que ce qu'on m'avait dit.

J'aimerais entendre ses commentaires, notamment sur le caractère d'impartialité qu'il a abordé. Faut-il comprendre que les coûts d'inspections qui étaient déjà assumés par l'État, de façon impartiale, au nom de l'intérêt public, relèvera dorénavant des producteurs qui devront rémunérer les inspecteurs, ce qui placerait ces derniers à leur merci? À cause de ce fait, ils seront à la merci de quelqu'un qui est juge et partie.

Est-ce que cela signifie que l'intérêt public dans ce domaine sera dorénavant menacé au prix du vent de privatisation qui souffle partout et qu'on applique peut-être sans nuance?

M. Lefebvre: Monsieur le Président, je remercie mon collègue et voisin de Trois-Rivières. À l'heure actuelle, il existe des cas dans mon comté, et je voudrais citer le cas de petits abattoirs qui emploient entre 15 et 25 personnes. Par le passé, la supervision de la salubrité des lieux et des aliments se faisait aux frais de l'État. Avec le dernier Budget du gouvernement libéral, ils ont donné une charge monétaire supplémentaire de contributions envers ceux qui possèdent de petits abattoirs. Je crois que ces petits abattoirs ne peuvent pas compétitionner avec les gros, et c'est une iniquité du Budget fédéral.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, je tenais à intervenir parce que vous n'êtes pas sans savoir que mon collègue de Champlain siège au Comité permanent de l'agriculture. Il a toujours démontré, par le passé, un intérêt certain envers l'agriculture.

(1210)

Cependant, j'aimerais qu'il élabore pendant quelques minutes au sujet de la recherche et développement. Il a mentionné, malheureusement, pour le Québec qu'on fermait deux stations de recherche, soit L'Assomption et La Pocatière.

Je me rappelle, j'étais justement au Comité de l'agriculture avec, comme témoin invité, l'honorable Eugene Whelan, que vous avez sûrement très bien connu et qui a laissé sa marque en agriculture. Il nous disait ceci: «Chaque dollar qu'on investit en agriculture rapporte 7 $.»

Je demanderais à mon collègue de Champlain s'il partage l'avis donné par l'honorable Eugene Whelan et, si oui, comment peut-il justifier que le gouvernement libéral coupe dans la recherche et développement en agriculture?

M. Lefebvre: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Frontenac de sa question.

Nous savons que la recherche et le développement représentent les sources dont les agricultures et agricultrices de toute la province de Québec ont vraiment besoin.

J'ai ici un rapport de stratégie fédérale en matière de recherche et de développement. Le gouvernement fédéral investit chaque année près de six milliards de dollars en recherche et développement, sans compter les crédits d'impôt qui représentent annuellement plus de un milliard de dollars. Près de 60 p. 100 de la contribution fédérale en recherche et développement, excluant les crédits d'impôt, est destinée à la recherche intra-muros, c'est-à-dire la recherche effectuée par les laboratoires fédéraux, ce qui inclut l'ensemble des ministères. Le reste est affecté à l'industrie, 977 millions; aux universités, 960 millions; aux exécutants étrangers, 286 millions; et aux autres, 210 millions.

Dans l'ensemble, les dépenses fédérales en matière de recherche et développement favorisent l'Ontario. En 1990-1991, l'Ontario recevait 53 p. 100 des dépenses fédérales, alors que le Québec en recevait 19,5 p. 100. Pourtant, la structure industrielle du Québec ne justifie pas la faiblesse des investissements fédéraux.

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais vous indiquer que je partagerai mon temps avec le député de Durham.

J'interviens dans ce débat sur la motion du député de Frontenac, sans doute inspirée du député de Saint-Hyacinthe-Bagot. Pour ces deux députés, l'agriculture est au Québec ce que le fédéralisme est au Bloc. Ils ne comprennent rien. Ils n'y croient tout simplement pas. Ils sont bloqués.

Le Budget a été présenté au mois de février. La réaction de toutes parts a été bonne. Pour que notre pays continue à évoluer et pour que nous puissions continuer à bénéficier des services auxquels nous tenons, nous devons mettre de l'ordre dans nos affaires. Le Budget Martin a fait précisément cela. On met l'accent sur la réduction des dépenses et non sur les hausses d'impôt. Pour chaque dollar de taxe additionnel, il y a eu 7 $ de réduction de dépenses. Nous cherchons à assainir nos finances en assurant d'abord la promotion de la croissance et de l'emploi. Des décisions difficiles s'imposaient et notre gouvernement a eu


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le courage de les prendre. C'est ça, un gouvernement responsable.

Le gros bon sens est à l'ordre du jour, du moins du côté libéral. Nous avons mis le cap pour maîtriser le déficit; nous sommes sur le bonne voie. Si nous avons fait des choix difficiles, c'est pour pouvoir protéger nos services sociaux, notre sécurité sociale et notre niveau de vie.

Le secteur agricole du Québec n'est pas plus touché par le Budget de 1995 que toute autre province ou secteur. Pour ma part, j'aimerais prendre une approche légèrement différente en témoignant de l'importance que revêt le secteur agricole québécois au sein de l'ensemble du secteur agricole et agroalimentaire canadien.

Les plus récentes données agricoles relatives au Québec sont impressionnantes et témoignent d'un secteur agricole dynamique, viable et prometteur. Par exemple, l'agroalimentaire représente 5 p. 100 du PIB québécois ainsi que 4 p. 100 des emplois de l'économie québécoise pour environ 130 000 emplois directs.

La plus importante industrie primaire au Québec est son secteur agricole et agroalimentaire qui se retrouve en première position des industries manufacturières.

(1215)

Pour ce qui est des chiffres situant le Québec dans un contexte canadien, le Québec fait très bonne figure. En fait, l'agroalimentaire québécois compte pour 22,4 p. 100 du PIB agroalimentaire canadien et pour 25 p. 100 des livraisons manufacturières, alors que 19 p. 100 des recettes monétaires agricoles, 37 p. 100 du lait produit au Canada dont 47 p. 100 du lait de transformation proviennent également du secteur agricole du Québec.

Si on ajoute à ces chiffres le fait que 33 p. 100 des exportations canadiennes de porc et que 9,6 p. 100 de l'ensemble des exportations du Canada proviennent également du Québec, il est évident que le profil du Québec dans le contexte du secteur agricole et agroalimentaire du Canada occupe une place de choix.

Au sein du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, il est reconnu que le succès du secteur agricole provient en bonne partie des efforts déployés par l'ensemble des intervenants du secteur.

Cependant, nul ne peut nier la contribution d'Agriculture et Agroalimentaire Canada à de nombreuses initiatives visant premièrement à assurer la viabilité de l'agriculture et la prospérité du secteur agroalimentaire; deuxièmement, à assurer la sécurité financière à long terme; troisièmement, à favoriser la croissance et la diversification et l'emploi dans les régions rurales; quatrièmement, à assurer la viabilité des ressources et la protection de l'environnement; et cinquièmement, à maintenir un approvisionnement d'aliments sains et de première qualité.

Citons entre autres le fait que les intérêts du secteur agroalimentaire québécois ont été très bien représentés par Agriculture et Agroalimentaire Canada dans le cadre du commerce international, c'est-à-dire les discussions sur l'Accord du libre-échange Canada-États-Unis, l'ALENA qui a suivi et le GATT. Qui plus est, les producteurs et transformateurs québécois ont déjà commencé à tirer parti des nombreuses possibilités, et le tempo devrait s'accélérer à cette époque de mondialisation des marchés.

Et que dire des quatre centres de recherche établis au Québec pour le bienfait de la commuanuté agricole du Canada, des programmes de conservation de ressources naturelles et de la participation d'Agriculture et Agroalimentaire à des initiatives visant à réduire la pollution diffuse, comme Vision 2000.

J'aimerais rappeler aux députés en Chambre que le ministre actuel de l'Agriculture a toujours fait preuve, depuis son entrée au Cabinet, d'un étroit partenariat avec les provinces, avec le secteur privé, les institutions d'enseignement, les associations de producteurs agricoles, les secteurs de la transformation et tous les producteurs canadiens.

Et c'est dans ce sens que ça va continuer, dans le sens de la coopération et de la concertation. L'agriculture va continuer à évoluer très rapidement au Québec et au Canada. Les électeurs de Brome-Missisquoi sont fiers d'avoir élu un député libéral qui est prêt à travailler pour tous les producteurs agricoles, autant de Brome-Missisquoi que d'ailleurs. Ils ont préféré choisir le dynamisme, l'ouverture, la concertation que je leur proposais plutôt qu'un blocage continuel avec le Bloc. Et c'est dans un fédéralisme souple et flexible que nous continuerons d'évoluer sécuritairement à l'intérieur du Canada.

Les producteurs laitiers, les producteurs de porc, de céréales, de pommes, et les autres producteurs, toute l'industrie de la transformation vivent et vivront des moments de grands changements dans le vaste monde des échanges internationaux.

Plutôt que de chialer, débloquons-nous, aidons-les.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, je vous rappelle encore une fois qu'en octobre 1993, les Québécois, les Canadiens se sont donné une nouvelle dynamique, mais particulièrement les Québécois.

Avant 1984, il se trouvait en cette Chambre 74 députés libéraux semblables à celui que je viens d'entendre. Aujourd'hui, il y a au moins 53 députés du Bloc québécois qui osent se lever en cette Chambre pour dénoncer des iniquités. Lors de la dernière campagne électorale à laquelle mon collègue a fait allusion tout à l'heure, je l'ai suivi quelques jours et il était toujours caché, alors que moi je circulais aux alentours de son comté. Je fréquentais régulièrement l'Encan Lafaille et Fils.

(1220)

Je l'invite à aller voir, lundi prochain, les agriculteurs à l'Encan Lafaille, à Coaticook, pour leur demander ce qu'ils pensent du Budget Martin au sujet de l'agriculture. Ce gars-là est complètement coupé de la réalité. Qu'il aille voir l'UPA, sur le boulevard Bourque, à deux pas de son comté, tout près de Magog, voir ce que l'UPA Sherbrooke pense du Budget Martin, particulièrement des coupures dans le secteur laitier. Qu'il lise La Terre de chez nous, qu'il regarde ce que les agriculteurs pensent de son


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gouvernement, et il va s'apercevoir que les agriculteurs sont peu fiers de ce Budget.

Pourquoi ne parle-t-il pas de ces agriculteurs qu'il n'a pas rencontré durant la campagne électorale, parce qu'il a refusé tout débat? Il n'en parle pas, il se cache, il se camoufle. Et lorsque le Québec était représenté par 74 députés, 74 moutons, cette dynamique a été nuisible. Et moi, j'invite, en terminant, mon collègue à se rendre sur le boulevard Bourque. Je l'invite à se rendre, lundi prochain-je vais l'accompagner s'il ne connaît pas le chemin-à l'Encan Lafaille et questionner, jaser avec les agriculteurs. Il va peut-être se rebrancher sur la réalité.

Il est bien beau d'avoir une classe d'avocats, mais une classe d'agriculteurs défendue par des agriculteurs, c'est encore bien mieux. Alors, j'invite l'ancien bâtonnier du Québec à se positionner en faveur de l'agriculture.

M. Paradis: Monsieur le Président, en parlant de terrain, je rappellerais à mon honorable confrère que je viens de terminer une campagne électorale, que j'ai rencontré beaucoup d'agriculteurs dans Brome-Missisquoi. Par la suite, j'ai rencontré des agriculteurs d'ailleurs, aussi. Je remercie l'ensemble des agriculteurs de Brome-Missisquoi pour avoir voté libéral aux dernières élections. Je les remercie énormément de cette confiance qu'ils ont eue envers leur député actuel de Brome-Missisquoi. Je les remercie beaucoup.

Pour revenir sur un petit point mentionné par l'opposition officielle, on parlait de recherche et développement, tout à l'heure. Plusieurs députés du Bloc ont parlé de recherche et développement dans le cadre de ce débat, et il y a peut-être lieu de se demander si le ministre provincial de l'Agriculture du Québec, un de leurs bons amis de la maison mère péquiste, a entendu les propos des gens du Bloc, lui qui vient de déposer des crédits à Québec. Et quand on lit dans les crédits du ministère de l'Agriculture du Québec, à la section «Formation, recherche et développement économique», on voit que le budget alloué à ce poste est passé de 45 millions à 41 millions de dollars, ce qui représente une baisse de 4 millions de dollars en recherche et développement.

Leurs petits amis de la maison mère leur font subir une baisse de quatre millions de dollars en recherche et développement. Alors, à tout le moins, il y aurait lieu d'envoyer immédiatement une copie des remarques que ces gens viennent de faire, relativement à la recherche et développement, à la maison mère péquiste et à l'honorable ministre de l'Agriculture du Québec.

[Traduction]

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une certaine expérience de l'agriculture. En cette époque de l'année, je serais normalement dans les champs en train de cultiver la terre. Et c'est ce que font la plupart des agriculteurs de Durham. Je me demande parfois si leur sort n'est pas préférable au mien.

Dans ma circonscription, un emploi sur cinq est lié au secteur de l'agroalimentaire et 2,8 p. 100 de la production laitière de la province provient des producteurs de Durham. Nos ventes de grains dépassent 10,5 millions de dollars. Nous avons acquis une réputation mondiale fort enviable pour nos productions fourragères et animales. L'agriculture n'est donc pas étrangère aux habitants de Durham.

En fait, 1,8 million de Canadiens sont engagés dans la vocation agricole. Ce secteur génère 8 p. 100 de notre produit intérieur brut et 15 p. 100 des emplois au Canada. C'est donc une industrie de première importance.

L'agriculture est un secteur où le gouvernement fédéral et les provinces se partagent la compétence et je crois qu'il en est ainsi pour plusieurs bonnes raisons. Ce partage des compétences existe depuis les débuts de la Confédération. Tous les Canadiens ont certainement une chose en commun; ils doivent tous manger. Il est donc important de fabriquer nos produits agricoles de la façon la plus efficace, de les transporter à l'intérieur du pays le plus efficacement possible et de maintenir l'excellente réputation du Canada à titre d'exportateur de produits agricoles.

(1225)

Je voudrais expliquer brièvement comment le Québec bénéficie à certains égards du partage de compétences. On a soutenu aujourd'hui que l'industrie agricole du Québec subventionnait certains secteurs agricoles au Canada.

En 1990, le Québec a reçu 35,1 milliards de dollars en dépenses et impôts fédéraux et qu'il a payé 24,5 milliards d'impôts. Ces chiffres montrent bien que le Québec ne subventionne pas le système. En jouant avec les chiffres, on a gonflé un aspect du système de dépenses et d'impôts à l'appui de l'argumentation.

Le Québec bénéficie du système à bien d'autres égards. Pendant les négociations du GATT, le gouvernement est intervenu très énergiquement et avec succès pour protéger les industries soumises à la gestion de l'offre. Les barrières douanières élevées empêcheront une réduction rapide du prix des produits au Canada. Tous les agriculteurs canadiens en bénéficient, mais la population de Durham, qui possède une importante industrie laitière, a remercié le gouvernement de ce qu'il avait fait pour elle. Je suis sûr que les producteurs laitiers du Québec éprouvent le même sentiment.

Lorsque la gestion de l'offre a été établie au Canada, le Québec a obtebu 48 p. 100 des contingents de production de lait de transformation. C'est la part actuelle des agriculteurs québécois.

Nous avons abordé très brièvement la recherche et le développement. Le porte-parole du Bloc pour les questions d'agriculture, le député de Québec-Est, a fait tout récemment une déclaration très intéressante que je cite: «Il ne fait aucun doute que le ministère de l'Agriculture ne traite pas le Québec de façon injuste en ce qui concerne la recherche.» Le Bloc lui-même rconnaît que le Québec n'est pas traité injustement au sein de la fédération.

Le gouvernement fédéral consacre environ 360 millions de dollars à l'agriculture au Québec. Le Québec vend trois fois plus de sa production agricole au Canada qu'il n'exporte. C'est dire que le marché canadien revêt une grande importance pour la production agricole québécoise. Le Québec vend plus du tiers de sa production agricole sur le marché canadien et il en consomme lui-même une partie encore beaucoup plus considérable. Le


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Canada est, de toute évidence, un consomateur important de produits québécois.

À l'heure actuelle, quelque 1 400 employés fédéraux travaillent au Québec pour aider l'industrie agricole. En réduisant les subventions, et je crois que c'est là l'essentiel de la motion dont nous sommes saisis, nous accroîtrons la flexibilité dans le secteur agricole.

C'est justement ce que réclament les députés du Bloc, depuis un an, c'est-à-dire réduire les subventions céréalières et les subventions au transport du grain de l'Ouest. C'est ce que nous avons fait. Le Bloc devrait se réjouir aujourd'hui, plutôt que de présenter des motions de ce genre et se plaindre du fait que cela se produit maintenant.

En réduisant les subventions, nous donnons aux agriculteurs la possibilité d'être innovateurs et d'offrir des produits à valeur ajoutée. Pourquoi envoyons-nous nos matières premières dans le monde entier alors que d'autres pays nous expédient des produits finis? Il s'agit d'une situation à laquelle doivent s'attaquer les agriculteurs du Québec et de l'Ouest et, en fait, de tout le Canada.

Les agriculteurs de ma circonscription ne se plaignent pas de la réduction de 30 p. 100 des subventions à la production de lait de transformation. Ils ne l'apprécient pas, mais ils la comprennent et ils s'en inquiètent moins. Quand le gouvernement a présenté son budget, ils sont venus me voir pour me demander de m'assurer qu'on allait maintenir la position que le gouvernement avait négociée pour eux.

En 1993, le secteur agroalimentaire du Québec représentait 1,2 milliard de dollars, soit 9 p. 100 des recettes totales du marché canadien. Au cours des 12 dernières années, le revenu agricole a augmenté de 67 p. 100 au Québec. Les agriculteurs québécois ont le plus fort revenu par habitant de tous les agriculteurs du pays. Comment expliquer alors que les députés du Bloc se plaignent?

(1230)

Revenons sur le fédéralisme coopératif et précisons pourquoi il s'agit d'un champ de compétence partagée. Le rapport que le gouvernement du Québec a publié encore l'année dernière montrait que les deux ordres de gouvernement unissaient très bien leurs efforts. C'est ce qu'on disait en conclusion. On ajoutait que les chevauchements étaient minimes, qu'ils représentaient moins de 1 p. 100 des dépenses fédérales-provinciales, au total.

En juillet 1994, les ministres fédéral et provinciaux de l'Agriculture ont réitéré l'engagement qu'ils avaient pris de collaborer pour veiller à ce que les exportations canadiennes atteignent deux milliards de dollars d'ici l'an 2000. Ils ont dit vouloir que le Canada représente à nouveau 3,5 p. 100 de tous les échanges sur le marché mondial de l'agriculture. Cela a déjà été le cas, mais cette proportion a baissé au cours des deux dernières années. Le groupe de travail fédéral-provincial s'est donné pour objectif de ramener à 3,5 p. 100 la part du Canada. C'est pour cela qu'il a établi un conseil de développement fédéral-provincial.

On crée ainsi un guichet unique pour que tous les secteurs de l'agriculture puissent commercialiser leurs produits sur le marché mondial. En fait, le gouvernement fédéral a chargé 50 fonctionnaires fédéraux à temps plein de trouver des façons de pénétrer 150 marchés étrangers dans le monde entier.

En résumé, si les gouvernements fédéral et provinciaux continuent de collaborer, si nous unissons nos efforts pour résoudre les problèmes de l'agriculture et pour utiliser efficacement les budgets de recherche, bien que moindres, notre pays sera alors un chef de file mondial dans la commercialisation des produits agricoles dans le monde entier et nous pourrons aussi compter sur une industrie plus efficiente au Canada même.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je reprendrai un point mentionné par le député dans son discours qui m'apparaît très pertinent. Il se demandait pourquoi on importe tant de produits de l'extérieur, pourquoi il y a des endroits où le Canada n'est pas autosuffisant.

Dans ce sens, il rejoint la position de la Fédération canadienne du mouton qui dit: «Le gouvernement du Canada abandonne sans raison une production en plein développement.» Comment explique-t-il la décision de son gouvernement d'éliminer l'aide à la recherche et développement à cette industrie qui depuis 1976 est passée, à la grandeur du Canada, de 23 p. 100 à 45 p. 100 d'autosuffisance? Pourquoi donne-t-on le message à toute l'industrie du mouton qu'il n'y aura plus de recherche et développement et qu'on redeviendra, possiblement, plus dépendants des importations?

Qu'est-ce qui peut justifier une telle décision de la part du ministre? Il n'est pas question ici de protéger seulement le marché québécois, c'est un constat de la Fédération canadienne du mouton qui n'en revient pas de cette décision.

L'autre question que j'aimerais lui poser aussi concerne la juridiction partagée. Comment se fait-il qu'à La Pocatière, dans un milieu où il y a un institut de technologie agricole qui dépend du gouvernement du Québec et une ferme expérimentale du fédéral, qu'on ferme la ferme sans même en informer le gouvernement du Québec, sans proposer aucune autre solution d'utitlisation? Est-ce que ce n'est pas là l'impact négatif majeur d'une juridiction partagée comme celle qu'on a en agriculture?

[Traduction]

M. Shepherd: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question concernant la fermeture d'un de ces établissements.

De toute évidence, il fallait rationaliser les établissements de recherche au Canada. Cela ne touche pas que l'agriculture. Cela concerne aussi l'industrie, la technologie et toutes sortes de secteurs où il s'agissait de savoir s'il fallait avoir des établissements de recherche un peu partout au Canada.

La technologie et la recherche peuvent se passer d'un établissement bien à elles. Je constate que, de nos jours, une bonne partie de notre technologie peut être issue de la recherche faite à domicile. La question n'est pas de savoir si nous devons cons-


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truire des établissements de recherche au Québec ou au Manitoba. Je constate également que l'établissement agricole que nous avons ici à Ottawa se départit de bon nombre de services qui ont été transférés au Québec.

(1235)

Le député s'intéresse aux agneaux et aux moutons, mais je dois avouer que je ne m'y connais pas beaucoup. Je suppose, toutefois, qu'il s'agit là sans doute d'un effort de rationalisation. Il ne fait aucun doute que nous ne pouvons être compétitifs dans tous les produits agricoles. Il est évident qu'il faut se concentrer sur les domaines où on peut réussir mieux qu'ailleurs.

J'ignore si c'est le cas des moutons et des agneaux, mais j'ai le sentiment qu'il y a tellement de domaines dans le secteur agricole où nous pouvons être efficaces et compétitifs. Je crois savoir que c'est un domaine qui est en butte à une vive concurrence de la part de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande. Il faudrait me livrer à une étude comparative de nos rendements respectifs pour répondre correctement à la question.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je vais vous informer tout de suite que je partagerai mon temps de parole avec le député de Shefford.

Je profite de cette chance d'intervenir au cours de cette journée sur l'agriculture pour mettre l'accent sur une décision prise par le gouvernement fédéral lors du dernier Budget et sur laquelle on peut fortement s'interroger.

Le soir du Budget, on nous a annoncé que la ferme expérimentale de La Pocatière fermerait. Comme elle est située dans ma circonscription, il est sûr que je peux trouver cela inacceptable et défendre la réalisation de cette fermeture. Mais mon étonnement le plus grand est venu lorsque j'ai vu la justification qui est donnée dans le budget de dépenses du ministère de l'Agriculture. On y dit ceci: «On ferme l'installation parce que le mouton et l'agneau sont des produits à priorité peu élevée.» J'aimerais faire la démonstration à cette Chambre que ce n'est pas le cas.

Dans ma région, on a fait une priorité de la Stratégie de développement en agroalimentaire pour toute la Municipalité régionale de comté de Kamouraska. Le Conseil régional de concertation et de développement du Bas-Saint-Laurent l'a inscrite aussi dans ses priorités. Jusque-là, vous allez me dire que c'est normal, puisqu'il y a un intérêt régional. Mais là, on est rendu aussi avec la Fédération canadienne du mouton qui, en collaboration avec la Fédération des producteurs d'agneau et de mouton du Québec, considère que le gouvernement du Canada abandonne sans raison une production en plein développement.

Sur quoi s'appuie-t-on pour dire cela? Est-ce que ce sont des paroles en l'air ou si c'est basé sur une réalité? Mes recherches m'ont permis de constater que, de 1976 à 1992, au Canada, on est passé d'un taux de 23 p. 100 à un taux de 45 p. 100 d'autosuffisance. Cela veut dire que, pendant ces années, on a réussi à faire que la production du mouton au Canada participe plus à l'économie du pays et contribue à la richesse des Canadiens. Plus que cela. Entre 1971 et 1991, il y a eu un accroissement du cheptel de l'ordre de 8,7 p. 100. Au Québec, entre 1971 et 1991, il y a eu une augmentation du nombre de bêtes de 88 000 à 121 000, soit 37 p. 100 d'augmentation.

Donc, quand le ministère de l'Agriculture dit que c'est un produit à priorité peu élevée, je cherche les arguments qui peuvent justifier cette prise de position, puisqu'il y a une augmentation très nette de la production et de la consommation. Le marché prend plus d'ampleur grâce au fait qu'il y a eu un taux d'immigration intéressant au Québec et au Canada. En effet, pour beaucoup de communautés culturelles l'agneau fait partie de leur culture et de leur alimentation.

À ce moment-là, qu'est-ce qui justifie qu'on décide de couper dans ce secteur? Il faut comprendre que la recherche et le développement, pour une industrie, sont très importants. On n'a pas bâti l'industrie laitière qu'il y a au Québec, en Ontario et au Canada sur rien. Il y a eu des recherches pour faire que les bêtes soient plus productives, que la qualité du lait soit meilleure et qu'il y ait de meilleurs produits dans le domaine de la transformation.

Dans le domaine de l'agneau et du mouton, on est en train de mettre en place le même genre de responsabilité. Je vais vous donner un exemple de projets de recherche qui étaient en cours à la Ferme expérimentale de La Pocatière, pour que vous compreniez que ce ne sont pas des recherches farfelues mais vraiment de la recherche concrète qui vise à aider l'industrie.

Par exemple, on veut enrichir l'alimentation des brebis qui nourrissent trois petits au lieu de deux, ce qui augmente de beaucoup la productivité. C'est très concret. C'est quelque chose qui permet de diminuer le coût de production, d'entrer plus facilement sur le marché et de compétitionner le marché de Nouvelle-Zélande ou le marché d'Australie de façon très concrète.

(1240)

Ensuite, il y a d'autres études sur la régularisation du cyle de reproduction. On est même en train de bâtir un logiciel pour la régie du troupeau. L'informatique a fait son apparition dans le domaine agricole, comme dans d'autres secteurs. Il m'apparaît important que ce genre de recherche puisse se faire. Si on ne permet pas à une industrie comme la production ovine de profiter des mêmes avantages de recherche que ceux des autres secteurs, c'est comme dire aux producteurs qui ont investi dans ce domaine qu'on met la clé sous la porte.

Pour donner un autre exemple, on fait aussi des études sur l'utilisation du tourteau de canola pour nourrir les moutons. Le tourteau de canola, pour ceux qui ne savent pas ce que c'est, c'est le résidu du canola. Ce type de recherche est intéressant pour les gens de l'Ouest, parce que la production de mouton est en hausse dans l'ouest du Canada, et pour l'est du Canada aussi parce que le canola y est produit. Il peut être utilisé à la grandeur du pays et coûterait moins cher que certains autres éléments de l'alimentation actuellement.

Ces exemples de projets de recherche sont des choses concrètes. Ce sont des exemples qui prouvent que cette ferme-là avait un mandat national d'appui à l'industrie ovine. La raison du fédéral pour fermer cette exploitation est qu'on considère le mouton comme un produit à priorité peu élevée. Est-ce que c'est raisonnable de faire cela, aujourd'hui, dans le contexte qu'on


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connaît, de demander aux agriculteurs de diversifier leur production, tout en étant prêts à faire face aux changements du marché?

Si l'on considère que la production ovine est la plus écologique des productions agricoles, et permet de mettre en valeur des terres qui ne peuvent l'être autrement, est-il logique de fermer le seul centre de recherche sur la production ovine du Canada, c'est-à-dire la Ferme expériementale de La Pocatière?

Je pense qu'il s'agit, comme il y en a probablement dans chaque budget, d'une coquille importante. Le Bloc n'a jamais dit qu'il ne fallait pas qu'il y ait de coupures dans le Budget canadien, on a fait des suggestions à cet égard. Mais quand on coupe dans les fonds de recherche et développement pour une industrie qui progresse, c'est une économie de bouts de chandelles inutile et qui risque de nous retomber sur le nez.

On dirait que c'est un autre exemple du fédéralisme canadien. Les producteurs ovins qui seront moins compétitifs devront faire appel plus souvent au programme de stabilisation. Cela met un pression supplémentaire sur le gouvernement du Québec. Ce genre de décision nous apparaît inacceptable et entre dans la première partie de notre motion quand on dit «qu'on dénonce le gouvernement pour avoir réduit de 19 p. 100 le budget général du ministère de l'Agriculture.»

Si les 19 p. 100 de coupures avaient été dans des secteurs qui n'hypothéquaient pas l'avenir des productions, on aurait pu voir ce que cela signifiait en termes de résultats. Mais lorsqu'on coupe au-delà de 400 emplois dans la recherche et développement dans le secteur agricole du Canada-qui se traduiront par une perte de 30 emplois à La Pocatière dans la région de Kamouraska-, comment peut-on prétendre, en même temps, être un gouvernement créateur d'emplois et éliminer de façon systématique des emplois dans des secteurs bien rémunérés et qui aident au développement de l'économie?

Quand on coupe des postes de chercheurs, de biologistes, de techniciens en agriculture, de manoeuvres, quelles justicifications pourra-t-on offrir pour dire qu'on a coupé 30 emplois, mais on annoncera la semaine prochaine qu'on en a créé 25 ailleurs dans un autre secteur? Il y a comme un non-sens dans cette décison.

Je pense connaître une des raisons fondamentales de ce choix. On a spécialisé les fermes expérimentales en leur donnant un mandat, par exemple, comme celui de La Pocatière, dans la production ovine. On a investi environ sept millions de dollars dans les dernières années. On a reconstruit une bergerie qui avait brûlé. Et tout à coup, on décide de mettre fin à l'exploitation. Comme il n'y avait qu'un mandat dans ce secteur, tous les autres se sentent peu touchés. On a commencé à éliminer les liens importants qui existaient entre cette ferme et l'économie régionale.

(1245)

Je pense qu'un volet du mandat aurait dû être maintenu de ce côté-là. Aujourd'hui, on est devant la situation où il y a une multitude d'intervenants, et je peux vous en nommer quelques-uns qui ne sont pas nécessairement identifiés comme étant des bloquistes, des séparatistes, des souverainistes, et je vais vous donner un exemple. Les responsables de l'Institut de technologie agricole à La Pocatière, un institut qui est situé à côté de la ferme, l'Université Laval, la Société des éleveurs de moutons de race pure, les deux fédérations nationales que je vous ai mentionnées tantôt, le ministère de l'Agriculture du Québec, l'ensemble de ces intervenants viennent demander une rencontre au ministre pour lui dire: On va vous expliquer ce qu'on pense être une erreur là-dedans, pourquoi il faut que vous reveniez sur votre décision.

J'espère que le ministre de l'Agriculture aura le bon sens d'accepter les arguments et de voir quelles sont les solutions possibles pour qu'à la fois la recherche et le développement pour l'industrie ovine au Canada puissent être, maintenus et développés, puissent être un appui intéressant pour les producteurs et, en même temps, permettre qu'une des régions agricoles du Canada qui a le plus grand passé puisse maintenir son implication, puisse s'assurer un avenir par une ferme expérimentale qui soit prospère à La Pocatière.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, à entendre le discours de mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup, on est à même de constater que La Pocatière fait bien entendu partie de sa circonscription.

Encore une fois, je rappellerai que la recherche et le développement en agriculture, c'est le nerf. C'est le nerf de la réussite, c'est la différence entre un pays autosuffisant pour nourrir son peuple ou encore un pays du tiers monde qui doit constamment importer sa nourriture pour nourrir ses bouches.

Ce qui m'intéresse particulièrement dans le mouton c'est la race DLS. Des chercheurs, notamment des chercheurs de La Pocatière, avec la collaboration de chercheurs de Lennoxville, à proximité du comté de mon collègue de Mégantic-Compton-Stanstead et du mien, Frontenac, ont réussi à créer génétiquement une nouvelle race de moutons qui laissera sa marque dans le futur de l'élevage ovin au Québec et au Canada.

Ce qui est encore le plus décevant dans le cas de mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup, c'est bien entendu le fait que, suite à un incendie à la ferme expérimentale, le gouvernement fédéral, par son manque de vision, a investi près de sept millions de dollars pour réparer, pour reconstruire des bâtiments où on ferait notamment des recherches sur les moutons. Aujourd'hui on nous annonce, dans un budget sans vision globale, qu'on va fermer cette station de recherche qui, soit dit en passant, était la plus vieille au Canada et au Québec, bien sûr.

M. Crête: Monsieur le Président, je veux profiter de l'intervention du député de Frontenac pour montrer encore plus l'illogisme de cette décision. Il y a quelques années, la Fédération des producteurs de races pures de moutons avait à décider où elle installerait son centre d'insémination artificielle. Cela s'est fait dans les deux ou trois dernières années. On a décidé que la ferme expérimentale qui a le mandat en ovins au Canada, c'est La Pocatière, on va donc installer notre centre d'insémination à La Pocatière. De la sorte, il y aura un lien direct entre les chercheurs, les gens de l'industrie et on pourra travailler de façon efficace.

L'exemple qu'on nous donnait du développement de nouvelles races, c'est effectivement le genre de champ d'action auquel on peut s'attendre d'une ferme expérimentale qui travaille dans un domaine de production et qui peut permettre de développer des races, des individus, des groupes qui vont être plus productifs. On peut faire toutes sortes de recherches sur le mouton pour s'assurer qu'ils vont être compétitifs, qu'ils vont permettre d'en-


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trer dans le marché qu'on importe présentement de Nouvelle-Zélande. Personne ne va pouvoir m'expliquer aujourd'hui que c'est plus payant à long terme pour les Québécois, pour les Canadiens, d'importer des moutons de Nouvelle-Zélande, alors que nous ici avons entrepris une démarche depuis 20 ans pour aller vers l'autosuffisance.

(1250)

Au moment où on atteint 50 p. 100, le gouvernement fédéral coupe l'herbe sous les pieds et cela, sans aucune consultation. Personne n'avait entendu parler de ce projet avant le soir du Budget. Là, le milieu s'est élevé contre cette décision et on demande au ministre de reconsidérer sa décision de rencontrer les gens du Comité de survie, pour s'assurer qu'on va à la fois permettre à la production de l'ovin de continuer dans l'avenir, d'avoir un appui adéquat en recherche et développement et à la Ferme expériementale de La Pocatière de continuer son action.

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, l'agriculture est, encore aujourd'hui, la base de l'économie rurale du Québec et du reste du Canada. Au Québec, près de 50 p. 100 du revenu des exploitants agricoles provient de produits soumis à la gestion de l'offre, tels le lait, les oeufs, les poulets et les dindes. Ainsi, le lait industriel représente 27 p. 100 de la production agricole québécoise. Les agriculteurs, les agricultrices, les producteurs laitiers de mon comté, qu'ils viennent de Marieville, de Saint-Césaire, de Roxton Falls ou de Béthanie, sont inquiets.

Sous le régime actuel de gestion de l'offre canadienne de lait industriel, établie en 1990, les agriculteurs du Québec possèdent près de 48 p. 100 des quotas canadiens de lait industriel et 46 p. 100 de ce lait est vendu dans les autres provinces canadiennes, représentant une valeur, à la ferme, de 400 millions de dollars et, au marché, de un milliard de dollars. Au Québec, le lait industriel implique quelque 2 900 producteurs laitiers et sa transformation, quelque 4 000 emplois réguliers à temps plein. C'est donc dire que c'est très important pour nous.

En vertu du Budget fédéral déposé par le ministre des Finances en février dernier, les producteurs de lait industriel du Québec se verront amputés, coupés d'un seul coup, de 30 p. 100 de leurs revenus en deux ans. Cela veut dire que dès la première année d'entrée en vigueur et de façon unilatérale, les producteurs de lait industriel verront leurs revenus de base baisser de 15 p. 100 la première année, et d'encore 15 p. 100 l'année suivante.

Comment penser que cette mesure budgétaire ne pourra se faire sans de lourds sacrifices financiers pour les exploitants et les communautés rurales du Québec et du Canada? Comment penser qu'il n'y aura pas de changement radical de la structure rurale? La réalité du monde rural contraste profondément avec les discours du gouvernement libéral qui prône le développement de nouveaux marchés et la sécurité du revenu des agriculteurs. Paradoxalement, aux dires du gouvernement libéral fédéral, ces mesures budgétaires sont un moyen de stabiliser les prix et les revenus des producteurs par rapport à la tendance mondiale, mais surtout une façon de réduire la dépendance du monde agricole envers l'État.

La réalité, c'est que l'industrie agroalimentaire québécoise et canadienne ne fait pas le poids dans la balance des négociations internationales pour l'ouverture des marchés. Autrement dit, le fédéral préfère sacrifier un pan complet de son économie, afin de préserver d'autres avantages économiques comparatifs qu'il a réussi à négocier avec les États-Unis et les autres pays industrialisés. Je comprends cette stratégie purement économique, dégagée de tout sentiment, où les hommes et les femmes qui produisent le pain et le beurre sont de simples statistiques, sans autre valeur que le signe de dollar qui se rattache à la production.

Cependant, il y a un énorme écart entre comprendre une chose et l'accepter. Je ne puis accepter que les agricultrices et les agriculteurs du Québec ou d'ailleurs soient des victimes du système. J'ai de la difficulté à accepter que les spéculateurs financiers aient pris le haut du pavé, au détriment de ceux qui nourrissent nos familles, je le répète, nourrissent nos familles depuis nombre de générations.

Des voix: Bravo!

M. Leroux (Shefford): Je ne puis accepter qu'on veuille démonter un système qui aura pour cause de mettre en danger la sécurité nationale du Québec et du reste du Canada et qui nous laissera vulnérables face aux spéculateurs des marchés agricoles internationaux.

(1255)

Combien de générations d'hommes et de femmes ont travaillé à défricher nos terres? Ces terres qu'ils ont rendues fertiles et qui produisent aujourd'hui l'abondance et la diversité de nos produits agricoles. C'est cela que les libéraux veulent sacrifier!

Est-ce parce que le Québec contrôle 48 p. 100 du marché de lait industriel que le gouvernement libéral veut délaisser le pain et le beurre des producteurs laitiers? Ou est-ce simplement que les libéraux fédéraux continuent la croisade contre les producteurs laitiers par le biais des politiques agricoles désavan-tageuses, définies. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Mes chers collègues, on vous demande votre coopération. Je comprends que, des fois, il y a un peu d'animation qui se fait.

M. Leroux (Shefford): Cela fait mal au whip du Parti libéral lorsqu'on dit des vérités. Pourtant, il est d'un comté agricole de l'Ontario. Il devrait comprendre les problèmes que j'explique et qui sont les mêmes pour son comté, un comté majoritairement francophone.

Depuis 1958, l'industrie laitière a été constamment protégée et encouragée en vertu de la Loi sur la stabilisation des prix agricoles par des conservateurs. Conséquemment, depuis 1986, Ottawa avait approuvé une politique laitière à long terme et avait autorisé des paiements aux producteurs laitiers de 6,03 $ l'hectolitre de lait industriel ayant 3,6 kilogrammes de matières grasses. Cela s'est fait sous les conservateurs.

En 1991, les conservateurs abrogent la Loi sur la stabilisation des prix agricoles pour la remplacer par la Loi sur la protection


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du revenu agricole et ainsi mettre un terme au support de l'industrie laitière en l'excluant de cette nouvelle entente.

Dans le discours du Budget de novembre 1992, le gouvernement conservateur avait annoncé son intention de réduire de 10 p. 100 le niveau de subventions à l'industrie laitière, en même temps que d'autres réductions similaires pour toutes les subventions et contributions au secteur agricole.

À partir de la campagne laitière commençant le 1er août 1993, cette décision donnait le droit au gouvernement fédéral de réduire le taux des paiements aux producteurs laitiers de 6,03 $ l'hectolitre de lait à 5, 43 $. C'est tragique.

Ainsi, le gouvernement libéral actuel n'avait qu'à entériner la politique agricole des conservateurs afin que cette réglementation lui donne l'autorité d'établir le taux de subvention à 5,43 $ par hectolitre et ce, débutant par l'année fiscale allant du 1er avril 1994 à mars 1995. Ce que l'on peut dire, c'est que plus ça change, plus c'est pareil.

On a eu des conservateurs, ici, qui ont gouverné, et maintenant des libéraux, et c'est tout à fait la même chose qui se produit. Ce qui me frappe le plus, c'est quand je lis l'objectif du gouvernement dans la Partie II du Budget des dépenses 1995-1996, sous la rubrique Agriculture et Agroalimentaire, Commission canadienne du lait, page 5-8, et je cite: «Offrir aux producteurs efficaces de lait et de crème l'occasion d'obtenir une juste rétribution de leur travail et de leurs investissements et assurer aux consommateurs de produits laitiers un approvisionnement continu et suffisant de produits laitiers de bonne qualité.» Est-ce cela que vont produire les 15 p. 100 par année de moins de revenu? Non.

Quelle inconsistance de la part du gouvernement! C'est comme si l'ensemble des producteurs laitiers n'étaient pas efficaces et comme s'ils étaient beaucoup trop payés par rapport à leurs investissements et à leur travail. Allez travailler sur une ferme une semaine, et vous verrez que c'est un travail qui est très pénible, qui est long et où on ne compte pas ses heures. Pire encore, par cet énoncé, on tente de nous rassurer qu'il n'y aura aucune incidence dans l'approvisionnement de produits laitiers aux consommateurs et que ceux-ci pourraient même peut-être bénéficier d'une réduction du prix à la consommation. Et voilà, le tour est joué. Tout le monde y trouvera son compte. Quelle arrogance!

Finalement, je voudrais apporter un dernier point à mon intervention d'aujourd'hui.

(1300)

Comment se fait-il que le gouvernement fédéral, gouvernement libéral, ait prévu des mesures transitoires de 1,6 milliard de dollars aux propriétaires des terres agricoles des provinces de l'Ouest parce qu'il met fin aux subventions du transport du grain et que d'autre part, il n'y ait aucune mesure de transition pour les agriculteurs du Québec? Pourquoi les producteurs de l'Ouest sont-ils avantagés au détriment de ceux du Québec?

Comment se fait-il que le gouvernement fédéral ait toujours deux poids, deux mesures, quand il s'agit des intérêts des électeurs de provinces anglophones? Encore une fois, n'est-ce pas un signe que le Canada est deux pays? N'est-ce pas un signe qu'il y a deux pays dans ce pays, il y a l'Est et il y a l'Ouest? Ce n'est pas une question de racisme, c'est que nous avons toujours eu deux politiques différentes parce que l'agriculture n'est pas la même. Lorsqu'on regarde, on s'aperçoit d'une chose, c'est que le Québec a toujours été défavorisé.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, j'ai trouvé très intéressante la présentation du député de Shefford sur la question des impacts chez l'agriculteur de la diminution du subside laitier, mais j'aimerais qu'il nous donne des précisions. L'évaluation que j'en ai faite est que, finalement, la disparition ou la diminution de ce subside ne pourrait-elle pas avoir un impact sur le prix de la livre de beurre, qu'il y ait une augmentation allant jusqu'à 30c. la livre? Cela va pénaliser encore plus les gens qui sont les bas salariés.

Payer 30c. de plus pour une livre de beurre, pour quelqu'un qui gagne 50 000 $ par année, ce n'est peut-être pas grand-chose, mais 30c. sur chaque livre de beurre toutes les semaines dans une famille monoparentale, où le parent concerné gagne 10, 12, 15 000 $ par année, cela a un effet beaucoup plus grand. Est-ce que cet effet n'est pas en danger de se réaliser, de telle façon que le consommateur va, en bout de ligne, avoir à absorber le prix et que cela va toucher de façon beaucoup plus directe les gens qui ont des revenus moins élevés?

M. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, je remercie mon honorable collègue pour sa question et je dois dire aux députés de cette Chambre qu'il est bien évident qu'il va y avoir une certaine insécurité qui va se créer chez les producteurs laitiers. Évidemment, les producteurs dans d'autres domaines agricoles ont aussi leurs problèmes, mais je voulais aujourd'hui m'en tenir aux producteurs laitiers, parce qu'on s'est entendu qu'il fallait toucher les différents domaines. Dans ce domaine, donc, il y aura 15 p. 100 de moins de revenus. Il est bien évident qu'il y aura peut-être et certainement une hausse des prix.

J'aimerais aussi vous dire que lorsqu'on est agriculteur, producteur laitier ou autre, on a à envisager l'avenir, souvent, et à investir, risquer, après avoir travaillé tellement d'années, continuer à risquer et espérer qu'il y aura des jours meilleurs. Avant les agriculteurs, et ailleurs au Canada c'est la même chose, avant eux, les essoucheurs ont été les pionniers de ce pays et on a toujours eu, au Canada, deux politiques d'agriculture, parce qu'on a deux systèmes complètement différents.

Comme je le disais tout à l'heure, le Canada et le Québec, dans la réalité, forment deux systèmes différents. Le jour où on l'admettra, il sera beaucoup plus facile de négocier. Je pense que le Québec a toujours, et les chiffres le prouvent, été défavorisé par rapport à l'Ouest. Je ne dis pas que l'Ouest n'a pas de problèmes, il est évident que l'Ouest a des problèmes très graves aussi, mais les Québécois, les producteurs de lait et les autres producteurs du Québec ont aussi des problèmes, et je pense qu'on ne peut pas les défavoriser.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 43(2) du Règlement, j'aimerais vous indiquer que les députés du Parti libéral partageront leur temps de parole pour le reste de cette journée de débat. Sir Winston Churchill a déjà dit à la Chambre des communes britannique, et la Présidence les avait jugés comme étant parlementaires, les propos qui suivent, ou à peu près: «L'opposé de la vérité n'a jamais été exprimé avec autant de précision.» Et c'est ce que je pense des propos du député que je viens d'entendre.


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(1305)

On vient d'entendre, d'un député du Bloc québécois, et vous l'avez entendu vous aussi, que les revenus des producteurs laitiers seraient réduits de 30 p. 100 en deux ans. Vous avez entendu vous-même, monsieur le Président, des sottises de pareille sorte à être exprimées par un parlementaire en cette Chambre. Je ne sais pas qui a écrit son discours, mais il devrait être congédié sur-le-champ pour avoir dit de telles choses. Oui, téléphonez-lui et vite.

Voici la réalité, pour que tous les Canadiens et Canadiennes la comprennent, ceux vivant dans ma circonscription, et ceux vivant au Québec et ailleurs: le subside actuel est de 5,43 $ l'hectolitre et il sera diminué à 3,80 $ à compter du 1er août 1996. Cela veut dire une réduction de 80c. par année, par hectolitre, sur 54 $ de revenus. J'aimerais que les députés d'en face m'expliquent comment une réduction de 80c. sur 54 $ fait 30 p. 100. J'aimerais bien qu'on m'explique cela. Avec quelle sorte de mathématiciens bloquistes peut-on justifier des propos semblables?

Le député nous dit que c'est dans le Budget. Monsieur le Président, le député d'en face devrait relire le budget s'il croit avoir là les chiffres que vient d'exprimer son collègue, le député de Shefford. Qui plus est, la réduction de 80 c. l'hectolitre ne s'applique seulement que sur le lait industriel et non pas, bien sûr, sur le lait de consommation.

[Traduction]

En supposant qu'une ferme laitière produise à parts égales du lait industriel et du lait de consommation, il est question d'une réduction globale de 40c. par hectolitre sur 54 $ de recettes. Les députés d'en face disent qu'il s'agit d'une réduction de 30 p. 100 des recettes. Une réduction de 40c. sur 54 $ représente moins de 1 p. 100. C'est ainsi que certains députés d'en face présentent la vérité.

[Français]

Non, monsieur le Président, ce que nous avons entendu aujourd'hui, ce sont des propos incendiaires la part du Bloc québécois pour faire peur aux Canadiens et Canadiennes. Écoutez ce que le député de Frontenac nous a dit dans sa proposition, que je cite: «Que la Chambre dénonce le gouvernement pour avoir réduit de 19 p. 100 le budget général du ministère de l'Agriculture et de 30 p. 100 le subside laitier, et pour avoir transformé. . .» Écoutez ceci: Si cela est vrai, cela veut dire que l'inverse est également vrai des propos tenus par le député de Shefford, parce que ce n'est pas la même chose que ce qu'il a dit. Je continue la citation: «. . .pour avoir transformé les subventions au transport des céréales en subventions directes aux agriculteurs de l'Ouest. . .» Écoutez cela: «. . .permettant à ces derniers de se diversifier et de concurrencer de façon déloyale les agriculteurs de l'Est du Canada.»

Je viens d'entendre de vive voix des députés qui maintiennent que les agriculteurs d'ailleurs au Canada font une concurrence déloyale avec ceux de l'Est.

Quelle sorte de politique divisible. Ces propos que l'on vient d'entendre par un député, il y a quelques secondes, sont dangereux. Ils sont dangereux parce qu'ils incitent le peuple canadien, avec des allégations qui ne sont pas vraies, à se détester les uns et les autres. C'est cela le genre de propagande que l'on entend de certains députés d'en face, et je n'y souscris pas.

[Traduction]

Je ne pense pas que les agriculteurs de l'Ouest aient été mieux traités que les agriculteurs d'une autre région du pays. Tous les gouvernements du Canada, qu'il s'agisse du gouvernement libéral comme c'est le cas actuellement, de l'ancien gouvernement conservateur ou des autres, ont peut-être commis des erreurs, mais jamais ils n'ont cherché à faire s'affronter deux groupes de Canadiens de la façon dont certains députés de la Chambre le laissent entendre aujourd'hui. Il est honteux que l'on fasse ce genre d'observation à la Chambre des communes. C'est honteux.

(1310)

Voyons vraiment ce qu'il en est. Des députés d'en face parlent de la réduction de 80 cents par hectolitre. Cette réduction existe, je le reconnais. Elle touche les habitants de ma circonscription peut-être plus encore que les habitants de n'importe quelle autre circonscription au Canada. Il y a plus de producteurs de lait dans ma circonscription que dans n'importe quelle autre circonscription représentée à la Chambre. Cependant, le fait est que l'on ne peut pas comparer la réduction de 80 cents par hectolitre, dans les subventions, à l'élimination complète des subventions prévues par la Loi sur le transport du grain de l'Ouest et au paiement ponctuel qui sera versé aux propriétaires de terres agricoles pour faciliter ce changement.

[Français]

Si les députés du Bloc prétendent aujourd'hui que les agriculteurs de l'Ouest ont été traités de façon avantageuse par rapport à eux, voire même déloyale si je lis la motion qui est devant la Chambre aujourd'hui, pourquoi ne préconisent-ils pas, pour les agriculteurs et les producteurs laitiers, de voir trois ans de subsides convertis et donnés immédiatement pour l'élimination des subsides laitiers? Je n'ai pas vu un député du Bloc demander le parallèle de ce qui était offert aux agriculteurs de l'Ouest.

Pourquoi ne l'ont-ils pas demandé, monsieur le Président? C'est parce que justement la préservation de l'autre 70 p. 100 des subsides aux producteurs laitiers avantage les producteurs laitiers vis-à-vis de ce qui était offert aux producteurs de l'Ouest.

C'est la raison pour laquelle nous ne l'avons pas invoqué, et c'est pour ça qu'on ne l'a pas demandé. D'ailleurs, moi non plus je ne voudrais pas une formule du genre. J'aime mieux préserver les 70 p. 100 qui resteront.

Je ne suis pas fier des coupures, non monsieur le Président. Il n'y a personne qui est fier de perdre des revenus. Mais nous, on sait que pour la viabilité à long terme du secteur agricole et de toute l'économie canadienne, il a fallu faire des sacrifices. Notre gouvernement a fait des coupures budgétaires, mais je ne crois pas qu'il a été injuste. Je suis sûr qu'il n'a certainement pas voulu faire une concurrence déloyale. Je dis au député du Bloc de retirer ce genre d'allégation qui a été faite à l'endroit d'agricul-


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teurs vivant ailleurs au Canada. Cela n'aide aucunement au débat. Il devrait avoir honte, monsieur le Président.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, j'ai ici un article du journal Le Droit où on qualifiait le député de Glengarry-Prescott-Russell: «le lion est devenu une souris».

Si on avait attrapé, frappé, bousculé les agriculteurs lorsqu'il était dans l'opposition, ce whip du Parti libéral aurait fait le discours qu'il vient de faire, mais à l'inverse. Ici, on disait: monsieur le député, qui est en face, est intraitable sur les questions agricoles. Il dénonçait toutes les mesures qui pouvaient affecter les agriculteurs qui composent une bonne partie de son électorat, dont Réjean Pommainville.

J'ai ici devant moi un journal qui est l'équivalent de La terre de chez nous, au Québec, Farm and Country, où on évalue qu'on va imposer aux agriculteurs 56 $ par vache, 56 $ par vache. Les agriculteurs de son comté ont en moyenne 60 vaches, Réjean Pommainville, en a 75. Multipliez ça par 56 pour éponger le déficit, qui a été créé année après année depuis 1970, notamment par des libéraux.

J'ai ici les notes du président de l'UPA-l'Union des producteurs agricoles du Québec-lorsqu'il a donné une conférence de presse la semaine dernière.

Il traite ici de la subvention laitière pour le lait de transformation. J'invite mon distingué collègue de Glengarry-Prescott-Russell à téléphoner à l'UPA, et si besoin est, je lui donnerai le numéro de téléphone, comme il l'a fait dimanche il y a 15 jours, un numéro de téléphone où on avait les informations totalement contraires.

(1315)

Or, les notes de l'UPA disent ceci: 5,43 $ par hectolitre, coupure de 30 p. 100 pour deux ans, je suis honnête, je le dis. Cela ne représente pas 80 cents, pas plus que ça ne représente 90 cents. Je l'invite à faire la multiplication: 5,43 $ multiplié par 0,3 va donner 1,51 $ de baisse par hectolitre.

Alors, si un agriculteur a un quota de 2 500 hectolitres, ça fait une participation pour éponger le déficit-qu'il a contribué à créer lui-même-de 3 775 $ et, qui plus est, il coupe le transport, la subvention au transport de céréales fourragères qu'on évalue à 10 $ la tonne. Et si notre agriculteur achète 71 tonnes pour nourrir ses vaches qui vont produire 2 500 hectolitres, cela lui demande une contribution additionnelle de 710 $.

Donc, pour la moyenne de ces agriculteurs de Glengarry-Prescott-Russell, cela fait une contribution de 4 485 $. Pour un lion, pour un rat pack, il a contribué à se faire un nom lorsqu'il était dans l'opposition, aujourd'hui, c'est devenu une souris. Qu'il aille voir les gens de l'UPA, qu'il se promène dans les maisons d'encan d'animaux vivants pour voir la grande déception que le Budget libéral a créée dans tout le Québec et dans tout le Canada rural.

M. Boudria: Monsieur le Président, tout d'abord, laissez-moi remercier le député d'en face, d'avoir cité le député de Prince Edward-Hastings. En fait, l'extrait qu'il a pris de Farm and Country, c'est une citation du député de Prince Edward-Hastings. Toutefois, il a oublié la moitié de la phrase. Le député de Prince Edward-Hastings a bel et bien dit, c'est vrai: «80 cents l'hectolitre multiplié par 70 hectolitres donne 56 $ la vache.» C'est vrai. Et cela laisse présumer que le producteur en question aurait 100 p. 100 de son lait industriel. Comme la moyenne habituelle est de 50-50, cela veut dire que le député d'en face avait des chiffres deux fois trop élevés.

Dans un deuxième temps, si je peux parler du dossier de la Coopérative Avicole de St-Isidore. On a parlé de la coopérative et, justement, ce qu'avait dit la Coopérative Avicole de St-Isidore, et je cite les propos: «Le 27 mars 1995, à M. Don Boudria», c'est sous l'en-tête de la Coopérative Avicole de St-Isidore. Je continue d'en faire la lecture et il me fera plaisir de la déposer en cette Chambre: «À cause de la grève ferroviaire, nous n'avons plus notre prix garanti par le chemin de fer. Nous sommes obligés d'acheter au prix du marché qui est plus élevé de 20 p. 100 et notre coût de production aussi est plus élevé. Espérant que vous pourrez remédier à la situation. Bien à vous, Alain Léger.»

C'est en date du 27 mars 1995, donc de lundi dernier, et je dis au député d'en face, que j'ai la preuve à l'appui que le prix du soya avait augmenté de 20 p. 100. Si le député d'en face pense en avoir une semblable, qu'il la dépose. Bien sûr, il n'en a pas de preuve contraire.

Non, il n'y a personne qui se félicite quand les subsides sont dérangés, quand le revenu d'un secteur ou d'un autre dans notre société est diminué. D'accord, il n'y a personne qui s'en félicite, mais les réductions ont été faites de façon juste et équitable par un gouvernement honnête voulant faire le meilleur travail possible pour l'ensemble des Canadiens et Canadiennes, tant ceux vivant au Québec que ceux vivant ailleurs.

La seule chose que je trouve qui manque des discours prononcés par les députés d'en face, c'est qu'ils n'ont pas vérifié avec la maison mère. Je sais qu'ils ne sont qu'une succursale à Ottawa, mais il y a eu des coupures au Québec dans les subsides et dans les services offerts au secteur agricole, surtout dans la recherche, et les députés d'en face l'ont malheureusement oublié.

[Traduction]

M. Lyle Vanclief (Prince Edward-Hastings, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat d'aujourd'hui.

(1320)

Je voudrais d'abord formuler quelques observations pour faire suite à celles du député de Glengarry-Prescott-Russell.

J'ai eu l'occasion et le privilège de passer la majeure partie de la journée d'hier dans la circonscription de Beauharnois-Salaberry. Après le déjeuner, j'ai passé quelques heures en compagnie de 125 ou 130 producteurs laitiers. J'ai bavardé avec eux de ce que nous avions fait dans le budget en ce qui a trait à l'agriculture. Nous avons parlé de la Loi sur le transport du grain de


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l'Ouest et de ses conséquences. J'ai mentionné les changements dans l'aide que le gouvernement fédéral apporte au programme concernant le lait de transformation. Une personne s'est levée et m'a dit: «Oui, nous sommes bien au courant du budget. Il ne nous pose aucun problème. Nous voudrions que vous discutiez avec nous de la contestation qu'ont lancée les États-Unis au sujet de la gestion de l'offre au Canada.» Ses propos n'avaient soulevé aucune objection.

Cela montre bien que les producteurs laitiers ont accepté le budget. Ils reconnaissent que nous traversons une période où les changements et les perspectives sont énormes et les défis, immenses et sans précédent. Nous traversons une période de perspectives sans précédent.

Hier, j'ai eu l'occasion de visiter trois exploitations laitières familiales dans la région d'Ormstown. Ces exploitations sont excellentes et remarquables. Elles ne possèdent pas un grand nombre de vaches, à mon sens, mais elles ont une production et un rendement excellents. Elles sont extrêmement bien gérées.

Je leur ai garanti que le gouvernement comprenait et reconnaissait l'importance de ce genre d'exploitation agricole, l'importance de la gestion de l'offre, et je leur ai dit que nous serions avec eux pour les appuyer.

Je vais replacer dans leur contexte certains chiffres que les députés d'en face nous ont lancés, oui, lancés. Je vois le député de Frontenac sourire. Il va probablement essayer de citer d'autres chiffres du journal qu'il a cité auparavant. Son sourire s'agrandit, j'ai donc raison. Il a hâte que j'aie fini mes dix minutes pour qu'il puisse utiliser les cinq qui lui reviennent. Je lui demanderais de citer intégralement.

Je disais simplement que si, aujourd'hui, 100 p. 100 du lait d'une vache moyenne au Canada était vendu sur le marché de la transformation, les 81 cents par hectolitre représenteraient 56 $ par vache. J'ai dit dans cet article et je pense que l'on m'attribuait les propos suivants: «Oui, nous reconnaissons que ce n'est pas une somme d'argent minime, mais il faut la replacer dans son contexte.» Toute diminution du revenu de quelqu'un est importante. Il n'y a pas de doute là-dessus.

Toutefois, je veux replacer tout cela dans un contexte. Pour le producteur moyen de la province de Québec, la diminution de revenu, en raison de ce changement dans la subvention pour le lait de transformation, serait de 1 341 $ si l'on se base sur la production de lait industriel pour l'année 1993-1994. Je ne dis pas que 1 341 $ ce n'est rien. Ce serait certainement vu différemment si cela s'ajoutait au revenu, mais cela vient en déduction.

Comme je le disais aux producteurs auxquels je parlais hier, ils ne doivent pas sous-estimer ni dénigrer ce qu'ils ont fait dans leur industrie au cours des dernières années, et je pense en particulier à la façon dont ils ont utilisé le pool génétique du Canada pour améliorer la production, à la façon dont ils ont utilisé les pratiques de gestion pour augmenter la production. Si l'on regarde ce que notre industrie laitière a réalisé au cours des 12 ou 15 dernières années, on constate qu'il y a eu une augmentation considérable de la production.

J'étais dans une étable hier, près d'Ormstown, au Québec. J'ai vu là une vache-la meilleure du troupeau, je dois l'admettre-qui, si ma mémoire est bonne, a produit au cours des 365 derniers jours 30 000 livres de lait. Lorsque mon père a vendu son troupeau laitier, un troupeau commercial, au milieu des années soixante, je ne pense pas qu'il avait une seule vache qui produisait plus de 8 000 ou 9 000 livres par année.

(1325)

J'ai dit aux producteurs laitiers que j'ai rencontrés hier que personne n'aurait cru, il y a quinze ans, qu'on verrait un jour au Canada des vaches, les meilleures, produire 30 000 livres de lait. L'efficacité de cette industrie est absolument phénoménale. Je suis fier de dire que ce n'est pas fini. C'est un défi à l'industrie, mais je suis tout à fait confiant qu'elle sera en mesure de le relever, voire de le dépasser.

Durant les préparatifs de ce budget, nous étions tous d'accord à la Chambre pour dire-et l'opposition n'arrêtait pas de nous le répéter durant la période des questions-que le budget devait être juste, équitable et efficace sous tous ses aspects. Ce que nous avons fait dans le domaine de l'agriculture répond à tous ces critères.

J'ai déjà, à la période des questions et lors d'un débat d'ajournement, expliqué au député de Frontenac ce qui se passait avec la LTGO et l'impact qu'elle aurait sur l'ouest par rapport à l'est du Canada et surtout le Québec. Je le répète. Je veux qu'il soit bien clair que le versement de 1,6 milliard de dollars qui va être fait à titre gracieux aux producteurs de céréales de l'Ouest va être versé seulement une fois. Après cela, c'est fini. Les producteurs de céréales de l'Ouest n'ont plus de subventions pour le transport à partir du 1er août de cette année.

À partir du 1er août de cette année, les producteurs de lait au Québec continueront de recevoir 85 p. 100 de l'aide à laquelle ils avaient droit auparavant, alors que les producteurs de céréales de l'Ouest n'auront plus de subventions pour le transport. Ce que le budget réserve à l'ouest du Canada correspond grosso modo à une diminution de 10 p. 100 par an pendant dix ans.

Le ministre m'a demandé de diriger les consultations qui devront avoir lieu dans les mois à venir afin de déterminer, de concert avec tous les intervenants du secteur, y compris le gouvernement, quoi faire à long terme du programme de subventions au lait de transformation. On le sait, le budget propose une réduction de 15 p. 100 cette année, et une autre réduction de 15 p. 100 l'année prochaine, mais il ne précise pas de combien il s'agit exactement, ni s'il restera de l'argent après cela.

La première réunion a eu lieu ce matin, dans mon bureau, avec le président du Conseil national de l'industrie laitière. On est en train d'organiser des rencontres avec les présidents de la Fédération canadienne des producteurs de lait, des fabricants canadiens de produits alimentaires, de la Fédération canadienne de l'agriculture, de l'UPA et de l'OFA, ainsi qu'avec les divers offices


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provinciaux de commercialisation, afin de poursuivre les consultations en vue de déterminer ensemble quoi faire du reste.

L'an dernier, le total des subventions s'élevait à 228 millions de dollars. Cette année, cette somme sera réduite de 15 p. 100. Elle sera donc d'environ 193 millions de dollars. Je me permets de faire remarquer que sur ces 228 millions, 106 106 000 sont allés aux agriculteurs québécois puisqu'ils produisent 47 p. 100 du lait de transformation.

La question est donc de savoir si cette réduction de 15 p. 100 pourra être compensée par une augmentation des prix sur le marché. J'ai aussi traité de ce sujet dans l'article dont a parlé le député. Le débat est lancé.

Le ministre a été très clair. Il ne veut faire aucune déclaration à ce sujet pour le moment. Des discussions sont en cours sur la formule à utiliser pour calculer les coûts de production. D'une façon très responsable, l'industrie laitière et tous les intervenants dans ce secteur ont étudié comment le marché pourrait leur permettre et permettre aux producteurs de lait de couvrir leurs frais. Ils se sont conduits de façon très responsable et ont étudié quelles seraient les répercussions de l'augmentation du prix du lait cru sur les transformateurs et sur le prix des produits qu'ils vendent aux consommateurs canadiens.

Je tiens à faire remarquer en outre que l'industrie laitière-je crois d'ailleurs que c'est à cela que fait surtout allusion l'opposition aujourd'hui-le secteur soumis à la gestion de l'offre, et en particulier l'industrie laitière, ne sont pas touchés du fait que nous avons obtenu du GATT un tarif douanier qui les protège. Ces producteurs méritent certainement un certain rendement sur leur investissement, sur le risque qu'ils assument et sur leur structure de gestion. Les producteurs efficaces méritent un rendement équitable, et c'est ce qui leur est réservé. C'est ce que la protection tarifaire prévue leur assure.

(1330)

Je rappelle aussi aux députés que la production n'est pas tellement l'objet des aléas et des défis du marché. Elle est vendue sur le marché intérieur à 90 p. 100. Il ne s'agit pas du marché des exportations. Les céréaliculteurs de l'Ouest sont quant à eux totalement à la merci des marchés mondiaux. Nos producteurs soumis à la gestion de l'offre n'ont pas à assumer un tel risque.

Ils bénéficient d'énormément de soutien, mais on ne peut chiffrer la valeur de ce soutien, même avec beaucoup de graphiques, de tableaux et de colonnes de chiffres. Ce soutien existe et nous en sommes fiers. Nous allons nous battre tant que nous le pourrons contre les États-Unis et le défi qu'ils posent.

Tout semble indiquer que le GATT prévaut sur l'ALENA, du moins si l'on se fie à ce qui s'est fait jusqu'à maintenant. Le premier ministre a dit franchement au président des producteurs laitiers du Canada et au président de l'UPA-le premier ministre et moi-même étions présents à cette réunion-que nous avions fait ce qu'il fallait faire, en tant que Canadiens, et que nous allions défendre nos acquis. Voilà ce que nous allons faire.

Nous devons aussi reconnaître, et l'industrie laitière y est disposée, que malgré les réformes accomplies, il en reste encore à faire. Depuis quelques années, je parle de la réforme comme si c'était déjà fait, mais l'industrie peut poursuivre sur sa lancée. L'industrie laitière a montré qu'elle pouvait s'adapter. Elle l'a fait avec succès avec son exploitation de la génétique, ses techniques de commercialisation, ainsi de suite. Les producteurs sont un élément important de cette chaîne. Ceux qui transforment les produits en sont un autre. On fait un peu d'exportations. Les consommateurs sont aussi un élément important.

Il faut absolument que cet enchaînement très efficace rapporte aux producteurs un rendement juste sur leurs investissements, leur structure de gestion et le risque qu'ils assument. Nous allons nous battre pour conserver tout cela et nous espérons avoir la collaboration du Bloc québécois à cette fin, non pas uniquement pour le bénéfice des agriculteurs du Québec, mais des agriculteurs de tout le Canada.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Madame la Présidente, je voudrais féliciter chaleureusement le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture pour sa contribution au débat d'aujourd'hui qui consiste à démontrer, noir sur blanc, l'iniquité, la diversification, qu'on va permettre d'une façon tout à fait déloyale dans l'Ouest.

Ce qui m'a particulièrement plu, puisqu'il connaît bien le domaine agricole, c'est lorsqu'il parlait des vaches qui produisent des quantités astronomiques de lait. Je suis fier de vous dire qu'en 1990, la championne laitière, une vache Holstein, résidait dans mon comté, dans la paroisse de Plessisville.

Je voudrais vous dire également que le secrétaire parlementaire ne côtoie pas les mêmes producteurs laitiers que moi. J'ai ici une photocopie d'un éditorial paru dans le journal Le producteur de lait québécois, signé par M. Claude Rivard, ce n'est pas un deux de pique, c'est le président du Québec et le vice-président de la Fédération canadienne des producteurs de lait. Évidemment, le titre est La main trop lourde du fédéral.

Je voudrais ici contredire le secrétaire parlementaire au sujet de la recherche et développement en agriculture. La hache de M. Martin ne fait pas qu'entailler dans les subsides laitiers ou les subventions au transport. Le gouvernement a annoncé son intention de se retirer complètement, d'ici trois ans, des programmes de contrôle laitier. Comment voulez-vous avoir des vaches championnes au monde, si on ne pratique pas le contrôle laitier? La recherche et le développement sont la pierre angulaire de la production agricole.


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(1335)

Si les gouvernements qui nous ont précédés n'avaient pas investi des deniers publics dans la génétique et le contrôle laitier, on serait encore comme certains pays d'Amérique latine ou encore d'Afrique du Sud ou du Nord. Ils vont se retirer de cela d'ici trois ans, ils vont se péter les bretelles par exemple.

En 1990, la championne laitière au Canada était à Plessisville-Paroisse. Mais en 1995, on coupe, on annonce l'intention que d'ici trois ans, on va tout couper.

Un autre point m'a aussi intéressé dans son allocution, c'est lorsqu'il parle qu'en Ontario, c'est vrai, il faut le dire, c'est à peu près 50-50 lait industriel et lait de consommation. Au Québec, ce n'est pas le cas bien entendu.

Mais est-il au courant, ce secrétaire parlementaire, qu'on travaille avec acharnement depuis plusieurs années pour arriver à un lait, un prix. L'écart est en train de se rapetisser et on doit en principe avoir l'équité dans le prix du lait, le 1er août 1996, donc dans 16 ou 17 mois.

Mais en coupant de 1,51 $ l'hectolitre sur le lait de transformation, il vient d'agrandir encore une fois l'écart entre les deux laits. Bien entendu, les producteurs laitiers versent à même le fonds de rapprochement temporaire des équivalents, mais il ne reste pratiquement plus d'argent dans ce fonds-là. Ce qui va se produire, je le sais très bien. Ils vont se péter les bretelles en disant: On n'a pas augmenté les impôts, on n'a pas augmenté les taxes. Ils n'ont pas le coeur de le faire. Ils coupent les transferts aux provinces, les provinces vont couper les transferts aux municipalités et les municipalités vont augmenter votre taxe foncière.

Qu'est-ce que les producteurs laitiers feront au 1er août? Ils vont se présenter devant la Commission canadienne du lait pour obtenir une augmentation du prix de leur lait de transformation et les transformateurs augmenteront de 30c., 25c., 35c. le prix de la livre de beurre, le fromage, le yogourt et la crème glacée. Puis là on dira: Mais ce n'est pas nous qui augmentons les taxes. Ils les coupent à un, puis ils vont les chercher à l'autre.

M. Marchand: Hypocrisie!

M. Chrétien (Frontenac): De l'hypocrisie, monsieur lePrésident.

[Traduction]

M. Vanclief: Monsieur le Président, le député aurait dû écouter plus attentivement, parce que, contrairement à ce qu'il affirme, je n'ai rien dit au sujet de la recherche et du développement. Quant à ses observations sur l'évaluation génétique et les contrôles laitiers, il doit savoir que les producteurs laitiers sont prêts à discuter avec le gouvernement de leur participation à la gestion des programmes que le Canada a mis en place. Ils savent qu'en tant que producteurs, ils en retireront des avantages. Entre-temps, le gouvernement collabore étroitement avec eux pour qu'ils puissent participer au programme.

Dans l'intervention du député, je ne trouve rien qui explique pourquoi il ne pourrait plus se vanter d'avoir les meilleures vaches laitières du Canada dans sa circonscription, si ce n'est qu'il tient à conserver son siège, parce que quelqu'un de Prince Edward-Hastings pourrait bien ravir cet honneur. Il y d'excellents producteurs laitiers dans la circonscription de Prince Edward-Hastings.

Je remercie et félicite le gouvernement québécois pour son rôle dans les discussions qui se tiennent en vue d'établir un prix commun pour le lait au Canada. La plupart des provinces conviennent que cette voie s'impose, si nous voulons relever plus facilement les défis qui viendront de l'étranger.

En terminant, à l'instar du ministre, je ferai remarquer aux gens d'en face qu'en ce qui concerne l'iniquité des mesures concernant la LTGO par rapport à celles visant l'industrie laitière, la réforme ayant trait à la LTGO ne s'oppose pas du tout à la position que la coalition du Québec sur la LTGO a défendue dans une lettre adressée au ministre en décembre 1994. Ils font fausse route, car leurs représentants ont déjà déclaré au ministre qu'ils ne voyaient aucun problème et qu'ils étaient d'accord avec la manière dont le dossier était traité.

(1340)

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais vous aviser que, à partir de maintenant, mes collègues et moi partagerons le temps qui nous est accordé.

Je suis toujours heureux de me lever à la Chambre pour parler d'agriculture, surtout sur une motion présentée par le Bloc. J'aime bien la position que prennent les députés du Bloc au sujet de l'agriculture. Ils comprennent toute l'importance de l'industrie agricole. Je leur en suis reconnaissant, même si nous ne nous entendons pas toujours sur certaines questions. Le Bloc sait fort bien que le Québec, tout comme l'ouest du Canada, repose sur l'agriculture. Nous allons faire la leçon aux libéraux. Un jour, ils nous écouteront. Je crois même qu'ils commencent déjà à nous écouter.

À la ferme, on dit toujours que les pâturages du voisin semblent plus verdoyants. On entend probablement ce dicton tant au Québec que dans l'ouest du Canada. Le temps est peut-être venu pour les Québécois de délaisser la production laitière pour acheter des terres dans l'ouest du Canada et se lancer dans la céréaliculture. Nous serions ravis de travailler à leurs côtés. Ils pourraient ainsi bien comprendre les problèmes qu'ont connus les céréaliculteurs de l'Ouest ces dernières années.

Dans leur motion d'opposition qui ne fera pas l'objet d'un vote, les bloquistes affirment que les agriculteurs de l'Ouest seront en mesure de diversifier leurs activités. Leur déclaration est dure et pas tout à fait juste. Les agriculteurs seront obligés de diversifier leurs activités. Il n'y a pas tellement de céréalicul-


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teurs qui seraient enchantés de se lancer dans l'industrie laitière ou dans l'industrie du boeuf pour voler les emplois et les débouchés des gens qui travaillent déjà dans ces domaines.

J'ai eu l'occasion de discuter avec un certain nombre de producteurs de lait du Manitoba au cours des deux dernières semaines. Ils ont parfois l'air de beaucoup envier les Québécois. Ils disent: «Pourquoi ne pouvons-nous pas avoir une part de leur contingent laitier? Ils n'ont qu'un quart de la population et 48 p. 100 du contingent laitier.»

Je leur ai demandé: «Pourquoi ne réglons-nous pas le problème de la séparation? Pourquoi certains d'entre vous n'achèteraient-ils pas une ferme laitière au Québec pour commencer à y produire du lait?» Si nous pouvions amener quelques producteurs laitiers du Québec dans l'ouest du Canada, peut-être la question de la séparation pourrait-elle être réglée. Peut-être pourrions-nous mieux nous comprendre?

J'aimerais beaucoup mieux voir des Québécois que des Européens venir dans l'ouest du Canada acheter des terres à céréales. Je les y invite.

Je voudrais aussi parler des injustices que certains ont mentionnées. Elles existent probablement, mais elles ne sont pas attribuables aux techniques agricoles. Il faudrait plutôt en trouver la source dans les dépenses excessives et les impôts trop lourds des gouvernements précédents. Certains de nos problèmes viennent de là.

Je vois des députés de l'autre côté faire oui de la tête. Ils doivent être d'accord avec moi. Si nous pouvions nous entendre sur une liste, même partielle, des problèmes, peut-être pourrions-nous y trouver des solutions.

Une voix: Le gouvernement précédent n'était pas bon.

M. Hoeppner: Je suis entièrement d'accord avec le député, mais avant celui-là, il y a eu un gouvernement libéral dont je dirais qu'il n'était pas bon non plus. Nous divergeons probablement d'opinion là-dessus.

Des voix: Oh, oh!

M. Alcock: Je suis derrière vous.

M. Hoeppner: C'est toujours bon signe lorsque mes vis-à-vis s'animent un peu. Un nouveau-né doit crier beaucoup pour développer ses poumons et devenir plus tard un enfant en bonne santé. Je suis toujours très heureux lorsque je peux être utile à certains de mes vis-à-vis.

Une voix: Attention à. . .

(1345)

M. Hoeppner: Nos efforts portent fruits. Donnez-nous encore six mois et qui sait?

Je veux simplement parler de certaines des choses inutiles qui se passent dans le secteur agricole et qui nous nuisent. Voici ce qu'a dit un témoin devant le Comité permanent des transports: «Les utilisateurs ne devraient pas avoir à assumer les coûts inutiles. L'industrie a versé, au moyen des péages de la voie maritime, près de 35 millions de dollars qui ont servi à payer du personnel excédentaire, des indemnités de cessation d'emploi, des impôts doubles et les coûts reliés aux tunnels et aux ponts sur le canal de Beauharnois.»

Je ne savais pas que les céréaliculteurs de l'Ouest devaient assumer une partie des coûts d'entretien de certains des ponts sur la Voie maritime du Saint-Laurent. Je trouve cela très difficile à avaler. C'est injuste, mais c'est un problème qui existe et que nous devons régler. Je ne sais pas ce que les politiciens et l'industrie comptent faire à ce sujet, mais il faut faire quelque chose si nous voulons continuer d'expédier nos produits par la voie maritime.

J'ai un autre exemple à donner. À l'automne de 1990, l'Administration de pilotage des Laurentides, après des négociations avec l'association de pilotes avec qui elle a des contrats, a accepté des augmentations totalisant 32,12 p. 100 et 29,6 p. 100 sur trois ans. Cela représente une augmentation d'au moins 10 p. 100 par année.

Durant ces trois années, les prix de nos produits agricoles ont diminué de 30 p. 100 probablement. Il est vraiment difficile pour nous d'absorber ces coûts.

Certains de ces pilotes gagnent en moyenne entre 115 000 $ et 156 000 $ par année et ils travaillent environ neuf mois durant l'année. Personne dans l'industrie agricole n'a un contrat de travail ou un salaire qui se rapproche de cela. Voilà pourquoi je dis que les agriculteurs ne bénéficient pas d'une partie des subventions qui ont été consacrées au transport du grain. Elles servent à payer pour certaines des lacunes du système et les généreux salaires accordés aux travailleurs des transports au lieu de profiter à l'agriculture.

J'ai été vraiment étonné et plutôt encouragé d'entendre l'autre jour un député du Bloc poser une question en contestant l'équité de la hausse de 8,9 p. 100 du droit exigé par l'Administration de pilotage auprès des expéditeurs. Le député a reçu, à mon avis, une très mauvaise réponse du ministre, car ces coûts sont assumés par les expéditeurs qui les refilent ensuite aux producteurs ou aux manufacturiers qui recourent aux services des transporteurs maritimes.

L'ONT, qui est censé réglementer ces coûts, a recommandé de n'accorder absolument aucune hausse. Qu'a fait le gouvernement libéral? Il a passé outre en accordant une hausse de 8,9 p. 100, à la suite de la hausse de 30 p. 100 pour les trois dernières années. Ce sont des coûts que nous, les agriculteurs, devons absorber non pas seulement pour expédier nos produits, mais aussi pour défrayer une partie du coût de transport de l'acier et du minerai de fer qui sert à fabriquer du matériel agricole.

Ce sont là quelques-uns des aspects que je trouve injustes en ce qui concerne les agriculteurs et les expéditeurs.

J'ai tâché de faire comprendre à l'Administration de la voie maritime, et plus particulièrement à certains des députés d'en face, qu'à moins que les choses ne changent, que la situation ne soit renversée et que nous n'obtenions un traitement plus équitable pour ce qui est des coûts de transport, la voie maritime ne servira pas beaucoup dans les années à venir à transporter le grain produit au Manitoba et dans l'Ouest.


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Je voudrais simplement vous lire un court extrait d'un article paru dans le Winnipeg Free Press du 19 février. Voici ce qu'écrivait le chroniqueur agricole, et non pas un agriculteur, sous le titre suivant: «Bonjour Mississippi, au revoir Thunder Bay»:

Il est possible que la célèbre voie navigable américaine devienne la nouvelle voie d'acheminement du grain du Manitoba lorsque, Ottawa modifiera sa politique de subvention au transport du grain plus tard cette année.
Des études de la Commission canadienne du blé révèlent déjà que si l'on élimine l'incidence de la subvention au transport du grain canadien, il sera plus économique d'acheminer le grain par le Mississippi plutôt que par la Voie maritime du Saint-Laurent.
Selon Rask Klagenberg, un producteur de Selkirk, les agriculteurs insisteront pour avoir accès au fleuve américain.
(1350)

La Chambre peut voir que les agriculteurs ne sont pas les seuls à faire ces constatations; d'autres en parlent, car c'est la réalité. Nous devons trouver une solution.

Ce qui m'étonne vraiment, c'est que les organismes agricoles n'aient pas soulevé ces problèmes plus tôt pour que nous puissions les régler avant de nous retrouver en pareille situation. Je viens de recevoir un rapport de Manitoba Pool Elevators ou de Prairie Pools Inc. Voici ce qu'on lit dans le document: «En 1993, les impôts fonciers que les exploitants de silos terminus doivent payer au port de Vancouver sont en moyenne six fois plus élevés que ceux de terminaux de taille comparable dans le port américain de Seattle.» Cela semble déjà très élevé, et les céréaliculteurs trouve cela désastreux.

Écoutez maintenant ce que le document dit au sujet de Thunder Bay: «Les impôts fonciers que paient les exploitants de silos à Thunder Bay sont plus de 25 fois plus élevés que ceux de terminaux de taille semblable dans le port américain de Duluth.» Comment pouvons-nous être concurrentiels avec des impôts exorbitants comme ceux-là et d'autres coûts tout aussi excessifs?

Le rapport dit encore: «Les deux sociétés ferroviaires du Canada paient plus de 640 millions de dollars par année en taxes sur le carburant et les ventes, et en impôts fonciers, alors que le réseau ferroviaire américain a droit à des incitatifs fiscaux pour maintenir les services ferroviaires.»

Voilà certains des problèmes auxquels nous devons faire face dans le secteur céréalier. J'espère que nous pourrons trouver une solution et garder ces emplois au Canada au lieu de les laisser partir aux États-Unis comme cela s'est passé dans bien d'autres secteurs.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, comme mon collègue du Parti réformiste vient de le signaler, au Canada, il y a deux solitudes. Des agriculteurs dans son coin de pays trouvent qu'ils sont injustement traités. Mes agriculteurs du Québec, et particulièrement les agriculteurs laitiers, trouvent qu'ils sont également traités injustement. Moi, je pense qu'il est de mon devoir de rappeler à cette Chambre, ici, quelques chiffres très éloquents des parts des dépenses du gouvernement fédéral en matière d'agriculture.

J'ai deux dates que j'ai pigées au hasard. En 1980, dans l'Ouest, le gouvernement fédéral a dépensé 55 p. 100 du budget et en 1993, 60 p. 100, tandis qu'au Québec, en 1980, on a dépensé 16,4 p. 100 du budget-je précise les virgules, parce que c'est important un ,4 avec un petit 16 p. 100-et en 1993, 12,4 p. 100. Voyez-vous, dans l'Ouest, ce sont 55 et 60 p. 100, alors qu'au Québec, ce sont 16,4 et 12,4 p. 100.

Pourtant, le Québec génère des recettes monétaires canadiennes en agriculture de 17 p. 100. On représente, vous le savez mieux que moi, 24 p. 100 de la population. Mieux encore, je prends maintenant secteur agricole après secteur agricole, par exemple les pommes de terre. En ce qui concerne les superficies cultivées, dans l'Ouest, on a une augmentation de 30 p. 100 de 1981 à 1991. Au Québec, on a une diminution de 2 p. 100. Pour la production bovine, le boeuf, on a une augmentation de 4 p. 100 dans l'Ouest et une diminution de 13 p. 100 dans l'Est.

Pour le porc, le cheptel, et je termine là-dessus, on a une augmentation de 39 p. 100 dans l'Ouest et une diminution de 16 p. 100 au Québec. Pour l'agneau, on a une augmentation de 33 p. 100 dans l'Ouest et une augmentation de 8 p. 100 au Québec, et c'est partout comme cela. Voyez-vous, c'est ce que l'on veut dire, lorsqu'on parle de la diversification dans l'Ouest, à même nos taxes.

(1355)

Les Québécois vont payer pour se faire concurrencer d'une façon déloyale. C'est ce que nous dénonçons aujourd'hui. Et j'avertis les réformistes et le Parti libéral que chaque fois que les Québécois seront traités injustement, nous, du Bloc québécois, allons nous lever et crier haut et fort.

[Traduction]

M. Hoeppner: Monsieur le Président, je remercie le député de ces remarques; elles sont probablement très justes.

Je crains vraiment qu'une catastrophe environnementale ne se produise au Québec, car avec la quantité de larmes qui ont été versées dans cette province dernièrement, l'eau potable risque fort de s'y transformer en eau salée. Que ferions-nous alors? Je détesterais être témoin de cela.

Je reconnais le bien-fondé de certaines de ces observations. J'aimerais aussi souligner que le budget de l'agriculture représente environ 2 p. 100 du budget global, et peut-être même moins, alors qu'au moins 8 p. 100 du produit intérieur brut proviennent du secteur agricole. L'agriculture fournit 15 p. 100 des emplois. C'est un secteur très important que nous avons probablement négligé, au Québec comme dans l'ouest du Canada. J'aimerais que les députés du Bloc nous aident à rectifier cette situation au lieu de simplement critiquer.

Je persiste à dire que pour qu'un pays se porte bien, il faut que son secteur agricole se porte bien. Dès que nous aurons compris qu'il faut nous employer à résoudre les problèmes tous ensemble et à faire fi de nos dissensions, nous aurons un pays où il sera plus agréable de vivre, que ce soit au Québec ou dans l'ouest du Canada. C'est cela que je voudrais vraiment faire ressortir.

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au député qui vient de prendre la parole.

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Je viens de participer, sur la colline du Parlement, à un dîner organisé en l'honneur du séminaire national des 4-H sur la citoyenneté, séminaire qui permet aux membres des 4-H de se renseigner sur les activités parlementaires. Ces membres sont des passionnés d'agriculture qui peuvent très bien expliquer aux parlementaires la nécessité de soutenir ce secteur.

Comme il représente une région agricole de notre pays, le député peut-il nous dire s'il appuie le programme des 4-H du Canada et nous expliquer son importance pour tous les Canadiens?

M. Hoeppner: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

J'ai toujours appuyé le programme des 4-H. Le Parti réfor-miste est aussi très favorable à ce programme et à la R-D dans le domaine agricole. Les deux vont d'ailleurs probablement de pair.

Lorsqu'il faut protéger et défendre l'agriculture, je ne reste jamais à l'arrière-scène. Je suis toujours aux premiers rangs. Je vais continuer d'agir ainsi et je suis heureux d'avoir la possibilité de le faire.

Le Président: Chers collègues, comme il est maintenant 14 heures, conformément à l'article 35 du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés.

_____________________________________________


11478

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'ANNIVERSAIRE DU JOUR DE LA VICTOIRE EN EUROPE

M. Andy Mitchell (Parry Sound-Muskoka, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour souligner des efforts particuliers déployés par un certain nombre de mes électeurs, qui ont collaboré tous ensemble à la mise sur pied d'un événement très spécial dans ma circonscription.

Les 6 et 7 mai prochains aura lieu à l'aéroport Muskoka un spectacle aérien, dont le thème sera High Hopes-Looking Back, Flying Forward, pour célébrer le 50e anniversaire du Jour de la victoire en Europe.

Lors de ces célébrations familiales étalées sur deux jours, des anciens combattants, des historiens, des représentants de l'industrie de l'aviation, des dignitaires internationaux, des pilotes et des passionnés des avions feront la promotion de tout ce qui est lié aux voyages par avion. Les spectateurs pourront voir, notamment, un bombardier Lancaster, un Mitchell B-25, des répliques de la Première Guerre mondiale, un Hercules C-130 ainsi qu'un Tigermoth et un Grasshopper.

Les promoteurs de ce projet voulaient à la fois rendre hommage à ceux qui ont servi sous les drapeaux pendant la Seconde Guerre mondiale et stimuler l'activité économique à l'aéroport Muskoka, qui est reconnu depuis longtemps comme un rouage important de notre économie locale.

Je félicite les promoteurs de l'énergie et de l'esprit qu'ils ont insufflées dans ce projet.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. Michel Daviault (Ahuntsic, BQ): Monsieur le Président, hier, la secrétaire parlementaire du ministre de l'Immigration s'est exprimée contre une motion d'un de ses collègues libéraux. Cette motion rappelait aux Québécois et aux Canadiens que tout pays ou groupe politique recourant au génocide commet un crime contre l'humanité.

Notre amendement citait l'exemple du génocide arménien que le gouvernement canadien continue d'ignorer, et ce afin que de tels actes de barbarie ne sombrent pas dans l'oubli.

La députée obéissait probablement aux nouvelles priorités du gouvernement en matière d'Affaires étrangères où priment désormais les seuls intérêts commerciaux au détriment de la promotion des droits et libertés dans le monde.

Le refus du gouvernement de remettre en question la vente de ses chasseurs bombardiers CF-5 à la Turquie, et ce, malgré l'offensive turque contre les populations kurdes, en est un exemple honteux.

* * *

[Traduction]

LA CROSSE

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement a adopté une loi pour confirmer que la crosse resterait un sport national. Or, voici que, un an plus tard, on lutte encore pour faire reconnaître la crosse comme sport national.

Qui les Canadiens ont-ils élu pour prendre des décisions en leur nom? Les 295 députés élus en octobre 1993 ou les quelques personnes qui décident quels sports seront financés? Certes, des compressions s'imposent. Cependant, les lignes directrices et leur application à la répartition des fonds sont injustes.

À un jour d'avis, la crosse a perdu 60 p. 100 de son financement. C'est injuste. Ceux qui prennent les décisions ont oublié que la crosse a été mise de côté comme sport national depuis 60 ans, contrairement au hockey qui reste populaire à cause de l'appui dont il a toujours joui.

Je rappelle à la Chambre qu'en 1904 le Canada a envoyé sa première délégation aux Jeux olympiques. La crosse est le seul sport d'équipe où le Canada a remporté plus de médailles que tous les autres pays réunis.

La crosse gagne constamment en popularité, comme on a pu le constater aux Jeux du Commonwealth de l'an dernier. Nos jeunes ont besoin d'un soutien financier pour continuer de jouer à la crosse.

* * *

LES SOINS DE SANTÉ

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été très troublé d'apprendre par les médias qu'un jeune d'Edmonton s'était vu refuser le droit de figurer sur la liste d'attente pour


11479

obtenir une greffe de poumons. Il semble qu'on lui ait refusé cette possibilité parce qu'il est trisomique.

Terry Urquhart, champion aux Jeux olympiques spéciaux, mène une vie intéressante et fructueuse dans les limites de ses possibilités. Cet enfant et les autres comme lui ne doivent pas se voir refuser le droit-car c'est un droit-de subir les mêmes traitements médicaux que l'ensemble des Canadiens. J'ai été très heureux d'apprendre que les autorités de l'hôpital étaient revenues sur leur décision, et je les en félicite.

Je suis toutefois très inquiet quand je pense aux conséquences que peut avoir cet incident sur la vie des personnes handicapées. J'exhorte tous les décideurs ou les responsables de politiques qui se trouvent dans une situation semblable à reconsidérer immédiatement une position aussi insensée. Je demande à la ministre de la Santé et au ministre de la Justice de s'assurer que ce soit fait.

Qu'on se comprenne bien et qu'on ne s'y méprenne pas: au Canada, les mêmes règles s'appliquent aux personnes handicapées et aux autres. Tous les Canadiens sont égaux, et toute forme de discrimination est inacceptable.

* * *

L'ALLEMAGNE

M. John Harvard (Winnipeg St. James, Lib.): Monsieur le Président, en tant que président du groupe d'amitié germano-canadien, je suis heureux d'avoir l'occasion d'accueillir le vice-président du Bundestag, Hans-Ulrich Klose et ses collègues.

Je suis très heureux que cette délégation ait pu venir au Canada. J'espère qu'ils apprécieront l'hospitalité canadienne et qu'ils apprendront beaucoup de choses au sujet de notre grand pays. Le Canada partage avec l'Allemagne une longue histoire, une relation qui a grandi et s'est renforcée au cours des dernières années.

Je voudrais remercier l'Allemagne de son appui et de son rôle de leader au sein des conseils de l'Union européenne. Les Allemands ont fait le maximum d'efforts pour trouver une solution à la crise des pêches, de façon à préserver les stocks de poissons sur les Grands Bancs de Terre-Neuve.

En 1994, alors que l'Allemagne assumait la présidence de l'Union européenne, la collaboration avec le Canada a été plus étroite que jamais. De plus, grâce à la force du mark allemand, plus de touristes allemands ont visité le Canada en 1994 que jamais auparavant.

Au nom de l'amitié et de la permanence de nos relations, Wilkommen zu Kanada.

* * *

LE CAPORAL NEIL BERNARD MCKINNON

M. Ron MacDonald (Dartmouth, Lib.): Monsieur le Président, le 27 mars, le caporal Neil Bernard McKinnon était tué dans un accident survenu en cours d'instruction à la Base des Forces canadiennes Suffield. L'adjudant Kirk Drew était gravement blessé au cours de ce regrettable accident. Les deux hommes étaient membres du Princess Patricia's Canadian Light Infantry.

Le caporal McKinnon avait seulement 24 ans. Envoyé en mission à deux reprises comme soldat de la paix en ex-Yougoslavie, loin de sa famille et de son foyer à Sydney River, en Nouvelle-Écosse, il avait servi le Canada avec fierté et compétence. Il a donné sa vie à son pays. Nous regrettons tous sa mort. Il nous manquera vraiment.

Je demande aux députés à la Chambre de bien vouloir se joindre à moi pour adresser toutes nos condoléances à la famille de Neil et tous nos voeux de prompt rétablissement à l'adjudant Drew.

Des voix: Bravo!

* * *

[Français]

LA JOURNÉE DES DROITS DES RÉFUGIÉS

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, la Journée des droits des réfugiés est célébrée chaque année au Canada le 4 avril en souvenir de l'arrêt Singh. Cette année, nous commémorons le 10e anniversaire de la décision de la Cour suprême du Canada qui étend l'application aux réfugiés de la Charte canadienne des droits et libertés.

Cent vingt-cinq millions de personnes ont dû quitter leur pays ou leur ville à la suite de conflits ethniques ou de guerres civiles, dont 23 millions sont des réfugiés victimes de persécution.

(1405)

Compte tenu du sentiment anti-réfugiés qui se répand dans l'opinion publique canadienne, le gouvernement se doit de mener une campagne de sensibilisation sur l'accueil, l'ouverture et la tolérance ainsi que sur les obligations internationales du Canada envers les réfugiés.

J'exprime mon appui et ma solidarité avec les réfugiés et les organismes voués à leur défense.

* * *

[Traduction]

LES PÊCHES

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, depuis 15 ans, les avertissements retentissent proclamant que la pêche sur la côte ouest va tout droit vers le désastre. Par conséquent, personne n'a été surpris lorsque le rapport Fraser a conclu que le ministère des Pêches et des Océans avait perdu contact avec la réalité et qu'il ignorait tout de la situation des stocks de saumon qui revenaient frayer. Situation que de nombreux groupes de travail ont confirmée et continuent à confirmer.

J'implore le ministre de revenir à l'ancien système favorisant le choix de généralistes à titre d'agents du MPO, de donner foi aux rapports des agents du MPO qui travaillent sur le terrain plutôt qu'à ceux des bureaucrates, de faire respecter uniformément la loi par tous les pêcheurs, d'assurer le maintien d'une


11480

industrie de la pêche durable pour les générations à venir, et de s'assurer que ce qui s'est produit sur la côte est ne se reproduira pas sur la côte ouest.

Tous les signes sont là. Ne faisons pas l'autruche.

* * *

LE CENTRE CULTUREL DE HARBOURFRONT

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, quand vient le temps de défendre l'Ontario, les 98 députés libéraux se tiennent tranquilles. C'est particulièrement le cas des députés de Toronto.

Le gouvernement libéral a décidé d'éliminer tout financement au centre culturel de Harbourfront, qui a été établi par le gouvernement Trudeau et qui est de niveau international. Au départ, le fonctionnement devait être indéfiniment assuré par des revenus provenant du plan de développement original qui, comme la plupart des plans des libéraux, a échoué.

Les libéraux ont promis de financer Harbourfront, mais ils ont vite fait d'oublier cette promesse. Le président du caucus libéral de Toronto refuse de commenter cette dernière promesse que les libéraux ne tiennent pas. Le caucus en entier refuse de faire des observations sur une ou l'autre des 20 promesses qu'ils ont faites à l'Ontario, mais qu'ils n'ont pas tenues. Pourquoi? Le nombre des promesses qu'ils ne respectent pas les embarrasse, surtout leur trahison en matière de soins de santé, d'éducation et de création d'emplois. Plutôt que de justifier cette trahison envers l'Ontario, ils blâment à tort le gouvernement néo-démocrate.

Comme d'autres Canadiens, les habitants de l'Ontario apprennent durement la leçon des fausses promesses libérales. Libéraux ou conservateurs, c'est la même chose.

* * *

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER

Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Monsieur le Président, le mois d'avril est arrivé de même que le printemps, du moins en Colombie-Britannique. Les jonquilles sont épanouies, signe que la campagne de souscription de la Société canadienne du cancer bat son plein.

Depuis 1938, la Société canadienne du cancer tente de faire disparaître le cancer et d'améliorer le sort des gens qui souffrent de cette terrible maladie. Au fil des ans, la recherche contre le cancer a permis de mettre au point de nombreux nouveaux traitements. En 1979, le taux de survie cinq ans après le diagnostic de la leucémie infantile était de 17 p. 100. De nos jours, grâce aux progrès réalisés dans les domaines de la recherche et du traitement, le taux atteint 83 p. 100. La Société canadienne du cancer a aussi collaboré au financement des recherches qui ont mené récemment à la découverte d'un gène qui est lié au cancer du sein et qui favorisera la prévention de cette maladie.

Malgré ces petites victoires, la lutte contre le cancer n'est pas terminée. En 1995 seulement, on diagnostiquera le cancer chez 126 000 Canadiens et 62 000 autres patients mourront de cette maladie.

Par conséquent, en ce mois d'avril, j'invite tous les Canadiens à se montrer très généreux envers la Société canadienne du cancer lorsqu'un bénévole frappera à leur porte. Outre notre soutien financier, nous pouvons donner de l'espoir aux milliers de Canadiens qui souffrent du cancer.

* * *

LES LIBÉRAUX DE L'ONTARIO

M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, je veux aujourd'hui féliciter celui qui est mon adjoint parlementaire depuis sept ans d'être sorti victorieux de l'assemblée de mise en candidature du Parti libéral de l'Ontario dans la circonscription de Chatham-Kent la semaine dernière.

C'est avec loyauté et dévouement que Mike Ferguson m'a assisté et a servi la population de la circonscription de Kent. Pour lui, aucun problème n'était trop gros ou trop petit lorsqu'il rencontrait mes électeurs.

Bob Rae dépense huit millions de dollars par jour pour se faire réélire. Avec le déficit néo-démocrate de 10 milliards de dollars, l'Ontario fait triste figure à côté des sept provinces qui ont réussi à équilibrer leurs budgets. La dette de l'Ontario, gouvernée par le NPD, s'accroît de un million de dollars l'heure. Il nous faut un budget pratique, sensé et équilibré, et Mike et les libéraux de l'Ontario peuvent en présenter un. Tous les candidats libéraux de toutes les circonscriptions de l'Ontario ont été choisis tandis que les conservateurs doivent mettre des annonces dans les journaux pour trouver des gens prêts à représenter le parti du passé.

Je tiens à offrir mes meilleurs voeux de succès à Mike et à tous les libéraux. . .

Le Président: La députée de London-Ouest.

* * *

(1410)

LE DROIT À L'ÉGALITÉ

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je me sens obligée de répondre aux sentiments exprimés par au moins un député du Parti réformiste, qui voudrait qu'on refuse l'asile aux femmes qui craignent la mutilation génitale. L'automne dernier, j'ai fait un exposé sur ce sujet devant l'Union interparlementaire. Les pays ne peuvent pas se servir de la culture comme prétexte pour violer les droits des femmes. Les droits des femmes sont inclus dans les droits de la personne.

Le Canada accorde une grande importance au droit des femmes à l'égalité parce qu'il croit que c'est un aspect essentiel de toute démarche vers le respect des droits de la personne et la démocratie.

Au Canada, la mutilation génitale des femmes peut faire l'objet de poursuites en vertu d'un certain nombre de dispositions du Code criminel. La mutilation génitale des femmes est une expression brutale du pouvoir patriarcal. C'est de la torture à l'égard des enfants.

Nos lignes directrices en matière de persécution fondée sur le sexe font du Canada un chef de file dans ce domaine. Ces questions, comme tant d'autres, nécessitent de la compréhension et de la compassion, et non de beaux discours.


11481

[Français]

LE PROJET HYDRO-ÉLECTRIQUE DE SAINTE-MARGUERITE

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, après toutes les critiques portées par le chef cri, Matthew Coon-Come, contre la Convention de la baie James et Hydro-Québec, il était encourageant d'entendre hier les propos du chef montagnais Élie Jacques Jourdain, qui a souligné à Washington les avantages qu'offre à sa communauté le projet hydro-électrique de Sainte-Marguerite.

Ainsi, l'entente conclue entre les Montagnais et Hydro-Québec a permis de relancer l'économie et l'emploi dans la région. De l'avis du chef Jourdain, l'entente protégera le mode de vie et la culture des Montagnais puisque les deux conditions des Montagnais ont été remplies, à savoir que l'entente ne porte pas préjudice à leurs droits territoriaux ancestraux et qu'elle fasse d'eux des partenaires égaux.

J'aimerais féliciter le chef Jourdain ainsi que Konrad Sioui, leur négociateur, d'avoir eu le courage de dire en public ce que beaucoup d'autochtones pensent, c'est-à-dire qu'il peut y avoir un vrai partenariat entre le Québec et les peuples autochtones.

* * *

[Traduction]

LES SOINS DE SANTÉ

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, nous avons un système de santé qui a l'air formidable sur papier. La ministre de la Santé et le premier ministre évoquent constamment les cinq principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé. Bien des mots, et pas beaucoup de gestes concrets.

Notre système de santé, qui a été mis à l'essai avec succès dans un service régional de santé à Swift Current, en Saskatchewan, est cependant en train de se désagréger. Sur papier, les soins de santé sont accessibles au Canada. En réalité, les listes d'attente s'allongent pour les opérations chirurgicales importantes. Sur papier, le système est universel, mais les différentes provinces assurent des ordonnances et des services différents dans leurs systèmes de santé.

À mesure que la population vieillit, la demande de services augmente, alors que diminue la proportion de la population qui paie pour ces services. Les coûts liés au service de la dette augmentent tandis que diminuent les fonds fédéraux consacrés à la santé. Combien de temps encore cela pourra-t-il durer avant que le gouvernement ne prenne d'autres mesures, au lieu de citer constamment un document appelé Loi canadienne sur la santé?

Sur papier, le Canada possède un système de santé de niveau international. En réalité, quand les Canadiens sont malades ou blessés, ils ont le droit d'être inscrits immédiatement sur une liste d'attente de niveau international.

[Français]

LA SEMAINE NATIONALE DES SOINS PRÉHOSPITALIERS D'URGENCE

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine constitue la Semaine nationale des soins préhospitaliers d'urgence. Nous pouvons profiter de l'occasion pour reconnaître le rôle vital que jouent les professionnels de la santé dans les soins préhospitaliers d'urgence.

De fait, toute personne ayant eu recours à ces services aura sans doute apprécié les efforts des gens impliqués dans ce domaine.

[Traduction]

Je veux féliciter et remercier la Confédération canadienne des associations de service d'ambulance ainsi que son président, M. René Berthiaume, de leur dévouement, de leur enthousiasme et de leur participation à la Semaine nationale des soins préhospitaliers d'urgence.

* * *

LE SERVICE D'ASSISTANCE CANADIEN AUX ORGANISMES

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour signaler à la Chambre un geste de générosité fait par un citoyen canadien et un électeur de ma circonscription. M. Brian Oxley, de Scarborough, est en effet allé en Roumanie pour y aider et y conseiller les manufacturiers locaux de verre.

M. Oxley est un Canadien qui s'est rendu outre-mer pour conseiller bénévolement des entreprises, par l'entremise du Service d'assistance canadien aux organismes ou SACO. Depuis sa fondation en 1967, le SACO offre les services de conseillers bénévoles canadiens à des entreprises et à des organisations des collectivités autochtones du Canada, des pays en voie de développement et des nouvelles économies de marché de l'Europe centrale et de l'Est.

Les bénévoles du SACO sont des Canadiennes et des Canadiens compétents qui sont habituellement à la retraite et qui acceptent volontiers de partager l'expérience pratique qu'ils ont acquise durant leur vie avec ceux qui en ont le plus besoin.

Ils méritent tous nos félicitations. Je félicite M. Oxley de sa contribution exceptionnelle.

* * *

L'AGRICULTURE

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, hier, j'ai demandé au ministre de l'Agriculture si les agriculteurs qui livreront leur grain au silo avant le 31 juillet auront à payer le plein taux de fret si le silo ne l'expédie qu'après le 1er août.

(1415)

Le ministre a confirmé que les agriculteurs ayant vendu leur grain à la Commission canadienne du blé et l'ayant livré au silo

11482

avant le 31 juillet finiront par payer le plein taux de fret si le grain est expédié au terminal après le 1er août.

Cette position n'a pas été présentée clairement dans le budget. On a fait croire aux agriculteurs que si le grain était livré au silo au plus tard le 31 juillet, la subvention du Nid-de-Corbeau serait versée. Les agriculteurs apprennent maintenant que ce n'est pas le cas. Ils pourraient être tenus de payer le plein taux de fret même si leur grain était au silo avant la date limite du 31 juillet.

Le ministre aurait dû, dès le départ, parler clairement de cette date limite aux agriculteurs. Les agriculteurs finiront par payer le plein taux de fret pour une partie du grain qu'ils livreront avant la fin de la présente campagne agricole.

_____________________________________________


11482

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE FINANCEMENT DES PROGRAMMES SOCIAUX

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le Budget a annoncé un ensemble de refontes des paiements de transfert en un seul paiement, d'ailleurs très réduit, le Transfert social canadien. Ottawa accentue ainsi son désengagement dans le financement des programmes sociaux. Et loin de la flexibilité et de l'autonomie qu'il prétend offrir aux provinces, il veut les contraindre à la nouvelle norme nationale dans les domaines de la santé, de l'aide sociale et de l'éducation postsecondaire.

Comment le premier ministre peut-il affirmer que son gouvernement veut s'assurer que tous les Canadiens aient accès à des services adéquats, alors qu'en même temps il se désengage substantiellement des programmes sociaux en transférant ses responsabilités financières aux provinces, déjà aux prises avec de graves problèmes financiers?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les premiers ministres des provinces et tous les gouvernements provinciaux font en ce moment l'analyse de chacun de leur programme en la matière, et nous avons fait la même chose au fédéral. Tout le monde sait qu'au chapitre des dépenses des gouvernements, il faut réduire la pression sur les contribuables. Nous avons donc informé les provinces de notre position vis-à-vis de cette situation. Elles le savent d'ailleurs depuis décembre 1993, alors que nous leur avions dit que nous imposerions un système mais que nous leur donnerions deux ans pour se préparer.

Elles ont donc été informées dans le Budget de février du ministre des Finances de la nature des coupures fédérales. Les provinces en avaient prévues d'avance et elles vont continuer à en faire car nous croyons que pour tous les paliers de gouvernement, il est possible d'offrir de bons services sans toutefois dépenser autant d'argent que dans le passé.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, comment le gouvernement veut-il qu'on le prenne au sérieux quand il exprime sa volonté de collaborer avec les provinces alors qu'il les a exclues d'abord du Forum de la santé, et que les mesures législatives de mise en oeuvre du Budget les limitent à un rôle purement consultatif dans la définition des normes nationales?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): D'abord, monsieur le Président, je voudrais faire remarquer au chef de l'opposition qu'en ce qui concerne le Forum de la santé, tout d'abord, nous avons dit non, que nous ne voulions pas voir les provinces là. Ensuite, nous les avons invitées et elles ont refusé de venir.

Des voix: Oh! Oh!

M. Chrétien (Saint-Maurice): Écoutez, elles m'ont convaincu de les inviter, puis l'opposition m'a demandé de les inviter. J'ai été très gentil et je les ai invitées. Lorsqu'elles ont été invitées, elles ont décidé de ne pas venir. Ne me blâmez pas, je vous ai écouté. Allez plutôt les blâmer.

Quant au reste, si nous voulons avoir des normes nationales à la grandeur du pays, ce qui est normal, c'est à cause de la mobilité de la main-d'oeuvre au Canada et aussi parce que nous avons un minimun de respect pour tous les secteurs de la communauté canadienne. On trouve au moins un minimum acceptable pour tous les Canadiens au pays dans le domaine des services de santé, de l'aide sociale et des autres services de même nature.

Le Président: Mes chers collègues, permettez-moi de vous rappeler de vous adresser à moi au cours de vos questions ou de vos réponses.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, les provinces se font dire: «On ne veut pas vous voir.» Elles ont compris qu'on ne voulait pas les voir.

Comment le premier ministre peut-il parler de flexibilité du fédéralisme, lui qui menace les provinces de couper davantage la contribution fédérale si elles ne respectent pas les normes nationales du Transfert social canadien? Autrement dit, est-ce qu'il aura le courage de mettre clairement ses intentions véritables sur la table dans une conférence fédérale-provinciale?

[Traduction]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Finances, le ministre du Développement des ressources humaines et moi-même avons eu l'occasion d'en discuter avec les provinces au cours de diverses rencontres fédérales-provinciales.

Dans l'ensemble, les provinces reconnaissent que nous devons réduire les coûts de ces programmes. La meilleure façon d'y arriver passe par la coopération du gouvernement fédéral et des provinces. Nous devons réduire nos dépenses.

(1420)

Comme je l'expliquais, lorsque certaines provinces, dont le Québec, ont réduit les services de santé de 500 millions de dollars en décembre, elles ne nous ont rien remboursé de cet argent, même si le gouvernement fédéral avait fortement contribué au financement de ces services.


11483

[Français]

LES PÊCHES

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Pêches et Océans a confirmé, qu'hier, le Canada et l'Union européenne s'étaient entendu sur les principes d'un accord dans le conflit du flétan noir, principes devant être soumis au Cabinet fédéral de même qu'aux autorités de l'Union européenne. Or, devant le refus de l'Espagne et du Portugal, l'Union européenne a demandé la réouverture de l'entente pour arracher de nouvelles concessions du Canada et provoquer ainsi l'impasse dans les négociations.

Le ministre des Pêches et Océans peut-il nous confirmer que l'Union européenne, notamment sous la pression de l'Espagne, a rejeté l'entente de principes ramenant ainsi les négociations à la case départ?

[Traduction]

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Je puis confirmer que ce que le député vient de dire n'est pas exact. Les négociations se poursuivent en ce moment même à Bruxelles et elles progressent. Je crois savoir qu'un document, dont le député a certainement pris connaissance, indiquait que l'Union européenne a rejeté l'accord de principe. Ce n'est pas exact. Les négociations vont de l'avant et le Canada espère qu'elles aboutiront à une entente.

Nous l'avons toujours dit, notre intérêt primordial est d'avoir un régime de conservation efficace et de disposer des moyens nécessaires pour faire respecter les règles et protéger ces stocks de poisson qui chevauchent la zone de 200 milles.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre des Pêches et Océans peut-il afficher un tel optimisme sur l'issue des négociations en cours, alors que le premier ministre espagnol, M. Felipe González, a déclaré que l'Espagne rejette clairement les termes de l'accord de principes?

[Traduction]

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le Canada participe à des négociations bilatérales avec l'Union européenne. Les négociations se sont poursuivies sans interruption pendant toute la fin de semaine, elles ont marqué des progrès chaque jour et elles se poursuivent aujourd'hui même. L'Union européenne doit tenir compte de l'opinion, unanime ou non, de tous ses États membres.

Le Canada siège à la table de négociations avec l'Union européenne et des progrès sont enregistrés.

LES SOINS DE SANTÉ

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, dans tout le pays, le mystère s'épaissit autour des intentions du gouvernement fédéral quant au financement des services de santé.

La ministre de la Santé et le premier ministre ont tous deux laissé entendre que le financement pourrait être réduit d'un montant pouvant aller jusqu'à 16 milliards de dollars ou 2 p. 100 du PIB et que les Canadiens n'auront pas nécessairement droit à l'avenir à la même protection que par le passé. Le gouvernement a aussi laissé entendre que le financement des services de santé pourrait simplement être bloqué et rester au même niveau.

La ministre de la Santé pourrait-elle me dire exactement quelles sont les intentions du gouvernement en ce qui concerne la réforme des soins de santé, et plus particulièrement la portée et le financement des services?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, même si les provinces demeurent directement responsables des services de santé, nous entendons continuer à faire respecter les principes de la Loi canadienne sur le santé, loi qui nous a valu l'un des meilleurs régimes d'assurance-maladie du monde.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, j'ai demandé à la ministre de dissiper la confusion, et non d'y ajouter.

Le mois dernier, le premier ministre a tenu des propos favorables au rajustement de nos dépenses en matière de santé en fonction de ce qui se fait dans les pays européens. Le premier ministre ne doit toutefois pas oublier que presque tous les pays européens auxquels il songe ont un régime privé qui supplée au régime public. C'est ainsi qu'ils en ont plus pour leur argent.

(1425)

La ministre de la Santé appuie-t-elle la recommandation du premier ministre voulant que le financement des services de santé au Canada se rapproche du modèle européen? A-t-elle un plan d'action concret pour mener cette réforme à bien?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, bien sûr, j'appuie le premier ministre. Le premier ministre a dit et répété que nous conserverions au Canada un régime universel d'assurance-maladie.

C'est aujourd'hui le 32e anniversaire de l'élection du premier ministre comme député aux Communes.

Des voix: Bravo!

Mme Marleau: Monsieur le Président, au cours de ces 32 années, le premier ministre a assisté et contribué à la création et à la mise en place du meilleur régime d'assurance-maladie du monde. Notre premier ministre n'a pas de leçons à recevoir du Parti réformiste, qui préconise un régime à deux paliers.

Des voix: Bravo!


11484

Le Président: Le député de Calgary-Sud-Ouest.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, c'est plutôt le discours de quelqu'un qui veut garder son poste qu'une réponse sur les services de santé.

Dans un discours du 15 mars, le premier ministre a promis de préserver les cinq piliers de l'assurance-maladie, mais il n'a pas pu dire à son auditoire comment il s'y prendrait. Dans un discours du 4 mars, la ministre de la Santé a encouragé les provinces à multiplier les expériences dans la prestation des services, mais elle a refusé de dire sur quels pouvoirs elles pourraient compter pour faire ce travail.

Ma dernière question s'adresse au ministre des Finances. Combien de temps encore les Canadiens devront-ils attendre avant que le gouvernement ne propose un plan concret de réforme des services de santé? Combien de temps?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il serait bien que le Parti réformiste écoute parfois au lieu de toujours sermonner.

Nous avons été très clairs dès le départ. Il existe une certaine souplesse, pourvu que les principes soient respectés et que nous conservions un régime qui soit au service de tous les Canadiens, qu'ils aient de l'argent ou non. Il faut que notre régime soit fondé sur les besoins. Ce que le Parti réformiste préconise, c'est un régime semblable à celui des États-Unis, qui est conçu pour les personnes aptes et fortunées.

* * *

[Français]

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Dans un discours prononcé hier devant le Canadian Club à Toronto, l'ex-président de Radio-Canada, Tony Manera, a démontré que des coupures de plus du tiers du budget actuel de Radio-Canada vont compromettre sérieusement le mandat actuel de la société d'État. Pendant ce temps, le nouveau président de Radio-Canada, l'ex-ministre conservateur Perrin Beatty, a déclaré et je cite: «. . .qu'il ne reste pas beaucoup de temps pour prendre des décisions difficiles», en faisant référence à l'abolition de secteurs entiers de Radio-Canada.

Le premier ministre confirme-t-il que celui qu'il a lui-même nommé pour présider Radio-Canada est tout à fait prêt et disposé à appliquer des coupures qui priveront Radio-Canada du tiers de son budget actuel, entraînant ainsi la mise à pied de 3 000 à 4 000 employés?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, dans le Budget du ministre des Finances, nous avons indiqué qu'il y aurait des coupures de 4 p. 100 cette année. D'ailleurs, ce n'est pas exagéré, comparativement aux coupures que nous avons été obligés de faire dans d'autres secteurs.

Nous avons aussi décidé, à ce moment, qu'il fallait revoir le mandat de Radio-Canada et d'autres organismes complémentaires, de telle façon que l'on puisse voir comment on peut s'adapter à la réalité d'aujourd'hui avec les moyens financiers d'aujourd'hui, et pour voir de quelle type de télévision nous avons besoin pour être concurrentiels au XXIe siècle.

(1430)

Lorsque que Radio-Canada a été établie, il n'y avait que deux stations de télévision qui entraient dans les maisons au Canada, alors qu'aujourd'hui, il y en a 100 ou 200. Nous allons mettre sur pied très bientôt un comité qui va revoir le mandat de Radio-Canada pour l'adapter aux réalités d'aujourd'hui et de demain, et à partir de ce mandat, nous établirons un budget pour pouvoir atteindre les objectifs que nous donnerons à Radio-Canada et d'autres organismes de même nature.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre réalise-t-il que la Société Radio-Canada a déjà des coupures qui viennent des séquelles des budgets précédents, les coupures qui sont annoncées dans celui-ci et celles qui sont à venir.

Le premier ministre considère-t-il que l'ampleur des coupures qu'il entend imposer à Radio-Canada, en s'appliquant indistinctement aux réseaux anglais et français malgré la performance bien supérieure du réseau français, risque de compromettre gravement le mandat et l'avenir de la Société Radio-Canada française?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, historiquement, nous avons toujours reconnu la nécessité d'avoir une radio française et une télévision française au Canada. D'ailleurs, le budget de Radio-Canada est divisé; Or, proportionnellement la radio et la télévision française reçoivent plus que leur pourcentage de la population canadienne. Nous voulons continuer à donner un bon service de langue française à tous les Canadiens d'un océan à l'autre. Mais il faut adapter ce budget aux réalités d'aujourd'hui et au mandat qu'il faut donner à la télévision lorsqu'on réalise aujourd'hui que la concurrence ne se limite pas seulement à un seul réseau mais à des centaines de réseaux. Il faut donner une vocation appropriée à Radio-Canada français comme à Radio-Canada anglais.

* * *

[Traduction]

LES SOINS DE SANTÉ

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, mes collègues médecins me disent que la Loi canadienne sur la santé est déjà périmée.

Par exemple, cette loi est censée assurer un accès raisonnable aux services de santé. Cependant, au Manitoba, les gens doivent parfois attendre jusqu'à 60 semaines pour une arthroplastie de la hanche. En Saskatchewan, ils attendent 30 semaines pour une extraction de cataracte et, au Québec, 1 460 patients attendent une chirurgie de correction d'une hernie.

La ministre responsable de ces listes d'attente peut-elle définir clairement l'accès raisonnable afin que tous les Canadiens soient protégés par la Loi canadienne sur la santé?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je crois que les Canadiens sont protégés par la Loi canadienne sur la santé.


11485

J'admets que, dans certaines régions, il y a parfois des engorgements. Toutefois, la Loi canadienne sur la santé fait en sorte que les provinces peuvent remédier à ces situations. Lorsque les listes d'attente s'allongent, les provinces agissent rapidement et l'opinion publique les force à prendre les mesures appropriées pour répondre adéquatement aux besoins des citoyens, sans que ceux-ci aient à payer pour passer à la tête de la liste.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, l'accès raisonnable aux soins n'est pas le seul pilier de la Loi canadienne sur la santé qui se soit écroulé. Examinons un peu la définition arbitraire que la ministre donne du ticket modérateur.

La ministre affirme que l'Alberta autorise le ticket modérateur et que c'est tout à fait répréhensible. Cependant, dans l'Est, au King's Memorial Hospital de la Nouvelle-Écosse, les patients doivent payer les sutures, l'anesthésie et les seringues. La ministre responsable de cette loi arbitraire n'est-elle pas d'avis que les patients qui paient pour ces choses paient en fait un ticket modérateur?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, la lettre que j'ai fait parvenir à toutes les provinces pour expliquer la Loi canadienne sur la santé et le ticket modérateur s'adressait à toutes les provinces. Voilà comment nous exécutons les lois fédérales. En outre, la nécessité médicale a été définie par les associations médicales, les gouvernements provinciaux et même les tribunaux, dans certains cas.

* * *

(1435)

[Français]

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine.

Après avoir annoncé lui-même, en grande pompe, la nomination de M. Manera à la tête de Radio-Canada l'an dernier, on sait maintenant que le ministre du Patrimoine n'a pas été consulté par le premier ministre avant l'annonce de la nomination du nouveau président de Radio-Canada, M. Perrin Beatty.

Compte tenu que le premier ministre l'a carrément écarté de la décision de nommer M. Beatty comme nouveau président de Radio-Canada, le ministre du Patrimoine admettra-t-il qu'il s'agit là d'un geste de non confiance du premier ministre et du Cabinet fédéral à son endroit?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la déclaration de l'honorable députée est sans fondement, absolument sans fondement. J'en ai parlé au ministre, pour la première fois, avant d'en parler pour la première fois, au Cabinet. Je pense que c'est plus d'un mois avant la nomination de M. Beatty.

Je pense que les informations de la députée. . . M. Manera nous avait demandé, longtemps avant le Budget, de le remplacer pour des raisons purement personnelles. Il nous avait appelé des semaines avant le dépôt du Budget pour nous dire que, pour des raisons personnelles, il voulait partir et sa démission n'avait rien à voir avec le Budget. Lorsqu'il nous a offert sa démission, le Budget n'était pas encore déposé.

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question complémentaire s'adresse au ministre du Patrimoine.

Doit-on comprendre des propos du premier ministre que l'incapacité de s'acquitter de ses responsabilités de ministre du Patrimoine à l'endroit de Radio-Canada, c'est ce qui l'a conduit a abdiquer tout simplement son rôle de ministre responsable à cette importante société d'État?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je comprends la difficulté de la députée. La question supplémentaire a été écrite avant que je ne donne ma première réponse.

Évidemment, j'ai dit et je répète que M. Manera a démissionné longtemps avant le Budget. La première fois que j'ai soulevé le nom de M. Beatty a été des semaines avant de rendre cette nomination publique.

* * *

[Traduction]

LES SOINS DE SANTÉ

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais corriger cette erreur une fois pour toutes. Nous, du Parti réformiste, ne sommes aucunement favorables à un régime de santé à l'américaine et nous lutterons toujours contre un tel régime.

La Loi canadienne sur la santé n'a pas un brillant avenir. Elle est censée garantir un accès raisonnable. Pourtant, en Colombie-Britannique, une personne qui souffre beaucoup doit attendre 13 mois avant de subir une greffe de la hanche.

La ministre de la Santé examinera-t-elle la loi pour améliorer la définition de l'expression «accès raisonnable»?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je me réjouis d'entendre que le député est favorable au régime d'assurance-santé dont nous disposons actuellement au Canada. Je lui propose cependant de s'entretenir avec d'autres députés de son parti qui ne semblent pas partager ses sentiments.

Nous continuerons d'insister pour que la Loi canadienne sur la santé demeure en place. Elle a très bien servi les Canadiens et continuera de le faire, malgré les protestations des députés du tiers parti qui ne comprennent absolument pas ce que c'est que d'être malade et de ne pas avoir l'argent nécessaire pour recevoir des traitements. Nous refusons de retourner à une époque où il y avait des injustices dans nos services de santé.

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, la ministre ne peut pas me dire, à moi qui étais médecin affecté au service des urgences, que j'ignore ce que c'est que d'être malade au Canada.


11486

Vous ne pouvez pas me dire que les personnes qui doivent attendre 48 heures avant d'être admises aux soins intensifs ne souffrent pas. Elles souffrent! Allez dans les hôpitaux vous en rendre compte par vous-même. Je vous donnerai la main pour vous le montrer.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Je demanderais au député de bien vouloir s'adresser à la présidence. Je le prierais de formuler sa question.

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, à cause du vide que nous avons, des compagnies d'assurances privées doivent maintenant offrir à des personnes dont le nom figure sur des listes d'attente la possibilité d'être soignées aux États-Unis. Les Canadiens sont obligés de contracter des assurances privées pour cela.

(1440)

La ministre va-t-elle modifier la Loi canadienne sur la santé de façon que les provinces puissent avoir le contrôle du financement des soins de santé bien en main?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, je ne lui donnerai pas la main. Deuxièmement, je dois avouer qu'il y a longtemps que je n'ai entendu un discours aussi vaniteux.

Il n'est pas nécessaire de modifier la Loi canadienne sur la santé pour que les provinces soient en mesure d'assainir leurs finances. En fait, il est très important que nous veillions au respect des principes qui président à la Loi canadienne sur la santé, tout en nous efforçant tous d'assainir nos finances afin de pouvoir nous rappeler qui il nous faut représenter ici, c'est-à-dire la population, toutes sortes de gens, les riches, les malades et tous nos autres concitoyens.

* * *

[Français]

L'ACHAT D'HÉLICOPTÈRES EH-101

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Le gouvernement canadien négocie actuellement avec la société Agusta pour l'indemnité à payer, suite à l'annulation du contrat d'achat des hélicoptères EH-101 de plus de cinq milliards de dollars et qui a déjà coûté, malgré l'annulation, un demi-milliard de dollars. Or, Agusta est présentement mise en cause en Belgique pour le versement de pots-de-vin de 12 millions de dollars reliés à un contrat d'achat d'hélicoptères destinés à l'armée belge et ce, dans le cadre de l'enquête sur le meurtre d'un ministre du gouvernement belge.

Compte tenu des allégations de corruption qui pèsent sur Agusta, le premier ministre s'engage-t-il à suspendre toute négociation avec cette société, jusqu'à ce que le gouvernement ait mené une enquête judiciaire sur les circonstances entourant l'accord du contrat des EH-101, comme le réclamait, le 13 avril 1993, le minsitre du Développement des ressources humaines?

M. Réginald Bélair (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, en effet, des négociations ont été entreprises et compte tenu du fait qu'il y a des procédures judiciaires en cours, je crois qu'il serait inapproprié, à ce point-ci, de faire des commentaires publics.

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, j'aurais aimé que le premier ministre me réponde. Je ne pense pas que ce soit inapproprié d'entreprendre des discussions.

Compte tenu que la société Agusta fait l'objet d'enquêtes en Belgique et en Italie pour trafic d'influence, corruption et trafic d'armes, comment le premier ministre peut-il justifier la poursuite de négociations avec Agusta, sans avoir fait au préalable une enquête sur les enrichissements de cette entreprise dans le dossier des hélicoptères au Canada?

M. Réginald Bélair (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, d'abord, dans le préambule de sa question, mon honorable collègue fait allusion au fait qu'on devrait avoir des discussions, et un peu plus loin, il nous dit qu'on ne devrait pas entreprendre de négociations. Il faudrait qu'il se fasse une idée et à partir de là, on pourrait peut-être commencer à échanger.

* * *

[Traduction]

LA FONCTION PUBLIQUE

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor.

Lorsqu'on a annoncé la décision de réduire la taille de la fonction publique, le mois dernier, le gouvernement s'est engagé à veiller à ce que les gestionnaires locaux aient toute la souplesse voulue pour rajuster le tir des besoins concernant les effectifs et les programmes avant qu'on n'adopte les lois et les règlements pertinents.

Le ministre pourrait-il nous préciser les mesures que le gouvernement prend pour s'assurer que les gestionnaires locaux sont en mesure de répondre aux besoins individuels et à ceux de la collectivité dans le cadre de la réduction de la taille de la fonction publique?

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, pour mener à bien la restructuration de la fonction publique qui s'impose, à la suite des compressions dans les programmes et les services que le gouvernement a dû faire pour atteindre ses objectifs de réduction du déficit, nous avons créé des comités patronaux-syndicaux dans les diverses collectivités du pays en vue d'aider nos employés à passer du secteur public au secteur privé.

De plus, nous laissons les coudées franches aux ministères, et je suis persuadé qu'ils vont consulter les conseils régionaux pour qu'on puisse gérer cette réduction de la taille de la fonction publique en tenant compte de la situation dans une région donnée tout en respectant les besoins qu'on a établis dans le budget.

Je peux garantir au député que nous allons traiter tous nos employés, qu'ils partent ou qu'ils restent, de façon juste et raisonnable.


11487

(1445)

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Hier, j'ai demandé pourquoi Glenda Simms, ancienne présidente du Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme, continuait de figurer sur la liste de paie du gouvernement et faisait des voyages superflus et frivoles, alors que son travail est terminé. Le premier ministre a dit qu'il fallait lui laisser le temps de s'adapter au changement.

Le gouvernement se défait de 45 000 fonctionnaires. Comme de nombreux autres Canadiens, ces fonctionnaires n'auront rien pour s'adapter à ce changement. Pourquoi Mme Simms jouit-elle d'un traitement spécial? Est-ce un autre exemple de la politique libérale des deux poids, deux mesures?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, au contraire, le président du Conseil du Trésor s'est assuré que les personnes qui devront partir à cause des compressions recevront de bonnes indemnisations. Une entente a été négociée par le syndicat pour faire en sorte que ces personnes reçoivent de l'aide pour s'adapter au changement.

Le gouvernement a pour politique de faire en sorte que tout ne se termine pas du jour au lendemain. Nous agissons ainsi pour tous les fonctionnaires, y compris pour cette dame.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, 45 000 fonctionnaires n'ont pas eu droit à un voyage d'agrément aux Philippines.

Le gouvernement a nommé Mme Simms en janvier, alors qu'il savait qu'il allait démanteler le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme. Mme Simms a gaspillé l'argent des contribuables en faisant des dépenses contestables, lorsqu'elle occupait le poste de présidente de ce conseil. À présent, le gouvernement lui offre la possibilité de gaspiller encore plus d'argent en autorisant ce voyage inutile et frivole aux Philippines.

Le premier ministre va-t-il montrer aux Canadiens qu'il se soucie du gaspillage fait au gouvernement en annulant ce voyage aux frais de la princesse et en mettant fin à la nomination de Mme Simms?

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, Mme Simms a été invitée par des organismes internationaux à parler des excellents programmes qui existent dans notre pays pour garantir l'égalité pour tous au Canada, dont l'équité en matière d'emploi pour les femmes.

On lui a aussi demandé de parler des questions de harcèlement sexuel en milieu de travail, un domaine où le Canada a fait de l'excellent travail jusqu'à maintenant. Elle ira parler de ces programmes et de ces politiques aux Philippines, où elle a été invitée. Le ministre des Affaires étrangères a reconnu que le Canada était un modèle à suivre dans ce domaine et qu'il devrait s'exprimer dans des forums internationaux de ce genre. Nous sommes très fiers que Mme Simms nous y représente.

[Français]

LE BURUNDI

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Le président du Burundi a évoqué la menace d'un double génocide, et je cite: «Il y a actuellement des similitudes avec le Rwanda qu'il faut éviter.» Quatre cents Hutu, en majorité des femmes et des enfants, auraient été massacrés la semaine dernière par l'armée burundaise et des groupes armés de Tutsi dans la région de Gasorwe.

Le ministre peut-il nous indiquer ce que compte faire le gouvernement canadien à la suite du cri d'alarme lancé par le président du Burundi?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je pense que l'honorable député comprendra qu'un règlement de cette situation très précaire au Burundi passe d'abord et avant tout par la réconciliation entre les parties impliquées.

C'est pourquoi l'Organisation de l'unité africaine ainsi que la Francophonie qui se réunissaient à Paris la semaine dernière ont décidé d'envoyer des missions ministérielles pour rencontrer les parties et les inciter à comprendre que la réconciliation est essentielle. Nous avons confiance que ces efforts de diplomatie préventive auront des résultats.

Ce que l'honorable député recherche, c'est une solution militaire qui n'est pas demandée par les autorités gouvernementales. Ce qu'il propose n'a pas fait l'objet d'une demande des autorités gouvernementales, alors que la proposition avancée par les ministres de la Francophonie est celle qui a justement été demandée par le représentant du gouvernement du Burundi.

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, au-delà des assurances feutrées et des beaux discours de réconciliation, le ministre ne reconnaît-il pas l'urgence d'intervenir concrètement sur le terrain, notamment par la mise sur pied rapide d'une force d'interposition au Burundi, qui a d'ailleurs été demandée par l'ambassadeur du Burundi au Canada?

(1450)

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je viens de répondre à l'honorable député que même si l'ambassadeur du Burundi a pu demander une telle force d'intervention, les représentants du gouvernement du Burundi ne l'ont pas demandée.

J'arrive d'une réunion des ministres de la Francophonie où il a été question du Burundi, et où nous avons entendu un représentant du gouvernement. Et ce que le représentant du gouvernement du Burundi nous a demandé, nous allons le faire, c'est-à-dire, d'une part, envoyer une mission ministérielle qui ira faire des efforts de conciliation; deuxièmement, l'envoi d'un certain nombre d'experts pour aider les autorités en place à régler leurs problèmes; troisièmement, fournir une aide humanitaire, comme


11488

celle que le Canada est toujours prêt à offrir auprès d'organisations non gouvernementales qui aident la population affligée par le conflit.

* * *

[Traduction]

LES CRIMINELS DE GUERRE

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, en janvier de cette année le gouvernement a annoncé que les criminels de guerre qui vivent au Canada seraient expulsés, plutôt que traduits en justice pour leurs crimes contre l'humanité.

C'est un changement de politique par rapport à 1987, alors que le Parti libéral appuyait la solution canadienne en ce qui concerne les criminels de guerre nazis.

Ma question s'adresse au ministre de la Justice. Pourquoi le gouvernement a-t-il renoncé à son idée de traduire en justice les criminels de guerre nazis qui vivent au Canada?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il est certain que la voie que l'on préfère est celle des poursuites criminelles.

Toutefois il s'est produit deux choses depuis 1987. Tout d'abord, les dispositions du Code criminel qui ont été ajoutées à cette époque-là, pour permettre ces poursuites, ont été invoquées devant les tribunaux et interprétées par la Cour suprême du Canada.

Deuxièmement, la nature, la qualité et la disponibilité des preuves pour ces poursuites diminuent d'année en année, depuis 1987. Lorsque nous avons pris le pouvoir, nous étions déterminés à faire quelque chose au sujet de l'impératif moral d'éliminer ces gens de notre société.

Nous avons envisagé la possibilité de poursuites criminelles, mais conclu que, vu l'interprétation des dispositions faites par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Finta et vu la difficulté de trouver des preuves, la meilleure approche pour répondre à cet impératif moral de façon pratique, était de faire en sorte que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration procède à des poursuites civiles, et c'est la solution que nous avons choisie.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, je suis ici depuis 18 mois et je peux vous dire que nous aimons que justice soit faite, quel que soit le genre de crime. J'attends toujours. Nous n'avons toujours pas vu la justice se faire.

Plus tôt cette année, le ministre de la Justice disait: «Ceux qui enquêtent sur les crimes de guerre estiment que 12 suspects vivent actuellement au Canada.» Toutefois, le gouvernement n'a intenté des poursuites que dans quatre cas, pour voir ce que cela donnerait.

Plus le ministre attend et moins les preuves disponibles seront fiables. Pourquoi le ministre ne procède-t-il pas immédiatement dans les 12 cas?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député a tout à fait raison. Ces poursuites doivent être entreprises dès que possible. Nous commençons avec quatre cas. Il y en a huit autres que nous avons établis comme susceptibles de faire l'objet de poursuites semblables. Nous avons huit avocats, sous la direction d'un avocat principal, qui s'occupent des quatre affaires actuellement devant les tribunaux. Dès que possible nous nous attaquerons aux autres.

Nous avons commencé avec quatre cas qui, à notre avis, créeront le précédent juridique qui simplifiera la procédure dans les autres affaires.

Je suis tout à fait d'accord avec le député et nous nous attaquerons aux autres cas le plus tôt possible.

* * *

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Pour créer de l'emploi et stimuler la petite et moyenne entreprise dans une conjoncture nouvelle et innovatrice, nous avons besoin de nouveaux moyens de susciter des capitaux propres.

Que fait le gouvernement pour créer un nouveau milieu et encourager les Canadiens à investir dans leur propre pays et à soutenir leur excellence en technologie?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de Durham pour l'intérêt constant qu'il porte à la question de la formation de capitaux en ce qui concerne la petite et moyenne entreprise, surtout dans les nouveaux domaines de l'économie qui, comme il le sait, exigent des investissements à la fois en technologie et dans l'acquisition de compétences.

(1455)

C'est un élément majeur. Conformément aux principes d'aide aux entreprises énoncés par le gouvernement dans le livre orange, nous avons l'intention de créer un cadre qui favorisera la réussite des entreprises. Nous comptons aussi avoir recours souvent au secteur privé, tisser des liens avec les entreprises et exploiter cette importante source de fonds, et en plus, établir un régime fiscal qui encourage l'innovation et les investissements en R-D.

Le crédit d'impôt pour dépenses de R-D, la création du Plan d'investissements communautaires du Canada ainsi qu'Industrie Canada s'inscrivent dans la lancée de notre programme macro-économique, grâce auquel nous pourrons bien comprendre les besoins de la petite entreprise et établir les liens et les partenariats possibles. Ce sont là autant de moyens de résoudre ces problèmes.

* * *

[Français]

L'HÉPATITE C

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.


11489

La ministre de la Santé affirmait, hier, concernant l'hépatite C, et je la cite: «Je peux vous dire que la députée reconnaît qu'il y a beaucoup de juridictions en ce qui concerne cette question. On attend avec impatience les recommandations du juge Krever en ce qui a trait au dépistage des personnes atteintes de l'hépatite C.»

Comment la ministre peut-elle expliquer qu'elle justifie la décision de ne pas dépister les porteurs de l'hépatite C avant 1990, par le fait qu'il y a plusieurs juridictions en cette matière, alors que c'est la Croix-Rouge, seule, qui a pris la décision arbitraire de cesser le dépistage à ce moment?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, laissez-moi vous dire que le rôle de Santé Canada est de voir à la sécurité des produits sanguins. C'est vrai qu'il y a plusieurs juridictions, surtout la juridiction provinciale qui, en effet, a une responsabilité concernant le dépistage.

Il faut dire que plusieurs provinces ont commencé à retracer les personnes atteintes de l'hépatite C, entre autres, la Colombie-Britannique et certains hôpitaux dans d'autres provinces.

* * *

[Traduction]

EXPO 2005

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, deux villes canadiennes sont en concurrence pour obtenir le droit de présenter leur candidature en vue d'accueillir Expo 2005. Elles attendent avec impatience que le ministre du Patrimoine annonce à qui ira ce droit. Le ministre avait dit qu'il annoncerait sa décision fin mars. Nous attendons toujours.

Beaucoup de citoyens ont travaillé très fort à la préparation de ces soumissions. Le ministre pourrait-il dès maintenant mettre fin au suspens? Est-ce que ce sera Calgary ou Ottawa?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, l'étude de cette question est en bonne voie. Elle fait maintenant l'objet de discussions au niveau ministériel.

Nous sommes très conscients de la grande impatience des deux groupes concurrents. Ils seront informés du résultat des délibérations ministérielles le plus tôt possible.

* * *

LE BUDGET

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances qui conviendra, je crois, que son budget nous a entraînés sur une voie sans précédent.

Des voix: Bravo!

Une voix: Plus jamais un libéral ne sera élu en Saskatchewan.

M. Riis: Ce budget n'apporte pas de changement important à la politique monétaire. En ce qui concerne la réforme fiscale, seuls des changements mineurs ont été apportés. Les mesures principales ont consisté à procéder à des compressions massives au niveau des programmes sociaux et, en fait, de tous les programmes gouvernementaux.

En supposant que ce budget nous mène à la prospérité économique et à la création d'emplois, le ministre pourrait-il nous dire de quel pays, de quel gouvernement il s'est servi pour modèle afin de démontrer que cette approche est efficace et donne des résultats?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, pour commencer, je voudrais féliciter le député d'avoir si bien entamé sa question.

Nous avons analysé les besoins économiques du Canada et la situation dans laquelle nous nous trouvons et nous avons tenu compte de l'engagement pris par le gouvernement de veiller à faire de la création d'emplois la priorité de ce pays. Je crois que c'est la raison pour laquelle ce budget a été si bien accueilli. Grâce à ce budget, la reprise économique va se poursuivre et les Canadiens vont commencer à pouvoir faire ce que les libéraux ont toujours pensé qu'ils étaient capables de faire: concurrencer le reste du monde.

* * *

(1500)

L'AGRICULTURE

M. Tony Valeri (Lincoln, Lib.): Monsieur le Président, des agriculteurs et des entreprises du secteur agroalimentaire de ma circonscription de Lincoln reconnaissent que l'agriculture au Canada change et surtout qu'il faut étendre nos marchés d'exportation.

Nos agriculteurs comptent sur le gouvernement canadien pour que la valeur des échanges internationaux de produits agricoles atteigne 20 milliards de dollars d'ici l'an 2000.

Le ministre de l'Agriculture peut-il expliquer quels résultats concrets nos agriculteurs et les membres du secteur agroalimentaire peuvent attendre de sa récente visite au Chili, en Argentine et au Brésil?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je suis rentré hier d'une mission commerciale de dix jours en Amérique du Sud, dans les pays que le député vient de mentionner. La mission commerciale a été un franc succès, surtout parce que la délégation comprenait, outre les représentants du gouvernement canadien, ceux de trois provinces, soit le Québec, l'Alberta et la Saskatchewan, et près de 30 leaders d'organisations et d'entreprises de l'agriculture et de l'agroalimentaire du Canada. On y a retrouvé l'esprit d'Équipe Canada dont a parlé le premier ministre.

La mission a permis de réaliser des activités commerciales et de jeter les bases de nombreuses autres à venir. Nous avons fait des progrès à plusieurs égards, entre autres, au chapitre des subventions à l'exportation qui faussent les échanges ainsi que de l'indispensable respect des règles sanitaires.

11490

Nous avons discuté de l'adhésion du Chili à l'ALENA à titre de quatrième partenaire. Nous étendons les possibilités commerciales du Canada concernant les céréales, les légumineuses à grains, la luzerne, le bétail, la viande, la zoogénétique, la technologie agricole, les aliments transformés ainsi que le matériel et les machines agricoles.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de M. Hans-Ulrich Klose, vice-président du Bundestag allemand, et de ses trois collègues parlementaires.

Des voix: Bravo!

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord, Lib.): Madame la Présidente, comme on peut le constater à la page 11375 du hansard, au cours du débat tenu hier à la Chambre sur l'initiative parlementaire portant sur les crimes contre l'humanité, j'ai parlé de «300 000 intellectuels». Il s'agit plutôt de 3 000 intellectuels. Je suis responsable de cette erreur et je demande qu'elle soit corrigée dans la prochaine édition du hansard.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La correction sera apportée.

_____________________________________________


11490

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1505)

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'AGRICULTURE

La Chambre reprend l'étude de la motion.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Madame la Présidente, la motion du Bloc dont nous sommes saisis aujourd'hui ne me surprend pas tellement. Les députés du Bloc semblent appliquer leur stratégie habituelle, qui consiste à se montrer contrariants et provocateurs et à tenter d'intensifier la rivalité entre les Canadiens. Ils prétendent agir au nom de leurs électeurs, mais je ne pense pas que la société québécoise ne croie pas en l'équité. Généralement parlant, les Québécois sont comme le reste des Canadiens. Nous avons ici un exemple parfait des tactiques auxquelles le Bloc a constamment recours à la Chambre.

J'ai demandé à un ou deux députés québécois membres de l'autre parti qui représente le Canada central comment ils réagissent aux tactiques qu'utilise le Bloc. J'ai demandé à l'un d'entre eux s'il était gêné par les plaintes continuelles des députés du Bloc et leurs efforts constants pour obtenir plus d'argent. Ces Québécois m'ont répondu: «Oui, cela nous gêne.»

Examinons les mauvais traitements infligés aux producteurs de lait du Québec à qui l'on garantit pourtant 40 p. 100 du marché intérieur du lait. Oui, leurs subventions seront réduites. Leurs subventions de 217 millions de dollars seront réduites de 30 p. 100, ou de 57 millions de dollars, en deux ans.

Ce que les députés du Bloc oublient de dire, c'est que tous les producteurs laitiers du Canada ne se trouvent pas au Québec. Le reste du Canada aussi a des vaches. Nous perdrons aussi notre part de cette subvention qui suscite des jérémiades franchement exagérées.

D'un autre côté, la subvention du Nid-de-Corbeau ne sera pas réduite progressivement. Elle ne sera pas réduite d'un certain pourcentage chaque année pendant une certaine période, mais elle sera éliminée en une seule fois et pour toujours.

M. Solomon: Honte aux libéraux.

Une voix: Honte.

M. Morrison: Honte aux libéraux. Des indemnités de 1,6 milliard de dollars seront versées, ce qui est équivalent à trois années de subvention. Après cela, plus rien, mais les producteurs laitiers conserveront 70 p. 100 de leur subvention. Si c'est injuste pour les Québécois, que quelqu'un m'aide à comprendre. Qu'est-ce qui serait juste pour eux?

Le budget contient un autre petit truc dont pas un bloquiste n'a parlé. Il s'agit des subventions d'aide au transport des aliments du bétail pour l'est du Québec et les Maritimes. Cela s'applique au Québec. Cette aide sera éliminée progressivement sur une période de dix ans.

Il semble, d'après les rumeurs que j'ai entendues, que l'on ne touchera cependant pas à ces subventions avant un an. Il y aura un moratoire d'un an sur l'élimination de ces subventions. Cela signifie que l'Ouest continuera d'expédier ses céréales fourragères au Québec où ils seront transformés en viande de boeuf et en produits laitiers. Pourtant, si ces subventions ne jouaient pas contre nous, nous pourrions produire ce boeuf et ce lait chez nous à moindre coût et exporter les produits finis. Cependant, ce n'est pas ainsi que le Canada fonctionne. Nous sommes encore prisonniers du vieux système colonial où les deux provinces du Canada central ont le lait, où le foin est consommé dans l'Ouest et où nous savons ce qui tombe sur les Maritimes.

(1510)

Dans la motion, il est question de diversification. On dit que les indemnités qui remplaceront la subvention du Nid-de-Corbeau aideront beaucoup les agriculteurs de l'Ouest à se diversifier. Dans ma circonscription, les agriculteurs se diversifient depuis quelques années déjà et ce n'est pas parce qu'il y a ou parce qu'il n'y a pas de subventions, mais parce que les forces du marché l'exigent. Ils cultivent des plantes qu'ils n'avaient jamais cultivées auparavant.

En circulant en auto dans ma circonscription l'été dernier, j'ai vu d'immenses champs de colza, de lentilles et même de tournesols. Ce ne sont pas là des cultures habituelles dans ma région de la Saskatchewan, mais nous nous tournons vers ces cultures pour profiter du marché qui existe et pour nous éloigner de notre produit à bas prix, qui est le blé.


11491

En conclusion, je veux délaisser un peu l'agriculture pour parler encore une fois de ce que la Confédération apporte aux diverses régions du pays. Je suis certain que les députés du Bloc sont au courant d'une étude récente qui révèle que, au cours des dix dernières années, si on tient compte de ce que le Québec a reçu du gouvernement fédéral en paiements et de ce qu'il a donné au gouvernement fédéral en impôts, cette province affiche un bénéfice net de 168 milliards de dollars. Durant cette même période, l'Ontario est en déficit de 45 milliards de dollars. N'oublions pas que, à l'époque de la politique énergétique nationale, ma province voisine, l'Alberta, a dû renoncer à des recettes de 90 milliards de dollars pour appuyer les économies des deux provinces du centre du Canada. Je trouve cela très étrange que ceux d'entre nous qui veulent que notre pays reste uni soient ceux qui ont toujours payé la note et que ceux qui veulent détruire notre pays soient ceux qui ont toujours profité le plus de la Confédération sur le plan économique. Ce qu'ils disent en réalité, c'est: «Nous voulons être libres, nous voulons être seuls, mais, de grâce, continuez à nous donner de l'argent.»

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Madame la Présidente, mon distingué collègue qui vient de me précéder, député réformiste de l'Ouest, discrédite les députés du Bloc québécois parce qu'on défend notre pays, le Québec. J'aimerais lui faire un petit cours d'histoire.

En 1837, on a dissous le gouvernement du Québec à partir de Londres. Trois ans plus tard, en 1840, on a fusionné-il n'y avait plus de gouvernement à Québec, alors cela a été facile-on a fusionné le Bas et le Haut-Canada. Mais le hic, c'est que Québec était économe et ne voulait pas s'endetter comme le gouvernement le fait depuis 1970, régulièrement mais sûrement. Le Québec n'était endetté que de 85 000 livres, alors que l'Ontario était endetté de 1,2 million de livres.

Comme il n'y avait qu'un seul gouvernement qui pouvait décider, celui de l'Ontario, on a décidé d'additionner A et B, les deux dettes et d'appeler cela, dorénavant, une dette commune. C'est comme cela que le Québec a été traité depuis des années. Aujourd'hui, on ose nous reprocher de dénoncer des iniquités. Moi, je ne l'accepte pas. Je ne l'accepte pas.

(1515)

On offre 1,6 milliard de dollars aux producteurs de trois provinces de l'Ouest sans intérêt, sans impôt. Ils n'ont même pas l'obligation de le déclarer à l'impôt pour les dédommager de la disparition de la LTGO. Au Québec, on va pénaliser en moyenne près de 5 000 $ chacun des producteurs laitiers et on ne leur donne absolument rien pour les dédommager. Absolument rien.

Le pire dans tout cela c'est que nos producteurs de l'Ouest vont en profiter pour diversifier leur agriculture et venir sur le marché du Québec nous concurrencer à l'aide des impôts qu'on aura donnés à ce gouvernement. Je donne ici, à titre d'exemple, de 1981 à 1991 et cela tend depuis 1991 à s'intensifier, et à partir de 1996, ce sera pire encore. Je prends, par exemple, le porc. Il n'y a pas de gestion de l'offre dans le porc. Savez-vous qu'en 10 ans, la production de porc dans l'Ouest a augmenté de 39 p. 100, et durant la même période, diminution de 16 p. 100 au Québec. Ça va bien.

La culture en serre, en superficie, sans compter que les marchés sont autour de Québec et de l'Ontario, l'Ouest a augmenté de 67 p. 100, alors qu'au Québec on a augmenté d'à peine 46 p. 100. Je peux vous dire que chaque fois que nous en aurons la chance, les députés du Bloc québécois en cette Chambre se lèveront pour dénoncer autant des députés libéraux que des députés réformistes qui n'ont pas une vision globale de ce pays, qui n'ont jamais, pour la plupart, mis les pieds au Québec, et critiquent, disent que le Québec chiale encore, quémande encore. On a payé plus que notre part dans ce pays!

[Traduction]

M. Morrison: Madame la Présidente, j'ai bien aimé cette petite leçon d'histoire. Malheureusement, je ne vois pas quel rapport elle a avec le débat d'aujourd'hui, qui porte sur les conditions économiques actuelles au Canada.

Comme le député ne m'a laissé que très peu de temps, je vais être obligé de m'attarder seulement à une des statistiques qu'il a mentionnées. Il a parlé d'une augmentation de la production de porc de 39 p. 100, je crois, dans l'Ouest et d'une diminution de 16 p. 100 au Québec. Avec l'aide au transport des céréales fourragères, si le député croit que les agriculteurs du Québec ne sont pas capables de faire concurrence à ceux de l'Ouest, alors il dit du mal de sa propre province, le Québec. Je ne ferais jamais cela.

Nous sommes progressistes. Nous travaillons fort pour diversifier notre économie. Nous ne demandons pas la charité et, pour ce qui est du 1,6 milliard de dollars, le député n'a fait que répéter les mêmes arguments. Il n'a rien dit de nouveau; il n'a fait que répéter la même chose. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Reprise du débat.

[Français]

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec la députée de Guelph-Wellington.

Jusqu'à présent, on dirait que les députés du Bloc québécois choisissent les dossiers dans lesquels ils aimeraient intervenir. Dans le conflit du port de Montréal, dans le conflit du port de Vancouver, ils ont choisi de ne rien dire, mais dans le contexte du débat aujourd'hui, encore cette fois-ci, on a un autre exemple de la partisanerie avec laquelle les députés du Bloc québécois décident de choisir les dossiers qu'ils veulent défendre.

J'aimerais également apporter des précisions au sujet de la subvention laitière qui a été annoncée dans le dernier Budget.

(1520)

Il faut tout d'abord préciser que le gouvernement actuel s'est engagé formellement à maintenir un régime de commercialisation ordonné pour les producteurs laitiers, d'oeufs et de volaille. Ces productions constituent une assise très importante du secteur agroalimentaire canadien.


11492

Lors des dernières négociations finales du GATT, nous avons démontré notre sérieux en obtenant des tarifs douaniers suffisamment élevés pour garder notre système de gestion de l'offre presque inchangé. On parle de plusieurs tarifs douaniers qui atteignent entre 200 et 300 p. 100 pour différents produits laitiers.

Ces tarifs ne diminueront que de 15 p. 100 sur une période de six ans. Il s'agit de la plus faible réduction exigée sur de tels tarifs. De plus, des accords internationaux prévoient un accès limité pour les importations, tout en nous offrant un accès semblable ailleurs pour nos produits laitiers.

En conséquence, tous les spécialistes s'accordent pour dire que le secteur jouit d'une grande protection pour plusieurs années. Au moment où le projet de loi sur le GATT était à l'étude en cette Chambre, on se rappellera qu'on nous a attaqué en disant qu'on avait oublié de protéger l'article XI. Voilà la façon dont on a procédé.

C'est une bonne nouvelle, puisque le secteur laitier connaît actuellement un regain de ses activités. La production canadienne de lait de transformation a connu une hausse de 3,2 p. 100 en 1993-1994 par rapport à l'année précédente. On prévoit aussi une augmentation de 4,5 p. 100 pour l'année en cours. Les producteurs laitiers du Québec qui possèdent presque la moitié du contingent national profitent de cette situation avantageuse.

Pour ce qui est de la réduction du subside laitier de 30 p. 100 sur deux ans, elle s'avère nécessaire pour la santé des finances publiques.

En tant qu'élus, nous avons certaines responsablités incontournables, dont celle de réduire véritablement le déficit. On ne peut plus permettre une croissance du déficit qui s'ajoute constamment à la dette nationale. Au contraire, on doit ramener la balance budgétaire vers l'équilibre. Tous les Canadiens et les Canadiennes s'entendent là-dessus.

En conséquence, le gouvernement doit réduire ses dépenses à tous les niveaux et sur plusieurs fronts. Une de celles-ci concerne le secteur agroalimentaire.

Dans le secteur laitier, les producteurs reçoivent en ce moment 5,43 $ l'hectolitre pour le lait de transformation sous forme de subvention directe. Un hectolitre représente 100 litres; donc en termes familiers la subvention équivaut à 5c. le litre. D'autre part, elle ne s'applique pas au lait de consommation, c'est-à-dire le lait qu'on boit tous les jours, pour lequel les producteurs obtiennent un prix supérieur.

On parle donc d'une fraction du revenu des producteurs laitiers qui est touchée. À ce compte, je suis d'avis que cette décision se justifie entièrement, quand on sait, je le répète, que le gouvernement doit réduire ses dépenses. On n'a pas le choix d'appliquer des mesures budgétaires rigoureuses mais sensées.

Après tout, la subvention n'est pas toute abolie. Loin de là. Soixante-dix pour cent, soit environ 160 millions de dollars, iront toujours à la production laitière. Dans les mois à venir, la Commission canadienne du lait et des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire tiendront des consultations avec le secteur sur l'établissement des prix pour la campagne débutant le 1er août prochain.

Plus tard cette année, le gouvernement entamera des discussions avec l'industrie sur la meilleure façon d'utiliser cette subvention. Ces fonds doivent servir le plus efficacement possible, c'est-à-dire qu'ils doivent soutenir la croissance à long terme du secteur.

Autant les producteurs que les transformateurs ont le souci de s'adapter au nouveau contexte international. Le secteur laitier du Canada génère de nombreux emplois et des milliards de dollars en recettes. Dans l'avenir, il importe que ce secteur puisse prospérer et relever de nouveaux défis.

Depuis toujours, une certain portion de la production, en particulier la poudre de lait excédentaire et certains fromages réputés, est écoulée sur le marché mondial.

(1525)

Tout dernièrement, lors de la mission commerciale effectuée en Amérique du Sud par le ministre de l'Agriculture et des représentants du secteur, on a intéressé des Brésiliens à importer du parmesan et du mozzarella canadien. Cela prouve que l'on peut trouver de nouveaux marchés pour nos excellents produits.

À la dernière réunion du Comité national de gestion des approvisionnements du lait, six des neuf offices provinciaux de commercialisation ont décidé de créer un quota de mise en marché spécial pour développer le marché d'exportation. Cette nouvelle orientation pourrait voir le jour d'ici l'été et peut-être regrouper éventuellement toutes les provinces.

On peut constater que le secteur est en train d'évoluer selon ses besoins. Le gouvernement entend faciliter le passage vers une nouvelle génération de la commercialisation ordonnée dans le lait comme dans le secteur de la volaille et des oeufs.

D'autre part, le Budget a annoncé de nouvelles façons d'aider l'ensemble du secteur agroalimentaire, y compris le secteur laitier. En outre, le gouvernement propose un train de mesures d'adaptation pour qu'il puisse saisir les nouvelles possibilités qui s'offrent sur le marché mondial et pour compenser la réduction des prestations gouvernementales.

Le gouvernement s'engage à fournir des outils financiers, et on a pu s'en rendre compte quand les fonds de la Loi sur les prêts coopératifs ont été doublés, il y a quelques semaines. De même, le gouvernement offrira plus d'informations sur les marchés aux entreprises désireuses d'accroître leurs ventes à l'extérieur du pays.

Comme vous pouvez le constater, on peut conclure que le gouvernement aide, selon ses capacités financières, le secteur laitier tout comme les autres segments de l'agroalimentaire.

Les compressions annoncées sont réelles mais pas dramatiques au point de nuire à l'évolution du secteur laitier. Au contraire, nous voulons faire en sorte qu'il puisse continuer d'évoluer à l'intérieur de la mise en marché ordonnée.

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je tiens à remercier le député de ses observations. Je sais qu'il se préoccupe autant de l'avenir de l'agriculture au Québec que je m'en préoccupe pour tout le Canada.


11493

Le député a parlé du droit de douane actuel de 351 p. 100 imposé sur certains produits soumis à la gestion de l'offre. Il a également parlé de la part du marché, la moitié, dont les agriculteurs québécois jouissent présentement pour le lait de consommation. J'ai du mal à comprendre la logique de l'argumentation du Bloc selon qui, après la séparation, le Québec continuera de jouir de la moitié du marché canadien pour le lait de consommation, assorti d'un droit de douane de 351 p. 100. Ça ne semble pas coller.

Quelles mesures son gouvernement prend-il pour aider les agriculteurs québécois dont les produits sont soumis à la gestion de l'offre à faire les ajustements nécessaires pour le moment où les échanges seront complètement libéralisés en agriculture? Ce moment approche rapidement. Dans l'industrie du boeuf, nous pratiquons déjà le libre-échange avec les États-Unis. Nous avons en fait demandé des permis spéciaux d'importation au-delà de l'accès minimal, de sorte que le libre-échange s'instaure plus rapidement dans l'industrie du boeuf que cela n'était prévu dans le cadre de l'accord du GATT.

Nous savons que les États-Unis ont dit qu'ils voulaient discuter des secteurs soumis à la gestion de l'offre au Canada. Il y aura donc des pressions accrues pour passer à un régime de libre-échange complet.

Il me semble que le gouvernement libéral devrait prendre des mesures concrètes pour aider les agriculteurs à s'adapter à ce qui s'en vient. Si nous disons que cela ne peut pas se faire, si nous voulons maintenir ces droits de douane de 351 p. 100 après la réduction des droits étalée sur six ans prévue dans l'accord du GATT, il me semble que ce droit s'établira encore à 300 p. 100, ce qui n'est pas réaliste.

Qu'est-ce que le député compte faire pour aider les agriculteurs des secteurs soumis à la gestion de l'offre à effectuer les ajustements nécessaires pour conserver une exploitation rentable une fois que le libre-échange sera complètement en vigueur?

M. Discepola: Madame la Présidente, il est rassurant de constater que des députés autres que ceux du Bloc québécois ont compris l'importance de l'industrie agricole au Québec, et notamment de l'industrie laitière. Il semble n'y avoir à la Chambre qu'un seul parti qui ne réalise pas les avantages dont le Québec bénéficie grâce à la protection et aux mécanismes du système de gestion de l'offre. Les producteurs laitiers du Québec bénéficient d'avantages particulièrement importants.

(1530)

Je suis parfois très perplexe lorsque je discute de cette question avec des électeurs des secteurs ruraux de ma circonscription. Il n'est peut-être pas rare que les principaux dirigeants de la fédération censée défendre les intérêts des agriculteurs affichent des tendances séparatistes. C'est peut-être pour cette raison que le Bloc choisit de ne pas faire valoir les avantages dont bénéficient les agriculteurs parce qu'ils font partie de cette fédération que nous aimons appeler le Canada. Au Québec, certains préféreraient malgré tout avoir leur propre pays.

Je suis déconcerté. Chaque fois qu'une lettre est publiée dans un journal, il y a très rapidement une réplique de quelqu'unde l'UPA, par exemple, qui réfute les arguments, et le débats'amorce.

Rien ne garantit que la protection dont les agriculteurs bénéficient aujourd'hui serait maintenue. Aucun député du Bloc québécois ne peut l'affirmer en toute honnêteté devant cette Chambre. C'est en restant dans le Canada qu'on est protégé.

Examinons ce qu'ils appellent leur avant-projet de loi. Les bloquistes s'empressent de dire que nous n'avons que le statu quo à proposer. Or, exception faite de l'article 1 de l'avant-projet de loi qui dit expressément que le Québec sera un pays souverain, les articles 2 à 16 mentionnent que le Québec aimerait avoir la même monnaie, le même régime d'immigration, le même passeport, la même union économique. C'est cela le statu quo. Le Canada leur offre déjà tout cela, mais ils veulent le détruire pour l'obtenir à nouveau. Rien ne garantit qu'ils bénéficieront de la protection conférée en vertu du GATT, par les pays du G-7 ou par tout autre accord.

En réponse à la question, en vertu des droits qui ont été convenus lors de la dernière série de négociations du GATT, la protection par l'entremise des droits diminuera d'environ 15 p. 100 par année. L'industrie aura ainsi suffisamment de temps pour s'adapter. Par la même occasion, le gouvernement a doublé les réserves pour les prêts, les faisant passer de 1,5 à 3 milliards de dollars, afin d'aider les agriculteurs à avoir accès aux capitaux dont ils ont besoin. Le processus prévu à l'égard des droits leur laissera les trois ou quatre ans dont ils ont besoin.

M. Penson: Il est question de 15 p. 100 sur six ans.

M. Discepola: Non, non. La réduction est de 15 p. 100. À ma connaissance, la période de transition qu'ils demandent ne dépasse donc pas trois ou quatre ans. Ils ont amplement le temps de s'adapter.

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je prends la parole au sujet de la motion du député de Frontenac. Mes propos porteront sur l'inspection et la recherche.

Il est bien connu que le principe directeur de notre récent budget était la répartition du fardeau de la réduction du déficit. Tous les secteurs et toutes les régions ont été mis à contribution, et cela été fait équitablement. La population de Guelph-Wellington appuie les efforts de réduction du déficit du gouvernement. Mes électeurs veulent que nous réduisions les dépenses de l'État et que nous n'accusions plus de déficits.

Dans le cadre des restrictions budgétaires, nous avons préparé le budget pour soutenir notre vision de l'industrie agricole et agroalimentaire. Le budget s'appuie sur la croissance et la sécurité économiques, sur une agriculture durable et un approvisionnement en aliments sains.

La circonscription de Guelph-Wellington représente tous les aspects de la chaîne alimentaire. Nous avons d'excellents agriculteurs qui cultivent la terre et fournissent des produits alimentaires et laitiers. Ce sont des entreprises comme Better Beef Limited, qui emploie plus de 400 personnes, Woolrich Dairy Incorporated of Ariss, qui produit des fromages et du lait de chèvre qui ont remporté des prix, et United Co-operatives of Ontario, qui fabrique des céréales fourragères. Ces entreprises ne font pas que donner du travail à des gens, elles contribuent à notre industrie agricole. Dans ma circonscription se trouve éga-


11494

lement une importante institution de recherche, l'Université de Guelph.

Enfin, nous sommes tous des consommateurs qui tiennent à un approvisionnement de haute qualité et sans danger et nous voulons que soient contrôlées les maladies des plantes et des animaux qui peuvent avoir un effet sur la santé humaine ou l'économie. Mes électeurs veulent, de façon prioritaire, que nous garantissions que la sécurité alimentaire ne sera pas com-promise.

(1535)

Parallèlement, reconnaissant la nécessité de réduire le déficit, la population de Guelph-Wellington sait que les coûts des contribuables doivent être diminués et qu'il faut aider l'industrie à maintenir ses coûts de production bas pour pouvoir offrir le meilleur produit au meilleur prix.

C'est pourquoi Agriculture et Agroalimentaire Canada a, dans le passé, travaillé de très près avec d'autres ministères fédéraux ainsi que les ministères provinciaux de l'Agriculture et de la Santé pour mettre au point des normes nationales. Nous visons à établir un système national d'inspection des aliments. Cela réduira les chevauchements et permettra d'instituer un régime réglementaire plus simple et plus efficace. Mes électeurs ont demandé que tous les gouvernements travaillent ensemble pour réduire les chevauchements et pour maîtriser les dépenses, ce dont même le Bloc québécois peut se réjouir, je l'espère.

En outre, nous améliorerons les règles du jeu entre les branches d'industrie nationales et importatrices, en augmentant l'inspection des produits importés. Nous instaurerons également un mécanisme de sanctions pécuniaires pour favoriser l'application et le respect des mesures.

Ce sont là des exemples de l'équité qu'exigent les électeurs de Guelph-Wellington et d'autres Canadiens. Pendant l'exercice financier en cours, nous appliquerons, avec la collaboration de l'industrie des viandes, des mesures de surveillance de l'efficacité des programmes en vigueur dans le domaine de l'hygiène des viandes.

Nous prévoyons que ces initiatives nous feront économiser 10 millions de dollars. Tous les députés en seront certainement ravis. En 1997-1998, nous réaliserons d'autres économies en prenant des initiatives comme la privatisation de l'assurance de la qualité, la surveillance des résidus et la mise en oeuvre de programmes d'analyse des risques et de maîtrise des points critiques.

Nous comptons également transférer au secteur privé les essais courants en laboratoire. L'industrie bénéficie du fait que le système d'inspection et de réglementation des aliments rapporte des prix élevés pour des aliments de meilleure qualité. Nous estimons donc qu'elle devrait payer sa juste part des coûts d'inspection.

Nous engageons actuellement avec le secteur privé des négociations visant à rendre nos programmes d'inspection et de contrôle phytosanitaire plus efficaces et plus rentables, tout en atteignant les objectifs de réduction fixés dans le budget. C'est ce que nous ferons au cours des trois prochaines années, en prenant des initiatives pour réduire, éviter et partager les coûts.

Ces mesures n'auront toutefois aucun effet négatif sur la salubrité des aliments. Permettez-moi de souligner que la salubrité des aliments continue d'être la plus haute priorité du gouvernement. Son objectif est de réduire les coûts des contribuables de collectivités comme Guelph-Wellington en récupérant 46 millions de dollars supplémentaires, d'ici 1997 et 1998, dans le coût des services d'inspection.

Pour demeurer à la fine pointe du progrès, nous devons continuer d'effectuer de la recherche. Comme je l'ai mentionné précédemment, l'Université de Guelph dirige un projet de recherche dans divers domaines de la zootechnie et a ainsi mis au point un vaccin qui réduit le stress dont souffrent les animaux pendant le transport, d'où des économies de plusieurs millions de dollars pour les éleveurs.

De plus, des chercheurs de l'université étudient de nouvelles méthodes d'amélioration génétique pour les récoltes et, dans le cadre du programme d'aide au secteur agroalimentaire, ils touchent tous les aspects de l'exploitation agricole en réunissant tous les intervenants, notamment les environnementalistes, pour examiner les incidences positives et négatives de l'agriculture.

Le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire continuera d'être la principale source de financement de la recherche et du développement agricoles au Canada. La R-D représente une grande part des dépenses gouvernementales et restera une grande composante de l'appui gouvernemental au secteur agroalimentaire. Nous nous sommes engagés à déployer des efforts en matière de recherche et de transfert de technologies pour assurer la sécurité de notre approvisionnement en vivres, ainsi que la pérennité de notre base de ressources.

Des produits à valeur ajoutée, de nouvelles technologies qui permettent de réaliser des économies de coûts, des produits non alimentaires tirés de matières premières agricoles, ainsi que des approches innovatrices, telles que la biotechnologie, cela demande une infrastructure de recherche qui soit créatrice et dynamique. Nous nous engageons à maintenir tout cela. Il reste cependant que, vu l'énormité de la tâche qu'est la lutte contre le déficit, tous les secteurs doivent faire leur part.

(1540)

Les activités ministérielles en matière de recherche et de développement seront donc partiellement touchées par la réduction des dépenses consacrées au développement que prévoit le budget 1995. Des économies de 50 millions de dollars seront réalisées d'ici 1997-1998, grâce surtout à la rationalisation de l'infrastructure de recherche et aux compressions effectuées dans des domaines dont les activités se prêtent davantage à des déménagements ou peuvent être effectuées un peu n'importe où. C'est ainsi qu'une économie de trois millions de dollars sera réalisée à même le budget des dépenses en capital.

Nous nous orienterons vers un réseau de centres d'excellence dynamiques, viables et spécialisés. Sept petits établissements de recherche seront fermés: trois dans l'Ouest, deux en Ontario et deux au Québec. On va placer les autres centres à des endroits stratégiques pour bien refléter les points forts de l'industrie et les avantages sur le plan de la compétitivité des régions où ils sont situés, ce qui donnera la possibilité de créer une masse critique des compétences les plus utiles. On transfère et améliore une


11495

partie de nos travaux au Québec, chose que mes collègues de l'opposition officielle doivent sûrement apprécier et encourager.

En plus de rationaliser notre infrastructure dans le domaine de la recherche, nous réaffectons également les ressources pour financer un projet d'investissement de contrepartie. Ce fonds soutiendra des projets de recherche conjoints lancés par l'industrie. Le gouvernement apportera une contribution égale à celle de l'industrie, jusqu'à concurrence de 35 millions de dollars. Si l'industrie réagit bien à cette initiative, cela pourrait conduire à un investissement de 70 millions de dollars d'ici à la fin du siècle. On compensera ainsi, en partie, les réductions et on s'assurera que l'argent est bien dépensé là où l'industrie peut le mieux l'utiliser.

En conclusion, je voudrais simplement souligner à nouveau que nous entendons tout d'abord assurer la sécurité des aliments dans le cadre d'un système d'inspection, tout en réduisant les chevauchements, en établissant des règles du jeu égales pour les producteurs canadiens, grâce à de meilleurs contrôles aux frontières, et en partageant le coût des services avantageux pour l'industrie. Nous avons toujours l'intention de garantir une masse critique suffisante dans le domaine de la recherche et des transferts technologiques pour la sécurité de nos approvisionnements alimentaires et la viabilité de nos ressources agricoles.

En tant que représentante des gens de Guelph-Wellington, qui contribuent tous de façon importante à notre chaîne alimentaire, je souscris à ces initiatives. Je félicite le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire de veiller à ce qu'on respecte nos principes directeurs, malgré les compressions dans le financement.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Madame la Présidente, la députée de Guelph-Wellington a beaucoup de chance puisqu'elle peut compter dans sa circonscription une université qui porte ce nom. Le gouvernement fédéral et plusieurs organismes paragouvernementaux confient des budgets importants en recherche à l'unversité qui se trouve dans sa circonscription.

Malheureusement, vous admettrez comme moi que ce ne sont pas tous les comtés qui possèdent des universités de la trempe de l'université de Guelph. Elle a mis beaucoup l'emphase sur la recherche. Je pige au hasard, parmi mes notes, une année concernant les dépenses du gouvernement fédéral, et j'ai choisi le ministère de l'Agriculture en recherche pour l'année 1990. Je vous donne quelques idées et je vous invite à réfléchir sur ces chiffres.

Le gouvernement fédéral a dépensé presque la moitié de toutes ses dépenses de recherche en agriculture, soit 111 millions de dollars, dans le secteur des céréales. Les amis de l'Ouest ne se lamentent pas, bien sûr. Cent onze millions de dollars, près de la moitié. Or, le secteur des céréales ne représente que 6 p. 100 de la production agricole. La même année, 24 p. 100 des dépenses fédérales en recherche agricole ont été effectuées au secteur du lait, de la volaille et du porc.

(1545)

Et tout à fait par hasard, la production de porc, de volaille et de lait est en majorité au Québec et, bien entendu, en Ontario.

Or, voyez-vous, moi, je suis un producteur agricole, membre de l'UPA. Je côtoie les agriculteurs. Samedi, j'ai passé toute la journée dans les rangs à circuler et, c'est bizarre, je n'ai pas vu un agriculteur se taper dans les mains en louangeant le Budget de ce gouvernement libéral, surtout en matière agricole. Je n'en ai pas vu un.

Lundi passé, j'étais à l'Encan Lafaille, à Coaticook. Plus d'une centaine de producteurs agricoles étaient présents. Je les questionnais. Ils étaient évidemment fiers de voir un des leurs se ramasser ici à Ottawa pour défendre leurs intérêts. Pas un n'était satisfait. Pas un.

Voyez-vous en Ontario, sur 99 circonscriptions-pardon, 98 circonscriptions libérales, puisqu'il n'y a qu'un échappé, un ami réformiste-vous comprendrez que la contestation me fait penser un peu à ce qu'on a connu au Québec dans les années 1970 lorsqu'il n'y avait que Roch LaSalle qui pouvait jouer un petit peu le rôle de l'opposition.

L'UPA et l'Association des producteurs laitiers sont littéralement déchaînées contre ce Budget. Ici, je citerai un extrait d'article de Claude Rivard en demandant à la députée de Guelph-Wellington de le commenter. Claude Rivard dit ceci dans un article de journal de mars 1995 intitulé «Le producteur de lait québécois»: «L'intention du gouvernement fédéral de se retirer complètement des programmes de contrôle laitier et d'évaluation génétique.» Cela en est de la recherche. Son gouvernement se retire et elle est contente de la recherche. Mon oeil.

[Traduction]

Mme Chamberlain: Madame la Présidente, le député de Frontenac a commencé par dire que j'avais bien de la chance d'être la députée de Guelph-Wellington. Et il avait bien raison. D'ailleurs, nous avons tous de la chance de vivre dans ce merveilleux pays qui s'appelle le Canada. Je tenais à le préciser.

Le député de Frontenac voulait parler de la R-D. Le gouvernement libéral maintiendra une excellente infrastructure de recherche au Québec, qui sera composée de quatre centres d'excellence nationaux situés à Lennoxville, à Saint-Hyacinthe, à Saint-Jean-sur-Richelieu et à Sainte-Croix. Nous allons en fait transférer 53 postes de recherche de la région de la capitale nationale à ces centres pour permettre à nos chercheurs de se concentrer sur des secteurs de recherche hautement prioritaires pour les producteurs et les transformateurs du Québec aussi bien que ceux de l'est et du reste du Canada.

Nous sommes chanceux de vivre au Canada et de pouvoir compter sur le soutien du gouvernement fédéral, y compris le Québec.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette de devoir interrompre l'honorable députée. Puisque son temps de parole est écoulé, nous reprenons le débat avec l'honorable député de Matapédia-Matane.

M. René Canuel (Matapédia-Matane, BQ): Madame la Présidente, je veux d'abord remercier mon collègue de Frontenac d'avoir provoqué cette journée de l'opposition sur l'agriculture. Il s'agit d'une journée extrêmement importante pour tous les agriculteurs et toutes les agricultrices du Québec et de tout le Canada.


11496

Je vois les députés d'en face et ils ne sont pas nombreux. On dirait que, sans venir d'une autre planète, je ne sais pas d'où ils viennent.

Le Budget fait mal, terriblement mal. Mon collègue de Frontenac disait tantôt que parmi les cultivateurs et les agriculteurs qu'il a vus, pas un ne peut se dire satisfait de ce Budget.

Eux autres, ils disent qu'il est acceptable, qu'il est bon. Je ne comprends pas d'où viennent ces députés.

Une voix: De l'Ontario.

(1550)

M. Canuel: Jamais on n'attachera trop d'importance à l'agriculture, et plus particulièrement, aux jeunes agriculteurs. Un peuple qui n'est pas autosuffisant en alimentation est un peuple qu'il faut associer au tiers monde. Un pays qui ne met pas l'agriculture en tête de ses priorités, c'est un pays qui n'a absolument rien compris.

Lorsque le gibier commença à manquer, l'homme trouva l'agriculture pour assurer sa survie et depuis, rien n'a remplacé la nourriture issue de cet art. Mais cette nourriture issue de la terre commande énergie, efforts, sueurs et travail, investissements et risques. Oui, les agriculteurs risquent beaucoup, énormément même et cela depuis des générations. Ces personnes sont prêtes à assumer des risques terribles.

Ces gens-là, chez eux, sont devenus souverains. Ils sont propriétaires de leurs terres. Ils sèment les céréales qu'ils veulent. Ils élèvent les animaux de leur choix. Leur travail ne commande pas forcément des heures fixes, mais on sait une chose, cela commande des heures incroyables. Ils sont prêts à se donner un pays.

Dans un sondage commandé par l'UPA et dont les résultats ont été rendus publics le 22 novembre 1990 à l'occasion de la Commission Bélanger-Campeau, 73 p. 100 des agriculteurs favorisaient la souveraineté-association.

Et le 2 septembre dernier, en pleine campagne électorale, en présence du premier ministre, Daniel Johnson, le président de l'UPA, M. Laurent Pellerin, indiquait: «La souveraineté, ce n'est pas beaucoup plus inquiétant que la situation actuelle, que ce qu'on a vécu dans la volaille et ce qu'on vit quotidiennement dans les échanges commerciaux». C'est le président de l'UPA qui a dit cela.

Oui, les agriculteurs ont, depuis des années, relevé de grands défis: passer de l'agriculture traditionnelle à l'agriculture industrielle, faire face à la concurrence internationale, informatiser leurs entreprises, apprendre de nouvelles techniques de production et être à la fine pointe de toutes les technologies nouvelles. Ils sont prêts à relever un beau et grand défi, un nouveau défi pour eux, redevenir complètement maître chez eux, autrement dit, devenir souverains.

À ceux et celles qui disent que la souveraineté du Québec entraînerait une profonde remise en question de l'agriculture québécoise, nos agriculteurs répondent que c'est beaucoup plus l'ouverture des marchés qui conditionne l'avenir de l'industrie québécoise que l'avènement d'un Québec souverain.

Ceux et celles qui pensent qu'il est improbable que les agriculteurs des autres provinces acceptent le maintien de la gestion de l'offre se trompent. Tout le monde sait que pour maintenir les revenus de tous les producteurs de lait, toutes les provinces ont intérêt à maintenir la gestion de l'offre.

Nous doutons que le reste du Canada, en particulier l'Ontario et les Maritimes, aient intérêt à mettre fin à la gestion de l'offre qui demeure le seul système de sécurité du revenu valable pour les agriculteurs. S'ils devaient le faire, ils enclencheraient un processus d'ouverture des marchés devant lequel il est certain que le reste du Canada en ressortirait perdant.

Je veux ouvrir ici une parenthèse. Il est difficile au Québec, et particulièrement dans ma région, de parler d'agriculture sans parler de foresterie. La plupart de nos agriculteurs ont une partie de leur ferme en boisé. Pour plusieurs, ces boisés traités adéquatement leur procurent un revenu d'appoint et parfois un revenu assez consistant.

Encore là, le gouvernement fédéral vient de pénaliser ces groupes de personnes. Le Plan de l'Est, qui devait être renouvelé pour trois ans, ne l'a été que pour un an.

(1555)

C'est un manque à gagner pour deux ans de plus de 13 millions. L'entente fédérale-provinciale, qui se termine en 1996, tire également de l'aile. Je vous rappellerai que ces ententes fédérales-provinciales existent depuis 25 ans au Canada et on les remet en question, malheureusement. Des personnes, les forestiers, les agriculteurs sont très inquiets de ce qui va arriver.

Investir en agriculture c'est obligatoire, investir en foresterie, c'est une nécessité. C'est un plus, c'est un investissement, ce n'est pas un cadeau. Les ministres de l'Agriculture et des Ressources naturelles plient l'échine devant les grosses bottes du ministre des Finances qui, lui-même, plie l'échine devant les multinationales. C'est cela le problème, qui gouverne le pays? Ce sont les multinationales. Et le ministre des Finances, à l'occasion, donne son point de vue. Mais ce n'est qu'un point de vue. Quand, tantôt, on nous a accusés ici, en face, de partisanerie, je le veux bien parce que nous représentons, notre population. À ce moment-là, je voudrais bien être partisan pour les défendre jusqu'au bout.

Je peux dire que ce qui s'en vient c'est apeurant pour ne pas dire affolant.

C'est un devoir de justice de se nourrir, de nourrir les autres car nous avons en Gaspésie un territoire extrêmement grand. Quand on ne nous donne pas les moyens d'investir dans ces territoires agricoles, on pourrait nourrir des milliers de personnes, pour ne pas dire des millions de personnes, il s'agit d'avoir simplement un petit coup de pouce. Bien sûr les gens de nos régions sont habitués aux risques, comme je le disais tantôt, aux aléas de la température, des maladies, des taux financiers et ils


11497

ont appris à se dépasser. Une fois de plus, ils sauront se donner ces pouvoirs et le faire dans la fierté et la dignité.

L'homme ne vit pas seulement de pain, ne vit pas seulement de colonnes de chiffres et de bilans, nos agriculteurs du Québec savent que l'homme vit d'abord et avant tout de dignité et de fierté. Avons-nous le droit, sous prétexte que nous sommes une minorité dans cette mer nord-américaine de nous refuser la vie normale des peuples libres et dignes de l'être? En vertu de quelle logique et de quel décret la nation québécoise peut-elle se priver de ce qui est vital pour les autres nations? Les agriculteurs connaissent bien notre histoire. Ils savent qu'il y a eu un vainqueur et un vaincu.

Je termine en disant ceci: Mes amis agriculteurs, vous n'avez plus de complexe, vos performances, vos réussites sont un gage pour aujourd'hui et demain. Vos terres vous appartiennent. Il ne reste plus qu'à vous donner un pays et, ce pays s'appelle le pays du Québec!

La présidente suppléante (Mme Maheu): L'honorable secrétaire d'État aux Affaires parlementaires a la parole sur un recours au Règlement.

* * *

LA LOI SUR LES ARMES À FEU

PROJET DE LOI C-68-AVIS DE MOTION CONCERNANT L'ATTRIBUTION DE TEMPS

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, il a été impossible d'en arriver à un accord en vertu des dispositions du paragraphe 78(1) et 78(2) du Règlement relativement aux délibérations, à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-68, Loi concernant les armes à feu et certaines autres armes.

En vertu des dispositions du paragraphe 78(3) du Règlement, je donne avis de mon intention de présenter une motion d'attribution de temps à la prochaine séance de la Chambre afin d'attribuer un nombre spécifié de jours ou d'heures aux délibérations à cette étape et aux décisions requises pour disposer de cette étape.

* * *

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'AGRICULTURE

La Chambre reprend l'étude de la motion.

(1600)

[Traduction]

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Madame la Présidente, mon collègue a dit que l'avenir est inquiétant. Je suis entièrement de son avis. L'avenir est extrêmement inquiétant pour les agriculteurs du Québec s'ils écoutent les informations erronées que les députés d'en face véhiculent sur ce qui se produirait si le Québec se séparait.

Il a tout à fait raison de dire que le système de gestion de l'offre est le seul système rentable pour les agriculteurs. À mon avis, le député devrait toutefois admettre clairement que ce système sera compromis si le Québec décide de se séparer. Ce système de gestion de l'offre est l'un des avantages que les agriculteurs québécois ont obtenu du système canadien et de leur appartenance à la fédération canadienne.

Pendant que j'ai la parole, je devrais en profiter pour faire part de mes inquiétudes à propos de la motion présentée par les députés d'en face et pour poser une question à ce sujet. Ils laissent entendre que la conversion des subventions au transport du grain en subventions directes aux agriculteurs de l'Ouest se fait aux dépens du Québec. Rien n'est plus faux.

Le gouvernement a reconnu que la modification de la LTGO, qui a été la pierre angulaire de la politique agricole dans l'ouest du Canada, frappe très durement les agriculteurs de l'Ouest. En fait, les agriculteurs du Québec sont relativement épargnés par ce budget comparativement à ceux de l'Ouest.

Comment le député peut-il expliquer aux agriculteurs du Québec qu'ils ne devront pas renoncer au système de gestion de l'offre s'ils optent pour la séparation? N'est-il pas disposé à reconnaître que le Canada a été extrêmement généreux envers les agriculteurs du Québec depuis un siècle et qu'en fait, le budget les a relativement épargnés?

[Français]

M. Canuel: Madame la Présidente, mon collègue pose une question, mais cette question me fait sourire un peu, parce que vous savez très bien que lorsqu'on a besoin de quelque chose, on va le chercher là où il est. À un moment donné, la Russie nous commandait du blé. Nous étions capitalistes et eux étaient communistes. Ils ne s'occupaient pas de la frontière et venaient chercher notre blé parce qu'il était bon et c'était intéressant pour eux.

Quand on dit que le Canada a été très bon pour le Québec, je lui répondrais ceci: les agriculteurs chez nous disent qu'il faut que ça cesse. Ce sont eux qui le disent, pas moi. Je suis le porte-parole, et quand nous sommes des élus, nous devons être le porte-parole de quelqu'un. Moi, j'ai rencontré des agriculteurs et ils m'ont dit de dire ce que je viens de dire. Ce ne sont pas simplement des phrases en l'air, comme certains peuvent en faire. Je suis le porte-parole des agriculteurs et agricultrices et à ce moment, ce que je viens de dire, je le répète, ils disent que c'est presque impossible de vivre dans un tel contexte.

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Madame la Présidente, dès qu'il a été question, au caucus du Bloc québécois, d'inscrire au Feuilleton de la Chambre cette motion du Bloc québécois concernant notre journée de l'opposition, c'est-à-dire une motion sur l'agriculture dénonçant le Budget du gouvernement libéral, j'ai insisté auprès de mon collègue de Frontenac pour intervenir dans ce débat.

D'abord, je veux rendre hommage à mon collègue de Frontenac pour la perspicacité qu'il démontre dans la façon de mener ses dossiers, mais également la justesse de ses interventions au nom du Bloc québécois.


11498

(1605)

Je le félicite, au nom de l'ensemble des agriculteurs, hommes et femmes du Québec, qui sont fiers du travail du député de Frontenac.

Il est quelque peu difficile de garder son calme lorsqu'on intervient dans un tel débat. On entend du côté du parti ministériel en particulier, quoiqu'on l'entende également de certains collègues du Parti réformiste, ce que je qualifierais, tout en utilisant des propos qui sont acceptables dans cette Chambre, des énormités de la part des députés libéraux et de plusieurs députés réformistes.

Je réfère en particulier, avant d'en venir au coeur de mon intervention, aux propos du député de Glengarry-Prescott-Russell qui, en cette Chambre, a accusé l'ensemble des députés du Bloc de mentir ou de dire le contraire de la vérité, ce qui est, semble-t-il parlementaire, et à l'instar du ministre de l'Agriculture, il nous accuse également de susciter les passions à travers ce beau et grand Canada.

Le député de Glengarry-Prescott-Russell est un spécialiste parmi les parlementaires pour dire n'importe quoi, et qui plus est, de le dire n'importe comment. Tout le monde se rappellera, et cela passera à l'histoire comme étant un fait d'armes du député de Glengarry-Prescott-Russell, de son intervention à la Chambre au cours du débat sur l'imposition d'un règlement à la grève dans le conflit du rail. Le député de Glengarry-Prescott-Russell s'éleva ici, en cette Chambre, claironnant haut et fort, prêtant des paroles à un de ses électeurs, lui faisant dire que les coûts du transport des fèves de soja avaient augmenté de 20 p. 100 en raison de ce conflit-là. Il nous donnait son numéro de téléphone pour qu'on puisse l'appeler sur-le-champ. Or, il s'est révélé que la seule exactitude, la seule vérité dans les propos du député de Glengarry-Prescott-Russell était le numéro de téléphone. C'est tout ce qu'il y avait de vrai. Le reste, c'était un tissu de faussetés, vérification faite sur-le-champ par le député de Berthier-Montcalm qui a téléphoné à l'électeur de notre collègue libéral.

J'entendais également ce matin ou cet après-midi le député de Lisgar-Marquette du Parti réformiste nous dire que le Québec était bénéficiaire de l'intervention du gouvernement fédéral, particulièrement dans le secteur de la production laitière. Je voudrais prendre quelques minutes pour faire certaines précisions à ce sujet.

Je suis le représentant du comté de Mégantic-Compton-Stanstead, comme tout le monde le sait en cette Chambre, lequel compte un nombre important d'agriculteurs, particulièrement des producteurs de lait. La production laitière est une industrie fort importante au plan économique et elle a des retombées des dizaines de millions de dollars dans le comté de Mégantic-Compton-Stanstead. C'est donc important pour nous, la production du lait, dans le comté de Mégantic-Compton-Stanstead.

On nous dit qu'advenant la souveraineté du Québec, le reste du Canada refuserait d'acheter le lait en provenance du Québec. C'est le genre de chantage qu'on nous fait, et bien sûr, ces collègues qui soulèvent ce point-là n'ont aucunement l'intention de susciter des passions!

(1610)

Avec un calme absolu, ils ne veulent faire peur à personne, bien au contraire, ils veulent nous rassurer en nous disant: Une fois le Québec souverain, on ne fera plus affaire avec le Québec. C'est ce qu'ils disent en cette Chambre.

Cela m'apparaît être une énormité considérable. Il faut voir les faits en face. Les échanges commerciaux entre le Québec et le Canada représentent plus de 80 milliards de dollars. Donc, une bonne partie de ces échanges provient du domaine de l'agriculture. Et précisément, dans ce domaine, le Québec est en déficit commercial pour un montant supérieur à 800 millions de dollars, bon an mal an.

C'est donc dire, que par rapport au reste du Canada, le Québec est dans la position d'un acheteur et non pas d'un vendeur. Donc, s'il y a quelqu'un qui peut faire du chantage dans un contexte de souveraineté, ce n'est certes pas le reste du Canada. Cela veut donc dire que le Canada anglais déciderait calmement et froidement de cesser d'acheter le lait produit par les agriculteurs du Québec en sachant que le Québec pourrait acheter ailleurs son boeuf, ses grains ou toute autre matière qui relève du domaine agricole.

Je le répète très sérieusement, et surtout au bénéfice des agriculteurs, des hommes et des femmes qui possèdent des fermes valant des centaines de milliers de dollars, quelquefois plus d'un million de dollars. Ce n'est pas des bineries l'agriculture au Québec, c'est une industrie en pleine expansion. C'est une industrie très importante.

Je le dis à l'intention de ces hommes et de ces femmes, la souveraineté du Québec ne peut avoir l'effet que les députés libéraux et ceux du Parti réformiste prétendent. Au contraire, puisque le Canada-il est important de retenir ce chiffre-a un déficit commercial dans le domaine de l'agriculture de 800 millions de dollars bon an mal an, le Québec est en position de force lorsque vient le temps de négocier avec le reste du Canada.

Le député de Brome-Missisquoi soulevait en cette Chambre que le gouvernement du Québec était en train de couper dans la recherche et le développement au niveau du budget de l'agriculture. Il nous demandait très sérieusement-s'étant probablement trompé de juridiction puisqu'il vient de se faire élire au fédéral-d'intervenir auprès du gouvernement du Québec pour qu'une telle situation soit corrigée.

Je veux simplement signaler au député de Brome-Missisquoi, à l'ensemble des députés de cette Chambre, que la meilleure façon de régler notre problème budgétaire au Québec, c'est de faire la souveraineté du Québec. Puisque les Québécois, dans le domaine de l'agriculture, dans le budget qui dépasse les deux milliards de dollars soit le budget du ministère de l'Agriculture du gouvernement fédéral, la part du Québec, ce qui veut dire plus de 500 millions de dollars qu'on devrait dépenser au Québec, les chiffres nous prouvent le contraire. Ce n'est pas 25 p. 100 que l'on a comme dépenses c'est 16 p. 100, c'est 12 p. 100. Dans la recherche et le développement, c'est aux alentours de 10 p. 100.


11499

Je termine en vous disant que la meilleure façon de régler le problème du développement agricole au Québec, c'est de faire la souveraineté du Québec.

Des voix: Bravo.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je voudrais rappeler à l'honorable député que lors du discours qu'il a prononcé plus tôt aujourd'hui, ses paroles étaient près de ce que je qualifierais de non parlementaires. Je vous demanderais tout simplement de faire attention lorsque vous faites référence aux propos tenus par l'honorable député de Glengarry-Prescott-Russell.

(1615)

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je tiens à remercier le député de Mégantic-Compton-Stanstead pour son discours plein de verve sur les producteurs agricoles de sa circonscription. Moi aussi, je représente une circonscription agricole en Alberta. Je suis un agriculteur et je partage ses préoccupations à l'égard des gens touchés.

Je voudrais cependant signaler au député qu'il ne s'agit pas de refuser d'acheter du lait du Québec, même si le Québec possède actuellement 50 p. 100 du marché canadien du lait de consommation et seulement 25 p. 100 de la population du Canada. Si le Québec se séparait, le reste du Canada pourrait être amené à se demander s'il doit acheter du lait au Québec. Chose certaine, il n'achèterait pas du lait frappé d'un droit de douane de 351 p. 100. Le reste du Canada opterait pour un prix avoisinant le prix mondial. S'il veut soutenir la concurrence, le Québec doit être compétitif. Selon moi, la pire menace, c'est cela, et non pas la question de savoir si on achète au Québec ou non.

J'aimerais que le député nous explique comment les producteurs régis par la gestion de l'offre de sa circonscription peuvent passer du système actuel, qui impose un droit de douane de 351 p. 100 sur le beurre, et le reste à l'avenant, au libre échange des produits agricoles, ce qui va se produire progressivement d'ici peu. Comment faciliter cette transition chez les producteurs? C'est l'affaire de nous tous. Le député a parlé des centaines de milliers de dollars que ces gens ont investis. C'est aussi le cas dans l'industrie céréalière de l'Ouest.

Il me semble que, en gens sensés, nous ne saurions prétendre que la protection de la gestion de l'offre par des droits de douane est éternelle. Nous devons nous rendre à l'évidence que nous sommes à l'ère du libre-échange et que les droits de douane finiront par être complètement éliminés. Il nous faut aider ces gens à procéder aux adaptations qui s'imposent. J'aimerais qu'il dise ce qu'il en pense.

[Français]

M. Bernier: Madame la Présidente, je remercie mon collègue du Parti réformiste de sa question qui me semble très pertinente. Je lui répondrai le plus clairement possible. En fait, il me demande comment les agriculteurs pourront s'adapter à ce nouveau contexte international de commerce mondial, c'est-à-dire la diminution des tarifs qui sont maintenant imposés en vertu GATT.

Je lui dirai que, naturellement, c'est une préoccupation majeure des agriculteurs, des hommes et des femmes de mon comté, comme c'est le cas pour l'ensemble du Québec et l'ensemble des producteurs laitiers et autres producteurs touchés par le commerce international et les tarifs.

Tout d'abord, j'aimerais lui faire part de la réaction de quelques agriculteurs concernant la production laitière en particulier. Plusieurs agriculteurs de mon comté, à qui j'ai posé la question, m'ont répondu qu'ils seraient disposés à compétitionner avec les États-Unis-puisqu'ils sont notre principal compétiteur dans le domaine de la production laitière-s'ils jouaient le même jeu, avec les mêmes règles. Autrement dit, ils seraient disposés à le faire s'ils étaient en position d'offrir un produit de qualité égale à celui offert sur le marché américain.

Il faut savoir qu'au Québec, et aussi au Canada puisque le système concernant le lait est le même partout au pays, on a réglementé, non seulement la production de l'industrie laitière, mais également la qualité du lait, et c'est tout à notre honneur. Si on veut garder cette qualité, il y a des coûts à assumer. Il faut prendre en considération l'ensemble du dossier. J'aurai sûrement l'occasion d'y revenir à un autre moment.

[Traduction]

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn, Lib.): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec le député de Gatineau-La Lièvre.

(1620)

La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui laisse entendre que le gouvernement favorise injustement les agriculteurs de l'Ouest par rapport à ceux de l'est du pays. Notre travail consiste et consistera toujours à collaborer avec tous les secteurs de l'agriculture et de l'industrie agroalimentaire pour créer des débouchés et non pour favoriser un secteur au détriment d'un autre ou une région par rapport à une autre, comme mes collègues le prétendent.

Le gouvernement veut avant tout remporter la bataille nationale contre le déficit. Malgré certaines restrictions budgétaires, il déploie d'énormes efforts, par l'entremise du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, pour aider le secteur canadien de l'agriculture et de l'agroalimentaire à mieux s'implanter sur tous les marchés, tant à l'étranger qu'au Canada. On ne favorise pas pour autant une région plutôt qu'une autre. Les agriculteurs de l'Ouest et de l'Est ont répété à de nombreuses reprises qu'ils ne voulaient pas de subventions. Ils souhaitent simplement de bons marchés et des prix équitables.

Les modifications prévues dans notre budget aideront les agriculteurs à atteindre cet objectif, tout en favorisant une réduction globale du coût de l'appareil gouvernemental, grâce à certaines mesures destinées à améliorer notre efficience et notre compétitivité, à supprimer les obstacles au développement, ainsi qu'à la transformation et à la fabrication de produits à valeur ajoutée et à profiter au maximum du nouveau climat d'échanges sur la scène mondiale.


11500

Le gouvernement a reconnu qu'on aurait dû moderniser depuis longtemps la structure de notre système de transport. Cette réforme de la Loi sur le transport du grain de l'Ouest éliminera les obstacles à la fabrication de produits à valeur ajoutée au Canada, à la diversification et à la croissance économique. La suppression de cette loi donnera au Canada et au secteur agroalimentaire un système de transport plus rapide, moins coûteux et plus efficient. Cette réforme peut nous aider à mieux respecter les nouvelles règles sur la scène internationale en vertu du GATT.

Il y a une grande différence entre la subvention au transport du grain et celles offertes aux producteurs laitiers. En fait, l'élimination de cette subvention de 565 millions de dollars répond aux craintes que les agriculteurs de l'est du pays ont soulevées au sujet de leur compétitivité. On élimine complètement, à partir du 1er août 1995, cette subvention annuelle qu'on a déjà réduite de plus de 23 p. 100 au cours des deux dernières années. Pendant ce temps, on réduit d'à peine 30 p. 100 sur deux ans les subventions aux produits laitiers.

Le programme d'adaptation que notre gouvernement offre au secteur du grain reflète les répercussions possibles de l'élimination d'une subvention dont les céréaliers de l'Ouest profitent depuis maintenant 96 ans. Si on faisait disparaître cette subvention sans prévoir des fonds pour aider le secteur à s'adapter, l'économie céréalière en souffrirait beaucoup, car cette subvention donne depuis toujours une certaine valeur aux terres des producteurs des Prairies. On verse une indemnité de 1,6 milliard de dollars aux propriétaires des terres agricoles des Prairies pour tenir compte des répercussions sur la valeur des terrains que pourrait avoir la décision de supprimer la subvention au transport des marchandises qui existe depuis fort longtemps. Ce paiement unique n'est pas lié à des décisions concernant la production et la commercialisation.

On a également créé un programme d'adaptation de 300 millions de dollars qui s'échelonne sur plusieurs années pour remédier à certains problèmes découlant de la réforme du transport. Ce montant n'est pas excessif. Il ne donne pas aux agriculteurs de l'Ouest un avantage indu. Il est plutôt nécessaire pour aider l'industrie et le réseau de transport de l'Ouest à s'adapter.

Il faudrait mentionner que, bien que l'accord du GATT ait soumis les subventions à l'exportation à une certaine discipline, le secteur du grain des Prairies fera face à une concurrence considérable de la part des exportations de grain subventionnées. Même si la subvention versée aux producteurs de lait est réduite, elle ne disparaît pas. En fait, un système national de gestion de l'offre, l'un des grands avantages de notre système fédéral, assure un rendement raisonnable aux producteurs efficaces, et l'on conservera ce système de gestion.

Il est plutôt ironique que le député de l'opposition dise que notre approche face à la réforme du transport du grain favorise les agriculteurs de l'Ouest. Certaines provinces et certains producteurs de l'Ouest trouvent que les réductions budgétaires effectuées dans l'ouest du Canada sont beaucoup plus importantes que celles effectuées dans l'est du Canada. Ils ont dit que l'Est recevait une plus grande part du fonds d'adaptation, par rapport à l'importance des subventions qui sont éliminées ou réduites.

Ce qu'il faut comprendre, c'est que tous les agriculteurs et, en fait, tous les Canadiens assument à parts égales la responsabilité de réduire le déficit. C'est une responsabilité que nous devons tous partager pour assurer la croissance de notre secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire et demeurer concurrentiels sur la scène mondiale.

(1625)

Le gouvernement offre autant de possibilités aux agriculteurs de l'Ouest qu'aux agriculteurs de l'Est. Comme les députés le savent, il a prévu des fonds considérables pour les projets d'adaptation. Même si le budget d'Agriculture et Agroalimentaire Canada a été réduit de 19 p. 100, ce ministère a augmenté son fonds d'adaptation de 20 p. 100. Cela montre bien que l'industrie cherche à compter davantage sur le marché que sur les programmes gouvernementaux pour assurer sa sécurité financière. Ce fonds d'adaptation est offert autant aux agriculteurs de l'est qu'aux agriculteurs de l'ouest du Canada et vise à accroître la capacité du secteur agricole à se développer et à conquérir des marchés.

L'ensemble de mesures que le gouvernement propose dans le cadre de la réforme du transport du grain ne va pas à l'encontre de la position que la coalition québécoise a énoncée, en décembre 1994, au sujet de la LTGO. Les mesures prises face à la réforme des subventions sont justes et équilibrées et tiennent compte des situations particulières des différentes régions de notre pays. Tous devront faire leur part pour contribuer à réduire le déficit et tous en retireront des avantages.

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Madame la Présidente, je voudrais poser une question au député de Saskatoon-Dundurn.

J'ai été très déconcerté par la façon très faible dont il a défendu l'élimination de la subvention du Nid-de-Corbeau accordée jusqu'ici aux agriculteurs de l'Ouest. J'ai été déconcerté parce qu'il a dit dans son intervention que l'élimination de cette subvention allait, rien qu'en Saskatchewan, priver les agriculteurs de près de la moitié de leur revenu agricole net. Cela va aussi réduire substantiellement la valeur de leurs terres. Enfin, cela va faire doubler, voire dans de nombreux cas, tripler le prix du transport du grain. Il a dit que cela allait créer des débouchés pour les agriculteurs, que l'élimination de la subvention du Nid-de-Corbeau par les libéraux, qui va être désastreuse pour les agriculteurs de la Saskatchewan et pour les agriculteurs de l'Ouest, allait créer des débouchés pour les agriculteurs.

Cela me rappelle un autre scénario. Je veux parler de Grant Devine, le premier ministre conservateur de la Saskatchewan, qui en neuf ans à peine s'est arrangé avec son Cabinet pour mener à la faillite cette province qui était l'une des plus riches du Canada. Son gouvernement a licencié 275 travailleurs chargés de l'entretien des autoroutes. Il n'était pas question alors de créer des débouchés pour les agriculteurs, mais de libérer les travailleurs pour qu'ils puissent jouer un rôle dans le secteur privé. C'est exactement le même type de commentaire que nous avons entendu aujourd'hui à la Chambre en ce qui concerne l'élimination de la subvention du Nid-de-Corbeau, exactement la même position arrogante que marquent aujourd'hui les libéraux.


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Personnellement, je trouve cela dégoûtant. Je prédis, et d'autres gens en Saskatchewan le prédisent aussi, qu'aux prochaines élections, pas un seul député libéral ne sera réélu rien qu'à cause de ce coup porté aux fermiers et aussi à cause de l'abandon de lignes de chemins de fer.

Le député de Malpèque, autre député libéral qui a voté en faveur de l'abolition de la subvention du Nid-du-corbeau, est maintenant président d'un sous-comité de l'agriculture qui va parcourir le pays en compagnie d'autres députés réformistes et libéraux pour recueillir les réactions des agriculteurs et voir quels seront les effets de l'élimination de la subvention du Nid-du-corbeau. Nous pouvons leur dire quels en seront les effets, mais demander au député de Malpèque et à ses collègues libéraux de parcourir le pays et d'écouter les revendications des agriculteurs, c'est comme si on introduisait un loup dans la bergerie. Ces députés libéraux et réformistes vont demander aux agriculteurs: «Nous voulons savoir quelles seront les conséquences. Dites-le nous, s'il vous plaît. Nous en avons déjà voté l'élimination, mais nous allons quand même essayer d'écouter ce que vous avez à dire.» C'est de la foutaise. C'est de l'arnaque.

Le député libéral de Saint-Boniface, qui participe à ce débat de son fauteuil, ne comprend pas de quoi il s'agit car sa circonscription n'a rien de rural. Si tel était le cas, il risquerait de perdre son siège.

Le député de Dundurn peut-il expliquer en quoi l'élimination de la subvention du Nid-du-corbeau et l'abandon massif de lignes ferroviaires feront augmenter les exportations alors qu'en fait on ne produira plus autant de céréales que maintenant pour l'exportation? Les agriculteurs vont faire faillite en grand nombre et ils seront de moins en moins nombreux à cultiver la terre dans l'ouest du Canada. Comment peut-il justifier cela?

(1630)

M. Bodnar: Madame la Présidente, le député parle de la faillite des agriculteurs. En Saskatchewan, si des agriculteurs devaient faire faillite, ce serait à cause des politiques néo-démocrates de la province, et non à cause des politiques libérales du gouvernement fédéral.

N'oublions pas que certaines des politiques du gouvernement de la Saskatchewan, que le député appuie parce qu'elles sont censées être extraordinaires, sont celles d'un gouvernement néo-démocrate. C'est ce même gouvernement néo-démocrate qui refuse d'abaisser la taxe de vente provinciale, ce qui a fait fuir les entreprises vers d'autres provinces. C'est honteux que ce même gouvernement ait refusé de réduire la taxe sur le carburant des avions aussi longtemps qu'il a pu le faire, ce qui nous a aussi fait perdre des emplois. Si le gouvernement néo-démocrate de Saskatchewan a agi ainsi, c'est parce qu'il ne voulait pas voir diminuer ses paiements de péréquation du gouvernement fédéral.

Le gouvernement néo-démocrate de la Saskatchewan se comporte en société parasite du gouvernement fédéral. Voilà ce qu'il fait. Chaque fois que nous avons créé des emplois en Saskatchewan, dans le cadre de son programme d'infrastructure, entre autres, le gouvernement de la province n'a eu aucun scrupule à les détruire.

Je ne crois pas que le député soit bien placé pour dénoncer l'état de désolation dans lequel se trouve actuellement l'industrie agricole de la Saskatchewan. En fait, certains secteurs s'améliorent, comme l'élevage de porcs et de bovins. L'ensemble de l'industrie bénéficiera de ces changements plutôt que d'en souffrir, comme le député le laisse entendre.

[Français]

M. Mark Assad (Gatineau-La Lièvre, Lib.): Madame la Présidente, en écoutant mon collègue de Saskatoon-Dundurn et les questions posées par l'honorable député de Regina-Lumsden, cela démontre le conflit qui existe dans le domaine de l'agriculture et la nécessité d'apporter des réformes.

La question des changements ou les réductions budgétaires annoncées récemment par le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire du Canada ne nous laissent évidemment pas indifférents. Il faut dire que l'opposition, dans sa motion, dénonce les compressions budgétaires qui ont été faites récemment par le ministre des Finances comme étant injustes pour certains producteurs canadiens. On voit par là que ce sont des personnes de bonne foi mais qui, j'en suis sûr, ont été induites en erreur.

Il arrive parfois que nos collègues d'en face ne réalisent pas la crise qui existe au pays quand on voit le déficit accumulé depuis les derniers 15 ou 20 ans. On voit que notre déficit absorbe 73 p. 100 de notre produit intérieur brut. On ne peut plus négliger des choses pareilles. Peu importe les difficultés auxquelles on pourrait avoir à faire face dans l'avenir, il y a des choses qu'il faut régler, c'est la question des dépenses publiques et d'établir une administration saine qui touche l'ensemble, sans exception, de tous les Canadiens.

On a demandé au ministère de l'Agriculture de réduire ses dépenses de 19 p. 100. Il y a d'autres ministères qui ont été obligés de faire des sacrifices et le ministère de l'Agriculture a répondu au défi auquel nous faisons face et il a trouvé une façon pour que l'on avale notre pilule le mieux possible, c'est-à-dire d'avoir une réduction équitable pour tous les agriculteurs au Canada.

Le programme d'aide au transport des céréales fourragères verse des paiements aux éleveurs des régions déficitaires en aliments du bétail afin de réduire le coût de ces aliments et de permettre ainsi aux éleveurs de soutenir la concurrence. Une aide financière est consentie aux producteurs de presque toutes les régions, des provinces de l'Atlantique au Yukon en passant par certaines parties de l'est du Québec, le nord de l'Ontario et la Colombie-Britannique. Ce sont les faits.

(1635)

Une subvention dont dépendent les producteurs de la plupart des provinces canadiennes, y compris ceux du Québec, est en voie de disparaître, mais il y a plus. Le gouvernement reconnaît que la décision n'est peut-être pas populaire. Il sait également qu'il ne peut pas et ne doit pas demander aux producteurs de changer radicalement leur façon de faire du jour au lendemain.

Contrairement à ce que certains peuvent penser, le gouvernement est prêt à écouter. Au cours de nos consultations postbudgétaires, nous avons appris que la date prévue au départ pour l'abolition du PATCF, qui est le Programme d'aide au transport


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des céréales fourragères, le 1er octobre, ne laissait pas suffisamment de temps aux producteurs et au secteur pour s'adapter à un changement d'une telle envergure. Le gouvernement a donc accepté de repousser l'échéance jusqu'au 31 décembre 1995 et de ne pas réduire les taux d'aide au cours de cette période.

Tandis qu'il élimine la subvention au transport des céréales fourragères, le gouvernement injectera 62 millions de dollars, au cours des dix prochaines années, dans les régions où le PATCF s'applique actuellement. Une partie de ces fonds servira à verser les paiements prévus par le programme et ce, jusqu'à son expiration, plus tard cette année. Le gouvernement accorde également une aide financière sous la forme d'un paiement forfétaire aux propriétaires terriens de l'Ouest, qui sont touchés par l'abolition du LGTO. De cette façon, il se montre à la fois sensible aux préoccupations des producteurs et financièrement responsable envers les contribuables canadiens.

L'aide financière que je viens de mentionner sera offerte aux producteurs touchés de toutes les provinces et régions du pays. Comment cet argent sera-t-il dépensé? Évidemment, comme vous le savez, on n'a pas encore la réponse, mais nous avons décidé de nous adresser à des experts. Le gouvernement estime que les personnes les mieux qualifiées pour répondre à cette question sont les producteurs, les gens de l'industrie des aliments et du bétail, les producteurs de céréales fourragères et les éleveurs des régions déficitaires que l'élimination progressive du PATCF touchera le plus.

C'est à cette fin que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a annoncé la tenue des consultations avec les producteurs au cours des mois à venir, pour examiner les façons possibles d'utiliser le fonds d'ajustement du PATCF et le fonds d'adaptation. En outre, on examinera des options de financement qu'offrent d'autres programmes du ministère de l'Agriculture, comme le projet de coinvestissement dans les recherches agroalimentaires.

Le gouvernement est conscient que des temps difficiles s'annoncent. J'admets qu'il ne s'agit pas nécessairement de la solution idéale, mais dans les circonstances, nous sommes obligés d'agir. Toutefois, s'il y a de meilleures solutions, on voudrait que l'opposition nous les suggère. Il faut se rappeler que la situation financière désastreuse que nous avons héritée du gouvernement précédent nous met dans une situation où on est obligé de prendre des mesures assez draconiennes.

La consultation qui doit être faite au niveau national est la seule façon de s'approcher des intervenants dans le domaine agricole. C'est avec eux qu'on pourra trouver des solutions, des nouvelles idées, et même les compromis pour s'assurer que ce soit équitable pour tous les agriculteurs. Ces réformes dans le domaine agricole auraient dû être mises de l'avant il y a plusieurs années. Quand on regarde dans le domaine de Pêches et Océans, par exemple, où on sait depuis dix ans que les stocks sont en danger; depuis plus de dix ans, des réformes auraient dû se faire, mais rien n'a été fait et on voit le résultat aujourd'hui. On ne voudrait pas que les mêmes dangers se produisent dans le domaine agricole.

(1640)

Le monde connaît des bouleversements sans précédent et cela nous impose des changements profonds si nous voulons sauvegarder l'industrie agroalimentaire de notre pays.

En conclusion, tous ceux qui ont une certaine connaissance du monde agricole réalisent que c'est une industrie qui a été très efficace dans notre pays par le passé. Si on regarde l'évolution de l'industrie agroalimentaire au Canada, on est un des pays les plus favorisés au monde. Mais avec les changements qu'on a connus, que ce soit le GATT, l'ALENA, il est évident qu'avec un concurrent comme les États-Unis au sud, cela met des pressions énormes sur nous.

Il faut dire qu'il y a des moments où la façon d'agir des États-Unis sur le marché international crée une concurrence déloyale. Cela n'empêche pas qu'un pays qui compte un dixième de la population américaine subit des contrecoups. C'est pour cette raison que le ministère de l'Agriculture doit effectuer des changements. On ne pouvait pas laisser la situation se détériorer. Cela aurait été néfaste pour nos agriculteurs à travers tout le pays.

Donc, les mesures préconisées, il faut le dire, ne sont pas idéales. Il n'y a rien d'idéal en ce monde. De toute façon, l'important c'est d'agir. À mesure que la situation évoluera, on apportera des correctifs pour s'assurer que tous les agriculteurs sont traités avec justice.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Madame la Présidente, je suis partiellement d'accord avec mon honorable collègue de Gatineau-La Lièvre qui occupe, avec moi, le poste de vice-président au Comité permanent de l'agriculture. Je dois vous avouer que ce député de Gatineau-La Lièvre est un fin connaisseur en matière agricole.

Cependant, je voudrais lui rappeler que le déficit que le pays connaît présentement, ce ne sont pas les Américains, les Français ou les Mexicains qui l'ont créé. Aux environs de 1969-1970, le déficit était presque inexistant. Je ne vous dis pas qui gouvernait le pays à ce moment, vous le savez mieux que moi. Mais en 1984, lorsqu'on a chassé du pouvoir l'équipe libérale, le déficit totalisait environ 250 milliards.

Les conservateurs, en neuf ans, on rapproché le déficit du 500 milliards. Son équipe est responsable d'avoir, par le passé, créé au moins la moitié de ce déficit accumulé. Maintenant, le gouvernement demande très durement aux agriculteurs de faire leur part pour réduire le déficit qu'il a lui-même créé. Et on demande encore un peu plus aux agriculteurs, c'est bizarre.

Mes amis d'en face n'ont pas parlé que dans l'année budgétaire qui vient de s'écouler il y a eu 328 000 voyages par avion effectués par les fonctionnaires, sans compter les députés et les sénateurs, 328 000 voyages; coût: 275,5 millions de dollars. Ils n'en parlent pas.

Je lisais, tout à l'heure en écoutant mon collègue de Gatineau-La Lièvre, l'éditorial de Claude Rivard, président québécois des producteurs laitiers, qui disait ceci: «Les efforts en vue de réduire le déficit, nous attendions donc de M. Martin et de son gouvernement ce qu'il avait promis: un budget dur, mais juste.» Vous vous rappelez que pendant un mois, on disait que le budget serait dur, mais juste. Je continue: «Or, le gouvernement Chré-


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tien, en ce qui nous concerne, a été dur, mais inéquitable.» C'est la perception que les agriculteurs québécois, notamment, ont de ce Budget.

Qu'est-ce qu'on a réservé aux grandes banques qui déclarent 3,5 milliards de dollars de profit en une seule année? On va chercher un maigre 100 millions additionnnels et on dit que c'est un impôt provisoire étalé sur 18 mois.

(1645)

Je sais très bien que les grandes banques comptent parmi les plus grandes contributions à ce parti. Il y avait le Parti conservateur, mais comme ils ont disparu, je n'en parle pas.

Alors, je suis d'accord qu'il faut réduire le déficit. Mais avant de s'en prendre injustement aux agriculteurs, je voudrais ajouter pour mon collègue de Malpèque qu'en 1988-1989-et je termine là-dessus, madame la Présidente-les dépenses dans le secteur agroalimentaire, en pourcentage des dépenses totales du gouvernement fédéral représentaient 3,5 p. 100. En 1994-1995-on vient de terminer-elles représentaient 1,6 p. 100; et la projection pour 1996-1997 est de 1,2 p. 100. Alors, je ne suis pas fier de la façon dont ce gouvernement a traité et va traiter l'agriculture au Canada.

M. Assad: Madame la Présidente, je pense qu'il est nécessaire d'apporter une correction. Mon collègue d'en face a mentionné qu'en 1984, le gouvernement libéral a quitté le pouvoir en laissant une dette de 250 milliards. La dette n'était pas de 250 milliards, mais de 160 milliards. C'est une grosse différence, surtout qu'en 1984, la dette, quand on regarde l'économie canadienne, était une des moins lourdes des pays industrialisés. Donc, je trouve un peu curieux qu'on cite des chiffres inexacts. Il pourrait examiner les faits.

Deuxièmement, il a mentionné que M. Rivard, président des producteurs laitiers, a dit qu'il s'agissait d'un Budget dur. C'est vrai qu'il est assez dur, mais il faut se rappeler que c'est un gouvernement libéral qui a conduit l'industrie laitière au niveau où elle se situe aujourd'hui. Avec le contingentement du lait, les exploitants de fermes laitières au Québec sont devenus parmi les plus riches de nos agriculteurs. Il faut donc regarder les deux côtés de la médaille.

Je dirais à mon collègue d'en face qu'il faudrait qu'il soit assez précis lorsqu'il veut citer des chiffres, parce qu'il y a des conséquences.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera, à l'heure de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Verchères-Le commerce international; l'honorable député de Cumberland-Colchester-La santé; et l'honorable député de Lévis-Le programme Stratégie Jeunesse.

Nous reprenons le débat avec l'honorable député deLotbinière.

M. Jean Landry (Lotbinière, BQ): Madame la Présidente, je prends la parole aujourd'hui afin de traiter d'un secteur capital de notre économie qu'est l'agriculture.

L'opposition officielle profite de cette journée consacrée à l'agriculture pour remettre les pendules à l'heure en ce domaine. Je ne serais pas surpris qu'en face, certaines personnes aient oublié d'ajuster leur montre en fin de semaine.

Notre tâche sera donc de donner l'heure juste à ce gouvernement, dont le dernier Budget a laissé un goût pour le moins amer dans la bouche des agriculteurs du Québec.

Le dernier Budget prouve, encore une fois, que ce gouvernement est inéquitable.

On a à nouveau été témoins de la politique deux poids, deux mesures avec les mesures compensatoires appliquées dans l'Ouest à la suite de l'abolition des subventions du Nid-de-Corbeau. La position de notre parti est claire: nous sommes d'accord avec l'abolition de cette subvention qui créait des distorsions dans le transport céréalier.

Par contre, nous dénonçons les mesures compensatoires de 2,2 milliards de dollars versées aux producteurs de l'Ouest. En reniant ses engagements, le gouvernement fédéral crée des tensions entre les producteurs de l'Est et de l'Ouest et crée de nouvelles distorsions sur les marchés. À la suite de l'abolition de la subvention, les producteurs céréaliers des régions éloignées seront tentés de vendre à rabais leur production sur le marché intérieur. Sinon, ils devront défrayer les coûts de transport pour l'exportation. Cela se traduira par une baisse des prix des céréales dans l'Ouest et une hausse des prix dans l'Est, puisque les nouveaux prix refléteront les coûts réels de transport.

(1650)

De plus, les producteurs de viande et de lait de l'Est seront doublement pénalisés vis-à-vis leurs concurrents de l'Ouest, eux qui utilisent des céréales pour l'alimentation animale.

Mon intention n'est pas de m'attaquer aux producteurs de l'Ouest. C'est le fédéral, et personne d'autre, qui perturbe les marchés domestiques par l'application des mesures compensatoires dans l'Ouest uniquement. Le gouvernement créait un déséquilibre avec le Nid-de-Corbeau et il crée un nouveau déséquilibre en l'abolissant. Il aurait dû soit couper la subvention, mais sans compensation, ou la couper en compensant équitablement tous les producteurs. C'est sans doute trop demander à des gens qui, comme d'habitude, ont posé des gestes sans se soucier des répercussions.

Suite au Budget Martin, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire verra son enveloppe budgétaire passer de 2,1 à 1,7 milliard de dollars au cours des trois prochaines années. Deux mille postes seront abolis suite à ces réductions.

Plutôt que de réduire le budget de l'agriculture de cette façon, pourquoi le fédéral ne transfère-t-il pas ses ressources aux provinces? Celles-ci pourraient rationaliser les dépenses en tenant compte, elles, des programmes qu'elles administrent déjà. Le fédéral n'a qu'à se retirer de ce champ de compétence provinciale. Il s'agit à nouveau d'un beau cas de dédoublement où deux paliers de gouvernement vont jusqu'à se concurrencer sur le dos


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de l'industrie. En éliminant le chevauchement, on aurait pu éviter certaines coupures.

Le Québec n'aurait certes pas sabré dans la recherche et le développement, et les fermes expérimentales de La Pocatière et de L'Assomption auraient survécu. Dans le milieu agricole, comme dans d'autres milieux, on s'interroge de plus en plus sur la pertinence de payer des impôts à Ottawa sans recevoir en retour les ressources nécessaires pour développer son industrie.

D'ailleurs, nous n'obtenons toujours pas notre juste part des dépenses fédérales en agriculture avec 12,4 p. 100 environ, c'est des «pinottes», alors que 17 p. 100 des recettes monétaires canadiennes proviennent du Québec. Pendant ce temps, l'Ouest se taille la part du gâteau avec 60 p. 100 des dépenses du fédéral.

La situation du Québec a même empirée depuis 1980, alors que notre part des dépenses en provenance du fédéral s'établissait à 16,4 p. 100 cette année là. En plus, les impôts payés par nos agriculteurs servent à soutenir des politiques qui concurrencent leur propre production. Oui, bien des agriculteurs québécois se posent des questions sur l'utilité de demeurer au sein d'un pays qui les laisse tomber à la moindre occasion. Nous savons, par contre, qu'il nous faudra contrer la peur engendrée par les épouvantails brandis par les fédéralistes.

La campagne de peur est amorcée avec les propos publiés par les mercenaires fédéralistes au sujet de l'industrie laitière québécoise qui, selon eux, serait menacée par la souveraineté. On nous dit qu'un Québec souverain perdrait la moitié de son quota de lait de transformation, entraînant la fermeture de milliers de fermes laitières au Québec.

Selon les fédéralistes, la souveraineté serait une catastrophe pour les producteurs laitiers du Québec parce qu'au sein de la fédération, ils approvisionnent 48 p. 100 du marché canadien de lait de transformation, alors qu'ils ne représentent que 25 p. 100 de la population canadienne.

Analysons cette situation froidement. Il est faux de prétendre que le Québec souverain ne fera plus d'échanges commerciaux avec le reste du Canada. L'industrie laitière québécoise n'est ni un cadeau tombé du ciel, encore moins un cadeau ou un bienfait du fédéralisme, mais une simple réalité économique.

Alors, le scénario catastrophique devrait tenir compte du fait que les échanges commerciaux entre le Québec et le Canada dépassent les 80 milliards de dollars, et que cette somme ne voyage pas seulement dans un sens. Si le Québec est supposé perdre dans ses échanges avec le reste du Canada, l'inverse n'est-il pas aussi vrai?

Scénario pour scénario, avouez que celui-ci décrivant un nécessaire espace économique, salutaire pour les deux parties, est beaucoup plus réaliste. Vrai qu'il ne gagnera pas d'Oscar pour l'épouvante ou la fiction. Vrai cependant que les gens préfèrent les films qui finissent bien. Voici d'ailleurs un scénario véridique. Pas plus tard que mercredi dernier, les producteurs de lait du Québec et ceux du Canada ont signé une entente de principe stipulant que la commercialisation du lait de tranformation et de consommation sera maintenant intégrée dans les six provinces de l'Est. Pour ces six provinces, les producteurs recevront le même prix pour leur lait et géreront un quota commun.

(1655)

Ensemble, ces provinces représentent 85 p. 100 du quota canadien du lait de transformation. Cette intégration éliminerait les barrières interprovinciales pour l'approvisionnement du lait. Le Québec a joué un rôle de premier plan dans ce dossier, personne n'a eu envie de le laisser de côté.

Sans le Québec, la politique laitière canadienne s'écroulerait. Et cela, les producteurs laitiers des autres provinces le savent et l'ont bien compris. En pleine période préréférendaire, ils reconnaissent l'importance de procéder à une intégration économique avec le Québec. On est rendu loin du scénario de peur des fédéralistes, n'est-ce pas? Les producteurs laitiers du Canada savent qu'au lendemain d'un oui au référendum, le Canada maintiendra une union économique avec le Québec, pas pour faire plaisir au Québec, mais bien pour protéger leurs propres intérêts.

Qui songerait à exclure le Québec du système de gestion de l'offre, les quotas? Les producteurs du reste du Canada seraient exposés à la forte concurrence des produits laitiers québécois et des pénuries de produits québécois apparaîtraient sur le marché canadien. En vertu des règles du GATT, le Canada pourrait difficilement imposer de nouvelles restrictions commerciales pour empêcher les produits laitiers québécois d'entrer sur ses marchés.

Le GATT ne permet pas l'implantation de nouvelles mesures restrictives sur les marchés. Le maintien d'un espace économique commun permet de lutter contre les presssions américaines qui s'opposent toujours aux tarifs douaniers sur les produits laitiers canadiens. Les fédéralistes essaient aussi de nous faire peur avec l'ALENA.

Même si les États-Unis tentent toujours d'en soutirer le plus possible à ses partenaires économiques, le Québec s'appuiera sur le GATT, tout comme l'a fait actuellement le gouvernement canadien, pour protéger ses tarifs douaniers.

Si on tient absolument à parler de menaces pour l'industrie laitière québécoise, on doit parler du dernier Budget fédéral. Voilà la vraie menace pour l'industrie laitière! Le gouvernement réduit sa subvention pour le lait de transformation de 30 p. 100 sur deux ans. Évidemment, avec sa production de 48 p. 100 du quota de lait de transformation, le Québec assume la grosse part de la réduction.

Calcul rapide, cela représente une perte de revenu de 3 775 $ pour une ferme laitière de taille moyenne, dont le revenu net du producteur s'élève à 25 000 $. Il s'agit d'une perte de 15 p. 100 du revenu. Il faut ajouter à cela la hausse des coûts pour l'alimentation du bétail qui découle de la perte des subventions pour le transport fourrager et céréalier, dont je parlais en début d'intervention.

Je répète qu'aucune compensation n'est prévue dans le Budget pour les agriculteurs québécois qui seront pourtant les plus affectés.

En terminant, permettez-moi de citer le ministre de l'Agriculture du Québec, M. Marcel Landry, suite au dépôt du Budget Martin: «Le nouveau fédéralisme canadien, c'est une ponction


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importante de taxes et d'impôts, une diminution de services, des normes nationales. À ce compte-là, reprenons au plus vite nos taxes et nos impôts et traçons nos propres voies d'avenir. . .»

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je m'excuse, mais le temps de parole alloué à l'honorable député est écoulé. Questions et commentaires. L'honorable député de Malpèque a la parole.

[Traduction]

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Madame la Présidente, le député saura que je suis un fédéraliste et que je n'essaie pas de faire peur aux Québécois ni aux agriculteurs du Québec. Je voudrais que les agriculteurs comprennent bien où ils se situent au Canada, surtout en ce qui a trait au système de gestion de l'offre.

À mon avis, le député ne faisait pas attention quand il a dit qu'environ 12,4 p. 100 du financement direct allait aux producteurs québécois et que ce n'était pas une part équitable. La réalité, c'est que le Québec possède 48 p. 100 des quotas de lait.

Le député a-t-il fait des calculs? Dans l'affirmative, pourrait-il déposer des chiffres concernant les avantages réels que les producteurs québécois tirent du système canadien de gestion de l'offre au chapitre des produits laitiers, de la volaille et des oeufs?

Le député a parlé de la perte de la subvention. Je reconnais que c'est une perte. Je suis un producteur laitier et j'accepte que la subvention soit éliminée, parce que cela me permet de contribuer à réduire le déficit de notre pays. En même temps, je sais fort bien, comme le député d'ailleurs, que l'industrie laitière fonctionne selon une formule du coût de production qui garantit aux producteurs un rendement raisonnable sur leur coût de production, de la main-d'oeuvre et de l'investissement. La formule est excellente. Nous savons que les producteurs retirent beaucoup du Canada.

(1700)

J'ai un dernier point à soulever; il s'agit peut-être simplement d'une erreur de fait, mais nous ne devons pas laisser une mauvaise impression. Le député a dit qu'il n'y avait aucune compensation pour l'élimination du Programme d'aide au transport des céréales fourragères. En fait, des fonds sont prévus pour faciliter l'adaptation dans ce cas. Nous avons connu une telle expérience à l'Île-du-Prince-Édouard. En effet, le programme prévoit un montant de 60 millions de dollars pour aider les agriculteurs à s'adapter à l'élimination du programme.

[Français]

M. Landry: Madame la Présidente, il me fait plaisir de répondre à mon collègue de Malpèque. Il a parlé d'équité et il a admis dans son discours qu'il y avait de l'iniquité qui existait depuis longtemps entre le Québec et le reste du Canada.

Il a dit qu'il était producteur dans les Maritimes. Il sait très bien qu'il y a quelques années, la pomme de terre des Maritimes était totalement subventionnée pour l'exportation sur le marché québécois, pendant qu'on avait ici, dans la province de Québec, des personnes qui devaient payer le transport de leurs pommes de terre pour que ce soient les mêmes Québécois qui les consomment, qu'elles viennent des Maritimes ou du Québec. Moi je dis que si on parle d'équité, allons-y sur toute la ligne.

On parle des transports et du retrait des subventions au Nid-de-Corbeau, mais on applique encore des formules compensatoires inéquitables par rapport au Québec. Je n'étais pas en politique il y a 25 ans, j'étais trop jeune, mais des politiciens très honnêtes, de qui j'ai suivi les traces, m'ont dit: «Jean, tu verras quand tu grandiras, comme c'est difficile de se battre avec le fédéral.» Je réalise que ce qu'on m'a dit il y a 25 ans, c'est vrai. Mais tout ce que je demande au gouvernement, c'est d'être équitable envers le Québec et le reste du Canada.

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Madame la Présidente, j'aurais bien voulu céder la place à mon collègue de Mégantic-Compton-Stanstead, mais comme vous l'avez bien dit, je suis le député de Québec-Est. Le comté de Québec-Est est un comté urbain. Je ne représente pas un comté rural, mais urbain. Il y a un certain nombre d'agriculteurs dans mon comté, mais ils sont tous retraités.

Je reconnais cependant l'importance de l'agriculture. Je sais que l'agriculture est un des piliers les plus importants de l'économie, surtout au Québec qui deviendra bientôt un pays. L'agriculture est un secteur économique fondamental. Je connais aussi un peu le domaine de l'agriculture pour avoir travaillé, il y a quelques années, pour le ministre de l'Agriculture du Canada, M. Eugene Whelan, qu'on connaît comme ayant été un des plus grands ministres de l'Agriculture au Canada.

Donc, je connais ce dossier de l'iniquité dont on a parlé longuement aujourd'hui. C'est bien connu que les agriculteurs du Québec ont été défavorisés comparativement au reste du Canada, et surtout à l'Ouest. Nous avons actuellement, avec le dernier Budget déposé en cette Chambre par le Parti libéral, un cas parmi les plus flagrants d'iniquité et c'est évident.

Alors qu'on compense les producteurs de l'Ouest de façon très généreuse, près 2 milliards, on coupe les subventions laitières dans l'Est de 30 p. 100. Il faut dire que ce n'est pas d'hier que cette iniquité existe. On en a longuement parlé en cette Chambre aujourd'hui. Il y a très longtemps que le Québec ne reçoit pas sa juste part à cet égard.

(1705)

Si le Québec avait reçu le quart des dépenses fédérales dans le domaine agricole au Canada, puisque c'est normalement calculé sur la base de la population, le Québec aurait reçu beaucoup plus. Chaque année, le Québec recevait 10 p. 100, 12 p. 100, des fois même jusqu'à 15 p. 100, mais jamais le quart des dépenses du gouvernement fédéral. J'ai fait le calcul et le Québec, sur cette base, a perdu, depuis 1980, depuis les 15 dernières années, de cinq à sept milliards de dollars.

M. Chrétien (Frontenac): Honteux! Honteux!

M. Marchand: Le Québec a versé, de sa poche, pour entretenir l'agriculture de l'Ouest et du reste du Canada, de 5 à 7 milliards de dollars. Imaginez-vous, si les agriculteurs du Québec, eux, avaient eu cet argent investi au Québec, comment l'agriculture aurait été encore plus forte qu'elle ne l'est actuellement et cela, ça ne comprend pas l'accord du Nid-de-Corbeau, qui coûtait au fédéral entre 600 et 800 millions de dollars par


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année. Cet argent qui a été investi dans le transport du grain de l'Ouest, ce seul montant est très discriminatoire. C'est de l'argent qui a été investi uniquement pour les agriculteurs de l'Ouest.

Le quart de cet argent a été versé par le Québec, et au cours des 15 dernières années, quand on fait le calcul, ce sont deux autres milliards de dollars que le Québec a perdus. Ce sont des pertes considérables. Et là, quand le fédéral annonce qu'il abolit l'accord du Nid-de-Corbeau et parle de compenser les agriculteurs, il parle uniquement de compenser les agriculteurs de l'Ouest, qui ont toujours été gagnants sur toute la ligne, depuis 15 ans, avec le subside au grain, avec le déséquilibre dans les investissements fédéraux agricoles. Le Québec a toujours été perdant. C'est une iniquité flagrante, d'autant plus que l'on reconnaît que les agriculteurs au Québec, en moyenne, ont un revenu d'environ 25 000 $, et travaillent très fort.

On estime qu'un agriculteur met jusqu'à 80 heures de travail par semaine. Cela équivaut à deux emplois pour un salaire total de 25 000 $. Donc, quand on coupe de 30 p. 100 les subventions pour le lait et qu'on coupe 15 p. 100 des revenus nets d'un agriculteur, on frappe fort sur les producteurs laitiers. On frappe très fort, parce que les revenus ne sont pas si élevés que cela. Donc, c'est évidemment une question d'iniquité flagrante, on en a longuement parlé.

Mais, le portrait type est que le Québec, dans tous les dossiers ou presque, a subi une iniquité semblable. Le Québec, même si les autres députés en cette Chambre ne sont pas prêts à l'avouer, a été, pour ainsi dire, la vache à lait du reste du Canada, comme c'est le cas de façon flagrante ici, dans tous les domaines: dans l'achat des biens de service, dans le domaine de la recherche. Pour ce dernier domaine, le Québec a reçu, en moyenne, depuis 15 ans, à peu près 10 à 15 p. 100 des investissements en recherche, alors que c'est surtout l'Ontario qui a reçu la grande part de l'argent fédéral, 50 p. 100 en moyenne. C'est encore de l'argent perdu.

Je pourrais vous citer toute une série de cas de dossiers dans lesquels le Québec a été perdant, mais il faut en finir. Les Québécois doivent se réveiller, à un moment donné, et dire: «C'est fini! C'est assez d'injustices!»

M. Chrétien (Frontenac): Bravo!

M. Marchand: Et c'est la raison pour laquelle les Québécois agriculteurs doivent eux aussi assumer la part de responsabilités de cette entreprise qui n'est pas sans risque. Il est bien certain qu'il y a des éléments qui posent problème. La souveraineté du Québec ne sera pas facile, personne ne dit que ça sera facile, mais à moyen terme et à long terme, il est certain que tous les Québécois vont être gagnants. C'est sûr et évident.

Il y a un élément de transition, si l'on veut, et cela porte même à se poser plusieurs questions, que les agriculteurs se posent, par exemple.

(1710)

Eux aussi se posent la question à savoir ce qu'il adviendra une fois que le Québec aura voté oui en faveur de la souveraineté.

Il est sûr que le député de Lotbinière a répondu à des questions très importantes tantôt. On fait appel à des arguments basés sur la peur pour dire que les producteurs de lait du Québec vont perdre tous leurs quotas. C'est peu raisonnable. Bien sûr que c'est basé sur des arguments émotifs.

On sait qu'au Québec on achète évidemment du boeuf de l'Alberta, qu'on achète des grains de l'Ouest, qu'on achète du maïs et du soja de l'Ontario. On achète beaucoup plus de l'extérieur que ce qu'on vend. Est-ce que là, tout à coup, le Canada anglais va refuser d'acheter notre beurre ou notre fromage pendant que nous, au Québec, on refusera d'acheter le boeuf de l'Alberta? Non. C'est tout à fait déraisonnable de vouloir penser que le reste du Canada va nous forcer vers une situation qui serait inéquitable pour le Québec.

Il est bien sûr que la souveraineté sera sûrement, d'après moi, gagnante pour les agriculteurs du Québec.

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Madame la Présidente, je veux remercier mon collègue de Québec-Est de son intervention qui démontre hors de tout doute raisonnable les avantages pour les Québécoise et Québécoises d'opter pour la souveraineté du Québec dans les meilleurs délais. La démonstration du mauvais fonctionnement du système fédéral a été faite également. Je sais que nos amis libéraux et réformistes n'aiment pas qu'on parle d'iniquité, même si cela correspond à la réalité, mais parlons du mauvais fonctionnement du système fédéral, si ces fédéralistes préfèrent cette expression.

Dans ce sens, l'intervention du député de Lotbinière a été très éloquente. Je pense qu'il a démontré, chiffres à l'appui, à l'aide de plusieurs arguments, qu'il est impossible de contredire à quel point le fonctionnement du ministère canadien de l'Agriculture a desservi les intérêts du Québec.

Je veux simplement terminer ce commentaire qui, en fait, pourra se transformer en question pour le député de Québec-Est.

Sans demander plus que ce que les Québécois donnent au gouvernement fédéral dans le domaine de l'agriculture, c'est-à-dire en prenant pour acquis que les Québécois paient 25 p. 100 des impôts du gouvernement fédéral, si le budget de l'agriculture nous revenait dans la même proportion, si nous le gérions au complet, totalement, c'est donc dire que nous ajouterions une somme de 500 millions-puisque le budget du ministère de l'Agriculture au fédéral est de deux milliards-en aide aux agriculteurs du Québec, qui s'ajouterait en plus aux 300 ou 350 millions du budget du ministère de l'Agriculture du Québec.

Je suis convaincu qu'avec le savoir-faire des Québécois et la passion et la fierté qu'on a dans notre agriculture, on serait d'une compétitivité à n'en pas douter. Alors merci à mon collègue de Québec-Est.

M. Marchand: Madame la Présidente, je veux remercier mon collègue de Mégantic-Compton-Stanstead.

Ce qu'il dit est vrai. Effectivement, les agriculteurs du Québec risquent d'avoir une plus grande part des revenus du Québec, justement parce qu'ils ont perdu pendant tant d'années des sommes d'argent qui ont été distribuées ailleurs. Mais là, une fois


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souverains, il est sûr que les agriculteurs auront la chance de recevoir plus d'argent de la part du gouvernement.

Il faut aussi reconnaître la force de l'organisation de l'UPA et des agriculteurs au Québec. Elle est, sans aucun doute, la mieux organisée dans le domaine agricole au Canada. Elle est bien positionnée. Elle est bien structurée. Les agriculteurs ont une connaissance de leur métier qui leur permettra de bien se positionner sur de nouveaux marchés, et surtout de profiter du nouveau marché américain qui s'ouvre. On va avoir accès d'ailleurs avec les nouvelles ententes, je crois, à 5 p. 100 du marché américain. Donc, les producteurs du Québec sont bien positionnés pour profiter de la souveraineté du Québec.

(1715)

J'aimerais revenir quand même à cette histoire du quota de lait. Il faut que les agriculteurs, les producteurs de lait, comprennent qu'effectivement au lendemain d'un oui au référendum, que le Québec ne devient pas tout à coup indépendant. Il y a une période de négociation. Les ententes, les accords, les signatures qui existent actuellement, soit du GATT ou de l'ALENA vont se maintenir. On entreprendra des négociations entre le Canada et le Québec et ce ne sera pas des négociations secteur par secteur nécessairement, ce ne sera pas des agriculteurs avec des agriculteurs et des banquiers avec des banquiers, ce sera le Québec à égal avec le Canada, des négociations globales. Il faudra établir un cadre d'entente et, une fois que l'émotion sera résorbée et que l'on va examiner cela froidement, rationnellement, le reste du Canada va comprendre que dans le secteur agricole, les agriculteurs, dans le reste du Canada auront besoin de maintenir une bonne entente avec les agriculteurs du Québec dans tous les secteurs pour les protéger de l'ingérence et la compétition indue des Américains.

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux d'avoir l'occasion de commenter la motion dans laquelle l'opposition officielle reproche au gouvernement d'avantager indûment les agriculteurs de l'Ouest par rapport à leurs homologues de l'Est.

Les faits vont cependant à l'encontre de cette motion. Ils montrent que chaque particulier, chaque région et chaque secteur contribue sa juste part, rien de plus et rien de moins, à la réduction du déficit.

Le Budget de 1995 prévoit des mesures justes et équilibrées pour répondre à des situations qui diffèrent d'une région et d'un secteur à l'autre du pays. Il convient également de souligner que notre réforme de la LTGO va de pair avec la position prise par la coalition du Québec en décembre 1994.

De façon générale, le gouvernement élimine ses programmes de subventionnement du transport, y compris la LTGO dans l'Ouest, l'aide au transport des céréales fourragères en Colombie-Britannique, dans le Centre et dans l'Est du Canada, ainsi que diverses subventions au transport dans les Maritimes. Il ne s'agit pas d'une proposition visant à établir un parallèle entre l'Est et l'Ouest, mais plutôt d'un principe appliqué à l'échelle nationale.

Toutefois, là où nous éliminons les subventions au transport, nous fournissons une aide à ceux qui sont le plus touchés, que ce soit dans l'Est ou dans l'Ouest.

Comme les députés de la Chambre le savent, la subvention au transport du grain de l'Ouest est abolie à compter du 1er août 1995.

Dans les mesures d'adaptation qu'il a offertes, le gouvernement tient compte des retombées possibles de la disparition de cet engagement de 96 ans envers le secteur des grains de l'Ouest. Les propriétaires de terres agricoles des Prairies recevront un paiement initial de 1,6 milliard de dollars au titre du capital, soit l'équivalent de trois autres années de versement de la subvention annuelle de 560 millions de dollars.

Dans le Budget qu'il a présenté, le ministre des Finances a souligné clairement que ce paiement à titre gracieux aux propriétaires de terres agricoles des Prairies visait à compenser l'incidence possible de la réforme de la LTGO sur la valeur des terres. Il ne s'agit pas d'un cadeau du ciel ni d'une subvention au développement régional.

L'aide financière accordée n'est pas excessive et elle ne procure pas d'avantages indus aux agriculteurs de l'Ouest. Toutefois, elle permettra aux producteurs de grains de s'adapter au changement. Tandis que le GATT a établi certaines règles de discipline pour les subventions à l'exportation, les producteurs de grains des Prairies doivent toujours soutenir la forte concurrence des exportations de blé subventionné.

Le fait est que la subvention laitière est réduite de 30 p. 100 sur une période de deux ans, mais que le gouvernement continue de s'engager à maintenir notre systrème national de gestion de l'offre.

(1720)

Ce système constitue l'un des grands avantages de notre régime fédéral et assure un revenu raisonnable aux producteurs efficaces de l'Est et de l'Ouest.

Les producteurs laitiers n'obtiennent aucun paiement initial parce que leur subvention, contrairement à celle de la LTGO, n'a pas été abolie. Par contre, nous cherchons des façons d'améliorer la compétitivité du secteur laitier. L'avenir de la subvention laitière fera l'objet de consultations avec les producteurs laitiers.

Nous pesons, depuis 25 ans, le pour et le contre d'une réforme des subventions au transport du grain de l'Ouest. En conséquence, nous comprenons très bien les raisons à l'origine d'un tel changement. La solution à laquelle nous sommes arrivés avec le secteur tient compte des nouvelles réalités du commerce international, de la situation budgétaire et de la nécessité d'augmenter notre sensibilité aux forces du marché.

En ce qui concerne l'industrie laitière, nous n'avons pas encore établi ce genre de dialogue. Nous ne proposons pas de changement en particulier, mais nous pensons que le temps est venu de déterminer, avec les producteurs et les autres intervenants, la façon idéale de soutenir la compétitivié du secteur laitier. Nous entendons amorcer les discussions dès cette année.


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Le ministre a annoncé que son secrétaire parlementaire, l'honorable député de Prince Edward-Hastings, consultera le secteur au sujet de l'utilisation des fonds importants qui restent à notre disposition.

Les réductions des dépenses consacrées à l'agriculture tiennent compte de l'amélioration des perspectives financières du secteur, des règles de discipline du nouvel Accord général applicables aux subventions internationales, ainsi que de la situation budgétaire difficile du gouvernement.

Si l'opposition officielle nous reproche de couper davantage dans l'Est que dans l'Ouest pour l'agriculture, il est tout de même curieux de constater que d'autres nous accusent de faire le contraire. Les critiques placent l'abolition de la LTGO hors contexte et ignorent le paiement à titre gracieux de 1,6 milliard de dollars. L'opposition officielle fait de même avec la réduction de 30 p. 100 de la subvention laitière et ne tient pas compte des facteurs qui atténuent l'impact de la réduction ni de l'engagement du gouvernement envers le système national de gestion de l'offre.

La réduction de 19 p. 100 du budget d'Agriculture et Agroalimentaire Canada correspond exactement à la moyenne pour l'ensemble des ministères fédéraux. Autrement dit, les compressions budgétaires d'Agriculture et Agroalimentaire Canada constituent environ 4 p. 100 des réductions totales de 7,2 milliards de dollars proposées dans le cadre de l'examen des programmes fédéraux. Le fait que les dépenses du AAC constituent environ 4 p. 100 du total des dépenses fédérales n'est pas une coïncidence.

Nous avions des choix difficiles à faire compte tenu de la situation critique de la dette et du déficit. Tous les changements budgétaires effectués répondent au besoin de concrétiser la vision qu'a le gouvernement du secteur agroalimentaire canadien et de faire en sorte que le déficit ne compromette pas notre avenir.

Notre vision repose sur la sécurité financière ainsi que sur le dynamisme et la viabilité de ce secteur. Or, seule la croissance soutenue et durable du Canada rural et des centres urbains nous permettra de la concrétiser. La priorité du gouvernement est de mettre en place le cadre nécessaire pour aider le secteur à développer de nouveaux marchés, à créer des emplois et à assurer sa croissance.

Un investissement dans le secteur agroalimentaire est un investissement dans la croissance de toutes les régions du Canada, régions de l'Est, de l'Ouest, du Nord et du Sud.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais féliciter mon collègue de son discours équilibré qui traitait des deux côtés de la médaille. Je voudrais lui poser une question très importante.

Je soupçonne-et s'il est en désaccord avec moi, cela ne me peinera aucunement-que cette motion proposée par le Bloc québécois aujourd'hui avait pour but de faire de la petite politique et de tenter de monter un coin du pays contre l'autre.

(1725)

Ce n'est pas qu'ils croyaient sincèrement que l'on avait traité une région plus favorablement ou moins qu'une autre, ils voulaient simplement inciter les gens d'une région du pays à jouer contre l'autre. Ils ont été incapables de regarder la situation, cette question de façon équilibrée. Comme je l'ai dit tout à l'heure, cela ne me choquera aucunement si mon collègue est en désaccord avec moi. J'aimerais obtenir ses commentaires et ce, de façon sincère et honnête.

M. Bertrand: Madame la Présidente, j'aimerais remercier mon collègue, le député de Saint-Boniface, pour sa question.

J'aimerais vous dire que je suis un peu d'accord avec les propos tenus par mon collègue. C'est vrai que notre gouvernement a dû faire face à des décisions très difficiles, et je crois sincèrement que les décisions qui ont été prises par le ministre des Finances ont été très difficiles et ce, pour toutes les régions du Canada, tant dans l'Est que dans l'Ouest. Je crois que les coupures qui ont été annoncées ou qui vont l'être dans le futur ont été faites de façon juste et équitable. Je trouve cela un peu difficile de comprendre pourquoi l'opposition officielle est en train de faire une bataille entre l'Est et l'Ouest.

[Traduction]

M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais prendre le peu de temps qu'il nous reste pour dire à quel point je désapprouve la motion proposée par l'opposition.

Je suis surpris que mes collègues du Bloc québécois qui s'intéressent à l'agriculture formulent une motion de ce genre. Je les connais, car je siège avec eux au comité. Je suis surpris qu'ils cherchent à faire croire à la Chambre et aux Canadiens que le budget et les mesures agricoles qu'il contient ne sont pas justes à l'endroit de toutes les régions du Canada.

Tous les agriculteurs reconnaissent que nous devons agir équitablement lorsque nous nous attaquons à la dette et au déficit. Le ministre de l'Agriculture a eu l'occasion de conseiller le ministre des Finances sur le budget qu'il élaborait et surtout sur les mesures agricoles qu'il fallait prévoir. Le budget propose des solutions justes et équitables aux problèmes que posent la gestion de l'offre et le transport du grain de l'Ouest.

En tant que président du Comité permanent de l'agriculture, je suis déçu d'entendre non seulement des députés nous dire qu'une région est favorisée par rapport à une autre, mais aussi un certain nombre de groupes de producteurs spécialisés et d'associations agricoles abonder dans le même sens. Ces groupes et associations passent trop de temps à réfléchir et à déterminer qui a obtenu quoi, au lieu d'unir leurs efforts et même de réunir les diverses composantes d'une organisation qui pourrait aider le Canada à respecter ses engagements dans le domaine du commerce à l'exportation.

C'est dans le secteur des exportations que les agriculteurs et les habitants des régions rurales du Canada trouveront des emplois à l'avenir. Le gouvernement a pris de grands engagements en matière d'exportation. Je crois que si les différents groupes unissent leurs efforts et si le Bloc québécois oublie ses préjugés, les Canadiens voudront tous collaborer pour veiller à ce que les

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produits agricoles de leur pays soient exportés dans le monde entier.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est 17 h 30, il est de mon devoir de faire savoir à la Chambre que, conformément au paragraphe 81(19) du Règlement, les délibérations relatives à la motion sont terminées.

[Traduction]

La Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


11509

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LOI SUR LE JOUR D'EXPRESSION NATIONALE DE SOLIDARITÉ À L'ÉGARD DES AUTOCHTONES DU CANADA

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD) propose: Que le projet de loi C-244, Loi concernant l'institution d'un jour d'expression nationale de solidarité à l'égard des autochtones du Canada, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Madame la Présidente, étant donné que le premier orateur a droit à 20 minutes, je voudrais demander, avant de commencer, s'il y a consentement unanime pour me permettre de partager ces 20 minutes avec un de mes collègues néo-démocrates.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

M. Riis: Madame la Présidente, je vous remercie ainsi que tous les députés de permettre si généreusement à un de mes collègues de co-parrainer, si l'on peut dire, ce projet de loi. Madame la Présidente, vous constaterez dans le Feuilleton que le projet de loi a plusieurs co-motionnaires. Il s'agit des députés de The Battlefords-Meadow Lake, de Regina-Lumsden et de Burnaby-Kingsway. D'autres m'ont aussi fait part de leur soutien.

C'est la deuxième fois que je dépose ce projet de loi. La première fois, il a reçu le soutien de tous les organismes autochtones du Canada. Il a été appuyé par un nombre incalculable de bandes indiennes et aussi par de nombreuses organisations autochtones en milieu urbain ainsi que par les principaux chefs autochtones du Canada. À ma connaissance, personne n'a encore manifesté son opposition au projet de loi, que ce soit parmi les autochtones ou les non-autochtones.

Nous n'avons qu'une heure pour tenir le débat. À la fin de cette heure, j'espère que, ou bien il n'y aura plus de députés qui veulent prendre la parole, ce qui permettrait de tenir un vote par oui ou non pour renvoyer le projet de loi au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord, ou il y aura tout simplement consentement unanime pour renvoyer le projet de loi au comité compétent pour en poursuivre l'étude.

Le projet de loi est très simple. Je ne pense pas qu'il nécessite une étude très poussée. Il se peut même que la Chambre accepte à l'unanimité de procéder à toutes les étapes du projet de loi avant la fin de l'heure, ce que nous avons déjà fait auparavant.

M. Solomon: Bonne idée.

M. Riis: Mon collègue de Regina-Lumsden dit que c'est une bonne idée. Nous verrons comment se déroule le débat.

Le préambule du projet de loi C-244, Loi concernant l'institution d'un jour d'expression nationale de solidarité à l'égard des autochtones du Canada, dit ceci:

Considérant: qu'il est souhaitable que les Canadiens instituent un jour spécial pour honorer les Premières nations du Canada;
que les Canadiens veulent ardemment donner un exemple de leur volonté de célébrer les cultures autochtones;
qu'il y a lieu de désigner un jour d'expression de solidarité à l'égard des autochtones le 21 juin, jour le plus long de l'année et jour qui marque un changement de saison,
Sa Majesté, sur l'avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte:
Vient ensuite le titre abrégé, qui est Loi sur le jour d'expression nationale de solidarité à l'égard des autochtones du Canada. Si ce projet de loi est adopté, ce jour deviendra une réalité.

Je dois donner une précision. Certains députés, particulièrement des réformistes, ont demandé s'il s'agit d'un jour férié. Le but n'est pas de faire de ce jour un jour férié, mais bien un jour où les Canadiens d'un bout à l'autre du pays se joignent aux autochtones de toutes les régions du Canada pour reconnaître l'immense contribution culturelle que les premières nations et que les autochtones en général ont apportée à ce pays. On ne s'entend pas sur l'origine des premiers Européens qui sont arrivés ici. Je suis fier de dire que mes ancêtres, les Vikings, ont probablement été les premiers Européens à arriver ici, alors que d'autres prétendent que ce sont les Irlandais. D'autres encore diront que les Chinois ont été parmi les premiers à venir de l'autre côté. Peu importe qui ils étaient, il faut dire que, en arrivant en Amérique du Nord et au Canada, ces gens ont rencontré des cultures incroyablement avancées. Ces cultures existaient depuis des centaines et même des milliers d'années dans des environnements naturels plutôt hostiles dans certains cas.

(1735)

Ils avaient non seulement développé une harmonie extraordinaire entre eux, chaque culture et chaque organisation, tribu ou clan coopérant les uns avec les autres et se complétant les uns les autres, mais encore ils vivaient et exerçaient leurs activités en harmonie avec leur environnement naturel.

Lorsque les premiers explorateurs européens ont abordé les côtes canadiennes, ils ont trouvé en général des gens qui les ont aidés dans leurs efforts et qui leur ont fait partager leurs ressources pour leur faciliter l'exploration du territoire que nous appelons maintenant le Canada.


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Puis vinrent les colonisateurs, les colons. Ils trouvèrent des gens relativement accueillants qui leur firent connaître les réalités de la vie dans cette partie du globe. On peut imaginer les souffrances terribles qu'auraient connues certains de ces colons si les premiers habitants de ces régions n'avaient pas été là pour leur offrir leur coopération, leur soutien, leurs conseils et leur aide dans pratiquement tous les domaines.

La situation commença ensuite à s'envenimer. C'est alors que nous, de culture non autochtone, avons commencé à pratiquer ce qu'on ne peut décrire que comme un génocide culturel, intentionnellement dans bien des cas, et indirectement dans d'autres. La réalité, c'est que les maladies et la violence et toutes sortes d'autres aspects de notre présence ont donné lieu au génocide des cultures autochtones, les menant presque au point d'extinction.

À l'heure actuelle, il ne reste plus qu'une poignée de langues autochtones originales au Canada. Dieu merci, à la onzième heure, il faut leur en reconnaître le mérite, des chefs autochtones partout au Canada ont pris position et ont décrété que c'en était terminé, qu'il fallait maintenant renverser le processus. En faisant preuve d'un incroyable leadership, ils ont inversé le processus d'extinction culturelle. Aujourd'hui, les cultures autochtones d'un bout à l'autre du pays sont probablement plus riches, plus vivantes et plus dynamiques qu'elles ne l'ont été depuis longtemps.

Je voudrais dire un mot d'un certain nombre de dirigeants autochtones de ma propre circonscription. Je sais que tous les députés pourraient en faire autant. Ce sont des personnes exceptionnelles qui, par leurs talents de chef et leur détermination à faire avancer la cause de leurs peuples et du pays tout entier, ont rendu possibles ces progrès extraordinaires.

Je songe à des personnes comme les chefs Nathan Matthew, Manny Jules, Ron Ignace, Richard LeBourdais et bien d'autres de la nation shuswap du centre de la Colombie-Britannique. Je reconnais qu'on pourrait en dire autant au sujet de chefs autochtones d'un océan à l'autre.

M. Solomon: Le chef Sol Sanderson de la Saskatchewan.

M. Riis: Le chef Sol Sanderson de la Saskatchewan et David Ahenakew et d'autres encore, comme mon collègue le signale. Ils sont si nombreux et nous leur devons tant.

Au cours des prochaines années, il est probable que la plus importante question sociale qui se posera sera celle des relations entre autochtones et non-autochtones, et l'élucidation de ces relations complexes et de plus en plus importantes.

Je songe, en disant cela, à la nouvelle réalité de l'autonomie gouvernementale, de l'autodétermination et de l'autarcie des autochtones. Le règlement de leurs revendications territoriales, la préservation de leurs cultures, leur développement social et économique, leur éducation et leur formation et l'avancement culturel général sont autant d'éléments à ne pas négliger.

Je voudrais saluer le travail du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien qui a, à sa manière, assuré un leadership important dans divers domaines.

(1740)

Lorsqu'on regarde ce qui s'est passé depuis 18 mois, je crois qu'il est juste de dire que des progrès importants ont été réalisés sur le plan de l'autonomie gouvernementale, de l'autodétermination et de l'autosuffisance, particulièrement pour les bandes indiennes progressistes d'un bout à l'autre du pays, sans parler des Inuit, des Dénés et des Métis.

Afin de permettre à mon collègue de dire quelques mots, je vais terminer mes remarques en disant que, à un moment crucial dans l'évolution des premières nations dans notre région d'Amérique du Nord, il convient parfaitement que, en tant que parlementaires et au nom des gens que nous représentons, nous reconnaissions la contribution des premières nations.

Nous devons leur dire que nous apprécions ce qu'elles ont fait et que nous aimerions travailler de façon positive avec elles pour l'avancement non seulement des autochtones du Canada, mais aussi de tous les Canadiens. Nous reconnaissons l'existence des premières nations et les droits que ce statut leur confère.

Je voudrais terminer mes remarques en faisant allusion à la Loi sur les Indiens et montrer comment, à mon avis, cette loi a toujours été fondée sur un mensonge. Ce mensonge, on peut le lire à la première ligne de la version anglaise de la loi, qui dit «An Act respecting Indians». Si on donne au mot «respecting» le sens du verbe respecter, cela est absolument faux. Cette loi ne respectait pas les Indiens, et c'est pourquoi je demande à mes collègues de leur tendre la main maintenant et de reconnaître le 21 juin comme un jour de solidarité à l'égard des autochtones.

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Madame la Présidente, je suis heureux d'avoir l'occasion de parler au sujet de cette excellente motion présentée par mon collègue de Kamloops. C'est une motion qui vise à instituer une journée de solidarité avec les peuples autochtones. Elle montre que le député comprend bien les défis qui assaillent nos sociétés.

Je voudrais penser que tous les jours je suis solidaire avec les peuples autochtones. Cependant, je sais que ce n'est pas le cas dans l'ensemble du pays. Il serait fort utile de nous rappeler les injustices qu'ont subies les peuples autochtones et qu'il existe un certain nombre de choses que nous pouvons faire pour remédier à ces injustices et relever les défis à venir.

La Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones a publié son rapport provisoire sur le suicide. Nous devons travailler activement pour donner suite aux recommandations de ce rapport.

Le Sénat vient tout juste de publier un rapport sur le traitement des anciens combattants autochtones des deux conflits mondiaux et de la guerre de Corée. En tant que pays, nous devons travailler activement à redresser les torts causés aux anciens combattants autochtones.

Le Comité permanent de la Chambre des communes des affaires indiennes a, dans le passé, fait état du caractère insuffisant et inadéquat du logement dans les collectivités autochtones. Il faut sûrement se pencher sur cette question.


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Selon un groupe d'experts en environnement qui a examiné l'acceptabilité de l'entraînement aux vols à basse altitude au-dessus du territoire innu au Labrador, il faut régler rapidement les revendications territoriales des autochtones. C'est une question importante sur laquelle le gouvernement doit se pencher le plus rapidement possible.

Et la liste se poursuit. À l'heure actuelle, des comités de la Chambre et le gouvernement examinent les questions de l'autonomie gouvernementale, de l'éducation des autochtones, des droits de pêche des autochtones, du développement économique des autochtones, de l'état de la santé mentale chez les autochtones et de l'avenir de la gestion des ressources dans les régions où vivent des autochtones.

Il est urgent que tous les Canadiens, peu importe leur race et leur origine ethnique, reconnaissent l'histoire, le patrimoine et l'avenir des premières nations du Canada. L'adoption d'une journée de solidarité est sûrement un pas dans la bonne direction.

Beaucoup de choses se produisent à cet égard dans ma circonscription. Au sein des collectivités autochtones, des chefs comme les défunts Big Bear, Poundmaker, Ahtakakoop et Seekaskoch, servent de sources d'inspiration pour la création de centres d'interprétation et d'éducation. Les collectivités non autochtones ont commencé à parrainer ou à organiser conjointement des pow-wows et d'autres activités multiculturelles.

Des particuliers, comme le chef Blaine Favel, de la Fédération des nations indiennes de la Saskatchewan, ont parlé de la nécessité de favoriser des rapports humains et économiques plus forts entre les collectivités autochtones et non autochtones. Des conseils tribaux, comme le Conseil tribal de Meadow Lake, ont montré que des entreprises autochtones prospères pouvaient contribuer grandement au succès des collectivités non autochtones avoisinantes. Les relations qui existent entre nos sociétés comportent des inconvénients et des avantages. Si nous voulons surmonter les inconvénients et faire en sorte que l'avenir soit avantageux, nous devons commencer par prendre de petites mesures. Le projet de loi que le député de Kamloops a présenté et que le député de Regina-Lumsden et d'autres députés de la Chambre ont appuyé nous donne précisément la possibilité de le faire.

(1745)

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Madame la Présidente, je prends la parole pour exprimer mon appui à ce projet de loi et pour féliciter le député de Kamloops qui l'a présenté à la Chambre. Le jour dont il parle serait un jour de réflexion.

Je voudrais citer les propos de Georges Erasmus, qui a dit:

L'histoire de notre peuple doit être racontée. Il nous faut présenter avec exactitude ce qui s'est passé jadis afin que nous puissions en tenir compte dans les siècles à venir. . . Je n'aime pas ce qui s'est passé ces 500 dernières années. Nous n'y pouvons pas grand-chose. Mais que ferons-nous à propos des 500 prochaines années? Que ferons-nous au cours des dix prochaines années?
En ce jour de réflexion, il y a bien des choses qui donnent à réfléchir. Nous devrions songer au fait que, lorsque les Européens ont débarqué ici, les Indiens les ont nourris, leur ont enseigné des moyens de prévenir le scorbut, sans rien demander en retour. Ils n'ont rien demandé à Jacques Cartier. Nous devrions réfléchir au wampun de Truro, à la chaîne d'alliance, aux traités rompus, à la nourriture que les Indiens nous ont procurée.

Je suis d'origine irlandaise et italienne. Pour les Irlandais, la pomme de terre est originaire de l'Irlande. Or, nous la devons aux Indiens. Les Italiens pensent que la tomate est originaire d'Italie. Or, nous la devons aux Indiens. Il y avait plus de 1 200 variétés de plantes ici, à notre arrivée. C'était une nation autarcique.

Nous devrions réfléchir à leurs sentiers baignés de larmes. Nous leur avons pris leurs embarcations. Nous leur avons enlevé leur statut de personnes. Nous les avons parqués dans des réserves. Nous les avons mis dans des pensionnats et les avons déménagés de provinces. Comme si ce n'était déjà pas assez de les avoir mis dans des écoles d'autres provinces, nous avons dit: «Vous n'irez pas chez vous de l'âge de six à 18 ans.» Ils n'allaient pas chez eux, même pas à Noël ou pendant les vacances. Nous avons ensuite décidé de les priver de leur langue et de leur culture. Pour couronner le tout et obliger les enfants à aller dans les pensionnats, nous avons concocté les lois de passage. Si les parents refusaient d'envoyer leurs enfants dans ces établissements, on ne leur accordait pas la permission de quitter laréserve.

Montrez-moi une famille irlandaise, une famille italienne ou une autre famille quelconque qui ait été traitée de la sorte. Autrement dit, les visiteurs étaient mieux traités que les personnes qui occupaient ces terres depuis 10 000 ans. Nous devrions réfléchir à tout cela.

Mon collègue nous rappelle que nous devrions réfléchir à la Loi sur les Indiens. Elle est archaïque. C'est une loi qui ne devrait exister nulle part au monde.

Nous devrions penser aux barrages de Grand Rapids, Churchill, Nelson et Cheslatta qui les ont privés de leurs moyens de subsistance. Nous leur avons pris leur existence même. Nous devrions réfléchir à ce que nous avons fait aux Haida Gwaii et aux Micmacs avec nos méthodes d'exploitation forestière. Nous devrions réfléchir à ce que nous avons fait des minéraux. Nous avions besoin de minéraux, alors nous avons imposé les traités Robinson-Superior. Ces traités existent uniquement parce que nous avons eu besoin de minéraux.

Dans de nombreux endroits, nous leur avons enlevé les esturgeons et le riz sauvage qui étaient pour eux non seulement des aliments, mais aussi des objets religieux. Ces ressources ont été là pendant des générations, puis sont disparues tout à coup.

Nous ne devons pas oublier les terres que nous nous sommes appropriées à l'époque, ni les gens qui sont passés à l'histoire. Les Elijah Smith, les anciens du Yukon, Jake Fire, un Mohawk traditionaliste qui s'est présenté à une réunion sans arme et a été abattu, Frank Calder et les Sparrow. Il ne s'agit pas uniquement de particuliers, mais de familles entières. La famille Sparrow de la Colombie-Britannique, par exemple, répète la même chose depuis trois générations. Nous devrions réfléchir à cela et ne pas l'oublier.

Nous devrions aussi réfléchir à ce qu'ils font. Ils ont maintenant plus de 5 000 entreprises qui créent de l'emploi pour 31 000 personnes. Il y a 25 ans, de 600 à 800 autochtones seulement étudiaient dans nos écoles postsecondaires.


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Aujourd'hui, ils sont 150 000 diplômés, 22 000 fréquentent les écoles postsecondaires cette année et ils seront 23 000 l'année prochaine.

Ils dirigeaient et ils étaient très éloquents. Nous devrions réfléchir à tout cela à la date que le député propose.

(1750)

En 17 mois, ces 17 mois qui m'ont semblé être plutôt 17 années, nous avons tenté de mettre en oeuvre le contenu de notre livre rouge. Nous avons négocié avec les Micmacs. Nous leur avons dit: «Vous avez si bien réussi dans le domaine de l'éducation qu'il est temps d'assumer votre autonomie.» C'est exactement ce que font les Micmacs de la Nouvelle-Écosse.

Lors de la réunion de signature, l'un des chefs, qui est sans doute un ancien maintenant, m'a dit: «Vous savez, lorsque j'ai entrepris tout ceci, Ron, il n'y avait que quatre Micmacs à l'école postsecondaire dans toute la province de la Nouvelle-Écosse. Je suis venu ici ce soir pour signer, avec beaucoup d'espoir dans l'âme. J'ai vu une auto sur la route. Trois jeunes étaient en panne d'essence et je me suis arrêté pour leur venir en aide. C'étaient trois Micmacs, tous les trois diplômés de l'université.» Nous ne devons pas oublier cela.

Au sujet du démantèlement au Manitoba, il y a un an les députés d'un parti à la Chambre ont qualifié ce projet de démentiel. Trois ou quatre mois plus tard, le public a commencé à reconnaître qu'il avait peut-être de l'importance. Un mois avant la signature, on y voyait un événement historique. Aujourd'hui, Harvard soutient qu'il s'agit de l'entente d'autonomie gouvernementale autochtone la plus importante au monde. C'est l'esprit qui présidait au processus.

En Colombie-Britannique, les choses sont difficiles parce que nous négocions des traités contemporains dans l'esprit et l'intention. En Colombie-Britannique, 120 premières nations et 50 de nos représentants négocient des ententes contemporaines et modernes à cinq tables de négociation.

Nous entendons procéder au démantèlement dans le nord de l'Ontario où les rencontres se tiendront au cours des deux ou trois prochains mois. Nous voulons déplacer la juridiction du traité no 3 dans la région de Fort Frances et les négociations sont en cours.

Nous allons céder la compétence sur le gaz et le pétrole. C'est ainsi que les choses se font. Il y a 110 chefs qui vivent dans des réserves où il y a du pétrole et du gaz, dont 50 possèdent des réserves importantes, mais les réserves autochtones ne sont pas propriétaires de ces ressources et elles ne les gèrent pas. Nous devons leur céder ces ressources parce qu'elles leur appartiennent et sont situées sur leurs réserves et c'est ce que nous entendons faire.

Au Québec, nous négocions avec les Inuit, les Cris, les Montagnais et les Hurons. Nous négocions face à face, avec dignité et dans le respect mutuel et des ententes sont conclues.

La même chose s'est produite au Yukon. Vous avez tous vécu cette étape en tant que parlementaires. Vous vous souviendrez peut-être que le soir où nous avons tenu le vote, les membres de la délégation du Yukon se trouvaient dans la tribune et tous portaient le costume traditionnel. J'avais alors jeté un coup d'oeil dans leur direction. Nous avons applaudi et ils ont fait de même. Ils ont alors versé des larmes et nos députés endurcis en ont fait autant. Les impitoyables libéraux versaient des larmes. Voilà ce que nous devons faire et nous entendons le faire aussi dans les Territoires du Nord-Ouest.

Je souhaiterais pouvoir continuer, mais j'ai tellement peu de temps. Je voudrais seulement parler de ce qui peut être fait et de ce que nous devrions nous rappeler cette journée-là. Comment pouvons-nous le faire? Cela semble très simple, mais c'est compliqué. Imaginons une pyramide. En haut, on trouve la dignité, le respect et l'autonomie gouvernementale, à la base, des installations de santé, des logements et un développement économique satisfaisants. Si ces éléments n'existent pas à la base, la pyramide s'effondrera.

Des opposants diront que nous avons un grand coeur, que nous avons un programme politique, que les Indiens reçoivent trop à l'heure actuelle. Je n'ai pas l'impression d'avoir un grand coeur ni un programme politique. J'ai des yeux pour voir. Erasmus nous demande de voir.

Que faudra-t-il? Il faudra d'abord le courage de résister à ces arguments. Il faudra savoir ce qui se passe là-bas. Il faudra de la compassion. Nous devons faire preuve de compassion. Il faudra nous décider à parler face à face. Un chef métis m'a dit: «Nous avons parlé trop longtemps dos à dos, côte à côte. Nous devons parler face à face.» Nous pouvons le faire.

Dans les Territoires du Nord-Ouest, on compte neuf langues officielles, quatre de plus qu'aux Nations Unies, et ces langues sont traduites dans leur assemblée législative. Les Russes sont venus voir ce que nous avons fait. En tant que Canadiens, nous devrions faire non seulement du bon travail, mais le meilleur travail au monde, qui servira d'exemple aux autres.

(1755)

Aujourd'hui, les Irlandais, les Écossais, les Britanniques et même les Français arborent des drapeaux canadiens. À mon avis, si nous voulons que le Canada joue un rôle exemplaire dans la question autochtone, les autochtones eux-mêmes et les autres Canadiens doivent reconnaître dans notre drapeau un symbole de tolérance, de dignité, de partage et de respect. Et cela fonctionnera. C'est la raison pour laquelle cette journée est importante et pour laquelle j'y donnerai mon appui.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Madame la Présidente, le Bloc québécois va également appuyer la motion de notre honorable collègue du NPD.

Il s'agit d'un dossier que je connais et que j'essaie de connaître depuis presque maintenant un an et demi, surtout parce qu'il est extrêmement compliqué. Il n'est pas facile à comprendre parce qu'on compte quand même 635 communautés au Canada. Quand on dit «communautés», il s'agit souvent des réserves réparties d'un bout à l'autre du Canada. Non seulement on a des communautés, mais on compte également des nations. Effectivement, on compte presque une cinquantaine de langues et de dialectes, ce qui est assez surprenant.

On remarque, chez les nations autochtones, leur intention arrêtée de retourner vraiment à leurs traditions et à leur langue. Il faut les honorer pour cela.


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Dix minutes, c'est très court pour parler d'un dossier aussi complexe et édifiant parce qu'il est toujours intéressant d'en jaser et de voir la façon dont ces échanges se font, la façon dont les autochtones tentent de négocier avec nous, puisqu'elle est basée sur la tradition et sur la modernité. Cependant, j'ai tenté de m'arrêter sur les symboles dans mon discours parce que, du côté autochtone, on en utilise beaucoup. J'aimerais vous entretenir de celui sur lequel je me suis particulièrement arrêté: le wampum.

Vous vous demandez peut-être ce qu'est le wampum. Il y a plusieurs définitions et, bien qu'il y en ait plusieurs, il y en a une que j'estime particulièrement et sur laquelle je m'attarderai un peu plus longtemps.

Qu'est-ce que le wampum? Ce sont des bandes de perles blanches et noires qui sont souvent disposées en parallèle. C'était très important à l'époque, particulièrement au XVIIe siècle, de faire des échanges. Souvent les échanges entre les nouveaux arrivants et ceux qui étaient déjà là depuis 25 000 ans se faisaient sous forme d'échanges de présents, et le wampum était quelque chose d'extrêmement important pour eux.

L'origine linguistique est algonquine. J'ai ici une interprétation du wampum qui nous est livrée quelquefois au Comité des affaires autochtones. Je partage cet avis sur le wampum. Plusieurs chefs sont venus nous l'expliquer et je pense que le wampum a une connotation non seulement historique, mais on peut y donner un prolongement moderne aujourd'hui. Je pense que ce qui est expliqué et interprété dans le wampum a une application tout à fait moderne aujourd'hui.

Je lis donc ce que le wampum signifie pour la plupart des chefs autochtones, et c'est l'interprétation à laquelle je donne le plus de signification: «Nos relations ne seront pas celles d'un père et d'un fils, mais celles de frères. Ces deux rangs-ce sont les deux rangs de perles dont je parlais plus tôt-symboliseront des vaisseaux qui voguent ensemble sur la même rivière. L'un sera celui du peuple original-ceux qui étaient déjà là avant nous-avec ses lois, ses coutumes, et l'autre sera celui du peuple européen avec ses lois et ses coutumes. Nous voyagerons ensemble, mais chacun dans sa propre barque. Ni l'un ni l'autre n'essaiera de conduire le vaisseau de l'autre.»

Je trouve que c'est très significatif du type de relations qui nous guident, nous les Européens, avec les autochtones. Naturellement, j'ajouterais qu'on ne doit pas essayer de couler le bateau de l'autre non plus sur la même rivière. Donc, on voit la portée symbolique.

Au XVIIe siècle, le wampum était très important pour les officiers de la Couronne britannique avec qui on échangeait des présents. Le wampum était un présent particulièrement apprécié.

Sur l'aspect des présents-et on le constate encore aujourd'hui-à l'époque, plus il y avait de présents, plus c'était important. Lorsque je fais le tour de certaines réserves au Canada et au Québec, même aujourd'hui, à quelques exceptions près, on m'offre des cadeaux. De notre côté, nous avons aussi pris l'habitude d'arriver là, non pas les mains vides, mais en leur offrant un petit quelque chose.

(1800)

La grosseur ou le nombre de cadeaux ne sont souvent pas très importants, mais c'est toujours l'aspect symbolique de continuer cette tradition de fournir un cadeau, et cela provoque un échange fructueux du côté des autochtones parce qu'on respecte leur tradition.

Maintenant, le Wampum s'il était un signe d'engagement connu des Européens à l'époque, il semble que ces engagements ne furent pas respectés. Là-dessus, nous avons une prise de conscience à faire et, effectivement, la journée du 21 juin pourrait être cette prise de conscience.

On a dénoncé le gouvernement de l'Afrique du Sud, à l'époque, sur la question de l'apartheid. Je trouve scandaleux que dans un pays aussi ouvert que le Canada actuellement, on ait encore 635 réserves au Canada, c'est-à-dire qu'on «ghettoïse» ces gens-là, on les met sur des coins de terre, on a pris 90 ou 95 p. 100 de leurs terres, on a fait des milliards de dollars avec cela, et en échange dans le contrat social, on les a souvent remisés, ignorés ou repoussés sur des terres qui n'étaient même pas fertiles, et dans le contrat social, on a dit: Maintenant, on va s'occuper de vous.

Je pense que la journée du 21 juin, si jamais elle est retenue, il faudra s'interroger sur la portée de cette loi et l'importance de la démanteler le plus rapidement possible. C'est une loi qui est déjà centenaire au Canada et je pense que c'est cent ans de trop.

Je veux aussi vous entretenir sur la journée du 21 juin. C'est important le 21 juin; ce n'est pas par inadvertance que cette date a été choisie. Le 21 juin est la journée du solstice, c'est-à-dire que c'est la plus longue journée de l'année. Il n'y a pas seulement qu'au Canada, mais l'ensemble des autochtones de la planète honore souvent cette journée-là. Pour avoir été moi-même à Cancun, je peux vous certifier que les Mayas à l'époque disposaient leurs pyramides en conséquence du solstice.

La plus longue journée de l'année, à une heure donnée, on voit descendre en bas de la pyramide de Chichén Itza une espèce de serpent qui représente le symbole de la plus longue journée. Le serpent descend la pyramide, je pense que c'est à 18 heures, la journée du solstice. Souvent la disposition des temples et des pyramides fait en sorte de respecter cette journée-là. Donc, la journée du 21 juin est extrêmement importante et, je pense qu'il faut faire un effort, si on en reconnaît une journée nationale, pour que ce soit le 21 juin.

Finalement, c'est une journée où il faudra essayer de mélanger la culture européenne et la culture autochtone le plus possible. En partie, c'est déjà fait. Le ministre a donné des exemples de nourriture, des exemples d'échanges entre nous, mais il y a aussi d'autres aspects. Si on regarde toutes les petites choses qui touchent notre vie quotidienne, en tant qu'Européen, quoi de plus gentil que d'aller glisser avec ses enfants en traîne sauvage qui est une invention autochtone, de même que le canot, les


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raquettes, les vêtements, les mocassins, les fourrures, comment vivre en forêt, comment attraper les animaux et comment chasser. Tout cela nous a été montré par les autochtones.

Il faudra profiter de cette journée, je pense, pour essayer de rapprocher nos deux cultures qui, malheureusement, à mon point de vue, se sont éloignées depuis quelques décennies déjà.

Donc, ce n'est pas le livre rouge qui va régler la question, ni même la Constitution canadienne, ce sera plutôt notre ouverture d'esprit et le rapprochement entre les deux nations. Il faudra faire preuve de compassion, d'écoute et d'ouverture d'esprit. Il faudra cesser de tenter de cristalliser les oppositions qui opposent les nations: la nation canadienne, la nation québécoise et la nation autochtone. Il faudra faire en sorte d'essayer de se rapprocher en faisant preuve de générosité et en s'ouvrant. À ces conditions-là, cette journée du 21 juin ne pourra que nous enrichir, et c'est un appel à une très grande ouverture sur la culture autochtone qu'il faudra mettre en relief en cette journée du 21 juin, et cela nous fera plaisir, nous, du Bloc québécois, de soutenir cette motion.

[Traduction]

Mme Jean Augustine (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Madame la Présidente, j'interviens pour appuyer le projet de loi C-244 qui propose de faire du 21 juin un jour d'expression nationale de solidarité à l'égard des autochtones du Canada.

Depuis deux semaines, les Canadiens montrent qu'ils comprennent les principes importants qui sous-tendent ce projet de loi, c'est-à-dire la nécessité de célébrer l'égalité et le partenariat. Vendredi dernier, les autochtones et les non-autochtones de tout le pays, notamment le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, se sont réunis à Vancouver à l'occasion de la remise des prix nationaux de mérite exceptionnel destinés aux autochtones. On a honoré alors 14 autochtones pour leur contribution remarquable. Jeudi soir, à 21 heures, tous les Canadiens pourront participer à cette cérémonie, puisque la Société Radio-Canada la télédiffusera au niveau national.

(1805)

Les Canadiens ont également marqué le caractère unique de nos cultures et de notre patrimoine, le 26 mars, à l'occasion de la remise annuelle des prix Juno. Un hommage touchant à Buffy St. Marie en particulier a mis en lumière le rôle central que les cultures autochtones ont joué pour ce qui est de définir la culture canadienne en général.

C'est ce dont il est question aujourd'hui. Il s'agit de souligner les réalisations des autochtones et leur contribution remarquable à notre grand pays. On parle du rôle joué par les autochtones dans tout un éventail de domaines allant de la politique à la cuisine, en passant par les affaires, le droit, le divertissement et les sports.

Durant des générations, les autochtones ont apporté une contribution qu'on a reconnue à l'échelle internationale, mais dont on a largement fait fi, pendant trop longtemps, au Canada. À l'instar du gouvernement et de tous les députés de ce côté-ci, je crois fermement au principe qui sert de fondement à cettemotion.

Nous avions justement ces principes à l'esprit, lorsque nous avons rédigé notre livre rouge. Nous avions alors pour objectif, et c'est toujours le cas, de nous assurer que les autochtones pourront, à l'avenir, avoir un niveau de vie et une qualité de vie, ainsi que des chances de réussite comparables à ceux dont jouissent les autres Canadiens. Nous voulons que les autochtones puissent, à l'avenir, vivre de façon autosuffisante en sachant qu'ils constituent des peuples uniques. Nous souhaitons également que, dans les années qui viennent, les cultures autochtones enrichissent tous les Canadiens et que les gens soient alors bien décidés à partager de façon équitable les possibilités qu'offre notre pays. Il faut que les autochtones puissent, dorénavant, vivre et travailler là où ils veulent et que les enfants autochtones grandissent dans des familles stables et des collectivités florissantes, en étant capables de prendre toute la place qui leur revient au Canada.

Le gouvernement est conscient du lien spécial qui existe entre les autochtones, les premiers habitants de cette terre et la Couronne. Nous entendons bien respecter nos obligations et bâtir un nouveau partenariat sur la confiance, le respect mutuel et la participation au processus décisionnel.

C'est pour cela que nous avons placé les questions autochtones au premier plan de notre programme. Je suis heureuse de voir que mon collègue de Kamloops aborde lui aussi les questions autochtones avec autant de sérieux.

L'idée de permettre aux autochtones d'occuper la place qui leur revient en tant que partenaires de plein droit au sein de la société canadienne n'est pas mise de l'avant par un seul groupe. C'est une idée que partagent des millions de Canadiens. Les questions autochtones ne concernent pas que les autochtones. Elles touchent tous les Canadiens. C'est pourquoi je trouve important que tous les Canadiens participent à la mise en valeur des contributions passées, présentes et futures des peuples autochtones. Pour ce faire, nous devrions former des partenariats, employer des moyens concrets et tenir des cérémonies de commémoration.

Évidemment, avant de prendre une décision comme celle-là, il importe d'obtenir la permission de la collectivité autochtone. Si notre but ultime est de créer une société égalitaire où tous participent, ce serait une attitude régressive de notre part d'adopter à la Chambre une journée spéciale en l'honneur des autochtones sans obtenir explicitement leur accord.

Je suis convaincue que le projet de loi présenté par mon collègue vaut la peine que nous l'examinions et que nous en discutions, surtout maintenant que nous célébrons la première année de la décennie internationale des peuples autochtones du monde, sous l'égide des Nations Unies. En appuyant la proposition de l'ONU, qui recommandait de faire du 9 août la journée internationale des peuples autochtones, on contribuera peut-être aussi à faire progresser les questions autochtones sur la scène internationale.

Je remercie le député d'avoir présenté ce projet de loi. Il nous rappelle à juste titre que les questions autochtones doivent rester une priorité pour tous les Canadiens. Je le remercie de nous avoir donné la chance de participer à ce débat.

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de participer à ce premier débat sur le projet de loi C-244, Loi concernant l'institution


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d'un jour d'expression nationale de solidarité à l'égard des autochtones du Canada.

Je suis sûr que c'est animé des meilleures intentions et soucieux de reconnaître la contribution des cultures autochtones à la mosaïque canadienne que le député de Kamloops a présenté ce projet de loi. Les Canadiens sont fiers du caractère unique des cultures autochtones et de leur contribution à ce que nous appelons le Canada. D'un bout à l'autre du pays, les tribus indiennes ont contribué, par leurs antécédents et leur histoire, à l'édification de ce pays. La contribution des cultures autochtones et celle faite par d'autres cultures au fil des siècles ont fait de nous un peuple unique. C'est en raison de sa compréhension et de son respect des autres cultures que le Canada est un bastion de tolérance, de compassion et de stabilité.

(1810)

Depuis que je suis député, j'ai eu l'occasion de rencontrer des autochtones de toutes les régions du Canada. Il existe une grande diversité parmi les peuples autochtones qui sont en fait les premiers Canadiens. Leur héritage culturel contribue beaucoup à nous différencier des États-Unis, et les Canadiens sont fiers de cette distinction.

J'invite le gouvernement à faire preuve de prudence avant de faire de la politique avec le dynamisme des cultures autochtones. Nos populations autochtones sont sensibles, intelligentes et fières en dépit d'années d'injustice, de discrimination flagrante à certains moments et d'une mauvaise gestion criminelle de leurs affaires à d'autres moments, malgré tout cela, elles ont poursuivi leurs entreprises culturelles et elles ont développé une communauté d'intérêts.

Mon parti appuie l'indépendance des nations autochtones et leur participation pleine et entière à la vie de ce pays. Nous appuyons leur autosuffisance et l'élimination de ce boulet qu'est pour eux le ministère des Affaires indiennes. Nous appuyons leurs progrès et non un renforcement du passé.

Comme je l'ai dit précédemment, ils représentent une culture dynamique qui mérite de croître et de fleurir tout autant que celle des autres citoyens de ce pays. La contribution culturelle extraordinaire des peuples autochtones à la vie de ce pays se défend d'elle-même. C'est une culture riche et attachante, pas une culture qui isole ou enferme dans un ghetto, comme nous l'avons fait avec l'article 91.24 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique et ensuite avec de nombreux aspects de la Loi sur les Indiens. C'est de cela que nos cultures autochtones essaient de se débarrasser. Les tristes servitudes du colonialisme doivent être abolies.

Tel que je la vois, la reconnaissance par le Parlement d'un jour d'expression nationale de solidarité à l'égard des autochtones serait sans grande conséquence, étant donné que ce ne serait pas un jour désigné férié et que cela n'entraînerait pas de dépenses.

Mais, est-il nécessaire de parler de solidarité nationale à l'égard des peuples autochtones? Cela me rappelle la période où la Pologne essayait de se sortir du joug de l'oppression communiste. Il me semble que l'on pourrait célébrer la culture autochtone sans décréter de jour d'expression nationale de solidarité. Cela paraît paternaliste. Ne construisons pas de mur. Nourrissons sans singulariser, sans séparer nos peuples autochtones du courant principal de la société. Construisons sur ce qui nous renforce, sur notre consensus, sur ce qui a fait la force du Canada face à l'adversité.

C'est le consensus canadien, plus que n'importe quelle action gouvernementale, qui a protégé la minorité contre la tyrannie de la majorité à l'époque moderne.

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants, Lib.): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je prends part à ce débat. J'aimerais féliciter le député de Kamloops d'avoir soulevé cette question à la Chambre.

C'est un principe établi depuis longtemps dans ce pays que nous devons travailler à l'avènement d'une société égalitaire. Mais cela n'a malheureusement pas toujours été le cas. Depuis des centaines d'années, les autochtones ne sont pas traités sur un pied d'égalité. Il est temps d'essayer de mettre fin à une telle injustice. C'est pourquoi le gouvernement s'est engagé à prendre les mesures nécessaires pour aider les autochtones à devenir, comme il se doit, des partenaires à part entière dans la société canadienne.

En ma qualité de membre du Comité des affaires autochtones et du dévéloppement du Grand Nord, j'aimerais parler du travail qu'a entrepris le gouvernement en collaboration avec des localités et des organisations autochtones. Dans notre livre rouge, nous avons consacré un chapitre entier aux questions autochtones. Nous avons fait de la reconnaissance du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale une priorité importante de notre programme.

(1815)

En janvier 1994, le ministre a lancé un processus de consultation nationale sur la meilleure façon d'appliquer ce droit inhérent. Ces consultations s'achèvent et des moments passionnants s'annoncent.

Il y a trois questions que nous devons absolument régler pour atteindre nos objectifs, c'est-à-dire: le règlement des revendications territoriales, la modification de la Loi sur les Indiens et le démantèlement du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Tout d'abord, nous devons tenter de donner de la certitude aux droits et aux titres des autochtones, ainsi qu'aux possibilités de développement économique de leurs collectivités. Pour y parvenir, nous devons notamment trouver des solutions aux revendications territoriales qui ne sont pas encore réglées.

Ces revendications se divisent en deux catégories, selon qu'elles sont particulières ou globales. Les revendications particulières ont pour origine le non-respect des traités et d'autres obligations légales, dont celles qui découlent de la Loi sur les Indiens. Depuis notre arrivée au pouvoir, notre gouvernement a réglé plus de 50 revendications de cette nature partout au Canada. Par contre, les revendications globales reposent sur le principe voulant que les droits et titres qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement, aux termes de traités ou d'autres moyens juridiques, soient maintenus. Ces accords définissent les façons dont les peuples


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autochtones font respecter leurs droits concernant des terres et des ressources naturelles.

À l'heure actuelle, le gouvernement du Canada, les provinces, les territoires et les premières nations se penchent sur onze revendications globales. Les négociations portent notamment sur le développement économique, qui revêt une importance primordiale. Dans ces négociations, nous faisons des progrès pour aider les peuples autochtones à tracer la voie vers l'autosuffisance, qui est une composante essentielle du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

En même temps, nous sommes confrontés à de véritables obstacles. Je fais directement allusion à la Loi sur les Indiens. Cette loi autorise le gouvernement fédéral à réglementer sévèrement les premières nations et leur mode de vie. Elle porte notamment sur les terres de réserve, les élections, l'éducation et les centres de loisirs. La loi interdit aux premières nations de gérer leurs propres affaires.

C'est pourquoi le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a récemment annoncé l'intention du gouvernement de modifier la Loi sur les Indiens, si les premières nations le désiraient. Bien sûr, cette mesure serait provisoire. Le but que poursuivent le gouvernement fédéral et les peuples autochtones, c'est d'arriver réellement à l'autonomie gouvernementale. La Loi sur les Indiens deviendra alors inutile.

Il est clair que tout cela signifie qu'il faut redéfinir le rôle du ministère des Affaires indiennes et du Nord. Ainsi, dans la pratique, les responsabilités du ministère seront graduellement confiées aux premières nations et le ministère deviendra inutile.

Le 7 décembre 1994 a marqué une date historique pour les premières nations du Manitoba. Le gouvernement et le grand chef Phil Fontaine, de l'Association des chefs du Manitoba, ont signé le premier accord de démantèlement du ministère des Affaires indiennes et du Nord. Cet accord donnera aux peuples autochtones de cette province l'entière responsabilité de l'administration des programmes.

En outre, il s'agit d'un accord qui prépare le terrain en vue de véritables changements tant pour le gouvernement fédéral que pour les premières nations. Le démantèlement du ministère retirera au gouvernement fédéral son rôle, qui remonte à 1876, dans les décisions concernant la vie quotidienne des peuples autochtones. Cela contribuera beaucoup à résoudre les difficultés et à rendre aux Premières Nations dignité, honneur, indépendance et autonomie.

Il importe cependant de nous rappeler que ce démantèlement ne se fera pas du jour au lendemain. Nous avons accepté dans le livre rouge de démanteler le ministère à un rythme déterminé par les autochtones. C'est important, étant donné que nous avons pour objectif de créer de véritables partenariats avec lesautochtones.

Cela ne peut pas se faire en imposant simplement, unilatéralement, notre volonté et notre conception des changements qui devraient être effectués et comment ils devraient s'effectuer. Nous attendons à cet égard l'initiative des dirigeants et des collectivités autochtones qui ont leurs propres idées, échéanciers et objectifs. Le démantèlement se fera en fonction d'ententes négociées, de plans d'action raisonnables et d'échéanciers réalistes, qui seront tous établis conjointement par les gouvernements fédéral et autochtones.

Le plus important de tout, c'est que la dissolution du ministère aidera les premières nations à exercer leur droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. En fin de compte, cela entraînera la fermeture graduelle du bureau régional du ministère auManitoba.

Notre gouvernement veut revoir notre relation et en faire une relation de gouvernement à gouvernement. Nous pouvons modifier notre manière d'exercer nos responsabilités. Nous pouvons essayer de corriger nos erreurs passées. Nous mettons en place un processus qui permettra aux autochtones de prendre leur vie en main.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je dois aviser la Chambre que, conformément à l'article 44 du Règlement, la réplique de l'auteur de la motion-en l'occurrence, le député de Kamloops-aura pour effet de clore le débat.

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Madame la Présidente, je serai très bref.

C'est une des occasions où la Chambre travaille incroyablement bien sur une question à laquelle tous les partis reconnaissent du mérite. Il convient de signaler que tous les députés qui ont pris la parole à cet égard l'ont fait, en quelque sorte, à titre de co-motionnaires. L'aspect positif des initiatives parlementaires, c'est qu'elles ne sont pas une activité de parti, mais simplement une activité réservée aux simples députés et ainsi maintenue.

À la lumière de ce que je viens de dire ainsi que de certaines des observations de mon collègue au sujet de la solidarité et de la question de savoir si c'est approprié ou nécessaire, j'ai tendance à dire, à bien y penser, que la mention de la solidarité n'est pas absolument nécessaire. C'est une chose qui pourrait être examinée rapidement par le comité.

À titre de clarification, je voudrais savoir s'il y a consentement unanime à ce que l'on renvoie cette question au comité pour qu'il l'examine.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime?

Une voix: Non.

M. Riis: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je veux qu'il soit clairement indiqué dans le compte rendu que c'est un député libéral. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Ce n'est pas un rappel au Règlement. Cela relève du débat.

M. Rideout: Madame la Présidente, demande-t-on simplement que le projet de loi soit renvoyé au comité ou demande-t-on un vote?

La présidente suppléante (Mme Maheu): La motion voulait que le projet de loi soit adopté à l'étape de la deuxième lecture et renvoyé au comité. Nous n'avons pas le consentement unanime.

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Comme aucun autre député ne demande la parole sur cette motion qui n'est pas désignée comme une initiative faisant l'objet d'un vote, l'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée. Conformément au paragraphe 96(1) du Règlement, l'article est rayé du Feuilleton.

M. Solomon: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je voudrais faire un commentaire sur les derniers mots de la Présidente. Je ne conteste pas la présidence, je veux que ce soit clair, qu'on me comprenne bien. Je veux qu'il soit consigné au compte rendu que je me suis levé, à ma place, pour participer à ce débat avant que la période consacrée à cette question ne prenne fin. La Présidente était occupée à autre chose, et je voulais participer. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Permettez-moi de rappeler au député que, si le député de Kamloops s'est levé, c'est que le débat était terminé.

L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée. Conformément au paragraphe 96(1) duRèglement, l'article est rayé du Feuilleton.

SUSPENSION DE LA SÉANCE

La présidente suppléante (Mme Maheu): Nous suspendons la séance jusqu'à 18 h 30.

(La séance est suspendue à 18 h 24.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 18 h 28.


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MOTION D'AJOURNEMENT

[Français]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office, en conformité de l'article 38 du Règlement.

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Madame la Présidente, il y a de cela quelques semaines, je questionnais le ministre du Commerce international à propos du conflit commercial entre les États-Unis et le Canada sur les produits contingentés tels la volaille, les oeufs et les produits laitiers. Le ministre du Commerce international n'a pu garantir aux producteurs agricoles que la position canadienne allait prévaloir sur celle des Américains. La position canadienne, selon laquelle les dispositions du GATT ont préséance sur celles de l'ALENA en matière de produits agricoles contingentés, est pourtant solide et sans faille.

Les Américains n'ayant pas contesté la grille tarifaire déposée par le Canada dans le cadre des accords de l'Uruguay Round, particulièrement dans le cas du yogourt et de la crème glacée, il leur serait maintenant très difficile de réclamer des concessions tarifaires de la part du Canada pour ces productions.

Cela dit, la restructuration rendue nécessaire pour le changement d'un système de quotas à celui d'un système de tarifs affectera plus particulièrement les producteurs laitiers, dont près de la moitié viennent du Québec.

En effet, les producteurs laitiers devront, pendant cette période, subir le désengagement de l'aide fédérale et ce, dans plusieurs domaines. Évidemment, ce désengagement de l'aide fédérale aura des répercussions importantes auprès de ceux-ci, car il affectera leur capacité concurrentielle internationale à court, moyen et long terme.

Tout d'abord à court terme, le gouvernement fédéral, en décidant de couper ses subventions aux producteurs de lait industriel de 30 p. 100 au cours des deux prochaines années, créera des pertes importantes de revenu pour ceux-ci.

À ce titre, la Fédération des producteurs de lait du Québec estime que ces coupures entraîneront des pertes de revenu de l'ordre de 15 p. 100 pour les producteurs de lait industriel. Cela se traduit par une perte de revenu de 3 775 $ pour une ferme laitière de taille moyenne de 25 000 hectolitres de lait.

Ces pertes amèneront un manque à gagner de près de 34 millions de dollars pour l'industrie québécoise et elles se feront sentir lorsque viendra le temps, comme c'est le cas actuellement, de réinvestir dans des infrastructures modernes nécessaires pour affronter la concurrence américaine.

En passant, mentionnons que contrairement aux agriculteurs de l'Ouest, les producteurs laitiers ne pourront bénéficier de mesures compensatrices pour la diminution de leurs subventions fédérales, ce qui démontre, encore une fois, si tant est qu'il fallait le démontrer, la politique de deux poids deux mesures du gouvernement fédéral.

Mais encore, le désengagement du gouvernement fédéral envers l'industrie laitière aura également des répercussions à moyen et long terme, car plusieurs programmes dits verts selon le GATT seront abolis. Ces programmes touchent l'évaluation génétique, le contrôle laitier, l'amélioration des animaux laitiers et la recherche.

La diminution ou l'abolition du financement de ces différents programmes aura des répercussions très graves car elle remettra en question non seulement des programmes déjà en place, mais elle affectera également la capacité du Québec et du Canada de rester à l'avant-garde dans le champ de la production laitière dans le monde.

Ainsi, pendant que nous coupons dans ce qui nous permettrait de nous maintenir à la fine pointe du développement dans ce secteur névralgique de notre économie, les Américains, eux, envisagent d'investir plus de 600 millions de dollars, au cours des cinq prochaines années, dans les programmes agricoles dits verts selon les termes des accords de l'Uruguay Round.

Quelle est la logique du gouvernement fédéral quand il coupe dans les programmes de recherche et développement au niveau de la production laitière lorsque les études démontrent que pour chaque dollar investi dans l'amélioration génétique ou le contrôle laitier, par exemple, les contribuables québécois et canadiens récoltent des bénéfices de l'ordre de sept dollars?

Non, les producteurs laitiers s'opposent énergiquement à toute réduction du financement par le gouvernement des programmes dits verts parce qu'ils sont jugés prioritaires par l'industrie. Évidemment, il n'est pas question pour moi, ou pour le Bloc québécois, de cautionner de tels gestes de la part du gouvernement et c'est pourquoi j'appuie avec force les producteurs lai-


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tiers pour que cesse le démantèlement de leur industrie par le gouvernement fédéral.

Non seulement ce dernier est-il en train de mettre en péril l'avenir de nos producteurs laitiers, mais on dirait que son incompétence fait en sorte qu'il enlève à l'industrie laitière le moyen de se développer dans un contexte économique mondial de plus en plus concurrentiel.

[Traduction]

M. Lyle Vanclief (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je réagis aux observations formulées par l'opposition ce soir. Je dois toutefois signaler au député que ses observations n'ont absolument rien à voir avec la question qu'il a posée à la Chambre. Voici ce que je répondrais, car j'estime que c'est ce que ses électeurs souhaitent qu'on leur réponde.

Les États-Unis ont réclamé, conformément au chapitre 20 de l'ALENA, la tenue d'une série de consultations sur l'application aux produits laitiers et avicoles américains des équivalents tarifaires canadiens fixés dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce. La première séance de consultation a eu lieu le 1er mars, à Ottawa.

Nous avons toujours soutenu que l'ALE et l'ALENA reconnaissent clairement que le Canada conserve tous les droits que lui a conférés le GATT à l'égard des produits régis par la gestion de l'offre, dont le droit d'appliquer les dispositions tarifaires de l'Organisation mondiale du commerce aux produits agricoles en provenance des États-unis. À notre avis, l'approche canadienne de l'application des droits de douane aux produits laitiers et avicoles est tout à fait conforme aux exigences de l'ALENA et de l'OMC.

En ce qui concerne la crème glacée et le yogourt, à la lumière du rapport de 1989 du groupe du GATT sur la crème glacée et le yogourt, nous avons fait savoir que le Canada mettrait en oeuvre les conclusions du groupe dans le contexte de l'Uruguay Round. Lors de l'Uruguay Round, le Canada et toutes les autres parties à l'OMC ont convenu d'appliquer des droits de douane pour limiter les importations. Selon nous, l'application des droits de douane pour contingenter la crème glacée et le yogourt reflète le rapport de 1989 du groupe du GATT.

(1835)

Je peux assurer à la Chambre, à tous les producteurs laitiers et aux députés de l'opposition que nous continuerons de défendre vigoureusement l'approche du Canada qui préconise l'imposition de droits de douane sur tous les produits soumis à la gestion de l'offre.

LA SANTÉ

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Madame la Présidente, ma question s'adresse à la secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé.

Le 27 mars dernier, Statistique Canada a publié son étude de 39 actes médicaux pratiqués dans les hôpitaux du Canada. Un de ces actes qui a fait l'objet d'une étude est l'hystérectomie. Le nombre des hystérectomies pratiquées chez les femmes de la circonscription de Cumberland-Colchester est très élevé. Il est alarmant. En fait, il est le plus élevé au Canada. Il y en a près de 1 137 par 100 000 femmes, alors que la moyenne nationale est d'environ 437.

Dans la circonscription voisine de la mienne, Annapolis Valley, le nombre des hystérectomies s'élève à 137 par 100 000. C'est un écart considérable. Les hystérectomies sont donc dix fois plus nombreuses dans la circonscription de Cumberland que dans celle d'Annapolis, et ces deux circonscriptions sont situées dans la même province.

Il s'agit là d'un problème de santé. Nous savons que beaucoup de problèmes de santé chez la femme justifient l'hystérectomie. Le plus important est le cancer des ovaires, du col de l'utérus ou de l'utérus. Un autre problème est lié au trophoblaste: fibromes, endométriose, contraception chez les femmes pour lesquelles une grossesse risque d'entraîner la mort. Et il en existe d'autres, comme le mongolisme, qui est caractérisé par une arriération mentale de l'enfant.

L'hystérectomie est un acte médical très normal, mais il représente une intrusion dans la santé des femmes. Cela me préoccupe au plus haut point.

Nous avons vérifié l'exactitude de ces chiffres. Ils provenaient du ministère de la Santé, à Halifax, en Nouvelle-Écosse, et ce sont les hôpitaux qui ont pratiqué ces hystérectomies. Les chiffres sont valables.

Voici la question que je voudrais poser à la secrétaire parlementaire: Allons-nous examiner cette anomalie phénoménale qui représente une grande intrusion dans la santé des femmes? Que ce phénomène soit attribuable à des médecins trop zélés qui cherchent à pratiquer des interventions chirurgicales lucratives, ou encore, à des problèmes de santé fondamentaux chez les femmes de la circonscription de Cumberland, je demanderais à la secrétaire parlementaire de se pencher sur cette grave anomalie.

Mme Hedy Fry (secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, la députée pose une question extrêmement importante et tout à fait pertinente. C'est une question qui nous intéresse beaucoup au ministère de la Santé, car elle touche la santé des Canadiens et des Canadiennes.

Avant d'en dire davantage sur ce sujet, je tiens à signaler à la députée que la question du nombre de services offerts relève surtout des gouvernements provinciaux et de la profession médicale. Ainsi, je ne peux formuler aucune observation là-dessus. Par contre, je peux dire à ma collègue que des raisons tout à fait légitimes peuvent parfois expliquer des écarts d'une région à une autre en ce qui concerne les interventions chirurgicales qu'on pratique.

Quoi qu'il en soit, le gouvernement fédéral accorde beaucoup d'intérêt aux services de soins de santé en général, de même qu'au type et à la qualité des services offerts partout au Canada. Nous essayons de voir, de concert avec les provinces et les responsables de la prestation des soins, comment améliorer la qualité et la pertinence des soins.

Par exemple, la ministre de la Santé vient de donner de l'argent à l'Association médicale canadienne pour qu'elle élabore des directives canadiennes sur la pratique clinique. Nous devons examiner la pertinence des soins et établir des directives et des

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priorités claires concernant les soins. Nous serons ainsi en mesure de prodiguer, au moment opportun, les bons soins aux bonnes personnes. Nous voulons tenir un dialogue sur ce genre de questions, faire progresser l'évaluation des soins, etc.

En ce qui concerne la santé des femmes, ce sujet nous préoccupe beaucoup et la ministre a promis d'examiner les questions qui touchent la santé des femmes. Il n'y a pas encore suffisamment de recherches et d'études pour nous permettre de déterminer quand, comment et pourquoi faire des hystérectomies. À l'heure actuelle, nous nous en remettons à des données désuètes. Il faut créer, à l'intention des femmes, des centres d'excellence qui effectueront les recherches et les études nécessaires et qui évalueront les soins dispensés aux Canadiennes.

Je suis heureuse que la députée ait soulevé cette question, parce que nous estimons que des mesures doivent être prises à cet égard. Nous avons déjà amorcé le dialogue nécessaire avec les intervenants et les provinces afin que des soins appropriés soient dispensés dans notre pays.

(1840)

[Français]

LE PROGRAMME STRATÉGIE JEUNESSE

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Madame la Présidente, le 30 mars dernier, je posais une question au ministre du Développement des ressources humaines au sujet de l'efficacité de son programme Stratégie jeunesse. Évidemment, comme il n'a pas répondu à ma satisfaction et que dans sa réponse, il affirmait le contraire de ce qu'une évaluation de son propre ministère faisait de son propre programme, je voudrais revenir sur cette question. Je m'étais servi de citations que j'aimerais rappeler, et c'était à la page 246 du document budgétaire du ministère du Développement des ressources humaines.

La première était: «Les évaluations, par rapport au programme, n'ont pas révélé d'améliorations sensibles du point de vue du marché du travail par rapport à ce qu'on aurait pu s'attendre sans Stratégie jeunesse.» Un peu plus loin: «La Stratégie jeunesse Canada-Nouveau-Brunswick a accentué la dépendance des participants à l'aide sociale.» Un peu plus loin encore: «La Stratégie n'a pas eu d'incidences manifestes sur la dépendance à l'aide sociale à Terre-Neuve. Les participants, comme les non-participants, étaient plus dépendants de l'aide sociale après le programme.» Or, il y a là des sommes considérables qui sont dépensées.

Par exemple, l'entente Canada-Nouveau-Brunswick stipule qu'il y aura 120 millions de dollars de dépensés. L'entente Stratégie jeunesse à Terre-Neuve fera dépenser 56,6 millions de dollars. J'aimerais, si le temps me le permet, parler de statistiques provenant du Québec pour démontrer que ce n'est pas seulement au Nouveau-Brunswick ni à Terre-Neuve que le taux de dépendance à l'aide sociale chez les jeunes s'accentue. Je vais donner des statistiques au Québec.

En 1991, il y avait 116 000 assistés sociaux au Québec de moins de 30 ans. En 1995, le nombre est passé à 140 000 jeunes qui dépendent de l'aide sociale, dont 74 000 qui ont moins de 25 ans, si on veut correspondre aux chiffres de Statistique Canada tels qu'utilisés par le ministère du Développement des ressources humaines. Moi, je comprends mal et j'espère que le secrétaire parlementaire va être plus éloquent que son ministre, qu'un propre document du ministère affirme que, finalement, l'évaluation interne de ce programme montre qu'il y a une augmentation du nombre de jeunes à l'assistance sociale, et le ministre dit que c'est le meilleur programme au monde. Alors, je trouvais cela assez invraisemblable.

Il y a un autre élément, c'est qu'on sait qu'il y a eu des coupures à l'assurance-chômage de 2,5 milliards de dollars, l'an dernier. Le projet de loi C-17 a augmenté le délai pour obtenir de l'assurance-chômage, a diminué les prestations, a diminué aussi la durée des prestations. En conséquence, il y a eu une augmentation importante au Québec, et aussi ailleurs, du nombre de personnes qui vont de l'assurance-chômage à l'aide sociale. Les principales victimes de cette situation sont justement les jeunes, parce que les jeunes détiennent 40 p. 100 des emplois précaires au Canada et ce sont eux qui, en premier, sont victimes du chômage, et ce sont eux qui sont victimes des coupures à l'assurance-chômage. La seule alternative qui leur reste est l'aide sociale. J'aimerais que le secrétaire parlementaire démontre avec plus d'éloquence que le fait son ministre quant à l'évaluation de ce programme.

[Traduction]

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais tout d'abord remercier le député pour l'intérêt sincère qu'il porte aux jeunes. Je sais que le député se préoccupe véritablement du sort qui leur est réservé.

Revenons à la question originale que le député a posée au sujet des programmes à Terre-Neuve et au Nouveau-Brunswick, il a dit: «Les résultats sont dévastateurs.» Voilà pourquoi le ministre du Développement des ressources humaines a décidé de mettre fin à cette initiative inefficace et de concentrer nos efforts sur les programmes qui sont conçus à l'intention des jeunes et qui fonctionnent bien.

Il est également important de rappeler au député que cette initiative remonte à l'époque des conservateurs. Notre approche à l'égard des jeunes a changé au point où, si nous regardons les postes budgétaires liés à l'emploi des jeunes, nous constatons une augmentation par rapport à l'an dernier même si nous devons tenir compte de notre situation financière.

Le programme de stages pour les jeunes est conçu exclusivement pour aider les jeunes à faire la transition entre l'école et le travail. Plus de 2 000 jeunes Canadiens auront profité des programmes que nous avons lancés dans différents secteurs comme l'environnement, la logistique, la réparation d'automobiles, l'électronique, l'électricité, la fabrication, le tourisme, tous des

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secteurs où les jeunes pourront trouver des emplois à l'avenir. Environ 80 projets ont également été lancés dans le programme axé sur la collectivité et l'école et ont accueilli plus de 4 000 participants.

Le financement des programmes de stage pour les jeunes est passé de 25 millions de dollars en 1994-1995 à 118 millions pour 1995-1996. Cela reflète bien l'excellence des réalisations du gouvernement concernant la jeunesse.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément au paragraphe 38(5) du Règlement, la motion d'ajournement est adoptée d'office.

La Chambre s'ajourne donc à 14 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 46.)