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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 6 avril 1995

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS FIGURANT AU HANSARD

LES AFFAIRES INDIENNES

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

LA LOI SUR LA MONNAIE ROYALE CANADIENNE

    Projet de loi C-82. Adoption des motions de présentation et de première lecture 11571

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Proposition et adoption de la motion d'adoption 11571

PÉTITION

LE SUICIDE ASSISTÉ

LA PEINE CAPITALE

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

LE DÉFICIT

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

LA CONTRÔLE DES ARMES À FEU

L'ORIENTATION SEXUELLE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11572

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11572

LES SERVICES DE GARDE D'ENFANTS

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11572

LA JUSTICE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 11572

LES DÉPENSES PUBLIQUES

    M. Mills (Red Deer) 11573

LES JEUNES CONTREVENANTS

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

LA JUSTICE

QUESTIONS AU FEUILLETON

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔT

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI D'EXÉCUTION DU BUDGET 1995

    Projet de loi C-76. Reprise de l'étude de la motion de deuxième lecture 11574
    M. Speaker (Lethbridge) 11579
    M. Breitkreuz (Yellowhead) 11581
    Mme Dalphond-Guiral 11593
    Report du vote sur la motion 11596

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

    Projet de loi C-69. Reprise de l'étude de la motion en troisième lecture 11596
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 11596

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE PRIX DES JEUNES TALENTS

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 11605

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA DETTE

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

L'OPÉRATION HOME FRONT

    Mme Stewart (Brant) 11606

MME MARY KENNEDY

LA NATION CRIE

L'INDUSTRIE SUCRIÈRE

LE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

LE GROUPE CITOYENS CONTRE L'EXPLOITATION DES ENFANTS

LE PRIX DE L'ESSENCE

LE COMPLEXE DE HARBOURFRONT

EXPO 2005

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 11608

LE PROJET DE LOI C-68

LE CENTRE D'INFORMATION DE LA POLICE CANADIENNE

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

QUESTIONS ORALES

LA CRÉATION D'EMPLOIS

    M. Gauthier (Roberval) 11609
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11609
    M. Gauthier (Roberval) 11609
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11609
    M. Gauthier (Roberval) 11609
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11610
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11610
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11610

LA RADIODIFFUSION DIRECTE À DOMICILE PAR SATELLITE

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11610
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11611
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 11611

LES CONTRATS GOUVERNEMENTAUX

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 11612
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 11613

LES AFFAIRES INDIENNES

LA SITUATION DE LA FEMME

    Mme Gagnon (Québec) 11613
    Mme Gagnon (Québec) 11614

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

LE BURUNDI

LA JUSTICE

LE DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 11616

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

    M. Harper (Calgary-Ouest) 11617

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    M. Gauthier (Roberval) 11617

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

AFFAIRES COURANTES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

ÉDUCATION DES AUTOCHTONES

    Adoption de la motion 11619

ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

    Adoption de la motion 11619

PÊCHES ET OCÉANS

    Adoption de la motion 11619

EXAMEN DE LA RÉGLEMENTATION

    Adoption de la motion 11619

PÉTITIONS

LES BOÎTES VOCALES

LE RÉGIMENT AÉROPORTÉ CANADIEN

MAHESH INDER SINGH

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

    Projet de loi C-69. Reprise de l'étude de la motion 11620
    Retrait de la motion 11633
    M. Tremblay (Rosemont) 11634
    M. Tremblay (Rosemont) 11635
    M. Harper (Calgary-Ouest) 11635

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

    M. White (North Vancouver) 11636

MOTION D'AJOURNEMENT

LA TURQUIE

L'IMMIGRATION


11571


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 6 avril 1995


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS FIGURANT AU HANSARD

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur une observation que j'ai faite dans le hansard hier. Je n'avais pas le bon chiffre et je tiens à corriger l'erreur qui figure à la page 11553.

J'ai dit que «Pour chaque dollar que nous allons économiser, nous allons dépenser neuf milliards de dollars en paiements d'intérêts». Je voulais dire ceci: «Pour les neuf milliards de dollars que nous avons économisés, nous allons dépenser environ neuf milliards de dollars en intérêts». À chaque dollar économisé correspondra un dollar de plus pour les paiements d'intérêts sur le déficit.

LES AFFAIRES INDIENNES

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, hier, à la période des questions, j'ai mentionné qu'une accusation avait été portée dans l'affaire Stoney. Je m'appuyais alors sur une information que j'avais reçue. Or, l'accusation n'a pas encore été portée. Ce n'est pas à moi de dire si la GRC portera une accusation et, le cas échéant, à quel moment. Il vaudrait mieux que ce soit la GRC elle-même qui communique cette information.

_____________________________________________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 44 pétitions.

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 72e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre concernant la composition des comités permanents.

[Français]

Si la Chambre donne son consentement, j'ai l'intention de proposer l'adoption du 72e rapport plus tard aujourd'hui.

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LA MONNAIE ROYALE CANADIENNE

L'hon. Herb Gray (au nom du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-82, Loi modifiant la Loi sur la Monnaie royale canadienne.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre y consent, je propose que le 72e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté à la Chambre plus tôt aujourd'hui, soit agréé.

(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITION

L'AIDE AU SUICIDE

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter deux pétitions signées par des habitants de ma circonscription, Comox-Alberni.

La première pétition, qui est signée par 607 personnes, porte sur l'article 241 du Code criminel. Aux termes de l'article 241, le fait de conseiller le suicide ou d'y aider constitue un acte criminel. Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas abroger l'article 241 du Code criminel, de n'y apporter aucune


11572

modification et de faire respecter la décision que la Cour suprême du Canada a rendue le 30 septembre 1993 et qui interdit l'euthanasie ou le suicide assisté.

LA PEINE CAPITALE

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, les 303 signataires de la deuxième pétition demandent au Parlement de tenir un référendum national sur la peine capitale dont les résultats seront exécutoires.

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui à la Chambre une pétition signée par un certain nombre d'habitants de la circonscription de Végréville. Les vingt-six pétitionnaires demandent au Parlement de continuer d'investir la Commission canadienne du blé de pouvoirs monopolistiques dans la commercialisation du blé et de l'orge destinés à l'exportation.

LE DÉFICIT

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville, Lib. ind.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je présente une pétition signée par des habitants de la région de Markham-Whitchurch-Stouffville. Ces pétitionnaires demandent au Parlement de réduire le déficit en supprimant le gaspillage et de comprimer d'au moins 5 p. 100 les dépenses générales de tous les ministères fédéraux.

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai une pétition signée par plus de 400 électeurs d'une région très rurale et très éloignée, située dans l'ouest de la circonscription de Miramichi, qui estiment que la Loi sur l'assurance-chômage exerce une discrimination contre eux.

(1015)

Les pétitionnaires demandent au Parlement de réformer les limites de région, qui nuisent aux localités éloignées et isolées. Ils estiment que la commission ne les traite pas équitablement.

LA CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, je prends également la parole, conformément à l'article 36 du Règlement, pour présenter un certain nombre de pétitions signées par des électeurs de ma circonscription qui ont des préoccupations au sujet de la loi actuelle sur les armes à feu.

Ces électeurs demandent au Parlement d'approuver des lois qui puniront sévèrement les auteurs de crimes avec violence, ce que le ministre a fait, bien sûr, et d'approuver également une mesure législative visant à abroger et à modifier les dispositions actuelles en matière de contrôle des armes à feu qui n'ont pas amélioré la sécurité publique ou qui ne se sont pas révélées économiques.

L'ORIENTATION SEXUELLE

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je veux également présenter des pétitions aujourd'hui. La première vient d'électeurs de Beaver River, Redwater, Thorhild, Radway et Waskatenau, qui demandent au Parlement de ne pas ajouter l'expression «orientation sexuelle» dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Ils disent que, en ajoutant cette phrase dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, on accorderait à certains groupes un statut, des droits et des privilèges spéciaux en se fondant uniquement sur leur comportement sexuel. L'ajout d'une telle disposition violerait les droits historiques des Canadiens, par exemple la liberté de religion, de pensée, d'expression et d'association.

Les signataires prient humblement le Parlement de s'opposer à toute modification qui ajouterait l'expression «orientation sexuelle» à la Loi canadienne sur les droits de la personne ou à la Charte canadienne des droits et libertés.

Je suis fière de présenter cette pétition, en ma qualité de députée de Beaver River.

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter quatre pétitions venant de ma circonscription.

La première demande au gouvernement du Canada de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite. En refusant de définir cette expression, on laisse la porte ouverte à l'interprétation des tribunaux, ce qui risque de créer un dangereux précédent. Le Parlement doit assurer aux Canadiens qu'il est impossible de faire une fausse interprétation de la loi.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte sur le projet de loi C-68 qui traite du contrôle des armes à feu. Les signataires sont d'avis que toutes les dispositions du Code criminel se rapportant au contrôle des armes à feu doivent cibler les criminels qui menacent la sécurité de la population et non les propriétaires d'armes à feu responsables et respectueux des lois.

LES SERVICES DE GARDE D'ENFANTS

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la troisième pétition concerne les services de garde d'enfants. Les pétitionnaires sont d'avis que les politiques fédérales actuelles concernant les services de garde d'enfants empiètent sur les droits des parents et sont discriminatoires à l'égard de nombreuses familles. Ils croient que les parents devraient pouvoir choisir eux-mêmes le type de services de garde qui conviennent le mieux à leurs enfants.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de s'opposer à toute loi qui aurait pour effet d'accroître les frais de garde d'enfants.

LA JUSTICE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la dernière pétition a trait à la consommation de

11573

spiritueux et à la violence. Les pétitionnaires sont choqués de la récente décision de la Cour suprême et croient que chacun doit être tenu pleinement responsable de ses actes, même s'il a agi sous l'effet de l'alcool.

Je donne mon appui à ces pétitions.

LES DÉPENSES PUBLIQUES

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition signée par plus de 800 électeurs de ma circonscription, Red Deer. Les signataires estiment que leur fardeau fiscal est déjà trop lourd, à cause des dépenses du gouvernement, et ils demandent humblement au Parlement de réduire les dépenses du gouvernement, au lieu d'augmenter les impôts, puis d'appliquer une loi de protection des contribuables afin de limiter les dépenses fédérales.

LES JEUNES CONTREVENANTS

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, je ne veux pas prendre trop de temps, puisque nous disposons de quinze minutes. Je désire présenter quelques autres pétitions. L'une d'elles, signée par de nombreux habitants de St. Paul, Saddle Lake, St. Vincent et d'autres localités de la circonscription de Beaver River, concerne la Loi sur les jeunes contrevenants. Les signataires souhaitent que la loi soit suffisamment rigoureuse pour enrayer la criminalité juvénile et garantir vraiment que justice soit faite.

Dans sa forme actuelle, la Loi sur les jeunes contrevenants ne permet pas d'atteindre ces objectifs. Les pétitionnaires demandent au Parlement de s'assurer que, outre le Code criminel, nous ayons une Loi sur les jeunes contrevenants qui porte vraiment.

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai aussi une pétition portant sur la programmation de la Société Radio-Canada. Les pétitionnaires s'inquiètent de ce que la société passe des émissions comme Kids in the Hall qui ne s'inscrivent pas dans son mandat. Les signataires se préoccupent de cette émission et d'autres. Ils affirment que ce genre d'incidents dans la programmation devient de plus en plus fréquent.

Ils demandent au Parlement de promulguer une loi établissant des normes très précises concernant la conduite et un contenu acceptable pour les émissions de télévision de la Société Radio-Canada.

LA JUSTICE

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, conformément à l'article 36 du Règlement, une pétition signée par des gens qui considèrent qu'on accorde une libération conditionnelle prématurément à de nombreux délinquants violents et délinquants sexuels et qu'on les libère sans les avoir traités auparavant pour faciliter leur réinsertion sociale. Les pétitionnaires sont persuadés qu'on devrait garder en prison les criminels dangereux et les délinquants sexuels, tant qu'ils n'ont pas subi des traitements et ne peuvent prouver sans équivoque qu'ils sont tout à fait prêts à réintégrer la société. Ils demandent au gouvernement de prendre toutes les mesures voulues à cet égard.

(1020)

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous répondons aujourd'hui à la question no 102.

[Texte]

Question no 102-M. Breitkreuz:

Pour chaque circonscription électorale, à combien s'est élevée au total la contribution financière du Bureau fédéral du développement régional (Québec) entre le 25 octobre 1993 et aujourd'hui?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Les contributions autorisées sous la programmation du Bureau fédéral de développement régional (Québec) pour la période du 25 octobre 1993 au 1er novembre 1994 inclusivement sont énumérées ci-dessous.

Veuillez noter que ce rapport n'inclut aucune contribution faite sous le Programme fédéral-provincial-municipal sur les infrastructures ainsi que les ententes industrielle et touristique relevant du portefeuille d'autres ministères fédéraux.

Circonscription
(Carte électorale de 1988)

Contribution
autorisée

Abitibi

4 055 188$

Ahuntsic

3 167 000$

Anjou-Rivière-des-Prairies

3 660 737$

Argenteuil-Papineau

977 632$

Beauce

721 055$

Beauharnois-Salaberry

99 375$

Bellechasse

906 120$

Berthier-Montcalm

2 484 270$

Blainville-Deux-Montagnes

950 401$

Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine

1 138 175$

Bourassa

22 000$

Brome-Missisquoi

257 300$

Chambly

436 250$

Champlain

1 974 272$

Gatineau-La Lièvre

530 225$

Charlesbourg

247 705$

Charlevoix

2 239 092$

Châteauguay

447 940$

Chicoutimi

5 408 048$

Drummond

2 611 213$

Laval-Est

60 000$

Frontenac

864 855$

Gaspé

1 162 520$

Hochelaga-Maisonneuve

5 866 235$

Hull-Aylmer

285 775$

Joliette

87 500$

Jonquière

128 185$

Kamouraska-Rivière-du-Loup

1 956 121$

Lachine-Lac-Saint-Louis

1 232 040$

Lac-Saint-Jean

165 792$

Québec

136 100$

La Prairie

174 520$

Lasalle-Émard

1 126 600$

Laurentides

862 940$

Laurier-Sainte-Marie

2 957 600$

Laval-Ouest

60 150$

Laval-Centre

1 263 712$





Lévis

152 350$

Longueuil

486 980$

Lotbinière

910 360$

Louis-Hébert

468 180$

Manicouagan

699 062$

Matapédia-Matane

627 220$

Mégantic-Compton-Stanstead

516 930$

Mercier

1 604 500$

Beauport-Montmorency-Orléans

1 656 970$

Mont-Royal

481 305$

Notre-Dame-de-Grâce

901 150$

Outremont

4 436 412$

Papineau-Saint-Michel

25 000$

Pierrefonds-Dollard

19 500$

Pontiac-Gatineau-Labelle

3 463 140$

Portneuf

1 001 079$

Québec-Est

471 879$

Richelieu

1 916 210$

Richmond-Wolfe

1 203 610$

Rimouski-Témiscouata

385 675$

Roberval

2 493 361$

Rosemont

55 999$

Saint-Denis

2 028 800$

Saint-Henri-Westmount

6 058 916$

Saint-Hubert

128 000$

Saint-Hyacinthe-Bagot

232 850$

Saint-Jean

849 750$

Saint-Laurent-Cartierville

2 963 283$

Saint-Léonard

357 700$

Saint-Maurice

5 995 460$

Shefford

736 325$

Sherbrooke

6 102 590$

Témiscamingue

488 734$

Terrebonne

123 325$

Trois-Rivières

7 095 040$

Vaudreuil

1 136 500$

Verchères

289 904$

Verdun-Saint-Paul

75 186$

109 363 878$

[Traduction]

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔT

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, à la demande générale, si on pouvait transformer en ordres de dépôt de documents les questions nos 83 et 91, dont l'une d'elles est inscrite au nom de la députée de Saint John qui s'élève contre le fait qu'on tarde à lui donner une réponse, je serais heureux de déposer ces documents immédiatement.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

[Texte]

Question no 83-M. Cummins:

En ce qui concerne la remontée hâtive de la Stuart et la remontée hâtive d'été du saumon sockeye, le bureau local de Steveston du ministère des Pêches et des Océans, chacun des autres bureaux locaux situés dans la région du bassin du Fraser, ainsi que la région surveillée par chacun de ces bureaux en 1993 et en 1994, a) quel était l'effectif sur place pendant les fins de semaine et les congés fériés lors de ces remontées, b) l'effectif prévu était-il suffisant pour procéder, sur les lieux de pêche, à des patrouilles complètes de nettoyage avant l'ouverture de la pêche et après la fermeture de la pêche, c) l'effectif prévu était-il suffisant pour effectuer des patrouilles régulières et assurer une surveillance complète de la pêche autochtone pendant l'ouverture de la pêche, d) quelle a été l'importance de la pêche avant l'ouverture et la fermeture des pêcheries, e) en quoi a consisté la surveillance des sites obligatoires de débarquement, ces sites ont-ils fait l'objet d'une surveillance régulière pendant l'ouverture de la pêche et est-il arrivé que des pêcheurs désireux de débarquer du poisson à l'un de ces sites n'aient pu le faire parce qu'aucun d'entre eux n'était disponible, et f) les responsables de la surveillance aux sites de débarquement ont-ils compté le poisson, comme le prévoient les ententes sur la pêche autochtone, g) les prises ont-elles fait l'objet d'un contrôle, est-ce que l'on vérifie vraiment les permis accordés à des fins cérémoniales, h) quelle a été l'importance de la pêche nocturne, ces prises ont-elles fait l'objet d'un contrôle régulier, i) combien de personnes ont été accusées d'infractions à la Loi sur les pêches?
(Le document est déposé.)

Question no 91-Mme Wayne:

Dans chaque circonscription fédérale, quelle a été l'aide financière totale fournie par l'Agence de promotion économique du Canada atlantique du 4 novembre 1993 jusqu'à maintenant?
(Le document est déposé.)

_____________________________________________


INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI D'EXÉCUTION DU BUDGET 1995

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 3 avril, de la motion: Que le projet de loi C-76, Loi portant exécution de certaines dispositions du Budget déposé au Parlement le 27 février 1995, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, ce matin, j'aimerais à propos du budget faire particulièrement référence aux pêches. Les députés seront soulagés de l'apprendre.


11575

Au cours des trois prochains exercices, le budget consacré aux pêches sera réduit substantiellement, en fait de 211 millions de dollars.

Notre parti estime que le gouvernement dépense de façon incontrôlée et qu'il doit sérieusement réduire ses dépenses. Cela dit, notre parti reconnaît que le gouvernement a certaines responsabilités, dont la responsabilité constitutionnelle de gérer les ressources halieutiques d'une façon responsable et raisonnable.

Cela ne veut pas dire toutefois que nous devons réduire le budget du ministère des Pêches et des Océans de façon irréfléchie. Nous devons agir avec précaution et avec prudence afin de veiller à ce que cette précieuse ressource-qui, en fait, pourrait être le moteur de l'économie sur les deux côtes de notre pays-soit protégée.

Pour commencer, j'examinerai une ou deux mesures prévues dans le budget et l'impact que ces mesures vont avoir sur les pêches.

Il est indiqué dans le budget que le gouvernement va négocier avec les provinces le transfert des pouvoirs en matière de gestion des ressources en eau douce et d'autres responsabilités relatives aux eaux intérieures. Autrement dit, l'objectif du gouvernement est de transférer à la province sa responsabilité constitutionnelle à l'égard des ressources halieutiques des eaux intérieures. À priori, cela peut sembler un objectif raisonnable. En réalité, c'est nier un problème très critique, à savoir les difficultés auxquelles font face dans notre pays de nombreuses collectivités qui dépendent des ressources, des collectivités où l'exploitation de ces ressources peut être saisonnière, où la population augmente et où les voies de transport sont très difficiles. C'est un problème auquel nous devons nous attaquer en tant que nation. C'est un problème qui existe non seulement dans les régions les plus reculées du nord des Prairies, mais qui se manifeste plus en plus dans la province de Terre-Neuve, par exemple.

Au printemps dernier, durant les audiences du comité permanent sur les problèmes que connaît Terre-Neuve, nous avons appris que des problèmes sociaux du même type que ceux qu'éprouvent depuis des années les localités du nord des Prairies et des territoires faisaient jour à Terre-Neuve à cause de la disparition des ressources halieutiques si précieuses.

(1025)

Le gouvernement fédéral, en essayant de se dérober à ses responsabilités dans ce domaine, n'aide personne.

Une autre chose que dit le plan budgétaire, c'est: «Les activités de la garde côtière canadienne seront intégrées à celles de Pêches et Océans, afin d'assurer une utilisation plus efficiente des ressources et de l'infrastructure.» Nous sommes tous pour une amélioration de l'efficience. La question qu'il faut se poser, c'est si la fusion des deux flottes en une flotte plus réduite permettra de satisfaire les deux objectifs et quelle sera la priorité de cette flotte? Si la priorité est de maintenir les aides à la navigation là où il y a des activités de pêche, qu'arrivera-t-il à l'application des lois et règlements dans le secteur des pêches? Par contre, si les navires de la garde côtière sont utilisés pour le contrôle de la pêche, qu'arrivera-t-il aux aides à la navigation.

Il faut envisager de combiner ces deux opérations, mais nous devons nous assurer de respecter nos priorités et de nous acquitter de nos responsabilités. En réduisant simplement le nombre de navires et le personnel disponibles, nous n'arriverons pas à faire ce qui doit être fait.

Lors de la dernière saison de pêche au saumon, le gouvernement a gravement fauté. Sur la côte ouest, traditionnellement, c'est la garde côtière qui est chargée de faire appliquer les lois sur les pêches. Ce ne fut pas le cas en 1994.

On m'a signalé un cas où un navire de la garde côtière revenait d'une patrouille le long des côtes de l'île de Vancouver. Il a été appelé au terminal du traversier de Tsawwassen par la B.C. Ferry Corporation en raison d'activités de pêche illégales par des Américains, dans les eaux canadiennes. Lorsque le navire de la garde côtière est arrivé, il n'avait pas l'autorité voulue pour procéder à l'arrestation des bateaux américains. Tout ce qu'il pouvait faire, c'était de leur conseiller de quitter les eaux canadiennes. On a essayé de contacter le ministère des Pêches et Océans, mais personne n'était disponible. À cette heure, les bureaux étaient fermés et le seul contact qui a pu être fait a été avec un agent des pêches qui se trouvait plus en amont du fleuve et qui a répondu: «Je surveille des activités de pêche ici et il n'y a rien d'autre que je puisse faire.»

Nous devons nous assurer que nos priorités sont clairement établies si nous voulons suivre la voie que le gouvernement propose.

On a présenté une proposition visant à rationaliser les ports de pêche commerciaux, et notamment à demander des droits plus élevés. Je n'ai rien contre le principe de faire payer les utilisateurs. Mon parti est tout à fait en faveur de ce principe, mais la dernière chose que nous voulons, c'est imposer aux gens des droits qu'ils seront incapables de payer. Et c'est le cas sur les deux côtes. Ce n'est pas le moment d'augmenter les frais de l'industrie de la pêche, car il est déjà assez difficile d'y gagner sa vie.

Une grande partie de la faute dans ce domaine est imputable non seulement au gouvernement actuel, mais aussi à ceux qui l'ont précédé.

Le gouvernement veut aussi conclure des partenariats avec l'industrie de la pêche et d'autres intervenants pour la gestion de la ressource, des permis et des contrôles d'application. Il prétend imposer des frais plus élevés à l'industrie pour les privilèges d'accès; en outre, elle devra assumer une partie du coût de la gestion des pêcheries et payer plus cher ses services. Encore une fois, ces décisions arrivent à un moment où la mauvaise gestion du gouvernement fédéral a gravement affaibli la capacité de payer de l'industrie de la pêche, non seulement sur la côte est, mais aussi sur la côte ouest.

L'effondrement de l'industrie de la pêche en 1994 est directement attribuable au ministre des Pêches et des Océans. La dévastation de la ressource aura pour conséquence qu'il faudra probablement 12 ans, sur la côte ouest, avant que le cycle du poisson ne permette le rétablissement des stocks. Pourtant, on attend des pêcheurs qu'ils paient plus cher pour leur permis, alors qu'ils auront déjà de la difficulté à continuer à faire leurs paiements sur


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leurs bateaux. Ils ne pourront absorber des frais de permis plus élevés. La même chose vaut, évidemment, sur la côte est.

Les coupes de 211 millions de dollars dans le budget du ministère des Pêches et Océans doivent être administrées très prudemment, comme je le disais un peu plus tôt.

(1030)

Le ministère des Pêches et des Océans a subi des compressions budgétaires importantes depuis deux ou trois ans. Ces compressions ont eu des effets désastreux, surtout sur la côte ouest.

Je veux vous faire part des préoccupations que des agents des pêches ont fait valoir au ministre le 2 novembre 1994. Les agents des pêches ont signalé les difficultés que leur avaient causées les compressions budgétaires. Selon eux, les sommes accordées ne permettaient pas d'appliquer les programmes avec succès. Certains membres du personnel n'avaient pas eu de formation et n'étaient pas capables d'exercer les contrôles coercitifs. La surveillance des prises s'en trouvait touchée, ainsi de suite.

Trois mois avant l'ouverture de la saison 1994, les hauts fonctionnaires du ministère sur la côte ouest prévenaient qu'un désastre allait se produire si les mesures coercitives étaient diminuées à nouveau. Un rapport de R.K. Carson, gestionnaire de secteur à la division du fleuve Fraser, disait ceci:

De nouvelles compressions auront des répercussions importantes sur le succès des accords AFS le long du fleuve Fraser. Le nombre réduit d'agents des pêches et de garde-pêches [. . .]fera que l'on ne respectera pas les conditions des accords, des permis et de la réglementation et nous perdrons tout contrôle dans ce secteur. La ressource en souffrira et une situation semblable à celle qu'on a connue en 1992 avec les «saumons manquants» pourrait se reproduire.
C'est exactement ce qui s'est produit.

M. D. Aurel, chef de la conservation et de la protection à New Westminster, signalait aussi que les compressions budgétaires allaient réduire les pouvoirs des agents chargés de l'application du libre-échange, dans le domaine des pêches. Il soulignait ceci:

[. . .] en 1993, une enquête sur l'exportation illégale de deux millions de livres de saumon kéta avait entraîné 15 accusations contre une seule société de transformation du poisson. Un seul agent ne peut suffire à enquêter sur ce genre de violation grave de l'Accord de libre-échange.
La liste est encore longue. Quand on sabre le budget d'un ministère comme Pêches et Océans, il faut procéder avec soin.

[Français]

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau, BQ): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir ce matin sur l'amendement de mon collègue de Saint-Hyacinthe-Bagot. Le débat sur le projet de loi C-76, dispositions mettant en vigueur les modifications du Budget 1995-1996 concernant les transferts aux provinces, intéresse tous les Canadiens et Canadiennes, les Québécois et les Québécoises.

Dans un premier temps, je ferai un bref historique des changements majeurs introduits par le Budget 1995-1996, puis, en tant que représentant des organismes pour le troisième âge pour l'opposition officielle, je tenterai de démontrer l'objectif du gouvernement fédéral de réduire les pensions de vieillesse en 1997.

Les transferts aux provinces ne sont pas changés par l'introduction du Budget de 1995-1996. Il existe présentement trois principaux programmes de transfert aux provinces, soit le Financement des programmes établis, 21,73 milliards, la péréquation, 8,87 milliards, et le troisième, le Régime d'assistance publique du Canada, 7,95 milliards de dollars. Le Budget fédéral n'a pas modifié le programme de la péréquation, mais le gouvernement fédéral a reconduit la disposition plafond de la péréquation pour une période de cinq ans.

Le projet de loi C-76, par son article 48, privera le Québec de 650 millions de dollars en 1996-1997. Le projet de loi C-76 propose de nouvelles normes nationales en matière de santé et prévoit l'introduction de nouvelles normes nationales en matière d'aide sociale et d'enseignement postsecondaire. Ce fédéralisme nouveau n'a rien d'une décentralisation. Ces normes nationales limiteront l'autonomie des provinces dans leur propre secteur.

L'objectif du gouvernement est de minimiser l'importance de ces coupures, alors qu'elles sont au contraire dévastatrices pour les gouvernements provinciaux et plus particulièrement pour le Québec. Le gouvernement inclut les transferts en points d'impôt dans les chiffres concernant les coupures dans les transferts aux provinces. Le gouvernement fédéral n'a aucun contrôle sur les transferts de points d'impôt versés aux provinces dans le cadre des principaux programmes de transfert aux provinces.

(1035)

En fait, l'ensemble des transferts financiers, transferts en espèces, versés au gouvernement du Québec diminuera de 32 p. 100 entre 1994-1995 et 1997-1998, en raison des coupures effectuées dans les transferts aux provinces.

Un Québec souverain perdrait les transferts financiers du fédéral mais récupérerait les quelque 30 milliards de dollars d'impôts et de taxes que les Québécois paient au gouvernement fédéral.

Les coupures du dernier Budget mises en vigueur par le projet de loi C-76 vont toucher les plus démunis. Le ministre des Finances du Québec évalue que les coupures dans les transferts aux provinces feront chuter la part du gouvernement fédéral au financement des programmes sociaux de 37,8 p. 100 à 28,5 p. 100 entre 1994-1995 et 1997-1998. Le gouvernement fédéral intervient dans les secteurs de compétence provinciale et il se garde une ouverture pour des coupures additionnelles dans la portion en espèces des paiements de transfert aux provinces.

En tant que représentant des organismes du troisième âge pour l'opposition officielle, je suis très concerné par la réforme des pensions de vieillesse annoncée par le gouvernement, réforme qui prendra effet en 1997. En 1994, on annonçait la production d'un document qui devait être déposé incessamment. Le gouvernement a retardé la production de ce document en préférant attendre la tenue du référendum au Québec.

En effet, le gouvernement annonce que la protection ne sera pas diminuée pour les personnes âgées les moins bien nanties, ce qui veut dire, d'une part, que les pensions de ceux qui seront définis comme ayant des revenus élevés seront réduites et, d'autre part, que cette réduction des pensions ne viendra pas augmenter celles des personnes âgées à faible revenu, étant


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donné qu'on ne leur garantit seulement que leur pension ne sera pas réduite. Ainsi, plusieurs verront leur prestation réduite et personne ne bénéficiera d'une augmentation.

Un autre point important est l'admissibilité aux pensions en fonction du revenu familial. Cette mesure est inacceptable, puisque les femmes se sont battues pour l'obtention de leur autonomie financière depuis des décennies.

D'ailleurs, cette mesure n'est pas nouvelle, le gouvernement se préparait à effectuer des changements similaires dans le cadre de la réforme des programmes sociaux pour le régime d'assurance-chômage. Face à l'opposition générale des femmes, la majorité libérale au Comité permanent du développement des ressources humaines n'a pas recommandée de subordonner le montant des prestations au montant du revenu familial. Je me réfère au rapport du Comité sur la réforme des programmes sociaux, aux pages 53 et 104.

Il est à noter que les pensions de vieillesse sont déjà réduites pour les personnes âgées qui ont un revenu supérieur à 53 000 $. En effet, lors du dernier Budget, les libéraux ont décidé de réduire ce crédit d'impôt pour les personnes âgées ayant un revenu supérieur à 25 000 $. Le gouvernement fédéral continue de s'attaquer aux revenus des personnes âgées, particulièrement à la classe moyenne.

Les pensions de vieillesse sont une source importante de revenu pour les personnes âgées. Des documents du gouvernement fédéral indiquent que les pensions de sécurité de la vieillesse et le supplément du revenu garanti comptaient, en 1989, pour 28,9 p. 100 des revenus des hommes seuls, 41,3 p. 100 de ceux des femmes seules et 25,9 p. 100 de ceux des couples.

Ainsi, le gouvernement annonce l'examen du Régime de pensions du Canada, le RPC, l'automne prochain. Une réunion des ministres des finances du Canada et des provinces est prévue dans le cadre de l'examen quiquennal du financement du Régime de pensions du Canada. Le ministre des Finances utilise cette réunion pour prétexter que l'étude des pensions de vieillesse est obligatoire.

(1040)

Rien n'oblige le gouvernement fédéral à réformer les pensions de vieillesse, sinon de réduire le budget sur le dos des personnes âgées.

Les personnes âgées au Québec ont eu l'occasion de se prononcer sur leur avenir grâce aux auditions de la Commission des aînés sur l'avenir du Québec. Cette commission était présidée par une ex-ministre du gouvernement conservateur, Mme Monique Vézina. Dans cette consultation, nous constatons que les aînés ont des préoccupations similaires à travers le pays. Ils sont concernés par leur situation sociale et économique.

La situation économique du Québec est difficile. Certains intervenants, lors de ces auditions, ont raconté leurs problèmes de chômage et de pauvreté reliés également aux menaces constantes de coupures dans les programmes sociaux et les soins de santé.

Les représentants de la Fédération de l'âge d'or du Québec ont indiqué à la commission que leurs organismes combattaient les quatre «i» qui affectent les personnes âgées, c'est-à-dire inutilité, inactivité, insécurité et isolement. À peu près partout, on plaide pour qu'une place soit assurée aux personnes âgées qui ne demandent pas mieux que de mettre leur expérience à profit pour l'édification de la société qu'elles vont léguer à leurs petits-enfants. Il est clair qu'il ne faut pas toucher au régime universel des pensions de vieillesse.

M. Lucien Bouchard, chef de l'opposition officielle, mentionnait aux Québécois et Québécoises récemment la position de son parti face à la position du gouvernement fédéral concernant les retraités, et je cite:

Après avoir taxé l'an dernier les retraités ayant un revenu annuel supérieur à 26 000 $, le gouvernement fédéral continue de s'en prendre à eux. Le ministre des Finances a ainsi annoncé que l'universalité des pensions de vieillesse est définitivement chose du passé, puisqu'à l'avenir, le calcul du montant du chèque de pension sera fait en fonction du revenu familial, privant ainsi des milliers de femmes de leur autonomie financière. En attendant au lendemain du référendum pour imposer ces coupures en matière de sécurité sociale, les libéraux fédéraux cachent aux Québécois et Québécoises les efferts pernicieux de ces réductions. Soyez assuré que le Bloc québécois ne ménagera aucun effort pour empêcher que le nécessaire redressement des finances publiques se fasse sur le dos des aînés, des sans-emploi et des autres qui ont le plus besoin des programmes de santé, d'éducation postsecondaire et d'aide sociale.
Le gouvernement fédéral doit couper 2,85 millards de plus sur trois ans dans les dépenses du ministère de la Défense nationale au lieu de s'acharner, l'automne prochain, à l'examen des programmes touchant les aînés pour réduire son déficit.

Soyez assuré, monsieur le Président, qu'en tant que représentant des organismes du troisième âge pour l'opposition officielle, je m'engage à combattre toute intervention de la part du gouvernement fédéral qui aurait pour but de réduire le déficit sur le dos des personnes âgées.

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, l'honorable député de Saint-Hyacinthe-Bagot a déposé en cette Chambre un amendement que je suis heureux d'appuyer.

Le projet de loi C-76 manque de cohérence et le ministre des Finances doit retourner faire ses devoirs et présenter en cette Chambre un projet de loi reflétant réellement ce que les Canadiens veulent, c'est-à-dire une plus grande équité du gouvernement dans sa façon d'assumer ses responsabilités financières.

L'absence ou encore la faiblesse de certaines mesures budgétaires de ce projet de loi m'inquiète plus particulièrement et je voudrais en traiter de deux. D'abord, la stratégie du gouvernement en sciences et technologie. Dans son dernier rapport, le vérificateur général déplorait le manque de stratégie gouvernementale en matière de sciences et de technologie. Il soulignait l'importance de celle-ci, compte tenu de la libéralisation des marchés et de la nouvelle ère technologique dans laquelle nous mène le XXIe siècle.

(1045)

Le gouvernement se doit d'assumer un puissant leadership dans ce domaine, qui permettra au Canada de continuer à se développer au niveau technologique et de maintenir sa compétitivité sur les marchés internationaux. Le niveau de vie des Canadiens et des Québécois en dépend. Ce leadership doit se refléter dans le Budget du gouvernement. Il constitue la pierre angulaire de toute stratégie pour remettre les Canadiens au travail. Malheureusement, le Budget ne laisse entrevoir aucune planification stratégique en matière de recherche, de sciences et


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de technologie. Pis encore, on coupe aux endroits qui sont les plus performants.

Je donne quelques exemples de coupures dans les conseils subventionnaires. Le ministre Martin affirmait dans son Budget de 1994 qu'il ne toucherait pas au budget des conseils subventionnaires, en raison de l'importance que le gouvernement fédéral accorde aux activités de recherche et développement. Pourtant, faisant volte-face, le ministre des Finances coupe plus de 10 p. 100 du budget des conseils, contrairement à ce qu'il annonçait dans le Budget de 1994.

Pour mieux comprendre l'impact d'une telle décision, examinons la situation du Canada en matière de sciences et de technologie. En ce domaine, le Canada se classe 6e pays du G-7, par rapport au montant du budget en pourcentage du Produit intérieur brut, tout de suite avant l'Italie. Par contre, selon les revues spécialisées en cette matière, au niveau de la qualité et de l'utilisation des recherches, et compte tenu de sa population, le Canada se place au 2e rang parmi les pays du G-7, derrière les États-Unis.

Cette performance est principalement due aux budgets qui étaient alloués au mérite par les conseils subventionnaires à nos universités et à nos industries. Or, le vérificateur général, dans son rapport, souligne la piètre qualité de notre stratégie en sciences et technologie depuis les 30 dernières années. Ce n'est pas récent. Cela fait 30 ans que le vérificateur général déplore ce manque de stratégie. Il recommande que le gouvernement se concentre principalement sur les activités de recherche les plus performantes qui, dans notre cas, sont celles financées par les conseils subventionnaires.

Il importe de souligner ici que la majorité des intervenants qu'a consultés le gouvernement-et ils sont venus témoigner lors des consultations sur cette question-ces spécialistes ont insisté sur le maintien des budgets des conseils subventionnaires. Ces consultants de très haute compétence avisaient que s'il devait y avoir des coupures dans les budgets de recherche, le gouvernement devrait à tout le moins maintenir intacts les montants accordés aux conseils subventionnaires, compte tenu de l'efficacité et de la qualité des projets de recherche qu'ils retiennent, et couper plutôt ailleurs dans le Budget.

Le gouvernement a fait fi des recommandations de ces consultants. Non seulement il a coupé les budgets des conseils subventionnaires, non seulement il coupe aussi les budgets de recherche de tous les ministères et organismes gouvernementaux, mais il a le culot de maintenir un milliard de dollars d'incitatifs fiscaux en recherche et développement qu'il accorde aux entreprises, en donnant comme raison que la consultation n'est pas terminée. Nous avons encore là un autre exemple flagrant où le gouvernement ne consulte que pour la frime et pour mieux faire passer des coupures aveugles qu'il a l'intention d'appliquer dans son Budget.

On n'appelle pas cela de la consultation, mes chers collègues d'en face. On appelle cela de la manipulation de l'opinion publique, qui reflète bien le profond mépris que ce gouvernement démontre envers la population canadienne. Je veux, d'autre part, parler des iniquités de ces dépenses fédérales. Le Bloc québécois a déploré depuis toujours l'iniquité évidente du gouvernement fédéral dans ses dépenses de recherche et développement.

(1050)

En 1990-1991, l'Ontario recevait 53 p. 100 des dépenses fédérales, alors que le Québec n'en recevait que 19,5 p. 100.

J'ai reçu ce matin des statistiques du gouvernement qui démontrent que, depuis 1985-1986, en dépenses fédérales totales pour les sciences et la technologie, en Ontario, si on ne compte pas les dépenses faites dans la région de la Capitale nationale, on a eu à peu près tous les ans 22 ou 23 p. 100 des dépenses fédérales consacrées à la recherche en Ontario; au Québec, 17 p. 100. Si on inclut les dépenses faites dans la région de la Capitale nationale, on se rend compte qu'en Ontario il y en a 27,9 p. 100, ce qui frise les 30 p. 100, chaque année, depuis 1985-1986, alors que le Québec ne reçoit que 3,1 p. 100. Voilà l'équité du gouvernement.

Si on compare les dépenses fédérales au chapitre des sciences naturelles pour l'Ontario et le Québec, l'Ontario a reçu, bon an mal an, entre 24 et 26 p. 100 des dépenses fédérales, alors qu'au Québec, si on excepte toujours la région de la Capitale nationale, c'est 19,9 p. 100; encore 6 p. 100 de différence.

Si on regarde maintenant ce qui s'est fait dans la région de la Capitale nationale pour les recherches en sciences naturelles, du côté ontarien de la capitale nationale, 26,6 p. 100; du côté québécois de la région de la Capitale nationale, 1 p. 100.

Quand on sait compter le moindrement, 26 moins 1 égale 25 p. 100 de différence. Et le gouvernement appelle cela de l'équité budgétaire.

M. Nunez: C'est de l'iniquité.

M. Laurin: La qualité de la structure industrielle du Québec ne peut justifier la faiblesse de ces investissements fédéraux en recherche et développement. D'autant plus que, lorsqu'il s'agit d'octroyer des subventions au mérite, le Québec récolte plus de 30 p. 100 des montants accordés, ce qui reflète très bien la capacité concurrentielle du Québec. Quand on évalue nos projets au mérite, on se classe, on va chercher les 30 p. 100. Mais quand on les accorde de façon à faire du favoritisme, le Québec est toujours le dernier par rapport à l'Ontario, l'autre province la plus puissante.

Des voix: Patronage!

M. Laurin: Ce déséquilibre perpétue les écarts entre les provinces en matière de recherche et de développement. Et les statistiques, ce n'est pas moi qui les ai faites, c'est le gouvernement. Ce déséquilibre influence directement le rythme de croissance des provinces. En d'autres termes, cette politique pernicieuse s'est établie depuis nombre d'années. C'est une politique par laquelle on finance certaines provinces en recherche et développement, tandis qu'on en finance d'autres, dont le Québec, en assurance-chômage.

La situation se perpétue année après année et le gouvernement perpétue toujours son inaction. On dénonce ces choses-là depuis 15 ans.


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On aurait pourtant pu couper à d'autres endroits. Je vais laisser mon texte pour donner un autre exemple de statistiques que j'ai reçues ce matin.

Quelles sont d'autres endroits où on aurait pu couper? Nous, du Bloc québécois, avons souvent parlé de la Défense nationale. Dans les prévisions des dépenses du ministère de la Défense nationale, simplement les erreurs d'évaluation auraient permis d'épargner des sommes astronomiques. Par exemple, on a prévu des réductions d'ici à trois ans de 2,8 milliards. On pensait, nous, qu'il aurait été possible de réduire de 5 milliards, alors que le ministère de la Défense dit que ce n'est pas possible. Pourtant, voici des exemples de la justesse de ces évaluations.

Si je prends seulement qu'un exemple, celui de la fermeture de la base de Portage la Prairie, on prévoyait faire des économies de 411 millions, alors que les économies réelles ont été de 170 millions; erreur: 241 millions.

En formation aérospatiale, on nous avait dit qu'il en coûtait 200 000 $ pour la formation de base d'un étudiant. Le coût réel est de 700 000 $; 500 000 $ de plus par étudiant. Ce sont des erreurs de prévision, et après on nous dit qu'on pourra épargner 2,8 milliards de dollars. On ne le sait pas, monsieur le Président, on arrivera encore avec des déficits imprévus.

C'est dans ce genre de chose là, améliorations dans l'administration interne de la Défense nationale et dans plusieurs autres ministères, qu'on pourrait trouver des sommes d'argent nécessaires à faire de la recherche, qui est la semence même de la réussite de nouveaux produits qui nous amèneraient à une croissance rapide.

On aura l'occasion d'insister davantage sur ces choses.

(1055)

En attendant, je pense que ces nouvelles statistiques doivent porter le ministère et le gouvernement à réfléchir. Que le ministre retourne à sa table de calculs, à sa table de travail et d'opérations, et qu'il nous présente de nouveau ces budgets. Au moins dans quelques mois on pourra peut-être être plus d'accord avec le gouvernement.

[Traduction]

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de parler du projet de loi C-76, loi d'exécution du budget.

Mes collègues réformistes ont déjà traité des différents éléments de ce projet de loi. J'aimerais élargir mon propos à l'ensemble du budget. Je veux exposer à tous les Canadiens ce qui se cache derrière cet écran de fumée que le gouvernement libéral appelle un budget et leur montrer exactement ce qu'il supprime et où se font les compressions.

Les ministériels trompent les Canadiens, et ce, sur plusieurs plans très importants. La façon dont ils présentent le budget est malhonnête. Jusqu'à maintenant, ils ne se sont pas faits prendre. Malheureusement, les Canadiens ne se sont pas aperçus de ce qui se passait.

Aujourd'hui, je vais dévoiler deux inexactitudes notoires concernant le budget libéral qui, à mon avis, n'ont pas été clairement expliquées aux Canadiens.

On leur a fait croire que c'était un budget dur qui réduisait les dépenses de quelque 25 milliards de dollars et que les provinces s'en sortaient relativement bien par rapport aux compressions que le gouvernement faisait dans ses propres rangs.

Le Parti réformiste a annoncé son plan pour équilibrer le budget d'ici 1998. Nous avons alors dit aux Canadiens que pour ce faire, il fallait réduire les dépenses de quelque 25 milliards de dollars, dont 15 milliards au titre des programmes sociaux.

Et quelle a été la réaction des libéraux? Le premier ministre a dit qu'un tel plan plongerait les Canadiens dans une profonde récession, voire une dépression. Le ministre des Finances l'a qualifié de cruauté financière, ajoutant que notre plan ravagerait les programmes sociaux. Quant au ministre du Développement des ressources humaines, il a dit que nous réduirions les pauvres en cendres.

Une semaine plus tard, les libéraux publiaient leur propre budget. À la page 73, on peut y lire: «Les réductions de dépenses découlant expressément de ce budget totalisent $4,1 milliards en 1995-1996, $9,3 milliards en 1996-1997 et $11,9 milliards en 1997-1998.» Autrement dit, les dépenses seront réduites de 25,3 milliards de dollars.

De toute évidence, il y a de l'hypocrisie quelque part. Lorsque le Parti réformiste propose de réduire les dépenses de 25 milliards, c'est un acte de cruauté financière qui va plonger le pays dans une dépression et mettre les veuves et les orphelins à la rue; mais lorsque le gouvernement propose la même chose, c'est pour le bien des Canadiens et du pays tout entier. C'est dur mais équitable. Réduire le déficit stimulera la croissance économique à long terme, nous dit-on.

Le gouvernement n'est pas tout à fait hypocrite quand il fait cela. Il n'effectue pas réellement des coupes de 25,3 milliards de dollars. Il veut le faire croire aux marchés financiers, en particulier à la firme Moody's, qui envisage toujours la possibilité d'abaisser la cote de crédit du Canada.

Ces compressions de 25 milliards de dollars sont en réalité du trompe-l'oeil, puisque les libéraux réduisent des dépenses qui n'ont jamais été effectuées et qui ne le seront pas. En fait, leur budget prévoit de réduire les dépenses de seulement 15 milliards de dollars. Voilà pourquoi les réformistes, avec les coupes de 25 milliards de dollars prévues dans leur budget des contribuables, pourraient éliminer le déficit en trois ans, alors qu'à ce moment-là, les libéraux laisseront les Canadiens se débrouiller avec un déficit qui atteindra les 24 milliards de dollars. De toute évidence, ce budget n'est pas aussi dur que le gouvernement voudrait bien nous le faire croire.

(1100)

D'après la deuxième fausseté, le gouvernement s'imposerait des coupes à lui-même plutôt que de refiler le problème du déficit aux provinces. Est-ce exact? Voyons un peu.

Par exemple, on trouve à la page 73 du budget le passage suivant:

Ces compressions touchent surtout le fonctionnement de l'État, par opposition aux transferts aux provinces ou aux ménages, ce qui prouve que le gouvernement accorde la priorité au redressement de sa propre situation.
Examinons cette déclaration. Est-ce la vérité? Les provinces sont-elles épargnées, compte tenu des autres coupes prévues dans le budget? Non, et je vais vous dire pourquoi. Voyons quelle


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est vraiment l'ampleur des coupes dans les transferts provinciaux.

À la page 59 du budget, il est indiqué que le total des transferts diminue, passant d'environ 37 milliards de dollars en 1994-1995 à environ 34 milliards de dollars en 1997-1998, ce qui représente une diminution de l'ordre de 4 p. 100. Cette réduction est inférieure aux coupes de 7 ou 8 p. 100 qui visent les autres dépenses.

Or, ces chiffres ne disent pas que la valeur des transferts inclut les transferts des points d'impôt. C'est un calcul qui induit complètement les Canadiens en erreur. Cette déclaration du budget est trompeuse.

Nous avons accordé ces points d'impôt aux provinces en 1977, ce qui modifiait notre situation budgétaire en créant une réduction unique de nos recettes. Depuis ce temps, les points d'impôt n'ont pas ajouté le moindre cent à notre déficit annuel. Ils ne sont plus un élément du budget.

Si l'on examine le budget de 1994, on ne trouve aucun renvoi aux points d'impôt. En fait, on n'en trouvera pas non plus dans aucun des budgets présentés depuis 1977. Le budget de cette année y fait référence uniquement pour créer de la confusion, afin que les Canadiens ne se rendent pas compte de l'ampleur des coupes qui leur sont imposées.

En faisant la lumière sur ces points d'impôt, que voit-on? Quelle est la vérité? Le total des transferts en argent faits aux provinces, qui incluent les paiements de péréquation, pour la santé, l'enseignement postsecondaire et l'aide sociale, sera réduit, passant de 25 milliards de dollars en 1994-1995 à 20 milliards de dollars en 1997-1998.

Il s'agit d'une réduction de 5 milliards de dollars, ou de 20 p. 100. Comparons cela aux coupes effectuées dans deux autres secteurs importants des dépenses. Les transferts de 38 milliards de dollars aux personnes sont pratiquement restés intacts, puisqu'ils diminuent d'à peine 500 millions de dollars.

Les dépenses ministérielles de 52 milliards de dollars, qui ont été assujetties à l'examen des programmes du gouvernement, seront réduites d'un peu moins de 10 milliards de dollars, soit de 18 p. 100. Il est clair que les provinces n'ont pas eu la partie belle dans ce budget. Elles sont plutôt les grandes victimes des compressions budgétaires. Ce sont elles qui sont le plus durement touchées.

Ce qui m'étonne encore davantage, ce sont les réductions appliquées aux domaines de la santé, de l'éducation et de l'assistance sociale, les trois programmes qui ont été fusionnés et qui seront désormais subventionnés grâce à ce qu'on appelle le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Les transferts de fonds pour ces programmes passeront de 17 milliards de dollars cette année à 10 milliards de dollars en 1997-1998, soit une réduction d'environ 7 milliards de dollars. Cela représente une réduction considérable, une réduction de 40 p. 100, des transferts fédéraux au titre de la santé, de l'éducation et de l'assistance sociale.

Les députés peuvent-ils s'imaginer les hauts cris que pousseraient les libéraux si un gouvernement réformiste tentait de réduire le régime d'assurance-santé de 40 p. 100? C'est pourtant ce qu'ont fait les libéraux et les gens ne s'en sont pas encore aperçus. Les libéraux traitent encore les réformistes de sauvages en matière budgétaire. Ils devraient plutôt s'analyser eux-mêmes.

(1105)

En terminant, permettez-moi de clarifier le but de mon exposé. Je ne dis pas que des compressions budgétaires draconiennes ne s'imposaient pas. Au contraire, le budget du gouvernement ne va pas assez loi. Au terme du mandat du gouvernement, le déficit s'élèvera encore à 25 milliards de dollars. Autrement dit, il reste encore beaucoup de chemin à faire.

J'espère sincèrement que, lorsque les Canadiens auront percé l'écran de fumée du gouvernement, nous pourrons amorcer un dialogue sérieux sur la politique budgétaire. J'espère que les gens auront l'occasion au cours des deux ou trois prochaines années d'examiner notre budget des contribuables et le budget des libéraux et de découvrir les points forts et les points faibles de chacun.

Si nous pouvons y parvenir, si nous pouvons élever le niveau de ce débat national, le pays ne s'en portera que mieux.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, je me permettrai d'aborder le projet de loi C-76 relatif au Budget 1995-1996, ainsi que l'amendement déposé, le 30 mars dernier, par le député de Saint-Hyacinthe-Bagot, amendement que j'appuie.

Cet amendement propose que ce projet ne soit lu une deuxième fois que dans six mois. En d'autres termes, la motion demande au ministre des Finances de retourner faire ses devoirs parce que c'est le pire budget pour les gens pauvres et pour les gens ordinaires. Naturellement, c'est un excellent budget pour les riches, les banques et les grandes compagnies.

J'ai déjà eu l'occasion de critiquer ce Budget qui est dur pour les provinces, pour le Québec en particulier, pour les travailleurs et travailleuses, pour les immigrants et réfugiés, pour les fonctionnaires et pour les plus démunis de notre société.

Ce Budget ne contient aucune mesure pour créer des emplois ou stimuler la croissance économique. Son objectif principal est de couper partout, particulièrement dans les programmes sociaux, dans l'assurance-chômage, dans l'aide internationale. Il ne fait que frapper les personnes les plus pauvres de notre société. Ce gouvernement, dit libéral, est le plus conservateur des gouvernements de l'histoire canadienne.

Nous assistons effectivement à un virage à droite, et du gouvernement, et du Parti libéral. C'est incroyable. Seulement dans le domaine de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, au cours des trois prochaines années, le gouvernement se propose de couper la somme de 307 millions de dollars. Et le logement social est très important au Québec, au Canada, et particulièrement dans mon comté de Montréal-Nord où il y a beaucoup d'assistés sociaux et il n'y a pas suffisamment de logements sociaux pour ces personnes.

Je me permets de commenter brièvement le rapport qui vient d'être publié ce matin, ou hier, du Conseil national du Bien-être social du Canada: 20,7 p. 100 de la population québécoise vit dans la pauvreté. La pauvreté a augmenté partout au Canada entre 1992 et 1993. À l'échelle nationale, le taux de pauvreté est


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passé de 16,1 en 1992 à 17,4 en 1993. C'est dramatique, cette augmentation seulement en un an.

Surtout, la pauvreté des enfants a atteint un sommet en 14 ans, atteignant le taux de 20,8 p. 100. En 1993, on comptait 1 415 000 enfants démunis au Canada. Les enfants sont pauvres parce que les parents sont pauvres. Les parents sont surtout pauvres parce qu'il n'y a pas suffisamment d'emplois dans ce pays. Il faut signaler que les femmes sont en général plus pauvres que les hommes. C'est scandaleux.

(1110)

[Traduction]

En 1993, le nombre de pauvres au Canada a augmenté de près d'un demi-million. Ce nombre est passé à près de 4,8 millions, comparativement à 4,3 millions l'année précédente. Il y a un demi-million de pauvres de plus au Canada. La situation est tragique.

[Français]

C'est un scandale. Le gouvernement devrait examiner ce rapport avec attention et agir. Je demande au gouvernement de présenter un plan de lutte contre la pauvreté au Canada. J'espère que d'autres députés dénonceront cette situation dramatique: un demi-million de nouveaux pauvres.

Ce qui est intéressant, c'est que 50 p. 100 de ces nouveaux pauvres travaillent, c'est-à-dire que les salaires sont tellement bas qu'il y a eu même des concessions qui ont été accordées. Je pense que le salaire minimum est un scandale, tant au niveau fédéral que provincial.

C'est l'Alberta qui a un des salaires minimums les plus bas au Canada, et c'est une des provinces les plus riches, 5 $ l'heure. Souvent, nos collègues d'en face nous disent que nous vivons, au Canada, «the best country in the world». Je pense qu'avec ces chiffres, le Canada n'est plus ce pays merveilleux que parfois ils essaient de nous présenter.

Je disais que ce gouvernement et le Parti libéral vont de plus en plus à droite. On a vu, il y a quelques jours, l'adoption de la loi matraque, la loi C-77, par la nouvelle ministre du Travail, qui est une attaque de front contre les syndicats et qui renie le droit de grève au Canada, dont le but est de privatiser le CN et avoir encore plus d'argent pour le Trésor public.

Le gouvernement, avec cette loi, essaie de casser les syndicats, essaie de casser aussi les fonctionnaires fédéraux qui ont beaucoup de problèmes avec ces 45 000 pertes d'emplois. Le gouvernement attaque les programmes sociaux et attaque également les chômeurs, et non pas le chômage.

Par contre, le gouvernement refuse d'adopter une loi antibriseurs de grève qui est demandée par les syndicats. Particulièrement au Québec, l'entreprise Ogilvie, qui est depuis des mois et des mois en grève, mais qui continue à fonctionner parce qu'il y a des briseurs de grève. J'en appelle, encore une fois, au gouvernement pour adopter et pour soumettre au Parlement une législation antibriseurs de grève.

Au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, dont je suis le porte-parole de l'opposition officielle, le budget prévoit qu'en 1995-1996 les dépenses s'élèveront à 592,7 millions de dollars et qu'il y aura l'équivalent de 4 645 employés à temps plein, dont 260 dans les missions canadiennes à l'étranger.

Mais ce qui est scandaleux, et que j'ai déjà dénoncé ici, c'est que ce budget du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, on va l'autofinancer à plus de 50 p. 100, c'est-à-dire qu'environ 300 millions de dollars viendront des usagers, surtout avec cette nouvelle taxe à l'immigration. Je pense que le ministre essaie de diriger son ministère comme une entreprise privée. Il cherche l'autofinancement, et probablement plus tard, il cherchera des profits.

Il y a eu des coupures à la CISR, des coupures d'environ 5,7 millions de dollars. Dorénavant, un seul commissaire va entendre les dossiers au lieu de deux. On va réduire le nombre de commissaires de 175 à 112.

(1115)

J'aimerais en profiter, puisqu'il me reste encore deux minutes, pour dire quelques mots concernant l'aide internationale.

Je condamne très vigoureusement les coupures à la coopération internationale. Ce pays qui, disait-on avait à coeur les problèmes et la cause des pays pauvres, ce n'est plus le Canada que j'ai connu il y a un certain nombre d'années. Des coupures épouvantables sont effectuées à Montréal, au Québec et au Canada. Il y a plus de 80 organismes voués à la sensibilisation du public envers la coopération internationale qui vont être coupés à 100 p. 100 et qui vont disparaître. Or, des coupures de 1,3 milliards de dollars en trois ans, c'est beaucoup. L'ONU demande à tous les pays industrialisés de consacrer 0,7 p. 100 du Produit intérieur brut à la coopération internationale. Le Canada va se se retrouver avec un taux de 0,3 p. 100.

Finalement, j'aimerais attirer l'attention du gouvernement pour ne pas réduire les programmes d'adaptation des travailleurs âgés. Les syndicats sont très inquiets et les provinces également. Il faut renouveler ces ententes, et j'espère que le gouvernement va essayer de faire quelque chose pour ces travailleurs.

[Traduction]

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir à la Chambre dans le débat sur le budget fédéral au nom des électeurs de ma circonscription.

Mes électeurs me disent souvent qu'ils en ont assez des programmes fédéraux qu'ils ne veulent pas, qu'ils n'ont pas demandés et pour lesquels il ne veulent certainement pas payer. Ils m'arrêtent dans la rue pour me poser des questions sur la politique des langues officielles. Pourquoi avons-nous cette politique? Pourquoi devons-nous payer pour cela? Dans le débat d'aujourd'hui sur le budget, je me bornerai à parler des préoccupations de mes électeurs au sujet des langues officielles.

En commençant, au nom de la population de Yellowhead, je demande ceci: Pourquoi avons-nous un ministère du Patrimoine canadien? Ce ministère est l'un des plus controversés et des plus perturbateurs aux yeux des Canadiens, car il reçoit des sommes énormes pour mettre en oeuvre des programmes qui sont autant


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de sujets de discorde, notamment la SRC, le multiculturalisme et, bien sûr, le bilinguisme officiel. Je serai direct. La population de Yellowhead n'a absolument rien à faire du ministère du Patrimoine canadien et de ses programmes destructeurs et créateurs de dissensions.

Ils ignorent totalement quels avantages peuvent bien découler du paiement de primes au bilinguisme qui leur coûtent, à eux et à leurs concitoyens, 50 millions de dollars par année. Ils ne voient pas quels avantages ils peuvent retirer du financement d'une police linguistique, le Commissariat aux langues officielles, à hauteur de 11,1 millions de dollars. Ils ne savent pas quels avantages ils retirent de la subvention annuelle de 103 000 $ versée à la composante d'Edmonton de l'Association des francophones de l'Alberta et de la subvention de 12 millions de dollars qui doit être dépensée dans une circonscription où on compte 945 francophones.

La population de Yellowhead ne sait pas trop pourquoi elle contribue à payer le soutien des langues officielles dont le budget prévu s'élève à 253 millions de dollars cette année, soit plus d'un quart de milliard de dollars.

Je ne veux pas ici nourrir le ressentiment, mais simplement remettre en doute une politique qui a contribué dans une large mesure à défaire le tissu social et linguistique de notre nation.

Le bilinguisme officiel au Canada n'est pas la promotion de l'égalité de l'anglais et du français, mais plutôt la promotion de droits linguistiques de la minorité au sein de la majorité de la population. En fait, les gouvernements fédéraux successifs, invoquant le prétexte de l'unité nationale, ont abusé de la Loi sur les langues officielles adoptée en 1969 pour imposer le bilinguisme d'un océan à l'autre.

Dès le départ, cette loi avait pour but d'apaiser les tensions. Des questions ont été soulevées sur le mode de financement de ce programme linguistique forcé. Bien sûr, le Canada anglais a protesté contre l'imposition de cette loi et, bien sûr, le Canada anglais paie pour son application.

(1120)

Pierre Trudeau était bien conscient du fait qu'il devait maintenir sa popularité au Québec. Après tout, il n'avait pas d'appui dans l'Ouest. La Loi sur les langues officielles a donc été imposée à l'ensemble du Canada. Depuis ce temps, cette loi a été utilisée pour éteindre les feux nationalistes au Québec, mais en vain. Cette stratégie a eu des conséquences graves.

Je veux signaler aux députés comment la Loi sur les langues officielles a été utilisée en 1976, à un moment où les dissensions au Québec atteignaient leur paroxysme, pour éteindre un feu qui menaçait l'unité nationale. À la veille des élections au Québec, 30 000 fonctionnaires fédéraux dans cette province ont dit qu'ils refuseraient de servir les gens en anglais si on ne leur accordait pas la prime au bilinguisme que touchaient les secrétaires, les sténographes et les dactylos bilingues.

Pour apaiser les fonctionnaires et pour empêcher le Parti québécois séparatiste de prétendre que les francophones étaient traités de façon injuste, Trudeau a cédé et a accepté que la prime au bilinguisme soit versée à ces fonctionnaires. Et pour comble, c'est le PQ qui a remporté les élections.

La prime au bilinguisme est restée et a même été accordée aux agents bilingues de la GRC par le gouvernement libéral actuel. Je suis convaincu qu'on a pris cette décision dans le but de contrer les attaques du Bloc.

Cette politique est discriminatoire à l'endroit des anglophones et des francophones unilingues. Elle sème la division au lieu de favoriser l'unité. Elle va à l'encontre de l'objectif de la Loi sur les langues officielles. La non-application du système du mérite a eu un impact négatif sur le moral des employés.

Ce n'est pas la seule fois où le maître de la sociologie appliquée s'est servi de la question controversée des langues officielles pour apaiser la minorité aux dépens de la majorité des Canadiens. Trudeau a mis en place un programme d'action positive pour le recrutement des fonctionnaires.

Je signale à mes collègues que la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme a recommandé qu'on crée, au sein de la fonction publique, des sections francophones où tout le travail serait exécuté en français et des sections anglophones où tout le travail serait exécuté en anglais. Dans un tel système, presque tous les postes seraient ouverts à des personnes unilingues.

Il est vrai que, au départ, il y aurait beaucoup plus de postes unilingues anglophones, mais, au fur et à mesure que les employés anglophones prendraient leur retraite et que des francophones entreraient dans la fonction publique, les sections francophones prendraient de l'ampleur pour en arriver un jour à représenter une proportion de postes équivalente à la proportion de francophones au sein de la population canadienne. On en arriverait en théorie à une représentation équitable sans recourir à l'action positive ni se plaindre de discrimination à l'égard des anglophones ou des francophones. Tous les députés en conviendront sûrement, un tel scénario semble raisonnable et juste.

M. Trudeau n'a cependant pas adopté cette solution juste, pour des considérations politiques. Il aurait apparemment jugé qu'il faudrait trop de temps pour implanter des unités de langue française alors que la menace séparatiste constituait un problème immédiat. Comme M. Trudeau l'a dit: « Nous ne pouvons pas dire aux Québécois de ne pas s'énerver et que nous serons en mesure de discuter avec eux dans 40 ans. Nous pourrions peut-être économiser de l'argent, mais non sauver le pays. » Sauver le pays? Quelle ironie!

Aujourd'hui, c'est l'unité du pays qui est menacée, une chose qui ne devrait pas arriver si le sacro-saint bilinguisme officiel avait marché, mais cela ne pouvait bien sûr pas marcher. Cette politique a coûté des milliards de dollars depuis le début de sa mise en oeuvre. Nous voyons ce que les contribuables canadiens


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obtiennent en retour: entre autres choses, un parti séparatiste qui devient l'opposition officielle à la Chambre des communes.

Si les politiques du passé ne donnent pas de résultats, le temps est peut-être venu d'y mettre fin et d'élaborer un nouveau cadre de travail à partir duquel nous pourrons tous oeuvrer à l'unification du Canada. Les Canadiens détestent le bilinguisme officiel dans sa forme actuelle.

Je terminerai en relatant un incident qui s'est produit en octobre dernier. Le commissaire aux langues officielles, la police de la langue, est allé au parc national Jasper pour récompenser les autorités du parc de leur remarquable travail de promotion du français dans le parc. Un examen plus attentif des statistiques révèle à quel point le voyage du commissaire était inutile. Il est illogique d'offrir des services bilingues au parc national Jasper ou n'importe où ailleurs quand la demande ne le justifie pas.

(1125)

L'an dernier, le parc a reçu plus de 2,4 millions de visiteurs. Les utilisateurs des terrains de camping provenaient notamment de l'Alberta, à 35 p. 100, de la Colombie-Britannique, à 15 p. 100, de même que de la Californie, de l'Ontario, de l'État de Washington, de la Saskatchewan et du Manitoba. Voici l'origine des visiteurs par pays: 60 p. 100 venaient du Canada, 20 p. 100 des États-Unis, 5 p. 100 d'Allemagne, et les autres venaient surtout d'Angleterre et de Suisse.

Il est intéressant de noter que la signalisation dans les terrains de camping est en français et en anglais et que la plupart des préposés aux terrains de camping doivent être bilingues dans les deux langues officielles. Les services devraient plutôt être offerts en anglais et en allemand, à en juger par les statistiques. Ce serait bien sûr ridicule, car la majorité des Allemands qui visitent le Canada parlent l'anglais.

Toute la politique du gouvernement doit s'inspirer du simple bon sens. Il est temps de mettre fin aux vieilles politiques usées et coûteuses, qui sèment la division et qui contribuent non seulement à alourdir notre dette, mais à créer des problèmes au lieu de les résoudre. Le temps est maintenant venu d'y mettre fin.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, vous me permettrez de ne pas donner suite aux propos incendiaires qui viennent d'être prononcés par mon collègue qui vient d'intervenir. Ce n'est certes pas avec plaisir, mais bien avec le sentiment de faire mon devoir de parlementaire, que je prends la parole aujourd'hui pour débattre du projet de loi C-76, qui porte sur certaines dispositions annoncées dans le Budget déposé le 27 février dernier, et qui met notamment en vigueur les modifications prévues concernant les transferts aux provinces.

Pour tout dire, ce projet de loi n'est rien d'autre que le fruit amer de la mise en application de certaines décisions contenues dans le dernier Budget fédéral. Le projet de loi C-76 illustre, dans toute sa candeur, la conspiration dont les provinces sont victimes de la part du gouvernement libéral. Par ce projet de loi, le gouvernement fédéral entend littéralement pelleter 7 milliards de dollars de son déficit dans la cour des provinces. Pour y arriver, il a déjà travesti l'un de ses trois principaux programmes de transfert aux provinces. Il s'agit du Programme de péréquation, pour lequel les provinces toucheront 8,87 milliards de dollars pour l'année fiscale en cours.

Ce programme a pour but de redistribuer la richesse au sein de la fédération canadienne en transférant une partie des revenus des provinces les mieux nanties aux provinces qui le sont moins. Depuis 1982, cependant, le gouvernement fédéral a imposé un plafond aux paiements de transfert des provinces au chapitre du programme de péréquation, en limitant les droits totaux de péréquation à la croissance du PNB nominal du Canada. Cette mesure de plafonnement a été reconduite en janvier 1994 par le projet de loi C-3 et ce, pour une période de cinq ans. Ce faisant, le gouvernement fédéral, que ce soit sous les conservateurs ou les libéraux, a privé et prive encore les provinces de revenus auxquels elles auraient normalement eu droit.

Le Québec étant, tout comme les provinces atlantiques, la Saskatchewan et le Manitoba, l'une des provinces qui reçoit les sommes du gouvernement fédéral par le biais du programme de péréquation, les finances publiques québécoises souffrent et souffriront énormément de cette mesure. Celle-ci est d'autant plus difficile pour le Québec, puisque de toutes les provinces qui en bénéficient, le Québec est celle qui retire le moins de ce programme per capita.

En décidant de plafonner les droits totaux de péréquation à la croissance du PNB nominal du Canada, le gouvernement fédéral dénature l'essence même des paiements de péréquation, qui ont essentiellement pour but de redistribuer la richesse entre les provinces de la fédération. Ce n'est pas tout, car le projet de loi C-76, tel qu'annoncé dans le dernier Budget, prévoit remplacer, à compter de 1996-1997, les deux autres programmes de transferts aux provinces, soit le Régime d'assistance publique du Canada, plus communément appelé le RAPC, et le financement des programmes établis, par un nouveau programme: le Transfert social canadien.

Jusque là, on pourrait penser qu'il s'agit d'une bonne nouvelle : fusionner ces deux programmes en un seul, pour ainsi rationaliser les opérations, simplifier les structures, etc. Mais là s'arrête la bonne nouvelle, car au lieu de maintenir ou d'augmenter le niveau des paiements de transfert aux provinces, Ottawa s'apprête à couper 2,5 milliards de dollars en 1996-1997, dans l'enveloppe qui leur était normalement réservée à ce titre.

(1130)

Ce sera pire encore pour l'année financière 1997-1998, car le gouvernement fédéral entend réduire son aide aux provinces de 4,5 milliards de dollars. On voit là une autre manifestation de ce fédéralisme flexible dont on nous fait l'apologie tous les jours en cette Chambre.

Le problème, c'est que la seule chose que ce gouvernement parvient à décentraliser, c'est son déficit. Évidemment, le Québec n'échappera pas à cette opération de décentralisation du déficit du gouvernement fédéral. Pour l'année financière 1996-1997, le Québec, en vertu de l'article 48 du projet de loi C-76, se verra privé de la somme de 650 millions de dollars.

En ce qui concerne l'année financière 1997-1998, nous ne savons pas encore sur quels critères le gouvernement fédéral entend s'appuyer pour réduire ses paiements de transfert aux provinces. S'il décide tout simplement de continuer à appliquer


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la formule existante, les coupures dans les paiements de transfert au Québec s'élèveraient à 1,2 milliard de dollars.

Mais le gouvernement fédéral, sous la pression des provinces mieux nanties, dont l'Ontario, semble vouloir introduire une nouvelle formule s'articulant autour du critère de la proportion démographique de chaque province par rapport à l'ensemble de la population canadienne.

Si cette option devait être retenue, cela signifierait une perte pour les finances publiques québécoises, non pas de 1,2 milliard de dollars, mais bien de 1,9 milliard de dollars, soit un manque à gagner additionnel de l'ordre de 700 millions de dollars. Malheureusement, il semble que ce soit ce deuxième critère qui a le plus de chance d'être retenu, car il n'est pas dans les habitudes du gouvernement fédéral de remettre en question une formule établie s'il n'a pas l'intention de la modifier, d'autant plus qu'il est soumis aux pressions instantes de la part des provinces les mieux nanties.

Ainsi, dans la foulée du projet de loi C-76, le gouvernement du Québec se verra vraisemblablement privé au mieux de 1,850 milliard de dollars, et au pire de 2,550 milliards de dollars. N'est-ce pas là, comme je le signalais plus tôt, un bel exemple de fédéralisme flexible, un bel exemple de fédéralisme rentable?

À la lecture des dispositions contenues dans le projet de loi C-76, il y a tout lieu de s'interroger sur la compétence et le sérieux des individus qui composent le gouvernement et qui se défilent devant leurs obligations en tant qu'administrateurs des deniers publics. En effet, quoi de plus facile et de plus commode que de fuir devant ses responsabilités en les refilant à d'autres, comme le fait actuellement le gouvernement libéral vis-à-vis des provinces, et plus particulièrement du Québec.

Ce triste épisode de la politique économique et budgétaire poursuivie par le gouvernement fédéral, si tant est qu'il en ait une, démontre bien jusqu'à quel point les finances publiques canadiennes sont dans un état pitoyable. Ainsi, non seulement les principales mesures de réduction du déficit annoncées dans le dernier Budget fédéral sont reportées à plus tard ou reléguées aux provinces, mais elles ne régleront en rien l'épineux problème de la dette canadienne.

Il faut bien comprendre que chaque déficit enregistré par le gouvernement fédéral vient s'ajouter à la dette monstrueuse du Canada. Or, le déficit anticipé du gouvernement sera de 32,7 milliards de dollars en 1995-1996. Mais même si le gouvernement parvenait dès cette année à ramener son déficit à zéro, au prix de sacrifices difficiles et déchirants, la dette du Canada continuerait néanmoins de croître inexorablement, et ce en raison des intérêts qui lui sont appliqués.

Cette croissance quasi exponentielle de la dette fédérale entraîne inévitablement une augmentation continuelle de la part du Budget qui doit être affectée au remboursement des seuls intérêts sur la dette. Cette année, par exemple, le gouvernement est confronté à une augmentation substantielle du remboursement des intérêts sur la dette, qui passeront de 42 à 50 milliards de dollars. C'est donc dire que si le gouvernement décidait tout simplement de geler ses dépenses à leur niveau actuel, il devrait néanmoins faire face à une augmentation importante de son déficit, lequel s'ajouterait également à la dette.

Un gouvernement résolument décidé à réduire son déficit devrait donc sabrer dans ses programmes et dépenses d'une façon impitoyable, ne serait-ce que pour faire contrepoids à la hausse du déficit imputable au remboursement des intérêts sur la dette. Autrement dit, le problème de la dette reste entier en dépit des engagements du gouvernement.

Comme nous l'avons vu précédemment, le gouvernement fédéral n'a pas eu le courage de s'attaquer à son propre déficit, il a tout simplement décidé de le déplacer en coupant progressivement dans les transferts aux provinces, lesquelles devront assumer ces pertes de revenu en réduisant les services, en augmentant les taxes et les impôts, ou en pelletant à leur tour ce manque à gagner dans la cour des municipalités.

(1135)

Mais au bout du compte, c'est toujours le même contribuable qui paie la note.

Certains prétendent que le gouvernement du Québec doit faire le ménage dans ses propres finances publiques avant de convier la population à se prononcer sur la souveraineté. Nous devons réaliser qu'il sera de plus en plus difficile pour le gouvernement du Québec de boucler son propre budget, compte tenu des coupures dans les transferts aux provinces. Rappelons-nous également qu'en 1980, lors du premier référendum sur la souveraineté, la dette fédérale s'élevait à 90 milliards de dollars. Elle atteint maintenant près de 550 milliards de dollars et devrait franchir le cap des 800 milliards de dollars en l'an 2000.

En 1980, les tenants du fédéralisme promettaient les Québécois et les Québécoises aux géhennes de l'enfer s'ils s'avisaient de s'aventurer sur la voie de la souveraineté-association. Dans l'éventualité de la souveraineté, ces chantres de l'apocalypse nous prédisaient un dollar à 70c., des taux d'intérêt élevés et une dette de plusieurs centaines de milliards de dollars. Nous avons eu droit à tout cela à l'intérieur du régime fédéral canadien avec, en prime, le rapatriement de la Constitution canadienne sans l'accord du Québec, gracieuseté de l'actuel premier ministre du Canada.

En conclusion, le Québec n'échappera pas à l'opération fédérale de pelletage du déficit canadien dans la cour des provinces, pas plus d'ailleurs qu'aux autres mesures sournoises prévues dans le Budget. Aujourd'hui comme dans les mois qui viennent, ce sont les Québécoises et les Québécois qui devront faire les frais de ce Budget, du moins jusqu'à ce qu'ils décident de se retirer de ce régime injuste, inefficace, qui frôle toujours davantage la catastrophe financière; jusqu'à ce qu'ils décident de prendre en main leur propre destinée en s'engageant sur la voie de la souveraineté.

[Traduction]

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, «il y a des époques dans l'évolution d'une société où elle doit relever des défis fondamentaux, prendre un nouveau cap.» En prononçant ces mots, le ministre des Finances a déposé le budget qu'on a dit être le plus important de l'histoire du Canada. Le ministre dit que ce budget a un seul objectif, maîtriser le déficit et assainir nos finances.

Les Canadiens vont devoir juger les propos du ministre à la lumière de ses propres critères. Ils devront se poser quelques questions. Le défi fondamental qu'est l'élimination du déficit a-t-il été relevé? Les choix fondamentaux nécessaires pour relever le défi ont-ils été faits? A-t-on vraiment adopté une


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orientation qui témoigne d'une nouvelle responsabilité financière à l'échelon fédéral? C'est à ces questions que je voudrais m'attarder.

Première question: le défi de l'élimination du déficit a-t-il été relevé? Vers la fin du régime Trudeau, un budget a été déposé qui prévoyait un déficit sans précédent de plus de 38 milliards de dollars.

Michael Wilson a dit, il y a six ans: «Nous avons un grave problème sur les bras, une dette publique importante et en croissance». Les conservateurs ont eu neuf ans pour rétablir l'équilibre budgétaire, mais ils ont échoué à toutes leurs tentatives. Le mieux qu'ils aient pu faire est un déficit de 19 milliards.

Les libéraux sont de retour au pouvoir. Le ministre des Finances dit, comme ses prédécesseurs l'ont fait avant lui, que le moment est venu de régler le problème du déficit. Pourtant, un coup d'oeil sur le plan triennal permet de constater que l'objectif final n'est pas l'élimination du déficit, mais seulement une réduction modeste. Si le défi à relever est d'équilibrer le budget-et ce doit être notre objectif, compte tenu du climat économique-il faut bien dire que ce défi n'a pas été relevé.

Deuxième question, les choix fondamentaux nécessaires pour relever le défi du déficit ont-ils été faits? Des décisions claires s'imposent: statu quo ou orientation nouvelle? Poursuite ou élimination des déficits? Hausses d'impôt ou compressions de dépenses?

Le bilan dit tout: les dépenses de programmes ont diminué d'à peine 5,1 milliards de dollars sur un total de 163,5 milliards. Cela ne représente que 4 p. 100 des dépenses de programmes et 3 p. 100 de l'ensemble des dépenses. Ces prétendues compressions ne sont rien auprès de ce qu'il faudrait faire pour assainir nos finances.

Par contre, il y a de nouveaux impôts pour les entreprises, une taxe sur l'essence et de nouveaux frais aux usagers. De toute évidence, le gouvernement n'a pas pris de mesures draconiennes et n'a pas fait les choix fondamentaux que les Canadiens demandent.

(1140)

Troisièmement, en réponse à la question de savoir si ce budget a tracé une nouvelle ligne de conduite en matière de dépenses publiques, il est clair que, depuis les 20 dernières années, les gouvernements fédéraux ont suivi une ligne de conduite qui a mené d'un déficit à l'autre et qui s'est traduite par un coût cumulatif de plus de 558 milliards de dollars.

Depuis que le gouvernement actuel a été porté au pouvoir, il a adopté cette même ligne de conduite qui garantit des déficits bien au-delà de 1997. Aucune nouvelle orientation n'a été élaborée. C'est toujours la même rengaine: des déficits, des déficits et encore des déficits.

Il y a plusieurs mois, dans un bulletin parlementaire, j'ai demandé aux électeurs de ma circonscription, Cariboo-Chilcotin, leurs idées sur la réduction du déficit. Je leur ai soumis la liste des compressions que le Parti réformiste a présentée au comité des finances et je leur ai demandé s'ils souscrivaient ou non à cette liste.

Les résultats ont révélé que les électeurs étaient fortement en faveur de la suppression des programmes de développement régional, de la privatisation de la SRC, de la suppression du financement consenti aux sociétés d'État et de celui prévu pour le multiculturalisme ainsi que le bilinguisme, de l'élimination immédiate de l'aide aux groupes d'intérêts spéciaux et de la réduction des effectifs des ministères de l'Agriculture, de l'Industrie, des Ressources naturelles ainsi que des Pêches et des Océans. Ce sont là les recommandations de mes électeurs.

Ce budget est-il juste? Le ministre des Finances s'est empressé de souligner que le budget répartit le fardeau. Il a dit que personne n'est épargné et que tous sont également mis à contribution.

Le budget est-il juste pour les Canadiens, pour nos familles, nos enfants, nos petits-enfants, nos arrière-petits-enfants et les futures générations? À tous les égards, la réponse est un non catégorique. Il n'est pas juste pour les milliers de fonctionnaires qui pourraient perdre leurs emplois en raison de leur race ou de leur sexe.

Selon le ministre des Affaires intergouvernementales, les compressions viseront surtout les fonctionnaires blancs de sexe masculin, même si cela contrevient à la Charte des droits et libertés. Des familles seront mises à rude épreuve, des carrières seront détruites, et l'on ne tiendra pas compte du principe du mérite pour apaiser les groupes d'intérêts spéciaux radicaux.

Le budget n'est pas juste pour la masse qui continuera d'être bâillonnée sur la scène nationale. Le financement des groupes d'intérêts spéciaux permet aux marginaux politiques de notre société de subsister. Les programmes radicaux continueront d'être mis à l'avant-scène, alors que les vues et opinions des Canadiens ordinaires seront encore une fois reléguées au second plan.

Le budget n'est pas juste pour les jeunes Canadiens, nos travailleurs et nos dirigeants de demain. Pour la première fois de l'histoire du pays, les jeunes sont confrontés à un avenir qui leur apportera moins de prospérité que celle dont ont joui leurs parents et leurs grands-parents. Ce sont les jeunes, et non leurs parents et leurs grands-parents, qui auront à éponger la dette qui s'élève maintenant à 548 milliards de dollars.

Le ministre des Finances a reporté d'autres compressions à une date indéterminée dans le proche avenir. Ce sont nos enfants qui feront les frais des atermoiements du ministre parce qu'ils devront relever encore les impôts et comprimer davantage les programmes sociaux.

J'ai souvent dit que je ne suis pas entré en politique pour moi-même, mais pour mes enfants et tous les autres enfants du pays. À la fin de mes études, les possibilités étaient presque illimitées. Si je voulais un emploi, je n'avais qu'à choisir un domaine. Si je voulais aller à l'école, je pouvais être admis facilement et les frais de scolarité étaient abordables.

Je touchais un bon salaire pour joindre les deux bouts et satisfaire les besoins de ma femme et de ma famille. Tout cela a changé. Les jeunes n'ont plus l'embarras du choix quand ils cherchent un emploi. Ils doivent se contenter de n'importe quel emploi, et il n'est pas rare qu'ils doivent occuper deux ou trois emplois à temps partiel pour joindre les deux bouts.

Les frais de scolarité augmentent rapidement, les inscriptions sont en baisse et les possibilités d'emplois se font plus rares et espacées. Ces changements s'expliquent de bien des façons: le poids des charges sociales, la baisse du financement et la


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restructuration économique. Cependant, la cause principale est la dette.

À mesure que la dette va s'alourdir d'ici trois ans, notre économie va être mise à rude épreuve, car le service de la dette va augmenter, ce qui se traduira par une autre diminution des possibilités d'emplois pour les jeunes dans les années à venir. Pour le bien des jeunes, il faut s'attaquer au déficit dès maintenant.

Le budget a été un échec sur toute la ligne.

(1145)

Le gouvernement n'a pas relevé le défi de l'élimination du déficit. Il n'a pas fait les choix fondamentaux que les Canadiens lui ont demandé de faire. Contrairement à ce que dit le ministre des Finances, le budget n'a pas replacé le pays sur la voie de la responsabilité financière et n'a pas été équitable.

Les Canadiens ne veulent pas d'un autre Michael Wilson ni d'un autre Don Mazankowski, qui ont tous deux dérivé de déficit en déficit. Ils veulent que le ministre des Finances prenne des mesures décisives pour rétablir l'équilibre budgétaire du pays. J'espère que le ministre des Finances en poste fera preuve de plus de détermination l'an prochain. Le temps commence à lui manquer.

Je me réjouis que le Parti réformiste ait présenté un budget de rechange qu'il a invité le Parti libéral à examiner, à copier et à utiliser.

[Français]

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, dans les mois qui précédaient le dépôt du budget, le ministre des Finances se rendait au Comité des finances et faisait un certain nombre de déclarations dont certaines ont été rapportées à la télévision. Je cite les propos du ministre: «La dette totale du secteur public au Canada a maintenant atteint 100 p. 100 du Produit intérieur brut. À eux seuls, les intérêts de cette dette ont dépassé 56 milliards de dollars l'an dernier, dont près de 39 milliards de dollars ont été payés par le gouvernement fédéral. Cette somme risque de dépasser 44 milliards de dollars cette année. Nous en sommes arrivés au point où l'intérêt de la dette augmente plus vite que l'économie. Nous sommes endettés par-dessus la tête et cela ne peut plus durer. La situation est insoutenable, d'après les lois des marchés des capitaux, et insoutenable également d'après les lois de l'intérêt composé.»

Je termine avec les propos du ministre: «C'est comme si notre pays essayait de monter un escalier roulant qui serait en train de descendre.» On connaît ça, les petits gars qui montent l'escalier roulant dans le métro. C'est bon pour les petits gars, mais pour le monde ordinaire, c'est difficile. Je poursuis : «Le problème est si colossal que nous ne pouvons plus compter sur la croissance économique pour en sortir. Pourquoi? Parce que le déficit est devenu lui-même un boulet pour la croissance. Tant qu'il n'aura pas été vaincu, trop d'investissements resteront à l'état de projet, les taux d'intérêt demeureront élevés, l'emploi diminuera et les générations futures en paieront le prix.»

La dette canadienne est devenue tellement lourde que le gouvernement du Canada se voit maintenant dans l'obligation d'emprunter des milliards de dollars chaque année pour payer les intérêts de sa dette. C'est exactement comme un citoyen normal qui serait endetté vis-à-vis sa banque et qui, chaque année, serait obligé de s'endetter toujours davantage seulement pour payer les intérêts de sa dette. On voit bien que c'est un cercle vicieux qui n'en finit plus.

La dette canadienne qui était de 90 milliards de dollars en 1980 sera, au 31 mars 1995, de 548 milliards de dollars, et ça va continuer. Il y a donc eu une augmention de 509 p. 100 en 15 ans. On sait parfaitement bien qu'il n'y a aucun citoyen qui serait capable d'absorber une augmentation de dette de cette nature. On sait très bien également qu'il n'y a aucune compagnie qui serait capable de subir, sans envisager la faillite à court terme, une augmentation de sa dette de cette portée, et on sait très bien aussi que c'est la même chose pour les pays. D'ailleurs, le Wall Street Journal, en janvier 1995, l'un des plus grands journaux financiers de New York, déclarait que le Canada avait désormais atteint le statut de pays du tiers monde au niveau de sa dette, et allait même jusqu'à évoquer clairement la possibilité très réelle que le Canada fasse faillite.

À ce sujet, le ministre continuait, et je cite son document: Instaurer un climat financier sain, publié en octobre 1994. Il nous faisait un petit aperçu de ce que cela voulait dire, et je continue de le citer: «Une puissante dynamique de la dette est fermement ancrée dans l'économie canadienne et se révèle difficile à corriger. À mesure que les déficits s'accumulent, les frais d'intérêt d'une croissance grimpent également, et on le comprend. Par conséquent, le cercle vicieux continue. Les déficits qui résultent des frais d'intérêt sur la dette actuelle se traduisent par une augmentation de la dette qui, elle, continue d'augmenter. Cela fait plusieurs années maintenant que l'économie canadienne n'est pas assez vigoureuse pour en faire augmenter les recettes suffisamment rapidement pour compenser la croissance rapide des frais d'intérêt, et on ne s'attend pas à un renversement de cette tendance dans l'avenir prévisible.»

Suite à cette analyse, bien sûr, le ministre déposait en Chambre son Budget, budget qui prévoit ou qui tente de ramener le déficit à 3 p. 100 du Produit intérieur brut d'ici 1996-1997, faisant ainsi passer le déficit de 39,7 à 25 milliards de dollars. Et pour ce faire, le ministre nous annonce, dans les deux ans qui s'en viennent, des coupures de l'ordre de 13,4 milliards de dollars.

(1150)

Quelle leçon au juste pouvons-nous tirer du dépôt d'un Budget comme celui-là? Je pense que la première leçon qu'on peut tirer c'est le fait que jusqu'à maintenant, pour les citoyens normaux de ce pays, la dette canadienne s'est accumulée en quelque sorte dans l'abstrait des choses.

Deux cent milliards de dollars, 300 milliards, 500 millliards, pour le citoyen ordinaire, quand il n'en voit pas les effets directs dans sa poche, c'est l'abstrait. Mais la chose déterminante de ce Budget, c'est que maintenant on passera de l'abstrait au concret. Les gens vont commencer à la payer cette dette. On prévoit des coupures massives: assurance-chômage, aide sociale, soins de santé, les étudiants devront s'endetter pour aller à l'école.

Ce matin, mon honorable collègue, à côté de moi, a même fait état du fait que les pensions de vieillesse sont maintenant en jeu, après qu'on vienne d'annoncer-et je le dis sans rire, mais je pense qu'il faudrait rire-une immense augmentation des pensions de vieillesse de 0,78 $ par mois. Il n'y a même pas de quoi s'offrir un café.


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Deuxième constatation qu'on peut tirer de ce Budget, c'est que, le ministre nous le dit lui-même, quoi qu'on dise et quoi qu'on fasse, cette dette continuera d'augmenter et les sommes coupées actuellement dans les services sociaux et qui s'appliqueront dans quelques mois, ces sommes-là, la dette augmentant continuellement, ne pourront qu'augmenter au fur et à mesure que les années passeront.

La troisième constatation s'applique beaucoup plus au Québec, je crois. Pour la première fois de leur histoire, les Québécois et les Québécoises pourront prendre conscience d'un fait: combien il en coûte de faire partie du Canada. Et cela coûtera cher et cela fera mal.

D'ailleurs, on se souvient que le conseiller du premier ministre lui-même est allé à Toronto récemment pour dire à l'intelligentsia canadienne que plus on ferait souffrir le Québec, plus cela ferait mal, plus les Québécois seraient tentés de demeurer dans la Confédération canadienne. Je ne commenterai pas la moralité de ce geste. Je pense que cela relève beaucoup plus de l'imbécillité qu'autre chose et que l'effet sera exactement le contraire.

Bien sûr, la défense est toujours la même: c'est la faute du Québec. Si cela va mal au Canada, c'est la faute du Québec. Le premier ministre lui-même, qui n'a pas dénoncé les propos de son conseiller spécial, donc qui endosse le fait qu'on fera souffrir le Québec, disait, hier ou avant-hier, dans les journaux, que si on disait non à la souveraineté du Québec, les taux d'intérêt baisseraient de quelques points. Il a été immédiatement rabroué par les vrais économistes au Canada qui ont trouvé ses propos extrêmement naïfs.

J'aimerais rappeler au premier ministre deux petits événements qui prouvent éloquemment qu'il n'y a aucun rapport entre la situation désastreuse des finances publiques canadiennes et le rôle politique du Québec. En période de très grande stabilité politique, soit dans les années qui ont suivi le rejet de la souveraineté du Québec en 1980, le Canada a connu les plus hauts taux d'intérêt qu'il n'a jamais connus, ils ont largement dépassé 20 p. 100. Pourtant, on venait de dire oui au Canada.

On se rappelle également 1986. Qui était au pouvoir à ce moment? Au Québec, M. Bourassa; au fédéral, M. Mulroney. C'était bien sûr quelques années avant l'échec de Meech et de Charlottetown. Le Parti québécois était tout à fait tranquille dans son petit coin. Il y a même des gens qui disaient «PQ is dead at this moment.» Le Bloc québécois n'existait pas. Le dollar est descendu à 0,69 $. Et il redescendra probablement à ce niveau très bientôt. Je vous rappelle qu'il n'y avait aucun lien à ce moment entre la situation politique très tranquille au Québec et les déficiences.

Bien sûr, on a toujours dit que c'était la faute du Québec et on continue à le dire. On reprend actuellement les mêmes propos qu'en 1980. On se souvient très bien de ce qu'on nous disait: «Nous mettons nos sièges en jeu au Canada», c'est M. Trudeau qui disait cela, l'honorable Peter Trudeau. Il disait: «Nous mettons nos sièges en jeu politiquement pour qu'il y ait des changements.» On a eu le rapatriement de 1982, qui n'a jamais été accepté par les Québécois, les échecs de Meech et de Charlottetown.

On nous disait aussi, pour faire peur aux Québécois-maintenant on veut leur faire mal, à ce moment, on voulait leur faire peur-si vous faites la souveraineté du Québec, des dettes, du chômage et des taxes, vous en aurez en masse. On a dit oui au Canada à ce moment-là, et la dette est passée de 90 milliards à 548 milliards; le taux de chômage était à 7,5 p. 100, il frôle le 10 p. 100; le nombre de bénéficiaires d'aide sociale a presque doublé et on n'a jamais été aussi taxé qu'on l'est aujourd'hui. Et cela ne fait que commencer.

(1155)

Alors tout ce dont on avait peur d'avoir en devenant un pays, on l'a eu en restant dans la Confédéréation canadienne. Et ce sera pire. Je rappelle les propos du Wall Street Journal: «Ce pays-là s'en va en faillite.»

On a tenu des commissions régionales récemment sur la souveraineté, commissions auxquelles les Québécois ont participé massivement. Mémoire après mémoire, les Québécois sont venus nous dire qu'ils avaient deux options devant eux: demeurer dans la Confédération canadienne ou faire du Québec un pays. Ils nous ont surtout dit qu'ils voulaient plus d'information.

En terminant, je vous dirai que je pense qu'on devra donner beaucoup plus d'information aux Québécois sur les enjeux de la souveraineté et qu'on devra également laisser le Budget canadien porter ses fruits et annoncer combien il en coûte exactement pour faire partie du Canada. Je pense très sincèrement qu'au momement venu, au bon moment, les Québécois, massivement et démocratiquement, choisiront finalement la seule voie possible: faire du Québec un pays.

[Traduction]

M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais prendre quelques instants pour discuter des conséquences qu'aura le budget dans la circonscription de Haldimand-Norfolk et parler aussi un peu d'agriculture.

Ces derniers jours, nous avons entendu les députés de l'opposition loyale de Sa Majesté et du Parti réformiste parler de l'iniquité du budget. Ils veulent laisser entendre que les compressions dans le secteur agricole sont effectuées au Québec ou dans l'Ouest et qu'elles ne sont pas réparties équitablement dans tout le pays.

Lorsque le ministre des Finances a énoncé ses propositions budgétaires, et lorsque des débats, des négociations et des discussions ont eu lieu au préalable avec divers groupes, au sein de notre caucus et avec les habitants de ma circonscription, compte tenu de l'ampleur de la dette et du déficit ainsi que des problèmes qui en résultent, on nous a souligné que l'équité s'imposait. Les Canadiens de toutes les régions sont prêts à faire le nécessaire pour aider à assainir les finances de l'État, à condition que le gouvernement fasse preuve d'équité partout dans le pays.

Jetons un coup d'oeil sur l'agriculture. Des compressions ont été faites dans trois domaines importants. La subvention aux produits laitiers a été réduite de 30 p. 100 sur deux ans, la Loi sur le transport du grain de l'Ouest a été supprimée et, il importe de le noter, la recherche et le développement ont été centralisés.

Pour ce qui est de la subvention aux produits laitiers, étant donné ce qui se passe avec le GATT et les réformes qui s'imposent dans la gestion de l'offre, tous les producteurs laitiers se rendent compte, bien sûr, que des changements auront lieu et qu'ils devront, au cours des 20 prochaines années, trouver


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des moyens de livrer concurrence sur les marchés internationaux, et non seulement sur le marché canadien. Cette réduction de 30 p. 100 dans la subvention aux produits laitiers portera un coup dur aux producteurs laitiers. Ils devront certes faire leur part pour réduire le déficit.

Lorsque je m'entretiens avec les agriculteurs de ma circonscription, et d'ailleurs de tout le Canada, la plupart se disent prêts à faire ce sacrifice pour aider à réduire la dette et le déficit. Cependant, ils veulent que d'autres Canadiens en fassent autant.

Ils parlent surtout de la réforme de la politique sociale. Ils veulent s'assurer que nos programmes sociaux sont pertinents, efficaces et n'obligent pas toute une catégorie de gens à compter sur les aumônes de l'État. Ils estiment également que les dépenses devraient être comprimées dans certains programmes sociaux. À mon avis, lorsqu'ils verront que le ministre et le gouvernement prennent un engagement ferme en ce sens, ils seront tout disposés à accepter une réduction de leur subvention.

(1200)

On a constaté certaines lacunes dans ce domaine. Le ministre a précisé que nous reviendrions probablement sur cette question à l'automne et que certains changements nécessaires seraient alors mis en oeuvre.

J'ai tenu, dans ma circonscription, une réunion où de nombreux citoyens sont venus exprimer leurs préoccupations concernant la réforme de la politique sociale et me communiquer des idées très valables. Je suis certain que bien des députés de tous les côtés de la Chambre ont fait de même. Je sais que mon collègue d'en face aime organiser ce genre de forums publics qui sont ouverts à tous. Ils sont une excellente tribune pour les députés, car ils nous donnent l'occasion d'entendre nos électeurs donner leur avis sur différents sujets importants et exprimer toutes sortes d'idées.

Bien des producteurs de lait présents à cette réunion m'ont dit qu'ils comprenaient les mesures du gouvernement. Ils ne sont pas particulièrement heureux de voir que l'argent sortira de leur poche, mais ils étaient prêts à l'accepter, dans la mesure où ils se sont rendu compte que le gouvernement s'engageait fermement à prendre des mesures semblables dans d'autres domaines.

Durant les discussions sur la Loi sur le transport du grain de l'Ouest, le Parti réformiste a signalé qu'il voulait voir disparaître cette loi. Toutefois, étant donné nos engagements en vertu du GATT, nous voulions nous assurer que nous pourrions offrir certains rajustements aux agriculteurs et que le système pourrait quand même continuer de fonctionner.

À cet égard, certains points m'inquiètent. En ma qualité de président du Comité permanent de l'agriculture, j'ai rencontré les députés de tous les partis. Nous avons décidé qu'il valait mieux créer un sous-comité sur le transport, qui étudierait plus précisément ces questions. Les agriculteurs de l'Ouest et les gens qui dépendent de la Voie maritime du Saint-Laurent sont inquiets pour diverses raisons. Nous espérons que les députés de ce sous-comité, présidé par le député de Malpèque, pourront faire quelque chose pour que l'on tienne compte des inquiétudes de ces agriculteurs et pour que le ministre de l'Agriculture et le premier ministre en soient informés directement.

Le paiement de 1,6 milliard de dollars s'échelonnera sur deux ou trois ans et cette période sera en quelque sorte une période de rajustement. Les agriculteurs avec lesquels je me suis entretenu ne sont pas très fiers de voir que le montant viendra de leur région, mais ils sont prêts, comme les agriculteurs de toutes les régions et comme tous les Canadiens, à faire leur part pour réduire le déficit et la dette.

C'est à peu près le leitmotiv qui est ressorti de mes rencontres avec mes électeurs de Haldimand-Norfold, lorsque j'y suis retourné, après le dépôt du budget, pour discuter de ce budget avec eux. Habituellement, après la présentation d'un budget, comme le sait le député néo-démocrate d'en face, qui siège ici depuis vingt ou trente ans, même si on dirait qu'il est ici depuis toujours, on reçoit une vingtaine ou une trentaine d'appels. Après la présentation de ce budget-ci, je n'ai reçu que trois appels des habitants de ma circonscription. J'en ai déduit que l'on avait trouvé ce budget équitable.

Après la présentation du budget, alors que je participais aux différents événements organisés dans ma circonscription, j'ai constaté que les gens acceptaient le budget, quoique pas de gaieté de coeur, mais parce qu'ils avaient compris qu'il fallait s'attaquer à la dette et au déficit et faire des réductions. Ils étaient donc prêts à l'accepter dans la mesure où ils pouvaient sentir que cela allait entraîner une amélioration de la situation et que le gouvernement allait s'engager à être plus responsable sur le plan financier.

J'ai parlé au ministre des Finances, à une réunion du caucus, et je sais que cet engagement existe. Nous devons composer avec le fait que 43 ou 44 p. 100 de notre dette est contrôlée par des intérêts étrangers et que notre déficit courant pose un problème.

Le ministre des Finances m'a dit qu'il prendrait les mesures fermes qui s'imposent pour régler ce problème, qui est un problème pour tous les Canadiens. C'est un problème pour mes enfants et les enfants de tout le pays. C'est une chose dont ils ne tiennent pas particulièrement à hériter. Nous allons régler ce problème. Nous allons nous pencher sur la question de l'équité, non seulement dans les dépenses budgétaires futures du pays, mais aussi dans le secteur de l'agriculture, alors que, en collaboration avec l'opposition et le troisième parti, nous allons aider les agriculteurs canadiens à composer avec les incertitudes du nouvel ordre économique mondial.

(1205)

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, comme nous le savons tous, le 27 février, le ministre des Finances a présenté son deuxième budget. On y disait qu'on allait réduire les dépenses de quatre milliards de dollars et augmenter les impôts de 1,5 milliard de dollars. On ajoutait que le déficit annuel prévu ne serait que de 32,7 milliards de dollars qui viendront s'ajouter à notre dette.

Ce document ne précisait pas que le gouvernement allait consacrer 50 milliards de dollars au service de la dette, cette année, et que notre dette globale allait augmenter de plus de cent milliards de dollars durant le mandat du gouvernement libéral. Pensez-y! Nous consacrons 50 milliards de dollars au service de


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la dette. Combien de services sociaux ou autres pourrions-nous financer, chaque année, avec tout cet argent?

La réaction étonnamment modérée de la population à l'égard de ce budget semble montrer que les Canadiens ne comprennent pas pleinement la gravité de notre situation financière. Réalisent-ils, aux quatre coins de notre pays, que nous avons une dette de 550 milliards de dollars et que, à la fin du mandat du gouvernement, elle sera passée à 650 milliards de dollars? Je ne pense pas que les gens en soient encore conscients.

Il nous incombe donc, en tant qu'opposition responsable, de dire aux Canadiens que tout ne va pas pour le mieux dans le meilleur des mondes. Nous devons faire beaucoup plus pour nous attaquer à notre dette et à notre déficit qui ont des répercussions catastrophiques. Notre vis-à-vis de Haldimand-Norfolk nous a dit n'avoir reçu que deux coups de téléphone à ce sujet; cela montre bien que la population ignore tout de la gravité du problème.

Que peut-on faire? Le gouvernement prétend qu'il agit le plus rapidement possible pour résoudre le problème. Cependant, si on examine de plus près ce budget bien timide, on s'aperçoit qu'il n'en est rien et qu'on pourrait faire bien davantage.

En ce qui concerne mon domaine de responsabilité, les langues officielles, je peux facilement montrer comment nous pourrions épargner de l'argent sans pour autant réduire les services à la population. Nous allons nous pencher sur mon petit domaine, mais on pourrait réaliser des économies dix ou vingt fois plus grandes dans d'autres domaines. Il est donc possible de trouver de l'argent.

Pour être juste envers le gouvernement, il a commencé à agir même dans le domaine des langues officielles pour supprimer certaines dépenses inutiles, mais il n'est pas allé assez loin. Les prévisions budgétaires montrent qu'on a réduit de 50 millions de dollars les dépenses au titre des langues officielles au ministère du Patrimoine canadien. De même, on a réduit quelque peu le budget du commissaire aux langues officielles.

Là encore, ce sont de petits pas dans la bonne direction. Il y a beaucoup d'autres programmes qu'on pourrait supprimer ou sabrer. Le financement des groupes d'intérêts est un exemple classique. Il n'est question que d'un petit secteur dans le programme global des langues officielles. Cette année, le ministère du Patrimoine canadien va dépenser, à lui seul, 28,5 millions de dollars à cet égard. Où va donc cet argent? Encore cette année, on va verser un million de dollars à Alliance Québec, un groupe qui prétend défendre les droits linguistiques des anglophones du Québec. Je dis «qui prétend», car il est difficile de vraiment croire que ce groupe accomplit un travail utile sur le plan de la préservation des droits des anglophones du Québec.

(1210)

Plus tôt cette semaine, j'ai pris la parole à la Chambre pour demander au gouvernement pourquoi il avait donné 1,2 million de dollars à Alliance Québec, puisque nous avons appris que, sur ce montant, 837 000 $ sont dépensés en salaires et 95 000 $ servent à payer le loyer de ses bureaux luxueux au centre-ville de Montréal. Par ailleurs, cette organisation ne compte plus que 2 500 membres, soit le nombre le plus faible de son histoire. Le chef d'Alliance Québec, M. Hamelin, a contesté ces chiffres à une émission de radio, cette semaine, en déclarant que le nombre de membres était passé à 3 700. Même si c'était le cas, on sait que l'organisation comptait entre 15 000 et 20 000 membres, il y a quelques années. Que se passe-t-il donc?

Lorsque je l'ai interrogé au sujet de la subvention accordée à Alliance Québec, le gouvernement a répondu qu'il était important d'appuyer les minorités linguistiques, tant au Québec qu'à l'extérieur, que c'était ce qu'il avait fait et entendait continuer de faire.

Cette réponse ne résiste pas à un examen plus approfondi. Comment peut-on prétendre que le fait de remplir les poches de quelques libéraux nantis de la région de Montréal aide de quelque façon que soit la communauté anglophone du Québec? Alliance Québec dépense 75 p. 100 de son budget payé par les contribuables en salaires et loyer. Dans ce cas, que peut vraiment faire cette organisation pour soutenir la communauté qu'elle prétend représenter?

Pire encore, lorsque le personnel de mon bureau a demandé ce genre de renseignements financiers à Alliance Québec et à d'autres organisations linguistiques semblables ailleurs au Canada, on lui a répondu que cette information n'était pas du domaine public et que nous ne pouvions pas y avoir accès. On nous a dit de communiquer avec le Conseil du Trésor pour en savoir plus. Or, le Conseil du Trésor nous a répondu qu'il pouvait seulement nous communiquer les renseignements généraux sur les subventions qui étaient déjà publiés dans les comptes publics. Ces renseignements nous étaient, par conséquent, de peu d'utilité. On nous a dit que, pour obtenir des renseignements plus détaillés, nous devions nous adresser à Patrimoine Canada, qui nous a répondu qu'il ne possédait pas ce genre d'informations dans la plupart des cas et que les renseignements qu'il avait ne nous étaient pas accessibles.

Depuis un an et demi, j'essaie d'obtenir des renseignements à la Chambre concernant des dépenses du gouvernement et je me heurte constamment à des tactiques dilatoires. L'argent des contribuables est censé être dépensé dans l'intérêt de tous les Canadiens, mais ceux-là mêmes qui paient ne peuvent pas savoir où va leur argent.

Ce n'est que grâce à la persévérance d'un journaliste de La Presse que l'information sur Alliance Québec a été portée à l'attention de la population. Il a fallu un journaliste pour révéler ces faits. C'est inacceptable!

Il est également intéressant de constater que les langues officielles sont peut-être le seul programme fédéral à échapper totalement à la loupe du vérificateur général. Créé il y a un quart de siècle, il n'a jamais fait l'objet d'une vérification en règle. Que se passe-t-il donc à ce chapitre? Où cet argent est-il dépensé? Que peut-on éliminer?

Dans la partie V des comptes publics pour 1993-1994, qui ventile en détail les fonds consacrés aux services spéciaux professionnels, on peut constater que près de neuf millions de dollars ont été affectés aux langues officielles. Voici quelques chiffres à cet égard: Conseil privé, 900 000 $; Communications Canada, 4 millions de dollars; Transports Canada, 340 000 $;


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Énergie, Mines et Ressources, 1,6 million de dollars. Comment ces sommes ont-elles été dépensées et à quelles fins? Mystère!

De même, d'après la partie VIII des comptes publics pour 1993-1994, un montant de 273 millions de dollars a été consacré aux paiements de transfert au titre des langues officielles. Sur ce montant, plus de 270 millions de dollars sont allés à Communications Canada et 2,5 millions de dollars, à Emploi et Immigration. Et encore une fois, à quelle fin? Seuls les gens qui ont reçu l'argent le savent et ils ne veulent rien dire.

Chose certaine, il y aurait tout lieu de procéder à une vérification exhaustive pour savoir si toutes ces sommes d'argent sont dépensées à bon escient. Or, le gouvernement n'a pas la volonté nécessaire pour le faire. C'est une vache sacrée et il n'en démord pas.

Une étude attentive du budget nous montre qu'il ne fait pas son boulot. Nous ne pouvons pas nous permettre de progresser nonchalamment vers la réalisation de l'objectif d'un déficit nul. Il sera bientôt trop tard pour prendre des mesures énergiques et c'est peut-être la cas déjà cette année.

(1215)

Je conclus en exhortant le gouvernement à examiner sérieusement les dépenses faites dans mon seul petit secteur, les langues officielles, dans un effort d'élimination du déficit que les Canadiens appuieront.

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir participer à ce débat sur le budget. Je suis sûr que je n'aurai pas assez de dix minutes pour traiter toutes les questions que j'aimerais aborder. J'énumérerai les grands points qui me préoccupent le plus dans ce budget.

L'équité de ce budget est un des points qui me préoccupent, et j'aimerais discuter plus à fond de cette question avec le député de Haldimand-Norfolk, mais je n'aurai pas le temps de le faire.

L'une des raisons qui font que ce budget a été aussi bien accueilli, c'est que le gouvernement a donné l'impression qu'il ne comportait pas de hausses d'impôts. À bien des égards, c'est vrai qu'il ne prévoit pas le genre de hausses d'impôt qu'on anticipait avant sa présentation. C'est un truc vieux comme le monde d'inquiéter les gens au sujet d'une série de mesures possibles, puis de ne pas intégrer ces mesures au budget. Ainsi, les gens sont soulagés.

Le fait est pourtant que les Canadiens devront puiser davantage dans leurs poches pour toutes sortes de raisons, à la suite de ce budget. Ce ne sera peut-être pas sous forme d'impôts, mais on devra certainement dépenser davantage pour obtenir des services qui étaient auparavant fournis par le gouvernement, qu'il s'agisse de frais d'accès aux parcs nationaux, de restrictions à l'assurance-maladie ou autre chose. Nous ne devons pas nous faire d'illusions-les Canadiens n'ont pas eu de cadeau avec ce budget, absolument pas.

Un certain nombre d'éléments m'inquiètent dans ce budget. Ce qu'il y a de plus inquiétant pour mes électeurs et moi-même, c'est la privatisation du Canadien National. Étant donné l'emplacement des ateliers principaux de réparation du CN à Transcona, dans la circonscription de Winnipeg-Transcona, c'est une chose qui n'est pas sans nous inquiéter énormément.

Cela montre à quel point cette législature et le Parti libéral ont glissé vers la droite. Le Parti libéral propose de privatiser le CN, chose qu'auparavant non seulement on aurait pu penser impossible de sa part, mais qui va à l'encontre des promesses de nombreux députés et candidats libéraux aux cheminots de Winnipeg et du Manitoba, lors des élections de 1993.

De nombreuses personnes-pas moi-avaient l'impression en 1993, étant donné ce que disait le député de Winnipeg-Sud-Centre, le ministre du Développement des Ressources humaines, que si les libéraux étaient élus l'exode des emplois de cheminots de Winnipeg vers Edmonton ou vers d'autres endroits s'arrêterait et Winnipeg reprendrait sa place de plaque tournante.

C'est exactement l'inverse qui se produit. L'actuel ministre des Transports, par ses déclarations et la politique qu'il semble suivre, fait pratiquement paraître les ministres des Transports conservateurs comme des amis des cheminots.

La privatisation du CN, prévue dans le budget, n'est que la cerise sur le sundae en ce qui concerne ce qu'a subi le rail aux mains du gouvernement conservateur précédent et maintenant de celui-ci. C'est une trahison des promesses libérales et de la politique libérale. C'est quelque chose qui montre combien l'idéologie des libéraux a changé, une fois qu'ils ont été au pouvoir, en dépit de tout ce qu'ils avaient dit dans l'opposition. Ils ont repris où les conservateurs avaient laissé et ils ont même accéléré les mesures qui étaient dans le programme de Mulroney.

En ce qui concerne le transfert social canadien et le financement global de toutes les dépenses sociales, une fois encore c'est une trahison de tout ce que le Parti libéral a défendu lorsqu'il était dans l'opposition et lorsqu'il était au gouvernement précédemment.

(1220)

Peut-être le ministre des Finances aurait-il dû attendre jusqu'au 8 mai pour présenter son budget. Nous aurions pu alors célébrer le même jour le 50e anniversaire de la fin de la Deuxième Guerre mondiale et de la fin du Canada d'après-guerre.

Car c'est essentiellement ce que fait ce budget. Il marque la fin du type de société que nous avons bâtie ces cinq dernières décennies. Le fait que la fin de cette ère arrive au moment où le NPD est considérablement affaibli au Parlement n'est pas une coïncidence.

Le gouvernement n'a à subir de la gauche aucune pression, aucune critique, aucune opposition-en tous cas pas du type de celles auquel il était habitué. Tout ce qu'il a à subir, ce sont des pressions de la droite, de mes collègues réformistes ici présents. Le Bloc québécois, lui, est seulement préoccupé par son propre programme.

Le gouvernement et les milieux d'affaires libéraux de droite, qui pendant longtemps ont dû lutter contre un contingent de gauche dans leur propre parti et avec le NPD à gauche, ont à présent la partie belle. Le ministre des Finances est un libéral de droite. Il s'en donne à coeur joie.


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Je ne sais pas ce que fait le premier ministre. Il laisse le ministre des Finances faire tout ce qu'il veut. Peu importe que cela soit en contradiction avec ce qu'ont dit les libéraux auparavant.

Je me demande avec inquiétude quel effet cela va avoir sur les soins de santé. Quand cela va-t-il cesser? Quand la ministre de la Santé et le premier ministre vont-ils dire à Ralph Klein, en Alberta, qu'assez c'est assez, que la Loi canadienne sur la santé doit être appliquée, que nous allons établir des normes nationales dans ce pays et que tous ces bavardages au sujet d'appliquer la Loi canadienne sur la santé de façon flexible et d'autres choses que nous entendons cesseront bien.

La situation n'est pas près de changer. Il me semble que les libéraux ont décidé que la Loi canadienne sur la santé était dépassée et qu'ils allaient en permettre le démantèlement de plusieurs façons. Ils vont autoriser les provinces à faire des expériences qui vont saper le régime d'assurance-maladie.

C'est quelque chose que j'avais prédit, en 1984, dans mon dernier discours sur la Loi canadienne de la santé. J'avais dit que si le gouvernement fédéral n'était pas prêt à mettre suffisamment d'argent dans le régime, tôt ou tard des pressions émergeraient du public, des gouvernements provinciaux et, finalement, du gouvernement fédéral qui pousseraient au démantèlement du régime d'assurance-maladie.

Pour être un succès, le régime doit recevoir un financement suffisant. C'est une évidence que d'autres participants à ce débat ont fait ressortir. Il ne suffit pas d'avoir des normes nationales. Il faut également avoir un financement suffisant. Si le financement est insuffisant, pour commencer, le gouvernement fédéral ne peut pas s'en servir comme d'un outil pour faire respecter les normes nationales et ensuite, les gens finissent par être déçus par un régime d'assurance-maladie qui ne correspond pas à leurs attentes, et ce, en dépit des normes nationales.

Quant à l'élimination de la subvention du Nid-de-Corbeau, c'est là encore un coup traître, non seulement à l'égard des chemins de fer, des agriculteurs et des cheminots, c'est également une capitulation supplémentaire du gouvernement devant cette opposition massive à tout ce qui ressemble, de près ou de loin, à une subvention. Une telle idéologie anti-subvention qui ne tient pas compte de la réalité d'un pays comme le Canada est très dangereuse pour notre pays. À bien des égards, le Canada s'est édifié selon un axe est-ouest, résistant à des pressions naturelles nord-sud. Si nous supprimons toutes ces choses qui nous unissent d'est en ouest et si nous décidons de ne plus en tenir compte, nous allons nous retrouver avec un pays entièrement différent.

C'est peut-être ce que veut le gouvernement, mais ce n'est pas ce que les libéraux disaient quand ils formaient l'opposition. Ils devraient fournir des explications aux Canadiens.

Même en ce qui concerne l'élimination de la subvention du Nid-de-Corbeau, le gouvernement devrait s'empresser d'expliquer comment il procédera pour que les producteurs reçoivent l'argent versé en compensation, et non les propriétaires des terres agricoles, comme cela pourrait se produire compte tenu du libellé du projet de loi.

Il ne suffit pas que le gouvernement dise que la Société du crédit agricole veillera à ce que les producteurs touchent l'argent. Le gouvernement doit veiller à ce que les producteurs le reçoivent, peu importe qui ils sont ou de qui ils louent des terres agricoles.

(1225)

Enfin, en ce qui concerne le déficit, j'ai écouté le député réformiste quand il a déclaré que le gouvernement devait s'attaquer au déficit avec beaucoup plus de détermination.

Je voudrais bien que les réformistes et les ministériels s'attaquent plus sérieusement aux véritables causes du déficit. Les néo-démocrates sont d'avis que ces causes remontent aux échappatoires fiscales qui ont été créées par un gouvernement libéral, au milieu des années 1970, et à la politique des taux d'intérêt réels élevés qui a suivi et qui règne depuis 15 ans. Ensemble, ces échappatoires fiscales et cette politique des taux d'intérêt élevés sont à l'origine du déficit.

Les dépenses du secteur social n'en sont pas la cause. Ces dépenses n'ont pas augmenté comme certains l'ont laissé entendre et elles n'ont pas causé le déficit. Elles devront peut-être faire partie de la solution, en ce sens que nous devons évidemment examiner la façon dont l'argent est dépensé et voir s'il ne pourrait pas l'être plus judicieusement. Toutefois, à défaut de revoir notre politique des taux d'intérêt élevés, notre politique monétaire et notre façon de financer la dette au Canada, nous resterons toujours confrontés au problème. Nous continuerons de consacrer 50 milliards de dollars par année au paiement des intérêts.

Si ces intérêts font problème, revoyons la politique des taux d'intérêt élevés qui en est la source. Examinons le rôle de la Banque du Canada et voyons s'il n'y a pas moyen pour la Banque de financer une plus grande partie de la dette nationale, comme elle avait l'habitude de le faire. Revoyons la façon dont les banques privées on pu imprimer et prêter de l'argent au gouvernement, en réalisant un bénéfice considérable aux dépens des Canadiens, sans devoir effectuer les dépôts appropriés.

Le vice-président: J'ai le regret d'informer le député que son temps est écoulé.

M. Blaikie: Merci, monsieur le Président. J'avais encore beaucoup à dire sur le sujet, mais je ne disposais que de dix minutes.

M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le débat porte sur l'exécution de certaines dispositions du budget fédéral. Cependant, je voudrais profiter de l'occasion pour reprendre un point qu'a soulevé le député à la fin de son intervention et déborder le cadre du débat pour examiner toute la question de la dette nationale du Canada, ce monstre qui ne cesse de grandir et à qui il faut consacrer 44 milliards de dollars par année simplement pour l'alimenter. Comme le signalait le ministre des Finances dans le budget, les frais de service de la dette atteindront 50 milliards de dollars avant que le rapport entre la dette et le produit intérieur brut ne commence à s'améliorer.


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Comme tout le monde le sait, le moment est bien choisi pour parler de la dette puisque des agents du ministère des Finances rencontrent des représentants de la société Moody's, la société d'évaluation du crédit établie à New York, pour discuter de la baisse possible de la cote du Canada. Si les pourparlers tournent mal et si Moody's décide finalement de revoir notre cote à la baisse, les frais d'emprunt qu'il nous faudra assumer pour rembourser notre dette seront encore plus élevés.

Comme on nous l'a souvent signalé, le livre rouge des libéraux omet d'aborder deux questions: quand allons-nous éliminer le déficit et que ferons-nous par la suite avec la dette accumulée du Canada?

Un électeur de la circonscription de Don Valley-Ouest, l'analyste financier Ross Healy, de la Strategic Analysis Corporation de Toronto, propose une solution élégante et radicale au problème de la dette du Canada qu'il appelle la solution du phénix. Au coeur de sa proposition se trouve une méthode qui est souvent utilisée pour restructurer des sociétés privées et qui consiste à équilibrer le bilan en convertissant la dette excessive par du capital-actions. Cela fait de la solution du phénix une solution conventionnelle et même courante dans le secteur privé, mais une solution unique pour le secteur public, audacieuse au niveau des valeurs offertes et radicale dans sa façon de transformer les finances publiques.

Voici, dans les mots de M. Healy, la solution qui est proposée:

[. . .] un engagement de prise de participation pour une somme allant jusqu'à 780 milliards de dollars qui sera utilisé pour réduire la dette des gouvernements fédéral et provinciaux. Le «capital-actions» correspondra à 30 ans de recettes fiscales, afin que sa valeur actuelle suffise à remplacer la dette du gouvernement. Le nouvel instrument sera appelé la fiducie canadienne du phénix. Des actions de la fiducie canadienne du phénix seront échangées contre les dettes courantes des administrations publiques à raison d'un dollar pour un dollar. Autrement dit, la dette actuelle sera remplacée par du capital-actions et le succès de cette initiative ne reposera pas sur l'injection de nouveaux capitaux.
(1230)

Voici les détails de la proposition. Les gouvernements fédéral et provinciaux vendent les droits sur des recettes fiscales futures à une fiducie exemptée d'impôt, ces recettes pouvant atteindre 780 milliards de dollars, soit le total de la dette directe du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux. Des parts de la fiducie seraient échangées contre des titres de la dette actuelle.

En utilisant un taux nominal de croissance du PIB de 3,5 p. 100 et un taux d'escompte exempt d'impôt de 4,5 p. 100, il faudrait environ 4,2 p. 100 du PIB chaque année pendant 30 ans pour payer le service et le remboursement des 780 milliards de dollars d'actions créées. L'argent proviendrait des recettes fiscales existantes.

Le service de la dette fédérale et des dettes provinciales coûte actuellement environ 60 milliards de dollars par année et va en augmentant. La proposition permettrait d'économiser immédiatement environ 50 p. 100 du coût du service de la dette. L'argent payé ne couvrirait pas uniquement le coût du service de la dette, mais aussi l'amortissement du capital.

Ce serait comme un prêt hypothécaire et les paiements confondus de dividendes et de capital seraient faits annuellement et le revenu de la fiducie serait de 4,2 p. 100 du produit intérieur brut canadien pendant 30 ans. Les paiements annuels augmenteraient en proportion directe de la croissance du PIB.

Deux questions viennent immédiatement à l'esprit. Si un tel système fonctionnait, quels en seraient les avantages? Et, bien sûr, ce qui est le plus important, est-ce qu'un tel système fonctionnerait?

Tout d'abord, les avantages. Des économistes ont calculé que le niveau actuel d'endettement du gouvernement du Canada constitue une sérieuse entrave à la croissance économique, car cela encombre le marché privé de l'emprunt. Ces économistes estiment que le produit intérieur brut du Canada serait de 110 à 140 milliards de dollars plus élevé que ce qu'il est actuellement si cette dette n'existait pas.

L'élimination de la dette du gouvernement permettrait au Canada de réduire de façon permanente ses taux d'intérêt, ce qui améliorerait le climat pour les innovations, les investissements et la croissance à long terme.

La réduction du coût du service de la dette gouvernementale de 50 p. 100 et les mesures budgétaires proposées en février permettraient au gouvernement d'éliminer la dette fédérale en deux ans et non pas simplement de la ramener à 3 p. 100 du PIB. La combinaison d'une croissance économique plus vigoureuse et d'excédents budgétaires permettrait aux gouvernements de réduire les taxes, ce qui stimulerait davantage la croissance économique. La solution phénix engendrerait un cycle économique très positif.

La grande question est évidemment de savoir si un tel système peut fonctionner. Plus précisément, y aura-t-il suffisamment d'investisseurs qui échangeront leurs obligations d'État pour des parts de la fiducie du phénix pour que cette solution soit efficace? Selon Ross Healy et son associé, Enrico Sgromo, «les investisseurs échangeront leurs obligations s'ils estiment que les parts de la fiducie du phénix représentent un bon investissement et que les obligations actuelles du gouvernement du Canada représentent un risque accru à cause de la crise financière à laquelle le gouvernement est confronté.» Compte tenu des récents commentaires de la firme Moody's, au moins la dernière partie de cette hypothèse semble raisonnable.

Le principal attrait à court terme pour les investisseurs étrangers est l'impact positif que cela aurait sur le dollar canadien, dont la valeur augmenterait immédiatement. À long terme, la participation à une économie croissante avec des taux d'intérêt peu élevés offrirait aux investisseurs étrangers et canadiens la possibilité de réaliser des gains importants. Ce qu'il y a de merveilleux dans cette solution, c'est que plus le Canada connaît du succès sur le plan économique, plus les investisseurs


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connaissent du succès sur le plan financier. Si nous réussissons, ils réussissent aussi.

Je viens de décrire les grandes lignes d'un concept qui a été expliqué de façon plus détaillée ailleurs. Je voulais exposer cette nouvelle idée dans le but d'obtenir des critiques constructives de la part de mes collègues à la Chambre et aussi des Canadiens qui nous regardent peut-être aujourd'hui.

Je ne prétends pas que la solution du phénix est parfaite. Je dis seulement qu'elle est meilleure que toutes les autres solutions proposées jusqu'à maintenant pour régler le problème de la dette, du moins celles que j'ai entendues.

Finalement, ce sera aux investisseurs du monde entier de décider s'ils sont prêts à se lancer dans un nouveau genre d'investissement. Au fil des années, la communauté financière a montré une remarquable capacité d'innovation, même si cela lui a parfois coûté cher, comme on l'a vu récemment dans l'affaire de la Barings Bank. Cependant, je crois que l'idée d'exiger une commission même modeste pour la conversion en capital-actions de 780 milliards de dollars de dette pourrait intriguer même les esprits les plus blasés de Bay Street et de Wall Street.

(1235)

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de traiter aujourd'hui du projet de loi C-76 qui introduit certaines dispositions du Budget fédéral présenté par le ministre des Finances en février dernier.

Force est de constater que ce projet de loi confirme les appréhensions de l'opposition officielle à la suite du dépôt du Budget fédéral. Mais comment se concrétisent ces appréhensions?

Le gouvernement libéral ne peut plus indûment gonfler sa dette et il a conclu que la réduction du déficit fédéral passe maintenant par le pelletage de ce déficit dans la cour des provinces. Le grand frère libéral s'est subitement transformé en mauvais partenaire; un très mauvais partenaire qui a décidé unilatéralement de réduire ses paiements de transfert aux provinces de plus de 7 milliards de dollars au cours des trois prochaines années.

Ces coupures, le fédéral les effectuera en 1996 seulement, histoire de maintenir l'illusion que le fédéralisme rapporte surtout au Québec; une illusion que l'on fera miroiter durant la période référendaire.

Mais l'opposition officielle veille au grain. Cette opération maquillage est odieuse. Dès 1996, c'est plus de 700 millions de dollars que perdra le Québec et, en 1997, ce serait plus d'un milliard. Cette situation est inacceptable.

Ce qui est aberrant, c'est que ce gouvernement irresponsable tente de responsabiliser les provinces face à une situation qu'il a lui-même provoquée. On refile la facture aux provinces sans leur donner de nouveaux pouvoirs. On décentralise la dette fédérale sans décentraliser l'État fédéral.

En matière sociale, le grand transfert de compétence que nous attendions n'a pas eu lieu. En dépit des apparences, le gouvernement fédéral persiste à vouloir s'immiscer dans des domaines de compétence relevant exclusivement des provinces. Il se retire, mais refuse de consentir aux provinces une part équivalente de points d'impôt. Est-ce cela le fédéralisme flexible que l'on tente de nous vendre à tout prix?

Où est la souplesse lorsqu'on refile, manu militari, la facture aux soi-disant partenaires de cette belle fédération et que l'on impose dans plusieurs champs de compétence des normes nationales qui se veulent de plus en plus contraignantes?

L'article 48 de l'actuel projet de loi confirme qu'outre les normes nationales dans le secteur de la santé, de nouvelles normes en matière d'aide sociale et d'enseignement postsecondaire seront introduites. Et gare aux provinces qui ne respecteront pas les règles; on leur coupera les vivres.

Le gouvernement fédéral rétorquera que ces normes feront l'objet d'un consensus de la part des provinces avant d'être en vigueur. Comment expliquer dès lors que l'on tente d'introduire ces dites normes nationales avant qu'il n'y ait eu négociation entre les parties?

Et je passe sous silence l'obligation pour les provinces de mentionner le Transfert social canadien dans toute la publicité et la documentation concernant les services de santé offerts par les provinces. Le fédéralisme flexible est mort-né, vive le fédéralisme impérial.

Mais l'empire s'effondre, écrasé sous le fardeau des taxes et des impôts. En dépit des coupures dans les programmes sociaux et dans les paiments de transfert, l'ogre fédéral aura besoin d'encore plus d'argent pour se nourrir au cours des trois prochaines années.

Ainsi, les recettes du gouvernement canadien passeront de 125 milliards de dollars en 1994-1995 à 137,4 milliards de dollars en 1996-1997. Quant au taux d'imposition, il augmentera de plus de 3,5 milliards sur une période de trois ans. En définitive, c'est payer plus tout en recevant moins.

Est-il nécessaire de rappeler à cette Chambre que, depuis 1980, le ratio des revenus gouvernementaux en rapport avec le Produit intérieur brut a augmenté de 18 p. 100? Ainsi, depuis le référendum québécois de 1980, l'augmentation des taxes et des impôts a été deux fois plus élevée au Canada que la moyenne des pays du G-7.

Il est scandaleux de constater que ce gouvernement, qui, d'une part, s'apprête à couper dans les paiements aux provinces et à augmenter les taxes et les impôts, refuse, d'autre part, d'agir pour mettre fin au chevauchement des compétences et au gaspillage éhonté des fonds publics.

(1240)

Où sont les véritables mesures d'élimination du gaspillage et de chevauchements entre paliers de gouvernement? Poser la question, c'est y répondre. Avec le régime fédéral, il y aura toujours deux ministères de l'Environnement, deux ministères de la Santé, deux ministères de la Justice. C'est dans la nature même de ce régime d'étendre de plus en plus ses tentacules. Les effets négatifs du Budget fédéral, reconduit dans le projet de loi C-76, se feront sentir durement par les provinces, surtout par le Québec.

Une étude récente de la firme Wood Gundy révèle que le plan de contrôle des dépenses proposé par le gouvernement fédéral et qui vise à réduire les paiements de transfert aux provinces, de même que les multiples changements effectués au cours des dix dernières années au chapitre du financement des programmes établis, ont eu un impact négatif sur les déficits provinciaux.


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Le gouvernement du Québec a évalué, quant à lui, que de 1982 à 1994, l'impact cumulatif de ces mesures a entraîné un manque à gagner de 14,3 milliards de dollars pour le Québec. Le dernier Budget présenté par le gouvernement fédéral tend à confirmer l'accélération de cette tendance.

En effet, les transferts financiers fédéraux représentent une part de plus en plus faible des revenus du Québec. Pour ne citer qu'un exemple, en 1983, les transferts fédéraux représentaient près de 29 p. 100 des revenus de l'État québécois; en 1994, cette proportion tombe à 20 p. 100.

Wood Gundy considère que le seul coût des désengagements fédéraux quant au financement des programmes établis, responsable de 28 p. 100 des déficits provinciaux en 1993-1994, passera à plus de 60 p. 100 de ceux-ci en 1996-1997. Le Budget fédéral déposé en février dernier ne fait qu'annoncer une aggravation de cette situation.

Pourtant, les besoins dans les secteurs de l'enseignement postsecondaire et de la santé s'accroissent de plus en plus et les gouvernements provinciaux sont face à un dilemme existentiel: couper les services ou augmenter leur déficit.

L'opposition officielle n'a d'autre choix que de dénoncer ce gouvernement pour son manque de vision quant à la réduction du déficit accumulé au fil des années. Ce gouvernement aurait dû s'employer à faire disparaître les dédoublements inutiles et les chevauchements de compétence avec les provinces.

Il aurait dû procéder au dégraissage de sa structure, toujours aussi lourde, toujours aussi coûteuse. Ainsi, pour le seul ministère de la Défense, le gouvernement libéral aurait pu couper près de 3 milliards de dollars de plus sur une période de trois ans. Il ne l'a pas fait.

En se retirant des champs de compétence des provinces en échange d'une compensation équivalente versée sous forme de transferts en points d'impôt, il en aurait résulté une économie appréciable autant pour les provinces que pour le fédéral. Ainsi, la santé, la formation professionnelle, l'enseignement postsecondaire, tous les programmes reliés au développement des ressources humaines sont autant de secteurs pour lesquels le gouvernement fédéral aurait pu économiser près de trois milliards de dollars.

Le retrait fédéral de ces champs de compétence permettrait entre autres au gouvernement du Québec d'établir une véritable stratégie de lutte au chômage en s'attaquant, par l'utilisation de programmes en développement des ressources humaines et en formation professionnelle, à la création d'emplois dans les secteurs clés de l'économie québécoise.

Mais la réalité de l'action fédérale est toute autre. L'opposition officielle considère que ce projet de loi nuit à la création d'emplois puisqu'il propose de consolider l'intervention du gouvernement fédéral dans les politiques de main-d'oeuvre et d'éducation plutôt que de se retirer de ces champs de compétence et permettre aux provinces de s'attaquer véritablement au noeud du problème.

Quant au régime fiscal canadien, pas l'ombre d'une révision sérieuse et complète de la part du gouvernement fédéral à l'horizon. L'échappatoire fiscale, pour certains, a encore bien meilleur goût.

Les Québécoises et les Québécois auront bientôt à choisir entre deux options. D'une part, ils seront conviés à prendre leurs affaires en main, à maîtriser leur avenir, avec toute l'imagination, la créativité et le sens du dépassement qu'on leur reconnaît, et ce, en se dotant d'un pays qui leur appartiendra véritablement.

D'autre part, ils seront invités à demeurer dans un système politique et économique qui nie distinctement leur existence, qui les convie au statu quo, et qui, en définitive, comme peuple, les mène nulle part. Un régime politique et économique incapable de se ressourcer, qui croule sous l'endettement, le déficit, les taxes et les impôts, qui ne peut garantir à ses citoyens une qualité de vie acceptable. Un régime politique et économique qui, en définitive, est acculé à la faillite.

(1245)

La souveraineté, certes, ne constitue pas le remède miracle aux problèmes auxquels sont confrontés le Québec et les Québécois, mais elle permettra au peuple québécois de contrôler les leviers politiques et économiques nécessaires à son plein épanouissement.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, pourquoi l'opposition, par son amendement, demande-t-elle au gouvernement de refaire ses devoirs? C'est parce qu'il y a plusieurs secteurs où la volonté de couper dans les dépenses s'effectue mal, se fait dans les mauvais secteurs, ou est mal appliquée, tout simplement. Je vais vous donner un exemple. On a décidé de faire disparaître les subventions au transport dans l'Est du Canada. On peut comprendre, après plusieurs années, qu'il fallait remettre en question ce programme.

Cependant, dans les documents qu'on lit de Transports Canada, il est prévu que le fonds de transition qui sera créé pour remplacer ces subventions ne pourra servir qu'à l'aide aux expéditeurs ou à l'investissement dans des réseaux routiers ou autres infrastructures de transport sur une base de partage des coûts. Il peut y avoir des projets qui sont intéressants dans les deux options qu'on nous offre, mais dans la région qui est touchée, ce qui est important, c'est qu'on s'assure que l'argent va servir à réaliser les objectifs réels pour lesquels elle devrait servir, c'est-à-dire orienter le développement des industries et s'assurer qu'on aura une nouvelle structure industrielle adéquate pour faire face au XXIe siècle.

C'est pour cela que l'opposition fait une proposition qui est très constructive au gouvernement. L'opposition propose que l'on puisse utiliser ce fonds qui, pour le Québec, représentera 78 millions de dollars, pour le Nouveau-Brunswick 121 millions et ainsi de suite pour les provinces des Maritimes, non seulement pour les infrastructures routières, mais aussi pour créer un fonds d'aide à l'entreprise pour qu'elle puisse faire face à la fois aux besoins de développer le secteur de la deuxième et de la troisième transformation ou, tout simplement, pour s'ajuster aux changements technologiques. Il est important d'investir dans les routes, mais les routes ne sont qu'un aspect du développpement industriel.

Si on met tous nos oeufs dans le même panier, dans ce domaine, on va se retrouver avec un réseau routier à entretenir sur un certain nombre années. L'État a des difficultés qui, de ce côté, ne sont pas prometteuses pour l'avenir, alors qu'en investissant dans les entreprises, en permettant aux entreprises


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d'utiliser un fonds dans lequel elles emprunteraient de l'argent qu'elles remettraient ensuite et ainsi de suite, le fonds pourrait vivre 5, 10, 15, 20 ans et aurait un effet permanent sur la restructuration de l'économie dans l'Est du Canada, et particulièrement dans l'Est du Québec.

C'est ce genre de suggestions qui nous amène à dire au gouvernement de retourner faire leurs devoirs, de prendre quelques mois de plus pour passer à travers le projet de loi qui vise à mettre en place les changements nécessaires à la réalisation du Budget.

Je vais donner un autre exemple de ce type de situation. On va assister, dans les prochains mois, à ce que j'appellerais l'automatisation des centres d'emploi du Canada. C'est assez paradoxal que dans un ministère qu'on appelle ministère du Développement des ressources humaines, on mette l'accent de façon majeure, l'année prochaine, sur le remplacement de gens par des machines. On va s'assurer qu'il y ait des terminaux à certains endroits, pour que les chômeurs viennent s'en servir. Je vois bien là se reproduire le modèle qu'on a vu avec les personnes âgées et les boîtes vocales. Les gens qui ont affaire au bureau d'assurance-chômage ne sont pas nécessairement des gens qui ont l'habitude de fonctionner avec des machines automatisées.

On va aussi éloigner le citoyen du fonctionnaire, de telle façon qu'on va accentuer le fait que les gens sont devenus des dossiers pour les fonctionnaires et de l'autre côté, pour la personne, l'incitation à profiter un peu du système. Donc, au lieu de tendre vers des objectifs qui soient réalistes, on va avoir exactement l'effet inverse, parce qu'on veut remplacer des gens par des machines. Dans ce domaine, celui des ressources humaines, ce n'est pas comme fabriquer des automobiles, car pour fabriquer des automobiles, on peut utiliser des robots, mais pour aider les gens à travailler et à se réinsérer sur le marché du travail, il est très important qu'ils puissent avoir un bon contact en termes de conseils professionnels, qu'ils sentent que lorsqu'ils vont au centre d'emploi, ils peuvent être reçus par des personnes qui vont les aider dans leur situation personnelle.

(1250)

Je me souviens que dans la tournée du comité sur la réforme Axworthy quelqu'un m'avait fait une proposition qui, je pense, aurait été bien plus adéquate que les changements actuels: si tout à coup on se mettait à faire l'évaluation des services par les utilisateurs, que les gens qui reçoivent l'assurance-chômage puissent juger des services qu'ils reçoivent. Peut-être qu'il y aurait de l'information qui amènerait le gouvernement à mettre de côté ce type de réforme, en tout cas de s'assurer que l'aspect humain va être toujours présent, ainsi que l'ajout de nouvelles technologies.

J'aimerais aussi donner quelques exemples où on invite le gouvernement à refaire ses devoirs. On a décidé, et ce n'est pas rien, de couper à zéro le budget des organismes de sensibilisation et de participation du public dans le domaine de la coopération internationale. Tous les organismes qui avaient comme mandat de sensibiliser la population du Québec et du Canada à l'importance de la coopération internationale, n'auront plus un sou. Cela a été fait de façon très cavalière. On les avertit par téléphone et l'organisme qui est touché dans ma circonscription, l'organisme CRÉECQ, a reçu la confirmation écrite après qu'elle prenne effet.

C'est assez aberrant et assez insultant pour un organisme qui se consacre à assurer qu'il y aura un avenir à la coopération. Il y a aussi un effet pervers dans cette décision. Ces organismes faisaient aussi un parallèle entre la pauvreté existant dans nos régions et celle des pays du Sud. On pouvait voir que tout est relié et que ce sont les choix des pays du Nord qui font la pauvreté de ceux du Sud. Souvent on a le même genre de comportement pour nos populations désavantagées que celui qu'on peut avoir pour les gens des pays du Sud.

Ces organismes remettaient les gens devant cette réalité. On peut comprendre que, dans l'orientation actuelle du gouvernement de multiplier l'implantation du système américain, avec la désintégration de la classe moyenne, ils aient eu envie de faire disparaître les gens qui posaient des questions sur les gestes sociaux faits par le gouvernement.

Cela semble être une très mauvaise mesure qui va avoir pour effet de contribuer à ce qu'il y ait diminution de la sensibilisation de la population québécoise et canadienne à la nécessité de l'aide internationale.

Citons comme autre exemple la fermeture du Conseil consultatif canadien du statut de la femme. Là encore, c'est une annonce inacceptable. On n'a pas fait une déclaration ministérielle. On est arrivé au milieu d'un débat pour nous informer que le Conseil consultatif canadien du statut de la femme disparaîtrait. Là encore une fois c'est: faisons disparaître les témoins qui interrogent le gouvernement, qui le remettent en question sur la façon dont il agit avec des gens qui sont dans des situations difficiles et qui ont besoin que la société s'ajuste.

Le dernier exemple que je voudrais donner touche l'agriculture. On diminue le subside pour le lait de transformation de 30 p. 100. Cela aura pour effet, soit que le producteur absorbera une partie de ce coût, ou le consommateur en fin de compte. Quel est le consommateur qui sera le plus touché s'il y a une augmentation de la livre de beurre? C'est celui qui gagne le moins. Quand il y a une augmentation de 10 ou 15c. la livre de beurre, pour quelqu'un qui gagne 60 000, 70 000 ou 80 000 $, l'effet est nul, mais pour les gens plus pauvres, cela a un effet direct sur leur budget et les oblige à faire de plus grandes compressions.

Tout cela pour vous dire qu'on se demande un peu, dans l'ensemble canadien, comment il se fait que le Budget ne soit pas trop mal reçu dans la majorité des provinces anglophones mais mal reçu au Québec. On a eu la réponse hier dans les journaux à ce sujet. Ce système a généré au Québec le taux de pauvreté le plus élevé au Canada. Nous sommes la province du Canada qui a le plus de personnes pauvres. Après 125 ans, avec un tel résultat, il n'y aurait que cela pour me convaincre de la nécessité de changer de système, de nous donner le contrôle sur l'ensemble de notre développement. Cela m'apparaîtrait essentiel.

Que ce soit face à un budget annuel comme celui-là ou que ce soit face à une décision plus fondamentale, les Québécois ont une vision très différente du développement. C'est pour cette raison que pendant qu'on est dans le système, on veut que le gouvernement s'assure de faire son travail correctement. On lui demande de refaire ses devoirs, de reconsidérer plusieurs aspects des lois qui vont devoir être adoptées pour appliquer le Budget. En deuxième lieu, on espère que les Québécois, lorsqu'ils auront à faire un choix fondamental, pourront se rendre compte que ce


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choix est essentiel à leur développement pour changer des choses qui ne peuvent plus être tolérées au Québec.

(1255)

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: La mise aux voix porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement.

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui appuient l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent

Et plus de cinq députés s'étant levés.

Le vice-président: Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

[Traduction]

Le vice-président: Le vote par appel nominal sur la motion est reporté à la fin de la période réservée à l'étude des initiatives ministérielles le lundi 24 avril 1995. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

* * *

[Français]

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 29 mars, de la motion: Que le projet de loi C-69, Loi portant sur la création de commissions de délimitation des circonscriptions électorales et la révision des limites des circonscriptions électorales, soit lu pour la troisième fois et adopté.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, le projet de loi C-69 que nous débattons aujourd'hui porte sur la création de commissions de délimitation des circonscriptions électorales et de la révision des limites des circonscriptions électorales.

Ce projet de loi présente certes des améliorations par rapport à la situation actuelle. Qu'il suffise de mentionner les commissions provinciales qui devront désormais tenir des audiences avant de commencer leur travail, et qui devront produire trois cartes pour les régions qu'elles couvrent, c'est-à-dire trois projets ou trois hypothèses de découpage électoral. S'il y a une demande suffisante de la population, les commissions devront tenir de nouvelles audiences. Il faut donc admettre que le processus a été amélioré pour la peine par rapport à ce que nous avons actuellement.

On a aussi établi des critères dans la loi qui obligent les commissions à prendre en considération certains éléments pour déterminer des limites satisfaisantes pour les circonscriptions électorales. Ces limites à prendre en compte qu'on retrouve au paragraphe 19b) de la loi sont les suivants: premièrement, la communauté d'intérêts; deuxièmement, le souci de faire en sorte que la superficie des circonscriptions dans les régions peu peuplées, rurales ou septentrionales de la province, ne soit pas trop vaste; troisièmement, la probabilité que la population des circonscriptions augmentera considérablement au cours des cinq prochaines années.

Finalement, le paragraphe c de l'article 19 stipule que la commission ne recommande des changements aux limites existantes des circonscriptions électorales que si les éléments mentionnés ci-haut sont suffisamment importants pour les justifier.

C'est intéressant de constater que le premier critère réfère à la communauté d'intérêts. Mais on se heurte vite à une autre disposition de la loi qui stipule qu'une circonscription électorale ne peut pas varier de plus ou moins 25 p. 100 du quotient provincial. À titre d'exemple, si au Québec le quotient provincial est de 100 000 électeurs, la commission pourra établir des circonscriptions allant jusqu'à 125 000 électeurs ou des circonscriptions comptant au moins 75 000 électeurs.

La commission peut constater qu'il y a une communauté d'intérêts mais que le nombre d'électeurs n'entre pas dans la norme.

(1300)

Prenons l'exemple de la circonscription de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine qui, actuellement, est en dessous du quotient provincial, mais a un immense territoire.

Le projet de loi prévoit cependant une possibilité pour les commissions de ne pas tenir compte de façon absolue de ces 25 p. 100. Mais, les circonstances sont tellement restrictives qu'il y a lieu de se demander dans quel cas on pourrait bien les utiliser et les mettre en pratique.

En effet, conformément au paragraphe 19(3), la Commission peut déroger de la déviation de 25 p. 100 si une circonscription ou un territoire est géographiquement isolé du reste de la province ou si on ne peut s'y rendre facilement.

Que signifie «géographiquement isolé»? Qui va le définir? La commission provinciale? Les tribunaux? La loi n'y fait aucune référence. Revenons au cas des Îles-de-la-Madeleine. Elles sont géographiquement isolées, et personne ne peut le contester. Le critère de la population pourrait-il être retenu? Les Madelinots ont eu leur circonscription électorale fédérale jusqu'en 1968, et la loi québécoise, jusqu'à ce jour, leur garantit un comté autonome. Sans vouloir remettre en cause la qualité du travail de notre honorable député et collègue de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, il nous apparaît tout à fait légitime et souhaitable que les îles de la Madeleine, situées en haute mer, à 210 kilomètres de la côte de Gaspé, puissent avoir un député uniquement pour les îles.

Les Madelinots devront donc faire valoir que les îles sont géographiquement isolées. Pour ce faire, cela ne sera pas difficile. Leur demande devrait satisfaire tout à fait ce premier critère. Il leur faudra par la suite démontrer que la population aux îles peut justifier l'établissement d'une nouvelle


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circonscription. Mais on peut déjà anticiper l'effet domino d'une telle décision. Si les Îles-de-la-Madeleine ont droit à leur député, la circonscription de Bonaventure est amputée du même nombre d'électeurs et d'électrices qu'on attribuerait à la nouvelle circonscription des îles. Le problème demeure donc entier pour la péninsule gaspésienne.

Qu'adviendrait-il alors des circonscriptions de Gaspé, de Matapédia-Matane, de Rimouski-Témiscouata et de Bonaventure? Qu'est-ce qu'on fait? Est-ce que le paragraphe 19(3) permet de trouver une solution au problème de la péninsule gaspésienne? Malheureusement, ce paragraphe de la loi ne contient pas assez de précisions. La péninsule gaspésienne est une région en dépeuplement où les députés, quelle que soit leur allégeance politique, ont une grande étendue de territoire à couvrir. Ils doivent faire face à des problèmes qui n'existent pas ou existent de façon différente à l'intérieur du pays ou de la province représentée. La péninsule gaspésienne est un sujet d'inquiétude en terme de représentation pour les députés.

Le paragraphe 19(3) est beaucoup trop restrictif pour qu'il nous soit acceptable. Nous avions proposé de maintenir dans le projet de loi que nous débattons actuellement, les critères de dérogation qui sont actuellement en vigueur. Quels sont ces critères?

Actuellement, une commission provinciale peut déroger du critère de déviation de 25 p. 100 chaque fois que cela lui paraît souhaitable pour des raisons tenant au caractère spécial d'une collectivité ou à la diversité particulière des intérêts des habitants des différentes régions de la province. Donc, actuellement, les commissions provinciales ont une norme beaucoup plus large lorsqu'elles ont à traiter de cas particuliers. La norme est beaucoup plus large que celle qui existe présentement.

Alors, une région comme celle du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et des îles aurait bénéficié davantage de la loi actuellement en vigueur que du projet de loi extrêmement restrictif que l'on propose d'adopter aujourd'hui.

L'article 19 est sûrement, pour nous de l'opposition officielle, un empêchement majeur pour lequel nous ne pouvons appuyer le projet de loi.

Il y a également l'article 16 qui, pour nous, est inacceptable autant par ce qu'il dit que par ce qu'il ne dit pas. Le silence de l'article 16 est particulièrement éloquent. Le gouvernement fait la sourde oreille à la demande traditionnelle des Québécois et des Québécoises et à leurs gouvernements successifs qui ont toujours réclamé d'avoir une représentation minimale à la Chambre des communes du Canada, comme l'ont d'ailleurs certaines autres provinces de l'Atlantique.

La représentation des provinces atlantiques, vous le savez bien, est garantie par la clause sénatoriale qui remonte à 1915, clause que nous ne contestons absolument pas.

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Cette clause permet entre autres à une population de 120 000 personnes de l'Île-du-Prince-Édouard d'avoir quatre députés en cette Chambre, puisque la clause sénatoriale spécifie qu'une province ne peut avoir, à la Chambre des communes, moins de députés qu'elle n'a de sénateurs au Sénat, et l'Île-du-Prince-Édouard a une garantie de quatre sièges au Sénat canadien. C'est la même règle qui s'applique pour la province du Nouveau-Brunswick, qui a une garantie de dix sièges au Sénat.

Le Nouveau-Brunswick, bien que sa population ne justifie pas dix sièges à la Chambre des communes, a droit quand même à dix sièges, nous en convenons. La Loi sur les conditions de l'entrée de Terre-Neuve dans la fédération canadienne de 1949 touchait également ce point et elle pourra s'appliquer pour garantir une représentation adéquate de la province de Terre-Neuve, tant à la Chambre des communes qu'au Sénat. C'est ce qu'elle a garanti effectivement, six sièges au Sénat canadien à la province de Terre-Neuve.

Si nous acceptons la clause sénatoriale que les garanties soient données à l'Île-du-Prince-Édouard, à la Nouvelle-Écosse, à Terre-Neuve, pourquoi en arrive-t-on devant une véritable Muraille de Chine, lorsqu'on parle de garanties à donner à la province de Québec, lorsqu'on parle d'assurer un minimum de représentation pour le Québec?

Le Québec est, comme peuple, comme nation, un des deux peuples fondateurs de ce pays. La mémoire collective des Québécois et des Québécoises se rappelle qu'en 1867, nous étions l'un des deux peuples fondateurs. Vous me permettrez de vous rappeler qu'au 30 juin 1867, la veille de l'entrée en vigueur de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, le Québec, le Bas-Canada d'alors, avait droit à 65 sièges sur 130 au Parlement du Canada-Uni, soit la moitié des sièges, 50 p. 100 de la députation.

Par personnes interposées, c'est-à-dire par les élus qui nous représentaient à l'époque, nous avons accepté, au moment du pacte de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 65 sièges sur 181 pour représenter le Québec au Parlement canadien et ce, suite à l'entente des Pères de la Confédération, entente qui entrait en vigueur le 1er juillet 1867.

Il n'y a pas eu de référendum à l'époque. Il n'y a même pas eu de consultation populaire auprès des citoyens du Québec pour prendre une telle décision. Il est important de rappeler également que les citoyennes n'ont pas été consultées, puisqu'elles n'avaient même pas le droit de vote à ce moment-là. Il n'y a pas eu de disposition constitutionnelle pour prévoir une représentation minimale pour le Québec. La seule garantie qui a été obtenue, c'est que le Québec compterait 65 sièges, mais on ne disait pas sur combien. Sur ce sujet le texte est muet.

Et puis, compte tenu de l'expansion du territoire canadien, de l'entrée des nouvelles provinces dans la Confédération, la proportion de la représentation québécoise à la Chambre des communes a sans cesse diminué, pour se stabiliser, au cours des dernières décennies, à quelque chose qui était légèrement au-dessus de 25 p. 100. Il est manifeste qu'il y a eu une erreur de la part des Pères de la Confédération de ne pas garantir une clause pour le Québec, une clause de représentation minimale qui, à l'époque, aurait dû être de 50 p. 100.

Il est bien difficile de refaire l'histoire et de vouloir aujourd'hui réclamer 50 p. 100. Ce que nous demandons, c'est une garantie minimale de 25 p. 100 des sièges à la Chambre des communes. Si d'aventure le Québec devait participer à l'élection du 36e Parlement, pour la première fois de son histoire sa


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représentation tomberait à moins de 25 p. 100 puisqu'il ne compterait que 75 sièges sur 301.

De là notre proposition qui, au fond, rejoignait la proposition libérale de 1992, alors que le gouvernement d'aujourd'hui était dans l'opposition. Voyons d'ailleurs ce que disait l'honorable député de Papineau-Saint-Michel et actuel ministre des Affaires étrangères. Il était heureux de pouvoir garantir au Québec une représentation minimale de 25 p. 100, disant que c'était un gain majeur, un pas incroyable que le Québec avait fait.

En ce qui concerne notre demande de 25 p. 100 que nous avons faite, aucun des députés libéraux qui siégeaient en cette Chambre en 1992 et qui y siègent encore aujourd'hui n'a appuyé cette mesure. Pourquoi ces députés ont-ils changé d'idée en si peu de temps? Pourquoi refuser au Québec quelque chose de si minimal? Pourquoi refuser de faire un pas dans la bonne direction? Pourquoi refuser de manifester une simple ouverture à l'endroit du Québec? Pourquoi refuser de manifester un signe d'attachement au Québec?

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Pourquoi ce gouvernement refuse-til de montrer au Québec qu'il tient à lui? Qu'il tient à le garder debout dans le Canada? Le Canada n'a aucun intérêt à avoir à la Chambre des communes un Québec sous-représenté, un Québec diminué. Le Québec doit garder sa représentativité parce que le Québec est une nation. Le Québec est un des peuples fondateurs. Et en tant que peuple fondateur, les francophones occupaient tout l'espace du Canada et même un peu plus puisque l'on allait jusqu'en Louisiane.

Appuyer cette demande du Québec, cela va de soi, puisque l'immense majorité des députés québécois présents en cette Chambre ont voté en faveur de cette garantie minimale de 25 p. 100. Même à l'Assemblée nationale du Québec, le chef de l'opposition officielle, M. Daniel Johnson, a présenté la motion suivante, et je cite: «Que l'Assemblée nationale du Québec réitère l'objectif de maintenir une représentation québécoise d'au moins 25 p. 100 à la Chambre des communes du Canada et demande au gouvernement du Québec de faire des représentations en ce sens.»

Donc, on peut dire qu'il y a un large consensus au Québec débordant toutes les lignes de partis pour réclamer cette garantie minimale de 25 p. 100. Quand vous voyez le Parti progressiste conservateur, l'opposition officielle-le Bloc québécois-, le député de Burnaby-Kingsway, le député indépendant de Beauce qui appuient une telle motion pour inclure dans le projet de loi C-69 une garantie d'une représentation de 25 p. 100 on voit là le très large consensus qu'il y a au Québec sur cette question.

Inutile d'ajouter l'appui que le sénateur Rivest avait donné à cette disposition. Même l'appui des gouvernements du Québec, qui ont réclamé l'ajout à nos lois d'une telle disposition, ne s'est pas démenti, et que je sache, le gouvernement actuel n'a jamais reculé sur ce qui avait été antérieurement accordé.

Comme il est bizarre de voir que le gouvernement, finalement, ait reculé sur quelque chose qu'il avait appuyé, lui-même, au mois de septembre 1992. Ce gouvernement a reculé sur ce qui avait été unanimement accepté par nos partenaires canadiens. Bien sûr, c'était dans le contexte de l'Accord de Charlottetown. Mais faut-il pour autant punir le Québec parce que l'ensemble du Canada a finalement jugé que cet accord n'était pas à l'avantage des Canadiens et des Canadiennes?

Vous comprendrez donc que le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui en troisième lecture est incomplet. Surtout en ce qui concerne les critères de déviation qui peuvent être appliqués dans les circonscriptions et les circonscriptions spéciales. Il est également incomplet parce que le sort de la représentation d'un des deux peuples fondateurs de ce pays n'est pas pris en considération dans cette loi. Le vote sur l'amendement proposé par l'opposition officielle démontre hors de tout doute que le gouvernement n'avait pas omis par erreur, mais sciemment, d'inscrire dans la loi une garantie pour le Québec de conserver une représentation équitable dans cette Chambre.

Est-ce que les Canadiens et les Canadiennes auraient été malheureux que le gouvernement agisse en ce sens, c'est-à-dire qu'il reconnaisse au Québec, enfin, ce statut de société distincte, de peuple fondateur, de nation qui est à l'origine de ce pays? Je suis convaincue que non. Et pourtant, on nous l'a refusé. C'était la demande la plus minimale à être formulée au cours des 50 dernières années.

Il serait bon de faire un retour aux sources pour comprendre que l'histoire du Canada a débuté avec l'arrivée de Jacques Cartier en 1534, à Gaspé. Puis, il y eut la fondation de Québec, en 1608, par Samuel de Champlain; la fondation de Trois-Rivières et de Montréal dans les décennies qui ont suivi et finalement, l'établissement en Nouvelle-France, le Canada d'alors, d'un premier gouvernement public.

En 1663, nous avons eu pour la première fois des institutions publiques puisque le roi de France établissait le Conseil souverain de la Nouvelle-France. Tranquillement, nous avons cessé d'être des Français et Françaises, nous sommes devenus Canadiens et Canadiennes, puis Canadiens français et Canadiennes françaises pour finalement devenir Québécois et Québécoises.

Entre temps, en 1774, l'Acte de Québec nous a permis de rétablir le droit civil public au Québec et d'être administrés par un conseil législatif non élu. On a eu peur de donner aux francophones, pourtant si pacifiques, des institutions démocratiques, des institutions où les Québécois pourraient choisir leurs représentants. Et pourtant, les Québécois et les Québécoises, les Canadiens de l'époque, avaient fait preuve d'un très grand pacifisme, d'une très grande ouverture d'esprit.

Finalement, en 1791, grâce à l'Acte constitutionnel, nous avons eu pour la première fois le droit d'élire nos représentants, notre première Chambre d'assemblée au Québec. En 1791, nous pouvons contrôler une partie de nos institutions. Cela évoluera assez rapidement, sauf qu'on divise le Canada en deux: le Haut et le Bas-Canada. L'Assemblée que nous élisons au Bas-Canada n'a aucune compétence extraterritoriale et ne peut donc pas légiférer pour le Haut-Canada et vice versa.

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En 1867, on devait créer de nouvelles institutions qui nous ont menés jusqu'à aujourd'hui. Cela peut paraître paradoxal pour une souverainiste de se lever en cette Chambre et de dire: «Donnez-nous au moins 25 p. 100 de la représentation.» Nous n'avons toujours pas quitté ce pays. Nous sommes encore ici et notre devoir, notre responsabilité et l'engagement que nous avons pris de défendre les intérêts du Québec nous obligent à


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réclamer à l'ensemble des parlementaires qui sont ici de nous donner la représentation de 25 p. 100.

Nous étions ici en premier, nous avons fait l'union en 1840, on a décidé de vivre ensemble. Vous ne perdez rien à nous donner une représentation de 25 p. 100. C'est un geste d'ouverture et de sympathie à l'égard d'un peuple, d'une nation que vous prétendez vouloir garder avec vous. Il me semble que si le gouvernement veut donner une preuve évidente qu'il aime le Québec et qu'il tient à le garder dans ce pays, il doit nous garantir notre 25 p. 100 de représentation.

[Traduction]

M. Stinson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai une question qui est au Feuilleton depuis 348 jours, et je commence à me demander si je vais devoir attendre. . .

Le vice-président: Le député a parfaitement le droit de soulever ce point, mais il devrait le faire à un autre moment. Puisqu'il ne recevra pas de réponse, je lui demande d'attendre la prochaine fois que les questions au Feuilleton seront abordées à la Chambre.

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais parler de la révision des limites des circonscriptions parce que c'est la représentation selon la population qui est en cause et, plus important encore, le principe du gouvernement responsable.

Je voudrais rappeler que la Chambre des communes est fondée sur le principe de la représentation selon la population. Ce grand pays qu'est le Canada n'est pas le fruit du hasard. Il repose sur la profonde conviction que tous peuvent conjuguer leurs efforts pour assurer le mieux-être de tous. Peut-être le devons-nous au fait que le bon homme s'est trouvé au bon endroit dans les années 1850 et 1860, ou encore à une forte conviction que le fédéralisme pouvait fonctionner, mais je sais que le compromis a joué un rôle important dans la décision finale. Pour que le principe du gouvernement responsable puisse s'appliquer dans les années 1850, avant la Confédération, il a fallu que bien des gens collaborent, et il a fallu en particulier le compromis de George Brown, un homme qui a su faire passer les intérêts de son pays avant les siens lorsqu'il a proposé la grande coalition de 1864.

Mon collègue de Chambly a parlé l'autre jour de l'influence française et de ce qu'il interprète comme un manque d'appui des députés réformistes pour la cause ou l'histoire des Français. Je tiens à rassurer le député: les réformistes ne sont pas ignorants au point de renier l'histoire de leur propre pays et de ne pas savoir qui l'a modelé dès le début.

Pour être honnête, je dois tout d'abord souligner le rôle de nos peuples autochtones, qui étaient ici bien avant l'ère chrétienne. Sur la côte ouest, l'utilisation du cèdre nous donne de nombreux repères chronologiques. Nous pouvons même retrouver, sur la côte de la Colombie-Britannique, des arbres qui ont au moins 3 500 ans.

Les Européens sont venus plus tard et ils ont pris possession de ce territoire. N'est-ce pas étrange? Ces terres étaient déjà occupées par bien d'autres peuples. Il est vrai que les premières colonies ont été françaises. Elles se sont implantées après les séjours de Cartier, en 1534 et en 1535. Les premières colonies se sont installées sur la côte de la Nouvelle-Écosse. En 1604 et 1605, elles ont subi de dures épreuves. Ces épreuves tenaient à la grande rigueur des hivers, au manque d'eau potable et à la maladie. Ces colonies n'ont pas survécu à ce moment-là.

Puis vint la colonisation du Québec en 1608, comme l'ont mentionné mes collègues du Bloc. Je veux bien sûr parler de l'établissement de Champlain à Québec. Si ma mémoire est bonne, Champlain se préoccupait beaucoup des habitants de sa petite colonie. Il se demandait comment il pouvait les aider à garder bon moral. Son Ordre de Bon Temps visait à relever le moral des colons et à procurer un peu de soulagement et de divertissement à ces gens qui étaient si loin de leur pays d'origine. Il est intéressant de noter que bien des années plus tard, Voltaire, l'écrivain français, parlait de la Nouvelle-France comme de quelques arpents de neige.

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Entre temps, des colons français étaient revenus s'établir sur les côtes acadiennes et, en 1713, ces Acadiens, de paisibles agriculteurs qui labouraient et cultivaient la terre, ne dérangeaient vraiment personne. Cela n'a cependant pas empêché la déportation des Acadiens en 1755. Bien sûr, ils n'avaient pas prêté le serment d'allégeance à la Couronne britannique. Leur expulsion de Grand-Pré a été une cruelle injustice.

Accorde-t-on maintenant de l'importance au fait que les Anglais craignaient à cette époque l'explosion de troubles dans leurs 13 colonies plus au sud, car les Américains de cette époque protestaient contre les taxes injustes imposées par les Anglais, dont ils jugeaient les lois intolérables. Nous connaissons tous l'épisode du Boston Tea Party. Mais cela a-t-il de l'importance maintenant? Je ne le pense pas.

Les réformistes connaissent également le poème épique de Longfellow, « Évangéline », qui a immortalisé cette jeune Acadienne qui a passé sa vie à chercher l'amoureux qu'elle avait perdu, pour ne le retrouver que mourant. Je l'assure aux députés du Bloc, cet épisode fait également partie de notre histoire tragique.

J'ai regardé l'émission d'Anne Murray vendredi soir dernier, consacrée à la bonne musique et aux excellents musiciens de la Nouvelle-Écosse. Elle a parlé avec fierté de son ascendance acadienne.

Au cours des années qui ont suivi 1755, de nombreux Anglais, qu'on appela plus tard loyalistes, ont fui les 13 colonies, souvent pour éviter de se faire passer au goudron et à la plume. Ces citoyens paisibles et respectueux des lois ont tout quitté parce qu'ils voulaient demeurer fidèles à la Couronne britannique. N'est-ce pas curieux? Quelques années plus tôt, un traitement cruel avait été fait aux Acadiens parce qu'ils ne voulaient pas


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prêter le serment d'allégeance à la Couronne britannique. Il y a des torts des deux côtés.

Nombre d'entre eux ont fui la persécution des Américains, n'emportant avec eux que leurs seuls vêtements. Ils ont franchi de grandes distances, traversant des forêts inconnues, des territoires indiens hostiles, comme les Acadiens. Ils sont venus en si grand nombre dans ces années-là qu'en 1784 la colonie du Nouveau-Brunswick a été fondée.

Nous, dans cette enceinte, savons fort bien qu'il s'agit de plus de 100 000 loyalistes. Ils sont venus s'installer partout au Canada, en Nouvelle-Écosse et au Québec. Ils sont venus en si grand nombre au Québec qu'il a fallu créer le Haut-Canada. Ils sont venus à l'Île-du-Prince-Édouard et dans certaines régions de Terre-Neuve.

En 1791 a été adopté l'Acte constitutionnel, qui séparait le Québec en deux, créant le Bas-Canada et le Haut-Canada. Le Haut-Canada comptait beaucoup de loyalistes. L'Acte constitutionnel a établi des assemblées élues dotées de pouvoirs limités. Encore une fois, l'Angleterre dominait la situation et craignait d'accorder trop de pouvoirs à ses colonies, car elle venait tout juste de voir ce qui s'était produit au sud et en avait tiré des enseignements. A-t-elle eu tort? Je crois que l'histoire a montré qu'elle s'est trompée.

Après la défaite de la Nouvelle-France en 1759 et la capitulation de Montréal un an plus tard, des décisions devaient être prises. Les deux premiers gouverneurs après le régime militaire de 1760 à 1763 ont été Murray et Carleton. Ces deux gouverneurs ont tenté de protéger les coutumes des Canadiens français: la religion catholique, le Code civil, la langue et la culture françaises; mais ils ont implanté le droit pénal anglais.

Murray a hésité quand est venu le moment de créer une assemblée élue. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait? Une minorité d'anglophones de Montréal faisaient pourtant des pieds et des mains pour l'obtenir. Murray était constamment attaqué. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait? Il essayait de protéger la majorité des Canadiens français, qui ne pouvaient pas être élus à l'époque. Murray n'a pas créé d'assemblée élue, et il est arrivé ce qui devait arriver.

Compte tenu de notre grande diversité historique, notre pays a connu bien des tragédies. D'aucuns estiment que nous devrions être divisés en différentes nations. Je ne le pense pas. Notre pays a connu des tragédies. Ce sont nos tragédies.

Au député de Chambly, je répondrai qu'il est vrai que les Anglais et les Français se sont battus aux XVIIe et XVIIIe siècles. C'est vrai. Ils se sont livré une guerre dont l'enjeu était les abondantes ressources naturelles de l'Amérique du Nord. Quelles étaient ces ressources? La pêche à la morue à Terre-Neuve et en Acadie, le commerce des fourrures le long du Saint-Laurent. Qu'est-il advenu de ces ressources? Il n'y a plus de morue. Nous blâmons-nous les uns les autres?

Est-il important que, depuis 20 ans, les gouvernements libéraux et conservateurs n'aient pas géré correctement cette grande ressource? Pour ce qui est du commerce des fourrures, les animaux ont été repoussés toujours plus loin dans le reste des forêts et l'arrière-pays.

Avons-nous protégé le majestueux Saint-Laurent de la pollution? Les bélugas ne sont-ils pas lentement empoisonnés? Qu'en est-il de ce béluga qui a laissé son bébé près d'un bateau pour que les scientifiques puissent voir ses plaies? Dans ce documentaire, les scientifiques croyaient honnêtement que le béluga voulait vraiment qu'ils voient les plaies de son petit. Les animaux savent-ils ce que nous faisons?

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Le Bloc veut une garantie de 25 p. 100 des sièges. Lorsque la ville de Québec est tombée aux mains du général britannique Wolfe en 1759 et que Montréal a ensuite connu le même sort en 1760, la Nouvelle-France, telle qu'elle avait existé jusqu'alors, est devenue chose du passé.

Le Traité de Paris proclamé en 1763 promettait que le mode de vie des Canadiens, y compris leurs lois traditionnelles et la religion catholique romaine, serait protégé. Cela ne signifie pas que nous sonnons le glas de la représentation d'après la population.

Je tiens par ailleurs à rassurer le député de Chambly: les réformistes ne croient pas que l'histoire du Canada a commencé avec eux et ils sont, au contraire, parfaitement conscients de la contribution des premiers colons français. La représentation d'après la population, obtenue en fonction de celle-ci, l'équité et l'égalité pour tous, voilà ce qui nous tient à coeur.

Puisqu'il est question des réformistes, j'aimerais savoir de quels réformistes mon collègue parlait. S'agissait-il de ceux de 1800 ou de 1900? Je vois que mon collègue là-bas rit encore. Cela le fait toujours rigoler. S'il est disposé à écouter un peu, on verra bien si mes propos sauront lui faire retrouver son sérieux pour un moment.

Durant les années 1800, dans le Haut-Canada, le Pacte de famille composé des Bidwell, Ryerson, Mackenzie et Baldwin n'était guère prisé. Pourquoi? Parce qu'il était formé de ce que l'on pourrait appeler, faute d'une expression plus juste, une petite noblesse anglaise qui souhaitait tout contrôler. La vérité, c'est que la majorité des habitants du Haut-Canada étaient très pauvres. On a encouragé les immigrants à venir au Canada lors de la grande migration.

J'aimerais présenter brièvement à la Chambre un article que j'ai lu à maintes reprises à mes étudiants pour leur donner une idée de la misère qui frappait, non pas les Canadiens français, mais les Européens à leur arrivée au Canada, en 1815.

«La plupart des immigrants venus au Canada durant cette grande migration étaient très pauvres, mais ils pouvaient être transportés à bon compte au Canada. Durant les années 1820, il en coûtait sept livres, soit environ deux mois de salaire d'un ouvrier agricole, pour venir à Montréal ou à Québec en bateau à voile, les repas étant inclus. Les enfants payaient la moitié de ce tarif. Ces immigrants vivaient dans des conditions extrêmement difficiles à bord des voiliers et dans les colonies où ils se rendaient. Des maladies comme le choléra étaient courantes à bord des bateaux. Des dizaines de milliers de personnes en sont mortes durant la traversée devant les mener en Amérique du Nord. Les survivants se heurtaient à de graves problèmes dans leur quête de travail et lorsqu'ils essayaient de défricher les terres destinées aux colons.»


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La description qui suit a été écrite en 1821 et explique la misère d'une famille d'immigrants du Haut-Canada qui vit dans une caverne.

«La mère qui continuait de pleurer m'a dit que les membres de sa famille et elle étaient des immigrants venus d'Irlande. À la suite d'une série de revers, ils avaient décidé de s'embarquer à destination du Canada afin d'y obtenir une terre, et voilà où ils en étaient rendus dans leur périple, après avoir essuyé maintes difficultés. N'ayant plus d'argent, ils ne pouvaient pas trouver de logement et ignoraient où s'adresser pour obtenir du travail, de l'aide ou des renseignements. «Un mari et ces deux garçons», disait la femme, «sont tout ce qu'il me reste. Ma petite fille est morte à bord du bateau et on a jeté son corps à la mer. Ce fut sûrement le pire moment», ajoute- t-elle, écrasée par la peine. «La pauvre petite n'a eu droit ni à des prières ni à des obsèques.»

On n'entend pas souvent ce genre de récit, mais je peux affirmer qu'il y en a beaucoup de semblables. J'ai été enseignante pendant trente ans et j'ai des livres qui en sont remplis.

Souvent, au lieu de recevoir l'acte de concession de la terre sur laquelle ils travaillaient depuis des années, comme on le leur avait promis, ces nouveaux Canadiens recevaient le compte du prix de la terre, mais, bien entendu, ils n'avaient pas l'argent. Les promesses qu'on leur avait faites n'étaient que des mensonges et beaucoup de ces gens ont perdu leur terre. On leur avait promis des routes, des écoles et de l'aide qui ne se sont jamais concrétisées.

Qui étaient les premiers réformistes? C'étaient les nouveaux habitants du Haut-Canada à qui on avait menti et qui n'avaient aucun espoir de changement dans le régime en place. Ils ont subi bien des épreuves.

Il y a eu des réformistes modérés et radicaux pendant la période de 1824 à 1837. J'ai choisi cette période parce qu'elle semble correspondre à celle où le phénomène a atteint son paroxysme.

Après l'échec des solutions pacifiques et constitutionnelles, qui ne donnèrent aucun résultat et n'apportèrent aucun soulagement, William Lyon Mackenzie King est devenu un réformiste radical. Combien de fois a-t-il été élu à l'Assemblée législative? Combien de fois en a-t-il été expulsé par Bond Head pour se faire réélire ensuite? A-t-il éprouvé de la colère? Je suppose que oui.

Les gens voulaient obtenir une représentation équitable, mais le résultat a été la rébellion de 1837. Que dis-je? La rébellion n'a pas été un phénomène spontané. Elle a été l'aboutissement de nombreuses années d'injustices créées par une petite minorité de dirigeants qui tentaient de contrôler la population. Les réformistes étaient le fruit de la nécessité. On sait que la nécessité est mère de l'invention.

Je sais bien que la Rébellion au Bas-Canada s'est également produite parce qu'une petite minorité opprimait et contrôlait la population. Là encore, le gouverneur sir Francis Bond Head n'aurait jamais dû être nommé au poste d'autorité qu'il occupait. L'histoire regorge d'exemples de personnes qui n'auraient pas dû exercer les fonctions qu'ils avaient. Le gouverneur nommait qui il voulait pour agir auprès de lui comme conseillers administratifs ou juridiques.

Au Haut-Canada, l'Église anglicane occupait l'avant de la scène. John Strachan, qui fut évidemment le premier évêque anglican de Toronto, portait plusieurs chapeaux.

D'où le Pacte de famille tire-t-il son nom? Du fait que de nombreuses personnes se mariaient entre elles et donnaient des emplois à des amis et parents. Je pense que nous parlons de népotisme, n'est-ce pas? Est-ce que cela se produit encore de nos jours?

(1330)

Il est question ici d'une classe privilégiée de juges et de magistrats ayant des liens familiaux dans une société coloniale. Tous les dirigeants du Haut-Canada étaient membres du Family Compact tant redouté et, au Bas-Canada, il y avait la Clique du château. Un gouverneur, Bond Head, choisissait son conseil exécutif et son conseil législatif parmi un groupe de marchands britanniques. Quel était le mandat dans le Bas-Canada? Il semblait être de forcer la population canadienne à adopter le mode de vie britannique.

Louis Papineau s'est révélé être un brillant orateur du mouvement réformiste dans le Bas-Canada. L'exaspération des Canadiens découlait d'une division culturelle entre les Français et les Anglais dans le Bas-Canada et de la nature non démocratique du gouvernement colonial. On abusait du pouvoir. Selon un dicton, «le pouvoir corrompt, le pouvoir absolu corrompt absolument». C'est certes vrai.

L'autre soir, j'ai regardé brièvement une partie d'un documentaire sur J. Edgar Hoover. Cela faisait peur. Il est peut-être le symbole même du contrôle des fonctionnaires et les dangers que cela peut représenter s'il devient absolu. Pourquoi? Ce sont les gens élus, qu'on peut flanquer à la porte, qui doivent rendre des comptes.

Qu'est-il arrivé à Hoover? Des gens ont perdu la vie. Y avait-il des motifs pour cela? Le président a été tué. Qui l'a tué? Des événements terribles ont eu lieu et tout cela parce qu'on n'a pas placé le pouvoir entre les bonnes mains.

Dans son histoire, notre pays a été témoin de choses répréhensibles. Les réformistes ont vu le jour dans les années 1800, par nécessité. Dans le Bas-Canada et le Haut-Canada, Ryerson, Bidwell, McKenzie, Papineau, Baldwin et La Fontaine étaient tous des réformistes. On trouve du côté est de la colline, la statue de deux réformistes: La Fontaine et Baldwin. Pour mon collègue de Chambly, ces réformistes étaient tous de braves gens. Malheureusement, lorsqu'on veut changer les choses et que rien ne se produit, on devient exaspéré. C'est alors que des rébellions éclatent.

Qu'est-il arrivé à ces réformistes? Certains de ceux qui détenaient le pouvoir les ont qualifiés de traîtres à la solde des Américains. Est-ce que cela vous dit quelque chose? Combien de fois entendons-nous cela à la Chambre des communes? En tant que réformistes, nous essayons de parler d'une réforme du régime de soins de santé. Nous voulons aborder certains programmes importants qu'on doit modifier si on veut les conserver. Pourtant, on nous accuse d'être Américains, d'essayer de faire adopter des doctrines américaines à la Chambre. Je suis vraiment désolée que le débat en soit réduit à ces attaques et à ces fausses affirmations. Généralement, on agit ainsi pour éviter de répondre à une question.


11602

Baldwin et La Fontaine ont déployé d'énormes efforts pour parvenir à un gouvernement responsable. À quel point était-il important de se pencher sur le droit à la représentation équitable et à un gouvernement responsable? Enfin, l'Angleterre a décidé d'assumer ses responsabilités. Face à une rébellion, on doit, selon moi, voir ce qui la justifie.

Malheureusement, le secrétaire aux colonies, lord John Russell n'attachait aucune importance au gouvernement responsable. C'était une notion tout à fait inacceptable pour lui. Même si on a écrasé les deux rébellions, elles ont réussi quand même. En effet, la Grande-Bretagne s'est inquiétée alors. Soixante ans plus tôt, elle avait perdu ses 13 colonies. Le bon sens a prévalu.

On a envoyé lord Durham au Canada. On le qualifiait de Jack le radical, probablement parce qu'il était partisan d'une réforme politique dans les années 1830, en Angleterre. Il a joué un rôle dans la mise en place du scrutin secret et obtenu le droit de vote pour tous les hommes. À mon avis, c'est précisément ce qui explique sa nomination. C était à coup sûr un homme qui portait un autre regard sur les choses. C'était un homme malade. Il était mourant, à son arrivée au Canada.

Des deux côtés de l'Atlantique, les partisans d'un changement politique firent bon accueil à la nomination de Durham. Il arriva en 1838. Il n'allait pas bien, comme je l'ai dit, mais il était déterminé à mener sa tâche à terme.

L'idée d'un gouvernement responsable fut soumise à lord Durham, le nouveau gouverneur général, par Robert Baldwin, un réformiste, au nom de l'ensemble des six colonies britanniques qui restaient dans l'est de l'Amérique du Nord, soit le Haut-Canada, le Bas-Canada, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve.

Toutes les six souffraient de nombreuses injustices, qui ont conduit à la Révolution américaine. Robert Baldwin était un réformiste modéré. Sa proposition en faveur d'un gouvernement responsable plut à lord Durham. Cela rappelait la forme de gouvernement existant en Grande-Bretagne.

Toutefois, après la rébellion, Durham a dû régler la question des prisonniers politiques. Sa clémence envers les rebelles, surtout ceux du Bas-Canada, souleva la colère de la minorité anglaise de Montréal. À cause de l'antagonisme persistant auquel il était en butte, au bout de cinq mois, il démissionna et rentra en Grande-Bretage, mais il allait rédiger le fameux «rapport Durham» qui devait aboutir, comme tout le monde le sait, à l'Acte d'union de 1840.

(1335)

L'idée d'appuyer le principe d'un gouvernement responsable s'est répandue dans les Canada et la réaction dans le Haut-Canada allait maintenant être très positive. Les réformistes savaient que des leaders politiques allaient émerger, tels Francis Hincks, un ancien journaliste de l'Examiner de Toronto, et les Baldwin, qui aspiraient à une réforme depuis des années. Dans le Bas-Canada, Étienne Parent et Louis Lafontaine étaient également impatients d'assister à ces changements.

Lord Elgin sera l'homme par qui l'idée d'un gouvernement responsable s'implantera. Entre parenthèses, il était le gendre de lord Durham. Il avait épousé Mary, fille de lord Durham. À son arrivée, il profita de l'occasion offerte par la présentation du projet de loi sur les pertes dues à la rébellion qui visait à dédommager les gens ayant perdu des biens de valeur.

Nous savons ce qui s'est produit. Le gouvernement responsable a été instauré. Lord Elgin a écouté les gens. Il a accordé la sanction royale. En 1848, le gouvernement responsable a été instauré en Nouvelle-Écosse, parce que le gouvernement réformiste était au pouvoir. En 1849 ce fut le tour du Nouveau-Brunswick; il y eut alors un gouvernement responsable dans les deux Canada. Il fut ensuite instauré à l'Île-du-Prince-Édouard, en 1851, et à Terre-Neuve, en 1855.

Que dire des autochtones du Canada et du génocide commis contre la nation béothuke de Terre-Neuve? Nous avons commis tant d'erreurs. Que dire du confinement des Japonais? Durant la guerre, je comprends qu'il y ait des considérations de sécurité, mais nous n'avions pas à donner tous leurs biens. . .

Le vice-président: Je me demande si la Chambre consentirait à l'unanimité à accorder quelques minutes de plus à la députée afin qu'elle termine son discours?

Des voix: D'accord.

Mme Jennings: Merci. Je parlais donc des erreurs que nous avons commises par notre façon de traiter les Canadiens d'origine japonaise. Ces personnes possédaient des biens immobiliers de grande valeur, surtout en Colombie-Britannique, et ces biens se sont retrouvés aux mains de gens douteux. Je n'ai pas aimé ce qui s'était produit en Colombie-Britannique, ce n'était pas correct.

Nous avons donc plusieurs raisons d'avoir honte, mais cette honte est la nôtre. C'est notre histoire, notre pays. Nous devons être égaux. Nous devons nous inquiéter ensemble. Ce n'est certainement pas juste de retirer les possessions aux gens et de les vendre.

Devons-nous faire payer aux fils les erreurs de leurs pères? Je ne le crois pas. Je disais souvent aux étudiants de ma classe: «Hier est déjà passé et demain sera le premier jour du reste de ma vie.» Je crois que c'est l'orientation que le Canada doit prendre aujourd'hui. Nous avons eu l'exemple de l'Irlande où les catholiques et les protestants ont aussi tenté de parvenir à la paix de cette façon. Nous devons améliorer le monde où nous vivons.

Toute révision des limites des circonscriptions électorales doit protéger également tous les Canadiens, aussi également que notre présente Constitution le permet. J'espère que mon collègue de Chambly admettra que les réformistes connaissent leur histoire, quoique leur point de vue soit peut-être un peu différent. J'espère respecter toutes les cultures de notre pays. Je ne veux accorder aucun privilège et ne faire place à aucun groupe d'intérêt spécial; nous devons tous travailler en collaboration au sein d'une union fédérale.

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais faire un commentaire et poser une question. Nous discutons actuellement de la motion qui indique que l'on devrait


11603

maintenir une représentation d'au moins 25 p. 100 pour le Québec dans cette Chambre.

J'ai écouté attentivement ma collègue. Elle nous a fait un historique très lointain, de 200 à 300 ans en arrière, mais par contre, elle nous dit que l'on devrait oublier tous ces faits-là. Elle ne nous a pas parlé des événements survenus au cours des vingt dernières années.

J'aimerais lui rappeler pourquoi le Québec est si méfiant et pourquoi il demande que cette protection lui soit accordée. Très récemment, donc en 1980, le gouvernement fédéral, après avoir englouti plusieurs centaines de millions de dollars, a battu le référendum au Québec. En outre, pourquoi ne fait-on pas mention du fait que le Parlement, en 1971, a adopté la Loi sur les langues officielles, qui est devenue par la suite l'instrument d'assimilation par excellence?

(1340)

En 1970, tout près de nous, en pleine nuit, la Loi sur les mesures de guerre a été adoptée par le gouvernement du Canada pour envoyer l'armée, pour aller mater un mouvement séparatiste, souverainiste. Puis on arrête 500 personnes, sans mandat. Pensez-vous qu'on va oublier ces faits-là du jour au lendemain? C'est impossible. On ne peut pas oublier ces événements-là.

Et plus près de nous encore, souvenons-nous de Meech. Je ne veux pas en faire une démonstration puisque, actuellement, il y a un membre de cette Chambre qui siège en face de nous, qui alors, comme député à la législature du Manitoba, a empêché que des discussions se tiennent sur ce sujet, et qui a fait avorter ces ententes. Personne ne semblait trop triste de cet échec du lac Meech, sauf naturellement les Québécois.

Et aujourd'hui, il faudrait effacer, comme un bon professeur, l'histoire comme elle se prétend, effacer avec une brosse son grand tableau noir et dire: «On ne s'occupe plus de ces faits-là».

Ma question est la suivante, monsieur le Président: Pensez-vous que les Québécois et les Québécoises doivent se fier à ce gouvernement justement pour rétablir ces faits-là?

[Traduction]

Mme Jennings: Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations.

Tout d'abord, son professeur d'histoire compatit beaucoup, comme lui d'ailleurs, à la douleur des gens. Je comprends sa douleur. Je ne crois pas que nous puissions l'oublier. J'ignore si quelqu'un pourrait l'oublier. Je ne sais pas si mon père a pu oublier tout ce qu'il a vu au cours des quatre guerres auxquelles il a participé. Je ne sais pas si ma grand-mère a pu oublier qu'elle a perdu quatre fils âgés de 17, 18 et 19 ans. J'ignore si les gens peuvent oublier ces choses. Je sais que nous ferions mieux de songer à apporter des changements. Je sais qu'ils essaient toujours d'obtenir réparation.

Personne ne peut dire que nos amis du Québec ont été assimilés. Je ne crois pas que cela puisse se produire. Ils sont très fiers de leur culture. Ils ont fait un travail remarquable pour la maintenir. Chaque année, dans ma salle de classe, j'avais six élèves qui venaient du Québec. C'était une expérience merveilleuse. Il n'y a aucun risque que nos amis du Québec soient assimilés.

Cependant, je leur demande de faire quelque chose pour tous les Canadiens, de même que pour les gens du Québec. Nous faisons tous partie d'un pays, d'un pays riche. Nous pouvons donner l'exemple au reste du monde si nous sommes prêts à travailler ensemble. Je vous prie de nous aider à apporter ces changements.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté mon honorable collègue du Parti réformiste. Je l'ai entendue dire au sujet des loyalistes: There were so many in Québec that Upper Canada had to be created-To be created out of what exactly?

Est-ce qu'on n'a pas, de cette manière-là, été refoulés dans des frontières-je parle des francophones-dans des frontières plus restreintes?

On nous parle de la grande immigration de 1815. La députée du Parti réformiste a dit: Those people were lied at. They could see no change, no chance of change coming into the system. Ne voyons-nous pas à nouveau ces choses se produire encore et encore depuis nombre d'années?

Elle dit également: Reformers arose in the 1800 out of necessity. Est-ce que ceci ne s'applique pas à la présence même des souverainistes qui font leur action déjà depuis 30 ans et davantage?

Je voudrais conclure avec cette réflexion qui est une question à l'endroit de ma collègue du Parti réformiste. History tends to keep repeating itself mainly because we do not listen to it, and that is a question I would like an answer to.

(1345)

[Traduction]

Mme Jennings: Monsieur le Président, je suis d'accord avec le député quand il dit que l'histoire se répète constamment.

Qu'est-il arrivé quand les Loyalistes sont venus ici? Nous savons que dans les années 1850, 400 000 personnes vivaient dans le Haut-Canada. Après la division, dans le Bas-Canada, il y avait environ 150 000 Anglais, comparativement à 450 000 Français. Quand on jette un coup d'oeil sur cet équilibre, on constate que cela fait beaucoup de personnes à gouverner.

Je n'étais pas là, mais je suppose que les gens, à l'époque, devaient trouver logique que l'on fasse une division géographique, la rivière des Outaouais constituant la ligne de démarcation. C'est tout ce que je peux répondre au député.

Il y avait effectivement des réformistes au Canada, au XIXe siècle. Le député a dit que l'histoire se répétait constamment. Je tiens à lui rappeler que le Haut-Canada et le Bas-Canada avaient tous deux leurs réformistes, Lafontaine et Baldwin, qui étaient reconnus par le gouvernement canadien. Étant donné que l'histoire se répète, on trouve encore aujourd'hui des réformistes. Si nous ne retenons pas les leçons de l'histoire, certaines choses se produisent de nouveau.

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, je dois d'abord m'élever contre le projet de loi C-69 qui, pour moi, n'est qu'une grossière mascarade. Ce projet n'a comme unique raison d'être que de vouloir faire perdre au Québec ses droits acquis en tant que peuple fondateur, et je m'explique.


11604

Il est essentiel que le nombre historique de députés qui représentent les régions québécoises soit conservé. C'est sûr que, dans quelques mois, quand le Québec sera souverain, le gouvernement du Canada fera bien ce qu'il voudra. Mais, actuellement, nous sommes encore ici et nous devons protéger les intérêts des citoyens du Québec.

De toute évidence, le gouvernement libéral, les gens d'en face ont la mémoire bien courte. Je vais tenter de faire un peu d'histoire pour les rapprocher de la réalité.

Le partage des sièges et la délimitation des circonscriptions électorales sont tous deux calculés selon des règles énoncées aux articles 51 et 51a) de la Loi constitutionnelle de 1967, ainsi qu'aux articles 14 et 15 de la Loi fédérale sur la révision des limites des circonscriptions électorales.

La Loi fédérale sur la révision des limites des circonscriptions électorales a mis sur pied des commissions de délimitation pour chaque province. Ces commissions ont pour tâche de tracer la nouvelle carte électorale afin que la population de chacune ou de chacun de ces comtés corresponde au quotient provincial. Ce quotient résulte de la division du chiffre représentant la population de la province par le nombre de sièges à pourvoir.

La Loi fédérale sur la révision des limites des circonscriptions électorales a un article, que je trouve très intéressant, soit l'article 15, et je cite: «La communauté d'intérêt ou la spécificité d'une circonscription d'une province ou de son évolution historique, de même que le souci de faire en sorte que la superficie de ces circonscriptions dans les régions peu peuplées rurales de la province ne soit pas trop vaste.»

L'an dernier, lors du passage de cette commission dans le comté de Chicoutimi, on a proposé des changements. On a demandé de retrancher du comté de Chicoutimi cinq des sept municipalités composant le comté et de les annexer au comté de Jonquière. Le problème avec ce changement est bien cerné par l'article que je viens d'énoncer.

(1350)

Premièrement, la communauté d'intérêt, les municipalités du Bas-Saguenay, les municipalités qu'on voudrait retrancher, ont toujours été associées économiquement, socialement à la ville de La Baie, autre grande ville composante du comté de Chicoutimi. En effet, plusieurs services situés à la ville de La Baie sont donnés aux gens du Bas-Saguenay. On peut penser ici aux centres d'emploi du Canada, aux centres d'aide aux petites entreprises pour n'en nommer que quelques-uns.

Deuxièmement, on doit tenir compte de la superficie des circonscriptions. Afin d'obtenir des services dans le comté de Jonquière, il aurait fallu que les gens de Ferland-et-Boileau-la municipalité la plus rapprochée de celle que l'on proposait d'annexer au comté de Jonquière-aient à parcourir 45 kilomètres. Cela est un exemple concret de ce que le gouvernement libéral se proposait de faire comme changement l'an dernier dans mon comté.

Je suis persuadé que ce genre d'aberration se serait certainement produit ailleurs qu'au Saguenay. Il serait intéressant de le vérifier dans toute la province. Cependant, si on analyse les décisions que les gens d'en face prennent à la journée longue, on a pas à perdre de temps supplémentaire et futile en vérification. Leurs actions quotidiennes parlent pour eux et me suffisent bien.

Mon collègue du comté de Bellechasse nous rappelait, il y a quelques jours, que la Loi de 1985 sur la représentation électorale en ce qui concerne le nombre de sièges à attribuer au Québec était des plus claire. Ne dit-on pas dans cette loi que l'officier ou le directeur général du scrutin doit tenir compte, avant de faire toute autre distribution, que 25 p. 100 des sièges doivent être attribués au Québec?

Vous savez, ce n'est pas la première fois que le Québec est bafoué. Cette malheureuse réalité historique se retrouve tout au long de l'histoire de notre province, elle qui fut l'une des deux provinces fondatrices du Canada. Je n'ai qu'à penser à la proclamation royale de 1763, où on nous imposait des lois anglaises et le Serment du Test, c'est-à-dire que pour occuper une fonction publique, on devait renoncer à notre foi catholique et faire serment de fidélité, oui, faire serment à la Couronne britannique.

Je me souviens également de l'Acte de Québec de 1774, de l'Acte consitutionnel de 1791. Au sujet de ce dernier, je vais vous citer ce qu'on disait dans un journal de l'époque, pour que les colons anglais puissent l'amender. En parlant du Bas-Canada on disait: «Cette colonie est trop française. Il faut la défranciser. Après la prise de Québec, il est temps que cette province soit anglaise.» Voyez-vous, on ne peut pas oublier ces faits-là.

Vient ensuite la Confédération qui ne fera que compléter le travail commencé par l'Acte d'Union de 1840. Après la Confédération, les Canadiens français croyaient avoir signé un traité entre deux nations, entre deux peuples distincts, entre deux peuples fondateurs, mais pour les Canadiens anglais, ce traité avait d'abord valeur de loi en vertu de laquelle la majorité anglaise était désormais légitimée de dominer le peuple minoritaire, c'est-à-dire les Canadiens français. Et pourquoi pas tenter de les faire souffrir, expression à la mode ces temps-ci. Encore aujourd'hui, le gouvernement, par ce projet de loi, essaie de nous enlever nos droits, des droits acquis, à savoir que le Québec ait 25 p. 100 de représentants dans cette Chambre.

(1355)

Je le répète, sinon par respect du moins par conscience, il ne faut pas que ce projet de loi pénalise une fois de plus le Québec. Le Québec, les Québécois et les Québécoises n'ont-ils pas assez souffert de cette domination? À ce que je sache, la population du Québec représente toujours plus de 25 p. 100 de la population du Canada. Alors, n'est-il pas normal qu'il y ait au moins 25 p. 100 de députés de cette Chambre qui la représentent? De quoi a donc

11605

peur le reste du Canada pour essayer si fortement de nous enlever notre droit le plus légitime à une juste représentation?

Je le répète, le Québec a un droit légitime et historique de conserver un poids politique minimal au sein de la Fédération canadienne, déjà qu'il ne reçoit pas sa juste part des transferts fédéraux aux provinces, pas plus dans les investissements militaires que dans la recherche et le développement et naturellement, personne ne peut le nier, dans la création d'emplois. Il risque maintenant d'assister à la réduction de sa représentativité au sein du Parlement canadien.

Où était donc le premier ministre, le député de Papineau-Saint-Michel et le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, trois bons Québécois, lors du vote du 28 mars dernier, alors qu'on refusait, oui, on refusait, un amendement proposé par mon collègue de Bellechasse, amendement qui aurait protégé, une fois pour toutes, le poids politique du Québec au sein de cette fédération? Ils étaient absents, alors qu'ils auraient dû être à la Chambre et voter avec nous.

Le Président: Mon cher collègue, d'habitude, nous ne faisons pas référence au fait qu'un député soit ici ou non. Peut-être que mon honorable collègue voudra se reprendre après la période des questions orales.

Comme il est maintenant 14 heures, nous allons passer aux déclarations de députés.

_____________________________________________


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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE PRIX DES JEUNES TALENTS

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de féliciter Measha Gosman qui a remporté le prix des jeunes talents, catégorie chant, décerné par le réseau YTV.

Measha est une étudiante de douzième année de ma circonscription, Fredericton-York-Sunbury. Elle est la deuxième personne de Fredericton à recevoir ce prix depuis sa création, il y a six ans.

Les habitants de ma circonscription, les Néo-Brunswickois et ses parents sont très fiers d'elle.

La concurrence pour l'obtention des prix décernés par le réseau YTV est très vive, car seuls quinze prix sont remis chaque année. Les différentes catégories vont de la danse à l'entrepreneuriat, et les candidatures de plus de 1 000 jeunes Canadiens sont présentées chaque année.

J'ai bien hâte de voir Measha à la cérémonie de remise des prix qui aura lieu ce soir, au Centre national des arts. Au nom des habitants de Fredericton-York-Sunbury, je lui souhaite beaucoup de succès lors de son passage à la télévision nationale.

[Français]

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Développement des ressources humaines démontre encore une fois qu'il manque de cohérence et de vision lorsqu'il s'agit d'élaborer des politiques gouvernementales visant prétendument à protéger les citoyens qui font l'objet d'injustice.

En février dernier, il présentait les modifications apportées à la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Au nombre des responsabilités nouvelles confiées à la Commission figure l'application de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, la création d'un tribunal administratif sur l'équité et, ce qui n'est pas négligeable, la vérification des rapports présentés par les employeurs du secteur privé. De l'avis du commissaire des droits de la personne, il faudrait 15 nouveaux agents à la Commission pour qu'elle s'acquitte de ses nouvelles responsabilités.

Le ministre a sûrement oublié qu'il a lui-même fermé les bureaux régionaux de la Commission, tout en amputant son budget de plus de 3 millions de dollars. Quel geste contradictoire!

* * *

[Traduction]

LA DETTE

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole au nom des électeurs d'Okanagan-Similkameen-Merritt pour rendre hommage aux habitants de Salmo, en Colombie-Britannique. Ces Canadiens distingués ont décidé de faire quelque chose pour réduire la dette nationale, considérant qu'ils devaient le faire parce que les libéraux n'avaient rien fait à ce chapitre. En fait, les libéraux ont augmenté la dette.

Les gens de Salmo ramassent des cennes noires pour les faire parvenir au fonds de réduction de la dette. Tandis que ces bons Canadiens grattent les fonds de tiroirs, soulèvent les coussins des fauteuils et tirent parti du moindre sou, les libéraux continuent leurs folles dépenses.

Le Conseil des Arts du Canada a distribué 88 millions de dollars de subventions, l'an dernier. Parmi ses derniers dons, on remarque un versement de 10 000 $ à un festival de films pour gais et lesbiennes qui doit se tenir en fin de semaine à Saskatoon. Ce festival est organisé par le groupe «Positively Queer».

Les habitants de Salmo ont toute ma sympathie. Que feront-ils quand ils se rendront compte qu'ils doivent recueillir un million de pièces d'un cent pour payer le soutien financier offert par le gouvernement libéral au festival de films Positively Queer? C'est presque trois tonnes de cents. Les libéraux devraient avoir honte.

* * *

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, le Conseil national du bien-être rapporte que le


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nombre de pauvres au Canada a augmenté de façon spectaculaire et que la pauvreté parmi les enfants est à son niveau le plus élevé depuis quatorze ans.

Pendant de nombreuses années, les gouvernements canadiens qui se sont succédé ont suivi des politiques visant à réduire les salaires des travailleurs canadiens et à engraisser les riches. Les riches deviennent plus riches et les pauvres deviennent plus pauvres, et il y a plus de riches et plus de pauvres. La classe moyenne est en voie de disparition.

La déréglementation, le libre-échange, la privatisation, la sous-traitance, et l'action antisyndicale entraînent une diminution du revenu personnel des travailleurs canadiens. En même temps, les travailleurs voient peu à peu leurs avantages sociaux réduits à la suite des compressions effectuées dans les domaines de la santé et de l'éducation, sous prétexte de combler un déficit causé par une politique visant à maintenir des taux d'intérêt réels élevés et des échappatoires fiscales qui profitent en premier lieu aux riches.

Les enfants sont pauvres parce que leurs parents n'ont pas d'argent. Pour vous donner un exemple, la chaîne de cinémas Famous Players, qui appartient à Viacom Blockbuster, veut que ses projectionnistes acceptent une réduction de salaire de 60 p. 100 et a recours aux services de briseurs de grève pour imposer sa volonté. Le gouvernement devrait faire quelque chose pour protéger les enfants des travailleurs qui sont en grève pour protéger. . .

* * *

L'OPÉRATION HOME FRONT

Mme Jane Stewart (Brant, Lib.): Monsieur le Président, à Noël dernier, les habitants de Brant, sous l'instigation de Sheila Enslev et de la légion de Dunsdon, ont organisé l'opération Home Front pour l'envoi de colis à nos soldats de la paix à l'étranger. Cette idée est née à la suite d'un voyage d'étude en Bosnie au cours duquel Mme Enslev a pu constater de ses propres yeux la précieuse contribution que font nos soldats de la paix à la région.

Cette opération a connu un succès considérable auprès de la collectivité. Cent soixante-douze colis ont été envoyés aux soldats canadiens stationnés en Bosnie. Un soldat a écrit pour dire: «Vous m'avez montré qu'il y a des gens qui ne sont pas indifférents et qui savent que nous existons.»

À l'approche de Pâques, l'opération Home Front va étendre ses services afin d'inclure nos soldats stationnés sur les hauteurs du Golan et en Haïti.

Étant donné les rapports négatifs des médias sur nos opérations militaires à l'étranger, il est important que tous les Canadiens reconnaissent l'excellent travail qu'ont accompli et que continuent d'accomplir nos soldats de la paix.

Au nom des habitants de ma localité, je remercie Sheila et les membres de la légion de Dunsdon, de nous avoir donné la possibilité de marquer notre reconnaissance à nos Casques bleus.

MME MARY KENNEDY

M. Mauril Bélanger (Ottawa-Vanier, Lib.): Monsieur le Président, des centaines d'amis de Mary Kennedy se sont réunis lundi, à Ottawa, à la basilique Saint-Patrick pour dire adieu à une grande dame.

Mary a consacré 30 ans de sa vie à la politique canadienne pendant lesquelles des personnes comme Hugh Faulkner, Ross Milne, Ralph Fergusson et notre collègue d'Edmonton-Nord, John Loney, ont bénéficié de son dévouement, de son travail acharné et de ses conseils empreints d'une grande rigueur morale.

J'ai moi-même eu l'extrême privilège de pouvoir compter sur l'aide de Mary à l'occasion des récentes élections partielles dans Ottawa-Vanier. Mary ne se contentait pas de critiquer. Elle croyait en notre système politique et mettait cette conviction en pratique. Elle était le modèle même du genre de personne sur lequel repose tout parti politique et à qui nous devons rendre hommage en cette Chambre.

Un passage d'un poème d'Irving Layton décrit très bien la personnalité de Mary.

They dance best who dance with
Who lifting feet of fire from fire
Weave before they lie down
A red carpet for the sun.
Mary, vous allez nous manquer.

* * *

[Français]

LA NATION CRIE

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, récemment, les compagnies Domtar et Mishtuk ont réuni leurs efforts pour bâtir un moulin à scie à Waswanipi, au nord du Québec. Cette nouvelle compagnie appartient à 55 p. 100 aux autochtones et 45 p. 100 à Domtar.

Nous avons ici un exemple parfait d'une grande compagnie commerciale contribuant à l'autosuffisance d'une nation autochtone. Soixante-dix emplois à long terme pour les Cris seront créés.

(1405)

De plus, on doit se féliciter de cette aventure pour son approche dans la gestion durable de nos forêts. Je tiens aujourd'hui à rendre hommage au chef John Kitchen de la nation crie et à l'équipe de gestion de Domtar.

* * *

[Traduction]

L'INDUSTRIE SUCRIÈRE

M. Paul Zed (Fundy-Royal, Lib.): Monsieur le Président, le Congrès américain vient d'être saisi de deux projets de loi extrêmement dangereux et choquants, qui risquent de ruiner l'industrie sucrière canadienne.

Le sénateur Jesse Helms et le représentant Dan Burton ont chacun présenté un projet de loi qui renforcerait les sanctions économiques contre Cuba en imposant des sanctions contre tout pays entretenant des liens commerciaux avec Cuba, ce qui aurait


11607

pour effet d'interdire les exportations canadiennes de sucre et de produits contenant du sucre, et réduirait à néant plus de 500 millions de dollars d'exportations vers le marché américain.

Ces projets de loi ont été coparrainés, entre autres, par les candidats à la présidence Dole et Gramm et par les sénateurs D'Amato et Thurmond. Hier, le Washington Post déclarait que ce projet de loi jouissait de l'appui général des deux partis et qu'il serait probablement adopté au printemps, après une série d'audiences.

Au nom de la souveraineté du Canada, j'implore tous les partis de continuer à coopérer et d'appuyer toute tentative de la part du gouvernement en vue de faire dérailler ces deux projets de loi si dangereux pour le Canada.

* * *

[Français]

LE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires étrangères a fait preuve d'un mépris inqualifiable hier à l'égard des personnes qui oeuvrent au sein des organismes d'éducation en développement international.

Après avoir coupé le financement de ces organismes qui ne représentent pourtant qu'une demie de 1 p. 100 du budget total de l'aide, le ministre a eu le culot d'insulter les milliers de bénévoles impliqués. En affirmant que s'ils sont vraiment conscients de l'importance de sensibiliser le public à l'aide au développement ils n'ont pas besoin d'être payés pour le faire, le ministre déforme les faits. Les fonds alloués à ces organismes ne servent pas à rémunérer des bénévoles.

De surcroît, le ministre ignore ostensiblement les conséquences incalculables que cette mesure provoquera sur le réseau de solidarité et de coopération internationale. Plutôt que d'insulter tout le monde, le ministre devrait reconsidérer cette décision totalement irréfléchie.

* * *

[Traduction]

LE GROUPE CITOYENS CONTRE L'EXPLOITATION DES ENFANTS

M. Werner Schmidt (Okanagan-Centre, Réf.): Monsieur le Président, aujourd'hui Monica Rainey, directrice exécutive du groupe Citoyens contre l'exploitation des enfants, présentera au ministre de la Justice une liste de 42 000 signatures. Chacune représente un enfant ayant fait l'objet d'agression sexuelle au Canada.

Le message est clair. L'élimination de l'exploitation sexuelle de nos enfants doit devenir une priorité.

Pourtant, le gouvernement continue à choisir des questions politiques, comme le contrôle des armes à feu, plutôt que des questions critiques, comme les agressions sexuelles contre les enfants, faisant de cette Chambre un simple forum politique. Des actes criminels innommables sont commis chaque jour dans les lieux où les enfants jouent, apprennent et, surtout, ceux qu'ils appellent le foyer.

Je défie le gouvernement libéral d'adopter une mesure législative qui protégera nos enfants. Il faut empêcher que le système juridique les trahisse. Je demande au ministre de la Justice de nous prouver qu'Ottawa n'est pas simplement un endroit où l'on pratique l'opportunisme politique, mais aussi un endroit où la justice prévaut, où les questions sensées ont la priorité et où on prend des décisions de gouvernement véritablement humanitaires.

* * *

LE PRIX DE L'ESSENCE

M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton, Lib.): Monsieur le Président, certains députés demandent une enquête sur le prix de l'essence.

Vu que les taxes provinciales et fédérales représentent environ 55 p. 100 du prix, vu que les raffineries ne réalisent, en moyenne, que 4 p. 100 de rendement sur leurs investissements depuis quelques années et vu que les stations-services ferment parce qu'il n'y a pas de bénéfices à faire, que reste-t-il? S'agirait-il des taxes fédérales et provinciales combinées, des demandes législatives unilatérales imposées à l'industrie ou des taxes municipales élevées dans des villes comme Ottawa?

De toute évidence, toute enquête doit commencer par l'examen complet du rôle des trois niveaux de gouvernement dans le prix de l'essence. Agir autrement, c'est refuser de voir le problème véritable.

* * *

LE COMPLEXE DE HARBOURFRONT

M. Barry Campbell (St. Paul's, Lib.): Monsieur le Président, le 31 mars, le ministre des Travaux publics a annoncé que l'appui financier du gouvernement fédéral au complexe de Harbourfront, pendant l'exercice en cours, serait de six millions de dollars, mais il n'a rien promis pour les exercices à venir. Compte tenu de cette annonce, le conseil d'administration a décidé de fermer le complexe le 15 septembre.

(1410)

Les députés de la région torontoise se sont réunis mardi soir et ont réitéré leur engagement à l'égard du complexe, qui est un actif culturel indispensable dont bénéficie toute la région.

Les députés en question sont déterminés à travailler de concert pour garantir un financement stable pendant plusieurs années ou pour trouver d'autres sources de financement afin d'assurer l'avenir du complexe Harbourfront. Ils ont travaillé pour obtenir un niveau adéquat de financement pour cette année, malgré les contraintes auxquelles sont assujetties les finances publiques, et ils continueront de promouvoir le complexe.

Nous regrettons que le conseil d'administration ait décidé de fermer les portes le 15 septembre. Nous avions espéré qu'il prendrait le temps d'explorer d'autres sources de financement ou de s'assurer la participation de nouveaux administrateurs qui seraient prêts à exploiter le complexe avec un budget réduit.

La fermeture de centres comme celui de Harbourfront appauvrit les Canadiens, mais ces derniers nous ont bien demandé de mettre de l'ordre dans nos finances. Malheureusement, cela signifie que Harbourfront ainsi que d'autres institutions et d'autres programmes importants devront désormais compter sur un appui financier plus modeste.


11608

[Français]

EXPO 2005

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, la députée bloquiste de Rimouski-Témiscouata annonçait que Hull était la ville la plus laide au monde. Qu'il est bon d'entendre que la députée court les rues de Hull, ces jours-ci, pour annoncer aux habitants qu'elle retire ses paroles et qu'elle annonce maintenant à tous ceux et celles qui veulent l'entendre, et surtout à son nouvel ami, le ministre du Patrimoine, qu'elle appuie la candidature de cette ville pour Expo 2005.

Ceci permettrait aux gens à travers le monde de venir voir ce phénomème d'une ville transformée et devenue accueillante, en une semaine, grâce aux députés du Bloc. Serait-ce une indication que les séparatistes se sont finalement décidés sur la date du référendum, soit l'année 2005?

* * *

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Patrimoine canadien ne partage aucunement l'opinion émise par la ministre du Travail, suite à l'annonce faite hier par le premier ministre du Québec, quant à la tenue du prochain référendum québécois. Le ministre du Patrimoine a confirmé que lui et son premier ministre ne souhaitaient pas que le référendum se fasse avant l'été.

La ministre du Travail, responsable de la bataille référendaire pour le fédéral, est surprise et déçue que le référendum sur la souveraineté du Québec ne se tienne pas avant l'été. De toute évidence, les opinions sont partagées au sein du Cabinet. Cependant, il faut leur rappeler que cette décision appartient au gouvernement du Québec et que le premier ministre a toute la latitude pour fixer le moment où devra se tenir cette importante consultation pour décider de l'avenir du Québec et des Québécois, n'en déplaise à la ministre du Travail.

* * *

[Traduction]

LE PROJET DE LOI C-68

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, hier, le ministre de la Justice, avec l'appui du caucus libéral, a manifesté un vil mépris pour les principes démocratiques qui régissent notre pays.

À l'époque où ils formaient l'opposition, les libéraux ont tempêté lorsque les débats sur la TPS ont été écourtés et cette taxe boiteuse a été imposée aux Canadiens. Que viennent-ils de faire? Ils ont suivi l'exemple de Mulroney.

Le ministre de la Justice a tout d'abord déclaré que le sort du projet de loi sur le contrôle des armes ne dépendrait pas uniquement d'un vote. Puis, dès qu'il a présenté le projet de loi C-68, il a dit que le processus de consultation était terminé.

Le Président: Chers collègues, nous savons tous naturellement que, selon la tradition de la Chambre, nous ne devons faire aucune allusion à un vote tenu à la Chambre des communes. J'espère que le député n'allait pas s'engager dans cette voie. Puis-je gentiment lui rappeler d'éviter de mentionner les votes, le résultat des votes ou la façon dont les députés auraient voté.

M. Ramsay: Monsieur le Président, n'oublions pas que, pendant que les libéraux faisaient adopter ce projet de loi à toute vapeur. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Le député de Haldimand-Norfolk.

* * *

LE CENTRE D'INFORMATION DE LA POLICE CANADIENNE

M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, chaque année, 42 000 enfants canadiens seraient victimes d'agression sexuelle. En novembre dernier, le ministre de la Justice et le solliciteur général ont annoncé des changements au Centre d'information de la police canadienne.

(1415)

Je félicite le ministre pour ces améliorations positives. Malheureusement, même si la base de données fonctionne, personne n'est tenu de la consulter. À l'heure actuelle, le processus est lourd.

Nous sommes aux prises avec un autre problème grave, soit la réhabilitation octroyée aux personnes reconnues coupables d'infractions sexuelles contre des enfants. Des dizaines de milliers de Canadiens ont signé des pétitions et des lettres pour réclamer de nouvelles lois visant à protéger nos enfants. Aujourd'hui, après la période des questions orales, bon nombre de ces pétitions seront présentées par Monica Rainey, fondatrice et directrice générale de la Coalition des citoyens contre l'exploitation des enfants.

Étant donné les difficultés que connaissent les enfants canadiens maltraités, j'exhorte le ministre de la Justice à mettre sur pied un système d'attestation obligatoire et à étudier immédiatement la possibilité de modifier la Loi sur le casier judiciaire afin d'empêcher que la réhabilitation soit octroyée aux personnes reconnues coupables d'infractions sexuelles contre des enfants de moins de 18 ans.

* * *

[Français]

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

M. Martin Cauchon (Outremont, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre du Québec a annoncé officiellement, hier, qu'il reportait son référendum à l'automne prochain. Ce faisant, le chef du Parti Québécois nous dit qu'il n'a rien à faire du rapport de la Commission nationale sur la souveraineté du Québec qui doit être déposé le 13 avril prochain.

11609

Nous savons tous que des millions de dollars ont été investis dans cette vaste opération de consultation populaire qui devait permettre à la population de faire connaître son point de vue au gouvernement sur la question de la souveraineté du Québec.

Avec l'annonce faite hier par le chef péquiste, une semaine avant le dépôt du rapport de la Commission nationale, force nous est de constater que pour le gouvernement péquiste et leurs amis du Bloc, la stratégie compte bien plus que l'opinion des Québécoises et des Québécois.

_____________________________________________


11609

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA CRÉATION D'EMPLOIS

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Dans son rapport déposé hier, le Conseil national du bien-être social constate que la pauvreté a continué de progresser au Canada, en 1993, et particulièrement au Québec où 20,7 p. 100 de la population vit sous le seuil de la pauvreté.

Étant donné l'aggravation du problème de la pauvreté, comment le gouvernement peut-il nous expliquer qu'il n'ait mis en place aucune mesure de création d'emplois et qu'il ait même réduit ses efforts dans le programme d'infrastructure qui constituait sa seule initiative en matière de création d'emplois depuis qu'ils sont au pouvoir?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je crois qu'il est très important que tous les députés reconnaissent la gravité de la situation, comme le souligne le Conseil national du bien-être dans son rapport.

Le problème de la pauvreté dans notre pays est un problème que nous devons tous prendre très au sérieux. Le plus important, c'est de s'assurer que nous créons au Canada un climat propice à la création d'emplois. Un des moyens les plus efficaces d'enrayer la pauvreté est encore de donner aux gens la chance de travailler.

Au cours de la dernière année, nous avons créé plus de 450 000 emplois dans notre pays. Nous avons eu le taux de croissance de l'emploi le plus élevé de tous les pays industrialisés. Les chiffres utilisés par le Conseil national du bien-être s'arrêtent à l'année 1993. Nous espérons que les progrès importants réalisés sur le plan de la création d'emplois au cours de la dernière année tendront à améliorer la situation, mais ce n'est certainement pas une raison pour que nous nous assoyions sur nos lauriers.

Il nous faut redoubler d'efforts pour redonner des emplois aux Canadiens, pour investir davantage dans les programmes et les initiatives qui donneront vraiment aux gens la chance d'améliorer leur sort. J'espère pouvoir compter sur la collaboration du député et de son parti pendant cette période où nous essayons de réformer notre système social pour atteindre ce but.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, nous avons offert à maintes reprises, à maintes occasions notre coopération au gouvernement pour créer des emplois. Toutes nos suggestions ont été repoussées du revers de la main.

Comment le gouvernement peut-il prétendre agir pour la création d'emplois quand il refuse de mettre en place une véritable stratégie de reconversion de l'industrie militaire, quand il refuse de venir en aide aux chantiers de la MIL Davie et quand il décide de maintenir une politique monétaire qui est obsédée par la lutte à l'inflation plutôt que par la création d'emplois?

Le ministre prétendra-t-il que le laisser-faire du gouvernement contribuera à créer des emplois?

(1420)

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député sait très bien que la plupart des emplois dans notre pays doivent être créés par le secteur privé.

Si nous sommes dans une situation où les taux d'intérêt montent à un rythme inacceptable ou encore où les mouvements de capitaux internationaux deviennent instables, ce qui nous met dans une position de vulnérabilité, nous serons incapables de stimuler la création d'emplois.

C'est pourquoi, dans notre budget, nous avons essayé d'assainir la situation financière du Canada afin d'être moins vulnérables aux mouvements de capitaux internationaux, de pouvoir stabiliser les taux d'intérêt et d'établir un cadre qui permet au secteur privé de créer des emplois.

Nous croyons aussi que, parallèlement à cela, nous devons nous attaquer très sérieusement à ce que nous appelons le déficit humain, c'est-à-dire voir à ce que les gens aient davantage de possibilités d'améliorer leurs compétences et de participer à des programmes d'emploi au lieu de simplement dépendre des programmes de prestations.

C'est là le but des propositions de réforme que le comité de la Chambre des communes a étudiées et des recommandations que nous examinons actuellement en vue de prendre dès cette année des mesures concrètes à cet égard.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, ce vibrant plaidoyer pour l'entreprise privée en vertu de la création d'emplois ne cache-t-il pas, de la part du ministre, une incapacité d'intervenir comme gouvernement pour aider les sans-emploi?

Le ministre reconnaîtra-t-il que le triste portrait du Québec, où près de 21 p. 100 des Québécois vivent maintenant sous le seuil de la pauvreté, le plus haut taux au Canada, je vous le rappelle, est l'héritage du fédéralisme et la preuve accablante de l'échec du régime qui est incapable, mais absolument incapable, de contribuer au développement économique du Québec et impuissant devant l'aggravation de la pauvreté au Québec?


11610

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est malheureux que le député se serve de ce que nous considérons tous comme une situation très grave pour s'en prendre au fédéralisme.

La pauvreté, particulièrement chez nos jeunes enfants et nos familles, est un problème qui nécessitera la collaboration de tous les niveaux de gouvernement. Le fait qu'un parti s'entête à vouloir diviser le pays à un moment où nous avons besoin de travailler ensemble ne fera que nuire à nos efforts.

Si nous voulons vraiment régler le problème de la pauvreté, il faut que tous les Canadiens, toutes les provinces et toutes les régions unissent leurs efforts.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Toujours dans ce même rapport, le Conseil national du bien-être social note l'augmentation de la pauvreté chez les jeunes familles, pour la plupart des familles monoparentales dirigées par une femme. Le rapport poursuit, et je cite: «Les enfants sont pauvres parce que leurs parents sont pauvres. Et l'une des principales raisons de cette pauvreté est la pénurie de bons emplois.»

Le ministre du Développement des ressources humaines admettra-t-il que, loin de s'améliorer, la situation de la pauvreté va s'aggraver en raison des coupures à l'assurance-chômage, dont son gouvernement est responsable, qui ont pour effet de refouler des dizaines de milliers de chômeurs chaque mois à l'aide sociale?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, parmi les modifications au régime d'assurance-chômage que nous avons présentées l'an dernier dans le projet de loi C-17, il y avait une mesure spéciale prévoyant deux niveaux de prestations, ce qui permet de donner davantage aux personnes à très faible revenu qui ont des enfants à charge. Le taux applicable à ces personnes représente 60 p. 100 du revenu admissible comparativement à la norme nationale de 55 p. 100.

(1425)

Depuis, près de 200 000 familles canadiennes ont bénéficié de ce taux de prestation supérieur, ce qui a ajouté près de 1 000 $ à leur revenu familial pendant l'année.

Cela démontre que, en modifiant le régime d'assurance-chômage, nous avons tenu compte des besoins particuliers des familles. Je peux assurer à la députée qu'au moment d'entreprendre une réforme plus complète de l'assurance-chômage, nous continuerons de tenir compte des besoins des membres les plus démunis de notre société.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, le propre plan budgétaire du ministre dit qu'il y a eu une diminution de 16,2 p. 100 des mandats attribuables aux modifications législatives, projet de loi C-17, qui ont réduit le nombre maximal de semaines d'admissibilité.

Le ministre du Développement des ressources humaines reconnaîtra-t-il que la situation va s'aggraver aussi dans les trois prochaines années en raison des réductions dans les paiements de transfert et de la mise en place du Transfert social canadien, qui n'est rien d'autre que la poursuite et l'aggravation des coupures fédérales dans le financement des programmes sociaux?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'Économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, au contraire, je pense que les occasions pour développer un nouveau cadre de transferts entre le gouvernement fédéral et les provinces offrent le moyen de développer une approche coopérative, une approche efficace pour traiter du problème de pauvreté des familles et des enfants. Je pense que c'est un effort pour développer une stratégie nationale, une stratégie coopérative entre les deux niveaux de gouvernement pour s'attaquer à ce problème, et j'espère que l'honorable députée et ses collègues se joindront à nous dans cet effort national pour lutter contre la pauvreté au Canada.

* * *

[Traduction]

LA RADIODIFFUSION DIRECTE À DOMICILE PAR SATELLITE

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

En novembre dernier, le Cabinet a décidé d'annuler une décision du CRTC et de créer un groupe de spécialistes chargé d'examiner la politique canadienne de radiodiffusion directe à domicile par satellite. Ce groupe a évidemment des liens très étroits avec le Cabinet du premier ministre.

Selon des informations qui ont filtré, cet examen qui s'est déroulé à huis clos est maintenant terminé, mais le Cabinet annoncera sa décision après l'ajournement de la Chambre pour le congé de Pâques, afin d'éviter qu'elle ne fasse l'objet d'un examen public minutieux.

Quelle décision le gouvernement a-t-il prise au sujet de la radiodiffusion directe à domicile par satellite et pourquoi ne l'a-t-il pas annoncée avant le congé?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, les affirmations que la députée a faites dans le préambule de sa question sont généralement inexactes.


11611

Les questions dont le groupe a été saisi revêtent une grande importance, aussi bien pour le projet d'autoroute électronique que pour le système de radiodiffusion par satellite. Nous avons annoncé que l'examen se ferait ouvertement, et c'est ainsi qu'il s'est déroulé. Les spécialistes ont été nommés et ils ont pris connaissance des mémoires de tous les Canadiens qui s'intéressaient à la question. Ces mémoires ont été rendus publics. La population a ensuite eu la possibilité de les commenter par écrit. Ces commentaires ont eux aussi été rendus publics.

Cet après-midi, le groupe présentera ses recommandations. Je conseille à la députée de prendre connaissance de celles-ci. Elle aura peut-être des suggestions à faire après les avoir lues.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma question complémentaire s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Des facteurs politiques ont influé sur l'issue de cet examen. L'examen a d'abord été demandé parce que la décision initiale était défavorable à Power Corporation, une société présidée par le gendre du premier ministre. Le groupe chargé de l'examen comprenait Robert Rabinovitch, qui est personnellement lié à Power Corporation et au Claridge Group, ainsi que Roger Tassé, un associé de l'ancien cabinet d'avocats d'Eddie Goldenberg. Pis encore, le gouvernement a tenté de passer cette décision en douce sans en parler à la Chambre afin d'éviter tout débat public.

Pourquoi l'examen sur la radiodiffusion directe à domicile par satellite n'a-t-il pas été fait dans le cadre des audiences du ministère de l'Industrie sur l'autoroute de l'information ou de celles du CRTC sur la convergence?

(1430)

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, voici un autre exemple donné par une députée qui porte des accusations non fondées d'une manière éhontée et irresponsable.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Chers collègues, je vous demanderais de bien vouloir peser vos mots quand vous faites allusion à d'autres députés dans vos observations. Je vous demanderais de bien vouloir conserver cela à l'esprit quand vous posez des questions ou donnez des réponses.

M. Manley: Monsieur le Président, nous avons procédé de cette façon pour une raison fort simple. Comme la députée le sait, nous nous préoccupons beaucoup du système de radiodiffusion directe à domicile par satellite à cause de la croissance très rapide de ce qu'on appelle le marché gris.

Il est important que le gouvernement adopte une politique très claire le plus rapidement possible et le plus ouvertement possible. Nous avons décidé de former un groupe d'étude, qui serait chargé d'examiner la question, comme je l'ai expliqué dans ma réponse précédente.

Je tiens toutefois à préciser que le ministre du Patrimoine canadien et moi n'avons reçu le rapport que ce matin directement des mains du président du groupe d'étude. Nous allons l'examiner très attentivement, et je lui suggère d'en faire autant. Nous n'avons pas pris de décision quant à la suite à donner aux recommandations.

J'aimerais savoir si le Parti réformiste a pris position sur cette importante question. C'est avec plaisir que j'en tiendrai compte avant de faire des recommandations au Cabinet.

Le Président: Chers collègues, je vous demanderais à tous de bien vouloir faire preuve d'un peu plus de concision dans vos questions et vos réponses.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse encore une fois au ministre du Patrimoine canadien.

Le Parti réformiste a toujours été favorable à un réexamen de la politique canadienne sur la radiodiffusion directe à domicile par satellite. Nous voulons que la concurrence s'exerce, mais le réexamen doit se faire au grand jour.

Le réexamen que le gouvernement a fait s'est déroulé dans les coulisses et il a conclu une entente derrière des portes closes pour avantager une bande de collecteurs de fonds du Parti libéral. C'est un autre exemple qui montre que le gouvernement n'a pas de politique culturelle.

Un jour, ils limitent la concurrence en faveur des industries canadiennes, le lendemain ils ouvrent la porte toute grande. . .

Le Président: La question, s'il vous plaît.

Mme Brown (Calgary-Sud-Est): Le gouvernement a-t-il une politique culturelle ou continuera-t-il de prendre ses décisions au petit bonheur dans l'intérêt de ses amis libéraux?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'ignore de quel coin de l'univers la députée peut bien venir. J'ignore si elle connaît la moindre chose sur les satellites, mais elle a l'air de s'y connaître en soucoupes volantes.

Pour étudier cette politique le plus rapidement possible, nous avons fait appel à des personnes dont la réputation ne peut être mise en question. Pas par la députée en tout cas.

Nous avons mis sur pied un groupe formé de trois anciens sous-ministres qui ont tous servi sous d'autres gouvernements. Leur réputation n'a été remise en question par personne d'autre. La députée elle-même ne l'a pas fait en dehors de la Chambre, car elle s'exposerait à des poursuites. Elle prend la parole ici pour salir la réputation de trois personnes qui ont offert leurs services au gouvernement.

Si la députée lisait le rapport, elle verrait que ses allégations sont sans fondement.

* * *

[Français]

LES CONTRATS GOUVERNEMENTAUX

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. On apprend que le ministre de la Justice a accordé, en novembre dernier, un contrat de 22 500 $ à la firme de communication Earnscliffe Strategy Group.


11612

(1435)

Dans le mandat prévu au contrat, la firme devait conseiller le ministre sur la stratégie à adopter devant son caucus sur le contrôle des armes à feu.

Comment le ministre peut-il justifier dépenser 22 500 $ de fonds publics pour élaborer une stratégie de communication visant à convaincre ses collègues libéraux de respecter leur engagement électoral?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous avons passé le contrat en question dans le cours normal de nos activités pour obtenir des conseils qui nous aident à remplir nos responsabilités de tous les jours. C'est parfaitement correct. C'est de l'argent bien dépensé.

Les événements d'hier nous en fournissent la preuve la plus convaincante.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ma question complémentaire s'adresse au premier ministre suppléant.

Le premier ministre suppléant peut-il nous dire si la pratique d'utiliser des fonds publics pour l'élaboration d'une stratégie de communication destinée au caucus libéral est une pratique répandue parmi ses collègues du Cabinet, et est-elle conforme à l'éthique gouvernementale?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la députée possède quelques faits, mais pas beaucoup. Quant au reste de sa question, c'est une combinaison d'inventions ou d'idées chimériques.

Les fonds ont été dépensés dans le but légitime d'obtenir des conseils de l'extérieur sur la meilleure façon de servir l'intérêt public. Il ne s'agissait pas de conseils sur la façon de s'y prendre avec le caucus, mais de conseils sur la façon de s'occuper des problèmes auxquels le ministre de la Justice doit faire face en remplissant ses responsabilités dans l'intérêt public. C'est exactement pour cela que cet argent a été dépensé.

* * *

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, ce matin, le ministre de la Justice a déclaré qu'on ne punirait pas les députés libéraux qui ont exprimé leur opinion et leur opposition au projet de loi sur le contrôle des armes à feu. C'est une maigre consolation. En effet, ces députés ont déjà été jetés à la porte de leurs comités.

Le Président: Comme je l'ai expliqué plus tôt, la tradition à la Chambre veut qu'on ne parle pas des votes pris à la Chambre ni de la façon dont les députés se sont prononcés. J'invite donc les députés à en tenir compte dans leurs questions, ainsi que dans leurs réponses.

Mme Grey: Le leader du gouvernement à la Chambre peut-il expliquer à la Chambre et aux Canadiens ce qu'il est advenu de la promesse que les libéraux ont faite dans leur livre rouge et qui consistait à permettre la tenue d'un plus grand nombre de votes libres à la Chambre des communes?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est le gouvernement qui décide des votes qui sont libres. Or, nous n'avons pas décidé que le vote, à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi sur le contrôle des armes à feu, entrait dans cette catégorie.

Cependant, nous tenons notre promesse tous les jours de séance de la Chambre, car nous traitons les projets de loi d'initiative parlementaire comme des mesures faisant l'objet d'un vote libre. C'est certainement beaucoup plus que le gouvernement précédent. De plus, en se prononçant comme elle l'a fait sur le contrôle des armes à feu, la Chambre a répondu librement au consensus des Canadiens.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, il faut que les députés puissent représenter leurs électeurs sans être menacés par le whip de leur parti. On doit les féliciter pour cela et non les punir.

Le ministre de la Justice ou le leader du gouvernement à la Chambre pourraient-il nous expliquer pourquoi certains députés libéraux ont immédiatement été mis à la porte de leurs comités?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, ce n'est pas une question qui touche le gouvernement lui-même, mais bien le fonctionnement interne de notre caucus.

(1440)

Nous serons heureux, en temps voulu, de nous adresser aux Canadiens, en tant que parti ou caucus, et de leur demander leur appui en fonction du bon travail que nous accomplissons en leur nom, comme le montre très bien notre appui au projet de loi extrêmement constructif et nécessaire que le ministre de la Justice a présenté au sujet du contrôle des armes à feu.

* * *

[Français]

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine.

Insatisfait d'une ordonnance du CRTC relativement à la diffusion directe par satellite, le gouvernement fédéral mettait sur pied, en novembre dernier, comme on vient de le souligner, un comité formé d'amis du régime et chargé de contourner la décision du CRTC de façon à avantager d'autres amis du régime, dont Power Broadcasting.

Comment le ministre du Patrimoine peut-il accorder une crédibilité au rapport d'un comité de soi-disant experts alors qu'ils n'ont rencontré que les représentants du projet de Power


11613

Broadcasting, tout en refusant de rencontrer leurs concurrents, sous prétexte de manque de temps?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, les allégations qui sont faites sont fausses. Je suggère à la députée de peut-être prendre le temps de lire le rapport, et il est peut-être possible qu'elle sera d'accord avec les recommandations faites par ce groupe d'experts.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, le ministre de l'Industrie répondait tout à l'heure à ma collègue en affirmant que le gouvernement avait formé son propre comité pour avoir l'avis d'experts.

Doit-on comprendre que si le ministre a formé son propre comité, c'est qu'il considère que le CRTC n'était pas apte à faire une recommandation qu'il juge adéquate, et que c'est pour cela qu'il a créé son comité afin d'obtenir la recommandation qui lui convenait?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, la réponse est non. En fait, le gouvernement n'a pas manifesté de préférence pour une décision en particulier. Il incombe au gouvernement d'établir des politiques dans un important domaine qui touche non seulement l'administration des services de programmation, mais aussi l'autoroute de l'information en général.

La responsabilité d'adopter des politiques incombe au gouvernement. C'est pour cela que les gouvernements sont élus. Nous examinerons les propositions du groupe d'experts qui déposera son rapport aujourd'hui et nous ferons savoir quelle politique nous semble la plus appropriée.

Dans ce genre de situation, le choix des perdants et des gagnants dépend souvent des décisions que prend un organisme de réglementation, un tribunal, comme le CRTC, dans le cas présent. Personne n'a recommandé que ces décisions soient prises ailleurs.

* * *

LES AFFAIRES INDIENNES

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, hier, le ministre des Affaires indiennes a fait preuve d'une telle irascibilité et d'un tel obscurcissement qu'il a dû, ce matin. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Je prierais le député d'être très judicieux dans le choix de ses mots, à compter de maintenant.

M. Duncan: Monsieur le Président, ce matin, le ministre des Affaires indiennes a clarifié les réponses contradictoires qu'il a fournies au sujet de ce qui s'est passé à la réserve Stoney. Il est maintenant évident que le ministre ne s'était pas vraiment penché sur la situation en cours avant la période des questions d'hier.

Or, on m'a signalé qu'il y avait cinq autres endroits en Alberta où l'exploitation forestière est éventuellement plus grande que celle autorisée par le MAINC: Gerard Sturgean, Hart Lake, Boyer et Eden Valley. Que fait le ministre à cet égard?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, hier a été une journée révélatrice, ne serait-ce que parce que le député de Kootenay-Est est allé raconter au Sun de Vancouver que toutes les entreprises se trouvaient dans sa circonscription et qu'il ne citerait pas leurs noms.

Pour le cas où le député voudrait savoir où est le député de Kootenay-Est, je lui signale qu'il se trouve trois rangées plus bas et qu'il siège parmi les réformistes. S'il veut être de quelque utilité, car il connaît évidemment les noms des compagnies qui s'y trouvent, il ferait bien d'aller trouver rapidement la GRC pour lui communiquer les renseignements dont elle a besoin pour porter des accusations.

(1445)

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais que le ministre cesse, un jour, de s'en prendre au Parti réformiste chaque fois qu'on lui pose une question et qu'il agisse enfin comme ses fonctions l'exigent.

Le ministre a fourni des avis contradictoires quant à ce qu'il savait de la surexploitation forestière à la réserve Stoney. Connaissait-il la situation, alors que le ministère est au courant depuis un an? Sinon, pourquoi? S'il était au courant, pourquoi n'est-il pas intervenu?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je dirais que c'est davantage un aveu qu'une attaque. Je suis heureux que le député ait posé cette question, car, à mon avis, il est grand temps d'en venir aux faits.

Qu'allons-nous faire à cet égard? Je pense que nous pourrions faire appel au Parti réformiste parce que l'Association nationale de foresterie autochtone recommande des mesures législatives. Elle représente 120 premières nations qui s'occupent de foresterie, 54 entreprises forestières, des institutions d'enseignement, ainsi que les responsables du Programme de gestion intégrée de Meadow Lake qui assure la formation. Elle poursuit cinq objectifs auxquels souscrirait probablement le Parti réformiste.

Si elle tient des consultations, et je crois que c'est son intention, et si nous disposons de mesures législatives. . .

M. Thompson: C'est inutile!

M. Irwin: Restons calme! Je sais, je t'ai à tout coup.

Le Président: C'est ça, je vais rester calme et demander à un autre député de poser une question.

* * *

[Français]

LA SITUATION DE LA FEMME

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la secrétaire d'État à la situation de la femme.

Ce matin, des femmes représentant littéralement des centaines d'organismes canadiens et québécois sont venues protester contre les coupures au programme Promotion de la femme. Elles ont dénoncé l'effilochage des subventions aux groupes de femmes; effilochage qu'on peut maintenant chiffrer à plus de 4 millions de dollars depuis six ans et qui continue d'année en année.


11614

Comment la secrétaire d'État à la situation de la femme peut-elle justifier ces nouvelles coupures aux organismes qui oeuvrent auprès des femmes les plus démunies, alors que son premier ministre n'avait que les mots «fierté» et «dignité» à la bouche lors de la dernière campagne électorale?

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, je suis fière et je suis convaincue de l'engagement de notre gouvernement envers l'égalité des femmes, point final, sans équivoque.

Je dois rappeler à mon honorable collègue que nous avons rétabli le Programme de contestation judiciaire, que nous sommes en train de mettre sur pied les centres d'excellence en santé pour les femmes et que nous avons travaillé à la réforme des sentences, au contrôle des armes à feu, à l'équité en matière d'emploi et à la petite et moyenne entreprise dans l'intérêt des femmes. Je crois qu'on démontre concrètement qu'on a un intérêt envers l'égalité des femmes.

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, en question complémentaire, la secrétaire d'État à la situation de la femme aurait déjà prévenu les groupes de femmes avant le dépôt du Budget que les critères d'attribution de subventions seraient révisés avant l'automne prochain.

La secrétaire d'État compte-t-elle consulter les groupes au sujet de l'élaboration de ces nouveaux critères? Si oui, quelle importance entend-elle accorder aux résultats de ces consultations dans la prise de décision finale?

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, j'apprécie beaucoup l'intérêt que porte le Bloc envers la condition des femmes du Canada. Je crois qu'il démontre reconnaître que l'équité et l'unité sont en force au Canada.

À cet égard, elle doit reconnaître que le Budget de février n'a fait aucune coupure aux subventions et contributions aux groupes féminins. J'ai d'ailleurs répété aux femmes: «subventions et contributions». J'ai dit aux femmes et je le soutiens que l'opinion des femmes de tout le Canada sera prise en considération quand viendra le rajustement de nos budgets. J'espère que le Bloc sera intéressé dans l'intérêt de toutes les femmes, partout au Canada.

* * *

(1450)

[Traduction]

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, la population de l'ouest de l'île, en fait de toute la région de Montréal, a été stupéfiée d'apprendre l'assassinat brutal du révérend Frank Toope et de son épouse, Jocelyn. Trois adolescents ont été accusés du meurtre au premier degré du couple à la retraite. Les victimes ont été battues à mort avec un bâton de baseball.

Le ministre de la Justice peut-il dire à la Chambre que, par suite des modifications qu'il est proposé d'apporter à la Loi sur les jeunes contrevenants et qui sont actuellement soumises au Sénat, les jeunes contrevenants violents ne pourront plus se retrancher derrière la loi et que justice sera faite pour les victimes, leurs familles, les contrevenants et, surtout, l'ensemble de la société?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la mort tragique du révérend Toope et de son épouse a consterné et attristé toute la collectivité de Beaconsfield. Cependant, tous les Canadiens ont été révoltés par le caractère insensé de ce crime brutal. Comme le député l'a dit, les adolescents ont été accusés et l'affaire est maintenant devant les tribunaux. Je ne veux pas commenter les faits qui entourent cette affaire, mais je voudrais parler plus généralement des points que le député a soulevés.

Le gouvernement ne peut pas dire que le simple fait de modifier une loi va empêcher des tragédies comme celle-ci de se produire. Nous savons que ce n'est pas le cas. Il faut faire un certain nombre de choses pour empêcher la criminalité et aller à la source du problème.

Le gouvernement a pris des mesures pour modifier le droit pénal et la Loi sur les jeunes contrevenants afin de dissuader les jeunes d'adopter de tels comportements et de prévoir des sanctions adéquates. Le projet de loi C-37, que la Chambre a adopté, est actuellement à l'étude au Sénat. J'espère que le Sénat l'examinera sans tarder. Comme la Chambre le sait, ce projet de loi augmente la durée des peines infligées dans les cas de meurtre. Il prévoit la comparution devant un tribunal pour adultes de certains jeunes accusés de crimes de violence graves. Il prévoit également l'échange de renseignements.

J'ai aussi demandé au comité de la Justice d'aller dans les différentes régions du pays, d'écouter ce que les Canadiens ont à dire, d'examiner notre système de justice pour les jeunes et de déterminer si d'autres changements s'imposent. Le gouvernement sera sensible à ces recommandations. Nous nous sommes engagés à nous doter d'un système qui soit juste et rigoureux. Nous prendrons des mesures pour y parvenir.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais poser une question à propos de cette horrible tragédie qui s'est produite à Montréal, où deux personnes ont été brutalement et froidement exécutées à coups de bâtons de baseball par trois jeunes contrevenants qui avaient prémédité leur crime. Il s'agit d'un homicide froidement prémédité pour lesquels les auteurs n'ont manifesté aucun remords.

Le ministre de la Justice va-t-il assurer aux Canadiens qu'il va insister afin que les jeunes psychopathes de 14 et 15 ans soient traduits devant un tribunal pour adultes?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je comprends la réaction des Canadiens, y compris des députés de la Chambre, face à des événements aussi horribles et tragiques que celui-ci.

Le député ne doit pas oublier que la justice doit suivre son cours. Les personnes accusées sont présumées innocentes jusqu'à preuve de leur culpabilité. Il va y avoir un procès. La Couronne va présenter la preuve et un tribunal décidera qui est responsable. Nous ne devons pas entraver le processus judiciaire.


11615

Pour répondre à sa question, c'est au procureur de décider de demander ou non le transfert à un tribunal pour adultes. Le procureur reçoit ses instructions du procureur général du Québec.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, j'ai reçu près de 50 000 lettres à propos de la Loi sur les jeunes contrevenants et je sais que le ministre en a reçu autant.

Le ministre n'arrête pas de nous dire que l'aide aux jeunes en détresse à risque permettra de mettre fin à ces crimes horribles. Il est trop tard pour ces deux personnes âgées.

Des organismes provinciaux nous ont dit que ce gouvernement parle d'aide pour les jeunes à risque, mais qu'il ne fait rien. Le ministre peut-il nous dire quand il va passer à l'action?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai jamais prétendu que nous allions pouvoir mettre totalement fin à la criminalité. Il ne faut pas y compter.

Ce que j'ai dit, c'est que l'on peut renforcer les lois, réagir de façon plus appropriée et mieux faire appliquer les lois, mais que ce n'est pas tout. Ce n'est pas suffisant. Il y a beaucoup d'autres choses à faire et nous devons concentrer nos efforts sur toutes.

(1455)

Nous sommes passés à l'action. Nous avons adopté le projet de loi C-37, nous avons demandé au comité de recommander d'autres changements, nous avons créé un Conseil national de prévention de la criminalité. Mes collègues du Cabinet s'efforcent de diverses manières de s'attaquer aux causes sociales de la criminalité dans ce pays.

* * *

[Français]

LE BURUNDI

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Le représentant spécial des Nations Unies au Burundi a accusé la communauté internationale de pousser le Burundi au génocide. Il dénonçait hier, à Bujumbura, l'inconsistance et l'irresponsabilité de la communauté internationale dans la crise qui sévit au Burundi et où deux millions de personnes pourraient être jetées sur les routes et créer le plus grand problème de réfugiés au monde, selon la Croix-Rouge britannique.

Est-ce que le ministre entend rester une fois de plus et longtemps insensible aux appels de détresse qui se multiplient au Burundi?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais simplement rappeler à l'honorable député ce que le Canada a fait au cours des dernières semaines et des derniers mois pour éviter une telle crise qui pourrait avoir des proportions semblables à celle du Rwanda.

D'une part, la secrétaire d'État responsable pour l'Amérique latine et l'Afrique est allée elle-même à Bujumbura participer à une réunion en vue de trouver des solutions au problème des réfugiés.

Deuxièmement, le Canada a présenté une résolution qui a été acceptée par tous les ministres présents à une conférence des pays de la Francophonie en France où nous avons décidé d'envoyer une délégation ministérielle sur place pour tenter de trouver une solution avec les autorités du pays.

Troisièmement, le gouvernement canadien subventionne des organismes non gouvernementaux, en particulier la Croix-Rouge internationale, dans ses efforts pour aider les populations civiles affectées par ce conflit.

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, le ministre nous a déjà fait part de ses informations, de ses inquiétudes, de ses démarches, de ses bons voeux. Mais, ce que je demande, c'est comment le Canada peut-il rester indifférent au cri d'alarme lancé hier par le représentant spécial des Nations Unies au Burundi? Qu'attend le Canada pour agir et se décider à assumer un leadership à l'égard de cet État partenaire de la Francophonie, leadership qu'il a déjà par ailleurs exercé dans le passé?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je remercie l'honorable députée de reconnaître que le gouvernement s'implique déjà. Je pense qu'elle ne peut pas dire que nous sommes indifférents. Au contraire, toutes les démarches que je viens de mentionner démontrent l'intérêt et le désir de trouver une solution.

L'honorable députée aimerait que le Canada joue un rôle de leader à cet égard. Nous sommes prêts à jouer le rôle que les parties voudront bien nous voir jouer. Le Canada ne peut pas s'imposer. Mais, le Canada a démontré dans le passé et a exprimé sa disponibilité et son désir d'aider les parties si elles le veulent bien.

* * *

[Traduction]

LA JUSTICE

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, il y a sept semaines, deux de mes électeurs ont vu leur fille de 14 ans emménager avec un délinquant sexuel reconnu, âgé de 26 ans. Ni les parents ni les policiers ne peuvent faire quoi que ce soit, parce que la loi établit à 14 ans l'âge auquel une personne est apte à consentir.

Le ministre de la Justice considère-t-il qu'il s'agit d'un cas d'exploitation d'une enfant ou le gouvernement se contente-t-il de laisser la situation rester telle qu'elle est?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le ministère de la Justice est justement en train de revoir toute la question de l'âge requis pour consentir à une activité sexuelle, précisément pour éviter que des jeunes ne deviennent des victimes.

Je tiens à souligner toutefois que le droit pénal manque un peu de rigueur à cet égard. Par exemple, selon l'article 273.1 du Code criminel, il n'y a pas consentement quand un jeune de cet âge est incité à l'activité par abus de confiance ou d'autorité, ou par crainte.


11616

(1500)

Il serait possible d'ajouter des dispositions dans le Code qui traitent de la question que la députée soulève.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, j'attire l'attention du ministre sur une autre affaire, où un homme de 46 ans, Henry Halm, se réfugie au Canada depuis deux ans, parce qu'il a été condamné à deux ans de prison à New York pour avoir agressé sexuellement quatre jeunes garçons de 15 et 16 ans.

Un juge canadien a récemment déclaré inconstitutionnelle notre loi qui traite de l'âge de consentement en cas de sodomie.

Pour le ministre de la Justice, s'agit-il d'exploitation des enfants? Le ministre serait-il disposé à modifier les dispositions législatives concernant l'âge de consentement pour mettre un terme à tout cela?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la députée fait allusion à une affaire tout à fait différente. Dans cette affaire, on a déclaré inconstitutionnelle l'interdiction visant l'activité homosexuelle à laquelle participe un jeune de moins de 18 ans, parce cette interdiction n'était pas conforme à la règle concernant l'activité hétérosexuelle. Je ne ferai pas d'autres observations à cet égard, parce que je crois que cette affaire est toujours devant les tribunaux.

Cet après-midi, je dois rencontrer un groupe de Citoyens contre l'exploitation des enfants. Ce groupe est dirigé par Monica Rainey, une femme courageuse et dynamique de la Colombie-Britannique. Cette rencontre m'intéresse, car chaque fois que j'ai rencontré Mme Rainey, j'ai recueilli beaucoup de renseignements. Je dirai à Mme Rainey que je m'intéresse à la question et que j'en discuterai avec elle.

Je peux assurer à la députée que nous examinerons la question avec toute l'attention voulue.

* * *

LE DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn, Lib.): Monsieur le Président, l'automne dernier, un groupe de députés de l'Ouest a consulté des Canadiens de cette région au sujet du développement régional. On a fait des recommandations importantes au ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, notamment en ce qui a trait à la promotion des exportations et à l'aide aux secteurs à forte croissance.

Que fait le ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien pour mettre en oeuvre les recommandations qui lui ont été faites en vue de renforcer l'économie de cette région?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je veux remercier le député et les membres de son comité, qui ont fait de très importantes recommandations.

Je suis heureux d'annoncer à la Chambre que, par suite de ces démarches et conformément aux lignes directrices énoncées dans le budget, le ministère de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien a changé son approche fondamentale en ce qui concerne le financement. Donc, depuis le 1er avril, nous ne consentons plus de prêts et ne versons plus de subventions directement aux entreprises. Au lieu de cela, nous travaillons actuellement avec les institutions financières pour établir un réseau de fonds communs de capital d'investissement dans l'Ouest du pays.

Je peux dire que la Banque royale est maintenant prête à se joindre à nous pour établir un important fonds commun de capital d'investissement pour l'industrie de la biotechnologie agricole, comme elle l'a mentionné devant le comité la semaine dernière. Plusieurs autres fonds communs de ce genre verront bientôt le jour. Ce nouveau système de capital d'investissement sera la clé de la croissance et de la création d'emplois dans l'ouest du Canada.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de Mme Kleveland, ministre des Affaires culturelles (Culture, Sports et Médias) de la Norvège.

Des voix: Bravo!

* * *

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, on lit notamment ceci à l'article 18 du Règlement:

Aucun député ne peut critiquer un vote de la Chambre. . .
Dans la déclaration, je n'ai jamais fait spécifiquement référence à un vote de la Chambre et je n'étais pas non plus sur le point de le faire.

Puisque vous m'avez interrompu au milieu de ma déclaration, je vous demande respectueusement de me dire comment cela n'a pas porté atteinte à mes privilèges.

Le Président: À l'ordre. Il arrive, lorsque des députés font des déclarations et qu'ils posent des questions ou qu'ils y répondent que, dans le feu de l'action, je me base sur certains mots pour présumer de la direction que prendra le discours d'un député.

(1505)

Dans le cas qui nous occupe aujourd'hui, comme les députés le savent, le Président ne justifie pas sa décision. Je serai cependant heureux d'en discuter avec le député de Crowfoot.

Cependant, sauf le respect que je dois au député, j'ai pensé qu'il allait dans une certaine direction, car j'ai cru l'entendre faire allusion à un vote.


11617

Je suis tout à fait disposé à revoir la transcription. J'ai peut-être fait erreur, ce qui m'arrive de temps à autre parce que beaucoup de choses se passent en même temps, même si j'essaie d'être extrêmement attentif à ce que disent les députés. Je reverrai la transcription et, si j'ai fait une erreur, j'en reparlerai à la Chambre.

Le député me donnera-t-il au moins le temps de revoir la transcription pour que nous puissions reparler de la question à partir de là? Je serai heureux d'en discuter dans mes appartements si le député le désire.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, sur le même rappel au Règlement. Si, après avoir revu la transcription, vous décidez de revenir sur la question, j'aimerais que vous nous donniez une interprétation de cette disposition du Règlement. Il me semble qu'il y a eu de nombreux commentaires sur des votes pendant les périodes des questions.

Par exemple, le ministre de l'Immigration mentionne régulièrement le vote sur le projet de loi C-44. Peut-être pourriez-vous clarifier l'article du Règlement en cause.

Le Président: S'il est nécessaire de faire une mise au point à la Chambre sur une décision concernant ce sujet, la présidence tiendra compte de toutes les demandes qui lui ont été faites à la Chambre aujourd'hui.

Je vais d'abord passer à la question habituelle du jeudi. Ensuite, je rendrai ma décision sur le rappel au Règlement soulevé par le député de Crowfoot.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, aussi invraisemblable que cela puisse paraître, je pose aujourd'hui encore la question du jeudi. Même si c'est la dernière journée pour les quinze prochains jours, je vais quand même demander à mon honorable collègue leader du gouvernement en Chambre de nous dire ce que l'on fera durant les deux prochaines semaines.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député veut savoir ce que nous ferons pendant les deux prochaines semaines. Je pense que cela ne concerne pas la Chambre.

Je vais cependant dire ce qui se passera au retour des députés le 24 avril. Je le répète, je laisse la question de savoir ce que feront les députés dans l'intervalle à leur bon jugement sinon à leur bon goût.

Lorsque la Chambre reprendra ses travaux le 24 avril, nous entamerons la partie la plus intense du calendrier parlementaire. Je pense donc qu'il serait utile de donner un bref aperçu non pas seulement des travaux pour les quelques jours qui suivront notre retour, mais aussi des priorités pour la période allant de la reprise de la session à la semaine de relâche du mois de mai.

L'examen des crédits exigera de nombreuses journées de l'opposition pendant cette période, une ou deux par semaine. J'annonce donc que le jeudi 27 avril sera l'un de ces jours désignés.

Nous aurons comme premières priorités à notre retour du congé de Pâques de terminer l'étude à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-69, concernant les limites des circonscriptions électorales, de même que l'étude à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-76, portant exécution du budget. À moins bien sûr que nous en ayons terminé l'étude avant l'ajournement d'aujourd'hui.

Nous reviendrons ensuite à l'étude à l'étape du rapport du projet de loi C-43, concernant les lobbyistes, et à l'étude d'une motion visant à créer un comité mixte spécial chargé d'élaborer un code d'éthique pour les membres des deux Chambres du Parlement.

Notre priorité suivante consistera à étudier à l'étape de la deuxième lecture d'autres mesures importantes et urgentes, comme le projet de loi C-75, sur les prêts agricoles, le projet de loi C-70, concernant l'impôt sur le revenu, le projet de loi concernant la Monnaie qui a été présenté ce matin, de même qu'un nombre très limité de mesures qui seront présentées plus tard au cours du mois et qui doivent obéir à des contraintes de temps.

Nous donnerons également la priorité à des projets de loi qui ont déjà été étudiés par des comités parlementaires qui en ont fait rapport à la Chambre, et qui en sont donc maintenant aux dernières étapes de leur étude à la Chambre. Il s'agit du projet de loi C-54, sur la sécurité de la vieillesse, du projet de loi C-67, sur les pensions des anciens combattants, et du projet de loi C-65, sur l'organisation du gouvernement.

(1510)

Il y a aussi le projet de loi C-41, sur la détermination de la peine, le projet de loi C-45, sur la mise en liberté sous condition, le projet de loi C-58, concernant la Gendarmerie royale du Canada, et le projet de loi C-52, concernant le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux.

Nous étudierons ensuite d'autres articles dont les comités auront fait rapport et tout autre article sur lesquels nous nous entendons pour procéder.

En guise de conclusion, je dirai que je donne maintenant cette information pour que les leaders parlementaires des autres partis puissent évaluer leurs positions afin d'être en mesure de se réunir avec moi à la reprise des travaux pour établir un échéancier raisonnable des travaux de la Chambre pour la fin d'avril et le début de mai, ce qui nous permettra ensuite de faire une planification similaire concernant le programme des travaux de juin qui s'annonce très chargé.

Cela dit, je souhaite à tous les députés et à leur famille de joyeuses Pâques et une joyeuse pâque juive.


11618

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Chers collègues, le 31 mars 1995, le député de Crowfoot a invoqué le Règlement au sujet des réponses données par le ministre de la Justice aux questions posées au moment de la période des questions du 27 et du 29 mars. Je remercie le député de Crowfoot, le ministre de la Justice, le whip en chef du gouvernement et le député de Kindersley-Lloydminster de leur contribution au débat.

Le député de Crowfoot a soutenu que le ministre de la Justice a enfreint la convention relative aux affaires en instance devant les tribunaux en commentant une affaire en appel devant les tribunaux de l'Alberta et que, ce faisant, il peut en avoir compromis l'issue. Faisant allusion à plusieurs commentaires de la sixième édition de Beauchesne et à l'affaire opposant la reine à Atlantic Sugar Refineries Co. pour étayer son argumentation, le député a demandé à la présidence d'examiner la question et de décider si le ministre avait contrevenu ou non à la convention relative aux affaires devant les tribunaux.

[Français]

L'honorable ministre de la Justice a répondu qu'il n'y avait rien dans ce qu'il a dit sur cette affaire qui contrevenait à la convention et il a soutenu qu'il y a une différence entre commenter les faits d'une affaire en instance devant les tribunaux et énoncer l'avis du gouvernement sur une décision prononcée par une cour de justice.

En vertu de la convention relative aux affaires en instance devant les tribunaux, il est de pratique reconnue que, dans l'intérêt de la justice et de l'équité, la liberté des députés de faire état dans les débats d'affaires en instance devant les tribunaux soit soumise à des restrictions. De même, il est reconnu que ces sujets ne devraient pas faire l'objet de motions ou de questions à la Chambre.

Comme je l'ai dit vendredi dernier, nous parlons de «convention» pour désigner les sujets qui sont sub judice, c'est-à-dire portés à l'attention d'un juge ou d'une cour de justice, puisqu'il n'existe pas de «règle» qui empêche le Parlement de débattre de ces sujets.

[Traduction]

Au Canada, le Premier rapport à la Chambre du Comité spécial sur les droits et immunités des députés, déposé le 29 avril 1977, constitue l'examen le plus complet de la convention relative aux affaires en instance devant les tribunaux. Ce comité spécial était présidé par le Président James Jerome. Dans son rapport, le comité donne une explication détaillée de l'objet de la convention et, avec votre permission, je citerai le rapport de ce comité, au fascicule no 1, page 1:4:

La liberté de parole dont jouissent les députés est un droit fondamental, sans lequel ils ne pourraient remplir convenablement leurs fonctions. Cette liberté leur permet d'intervenir sans crainte dans les débats de la Chambre, de traiter des sujets qu'ils jugent pertinents et de dire tout ce qui, à leur avis, doit être dit pour sauvegarder l'intérêt du pays et combler les aspirations de leurs électeurs. La convention relative aux affaires en instance sub judice restreint, dans une certaine mesure, cette liberté parlementaire fondamentale. Selon cette convention, qui a été modifiée au cours des années, les députés ne doivent pas débattre des questions dont sont saisis les tribunaux. Quant à son application, aucune distinction n'a été établie au Canada entre les cours d'assises et les tribunaux civils. Elle s'applique cependant aux tribunaux autres que les cours de justice et elle protège les parties dont la cause sera ou est entendue ainsi que les personnes qui sont visées par le résultat d'une enquête judiciaire. Elle garantit à tous un procès équitable et empêche toute intervention indue qui pourrait influer sur une décision judiciaire ou le rapport d'un tribunal d'enquête.
(1515)

[Français]

La convention relative aux affaires en instance devant les tribunaux est elle-même assez mal définie et son interprétation est ordinairement laissée au Président. La difficulté où je me trouve en tant que Président tient à ce que toute tentative de déterminer si un commentaire pourrait avoir des conséquences est au mieux spéculative, et non préventive, puisque je ne puis arriver à telle décision qu'après que le commentaire a été fait. En conséquence, la plupart des présidents ont plutôt eu tendance à décourager les députés de commenter les affaires en instance devant les tribunaux que de leur permettre de trouver les limites de la convention et d'éprouver le pouvoir discrétionnaire du Président.

[Traduction]

Comme on le dit dans le rapport du comité spécial, fasciculeno 1, à la page 1:12:

De l'avis même du comité, il n'est pas possible d'établir des règlements précis quant à l'application de la convention relative aux affaires en instance sub judice, et il serait d'ailleurs peu souhaitable de le faire. Le Président doit exercer son pouvoir discrétionnaire en la matière, tout en se servant de son autorité pour empêcher tout débat à la Chambre portant sur des affaires en instance; son intervention ne devrait néanmoins qu'être exceptionnelle, notamment s'il juge que tel ou tel débat pourrait léser certains intérêts. Si la situation n'est pas claire, le Président doit alors accorder le bénéfice du doute au député qui désire soulever une question à la Chambre et s'abstenir de se servir de son pouvoir discrétionnaire en ce qui a trait l'application de la convention.
Pour ce qui est de l'affaire soulevée par le député de Crowfoot, j'ai examiné les échanges de propos de la période des questions et les arguments invoqués par les honorables députés pendant le débat sur le rappel au Règlement, et je ne puis conclure qu'en disant que le gouvernement fédéral était en désaccord avec la décision d'un tribunal et projetait de la contester, le ministre de la Justice ait enfreint la convention relative aux affaires en instance devant les tribunaux.

[Français]

Permettez-moi d'ajouter un commentaire. Bien que l'autorité ultime de juger ces questions appartienne à moi, à la Présidence, je dois souligner que tous les députés partagent la responsabilité de faire preuve de réserve lorsque celle-ci paraît s'imposer. Je cite à nouveau le rapport du Comité spécial, fascicule no 1, page 1:12: «Le comité est d'avis qu'au cours de la période des

11619

questions, la Présidence devrait s'abstenir d'intervenir en ce qui a trait à l'application de la convention et qu'il incomberait plutôt au député qui pose la question ainsi qu'au ministre à qui elle est adressée de faire preuve de discernement.»

[Traduction]

En guise de conclusion, j'invite instamment tous les députés et les ministres à être prudents et réservés dans le choix de leurs mots lorsqu'ils traitent de sujets qui pourraient relever du domaine difficile des affaires soumises aux tribunaux.

Je remercie tous les députés de leurs interventions.

_____________________________________________


11619

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

ÉDUCATION DES AUTOCHTONES

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, avant que le débat ne reprenne, je voudrais savoir s'il y a consentement unanime à l'égard de quelques motions.

Premièrement, je propose:

Que le Sous-comité sur l'éducation des autochtones (composé de cinq membres) du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord soit autorisé à se rendre à Sudbury, l'île Manitoulin, Sioux Lookout et Winnipeg du 22 au 30 avril 1995, et qu'un personnel composé de trois personnes accompagne le Sous-comité.
(La motion est adoptée.)

(1520)

[Français]

ENVIRONNEMENT ET DÉVELOPPEMENT DURABLE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième motion est une autre motion visant à autoriser un comité à voyager. Je propose:

Que le Comité permanent de l'environnement et du développement durable et le personnel nécessaire soient autorisés à voyager afin de tenir des audiences et de visiter divers endroits à Iqaluit, Resolute Bay, Cambridge Bay et Yellowknife entre le 1er mai 1995 et le 19 mai 1995.
(La motion est adoptée.)

[Traduction]

PÊCHES ET OCÉANS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une autre motion à présenter. Je propose:

Qu'un sous-comité du Comité permanent des pêches et des océans soit autorisé à voyager à Vancouver, Prince Rupert, Nanaïmo et Campbell River, du 27 avril au 4 mai 1995, pour étudier les questions relatives au saumon du Pacifique, à la stratégie de pêche autochtone, à la fusion du ministère des Pêches et des Océans et de la Garde côtière, et à la délivrance de permis.
(La motion est adoptée.)

EXAMEN DE LA RÉGLEMENTATION

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je m'excuse d'abuser de la bonté de la Chambre cet après-midi, mais j'ai une autre motion à présenter. Je propose:

Que, nonobstant tout article du Règlement, le gouvernement puisse déposer sa réponse au 2e rapport du Comité mixte permanent de l'examen de la réglementation au plus tard le 5 juin 1995.
(La motion est adoptée.)

M. Boudria: Monsieur le Président, plus tôt aujourd'hui, le vote sur une motion a été reporté à notre retour, soit le lundi 24 avril, si je ne m'abuse. Je demande le consentement unanime pour que la mise aux voix de cette motion soit encore reportée au mardi 25 avril, à 17 h 30.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre! L'honorable député de Trois-Rivières demande à la Chambre son consentement unanime pour que la Chambre puisse retourner à la présentation de pétitions. Est-ce qu'il y a consentement unanime?

Des voix: D'accord.

* * *

PÉTITIONS

LES BOÎTES VOCALES

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, je voudrais présenter trois pétitions dont l'objet est le même, soit demander au gouvernement de renoncer à son projet d'implantation de boîtes vocales à l'intention des personnes âgées.

L'une des pétitions provient de la région de la Mauricie, l'autre provient de mon comté, de même que la troisième, mais plus spécifiquement de l'AFEAS de Sainte-Thérèse de Trois-Rivières, et je profite de l'occasion pour saluer tous les membres.

La pétition se lit comme suit: Les pétitionnaires prient le Parlement de bien vouloir demander au gouvernement de renoncer au projet d'implantation de boîtes vocales pour les personnes âgées.

Vous comprendrez, monsieur le Président, que j'appuie ces pétitionnaires.

[Traduction]

LE RÉGIMENT AÉROPORTÉ CANADIEN

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition à la Chambre, conformément aux dispositions du Règlement.

11620

Les pétitionnaires signalent à la Chambre que le démembrement du Régiment aéroporté canadien est un acte sans précédent dans l'histoire du pays.

(1525)

Par conséquent, ils prient le Parlement de tenir une commission d'enquête ou une enquête publique globale approfondie sur les Forces armées canadiennes, y compris les forces de réserve, de produire un rapport et de faire des recommandations sur les questions touchant aux opérations, aux fonctions, aux ressources, à l'efficacité, au moral et au bien-être des forces.

MAHESH INDER SINGH

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, au nom de ma collègue, la députée de Nepean, j'ai le devoir de présenter une pétition venant des Sikhs du Canada au sujet de l'extradition de Mahesh Inder Singh, qui est en instance.

_____________________________________________


11620

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI DE 1995 SUR LA RÉVISION DES LIMITES DES CIRCONSCRIPTIONS ÉLECTORALES

La Chambre reprend l'étude de la motion.

Le président suppléant (M. Kilger): Lorsque nous avons interrompu le débat pour la période des questions, il restait environ dix minutes au député de Chicoutimi.

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, j'en étais justement à souligner à cette Chambre que l'on devait à tout le moins confirmer une représentativité de 25 p. 100 des députés du Québec en cette Chambre. Je me posais également la question suivante: pourquoi le reste du Canada avait aussi peur, puisqu'on essaie de nous enlever ce droit très légitime à une juste représentation, d'autant plus que le chef de l'opposition du gouvernement du Québec, petit frère du gouvernement libéral fédéral, a déposé, le 4 avril, exactement la même motion que celle déposée par mon collègue de Bellechasse.

Donc, je le répète, le Québec a un droit légitime et surtout historique de conserver un poids politique minimal au sein de la fédération canadienne. Déjà, on ne reçoit pas notre juste part des transferts fédéraux, pas plus que dans les investissements militaires. On a eu l'occasion de le démontrer plusieurs fois dans cette Chambre. Également ce matin, un de mes collègues a souligné qu'au niveau de la recherche et du développement, nous n'avions pas notre représentativité et même dans la création d'emplois et cela, c'est très peu dire.

Le Québec, en plus d'assister à cette réduction de la représentativité, va subir, au cours des prochains mois, d'autres points semblables. Je me posais la question suivante: Qu'en pense le premier ministre? Qu'en pense également le député de Gatineau? Qu'en pense le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine?

Lors du dernier vote sur le sujet, le 28 mars dernier, je n'ai pas senti beaucoup d'appui de ce côté. J'ai du mal à comprendre ce qui se passe. N'est-il pas vrai que dans l'histoire politique canadienne et québécoise le législateur a souvent exprimé la volonté d'assurer aux régions, et surtout aux régions éloignées ou rurales, une représentation équitable à la Chambre des communes? Mais dans la mesure, par exemple, où la formule actuelle du partage des sièges entre les territoires et les provinces n'est pas modifiée et que la Loi constitutionnelle de 1867, telle qu'amendée en 1915 et 1976, ainsi que cette Loi sur la révision des limites des circonscriptions demeurent relativement inchangées, il est évident pour tout le monde, à ce moment-là, que les mêmes principes de représentation des régions éloignées ou rurales devraient s'appliquer spécialement pour le Québec.

Tous ici savent que tant que les Québécois et les Québécoises n'auront pas tranché en faveur de la souveraineté du Québec, il est d'une très grande importance que le Québec conserve une représentation minimale de 25 p. 100 dans toutes les institutions centrales de cette fédération.

(1530)

Aussi surprenant que cela puisse paraître, et malgré tous les mécanismes constitutionnels qui favorisent la représentation des provinces, des provinces en déclin démographique relatif, une seule province a toujours eu un nombre inférieur de députés à sa part de la population au cours des 128 ans d'histoire et de l'expérience canadienne, et naturellement, on va nous dire que c'est par hasard, mais c'est encore le Québec qui a dû souffrir à ce moment-là.

Même la province la plus populeuse, l'Ontario, a eu droit à plusieurs députés supplémentaires au début du siècle et huit députés supplémentaires après le recensement de 1941 car à l'époque, disait-on, devant la croissance rapide des provinces de l'Ouest, l'Ontario était en déclin démographique relatif. Cependant, je dirai, et sans grande surprise, que le Québec, qui est passé à 33 p. 100 de la population canadienne, n'avait pas, à cette époque, 33 p. 100 de députés en cette Chambre. Aujourd'hui, nous avons peine à maintenir les 25 p. 100. Nous n'avons jamais pu bénéficier, de 1867 à 1995, de sièges supplémentaires, même lorsque notre population aurait pu l'exiger. Est-ce que c'est vraiment acceptable de voir ce phénomène de deux poids deux mesures? Selon moi, ce n'est pas acceptable, et ce ne devrait pas l'être.

Je crois fermement que les lois constitutionnelles électorales doivent refléter la dualité canadienne et garantir en conséquence que le Québec conserve le quart de ses députés dans cette Chambre jusqu'au moment où sa population en aura décidé autrement. Au-delà des considérations partisanes, cette mesure répond aux demandes historiques du Québec, encore une fois. Je vous rappelle que cette mesure a reçu l'appui du Parti libéral du Canada lors de la dernière série de négociations constitutionnelles. Le député de Papineau-Saint-Michel doit certainement s'en souvenir, à moins qu'il ait la mémoire très courte.

Il serait beaucoup plus sage de la part du gouvernement d'attendre quelques mois avant de présenter ce projet de loi ou encore mieux de le reporter définitivement. Que le


11621

gouvernement s'attaque donc aux vrais problèmes de ce pays. Ne sait-il donc pas que le projet de loi C-69 va coûter terriblement cher aux contribuables, avec ses commissions qui auront à se promener dans l'ensemble du Canada? Est-ce que cet argent ne serait pas mieux utilisé ou dépensé plus sagement en créant, par exemple, des emplois, en se dotant d'une politique familiale?

Le Parti réformiste, quant à lui, voudrait qu'il y ait une diminution du nombre de sièges à la Chambre des communes. Au lendemain du référendum, son voeu sera exaucé. Le gouvernement libéral nous dit que le pays a besoin d'un redécoupage des limites des circonscriptions électorales. Au lendemain du référendum, son voeu sera également exaucé. Dans quelques mois, le Parti réformiste et le Parti libéral auront satisfaction, après le référendum que nous gagnerons, ne l'oubliez pas.

(1535)

Il y aura donc moins de députés qui siégeront dans cette Chambre et le Canada aura vraiment besoin d'un redécoupage des limites des circonscriptions, puisque le Québec sera souverain et qu'il ne fera plus partie d'un pays qui, historiquement-et j'ai parlé de l'historique avant la période des questions-ne veut pas de lui. Et les faits pertinents, je les ai cités plus tôt.

[Traduction]

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement les observations du député et sa proposition concernant la garantie de 25 p. 100 des sièges de cette auguste Chambre.

Je me demande s'il envisage maintenant sérieusement de renoncer à la séparation et d'avoir un brillant avenir au sein de ce merveilleux pays qu'est le Canada. Dans mon esprit, il ne fait pas l'ombre d'un doute que le Québec complète notre pays et qu'il y joue un rôle essentiel.

Le député est-il en train de dire que le référendum devrait être relégué aux oubliettes et que le Québec devrait continuer de faire partie de ce pays et d'être représenté à la Chambre des communes? Est-ce là ce qu'il suggère avec sa proposition concernant les 25 p. 100 de sièges? Le cas échéant, je me réjouis que le député soit prêt à proposer cela. J'en déduis que lui et ses collègues bloquistes se ravisent et qu'ils comprennent maintenant que c'est un privilège de faire partie de ce pays extraordinaire.

[Français]

M. Fillion: Monsieur le Président, à partir de fins historiques tout près de nous, il est possible d'obtenir la réponse à la question qui est posée.

En 1965, nous avons subi au Québec la Loi sur les mesures de guerre. Cette loi a été adoptée ici, en pleine nuit, par le gouvernement du Canada. L'armée, sous certains prétextes, a voulu venir mater, paraîtrait-il, un mouvement séparatiste. On a arrêté 500 personnes sans aucun mandat; c'est un premier fait. Le deuxième fait, qui se rapproche encore un peu plus de 1995, s'est produit en 1981, lorsque les premiers ministres du Canada, en pleine nuit et en l'absence du Québec, reniaient leurs signatures en prévision d'un rapatriement unilatéral de la Constitution.

Je pourrais également relater ce qui s'est passé au niveau de l'Accord du lac Meech. Ceci est très récent, c'est en 1987. On sait qu'un député de ce Parlement a refusé, à l'époque, à l'Assemblée législative de sa province, d'en discuter. Ce qui a fait que tout ce qui était prévu dans l'entente du lac Meech a été rejeté. Cette personne siège actuellement avec les députés du parti ministériel.

On pourrait également relater ou se rappeler tout simplement la ronde de négociations de Charlottetown et la façon dont tout cela s'est terminé. Ces faits, c'est bien dommage, mais les Québécois et les Québécoises ne les oublieront pas. C'est sûr que les députés du Bloc québécois ne retireront pas de leur option la préparation à la souveraineté du Québec. Et c'est ici qu'on va le faire.

Tout ce qu'on demande actuellement, puisque nous sommes encore dans cette fédération, c'est qu'on puisse conserver les mêmes droits. C'est aussi simple que cela. Et lorsque les Québécois et les Québécoises se seront prononcés sur la souveraineté du Québec, vous agirez à votre guise. Je pense qu'à ce moment-là, les deux peuples fondateurs auront chacun un gain.

(1540)

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, à écouter le discours de mon collègue, je me suis souvenu du mandat que nous avons reçu de la population, soit d'assurer la défense des intérêts du Québec et en même temps faire la promotion de la souveraineté.

Ne pense-t-il pas que nous avons devant nous un dossier très net et très clair où on remplit ces deux objectifs? Par le rejet de l'amendement visant à conserver au Québec une représentativité de 25 p. 100 à la Chambre des communes, le gouvernement prouve qu'il n'y a aucune possibilité de renouvellement de la Constitution. Le gouvernement ne nous a même pas accordé ce droit minimal.

Par la négation de la notion de peuple, du fait qu'on est un des peuples fondateurs de cette société, est-ce que ce n'est pas plutôt le gouvernement qui se verra reprocher de ne pas avoir défendu les intérêts du Québec, particulièrement les députés libéraux qui ont voté contre l'amendement, ou ceux qui se sont simplement abstenus? Est-ce qu'ils ne porteront pas l'odieux de cette décision du gouvernement actuel, qui s'inscrit toujours dans la même ligne que celle des gouvernements antérieurs? Et dans la logique aussi du rapatriement unilatéral de la Constitution, en 1982, le député n'a-t-il pas l'impression d'être beaucoup plus à l'aise dans sa position que ne pourrait l'être l'ensemble des députés libéraux?

M. Fillion: Monsieur le Président, le commentaire de mon collègue me permet de démontrer que le peuple québécois, malgré tout ce qu'il a eu à subir depuis 100 ans, ce peuple qui aujourd'hui est devenu un peuple mature ne décidera pas de son avenir sur un coup de dés. Cela se fera suite à des événements qu'il a vécu tout au long de son histoire.

Le peuple québécois est maintenant rendu à la limite, il est rendu au moment où il devra prendre une décision. Cette décision, bien sûr, sera le rapatriement, au niveau du gouvernement du Québec, de tous les leviers, qu'ils soient politiques ou économiques, qui lui permettront de se gouverner sans devoir attendre continuellement de recevoir, de ce Parlement, des choses qui ne se produisent jamais, des transferts


11622

qui nous sont faits, mais par contre, sans être accompagnés du financement requis.

À ce moment-là, c'est sûr que nous sommes rendus à la croisée des chemins. La décision se prendra, et je suis assuré qu'avec le débat que nous tiendrons dans les prochains mois, la majorité des Québécois et des Québécoises diront non merci à ces luttes stériles que nous menons depuis trop longtemps déjà.

[Traduction]

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de me prononcer sur le projet de loi C-69, Loi portant sur la création de commissions de délimitation des circonscriptions électorales et la révision des limites des circonscriptions électorales qui en est aujourd'hui à l'étape de la troisième et dernière lecture.

Je me réjouis de l'occasion qui m'est offerte parce que, même si je ne suis pas d'accord sur la façon dont le gouvernement libéral a traité le dossier, le débat qui a suivi sur la question relative à la révision des limites des circonscriptions électorales a donné lieu à la présentation de très de bonnes recommandations. Le débat d'aujourd'hui m'offre l'occasion de m'exprimer plus à fond que je ne l'ai fait plus tôt cette année, lorsque je me suis prononcé sur la motion d'adoption qui avait été présentée à la Chambre.

Le projet de loi C-69 a été déposé à la Chambre des communes le 16 février 1995. Il a été étudié en comité et il nous revient maintenant pour y être lu pour la troisième fois. Le projet de loi C-69 abroge la Loi de 1964 sur la révision des limites des circonscriptions électorales.

Début 1994, les commissions créées conformément aux règles de 1964 et dotées plus récemment ont commencé à soumettre leurs recommandations concernant les nouvelles circonscriptions électorales qu'elles avaient élaborées au cours des mois précédents. Ces propositions ont suscité bien des inquiétudes et des controverses, surtout avec la fin de la campagne électorale et la tenue des élections fédérales.

(1545)

Au mois de mars 1994, le gouvernement a présenté le projet de loi C-18, Loi suspendant l'application de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales. Dans sa mouture originale, le projet de loi C-18 visait la dissolution des 11 commissions de délimitation des circonscriptions électorales ainsi que la suspension de la loi elle-même pour une période de deux ans. Craignant que cela ne retarde indûment le remaniement des circonscriptions électorales-ce que la majorité libérale à la Chambre des communes a refusé de reconnaître-, l'autre Chambre a formulé des amendements. On recommandait que la loi ne soit suspendue qu'à compter du 22 juin, à moins qu'une nouvelle loi ne soit mise en application dans l'intervalle, et que les commissions ne soient pas dissolues d'ici là.

Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui va dans ce sens et le gouvernement fait son possible pour qu'il soit adopté avant le 22 juin. Permettez-moi de dire, tout d'abord, que je n'appuierai pas le projet de loi à la fin du débat. Je m'y opposerai, car je crois que le gouvernement intervient dans un processus qui devrait être indépendant, impartial et entièrement libre, c'est-à-dire dans la relation entre la population du Canada et ses politiciens.

Les politiciens peuvent discuter des processus et des procédures et fixer les règles qui s'appliqueront dans l'avenir. Toutefois, dans ce cas, le processus indépendant avait déjà commencé et se déroulait selon le mandat existant, lorsque le gouvernement a unilatéralement mis fin à tout cela pour établir de nouvelles règles qui s'appliqueraient rétroactivement.

Si ce projet de loi est adopté, les nouvelles règles entreront en vigueur et le travail de nombreuses commissions de délimitation des circonscriptions électorales, parachevé très souvent après de nombreuses audiences publiques, ne servira plus qu'à garnir les étagères et à amasser la poussière. Je suppose qu'il en sera ainsi de la commission de la Saskatchewan, qui a pratiquement terminé le travail de révision des limites des circonscriptions fédérales dans ma province. À cause des dispositions de ce projet de loi, le mandat de cette commission ne sera probablement pas renouvelé et, lorsqu'auront lieu les prochaines élections générales, les habitants de la Saskatchewan devront voter en vertu des circonscriptions établies pour les élections générales de 1988.

Les limites des circonscriptions électorales sont semblables aux frontières provinciales et nationales. Même si elles sont parfois déterminées arbitrairement, elles nous aident à repérer certaines configurations géographiques ou socio-économiques. Et la population les accepte plus facilement, lorsqu'elles tiennent compte de ces configurations.

Au Canada, nous avons créé un système fondé sur la démographie et nous modifions les limites des circonscriptions électorales en fonction des déplacements de populations. J'admets que cet élément est très important dans un contexte de représentation proportionnelle à la population. Je suis d'accord avec les personnes qui, tant à la Chambre qu'à l'extérieur, soutiennent qu'il n'est pas logique qu'un député représente une circonscription comptant 110 000 habitants et qu'un autre député représente une population de 55 000 habitants ou moins.

Même si chaque citoyen canadien exerce son droit de vote une fois aux élections générales, les votes, au moment du dépouillement, ne sont pas égaux. Dans le cas dont je viens de parler, monsieur le Président, vous pouvez constater que les petites circonscriptions ont besoin, pour élire un représentant, de deux fois moins de votes que les grandes circonscriptions. Ces représentants vont, en leur nom, se prononcer sur des questions qui intéressent tous les Canadiens.

Les commissaires qui sont nommés pour redéfinir les limites des circonscriptions électorales, quand les populations changent, doivent aussi tenir compte de la structure des échanges, des communautés d'intérêts, des obstacles géographiques à la circulation et de l'état de l'économie locale. L'histoire montre que ça n'a pas toujours été le cas. Par conséquent, il est important de modifier notre façon de procéder.

Jusqu'à un certain point, ce projet de loi aborde certains des problèmes que nous devrions examiner en prévision de l'avenir. Je vais parler de ces changements dans un instant. Tout d'abord, je pense qu'il est important de ne pas négliger le fait que le système a besoin de changements beaucoup plus profonds que ceux que ce projet de loi propose.


11623

On dit qu'il faut réduire le nombre de députés. C'est un point que j'appuie et que le Parlement, à mon avis, devrait examiner plus longuement. Il a beaucoup été question de bâtir un système électoral autour de quelques concepts différents, comme la représentation proportionnelle ou peut-être un vote préférentiel. Je suis également pour que l'on discute de ces différents systèmes électoraux. Nous ne serions pas justes envers nous-mêmes, si nous ne poursuivions pas ce débat également.

(1550)

La Chambre des communes n'est qu'une partie de ce que nous appelons le Parlement. Il est impossible et, irresponsable, selon moi, de réformer seulement une partie de l'ensemble. J'ai parlé du Sénat, de l'autre endroit, dans mes observations sur la motion d'acceptation.

Je tiens à souligner à nouveau que tant que nous nous en tiendrons à un système électoral basé seulement sur la représentation en fonction de la population, nous devrons résoudre les problèmes qui en découlent sur le plan de l'équité régionale. La meilleure façon d'y parvenir consiste à réformer la seconde chambre du Parlement. Je souscris à l'abolition du Sénat actuel dont les membres ne sont pas élus et n'ont aucun compte à rendre. Il faut le remplacer par une seconde chambre élue, responsable de ses actions et, chose certaine, plus utile qui peut répondre plus équitablement aux griefs des régions.

Ces questions sont extrêmement importantes pour résoudre les problèmes socio-économiques qui assaillent tous les Canadiens. Le gouvernement devrait être disposé à passer à la prochaine étape, sitôt que le débat sur ce projet de loi sera terminé.

Lorsque, à titre de président du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, le comité qui a rédigé ce projet de loi dans une large mesure, le député de Kingston et les Îles a présenté son rapport au Parlement, il a laissé entendre qu'il y avait un certain nombre de problèmes liés au processus d'examen des nouvelles limites. Dans l'ensemble, je suis d'accord avec lui. Il faut se pencher sur ces problèmes.

Le député de Kingston et les Îles a affirmé que le début du processus posait un problème. Les nouvelles cartes électorales sont souvent rendues publiques comme par magie. La plupart des citoyens ordinaires comprennent pour la première fois qu'on est en train de modifier les limites des circonscriptions, lorsque le journal local publie une nouvelle carte électorale. Les nouvelles limites semblent être un fait accompli. On a l'impression que le travail est terminé. Même si on a demandé à la population de faire connaître son point de vue à ce stade-ci, beaucoup de Canadiens ont le sentiment que c'est tout à fait inutile. La majeure partie du travail est terminée.

En vertu des modifications envisagées et présentées dans ce projet de loi, le processus de consultation débute plus tôt. On va aviser la population avant que les commissions n'entreprennent de modifier les cartes électorales. On tiendra compte du point de vue des gens à ce stade-ci. C'est très important et je suis heureux de voir qu'on le prévoit dans le projet de loi. Les premières étapes du processus de prise de décisions exigent tellement de travail qu'on doit tenir compte du rôle de la population.

De plus, nous savons que les commissions n'ont pas actuellement à justifier leurs décisions au sujet des nouvelles limites. En vertu des nouvelles règles, les commissions devront donner les raisons pour lesquelles elles ont établi la carte électorale de telle ou telle façon, et je suis également tout à fait d'accord là-dessus.

Dans notre cas, en Saskatchewan, la toute dernière commission avait pris la décision anticipée d'attribuer à chacune des deux villes principales, Saskatoon et Regina, quatre sièges au lieu de trois, ce qui a eu un impact sur tous les autres sièges de la province, étant donné qu'il n'y avait pas de sièges supplémentaires pour la Saskatchewan.

La province avait quatorze sièges avant la redistribution, elle en avait quatorze après. La décision de la commission d'attribuer deux sièges supplémentaires aux circonscriptions urbaines signifiait essentiellement la disparition de deux sièges pour les régions rurales. La décision a été prise sans que le public ait été consulté et la commission n'a pas eu par la suite à expliquer pourquoi elle avait estimé nécessaire d'attribuer un plus grand nombre de sièges aux deux circonscriptions urbaines et un plus petit nombre de sièges aux régions rurales.

J'aimerais faire un petit aparté et vous parler un peu de l'histoire de la Saskatchewan que je trouve très intéressante en ce qui concerne la représentation fédérale. Si nous regardons l'histoire, nous notons que lors des premières élections fédérales qui se sont disputées dans la nouvelle province de la Saskatchewan en 1907, il y avait 10 circonscriptions électorales. En 1907, la Saskatchewan avait 10 sièges sur un total de 221 à la Chambre des communes. Le nombre de sièges a fluctué considérablement au fil des ans pour atteindre 21 sièges aux élections de 1924 et de 1933, alors qu'il y avait à la Chambre un total de 245 sièges. Aujourd'hui, la Saskatchewan est représentée à la Chambre des communes par 14 députés sur un total de 295.

Si la Chambre des communes s'agrandit pour atteindre un total de 301 sièges, nous continuerons pendant un certain temps d'avoir 14 sièges mais nous finirons par en perdre et par nous retrouver avec 10 sièges au début du siècle prochain. Après un siècle d'histoire, nous nous retrouverons à la case départ: 10 sièges en 1907, 10 sièges en 2003.

(1555)

J'ajoute que, selon le directeur des élections du Canada, si jamais le gouvernement réduisait le Parlement, la Saskatchewan perdrait davantage de sièges et n'aurait probablement plus que huit députés pour représenter la totalité de ses citoyens. C'est une raison plus que suffisante pour inciter les habitants de la Saskatchewan à réclamer que nous regardions au-delà de la représentation proportionnelle pour la deuxième Chambre et que nous réclamions un système qui garantirait une plus grande équité en matière de représentation régionale.


11624

Pour revenir au projet de loi, le mélange de règles en vigueur pose un autre problème, c'est qu'il n'existe aucune norme nationale régissant le processus de prise de décisions. Toutes les commissions de délimitation ont établi leurs propres règles et lignes directrices sur la façon dont elles s'y prendraient pour modifier la carte électorale sur leur territoire.

Il n'y avait donc aucune uniformité à l'échelle du Canada. Certaines circonscriptions ont été créées en vertu de lignes directrices fondées sur les pratiques commerciales, la situation économique ainsi que le contexte social et même religieux de la région. D'autres ont été créées en fonction de la population ou même pour servir des fins politiques.

C'est donc dire que certaines commissions ont fait des changements qui n'étaient absolument pas nécessaires. Elles ne les faisaient que parce qu'elles pouvaient modifier les règles qu'elles s'étaient elles-mêmes imposées. La possibilité de faire des changements inutiles est absurde. Je crois que le comité l'a reconnu en proposant les amendements à ce projet de loi.

Les changements proposés permettront de tirer davantage parti des opinions exprimées par la population, d'utiliser davantage la consultation et de ne modifier les circonscriptions que lorsque c'est nécessaire à cause de changements radicaux dans la répartition de la population. Ces changements sont vraiment nécessaires.

Je reconnais qu'il faut renforcer le rôle du public, car cet exercice est finalement pour lui. Les limites de la circonscription dans laquelle un député est élu ont des répercussions sur le type de représentation à laquelle peut ou devrait s'attendre la population qui y vit. En traçant ces limites, il faut tenir compte des besoins de ceux qui seront directement visés.

J'aime aussi le fait que ce projet de loi propose d'apporter le moins de changements possible, même si je n'appuie pas le caractère rétroactif de celui-ci. Cela signifie qu'aucune commission de délimitation des circonscriptions électorales ne sera constituée si les changements dans la population ne le justifient pas. S'il n'y a pas de fluctuation démographique importante, on ne constituera pas de nouvelle commission, on ne s'emploiera pas à réviser les limites, on ne tiendra pas d'audiences publiques, on n'établira pas de nouvelles cartes, on ne fera pas de publicité à ce sujet et l'on n'engagera pas de nouvelles dépenses publiques pour apporter des changements inutiles. C'est là un élément positif.

Comme je l'ai dit plus tôt, pour les électeurs de ma circonscription en Saskatchewan, cela signifie probablement qu'il n'y aura pas de révision des limites des circonscriptions fédérales de cette province. La circonscription de The Battlefords-Meadow Lake, qui a été créée pour les élections de 1988 et qui existait pour celles de 1993, restera probablement en place lorsque les prochaines élections fédérales auront lieu.

En conclusion, permettez-moi simplement de dire que les modifications proposées dans le projet de loi C-69 ne justifient pas la suspension du processus actuel ni le rejet du travail que de nombreuses commissions avaient presque terminé. Le débat a toutefois été utile. Les modifications permettront d'améliorer le processus dans l'avenir. Il ne faut toutefois pas oublier l'examen d'une plus vaste portée que nous devons faire et qui devrait comprendre l'étude du nombre total de sièges à la Chambre, du principe de la représentation proportionnelle ou du vote préférentiel ainsi que l'idée d'une deuxième chambre du Parlement qui aurait des comptes à rendre à la population du Canada.

[Français]

M. André Caron (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt la présentation de notre collègue de The Battlefords-Meadow Lake. Je pense qu'il a bien présenté sa position et qu'elle est claire.

J'aimerais lui poser un certain nombre de questions, peut-être deux, surtout en ce qui a trait au Sénat élu. Mais je voudrais, avant de m'étendre plus longuement sur cette question, motiver un petit peu ma participation au débat.

Comme député souverainiste du Québec, il peut peut-être paraître curieux que je veuille me mêler de la représentation des Canadiens à la Chambre des communes, mais il faut bien comprendre que les électeurs nous ont accordé le mandat d'être l'opposition officielle à la Chambre des communes. Je pense qu'il aurait été malséant de notre part de se dispenser de débattre cette question en prétextant qu'elle ne nous concerne pas.

(1600)

Elle nous concerne d'abord à cause du mandat que nous avons reçu que je viens de préciser, et elle nous concerne aussi parce que l'association que nous voulons promouvoir avec le Canada fait qu'il est dans notre intérêt, comme Québécois, de voir à ce que le Parlement canadien fonctionne de la meilleure façon possible.

J'aimerais rappeler à notre collègue, que j'ai entendu avec intérêt mentionner la perte d'importance de la députation de la Saskatchewan dans le Parlement canadien, à l'avenir, si on regarde le critère de la population. J'aimerais donc lui rappeler la motivation qui nous a poussés, nous du Bloc québécois, à présenter un amendement qui a d'ailleurs été défait par cette Chambre. Cet amendement demandait que la représentation du Québec, à l'avenir, advenant que le Québec reste dans la Confédération canadienne, ne descende jamais en bas de 25 p. 100 de la députation.

Pourquoi sommes-nous attachés à ce chiffre? Je pense que le chiffre de 25 p. 100 est bien petit, si on considère ce que nous avons été. Quand on entre dans la Chambre des communes par le hall d'entrée et qu'on examine la porte de l'opposition et la porte du gouvernement et qu'on regarde en haut de la porte de l'opposition, on voit deux médaillons. Dans un de ces médaillons, il y a le roi Louis XIV et dans l'autre, le roi François 1er.

Du côté de la porte du gouvernement, on retrouve deux rois d'Angleterre. Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie qu'on voit, inscrit dans la pierre, ce qu'était le Canada quand nous sommes entrés dans la Confédération. En passant, nous sommes seulement entrés par un vote du Parlement du Bas-Canada. Il n'y a pas eu de référendum. Alors, le Canada était une dualité, c'était ce qu'on appelait autrefois le peuple canadien-français et le peuple canadien-anglais. C'est ce que nous croyons qu'était le Canada.

En 1982, le Canada a muté. Le Canada est devenu un pays avec dix provinces égales, et dans ces provinces, il y avait des citoyens qui étaient égaux entre eux, quelle que soit leur origine et je n'ai pas à discuter de tout cela, mais ce dont je me plains, c'est qu'on a changé la nature du pays dans lequel nous vivions, et on l'a fait à la suite d'un coup de force et à la suite d'une loi


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votée par le Parlement d'Angleterre. Ce n'est pas exactement ce qui souvent favorise la bonne entente entre les peuples, et j'entends ici, en disant «les peuples», la bonne entente entre le peuple québécois et le peuple canadien.

Notre collègue de The Battlefords-Meadow Lake s'est élevé contre le fait que la Saskatchewan verrait le nombre de ses députés diminuer, dans l'avenir. Nous aussi, du Québec, nous nous sommes élevés contre cette éventualité et la Chambre des communes ne l'a pas considéré. Nous nous sommes élevés compte tenu de notre responsabilité historique de foyer national des Canadiens français. Maintenant, les Canadiens français sont devenus les Québécois, à la consternation peut-être de certaines personnes au Canada anglais.

Maintenant, ma question est à propos du Sénat. Notre collègue de The Battlefords-Meadow Lake, pour contrer l'effet négatif de la diminution de la représentation des provinces, suggère la nomination ou l'élection d'un Sénat, qui verrait à faire une sorte de contrepoids au fait que la Chambre des communes représenterait, à ce moment-là, peut-être plus des circonscriptions et que le Sénat représenterait des provinces et exercerait un certain rôle de protection.

Compte tenu de son expérience à la Chambre des communes-notre collègue est un député d'expérience qui a vécu toute la période Mulroney-le député croit-il vraiment que le Canada, dans la situation actuelle, puisse jamais en arriver à une réforme constitutionnelle qui fasse en sorte qu'on puisse changer quoi que ce soit à ses institutions?

(1605)

[Traduction]

M. Taylor: Monsieur le Président, dans la question du député, il y a bien des aspects sur lesquels j'aimerais me prononcer.

Je formulerai d'abord ma réponse à la question, car cette réponse est très simple. Je suis un grand optimiste. Je crois que les gens peuvent collaborer entre eux et arriver à des compromis qui soient acceptables aux yeux de la plupart des Canadiens.

Nous avons bâti tout un patrimoine là-dessus. Nous sommes sur le point de conclure des accords avec les peuples autochtones du Canada dont l'issue, j'en suis sûr, était plus lointaine qu'elle ne l'est aujourd'hui. Nous y sommes, et je suis persuadé que nous parviendrons à en faire autant avec le Québec, sa population et ses dirigeants.

Je n'hésite pas à dire que, lorsque nous affirmons la même volonté, nous poursuivons le même rêve, soit celui de bâtir un système politique qui convienne à tout le monde.

Par ailleurs, avant d'en venir à sa question, le député a affirmé que le Bloc québécois assumait un rôle, en sa qualité d'opposition officielle à la Chambre des communes. Il a dit que le Bloc québécois, en tant qu'opposition officielle, veillait à ce que le Parlement soit aussi efficace que possible. Il voulait laisser entendre par là que le Bloc québécois, du fait qu'il est l'opposition officielle, est en mesure de représenter les intérêts des habitants de la Saskatchewan. À mon avis, c'est loin d'être le cas.

Après 18 mois d'exercice du pouvoir, le gouvernement jouit d'une immense popularité auprès de la population canadienne. Or, cela n'a rien à voir avec le bilan du gouvernement jusqu'ici. C'est plutôt parce que l'opposition n'arrive pas à faire comprendre à la population canadienne les ravages que font les politiques du gouvernement.

Rien ne saurait être plus clair que l'impact de ces politiques sur les gens de la Saskatchewan. L'élimination de la subvention du Nid-de-Corbeau aurait, durant toute autre législature au cours de notre histoire, suscité un débat animé à la Chambre. Les députés auraient crié haut et fort. Ils auraient pris tous les moyens possibles et permis pour empêcher le gouvernement de modifier la subvention du Nid-de-Corbeau, car cette mesure sera néfaste pour le transport ferroviaire et l'agriculture en Saskatchewan.

Au cours des derniers jours, nous avons débattu à la Chambre de la modification de la subvention du Nid-de-Corbeau. Vingt-trois députés du Bloc québécois ont parlé de ce projet de loi qui transforme toute la relation entre le gouvernement et les agriculteurs de la Saskatchewan. Sur ces 23 députés, pas un seul n'a défendu les intérêts de la Saskatchewan à ce sujet. Au contraire, le Bloc a même présenté une motion pour affirmer que le minuscule montant accordé aux agriculteurs de la Saskatchewan, en compensation de cet énorme programme qu'ils perdent, était discriminatoire envers le Québec.

Cela n'est certes pas le comportement d'une opposition officielle qui défend les intérêts des habitants de la Saskatchewan. Cette opposition ne va certainement pas amener les Canadiens de quelque région que ce soit à conclure que les politiques du gouvernement sont mauvaises pour eux.

Le gouvernement en place continuera donc de jouir d'une popularité non méritée, tant que nous n'aurons pas une opposition efficace, formée de gens qui s'intéressent au Canada tout entier.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir au sujet du projet de loi C-69.

Les journaux n'en ont pas vraiment parlé. À première vue, c'est un projet de loi plutôt technique qui est loin de susciter beaucoup d'intérêt.

Cependant, c'est un projet de loi qui est très important pour deux raisons. Tout d'abord, il souligne le besoin désespéré de réformer le système parlementaire canadien. Il signale certaines des lacunes du système actuel. On doit l'examiner et en discuter dans le contexte d'une réforme globale du système parlementaire canadien.

Trois groupes différents s'opposeront à ce projet de loi. Ce sont premièrement ceux qui croient dans une représentation réelle en fonction de la population. Il y a ensuite ceux qui jugent que nous sommes déjà trop gouvernés. Viennent, enfin, les gens qui ne sont pas d'accord pour accorder certains pouvoirs à des organismes qui ne sont pas élus et n'ont pas de comptes à rendre, comme une commission de délimitation des circonscriptions électorales.


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(1610)

Tout d'abord, permettez-moi de m'arrêter sur la représentation d'après la population. Parlons-en à nouveau dans le contexte de la réforme globale de notre système parlementaire. Les réformistes croient en la notion de représentation absolue en fonction de la population. En d'autres termes, dans la mesure du possible, les circonscriptions doivent toutes avoir la même population.

Cependant, pour contrebalancer le fait qu'il pourrait y avoir plusieurs circonscriptions regroupées dans des régions à forte densité de population, nous croyons qu'il faut prévoir un Sénat triple E, c'est-à-dire élu, efficace et à représentation égale. C'est là une chose pour laquelle notre parti se bat depuis sa création, en 1987.

Nous sommes fiers du fait que nous sommes le seul parti à avoir jamais fait élire un sénateur, le regretté Stan Waters, qu'on a élu, en 1991, en Alberta et qu'on a ensuite nommé au Sénat. Nous croyons que cela aurait pu être une façon très utile de se lancer sur la voie d'un Sénat triple E.

Comme mon collègue de la circonscription de The Battlefords-Meadow Lake vient de le dire, ce système donnerait probablement à certaines régions, comme l'Alberta et la Saskatchewan et d'autres, une certaine représentation et une certaine protection contre la tyrannie de la majorité qu'on constate lorsqu'on applique un système de représentation en fonction de la population dans un pays aussi étendu que le Canada.

Les réformistes souscrivent à la notion de représentation d'après la population, car elle va vraiment dans le sens de notre engagement en ce qui concerne l'égalité de tous devant la loi. C'est une notion extrêmement importante et que l'on a oubliée, dans une certaine mesure, au cours des dernières années. Ce concept a été supplanté par une autre conception de l'égalité à laquelle les gouvernements ont fini par adhérer et c'est l'égalité du résultat. Tout ce que les Canadiens veulent vraiment, c'est l'égalité des chances et ils la trouveraient dans un système fondé sur la représentation proportionnelle pure et sur un Sénat triple E. Il s'agit d'une formule très pragmatique et bien connue dans des pays très vastes, comme les États-Unis ou l'Australie.

L'idée est pragmatique parce qu'elle évite à des pays qui ont un territoire très étendu, mais dont certaines régions sont peu peuplées, de se désintégrer. Dans un pays aussi vaste que le Canada, les points de vue et les intérêts peuvent être très divergents. Dans un régime de représentation proportionnelle pure, les idées qui ont cours dans certaines régions du pays risqueraient de ne pas toujours être bien représentées à la Chambre des communes, par exemple. Il faut donc un contrepoids et c'est pour cette raison que le Parti réformiste tient tellement à un Sénat triple E.

Le projet de loi C-69 ne contient aucun de ces concepts, en tout cas certainement pas une représentation fondée sur la population ni aucune proposition de changement qui conduirait à la création d'un Sénat triple E. En fait, le projet de loi va à l'encontre des principes qui sous-tendent ces deux concepts.

Une des propositions du projet de loi que le Parti réformiste trouve difficile d'accepter est la règle concernant la variation de 25 p. 100 applicable aux circonscriptions, ce qui signifie que la taille d'une circonscription pourrait accuser un écart de 25 p. 100 par rapport à la moyenne. Cette formule pourrait créer des différences démographiques pouvant atteindre 67 p. 100 entre certaines circonscriptions, ce qui est énorme. En outre, elle rejette définitivement l'idée que tous les votes aient le même poids dans le système canadien.

Cette notion pourra paraître dépassée à beaucoup de députés, mais je crois que nos électeurs sont convaincus que toutes les voix doivent avoir un poids égal et nous sommes convaincus que le gouvernement doit agir dès maintenant en s'inspirant de cette idée. C'est pour cette raison que le Parti réformiste a proposé, à tout le moins, de ramener l'écart entre les circonscriptions à 15 p. 100. Si cette proposition était adoptée, les différences démographiques entre les circonscriptions ne pourraient pas excéder 35 p. 100. Ce n'est pas parfait, mais cela nous rapproche sûrement de l'idée de la représentation d'après la population, jusqu'à ce que nous puissions avoir de nouveau une réforme constitutionnelle qui puisse régler certains des vrais problèmes du système parlementaire canadien.

(1615)

Comme je viens tout juste de le mentionner, je pense que les gens trouvent que nous sommes déjà trop gouvernés, dans notre pays. Je voudrais parler aux députés d'un article paru dans l'omniprésente publication qui se retrouve sur les tables de nuit de presque tous les Canadiens, le Reader's Digest. Il y a environ un an, on pouvait y lire un article sur les sommes d'argent dépensées pour gouverner les Canadiens et sur ce qu'il en coûtait pour faire fonctionner le Parlement. Quand je repense à cet article, je ne peux m'empêcher de penser à notre Sénat, qui n'est pas élu, et aux sénateurs qui, malheureusement, ne jouissent pas de la confiance des Canadiens. Je ne peux m'empêcher de penser comment, par moments, ils n'ont pas montré le genre de comportement que nous attendons de tous les parlementaires. Je pense ici au débat sur la TPS.

Il est plus que nécessaire d'obliger ces personnes à rendre des comptes. Si nous avions un Sénat triple E, il serait tout à fait possible d'en réduire la taille. En fait, le Parti réformiste a réclamé à maintes reprises une réforme du Sénat qui pourrait se traduire par la représentation de chaque province par six sénateurs. Certaines personnes ont dit que nous n'avions besoin que de deux sénateurs par province. Si nous regardons ce qui se passe aux États-Unis, nous pouvons voir que ce pays peut se débrouiller avec deux sénateurs représentant des États aussi grands que la Californie, dont la population est presque aussi importante que celle du Canada, et qu'en fin de compte, ce système fonctionne bien. On pourrait sûrement réduire le nombre de sénateurs.

Beaucoup de personnes seraient d'accord avec moi si je disais qu'il y a de nombreux députés de l'arrière-ban dont nous pourrions nous passer à la Chambre, parce qu'il n'y a pas toujours suffisamment de travail important à faire. Je ne veux manquer de respect à personne en particulier à la Chambre. Toutefois, je suis convaincu qu'en privé, s'ils étaient sincères, bon nombre de simples députés reconnaîtraient que nous


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pourrions probablement réduire notre nombre à la Chambre et quand même parvenir à faire fonctionner le gouvernement.

L'article mentionnait entre autres qu'il en coûte quelque 770 millions de dollars juste pour assurer le fonctionnement du Parlement. Si nous pouvions ramener le nombre de députés autour de 265, comme le suggère le Parti réformiste, les circonscriptions seraient encore d'une taille assez convenable pour permettre aux députés de faire leur travail.

Si nous pouvions réduire la taille du Sénat et le rendre efficace, élu et égal, celui-ci gagnerait la confiance de la population et pourrait remplir des fonctions très utiles et même nécessaires. Il pourrait même faire beaucoup pour régler certaines matières à conflit qui divisent notre pays.

Quant à l'idée de donner beaucoup de pouvoirs aux commissions de délimitation des circonscriptions pour faire les changements qu'elles jugent nécessaires, cette question me préoccupe et je crois qu'elle devrait préoccuper également les Canadiens. On peut craindre que le gouvernement soit finalement investi des pouvoirs, parce que c'est lui qui administre la loi.

Les personnes qui siégeraient au sein des commissions ne seraient pas élues et n'auraient pas de comptes à rendre. Elles auraient le pouvoir de fixer les limites des circonscriptions. Je ne veux pas insinuer que c'est ce que le gouvernement a l'intention de faire, mais s'il le voulait, il pourrait pas mal faire à sa guise, comme c'est arrivé par le passé, selon d'autres députés qui affirment que des circonscriptions ont été dessinées plus ou moins arbitrairement pour des raisons politiques ou d'autres motifs qui n'avaient vraiment rien à voir avec les fonctions qu'elles remplissent ni avec les règles normalement appliquées dans la procédure de choix de nos représentants et de leurs territoires. Cela m'inquiète.

Il faut éviter cela à tout prix. Définissons plus précisément dans la loi la façon d'appliquer les régles afin que des organismes non élus et non tenus de rendre des comptes n'aient pas la latitude de modifier les circonscriptions électorales pour satisfaire leurs propres besoins ou ceux de leurs patrons politiques.

Le projet de loi C-69 donne une latitude énorme aux commissions de délimitation des circonscriptions qui peuvent faire des exceptions à la règle de l'écart de 25 p. 100 dans le cas de certaines circonscriptions. Auparavant, cela ne s'appliquait qu'aux circonscriptions très vastes. Rien n'empêche une commission de faire une exception dans le cas d'une circonscription peu vaste.

(1620)

Le Parti réformiste aimerait proposer des changements encore plus importants, qui feraient l'objet d'un autre débat dans un autre forum. Nous aimerions voir imposer une taille minimum pour les circonscriptions pouvant faire l'objet d'une exception. Nous suggérons quelque chose de l'ordre de 200 000 à 250 000 kilomètres carrés. Nous craignons qu'aussi longtemps qu'il n'y aura pas de limite, les députés viendront de tous les coins du pays exercer des pressions pour que leur circonscription soit exemptée, pour des motifs purement politiques.

Parlons maintenant de la raison pour laquelle nous sommes ici en train de débattre le projet de loi C-69. Nous avons été témoins d'un spectacle peu édifiant, il n'y a pas si longtemps de cela, lorsque les circonscriptions ont été redéfinies en vertu du projet de loi alors à l'étude. Des ministériels et des bloquistes sont arrivés en criant: «S'il vous plaît, ne modifiez pas les limites de ma circonscription; je n'aurai plus aucune chance d'être réélu.» On a alors interrompu le processus en cours.

Les réformistes eux aussi étaient durement touchés par la révision des limites des circonscriptions. La députée de Beaver River, le leader suppléant du Parti réformiste, allait carrément perdre sa circonscription. Les réformistes n'ont pourtant pas commencé à se plaindre. Ce n'est pas comme les députés du Bloc à l'autre bout qui ont commencé à faire toute une montagne, à veiller à ce que leurs intérêts soient protégés au détriment des contribuables et au risque de ralentir le processus, d'obliger la Chambre des communes à réexaminer la question sous la forme d'une nouvelle mesure législative, d'accaparer le temps des députés pour examiner une nouvelle fois cette question. J'estime que c'est tout à fait inapproprié.

Le gouvernement a fait une erreur grave. Il s'est donné beaucoup de mal pour protéger ses intérêts comme dans d'autres cas, par exemple les pensions des députés. Pour une fois, il serait bien de voir le gouvernement faire passer les intérêts de ses électeurs et des Canadiens avant les siens. C'est tout ce que veulent les Canadiens.

Cette situation incongrue a donné lieu au projet de loi C-69. C'est la raison du débat d'aujourd'hui. Ce que veulent ultimement les Canadiens, c'est une réforme complète du système, une réforme à la base. Ils veulent une représentation proportionnelle. Ils veulent un Sénat triple E qui contribuerait dans une large mesure à la représentation des régions et à panser certaines blessures causées par le système défectueux qui est le nôtre actuellement.

Tout ce que veulent les Canadiens, c'est un ensemble d'institutions démocratiques, justes et transparentes. Le gouvernement et ce projet de loi, le projet de loi C-69, ne leur donnent pas ce qu'ils demandent. C'est pourquoi je n'appuierai certainement pas cette mesure législative.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, le député a soulevé un argument qui m'étonne un peu. Il a fait allusion aux annexes du projet de loi permettant aux députés de faire exempter leur circonscription du processus de remaniement, en les inscrivant sur la liste en annexe.

Sait-il qu'au comité, cette partie du projet de loi a été retranchée?

M. Solberg: Monsieur le Président, je ne peux intervenir directement sur ce que vient de déclarer le député, mais je m'inquiète parce que des députés et leurs représentants voudront comparaître devant les commissions pour demander l'exemption, immobilisant ainsi tout le processus.


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Nous avons déjà vu des députés s'adresser au gouvernement pour qu'il change tout le système, ce qui a entraîné des coûts élevés pour les contribuables canadiens. Je crains les échappatoires qui permettraient à des ministériels et à d'autres députés-des bloquistes, par exemple-de continuer cette pratique.

(1625)

M. Boudria: Monsieur le Président, avec tout le respect que je vous dois, le député n'a pas répondu à la question.

Ne sait-il pas que la partie dont il parle, qui permettrait notamment à des députés bloquistes ou libéraux de faire inscrire leur circonscription sur la liste en annexe, par exemple, parce qu'elle est trop grande, n'existe plus? Le projet de loi s'achève avec la partie intitulée «Entrée en vigueur», ou l'article 40. L'annexe a été supprimée en comité, par voie d'un vote unanime, c'est-à-dire avec l'approbation des députés réformistes du comité.

Dans ce cas, le député comprendra que son intervention aujourd'hui repose sur une hypothèse qui est fausse. Par conséquent, devons-nous conclure qu'il est maintenant favorable au projet de loi? La partie du projet de loi qui motivait son opposition n'existe plus; il y a déjà plusieurs semaines que le comité de la Chambre l'a supprimée, par suite d'une motion proposée par un membre du comité et approuvée par tous les autres membres.

M. Solberg: Monsieur le Président, je m'oppose au raisonnement du député. On a pu constater que j'ai fait valoir de nombreux arguments dans mon discours. Le député n'a pas tenu compte des préoccupations que j'ai décrites, c'est-à-dire, qu'il fallait fixer un seuil au-dessous duquel les exemptions seraient interdites, par exemple de 200 000 à 250 000. Voilà ce que nous demandons.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, mon commentaire va porter sur un aspect que je trouve très regrettable de son discours, celui du dénigrement fait par le député réformiste de la fonction de député.

Il commence par dire que les choix de la population n'ont pas tous été bons. C'est comme insulter les électeurs au départ. Ensuite, il critique le nombre. Ce sont des commentaires faciles car il me semble que depuis qu'on est ici, qu'on soit d'un côté ou de l'autre de la Chambre, qu'on présente une opinion ou l'autre, comme dans toute population, il y a peut-être des gens plus efficaces, d'autres moins, mais la très grande majorité des gens font leur job avec le plus de coeur possible en essayant de faire un travail correct.

Il nous a indiqué également qu'on cherchait à protéger nos circonscriptions. Je pense qu'il faut que ce soit nié de façon formelle. Lorsqu'il y a eu des représentations, quelle que soit l'étape, elles ont toujours été pour défendre les citoyens afin qu'ils aient une représentation adéquate et qu'on tienne compte de certains critères.

Je termine mon commentaire et je pose la question suivante, qui est en même temps un étonnement. Le député réformiste ainsi que le député du NPD qui l'a précédé ont tous les deux jugé essentielle une réforme constitutionnelle. Les députés ne sont-ils pas conscients que, depuis l'échec de Charlottetown, il n'y a plus aucune possibilité de réformer le système actuel?

[Traduction]

M. Solberg: Monsieur le Président, je rejette l'idée que toute réforme constitutionnelle est impossible. Dans l'ensemble, les Canadiens veulent changer le système et le jour, pas trop lointain, viendra où ils seront prêts à en discuter. Peut-être le député bloquiste, qui, bien sûr, veut la séparation, rêve-t-il en couleur, mais c'est triste pour lui, car il sera ramené à la réalité par le prochain référendum que les séparatistes perdront sûrement, en grande partie à cause de l'incapacité des députés du Bloc québécois de représenter efficacement leurs électeurs.

Peut-être le député a-t-il apporté de l'eau à mon moulin en disant que certains simples députés n'ont pas réussi à faire valoir très efficacement les opinions des électeurs de leur circonscription.

[Français]

M. André Caron (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais simplement poser une question à mon collègue, après avoir fait un petit commentaire, naturellement.

En entendant le discours de mon honorable collègue, je pense avoir compris un peu la différence entre les députés du Parti réformiste et ceux du Bloc. J'ai l'impression que les députés réformistes représentent des contribuables tandis que nous, députés du Bloc, représentons des citoyens.

On dit souvent que les citoyens ne veulent pas que la limite de leur circonscription change ou qu'un député fasse des représentations au nom de ses électeurs pour garder les limites de la circonscription. Le député en question reconnaît un sentiment d'appartenance aux gens de telle ou telle circonscription.

(1630)

Les gens s'attachent; ils viennent d'un milieu, ils sont représentés par un député, et souvent, ils ont construit, autour d'une circonscription électorale, un milieu social qui veut vivre et survivre.

Je pense qu'en appliquant toujours un critère numérique abstrait pour délimiter les circonscriptions, on tombe dans le même panneau que celui dans lequel on est tombé en 1982, lorsqu'on a réformé la Constitution canadienne, en ce sens qu'on a divisé le Canada en dix provinces inégales en population et qu'on a dit que chacune d'elles était égale. On a créé un pays artificiel.

Je crois qu'avec la mentalité qui préside souvent à la délimitation des circonscriptions, on en vient à faire des circonscriptions artificielles qui ne représentent rien de spécial. C'est comme si on avait pris le Canada comme un immense gâteau et qu'on aurait tranché ça et là en espérant obtenir des morceaux égaux. Ce n'est pas cela un pays, c'est différent. Il y a un sentiment d'appartenance.


11629

Je demande à mon collègue s'il ne juge pas important qu'on tienne compte du sentiment d'appartenance des électeurs et des citoyens à une circonscription quand on préside à une réforme des limites des circonscriptions électorales?

[Traduction]

M. Solberg: Monsieur le Président, je reconnais sans hésitation qu'il y a des différences entre les collectivités et que, dans toute la mesure du possible, on devrait le reconnaître en délimitant les circonscriptions et on devrait tenter de ne pas diviser les collectivités qui forment un tout depuis longtemps.

Toutefois, le principe le plus important à mon sens, est celui du nombre égal d'électeurs dans chaque circonscription. En cette fin du XXe siècle, nous n'avons pas encore un système politique où les élus représentent tous un même nombre d'électeurs et où les inégalités, s'il doit y en avoir, sont compensées par un Sénat triple E. Je crois qu'il est temps de remédier à la situation.

Les amendements que nous proposons au projet de loi C-69, notamment celui où nous préconisons de ramener l'écart admissible à 15 p. 100, nous rapprocheraient d'un système plus équilibré. Cela doit être le premier principe qui guide tout changement des limites des circonscriptions électorales. Le deuxième principe devrait être le respect des zones commerciales et d'autres caractéristiques du même genre. Nous sommes tout à fait d'accord avec cela, mais ce dernier principe ne doit pas devenir le premier.

Les Canadiens sont d'abord et avant tout des démocrates. Je crois qu'ils aimeraient un système reposant sur des règles plus démocratiques.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable de Burnaby-Kingsway-La Turquie; l'honorable député de Bourassa-L'immigration.

Nous reprenons le débat avec l'honorable député de Kamouraska-Rivière-du-Loup.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, au début de cette dernière intervention sur ce projet de loi, j'aimerais situer les critères qui m'amènent à prendre position contre ce projet de loi.

Premièrement, le Bloc québécois a été élu pour assurer la défense des intérêts du Québec et aussi assurer la promotion de la souveraineté. Personnellement, en tant que député, j'ai dit, évidemment, que je voulais assurer la défense des intérêts des gens de mon coin de pays.

Lorsqu'on prévoit refaire la carte électorale et qu'on envisage de faire disparaître une des cinq circonscriptions de l'est du Québec, qu'il s'agisse de Gaspé, de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, de Matane-Matapédia, ou qu'on propose de modifier celle de Kamouraska-Rivière-du-Loup ou de Rimouski-Témiscouata, il m'apparaît important de sensibiliser tous les députés de cette Chambre à la nécessité d'une loi permettant une vraie représentation des citoyens et non pas un calcul mathématique.

À cet égard, depuis notre élection en cette Chambre, on a fait des représentations aux commissions de détermination des limites des circonscriptions. Ensuite, on a fait des interventions à la Chambre en deuxième lecture et devant le comité parlementaire. Après toutes ces interventions, j'invite encore la population à s'assurer qu'on respectera réellement les régions d'appartenance naturelle dans les circonscriptions fédérales, si la carte fédérale servait une autre fois.

(1635)

Pour ce faire, j'ai donné l'exemple de ma circonscription de Kamouraska-Rivière-du-Loup. Si jamais il y avait une modification à la carte électorale, j'aimerais qu'on demande aux gens des MRC concernés dans quelle circonscription ils veulent appartenir, de telle sorte qu'on soit certain que les gens se retrouvent là où ils veulent être. Il ne faudrait pas que ce soit seulement le fruit d'un calcul arithmétique ou d'un calcul géographique qui ne correspondrait pas à une réalité.

Quand on révise les circonscriptions électorales, on a tous en tête un peu du folklore: les très grands comtés qui peuvent exister à travers le Canada avec une population éparpillée où il est un peu difficile de rejoindre tous les concitoyens. On a même eu dans le passé des expériences de comtés protégés au Québec pour assurer une représentation accrue aux anglophones qui étaient dans la région des Cantons de l'Est. Mais lorsqu'on considère la carte électorale comme un outil de la démocratie pour l'avenir, on doit s'assurer qu'il y aura là une meilleure représentation et un bon outil pour que s'exerce adéquatement la démocratie.

Je suis député, depuis un an et demi, et je pense que tous les députés de la Chambre partageraient ce point de vue là. En Chambre, le travail s'équilibre assez bien. Qu'on soit d'une grande ou d'une petite circonscription en termes de superficie, le travail à Ottawa se ressemble. Par contre, lorsqu'on parle du travail dans nos circonscriptions, là c'est très différent. Il y a des comtés qui se retrouvent à l'intérieur d'un centre-ville, à quelques coins de rues, comme celui que je représente où il y a 55 municipalités dans le comté. Il y en a même qui ont 80 municipalités dans leur comté. Tout ceci amène une conception différente du travail de député et une façon différente de le faire.

Il n'y a pas juste le nombre de municipalités. On peut parler de l'éparpillement des services gouvernementaux et un peu du rôle compensatoire que le député doit remplir dans les régions particulièrement rurales. Dans les grands centres, les services gouvernementaux sont là; les gens peuvent toujours trouver le bureau qui va pouvoir remplir tel ou tel service. Mais en milieu rural, c'est souvent le bureau du député qui est le seul point de repère par rapport à plusieurs services gouvernementaux. Il a donc un travail accru à accomplir. Donc, lorsqu'on lui donne de très grandes étendues, évidemment cela a un effet sur le travail à accomplir.

Donc, il y a l'étendue du territoire qui est un critère important à considérer et dont on doit tenir compte lorsque le député désire assurer la représentativité des électeurs, afin qu'il soit bien leur


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porte-parole. De plus, il faut qu'il ait la chance de les voir à intervalles réguliers.

Il est également important de tenir compte des secteurs d'activités et des secteurs industriels. Par exemple, cette semaine, on a eu une journée de l'opposition sur l'agriculture. Si on tend de plus en plus à une représentation purement démographique, on va diminuer l'impact d'un tel secteur, l'impact des députés représentant des circonscriptions rurales, des circonscriptons où la vocation agricole est importante. On va nuire en ce sens à l'ensemble de la société, parce que l'agriculture a un impact sur l'ensemble de la population.

Donc, il faut que l'on puisse tenir compte aussi des secteurs comme ceux-là. C'est la raison pour laquelle la présente loi m'apparaît manquer de nuance, de subtilité dans la façon dont on va pouvoir déterminer les circonscriptions électorales. C'est un aspect que je voulais aborder, mais il y en a un autre, et c'est peut-être la plus grande déception finalement dans toute l'étude du projet de loi, soit le refus, par la majorité libérale, d'accorder au Québec le 25 p. 100 minimum de protection au niveau du nombre de députés à la Chambre des communes.

J'ai interprété cela comme quelqu'un qui nous fermait la porte, comme un comportement égoïste de la majorité, et une espèce de négation du fait qu'il y a, au Canada, deux peuples fondateurs. Initialement, dans cette Chambre, il y a deux peuples fondateurs qui ont créé ce pays-là. Par l'impact de politiques d'immigration, par la façon dont on a créé les provinces, on continue le travail qui conduit à une «minorisation» telle que si les Québécois font le choix de rester dans le Canada, ils vont en même temps faire le choix de devenir une minorité qui n'aura plus d'impact réel par rapport à ce qu'ils représentaient en Amérique du Nord depuis des siècles, eux qui ont été les premiers explorateurs dans ce vaste continent.

(1640)

Je pense que cet encouragement à la «minorisation» s'inscrit un peu dans la logique du rapatriement unilatéral de la Constitution. Il y a comme un geste continu dans ce sens. De la même façon que les députés libéraux du Québec n'étaient pas très fiers du rapatriement en 1982, on leur a très bien fait sentir lors des élections de 1984, au Québec, qu'on n'était pas satisfaits de leur geste lorsqu'est venu le temps de voter ici à la Chambre sur cet amendement. On a été très surpris de voir les députés libéraux du Québec voter contre l'amendement du Bloc qui, dans le fond, ne visait qu'à assurer un minimum de représentation à la Chambre.

Je pense que c'est un geste dont l'ensemble des Québécois vont se souvenir pendant longtemps. Ils vont s'en souvenir particulièrement comme étant l'un des symboles du fait que lorsqu'ils choisiront de devenir un pays souverain, une des raisons de leur choix sera qu'ils n'avaient plus d'espoir de réussir à prendre leur place dans ce pays parce qu'on leur refusait même cette garantie minimale de survie.

Un autre ordre de déception, qui n'est pas de la même envergure nationale mais qui m'apparaît significative, c'est le refus de considérer une région comme celle des îles de la Madeleine comme étant une situation exceptionnelle qui pourrait être reconnue comme comté. On voit là un manque de sensibilité qui ne se retrouve pas dans la Loi électorale du Québec où on a donné aux îles de la Madeleine un comté, faisant formellement exception à la norme connue pour l'ensemble des autres comtés. Au fédéral, on a déjà eu ce comté-là, on a retiré le droit à ce comté et, depuis ce temps, les îles ont été représentées pendant un certain temps par le député de Gaspé-Îles-de-la-Madeleine et maintenant c'est Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine.

Le député qui représente cette région est placé devant une situation quasi impossible parce qu'il y a là des intérêts très différents. On le voit à propos du territoire couvert, de l'isolement, des relations avec les autres régions du Canada qui entourent le golfe, et je trouve que la décision de ne pas reconnaître les îles comme un comté particulier, cela m'apparaît aussi inacceptable parce qu'il y aurait là une contribution intéressante qui pourrait être faite par un député qui représenterait une région comme les îles. Cela ne veut pas dire qu'il ne pourrait pas y avoir au Canada d'autres exceptions du même type qu'on aurait pu reconnaître de façon particulière.

La raison pour laquelle je suis contre ce projet de loi c'est que, pour l'établissement des commissions provinciales qui vont définir les circonscription électorales, on donne trois critères: la communauté d'intérêt, le fait que ce soit d'une superficie raisonnable et qu'il y ait une augmentation considérable de la population, possiblement au cours des cinq prochaines années. Là-dessus, on a mis à l'envers un argument que j'avais présenté en comité lorsque je disais: Est-ce qu'il ne serait pas pertinent que lorsqu'on entrevoit de faire disparaître une circonscription, on lui donne la chance, pendant la durée d'un recensement de continuer à pouvoir être représentée à la Chambre des communes et, si au rencensement suivant, la baisse démographique continue, là on pourra le constater et faire disparaître la circonscription?

On inverse la situation, et pour qu'une circonscription puisse être acceptée hors des normes, il faudra annoncer qu'on prévoit une augmentation considérable de la population de cette région au cours des cinq prochaines années. Cela va complètement à l'inverse de la vision qu'on peut avoir du développement de l'occupation du territoire dans une région. Par exemple, l'est du Québec est en baisse de population depuis 10 à 15 ans. Il y a eu des choix délibérés des gouvernements centralisateurs qui ont fait que la population a fui la région à la recherche d'emplois.

Depuis quelques années, tous les intervenants économiques se sont mis à la tâche pour renverser cet effet. Cela va prendre quelques années. Les démographes disent qu'on en a encore pour au moins 10 ans si les mesures qu'on a mises en place s'avèrent un succès. Mais, si pendant ce temps-là, on leur enlève la capacité de représentation, on va à contresens des acteurs qui veulent faire le développement de ce coin de pays.

Donc, je pense qu'au niveau des commissions de délimitation de la carte électorale, il y aurait d'autres critères dont on devrait tenir compte qui devraient s'ajouter aux trois que j'ai déjà nommés, soit la communauté d'intérêt, la superficie raisonnable et l'augmentation considérable de la population au cours des cinq prochaines années.

(1645)

Je les ai nommés précédemment, mais il y a particulièrement le portrait économique d'une région, l'étendue du territoire, le nombre de municipalités, les régions d'appartenance naturelle. Ce sont tous des critères qui, selon moi, auraient dû être retenus


11631

et auraient permis une délimitation plus nuancée des circonscriptions électorales.

Donc, quand on passe les cinq circonscriptions de l'est du Québec à travers le tamis des critères prévus dans le présent projet de loi, on va nécessairement en arriver à une décision qui va accélérer le dépeuplement et qui va nuire à la construction d'une nouvelle ruralité. Cette situation ne se vit pas seulement chez nous, elle se vit aussi dans toutes les régions du Canada et je pense qu'il y aurait intérêt à ce que le gouvernement soit sensible à cette réalité.

Donc, en conclusion, après avoir suivi ce projet de loi à plusieurs étapes, je pense que celui-ci devrait être défait, parce que le gouvernement n'a pas rempli le mandat qu'il devait se donner, c'est-à-dire d'assurer une carte électorale qui va contribuer à une représentation adéquate de tous les citoyens du pays et qui, en même temps, va être un outil pour permettre à la démocratie d'être plus vivante.

Là-dessus, en commentaire final, je dirais qu'il est très important de voir que les coûts encourus par nos outils démocratiques sont tout à fait normaux et c'est probablement le système le moins coûteux pour atteindre des résultats intéressants. Dans la situation actuelle, on aurait pu en arriver à un outil qui soit encore plus adéquat et je pense que le gouvernement aurait gagné à écouter les représentations en ce sens.

J'espère que les Québécois vont pouvoir voir très clairement que le Bloc, là-dessus, s'est rendu à la limite de son mandat, c'est-à-dire d'assurer la défense des intérêts du Québec, de respecter la décision qu'ils prendront lors du référendum. Qu'ils disent oui ou qu'ils disent non, ils auront eu des représentants ici qui leur auront assuré au maximum une représentation adéquate.

En étudiant la carte électorale, on peut aussi constater la double représentation des députés. Dans le travail quotidien du député, de façon très nette, il y a un dédoublement et des frais supplémentaires à l'État. Il y a là aussi une espèce de compétition malsaine entre les députés provinciaux et les députés fédéraux, ce qui ne contribue pas à l'efficacité du système. C'est, je pense, une des raisons assez importantes pour lesquelles les citoyens du Québec condamnent majoritairement le système fédéral actuel et ont essayé pendant 30 ans de le corriger, sauf que les démarches des dernières années ont bien prouvé que cela n'était pas possible et que la seule façon qu'ils avaient de débloquer la situation était de voter oui au référendum et, ainsi, de s'assurer le contrôle sur leur avenir.

[Traduction]

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les remarques de mon collègue d'en face.

Je crois qu'il a dit qu'on fermait la porte au nez du Québec en n'acceptant pas d'emblée de donner à cette province 25 p. 100 des sièges à la Chambre des communes. Je suppose que beaucoup de Québécois et d'autres Canadiens pourraient considérer que les séparatistes du Québec qui proposent de se séparer du reste du Canada ferment la porte au nez des autres Canadiens.

Nous sommes des adultes et nous devrions résoudre nos problèmes en discutant sérieusement et en partageant nos opinions et nos idées avec nos concitoyens de toutes les régions de notre beau pays. Il ne faut pas agir comme un enfant qui exige d'avoir droit à quatre ou cinq prises avant d'être retiré et qui, si on lui refuse, prend sa balle et son bâton et rentre chez lui.

(1650)

Mon collègue d'en face a soulevé certaines des préoccupations qu'il a et que d'autres ont peut-être aussi. On pourrait probablement passer des jours et même des semaines à exprimer des préoccupations à caractère historique. Cependant, nous devons plutôt partir du point où nous sommes aujourd'hui et aller de l'avant. Nous ne pouvons pas aller de l'avant et atteindre nos buts lorsque nous devons nous préoccuper de référendum et de séparation. Ce qu'il nous faut vraiment faire, c'est nous asseoir ensemble pour négocier l'avenir de notre pays.

Je félicite mon collègue d'en face d'avoir proposé cela, et le fait que les bloquistes parlent du pourcentage de sièges que le Québec doit avoir à la Chambre des communes me porte à croire que, au fond, ils veulent continuer de faire partie du Canada et rester à la Chambre des communes.

[Français]

M. Crête: Monsieur le Président, je ne sais pas où le député a entendu que je faisais le choix de rester ici. Je pense que c'est assez évident par notre approche et par notre volonté d'aller au bout de notre mandat. Je pense que le nombre de fois où nous avons manifesté qu'on était souverainistes et qu'on a voulu que le Québec fasse ce choix-là, de façon démocratique, est assez évident.

Par contre, sur la question même du projet de loi actuel, il est assez intéressant de voir que ce n'est pas seulement l'opposition officielle à Ottawa qui demandait 25 p. 100. Le chef de l'opposition à l'Assemblée nationale du Québec, qui est le chef du Parti libéral du Québec, a proposé: «Que l'Assemblée nationale du Québec réitère l'objectif de maintenir une représentation québécoise d'au moins 25 p. 100 à la Chambre des communes du Canada et demande au gouvernement du Québec de faire des représentations en ce sens.»

Cela ressemble un peu au genre de consensus sur la question d'avoir la juridiction sur la main-d'oeuvre. C'est le genre d'opposition unanime qu'on a au Québec par rapport à cela, et c'est la majorité libérale qui a voté contre la représentation des 25 p. 100 ici; c'est le résultat qu'on va pouvoir garder.

L'opposition officielle à Québec dit la même chose que l'opposition officielle ici à ce sujet. Elle dit aussi que le gouvernement du Québec veut s'assurer de cette responsabilité, de cette partie-là de protection minimale. Je pense qu'il y a un consensus auquel la majorité libérale doit faire face.

Il faut se parler sérieusement et voir qu'on peut régler des problèmes. Mon père m'a raconté qu'avant ma naissance il y avait eu la question de la circonscription électorale. Quatre-vingt pour cent des Québécois ont voté contre et on leur a quand même imposé cette circonscription.


11632

Ensuite, lors du rapatriement unilatéral de la Constitution, le gouvernement du Québec n'a pas adhéré à ce rapatriement-là, ni le gouvernement de M. René Lévesque, ni les gouvernements fédéralistes qui ont suivi. Aujourd'hui, on vit encore dans une constitution où la majorité libérale vit très facilement avec le fait qu'une des provinces n'a pas adhéré au pacte confédératif, et c'est très difficile à accepter.

J'ai aimé par contre un élément du discours du député d'en face. Il a dit qu'il faudrait s'asseoir et négocier. Je pense qu'il devrait parler à son chef et à toute la députation libérale parce qu'il est évident que du côté du chef du gouvernement, on a reçu systématiquement des non sur la nécessité de changer la Constitution.

L'approche du premier ministre actuel est claire: en essayant de donner un bon gouvernement aux Canadiens et aux Québécois, les Québécois vont oublier la réalité qui est la leur. Aujourd'hui même, on vient d'avoir les chiffres et après 125 ans on est, pour la première fois, la province où il y a plus de pauvres au Canada. Ce genre de situation-là nécessite des changements fondamentaux et si le système a produit quelque chose comme ça pendant 125 ans, la seule solution, selon moi, c'est d'en sortir.

Des voix: Bravo!

(1655)

Le vice-président: Comme personne ne se lève pour poser une question ou faire un commentaire, nous reprenons le débat avec l'honorable whip adjoint du gouvernement.

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, la plupart des Québécois et Québécoises ne partagent pas du tout le point de vue de mon collègue de l'autre côté de la Chambre qui vient de prononcer un discours, parce qu'il est évident que les Québécois ne veulent pas quitter le Canada. C'est pour cette raison que les séparatistes québécois ont reporté la tenue du référendum.

J'aimerais également rappeler aux députés du Bloc que les Québécois ont rejeté les amendements constitutionnels garantissant un pourcentage des sièges dans cette Chambre à la province de Québec.

Monsieur le Président, avant de continuer mon discours, je désire vous informer que je partagerai mon temps de parole avec le député de Glengarry-Prescott-Russell.

[Traduction]

Je suis heureuse d'avoir l'occasion de parler de ce projet de loi. Il s'agit vraiment d'un projet de loi extrêmement important, qui porte sur la façon dont nous, Canadiens, déterminons comment nous serons représentés dans notre Chambre des communes.

J'ai eu l'honneur de faire partie du comité de la procédure et des affaires de la Chambre chargé d'étudier le projet de loi, mais je n'en suis devenue membre qu'à mi-chemin de son travail. Je sais que les membres du comité y ont consacré beaucoup de temps. Il s'est agi d'un processus innovateur, car c'était la première fois qu'un comité remplissait un mandat que notre gouvernement avait promis de donner aux députés en qualité de membres d'un comité, soit de prendre l'initiative d'un projet de loi, de sorte que ce soient des députés plutôt que le gouvernement qui le présentent à la Chambre.

Je tiens à féliciter les membres du comité ayant oeuvré à ce projet depuis le début de l'excellent travail qu'ils ont accompli et de l'étude minutieuse qu'ils ont faite de tous les aspects du projet de loi.

J'ai dit qu'il s'agissait d'un important projet de loi, et ça l'est. Il traite de la façon dont nous sommes représentés démocratiquement en tant que Canadiens. C'est un problème très difficile dans un pays comme le nôtre dont la population est si dispersée, si disparate et si différente sur les plans géographique et démographique.

Nous avons de fortes concentrations de population dans les grands centres urbains comme Montréal, Toronto et Vancouver, et nous avons aussi de vastes étendues de territoire très faiblement peuplées et dont les habitants ont très peu l'occasion d'entrer directement en contact avec leurs représentants élus.

Un des dilemmes auxquels le comité a été confronté, c'était de déterminer comment assurer une représentation équitable de la population pour les habitants des régions très densément peuplées et pour ceux des régions peu densément peuplées.

Le défi n'est pas facile à relever. Il faut reconnaître que la représentation par un représentant élu est plus difficile quand le député doit parcourir des milliers de milles peut-être pour visiter certaines parties de sa circonscription. On peut avoir une très faible population dans une vaste circonscription du Nord ou dans une circonscription comme celle de Labrador et avoir quand même moins de contact avec ses électeurs que ce n'est le cas avec une population beaucoup plus nombreuse dans une zone urbaine qui est beaucoup plus densément peuplée.

(1700)

Le comité a proposé des solutions novatrices pour garantir que, au moment où les limites des circonscriptions seront déterminées-pas par nous, bien entendu, mais par des commissions indépendantes-on prendra ces facteurs en considération. On tiendra compte du caractère unique de notre pays. Les circonscriptions seront établies de manière que les gens y soient représentés équitablement, indépendamment des considérations géographiques ou du fait que la population est clairsemée, disséminée ou concentrée.

Je voulais parler de toute cette idée de la communauté d'intérêts. De l'avis de bon nombre d'entre nous, ce facteur n'était pas suffisamment respecté dans le dernier rapport des commissions de délimitation des circonscriptions électorales, mais j'estime que cet aspect est considérablement renforcé dans le projet de loi dont la Chambre est actuellement saisie.

Il ne faut pas prendre seulement en considération les chiffres quand on établit la taille et les limites des circonscriptions; il faut examiner aussi la communauté d'intérêts des gens qui seront représentés par le même député. Considèrent-ils qu'ils forment une communauté? C'est probablement extrêmement important de prendre cela en considération au moment de décider quel groupe sera représenté par le même député. Évidemment, les membres de toute communauté, quelle que soit sa taille, présenteront toujours une certaine diversité et des différences.


11633

Lorsqu'un député entre dans cette Chambre pour représenter ses électeurs, il est extrêmement important qu'il représente un groupe de personnes qui ont quelque chose en commun, qui considèrent depuis longtemps qu'elles forment une communauté ou parce qu'elles ont des intérêts communs.

J'aimerais aussi commenter certaines observations qui ont été faites sur les 25 p. 100 de sièges, car les députés du Bloc savent pertinemment que ce dont ils ont parlé toute la semaine ne peut s'accomplir autrement que par une modification constitutionnelle. C'est manquer de franchise envers la population que de prétendre autre chose.

À mon avis, rares sont les Canadiens qui voudraient revivre l'émoi des discussions sur les changements constitutionnels, alors que de nombreux problèmes beaucoup plus graves, beaucoup plus importants touchent les gens quotidiennement.

Certains ont communiqué avec moi et m'ont demandé pourquoi nous ne pouvons avoir une Chambre comptant beaucoup moins de députés. C'est certainement possible, mais je le répète, il faudrait pour cela modifier la Constitution parce qu'une représentation minimale est garantie à certaines de nos plus petites provinces.

Je dis aussi aux gens qu'il est tout à fait possible de réduire considérablement le nombre de sièges à la Chambre des communes, mais que nous perdrions quelque chose en agissant ainsi. Les Canadiens seraient alors privés d'un contact beaucoup plus étroit et personnel avec leurs députés.

Les personnes avec lesquelles j'ai parlé estiment important de pouvoir établir un contact personnel avec leur député et de pouvoir obtenir de lui une réponse personnelle lorsqu'elles veulent résoudre un problème ou discuter d'une question avec leur député ou lui recommander des mesures que le gouvernement pourrait prendre. C'est extrêmement important pour les Canadiens. Pour en revenir à ce que je disais au début, c'est très important étant donné la diversité de notre pays. Les gens devraient donc se montrer prudents quand ils proposent de réduire le nombre d'élus. Il y aurait alors une plus grande distance entre eux et leur représentant.

Monsieur le Président, il ne me reste que quelques secondes. Je propose donc, conformément à l'article 26 du Règlement:

Que la Chambre continue de siéger au-delà de l'heure normale d'ajournement pour étudier le projet de loi C-69.
(1705)

[Français]

Le vice-président: Que tous les députés qui s'opposent à cette motion veuillent bien se lever.

Et plus de quinze députés s'étant levés:

Le vice-président: Plus de 15 députés s'étant levés, conformément au paragraphe 26(2) du Règlement, la motion est réputée retirée.

(La motion est retirée.)

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, j'écoutais avec intérêt les propos de l'adjointe parlementaire et je la trouve pas mal présomptueuse lorsqu'elle affirme sans le moindre doute que les Québécois n'adhèrent pas à la théorie des souverainsites au Québec. Je lui ferais remarquer qu'il est vrai que les Québécois ont voté contre l'Accord de Charlottetown qui contenait, à l'intérieur du texte, une espèce d'assurance du 25 p. 100 de représentation à la Chambre des communes, mais je lui ferais remarquer également que les anglophones et les gens des autres provinces ont voté contre aussi.

Donc, il ne faudrait pas qu'elle nous fasse subir à nous l'odieux du rejet de Charlottetown. En plus, je lui ferais remarquer que son chef, le premier ministre actuel du Canada, a reçu à bras ouverts dans son parti l'auteur du torpillage de l'entente de Meech. Je profite aussi de l'occasion pour lui dire que ce n'est pas parce que les sondages défavorisent momentanément l'option souverainiste au Québec que les Québécois épousent la thèse fédéraliste et y adhèrent.

Je pourrais vous dire que les Québécois, pour diverses raisons, et moi j'estime souvent que c'est à cause du contexte, à cause des menaces passées exercées contre les Québécois, certains, à cause des campagnes de peur, sont réticents à s'embarquer là-dedans, mais dites-vous que lorsqu'on épouse quelqu'un par la peur, cela ne fait jamais un bon ménage. La députée ferait mieux de se souvenir de cela, parce qu'avec la dette qui s'en vient et le déficit duquel, ils ne veulent pas l'avouer, ils ne se sortiront jamais, ils vont être obligés de nous dire: «Québécois, séparez-vous, on n'est plus capable d'être si gros, d'être si gras, d'entretenir tant de faste.»

Alors, on peut couper court assez rapidement aux petites réjouissances de la députée d'en face. Je lui demanderais donc de faire preuve de modestie dans ses propos et de nous dire en quoi cela la brimerait que les Québécois aient 25 p. 100 de la représentation ici, en Chambre des communes, puisqu'ils ont déjà eu, au départ, 50 p. 100 ou presque, lors de la Confédération.

Je vais citer au député de Glengarry-Prescott-Russell ce passage de Confucius qui dit: «Il n'appartient pas à la poule de régenter la basse-cour.»

Mme Catterall: Monsieur le Président, il serait facile de jouer avec le mot souverainiste et de prétendre qu'on peut avoir l'appui de la majorité de la population du Québec.

(1710)

Mais, il est clair après les déclaration d'hier qu'il n'y aura pas de référendum avant l'automne, que les séparatistes ont peur


11634

d'une décision des peuples du Québec. C'est très clair qu'ils veulent avoir une interprétation souverainiste qui plaira aux gens du Québec.

Mais la vérité est qu'ils évitent toujours la vraie question: la séparation. Ils veulent toujours éviter la vraie définition de leur but qui est la séparation et le fait qu'ils sont des séparatistes. C'est une question très claire. Je ne peux pas comprendre la difficulté à poser la question tout de suite.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je suis content d'avoir un si vaste auditoire en face de moi et d'entendre les députés du Bloc qui sont tous enthousiasmés et prêts à écouter le discours qui les influencera à voter en faveur du projet de loi C-69. Je les vois tous devant moi.

Laissez-moi débuter par le député qui vient de nous parler de l'histoire de la Confédération canadienne et de la représentation à la Chambre des communes en 1867. On n'a pas besoin d'être un très grand historien pour savoir qu'en 1867. . . Au début, il a parlé de la Confédération, et le député qui connaît son histoire, sait très bien qu'il ne faut pas confondre l'Acte d'Union de 1840 avec l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

Toujours est-il qu'en 1867, lors de la Confédération, il y avait en fait trois participants. Il y avait, bien sûr, 24 sièges réservés à ce qui était jadis le Haut-Canada, 24 au Bas-Canada et 24 aux trois provinces des Maritimes: dix pour le Nouveau-Brunswick, dix pour la Nouvelle-Écosse et quatre pour l'Île-du-Prince-Édouard.

Bien sûr, l'Île-du-Prince-Édouard a choisi à ce moment-là de ne pas se joindre à la Confédération, elle ne l'a fait que quelques années plus tard. Donc, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse avaient chacun 12 sièges; 12 et 12 font 24, n'est-ce pas? Vingt-quatre au Québec et 24 en Ontario. Pour un député de prétendre que le Québec avait 50 p. 100 des sièges en 1867, c'est l'inverse de la vérité, comme l'avait si bien dit sir Winston Churchill et ses parlementaires.

Voilà la vérité. Et le député d'en face, avec tout le respect que je lui dois, ne sait pas de quoi il parle, 24 de 72. Notre ami le député qui veut quitter la pièce, pour des besoins très urgents, sans doute, sait mieux que ça.

M. Tremblay (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je trouve qu'il y a un peu de laxisme dans la formule négative utilisée pour éviter d'utiliser des mots non parlementaires. Il y a beaucoup de laxisme dans le contenu du discours du député. J'espère qu'il n'y en aura pas autant dans le contenu du vocabulaire.

Le vice-président: J'ai aussi entendu un mot qui me semble être près d'un mot non parlementaire. Je demande à tous les députés de respecter les règles.

M. Boudria: Monsieur le Président, je continue, après cette interruption causée par un certain député du Bloc. Un autre député du Bloc, aujourd'hui, dans un discours, alléguait, et ce n'était toujours pas la réalité-pour ne pas utiliser un autre terme-que c'était la faute de certains fédéralistes à Ottawa, et uniquement de leur faute disait-il, si la Loi sur les mesures de guerre avait été invoquée lors de la crise d'octobre.

(1715)

J'ai quelques extraits d'une lettre que j'aimerais lire pour relater certains faits: «Dans ces circonstances, au nom du gouvernement du Québec, je vous demande de nous donner des pouvoirs d'urgence aussitôt que possible pour que nous puissions prendre des mesures plus efficaces. Je demande en particulier que ces pouvoirs nous autorisent à arrêter et à détenir des personnes dont le procureur général du Québec a des raisons valables de croire qu'elles veulent renverser le gouvernement en recourant à la violence, des moyens illégaux. . .», ainsi de suite.

Je lis plus loin: «Le chef de police de Montréal nous a informés que les moyens dont il dispose se révèlent insuffisants et que l'aide de paliers supérieurs de gouvernement est devenue indispensable pour protéger la société.» Etc.

Bien sûr, je lisais une lettre qu'avait fait parvenir le gouvernement du Québec au gouvernement du Canada à la demande du chef de police de Montréal, à l'époque. Je ne suis ici ni pour faire l'éloge ni pour faire le procès de la Loi sur les mesures de guerre mais pour dire aux députés d'en face, lorsqu'ils parlent de la Loi sur les mesures de guerre, qu'ils disent donc tous la vraie histoire et qu'ils n'oublient donc pas la moitié de la vérité, comme ils le font si souvent.

On a entendu un peu plus tôt aujourd'hui, certains parlementaires d'en face dire, qu'ils refusent d'adopter ce projet de loi alors que leur parti était unanime en comité parlementaire à l'appuyer-on s'en souviendra-et qu'ils ont changé d'avis à mi-chemin. Ils ont changé d'avis parce qu'un d'entre eux a cru bon de proposer cette motion pour garantir 25 p. 100 des sièges au Canada, au Québec. Ce sont ces mêmes députés d'en face qui rouspètent, comme le fait un des leurs au moment où je parle, qui oublie sans doute que lui et ses amis lors de l'Accord de Charlottetown qui proposait quelque chose de semblable, et qui ont voté contre.

M. Leroux (Richmond-Wolfe): Cela a été rejeté partout!

M. Boudria: Non cela n'a pas été rejeté partout, je regrette, le député d'en face, mais, par exemple, au Canada français hors Québec, dans ma circonscription, 70 p. 100 des gens avaient voté pour l'accord. Le député d'en face qui prétend que cela a été rejeté partout, ce n'est pas vrai. Bien sûr, l'accord n'a pas été adopté. Mais quand j'entends les députés du Parti réformiste nous dire aujourd'hui qu'ils veulent un Sénat élu et qu'ils l'ont refusé dans l'Accord de Charlottetown, quand j'entends les députés du Bloc nous dire qu'ils veulent avoir 25 p. 100 des sièges et qu'ils l'ont refusé dans l'Accord de Charlottetown, on est en droit de se demander où est la sincérité.

[Traduction]

Certains députés d'en face ont une mémoire sélective. Ils ne se souviennent que de ce qu'ils veulent bien se souvenir.

Pour ma part, je suis en faveur de ce projet de loi. Il n'est pas question de modifier la Constitution. Pas du tout. Le projet de loi ne vise qu'à moderniser nos lois électorales. Faisons-le maintenant, car si nous n'adoptons pas le projet de loi, ces mêmes députés d'en face vont nous accuser de ne pas l'avoir l'adopté et de ne pas avoir révisé à temps les limites des circonscriptions.


11635

Qu'ils sachent que tout doit être prêt en juin, sinon la révision ne pourra être faite. J'ai devant moi l'échéancier pour la révision des limites des circonscriptions. Si le projet de loi n'est pas adopté et sanctionné d'ici le 22 juin, on ne pourra pas faire la révision.

Les députés d'en face devraient avoir honte d'avoir délibérément retardé l'étude de ce projet de loi, qui vise à garantir une meilleure représentation, une représentation plus efficace à tous les Canadiens.

(1720)

[Français]

M. Benoît Tremblay (Rosemont, BQ): Monsieur le président, j'ai entendu tout à l'heure le député de Glengarry-Prescott-Russell lire une lettre relative à la crise d'octobre. Il ne nous l'a pas lue jusqu'au bout et il ne nous a pas indiqué qui l'avait signée. On se souvient que, forcément, elle devait être signée par le premier ministre du Québec de l'époque, Robert Bourassa. C'est avec beaucoup de tristesse que je l'entends rappeler cet événement comme s'il s'agissait d'un événement qui faisait honneur au Canada et au Parlement canadien.

Je pense que tout ce qui est sorti des discussions du Cabinet fédéral sur l'époque démontre très bien que s'il y a une partie noire de l'histoire récente du Canada, c'est bien celle-là. Je peux le rassurer en lui garantissant que maintenant qu'on a à Québec un premier ministre qui a une bonne colonne vertébrale, vous n'aurez pas une lettre comme celle-là dans les mois prochains.

Des voix: Bravo!

M. Boudria: Monsieur le Président, il me fait toujours plaisir d'entendre le député parler de la maison mère et de son chef de bureau à Québec, le chef du gouvernement provincial, dont il dit élogieusement qu'il a du coeur au ventre, du courage et tout le reste.

Je demande à mes collègues de réfléchir aux questions suivantes: Est-ce le même chef provincial qui n'ose pas appeler le référendum parce qu'il sait qu'il va le perdre ou en est-ce un différent? Est-ce le même chef provincial qui retarde le référendum jusqu'à l'automne prochain? Est-ce le même qui a renié sa promesse formelle devant le peuple québécois durant la campagne électorale? Est-ce un autre? Ah, ce doit en être un autre. Il ne peut certainement pas s'agir du même.

Je sais que le député d'en face n'est membre que d'une succursale locale du Parti québécois, en fait une succursale qui se nomme le Bloc, et que la maison mère est loin. Mais je l'inviterais peut-être à faire un appel-conférence avec certains autres représentants de la maison mère. Et lorsqu'il s'informera à la maison mère, il saura ce que nous savons tous, que le Parti québécois n'a pas le courage aujourd'hui de faire le référendum. Il veut attendre en disant que le peuple n'est pas prêt. Traduction: c'est parce qu'il ne veut pas perdre.

[Traduction]

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je suis d'accord sur un certain nombre de points soulevés par le député de Glengarry-Prescott-Russell, mais en désaccord sur d'autres. Il a dit, peut-être par inadvertance, et je voudrais qu'il précise sa pensée à cet égard, que si nous n'adoptons pas ce projet de loi, il n'y aura pas de révision des limites des circonscriptions électorales avant les prochaines élections.

N'est-il pas vrai que l'actuel processus de révision des limites des circonscriptions est suspendu et que si le projet de loi n'est pas adopté nous pourrions simplement reprendre ce processus, qui est presque terminé et pourrait être complété assez rapidement? N'est-ce pas là une solution plus réaliste plutôt que de tout reprendre à zéro à des coûts de quelque 5 ou 6 millions de dollars?

M. Boudria: Monsieur le Président, c'est une question intéressante. Le processus de révision des limites des circonscriptions électorales dont il parle figurait dans un projet de loi que nous avons mis de côté pour avoir celui-ci, qui est meilleur encore, et ne prévoyait pas de révision quinquennale pour augmenter le nombre de sièges en Colombie-Britannique, une province qui, de l'avis de certains de ses collègues, allait être sous-représentée si l'on ne donnait pas suite à un projet de loi comme celui-ci. C'est le même parti qui préconise les deux positions.

Le député vient peut-être de la province d'à-côté, mais il devrait discuter de cette question avec ses amis de la Colombie-Britannique avant de dire qu'il veut revenir au projet de loi que l'on a mis de côté au lieu de s'occuper de celui dont nous sommes saisis, le projet de loi C-69. Le projet de loi C-69 est bien meilleur, car il prévoit des révisions de limites plus égales et plus rapides, qui sont plus justes pour tous les Canadiens. Je suis sûr qu'il le sait, mais si jamais il ne le sait pas, les habitants de la Colombie-Britannique. . .

Le vice-président: Nous reprenons le débat, avec la députée de Mercier.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, je veux dire en commençant que nous venons d'assister à un excellent exemple du mépris à l'endroit du peuple québécois, qui s'appelle comme cela maintenant après avoir longtemps été la nation canadienne-française.

(1725)

Si dans cette Chambre et dans celle qui l'a précédée, les autres avaient pu être respectueux du peuple québécois, l'histoire du Canada et l'histoire du Québec auraient été différentes, et c'est ce dont je veux parler parce que malgré tout, nous aurons à vivre ensemble de toute manière comme voisins.

Je veux rappeler que Daniel Johnson, père, dont le père irlandais immigrant ne parlait pas français, a relancé son parti, en 1965, avec un livre qui s'appelait à l'époque «Égalité ou indépendance», sur le thème duquel il a tenu son congrès et il a fait sa campagne électorale.

Daniel Johnson a écrit les mots suivants: «Nos compatriotes anglo-canadiens parlent d'une nation composée de deux peuples, alors que dans notre concept français du fait canadien, nous disons qu'il existe un peuple composé de deux nations. La confusion entre la définition anglaise et la nôtre vient de ce que l'anglais s'appuie davantage sur le contenu politique du mot tandis que le français cueille le terme au sortir du contenu sociologique. Si l'on part de cette description, il ne fait aucun doute qu'il y ait au Canada deux nations. Il n'y a pas une, mais deux communautés humaines qui se distinguent par la langue, la religion, la culture, les traditions, l'évolution historique et enfin, un vouloir vivre commun. Puisque même dans les

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provinces où elles sont en minorité, elles tendent naturellement à se regrouper sur le plan régional ou local de façon à se donner un milieu favorable à leur épanouissement. Il est à noter que l'élément fondamental de la nation n'est pas la race, disait Daniel Johnson en 1965, mais bien la culture. Peu importe son nom, son origine ethnique, on est de l'une ou l'autre nation suivant que par son enracinement, sa formation, son choix, son style de vie, son mode de pensée et d'expression, on appartient, on s'identifie à l'une ou l'autre communauté culturelle.» Et il dit: «Je pense, entre autres, à tous les néo-Canadiens qui ont joint volontairement, par goût, par choix, la culture canadienne-française et qui participent à son épanouissement et à son enrichissement.»

Plus loin, il disait: «[. . .] que la nation canadienne-française tend de toutes ses forces, de toutes ses fibres, à se réaliser sur le plan de l'État, et ses aspirations sont strictement normales et légitimes. Je démontrerai, plus loin, pourquoi et comment les Canadiens français cherchent à s'identifier à l'État du Québec, le seul où ils puissent prétendre être maîtres de leur destin et le seul qu'ils puissent utiliser à l'épanouissement complet de leur communauté, tandis que la nation canadienne-anglaise tend, de son côté, à faire d'Ottawa, le centre de sa vie communautaire.»

Si le Canada avait reconnu la nation canadienne-française, nous ne serions pas aujourd'hui où nous sommes. Et où nous sommes, c'est que face au refus de l'égalité, la nation canadienne-française est devenue la nation québécoise et cherche sa souveraineté, comme Daniel Johnson ici l'explique.

J'ai bien peu de temps, monsieur le Président, donc je continuerai. Mais dans ce vote sur la position du Bloc québécois, le Canada, les libéraux auraient pu montrer qu'ils avaient un respect minimal pour ce peuple, cette nation avec laquelle de toute manière, comme voisins ou autrement, ils auront à composer.

Des voix: Bravo!

Le président suppléant (M. Kilger): L'honorable députée de Mercier disposera de quinze minutes la prochaine fois.

Comme il est 17 h 30, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


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INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

M. Ted White (North Vancouver, Réf.) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait mettre fin immédiatement aux programmes d'équité en matière d'emploi et à l'inclusion d'exigences relatives à l'équité en matière d'emploi sur les formulaires de formation, parce que ces exigences incitent à choisir des candidats en fonction de leur sexe ou de leur origine ethnique plutôt qu'en fonction de leur mérite et, par conséquent, suscitent du ressentiment parmi les candidats.
-Monsieur le Président, on a jugé que la motion ne pouvait pas faire l'objet d'un vote, mais, étant donné l'importance du sujet dont traite cette motion, je demande à la Chambre de déclarer qu'elle peut faire l'objet d'un vote.

Le président suppléant: Y a-t-il consentement unanime de la Chambre?

Des voix: Non.

Le président suppléant: La motion est rejetée, mais le député a la parole.

M. White (North Vancouver): Monsieur le Président, je constate que les députés ministériels ne veulent pas voter sur cette question.

M. Boudria: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le député d'en face prête des intentions aux députés ministériels, lorsqu'il affirme qu'un comité de la Chambre a décidé que sa motion ne pouvait pas faire l'objet d'un vote. Le Règlement est clair et les députés d'en face connaissent bien cette règle. Aussi, je crois qu'il y a matière à rappel au Règlement.

En fait, un comité de la Chambre a refusé cette motion à l'unanimité et il est, par conséquent, inexact d'affirmer que c'est le gouvernement qui l'a refusée.

Le vice-président: En toute déférence, je ne crois pas que le rappel au Règlement soit justifié.

M. White (North Vancouver): Monsieur le Président, au cours de la prochaine heure, la Chambre aura l'occasion de débattre ce que certains députés considéreront comme une motion politiquement incorrecte.

J'ai décidé d'élaborer cette motion après que des électeurs se sont plaints de ce que leur candidature à des programmes de formation ou de création d'emplois financés par les contribuables ait peut-être été écartée pour la simple raison qu'ils ne cadraient pas avec le profil d'un membre d'un groupe désigné sur le formulaire.

Fait consternant, le gouvernement d'un pays démocratique a une politique qui tolère que la sélection des travailleurs ou des étudiants-stagiaires se fasse en fonction de leur sexe ou de leur origine ethnique. Le gouvernement se rend ainsi coupable de sexisme et de racisme et cette politique est particulièrement mauvaise, faute de toute preuve statistique quant à la prétendue nécessité des programmes d'équité en matière d'emploi.

Ainsi, selon Statistique Canada, le taux de chômage chez les jeunes gens se situe entre 20 et 23 p. 100 et chez les jeunes filles, entre 14 et 15 p. 100. Certes, ces deux chiffres sont beaucoup trop élevés, mais il est évident que les jeunes gens constituent le groupe défavorisé. Le taux de chômage qui les frappe est immanquablement deux fois supérieur à la moyenne nationale et il contribue probablement à l'augmentation du taux de suicide chez les jeunes gens et à la montée de la criminalité chez les jeunes.

Voici certaines données intéressantes tirées d'un rapport de recherche de M. John T. Samuel, de l'Université Carleton, qui cite des statistiques du recensement de 1986 montrant que 72,1 p. 100 des membres des minorités visibles âgés de plus de 15 ans sont sur le marché du travail, alors que ce n'est le cas que de 65,5 p. 100 de la population générale dans ces tranches d'âge. D'après les données du même recensement, le revenu personnel moyen est de 17 500 $ pour la population générale et de près de 1 500 $ de plus pour les minorités visibles. Le groupe REAL Women confirme ces chiffres dans son enquête sur la représentation des minorités visibles et des femmes dans la population active du Canada.

Des gens bien intentionnés se battent contre des fantômes, car rien ne prouve que les programmes d'équité en matière d'emploi soient nécessaires. Je ne veux pas dire que les employeurs sont


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tous des saints. Mais lorsque des employés n'ont pas été traités équitablement, la meilleure façon d'examiner leur cas est de le porter devant les tribunaux pour qu'ils punissent les employeurs en conséquence.

Malheureusement, les dispositions qu'applique le gouvernement partent du principe que tous les employeurs sont coupables, même si l'économiste Gary Becker, lauréat du prix Nobel de 1993, fait remarquer que la discrimination impose à l'entreprise des coûts à la fois internes et externes. Autrement dit, des décisions discriminatoires en matière d'emploi coûtent de l'argent aux entreprises. Si elles ne choisissent pas le meilleur candidat pour l'emploi, leur décision se traduit directement par une baisse de la productivité et des recettes. Comme l'objectif primordial d'une entreprise est de faire de l'argent, la discrimination ne durera pas longtemps et les lois du marché se chargeront de contrôler la discrimination. Cette théorie est corroborée par les statistiques que j'ai déjà présentées et celles qui suivront dans le reste de ce discours.

(1735)

Pour ce qui est de l'appui du public à l'équité en matière d'emploi, un sondage Gallup réalisé en décembre 1993 a montré que 74 p. 100 des Canadiens s'opposent à des programmes de ce genre. Ce pourcentage élevé ne m'étonne pas car, à ce jour, je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui voulait obtenir un emploi ou être promu en raison de son sexe ou de sa race, plutôt que de ses aptitudes ou de son mérite.

Hélas, comme d'habitude, le gouvernement n'est pas le moindrement intéressé par ce que pensent la majorité des Canadiens, et il est bien déterminé à s'en tenir à un programme de sociologie appliquée qui aura malheureusement l'effet contraire à celui qu'il souhaite.

J'entretiens régulièrement une correspondance avec une jeune dame de Vancouver qui s'appelle Kim Oliver. Kim a un handicap appelé syndrome de l'X fragile. Malgré ce handicap, Kim a un vif sens de l'humour, beaucoup d'ambition et un grand flair artistique. Elle a indiqué dans ses lettres qu'elle désire exactement la même chose que tous les autres jeunes. Elle veut pouvoir subvenir à ses besoins en mettant ses compétences à profit sur le marché du travail.

Je voudrais vous lire une des lettres de Kim. Voici ce qu'elle dit:

Les membres de la United Farm Women des années 20 et 30 étaient des femmes de l'Ouest qui luttaient aux côtés de leur mari contre les dures conditions de vie de l'époque sur les exploitations agricoles. Elles exerçaient des pressions pour obtenir le droit de vote, la mise en oeuvre de programmes sociaux universels et l'établissement de pensions pour les veuves et les orphelins. Elles ont également aidé leur mari à former des syndicats et des coopératives. Je m'identifie à ces femmes, car, contrairement aux féministes d'aujourd'hui, elles ont pris les choses en main, en utilisant des presses pour diffuser un journal pour les femmes, en se rendant à la Convention de Genève dans les années 40 et, surtout, en obtenant des hommes le droit de vote. Contrairement au Comité canadien d'action sur le statut de la femme, au Comité sur la situation de la femme de Vancouver et à d'autres groupes d'intérêts, la UFW ne pouvait compter ni sur les médias ni sur les millions de crédits gouvernementaux. Ainsi, pourquoi continuer de financer des groupes ethniques ou des associations féminines? Ces groupes se contentent de dire aux femmes, surtout les femmes pauvres, membres des minorités visibles ou handicapées, que nous sommes victimes de racisme, de sexisme, de l'impérialisme de l'homme blanc et que nous ne recevrons jamais un salaire égal, qu'on ne nous entendra jamais autant et que nous ne serons jamais aussi bien instruites, à cause des hommes et de leurs symboles culturels. C'est vraiment triste, n'est-ce pas?
Kim s'identifie aux gens qui ont dû travailler fort pour obtenir ce qu'ils ont. Elle précise clairement aussi qu'elle ne veut pas que les groupes d'intérêts la considèrent comme une victime.

Kim ajoute qu'elle s'est aperçue que les réformistes la traitaient comme une concitoyenne, au lieu de la considérer comme une handicapée ou une personne défavorisée.

Je souhaiterais pouvoir montrer certains des dessins de Kim pour que la Chambre se rende compte de son sens artistique, mais, malheureusement, nous ne pouvons le faire à la Chambre, et je demande donc à mes collègues de me croire, lorsque je leur dis qu'ils sont très bons. Je crois que Kim finira par trouver sur le marché du travail une place qui lui permettra d'utiliser ses dons artistiques. Je sais qu'elle veut parvenir à cela non pas grâce à l'équité en matière d'emploi, mais bien grâce à ses efforts acharnés.

Il ne faut pas en déduire que les handicapés n'ont pas besoin d'aide pour acquérir des compétences ni que le gouvernement ne devrait pas favoriser leur accession au marché du travail. Cependant, nous ne devrions pas insulter leur intelligence et leurs compétences en leur donnant la priorité en matière d'emploi. Comme tout le monde, ces gens veulent avoir la chance de prouver leur valeur dans le cadre d'entrevues d'emploi franches et objectives.

Il est évident qu'il y a moins de débouchés sur le marché du travail pour quelqu'un qui souffre du syndrome de l'X fragile et c'est là où nous tous, en tant que Canadiens compatissants, pouvons apporter notre aide. Nous devons être conscients des problèmes et faire tout ce que nous pouvons pour soutenir ces gens. Pour Kim, je voudrais que d'autres députés ou peut-être des gens qui ont suivi ce débat me donnent des exemples de gens souffrant de ce syndrome qui ont quand même très bien réussi leur vie au Canada. Quelle sorte d'emplois ont-ils fini par occuper? Comment s'en sont-ils sortis? J'espère que ces gens vont m'écrire pour que je puisse faire part de leur réussite à Kim en vue de l'encourager davantage pour l'avenir.

(1740)

Pour terminer, j'aimerais lire un autre passage de la lettre qu'elle m'a écrite en septembre dernier:

Nous avons un ministère responsable de l'égalité des femmes, plus de multiples groupes féministes financés par le gouvernement. Les minorités visibles et les autochtones font l'objet d'une attention aussi grande de la part du gouvernement.
Pourquoi le ministre des sciences sociales et des ressources humaines classe-t-il encore les minorités et les autochtones parmi les groupes défavorisés?
Elle dit aussi:

Pourquoi les ministères chargés des services sociaux et des ressources humaines n'ont-ils pas un secteur responsable des personnes handicapées? S'ils veulent absolument nous placer dans des familles d'accueil, les gouvernements fédéral et provinciaux ne pourraient-ils pas au moins reconnaître nos besoins spéciaux?
Je sais que Kim n'est pas seule à penser ainsi. Elle représente un groupe très important de personnes handicapées qui réfléchissent et qui estiment que le gouvernement ne tient pas compte de leurs besoins.

Dans leurs efforts bien intentionnés en vue de promouvoir l'égalité des chances, que nous appuyons tous, le gouvernement est en fait en train d'encourager le racisme législatif et de dresser des groupes identifiables les uns contre les autres.

En voulant faire de la sociologie appliquée, il sème sans le vouloir les graines du conflit raciste en obligeant les employeurs à insister sur les différences de race et de sexe au lieu d'insister sur les compétences et les aptitudes qui devraient être les critères de base de recrutement.


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J'ai ici une lettre et un questionnaire adressés par le chef d'état-major de la défense à toutes les forces régulières et à tous les membres de la première réserve, dans le but de déterminer la représentation des autochtones et des minorités visibles au sein des Forces canadiennes.

N'est-ce pas raciste d'effectuer un sondage spécialement conçu pour identifier les personnes en fonction de leur race? Est-ce vraiment approprié pour un gouvernement d'avoir une base de données identifiant ses employés selon leurs origines raciales?

Les répondants doivent s'identifier comme étant Noirs, Chinois, Philippins, Japonais, Coréens, Asiatiques du Sud, Indiens d'Asie, Asiatiques du Sud-Est, Latino-Américains non-blancs, Asiatiques de l'Ouest non-blancs, Inuit, Métis, membres d'une première nation, métissés ou personnes de couleur.

Quiconque, outre notre gouvernement libéral, aurait fait un tel sondage aurait été traité de raciste et accusé de chercher à servir des fins de persécution raciale. Il en ressort que, statistiquement, les jeunes hommes de race blanche sont ceux qui forment le groupe désavantagé.

Si l'on regarde la composition de plusieurs importantes équipes de travail oeuvrant dans le domaine de l'équité en matière d'emploi, on trouve des situations assez troublantes. En 1994, le bureau de l'équité en matière d'emploi du gouvernement de l'Ontario avait un effectif composé à 90,5 p. 100 de femmes, à 52,9 p. 100 de minorités ethniques et à 5,6 p. 100 d'autochtones. On n'y trouvait aucun homme blanc non handicapé.

L'effectif de la Commission ontarienne des droits de la personne est composé à 67 p. 100 de femmes et à 38 p. 100 de minorités, même si ces minorités ne représentent que 9 p. 100 de l'ensemble de la population. Il n'y a aucun homme blanc parmi les cadres supérieurs ni au sein de la direction des politiques de cette commission.

Dans un article paru le 26 août 1994 dans le Toronto Sun, Mme Christie Blatchford déclarait: «Il est assez évident que si la commission est un avant-goût de l'avenir de l'Ontario en vertu des règles d'équité en matière d'emploi, l'avenir appartient aux femmes et aux gens de couleur.»

La Employment Excellence Organization demande si la seule différence entre le programme raciste du groupe Heritage Front et celui de la Commission ontarienne des droits de la personne ne serait pas que ce dernier est financé par les contribuables. C'est une déclaration assez extrémiste, mais c'est le genre de chose que ces dispositions sur l'équité en matière d'emploi nous amènent à penser.

Le gouvernement ne veut pas entendre ces vérités, parce que son argument est entièrement fondé sur les sentiments plutôt que sur les faits. Le fait est qu'on ne peut pas régler le problème de la discrimination en imposant un autre genre de discrimination.

L'économiste d'origine sri-lankaise qui, en 1992, a signé un rapport du Conseil économique, M. Arnold deSilva, n'a trouvé aucune corrélation entre le niveau du salaire et l'origine des gens. Il a aussi conclu qu'en général, les immigrants n'étaient victimes d'aucune discrimination notable, et qu'il n'y avait pas de discrimination systématique pour des raisons de couleur, dans le monde du travail.

Une autre étude, réalisée en 1992 par M. Daniel Boothby pour le gouvernement du Canada, portait sur un échantillon de 115 000 personnes. Intitulé Job Changes, Wage Changes and Employment Equity Groups, le rapport concluait que «le statut de minorité visible n'a pas d'effet significatif sur la probabilité de perte d'emploi et, toutes choses égales par ailleurs, les femmes risquent moins de perdre leur emploi que les hommes».

(1745)

En 1992, Statistique Canada a signalé que 56 p. 100 de tous les diplômes de premier cycle décernés par nos universités l'ont été à des femmes. En 1990, elles ont obtenu 45 p. 100 des diplômes dans des domaines qui étaient traditionnellement réservés aux hommes, soit le commerce et la gestion des affaires. La proportion des diplômes qu'elles ont reçus s'élevait à 47 p. 100 en droit, 46 p. 100 en médecine et 63 p. 100 en médecine vétérinaire. Selon Fazil Mihlar, analyste principale en matière de politiques au Fraser Institute, les cas de discrimination au travail sont rarement prouvés et ce sont des cas isolés.

Dans ma circonscription de North Vancouver, je n'ai pu confirmer le moindre cas de discrimination, même si chaque fois que je reçois une lettre ou un appel téléphonique me demandant d'appuyer l'équité en matière d'emploi, je demande qu'on me fournisse un exemple précis de discrimination dans North Vancouver, pour que j'en fasse état publiquement.

Je défie tous les députés de faire la même chose, avant d'appuyer les programmes d'équité en matière d'emploi et l'inclusion d'exigences qui s'y rapportent sur les formulaires de formation dans la fonction publique.

Bell Canada est assujettie à la Loi fédérale sur l'équité en matière d'emploi de 1986. En 1989, cette société employait 61 femmes de plus que d'hommes. Les chiffres étaient donc assez bien équilibrés. À peine deux ans plus tard, il y avait 2 058 femmes de plus que d'hommes, le nombre de ces derniers ayant chuté de presque 2 000. Personne ne peut soutenir que les femmes ne sont pas représentées comme il faut chez Bell Canada, mais la tendance qui se manifeste dans l'emploi des hommes devrait réellement inquiéter ceux qui croient à l'équité forcée en matière d'emploi. Ils seraient mieux d'insister pour que Bell Canada inscrive sur ses formules d'emploi une catégorie spécialement réservée à un groupe sous-représenté, celui des hommes.

En parlant de pertes d'emplois, je mentionne que des électeurs m'ont demandé s'il y aurait des exercices d'action positive en vue des congédiements qui doivent avoir lieu dans le cadre de la rationalisation de la fonction publique qui a été annoncée dans le budget. On se demande si ces exercices fausseront la base des effectifs de la fonction publique en forçant l'application de quotas relatifs à l'équité, qui ne reconnaissent ni le niveau de compétence des individus ni le coût qui en résultera pour le contribuable.

J'ai déjà reçu des plaintes de la part d'électeurs qui soutiennent que des fonctionnaires fédéraux, qui dispensent des services à des comptoirs ou au téléphone, parlent à peine l'anglais et arrivent difficilement à se faire comprendre. Ce message ne plaira pas à certains de nos vis-à-vis, mais je suis tenu de transmettre les préoccupations de mes électeurs.

Aux États-Unis, le gouvernement fédéral envisage l'adoption d'une mesure législative qui mettra un terme à l'action positive et, en Californie, une initiative a été lancée visant à inscrire la


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question de l'action positive sur le bulletin aux prochaines élections.

Selon les sondages, l'action positive perd du terrain auprès des Américains qui favorisent un marché équitable et ouvert. À la chaîne CNN, quelqu'un a comparé le programme à la guerre du Vietnam, en disant qu'au début, l'idée semblait bonne, mais qu'elle s'était transformée en cauchemar.

Malheureusement, le gouvernement canadien souffre de nostalgie et essaie de raviver un programme qui est périmé depuis 20 ans; il fait preuve de bonne volonté et de compassion, mais en même temps, il manque vraiment de logique. Pour comble, il est injuste à l'endroit de gens compétents qui ont le malheur de ne pas faire partie d'une minorité visible.

Je me demande combien de députés libéraux seraient prêts aujourd'hui, tout de suite, à céder leur place à un membre d'une minorité visible. Je ne vois aucun volontaire, sûrement parce que chaque député est convaincu d'avoir mérité son siège à la Chambre. Pourquoi le céderait-il à quelqu'un qui ne s'est pas fait élire? Or, la situation est exactement la même sur le marché du travail.

Partout au Canada, les gens s'opposent aux programmes d'équité en matière d'emploi. Tous les ministériels devraient reconnaître que ces programmes sont injustes et discriminatoires ou admettre au moins qu'ils ne voudraient pas qu'on applique ces programmes à leurs sièges. Ils devraient aussi décider de mettre un terme à la discrimination en refusant, comme je le fais, d'approuver les subventions ou les programmes de création d'emplois qui font de l'équité en matière d'emploi une condition de l'existence du projet.

Enfin, ils devraient faire preuve de courage, en représentant véritablement les Canadiens à la Chambre et en rejetant à l'avenir tout projet de loi sur l'équité en matière d'emploi.

(1750)

Mme Jean Augustine (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de pouvoir participer au débat sur la motion. Je tiens à dire clairement ceci à l'intention des Canadiens: je suis convaincue que ceux qui regardent les débats à la télévision et ceux qui en liront le compte rendu dans le hansard seront attristés d'avoir vu le député prendre la parole à la Chambre pour demander au gouvernement de mettre fin immédiatement aux programmes d'équité dans l'emploi et à l'inclusion d'exigences relatives à l'équité en matière d'emploi sur les formulaires de formation parce que ces exigences incitent à choisir des candidats, et le reste, et le reste.

Quel triste jour c'est d'avoir à prendre la parole pour démentir certaines idées fausses comme celles que nous venons d'entendre. La situation, telle qu'elle est vécue tous les jours, est toute différente. On sait que les pratiques d'embauchage reposent très peu sur les capacités, mais beaucoup sur des attitudes discriminatoires envers les femmes, les minorités visibles, les autochtones et les personnes handicapées.

Je crois sincèrement que, dans la motion du député, l'accent n'a pas été mis au bon endroit. Plutôt que de demander pourquoi nous avons besoin de programmes d'équité, nous devrions nous demander pourquoi les minorités visibles, les femmes, les autochtones et les personnes handicapées connaissent des taux de chômage plus élevés, parfois plus du double de la moyenne nationale, même lorsqu'ils ont clairement prouvé qu'ils étaient qualifiés pour les emplois. C'est cela la vraie question.

Des documents et des travaux de recherche nous disent que ces personnes sont souvent plus instruites et mieux formées que la moyenne de la population. En plus de leurs diplômes universitaires plus avancés, elles possèdent souvent des connaissances spécialisées ou des qualités personnelles qui en font des candidats idéaux pour les postes.

Considérons la question d'un point de vue strictement pragmatique, celui des affaires. Les membres des minorités visibles, par exemple, peuvent être des immigrants qui apportent avec eux des connaissances de première main sur les marchés étrangers, ce qui peut être extrêmement précieux pour les exportateurs canadiens.

Quelques cas d'entreprises ont été cités et nous avons entendu des statistiques trompeuses. Les femmes, qui représentent plus de la moitié de la population, connaissent mieux que quiconque les besoins des consommateurs canadiens, ceux de leur famille et les leurs. Les autochtones ont un trésor d'expérience dans l'approche traditionnelle d'une multitude de disciplines, depuis les sciences de la terre jusqu'aux soins de santé holistiques en passant par le règlement des différends. Avec des études poussées, ils sont en bonne position pour concilier les traditions avec ce que l'économie contemporaine peut offrir de mieux.

Qui, mieux que les handicapés, peut expliquer les besoins particuliers des handicapés physiques ou mentaux, ce qui sera l'un des marchés en croissance au siècle prochain.

Le député d'en face a parlé d'une étude de cas. Dans ses diatribes, il a mélangé une foule de choses, des pommes, des oranges et des mythes. Trop d'employeurs continuent de dresser des obstacles devant ces personnes compétentes et prêtes à travailler.

Nous pouvons consulter les statistiques du commissaire aux droits de la personne, Max Yalden. Il a exprimé publiquement l'inquiétude que lui inspire l'attitude de plus en plus mesquine qui semble régner au Canada. Il a tiré la sonnette d'alarme, craignant des réactions négatives contre les groupes les plus vulnérables de la société de la part de critiques qui leur reprochent d'être avantagés en milieu de travail et à l'embauche. Les statistiques montrent clairement qu'il n'en est rien.

M. Yalden a signalé que, alors que les hommes blancs représentent seulement 45 p. 100 de la population active, ils accaparent 55 p. 100 des postes offerts. Les hommes occupent près de 95 p. 100 des postes dans les conseils d'administration et plus de 90 p. 100 des cadres supérieurs sont des hommes. De plus, ils gagnent en moyenne 20 p. 100 de plus que les femmes. Il a été fait état dans les médias d'une étude récente.

Une étude que Statistique Canada a faite récemment conclut que la discrimination systémique explique en grande partie l'écart salarial. Beaucoup de femmes estiment avoir de la chance de se faire engager. La part des femmes dans l'embauche a diminué de 1988 à 1992, et il n'y a eu depuis qu'une légère amélioration.


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(1755)

Souvent, les femmes font partie de plus d'un groupe désigné; elles sont parfois doublement ou triplement désavantagées. Imaginez les difficultés supplémentaires que doivent surmonter les candidates qui sont autochtones, membres d'une minorité visible ou handicapées. Les personnes qui font partie de ces groupes sont particulièrement victimes de préjugés au chapitre de l'emploi.

Les préjugés sont le seul facteur semblant expliquer le fait que, parmi les diplômés universitaires qui appartiennent à une minorité visible, qui sont autochtones et qui sont handicapés, le taux de chômage est beaucoup plus élevé que chez les personnes de race blanche et de sexe masculin ayant le même niveau de scolarité. En fait, il peut être deux fois plus élevé.

Les rapports présentés par les employeurs, en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, révèlent certaines tendances inquiétantes quant au taux d'embauche des personnes faisant partie des groupes désignés. Les mêmes rapports montrent que la situation des personnes handicapées est encore pire. Je pourrais donner bien d'autres exemples, mais je demande aux députés si, à leur avis, ces chiffres donnent à penser que les membres des groupes désignés bénéficient d'un traitement préférentiel. La réponse est évidente.

Le député a dit que, dans sa circonscription, il ne pouvait trouver une seule personne qui soit victime d'iniquité. Je tiens à lui rappeler que la Loi sur l'équité en matière d'emploi vise à faire en sorte que les décisions que prend un employeur, au chapitre de l'embauche et des promotions, soient fondées uniquement sur les exigences véritables d'un emploi et non pas sur d'autres critères connexes.

La Loi sur l'équité en matière d'emploi garantit que seules les personnes compétentes verront leur candidature examinée, mais elle oblige surtout les employeurs à supprimer les obstacles à l'emploi auxquels se heurtent des candidats compétents qui font partie des groupes désignés, de sorte que nous puissions faire changer ces statistiques de chômage inacceptables, ce qui ne serait que justice.

Le commissaire responsable des droits de la personne au Canada, M. Yalden, a raison de s'inquiéter. L'idéologie rétrograde qui a inspiré cette motion ne nous aidera certainement pas à atteindre notre objectif, celui de préparer le Canada à relever le défi économique mondial du XXIe siècle.

Cette idéologie ne tient pas compte du fait que le Canada sera bientôt aux prises avec une grave pénurie de main-d'oeuvre spécialisée et qu'il lui faudra mettre à contribution tous les Canadiens compétents. Elle ne tient pas compte du fait que les deux tiers des nouveaux venus sur le marché du travail feront partie des groupes désignés d'ici l'an 2000 et qu'un grand pourcentage d'entre eux seront plus que qualifiés pour relever le défi. Elle ne tient pas compte de l'importance de mettre à profit la diversité des êtres dans une économie de plus en plus spécialisée, interreliée et internationale.

Heureusement que cette motion ne peut faire l'objet d'un vote, car elle aurait été rejetée par les députés de ce côté-ci de la Chambre. Si elle avait fait l'objet d'un vote-mais, Dieu merci, il n'en est rien-cette motion aurait pu avoir pour effet que l'on ferme les yeux sur le racisme, le sexisme et les autres formes de discrimination qui, nous le savons tous, existent sur le marché du travail. Elle aurait pu nous amener à fermer les yeux sur les préjugés et aurait même pu encourager des actes flagrants de harcèlement physique ou sexuel à l'endroit des personnes les plus vulnérables.

Contrairement à ce que le député voudrait nous faire croire, la Loi sur l'équité en matière d'emploi n'a rien à voir avec de simples calculs. Elle concerne plutôt l'établissement de règles et de règlements irritants qui empêchent des membres de notre société de contribuer à part entière à l'édification du Canada.

Je demande à tous les députés de soutenir fermement la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je suis déçu et inquiet que nous nous retrouvions aujourd'hui comme parlementaires saisis d'une motion qui ne me semble en rien conforme à la réalité et qui me semble, en tout respect pour son auteur, fondée sur une incompréhension totale de ce qu'est la Loi sur l'équité en matière d'emploi.

Je voudrais relever que notre collègue semble associer l'existence de la Loi sur l'équité en matière d'emploi avec une tendance de la part d'un certain nombre d'employeurs à engager des personnes incompétentes. C'est justement le type de rapprochement qui colporte des préjugés qui sont totalement aberrants.

Avant d'aller plus au fond des choses, je voudrais rappeler à ceux qui nous écoutent et à nos collègues de cette Chambre, que la Loi sur l'équité en matière d'emploi qui existe depuis 1986, a comme seul et unique objectif de s'assurer que les effectifs que l'on retrouve en milieu de travail soient de plus en plus représentatifs de ce qu'est la société québécoise et canadienne.

(1800)

Pour ce faire, on demande aux employeurs, dans les pratiques d'embauche à l'égard de quatre groupes particuliers qu'on appelle des groupes désignés que sont les femmes, les personnes autochtones, les minorités visibles et les personnes handicapées, de tenir compte du fait que, face au marché du travail, on ne part pas en toute égalité. Il y a des gens qui vivent des situations de discrimination, donc qui ont de la difficulté à se tailler la place qui leur revient de droit sur le marché du travail. Nous avons une loi sur l'équité en matière d'emploi comme celle qui existe depuis 1990 et que l'on est à revoir, et faire une association entre l'existence de cette loi et la pratique de certains employeurs d'embaucher des personnes incompétentes est quelque chose d'aberrant.

Je voudrais rappeler qu'à l'article 6 de l'ancienne et de la nouvelle Loi sur l'équité en matière d'emploi, on dit clairement:

«. . .l'obligation de mise en oeuvre de l'équité en matière d'emploi n'oblige pas l'employeur
a) à prendre des mesures susceptibles de lui causer un préjudice injustifié,
b) à engager ou promouvoir des personnes non qualifiées.
C'est très explicite à l'intérieur de la loi.


11641

Nous croyons qu'il est important d'avoir une loi comme celle sur l'équité en matière d'emploi, parce que nous savons très bien que le marché du travail, laissé à lui-même, n'est pas susceptible de provoquer cette égalité entre les groupes. Je donnerai pour preuve notre collègue de Vancouver-Nord qui a commencé son discours en disant: «La Loi sur l'équité en matière d'emploi n'est plus nécessaire.» Regardons ce qu'en disent les groupes qui ont procédé à l'analyse de cette loi, et particulièrement la Commission canadienne des droits de la personne. Il y a quelque chose d'assez particulier à la limite de la malhonnêteté lorsqu'on donne à penser que les Blancs sont victimes de discrimination à rebours. Voilà un préjugé qui doit être détruit, qui doit être combattu dès l'origine.

Je siège au Comité des droits de la personne et depuis le mois de janvier, nous revoyons, nous tentons de bonifier la Loi sur l'équité en matière d'emploi en étant conscients qu'elle a des lacunes. Voyons ce qu'a dit le commissaire Yalden, qui est tout aussi critique devant le gouvernement que c'est permis de l'être. Le commissaire Yalden est venu nous dire, et vous savez que c'est un homme qui connaît très bien l'appareil gouvernemental, puisqu'il y travaille depuis 1956, avant même que je sois né, donc le commissaire Yalden nous disait: «En 1993, les hommes de race blanche, sans incapacité, représentaient à peu près 55 p. 100 de tous les travailleurs nouvellement engagés par voie de postes permanents à temps plein par les employeurs visés par la Loi fédérale sur l'équité en matière d'emploi. Le pourcentage ci-dessus dépasse de manière significative la proportion des personnes de race blanche sur le marché du travail qui n'ont aucune incapacité, puisque cette proportion est inférieure à 45 p. 100.»

Donc, lorsque l'on tente de nous faire croire que les Blancs, sans incapacité, sont l'objet de discrimination, c'est mal connaître la réalité statistique et la réalité effective du marché du travail.

Ce que dit la Loi sur l'équité en matière d'emploi, c'est qu'il y a certaines personnes qui sont désavantagées sur le plan systémique. Ce que cela veut dire, c'est que sans mesure de redressement, sans mesure correctrice, il y a des groupes qui vivent des situations d'inégalité. Quelle forme prend cette inégalité pour les groupes? Elle prend les cinq formes suivantes: ce sont les groupes qui vivent des niveaux de chômage plus élevés que la moyenne canadienne; ce sont les groupes qui ont des niveaux de revenu moins élevés que ceux de la population générale; ce sont les groupes qui vivent une surreprésentation dans les professions qui sont moins rémunérées et qui offrent moins de possibilités d'avancement.

(1805)

C'est particulièrement vrai, comme on va le voir, pour les autochtones et pour les personnes handicapées. Ce sont finalement des groupes qui vivent une sous-représentation dans les professions qui sont bien rémunérées, qui offrent des bonnes perspectives d'emplois et qui sont en croissance. Alors, voilà le canevas général de la discrimination que vivent les catégories désignées qui sont, je le rappelle, les personnes handicapées, les autochtones, les membres des minorités visibles et les femmes.

Regardons si, comme le prétend le député, la discrimination dont ces groupes sont l'objet a pris fin au cours des derniers mois, et regardons pour chacune des catégories. Les femmes forment 52 p. 100 de la population canadienne mais formaient, en 1993-ce n'est pas quelque chose qui n'est pas récent-45 p. 100 de la population active. L'an passé, les femmes recevaient toujours à peu près les deux tiers de la rémunération versée aux hommes. Donc, une femme sur le marché du travail, en 1993, à compétence égale, va être payée, pour le même travail, les deux tiers de ce que touche un homme qui occupe le même travail. Si ce n'est pas de la discrimination, je souhaite que le député de North Vancouver nous dise comment il faut qualifier la chose.

Deuxièmement, les femmes, qui forment on le sait 52 p. 100 de la population canadienne et représentent 45 p. 100 de la population active, se retrouvent dans des emplois qui sont, dans 52 p. 100 des cas, des emplois dits appartenant au tertiaire inférieur, soit des emplois comme commis de bureau, des emplois de secrétariat, des emplois qui sont, évidemment, moins bien rémunérés.

Il faut également se rappeler que les femmes qui font carrière et qui ont un diplôme universitaire-on pourrait citer le cas que 18 p. 100 des femmes de race blanche qui détiennent un diplôme universitaire en commerce, en administration ou en gestion des entreprises-et qui ont été engagées dans les derniers mois ont été affectées à des emplois qui étaient inférieurs à leurs qualifications professionnelles. Alors, dans 18 p. 100 des cas où les femmes ont une formation universitaire, elles sont affectées à des emplois inférieurs à leurs qualifications professionnelles, alors que selon Statistique Canada, c'est le cas de seulement 5 p. 100 des hommes.

Lorsque l'on pense et lorsque l'on nous dit que l'équilibre est atteint sur le marché du travail et que ce n'est plus nécessaire d'avoir une loi comme celle de l'équité en matière d'emploi, je pense que c'est méconnaître la réalité d'un des groupes désignés, qui est la population féminine.

Autre situation, nous avons eu énormément de témoignages devant le Comité sur l'équité en matière d'emploi en ce qui concerne les autochtones. Vous serez surpris d'apprendre que les autochtones représentent-et notre ami du Parti réformiste s'est bien gardé d'en parler-3,8 p. 100 de la population totale. Or, ils n'ont réussi, jusqu'à ce jour, à n'occuper les postes disponibles que de 1,4 p. 100 de la population active. Il faut constater, et ce sont des données récentes, que les autochtones ont non seulement de la difficulté à se tailler une place sur le marché du travail, mais en plus, le taux de chômage des autochtones est littéralement le double de celui qui sévit au niveau de la moyenne nationale.

Vous constaterez également, monsieur le Président, que les autochtones ont un revenu inférieur à 10 000 $. Alors, ma conclusion sera que ce sont des exemples de discrimination qui sont toujours d'actualité, et qu'il est nécessaire pour le Parlement d'avoir une loi comme celle de l'équité en matière d'emploi pour favoriser un plus grand équilibre à l'intérieur de la population active canadienne.

[Traduction]

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole à la Chambre au sujet de la motion no M-372, dans laquelle le député de North Vancouver demande que le gouvernement mette fin aux programmes d'équité en matière d'emploi et à l'inclusion d'exigences relatives à l'équité en matière d'emploi dans les formulaires de formation.


11642

(1810)

Récemment, une réaction s'est produite contre l'équité en matière d'emploi. C'est malheureux parce que le principe sous-jacent à l'équité en matière d'emploi est noble et valable. En effet, ce programme vise à remédier à la discrimination, tant systémique qu'intentionnelle à l'endroit de groupes désignés. Autrement dit, les personnes handicapées, les autochtones, les minorités visibles et les femmes.

Ceux qui critiquent l'équité en matière d'emploi prétendent qu'elle a provoqué une discrimination à rebours contre les hommes blancs. Ils soutiennent qu'elle a entraîné un abaissement des exigences et qu'elle encourage la médiocrité. C'est clairement une évaluation simpliste et injuste de l'équité en matière d'emploi.

Cela ne veut pas dire que les programmes d'équité en matière d'emploi sont parfaits et qu'ils ne sont pas perfectibles. À l'heure actuelle, la politique d'équité en matière d'emploi pourrait être à l'origine d'effets néfastes. Ces craintes doivent faire l'objet d'une étude.

Prenons, par exemple, le profond ressentiment qu'on trouve chez les groupes non désignés, la baisse du moral des employés des groupes non désignés lorsqu'ils estiment, à tort, que les employés des groupes désignés reçoivent un traitement préférentiel au travail ou dans les promotions.

Ces facteurs comptent parmi les quelques problèmes qui doivent être réglés si on veut que le programme d'équité en matière d'emploi soit appliqué d'une manière juste et équitable. Il est très évident que pour remédier à ces réactions il va falloir absolument sensibiliser davantage le public et les employés. En outre, il faudrait mettre en oeuvre des programmes de renforcement pour les personnes handicapées à tous les niveaux scolaires pour qu'elles acquièrent les outils nécessaires afin de devenir plus concurrentielles.

En mettant en oeuvre un programme d'équité en matière d'emploi, nous devons garder à l'esprit que la main-d'oeuvre n'est pas responsable de la discrimination que tente d'éliminer le programme. Si les droits de la main-d'oeuvre sont respectés, on peut éviter les ressentiments causés par la mise en oeuvre de la politique d'équité en matière d'emploi.

Une solution de rechange qui pourrait être utilisée pour rajuster l'équité en matière d'emploi consisterait à instituer un programme qui serait représentatif de la répartition d'employés qualifiés de groupes désignés dans le marché du travail local.

Par exemple, si 5 p. 100 de la population du pays sont des personnes handicapées et seulement 1 p. 100 de la population d'une localité sont des personnes handicapées titulaires de diplômes d'ingénierie, il est bien évident que seulement 1 p. 100 de l'effectif d'une compagnie d'ingénieurs-conseils locale devraient être des ingénieurs handicapés. En effet, ce ne serait pas juste pour les groupes non désignés si 5 p. 100 de l'effectif de la compagnie d'ingénieurs-conseils étaient des personnes handicapées venant d'autres localités, à moins, bien sûr, que les candidats les plus compétents faisaient partie des 5 p. 100 au moment de l'embauche.

Tout compte fait, il faudrait s'assurer que les habitants de la localité ne sont pas désavantagés. Que l'on choisisse toujours les plus compétents et que l'on mette fin aux pratiques d'embauchage discriminatoires.

À quelques petits détails près, il est clair que l'équité en matière d'emploi est avantageuse pour les employeurs et pour les travailleurs canadiens. Des études ont montré que les membres de groupes désignés avaient fait des gains substantiels depuis l'adoption de la Loi fédérale sur l'équité en matière d'emploi. Nous continuerons d'oeuvrer en faveur de la parité la plus complète en matière d'emploi pour ces groupes.

La loi n'a pas pour objet d'assurer un traitement de faveur. Elle vise à accorder l'égalité d'accès à l'emploi à tous les Canadiens déjà compétents, sans égard à leur race, à leurs attributs physiques ou à leur sexe. Il s'agit de lever, et non de dresser, des obstacles à l'emploi.

La loi ne s'est pas faite en une nuit. Elle est le fruit d'une étude exhaustive du marché du travail canadien menée en 1984 par la Commission royale sur l'équité en matière d'emploi, avec le concours de la juge Rosalie Abella. Au cours de cet exercice, la commission s'est penchée sur les programmes d'action positive existant aux États-Unis. Les commissaires canadiens voulaient tirer parti de l'expérience américaine afin d'éviter quelques-uns des problèmes associés à cette loi.

La juge Abella a conclu, avec raison d'ailleurs, que les Canadiens résisteraient à l'approche américaine, étant donné ses politiques gouvernementales trop interventionnistes et l'imposition de quotas. Elle a recommandé que les Canadiens adoptent plutôt un modèle d'équité en matière d'emploi axé sur l'élimination des obstacles de nature discriminatoire.

(1815)

Le programme d'action positive des États-Unis cible des groupes particuliers pour leur réserver un traitement spécial parce la discrimination s'est déjà exercée dans ce pays. Au Canada, par contre, le programme d'équité en matière d'emploi vise à ce que tous les candidats qualifiés pour des emplois disponibles puissent les postuler d'une façon équitable. Le programme d'équité en matière d'emploi qui existe aux États-Unis est censé être supprimé, et avec raison, car c'est un modèle destructif, fondé sur un ancien modèle portant sur la discrimination envers certaines catégories de personnes, un modèle de déségrégation qui a détruit le tissu de la société américaine, qui a détruit une collectivité après l'autre, à cause d'un système de quotas.

Notre approche à l'égalité est beaucoup plus progressiste que le modèle américain. Elle a permis une coopération plus poussée entre les groupes qui recherchent l'égalité d'accès à l'emploi et elle a donné de biens meilleurs résultats.

Par exemple, il est fréquent que des travailleurs, des dirigeants syndicaux et des employeurs s'unissent pour établir un plan d'équité en matière d'emploi, ce qui est tout aussi avantageux pour l'employeur que pour les groupes désignés.


11643

Les organisations qui tirent profit de la riche composition de la société canadienne acquerront une longueur d'avance. Celles qui savent gérer une main-d'oeuvre diversifiée et dynamique sont destinées à être plus concurrentielles sur les marchés d'aujourd'hui. D'ailleurs, l'évolution démographique ne nous permet pas de sous-exploiter quelque source de talent que ce soit.

En l'an 2000, le vieillissement de la population causera une grave pénurie de main-d'oeuvre et les deux tiers des nouveaux venus sur le marché du travail canadien seront des femmes, des membres des minorités visibles, des autochtones et des personnes handicapées. Voilà à quoi ressemblera la main-d'oeuvre de demain et nous devons intégrer ces gens, que cela plaise ou non au Parti réformiste.

Enfin, je ne crois pas que le gouvernement devrait tenir compte, dans ses politiques, de l'importance que les médias accorderont à la réaction contre l'équité en matière d'emploi. À la vérité, la législation canadienne sur l'équité en matière d'emploi ne fait pas de perdants. Il ne peut y avoir que des gagnants, quand chaque citoyen a une chance équitable d'obtenir un emploi, puis de l'avancement au sein de l'organisation.

La protection des minorités qualifiées contre la discrimination est un objectif noble et valable. Les Canadiens, qui cultivent l'esprit de compassion et le respect de la dignité et de la justice, sont déterminés à édifier un pays où tous et chacun puissent être fiers de l'emploi qu'ils occupent et de leur contribution au bien commun.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui pour parler de la motion de mon collègue de North Vancouver. Je voudrais le féliciter pour son discours, car il a bien expliqué le but de sa motion.

Celle-ci porte sur un sujet délicat, l'équité en matière d'emploi. Je suis heureux d'avoir appuyé et d'appuyer maintenant cette motion qui demande au gouvernement de mettre immédiatement fin aux programmes d'équité en matière d'emploi et à l'inclusion d'exigences relatives à l'équité en matière d'emploi dans les formulaires de formation ou de demande d'emploi. De telles exigences incitent les employeurs à choisir les candidats en fonction de leur sexe ou de leur origine ethnique et non en fonction de leurs compétences et aptitudes. Par conséquent, elles favorisent le ressentiment entre les candidats. Le concept même de l'équité en matière d'emploi est lacunaire. Comme mon collègue l'a fait remarquer, il encourage l'embauche fondée sur la désignation et non sur le mérite.

Le député de Fraser Valley-Ouest a aussi très bien exprimé cette idée. Il a dit que le concept d'équité en matière d'emploi subordonnerait le principe du mérite à la politique de la race et du sexe. Certains facteurs lui donnent raison. D'abord, ceux que les programmes d'équité en matière d'emploi prétendent aider n'en sont pas du tout satisfaits.

Les membres des groupes-cibles, qui sont censés profiter de l'équité en matière d'emploi, doivent répondre à deux questions fort complexes. Premièrement, ils se demandent s'ils ont obtenu un poste parce qu'ils faisaient partie d'un groupe-cible ou parce qu'ils étaient compétents. Cette question les hante sans doute toujours.

(1820)

Deuxièmement, ils doivent répondre aux collègues qui pourraient se demander s'ils sont à leur poste parce qu'ils appartenaient à une minorité visible ou à un groupe défavorisé ou parce qu'ils méritaient vraiment ce poste.

Ceci m'amène à mon deuxième point. Lorsque, dans un milieu de travail donné, les gens ne savent pas si eux-mêmes ou leurs collègues ont été embauchés pour leurs compétences ou pour leur appartenance à une catégorie quelconque, cette situation crée un sentiment d'inégalité et elle divise les travailleurs. Ce sentiment d'inégalité découlant de pratiques d'embauchage astucieuses et de la nécessité de respecter les objectifs quantitatifs de l'équité en matière d'emploi peut entraîner de graves divisions, car il crée une atmosphère de méfiance et de doute. Cela ne contribue pas à rendre un milieu de travail agréable et productif.

Je voudrais vous raconter une anecdote qui m'a été rapportée par un membre du personnel d'un parlementaire, sur la colline. Cette personne avait un ami à l'université, une personne très brillante qui faisait partie d'un groupe minoritaire et qui, souvent, critiquait fortement les programmes d'équité en matière d'emploi. Bon nombre de personnes se demandaient pourquoi il agissait ainsi. Elles ne comprenaient pas pourquoi lui, qui pouvait, de toute évidence, profiter de ces programmes, s'y opposait autant. Il le faisait, disait-il, parce qu'il ne savait pas et avait peur de ne pas savoir si on l'engageait pour ses compétences ou en raison de la couleur de sa peau et que ses collègues de travail ne le savaient pas non plus. Cet homme disait qu'il voulait être jugé uniquement d'après son mérite et rien d'autre.

En fait, des députés d'en face ont eux aussi exprimé des points de vue semblables et parlé d'histoires semblables. Le député de Waterloo a dit en comité, au sujet des mesures législatives du gouvernement sur l'équité en matière d'emploi, qu'un homme de sa circonscription ne voulait pas que les gens pensent qu'il avait bénéficié d'un traitement de faveur pour obtenir son emploi. Cet homme critiquait également l'équité en matière d'emploi.

Je voudrais vous raconter une autre anecdote qui a trait à cette préoccupation mais d'un autre angle, du point de vue de la productivité en milieu de travail et du point de vue de l'employeur. Elle m'a été rapportée personnellement par un homme qui dirige, dans ma circonscription, une entreprise assez importante qu'il a entièrement montée lui-même.

Son entreprise répondait assez régulièrement à des appels d'offres du gouvernement. Elle avait réussi à obtenir ainsi plusieurs contrats, au fil des ans. Cet homme me disait qu'il était extrêmement préoccupé du fait que son entreprise n'avait plus le droit de soumissionner à ces appels d'offres, parce que les différents groupes de la société n'étaient pas représentés de façon adéquate au sein de son personnel. Plus de 50 p. 100 de ses employés étaient des femmes. Il avait toujours embauché un nombre considérable de femmes parce qu'elles faisaient mieux le travail. Il avait aussi des employés de minorités visibles, mais sa compagnie n'avait pas réussi à garder suffisamment d'employés des groupes autochtones qui lui avaient été désignés pour être capable de soumissionner pour ce contrat. À cause de cela, cette personne n'a pas pu soumissionner. Quelle que soit la façon dont vous considérez la chose, c'est de la discrimination.


11644

Pourquoi le gouvernement estime-t-il que nous avons besoin d'équité en matière d'emploi? Je suppose que sa raison est de corriger des injustices perçues dans le milieu de travail et c'est tout à fait honorable. Lorsqu'on regarde les chiffres, on se rend compte que ces injustices sont souvent une simple perception et, surtout, une perception du gouvernement.

Je voudrais vous donner quelques autres statistiques, pour ajouter à celles présentées par le député de Vancouver-Nord un peu plus tôt.

Actuellement il y a 570 000 personnes visées par la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Les femmes représentent 45,6 p. 100 de ces personnes. Lorsqu'on regarde la situation de la femme en général dans la population active canadienne, on constate que 45,9 p. 100 de la population active est féminine. Il y a donc une différence de 0,3 p. 100 entre ceux qui sont visés par le programme d'équité en matière d'emploi et la population active en général. J'ai bien dit 0,3 p. 100. Nous devons nous demander si ces 0,3 p. 100 constituent une différence assez importante pour justifier le coût engendré et les torts causés par ces programmes d'équité en matière d'emploi.

(1825)

Selon Statistique Canada, en 1992, les femmes célibataires avaient un salaire équivalant à 99 p. 100 de celui des hommes célibataires. Beaucoup de différences salariales entre les hommes et les femmes peuvent s'expliquer par des choix de vie, par exemple la décision de rester à la maison pour élever une famille. Bien sûr, c'est un choix tout à fait respectable.

Le Conseil économique du Canada a aussi publié, en 1992, un rapport disant qu'on n'avait constaté aucune corrélation entre le salaire et le pays d'origine des gens. Le même rapport nous apprenait que le taux de chômage était moins élevé chez les immigrants que chez les Canadiens de souche. Le rapport concluait que, dans l'ensemble, il y avait peu de discrimination à l'endroit des immigrants.

En 1994, le rapport sur l'équité en matière d'emploi révélait que, en tout, les femmes occupaient 47 p. 100 des emplois au gouvernement, et que 47,3 p. 100 d'entre elles étaient prêtes à travailler. Les emplois occupés par des femmes ont connu une hausse d'un point de pourcentage en 1993-1994. Les emplois de niveau supérieur occupés par des femmes avaient aussi augmenté d'un point de pourcentage, malgré une diminution de 6 p. 100 dans la catégorie de la direction. Encore une fois, le gouvernement voudrait-il nous faire accepter des programmes coûteux pour corriger une différence de 0,3 p. 100?

J'ai d'autres chiffres à communiquer. Le personnel civil de la GRC est composé de femmes à 82,6 p. 100. À Citoyenneté Canada, 74 p. 100 des employés sont des femmes. Cependant, au ministère des Transports, plus de 75 p. 100 sont des hommes. Devons-nous présumer que cette sous-représentation des femmes au ministère des Transports est attribuable à la discrimination? Je dirais que non. Toutefois, le rapport suppose à tort que oui, ce qui illustre en quoi le rapport est fondamentalement faussé. Il est difficile de déterminer pourquoi il y a des différences, mais nous ne pouvons pas automatiquement conclure qu'elles sont dues à une discrimination systématique.

Je pose à nouveau la question: Pourquoi avons-nous besoin de lois et de programmes promouvant l'équité en matière d'emploi? Ma réponse est que nous n'en avons pas besoin. Alors pourquoi existent-ils? À mon avis, c'est parce que le programme du gouvernement libéral est trop influencé par les groupes d'intérêts spéciaux et que ces derniers sont en faveur de l'équité en matière d'emploi. Ils ne sont pas motivés par l'intérêt public.

Trop de mesures gouvernementales sont dictées par une minorité bruyante et pas assez par la majorité silencieuse. C'est le gouvernement de la minorité au lieu d'être le gouvernement de la majorité. L'équité en matière d'emploi fait pencher la balance en faveur des groupes d'intérêts spéciaux. Ce n'est pas ça, le Canada.

La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui demande qu'il soit immédiatement mis fin aux programmes d'équité en matière d'emploi. Je l'appuie sans réserve. Conformément à l'habitude qu'ont les réformistes de proposer des solutions constructives, j'expliquerai la position de mon parti en faisant cinq déclarations brèves:

Premièrement, tous les Canadiens sont égaux devant la loi et tous les travailleurs ont le droit de ne faire l'objet d'aucune discrimination au travail. Deuxièmement, le marché fournira des solutions au problème du milieu de travail représentatif dans le secteur privé. Troisièmement, il appartient au gouvernement de veiller à l'égalité des chances, non de déterminer l'équité en matière d'emploi dans la fonction publique. Quatrièmement, il ne devrait pas y avoir d'obstacles arbitraires au recrutement ou à la promotion. Le mérite doit être le seul critère de recrutement. Cinquièmement, la Loi sur l'équité en matière d'emploi est coercitive, discriminatoire, inutile et coûteuse. Elle devrait être abrogée.

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, comme j'ai bien peu de temps à ma disposition, je compte l'utiliser de mon mieux.

Comme le dit une de mes bonnes amies: «D'après moi, l'équité en matière d'emploi existera quand une femme non qualifiée et incompétente aura autant de chances qu'un homme non qualifié et incompétent d'obtenir un emploi.» C'est cela l'égalité.

L'égalité en matière d'emploi ne veut pas dire qu'il existe un traitement spécial, mais que les chances sont égales. L'histoire, les statistiques prouvent qu'en réalité, une minorité de Canadiens ont la préférence au moment de l'embauche et d'une promotion. Autrement, comment expliquer qu'au gouvernement fédéral, 84 p. 100 des commis, qui ont un salaire moins élevé, sont des femmes? Même à l'intérieur de la catégorie des commis, les hommes atteignent plus souvent les échelons supérieurs que les femmes.

11645

(1830)

De nombreuses statistiques montrent clairement que le principe du mérite ne s'applique ni au moment de l'embauche ni dans l'emploi au Canada et même dans notre fonction publique fédérale. C'est une honte. Les statistiques prouvent que les femmes sont lésées et leurs niveaux d'emploi restent peu élevés. Les personnes handicapées sont tout à fait sous-représentées dans nos effectifs, peu importe leurs compétences. La sous-représentation des autochtones est scandaleuse. Parmi les candidats à un emploi, les membres d'une minorité visible ont réellement moins de chances d'être retenues que les personnes de race blanche, le quart des chances, selon les statistiques d'il y a un an ou deux.

La discrimination n'est pas nécessairement consciente. Elle fait partie intégrante de notre système et de notre jugement des valeurs. Aux hommes de race blanche au Canada, je dis: «Vous n'avez vraiment rien d'autre à perdre que des privilèges.» Dans le Canada que nous voulons, il n'y aura pas de privilèges. Il n'y aura pas ce traitement préférentiel qui a été réservé à une minorité pendant si longtemps. Il y aura un plein et riche. . .

Le vice-président: Je regrette, mais la période attribuée aux initiatives parlementaires est maintenant écoulée. Conformément au paragraphe 96(1) du Règlement, l'article est rayé du Feuilleton.

_____________________________________________


11645

MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA TURQUIE

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway, NPD): Monsieur le Président, le mois dernier, j'ai eu l'honneur de diriger une délégation qui s'est rendue en Turquie pour constater les très graves violations des droits de la personne commises dans ce pays. Je me suis penché en particulier sur les violations incroyables des droits de la personne dont sont victimes les Kurdes en Turquie.

Les droits démocratiques d'environ 12 millions de Kurdes vivant en Turquie ont été bafoués, ce qui les empêche de préserver leur patrimoine culturel et linguistique.

De retour au pays, j'ai posé une question à la Chambre la semaine dernière. J'ai demandé au premier ministre d'expliquer comment il se fait que le gouvernement canadien compte envoyer en Turquie une délégation, dirigée par un ministre, à l'occasion du 75e anniversaire de la démocratie parlementaire en Turquie?

Il est absolument effroyable de constater que le gouvernement envisage sérieusement la possibilité d'envoyer une telle délégation, lorsque six députés du Parlement turc sont détenus à la prison d'Ankara simplement pour avoir défendu les droits humains, la démocratie et la justice.

Lorsque j'ai eu l'honneur de rencontrer ces députés, y compris une femme kurde, Leyla Zana, qui purge une peine de 15 ans d'emprisonnement, ils se sont dits étonnés et très déçus que le gouvernement canadien songe à envoyer une délégation.

J'ai aussi posé une question sur la possibilité que le Canada vende 39 avions de chasse CF-5 à la Turquie. Nous savons que les droits fondamentaux de certains habitants de ce pays sont bafoués, que des villages sont complètement anéantis et que plus de deux millions de Kurdes sont sans abri dans le sud-est de la Turquie. Nous savons que des journalistes sont victimes d'agressions. Nous savons que beaucoup d'autres groupes minoritaires turcs sont aussi agressés.

L'accord sur la vente d'avions de chasse est tout simplement immoral. J'exhorte le gouvernement du Canada à faire comme la Norvège et l'Allemagne, deux de nos meilleurs alliés au sein de l'OTAN, et à imposer un embargo sur les ventes d'armes à la Turquie. Plutôt que de vendre des avions de chasse, nous devrions imposer un embargo sur les armes. Pensons à l'invasion illégale de Chypre par la Turquie de même qu'à son triste bilan en matière de respect des droits de la personne.

Selon sa politique, le Canada n'est pas censé vendre d'armes dans des zones de conflit ou à des pays qui ont un bilan douteux en matière de respect des droits de la personne. Le gouvernement nous dit de ne pas nous inquiéter, qu'il obtiendra de la Turquie la promesse qu'elle n'utilisera pas ces avions contre des civils. La Turquie a fait cette promesse à l'Allemagne lorsqu'elle a acheté ses tanks, mais elle ne l'a pas tenue.

(1835)

J'exhorte le gouvernement à déclarer catégoriquement qu'il ne participera pas à la mascarade que constitue la célébration de la démocratie turque, qu'il annulera le voyage de la délégation canadienne, qu'il ne vendra pas de chasseurs CF-5, qu'il imposera un embargo sur les ventes d'armes et qu'il demandera au gouvernement turc d'arriver à un règlement pacifique avec les Kurdes par le dialogue politique et des moyens pacifiques plutôt que par les armes.

Enfin, le PKK a demandé au gouvernement de reconnaître qu'il était temps de dialoguer, non pas en vue de la séparation, mais, comme le secrétaire général Ocalan l'a dit «pour vivre côte à côte, en toute liberté et dans l'égalité». Le moyen d'y parvenir passe par l'ouverture et l'honnêteté.

J'espère que le secrétaire parlementaire profitera de l'occasion pour énoncer une position claire sur la question.

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je veux rétablir les faits. Le député a soulevé trois questions importantes. Il y a d'abord la délégation canadienne qui participera au 75e anniversaire de la fondation du Parlement turc, le 23 avril. Il y a ensuite les violations des droits de la personne contre les Kurdes dans le nord de l'Irak et contre des parlementaires, dont il a parlé en détail. Il y a enfin la vente d'appareils CF-5 à la Turquie.

11646

Je commencerai par parler des deux premières questions. Le député a reçu une excellente réponse du premier ministre quand il a posé sa question le 28 mars. Le premier ministre lui a en effet répondu ceci: « Ce serait peut-être une bonne occasion pour la délégation ministérielle de soulever la question des droits de la personne auprès du gouvernement pendant son séjour en Turquie. » Il a ajouté plus loin: « On pourrait annuler la visite de la délégation, mais on peut aussi envoyer la délégation et lui demander d'aborder la question des droits de la personne.»

Il est intéressant de voir ce que fait le député quand il entend parler de violation des droits de la personne. Il saute dans un avion et va voir sur place, que ce soit au Moyen-Orient, en Chine ou en Afrique. Il fait les manchettes. Il se fait le champion de la lutte contre les violations des droits de la personne.

En l'occurrence, il dit aux autres Canadiens de ne pas aller là-bas. Lui peut y aller, mais pas les autres Canadiens. Or, le député serait sans doute d'accord avec moi pour reconnaître que la meilleure façon d'aborder le problème des violations des droits de la personne avec les Turcs, c'est d'aller là-bas et de leur en parler face à face.

Nous n'avons cessé de faire des démarches auprès du gouvernement turc par le truchement de l'ambassadeur à Ottawa et par le truchement de notre ambassade à Ankara. Dès juin dernier, le ministre des Affaires étrangères a soulevé cette question avec son homologue turc à l'époque, M. Çetin, qui est maintenant vice-premier ministre de Turquie.

Je suis sûr que ce genre d'intervention directe, face à face, donne de bons résultats. Ce n'est pas en boycottant un pays et en refusant tout contact qu'on peut faire passer un message. Il faut aller sur place et parler directement du problème aux dirigeants. Voilà pour les deux premières questions.

Quant à la vente des CF-5, je me demande pourquoi le député en fait toute une affaire. Tout de suite après la période des questions, hier, j'ai parlé au ministre des Affaires étrangères de la question que le député soulève sans cesse. Aucun CF-5 n'a été vendu à la Turquie. Cela est encore vrai aujourd'hui. J'espère que le député transmettra cette information à ses électeurs et à d'autres citoyens canadiens. Il est vrai que nous avons des appareils en trop. Il est vrai que d'autres pays veulent les acheter. Le prix est un peu plus faible parce que ce sont des appareils qui ont servi et dont nous n'avons plus besoin. Jusqu'à maintenant, aucun CF-5 n'a été vendu à la Turquie.

Je remercie le député de ses interventions, mais j'espère qu'il ne sera pas hypocrite. . .

Le vice-président: Votre temps de parole est terminé.

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, hier, je posais une question au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration concernant la déportation de la famille de réfugiés roumains formée par le couple Alexandru et Carmen Dima et par leurs filles Simona et Diana.

Le ministre, une fois de plus, a refusé d'intervenir dans ce dossier, en faisant preuve d'un manque flagrant de sensibilité, d'humanisme et de compassion. L'opinion publique, les groupes et les personnes qui ont appuyé cette famille ont été frustrés et bouleversés par le refus du ministre et de son gouvernement d'utiliser ses pouvoirs discrétionnaires dans ce cas. Cette famille était arrivée au Québec le 27 février 1992 et a aussitôt revendiqué le statut de réfugié. Contre toute attente, la CISR et le ministre ont rejeté tous les recours.

La famille Dima s'était très bien intégrée au Québec. L'épouse, une enseignante en Roumanie, était bénévole à l'école Notre-Dame-de-Grâce. Elle avait obtenu une promesse d'emploi à la CECM. Son mari, un technicien en informatique, a eu une offre d'emploi de la compagnie Avtech à Dorval.

Quant aux deux enfants, Simona obtient des notes de 97 p. 100 en français et est classée dans un groupe enrichi à l'école secondaire Saint-Luc. Diana fréquente l'école Notre-Dame-de-Grâce et ne parle que le français. De plus, cette famille a des parents à Montréal. J'ai vu les Dima pleurer à la télévision avant leur déportation et j'ai été très touché par ce drame.

Je félicite le ministre de l'Immigration du Québec, M. Bernard Landry, qui a promis d'accueillir avec célérité et sympathie une demande d'immigration qui sera faite au consulat canadien de New York. C'est une autre preuve d'ouverture du gouvernement du Québec envers les immigrants et réfugiés. Le Québec constitue une terre d'accueil exceptionnelle.

Je tiens à souligner la vague de solidarité avec la famille Dima venant de simples citoyens, des paroissiens de l'église Notre-Dame-de-Grâce, de l'abbé Fernand Patry, des enseignants et élèves des deux écoles mentionnées, ainsi que des frères des Écoles chrétiennes qui les accueilleront à Plattsburgh.

Le ministre, qui a peur du Parti réformiste et qui devient de plus en plus dur envers les immigrants et réfugiés, devrait tenir compte de ces expressions spontanées de solidarité humaine de la part de la population. J'espère que le ministre prendra les mesures qui s'imposent pour accorder un traitement accéléré aux demandes d'immigration de cette famille en ce qui concerne les aspects de juridiction fédérale.

Je suis convaincu que la société québécoise et canadienne se verra enrichie par l'apport de la famille Dima. Je suis le dernier intervenant et je profite de l'occasion pour vous souhaiter, monsieur le Président, et à tous mes collègues de la Chambre, de joyeuses Pâques.

[Traduction]

Mme Jean Augustine (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question au ministre et de l'intérêt qu'il porte à la famille Dima.

J'aimerais lui signaler que la famille a coopéré avec les autorités responsables de l'immigration en retournant aux États-Unis, d'où elle pourra présenter une demande en suivant la filière normale. Le gouvernement du Québec a dit qu'il accordera une entrevue à la famille lorsqu'elle présentera sa demande de l'extérieur du Canada.

Les membres de cette famille ont pleinement bénéficié du système de détermination du statut de réfugié, mais on ne leur a pas reconnu ce statut. Leur cas a ensuite été examiné en fonction des critères d'évaluation des risques, mais on a conclu que la famille Dima ne serait pas en danger si elle retournait en Roumanie. La demande de cette famille a aussi a été examinée en fonction de considérations humanitaires, mais elle a été rejetée.

11647

La vaste majorité des 2 900 personnes qui ont émigré de la Roumanie au Canada en 1994 l'ont fait selon le procédure normale de l'extérieur du Canada. En fait, en 1993, 3 300 personnes sont venues de la Roumanie au Canada.

Je voudrais répondre aux souhaits du député en souhaitant moi aussi à monsieur le Président, au député et à toutes les autres personnes ici présentes un très agréable congé de Pâques.

Le vice-président: Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la motion d'ajournement est adoptée d'office. La Chambre s'ajourne à 11 heures, le lundi 24 avril 1995.

Joyeuses Pâques et Happy Easter à tout le monde.

(La séance est levée à 18 h 44.)