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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 21 février 1994

PRIÈRE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES PÉTITIONS

    M. Mills (Broadview-Greenwood) 1585
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 1592
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1593
    M. White (North Vancouver) 1594
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1596
    M. Bernier (Gaspé) 1598

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

L'ACADIA CENTRE FOR SMALL BUSINESS AND ENTREPRENEURSHIP

LA COUPE DU MONDE DE SURF DES NEIGES

LE BUDGET

LA JOURNÉE DU PATRIMOINE NATIONAL

LES GUIDES DU CANADA

KATE PACE

LE FONDS DE SOLIDARITÉ DES TRAVAILLEURS DU QUÉBEC

LA DETTE NATIONALE

LE BILINGUISME

LA FÊTE DU PATRIMOINE

LA FÊTE DU PATRIMOINE

L'IMMIGRATION

LES FORÊTS

LA RÉFORME ÉLECTORALE

BOURSES CANADA

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 1609

QUESTIONS ORALES

LA BOSNIE

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

LE BUDGET

L'IMMIGRATION

LA SÉCURITÉ DU REVENU

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1612
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1613

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

LES SUBVENTIONS FÉDÉRALES

L'OFFICE NATIONAL DE L'ÉNERGIE

L'ÉCONOMIE SOUTERRAINE

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 1614
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 1615

LES AFFAIRES INDIENNES

LES ANCIENS COMBATTANTS

LE CENTRE NATIONAL DES ARTS

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1616
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1616

LES MINES

LES PÊCHES ET LES OCÉANS

L'EXPLORATION MINIÈRE

LE BUDGET

LES PÊCHES

AFFAIRES COURANTES

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

    Projet de loi C-13. Adoption des motions portant présentation et première lecture 1617

PÉTITIONS

LA FAMILLE MARALOÏ

MARKHAM-WHITCHURCH-STOUFFVILLE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 1618

LE SÉNAT

LE SERVICE POSTAL EN MILIEU RURAL

LES VOIES ET MOYENS

DÉPÔT D'UN AVIS DE MOTION

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-PÉTITIONS

    Reprise de l'examen de la motion 1619
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 1620
    M. White (North Vancouver) 1625
    M. White (North Vancouver) 1638
    M. Speaker (Lethbridge) 1642

1581


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 21 février 1994


La séance est ouverte à 11 heures.

[Traduction]

PRIÈRE

Le Président: En ce moment même, plus de un million de Canadiens suivent nos délibérations à la télévision. Puisque les députés essaient de changer quelque peu la formulation de la prière depuis 1920, j'ai cru qu'aujourd'hui nous pourrions faire en public, avec nos concitoyens, ce que nous faisons normalement en privé, ici à la Chambre.

Chers collègues, avec votre permission, je lirai donc la prière en anglais, puis en français. Je vous demanderai ensuite de vous recueillir quelques instants, le temps de réciter la prière de votre choix ou de penser à autre chose. Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le Président: Almighty God, we give thanks for the great blessings which have been bestowed on Canada and its citizens, including the gifts of freedom, opportunity and peace that we enjoy. We pray for our sovereign, Queen Elizabeth, and the Governor General. Guide us in our deliberations as members of Parliament and strenghthen us in our awareness of our duties and responsibilities as members. Grant us wisdom, knowledge and understanding to preserve the blessings of this country for the benefit of all and to make good laws and wise decisions.

[Français]

Dieu tout-puissant, nous te remercions des nombreuses grâces que tu as accordées au Canada et à ses citoyens, dont la liberté, les possibilités d'épanouissement et la paix. Nous te prions pour notre souveraine, la reine Élizabeth, et le gouverneur général. Guide-nous dans nos délibérations à titre de députés et aide-nous à bien prendre conscience de nos devoirs et responsabilités. Accorde-nous la sagesse, les connaissances et la compréhension qui nous permettront de préserver les faveurs dont jouit notre pays afin que tous puissent en profiter, ainsi que de faire de bonnes lois et de prendre de sages décisions.

[Traduction]

Amen.

Nous allons maintenant nous recueillir pendant quelques instants.

[Note de l'éditeur: La Chambre observe un moment de silence.]

_____________________________________________

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-LES PÉTITIONS

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest) propose:

Que de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager l'opportunité de modifier le Règlement afin d'instaurer une procédure selon laquelle, au moins une fois au cours d'une session, les pétitions présentées pendant cette session soient étudiées par les représentants élus des Canadiens et puissent faire l'objet d'un débat et d'une mise aux voix à la fin du débat, comme par exemple:
a) la teneur de la pétition interdisant l'importation, la distribution, la vente et la fabrication de «cartes de tueurs en série»,
b) la teneur de la pétition demandant des changements à la Loi sur les jeunes contrevenants afin de rendre plus difficile la libération des jeunes contrevenants dangereux, telle la pétition présentée à la mémoire de la regrettée Rosalynn Dupuis,
c) une pétition qui sera présentée demandant au gouvernement de déposer un projet de loi prévoyant que la révocation des députés de la Chambre des communes fasse partie des lois.
-Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de plaisir que j'interviens aujourd'hui en cette journée historique. Comme les téléspectateurs ont pu s'en rendre compte et comme nous, à la Chambre, avons pu le vivre, c'est la première fois en presque 120 ans que nous avons modifié notre prière. Cela devrait montrer à nous tous que, même si les choses évoluent lentement, elles peuvent quand même le faire et c'est ce qui se produit.

(1110)

Je suis très heureux de me pencher sur cette motion. Alors que j'interviens et que nous étudions cette motion, nous devrions réfléchir à la ligne de pensée qui la sous-tend. Elle s'inscrit dans un idéal plus grand qui consiste à s'assurer que les Canadiens ont un rôle permanent dans les débats au Canada en instaurant un régime qui prévoie une démocratie plus directe et une participation accrue des citoyens dans la vie politique du Canada.

Le droit des citoyens de se faire entendre, d'obtenir la parole et de faire bouger les choses est fondamental pour tout pays ou Parlement qui souhaite renforcer son régime démocratique.


1582

Les pétitions sont un moyen efficace de permettre aux Canadiens de jouer un plus grand rôle dans l'établissement du programme national. Elles constituent l'une des méthodes les plus anciennes donnant aux citoyens la possibilité d'obtenir réparation; cette pratique remonte en effet à l'époque du roi Édouard, au XIIIe siècle. C'est à la suite de la présentation de pétitions qu'on en est venu à saisir les assemblées législatives de projets de loi. Nos traditions parlementaires sont nées des pétitions. Ainsi, on ne devrait pas faire fi de leur importance.

Je ne suis pas le premier à intervenir dans cette enceinte au cours des dernières années pour parler de la véracité des pétitions. Je vais vous citer des paroles tirées du hansard du 1er juin 1983. Stan Schellenberger, le député de Wetaskiwin à l'époque, avait présenté un projet de loi d'initiative parlementaire. Pour l'appuyer, il avait déclaré ce qui suit:

La pratique de présenter des pétitions à une assemblée législative n'est pas nouvelle. Elle existe depuis des centaines d'années. Nous avons emprunté au parlement britannique dont s'inspire le nôtre la pratique de présenter des pétitions au Parlement. Depuis toujours, la présentation de pétitions au Parlement a été une occasion pour les simples citoyens de saisir la Chambre des communes de leurs griefs.
C'est une méthode qui permet aux citoyens ordinaires de soumettre au Parlement du Canada des griefs, des réserves et des questions. Ce n'est pas une simple soupape de sûreté: on ne peut recevoir des pétitions, dont beaucoup portent des milliers, voire des centaines de milliers de signatures, et les rejeter, puis les oublier. Ce n'est pas qu'une façon de laisser les gens se défouler avant qu'ils n'explosent. Il s'agit plutôt d'un mécanisme grâce auquel les citoyens du pays sont directement reliés à leurs députés et peuvent ainsi leur faire part de divers problèmes quotidiennement.

Je poursuis ma citation de M. Schellenberger, que je tire du même numéro du hansard de 1983:

. . . ce n'est que depuis quelques années que les pétitions restent sans suite. Pour présenter une pétition à la Chambre, un député en donne lecture à la présidence et le lendemain le greffier aux pétitions précise si elle est recevable. Ensuite on l'enfouit quelque part dans une pièce du Parlement.
On ne la revoit plus jamais. Voici la suite de la citation:

Pas tout à fait, mais plus ou moins.
C'est un député qui tenait ces propos sur les pétitions, il y a dix ans de cela. Cette question revient sur le tapis régulièrement. Nous en parlons aujourd'hui parce que nous espérons que notre nouveau Parlement fraîchement émoulu accordera beaucoup plus d'attention à cet important mode d'expression pour les citoyens, dans un pays qui se veut démocratique. Je continue la citation:

Par exemple, en ce qui concerne la peine capitale, beaucoup de nos citoyens considèrent que le Parlement ne représente pas le choix de la majorité. . .
Peut-on dire, sans égard à notre opinion personnelle sur la peine capitale, que nos lois sont conformes aux souhaits de la nation? Je continue la citation:

. . . et le seul moyen de le signaler à la Chambre est de présenter des pétitions ou des mesures d'initiative parlementaire. Ni l'une ni l'autre de ces deux méthodes n'a donné beaucoup de résultats par le passé, mais au moins elles fournissent l'occasion d'exposer les griefs des citoyens.
Je précise aux députés qu'en 1981, Stan Schellenberger avait présenté un projet de loi d'initiative parlementaire sur les pétitions. Une bonne partie du travail préliminaire a déjà été fait.

(1115)

Pour nous, les pétitions soulèvent une question beaucoup plus étendue. Il s'agit en effet de voir si la démocratie est enchaînée à la tradition, ancrée dans la sécurité du passé, ou si elle est plutôt un idéal vivant qui s'adapte aux changements.

Chaque fois qu'un député évoque à la Chambre le concept de révocation, l'initiative du citoyen ou la tenue d'un référendum, on lui cite toujours en réplique la fameuse lettre d'Edmund Burke, dans laquelle il disait à ses électeurs de Bristol que leur député était élu pour servir ses électeurs et que, si ces derniers n'aimaient pas sa façon de faire, ils pouvaient toujours le mettre à la porte à la fin de la session. De fait, après avoir écrit cette lettre à ses électeurs en 1779, Edmund Burke fut défait aux élections générales qui suivirent.

Il avait écrit cette lettre en réponse à ses électeurs qui considéraient comme des pirates les marins américains révolutionnaires qui avaient été capturés. Ces derniers devaient être amenés en Angleterre et, après environ trois années d'attente, ils avaient été pendus à l'issue d'un procès juste et équitable. Selon Edmund Burke, cette façon de faire n'était pas juste. Il estimait que les marins américains devaient être traités comme des prisonniers de guerre et jugés rapidement et équitablement par leurs pairs conformément à la tradition britannique.

Thomas Payne, compatriote et contemporain d'Edmund Burke, a rompu avec ce dernier, essentiellement parce qu'il estimait qu'il était enchaîné à la tradition. Selon lui, Edmund Burke considérait comme une vertu en soi le fait d'avoir juré fidélité perpétuelle à la Couronne, à la Grande Charte, et que parce que la Couronne avait accordé certains droits au peuple en retour de certaines obligations, ces valeurs étaient perpétuelles. D'où la conclusion que la conception de la démocratie selon Edmund Burke reposait essentiellement sur la tradition.

Thomas Payne était un contemporain de Thomas Jefferson et donnait beaucoup de conseils à ce dernier concernant la rédaction des déclarations américaines. Il soutenait que la démocratie ne pouvait survivre sans que des changements se produisent. Dans son oeuvre The Rights of Man, il a écrit: «Chaque génération a le droit et la responsabilité de gouverner pour son époque et ne devrait pas plus lier les générations futures par ses décisions que les générations passées n'avaient le droit de lier les générations actuelles par leurs décisions.»


1583

Ce principe est très important. Bien des gens se souviendront qu'il a aussi écrit: «La plus grande tyrannie consiste à croire qu'on puisse gouverner après la mort.» Voilà ce dont nous parlons lorsque nous commençons à discuter des modifications à apporter au mode de fonctionnement de notre Parlement et à sa relation avec les Canadiens, et lorsque nous nous demandons s'il serait bon de conférer plus de pouvoir aux Canadiens. Tout dépend de la confiance que nous mettons dans le choix que nos électeurs font en nous envoyant à la Chambre.

Il faut comprendre que la Grande-Bretagne du XIIe ou du XVIe siècle est disparue. Notre monde est complètement différent. Nous pouvons centrer l'attention de tous les Canadiens sur une chose en particulier. En effet, tout le monde comprend aujourd'hui. Chacun se souvient de ce qu'il était en train de faire lorsque des événements marquants se sont produits.

L'exemple qui revient toujours est celui de Ben Johnson. Qui ne se souvient pas de sa victoire au cent mètres? Tous les Canadiens en étaient au courant. Au XVIe siècle, il aurait fallu 30 ans pour que cette victoire soit connue en Europe, mais au XXe siècle, la nouvelle s'est répandue instantanément partout dans le monde.

Nous devons faire en sorte que nos traditions démocratiques évoluent et tiennent compte de la façon dont la communication s'effectue. Les Canadiens sont beaucoup plus au courant de ce qui se passe et nettement mieux en mesure de jouer un rôle efficace dans le mode d'organisation et de gestion des affaires courantes de notre pays. C'est pourquoi les pétitions devraient être traitées avec le respect et la célérité qu'elles méritent. Les pétitions constituent un droit constitutionnel des Canadiens et elles sont, en principe, un moyen efficace de faire connaître les préoccupations, les opinions et les problèmes de la nation.

(1120)

Les Canadiens peuvent présenter des pétitions au Parlement pour lui faire connaître leurs opinions, mais leur usage est en régression. Il serait bon de voir pourquoi. Pour quelles raisons, les citoyens présentent-ils moins de pétitions? C'est sans aucun doute parce qu'ils ne croient pas que leurs pétitions peuvent changer quelque chose. Lorsque des gens travaillent jour et nuit pour faire signer une pétition et que, après être parvenus à réunir un million de signatures, ils envoient cette pétition à la Chambre des communes, n'est-ce pas que celle-ci ne fait que nourrir le cynisme de la population pour les institutions gouvernementales, que tous les parlementaires ont observé au sein de la population, si elle se contente de lire la pétition puis de la laisser en plan?

Les pétitions sont un lien direct entre la Chambre des communes et la population. Nous devrons traverser une période très difficile parce qu'il faudra un jour vivre selon nos moyens et, pour cela, l'exemple doit venir de la Chambre des communes. Il faut que nous, les députés, respections et écoutions les Canadiens, que nous soyons d'accord avec eux ou pas.

Les électeurs que nous représentons veulent que nous fassions appel à notre sagesse et à notre intelligence, mais ils ne s'attendent pas à ce que la communication se fasse à sens unique. Ils veulent que nous les écoutions nous aussi. Ils ne s'attendent pas à ce que tout fasse l'objet de référendums ou de pétitions, mais ils veulent que nous les écoutions et que nous accordions une attention à ce qu'ils ont à dire, et pas juste au moment des élections.

Nous ne pouvons pas savoir à l'avance tout ce que nous allons faire ou dire. Nous devons reconnaître que beaucoup a été dit dans le livre rouge, mais il y a beaucoup d'autres choses qui n'ont pas été prévues par le gouvernement. Il lui était impossible de savoir à l'avance que telle ou telle chose se produirait; il ne pouvait pas se préparer; il ne pouvait pas inclure l'imprévisible dans le programme électoral qui l'a fait élire. C'est pourquoi, nous devons, entre les élections, disposer du moyen d'écouter les citoyens et réagir à leurs opinions.

La régression du recours aux pétitions populaires est le symptôme d'un grave problème, soit la négligence des pétitions par les élus. Cette négligence illustre on ne peut mieux tout ce qui amène les citoyens à se sentir tenus à l'écart du système politique.

Comme je l'ai dit tout à l'heure aux députés, il arrive que soient soulevées, entre les élections, des questions qui n'ont pas été abordées durant la campagne électorale. C'est à ce moment-là que les citoyens doivent pouvoir faire part de leur opinion au gouvernement. La démocratie doit être un processus bilatéral, les pétitions permettant un échange efficace.

Même si, en principe, les pétitions semblent un bon moyen pour les Canadiens de communiquer avec leur gouvernement et une façon efficace pour ce dernier de prendre le pouls de la population, elles ont été négligées ces dernières années, et leur valeur n'a pas été mise à profit. En conséquence, nous ne pouvons blâmer les Canadiens de se montrer cyniques envers le gouvernement quand, chaque fois, ils voient leurs protestations ignorées. Le fait que les législateurs négligent les pétitions laisse amers ceux qui veulent participer davantage au processus démocratique. La rédaction d'une pétition doit respecter de nombreuses règles et consignes, et c'est un processus laborieux pour ceux qui en sont les instigateurs.

Nous avons déjà reçu une pétition qui portait plus d'un million de signatures. Imaginez les efforts qu'elle a nécessités. Les pétitions ne devraient donc pas être prises à la légère. Le fait que le gouvernement puisse, avec une réponse générale, écarter une pétition sans tenir compte du nombre de signatures ou de l'importance du sujet visé est une forme de mépris à l'endroit des signataires et de la démocratie.

Les gouvernements doivent reconnaître qu'une pétition est un outil extraordinaire pour présenter des mesures législatives efficaces. En apportant des modifications très simples à la procédure concernant les pétitions, le gouvernement pourra jauger efficacement l'opinion des Canadiens et leur permettre de se prononcer sur des questions d'intérêt national.

Ainsi, des pétitions ont déjà été présentées à propos de questions comme l'avortement, la peine de mort, etc. Si le gouvernement n'écartait pas aussi rapidement les opinions que les Canadiens expriment dans ces pétitions, il pourrait s'inspirer de ces dernières pour élaborer ses orientations. Si les Canadiens se


1584

donnent la peine de formuler une pétition, c'est sans doute qu'elle reflète l'attitude que la population partage à un moment précis à l'égard d'un sujet donné. Ainsi, une pétition concernant l'avortement a été présentée à la Chambre, en 1975. Elle avait été signée par un million de personnes. Dernièrement, nous avons reçu une pétition ayant trait à la Loi sur les jeunes contrevenants. On n'avait jamais vu une pétition portant autant de signatures, mais le nombre considérable de pétitionnaires n'a rien changé à l'affaire. Elle n'a eu que peu de résonnance, si tant est qu'elle en a eu, même si elle correspondait à l'opinion de la grande majorité des Canadiens.

(1125)

Donc, les pétitions peuvent et doivent constituer un outil de démocratie. Désormais, les pétitions permettront, d'une part, au gouvernement de rester en contact avec l'opinion publique et, d'autre part, aux députés de se rapprocher de leurs électeurs. Par-dessus tout, elles seront, pour le simple citoyen, l'occasion de participer de nouveau au processus décisionnel de son pays.

Je suis persuadé que, moyennant de petites modifications faciles à apporter à la procédure, il serait possible de faire en sorte que les pétitions jouent ce rôle. Il existe bien des façons de donner plus de poids à une pétition. Il nous faudra soupeser chacune d'elles, car elles ne revêtent pas toutes, bien sûr, la même importance. L'importance d'une pétition peut se mesurer à sa fréquence ou au nombre de signatures. Tels sont les deux facteurs à considérer au moment de décider du sort d'une pétition.

Voici quelques-unes des modifications que nous pouvons apporter à la procédure. Je signale à l'attention des députés le cas de l'initiative parlementaire qui a abouti, en 1980-1981, à l'adoption du projet de loi C-642 ayant trait à certaines attitudes bien définies. Cela donne une idée des changements possibles. Nous pourrions d'abord proposer qu'après lecture à la Chambre, les pétitions soient soumises à l'étude d'un comité approprié qui rendrait compte au Parlement. Bien sûr que le comité de la procédure effectuera une analyse plus détaillée des pétitions.

Nous pourrions également proposer que les pétitions fassent l'objet d'un débat à la Chambre. Le gouvernement et chacun des partis de l'opposition pourraient profiter d'un jour désigné pour tenir ce débat. Une pétition ayant été soumise à la Chambre, nous pourrions consacrer notre jour désigné à son étude. C'est précisément ce qui nous faisons aujourd'hui en formulant notre proposition.

Il ne se passera rien à moins que nous n'ayons en place un mécanisme visant à faire en sorte que le gouvernement réagisse. Nous devons présenter des pétitions de façon à ce que tous les députés reconnaissent la nécessité de faire évoluer leur Parlement sans que ce soit uniquement l'opposition qui demande d'accorder une attention à tel ou tel problème. C'est à nous tous, l'opposition et le gouvernement, de nous demander comment nous pouvons améliorer cette institution.

Je crois savoir que, à l'heure actuelle, le gouvernement doit répondre à une pétition dans les 45 jours. Cependant, rien ne dit que cette réponse doit être autre chose qu'une déclaration générale qui peut être sans grand rapport avec la pétition. En substance, il s'agit uniquement d'un accusé de réception de la pétition.

Donc, il devrait y avoir à tout le moins un mécanisme permettant de suivre les pétitions qui ont été présentées à la Chambre à chaque session, ainsi que de savoir le nombre de signatures et le sujet des pétitions. Ce bureau central offrirait aux législateurs un moyen efficace de se tenir au courant de l'humeur des Canadiens et constituerait un système de classement des pétitions permettant de déterminer si une question en particulier revient sur le tapis jour après jour.

Certains craignent que les pétitions ne soient un moyen pour des groupes d'intérêt spécial d'accéder facilement au processus politique. Or, je soutiens que des intérêts spéciaux ont déjà fait main basse sur le plan d'action national et qu'il faut avoir recours à un peu de démocratie directe pour compenser cet état de choses et pour faire participer la majorité des Canadiens en leur offrant une tribune où ils pourront exprimer leurs doléances tout en sachant qu'on y donnera suite. Je suis encouragé de constater que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre envisage d'examiner des questions concernant la démocratie directe, notamment les pétitions.

(1130)

Il est impérieux que le Parlement écoute ses citoyens et que tous les Canadiens sachent que cette institution se préoccupe de ce qu'ils ont à dire.

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Monsieur le Président, je voudrais faire un bref commentaire et poser une question au député. Il a dit, vers la fin de son intervention, qu'un groupe d'intérêts avait fait main basse sur le plan d'action national. «Faire main basse sur quelque chose» est une expression péjorative qui a une connotation très négative.

Le député pourrait-il me dire à quel groupe d'intérêts il faisait allusion?

M. McClelland: Monsieur le Président, je prends bonne note des commentaires du député. Je me suis mal exprimé. Je n'aurais peut-être pas dû utiliser cette expression, qui est peut-être péjorative et qui apporte au débat un élément négatif que je ne souhaitais pas apporter.

Cela ne m'empêche pas pour autant de penser que des groupes d'intérêts ont effectivement eu une influence considérable sur les affaires du pays, mais pas sur cette législature jusqu'à maintenant. Nous savons cependant qu'au cours des dix dernières années, il y a eu énormément de groupes d'intérêts à but politique dans notre pays. Tous ceux qui ont un grief à présenter ou un point à faire valoir n'hésitent pas à s'exprimer, et tous les députés savent à quoi s'attendre quand ils ouvrent leur courrier. Nous


1585

savons que nous allons recevoir, chaque jour, toute une série de documents venant de groupes d'intérêts.

Une voix: Des pétitions.

M. McClelland: Un député a dit qu'il s'agit de pétitions. C'est vrai. Nous recevons des pétitions, mais pas comme celles dont nous parlons ici.

Il s'agit de personnes très bien organisées, qui disposent des ressources nécessaires pour influer sur le processus de prise de décisions de la Chambre soit parce qu'elles peuvent retenir les services d'un lobbyiste à Ottawa, soit parce qu'elles possèdent, au sein de leur organisation, les compétences nécessaires pour huiler les rouages et arriver à leurs fins.

La plupart des Canadiens n'ont pas accès à ces moyens organisés de se faire entendre. Ils vont se dire vraiment choqués à propos d'une chose, vont se demander ce qu'ils peuvent faire et vont finalement décider de faire circuler une pétition.

Qu'arrive-t-il alors? Ils font circuler une pétition qui va recueillir plus ou moins de signatures. L'idée peut être fantastique, mais la pétition ne reçoit pas toute l'attention qu'elle mérite lorsqu'elle est présentée à la Chambre. C'est de cela dont nous parlons.

Je reconnais, comme le député, que l'expression «faire main basse» est péjorative. Je n'aurais probablement pas dû utiliser cette expression.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je félicite le député d'avoir pris l'initiative de ce débat sur la procédure des pétitions dans son ensemble.

C'est une bonne idée de vouloir sensibiliser la Chambre à cette question. Cependant, je ne suis pas d'accord avec lui lorsqu'il dit qu'une fois que ces pétitions sont présentées à la Chambre, elles tombent dans les oubliettes. En fait, il est répondu individuellement à chaque pétition et il existe un autre moyen de faire en sorte que les pétitions n'en restent pas là, une fois présentées à la Chambre.

Quand on leur soumet une idée particulière, les députés peuvent la reprendre dans un projet de loi d'initiative parlementaire. Le député a mentionné la Loi sur les jeunes contrevenants. Vendredi dernier, le député ministériel de York-Sud-Weston a proposé d'apporter des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants. Je pense que le député sous-estime le système.

Le député a également mentionné que ce ne sont pas toutes les pétitions qui ont le même poids. À mon avis, si nous voulons poursuivre sur son thème de la démocratie directe, toutes les pétitions devraient avoir le même poids. Je ne pense pas que nous devrions faire de distinction. Si une personne se sent à ce point touchée par une question qu'elle va recueillir des signatures pour une pétition et demander à son député de la présenter, cette pétition devrait être présentée en même temps que toutes les autres. Aux députés alors de réagir comme bon leur semble.

(1135)

Je suis un peu plus optimiste à l'égard de la procédure des pétitions, car j'ai vu beaucoup de problèmes réglés de cette façon. À mes débuts à la Chambre, la première année, j'étais un peu sceptique. Toutefois, durant la dernière législature, j'ai défendu avec vigueur une question qui avait trait à la violence faite aux femmes et aux enfants. J'ai finalement réussi à amener d'autres députés à s'intéresser à cette question grâce au nombre de pétitions présentées à ce sujet à la Chambre. Au bout de quelque temps, cette question est passée au premier plan.

Je ne veux pas que le public ait l'impression qu'une fois la pétition est présentée, les choses en restent là. C'est faux.

M. McClelland: Monsieur le Président, moi aussi, je veux être sûr que les Canadiens comprennent bien que les pétitions présentées jusqu'ici n'ont pas abouti à la poubelle. Un bon nombre d'entre elles ont eu une influence marquante sur notre Parlement.

Cependant, je crois que, si les députés sont nombreux à penser -peut-être tout comme mon collègue au cours de sa première année à la Chambre -que les pétitions n'ont pas tellement d'importance, cette même perception doit exister au sein de la population.

Par contre, nous avons un problème si nous croyons à l'influence des pétitions -parce que nous sommes témoins de l'effet qu'elles ont eu lorsqu'elles ont été présentées à maintes reprises à la Chambre ou en d'autres occasions -tandis que la population croit que c'est une perte de temps. Nous devons régler ce problème, parce que les Canadiens doivent avoir la conviction que leurs voeux comptent pour quelque chose. Si nous pouvons ramener tout le monde sur la même longueur d'onde, nous aurons vraiment réussi à établir un lien entre les électeurs et leurs représentants.

La position du député sur l'importance relative des pétitions est sensée. Une pétition de 100 noms qui défend les intérêts de la population est extrêmement importante. Nous devons cependant prendre garde de ne pas nous retrouver enterrés sous les pétitions. Au Parlement britannique, le nombre record de pétitions présentées en un an s'élève à 33 000. Évidemment, cela n'a pas été productif.

Par ailleurs, prenons une pétition sur la peine capitale, une question sur laquelle l'opinion de la Chambre ne correspond pas à celle de la grande majorité des Canadiens. Si nous voulons réaliser les voeux des citoyens, il nous faudrait mettre en place des mesures permettant à tous d'avoir un certain poids dans la procédure parlementaire sans qu'il y ait de risque d'abus. Dans une proposition que nous avons présentée, nous suggérions que le nombre de signatures doive représenter 3 p. 100 des Canadiens pour qu'on prenne des mesures en conséquence.

Les autres sortes de pétitions qu'on présente à la Chambre ont aussi leur importance, qu'elles comptent dix signatures, mille signatures ou un million de signatures. Il faut toutefois convenir qu'un million de personnes qui s'entendent pour signer une pétition auront plus de poids que 20 personnes.


1586

M. John Finlay (Oxford): Monsieur le Président, j'ai bien entendu les observations de mon collègue et les idées contenues dans son discours, mais je crois que le danger réside justement dans ce dont il a parlé. Le député affirme que les pétitions ne doivent pas avoir un caractère frivole. Il rappelait que la Chambre des communes britannique en avait reçu 33 000 en une année et que la situation était devenue incontrôlable.

Malheureusement, la plupart des pétitions émanent de groupes d'intérêts spéciaux. Je citerai un exemple à l'intention de mon collègue. Ce dernier a parlé d'une pétition de 1 000 signatures sur l'avortement, dont la réalisation a demandé des efforts considérables. Le député sait probablement que, d'après les derniers sondages d'opinion au Canada, de 70 à 80 p. 100 de Canadiens ne veulent pas que l'on rende l'avortement illégal. Autrement dit, en langage populaire, ils sont en faveur du libre choix. Aussi, en accordant trop d'importance à une pétition d'un million de signatures présentée par un groupe d'intérêt spécial, nous risquerions de nous mettre dans le pétrin.

(1140)

Tous les députés qui siègent à la Chambre représentent les électeurs de leurs circonscriptions respectives. Ceux d'entre nous qui font bien leur travail savent ce que pensent la plupart de leurs électeurs, même ceux qu'on appelle la majorité silencieuse, et je crois qu'il nous incombe de demeurer en contact avec eux et de ne pas nous laisser fléchir trop rapidement par les groupes d'intérêts spéciaux.

M. McClelland: Je prends bonne note de l'opinion émise par mon collègue. Il ne fait aucun doute que nous ne sommes pas élus pour travailler à l'aveuglette. Nous devons nous servir de notre intelligence et mettre notre sagesse individuelle au service de la sagesse collective de la Chambre. Loin de moi l'idée que nous devions diriger le pays en nous en remettant aux référendums ou aux initiatives de particuliers, mais ces moyens doivent exister et être accessibles aux simples citoyens.

Il s'agit de voir ici quel traitement la Chambre réserve aux pétitions, ce qu'elle en fait et si les citoyens ont l'impression que les pétitions qu'ils présentent valent l'effort qu'elles leur demandent.

[Français]

L'hon. Fernand Robichaud (secrétaire d'État (Affaires parlementaires)): Monsieur le Président, j'aimerais d'abord faire remarquer aux députés de cette Chambre que le principe de la motion que nous débattons aujourd'hui a déjà fait l'objet de considérations et a été renvoyé, le 7 février dernier, au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour étude et rapport à une date ultérieure.

Voici le texte, et je cite: «Que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre examine les procédures concernant les déclarations des députés, les débats spéciaux, l'enregistrement par des moyens électroniques des votes en Chambre, la conduite des affaires émanant des députés, notamment en ce qui touche les projets de loi d'intérêt privé et les projets de loi d'intérêt public émanant du Sénat, les anomalies ou erreurs techniques qui se trouvent dans le Règlement, la réforme de la période des questions, les mesures propres à favoriser une participation plus directe de citoyens, notamment des initiatives de citoyens, le droit des électeurs de révoquer leur député, les référendums obligatoires, les votes libres à la Chambre des communes, les débats sur des pétitions et les élections à date fixe.»

Il s'agit donc d'un exercice redondant, déjà entrepris par un comité permanent de cette Chambre. Mais je ne veux d'aucune façon contester le droit du parti de l'opposition de débattre de ce sujet aujourd'hui, un jour désigné.

Avant d'amorcer le débat comme tel, il est important de noter qu'il existe deux types de pétition: le premier, les pétitions découlant du droit fondamental des citoyens de présenter des griefs au Parlement, et, le deuxième, des pétitions visant à obtenir la présentation d'un projet de loi d'intérêt privé et qui seront signées par la ou les personnes demandant d'être soustraites à l'application d'une loi. Évidemment, le débat d'aujourd'hui porte sur le premier type de pétition, à savoir celui portant sur des griefs exprimés par les citoyens.

Pour bien situer le débat pour les Canadiens et les Canadiennes qui nous écoutent, je ferai, au cours des prochaines minutes, un bref historique des pétitions présentées à la Chambre des communes, comment elles y sont présentées et quelle action le gouvernement doit entreprendre en réponse à celles-ci. Par la suite, j'énoncerai une série d'exemples démontrant que le présent Règlement met à la disposition des députés, donc de cette Chambre, les moyens d'aborder les sujets présentés par les pétitionnaires. Enfin, je ferai un survol rapide des actions entreprises par notre gouvernement pour réformer en profondeur le fonctionnement de la Chambre des communes et visant à augmenter substantiellement le rôle des députés dans l'élaboration des politiques fiscales et du processus législatif.

(1145)

Les pétitions telles que nous les connaissons maintenant se sont développées au XVIIe siècle, période au cours de laquelle le Parlement britannique a commencé à être perçu beaucoup plus comme une institution politique et législative plutôt que d'être la plus haute cour de justice de la nation. Le droit des pétitionnaires et les pouvoirs de la Chambre d'agir sur ces pétitions ont été définis au sein de deux résolutions adoptées par la Chambre des communes en 1669. Et voici leur libellé:

[Traduction]

«Il est entendu que chacun en Angleterre a le droit de préparer des pétitions et de les présenter à la Chambre des communes en cas de grief, que la Chambre des communes doit les recevoir et que c'est son droit et son privilège indubitables de les juger et de déterminer la nature et l'objet de ces pétitions et de décider à quel point elles sont recevables ou non.»

[Français]

Jusqu'à l'adoption, en 1842, de plusieurs articles du Règlement visant à encadrer la présentation et à rendre quasi impossible tout débat immédiat sur ces pétitions, la Chambre des communes imposait très peu de restrictions sur les débats découlant de la présentation de pétitions. La présentation de pétitions était alors devenue une méthode par laquelle des sujets de débat étaient introduits à la Chambre de l'extérieur et étaient parfois utilisés pour faire obstruction aux travaux déjà prévus des Communes.


1587

De plus, la composition de la Chambre devenant à l'époque de plus en plus représentative des différents courants de pensée, le besoin de canaliser les demandes pressantes de la population via des pétitions diminua et par le fait même le volume de pétitions décrût substantiellement.

Au Canada, le droit de pétitionner la Couronne ou le Parlement afin qu'elle apporte remède à un grief, est un principe fondamental de notre Constitution et est utilisé fréquemment depuis 1867. Bien que la Chambre des communes soit une institution représentative des électeurs qui en élisent ses membres, la Chambre ne peut être saisie que de sujets présentés par les élus et aucun citoyen ordinaire n'a le droit d'y siéger personnellement. De là, la nécessité de permettre aux Canadiens et Canadiennes de porter à l'attention du Parlement les griefs qu'ils jugent ainsi pertinents.

Au Canada, et contrairement à ce qui s'est passé en Grande-Bretagne, la mise en place de cours de justice et le manque de précision dans le Règlement d'alors et un traitement des pétitions qui ne reflétaient en rien l'importance qui aurait dû leur être attribuée, compte tenu de la nature fondamentale de ce droit, auront contribué substantiellement à la réduction du nombre des pétitions soumises au Parlement.

C'est pourquoi, en 1984, le Comité spécial sur la réforme de la Chambre des communes s'est penché sur la question des pétitions et a proposé de nombreuses modifications au Règlement afin de corriger les anomalies associées au traitement de celles-ci.

Voici ce qu'a soulevé le Comité présidé par l'honorable McGrath dans son rapport présenté en juin 1985:

«Les pétitions adressées à la Chambre des communes constituent un des moyens de communication les plus directs entre le peuple et le Parlement. Cet instrument fort simple permet à la population de faire part à la Chambre de ses inquiétudes sur des questions d'intérêt public. Cependant, tous les efforts déployés pour les préparer et obtenir les signatures nécessaires semblent vains puisqu'il est rare que l'on donne suite aux pétitions après qu'elles aient été présentées et reçues par la Chambre.

Nous estimons que la présentation de pétitions constitue un droit fondamental des citoyens et qu'elles font partie intégrante du processus qui leur permet de s'adresser à leurs élus. Toutefois, la façon dont elles sont actuellement traitées à la Chambre des communes laisse à désirer. Il y aurait lieu de préciser la procédure qui régit les pétitions pour accroître le respect dont ce processus devrait faire l'objet et le rendre plus efficace. Il faut absolument préciser les règles concernant les pétitions, de manière à rendre leur présentation plus uniforme et assurer que leur fond soit jugé recevable par la Chambre. Par ailleurs, on devrait émettre des lignes directrices au sujet de la formulation de la pétition et des signatures qui y apparaissent. Nous estimons également que les auteurs de pétitions ont le droit de recevoir une réponse.»

(1150)

Dans le but de réaliser ces objectifs, le comité recommanda huit amendements, huit changements au Règlement concernant les pétitions.

Voici donc les règles à suivre pour présenter une pétition à la Chambre des communes-je suis sûr que tous les députés les connaissent, mais pour le bénéfice des gens qui nous écoutent- telles que dictées par l'article 36 du Règlement, et tel que décrit sommairement dans la troisième édition du Précis de procédure, préparé pour la Direction des recherches pour le Bureau.

«Les députés qui veulent présenter des pétitions doivent le faire pendant les Affaires courantes, après la rubrique «Motions» et avant que ne soit fait appel des questions inscrites au Feuilleton. Une pétition peut aussi être présentée en la remettant au greffier de la Chambre, à n'importe quel moment de la durée d'une séance.

Toutefois, avant qu'une pétition ne puisse être présentée, elle doit être examinée et certifiée conforme quant à la forme et au contenu par le greffier des pétitions.

Une fois les exigences liées à la certification dûment remplies conformément au Règlement, le député à qui la Présidence a donné la parole pour présenter la pétition de sa place, peut faire une très courte déclaration pour informer la Chambre de son contenu; la pétition elle-même ne doit par ailleurs donner lieu à aucun débat.

De plus, le gouvernement doit répondre dans les 45 jours à toutes les pétitions qui lui sont renvoyées. La présentation des pétitions est assujettie à diverses conditions. Ainsi, les étrangers qui n'ont pas leur domicile au Canada n'ont pas le droit d'en adresser au Parlement. Quant aux citoyens canadiens ordinaires, ils ne peuvent s'adresser directement à la Chambre, leurs pétitions doivent être datées, endossées et présentées par un député. Un député ne peut être contraint à présenter une pétition et, s'il refuse, aucune accusation ne peut être portée contre lui.

Il est intéressant de noter que l'article 36 du Règlement inclut les huit recommandations du rapport McGrath, à l'exception d'un élément. Le comité recommandait d'exiger du gouvernement une réponse dans les deux semaines suivant le dépôt d'une pétition, alors que l'article 36 prescrit un délai maximal de 45 jours.

Il existe au sein du Règlement de notre institution plusieurs chemins pouvant conduire à un débat sur un grief présenté dans une pétition qui a été déposée à la Chambre. Un député peut en faire le sujet d'une motion ou d'un projet de loi, qu'il ou elle inscrira au Feuilleton de la Chambre pour débat. Il peut faire l'objet d'une motion émanant du gouvernement, et à titre d'exemple la motion que nous avons présentée sur l'essai des missiles de croisière en sol canadien, qui a permis aux parlementaires de débattre de cette question qui, à plusieurs reprises, a fait l'objet de nombreuses pétitions déposées en cette Chambre.

Le grief peut aussi être étudié par les parlementaires en comité, peut prendre la forme d'une question orale, lors de la période des questions, ou d'une question inscrite au Feuilleton. Évidemment, le gouvernement peut juger nécessaire de légiférer afin


1588

d'apporter remède au grief qui lui a été présenté par le biais de la Chambre des communes.

À ceci s'ajoutent bien sûr les débats généraux des subsides ou plus communément appelés les jours de l'opposition qui, comme aujourd'hui, permettent à l'opposition de décider de la motion qui sera débattue au cours de jours désignés de la période de subsides. Nous sommes présentement dans la période se terminant le 26 mars et dans cette période, on a réservé neuf jours désignés. La prochaine période, qui prendra fin le 30 juin, dix jours désignés sont réservés. Pour la période qui se termine le 10 décembre, six jours désignés à l'opposition sont aussi réservés.

(1155)

Donc, s'ils le désirent, les partis d'opposition disposent normalement de 20 jours par année au cours desquels les griefs soulevés par les Canadiens et les Canadiennes au moyen de pétitions déposées à la Chambre feraient et pourraient faire l'objet de débats.

Le 7 février dernier, la Chambre des communes adopta la motion présentée par le leader du gouvernement à la Chambre des communes, l'honorable Herb Gray, motion qui modifie les règles parlementaires. Le but de cette réforme est de rehausser l'efficacité de la Chambre en donnant à chaque député davantage d'influence sur l'élaboration des politiques.

Ces modifications permettant aux députés d'élargir leur rôle dans l'élaboration des lois et l'établissement des priorités des dépenses du gouvernement furent les premières initiatives découlant du programme électoral libéral, «Pour la création d'emplois: pour le relance économique», et, bien sûr, notre fameux livre rouge. Ces initiatives ont été adoptées par la Chambre des communes.

Lors du débat, M. Gray a indiqué, et je cite: «Aujourd'hui, nous rétablissons les bases nécessaires à cette réforme. Il est maintenant de la responsabilité de tous les députés, tant du gouvernement que ceux de l'opposition, de faire fonctionner ces nouvelles règles.»

Les principaux changements au Règlement sont les suivants: l'instauration de deux nouveaux processus, en plus de celui qui existe actuellement, permettant aux députés d'étudier les projets de loi. Ceci résultera en une participation directe des députés dans l'élaboration des lois et une plus grande autonomie pour amender les législations gouvernementales, et ce, par le système des comités.

Le Comité permanent des finances tiendra des consultations prébudgétaires et fera des recommandations au ministre des Finances.

Les comités permanents auront le pouvoir d'examiner les priorités futures du gouvernement en matière de défense, et de faire rapport à ce sujet en même temps qu'ils se penchent sur le budget principal de l'année en cours.

Ces mesures ont été précédées par une révision de la structure des comités permanents afin de refléter la réorganisation du gouvernement. Ces réformes ne sont qu'une première étape.

Une pétition est un moyen privilégié dont dispose la population pour exprimer ses opinions, et ce directement sur le parquet de la Chambre des communes ou du Sénat, par l'entremise d'un parlementaire. Le gouvernement est forcé d'y répondre et, à bien des égards, les prendra en considération lors de décisions futures.

Par exemple, et ceci est un très bon exemple, la semaine dernière, mon collègue, le ministre responsable de la Société canadienne des postes, a annoncé un moratoire sur la fermeture des bureaux de poste. Il ne fait aucun doute à mon esprit que les nombreuses pétitions présentées en cette Chambre par les députés à cet égard auront eu un impact certain sur non seulement la décision de procéder à une révision de cette politique, mais aussi à la décision d'imposer le moratoire.

Un autre cas, qui est aussi un bon exemple, la TPS. Durant la campagne électorale, nous avons pris l'engagement de remplacer la TPS et de demander au Comité permanent des finances d'étudier des solutions de rechange. Cette décision ne s'est pas prise en vase clos. Il est bien évident que les Canadiens et les Canadiennes ont été entendus par notre gouvernement et que leurs milliers de pétitions présentées à cette Chambre, soumises à la Chambre, auront porté fruit.

Bien sûr, les députés du parti de l'opposition, qui ont présenté la motion, s'empressent de soulever les cas où les opinions exprimées par les Canadiens dans des pétitions n'ont pas été reflétées dans les décisions prises par le gouvernement et négligent de mentionner tous les autres cas.

Aujourd'hui, nous débattons principalement de la question des pétitions, mais je crois que l'enjeu véritable de ce débat et de toutes les questions soulevées par les députés du Parti réformiste en matière de réforme parlementaire est celui de la loyauté des députés, soit envers leurs électeurs, leur parti, leur pays ou leur conscience.

(1200)

Nous, du Parti libéral, croyons qu'un député se doit d'établir un équilibre entre ces pôles qui sont parfois compatibles et parfois très contradictoires lorsque vient le temps de prendre une décision.

Le Canada est un pays dont l'ensemble est supérieur à la somme de ses régions et les décisions prises par le Parlement canadien se doivent d'être plus que la somme des décisions prises individuellement par chacun des députés et ce, dans le but d'assurer une cohérence nationale.

Pour nous, libéraux, la crédibilité des parlementaires est rehaussée lorsque ceux-ci participent directement et de façon importante dans la création et la réalisation des programmes et objectifs que devra accomplir le gouvernement fédéral et, non pas, comme le voudraient certains députés, en faisant d'eux des perroquets de l'opinion publique et de simples machines à voter.

[Traduction]

En conclusion, je sais que le temps qui m'était alloué s'achève, mais pour ce qui est des autres exemples mentionnés dans la motion de l'opposition, j'aimerais rappeler aux députés que le ministre de la Justice a déjà répondu, durant la période des questions, à certaines de ces demandes qui sont à l'étude.


1589

Quant au troisième et dernier exemple, qui traite de la révocation des députés, je n'ai pas à revenir sur ce qui a déjà été dit en cette Chambre au sujet de l'expérience menée en Alberta.

[Français]

En conclusion, je pense sincèrement qu'il existe déjà dans notre Règlement de nombreuses façons de débattre des griefs présentés dans les pétitions que nous déposons en cette Chambre. Par contre, si le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre en venait à la conclusion qu'il faut apporter des correctifs au sujet des pétitions, je suis convaincu que tous les députés considéreront très sérieusement ces recommandations.

[Traduction]

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, je remercie l'honorable député de son intervention.

Alors que nous parlons de réforme, le gouvernement promet de rendre tout le processus plus transparent. Le député a mentionné au début de son discours que les pétitions seraient étudiées en comité. Il me semble, pour ma part, qu'il a insinué que notre motion était recevable, mais certes contestable, du fait que le renvoi des pétitions en comité réglait le problème.

Les députés savent que les citoyens peuvent suivre les débats de la Chambre à la télévision, et lorsque la Chambre renvoie un dossier ailleurs, ils se demandent où il peut bien aller. Par exemple, qu'advient-il lorsqu'une question est renvoyée en comité? Durant ce mandat, lors des séances d'information à l'intention des nouveaux députés, l'un des greffiers a mentionné que les pétitions étaient simplement empilées dans un endroit quelconque.

J'ai pris note des commentaires du député au sujet de la fermeture des bureaux de poste ruraux. Ce gouvernement vient tout juste de déclarer un moratoire. Cette décision est peut-être due en partie aux pétitions. C'est une bonne chose. Le gouvernement en tient peut-être compte, après tout.

Mais je n'irais pas jusqu'à dire que le débat d'aujourd'hui est inutile puisque les pétitions seront étudiées en comité. Les Canadiens ignorent ce qui se passe en comité. Je doute qu'ils retiendront leur souffle en attendant qu'un député vienne en Chambre présenter un rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre sur une pétition donnée.

De ce côté-ci de la Chambre, nous réclamons que le processus soit plus ouvert de façon à ce que les citoyens puissent suivre les débats que les pétitions susciteront à la Chambre des communes.

J'aimerais demander au député s'il pense que ce serait une bonne chose que les électeurs puissent effectivement suivre de tels débats à la télévision. À propos des pétitions contre la TPS, dont il a parlé et que ses collègues ont présentées en grand nombre lors de la dernière législature, par centaines de milliers je dirais, je voudrais bien savoir ce qui va se passer lorsque son gouvernement en présentera une nouvelle version améliorée. Comment ce gouvernement réagira-t-il aux pétitions de toutes sortes qui seront présentées à la Chambre des communes au nom des Canadiens?

(1205)

[Français]

M. Robichaud: Monsieur le Président, je veux rassurer la députée qui vient de poser la question que je ne doute pas du droit de son parti de présenter aujourd'hui cette motion. J'ai tout simplement dit qu'on avait déjà traité de ce sujet et qu'un comité allait l'examiner, mais je crois quand même qu'il pourrait être utile d'en débattre plus longuement dans cette Chambre.

Elle a fait allusion à l'exemple que j'avais donné, celui d'un moratoire sur la fermeture des bureaux de poste annoncé par le ministre. Je me rappelle bien, lorsque j'étais député, de 1984 à 1990, que déjà, les gens nous faisaient parvenir des pétitions. Les gens de mon comté m'avaient fait parvenir nombre de pétitions parce que le gouvernement de l'heure avait décidé à un moment donné de mettre la hache dans les bureaux de poste, principalement dans les régions rurales.

Je crois que les pétitions ont joué un rôle de première importance pour attirer l'attention du gouvernement sur le fait que pour les gens des régions rurales, les bureaux de poste étaient très importants.

Elle a aussi fait allusion à la TPS. Lorsque nous étions dans l'opposition, nous avons présenté beaucoup de pétitions à l'effet que la TPS rendait les affaires difficiles. On imposait aux hommes d'affaires toute une procédure qui était assez compliquée. Nous avons décidé de trouver un mécanisme de remplacement de la TPS. Je crois sincèrement que le comité qui examine actuellement ce problème, qui recherche des moyens pour remplacer la TPS par un système beaucoup plus compatible avec la façon de gérer des affaires, un système plus simple, que ce comité va tenir compte des revendications des Canadiens et des Canadiennes, lesquelles ont été présentées à cette Chambre par le biais de pétitions présentées par tous les députés de tous les partis.

[Traduction]

M. Jim Jordan (Leeds-Grenville): Monsieur le Président, je doute que quiconque remette en question le principe voulant qu'on veuille toujours savoir ce que pensent les Canadiens.

Je ne vois pas comment on peut l'appliquer. Je me demande si nous ne risquons pas de créer des attentes en annonçant que les pétitions pourraient éventuellement faire l'objet de discussions et de débats, au moins une fois au cours d'une session, comme l'indique la motion.

J'ignore comment on pourrait régler la question. J'ai présenté de nombreuses pétitions à la Chambre des communes. L'an dernier, j'en ai présenté une qui avait de 4 000 à 5 000 signatures. Je suis toujours aussi un peu déçu du sort que connaissent les pétitions présentées. Des gens les signent, mais on ne peut même pas déchiffrer les signatures et on se demande quoi en faire.

Or, j'ai gardé cette pétition, parce que le sujet soulève beaucoup d'intérêt dans ma circonscription. J'ai l'intention d'y donner suite. C'est une question qui prend presque tout mon temps à l'heure actuelle. Je pense qu'un parlementaire qui présente et dépose une pétition devrait s'interroger sur son bien-fondé. Il se


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peut qu'une pétition présentée ne porte que 25 signatures et qu'on sache pertinemment que, dans sa propre circonscription, on pourrait obtenir des milliers de signatures pour une pétition faisant valoir des opinions contraires.

Je me demande si le simple fait de présenter une pétition ne nous donnera pas l'illusion que la question est vraiment importante et qu'elle devrait faire l'objet de discussions, mais que cela ne se réalisera pas à cause de notre mode de fonctionnement.

Comme le député l'a mentionné, il y a bien d'autres façons de présenter une motion à partir d'une question soulevée dans une pétition. On peut le faire par le biais des journées d'opposition, comme nous le faisons aujourd'hui. On peut continuer de réserver à une journée d'opposition une question qui a été soulevée par une pétition qu'on a reçue et qui semble avoir l'approbation de beaucoup de Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

Le mode d'action de la procédure me laisse songeur. Je n'arrive pas à le comprendre.

(1210)

[Français]

M. Robichaud: Monsieur le Président, j'aborderai seulement les points que mon honorable collègue a soulevés. Il y avait plusieurs moyens d'apporter, devant les députés de cette Chambre, les sujets qui sont présentés à la Chambre par les Canadiens et les Canadiennes dans leurs pétitions. Mais donner peut-être espérance que le tout pourrait porter, chaque fois que les gens proposent une pétition, voudrait dire que beaucoup de temps en cette Chambre serait consommé pour la considération de sujets qui sont souvent de nature très régionale.

Toutefois, je crois quand même que le dépôt de pétitions a sa raison d'être et que je serais certainement consentant à examiner les propositions du comité de la Chambre qui examine actuellement toute la procédure de la présentation des pétitions, s'il advenait qu'il nous présentait une façon de mieux donner suite à ces pétitions qui, en fait, répondraient aux aspirations de ceux qui les présentent.

M. François Langlois (Bellechasse): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur la motion du Parti réformiste telle que présentée par l'honorable député d'Edmonton-Sud-Ouest.

La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui me semble un petit peu prématurée en ce sens que déjà le comité qui étudie cette question, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre qui est saisi d'un de ces aspects de la question, n'a pas fait rapport et va, dans les semaines qui viennent, se prononcer sur cette question-là. Cependant, le Parti réformiste a choisi d'amener comme sujet, lors de sa journée d'opposition, ce thème-là.

C'est un thème qui me tient à coeur puisqu'il touche directement aux considérations principales de la démocratie canadienne, de la démocratie parlementaire, de la démocratie représentative. Lorsqu'on lit notre Constitution écrite et en particulier la Loi constitutionnelle de 1867, le premier considérant dans le préambule se lit comme suit: «Considérant que les provinces du Canada, de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick ont exprimé le désir de s'unir en fédération pour former un seul et même dominion sous la couronne du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande avec une constitution semblable dans son principe à celle du Royaume-Uni.»

Nous avons donc, de par la volonté du constituant de 1867, le Parlement de Westminster, une constitution écrite et des institutions, notamment la Chambre des communes, qui, dans leur essence même, sont basées sur le même principe que les institutions du Royaume-Uni, où existe le système de la démocratie par représentation. C'est-à-dire que les députés sont élus pour un mandat qui, bien sûr, n'est pas fixe, mais qui varie de quatre à cinq ans, suivant les aléas de la vie politique, et à l'intérieur de ce mandat ils ne sont pas directement imputables à leurs électeurs et électrices.

Cette représentativité parlementaire, on l'a vue au cours des siècles et jusqu'à la fin du siècle dernier. Permettez-moi de rappeler que les gouvernements et les Parlements voulaient tellement montrer que les députés et les gouvernements étaient les représentants de la population, que les gouvernements ne démissionnaient pas immédiatement après une élection générale, même s'ils avaient été battus lors de l'élection générale, mais attendaient un vote formel de la Chambre des communes qui les mettait en minorité, et suivait la démission. Ça s'est accéléré au XXe siècle, pour en venir à une situation beaucoup plus rapide où les gouvernements, maintenant, dès qu'ils ont réalisé qu'ils n'avaient plus la confiance de l'électorat, n'attendent plus un vote formel de la Chambre des communes avant de démissionner. Il y a déjà eu une adaptation, lente, bien sûr, mais une adaptation qui s'est faite.

(1215)

Je me permets d'ouvrir une parenthèse à ce stade-ci, et je vais revenir sur la motion de l'honorable député d'Edmonton-Sud-Ouest, pour mentionner qu'actuellement, nous discutons, dans chacune des provinces, de la refonte de la carte électorale, qui est un sujet où les électeurs et électrices sont concernés au premier chef. Des audiences publiques sont prévues.

Permettez-moi de souligner qu'au Québec, particulièrement, avec le projet de réforme de la carte électorale qui s'en vient, et comme député dont la circonscription est à cheval entre la région de la capitale nationale-celle de Québec, bien sûr-et l'est du Québec, cette région, avec le projet qui nous est soumis, va manifestement perdre un député. La circonscription de Matane se voit englobée dans celle de Gaspé et ma propre circonscription, celle de Bellechasse, s'enrichit de neuf municipalités et voit sa population encore augmentée.

On voit, par exemple, dans la carte électorale qui nous est soumise, que les circonscriptions rurales, du moins dans leur grande majorité, où traditionnellement on avait diminué le nombre d'électeurs pour compenser l'agrandissement du territoire, dans beaucoup de ces circonscriptions rurales, on ne retrouve plus maintenant-et c'est le cas de ma circonscription, celle de Bellechasse-le facteur de pondération, c'est-à-dire un nombre moindre d'électeurs pour un territoire plus grand. C'était une chose sur laquelle on aurait pu se pencher, sur laquelle des pétitions pourraient être facilement présentées, il suffirait de les susciter et bon nombre d'entre elles pourraient être déposées sur la table et possiblement, si une réforme comme celle dont parle le Parti réformiste était acceptée, pourraient être débattues.


1591

Dans le même sujet, lorsqu'on parle de réforme de la carte électorale, l'article 51 de notre Loi constitutionnelle de 1867, pourquoi n'a-t-on pas touché, en vertu des dispositions constitutionnelles ou par le biais de pétitions, des sujets aussi importants que la représentation des Îles-de-la-Madeleine, par exemple, qui forment une entité tout à fait distincte dans le régime actuel. Je pense que nous aurions pu obtenir un consentement assez rapide quant aux Îles-de-la-Madeleine pour que ces dernières puissent constituer une circonscription visée par l'article 51 de la Loi constitutionnelle de 1867, c'est-à-dire une circonscription où le nombre d'électeurs ne serait pas compensé par le nombre d'électeurs du Québec continental. Je ne parle pas seulement pour le Québec, cela pourrait être la même chose pour la circonscription du Labrador.

Je voulais ouvrir cette parenthèse pour vous signaler que notre souci de nous adapter au désir démocratique de nos concitoyens et concitoyennes est tout à fait présent.

La motion de l'honorable député d'Edmonton-Sud-Ouest, évidemment, est extrêmement vague de par son libellé même puisqu'elle donne des exemples qui vont des cartes de tueurs en série, «serial killer cards», en anglais, c'est peut-être plus précis, à des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants, à la révocation des députés. J'entendais, tout à l'heure, lors du discours du proposeur de la motion, parler de peine capitale, si j'ai bien entendu.

Je trouve un peu dommage que par le biais d'une motion qui vise à modifier le Règlement de la Chambre, on veuille réintroduire cette notion de peine capitale qui est disparue de nos moeurs. Il n'y a pas eu d'exécution depuis 1963; cela fait donc 30 ans et plus maintenant qu'il n'y a pas eu d'exécution dans ce pays. Il m'apparaît malheureux qu'on veuille, aujourd'hui, introduire un élément comme celui-là dans un débat, alors que nous avons fait la preuve, Québécois et Québécoises, Canadiens et Canadiennes, de notre capacité de tolérance en donnant l'exemple que comme État, ce n'était pas en tuant des gens qu'on allait enseigner à la population que ce n'était pas bien de tuer. Nous avons largement fait ce débat et il serait dommage qu'à l'occasion de meurtres crapuleux, qui soulèvent souvent la vindicte populaire, on se dépêche à faire signer des pétitions, qui, avec nos règlements pourraient être immédiatement votables, que l'on fonctionne un petit peu comme un ivressomètre ou un petit peu comme un appareil pour mesurer le rythme cardiaque ou lorsqu'il y a une pointe, effectivement, qu'on réagisse immédiatement.

(1220)

Je crois que le régime parlementaire doit s'accommoder de situations qui requièrent une analyse un peu plus profonde, un peu plus poussée et sur un continuum de temps qui soit plus approfondi; parce qu'il est toujours facile dans le domaine des émotions de faciliter la présentation de motions, la présentation de pétitions, qui pourraient, suivant des termes que l'on ne nous précise cependant pas, devenir débattables et votables en cette Chambre. Alors, là je mets un bémol, parce que je ne suis pas sûr de l'efficacité à long terme ou à moyen terme d'une proposition comme celle-là.

Il faut comprendre aussi que la proposition qui est faite s'inscrit dans un cadre. Non seulement on parle de pétitions, mais il faut rattacher ça à d'autres propositions qui nous sont faites par le Parti réformiste sur le rappel des députés, sur probablement l'initiative populaire des projets de loi, sur le référendum bien sûr, généralement nous sommes d'accord, puisque le grand rendez-vous référendaire au Québec est pour bientôt, monsieur le Président. Vous savez mieux que quiconque, nous allons avoir à nous prononcer sur notre destin national au Québec.

Je pense qu'il est acquis, en matière constitutionnelle maintenant, que les changements majeurs-et ça nous le savons depuis Charlottetown-en matière constitutionnelle ne feront plus l'objet de décisions en vase clos, de discussions derrière les portes closes, que l'expression «to roll the dice» ne s'appliquera plus, que les citoyens et les citoyennes seront consultés. Et 1992 nous donne une indication claire au niveau fédéral, pour des fins fédérales. Ça ne veut pas dire l'immixtion fédérale dans les juridictions provinciales; que si un gouvernement fédéral veut consulter la population pour des fins fédérales, pour des fins qui relèvent de la compétence de cette Chambre ou de ce Parlement, mais jamais nous ne pourrons accepter que le gouvernement fédéral consulte la population pour des fins qui ne relèvent pas de la compétence fédérale.

C'est ainsi que nous avons toujours prôné, et c'est maintenant admis, que le destin du Québec doit se décider par les Québécois et les Québécoises, sous l'empire de lois votées par l'Assemblée nationale du Québec, et non pas sous l'autorité de quelque mesure législative adoptée par cette Chambre. C'est le droit fondamental des peuples à l'autodétermination, droit qui est d'ailleurs reconnu par la Charte de San Francisco, fondatrice des Nations Unies, tel que nous le connaissons.

J'irais même un peu plus loin, monsieur le Président, en vous disant que la motion du Parti réformiste qui est devant cette Chambre aujourd'hui tient peut-être plus d'un programme électoral que d'une motion qui peut sembler être une affaire de routine, en ce sens que tout au cours de la campagne électorale, qui s'est terminée le 25 octobre dernier, le Parti réformiste a suggéré plusieurs des réformes qui ont été présentées devant cette Chambre ou qui ont fait l'objet d'interrogations de la part du Parti réformiste, notamment de questions qui ont été posées au premier ministre, de questions qui ont été posées au leader du gouvernement à la Chambre. Les réponses ont été assez claires et assez précises, il me semble, à partir du moment où les réponses du gouvernement sont claires, à savoir que le gouvernement libéral actuel n'entend pas permettre le vote libre de façon systématique, mais possiblement de façon ponctuelle.

Deuxièmement, le leader du gouvernement a clairement indiqué qu'il tenait à ce que la question soulevée ou les questions soulevées par le vote libre, entre autres, soient étudiées par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Nous devons aussi en prendre acte. Il y a une volonté politique de la part du gouvernement d'agir de cette façon.

Alors, ce qui a été décidé par le gouvernement, ce dont le gouvernement nous avise, suite à une élection, j'ai le net sentiment que des changements profonds ne pourront être apportés que dans une législature subséquente.

(1225)

Cela peut être un beau programme et même un programme intéressant que propose le Parti réformiste lorsqu'il parle d'initiatives populaires, de rappel des députés, de pétitions débattables et votables, et d'autres mesures analogues. Mais à moins que le Parti réformiste ne se prépare des munitions pour la campagne électorale qui précédera la 36e législature, je vois difficilement


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comment, en modifiant le Règlement de la Chambre ou en tentant de le faire modifier, on puisse s'attaquer à une décision gouvernementale assez bien établie, avec laquelle on peut être en désaccord, mais cette position a été émise de façon claire et précise.

Assez curieusement, les protagonistes du vote libre à la Chambre ne nous ont malheureusement pas donné d'exemples de votes libres depuis le début de la session. À moins que je fasse erreur, je n'ai encore vu aucun de mes collègues réformistes se lever pour exprimer un point de vue personnel, à moins que les points de vue personnels soient toujours convergents et que les mêmes se lèvent en même temps. Ce n'est pas mon problème, c'est le problème du caucus de ce parti qui a à vivre avec ses décisions. Mais j'ai hâte de voir le jour où le caucus réformiste, non pas se divisera dans son approche, mais où les divergences d'opinions se manifesteront, où ce sera un véritable forum ouvert où un débat d'idées se fera sur le parquet de la Chambre. Mais nous n'avons pas cette image de ce à quoi cela ressemble. Peut-être qu'ils pourraient nous donner un avant-goût en faisant un débat ouvert sur un projet de loi particulier, peut-être vont-ils nous l'annoncer prochainement. Mais en attendant, nous ne l'avons pas vu.

Il faut dire, bien sûr, et il me fait plaisir de le souligner à mon distingué collègue de Kingston et les Îles, que le gouvernement ne nous a pas non plus donné l'exemple beaucoup de votes libres en cette Chambre. On nous a dit qu'il y en aurait, mais on n'en a pas encore annoncé.

M. Milliken: Vous n'avez pas entendu M. Gray?

M. Langlois: Cela ne figure pas au hansard, mais je me permettrai de reprendre ses paroles, cela va venir bientôt. Alors, on pourra vérifier si les paroles de l'honorable député de Kingston et les Îles vont se concrétiser dans les semaines qui viennent. Alors, puisque ce sera consigné dans le hansard à compter du 21 février-et je n'ai pas eu de correction de la part du collègue de Kingston et les Îles-bientôt, il y aura des votes libres de la part du gouvernement. Le leader du gouvernement à la Chambre devrait-il parler au président du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Peut-être que bientôt nous aurons à le vivre.

Ce serait une autre dynamique, mais aussi une dynamique où l'initiative devrait venir du côté gouvernemental. On peut le traiter de façon un peu plus légère en disant que le Parti réformiste n'a pas encore appliqué, dans le concret, son programme, mais c'est plus facile pour un parti d'opposition de permettre des votes libres dont la signification serait beaucoup plus aléatoire. Alors que pour le gouvernement, permettre un vote libre à ses députés, une discussion libre, serait beaucoup plus significative. Lorsque le premier ministre se lèvera et qu'il dira, sur tel projet de loi, que la responsabilité ministérielle n'est pas engagée, nous pourrons voir comment tout cela se déroulera.

Je présume qu'il y aura une période d'adaptation, peut-être difficile. Qu'on regarde chez nos voisins du Sud le tordage de bras systématique qui peut se faire lors de certains projets de loi, même si le vote est supposément libre. Peut-être que notre système n'est pas si mauvais dans le fond; les discussions se font en caucus, et il s'agit finalement de l'endroit privilégié pour discuter d'une question pour qu'ensuite, les députés arrivent avec une position commune, qu'ils tentent d'atteindre des consensus. Peut-être. Je me pose la question. Ce n'est pas une réponse, mais peut-être que le vote libre, de façon systématique, empêcherait la recherche du consensus qui est si chère à notre démocratie parlementaire.

De toute façon, nous aurons à faire ce débat avec l'accession du Québec à la souveraineté, mais au niveau du Québec. Il n'entre pas dans mes prétentions de vouloir réformer cette Chambre. Je préfère y vivre, la réformer en profondeur bien sûr, mais avec les règles que nous avons acceptées et auxquelles nous nous soumettons de bonne grâce, avec toutes les règles du fair play britannique que nous avons eu l'occasion d'apprendre et de respecter, monsieur le Président. Je pense que l'opposition officielle, à ce sujet-là, a pu donner l'exemple de tout le respect qu'elle donnait au parlementarisme britannique dont nous avons hérité dès nos premières institutions de 1792.

(1230)

De cette façon, on se sent peut-être plus à l'aise que d'autres qui se sont fait élire avec le mandat de changer bien des choses en cette Chambre. Nous, nous voulons changer bien des choses, mais ailleurs. Nous voulons changer des choses au Québec. Par voie de conséquence, bien sûr, le Canada bénéficiera aussi des changements que nous voulons apporter à la réforme constitutionnelle canadienne et québécoise puisqu'il y aura une interaction continuelle entre les deux.

C'est de cette façon que j'entrevois le débat qui a cours. Un parti qui continue sa campagne électorale, un parti qui est en train tranquillement de déchirer certaines pages ou certains passages de son livre rouge et finalement un parti qui, depuis son élection, depuis le 25 octobre, continue le discours qu'il avait entrepris avant, pendant, et qui a suivi après la campagne électorale.

Un parti fondamentalement voué, et c'est le parti de l'opposition officielle, le Bloc québécois, parti dévoué à la défense, à la promotion des intérêts du Québec et ultimement, pas dans l'éternité mais dans les mois à venir, de pouvoir réaliser, non pas une réforme des procédures, non pas l'amendement à l'article 36 de nos règles de procédure de la Chambre, mais un projet combien plus emballant qui est celui, sans animosité, avec l'esprit ouvert, celui de se créer, chez nous au Québec, un pays, tout en vivant en harmonie avec nos plus merveilleux voisins, les Canadiens et les Canadiennes.

[Traduction]

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'ai écouté les observations du député de Bellechasse. Il a dit notamment que le Bloc québécois défend les intérêts du Québec.

À propos des intérêts du Québec, le député ne croit-il pas qu'il conviendrait de parler aussi de tout ce que la présente institution fait pour les Québécois? Par exemple, le gouvernement fédéral offre de bons services en fixant des normes dans les domaine de la protection de l'environnement et de l'appui aux petites entre-


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prises. Autrement dit, on fait beaucoup de choses non seulement pour les Québécois, mais pour tous les Canadiens.

Le député croit-il convenable de ne parler que des doubles-emplois et des problèmes avec le Canada? Ne croit-il pas qu'il est aussi de son devoir d'informer ses électeurs des avantages de la présence fédérale pour le Québec?

[Français]

M. Langlois: Monsieur le Président, je remercie l'honorable député de ses commentaires. De deux choses l'une, ou je me suis mal exprimé ou le député a mal compris. On pourrait peut-être faire un compromis et dire qu'il y a une responsabilité partagée, si l'honorable député est d'accord.

J'ai affirmé tout au long de mon intervention l'héritage que nous avions du parlementarisme britannique, la chance que nous avons eue de vivre en démocratie. Si aujourd'hui, on peut parler de faire la souveraineté du Québec en déposant tout simplement nos bulletins de vote dans une boîte de scrutin, en comptant les bulletins ainsi déposés et que la majorité l'emporte, c'est un héritage de la tradition démocratique britannique. Si nous n'avions pas cet héritage, nous ne pourrions pas réaliser le débat que nous entreprenons sur la souveraineté et l'avenir du Québec, ainsi que sur l'avenir du Canada aussi, parce que nos destins sont intimement liés.

(1235)

Si le débat est si civilisé, je pense que nous le devons en grande partie au fait que depuis maintenant 200 ans nous avons des élections libres et démocratiques, parfois plus libres et démocratiques que d'autres, et nous avons pu en bénéficier.

Pour compléter la question qu'il me posait, ainsi que ma réponse et mon intervention, le député me permet de rejoindre un point sur la motion principale du député d'Edmonton-Sud-Ouest. Je me posais une question sur la présentation de pétitions, les groupes spéciaux d'intérêt, le financement de pétitions. Qui va financer ça?

Des jugements ont été rendus en Saskatchewan confirmant que tout citoyen, personne morale ou physique, pouvait investir toute somme qu'il jugeait à propos lors d'une campagne électorale ou référendaire et ce pourrait être le cas pour le dépôt d'une pétition. Mais pour l'instant on n'a pas de balises, des balises claires reconnues par la loi, reconnues par nos tribunaux. Nous allons avoir un jour un jugement de la Cour suprême là-dessus puisque le solliciteur général a manifesté le désir que la Cour suprême soit saisie de la décision rendue par la Cour d'appel de la Saskatchewan là-dessus.

Tant qu'il n'y a pas de balises, personnellement, je préfère un statu quo dont nous connaissons les grandes lignes directrices plutôt qu'une aventure à risques très élevés.

[Traduction]

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté les observations du député. En tant que nouveau député, j'ai entendu dire ici bien des choses, dont l'expression «nous, Canadiens et Québécois», comme si le Canada et le Québec étaient séparés. Les dernières observations du député me troublent beaucoup. J'ignore s'il les lisait ou s'il improvisait, mais il a laissé entendre que le Bloc sera capable de réaliser l'indépendance du Québec sans susciter d'animosité. Je trouve cela très inquiétant.

Cela suscitera certainement de l'animosité. C'est là le genre de déclarations que je ne saurais prendre à la légère, moi qui suis allé partout au Canada et qui ai vécu dans toutes les provinces canadiennes, le Québec y compris.

Le député peut-il me dire comment le Bloc, en tant qu'opposition officielle, peut représenter l'est ou l'ouest du Canada, alors que son programme est absolument étranger à l'une ou l'autre de ces régions du pays?

[Français]

M. Langlois: Monsieur le Président, le Bloc québécois est dévoué, bien sûr, aux intérêts et à la sauvegarde des intérêts du Québec, mais le voeu des électeurs et électrices, en nous donnant le rôle d'opposition officielle, nous donne aussi le mandat de parler comme opposition officielle au nom de tous les Canadiens et Canadiennes, quelle que soit leur province d'origine. Et nous l'avons démontré dans cette Chambre lorsque nous avons donné notre consentement unanime pour la considération, en une seule journée, du projet de loi présenté pour mettre fin à la grève des débardeurs du port de Vancouver.

Nous avons participé activement, nous avons donné notre consentement, posé des questions sur les projets de loi et les sujets qui pouvaient intéresser les Canadiens de l'Atlantique, ceux des Prairies et ceux de l'Ouest. Bien sûr, notre mandat fondamental nous vient du Québec, le député ne fait qu'un constat lorsqu'il le mentionne, mais en aucune circonstance a-t-on pu nous prendre en défaut d'avoir refusé de prendre la défense des intérêts des Canadiens et Canadiennes lorsque la justice et l'équité pouvaient démontrer que nous devions agir en ce sens.

M. Dan McTeague (Ontario): Monsieur le Président, j'aimerais faire quelques commentaires à mon ami et collègue de Bellechasse, au sujet de la valeur de la responsabilité de représentation. Avant le 25 octobre, il s'agissait d'une reconnaissance qu'il n'était pas possible que le Bloc québécois soit l'opposition officielle.

(1240)

J'aimerais poser une simple question au député: Ne pense-t-il pas que c'est important qu'il représente tous les Canadiens, y inclus les Franco-Ontariens, les Franco-Québécois, les Franco-Terre-Neuviens et les Franco-Manitobains?

Je trouve qu'il est très important que le Bloc québécois aborde des sujets touchant le Canada en entier.

M. Langlois: Monsieur le Président, je remercie l'honorable député d'Ontario de sa question. Le sort des minorités francophones me préoccupe depuis que je suis un petit bonhomme à l'école primaire, où on demandait un sou blanc pour la survivance du français. Notre sou blanc, à l'époque, c'était notre cinq cents ou notre dix cents qui allait peut-être nous permettre d'acheter une tablette de chocolat ou une boisson gazeuse. On l'apportait à l'école et on savait que c'était pour une bonne cause.


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Tout le monde y travaillait. On voit aujourd'hui l'honorable député qui s'exprime dans un français impeccable.

Pensons à l'argent qui a été amassé au Québec, non seulement l'argent, mais pensons aussi aux membres du clergé du Québec qui ont fait de l'apostolat dans les autres provinces, dans plusieurs diocèses où ce n'était pas nécessairement facile. Rendons hommage à ces hommes et à ces femmes qui ont travaillé à l'extérieur du Québec.

En terminant, je me permets de rappeler qu'il y a quelques jours à peine nous, du Bloc québécois, élus par les seuls Québécois et Québécoises, avons donné une preuve de très grande ouverture et de compréhension des problèmes de l'Est canadien et en particulier de l'Atlantique canadien lorsque nous avons voté en faveur de la résolution constitutionnelle permettant la construction du pont reliant l'Île-du-Prince-Édouard au continent, ce contre quoi ont voté nos collègues réformistes. Alors, posons-nous la question: Qui, dans l'opposition, défend vraiment les intérêts des Canadiens, de l'Atlantique au Pacifique: le Bloc québécois ou le Parti réformiste?

Je pense qu'aller poser la question à la population de l'Atlantique canadien aujourd'hui nous amènerait une réponse assez claire et précise.

Monsieur le Président, permettez-moi aussi de vous mentionner tous les commentaires extrêmement positifs que nous avons reçus de la part de la presse et d'éminentes personnalités de l'Ouest canadien lorsque nous avons pris position sur la question du lock-out au port de Vancouver.

[Traduction]

M. Ted White (Vancouver-Nord): Monsieur le Président, au nom du whip du Parti réformiste, je veux informer la Chambre que, conformément au paragraphe 43(2) du Règlement, les députés de notre parti qui interviendront sur la motion diviseront leur temps de parole.

La motion à l'étude aujourd'hui est un autre exemple de la volonté du Parti réformiste de trouver des moyens de donner à la population canadienne un plus grand rôle dans le processus décisionnel du gouvernement.

Nous voulons favoriser des débats sur des questions importantes dans toutes les collectivités du Canada. Nous estimons que le gouvernement n'a pas toujours à prendre part à ces débats. Il n'est pas toujours nécessaire que ces débats soient organisés ou financés par le gouvernement.

Les gens aiment discuter des questions importantes avec leurs amis et leurs voisins. Ils aiment écrire aux courriers des lecteurs des journaux locaux et ils aiment téléphoner dans les tribunes téléphoniques à la radio et à la télévision.

Certaines personnes lancent des pétitions pour faire ressortir les préoccupations de leur collectivité. Ces débats et ces pétitions surgissent spontanément sans qu'il en coûte un sou au gouvernement et ils n'exigent pas sa participation ou son ingérence. Toute tentative faite par le gouvernement pour influer sur l'issue de débats à l'échelle locale peut facilement se retourner contre lui.

L'ancien gouvernement a dépensé d'immenses sommes pour le camp du oui dans le référendum de 1992, mais la population du Canada s'est faite sa propre opinion et a rejeté majoritairement sa proposition.

Les politiciens de l'époque ont refusé de s'excuser d'avoir tenté de manipuler les résultats du référendum et la volonté du peuple. Encore aujourd'hui, beaucoup sont incapables d'accepter ces résultats et continuent de critiquer le processus référendaire.

(1245)

Le Parti réformiste adopte une position tout à fait contraire. Nous avons fermement appuyé le droit des électeurs d'exprimer leur opinion lors du référendum de 1992 et nous en acceptons les résultats. Nous en acceptons toujours les résultats. Nous continuons de réclamer qu'une série de questions référendaires soient soumises aux électeurs sur un bulletin de vote distinct au moment de tous les scrutins fédéraux. Le coût de ces référendums serait minime, mais les avantages pour la population du Canada seraient énormes. En permettant aux Canadiens de jouer un rôle actif dans des décisions importantes, nous leur démontrerions que nous, les politiciens, sommes disposés à écouter leurs préoccupations.

Nous croyons que ce type de référendums constitue un élément essentiel de la nouvelle démocratie qui commence à poindre dans notre système parlementaire. Une pétition est une forme de mini-référendum. Émanant des citoyens, les pétitions ont parfois un caractère très local, ne comprenant que quelques milliers de signatures, mais sont parfois aussi d'envergure nationale, réunissant jusqu'à un million de signatures et plus.

Malheureusement, les gouvernements sont tellement absorbés par leur propre programme politique qu'ils ont tendance à ne pas tenir compte des pétitions, de ces mini-référendums. On voit souvent, sur des photos, des ministres en train d'accepter une pétition sur tel ou tel sujet, profitant de cette occasion pour faire la une au lieu d'en profiter pour écouter la volonté du peuple.

Beaucoup de pétitions visent précisément à demander au gouvernement de changer d'orientation ou de politique. Les Canadiens ont l'impression, à raison peut-être, que, au lieu de voir ces pétitions comme une façon de gagner la confiance des électeurs et de corriger certaines imperfections dans ses politiques, un gouvernement préférera ranger les pétitions sur une tablette et continuer de s'acquitter de ce qu'il appelle «son mandat».

Les gouvernements ne se rendent pas compte que, pour se faire réélire à l'âge de l'information, ils doivent écouter la volonté du peuple. Dorénavant, si nous voulons assurer la stabilité politique au lieu de dépendre de l'unité au sein des partis, il faudra que les gouvernements soient attentifs aux préoccupations des électeurs. Si nous ne voyons pas bientôt au moins certains éléments fondamentaux d'une démocratie de participation, nous devrons certainement traverser de nombreuses années de bouleversement et d'incertitude sur le plan politique.

Un des ministériels a dit que les pétitions ne sont pas rangées sur les tablettes, mais ce n'est pas l'impression qu'a la population. La plupart des adultes ont probablement signé une pétition à


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un moment ou à un autre -je sais que je l'ai fait -et, comme moi, ont probablement été déçus de constater que, peu importe le nombre de signatures que renferme une pétition, il n'existe en réalité aucun moyen de transformer cette pétition en une mesure législative qui puisse calmer les inquiétudes des pétitionnaires.

Nous croyons que des débats réguliers et ouverts sur les grandes pétitions présentées à la Chambre contribueraient à montrer aux Canadiens que le Parlement tient compte de leurs préoccupations et que leur signature sur une pétition a vraiment du poids. Ils sauraient que les grandes pétitions sont débattues ici et que le gouvernement peut alors prendre note de leurs préoccupations et présenter ou modifier des mesures législatives à cet égard.

Tout ce qui est fait mérite l'être bien fait. Le processus aurait encore plus de crédibilité si l'on tenait un vote libre à la fin du débat. Au lieu de faire preuve d'esprit de parti, nous aurions l'occasion, en tant que députés, de travailler ensemble pour appuyer ou rejeter activement l'orientation proposée dans une pétition.

La modification du Règlement tel que nous le proposons dans notre motion ne pose aucune menace pour le gouvernement. C'est une proposition qui n'a tout simplement pas de mauvais côtés. Après tout, quel tort pourrions-nous causer en débattant les pétitions de temps à autre?

Je prie instamment tous les députés de se joindre à moi pour appuyer cette motion et j'espère que beaucoup d'entre eux en parleront en termes favorables. Je suis très déçu de constater que les ministériels qui ont pris la parole jusqu'à maintenant semblent adopter une position négative simplement parce que c'est une motion du Parti réformiste. La possibilité de débattre les pétitions à la Chambre montrerait aux électeurs d'un bout à l'autre du Canada que nous sommes vraiment attentifs à leurs préoccupations.

Je voudrais établir un lien entre la discussion que nous avons aujourd'hui et le livre rouge. Les ministériels laissent entendre régulièrement que, parce que les Canadiens ont élu un gouvernement libéral, tous ceux qui ont voté pour les libéraux appuient chacune des politiques énoncées dans le livre rouge.

(1250)

Ou bien les députés ministériels sont naïfs -et je ne crois pas que ce soit le cas de la majorité -ou bien ils adoptent une position déraisonnable qui ne saurait tromper aucun Canadien qui y réfléchit bien. Tous les électeurs qui ont voté libéral ne peuvent souscrire à chacune des politiques énoncées dans le livre rouge. Ils l'ont probablement fait en estimant que, tout compte fait, ils faisaient le meilleur choix même si certaines des politiques pouvaient leur paraître inacceptables.

Même les députés ministériels doivent admettre qu'il y a probablement dans le livre rouge quelques politiques que la majorité des Canadiens souhaiteraient voir modifier. Ce n'est pas parce que la recherche initiale était mal faite, mais parce que les temps changent et que les opinions varient. Qu'y a-t-il de mal à s'adapter aux temps qui changent? Qu'y a-t-il de mal à reconnaître qu'une politique a fait son temps et ne convient plus? Quel meilleur moyen pour les électeurs de le faire savoir que de lancer une grande campagne de pétitions?

Si le gouvernement réagissait à une pétition importante à la suite d'un débat libre à la Chambre, sa popularité s'en trouverait raffermie, et il augmenterait vraisemblablement ses chances de remporter les élections subséquentes. Voilà le conseil que je donne gratuitement au Parti libéral.

Ce principe me semble tellement simple que je ne comprends pas pourquoi les gouvernements continuent de défier régulièrement les électeurs. Pourquoi font-il adopter de force leur programme pour s'étonner ensuite d'être défaits lors des élections subséquentes? Si chacun de nous ici apprécie l'opinion des membres de sa famille, de ses voisins et de ses amis, nous devons par extension apprécier l'opinion de tous les Canadiens.

Nous devons nous efforcer ensemble de leur donner davantage voix au chapitre ici à la Chambre en autorisant la tenue de débats sur des pétitions en leur nom. Traiter les pétitions plus au sérieux, c'est une façon de gagner la confiance des électeurs canadiens, surtout à propos de pétitions importantes comme celles qui réclament des modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants.

Le processus permettant la tenue de débats sur des pétitions serait nouveau et aurait sans doute besoin d'être modifié à la lumière de l'expérience après quelques sessions. Il faudrait trouver un moyen équitable de choisir les pétitions devant faire l'objet de débats, car il est clair que nous ne pourrions pas discuter de toutes celles qui sont présentées à la Chambre.

Si le choix se faisait en fonction du nombre des pétitionnaires, on aurait là un jugement implicite quant à l'importance du sujet à aborder à la Chambre. Il est clair qu'une pétition réunissant plus de un million de signatures aura été bien organisée et portera probablement sur une question d'importance nationale, tandis que les pétitions réunissant quelques milliers de signatures auront probablement été entreprises en réaction à un problème d'intérêt plus local intéressant davantage les administrations provinciales ou municipales. Quand les électeurs verront que nous discutons, à la Chambre, des grands problèmes qui nous auront été signalés au moyen de pétitions importantes, ils auront beaucoup plus confiance en nous, leurs représentants.

Encore une fois, je recommande instamment à tous les députés à la Chambre de montrer à leurs électeurs qu'ils sont à l'écoute de leurs opinions et se conduisent en conséquence. Je les exhorte donc à appuyer la motion à l'étude.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les observations de notre collègue d'en face. Bon nombre de ses objectifs sont certes réalisables et ne vont pas à l'encontre de certains principes auxquels je crois.

Aujourd'hui, nous sommes toutefois saisis d'une motion qui demande au gouvernement de modifier le Règlement. Aux dernières nouvelles, il est question du Règlement de la Chambre, pas de celui du gouvernement. Monsieur le Président, vous seriez outré si le gouvernement essayait unilatéralement de mo-


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difier le Règlement, sans compter que bien d'autres aspects de la proposition laissent à désirer.

Durant la dernière session, tous les députés de l'opposition se sont indignés de ce que le gouvernement de l'époque avait décidé de modifier le Règlement conformément à une recommandation du comité parlementaire, mais sans tenir compte des autres changements préconisés par ce dernier, créant ainsi un déséquilibre à la Chambre que l'opposition estimait inacceptable. En d'autres termes, le gouvernement n'aurait pas dû se montrer sélectif dans la mise en application du rapport. À ma connaissance, le comité n'a pas été saisi d'une recommandation visant à modifier le Règlement, du moins pas dans le sens où le député le propose dans sa motion d'aujourd'hui.

(1255)

Le vice-président: Je crois que la question est suffisamment claire. Le député veut-il répondre?

M. White (Vancouver-Nord): Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations, mais je ne peux m'empêcher de penser qu'elles s'éloignent beaucoup du sujet et de l'esprit du débat d'aujourd'hui.

Je tiens à rappeler que le Parti réformiste a présenté la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui pour aider les électeurs canadiens à avoir davantage leur mot à dire dans le fonctionnement de l'appareil gouvernemental. À notre avis, si les Canadiens constataient parfois, lors des débats télévisés de la Chambre, que nous discutons réellement de leurs pétitions, nous accomplirions un énorme progrès en vue de rendre le processus parlementaire plus accessible à la population.

Mme Grey: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement car il me semble que, si le Bureau a jugé la motion recevable, nous ne devrions certainement pas être en train de nous interroger sur sa légitimité. C'est aussi simple que cela.

Le vice-président: Chose certaine, elle suscite un débat.

[Français]

L'honorable député de Kamouraska-Rivière-du-Loup se lève-t-il pour faire un commentaire ou une observation? Très brièvement, il ne reste que deux minutes pour vous deux.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, je voudrais dire au député de Vancouver-Nord que j'aurais peut-être préféré que le Parti réformiste présente une motion sur les façons de moderniser la représentation des députés plutôt que vers l'accroissement de la démocratie directe, parce qu'il m'apparaît qu'il y a des choses du côté, par exemple, du vote électronique par télématique, les téléconférences, qu'il y aurait des choses que l'on pourrait mettre en place qui seraient plus urgentes que le fait d'amener en Chambre des pétitions tout de suite après l'élection d'un gouvernement où finalement la plupart des enjeux ont déjà été un peu décidés par la population, en tout cas, pour l'année qui vient.

J'aurais peut-être par contre une question à poser au député: Est-ce qu'il pourrait nous préciser qu'est-ce qui ferait qu'une pétition serait acceptée plutôt qu'une autre, parce qu'il faudrait se poser des questions sur combien faut-il de signatures, est-ce qu'il en faut dans chaque province? Est-ce que ce sont des sujets comme les modifications constitutionnelles qui pourraient revenir régulièrement? Parce que, sinon, on va se mettre à discuter de points qui sont de la quotidienneté des gens.

[Traduction]

M. White (Vancouver-Nord): Monsieur le Président, je voudrais étudier les propositions du député et, peut-être, suggérer que son parti se serve des jours désignés pour présenter le sujet de son choix.

Quant à la méthode à utiliser pour choisir les pétitions, j'en ai parlé dans mon discours. J'ai dit qu'on pourrait choisir les pétitions comportant le plus grand nombre de signatures, ce qui les placerait d'office au rang des pétitions d'importance nationale.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, il n'y a pas beaucoup de différence entre les circonscriptions de Fraser Valley-Est et de Fraser Valley-Ouest. Elles sont toutes deux dans la vallée du Fraser.

Il est quelque peu difficile d'éviter les redites en raison du sujet lui-même. Il n'est certes pas aussi important que peut l'être la question des finances, mais il a quand même son importance. En fait, il est au coeur même d'une foule de modifications que le Parti réformiste veut voir adopter.

Je suis heureux de prendre la parole sur la question des pétitions. La présentation de pétitions constitue l'un des moyens les plus anciens que puisse utiliser la population pour exprimer ses doléances ou ses aspirations. Les gens ordinaires ont ainsi l'occasion de saisir la Chambre des communes de questions particulières. Les députés peuvent également se servir des pétitions pour faire avancer des causes défendues par eux ou leur parti.

Je sais aussi que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a déjà été saisi de cette question. Je fais partie de ce comité, et cette question figure à son ordre du jour. Il importe néanmoins d'exprimer notre avis à ce moment-ci.

Comparativement aux projets de loi, aux motions et aux questions écrites et orales, les pétitions semblent avoir peu d'importance. La principale critique vient du fait qu'une fois qu'elles ont été présentées, la Chambre ne prend aucune mesure immédiate, visible, comme c'est le cas généralement avec les discours des députés. Il n'arrive pas souvent que des mesures soient prises tout de suite après un discours. En effet, il faut insister pour que le gouvernement se décide à agir.

(1300)

Nous sommes plus de 200 nouveaux députés dans cette 35e législature. J'ai le sentiment que nous adopterons plus de changements fondamentaux au cours de la présente législature que durant les 34 précédentes. La nouvelle prière du matin en est un exemple. Si nous n'explorons pas de nouvelles idées et si nous ne


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favorisons pas ces réformes, nous continuerons de faire les choses comme nous l'avons toujours fait depuis 125 ans.

Cela dit, le processus des pétitions est une autre réforme tout aussi nécessaire, comme on l'a déjà fait remarquer aujourd'hui, que les votes libres, la tenue d'élections tous les quatre ans, un Sénat élu, la révocation, les référendums et une période des questions améliorée. Ces changements s'imposent, et ils méritent tous que nous réservions une journée pour en discuter.

Pour faire comprendre la nécessité de changements, je voudrais faire l'historique des pétitions au Parlement et expliquer ensuite ce qui, à mon avis, laisse à désirer dans la formule actuelle. Enfin, je vais proposer quelques changements.

Nous avons déjà vu un peu cet historique ce matin, mais il est parfois utile de répéter. Le droit d'adresser des pétitions au Parlement pour obtenir le redressement de griefs remonte au règne d'Édouard Ier, comme mon collègue d'Edmonton-Sud-Ouest l'a dit ce matin. C'était au XIIIe siècle. Ce sont en fait les pétitions qui sont à l'origine de notre façon de légiférer par examen de projets de loi.

La Chambre des communes du Canada a emprunté à son modèle, le Parlement de Grande-Bretagne, la coutume des pétitions. Jusqu'en 1842, les pétitions faisaient l'objet de débats en Grande-Bretagne. Cette année-là, il a été décidé de modifier cette façon de faire parce que ces débats ne laissaient pas à la Chambre le temps de faire autre chose. En soi, cela est révélateur: si les débats sur les pétitions prenaient tellement de temps, c'est que le peuple voulait avoir son mot à dire. Lorsque la procédure a été modifiée, environ 33 000 pétitions étaient débattues chaque année. Ne serait-il pas fantastique qu'un intérêt aussi vif se manifeste au Canada?

Après 1842, en Grande-Bretagne, les pétitions étaient lues et pouvaient ensuite être renvoyées au comité des pétitions, mais les débats n'étaient généralement pas permis. Si les pétitions portaient sur des griefs personnels, elles pouvaient être désignées comme urgentes et faire l'objet d'un débat sur-le-champ.

Toujours en Grande-Bretagne, le comité des pétitions publiait un rapport sur les pétitions et avait des pouvoirs analogues à ceux des comités permanents des Communes au Canada de nos jours. Par contre, ce comité britannique n'avait pas le pouvoir de faire enquête et rapport sur le bien-fondé d'une pétition ni de convoquer des témoins pour faire enquête.

En 1974, la Grande-Bretagne a changé sa façon de faire. Désormais, chaque pétition est renvoyée à un ministre, qui doit présenter à la Chambre une recommandation ou des observations, qui sont déposées et imprimées.

Au début de la Confédération canadienne, les pétitions publiques jouaient un rôle important dans les délibérations de la Chambre. Elles étaient fréquemment renvoyées à des comités spéciaux. Des ordres de dépôt étaient adoptés pour faire déposer des pétitions particulièrement d'actualité, et il y avait des débats et des votes pour décider si des pétitions devaient être reçues.

Au Canada, le nombre de pétitions a beaucoup diminué avec les années. Les citoyens s'adressaient davantage aux tribunaux et à des organismes administratifs pour obtenir réparation. Le lobbying s'exerçait à d'autres niveaux. Les députés sont devenus plus sensibles à l'opinion publique et ont commencé à utiliser d'autres procédures, comme les questions orales et écrites, pour exprimer les besoins des habitants de leur circonscription. Par contre, ce qui est le plus frustrant, et ça l'a toujours été, c'est de constater que la Chambre ne donne pas suite rapidement et de façon visible aux pétitions. À mon avis, il y a plus de formalités et de paperasserie dans le processus de présentation des pétitions.

Nous devons examiner ce qui arrive une fois la pétition présentée. C'est là qu'est toute la substance. L'article 36 du Règlement porte exclusivement sur la présentation des pétitions, à l'exception du dernier paragraphe de cet article, le paragraphe 8, qui se lit comme suit:

(1305)

Le gouvernement répond dans les quarante-cinq jours à toutes les pétitions qui lui sont renvoyées.
Si l'on regarde la suite qui est réellement donnée aux pétitions, on constate que ce ne sont là que de belles paroles. Étant donné que le Règlement même de la Chambre ne reconnaît pas leur importance, il n'est pas surprenant que les pétitions soient considérées comme un exercice futile.

En 1994, alors que les citoyens ont le plus besoin d'exprimer leur opinion sur des questions telles que les lacunes de notre système de justice pénale, la piètre qualité de la gestion financière du gouvernement et la réforme dont a tant besoin notre système parlementaire, les députés du Parlement du Canada ne peuvent même pas faire suivre la présentation d'une pétition d'un discours et doivent simplement se contenter d'une brève déclaration. Ils ne peuvent présenter une motion renvoyant à une pétition pour veiller à ce que des mesures soient prises. Ils ne peuvent en aucun cas savoir si la pétition se rendra plus loin que le bureau du greffier de la Chambre. Ils ne peuvent garantir aux habitants de leur circonscription que l'on prendra en considération la préoccupation qu'ils ont exprimée, pas plus qu'ils ne peuvent renvoyer la pétition à un comité de la Chambre des communes.

Je proposerais que les changements suivants soient apportés au système des pétitions. Premièrement, chaque pétition devrait être présentée à un comité parlementaire qui, formé de membres de tous les partis, choisirait chaque mois un nombre précis de pétitions à examiner.

Deuxièmement, chaque débat et chaque pétition devraient être présentés dans le cadre d'une motion sur laquelle la Chambre serait appelée à se prononcer.

Troisièmement, chaque pétition devrait faire l'objet d'une réponse du ministre compétent afin de montrer que le gouvernement ne fait pas que prendre note de ces pétitions sans y donner suite.

Quatrièmement, le comité des pétitions devrait avoir les mêmes pouvoirs que n'importe quel autre comité parlementaire, ce qui, en soi, est un autre sujet de discussion, car ces comités ont besoin d'être modifiés.


1598

Pour terminer, il faut dire que les citoyens ne présentent pas des pétitions à la légère. Nous savons tous à quel point il est difficile d'amener les citoyens à s'intéresser de façon soutenue à leurs affaires et à leur Parlement.

J'espère sincèrement que ce ne sera pas là un discours de plus qui tombera dans l'oubli. D'après les notes que j'ai ici, bon nombre de discours concernant le système des pétitions ont été prononcés au fil des ans sans qu'aucun changement, ou presque, n'ait été apporté à ce système.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de Fraser Valley-Ouest pour son intervention. J'ai beaucoup écouté les différents orateurs, et plus précisément le dernier, sur le sujet dont il est fait état ici ce matin.

Le premier point qui me touche-et c'est un compliment que je leur adresse, même s'ils appartiennent à un parti politique différent-va dans le sens que l'objet de leur présentation est d'apporter une plus grande démocratie et d'intéresser les Canadiens à ce qui se passe, à leur destinée. En ce sens, je leur lève mon chapeau.

Ce sur quoi j'ai des interrogations, comme certains de mes confrères peuvent en avoir, c'est sur l'outil qu'ils veulent utiliser. Aujourd'hui, on parle d'utiliser les pétitions, d'accorder une plus grande place aux pétitions au sein de cette Chambre. Je ne suis pas contre l'idée nécessairement, mais, comme tout théoricien, j'aime bien voir ce qui va appuyer cette idée.

Par exemple, les pétitions, par chez nous, certaines ont un poids et certaines n'en ont pas. Ce que je veux soulever, c'est qu'il peut y avoir des compréhensions différentes de l'utilité d'une pétition. Si certaines gens habiles à utiliser l'opinion publique comprennent très bien où on doit en venir, ils pourraient mettre, à cette fin, des moyens financiers. Alors, il serait peut-être important qu'on puisse préciser, peut-être dans un autre cadre, ce que signifie «encadrer les formes de pétition» et quels pourraient être les moyens financiers, de façon que ce soit juste pour tout le monde.

(1310)

[Traduction]

M. White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je ne sais pas si j'ai bien compris la question, mais je sais que l'on a fait référence à l'importance d'une pétition et à l'effet qu'elle obtient. Nous avons tous parlé à des tas de gens pendant la campagne électorale. Nous avons tous eu la chance de constater que les gens estiment ne pas avoir assez d'influence sur le rôle du gouvernement. Il n'y a qu'à prendre la TPS qui a été adoptée, malgré toutes les pétitions qui ont submergé la Chambre.

Il doit exister un moyen pour que les gens puissent exprimer vraiment ce qu'ils ont à dire. Et ce moyen, c'est de signer une pétition. C'est la bonne façon de procéder. Le problème, c'est de savoir ce qui arrive à la pétition une fois qu'elle est présentée à la Chambre des communes. Quelle influence le Canadien moyen peut-il avoir sur le programme politique de la Chambre?

Je répondrai au député que nous croyons à la valeur des pétitions. Nous pensons que des pétitions devraient être adressées à la Chambre. Nous pensons également que des mesures doivent être prises pour montrer aux gens que leurs préoccupations ne sont pas sans intérêt.

Le vice-président: Je prie le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans de ne pas oublier pas qu'il lui reste une minute pour répondre.

M. Harbance Singh Dhaliwal (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, j'ai prêté une oreille attentive aux observations du député de Fraser Valley-Ouest. J'ai quelques questions qui ont déjà été posées, mais je n'ai pas l'impression que le député y ait répondu de façon claire et limpide. Je dois dire qu'un peu plus de démocratie ne nuit jamais à la Chambre, mais, dans toute démocratie, le pragmatisme a toujours sa place.

Nous voulons un gouvernement qui marche. Nous voulons un gouvernement qui soit pragmatique et qui puisse travailler efficacement. Voilà ce qu'il ne faut jamais perdre de vue! Or, les 33 000 pétitions dont il a été question plus tôt prouvent bien qu'il ne sert à rien de vouloir continuer de tenir des débats au sujet des pétitions.

Ainsi, ma première question, qui porte sur les groupes d'intérêts spéciaux, est la suivante: L'honorable député a-t-il l'impression que les groupes d'intérêts spéciaux sont mieux à même d'influencer l'ordre du jour des travaux parlementaires du fait qu'ils possèdent les ressources, financières et autres, pour multiplier les pétitions?

L' autre question concerne la priorité. . .

Le vice-président: Le temps tirant à sa fin, le député devra se contenter de répondre à la première question. Je vous prie d'être très bref.

M. White (Fraser Valley-Ouest): Merci, monsieur le Président. L'honorable député a abordé mon sujet préféré, le financement des groupes d'intérêts spéciaux. Il va de soi que, dans un groupe d'intérêts spéciaux, tout le monde a quelque chose qui lui tient à coeur. Or, le fait est que les groupes qui sont très riches le sont grâce aux largesses de nul autre que cette institution.

Nous nous opposons farouchement à la pratique qui a été utilisée à maintes reprises par les gouvernements, aussi bien libéraux que conservateurs, et qui consiste à financer certains groupes de pression ou d'intérêts spéciaux. Voici donc ma réponse: il s'agit d'éliminer les subventions faramineuses accordées à ce titre et de faire en sorte que les groupes d'intérêts spéciaux soient tous sur un pied d'égalité en ce qui concerne les pétitions qu'ils présentent.

Le vice-président: Je remercie le député de Fraser Valley-Ouest. Le temps est écoulé. Revenons au débat.

[Français]

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, c'est un plaisir de participer à un débat traitant d'un sujet aussi important que celui qui est devant nous. En tant que président du Comité de la procédure et des affaires de la Cham-


1599

bre, je m'intéresse beaucoup à ce sujet parce qu'il a déjà été renvoyé à mon comité.

Je sais que l'honorable député de Fraser Valley-Ouest qui vient de prendre la parole saura faire valoir ses idées à ce comité, de même que l'honorable député de Bellechasse, bien sûr, qui a participé au débat aujourd'hui.

[Traduction]

Je me réjouis de leur participation au débat et j'espère qu'elle se poursuivra au sein du comité. À mon avis, il est important de dire publiquement que les dispositions du Règlement de la Chambre concernant les pétitions ne sont pas totalement désuètes et à ce point non représentatives, contrairement à ce que laissent entendre le député de Fraser Valley-Ouest et son collègue, le député d'Edmonton-Sud-Ouest, qui a lancé le débat au nom de son parti ce matin.

(1315)

En réalité, ce débat d'aujourd'hui sur les pétitions fait partie d'un débat plus vaste, portant sur tout le régime parlementaire, que lance le Parti réformiste. En effet, son plan d'action comprend non seulement un débat sur les pétitions, mais également des propositions de révocation des députés, des référendums auprès des Canadiens pour les consulter sur diverses mesures législatives, de vagues propositions de démocratie directe dont nous entendrons parler davantage, j'en suis sûr, et d'autres propositions que le parti a faites pour modifier le fonctionnement du Parlement vis-à-vis la population générale, notamment à l'égard des votes libres.

À mon sens, si le Parti réformiste a déposé cette motion, c'est en partie parce qu'il n'a aucune option politique sur d'autres questions. Au cours de la dernière semaine, pendant la période de questions, les membres du Parti réformiste se sont attardés à cette question en excluant presque toute autre question d'intérêt national. Leur plan d'action sur la réforme du Parlement n'est en quelque sorte que leur seule option politique pour l'instant. Je trouve cela un peu regrettable, quoique ces propositions soient intéressantes et dignes d'un débat.

Je suis heureux de pouvoir participer à cette vigoureuse discussion publique sur chacune de ces questions, car j'estime qu'elle est importante. Cependant, cela signifie peut-être que nous devrons défendre aussi vigoureusement un régime qui sert le Canada extrêmement bien depuis plus de 125 ans et qui fonctionne au Royaume-Uni depuis des centaines d'années. Le régime est souple et il permet des changements. C'est ce qui peut se produire, mais je ne crois pas qu'il soit nécessaire de modifier toutes les règles du jeu pour qu'il fonctionne de cette façon-là.

L'attaque concertée dirigée contre les institutions parlementaires -j'emploie cette expression parce que je crois qu'on s'efforce de diminuer le Parlement à certains égards et au sens large du terme -est en partie bien motivée. C'est ce qui explique l'élection d'un bon nombre de députés du Parti réformiste et, en fait, l'élection de presque tous les députés à la Chambre.

C'est le dégoût suscité par les politiques et méthodes de l'ancien gouvernement conservateur qui a siégé de ce côté-ci de la Chambre pendant neuf ans. Je ne vais pas expliquer toutes les causes qui sont à l'origine de ce dégoût. Toutefois, la population canadienne a clairement fait connaître sa volonté, comme en témoigne tristement la présence des deux seuls députés conservateurs qui occupent aujourd'hui la dernière banquette de l'autre côté avec les indépendants. Les Canadiens en ont eu assez de la fourberie dont le gouvernement précédent faisait montre presque quotidiennement dans ses rapports avec le Parlement et la population, puisque les politiques qu'il proposait allaient dans un sens et ses actes, dans l'autre.

La population canadienne a fini par se rendre compte de la situation, mais au lieu d'y voir le fait d'un mauvais gouvernement, elle a blâmé le Parlement et s'en est prise à l'institution et à la façon dont le gouvernement fonctionnait plutôt qu'aux occupants des banquettes ministérielles responsables du gâchis.

Si les députés du Parti réformiste avaient été ici en nombre suffisant au cours de la dernière législature, ils m'auraient souvent entendu parler des méfaits de l'ancien gouvernement et de ses lacunes. Et je n'étais pas le seul à le faire; quelque 80 députés de mon parti ont fait la même chose, alors que les critiques les moins efficaces émanaient du Nouveau Parti démocratique, dont une bonne partie des députés n'est d'ailleurs plus ici. Nous avions affaire à un piètre gouvernement. La population canadienne s'est sentie trompée par ce gouvernement et elle a en quelque sorte reproché au Parlement de ne pas avoir pris son parti.

Nous faisions face à une majorité. Cette majorité s'est maintenue en place durant toute la durée de la législature et il nous a été impossible de défaire le gouvernement. Si nous avions réussi, je crois que l'institution parlementaire aurait considérablement gagné en prestige aux yeux de la population canadienne, mais ce ne fut pas le cas. Il a donc fallu des élections pour débarrasser la Chambre des partisans de ce gouvernement et les remplacer par un bon nombre de députés libéraux de ce côté-ci et un certain nombre de députés réformistes; dans le présent contexte, je ne mentionnerai pas les députés du Bloc.

Or, un groupe de réformistes se sont joints à nous pour faire écho à la population et essaient même d'agir comme son seul porte-parole pour démontrer que quelque chose n'allait pas au Parlement, alors qu'en fait le problème émanait du gouvernement. Il y a une différence. Le député de Fraser Valley-Ouest l'a montré dans son discours, lorsqu'il a dit que les règles du gouvernement n'autorisaient pas certaines choses. Or, les règles dont il faisait état sont les règles du Parlement et non pas les règles du gouvernement. Il s'agit du Règlement de la Chambre des communes.

(1320)

Il y a une différence que je ne pourrai jamais assez souligner. La Chambre n'est pas le gouvernement. On y retrouve, il est vrai,


1600

un grand nombre de ministériels qui participent aux débats et qui peuvent peut-être contrôler le déroulement des travaux d'une journée à l'autre. Ils doivent certes conserver la confiance de la Chambre durant leur mandat, mais notre institution est une assemblée parlementaire et non l'apanage du gouvernement.

Elle nous permet de discuter de la politique du gouvernement. Nos vis-à-vis, en particulier, ont amplement l'occasion de critiquer la politique du gouvernement. Lorsque les députés de ce côté-ci ont également des critiques à formuler, on leur donne également, dans une certaine mesure, la possibilité de le faire.

Notre Chambre n'a pas pour objectif de décider de la politique gouvernementale. Il lui incombe plutôt de débattre sa sagesse et de réclamer des comptes au gouvernement. Ce sont là ses principales fonctions. En tant que députés, nous avons diverses tribunes où nous pouvons exercer ces droits et assumer nos responsabilités. Je crois que, si le gouvernement répond à leurs attentes, les Canadiens ne souhaiteront plus alors des réformes importantes de notre système.

Le système a très bien fonctionné pendant au moins 100 ans. Ce n'est qu'au cours des dernières années qu'il est tombé en discrédit. La situation s'explique en partie par les énormes revirements de l'opinion publique qui ont donné de très fortes majorités au gouvernement en 1984 par exemple, ainsi qu'en 1958, avec des conséquences aussi catastrophiques. Ces très grandes oscillations de l'opinion publique, qui deviennent de plus en plus prononcées, ont été très en évidence au cours des élections de 1993 puisqu'elles ont permis à trois partis, deux très régionaux et un national, d'obtenir un très grand nombre de sièges. Cela montre l'instabilité de l'électorat qui est peu disposé à respecter les lignes de parti traditionnelles ou à continuer d'accorder son appui à un parti s'il est persuadé qu'un autre parti saura avant tout défendre les intérêts de sa région.

Ainsi, les députés peuvent réagir différemment, ce qui ne veut pas dire qu'ils doivent laisser tomber leurs principes et leurs opinions sur la façon dont notre politique gouvernementale devrait être élaborée au Canada. L'objectif des partis politiques est de regrouper divers intérêts afin que les députés qui les représentent fassent des concessions pour le bien de l'ensemble du pays. Or, on assiste, dans les partis d'opposition, à la fin de cette relation normale; le parti défend une seule politique, et ses membres doivent y adhérer.

C'est particulièrement vrai au Parti réformiste. Je l'ai signalé à diverses reprises auparavant et, en ce sens, je n'adresse pas là une critique à ce parti. Je ne fais que dire une évidence, à savoir que tout membre de ce parti doit souscrire entièrement à la politique du parti sous peine d'être exclu. Naturellement, on retrouve dans ce parti une assez grande unanimité qui manque à notre parti et peut-être au Bloc sur des questions autres que la souveraineté ou la séparation du Québec, selon le terme que nos collègues veulent employer.

Je sais que je dois m'en tenir à la motion et j'y arrive. Je tiens tout d'abord à m'arrêter sur le rôle des députés de façon générale. Il est important de se reporter à certaines observations faites à d'autres occasions par des gens célèbres relativement à ce rôle.

Ce matin, le député d'Edmonton-Sud-Ouest a parlé d'Edmund Burke, mais il ne l'a pas cité. Je voudrais le faire, parce que ce qu'Edmund Burke avait à dire à ce sujet était fort intéressant. Bien entendu, les députés se rappellent qu'il siégeait à la Chambre des communes en Grande-Bretagne. Dans son célèbre discours de Bristol, en 1774, il a fait valoir plusieurs points que je pense importants. Malheureusement, je ne peux trouver les paroles précédant cette citation et je ne suis donc pas en mesure de citer ses propos de façon exacte.

Il a parlé de la nécessité pour un député, une fois élu, d'agir dans l'intérêt national et de ne pas simplement représenter les gens de sa collectivité. Il a ajouté qu'il fallait qu'un député soit le porte-parole d'une collectivité donnée, mais qu'en outre, il devait avoir à coeur l'intérêt national et se comporter en conséquence. Il a dit en conclusion aux gens de Bristol qu'ils choisissaient un représentant, mais qu'une fois élu, celui-ci n'était alors pas seulement le député de Bristol, mais un membre du Parlement.

Je ne pourrai jamais assez le souligner. Nous n'avons pas été élus dans cette enceinte pour représenter seulement Kingston et les Îles dans mon cas ou Edmonton-Sud-Ouest dans celui du député qui a parlé tout à l'heure ou encore la circonscription d'Elgin-Norfolk. Nous devons voir le pays dans son ensemble, soutenir toutes les régions du pays et agir dans l'intérêt national. C'est ce qu'Edmund Burke a déclaré, et je suis d'accord avec lui. Je pense que c'est là une obligation qui nous incombe à tous.

(1325 )

Ces paroles sont peut-être un peu dépassées aujourd'hui, mais il a dit dans le même discours:

Il est certain, Messieurs, qu'un représentant devrait être heureux et fier de vivre dans la plus étroite union, la collaboration la plus serrée et un état de communication sans réserve avec ses électeurs. Leurs désirs devraient être prioritaires à ses yeux, il devrait respecter leurs opinions et accorder à leurs affaires son attention constante. Il est de son devoir de sacrifier son repos, ses loisirs et ses plaisirs aux leurs et, par-dessus tout et dans tous les cas, de choisir leurs intérêts de préférence aux siens.
Mais il ne devrait jamais renoncer à son opinion objective, à son jugement réfléchi et à ce que lui dicte sa conscience éclairée en faveur d'un autre homme ou groupe d'hommes. Il ne tire pas ces caractéristiques de votre bon vouloir, ni de la loi, ni de la Constitution. Elles lui sont attribuées par la Providence et s'il en abuse, il en sera tenu responsable. Votre représentant vous doit non seulement tous ses efforts, mais aussi son jugement et il vous trahit si, au lieu de vous servir, il renonce à ses idées en faveur de votre opinion.
J'aimerais aussi vous rapporter une troisième citation de ce personnage éminent. Dans le même discours à ses électeurs, à Bristol, il a déclaré:

Je n'ai pas obéi à vos directives. Non. Je me suis conformé aux directives de la vérité et de la nature, et j'ai protégé vos intérêts à l'encontre de vos opinions, avec une constance tout à fait conforme à mes principes. Car un représentant digne de vous devrait être quelqu'un de stable. Je dois évidemment respecter vos opinions, mais à condition que ce soient des opinions que vous et moi puissions encore respecter dans cinq ans. Je ne devais pas suivre la tendance du jour. Je savais que, si vous m'aviez choisi parmi les

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autres pour vous représenter, c'est pour que je sois un pilier de l'État et non une girouette sur le toit de l'édifice. Celle-ci est exaltée par sa légèreté et sa souplesse, mais elle ne sert à rien d'autre qu'à indiquer dans quel sens souffle le vent des tendances.
Ces paroles ont plus de 200 ans, mais elles décrivent encore dans une certaine mesure les devoirs et les obligations d'un député. J'oserais affirmer qu'aucun député de cette Chambre ne prend à la légère ses obligations. Ce discours est un peu radical sans doute, car nous connaissons mieux l'opinion publique aujourd'hui que ne le pouvait Edmund Burke en 1774, en partie parce qu'on peut la mesurer plus facilement, mais il n'en demeure pas moins que les députés ont leurs propres opinions et que c'est même leur devoir d'en avoir une.

En tant que députés, nous sommes souvent forcés de prendre des décisions sur des questions qui n'étaient pas d'actualité ou dont on ne parlait pas durant la campagne électorale. Ces questions ont fait jour après la campagne, et nous devons prendre une décision; c'est même notre devoir en tant que député. Je ne cherche pas à me soustraire à mes obligations.

On n'a qu'à repenser au jour où nous avons mis aux voix, à la Chambre, une déclaration de guerre, au cours de la dernière législature. Aucun député ne soupçonnait, en 1988, durant la campagne électorale, que nous aurions à prendre une telle décision au cours de cette législature, et pourtant, c'est arrivé. Nous avons fait face à la musique et nous avons voté. Ce fut une dure décision. Les députés ont trouvé très difficile et très troublant de se trouver dans une telle position. Pourtant, il fallait y faire face, et nous nous en sommes tirés.

La même chose se produira de nouveau sur d'autres questions. Cela se produira au cours des quatre ou cinq ans que durera notre mandat. Je ne veux pas laisser entendre, comme le font les députés réformistes, que chaque fois que nous avons à prendre une décision délicate, nous devons nous y dérober et organiser un référendum, ou faire un sondage et prendre la décision en fonction des résultats obtenus. Nous avons été élus pour utiliser notre expérience et notre faculté de jugement. C'est la raison de notre présence ici, et c'est ce que nous ferons.

J'ai une autre citation intéressante. C'est plutôt amusant, mais cela s'applique particulièrement bien à la question des pétitions. Les pétitions sont signées par des groupes organisés, souvent représentés d'un bout à l'autre du pays, qui décident qu'un grand nombre de pétitions doivent être présentées au Parlement afin que les députés prennent conscience que leur point de vue est important, qu'il est justifié ou, du moins, qu'il est partagé par un nombre considérable de personnes.

M. Nault: Des groupes d'intérêt.

M. Milliken: Ce sont en effet des groupes d'intérêt qui organisent ces pétitions, comme le député de Kenora-Rainy River le signale.

Laissez-moi vous lire ce que M. Burke avait à dire à une autre occasion. Cette fois, je crois que c'était lors d'un discours sur la révolution française. C'est une citation intéressante, s'il en est.

Une demi-douzaine de sauterelles dissimulées dans les fougères font résonner le pâturage de leur chant strident, tandis que des milliers de bovins majestueux ruminent en silence, à l'ombre des grands chênes; de grâce n'allez pas imaginer pour autant que ces bruyants insectes sont les seuls habitants de ces lieux; ni qu'ils sont légions, et encore moins qu'ils sont autres que ces petites créatures sautillantes, chétives et desséchées qui vous crèvent les tympans de leur tintamarre abrutissant.
(1330)

Loin de moi l'idée de suggérer que cette citation s'applique à tous les groupes de pression. Il n'en demeure pas moins que certains groupes d'intérêt présentent ces caractéristiques, ce qui crée des problèmes, non seulement pour le gouvernement, mais également pour l'opposition, lorsqu'ils demandent aux députés de présenter des pétitions en leur nom. Il arrive que ces derniers n'approuvent pas la pétition en question, mais qu'ils se sentent obligés de la présenter, ce qu'ils font.

Et je dirais aux députés des deux côtés de la Chambre qu'il arrive effectivement qu'un député se voie demander de présenter une pétition qu'il n'approuve pas, ce qui le met dans une situation délicate. Il a alors deux options. Il peut soit se contenter de la déposer auprès du greffier, soit prendre la parole à la Chambre et la présenter comme nous le faisons ordinairement.

Ces options sont énoncées à l'article 36 du Règlement. Les députés peuvent choisir celle qui leur convient le mieux.

Qu'advenait-il des pétitions par le passé? Au cours de la dernière session de la dernière législature, 5 282 pétitions ont été présentées. Pendant la session d'avant, soit la deuxième session de la dernière législature, 14 581 pétitions ont été étudiées. De ce nombre, 8 631 avaient été présentées à la Chambre.

Un nombre extrêmement élevé de pétitions ont été présentées au cours des cinq années qu'a duré la législature précédente, presque plus de 14 000 pendant les deux dernières sessions. Je pense qu'il n'y en a pas eu pendant la première session, ou du moins quelques-unes seulement.

La majorité de ces pétitions concernaient la taxe sur les produits et services. Allons-nous tenir un débat sur chaque pétition qui porte sur la TPS? Nous avons souvent l'occasion de débattre des pétitions. Une amélioration est possible et, à titre de président du comité, j'écouterai très attentivement toutes les propositions en ce sens.

Examinons les occasions qui nous sont offertes. D'abord, un grand nombre de pétitions portent sur les initiatives ministérielles, et la TPS a été débattue à la Chambre, même si elle l'a été à toute vapeur parce que le gouvernement avait un faible pour la clôture et n'hésitait pas à y recourir. Nous avons néanmoins eu l'occasion d'en débattre.

Les députés peuvent présenter les motions concernant d'autres sujets au cours des initiatives parlementaires; non seulement ces motions peuvent porter sur l'argument essentiel des pétitions, mais elles peuvent aussi demander un renvoi à un comité pour que la question fasse l'objet d'un examen plus approfondi. Elles peuvent être débattues à la Chambre au cours de l'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires, durant un temps limité, j'en conviens, mais elles peuvent faire l'objet d'un débat et d'un renvoi à un comité.


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Nous pouvons poser des questions sur des pétitions. De même, nous pouvons demander que le débat sur la motion d'ajournement porte sur des sujets de pétitions.

Les initiatives ministérielles permettent généralement de se pencher sur des questions qui font l'objet de pétitions. Bon nombre des pétitions aujourd'hui concernaient la révocation de députés. Je remercie les députés du Parti réformiste qui les ont présentées.

Nous avons tenu un débat sur cette question l'autre jour. Nous avons renvoyé la question au comité que j'ai l'honneur de présider et où nous l'étudierons en profondeur.

Les sujets de ce genre sont débattus au Parlement. Ces débats ne se tiennent pas nécessairement le jour où la pétition est présentée, mais en général, si la question est importante, il y a des milliers de pétitions qui en traitent pendant une longue période de temps; j'espère bien qu'on ne propose pas de tenir un débat chaque fois qu'une telle pétition est présentée.

Il faut penser aussi que le gouvernement est tenu de répondre aux pétitions. Le député de Fraser Valley-Ouest a dit que le gouvernement n'en tenait pas compte. C'est inexact. Le gouvernement doit y donner suite dans les 45 jours, et je suis certain que, d'ici quelques jours, je déposerai à la Chambre les réponses du gouvernement aux pétitions.

Le député soutient que le ministre ne répond pas. Or, chaque réponse est signée par le ministre et remise à la Chambre au député qui a déposé la pétition. Des copies sont distribuées aux autres députés qui le demandent. Il n'est donc pas juste de dire qu'on ne donne pas suite aux pétitions présentées.

Je constate à regret que mon temps de parole est écoulé. C'est surprenant comme il passe vite, et je regrette de ne pouvoir continuer.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté les observations du député, et je voudrais présenter quelques observations et poser aussi une question.

Tout d'abord, le député a dit que, si l'on en juge par les questions que nous posons au cours de la période des questions, mon parti, le Parti réformiste, n'a qu'un cheval de bataille. Plus précisément, nous traitons très souvent de questions de démocratie vraiment directe.

(1335 )

Nous croyons que la toute première priorité des Canadiens réside dans les questions économiques. Nous nous sommes efforcés de poser des questions de ce genre, mais nous n'avons pu obtenir de réponse de la part du gouvernement. Celui-ci ne cesse de dire qu'il ne peut pas répondre à ces questions avant la présentation du budget. Entre-temps, nous posons des questions sur d'autres sujets dont nous ont fait part les Canadiens, notamment sur le fait qu'ils regrettent de ne pas avoir leur mot à dire dans les décisions qui sont prises à la Chambre.

Je me réjouis que le député reconnaisse qu'il y a place à amélioration et qu'il est disposé à ce que le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre envisage d'autres façons dont nous pourrions traiter les pétitions. C'est l'essentiel de cette motion qui demande seulement que, une fois au moins au cours d'une session, les pétitions soient examinées par la Chambre réunie en comité plénier.

Ce qui m'inquiète, surtout, c'est que la Chambre n'a plus d'intérêt ni de respect pour les Canadiens pris individuellement. Le député a cité sir Edmund Burke, et j'ai presque cru entendre un politicien conservateur d'autrefois. Les conservateurs ont été presque rayés de la Chambre en adoptant une attitude de ce genre, en disant aux Canadiens de les juger à leurs actes et que, si les Canadiens n'aimaient pas ce que les conservateurs faisaient, ils pouvaient toujours s'en débarrasser aux prochaines élections. Eh bien, c'est ce que les Canadiens ont fait.

Finalement, les Canadiens ont accordé deux mandats aux conservateurs parce qu'ils se souvenaient de ce que les gouvernements libéraux antérieurs avaient fait et qu'ils n'étaient pas prêts à revenir à ce régime. Et cela, jusqu'au jour où ils en ont eu assez et qu'ils ont décidé de changer de gouvernement. Ils ne savaient pas encore que le Parti réformiste était en mesure de remédier à la situation et de former le gouvernement.

Le problème, c'est que les politiciens semblent beaucoup trop élitistes.

Le député a aussi fait mention des groupes d'intérêt. Ces groupes jouent un rôle plutôt vital dans la société canadienne en ce qui concerne les questions de l'heure. Le député croit-il que les groupes d'intérêt doivent financer leur publicité avec l'argent des contribuables dont ils disposent par l'intermédiaire des subventions du gouvernement?

Le député préférerait-il que ces groupes s'adressent aux Canadiens qui sont vraiment importants et sollicitent leur appui en obtenant qu'ils signent une pétition qui serait présentée et peut-être même débattue à la Chambre?

M. Milliken: Monsieur le Président, dans sa question, le député de Kindersley-Lloydminster a posé un jugement peut-être un peu injuste à l'endroit du gouvernement libéral précédent. Ceux d'entre nous qui étaient candidats aux élections de 1988 n'ont que de bons souvenirs de l'excellent gouvernement libéral antérieur. Nous estimons que les Canadiens se sont laissés convaincre de voter pour le Parti conservateur en 1988, parce qu'ils pensaient que le libre-échange allait valoir au Canada une prospérité démesurée. Nous savons maintenant que ce n'est pas le cas. Malheureusement, les Canadiens en sont arrivés à cette conclusion entre 1988 et 1993; mais depuis, la situation a été corrigée.

À mon avis, en 1988, les électeurs n'étaient pas aux prises avec des images d'un gouvernement libéral désastreux.

J'ai l'impression que le député de Kindersley-Lloydminster a cherché, en posant sa question, à refaire un peu l'histoire. Peut-être qu'en relisant mes commentaires demain, il se rafraî-


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chira la mémoire, bien qu'il ne semble pas vouloir admettre la vérité pour l'instant.

Dans la question qu'il m'a posée, le député tentait de m'inciter à dénoncer les subventions gouvernementales accordées aux groupes d'intérêts et à reconnaître le caractère néfaste de cette forme d'aide gouvernementale, en alléguant que les groupes d'intérêts se servent de l'argent reçu pour exercer des pressions sur le gouvernement. De toute évidence, certains groupes d'intérêts deviennent une source d'irritation pour le gouvernement, surtout dans les cas où le gouvernement subventionne le groupe qui lui cause des embêtements. Le député conviendra avec moi qu'il serait bien d'éliminer ces subventions.

Par contre, il est très important que certains groupes d'intérêts reçoivent à l'occasion des subventions afin de défendre la cause de ceux qu'ils appuient et épaulent, car il arrive parfois que ceux-ci ne soient pas en mesure de s'autofinancer et de retenir les services de gens compétents pour les représenter. Donc, pour une raison ou une autre, ils sont sous-représentés à l'intérieur de notre régime.

Il me vient à l'esprit des exemples que je ne citerai pas à la Chambre aujourd'hui, de peur d'en oublier d'autres. J'estime, quant à moi, qu'il existe des raisons justifiant la participation du gouvernement au financement des groupes d'intérêts, même lorsqu'ils utilisent les subventions pour exercer des pressions sur le gouvernement lui-même. Il arrive parfois que les gouvernements ont besoin de ce genre de lobbying, notamment pour convaincre certaines personnes des avantages que peut procurer l'intervention du gouvernement dans un domaine particulier.

(1340 )

Les gouvernements ont un rôle éducatif à jouer, et les groupes d'intérêts peuvent leur venir en aide à cette fin. Même si les démarches peuvent viser directement le gouvernement, le but recherché est d'informer la population de l'importance du sujet abordé et, parfois, le but est atteint.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, le député a attaqué avec éloquence les réformes de l'appareil gouvernemental mises de l'avant dans la motion du Parti réformiste. Je trouve que ce qu'il a dit est très différent de la déclaration qu'il avait faite devant le caucus du Parti réformiste à l'approche de l'élection du Président. Je vois une différence entre ce qu'il vient de dire et ce qu'il nous avait dit au sujet de la réforme du Parlement et d'autres réformes que nous préconisons.

J'ai trouvé certains passages de son intervention très intéressants. Il a cité M. Burke en disant que, selon lui, il était du devoir du député de tenir compte de toutes les facettes de chaque question et de prendre sa décision en fonction du bien de la nation. Pourtant, pendant le référendum de 1992, nous avons vu tous les députés à la Chambre des communes suivre la ligne de parti fixée par leurs chefs. La très grande majorité des députés ont suivi la ligne de parti. Ils n'ont pas écouté le peuple.

Par conséquent, ce ne sont pas les députés élus qui ont décidé quelle option servait le bien de la nation, s'il était vraiment question du bien de la nation dans ce référendum. C'est le peuple qui a décidé par un vote libre.

Le député a déclaré que le système actuel nous avait bien servi pendant 125 ans et que tout allait très bien. Il a oublié de mentionner le Programme énergétique national imposé à l'Ouest et qui a été catastrophique pour l'industrie pétrolière, et notre insistance sur la nécessité de réformer le Sénat, la chambre haute qui aurait pu, à l'époque, bloquer le projet de loi créant ce programme, à moins, bien sûr, que le député appuie ce programme énergétique.

Je lui pose une question générale. Ne voit-il aucun bien-fondé au fait que les Canadiens aient voulu faire de la Chambre un endroit plus démocratique en élisant des réformistes et beaucoup d'autres nouveaux députés aux dernières élections?

M. Milliken: Monsieur le Président, le député de Crowfoot semble ne pas avoir bien compris. Je tiens à dire clairement que je suis en faveur de la discussion de certaines de ces propositions et que je ne suis pas contre toutes les propositions que fait le Parti réformiste.

Je ne suis cependant pas en faveur d'une modification fondamentale comme celle qu'apporterait par exemple à notre système parlementaire l'adoption de la possibilité de révoquer des députés. J'écouterai les arguments qu'on pourra défendre à ce sujet, mais je doute beaucoup que cela améliore le système. Cela aurait plutôt un effet négatif.

J'ai cité les paroles de M. Burke parce qu'elles impartissent une obligation. Elles établissent l'obligation imposée aux députés de voter selon leur meilleur jugement, ce qui ne veut pas dire, comme il le sait sûrement, voter en bloc ou voter selon les instructions du parti en toutes circonstances. « Ce qu'il faut, c'est votre meilleur jugement. » Voilà ce qu'a dit M. Burke. Il n'a pas dit qu'il fallait voter selon les instructions du parti en toutes circonstances, et je n'ai rien lu de tel. C'est une différence importante. Les votes libres constituent l'un des articles du programme électoral que le Parti réformiste préconise ici, et je n'ai pas dit que je ne souscrivais pas à cela.

En fait, dans son intervention pendant le débat sur le discours du Trône il y a quelques semaines, le leader du gouvernement à la Chambre a dit qu'il y aurait des votes libres à la Chambre. J'invite le député à lire le discours très clair du leader du gouvernement à la Chambre qui a élucidé largement la position du gouvernement sur les votes libres. C'était un chef-d'oeuvre de clarté.

Le député a dit que, lors de la campagne référendaire, je n'avais en quelque sorte pas tenu compte des voeux de mes électeurs. Tout ce que je puis dire au député de Crowfoot, c'est que les électeurs de Kingston et les Îles ont voté oui, en souscrivant entièrement à la position que j'ai adoptée lors du référendum national. Les partisans du oui l'ont emporté par une faible marge dans Kingston et les Îles, et j'ai été très heureux de voir qu'ils entérinaient ma position. J'ai supposé qu'ils le feraient lorsque j'ai pris position sur la question. J'ai appuyé cette cause à la Chambre et lorsque nous avons soumis la question aux électeurs pendant la campagne référendaire. Le député a tort de


1604

laisser entendre que les députés de notre parti n'ont en quelque sorte pas tenu compte des voeux de leurs électeurs. J'ai pleinement représenté les voeux de mes électeurs à ce moment-là, comme je le fais maintenant.

(1345)

Enfin, je note que le député a parlé de la Politique énergétique nationale. Je n'étais pas ici quand elle a été conçue. Tout ce que je puis dire, cependant, c'est qu'on lui a imputé tout ce qui a mal fonctionné dans l'ouest du Canada depuis sa mise en oeuvre, et je ne crois pas que ce soit juste.

M. Ken Epp (Elk Island): Monsieur le Président, lorsque des citoyens décident de rédiger et de faire signer une pétition, ils sont toujours très motivés. Généralement, une question sans intérêt ne suscite pas ce genre d'initiative. Cependant, lorsque les gens ont une question qui leur tient à coeur, ils se réunissent et s'occupent de rédiger et de faire circuler une pétition; ils le font parce qu'ils considèrent très important le sujet de leur pétition.

Il faut consentir beaucoup d'efforts et de sacrifices personnels pour lancer une pétition. Par ailleurs, ceux qui signent celle-ci le font généralement en toute sincérité, et parce qu'ils appuient vraiment la cause défendue. À mon avis, il est très rare que quelqu'un appose sa signature sur une pétition sans vraiment s'interroger sur ce qu'il signe. Je crois aussi que le lancement d'une pétition a un autre effet souhaitable: il s'ensuit beaucoup de discussion et de nombreux citoyens parlent de la question. La compréhension des enjeux et l'information à ce sujet s'en trouvant améliorées du fait du débat ainsi suscité.

Il y a donc lieu de s'interroger sur le sort que les élus et les décideurs réservent aux pétitions. Je crois, à l'instar de bien des Canadiens probablement, qu'un député qui reçoit une pétition a un peu de temps pour en expliquer la teneur à la Chambre. Il est ensuite fait mention de la présentation de la pétition dans le hansard et dans d'autres documents. Puis, cette dernière semble être entreposée quelque part, et il est très rare qu'elle fasse l'objet d'un suivi. Quoi qu'il en soit, il est encore plus rare que des mesures de suivi soient prises rapidement, si jamais elles sont prises.

Un exemple me vient à l'esprit. Depuis quelque temps, nous avons reçu de nombreuses pétitions sur les cartes de tueurs. Il semble y avoir un grand nombre de Canadiens, et j'en suis, qui s'inquiètent de plus en plus de l'augmentation de la violence dans notre société. Ils estiment qu'il faut intervenir pour la freiner.

Nous sommes inondés de ce genre de pétitions, mais que fait le gouvernement? Rien, semble-t-il, jusqu'à maintenant. Et je souligne les mots «semble-t-il». Il est indéniable que le gouvernement reconnaît l'existence de ce problème et qu'il va réagir. Le fait est qu'il doit y avoir davantage de communication entre le gouvernement et la population pour que celle-ci ait l'assurance qu'elle est entendue.

Nous sommes au début d'une ère nouvelle. Les choses seront désormais faites différemment. Nous sommes près de 200 nouveaux députés qui veulent vraiment influer sur les façons de faire du gouvernement.

Je ne puis m'empêcher de citer le fameux livre rouge. Certaines des idées du livre rouge figuraient déjà dans le livre bleu du Parti réformiste. Ce n'est guère étonnant puisque le livre rouge a été publié pendant la campagne électorale. Je crois que c'était à un moment où les députés qui cherchaient à se faire réélire voulaient savoir ce que la population pensait. Ils ont sans doute fait des sondages et du porte à porte pour prendre le pouls de la population. Le livre rouge est le résultat de ces recherches.

(1350)

Nous avons fait la même chose pendant un certain nombre d'années. Nous avons utilisé un processus semblable pour élaborer le livre bleu. Les gens nous ont dit à maintes reprises qu'ils voulaient une vraie démocratie, pas une dictature, toute élue soit-elle. Ce n'est pas un bien joli terme, mais c'est lui que nous entendions constamment. Les gens avaient le sentiment qu'une fois élus leurs députés n'en faisaient qu'à leur tête sans tenir compte le moindrement de leurs idées la plupart du temps.

Reflétant ainsi les idées de la population, le livre bleu renfermait des propositions qui se faisaient attendre depuis longtemps sur le fonctionnement du gouvernement. Ce sont par exemple les pétitions, les initiatives populaires -dont les pétitions sont une forme -, les référendums et la révocation. Tous ces moyens permettent aux citoyens de donner leur avis non seulement au moment des élections, mais aussi entre les élections, sur la façon dont ils sont gouvernés.

Je voudrais citer un phrase capitale du livre rouge, car elle me semble décrire avec justesse les sentiments des Canadiens: « Les citoyens sont mécontents parce qu'ils ne sont pas consultés. »

Quelles conclusions faut-il tirer de ce constat? La période entre la tenue d'élections varie entre six mois et cinq ans. C'est ainsi que se tiennent nos élections, et c'est à ce moment que les citoyens sont consultés. Si cela est satisfaisant, pourquoi ce mécontentement? Sûrement parce que les citoyens ne sont pas consultés entre les élections. C'est là le fond de la question, lorsqu'il s'agit de trouver un moyen efficace de répondre aux pétitions, aux initiatives populaires ainsi qu'aux propositions de révocation et de référendum.

Si les gens sont mécontents à cause du manque de consultation, ils doivent l'être encore bien davantage lorsqu'ils se donnent la peine de présenter une pétition pour soumettre un problème à la Chambre, et que nous leur donnons l'impression de ne même pas faire attention, lorsque nous ne tenons aucun compte de l'énorme travail que c'est de recueillir des milliers ou des dizaines de milliers de signatures. Nous devons commencer à écouter et à donner suite à leurs requêtes.

Il s'agit ici d'une question absolument fondamentale. Un député d'en face a fait remarquer tout à l'heure que les députés réformistes revenaient sans cesse à la charge avec ces réformes


1605

parlementaires. Je soutiens que c'est plus fondamental que tout le reste. À moins que nous n'ayons une vraie démocratie par représentation, nous ne pourrons probablement jamais résoudre les autres problèmes qui surgissent de temps à autre. Je pense, en particulier, à la question de la dette nationale et de la catastrophe qu'elle constitue pour nous, étant donné qu'elle ne cesse d'augmenter.

Les gens disent clairement qu'il faut contrôler les dépenses du gouvernement. Pourtant, quand on voit comment fonctionne la Chambre, on pense qu'il ne semble pas y avoir de véritable mécanisme qui nous permette de dire que nous aurons, en fin de compte, un budget équilibré. Il n'existe pas, à la Chambre, d'ultime autorité qui peut décider de cette question. Le budget nous est annoncé, et notre seule contribution consiste à l'examiner en espérant pouvoir en influencer l'issue.

Dans une véritable démocratie, qui détient finalement le pouvoir? Nous semblons tout à fait prêts à reconnaître que c'est le peuple. En tant que nouveau député, j'ai parlé à un grand nombre de députés, anciens et nouveaux. Je trouve intéressant que personne à la Chambre ne mette en doute la sagesse des gens qui les ont élus.

(1355)

Le Parti réformiste et tous ses membres estiment que les habitants de l'Ouest ont fait un choix très avisé. Je suis sûr que, de leur côté, les députés d'en face sont convaincus que les électeurs ont fait un excellent choix en les envoyant à la Chambre. Si l'on peut faire confiance aux électeurs pour décider qui va les représenter à la Chambre, pour quel parti voter et quel chef de parti appuyer, ne devrions-nous pas leur faire confiance pour d'autres questions? Bien entendu, on touche là au sujet des référendums et à la question dont la Chambre est saisie aujourd'hui.

Les gens réclament un gouvernement plus représentatif. Ils veulent être représentés plus démocratiquement. Ils commencent à vouloir qu'on les écoute et, si nous nous comportons en dictateurs, ils vont finir par ne plus vouloir être régis par des assemblées législatives.

Je suis convaincu, par ailleurs, que si nous prêtons une oreille plus attentive au public et aux différents messages qu'il nous adresse dans le cadre des référendums ou des pétitions, nous arriverons à prendre des décisions plus sages. Le public en général prend de meilleures décisions pour notre pays que ceux d'entre nous qui vivent isolés sur une petite île.

J'attends avec impatience les questions et les autres interventions à ce sujet.

[Français]

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester): Monsieur le Président, dans le discours du député d'Elk Island, il traite de la question, que je trouve absolument ridicule, qui fait l'objet du débat; mais la partie qui m'apparaît ridicule, c'est d'en faire une mise aux voix à la fin du débat sur les pétitions.

Si les députés du Parti réformiste avaient siégé depuis cinq ans comme je l'ai fait, ils verraient très bien les problèmes que cela engendre. Les membres du Parti réformiste mentionnent que le gouvernement dépense trop, que nous dépensons trop, ici, au Parlement. Ne se rappelle-t-il pas que le référendum a coûté plus du quart de un milliard de dollars et qu'avoir des référendums pour tout un chacun, continuellement, durant une année, cela pourrait représenter des milliards de dollars de dépenses?

[Traduction]

Le genre de règle que propose le Parti réformiste, c'est-à-dire que chaque pétition soit examinée en détail et fasse l'objet d'un vote, risque de semer la discorde. Par exemple, le Parti réformiste a remis en question l'utilisation des langues officielles. Est-il en train d'essayer de diviser davantage notre pays? Est-ce ce qu'il cherche?

Si vous avez déjà fait partie d'un conseil municipal, vous vous souviendrez sans doute que les propriétaires de maison d'une seule rue. . .

Le Président: Je suis sûr que le député voudrait s'adresser à la présidence à cet égard.

M. Bellemare: Monsieur le Président, ils constateraient, s'ils siégeaient à un conseil municipal, que si l'on demande aux résidents d'une rue de signer une pétition, souvent ils vont être partagés sur la question. On pourrait demander à une centaine de personnes de signer une pétition, ils diraient oui. Pourtant, dans la même rue, d'autres signataires pourraient être contre.

Comment vérifier l'exactitude des signatures et l'âge des signataires? Qui s'occupe de tout cela? Quelles dépenses devrions-nous engager pour s'assurer que toutes les signatures sont véritables, que tous les signataires sont d'âge légal et pas à moitié ivres ou qu'on ne se retrouve pas avec une bande de cinglés ou de fanatiques qui signent constamment des pétitions sans croire à la procédure équitable?

Nous l'avons vu dans le cas du député de Markham, où les gens se groupent comme des gangs de lynchage dans un village, pour essayer de pendre quelqu'un sans passer par la procédure équitable.

(1400)

Le lynchage était peut-être acceptable dans les années 30 ou 60 du siècle précédent en Alabama, mais ce n'est pas ce que nous voulons au Canada. Nous ne sommes pas des fanatiques.

M. Epp: Monsieur le Président, je voudrais simplement faire l'observation suivante: si le député de Carleton-Gloucester insiste pour dénigrer ses électeurs et dire qu'ils sont des fanatiques lorsqu'ils présentent leurs pétitions ou votent à un référendum, c'est son affaire.

1606

Quant à moi, je choisirais plutôt d'écouter mes électeurs et de prendre très au sérieux l'opinion qu'ils expriment dans un référendum ou dans une pétition. Cela présente peut-être quelques difficultés sur la plan administratif mais, en cette ère moderne de la technologie, nous pouvons sûrement les surmonter et nous avons beaucoup à gagner à écouter de plus en plus les gens qui nous ont élus ici.

[Français]

Le Président: Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés en vertu de l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


1606

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'ACADIA CENTRE FOR SMALL BUSINESS AND ENTREPRENEURSHIP

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui féliciter l'Acadia Centre for Small Business and Entrepreneurship et lui exprimer mon soutien dans ses efforts pour promouvoir l'esprit d'entreprise.

Cet organisme inaugure aujourd'hui, à l'Université Acadia, une semaine d'information à l'intention des personnes qui songent à travailler à leur compte.

La conférence portera sur l'entreprenariat et ses perspectives d'avenir. Ce sera l'occasion pour les participants de déterminer si la formule du travail autonome leur convient et, dans l'affirmative, de se renseigner sur les façons de se lancer en affaires.

On choisira ensuite 35 candidats pour suivre le programme de formation d'une durée de 14 semaines.

Non seulement ce stage d'information joue-t-il un rôle important dans la création d'un réseau communautaire à l'échelle locale, mais il fournit des services et des renseignements précieux à ceux et celles qui souhaitent monter leur propre entreprise.

Je m'associe de tout coeur aux efforts de l'Acadia Centre for Small Business and Entrepreneurship et j'invite les députés à joindre leur voix à la mienne pour féliciter les organisateurs de cet important stage d'information.

* * *

[Français]

LA COUPE DU MONDE DE SURF DES NEIGES

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans): Monsieur le Président, pour la deuxième année consécutive, le parc du Mont-Sainte-Anne, dans le magnifique comté de Beauport-Montmorency-Orléans, sera la station hôte de la Coupe du monde de surf des neiges, du 9 au 13 mars 1994.

En 1993, l'événement a attiré plus de 10 000 spectateurs sur le site, en plus de bénéficier d'une importante couverture médiatique.

Des millions de spectateurs d'Europe, d'Asie et d'Amérique ont pu assister à ces compétitions par le biais de la télévision et ont ainsi mieux connu le Québec, et plus particulièrement la Côte-de-Beaupré et le parc du Mont-Sainte-Anne.

[Traduction]

La deuxième Coupe du monde de surf des neiges au parc du Mont-Sainte-Anne devrait une fois de plus attirer l'attention du monde entier sur Québec, une région qui sait mettre en valeur son caractère particulier et la qualité de ses installations sportives et touristiques.

Du 9 au 13 mars 1994, le monde entier regardera le parc du Mont-Sainte-Anne.

* * *

LE BUDGET

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt): Monsieur le Président, mes électeurs sont en très grande majorité opposés à toute réduction des limites de cotisation au REER. Réduire ces limites reviendrait à augmenter les impôts pour les Canadiens moyens, comme les propriétaires et employés de petites entreprises pour qui le REER est le seul moyen de se constituer une pension de retraite.

J'ai aussi reçu littéralement des centaines de lettres d'appui au Régime d'accession à la propriété qui doit expirer à la fin de ce mois-ci. Ce régime donne le droit d'utiliser le REER pour acheter une première maison, rendant cet achat possible pour beaucoup de Canadiens. Nous avons là un rare exemple de programme gouvernemental qui a du succès, sans coûter un sou au Trésor.

J'espère que le ministre des Finances tiendra compte de l'opinion des Canadiens ordinaires dans son prochain budget.

Au nom de mes électeurs d'Okanagan-Similkameen-Merritt, je demande au ministre des Finances d'arrêter de s'exprimer en langage codé. Élargir l'assiette signifie augmenter les impôts.

* * *

[Français]

LA JOURNÉE DU PATRIMOINE NATIONAL

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis): Monsieur le Président, je suis heureuse de pouvoir m'adresser à mes collègues de cette Chambre à l'occasion de la Journée du patrimoine national.

La diversité de notre pays et de sa population se manifeste de bien des façons et nous confère à notre singularité dans le concert des nations.

Les cultures, les langues et les traditions d'ici et d'ailleurs enrichissent la vie quotidienne de tous les Canadiens et Canadiennes.


1607

(1405)

Cette Journée du patrimoine canadien donne à tous les Canadiens et Canadiennes l'occasion de se pencher sur la valeur et la richesse de leur patrimoine.

[Traduction]

Les Canadiens devraient profiter de cette Journée du patrimoine national pour se souvenir avec fierté de l'apport de tous ceux qui ont aidé à façonner ce grand pays, pour apprécier et partager la diversité qui s'exprime dans notre patrimoine ainsi que pour renforcer et célébrer le tissu multiculturel du Canada.

Nous avons, à la Chambre, beaucoup de raisons de célébrer, car nous sommes un reflet de ce tissu multiculturel.

* * *

LES GUIDES DU CANADA

M. John Cannis (Scarborough-Centre): Monsieur le Président, vendredi soir dernier, les Guides du Canada et la ville de Scarborough ont décerné la Fourragère du Canada à cinq jeunes femmes de la circonscription de Scarborough-Centre.

La Fourragère est décernée par les Guides du Canada à des personnes dont on veut reconnaître le dévouement à l'égard de ce mouvement, de leur collectivité et de leur pays.

Ces cinq jeunes femmes -Jennifer Barnes, Analese Campbell, Jandy Morrow, Kristi Tumbling et Jennifer Wright -ont mérité ce prix pour avoir consacré leur temps et leurs efforts à cette cause depuis trois ans. Tout comme leur collectivité, qui a reconnu leur valeur, nous pouvons les citer en exemple à tous les jeunes Canadiens, et je les en félicite.

* * *

KATE PACE

M. Bob Wood (Nipissing): Monsieur le Président, au nom de tous les Canadiens et particulièrement au nom des habitants de la circonscription de Nipissing, je tiens à féliciter Kate Pace, de North Bay, en Ontario, pour sa remarquable performance à la compétition féminine de course en descente, samedi dernier, aux Jeux olympiques.

Déjà championne du monde, Kate s'est une fois de plus distinguée comme l'une des meilleures skieuses de descente du monde. Elle a maintenant hâte de défendre son titre à la Coupe du monde du ski alpin.

Le centre culturel de North Bay était bondé samedi, à 4 heures du matin, 1 000 personnes s'y étant réunies pour assister à la performance de Kate. C'est l'engagement manifesté par Kate Pace à l'égard du sport qu'elle a choisi, de sa collectivité et de son pays, le Canada, qui lui a valu ce témoignage de soutien de la part des gens de North Bay et de la région.

Je suis très fier de féliciter Kate aujourd'hui, à la suite de sa réussite extraordinaire aux Jeux olympiques. Je lui souhaite tout le succès qu'elle mérite à l'épreuve de course en descente de la Coupe du monde, où elle défendra son titre plus tard cette année.

* * *

[Français]

LE FONDS DE SOLIDARITÉ DES TRAVAILLEURS DU QUÉBEC

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de fierté que j'informe cette Chambre que grâce à un investissement du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, l'usine Produits forestiers Canadien Pacifique de Trois-Rivières, fermée depuis deux ans, recommencera à produire du papier le 23 février prochain sous la raison sociale TRIPAP et redonnera ainsi un emploi à plus de 300 travailleurs.

Au cours des dernières années, ce sont plus de 700 emplois qui ont été créés ou maintenus grâce au Fonds de solidarité, notamment chez FABRON de Trois-Rivières, Cadorette Marine de Grand-Mère, dans la circonscription du premier ministre, et chez Nova Quintech de Pierreville, dossiers qui représentent au total des investissements de plus de 41 millions de dollars.

En ce 10e anniversaire de fondation, l'action très utile du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec dans la région Mauricie-Bois-Francs devait être portée à l'attention de cette Chambre.

* * *

[Traduction]

LA DETTE NATIONALE

M. Ken Epp (Elk Island): Monsieur le Président, je suis très enthousiasmé par l'initiative prise par plusieurs femmes de ma circonscription d'Elk Island. Maralyn Benay et ses collègues ont décidé de créer une organisation qui se chargera de recevoir les dons volontaires des gens et de les transmettre au gouvernement afin qu'ils aillent directement réduire la dette nationale. Le projet a déjà reçu une énorme publicité favorable, et le groupe a le vent en poupe.

En parlant avec Mme Benay de l'ampleur de la dette du Canada et du problème des dépenses excessives, j'ai comparé ses efforts à ceux de quelqu'un qui tenterait de remplir un baril d'eau à la cuiller sans savoir que le baril n'avait pas de fond.

Il y a au pays des gens qui son prêts à s'attaquer à l'énorme problème de la dette avec autant de ferveur que celle que nous avons mise à accepter la situation d'urgence de notre pays durant la Deuxième Guerre mondiale. Comme ce serait magnifique si nous, à Ottawa, pouvions faire notre part en endiguant l'eau qui s'échappe du fond du baril.

Mme Benay et son groupe méritent tout l'encouragement qu'ils pourront obtenir, et tous ceux qui sont prêts à donner de leur argent, que ce soit une petite somme ou une grosse, devraient être considérés comme des héros canadiens.


1608

[Français]

LE BILINGUISME

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount): Monsieur le Président, vendredi dernier, c'était très amusant d'écouter les déclarations de deux députés du Bloc québécois.

Le député de Richmond-Wolfe a condamné ceux qui s'opposent au bilinguisme officiel. Je suis très heureux d'apprendre que le Bloc appuie le bilinguisme officiel.

Pour sa part, le député de Louis-Hébert a félicité Isabelle Brasseur pour sa médaille de bronze. Mais il n'a pas daigné mentionner le nom de son partenaire, Lloyd Eisler qui, lui, vient de l'Ontario. Pense-t-il que Mme Brasseur aurait gagné sa médaille en patinage double, seule?

Cela me fait penser à la Coupe du Canada il y a quelques années lorsque nous avions gagné avec Wayne Gretzky et Mario Lemieux. Bien des gens avaient dit que nous n'aurions pu gagner sans les deux, car n'est-il pas vrai que l'union fait la force.

Ces déclarations de deux députés du Bloc québécois démontrent les contradictions et les faiblesses dans les positions de ce parti.

* * *

(1410)

[Traduction]

LA FÊTE DU PATRIMOINE

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui la Fête du patrimoine.

Il n'est pas surprenant que le Canada ait choisi de célébrer sa diversité ethnique. C'est un pays où les différences culturelles sont considérées comme une force et non comme une faiblesse. C'est là une des nombreuses raisons qui valent au Canada sa solide réputation en matière d'équité raciale.

Pour certains Canadiens, la liberté dont ils jouissent va de soi, ce qui n'est pas le cas de ceux qui ont dû se battre contre vents et marées pour y immigrer. Le Canada est une nation suffisamment sûre d'elle pour permettre à ses nouveaux citoyens de conserver leur culture, et même les y encourager.

N'oublions pas que la plupart des pays forcent les immigrants à oublier leur patrimoine culturel. Le Canada, au contraire, reconnaît la richesse d'un tel patrimoine et le célèbre d'un océan à l'autre.

À tous, joyeuse Fête du patrimoine.

LA FÊTE DU PATRIMOINE

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Monsieur le Président, la Fête du patrimoine revêt beaucoup d'importance pour notre pays. Aujourd'hui, nous réfléchissons aux nombreuses facettes du Canada et nous célébrons notre diversité et notre unité.

Cela me rappelle ma propre immigration au Canada et le fait que mon épouse et moi avons eu la chance de voir naître et grandir quatre fils dans ce merveilleux pays. Je suis privilégié de vivre au Canada. Je suis honoré de servir mes électeurs de Winnipeg-Nord et fier de faire partie de la superbe diversité que constitue la mosaïque canadienne.

La Fête du patrimoine porte également sur nos institutions nationales, nos chemins de fer, nos écoles, nos parcs et notre système de gouvernement. Elle porte sur la construction de notre nation qui a touché des générations de Canadiens de bien des façons sur les plans politique, économique et social.

Cette journée souligne en outre le rôle important joué par les gouvernements pour ce qui est de préserver notre patrimoine culturel, de favoriser des relations plus étroites avec nos premières nations et de maintenir le bilinguisme officiel dans un cadre multiculturel.

La somme de tout cela définit nos valeurs nationales: la démocratie, la liberté, la justice sociale et la paix.

* * *

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, je tiens à dénoncer une situation inhumaine vécue par une famille de mon comté, Roumains d'origine, M. et Mme Maraloï et leurs deux fils, qui sont au Canada depuis trois ans. Dès leur arrivée, ils ont entrepris les démarches nécessaires auprès du ministère de l'Immigration pour régulariser leur situation au pays. Ils ont déployé beaucoup d'efforts pour s'intégrer à la communauté québécoise. Ils n'ont jamais eu recours à aucune forme d'aide gouvernementale quelle qu'elle soit. Les enfants, par leur réussite scolaire, témoignent du succès de leur intégration. Ils sont une famille exemplaire.

Malgré cela, les demandes de la famille sont demeurées vaines, les autorités ayant jugé qu'ils n'avaient pas fait la preuve du danger de persécution s'ils retournaient en Roumanie. Après trois ans, on décide de les expulser. C'est inhumain. Est-ce là une façon de souligner l'année internationale de la famille, en les retournant dans un pays où ils n'ont plus rien, où tout porte à croire qu'ils seront en danger, en les déracinant de la communauté où ils se sont installés et où ils sont appréciés?

1609

[Traduction]

LES FORÊTS

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, j'ai eu la chance de participer la semaine dernière à Vancouver à plusieurs rencontres avec des membres de l'Association parlementaire Canada-Europe. Nous avons abondamment survolé et visité le détroit de Clayoquot.

La Chambre n'ignore pas que les Européens ont présenté au Parlement européen une résolution qui proposait de boycotter pour deux milliards de dollars d'exportations canadiennes de bois d'oeuvre. Cette décision provisoire était fondée sur l'information et les démarches de certains environnementalistes de Colombie-Britannique, mais les parlementaires européens ont voulu prendre le temps, et ils méritent nos félicitations, de venir constater sur place les méthodes d'exploitation que certains groupes protectionnistes dénoncent à fond.

Je suis heureux de pouvoir dire qu'après des discussions et une observation sérieuses, nous sommes parvenus à trouver une solution acceptable. Les environnementalistes doivent tenir compte des progrès réalisés au chapitre des méthodes visant à permettre une exploitation forestière durable. Je leur recommande d'ailleurs d'opter pour le compromis plutôt que pour la confrontation et pour la coopération plutôt que pour la controverse.

* * *

LA RÉFORME ÉLECTORALE

M. Nick Discepola (Vaudreuil): Monsieur le Président, je m'oppose entièrement au remaniement proposé de la carte électorale et je demande que des mesures soient prises immédiatement pour mettre fin à ce processus.

Vendredi dernier, on a consulté plus de 30 dirigeants municipaux de ma circonscription et de l'ouest de l'île de Montréal. Ils ont unanimement reconnu que le projet ne tenait pas compte de la réalité de notre région. En ces temps de difficultés économiques, alors qu'on va demander demain, ici même à la Chambre, aux Canadiens de consentir à des sacrifices difficiles, avons-nous les moyens de nous permettre une réforme qui va coûter des millions de dollars et dont les résultats me semblent douteux?

(1415)

J'ai consulté bon nombre de mes collègues de l'Ontario, du Québec, de l'Ouest et des provinces atlantiques, et nous estimons tous qu'il est de notre devoir de faire preuve de frugalité dans la gestion de l'argent durement gagné des contribuables. Nous pouvons économiser des millions de dollars simplement en adoptant un projet de loi et en reportant la réforme électorale jusqu'au prochain recensement.

Je ne crois pas que les Canadiens soient sous-représentés par les 295 députés que compte actuellement la Chambre des communes. Je rappelle à la Chambre que l'important n'est pas la quantité mais la qualité.

[Français]

BOURSES CANADA

M. Patrick Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine): Monsieur le Président, permettez-moi de joindre en cette Chambre mes voeux de sincères félicitations à huit jeunes étudiants de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine. En effet, ceux-ci ont reçu du gouvernement du Canada des bourses d'études pour soutenir leurs efforts d'excellence académique de niveau postsecondaire en sciences, en génie et en mathématiques.

Ces secteurs font partie de l'avenir économique de ma région ainsi que de celui du Canada, et je compte grandement sur l'apport professionnel de ces boursiers gaspésiens et madelinots pour notre avenir économique. J'offre mes sincères félicitations à Frédéric Aspirot, Nadia Bouchard, Julie Cummings, Anik Henry, Pascal Poirier, Steve Renaud, Stéphane Thériault et Serge Vigneau.

La bourse, d'un maximum de 10 000 $ au niveau universitaire et de 7 500 $ au niveau collégial, permettra à ces jeunes d'exceller dans leurs études.

Ces boursiers contribueront au maintien de l'excellence scientifique au Canada, et j'en suis très fier.

Le Président: Mes chers collègues, depuis quelques semaines, certains d'entre vous m'ont posé la question au sujet de l'article 31 du Règlement.

[Traduction]

Vous avez demandé à la présidence de vous donner des précisions concernant la durée des déclarations en conformité avec l'article 31 du Règlement. Après cinq semaines de séance, je suis heureux d'affirmer que, lorsque les déclarations sont d'environ 150 à 160 mots, tout le monde semble être en mesure de parler à son tour. Je signale donc que tout semble bien aller.

De plus, dans le cas des déclarations rédigées à l'avance, je tiens à remercier les députés qui les font parvenir aux interprètes. La traduction s'en trouve facilitée, et je vous en remercie au nom de vos collègues.

_____________________________________________


1609

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA BOSNIE

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Les dirigeants de l'OTAN et de l'ONU ont convenu hier de ne pas effectuer de frappes aériennes à Sarajevo. Il semble que les casques bleus soient en train de reprendre le contrôle des positions serbes et que la paix puisse enfin s'installer à Sarajevo.


1610

Je demande au ministre s'il peut faire le point sur la situation qui prévaut aujourd'hui à Sarajevo et nous donner l'assurance que le retrait de l'artillerie lourde serbe a suffisamment progressé pour justifier l'annulation des frappes aériennes.

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, il n'y a pas de doute que le retrait de l'artillerie lourde ou sa mise sous contrôle des Nations Unies a eu pour effet de créer une amélioration des conditions très substantielle. Il n'y a aucun doute que ces actions correspondent aux voeux formulés tant par les Nations Unies que par les membres de l'OTAN.

Il va sans dire que la démilitarisation de Sarajevo se poursuivra dans les prochains jours. C'est pourquoi nous avons pensé qu'il était important de maintenir la menace de l'utilisation de frappes aériennes pour le cas où tant les Serbes que les Musulmans voudraient ramener de l'artillerie lourde et l'utiliser.

Nous pensons cependant que les efforts diplomatiques ont porté fruit et que le processus de paix est définitivement engagé et il est à espérer que les forces de frappe ne seront pas nécessaires dans les circonstances.

(1420)

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, il faut convenir qu'il s'agit là de bonnes nouvelles et que le gouvernement a bien fait de se concerter avec ses partenaires pour le résultat qui est maintenant escompté.

Cependant, malgré ces bonnes nouvelles, la guerre se poursuit dans d'autres parties de la Bosnie. Je voudrais demander au ministre s'il peut nous indiquer quels moyens sont envisagés par le Canada et ses partenaires pour mettre un terme au combat qui perdure en Bosnie, et ainsi empêcher les Serbes d'utiliser l'artillerie lourde, retirée maintenant de Sarajevo, pour servir à la poursuite des combats ailleurs en Bosnie?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, nous pensons que les initiatives diplomatiques, tant des Américains que des Russes, ont permis de créer un climat beaucoup plus prometteur que les initiatives précédentes. Nous pensons que ces initiatives diplomatiques doivent continuer, qu'elles doivent être poursuivies afin d'amener les trois parties en conflit, tant les Serbes, les Croates que les Musulmans, à accepter un processus de paix qui s'étendra à tout l'ensemble de l'ex-Yougoslavie. À cet égard, des réunions auront lieu demain et dans les prochains jours en Europe afin de mettre en place, aux plus hautes instances, un mécanisme qui amènera une paix durable dans la région.

[Traduction]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, étant donné que l'ultimatum concernant la levée du siège de Sarajevo est expiré, le ministre peut-il indiquer quel est le nouvel échéancier prévu pour le retrait des troupes canadiennes à Srebrenica? Pouvons-nous maintenant nous attendre à un retrait rapide dans des conditions absolument sûres pour nos troupes?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, je suis heureux de signaler qu'effectivement, on est en train de mettre en oeuvre la décision au sujet de la relève des troupes.

Malheureusement, les troupes des Pays-Bas ne sont pas encore arrivées sur les lieux à cause des conditions météorologiques et des nombreux points de contrôle qu'elles doivent franchir. Cependant, elles sont bel et bien en route, et je crois que la relève se fera dans les semaines qui viennent.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, vendredi dernier, le grand chef du conseil de bande d'Akwesasne, M. Mike Mitchell, remettait sa démission en déclarant et je cite: «J'avais ébauché des projets pour favoriser la collaboration entre les Mohawks et le gouvernement, mais les querelles intestines m'ont épuisé.»

Le solliciteur général ne convient-il pas que la démission soudaine de M. Mitchell constitue un aveu d'impuissance des autorités mohawks à faire respecter la loi et l'ordre sur leur territoire?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, mon collègue doit poser sa question au chef Mitchell afin de déterminer les raisons de sa démission. Je peux dire que la GRC a fait et continue de faire respecter la loi partout et je ne vois aucun lien entre la démission du chef Mitchell et le travail des forces policières, y inclus la Sûreté du Québec.

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, doit-on comprendre de la démission de M. Mitchell et de l'assurance donnée par le solliciteur général, à l'effet qu'il n'y aurait pas d'intervention policière en territoire mohawk, doit-on comprendre que le gouvernement a en quelque sorte renoncé à faire respecter la loi et l'ordre sur ces territoires et laisse à une poignée d'individus armés la possibilité de faire fructifier leurs actes criminels, leur activité illégale en toute impunité?

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, je n'ai donné aucune assurance qu'il n'y aura pas d'intervention policière dans les réserves mohawks. J'ai dit justement et exactement le contraire. J'ai dit que c'était entre les mains de la GRC et que c'est à cette dernière de prendre ses propres décisions pour faire les enquêtes et les interventions qu'elle pense nécessaires. Je n'ai donné aucun engagement à quiconque qu'il n'y aura pas de telles interventions.

* * *

(1425)

[Traduction]

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre.


1611

Quelles que soient les mesures qui seront proposées dans le budget en vue de la réduction du déficit, la plupart des députés reconnaissent qu'elles seraient certainement plus efficaces si le Parlement lui-même avait de meilleurs outils à sa disposition pour contrôler les dépassements budgétaires.

La vice-première ministre peut-elle nous dire si le gouvernement a des plans précis en vue de doter le Parlement de tels outils et, dans l'affirmative, quels sont ces plans?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, le leader du gouvernement à la Chambre a déjà exposé ses plans en vue de rendre le Parlement non seulement plus responsable, mais aussi plus attentif aux besoins des contribuables.

Lorsque les prévisions budgétaires seront déposées cette semaine, je suis certaine que le député et ses collègues du Parti réformiste seront tout aussi empressés que nos ministériels de les examiner scrupuleusement pour s'assurer que l'argent des contribuables est dépensé de façon judicieuse dans chacun des ministères.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): J'ai une question supplémentaire à poser, monsieur le Président. La Commission Lambert a recommandé l'introduction de dispositions de temporarisation aux termes desquelles l'autorisation législative de dépenser pour certains programmes prendrait fin après cinq ans à moins qu'elle ne soit renouvelée de façon expresse par le Parlement au moyen d'un vote.

La vice-première ministre peut-elle dire à la Chambre si le gouvernement accepte en principe les dispositions de temporisation comme moyen de contrôler les dépenses du gouvernement?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada n'a pas besoin de dispositions de temporarisation pour contrôler ses dépenses. Nous réévaluons constamment la nécessité de chaque programme parce que nous nous rendons bien compte que les contribuables nous ont confié la responsabilité de voir à ce que leur argent soit dépensé de façon judicieuse chaque jour, chaque mois et chaque année.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, je veux poser une autre question supplémentaire à la vice-première ministre. Certains députés se souviendront certainement que, durant la dernière législature, le Parlement avait examiné une loi sur le contrôle des dépenses qui prévoyait que les dépenses de programmes ne dépasseraient pas certaines limites.

La vice-première ministre pourrait-elle dire à la Chambre si le gouvernement reconnaît en principe l'adoption d'une mesure législative limitant les dépenses comme autre moyen de contrôler les dépenses?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, notre meilleur moyen de contrôler les dépenses sera le budget qui sera déposé demain.

[Français]

LE BUDGET

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, dans le dernier droit du processus budgétaire, il semble clair et de plus en plus clair que ce gouvernement, se disant hypocritement à l'écoute de la population, fera fi de ses intérêts en augmentant honteusement la charge fiscale des familles à revenu moyen.

Ma question s'adresse à la vice-première ministre. Ne convient-elle pas que la direction que semble vouloir emprunter son gouvernement va à l'encontre des principes d'équité fiscale et de relance économique que son gouvernement semble vouloir défendre au cours de son mandat?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, ce n'est pas le gouvernement qui parle d'hypocrisie, mais si je veux souligner l'hypocrisie, je peux parler de ce que j'ai entendu, en fin de semaine dernière, alors que le critique de l'opposition en matière de finances disait qu'il faudrait régler nos problèmes financiers, qu'il faudrait faire de notre mieux pour prendre soin des contribuables canadiens, mais qu'il ne faut s'attaquer à aucun programme qui touche, soit la classe moyenne, soit les programmes fiscaux du gouvernement, soit les REA. Je pose la question au critique en matière de finances: Comment entend-il tenir ses engagements à respecter un budget canadien?

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, je suis très satisfait de la question de la vice-première ministre puisqu'il s'agit de la même question que celle que nous posons à son gouvernement et au ministre des Finances depuis le 17 janvier.

Est-ce que le gouvernement entend aller chercher l'argent là où il se trouve, c'est-à-dire chez les grandes sociétés canadiennes qui n'ont pas payé un cent d'impôt depuis 1987, même si elles font des profits mirobolants, et auprès des plus riches familles canadiennes qui bénéficient d'évasions fiscales par l'entremise des fiducies familiales? C'est là qu'il faut aller chercher les milliards qui manquent au budget annuel du gouvernement.

Est-ce que son gouvernement a l'intention de couper là, justement, et d'épargner les revenus moyens?

(1430)

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, je suis tout à fait certaine que le critique financier du Bloc québécois ne voudrait pas, par exemple, que l'on touche à ces abris fiscaux qui sont disponibles grâce au Fonds de solidarité. Je pense qu'il y a plusieurs instruments gouvernementaux qui sont très importants au développement de l'économie.

Lorsque le député prétend qu'il faudrait revoir ces abris fiscaux pour régler ce problème, c'est évident que nous sommes d'accord, tous et toutes, que nous devrons partager le fardeau de régler nos problèmes financiers. On ne peut pas toucher qu'à ce 2 p. 100 de la population, parce que ça ne va pas régler notre problème. Nous devons tous être prêts à faire notre effort. Et là,


1612

j'aimerais que l'opposition se joigne à cet effort, qui va être à la fois très difficile mais nécessaire à la santé fiscale et à la santé en matière d'emploi des Canadiens.

* * *

[Traduction]

L'IMMIGRATION

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre. Il s'agit d'un sujet qui a été porté à mon attention par la communauté somalienne et par les médias.

Apparemment, un membre du cruel régime Barre, de Somalie, qui se serait rendu coupable de violations des droits de la personne, habiterait maintenant à Ottawa. Quand la vice-première ministre prendra-t-elle des mesures pour que cet individu fasse l'objet d'une enquête visant à déterminer si les allégations de brutalité le mettant en cause sont fondées et, si elles le sont, pour que les procédures d'expulsion soient entreprises immédiatement?

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question et je peux lui dire que, en ce moment même, des fonctionnaires de mon ministère enquêtent sur les allégations rapportées.

La Loi sur l'immigration contient des dispositions prévoyant l'expulsion des membres supérieurs d'un gouvernement se rendant coupable de violations graves des droits de la personne. Si l'enquête révèle que cette personne était un membre important du gouvernement de Siyad Barre, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration prendra des mesures, comme il l'a déjà fait dans d'autres cas, pour qu'il soit expulsé du Canada.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire à poser à la vice-première ministre.

La semaine dernière, j'ai demandé au ministre de l'Immigration combien d'exemples d'abus contre les droits de la personne les Canadiens devront encore tolérer. Régulièrement, les médias nous signalent l'entrée au Canada de criminels et d'auteurs de violations des droits de la personne et, pourtant, le ministre de l'Immigration nous a maintes fois assurés que le Canada était à l'abri de ces criminels.

Quand la vice-première ministre ou le premier ministre, puisque lui aussi est en cause, demanderont-ils au ministre de l'Immigration de commencer à faire son travail plutôt que de le laisser faire par les médias?

Mme Mary Clancy (secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, nous pouvons dire que le ministre de l'Immigration fait un travail remarquable en suivant les voies de droit régulières.

Depuis longtemps, le Canada est un pays ouvert qui accueille avec joie des immigrants et des réfugiés venant des pays qui n'ont pas la chance que nous avons, et cela ne changera pas.

Il existe des lois et, de temps à autre, il y a des individus qui les enfreignent. Dans ces cas, il existe des moyens permettant de punir les coupables avec toute la rigueur de la loi. Si le cas soulevé par le député est de cette nature, c'est ce qui se produira.

* * *

[Français]

LA SÉCURITÉ DU REVENU

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Le ministre a fait connaître, le vendredi 18 février, la composition du comité d'experts, qui aura un peu moins de deux mois pour le conseiller sur le projet de réforme le plus ambitieux de la sécurité du revenu et du marché du travail au Canada.

De son côté, le comité de députés n'aura que 12 jours pour entendre les personnes et les groupes et conseiller le ministre sur les préoccupations et les priorités des Canadiens.

Face à cet échéancier irréaliste, ma question est la suivante: Le ministre ne convient-il pas qu'en réalité son plan d'action est déjà prêt, que c'est celui des conservateurs, et qu'il préfère consulter un comité d'experts à 500 $ par jour, plutôt que de donner à la population un temps suffisant de consultation?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, j'ai beaucoup plus confiance dans les capacités des députés et du comité que ne semble en avoir la députée.

(1435)

La députée ne devrait pas sous-estimer la capacité du Parlement de constituer une tribune publique où les Canadiens puissent se faire entendre, de s'assurer que le plus grand nombre est consulté et d'accomplir la très précieuse tâche qui consiste à veiller qu'un éventail d'opinions d'un bout du pays soit clairement présenté au début de la consultation. Puis, le comité pourra examiner plus en profondeur un plan d'action, de telle sorte qu'il se fasse quelque chose de précis.

Ce n'est pas en essayant de freiner ou de minimiser le travail de ce comité que la députée jouera son rôle de porte-parole de l'opposition. Il importe beaucoup que le Parlement se décide à donner aux Canadiens l'occasion de se faire entendre afin que nous puissions procéder ensemble à la réforme que souhaitent tous les Canadiens.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier): Monsieur le Président, je voudrais d'abord dire au ministre que mon rôle comme parlementaire dans ce comité ne peut pas être questionné, j'ai poussé dessus. Mais nous n'aurons, malgré tout, que 12 jours.

Je voudrais aussi, s'il vous plaît, et je passe à l'anglais, citer le Globe and Mail de ce matin:


1613

[Traduction]

«Le ministre des Finances Paul Martin a fait savoir que la réduction du déficit fédéral de 45 milliards de dollars devra attendre que le gouvernement ait réglé des questions fondamentales, telle la réforme du filet de la sécurité sociale.»

[Français]

Monsieur le Président, ma question complémentaire est la suivante: Le ministre ne convient-il pas que s'il est si pressé, c'est pour permettre au ministre des Finances de couper l'an prochain dans les programmes sociaux?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je répondrai à la députée que c'était peut-être là le programme du gouvernement précédent. Elle pourrait poser la question au chef de son propre parti, puisqu'il faisait partie de ce gouvernement.

Ce n'est certes pas le programme de notre gouvernement. Nous avons l'intention de trouver un moyen vraiment juste et équitable de permettre aux Canadiens de retourner au travail et de pouvoir être convenablement appuyés. Nous voulons nous assurer que nous avons un système moderne qui offre aux Canadiens une possibilité réelle de participer pleinement à la vie de notre pays.

* * *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, aujourd'hui, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Hier, la presse canadienne rapportait que le ministre a quitté la séance de discussions à laquelle participaient des représentants du Conseil de la bande indienne du Petit lac des Esclaves et de la Bande indienne de Sawridge. Le ministre aurait trouvé inacceptable l'autonomie gouvernementale telle que conçue par la Bande indienne de Sawridge. Si j'ai bien compris, la proposition de la Bande de Sawridge prévoit la création d'un palier d'administration municipale et la possibilité de s'affranchir de la Loi sur les Indiens.

Le ministre pourrait-il dire aujourd'hui à la Chambre ce qu'il trouve de si répréhensible dans cette proposition?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, le projet de loi de Sawridge n'aborde pas la question du projet de loi C-31 actuellement devant les tribunaux.

Lorsque le projet de loi de Sawridge a été présenté à l'ancien gouvernement, probablement avec l'appui de l'ancien ministre, il n'a pas été accepté par le Cabinet. Il a également été rejeté par le ministère de la Justice qui soutient que la mesure législative n'est pas conforme aux obligations que possède l'État envers l'ensemble d'une bande indienne.

Le projet de loi a aussi été rejeté par moi, par mon chef et par notre gouvernement. C'est en pensant au projet de loi C-31 et à l'ensemble de la nation Cri que nous affirmons que le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale existe bel et bien et que nous travaillerons à l'intérieur de la structure établie.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, la Bande indienne de Sawridge a proposé un modèle pratique d'autonomie gouvernementale qui répond aux besoins de la collectivité de Sawridge.

Le ministre veut-il imposer un modèle d'autonomie gouvernementale aux peuples autochtones du Canada? Est-il disposé à négocier des accords avec chacune des bandes indiennes individuellement?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, nous considérons tous les aspects culturels de l'autonomie gouvernementale.

Il s'agit d'une question très importante. Dans les régions du Nord, les anciens choisissent les chefs. Il arrive parfois que ces chefs, de retour dans leur village, s'aperçoivent qu'ils ont perdu leur titre. Dans le cas des Ojibways, les anciens jouent le rôle de conseillers. Chez les Mohawks, la culture se fonde sur le principe de la longue maison. Il n'existe pas un modèle unique d'autonomie gouvernementale au Canada.

Cependant, je préciserai que la Bande indienne de Sawridge est probablement l'une des bandes les plus riches au pays, puisqu'elle possède des dizaines de millions de dollars. Elle dit à ses membres qu'elle ne partagera pas l'argent. Cela ne correspond pas à la façon de faire du gouvernement ou des Canadiens.

* * *

(1440)

[Français]

LES SUBVENTIONS FÉDÉRALES

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Monsieur le Président, le quotidien La Presse fait état ce matin de diverses subventions fédérales dont aurait bénéficié M. Jerry Peltier avant et après son élection comme grand chef de Kanesatake. Selon ces informations, M. Peltier aurait encaissé des sommes totalisant plus de 58 000 $ en 1991, sur une période de six mois seulement.

Le ministre des Affaires indiennes peut-il nous confirmer les allégations voulant que M. Peltier ait touché, de façon rétroactive, des honoraires de 25 600 $ pour des services rendus au gouvernement pendant la crise d'Oka?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, si le député tient vraiment à poser cette question, il devrait l'adresser au chef de son parti. Si des fonds ont été versés mal à propos, cela est arrivé pendant le mandat d'un gouvernement précédent.

Nous avons hérité de ce problème des paiements en trop. Nous avons chargé le cabinet d'experts-comptables Raymond, Chabot, Martin et Paré d'examiner un problème dont nous avons hérité. Les experts-comptables établissent une relation spéciale avec l'administrateur de la bande pour remédier à ce problème.

Si le chef de son parti n'était pas membre du gouvernement à ce moment-là, il en faisait certes partie pendant la période où les fonds ont été versés à cette bande. Si les fonds ont été dépensés mal à propos, le député devrait demander pourquoi le chef de son


1614

parti ne s'est pas occupé de ce problème quand il était membre du gouvernement et qu'il en avait l'occasion.

Nous nous attaquons au problème avec l'aide d'un cabinet d'experts-comptables. Nous élaborons une entente de gestion. Je suis prêt à faire connaître les problèmes de l'entente de gestion au député, car nous ne voulons certes pas que le problème perdure ni que les paiements en trop se poursuivent.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Je pense que le ministre est mêlé dans son calendrier, parce que notre chef, le chef actuel du Bloc québécois, n'était pas en poste au moment de ces événements. Il avait déjà démissionné en 1990, donc il ne pouvait pas régler cette facture-là.

Le ministre peut-il nous dire quelles étaient les responsabilités et le statut de M. Jerry Peltier au ministère des Affaires indiennes avant la crise d'Oka?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, on peut prétendre que le chef de l'opposition n'était pas là au moment exact de la crise d'Oka. Mais, dans un article paru dans le Soleil de samedi-et je suis certaine que vous lisez beaucoup d'articles de presse-le président de l'Association des policiers, M. Jocelyn Turcotte, a déclaré que le problème des autochtones, en ce qui concerne la contrebande, a commencé en 1988 pendant la période où le chef de l'opposition faisait partie du cabinet du M. Mulroney.

Donc si on prend l'échéancier que nous avons adopté, à partir des 100 jours d'aujourd'hui, c'est évident que le gouvernement règle un problème qui n'a pas été réglé pendant cette période de quatre ans par son ami le chef de l'opposition.

[Traduction]

Le Président: Je sais que tous les députés s'intéressent à ce qui s'est passé avant, mais j'inviterais les députés à limiter autant que possible leurs questions à ce qui relève de la responsabilité du gouvernement actuel. Dans la mesure où nous pourrons le faire, je suis convaincu que nous pourrons obtenir des questions et des réponses qui seront acceptables pour tous les participants.

* * *

L'OFFICE NATIONAL DE L'ÉNERGIE

M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre des Ressources naturelles.

Au mois de janvier, l'Office national de l'énergie a tenu de longues réunions dans le sud de l'Ontario, à la suite d'une demande de l'Interprovincial Pipeline et de l'Intercoastal Pipeline visant à prolonger un pipeline américain au Canada.

Des centaines de propriétaires fonciers avaient des inquiétudes légitimes et voulaient se faire entendre. La législation fédérale en matière d'énergie ne prévoit toutefois aucune disposition sur le financement des intervenants. Ceux qui ont demandé le prolongement du pipeline de ce côté-ci de la frontière canado-américaine n'ont pas eu à payer les coûts des intervenants qui se sont élevés à des millions de dollars. Ce sont les agriculteurs, les commissions scolaires et les propriétaires fonciers qui ont dû payer eux-mêmes les dépenses nécessaires.

Voici ma question: Que fera la ministre pour tenter de persuader l'Interprovincial Pipeline et l'Intercoastal Pipeline de payer les dépenses raisonnables des intervenants? La ministre compte-t-elle modifier la loi pour éviter que cela ne se reproduise?

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Monsieur le Président, je remercie le député de Sarnia de sa question. Comme il vient de le souligner, en vertu de la Loi sur l'Office national de l'énergie qui est actuellement en vigueur, l'Office ne peut assurer le remboursement des dépenses des intervenants dans de telles circonstances.

(1445)

Permettez-moi toutefois de dire que l'Office national de l'énergie est parfaitement conscient des dépenses découlant des audiences et qu'il s'efforce de tenir celles-ci dans les localités visées, comme il l'a fait en l'occurrence, pour réduire les coûts au minimum et accroître au maximum la participation des citoyens concernés.

Je tiens aussi à dire que je ne peux ordonner aux sociétés dont le député a parlé de payer ou de rembourser les frais des intervenants, car elles ne sont pas légalement tenues de le faire.

En terminant, je veux donner au député l'assurance que la question qu'il a soulevée me tient à coeur; aussi, j'ai demandé à mes fonctionnaires d'examiner tous les mécanismes de remboursement qui pourraient être envisageables dans l'avenir.

* * *

L'ÉCONOMIE SOUTERRAINE

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Revenu national.

Un nombre croissant de Canadiens passent à l'économie souterraine et se soustraient à l'impôt. Le président du Comité permanent des finances estime que c'est à cause de la TPS. De son côté, le ministre du Revenu national est d'avis que les comptables agréés et les avocats en sont quelque peu responsables.

Ma question est la suivante: Le gouvernement cherche-t-il des boucs émissaires ou sait-il vraiment pourquoi l'économie souterraine est en plein essor?

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question, d'autant plus que ma femme, qui détient deux diplômes en droit, est assise à la tribune aujourd'hui.

Je voudrais d'abord souligner que l'économie souterraine a maints aspects et que nous y faisons la lutte du mieux que nous pouvons sur un certain nombre de fronts, y compris la lutte contre la contrebande, dont nous avons déjà parlé, l'application de la loi et les efforts visant à rendre le régime fiscal plus équitable.


1615

J'ajouterai que, en ce qui concerne les avocats et les comptables agréés, tous ceux qui tentent de tricher peuvent faire l'objet d'enquêtes et de poursuites de la part de Revenu Canada, quelle que soit leur profession.

J'assure la députée que les reportages de Radio-Canada sur l'entrevue ont omis de préciser qu'aucun effort particulier n'était fait pour viser une profession donnée et que seuls étaient visés ceux qui tentent de tricher en ne payant pas leur juste part d'impôts.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire.

Je remercie le ministre du Revenu national de son assez longue réponse. Mais je dois lui demander encore, par votre entremise, monsieur le Président, si son gouvernement a un vrai plan pour réduire les impôts afin de remédier au problème de l'économie souterraine.

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, je m'excuse de la longueur de ma réponse, mais c'est un sujet d'une très grande importance mettant en jeu bien des milliards de dollars.

Quant à savoir si mon ministère a un plan pour réduire les impôts, je puis l'assurer que nous avons une foule de propositions à faire pour rendre le régime fiscal plus équitable. De plus, les questions liées à la réduction des impôts et aux politiques en cette matière relèvent de la compétence du ministre des Finances, qui parlera précisément de cette question demain après-midi.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes. Peut-il nous dire quels étaient les responsabilités et le statut de M. Jerry Peltier au ministère des Affaires indiennes pendant la crise d'Oka, à l'automne 1990?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, le député demande quelles étaient les responsabilités de cette personne à ce moment-là. Nous n'étions pas ici à ce moment-là. Je crois qu'il y a encore, de l'autre côté de la Chambre, deux députés du parti qui nous a précédés au pouvoir. Si mon collègue veut leur poser la question, il pourra le faire après la séance.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, encore une fois, je m'adresse au ministre des Affaires indiennes. J'aimerais savoir ce qu'il a à cacher? Que tente-t-il d'escamoter? Est-ce que ce gouvernement a été élu pour assumer des fonctions? Est-ce que ce gouvernement n'a pas en main toutes les informations? Est-ce que le ministre ne lit pas les journaux, ne se prépare pas à répondre aux questions? Qu'est-ce que ce ministre tente de nous cacher?

(1450)

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, les députés d'en face ont beau crier et applaudir tant qu'ils veulent, ils n'arriveront jamais à expliquer ou à justifier le fait que leur chef était assis de ce côté-ci de la Chambre à ce moment-là et faisait exactement ce dont se plaint le député.

* * *

LES ANCIENS COMBATTANTS

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre.

Un éminent Canadien, héros de guerre et ensuite dirigeant des services de l'aviation civile, est décédé en 1990 à l'âge de 75 ans. Six mois avant sa retraite, Mervin Matthew Flemming et sa femme ont divorcé après 29 ans de mariage, mais ils se sont remariés peu après.

La pension de veuve a été refusée à Mme Flemming, après 37 ans de mariage, parce que les conjoints étaient divorcés au moment du départ de M. Flemming à la retraite. En 1992, le premier ministre, alors chef de l'opposition, a dit que c'était inadmissible et a promis d'examiner la situation avec le Conseil du Trésor.

La vice-première ministre peut-elle assurer la Chambre que le gouvernement interviendra pour que justice soit faite?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Monsieur le Président, nous sommes parfaitement au courant du problème et, comme le député l'a rappelé, notre chef s'en est montré très préoccupé.

J'ai eu des entretiens avec le président du Conseil du Trésor. Nous sommes à la recherche de moyens prévus par la loi pour résoudre ce problème profondément regrettable.

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe): Question supplémentaire, monsieur le Président.

Mme Flemming est âgée de 77 ans et vient d'être admise à l'hôpital, souffrant du cancer. Le ministre admettra-t-il qu'il y a une certaine urgence à régler le problème?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants): Oui, monsieur le Président.

* * *

[Français]

LE CENTRE NATIONAL DES ARTS

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la vice-première ministre.


1616

On apprend que le départ précipité du directeur général du Centre national des Arts, M. DesRochers, aurait coûté plus de 350 000 $ aux contribuables. En effet, le conseil d'administration a décidé, le 14 janvier, de payer cette somme faramineuse pour congédier M. DesRochers avant l'expiration de son mandat.

La vice-première ministre ne considère-t-elle pas que ce règlement de compte de 350 000 $ constitue un gaspillage éhonté de fonds publics?

Mme Albina Guarnieri (secrétaire parlementaire du ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, comme le sait l'honorable députée, M. DesRochers a été nommé par le conseil d'administration du Centre national des Arts lors du mandat de l'ancien gouvernement, et la décision de son renvoi a été prise à l'intérieur du pouvoir conféré à ce conseil.

Les détails de son contrat sont confidentiels. Comme elle est au courant, il est peu approprié de commenter une décision de gestion interne, car elle sait très bien que le Centre national des Arts est une société d'État autonome.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, je suis un peu surprise d'apprendre cela au niveau de la confidentialité, parce que le conseil d'administration, effectivement, nomme le directeur général, mais c'est le gouverneur en conseil qui fixe le salaire du directeur général. Alors, je suis un peu surprise qu'on me parle de confidentialité.

La vice-première ministre ne convient-elle pas que ce genre de gaspillage risque de miner une fois de plus la confiance des citoyens dans les institutions gouvernementales?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, il est évident que selon un arrêté en conseil, c'est le gouvernement qui fixe les salaires. Il est aussi évident que le premier ministre a déjà ordonné de surveiller tous les niveaux salariaux accordés par arrêté en conseil pour s'assurer qu'ils ne représentent pas un gaspillage d'argent des contribuables canadiens. C'est déjà fait.

* * *

[Traduction]

LES MINES

M. Benoît Serré (Timiskaming-French River): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre des Ressources naturelles.

Le 10 février, on a retrouvé les corps de deux mineurs ensevelis à la mine Macassa, à Kirkand Lake. Ces hommes ont trouvé la mort à la suite d'un grave coup de toit qui s'est produit à la mine le 26 novembre 1993. Les accidents de ce genre ne sont malheureusement que trop fréquents. Ils sont extrêmement difficiles à prévoir et à prévenir.

(1455)

La ministre pourrait-elle nous dire si elle est prête à consacrer des fonds à la recherche pour que des études soient effectuées sur les coups de toit en vue de réduire et de prévenir de telles tragédies dans l'avenir?

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Monsieur le Président, je remercie tout d'abord mon collègue d'avoir posé cette question très importante. Permettez-moi d'en profiter pour adresser publiquement mes sincères condoléances aux familles des personnes qui ont perdu la vie dans ce regrettable coup de toit survenu à la mine Macassa, à Kirkland Lake.

Depuis 1984, mon ministère participe activement à des recherches sur les coups de toit. En 1990, le financement de ce programme a été reconduit pour cinq ans. Il représente environ dix millions de dollars.

Je peux assurer le député que mon ministère et moi comprenons combien la recherche dans ce domaine est importante pour l'avenir de l'exploitation minière et la sécurité des mineurs dans notre pays. J'ai tout lieu de croire que mon ministère va continuer de se montrer actif et de financer la recherche sur les coups de toit.

* * *

LES PÊCHES ET LES OCÉANS

M. John Cummins (Delta): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans.

La société de vérification Peat Marwick, que le Conseil du Trésor a embauchée pour éplucher les comptes de dépenses du sous-ministre des Pêches et des Océans et de son sous-ministre adjoint chargé des politiques, absout ces deux personnes de tous méfaits. Toutefois, selon le rapport soumis par la société de vérification, il semblerait que leur gestion des comptes de dépenses n'était pas aussi prudente qu'elle aurait dû l'être.

Le ministre est-il disposé à déclarer à la Chambre que la façon dont le sous-ministre et son adjoint géraient leurs comptes de dépenses, et donc les deniers publics, était conforme à ce que l'on attend de la conduite des affaires de son ministère?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, si je comprends bien, l'honorable député voudrait que je fournisse des précisions limpides sur les grandes conclusions de l'enquête effectuée entièrement par un organisme tout à fait étranger au gouvernement, et non pas par le ministère des Pêches et des Océans ou par le Conseil du Trésor, mais bien, comme l'a fait remarquer le député, par la société de vérification Peat Marwick Thorne et son analyste judiciaire en chef.

Les grandes conclusions sont au nombre de deux: premièrement, toutes les dépenses engagées au chapitre des frais de déplacement avaient été autorisées par le ministre d'alors; deuxièmement, toutes les demandes de remboursement étaient conformes aux lignes directrices du Conseil du Trésor en la matière.

M. John Cummins (Delta): Monsieur le Président, le mandat de la société Peat Marwick était ainsi énoncé: «L'examen avait pour objet de déterminer si le sous-ministre et son adjoint ont respecté les politiques du gouvernement en ce qui concerne les

1617

déplacements et les réceptions officielles, et non pas d'excuser leur conduite.»

Le ministre n'estime-t-il pas que formuler un avis quant à la pertinence de la conduite du sous-ministre et de son adjoint outrepassait le mandat de la vérification et la compétence du vérificateur?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je ferais observer à l'honorable député qu'il est tout à fait extraordinaire qu'à l'issue d'une enquête effectuée par un vérificateur externe, par l'analyste judiciaire d'une firme de vérification indépendante, on aboutisse à une conclusion aussi nette.

Selon moi, une fois la conclusion tirée et étant donné que nous avons affaire ici à de hauts fonctionnaires, il ne reste plus aux députés de la Chambre et à ceux dont les allégations ont donné lieu à l'enquête, qu'à se rallier à l'avis d'une firme de vérification indépendante ou à fournir de nouveaux éléments de preuve.

On ne saurait contester la réputation de hauts fonctionnaires possédant de longs états de service à des fins partisanes.

* * *

[Français]

L'EXPLORATION MINIÈRE

M. Bernard Deshaies (Abitibi): Monsieur le Président, le secteur des mines, un secteur des plus importants en termes d'emplois et de retombées économiques, vit actuellement une situation très inquiétante. En 1987, le gouvernement fédéral décidait de réduire son effort fiscal dans les actions accréditives dont le but était de stimuler l'exploration minière. Cette décision malheureuse, dénoncée entre autres par le gouvernement québécois, est une cause majeure des graves difficultés que connaît le secteur.

Ma question est la suivante et s'adresse à la ministre des Ressources naturelles. La ministre reconnaît-elle que la relance de l'exploration minière ne peut passer que par une relance des actions accréditives à 133 p. 100?

(1500)

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Permettez-moi de dire que notre parti a été le seul à présenter une politique d'exploitation des ressources minières, lors des dernières élections générales. Nous nous sommes engagés, dans cette politique, à examiner, au cours des prochaines années, un certain nombre d'options qui, nous l'espérons, vont permettre à l'industrie minière de ce pays de redevenir viable et prospère.

* * *

LE BUDGET

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances et m'a été suggérée par M. Earl Christenson, d'Oshawa, en Ontario.

Bon nombre de Canadiens soupçonnent les politiciens et les fonctionnaires haut placés de vouloir éliminer l'exonération cumulative de 100 000 $ des gains en capital parce qu'ils en ont déjà eux-mêmes profité.

Le ministre mettra-t-il fin à cette attitude cynique de la part du public en s'engageant à maintenir cette exonération unique de 100 000 $?

Une voix: Vous devriez en parler au chef de votre parti.

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales)): Monsieur le Président, le ministre des Finances présentera son budget demain, à 17 heures, soit dans 26 heures exactement. Les commentaires ayant trait au budget devront être faits à ce moment-là.

* * *

LES PÊCHES

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges): Monsieur le Président, j'ai une question à poser à mon collègue et compatriote, qui revient d'une visite fructueuse à Bruxelles, avec l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest. Je l'en félicite et félicite aussi le gouvernement.

Le problème, bien sûr, c'est qu'il y a eu trois abstentions, celles de l'Union européenne, de la Norvège et du Danemark. Le ministre pourrait-il prendre quelques instants pour nous dire ce qui se passera au Canada et ce que lui et le gouvernement feront pour s'assurer que ces pays se rallieront aux autres? Sinon, quel sera le plan B? Qu'arrivera-t-il s'ils ne se rallient pas?

Le Président: Le ministre des Pêches. . .

M. Simmons: Monsieur le Président, n'oubliez pas les océans. Ils sont en quelque sorte à court de poisson, mais ils sont toujours là.

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je remercie mon collègue et ami de sa question. Sachant que cette question l'intéresse particulièrement puisqu'il est député de l'une des plus vastes circonscriptions de pêche au Canada, je tiens à l'assurer que l'Union européenne, le Danemark et la Norvège nous ont garanti que, même s'ils se sont abstenus de voter sur le moratoire sur les stocks de morue de la zone 3NO, ils entendent respecter la décision de l'OPANO de ne pas recourir à la procédure d'objection. Ainsi, comme l'avait promis le premier ministre, le gouvernement a remporté une première victoire dans la bataille contre la surpêche.

La bataille n'est pas terminée, mais cette première victoire importante découle de la nouvelle position rigoureuse et déterminée qu'a adoptée le gouvernement à l'égard des ressources de l'océan.

_____________________________________________


1617

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

L'hon. Douglas Peters (pour le ministre des Finances) demande à présenter le projet de loi C-13, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise et une loi connexe.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)


1618

(1505)

[Français]

PÉTITIONS

LA FAMILLE MARALOÏ

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par plus de 2 000 résidants de mon comté de Québec-Est et de plusieurs régions de la province de Québec.

Les pétitionnaires veulent attirer l'attention du Parlement sur la situation de la famille Maraloï, d'origine roumaine, habitant la ville de Vanier. Cette famille est au Canada depuis trois ans, s'est intégrée parfaitement à la communauté québécoise et subvient elle-même à ses besoins en travaillant. Elle s'est vu refuser le droit de rester au pays et l'on croit qu'elle court de graves dangers si elle retourne en Roumanie.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de bien vouloir inciter le ministre de l'Immigration à reconsidérer la décision de son ministère qui est de les expulser hors du pays, et ainsi permettre à la famille Maraloï de rester au Canada. J'appuie sans réserve cette pétition et j'exhorte le gouvernement à y donner suite.

[Traduction]

MARKHAM-WHITCHURCH-STOUFFVILLE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, au nom de plus de 30 000 habitants de la circonscription de Markham-Whitchurch-Stouffville, je présente cette pétition qui porte environ 30 000 noms.

Cette pétition se lit comme suit: «À la Chambre des communes, en Parlement assemblée, les soussignés, résidants du district électoral de Markham-Whitchurch-Stouffville, désirent attirer l'attention de la Chambre sur ce qui suit: Attendu que notre député a reçu de ses électeurs le mandat de siéger au caucus libéral et que, depuis le 28 janvier 1994, il a démissionné de ce caucus à la demande du premier ministre; attendu que notre député a admis avoir eu un comportement inexcusable à l'égard d'anciens employés et que ce renseignement avait été caché à l'électorat avant les élections; attendu que notre député a intentionnellement induit en erreur l'électorat et le Parti libéral du Canada au sujet de ses diplômes; attendu que notre député a annoncé qu'il continuerait de siéger comme indépendant en dépit de la demande de démission d'une grande majorité de ses électeurs dont les soussignés; attendu que les pétitionnaires ont perdu tout respect et toute confiance envers le député qui les représente. . .

Le vice-président: Le député ne sait peut-être pas qu'il n'est pas censé lire la pétition, mais seulement la résumer. Pourrait-il la résumer en une phrase.

M. Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, on m'affirme que beaucoup d'autres noms s'ajouteront bientôt aux 30 000 qui figurent déjà sur cette pétition.

LE SÉNAT

M. Vic Althouse (Mackenzie): Monsieur le Président, j'ai une autre liste de 850 à 900 noms jointe à une pétition signalant que le Sénat n'est ni élu, ni responsable et qu'il accueille les bénéficiaires de faveurs politiques de la part tant des libéraux que des conservateurs.

Les pétitionnaires font remarquer que les articles 41 et 42 de la Loi constitutionnelle prévoient que la Chambre des communes peut entreprendre de modifier la Constitution du Canada à ce sujet et, par conséquent, ils demandent à la Chambre d'adopter une proposition afin d'abolir le Sénat.

[Français]

LE SERVICE POSTAL EN MILIEU RURAL

M. François Langlois (Bellechasse): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, il me fait plaisir de déposer une pétition signée par la maîtresse de poste de ma paroisse de Sainte-Claire-de-Dorchester, et de concitoyens et concitoyennes de la même paroisse, relativement au service postal en milieu rural, pétition qui demande non pas une politique de moratoire indéterminée, mais une politique constante en matière de poste; également que les paroisses rurales qui ont vu leur service postal coupé grâce à l'ineptie du gouvernement précédent, voient leur service postal restauré comme il l'était auparavant.

* * *

(1510)

[Traduction]

LES VOIES ET MOYENS

DÉPÔT D'UN AVIS DE MOTION

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales)): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 83(1) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer un avis de motion des voies et moyens visant à modifier la Loi sur la taxe d'accise et je demande que l'étude de la motion soit inscrite à l'ordre du jour.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

(Les questions auxquelles une réponse verbale est donnée sont marquées d'un astérisque.)

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, nous commençons aujourd'hui à répondre aux questions. Nous répondons à la question no Q-3.

[Texte]

Question no 03-M. Taylor (The Battlefords-Meadow Lake):

1619

Quelle est l'intention du gouvernement au sujet de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (Lois de 1992, c.37) et quelles mesures ont été prises, depuis le 26 octobre 1993, en vue de sa promulgation et des règlements qui doivent en découler?
L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, tel que mentionné dans le discours du Trône, le gouvernement s'est engagé à promulguer le plus tôt possible la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. De plus, dans le livre rouge, «Créer des occasions; le projet libéral pour le Canada» et l'historique sur les questions d'ordre environnemental qui l'accompagne, on retrouve un engagement qui avait été pris en vue de renforcer et de mettre en valeur la loi une fois qu'elle serait proclamée. Le gouvernement compte bien remplir cet engagement.

Les quatre règlements requis pour l'application de la loi ont paru le 17 septembre 1993, dans la Partie I de la Gazette du Canada. La période accordée au public pour faire ses commentaires devait se terminer le 17 novembre dernier. Cependant, compte tenu des préoccupations qu'ont exprimées les Canadiens, le gouvernement a choisi de prolonger la période des commentaires jusqu'au 17 décembre 1993. Le bureau fédéral d'examen des évaluations environnementales (BFEEE) a recueilli les observations formulées et, à la lumière de ces observations et des engagements gouvernementaux, des modifications aux règlements sont en cours. Ces changements, tout comme les amendements prévus, seront examinés sous peu par le gouvernement.

La loi doit être promulguée rapidement afin de réduire l'incertitude qui entoure l'application de l'actuel décret sur les lignes directrices.

[Traduction]

Le vice-président: On a répondu à la question mentionnée par le secrétaire parlementaire.

M. Milliken: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


1619

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-PÉTITIONS

La Chambre reprend l'examen de la motion.

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat sur la motion de crédits présentée par mon parti. Je parlerai plus précisément de l'alinéa c):

une pétition qui sera présentée demandant au gouvernement de déposer un projet de loi prévoyant que la révocation des députés de la Chambre des communes fasse partie des lois.
La réforme parlementaire est un sujet de grand intérêt à la Chambre depuis de nombreuses années. Suite aux voeux exprimés par la population canadienne, mon parti a proposé plusieurs mesures et réformes en vue de rendre des pouvoirs au Parlement et d'améliorer la démocratie représentative dans ce pays.

Une démocratie représentative se porte mieux lorsque les citoyens ont la possibilité et la volonté d'exprimer leurs points de vue à leurs représentants. Je parle de volonté dans la mesure où les Canadiens doivent croire que nous recevrons les opinions qu'ils formulent, que nous les écouterons et que nous en tiendrons vraiment compte.

Malheureusement, de nombreux Canadiens ne participent pas à la vie politique. On constate chez beaucoup de Canadiens un sentiment de désillusion, de la désaffection et du cynisme à l'égard de l'ensemble des institutions politiques. Ceux qui participent activement à la vie politique et qui croient encore que des citoyens éveillés et informés peuvent changer quelque chose, devraient être encouragés par tous les moyens raisonnables à faire valoir leurs points de vue, et c'est la raison pour laquelle nous avons choisi ce sujet de discussion aujourd'hui.

La pétition offre aux citoyens ordinaires un moyen ancien, traditionnel et sensé de faire valoir leurs points de vue auprès du gouvernement, et nous devons en encourager l'utilisation. Une des formes de pétition que la Chambre devrait adopter le plus tôt possible est la pétition demandant la révocation d'un élu. Je suis convaincue qu'une loi de révocation donnerait aux électeurs un sentiment de contrôle accru à l'égard de leurs représentants entre les élections. La révocation pourrait être un moyen de lutter contre le cynisme et la désaffection de nombreux électeurs canadiens à l'égard des politiciens, des partis politiques et du gouvernement.

La révocation fournirait à un électorat désillusionné un moyen d'action concret et public. La révocation permettrait de mettre en valeur le rôle des électeurs entre les élections et, partant, d'améliorer le dialogue entre les électeurs et leurs représentants. Les parlementaires et les électeurs en sortiraient gagnants. Une loi de révocation améliorerait la démocratie représentative au Canada.

Les députés ne devraient pas craindre l'adoption d'une loi de révocation. Une telle mesure contiendrait des dispositions visant à prévenir une utilisation abusive ou malicieuse de cette mesure de réforme démocratique. Ainsi, une pétition devrait être signée par un nombre suffisant d'électeurs de la circonscription afin d'éviter les abus. Deuxièmement, la loi prévoirait une période de grâce après les élections générales, au cours de laquelle aucune pétition ne pourrait être présentée à cette fin. Troisièmement, une révocation ne pourrait intervenir qu'une fois par mandat dans une circonscription. Quatrièmement, la révocation serait assujettie à une réglementation rigoureuse dont l'application serait vérifiée par le directeur général des élections. On y préciserait notamment comment vérifier que toutes les signatures contenues dans la pétition sont authentiques et ont été obtenues par des moyens légitimes. Le non-respect de ces exigences pourrait donner lieu à l'imposition d'une amende assez lourde.


1620

(1515)

La révocation dont il est question n'est pas une mesure radicale que nous venons d'inventer pour le Parlement du Canada; les citoyens de l'ancienne Athènes avaient un processus démocratique leur permettant de prononcer l'ostracisme contre les politiciens tombés en défaveur, de les bannir d'Athènes pour une période de dix ans.

Pensez au nombre de députés dans cette enceinte. Nous risquerions d'être bannis ou, comme on dit dans ma région, mis en quarantaine pour dix ans si nous déplaisions à nos électeurs. Cela nous inciterait à réfléchir sérieusement à la façon dont nous représentons notre circonscription.

Certains auteurs affirment que cette ancienne démarche est à la base du projet de loi sur la révocation des députés dont nous discutons aujourd'hui. La révocation fait partie du système suisse de démocratie directe depuis fort longtemps. En fait, aux États-Unis, 15 États prévoient la révocation des élus au niveau de l'État; dans 36 États, on peut révoquer les gens élus localement. Aucun État américain n'a annulé une loi portant sur la révocation des élus une fois qu'elle a été adoptée. On n'a eu recours à cette procédure avec succès que neuf ou dix fois environ dans toute l'histoire. Manifestement, on n'en abuse pas.

Le mécanisme utilisé en Alberta en 1936 a été inclus dans une loi, mais elle avait ses lacunes. Il en a été question dans cette enceinte plus tôt aujourd'hui lorsque quelqu'un a mentionné le projet de loi visant la révocation des élus en Alberta. Cependant, dans ce cas, la loi pouvait trop facilement donner lieu à des abus de la part des partis de l'opposition et des groupes d'intérêt, ce dont on a beaucoup parlé aujourd'hui.

Ainsi, elle ne renfermait aucune disposition interdisant de payer des gens pour qu'ils signent une pétition réclamant la révocation d'un élu. La première fois qu'on s'en est servi, on a malheureusement assisté à ce type d'abus lorsqu'un groupe d'avocats de Calgary aurait offert aux citoyens de High River jusqu'à 5 $ chacun pour signer une pétition de ce genre pour se débarrasser du premier ministre de la province. C'est pour ces raisons notamment que nous pensons qu'on doit pouvoir compter sur un très bon mécanisme de protection.

Cependant, lorsque l'Assemblée législative de l'Alberta a annulé ce projet de loi, elle l'a fait dans le cadre d'un vote libre. Le premier ministre de l'époque, William Aberhart, s'est prononcé contre cette annulation, à l'instar d'Ernest C. Manning, qui était ministre à l'époque. L'annulation a été obtenue par une majorité de députés de l'arrière-ban qui considéraient que ce projet de loi renfermait des lacunes.

Certains adversaires de la révocation prétendent que les députés sont élus principalement pour réaliser un mandat précisé en détail dans le programme électoral de leur parti et qu'ils doivent souvent sacrifier l'intérêt de leur propre circonscription au bien de la nation dans son ensemble. Ainsi, selon eux, ce processus encouragerait l'étroitesse de vues ou l'esprit de clocher au détriment du bien de la majorité.

Les réformistes conviennent que les députés ne doivent pas s'en tenir uniquement aux desiderata de leurs électeurs, mais insistent sur le fait que la loyauté première d'un député n'est pas envers son parti mais bien envers ses électeurs dont il doit représenter les préoccupations ainsi que les besoins ainsi que défendre les intérêts.

Dans son ouvrage intitulé Direct Democracy: the Politics of Initiative, Referendum and Recall, publié par Harvard University Press, en 1989, Thomas E. Cronin déclare ce qui suit:

Les détracteurs de la révocation continuent à voir en cet outil une invitation au désordre et à l'action irréfléchie mettant en danger la démocratie représentative. Ils prétendent également que c'est un phénomène de notre époque médiatique qui pourrait affaiblir le régime des partis. Il n'existe aucune preuve pour étayer l'une ou l'autre de ces hypothèses.
Cette observation vaut la peine d'être répétée. Thomas Cronin dit qu'il n'existe aucune preuve étayant l'une ou l'autre de ces hypothèses.

Le pouvoir ne corrompt peut-être pas toujours, mais c'est un risque permanent. La révocation attend les arrogants.
Nous tous ici présents aujourd'hui ferions bien de prêter attention à cet avertissement qui touche chacun d'entre nous qui avons été élus par le peuple. «La révocation attend les arrogants.»

Ce n'est pas en tant qu'étrangère que je parle aujourd'hui, en cette enceinte, de la révocation des députés, mais en tant que députée élue, et même réélue aux élections générales d'octobre 1993. Je puis être révoquée, tout comme les autres députés de cette Chambre; qu'on ne dise donc pas que la critique vient de l'extérieur.

En résumé, les parlementaires devraient encourager les citoyens à exprimer leur opinion en tout temps, par tous les moyens légitimes à leur disposition. Une pétition est un moyen légitime et valable. Il faut en encourager et en respecter l'utilisation. Une pétition demandant la révocation d'un député permettrait aux citoyens de se débarrasser de ceux qui auraient abusé de leur confiance. Cette mesure encouragerait les députés à se montrer plus sensibles au point de vue de leurs électeurs et mettrait en valeur le rôle des simples députés. Cela favoriserait l'établissement d'une démocratie représentative dans notre pays.

(1520)

Permettez-moi de conclure par quelques observations que j'ai tirées du Globe and Mail du 19 février 1994. Il y a à peine quelques jours, Kenneth Whyte affirmait, dans un article intitulé L'Ouest, que le vrai problème que dénote la réaction actuelle du gouvernement, sa réaction à toutes les questions que nous avons posées au cours des dernières semaines, que ce soit au sujet de la démocratie représentative, de la révocation des députés, d'une possibilité de référendum sur le suicide assisté par un médecin et j'en passe, c'est que le gouvernement ne connaît pas les enjeux. Selon M. Whyte, les concepts de référendum ou de révocation des députés ont une importance symbolique énorme. C'est on ne peut plus vrai. «L'inévitable dénouement, c'est que les institutions politiques traditionnelles s'ouvriront à une plus grande participation du public ou perdront encore un peu plus de crédibilité.»

Monsieur le Président, je considère que la révocation des députés est une question que nous devrons régler avant la fin de la présente législature.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je souligne tout d'abord que la députée a toujours prôné vigoureusement la réforme à la


1621

Chambre, et pas seulement au cours de la dernière législature; elle y consacre beaucoup d'énergie.

Je vais être précis. Dans le cas où un parlementaire est accusé d'une faute que la Chambre juge inadmissible, la députée estime-t-elle qu'il devrait être assujetti à l'application régulière de la loi? À quels critères la députée se référerait-elle pour entamer la procédure de révocation?

Mme Grey: Monsieur le Président, je remercie le député de Broadview-Greenwood. Nous sommes souvent d'accord à la Chambre. Sur cette question, je devine que nos positions ne sont probablement pas totalement opposées.

Nous avons échangé quelques mots précédemment sur ce que représente l'application régulière de la loi. Nous pourrions prendre un exemple particulier. Il serait trop facile de ne pas tenir compte de la situation que nous vivons présentement, alors que nous sommes en train d'examiner les titres d'un député.

Je suis tout à fait favorable à l'application régulière de la loi. Je suis certaine que les députés des deux côtés de la Chambre le sont aussi. Bien sûr, il reste une question à régler. Je l'ai posée au député ce matin et je la lui pose à nouveau. Je sais qu'il ne peut y répondre, mais nous en discuterons et nous verrons bien ce qu'il adviendra.

Pourquoi n'a-t-on pas eu recours dès le départ à l'application régulière de la loi dans le cas du député de Markham-Whitchurch-Stouffville? Si on l'avait fait, nous n'en serions pas là. S'il n'y avait eu que la question des titres, aujourd'hui la question serait plus simple; le premier ministre aurait pu s'en charger simplement en examinant les titres et en déclarant qu'il réservait son jugement.

Rejeter un député d'un caucus, c'est grave. Nous l'avons vu au cours de la dernière législature. Nous le voyons encore aujourd'hui.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Le député a démissionné.

Mme Grey: Garantissons l'application régulière de la loi pour les deux aspects du problème, et non un seul.

En ce qui concerne la procédure de révocation, je crois que, selon les critères, nous aurions besoin de 50 p. 100 du nombre des électeurs qui se sont prononcés au cours des dernières élections plus une voix, et il y aurait généralement une période d'attente, ou période de grâce, comme il est mentionné dans le projet de loi C-210 que j'ai présenté. Il y est question d'une période de 18 mois. Je proposerai un amendement précisant que, dans le cas d'une fausse déclaration incontestable, la procédure pourrait être entamée. Une telle situation ne pourrait se produire qu'une seule fois dans une même législature, de sorte qu'on ne pourrait s'en servir pour s'en prendre à certains.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, je voudrais ramener le débat à des questions plus théoriques et moins spécifiques. Je suis féru d'histoire. J'ai retenu, dans toutes les lectures que j'ai faites, que les dictatures, comme celles de Hitler et de Mussolini, se fondent toujours sur l'appui général et massif de la population. Cependant, dès qu'ils ont capté l'imagination des gens, les dictateurs tirent profit de l'appui extraordinaire qui leur est manifesté pour mettre en oeuvre des mesures contraires à la démocratie.

(1525)

Dans le cas des pétitions dont nous parlons aujourd'hui, je vois un danger. Si un gouvernement est très populaire, je me demande si la députée de Beaver River ne craint pas qu'il profite de cette popularité pour présenter une pétition et se débarrasser de ses opposants, de ces gens dont nous avons besoin pour faire une démocratie.

Mme Grey: Monsieur le Président, j'avoue que je ne suis pas une historienne, mais il me semble que toute mon intervention était théorique. Ce n'est qu'en réponse à une question du député de Broadview-Greenwood que nous sommes entrés dans des détails précis.

Il se peut que le Parlement ait la fâcheuse tendance de toujours parler en théorie. Qui sait? Mais cernons très clairement le risque que signale le député. S'il arrive qu'un gouvernement soit populaire, cela se limite certes à ses 100 premiers jours si quelqu'un gouverne vraiment et cela s'arrête dès qu'il commence à réclamer des fonds publics, par exemple. C'est manifestement ce qui fait le plus mal aux gens.

Voyons cela de plus près. Il y a un an, au cours du référendum, les Canadiens ont dit très clairement qu'ils voulaient exercer le pouvoir. On m'a demandé si je voyais un danger à cela. Non, je n'en vois aucun. Je ne crois pas qu'il y ait le moindre risque à céder du pouvoir et à soumettre ce que nous estimons important au bon jugement de tous les Canadiens. Le seul danger que je perçois, c'est qu'on ne le fasse pas.

On me demande toujours combien il en coûterait de révoquer des députés étant donné qu'il faudrait vérifier noms et signatures. Je réplique, pour la forme, par la question suivante: «Combien en coûterait-il de ne rien faire?» Nous voyons ce qui se passe au Canada. D'un océan à l'autre, les Canadiens commencent à avoir l'impression que leurs représentants élus s'éloignent d'eux.

Je crois sincèrement qu'il est bel et bien dangereux et coûteux de ne pas procéder à la réforme parlementaire que nous estimons essentielle et qui, je le répète, devrait probablement avoir lieu au cours de la présente législature.

M. Dan McTeague (Ontario): Monsieur le Président, je félicite la députée de Beaver River pour sa perspicacité en ce qui a trait à la révocation, mais nous revenons constamment à cette question.

Plus tôt, des collègues de la députée ont cité le grand parlementaire Edmund Burke. On a laissé entendre qu'Edmund Burke avait perdu ses élections après ses fameuses déclarations sur l'opposition entre l'exercice du jugement et le suivisme.

Je crois que les députés sont élus ici pour exercer leur jugement. Dans ma circonscription, plus de 45 000 personnes ont élu un candidat qui défendait le principe du jugement. Je m'inspire de mes principes et de mes meilleures idées pour représenter tous


1622

les électeurs de ma circonscription, qu'ils appartiennent à la majorité ou à la minorité.

Puisque la députée a accordé beaucoup d'attention à la question et puisque Edmund Burke n'a jamais été défait, contrairement à ce que deux députés réformistes ont soutenu -il a été député de 1765 à 1794 et a représenté les circonscriptions de Wendover, Bristol et Malton-Yorkshire -ne croit-elle pas que le système de révocation proposé laisse à désirer?

Le vice-président: La députée de Beaver River a la parole.

Mme Grey: Merci, monsieur le Président. Je remercie également le député d'Ontario pour ses commentaires. Je crois que nous manquons un peu de temps.

Edmund Burke a probablement été mentionné plus souvent à la Chambre aujourd'hui qu'il l'a été lorsqu'il siégeait lui-même. Disons simplement qu'il a été député pendant un certain temps. C'était il y a longtemps, en Angleterre. Il ne fait aucun doute qu'avec la télévision, pour ne mentionner que ce média, la politique a fait irruption dans les salons des Canadiens, et ils sentent le besoin d'en parler.

Edmund Burke était sans aucun doute un homme remarquable, et il croyait fermement à la théorie du mandat: «Vous m'avez confié un mandat. Je suis ici pour vous servir.» Nous ne sommes pas uniquement des mandataires ou des délégués. Nous devons trouver un équilibre et nous dire que si, à notre avis, telle ou telle mesure reçoit l'appui de la population, nous pouvons alors agir selon notre jugement, mais que, si un consensus se dégage clairement au sein des électeurs de notre circonscription et qu'ils nous disent de nous prononcer d'un côté en particulier, nous devons le faire, sinon nous suivrons les traces d'Edmund Burke.

(1530)

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, je suis heureux de participer aujourd'hui à ce débat sur une motion de l'opposition. L'opposition, ou du moins le troisième parti à la Chambre, part de la prémisse selon laquelle le Parlement, en tant qu'institution, ne fonctionne pas. Le Parlement fonctionne très bien.

Oui, le gouvernement précédent a perdu la confiance des Canadiens. Oui, il a été défait à cause de cela. Toutefois, cela ne veut pas dire que l'institution elle-même ne fonctionne pas. Je dis cela aux deux partis d'en face parce que c'est ce que je vois dans leurs discours, dans leurs remarques et ailleurs.

Le Parti réformiste a tort de dire qu'on doit changer totalement le Parlement en tant qu'institution parce qu'il ne fonctionne pas, et le Bloc québécois a tort aussi de dire que le pays devrait se séparer parce que la population n'aimait pas le gouvernement précédent. Ce n'est pas le Parlement, cette belle institution, qui faisait défaut, mais bien les élus de la dernière législature. Ce n'est pas la même chose, et il est grand temps que nous commencions à penser de cette façon.

Je lis la motion à l'étude aujourd'hui. Écoutez-la, monsieur le Président, vous qui connaissez si bien toutes nos règles. La motion dit ceci:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager l'opportunité de modifier le Règlement. . .
A-t-on déjà entendu quelque chose d'aussi ridicule! Le gouvernement n'a pas de règlement, c'est la Chambre qui a un règlement. Mes collègues d'en face, dont beaucoup sont relativement nouveaux ici, devraient apprendre que nos règles sont celles de la Chambre et non celles du gouvernement et que ce n'est pas au gouvernement de les modifier. Si le gouvernement décidait de modifier ces règles de façon arbitraire, les ministériels seraient les premiers à critiquer.

[Français]

Les règles de cette Chambre sont modifiées sur avis d'un comité parlementaire qui habituellement même fait rapport unanime à cette Chambre. Ce rapport du comité parlementaire est offert à la Chambre et adopté par la Chambre, après quoi les règles sont modifiées.

[Traduction]

Certains députés s'en rappelleront: au cours de la dernière législature, le gouvernement de l'époque a accepté quelques-unes seulement des modifications qu'un comité permanent avait recommandé d'apporter au Règlement. Ce gouvernement a été critiqué par tout le monde non pas parce qu'il avait modifié le Règlement unilatéralement, mais parce qu'il n'avait pas accepté d'apporter en même temps toutes les modifications qui avaient été recommandées dans un rapport unanime et parce qu'il avait, de ce fait, rompu l'équilibre qui est tellement indispensable pour que le gouvernement puisse gouverner et pour que l'opposition puisse en exiger des comptes. On considérait que le gouvernement avait tort d'agir ainsi.

La députée d'en face et ses collègues proposent que le gouvernement modifie de son propre chef le Règlement de la Chambre. Cela, soit dit en toute déférence, est absurde. Il est absolument absurde en effet qu'un gouvernement tente de le faire.

La députée veut que le gouvernement modifie unilatéralement le Règlement, peut-être même contre les voeux de l'opposition en établissant une formule en vertu de laquelle les pétitions puissent faire l'objet d'un débat suivi d'un vote.

J'attire l'attention des députés sur le Feuilleton d'aujourd'hui. J'en recommande vivement la lecture aux députés. C'est un document très utile, car il nous fait connaître le fonctionnement de la Chambre des communes.

(1535)

À l'instar de nombreux autres députés, j'ai fait inscrire une motion au Feuilleton d'aujourd'hui, la motion M-218.

[Français]

Je vois par exemple que le député de Laurier-Sainte-Marie a une motion, ainsi que le député d'Anjou-Rivière-des-Prairies. C'est inusité, mais aucun député du Parti réformiste n'a de motion à l'ordre du jour de la Chambre, aucun député du Parti réformiste.


1623

Une voix: C'est impossible.

M. Boudria: Mais oui, mais oui, c'est vrai. Aucun d'entre eux n'en a.

[Traduction]

La députée sait-elle qu'elle et ses collègues peuvent proposer la tenue d'un débat sur la teneur d'une pétition grâce à ce mécanisme? Il suffit de faire inscrire une motion à la page IV du Feuilleton. Je fais donc remarquer à la députée que ce processus existe déjà. Nous pouvons présenter une motion sur n'importe quel sujet, y compris la teneur d'une pétition, et demander qu'elle fasse l'objet d'un débat à la Chambre.

Pour ma part, j'ai fait inscrire au Feuilleton une motion portant que:

Que la Chambre confirme son appui à l'article 241 du Code criminel, lequel interdit de conseiller le suicide à une personne, de l'inciter, de l'aider ou de l'encourager à se donner la mort. . .
Je ne pense pas que nous devrions modifier cette disposition. La députée et moi pouvons ne pas être d'accord sur ce point, mais nous pouvons en discuter. Nous pouvons en débattre, peu importe que l'idée vienne d'une pétition ou d'ailleurs, et la motion fera l'objet d'un vote à la Chambre. Cette possibilité existe à l'heure actuelle grâce aux dispositions de notre Règlement.

Pourquoi donc nous faire cette suggestion aujourd'hui? Nous en avons déjà la possibilité.

[Français]

La députée nous dit qu'elle veut modifier la Loi sur les jeunes contrevenants; a-t-elle un projet de loi à l'ordre du jour pour vouloir faire un changement semblable? Car on le sait, nous pouvons tous proposer des projets de loi d'initiatives privées. Ces projets de loi seront débattus et votés par cette Chambre. A-t-on besoin d'inventer quelque chose de nouveau? Pas du tout, ça existe déjà. Tous ces mécanismes-là sont déjà des outils de cette Chambre.

[Traduction]

Non, monsieur le Président. Il peut être nécessaire de modifier notre Règlement. Je fais partie du comité qui étudie ces questions avec notre collègue, le député de Kingston et les Îles, notre collègue d'en face et d'autres députés. Bon nombre ont fait de l'excellent travail, mais certains ne semblent pas savoir ce qu'ils veulent.

Vendredi, nous avons proposé de modifier la prière que nous récitons à la Chambre. Quelle a été la première personne à se plaindre? Un député du Parti réformiste qui a dit qu'il ne fallait rien changer. Un rapport unanime du comité a été adopté par la Chambre et, malgré la quasi-unanimité, cette décision a été considérée comme inopportune.

Comme les députés d'en face, nous croyons aussi qu'il faut modifier cette institution. C'était l'une de nos propositions du livre rouge. Nous voulons toutefois apporter des modifications auxquelles souscriront les députés de cette Chambre et qui viseront à améliorer celle-ci. Nous ne voulons pas le faire simplement pour prouver aux électeurs de nos circonscriptions que nous sommes venus à Ottawa pour tout chambouler.

Le droit dont nous discutons aujourd'hui, celui de présenter des pétitions, existe au sein de la démocratie parlementaire britannique depuis 1669. Il s'est avéré un outil très important. Je m'en suis prévalu. J'ai déposé des pétitions à la Chambre. Jeudi, j'en présenterai d'autres au nom de 100 000 signataires qui demandent au gouvernement d'interdire l'importation du jeu du tueur en série.

Des voix: Bravo!

M. Boudria: Qu'ai-je fait? Les députés qui liront le Feuilleton constateront que j'y ai fait inscrire le projet de loi C-203, qui propose de modifier le Code criminel afin d'interdire l'importation de ce produit. Ces 150 000 signatures, y compris les 50 000 que j'ai déjà déposées, témoignent de l'appui accordé à pareille mesure.

En conséquence, je peux demander à mes collègues de l'appuyer et je recourrai aux pétitions pour prouver la valeur de ce que je propose.

(1540)

Qu'est-ce que la motion à l'étude aujourd'hui est censée faire? Elle doit nous donner la possibilité de voter sur des propositions comme la Loi sur les jeunes contrevenants, qui ne nécessite aucune recommandation royale, pour que n'importe quel député puisse présenter un projet modifiant cette loi. N'importe quel député peut proposer une motion donnant suite à une pétition. Il y a enfin la question des cartes de tueurs en série. J'ai une initiative semblable actuellement inscrite au Feuilleton.

[Français]

Alors, vous voyez, monsieur le Président, ce n'est pas tout de présenter des motions de ce genre, car la motion, pour quelqu'un qui est peut-être moins averti à propos de la procédure de cette Chambre, pourrait laisser croire que le Parlement n'est doté d'aucun de ces outils au moment où on se parle. Mais la vérité est clairement le contraire! Tous ces outils-là que renvendique le député du Parti réformiste, d'Edmonton-Sud-Ouest, sont déjà des outils de cette Chambre. Ces outils-là existent tous sans exception, tel qu'indiqué dans cette motion.

[Traduction]

Aujourd'hui, la députée de Beaver River a proposé un élément nouveau, des mécanismes de révocation. Cela n'a rien à voir avec la motion, il va sans dire, bien que je sois tout à fait en désaccord.

Mme Grey: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je ne veux pas interrompre impoliment le député, mais notre motion, si elle avait été irrecevable, comme il semble le dire, aurait été rejetée par les services du greffier.

Deuxièmement, le député constatera, maintenant qu'il a eu quelques secondes pour lire le texte, que tout mon exposé a porté sur le l'alinéa c) de la motion.


1624

Le vice-président: La députée a fait valoir son point de vue. Nous aurons tous compris que son intervention n'est pas un rappel au Règlement, mais tient plutôt du débat.

M. Boudria: Monsieur le Président, les députés ont encore des choses à apprendre sur le Règlement. Lorsqu'ils invoquent le Règlement parce qu'ils ne sont pas d'accord sur le contenu du discours d'un collègue, il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement. La plupart du temps. . .

Le vice-président: Le député de Glengarry-Prescott-Russell ferait peut-être bien, au lieu d'insister sur le rappel au Règlement, de poursuivre le débat.

M. Boudria: Monsieur le Président, comme je le disais avant d'être si sèchement interrompu par la députée d'en face, la motion d'aujourd'hui propose de donner à la Chambre la possibilité de voter sur les pétitions. Cette possibilité existe déjà.

Je conseille à la députée de lire Beauchesne, le Règlement et le Feuilleton. Les députés qui proposent des initiatives semblables constateront que ces moyens existent déjà.

Enfin, il est faux de prétendre, dans une motion ou autrement, que le Règlement de la Chambre est le Règlement du gouvernement. C'est faux. Le Règlement de la Chambre appartient à la Chambre.

Pendant mes longues années sur les banquettes de l'opposition, j'ai défendu les privilèges de la Chambre à nombre d'occasions. Quand je voyais le gouvernement tenter de brimer les droits des députés, je ne pensais jamais entendre un député de l'opposition demander des choses que les députés ministériels n'oseraient jamais proposer.

Les députés devraient voter contre cette motion. Ils devraient avoir le bon sens de voter contre une motion qui prétend que le Règlement de la Chambre est celui du gouvernement et non celui de la Chambre. Les députés devraient voter en faveur de modifications du Règlement proposées par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, auquel siège un député du Parti réformiste.

Nous venons tout juste de commencer nos travaux. Nous avons fait du bon travail.

(1545)

Si ce comité propose, dans un rapport, de modifier le Règlement et que ce rapport ne soit même pas unanime, nous verrons, écoutez-moi bien, que les mêmes députés qui demandent maintenant au gouvernement de modifier le Règlement de la Chambre s'y opposeront, même si tous les membres du comité sauf un sont d'accord sur les changements.

Tel est le paradoxe qu'on voit aujourd'hui.

[Français]

Alors, cette motion qui nous est présentée aujourd'hui ne devrait pas être adoptée.

Je termine en répétant qu'il y a une différence ou qu'il devrait y en avoir une pour tous les députés, à savoir que si le gouvernement précédent avait perdu la confiance du peuple canadien, ce n'est pas la même chose que de dire que le Parlement, comme institution, ne fonctionne plus.

[Traduction]

C'est une de nos plus grandes libertés, c'est une institution qui existe depuis des temps immémoriaux, qui est née avant même la conquête de l'Angleterre par les Normands. Comme mon collègue l'historien le sait, il y avait une forme d'institution représentative au temps du «Witan», avant l'invasion normande. Cette institution existe depuis quelque 1 500 ans.

Peu importe de quel côté je siège dans cette enceinte, je tiens à ce que les modifications qu'on apporte au Règlement soient acceptables à la Chambre, qu'elles fassent en sorte que nous répondions mieux aux souhaits de nos électeurs et qu'elles nous permettent de prendre des décisions mieux éclairées et plus sages pour ceux qui nous ont élus pour les représenter.

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, je serai très brève. Nous ne demandons pas au gouvernement de modifier le Règlement. Il suffit de bien lire la motion qui dit ceci: «Que le gouvernement devrait envisager l'opportunité». Autrement dit, le gouvernement devait voir s'il y a consentement unanime quant à la pertinence de cette motion.

Je le répète, il ne s'agit pas d'un recours au Règlement, mais bien d'une observation, sinon la présidence aurait jugé la motion irrecevable.

Par ailleurs, puisqu'il vient d'inviter ses amis à voter contre, mon collègue sait-il bien qu'il s'agit en fait, comme il est clairement indiqué à la toute fin, d'une motion ne faisant pas l'objet d'un vote?

M. Boudria: Monsieur le Président, je sais pertinemment que l'on ne demande pas de se prononcer par vote, encore que l'opposition a le droit de demander qu'une motion de l'opposition soit mise aux voix. Il s'agirait évidemment dans ce cas-là d'un vote de confiance.

Cela étant dit, il ne s'agit pas de savoir si la motion est, oui ou non, irrecevable. Bien sûr qu'elle n'est pas irrecevable! Toute motion portant la mention «envisager l'opportunité» est presque toujours recevable. D'après ma longue expérience de la présentation de motions que j'ai acquise lorsque je siégeais de l'autre côté de la Chambre, je dirais -et je suis sûr que la présidence est aussi de cet avis -qu'on ne risque jamais de se tromper en ajoutant la mention «envisager l'opportunité».

En ajoutant une expression de ce genre, on ne court pas le risque de voir sa motion déclarée irrecevable. Mais cela ne veut pas dire pour autant que la motion mérite d'être appuyée, que son


1625

contenu est conforme ou qu'elle doit être automatiquement adoptée par le gouvernement, par la Chambre ou par qui que ce soit.

M. Ted White (Vancouver-Nord): Monsieur le Président, le député a dit, au début de son intervention, que le Parti réformiste estimait que le Parlement ne fonctionne pas. Nous ne sommes pas de cet avis. Nous pensons seulement qu'il a besoin d'une petite remise à neuf.

Nous voulons un Parlement plus transparent. Nous voulons qu'en cette ère de l'information, les Canadiens participent davantage aux travaux de la Chambre et soient témoins du fait que nous débattons activement de questions qui sont importantes à leurs yeux.

Le député sait parfaitement que c'est le gouvernement qui change les règles, puisque c'est lui qui a la majorité à la Chambre. Le Règlement ne peut être modifié qu'avec l'approbation du gouvernement. Il sait aussi que, vu leur nombre, il est peu probable que les motions inscrites au Feuilleton soient toutes examinées.

Le député refuse constamment de s'entendre avec les autres députés sur un nouveau système qui permettrait aux habitants de sa circonscription d'être mieux représentés. Pourquoi le député a-t-il peur d'examiner les pétitions présentées à la Chambre devant les caméras de télévision? Craint-il que les habitants de sa circonscription ne s'aperçoivent qu'il ne les représente pas comme il le devrait à la Chambre?

Une voix: Par combien l'avez-vous emporté la dernière fois, Don?

(1550)

M. Boudria: Monsieur le Président, mon collègue me rappelle que les électeurs de Glengarry-Prescott-Russell ont eu l'amabilité de m'élire avec une majorité considérable. En tant que députés, nous sommes égaux, que nous ayons été élus par une ou deux voix de majorité ou par un grand nombre de voix, comme j'en ai eu la chance aux dernières élections. Une fois à la Chambre, nous sommes tous égaux, et je le reconnais.

J'ai souligné à la Chambre et au député qu'il existe actuellement une procédure selon laquelle toute pétition peut être mise aux voix si une motion est présentée à cette fin. Or, il n'y a au Feuilleton aucune motion inscrite au nom d'un député du Parti réformiste. J'ai copie du Feuilleton sous les yeux. Il renferme cinq motions du député de Richelieu du Bloc québécois, une motion du député de Winnipeg-Nord, une motion de votre humble serviteur de Glengarry-Prescott-Russell, deux du député de Kamloops, une du député de Laurier-Sainte-Marie, une du député de Saskatoon-Clark's Crossing et une du député d'Anjou-Rivières-des-Prairies. Aucune de ces circonscriptions n'est représentée par le Parti réformiste.

M. Ken Epp (Elk Island): Monsieur le Président, je tiens à dire également que j'ai écouté avec un vif intérêt les propos du député d'en face. Si j'en crois le livre rouge, lors de la dernière campagne électorale, les libéraux souhaitaient ardemment dissiper cette mauvaise perception ou cette méfiance des Canadiens à l'égard du gouvernement.

Ils ont notamment fait valoir, et j'en ai parlé tout à l'heure, que les gens en avaient assez de ne pas être consultés par les gouvernements.

La question que je voudrais poser au député est très simple. S'il s'oppose à ce point aux propositions que nous présentons au sujet des référendums, de la révocation et des pétitions, question que nous examinons aujourd'hui, quelle autre solution propose-t-il pour rendre le gouvernement plus transparent comme les Canadiens semblent le réclamer et comme le prévoit le livre rouge?

M. Boudria: Monsieur le Président, je n'aime pas procéder ainsi, mais je vais reprendre, lentement, ce que je viens de dire.

La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui demande au gouvernement de modifier le Règlement de la Chambre -et c'est là le premier point qui ne va pas -pour nous permettre de nous prononcer sur les pétitions. Un tel mécanisme existe déjà et bon nombre de députés ont profité du privilège qui leur est offert de présenter des motions à la Chambre: tous les députés, à l'exception des réformistes.

S'ils ont besoin d'aide pour rédiger ces motions, j'irai volontiers leur donner un coup de main.

Le vice-président: Je pense qu'il ne reste plus de temps. Je voudrais que les députés comprennent que le député de Glengarry-Prescott-Russell et moi siégions ici au cours de la dernière législature et que c'est en raison de commentaires semblables à celui qu'il vient tout juste de faire que nous nous sommes attirés des ennuis.

J'inviterais les députés à éviter ce genre de commentaires à l'avenir.

[Français]

M. Maurice Godin (Châteauguay): Monsieur le Président, la première disposition du Règlement de la Chambre des communes, que l'on est en droit de déplorer, c'est sans nul doute, celle qui permet à une formation politique de déposer, vers 14 heures, un vendredi, une motion qui doit être débattue le lundi matin suivant.

L'article 43, qui permet des délais si courts, devrait être l'article sujet du débat d'aujourd'hui, puisqu'il vient de démontrer sa faiblesse, lorsqu'un manque de fair play guide l'action de certains groupes parlementaires. Mais passons, puisque cette motion permet de nous arrêter à notre rôle comme députés au sein de ce Parlement. Il n'est pas dans mon intention de traiter des cas particuliers qui ont été présentés en guise d'exemples, en appui à la motion de ce jour.

Ce qui m'intéresse, aujourd'hui, c'est de traiter de la nature d'une pétition, de son sens profond, de l'origine d'une telle forme de représentation adressée au Parlement, et de l'attitude que nous devrions entretenir à l'endroit de ces outils qui affichent plus souvent qu'autrement des efforts considérables pour nous rejoindre nous, les députés.

Aux origines du parlementarisme sur les terres du Canada, dès l'Acte constitutionnel de 1791, les groupes de citoyens ont bien compris qu'il leur était possible de faire valoir des doléances et des revendications par l'entremise d'un texte commun qu'ils contresignaient. Les pétitions sont nées, comme pratique inté-


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grante au système politique, alors qu'aucun média électronique ou qu'aucune loi sur les lobbyistes ne préoccupe l'action des députés et de leurs formations respectives.

(1555)

Sous la version la plus pure, une pétition demeure donc le geste d'un groupe de citoyens qui s'entendent sur la définition d'un problème et sur la solution de celui-ci. Bien souvent, on a vu de bonnes idées être traduites dans de tels efforts de concertation. Ce fut dans bien des cas un lieu où le gros bon sens prévaut, et bien au-delà des grandes analyses produites par les experts, les pétitions ont amené souvent des alternatives que les assemblées législatives ne voyaient pas ou n'osaient pas voir.

Mais il y a aussi l'autre côté de la médaille. Nous ne sommes pas dupes et nous avons eu, chacune et chacun, l'occasion de constater la production de pétitions appuyées par des organismes dotés de ressources importantes et capables, par conséquent, de développer des pétitions dont le volume était disproportionné par rapport à la question qui y était traitée.

À l'heure de notre société technologique, informatique, médiatisée au centuple, il est plus que jamais essentiel de discerner l'intérêt public de l'intérêt individuel, les démarches de bonne foi des démarches avec dessein. Toute cette question des pétitions est en fait l'ouverture à une question beaucoup plus large: celle des représentations faites sur les détenteurs du pouvoir législatif.

La Société Radio-Canada diffusait la semaine dernière, dans le cadre de l'une de ses éditions de l'émission Le Point, un documentaire intitulé «Les chemins de l'influence.» Cette émission montrait bien comment les lobbyistes sont organisés pour développer leurs rapports d'influences auprès des décideurs. Devant des moyens aussi spécialisés, les pétitions font office de parents pauvres, c'est le moins qu'on puisse dire. Pourtant, les lobbyistes ne sont jamais cités directement à la Chambre, alors que nous savons bien quel rôle ils exercent auprès des détenteurs du pouvoir. L'émission dont je faisais allusion tout à l'heure citait en exemple le cas de l'industrie pharmaceutique, qui a réussi, en faisant miroiter d'abord et avant tout les retombées d'emplois et les investissements considérables, à obtenir les engagements du gouvernement Mulroney et de son ministre de la Santé nationale et du Bien-être social, Benoît Bouchard.

Une pétition aurait-elle été efficace dans ce cas? Aurait-elle atteint aussi efficacement l'objectif recherché? Sûrement pas! Alors pourquoi l'on persiste encore à faire usage de pétitions lorsqu'il s'agit de demander quelque chose au gouvernement? Sans doute pour deux raisons: d'abord, parce qu'on ne peut faire autrement, parce que, faute de moyens, c'est la seule façon de pouvoir attirer l'attention du gouvernement; ensuite, parce qu'il est sans doute normalement préférable d'agir ouvertement, par le biais d'une requête on ne peut plus publique, plutôt que de passer par les coulisses du pouvoir.

Une pétition, toute visible soit-elle, demeure néanmoins, dans les moeurs d'aujourd'hui, un objet que l'on se contente de déposer. Depuis les débuts de cette législature, 84 ont été déposées en cette Chambre. De ce nombre, aucune n'ont encore fait l'objet d'une réponse. Tout est là. Une grande partie de la crédibilité de cette disposition permise en vertu du Règlement réside dans le suivi que l'on peut y accorder. Le suivi actuel, prescrit par l'article 36(8), consiste à ce que le gouvernement examine chaque pétition et y réponde dans un délai de 45 jours civils. Le gouvernement ne devrait pas échapper à cette obligation.

Tout député est en droit de déposer une pétition. Cet acte de dépôt, qui n'est pas présentement sujet à débat, ni par la forme ni par le contenu de la pétition, permet au député d'exercer librement son rôle de représentant des citoyens et citoyennes, sans être pour autant obligé d'endosser les revendications des pétitionnaires. Il ne serait pas dans mes principes de déposer une pétition sans la cautionner, mais cette latitude permise par le Règlement peut donner une marge de manoeuvre aux députés qui se donnent comme premier mandat de se faire commissionnaires de la population qu'ils représentent.

(1600)

Au-delà du dépôt comme tel, la possibilité de débattre et de mettre aux voix les pétitions, tel que suggéré par la motion du Parti réformiste, pose de nombreuses difficultés. La première et la principale, c'est de se demander si nous devrions toutes les débattre. Si oui, ce serait sans doute par regroupement. Mais si certains regroupements sont évidents, ne serait-ce que par la forme et par l'origine de la pétition, d'autres le sont moins.

D'autre part, si nous voulions trier ou sélectionner des pétitions à débattre et à disposer, ce serait en vertu de quels critères? En vertu d'un tirage au sort, comme pour les Affaires émanant des députés, tels que prévu à l'article 87 du Règlement? En vertu du volume, c'est-à-dire du nombre de signatures obtenues? En vertu de l'objet des pétitions? Quelle que soit la méthode préconisée, il m'apparaît clair qu'elle serait critiquée comme une forme de discrimination.

Mais le plus important, c'est que la motion d'aujourd'hui ouvrirait la porte à une nouvelle pratique qui remettrait en question notre rôle de représentant des intérêts communs. Beaucoup de gouvernements ont été critiqués de gouverner par sondages d'opinions. Cette critique pourrait se renverser sur tout gouvernement, ou même sur tout Parlement, qui gouvernerait par pétitions.

Les députés de cette Chambre et les formations politiques qui les regroupent ont tous et toutes brigué les suffrages en préconisant ouvertement diverses politiques et diverses solutions envisagées pour répondre à nos problèmes contemporains. Ces députés ont été élus, monsieur le Président, et leur premier devoir devient alors de tout faire pour réaliser les engagements qu'ils ont annoncés.

Comment pourraient-ils toujours concilier leurs engagements par lesquels ils ont été élus, et les pétitions par lesquelles ils devraient orienter leurs débats et même leurs votes? Si ce pouvait être possible, parfois, en cas d'incompatibilité, qu'est-ce qui prévaudrait? La position officielle de la formation politique? Les convictions personnelles du député? Les engagements pris lors de la période électorale? Les pétitions? Par leur contenu? Par leur volume? Par leur origine?

La prudence veut que nous sachions faire preuve de discernement entre notre rôle et ceux que d'innombrables sources veulent nous faire prendre. À la fois représentant d'une circonscription électorale, équipier d'un groupe parlementaire partageant les mêmes politiques, et composante de la première assemblée déli-


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bérante de ce pays, chaque député doit composer avec l'ensemble des démarches et des contraintes qui l'environnent.

Ajouter aux ressources déjà présentes dans le Règlement de la Chambre des communes la possibilité de débattre des pétitions et même de les mettre aux voix, ce serait ajouter une contrainte, somme toute, inutile. Une multitude d'autres possibilités s'offrent en guise de véhicules pour toute question, dont plusieurs seraient originaires de pétitions. N'a-t-on pas déjà vu des pétitions regroupées d'abord en une motion, puis en un projet de loi, puis débattu en comité, puis finalement adopté? Si ce chemin existe, avec toutes les limitations que l'on peut lui reconnaître, il demeure néanmoins praticable.

En terminant, j'aimerais bien que les dépositaires de la présente motion puissent répondre à nos interrogations et apporter des éléments de solution aux difficultés que j'ai soulignées.

[Traduction]

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, je voudrais féliciter le député de Châteauguay de ses observations. Je partage beaucoup de ses idées. Je voudrais lui dire ce qui m'inquiète et voir ce qu'il en pense, car un des problèmes que je vois, c'est que ceux qui signent les pétitions sont parfois mal informés.

Le Parti réformiste nous parle d'une pétition pour révoquer un député. Supposons que les renseignements fournis aux gens auxquels on demande de signer ne soient pas complets et qu'ils ne signent que sur la foi de ce qu'ils ont lu dans la presse locale. Ces gens pourraient réclamer la révocation sans connaître réellement tous les faits nécessaires pour juger.

(1605)

Je vais pousser l'analogie plus loin en espérant que le Bloc n'en prendra pas ombrage. J'espère qu'il ne verra pas cet exemple comme du sectarisme. En tant qu'ancien journaliste, j'ai toujours pensé que l'information que reçoivent les Québécois francophones est teintée par les médias francophones.

Dans ce contexte, considérant qu'un groupe régional pourrait recevoir une information très partielle, je me demande si une pétition de Québécois pour révoquer leur député, basée sur un seul point de vue, pourrait être considérée recevable.

J'irais plus loin et je dirais que le même problème existe dans le cas des référendums. Si les gens viennent voter sur un sujet de grande importance comme la souveraineté-association, la séparation ou quoi que ce soit de cette nature, c'est-à-dire un référendum tel que le propose le Parti réformiste, si donc l'information que reçoivent les électeurs est biaisée, j'aimerais que le député de Châteauguay me dise s'il pense qu'un référendum ou une pétition serait légitime dans un cas semblable.

[Français]

M. Godin: Monsieur le Président, non, mais je remercie le député pour cette question. Pour ma part, je trouve qu'un référendum et une pétition sont deux choses complètement différentes. Il faut comprendre que la pétition s'adresse bien souvent surtout à un petit groupe d'électeurs et d'électrices, contrairement à un référendum. Et nous avons vécu le référendum de Charlottetown qui ne s'adressait pas seulement à un petit groupe mais à tout le Canada en entier. À ce moment-là, on a dépensé des millions et des millions. Si à ce moment-là les personnes qui nous dirigeaient n'ont pas obtenu le «oui» qu'elles voulaient, ce n'est pas parce que les gens n'étaient pas informés, loin de là; c'est tout simplement parce qu'on a tenté d'imposer à la population une solution qu'elle ne voulait pas.

Pour moi, il y a toute une différence entre une pétition et un référendum. Mais je crains que des groupes de pression ne se servent de la pétition pour venir imposer au gouvernement leurs vraies questions, leurs vraies demandes.

[Traduction]

M. Bryden: Monsieur le Président, je voudrais dire au député de Châteauguay que je fais une analogie entre une pétition et un référendum régional comme celui qui pourrait avoir lieu au Québec, où l'on inviterait un groupe d'électeurs à se prononcer sur une certaine question.

Je n'essaie pas de préjuger de ce vote ou de ce que les Québécois devraient faire en l'occurrence. Voici en quoi consiste ma question. Comment le député réagit-il si les électeurs qui sont ainsi appelés à se prononcer, que ce soit dans le cadre d'une pétition d'intérêt régional ou dans celui d'un référendum régional, disposent de sources d'information très étroites et très limitées et ne peuvent donc pas connaître les deux côtés de la médaille?

[Français]

M. Godin: Monsieur le Président, non, je ne le crois pas. Je ne crois pas que les gens ont été mal informés, parce que ce ne sont pas les moyens qui ont manqué lors du référendum. Même que les gens étaient tellement bien informés que, dans des endroits où on n'avait pas de budget, les gens ont voté «non» quand même. Je pense que c'est toute une différence. Une pétition, c'est une demande. Les électeurs et les électrices demandent quelque chose, et le moyen de faire parvenir leur demande au gouvernement est la pétition, alors qu'un référendum est une décision que le peuple prend et c'est une décision où le peuple est majoritaire de sa décision.

(1610)

M. François Langlois (Bellechasse): J'aimerais connaître la position du député de Châteauguay, à savoir si à son avis, la loi québécoise sur les référendums, qui permet lors de référendums la création de comités-parapluies en faveur du oui, ou en faveur du non, et qui octroie le même montant d'argent à chacun de ces comités, et défend aux corporations, aux syndicats, aux personnes morales, toute contribution aux caisses électorales du comité du oui ou du comité du non, n'est pas finalement, en démocratie, la solution la plus saine et la plus avantageuse dont nous disposions, au Québec, pour décider d'une question qui concerne toute la population?


1628

M. Godin: Je pense que mon collègue a drôlement raison. Cependant, il faut admettre que le Québec, encore une fois, comme dans bien d'autres domaines, a innové et a montré le chemin à suivre, le vrai chemin démocratique.

Pour ma part, j'ai vécu le dernier référendum de Charlottetown, où à un moment donné l'argent coulait à flots, de tous les bords, de tous les côtés. Si seulement, et je pense que mon collègue répond vraiment à la question qui m'était posée tout à l'heure, si seulement cette politique avait existé à la grandeur du Canada, au lieu de noyer, parce que des fois, il est aussi dangereux de recevoir plus d'informations que de ne pas en recevoir assez. Je pense que cette politique permet à l'ensemble de la population de recevoir vraiment la quantité d'informations dont elle a besoin, et je suis persuadé que nous obtiendrons les résultats attendus au Québec.

[Traduction]

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice): Monsieur le Président, j'ai bien franchement du mal à accepter cette motion, car il me semble qu'on tente en l'occurrence de structurer le travail des députés à un point tel qu'ils ne possèdent plus la liberté d'action nécessaire pour accomplir vraiment le travail qu'ils ont à faire.

Les pétitions constituent un élément très important du processus démocratique. Cela ne fait aucun doute. Elles expriment l'opinion des électeurs par le truchement de leur députés. Elles lui demandent d'exprimer telle ou telle opinion. Les électeurs expriment en effet, dans le libellé de la pétition, en quels termes ils veulent que ce plaidoyer se fasse au Parlement.

C'est très bien et c'est ainsi que cela doit se faire. Le programme quotidien des travaux de la Chambre prévoit une période réservée à la présentation des pétitions. La Chambre des communes reçoit alors les pétitions, et une réponse est par la suite adressée aux pétitionnaires.

Le fait est que, si nous poussons les choses plus loin, c'est-à-dire si, au lieu ou en plus de faire cela, nous retenons le sujet de chaque pétition pour en faire l'étude au cours de chaque session, nous nous trouvons à structurer le travail même de la Chambre des communes. Nous prescrivons ce que la Chambre doit juger le sujet le plus important à mettre à l'étude.

Ce n'est pas la forme réelle de démocratie que la plupart des citoyens de notre pays veulent voir appliquer ici à la Chambre. Ils veulent que nous exprimions leurs sujets de préoccupation. Ils chargent les députés de s'occuper de leurs sujets de préoccupation et, au moyen des pétitions, ils disent eux-mêmes qu'ils veulent que ces questions soient portées à l'attention de la Chambre des communes comme elles le sont en vertu de l'usage régissant actuellement la présentation des pétitions.

Si nous commençons à vouloir débattre de chaque question faisant l'objet de pétitions, comment allons-nous déterminer les questions dont nous allons discuter? Si nous voulons débattre de toutes les questions faisant l'objet de pétitions, combien de temps allons-nous consacrer à chacune d'elles? Combien de temps allons-nous consacrer à chaque question? Si l'on décide de choisir certains domaines qui feront l'objet d'un débat, lesquels choisirons-nous? Nous pouvons opter pour certains projets de loi d'initiative parlementaire qui seront proposés à la Chambre; toutefois, il s'agit de projets de loi d'initiative parlementaire présentés par les députés eux-mêmes tandis que nous parlons ici de la population du Canada qui donnerait son avis sur ce qui la préoccupe. Comment pouvons-nous affirmer que certaines motions ou certains sujets feront l'objet d'un débat et d'autres non?

(1615)

Je ne crois pas que cette façon de procéder donne de bons résultats. Je dirais à la population canadienne: «Tous les députés de la Chambre des communes sont mis au courant de vos préoccupations par le truchement de vos pétitions.» Je voudrais aussi dire que les Canadiens ont fait un excellent travail pour recueillir tous ces noms et préparer ces pétitions. Ils ont consacré d'énormes efforts à faire valoir ces préoccupations à la Chambre des communes.

J'aimerais relever un seul des points soulevés par le député d'Edmonton-Sud-Ouest relativement aux cartes de tueurs en série. Il dit que le sujet de la pétition interdisant l'importation, la distribution, la vente et la fabrication des cartes de tueurs en série est un exemple de pétition de ce genre.

Eh bien, nous avons énormément entendu parler de ce sujet et nous avons reçu de nombreuses pétitions à cet égard. Je suis convaincu que c'est maintenant un dossier que le ministère de la Justice étudie sérieusement dans l'espoir de pouvoir faire adopter une loi qui réglera la question. Ce n'est pas chose simple, étant donné la Charte canadienne des droits et libertés. L'article 2 de la Charte traite de la liberté d'expression, et cette liberté est justement en cause dans cette affaire. Toutefois, nous devons nous occuper de l'importation, de la distribution, de la vente et de la fabrication d'objets de cette sorte, et ces aspects de la question sont à l'étude. C'est choquant de penser que des gens réalisent des profits grâce à de telles choses.

Nous sommes au courant de pétitions comme celle de Mme Debbie Mahaffy qui a réussi a obtenir 500 000 signatures. Léna Cléroux, de Rockland, en Ontario, a présenté une pétition portant 14 000 signatures. Le député de Glengarry-Prescott-Russell, qui a pris la parole il y a quelques instants, a recueilli 50 0000 signatures sur une pétition visant à interdire le jeu de société du tueur en série. Il a aussi présenté un projet de loi d'initiative parlementaire à ce sujet.

La question est donc à l'étude. Les pétitions ont produit les résultats escomptés. Le plaidoyer des Canadiens auprès de leurs députés a été entendu. Qu'espérons-nous réaliser en nous engageant dans un autre débat sur le même sujet? Le gouvernement sait que c'est un problème. Tous les députés savent que c'est un problème. Ce qu'il faut maintenant, c'est que nous posions des questions de temps en temps, à la Chambre, au cours de la période des questions, et au Comité permanent de la justice, pour connaître l'évolution de cette affaire et savoir ce que fait le gouvernement à cet égard. Voilà comment il faut s'y prendre.

La Loi sur les jeunes contrevenants laisse aussi à désirer, cela ne fait aucun doute. Le Parti libéral l'a reconnu au cours de la campagne électorale, et c'est mentionné dans le livre rouge. Cette question occupait aussi une place importante dans l'exposé


1629

de principes sur la justice que nous avons dévoilé le 22 avril 1993. On y affirmait qu'il fallait modifier la Loi sur les jeunes contrevenants, que des peines plus sévères devaient être prévues pour les crimes avec violence et qu'il fallait réagir plus fermement à certaines infractions impliquant de la violence. Nous devons examiner toute cette question.

Le ministre de la Justice a fait savoir qu'il donnerait suite aux recommandations du livre rouge et de l'exposé de principes d'avril dernier. Il a affirmé par ailleurs qu'il étudierait attentivement la question de la Loi sur les jeunes contrevenants avec la ferme intention de présenter un projet de loi plus détaillé qui réglerait les préoccupations que suscite cette loi.

(1620)

Encore une fois, les inquiétudes que manifestent les Canadiens par la voie de leurs pétitions et dont ils font part à leur député ont été soumises à l'attention du gouvernement, celui-ci ou le précédent. Le gouvernement est saisi de cette question, et il l'étudie actuellement.

Le gouvernement est déterminé à prendre des mesures pour mettre un terme à l'inquiétude manifestée par les Canadiens. Il s'en occupe avec diligence, et je dirais même qu'il y travaille avec ardeur. Cette question est aussi grave que celle des cartes de tueurs en série. Nous devons réagir à ces deux problèmes, et le gouvernement s'en occupe.

J'ai parlé aussi d'autres sujets de préoccupation mentionnés dans la motion. Que faut-il faire relativement à ces questions? Le parti de mon collègue accorde beaucoup d'importance au troisième élément, soit la révocation des députés. Il y aura certainement des pétitions qui réclameront une telle mesure. Les pétitions couvrent en fait un très grand nombre de sujets. Comment réagissons-nous à ces demandes? Que faisons-nous lorsque le gouvernement est sensible à ces motifs d'inquiétude?

Les députés du Parti réformiste disent qu'ils veulent avoir un moyen de révoquer les députés, et le gouvernement a répondu qu'il ne croyait pas que c'était sage d'instituer une telle procédure. Croit-on que la réponse va être différente du fait qu'il va être possible de discuter de cette question, car elle aura fait l'objet d'une pétition?

Ce qui se passe, c'est que, sur les instances du Parti réformiste ou à la suite de questions, on a soumis cette question au gouvernement au moyen de pétitions comme dans les deux autres cas. Cependant, ce qui est différent, c'est que, contrairement à ce qui s'est passé relativement au jeu du tueur en série et aux cartes de tueurs en série, le gouvernement a dit non, un point c'est tout, aux modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants, alors qu'il prend très au sérieux les deux premières questions. Il reconnaît les préoccupations des Canadiens à cet égard et il entend prendre des mesures pour les apaiser. Le fait est qu'on a étudié la question.

La Chambre doit être en mesure de répondre aux préoccupations des Canadiens qui ne nous envoient pas de pétitions. Il faut que les députés puissent prévoir les besoins du pays à l'avenir, se pencher sur les questions urgentes qui se posent et déterminer comment, à titre de représentants de la population, ils pourront améliorer la situation de notre pays dans les jours à venir.

Nous devons avoir la liberté de soumettre au Parlement des projets de loi et les problèmes que notre pays doit régler. Ces préoccupations sont présentées à des comités représentant tous les partis, qui leur accordent l'attention voulue. Manifestement, le gouvernement peut, grâce à sa majorité, déterminer en définitive ce dont la Chambre sera saisie, et il est normal que les choses se passent ainsi. Il doit y avoir un mécanisme permettant de sortir des impasses sur ce plan. C'est pourquoi les ministériels forment un gouvernement et c'est la raison pour laquelle ils ont été élus pour diriger le pays.

Je tiens à ce que tous les députés sachent que la Chambre des communes se penche déjà sur les préoccupations des Canadiens. On s'occupe de trois des questions mentionnées par le député. L'une a déjà été réglée. Les deux autres font l'objet d'un examen très attentif.

Nous nous inquiétons vivement dans cette enceinte de notre situation financière nationale. Croyez-vous que, malgré le déficit auquel nous faisons face à l'heure actuelle et notre fort endettement, nous pouvons consacrer à cette question autant de temps, car elle fait l'objet d'une pétition, de même que toutes les autres questions? Le gouvernement et les députés de la Chambre des communes n'auront plus alors la latitude voulue pour déterminer ce qu'ils doivent examiner en premier lieu à un moment donné.

Les gens élisent leurs députés pour faire un certain travail. En affirmant, en tant que députés, comme certains le font dans cette motion, que les Canadiens ne croient pas que les députés prendront les bonnes décisions et qu'il faut donc imposer toutes les entraves possibles afin de les forcer à suivre une voie bien étroite, nous ne faisons qu'aggraver le problème.

(1625)

Il se peut qu'il réside dans le fait que les députés et les politiciens n'ont pas aussi bonne réputation que les élus dans cette enceinte et d'autres assemblées législatives le souhaiteraient. Cependant, c'est à nous qu'il incombe de changer cela. Nous ne pouvons y parvenir que par nos actions. Si nous n'en faisons rien, ceux d'entre nous qui ne réussissent pas à convaincre les électeurs que nous voulons changer les choses et que nous prenons des mesures à cette fin, tomberont dans le discrédit.

En définitive, les députés doivent travailler dans l'intérêt des Canadiens et prendre les mesures qu'ils jugent appropriées en se rappelant que leurs électeurs leur ont demandé d'agir. Les députés sont la voix du peuple, et il faut leur laisser les coudées franches pour faire ce qui convient, selon eux.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud): Monsieur le Président, je félicite le député pour la qualité de son intervention au sujet de la motion de l'opposition. Ses électeurs seraient certainement très fiers de la façon dont il a parlé aujourd'hui car il a su présenter son point de vue de façon très documentée et logique, et c'est notamment ce que les Canadiens attendent de leurs députés. C'est à la fois une question d'image et de point de vue.


1630

Je voudrais revenir à l'un des derniers points soulevés par le député puisqu'il touche, à mon avis, au coeur même de la question. Mon collègue dit que le rôle des parlementaires est de représenter les intérêts des Canadiens. Il a parlé des «Canadiens», et non pas des électeurs de chaque député. Cette distinction m'apparaît très importante. En tant que députés, il nous incombe de représenter de notre mieux les intérêts de nos électeurs, mais dans un contexte canadien. Nous devons aussi tenir compte de disparités régionales et locales très importantes.

Durant la campagne électorale, un exercice important que nous avons tous vécu, je n'ai pas eu la possibilité de me rendre dans les 30 000 foyers ou de rencontrer les 67 000 électeurs de ma circonscription. Comment aurais-je pu espérer connaître tout le monde, être informé du point de vue de chacun sur tout et défendre tous les intérêts au Parlement? Je n'ai d'autre solution que de faire de mon mieux et d'utiliser mon jugement du mieux que je peux. Je crois que c'est ce que voulait dire le premier ministre.

Je tiens à remercier le député qui a dit que nous sommes ici pour représenter les Canadiens. Il s'agit là d'une distinction importante dont la motion de l'opposition ne tient pas compte.

M. McLellan: Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations. À mon avis, il est important que les députés représentent leurs électeurs. Chacun d'entre nous est en effet le porte-parole des électeurs de sa circonscription. Nous ne pouvons supposer que quelqu'un d'autre parlera en leur nom, car c'est nous qu'ils ont choisis.

Il y a certes des préoccupations individuelles, mais les électeurs de toutes les régions du pays savent qu'il faut concilier leurs préoccupations et celles de l'ensemble des Canadiens. Les électeurs de nombreuses circonscriptions se sentent liés au reste du Canada; la force de notre pays lui vient de ce que les Canadiens conjuguent leurs efforts.

Il y a des préoccupations individuelles et des préoccupations nationales. C'est dans cette optique que les Canadiens ont élu des députés qui, à leur avis, allaient exprimer leurs préoccupations nationales et locales. Évidemment, une fois élus, nous devons honorer cet engagement et respecter les raisons pour lesquelles les électeurs nous ont accordé leurs votes. Nous devons faire ce qu'ils attendent de nous; il faut éviter de nous désintéresser de leurs préoccupations et de faire preuve de favoritisme. Nous devons continuer de respecter les engagements que nous avons pris durant la campagne électorale quand nous invitions les électeurs à voter pour nous.

(1630)

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, je tiens moi aussi à remercier mon collègue de nous avoir rappelé que nous ne sommes pas ici uniquement pour représenter nos électeurs, mais l'ensemble des Canadiens.

Il a été dit dans un autre exposé que, si le parti qui a proposé cette motion avait connu les mécanismes qui existent pour soulever certaines questions et ainsi représenter les électeurs équitablement, il ne les aurait pas nécessairement utilisés. Une idée m'est venue à cause de la mention des cartes des tueurs en série, de la Loi sur les jeunes contrevenants et de l'idée de révocation: ce parti-là essaie peut-être d'utiliser ce débat à des fins politiques.

Nous savons que ces questions préoccupent les Canadiens. Nous avons reçu des pétitions sur chacune de ces questions et bien d'autres encore. Mon collègue, qui a quelques années d'expérience à la Chambre et possède la réputation d'être juste, voudrait-il nous dire ce qu'il pense des motifs qui ont pu justifier cette motion? Son point de vue m'intéresserait beaucoup.

M. MacLellan: Monsieur le Président, je pense que nous avons là un effort pour encadrer les députés à un point tel qu'ils n'auront que très peu de latitude pour exercer leur jugement objectif et décider de ce que les Communes doivent faire.

Ce qui me dérange, dans cette motion, c'est le cynisme, c'est qu'on dise que les députés sont incapables de décider comment ils doivent s'y prendre pour gouverner et qu'on souhaite les encadrer le plus rigoureusement possible pour qu'ils s'écartent le moins possible de ce que, selon eux, les Canadiens souhaitent.

Ce que les Canadiens veulent, c'est une bonne représentation, des députés qui interviennent en leur nom, qu'il s'agisse d'intérêts locaux ou nationaux. Ils veulent que les députés soient justes et objectifs et qui s'attaquent sans détours aux problèmes qui les inquiètent.

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi): Monsieur le Président, je dois d'abord remercier le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice pour son exposé. Il a surtout abordé le problème de la priorité à accorder aux pétitions qui doivent être débattues en Chambre. Je m'aperçois, en cours de route, que toutes les motions, et les trois exemples qui sont cités par le Parti réformiste, pourraient devenir des lois ou des motions discutées ici en Chambre.

J'aimerais que le secrétaire parlementaire complète un peu ce qui a été dit par l'orateur précédent, lorsqu'on a interrogé mon collègue sur la question du référendum et des pétitions. J'aimerais connaître son point de vue, à titre de secrétaire parlementaire du ministre de la Justice, ou la distinction qu'il fait entre ces deux termes, référendum et pétition.

M. MacLellan: Monsieur le Président, c'est une bonne question parce que ce sont deux formules qui assurent l'information aux Canadiens. Mais une pétition, c'est un document qui est fourni par les Canadiens.

[Traduction]

C'est un document que nous recevons des Canadiens nous disant qu'ils se préoccupent de telle ou de telle chose. Une proposition référendaire est un document par lequel nous disons que nous sommes conscients des inquiétudes sur une question donnée et que nous voulons connaître l'opinion des Canadiens. La pétition, par contre, nous dit que les gens s'inquiètent et qu'ils veulent le faire savoir. Le référendum prend acte d'une préoccu-


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pation et propose une solution: pensez-vous que cela va faire l'affaire?

(1635)

M. Ken Epp (Elk Island): Monsieur le Président, le député qui vient de parler pense qu'il n'est pas nécessaire de modifier la façon de procéder en ce qui concerne les pétitions.

Du moins, c'est l'impression très nette qu'il m'a donnée. Pourrait-il confirmer cette impression? Ensuite, j'aimerais qu'il réponde à la question suivante, mais je voudrais d'abord préciser que nous n'essayons pas de nous faire du capital politique avec ça. Nous essayons plutôt de donner aux Canadiens le genre de gouvernement qu'ils nous ont dit vouloir. Ils veulent quelqu'un qui les représente, qui les écoute, qui prenne bonne note de ce qu'ils ont à dire et qui y donne suite.

Pour ce qui est des pétitions, ils ont l'impression qu'elles tombent dans l'oreille d'un sourd, en quelque sorte. Ma question est donc la suivante. Pourquoi ne pas refuser aux citoyens la possibilité de nous soumettre des pétitions, puisque nous disposons d'autres outils pour savoir ce qu'ils pensent et que la Chambre ne va pas recourir directement aux pétitions pour prendre ses décisions?

M. MacLellan: Monsieur le Président, je ne partage pas exactement les sentiments du député.

Les pétitions servent à quelque chose. Elles ont une influence sur la Chambre des communes et sur tous les députés. À la lecture de chaque pétition, nous ne pouvons nous empêcher de nous dire que l'objet de cette dernière est un sujet de préoccupations pour nos concitoyens, car autrement, pourquoi l'auraient-ils signée?

Et en fait, nous leur répondons qu'il nous préoccupe, nous aussi. Les objets de deux des pétitions données en exemple dans la motion sont à l'étude. Le ministère de la Justice se penche sur la question des cartes de tueurs en série et la révision de la Loi sur les jeunes contrevenants.

Par contre, je l'ai déjà dit, et le premier ministre aussi, nous pensons que la révocation des députés ne se justifie pas. Les trois points soulevés sont à l'étude ou ont déjà fait l'objet de mûres réflexions.

Cela ne veut pas dire qu'aucun changement n'est nécessaire dans la façon de traiter les pétitions, mais plutôt que la méthode proposée dans la motion n'est pas la bonne. Nous sommes prêts à envisager d'autres options. Je pense que nous devons faire preuve de souplesse et d'ouverture d'esprit en ce qui concerne les affaires de la Chambre.

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole pour appuyer cette motion. Il s'agit essentiellement d'une motion d'ordre administratif puisqu'elle propose une modification au Règlement, de façon à permettre que les pétitions puissent faire l'objet d'un débat à la Chambre.

Un député d'en face a laissé entendre qu'il est possible de déposer un projet de loi d'initiative parlementaire pour présenter des pétitions aux fins de débat à la Chambre. C'est effectivement une possibilité, mais nous aimerions qu'un mécanisme indépendant soit prévu, afin que l'étude de pétitions ne soit pas subordonnée à la présentation d'un projet de loi d'initiative parlementaire.

À l'heure actuelle, les pétitions reçues sont soit déposées, soit présentées oralement à la Chambre, puis déposées aux fins d'enregistrement. Les pétitions sont ensuite transmises aux ministères qui y donnent réponse dans un délai précis.

Cette façon de procéder fait ressortir deux points généraux qui militent en faveur de la présentation de pétitions aux fins de débat. D'une part, les pétitions peuvent révéler l'existence d'une lacune ou d'un problème dans une mesure législative. D'autre part, l'objet des pétitions relève dans bien des cas de la compétence de plus d'un ministère. Ces deux points sont de bonnes raisons de discuter des pétitions.

Souvent, les pétitions visent des questions précises qui sont la conséquence ou le résultat d'une politique ou d'une loi. Il existe une relation de cause à effet. Le résultat en question peut être perçu comme un problème par les Canadiens qui nous en font part, mais celui-ci ne constitue pas nécessairement le problème principal ou la cause profonde. C'est plutôt la conséquence d'une faille dans le processus ou dans la loi comme telle; il s'agit donc d'un symptôme ou d'un avertissement de l'existence d'un problème au niveau de la politique ou de la mesure législative pertinente. Compte tenu de ce lien de cause à effet, l'examen de quelques aspects s'impose. Par exemple, une lacune pourrait exister au niveau du contenu de la mesure législative; il pourrait y avoir une omission; il pourrait aussi exister, dans certaines régions du pays, un ensemble de circonstances particulières qui entraîne des résultats différents. Il pourrait évidemment y avoir une combinaison quelconque de ces différentes possibilités.

(1640)

Étant donné toutes les possibilités que nous avons, si nous considérons les pétitions comme un symptôme d'un problème sous-jacent, il semble logique que les pétitions fassent l'objet d'un débat à la Chambre dont le but serait de déterminer la cause des problèmes et les solutions possibles.

Nous pourrions naturellement nous contenter de traiter le symptôme, sans nous préoccuper de la cause du problème. Le cas échéant, le problème s'étendrait ou s'aggraverait, ou encore les deux. À un moment donné, nous serions obligés d'étudier le problème en profondeur, d'en déterminer la cause et de le régler.

Il y a une deuxième raison qui justifie l'étude des pétitions à la Chambre. Il s'agit de la possibilité que le problème soulevé touche plus d'un ministère. Cet aspect de la question est important pour plusieurs raisons, mais surtout parce que nous pouvons acquérir des renseignements nous permettant d'examiner les mesures et les lois sous un éclairage nouveau ou différent par rapport au débat original.

Ces nouveaux renseignements peuvent intéresser des ministères qui n'ont pas participé au processus décisionnel original ou qui n'y ont pas participé dans la mesure voulue. L'exemple classique de nos jours est celui du ministère de l'Environnement, qui est très touché par les résultats ou les répercussions de


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nombreuses décisions prises antérieurement par d'autres ministères.

La même chose vaut pour les soins de santé. De nombreuses mesures ou lois adoptées antérieurement constituent de nos jours des risques pour la santé qui sont essentiellement intolérables selon les normes actuellement en vigueur. Il se peut que la santé ne soit pas l'idée maîtresse ou l'objectif de la pétition, mais la question des soins de santé est presque toujours liée, dans une certaine mesure, à la teneur de la pétition, que ce soit de façon directe ou indirecte.

Par exemple, toute pétition concernant, disons, l'utilisation de pesticides sur les récoltes ou l'administration d'antibiotiques ou d'autres médicaments au bétail pourrait être achessés au ministère de l'Agriculture, mais il y a certainement dans cela des questions relatives à la santé qui doivent être examinées.

Un autre exemple serait une pétition concernant une usine qui déverse des déchets toxiques dans un lac ou un cours d'eau. Cette pétition pourrait être envoyée soit au ministère de l'Industrie soit au ministère de l'Environnement. Cependant, encore là, il y a dans cela d'importantes questions relatives à la santé qui n'ont peut-être pas été examinées lors du débat initial.

La peine imposée à un agresseur a également un impact indirect sur la santé. Si la peine est réduite et que les gens présentent une pétition à ce sujet, c'est peut-être parce que le taux d'agression a augmenté et qu'un plus grand nombre de victimes d'agression ont besoin de traitement.

La plupart des pétitions aujourd'hui concernent des questions qui touchent de près ou de loin à la santé. Nous devons nous pencher sur ces questions et les régler afin de pouvoir continuer à promouvoir un environnement sain pour tous les Canadiens.

Il est essentiel de cerner et de régler les problèmes concernant la santé dans les sujets qui sont portés à notre attention par les pétitions si nous voulons réduire le coût des soins de santé et promouvoir la santé grâce à la prévention et non à la guérison. Nous devons adopter une attitude proactive à l'égard des questions liées aux soins de santé, quelle que soit la façon dont elles nous sont signalées. Les pétitions peuvent être une excellente ressource, particulièrement si on les perçoit comme de la rétroaction.

(1645)

Les questions précises soulevées dans les pétitions peuvent être décrites comme des situations isolées ou des exceptions à la règle et ne pas être considérées comme très importantes par rapport à l'impact global d'une loi ou d'une politique. Toutefois, elles sont quand même des symptômes d'un problème qui ne fera que s'aggraver si nous ne faisons rien pour le régler. C'est comme le cancer. Cela commence par une toute petite tumeur qui progresse lentement jusqu'à ce qu'elle devienne un cancer généralisé. Il faut freiner cette progression, et plus on s'y prend tôt, plus les chances de guérison totale sont bonnes.

En terminant, je rappelle à tous les députés que les pétitions sont des invitations. Elles nous invitent à réexaminer, de façon plus approfondie ou à la lumière de nouvelles informations qui n'étaient pas accessibles auparavant, les diverses décisions prises dans le passé et toutes les ramifications directes et indirectes de ces décisions.

Nous devrions avoir la possibilité de débattre les pétitions à la Chambre afin de pouvoir examiner, réviser ou mettre à jour les diverses lois et politiques.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, je remercie la députée de Surrey-Nord. Son intervention était très réfléchie. Je l'ai écoutée avec beaucoup d'intérêt.

Je me demande si la députée pourrait m'éclairer sur un sujet qui a été abordé par d'autres et qui me préoccupe beaucoup. Elle a dit que la motion visait essentiellement à la tenue de débats sur les pétitions.

Prenons l'exemple d'un débat, suivi d'un vote, sur une pétition demandant d'interdire l'importation, la distribution, la vente et la fabrication des cartes de tueurs en série. Ce qui m'inquiète, c'est qu'un débat et un vote sur une motion de ce genre risque d'engager le Parlement dans quelque chose qui va beaucoup plus loin qu'un simple «non» ou un simple «oui, nous approuvons l'interdiction des cartes de tueurs en série».

L'interdiction de quelque chose comme les cartes de tueurs en série fait intervenir la question de la liberté d'expression. C'est une question très vaste. Elle a de nombreuses ramifications. Si nous adoptons la voie proposée dans la motion, voudrons-nous mettre de l'avant une série de mesures législatives exigeant des débats très approfondis?

Mme Bridgman: Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question.

Je crois que ce que dit le député est exactement ce que je déclarais. Le véritable sujet d'une pétition pourrait être vu comme l'aboutissement d'un processus, d'une loi ou d'une politique. Un débat sur ce sujet précis serait un débat limité puisque ce sujet ne constituerait que le symptôme de quelque chose de plus grand.

À mon avis, il serait indiqué de soumettre à la Chambre la question plus générale qui donne lieu à la situation dénoncée par la pétition.

La tenue de débats approfondis exigerait certes du temps de la Chambre.

[Français]

M. Maurice Godin (Châteauguay): Monsieur le Président, je remercie ma collègue pour ses commentaires. Je voudrais commenter brièvement sur un exemple au niveau des pétitions au sujet de la révocation des députés. Cela m'apparaît extrêmement dangereux. À cet égard, je rejoins mon confrère de l'autre côté qui disait, tout à l'heure, qu'il serait possible qu'un parti mette de la pression sur un député qui ne serait pas d'accord, à un


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moment donné, sur un sujet donné et qu'on le forcerait à démissionner. C'est le premier point.

(1650)

Le deuxième point, aussi extrêmement important, serait de limiter la prévoyance d'un député. On a vu dans cette Chambre, au cours des années 1990, cinq ou six députés conservateurs quitter leur parti pour siéger comme indépendants; par la suite, ils ont formé le Bloc québécois. S'il avait fallu que, par une loi, on révoque les députés de leur position, je pense qu'on aurait tout simplement limité ces gens-là qui prévoyaient des choses, parce que ce ne sont pas simplement cinq ou six députés qui prévoyaient que cela ne fonctionnait plus, c'est le Canada entier qui, au dernière élections, a voté et ainsi éliminé les conservateurs de cette Chambre.

Alors, pour ces deux raisons, je pense que ce serait un peu dangereux d'inscrire cette position dans une loi.

[Traduction]

Mme Bridgman: Monsieur le Président, je ne sais pas très bien qu'elle est au juste la question. Le député parle de révocation des députés et de ce que cela peut constituer pour nous, parlementaires, une espèce d'épée de Damoclès.

Je ne crois pas que nous devrions nous sentir limités ou brimés dans nos décisions. Nous devrions peut-être adopter une attitude plus positive que négative et faire davantage confiance à nos électeurs et aux Canadiens en général pour saisir notre position, ici, à la Chambre et pour comprendre que nous ne pouvons pas toujours plaire à tout le monde. Il faut avoir confiance dans les Canadiens pour évaluer honnêtement ce que nous faisons.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Monsieur le Président, le présent débat est fort intéressant et, naturellement, très cher au coeur des réformistes.

Au cours de la campagne électorale, qui remonte à quelques mois à peine, j'ai participé à des assemblées très intéressantes. La candidate libérale, par ailleurs une excellente personne, disait quelque chose qui était très bien accueilli par la foule jusqu'à ce que je le conteste. Elle disait ceci: «Dans quelques jours, ce sera vous le patron. Pendant les trois ou quatre minutes où vous serez dans l'isoloir, ce sera à vous de décider ce qui se passera au Canada au cours des quatre prochaines années.» C'est vrai.

Mais j'ai répondu à cela que, en démocratie, les Canadiens devraient être au pouvoir plus que trois ou quatre minutes tous les quatre ou cinq ans.

Le présent débat est important parce qu'il renvoie à une définition philosophique absolument fondamentale de la démocratie: l'opinion du peuple importe-t-elle, entre les élections? Si l'on en juge par ce qui se passe au Canada à l'heure actuelle, j'estime que cela ne compte pas beaucoup. Nous avons entendu un certain nombre de députés affirmer avec passion que ce ne doit pas compter non plus. À mes yeux, c'est absolument faux.

Je crois que beaucoup de Canadiens voudraient être à notre place. Ils voudraient avoir le temps et la chance d'examiner les problèmes qui assaillent notre pays et de prendre des décisions en conséquence. Toutefois, ce ne sont pas tous les Canadiens qui peuvent le faire, compte tenu des contraintes de temps, notamment, que leur imposent leurs autres devoirs et responsabilités. Par conséquent, à partir du principe démocratique du suffrage égalitaire, ils élisent des représentants.

Il faut insister, je crois, sur le mot «représentants». Jusqu'à maintenant, la représentation importait peu dans ce qui se passait ici, au Parlement. Dans le passé, ce n'était pas tant ce que nos électeurs pensaient qui comptait que ce que pensait notre parti. Si cela avait bien fonctionné, je pense que nous nous en réjouirions tous. Mais ce n'est pas le cas.

(1655)

Quand on en vient à un système où c'est le parti qui décide, ce sont ceux qui tiennent les rênes de ce parti qui décident pour tous les parlementaires et tout le pays. On en vient au point où c'est une poignée de gens qui décident de tout parce qu'ils ont l'appui des députés de leur parti et que ce dernier domine le Parlement.

C'est ça le problème que nous essayons de régler. Si ce groupe sélect avait constamment pris de sages décisions respectant les points de vue des Canadiens, j'estime que nous n'aurions rien à redire. Nous avons tous une vie à vivre. Nous nous contenterions de vivre notre vie et de vaquer à nos affaires ainsi qu'à nos activités familiales ou professionnelles, en laissant à ce petit groupe le soin de tout décider pour nous s'il le faisait bien. Mais ce n'est pas le cas.

Le fait est qu'il nous a endettés jusqu'au cou. Il ne nous a pas écoutés. Il n'a pas tenu compte de nos points de vue. Il est arrivé, à maintes reprises au cours de la législature précédente, que des députés déclarent ouvertement dans des assemblées publiques des choses comme: «Je me fous que 90 p. 100 de mes électeurs soient contre ce projet de loi, je vais voter en faveur parce que c'est dans l'intérêt du Canada.»

Je voudrais que certains de nos prédécesseurs sachent que c'est l'argent des Canadiens qu'ils ont dépensé et l'avenir des Canadiens qu'ils ont hypothéqué, eux qui prétendaient être les seuls à savoir ce qui était bon pour notre pays.

Les gens sont-ils investis d'une sagesse particulière du simple fait qu'ils traversent ces couloirs déserts? Malgré nos antécédents et notre formation, nous n'en savons pas plus que la plupart des Canadiens. Nous sommes simplement ici pour accomplir un travail, un travail qui comporte trois éléments. Premièrement, un mandat, parce que nous avons basé notre campagne électorale


1634

sur un certain nombre de points. Si nous avons promis, pendant notre campagne électorale, d'équilibrer le budget, alors nous ferions mieux de le faire. Si nous avons promis d'écouter les gens, alors nous ferions mieux de le faire. Si nous avons promis aux gens que nous allions faire telle autre chose, alors nous ferions mieux de tenir nos promesses, car c'est pour cela que les gens nous ont élus.

Il se présente au Parlement beaucoup de questions dont nous n'avons pas nécessairement parlé au cours des 50 jours de campagne électorale et au sujet desquelles nous n'avons pas pris d'engagement. Nous devons alors exercer notre propre jugement parce que nous ne pouvons sonder les milliers d'habitants de nos circonscriptions et leur demander ce qu'ils voudraient que l'on fasse.

Nombreuses sont les occasions où la personne élue doit exercer son jugement. Sur ce point, je suis d'accord avec les députés d'en face. Il y a aussi beaucoup de cas où les questions sont tellement importantes, ont de telles conséquences et sont d'une telle portée nationale qu'il n'est que normal et approprié, dans une démocratie, que tous les citoyens, après avoir eu la possibilité de faire un examen complet et juste de la question, puissent avoir leur mot à dire.

Autrement, nous arrivons à une situation semblable à celle que nous avons connue avec les débats du lac Meech et l'accord de Charlottetown où quelques personnes pensaient pouvoir décider pour toutes les autres. Or, il semble que, dans leur sagesse, les différents partis de la Chambre sont complètement débranchés de la réalité, de ce que veulent vraiment les Canadiens.

C'est à nous, qui avons été élus, de corriger cette situation. Le meilleur moyen d'y parvenir est de procéder aux réformes démocratiques dont nous avons parlé. C'est ce que font d'autres démocraties et ça marche bien. Il suffit d'établir un lien entre le jugement des décideurs et celui des Canadiens ordinaires.

Nous avons amplement l'occasion d'exercer notre merveilleux jugement sur nombre d'autres questions. Nous avons besoin de vérifier le bien-fondé de ce jugement, et c'est tout ce que nous demandons.

Nous avons décidé aujourd'hui de parler des pétitions. Des milliers de Canadiens, persuadés qu'il faut changer les choses, consacrent beaucoup de temps, d'efforts et d'énergie à préparer des pétitions pour nous demander d'agir. Et que se passe-t-il? Eh bien, tout cela est fait en pure perte! Les pétitions ne font pas l'objet de débats, elles ne sont pas mises aux voix et elles sont rarement étudiées. Il arrive même que les gens ne savent pas qu'une pétition a déjà été présentée à maintes reprises, car on ne les dépose pas quand la Chambre affiche complet. Ce n'est pas correct. Les Canadiens doivent pouvoir avoir l'impression que nous attachons du prix à leurs opinions. Le processus de présentation des motions se prête bien à cela.

(1700 )

Ce n'est là qu'un moyen parmi tant d'autres qui permet aux parlementaires de montrer qu'ils ne sont là que pour représenter la population. Il est de leur devoir de rester en contact avec leurs électeurs et de leur rendre compte. Ils n'ont de cesse que de satisfaire les désirs de leurs concitoyens et de se préoccuper de leurs doléances.

Je demande à tous les députés de la Chambre de se rendre à l'évidence qu'il est temps de changer les choses. Au nom des Canadiens, je leur demande d'appuyer cette motion afin que nous réussissions tous ensemble à faire en sorte que nos concitoyens puissent renouer avec le processus décisionnel.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Monsieur le Président, les députés du Parti réformiste agitent encore un autre tigre de papier devant les Canadiens.

J'entends dire que le Parlement n'est pas un endroit démocratique. J'appuie les propos qu'a tenus plus tôt le député de Glengarry-Prescott-Russell. Il existe un mécanisme pour examiner les pétitions et il incombe aux députés de présenter ces pétitions afin de défendre les intérêts de leurs électeurs. Comme le député de Glengarry-Prescott-Russell l'a souligné, où sont les motions présentées par les députés du Parti réformiste au sujet des pétitions?

Je siège de ce côté-ci de la Chambre et, en tant que toute nouvelle députée, j'en apprends beaucoup au sujet des traditions du Parlement. Je dois vous dire que, lors d'une journée d'orientation, la toute première fois où je me suis assise ici, la chose qui m'a le plus impressionnée a été d'écouter l'orateur précédent parler de l'excellente tradition qui existe au Parlement et qui évolue depuis des centaines d'années.

Lorsqu'on décide de bouleverser une tradition comme celle-là, on ne peut pas savoir ce qui risque de se produire et quelles injustices seront causées au processus démocratique. Les propositions du député d'en face sont peut-être enthousiastes, mais ne sont pas dépourvues de naïveté. Les députés du Parti réformiste agitent encore une fois un tigre de papier devant les Canadiens, alors qu'il existe bel et bien au Parlement un mécanisme leur permettant de faire exactement ce qu'ils proposent. S'ils étaient au service de leurs électeurs, c'est exactement ce qu'ils feraient.

Mme Ablonczy: Monsieur le Président, je remercie la députée d'en face de ses observations. Je lui dirais que je pense que c'est insulter les Canadiens que de comparer leurs milliers de signatures à un tigre de papier. Il faut qu'elles signifient quelque chose.

C'est vrai, les députés peuvent présenter des projets de loi basés sur ces pétitions, mais que leur arrive-t-il? Ils sont soumis à une loterie! Il arrive très souvent qu'ils ne soient même pas débattus et qu'ils ne fassent pas l'objet d'un vote.

Bien entendu que vous pouvez essayer d'en parler en comité. Mais est-ce qu'une pétition signée par des milliers de Canadiens ne devrait pas avoir plus d'importance qu'un tirage au sort? Ne devrait-elle pas faire l'objet d'un accusé de réception quelconque et de respect de la part des destinataires?


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Si nous présentons une demande à quelqu'un, nous nous attendons à une réponse. Nous nous attendons à ce qu'on nous dise si l'on est d'accord et si l'on va nous appuyer. Les pétitions nous sont transmises parce que nous sommes députés, et il me semble qu'elles méritent mieux que d'être classées quelque part, de faire l'objet d'un quelconque projet de loi d'initiative parlementaire ou peut-être d'être discutées un jour en comité.

(1705)

Ces initiatives de nos citoyens méritent une meilleure réponse. C'est ce que j'ai à dire. Je suis sûre que les Canadiens seront d'accord, sinon perdraient-ils leur temps à faire signer des pétitions?

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington): Monsieur le Président, je voudrais dire à la députée de Calgary-Nord que ses propos m'inquiètent. La députée dit que nous ne faisons pas ce que les gens attendent vraiment de nous. Ce que les gens pensent et veulent ne compte-t-il pas à ses yeux? Je désapprouve ce qu'elle avance. Personnellement, les gens m'ont élue pour défendre leurs intérêts, et c'est ce je fais. La plupart des libéraux qui ont été élus aux dernières élections l'ont été parce que le programme libéral était équilibré.

Aussi populaire puisse-t-il paraître dans l'ouest du Canada, le mouvement réformiste n'a guère d'assise dans le reste du pays. Comme nous le savons, le Parti réformiste n'est pas véritablement un parti national. C'est plutôt un parti régional.

M. White (North Vancouver): Attendez aux prochaines élections!

Mme Chamberlain: Nous verrons. Je pense que les gens se sont clairement et vivement prononcés en faveur de notre programme. Il est important que les députés du Parti réformiste le reconnaisse. C'est le souhait du peuple.

L'autre jour, le député de Calgary-Sud-Ouest m'a parlé de la même question. Je suis fermement convaincue que nous avons été élus pour apprendre et pour obtenir des informations auxquelles le public en général n'a peut-être pas accès. Je m'inquiète quand le chef du Parti réformiste déclare éduquer le public, instaurer un processus éducatif. Je m'inquiète à l'idée qu'un certain parti puisse mettre au point un processus pour apprendre aux Canadiens ce qu'est un référendum.

Je suis vraiment inquiète. La députée se sent-elle mal à l'aise de prendre des décisions sur la foi d'informations qui lui sont fournies par les habitants de sa circonscription au téléphone, au cours d'assemblées publiques ou autres? Est-elle mal à l'aise de se fonder sur ces informations. . .

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je pense que la question est claire.

Mme Ablonczy: Monsieur le Président, je n'aime pas voir une discussion sur la question fondamentale des droits et libertés démocratiques tournée en attaque partisane. C'est comme si on disait qu'un parti vieux de six ans n'a aucune légitimité parce qu'il n'a pas effectué de balayage national. Ce genre d'argument n'est pas utile.

La députée soutient que les voeux de la population sont pris en considération et que le fait que le gouvernement soit élu lui donne en quelque sorte carte blanche pour faire ce qu'il veut car, après tout, il a reçu un mandat. L'histoire récente montre que ce n'est pas le cas. Le gouvernement précédent a été élu, puis a imposé la TPS malgré l'opposition énergique de la population canadienne. Le gouvernement actuel, tenant compte de cette opposition, est disposé à abolir la taxe.

L'accord de Charlottetown a été proposé par le gouvernement précédent qui prétendait avoir été clairement mandaté pour le faire. Or, la population a rejeté l'accord. L'élection d'un gouvernement pour une période de quatre ans ne l'autorise pas à faire tout ce qu'il veut au cours de son mandat. Il doit exister un mécanisme de pondération des décisions prises par le gouvernement. C'est notre point de vue.

Pourquoi faudrait-il se préoccuper d'éduquer la population? C'est précisément ce qu'il nous faut faire dans ce pays. Nous devons informer la population des enjeux, faire en sorte qu'elle en connaisse les avantages et les inconvénients afin qu'elle puisse porter, par l'intermédiaire de ses représentants, son propre jugement sur les questions d'actualité.

J'espère que le député ne veut pas dire que les Canadiens n'ont pas la capacité d'être informés et de prendre de bonnes décisions; ce serait anti-démocratique. Il doit y avoir un démarche d'information, comme ce fut le cas lors du débat qui a précédé le référendum sur l'accord de Charlottetown. En fait, ce processus a insisté de façon disproportionnée sur un côté de la question, ce qui n'a pas empêché la population de décider en fonction de l'information dont elle disposait. N'ayons pas peur.

Le vice-président: À l'ordre s'il vous plaît. La période attribuée est écoulée.

(1710)

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges): Monsieur le Président, dans une autre vie, j'ai été surintendant au ministère de l'Éducation. Je me souviens très bien qu'une fois -je pourrais en donner tous les détails -, c'était à Springdale sur la côte nord-est de Terre-Neuve, nous discutions de la fusion des services scolaires.

Les députés comprendront qu'en vertu de la Constitution, Terre-Neuve possède un régime d'éducation confessionnel. Aujourd'hui, en 1994, il y a les trois régimes catholique romain, pentecôtiste et intégré, c'est-à-dire le système qui intègre d'anciens services séparés selon plusieurs confessions religieuses. L'époque à laquelle je me reporte se situe juste avant cette intégration. Dans une collectivité donnée, il y avait divers régimes scolaires distincts.

Quelqu'un a présenté une pétition proposant leur intégration. Des 3 000 habitants de la collectivité, 85 p. 100 -je n'ai pas les chiffres exacts, mais le pourcentage représentait la grande majorité de la population adulte de la collectivité -ont signé la pétition demandant la fusion, l'intégration des services séparés. Or, en moins de deux semaines, on a présenté une autre pétition


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signée par une nette majorité de la population adulte, soit environ 58 p. 100, s'opposant à la fusion. De toute évidence, de nombreuses personnes avaient signé les deux pétitions dans la période de 10 à 12 jours.

Mon argument, c'est que les pétitions sont très utiles, dans la mesure où il n'y a pas d'abus. Une des raisons de l'abus qui peut en être fait, c'est notamment le fait qu'il est difficile de dire non à un voisin qui vient tout simplement demander une signature.

Les députés admettront que les pétitions font rarement l'objet d'une mûre réflexion, de sorte qu'il est préférable de les traiter avec circonspection. Les pétitions doivent toutefois être considérées comme un indicateur. Si quelqu'un s'amène avec une pétition et me dit que 85 p. 100 des membres de la collectivité sont de tel ou tel avis, j'estime qu'il s'agit d'un message très clair.

Savez-vous ce qui est encore meilleur qu'une pétition? Une boîte de scrutin, parce que les gens ne peuvent voter que d'un côté. Ils ne peuvent s'exprimer qu'une fois.

Je tiens à être clair en ce qui a trait à l'utilité des pétitions. Celles-ci sont un outil très important, et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle elles ont été prévues par nos prédécesseurs, ici et au Parlement britannique, et la raison pour laquelle nous, législateurs et parlementaires, avons toujours accordé beaucoup d'importance à la présentation de pétitions à la Chambre.

Celles-ci sont un outil qui permet au public d'exprimer ses doléances. Par leur entremise, la collectivité nous dit qu'elle appuie ou rejette telle ou telle mesure, ou qu'elle est préoccupée par une question donnée. Tout député qui prendrait les pétitions à la légère prendrait beaucoup de gens à la légère. Il prendrait à la légère un outil qui sert très bien le Parlement et les Canadiens, et ce depuis très longtemps.

Cela dit, il faut éviter que les pétitions, qui sont un moyen d'envoyer un signal ou de faire part d'une doléance, ne forcent le gouvernement à agir uniquement en fonction de leur contenu.

Je pense que l'exemple que j'ai donné illustre les problèmes qui surgiraient si le gouvernement devait diriger le pays en fonction des pétitions reçues. Si, à l'époque, nous avions donné suite aux deux pétitions à Springdale, nous nous serions retrouvés avec deux écoles. Nous aurions eu l'école fusionnée parce que c'est ce que voulait 85 p. 100 de la population, et nous aurions aussi eu toutes les écoles séparées, parce que c'est ce que voulait 58 p. 100 de la même population une dizaine ou une douzaine de jours plus tard.

Voilà la difficulté.

(1715)

Tel est le problème avec les pétitions. Très souvent, les pétitionnaires voudraient que vous preniez des mesures qui s'excluent mutuellement. Je vous garantis que, si vous faites signer une pétition relativement à une question donnée, je pourrais, dans la même semaine, obtenir autant de signatures de personnes qui endossent le point de vue opposé. Le mérite des pétitions est d'envoyer un signal: leur risque est d'envoyer des signaux contradictoires.

Comme je l'ai mentionné il y a quelques instants, le problème est lié à ce qui se passe lorsqu'on cogne à la porte pour vous demander de signer une pétition. Il est difficile aux gens de refuser de signer, à moins qu'ils n'aient sérieusement étudié la question en cause. S'il est notoire qu'on est contre l'avortement, par exemple, il est facile de dire à la personne qui fait circuler la pétition: «Vous connaissez ma position là-dessus, et je ne peux pas signer votre pétition en faveur de l'avortement.» Cependant, sauf pour trois ou quatre questions de conscience comme l'avortement, la peine capitale et l'euthanasie, comme les gens vivent ensemble dans de petites collectivités, lorsqu'un voisin frappe à la porte en montrant cette pétition, très souvent, il est plus facile de la signer. Je ne dis pas que c'est bien. Je n'essaie pas de justifier cela. J'explique simplement ce qui se passe des milliers de fois avec des pétitions. Des milliers de fois, des gens signent des pétitions et, dans bien des cas, on sait qu'ils ont signé des pétitions contradictoires.

C'est la raison pour laquelle j'ai commencé par un exemple, et non par une généralisation. Dans un cas précis, j'ai su qu'en 8, 10 ou 12 jours, des gens avaient appuyé deux propositions qui s'excluaient mutuellement.

C'est la raison pour laquelle il est dangereux et malavisé d'utiliser des pétitions qui ne sont qu'une forme de grief, un moyen de prendre le pouls d'un groupe et de savoir ce qu'il pense d'une question, et de présenter ces pétitions au gouvernement.

Examinons l'essence de cette motion. Elle dit en effet que les pétitions constituent un moyen important et qu'elles devraient jouer davantage un rôle à la Chambre.

Je dis au député d'Edmonton-Sud-Ouest que, s'il s'agit là de son motif réel, et je présume que oui, il y a des façons de procéder à cette fin. Son collègue de Calgary-Nord écarte l'idée de projets de loi d'initiative parlementaire. Il est vrai qu'une foule de projets de loi d'initiative parlementaire sont rejetés, un grand nombre parce qu'ils devraient l'être. Cependant, une foule d'autres ont été rejetés parce que le député n'a pas bien fait son travail. Très souvent, si un député est saisi d'une question, s'il est frappé par l'importance de cette question et s'il peut se faufiler dans le dédale du processus législatif, il peut réussir à faire adopter son projet de loi d'initiative parlementaire. C'est arrivé très souvent.

Avant que les gens ne commencent à critiquer les projets de loi d'initiative parlementaire, ils devraient vérifier le compte rendu de la Chambre. Ils verront que bon nombre de projets de loi d'initiative parlementaire ont réussi à franchir toutes les étapes à la Chambre.

M. Young: Nous ne pouvons pas fumer ici en raison d'un projet de loi d'initiative parlementaire.

M. Simmons: La politique anti-tabac, qui est actuellement en vigueur sur la colline, comme mon collègue, le ministre des Transports, vient de le rappeler, découle directement d'un projet


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de loi d'initiative parlementaire. Et nous pourrions parler de bien d'autres cas.

Si les pétitions attirent l'attention du public sur une question qui est suffisamment importante et si les pétitionnaires sont représentés par un député assez énergique et assez informé, cette question finira par être examinée à la Chambre et par donner des résultats. C'est le premier point que je tiens à faire valoir.

J'ai déjà parlé de mon deuxième point à une ou deux reprises. Il ne faudrait surtout pas chercher à gouverner par correspondance. Si nous pensons que c'est ainsi qu'il faut procéder, nous n'avons plus aucun rôle à jouer ici. Il suffit que nous installions des appareils dans 27 millions de foyers et que nous demandions à leurs occupants d'appuyer sur telle touche s'ils sont pour ce qui est proposé et sur telle autre s'ils sont contre. Un gouvernement, ce n'est pas ça. Une institution comme la Chambre, ce n'est pas ça non plus. C'est une tribune propice aux échanges. Des députés de tous les partis m'ont dit clairement ou à mots couverts qu'ils étaient entrés au Parlement sans trop savoir ce dont il s'agissait, sans trop en mesurer toutes les conséquences.

(1720)

À maintes reprises, il m'a fallu expliquer à d'aucuns pourquoi je siégeais dans cette enceinte. Je ne suis pas venu ici pour me fermer à toute influence. Ce ne sont pas les habitants de Burin-Saint-Georges qui m'ont pas envoyé ici pour que je sois leur mandataire. L'automne dernier, le 25 octobre, pour être plus précis, 25 000 personnes ont apposé un x à côté de mon nom. Pour bon nombre d'entre eux, ce n'était pas la première fois qu'ils accomplissaient ce geste. Ils avaient eu neuf occasions de voter pour ou contre moi. Quant au processus de révocation, si tel est l'enjeu, j'ai des réserves.

J'ai noté une phrase qui a été prononcée par la députée de Calgary-Nord et selon laquelle la représentation n'était ici qu'un minuscule élément. Je lui suggère de relire sa phrase. Elle a peut-être prononcé ces mots parce qu'elle était dans le feu de la discussion.

Quel affront!

Des voix: Bravo!

M. Simmons: Ma foi, qu'est-ce que je faisais quand je m'égosillais des heures durant dans l'espoir de résoudre les problèmes de la pêche sur la côte sud de Terre-Neuve. De quoi s'agissait-il?

Et toutes les fois que j'ai insisté sur la nécessité de bonifier les programmes d'aide aux étudiants? Et toutes les fois que je me suis battu pour obtenir un peu d'équité, un peu d'équilibre, dans le partage des paiements de transfert entre les provinces? Et toutes les fois que j'ai réclamé des lois plus rigoureuses concernant le contrôle des armes à feu?

S'agissait-il alors de faire mousser mon propre programme? Pendant tout ce temps, est-ce que je représentais quelqu'un? Pour reprendre l'expression employée par la députée, s'agit-il d'un minuscule nombre de fois? Est-ce que j'agissais ainsi par hasard? Suis-je venu dans cette enceinte pour mousser mon propre programme? Je ne pense pas qu'elle puisse oser le croire. Comme je ne la connais pas, j'aimerais l'entendre de sa bouche, car croire une telle chose, ce n'est pas possible. Tenir un tel discours est complètement absurde!

Peut-être acceptera-t-elle de se rétracter. Si elle ne le fait pas, ce n'est pas seulement moi qu'elle aura insulté. Moi, on m'a déjà insulté. Les insultes ne m'atteignent pas. Mais je ne suis pas seul ici. Il y a d'autres députés. Exlcuons les membres de son parti qui sont nouveaux à la Chambre. Supposons qu'ils n'oseraient rien faire d'autre que représenter leurs électeurs. Essayons d'avaler ça. La même chose vaut pour mes amis du Bloc qui sont nouveaux à la Chambre, à l'exception de six ou sept. La même chose vaut pour un certain nombre de députés de ce côté et d'autres députés qui aimeraient s'y trouver, ceux qui sont massés là-bas. Nous avons l'intention de les avoir parmi nous pendant un certain temps.

Nombre d'entre nous ne sont pas nouveaux à la Chambre. Un certain nombre de membres d'autres partis le sont. Peut-être me suis-je entièrement trompé, mais j'ai eu l'impression en les regardant, alors que je présentais des pétitions et soulevais certaines questions, qu'ils représentaient effectivement les gens. Je dois maintenant me rendre à l'évidence qu'ils ne faisaient que rabâcher les mêmes choses et qu'ils faisaient seulement ce qui les intéressait.

Je ne veux pas chercher à faire la lumière sur le commentaire qu'a fait la députée. Elle a utilisé un exemple que je voulais moi-même utiliser. Je l'utiliserai donc aussi. Elle a pris l'exemple de la TPS. Un exemple on ne peut plus clair d'une mesure que le gouvernement a fait adopter à toute vitesse, malgré les nombreuses pétitions et l'opposition de 85 p. 100 des Canadiens. C'est effectivement un cas où le système n'a pas fonctionné. Cela n'a été que provisoire. Les gens ont fait savoir au gouvernement ce qu'ils pensaient le jour des élections. Le parti qui a agi de la sorte n'a plus que deux membres à la Chambre à présent.

Le système n'a pas fonctionné. Mais c'était provisoire. C'est en fait l'exception. Prenons un autre exemple. Aux alentours de 1983, le gouvernement de M. Trudeau avait envisagé d'apporter certains changements à la pension de vieillesse. Les pétitions commencèrent à arriver. La volonté de la population s'est faite entendre. Nous avons rapidement abandonné tous nos plans de réforme de la pension de vieillesse.

(1725 )

On ne peut pas avoir des élections tous les jours. Est-ce que tous les quatre ans, c'est assez? Ramenons cela à trois ans. Si l'intervalle entre les élections est trop long, si on ne peut pas nous faire confiance pour quatre ans à la fois, faisons comme aux États-Unis, présentons-nous devant les électeurs tous les deux ans. Changeons la durée de la législature.

N'essayons pas de duper la population en lui faisant croire que tout baignera dans l'huile si elle peut faire connaître sa décision sur le problème du jour, appuyer sur le bouton aujourd'hui et envoyer la pétition demain matin.

Le problème que j'ai illustré dans mon premier exemple en ce qui concerne les pétitions et la volonté de la population, c'est que tout n'est pas noir ou blanc. Parfois, 30 p. 100 veulent un chose, 35 p. 100 en veulent une autre et 35 p. 100 une troisième. Que faites-vous, vous adoptez trois politiques?

On ne peut pas échapper au fait qu'un gouvernement est élu pour gouverner. Il le fait conformément à son mandat et de manière à pouvoir se défendre devant son électorat aux élections


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suivantes. S'il ne respecte pas son mandat, on sait ce qui arrive: nous l'avons vu avec le dernier gouvernement.

La notion que l'on peut tromper tout le temps l'électorat. J'ai mentionné que j'avais eu 25 000 voix, d'autres peuvent citer des chiffres encore plus impressionnants. Mon collègue de North York pourrait nous dire, je pense, que plus de 100 000 personnes ont voté pour lui. Étaient-elles toutes dupes? Étaient-elles toutes stupides? Tous, ici, nous avions une majorité simple ou absolue. Tous les députés sont ici avec la bénédiction de milliers d'électeurs.

On est en train de nous dire aujourd'hui que ces gens ne voulaient pas vraiment cela. Tous ce qu'ils voudraient, au lieu de simplement cocher un nom sur un bulletin, c'est pouvoir envoyer des pétitions. Dieu les bénisse! Envoyez-nous des pétitions, plein de pétitions, toutes les pétitions que vous voulez. Je peux dire à mes électeurs de Burin-Saint-Georges, à ces 25 000 personnes qui ont voté pour moi, que je respecterai leur pétition, que j'entendrai leur grief, mais que je ne les laisserai pas révoquer mon mandat qui est de représenter tous les habitants de Burin-Saint-Georges, pas seulement ceux qui savent le mieux exploiter le système des pétitions. Voilà mon mandat, et c'est un mandat que j'entends remplir au mieux de mes compétences.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, je n'ai pas de questions à poser au député, parce que je connais bien sa position. Elle correspond plus ou moins au statu quo.

J'ai quelques observations à formuler, et il se pourrait que le député veuille y répliquer. Il s'est indigné des propos de notre collègue de Calgary, quand elle a dit avoir l'impression que la représentation importait peu dans ce qui se passait au Parlement. Je rappelle au député que son ancien chef, M. Trudeau, avait dit un jour qu'un simple député n'était plus rien d'important dès qu'il se trouvait à 50 pieds de la Chambre des communes.

Cela peut lui donner matière à réflexion. Il peut aussi se demander ce que les gens en pensent quand un petit groupe de personnes au sein d'un parti ou du gouvernement décide de l'orientation du gouvernement sur des questions importantes, qui ont de graves conséquences pour les électeurs.

Selon moi, et j'en connais qui partagent cet avis, ceux qui s'opposent aux principes démocratiques s'appuyant sur l'opinion populaire, comme les référendums, la révocation des députés, les initiatives des citoyens et la réforme du Sénat, le Sénat élu, ces gens-là ont peur de leurs électeurs. Ils ne leur font pas confiance. Le jour des élections, ils leur disent «Faites-moi confiance, confiez-moi des pouvoirs en me choisissant pour vous représenter à Ottawa, mais ne me demandez pas de vous rendre des comptes sur la façon dont nous régirons vos affaires au jour le jour.»

(1730)

Le député a par ailleurs mentionné cette désastreuse erreur de l'ancien gouvernement, la TPS. Qu'il pense seulement aux dommages que cela a causés et que cela continuera à causer. Nous disons que, s'il y avait en place un mécanisme quelconque, cela aurait permis à la population de mettre un terme à cette politique, cette mesure législative mal conçue n'aurait jamais été adoptée et les graves répercussions économiques qu'elle a engendrées et que le gouvernement libéral a reconnues ne se seraient jamais produites. Voici donc ce que nous disons. Les gens ont besoin de cette forme d'équilibre des pouvoirs, et c'est de cela que parlait notre collègue de Calgary.

Nous ne disons pas que nous voulons diriger le gouvernement à coups de sondages, comme notre collègue le laissait entendre. Nous voulons établir un équilibre des pouvoirs raisonnable qui donnerait à nos concitoyens, lorsqu'une question les préoccuperait particulièrement, un moyen d'empêcher l'adoption d'une mauvaise mesure pouvant avoir des conséquences aussi désastreuses dans leur vie et celle de leurs enfants.

M. Simmons: Je voudrais remercier le député de Crowfoot. Il a parlé du statu quo. Je ne suis pas très en faveur de cela, mais je n'adore pas non plus les changements. Si une chose mérite d'être modifiée, faisons-le, mais n'apportons pas des modifications juste pour le plaisir.

Le député sera peut-être surpris de l'entendre, mais j'ai apprécié la majeure partie de son intervention. J'ai jugé son exemple de M. Trudeau un peu dépassé, mais cela n'a rien à voir avec la question. Cependant, à la fin, le député parle d'équilibre des pouvoirs.

En 1992, j'ai fait le trajet d'Ottawa à Burin-Saint-Georges 49 fois en 52 semaines. Il y a une quinzaine de jours, je me suis absenté de cette enceinte le vendredi et le lundi. Ce weekend là, je me suis rendu à Terre-Neuve et j'en suis revenu, ce qui signifie huit heures d'avion au total, quatre heures à l'aller et autant au retour. J'ai passé 26 heures en voiture et j'ai assisté à 29 réunions de comités de pêcheurs, de conseils municipaux et le reste.

Je tiens à dire à mon collègue de Crowfoot que c'est ça, l'équilibre des pouvoirs dont il parle. Si le député reste en contact avec ses électeurs, il ne peut venir dans cette enceinte et faire fi des conseils qu'il a reçus. Je vous dis que je reflète le plus fidèlement possible les souhaits de mes électeurs à la Chambre.

M. Ted White (Vancouver-Nord): Monsieur le Président, notre motion semble avoir piqué les députés d'en face au vif.

Le député s'élève contre un gouvernement par pétition, comme si c'était ce que nous proposions. Débattre de temps en temps d'une pétition importante, c'est à peine gouverner par pétition. Il est triste de voir que les ministériels craignent une réforme qui signalerait aux Canadiens que leur point de vue nous importe, même en dehors des élections.

Une pétition signée par un million de personnes vaudrait-elle la peine d'être débattue aux yeux du député? Je lui pose la même question que j'ai achessée plus tôt à un autre député: Pourquoi a-t-il peur de débattre en Chambre d'une pétition de cette importance? A-t-il peur que ses électeurs s'aperçoivent, grâce aux caméras de télévision, qu'il ne les représente pas comme il le devrait?


1639

M. Simmons: Le député de Vancouver-Nord est, comme la plupart du temps, d'humeur belliqueuse. Il devrait cependant se garder d'attribuer des motifs à la crainte qu'éprouvent certaines personnes. L'intensité de ce sentiment ne se mesure pas en fonction du côté où l'on siège. J'ai siégé de l'autre côté pendant un bon nombre d'années.

(1735)

En fait, je vérifierai, mais je crois bien que j'occupais le siège qui est maintenant celui de mon bon ami de Kindersley-Lloydminster. Sa question ne tient pas debout. Comme si tous les députés de ce côté-ci étaient méchants et avaient peur de tout!

La réponse à sa question est non. Qu'il m'apporte une pétition avec un million de signatures, et je me ferai un plaisir d'en débattre, n'importe quand. Ce dont je parlais est un peu plus complexe que cela. Ce qui me préoccupe, et le député de Vancouver-Nord me corrigera si je me trompe, c'est que j'ai l'impression qu'ils pensent que, si toutes les pétitions faisaient l'objet d'un débat à la Chambre et que nous décidions tous les matins par référendum quoi mettre sur nos tartines, tout irait comme sur des roulettes. Nous baignerions dans le bonheur.

Ce que j'ai à dire au député et aux autres députés de cette Chambre, c'est que, dans le système actuel, et ce tant qu'il ne sera pas modifié, le gouvernement est élu pour gouverner. S'il gouverne mal, comme l'a fait le gouvernement précédent, aux élections, il récolte ce qu'il a semé.

M.Paul Szabo (Mississauga-Sud): Monsieur le Président, je serai bref.

Quelqu'un a demandé si une pétition portant un million de signatures mériterait d'être débattue à la Chambre. Peut-être devrions-nous y réfléchir un peu. Supposons un instant que nous soyons saisis d'une pétition signée par un million de Canadiens qui réclament l'abolition du bilinguisme officiel au Canada.

Je crois qu'il y a des choses dont le gouvernement peut s'occuper sans qu'il faille nécessairement en débattre. C'est une question d'ordre administratif. J'inviterais le député à nous dire ce qu'il pense sur ce point. Si une pétition était mise à l'étude et qu'on appliquait la procédure proposée par le Parti réformiste, comment les autres députés feraient-ils pour en débattre sans avoir sondé au préalable l'opinion de leurs électeurs sur le sujet? C'est tout à fait absurde! Peut-être le député de Burin-Saint-Georges voudrait-il nous donner son point de vue?

Le vice-président: Un de vos collègues voudrait aussi poser une toute petite question. Plus la réponse sera courte, meilleures seront ses chances.

M. Simmons: Monsieur le Président, je remercie mon ami le député de Mississauga-Sud. Ce n'est pas parce que c'est compliqué que cela ne peut pas se faire. La plupart des choses que nous faisons ici sont compliquées et créent de la confusion.

Si le député veut bien prendre la peine de se reporter au Feuilleton et à la motion proposée par mon ami le député d'Edmonton-Sud-Ouest, celle qui est à l'étude en ce moment, je crois que la réponse à sa question et à celle qu'a posée le député de Vancouver-Nord avant lui s'y trouve.

La réponse se trouve dans la convention qui est à l'oeuvre aujourd'hui et qui veut que, quelque méchant que soit le gouvernement, les députés peuvent mettre à l'étude toutes les questions qu'ils veulent. Si le Parti réformiste ou un autre parti représenté à la Chambre se voyait adresser une pétition signée par un million de personnes, il serait extrêmement stupide de ne pas en faire le sujet d'une motion de l'opposition.

M. Benoît Serré (Timiskaming-French River): Monsieur le Président, je voudrais faire une observation pour appuyer les propos que le député de Burin-Saint-Georges a présentés au cours des 10 ou 15 dernières minutes. Permettez-moi de rappeler une petite expérience que j'ai vécue au cours de la campagne électorale.

Plusieurs sondages réalisés dans ma circonscription ont indiqué que de 80 à 85 p. 100 des électeurs étaient favorables à la peine capitale. Pendant la campagne, on m'a demandé une cinquantaine de fois si, une fois élu, j'appuierais mes électeurs et voterais comme la majorité d'entre eux en faveur de la peine capitale. J'ai répondu que j'étais par principe contre la peine capitale et que je m'y opposerais. J'ai dit que cette question me tenait à coeur et que, si l'on était pas d'accord, on n'avait qu'à ne pas voter pour moi.

Or, j'ai remporté la victoire avec 60 p. 100 des voix. Si mes calculs sont exacts, même si les 20 p. 100 des électeurs opposés à la peine capitale avaient tous voté pour moi -et j'en doute parce que bon nombre d'entre eux sont des néo-démocrates -, j'aurais quand même bénéficié du vote de 40 p. 100 des électeurs favorables à la peine capitale.

Je pense que, en tant que député, je dois prendre mes propres décisions et voter contre la peine capitale. Voilà la véritable démocratie qui règne au Canada.

M. Simmons: Monsieur le Président, le député de Timiskaming-French River fait valoir un argument capital en disant que, gouverner, c'est prendre des décisions. Si les députés sont élus en raison de leur position à l'égard d'une seule question, on comprend difficilement la position de celui qui, comme dans le cas du député, doit une bonne majorité des voix à la position qu'il a prise à l'égard de la peine capitale, mais qui, sur une autre question, s'oppose à la majeure partie de ses électeurs et, à l'égard d'une troisième question, prend encore une position différente de la leur. S'il fait l'affaire de 65 ou de 85 p. 100 de ses électeurs en raison de sa position sur une question, que se passe-t-il dans les deux autres cas, où il leur est opposé? À mon avis, un député n'est pas élu tellement en raison de ses prises de position sur chacun de 1 015 différentes questions, mais plutôt parce qu'il est capable d'exercer son jugement comme il le faut à la Chambre.

(1740)

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Monsieur le Président, c'est un honneur que de prendre la parole relativement à la motion à l'étude, qui porte sur l'examen de pétitions par la Chambre.


1640

Je dois admettre que je suis un peu déçu de la réaction des députés d'en face. Cette motion demande simplement au gouvernement d'envisager que les pétitions importantes présentées à la Chambre puissent faire l'objet de débats. En fait, je suis très surpris que les députés d'en face s'opposent si fermement à simplement discuter de ce que nous pourrions faire pour améliorer cet outil important qui permet aux Canadiens de communiquer avec nous.

J'ai été quelque peu déçu de la réaction du député de Kingston et les Îles, qui s'est vivement opposé à ce que l'on envisage de prévoir une période au cours de la session pour discuter de certaines pétitions à la Chambre. De même, j'ai été désolé de voir le député de Glengarry-Prescott-Russell s'opposer avec autant de vigueur à l'étude de notre motion. Celui-ci a même laissé entendre qu'il était inconvenant de la part du Parti réformiste de déposer cette motion. J'ai trouvé curieux que le député cite Edmund Burke, le père des conservateurs. Cela signifie peut-être que les libéraux deviendront des conservateurs dans l'avenir, ou que les libéraux vouent une grande estime aux conservateurs et qu'ils comptent s'en inspirer dans l'avenir.

Notre motion a été présentée de bonne foi afin de favoriser une discussion sur l'opportunité de débattre de certaines pétitions. Comme les députés le savent, des pétitions sont présentées presque chaque jour à la Chambre. Celles-ci sont souvent le résultat de gros efforts de la part de Canadiens qui jugent certaines questions assez importantes pour prendre la peine de faire signer des pétitions et de les faire parvenir à leurs représentants élus afin que ceux-ci y donnent suite.

Le député de Glengarry-Prescott-Russell a dit que l'on pouvait présenter des pétitions par l'entremise de projets de loi d'initiative parlementaire. Toutefois, et peut-être est-ce parce que je suis un nouveau venu ici, ce processus me semble lent et laborieux. En outre, je ne pense pas non plus que cette façon de procéder tienne adéquatement compte du temps et des efforts des nombreux Canadiens qui s'efforcent de signaler à la Chambre des questions qui, à leurs yeux, revêtent une grande importance.

Je sais qu'il n'est pas possible de s'occuper de toutes les pétitions reçues ici, et tel n'est pas le but de notre motion. Elle prévoit que la Chambre ait l'occasion d'étudier les pétitions les plus importantes qui lui sont présentées, telle celle qui a été présentée l'autre jour et que deux millions et demi de personnes ont signée. Des députés des deux côtés de la Chambre ont présenté plusieurs pétitions concernant la circulation de cartes de tueurs en série, à laquelle nous convenons tous qu'il faudrait mettre fin. Il importe d'adopter une mesure législative pour régler ce problème. Ce sont des choses de ce genre-là que nous, réformistes, proposons de débattre.

Je crois sincèrement que, par leurs hésitations, les députés d'en face témoignent d'un réel manque de confiance envers les Canadiens ordinaires. Souvent, tout ce que les Canadiens ordinaires savent de la Chambre, c'est ce qu'ils voient à la télévision au cours de la diffusion de la période des questions, ce qui n'est pas, à mon avis, un reflet vraiment fidèle de ce qui se passe ici. Du moins je l'espère.

Je tiens à dire quelques mots sur ce qui m'a motivé à faire de la politique. Je crois que cela a un rapport avec la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui. Lorsque j'étais jeune, le gouvernement était un gouvernement libéral. Je me sentais très loin de ce gouvernement. Il a présenté un projet de loi qui n'était absolument pas avantageux pour mon secteur industriel, pour ma famille, ni pour les questions qui m'intéressaient. Toutefois, presque aucun député de ma région ne siégeait sur les banquettes ministérielles. Un libéral était un oiseau rare dans l'Ouest, dans les années 60 et 70. Dans ces années-là, le premier ministre a dit, à l'agriculteur que j'étais, de vendre moi-même mon blé, et cela dans des termes peu flatteurs, mais il ne m'a fourni aucun moyen de le faire. Puis, son gouvernement a présenté le Programme énergétique national, qui a détruit le secteur industriel dans mon coin de pays. Encore aujourd'hui, nous subissons le contrecoup du Programme énergétique national, qui a fait tellement de torts à ma région, aux plans financier et économique.

(1745)

Puis, comble de malheur, il y a eu les taxes et les folles dépenses des toutes dernières années du gouvernement libéral, avant qu'il ne soit remplacé par les conservateurs qui nous ont entraînés sur la pente dangereuse de la dette accumulée et des dépenses fédérales annuelles effrénées. Entre-temps, dans l'ouest du Canada, nous continuions d'élire des députés, tant des progressistes-conservateurs que des néo-démocrates, qui siégeaient de ce côté-ci de la Chambre.

Finalement, les libéraux ont rendu les Canadiens tellement furieux qu'ils ont perdu également leurs appuis en Ontario et au Québec. À l'époque, l'ouest du Canada, en fait toutes les régions du Canada, étaient bien représentés à la Chambre. D'ailleurs, le député de ma circonscription faisait partie du gouvernement. Les progressistes-conservateurs ont remporté une victoire écrasante. Il restait très peu de libéraux à la Chambre. Peu de gouvernements ont eu un mandat aussi clair que les conservateurs pour gouverner, puisque ces derniers avaient remporté 208 sièges, si ma mémoire est bonne. Cependant, ils n'ont pas rendu de comptes aux Canadiens. En fait, les habitants de ma région du Canada n'ont vu aucune différence dans le style de gestion du nouveau gouvernement par rapport au style de l'ancien gouvernement.

C'est alors que la lumière s'est faite pour un certain nombre d'entre nous. Nous en sommes arrivés à la conclusion que ce n'était peut-être pas les gens que nous élisions à Ottawa qui faisaient problème, mais peut-être le système lui-même.

Le nouveau gouvernement conservateur continuait sur la lancée du gouvernement Trudeau. Il a adopté la TPS contrairement aux souhaits de la majorité des Canadiens. Il disait: «Nous avons le mandat d'agir comme nous le faisons. Si vous croyez que nous avons tort, vous pourrez nous le faire savoir aux prochaines élections.»


1641

Pis encore, les conservateurs ont négocié l'Accord du lac Meech. Je me dois d'ajouter qu'ils l'ont fait avec l'appui des députés libéraux et néo-démocrates à la Chambre. Les conservateurs disaient: «Nous parlons au nom des Canadiens. Vous pouvez vous fier à notre sagesse. Nous avons étudié la question très attentivement. Nous prenons la meilleure décision qui soit dans l'intérêt de tous les Canadiens.»

Dieu merci, non seulement les réformistes, mais un certain nombre de Canadiens ont exigé d'avoir leur mot à dire dans les décisions prises dans cette Chambre, parce que personne ne semble maîtriser la situation. Nous n'avons aucun influence, aucune façon de remettre nos dirigeants, les députés de la Chambre des communes, sur la bonne voie lorsqu'ils s'écartent du droit chemin.

Heureusement, l'accord de Charlottetown a mis à l'épreuve la sagesse de cette Chambre. Il ne faut pas oublier que les députés appuyaient presque à l'unanimité l'accord de Charlottetown. Naturellement, la députée de Beaver River s'y était farouchement opposée, tout comme une poignée d'autres députés. On s'est aperçu que cette institution avait totalement perdu contact avec la réalité telle qu'elle est à l'extérieur de cette Chambre. Je me suis entretenu avec des gens qui ont été associés de très près à l'accord de Charlottetown et ils ont dit qu'ils ne savaient pas à quel point les Canadiens avaient une opinion différente de la leur sur la question. Ils avaient perdu contact avec la population.

Peut-être devrions-nous commencer, je dis bien commencer, à renverser la vapeur, à remettre la responsabilisation à l'honneur, à rétablir la communication entre les députés et leurs électeurs. Il serait temps de commencer à rechercher ces petites choses qui nous permettraient de rester en contact avec ceux qui nous ont envoyés ici. Et ils ne nous ont pas donné le mandat de faire ce que nous voulons. Chaque fois que le parti au pouvoir change, tout ce qui se passe, c'est qu'un groupe en remplace un autre. Il est temps de nous réveiller et de nous en rendre compte. On ne peut pas dire qu'on a le mandat de gouverner si les Canadiens ne font que remplacer un groupe de gens dont les actions étaient devenues intolérables par un autre groupe de gens identiques. Les gouvernants ont perdu le contact avec les Canadiens. Il faut changer complètement notre façon de voir les choses.

Je suis très déçu que les députés d'en face qui se sont opposés à notre motion soient prêts à se contenter d'un régime parlementaire médiocre. Je suis déçu qu'ils refusent de voir la situation en face et qu'ils veuillent garder inchangée la forme de gouvernement que nous avons depuis 127 ans.

Nous arrivons au XXIe siècle et, fondamentalement, nous fonctionnons selon un modèle du XIXe siècle. C'est déplorable. Il est malheureux que nous n'élisions pas les membres de l'autre endroit. Il est malheureux que le dépôt de pétitions soit une simple formalité et que les pétitions ne reçoivent pas toute l'attention qu'elles méritent, compte tenu des efforts déployés par des Canadiens pour en porter les sujets à l'attention de la Chambre des communes.

(1750)

Je crois que tout cela se ramène à la question de savoir -et je terminerai là-dessus -si les députés veulent accorder de l'importance à chaque Canadien ou s'ils ne veulent écouter que les groupes de pression très efficaces et les groupes défendant des intérêts particuliers qui sont capables de capter notre attention par des dépliants accrocheurs et qui ont les moyens d'envoyer leurs représentants à nos bureaux pour nous convaincre de défendre leur point de vue à la Chambre.

Une pétition constitue un moyen très peu coûteux auquel peut recourir tout travailleur ordinaire intéressé au sort de son pays et aimant son pays pour porter à l'attention de la Chambre des communes les questions qui le préoccupent. Rejeter sommairement les doléances des simples Canadiens n'est pas, à mon avis, leur témoigner le respect que nous devrions leur témoigner puisqu'ils nous ont élus et nous ont confié la responsabilité de prendre les bonnes décisions et de rester en contact avec eux pour que nous puissions agir en leur nom.

Je ne pense pas qu'il faille éviter de parler de réforme ici parce que le système ne s'est pas encore écroulé. Parce que le régime actuel convient bien à certains égards ne signifie pas que le statu quo soit la solution d'avenir.

Le fait que les Canadiens éjectent un parti politique du gouvernement pour le remplacer par un autre démontre bien que nous avons besoin d'une réforme à la Chambre des communes pour donner aux Canadiens le genre de gouvernement et les leaders forts qu'ils attendent et qu'ils méritent.

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, tout au long du débat, le député de Kindersley-Lloydminster et d'autres députés ont parlé de recourir à des consultations, à des discussions avec leurs électeurs et au principe des freins et contrepoids pour les guider dans leurs décisions.

La question que je veux poser au député est la suivante: Est-ce un véritable processus de consultation que le député propose ou est-ce simplement un moyen de ne pas assumer l'entière responsabilité des décisions extrêmement importantes qui doivent être prises à la Chambre de temps à autre de sorte que, le moment venu, les députés n'aient pas à se justifier pour les décisions qu'ils ont prises?

M. Hermanson: Je veux remercier le député pour sa question. Je crois que c'est une très bonne question qui mérite une bonne réponse.

Ce n'est pas pour nous décharger de nos responsabilités que nous consultons les Canadiens et écoutons leur point de vue. C'est démoralisant de penser que certains puissent être de cet avis -et je ne veux pas dire que le député est de cet avis; en fait, j'espère qu'il n'est pas de cet avis. Toutefois, il n'en reste pas moins que, si nous ne sommes pas disposés à écouter et à consulter les électeurs, nous pouvons nous écarter tellement de la voie qu'ils veulent que nous suivions qu'ils finissent par ne plus vouloir être représentés par nous. Alors, sans cette consultation, non seulement nous risquons de perdre notre place ici, ce qui n'est pas vraiment important, mais nous engageons le pays dans


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la mauvaise voie et prenons des décisions qui, souvent, peuvent avoir des conséquences néfastes.

Par exemple, notre dette nationale, qui dépasse maintenant les 0,5 billion de dollars, est un fardeau que nous laissons à nos enfants sans qu'ils y aient contribué. Parce que nous n'avons pas écouté les parents et les grands-parents qui se préoccupent du bien-être des générations futures de Canadiens, nous risquons d'avoir une tache très noire dans l'histoire de notre pays.

Les Canadiens sont des gens responsables. Si nous les incluons dans le processus décisionnel, nous pourrions être surpris, et le député aussi, de la sagesse de leurs décisions. Je trouve cela étrange que les députés félicitent leurs électeurs d'avoir fait preuve de bon jugement en les envoyant à la Chambre et que, soudainement, une fois les députés rendus ici, leurs électeurs semblent avoir perdu tout ce bon jugement. Ils ne sont pas capables de prendre une bonne décision dans l'intérêt du Canada. Ils ne cherchent qu'à défendre leurs propres intérêts.

Je n'accepte pas cela. Je crois que, si les Canadiens savaient qu'ils ont vraiment voix au chapitre dans les décisions qui sont prises à la Chambre et si on leur donnait toute l'information nécessaire, nous verrions que ces décisions seraient aussi bonnes ou meilleures que celles que nous prenons seuls.

(1755)

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, je voudrais soulever deux points.

Tout d'abord, mon collègue pourrait-il expliquer ce qu'il entend par «pétition importante», une expression qu'il a utilisée durant ses observations? Veut-il parler du nombre de signataires? De la teneur de la pétition? D'autre chose?

Par ailleurs, je me demande si le député n'a pas agi malicieusement en parlant de consultation. Il a parlé de consultation. Or, nous accordons tous une place importante aux consultations. Certains d'entre nous comprennent peut-être sélectivement ce qui se dit, mais l'importance que nous accordons aux consultations ne saurait être mise en doute. Il est question des pétitions, mais le député a savamment manoeuvré pour détourner le débat.

Je vous ferai aussi remarquer que le député a évoqué la Constitution. Pourquoi? Parce qu'il sait pertinemment que c'est une question très délicate dans sa circonscription. Le député a aussi parlé du Programme énergétique national. Qu'est-ce que cela a à voir avec la motion dont nous sommes saisis?

Je demande s'il ne se montre pas plutôt malicieux.

Le vice-président: Avant de laisser le député répondre, je tiens à rappeler qu'il existe à la Chambre une règle selon laquelle on ne prête pas d'intentions aux autres députés, notamment au début d'une nouvelle législature.

M. Hermanson: Monsieur le Président, comme je ne vois pas le lien entre la Constitution et le Programme énergétique national, je ne m'attarderai pas sur le sujet.

Nous avons mentionné trois types de pétitions dont il y aurait peut-être lieu de débattre à la Chambre. Le premier concerne les cartes de tueurs en série. Même si j'exerce mes fonctions depuis peu, au moins une douzaine de pétitions en provenance de toutes les régions du Canada ont été présentées à ce sujet. Cette question est vraiment importante pour les Canadiens, car des députés des deux côtés de la Chambre présentent à ce sujet des pétitions réunissant de très nombreuses signatures.

J'ai déjà parlé de l'autre type de pétition qui, sauf erreur, a été signée par 2,5 millions de personnes, ce qui en dit long sur l'importance que les Canadiens accordent à la question.

Le troisième type concerne le révocation des députés; une pétition à ce sujet a d'ailleurs été déposée à la Chambre aujourd'hui. Je le répète, cette question concerne directement quelque 30 000 signataires et un député qui siège parmi nous.

Ce sont là trois excellents exemples de pétitions pouvant mériter un examen particulier de la Chambre au moins une fois durant la session ou l'année.

Je ne vois là rien de malicieux. Je crois que cela s'inscrit dans l'esprit de la réforme et témoigne de notre volonté de consulter les Canadiens.

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, la motion à l'étude a trait au débat des pétitions présentées à la Chambre.

Nous devrions tout d'abord reconnaître comme un principe tout à fait fondamental de notre institution qu'il faut accepter tous les moyens de faire entrer dans notre assemblée les idées et l'apport du public en général. Nous ne devrions pas essayer d'y faire obstacle ou d'empêcher le passage de ce courant; à titre de législateurs ou de parlementaires chargés d'établir les règles de fonctionnement de la Chambre, nous devons plutôt veiller à ce que ces règles soient aussi ouvertes et fonctionnelles que possible. Je le dis dès le départ pour établir un principe qui inspirera le reste de mes observations.

Depuis mon arrivée à la Chambre des communes, j'ai noté quelques très bonnes différences d'avec l'Assemblée législative de l'Alberta où j'ai été député.

La première a trait aux déclarations de députés. Cette activité n'existe pas dans cette assemblée législative. Les 15 minutes précédant immédiatement la période des questions constituent l'élément le plus instructif de la séance, car j'y prends connaissance d'idées venues de tous les coins du pays, des Maritimes, du Québec, de l'Ontario, des Prairies et de la Colombie-Britannique. Elles sont présentées en une minute, ce qui me permet de comprendre très rapidement un sujet de préoccupation, un problème ou une attitude existant dans telle ou telle région du pays. C'est important et c'est un excellent changement. Je félicite certainement ceux qui siégeaient ici lorsque ces modifications furent apportées au Règlement de la Chambre.


1643

Il y a une seconde différence qui me paraît importante. Dès qu'un orateur a terminé son intervention dans un débat, nous avons droit à une période de cinq ou dix minutes durant laquelle nous pouvons interroger l'orateur sur un sujet. Nous pouvons en obtenir plus de détails ou d'information au sujet de son intervention ou lui demander d'expliquer davantage son attitude. C'est une excellente innovation.

(1800)

Nous ne bénéficions pas d'une telle innovation à l'Assemblée législative de l'Alberta. Je mentionne ces deux innovations parce qu'elles m'impressionnent. Il y en a d'autres encore que j'ai notées dans notre assemblée et qui permettent le bon fonctionnement du processus démocratique.

Nous pouvons examiner le concept des pétitions et leur présentation. Je tiens à dire une chose à propos des pétitions. Au cours des nombreuses années que j'ai passées à l'Assemblée législative de l'Alberta, j'y ai vu présenter une multitude de pétitions. Tout d'abord, il arrivait souvent qu'un député soit convaincu de la valeur de la pétition et de la nécessité de faire quelque chose, qu'il considère la pétition comme un élément d'information susceptible d'influencer l'Assemblée législative. On observe la même chose à la Chambre des communes.

J'ai aussi remarqué que beaucoup de pétitions étaient présentées sans conviction, par un député qui ne cherchait pas à faire apporter des changements ou à représenter un groupe, mais simplement à remplir une formalité nécessaire dans la vie politique. La pétition était déposée, ce qui permettait au député de dire qu'il avait rempli son devoir, mais il s'empressait de se dissocier de la pétition. Il pouvait dire au groupe en cause qu'il avait déposé sa pétition, et le groupe pouvait penser, plus ou moins, qu'on avait présenté son point de vue. Mais il y avait dans cette manière de faire un manque absolu de sincérité.

Le député de Burin-Saint-Georges a effleuré le sujet dans son exposé de cet après-midi en disant que n'importe qui peut signer n'importe quelle pétition. Il suffit de se promener dans une rue, et on trouvera des gens pour signer une pétition pour ou contre n'importe quoi. Conclusion: les pétitions n'ont aucune crédibilité.

Pourquoi les pétitions ne sont-elles pas vraiment crédibles? Pourquoi estimons-nous qu'elles n'ont pas la crédibilité qu'elles devraient? C'est peut-être, entre autres raisons, parce que, comme législateurs ou parlementaires, nous ne leur avons pas donné la crédibilité qu'elles devraient avoir. Les gens signent souvent une pétition en se disant qu'elle sera présentée, mais que rien ne se produira, qu'elle va dormir dans un débarras du Parlement; on la signe en sachant qu'il n'arrivera rien, que personne ne lira jamais les noms.

Si nous accordions une plus grande importance aux pétitions à la Chambre et si nous les inscrivions à l'ordre du jour pour qu'elles soient débattues, comme le Parti réformiste le propose, les pétitions auraient plus de poids et entraîneraient des réactions. Quels seraient les critères en vertu desquels une pétition pourrait être inscrite à l'ordre du jour et faire l'objet d'un débat?

D'abord, il faudrait qu'un député soit responsable de la pétition. Ou encore, un groupe de députés pourrait examiner la pétition et signifier par écrit son intention de la présenter à la Chambre. Ce serait le premier critère. Il faudrait qu'un ou plusieurs députés se chargent de la pétition.

Le groupe ayant pris charge de la pétition devrait avoir la responsabilité de demander à d'autres députés, quel que soit leur parti, de juger si c'est une bonne pétition pouvant être débattue et de donner les motifs de leur décision. La pétition serait ensuite présentée à la Chambre. Voilà pour le premier critère.

(1805)

Ensuite, on examinerait le nombre et la représentativité régionale des pétitionnaires. Si les pétitionnaires demandent le maintien du bureau de poste d'une petite localité de ma circonscription, ce serait là une pétition très personnelle. La question à débattre devrait préoccuper une majorité de circonscriptions dans l'ensemble du pays, et non pas une seule.

Voilà quelques critères dont nous pourrions nous servir pour inscrire une pétition à l'ordre du jour, et il y en a sans doute d'autres.

Nous avons mentionné d'autres demandes de réforme parlementaire. Je pense que nous pourrions renvoyer celles-ci au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre qui pourrait l'étudier en tant qu'innovation. On ferait ainsi savoir aux Canadiens qu'on ne suit pas aveuglément les vieilles règles.

Nous sommes disposés à changer, et nous avons apporté d'excellentes modifications jusqu'ici, et nous voulons examiner et essayer de nouvelles façons de faire. Je ne connais aucune autre assemblée législative qui traiterait les pétitions de la manière proposée par le Parti réformiste. Ce serait très différent.

Je voulais faire connaître certaines de mes sources. Le député de Kingston et les Îles m'a informé officieusement que la Chambre reçoit de 1 000 à 1 500 pétitions pendant chaque session. Nous, du Parti réformiste, ne proposons aucunement d'étudier toutes ces pétitions. Cependant, il est fort probable que certaines d'entre elles revêtent une grande importance selon des critères que nous pourrions établir. La Chambre pourrait être saisie de ces pétitions sous une rubrique intitulée «pétitions à débattre» et on pourrait procéder ainsi. Je suis sûr qu'une telle démarche encouragerait un plus grand nombre de citoyens à proposer des modifications aux lois pour le mieux-être des Canadiens.


1644

Au cours du débat, on a laissé entendre que l'on pourrait présenter un projet de loi d'initiative parlementaire ou procéder par voie de résolution, et c'est probablement vrai. C'est un autre moyen dont nous disposons en tant que députés pour saisir la Chambre de la question. Je suis sûr que nous aurons recours à ce moyen pendant la présente législature.

Ce sont deux possibilités. Quel mal y aurait-il à accorder une certaine importance aux pétitions dans l'ordre du jour? On pourrait ainsi rehausser un peu la crédibilité des pétitions. Les signataires sauraient que les pétitions feraient l'objet d'un débat, que leur nom serait mentionné à la Chambre et qu'il pourrait y avoir des changements. Ils penseraient donc un peu plus à leurs responsabilités avant de signer la pétition.

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Monsieur le Président, j'ai beaucoup de mal à saisir ce dont il est question ici. Je croyais que la motion visait à renforcer le régime démocratique au Canada, à multiplier les débats sur la place publique et à servir les desseins d'un populisme de bon aloi.

Pendant la période électorale, j'ai causé avec des habitants de ma circonscription. Ils avaient des vues différentes sur certains dossiers, dont l'avortement. Je me suis alors fermement engagée à les transmettre à la Chambre, même si je ne les partageais pas toutes.

J'ai de grandes réserves sur la proposition qui veut qu'un député puisse décider des pétitions qui seront présentées ou pas. Même si une pétition ne porte qu'une vingtaine de signatures d'électeurs de la circonscription de York-Simcoe que je représente, je me fais un devoir de la présenter à la Chambre.

(1810)

M. Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, la députée de York-Simcoe a défendu avec beaucoup d'ardeur les intérêts des habitants de sa circonscription. Il n'est pas question que le Parti réformiste se mette en travers de la façon dont les pétitions sont présentées actuellement. Il peut y avoir de 1 000 à 1 500 pétitions, mais celles des habitants de sa circonscription seront toujours entendues dans cette assemblée.

Ce que nous essayons de dire, c'est que certaines pétitions demandent une attention spéciale. Tout ce que nous voulons, c'est créer un mécanisme qui permettrait à deux, trois, cinq ou dix pétitions sur 1 000 ou 1 500 de faire l'objet d'un important débat à la Chambre.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud): Monsieur le Président, j'entends ce que disent les députés du Parti réformiste. Je suis assis ici depuis des heures à écouter le débat. Or, j'examine le Feuilleton et je ne peux m'empêcher de me demander pourquoi ces exemples se trouvent dans la motion.

Le premier concerne les cartes de tueurs en série. Nous savons que cette question a fait l'objet de discussions, de pétitions et de déclarations de députés. Les députés du Parti réformiste doivent également comprendre que le ministre de la Justice a dit à la Chambre que ses collaborateurs examinaient actuellement cette question. Ils examinent les dispositions de la charte pour s'assurer qu'une mesure législative pourra être adoptée et qu'elle sera efficace. Ils s'occupent de cette question et ce, à la suite du processus de présentation de pétitions. Nous n'avons plus à la débattre. Cet exemple est très mauvais.

Le deuxième porte sur les jeunes contrevenants. Lorsque le gouvernement a été élu, une de ses principales intentions était de réformer la Loi sur les jeunes contrevenants. Beaucoup de Canadiens ont présenté des pétitions à cet égard. Est-il nécessaire de débattre à la Chambre une question que le gouvernement s'est déjà engagé à régler?

M. Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, le gouvernement a l'intention d'apporter des changements en ce qui concerne les cartes de tueurs en série et la Loi sur les jeunes contrevenants. Des mesures législatives sont souvent proposées, mais ce sont les échelons supérieurs de gouvernement, les experts-conseils, le ministre et le cabinet du ministre qui regroupent les idées et les présentent ensuite à la Chambre. Les mesures législatives présentées ici comportent souvent d'importantes lacunes.

La semaine dernière, le député de Wild Rose a prononcé un discours remarquable sur les lacunes d'une mesure de justice pénale. C'est là qu'une pétition à la Chambre aurait pu être utile. Je pense simplement que nous laissons passer des occasions.

Le vice-président: Je regrette, mais le député de Waterloo, qui est en train de chronométrer, me signale que votre temps est écoulé.

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Monsieur le Président, il ne sera pas dit qu'il n'y a pas de réformateurs à la Chambre. Le député de Lethbridge a dit au cours du débat que nous devons modifier la façon dont nous traitons les pétitions; qu'il faut les considérer avec plus de sérieux, de sorte que les citoyens les signeront avec plus de vigilance et de sérieux. Je n'ai pas tout à fait suivi la logique de mon collègue, mais tant pis.

J'ai moi aussi trouvé quelque peu décevant le débat d'aujourd'hui. J'ai déjà oeuvré au niveau municipal avec des représentants de tous les partis politiques. J'ai eu la chance de siéger aux côtés d'un conservateur qui était également de mes amis. Je constate que les conservateurs sont maintenant peu nombreux à la Chambre. En fait, il y en avait plus parmi les 11 membres de mon conseil municipal qu'à la Chambre.

De temps à autre, lorsque je retourne dans ma circonscription, je vais consulter les conseillers car j'estime qu'ils ont une approche plus équilibrée, une approche du centre-droite. Cela me plaît.

Lorsque j'étais conseiller municipal, j'ai reçu des pétitions dont les signataires s'opposaient à l'aménagement de studios


1645

pour personnes âgées, la presque totalité des habitants du quartier affirmant que ce genre de logements entraînerait la détérioration de leur quartier. La chose s'est produite dans ma propre localité.

(1815)

J'ai pris cette pétition au sérieux car les signataires faisaient valoir que, si nous autorisions ces studios pour personnes âgées, cela pourrait être le prélude à la construction de tours d'habitation dans des quartiers de maisons unifamiliales.

J'ai pris la pétition et je suis allé frapper aux portes pour expliquer aux résidents que les craintes des pétitionnaires n'étaient pas justifiées et que leur quartier demeurerait inchangé. Or, la presque totalité des résidents du quartier avaient signé la pétition. Je prends toujours au sérieux les pétitions que je reçois.

Il y a aussi eu des pétitions sur les logements à densité moyenne, les foyers de groupe et les foyers de soins infirmiers. La population s'y est opposée. On aurait cru qu'un bande de motards des Hell's Angels voulait s'y construire un club, alors qu'il s'agissait en fait d'un foyer où bon nombre d'entre nous auront un jour la chance de nous retrouver à condition de vivre assez vieux. Nous avons reçu des pétitions sur les garderies, le développement, les colporteurs, le ralentissement de la croissance et la refonte de la Loi sur les jeunes contrevenants. Les pétitions peuvent porter sur n'importe quoi, et le conseil municipal les reçoit toutes.

En politique municipale, n'importe quelle délégation peut se présenter devant le conseil pour y défendre un point de vue. C'est pourquoi je prends toujours les pétitions très au sérieux, et je crois que la plupart des députés font de même.

Je crois que tous les députés consultent régulièrement leurs électeurs, et il est faux de prétendre qu'ils ne le font pas. Tous ceux qui siègent à la Chambre ont essentiellement pour préoccupation première de servir leurs électeurs.

Permettez-moi de parler d'une pétition qui porte sur une question qui a été soulevée durant la campagne électorale. Il s'agissait du cumul de pension et de traitement et de mon opinion à ce sujet. Je n'ai pas caché que je pensais qu'il fallait revoir le régime de pension et que 60 ans me semblait être un âge raisonnable.

J'ai violemment dénoncé le cumul. Si, en tant que député, je faisais circuler une pétition demandant aux électeurs de se prononcer contre le cumul, ils seraient très nombreux à la signer. Je pourrais modifier la pétition légèrement en fonction des trois niveaux de gouvernement, en fait des quatre puisqu'en Ontario, nous avons le niveau municipal, régional, provincial et fédéral.

Le chef du Parti réformiste a toujours dit, et je suis totalement d'accord avec lui là-dessus, qu'il n'y avait qu'un seul et même contribuable. En gardant cela à l'esprit, si je devais préparer une pétition demandant aux gens s'ils sont d'accord pour rendre illégal le cumul de pension et de traitement au Canada, je pense que j'obtiendrais un oui retentissant.

Si je précise un peu les termes de cette pétition et que je demande aux Canadiens s'ils croient qu'on devrait interdire à toute personne touchant une pension pour avoir siégé à un conseil municipal ou à une assemblée législative provinciale d'être ensuite élue à la Chambre, ce qui revient encore à un cumul de pension et de traitement, je peux dire, après m'être entretenu avec les gens, que là encore, ils répondraient par l'affirmative. Je suppose que, d'une certaine façon, je souhaite vraiment qu'on essaie de rendre notre Chambre un peu moins sectaire et de discuter vraiment du pour et du contre des projets de loi présentés.

On a parlé de l'intervention du député de Wild Rose vendredi. Il s'est penché sur toute la question du crime, de la justice et du manque de respect envers la loi au Canada. Je trouve ce type de discours ennuyeux, car la criminalité est un sujet facile. Chose intéressante, c'est l'un des exemples choisis dans le cas présent. On parle de la Loi sur les jeunes contrevenants. Il n'y a pas si longtemps, le ministre de la Justice est intervenu dans cette enceinte et s'est arrêté sur le rapport d'Anthony Dupe. M. Anthony Dube est criminologue à l'Université de Toronto. Il sait probablement mieux que quiconque au pays comment le système judiciaire est perçu par le public et quelle est, de l'avis public, l'ampleur de la criminalité au Canada. C'est un expert dans ce domaine.

(1820)

Il a constaté que les Canadiens en général croient qu'ils vivent dans une société beaucoup plus violente qu'elle ne l'est en réalité. Voilà une observation intéressante. Quelles sont les raisons et les répercussions de cet état de fait? Je peux vous expliquer les raisons. M. Dube les a décrites brièvement. Cela vient du fait que les médias populaires de notre pays tiennent à nous faire avaler notre dose quotidienne de crimes horribles, en les puisant d'abord dans l'actualité canadienne et, s'il ne se passe rien au Canada, en allant chercher ce qu'il faut aux États-Unis. Au besoin, ils iront jusqu'en Europe, en Afrique et en Asie pour trouver de quoi nous mettre sous la dent.

Nous avons dans notre pays des équipes de journalistes prêtes à bondir immédiatement sur la scène du crime, quel qu'il soit, et à nous en mettre plein la vue à la télévision, pour ensuite nous permettre de le lire dans la presse écrite le jour suivant, dans le seul but de mousser leur popularité. Dès lors, ce n'est pas difficile de comprendre pourquoi les gens perçoivent notre société comme étant plus violente qu'elle ne l'est réellement.

Il y a beaucoup moins de violence chez nous qu'aux États-Unis, mais nous n'avons pas la chance des Européens, du moins statistiquement parlant. Dans certains coins, en Europe, les crimes ne sont pas rapportés aussi systématiquement, parce qu'on estime que ce genre de nouvelles témoigne mal de la société. Cela laisse supposer qu'on encourage ainsi la criminalité.

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M. Dube a également parlé de la façon dont les sentences prononcées par les juges sont perçues par le public. Il a fait une expérience avec deux groupes de Canadiens. Au premier, il a remis la transcription intégrale d'un procès, des centaines de pages décrivant en détail ce qui s'était dit en cour. Au deuxième, il a fourni le compte rendu que les médias avaient fait du même procès.

Il a constaté que les gens qui avaient puisé leur information dans la transcription du procès étaient plus nombreux à penser que les juges avaient été justes, voire trop sévères, dans leur sentence et qu'il y aurait peut-être eu lieu d'imposer une peine autre que l'emprisonnement. Par contre, l'étude a révélé que les personnes dont l'information provenait de la presse estimaient que l'appareil judiciaire ne fonctionnait pas parce qu'il leur semblait que les juges n'étaient pas assez sévères. C'est révélateur. Je crois qu'il y a une leçon importante à tirer de tout cela. En effet, quand on prend le temps d'examiner une question sous tous ses angles, on se rend compte que les solutions ne sont peut-être pas aussi simplistes qu'elles en ont l'air de prime abord. Je tenais à le souligner.

En ce qui concerne la Loi sur les jeunes contrevenants, le Parti libéral s'est engagé à s'en occuper, et nous voulons que tous les députés s'en occupent en comité et qu'ils s'en occupent sérieusement. Je voudrais que cette question soit abordée de telle façon que les meilleurs modifications possibles soient apportées à la loi, sans perdre de vue le fait qu'elle ne sera jamais parfaite parce que nous vivons dans un monde en constante évolution où les rapports sont changeants.

Quant aux «cartes de tueurs en série», il ne fait aucun doute que tous les députés ne demandent pas mieux que de les voir disparaître. Cela ne fait aucun doute.

Pour ce qui est de la révocation de députés, je fais des réserves là-dessus. Pour commencer, cette proposition part du principe que la décision que les électeurs ont prise le 25 octobre 1993 n'était pas une décision éclairée.

(1825)

Je crois plutôt que c'était une décision éclairée. Les électeurs assument une responsabilité quand ils décident qu'un gouvernement sera au pouvoir pendant environ quatre ans.

L'insulte suprême consiste à dire que, lorsqu'ils rendent leur décision, les électeurs se trompent et qu'il faudrait les protéger contre leur propre décision.

Nous avons discuté des pétitions et de la façon de les présenter. À titre de nouveau député à la Chambre, j'ai adopté la marche à suivre que la députée de Beaver River a expliquée devant tous les députés. Elle nous a indiqué comment présenter une pétition. C'est elle qui a fait des propositions à cet égard. Je ne pense pas qu'elle nous ait dit de ne pas prendre au sérieux ces présentations. Je crois d'ailleurs que chacun de nous les prend au sérieux.

Il y a un principe fondamental qui sous-tend toutes ces motions, comme le prouvent certainement les allusions faites au Programme énergétique national et aux époques où sont apparus le déficit et la dette. De toute évidence, il y a des gens qui cherchent à faire de la petite politique ici. J'aurais aimé qu'il en soit autrement, mais ce n'est pas le cas.

Au cours des quatre prochaines années, je m'abstiendrai de qualifier le Parti réformiste de l'Ouest de parti de la désaffectation qui exploite le mécontentement des gens, un peu comme le faisait le Crédit social. Je m'abstiendrai de dire, nonobstant les explications fournies par la députée de Beaver River, que ce sont les membres du Crédit social, dont faisait partie le père du chef actuel du Parti réformiste, qui ont mis un terme à la révocation des députés.

Je suis convaincu que les allégations soulevées à la Chambre et selon lesquelles ce Parlement ne fonctionne pas, ne sont que des faux-fuyants. Je dis cela parce que la population a perdu confiance dans nos institutions démocratiques, et c'est un fait que je reconnais, mais cette perte de confiance est attribuable à des forces au sein de notre pays. À mon avis, ce que nous allons faire collectivement à la Chambre au cours des quatre prochaines années va vraiment déterminer l'avenir du Canada.

Nous allons nous engager dans des débats très difficiles. Je suis certain que nous ne pourrons pas éviter la question du Québec. Nous allons devoir y faire face à un certain moment, et je crois que tous les députés le savent. Toutefois, il est important que nous examinions les aspects de notre pays qui fonctionnent bien. Nos institutions démocratiques en sont un. Elles fonctionnent bien depuis 127 ans. Nous avons l'un des meilleurs gouvernements dans le monde entier, et c'est un fait que chacun de nous devrait reconnaître. Nous ne devrions certes pas dire que le pays ne fonctionne pas ou qu'il est en panne parce que ce n'est pas le cas.

Nous pouvons certainement travailler ensemble pour l'améliorer, mais l'une des choses que nous devons à notre pays, c'est de croire que nous pouvons le faire. Ce n'est pas de détruire l'institution elle-même.

En ce qui concerne la responsabilisation, gouverner n'est pas facile. Tout parti au pouvoir éprouvera des difficultés. Cependant, nous nous sommes présentés devant l'électorat le 25 octobre et nous lui avons proposé un plan. Nous avons remporté la majorité des sièges.

En tant que député, je trouve malheureux ce qui est arrivé au gouvernement précédent en ce qui concerne le nombre de sièges qu'il a gagnés. D'une certaine façon, je trouve que c'est injuste. J'espère que, au cours de la présente législature, on remédiera à cette situation. Quand je vois ces députés maintenant classés comme indépendants, je considère qu'ils ne sont pas des députés à part entière. Si chacune des circonscriptions a le droit d'être représentée, chacun des députés a droit au respect fondamentale de ses droits.

On a mentionné l'accord de Charlottetown, mais personne n'a signalé que, en tant que chef de l'opposition, notre premier ministre avait demandé qu'on tienne un référendum sur cet accord. Nous, libéraux, croyons que les référendums ont leur raison d'être. Je puis dire que, dans ma circonscription, les votes étaient presque également divisés: 55 p. 100 pour l'accord de Charlottetown et 45 p. 100 contre. Je sais que mon collègue, le député de Kitchener, a voté contre.

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M. Pickard: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Mon collègue pourrait terminer son allocution et les autres députés, lui poser des questions.

Pour cela, je sollicite le consentement unanime de la Chambre pour poursuivre jusqu'à 18 h 40.

Le vice-président: Très bien. Il n'y a pas de débat sur la motion d'ajournement ce soir. Les députés voudront bien tenir compte de cela avant de décider s'ils veulent accorder leur consentement unanime au député d'Essex-Kent.

Y a-t-il consentement unanime pour poursuivre jusqu'à 18h40?

Des voix: Non.

Le vice-président: C'est non, et je dois respecter cela. Le député aurait-il l'obligeance de terminer son allocution?

M. Telegdi: Monsieur le Président, je conclurai en disant que notre premier ministre s'est prononcé en faveur d'un référendum et que notre parti l'a appuyé. Il y a eu un référendum parce qu'il a exercé des pressions en ce sens sur le gouvernement. À mon avis, c'est important de le souligner.

Enfin, à titre de député de Waterloo, j'estime avoir des comptes à rendre à mes électeurs et je ne vois rien de mal dans le traitement que nous réservons aux pétitions et la façon dont nous pouvons en saisir les comités. Tout député à la Chambre peut se prévaloir de cette possibilité.

Permettez-moi de dire que, à mon avis, nous sommes tous des réformistes avec un «r» minuscule. Les nouveaux venus à la Chambre le sont certainement. Le fait que quelqu'un soit un Réformiste avec un «r» majuscule ne lui confère pas un monopole à ce chapitre. J'espère que, au cours des quatre prochaines années, les députés des deux côtés de la Chambre s'efforceront autant que possible de rester impartiaux et non moralisateurs.

[Français]

Le vice-président: Comme il est 18 h 30, il est de mon devoir de faire savoir à la Chambre que conformément à l'article 81(19) les délibérations relatives à la motion sont terminées.

[Traduction]

Comme aucun député n'est présent pour les délibérations sur la motion d'ajournement, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément à l'article 24 du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 30.)