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Publications de la Chambre

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 22 février 1994

AFFAIRES COURANTES

LA LOI SUR L'IMMIGRATION

    Projet de loi C-219. Adoption des motions portantprésentation et première lecture 1649

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Motions 1649Adoption des motions 1649

PÉTITIONS

LE LOGEMENT SOCIAL

    M. Tremblay (Rosemont) 1649

L'IMMIGRATION

LA VIOLENCE

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR L'ACCISE

    Projet de loi C-11. Motion visant à la deuxième lecture 1650
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 1655
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 1660
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 1666
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 1667
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 1667

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

LA VILLE DE JONQUIÈRE

L'ATHLÈTE STEPHEN GOUGH

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 1681

LE TOURNOI DE COEURS DE SCOTT

LA MANUTENTION DES GRAINS

LE TOURISME

LA LUTTE À LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

LA PETITE ENTREPRISE

L'AVRO ARROW

LES PROGRAMMES D'APPRENTISSAGE

LE COMTÉ DE BONAVENTURE

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

LE BILINGUISME

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

LE PROGRAMME «L'ÉCOLE AVANT TOUT» AU YUKON

QUESTIONS ORALES

LA BOSNIE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1684
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1684
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1684

LES AFFAIRES INDIENNES

L'ÉLECTION PARTIELLE DANS UNE PROVINCE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1685
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1685
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1685

LES AFFAIRES INDIENNES

L'IMMIGRATION

L'EMPLOI

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1686
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1687

LA SANTÉ

L'IMMIGRATION

LES ÉCHANGES INTERPARLEMENTAIRES

LES FORÊTS

LA JUSTICE

LE CENTRE NATIONAL DES ARTS

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1689
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1689

LE PARTI RÉFORMISTE

LES LOBBYISTES

LA COMMISSION DE CONTRÔLE DE L'ÉNERGIE ATOMIQUE

LE LOGEMENT SOCIAL

LES PORTS DE LA CÔTE EST

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 1691

L'ÉDITION

QUESTION DE PRIVILÈGE

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR L'ACCISE

    Projet de loi C-11. Reprise de l'étude de la motionportant deuxième lecture 1692
    M. Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing) 1696
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 1701

SUSPENSION DE LA SÉANCE

    (La séance est suspendue à 16 h 57.) 1708

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 17 heures. 1708

LE BUDGET

EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

    M. Martin (LaSalle-Émard) 1708
    (La motion est adoptée.) 1716

1649


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 22 février 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LA LOI SUR L'IMMIGRATION

M. Derek Lee (Scarborough-Rouge River) demande à présenter le projet de loi C-219, Loi modifiant la Loi sur l'immigration (visas de séjour).

-Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je présente aujourd'hui cette mesure modificative concernant les dispositions de la Loi sur l'immigration régissant les visas de séjour, qui avait déjà été présentée lors de la législature précédente.

Ce projet de loi permettrait aux citoyens canadiens de verser un cautionnement au gouvernement canadien avant qu'un parent non canadien ne fasse une demande de visa.

À l'heure actuelle, il n'y a pas de place pour les simples citoyens dans le processus. Je suis convaincu, comme d'autres d'ailleurs, que leur participation au processus, par le biais d'un cautionnement, accroîtra les chances des membres de leur famille d'obtenir un visa de séjour et de leur rendre visite.

Le projet de loi précise que l'absence de cautionnement ne devra en aucun cas être considérée par les agents des visas comme portant préjudice aux visiteurs qui font une demande de visa, mais qui n'ont pas de famille au Canada.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, j'ai trois motions à soumettre à la Chambre pour lesquelles je demande le consentement unanime de cette dernière. Je propose, tout d'abord:

Que, si un vote par appel nominal est requis au cours du débat sur le Budget le jeudi 24 février 1994, ce vote soit différé jusqu'au mardi 8 mars 1994, à 18 h 30.
(La motion est adoptée.)

M. Milliken: Monsieur le Président, pour gagner du temps, je vais lire les deux motions suivantes avant qu'elles ne soient mises aux voix, car je pense qu'il y a accord sur les deux.

Que, pendant l'ajournement de la Chambre entre le vendredi 25 mars 1994 et le lundi 11 avril 1994, si un projet de loi de crédit adopté par la Chambre n'a pas encore reçu la sanction royale, le Président soit autorisé à rappeler la Chambre dans le seul but d'assister à la sanction royale de tout projet de loi, après quoi la Chambre s'ajournera immédiatement jusqu'au lundi 11 avril 1994; et
Que, si le Président ne peut, pour une raison quelconque, donner suite au présent ordre, le Vice-président, la vice-présidente des Comités pléniers ou le vice-président adjoint des Comités pléniers soit autorisé à agir en son nom.
(La motion est adoptée.)

M. Milliken: Je propose:

Que, nonobstant l'ordre spécial du 15 février 1994, le vote par appel nominal sur l'Affaire émanant du gouvernement no 8 soit tenu le mercredi 23 février 1994, à 15 h 00.
Monsieur le Président, le vote par appel nominal qui devait avoir lieu aujourd'hui à 15 heures est donc reporté à mercredi, à la même heure.

(La motion est adoptée.)

* * *

(1010)

[Français]

PÉTITIONS

LE LOGEMENT SOCIAL

M. Benoît Tremblay (Rosemont): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer ce matin une pétition signée par près de 300 citoyens et citoyennes de mon comté de Rosemont, qui demandent le rétablissement des budgets pour le logement social et coopératif et qui dénoncent le projet du gouvernement fédéral d'augmenter de 20 p. 100 le coût des loyers subventionnés.

Dans le seul comté de Rosemont, plus de 1 000 familles sont en attente d'un logement social alors que tous les budgets ont été gelés.

Vous devez savoir, monsieur le Président, qu'en tenant compte de l'ensemble des coûts liés à l'habitation, la Régie du logement du Québec ne permet cette année au secteur privé qu'une augmentation de 0,5 à 1,1 p. 100 des loyers. Il serait aberrant que le

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secteur public, qui a la responsabilité de protéger les plus démunis, procède à une augmentation de 20 p. 100.

À quelques heures du dépôt du Budget, la population de mon comté de Rosemont demande au ministre des Finances de respecter ses engagements, pris lors de la dernière campagne électorale. Il est urgent qu'il mette fin à l'incertitude qui pèse sur les plus démunis et qu'il rétablisse un financement décent pour la réalisation de nouveaux logements sociaux.

L'IMMIGRATION

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, j'ai le très grand honneur de présenter une pétition, signée par quelques milliers d'habitants de mon comté de Québec-Est et de plusieurs régions de la province de Québec.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de bien vouloir inciter le ministre de l'Immigration à reconsidérer la décision du ministère de l'Immigration d'expulser la famille Maraloï, de Vanier, et de lui permettre de rester au Canada où elle s'est parfaitement intégrée depuis trois ans.

J'appuie sans réserve cette pétition, et j'exhorte le gouvernement à y donner suite.

[Traduction]

LA VIOLENCE

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, je désire présenter une pétition dont les signataires dénoncent la quantité excessive de violence présente à la radio et à la télévision, notamment sous forme de langage ordurier et autres actes physiques, et ils déplorent l'aggravation du phénomène.

Les pétitionnaires demandent au Parlement du Canada de faire en sorte que le CRTC reconnaisse la nécessité d'appliquer des normes régissant toutes les formes d'abus, y compris l'utilisation de langage ordurier et de violence excessive sous toutes ses formes. Les pétitionnaires font valoir qu'à défaut de telles mesures, leurs efforts pour élever leurs enfants dans un environnement sain seront compromis.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le Président: Les autres questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.


1650

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LA LOI SUR L'ACCISE

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national) propose: Que le projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur l'accise, la Loi sur les douanes et la Loi sur la vente du tabac aux jeunes, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, il me fait plaisir de parler aujourd'hui en faveur du projet de loi C-11. En tant que ministre du Revenu national, j'ai la responsabilité de faire tout en mon possible pour maintenir et protéger l'intégrité de la frontière canadienne et assurer le respect des lois fiscales canadiennes. Pour ces raisons, j'ai été profondément touché par l'augmentation dramatique de la contrebande.

Il y a certaines personnes qui affirment encore qu'il s'agit d'un problème régional et que le programme en quatre points du gouvernement fédéral pour lutter contre la contrebande et le tabagisme ne repose que sur les intérêts d'une région du pays. Cela est entièrement faux.

La croissance de la contrebande au Canada, surtout de la contrebande du tabac, est un problème national, qui exige une solution à l'échelle nationale. Regardons les faits.

Le tabac vendu en contrebande représente environ 5 milliards des 12,4 milliards de dollars du marché canadien des produits du tabac, soit à peu près 40 p. 100.

(1015)

Cela veut dire qu'environ 1,6 milliard de cigarettes de contrebande sont vendues dans nos communautés, dans nos rues et dans nos écoles chaque mois. Il en résulte malheureusement que si nos jeunes veulent commencer à fumer, ils ont actuellement un accès presque illimité à du tabac de contrebande à bon marché. Il est clair que cette situation vient saboter les efforts des gouvernements fédéral et provinciaux pour décourager, par les prix, l'usage du tabac.

[Traduction]

Cela signifie que la contrebande mine les efforts du gouvernement fédéral et des provinces en vue de décourager le tabagisme. Malheureusement, le problème auquel nous faisons face aujourd'hui ne s'arrête pas là. La contrebande a coûté environ un milliard de dollars au Trésor fédéral au cours du dernier exercice, et un autre milliard aux provinces pendant la même période.

Il s'agit de pertes de recettes nettes qui ne peuvent être récupérées et qui se sont considérablement accrues ces derniers mois. Aussi, j'estime que la contrebande nuit à la situation financière et aux programmes sociaux tant au niveau fédéral que provincial. Le problème va en s'aggravant, et la situation est intolérable.

Les pertes de recettes ne sont pas le seul problème. Parce que la contrebande est de plus en plus l'affaire de la criminalité organisée et parce que, d'après les forces policières, la criminalité organisée contrôle maintenant la quasi-totalité de la contre-


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bande de tabac évaluée à 5 milliards de dollars, les Canadiens se voient privés de milliards de dollars au profit de criminels qui utilisent cet argent pour le commerce illégal d'alcool, d'armes paramilitaires et de drogue, l'immigration illégale et autres activités de contrebande.

[Français]

En résumé, les seuls à bénéficier de la situation actuelle sont les groupes criminels qui vendent la drogue dans nos écoles, arment nos malfaiteurs et déstabilisent la société canadienne. Les perdants sont la majorité des Canadiens qui respectent les lois, qui paient leurs impôts et leurs taxes et désirent vivre en toute sécurité. La situation ne cesse d'empirer.

Parce que la contrebande a aussi un effet néfaste sur les petits commerçants honnêtes qui respectent la loi, le problème de la contrebande conduit ces personnes à la faillite. En somme, la contrebande pénalise les Canadiens qui veulent gagner leur vie honnêtement.

La contrebande sape l'emprise des lois dans ce pays et nuit aux efforts du gouvernement visant à réduire la consommation des produits du tabac, principalement par les jeunes Canadiens. En outre, elle prive les ministères des Finances fédéral et provinciaux de recettes importantes.

Comme l'a dit le premier ministre il y a deux semaines dans cette Chambre, et je cite: «Nous avons affaire à un problème d'exécution de la loi et du crime organisé, à des questions de santé, à des relations entre les gouvernements. . .».

[Traduction]

En dépit de l'ampleur du problème et des répercussions qu'il a sur nos communautés, sur notre système social et sur l'application de la loi, il y en a encore qui soutiennent qu'il s'agit d'un problème régional. Ces derniers pointent du doigt le Québec, affirmant que le problème affecte cette province mais pas eux. Or, les faits démentent cette position simpliste.

Les députés me permettront de leur citer des statistiques. Il est vrai que la contrebande est plus répandue au Québec, ou du moins elle l'a été jusqu'à tout récemment. Il est également vrai que le phénomène s'est répandu dans cette province. Mais la contrebande a également connu une croissance alarmante dans toutes les autres provinces canadiennes.

Je demande aux députés de considérer les faits. La part du marché du tabac détenue par la contrebande était estimée à seulement 9 p. 100 au Québec il y a quatre ans. Aujourd'hui, on estime que les produits de contrebande représentent entre 60 et 65 p. 100 de la vente de tabac dans la province.

(1020)

Le tabac de contrebande représentait 12 p. 100 environ du marché dans la région de l'Atlantique en 1990, il y a quatre ans donc. À l'heure actuelle, la proportion est d'environ 40 p. 100. En 1992, il y a deux ans à peine, le tabac de contrebande constituait 13 p. 100 du marché en Ontario, et cette proportion est aujourd'hui de près de 35 p. 100.

Dans l'Ouest, où le problème de contrebande est manifestement moins grave pour le moment, la proportion n'était que de 9 p. 100 il y a un peu plus d'un an. Elle est maintenant passée à 15 p. 100 du marché, soit une croissance de 60 p. 100 en un an.

Il n'est pas bon de considérer que ce problème ne touche qu'une seule province. On assiste à une tendance tout à fait évidente à laquelle les députés et les Canadiens doivent porter attention. Que ce soit dans les Maritimes, en Ontario, au Québec ou dans l'Ouest, la contrebande s'accroît à un rythme très rapide dans tout le pays et elle devient un problème national.

Penchons-nous maintenant sur les leçons à tirer.

[Français]

Premièrement, l'inaction n'est pas une solution. Il n'est plus possible d'ignorer le problème. Il est évident que si nous ne prenons pas dès maintenant des mesures énergiques, le volume de tabac de contrebande au sein de nos communautés continuera d'augmenter et les bénéfices illicites continueront de garnir les coffres du crime organisé.

L'ancien gouvernement, le gouvernement conservateur, a permis au problème de la contrebande de prendre une ampleur que le gouvernement actuel, le gouvernement d'aujourd'hui, ne saurait tolérer. Notre gouvernement refuse de détourner le regard et de prétendre que le problème peut être réglé au moyen de demi-mesures. Nous refusons également d'avancer que le problème de la contrebande n'affecte qu'une seule région du pays.

La contrebande est un problème national, alors, la solution doit également être d'envergure nationale. Nous devons prendre des mesures énergiques dès maintenant. Nous ne pouvons pas permettre que du tabac de contrebande, bon marché, continue de s'infiltrer dans nos collectivités et se retrouve entre les mains des jeunes Canadiens. Nous ne pouvons pas admettre que la primauté du droit dans ce pays continue à être ébranlée. Je le répète, l'inertie et les demi-mesures ne sont pas des solutions réalistes. C'est pourquoi, aujourd'hui, j'appuie le projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur l'accise, la Loi sur les douanes et la Loi sur la vente du tabac aux jeunes.

Les modifications qui sont proposées supportent l'initiative en quatre points du gouvernement en vue de lutter contre la contrebande et l'usage du tabac. Avec ces modifications, nous donnerons à des autorités policières canadiennes des pouvoirs juridiques supplémentaires pour lutter contre la contrebande. Nous allons alors améliorer aussi les efforts déployés par le gouvernement pour veiller à la santé des jeunes.

Prises dans leur ensemble, les modifications déposées devant la Chambre aideront à établir l'intégrité des lois canadiennes et de la frontière canadienne et, ce qui est peut-être le plus important, à freiner l'augmentation de la contrebande dans les régions du pays où elle n'a pas encore atteint des niveaux inquiétants.

[Traduction]

La première modification contenue dans ce projet de loi s'applique donc à la Loi sur l'accise. Elle vise, en fait, à accroître les ressources auxquelles on peut avoir recours pour lutter contre la


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contrebande. Le gouvernement pourra ainsi donner aux corps de police autres que la GRC le pouvoir d'appliquer les articles de la Loi sur l'accise qui permettent la saisie de tabac, d'alcool et de véhicules utilisés dans le cadre d'activités illégales de contrebande.

(1025)

Le gouvernement sera en mesure de fournir aux services de police provinciaux, notamment la Sûreté du Québec et la Police provinciale de l'Ontario, ainsi qu'aux corps policiers municipaux, au besoin, les outils juridiques supplémentaires dont ils ont besoin pour combattre la contrebande et les membres du crime organisé qui la contrôlent. On assistera donc à une augmentation marquée des ressources policières collaborant avec le gouvernement fédéral pour mettre un terme à ce trafic.

Deuxièmement, les modifications proposées à la Loi sur les douanes et à la Loi sur l'accise donneront aux corps de police le pouvoir de détruire certains produits saisis sans nuire à la capacité des autorités de poursuivre avec succès les personnes impliquées. Cette réduction des quantités de produits de contrebande entreposés épargnera aux contribuables canadiens plus de 200 000 $ par année en frais d'entreposage des biens saisis.

Troisièmement, il y a une proposition visant à modifier la Loi sur l'accise afin de bien estampiller les cigarettes sur lesquelles les taxes ont été payées. Je pourrais ajouter que, même si certaines questions d'ordre administratif se posent encore, il sera également possible d'estampiller les cigarettes qui sont en vente dans les boutiques hors taxes ou qui sont exportées. Nous aurons la capacité d'estampiller les cigarettes afin de bien préciser les taxes qu'on a prélevées sur ces dernières. Les organismes d'application de la loi pourront ainsi plus facilement identifier les gens qui fument des produits de contrebande.

Quatrièmement, on propose deux modifications à la Loi sur la vente du tabac aux jeunes. Aux termes de la première, il sera illégal pour les fabricants de produits de tabac de conditionner les cigarettes en paquets de moins de 20 cigarettes. Cela fera disparaître, en fait, les petits paquets de six cigarettes ou un peu plus destinés principalement aux jeunes.

La seconde modification à la loi interdira l'importation au Canada de produits du tabac par une personne âgée de moins de 18 ans. Cela vient s'ajouter à d'autres mesures qui seront prises à l'interne pour empêcher dans la mesure du possible des jeunes qui n'ont pas atteint cet âge de se procurer du tabac.

À la suite de l'entrée en vigueur de ces deux mesures et d'autres dispositions, il devrait être beaucoup plus difficile pour les jeunes Canadiens d'obtenir ces produits.

[Français]

Le projet en quatre points de la lutte à la contrebande et au tabagisme est un plan d'action complet qui aborde le problème de la contrebande dans son ensemble, et le projet de loi C-11 fait partie intégrante de ce plan. Il concerne la nécessité de renforcer nos moyens d'exécution pour la lutte à la contrebande. Il concerne la nécessité d'enrayer le crime organisé qui contrôle les activités de contrebande. Il concerne également la nécessité de protéger la santé des jeunes Canadiens. Bref, le projet de loi C-11 est une partie intégrante de la solution du gouvernement à un problème national.

Pour ces raisons, je demande que la Chambre appuie l'adoption du projet de loi C-11.

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, il me fait plaisir, à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de formation et jeunesse, de présenter ici aujourd'hui la position du Bloc québécois quant au projet de loi C-11 qui modifie la Loi sur l'accise, la Loi sur les douanes et enfin la Loi sur la vente du tabac aux jeunes.

En ma qualité de critique en matière de jeunesse, l'essentiel de ma présentation va porter sur les dispositions du projet de loi visant à faire diminuer la vente du tabac chez les jeunes, car le problème du tabagisme chez les jeunes est très important, sans doute l'un des pires fléaux auxquels notre jeunesse est présentement confrontée.

En effet, selon une étude réalisée en 1992 par Santé et Bien-être social Canada, 38 000 Canadiens et Canadiennes meurent chaque année des maladies liées au tabagisme. De 80 à 90 p. 100 de tous les cas d'emphysème et de bronchite sont causés par la cigarette. Je dis cela parce que souvent, on ramène cela au cancer du poumon, alors que beaucoup d'autres maladies y sont rattachées. Trente pour cent des jeunes Canadiens et des jeunes Québécois fument actuellement, c'est-à-dire à peu près la même proportion que les adultes. C'est un problème qui se maintient.

(1030)

En 1989, on estimait que les jeunes Canadiens et Canadiennes, de 12 à 19 ans, avaient dépensé plus de 436 millions de dollars en cigarettes, et tout nous indique que c'est encore supérieur aujourd'hui. On dit que 90 p. 100 d'entre eux fument régulièrement, et par régulièrement, j'entends tous les jours. Cinquante-huit pour cent des jeunes fumeurs consomment d'ailleurs de 11 à 25 cigarettes par jour; 75 p. 100 des adolescents qui fument développent une dépendance au tabac avant l'âge de 17 ans et l'âge moyen auquel on commence à fumer-c'est étonnant, ça baisse de plus en plus-est actuellement de 13 ans. Donc, on commence à fumer à 13 ans.

De plus, d'autres études démontrent qu'après avoir diminué graduellement jusqu'en 1989, le tabagisme s'est mis à remonter chez les jeunes depuis ce temps et l'âge auquel les jeunes consomment leur première cigarette a continué de baisser. En effet, selon le Centre national de documentation sur le tabac et la santé, de 1965 à 1989, le taux de tabagisme chez les jeunes de 15 à 19 ans est passé de 55 à 21 p. 100 chez les hommes et de 37 à 21 p. 100 chez les femmes. Voilà pour les bonnes nouvelles! Mais depuis 1989, 23,8 p. 100 de tous les étudiants questionnés ont déclaré fumer quotidiennement, la proportion étant à peu près la même pour les filles que pour les garçons. Le tabagisme a considérablement augmenté en 1991 et 1993 parmi les étudiants,


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notamment les étudiants du secondaire I, soit de 6,1 p. 100 qu'il était en 1989, à 9,4 p. 100 en 1993.

De plus, il apparaît évident, selon plusieurs études menées par le Centre national de documentation sur le tabac et la santé que pauvreté, chômage, tabagisme, alcoolisme et toxicomanie sont liés.

Le niveau d'instruction est aussi une donnée intéressante pour observer la clientèle de prédilection de tels phénomènes. Alors, toujours selon le Centre national de documentation sur le tabac et la santé, 34 p. 100 des individus de 15 ans et plus fument contre seulement 18 p. 100 chez les universitaires. Trente-six pour cent des gens les plus pauvres de notre société fument contre 25 p. 100 chez les plus riches.

L'impact social des mesures économiques mises en place par les précédents gouvernements au Canada depuis 1984 ont généré une plus grande pauvreté chez les Canadiennes et les Canadiens. Les jeunes ont davantage été frappés par ces mesures. Ainsi, en 1990, 40 p. 100 des jeunes Québécois vivaient dans la pauvreté. Le chômage chez les jeunes s'élève présentement au Québec à près de 20 p. 100.

Malgré les données statistiques que je viens d'énumérer, je ne pense pas que toute la lumière ait été faite quant aux causes réelles du tabagisme chez les jeunes. Donc, il faudrait, à mon avis, réaliser d'autres recherches pour analyser plus en profondeur ce phénomène, d'ailleurs très changeant. C'est un phénomène très inquiétant en rapport évidemment avec la santé future de nos jeunes et des coûts que cela va engendrer pour notre système de santé.

Or, j'espère ne surprendre personne dans cette Chambre aujourd'hui en déclarant que l'opposition officielle est favorable à l'adoption de mesures visant à restreindre la consommation du tabac en général, et chez les jeunes en particulier. Cela devrait aller de soi d'ailleurs pour tous les partis politiques préoccupés par la santé publique. Mais il y a lieu de se poser certaines questions sur le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui quant à ses chances de réussite, s'il n'est pas appliqué correctement, ou s'il n'est pas accompagné de mesures efficaces pour atteindre l'objectif visé.

Une question se pose d'abord quant au moment choisi par le gouvernement pour présenter le projet de loi C-11. Il faut rappeler ici qu'il a été déposé à la Chambre des communes deux jours après l'annonce par le premier ministre, le 8 février dernier, de différentes mesures, dont la réduction de taxes, pour lutter contre la contrebande de cigarettes.

(1035)

On dirait que le gouvernement s'est efforcé, tout d'un coup et d'une manière un peu improvisée, à notre avis, à donner l'impression qu'il peut régler tous les problèmes reliés à la consommation du tabac.

Pourquoi avoir attendu le 8 février dernier pour faire entrer en vigueur la Loi sur la vente du tabac aux jeunes, adoptée en troisième lecture par la Chambre des communes, le 12 février 1993? Il y a déjà un an, monsieur le Président.

Une autre question fondamentale se pose quant à la volonté, ou à la capacité du gouvernement fédéral, de faire respecter ses lois relativement à la consommation du tabac.

En disant cela, on a évidemment à l'esprit les hésitations de l'actuel gouvernement quant à la lutte à la propagande et son impuissance face à la montée de ce phénomène. Mais nous avons aussi à l'esprit d'autres lois.

Ainsi, dans un article paru dans le quotidien Le Soleil du l3 février dernier, on apprenait que le gouvernement fédéral n'avait pas infligé, en quatre ans, la moindre petite amende en vertu de sa Loi sur la santé des non-fumeurs dans ses propres édifices, et ce, malgré un nombre considérable de plaintes et pas moins de 102 avis d'infraction qui ont été déposés dans les trois premières années d'application de cette loi; et aucun de ces avis n'a résulté en paiement d'amendes. La seule démarche entreprise en ce sens, semble-t-il, s'est transformée en simples avertissements.

Nous, de l'opposition officielle, voulons bien participer au processus législatif, mais encore faut-il que le gouvernement fasse respecter les lois adoptées par le Parlement actuellement, mais également celles qui ont été adoptées antérieurement.

Il serait donc intéressant que les représentants du gouvernement nous fassent part des mesures qu'ils entendent prendre afin d'assurer le respect de certaines des dispositions prévues dans le projet de loi C-11, notamment sur le contrôle des estampilles à apposer sur les produits du tabac, individuellement, et sur la production et la vente de cigarettes en paquets de moins de 20 cigarettes. Tout cela est bien beau et on peut bien affirmer qu'on veut agir en ce sens, mais comment s'y prend-on pour ce faire? C'est très important qu'on le sache. Il y a d'abord le contrôle de la vente de cigarettes à l'unité; c'est petit une cigarette, c'est facile à dissimuler. Il y a aussi le contrôle de l'âge des acheteurs. Est-ce qu'on va exiger une carte d'identité? Quels moyens le gouvernement entend-il prendre pour contrôler cet aspect de l'âge des acheteurs? On sait maintenant que depuis l'application de l'ancienne loi C-111, il faut avoir 18 ans. Mais encore faut-il que l'on soit en mesure de contrôler l'âge des acheteurs sur la carte d'identité. Évidemment, on se pose une question, le ministre en a parlé quelque peu, sur le nombre d'agents chargés d'appliquer la loi et les coûts qui en résulteront.

La réponse à ces questions est très importante, car elle touche l'élément majeur entourant cette loi, soit celui relié à son application. D'ailleurs, le ministre en faisait mention au début de son exposé.

De plus, nous pensons qu'il faille faire accompagner l'adoption de cette loi de mesures positives visant à informer les jeunes du danger du tagagisme et à les encourager à ne pas fumer. Car il faut se méfier de l'effet boomerang que peut provoquer une approche répressive chez les jeunes, dans tous domaines d'ailleurs. Plusieurs spécialistes en éducation m'ont maintes fois répété que «l'interdit» peut représenter un défi pour les jeunes en mal de développement et d'affirmation de soi.


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Une consultation que j'ai menée récemment auprès de plusieurs jeunes m'a convaincu du fait que dans le cas de mesures plus sévères visant à restreindre l'usage de la cigarette chez les jeunes, ces derniers pourraient y voir une certaine provocation et pourraient être aussi davantage stimulés à transgresser cette restriction.

(1040)

En fait, il nous faut responsabiliser les jeunes et non pas contribuer davantage à les marginaliser par des approches uniquement traditionnelles, uniquement répressives.

Ce projet de loi vise à restreindre l'accès des jeunes aux produits du tabac, ne doit pas nous faire oublier que les jeunes vivent quotidiennement des difficultés causées par la drogue et l'alcool. Selon Statistique Canada, 12 p. 100 de nos jeunes auraient aujourd'hui des problèmes graves de toxicomanie.

L'éventail des substances illicites disponibles dans les écoles secondaires fait peur. Dans un article de La Presse du 19 février dernier, on indique que des jeunes peuvent se procurer des drogues chimiques, tel le PCP, pour seulement cinq dollars l'unité, et cela dans nos écoles secondaires. Les revendeurs proposent à des jeunes, souvent âgés de 12 à 13 ans, des substances aux effets dévastateurs pour leur santé et pour la société.

Tout comme pour le tabac, les jeunes qui commencent à consommer de la drogue au début de leur adolescence ont beaucoup plus de chance d'en consommer encore lorsqu'ils seront à l'âge adulte. Il n'y a pas que la drogue qui soit facilement accessible aux jeunes, ils peuvent aussi se procurer de l'alcool facilement.

Dans un autre article paru dans La Presse du 20 février dernier, on mentionne que les adolescents n'ont aucune difficulté à acheter de la bière chez les dépanneurs. Cet article tire ses conclusions d'une étude menée auprès d'étudiants du secondaire, âgés de 16 et 17 ans à Montréal, et de 18 ans à Toronto. Sur une centaine de marchands visités par les jeunes dans cet échantillon d'âge, 85 p. 100 leur ont vendu des produits alcoolisés sans demander de pièce d'identité. C'est aberrant, monsieur le Président!

Il est évident que la Loi sur la vente d'alcool aux mineurs n'est pas très respectée. Devons-nous nous attendre qu'il en soit de même pour celle régissant la vente des produits du tabac aux jeunes?

Nous ne somme pas contre l'adoption du projet de loi C-11, nous l'avons dit et nous le répétons. Ce dont nous doutons, c'est de son application.

Par ailleurs, il ne faut pas que le message soit perçu négativement par les jeunes. Ainsi lorsque le gouvernement, par le biais de son discours inaugural, annonce qu'il a l'intention de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants, il est possible que le message perçu par les jeunes à travers cette loi soit que ce sont eux le problème, que ce sont eux que la société identifie comme la cause de ces problèmes. Or, les jeunes, à mon avis, représentent l'avenir, ils représentent notre avenir aussi. Il nous incombe de faire en sorte que les mesures proposées soient perçues positivement.

De plus, il y a une autre question relativement, cette fois, à l'article 66 du projet de loi, à propos de mesures d'exécution. Cet article nous apprend que d'autres corps policiers que la GRC-le ministre en parlait tout à l'heure-pourront, si le ministre le juge approprié, saisir du tabac, des spiritueux et des véhicules utilisés pour des fins d'activités illégales de contrebande. Est-ce que cela veut dire que les ressources policières affectées à la lutte contre la contrebande seront substantiellement augmentées? Dans l'affirmative, quel en sera le coût?

Il serait également à mon avis un peu surprenant que le gouvernement puisse obtenir aussi facilement que le ministre l'a dit tout à l'heure la collaboration de corps policiers qui ne sont pas sous sa juridiction, alors que la plupart des effectifs policiers partout dans les provinces et les municipalités sont en réduction d'effectifs et que la plupart d'entre eux se disent débordés. Ce n'est pas toujours par mauvaise volonté qu'on refuse de collaborer, mais lorsqu'on n'arrive pas à réaliser les tâches qu'on devrait accomplir tous les jours, il est difficile de collaborer pour une tâche supplémentaire avec un autre niveau de gouvernement.

Il a aussi été mentionné que des biens saisis, comme des véhicules, pourront être vendus par encan. Est-ce que l'argent de ces ventes ne pourrait pas être employé pour la lutte contre la contrebande et le tabagisme?

(1045)

L'article 112 de l'ancienne loi sur la vente du tabac aux jeunes, relatif à la destruction immédiate de certains articles saisis, permettra aux membres des corps policiers de détruire immédiatement certains produits saisis, des photos et des vidéos pouvant servir de pièces à conviction lors de procès. Cela pourrait évidemment réduire considérablement les coûts d'entreposage, mais comment s'assurer que ces photos et ces vidéos soient bien gardés? Cela est une question que nous avons lieu de nous poser.

En ce qui touche les articles 201 et 211 de la loi concernant l'estampillage individuel des cigarettes, cette mesure modifiera la loi sur l'accise afin de permettre une meilleure identification, par les autorités et les citoyens respectueux, des produits ayant été soumis aux taxes et ceux ne l'ayant pas été. Mais on mentionne que ces nouvelles exigences d'estampillage pour les cigarettes seront prescrites par règlement après l'adoption du projet de loi C-11. Nous espérons que ces règlements seront adoptés et appliqués rapidement, du moins plus vite que ceux reliés à la loi C-111 de l'année dernière.

L'article 7.1 du projet de loi C-11 rendra illégale la production et la vente de paquets de moins de 20 cigarettes. À notre avis, cette mesure est atténuée par la baisse du prix des cigarettes. Le paquet de 25 cigarettes coûte maintenant beaucoup moins cher que ne coûtait le paquet de 15 cigarettes avant la baisse des taxes et des prix.

L'article 7.3 du projet de loi C-11 vise à interdire l'importation de produits du tabac pour les moins de 18 ans et par les moins de 18 ans. Cette mesure va de soi, si on interdit aux moins de 18 ans d'acheter ces produits dans les limites géographiques du


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Canada. Mais comment s'assurer d'un contrôle douanier efficace pour que cette mesure ne demeure pas un voeu pieux.

En guise de conclusion, j'aimerais rappeler que l'opposition officielle est favorable à l'adoption du projet de loi C-11, mais nous insistons à nouveau sur l'importance des mesures à prendre pour la faire respecter: tout d'abord, en adoptant des règlements faciles d'application et ensuite par la mise en place d'un meilleur programme de sensibilisation chez les jeunes, afin de les convaincre que le tabac est nuisible à leur santé, et que cela peut engendrer des coûts importants pour la société de demain.

[Traduction]

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, j'ai l'honneur d'être le premier réformiste à prendre la parole sur ce projet de loi. Comme les députés le savent, je suis un nouveau venu à la Chambre. En étudiant ce projet de loi, j'ai beaucoup appris sur le processus législatif, et tous les Canadiens devraient en savoir autant.

Quand le premier ministre a annoncé le plan d'action national du gouvernement pour combattre la contrebande et que le ministre du Revenu national a présenté le projet de loi C-11, nous avons présumé que ce texte de loi comporterait toutes les mesures annoncées dans le plan d'action national de lutte contre la contrebande. Malheureusement, ce n'est pas le cas.

En fait, toutes les mesures fiscales annoncées par le premier ministre dans son plan de lutte contre la contrebande ont été mises en oeuvre à l'aide de motions de voies et moyens.

Une motion de voies et moyens exige que le gouvernement présente un ou plusieurs projets de loi à la Chambre, dans un certain délai. On ne peut débattre des motions de voies et moyens. Par conséquent, il n'y a aucune mention de la réduction de la taxe sur les cigarettes, de la question de la taxe à l'exportation ni de la surtaxe de promotion de la santé dans le projet de loi C-11. En fait, ces mesures ne feront l'objet d'aucun débat véritable, et le Comité permanent des finances nationales ne pourra ni les étudier ni proposer d'amendement tant que le gouvernement n'aura pas décidé de présenter d'autres projets de loi à cette fin, comme il est tenu de le faire quand il a recours à des motions de voies et moyens.

Comme je le disais, cette expérience m'a beaucoup appris sur la façon dont le gouvernement fait les choses. Le gouvernement peut réaliser son programme après très peu de débat. Il se peut même que ses propres députés aient peu de chances d'en débattre.

Les mesures proposées dans le projet de loi C-11 sont relativement mineures par rapport au programme du gouvernement. Les modifications à la Loi sur l'accise et à la Loi sur les douanes ont surtout pour objet d'autoriser le gouvernement à détruire sans délai des biens saisis et à conférer à des corps policiers des pouvoirs de saisie comparables à ceux que possède la GRC.

(1050)

Une autre modification proposée à la Loi sur l'accise prévoit que les cigarettes fabriquées ou importées au Canada portent une estampille indiquant que les droits ont été acquittés. Il s'agit d'une excellente mesure de contrôle.

Enfin, la Loi sur la vente du tabac aux jeunes serait modifiée afin d'interdire la vente de produits du tabac à une personne âgée de moins de 18 ans et d'interdire la fabrication, l'empaquetage ou la vente de cigarettes dans des paquets en contenant moins de 20. C'est une autre bonne mesure.

Le 8 février, lorsque le premier ministre a annoncé son plan d'action national pour lutter contre la contrebande, mon bureau de circonscription a reçu 52 appels, dont 43 exprimant une opposition à la réduction des taxes sur les cigarettes. Depuis que le gouvernement a fait connaître son intention de réduire ces taxes, j'ai reçu des lettres de protestation venant de nombreuses sources différentes.

Il y a notamment l'Association médicale de la Saskatchewan, l'Association médicale canadienne, la section de la Saskatchewan du Collège des médecins de famille, la Régie de l'assurance-maladie de la Saskatchewan, la Fondation des maladies du coeur de la Saskatchewan, la Fondation des maladies du coeur du Canada et la Société canadienne du cancer.

S'opposent également à cette mesure le Conseil interinstitutions de la Saskatchewan du tabagisme et de la santé, qui regroupe tous les organismes suivants: la Fondation des allergies du Canada, le Service de santé de la ville de Regina, le Département d'épidémiologie et de santé communautaire de l'Université de la Saskatchewan, la Formation médicale permanente, l'Éducation permanente en soins infirmiers, la Conference of Seventh Day Adventists du Manitoba et de la Saskatchewan, la Commission de la Saskatchewan sur l'alcoolisme et les toxicomanies, les ministères de l'Éducation et de la Santé de la Saskatchewan, l'Association pour les soins de santé de la Saskatchewan, l'Institut de la Saskatchewan pour la prévention des handicaps, les associations médicale et pharmaceutique de la Saskatchewan, l'Association pour la santé publique de la Saskatchewan, l'Association des infirmières de la Saskatchewan, la Clinique pour les soins de santé de Saskatoon, l'Université de la Saskatchewan ainsi que l'Association pulmonaire de la Saskatchewan.

Nous a aussi fait part de son opinion sur la question la Saskatchewan Heart Health qui regroupe les associations et organismes suivants: la Société canadienne du cancer, l'Association canadienne du diabète, l'Association des consommateurs du Canada, le Coronary Artery Rehabilitation Group, la Coteau Hills Heart Health Coalition, la Fondation des maladies du coeur de la Saskatchewan, le Conseil interinstitutions de la Saskatchewan du tabagisme et de la santé, le Service de santé du district de Regina, le Regina Heart Healthy Partners, le Saskatchewan Council on Community Development, la Saskatchewan Diabetic Association, les directions générales des services communautaires et de la promotion de la santé du ministère de la Santé de la Saskatchewan, la Saskatchewan Lung Association, l'Association de la santé publique de la Saskatchewan, l'Association médicale de la Saskatchewan, la Saskatchewan Physical Education Association, la Saskatchewan Recreational Association, l'Association des infirmières de la Saskatchewan, la Saskatchewan Restaurant Association, le Saskatoon Tri-hospital Cardiac Rehabilitation Program, le SIAST-Wascana Institute de même


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que le Service d'épidémiologie cardiaque de l'Université de la Saskatchewan.

Cette longue liste représente bien des gens. Elle prouve que nombreux sont ceux qui s'inquiètent des mesures prises par le gouvernement et s'y opposent. Tous ces groupements ont exprimé des préoccupations en ce sens.

(1055)

Nous avons aussi reçu une lettre d'opposition à la réduction des taxes de la Campagne nationale d'action contre le tabac, qui regroupe les associations et organismes suivants: la Société canadienne du cancer, l'Association chiropratique canadienne, le Conseil canadien sur le tabagisme et la santé, l'Association dentaire canadienne, la Fédération canadienne des associations foyer-école et parents-maîtres, l'Association des hôpitaux du Canada, l'Association pulmonaire du Canada, l'Association médicale canadienne, l'Association pharmaceutique canadienne, l'Association canadienne de physiothérapie et l'Association canadienne de santé publique, la Société canadienne des thérapeutes respiratoires, la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants, la Fondation des maladies du coeur du Canada, l'Association pour les droits des non-fumeurs, Physicians for a Smoke-Free Canada, l'Association canadienne des optométristes, le Collège des médecins de famille du Canada, le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada et l'Église unie du Canada.

Cela représente un nombre considérable de personnes ayant des objections et des réserves à l'égard de cette mesure. Je n'en ajouterai pas davantage, mais je ferai remarquer que cela témoigne du grand nombre de personnes qui sont préoccupées par ce qui se passe dans ce domaine.

Soixante-dix organismes et associations ont communiqué avec moi, c'est-à-dire un seul député, pour formuler leur opposition à la réduction des taxes sur les cigarettes. Par contre, je n'ai reçu que neuf appels téléphoniques et une lettre en faveur de la mesure annoncée par le gouvernement.

Je profite de l'occasion pour faire part de quelques-unes des préoccupations qu'a suscitées cette décision. Citons d'abord un passage de la lettre du Conseil de la santé de la Saskatchewan adressée au premier ministre:

Nous sommes étonnés et consternés d'apprendre que votre gouvernement envisage de réduire les taxes sur le tabac.
Toutes les provinces canadiennes sont plus ou moins engagées dans un processus de réforme des soins de santé, et leurs efforts visent à éliminer les mauvaises habitudes contractées par les malades et à prévenir les maladies. Nous supposions que le gouvernement fédéral appuyait ces initiatives.
Voilà que nous apprenons que vous vous apprêtez à atténuer certaines contraintes, ce qui aura décidément pour effet d'encourager les gens, et notamment nos jeunes, à adopter ou à renforcer une pratique qui crée une dépendance entraînant la maladie, et même la mort.
Veuillez tenir compte des faits suivants:
En 1989, le tabagisme a entraîné pour les Canadiens une dépense de 9,5 milliards de dollars au chapitre des soins de santé dans les lieux de travail.

Un quart des élèves du secondaire qui fument ont contracté cette habitude en sixième année.

On compte 43 substances cancérigènes connues dans la fumée du tabac.

La nicotine a, sur le comportement, des effets comparables à ceux de l'héroïne et de la cocaïne.

Quelque 175 000 adolescents vont se mettre à fumer, si vous réduisez les taxes sur les produits du tabac.

Votre gouvernement ne tient sûrement pas à passer à l'histoire comme celui qui a contribué à la mort prématurée de 250 000 personnes.
J'ai reçu une autre lettre, adressée cette fois-ci au ministre des Finances. On peut lire ceci: «Nous tenons à vous exprimer notre vive opposition à toute réduction des taxes sur le tabac.»

(1100)

Voici un autre extrait de cette lettre: «Le tabac est le seul produit légal disponible sur le marché qui entraîne prématurément la mort et l'invalidité lorsqu'on l'utilise pour les fins auxquelles il est destiné. L'usage du tabac constitue à lui seul le plus grand facteur de risque des maladies cardiaques, et celles-ci représentent la principale cause de décès au Canada. Elles représentent 12 p. 100 de toutes les admissions dans les hôpitaux, 20 p. 100 des journées d'hospitalisation, 20 p. 100 des pensions d'invalidité versées aux termes du Régime de pensions du Canada et sont responsables de 32 p. 100 du total des futures rémunérations perdues à cause de décès prématurés.

D'où vient cette lettre? De la Fondation des maladies du coeur de la Saskatchewan, qui s'intéresse à cette question.

Cette fondation ajoute: «Réduire maintenant les taxes sur le tabac aurait pour effet d'accroître la consommation de tabac chez les jeunes, de diminuer les recettes gouvernementales et de récompenser un des principaux agents du problème de la contrebande du tabac, c'est-à-dire les fabricants canadiens de produits du tabac.»

Je voudrais lire d'autres extraits. Cette lettre-ci vient de la Fondation des maladies du coeur du Canada et m'est adressée. «Monsieur Breitkreuz, ce que vous ne savez peut-être pas, c'est que l'industrie du tabac, dont les bénéfices sont l'unique motivation, a présenté sous un faux jour tant la nature du problème que les conséquences de sa proposition visant à réduire les taxes. Par contre, les groupes responsables des soins de santé n'ont personnellement rien à gagner de la position qu'ils adoptent sur cette question. Notre seul intérêt consiste à protéger la santé des Canadiens en préservant les énormes progrès réalisés au cours de la dernière décennie pour réduire la consommation du tabac. Dans ce qui suit, nous réfutons point par point le principal argument des groupes de pression en faveur d'une baisse des taxes sur le tabac.»

Je ne vais pas lire toute la lettre, mais celle-ci évoque le mythe qu'une réduction des taxes mettrait un terme aux recettes provenant de la contrebande. Il est dit ceci: «En fait, une réduction des taxes entraînerait pour les gouvernements une perte encore plus importante de recettes.»

Il y est également question d'un autre mythe voulant qu'une augmentation des taxes sur le tabac n'ait aucun effet sur la réduction de la consommation du tabac. En réalité, ces dix dernières années, la consommation de tabac a connu au Canada une chute spectaculaire par suite des augmentations de taxes sur le tabac.


1657

La lettre dit ensuite que la consommation de tabac a chuté de 40 p. 100 au Canada, au cours de la dernière décennie, et ce, même si l'on tient compte de la contrebande de tabac, principalement par suite d'une augmentation des taxes sur les produits du tabac qui a rendu le prix des cigarettes moins abordable. Durant le même période, la consommation de tabac par habitant a connu une réduction nettement plus marquée au Canada, où elle est de 40 p. 100, qu'aux États-Unis, où elle est de 27 p. 100. Nous devons tenir compte de ces faits dans l'examen de cette question.

L'autre mythe dont il est question dans cette lettre, c'est que le tabac est taxé à un taux injustement élevé au Canada: «En fait, les niveaux des taxes sur le tabac au Canada sont les mêmes que ceux en vigueur dans la plupart des pays industrialisés.»

Je voudrais lire un bref extrait d'une lettre qui m'a été adressée par la Société canadienne du cancer: «Cher Monsieur, nous vous supplions de vous opposer, aux réunions de votre caucus, à une réduction des taxes sur le tabac, qui profiterait seulement à l'industrie du tabac et serait un désastre pour la santé publique.»

Dans une lettre qu'il m'a adressée, le Saskatchewan Interagency Council on Smoking and Health me dit, et je cite: «Tout récemment, des chercheurs travaillant pour le compte du gouvernement américain ont rapporté que, si les maladies du coeur et le cancer sont les principales causes de décès aux États-Unis, la consommation de tabac est la principale cause sous-jacente. N'oublions pas que le tabagisme est la principale cause des maladies pouvant être évitées au Canada.» Je répète, le tabac est la principale cause des maladies qui peuvent être évitées au Canada.

N'oublions pas que la cigarette est à l'origine de problèmes de santé lorsqu'elle est utilisée exactement comme prévu. Si le Canada veut continuer à réduire l'usage du tabac, il doit maintenir un ensemble de politiques à la fois fiscales et sanitaires.

(1105)

Nous appuyons fortement ce que fait le gouvernement et ce qu'il tente d'accomplir, mais nous devons remettre en question une chose qui n'est pas dans le projet loi, et c'est la mesure de réduction des taxes.

Voici un autre communiqué de la Campagne nationale d'action contre le tabac. Là encore, je ne vais pas tout lire, seulement un petit extrait.

«En réduisant les taxes sur le tabac, on rend les produits plus abordables, ce qui devrait entraîner une augmentation énorme de la consommation, particulièrement chez les jeunes et les adolescents», disait David Sweanor, conseiller juridique principal de l'Association pour les droits des non-fumeurs. «L'industrie du tabac, grâce à son lobbying, se trouve dans une situation où elle ne peut pas perdre. Elle profite de la vente des produits du tabac qui sont réintroduits en contrebande au Canada et, naturellement, elle en profite aussi, lorsque les gouvernements succombent aux pressions, pour obtenir une réduction des taxes.»
C'est l'une des principales inquiétudes exprimées par les nombreuses personnes qui nous ont appelés. Le gouvernement s'incline devant les pressions de certains groupes.

Voici une autre lettre de l'association de la santé cardiovasculaire de la Saskatchewan:

Nous vous écrivons pour vous prier de ne pas réduire les taxes sur les produits du tabac.
Nous estimons que la réduction des taxes ne résoudra pas le problème de la contrebande, mais qu'elle conduira à une augmentation de la consommation des produits du tabac par les Canadiens, en particulier les jeunes. Par ailleurs, c'est un mauvais signal à donner aux États-Unis qui envisagent une augmentation des taxes sur le tabac.
Je pense que nous avons entendu aux nouvelles récemment qu'ils surveillaient la situation au Canada, et cela va les encourager à ne pas augmenter les taxes chez eux. Je continue à lire la même lettre:

Au cours de la dernière décennie, le Canada a connu une baisse sans précédent de la consommation de tabac et cela a coïncidé avec une augmentation des taxes fédérales et provinciales. On peut attribuer cela au fait que les prix élevés ont un effet plus dissuasif sur les jeunes dont le revenu est plus limité.
Alors que d'autres pays considèrent le Canada comme un pays progressiste, étant donné sa politique d'imposition des produits du tabac et la diminution de la consommation que cette politique entraîne, réduire les taxes serait faire un très grand pas en arrière.
L'Association pulmonaire de la Saskatchewan nous a envoyé un message portant la mention «urgent» et faisant ressortir trois points principaux, à savoir:

1. Réduire les taxes sur le tabac serait désastreux sur le plan économique.
2. Réduire les taxes sur le tabac contribuerait à une forte augmentation des problèmes de santé.
3. Réduire les taxes sur le tabac n'éliminerait pas la contrebande.
J'ai aussi une autre lettre que m'a adressé personnellement un habitant de MacNutt, en Saskatchewan. En voici un extrait:

Monsieur,
Nous sommes consternés d'apprendre que le gouvernement fédéral a l'intention d'éliminer certaines taxes sur les produits du tabac. Ce gouvernement, comme ses prédécesseurs, cherche à plaire au Québec. Pourquoi ne surveille-t-on pas davantage les activités des contrebandiers? De même, pourquoi faudrait-il que les réserves amérindiennes soient soustraites aux lois et aux impôts de ce pays? Ne sommes-nous pas censés être tous traités de la même façon? Comment compensera-t-on la perte de recettes provenant de la vente de cigarettes? Qui paiera les coûts supplémentaires qu'engendrera, au niveau de la santé, la consommation accrue de produits du tabac?
Voilà ce que pense l'un des habitants de ma circonscription. J'estime que nous devrions tenir compte des opinions de chacun à ce sujet.

En tant que député réformiste, j'ai le devoir, en vertu de la constitution du Parti réformiste du Canada, de me faire le porte-parole des habitants de ma circonscription.

(1110)

Il est facile de voir comment je vais me prononcer sur le projet de loi que le gouvernement va présenter afin de réduire les taxes sur les cigarettes. Je crois moi aussi qu'on doit baisser les taxes, mais je ne pense pas que nous devions le faire tant que le budget ne sera pas équilibré.

Comprimons d'abord les dépenses gouvernementales, équilibrons le budget et nous songerons ensuite à réduire les taxes. Les députés réformistes sont-ils les seuls dans cette enceinte à recevoir des coups de téléphone et des lettres de gens qui s'opposent à cette mesure? Suis-je le seul dont le bureau soit inondé d'instances de ce genre?


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Je me demande combien de députés seront en mesure de regarder leurs électeurs en face s'ils votent en faveur de cette réduction de taxes lorsque le projet de loi pertinent sera présenté à la Chambre. Nous devons écouter les Canadiens. Il faut écouter leurs préoccupations et y répondre.

Le 8 février, après l'annonce par le premier ministre du plan d'action national de lutte contre la contrebande, le chef de notre parti a précisé dans cette enceinte que le Parti réformiste souscrivait à certains aspects de ce plan d'action et s'opposait à d'autres.

Il a ajouté que nous étions en faveur d'une application plus rigoureuse des lois, d'une campagne d'information anti-tabac et d'une taxe à l'exportation sur les cigarettes, mais que nous nous opposions à une réduction des taxes sur les cigarettes.

Nous avons donc donné notre appui à trois des initiatives du gouvernement, mais nous nous sommes élevés contre la diminution des taxes. Depuis l'annonce du gouvernement, notre bureau d'Ottawa a reçu plus de 60 appels téléphoniques et télécopies. La grande majorité d'entre eux s'opposaient à cette décision.

Je tiens à dire aujourd'hui à la Chambre que je suis généralement en faveur de la position exposée par notre chef le 8 février 1994 dans cette enceinte, car elle est conforme aux souhaits de mes électeurs.

Cependant, je ne me prononcerai pas sur les mesures du plan d'action de lutte contre la contrebande tant que mes collègues ne seront pas intervenus, n'auront pas fait connaître au gouvernement leur analyse et ne lui auront pas proposé des solutions de rechange constructives.

Même si le projet de loi C-11 ne renferme pas toutes les mesures annoncées dans le plan d'action national du gouvernement, nous jugeons qu'il ne faut pas remettre à plus tard le débat sur l'ensemble des initiatives proposées par le gouvernement dans ce plan.

On ne peut attendre encore une semaine ou un mois pour débattre dans cette enceinte les questions relatives aux taxes et bien informer les Canadiens de toutes les répercussions de ce plan d'action. Nous devrions discuter de toutes ces questions dès maintenant.

Nous devrions amorcer aujourd'hui le débat sur tous les aspects du dossier qui touchent le public et non pas seulement sur les quelques mesures contenues dans le projet de loi C-11. Combien de personnes seront devenues dépendantes du tabac avant même que le véritable débat sur la réduction des taxes puisse débuter?

Les personnes qui m'ont écrit ou téléphoné, en leur nom propre ou au nom d'un organisme, m'ont révélé des faits étonnants. Selon elles, plus de 840 000 Canadiens se mettront à fumer à cause de la baisse des taxes annoncée par le gouvernement.

De ce nombre, 175 000 seront des adolescents qui n'avaient encore jamais fumé, et 250 000 mourront prématurément des effets directs de leur dépendance aux produits du tabac. Déjà, 40 000 Canadiens meurent chaque année pour avoir fumé. Ce chiffre ne tient pas compte des 840 000 nouveaux fumeurs qui iront grossir les rangs de leurs confrères dans les hôpitaux et les salons funéraires. Lorsque le prix des cigarettes augmente de 10 p. 100, les ventes aux adultes diminuent de 4 à 9 p. 100, alors que celles aux adolescents baissent de 10 à 14 p. 100. Il n'est donc pas surprenant qu'on s'attende à une remontée spectaculaire des ventes à la suite de la diminution des taxes.

(1115)

Ces personnes m'ont également appris qu'il en coûtera environ 1,3 milliard de dollars de plus par an pour traiter les maladies de ces 840 000 nouveaux fumeurs. Le gouvernement a-t-il pris en considération cette augmentation du coût des soins de santé?

Elles ne comprennent vraiment pas pourquoi il faut diminuer les taxes sur les cigarettes dans tout le pays pour mettre fin à la contrebande au Québec. Elles ne comprennent pas non plus pourquoi le gouvernement a pris des mesures à l'échelle du pays alors que le commissaire de la GRC a confirmé que 70 p. 100 des cigarettes de contrebande transitaient par les trois réserves mohawks situées entre Cornwall et Montréal.

Elles se demandent si le gouvernement va partout intensifier son action policière avec la même vigueur et poursuivre les criminels, qu'ils vivent dans les réserves ou pas. Voilà les questions que se posent les gens. Ils ne comprennent pas que la ministre de la Santé appuie la réduction des taxes sur les cigarettes alors que tant d'organismes oeuvrant dans le domaine de la santé et la plupart des ministres provinciaux de la Santé s'y opposent.

Telles sont les réactions dans ma province où l'opposition est vive. Ces gens m'ont dit qu'ils s'inquiétaient des effets qu'auraient ces mesures sur les relations fédérales-provinciales et sur les relations entre les provinces, plus particulièrement entre l'Ontario et le Québec.

Le Parti réformiste est heureux de la tenue de ce débat, qui nous permettra de discuter de ces questions à la Chambre et devant le public canadien. Comme chacun peut le voir, nous cherchons des réponses à de nombreuses questions. Le gouvernement acceptera-t-il d'y répondre, pour notre information et celle de la population?

En définitive, je voudrais poser les questions qui préoccupent les Canadiens. Tout d'abord, quelles seront les répercussions à court et à long terme de cette mesure au chapitre des coûts et recettes? Le gouvernement a-t-il effectué une étude à ce sujet? Connaissons-nous les effets qu'aura cette mesure sur les coûts et recettes?

Deuxièmement, quelles seront les répercussions sur les programmes de soins de santé des provinces et sur la part des coûts supportés par le gouvernement fédéral? Serons-nous en mesure de faire face à la hausse des coûts des soins de santé?

Troisièmement, quels seront les effets de cette mesure sur les services de police et les systèmes judiciaire et juridique? Autant de questions qui exigent des réponses.

Quatrièmement, combien d'emplois seront affectés dans l'industrie du tabac? A-t-on fait une étude pour le déterminer?


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Cinquièmement, combien de producteurs de tabac seront touchés par cette mesure?

Sixièmement, s'il n'existe vraiment aucune zone d'exclusion au Canada, quelles répercussions la fin de la contrebande dans les réserves mohawks aura-t-elle sur les négociations concernant l'autonomie politique au Canada? Quelqu'un a-t-il vérifié? Les ministres et le caucus libéral ont-ils consulté leurs membres en Ontario et partout au Canada avant d'appliquer ces mesures? Toute la population a-t-elle été consultée? Les députés libéraux n'ont-ils pas reçu la même information que ceux du Parti réformiste? Aurons-nous des réponses à ces importantes questions avant de voter à la Chambre?

Je suis heureux que nous ayons la possibilité d'en discuter et je félicite le gouvernement pour l'ouverture dont il fait preuve. Je suis heureux de pouvoir exprimer l'opinion de mes électeurs et mes propres préoccupations.

Le Parti réformiste croit également que le plan d'action national de lutte contre la contrebande devrait être amélioré. Les députés de mon parti proposeront des solutions constructives que le gouvernement voudra peut-être examiner et proposer comme amendements à l'étape de l'étude en comité.

Monsieur le Président, je vous remercie de m'avoir permis d'exprimer mon opinion au sujet des mesures de lutte contre le tabagisme proposées par le gouvernement dans le projet de loi C-11. J'espère que la discussion concernant ces mesures sera fructueuse.

(1120)

Le président suppléant (M. Kilger): Je signale à tous les députés présents et à ceux qui suivent le débat ailleurs que nous passons à l'étape suivante de ce débat. À partir de maintenant, les députés ont droit à un temps de parole de 20 minutes, suivi d'une période de 10 minutes pour les questions et les observations.

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends aujourd'hui la parole à l'appui du projet de loi C-11, à l'étape de la deuxième lecture.

Comme le disait le ministre du Revenu national, ce projet de loi est un élément important du plan d'action national du gouvernement pour combattre la contrebande, plan que le premier ministre a annoncé à la Chambre le 8 février dernier.

En annonçant cette mesure, nous avons souligné notre engagement à aborder fermement le problème de la contrebande, dans une perspective globale. Ce projet de loi est une autre preuve de cet engagement. Le ministre du Revenu national nous a expliqué comment les dispositions de ce projet de loi permettront à son ministère de se charger du volet recettes de notre stratégie nationale. La ministre de la Santé nous décrira ce qui touche les questions de santé. Pour ma part, à titre de solliciteur général, j'aimerais vous exposer les dispositions du projet de loi à l'appui du plan d'action national du gouvernement, pour ce qui est des mesures coercitives.

[Français]

En annonçant la stratégie du gouvernement, le premier ministre a bien fait comprendre que nous nous attaquions à un problème d'envergure nationale touchant tous les Canadiens. Il a aussi clairement indiqué que le principe de la légalité devait être respecté, qu'il devait être appliqué et qu'il devait s'appliquer également à tous les citoyens.

[Traduction]

Compte tenu de la gravité du problème de la contrebande, nous savions qu'il fallait absolument, pour casser les réseaux de commerce clandestin du tabac et de l'alcool, donner aux policiers et aux agents de douane les ressources ainsi que les pouvoirs qui allaient leur permettre de faire leur travail correctement.

À cette fin, nous avons doublé le nombre d'agents de la GRC et d'agents de douane affectés aux opérations de lutte contre la contrebande. Nous savions qu'augmenter leur nombre ne suffirait pas et qu'il fallait aussi adopter une stratégie leur permettant de veiller plus efficacement au respect de la loi. Il fallait donc tenir compte des besoins des divers services de police engagés dans la lutte contre la contrebande.

Ce projet de loi facilite l'application de la loi de trois façons différentes. D'abord, le projet de loi permettra au gouvernement de charger, au besoin, les services de police provinciaux ou municipaux de faire appliquer certaines dispositions de la Loi sur la taxe d'accise. Auparavant, ce rôle relevait exclusivement de la Gendarmerie royale du Canada.

[Français]

Cela signifie que lorsque des produits de contrebande entrent au Canada, la GRC est le seul organisme d'application de la loi légalement autorisé, en ce moment, à confisquer l'alcool et le tabac aux termes de l'actuelle Loi sur l'accise. S'il semble y avoir eu évasion de taxes provinciales, il s'agit alors d'une infraction à la législation provinciale, et les services de police provinciaux et municipaux peuvent intervenir.

[Traduction]

Étant donné la gravité du problème dû à la contrebande, le strict bon sens exige que nous ayons la souplesse nécessaire pour autoriser non seulement la GRC, mais aussi divers corps policiers provinciaux et municipaux désignés à saisir l'alcool et le tabac de contrebande qu'ils trouvent, et à saisir également le matériel de fabrication et les véhicules utilisés au Canada aux fins de la contrebande. C'est précisément l'objet de ce projet de loi.

[Français]

Le ministre de la Sécurité publique du Québec et le solliciteur général de l'Ontario m'ont demandé que des membres de leurs corps de police provinciaux, c'est-à-dire la Sûreté du Québec et la police provinciale de l'Ontario, soient habilités à assurer l'exécution de la Loi sur l'accise de la façon que je viens de décrire.

(1125)

[Traduction]

Ce projet de loi donne suite à ces demandes et nous permettra de collaborer davantage avec les corps policiers provinciaux et municipaux, de miser sur cette collaboration et d'accroître l'efficacité des activités policières conjointes. En Ontario et au Québec, cette mesure améliorera l'efficacité des corps policiers


1660

provinciaux et municipaux désignés qui mènent leur propre lutte à la contrebande.

Nous avons insisté sur notre engagement à saisir toutes les occasions pour collaborer avec les provinces et garantir que la lutte contre la contrebande, surtout celle du tabac et de l'alcool, soit la plus efficace possible; ce projet de loi est une manifestation de notre engagement.

Ce projet de loi aidera aussi les agents de la force publique à mener une campagne contre la contrebande qui soit plus efficace au niveau des coûts. En effet, grâce aux modifications proposées à la Loi sur les douanes et à la Loi sur l'accise, le ministre du Revenu national pourra autoriser ces responsables à détruire les biens saisis, surtout le tabac et l'alcool, immédiatement après en avoir prélevé des échantillons qui serviront d'éléments de preuve devant les tribunaux.

Cette disposition vise à réduire la hausse des frais d'entreposage des biens saisis, car ces frais ne cessent d'augmenter depuis quelques mois, surtout dans le cas des produits du tabac.

J'ai appris que, seulement en Ontario, il en coûte actuellement à la Gendarmerie royale du Canada près de 2 millions de dollars par année pour entreposer l'alcool et le tabac saisis. En Colombie-Britannique, la GRC a utilisé, outre tout l'espace dont elle disposait, une partie d'un parc de stationnement souterrain à des fins d'entreposage. Ces frais généraux qui augmentent à mesure que se multiplient les saisies d'alcool et de tabac ne sont pas nécessaires, et je crois que nous pouvons les éviter. Les modifications proposées nous aideront à les contrôler et, espérons-le, à les réduire.

Je tiens à dire que, dans les cas où les tribunaux jugeront-et cela pourra arriver à l'occasion-que des marchandises qui ont déjà été détruites n'auraient pas dues être saisies, le projet de loi prévoit que le premier propriétaire de ces marchandises sera pleinement indemnisé.

Enfin, je tiens à dire que les dispositions actuelles de la Loi sur l'accise prévoient que les paquets de cigarettes, et non les cigarettes elles-mêmes, portent une estampille de tabac. Cela n'est pas suffisant, car on a vu que certains éléments criminels réussissent très bien à fabriquer de fausses estampilles de façon à maquiller les paquets de cigarettes de contrebande. Ce projet de loi élargirait le pouvoir de réglementation de façon que les cigarettes destinées à être légalement consommées au Canada portent elles-mêmes une estampille, ce qui aiderait les forces policières à mettre un frein à la fabrication de fausses estampilles et, partant, à la fabrication d'emballages illégaux. En outre, si les cigarettes étaient clairement estampillées, les forces policières auraient moins de mal à reconnaître les cigarettes de contrebande.

[Français]

Monsieur le Président, il y a, pour terminer, ces trois dispositions: accroître les secteurs de compétence de façon à y inclure les corps de police provinciaux et municipaux; autoriser les responsables à détruire immédiatement les biens saisis; marquer et emballer les produits du tabac fabriqués au pays d'une manière qui aiderait la police à reconnaître les produits de contrebande. Ces dispositions renforceront le volet d'application de la loi du plan gouvernemental de lutte à la contrebande du tabac, ainsi que la lutte à la contrebande de l'alcool.

[Traduction]

De concert avec les propositions visant à interdire la vente des très petits paquets de cigarettes et touchant à d'autres questions connexes que doit examiner la ministre de la Santé, le projet de loi va aider le gouvernement dans la poursuite de ses objectifs nationaux, à savoir s'assurer que les lois, et surtout celle sur la contrebande, sont respectées et protéger la santé des Canadiens.

Nous avons promis aux Canadiens de prendre des mesures vastes et complètes contre la contrebande; en effet, compte tenu de la complexité de la question de la contrebande, il ne saurait en être autrement. Ce projet de loi nous donne de précieux outils dans la lutte contre la contrebande, notamment la contrebande des cigarettes et des boissons alcoolisées; il nous aide à respecter notre engagement de protéger la santé des Canadiens, des jeunes Canadiens surtout. Le projet de loi C-11 constitue un aspect important de notre effort général, et je demande aux députés de tous les partis représentés à la Chambre de lui accorder leur appui.

(1130)

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, j'ai écouté le ministre avec beaucoup d'intérêt et je souscris aux mesures qu'il a dû prendre.

Je me demande s'il peut répondre à quelques questions que j'ai soulevées et qui ne sont pas directement liées au projet de loi C-11. Combien en coûterait-il pour faire respecter la loi? Comment les mesures dont il parle se répercuteraient-elles sur l'ensemble du système de répression de la criminalité et du système juridique? Des études ont-elles été faites sur le sujet? Savez-vous quelles seraient les répercussions de ces mesures? Quelles seraient les répercussions à court et à long termes de la réduction des taxes à la consommation et de la majoration des taxes à l'exportation sur les recettes gouvernementales?

Cela n'est pas directement lié au projet de loi C-11, et vous n'êtes peut-être pas en mesure de répondre. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. Je veux simplement rappeler à tous les députés qu'ils doivent poser leurs questions par l'intermédiaire de la présidence et qu'ils ne doivent pas d'adresser directement à leurs vis-à-vis.

M. Breitkreuz (Yorkton-Melville): Je vous demande pardon, monsieur le Président. Je tenterai de me corriger.

J'avais presque terminé de poser mes questions. Je voudrais simplement savoir quelles seraient les répercussions sur notre système de répression de la criminalité et sur notre système juridique, et aussi, quelles seront les répercussions à court et à long terme des rajustements de taxes sur les recettes du gouvernement.

M. Gray: Monsieur le Président, je n'ai pas ici les chiffres, mais je peux tenter de les donner de mémoire, sous réserve des correctifs qui pourraient être apportés plus tard au cours du débat ou devant le comité parlementaire qui étudiera le projet de loi.


1661

Je pense que le coût initial des mesures de répression de la criminalité, soit le recours à des agents de douanes et à des agents de la GRC supplémentaires, oscillerait entre 100 et 150 millions de dollars par année.

Les répercussions sur les recettes de la réduction des taxes sont, si ma mémoire est bonne, de plus de 300 millions de dollars la première année. Nous prévoyons que cette perte diminuera radicalement les années subséquentes grâce à la mise en oeuvre du programme de lutte à la contrebande.

Je donne ces chiffres sous toute réserve, puisque la question a été étudiée en comité, mais je crois être assez près des chiffres auxquels nous sommes arrivés.

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, j'ai beaucoup apprécié le discours du porte-parole du Parti réformiste et celui du solliciteur général, discours qui avaient un certain rapport entre eux. Le porte-parole du Parti réformiste a cité des extraits de lettres venant de 70 organismes qui s'opposent à la réduction des taxes. J'ai également reçu des lettres de ce genre. Il n'a cependant pas parlé des préoccupations de la Gendarmerie royale du Canada, ce que le solliciteur général a fait.

Le 8 février dernier, le premier ministre a déposé à la Chambre une lettre de N. D. Inkster en date du 3 février, lettre dans laquelle le commissaire de la GRC dit ceci: «Les ressources dont dispose présentement la GRC sont insuffisantes pour régler le problème, compte tenu de ses autres responsabilités pour l'ensemble du Canada.»

Les saisies ont augmenté. C'est ce que tout le monde réclame. Pourquoi n'augmentons-nous pas les saisies? Le commissaire dit ceci: «Certes, les saisies ont augmenté de façon importante, mais nous sommes littéralement débordés du fait de l'implication du crime organisé et parce que des citoyens généralement respectueux de la loi encouragent ces activités en achetant ouvertement des produits illégaux. Je suis convaincu qu'une stratégie globale s'impose pour lutter contre ce fléau, notre action ne pouvant se limiter à une intervention policière plus musclée.»

Voici la question que je veux poser au solliciteur général: Maintenant que nous voyons les résultats obtenus grâce à la baisse des prix et à l'intensification de l'intervention policière, croit-il, d'après les entretiens qu'il a eus avec la GRC et avec d'autres services de police, que le problème aurait pu être réglé sans qu'on réduise le prix des cigarettes?

(1135)

M. Gray: Monsieur le Président, le conseil que nous avons reçu du commissaire de la GRC était que des mesures plus sévères sur le plan de l'application de la loi ne seraient pas suffisantes à elles seules pour régler le problème. Tout conseil venant du chef d'un des services de police les plus respectés du monde mérite certainement d'être suivi.

Il est évident qu'on nous a donné ce conseil parce qu'il s'agit d'un problème d'envergure nationale. Il est vrai que l'est de l'Ontario et le Québec sont peut-être plus touchés, mais nous savons aussi que la proportion de produits de contrebande par rapport à l'ensemble des produits du tabac consommés atteint quelque 40 p. 100 dans les provinces atlantiques, quelque 35 p. 100 en Ontario et quelque 15 p. 100 dans les provinces de l'Ouest, et ces chiffres augmentent rapidement.

Nous savions que des milliers d'individus étaient impliqués partout au Canada dans la distribution de ces produits du tabac de contrebande. Des dizaines de milliers d'autres les achetaient et les consommaient. Cela entraînait la formation de réseaux de contrebande de mieux en mieux organisés qui ne se limitaient pas à la contrebande du tabac, mais faisaient également celle de l'alcool, de la drogue et des armes à feu.

Le problème prenait une telle ampleur qu'il nous fallait renforcer la lutte contre la contrebande en nous attaquant aux réseaux au moyen de mesures de coercition plus rigoureuses, mais il fallait également faire disparaître l'aspect lucratif de la contrebande du tabac pour soutenir l'application des mesures de coercition. Nous étions bien conscients de tous les problèmes et de tous les sujets de préoccupation, mais nous savions également qu'il n'y avait pas de solution simple à un problème d'une telle complexité. Nous savions que notre plan national devait comporter un volet touchant la réduction des taxes canadiennes sur le tabac afin de faire disparaître l'aspect lucratif de la contrebande. Nous savions en même temps qu'il fallait imposer aux fabricants une taxe à l'exportation du tabac de même qu'un impôt sur les surplus de bénéfices pour restreindre encore davantage les bénéfices et pour générer également des fonds servant à financer une importante campagne de lutte au tabagisme. Nous savions que toutes ces mesures devaient être prises.

Nous en sommes venus à la conclusion que le plan national de lutte contre la contrebande ne pouvait pas se limiter à la seule application des lois; nous ne nous y sommes pas résolus de gaieté de coeur, mais nous estimions cela nécessaire dans l'intérêt public. Il fallait prendre en outre des mesures fiscales qui, je le répète, ne prévoyaient pas uniquement une réduction des taxes canadiennes sur le tabac, mais aussi de fortes hausses de taxes pour les fabricants de tabacs, dont une taxe à l'exportation des produits fabriqués au Canada et expédiés à l'étranger, car nous savions que c'était la source d'une grande partie des cigarettes rentrées en contrebande au Canada, de même qu'un impôt élevé sur les bénéfices des fabricants pour financer une importante campagne de lutte contre le tabagisme.

J'ai le plus grand respect pour les organismes cités par le porte-parole du Parti réformiste, mais la plupart de leurs communications ont été publiées avant la mise en application de notre plan, et elles craignaient que nous ne prêtions pas attention aux fabricants de tabacs. Elles craignaient que nous ne tenions pas compte de la nécessité d'une campagne de lutte contre le tabagisme; mais nous n'avons évidemment pas oublié ces éléments absolument nécessaires. Ils font partie de notre plan national, et j'espère que ces organismes examineront à nouveau les mesures que nous prenons. Je le répète, je respecte leurs préoccupations à l'égard des conséquences que pourraient avoir les réductions de taxes, mais beaucoup d'autres éléments de notre plan donnent suite à des mesures qu'elles réclamaient elle-mêmes depuis plusieurs années; voici maintenant que nous les mettons en oeuvre.

Pour résumer, l'application des lois est un élément essentiel de notre programme, mais nous en sommes venus à regret à la conclusion que l'application des lois existantes ne suffirait pas à vaincre la contrebande. Cela montre bien que gouverner un pays


1662

comme le Canada constitue une tâche complexe. Il surgit parfois des problèmes pour lesquels il n'existe pas de solution simple ou facile; quelle que soit la solution qu'on prenne, elle présente des problèmes. Les gouvernements doivent quand même prendre des décisions et gouverner au mieux des intérêts du pays pour ensuite se soumettre, le temps venu, au jugement de la population. C'est ce que nous sommes heureux de faire en l'occurrence et à l'égard également des autres mesures que nous avons prises et que nous prendrons dans le but de servir les intérêts les meilleurs de tous les Canadiens, dans toutes les régions du pays.

(1140)

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington): Monsieur le Président, je voudrais signaler que l'idée de marquer chaque cigarette vient de Guelph. Nous la devons à M. David Kennedy, qui n'est pas, je le précise, trésorier de la ville. Il s'agit d'un simple citoyen qui travaille très fort avec d'autres personnes de ma circonscription pour trouver des solutions aux problèmes de gouvernement. Je tiens à le remercier.

Je voudrais aussi dire un mot du programme antitabac que nous envisageons de lancer. Je voudrais demander au député si nous avons communiqué avec des associations comme l'Association pulmonaire afin de solliciter leur aide pour cette campagne de sensibilisation. Cette association a peut-être déjà une foule de bonnes idées ou de mesures de sensibilisation. Pour éviter tout chevauchement, nous pourrions peut-être faire appel à des organismes de cette nature pour nous aider dans notre campagne antitabac.

Le député veut-il commenter?

M. Gray: Monsieur le Président, je ne veux pas trop empiéter sur le domaine de la ministre de la Santé. Elle va elle-même prendre la parole et je suis sûr qu'elle confirmera qu'elle-même et le gouvernement veulent travailler en collaboration avec des groupes comme l'Association pulmonaire.

La ministre confirmera sûrement que nous voulons profiter des idées, programmes et services de ces organismes. Je tiens, comme tout le gouvernement, à une collaboration plus étroite entre la ministre de la Santé, ses fonctionnaires et des groupes comme l'Association pulmonaire. Cette coopération est essentielle au succès de notre programme.

Mme Hedy Fry (secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé): Monsieur le Président, en l'absence de la ministre de la Santé, je voudrais confirmer qu'elle a rencontré les représentants de l'Association pulmonaire, de la Fondation des maladies du coeur, de l'Association médicale canadienne et de tous les groupes antitabac pour discuter de la nouvelle stratégie.

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo): Monsieur le Président, j'ai quelques observations à faire. Je voudrais d'abord remercier le ministre des mesures prises pour examiner les causes de ce problème.

Ce fut un exercice vraiment nécessaire. La situation s'envenimait. On s'adonnait ouvertement à des activités illégales. On gagnait beaucoup d'argent. Certains se faisaient construire de luxueuses résidences, et pas seulement dans certains secteurs. On faisait des profits illégalement, et cela devenait un mode de vie. Il fallait y mettre un terme pour protéger la société et garantir son intégrité.

Pour ma part, je suis heureux que le gouvernement ait méticuleusement analysé toutes les composantes du problème avant de prendre ces mesures. Se fondant sur cette analyse, le gouvernement a conçu un programme en quatre points afin de remédier pour de bon à ce problème.

Le gouvernement a pris des mesures concrètes. J'espère qu'on assurera le suivi de la situation et qu'on constatera que la loi et l'ordre ont été rétablis au Canada.

M. Gray: Monsieur le Président, avec votre permission, je voudrais répondre brièvement aux observations du député.

Il importe de se rappeler que ce problème ne date pas de l'arrivée au pouvoir de notre gouvernement il a trois mois et quelque. Il s'agit d'un problème qui s'est aggravé pendant des années sans que le gouvernement conservateur intervienne.

Notre gouvernement, avec son fameux livre rouge renfermant des plans pour créer des emplois et relancer l'économie, a dû aussi faire face à des problèmes dont l'origine remonte au gouvernement précédent. Il faut s'en souvenir et reconnaître que notre gouvernement a montré qu'il était prêt à prendre des mesures immédiates pour régler des problèmes comme la contrebande.

En outre, nous voulons nous assurer que tout soit fait d'une manière équilibrée. Je suis heureux que le député ait soulevé les dangers que ce problème fait peser sur notre société. C'est pourquoi notre programme possède toutes ces composantes. C'est vrai qu'il prévoit des mesures d'application de la loi plus sévères. C'est vrai qu'il comprend un volet impôts. Mais il comprend aussi un très important volet lié à la santé et la lutte anti-tabac. J'ai hâte d'entendre les observations de la ministre de la Santé, qui parlera tout à l'heure dans ce débat. J'ai hâte aussi à l'étude en comité où nous pourrons donner d'autres renseignements plus détaillés.

(1145)

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre): Monsieur le Président, le ministre du Revenu déposait, le 10 février dernier, un projet de loi qui a pour objectif de modifier de façon importante trois autres lois de ce Parlement: la Loi sur l'accise, la Loi sur les douanes et la Loi sur la vente du tabac aux jeunes.


1663

Ce projet de loi veut en quelque sorte équilibrer par une série de mesures législatives le plan gouvernemental de lutte à la contrebande que le premier ministre a annoncé dans cette Chambre le 8 février 1994.

Plusieurs intervenants du domaine de la santé se sont dits inquiets des conséquences possibles de ce plan national de lutte à la contrebande qui pourrait engendrer, sur le plan de la santé des Canadiens et des Québécoises, des retombées fort peu souhaitables. Ces intervenants, praticiens et spécialistes de la santé, craignent une recrudescence du tabagisme en général, mais aussi et surtout une augmentation de la consommation du tabac chez les jeunes.

Même si les efforts du gouvernement fédéral semblent louables pour tenter d'éliminer ou, tout au moins, pour mieux contrôler l'accès des jeunes aux produits du tabac, il n'en demeure pas moins que la situation est critique.

Le gouvernement propose des modifications qui viendront, selon ce dernier, renforcer certaines dispositions de la loi C-111, sanctionnée le 25 mars 1993. Cette loi, rappelons-le, a pour objet d'interdire la vente de cigarettes aux jeunes de moins de 18 ans.

Quelles sont donc ces fameuses dispositions? La partie III du projet de loi C-11 apporte trois modifications à la Loi sur la vente du tabac aux jeunes. L'article 10 du présent projet de loi propose de remplacer le titre intégral de la «Loi sur la vente du tabac aux jeunes» par la «Loi limitant l'accès des jeunes au tabac». Au dire du gouvernement, ce nouveau titre élargirait implicitement la portée de la loi; il correspondrait beaucoup plus à l'optique nouvelle de limiter plutôt que d'interdire.

L'article 11, quant à lui, ajoute trois nouveaux éléments à la loi C-111. L'article 7.1 interdirait la vente de cigarettes en paquet contenant moins de 20 unités. À partir du 1er mai 1994, il serait interdit de produire ou de vendre ce qu'on appelle communément des paquets pour enfants, c'est-à-dire des paquets de 15 ou 10 cigarettes. Ces paquets, que l'on retrouve actuellement sur le marché à bon prix, sont extrêmement séduisants pour les jeunes. Leur coût relativement restreint est un élément incitatif important. Il est facile de commencer à fumer. Tout d'un coup ce serait agréable.

Finalement, l'article 7.3 interdirait l'importation au Canada de produits du tabac par une personne âgée de moins de 18 ans, que ce soit pour sa consommation personnelle ou pour l'offrir à sa mère, par exemple.

Nous nous sommes attardés, au cours des dernières semaines, aux aspects légaux et fiscaux du débat, et plus particulièrement à l'épineux problème de la contrebande des cigarettes. Nous avons cependant mis un bémol aux aspects liés à la santé et au bien-être des Canadiens et des Québécois.

Selon le Dr Richard Lessard, directeur de la santé publique à la Régie de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre, il serait faux de réduire l'actuel débat à un problème essentiellement juridique et fiscal. Un problème majeur transcende la contrebande du tabac: c'est un problème lié à la santé des Canadiens et à la santé des Québécois.

Voici ce que nous dit le Dr Lessard lui-même: «Le tabac est actuellement associé à 40 p. 100 des décès par maladie cardiovasculaire, à 87 p. 100 des décès par cancer du poumon et à 80 p. 100 des maladies du système respiratoire. L'incidence des bébés de petit poids est deux fois plus élevée chez les mères fumeuses que chez les mères non fumeuses. Or actuellement, la hausse est la plus importante chez les jeunes femmes au niveau du tabagisme.

(1150)

On commence à fumer entre 11 et 15 ans. À 15 ans, 22 p. 100 des garçons fument, et presque 30 p. 100 des filles fument. Par ailleurs, 65 p. 100 de ces jeunes paient eux-mêmes leurs cigarettes. Toute politique publique, que ce soit la non-intervention pour contrôler la contrebande ou la baisse des taxes sur le tabac, non accompagnée de mesures énergiques de prévention, favorise nécessairement l'adoption de la cigarette par ce groupe vulnérable».

M. Lessard ajoute que présentement l'évaluation des coûts reliés à l'adéquation tabac-problèmes de santé se chiffre à 2,5 milliards de dollars pour le Québec et à 9,5 milliards pour le Canada, et ce, malgré le fait qu'avant la débâcle actuelle, il y avait eu une baisse de 40 p. 100 dans la consommation de tabac depuis 1980.

Plusieurs intervenants en matière de santé ont déploré la diminution du prix de vente des cigarettes suite à la baisse de taxes annoncée par le gouvernement. Cette mesure entraînera, à leur avis, une augmentation de la consommation du tabac auprès des groupes plus fragiles, notamment les adolescents et les jeunes femmes.

Mon collègue de Lévis a souligné, à juste titre, les effets néfastes de la consommation de tabac chez les jeunes. Nous sommes d'avis que les mesures législatives annoncées doivent être nécessairement accompagnées de mesures éducatives. Il faut développer de nouveaux programmes ou soutenir les programmes actuels en investissant dans des campagnes publicitaires de masse.

Il importe également de conscientiser les commerçants face à leur responsabilité sociale. La loi C-111 entreprend ce virage par la mise en place de mesures entourant la vente de cigarettes. Par exemple, un affichage énonçant clairement l'interdiction de vendre des cigarettes aux mineurs est un pas dans la bonne direction.

Mais il faut, à notre avis, investir à plus long terme dans une campagne massive de lutte au tabagisme. C'est d'ailleurs avec intérêt que je souligne que le gouvernement du Québec a mis de l'avant une importante campagne afin de prévenir la consommation de cigarettes et de modifier le comportement des jeunes fumeurs. Plusieurs gouvernements sur le territoire canadien ont d'ailleurs emboîté le pas.

Les dispositions annoncées dans le projet de loi C-11 au sujet de la Loi sur l'accise et celle sur la douane confèrent des pouvoirs plus étendus au ministre responsable, de même qu'aux différents corps policiers au Canada et au Québec chargés de faire respecter la loi sur l'ensemble du territoire. Ces dispositions, selon le gouvernement, donneront les outils juridiques nécessaires à un meilleur respect de la loi et à une poursuite de la lutte à la contrebande.


1664

Une disposition intéressante de ce projet de loi se retrouve à l'article 9. Il y est fait mention que le ministre peut autoriser l'agent à vendre ou à détruire les marchandises saisies.

Il va sans dire que le gouvernement ne procédera jamais, j'en ai l'intime conviction, à la vente de produits du tabac résultant d'une saisie. Cette pratique, si elle est répandue dans certains États américains, serait malvenue dans le contexte actuel du pays. Par contre, la vente de matériel qui a servi au transport ou à l'entreposage de ces marchandises pourrait être, bien sûr, vendu et pourrait s'avérer une source de financement intéressant, notamment pour être réinjecté dans des programmes de lutte à la contrebande ou dans une campagne de sensibilisation auprès de la population.

(1155)

Le gouvernement doit s'assurer, afin de lutter efficacement contre les méfaits du tabac, de maintenir la stratégie nationale de lutte contre le tabagisme. Ce plan d'action, élaboré avec les gouvernements provinciaux, a pour principal objectif de réduire la consommation.

Cette stratégie, tous les députés de cette Chambre le savent, vise trois objectifs: la protection de la santé et les droits des non-fumeurs, la prévention, c'est-à-dire aider les non-fumeurs à le rester, et finalement, la cessation, aider ceux et celles qui voudraient bien arrêter de fumer.

À ce chapitre, la concertation des divers niveaux de gouvernement et des organismes non gouvernementaux va de pair avec l'efficacité à réduire la consommation du tabac.

Nous croyons que le gouvernement doit harmoniser les différentes mesures législatives visant à lutter contre le tabagisme et ses effets. Nous croyons que les mesures de renforcement proposées dans le projet de loi C-11 quant à la vente de produits du tabac aux jeunes, doivent s'accommoder d'une volonté réelle de mettre fin au tabagisme.

Se contenter de limiter simplement l'accès aux produits du tabac aux jeunes, par des mesures plus ou moins coercitives à l'endroit des commerçants, des producteurs et des consommateurs, n'est pas en soi une solution suffisante au problème du tabagisme.

Le gouvernement doit assumer ses responsabilités. Comme le soulignait le Dr Lessard, nos gouvernements ont déjà pris un virage en faveur de la santé et compris que l'investissement à long terme dans la santé constitue une des garanties les plus importantes de notre capacité comme société à résoudre la crise économique. Pendant cette période de restriction dans les services de santé au Québec, et probablement ailleurs au Canada, comment comprendre que la santé soit laissée à l'écart d'une crise dont la conséquence la plus importante est la production de la maladie?

Comment ne pas conclure que les seuls gagnants sont les compagnies de tabac? Notre société doit-elle se mettre à genoux devant une industrie qui prend notre propre santé en otage, une industrie dont les économistes nous disent qu'elle est de plus en plus mineure dans notre économie?

Nous comprenons l'importance des enjeux économiques et juridiques présentés par la révolte d'une partie de la population contre les taxes et l'indignation de toute la population pour la contrebande et ses effets corrupteurs. Nos ministres de la Justice et des Finances, stimulés par la grogne populaire, nous présentent là-dessus des arguments plus que convaincants.

Il paraît urgent et critique de demander aux premiers ministres d'écouter également leur ministre de la Santé et de renouer avec leurs engagements en faveur du bien-être de la population.

Il importe de réintroduire la dimension sociale et humaine dans le débat actuel. Nul gouvernement n'a le droit d'oublier, au nom de considérations purement fiscales, la santé et le bien-être de la société.

[Traduction]

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, je suis très heureuse de pouvoir me prononcer aujourd'hui sur la partie du projet de loi C-11 qui modifiera la Loi sur la vente du tabac aux jeunes. La mesure figurant dans cette proposition de modification constitue une étape importante dans notre lutte permanente contre la consommation du tabac, surtout auprès des jeunes Canadiens.

Entrée en vigueur le mardi 8 février 1994, la nouvelle Loi sur la vente du tabac aux jeunes se veut un des volets du plan gouvernemental visant à combattre la contrebande. Elle fait passer de 16 à 18 ans l'âge requis pour acheter des cigarettes. Elle limite les distributrices automatiques de cigarettes dans les bars, tavernes et autres lieux semblables. Elle augmente les peines dont est passible quiconque vend des produits du tabac à des mineurs.

(1200)

Une nouvelle gamme de peines a été établie pour toute vente à des personnes âgées de moins de 18 ans, y compris la vente effectuée par distributrice automatique. Pour la première infraction, l'amende s'élèvera à 1 000 $; pour la deuxième infraction, l'amende maximale sera de 10 000 $; pour les infractions subséquentes, elle sera 50 000 $.

La proposition de modification dont nous sommes saisis aujourd'hui concerne ce qu'on appelle communément les mini-paquets qui contiennent généralement 15 ou 5 cigarettes, soit moins de 20. J'ai vu ces mini-paquets. Dans bien des cas, on dirait des tablettes de chocolat. Il est très étonnant de voir que ces paquets de cigarettes puissent être vendus aux jeunes, sans contrainte, comme s'il s'agissait de simples tablettes de chocolat. J'estime qu'il est très important de les interdire.

[Français]

Les paquets pour jeunes ont commencé à faire leur apparition chez les commerçants canadiens vers la fin des années 1980. Les fabricants de produits du tabac ont prétendu, à l'époque, que cette mesure avait été adoptée pour plaire aux fumeurs adultes. Mais je crois, tout comme les organismes canadiens de santé, que leur disponibilité accroît la possibilité que les jeunes commencent à fumer.

Ces paquets ont un attrait spécial pour les jeunes parce qu'ils sont attrayants et que leur prix est inférieur à celui des paquets ordinaires. Pour un jeune qui ne dispose que de peu d'argent, ces paquets sont plus abordables et pour les plus jeunes, il est plus facile de les cacher à la vue des parents et des enseignants.


1665

Comme je l'ai dit, il y en a certains qui contiennent environ cinq cigarettes, cela ressemble à une tablette de chocolat.

Un sondage mené en Nouvelle-Écosse en 1990 a indiqué que la majorité des adolescents qui fument achètent des «kiddy pack». Chez les fumeurs de sixième année, qui ont entre 11 et 13 ans, près de la moitié des fumeurs achètent des paquets pour jeunes. Cette recherche a été effectuée il y a près de quatre ans, mais la situation est probablement la même aujourd'hui.

[Traduction]

Le projet de loi C-11 interdira la vente de paquets contenant moins de 20 cigarettes. Il interdira aux fabricants de tabac de faire des paquets de moins de 20 cigarettes. Quiconque vendra ou mettra en vente des paquets contenant moins de vingt cigarettes encourra, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de 2 000 $ ou une peine d'emprisonnement maximale de six mois, ou les deux, et par mise en accusation, une amende maximale de 100 000 $ et une peine d'emprisonnement maximale de deux ans, ou les deux. Tout fabricant de tabac qui fera des paquets de moins de 20 cigarettes encourra, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de 200 000 $ ou une peine d'emprisonnement maximale de six mois, ou les deux, et par mise en accusation, une amende maximale de 500 000 $ ou une peine d'emprisonnement maximale de deux ans, ou les deux.

Le gouvernement a reconnu que le plan d'action visant à lutter contre la contrebande et les mesures fiscales associées à ce plan posaient des risques pour la santé. Je tiens à souligner que nous sommes tout aussi déterminés à mettre fin à la consommation de tabac qu'à régler le problème de la contrebande. Cette modification ne constitue qu'une étape de plus dans nos efforts en vue d'éliminer la consommation de tabac.

La santé occupe une place très importante dans ce plan d'action qui prévoit, entre autres, l'adoption d'une mesure législative. À cet égard, nous avons réagi immédiatement en proclamant la Loi sur la vente du tabac aux jeunes et en présentant une modification concernant les paquets de moins de 20 cigarettes.

[Français]

Nous adoptons aussi des mesures pour donner plus de mordant à la mise en application de cette loi. Quelque 300 inspecteurs de Santé Canada ont déjà été désignés en vertu de cette loi et, comme mesure intérimaire, ils seront disponibles pour assurer le respect de la loi tout en veillant à d'autres tâches. Au cours des deux prochains mois, nous produirons une trousse de formation et de nouveaux inspecteurs seront engagés pour prendre la relève et assurer le respect de la Loi sur la vente du tabac aux jeunes.

D'autres activités de conformité en cours ont trait à l'envoi de lettres explicatives et d'affiches à tous les détaillants du Canada. Les affiches doivent être placées partout où l'on trouve des produits du tabac et partout où on les met en vente. Tout détaillant qui refuse de placer ces affiches bien en vue indiquant que la vente du tabac aux jeunes âgés de moins de 18 ans est interdite sera passible d'une amende allant jusqu'à 250 $.

(1205)

Nous placerons aussi des annonces dans les journaux pour informer les détaillants de leurs obligations en vertu de la nouvelle loi.

[Traduction]

Nous examinons également les mesures qui pourraient être prises dans des secteurs tels que l'empaquetage sans marque distinctive et les normes des produits. L'empaquetage sans marque distinctive ne comporte aucun trait particulier, même si l'utilisation d'une marque de commerce est permise. Nombre de personnes qui oeuvrent pour la promotion de la santé estiment que l'empaquetage sans marque distinctive, qui empêche les produits de se démarquer et qui rend la promotion beaucoup plus difficile, constituerait un moyen de dissuasion très efficace.

En ce qui concerne les normes des produits, nous tentons d'introduire de nouveaux règlements en vertu desquels les fabricants seraient tenus de faire figurer, sur les paquets, des renseignements sur les substances chimiques que renferment le tabac et la fumée du tabac.

Une importante campagne de sensibilisation est également en préparation. Cette campagne, qui s'adressera au grand public et à des groupes-clés comme les jeunes et les femmes, sera mise sur pied en collaboration avec les gouvernements des provinces et des territoires, de concert avec des organisations non gouvernementales qui oeuvrent dans le domaine de la santé.

Des mesures ont déjà été prises. Une campagne nationale à l'intention des jeunes a été lancée la semaine dernière sur les chaînes de radio et de télévision qu'ils écoutent et regardent le plus souvent.

Nous avons également l'intention de collaborer étroitement avec nos partenaires de la santé et des gouvernements provinciaux à la mise au point d'un système de suivi de la consommation du tabac, particulièrement chez les jeunes. Il sera alors essentiel de recueillir régulièrement des informations si nous voulons être capables de mesurer le succès de nos initiatives et de mettre en place des mesures encore plus efficaces à l'avenir.

[Français]

La consommation du tabac est alarmante chez un bon nombre de groupes difficiles à rejoindre. Ces groupes ne répondent pas traditionnellement aux messages conventionnels antitabagisme. Nous consacrerons des efforts spéciaux pour les rejoindre.

Nous ferons aussi des efforts accrus pour rejoindre des familles, les nouveaux parents, les dispensateurs de soins et les autres intervenants qui jouent des rôles modèles positifs auprès des enfants. Nous accorderons notre appui aux programmes d'éducation scolaire et aux activités communautaires.

Une surtaxe sur les profits des fabricants de produits du tabac consacrée à la santé sera prélevée pendant trois ans pour financer ces initiatives spéciales. Nous affirmons en effet que les fabricants sont responsables et qu'ils doivent en payer le prix.

[Traduction]

Ces trois prochaines années, nous allons assister à l'un des efforts les plus concertés jamais déployés dans le domaine de l'éducation en matière de santé. C'est le programme de lutte anti-tabac le plus rigoureux qu'on ait jamais mis en place. Les initiatives de collaboration prises ces quelques dernières années dans le domaine de la lutte anti-tabac se sont révélées très fructueuses. Elles ont permis de réduire la consommation de tabac chez les personnes âgées de plus de 15 ans. Je suis sûre que ces nouvelles ressources nous permettront d'améliorer encore


1666

ces premiers résultats. Cela exigera une coopération soutenue et une étroite collaboration.

Ces deux dernières semaines, j'ai eu des entretiens avec des représentants d'organisations oeuvrant dans le domaine de la santé, ainsi qu'avec les ministres provinciaux et territoriaux de la Santé. Lors de la dernière rencontre que j'ai eue avec les ministres de la Santé, je leur ai proposé d'étudier avec eux la meilleure utilisation possible des ressources consacrées à la nouvelle stratégie fédérale de lutte anti-tabac.

Les fonctionnaires de mon ministère et moi avons pris l'engagement de demander leur avis et leur aide à ces groupes et de nous efforcer avec eux de réduire la demande de tabac, la cause principale des maladies pouvant être évitées au Canada.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, j'ai écouté la ministre de la Santé avec beaucoup d'intérêt, comme je l'ai d'ailleurs écoutée chaque fois qu'en Chambre elle a répondu à des questions concernant le problème du tabagisme.

On peut constater que la ministre, encore aujourd'hui, est bien intentionnée quant aux mesures à prendre en terme de prévention. Cependant, comme je l'ai dit lors de mon intervention, ce que l'opposition officielle craint le plus, c'est l'application de ces mesures. Vous avez notamment parlé du coût de ce qu'on appelle les paquets pour enfants, les paquets de moins de 20 cigarettes qui seront dorénavant interdits. Il faut se rappeler aussi que suite à la baisse des taxes, le prix, en ce qui concerne le Québec, a considérablement diminué, de sorte que le paquet de plus de 20 cigarettes coûte aujourd'hui beaucoup moins cher. Il coûte même moins cher que le paquet de 15 cigarettes d'autrefois. Donc, l'influence du coût peut jouer beaucoup.

(1210)

Alors, j'aimerais bien que la ministre nous donne son opinion sur cet aspect, si cela a été correctement évalué suite à la baisse du coût du paquet de cigarettes. On sait maintenant que les personnes qui fument au-delà de 20 cigarettes sont considérées comme des fumeurs à pratique très élevée, ce qui est fortement nuisible pour la santé.

La ministre a parlé de nouveaux inspecteurs. J'aimerais qu'elle nous précise, si elle est en mesure de le faire aujourd'hui, le nombre de nouveaux inspecteurs qu'elle envisage recommander, l'engagement, et le coût que cela impliquera. Quant à l'aspect des amendes, à mon avis, elles ne sont pas tellement sévères et le montant n'est pas si élevé, dépendant toujours de l'infraction ou de la mesure. Je veux relater ici une expérience vécue relativement à la Loi sur les non-fumeurs dans les édifices gouvernementaux.

À Radio-Canada, à un moment donné, il y avait eu une opération massive d'application de cette nouvelle loi dès l'entrée en vigueur du règlement. Finalement, le montant total de ces amendes s'était chiffré à une somme très importante. Les employés ont protesté, et finalement, tout cela s'est terminé sans paiement d'amendes.

Alors, le jour où le gouvernement décidera de l'appliquer équitablement partout, à la grandeur du Canada, de façons juste et complète, avec un nombre approprié d'inspecteurs, il faudra aussi prévoir les cas où on n'aura pas la collaboration des corps policiers, provinciaux ou autres. Nous aurons besoin d'un grand nombre d'inspecteurs pour couvrir tout le territoire. Je doute qu'on puisse le faire. Il risque aussi de se produire des actions partielles.

J'ai donné l'exemple de Radio-Canada, mais il pourrait s'agir d'autres entreprises, dans d'autres milieux où, tout à coup, les individus subissent les amendes, mais constatent, en même temps, que des gens, ailleurs au pays ou même dans la région, peuvent continuer à fumer impunément, et je pense en particulier aux jeunes. Il risque de se produire un sentiment d'injustice, alors que certaines personnes seront visées par l'application de la loi, tandis que d'autres pourront continuer à y contrevenir sans pénalité.

J'aimerais connaître l'opinion de la ministre de la Santé à cet égard.

Mme Marleau: Monsieur le Président, je dois dire que les amendes sont, en effet, imposées lors de la vente de cigarettes à des jeunes. C'est vrai que nous avons maintenant des inspecteurs, qui étaient d'ailleurs déjà en place, à qui on a donné le mandat de s'assurer que les commerçants ne vendent pas à des jeunes.

Mais l'idée est de convaincre tous les détaillants de faire bien attention à qui ils vendent ces cigarettes. Vous savez, certains jeunes n'ont pas l'air de gars de 30 ans, ils ont plutôt l'air d'enfants de 10 ans, lorsqu'ils s'amènent au dépanneur pour acheter des cigarettes.

Il faut plutôt leur faire penser qu'il n'est pas bon que ces jeunes achètent des cigarettes, qu'ils ne devraient pas en avoir et que c'est contre la loi. C'est vrai que nous voulons que les inspecteurs fassent leur travail, mais nous sommes convaincus que la plupart des détaillants sont conscients, ou le seront sous peu, des effets néfastes. Que voulons-nous faire? Nous voulons nous assurer que les jeunes n'auront pas accès facilement aux cigarettes. C'est bien important. C'est une autre raison pour laquelle nous voulons que cesse la vente des petits paquets ou kiddy packs.

Si beaucoup de ces jeunes arrivent à la maison avec un paquet de cigarettes, leur mère ou leur père s'en apercevra. Il est donc plus facile de cacher ces petits paquets, qui sont vraiment faits pour des enfants. Quand on voit le petit kiddy pack, on sait que c'est fait pour des enfants. C'est pour ça que c'est fait.

(1215)

Alors, c'est contre la réalité de ce que l'on veut faire que de vendre à ces jeunes. Nous espérons, et nous en sommes certains, que nous allons obtenir la collaboration de la plupart des détaillants, parce que cela est essentiel pour le bien-être de la société canadienne.

[Traduction]

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, je voudrais féliciter la ministre de la Santé pour son exposé et je sais gré au gouvernement des efforts qu'il déploie dans ce domaine. J'estime qu'il a adopté une approche équilibrée et qu'il a tenté de s'attaquer à tous les aspects de ce problème très complexe.

Cependant, mes électeurs ont soulevé un point qui est lié directement à cette question. Il s'agit d'un autre problème de santé chez les jeunes. En effet, selon certains experts, la consommation d'alcool parmi les jeunes est probablement un des graves


1667

problèmes que nous devrons affronter. Nous nous rendons compte que, une fois que toutes ces mesures auront été prises à l'égard du tabac, les éléments criminels de la société chercheront de nouveaux moyens de réaliser des bénéfices. Nous savons aussi que le marché de l'alcool est très vaste et que ces éléments criminels voudront cibler les jeunes en recourant à la contrebande, qui pourrait tout à coup devenir très profitable.

Étant donné que l'alcool constitue un grave problème chez les jeunes et qu'il risque d'être vendu en contrebande, la ministre serait-elle disposée à s'engager à prendre aussi des mesures contre l'abus d'alcool et contre la contrebande de ce produit qui risque d'avoir lieu après les mesures de lutte contre la contrebande du tabac? Serait-elle disposée à commenter ou à examiner aussi ce problème?

Beaucoup de nos électeurs se demandent si la situation ne fera pas boule de neige. La réduction des taxes sur le tabac sera-t-elle suivie d'une réduction des taxes sur l'alcool et sur bien d'autres produits susceptibles d'être vendus en contrebande?

Mme Marleau: Monsieur le Président, nous sommes résolus à briser le réseau de contrebande, et c'est ce que nous avons voulu faire en baissant le prix des cigarettes.

Bien que nous sachions que de l'alcool entre par le même réseau, ce n'est pas le même problème, du moins il n'est pas aussi important, même s'il existe. Nous sommes persuadés que nous aurons le dessus et que c'est vraiment un problème d'application de la loi.

La vente d'alcool aux mineurs est interdite partout au Canada. Ce n'est pas légal. Pour le tabac, nous essayons de faire la même chose, c'est-à-dire de rendre illégale la vente de tabac aux moins de 18 ans, comme c'est le cas pour la vente d'alcool. C'est la base des changements que nous proposons, et il importe que tous les Canadiens collaborent au succès de cette mesure.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je suis heureuse également des observations de la ministre de la Santé.

Je me demande si elle pourrait répondre à cette question que je me pose depuis la réunion d'information d'hier. Ce n'est absolument pas une attaque, c'est simplement une demande de précisions.

Si j'ai bien compris, la fabrication de mini-paquets va continuer jusqu'au 1er mai 1994. Cela signifie que la production pourra encore continuer pendant deux mois pour donner le temps aux fabricants de faire la transition.

Il me semble inhabituel et presque ridicule de laisser cet emballage sur le marché pendant encore deux mois, alors que nous cherchons à faire appliquer une loi.

(1220)

La ministre pourrait-elle nous donner l'assurance qu'elle examinera la question et nous expliquer comment elle s'y prendra pour empêcher que les mini-paquets ne soient effectivement vendus aux mineurs entre l'adoption de la loi et le 1er mai 1994?

Mme Marleau: Monsieur le Président, je partage les réserves de la députée.

Un de nos problèmes, c'est que nous parlons du projet de loi C-11. Ce n'est toujours pas une loi. Plus elle sera adoptée rapidement, plus tôt nous pourrons agir pour mettre un terme à la vente des mini-paquets. Tant que la loi n'aura pas été adoptée, il ne sera pas illégal de les fabriquer et de les vendre. Il importe donc que cette loi soit adoptée le plus vite possible.

Les fabricants en sont parfaitement conscients. Nous avons donné avis que, très bientôt, il serait illégal de les vendre et de les produire.

Ce serait merveilleux si nous pouvions adopter cette loi à toutes les étapes très rapidement, qu'il en soit de même au Sénat et qu'elle reçoive la sanction royale.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui en tant que représentante élue de la circonscription de Calgary-Sud-Est. À ce titre, je parle au nom de mes électeurs et je joins ma voix aux leurs.

Cela dit, en préparation de ce débat, j'ai non seulement pris note des lettres et des appels que j'ai reçus, mais j'ai également fait un sondage dans ma circonscription. Cinquante-huit pour cent des gens interrogés se sont prononcés contre la proposition du gouvernement de réduire les taxes. Je me fais un plaisir d'enrichir le débat de leur opinion et de leur sagesse collectives.

Le projet de loi dont nous sommes saisis comprend trois éléments. Je limiterai mon intervention aux modifications proposées à la Loi sur la vente du tabac aux jeunes. J'aimerais également faire part de mon point de vue personnel sur la question. Mais avant cela, j'estime essentiel de s'arrêter un moment sur le but de cette mesure législative.

Le gouvernement prétend vouloir mettre fin à la contrebande qui prospère dans notre pays. D'où le projet de loi C-11, qui s'inscrit dans le plan d'action national de lutte contre la contrebande. Cette mesure législative et le plan d'action qui l'accompagne me disent quatre choses.

Premièrement, ce projet de loi est la preuve que le gouvernement canadien n'est pas capable de faire respecter ses propres lois. Deuxièmement, il prouve que la puissante industrie du tabac a une influence énorme et très subtile. Troisièmement, le projet de loi C-11 est la preuve éclatante que le gouvernement fait fi du déficit. Quatrièmement, il démontre très clairement que le gouvernement se préoccupe bien peu de la santé et du bien-être des jeunes Canadiens.

Je vais traiter du premier point, soit que le gouvernement canadien démontre qu'il ne peut pas faire respecter ses propres lois. Il admet que le problème de la contrebande est important et qu'il y a des gens qui s'enrichissent en défiant la loi. Mais au lieu d'appliquer plus strictement les lois qui existent déjà, le gouvernement préfère les modifier. Il se berce d'illusions. Cette mesure législative mettra peut-être fin à la contrebande organisée de cigarettes, mais ce n'est qu'une demi-mesure qui ne mettra pas fin à la contrebande en général.


1668

Tout bon débat doit être une remise en question. Ma première question est donc la suivante. Comment se fait-il que le gouvernement ait si mal fait respecter la loi qu'il doive maintenant en venir à de telles mesures? Vont-elles rendre la loi plus facile à appliquer?

(1225)

Ma question suivante concerne l'influence de l'industrie du tabac. Le lobby hautement perfectionné et puissant de cette industrie a finalement amené le gouvernement à faire marche arrière au sujet du facteur qui contribuait le plus puissamment à réduire les ventes de tabac, soit les taxes élevées qui frappaient ce produit. La population canadienne est déjà désabusée et a perdu confiance dans le gouvernement actuel. Comment le gouvernement fera-t-il pour rétablir cette confiance puisqu'il semble avoir cédé aux pressions du lobby de l'industrie du tabac?

En proposant le projet de loi C-11 pour mettre fin à la contrebande, le gouvernement va se priver de recettes et, ce faisant, il démontre clairement que la lutte au déficit et à la dette n'est pas une priorité.

Le premier ministre a reconnu que le gouvernement prévoit de perdre, en 1994-1995 seulement, quelque 300 millions de dollars de recettes à cause de la réduction des taxes sur le tabac. Le premier ministre a ajouté que la surtaxe de promotion de la santé qui frappera les profits des fabricants de tabac produira des recettes de 200 millions de dollars en trois ans. L'information publiée par le gouvernement au sujet de son plan de lutte contre la contrebande indique que ces 200 millions serviront à financer des activités de promotion de la santé, notamment des mesures visant à réduire le tabagisme. Tout cela semble très bien, mais qui paiera?

Le gouvernement prévoit de perdre 300 millions de dollars en recettes fiscales pendant la première année. Il affirme ensuite qu'il pourra aller chercher 200 millions de dollars en taxes auprès de l'industrie du tabac. Ces chiffres me semblent douteux. Il y aura, au mieux, un manque à gagner de 100 millions de dollars, sans tenir compte des coûts supplémentaires des programmes de promotion de la santé que le gouvernement présente comme une priorité. Un manque à gagner de 100 millions de dollars au départ, c'est un montant substantiel, mais ce n'est encore rien en comparaison des coûts de santé qu'entraînera l'application du plan d'action.

En réduisant les taxes, nous encourageons les fumeurs à fumer encore davantage et les nouveaux fumeurs à accroître leur dépendance à l'égard du tabac. Les fumeurs feront augmenter les coûts du système de soins de santé. Ils n'ont peut-être pas besoin de soins dans l'immédiat, mais dans 10 ou 15 ans, le gouvernement regrettera sa décision.

Les études et les statistiques des dernières décennies ont montré qu'il existe un lien direct entre le tabagisme et les maladies cardiaques ainsi que les cancers du poumon, de l'oesophage, de la bouche, de la langue et du larynx. On a également démontré que le tabagisme a un effet néfaste sur le foetus.

Combien tout cela finira-t-il par coûter? Les chiffres dépassent de beaucoup les bienfaits du programme proposé.

La troisième question adressée au gouvernement est de savoir comment trouver la meilleure façon de s'attaquer au problème du déficit sans avoir recours à des solutions fiscales complexes. Les mesures proposées ne mettront pas fin à la contrebande de cigarettes; elles ne sont que de la poudre aux yeux.

Quatrièmement, j'estime que le projet de loi C-11 est la preuve que le gouvernement fédéral se soucie fort peu de la santé et du bien-être des jeunes. Les taxes sur les cigarettes et les produits du tabac étaient élevées pour une raison: elles rapportaient de l'argent au gouvernement. En outre, les statistiques démontrent que les taxes élevées entraînent une diminution des ventes de tabac, en particulier chez les jeunes. Les cigarettes étaient tout simplement devenues trop coûteuses à cause des taxes.

Selon des données provenant de Santé et Bien-être social Canada, chaque hausse de 10 p. 100 du prix des produits du tabac entraîne une baisse de 4 à 9 p. 100 de la consommation chez les adultes. Chose plus importante, les ventes aux adolescents baissent de 10 à 14 p. 100.

(1230)

Ce projet de loi a des répercussions très graves sur la santédes Canadiens et plus particulièrement, celle de nos jeunes. M. Robert Allen est le professeur canadien d'économie qui prétend que, si la réduction de taxes sur le tabac à laquelle on a procédé au Québec s'étend au reste du pays, elle se traduira par 840 000 nouveaux fumeurs et que 175 000 d'entre eux seront des adolescents.

Le gouvernement affirme avoir un plan pour empêcher nos jeunes de fumer. Si j'ai bien compris, il s'agit de faire en sorte que nos jeunes n'aient pas accès à des cigarettes bon marché. Cependant, le gouvernement a choisi de modifier un plan qui fonctionnait bien. L'usage du tabac était en baisse au Canada et les jeunes, y compris ma fille, étaient découragés de fumer.

Malgré mes objections et en cachette au début, ma fille a commencé à fumer à l'âge de 12 ans. Elle pouvait consommer plusieurs paquets par semaine et rien de ce que nous pouvions dire ou faire ne l'amenait à changer d'idée. Lorsque nous allions aux États-Unis, elle s'achetait des cartouches bon marché de cigarettes américaines et fumait comme une cheminée jusqu'à ce qu'elle ait épuisé ses stocks. Cependant, une fois de retour chez nous, elle reprenait ses habitudes et ne fumait que deux paquets par semaine. Elle ne pouvait se permettre d'acheter de grandes quantités de cigarettes au prix où elles étaient.

L'augmentation du prix des cigarettes avait entraîné une baisse de la consommation de tabac chez elle. Cela m'afflige de penser qu'une mesure prise par le gouvernement va maintenant encourager davantage son accoutumance aux cigarettes.

Le gouvernement propose une autre idée pour réduire le nombre de jeunes qui fument, interdire la vente des petits paquets. Je trouve cette idée ridicule. Comme un de mes jeunes électeurs qui travaille dans une station-service me l'a dit, ce sont surtout des personnes âgées qui achètent ces petits paquets; les jeunes à la page achètent plutôt les paquets de 25.

Il y aura toujours une partie de la population qui essaiera de contrevenir aux règles et cela s'appliquera sans aucun doute à ce projet de loi. Si les jeunes veulent des cigarettes-et grâce au projet de loi C-11, ils pourront se permettre d'en acheter-une fois couchés, le soir, ils penseront au moyen de s'en procurer. Le gouvernement n'a fait que relever l'âge à partir duquel il est permis d'acheter des cigarettes et, encore là, cette disposition


1669

perd de son importance en l'absence d'une volonté très ferme de la faire respecter.

Il n'y a qu'une seule mesure qui a réussi à réduire l'accès de nos jeunes aux produits du tabac, et c'est l'augmentation des taxes. J'invite mes vis-à-vis et tous mes collègues de ce côté-ci à reconnaître la sagesse de cette mesure. Comme un jeune adulte me l'a dit tout récemment, le gouvernement devrait accroître les taxes sur les produits néfastes pour la santé et les réduire sur les produits qui sont bons pour nous au contraire.

Les gouvernements doivent être conscients de leur responsabilité sociale à l'égard de nos jeunes. Lorsqu'ils le sont, les parents comme moi peuvent alors les en remercier.

M. Julian Reed (Halton-Peel): Monsieur le Président, je m'interroge simplement sur quelques points. J'écoutais la députée exprimer son inquiétude-sincère de toute évidence-devant le fait que le tabagisme crée une dépendance. Je suis moi-même un ancien fumeur invétéré, mais j'ai mis un terme à cette pratique il y a environ 25 ans.

Je crois tout de même que certaines choses méritent d'être tirées au clair. Je me demande si la députée sait qui fume les cigarettes de contrebande, ces cigarettes bon marché.

(1235)

Si vous visitez les écoles, vous constaterez que des revendeurs s'y rendent avec leurs voitures pleines de cigarettes. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. Je veux seulement rappeler une fois de plus aux députés qu'ils doivent adresser leurs questions à la présidence plutôt que d'adopter un ton qui peut sembler plus personnel en échappant un vous par-ci, un autre par-là. Que vous vouliez me faire intervenir ou non, veuillez vous adresser à la présidence en tout temps, s'il vous plaît.

M. Reed: Merci, monsieur le Président, pour ce rappel à l'ordre. Veuillez excuser cette distraction de ma part. Je poursuis.

Ce sont malheureusement les jeunes qui achètent ces cigarettes de contrebande bon marché. À cause de la contrebande, de plus en plus de jeunes sont exposés au tabagisme. Il fallait donc faire quelque chose pour corriger le problème.

Je signale aussi à la députée que cette baisse de taxe est considérée comme temporaire et qu'on rectifiera la situation dès que la contrebande du tabac aura cessé.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir fait part de ses observations.

J'ajoute à son intention que je parlais de mon expérience personnelle, mais que je mets par ailleurs en question la valeur de ces changements à la loi. Je me demande pourquoi on modifierait ainsi notre façon de fonctionner et pourquoi le gouvernement en était venu à croire que les lois en vigueur n'étaient plus satisfaisantes. Voilà ce que j'essayais de faire valoir.

Je dois dire que je ne m'étais pas rendu compte que cette modification était temporaire. J'en reste abasourdie, parce que je croyais que nous discutions d'un changement à long terme. Je n'ai rien à ajouter.

Mme Susan Whelan (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national): Monsieur le Président, je signale à la députée qu'elle se trompe quelque peu lorsqu'elle dit que le gouvernement ne se préoccupe pas de l'application de la loi. Au contraire, cet aspect nous préoccupe énormément et c'est d'ailleurs l'une des raisons principales du dépôt du projet de loi.

Le commissaire de la GRC nous a dit que des mesures devaient être prises, et le gouvernement a répondu en présentant ce plan. Il s'agit d'une stratégie qui vise à assurer l'application de la loi dans notre pays.

Je signale que le problème existe depuis longtemps. Lorsque le gouvernement s'est amené il y a à peine 100 jours, il a dû faire face à un très grave problème. Ce problème n'était pas mineur et il ne venait pas tout juste de se manifester. Il s'agit d'une situation qui dure depuis des années. Nous prenons des mesures et nous faisons face au problème.

Je veux aussi dire à la députée que nous nous préoccupons du déficit et que c'est la raison pour laquelle nous prenons des mesures. Le gouvernement perd plus d'un milliard de dollars à cause de la contrebande de cigarettes. Soixante-quinze millions de cartouches de cigarettes sont illégalement réimportées au Canada. C'est un grave problème dont il faut s'occuper et c'est ce que fait le gouvernement.

La députée juge-t-elle que ce n'est pas une bonne initiative que de dépenser 185 millions de dollars de plus pour la santé des Canadiens, de mener une campagne de sensibilisation ou de renseigner la population sur les problèmes liés à l'usage du tabac? Cette initiative n'est-elle pas une solution concrète aux problèmes soulevés par les intervenants du secteur de la santé? Le gouvernement a adopté une approche globale.

Nous avons étudié les répercussions d'une diminution de la taxe, de même que les préoccupations de ces intervenants, puis nous avons proposé une stratégie globale. J'aimerais bien que la députée nous communique ses vues à cet égard.

Mme Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je vais devoir demander à la députée des précisions relativement à quelques points. Je lui sais gré de ses observations qui, à mon avis, apportent beaucoup à la qualité du débat d'aujourd'hui.

(1240)

Le solliciteur général a déclaré plus tôt ce matin que l'application de mesures d'exécution plus rigoureuses n'aurait pas permis d'atteindre l'objectif visé, qui est de mettre fin au problème de la contrebande. Par conséquent, je me demande pourquoi la députée dit avec autant de fermeté que mes observations au sujet de l'application de la loi ne sont pas tout à fait justes.

J'ai demandé pourquoi on modifiait des lois à ce stade-ci. Assurer l'application des dispositions d'une loi est très important. Il me semble que ceux qui doivent veiller à l'application de la loi doivent assumer cette responsabilité jusqu'au bout. J'ai


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simplement demandé pourquoi il était nécessaire de modifier la loi. Le solliciteur général a effectivement déclaré que l'application de mesures d'exécution plus rigoureuses n'aurait pas permis d'atteindre le but souhaité. Je ne vois pas très bien où la députée veut en venir.

Je suis toutefois d'accord avec elle qu'il est très important d'informer le public de ce que le gouvernement essaie d'accomplir. Néanmoins, je pense que le fait de faciliter la consommation du tabac nous posera un énorme problème de santé dans l'avenir.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex): Monsieur le Président, je voudrais revenir sur certaines questions qu'a soulevées le député. À titre d'ancienne productrice de tabac, de professionnelle de la santé et maintenant de députée, je vois certainement divers aspects du problème. En tant que représentante des producteurs de tabac de ma circonscription, je me devais d'intervenir pour faire des observations sur certaines déclarations faites précédemment.

Quant à l'affirmation que le gouvernement ne s'inquiète ni du déficit ni de la quantité de cigarettes de contrebande, je dirai que, dans la situation actuelle, nous ne percevons pas de recettes. Par conséquent, nous pouvons alléger le problème en réduisant les taxes, quitte à les rétablir ultérieurement, lorsqu'il sera à nouveau possible de percevoir des recettes.

J'en arrive maintenant au fait que le gouvernement ne s'inquiète pas de la santé des Canadiens. Personnellement, je n'ai jamais fumé. Mon mari a été fumeur, et mes deux enfants ne fument pas. Ils ont vraiment choisi de ne pas fumer. Ils ont certainement été exposés au tabagisme. Nous le sommes tous, et c'est à nous de décider si nous prenons cette habitude ou non. C'est une question de jugement, et le gouvernement ne légifère pas là-dessus.

Voilà comment je vois la question: le tabac est un produit légal, et nous devons en tenir compte.

Mme Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je dirai simplement que ces observations sont bien faites et bien accueillies. Je remercie la députée qui les a prononcées.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de donner la parole au député de Scarborough-Rouge River, je me demande s'il veut bien indiquer à la présidence s'il entend partager son temps de parole ou utiliser toute la période de 20 minutes.

M. Derek Lee (Scarborough-Rouge River): Monsieur le Président, si j'ai bien compris, à partir de maintenant, les membres du gouvernement diviseront le temps qui leur est accordé en segments de dix minutes.

Je suis très heureux d'avoir l'occasion de parler de l'initiative que prend le gouvernement pour régler le problème très grave de la contrebande des produits du tabac. À mon avis, le problème ne se résume pas simplement à la consommation du tabac ou à la production de recettes.

Aujourd'hui, j'ai décidé d'aborder la question en m'attaquant à la source du problème, c'est-à-dire au crime organisé. Les criminels professionnels organisés me diraient probablement qu'ils ne constituent pas le problème, mais qu'ils sont simplement une manifestation ou un symptôme du problème. Devant l'importance que prend la contrebande, il m'est impossible de partager leur avis. Le crime organisé est au centre d'autres problèmes très évidents qui minent notre société. Je crois qu'il faut en tenir compte lorsque nous cherchons des solutions aux problèmes que nous étudions aujourd'hui et à d'autres problèmes de nature criminelle qui affligent notre société et dont je parlerai plus tard.

Des ministres et des députés des deux côtés de la Chambre ont très bien décrit le projet de loi C-11 dont nous sommes saisis aujourd'hui. La mesure législative aidera les policiers à faire respecter les mesures de lutte contre la contrebande et permettra également aux autorités de poursuivre leurs efforts ou de redoubler d'ardeur pour réduire la consommation de tabac.

(1245)

Le projet de loi C-11 nous fournit de nouveaux outils que je considère plutôt modestes pour régler les problèmes que pose actuellement la contrebande de cigarettes et d'autres produits. À l'instar des orateurs précédents, je crois que l'application de la loi fait partie intégrante de la solution. Cependant, ce n'est pas la seule solution.

Les mesures que le premier ministre a annoncées le 8 février dernier devraient, du moins je l'espère, permettre à notre société de régler à court et à long termes le problème du tabagisme. La présente initiative traite, je crois, de crime organisé, de revenus et d'interdiction. Elle vise à rétablir l'ordre sur le marché canadien du tabac.

Que s'est-il passé jusqu'à aujourd'hui? Je siège ici depuis cinq ans. Assez tôt, il est apparu que le tabagisme allait causer un très sérieux problème. En effet, c'en est venu au point où 40 p. 100 du secteur canadien du tabac, d'une valeur de 12,4 milliards de dollars, était aux mains des contrebandiers. C'est ainsi que les contrebandiers empochaient chaque année quelque cinq milliards de dollars.

Je signale que cette activité de contrebande était à 95 p. 100 le fait du crime organisé. La nature et l'ampleur de cette activité ainsi que l'existence même du crime organisé ont créé des problèmes sociaux et économiques très évidents, du moins au plan régional et peut-être même dans tout le pays.

Il fallait faire quelque chose, et on aurait souhaité, je suppose, que cela fût fait il y a un an ou deux. De toute façon, nous prenons aujourd'hui des mesures. Si nous ne le faisions pas, plus de 50 p. 100 du marché des cigarettes passerait aux mains des prétendus contrebandiers, du crime organisé, en fait, qui aurait alors empoché 6,2 milliards de dollars.


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Le nombre des saisies de produits illégaux du tabac par la GRC est passé de 303 en 1990 à 5 044 en 1993, et la GRC nous dit que cela ne représente que 1 p. 100 du marché illégal des produits du tabac.

Le trafic des produits du tabac est devenu une entreprise extrêmement lucrative. Les profits à réaliser sont tels que les trafiquants de drogue s'intéressent maintenant à la contrebande des produits du tabac. Le crime organisé est aussi très impliqué.

Je tiens à citer ici le président de la Colombie, un pays qui sait très bien de quoi le crime organisé est capable pour avoir subi toute une série de malheurs par suite du trafic de la drogue. Or, le président colombien a dit que la seule loi que les trafiquants de drogue n'ont pas violée, c'est la loi de l'offre et de la demande. Cela est essentiel à la portée de mon intervention.

Comme il n'y a désormais plus de profits à réaliser dans la contrebande des cigarettes, nous croyons que les éléments du crime organisé qui ont littéralement fait exploser la contrebande de cigarettes, ces dernières années, vont probablement se retirer de cette activité. Avec cette nouvelle initiative, on portera un coup réel et décisif à la contrebande de cigarettes.

(1250)

Je le répète, la contrebande des cigarettes n'est pas à la racine du problème, elle n'en est qu'une manifestation. La même chose est vraie pour la contrebande d'alcool, d'armes à feu et de matériel pornographique, de la prostitution et des jeux de hasard. Ce qui est à la racine du problème, c'est le profit que toutes ces activités peuvent apporter au crime organisé.

Lorsque le premier ministre a réagi, il a d'abord écouté les experts. Ceux-ci, les autorités policières au Canada, ont dit au premier ministre qu'il leur était impossible, par les moyens de répression de la criminalité dont ils disposent, de s'attaquer efficacement à la contrebande et aux autres activités illégales du crime organisé. La réaction du gouvernement est donc fondée sur les conseils d'experts. Nous ne pouvions imaginer aucun autre moyen de faire face à la situation.

Nos plans reposent sur une véritable stratégie qui ne tient pas compte uniquement d'un seul aspect du problème, que ce soit les profits, les revenus ou la décision, pour une personne, de fumer ou de ne pas fumer. Nous devons adopter une vision globale du problème, et je crois que c'est ce que nous avons fait.

Le crime organisé dispose de plus de ressources financières que bien des corps policiers. Il est courant que les organisations de criminels utilisent du matériel très perfectionné et aient recours à des méthodes de contre-surveillance pour se soustraire à toute mesure de détection pendant qu'ils s'adonnent à leurs activités illégales. Ces organisations utilisent des ordinateurs et ont recours aux services d'experts juridiques et financiers ainsi qu'à d'autres personnes pour les aider à administrer leurs entreprises illégales. Ces organisations connaissent des méthodes très complexes pour blanchir l'argent tiré de leurs crimes et en investir une bonne part dans des entreprises légales.

Les organisations de criminels sont attirées par les activités qui rapportent beaucoup-et nous parlons ici de ce type d'activités-et elles s'engagent donc dans les activités qui génèrent le plus de profits au moindre risque. En ce moment, ces activités incluent la contrebande de l'alcool et des armes en plus de celle de la cigarette, le jeu, la prostitution, le passage illégal d'étrangers aux frontières et la pornographie.

Nos prisons seraient insuffisantes pour accueillir tous les drogués, marchands de drogue et contrebandiers. Tant qu'il y aura des clients pour les produits du marché noir, le crime organisé verra un intérêt à recruter des gens et des consommateurs et trouvera constamment de nouveaux moyens pour poursuivre ses activités illégales.

La nécessité de faire échec au crime organisé, du moins dans le domaine de la contrebande de cigarettes, fait partie intégrante de notre stratégie.

Je vous donne un exemple d'opinion d'expert, en l'occurrence Thomas O'Grady, commissaire de la Police provinciale de l'Ontario. Il dit: «Les corps policiers, la population et les paliers de gouvernement concernés», ce qui inclut le fédéral, «doivent continuer de travailler ensemble à l'élaboration de lois et de programmes de lutte contre le crime pour que les jeux de hasard finissent par présenter peu d'intérêt pour les groupes de criminels et soient peu susceptibles de leur rapporter des profits.» D'autres personnes, provenant d'ailleurs dans le monde et citées devant des assemblées législatives canadiennes, au Congrès américain, aux Nations unies et devant des parlements européens, déclarent, comme M. O'Grady, que la perspective de profits incite à former des groupes de criminels.

Je crois que, tout comme nous nous sommes attaqués au problème de la contrebande du tabac, nous devons nous attaquer à la consommation de drogues. Nous devons adopter une stratégie. J'aimerais croire que le gouvernement actuel saura, s'il en a l'occasion et avec l'appui des Canadiens, s'attaquer à cet autre grand mal que constitue la consommation de drogues. Lorsque nous étudierons ce grave problème, il faudra examiner l'ensemble du régime d'imposition, les interdictions, le rapport entre l'offre et la demande ainsi que toute la législation.

(1255)

Mme Hedy Fry (secrétaire parlementaire de la ministre de la Santé): Monsieur le Président, je prends la parole pour appuyer le projet de loi C-11.

Comme les députés le savent, une partie de ce projet de loi vise à modifier la Loi sur l'accise et la Loi sur les douanes. Il porte donc sur des questions telles que la saisie, l'application de la loi, l'identification des produits de contrebande et d'autres questions à caractère juridique liées à la contrebande.

L'autre partie du projet de loi porte sur les conséquences de la baisse du prix des produits du tabac sur les jeunes. Je tiens à dire que, en tant que médecin, j'ai toujours été spécialiste des questions de santé. Je m'intéresse aussi depuis de nombreuses années aux questions liées au tabagisme et à la lutte contre le tabagisme.

Lorsque je suis arrivée à la Chambre, je ne connaissais que mon propre point de vue. Je ne voyais le problème du tabagisme que du point de vue de ses effets sur la santé. C'est un aspect de la


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question que tous les députés qui ont participé au débat jusqu'à maintenant ont mis en relief. Tout le monde sait que le tabagisme est la cause la plus évitable de décès et de maladie dans le monde.

Tout le monde sait également que l'Organisation mondiale de la santé a dit que, de 1990 à 2000, si les gens continuent de fumer au rythme actuel, on dépassera les 40 millions de décès attribuables au tabagisme, ce qui est plus élevé que le nombre total de personnes qui ont perdu la vie durant les guerres du XXe siècle. Cela montre bien aux députés que le tabagisme est vraiment un problème mortel.

Toutefois, lorsque je suis arrivée à la Chambre, je n'étais pas consciente de l'autre aspect du problème, soit la contrebande. Il a été prouvé que la hausse du prix des produits du tabac a joué un rôle clé dans la lutte contre le tabagisme.

En fait, en augmentant les prix, on rend les produits du tabac moins accessibles pour les jeunes. Nous savons que les jeunes qui commencent à fumer entre 13 et 20 ans ont de fortes chances de devenir esclaves du tabac.

J'étais très inquiète de voir que l'un des moyens de régler le problème de la contrebande du tabac consistait à réduire les prix. Toutefois, je sais maintenant qu'un autre groupe d'experts dans le domaine de l'application de la loi et de la contrebande-je ne suis pas spécialiste de ces questions; je suis seulement spécialiste des questions de santé, quoi qu'en disent certaines personnes-ont dit au gouvernement que l'augmentation de la taxe à l'exportation et une intervention policière plus musclée ne seraient pas suffisantes à elles seules pour régler le problème de la contrebande.

Nous avons atteint maintenant un point critique pour ce qui est de la hausse des taxes sur le tabac. Nous en étions presque arrivés au point où en étaient les États-Unis à l'époque où l'alcool était prohibé. Nous avons commencé à voir ici, relativement à la contrebande du tabac, la même chose que ce qui s'était passé aux États-Unis à cette époque-là.

Quarante pour cent de toutes les ventes de tabac portaient sur des produits de contrebande. Deux millions de Canadiens achetaient du tabac de contrebande, et bon nombre d'entre eux étaient des jeunes. Ces mêmes jeunes qui ne pouvaient se procurer des cigarettes à cause de la hausse des prix y avaient maintenant accès grâce aux cigarettes de contrebande bon marché. En fait, toute la stratégie des prix élevés du tabac se trouvait minée.

J'appuie le projet de loi tout d'abord parce qu'il remédie au problème de l'ordre public en accroissant les pouvoirs de saisie, en augmentant les moyens d'identification des produits de contrebande et en intensifiant la lutte contre la contrebande grâce aux outils dont la GRC et les douaniers disposent déjà et dont pourront également se prévaloir, sauf erreur, les corps policiers locaux.

J'appuie également le projet de loi à cause de son second volet qui montre plus précisément que le gouvernement comprend bien la complexité du problème. Il comprend en effet que la baisse des prix du tabac va en accroître l'accessibilité auprès des jeunes Canadiens. Il a donc pris des mesures visant à atténuer les effets de la réduction des taxes sur le tabac en proposant des modifications à la Loi sur la vente du tabac aux jeunes. Ces modifications, qui ont pour effet de porter de 16 à 18 ans l'âge où un jeune peut importer du tabac au Canada, de faire disparaître les machines distributrices partout sauf dans les bars, de renforcer l'application de la loi et de rendre plus sévères les peines frappant quiconque vend du tabac aux mineurs, mettent très clairement le tabac à la place qui lui revient, à côté des produits à vente réglementée comme l'alcool. J'attends avec impatience le jour où le tabac sera traité comme l'alcool, dont les produits sont vendus uniquement dans des magasins qui leur sont réservés.

(1300)

Le gouvernement a agi immédiatement et rapidement pour remédier à un problème que le gouvernement précédent avait laissé s'amplifier sans rien faire pendant quatre ans et prendre les proportions de crise que nous lui connaissons actuellement. Le gouvernement actuel a tâché de remédier à un problème complexe en se préoccupant des deux facettes du problème et en se souciant clairement de la santé des Canadiens.

J'espère que tous les députés à la Chambre comprendront non seulement que le projet de loi mérite qu'on l'appuie, mais qu'il est urgent de le faire pour que nous puissions mettre en application les nombreuses mesures qui sont nécessaires pour améliorer la santé des Canadiens et veiller à ce que nos jeunes n'aient pas accès à cette drogue mortelle.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Monsieur le Président, je participe aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-11, en tant que représentant du caucus réformiste. D'autres députés du Parti réformiste ont déjà parlé de cette importante question à la Chambre, et je suis heureux de pouvoir moi aussi prendre part à la discussion.

Les mesures réellement prévues dans le projet de loi C-11 sont secondaires par rapport à celles du plan d'action gouvernemental de lutte contre la contrebande. Elles permettent au gouvernement de vendre ou de détruire les biens saisis même s'il y a une réclamation en suspens et elles l'autorisent à conférer aux policiers les mêmes pouvoirs de saisie qu'aux agents de la GRC. Le projet de loi exige aussi que les paquets de cigarettes soient estampillés convenablement s'ils sont manufacturés ou importés au Canada, ce qui garantit que les droits ont été payés.

Le projet de loi rend illégale la fabrication ou la vente de paquets contenant moins de 20 cigarettes.

Comme mes collègues du Parti réformiste, j'estime qu'il faut discuter sans tarder de toutes les mesures gouvernementales de lutte contre la contrebande et non pas simplement de celles qui sont prévues dans le projet de loi C-11. Pour l'ensemble des Canadiens, il est très important d'étudier immédiatement toute la portée de ces mesures.

Depuis que je suis député, cette question a été soulevée beaucoup plus souvent que n'importe quelle autre par mes électeurs, ceux-ci étant très majoritairement contre les mesures préconisées par le gouvernement. Les modifications proposées risquent d'avoir d'énormes répercussions sur les Canadiens. Elles auront des conséquences dans de nombreux secteurs, dont l'application


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de la loi, la justice, les relations interprovinciales et, évidemment, la santé, notamment celle des jeunes Canadiens.

Je tiens aussi à signaler qu'en 1993, la production de tabac en Ontario s'est élevée à 173 millions de livres, soit 5,5 millions de plus que le quota de 167,5 millions de livres fixé par la Commission de commercialisation du tabac.

À un moment où les producteurs de tabac sont aux prises avec cet énorme surplus, et cela vaut aussi pour ceux des États-Unis et d'autres pays, n'est-il pas intéressant que le gouvernement propose ces mesures qui accroîtront assurément les ventes de tabac? Il s'agit certes d'une excellente nouvelle pour l'industrie du tabac.

À titre d'agriculteur, je puis dire que, dès qu'il y a surabondance d'un produit, il faut baisser ses prix pour rester concurrentiel sur le marché. En l'occurrence, les entreprises qui fabriquent des produits du tabac achètent leurs intrants à bas prix et augmentent leurs ventes en raison de la baisse des taxes. Elles bénéficient d'abord des faibles coûts de production, puis des taxes moins élevées. Ce sont clairement elles qui bénéficient de ces mesures. Les contribuables sont de toute évidence les perdants, à cause des recettes perdues et des coûts des soins de santé qui augmenteront. Les répercussions financières de ces mesures sont d'ailleurs loin d'être négligeables.

(1305)

Le 8 février 1994, le chef du Parti réformiste a donné ses premières réactions aux mesures annoncées par le gouvernement et fait remarquer que les dépenses excessives du gouvernement étaient la cause profonde de ces graves problèmes. Elles sont effectivement la cause d'une fiscalité trop lourde et, par ricochet, de tous ces autres problèmes.

J'admets volontiers que les conséquences financières ne sont qu'un des aspects importants des mesures prises pour réprimer la contrebande, mais je voudrais m'y attarder aujourd'hui en tenant compte de la question plus large de la politique fiscale du gouvernement fédéral. Je crois que ces problèmes font très bien ressortir comment il faut revoir les priorités du gouvernement.

Il y a plusieurs questions à poser au gouvernement fédéral au sujet de ces mesures. Pour commencer, je voudrais savoir combien elles coûteront. Je puis constater qu'elles ont un retentissement sur bien des aspects de la situation financière. L'une des questions les plus évidentes est la suivante: Comment le gouvernement remplacera-t-il les recettes qu'il a sacrifiées en abaissant les taxes sur les cigarettes? Nous savons bien qu'il n'y a pas de coffre aux trésors dans lequel il pourrait puiser. Toute recette supplémentaire devra venir de nouveaux impôts, et cette charge fiscale ne pourra que créer de nouveaux problèmes de fiscalité.

La réduction des taxes aura aussi des conséquences catastrophiques sur le plan de la santé publique. À cause de cette initiative, il sera très difficile aux fumeurs de renoncer à une habitude bien ancrée, et toute une nouvelle génération commencera à consommer ce produit nocif. Mis à part les coûts humains, impossibles à mesurer, quels seront les coûts pour nos services de santé?

Depuis un certain nombre d'années, le gouvernement fédéral réduit ses paiements de transfert aux provinces. Certaines d'entre elles ne peuvent plus faire face aux coûts des soins de santé. Personne n'ignore que les services de santé sont aux prises avec des difficultés financières redoutables. Des groupes qui oeuvrent dans le domaine de la santé prétendent que le traitement des maladies des nouveaux fumeurs ajoutera environ 1,3 milliard de dollars aux coûts de notre régime. Je voudrais savoir si le gouvernement sait comment il va s'y prendre pour payer.

Tout semble indiquer qu'il y aura de nouveaux impôts. Je me demande si ce projet de loi a été mûrement réfléchi lorsque je constate que le gouvernement élimine les mini-paquets de cigarettes afin de lutter contre le tabagisme chez les jeunes tout en réduisant radicalement le coût de tous les paquets.

Autrement dit, les jeunes ne sont pas stupides. Ils ne vont pas tarder à comprendre que, grâce aux mesures du gouvernement, ils peuvent acheter des paquets de format ordinaire à meilleur marché que les mini-paquets. Les statistiques montrent que, si le prix des cigarettes monte de 10 p. 100, les ventes de cigarettes aux adultes diminuent dans une proportion de 4 à 9 p. 100, et les ventes aux adolescents, d'une proportion de 10 à 14 p. 100. Les groupes de la santé ont fait part de ces statistiques au gouvernement avant qu'il prenne sa décision de réduire les taxes sur le tabac.

Nul ne devrait se surprendre du fait que le nombre de fumeurs augmente fortement par suite de l'abaissement des taxes. Que le gouvernement en ait été avisé et qu'il ait quand même décidé de diminuer les taxes me fait croire soit qu'il ne comprend pas bien le problème soit qu'il s'en fout. Huit provinces sur dix ont fait pression pour que le gouvernement ne réduise pas les taxes.

En ce qui concerne les soins de santé, je constate que, dans ma province, le Manitoba, un quart des enfants vont à l'école le ventre vide. Des milliers d'adultes doivent compter sur les banques d'alimentation pour se nourrir. Non seulement le gouvernement ne règle pas ces problèmes, mais il décide de renoncer à un demi-milliard de dollars de recettes en diminuant les taxes sur le tabac. Ne vaudrait-il pas mieux que le gouvernement compense ces pertes en abaissant le coût des aliments pour que les gens qui ont faim puissent se nourrir au lieu de fournir des cigarettes bon marché aux Canadiens?

(1310)

Il est regrettable que les gouvernements au Canada aient tenté en vain d'effacer leurs déficits en relevant les taxes plutôt qu'en dépensant plus judicieusement l'argent des contribuables. Il est faux de penser qu'on peut réduire le déficit uniquement à l'aide d'une augmentation des recettes publiques.

Au niveau fédéral, la hausse des impôts n'a pas permis de réduire le déficit. Au contraire, elle a freiné l'activité économique en diminuant le pouvoir d'achat des consommateurs, en


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décourageant l'investissement et en favorisant la croissance de l'économie parallèle.

Il est vrai que les mesures prises par le gouvernement apportent des éléments de solution au problème du marché noir, mais ne vaudrait-il pas mieux réduire les taxes dans une région où pareille mesure stimulerait la croissance économique du Canada? Par exemple, les agriculteurs de ma circonscription ont constaté, à l'instar du reste des Canadiens, que la compétitivité du Canada avait diminué sur les marchés agricoles internationaux. Cette baisse de compétitivité n'est pas attribuable aux agriculteurs eux-mêmes, mais plutôt aux coûts d'intrants élevés qu'entraîne la politique fiscale.

Je vous en donne un exemple. Au Manitoba, la taxe provinciale sur l'essence, carburant qui n'est pas utilisé dans l'industrie agricole, est de 11,5 cents, et la taxe fédérale, de 8,5 cents. Pour le diesel, la taxe provinciale est de 10,9 cents, et la taxe fédérale, de 4 cents. Cependant, il n'y a pas de taxe provinciale sur le carburant utilisé dans l'industrie agricole, mais il y a quand même des taxes fédérales de 8,5 cents et de 4 cents. Il n'y aucun allégement fiscal fédéral. Ce n'est qu'un exemple montrant que les taxes font monter les coûts des intrants. En essayant de soutirer le plus d'argent possible aux Canadiens, le gouvernement étouffe notre économie. Là où nous ne voudrions pas d'allégement fiscal, on nous en donne, et là où il devrait y en avoir, nous n'avons rien.

L'article du Financial Post le dit très clairement:

Les politiques fédérales forcent plus d'une société sur cinq interrogées par la Chambre de commerce du Canada à déménager ou à envisager de déménager leur entreprise à l'extérieur du Canada.
De très nombreux entrepreneurs m'ont dit: «Oui, j'aime beaucoup le Canada et je n'ai pas d'objection à payer mes impôts personnels ici, mais mon avenir et mes bénéfices, si le gouvernement continue de les imposer ainsi, seront ailleurs.»

Dans les communautés agricoles, de très nombreux agriculteurs sont obligés de gagner 50 p. 100 de leurs revenus à l'extérieur, car l'agriculture n'est plus rentable. Les agriculteurs doivent trouver des revenus supplémentaires pour vivre. Imaginez l'effet que cela produit sur le niveau de chômage. On voit cela partout au Canada. Les gens qui ont une formation universitaire quittent le Canada pour aller dans des pays où les impôts sont moins élevés et où le coût de la vie est plus bas, alors que nous avons payé leur éducation.

Ce que le gouvernement devrait envisager, ce sont des allégements fiscaux qui aideraient les agriculteurs, et aussi les entreprises, à devenir plus compétitifs et qui encourageraient les professionnels à rester au Canada et à y faire carrière.

J'ai été stupéfait d'apprendre récemment que, depuis 1961, le nombre de jours qu'il faut pour payer tous les impôts avait augmenté de 73. En 1961, les impôts du Canadien moyen étaient payés le 3 mai. L'an dernier, il lui a fallu travailler jusqu'au 15 juillet. Si cette tendance se poursuit, nous n'aurons bientôt plus le temps de nous asseoir et d'allumer une cigarette.

Nous approchons rapidement du point où nous travaillerons à plein temps pour les gouvernements, simplement pour payer les politiques créatrices de déficit et leurs mauvaises décisions sur le plan des dépenses. Devant d'aussi graves conditions, alors que la population veut absolument une réforme fiscale en profondeur, le gouvernement nous offre une baisse des taxes sur les cigarettes. Cela ne peut être assurément ce que le gouvernement estime dans le meilleur intérêt des Canadiens en ce moment. Le ministre du Revenu national, jurant de mettre fin à l'économie parallèle qui coûte au gouvernement des milliards de dollars, a récemment engagé un bataillon de 500 vérificateurs fiscaux supplémentaires, ce qui montre bien ce qui ne va pas dans la politique fiscale du gouvernement. Plutôt que d'accorder un allégement fiscal qui permettrait de donner un nouvel élan à l'économie, le gouvernement a décidé de consacrer les fonds à une mission impossible dans le but de récupérer les recettes perdues à cause de l'économie parallèle.

(1315)

Pour terminer, j'espère avoir réussi à montrer que ce projet de loi et toutes les mesures qui vont de pair illustrent bien la nécessité de revoir sérieusement la politique d'imposition du gouvernement.

Ce n'est pas par la surimposition que l'on va régler les problèmes attribuables à des dépenses excessives. La surimposition des cigarettes a donné lieu, au départ, à un marché parallèle. Et ce n'est là qu'un exemple de la façon dont des niveaux d'imposition élevés peuvent étouffer l'économie.

En réduisant les taxes sur les cigarettes, le gouvernement s'expose à des coûts d'environ un demi-milliard de dollars par an rien que pour l'application de cette mesure. On peut ajouter à cela des milliards de dollars pour faire face à l'accroissement des coûts que cela va entraîner sur le plan de la santé. Où allons-nous trouver les fonds nécessaires? Je crains bien que ce ne soit encore en augmentant les impôts.

Les mesures prises ne font rien pour briser le cycle destructeur qui consiste à imposer davantage les contribuables pour payer les dépenses. Si nous ne brisons pas rapidement ce cycle et si nous refusons d'accorder aux contribuables des allégements fiscaux étudiés avec soin, les Canadiens risquent fort de voir leur revenu réduit à zéro.

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord): Monsieur le Président, l'honorable député d'en face s'est dit d'avis que la réduction des taxes serait une aubaine pour les fabricants de cigarettes. Il a oublié de citer d'autres mesures du plan d'action gouvernemental, comme l'imposition d'une taxe à l'exportation de 8 $ par cartouche, ainsi que celle d'une surtaxe sur les bénéfices des fabricants de cigarettes.

J'aimerais entendre les observations de l'honorable député à propos des répercussions que ces mesures ne manqueront pas d'avoir sur les fabricants de cigarettes.

M. Hoeppner: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question très pertinente.

Je voulais attirer l'attention sur le fait qu'après avoir atteint un premier contingent de production de 167 millions de livres, puis un autre de 5,5 millions de livres, les agriculteurs vont devoir consentir à une baisse de prix s'il en va du tabac comme des autres produits.

Vu la vente accrue de tabac, évaluée à 173 millions de livres, qui va être ainsi réalisée, ce n'est pas cette timide mesure fiscale


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adoptée par le gouvernement fédéral qui va porter un coup dur aux énormes bénéfices de l'industrie du tabac.

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris): Monsieur le Président, j'aimerais connaître l'écart de prix entre le produit américain et le produit canadien avant la mise en oeuvre de ce nouveau projet de loi.

Le député d'en face n'a-t-il pas l'impression que cela ne fait qu'alimenter davantage la contrebande?

M. Hoeppner: Monsieur le Président, je remercie l'honorable député de sa question. Comme il le sait probablement, Snowflake passe pour être la plaque tournante de la contrebande au Manitoba. Or, selon moi, ce n'est pas le prix du produit américain qui est le vrai responsable de cette économie souterraine.

Ce sont les taxes imposées sur ces produits qui les rendent si lucratifs. Il n'y a pas que les cigarettes au Manitoba. La contrebande des spiritueux y est, à mon avis, deux fois plus importante que celle des cigarettes. En effet, si on regarde les statistiques de près, on constate que 90 p. 100 des spiritueux vendus dans les hôtels et les restaurants peuvent avoir été passés en contrebande. Il y a de quoi s'inquiéter pour l'avenir.

L'autre problème a trait à l'essence. Le député n'est pas sans savoir qu'il est ou qu'il a été très avantageux de traverser la frontière pour faire le plein. Sur le chapitre des coûts de production dans le secteur agricole, je serais beaucoup plus favorable à l'élimination de la taxe sur l'essence. Nous pourrions ainsi récupérer ce carburant que l'on a exporté à un prix correspondant aux deux tiers de ce que nous le payons aujourd'hui.

(1320)

Voilà ce que je voulais faire ressortir. Je ne crois pas que le coût des produits fasse la différence. Le grand facteur, c'est que ces produits sont surtaxés. Un grand nombre des produits fabriqués ici, puis exporté aux États-Unis, repasse en contrebande, à cause des mesures fiscales excessives dont ils font l'objet.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-11. C'est à plusieurs titres que je prends la parole aujourd'hui.

En tant que comptable agréé, je crois être en mesure de comprendre les conséquences financières du projet de loi C-11. À titre d'ancien membre, pendant neuf ans, et de vice-président du conseil d'administration de l'hôpital de Mississauga, je sais que les conséquences de l'usage du tabac pour la santé revêtaient une grande importance pour cet établissement de soins de santé. En ma qualité de député qui représente et qui écoute ses électeurs, et comme beaucoup d'autres députés, j'ai reçu de nombreuses communications de mes électeurs, qui m'ont posé des questions ou présenté des suggestions sur la façon dont nous pourrions améliorer la loi davantage afin de lutter contre les conséquences de l'usage du tabac pour la santé et, notamment, contre la contrebande de cigarettes.

Je prends aussi la parole en tant que père de trois enfants âgés de 12 à 19 ans. Bien sûr, je suis inquiet des conséquences de l'usage du tabac pour mes enfants et me demande s'ils prendront les bonnes décisions personnelles. C'est là un choix que les Canadiens doivent faire.

Je dois vous avouer, monsieur le Président, que je suis un peu inquiet de la confusion qui risque de s'installer chez les Canadiens au moment où ils écoutent le débat uniquement sous l'angle d'une réduction de la taxe d'accise. Je voudrais apporter un éclaircissement. À mon avis, il est très important que les Canadiens comprennent que nous nous attaquons ici à un problème complexe.

D'après mon expérience, pour chaque problème complexe, il existe une solution simple, mais ce n'est pas la bonne. Comme l'ont déjà dit le ministre du Revenu national, le solliciteur général et la ministre de la Santé, le problème n'est manifestement pas régional, mais plutôt national.

Par conséquent, le 8 février, le gouvernement a présenté un programme en quatre points pour surmonter ce problème complexe. Il comprend que le tabac de contrebande peu coûteux a miné l'objectif du Canada en matière de santé, soit de réduire la consommation de tabac, surtout chez les jeunes. La question n'est plus de savoir comment maintenir les prix élevés pour empêcher les jeunes de fumer. Elle est plutôt de savoir comment éviter que des cigarettes de contrebande ne tombent entre les mains des jeunes.

Je voudrais m'assurer que tous les députés saisissent clairement l'ampleur du problème. Il s'agit d'un très grave problème. Pour donner une idée à tous les députés, entre 1990 et 1993, le nombre de saisies effectuées par la GRC est passé de 303 à 5 044. Quant à la valeur de ces saisies, elle est passée de 4,1 millions de dollars en 1990 à 53,5 millions en 1993.

Que dire des exportations? Nous avons tous entendu dire que la principale source de contrebande de cigarettes étaient les exportations vers les États-Unis, dont 90 p. 100 reviennent au Canada. En 1990, on exportait 11,3 millions de cartouches de cigarettes. En 1993, ces exportations sont passées à 62,8 millions. De toute évidence, le problème est de taille et augmente très rapidement.

Enfin, en ce qui concerne le nombre d'accusations portées par les autorités contre des contrebandiers, en 1990, seulement 414 accusations ont été portées, alors qu'en 1993, il y en a eu 3 389.

(1325)

Tous les députés reconnaîtront, j'en suis certain, que nous n'avons pas affaire ici à une situation ordinaire. Il s'agit d'un problème extrêmement important. Cela donne aux députés une idée du peu de respect accordé aux lois du Canada.

Même si beaucoup de députés l'ont souligné, je pense qu'il vaut la peine de rappeler que les ventes illégales de tabac représentent actuellement 40 p. 100 du marché canadien des produits du tabac et que le crime organisé contrôle jusqu'à 95 p. 100 du tabac qui entre illégalement au Canada.


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En outre, plus de deux millions de Canadiens achètent ces produits de contrebande. Cette contrebande a fait perdre plus de un milliard de dollars de recettes au gouvernement fédéral et un montant du même ordre aux gouvernements provinciaux.

Comment pouvons-nous ignorer ce problème quand nous perdons deux milliards de dollars de recettes qui pourraient servir à financer des soins de santé, des programmes sociaux et des initiatives d'emploi?

Le 8 février, le gouvernement a présenté un plan d'action qui comprenait les quatre volets suivants: étoffer les mesures d'application de la loi, réduire les taxes sur les produits du tabac, imposer des mesures spéciales aux fabricants de tabac et lancer la campagne anti-tabac la plus intensive dans toute l'histoire du Canada. Telle était l'initiative annoncée par le premier ministre.

Dans un discours éloquent, le premier ministre a expliqué à la Chambre qu'après avoir pleinement consulté les provinces et bien évalué l'information obtenue des différents secteurs au sujet de ce problème complexe, il fallait en arriver à une solution harmonieuse et globale pour traiter de tous les aspects, et non simplement des conséquences pour la santé, comme les députés du Parti réformiste semblent l'avoir suggéré.

Le projet de loi C-11 a été présenté par le ministre du Revenu national et par la ministre de la Santé qui ont tous deux dit du bien des modifications qui sont proposées à l'appui de l'initiative présentée le 8 février. Ces modifications à la Loi sur l'accise, à la Loi sur les douanes et à la Loi sur la vente du tabac aux jeunes constituent toutes des compléments importants à l'initiative annoncée par le premier ministre, le 8 février.

Ces modifications accroîtront les pouvoirs juridiques des organismes d'application de la loi du Canada pour mettre fin à la contrebande. Elles protégeront la santé des jeunes Canadiens en interdisant la production de paquets de cigarettes contenant moins de 20 cigarettes, que nous avons appelés les mini-paquets, et en interdisant la vente de produits du tabac aux moins de 18 ans. En vertu de cette mesure législative, toutes les cigarettes devront porter une marque distinctive indiquant que les droits d'accise afférents ont été acquittés.

La contrebande est une activité criminelle qui fait du tort à tous les Canadiens respectueux des lois. Tous les députés savent bien que l'ordre public est très important dans notre société. On nous a dit, durant toute la campagne électorale, et on continue à nous répéter que les Canadiens veulent le respect de la loi. Ils font savoir à notre gouvernement que nous avons le devoir et l'obligation de veiller au respect de l'ordre public au Canada.

C'est pourquoi nous avons besoin de ces modifications. Elles donneront aux services de police les moyens et la souplesse dont ils ont besoin pour défaire les réseaux de contrebande.

La décision du premier ministre, annoncée le 8 février dernier, a donné lieu à beaucoup de discussions, et nous avons eu le temps de prendre connaissance des réactions de la population. J'ai ici des informations valables à communiquer aux députés.

L'Association canadienne des chefs de police a bien accueilli le plan d'action du gouvernement. Elle considère que, si les profits des vendeurs diminuent, cette forme de crime organisé perdra vite son intérêt. On a aussi fait remarquer que la Gazette de Montréal avait félicité le premier ministre au sujet de ce plan, en disant que les taxes élevées sur la cigarette avaient permis de réduire le tabagisme pendant un certain temps, mais que cela ne fonctionnait plus. Cette méthode avait été neutralisée par quelque chose de bien pire que du tabac bon marché légal, soit du tabac bon marché provenant d'un vaste réseau de criminels violents.

Voici quelques messages que nous avons reçus de la population canadienne depuis la mise en oeuvre de ce plan. D'abord, la loi s'applique à tout le monde au Canada, et les agents chargés de l'exécuter doivent être en mesure de casser les réseaux de contrebande où qu'ils soient, ce qu'ils ont entrepris de faire. Deuxièmement, la nouvelle loi renforcera les pouvoirs de la police pour faire respecter la loi. Enfin, l'action concertée fédérale-provinciale est la meilleure façon de lutter contre la contrebande.

(1330)

En tant que membre du Comité permanent de la santé, je manquerais à mon devoir si je n'abordais pas la question de la santé. Cela ne fait aucun doute. Ce matin, j'ai entendu dire qu'un député réformiste, parlant au nom de son parti, avait reconnu qu'il approuvait le projet de loi C-11, à l'exception de la réduction de la taxe d'accise. C'est comme si une table avait pour pieds les quatre points du plan du premier ministre. Le député prétendait que, même avec un pied en moins, la table serait toujours assez solide pour qu'on continue à y faire ce qu'on y faisait avant.

Le député conviendra qu'imposer une taxe à l'exportation sans réduire la taxe d'accise n'éliminerait pas l'attrait financier de la contrebande. Il était absolument essentiel d'avoir recours à cette mesure pour rendre la contrebande moins alléchante du point de vue pécuniaire, pour reprendre le contrôle de la situation et, espérons-le, comme l'a indiqué la ministre de la Santé, pour consacrer nos efforts à convaincre les jeunes de ne pas fumer même si les cigarettes sont à nouveau à leur portée.

J'aimerais mentionner que l'Association médicale canadienne a écrit à tous les députés et a félicité le gouvernement pour son programme; elle en approuve trois points, mais émet des réserves au sujet de la réduction de la taxe d'accise. Nous avons son appui moral, et je sais que le gouvernement et la ministre de la Santé travaillent en consultation avec l'association.

Le Canada doit faire respecter la loi, et nous devons régler cet important problème afin de pouvoir nous consacrer de nouveau à la création d'emplois et à la stimulation de l'économie.

M. Leon E. Benoit (Végréville): Monsieur le Président, le député a déclaré dans son discours qu'une réduction de la taxe d'accise rendrait leur activité moins lucrative aux contreban-


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diers. Mon collègue croit-il que, de façon générale, une réduction de la taxe améliorerait la situation de la petite entreprise?

M. Szabo: Monsieur le Président, on peut raisonnablement soutenir qu'une réduction de la seule taxe d'accise, indépendamment de toute autre mesure, en faisant baisser le prix d'un produit, rendrait celui-ci plus attrayant. Toutefois, mon collègue pose comme principe qu'une réduction de la taxe d'accise nuira à l'entreprise. Il ne s'imagine sûrement pas que la contrebande n'affectait pas la petite entreprise.

La mesure proposée par le gouvernement vise à combattre la contrebande, qui fait perdre de l'argent à l'ensemble des Canadiens et des entreprises canadiennes.

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe): Monsieur le Président, on a beaucoup dit que la réduction des taxes sur les cigarettes faisait perdre de l'argent au gouvernement. Toutefois, si l'on tient compte du fait que 75 p. 100 des cigarettes consommées au Québec et entre 35 et 40 p. 100 des cigarettes consommées en Ontario étaient des produits de contrebande, est-ce que le député peut me dire si le calcul du manque à gagner en taxes tient compte des cigarettes de contrebande ou seulement des cigarettes vendues légalement? Car, de toute évidence, on enregistre une hausse des ventes au détail de cigarettes au Québec et en Ontario. Peut-être n'y a-t-il aucune perte de recettes fiscales.

M. Szabo: Monsieur le Président, d'après les prévisions fournies par les fonctionnaires du ministère, il ne fait aucun doute qu'il y aura un coût net à court terme. Toutefois, je dois féliciter le ministre et le premier ministre de ne pas avoir anticipé d'autres avantages. Un des problèmes des gouvernements précédents est justement qu'ils anticipaient des recettes ou des avantages.

(1335)

Par exemple, les mesures rigoureuses que le gouvernement a annoncées pour lutter contre la contrebande du tabac pourraient aussi avoir des retombées positives au chapitre de la lutte contre la contrebande d'alcool, de drogue, d'armes, etc. Or, le gouvernement n'a pas inclus ni exclu ces retombées.

J'aimerais pouvoir être plus précis en ce qui concerne les aspects économiques du plan. Qu'il suffise de dire qu'à court terme, il y aura peut-être un coût net à supporter, mais les fonctionnaires, l'entreprise, l'industrie et la population canadienne croient qu'à long terme le programme donnera des résultats avantageux.

M. Jerry Pickard (Essex-Kent): Monsieur le Président, je souhaiterais qu'à un moment donné nous puissions en arriver à trouver une question facile à discuter au Parlement. Ce n'est certes pas le cas aujourd'hui. Quel est le problème dans le cas présent? C'est sans contredit un problème de santé majeur.

Pour ma part, je tiens à dire que je serais très heureux si les gouvernements fédéral et provincial ne tiraient plus jamais de nouvelles recettes fiscales des cigarettes. De nombreux Canadiens partagent mon sentiment, mais le fait est qu'il y a des gens qui fument et qui continueront de fumer. Ainsi, nous faisons face au problème découlant de leur accoutumance. Alors que je m'efforce d'examiner les choses de façon rationnelle et réfléchie, je pense que nous devons nous pencher sur cette question de santé, et c'est ce qu'on essaie de faire dans ce projet de loi.

Cette question touche non seulement la santé des Canadiens, mais également l'application de la loi. Nous sommes aux prises avec une économie souterraine et une activité illégale qui a atteint des proportions monumentales. On s'en rend compte lorsqu'on regarde les faits. Au Québec, au cours des quatre dernières années, la part du marché détenue par le tabac de contrebande est passée de 9 p. 100 à 60 p. 100. En Ontario, elle était de 13 p. 100 et elle s'établit maintenant à 35 p. 100. Dans les provinces de l'Atlantique, la proportion n'était que de 12 p. 100 et elle est aujourd'hui de 40 p. 100 et, juste au cours de la dernière année, dans l'Ouest, elle est passée de 9 p. 100 à 15 p. 100, une augmentation de 60 p. 100.

Nous devons donc faire face à un commerce illégal qui, à première vue, nuit beaucoup à notre pays. Cependant, il rapporte énormément aux gens qui, au Canada, s'adonnent à de nombreux autres commerces illégaux.

Étant donné que des gens deviennent millionnaires du jour au lendemain grâce à la contrebande du tabac du fait des taxes élevées et que ce trafic s'accroît dans tout le pays, tous les Canadiens, selon moi, veulent qu'on prenne des mesures très fermes pour mettre un terme à cette contrebande. Ainsi, on en adopte certaines mesures auxquelles tous les députés dans cette enceinte peuvent souscrire.

Nous faisons face également à d'autres problèmes relativement à ce trafic. Le premier, c'est l'application de la loi. Comment pouvons-nous bien mettre un terme à cette contrebande illégale et à quel prix appliquons-nous la loi?

Ce problème a bien des facettes, et j'ai reçu de nombreuses lettres de la Société canadienne du cancer, d'associations médicales et de divers groupes qui se préoccupent de la santé des Canadiens et qui s'inquiètent vivement de la suppression de la taxe d'accise sur les cigarettes.

(1340)

Pensons aux taxes qui ont été imposées et demandons-nous pourquoi elles l'ont été. Le gouvernement fédéral a étudié le problème et il a pensé que la seule façon d'arrêter la vente illégale de cigarettes était de réduire les profits des responsables de ce commerce illégal. Or, la seule façon d'y parvenir consiste, premièrement, à sévir contre eux tellement lourdement qu'ils ne pourraient plus poursuivre leurs activités et, deuxièmement, à éliminer leur base de profits.

En réduisant les taxes, on fait disparaître la base de profits du ce commerce de contrebande. En ce qui concerne la capacité de fonctionner des contrebandiers, je suis convaincu que, si nous réduisons les taxes provinciales de 10 $ et les taxes fédérales de 10 $ sur un carton de cigarettes, faisant passer son prix de vente au détail de 43 $ à 23 $, nous réduisons considérablement les profits des contrebandiers.

Il est exact que le gouvernement canadien perçoit moins de recettes. Cependant, à mesure que le commerce de contrebande augmentait, les recettes fédérales chutaient. Le pourcentage des pertes au Québec et en Ontario correspond bien à des pertes de recettes fiscales dans les deux provinces, et il en va de même pour les autres provinces. Par conséquent, quand nous réduisons


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la taxe d'accise sur les cigarettes, nous réduisons les profits de ceux qui font la vente illégale de cigarettes.

Quant aux risques pour la santé, nous devons aussi nous rendre compte qu'il y a des répercussions sur toutes nos collectivités. Le tabagisme compromet la santé des jeunes comme des moins jeunes. On doit reconnaître que le gouvernement est intervenu pour corriger une partie du problème.

En effet, d'une façon générale, un des principaux objectifs du gouvernement consiste à empêcher les jeunes de prendre l'habitude de fumer. Pour y parvenir, le gouvernement a mis en oeuvre des règlements portant à 18 ans l'âge requis pour pouvoir acheter des cigarettes. Ainsi, il est donc impossible pour des jeunes d'acheter légalement des cigarettes.

Certains députés diront que des jeunes peuvent quand même se procurer des cigarettes. Personnellement, je pense que, si des jeunes de 13, 12, voire 11 ans veulent acheter des cigarettes, ils peuvent facilement le faire illégalement sur les marchés de contrebande. On peut en conclure que, tant que nous tolérons que le commerce illégal prospère et persiste, les jeunes pourront acheter des cigarettes plus facilement.

Par conséquent, il serait très nocif, sur le plan de la santé, de poursuivre dans la même veine que par le passé. Il ne fait aucun doute que cela nuirait à notre capacité de contrôler la marchandise, de sorte qu'un nombre de plus en plus élevé de jeunes de tous âges pourrait acheter des cigarettes à très bas prix. En fait, deux grandes mesures de protection de la santé disparaîtraient.

Le ministre a aussi pris d'autres initiatives afin d'instaurer un plus grand nombre de contrôles au pays, ce qui m'amène à parler de l'exécution. La GRC disposera d'un effectif accru et pourra travailler plus étroitement avec les agents douaniers de Revenu Canada. Ces deux groupes vont certainement s'attaquer aux organisations du crime organisé et s'efforcer de contrecarrer les plans des principaux fournisseurs de cigarettes de contrebande, et ce partout au pays. Le contrôle à la frontière s'effectuera d'une façon beaucoup plus efficace, étant donné qu'une surveillance sera exercée en permanence à de nombreux postes frontières qui ne font actuellement que l'objet de contrôles sporadiques.

Des mesures sont aussi prises pour exercer un contrôle très serré de la vente de cigarettes au comptoir, de façon à compliquer la tâche des trafiquants qui traitent directement au niveau du public.

(1345)

Il va de soi que tant la GRC que les agents de Douanes Canada doivent prendre des mesures d'exécution rigoureuses. Le projet de loi favorise aussi la prise de mesures d'exécution au niveau provincial.

En effet, les agents des corps policiers provinciaux de l'Ontario et du Québec pourront collaborer étroitement avec la GRC et les agents de douane afin de mettre un frein à cette industrie illégale en pleine croissance. Je rappelle que les produits tirés de ce commerce illicite profitent au crime organisé. Il y a tout lieu de croire que des groupes de Montréal et de Toronto, notamment la mafia et les Hell's Angels, sont impliqués dans le commerce illégal des cigarettes.

Compte tenu que le crime organisé s'approprie 95 p. 100 des profits tirés de la vente illicite de cigarettes et s'adonne à des activités qui nuisent à la société canadienne, il faut prendre toutes les mesures possibles pour mettre un terme à cette situation.

Il ne fait aucun doute que la santé des Canadiens est une considération importante, mais le plan et les solutions proposés par le gouvernement sont très logiques. Il n'est pas facile de proposer de réduire les taxes et d'avoir l'air de céder au chantage du crime organisé.

Pourtant, cette mesure prive les criminels de profits et crée un contexte tel que leurs ventes illicites ne perturberont pas l'activité commerciale légale au point que le crime organisé en viendrait à détenir le monopole exclusif des ventes de cigarettes au pays.

Il faut aussi savoir qu'une taxe est imposée sur les cigarettes exportées, afin d'empêcher leur réimportation au Canada. En effet, cette taxe à l'exportation supplémentaire de 8 $ devra être acquittée par tous, entraînant ainsi un coût additionnel pour ceux qui achètent des cigarettes exportées uniquement pour les revendre illégalement au Canada.

En résumé, le gouvernement s'est efforcé de concilier les considérations liées à la santé, les mesures d'exécution et les mesures fiscales afin de régler le problème et, on l'espère bien, de nous garantir un avenir plus prospère.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, premièrement, je désire faire un commentaire. Le député mentionne qu'une des mesures du présent projet de loi fait en sorte que l'interdiction de la vente de cigarettes passera de 16 à 18 ans. Je voulais seulement souligner que c'est plutôt le projet de loi C-111, adopté l'an dernier, qui touchait cette mesure. Par contre, l'entrée en vigueur de cette loi se fait cette année.

Le député a de plus soulevé des questions intéressantes, à mon avis, quant à l'application des mesures visant à contrôler la vente de tabac. Dans son discours, il a dit qu'il ne savait pas jusqu'où il faudra aller quant au nombre d'agents ou de personnes affectés aux interventions. Alors, j'aimerais lui retourner sa question afin qu'il s'explique davantage et qu'il nous dise jusqu'où son gouvernement pense aller dans cette intervention?

[Traduction]

M. Pickard: Monsieur le Président, en ce qui concerne le nombre d'agents, Douanes Canada prend actuellement les mesures nécessaires pour affecter 350 agents de plus à l'application de la loi. Douanes Canada offre un service 24 heures sur 24, à 22 points d'entrée, pour surveiller plus de 99 p. 100 du trafic commercial au Canada.


1679

En parlant d'une application plus rigoureuse de la loi grâce à la collaboration des forces policières, je voudrais signaler que le projet de loi permet aux services de police provinciaux de faire respecter les dispositions de la Loi sur l'accise. Par conséquent, sans qu'il en coûte un sou aux contribuables, nous pouvons compter sur des centaines de milliers d'agents de plus pour faire respecter la loi, quand nous pensons aux membres des grands corps policiers, comme la Police provinciale de l'Ontario et la Sûreté du Québec. Par conséquent, la participation des forces policières s'est grandement accrue, elle aussi.

(1350)

Pour ce qui est de l'âge limite qui passe de 16 à 18 ans, il est évident que différents règlements s'appliquent dans différentes provinces. Cependant, dans le cas qui nous intéresse, nous n'autorisons l'importation de cigarettes que par les personnes âgées de 18 ans ou plus. Nous modifions donc la loi pour relever de deux ans l'âge limite.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Monsieur le Président, je remercie le député pour ses observations. Je crois qu'il a signalé de façon très éclatante que cette situation soulève deux grands problèmes, soit l'imposition excessive et l'application de la loi.

Je me demande si le député pourrait nous dire comment régler le problème d'application de la loi. Je crois qu'on a réglé le problème d'imposition excessive, puisqu'il ne sera probablement plus rentable dorénavant de faire la contrebande des cigarettes. Mais les gens qui s'adonnaient à cette activité sont désormais sans travail. Je ne crois pas qu'ils ont contribué à la caisse de l'assurance-chômage. Vont-ils aller travailler au salaire minimum? Ou allons-nous retrouver ces gens-là dans la contrebande d'autres produits? Faudra-t-il alors abaisser les taxes sur ces produits pour régler le problème?

On a créé un manque à gagner et aussi, probablement, un problème de santé. Quand va-t-on se décider à régler le problème au niveau de l'application de la loi? Je crois en effet que c'est un gros problème à régler, car ces gens-là ne sont pas des citoyens ordinaires respectueux de la loi.

M. Pickard: Monsieur le Président, je remercie le député de poser la question.

Si l'on ne prenait pas des mesures sérieuses, comme le gouvernement le fait maintenant, ce serait le chaos, je crois, et nous vivrions dans une société où la vente de produits de contrebande se ferait ouvertement-et cela s'est vu au Canada. Cette pratique s'est répandue comme une traînée de poudre dans tout le pays, et il faut en examiner les principales causes.

Je crois que la structure fiscale en est une. Une autre réside dans le fait que les Canadiens en ont aujourd'hui assez des impôts. Une autre encore, c'est que les dirigeants laissent entendre qu'on peut impunément violer la loi et troubler l'ordre.

Il est très clair pour tous les Canadiens que notre gouvernement va faire respecter la loi et présenter pour cela toutes les mesures qui s'imposent.

Nous ne nous inquiétons pas des gens qui violent la loi; nous les punirons.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, je vous remercie de me permettre d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-11.

La plupart des dispositions de ce projet de loi sont sans portée et insignifiantes. La mesure législative offre très peu pour lutter contre la contrebande. Le gouvernement croit que les mesures prévues dans la motion de voies et moyens no 3 ont éliminé les facteurs qui stimulaient la contrebande.

C'est peut-être vrai dans le cas des cigarettes, mais la contrebande porte maintenant sur d'autres articles. Nous entendons déjà parler d'une contrebande accrue de boissons alcoolisées. Nous savons que les contrebandiers s'intéressent aussi aux drogues, aux narcotiques et aux personnes en situation irrégulière.

Si le gouvernement agit comme il l'a fait dans le cas de la contrebande des cigarettes, nous pouvons supposer que les taxes sur l'alcool diminueront bientôt et que les lois réglementant les armes à feu et les immigrants illégaux seront modifiées pour éliminer toute possibilité de profit. Nous ne sommes pas devant un plan d'action national de lutte contre la contrebande, mais bien devant une capitulation.

Réglerions-nous le problème de la contrebande de la cocaïne et de l'héroïne en les légalisant et en les mettant en vente libre? Certainement, mais sommes-nous prêts à assumer les conséquences sociales de telles mesures?

Les lois contre la contrebande ont leur raison d'être et elles doivent être appliquées. En adoptant la voie choisie par le gouvernement, nous envoyons un mauvais message. Nous disons aux Canadiens que, si un nombre suffisant de personnes s'adonne à une activité illégale, le gouvernement cédera et modifiera sa loi.

(1355)

Quant aux dispositions du projet de loi, la plupart sont insignifiantes. Cependant, le projet de loi suscite chez moi une inquiétude. Selon les modifications prévues à la Loi sur l'accise et à la Loi sur les douanes, les biens saisis pourraient être vendus ou détruits, même avant le règlement des revendications s'y rapportant. On nous dit que cette disposition vise à réduire les frais d'entreposage du tabac et de l'alcool saisi, mais elle s'appliquera aussi aux véhicules ayant servi à transporter des articles que l'on présume être des articles de contrebande.

J'aide en ce moment un électeur de ma circonscription qui a récemment obtenu une décision de la Cour fédérale en sa faveur dans une affaire de biens saisis à tort par des douaniers. Malheureusement pour cette personne, la décision arrive dix ans après la saisie. Malheureusement pour les contribuables canadiens, le montant de 200 000 $ et plus adjugé par le tribunal est monté à plus de 400 000 $ avec les intérêts.

1680

Au lieu de donner au ministre le pouvoir d'aliéner les biens saisis, il serait peut-être préférable, tant pour l'accusé que pour les contribuables canadiens, d'établir un mécanisme indépendant de règlement des différends qui permettrait d'éviter les coûts énormes liés aux longues contestations judiciaires.

Pour ce qui est des autres aspects de ce projet de loi, les modifications à la Loi sur l'accise, qui donnent aux services de police non fédéraux les mêmes pouvoirs de saisie que la GRC, auraient probablement dû être apportées il y a longtemps. Il est préférable d'aplanir les obstacles bureaucratiques à l'application de la loi plutôt que de capituler.

Toutefois, c'est en modifiant la Loi sur la vente du tabac aux jeunes que le gouvernement fait preuve de la plus grande hypocrisie. Il essaie de nous convaincre que, en interdisant la fabrication, la vente ou la mise en vente de paquets contenant moins de 20 cigarettes, il empêchera le problème du tabagisme chez les jeunes de s'aggraver. Il essaie de nous convaincre que, en interdisant l'importation de produits du tabac par une personne âgée de moins de 18 ans ou pour son compte, il empêchera le problème du tabagisme chez les jeunes de s'aggraver.

Il y a une chose importante que le gouvernement ne dit pas, soit qu'un plus grand nombre de jeunes commenceront à fumer parce qu'il a baissé le prix des cigarettes. Nous avons tous vu le graphique qui montrait clairement que, plus le prix des cigarettes augmentait, plus le nombre de jeunes fumeurs diminuait.

J'imagine que nous verrons bientôt un graphique qui montrera que la baisse importante du prix des cigarettes entraînera une augmentation correspondante du nombre de jeunes fumeurs.

Est-ce que ce sera difficile d'appliquer ces modifications à la Loi sur la vente du tabac aux jeunes? Je ne crois pas. Pourquoi les fabricants de produits de tabac voudraient-il faire des paquets de moins de 20 cigarettes aujourd'hui? À cause des mesures prises par le gouvernement, un paquet de cigarettes coûte environ la moitié de ce qu'il coûtait le mois dernier. La modification visant à interdire l'importation de produits du tabac par quiconque est âgé de moins de 18 ans est redondante. Pourquoi voudrait-on traverser la frontière pour acheter des cigarettes bon marché quand on peut les avoir au même prix à l'épicerie du coin?

Si ces modifications avaient été présentées avant que le gouvernement ne capitule dans la motion de voies et moyens no 3, elles auraient pu avoir un certain effet.

Il est ironique de voir le ministre du Revenu national jouer au dur quand il parle d'éliminer la contrebande et l'économie souterraine alors qu'il fait partie d'un gouvernement qui a vite fait de capituler. Je me demande si le gouvernement sera tout aussi volontiers disposé à céder devant l'économie souterraine en constante expansion. Comme il y a de plus en plus de Canadiens qui prennent part à cette économie souterraine de plusieurs milliards de dollars, et comme bien d'autres encore seront probablement disposés à le faire après la présentation du budget cet après-midi, le gouvernement se prépare-t-il à réduire toutes ses taxes et tous ses impôts?

Puisque le gouvernement pense qu'une fiscalité réduite supprimera l'incitation à agir illégalement, il semble naturel qu'il allège le fardeau fiscal afin d'éliminer les incitations financières à participer à l'économie souterraine. Il ne le fera évidemment pas. Où trouverait-il l'argent pour compenser la perte de recettes fiscales? Comment donc le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux qui participent à ce programme conjoint vont-ils compenser la perte des recettes tirées des taxes sur les cigarettes?

(1400)

Les taxes sur les cigarettes étaient élevées, mais elles avaient été imposées pour une bonne raison. La ponction que le tabagisme exerçait sur le système de santé canadien était encore plus lourde. Maintenant, ce sont tous les Canadiens qui devront combler le déficit accru.

Je crains bien qu'avec la mesure qu'il prend en l'occurrence, le gouvernement ne donne à penser que, si suffisamment de gens violent la loi, ils n'ont pas à s'en faire puisqu'il la modifiera. Le gouvernement aurait plutôt dû faire appliquer la loi, de même que toutes celles qui sont en vigueur. Quand une loi a l'appui des Canadiens, il faut la faire respecter. La collectivité était en faveur de taxes plus élevées sur les cigarettes.

Sur six personnes qui appelaient à mon bureau, une seulement se disait favorable à la réduction des taxes sur les cigarettes. Si mes électeurs s'opposent à la réduction d'une taxe, c'est tout un exploit. Ils n'aiment pas les taxes. Ils veulent qu'on les réduise, mais qu'on le fasse systématiquement, raisonnablement et de façon sensée. Le gouvernement aurait dû concentrer ses efforts sur l'application de la loi au lieu de se contenter de réduire les taxes pour lutter contre la contrebande des cigarettes.

Certains Canadiens ont malheureusement besoin de se faire rappeler de temps à autre qu'il existe des lois dans notre pays et qu'il faut les respecter. Il y a des lois contre l'excès de vitesse dans notre pays, malgré le fait que la majorité d'entre nous dépassent la limite de vitesse. Pour la plupart d'entre nous, il suffit de voir une voiture de police sur l'accotement pour ralentir.

Le Président: Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés en vertu de l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


1680

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants): Monsieur le Président, l'Association des étudiants de Nouvelle-Écosse m'a récemment envoyé une recommandation préconisant que les paiements de transfert fédéraux au chapitre de l'éducation soient calculés en fonction de la population étudiante d'une province.


1681

Le financement fédéral pour l'enseignement postsecondaire est actuellement fondé sur la population globale de chaque province, ce qui a nui à la Nouvelle-Écosse et lui porte préjudice.

En raison du grand nombre d'étudiants de l'extérieur de la province qui sont inscrits à des établissements comme l'Université Acadia, dans ma circonscription, celle d'Annapolis Valley-Hants, la proportion d'étudiants est beaucoup plus élevée dans notre province que dans la plupart des autres. Le financement que nous recevons présentement ne tient toutefois pas compte de cette réalité.

J'appuie donc la recommandation de l'Association des étudiants de Nouvelle-Écosse et j'exhorte le gouvernement à examiner à fond cette importante proposition.

* * *

[Français]

LA VILLE DE JONQUIÈRE

M. André Caron (Jonquière): Monsieur le Président, j'aimerais souligner le lancement de l'ouvrage intitulé Jonquière, mémoires et lieux, un guide présentant et interprétant le patrimoine architectural de la ville de Jonquière, au Saguenay-Lac-Saint-Jean. L'ouvrage témoigne de l'évolution de la ville depuis sa fondation, en 1847.

Les auteurs, M. Luc Noppen et Mme Lucie Morrisset, de l'Université Laval, font valoir le caractère unique d'Arvida, la ville de la Société Alcan qui est maintenant intégrée à la ville de Jonquière. Le secteur Arvida se distingue par son urbanisme innovateur lors de sa construction, entre 1926 et 1928, ainsi que par l'originalité de son architecture.

Les gens de Jonquière, à l'approche du 150e anniversaire de leur ville, ont étroitement collaboré à la réalisation de cet ouvrage qui constituera la mémoire de trésors architecturaux souvent méconnus et parfois oubliés.

* * *

[Traduction]

L'ATHLÈTE STEPHEN GOUGH

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury): Monsieur le Président, je tiens à souligner que Stephen Gough, le seul athlète olympique du Nouveau-Brunswick, participera aujourd'hui à la première de trois rencontres de patinage de vitesse sur courte piste à Lillehammer. Stephen est originaire de ma circonscription, celle de Fredericton-York-Sunbury. Au nom des électeurs de ma circonscription, de la population du Nouveau-Brunswick et de tous les Canadiens, je veux lui souhaiter publiquement la meilleure des chances.

Stephen est l'un des 110 athlètes qui représentent le Canada aux Jeux olympiques et il est le quatrième patineur dans la course de relais de 45 tours de piste.

Jusqu'ici, les performances de Stephen en patinage de vitesse ont été impressionnantes. Le mois dernier, il a obtenu la deuxième place lors de la rencontre des pays côtiers du Pacifique qui s'est tenue à Lake Placid. Il s'est classé cinquième sur 66 lors de la course préolympique de 500 mètres qui a eu lieu en Norvège et il est aussi arrivé premier dans la course de relais.

Les Canadiens sont fiers qu'il les représente en Norvège, et je suis certain qu'il obtiendra d'excellents résultats lors des compétitions.

* * *

(1405)

LE TOURNOI DE COEURS DE SCOTT

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Monsieur le Président, je suis heureux d'informer la Chambre que Waterloo sera l'hôte du plus grand événement sportif féminin jamais tenu au Canada: le Tournoi de coeurs de Scott. Il s'agit du championnat canadien de curling féminin.

C'est un grand honneur pour nous; cet événement prestigieux se tiendra du 26 février au 5 mars dans le complexe sportif et récréatif flambant neuf de Waterloo. Des équipes de toutes les régions du Canada participeront au tournoi, y compris l'Équipe Canada de la Saskatchewan qui a remporté le championnat du monde en Suisse l'année dernière.

Nous, de la région de Waterloo, sommes très heureux d'être les hôtes de cet événement. Je voudrais inviter mes collègues et tous les Canadiens à venir se joindre aux festivités.

* * *

LA MANUTENTION DES GRAINS

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Monsieur le Président, le 31 janvier dernier, j'ai exhorté le ministre du Développement des ressources humaines à déclarer que la manutention des grains constituait un service essentiel. Comme il n'a pas réagi immédiatement, le secteur des grains a subi des pertes écrasantes de plus de dix millions de dollars. Le commerce du canola, du lin et du seigle a peut-être disparu à tout jamais. Le système d'élévateurs fonctionne à 90 p. 100, laissant de nombreux élévateurs bloqués.

L'impact de la grève sur le transport des grains vers la côte ouest est difficile à évaluer en dollars, mais il faudra sans doute attendre à juin avant que le transport des blés et orges revienne à la normale.

Les débardeurs du port de Montréal et les manutentionnaires céréaliers de Lakehead sont sur le point de déclencher une grève.

Le gouvernement fédéral doit promulguer sans délai une loi déclarant que la manutention des grains constitue un service essentiel afin de prévenir toute autre perturbation qui compromettrait encore davantage l'économie de l'Ouest canadien.

* * *

LE TOURISME

M. Brent St. Denis (Algoma): Monsieur le Président, l'industrie touristique canadienne présente de nombreuses possibilités pour la création d'emplois et le développement communautaire. C'est maintenant une industrie de 28 milliards de dollars.


1682

L'avenir du tourisme est prometteur, mais il importe de prendre dès maintenant des mesures pour garantir la pleine réalisation du potentiel touristique régional et national du pays.

Dans la circonscription d'Algoma, nous avons la chance d'avoir le chenal Nord du lac Huron, qui compte parmi les dix premières régions du monde pour la navigation de plaisance. Nous avons des lacs et des forêts sauvages. Nos montagnes du bouclier précambrien sont spectaculaires. Nous avons un grand nombre des meilleurs lacs à truite du Canada. Dans ma circonscription, on peut pêcher, chasser, faire des excursions touristiques, faire du ski de descente et de fond, faire du canot, se rendre dans des postes éloignés accessibles par avion seulement, acquérir une formation en tourisme et faire bien d'autres choses encore.

L'île Manitoulin, Espanola, North Shore, Elliot Lake, Central Algoma, Sault Ste. Marie et la côte est du lac Supérieur ont mis sur pied une excellente infrastructure touristique, mais il reste beaucoup à faire.

Il faut reconnaître que le tourisme représente nos meilleures chances pour la croissance économique. Réjouissons-nous parce que le Canada a tout ce qu'il faut pour être un chef de file mondial dans l'industrie du tourisme.

* * *

[Français]

LA LUTTE À LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi): Monsieur le Président, il n'aura fallu que deux semaines au gouvernement de l'Ontario pour se rendre compte à quel point sont néfastes les effets de la contrebande de cigarettes, situation qu'a vécue le Québec pendant près de cinq ans.

Le gouvernement de l'Ontario a finalement été frappé par le bon sens et a annoncé, hier, qu'il se joignait au gouvernement fédéral, au Nouveau-Brunswick et au Québec dans leur plan de lutte contre la contrebande de cigarettes.

Dans un sursaut de lucidité, M. Rae a finalement compris que le fléau de la contrebande est devenu un problème national au Canada. Par son hésitation, le gouvernement Rae a compromis l'application d'un plan national de lutte à la contrebande.

Il semble que les vertus du fédéralisme coopératif aient échappé à M. Rae pendant quelques malheureuses heures.

* * *

[Traduction]

LA PETITE ENTREPRISE

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia): Monsieur le Président, j'ai en main la copie d'une lettre de Harvey Wiebe, un de mes électeurs. Celle-ci est adressée au ministre des Finances. M. Wiebe écrit ceci:

En tant que petit entrepreneur, je procure de l'emploi à 200 personnes environ. Je sais que bien des gens comme moi ont déjà transféré leurs activités et leur argent à l'extérieur du pays. La perte que cela occasionne est plus grande que celle qui est attribuable aux entrepreneurs qui passent à l'économie souterraine. Pensez-y, 25 000 personnes comme moi pourraient créer 5 millions de nouveaux emplois.
Contrairement à la grande entreprise, mon groupe ne veut pas de subventions. On pourrait nous comparer à un menuisier qui construit une maison. Toutes les fois que nous voulons mettre la main sur un outil, le gouvernement nous l'enlève. Nous voulons certes partager la maison, mais de grâce, pour le bien du pays, qu'on nous laisse nos outils.
J'estime que vous savez ce qu'il vous reste à faire. Je pense aussi que vous n'avez pas le courage de le faire. Vous gagneriez beaucoup d'appuis en redonnant espoir aux gens au lieu de vous plier aux exigences des nantis.

* * *

(1410)

L'AVRO ARROW

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke): Monsieur le Président, dimanche dernier coïncidait avec une triste date historique. En effet, il y a 35 ans, soit le 20 février 1959, le gouvernement Diefenbaker annulait le projet de l'Avro Arrow, l'avion militaire de fabrication canadienne le plus aérodynamique et le plus sophistiqué de son temps. Ainsi se brisait notre deuxième rêve national.

Après une brillante carrière militaire en Pologne, en Grande-Bretagne et ailleurs en Europe, Janusz Zurakowski s'installa à Toronto, en 1952, et devint le premier pilote d'essai de l'Avro Arrow. Jan et son épouse Anna possèdent Kartuzy Lodge, près de Barry's Bay, dans ma circonscription. Lorsqu'on lui demandait ce qu'il éprouvait à bord d'un avion si rapide, il répondait que c'était comme voler lentement, mais en vitesse accélérée.

L'Arrow pouvait aller deux fois plus vite que le son. Il aurait encore été un avion adapté au début des années 80, période où on a dépensé bien des fois son prix de revient pour acheter les CF-18 de fabrication américaine.

Le gouvernement Diefenbaker ordonna la mise à la casse des six Avro Arrow déjà construits. Les registres, les installations et les plans, tout fut détruit sur ordre. Triste fin pour une magnifique réalisation canadienne!

Canadiens, bâtissons notre avenir sur les feux de nos réussites, et non sur les cendres de nos échecs. Alors, les Janusz Zurakowski seront heureux de constater le changement.

* * *

LES PROGRAMMES D'APPRENTISSAGE

M. Peter Adams (Peterborough): Monsieur le Président, les programmes d'alternance travail-études constituent une formule d'enseignement technique et technologique, qui est florissante au Canada. Selon cette formule, les étudiants sortent de leur milieu scolaire pour aller acquérir de l'expérience en milieu de travail.

Or, une autre méthode, celle des programmes d'apprentissage, donne des résultats très médiocres au Canada. Dans ce cas-ci, les étudiants reçoivent une formation en milieu de travail et suivent des programmes scolaires, au besoin.

Au Canada, le nombre d'apprentis ainsi que la qualité et la pertinence des programmes d'apprentissage ont diminué considérablement.

Une industrie de Peterborough qui avait des centaines d'apprentis n'en compte maintenant que quatre. C'est en partie parce que les apprentis obtiennent souvent des compétences qu'ils ne peuvent pas utiliser à l'extérieur de leur province. En Ontario,


1683

seulement 14 p. 100 des apprentis obtiennent des permis pour travailler dans d'autres provinces.

C'est une honte nationale et une tragédie pour des gens qui sont très qualifiés, mais qui se trouvent coincés dans une province où l'économie est affaiblie.

J'exhorte le gouvernement à agir rapidement au sujet du Programme national d'apprentissage. Nous avons besoin d'une main-d'oeuvre hautement qualifiée, très mobile et réellement nationale.

* * *

[Français]

LE COMTÉ DE BONAVENTURE

M. Yvan Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, pour faire face aux problèmes de chômage, à l'exode des jeunes et à la surexploitation des ressources naturelles, les gens de Bonaventure ont choisi, hier, lors d'une élection complémentaire, M. Marcel Landry et le Parti québécois, démontrant ainsi leur désir de changement et leur volonté de faire la souveraineté du Québec.

Comme l'a si bien dit le poète et grand Québécois, M. Félix Leclerc: «La Gaspésie, pays intérieur de chacun de nous, pays mystérieux, silencieux, patient. Le cri qui fera peur à tout le monde, c'est de là qu'il viendra.»

Après 37 ans de règne libéral, cette élection partielle est un véritable coup de tonnerre dans le ciel québécois, et nous nous en félicitons.

* * *

[Traduction]

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord): Monsieur le Président, je voudrais profiter de cette occasion pour féliciter nos athlètes qui participent aux Jeux olympiques d'hiver à Lillehammer, en Norvège.

Ils méritent notre appui et notre reconnaissance pour les efforts et l'engagement dont ils ont fait preuve afin d'atteindre l'excellence dans leur discipline sportive.

Je tiens à mentionner particulièrement Susan Auch de ma circonscription, Calgary-Nord, qui a remporté samedi dernier, le 19 février, la médaille d'argent aux 500 mètres en patinage de vitesse à l'amphithéâtre olympique de Hamar. Susan est la première Canadienne, depuis 1976, à remporter une médaille olympique sur longue piste.

Au nom de la population de Calgary-Nord, je lui adresse mes sincères félicitations.

(1415)

LE BILINGUISME

M. Benoît Serré (Timiskaming-French River): Monsieur le Président, je voudrais évoquer les déclarations que le chef de l'opposition officielle a faites à plusieurs reprises à la Chambre.

Le député parle souvent de notre pays comme d'un pays divisé en deux, avec, d'un côté, le Québec et, de l'autre, le Canada anglais. Cela sous-entend que le Québec est exclusivement français et le reste du Canada, exclusivement anglais.

C'est, à mon avis, une injustice et une insulte envers les 20 p. 100 de Québécois qui ne sont pas d'origine française, envers les francophones-plus d'un million-qui habitent en dehors du Québec et envers les 35 p. 100 de Canadiens qui ne sont ni d'origine française ni d'origine anglaise.

Je demande au chef de l'opposition de respecter tous les Canadiens, quelle que soit leur origine, et de s'abstenir de faire de telles déclarations à l'avenir.

* * *

[Français]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

M. Nick Discepola (Vaudreuil): Monsieur le Président, en novembre, Statistique Canada publiait les conclusions d'une enquête effectuée auprès de 12 300 femmes à travers le Canada. Les résultats sont effarants: une femme sur deux a été victime de violence au moins une fois depuis l'âge de 16 ans et une sur dix a craint pour sa vie.

Dans mon comté, la situation est d'autant plus grave qu'il n'existe aucun centre d'hébergement. Le comté de Vaudreuil compte 110 000 habitants à 80 p. 100 francophones. Les femmes qui ont besoin d'un refuge pour elles et leurs enfants doivent aller à l'extrême ouest de l'île de Montréal, dans un milieu anglophone.

Actuellement, le centre d'écoute et de référence La Moisson essaie de venir en aide aux femmes battues, mais il n'est ouvert que 5 jours par semaine durant les heures de bureau.

Au cours de sa dernière année fiscale, La Moisson a répondu à 478 demandes de femmes brutalisées, et depuis octobre dernier, la demande a doublé.

La situation est grave et c'est pourquoi je demande au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux de se pencher sur ce dossier pour y remédier le plus vite possible.

* * *

[Traduction]

LE PROGRAMME «L'ÉCOLE AVANT TOUT» AU YUKON

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon): Monsieur le Président, il est beaucoup question, ces jours-ci, de criminalité et de chômage parmi les jeunes. Ce dont nous n'entendons pas souvent

1684

parler, ce sont des réalisations qui montrent que, quand on leur en donne la possibilité, les jeunes de notre pays peuvent réaliser de grandes choses.

Le programme «L'École avant tout» de la ville de Dawson, au Yukon, en est pourtant un exemple. Sous la direction dévouée de M. Jim Johnston, conseiller pédagogique, le taux d'abandon scolaire a chuté de 40 p. 100 à 1 p. 100 en trois ans.

Malgré ces résultats, le gouvernement fédéral a mis fin au financement de ce programme. Le gouvernement dit qu'il veut s'attaquer au chômage. L'un des meilleurs moyens de le faire est d'assurer aux jeunes une bonne éducation.

Au nom des jeunes du Yukon et du Canada, je prie instamment le gouvernement de rétablir le financement de ce programme.

_____________________________________________


1684

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA BOSNIE

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Selon les autorités de la Force de protection des Nations Unies, quelques dizaines d'armes lourdes serbes échappaient hier au contrôle des Forces de l'ONU à Sarajevo, mais l'ONU prévoit toutefois s'en rendre maître aujourd'hui. Cependant, des bombardements serbes continuent sur des enclaves de la Bosnie comme Tuzla et Bihac, et à Moscou et Washington, les démarches se poursuivent pour essayer d'arriver à un règlement diplomatique pour un processus de paix durable en Bosnie.

Est-ce que le premier ministre peut nous indiquer si son gouvernement endosse la proposition visant à placer Sarajevo sous l'administration de l'ONU et est-il disposé, dans un tel contexte, à reconsidérer la décision du gouvernement canadien à l'effet de retirer les Casques bleus canadiens de la Bosnie?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, aucune décision n'a été prise concernant la Bosnie, à la suite de la suggestion de la France relativement au statut de la ville de Sarajevo. C'est une proposition très intéressante, mais nous devons terminer nos consultations avec les autres pays avant d'en venir à une décision.

Quant à la présence des troupes en Bosnie, la décision finale sera prise avant la fin du terme, qui doit expirer à la fin de mars, au début d'avril.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, je voudrais demander également au premier ministre s'il envisage de recourir à de nouveaux ultimatums pour mettre fin aux combats qui se poursuivent dans les enclaves comme Tuzla et Bihac, ou s'il s'en remet simplement aux initiatives diplomatiques en cours à Washington et à Moscou.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, la décision prise il y a une dizaine de jours concernant l'ultimatum et l'étranglement de la ville de Sarajevo a produit les résultats escomptés. Alors, à ce moment-ci, est-ce qu'on doit continuer? Je pense qu'on a eu du succès avec ce qui s'est passé jusqu'à maintenant, et je pense que la solution idéale est de trouver un accord entre les parties pour mettre fin à cette situation déplorable.

(1420)

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, la concertation et l'efficacité ferme des alliés durant cette période ont montré que la recette doit avoir des résultats. Est-ce qu'une bonne recette dans un cas ne devrait pas être appliquée dans les autres? La question est posée et je crois que le gouvernement devra y répondre très rapidement.

Advenant la nécessité de consolider le processus de paix par un plus grand nombre de contingents de Casques bleus en Bosnie et dans l'ensemble de l'ex-Yougoslavie, est-ce que le gouvernement est disposé à reconsidérer sa décision de ne pas envoyer de Casques bleus canadiens additionnels?

[Traduction]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Ce qu'a dit le ministre des Affaires étrangères la semaine dernière correspond à la position du gouvernement.

Le contingent canadien est le troisième en importance dans cette région. Nous avons participé à toutes les missions de maintien de la paix dans le monde. Certains pays n'ont envoyé aucun soldat en ex-Yougoslavie. C'est une excellente occasion de le faire. Plus il y a de pays qui participent à ces missions, meilleures sont les chances de succès. Le Canada s'est toujours montré très généreux, mais je pense que d'autres pays devraient également faire leur part.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, hier, à la période de questions, le ministre des Affaires indiennes a refusé à deux occasions de répondre à nos questions quant au statut de M. Jerry Peltier au sein du gouvernement fédéral au moment de la crise d'Oka. Maintenant qu'il a eu la chance d'aller aux sources, le ministre peut-il nous dire si M. Jerry Peltier était à l'emploi du gouvernement fédéral au moment de la crise d'Oka et quel était son statut?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, si je comprends bien, M. Peltier aurait été au service de l'ancien gouvernement à l'époque de la crise d'Oka. J'ignore si c'est exact ou non. Si le député a des renseignements à ce sujet, je le prierais de nous les communiquer afin que nous puissions les examiner.


1685

Il est difficile d'intervenir dans les activités quotidiennes d'une bande, en raison du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Par ailleurs, nous avons la responsabilité de veiller à ce que tout aille bien.

En tant que ministre, j'ai demandé aux fonctionnaires de mon ministère d'examiner cette allégation très attentivement. J'espère que le député sera en mesure de présenter certaines preuves. Pour ma part, je me suis engagé à faire preuve de responsabilité financière devant la Chambre et à lui présenter les rapports que nous pourrions avoir.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, quand le ministre aura terminé ses vérifications, pourrait-il indiquer à cette Chambre pour quel type de services des honoraires rétroactifs de 25 600 $ auraient été versés, après coup, à M. Peltier?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Encore une fois, monsieur le Président, je tiens à rappeler qu'il s'agit d'une allégation et, même si elle a été faite à la Chambre et non à l'extérieur, il faudrait peut-être la traiter avec beaucoup plus d'attention que mon éminent collègue ne semble vouloir le faire.

Si vous pouvez prouver l'allégation selon laquelle un paiement irrégulier aurait été effectué à une personne de la bande ou à une personne avec qui nous faisons affaire à quelque niveau que ce soit du gouvernement, montrez-nous cette preuve et nous ferons les vérifications nécessaires.

J'ai également demandé aux fonctionnaires de mon ministère de vérifier si cette allégation était fondée et d'examiner les livres da l'ancien gouvernement. Je suis tout à fait disposé à faire connaître au député l'issue de ces vérifications.

* * *

L'ÉLECTION PARTIELLE DANS UNE PROVINCE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Hier soir, le candidat du PQ, Marcel Landry, a connu une victoire retentissante à l'élection partielle qui a eu lieu dans Bonaventure.

Des voix: Bravo!

M. Manning: Bonaventure était considérée comme la circonscription la plus fédéraliste du Québec. Vu que des élections provinciales auront lieu prochainement, le premier ministre ne voit-il pas la nécessité d'une nouvelle et vigoureuse stratégie pour accroître l'appui au fédéralisme au Québec?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, la meilleure décision de la population canadienne a été prise le 25 octobre. C'était celle de remplacer l'ancien gouvernement par un gouvernement libéral.

Des voix: Bravo!

(1425 )

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, une question supplémentaire pour le premier ministre.

Lorsque des Québécois votent pour des souverainistes, le premier ministre ne pense-t-il pas-et nous demandons son avis-qu'ils rejettent le principe du fédéralisme ou tout simplement le genre de fédéralisme qu'offrent les partis traditionnels?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, je suis très heureux de constater la préoccupation du chef du Parti réformiste. Je suis heureux qu'il veuille faire sa part. S'il veut faire quelque chose, qu'il appuie les politiques du gouvernement en faveur du bilinguisme.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, je sais que le premier ministre s'inquiète de cette question. C'est pour cela que je lui demande quelles mesures précises il entend prendre, d'ici les prochaines élections provinciales, pour promouvoir le fédéralisme canadien au Québec?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, le meilleur moyen de vendre le fédéralisme au Québec est d'avoir à Ottawa un bon gouvernement, un gouvernement efficace et honnête.

Des voix: Bravo!

* * *

[Français]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Monsieur le Président, La Presse révélait dans son édition de samedi dernier que la situation financière de Kanesatake est pour le moins précaire. Le ministère des Affaires indiennes a conclu une entente avec le conseil de bande afin de redresser cette crise financière.

On apprend également que le gouvernement a commandé une procédure interne pour vérifier les pratiques de gestion du conseil de bande. Le ministre des Affaires indiennes peut-il s'engager à déposer devant cette Chambre les conclusions de cette vérification?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, comme je l'ai dit, certainement.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean): Monsieur le Président, est-ce que le ministre pourrait nous dire quel est le montant du prêt sans intérêt, accordé par son ministère au conseil de bande de Kanesatake?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, j'apprécie la séance d'exercice que me permet d'exécuter le député en me faisant lever et rasseoir, puisque je ne peux pas en faire au gymnase que je ne parviens pas à trouver. La réponse est oui.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, on m'a dit que le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien


1686

aurait annoncé aux bandes du Lac des Esclaves, à leur dernière réunion, qu'il allait révoquer la Loi sur les Indiens.

Le ministre pourrait-il dire à la Chambre par quoi il entend la remplacer?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, si mon collègue se donne la peine de lire le livre rouge, il verra que ce projet y tient une place importante. Nous croyons fermement au transfert des responsabilités et à la révocation de la Loi sur les Indiens, faite d'une façon pratique, en veillant à ne nuire à personne et en étalant la transition sur un certain nombre d'années. C'est ce que veulent les non-autochtones et c'est aussi ce que veulent les autochtones. Nous espérons que, à force de persévérance, le gouvernement pourra réaliser ce projet.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire. Le Edmonton Sun rapporte que, durant cette même réunion, le ministre aurait affirmé que «les membres du Parti réformiste haïssent les Indiens et se posent en défenseurs de l'homme blanc».

Le ministre a-t-il réellement fait cette affirmation?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, je répète au député que j'espère que le Parti réformiste montrera un peu de considération à l'égard des aspirations des peuples autochtones. Je suis prêt à collaborer avec le Parti réformiste pour la reconnaissance du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.

Aujourd'hui, je demande au député d'oser dire à la Chambre qu'il croit au droit inhérent des peuples autochtones à l'autonomie gouvernementale.

* * *

(1430)

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.

On apprenait hier matin que le ministre s'apprête à remplacer la fiche d'établissement actuelle des immigrants par une carte d'identité, et ce, à partir de l'automne. Cette carte contiendrait différentes informations sur l'immigrant: nom, date de naissance, nationalité, photo, etc.

Le ministre ne comprend-il pas qu'il créera ainsi deux classes de personnes au Canada: celles qui doivent porter une telle carte d'identité, et les autres?

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, la carte d'identité n'a rien de nouveau. Les organisations non gouvernementales et les juristes en ont été informés l'été dernier. La carte d'identité remplacera simplement la grande feuille de papier que reçoivent les immigrants une fois qu'ils ont obtenu le droit d'établissement.

Il y a deux raisons au remplacement de la lettre par la carte d'identité. Tout d'abord, la lettre peut facilement être contrefaite, reproduite et revendue à fort prix sur le marché noir. La carte, fabriquée selon des techniques de pointe, réduira les risques de fraude.

Deuxièmement, de nombreux résidents admis à s'établir au Canada ont demandé une petite carte de format portefeuille, qu'ils pourront utiliser comme carte d'identité jusqu'à l'obtention de leur carte de citoyenneté. Donc, la carte aura une utilité d'ordre pratique, et c'est la raison pour laquelle les personnes qui l'utiliseront l'ont demandée.

Il n'y a là rien d'inconvenant. La carte d'identité ne contient pas plus de renseignements qu'un passeport ordinaire. Le député suggère-t-il de supprimer aussi les passeports?

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, ce n'est pas la même carte et ce n'est pas une demande des immigrants.

Compte tenu de l'impact sur la vie privée d'une telle carte, le gouvernement ne convient-il pas de tenir un véritable débat avant de poser ce geste de restriction du droit à la vie privée?

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, le député avance un argument absurde. Je viens tout juste de lui dire que tous les résidents qui ont obtenu le droit d'établissement reçoivent une formule.

Nous essayons simplement, et je crois que les Canadiens et les immigrants nous approuvent, d'empêcher la reproduction frauduleuse de documents en vue d'obtenir des cartes illégalement. C'est aussi une carte d'identité pour les éventuels immigrants qui s'établissent ici. Cette carte ne permet pas de fouiller dans la vie privée des gens. Nous voulons simplement améliorer le système pour ceux qui l'utilisent et mieux le protéger contre ceux qui veulent en abuser.

* * *

L'EMPLOI

M. Monte Solberg (Medicine Hat): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Comme je le mentionnais la semaine dernière, une édition récente de l'émission de télévision Venture nous apprenait que, selon une étude effectuée par le ministère, les programmes de formation offerts actuellement par le ministère des Ressources humaines n'aident aucunement les gens à la recherche d'un emploi; ils leur nuisent.

Le ministre acceptera-t-il de déposer ce document à la Chambre des communes?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je l'ai dit la semaine dernière et je le répète, les renseignements ont toujours été à la disposition du député, qui n'avait qu'à les consulter. Nous n'avons rien à cacher ou à dissimuler. Nous


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serions plus que ravis de déposer toute évaluation qui aurait été effectuée.

Cependant, je me dois de souligner que les programmes de formation offerts au pays seront étudiés dans le cadre de l'examen général qu'a entrepris le Parlement. Nous aurons tout le temps voulu d'examiner en comité parlementaire la façon d'appliquer les programmes de formation et d'en discuter avec les provinces.

Je voudrais cependant faire une petite mise en garde au député. Je ne pense pas qu'il devrait, à partir d'un cours extrait d'un reportage télévisé, condamner de façon générale un programme de formation qui a bien aidé des centaines de milliers de Canadiens.

M. Monte Solberg (Medicine Hat): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire.

Si, d'après les études du ministère, les programmes de formation actuels, qui coûtent des milliards de dollars chaque année, n'aideront aucunement les gens à se trouver de nouveaux emplois, pourquoi les contribuables devraient-ils continuer de les financer?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, le député étale son ignorance en posant une telle question. Ce n'est pas ce que dit le rapport.

(1435)

Le rapport signale que, dans de nombreux domaines clés, comme la formation en milieu de travail, l'acquisition de nouvelles compétences et les cours d'alphabétisation, de telles dépenses rendent d'énormes services, puisqu'elles offrent à de nombreux Canadiens l'occasion de se recycler, permettent au gouvernement d'investir davantage dans les ressources humaines et redonnent au pays l'espoir dont il a besoin pour accroître sa productivité.

Je ferai remarquer au député que, en formulant des critiques globales sur un sujet qu'il ne connaît pas, il est loin de rendre service aux nombreux Canadiens qui participent actuellement à nos programmes de formation.

* * *

[Français]

LA SANTÉ

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, il semble y avoir unanimité au sein de l'industrie laitière pour exiger du gouvernement fédéral qu'il bloque la vente de l'hormone somatotrophine bovine au Canada, puisque les Canadiens ne sont pas rassurés quant aux effets de cette hormone de croissance sur la santé humaine.

Ma question s'adresse à la ministre de la Santé. Étant donné cette unanimité, la ministre peut-elle nous garantir qu'un moratoire d'au moins six mois sera établi sur la vente, au Canada, de l'hormone somatotrophine?

[Traduction]

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, j'ai déjà expliqué à la Chambre que la subtance BST est une hormone artificielle résultant de la biotechnologie. Elle équivaut à une hormone produite naturellement par les vaches. L'injection de la substance permet d'accroître la production des vaches laitières.

Mes fonctionnaires étudient actuellement la BST. Ils procèdent à des études cliniques sur ses effets et n'ont pas encore émis d'avis de conformité. Dès que les essais cliniques seront terminés, une fois qu'il sera prouvé que le lait est absolument sûr et qu'il n'y a absolument aucune différence, il ne nous restera probablement qu'à émettre l'avis de conformité.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, nous connaissons les effets de la somatotrophine bovine. Il n'empêche que l'industrie laitière s'inquiète beaucoup.

La ministre peut-elle nous garantir que les intérêts des consommateurs et de l'industrie laitière sur cette question auront préséance sur ceux de l'industrie pharmaceutique?

[Traduction]

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, ma responsabilité, c'est la santé des Canadiens, et je la prends très au sérieux.

Il est très important que nous procédions à tous les essais cliniques sur la BST, pour pouvoir dire aux Canadiens que leur lait est absolument sûr. C'est mon rôle à titre de ministre de la Santé, et j'entends le remplir.

* * *

L'IMMIGRATION

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. J'étais un immigrant et je suis maintenant un citoyen canadien.

Des voix: Bravo!

Une voix: Et maintenant, vous voulez fermer la porte.

M. Gruber: Je pose cette question au nom des Canadiens qui s'inquiètent de la crise financière qui secoue le pays. L'année prochaine, le Canada admettra 111 000 immigrants dans le cadre du programme de réunification des familles. Nombre d'entre eux seront à un âge où ils ne pourront contribuer aux programmes sociaux du Canada. Ces personnes ont droit à l'assurance-maladie gratuite.

Le ministre peut-il dire à la Chambre à combien, d'après lui, s'élèveront les coûts des services médicaux pour ces immigrants?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, dans notre livre rouge, nous avons dit, et les Canadiens nous ont signifié leur appui en nous élisant, que l'une des priorités de la politique d'immigration était les immigrants de la catégorie de la famille.


1688

Il y a deux raisons à cela. D'abord, nous estimons que les Canadiens ont droit à la réunification de leur famille. Ensuite, nous croyons que la famille est la cellule qui permet une meilleure intégration et un meilleur établissement des arrivants, favorisant ainsi leur succès sans accroître le fardeau de l'État.

Le parti du député parle souvent des valeurs familiales. J'estime qu'en matière de réduction du nombre d'immigrants on ne peut gagner sur les deux tableaux. On ne peut parler des valeurs familiales pour décrier ensuite l'immigration de la catégorie de la famille.

(1440)

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound): Monsieur le Président, la population du Canada doit-elle conclure, d'après la réponse ou plutôt l'absence de réponse du ministre, que les décisions sur les niveaux d'immigration sont prises sans égard aux coûts qu'elles entraînent pour le budget des programmes sociaux, qui est déjà grevé?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, nous n'avons rien dit de tel. En fait, quand nous avons annoncé les niveaux il y a quelques jours, nous avons dit qu'il était très important de les fixer non pas dans l'absolu, mais dans le cadre d'un programme d'établissement de deux ans et en tenant compte d'un budget d'intégration. C'est une très importante distinction à laquelle l'ex-gouvernement n'a guère porté attention.

Nous nous préoccupons des effets que cela aura sur notre système de santé, mais nous ne sommes pas prêts à interdire aux immigrants de la catégorie de la famille l'accès aux services médicaux et à l'offrir aux immigrants indépendants ayant des compétences particulières. Est-ce que le député veut dire qu'en étant admis comme résidents permanents les immigrants sont censés avoir passé un contrat avec le Canada, qu'ils sont censés contribuer et que c'est donnant donnant?

* * *

[Français]

LES ÉCHANGES INTERPARLEMENTAIRES

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. On apprenait dans La Presse que des députés libéraux fédéraux ont forcé 15 parlementaires européens à annuler une série de rencontres avec des organismes québécois pour les remplacer par un séjour officiel à Ottawa et à Vancouver, dans le cadre des travaux de l'Association parlementaire Canada-Europe.

Le Président: Peut-être que le député pourrait reformuler sa question puisque ceci n'est pas de la responsabilité administrative du gouvernement, puisqu'il s'agit d'un organisme non gouvernemental.

M. Canuel: Ma question est la suivante, monsieur le Président: Comment le ministre explique-t-il alors que son ambassadeur à Bruxelles ait, lui aussi, participé à convaincre des parlementaires européens, contre leur gré?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, je pense que vous avez eu raison de rappeler à l'honorable député que ce genre de rencontres entre parlementaires est organisé par des organismes qui ne sont pas des organismes gouvernementaux. Périodiquement, des parlementaires viennent au Canada dans ces programmes d'échange.

À l'occasion de la visite qui a eu lieu, il était déjà prévu qu'ils viendraient à Ottawa et qu'ils se rendraient en Colombie-Britannique pour étudier la question forestière, qui est actuellement l'objet de consultations au plus haut niveau.

Donc, les parlementaires qui sont venus ici savaient très bien pourquoi ils venaient et quel serait leur agenda. Il y a un de ces parlementaires, qui a probablement des accointances avec les séparatistes québécois, qui a fait un crochet à Montréal, et qui est allé dénigrer cette procédure parlementaire, bien établie, d'échange entre parlements, qui avait été acceptée d'avance. Tous les autres étaient contents, sauf cette mauvaise brebis qui s'est égarée à Montréal.

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Monsieur le Président, il y a plusieurs personnes, des parlementaires là-bas, qui nous ont dit la même chose. Est-ce qu'il y a d'autres parlementaires qui auraient questionné le ministre quand ils sont venus le voir?

(1445)

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, il n'y a aucun doute qu'il y aura d'autres échanges entre le Parlement européen et le Parlement canadien. Il n'y a aucun doute que ces parlementaires européens sont tout à fait bienvenus dans toutes les provinces du Canada, y compris dans la province de Québec.

Ceux qui sont venus ici ont rencontré le premier ministre et ont parlé des questions canadiennes et des questions qui intéressaient les parlementaires européens.

Ceux qui sont venus ici ont eu aussi l'occasion de rencontrer la vice-première ministre, qui les a invités à l'accompagner puisqu'elle s'en allait elle-même dans la province de Québec. Alors, ceux qui auraient voulu profiter de cette offre auraient pu le faire.

Je répète qu'il n'y a qu'un seul parlementaire qui a trouvé cette procédure inacceptable. Il aurait dû rester chez lui, puisqu'il savait d'avance que le voyage s'effectuait ici, à Ottawa, et à Vancouver, et se joindre à nous, lors d'une autre rencontre, quand le programme inclurait, à ce moment-là, la province de Québec.

* * *

[Traduction]

LES FORÊTS

M. John Duncan (North Island-Powell River): Ma question s'adresse à la ministre des Ressources naturelles.

Récemment, le gouvernement canadien a financé la création d'une forêt modèle de plusieurs millions de dollars au Mexique. La ministre peut-elle assurer à la Chambre que, à la conférence bilatérale qui aura lieu à Mexico à la fin du mois, le gouvernement ne s'engagera pas à financer d'autres recherches ou projets


1689

forestiers de notre nouveau partenaire dans le cadre de l'ALÉNA?

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Je remercie le député de poser la question.

Le député sait peut-être que le Canada a été l'un des premiers pays à donner suite à la notion de forêt modèle. Cela fait partie de notre engagement à gérer les forêts selon le principe du développement durable. Nous nous estimons très chanceux d'avoir pu participer à des partenariats et transférer cette importante technologie à d'autres pays, qu'il s'agisse du Mexique ou de l'ancienne Union soviétique. Je vais encourager le ministère des Ressources naturelles à faire partie d'autres partenariats afin que nous puissions continuer à assurer, à l'échelle de la planète, le développement durable des ressources forestières.

M. John Duncan (North Island-Powell River): Une question supplémentaire, monsieur le Président. Le Mexique affiche un excédent budgétaire alors que nous accusons un terrible déficit. La ministre conviendra-t-elle que son gouvernement ne devrait pas financer des projets forestiers à l'extérieur du Canada?

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Je crois que, en tant que gouvernement, nous devons collaborer avec nos voisins du monde entier pour que notre engagement à l'égard du développement durable se réalise partout où c'est possible.

* * *

LA JUSTICE

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Ces derniers mois, les Canadiens ont vu les tribunaux émettre plusieurs ordonnances de huis clos ou de non-publication. Ces ordonnances ou bien ont exclu les médias et le public de procès criminels ou bien leur ont permis d'y assister, mais pas de faire état des délibérations.

Le ministre pourrait-il nous dire quelles mesures il a prévues pour remédier à cette situation et sauvegarder le droit très important des Canadiens de savoir ce qui se passe au sein du système de justice pénale?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, selon le Code criminel et les règles de droit générales, les délibérations des tribunaux sont ouvertes au public. Cependant, le Code porte également qu'un juge peut décider d'émettre une interdiction de publier s'il croit que cela est nécessaire pour que l'accusé bénéficie d'un procès juste.

Comme le sait la députée, qui a travaillé pendant de nombreuses années comme avocate devant les tribunaux, il est parfois très important d'imposer des ordonnances de non-publication aux médias pendant des délais déterminés, notamment lors d'enquêtes préliminaires où les éléments de preuves ne sont pas encore connus. La justice s'en trouve mieux servie, et l'une des parties à un procès ne risque pas de subir de préjudice. Un juge peut aussi estimer une telle ordonnance nécessaire lorsqu'il y a un différend au sujet de l'admissibilité de certains éléments de preuve et qu'il ne veut pas que les membres d'un jury en soit informés avant qu'il ne tranche la question. Il est évident qu'il y a un équilibre. La Cour suprême du Canada est présentement saisie de deux affaires où elle doit se prononcer sur l'équilibre entre la liberté d'expression aux termes de la Charte et les ordonnances de non-publication dans les médias. Nous attendons ces décisions et nous les étudierons. La députée peut avoir l'assurance que tout sera mis en oeuvre pour que le droit pénal soit administré équitablement au Canada.

* * *

(1450)

[Français]

LE CENTRE NATIONAL DES ARTS

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Le gouvernement semble n'avoir aucun problème de conscience à laisser verser 350 000 $ au directeur général du Centre national des Arts à la suite de son congédiement, conséquence d'un putsch organisé par la mairesse d'Ottawa. D'ailleurs, le ministre du Patrimoine canadien s'en lave les mains, en invoquant l'autonomie de gestion de l'agence fédérale.

Le ministre reconnaît-il qu'il appartient au gouvernement de déterminer les conditions de travail des directeurs des sociétés d'État, y compris le régime des indemnités de départ, et que dans ce cas-ci, c'est précisément le montant démesuré de cette indemnité qui nous scandalise, à quelques heures à peine d'une hausse générale des taxes pour l'ensemble des Canadiens?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsieur le Président, je peux rassurer ma collègue que le ministre du Patrimoine canadien ne se lave jamais les mains de rien. Cela ne veut pas dire qu'il ait les mains sales.

Il y a peut-être un point à souligner, parce qu'il n'est pas connu de tout le monde. Cette institution, le Centre national des Arts, est la seule institution du genre dont le directeur est élu par le conseil de direction, plutôt que nommé par le gouvernement. Il y a donc une situation qui est tout à fait particulière et qui peut expliquer bien des choses.

Bien sûr, il existe, entre le gouvernement et cette institution, une relation d'autonomie, que notre collègue ne conteste pas, je crois, et que le gouvernement respecte. Mais le ministre a une certaine autorité, il a l'autorité de nommer des gens sur le conseil d'administration, de vérifier l'état des finances et d'amender la loi, si celle-ci doit l'être. Ce problème, qui sera considéré et auquel il a été fait allusion, sera bien sûr considéré dans le cadre des mesures que le gouvernement peut prendre à l'égard du CNA.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata): Monsieur le Président, en plus de l'indemnité de 350 000 $, le ministre peut-il nous dire s'il est vrai que la responsable de l'agence de placement au bureau du premier ministre, Mme


1690

Collenette, chercherait désespérément un nouvel emploi dans la fonction publique fédérale pour M. DesRochers?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Il y a des procédures, monsieur le Président, que nous suivons lorsqu'il s'agit de chefs d'agences. Lorsqu'il y a une vacance, on fait paraître une annonce dans la Gazette du Canada. Nous recevons des noms, et à ce moment-là, ces noms sont considérés.

Au moment où nous nous parlons, il y a effectivement une vacance dans une agence culturelle du gouvernement du Canada, une vacance annoncée, qui n'est pas réelle en ce moment, mais qui le sera un peu plus tard cette année, et à ce moment-là, quand le poste serait prêt à combler, les procédures seront suivies.

* * *

[Traduction]

LE PARTI RÉFORMISTE

M. Bob Ringma (Nanaimo-Cowichan): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Plus tôt, au cours de la période des questions, mon collègue, le député de Crowfoot, a posé une question directe au ministre à propos de ce qu'il avait ou n'avait pas dit concernant le Parti réformiste. Cherchant à l'esquiver autant que possible, le ministre n'a donc pas répondu directement, clairement, à la question.

Le ministre aurait-il maintenant l'obligeance d'y répondre? Avez-vous tenu les propos qu'on vous prête?

(1455)

Le Président: On devrait bien sûr toujours poser la question en s'adressant à la présidence. Je saurais gré au député de bien vouloir reformuler sa question.

M. Ringma: Monsieur le Président, j'aimerais bien que le ministre réponde maintenant à la question.

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, les positions du Parti réformiste ne laissent pas de m'inquiéter. J'ai vu à la Chambre les députés réformistes s'en prendre aux immigrants. J'en ai vu un exhiber à la Chambre une brochure dont il citait favorablement. . .

Le Président: À l'ordre. J'inviterais le ministre à conserver un ton un peu plus général en répondant à la question. Je lui en saurais gré.

M. Irwin: Je suis convaincu, monsieur le Président, que le Parti réformiste ne déteste pas les Indiens. Je pense que personne à la Chambre ne déteste les Indiens. J'aimerais cependant que le Parti réformiste fasse montre d'un peu plus de générosité à l'égard des aspirations de l'un des groupes de Canadiens les plus pauvres et les plus méritants que nous ayons.

Si nous ne pouvons ensemble résoudre les problèmes d'un million et demi de nos concitoyens, notre pays est alors sans espoir.

[Français]

LES LOBBYISTES

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Dans le cadre du discours du Trône, le gouvernement fédéral s'engageait à réglementer les activités et les pratiques des lobbyistes. Cependant, selon un reportage récent de Radio-Canada, le gouvernement subirait d'énormes pressions des lobbyistes pour que cette nouvelle réglementation se fasse en collaboration avec les lobbyistes, préservant ainsi l'intérêt de ces derniers.

Le gouvernement confirme-t-il son intention de déposer un projet de loi sur la réglementation des lobbyistes, dans les prochaines semaines, et peut-il rassurer cette Chambre quant à l'indépendance réelle dont il jouit dans l'élaboration de cette nouvelle réglementation?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je peux rassurer le député que nous allons bientôt présenter notre projet de loi sur les lobbyistes et j'espère qu'il sera d'accord avec nous afin de pouvoir donner plus de force à la réglementation relative aux lobbyistes.

* * *

[Traduction]

LA COMMISSION DE CONTRÔLE DE L'ÉNERGIE ATOMIQUE

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre des Ressources naturelles.

Malgré la réduction constante du nombre de permis d'entreposage et de manutention de substances radioactives octroyés au Canada, le personnel de la Division du contrôle de la conformité de la CCEA continue de s'accroître.

On a entendu récemment des rumeurs selon lesquelles la CCEA projetterait d'ouvrir des bureaux régionaux de contrôle de la conformité à Vancouver et à Halifax même s'il n'y a que 370 titulaires de permis en Colombie-Britannique et moins que cela dans les Maritimes.

La ministre peut-elle confirmer qu'on projette d'ouvrir ces bureaux et, dans l'affirmative, comment peut-elle justifier cette décision?

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Monsieur le Président, je peux assurer au député que le gouvernement ne projette absolument pas d'ouvrir des bureaux à Vancouver ni à Halifax.

* * *

[Français]

LE LOGEMENT SOCIAL

M. Michel Daviault (Ahuntsic): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics.

À l'occasion du 25e anniversaire de l'Office municipal d'habitation de Montréal, M. John Gardiner, responsable de l'habitation au Comité exécutif de Montréal, déplore, encore une fois, le désengagement du gouvernement fédéral dans le domaine du


1691

logement social. Rappelons que plus de 10 000 familles ou ménages à Montréal sont actuellement sur les listes d'attente pour de tels logements.

Ma question s'adresse au ministre des Travaux publics à titre de responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logement.

Puisque M. Gardiner dénonce une fois de plus le désengagement du gouvernement fédéral dans le domaine du logement social, doit-on comprendre que sa rencontre récente avec le ministre n'a produit aucun résultat positif?

(1500)

[Traduction]

L'hon. David Dingwall (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux et ministre de l'Agence de promotion du Canada atlantique): Monsieur le Président, je veux remercier le député pour sa question, mais je crois qu'il devra s'armer de patience et attendre que le ministre des Finances présente son budget à 17 heures. Le député et tous les gens qui s'intéressent à cette question pourront alors voir quelle sera la décision du ministre des Finances.

* * *

LES PORTS DE LA CÔTE EST

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports et m'a été suggérée par M. Creelman MacArthur, de Halifax.

Alors que les ports de Halifax et de Saint John sont libres de glaces durant toute l'année, le gouvernement fédéral dépense annuellement des millions de dollars pour briser les glaces dans le Saint-Laurent. Il s'ensuit une situation où le gouvernement subventionne indirectement les ports intérieurs au détriment de ceux de la côte est.

À un moment où l'économie de la côte est est la plus durement touchée du Canada, pourquoi Halifax et Saint John devraient-ils se trouver en concurrence avec les ports intérieurs, non seulement pour l'achalandage, mais aussi pour les subventions fédérales?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, je suis évidemment au courant des activités aux ports de Halifax et de Saint John. Depuis 40 ou 50 ans, nous devons faire appel aux principaux ports de la côte est pour faciliter le transport des marchandises à destination et en provenance du Canada.

Je trouve pour le moins curieux qu'on remette en question les activités du port de Montréal, vu le rôle essentiel que ce port joue pour l'ensemble de l'économie canadienne. Nous avons donc la ferme intention de continuer à fournir des services à partir du port de Montréal, tout en espérant accroître les activités aux ports de Saint John et de Halifax.

* * *

L'ÉDITION

M. Simon de Jong (Regina-Qu'Appelle): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine canadien.

Vendredi dernier, le ministre a annoncé l'approbation de la vente des sociétés Maxwell Macmillan et Ginn Publishing à Paramount Comunications. Cette décision se heurte à une politique longtemps établie et, dans le cas de Ginn Publishing, c'est la première fois, en 25 ans, que l'on permet qu'une maison d'édition appartenant à des intérêts canadiens passe aux mains d'étrangers.

La Loi sur Investissement Canada exige, en effet, que les Canadiens puissent participer pleinement et en toute équité au processus d'appel d'offres pour l'achat d'une maison d'édition canadienne. Or, des éditeurs canadiens m'ont informé que la CDIC avait bloqué toutes leurs tentatives en vue de faire une offre pour ces deux sociétés.

Le ministre peut-il expliquer à la Chambre pourquoi le gouvernement n'a pas respecté sa propre législation en cherchant activement des investisseurs canadiens? De même, le ministre peut-il expliquer la différence qu'il y a entre son. . .

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je pense que deux questions en une, ça va, mais à la troisième ou à la quatrième, il faut passer à autre chose. Le ministre de l'Industrie voudrait-il avoir l'amabilité de répondre à la question?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, au nom du ministre responsable de la CDIC, qu'il me soit permis d'informer le député que le gouvernement partage ses inquiétudes.

Il faut savoir également que l'obligation faite à la CDIC de se départir de 51 p. 100 de ses capitaux dans Ginn constitue une mesure arrêtée depuis longtemps déjà. Ainsi, de nombreuses démarches ont été faites auprès d'éventuels acheteurs canadiens, mais aucune d'elles n'a suscité assez d'intérêt pour déboucher sur une offre acceptable aux yeux de la CDIC.

Dans ces conditions, il a été décidé de disposer des capitaux investis par la CDIC dans Ginn selon l'engagement pris par le gouvernement précédent.

* * *

QUESTION DE PRIVILÈGE

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound): Monsieur le Président, je voudrais soulever la question de privilège à propos d'une observation qui a été faite pendant la période des questions.

J'estime que l'on a attaqué mon intégrité et ma crédibilité personnelles. Pendant la période des questions, j'ai dit que j'avais été immigrant et que j'étais maintenant citoyen canadien. Le député de Carleton-Gloucester a crié: «Maintenant vous voulez fermer la porte.»

Ma question ne portait pas là-dessus, et je ne recommande pas. . .

(1505)

Le Président: Le député a peut-être un grief qui mérite d'être entendu, mais j'aimerais qu'il me laisse l'occasion de regarder les «bleus» pour que je prenne connaissance de ce qui a été dit exactement à ce moment-là.

1692


1692

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR L'ACCISE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur l'accise, la Loi sur les douanes et la Loi sur la vente du tabac aux jeunes, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, je vais essayer de rafraîchir la mémoire de chacun en rappelant à la Chambre ce qui est arrivé avant la période des questions.

Je crains qu'en agissant ainsi, le gouvernement n'ait fait comprendre aux gens que s'ils sont assez nombreux à enfreindre la loi, ils n'ont pas à s'inquiéter, on la changera. Ce qu'aurait dû faire le gouvernement, c'est voir à faire appliquer les lois actuelles. Si une loi a l'appui des Canadiens, elle doit être appliquée. Or, les Canadiens étaient en faveur de taxes élevées sur les cigarettes.

De tous les appels que je reçois à mon bureau, seul un sur six est en faveur de la réduction des taxes sur les cigarettes. Et croyez-moi, quand on arrive à amener les habitants de ma circonscription à s'opposer à la réduction des taxes, quelles qu'elles soient, ça veut dire qu'on est arrivé à faire quelque chose. Les habitants de ma circonscription détestent les taxes. Ils veulent qu'elles soient réduites, mais de façon sensée et raisonnable, et dans tous les secteurs. Le gouvernement aurait dû concentrer ses efforts sur l'application des lois, au lieu de se contenter de réduire les taxes sur les cigarettes de contrebande.

Malheureusement, les Canadiens ont parfois besoin qu'on leur rappelle qu'il existe, dans notre pays, des lois qui doivent être respectées. Il existe, dans notre pays, des lois qui interdisent la vitesse au volant, même s'il arrive à la plupart d'entre nous de faire des excès de vitesse de temps en temps. La simple vue d'une voiture de police stationnée sur l'accotement de la route suffit à faire ralentir la plupart des conducteurs. Si ce gouvernement avait été responsable de la loi sur les véhicules automobiles dans ma province, il n'aurait pas pris des mesures pour mieux la faire appliquer. Au lieu de cela, il aurait augmenté la limite de vitesse et se serait ensuite vanté d'avoir réglé les problèmes d'excès de vitesse au Canada.

En conclusion, la Loi sur les douanes et la Loi sur l'accise prévoient d'importantes pénalités pour les personnes qui enfreignent la loi. Le gouvernement aurait dû donner aux organismes chargés de faire appliquer la loi les ressources humaines et autres dont ils ont besoin pour s'acquitter de leur mandat. Les initiatives mises en place grâce à la motion no 3 manquent de vision. À long terme, on regrettera cette décision.

Il est malheureux que le gouvernement n'ait pas eu le courage de s'attaquer de front à la question. Lorsque'il sera saisi de la question de la contrebande d'alcool, j'espère que le gouvernement se montrera intransigeant et ne refera pas la même erreur.

Ma circonscription se trouve en bordure de la frontière des États-Unis. Elle compte deux des passages frontaliers les plus fréquentés du Canada, dont celui du Pacifique. Je sais qu'il se fait du trafic illicite de toutes sortes et que la contrebande de cigarettes n'est pas celle qui pose le plus de problèmes aux passages frontaliers du Pacifique et de Douglas.

Le seul moyen de régler cette question est de voir à faire appliquer les lois du Canada, et non pas de céder aux personnes qui les enfreignent.

(1510)

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud): Monsieur le Président, je voudrais parler d'une question que le Parti réformiste soulève constamment depuis le début de ce débat et qui doit être tranchée.

On a fait valoir que la réduction de la taxe d'accise sur le tabac était une mesure unique qui n'a aucune répercussion sur quoi que ce soit d'autre qu'ait pu faire ce gouvernement. En fait, l'idée derrière cet exercice et les initiatives présentées par le premier ministre, par le ministre du Revenu national et par la ministre de la Santé, était de mettre fin à la contrebande.

Pour y parvenir, ils ont dû éliminer le profit, qui était le principal motif à la base de la contrebande. La réduction de la taxe d'accise, combinée à l'imposition d'une taxe à l'exportation et à la surtaxe sur la fabrication, contribue à éliminer le motif de profit qui est à la base de la contrebande.

Si on élimine cet aspect de la taxe d'accise et qu'on l'applique, par exemple, totalement aux taxes à l'exportation, si on se sert de cette taxe à l'exportation et de la surtaxe pour régler ce problème, tout ce qu'on va faire, c'est déplacer le fardeau des exportations vers les États-Unis qui reviennent ensuite au Canada et favoriser la création d'installations de fabrication parallèles au Canada.

Les députés doivent réellement essayer de comprendre qu'il existe une approche globale à ce problème, l'un des plus graves que ce gouvernement ait eu à régler au cours de ses trois ou quatre premiers mois au pouvoir.

Mme Meredith: Monsieur le Président, je pense que le député a oublié la première partie de l'intervention que j'ai faite il y a plus d'une heure.

Ce qui m'inquiète, ce n'est pas que le gouvernement ait seulement réduit les taxes, mais qu'il n'ait pas veillé à faire respecter les lois actuelles. S'il avait fait respecter ces lois, nous n'aurions pas eu ce problème.

M. Speller: Nous n'étions pas ici.

Mme Meredith: Le député est ici depuis au moins 100 jours.

Ce qui m'inquiète, c'est que nous ne faisons ici que nous attaquer aux taxes sur les cigarettes et que le gouvernement ne fait rien pour mettre fin à la contrebande. On va bientôt avoir un problème de contrebande d'alcool, de passage clandestin d'étrangers aux frontières et de contrebande d'héroïne ou de drogues dures. En fait, ça existe déjà.

Si le gouvernement ne fait rien pour faire respecter les lois, il y aura toujours une contrebande de quelque chose. Ce n'est pas en réduisant les taxes sur un article en particulier qu'on va mettre fin à la contrebande.

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Monsieur le Président, je voudrais féliciter la députée de son discours. Elle a très bien exposé son point de vue.


1693

Cependant, au début de la première partie de son discours, il y a plus d'une heure de cela, elle a laissé entendre que ce projet de loi contribuait fort peu à réduire la contrebande.

Estime-t-elle que les activités de contrebande augmenteront ou diminueront, si nous prenons des mesures pour qu'elles ne soient plus rentables?

Mme Meredith: Monsieur le Président, je ne tiens pas à prononcer le même discours devant le député qui est assis à mes côtés, mais j'estime qu'avec ces mesures des gens seront peut-être moins incités à faire la contrebande de cigarettes.

Cependant, ces mesures ne les décourageront pas de faire entrer au Canada des drogues dures, de l'alcool ou des étrangers clandestins. On ne peut pas régler un problème d'application des lois en réduisant les incitations à se livrer à la contrebande. Il faut appliquer les lois du pays à tous les gens. Ce n'est qu'en les appliquant que nous mettrons un frein à la contrebande.

M. Julian Reed (Halton-Peel): Monsieur le Président, je voudrais demander à la députée comment, en misant uniquement sur l'application des lois, elle s'attend qu'on puisse les appliquer sur la frontière non protégée la plus longue au monde et sur le littoral le plus long au monde.

Mme Meredith: Monsieur le Président, j'ai mentionné à un moment donné que ma circonscription longe effectivement la frontière canado-américaine. Ma circonscription compte deux des passages frontaliers les plus achalandés au Canada, et ce problème n'est pas considéré comme majeur.

Effectivement, on s'y livre à la contrebande de cigarettes. Je ne le nie pas, mais ce problème n'est certainement pas aussi étendu qu'en Ontario et au Québec. Je ne crois pas qu'on puisse régler les problèmes en appliquant à tout le pays une solution qui ne concerne qu'une région. Il faut régler un problème dans une région s'il se limite à cette région. On ne devrait pas présumer qu'il s'étend à tout le pays.

(1515)

Je sais qu'aux passages frontaliers de ma circonscription la contrebande de cigarettes n'est décidément pas aussi étendue qu'elle l'est au Québec.

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le discours de la députée. L'une des choses que j'ai remarquées, c'est qu'elle signale tout ce que nous avons fait de travers. Je n'ai pourtant pas entendu la députée présenter la moindre proposition quant à la façon dont elle réglerait le problème.

Nous avons vu la contrebande de la cigarette prendre de l'ampleur depuis la fin des années 80. Le phénomène a connu une croissance de 60 p. 100 en moins d'un an, c'est-à-dire de 75 p. 100 au Québec, de 35 à 40 p. 100 en Ontario et de 15 p. 100 dans les provinces de l'Ouest. Et j'insiste sur le fait que cela ne cesse d'augmenter. Avec une boîte de cartouches, on fait 500 $ de profits. Avec un camion plein, c'est 500 000 $ qu'on empoche. On crée un millionnaire par jour. Tout cet argent risque de stimuler ce dont la députée parlait, soit la contrebande d'alcool, d'armes et de drogues.

Nous avons réagi pour empêcher l'accumulation de ces capitaux. La députée peut-elle nous dire, puisque nous avons tout fait de travers, comment elle s'y serait prise pour faire les choses correctement?

Mme Meredith: Monsieur le Président, le député a oublié la première partie de mon discours, où je reconnaissais les éléments positifs de cette mesure. J'approuve notamment qu'on donne le même pouvoir à tous les agents de la paix, et non plus seulement à ceux de la GRC, lorsqu'ils doivent traiter ce problème.

C'est ainsi qu'il faut traiter la question, en prenant les moyens pour faire respecter les lois canadiennes, et non pas en cédant devant les pressions des criminels et en rendant les lois moins sévères. En cédant aux criminels et en permettant que les activités criminelles entraînent la modification de la loi du pays, on envoie le mauvais message. Il faut au contraire faire appliquer la loi plus sévèrement et donner plus de moyens aux personnes chargées de l'exécuter, au Canada.

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Monsieur le Président, la députée nous invite-t-elle à passer outre aux conseils du commissaire de la GRC qui, en tant que principal agent chargé de l'application de la loi au Canada, a déclaré que, pour remédier à ce problème, nous devions réduire l'écart entre le prix des cigarettes au Canada et celui pratiqué aux États-Unis?

La députée ne voit-elle pas que notre politique dans le passé a permis l'implantation du crime organisé dans ce secteur et, en fait, la croissance de l'économie souterraine?

Étant donné la position de son chef qui a déclaré qu'une révolte des contribuables couvait au Canada, je me demande si les députés réformistes sauraient reconnaître une révolte de ce genre s'ils en avaient une sur les bras.

Mme Meredith: Monsieur le Président, ce que je crains, c'est que cette réduction de taxes sur un produit de contrebande ne permette pas de résoudre le problème. Je sais que, pour la GRC, c'était peut-être là la solution facile. Cependant, va-t-elle proposer la même chose lorsqu'il s'agira des autres réseaux de contrebande qui font le trafic des drogues dures ou de l'alcool?

Allons-nous également recommander une réduction des taxes sur l'alcool ou la légalisation de l'héroïne et des drogues dures pour faciliter la tâche de ce corps policier?

Je ne pense pas que ce soit là la question qui se pose dans le cas présent. Le fait est que nos lois ont une raison d'être et que nous ne devrions pas céder devant les criminels et les modifier simplement pour faciliter la tâche de contrebandiers qui souhaitent se lancer dans d'autres trafics.

Mme Susan Whelan (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national): Monsieur le Président, je me demande si la députée a pu prendre connaissance intégralement du plan d'action qui traite justement de la question de l'application des lois et des problèmes qui y sont liés? Nous avons accru de 25 p. 100 le nombre des douaniers afin d'assurer une meilleure application des lois.


1694

Je voudrais également informer ma collègue que ce problème ne touche pas qu'une région au Canada.

(1520)

Le passage frontalier le plus fréquenté l'an dernier était le pont de Windsor-Detroit qui est situé juste à l'extérieur de ma circonscription. Comme je le disais, le problème ne touche pas que le Québec ou une région en particulier, mais l'ensemble du pays. Nous avons élaboré un plan général de mesures coercitives et de protection de la santé à la grandeur du pays. J'espère que la députée aura la chance de lire en particulier l'article 3 du projet de loi.

Mme Meredith: Je ne crois pas avoir jamais dit que le problème touchait seulement une région du Canada. J'ai reconnu que le problème était présent dans d'autres régions du Canada, mais pas de façon aussi prononcée.

Il y a aussi des problèmes de contrebande aux passages frontaliers dans l'ouest du Canada, mais le problème n'est pas aussi grave qu'ici, et la situation peut être contrôlée par les forces policières. Je suis heureuse que le gouvernement ait décidé d'accroître le personnel aux postes frontaliers, mais je crois que la politique devrait avoir pour objectif de renforcer l'application des lois et non pas d'affaiblir la législation canadienne.

Je le répète, nous ne pouvons pas régler les problèmes en cédant devant la criminalité. Si on cède une fois, on cédera encore et encore par la suite.

Les lois et leur application ont leur raison d'être, et je crois que, lorsqu'on cède à la criminalité en changeant les lois, on finit par se retrouver dans le pétrin.

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, en essayant de se justifier, la députée est complètement passée à côté de la question. Permettez-moi de lire pour son édification un passage de la lettre du commissaire de la GRC, que le premier ministre a déposée à la Chambre. Il dit ce qui suit:

En temps normal, une intervention policière accrue aurait suffi. Dans le cas présent, la contrebande atteint de telles proportions que les moyens qu'elle exige pour l'enrayer deviennent inacceptables[. . .]
Je n'ai pas le temps de finir; elle n'a qu'à consulter la lettre du commissaire qui a été déposée à la Chambre. Nous nous attaquons au problème sur tous les fronts comme l'a recommandé la GRC et conformément à tous les avis que nous avons reçus.

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. La question est claire. La parole est à la députée de Surrey-White Rock-South Langley. Soyez brève, s'il vous plaît.

Mme Meredith: Monsieur le Président, je ne peux pas le dire mieux que je ne l'ai déjà fait. Nous avons des lois. Les lois ont leur raison d'être. Je pense qu'on ne résout rien en les modifiant et en cédant devant la criminalité.

M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk): Monsieur le Président, je tiens à dire au député du Parti réformiste qui a pris la parole avant moi qu'on ne règle pas grand-chose à jouer à l'autruche. Nous avions une décision difficile à prendre et nous l'avons prise en nous fondant sur les excellents renseignements obtenus de la GRC, de Revenu Canada, des provinces et des divers organismes concernés. Nous avons pris une décision difficile, ce que certaines provinces canadiennes n'ont malheureusement pas jugé bon de faire. J'ai cependant le sentiment que, très bientôt, elles seront beaucoup plus nombreuses à reconnaître le problème et à emboîter le pas.

Il me tient à coeur de prendre la parole ici, aujourd'hui, en faveur de cette mesure législative. Vous savez, monsieur le Président, pour avoir déjà siégé ici avec moi, que j'ai longuement fait état de ce problème précis à la Chambre. Je l'ai étudié à fond, comme vous le savez, monsieur le Président, en raison de la composition de la circonscription que je représente.

On trouve dans la circonscription de Haldimand-Norfolk un bon nombre de producteurs de tabac; je dirais plus de 800 des 1 200 qui restent à l'échelle du pays. On y trouve également une des plus grandes réserves indiennes du pays, soit celle des Six Nations, où l'on vend du tabac à maints endroits, à plus de 200 endroits en fait. Je suis donc pris avec les deux côtés de la médaille à la fois.

Quand on se livre à la contrebande du tabac, les producteurs de tabac de ma circonscription ne font pas autant d'argent parce que le tabac destiné au marché américain leur rapporte moins, à savoir un dollar de moins la livre, que celui destiné au marché canadien. Il s'agit d'un système de double prix, et ce tabac de contrebande qu'on fume au Canada est en fait du tabac exporté.

La réserve des Six Nations est très peuplée. Je tiens à ce que tous les députés qui n'ont peut-être pas eu l'occasion de visiter des réserves sachent que la vaste majorité de leurs habitants, en tout cas ceux de la plus grande réserve au Canada, souhaite voir disparaître la contrebande.

Dans ma circonscription, il est intéressant de constater qu'il y a plus de monde dans la réserve qu'à l'extérieur de celle-ci qui estime qu'il faut s'attaquer à ce problème. C'est un message que je tenais beaucoup à faire passer.

(1525)

J'ai donc été heureux de constater que le solliciteur général a suivi le conseil des députés de ce côté-ci, soit celui de collaborer avec les collectivités autochtones pour chercher des solutions.

En gros, le message que les députés ont souvent envoyé était le suivant: «Allons, vous devez faire respecter la loi partout au Canada. Prenons les armes et réglons le problème.»

Je doute que ce soit la solution. Il ne s'agit pas simplement de faire respecter la loi. L'application de la loi revêt une grande importance et c'est pourquoi elle occupe une grande place dans ce projet de loi.


1695

J'ai déjà dit à la Chambre que les taxes étaient vraiment le seul instrument nous permettant de régler le problème, mais il y a d'autres moyens pour arriver à une solution. Permettez-moi de rappeler ce que nous avons fait.

Nous avons intensifié l'inspection aux douanes des voyageurs à risque élevé. Je pense qu'on constatera que la contrebande est loin de se limiter au tabac. Peut-être que cette inspection plus sévère nous permettra de venir à bout de l'entrée en contrebande au Canada d'armes à feu et de drogues, dont la cocaïne. Notre frontière est très longue. Je crains qu'avec les années, le problème ait pris des dimensions bien supérieures même à ce que nous en disons à la Chambre.

Toute la question de l'alcool qui entre en contrebande n'est que la pointe du iceberg. Il y a des armes à feu. Il y a divers produits qui entrent au Canada et qui exigent notre attention. Je pense que cette mesure nous permettra de réaliser des progrès considérables pour corriger ces problèmes.

Nous assurons un service permanent à 22 bureaux pour dédouaner 99 p. 100 du trafic commercial; nous examinons les frais liés au service fourni en dehors des heures normales à ces endroits; nous prolongeons les heures de service à un certain nombre de bureaux existants; nous effectuons des contrôles-surprises qui visent les voyageurs et les transporteurs à risques élevés.

À mon avis, ce projet de loi va au-delà des simples considérations fiscales en imposant des restrictions très nécessaires à la frontière afin de s'assurer que l'on contrôle et connaît précisément ce qui entre dans notre pays.

Le véritable problème au Canada n'est pas tant lié à la contrebande qu'au fait que, pour une raison quelconque, les Canadiens estiment que c'est une bonne chose que de ne pas payer leur juste part d'impôt et de priver le gouvernement de revenus nécessaires. Malheureusement, cette attitude commence avec la contrebande de cigarettes et se propage. Il faut expliquer aux Canadiens que la responsabilité n'incombe pas uniquement aux gouvernements et qu'ils doivent respecter la loi et ainsi aider à régler le problème.

J'ai toujours compris pourquoi les Canadiens achètent des cigarettes de contrebande. Si vous pouvez payer vos cigarettes moins cher et si vous estimez que le gouvernement n'est pas sensible à vos doléances fiscales, vous n'hésiterez pas. C'est une question d'impôt. Il faut débarrasser le public de cette perception selon laquelle il est facile et tout à fait normal d'éviter de payer les taxes prévues.

Nous avons un déficit de 45 milliards de dollars. Si nous voulons être compétitifs dans le siècle qui vient, il faudra absolument réduire ce déficit. Pour ce faire, il importe que les Canadiens aient le sentiment que notre régime fiscal est juste.

Les Canadiens n'ont pas le sentiment que les taxes d'accise sur les cigarettes, et aussi sur l'essence et l'alcool, sont justes. Voilà pourquoi, ils étaient plus que disposés à contourner la loi. En adoptant cette mesure législative, nous faisons savoir aux Canadiens que nous comprenons que les systèmes sont injustes et que nous sommes prêts à collaborer avec eux pour trouver de véritables solutions.

Pour mettre un terme à la contrebande au Canada, il nous fallait réduire les taxes. C'était la seule solution. En ce qui concerne la taxe à l'exportation, je n'ai jamais été en faveur de telles mesures fiscales. Franchement, je ne pense pas qu'elles puissent fonctionner. D'ailleurs, étant donné que les provinces se sont ralliées à notre avis et que les taxes ont été suffisamment réduites, il serait inutile d'imposer une taxe à l'exportation. Nous n'exporterons pas ces produits du tabac aux États-Unis.

Le projet de loi prévoit aussi des exemptions pour les exportations traditionnelles. Seront ainsi protégées les véritables exportations à destination de marchés autres que celui des États-Unis de même que les exportations traditionnelles vers les États-Unis, c'est-à-dire les produits destinés à la consommation aux États-Unis. Les cultivateurs de tabac de ma région se réjouiront de cette initiative.

(1530)

Il nous fallait donc prendre cette décision pour régler le problème. Nous nous devions d'adopter une attitude ferme et de réduire les taxes.

Certains diront que la réduction des taxes et des prix incitera les jeunes Canadiens à fumer davantage. En fait, j'ai entendu bien des jeunes qui déclaraient à la télévision: «C'est bien, j'aurai désormais plus facilement accès aux cigarettes.» Ce n'est pas vrai. Il est aussi facile à l'heure actuelle d'acheter des cigarettes que d'acheter une pizza, au centre-ville de Toronto. On peut en obtenir facilement dans les cours d'école.

Si l'on applique vraiment la loi et si l'on impose des peines sévères aux personnes qui vendent des cigarettes aux jeunes Canadiens de moins de tel âge, les jeunes seront protégés et ne pourront pas se procurer des cigarettes. À l'heure actuelle, ils ont facilement accès aux cigarettes de contrebande. Ils peuvent s'en procurer dans la cour d'école.

Nous avons établi un bon équilibre: nous protégeons les jeunes contre le tabagisme, nous rendons la fiscalité plus juste aux yeux des Canadiens en abaissant les taxes et nous faisons respecter la loi en nous assurant que les contrevenants qui bénéficient de la contrebande sont arrêtés. Je crois que cette façon de faire contribuera beaucoup à régler ce problème.

Nous en avons aussi profité pour discuter de cette question avec les peuples autochtones du Canada au lieu de paniquer et de faire appel à la force. Nous avons essayé de trouver des solutions avec les Canadiens et avec les peuples autochtones.

Il est vrai que nous nous trouvons aussi à mettre au chômage un tas de gens, soit tous ceux qui faisaient la contrebande des cigarettes. Je crois que le gouvernement se doit de le reconnaître. Que vont faire ces gens s'ils ne font plus la contrebande des cigarettes? Ces gens-là ne sont pas des contrevenants ordinaires. Pour la plupart, ils ne veulent que faire de l'argent. Ils n'ont pas


1696

de travail et ils ne veulent qu'une occasion de faire rapidement de l'argent.

Il faut lancer le débat là-dessus. Il n'y a pas beaucoup de gens qui parlent de cela. Cela ne vient pas spontanément à l'esprit. Il faut assurer le développement économique des réserves de telle sorte que les gens puissent se tourner vers des activités autres que criminelles.

M. Chris Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing): Monsieur le Président, les cigarettes sont le seul produit qui tue, lorsqu'il est utilisé suivant les indications.

Le député serait-il favorable à l'inclusion des cigarettes dans la Loi sur les produits dangereux?

M. Speller: Monsieur le Président, le député sait que la question a déjà été soulevée. D'ailleurs, je crois que notre Président faisait partie du comité qui l'a examinée.

M. Young: Vous ne pouvez pas les rendre inoffensives, même avec la Loi sur les produits dangereux.

M. Speller: Non, bien sûr que non. C'est un argument qui avait été avancé par un député néo-démocrate, je crois. C'était tout simplement impossible.

Si le gouvernement veut sérieusement interdire la cigarette, très bien, mais qu'il donne aux tabaculteurs de ma région une juste indemnisation de leur exploitation agricole et de la perte de leur gagne-pain, puis qu'il le fasse.

Les gouvernements sont très hypocrites. D'un côté, ils veulent tout l'argent tandis que, de l'autre, ils disent aux tabaculteurs qu'ils font un travail sale et répréhensible. Je ne pense pas que ce soit le cas. Les gouvernements doivent cesser de tergiverser et doivent prendre une décision une fois pour toutes. S'ils veulent interdire le tabac, qu'ils indemnisent les tabaculteurs et les laissent en paix, mais qu'ils ne les fassent pas mourir à petit feu comme c'est le cas actuellement.

(1535)

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, je veux d'abord féliciter le solliciteur général et la ministre de la Santé de s'être attaqués à ce qui était manifestement une question de vie ou de mort dans la circonscription que j'ai l'honneur et le privilège de représenter à la Chambre. Je ne crois pas exagérer en décrivant la situation de cette façon. Ces dernières années, des dizaines d'habitants de la circonscription de Glengarry-Prescott-Russell ont été tués ou sont disparus à cause de la contrebande du tabac et des crimes qui y sont reliés.

Lorsque nous parlons des effets néfastes du tabac sur les jeunes, je me demande combien d'entre nous se sont arrêtés à penser au nombre de fois où un adolescent qui travaillait dans un dépanneur s'est fait tirer une balle dans la tête par une personne qui voulait voler des cigarettes pour les revendre sur le marché noir. Et ce genre de crime n'est pas unique à ma circonscription. Malheureusement, on a vu cela plusieurs fois au Canada.

Pour décrire l'ampleur du problème, je vais reprendre quelque chose dont un autre député a parlé plus tôt aujourd'hui. Dans une lettre qui a été déposée à la Chambre, le commissaire de la GRC a dit: « Cela suppose une réduction suffisante de la taxe sur les cigarettes au point que les contrebandiers ne trouveront plus d'intérêt dans ce commerce illicite.» Le commissaire de la GRC nous a dit lui-même que nous n'avions plus le choix et que nous devions prendre de telles mesures.

Les choses n'ont pas toujours été ainsi. Je me souviens du temps où la contrebande était environ un dixième de ce qu'elle est maintenant ou de ce qu'elle était avant que nous ne prenions ces mesures. Je me souviens d'avoir pris la parole à la Chambre le 22 novembre 1991 pour poser une question au gouvernement précédent.

[Français]

J'aimerais vous citer la réponse du solliciteur général de l'époque, l'honorable Doug Lewis, qui disait à propos de la contrebande: «Il est évident que le problème continue d'exister jusqu'à un certain point et que nous faisons tout ce que nous pouvons pour le résoudre.»

[Traduction]

C'est ce qu'on m'a répondu à ce moment-là. Autrement dit, ne nous ennuyez pas avec cette question; ce n'est pas très important.

Le dernier jour où la Chambre a siégé avant les élections, j'ai posé de nouveau la question que j'avais posée maintes et maintes fois. Voici ce que j'ai dit. Vous penserez peut-être que la question était un peu dramatique, ou du moins c'est ce que les députés ont pensé à ce moment-là, mais, en rétrospective, ce n'est certainement pas le cas.

[Français]

J'ai dit ce jour-là:

«Presque tous les soirs on entend le crépitement des mitraillettes, le vrombissement de vedettes qui foncent dans le noir tous feux éteints. Il ne s'agit pas de la vie à Sarajevo ou à Mogadiscio, mais bien des activités de la contrebande du tabac sur le Saint-Laurent, à Glengarry, dans ma circonscription.»
J'ai fait cette affirmation en Chambre, le 16 juin 1993.
J'ai ajouté ce jour-là: «En cette dernière journée de la présente législature, je voudrais demander au solliciteur général ce qu'il a l'intention de faire pour mettre fin à ces activités illégales, qui mettent en danger la vie et la sécurité de mes électeurs. Quand a-t-il l'intention de faire en sorte qu'on cesse de perdre des milliards d'impôts à cause de cette activité illicite qui se poursuit en ce moment à 50 milles de la colline parlementaire?»
[Traduction]

Aucune mesure n'a été prise. Oui, on aurait pu prendre des dispositions. Oui, le gouvernement fédéral et celui de M. Rae, en Ontario, auraient pu faire quelque chose.

Pendant deux ans, les bureaux du détachement de la Police provinciale de l'Ontario à Lancaster, une localité située à proximité du lac Saint-François, étaient fermés la nuit. C'est seulement après mon intervention publique à ce sujet que le poste de police a été rouvert en novembre dernier. Cela dépasse l'entendement que le poste de police dans la région où se déroule toute


1697

l'activité criminelle soit fermé la nuit, cela en raison des compressions de Bob Rae? C'est ce qui s'est produit. La semaine dernière et l'autre avant, de son air satisfait, Bob Rae a dit aux médias qu'il ne croyait pas que c'était un problème en Ontario et qu'il s'agissait plutôt d'un problème régional au Québec. C'est soit lui soit M. Laughren qui a tenu ces propos. Or ces propos n'étaient pas tout à fait honnêtes. Il était au courant du problème.

(1540)

Mes collègues de l'ouest du Canada ont sûrement entendu parler du rapport de l'Institut MacKenzie sur la contrebande du tabac. Ils en ont tous reçu copie à leur bureau. Ce rapport explique l'envergure de cette activité criminelle. Si les députés n'en ont pas obtenu copie, je serai heureux de leur en fournir un exemplaire.

Tout ce que nous entendons aujourd'hui et ce que nous avons entendu au cours des dernières semaines à la Chambre, l'Institut MacKenzie nous l'avait dit il y a des mois. Les députés n'y ont pas prêté attention. Le gouvernement actuel, lui, en a tenu compte. Pendant trois ans, j'ai tenté, avec d'autres, d'amener le gouvernement précédent à prendre des mesures pour garantir la sécurité des Canadiens et le respect des lois, mais ce fut en vain. En trois mois, le nouveau gouvernement a fait quelque chose. J'en suis fier.

Certains disent que la contrebande du tabac ne fait de mal à personne. Je veux citer un article de Claude McIntosh, rédacteur en chef adjoint du Standard Freeholder de Cornwall. L'article a paru dans la livraison du 3 juillet 1993 de ce journal. L'auteur de l'article donne des exemples de victimes de la contrebande. Voici ce qu'il mentionne:

Un prestataire de l'aide sociale a décidé de s'approvisionner auprès d'un fournisseur qui vendait ses cartouches un dollar moins cher que son ancien fournisseur. Ce dernier, craignant de perdre d'autres clients, lui a rendu visite. Au cours de leur entretien, le prestataire s'est «accidentellement» fracturé un bras. Il a recommencé à s'approvisionner auprès de son ancien fournisseur. Les prestataires de l'aide sociale sont tout désignés comme victimes car 1) ils sont plus disposés à courir le risque et 2) ils sont disponibles jour et nuit.
Voyez maintenant cet exemple concernant les jeunes. Un enseignant ordonne à un élève turbulent de sortir de la classe. En se dirigeant vers la porte, l'élève sort de sa poche une liasse de billets et dit d'un ton sarcastique qu'il n'a pas besoin de s'instruire. Il travaille comme passeur pour l'un des groupes de contrebandiers et peut gagner en six mois ce que l'enseignant touche en un an.

Voilà la réalité de la contrebande. À mon avis, on aurait tort de faire l'autruche et de nier son existence.

Quel genre de message les jeunes retiennent-ils quand ils voient l'élève qui fait la contrebande de cigarettes et qui vend celles-ci dans les écoles rouler en Corvette alors qu'eux rentrent à la maison à pied le soir? Nous nous préoccupons des jeunes.

[Français]

Le contrat social est effrité. Quand, dans une société, 60 ou 70 p. 100 des cigarettes sont vendues illégalement comme c'est le cas au Québec, 35 p. 100 dans ma province, peut-être près de 100 p. 100 dans ma circonscription, ou dans l'Ouest canadien même, à 25 ou 30 p. 100, je vous dis que le contrat social en ce qui a trait à cela s'est effrité et qu'on est retourné au soi-disant. . .

[Traduction]

C'est l'état de nature selon Hobbes: chacun pour soi, et la vie est bestiale et brève, comme l'écrivait Thomas Hobbes. Ce n'est pas le genre de société que nous souhaitons. Nous devons rétablir ce contrat social. Il fallait pour cela que tous les gouvernements prennent de concert toutes les mesures nécessaires. Le gouvernement fédéral et celui du Québec l'ont fait. On a fini par amener le gouvernement de l'Ontario à prendre, en regimbant et en protestant, les mesures qu'il aurait dû adopter dès le début. Mais c'est maintenant fait.

J'ai un autre article du Standard Freeholder. Il a été écrit par Claudia Peel le 16 février 1994 et est intitulé «Le volume de la contrebande réduit à un filet»:

Le volume des cigarettes au marché noir transitant par notre région a diminué considérablement depuis le lancement de l'offensive fédérale contre la contrebande il y a une semaine aujourd'hui.
L'inspecteur Chris Lewis, de la Police provinciale de l'Ontario, a déclaré que la police avait saisi des cigarettes de contrebande depuis que le programme de lutte au tabagisme était entré en application mercredi dernier. Mais le volume de produits de contrebande saisis au cours de la semaine dernière a été «pas mal inférieur» à ce que la police a coutume de saisir en sept jours.
(1545)

[Français]

Alors, monsieur le Président, vous voyez que les mesures étaient nécessaires. Je n'ai même pas eu le temps d'aborder tout le dossier de ce système de contrebande, qui protège l'illégalité et l'encourage à se perpétuer non seulement par la vente de cigarettes, mais bien de la drogue, de l'alcool et tout le reste.

Qu'on soit de l'Ouest canadien, du Québec, de l'Ontario ou d'ailleurs, qu'on soit séparatistes, souverainistes ou fédéralistes, je pense qu'on a tous les mêmes intérêts. Dans notre société, les lois doivent être respectées. Les mesures qui ont été prises devaient être prises. Je conclus en félicitant le gouvernement, car c'était nécessaire et cela a été fait. J'espère que bientôt, nous pourrons dire que nous avons mis fin à ce fléau qui affecte notre société.

M. Ghislain Lebel (Chambly): Monsieur le Président, je ne sais pas si l'orateur précédent a réussi à se convaincre après coup, comme son gouvernement cherche à le faire actuellement, mais il voudrait nous convaincre que la décision prise a été la bonne décision.

Je pense que le gouvernement a baissé les taxes sur les cigarettes parce qu'il ne voulait pas s'attaquer au vrai problème, c'est-à-dire arrêter la distribution de la contrebande sur le territoire qui était visé implicitement par cette nouvelle loi et, plutôt que de s'attaquer aux contrebandiers comme tels, ils se sont attaqués au produit comme tel. Assez facilement, ce produit-là sera remplacé par un autre; ce sera l'alcool, la drogue et la cocaïne. Pour se justifier, on dit: On a demandé au commissaire de la GRC et il nous a dit qu'il fallait baisser le prix. Il n'appartient pas au commissaire de la GRC d'établir les lois dans ce gouvernement. Pour les faire appliquer, cela nécessite une volonté politique.


1698

Lorsqu'on ne veut pas les faire appliquer, on arrive avec une loi comme celle-là.

Le gouvernement a ainsi tiré dans son propre but. Il n'y a pas de solution à cela, tant qu'il n'aura pas la volonté politique d'intervenir et de briser les réseaux de distribution de cigarettes, de drogue ou de popcorn. Je m'en fous, mais il faut briser les réseaux de distribution. C'est ce que le gouvernement n'a pas eu le courage de faire.

Je demande donc au député qui vient de prendre la parole s'il aurait une solution personnelle qu'il pourrait suggérer à son gouvernement afin de briser les réseaux de distribution. C'est là qu'est le problème.

M. Boudria: Monsieur le Président, j'ai noté les applaudissements de certains députés, mais le député d'Argenteuil-Papineau, lui, s'en est abstenu, car je pense qu'il partage certains de mes sentiments en ce qui a trait aux effets de la contrebande. Il est en bonne position pour le voir très près de chez lui. D'ailleurs, le député qui vient de me poser la question n'est pas loin lui non plus d'une situation semblable.

Il parle du réseau de distribution. Comment naïf peut-on être pour croire que les réseaux de distribution n'existaient pas un peu partout dans la société? Dans ma propre circonscription-et il n'est même pas nécessaire de s'y rendre-ici même, sur la Colline parlementaire, combien de parlementaires savent que des cigarettes illégales étaient vendues ici sur place?

Lorsque je suis retourné dans ma circonscription, j'ai reçu un appel téléphonique, le jour avant l'annonce du premier ministre, d'une commettante qui se plaignait que le contrebandier local dans le village venait d'aller faire une livraison au presbytère. C'est une déclaration triste, c'est très triste.

D'ailleurs, on l'a vu ailleurs aussi, lorsque, dans une autre région, avec le groupe MATRAC, des déclarations semblables sont venues d'autres personnes dans la société occupant des charges semblables. Non, les gens ne se croyaient pas des criminels quand ils faisaient partie, à leur insu, d'un système de crime organisé.

(1550)

[Traduction]

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley): Monsieur le Président, le député parle de réalités. Moi aussi, je veux parler des réalités.

La première réalité, c'est que la contrebande est bien sûr illégale. La deuxième, c'est que si les gens enfreignent la loi ils devraient être arrêtés et punis. La troisième, c'est que ces derniers mois il a été clairement déterminé que 70 p. 100 de toutes les activités de contrebande de cigarettes avaient lieu dans les réserves des Mohawks. La quatrième, c'est que le gouvernement précédent n'a pas lutté contre la contrebande. La cinquième, c'est que le gouvernement actuel n'a pas fait respecter la loi qui aurait mis fin aussi à la contrebande.

La réalité, c'est que, pour une raison que l'on ignore, le gouvernement a lié les mains de nos forces de l'ordre. C'est peut-être pour des motifs de rectitude politique ou d'autres raisons politiques cachées, mais c'est un fait que la GRC n'a pas pu intervenir et faire respecter la loi, ce qu'elle est censée faire.

Une autre triste réalité, c'est que le gouvernement n'a pas fait ce qu'il fallait, soit faire respecter les lois du pays. Il a plutôt choisi de faire le contraire, soit de ne pas reconnaître qu'il y a des gens qui enfreignent les lois et qu'ils doivent être arrêtés. Il a choisi d'abaisser le prix des cigarettes. Ce n'est pas ce que j'appelle faire respecter les lois.

J'imagine que les criminels n'attendent plus qu'une chose: que le gouvernement leur dise dans quel domaine il renoncera maintenant à appliquer la loi.

M. Boudria: Monsieur le Président, je n'ai pas entendu de question. Mais je pourrais peut-être ajouter une sixième, voire une septième réalité, à celles que le député vient d'énumérer. La réalité, c'est que les lois en vigueur ont cessé d'être respectées à cause de la négligence d'autres gouvernements par le passé.

L'ordre public devait être rétabli. C'est fait, et c'est ce qu'il fallait faire. Rectitude politique, mon oeil! Et je le dis à tous mes collègues. Compte tenu que mes électeurs se faisaient tirer dessus et que des Canadiens perdaient la vie à cause de vulgaires cigarettes, il était temps que les gouvernements fassent quelque chose, et j'en suis fier.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations, mais je voudrais lui rappeler la cause véritable de ce problème. Je suis presque consterné de voir qu'on ne s'en rend pas compte.

Au cours des années 70, lorsque le gouvernement a autorisé des taux d'intérêt de 24 p. 100 et permis que des agriculteurs et des entrepreneurs fassent faillite, je me suis tenu près de la tombe de gens qui se sont suicidés à cause d'un régime politique où les dépenses étaient exagérées et les tractations, nombreuses. Aujourd'hui, le député prononce un discours extrêmement passionné. Je me demande ce qu'il dira à ses futurs arrière-petits-enfants lorsqu'ils n'auront rien à manger et qu'ils s'entre-tueront à cause de cela. Qui blâmeront-ils à ce moment-là?

Si nous avons ce problème aujourd'hui, c'est que les gouvernements qui se sont succédé au cours des 25 dernières années n'ont pas su prendre une décision raisonnable, celle de faire appliquer les lois. C'est ainsi que des milliers de gens sont morts lors des deux guerres mondiales. Je crois que nous ferions mieux de nous en rendre compte, car nous passerons à l'histoire comme quelques-uns des pires décideurs que notre pays ait jamais connus.

M. Boudria: Monsieur le Président, je ne suis pas sûr d'avoir compris l'analogie que le député a voulu faire. S'il laisse entendre que nos ancêtres ont lutté pour la liberté et pour le respect des lois, c'est exactement ce que je préconise moi aussi.


1699

(1555)

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Monsieur le Président, ça ne fait que commencer à être intéressant. Je n'aime pas jouer les rabat-joie, mais je me dois de parler en faveur du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur l'accise, la Loi sur les douanes et la Loi sur la vente du tabac aux jeunes.

Dans la circonscription de Calgary-Centre que je représente, cette décision a suscité des commentaires, tantôt défavorables, tantôt favorables. Les avis sont partagés. L'aspect le plus controversé du plan d'action à quatre volets proposé par le gouvernement, c'est la réduction du prix des cigarettes et ses incidences sur les coûts médicaux et autres. C'était la réserve que je voulais formuler. Par ailleurs, quand j'examine ce projet de loi et les diverses dispositions arrêtées par le gouvernement, j'en conclus qu'il nous faut aller de l'avant avec cette mesure législative.

Le gouvernement fédéral perd actuellement entre 60 et 80 milliards de dollars de recettes par an à cause de l'économie souterraine. Ce manque à gagner a des effets négatifs sur la capacité des petites entreprises respectueuses des lois à rivaliser avec les autres dans le secteur privé. Au bout du compte, ce sont tous les Canadiens qui doivent compenser ce manque à gagner et absorber les augmentations de coûts entraînées par les lucratives activités de contrebande.

Ce problème trouve sa source dans le fait que les Canadiens paient trop d'impôts et n'ont plus confiance dans la capacité du gouvernement à administrer le trésor public, à gérer les ressources disponibles et à vivre selon ses moyens. Nous pourrons constater cet après-midi, à 17 heures, dans quelle mesure le gouvernement actuel saura mieux gérer nos ressources financières et relancer l'économie.

Les Canadiens se font de plus en plus à l'idée d'acheter des produits de contrebande parce qu'ils ont dû en payer les taxes et les surtaxes perçues au Canada. Ce phénomène ne concerne pas seulement les cigarettes. Il s'étend aux vêtements, à l'alcool, aux produits alimentaires, aux bijoux, aux armes à feu, et j'en passe.

Selon les statistiques publiées par le gouvernement, une cartouche de cigarettes coûtait en moyenne 45 à 48 $ au Canada. Aux États-Unis, la même cartouche coûtait 15 $. Cet écart de prix explique pourquoi la contrebande de cigarettes est attirante pour de nombreux Canadiens et, dans une grande mesure, pour les milieux du crime organisé.

Une seule caisse de cinquante cartouches de cigarettes peut rapporter au moins 500 $ de bénéfices. Mille caisses par semaine peuvent rapporter un demi-million de dollars aux fournisseurs. Quand on voit les sommes faramineuses de ces bénéfices, comment s'étonner que la contrebande ait pris une telle ampleur?

Les fabricants canadiens de cigarettes étaient parfaitement conscients de l'existence de ce nouveau marché. Ils ont donc accru les exportations de cigarettes à un rythme effroyable. En 1985, 3,5 millions de cartouches ont été exportées aux États-Unis. Ce chiffre atteint aujourd'hui plus de 62,8 millions par an. Cet accroissement de plus de 1900 p. 100 en huit ans n'est pas certainement pas due au fait que les Américains se sont mis à aimer nos cigarettes. Je suis allé assez souvent en Californie pour vous dire que la plupart des Américains les détestent.

Les fabricants de cigarettes savaient qu'il existait un marché pour ce produit. Ils s'en sont servi pour augmenter la vente des cigarettes au Canada. On estime que 85 à 90 p. 100 des produits du tabac destinés à l'exportation reviennent au Canada.

Que les Canadiens qui ne fument pas et qui vous disent qu'il n'ont pas l'impression d'être touchés par les effets de la contrebande réfléchissent un peu. Le nombre de gens accusés par les services de la GRC responsables des douanes et de l'accise était de 414, en 1990. Il est maintenant de 3 389. Le nombre de saisies effectuées en 1990 étaient de 303. Il est aujourd'hui de 5 044.

L'accroissement des moyens coercitifs et la perte de recettes coûtent au gouvernement plus de un milliard de dollars par an. En fin de compte, ce sont tous les contribuables canadiens, et pas seulement ceux qui fument ou qui boivent, qui finissent par absorber ces coûts en payant des impôts plus élevés.

Mon parti croit fermement que le gouvernement fédéral n'a pas un problème de recettes, mais un problème de dépenses. Le simple fait de réduire les dépenses ne va pas faire disparaître le problème de la contrebande. Le seul moyen d'éliminer réellement le problème est de réduire les bénéfices pour les contrebandiers. Si l'on réduit l'écart entre le prix des cigarettes de contrebande et le prix des cigarettes ordinaires, les fumeurs auront moins tendance à acheter des cigarettes provenant du trafic illicite et, à plus grande échelle, les milieux du crime organisé ne pourront plus tirer de bénéfices de cette activité.

La contrebande ne diminuera pas tant que les profits seront là. Faire respecter les lois ne suffira pas pour régler ce grave problème. Il faut éliminer la marge de profit. Le projet de loi C-11 est la première d'une série de mesures visant à mettre fin à ce problème.

(1600)

On estime que plus de 70 p. 100 des cigarettes de contrebande transitent par des réserves amérindiennes de l'Ontario et du Québec. Comme nous le savons, ces dernières semaines, cette situation a beaucoup retenu l'attention de la Chambre à la période des questions et, en fait, l'attention de tout le pays.

Le fait est que des gens de toutes les origines et de toutes les conditions sociales sont impliqués dans le trafic illicite de cigarettes. L'action d'un petit groupe d'autochtones qui se livrent à la contrebande a fait du tort aux autochtones respectueux de la loi-la majorité-qui se trouvent ainsi marqués du stigmate de la contrebande.

Comme certains députés l'ont souligné, les lois devraient être respectées tant dans les réserves qu'à l'extérieur, et cela, dans les meilleurs délais.

Des particuliers et des organisations qui oeuvrent dans le domaine de la santé ont exprimé de grandes appéhensions car ils estiment qu'en réduisant le coût des cigarettes, plus de gens, surtout des jeunes, des enfants, vont se mettre à fumer. À mon


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avis, en rehaussant l'âge légal de fumer, en éliminant les mini-paquets et en limitant les distributrices de cigarettes aux bars, le gouvernement a pris une mesure valable pour réduire la consommation de tabac chez les jeunes. Cette mesure, combinée à l'augmentation du montant des amendes que devront payer les détaillants qui vendront des cigarettes aux mineurs et du montant des amendes qui seront imposées aux jeunes pris en délit de fumer, aidera à atténuer le problème.

Il ne faut pas oublier que ce projet de loi vise avant tout à détruire le marché de la contrebande, un marché de plusieurs milliards de dollars. Les gouvernements fédéral et provinciaux ne taxent pas les cigarettes et l'alcool seulement pour réduire la consommation, mais aussi pour produire des recettes pour financer d'autres programmes. Ces «saintes taxes», en plus des campagnes de sensibilisation aux risques pour la santé, ne sauraient éliminer complètement l'usage et l'abus de ces substances.

Si l'on se reporte à la situation antérieure à cette loi, quelle était la réalité? Les gens fumaient et les gens buvaient, mais l'argent dépensé en cigarettes allait dans l'économie souterraine. Ce que l'on essaie de faire, c'est de le ramener à la surface. Il appartient à chaque Canadien de s'attaquer à ce problème à la maison, à l'école ou dans la communauté.

Si d'autres mesures doivent être prises par le gouvernement, nous devrions examiner sérieusement toutes les options. Ce projet de loi vise le crime organisé, les sociétés productrices de tabac et le respect de la loi.

Les critiques du projet de loi, dont certains membres de mon caucus, ont insisté sur les coûts pour la santé, sur le fait que plus de jeunes se mettront à fumer et sur la perte de recettes à un moment où le gouvernement peut bien mal se le permettre. Il y a d'autres moyens de dissuader les fumeurs sans recourir seulement à l'imposition. Par exemple, nous pourrions avoir des primes d'assurance différentes pour les fumeurs et les non fumeurs, les buveurs et les abstinents, tout comme pour les primes d'assurance automobile, lesquelles augmentent avec l'accroissement du risque dans le cas des chauffeurs qui ont des accidents.

On s'attaque à la question des enfants, car pour combattre la baisse des prix-qui pourrait être incitative-il est prudent et sage de la part du gouvernement de relever l'âge légal, d'instituer des amendes et de faire appliquer la loi dans les écoles, ainsi que de limiter l'utilisation des distributrices aux établissements qui vérifient l'âge de leurs clients. De plus, en supprimant les mini-paquets et en exigeant un emballage spécial pour l'exportation, on réduira le flot de cigarettes de contrebande qui sont vendues aux jeunes de ce pays.

En outre, il faut reconnaître que les campagnes de publicité et de sensibilisation de la population aux effets du tabac ont une certaine influence, même s'il ne s'agit pas d'une fin en soi. Malgré les nombreux sermons des parents à leurs enfants, et le grand nombre d'annonces télévisées qui les invitent à ne pas le faire, il y a toujours des gens qui fument.

Il faut se rappeler qu'en définitive, malgré tous ses efforts, le gouvernement ne peut pas se servir de la fiscalité pour imposer un comportement social donné aux citoyens. Il ne peut que les influencer.

Ce projet de loi permettra de neutraliser le crime organisé en supprimant ses profits et en appliquant les lois de façon plus rigoureuse. Ces deux choses sont liées. Ma collègue, ma voisine de pupitre, a signalé que l'application de la loi était la solution, et je suis d'accord avec elle là-dessus. Je crois également que nous devons réduire le prix pour que ce trafic ne soit plus rentable.

Les fabricants de tabac sont aussi mis à contribution et, d'une certaine façon, punis pour leur comportement passé, par la mise en place d'une taxe à l'exportation de 8 p. 100.

(1605)

L'augmentation de leur taux d'imposition, qui passe de 21 p. 100 à 30 p. 100, et l'application d'une surtaxe de 3 p. 100 sur les impôts versés, ce qui devrait rapporter au gouvernement, selon le ministère du Revenu national, des recettes supplémentaires de 200 millions de dollars, montrent bien que les fabricants de tabac ne vont pas s'en tirer sans problème.

En conclusion, en ce qui concerne l'application de la loi et son respect, il est essentiel qu'on prenne des mesures concrètes à cet égard, ce qui n'est pas le cas pour le moment, malgré ce que mon collègue libéral a dit tout à l'heure. Je ne crois pas qu'on applique la loi. Nous n'avons aucune preuve en ce sens, et la GRC doit intervenir rapidement dans les principales zones connues de contrebande pour éliminer la perception qu'ont les gens qu'il y a deux ensembles de lois au Canada.

Si cela n'est pas fait dans les plus brefs délais, on donnera alors raison aux critiques de ce projet de loi, et le gouvernement sera placé dans l'embarras. Je ne fume pas, mais je pourrais bien sortir en griller une.

M. Julian Reed (Halton-Peel): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt l'intervention du député de Calgary-Centre.

Il a un point de vue éclairé sur la question et a souligné un problème commun à chaque député de cette Chambre, à savoir que les électeurs ne sont pas unanimes en ce qui concerne l'imposition et ses effets.

Il ne serait pas inutile de rappeler qu'on a réduit la taxe d'accise uniquement parce que se contenter d'imposer une taxe à l'exportation n'aurait qu'à moitié enrayé la contrebande de cigarettes.

Près de 50 p. 100 des cigarettes qui passent la frontière sont, nous le savons tous, des contrefaçons. Elles sont fabriquées aux États-Unis et empaquetées dans de beaux emballages canadiens avec des étiquettes canadiennes. Il est très difficile de déceler la fraude.

C'est évidemment la raison pour laquelle on a réduit la taxe. Nous pouvons faire notre part en expliquant cela à nos concitoyens. Ce n'est pas parce que nous avons cédé devant l'industrie du tabac. En fait, dès que le problème sera réglé, on la rétablira.


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Il est également important de noter que le président Clinton a annoncé, en présentant son projet de loi sur l'assurance-maladie, que le tabac américain serait plus lourdement taxé. Une telle mesure nous sera d'un grand secours. Encourageons donc M. Clinton à imposer cette nouvelle taxe le plus tôt possible.

Puis le député de Calgary-Centre a fait un faux pas. Je suivais son intervention avec le plus grand intérêt jusqu'au moment où il a mentionné qu'on n'appliquait pas la loi. Mais il va très vite s'apercevoir, et nous aussi, que la GRC fait très bien son boulot et qu'elle fait respecter la loi.

On apprend déjà que, dans une région en particulier, la contrebande a été réduite à un filet. On est en train de couper l'herbe sous les pieds des contrebandiers. Dans quelques mois, nous serons tous debout en train d'applaudir la GRC pour le beau travail qu'elle aura accompli.

M. Silye: Monsieur le Président, je prends note de l'opinion et des observations du député. Nous savons où sont les voies de communication. La GRC le sait aussi. Pourquoi les médias n'annoncent-ils rien? Pourquoi les responsables ne sont-ils pas capturés?

Je ne crois pas que la loi soit réellement appliquée. Le premier ministre nous répète la même chose depuis des mois. Il affirme qu'il n'y a pas de zone d'exclusion et que la loi s'appliquera partout au pays. Or, comme l'ont souvent fait remarquer des députés du Bloc, on entend constamment dire à la télévision que la loi n'est pas respectée.

Je voudrais qu'on fasse respecter la loi. Je voudrais que ce soit la police plutôt que les politiciens qui retienne l'attention des médias. Je voudrais voir ces escrocs derrière les barreaux, mais il ne se produit rien.

(1610)

Le premier ministre a dit qu'il avait beaucoup hésité avant de réduire la taxe. Or, c'est le patron de la GRC qui lui a conseillé de le faire; il avait besoin d'une telle mesure pour pouvoir faire son travail. «Rendez l'entreprise non rentable, et je m'occuperai ensuite de capturer les escrocs.» C'est maintenant à la GRC de jouer: qu'elle les capture. J'attends toujours des résultats concrets.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley): Monsieur le Président, j'approuve à peu près 85 p. 100 de ce que mon collègue de Calgary-Centre a dit.

Pour commencer, je suis tout à fait d'accord avec lui pour dire que l'application de la loi dont parlait le gouvernement ne s'est tout simplement pas matérialisée. Je voudrais établir une comparaison entre le problème qui nous occupe et ce qui se passerait si, dans un quartier, n'importe où au Canada, on soupçonnait quelqu'un de faire pousser de la marijuana dans le sous-sol de sa maison.

Je peux vous assurer, d'après ce que j'ai lu dans les journaux au fil des ans, que la GRC investirait la maison en un rien de temps. Je soutiens qu'il est tout aussi illégal de faire la contrebande de cigarettes que de faire pousser de la marijuana. Par contre, je n'ai encore jamais vu la GRC investir les secteurs où il se fait de la contrebande comme ce serait le cas ailleurs. L'application de la loi dont parle le gouvernement est en fait restée lettre morte.

Je suis aussi d'accord avec le député quand il dit que, pour venir à bout du problème, il faut combiner des mesures d'application de la loi et des mesures fiscales touchant les cigarettes, mais je m'y prendrais différemment.

J'estime qu'au lieu de réduire la taxe sur les cigarettes au Canada, il aurait mieux valu doubler la taxe à l'exportation actuelle, la portant à 16 $ la cartouche, et utiliser le supplément de 8 $ pour financer l'effort supplémentaire d'application de la loi, freiner la contrebande et assurer la couverture des secteurs où l'on se livre à la contrebande en y affectant des forces policières plus nombreuses et plus efficaces. Ainsi, les services de la police seraient payés par la taxe à l'exportation qui aurait dû être ajoutée au prix des cigarettes.

M. Silye: Monsieur le Président, je ne veux pas du député comme voisin de pupitre s'il n'est pas d'accord avec moi à 100 p. 100.

M. Rompkey: Quatre-vint pour cent, ce n'est pas si mal.

M. Silye: Quant à la solution qu'il préconise, je ne la trouve pas mauvaise. Toutefois, il n'est pas en notre pouvoir de prendre de tels règlements. Je peux affirmer sans craindre de me tromper que, si le député admet être d'accord à 85 p. 100 avec moi, nous pouvons compter sur le vote d'un réformiste de plus.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, je ne sais pas si je devrais mettre mon honorable collègue sur la sellette, mais je voudrais lui soumettre la proposition suivante pour connaître sa réaction.

Il y a au Canada des citoyens honnêtes qui n'aiment pas payer des taxes mais qui ne violent pas la loi pour faire valoir leur point de vue. Dans le cas présent, le gouvernement a réagi aux activités illégales en réduisant les taxes. De très nombreux agriculteurs qui ont appuyé le Parti réformiste désirent ardemment une réduction des taxes. Pourquoi le gouvernement ne leur répond-il pas avec autant d'empressement qu'il a répondu à un certain élément de notre société?

Je demande à mon honorable collègue ce qu'il pense du fait que de nombreux Canadiens honnêtes désirent ardemment une réduction des taxes, mais qu'ils n'enfreignent pas la loi pour obtenir ce qu'ils désirent. Comment concilier la démarche suivie dans les deux cas? Si nous appuyons la réduction des taxes dans le cas présent, pourquoi ne réagissons-nous pas avec le même empressement aux demandes de nombreuses honnêtes gens?

M. Silye: Monsieur le Président, c'est une question très difficile. Je répondrais en disant que les contrebandiers ne sont pas nombreux. Le nombre de personnes qui fraudent le fisc et qui servent le marché illicite est restreint, quelle que soit leur nationalité ou leur race, qu'ils soient autochtones, anglo-saxons blancs, chinois ou même américains. On ne met pas l'accent sur l'arrestation des criminels. Les contrebandiers vendent leurs


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cigarettes dans un marché où de nombreux Canadiens n'hésitent pas à s'approvisionner à cause des dépenses excessives de gouvernements successifs, qu'ils soient libéraux ou conservateurs. Les gens préfèrent acheter une cartouche de cigarettes à quelqu'un qui demande 22 $, plutôt que dans un magasin où le prix est de 48 $.

(1615)

Pour régler le problème, il suffit d'éliminer le profit. Si cela crée des problèmes de santé ou d'alcool, on trouvera des moyens de les régler. Ce ne sont pas les agriculteurs honnêtes qui causent le problème. Ce sont quelques individus qui tiennent le reste de la société en otage.

J'espère avoir plus ou moins répondu à la question.

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester): Monsieur le Président, je voudrais féliciter le député de Calgary-Centre de son excellent discours qui montre qu'il a très bien compris les mesures proposées dans ce projet de loi.

Je voudrais également lui dire qu'il m'a convaincue de la position que je devrais adopter au sujet de ce projet de loi. En ce qui concerne ses collègues, je lui suis reconnaissante d'avoir fait ressortir que nous ne pouvons faire de lois sur les attitudes et les comportements de la société. Nous pouvons cependant faire tout ce qui est en notre pouvoir à la Chambre pour examiner à fond chacune de ces questions et essayer de trouver une solution qui soit dans l'intérêt de la majorité des citoyens respectueux de la loi.

Je félicite le député de l'ouverture et de l'intelligence de son approche. J'espère qu'il pourra imposer son approche à ses collègues et convaincre ces derniers.

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, le député semble associer application de la loi et arrestation et condamnation de contrebandiers.

Je voudrais lui demander s'il ne pense pas que l'application de la loi est plus efficace lorsque les mesures prises dissuadent ou empêchent les gens de se livrer à la contrebande en premier lieu. Il me semble que c'est le genre d'application que nous encourageons avec des mesures qu'il semble appuyer. Autrement dit, en augmentant les ressources accordées à la GRC et aux agents des douanes, en abaissant le prix des cigarettes et en prenant toutes les mesures qui sont dans le programme, nous prévenons le plus gros de la contrebande qui se faisait auparavant.

Je demande donc au député s'il ne pense pas que c'est une meilleure forme d'application de la loi que de laisser l'infraction se faire pour essayer ensuite d'arrêter les coupables?

M. Silye: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Ce sont cette philosophie et cet argument qui obligent un grand nombre de mes collègues à soutenir que le gouvernement avait peur d'appliquer la loi. Elle existait pourtant. Nous savions où la contrebande avait lieu, mais le gouvernement n'a rien fait pour l'empêcher. Personne n'était sur place pour arrêter les contrebandiers. La police se tenait loin de ces secteurs.

Le député laisse maintenant entendre que, si nous éliminons les bénéfices provenant de la contrebande, elle disparaîtra, de sorte qu'il n'y aura pas lieu de procéder à des arrestations.

Une voix: Il faut aussi accroître les ressources policières.

M. Silye: Accroître les ressources policières et appliquer la loi. C'est un excellent argument, mais nous n'avons toujours pas capturé les personnes qui ont été les premiers responsables de cette contrebande. Maintenant, elles trouveront simplement d'autres produits à vendre en contrebande. Si le gouvernement connaissait les contrebandiers, pourquoi ne les a-t-il pas arrêtés avant de réduire le prix des cigarettes?

Comme le programme complet en quatre points, il s'agit là d'un programme. À mon avis, c'est un moyen de régler ce problème, mais répugner à appliquer la loi-le ministre de la Justice nous écoute maintenant avec une vive attention-c'est se dérober à ses responsabilités. Je ne dis pas que le ministre s'est dérobé aux siennes mais, en quelque sorte, et je ne fais que répéter ce que beaucoup de gens m'ont dit, on a le sentiment qu'il existe deux sortes de lois: une pour les Indiens et l'autre pour les autochtones à l'intérieur et à l'extérieur des réserves. Je ne dis pas qu'on a ordonné à la GRC de ne pas intervenir, mais elle a hésité à appliquer la loi lorsqu'on l'enfreignait.

(1620)

Ce programme vise à éliminer tout cela, et pour reprendre les propos des députés de mon parti qui ont parlé de l'application de la loi, c'est à cet égard que le gouvernement n'est pas intervenu avec assez de fermeté. Son argument est faible lorsqu'il soutient que quelqu'un ne violera plus la loi si on augmente la vitesse maximale permise sur les routes après qu'il l'a dépassée. Appliquons tout simplement la loi.

Des voix: Bravo!

M. Silye: Les députés de mon parti se sont enfin réveillés.

J'estime qu'il est impérieux que le gouvernement ne répugne pas à exercer ses fonctions d'application de la loi, même s'il a modifié la loi pour empêcher qu'elle ne soit violée.

Mme Susan Whelan (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national): Monsieur le Président, tout comme au cours des semaines qui viennent de s'écouler, nous avons encore parfait aujourd'hui notre connaissance du dossier de la contrebande et nous n'avons pas fini d'en discuter, mais en discuter n'est pas suffisant. En définitive, c'est aux ministériels qu'il incombe d'agir, d'agir maintenant contre la véritable épidémie nationale qu'est devenue la contrebande. Voilà pourquoi je prends la parole aujourd'hui pour exprimer mon appui au projet de loi C-11.

Pour reprendre l'expression employée un peu plus tôt aujourd'hui par le ministre du Revenu national, la contrebande est un problème national qui exige une solution nationale. Ce fléau n'est plus confiné à certaines régions. Comme plusieurs


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députés en ont témoigné aujourd'hui, il s'étend à tout le pays. Il est présent dans toutes les régions du Canada et touche tous les Canadiens.

L'histoire nous enseigne que, si on n'y prend garde, la situation ne peut que s'envenimer. L'histoire nous enseigne aussi que les menaces et les promesses en l'air ne peuvent rien contre ce phénomène. L'heure est à l'action.

Ces derniers mois, nous avons appris que les coûts liés à la contrebande sont stupéfiants. À elle seule, la contrebande de cigarettes représente pour le gouvernement fédéral un manque à gagner de plus de un milliard de dollars. La perte de recettes subie par les gouvernements provinciaux se chiffre également à un milliard de dollars.

Ne disposant plus des recettes qu'il affectait jusqu'ici au financement de divers programmes, tels que les soins de santé, les services sociaux et l'emploi, le gouvernement est moins en mesure d'aider les Canadiens les plus démunis. Cet argent se retrouve maintenant dans les poches des criminels qui s'en servent pour financer leurs activités illicites.

Ces activités de contrebande touchent non seulement les produits du tabac, mais également les drogues, l'alcool et les armes à feu. La contrebande a également coûté de l'argent aux propriétaires ou gérants d'entreprises légitimes qui ne peuvent concurrencer le marché de la contrebande de tabac. Ces entreprises sont en train de perdre plus de ventes à mesure que les ventes de cigarettes de contrebande augmentent, et ce, dans un plus grand nombre de régions au Canada.

Les coûts ne sont pas tous financiers. La contrebande de cigarettes n'est plus seulement une question d'évasion fiscale de la part des fumeurs. Elle a permis aux jeunes Canadiens d'avoir facilement accès à des produits du tabac à des prix bon marché. Il faut que tous les Canadiens sachent que les réseaux de contrebande ont pénétré les cours de récréation des écoles, où les jeunes peuvent se procurer des produits du tabac à bon marché. Il faut aussi qu'ils sachent que ces mêmes réseaux sont utilisés pour vendre de la drogue et d'autres produits de contrebande aux jeunes.

L'inaction dont a fait preuve jusqu'ici le gouvernement et sa tolérance en ce qui concerne la contrebande du tabac ont entraîné vis à vis de la loi un manque de respect non seulement de la part de criminels, mais aussi de Canadiens qui autrement seraient respectueux de la loi.

Le projet de loi C-11 fait partie intégrante de l'initiative de la lutte anti-contrebande et anti-tabac en quatre volets mise en place par le gouvernement. Les modifications qu'il est proposé d'apporter à la Loi sur l'accise, à la Loi sur les douanes et à la Loi sur la vente de tabac aux jeunes prouvent que le gouvernement est résolu à prendre les mesures nécessaires pour rétablir le respect à l'égard de nos lois et pour protéger les jeunes Canadiens.

Je voudrais encore une fois décrire aux députés ici présents les éléments fondamentaux de ce projet de loi.

(1625)

La première modification permettra au gouvernement de donner à des corps de police provinciaux ou municipaux, au besoin, le pouvoir d'appliquer les dispositions de la Loi sur l'accise, ce qui accroîtra les ressources policières consacrées à la lutte contre la contrebande.

Cette initiative aidera à mettre un terme à l'entrée et à la distribution de produits de contrebande sur le marché. Ce sont les mêmes produits bon marché auxquels ont accès nos jeunes, qui minent les programmes de lutte contre le tabagisme et qui réduisent les recettes tirées de programmes publics légitimes.

La deuxième modification, qui porte sur la Loi sur l'accise et la Loi sur les douanes, permettra de disposer immédiatement de certains articles saisis sans que cela nuise à la poursuite des criminels impliqués. Cette mesure économisera chaque année beaucoup d'argent aux contribuables en réduisant le coût d'entreposage de ces biens, ainsi que les ressources nécessaires pour les protéger et les surveiller.

La troisième modification à la Loi sur l'accise exigera que toutes les cigarettes vendues au Canada soient estampillées pour bien montrer que les taxes fédérales ont été payées. Cette disposition aidera beaucoup les organismes chargés de l'application de la loi à identifier les cigarettes de contrebande. En outre, les citoyens respectueux des lois seront en mesure de voir facilement qui fume des cigarettes de contrebande. Ils pourront savoir si ceux qui sont dans la pièce avec eux ou si leur voisin a acheté des cigarettes illégales.

Les deux dernières modifications proposées au projet de loi C-11 visent la Loi sur la vente du tabac aux jeunes. La première interdira la fabrication et la vente des mini-paquets de cigarettes au Canada. Ces paquets renferment moins de 20 cigarettes et sont destinés aux jeunes.

La seconde modification interdit à toute personne âgée de moins de 18 ans d'importer des produits du tabac au Canada. Douanes Canada pourra ainsi empêcher des jeunes d'importer du tabac qu'ils ne pourraient pas se procurer légalement au Canada.

Comme nous l'a dit aujourd'hui le ministre, des mesures doivent être prises pour contrer le problème de la contrebande au Canada. Le projet de loi C-11 appuie deux éléments clés de la politique de lutte contre la contrebande du gouvernement, soit l'application des lois et des mesures de protection de la santé et de la sécurité des jeunes.

Les modifications proposées à la Loi sur l'accise et à la Loi sur les douanes donneront aux corps policiers des moyens supplémentaires pour réprimer toutes les activités de contrebande. Les modifications proposées à la Loi sur la vente du tabac aux jeunes visent à faciliter la protection de la santé et de la sécurité des jeunes au Canada.

Ce projet de loi constitue un élément essentiel de la stratégie générale du gouvernement. Nous ne prétendons certainement pas que les modifications proposées vont permettre de régler tout le problème, mais elles viennent étayer les mesures générales de lutte contre la contrebande prises par le gouvernement. Sans ces modifications, l'efficacité de la lutte que le gouvernement entend faire à la contrebande s'en trouverait considérablement amoindrie.


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Le temps est venu de passer aux actes. Le débat actuel met en évidence le caractère très controversé de la question à l'étude, mais il montre également que de nombreux députés de l'autre côté de la Chambre appuient l'action du gouvernement et reconnaissent que les mesures prises par le gouvernement sont la responsabilité de tous les partis qui s'intéressent au débat.

Le gouvernement ne peut plus laisser libre cours au phénomène actuel, et c'est pour cette raison, monsieur le Président, que nous demandons à tous les députés d'appuyer l'adoption du projet de loi C-11.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin): Monsieur le Président, je vois que la députée a mentionné la contrebande de spiritueux. Une bouteille d'alcool, qui se vend 10 dollars aux États-Unis, en vaut 20 au Canada; les taxes représentent 87 p. 100 de ce prix. On estime que, chaque année, quatre millions de caisses de 12 bouteilles sont introduites illégalement au Canada en provenance des États-Unis. Il se vend légalement au Canada 13 millions de caisses par an.

Cette contrebande coûte des millions de dollars en recettes perdues aux gouvernements fédéral et provinciaux. Je me demande quand le gouvernement présentera un plan pour réduire les taxes sur l'alcool. Le scénario est exactement le même. Je ne peux m'empêcher de tirer un parallèle entre ces deux situations.

Quand la députée recommandera-t-elle la réduction des taxes sur l'alcool?

(1630)

Mme Whelan: Monsieur le Président, le plan d'action du gouvernement répond au problème de la contrebande. Nous reconnaissons que la contrebande ne se limite pas aux cigarettes et nous agissons en conséquence. Notre plan tient compte de tout ce qui peut faire l'objet de contrebande: le tabac, l'alcool, les armes à feu, etc. Nous avons accru notre action policière de 25 p. 100. Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui permet de renforcer cette action à certains égards et d'en confier la tâche à des corps de police désignés pour lutter contre la contrebande, non seulement de cigarettes, mais aussi d'alcool et autres.

[Français]

M. René Laurin (Joliette): Monsieur le Président, je constate avec beaucoup de satisfaction que dans la plupart de leurs propos, ceux qui sont en faveur de ce projet de loi tiennent une argumentation très sensée, que tout le monde reconnaît. Ce qui est triste c'est que ces arguments-là auraient dû être servis il y a un an, il y a même deux ans, lorsque le gouvernement du Québec demandait la collaboration du gouvernement d'Ottawa pour enrayer le fléau, pour faire en sorte que le problème de la contrebande ne se développe pas davantage.

On avait les mêmes problèmes avec la jeunesse. Nos enfants qui décrochaient dans les écoles commençaient à s'unir à ces réseaux de contrebande. À ce moment-là, on ne trouvait pas cela trop grave, parce que c'était principalement au Québec que ça se passait. Maintenant que le Québec a forcé la main, par la présence de 54 députés du Bloc québécois à Ottawa, maintenant que les représentants du Québec ont forcé la main à Ottawa pour intervenir et appuyer le geste de la province de Québec, les autres commencent à s'inquiéter. C'est comme tout d'un coup devenu plus moral d'abolir une loi qui en soi avait été abusive.

Les gens ne respectaient plus la loi, non pas parce qu'ils sont devenus des bandits, mais parce qu'ils n'étaient plus capables de la respecter, monsieur le Président. C'est cela qu'on tente de dénoncer aujourd'hui.

Il y a deux ans, on aurait dû faire en sorte que ces choses-là ne se produisent jamais. Il est peut-être trop tard dans certains cas, dont nos jeunes qui ont été infiltrés par ces réseaux de contrebande. Ces jeunes de 15 ou 16 ans, qui font des salaires, avec la contrebande, de 1 000 $ par semaine, peut-être leur avenir est-il gâché à jamais!

Si dans le temps, on avait voulu reconnaître que le problème existait, non seulement au Québec, ou principalement au Québec, mais qu'il représentait aussi un danger potentiel pour le reste du Canada, on aurait dû intervenir.

Si on tente d'intervenir par des mesures encore trop abusives, comme des amendes inconsidérées, il y a risque que ces amendes-là, elles aussi, soient payées au noir. Si les gens se mettent à payer leurs amendes au noir, les prisons ne seront pas assez grandes et on va créer un autre problème. C'est toujours comme ça. J'espère que le gouvernement en aura tiré des leçons et que lors de la présentation du budget ce soir, il n'y aura pas encore d'autres taxes abusives qui vont faire en sorte que les citoyens ne pourront pas les respecter.

Le vice-président: Est-ce que la secrétaire parlementaire veut faire un commentaire?

[Traduction]

Mme Whelan: Monsieur le Président, je suis on ne peut plus d'accord avec le député, quand il dit que le gouvernement aurait dû prendre de telles mesures il y a deux ans, pour éviter que ne se produise la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant.

Malheureusement, le gouvernement n'a rien fait, il y a deux ans. Certains députés qui siègent maintenant de ce côté-ci de la Chambre réclamaient des mesures à cette fin depuis cinq ou six ans. Malheureusement, l'ancien gouvernement n'a pas pris de telles mesures. Nous en avons pris: c'est ce que fait notre plan d'action visant à enrayer la contrebande.

Je veux aussi informer le député, au cas où il ne le saurait pas, que le présent gouvernement était conscient du problème à l'époque où il formait l'opposition. Aussitôt élu, tout de suite après le scrutin du 25 octobre, il a commencé à envisager des solutions possibles.

Si le député relit les journaux de l'époque, il verra que nous avions entamé des discussions sur ce problème et que nous cherchions des solutions bien avant que la Chambre soit rappelée, en janvier dernier.

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Monsieur le Président, permettez-moi de féliciter la députée de Essex-Windsor pour son discours mûrement réfléchi.


1705

Le député qui a pris la parole avant elle avait lancé le débat sur le point que le député de Notre-Dame-de-Grâce a repris. Il s'agissait du respect de la loi. Quand il s'agit de faire respecter la loi, on peut avoir recours à l'une de deux méthodes. À l'heure à actuelle, on utilise dans ce domaine soit l'approche dite proactive, que privilégient tous les corps de police, soit l'approche réactive. Le principe qui sous-tend la première est le suivant: il vaut mieux empêcher la commission d'un crime que d'intervenir après coup et essayer d'attraper les criminels.

(1635)

La députée a-t-elle réfléchi à la distinction entre ces deux approches? Laquelle préfère-t-elle?

Mme Whelan: Monsieur le Président, le gouvernement s'est penché tant sur la criminalité que sur les moyens de prévention.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, l'article 3 du projet de loi permet de renforcer l'application de la loi, du fait que les membres d'autres corps de police désignés par le gouvernement pourront nous aider à empêcher qu'il se fasse de la contrebande dans l'avenir et à enrayer ce fléau avant qu'il ne prenne trop d'ampleur.

M. Myron Thompson (Wild Rose): Monsieur le Président, je constate d'après la liste que je suis censé parler de l'application de la justice. C'est un plaisir pour moi, parce que je crois que la justice perd rapidement son sens dans la société canadienne.

Pour moi, la justice a toujours voulu dire qu'on arrête le malfaiteur et qu'on le traduise en justice. S'il est trouvé coupable, il est puni selon la gravité du crime commis. Ce que je constate aujourd'hui, avec le projet de loi C-11, c'est qu'on essaie de donner une leçon aux contrebandiers en réduisant les taxes. On pense qu'ils auront honte et que cela leur fera peur.

Je ne crois pas un seul instant que la cause de la justice est servie quand le pays est plein de contrebandiers, qui peuvent maintenant s'adonner au trafic est-ouest des cigarettes et, si cela ne marche pas, ils feront le trafic de l'alcool, par exemple. Ils peuvent faire le trafic des drogues illégales ou de la pornographie, cela peut être très intéressant. C'est devenu une industrie florissante. Mais le gouvernement se montre dur en offrant des concessions aux contrebandiers qui se sont fait prendre.

Notre pays aime les compromis. On ne punit plus les malfaiteurs. Prenons par exemple ceux qui sont trouvés coupables de meurtre au premier degré. Nous avons relâché nos principes de justice à un tel point qu'ils seront libérés après 15 ans en prison. Les législateurs sont allés jusque-là.

Nous avons fait tellement de concessions dans ce pays que, dans ma circonscription, je vois des maisons et des magasins munis de barreaux. On n'a plus besoin de barreaux pour les prisons, semble-t-il. On en a besoin pour protéger les maisons et les entreprises des citoyens respectueux de la loi, tandis que les criminels circulent librement dans la rue.

Cela me préoccupe vraiment. Qu'est-ce qu'il est advenu de la justice?

Nous sommes saisis du projet de loi C-11. Le gouvernement l'a présenté, j'imagine, parce qu'il ne pouvait ou ne voulait pas faire appliquer les lois déjà en vigueur. Nous avons des lois contre la contrebande, et voilà qu'on nous présente ce projet de loi. Je ne sais pas si c'est pour garder les bureaucrates occupés ou pour produire plus de documents à examiner.

Nous n'avons certainement pas besoin d'une nouvelle loi anti-contrebande. Ce qu'il nous faut, c'est un gouvernement qui a la volonté politique de ne pas faire de compromis avec les criminels au Canada, un gouvernement qui fera régner la justice, sans égard à la race, à la couleur, à la religion ou à d'autres considérations. Tous les criminels au Canada doivent payer pour leurs crimes.

(1640 )

Le premier ministre a admis que 70 p. 100 de la contrebande de cigarettes se produisait à des endroits précis au Québec et en Ontario. S'ils le savaient, pourquoi n'ont-ils pas appliqué la loi existante pour sévir contre les contrevenants? «Oh, mais nous l'avons fait, nous avons réduit les taxes.» C'est toujours la même rengaine. «Nous avons mis un terme à la contrebande dans le calme. Non, nous ne voulions pas intervenir avec des armes. Nous ne pouvons faire cela. Nous devons rechercher les compromis.» Les années passent, et le problème s'éternise.

Le premier ministre s'est emporté à la Chambre, l'autre jour. Il fulminait et disait qu'il allait se montrer intraitable avec les contrebandiers. J'ai hâte de voir cela. D'une part, le gouvernement reconnaît que la contrebande se produit à des endroits précis en Ontario et au Québec, et, d'autre part, il dit aux Canadiens que la contrebande est omniprésente au Canada. Eh bien, je n'en doute pas du tout.

Cependant, allons-nous enfin reconnaître qu'il y a des gens qui enfreignent les lois? Au lieu d'essayer d'imaginer un scénario qui découragerait les contrebandiers, pourquoi ne pas carrément les punir? Le Canada a toujours été fier de son système de justice et il doit continuer à l'être.

J'ai vraiment eu le goût de tout abandonner quand j'ai entendu un député tout à l'heure dire que nous allions prendre des mesures pour exécuter la loi. Il a ensuite parlé d'un jeune qui aurait en sa possession un paquet de cigarettes. Voyons, serons-nous bien avancés lorsque nous aurons attrapé ce jeune avec des cigarettes?

L'autre jour, nous avons discuté d'un projet de loi qui serait très sévère à l'endroit d'une personne qui serait surprise en train d'utiliser une drogue illégale. Je n'ai rien entendu relativement au traitement réservé aux fournisseurs, qui ne sont pas très nombreux mais qui approvisionnent nos jeunes. On ne parle jamais d'eux.

On entend des histoires d'autos piégées qui sont censées être l'oeuvre d'une organisation criminelle liée à la contrebande. Pourtant, un journaliste canadien ne peut même pas retracer la voiture piégée, ni même obtenir confirmation de l'incident. Je n'ai rien lu dans les médias au sujet d'une voiture qui aurait été


1706

piégée en raison d'une lutte quelconque se déroulant dans le territoire de contrebande. Je n'ai rien lu sur cet incident, mais il semble que cela se soit produit. Pourquoi ces événements sont-ils tenus secrets?

Le premier ministre dit qu'il n'y a pas de zone interdite. Pourtant, un journaliste déclare qu'on aurait tiré sur un agent de la GRC pendant que celui-ci observait des activités de contrebande. Je n'ai vu aucun rapport selon lequel la police aurait perquisitionné ou fouillé les lieux, ou qu'elle aurait confisqué les armes utilisées pour tirer sur cet agent de police. La loi ne dit-elle pas que l'on ne doit pas tirer sur des policiers qui essaient de s'acquitter de leurs responsabilités? Si tel est le cas, pourquoi alors la loi n'a-t-elle pas été appliquée?

Le premier ministre a déclaré que les Warriors de la réserve mohawk ont des armes paramilitaires. Monsieur le Président, vous avez intérêt à ne pas avoir d'armes paramilitaires à Edmonton parce que la police va venir vous chercher. Pourquoi ne s'occupe-t-on pas de cette situation?

Je me suis informé et j'ai appris que les autochtones qui vivent dans les réserves canadiennes sont assujettis aux mêmes lois que tous les Canadiens. Quand allons-nous faire en sorte que ce soit véritablement le cas? Je répète que je n'ai pas entendu dire que la police avait confisqué des armes à autorisation restreinte. Pourtant, de telles armes ont été utilisées contre des membres de la GRC.

J'ai peine à croire qu'une nouvelle loi interdisant la contrebande sera plus efficace que l'ancienne mesure législative, du moins tant que la volonté politique nécessaire ne prévaudra pas à la Chambre et que celle-ci ne décidera pas que la justice doit primer. Cessons de faire des compromis avec les criminels; appliquons la loi et faisons respecter la justice. Les crimes doivent être punis.

(1645)

L'interdiction des mini-paquets est, à mon sens, une excellente disposition du projet de loi. Le seul problème, c'est qu'il ne faut plus s'inquiéter de ces mini-paquets puisque les jeunes peuvent maintenant se payer des paquets de 25. Donc, rien n'a été réglé, mais l'intention était bonne.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi nous ne pouvons pas tout simplement appliquer une taxe à l'importation élevée sur tous les produits du tabac fabriqués au Canada. Si nous avions fait cela, la différence de prix entre les produits vendus normalement au Canada et les produits de contrebande serait si minime que cela aurait mis fin à cette contrebande. Cependant, je ne crois pas un seul instant que ce serait là la solution à tous les problèmes. Les contrebandiers peuvent maintenant se recycler dans d'autres produits. Ils ont été punis, car nous avons fait en sorte qu'il sera impossible de faire la contrebande des cigarettes.

J'ai examiné toute la question. Je suis prêt à appuyer le projet de loi C-11 si cela peut amener le gouvernement à faire respecter les lois, toutes les lois. Bravo s'il le fait. Cependant, je ne crois pas qu'il y aura une grande différence si le gouvernement ne tient pas plus que maintenant à aller dire aux citoyens respectueux des lois qu'il veille sur leurs intérêts et que ce sont les mauvais éléments qu'il faut prendre et punir. Quand le gouvernement manifestera-t-il la volonté d'agir? Le plus tôt serait le mieux.

Je me souviens, il y a quelques années, j'ai vu des gens qui vendaient de l'alcool à des jeunes se faire arrêter et condamner à des peines de prison de 30, 40 ou 60 jours. À ce moment, des gens croyaient qu'il était préférable de laisser faire pour ne pas nous mettre dans le pétrin. On ne respecte plus les lois. Il n'y a plus de respect, et ce sont des gens de cette espèce qui tuent le respect. Pour que les lois inspirent à nouveau le respect, il faut donner aux policiers et à ceux qui font appliquer les lois le pouvoir nécessaire, il faut les soutenir et s'occuper d'abord et avant tout des victimes.

J'appuierai le projet de loi C-11 simplement parce que c'est peut-être ce qu'il faut pour que le gouvernement fasse finalement quelque chose. L'exécution de la loi et la justice doivent prévaloir. J'ignore comment le gouvernement s'y prendra, mais j'attends le grand jour.

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, le député de Wild Rose semble dire essentiellement que, si l'on abaisse les taxes, certaines personnes disposeront alors d'un revenu trop important qu'elles utiliseront à acheter des cigarettes et des boissons alcoolisées.

Je me demande s'il est de la politique des réformistes de ne pas réduire certaines taxes afin que les gens n'aient pas trop d'argent à dépenser.

M. Thompson: Monsieur le Président, je vois qu'ils écoutent toujours aussi attentivement qu'au cours de la période des questions. Je n'ai jamais fait la moindre allusion au fait qu'une réduction des taxes causerait des problèmes.

Ce que je dis, c'est que ce n'est pas là faire preuve de justice à l'égard des criminels. «Nous allons réduire les taxes et cela leur montrera.» C'est cela qui est de la foutaise.

Mme Roseanne Skoke (Central Nova): Monsieur le Président, le député a surtout parlé de l'application de la loi et de l'aspect criminel de la question. Je voudrais profiter de cette occasion pour faire une observation et lui rappeler qu'il y a une différence entre le droit civil et le droit criminel ainsi qu'entre l'application de dispositions criminelles et l'application de dispositions civiles. Le projet de loi proposé ne porte aucunement atteinte au droit criminel ni à l'application des dispositions du Code criminel du Canada. Il apporte simplement certaines modifications à l'application des dispositions civiles de la Loi sur les douanes, de la Loi sur l'accise et de la Loi sur la vente du tabac aux jeunes.


1707

(1650)

Actuellement, en vertu de la Loi sur l'accise, aucun autre service de police à part la GRC n'est autorisé à assurer l'application des dispositions civiles de cette loi. Le débat d'aujourd'hui porte sur l'application des dispositions civiles de ces lois.

M. Thompson: Monsieur le Président, je regrette, mais j'étais distrait. Je n'ai pas tout entendu ce qu'a dit la députée. En ce qui concerne l'application des dispositions civiles, oui, c'est ce que nous voulons.

Pour ma part, je parle des criminels, des contrebandiers. La contrebande est un crime. C'est une infraction au Code criminel, si je ne m'abuse. Toute personne qui se fait prendre à faire de la contrebande devrait subir les conséquences de ses actes. Je n'ai pas encore vu cela ici, et il est grand temps que nous fassions quelque chose à cet égard.

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le député qui a répété à plusieurs reprises dans son intervention que la justice devrait prévaloir. Nous en convenons bien sûr tous, mais je note que la définition que le député donne de la justice consiste à se montrer aussi dur que possible contre le criminel, et tout ira très bien.

Des voix: Bravo!

M. Allmand: Ils sont tous d'accord. Selon mon interprétation, le système de justice pénale a pour but d'empêcher qu'on commette des crimes et de protéger le public.

Dans le sud des États-Unis, on fait exactement ce que préconise le Parti réformiste, c'est-à-dire faire preuve de sévérité et enfermer les gens à perpétuité, mais on y déplore les taux les plus élevés de crimes avec violence de tout le monde civilisé. Voilà ce que préconise le député, se montrer dur, mais oublier de protéger le public des crimes qui se commettent.

Ce qu'il faut faire, si on tient sérieusement. . .

Le vice-président: À l'ordre. La parole est au député de Wild Rose.

M. Thompson: Monsieur le Président, si le député pense qu'il suffit de dire aux gens qui violent ainsi la loi qu'ils ne pourront plus se livrer à ces activités parce que nous réduisons les taxes et s'il pense qu'ils ne s'engageront pas dans quelque autre activité illégale, je me demande bien comment il peut penser une telle chose.

On a toujours pensé dans ce pays, depuis aussi longtemps que je puisse me rappeler, que celui qui viole la loi devra en payer le prix, et le châtiment à subir pour cette violation de la loi doit correspondre au crime. Ce n'est pas en le laissant libre qu'on va lui faire payer le prix de son crime.

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona): Monsieur le Président, je ne veux pas faire le médiateur entre le parti ministériel et le Parti réformiste dans ce débat, mais à mon avis, ce que le député essaie d'expliquer, c'est que, d'une certaine façon, le gouvernement a porté atteinte à la primauté du droit dans notre pays en modifiant la structure fiscale pour venir à bout d'un problème essentiellement criminel, celui de la contrebande.

Si l'on croit à la primauté du droit, ce qui importe, ce n'est pas la sévérité des sanctions adoptées, mais le fait de sévir ou non contre les criminels. En l'occurrence, nous avons simplement modifié la loi pour résoudre un problème qui aurait pu être surmonté autrement.

Voilà ce que je voulais dire, et j'aimerais savoir ce que le député en pense. Il arrive que les gens enfreignent la loi et que nous modifiions celle-ci parce que les valeurs ou les circonstances ont changé, mais à ma connaissance, nos valeurs et les circonstances n'ont pas changé au point où nous pouvons approuver la contrebande et essayer de résoudre le problème en modifiant simplement les taxes.

Le gouvernement a esquivé ici une question fondamentale. Je comprends certaines des raisons qui l'ont poussé à agir ainsi, mais il faut reconnaître qu'il a porté atteinte à la primauté du droit. Le gouvernement a décidé de ne pas appliquer la loi. Il a préféré la modifier.

M. Thompson: Monsieur le Président, je crois que c'est ce que j'ai essayé d'expliquer, mais il y a un point que je ne veux pas négliger et que je vais répéter. Comme l'a dit le député, je m'oppose à ce qu'on réduise les taxes pour enrayer la contrebande et qu'on légitime ensuite celle-ci. La contrebande n'a rien de légitime. Il faut arrêter les contrebandiers et les punir si nous voulons y mettre un terme. Sinon, ils poursuivront leurs activités dans d'autres secteurs. Notez bien ce que je vous dis.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends de nouveau la parole pour dire que nous nous éloignons de l'objectif principal de la proposition du gouvernement, qui consiste à faire échec à la contrebande et non pas à ses effets.

C'est pourquoi le gouvernement a décidé de réduire la taxe d'accise tout en imposant une taxe à l'exportation et une surtaxe sur les revenus des fabricants. Il a pris cette combinaison de mesures pour éliminer le caractère profitable des activités des contrebandiers et faire échec à la contrebande.

Le député n'a absolument rien compris, tout comme le Parti réformiste dans son entier. Je suis complètement abasourdi qu'après quatre ou cinq heures de débat, ils continuent d'avoir une vue si étroite des choses.

M. Thompson: Monsieur le Président, je ne crois absolument pas que nous n'ayons rien compris.

Ce que le gouvernement n'a pas compris, c'est qu'on ne fait pas de compromis avec des criminels et qu'on ne les laisse pas agir à leur guise. Ils doivent être punis. Je veux que justice soit faite dans tout ce qu'entreprend le gouvernement. Ce n'est que normal.


1708

M. Andrew Telegdi (Waterloo): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au député de Wild Rose. Je voudrais lui demander s'il a étudié la sociologie ou les systèmes de maintien de l'ordre de l'Union soviétique, du Texas et de l'Afrique du Sud.

Le Président: Le député de Wild Rose veut-il répondre à la question?

M. Thompson: Monsieur le Président, je ne suis pas sûr d'avoir bien compris. Il y a un peu trop de bruit. Je regrette.

SUSPENSION DE LA SÉANCE

Le Président: Je me demande si la séance pourrait être suspendue pour les trois ou quatre minutes qui restent. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La séance est suspendue à 16 h 57.)

REPRISE DE LA SÉANCE

Reprise de la séance à 17 heures.

Le Président: À l'ordre. Comme il est 17 heures, il est de mon devoir, conformément au paragraphe 83(2) du Règlement, d'interrompre et d'ajourner les délibérations en cours.

[Français]

La Chambre procédera maintenant à l'étude de la motion des voies et moyens no 6 ayant pour objet l'exposé budgétaire.

* * *

[Traduction]

LE BUDGET

EXPOSÉ FINANCIER DU MINISTRE DES FINANCES

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)) propose:

Que la Chambre approuve la politique budgétaire générale du gouvernement.
-Monsieur le Président, monsieur le premier ministre, honorables députés, j'ose espérer que vous lèverez à la fin de mon exposé.

Je dois dire que c'est la cinquième fois que je prends la parole à la Chambre pour parler d'un budget. Mais c'est la première fois qu'il y a quelqu'un pour m'écouter.

Je dépose les documents budgétaires, y compris les avis de motion de voies et moyens. On trouvera dans ces documents tous les détails sur les mesures budgétaires.

Conformément à un ordre de la Chambre, je vais présenter un projet de loi demandant une autorisation d'emprunt pour l'exercice financier 1994-1995. Je demande que l'étude de ces motions soit inscrite à l'ordre du jour.

(1705)

Le budget déposé aujourd'hui fait suite à un processus sans précédent de consultation auprès des Canadiens. Leurs avis nous ont été extrêmement utiles. Cependant, une constatation domine toutes les autres. Les Canadiens aspirent à des changements fermes et en profondeur. Ils veulent que leur gouvernement ait un plan d'action et le suive-une stratégie pour l'emploi et pour la croissance.

[Français]

Les Canadiens savent quel genre de pays ils veulent.

Notre objectif, c'est un Canada où chaque Canadien et Canadienne apte à travailler pourra trouver un emploi qui lui convient.

Un Canada où le gouvernement facilite le changement plutôt que de le freiner.

Un Canada aux finances publiques solides, plutôt que délabrées.

[Traduction]

L'époque où le gouvernement faisait semblant de s'attaquer aux problèmes est chose du passé. L'époque des processus interminables dont on ne voyait jamais le résultat est terminée. Notre devoir est de mettre fin à la dérive. Nous avons besoin d'une architecture nouvelle pour le gouvernement comme pour l'économie. Ce n'est pas la nostalgie du passé qui nous aidera.

Ce budget met en branle la réforme la plus complète des politiques gouvernementales depuis des décennies. Nous mettons en place une stratégie qui favorise l'innovation dans la nouvelle économie. Nous répondons aux besoins de la petite entreprise. Nous engageons l'élaboration d'une nouvelle stratégie pour l'essor de la petite entreprise, une stratégie qui permettra de savoir quand le gouvernement doit se garder d'intervenir et dans quels cas il peut apporter son aide.

Nous amorçons un effort de grande envergure pour mettre en place un système de sécurité sociale qui soit équitable, adapté aux besoins et abordable. Cela nécessitera une transformation fondamentale de notre régime d'assurance-chômage. Cela nécessitera une refonte de toute la structure des transferts fédéraux-provinciaux en matière de programmes sociaux. Cela nécessitera un esprit de coopération et un cadre prévisible, qui mettront fin aux vieilles tactiques de dissimulation et de surprise.

La guerre froide est terminée. Le budget énonce des mesures immédiates, adaptées aux années 90, qui seront suivies d'un réexamen complet de la politique de défense du Canada.

[Français]

Pour réussir économiquement, les politiques monétaire et fiscale doivent être mises sur la bonne voie. C'est déjà fait pour la politique monétaire. Nous sommes un pays à faible taux d'inflation. Et nous le resterons.

[Traduction]

Nous sommes un pays à faible taux d'inflation. Et nous le resterons.

Il est maintenant temps pour le gouvernement de mettre de l'ordre dans ses finances. Cela fait des années que les gouvernements promettent plus qu'ils ne peuvent en donner, et en donnent plus qu'ils ne peuvent se permettre. Cela ne peut plus continuer. Nous y mettons fin.

Les mesures prises dans ce budget ramèneront le déficit de 45,7 milliards de dollars cette année à 39,7 milliards en 1994-1995 et à 32,7 milliards l'année suivante.

Il s'agit d'un budget en deux étapes. Par conséquent, des projections financières détaillées ne sont présentées que jusqu'en 1995-1996. Cela dit, cependant, en ce qui touche la réduction du déficit, nous n'attendons pas la seconde phase. Les


1709

décisions prises aujourd'hui nous mettent clairement sur une trajectoire permettant d'atteindre l'objectif du gouvernement, soit un déficit égal à 3 p. 100 du PIB dans trois ans.

Nous atteindrons ces résultats en utilisant des hypothèses économiques raisonnables, plutôt qu'exagérément optimistes. Nous pensons qu'il est plus important d'atteindre un objectif que d'annoncer un but irréaliste et, ensuite, de manquer la cible.

Les Canadiens nous ont déclaré qu'ils voulaient que la réduction du déficit se fasse par une compression des dépenses publiques, non par une augmentation des impôts. Nous sommes d'accord. L'ère où le gouvernement imposait davantage la population pour dépenser plus est révolue.

(1710)

Au cours des trois prochaines années, pour chaque dollar de nouvelles recettes, nous réduirons les dépenses de cinq dollars.

[Français]

Ceci dit, la clé du succès ne consiste pas, pour le gouvernement, à se retirer complètement de l'économie et à se croiser les bras. La clé du succès, c'est un engagement réfléchi et créatif dans l'économie. Ce n'est pas le principe d'une stratégie industrielle qui est mauvais. C'est sa mise en application.

[Traduction]

Ce budget est axé sur l'emploi-sur la mise en oeuvre d'une stratégie et l'adoption de mesures qui conduiront à la création d'emplois aujourd'hui et demain. Il s'agit d'un processus en deux étapes, pas en vingt étapes. Des échéances sont fixées. Des délais sont établis. Et des objectifs fermes en matière financière guideront notre réforme.

Il y a selon nous trois défis essentiels à relever. Le premier est de bâtir un cadre de renouveau économique. Le deuxième est de mettre en place des programmes sociaux faisant appel au sens des responsabilités. Le troisième consiste à assainir les finances publiques pour que le gouvernement puisse consacrer toute son énergie à aider les familles et les travailleurs canadiens à s'adapter à un monde changeant.

Commençons par le premier défi-l'emploi, la formation, l'innovation. Nous tenons nos engagements. Le programme des travaux d'infrastructure est en place. Il a été entériné par toutes les provinces. Il réalise ce qui a souvent été proposé par le passé, mais rarement accompli, soit amener les trois paliers de gouvernement à travailler ensemble pour créer des emplois.

Nous avons rétabli les budgets prévus pour les programmes d'alphabétisation. Afin d'appuyer la formation pratique des jeunes, le ministère du Développement des ressources humaines met en place à leur intention, en collaboration avec les provinces et le secteur privé, un nouveau programme d'apprentissage. Enfin, le Service jeunesse sera lancé prochainement dans plusieurs centres-jusqu'à 20-pour permettre à de jeunes Canadiens d'acquérir une expérience professionnelle enrichissante.

La question qui se pose alors est de savoir quels emplois nos jeunes vont trouver, une fois leur formation terminée. La réponse réside dans les petites et moyennes entreprises; la plupart y trouveront des emplois. Les PME jouent actuellement un rôle vital dans la création d'emplois. La dernière chose dont les entreprises ont besoin, monsieur le Président, c'est bien d'un nouveau programme d'intervention massive du gouvernement. Elles ont vraiment besoin d'une réduction des impôts, d'un accès aux capitaux ainsi que d'un allégement de la réglementation et des tracasseries administratives.

Les impôts sur la masse salariale constituent un obstacle à l'emploi. Ils dissuadent les entreprises d'engager du personnnel. En 1995, si nous ne faisions rien, la loi entraînerait une forte hausse des cotisations d'assurance-chômage, dont le taux passerait du niveau actuel de 3,07 $ à 3,30 $. Nous ne le permettrons pas.

Chose plus importante, après en avoir discuté avec le premier ministre et le ministre du Développement des ressources humaines, je suis heureux de pouvoir annoncer aujourd'hui que le taux de cotisation à l'assurance-chômage est ramené de 3,07 $ à 3 $. Cela permettra aux entreprises d'économiser près de 300 millions de dollars par année, de l'argent qu'elles pourront réinvestir dans de nouveaux emplois.

De plus, quand la réforme de la sécurité sociale fera sentir ses effets, et que de nouvelles économies importantes seront réalisées au chapitre de l'assurance-chômage, il sera possible de réduire encore les taux de cotisation, et nous verrons à ce qu'il en soit ainsi.

Les petites entreprises doivent avoir accès à des capitaux suffisants. De nouvelles pratiques et de nouvelles attitudes sont nécessaires de la part des prêteurs. À cette fin, nous avons constitué un groupe de travail Finances-Industrie chargé d'étudier ces questions avec les banques et les petites entreprises. Leur première tâche consiste à élaborer un code de conduite dans le domaine des prêts à la petite entreprise. Ce code exposera clairement les critères d'approbation des demandes de prêts et donnera aux petites entreprises un moyen d'action si elles ont des plaintes à formuler.

(1715)

En outre, le ministre du Commerce extérieur et moi convoquerons dès que possible une réunion entre les dirigeants des principales banques canadiennes et la Société pour l'expansion des exportations afin de chercher les meilleures façons d'accroître la capacité exportatrice des petites entreprises.

[Français]

Le gouvernement met également en place d'autres mesures pour stimuler la croissance des petites entreprises.

Nous allons intensifier nos efforts en vue d'éliminer les règlements qui occasionnent confusion et dépenses. Nous mettons en place un groupe de travail chargé d'élaborer, dans les meilleurs délais, un régime réglementaire amélioré, qui augmentera la compétitivité des entreprises.

Nous avons déjà accéléré le processus de réforme de la TPS.

Des guichets intégrés de services gouvernementaux seront développés pour que, d'ici l'an prochain, un centre unique de services aux entreprises soit en activité dans chacune des provinces du Canada.

[Traduction]

Cet été, nous publierons une déclaration des normes de qualité à respecter par tous les ministères fédéraux dans la prestation de leurs services.

Des fonds seront prévus en vue de l'établissement d'une stratégie de maillage pour aider les petites entreprises à collaborer pour faire ensemble ce qu'elles ne peuvent faire chacune de leur côté.


1710

Le ministre des Transports, en collaboration avec ses homologues des provinces et d'autres parties intéressées, envisagera des façons d'améliorer le système de transport des marchandises.

Enfin, le Programme d'aide à la remise en état des logements, qui apportait un soutien de taille à l'industrie de la rénovation résidentielle, est rétabli. De plus, en consultation avec le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, nous avons décider de remplacer le Régime d'accession à la propriété par un programme permanent qui permettra aux Canadiens qui achètent leur première maison d'utiliser à cette fin les fonds placés dans leurs REÉR.

Ces initiatives sont en voie de réalisation, mais il reste beaucoup à faire. Le ministre de l'Industrie et moi, au nom du gouvernement, publions aujourd'hui, en même temps que le budget, un document qui servira de base à un dialogue avec les petites entreprises afin de déterminer la façon dont nous pouvons mieux collaborer. Il sera tenu compte du résultat de ces échanges dans le budget de 1995.

Les innovations et les idées sont des sources d'emploi essentielles aujourd'hui, et le seront encore plus demain. Les idées sont les nouvelles ressources naturelles. Le gouvernement fédéral dépense environ 6 milliards de dollars par année dans le domaine scientifique et technologique. Nos encouragements fiscaux à la recherche et au développement sont parmi les plus généreux au monde. Pourtant, il y a beaucoup de choses à améliorer. Les secteurs privé et public doivent accroître leurs activités de recherche et de développement. Nous devons être plus efficaces dans l'innovation et l'exploitation commerciale des idées.

Après des années de paroles creuses et de promesses, le gouvernement fédéral mettra en place une véritable stratégie de recherche-développement, une stratégie qui présente de véritables priorités, une véritable orientation et un véritable examen des résultats.

Nous élaborerons un nouveau plan spatial à long terme de 800 millions au cours des dix prochaines années qui, tout en étant abordable, maximisera les possibilités de commercialisation et de création d'emplois. Nous nous concentrerons sur les domaines dans lesquels le Canada détient un avantage, par exemple la technologie des satellites.

Dans le cadre de cette opération de redéfinition de nos priorités et à cause de notre situation financière serrée, nous avons pris deux décisions concernant les programmes actuels de recherche-développement.

Premièrement, nous retirons l'aide du gouvernement fédéral au projet d'accélérateur de particules KAON.

Deuxièmement, nous avons décidé de négocier un désengagement ordonné du programme international de station spatiale.

(1720)

Étant donné les contraintes financières actuelles, nous devons concentrer nos dépenses de recherche-développement dans les domaines où le Canada détient un avantage, c'est-à-dire ceux où des emplois peuvent être créés et où il existe clairement des débouchés commerciaux.

[Français]

Pour créer des emplois et pour aider les PME à avoir accès aux technologies de pointe, nous créerons un programme de partenariat technologique avec les universités et les laboratoires d'État; un programme d'ingénierie et sciences; et un fonds d'investissement canadien pour fournir les capitaux nécessaires.

Les conseils, les organismes qui financent la recherche universitaire ne sont pas touchés par les réductions des dépenses prévues dans ce Budget.

De plus, le budget du Conseil national de recherches du Canada sera augmenté en 1994-1995, après plusieurs années de réductions.

[Traduction]

Au cours des prochaines semaines, le ministre de l'Industrie publiera deux documents, l'un sur l'autoroute électronique, l'autre sur les sciences et la technologie qui énoncera clairement les priorités du gouvernement. À partir de là se développera un dialogue intensif dans tout le pays, qui débouchera sur une nouvelle stratégie nationale en matière de sciences et de technologie. Notre défi consiste à mettre les ressources existantes au service d'un nouveau système national d'innovation.

[Français]

Nous sommes persuadés que le respect de l'environnement et le renouveau économique vont de pair.

Pour financer le nettoyage des sites miniers, nous permettrons aux compagnies minières de déduire les sommes versées à des fonds de régénération.

Nous bonifions aussi le régime fiscal de certains types d'équipement économisant l'énergie et nous fournissons des encouragements améliorés aux technologies «propres» les plus modernes.

[Traduction]

Ce gouvernement est attaché au développement durable. Cette année, les ministres de l'Environnement et de l'Industrie proposeront une stratégie pour favoriser la croissance du secteur de la technologie et des services dans le domaine de l'environnement.

En outre, nous établissons un groupe de travail rassemblant des représentants du gouvernement, de l'industrie et des organisations non gouvernementales qui travaillent dans le domaine de l'environnement, pour déterminer les obstacles à des saines pratiques environnementales ainsi que les facteurs qui incitent à ne pas adopter ces pratiques, de manière à utiliser efficacement des instruments économiques afin de protéger l'environnement. Et cela n'est qu'un début.

Comme pays, nous ne devons jamais renoncer à la compassion et à notre obligation d'aider ceux qui sont dans le besoin. Il faut accroître la responsabilisation dans nos programmes sociaux afin d'établir des ponts entre les programmes sociaux et le travail-pour engendrer l'autonomie, et non la dépendance.

[Français]

Dans le livre rouge, nous avions proposé un programme de nutrition prénatale; un programme d'aide préscolaire aux autochtones; un centre d'excellence pour la santé des femmes; le rétablissement du programme de contestations judiciaires et de la Commission de réforme du droit, ainsi que l'entrée en vigueur


1711

de la Fondation canadienne des relations raciales. Monsieur le Président, nous honorons ces engagements dans ce Budget.

Les organismes de charité jouent un rôle essentiel dans la société canadienne. Afin d'encourager les dons de charité, nous ramenons de 250 à 200 $ le seuil donnant droit au taux de crédit de 29 p. 100. Nous reconnaissons qu'il s'agit d'une mesure modeste, mais nous pensons que c'est un pas dans la bonne direction.

[Traduction]

Dans le cadre des initiatives stratégiques pour la réforme des programmes sociaux, le ministre du Développement des ressources humaines entreprendra un projet de démonstration en partenariat avec le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard et l'Association canadienne pour l'intégration communautaire. Ce projet vise à accroître les possibilités offertes aux personnes ayant un handicap intellectuel.

Ce sont souvent les femmes qui subissent de plein fouet les conséquences des perturbations économiques et des tensions sociales. Le budget commence à réduire certaines de ces disparités en assurant, par des modifications de l'assurance-chômage, un traitement plus équitable aux travailleurs à faible revenu qui ont des personnes à charge, et dont la majorité sont des femmes, chefs de famille monoparentale.

(1725)

De plus, il a été question des disparités qui, aux yeux de certains, existent dans le régime fiscal des pensions alimentaires, ainsi que du niveau de ces paiements et de leur exécution. Un comité fédéral-provincial du droit de la famille étudie la question depuis deux ans et présentera son rapport cet été. Nous donnerons suite rapidement à ses recommandations.

Au cours des prochains mois, nous publierons un document qui analysera les besoins d'une société vieillissante en matière de services, de même que les changements à apporter au régime de pension public de manière que celui-ci reste abordable. Ce document examinera également les changements qu'il pourrait être nécessaire d'apporter au régime fiscal actuel de l'épargne-retraite privée.

Il traitera notamment des régimes de pension et des régimes enregistrés d'épargne-retraite, ainsi que de l'usage qui est fait des fonds investis.

[Français]

Le premier ministre présidera un Forum national sur la santé afin de nourrir un dialogue sur le renouveau du système au Canada.

La ministre de la Santé travaillera avec ses collègues des provinces et, pour établir les conditions nécessaires à ce dialogue, ce Budget n'apporte aucun changement aux paiements de transfert au titre de la santé. Notre engagement de maintenir les principes de la Loi canadienne sur la santé demeure ferme.

[Traduction]

Le gouvernement a annoncé son intention de renouveler et de revitaliser le système de sécurité sociale en place au Canada, d'ici deux ans. Quelques projets pilotes nous indiqueront la voie à suivre.

[Français]

Ce Budget prévoit 800 millions de dollars pour permettre l'essai d'approches nouvelles en ce domaine, en collaboration avec les provinces et les territoires.

[Traduction]

Une bonne politique publique exige un cadre prévisible et de la planification. Le gouvernement précédent n'avait pas prévu de fonds, après le mois de mai de cette année, afin de venir en aide aux personnes qui dépendaient pour leur subsistance de l'industrie du poisson de fond de l'Atlantique.

Ce budget prévoit un programme quinquennal doté de 1,7 milliard en argent frais et de 200 millions de fonds réaffectés, ce qui donne 1,9 milliard pour l'adaptation à long terme de ce secteur. Dans le cadre de cet effort, le ministre des Pêches et des Océans concevra, en collaboration avec les parties intéressées, des approches nouvelles pour la création d'emplois durables. Les fruits de cette initiative pourraient contribuer sensiblement à la réforme générale du système de sécurité sociale.

Aujourd'hui, comme l'a déjà dit le ministre du Développement des ressources humaines, nous faisons avancer la réforme de la sécurité sociale en prenant des mesures précises touchant l'assurance-chômage et les transferts fédéraux aux provinces en matière de sécurité sociale.

Nous avons annoncé une importante réduction des taux de cotisation à l'assurance-chômage. Cela exige que nous commencions immédiatement à engager la réforme de l'assurance-chômage. Ces changements réduiront les dépenses de 725 millions de dollars en 1994-1995 et de 2,4 milliards de dollars par année ensuite dans ce secteur. La durée maximale de versement des prestations sera réduite pour les nouveaux bénéficiaires de l'assurance-chômage qui ne participent pas de façon constante au marché du travail.

La période minimale d'admissibilité sera portée de 10 à 12 semaines. Le taux de prestation sera ramené à 55 p. 100, sauf pour les bénéficiaires à revenu modeste qui ont des enfants, un parent âgé ou d'autres personnes à leur charge. Dans leur cas, le taux de prestation augmentera, pour passer à 60 p. 100.

Afin de rendre le régime plus équitable, des changements seront apportés aux dispositions applicables aux travailleurs qui quittent leur emploi volontairement ou qui sont congédiés pour inconduite.

Les changements que nous apportons à l'assurance-chômage vont dans un sens bien clair. Notre objectif est de rendre le système plus équitable, de lui permettre de bénéficier aux membres les plus vulnérables de notre société, d'être progressif et d'aider les Canadiens à retourner au travail.

(1730)

[Français]

La réforme de la sécurité sociale doit absolument déboucher sur des programmes moins coûteux, des programmes qui répondent mieux aux besoins des Canadiens et des Canadiennes. Pour


1712

pouvoir s'attaquer à cette réforme, tous les gouvernements doivent connaître les limites de leurs ressources financières.

[Traduction]

Pour le gouvernement fédéral, les transferts au chapitre du Régime d'assistance publique du Canada et du volet de l'enseignement postsecondaire, dans le cadre du Financement des programmes établis, ne devront pas être plus élevés après la réforme qu'ils ne le sont maintenant. Cela permettra au gouvernement fédéral d'économiser au moins 1,5 milliard de dollars en 1996-1997, sans compter les économies découlant de la réforme de l'assurance-chômage.

Nos objectifs, concernant les économies que nous voulons réaliser, sont fermes. Si la réforme ne permet pas d'atteindre au moins ces chiffres, d'autres mesures seront prises pour obtenir ces économies.

Nous entendons aussi faire régner une plus grande équité partout au Canada dans le régime des transferts.

[Français]

Nous voulons que la coopération fédérale-provinciale inspire ce processus de réforme. Ainsi, pendant deux ans, les transferts aux provinces au titre de la sécurité sociale seront prévisibles et vont enregistrer une légère croissance pendant que la réforme suivra son cours. Tel que promis par le premier ministre, nous progresserons vers une période de stabilité des transferts qui durera cinq ans.

Il est temps maintenant de rétablir le sens des responsabilités dans la gestion des finances publiques du Canada. Le problème de la dette et du déficit est beaucoup plus qu'un défi économique. C'est également une question morale, et la question est claire! Quel droit avons-nous de priver nos enfants de leurs possibilités d'avenir, de leur demander de résoudre des problèmes que nous n'avons pas le courage d'affronter nous-mêmes?

[Traduction]

Une croissance économique plus vigoureuse réduira le déficit. Cependant, la croissance ne permettra pas, à elle seule, de réduire suffisamment le déficit. Des initiatives budgétaires sont nécessaires.

[Français]

Conformément à notre programme électoral, le gouvernement réduira les budgets de fonctionnement des ministères fédéraux de 400 millions de dollars en 1994-1995, et de 620 millions de dollars par année à partir de 1995-1996. En plus, nous sommes en train d'examiner tous les conseils, commissions et organismes dont les membres sont nommés par le gouvernement. Cet examen portera sur la taille, la portée, la composition et le coût de ces organismes, y compris les salaires de leurs membres. Cet examen, mené sous la direction du ministre responsable du Renouveau de la fonction publique, sera terminé en 1994 et sera mis en application immédiatement.

[Traduction]

La solution du problème financier auquel le Canada fait face n'ira pas sans douleur, et toutes les composantes de la société doivent se partager équitablement le fardeau. Dans le cadre de notre effort de réduction du déficit, nous devons économiser 1,5 milliard de dollars de plus dans les opérations du gouvernement au cours des trois prochaines années.

Nous voulons étudier, de concert avec les représentants des fonctionnaires, les moyens de réaliser ces économies. En conséquence, le président du Conseil du Trésor amorcera immédiatement des discussions avec les agents négociateurs appropriés au sein de la fonction publique. Nous espérons sincèrement que ces décisions difficiles pourront être prises en collaboration.

Il faut cependant bien comprendre que ces économies ne constituent pas une position de négociation, mais un impératif financier. Pour s'assurer d'obtenir ces économies, le gouvernement annonce une prolongation de deux ans, par voie législative, du gel appliqué actuellement aux salaires et la suspension, pendant deux ans, des augmentations salariales à l'intérieur d'un même niveau.

(1735)

[Français]

Dans la mesure où les économies requises seront obtenues au moyen d'un réexamen des opérations gouvernementales qui permettra d'améliorer l'efficacité, le gouvernement raccourcira la durée de ces mesures de gel ou y mettra fin.

En plus des économies déjà prévues antérieurement dans les opérations gouvernementales, ce Budget prévoit de nouvelles économies de plus de 3 milliards de dollars au cours des trois prochaines années.

En plus, le ministre responsable du Renouveau de la fonction publique et le président du Conseil du Trésor examineront toutes les dépenses des ministères afin de voir si des économies supplémentaires peuvent être réalisées grâce à l'élimination ou la réduction de programmes non prioritaires.

[Traduction]

Pendant la campagne électorale, nous avons clairement exprimé la nécessité de réduire les dépenses consacrées à la défense. Le ministre de la Défense nationale s'est chargé de cette mission et a pris des mesures déterminées.

Outre l'annulation du programme d'achat des hélicoptères EH-101, les dépenses de la défense seront réduites d'encore 1,9 milliard de dollars au cours des trois prochaines années. Ces économies, qui touchent notamment les services professionnels, seront permises par d'importants gains d'efficience et de productivité ainsi que par des coupes dans les infrastructures de la défense, y compris la fermeture de bases qui ne répondent plus aux besoins probables du Canada en matière de défense. Un document joint au budget fournit de plus amples renseignements.

Ces économies déboucheront sur des forces armées plus modernes et plus efficaces. Étant donné la fin de la guerre froide et les exigences imposées aux hommes et aux femmes qui composent nos forces armées dans le nouvel ordre mondial, le ministre de la Défense nationale a commandé un réexamen de notre politique de défense. Le gouvernement fera connaître les résultats de ce réexamen à l'automne.

[Français]

Le gouvernement est déterminé à maintenir notre tradition bien établie d'aide au développement international. Cependant, la situation financière exige de nouvelles réductions des dépenses. Par conséquent, nous diminuerons les dépenses consacrées à l'aide au développement international de 2 p. 100 en 1994-1995. Les dépenses seront bloquées à ce niveau jusqu'en 1996-1997.


1713

Les budgets consacrés à l'aide internationale s'élèveront quand même à 2,6 milliards de dollars par année.

[Traduction]

La situation sera revue à l'issue du réexamen que fera le ministre des Affaires étrangères.

[Français]

Tout en réduisant les avantages fiscaux qui leur sont accordés, ce Budget diminue les subventions aux entreprises au-delà de l'objectif de 225 millions de dollars qui était prévu dans le livre rouge.

[Traduction]

Les réalités financières obligent le gouvernement à revoir sa politique d'aide financière aux groupes d'intérêt. Notre but est d'encourager ces groupes à se financer davantage auprès d'autres sources. Pour leur laisser le temps de s'adapter, les groupes en question seront informés à l'avance, et les effets de ce réexamen se feront entièrement sentir dans le budget de 1995.

J'aborderai maintenant la question des recettes et de la fiscalité. Je dois dire au premier ministre que j'ai reçu beaucoup de conseils en la matière.

Un régime fiscal sain doit reposer fondamentalement sur une répartition équitable-et perçue comme telle-du fardeau entre tous les contribuables. Lorsqu'une minorité croissante échappe à cette obligation, la légitimité du régime fiscal s'en trouve affaiblie. Nous continuerons d'agir avec détermination pour faire respecter la législation fiscale. Nous allons renforcer les mesures d'exécution. Il faudra pour cela prendre des initiatives conjointes avec les provinces et les milieux d'affaires, afin de régler le problème de l'économie souterraine et d'améliorer l'observation des règles fiscales. Des mesures précises seront annoncées prochainement par le ministre du Revenu national.

L'une des raisons expliquant l'expansion de l'économie souterraine réside dans le fait que les Canadiens estiment que les impôts sont trop élevés. Nous sommes d'accord. Nous voulons que les Canadiens reviennent participer à l'économie légitime, et non qu'ils en sortent. Notre objectif est de réduire le déficit de manière que, au cours des prochaines années, les impôts puissent être allégés. Mais nous n'en sommes pas encore là.

(1740)

[Français]

C'est l'une des raisons pour lesquelles il faut absolument gagner la bataille du déficit. Le gros de nos efforts prend la forme d'importantes réductions des dépenses gouvernementales.

Cependant, il faut également examiner le régime fiscal pour nous assurer que tous les Canadiens paient leur juste part d'impôts et que personne n'en soit exempté. C'est pourquoi nous entreprenons aujourd'hui d'éliminer un certain nombre d'avantages fiscaux qui ne répondent pas aux normes d'équité auxquelles les Canadiens et les Canadiennes s'attendent.

[Traduction]

En conséquence, nous présentons aujourd'hui les mesures suivantes en ce qui concerne l'impôt des entreprises.

Les grandes sociétés privées n'auront plus droit à certaines mesures fiscales préférentielles qui sont destinées à la petite entreprise.

[Français]

Les déductions et les crédits au titre des frais de repas et de représentation seront ramenés de 80 à 50 p. 100. Les règles appliquées au niveau fédéral à cet égard seront donc conformes à celles qui s'appliquent déjà en Ontario et au Québec, ainsi qu'aux États-Unis.

De plus, plusieurs encouragements fiscaux à dimension régionale qui ne se sont pas révélés productifs seront réduits ou éliminés.

[Traduction]

Certaines sociétés canadiennes ne paient pas suffisamment d'impôt. Par conséquent, nous prenons des mesures pour empêcher les sociétés établies au Canada de se servir d'entreprises étrangères affiliées pour échapper aux impôts canadiens. Nous prenons des mesures afin que le revenu des institutions financières soit convenablement calculé aux fins de l'impôt. Nous prenons également d'autres mesures afin d'éliminer des échappatoires dans le régime fiscal des sociétés.

Afin de réduire le déficit de la manière la plus équitable possible, nous annonçons les mesures suivantes en ce qui concerne l'impôt sur le revenu des particuliers.

L'exonération des gains en capital de 100 000 $ est abolie, mais les particuliers pourront appliquer leur exonération inutilisée aux gains courus à la date d'aujourd'hui. L'exonération de 500 000 $ pour les actions des petites entreprises et les biens agricoles est maintenue. Le ministre de l'Agriculture gagne encore.

Nous estimons toutefois que, dans la mesure où les circonstances le permettent, un abaissement général du taux d'imposition des gains en capital dans les deux secteurs pourrait stimuler davantage l'esprit d'entreprise. Pour cette raison, une étude spéciale sera consacrée au régime fiscal des gains en capital, dans le contexte des propriétaires des petites entreprises et des agriculteurs, avec l'entière participation de ces derniers.

[Français]

Le crédit en raison de l'âge qui est accordé aux personnes de 65 ans et plus sera soumis à un critère de revenu, comme c'est déjà le cas pour certaines autres prestations. Les trois quarts des personnes âgées ne seront pas touchées par cette mesure.

L'exonération fiscale des primes relatives à la première tranche de 25 000 $ de protection, dans les régimes d'assurance-vie fournis par les employeurs, est éliminée.

Enfin, un grand nombre de Canadiens et Canadiennes sont d'avis que le régime fiscal des fiducies familiales devrait être réexaminé. Cette question sera soumise à l'examen du Comité des finances de la Chambre des communes, tel que demandé par le critique du Bloc québécois.

[Traduction]

Ce budget est l'aboutissement des discussions et des consultations les plus considérables jamais entreprises au Canada. Les Canadiens nous ont dit qu'ils voulaient des emplois. Nous avons mis en place des conditions favorables à la création d'emplois.


1714

(1745)

[Français]

On nous a demandé de geler les dépenses. Grâce aux réductions annoncées dans ce Budget, les dépenses de programmes devraient être moins élevées en 1996-1997 que pour n'importe quelle année depuis 1991.

[Traduction]

Les gens nous ont demandé de réduire le déficit sans hausser les impôts. Je le répète: pour chaque dollar d'impôt supplémentaire, le budget prévoit une réduction de cinq dollars des dépenses. Nous avons consulté et nous avons écouté.

Nous publions aujourd'hui un rapport qui répond aux avis que nous avons reçus lors de nos consultations publiques. Cependant, nous rendrons le processus encore plus ouvert à l'avenir. Nous sommes d'avis que les gens libres ne supporteront des changements fondamentaux que s'ils jugent qu'ils participent à la prise des décisions qui entraînent ces changements.

L'automne prochain, le gouvernement publiera un exposé qui indiquera de manière complète et claire les changements de perspectives économiques et financières intervenus depuis le dernier budget, ce qui constituera une importante innovation. Les objectifs économiques et financiers du gouvernement, ainsi que des propositions générales sur la manière de les atteindre dans le prochain budget, seront publiés.

Des documents d'étude portant sur des options particulières seront également mis à la disposition du public.

[Français]

Cette nouvelle étape du processus budgétaire représente un progrès important. Elle servira de base à un dialogue national ouvert entre le gouvernement et les Canadiens.

Après la publication de ces nouveaux documents, je rencontrerai mes collègues des provinces. Cette rencontre aidera tous les gouvernements à travailler de concert à la réalisation d'objectifs communs, au lieu de suivre des politiques divergentes ou contradictoires.

Le Comité des finances de la Chambre sera chargé de mener des audiences publiques pour que les Canadiens et les Canadiennes puissent donner leur avis sur l'orientation de la politique économique. Le Comité présentera son rapport avant la fin de l'année, à temps pour que nous puissions en tenir compte dans le budget de l'an prochain. Pour ma part, je continuerai personnellement et largement à consulter les Canadiens et Canadiennes d'un bout à l'autre du pays.

[Traduction]

Je voudrais maintenant conclure en expliquant la motivation qui sous-tend ce budget. L'enjeu des décisions que nous prenons aujourd'hui dépasse de beaucoup un simple résultat financier. Il s'agit en fait de combler des gouffres. Je parle du gouffre qui apparaît lorsque les pauvres s'appauvrissent tandis que les riches s'enrichissent. Du gouffre qui existe entre cette génération et la prochaine, qu'il est inacceptable de priver d'espoir. Du gouffre qui sépare l'ancienne économie et la nouvelle, à laquelle nous devons nous intégrer. Du gouffre qui est creusé par les disparités croissantes entre une catégorie de Canadiens, dotés des compétences requises par les réalités modernes, et les autres dépourvus de ces compétences. Et enfin, je veux parler du gouffre qui s'élargit lorsque les gouvernements ont des dépenses supérieures à ce que le pays peut se permettre.

Combler ces gouffres, voilà notre défi. Et c'est l'engagement que nous prenons envers les Canadiens. Le chemin du renouveau et de la croissance sera parsemé de difficultés. Nous ne pouvons claquer des doigts pour faire disparaître le déficit. Nous ne pouvons pas non plus, du jour au lendemain, mettre en place un nouveau cadre pour l'économie canadienne. Toutefois, nous ne pouvons pas attendre une minute de plus pour nous attaquer à la tâche.

Nous suivons une approche équilibrée dans notre processus de réforme fondamentale, afin de créer des emplois, de maintenir notre appui à ceux et celles qui en ont besoin, et de réduire le déficit. Il faut pour cela un plan d'action, de la fermeté, de l'équité et de l'honnêteté envers les Canadiens.

Certains diront que nous n'allons pas assez loin et d'autres nous reprocheront d'en faire trop. À ceux qui voudraient que nous dépensions davantage, il faut demander-car les Canadiens méritent de le savoir-où ils prendraient l'argent nécessaire. Et à ceux qui exigent que nous réduisions davantage les dépenses, il faut demander-car les Canadiens méritent de le savoir-dans quelle mesure cela nuirait à la croissance, à l'emploi et aux plus démunis.

(1750)

Les périodes de difficulté ne mettent pas à l'épreuve uniquement notre patience et notre portefeuille. Elles mettent aussi à l'épreuve notre système de valeurs et notre caractère. Certains croient que, pour réussir, le Canada doit abandonner les valeurs qui ont fait de nous un grand peuple. Abandonner le sens du partage. Abandonner l'esprit de partenariat. Abandonner le bon sens et la compassion qui caractérisent ce pays. Ce n'est pas le moment de nous écarter de nos valeurs. C'est au contraire le moment d'y revenir.

Cela fait trop longtemps que le désespoir paralyse ce pays. Le temps est venu de redonner espoir. Nous ne sommes pas devenus ce que nous sommes en restant immobiles. Nous avons été guidés par les valeurs que nous partageons et la vision que nous avons choisi de réaliser ensemble. Ainsi, il nous incombe, aux gens de notre génération et de notre époque, de faire ce que tous ceux et celles qui nous ont précédés ont fait en leur temps, c'est-à-dire assumer nos responsabilités, créer des emplois et relancer l'économie aujourd'hui. Et nous serons jugés par les générations futures selon ces critères.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, je ne comprends pas l'engouement du gouvernement libéral actuel. Je ne comprends pas l'engouement des collègues du ministre des Finances, parce qu'il n'y a pas de quoi être fier à déposer un Budget de cette nature, un Budget, je dirais, vide de sens. Je vous dirais qu'il n'y a pas à être fier d'avoir une prévision de déficit, pour cette année, de 39,7 milliards, tout près de 40 milliards.

Si on se fie au passé, il ne serait pas anormal, étant donné la qualité des prévisions du ministre des Finances et de son ministère, que ce déficit ne soit pas à 39,7 milliards. Alors, il n'y a pas de quoi être fier, tout de suite en partant.

1715

Lorsqu'on regarde les prévisions de recettes, nous nous apercevons que le ministre des Finances fait exactement les mêmes erreurs que le précédent ministre des Finances. Il se croit encore au milieu des années 1970, jusqu'au début des années 1980, où les recettes fiscales accusaient le même taux de croissance que la croissance du Produit intérieur brut.

(1755)

On prévoit, par exemple, que toute augmentation de 1 p. 100 du PIB va se solder par une augmentation de plus de 1 p. 100 du PIB, c'est-à-dire 1,2 p. 100. Or, le Conference Board du Canada vient à peine de sortir une étude qui dit qu'à toutes les fois qu'il y a une augmentation de 1 p. 100 du PIB, il y a une augmentation de 0,5 p. 100 des recettes fiscales à cause justement de la montée de l'économie au noir. Alors, c'est quelque chose que le ministère des Finances a complètement évacué, ce qui me fait dire et qui fait dire au Bloc québécois que déjà, en partant, ces estimations n'ont pas de fichu de bon sens!

Monsieur le Président, il y a quelque chose aussi que j'ai compris, que mes collègues aussi comprennent, à la lumière de ce Budget: on comprend mieux maintenant ce que le ministre des Finances voulait dire lorsqu'il parlait d'élargissement de l'assiette fiscale. Ce gouvernement, le ministre des Finances élargit l'assiette fiscale en cassant les jambes des revenus moyens. C'est là qu'il va chercher son élargissement de l'assiette fiscale.

Voici quelques exemples: le ministre des Finances va chercher odieusement, au cours des trois prochaines années, en taxant la contribution de l'employeur aux différents régimes d'assurance-vie collective, sur le dos des travailleurs à revenu moyen, pas moins de 520 millions de dollars. C'est un demi milliard sur le dos des travailleurs à revenu moyen!

C'est la même chose lorsqu'il parle de réduire et même d'éliminer le crédit d'impôt en raison de l'âge des contribuables retraités. Le ministre des Finances élargit l'assiette fiscale sur le dos des personnes retraitées et va chercher, de ce fait, au cours des trois prochaines années, à peu près 500 millions de dollars sur le dos des personnes retraitées. Il dit que cela ne touche pas 75 p. 100 des personnes retraitées. Mais cela touche 25 p. 100 des personnes retraitées! Est-ce que les personnes retraitées méritent, après avoir travaillé toute leur vie, une telle mesure?

J'en viens maintenant au troisième type de mesure qui me fait dire que le ministre des Finances et ce gouvernement n'ont aucune conscience sociale. On va chercher, au cours des trois prochaines années, 740 millions de dollars en réduisant la portée de la déduction pour les frais de représentation. Une étude présentée par Ernst & Young récemment précise, au sujet des frais de représentation, que dans une proportion de 80 p. 100, ce ne sont pas les riches contribuables qui profitent de ces déductions, mais les contribuables à revenu moyen, les travailleurs autonomes pour la plupart, et même des cols bleus contractuels.

Ce gouvernement, encore une fois, va chercher 740 millions au cours des trois prochaines années dans les poches des travailleurs autonomes et des cols bleus contractuels, en grande majorité. C'est odieux!

Ces mesures et bien d'autres élargissent le fossé déjà assez grand entre l'impôt payé par les particuliers, par les contribuables, par les Canadiennes et les Canadiens, et les Québécois et les Québécoises, et les impôts payés par les sociétés canadiennes. Quand on parle de sociétés, on parle surtout des grandes sociétés.

Savions-nous que les particuliers, au Québec comme au Canada, paient déjà sept fois plus d'impôt sur leur revenu que ne le font les grosses entreprises? Savons-nous cela? Savons-nous aussi que l'assiette fiscale fédérale est constituée de 72,5 p. 100 de recettes provenant des particuliers et 27,5 p. 100 des entreprises. Il y a 25 ans, cela a déjà représenté le double, la contribution des entreprises. Là, les mesures présentées par le ministre des Finances élargissent encore plus cette iniquité, élargissent cet écart entre la contribution des particuliers et la contribution des entreprises.

À part des voeux pieux sur les fiducies familiales et sur les évasions fiscales dans les paradis fiscaux, comment se fait-il que le ministre des Finances n'ait pas annoncé aujourd'hui, dans son Budget, qu'il abolissait le régime odieux des fiducies familiales et qu'il abolissait aussi la possibilité pour les grandes entreprises d'effectuer des évasions fiscales dans des paradis fiscaux comme la Barbade ou ailleurs?

(1800)

C'est pratiquement incompréhensible que le ministre des Finances s'attaque tout de suite au revenu moyen, avec des mesures précises au cours des trois prochaines années, et ne s'attaque pas aux plus riches contribuables et aux grandes sociétés qui ont omis de payer des impôts à la fin des années 1980 et qui poursuivent ce régime, ce vol fiscal. Cela c'est un peu spécial.

Monsieur le Président, le ministre poursuit dans la même veine qu'il a commencé. Depuis le 26 octobre, il n'a que des voeux pieux à l'égard du rétablissement d'une équité fiscale au Canada et au Québec. Il n'a que des voeux pieux. Il ne prend l'engagement que de consulter, consulter et consulter. C'est pratiquement un credo, aussi fort que celui qu'il véhiculait lors de la campagne électorale où on parlait de «jobs, jobs, jobs». Sauf que ce budget ne contient aucune mesure supplémentaire pour créer des emplois. Au contraire, toutes les ponctions fiscales qu'on effectuera au cours des trois prochaines années vont faire en sorte qu'on va atténuer les chances d'une reprise durable et créatrice d'emplois au Québec comme au Canada. Et cela c'est inadmissible pour un gouvernement qui dit depuis le début qu'il a cette préoccupation de création d'emplois. Je ne comprends plus rien et mes collègues ne comprennent plus rien, eux non plus.

Des voix: Oh! Oh!

M. Loubier: Je demanderais à mes collègues d'en face d'avoir un peu plus de respect, nous en avons tous les jours, nous, de ce respect.

Monsieur le Président, il y a quelque chose de plus scandaleux dans ce budget, et je vais vous dire de quoi il s'agit. Le ministre des Finances, qui est véritablement celui qui dirige le développement des ressources humaines au Canada, le ministre des Finances, avec ce Budget, vient d'imposer une camisole de force au ministre du Développement des ressources humaines, en lui imposant au cours des prochaines années, au titre de la réforme des différents programmes de sécurité de revenu, au titre aussi des modifications scandaleuses qu'il impose au Régime d'assurance-chômage, celles-là mêmes qu'il a dénoncées du gouvernement précédent, au cours des trois prochaines années, il ira chercher 7,5 milliards d'économie au niveau de la réforme des

1716

régimes sociaux. Il imposera, autrement dit, au ministre du Développement des ressources humaines, déjà en partant, en préjugeant des travaux du comité, 7,5 milliards de dollars au cours des trois prochaines années.

C'est cela rétablir l'équité fiscale? C'est cela rétablir une certaine justice sociale au Canada lorsqu'on s'attaque à ceux-là mêmes qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire aux plus démunis, ceux qui sont les victimes, en grande partie, du gouvernement précédent et qui poursuivent leur misère à partir du gouvernement actuel.

Monsieur le Président, le chef du Bloc québécois et leader de l'opposition officielle avait raison. Lorsqu'on parle de réforme de l'autre côté de la Chambre, lorsqu'on parle de réforme des programmes sociaux, lorsqu'on parle des programmes de santé, etc., il faut entendre des coupures. On en a la preuve aujourd'hui, on en a la preuve indéniable.

Les contribuables à revenu moyen, les personnes âgées, auraient mérité probablement le répit fiscal que le ministre des Finances ne leur offre pas avec ce Budget. Les travailleurs en chômage aussi, les personnes les plus démunies de notre société, et on parle des 1,5 million de Canadiens qui souffrent du sous-emploi, qui souffrent du chômage. On parle des 437 000 chômeurs du Québec qui s'attendaient à des vraies mesures de création d'emplois, qui s'attendaient, non pas à des pacotilles, non pas à du colmatage de brèches, non pas uniquement à un programme qu'on appelle le Programme des infrastructures, qui va créer 45 000 emplois à temps partiel, mais ils s'attendaient à une véritable direction d'imprégnée par ce budget-là au niveau de la création d'emplois.

Il n'y a rien dans ce budget-là qui nous permet d'espérer. Il n'y a rien non plus, sauf les beaux discours et les beaux sourires du ministre des Finances et de ses collègues. Il n'y a rien là-dedans non plus pour aider les personnes et 1,2 million de Canadiens qui, à l'heure actuelle, sont en attente d'un logement social et qui consacrent plus de 50 p. 100 de leur budget au logement. Alors les beaux discours, c'est très beau, mais quand vient le temps de rétablir ce pourquoi ils ont déchiré des chemises lorsqu'on a aboli les 600 millions de dollars prévus pour les logements sociaux dans l'administration précédente, là on ne joint jamais les gestes aux paroles. Que des beaux sourires et des beaux discours sur la justice sociale au Canada. C'est ce que les Québécois et les Canadiens détestent chez les politiciens. C'est à cause de cela que les Québécois et les Canadiens font preuve de cynisme face aux politiciens et aux institutions politiques. C'est à partir d'un manque de courage aussi, d'un manque de vision à long terme que les Québécois, comme les Canadiens, font désaffection face aux promesses des politiciens et des politiciennes.

Non seulement ce budget ne contient rien de ce que le gouvernement aurait dû faire, mais en plus de cela, ses objectifs de réductions de dépenses sont ridicules. En terme nominal, au cours des trois prochaines années, il n'y aura aucune réduction de dépenses.

J'ai l'impression que ce gouvernement vit sur une autre planète, qu'il n'a pas conscience de l'endettement excessif du Canada, cet endettement qui lui donne la première place un peu partout en termes de mauvaises performances. J'ai l'impression que ces mauvaises performances et ce gouvernement sont deux choses totalement désincarnées.

Je reprends un peu les paroles du ministre des Finances, lorsqu'il a dit: «Vous allez nous reprocher de ne pas être allés assez loin.» Nous ne lui reprocherons pas de ne pas être allé assez loin, nous allons lui reprocher de ne pas avoir fait ce qu'il fallait faire, et c'est encore plus grave.

Nous lui reprocherons aussi d'avoir épargné, encore une fois, les riches amis du régime. Les gens, les Québécois comme les Canadiens, commencent à s'apercevoir de la vision de ce gouvernement.

Je propose donc:

Que le débat soit maintenant ajourné.
[Traduction]

Le Président: Conformément au paragraphe 83(2) du Règlement, la motion est adoptée d'office.

(La motion est adoptée.)

Le Président: Par conséquent, conformément au paragraphe 83(2) du Règlement, la Chambre s'ajourne à 14 heures demain.

(La séance est levée à 18 h 7.)