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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 17 avril 1996

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE SUICIDE CHEZ LES ADOLESCENTS

L'ACADÉMIE DES GRANDS MONTÉRÉGIENS

LE RECENSEMENT DE 1996

LE PRIX DE L'ESSENCE

LA COMPAGNIE EXPRO DE VALLEYFIELD

LES CHAMPIONNATS MONDIAUX DE CURLING

L'ENTREPRENEURSHIP

LE CONSEIL DES CANADIENS

LE DÉCÈS DU JUGE DAVID MCDONALD

SIR WILFRID LAURIER

MIKE HENRY

L'ENLÈVEMENT INTERNATIONAL D'ENFANTS

    M. Tremblay (Rosemont) 1583

CLIFFORD OLSON

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

LA CHAIRE STANLEY KNOWLES DE PROFESSEUR INVITÉ

LA VISITE ROYALE

LA LOI QUÉBÉCOISE SUR LA CONSULTATION POPULAIRE

    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 1584

QUESTIONS ORALES

LA SOCIÉTÉ DISTINCTE

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1589
    M. Mills (Red Deer) 1589
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1589

M. TRAN TRIEU QUAN

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1590
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1590

LE LIBAN

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 1590

LES PÊCHES

LA GARDE CÔTIÈRE

    M. Bernier (Gaspé) 1591

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

STRATEGIS

LE RECENSEMENT DE 1996

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

    Le président suppléant (M. Kilger) 1593

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

LOI SUR LES OCÉANS

    Projet de loi C-26. Adoption des motions de présentationet de première lecture 1593
    Deuxième lecture du projet de loi, étude en comité etrapport avec propositions d'amendement 1593

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Adoption de la motion d'adoption du treizième rapport 1593

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

LES BOISSONS ALCOOLIQUES

LA MAIN-D'OEUVRE ENFANTINE

TAIWAN

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR LES BANQUES

    Projet de loi C-15. Motion de troisième lecture 1594
    M. Mills (Red Deer) 1609

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

L'AGRICULTURE

MOTION D'AJOURNEMENT

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

    M. Leroux (Shefford) 1622

L'IMMIGRATION

ANNEXE


1581


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mercredi 17 avril 1996


La séance est ouverte à 14 heures.

_______________

Prière

_______________

Le président suppléant (M. Kilger): Comme le veut notre coutume, nous allons maintenant chanter le ô Canada sous la direction du député de Kingston et les Îles.

[Note de l'éditeur: Tous les députés chantent l'hymne national.]

______________________________________________

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE SUICIDE CHEZ LES ADOLESCENTS

M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord, Lib.): Monsieur le Président, le taux de suicide chez les adolescents au Canada atteint des proportions inquiétantes par comparaison avec les autres pays industrialisés. De 1979 et 1991, il a doublé chez les jeunes âgés de 15 à 19 ans, s'élevant à 13,5 par 100 000, si bien que le Canada occupe le troisième rang dans le monde, après la Nouvelle-Zélande et la Finlande. Du fait que cela se produit dans un pays qui année après année est considéré comme le meilleur au monde, il faut nous demander ce qui ne va pas.

J'exhorte les députés à se sensibiliser davantage à ce problème et à seconder les efforts que notre gouvernement déploie pour redresser cette tragique situation. Nos efforts doivent viser à transmettre un message d'espoir aux jeunes Canadiens. Nous ne devons pas renoncer à notre engagement envers la création d'emplois et la création d'une société porteuse d'espoir en un avenir toujours plus prometteur.

* * *

[Français]

L'ACADÉMIE DES GRANDS MONTÉRÉGIENS

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, le 26 avril prochain, l'Académie des grands Montérégiens rendra hommage à cinq personnalités de notre belle région. Parmi eux, on retrouve quelqu'un de bien connu à Saint-Hyacinthe, M. Claude Marchesseault.

Au cours des trois dernières décennies, M. Marchesseault s'est impliqué dans des domaines aussi variés que le développement économique, les loisirs, l'enfance inadaptée, l'agroalimentaire, les arts, la philanthropie et les affaires municipales, tout en exerçant un poste important à la Fédération des caisses populaires Desjardins.

Depuis sa création, l'Académie des grands Montérégiens a honoré des personnalités remarquables de notre région. Mentionnons, entre autres, Raymond Lévesque, Arlette Cousture, Juliette Huot, François-Albert Angers, Yves Beauchemin et Louis Laberge.

L'infatigable et l'incontournable Claude Marchesseault, dont je salue l'inestimable contribution au développement de notre collectivité, s'ajoute à ces grands hommes et ces grandes femmes.

* * *

[Traduction]

LE RECENSEMENT DE 1996

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, dans un mois, les Canadiens seront appelés à s'identifier selon la race dans le recensement de 1996. Nous avons le choix de nous classer comme étant des blancs, des Chinois, des Asiatiques, des noirs, des Arabes, des Philippins, des Latino-Américains, des Japonais, des Coréens ou autres. Nous n'avons pas le choix de sauter la question.

Si un employeur ou un propriétaire exigeait de connaître la race d'un Canadien, il supporterait tout le poids de la loi sur les droits de la personne qui interdit la discrimination raciale, et avec raison. Ce qui est pourtant incroyable, c'est que le gouvernement fédéral invoque la loi pour exiger exactement la même identification selon la race.

J'invite fortement tous les Canadiens à faire savoir au gouvernement fédéral que, au Canada, nous croyons en l'égalité de tous les Canadiens, sans égard à leur pays de naissance ou à la couleur de leur peau. Indiquer que notre origine ethnique est canadienne à la question 19 du recensement montrera au gouvernement libéral que les Canadiens veulent être considérés comme des Canadiens, ni plus ni moins.

Un recensement selon la race, quelle honte!

* * *

LE PRIX DE L'ESSENCE

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton, Lib.): Monsieur le Président, le prix de l'essence dans la région a atteint récemment son plus haut niveau depuis la guerre du Golfe. Le prix moyen en Ontario, vendredi dernier, était de plus de 58c. le litre.


1582

Cela représente une augmentation, en une semaine à peine, de jusqu'à 3c. le litre.

Un hiver inhabituellement froid et des stocks bas aux raffineries contribuent, sans aucun doute, à l'augmentation du prix de ce produit. Pourtant, dans l'ensemble il semble que la fluctuation des prix à la pompe a très peu à voir avec le prix de gros de l'essence.

Même s'il n'y avait pas d'augmentation des taxes sur l'essence dans le budget du mois dernier, le prix de l'essence est hors de contrôle. Nous devons agir pour remédier à la situation.

* * *

[Français]

LA COMPAGNIE EXPRO DE VALLEYFIELD

M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard, Lib.): Monsieur le Président, la compagnie de produits chimiques Expro de Valleyfield a signé un important contrat avec la firme américaine OEA Inc. un peu plus tôt cette semaine. La valeur de ce contrat ne se situe pas uniquement au niveau des sommes d'argent que recevra la compagnie Expro, mais bien plutôt au niveau de la nature du mandat qu'elle vient de se voir confier.

En effet, cette compagnie qui était jusqu'alors spécialisée dans la fabrication d'explosifs, surtout utilisés pour des fins militaires, vient de recevoir son premier contrat d'application civile. Expro est maintenant responsable de la fourniture d'un propulsif utilisé dans le mécanisme de déclenchement des coussins gonflables sur les modèles de voitures américaines 1997.

Voilà un bel exemple de l'esprit d'innovation et du dynamisme qui animent nos entreprises canadiennes. Avec l'exemple que nous donne la compagnie Expro, la preuve est faite qu'il est possible de convertir les industries militaires à des fins civiles et pacifiques.

* * *

[Traduction]

LES CHAMPIONNATS MONDIAUX DE CURLING

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, les curleurs canadiens sont les meilleurs du monde. Ils l'ont prouvé à Hamilton, le mois dernier.

(1405)

Le 30 mars, l'équipe féminine du Canada a remporté le Championnat mondial de curling féminin. L'équipe féminine extrêmement puissante et charismatique, menée par Marilyn Bodogh, du Club de curling de St. Catharines, et formée également de Kim Gellard, troisième, de Corie Beveridge, deuxième et de Jane Hooper Perroud, première, a fait honneur au Canada.

Le 31 mars, l'équipe masculine canadienne a remporté le Championnat mondial de curling masculin.

Les amis et les familles des membres de nos équipes, ainsi que les amateurs canadiens de curling, ont encouragé nos équipes et ont partagé avec elles la joie de leur victoire aux championnats mondiaux.

Je sais que mes collègues à la Chambre se joignent à moi pour féliciter ces athlètes canadiens remarquables. Leur talent et leur détermination sont exemplaires et nous sommes fiers d'eux, à titre de fiers Canadiens.

* * *

[Français]

L'ENTREPRENEURSHIP

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, l'automne dernier, deux citoyennes de Saint-Hubert ont décidé de s'en sortir par leurs propres moyens, en créant leur entreprise, et ce, sans recourir à aucune subvention.

En effet, Ginette Piché et Colette Gagné ont profité du virage ambulatoire pour lancer l'entreprise de services «Beau ménage, bons soins».

Elles offrent aux personnes âgées, convalescentes et en perte d'autonomie, des services de soins personnels et d'entretien ménager en fonction des attentes et du budget de leur clientèle.

La panoplie de leurs services favorise donc le maintien à domicile des personnes en difficulté. Dans le contexte actuel, une ressource comme celle-là s'avère indispensable. Offrir de bons services diversifiés, voilà ce que fait cette entreprise, voilà une bonne idée pour améliorer la qualité de vie des personnes âgées.

Des initiatives comme celle-là sont toujours les bienvenues. C'est pourquoi je tiens à féliciter Ginette Piché et Colette Gagné et les encourage à persévérer.

* * *

[Traduction]

LE CONSEIL DES CANADIENS

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, hier, un aîné de ma circonscription est venu à mon bureau très inquiet au sujet d'une lettre qu'il avait reçue du Conseil des Canadiens. Essentiellement, cette lettre n'était rien d'autre qu'une escroquerie et avait tout simplement pour objectif d'engendrer la peur chez l'un des groupes les plus vulnérables dans notre société, nos personnes âgées.

En dénaturant les faits, ce conseil profite des craintes de nos personnes âgées et essaie de leur soutirer de l'argent. Ce groupe veut que les personnes âgées du Canada paient pour une chose à laquelle elles ont droit gratuitement, à savoir la présentation d'une pétition au gouvernement au nom des aînés. Tous les députés offrent ce service gratuitement. Je sais, après avoir passé trois ans à la Chambre, que nous présentons tous toutes les pétitions de nos électeurs régulièrement.

Ce groupe, qui prétend se préoccuper du manque d'argent des personnes âgées, demande de l'argent dix fois dans sa lettre. On dit à ces gens que s'ils ne peuvent s'engager à verser des contributions mensuelles à ce groupe, ils pourraient toujours verser 35 $, 50 $ ou 75 $ maintenant pour protéger leur pension durement gagnée.

Les escrocs du passé étaient des amateurs par rapport à ce groupe.


1583

LE DÉCÈS DU JUGE DAVID MCDONALD

M. John Loney (Edmonton-Nord, Lib.): Monsieur le Président, je me lève aujourd'hui pour rendre hommage à l'honorable juge David McDonald, grand Canadien de l'Alberta, décédé le 8 avril, à Edmonton.

Le juge McDonald a consacré sa vie aux plus grands idéaux de la fonction publique. En sa qualité d'avocat, il a servi les tribunaux de 1957 à 1973. Il a ensuite siégé à la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta à compter de sa nomination en 1974 jusqu'à ce qu'il soit nommé à la Cour d'appel de l'Alberta, en novembre 1995.

Il a été président de la commission d'enquête sur certaines activités de la GRC de 1977 à 1981. Il avait déjà assumé la présidence de l'Institut canadien d'administration de la justice, de 1974 à 1977.

Boursier Rhodes et juriste d'une intelligence exceptionnelle, le juge McDonald était un humaniste qui a influencé tous ceux qui ont eu le privilège de travailler avec lui.

Nous offrons nos sympathies à sa femme, Dorothy, et à ses enfants, Jacqueline, Jonathan et Catherine.

J'invite tous les députés à saluer avec moi un grand Canadien, l'honorable juge David McDonald.

* * *

[Français]

SIR WILFRID LAURIER

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, le 16 avril, à 2 h 30 du matin, c'est dans cette même Chambre des communes que le gouvernement d'alors décidait de céder à la pression du Parti libéral. C'était le 16 avril 1896. C'était il y a 100 ans hier.

Neuf jours plus tard, des élections générales étaient déclenchées au pays pour le 23 juin suivant. Il importe aujourd'hui de se rappeler que ces élections de 1896 ont constitué pour notre pays, le Canada, le début d'un temps nouveau.

Wilfrid Laurier, originaire de Saint-Lin-des-Laurentides, a vécu à Arthabaska toute sa vie. Chef de l'opposition à l'époque dont nous parlons, il allait devenir, quelques deux mois plus tard, le premier d'une longue liste de Québécois qui sont devenus premier ministre du Canada.

Laurier disait, à l'époque, qu'au Canada, il pouvait y avoir plus d'une race. Il faisait référence alors aux Canadiens-français et aux Canadiens anglo-saxons. Dirions-nous aujourd'hui plus d'un peuple?

Cependant, il ajoutait aussi. . .

(1410)

[Traduction]

MIKE HENRY

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Madame la Présidente, après 20 années de service à la population de Guelph-Wellington, Mike Henry se retire du poste de directeur général de la Chambre de commerce de Guelph.

Dire que nous regretterons tous le départ de Mike, c'est peu dire. Comme la Tribune de Guelph l'écrivait récemment: «Il a été pour Guelph un ambassadeur dévoué et aimable, et il a fait également oeuvre de diplomatie en coordonnant les efforts des bénévoles afin d'atteindre les nombreux objectifs de la Chambre de commerce.»

Mike Henry a bien servi notre communauté. Il a bien mérité de partir à la retraite, mais je sais que son travail dans toute la circonscription de Guelph-Wellington nous manquera.

Mike, vous avez gagné notre respect, notre estime et notre gratitude. Puissent vos années de retraite être aussi profondément satisfaisantes et merveilleuses que l'a été votre travail au service de toute la communauté de Guelph-Wellington.

* * *

[Français]

L'ENLÈVEMENT INTERNATIONAL D'ENFANTS

M. Benoît Tremblay (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, le 17 janvier 1993, une résidante du comté de Rosemont, Mme Micheline Tremblay, apprenait que son fils Karim, âgé de trois ans et demi, était enlevé par son père et déplacé de façon illicite vers l'Égypte, pays d'origine du père.

Après trois ans d'efforts soutenus, Micheline Tremblay n'a toujours pas revu son fils. Tous les recours juridiques entrepris ont été pratiquement inopérants, parce que l'Égypte n'a signé ni la convention internationale ni une entente bilatérale avec le Canada concernant l'enlèvement international d'enfants.

Une telle entente est pourtant possible puisqu'elle existe entre la France et l'Égypte. Il manque à Ottawa la volonté politique d'agir sur cette question fondamentale de droit civil. Je fais appel à la solidarité de tous mes collègues de la Chambre des communes pour exiger que le gouvernement corrige cette situation et assure le retour de Karim auprès de sa mère dans les plus brefs délais.

* * *

[Traduction]

CLIFFORD OLSON

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière, Clifford Olson a envoyé à plusieurs députés, dont moi-même, une note sarcastique dans laquelle le tueur d'enfants annonçait son intention de demander sa mise en liberté anticipée en vertu de l'article 745 du Code criminel.


1584

La note que Olson a envoyée à mon bureau dit ceci: «Je m'en reviens, Art. Vite, fais abroger l'article 745. Souris, pauvre gogo.» Cette note est signée en lettres moulées: «Clifford Robert Olson, la brute de la Colombie-Britannique».

L'article 745 accorde aux criminels condamnés à l'emprisonnement à perpétuité l'admissibilité à la libération anticipée. Olson demandera officiellement en août à bénéficier d'un examen judiciaire pour obtenir sa libération conditionnelle. Par ailleurs, Roy Glaremin, coupable du meurtre d'un policier, présentera une deuxième demande en mai pour obtenir sa mise en liberté anticipée.

Sur les 60 meurtriers qui ont jusqu'ici demandé une libération anticipée, 50 ont obtenu la réduction du délai préalable à leur libération conditionnelle, et au moins 18 d'entre eux ont obtenu la réduction à 15 ans du délai pour être admissible à la libération conditionnelle.

J'exhorte le ministre de la Justice à faire disparaître le sourire narquois du visage de Olson. Il faut mettre fin à cette insanité et abroger sans délai l'article 745.

* * *

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, en août 1993, le premier ministre a dit qu'il ne mettrait pas plus de deux ans à honorer toutes ses promesses. La nouvelle ministre du Patrimoine canadien a dit pour sa part qu'elle démissionnerait si la TPS n'était pas abolie.

La TPS est toujours là, et nous attendons toujours que ces deux ministres tiennent parole. Le gouvernement prétend maintenant que l'harmonisation est une façon de tenir sa promesse d'éliminer la TPS. Or, il y a quelques années, au moins un membre du cabinet actuel considérait l'harmonisation comme un obstacle au remplacement de la TPS.

Voici les termes exacts que le ministre des Finances a employés lorsqu'il faisait campagne pour devenir chef du Parti libéral:

Il n'est pas impossible que, lorsque nous prendrons le pouvoir en 1992, les provinces aient déjà intégré la TPS dans leur régime de taxe de vente. Il serait alors extrêmement difficile de revenir en arrière, mais je suis déterminé à éliminer la TPS. . .
Ces propos sont tirés de De Novo, publication qui a été diffusée au congrès à la direction du Parti libéral. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Le député de Winnipeg-Nord.

* * *

LA CHAIRE STANLEY KNOWLES DE PROFESSEUR INVITÉ

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord, Lib.): Monsieur le Président, l'Université de Waterloo mérite nos félicitations pour avoir établi la chaire Stanley Knowles de professeur invité en études canadiennes au St. Paul's College, programme qui tend à souligner le lien entre les questions de justice sociale et les politiques gouvernementales.

La création de cette chaire de professeur invité est fort opportune, puisque Stanley Knowles a consacré toute sa vie à la promotion des libertés individuelles, de la démocratie, de la justice, de l'esprit communautaire et de l'internationalisme. Elle est également opportune parce que ces questions constituent toujours un défi pour la communauté internationale, à laquelle appartient la société canadienne tant diversifiée.

Je suis extrêmement honoré de siéger à titre de député de Winnipeg-Nord, circonscription qui englobe une partie du comté que représentait M. Knowles. Lui qui maîtrisait la procédure parlementaire et accordait plus d'importance aux gens qu'à des considérations sectaires s'est fait, pendant des décennies, le grand défenseur de la justice sociale à la Chambre des communes. Stanley Knowles est un modèle pour tous les parlementaires.

(1415)

Individuellement, il nous serait difficile d'atteindre les mêmes sommets que lui. Ensemble, nous pouvons parvenir à faire avancer la cause qu'il défendait.

* * *

LA VISITE ROYALE

Mme Judy Bethel (Edmonton-Est, Lib.): Monsieur le Président: «Nous en aurions pour notre argent avec la princesse Di, mais cinq sous pour le prince Charles ce serait déjà trop. Donnons-lui un bonbon et disons-lui de rester chez lui!»

Ces paroles grossières du député d'Edmonton-Sud-Ouest visaient notre longue tradition d'hospitalité qui veut que le Canada paie les frais lorsqu'il invite un membre de la famille royale au Canada.

Ces paroles grossières en disent long sur la volonté du Parti réformiste de se défaire de son image d'extrémiste lorsqu'il s'agit de l'égalité de tous les citoyens, du respect de la monarchie du Canada et de la politesse dans la politique au Canada.

Je mets au défi le chef du tiers parti de dire aux Canadiens et aux Canadiennes que le respect du Parti réformiste pour les femmes dépasse l'aspect physique, que ce genre d'attaques publiques contre la monarchie du Canada n'illustre pas la philosophie réformiste.

* * *

[Français]

LA LOI QUÉBÉCOISE SUR LA CONSULTATION POPULAIRE

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Monsieur le Président, la Loi québécoise sur la consultation populaire est parmi les plus avant-gardistes dans le monde démocratique et ne trouve pas son équivalent au niveau fédéral.

Or, lors du débarquement illégal des forces fédéralistes de l'extérieur du Québec, le 27 octobre dernier à Montréal, plusieurs députés libéraux savaient pertinemment qu'ils enfreignaient la loi. Plutôt que de dénoncer cette loi, le whip du gouvernement devrait chercher à s'en inspirer afin d'améliorer le processus démocratique au niveau fédéral.

Au nom de l'unité nationale, les députés libéraux semblent croire que tout leur est permis. Ils se mettent dans l'illégalité, ils jouent aux martyrs, ils font les vierges offensées ou encore se disent harcelés parce que le bureau du Directeur général des élections du Québec leur demande des comptes sur leur activité de rallye à Montréal.

1585

Je me permets de rappeler au whip et à ses complices que le 27 octobre dernier, ce sont des millions de Québécois et de Québécoises qui se sont sentis agressés par leur manoeuvre illicite.

______________________________________________


1585

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA SOCIÉTÉ DISTINCTE

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, lundi en cette Chambre, le nouveau ministre des Affaires intergouvernementales déclarait, et je le cite:

[. . .] les démocraties bilingues ou trilingues ont des mesures visant à assurer la coexistence harmonieuse de leurs diverses communautés linguistiques. C'est ce que nous avons au Canada, et nous en sommes très fiers.
Dans la foulée des recherches pour trouver un vocabulaire plus adapté à la réalité constitutionnelle canadienne, doit-on comprendre que pour lui, le concept de peuple québécois est maintenant réduit à celui de communauté linguistique?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, l'opposition officielle semble vouloir jouer à des jeux de dictionnaire. Peu importe. Ce qui compte, comme je le dis depuis que je suis dans cette Chambre, c'est la substance.

Et la substance que veulent garder les Québécois dans leur grande majorité, c'est l'identité québécoise, l'identité canadienne, la fierté québécoise, la fierté canadienne, la solidarité québécoise et la solidarité canadienne.

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, si le ministre veut jouer, je vais lui parler du scrabble. Il y a un mot de six lettres au scrabble qui s'écrit «vérité». C'est ce qu'on veut savoir, nous, de l'opposition.

Le ministre des Affaires intergouvernementales a dit lui-même qu'au-delà des mots, il y a une réalité. Peut-il nous dire, dans la réalité si, pour lui, comme ministre des Affaires intergouvernementales, les Québécois forment un peuple?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le chef de l'opposition officielle, et je le remercie des questions qu'il me pose, me faisant cet honneur, ne semble pas comprendre une chose.

C'est une chance extraordinaire, dans le monde dans lequel nous vivons, d'être né Québécois et Canadien. Je suis Québécois et Canadien et je me battrai, avec tous les moyens que me donne la démocratie, contre ceux qui veulent m'enlever mon identité canadienne.

(1420)

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, vous comprendrez qu'au contact du ministre, je vais certainement passer mon cours politique 101, mais ce n'est pas évident que lui, il va le passer, par exemple.

Après être passé de la réalité de peuple québécois à la notion de société distincte. . . Monsieur le Président, le ministre des Transports s'instruirait lui aussi s'il écoutait. Voulez-vous lui demander de se taire?

Des voix: Oh, oh!

Une voix: C'est le ministre du Développement des ressources humaines.

Le président suppléant (M. Kilger): Je suis convaincu que tous les députés voudront entendre autant la question que la réponse.

M. Gauthier: Monsieur le Président, je m'excuse auprès du ministre des Transports. C'est le ministre du Développement des ressources humaines qui n'écoute jamais rien et qui ne comprend jamais rien dans cette Chambre.

Je reviens au ministre des Affaires intergouvernementales qui, même s'il ne répond pas, au moins il écoute. Je demanderais au ministre des Affaires intergouvernementales, après être passé de la réalité de peuple québécois à la notion de société distincte, puis à celle de foyer de la langue et de la culture et enfin à celle de communauté linguistique, le ministre admettra-t-il que la recherche d'un nouveau vocabulaire au Parti libéral du Canada se fait toujours dans le même sens, soit celui d'une banalisation du statut et du rôle du peuple du Québec au sein du Canada?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de dire enfin la vérité sur le statut et le rôle des Québécois, parce qu'elle n'a pas été dite par l'opposition et elle ne le sera jamais.

La population du Québec jouit de l'autonomie la plus grande qui soit, au Canada, en ce qui concerne ses institutions propres. Parmi toutes les fédérations du monde, il serait difficile d'en trouver une plus décentralisée que celle du Canada. Le statut de province canadienne est supérieur à celui d'État américain, de canton suisse ou de Länder allemand. Voilà ce dont les Québécois jouissent. Ils jouissent en même temps du Canada.

Nous ne disons pas que tout est parfait. Il faut améliorer les choses. Il y a une reconnaissance de la réalité québécoise au Canada et en Amérique du Nord qui doit être trouvée, mais de là à toujours présenter la situation au Québec comme une situation misérabiliste qui demande une solution aussi extrémiste que la sécession, eh bien, il y a une marge que la vérité ne saurait tolérer.

Le président suppléant (M. Kilger): Il semble y avoir beaucoup d'énergie des deux côtés de la Chambre. C'est bien, mais par contre, je demande la coopération de tout le monde pour que les questions et les réponses soient un peu plus brèves.


1586

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, à prime abord, j'ai mon voyage d'entendre le ministre nous dire que nous, Québécois, on est chanceux d'avoir nos institutions au sein du Canada. C'est épouvantable!

Le ministre des Affaires intergouvernementales a beau essayer, comme on l'a vu hier et aujourd'hui, de se dissocier de la résolution du Parti libéral du Canada adoptée en fin de semaine, il n'en demeure pas moins qu'il a voté favorablement pour ce concept réducteur.

Le ministre admettra-t-il qu'il est préoccupant qu'un concept aussi important que celui qui a été retenu par le Parti libéral comme étant la nouvelle orientation du parti ait été entériné par le premier ministre, sans que le ministre porteur du dossier n'ait eu préalablement un mot à dire sur son contenu?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, à propos du préambule, l'honorable député a dit: «Nous, Québécois». Je lui rappelle que je suis Québécois autant que lui et que personne ici ne peut parler pour les Québécois comme s'il était lui-même le seul. Je me vois obligé de lui rappeler que le Québec est une société pluraliste.

(1425)

Deuxièmement, en ce qui concerne la motion sur laquelle j'ai voté, je rappelle encore une fois, je crois pour la troisième fois en cette Chambre, qu'il y est écrit que le «Parti libéral du Canada appuie la constitutionnalisation des principes reconnus dans la résolution parlementaire adoptée en décembre 1995 qui définit la société distincte». C'est bien pourquoi j'ai voté en faveur de la résolution.

Troisièmement, le Parti libéral du Canada est un parti très démocratique. La démocratie nous réserve parfois de ces surprises, mais nous serons toujours très heureux de reconnaître et d'accueillir à leur juste mérite, je dis bien à leur juste mérite, les leçons de démocratie que pourrait nous donner un parti dont le chef a été élu par le nombre astronomique de 150 membres, et dont l'une des députés en vue a dit que l'élection du chef ne concernait pas la population.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas ma faute si dans le «nous, Québécois», le ministre s'est senti exclu.

Quelle crédibilité doit-on accorder au nouveau ministre des Affaires intergouvernementales, alors qu'il a fallu attendre la dénonciation unanime de l'Assemblée nationale pour connaître réellement le fond de sa pensée sur cette proposition qu'il essayait de nous vendre à peine quelques heures avant ici même?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, je suis très heureux que l'honorable député s'engage à ne plus jamais s'identifier, lui et son parti seul, aux Québécois. C'est une très bonne nouvelle.

Deuxièmement, j'ai toujours dit la même chose sur cette question, à savoir qu'on peut avoir des désaccords sur le choix des mots, mais ce qui compte, c'est la substance. Je conseille à l'honorable député de ne pas trop ridiculiser les Québécois qui, fébrilement, avec tout leur coeur et parfois avec maladresse mais toujours de façon admirable, cherchent à trouver les voies de la réconciliation qui leur permettront de garder le Canada.

* * *

[Traduction]

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, hier, j'ai demandé au ministre de la Défense nationale d'expliquer à la Chambre en quoi consiste au juste sa conception de la responsabilité ministérielle, notamment en ce qui concerne les événements entourant l'enquête sur la Somalie.

Comme sa réponse est la plus faible qu'un ministre ait jamais donnée à la Chambre depuis le début de la 35e législature, nous voulons revenir à la charge.

Conformément à la doctrine de la responsabilité ministérielle qu'avait bien exposée l'ancien Président libéral de la Chambre, la responsabilité ministérielle s'étend aux cas où un collaborateur du ministre commet une grave négligence.

Le ministre de la Défense nationale admet-il que la tentative de camouflage de données concernant l'enquête sur la Somalie constitue une grave négligence de la part de quelqu'un de son ministère?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je regrette que le chef du Parti réformiste ait trouvé que la réponse était faible, mais peut-être rendait-elle compte de la faiblesse de la question.

Il est impossible de répondre à la question parce que toutes les hypothèses qu'elle comporte sont absolument fausses.

Je dois répéter qu'une commission d'enquête va examiner toutes les questions qui intéressent tellement le député. Il faut laisser cette commission faire son travail. Il ne faut pas nous adonner à la Chambre des communes à un jeu politique qui risquerait d'entraver le cours de la justice et de nuire encore davantage à la réputation des hommes et des femmes qui ont servi au sein des forces armées et peut-être même à la réputation du Parlement.

(1430)

Je demanderai au député de bien vouloir s'en tenir à des questions pertinentes, à savoir celles que se posera la commission d'enquête, et de reconnaître que la commission doit pouvoir accomplir son travail dans toute la mesure du possible.


1587

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, ma question parlait de négligence grave. Je n'ai pas fait allusion aux événements qui ont entraîné l'établissement de la commission d'enquête sur la Somalie. Ces événements sont survenus avant l'avènement du présent gouvernement. Ce n'est pas là la négligence grave dont je parle.

Je parle de la tentative de camouflage de données concernant l'enquête sur la Somalie qui s'est produite du temps de l'actuel gouvernement et de l'actuel ministre. Je parle en particulier du prétendu stratagème de la Direction des affaires publiques du ministère de la Défense nationale, sous la direction du général Boyle, pour renommer, dissimuler, voire détruire d'importants documents sur la Somalie.

Je répète ma question au ministre. Reconnaît-il que ce prétendu camouflage constitue une négligence grave de la part des hauts fonctionnaires du ministère qui relèvent de lui?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le député se préoccupe de la question des Affaires publiques. La semaine dernière, le président de la commission, M. le juge Létourneau, a dit qu'il consacrerait deux ou trois semaines à l'étude de cette seule question. Ces audiences vont débuter lundi. C'est là qu'on devrait répondre à toutes les questions. Tous les faits devront être exposés là et non à la Chambre des communes.

Si le député veut parler de négligence grave, je veux bien parler de la négligence grave dont se sont rendus coupables ses collègues et lui-même.

Hier, le député a fait une grave allégation à la Chambre, mais, à l'extérieur de la Chambre, là où il n'y a plus d'immunité parlementaire, cette allégation s'est volatilisée. Le porte-parole de son parti en matière de défense a changé tellement de fois de position à l'égard de l'enquête que sa crédibilité s'est envolée.

La députée de Surrey-White Rock-South Langley s'en est prise il y a quelques semaines au SCRS, mais les allégations qu'elle a alors faites se sont évanouies. La tendance est claire: le Parti réformiste va disparaître aux prochaines élections.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, si c'est comme cela que le ministre conçoit la responsabilité ministérielle, ce n'est pas étonnant que son ministère soit dans un tel pétrin et qu'il n'arrive pas à y mettre de l'ordre.

Le ministre occupait déjà le portefeuille de la Défense nationale lorsque la hiérarchie militaire s'est livrée à une entreprise de justification de toute l'affaire somalienne. Il était ministre de la Défense nationale lorsque des documents d'une importance capitale ont été falsifiés. Il était ministre de la Défense nationale lorsque ses collaborateurs ont délibérément essayé d'empêcher que des questions soient posées à la commission d'enquête sur la Somalie.

Que le ministre le veuille ou non, c'est lui le responsable au bout du compte. Je le répète, le ministre reconnaît-il sa responsabilité dans tout méfait qui a été commis, selon la conclusion de la commission d'enquête sur la Somalie, pendant qu'il occupait le portefeuille de la défense nationale?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, il est parfaitement évident que le chef du Parti réformiste n'a pas lu le mandat de la commission d'enquête sur la Somalie, lequel est d'examiner les allégations de camouflage, d'enquêter sur la destruction de documents et de déterminer s'il y a eu méfait. La commission constitue une tribune neutre où trois observateurs indépendants font leur travail; elle ne mène pas une enquête partisane à la Chambre des communes.

* * *

[Français]

LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

En 1993, le caporal québécois David Gunther est décédé en Bosnie. Encore une fois, le ministère de la Défense avait trouvé le moyen d'offrir deux versions contradictoires pour expliquer à la famille la cause du décès de ce militaire.

En effet, son ministère, dans un premier communiqué publié le 18 juin 1993, avait attribué la mort du caporal Gunther à des éclats de mortier ayant explosé près de son véhicule, alors qu'un deuxième communiqué de la même date indiquait plutôt que son décès était dû à un missile antichar qui aurait heurté son véhicule de plein fouet.

Comment le ministre explique-t-il encore cette fois cette pratique courante des deux versions de son ministère?

(1435)

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je ne peux discuter publiquement de cas particuliers, car cela contreviendrait à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Cependant, si le député m'avise d'une question qui devrait en réalité être inscrite au Feuilleton, je lui répondrai dans les délais opportuns.

[Français]

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, je n'apprécie pas du tout la réponse du ministre, mais tant qu'à faire des recherches, le ministre peut-il nous dire pourquoi, dans ce dossier, encore une fois, des documents importants ont mystérieusement disparus des classeurs de l'armée, comme dans le dossier de la Somalie?

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, comme je viens de le dire, je prends note de la question et je fournirai une réponse au député.


1588

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

Le 24 octobre 1995, à 8 h 40, Nancy Fournier, une préposée à la Direction des affaires publiques du MDN a été interrogée par la police militaire, relativement à son refus de détruire des documents concernant les événements survenus en Somalie. Permettez-moi de lire ceci: «Elle se souvient de s'être fait dire à maintes occasions de détruire des dossiers et, en particulier, d'un officier supérieur qui lui a dit que si elle s'était débarrassée des documents comme il le lui avait demandé, rien de ce qui se produit actuellement ne serait arrivé.»

Selon l'avocate de la commission, lundi, des témoins ont dit ceci: «. . .le ministre et le ministère ne voyaient pas l'utilité d'examiner la question plus en profondeur». Pourquoi pas?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, ce que font le député et le Parti réformiste est tout à fait condamnable et méprisant. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Collenette: Monsieur le Président, c'est méprisant pour les trois personnes chargées de diriger l'enquête.

Le juge Létourneau a prévu deux ou trois semaines pour l'examen de cette question. Toutes les personnes visées, y compris le chef d'état-major de la défense, auront l'occasion de s'exprimer, d'expliquer leurs points de vue, et la population pourra ensuite se faire une opinion en conséquence.

Cependant, il est parfaitement et totalement inacceptable que le député lise officiellement certains extraits de documents qui ont peut-être rapport à cette enquête, cela, pour produire une certaine impression; je dirais même que c'est antiparlementaire, voire anticanadien.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, le ministre louvoie, comme les libéraux savent si bien le faire, et essaie de se dérober à ses responsabilités de ministre.

Les Canadiens et nos militaires en ont assez du travail décevant du ministre.

Je répète qu'il ne voyait pas l'utilité d'examiner la question plus en profondeur. Le ministre devait savoir que des officiers supérieurs du MDN défiaient les ordres qu'il avait lui-même donnés un an plus tôt pour que des documents soient remis à la commission d'enquête sur les événements survenus en Somalie.

Comment le ministre peut-il continuer d'exercer ses fonctions en sachant que des officiers du MDN ont défié ses ordres?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le député devient tellement incohérent qu'il bafouille. D'une manière générale, j'estime avoir répondu à cette question dans ma première réponse.

Le député parle toutefois du moral des forces armées. Permettez-moi de dire au député et à ses collègues, et je suis certain que ses collègues ont aussi reçu des appels en ce sens, que les membres des forces armées et leur famille ont été outrés par la façon dont l'opposition a traité ce dossier.

C'est l'opposition qui dénigre ou qui essaie de dénigrer les forces armées et qui sape leur moral.

Cette question devrait être examinée calmement et rationnellement par une commission d'enquête qui a parfois l'appui des réformistes. À certains moments, ils l'appuient, mais à d'autres, ils ne savent plus trop s'il ne vaudrait pas mieux la démanteler. Ils n'ont aucune crédibilité dans ce dossier.

* * *

[Français]

LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE NATIONALE

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Défense, visiblement, s'outrage facilement lorsqu'on lui pose des questions sur ce qui se produit dans son ministère.

Tout à l'heure, à une question de mon collègue de Charlesbourg, il s'est montré offensé qu'on puisse le questionner sur des événements qui surviennent dans l'armée, remettant en cause la crédibilité des forces armées, mais surtout sa crédibilité et son leadership. Il vient de faire la même chose.

(1440)

Quand le ministre de la Défense prend à témoin les familles qui, selon lui, sont scandalisées de l'attitude de l'opposition, il devrait peut-être considérer les membres de la famille du caporal Daniel Gunther qui, eux, se sont fait répondre par le commissaire à l'accès à l'information du Canada qu'il y a des pièces manquantes dans le dossier du caporal et qu'il ne peut pas expliquer les raisons pour lesquelles ces pièces manquent toujours. Étrangement, c'est comme dans le dossier de la Somalie, et le ministre aurait intérêt à le considérer de façon très sérieuse.

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, si le député a des preuves qui se rapportent à l'enquête, il devrait les soumettre à la commission et ne pas les lire dans cette enceinte.

Il est assez évident, d'après les fanfaronnades que nous venons d'entendre, que le Bloc québécois s'est allié à l'inquisition dirigée par le député de Calgary-Ouest. Si le chapeau fait, qu'ils le portent.

[Français]

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, bientôt, ce sont tous les parlementaires de cette Chambre et tous les Canadiens qui s'indigneront de l'attitude du ministre, une attitude inacceptable.


1589

Je veux lui poser une question toute simple. Le commissaire à l'accès à l'information du Canada peut donner au ministre toutes les réponses qu'il veut avoir. Mais est-ce qu'il ne serait pas normal que le ministre de la Défense, qui est supposé être responsable de l'armée canadienne, sache ce qui se passe dans son ministère et savoir pourquoi il y a des gens qui ont pris l'habitude de détruire et de cacher des documents? Ça, il devrait le savoir, s'il était responsable.

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, c'est intéressant d'écouter les commentaires de l'honorable député quand il dit parler au nom de tous les Canadiens. C'est intéressant pour un séparatiste.

[Traduction]

Il est intéressant que le chef du Bloc québécois fasse front commun avec le Parti réformiste dans le but de miner la valeur de l'enquête et du processus judiciaire visant à faire la lumière sur cette très sérieuse question.

Les Canadiens veulent des réponses. Le gouvernement veut des réponses. Nous n'obtiendrons pas de réponses de cette façon-là, cependant. Seule une commission impartiale, qui fait bien son travail, nous permettra d'en obtenir.

* * *

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, hier, le ministre des Affaires étrangères a feint l'indignation lorsque le Parti réformiste a posé des questions au sujet de l'ambassadeur aux Nations Unies, Bob Fowler.

Je lui rappelle que M. Fowler nage dans la controverse depuis plus de deux ans. Je lui rappelle aussi que M. Fowler était sous-ministre du ministre de la Défense actuel et qu'il était sous-ministre durant l'affaire de la Somalie. On s'est empressé de lui faire quitter la ville le 23 décembre 1994. Il a des amis influents au sein du Parti libéral.

Le ministre ne reconnaît-il pas que les allégations soulevées par les médias, par l'ancien premier ministre Kim Campbell et par le colonel Geof Haswell sont assez graves pour qu'on cherche à éclaircir immédiatement cette situation controversée?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je tiens d'abord à dire que je n'ai pas feint l'indignation. J'étais bel et bien indigné par les remarques du député.

Bien que le travail de sous-ministre de la Défense soit très difficile, je ne crois pas que ce soit là une raison suffisante pour exiger le rappel d'un diplomate en poste à l'étranger.

Comme nous l'avons dit maintes et maintes fois, la réalité est que des allégations ont été faites. Je n'ai pas encore eu le plaisir de lire le livre de Mme Campbell. Je n'aurai peut-être jamais le plaisir de le lire. En fait, je suis presque certain que je n'aurai pas le plaisir de le lire. Il n'en reste pas moins que ce sont des allégations.

Comme le ministre de la Défense nationale l'a expliqué à plusieurs reprises, nous avons établi une commission d'enquête pour examiner ces allégations, pour voir à ce que tous les renseignements pertinents soient fournis et à ce que tous les témoins soient entendus et pour s'assurer que nous ne préjugerons pas des résultats de cette enquête.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, nous ne parlons pas ici d'un simple commis. Nous parlons du représentant du Canada aux Nations Unies. Cet homme a été sous-ministre de la Défense nationale pendant sept ans. C'est un ami des libéraux. Il ne suffit pas de dire que M. Fowler n'a pas été reconnu coupable.

Pour faire son travail et pour s'assurer que l'intégrité du Canada n'est pas minée aux Nations Unies. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Il est 14 h 45 et il y a encore beaucoup de députés qui voudraient poser des questions. Je vous demanderais de raccourcir les préambules et d'en arriver plus vite aux questions.

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, pourquoi le ministre ne défend-il pas les intérêts du Canada, comme il le devrait, au lieu de défendre une personne nommée par ses amis libéraux et pourquoi ne rappelle-t-il pas M. Fowler jusqu'à ce qu'il ait été exonéré des allégations qui pèsent contre lui?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, comme c'est souvent le cas, le Parti réformiste essaie d'introduire son genre de politique plutôt sournoise dans les débats de la Chambre.

M. Fowler est un fonctionnaire de longue date. Autant que je sache, il n'a jamais été affilié à un parti politique. Il a occupé un certain nombre de postes et s'est acquitté de ses fonctions avec grande distinction. Il continue de jouer ce rôle aux Nations Unies, où il a contribué à mettre sur pied une force de secours en Haïti qui a aidé les habitants de l'île. Il nous a représentés de façon efficace dans la réforme des Nations Unies. Il est chargé d'élaborer une nouvelle formule budgétaire pour l'ONU. Il fait bien son travail.

Le député ne devrait pas rejeter si vite le principe fondamental à la base de notre système de justice, soit qu'une personne est innocente jusqu'à preuve du contraire.

* * *

[Français]

M. TRAN TRIEU QUAN

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

L'incurie du gouvernement dans le dossier Tran Trieu Quan dure depuis trop longtemps. Avant-hier, dans une autre volte-face, le gouvernement a voulu donner l'image qu'il bougeait en demandant aux autorités du Vietnam d'exiger l'extradition de Paul Morgan. Pourtant, pas plus tard que la semaine dernière, il affirmait que cela incombait aux avocats de M. Quan.

Compte tenu que le gouvernement se traîne les pieds dans ce dossier et qu'il a attendu qu'un journaliste retrouve la trace de Paul


1590

Morgan, le ministre peut-il nous dire ce que faisaient le gouvernement et la GRC pendant tout ce temps?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, je voudrais dire que nous partageons les soucis du député concernant la situation grave de M. Quan. Mais c'est faux de dire que le gouvernement n'a pas de réponse dans cette situation. Nous avons pris plusieurs mesures.

Le premier ministre a présenté ce problème au premier ministre du Vietnam. L'ancien ministre des Affaires étrangères en a également parlé. J'ai moi-même parlé avec l'ambassadeur.

Cette semaine, le ministre des Finances qui était au Vietnam a présenté les inquiétudes du gouvernement du Canada au vice-premier ministre du Vietnam. Il a demandé la libération de M. Quan. En même temps, j'ai écrit à M. Christopher pour demander la coopération des autorités vietnamiennes pour partager l'information. À ce moment-là, nous avons parlé avec les avocats de M. Morgan pour rassembler les informations et les partager.

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, un collègue du ministre des Affaires étrangères déclarait ce midi encore que le gouvernement ne fait rien.

Maintenant que nous savons que l'ACDI vient d'accorder 7,5 millions au Vietnam, grâce aux bons offices du lobbyiste Marc Lalonde, n'est-ce pas là la preuve concrète que les relations commerciales passent bien avant les droits de la personne pour le gouvernement du Canada, même quand il s'agit des droits d'un citoyen canadien?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement canadien a pour politique de s'assurer que l'aide qu'il accorde aille bien au peuple vietnamien et serve à son développement.

(1450)

Je ne pense pas que le député et ses collègues bloquistes refuseraient d'accorder une aide au chapitre de la santé et de la sécurité à un pays qui sort d'une guerre et tente de se reconstruire.

Il est important de dissiper les mythes que le député et d'autres tentent de perpétuer, soit qu'aucune mesure n'a été prise au sujet de M. Quan. Diverses démarches ont été faites. Nous travaillons avec les autorités vietnamiennes et américaines pour obtenir les renseignements.

Nous avons fait tout ce que nous pouvions pour nous assurer que les droits de M. Quan soient respectés en prison. Nous sommes intervenus pas plus tard que cette semaine. Nous poursuivrons nos efforts pour faire en sorte que les droits des Canadiens soient respectés, où qu'ils se trouvent.

[Français]

LE LIBAN

M. Mark Assad (Gatineau-La Lièvre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires extérieures.

Compte tenu de la situation tragique et de la souffrance humaine causées au peuple libanais par une armée d'occupation, le ministre peut-il réitérer la position du Canada en fonction de la résolution 425 des Nations Unies à l'effet que l'intégrité territoriale et la souveraineté du Liban soient assurées?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je remercie l'honorable député de sa question.

La situation au Liban est assurément très grave. Nous appuyons l'intégrité territoriale du Liban, et nous demandons la mise en application de la résolution 425 du Conseil de sécurité dans le contexte des négociations de paix.

En même temps, nous avons demandé un cessez-le-feu dans cette région. Dans le contexte des problèmes de terrorisme et des conflits, je présenterai les positions du Canada à la réunion de Luxembourg lundi prochain, demandant une réduction du conflit ainsi que la protection des droits de la personne au Moyen-Orient.

* * *

[Traduction]

LES PÊCHES

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de Pêches et Océans tient en joue les pêcheurs commerciaux en Colombie-Britannique. Il leur a dit qu'ils doivent prendre une décision concernant le rachat des permis avant juin, mais que, pour sa part, il ne fixera pas les allocations avant l'automne, au plus tôt.

Comment les pêcheurs de Colombie-Britannique peuvent-ils prendre des décisions rationnelles quant à leur avenir dans les pêcheries s'ils ne savent pas quelles seront les règles du jeu? Le ministre va-t-il étendre l'offre de rachat à une date ultérieure à l'établissement des allocations, ainsi que les pêcheurs l'ont demandé?

L'hon. Fred J. Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question. Le programme dont il est question est un programme volontaire recommandé par l'industrie, qui connaît actuellement de grandes difficultés. Je ne pense pas que le député le conteste.

L'industrie a fait des propositions à la suite d'un rapport qui portait sur 70 parties intéressées et contenait 27 recommandations.

Dans une industrie qui traverse une période aussi difficile, où les pertes financières sont tellement grandes et risquent d'atteindre cette année 10 millions de dollars, il faut bien commencer quelque part. Nous avons commencé ici. Beaucoup de gens appuient ce programme. Pour répondre à la question du député, je dirai que malheureusement, non.


1591

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, voilà au moins une réponse nette.

Le gouvernement fédéral est en train de réaffecter les ressources en saumon en Colombie-Britannique au moyen d'ententes sur les revendications territoriales des autochtones, comme l'entente de principe avec les Nisga'a. Une majorité écrasante de Britanno-Colombiens désapprouve une industrie de la pêche commerciale distincte, fondée sur des questions de race. Ni la Constitution, ni la décision des tribunaux canadiens n'appuient une industrie de la pêche exclusivement autochtone.

Le ministre va-t-il enfin admettre qu'il est en train de réaffecter cette ressource alors qu'il demande à l'industrie de la pêche commerciale de réduire ses activités de 50 p. 100? Va-t-il renoncer à cette politique bizarre qui consiste à créer en Colombie-Britannique deux industries de pêche commerciale distinctes fondées sur la race?

L'hon. Fred J. Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je me dois de rafraîchir la mémoire du député et de lui rappeler les faits.

Lorsque l'entente avec les Nisga'a a été examinée avec l'ensemble des parties au règlement d'une question qui traînait depuis un siècle, il a été convenu que la pêche de subsistance serait maintenue dans l'entente de principe avec les Nisga'a et que la pêche commerciale rapporterait moins aux Nisga'a que si les prises augmentaient au cours des années suivantes. L'entente de principe ne porte pas expressément sur la pêche commerciale, mais prévoit qu'il y aura une entente sur les prises.

(1455)

Il n'est pas question d'industries de la pêche distinctes fondées sur des considérations de race. Je trouve déplacé de la part du député qu'il puisse seulement suggérer une chose pareille.

* * *

[Français]

LA GARDE CÔTIÈRE

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, les intervenants du Saint-Laurent et des Grands Lacs continuent de défiler devant le Comité permanent des pêches et des océans pour dénoncer la nouvelle tarification des services de la Garde côtière que veut leur imposer le ministre des Pêches. Or, depuis sa nomination à titre de ministre des Pêches, le ministre refuse toujours de rencontrer les intervenants touchés par sa nouvelle tarification.

Comment le ministre peut-il expliquer qu'il refuse systématiquement de rencontrer les intervenants du Saint-Laurent et des Grands Lacs, alors que des demandes formelles lui ont été adressées, notamment par le gouvernement du Québec et les cinq présidents des alumineries du Canada qui, à eux seuls, représentent un chiffre d'affaires de quatre milliards de dollars et plus de 45 000 emplois directs et indirects? Comment peut-il expliquer cela? Il refuse de les rencontrer.

[Traduction]

L'hon. Fred J. Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, cette affaire est à l'étude du comité, mais je vais répondre à la question.

Dans le processus d'examen de cette affaire, la garde côtière a tenu des consultations auprès de plus de 350 parties intéressées et ces consultations ont porté sur quatre systèmes diiférents: les ports eux-mêmes, les services nationaux, la circulation est-ouest, ainsi que la circulation est-ouest et la voie du Saint-Laurent. Il y a eu de nombreuses étapes, mais chacune a permis de perfectionner le processus.

Le processus en cours est le meilleur qu'on puisse avoir pour assurer un équilibre juste et équitable entre tous ceux qui paieront des frais pour les services à la navigation maritime offerts par le gouvernement du Canada.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas la réponse à la question, mais puisqu'il veut parler des quatre divisions qu'il veut faire, je vais lui donner une chance d'expliquer ce qui se passe chez lui. Pourquoi le ministre donne-t-il un traitement de faveur à sa province en donnant des rabais substantiels pour les aides à la navigation pour les navires qui accosteront à Terre-Neuve, et ce, sur le dos des autres régions, notamment celles du Saint-Laurent et des Grands Lacs qui absorbent déjà la moitié des coûts des aides à la navigation?

Comment explique-t-il cela? Il en fait trois, il en fait quatre, il subventionne sa province avec ça.

[Traduction]

L'hon. Fred J. Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, tout cela est de la foutaise, et le député le sait.

* * *

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, hier, la vice-première ministre a dit ceci: «La politique du gouvernement libéral vise à protéger le Régime de pensions du Canada pour les aînés et à assurer sa viabilité à long terme.»

Comment peut-elle affirmer qu'elle protégera le Régime de pensions du Canada et qu'elle préservera le revenu des personnes âgées avant d'avoir obtenu l'approbation des contribuables pour faire passer les cotisations du RPC de 5 à 15 p. 100 de leur revenu?

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il y a une chose qu'admettent presque tous ceux qui ont étudié le Régime de pensions du Canada, c'est qu'il doit être réorganisé pour assurer sa viabilité à long terme.


1592

Nous espérons que le député et son parti participeront au processus qui a été mis en place pour évaluer l'avenir du RPC. Les Canadiens ont le droit de savoir non seulement ce que le gouvernement envisage pour le Régime de pensions du Canada, mais aussi ce que le troisième parti voudrait faire pour protéger l'avenir des revenus des personnes âgées.

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, nous voulions savoir ce que le gouvernement libéral avait l'intention de faire pour protéger les personnes âgées et leurs revenus, alors que le Régime de pensions du Canada continue d'être sous-financé et qu'il a besoin d'appui.

Lorsque la vice-première ministre a pris la parole hier pour dire qu'elle protégerait les personnes âgées tant et aussi longtemps que les cotisations du Régime de pensions du Canada seraient augmentées considérablement, comment peut-elle garantir que les revenus de ces personnes seront protégés?

(1500)

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je pense que tous les membres du gouvernement comprennent la nécessité de protéger le Régime de pensions du Canada. Tous les députés de la majorité comprennent les dangers d'un régime qui est soumis aux aléas de l'évolution démographique de la société canadienne.

Le processus qui a été lancé, et dont le député est au courant, j'en suis sûr, donnera l'occasion aux Canadiens qui s'intéressent à cette question d'exprimer leur opinion.

Même si le député tient à connaître l'opinion du gouvernement à ce sujet, ce que ce processus nous permettra d'exprimer, nous attendons tous avec impatience d'avoir non seulement l'avis du député sur l'avenir du Régime de pensions du Canada, mais aussi l'avis de son parti sur la façon de financer le régime.

* * *

STRATEGIS

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Notre gouvernement est déterminé à encourager un partenariat nouveau avec les PME dans le but de créer encore plus d'emplois. En quoi le récent lancement de Strategis et d'autres initiatives donnant aux entreprises accès à l'autoroute électronique ont-ils créé un nouveau climat d'affaires au Canada?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, Strategis est un outil de l'âge de l'information conçu pour aider surtout les PME à développer de nouvelles technologies, à se lancer sur le marché international, à créer des emplois et des débouchés pour les Canadiens.

Le député et les députés des deux côtés de la Chambre vont encourager les PME de leur région à se brancher sur Strategis, le site Web d'information sur les entreprises le plus important d'Internet. Elles y trouveront tous les renseignements possibles et imaginables, dont une liste de 33 000 technologies pouvant donner lieu à une licence, le profil de 50 000 compagnies avec lesquelles elles pourront faire affaire, former des partenariats et des entreprises conjointes, et auprès desquelles elles pourront s'approvisionner, ainsi que l'indication de débouchés à l'étranger.

Les députés réformistes sont toujours préoccupés par le temps. Voilà qui fera gagner beaucoup de temps aux PME.

* * *

LE RECENSEMENT DE 1996

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Il y a quelques semaines, on a porté à mon attention le fait que le ministre de l'Industrie a communiqué avec le député d'une circonscription avoisinante dans ma région pour lui demander de présenter une liste de noms d'éventuels recenseurs pour le prochain recensement. Lorsque j'ai interrogé le ministre à cet égard, il a répondu: «Faites parvenir votre liste de noms à Halifax et non à mon cabinet».

Il existe deux listes: a et b. On m'a affirmé que ma liste ne pourrait servir que lorsque la liste a du cabinet du ministre serait entièrement épuisée.

Comment le ministre de l'Industrie peut-il justifier un tel système de favoritisme politique alors que son gouvernement et lui-même ont fait campagne en promettant des emplois, des emplois, des emplois pour tous les Canadiens?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de n'avoir pas quitté la Chambre à trois heures.

Je rappelle à la députée que c'est le gouvernement de M. Mulroney qui, en 1984, a fait campagne en promettant des emplois et il n'en a créé que deux lors des dernières élections. Si la députée avait été présente à la Chambre au cours des semaines précédant le congé pascal, elle m'aurait entendu affirmer que, si elle voulait soumettre des noms à Statistique Canada en vue du recensement, nous veillerions à ce que ces noms soient bien transmis.

Si elle a quelque difficulté à cet égard, elle devrait communiquer avec moi. Je serai heureux de faire enquête car je lui ai promis que les choses se passeraient ainsi.

1593

[Français]

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le président suppléant (M. Kilger): Depuis quelque temps, la Chambre rend hommage à des gens qui ont beaucoup apporté à la vie canadienne. Nous voulons ainsi saluer l'excellence et célébrer la réussite au Canada.

[Traduction]

Aujourd'hui nous avons l'honneur d'accueillir quelques-uns des athlètes les plus distingués du pays. Ces femmes nous ont représentés lors de compétitions nationales et internationales. Elles ont fracassé des records et ont valu des médailles olympiques au Canada. Ce sont des symboles d'excellence et des sources d'inspiration pour les Canadiens.

(1505)

Elles sont assises à la tribune et pendant que je vous les présente je vous prierais de bien vouloir attendre qu'elles se soient regroupées avant de les applaudir: ce sont les skieuses de fond Shirley et Sharon Firth; la gymnaste Lori Fung; la patineuse de patinage artistique Karen Magnussen; les curleuses Marcia Gudereit, Jan Betker et Sandra Peterson; la patineuse de vitesse Sylvia Burka; la skieuse Lucille Wheeler-Vaughan; la nageuse Joanne Mucz-Hainey; la judoka Tina Takahashi; la skieuse Anne Heggtveit-Hamilton; la tireuse Linda Thom; la skieuse de fond et kayakiste Sue Holloway; la skieuse Betsy Clifford-Higgins; l'athlète Diane Jones-Konihowski; la nageuse de nage synchronisée Michelle Cameron-Coulter; et la nageuse de longue distance Vicki Keith-Munro.

Veuillez vous joindre à moi pour souhaiter la bienvenue à ces femmes remarquables qui ont apporté des contributions exceptionnelles à la pratique du sport au Canada et ont fait connaître notre pays par leurs exploits.

Des voix: Bravo!

Le président suppléant (M. Kilger): Au nom du Président, je suis très heureux d'inviter tous les députés à se rendre à la pièce 216-N, le salon du Président, où aura lieu une réception en l'honneur de nos invitées.

______________________________________________


1593

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 48 pétitions.

COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 13e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre concernant les membres du Comité permanent des pêches et des océans et du Comité permanent de la santé et les membres associés de divers comités.

Si la Chambre y consent, j'ai l'intention de proposer l'adoption de ce 13e rapport plus tard aujourd'hui.

* * *

LOI SUR LES OCÉANS

L'hon. Fred J. Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-26, Loi concernant les océans du Canada.

(1510)

Le président suppléant (M. Kilger): Le ministre pourrait-il nous préciser si, en fait, le projet de loi est sous la même forme qu'au moment de la prorogation?

M. Mifflin: Monsieur le Président, je tiens à préciser que ce projet de loi est, en fait, sous la même forme que le projet de loi C-98 présenté durant la première session de la 35e législature, au moment de la prorogation. Je demande donc qu'il soit rétabli comme le prévoyait l'ordre spécial que la Chambre a adopté le 4 mars 1996.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

Le président suppléant (M. Kilger): La présidence est persuadée que ce projet de loi est sous la même forme que le projet de loi C-98 au moment de la prorogation de la première session de la 35e législature.

Par conséquent, conformément à l'ordre adopté le lundi 4 mars 1996, le projet de loi est réputé avoir été lu une deuxième fois, avoir été étudié par le Comité permanent des pêches et des océans et avoir fait l'objet d'un rapport avec des propositions d'amendement.

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, sous réserve du consentement de la Chambre, je propose: Que le treizième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté plus tôt aujourd'hui, soit adopté.

(La motion est adoptée.)

1594

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter à la Chambre deux pétitions.

La première vient d'Edmonton, en Alberta. Les pétitionnaires font remarquer à la Chambre que gérer une foyer et prendre soin d'enfants d'âge préscolaire est une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement de prendre des mesures pour éliminer la discrimination fiscale contre les familles qui décident de prendre soin à la maison d'enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, malades chroniques ou âgées.

LES BOISSONS ALCOOLIQUES

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, ma deuxième pétition vient de Sarnia, en Ontario.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcooliques peut provoquer des problèmes de santé, affaiblir les facultés. En particulier, on peut certainement éviter le syndrome d'alcoolisme foetal et les malformations congénitales reliées à l,alcool en s'abstenant de consommer de l'alcool pendant la grossesse.

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de légiférer pour rendre obligatoire l'apposition sur les contenants de boissons alcooliques d'étiquettes mettant en garde les futures mères et d'autres personnes contre les risques associés à la consommation d'alcool.

LA MAIN-D'OEUVRE ENFANTINE

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement et au nom de deux électrices dévouées, Virginia Uhran et Diane Acri, j'ai le plaisir de présenter et d'appuyer une pétition dénonçant la main-d'oeuvre enfantine au Pakistan.

Les pétitionnaires prient le Parlement d'imposer des sanctions contre le Pakistan afin d'interdire l'importation au Canada de tapis et de divers produits fabriqués par des enfants.

TAIWAN

M. Jesse Flis (Parkdale-High Park, Lib.): Monsieur le Président, j'ai également l'honneur et le devoir de présenter à la Chambre, conformément à l'article 36 du Règlement, une pétition signée par des électeurs de toute la région métropolitaine de Toronto.

Étant donné que Taïwan a considérablement amélioré son dossier au chapitre des droits de la personne et qu'il a tenu des élections libres dans le cadre d'un système multipartiste et ses premières élections présidentielles par scrutin direct le 23 mars 1996, les pétitionnaires prient le gouvernement d'exhorter le gouvernement de la Chine, en lui facilitant les choses au besoin, à entamer un dialogue véritable avec le gouvernement de Taiwan aux échelons les plus élevés, par exemple celui de leurs ministres respectifs des affaires étrangères, dans le but d'atténuer les tensions et de régler le problème de l'avenir de Taiwan.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

______________________________________________


1594

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1515)

[Traduction]

LA LOI SUR LES BANQUES

L'hon. Anne McLellan (au nom du ministre des Finances, Lib.) propose: Que le projet de loi C-15, Loi modifiant la législation sur les institutions financières et édictant une loi nouvelle, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Barry Campbell (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de parler du projet de loi C-15 à l'étape de sa troisième et dernière lecture à la Chambre. C'est le genre de projet de loi courant qui peut manquer d'éclat, mais qui demeure vitalement important pour le Canada car il permettra d'améliorer la sécurité et la santé du système financier de niveau mondial de notre pays.

Je rappelle d'abord à mes honorables collègues que le projet de loi est le fruit de vastes consultations. Je voudrais profiter de l'occasion pour exprimer la gratitude du gouvernement envers les nombreux participants et autres intervenants du secteur qui ont prodigué des conseils constructifs et judicieux.

[Français]

Je voudrais aussi exprimer ma reconnaissance au Comité permanent des finances pour avoir décidé de tenir des audiences anticipées sur ce projet de loi pendant la relâche parlementaire de l'été. Les observations reçues par le comité ont constitué un travail préparatoire d'une valeur inestimable pour l'examen efficace article par article de cet important projet de loi. Nous aurons également l'assurance que le projet de loi que nous approuverons servira au mieux les intérêts des consommateurs, des institutions financières, de leurs commettants et de toute l'économie canadienne.

[Traduction]

Il ne fait aucun doute que des institutions financières sûres et solides sont indispensables au bien-être de notre pays. Comme je l'ai dit au départ, le Canada a la chance d'avoir un système de qualité mondiale. Mais notre secteur financier fait partie intégrante d'un monde où le changement, dynamique et radical, ne cesse de s'accélérer sous l'impulsion de la nouvelle technologie, de la mon-


1595

dialisation et des nouvelles exigences des consommateurs. Tous ces facteurs se conjuguent pour aviver la concurrence. C'est pourquoi nous proposons les mesures contenues dans le projet de loi C-15.

Ce projet de loi arrive au bon moment. Ce n'est pas que notre système souffre de faiblesses critiques, car ce n'est pas le cas. Mais pour pouvoir conserver un secteur financier et un régime de réglementation dynamiques et concurrentiels, nous devons réagir aux tendances du marché et aux expériences sans tarder inutilement. Voilà la raison d'être du projet de loi C-15.

Ce projet de loi, permettez-moi de le préciser, n'est pas un ramassis d'expédients. Ce train de mesures découle d'une série de principes fondamentaux exposés dans le livre blanc que notre gouvernement a publié il y a plus d'un an. Voici ces principes: être propriétaire d'une institution financière est un privilège et non un droit. Deuxièmement, dès que des institutions éprouvent des difficultés, il faut intervenir promptement et résoudre les problèmes. Troisièmement, les institutions financières doivent avoir des incitations suffisantes qui les poussent à résoudre rapidement leurs problèmes. Quatrièmement, il faut retrouver dans le système la transparence et la responsabilité nécessaires.

Nous avons discuté assez longuement des détails du projet de loi au comité et à la Chambre. Je voudrais aujourd'hui nous rappeler simplement, à nous tous, certaines des modifications les plus importantes que la Chambre est appelée à approuver.

Premièrement, le projet de loi établit un système amélioré d'intervention rapide auprès des institutions en difficulté. La mesure législative permettra au Bureau du surintendant des institutions financières de prendre contrôle d'une institution éprouvant des difficultés plus rapidement qu'auparavant. Elle rendra aussi le processus de surveillance plus transparent en établissant des lignes directrices en ce qui concerne les interventions de surveillance. L'objectif visé ici est clair, net et positif.

Une intervention rapide est sans doute le meilleur moyen d'éviter des pertes importantes aux déposants, aux assurés ou aux créanciers et peut-être même aux actionnaires.

Le projet de loi énonce clairement le principe que, si une institution est en difficulté, les propriétaires n'ont pas le droit de la garder en activité jusqu'à ce qu'ils soient acculés au mur et ne puissent plus honorer leurs obligations à échéance. Les institutions devront comprendre que le BSIF interviendra si ses craintes ne sont pas rapidement apaisées. Cela représente une nette amélioration.

Il ne s'agit pas d'une mesure punitive. En étendant les pouvoirs d'intervention rapide du BSIF, le projet de loi incite les dirigeants et les administrateurs des institutions en difficulté à chercher à résoudre rapidement leurs problèmes par eux-mêmes.

Le deuxième aspect du projet de loi C-15 que je tiens à souligner est l'élargissement du rôle du surintendant dans l'administration des institutions financières en difficulté. Dans le cas qui nous intéresse, le surintendant aura le droit de désigner certains des administrateurs à titre d'affiliés et le droit de s'opposer à la nomination d'administrateurs et de dirigeants d'une institution en difficulté.

(1520)

Ces pouvoirs supplémentaires témoignent de notre reconnaissance de l'importance d'une direction indépendante efficace. Ils soulignent aussi que ce sont les conseils d'administration qui sont en toute première ligne pour le règlement des problèmes et la bonne gestion.

Avant de conclure, je voudrais parler des critiques de l'opposition officielle liées aux questions de compétence.

En dépit des avantages certains et évidents de ce projet de loi, l'opposition officielle a choisi jusqu'à maintenant de ne pas l'appuyer. Sa principale critique, c'est que, selon elle, les pouvoirs que le projet de loi confère à la Banque du Canada pour réduire les risques systémiques dans les systèmes de compensation et de règlement des paiements empiètent sur les pouvoirs des provinces dans la réglementation des valeurs mobilières. Ce n'est pas le cas.

Si l'opposition ne souscrit pas à l'objectif de ce projet de loi, c'est d'abord parce qu'elle ne comprend pas la nature du risque systémique en tant que tel. On peut définir ce risque comme la possibilité que l'incapacité d'une institution de se charger d'une transaction d'une valeur élevée ne provoque une réaction en chaîne chez les autres parties.

Dans le projet de loi, le gouvernement confère à la Banque du Canada un rôle de surveillance officiel et accroît ses pouvoirs l'autorisant à exiger un contrôle approprié du risque dans les paiements ainsi que les systèmes de compensation et de règlement des paiements.

Le projet de loi prévoit que le gouverneur de la Banque du Canada disposera des pouvoirs nécessaires pour maîtriser le risque systémique. Il pourra le faire en émettant des lignes directrices pour les chambres de compensation ou, le cas échéant, des participants dans de telles chambres afin de les enjoindre de cesser une activité causant un risque systémique mal maîtrisé.

Je tiens à faire remarquer que, non seulement au Canada, mais aussi dans les autres pays développés, ce sont généralement les banques centrales qui s'occupent des questions liées au risque systémique. Si jamais la faillite d'une grande institution financière au Canada ou à l'étranger menace la stabilité du système financier, ce seront les banques centrales des pays industrialisés, y compris la Banque du Canada, qui seront appelées à la rescousse.

Je voudrais également souligner qu'au sein du comité le gouvernement a proposé des modifications pour clarifier davantage que les pouvoirs de la Banque du Canada relativement au risque systémique n'empiétaient pas sur les domaines de préoccupation traditionnels des autorités de réglementation provinciales au sujet de la santé des maisons de courtage.

Le projet de loi confirme que le gouverneur ne peut pas émettre de directives sur des questions directement liées à l'administration de maisons de courtage ou de participants au système de compensation et de règlement. Cela inclut la régie interne, les relations avec les clients, la suffisance du capital et la gestion des placements.


1596

Nous comprenons très bien que ces aspects des activités sont du domaine de responsabilité des organismes provinciaux de réglementation comme les commissions des valeurs mobilières. Nous avons précisé que ces aspects ne concernaient pas la banque centrale. Pour ces raisons, je ne peux pas admettre que l'on prétende que le projet de loi empiète sur un domaine de responsabilité provincial. Ce n'est pas le cas.

En terminant, je tiens à dire que les Canadiens s'attendent maintenant à ce que le Canada ait un système financier solide et stable. C'est là un atout économique des plus durables. C'est pourquoi nous devons prendre les moyens pour mettre en place et maintenir les mécanismes qu'il faut pour gérer et minimiser le risque. C'est exactement ce que fait le projet de loi C-15, qui contient des mesures positives tournées vers l'avenir.

C'est donc sans aucune hésitation que j'exhorte mes collègues à adopter le projet de loi. J'espère que tous les députés de la Chambre s'uniront aux députés ministériels.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir, à l'étape de la troisième lecture, sur le projet de loi C-15, un projet de loi qui touche plusieurs lois concernant les institutions financières et le secteur bancaire.

C'est un projet de loi qui touche la Loi sur les banques, la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt, la Loi sur les compagnies d'assurances, la Loi sur les associations coopératives de crédit, la Loi sur les liquidations et les restructurations, la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, celle sur la Société d'assurance-dépôts du Canada, celle sur l'Association canadienne des paiements et enfin la Loi sur les sociétés d'investissement canadiennes.

C'est un vaste projet de loi. C'est une introduction à ce que le gouvernement libéral prépare comme modifications importantes à la Loi sur les banques pour le 31 mars 1997.

(1525)

C'est aussi et surtout un projet qui nous donne un aperçu, qui nous donnait un aperçu, dès juin, comme le mentionnait mon collègue du Comité des finances, lorsqu'au mois d'août nous avons commencé à analyser de façon précise l'ensemble des dispositions du projet de loi, nous donnait des indices sur les intentions du gouvernement. Depuis, elles se sont révélées, dans le discours du Trône et dans le Discours sur le budget, car le gouvernement les a rendues publiques, il y a quelques semaines.

Par ce projet de loi, le gouvernement, premièrement, s'immisce de façon draconienne, de façon cavalière, dans un domaine de juridiction exclusive du gouvernement du Québec et du gouvernement de l'Ontario, de même qu'à l'ensemble des gouvernements provinciaux, et j'ai appelé le domaine des valeurs mobilières.

Seulement par une disposition où on élargit les mécanismes de règlement au domaine des valeurs mobilières et qu'on met en place un système canadien de compensation, chapeauté par la Banque du Canada, le gouvernement vient de trahir ces dispositions, les dispositions de la Constitution de 1982. Non seulement a-t-il rapatrié la Constitution à l'encontre de la volonté généralisée du Québec, mais en plus, le gouvernement ne respecte même pas les dispositions de cette Constitution.

La compétence du Québec en matière de valeurs mobilières se fonde sur le paragraphe 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1982 conférant aux provinces la compétence en matière de propriété et de droit civil. Qu'est-ce qui complète ces dispositions? C'est la jurisprudence de la Cour suprême du Canada qui a rattaché à cette compétence initiale le marché des valeurs mobilières par le truchement des provinces.

Alors, lorsqu'on regarde ce qui est présenté et les intentions clairement définies, il y a quelques semaines, dans le discours du Trône et dans le Discours sur le budget quant à une ingérence totale et entière du gouvernement fédéral dans le domaine des valeurs mobilières, on ne peut que confirmer notre opposition à cette disposition du projet de loi.

Ce n'est pas que les objectifs du projet de loi soient mauvais. Le projet de loi, entre autres, a pour but de réduire ce qu'on appelle les risques systémiques du système financier canadien pour éviter ce qu'on appelle l'effet domino dans le secteur financier qui, par exemple, ferait en sorte qu'une institution serait incapable d'honorer ses engagements face à une autre institution. Il y a un effet domino qui se fait sur l'ensemble du secteur financier. Tout le monde, souverainistes comme fédéralistes, Québécois comme Ontariens, les gens des Maritimes ou de l'ouest du Canada, tout le monde s'accorde là-dessus: il faut en arriver à un système qui soit efficace et qui en vienne à réduire les possibilités de crise financière, les possibilités de risque systémique dans le secteur financier.

Mais nous devons totalement rejeter les moyens pris par le gouvernement. Lorsque le gouvernement, sous prétexte de réduction de ce risque systémique, engendre de nouveaux chevauchements coûteux pour l'ensemble des contribuables, de nouveaux chevauchements que les Québécois comme les Canadiens devront payer parce qu'il s'immisce dans un secteur qui est déjà fort bien desservi par des institutions provinciales, il y a un problème.

On tasse complètement la Commission des valeurs mobilières du Québec et la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario et on arrive, avec ce projet de loi, à faire entrer graduellement le gouvernement fédéral dans ce secteur par l'entremise des dispositions qui permettent au gouverneur de la Banque du Canada d'intervenir de façon sérieuse dans le domaine. Et, en dehors du projet de loi, dans le discours du Trône, on parle de la création d'une commission canadienne des valeurs mobilières. Mais cela ne marche pas.

Comment peut-on avoir à la fois des institutions provinciales et fédérales qui se chevauchent de cette façon? Comment peut-on en arriver à donner un signal clair au milieu financier?

(1530)

Quelle directive devra être suivie par les institutions financières québécoises et canadiennes? Celle émanant d'une entité fédérale, celle émanant du projet de loi C-15 ou bien celle qui proviendrait des organismes et des institutions déjà présents dans le secteur des valeurs mobilières, tels la Commission des valeurs mobilières,


1597

l'inspecteur général des institutions financières du Québec, le gouvernement du Québec ou même la Bourse de Montréal?

Comment voulez-vous en arriver à créer une stabilité dans le secteur alors que vous engendrez, par cette ingérence même permise par le projet de loi C-15, des signaux qui pourraient être contradictoires, mais des signaux qu'on émettrait auprès des mêmes institutions? Ça ne marche pas.

Comment accepter que le gouvernement fédéral dise au gouvernement du Québec et au gouvernement ontarien: «Vos institutions, dans lesquelles vous oeuvrez-et vous arrivez à contrôler le secteur des valeurs mobilières depuis plusieurs années-, on les met de côté et c'est nous qui, dorénavant, allons contrôler ce secteur.» Le gouvernement fédéral n'a aucune expertise dans le secteur des valeurs mobilières puisque, selon la Constitution même de 1982, c'est un secteur qui relève des provinces.

Le deuxième aspect du projet de loi C-15 avec lequel nous ne pouvons être d'accord est celui concernant les modifications aux prérogatives du surintendant aux institutions financières et à la Loi sur les liquidations. Le projet de loi C-15 octroie davantage de pouvoirs au surintendant canadien aux institutions financières et ce dernier pourra dorénavant intervenir directement auprès d'institutions à charte provinciale.

En élargissant ainsi les prérogatives du surintendant fédéral aux institutions financières, il résultera encore une fois des dédoublements coûteux et des inefficacités dans le système. D'une part, selon les discours du ministre et du secrétaire responsable, le projet de loi ne vise qu'à introduire de l'efficacité et réduire les chevauchements mais, d'autre part, on crée des chevauchements et des inefficacités avec une telle disposition. Pourquoi? Parce qu'à ce chapitre, encore une fois, l'inspecteur général des institutions financières du Québec et celui de l'Ontario font exactement le travail, ont exactement les mêmes responsabilités qu'on veut donner au surintendant canadien aux institutions financières.

Pourquoi ce double emploi? Pourquoi créer de nouvelles structures, alors qu'au contraire, on devrait éliminer les structures qui sont en double? Lorsqu'on demande au gouvernement d'étudier, d'analyser les dédoublements et les chevauchements, on ne lui demande pas d'en créer, on lui demande d'en éliminer. Là, ce qu'il fait, c'est qu'il en crée. Il en crée avec tout ce que ça peut comporter comme coûts additionnels aux contribuables et tout ce que ça peut aussi comporter comme problèmes de signaux sur le marché des valeurs mobilières.

Je crois que le projet de loi C-15, par cette disposition comme par la première aussi, crée nécessairement de l'instabilité, de l'incertitude sur les marchés financiers. Et je ne crois pas, contrairement à ce que disent les représentants du gouvernement, que ce soit généralisé à la grandeur du Canada, à savoir que les intervenants dans le secteur des valeurs mobilières veulent que le gouvernement fédéral s'ingère dans ce secteur, qu'il crée une commission de contrôle des valeurs mobilières ou que le surintendant général des institutions financières canadiennes tasse complètement les représentants provinciaux dans ce secteur de juridiction exclusif au profit des instances fédérales.

Ce n'est pas le message que j'ai eu des milieux financiers. Ce n'est pas le message que j'ai eu en particulier des représentants québécois et, en partie, des représentants canadiens de ces institutions.

Depuis une quinzaine d'années, je dirais, les représentants provinciaux, les acteurs déjà présents qui oeuvrent dans le secteur des valeurs mobilières ont développé une expertise, une compétence et, surtout, ont mis en place un processus d'harmonisation entre eux pour en arriver, justement, à réduire les possibilités de risque systémique, pour en arriver à une meilleure efficacité aussi dans le secteur des valeurs mobilières et pour en arriver bientôt, avec le nouveau système SEDAR, à ce que les prospectus d'émission soient faits, non pas en huit ou en dix exemplaires, mais en un seul, pour permettre une bonne allocation des fonds disponibles sur ce marché, des sources de financement sur le marché des valeurs mobilières.

(1535)

Alors, pourquoi, à ce moment-ci, le gouvernement fédéral nous arrive-t-il avec tel projet de loi? Sous prétexte de réduire les risques systémiques qui sont déjà réduits par l'entremise des mesures qui ont été prises depuis 10 ou 15 ans dans ce secteur, pourquoi le gouvernement fédéral arrive-t-il avec ses gros sabots en disant: «Dorénavant, c'est moi qui m'occuperai du secteur des valeurs mobilières et c'est moi qui m'assurerai de l'efficacité dans l'allocation des ressources.» C'est inadmissible.

On croit à une Constitution, comme les libéraux nous l'affirment, ou on n'y croit pas. On croit à la stabilité dans le secteur financier ou on n'y croit pas. On croit à une meilleure allocation des risques, et en particulier du risque systémique, ou on s'en fout éperdument. Et c'est ce qui semble ressortir des agissements de l'actuel gouvernement.

Lorsqu'on en est rendu à créer plus de tension sur les marchés, plus d'incertitude et d'instabilité que de les réduire, c'est parce que soit on n'y comprend rien, donc c'est l'incompétence qui est en jeu, soit, sous prétexte d'avoir plus de pouvoir, encore plus de visibilité pour le drapeau, plus de visibilité pour le gouvernement fédéral, on préfère sacrifier l'efficacité pour cette visibilité. Et là, ça ne marche plus. Si on veut affronter les années 1990 et 2000 dans le secteur des valeurs mobilières, dans le secteur financier en particulier, ce n'est pas de cela dont on a besoin.

Le troisième aspect sur lequel on ne peut donner notre accord au projet de loi C-15 présenté par le gouvernement concerne la modification à la Loi sur la société d'assurance-dépôts du Canada. Le projet de loi C-15 entend modifier le système d'assurance-dépôts actuellement en vigueur. Les institutions financières paient des primes pour participer au régime en fonction du volume des dépôts, c'est la situation actuelle, et le projet de loi C-15 prévoit que ces primes seront désormais payées, non pas en fonction du volume des dépôts, mais du risque que représente une institution financière.

Depuis que nous avons pris connaissance, en juin dernier, des dispositions de l'ancien projet C-100 qui est devenu le projet de loi C-15 à l'heure actuelle, nous questionnons le secrétaire d'État responsable, nous questionnons le ministre des Finances qui est l'ultime responsable, sur l'impact, l'incidence de cette nouvelle disposition. Et jusqu'à présent, presque neuf mois après l'accouche-


1598

ment du premier projet de loi, nous n'avons toujours pas eu de réponses à ces questions.

On ignore, par exemple, quels seront les critères retenus pour évaluer le risque d'une institution financière. Les règlements à venir fixent ces conditions et le gouvernement fédéral refuse de rendre publics ces règlements. On peut se poser la question à savoir si ces critères respecteront la spécificité des institutions financières québécoises. On n'a toujours pas de réponse, alors qu'on a questionné amplement, souvent, le secrétaire d'État responsable de même que le ministre des Finances. On n'a pas de réponse non plus à une question du genre «quel sera l'impact dans les milieux financiers d'une cote fédérale de risque, tel que proposé dans les dispositions du projet de loi C-15, et comment cette cote de risque sera-t-elle interprétée par les marchés financiers?»

D'un côté, on parle d'ingérence, d'efficacité, de gaspillage, de duplications, de chevauchements coûteux pour l'ensemble des contribuables canadiens et de l'autre côté, lorsqu'on a un manque de clarté dans une disposition et qu'on pose des questions, nous n'obtenons pas de réponse. À quel type de gouvernement a-t-on affaire?

En résumé, ce projet de loi est une nouvelle illustration, en premier lieu, de la dynamique centralisatrice inhérente au statu quo constitutionnel. Le projet de loi C-15, notamment par la mise en place de systèmes pancanadiens de compensation et de règlement des paiements, empiète sur des compétences déjà exercées par la Commission québécoise des valeurs mobilières et par l'inspecteur général des institutions financières du Québec. Ceci entraîne des chevauchements coûteux pour les contribuables de même que des inefficacités administratives, puisque les institutions financières québécoises, comme celles de l'Ontario et des autres provinces canadiennes, seront soumises à des doubles contrôles.

De plus, le projet de loi C-15 constitue une ingérence inacceptable dans le secteur des valeurs mobilières. Les divers gouvernements québécois ont toujours défendu vigoureusement les prérogatives du Québec en matière de valeurs mobilières.

(1540)

D'ailleurs, permettez-moi de citer à cet égard une lettre datée du 16 février 1994 et adressée à l'honorable président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique du temps. Cette lettre est adressée à ce ministre par l'ancien premier ministre du Québec, M. Daniel Johnson, concernant les valeurs mobilières, parce que déjà, à ce moment-là, le gouvernement fédéral avait indiqué qu'il s'intéressait fortement au secteur des valeurs mobilières.

La lettre se lit comme suit: «Monsieur le ministre, comme je vous l'indiquais dans ma lettre du 15 février concernant l'ensemble du processus d'amélioration de l'efficacité de la fédération canadienne, la présente porte plus spécifiquement sur votre proposition relative à la réglementation des valeurs mobilières.»

Je continue la citation de la lettre de M. Daniel Johnson: «Permettez-moi d'abord de vous rappeler que le gouvernement du Québec n'a jamais favorisé-n'a jamais favorisé-un rôle fédéral accru dans le secteur des valeurs mobilières, domaine qui relève de la compétence exclusive des provinces. Au contraire, il a régulièrement manifesté son opposition aux initiatives fédérales en cette matière.»

Ce n'est pas le premier ministre du Québec actuel qui parle, ce n'est pas M. Bouchard, ce n'est pas M. Parizeau, c'est M. Daniel Johnson, un fédéraliste qui s'adresse à un autre fédéraliste.

Je poursuis: «Comme plusieurs autres provinces, lors de la récente réforme de la législation fédérale relative aux institutions financières, dans le rapport quinquennal qu'elle a déposé à l'Assemblée nationale en décembre dernier, la ministre déléguée aux Finances a d'ailleurs réitéré les préoccupations du Québec en ce qui a trait au projet de réglementation fédérale en valeurs mobilières qui découlerait de cette législation. Elle soulignait-et il s'agit d'une actuelle ministre fédérale-qu'une réglementation fédérale serait inopportune tant sur le plan constitutionnel que sous l'angle de la recherche d'efficacité. Une telle réglementation conduirait en effet à une duplication des règles de surveillance et inévitablement à des charges administratives et financières plus lourdes pour les émetteurs, les investisseurs et les intermédiaires.» Fin de la lettre adressée par M. Daniel Johnson à l'actuel président du Conseil privé de la Reine pour le Canada.

Quand vous en êtes à citer des lettres de fédéralistes, il me semble que l'analyse présentée par un fédéraliste à un autre fédéraliste devrait être comprise. Il me semble que le prétexte de dire: «On sait bien, vous êtes souverainiste. Vous visez la souveraineté du Québec. Vous refusez toute ingérence. Vous combattez toute ingérence.» Oui, c'est notre job, et je pense que les Québécois et Québécoises sont fiers de cela. Sauf que lorsqu'on arrive avec des arguments implacables, des arguments qui sont les mêmes que les grands fédéralistes, comme M. Daniel Johnson, il me semble qu'à quelque part, le gouvernement libéral devrait comprendre qu'au Québec, il y a certains consensus. D'ailleurs, je pense qu'il commence à comprendre à l'heure actuelle au niveau du foyer et de la communauté linguistique, n'est-ce pas? Eh bien, il me semble que dans le domaine des valeurs mobilières, il devrait comprendre aussi que ce doit être un grand consensus que de vouloir garder jalousement nos prérogatives au Québec en matière de valeurs mobilières.

Il me semble que ce devrait également être simple, lorsqu'on écoute le président de la Bourse de Montréal nous dire que lui non plus n'est pas d'accord avec une ingérence du gouvernement fédéral dans le domaine des valeurs mobilières. Et quand on posait des questions au ministre des Finances après le discours du Trône et, a fortiori, après le Discours sur le budget où il mentionnait justement les intentions, avouées maintenant, du gouvernement fédéral de s'ingérer dans le domaine des valeurs mobilières, le ministre des Finances nous répondait: «Il y a unanimité dans les milieux d'affaires au Québec. Il y a unanimité chez les acteurs majeurs au Québec. Le gouvernement fédéral doit s'ingérer dans les valeurs mobilières.» À la lumière de ce que plusieurs intervenants nous disent, en particulier le président de la Bourse de Montréal, on est obligé de croire que le ministre des Finances nous dit n'importe quoi à cet égard.

Permettez-moi de citer M. Lacoste, le président de la Bourse de Montréal, lors de sa comparution à Montréal, le 20 février dernier, devant le comité sénatorial sur les banques et le commerce.


1599

M. Lacoste, concernant une meilleure harmonisation entre les provinces dans le secteur des valeurs mobilières et une meilleure efficacité, disait, et je cite, en anglais:

[Traduction]

«Une meilleure coordination est nécessaire, mais elle doit néanmoins permettre les disparités régionales. Je prends toujours comme exemple le fait que si nous avions eu une commission nationale ou unique au Canada dans les années 80, il n'y aurait pas eu de programme québécois concernant les valeurs mobilières. Il n'y aurait pas eu de fonds financés par les travailleurs au Québec. Ces choses existent maintenant, et il est nécessaire de les préserver. Je reconnais toutefois qu'il doit y avoir une meilleure coordination.»

(1545)

[Français]

Clairement, le président de la Bourse de Montréal, M. Lacoste, vient dire poliment mais fermement, avec des arguments aussi majeurs, il vient dire au gouvernement fédéral de rester chez eux. Il vient dire au gouvernement fédéral de se mêler de ses affaires et de ne pas faire d'ingérence, justement, dans le secteur des valeurs mobilières.

Quand le président de la Bourse de Montréal dit cela et qu'il dit aussi que s'il n'y avait pas eu cette compétence exclusive donnée au gouvernement du Québec par la Constitution de 1982 dans le domaine des valeurs mobilières, que les fonds de travailleurs, comme celui de la FTQ, le Fonds de solidarité des travailleurs et des travailleuses de la FTQ n'aurait pas existé parce qu'on aurait eu une politique coast to coast, on aurait eu une concentration de plus en plus grande des grands lobbies et des grandes décisions, en particulier dans la région de Toronto, je pense que cela contredit, et royalement, les propos tenus jusqu'à présent par le ministre des Finances.

Non, il n'y a pas de consensus au Québec à l'effet que le fédéral doive s'ingérer dans ce domaine. Oui, il y a consensus au Québec pour que le gouvernement fédéral reste chez eux, se mêle de ses affaires et ne crée pas d'inefficacité, de chevauchements et de duplications coûteux pour l'ensemble des contribuables québécois et canadiens.

À partir de cette analyse, et à partir surtout du constat que le gouvernement n'a pas répondu, mais aucunement, à nos attentes au niveau des amendements que nous lui demandions d'adopter, pour éviter les trois aspects négatifs du projet de loi, je serai obligé de demander à mes collègues de l'opposition officielle de voter contre ce projet de loi. Nous allons voter contre avec vigueur, avec ferveur aussi, en faisant beaucoup de pédagogie par la suite, puisque le gouvernement fédéral a décidé fermement, depuis juin de l'année dernière, en poursuivant par le discours du Trône et les dispositions du budget, de s'ingérer de façon cavalière, de façon cynique, dans le domaine des valeurs mobilières.

Je suis persuadé que les principaux intervenants québécois, de même que l'opposition officielle, vont s'opposer vigoureusement, dans les prochaines semaines, à la poursuite de cette ingérence par le gouvernement fédéral.

[Traduction]

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, le projet de loi C-15, Loi modifiant la législation sur les institutions financières et édictant une loi nouvelle, est une reprise du projet de loi C-100 qui avait été présenté avant la prorogation. Le gouvernement a représenté son projet de loi essentiellement sous la même forme. C'est pourquoi nous en sommes maintenant à la troisième lecture.

L'objet du projet de loi est d'apporter de nombreuses modifications et beaucoup de précisions à la législation sur les institutions financières. Le projet de loi a vu le jour à la suite d'un examen de la sécurité des institutions financières.

Cette mesure est une réaction aux échecs d'un certain nombre d'institutions financières. C'est la réaction du gouvernement à des préoccupations du public concernant ces institutions. C'est aussi une mesure préalable à l'examen de la Loi sur les banques qui est prévu pour 1997. Cet exament promet d'être beaucoup moins approfondi.

Je vais passer en revue certains faits saillants du projet de loi et certaines des objections formulées, puis traiter plus en profondeur de certains faits. Cette mesure est très complexe. Elle porte sur de nombreuses questions différentes. Je ne traiterai pas de toutes ces questions, mais je vais essayer de dégager certains des points dont les Canadiens devraient être au courant, à mon avis. Je vais aussi essayer d'éclairer les parties intéressées dans ce débat.

(1550)

Le projet de loi interdit la coassurance-dépôts, et nous ne savons pas pourquoi. Depuis l'adoption, en 1967, de l'assurance-dépôts protégeant à 100 p. 100 les épargnes déposées à la banque, jusqu'à une somme maximale actuellement fixée à 60 000 $, 30 institutions financières ont fait faillite, dont 20 dans les 10 dernières années. En mars 1994, cela avait coûté quelque 5 milliards de dollars à la Société d'assurance-dépôts du Canada.

Il est intéressant de constater que, avant 1967, il n'y avait pas de faillites de banques. Au fil des ans, les gouvernements se sont montrés réticents à adopter des réformes fondées sur les lois du marché telle la coassurance, préférant imposer plus de règlements et de surveillance. Si on faisait confiance au marché et qu'on avait recours à la coassurance et à des critères fondés sur le marché comme mécanismes de détection précoce, on remédierait aux problèmes du système financier de façon moins coûteuse et pourtant plus efficace qu'en proposant d'autres modifications de nature réglementaire.

Essayer, par des voies réglementaires, de parvenir à des résultats que seules les forces du marché peuvent produire sera toujours plus coûteux pour toutes les parties concernées et ne permettra que rarement, voire jamais, d'obtenir des résultats d'une qualité égale.

Le système actuel ne fait qu'encourager les déposants à rechercher les taux les plus avantageux, quel que soit le profil des risques de l'institution en question puisqu'ils savent que, si elle fait faillite, ils seront entièrement indemnisés par la SADC. Cela facilite l'arrivée sur le marché, l'expansion et enfin la faillite d'institutions à haut risque gérées de façon imprudente. Par ailleurs, cela nuit aux


1600

acteurs sains et forts du secteur financier qui réduisent les risques en adhérant à une politique prudente en matière de prêts et d'emprunts.

J'ai toujours beaucoup de mal à obtenir un prêt. Les institutions financières me font la vie dure.

Le projet de loi prépare la voie à un régime de cotisations établies en fonction des risques. Toutefois, le niveau de cotisation des différentes institutions ne sera pas rendu public. Cela donne l'impression qu'on cherche à protéger les institutions les plus faibles. Comme on l'a mentionné plus tôt, cela fait régner un climat trop empreint de secret sur la réglementation des institutions financières. La divulgation de plus amples renseignements serait une mesure positive.

Le Parti réformiste n'appuie pas ce projet de loi parce que le gouvernement aurait pu faire bien davantage pour que les institutions financières soient tenues d'être plus responsables, pour que le système soit ouvert et pour qu'il fonctionne. Les Canadiens seraient alors au courant de ce qui se passe et auraient davantage confiance dans le système.

Le projet de loi propose, pour la SADC, des primes graduées en fonction du risque. Comme je l'ai mentionné, l'aspect négatif, c'est que la SADC n'a pas l'intention de sensibiliser la population canadienne au risque que peut poser chacune des institutions financières. Le voile du secret n'est toujours pas levé et les contribuables devront payer la note lorsque de grandes institutions s'effondreront, comme l'ont fait la Barrings Bank, en entraînant des pertes de un milliard de dollars, et la Principal Savings and Trust Company de l'Alberta.

Voilà pourquoi il est important que le gouvernement envisage la coassurance comme solution partielle, ce qu'il a malheureusement rejeté cette option. Supposons qu'un maximum de 90 p. 100 des dépôts soient assurés, au lieu de 100 p. 100, les investisseurs auraient un intérêt de 10 p. 100 dans leurs investissements, un intérêt de 10 p. 100 dans ce qui se passe, et ils seraient plus conscients de leur vulnérabilité.

Les bienfaits de cette vulnérabilité, c'est que les gens s'occuperaient davantage de leur argent et feraient plus de recherches sur les institutions financières. La concurrence et les connaissances qui en découleraient favoriseraient de bonnes relations commerciales entre ces institutions. Pour avoir un monopole, le plus gros n'est pas toujours le mieux placé.

En outre, comme je l'ai déjà souligné, les réclamations récentes ont été très onéreuses. Lorsque les institutions sont mises sous séquestre, les pertes coûtent cher aux contribuables puisque ce sont eux qui donnent la garantie, par le truchement du gouvernement et de la SADC qui sont financés par eux, en bout de ligne, et les grandes banques adorent cela.

Je voudrais poursuivre dans cet ordre d'idées et expliquer certains faits concernant la coassurance pour qu'on l'examine plus amplement éventuellement. La coassurance présente des avantages considérables.

D'abord, la couverture de 100 p. 100 incite à investir les fonds dans des institutions à haut risque. Grâce à l'assurance à 100 p. 100, les institutions à risque peuvent attirer des dépôts en offrant des taux légèrement plus élevés.

(1555)

Les déposants sont prêts à utiliser ces institutions parce qu'ils savent que la protection de 60 000 $ venant de la SADC sera là si les choses tournent mal. Cela a permis à des institutions à risque et non compétitives d'entrer sur le marché, de croître et, finalement, de faire faillite, avec les conséquences que cela comporte pour le marché.

Ce sont les consommateurs qui paient pour la société d'assurance-dépôts. Les déposants des institutions les plus stables sont ceux qui en souffrent le plus. Ils ne bénéficient pas des taux d'intérêt plus élevés, mais pourtant ils doivent payer les dommages qui résultent de la faillite des institutions à risque.

Par conséquent, comme on le dit dans l'étude qui vient d'être publiée par le Centre pour la promotion de l'intérêt public, l'ironie c'est que c'est le groupe qui devrait bénéficier des avantages de la coassurance, le groupe des consommateurs moyens, qui subventionne les activités à risque pour les investisseurs les plus avertis, ceux qui connaissent les avantages des inefficacités qui font partie du système du fait de l'assurance à 100 p. 100 des dépôts.

Il y a un consensus pratiquement universel à l'appui de la coassurance. Nous avons eu des réunions du comité permanent, nous avons entendu des témoins et tous sont d'accord, en dépit de leurs intérêts divers, par exemple les banques, l'industrie de l'assurance, les surintendants passés et présents, le président de la SADC, l'Institut canadien des actuaires, les universitaires et plus récemment le CPIP qui a étudié cette question du point de vue du consommateur et finalement le comité des banques du Sénat, pour dire que la solution est la coassurance. Pourtant, ces changements ne figurent pas dans l'actuel projet de loi.

Les consommateurs savent déterminer le risque. Actuellement, ils n'utilisent pas toute l'information publique parce qu'ils n'ont aucune raison de le faire. Pourquoi s'inquiéter? Pourquoi se casser la tête? Pourquoi se documenter? Tout ce que vous avez à faire c'est placer votre argent et il est garanti de toute façon. Prenez la meilleure publicité, le meilleur rendement, et c'est tout.

Le très fort pourcentage de dépôts assurés dans les établissements qui ont fait faillite montre bien que les consommateurs ont un jugement exact. Par exemple, une récente institution qui a fait faillite, l'Income Trust, avait 99 p. 100 de dépôts assurés alors que dans l'industrie en général la proportion n'est que de 50 p. 100.

Les pays comme le Royaume-Uni et l'Irlande ont une certaine forme de coassurance et les gens ne réclament pas une protection à 100 p. 100.

Le secrétaire d'État disait le 15 août 1996, lorsque le projet de loi était encore connu sous le nom de projet de loi C-100, que les mesures qui étaient dans ce projet de loi découlaient d'une série de principes fondamentaux figurant dans le livre blanc publié en février. Il ajoute que les consultations ultérieures l'ont convaincu plus que jamais que ces principes et les changements radicaux de philosophie associés à certains d'entre eux faisaient de cette mesure législative le tournant de l'approche du gouvernement envers la réglementation.

Le secrétaire d'État énumère ensuite les quatre principes fondamentaux exposés dans ce projet de loi: la propriété d'une institution


1601

financière est un privilège et non un droit; lorsque des institutions sont aux prises avec des difficultés, il est préférable d'intervenir et de régler la situation rapidement; les institutions financières doivent être suffisamment incitées à régler leurs problèmes rapidement; le système doit être transparent et être doté des mécanismes voulus en matière de comptes à rendre.

Ces principes sous-jacents sont superbes. Qui dans les finances pourrait trouver à leur redire? J'approuve ces principes, mais ce projet de loi ne va pas assez loin en ce qui concerne les comptes à rendre et la transparence. Le processus continue de se dérouler dans le plus grand secret et, en ne retenant pas la coassurance, il empêche le consommateur de former lui-même des jugements rationnels.

Un examen plus approfondi s'impose. J'estime que les institutions financières de toutes sortes, ce qu'on appelle les quatre piliers, doivent faire l'objet d'un examen sérieux, non pas séparément mais collectivement. Nous devons procéder à une évaluation globale. Il est temps de mettre un frein à tout cela et de bien examiner le secteur financier.

(1600)

Mon collègue, le député d'Okanagan-Centre, qui est le porte-parole du Parti réformiste en matière d'industrie, a rédigé un document assez bref. Je voudrais vous en faire part pour lui attribuer le mérite qui lui revient, car je crois que si nous voulons vraiment respecter les quatre principes que le secrétaire d'État a présentés, en ce qui concerne l'évaluation des institutions financières, je crois alors que les recommandations de mon collègue méritent d'être étudiées.

Voici ce qu'on lit dans le document:

Le ministre des Finances, Paul Martin, a surpris beaucoup de gens dans son discours du budget de 1996 en garantissant aux Canadiens qu'on ne permettrait pas aux banques de vendre de l'assurance dans leurs succursales cette année. Ce ballon si adroitement lancé n'a ni apaisé nos craintes ni réglé la question.
La véritable question n'est pas de savoir si les banques devraient pouvoir vendre de l'assurance ou se lancer dans la location d'automobiles. Il s'agit plutôt de savoir s'il existe une véritable concurrence au sein du secteur financier et ainsi, si le consommateur et l'économie profiteront de l'entrée des banques sur d'autres marchés.
Les banques nous ont assurés que leur propre industrie est compétitive et qu'il ne s'agit pas d'un oligopole, contrairement à ce que les Canadiens peuvent penser. C'est difficile à croire lorsque les six plus grandes banques au Canada s'empressent toutes d'augmenter ou de réduire les taux d'intérêt chaque fois qu'il y a le moindre mouvement dans le taux d'escompte. La seule concurrence dans ce cas-ci, c'est qu'on se demande qui bougera le premier.
Pourtant, aucune de ces banques ne s'empresse de réduire les taux d'intérêt sur les cartes de crédit personnelles comme Visa, MasterCard, etc., que tout le monde possède. Aucune n'en fait rien. On pourrait penser qu'une d'elles réduirait ses taux pour accroître sa part du marché.

Les quatre piliers de notre secteur financier, soit, les banques, les compagnies d'assurance, les sociétés de fiducie et les firmes de courtage en valeurs mobilières, s'effondrent alors que la déréglementation et le progrès technologique effacent peu à peu les distinctions qui existaient. Les banques exercent des pressions depuis toujours pour vendre de l'assurance dans leurs succursales, pour se lancer dans la location d'automobiles et accroître leurs intérêts sur le marché des valeurs mobilières. Une déréglementation accrue et l'accroissement de la taille des banques qui s'ensuivrait, pourraient, cependant, réduire la concurrence dans le secteur financier et nuire aux consommateurs. Ce sont les questions qui se posent sans cesse au Parlement du Canada, surtout lorsqu'un examen de la Loi sur les banques est prévu. On procède à un examen important tous les dix ans, et on effectue dans l'intervalle des examens mineurs tous les cinq ans.
Un examen mineur est prévu en 1997, mais c'est un examen majeur qui s'impose. Il nous manque bien des données. Quelle est l'interaction entre nos institutions financières? Comment ces dernières fonctionnent-elles par rapport aux autres secteurs économiques? Quelles sont les forces et les faiblesses de la structure réglementaire actuelle? Non seulement les réponses à ces questions révéleront si la concurrence existe vraiment dans le secteur des banques et, par conséquent, si ces dernières devraient avoir le droit de fournir d'autres services financiers, mais elles nous diront aussi quelle est la véritable force de notre secteur financier au moment d'entrer dans le XXIe siècle. Tant qu'un examen de ce genre ne sera pas terminé, il faudrait imposer un moratoire sur toute décision concernant les institutions financières.
De plus, c'est le Parlement qui devrait se charger de cet examen, soit par l'intermédiaire d'un comité mixte ou des comités des finances et de l'industrie. Ce serait la seule façon de garantir que tous les intérêts sont pris en compte et que le processus est accessible et transparent. Les Canadiens doivent être en mesure de suivre ce processus pour y croire.
Comme des lobbyistes de toutes allégeances insistent auprès des parlementaires pour qu'ils prennent position et que d'autres encore tentent d'imposer les contraintes politiques déclarées d'une guerre entre grandes et petites entreprises, la difficulté sera de ne pas perdre de vue notre objectif. Autrement dit, nous devrons garantir qu'une véritable concurrence existe et s'exerce librement sur le marché, que la stabilité règne dans chaque secteur financier et qu'une solide structure réglementaire est en place pour protéger les consommateurs. Si l'essentiel est atteint, les Canadiens et l'économie en sortiront vainqueurs.
En terminant, je voudrais dire un mot sur les institutions financières, plus précisément, sur les banques.

Un grand nombre de Canadiens, surtout ceux qui appuient une politique de gauche, redoutent que les banques profitent d'eux. Je tiens à signaler que j'ai des choses positives à dire au sujet des grandes banques ainsi que certaines critiques. Puisque nous traitons des institutions financières, je voudrais profiter de l'occasion pour aborder deux questions.

(1605)

Bien des gens reprochent aux banques de ne pas payer leur juste part ou se scandalisent des bénéfices énormes qu'elles réalisent. Je sais que certaines banques réalisent peut-être des bénéfices de un milliard de dollars, mais elles paient aussi un milliard de dollars en impôt. Les bénéfices n'ont rien de honteux. Ils sont synonymes d'emplois. Les pertes, elles, sont synonymes de disparition d'emplois, de subventions, de contributions gouvernementales, de subventions financées par les contribuables, bref, de récompense de l'échec.

Récompensons et encourageons plutôt les bénéfices et cessons de critiquer les entreprises qui en réalisent. Cela ne regarde en rien les politiciens. Cela regarde les entreprises. Nous devrions les encourager à croître, à prospérer et à assurer le développement de l'économie. Nous devrions les féliciter lorsqu'elles le font, leur ficher la paix et ne pas les accabler financièrement de manière qu'elles puissent créer des emplois.

Combien de pages comporte ce projet de loi? Il faut bien que quelqu'un lise tous ces règlements et les interprète. Cela entraîne des coûts. Cela occasionne des dépenses pour l'entreprise. Ce n'est pas un encouragement qu'on lui donne pour qu'elle améliore ses affaires, qu'elle embauche plus de personnes et qu'elle crée des emplois. Il faut moins de règlements. Il en faut de bons, certes, mais


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il en faut moins. Le gouvernement doit cesser de se mêler des affaires des entreprises.

Il existe un grand nombre d'institutions financières. Je cherche un document qui fait état du nombre d'institutions et de leurs actifs. J'ai été surpris de tout ce qu'elles contrôlent. Comme je ne semble pas pouvoir trouver ce document pour l'instant, je ne pourrai en citer des passages.

Une critique que je voudrais adresser aux banques, c'est qu'elles n'hésitent pas à tripoter certains taux préférentiels, sans tenir compte des taux d'intérêt sur les prêts à la consommation ou les cartes de crédit. J'ai parfois l'impression qu'elles encouragent l'endettement en adressant des lettres à des étudiants universitaires pour leur accorder une limite de crédit instantanée de 1 000 $. C'est ce qui est arrivé à ma fille quand elle a obtenu son diplôme, il y a quelques années. Elle a tout de suite reçu une carte de crédit. Et vous devinez la suite: 30 jours plus tard, elle s'était endettée de 1 000 $. Ce n'est pas une pratique qu'il faut encourager. En tant que parent, c'est une pratique que je désapprouve. Mais cela se fait. Ce n'est pas illégal, mais j'estime que cette pratique incite des gens à se créer des difficultés financières.

Le problème, c'est que, en rafistolant la réglementation et en essayant d'établir des règles équitables pour les quatre piliers du secteur financier, le gouvernement ne cesse de modifier la définition de banque. Dans la Loi sur les banques, une banque est définie comme un établissement qui fournit des services bancaires. Mais nous changeons constamment ce que font les banques. Par conséquent, les autres institutions financières ont de la difficulté à soutenir leur concurrence parce qu'elles sont défavorisées.

L'examen approfondi prévu pour 1997 devrait donner des résultats positifs. Je crois sincèrement que nous voyons une fois de plus le gouvernement libéral utiliser les bons mots en décrivant le budget. Le discours est bien beau, mais les actions le contredisent. Les paroles des libéraux sont plus belles que leurs actions.

Comme je l'ai mentionné, le secrétaire d'État mérite une mention honorable pour avoir exposé les quatre principes qui servent de fondement, selon lui, au projet de loi sur les institutions financières. Cependant, la coassurance a été complètement laissée de côté. Pourtant, elle permettrait d'éviter beaucoup d'échecs à ces institutions tout en responsabilisant les investisseurs. La coassurance a tant d'avantages. Toutes les institutions et beaucoup de groupes reconnaissent que cette question aurait pu être abordée. On aurait pu faire quelque chose. Je crois que nous avons proposé un amendement à ce sujet, ici à la Chambre des communes ou devant le comité, et qu'il a été défait. Je sais que nous en avons parlé dans mon parti.

(1610)

La coassurance soulagerait les contribuables d'un fardeau. Elle réduirait le risque dans le cas des institutions à haut risque. Nous avons besoin des placements à haut risque. Il faut que des gens prennent ces risques et nous devons les encourager. La personne la mieux placée pour prendre des risques est la personne qui a assez d'argent pour le faire, mais nous ne devons pas risquer l'argent de l'ensemble des contribuables.

Le président suppléant (M. Kilger): Cela met un terme à la première période de discours d'une durée de 40 minutes. Nous passons maintenant à l'étape suivante du débat qui prévoit des discours de 20 minutes, suivis de périodes de questions et d'observations de 10 minutes.

[Français]

M. Richard Bélisle (La Prairie, BQ): Monsieur le Président, le projet de loi C-15 modifiant la législation sur les institutions financières et édictant une loi nouvelle nous apparaît comme une nouvelle tentative fédérale de contrôler les provinces et surtout le Québec qui, depuis 30 ans, s'est donné plusieurs outils originaux de développement économique et financier.

Au plan économique et financier, ce contrôle fédéral s'accroît de jour en jour. Au plan constitutionnel, l'aile québécoise du Parti libéral du Canada proposait, en fin de semaine dernière, que le Québec soit désormais, et je cite, «foyer principal de la langue, de la culture et de la tradition juridique françaises en Amérique».

La notion de société distincte, qui était dans le décor politique depuis l'Accord du lac Meech, qui a fait l'objet d'une motion de cette Chambre en décembre dernier et que le gouvernement voulait, semble-t-il, enchâsser dans la Constitution, est soudainement reléguée aux calendes grecques à la suite des atermoiements de quelques premiers ministres provinciaux.

Après la Seconde Guerre mondiale, on a renvoyé les femmes au foyer. Certains groupes de droite renvoient encore régulièrement les femmes au foyer. Les optométristes nous diront souvent si un double foyer améliorera notre vue. Mais que vient faire cette notion évanescente de «foyer» dans le dossier constitutionnel et la reconnaissance d'un peuple?

Aujourd'hui, ne sachant plus quoi en faire, c'est la question du Québec que des libéraux fédéraux renvoient au foyer. Même le chef de l'opposition officielle à Québec nous dit qu'il n'y a aucun contenu juridique là-dedans, que c'est comme dire que Terre-Neuve est une île et qu'il y a des Rocheuses dans l'Ouest. Quelle faiblesse intellectuelle dans ce gouvernement.

Toute cette mascarade de foyer principal en Amérique révèle encore une fois le vrai visage des libéraux fédéraux et leur méconnaissance et leur incompréhension du Québec moderne. Moins de six mois après le référendum québécois, le premier ministre fédéral renie encore sa parole.

De quoi entend-on parler ces jours-ci dans cette Chambre? De foyer et non plus de société distincte, d'importation de fromage au lait cru, de l'indiscipline de nos soldats, des bavures commises en Somalie, également du commando de choc déclenché par le ministre de la Défense pour retrouver des papiers égarés. Notre armée d'opérette, qui nous coûte encore 11 milliards de dollars par année, se pare encore une fois de ridicule. Et si le ridicule tuait? Est-ce pour cela qu'on a encore une armée au Canada, pour se protéger du ridicule? Si c'est ça, on est bien mal servis.


1603

Après bientôt trois ans de pouvoir, le gouvernement libéral trahit sa parole envers le Québec. Il se ridiculise face au reste du Canada, tant en matière d'importation qu'au plan militaire. Le premier ministre a perdu le contrôle de la situation. Il n'y a plus aucun leadership dans ce gouvernement. Pire encore, on n'y décèle aucune vision quant à l'avenir de ce pays.

Aujourd'hui, ce gouvernement, qui se montre incapable de renouveler la Constitution canadienne, de gérer son armée de manière professionnelle et moderne, d'établir des politiques d'importation crédibles dans un cadre de mondialisation, nous propose le projet de loi C-15, projet de loi qui illustre son incapacité à gérer la fédération au double plan économique et financier.

(1615)

En effet, il s'agit ici davantage d'un amalgame de mesures éparses et sans lien organique apparent n'ayant pour but que de renforcer la surveillance et la réglementation des services financiers au Canada. Ici également, le contrôle, la mainmise fédérale s'accroît.

Le Bloc québécois ne s'oppose pas au principe même du projet de loi C-15, mais plutôt à certaines des mesures proposées, car elles empiètent dans des champs majeurs de juridiction provinciale.

La mesure la plus importante de ce projet de loi est l'élargissement du mécanisme de règlement des paiements de la Banque du Canada au domaine des valeurs mobilières.

Cette mesure dédouble en fait les mécanismes de compensation qui sont déjà encadrés par la Commission des valeurs mobilières du Québec et permet au gouvernement fédéral de s'immiscer dans la réglementation des valeurs mobilières, qui est un domaine strictement de compétence provinciale.

La Société d'assurance-dépôts du Canada pourrait fixer, selon ce projet de loi, ses primes de participation en fonction du risque que représente une institution financière, y compris les institutions à charte québécoise déjà réglementées par la Régie d'assurance-dépôts du Québec, où le critère utilisé est le volume des dépôts. Il y aura donc deux normes d'évaluation, et celle basée sur le risque pourrait désavantager les institutions québécoises.

Le surintendant aux institutions financières aura des pouvoirs accrus lui permettant de liquider des institutions à charte québécoise. Que de conflits à prévoir entre les différentes instances à cause justement de ce dédoublement de service.

Comme nous l'avions mentionné lors du débat en deuxième lecture sur le même projet de loi, ce projet de loi modifie les neuf lois suivantes: la Loi sur les banques, la Loi sur les compagnies de fiducie et de prêt, la Loi sur les compagnies d'assurances, la Loi sur les associations coopératives de crédit, la Loi sur les liquidations et les restructurations, la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières, la Loi sur l'assurance-dépôts du Canada, la Loi sur l'Association canadienne des paiements et enfin la Loi sur les sociétés d'investissement, qui est elle-même éliminée.

Ce projet de loi est donc une nouvelle illustration de la dynamique centralisatrice d'Ottawa. Le projet de loi C-15, notamment par la mise en place de systèmes pancanadiens de compensation et de règlement des paiements, empiète sur des compétences déjà exercées par la Commission québécoise des valeurs mobilières et par l'Inspecteur général des institutions financières du Québec. Cela entraîne des chevauchements coûteux et une administration coûteuse. Les institutions financières québécoises seront soumises à de doubles contrôles.

Le projet de loi C-15 constitue donc une ingérence inacceptable dans le secteur des valeurs mobilières des provinces. Les divers gouvernements québécois ont toujours défendu vigoureusement les prérogatives du Québec en matière de valeurs mobilières. Même Daniel Johnson, alors premier ministre du Québec, a écrit, le 16 février 1994, au gouvernement fédéral pour réaffirmer cette position du Québec.

Or, les prérogatives du gouverneur de la Banque du Canada d'émettre des directives ou des ordonnances à des institutions financières vont carrément à l'encontre de cette position traditionnelle du Québec.

Ce projet de loi ajoutera encore des chevauchements inacceptables. Au-delà des domaines de compétence, les institutions financières du Québec, de même que les épargnants, seront victimes du double emploi qu'Ottawa entend imposer. Il en résultera des coûts supplémentaires et un manque de cohérence dans les politiques gouvernementales.

Je vais maintenant passer en revue les articles du projet de loi C-15 qui, selon nous, créeront les problèmes les plus importants.

La Loi sur les banques sera largement affectée. L'article 12 du projet de loi C-15 obligera les banques à déclarer des renseignements supplémentaires. Les commissions de valeurs mobilières des diverses provinces demandent déjà ce type d'information aux banques et aux autres compagnies cotées en bourse. Il s'agit donc, en fait, d'une nouvelle forme de duplication.

(1620)

La Loi sur la Société d'assurance-dépôts du Canada est également amendée. L'article 21 du projet de loi met en place la notion d'affaires internes et de groupe des institutions membres. Ainsi, si une seule des institutions du groupe Desjardins est membre de la Société d'assurance-dépôts du Canada, il devient possible au fédéral de donner des directives à tout le groupe.

L'article 22 du projet de loi permettra au dirigeant de la Société d'assurance-dépôts du Canada de participer à l'instauration de normes et pratiques commerciales et financières saines chez les institutions membres. C'est une bonne chose en soi, mais, dans le


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cas d'institutions financières à charte provinciale membres de la Société d'assurance-dépôts du Canada, il s'agit en fait d'une duplication puisque Québec exerce déjà un contrôle réglementaire sur ces institutions.

L'article 27, lui, permettra au conseil de la Société d'assurance-dépôts du Canada d'instituer un système qui regroupera les institutions membres en fonction du risque que représente chacune des institutions. Ceci amène inexorablement le fédéral à mettre en place un système de surveillance et de monitoring des institutions financières membres. Dans le cas des institutions à charte provinciale, il s'agit de double emploi, puisque Québec exerce déjà un contrôle et des vérifications sur lesdites institutions. Par ailleurs, un tel système de classification désavantagera les petites institutions. Il faudra voir comment le Mouvement Desjardins sera analysé; caisse par caisse ou le Mouvement pris dans son ensemble?

L'article 34 du projet de loi vise à déterminer les paramètres de la vérification mentionnée à l'article 27. Pour les institutions à charte provinciale, il existe déjà une vérification du genre effectuée par les autorités provinciales. Pourquoi alors créer une telle duplication?

L'article 60 du projet de loi C-15 établit les modalités selon lesquelles le surintendant peut prendre le contrôle d'une institution en difficulté. Par ailleurs, le surintendant a l'obligation d'aviser le ministre provincial responsable d'une prise de contrôle de la centrale d'une association coopérative de crédit constituée par les lois d'une province. Les pouvoirs provinciaux sont donc totalement écartés et le contrôle réglementaire qu'exerce une province sur ses associations coopératives de crédit devient pratiquement inopérant, voire caduc.

La Loi sur les sociétés d'assurances est également touchée par ce projet de loi. Encore ici, le projet de loi vise à donner plus de pouvoir d'intervention au surintendant auprès des entreprises en difficulté. Les compagnies d'assurances à charte provinciale, dans les faits, n'échappent pas aux pouvoirs d'intervention accrus du surintendant.

Selon l'article 66 du même projet de loi, la définition des entreprises sur laquelle la loi s'applique est également modifiée pour y inclure les sociétés de secours et les sociétés provinciales. Il y a empiétement sur les pouvoirs du Québec qui réglemente déjà ce secteur pour les entreprises à charte québécoise. Nous nous opposons donc à ce que les dispositions du projet de loi s'appliquent aux sociétés à charte québécoise et nous nous opposons à tous les autres articles relatifs au contrôle du surintendant sur les compagnies d'assurances à charte provinciale.

L'article 93 permettra aussi au surintendant de rendre publics les renseignements recueillis en vertu de la nouvelle loi. Elle obligera les sociétés d'assurance à charte provinciale de rendre publiques les données sur le traitement de leurs dirigeants, leurs affaires commerciales et leurs affaires internes. Les commissions de valeurs mobilières et les organismes de surveillance provinciaux demandent déjà ce type d'information, ce qui amène d'autres dédoublements. Par ailleurs, le fédéral n'a aucun droit et aucune légitimité pour réglementer les entreprises à charte provinciale.

Également, l'article 95 permettra au surintendant d'avoir son mot à dire sur la composition du conseil d'administration des sociétés d'assurances à charte provinciale qui seraient en difficulté. Il y a déjà un système québécois, également à ce niveau, de surveillance de ces institutions financières. Quelle est donc l'utilité de cet article 95?

L'article 103 vise essentiellement à donner au surintendant la possibilité de fixer des normes et pratiques commerciales saines aux sociétés d'assurances à charte provinciale. Encore une fois, on assistera à un empiétement injustifié dans le champ de juridiction des provinces.

(1625)

La Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières est aussi amendée: l'article 105 apporte des précisions sur les nouveaux objectifs du surintendant où il est écrit, blanc sur noir, que le projet de loi vise à assujettir toutes les institutions financières de toutes les provinces au contrôle réglementaire d'un organisme fédéral. Ça ne peut être plus clair, le fédéral a décidé de mettre les provinces à sa main.

L'article 106, quant à lui, précise de façon plus détaillée les objectifs poursuivis par le surintendant fédéral. Aucune distinction n'y est faite entre les institutions à charte fédérale et les institutions à charte provinciale. Les seules institutions financières visées par cet article de loi ne devraient être que les institutions financières à charte fédérale.

Enfin, l'article 62 nous démontre qu'une loi totalement nouvelle, la Loi sur la compensation et le règlement des paiements, est ici créée pour permettre au fédéral de mettre la main sur ce champ de compétence provinciale. La Loi sur l'Association canadienne des paiements, quant à elle, est abrogée.

Ces amendements, modifications, créations littéralement de nouvelles lois, toute cette mécanique législative est mise en place pour, encore une fois, rétrécir l'espace législatif des provinces. Le gouvernement a été on ne peut plus clair dans le discours du Trône. Il a l'intention de mettre sur pied une commission des valeurs mobilières nationale, commission nationale qui frappera de plein fouet le champ de juridiction et les activités des commissions de valeurs mobilières des provinces canadiennes. Dans ce contexte, le projet de loi C-15 prépare le terrain à l'arrivée de cette commission nationale des valeurs mobilières que le gouvernement entend mettre sur pied.

Encore une fois, l'idée fixe du gouvernement est d'établir des normes nationales mur à mur. Le domaine des institutions financières n'échappe pas à cette règle implacable. Par le projet de loi C-15, le gouvernement étend ce principe des normes nationales aux institutions financières. Le boucle est donc bouclée, la mainmise fédérale s'étend aux institutions financières, tandis qu'au plan constitutionnel, on parodie les demandes historiques du Québec en les ramenant à un foyer de survivance culturelle en Amérique.


1605

[Traduction]

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-15 et des institutions financières.

Le sujet du débat pourra sembler aride à beaucoup de monde, mais je crois que ce projet de loi est important. Il est important d'en parler et il faut peut-être le faire en tenant compte de ce que les Canadiens attendent des institutions financières.

Les gens parlent beaucoup des institutions financières ces temps-ci. Depuis que les banques ont fait connaître leur profits, nous en entendons beaucoup parler lorsque nous faisons la tournée de nos circonscriptions.

Les Canadiens attendent deux choses de leurs institutions financières. La première est la stabilité. Ils veulent que leur argent soit en sécurité, qu'il s'agisse de banques, de sociétés de fiducie ou autres. Deuxièmement, les Canadiens veulent que les institutions financières soient responsables, qu'elles soient transparentes dans le processus de concurrence. Il y a à cela plusieurs raisons.

Les gens veulent notamment que les frais de services soient le plus bas possible, que leur argent leur assure le meilleur rendement possible et, enfin, que les taux d'intérêt qu'ils paient sur les prêts bancaires soient les moins élevés possible.

L'idée est de trouver le meilleur équilibre possible entre ces deux attentes, afin d'éviter de nous retrouver dans la même situation qu'aux États-Unis, où la débâcle de l'épargne et des prêts aurait pu faire perdre des milliards de dollars aux gens si le gouvernement n'était pas intervenu. Par ailleurs, il doit y avoir suffisamment de concurrence entre les diverses institutions financières pour qu'elles demeurent responsables.

(1630)

Je déplore cependant que le projet de C-15 n'offre tout simplement pas l'option de la coassurance. La coassurance est tout simplement un régime d'assurance qui remplacerait l'assurance actuellement offerte par la Société d'assurance-dépôts du Canada. Jusqu'à 90 p. 100 des dépôts seraient protégés par le gouvernement et le reste devrait être assuré par les banques ou autres institutions financières. Ce serait un très bon système, car les institutions financières seraient responsables.

Il est intéressant de noter que, avant 1967, avant la création de la SADC, pas une seule banque n'avait connu d'échec dans notre pays. Après 1967, après la création de la SADC, 30 institutions financières ont connu des échecs.

La SADC a donné aux gens une fausse impression de sécurité à l'égard de ces institutions, qui n'étaient par conséquent pas tenues responsables. Les gens ne savaient pas vraiment à quel genre de risque ils s'exposaient en plaçant leur argent dans ces institutions. Et donc, ce fut un fiasco. Le gouvernement tirait d'affaire les institutions financières en difficulté grâce à la SADC. Il a remboursé quelque 5 milliards de dollars. En fait, en ce moment même, la SADC doit encore au Trésor public quelque chose comme 1,7 milliard de dollars. La situation est très grave. Il y a eu un grand nombre d'échecs qui ont coûté beaucoup d'argent aux contribuables.

Ce qui importe ici, c'est que le projet de loi ne prévoit pas la coassurance que beaucoup de gens favorisent. Bien des groupes, dont les banques, se sont prononcés en faveur de la coassurance. Des compagnies d'assurance, les surintendants d'institutions financières, le président de la SADC, l'Institut canadien des actuaires et des universitaires se disent aussi en faveur de la coassurance, tout comme le Comité sénatorial des banques. Cette idée jouit d'un appui généralisé. C'est pourquoi, il est très décevant de voir qu'il n'en est pas question dans le projet de loi C-15.

Il est important, quand nous parlons d'une idée nouvelle, de pouvoir nous appuyer sur des exemples, au Canada ou ailleurs dans le monde, pour voir si elle est bonne ou non. Nous avons des exemples au Royaume-Uni et en Irlande où la coassurance fonctionne extrêmement bien. Nous devrions nous inspirer de ces exemples. Malheureusement, il n'est pas question de coassurance dans le projet de loi C-15.

Il y a un élément très positif dans le projet de loi C-15, c'est le fait que des primes seront imposées et déterminées en fonction du risque, aux fins de l'assurance-dépôts. L'élément négatif, c'est que le public n'est pas autorisé à savoir quelles institutions paieront des primes plus élevées en raison du degré de risque. Si le portefeuille de prêt de ces banques court de plus grands risques et que l'argent que les gens leur confient est plus menacé, c'est malheureux. Je ne comprends donc pas très bien les raisons qui font que le coût de ces primes ne sera pas rendu public. Ainsi, les gens ne pourront pas prendre les mesures qu'ils jugent utiles pour se protéger eux-mêmes, surtout s'ils ont placé plus de 60 000 $ dans une institution.

Ce que les Canadiens veulent vraiment, ce sont des institutions qui, d'une part, sont sûres et leur offrent la sécurité souhaitée et qui, d'autre part, sont en assez bonne position concurrentielle pour que tous les frais imposés et les taux d'intérêt sur les cartes de crédit soient aussi bas que possible. Les gens veulent que les prêts personnels soient offerts au plus bas taux d'intérêt possible. Il s'agit d'un dossier délicat en ce moment chez nous et il est important que le gouvernement le règle.

(1635)

Dernièrement, la question s'est posée de savoir si, oui ou non, il convient d'autoriser les banques à intervenir dans les domaines du crédit-bail et de l'assurance auto. Je suis d'avis qu'il vaut mieux attendre qu'une véritable concurrence se fasse jour dans le secteur bancaire. Une quelconque concurrence doit d'abord apparaître sous forme d'une déréglementation des banques et il y a lieu de permettre une quelconque concurrence étrangère pour forcer les banques et les autres institutions financières à se montrer responsables. C'est crucial à mon avis.


1606

Au moment de se pencher de nouveau sur ce dossier, le gouvernement ferait bien d'examiner sérieusement toute la question de la coassurance. Cela rendrait les institutions financières vraiment responsables et, du même coup, rétablirait la confiance du public dans ces établissements.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, les députés réformistes ont parlé les uns après les autres de la coassurance. La réalité, c'est que cette notion n'intéresse pas les déposants, mais simplement les institutions financières. En effet, dans le cadre du système de coassurance, les déposants devraient connaître la solvabilité des institutions dans lesquelles ils déposent leur argent.

Cela semble équitable et raisonnable. En réalité, la capacité de comprendre un bilan, etc., n'est pas à la portée de tous les gens. Je le sais, car mon épouse dirige une entreprise financière qui vend des CPG et utilise une société d'assurance-dépôts pour cette raison. L'investisseur ou le déposant moyen n'a tout simplement pas les compétences voulues pour ce faire. Si la coassurance devenait une réalité, ces gens déposeraient simplement leur argent dans de grosses institutions, ce qui mettrait fin à la concurrence dans le secteur financier.

La coassurance n'est pas une chose souhaitée par le Canadien moyen. Seules les grosses institutions financières en veulent. Je prétends que c'est pour elles que le député défend cette notion. Il ne défend pas les intérêts du Canadien moyen qui ne comprendrait pas la notion de coassurance, ce qui l'empêcherait probablement de faire des dépôts dans certains établissements.

Le député a ajouté que la coassurance existait dans un certain nombre de pays et en Europe. Cependant, il a oublié de dire qu'aux États-Unis, on assure 100 000 $ par dépôt et non 60 000 $. Je le précise, car les réformistes ne cessent d'affirmer que nous devrions être comme les États-Unis. Cependant, dans ce cas-ci, le député a décidé de ne pas utiliser cet exemple.

Je voudrais simplement demander au député s'il se rend compte que que la coassurance n'a pas l'appui du Canadien moyen.

M. Solberg: Monsieur le Président, le député sous-estime les consommateurs. Ils souscrivent couramment de l'assurance pour toutes sortes de raisons. Le député ne veut pas dire, du moins je l'espère, que les consommateurs sont trop bêtes pour comprendre la question de l'assurance de leur voiture, de leur maison, etc.

En réalité, les consommateurs font couramment des placements d'un haut degré de complexité, depuis les placements à la bourse jusqu'aux placements dans les fonds mutuels. Il y a eu une croissance phénoménale des placements dans les fonds mutuels. Les consommateurs sont très bien renseignés sur le risque que présentent ces placements.

Le député sous-estime les Canadiens dans toute cette affaire. Le public a une très bonne idée de ce dans quoi il s'engagerait et est parfaitement capable de comprendre ce qu'est la coassurance. Le Centre pour la promotion de l'intérêt public est favorable à la coassurance. Le député sous-estime le public, qui est très bien renseigné sur l'assurance, et sur les placements qui présentent un élément de risque. Le public comprend beaucoup mieux que ce que le député peut penser.

(1640)

[Français]

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, le projet de loi C-15 en est maintenant à l'étape de la troisième lecture. Ce projet de loi est en quelque sorte un ramassis de mesures disparates qui ont pour seul objectif de renforcer la surveillance et la réglementation du champ des services financiers au Canada. Il modifie plusieurs lois sur les services financiers et abolit la Loi sur les sociétés d'investissement.

Même si, en principe, nous ne nous opposons pas à ce projet de loi, nous avons quand même plusieurs appréhensions quant à l'intention véritable du gouvernement fédéral dans l'établissement de ce projet de loi. Ce projet de loi constitue, dans les faits, un pas en avant vers une prise de contrôle des valeurs mobilières au Canada, une prise de contrôle qui sera éventuellement assurée par la Banque du Canada.

Le projet de loi C-15 se sert du prétexte du contrôle du risque systémique pour permettre à Ottawa de s'ingérer dans un domaine de compétence purement et simplement provincial. Nous en avons d'ailleurs discuté l'année dernière, alors que le projet de loi C-15 se dénommait alors C-100. Ce sont des exemples qui ont été rapportés par mon honorable collègue de Saint-Hyacinthe-Bagot. Ce projet de loi vient frapper de plein fouet un domaine de juridiction exclusive aux provinces, celui des valeurs mobilières, ce qui regroupe, entre autres, l'ensemble des actifs liquides, les actions, les bons et également les obligations.

Pourtant, lorsque je lis la Constitution canadienne, je dénote qu'il y a deux articles qui confèrent aux provinces la gestion des valeurs mobilières. Le premier, l'article 92.13 traite de la propriété des droits civils dans les provinces. Au Québec, le Code civil régit les valeurs mobilières. Le deuxième article est le paragraphe 92.16 qui stipule que toutes les matières d'une nature purement locale ou privée dans la province relèvent de la province.

Le Québec exerce déjà une présence dans le secteur des valeurs mobilières par l'entremise de la Commission québécoise sur les valeurs mobilières, ainsi que par l'inspecteur général aux institutions financières. Le projet de loi C-15 créera de nouveaux chevauchements coûteux et inutiles, et Dieu sait combien on en a dénoncé, en soumettant les institutions financières québécoises à des directives et à des ordonnances de la Banque du Canada.

De plus, en mettant en oeuvre le système canadien de compensation, le gouverneur de la Banque du Canada se réserve le droit d'émettre des directives, non seulement aux chambres de compensation, mais également à toute institution financière participante, et ce, sans égard à leur charte. Ainsi, le projet de loi permettra au gouverneur d'émettre des directives et des ordonnances à des insti-


1607

tutions comme la Fiducie Desjardins par exemple, et ça, jusqu'à un certain point, c'est un curieux retour des choses.

On se souviendra qu'Alphonse Desjardins, au moment où il fondait les caisses populaires au début du siècle-si je me souviens bien, Alphonse Desjardins, me semble-t-il, avait été greffier en cette Chambre et plus tard, il avait été greffier au gouvernement du Québec, à l'Assemblée nationale-donc, Alphonse Desjardins a décidé de créer les caisses populaires parce qu'il y avait un problème avec les banques au Québec. Les banques, à majorité anglaise à cette époque, ne prêtaient pas aux Québécois, ne prêtaient pas aux Québécois francophones et il n'y avait pas de banque non plus dans les comptoirs ruraux. Il y avait des banques dans les grands centres financiers et c'est pour ça que les Québécois, voyant qu'on ne leur prêtait pas leur argent, n'allaient pas le déposer dans les banques. C'est de là que vient le bas de laine des Québécois.

Alors, Alphonse Desjardins, se rendant compte de cela, décide de créer une institution financière qui jouerait un rôle que les banques ne jouaient pas à l'époque auprès des Québécois et vient demander une charte fédérale à Ottawa, charte qu'on va lui refuser parce que les banques, à cette époque, craignent qu'une institution se crée au Québec et vienne en compétition avec elles. On va donc lui refuser une charte fédérale. C'est pour cela qu'Alphonse Desjardins a parti les caisses populaires sous charte provinciale. Les banques vont résister à ça pendant des années.

Je me souviens que jusqu'au début des années 1960, les banques refusaient les chèques des caisses populaires. Il leur a fallu faire des luttes à tout crin pour pouvoir finalement créer un outil économique au Québec, un outil de première force: les caisses populaires. On a fait ça tout seuls. Je me souviens qu'on a fait ça dans des conditions où les gens se sont impliqués à tous points de vue dans les sous-sols d'églises.

(1645)

De nombreuses personnes ont travaillé bénévolement pendant de nombreuses années pour faire démarrer cet outil économique. On l'a fait tout seuls, alors qu'on nous empêchait de le faire presque au début. Et aujourd'hui, maintenant que cet outil est créé, eh bien, le gouvernement du Canada pourra réglementer cet outil qu'on s'est donné nous-mêmes. Et ça, bien sûr, c'est inacceptable.

Le buste d'Alphonse Desjardins se retrouve aujourd'hui dans la tour du CN à Toronto, comme étant un des dix grands Canadiens. Quand on va visiter la tour du CN, à Toronto, on le voit. Ce qui n'empêche pas qu'on tente aujourd'hui de réglementer cette institution, alors qu'on s'est quasiment opposé à sa naissance.

Je vous rappelle qu'on retrouve également, dans la tour du CN à Toronto, le buste de Joseph-Armand Bombardier, ce qui n'a pas empêché le gouvernement fédéral, en 1945, de saisir tous les brevets de Joseph-Armand Bombardier.

Une autre chose qui me chicote dans ce projet de loi, c'est la concentration du pouvoir entre les mains de quelques individus seulement. C'est ce qu'on fait avec ce projet de loi. On modifie les prérogatives du surintendant aux institutions financières et à la Loi sur les liquidations pour lui octroyer plus de pouvoir qu'il n'en avait déjà. Ce projet de loi, et tous les projets de loi fédéraux que l'on a vus passer depuis que l'on est ici, cherchent toujours à concentrer davantage de pouvoir dans les mains de ceux qui l'ont déjà, qu'ils soient des ministres ou qu'il s'agisse de surintendants des institutions financières.

Quoi qu'il en soit, le fait d'élargir les prérogatives du surintendant aux institutions financières du fédéral n'aura pour effet que des dédoublements coûteux que devront, encore une fois, assumer les contribuables. Il me semble que depuis le temps qu'on en parle, le gouvernement devrait avoir compris que l'empiétement du fédéral dans une juridiction provinciale n'apporte qu'efficacité et coûts inutiles. Et je ne parle pas des débats que cela engendrera entre les provinces et le fédéral, à la veille de l'ouverture des débats constitutionnels qui sont prévus dans les mois à venir, si on s'en tient à ce qui était rattaché à la Constitution de 1982, où le premier ministre nous assure que le fédéral, dans ces conditions, conditions de débat constitutionnel, est prêt à se retirer des domaines exclusifs de compétence des provinces. N'est-il pas vrai que nous pouvons en conclure qu'il nous reprend d'une main ce qu'il veut nous donner de l'autre main? Cette situation est inacceptable.

Ce que le gouvernement en cette Chambre encourage, c'est la concurrence entre les paliers de gouvernement. À cet égard, rappelons-nous que la concurrence entre les gouvernements ne sera jamais rentable pour la population. Nous n'avons qu'à songer au domaine de la formation de la main-d'oeuvre qui est devenue un élément qu'on utilise tous les jours parce que les Québécoises s'en aperçoivent de plus en plus. Donc, il y a un consensus évident au Québec sur le rapatriement de la formation de la main-d'oeuvre, et ce, depuis de très nombreuses années, entre tous les intervenants, mais cette situation n'est pas encore réglée. Il se perd actuellement, dans ce dédoublement de juridictions, plus de 250 millions de dollars par année.

Cet élargissement de prérogatives du surintendant, un élargissement qui donne un champ de pouvoir sans limite à une seule personne, risque fort bien d'entraîner un débat judiciaire entre Ottawa et Québec, laissant pour compte les institutions financières en difficulté et les épargnants qui auront investi de l'argent.

Je ne peux m'expliquer la raison du gouvernement fédéral. Pourquoi vouloir contrôler un secteur qui est fort bien contrôlé au Québec, et ce, depuis belle lurette? J'en arrive à la conclusion que le gouvernement fédéral veut trouver un moyen pour s'ingérer dans l'administration des différentes institutions provinciales, surtout au Québec, car il sent très bien que la situation du fédéralisme actuel est sur le bord d'échapper à son contrôle.

Il se prépare également pour les prochaines négociations constitutionnelles, qui devront inévitablement arriver, en allant chercher des pouvoirs, qu'il pourra par la suite redonner aux provinces en disant: «Voyez notre générosité; on vous donne ce que vous voulez. On se retire de certains champs de compétence provinciale, mais de l'autre côté du rideau, ils n'auront presque rien perdu, car ils se seront accaparé d'autres leviers, des leviers de contrôle et de pouvoir, notamment les leviers fiscaux. C'est le cas avec le projet de loi qui nous occupe aujourd'hui.


1608

Ainsi, on peut prévoir qu'il n'y aura, en fait, que des changements apparents. Jamais le Bloc n'acceptera d'octroyer une compétence qui est et a toujours été, jusqu'à maintenant, exclusivement provinciale. Même Daniel Johnson, tel que mon collègue en faisait état avant moi, disait, en 1994, alors qu'il était premier ministre du Québec, qu'il n'était pas question, pour le gouvernement libéral du Québec, d'accepter que le gouvernement fédéral empiète dans le domaine des valeurs mobilières.

(1650)

Il ajoutait que le gouvernement du Québec refuserait et garderait jalousement ses prérogatives dans ce secteur. On voyait tout récemment encore M. Johnson s'opposer à ce qui se passe en Chambre. Il se dissocie aujourd'hui de la notion «Québec comme foyer» qu'on a voulu répandre depuis quelques jours.

Le gouvernement d'Ottawa semble être dans une impasse où il lui importe peu de contredire ses alliés provinciaux du Québec, ses alliés qui, sur plusieurs points, sont de plus en plus d'accord-et obligés de l'être-avec les revendications des souverainistes, quoi qu'en disent le premier ministre et ses ministres.

Mais pire que cela, le gouvernement fait fi des articles fondamentaux de la Constitution, cette même Constitution par laquelle il prêche si souvent et dont il nous parle si souvent. La facture du projet de loi C-15 va même au-delà des domaines de compétence. Je l'ai mentionné tout à l'heure, ce sont les institutions financières du Québec et les épargnants qui seront victimes du dédoublement d'emploi qu'Ottawa veut imposer, car n'oublions pas que les différents agents qui oeuvrent dans le secteur des valeurs mobilières ont besoin d'une législation cohérente et stable, comme dans tous les secteurs qui touchent aux marchés financiers.

Mais au lieu de cela, au lieu de vouloir conserver une stabilité et une cohérence-deux prémisses très recherchées par les marchés financiers mondiaux-le gouvernement fédéral, avec son projet de loi C-15, vient nous dire qu'il veut mettre en place ses propres institutions et permettre à la Banque du Canada et à l'inspecteur général des institutions financières canadiennes d'intervenir dans le domaine des valeurs mobilières. Une telle attitude de la part du gouvernement est inacceptable.

Lorsque le secrétaire d'État aux Institutions financières canadiennes comparaissait devant le Comité des finances, au mois d'août dernier, lorsque le Bloc québécois lui a posé des questions sur l'envahissement du champ des valeurs mobilières par le gouvernement fédéral, un champ qui, de par la Constitution, est un champ exclusif du Québec comme on le disait tout à l'heure, il n'a d'aucune façon répondu aux questions. Il a cherché à détourner les réponses. On peut s'en rendre compte à la lecture du procès-verbal du comité en question. On avait l'impression que le secrétaire d'État ne connaissait même pas son projet de loi.

Le secrétaire d'État nous avait dit qu'il n'était pas dans l'intention du gouvernement, à cette époque, d'investir le champ des valeurs mobilières. On nous a raconté des histoires, puisque dans le récent discours du Trône on a parlé clairement de la mise sur pied d'une commission canadienne des valeurs mobilières.

Nous nous sommes opposés aux amendements du gouvernement, parce qu'ils ne répondaient aucunement aux attentes, tout comme le projet de loi C-15 ne répond pas aux attentes du Québec. Ce projet de loi a été rédigé d'une manière très technique, c'est bien sûr, parce qu'il est du domaine technique et il a été très volumineux. On est donc portés à croire que le gouvernement veut créer de la confusion auprès de l'opposition et de la population étant donné que ce projet de loi, qui nous est présenté sous des allures de modifications bénignes, propose en fait des modifications ayant des conséquences d'une gravité certaine.

On ne peut que déplorer que, dans la plupart des projets de loi déposés en Chambre, on est toujours en train de dénoncer-je parle bien sûr des gens du Bloc-les mêmes choses. Le gouvernement se sert de toutes sortes de moyens pour tenter de centraliser son pouvoir toujours davantage. Toutes les raisons sont bonnes. On invoque la mondialisation des marchés, la compétitivité internationale, les risques systémiques et autres raisons du même type. Je trouve cela extrêmement dommage de constater qu'au moment où le gouvernement tient un discours où il annonce qu'il est possible de s'entendre avec les provinces, il fait exactement le contraire dans les lois. On ne s'entend pas avec les provinces et on centralise.

Seulement depuis le dernier budget fédéral, c'est au moins la quatrième fois qu'Ottawa dépose un projet de loi ayant un impact sur les relations fédérales-provinciales, et ce, sans même consulter les provinces. Je me réfère ici au projet de loi C-76 entre autres, mise en oeuvre du budget, imposition de normes nationales; au projet de loi C-88, mise en oeuvre de l'Accord interprovincial sur le commerce, qui donne un pouvoir de rétorsion au fédéral; au projet de loi C-91 sur le développement régional, grâce auquel Ottawa peut désormais signer directement des ententes avec les instances locales sans égard aux gouvernements provinciaux; et bien sûr le projet de loi d'aujourd'hui, le projet de loi C-15.

C'est incroyable, parce qu'on nous dit qu'on peut s'entendre avec le Québec, on nous dit qu'on peut décentraliser, mais dans les faits-et on a appris cela au cours de l'histoire, au cours des 30 dernières années-ce sont toujours des mots qui ne veulent rien dire.

(1655)

On se rappelle des engagements de M. Trudeau en 1980, et j'irai très vite là-dessus puisqu'ils sont connus de tous: «Nous mettons nos sièges en jeu pour qu'il y ait du changement». Nous sommes en 1996 aujourd'hui. Entre-temps, il y a eu le rapatriement de la Constitution en 1982, il n'y a eu aucun changement pour le Québec. Des mots, donc, qui ne voulaient rien dire, des engagements qui n'en étaient pas. Aujourd'hui, on nous dit qu'on parle de décentralisation possible, d'entente administrative possible, et chaque projet de loi qui est adopté ici en cette Chambre est en fait le contraire des engagements qu'on prend.

On se souvient des engagements du premier ministre actuel quelques jours avant le dernier référendum: «Nous ferons reconnaître la société distincte.» C'est déjà oublié cela. On s'aperçoit à travers cela que les engagements que l'on prend, que les mots que l'on dit ne sont en fait que des engagements vides de sens, des mots vides de sens, parce qu'il n'y a jamais aucune volonté réelle d'en arriver aux faits.


1609

La seule chose qu'on décentralise, ce sont les coupures. J'aimerais en citer une parce qu'on en a parlé justement hier et aujourd'hui, la coupure dans le domaine énergétique. Depuis 20 ans, on a investi en Ontario 12 milliards de dollars dans la recherche en énergie atomique, 12 milliards du gouvernement fédéral. On investit dans le domaine énergétique quelques milliards aussi dans le projet Hibernia à Terre-Neuve. Actuellement, on fait une coupure au Québec dans le projet de recherche tokamak à Varennes dans le domaine de la fusion nucléaire, où on investissait jusqu'à aujourd'hui sept millions par année.

On investit des milliards ailleurs et la moindre petite coupure va au Québec. On utilise des mots qui ne veulent rien dire ou leur contraire.

En 1980, on s'en souvient, on nous disait: «Si vous faites la souveraineté du Québec, des dettes, des taxes et du chômage, vous en aurez en masse. Vous n'êtes pas capables de faire ça, les petits Québécois.» Qu'est-ce qu'on a eu depuis 1980? En 1980, la dette fédérale était de 80 milliards de dollars et elle est aujourd'hui de près de 600 milliards, les taxes n'ont jamais été aussi hautes et le taux de chômage n'a jamais été aussi élevé non plus. Ce qui veut dire que tout ce qu'on a eu peur de perdre en 1980 en devenant un pays, on l'a perdu en demeurant dans la Confédération canadienne.

Dernièrement, avant le dernier référendum, on nous disait: «Si vous devenez souverains, vous perdrez tous vos subsides laitiers.» Au dernier budget, on vient de nous annoncer que tous les subsides laitiers au Québec seront abolis dans cinq ans.

Donc, des engagements qui ne veulent rien dire. Le projet de loi C-15 qui est devant nous se sert du prétexte du risque systémique pour permettre au fédéral de s'ingérer dans le domaine des valeurs mobilières, alors que le gouverneur général de la Banque du Canada a lui-même affirmé, l'été dernier, que ces risques étaient maîtrisés par un contrôle accru du système de transfert des paiements de grande valeur.

On voit donc que c'est un projet qui, pour nous, est tout à fait inacceptable, puisqu'il s'agit uniquement d'un envahissement des juridictions du Québec.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de procéder aux questions et commentaires, conformément à l'article 38, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable député de Shefford-Les Forces armées canadiennes; l'honorable député de Bourassa-L'immigration.

[Traduction]

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais poser une question au député qui vient de parler. Je voudrais savoir comment il conçoit le commerce international en général. Qu'est-ce que notre adhésion à l'OMC représente vraiment pour nous, quant à notre avenir dans le monde? De toute évidence, nous avons un avenir de pays commerçant traitant avec les autres pays du monde.

Chaque fois que j'entends quelqu'un parler de la nécessité de la gestion de l'offre en disant croire vraiment qu'il s'agit d'un trait que nous pourrions toujours conserver à l'avenir tout en demeurant un pays commerçant à l'échelle internationale, je suis très étonné. Le député ne pense-t-il pas que l'industrie laitière du Québec ne serait pas capable de se moderniser et de soutenir la concurrence sur le marché mondiale sans dépendre des subventions de l'État?

J'aimerais qu'il réponde à cette question dans le contexte de l'Organisation mondiale du commerce, et nous dise ce que cela représentera pour nous, Canadiens, surtout si nous sommes 30 millions de Canadiens actifs sur le marché international.

(1700)

[Français]

M. Pomerleau: Monsieur le Président, je suis un peu surpris de la question de mon honorable collègue du Parti réformiste qui, au fond, me demande comment le Québec pourrait s'en sortir sans les subsides laitiers. On sait que le gouvernement canadien a annoncé, dans son dernier budget, qu'il abolirait ces subsides. Il y a déjà 15 p. 100 de ces subsides de partis depuis deux ans et dans les trois ou quatre prochaines années, il n'y aura plus de subsides pour le lait au Québec.

Pendant ce temps-là, par contre, on a investi des milliards de dollars dans l'Ouest, où on a enlevé ce qu'on donnait pour le transport du grain, mais où on a alloué des sommes pour compenser les pertes subies au niveau du transport.

Quand mon collègue nous parle des relations internationales, ce que je peux lui dire dans ce contexte, c'est qu'un pays comme le Québec-le jour où le Québec deviendra un pays-aura à prendre des engagements internationaux de même nature que ceux que le Canada, Singapour, la France ou l'Italie prennent et il devra avoir, à ce moment-là, les outils nécessaires pour le faire.

En attendant, le Québec, à l'intérieur de la Constitution canadienne, à l'intérieur du Canada, est soumis, à titre de province, aux règlements qu'applique le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral, depuis le début de la Confédération canadienne, sent le besoin-et peut-être est-ce un besoin fondamental pour les Canadiens, un besoin de survie pour le Canada-de centraliser complètement son pouvoir économique et de centraliser son pouvoir politique en Ontario. Cette centralisation vide effectivement le Québec de son infrastructure économique et de son pouvoir politique.

Je pense que mon collègue admettra qu'un pays peut avoir, sur les marchés internationaux, des facilités à titre de pays qu'il ne peut pas avoir en tant que province.

[Traduction]

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, je veux revenir à cette idée que le Québec paie tellement plus. En Alberta, par exemple, nous avons payé 145 milliards de dollars de plus que nous n'en avons jamais reçus.

Lorsqu'on dit que le tarif du Nid-de-Corbeau constitue une subvention, il s'agit d'une entente qui avait été conclue avec le secteur agricole, et les agriculteurs ne recevront désormais plus aucune subvention au transport.

Le paiement de 1,6 milliard de dollars visait à abolir un contrat qui devait valoir environ 18 milliards de dollars. Par conséquent, les 1,6 milliard ne représentent qu'un paiement unique, non renouvela-


1610

ble. Les agriculteurs devront maintenant concurrencer le marché international au sein de l'Organisation mondiale du commerce.

[Français]

M. Pomerleau: Monsieur le Président, bien sûr, c'est un montant payé pour remplacer une subvention qui était déjà là, 1,6 milliard de dollars nous dit mon collègue, mais les subventions au lait seront abolies complètement au Québec. Il n'y en aura plus.

Une voix: Sans compensation.

M. Pomerleau: Sans compensation, comme le dit mon collègue. Alors, 25 p. 100 des 1,6 milliard de dollars donnés à l'Ouest provient du Québec. On donne notre argent pour payer des compensations ailleurs pendant qu'on coupe chez nous, comme on l'a fait pour le projet tokamak. On a payé 3 ou 4 des 12 milliards qui sont allés en Ontario. On a payé 25 p. 100 des trois milliards à Hibernia. Pendant ce temps-là, on nous coupe le projet tokamak. Le Québec est perdant dans la Confédération canadienne.

[Traduction]

Beaucoup de gens au Canada croient en ces trois suppositions et certains y croient pour de bonnes raisons. Si nous sommes une bande de fauteurs de troubles sur le plan politique, ce qui est tout à fait vrai, si, au Québec, nous recevons beaucoup plus d'argent que nous n'en versons, alors, appuyez la souveraineté du Québec, car le jour où nous partirons, le problème sera réglé et vous en sortirez gagnants. Voilà la raison.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, ce débat pourrait très rapidement déborder le cadre du projet de loi C-15 et déboucher sur des questions d'unité nationale. Je m'en garderai bien et vais donc m'en tenir à notre sujet de discussion, à savoir les propositions de modification concernant les institutions financières.

Le volet qui m'intéresse plus particulièrement dans ce projet de loi a trait à la SADC et à la perception des primes. Les primes seront fonction du risque encouru. Nous, le public, ne serons pas en mesure d'évaluer les risques des diverses institutions. Le voile du secret n'a pas été levé. Je veux savoir si le député est d'avis qu'il s'agit là d'une mesure juste.

(1705)

De même, si l'objectif que le gouvernement poursuit est vraiment de rendre les institutions financières plus transparentes et plus responsables, que pense-t-il de ce que j'ai dit un peu plus tôt cet après-midi à propos de la coassurance? Il y a peut-être lieu de se pencher sur la coassurance. Au lieu d'une assurance couvrant 100 p. 100 des dépôts, on devrait peut-être se contenter d'une garantie à 90 p. 100, le 10 p. 100 de risque qui reste étant assumé par l'investisseur.

Le sens que l'on confère à l'équité dans le système actuel a un effet pervers, car les institutions à faible risque ou qui sont prospères et qui ne sont donc pas mises sous séquestre, qui ne font pas faillite, qui ne coûtent pas un sou au contribuable doivent payer pour les autres et, en dernière analyse, ce sont les contribuables qui écopent.

[Français]

M. Pomerleau: Monsieur le Président, premièrement au sujet de la coassurance, si je comprends ce que mon collègue a voulu dire, je n'ai malheureusement pas écouté son discours cet après-midi et je ne me sens pas en possession de toutes les informations pour répondre à cette question.

Cependant, au sujet de la transparence du gouvernement, effectivement, et ce n'est pas le seul document dans lequel on le voit, on l'a vu dans toute la question de l'étude qui s'en vient, nous dit-on, vers la fin de l'année dans le domaine de la fiscalité, il n'y en a pas de transparence. Le domaine de la fiscalité, à titre d'exemple, sera étudié en comité fermé, par les gens qui sont les utilisateurs les plus connus des paradis fiscaux à travers le monde et qui ont des institutions partout dans ces paradis fiscaux.

La transparence-mon collègue fait bien de le rappeler-est un domaine où le gouvernement, jusqu'à maintenant, n'a pas fait preuve de beaucoup de lumière, si je peux dire. Il s'agit d'une transparence très opaque. On peut se rappeler également les recommandations concernant l'aéroport Pearson, où tout cela devrait se régler dans le bureau du ministre, derrière des portes closes. On a amplement dénoncé, au cours des années passées, la non-transparence du gouvernement, et je pense que mon collègue fait très bien de la dénoncer aussi.

Quant à la coassurance, je sais que mon collègue et moi, probablement à un moment donné, aurons l'occasion d'en reparler de façon plus précise et technique en privé.

[Traduction]

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, l'objet du projet de loi C-15 n'est certes pas dans mon domaine de compétence. Je veux aborder cette question du point de vue d'un profane face au système bancaire et au système d'assurance, et à tout ce qu'ils signifient pour les Canadiens.

Nous sommes tous conscients de l'importance d'avoir un système bancaire et un système d'assurance stables. C'est nécessaire dans notre société. Lorsqu'on voit les problèmes qui perturbent le système financier aux États-Unis, aucun d'entre nous n'en voudrait au Canada.

En examinant ce projet de loi, on s'aperçoit qu'il y a un certain nombre de problèmes clés. Il s'agit avant tout de savoir comment surveiller nos institutions financières et nous assurer de leur santé financière.

Il faut également veiller à ce que les Canadiens ne soient pas incités à placer leur argent dans des institutions financières peu stables qui finissent par faire faillite. Chaque fois qu'une de ces institutions financières ou compagnies d'assurance fait faillite, nous en subissons tous les répercussions. Il en coûte des millions de dollars pour s'assurer que cela ne se produise pas et, au fil des ans, bien entendu, il y a eu beaucoup de problèmes.

La SADC doit souvent intervenir pour couvrir les 60 000 $ assurés sur les dépôts.


1611

(1710)

Je me rappelle de mon expérience personnelle en Alberta. Lorsque la compagnie Principal a fait faillite, les grands-mères, les agriculteurs, les gens qui avaient placé leur argent dans cette institution ignoraient s'ils allaient récupérer 10 p. 100 ou 50 p. 100 de l'argent qu'ils avaient placé et ce qui allait leur arriver.

À l'époque, beaucoup de gens ont déclaré que c'était par cupidité que certaines gens avaient investi dans cette compagnie, car il payait 1 p. 100 ou 0,5 p. 100 de plus. Je ne parlerais pas de cupidité. C'est plutôt la nature humaine qui est ainsi faite. Les gens placent leur argent dans des institutions en fonction du rendement qu'ils peuvent obtenir. Les personnes âgées sont les plus touchées, comme elles l'ont été dans ma collectivité à la suite de l'effondrement de la Principal. C'est ce sur quoi nous devons nous pencher aujourd'hui. Nous devons nous demander à quelle somme de renseignements la population devrait avoir accès sur toutes nos institutions financières.

Examinons le projet de loi C-15. Cette mesure a pour objet d'améliorer la réglementation des institutions financières. Malheureusement, le résultat n'est pas très satisfaisant. Comme tant d'autres projets de loi dont la Chambre a déjà été saisie, celui-ci fait une partie de la tâche, mais ne va pas assez loin. Soit qu'il y ait des raisons politiques ou alors il manque des renseignements. On compte peut-être trop sur le travail des bureaucrates et pas assez sur les véritables efforts des comités et du ministre même.

Il suffit de feuilleter ce projet de loi pour se rendre compte de sa complexité. Il y a 136 pages. Quand on utilise tellement le jargon des avocats et qu'on l'ajoute à la loi existante, qu'est-ce qu'on obtient? On obtient une collection de documents que pratiquement seulement quelques avocats arrivent à comprendre vraiment.

Depuis trois ans que je suis à la Chambre, je remarque lorsque nous procédons de cette façon en légiférant, nous laissons le champ libre à l'interprétation, à la confusion. Nos mesures peuvent donner lieu à de nombreuses opinions différentes. Le gouvernement doit recommencer à communiquer avec la population en utilisant les mots qu'elle comprend. Les avocats, les comptables et les banquiers ont fait de la complexité une industrie.

Qu'il s'agisse, par exemple, de notre régime fiscal ou de notre système bancaire, nous devons récrire les lois pour que les gens les comprennent et qu'ils puissent les observer. Ils ne doivent pas être obligés de recourir à des spécialistes. En procédant comme nous le faisons, nous attirons les paroles méprisantes que nos électeurs prononcent si souvent à notre endroit.

Ce projet de loi est très complexe. Il est opaque et ne s'attaque pas aux problèmes fondamentaux de nos institutions financières. C'est pourquoi mes collègues et moi ne l'appuyons pas. Nous ne croyons pas que le projet de loi C-15 soit mauvais ou mal intentionné. Nous croyons cependant que le gouvernement n'a pas adopté la bonne attitude, consistant à formuler la loi dans un langage que tout le monde puisse comprendre. Je ne crois pas qu'il serait si difficile d'exprimer les dispositions du projet de loi dans une langue juridique que nous pourrions comprendre et aborder.

En quoi consiste donc l'attitude simple dont nous parlons? Tout d'abord, il est très important que le système soit compréhensible, ouvert et responsable envers les Canadiens. C'est tout le contraire de ce que je vois quand j'essaie de lire le projet de loi C-15.

Le système actuel est tellement obscur que le Canadien moyen ne peut absolument rien y comprendre. Même si quelqu'un d'assez courageux voulait tâcher de savoir de quoi il retourne vraiment, l'information n'est tout simplement pas disponible. Elle est confidentielle, d'accès interdit, quelque chose que les particuliers ne devraient pas avoir. Autrement dit, il n'y a pas de transparence ni de responsabilité. Pas étonnant que les Canadiens n'aient pas une grande confiance en la façon dont les choses se font actuellement.

(1715)

J'en reviens encore une fois à la législation fiscale, par exemple, 2 100 pages de charabia. Quand je regarde notre Constitution, j'y vois encore du charabia, où nous devons nous reporter à l'article untel et untel, tel que libellé à telle ou telle date, et ainsi de suite. Les entreprises et les particuliers ne peuvent rien y comprendre. Les comptables doivent suivre des cours chaque mois pour comprendre les modifications qu'on apporte à la loi.

Je voudrais aborder une des dispositions du projet de loi C-15 qui a un certain potentiel. Elle dit que le risque devrait être un facteur déterminant dans l'établissement des cotisations à payer à la SADC. Cela semble être une très bonne idée. Tout le monde à la Chambre comprend qu'une entreprise très risquée devrait payer des cotisations plus élevées. L'inverse est également vrai. Plus une institution est solide, moins la cotisation devrait être élevée. Cela est de pratique courante dans le monde de l'assurance.

Malheureusement, la SADC ne veut pas faire connaître ces évaluations de risque au public. Si ces renseignements étaient ouverts, transparents et publics, une personne pourrait planifier ses investissements en conséquence. Nous connaîtrions le degré de risque que nous courons, et ce serait complètement ouvert. Nous ne pourrions nous en prendre qu'à nous-mêmes si nous décidions de faire cet investissement plus risqué, compte tenu des taux de cotisation plus élevés.

Il n'y a pas de transparence. Les choses se font actuellement de façon secrète, et il est donc impossible aux Canadiens de prendre des décisions éclairées. C'est ce que nous entendons toujours dire, quel que soit le domaine dont il est question. Les Canadiens veulent que la transparence règne.

Beaucoup de députés ministériels ont passablement d'argent. Cela a été dit à l'occasion. Beaucoup d'entre eux peuvent même être qualifiés de riches. S'ils plaçaient leur argent durement gagné dans une banque ou une fiducie et s'ils savaient que la SADC a fait une évaluation des risques, ne voudraient-ils pas connaître cette évaluation? Ne serait-il pas logique que soit rendue publique l'information sur le niveau relatif de risque des différentes institutions?

Ces renseignements devraient être du domaine public. C'est pourquoi les Canadiens perdent confiance dans ceux qui font de la politique et dans la politique elle-même. Il ne semble pas que nous soyons prêts à rendre cette information publique. Les consomma-


1612

teurs ont le droit de connaître les évaluations, et elles doivent être du domaine public. Nous devons savoir qui est fiable et qui ne l'est pas.

Si une grande institution faisait faillite, et si les contribuables devaient en payer les pots cassés, les gens qui ont pris cette décision ne seraient-ils pas fâchés d'apprendre que la SADC savait depuis longtemps que l'entreprise représentait un risque? Ces gens ne se demanderaient-ils pas pourquoi la SADC a préféré garder l'information secrète?

Je reviens à l'exemple que j'ai utilisé un peu plus tôt, lorsque des grands-mères, des agricultures et bien d'autres habitants de l'Alberta ont perdu l'argent qu'ils avaient épargné. Nous avons appris que les spécialistes savaient que l'entreprise présentait un risque, mais cette bonne grand-mère, elle, n'en savait rien. Comment aurait-elle pu le savoir puisque les renseignements étaient confidentiels? Les renseignements étaient secrets. Comme je l'ai dit au début de mon intervention, et je le répète en termes clairs pour que le profane puisse bien comprendre, nous devrions ouvrir tout ce processus et le rendre transparent, même si c'est la seule chose que nous faisons.

Je voudrais revenir à ce que j'ai appelé un peu plus tôt une solution toute simple. Il suffit de rendre le système transparent et responsable. À mon avis, la meilleure façon d'y parvenir est d'avoir recours à la coassurance. Cela a été proposé, mais n'a pas été mis en oeuvre. Cela ne fait pas partie du projet de loi et a été rejeté.

(1720)

Comment est-ce possible? Tout le monde convient, semble-t-il, que nous avons besoin de transparence et de responsabilité et que nous avons le droit de savoir si une compagnie présente des risques ou pas. Qu'a-t-on à reprocher à la coassurance? Pourquoi n'en est-il pas question dans ce projet de loi? Cela prouve encore qu'on ne va pas assez loin. On ne fait qu'effleurer le sujet.

Beaucoup des choses que l'on fait sont des décisions de petite politique; lorsqu'on a promis de faire un petit quelque chose, on fait un petit quelque chose. On ne fait pas preuve de clairvoyance. On n'a pas de plan à long terme. Il n'y a rien là.

M. Silye: Où en est-on en ce qui concerne la TPS?

M. Mills (Red Deer): Le député demande ce qu'il en est de la TPS. On nous avait manifestement fait une promesse au sujet de la TPS. On avait promis un important changement. Mais que va-t-il arriver de la TPS? On va la rebaptiser ABC et la porter à 15 p. 100. Cela constitue certes un important changement à mes yeux. Cela aura certes pour effet de détruire la responsabilité dont nous parlons tous. Je reviens à la méfiance que suscitent les politiciens et le système politique.

Les Canadiens, qui sont des gens responsables, s'assureraient des risques que présentent des institutions financières si une partie de leurs épargnes et de leurs prestations de retraite était en jeu. Conformément au système actuel, toutefois, les premiers 60 000 $ sont assurés à 100 p. 100 si une institution financière fait faillite. Or, qu'est-ce qui pousse à s'informer au sujet de ces institutions? Il faut examiner tout le secteur de la coassurance.

Avec une couverture à 100 p. 100, il n'est que logique que les Canadiens placent leur argent là où les conditions sont les meilleures et où les taux d'intérêt sont les plus élevés, quel que soit l'état de santé de l'institution au plan financier. Il sera parfaitement humain que, au moment de toucher leur pension de parlementaire, la plupart des députés d'en face confient leur argent à n'importe quelle institution, étant donné cette couverture de 100 p. 100. Vous pouvez me croire quand je dis que, nous, de ce côté-ci, devrons être beaucoup plus prudents parce que nous ne toucherons pas de pension de parlementaire. Nous ne profitons pas de l'assiette au beurre, contrairement à bien d'autres.

Avec la coassurance, le risque serait partagé et la responsabilité serait encouragée. Cela forcerait les gens à choisir entre les taux d'intérêt élevés ou la sécurité. Ceux d'entre nous qui ont été en affaires ont eu à faire ces choix. Selon nous, le projet de loi devrait traduire cela.

Ce n'est pas l'appât du gain qui pousse les gens à rechercher les taux d'intérêt les plus élevés. Bien souvent, c'est une méconnaissance du système. Nombreux sont ceux qui risquent l'argent qu'ils ont épargné toute leur vie. Ils ne sont pas âpres au gain, ils sont simplement des êtres humains.

C'est bien d'avoir le choix. La responsabilité personnelle est aussi une bonne chose. Je sais que certains députés d'en face ne sont pas d'accord, mais je n'en démords pas. Je sais que l'usage à cet endroit consiste à légiférer en supprimant tous les choix, de manière à protéger les Canadiens que l'on a, avec mépris, jugés incapables de s'occuper de leurs intérêts.

C'est la colère qui a amené ici un grand nombre d'entre nous. Les gens ont élu à cet endroit de nombreux députés qui, au bout de six mois, revenaient leur dire ceci: «Nous savons ce qui est mieux pour vous, car le parti nous a dit que c'est ainsi qu'il faut penser.» Il y a un député en face qui, j'en suis certain, va revenir là-dessus et dire qu'il n'a pas suivi la ligne de son parti parce qu'il a le sens de l'honneur et qu'il sait ce qu'il a à faire.

Nous entendons souvent ce message venu d'en haut, ici, à Ottawa. Il s'agit de la fièvre d'Ottawa. Ce phénomène survient quand c'est le parti qui mène la barque, pas les gens. Les Canadiens disent un tout autre message. Nous en avons assez de cela!

(1725)

Les Canadiens demandent au gouvernement d'être responsable, d'adopter une loi, de mettre en oeuvre les vrais changements qu'ils préconisent. Ils ont une longueur d'avance sur les politiciens. Ils comprennent la notion de risque. Ils comprennent le système bancaire. Ils connaissent la situation.

Mais revenons au projet de loi. Bien des choses dont nous avons parlé au sujet du secteur bancaire, du secteur juridique et de la bureaucratie sont d'une grande complexité. Nous croyons que les problèmes peuvent être réglés beaucoup plus facilement sans présenter un projet de loi de 136 pages. Le projet de loi C-15 devrait être abandonné, et il faudrait aborder la question d'une toute autre façon. Le principe sous-jacent de tout nouveau projet de loi devrait comprendre trois éléments, soit la transparence, la responsabilité et le choix.

1613

Des députés d'en face diront que, selon moi, la compétition n'est pas une bonne chose. J'estime que la compétition est ce qu'elle est, mais qu'il faut avoir des règles équitables pour tous. Le problème avec les banques, c'est que les règles ne sont pas équitables. Il n'y a pas de transparence. Il n'y a pas de responsabilité. C'est pourquoi nous sommes aux prises avec ces problèmes. C'est pourquoi les gens ont des doutes au sujet des banques, des compagnies d'assurances et des politiques. Et c'est à cause du manque de responsabilité.

C'est bon de retourner dans notre région et d'apprendre que les petites gens nous appuient, que cet appui s'est accru considérablement de plusieurs façons, notamment par le nombre d'adhérents à notre parti. Nous nous sentons vraiment bien. Nous savons alors que notre avons bien transmis à la Chambre le message de nos électeurs. Ils veulent que le message soit présenté d'une manière beaucoup plus simple, beaucoup plus compréhensible.

En terminant, je dirai que le projet de loi C-15 est trop complexe. Il ne traite pas des questions de la transparence et de la rsponsabilité comme les gens le veulent. Nous voterons contre ce projet de loi.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, je veux me porter à la défense des grands-mères. Il me semble que des députés fustigent les grands-mères. Pourtant, beaucoup de celles que j'ai rencontrées dans ma vie étaient des investisseurs éclairés.

Par ailleurs, le débat nous renvoie à la question de la SADC et à la raison d'être de l'assurance-dépôt. La SADC n'est pas une maison de cotation des obligations. Certains demandent qu'elle rende ses renseignements publics. Mais ce n'est pour cela qu'elle existe. Lorsque quelqu'un veut une cote sur des obligations, il s'adresse à Dunn and Bradstreet.

Enfin, je voudrais dire en passant que les arguments du député sur la coassurance sont favorables aux grandes institutions financières qui la permette. Les petites institutions financières seraient incapables de soutenir la concurrence si on introduisait le principe de la coassurance.

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, la question était plutôt embrouillée, mais je vais essayer d'y répondre. Je dirai d'entrée de jeu que nous aimons tous les grands-mères. Nous nous entendons tous là-dessus. Que cela soit bien clair et n'en parlons plus.

Quant à la SADC, nous ne demandons pas qu'elle se transforme en maison de cotation des obligations. Cependant, lorsqu'elle constate qu'une institution financière a des problèmes, nous nous attendons à ce qu'elle le dise. Nous ne voulons plus voir de situations comme celle que nous avons vue lors de la faillite du groupe Principal. On savait que l'institution allait tomber, mais l'information n'a pas été rendue publique. Cela fait du tort précisément aux grands-mères que nous voulons justement protéger. C'est de cela dont nous parlons. Nous pourrions avoir des maisons de cotation des obligations, mais nous ne nous attendons pas à ce que la SADC fasse leur travail, elle est une compagnie d'assurance. L'important, c'est qu'elle devienne transparente et rende des comptes.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je veux féliciter le député de Red Deer pour son discours. Il a dit que c'était un sujet qu'il ne connaissait pas beaucoup. Après l'avoir écouté, je dois dire que ses remarques et ses opinions ont même apporté des améliorations au discours que j'ai prononcé sur ce sujet. Il a fait un travail exceptionnel. Cela montre bien la qualité des députés que nous avons au sein du Parti réformiste.

Je voudrais demander au député de Red Deer. . .

Le vice-président: Le député de Calgary-Centre sera certainement désolé d'apprendre que son temps de parole est écoulé.

Comme il est 17 h 30, la Chambre passe main-tenant à l'étude des initiatives par-lemen-taires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

______________________________________________


1613

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

L'AGRICULTURE

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.) propose:

Que la Chambre appuie la création d'un milieu où les producteurs agricoles prennent leurs propres décisions en matière de commercialisation.
-Monsieur le Président, il est bon d'être à la Chambre lorsque tout le monde est de bonne humeur. J'espère que cette bonne humeur se maintiendra pendant que nous parlons d'agriculture.

Monsieur le Président, vous avez lu la motion, mais je veux la lire encore une fois:

Que la Chambre appuie la création d'un milieu où les producteurs agricoles prennent leurs propres décisions en matière de commercialisation.
Ma proposition prend la forme d'une motion parce qu'elle porte sur un principe et non sur une mesure législative précise, auquel cas elle aurait pris la forme d'un projet de loi.

Je veux citer un extrait de la politique agricole du Parti réformiste, qui a été imprimée avant les élections de 1993 et qui appuie également ce principe. On y dit ceci: «Le Parti réformiste croit que les producteurs devraient décider eux-mêmes de l'orientation que doivent prendre les organismes à leur service, y compris les offices, commissions et coopératives de commercialisation, et devraient structurer ces organismes de la façon qui, selon eux, sert le mieux leurs intérêts. En consultation avec les producteurs, les réformistes chercheront à favoriser une industrie viable autonome axée sur le marché en créant un environnement où les producteurs décideront eux-mêmes comment commercialiser leurs produits.»

C'est là une politique que les membres de notre parti ont appuyée en 1992, avant les élections de 1993. Nous avons fondé notre campagne sur ces principes et sur d'autres principes du même genre, et c'est pourquoi nous avons eu beaucoup de succès dans de nombreuses circonscriptions rurales.

La question que nous examinons aujourd'hui concerne la Commission canadienne du blé. Elle concerne les industries soumises à la gestion de l'offre. C'est une question très répandue dans le secteur agricole.


1614

Le Parti réformiste a adopté ce principe avant la tenue de plébiscites auprès de producteurs, comme celui qui a eu lieu en Alberta, et avant les sondages d'opinion qui ont permis d'avoir des données plus scientifiques. Ceci prouve qu'en fait, les réformistes sont à l'écoute du public, des entreprises et, en l'occurrence, des milieux agricoles. Les récents développements survenus dans l'industrie ont prouvé que nous avions raison. J'espère, par conséquent, que les députés qui prendront la parole après moi appuieront le principe que j'avance dans cette motion.

La question dont débattent les producteurs est de savoir si certains secteurs de l'industrie devraient avoir plus d'influence sur la commercialisation du grain et des produits soumis à la gestion de l'offre. Cela comprend la question de la commercialisation du porc qui pose maintenant un problème au Manitoba où l'on se demande si les producteurs devraient se voir offrir de nouvelles options de commercialisation et qui devrait avoir le dernier mot en ce qui concerne la commercialisation du porc dans cette province.

Trop souvent, les opérations des offices et commissions de commercialisation ne tiennent pas compte des intérêts des individus qu'ils sont censés servir. Le processus décisionnel est laissé au soin d'individus qui n'ont pas nécessairement à coeur les intérêts des producteurs ou qui ne sont pas conscients de la nécessité de prendre rapidement de bonnes décisions. L'enquête commandée et payée par le gouvernement de la Saskatchewan montre que 58 p. 100 des producteurs de cette province veulent que la participation à la Commission canadienne du blé soit plus facultative. De nombreux producteurs ont l'impression d'avoir besoin de plus de choix quant au mode de mise en marché. Je ferai porter mon intervention essentiellement sur ce qui concerne la Commission canadienne du blé. L'un de mes collègues parlera davantage plus tard de la gestion de l'offre.

(1735)

La Commission canadienne du blé a été l'objet d'une certaine controverse au cours des derniers mois. Quoique l'on peut dire qu'elle a toujours été controversée d'aussi loin que je me souvienne, on dirait que la controverse s'accentue, au point de faire régulièrement les manchettes, de nos jours.

On a tenu un plébiscite dans la province d'Alberta, l'an dernier, sur la commercialisation du blé et de l'orge. Les résultats ont clairement montré une tendance de plus en plus marquée vers un système qui permettrait aux producteurs de décider eux-mêmes de la façon dont leurs produits seront mis en marché.

Lors du plébiscite en Alberta, 66 p. 100 des producteurs d'orge ont voté pour le droit de vendre leur orge à l'acheteur de leur choix. Ce sont les deux tiers des producteurs d'orge d'Alberta. Pour leur part, 62 p. 100 des producteurs de blé ont voté pour la possibilité de vendre leur blé à l'acheteur de leur choix. C'est une majorité très forte qu'il faut écouter et non écarter. C'est un facteur important.

Les questions posées aux producteurs étaient: «Êtes-vous en faveur de pouvoir vendre librement votre orge à n'importe quel acheteur, y compris à la Commission canadienne du blé, pour les marchés intérieurs et pour l'exportation? Êtes-vous en faveur de pouvoir vendre librement votre blé à n'importe quel acheteur, y compris à la Commission canadienne du blé, pour les marchés intérieurs et pour l'exportation?» La réponse a été un oui retentissant. La participation à cette consultation a été très élevée. Des milliers d'électeurs ont pris le temps d'aller voter, parce qu'ils croyaient que cet enjeu en valait la peine.

Toutefois, c'est l'avis des agriculteurs d'Alberta, et ce n'est peut-être pas représentatif de l'ensemble des agriculteurs canadiens. Je sais que l'opinion des Albertains est importante, mais comme je représente une circonscription de la Saskatchewan, cette province est importante pour moi. Quant à mon collègue de Lisgar-Marquette, ce sont les producteurs du Manitoba qu'il écoute.

Le gouvernement de la Saskatchewan a fait une enquête, un sondage scientifique auprès des producteurs de la province, leur demandant ce qu'ils pensaient de la Commission canadienne du blé. Cette enquête a donné des résultats intéressants qui sont à notre disposition.

Près de 80 p. 100 des producteurs de la Saskatchewan ont dit qu'ils appuyaient la commission. Cela ne me surprend pas parce que la Commission canadienne du blé a toujours jouit d'un appui solide dans cette province. Je suis au nombre de ces 80 p. 100. Mon parti figure parmi les 80 p. 100 qui appuient la Commission canadienne du blé. Certains prétendent qu'il en est autrement, mais ce n'est pas vrai. Nous ne l'avons pas dit dans cette Chambre. Nous ne l'avons pas dit dans notre documentation électorale, et nous ne sommes pas sur le point de changer d'avis, à moins que nos membres ne nous disent que nous sommes sur la mauvaise voie et que nos électeurs ne nous disent que nous n'allons pas dans la bonne direction.

À y regarder de plus près, on trouve des choses très intéressantes dans les résultats de ce sondage. Par exemple, alors qu'une majorité de producteurs de la Saskatchewan pensent que les pouvoirs monopolistiques de la Commission canadienne du blé en font une puissance commerciale sur le marché international, les producteurs sont divisés sur la question de savoir si la commission obtient les meilleurs prix. Les opinions sont très partagées à ce sujet.

Ce qui est plus révélateur c'est que 58 p. 100 des producteurs de la Saskatchewan estiment qu'il devrait être facultatif d'être membre de la Commission canadienne du blé. Ce sondage est authentique. Il a été fait pas le gouvernement de la Saskatchewan, probablement le gouvernement provincial le plus en faveur de la Commission canadienne du blé.

Une majorité de producteurs se sont dits favorables à la vente de céréales sur les marchés nationaux sans l'intervention de la Commission canadienne du blé. L'opinion était partagée, mais une faible majorité était en faveur de la vente directe aux États-Unis.

Une majorité de producteurs de la Saskatchewan souhaiteraient que le gouvernement exerce moins de contrôle et d'influence sur la Commission canadienne du blé.

Cette enquête a aussi révélé une certaine fracture démographique. Les jeunes producteurs de la Saskatchewan sont plus ouverts que les plus vieux. En fait, ils demandent même des changements.


1615

La majorité des agriculteurs de l'avenir souhaitent que certaines modifications soient apportées à la Commission canadienne du blé.

Ils veulent voir des changements structuraux. Ils ont parlé du double marché, c'est-à-dire le marché national et l'exportation, et des mesures à prendre à cet égard. Durant la dernière campagne électorale, le point saillant était surtout la nécessité d'obliger la Commission canadienne du blé à rendre davantage de comptes aux producteurs qu'elle est censée servir. Les résultats de cette enquête montrent que les producteurs souhaitent massivement que la commission soit davantage tenue de rendre des comptes à ceux qu'elle est censée servir.

(1740)

À l'heure actuelle, la Commission canadienne du blé est contrôlée uniquement par le gouvernement fédéral. Elle rend des comptes au ministre de l'Agriculture et, par ricochet, au Conseil privé. Les commissaires sont nommés par le Conseil privé. Leur mandat dure jusqu'à leur 70e anniversaire. Ils profitent d'avantages luxueux et ont peu de comptes à rendre. Ce n'est pas ce que les producteurs désirent.

Deux tiers des répondants ont déclaré que le gouvernement fédéral devrait exercer moins de contrôle et d'influence sur la commission. Cela est parfaitement conforme à la motion que j'ai présentée aujourd'hui. Les producteurs devraient être en mesure de prendre leurs propres décisions en ce qui concerne la commercialisation de leurs produits.

Les agriculteurs peuvent recommander certaines modifications à la Commission canadienne du blé, mais la décision de mettre ces modifications en oeuvre relève strictement du gouvernement fédéral. Les agriculteurs n'ont pas de pouvoir. Le comité consultatif de la Commission canadienne du blé n'a pas le pouvoir d'apporter des changements, même s'il est censé être un organisme élu qui a de l'influence sur la commission.

La commission est une société d'État. Le gouvernement conserve le pouvoir d'intervenir dans son fonctionnement et de modifier ses pouvoirs et ses attributions.

Plus récemment, un certain nombre d'incidents concernant la Commission canadienne du blé ont soulevé des doutes quant à la capacité de la commission de représenter les intérêts de tous les producteurs. Je pourrais mentionner la façon dont elle s'est occupée de la maladie du fusarium dans le sud du Manitoba, du blé durum gelé dans le sud de la Saskatchewan et des exportations d'orge lors de la récolte de l'an dernier, pour ne mentionner que quelques cas.

Il en est résulté beaucoup de mécontentement dans la communauté agricole. Un certain nombre d'agriculteurs désirent se soustraire à la Commission canadienne du blé. Toutefois, la façon dont la loi sur la commission est rédigée ne leur laisse aucune liberté.

Nous avons vu naître un groupe d'agriculteurs qui s'appelle The Farmers for Justice. Je ne suis pas à la Chambre pour approuver certaines des initiatives de ce groupe. Toutefois, je dirais que la raison pour laquelle nous avons un groupe semblable dans les Prairies, c'est parce que ces gens estiment qu'ils devraient avoir la possibilité de commercialiser leurs produits à l'extérieur de la commission. Actuellement, telle que la loi créant la commission est rédigée, ils n'ont pas ce droit. Ils ne peuvent pas exporter leur blé aux États-Unis sans un permis d'exportation de la Commission canadienne du blé, même s'ils ont fait pousser ce grain sans permis de la commission et sans contrat avec celle-ci.

Je ne dis pas que les agriculteurs devraient rompre leurs contrats. Si un agriculteur a signé avec la Commission canadienne du blé, il n'y a pas de doute qu'il doit respecter son contrat. Les agriculteurs de tout le pays acceptent ce principe. Lorsque les agriculteurs concluent une entente, en général, ils la respectent, et il doit en être ainsi. Toutefois, ils n'ont pas le choix. S'ils choisissent de ne pas signer avec la Commission canadienne du blé, leur blé ne leur appartient pas réellement. Ils n'ont aucune liberté. Ils doivent demander à la commission le droit de commercialiser leurs produits.

Ces agriculteurs demandent un changement, mais ils n'ont pas la collaboration du gouvernement. Actuellement, ils prennent des mesures qui vont au-delà de ce que nous aimerions voir. Ils font des choses que je ne saurais approuver. Cependant, ils sont mécontents, tout simplement parce que ni la commission ni le gouvernement libéral n'ont agi pour corriger la situation.

J'appartiens à un parti politique. Beaucoup de Canadiens appuient mon parti. S'ils veulent y participer, ils peuvent acheter une carte de membre pour 10 $ et ils auront voix au chapitre dans le fonctionnement de mon parti. Ils peuvent voter sur les orientations que préconise mon parti et participer à la sélection des candidats. S'ils ne sont pas satisfaits du Parti réformiste et qu'ils veulent se joindre à un autre mouvement politique de moindre qualité, comme le Parti libéral, ils ont le droit d'y adhérer. S'ils ne sont pas satisfaits de mon parti, je préfère qu'ils se joignent au Parti libéral, car je voudrais qu'ils se sentent à l'aise.

Les agriculteurs de l'ouest du Canada n'ont pas ce choix. Ils sont liés par la Loi sur la Commission canadienne du blé et doivent vendre leur blé en passant par une commission sur laquelle ils n'ont aucun droit de regard. Ils n'ont aucune possibilité d'aider à formuler les orientations de la commission. Ils ne peuvent pas choisir les commissaires qui siègent à la commission. Il n'y a pas de démocratie dans la commission. Elle est devenue une institution très politique.

(1745)

Des rapports et des études ont été réalisés au sujet de la Commission canadienne du blé ces derniers mois. Un de ces rapports, le rapport Kraft, a été commandé récemment par la commission. Il porte sur l'évaluation du rendement de la commission. Il a été commandé par la commission et payé à même l'argent des agriculteurs. Il semble qu'on ait obtenu des renseignements confidentiels pour déterminer si la Commission canadienne du blé faisait du bon travail. C'est très bien. La commission devrait effectuer son propre examen et sa propre évaluation. Je n'ai rien contre cela.


1616

L'ennui, c'est que la commission a commandé une autre étude, cette fois-ci à la firme Deloitte et Touche, laquelle a été dissimulée et dont les agriculteurs n'ont pris connaissance que lorsque le Parti réformiste leur en a fourni un exemplaire il y a quelques semaines. Effectuée en 1992, cette étude révèle de sérieuses lacunes au sein de la Commission canadienne du blé.

Je vois que le député de Kingston et les Îles est d'accord avec moi. Lui aussi est préoccupé par les lacunes décelées au sein de la commission, car il semble s'intéresser beaucoup à cette affaire.

Cette étude ayant été cachée, nous ne saurions dire si la commission a donné suite aux recommandations de ses propres vérificateurs.

Nous disposons d'une autre étude, cette fois commandée par le gouvernement de l'Alberta qui est favorable à un double système de commercialisation du blé. C'est le gouvernement qui a tenu le référendum et a effectué une étude, le rapport Carter. Sa conclusion est diamétralement opposée à celle du rapport Kraft. Selon le rapport Carter, la Commission canadienne du blé est une institution plus coûteuse qu'on l'a prétendu et, à cause de cela, le marché doit assumer des coûts plus élevés qu'on a bien voulu nous le faire croire.

Il va de soi que, les agriculteurs n'ayant pas voix au chapitre, il leur est difficile de savoir si la commission est bien administrée. Faute de transparence, ils ne peuvent pas se prononcer sur le travail accompli par la Commission canadienne du blé. Ils sont tenus de passer par la commission pour vendre leurs produits.

C'est bien d'effectuer des études de ce genre, mais il est encore préférable de remettre sur-le-champ cette commission entre les mains des producteurs qu'elle est censée servir.

La Commission ontarienne de commercialisation du blé joue sensiblement le même rôle que celui qui a été confié à la Commission canadienne du blé, sauf qu'elle est gérée démocratiquement par les agriculteurs ontariens. Les administrateurs de la commission sont élus par les agriculteurs ontariens. Ils divisent l'Ontario en districts. Ils ont une organisation et les producteurs de blé de l'Ontario choisissent les administrateurs qui siègent au conseil.

Ils n'ont pas à s'adresser au gouvernement de l'Ontario ni au gouvernement fédéral, car ils peuvent choisir ces administrateurs eux-mêmes. Il n'en va pas de même des producteurs des Prairies. Ils n'ont absolument pas voix au chapitre dans le choix des commissaires.

M. Milliken: Ils ont un excellent ministre de l'Agriculture.

M. Hermanson: Je constate que le député de Kingston et les Îles ne comprend absolument rien à l'agriculture des Prairies. Il ne sait probablement pas à quoi ressemble une gerbe de blé ou de quel côté d'une moissonneuse-batteuse le grain entre.

Cependant, ce sont des questions essentielles pour les producteurs des Prairies.

On a tenté une expérience avec le marché continental de l'orge à la fin du mandat conservateur. Une chose très intéressante s'est produite alors. Les membres de la Commission canadienne du blé ont déclaré qu'ils pouvaient fonctionner dans ce contexte, que c'était une forme de double système de commercialisation. Ils ont dit qu'ils étaient heureux, car ils savaient qu'on avait modifié les règlements. Ils n'étaient pas prêts à plier bagage. Ils étaient disposés à livrer concurrence. Cela a ouvert les yeux de beaucoup d'agriculteurs sur le fait qu'il se pouvait que la Commission canadienne du blé ne disparaisse pas dans le cadre d'un double système de commercialisation. Ils ont été d'autant plus mécontents de ne pas avoir leur mot à dire dans la façon dont on commercialise leurs produits.

Nous pouvons discuter pendant bien longtemps pour savoir s'il est préférable ou non d'avoir un seul guichet de vente ou un double système de commercialisation. Je ne pense pas vraiment que les députés libéraux devraient prendre cette décision et, pour être tout à fait honnête, je ne crois pas non plus que cette décision doit revenir aux députés réformistes ou bloquistes. C'est plutôt aux producteurs à décider.

Il est très intéressant de noter que, avant les dernières élections et avant qu'on ne revienne sur la décision en ce qui concerne le marché continental de l'orge, le premier ministre et ses principaux collaborateurs dans le secteur de l'agriculture ont déclaré que les producteurs devraient prendre cette décision. Le premier ministre a affirmé qu'il devrait y avoir un plébiscite. Tout à coup, le vent tourne et il n'est plus question d'un plébiscite. «Les agriculteurs ne comprendront peut-être pas la question.» Peut-on imaginer à quel point les libéraux insulteraient les agriculteurs s'ils leur disaient qu'ils ne comprennent pas la question? Je dirai aux gens d'en face que les agriculteurs canadiens sont extrêmement intelligents, sans quoi ils n'auraient certes pas résisté aussi longtemps aux difficultés qui les accablent. Donnez-leur les outils nécessaires et ils feront un excellent travail.

(1750)

Le ministre de l'Agriculture a formé un groupe de consultation qu'il chargé de revoir tout le système de commercialisation du grain de l'Ouest. Les membres du groupe doivent faire un examen méticuleux et élaborer un mode de fonctionnement à recommander au ministre de l'Agriculture.

Une grande partie des travaux a déjà été accomplie et évaluée, grâce au plébiscite, aux sondages et à l'étude réalisée par la province de la Saskatchewan.

Le député de Lisgar-Marquette a interrogé ses électeurs et constaté que la majorité d'entre eux voulaient un plébiscite, peu importe le côté qu'ils appuyaient. Dans la circonscription de Kindersley-Lloydminster, plus de 70 p. 100 des gens interrogés ont dit vouloir un plébiscite. Ce résultat coïncide avec celui du sondage scientifique effectué par la province de Saskatchewan, qui donne de la crédibilité au sondage que nous effectuons auprès de nos électeurs.

Ce sondage dérange vraiment le député de Kingston et les Îles. Il n'aime pas beaucoup faire face à la réalité.


1617

Je demande à tous les députés d'étudier attentivement la motion. Je serais extrêmement déçu si un député s'opposait à ce que nous favorisions un environnement dans lequel les producteurs agricoles prenaient leurs propres décisions sur la façon de vendre leurs produits.

J'apprécie qu'on m'accorde du temps pour parler au nom des agriculteurs canadiens.

M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de répliquer à la motionno 176 au nom du gouvernement.

Le député de Kindersley-Lloydminster a proposé:

Que la Chambre appuie la création d'un milieu où les producteurs agricoles prennent leurs propres décisions en matière de commercialisation.
On ne peut savoir exactement, d'après le libellé de la motion, de quels produits ou de quels systèmes de commercialisation le député veut parler. Nous pouvons cependant présumer, d'après l'intervention qu'il vient de faire et d'après ses déclarations antérieures, qu'il veut parler de la commercialisation du blé et de l'orge dans l'ouest du Canada.

Le débat au sujet de la Commission canadienne du blé et des systèmes actuels de commercialisation du grain dure depuis plusieurs années, et les opinions divergent énormément, allant du statu quo à l'abolition de la commission. Certains soutiennent qu'il est plus avantageux pour les producteurs de transiger avec le service à comptoir unique de la Commission canadienne du blé, alors que d'autres prétendent qu'il serait plus avantageux pour eux de pouvoir commercialiser leur grain quand ils le veulent et où ils le veulent.

L'hypothèse qu'un double marché et la Commission canadienne du blé pourraient coexister n'a cependant pas été prouvée. La commission dit qu'un double système de commercialisation ne peut fonctionner car elle doit faire un paiement initial. Si les paiements initiaux sont trop faibles par rapport au prix au comptant, elle ne recevra ni blé ni orge. Si les paiements sont trop élevés, les producteurs essaieront de livrer toute leur production à la commission.

De plus, l'accord de libre-échange et l'ALENA interdisent tous deux le rétablissement de la commercialisation à comptoir unique après un essai d'un double système de commercialisation à moins que les intérêts des États-Unis n'en souffrent pas.

Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a fait allusion à Humpty Dumpty pour expliquer que nous pourrions pas revenir en arrière. Si nous nous engageons dans une expérience comme celle proposée par le Parti réformiste, nous risquons de compromettre le régime de commercialisation pour de bon.

Ceux qui sont favorables à un double régime de commercialisation veulent que la Commission canadienne du blé se comporte comme n'importe quelle compagnie céréalière. Impossible. C'est un office de commercialisation. Elle n'achète pas les céréales aux producteurs; elle les vend en leur nom. Elle réalise des bénéfices. Tout le produit de la vente est remis aux producteurs. Si les marchés s'effondrent, ce n'est pas elle qui absorbe la perte, ce sont les agriculteurs.

Il y a eu des manifestations publiques pour dénoncer les deux options. En général, les manifestants se sont lancés des invectives les uns aux autres au lieu d'essayer de faire valoir le bien-fondé de leurs points de vue respectifs.

(1755)

Ce qui a manqué dans le débat, c'est un examen posé et objectif. Le débat a jeté plus d'étincelles que de lumière. On a réclamé du gouvernement fédéral une consultation populaire. Le problème, c'est qu'il est difficile de se prononcer par oui ou non, comme il faut le faire dans un référendum, sur des questions complexes de structure de commercialisation ou de compatibilité de régimes différents.

Dans une consultation de cette nature, en Alberta, les producteurs se sont prononcés pour un double régime de commercialisation, mais nombre d'entre eux disent qu'ils auraient voté autrement si cela avait entraîné la disparition de la Commission canadienne du blé.

Il faut reconnaître qu'en apportant d'importantes modifications à un système de commercialisation rien que pour satisfaire un groupe de personnes, on risque de compromettre les avantages financiers et la survie du moyen de commercialisation favori de la majorité des agriculteurs.

Essayons de concentrer le débat. En juillet dernier, le ministre a chargé un comité de commercialisation d'examiner toutes les facettes de la commercialisation du grain au Canada. Ce comité a maintenant terminé ses audiences publiques et ses audiences officielles. Il est à rédiger son rapport. Un de mes collègues en aura plus long à dire là-dessus plus tard, au cours du débat. Cette démarche permet aux céréaliculteurs, aux membres du secteur et aux autres intervenants de participer à un certain nombre de discussions au plan régional. Je crois que c'est beaucoup plus productif que d'adopter une vague motion sur cette décision.

Au cours d'un débat antérieur à la Chambre, le député s'est plaint de ce que les producteurs n'avaient pas leur mot à dire. Il s'est à nouveau plaint aujourd'hui de ce que les producteurs n'ont pas leur mot à dire quant aux solutions à apporter à ce problème. Le comité de commercialisation du grain leur a donné la parole. Il a aussi permis à d'autres parties intéressées de se faire entendre.

Le député a comparu devant le comité le 18 mars. J'étais présent au moment de son témoignage. D'habitude, on ne participe à une démarche que si on la croit valable. Je félicite le député de reconnaître que le ministre a le droit de nommer un comité et d'y expliquer son point de vue.

Je me demande pourquoi le député ne veut pas attendre le rapport du comité. Adopter cette motion reviendrait à condamner le comité de commercialisation du grain avant même qu'il ait terminé son travail.

J'exhorte mes collègues députés à rejeter cette motion. Je les encourage à laisser plutôt le comité de commercialisation du grain terminer son travail et présenter son rapport. Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire sera alors en mesure de prendre une décision quant à l'avenir de la commercialisation du grain. Nous


1618

serons alors tous sûrs que les producteurs se seront exprimés et auront été entendus.

[Français]

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur la motion no 176 présentée par mon collègue de Kindersley-Lloydminster qui amènerait la Chambre à appuyer la création d'un milieu où les producteurs agricoles prendraient leurs propres décisions en matière de commercialisation.

Je dois tout d'abord souligner le caractère très vague de la motion. Il est difficile de bien cerner l'objectif de celle-ci, mais j'essaierai tout de même d'en faire ressortir les points qui m'apparaissent les plus importants.

Premièrement, je suis très fier de citer en exemple le Québec, où les agriculteurs sont, dans une grande mesure, responsables de la mise en marché de leurs produits. Pour que cela soit possible, il faut évidemment qu'ils soient bien organisés et bien représentés.

Voici donc pourquoi on compte, au Québec seulement, 34 600 producteurs agricoles québécois membres de coopératives agricoles. Je crois que c'est une très grande fierté pour nous, les Québécois. La Coopérative fédérée et Agropur, pour ne nommer que celles-ci, réalisent plus de 50 p. 100 du chiffre d'affaires de l'ensemble des coopératives non financières, soit un montant qui s'élève à plus de trois milliards de dollars. L'Union des producteurs agricoles, appelée l'UPA, a pour mandat de regrouper et de représenter tous les producteurs et productrices agricoles du Québec, indépendamment de la dimension et de la structure de leur ferme, de la production dans laquelle ils sont engagés et de l'endroit où ils résident.

(1800)

On constate donc qu'au niveau de la représentation, il n'y a aucun problème et les membres de ces coopératives semblent satisfaits des mandats de celles-ci. On pourrait citer en exemple les producteurs de lait du Canada et du Québec qui, après avoir évalué les changements de direction du commerce international, ont cru bon de mettre en place un quota de mise en marché destiné à l'exportation, afin de pouvoir profiter des ouvertures de marché qui se présentaient alors. Voilà un bon exemple où les producteurs ont pris leurs propres décisions en matière de commercialisation. Ceci fut possible parce que ces producteurs, réunis sous la même bannière d'un office de commercialisation, possédaient un instrument efficace de mise en marché, c'est-à-dire la gestion de l'offre.

De plus, un autre avantage à ce que les producteurs mettent en marché leurs produits via des offices de commercialisation est qu'en plus de contrôler les décisions de mise en marché, ils contrôlent également le coût des intrants, puisque les prix négociés pour la commercialisation des produits reposent sur les coûts de production.

Donc, on peut dire que la motion a le mérite de reconnaître que les agriculteurs ont leur mot à dire pour ce qui est de la commercialisation de leurs produits mais, comme je l'ai démontré, c'est déjà le cas au Québec. Je me demande donc si, par cette motion, mon collègue, le député de Kindersley-Lloydminster ne voudrait pas voir attribuer aux producteurs de l'Ouest le même environnement propice à la commercialisation de leurs produits dont bénéficient les producteurs de lait, d'oeufs et de volaille. Si tel est le cas, je me dois de le féliciter de reconnaître que le modèle québécois est exportable et qu'il pourrait peut-être s'appliquer pour les produits agricoles de l'ouest du Canada.

En ce sens, il est facile de comprendre le vent de protestation qui souffle dans l'Ouest canadien au chapitre, par exemple, de la Commission canadienne du blé. À propos des nominations, les producteurs n'ont aucun droit de regard sur les postes de commissaires. En effet, ceux-ci sont nommés par l'État.

Il a souvent été suggéré que le comité consultatif soit principalement constitué d'agriculteurs, autant pour les postes élus que pour les nominations. Il serait peut-être intéressant de suggérer que les nominations soient portées devant le Comité permanent de l'agriculture. Ceci assurerait sûrement une certaine impartialité dans le choix des postes au sein du conseil.

Il existe également un certain malaise au sein des agriculteurs de l'Ouest face à la Commission canadienne du blé. En effet, certains prétendent que la Commission ne représente plus les intérêts des agriculteurs, faute de ne pas vouloir se défaire d'un système désuet de gestion qui remonte à plus de 60 ans. De plus, le récent plébiscite en Alberta a prouvé que plus de 60 p. 100 des agriculteurs estiment que leurs idées ne sont pas considérées, voire même ignorées par la Commission et ceci s'explique facilement.

Lorsque l'on considère que la Commission contrôle ou influence fortement tous les aspects de la mise en marché, du transport et de la manutention du grain, qu'elle contrôle l'établissement des prix et la vente du blé et de l'orge, l'allocation par wagon, les sociétés céréalières pour ce qui est des rentrées et des expéditions, le traitement à valeur ajoutée et l'allocation des ressources, il est facile de comprendre l'inquiétude des agriculteurs. Je crois que l'on s'inquiète avec raison, car le pouvoir de la Commission, qui n'est pas obligée de rendre des comptes, pourrait devenir abusif et le danger qu'un organisme exerce autant de contrôle réglementaire est qu'il risque de se voir accusé de favoritisme.

Il faut bien me comprendre, il n'est pas question ici d'accuser la Commission canadienne du blé d'incompétence et d'abus de pouvoir, mais de démontrer que le potentiel d'abus existe et qu'il serait peut-être bon de revoir le processus de nomination des commissaires nommés par l'État, ainsi que les postes au sein du comité consultatif nommés par les agriculteurs de l'Ouest, afin d'assurer une représentation plus équitable des intérêts des agriculteurs de l'ouest du Canada.

Malheureusement, les intérêts des agriculteurs et producteurs sont souvent négligés, et pas seulement dans l'Ouest. On a juste à regarder le processus de consultation du gouvernement pour se rendre compte que, plus souvent qu'autrement, il consulte simplement pour la forme. Prenons par exemple les récentes coupures des subsides laitiers. Bien sûr, le gouvernement a consulté les producteurs de lait du Canada et du Québec, mais ils étaient tout de même placés devant un fait accompli: on coupe les subsides, point à la ligne. Maintenant, quelle solution vous ferait le moins de mal?


1619

Décision: des coupures échelonnées sur cinq ans. Conclusion: le gouvernement consulte, soit, mais il fait quand même à sa tête.

(1805)

Un autre exemple plus récent a trait à la question du fromage au lait cru. Obligation professionnelle oblige, je ne peux m'empêcher d'ouvrir cette petite parenthèse. Le gouvernement s'apprête à proposer que l'on modifie le règlement sur les aliments et les drogues pour améliorer le niveau de protection de la santé publique. La modification proposée a trait au fromage non pasteurisé fait à base de lait cru.

Il s'agirait d'exiger, à l'avenir, que tous les fromages destinés à la vente soient pasteurisés. Cela signifierait donc la disparition des tablettes d'épiceries des fromages fins. Vous rendez-vous compte de l'absurdité de cette modification? Juste sur le plan de la santé, si le fromage au lait cru était si dangereux, pourquoi, depuis 1991, autorisons-nous la vente de ceux-ci? Le seul cas d'intoxication relié à un produit laitier au Canada remonterait à 61 ans!

L'alcool et la cigarette sont des produits de consommation à risque, pourtant on ne les supprime pas des tablettes. Fumez deux paquets de cigarettes par jour, en étant conscient que vous risquez de souffrir éventuellement du cancer du poumon, mais ne mangez surtout pas de fromage au lait cru! Ça n'a pas de bon sens. D'autant plus qu'on se permet d'attaquer une industrie agroalimentaire québécoise naissante qui est capable de développer des produits qui feraient rougir nos amis européens.

En effet, c'est au Québec qu'est concentrée la majeure partie de l'industrie au lait cru ainsi que la majorité des consommateurs de fromages faits à partir de ce produit. On a découvert qu'il y a autre chose que le fromage Kraft dans la vie, donc, maintenant n'est pas le moment de nous enlever les plaisirs de la gastronomie.

C'est à se demander si, comme mon collègue et député de Frontenac le mentionnait récemment, ce n'est pas une sorte de psychose de l'intoxication ou plutôt des pressions de gros producteurs laitiers qui ont peur de perdre une part de leur marché qui motivent le gouvernement dans de dossier. Il reste à voir ce que le processus de consultation entraînera.

Qui sait, le gouvernement fera peut-être preuve de gros bon sens en ne mettant pas de l'avant son projet d'attaque contre le fromage au lait cru. Sinon, aujourd'hui c'est le fromage, mais demain ça pourrait être la salade de poulet ou la consommation de thon qui pourrait être interdite. En effet, on a constaté ces dernières années des cas d'épidémie impliquant la même bactérie que celle contenue dans certains fromages au lait cru.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, cette motion vise à donner aux agriculteurs canadiens un droit qui a été accordé à d'autres au Canada et dans le monde entier, celui de commercialiser leurs produits comme ils l'entendent. On aurait pu penser que les agriculteurs n'auraient pas à demander ce droit au gouvernement, mais ce n'est pas le cas.

Avant de faire mon exposé, je voudrais parler d'un agriculteur qui fait la grève de la faim depuis trois semaines pour tenter d'obtenir ce qui, penserait-on, est accordé volontiers dans notre pays. Tom Jackson, un agriculteur de Fort Saskatchewan, poursuit sa grève de la faim pour essayer d'amener le gouvernement à modifier la Loi sur la Commission canadienne du blé.

C'est draconien, c'est vrai, mais cet agriculteur se dit prêt, vu l'importance de l'enjeu, à prendre des mesures draconiennes pour amener le gouvernement à apporter les changements qu'il souhaite à la Commission canadienne du blé, à l'instar d'une majorité d'agriculteurs de l'Alberta et de probablement partout au Canada.

Le sujet dont je vais parler dans le cadre du débat sur la motion présentée aujourd'hui par le député de Kindersley-Lloydminster concerne les secteurs agricoles assujettis à la gestion de l'offre.

Les secteurs assujettis à la gestion de l'offre doivent être considérés séparément parce que, contrairement à ce qui se produit partout ailleurs dans le domaine agricole, dans ces secteurs, de nombreux agriculteurs, probablement la majorité, ne souhaitent pas la suppression de la gestion de l'offre. Ils ne veulent pas que leur industrie soit ouverte à la concurrence ni avoir la latitude de commercialiser leurs produits comme bon leur semble.

Je pense que c'est probablement là l'opinion d'une majorité d'agriculteurs. Le système de gestion de l'offre a très bien fonctionné pour eux. En réalité, il est toutefois fort probable que cela se produise, que les secteurs assujettis à la gestion de l'offre soient ouverts à la concurrence de l'extérieur. Cela risque fort de se produire.

(1810)

Il est vrai que la gestion de l'offre ne correspond pas totalement aux idées du Parti réformiste. Ce que les réformistes affirment, et depuis quelque temps déjà, c'est qu'ils veulent ce qu'il y a de mieux pour les agriculteurs dans les secteurs agricoles assujettis à la gestion de l'offre.

Il est important, du moins pour moi, de tenter de faire bien comprendre la position réformiste, notamment ce que les réformistes réclament pour les agriculteurs et les autres intervenants des secteurs agricoles touchés. Il est important, du moins pour moi, de communiquer notre message sans passer par le filtre des médias ni même par celui de certains dirigeants du domaine. Il arrive très souvent que ce que disent les députés réformistes et ce que rapportent les médias diffère beaucoup. Ça reste intéressant, mais c'est très différent.

Le dimanche matin, pour calmer son angoisse et se détendre, mon voisin, un agriculteur, fait une promenade dans son véhicule à cinq vitesses. Il prend une courbe à 120 kilomètres heure en accélérant, si bien qu'au sortir de la courbe, il atteint 140 kilomètres heures. Il se sent bien et cela le détend.

Un dimanche matin, mon voisin sort de son entrée et commence à accélérer, les yeux rivés sur la route, quand il voit une automobile venir en sens inverse. Soudain, la voiture fait une embardée. «Mon Dieu, il y a un chauffeur saoul sur ma route un dimanche matin» se dit-il.


1620

Lorsque l'autre voiture arrive assez près de lui, elle ralentit. Il ralentit aussi, mais n'a pas l'intention d'arrêter. Le conducteur est une femme. Il se dit: «Mon Dieu, il y a une femme au volant sur ma route un dimanche matin.» La dame arrête sa voiture et ouvre sa fenêtre. Il n'a vraiment pas l'intention d'arrêter. En passant à côté de l'automobile, il entend la conductrice crier «cochon». Cochon? Il se met en colère et réplique «cochonne». Il accélère, prend la courbe à 140 kilomètres heure et frappe un cochon.

En raison de son problème d'attitude, cet agriculteur a refusé de voir les signes qui lui auraient permis d'éviter l'obstacle, c'est-à-dire le cochon.

Je voudrais parler de quelques signaux que les agriculteurs des secteurs assujettis à la gestion de l'offre ne manqueront pas, je l'espère sincèrement. Je parle évidemment de la fin annoncée de la gestion de l'offre comme nous la connaissons. On nous avertit déjà que des changements vont ouvrir nos marchés à d'autres pays, tout particulièrement aux États-Unis.

Il se peut que le Canada perde une cause que les États-Unis ont portée devant un groupe constitué en vertu du chapitre 20 de l'ALENA. Dans ce cas, notre système actuel de gestion de l'offre subirait des transformations radicales. Bien que nombre d'agriculteurs et d'autres intervenants de l'industrie croient que nous aurons gain de cause, bien d'autres encore en sont beaucoup moins convaincus. Quoi qu'il en soit, ils s'inquiètent de l'issue des audiences du groupe d'experts.

La deuxième menace qui pèse sur le secteur soumis à la gestion de l'offre serait l'entrée du Chili dans l'ALENA et la réouverture de cette entente. Le gouvernement du Canada a dit à maintes reprises aux agriculteurs canadiens de ne pas s'inquiéter à ce sujet. L'entente ne sera pas rouverte même si le Chili y adhère.

Les libéraux ont dit durant la campagne électorale qu'ils ne signeraient pas l'ALENA, à moins que certaines conditions y soient ajoutées. Ces conditions n'ont pas été ajoutées à l'entente, mais ils l'ont signée quand même. On ne peut pas faire confiance au gouvernement quand il s'agit de promesses faites au sujet de ces accords commerciaux. Nous ne savons pas ce qui va arriver.

Si on regarde un peu plus loin, qu'adviendra-t-il de notre système de tarification actuel après la prochaine ronde de négociations, qui commenceront en 1999? Les membres du GATT continueront-ils de permettre à l'Europe, au Canada, aux États-Unis et à d'autres pays de maintenir des droits de douane élevés pour les importations de produits laitiers, les oeufs et la volaille? D'abord, j'estime que cette ronde de négociations sera beaucoup plus courte que dans les rondes précédentes. Elle ne durera pas 5 à 10 ans comme la dernière fois.

Au terme des négociations, les autres pays, les États-Unis notamment, auront un plus grand accès aux marchés canadiens dans le secteur soumis à la gestion de l'offre. J'estime qu'ils auront un accès bien plus grand.

(1815)

Un autre signal auquel, je l'espère, pensent les agriculteurs, et qui leur permettra peut-être d'éviter le cochon, est la possibilité de négociations commerciales bilatérales avec les États-Unis. C'est là une possibilité très réelle.

Plusieurs facteurs différents pourraient être à l'origine de ces négociations bilatérales. Elles pourraient être amorcées en raison de la décision du groupe d'experts. Elles pourraient être engagées à cause des négociations relatives à l'adhésion du Chili à l'ALENA. Les Américains pourraient enfin être disposés à réduire la protection dans certains secteurs protégés, comme les arachides, le sucre et le café.

Si les États-Unis acceptent de modifier leur régime d'aide aux exportations, le gouvernement fédéral acceptera-t-il de réduire ses tarifs protecteurs? Qui sait. Je puis dire honnêtement que j'ai plus de questions que de réponses. Avec la libéralisation des échanges commerciaux partout dans le monde, je suis certain que ces changements se produiront plus vite qu'on pourrait le penser.

Lorsque j'ai mentionné ces possibilités à une réunion à Richmond, au Québec, la première question qu'on m'a posée a été: quelle est l'autre possibilité? Quelle est la possibilité que le Québec se sépare du reste du pays? Évidemment, cela mettrait fin du jour au lendemain à la gestion de l'offre.

En terminant, je me demande quelle impression j'ai laissée aux producteurs aujourd'hui. Je ne leur ai pas laissé une impression vraiment positive, mais c'est parce que j'ai commis la même erreur que la plupart des gens commettent lorsqu'ils parlent de la disparition possible de la gestion de l'offre. J'ai parlé surtout des menaces découlant de ce changement. Mais que dire des nouvelles possibilités qu'auront nos producteurs? Ils feront face à une concurrence plus forte à cause des produits qui viendront des États-Unis. Par contre, l'immense marché américain leur sera ouvert. Les agriculteurs canadiens dans les secteurs soumis à la gestion de l'offre peuvent certainement faire concurrence à leurs voisins américains. Ils se tireront très bien d'affaire.

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet de la motion d'initiative parlementaire du député de Kindersley-Lloydminster. J'en suis heureux parce que je sais que mes homologues de la Saskatchewan et de l'Alberta viennent de communautés agricoles. Je suis ici pour représenter le point de vue de ces communautés.

Je suis originaire d'une communauté rurale du sud-est de la Saskatchewan. Les préoccupations formulées sont justifiées. Le ministre de l'Agriculture a créé un mécanisme pour examiner cette question. Où allons-nous? Comment pourrons-nous aborder le XlXe siècle si nous ne comprenons pas les problèmes actuels?

J'ai créé un groupe, que j'ai autorisé à tenir des audiences au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta. Le groupe a tenu ses audiences et il viendra présenter son rapport au ministre de l'Agriculture.


1621

Je tiens à dire aux députés d'en face que, tout au long de mes déplacements dans le sud-est de la Saskatchewan, je constate que les opinions varient. Certains voudraient que la vente du grain et autres denrées se fasse selon un double système de commercialisation. Or, il y a des gens qui me disent que la Commission canadienne du blé doit demeurer inchangée.

La Commission canadienne du blé doit subir des changements. Ces changements doivent être faits au moyen d'un mécanisme adéquat, c'est-à-dire par le panel qui a été créé pour examiner la question.

Examinons certaines des propositions que ce panel va examiner. Elles sont valables. Quels sont la nature et les besoins des marchés possibles? Examinons les denrées et produits qui pourraient être vendus sur ces marchés. Voyons ensuite les systèmes de commercialisation qui sont actuellement accessibles ou qui pourraient le devenir pour nous permettre d'exploiter ces marchés pour le plus grand bien des producteurs de l'Ouest.

Il y avait des parties intéressées. Qui avons-nous choisi comme président? Un avocat de Saskatoon connu et respecté. Qu'avons-nous fait ensuite? Nous nous sommes adressés à des tenants des deux côtés de la question. Le ministre de l'Agriculture a dit qu'il voulait que les deux points de vue soient représentés. Ces personnes viendront exprimer honnêtement leur opinion. Ce ne sera peut-être pas l'opinion que souhaitent les députés d'en face, mais elle portera néanmoins sur quelque chose de bien défini, elle reflétera fidèlement la réalité actuelle et elle nous permettra d'entrer dans le XlXe siècle.

(1820)

Quelqu'un a dit que les députés ne tiennent pas tous des sondages. J'en tiens chaque fois que je retourne dans ma circonscription. Je sonde mes homologues du milieu agricole et je les écoute.

Les gens du terminus intérieur ont leur idée sur cette question. Les habitants du sud-est de la Saskatchewan, de la région de Redvers, sont préoccupés par ce double système de commercialisation. D'autres agriculteurs disent: «Je suis vieux, je suis établi et, à mon avis, la Commission canadienne du blé fait un travail fiable.» C'est très beau de critiquer quand on ne comprend pas.

Cependant, la Commission canadienne du blé s'expose à la critique si elle ne change pas. Cela veut-il dire que nous devrions abandonner tout le système? Je ne crois pas. Je pense que, en bout de ligne, nous constaterons que tous les habitants de l'Ouest appuient la Commission canadienne du blé qu'ils estiment être l'organisme de commercialisation le plus efficace.

Ne nous leurrons pas. Si nous éliminons la commission pour la remplacer par un système de commercialisation où chacun agit à son gré, j'irai jusqu'à dire que, d'ici cinq ans, si ce n'est pas avant, les agriculteurs qui voulaient s'en débarrasser vont revenir frapper à la porte du ministre pour demander qu'elle soit rétablie.

Un de mes amis s'est rendu récemment en Chine. Il a parlé là-bas à des agriculteurs. Il a dit que nous devions féliciter nos producteurs. Ce sont eux qui produisent la meilleure qualité de grain au monde. Ils en ont en quantité suffisante pour répondre aux besoins de la Chine et la livraison se fait toujours à temps. Les Chinois seront bientôt les principaux acheteurs de notre bon grain. Il a toutefois fait cette mise en garde: «Si vous éliminez ce comptoir unique de commercialisation, nous réfléchirons deux fois avant de vous acheter du grain.»

C'est ce qui se passe dans le monde du commerce. Il y a des gens qui craignent que nous renoncions à cet organisme unique qui remplit très bien sa mission.

Je veux féliciter mon collègue de Kindersley-Lloydminster d'avoir présenté cette motion. Nous voulons pouvoir discuter ouvertement et à tête reposée des options possibles et de l'orientation à adopter au sujet de cette question.

Je félicite aussi le secrétaire parlementaire, qui a souligné un point très important, c'est-à-dire que le vote exprimé en Alberta ne constituait pas nécessairement une réponse directe à la question posée.

On à demandé aux gens: «Voulez-vous un système de mise en marché à deux volets?» Ils ont dit oui. Si cela signifie la fin de la Commission canadienne du blé, ils pourraient très bien dire non. C'est un argument très valable.

Je précise en terminant que les résultats du vote seront examinés par le ministre de l'Agriculture. Il examinera les deux côtés de la question et je suis sûr qu'il fera des recommandations pour qu'on fasse les changements nécessaires dans l'intérêt des agriculteurs de tout le Canada.

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Monsieur le Président, je vous remercie de cette occasion de dire quelques mots à propos de la motion pendant le peu de temps qui nous reste.

Depuis 50 minutes environ, j'écoute les propos des députés d'en face. J'ai l'impression qu'ils n'ont pas bien compris la motion, car nous parlons de deux choses différentes aujourd'hui. Les députés d'en face comparent les mérites d'un guichet de vente unique à ceux d'un système de commercialisation mixte dans le cadre de la Commission canadienne du blé ou quelque chose du genre. Tout ce que dit le député de Kindersley-Lloydminster dans sa motion c'est que les agriculteurs, les producteurs devraient avoir le droit de prendre leurs propres décisions en matière de commercialisation. Nous ne sommes pas là pour décider des modalités.

(1825)

Il y a quelques minutes, le député d'Essex-Kent a mis en doute la capacité des agriculteurs à s'occuper de telles questions. Étant moi-même agriculteur, je suis choqué et horrifié qu'un député du Parlement de ce pays puisse insinuer que les agriculteurs sont trop stupides pour prendre une décision aussi importante.

Ce qu'il a dit c'est qu'il allait décider pour eux, qu'il savait ce qui était bon pour eux. Cela fait trop longtemps que les agriculteurs sont traités de la sorte et ils ne l'acceptent plus.

1622

Parlons de démocratie. Faisons l'historique de la Commission canadienne du blé. Elle a été créée sans consultation formelle des intéressés. Les commissaires sont nommés par le gouvernement sans qu'on demande l'avis des agriculteurs. La commission, toujours sans leur demander leur avis, a mis l'orge en vente libre puis a révoqué sa décision. Les producteurs peuvent seulement commercialiser leur canola et d'autres cultures particulières à l'extérieur de la commission du blé. Mais on ne leur a toujours pas demandé leur avis à ce sujet.

Lors de la campagne électorale de 1993, les libéraux, qui forment maintenant le gouvernement, annonçaient qu'ils défendraient les grands principes de la démocratie. Le ministre de l'Agriculture avait promis un plébiscite sur l'orge. Voilà maintenant deux ans et demi de cela et rien n'a changé, il n'y a toujours pas eu de consultation officielle.

Il n'y a pas de démocratie à la Commission canadienne du blé. Je voudrais dire que, personnellement, je pense qu'il y a une place pour la Commission canadienne du blé dans ce pays. Mais si l'on ne fait rien, cette commission financée par les producteurs pourrait très bien s'autodétruire de l'intérieur, sans aucune pression de l'extérieur.

J'appuie la motion de mon collègue de Kindersley-Lloydmins-ter. Mon seul regret c'est que le gouvernement ait estimé que cette motion ne ferait pas l'objet d'un vote. Il a jugé bon d'étouffer un peu plus la démocratie en ne permettant pas que la Chambre s'exprime sur cette motion et, surtout, que les agriculteurs votent sur une question qui a des conséquences extrêmes sur leur destin.

Quand le gouvernement va-t-il se réveiller et s'apercevoir que les producteurs n'accepteront pas plus longtemps ce genre d'attitude dictatoriale à l'égard de leur industrie?

Il y a quelques semaines, je passais par Moose Jaw et j'entendais une émission à la radio où l'invitée était Nettie Wiebe, la présidente du Syndicat national des cultivateurs, qui défend une mise en marché ordonnée par un organisme unique. Je n'ai rien contre cela.

Elle disait que c'est une démocratie et que, dans toute démocratie, c'est la majorité qui gouverne. Tout à fait d'accord avec cela. Mais quand la majorité a-t-elle eu l'occasion de prendre une décision sur ce genre de choses?

Je pourrais parler longtemps de l'importance d'une consultation des intéressés, mais souvenons-nous que nous ne parlons pas ici de la valeur d'un organisme unique de commercialistaion par opposition à un double système de commercialisation. Nous parlons seulement de la question de donner aux producteurs la possibilité de se prononcer.

Le vice-président: Pouvons-nous dire qu'il est 18 h 30?

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1622

MOTION D'AJOURNEMENT

[Français]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office, en conformité de l'article 38 du Règlement.

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, le 21 mars dernier, je posais une question au premier ministre en cette Chambre sur les incidents qui se sont déroulés à Gagetown, au Nouveau-Brunswick, qui comprenaient, entre autres, des rites initiatiques de mauvais goût. Ces événements démontrent une fois de plus que les chefs de l'armée canadienne ont perdu le contrôle de l'éthique militaire. Les événements successifs de la Somalie, de Petawawa, de la Citadelle de Québec démontent hors de tout doute que les haut gradés s'organisent toujours pour tirer leur épingle du jeu et se lavent les mains de tout ce qui pourrait les empêcher d'obtenir une promotion. C'est cela qui compte, être promu, et souvent, au détriment même de la vérité.

Aujourd'hui, face à tous ces événements connus, on se demande qui dirige les forces? Pourquoi, lorsqu'il y a des événements malheureux, tels que ceux qui se sont déroulés récemment, il n'y a jamais personne, dans le haut de la chaîne de commandement, qui est responsable? Si tel est le cas, ne devons-nous pas craindre de la réussite des entreprises, ici et à l'étranger, des forces armées?

Comme vous le savez, avant les événements tristes et malheureux de Somalie, je rappelle qu'il y a eu mort d'homme, le Canada jouissait d'une réputation sans faille, sans tache dans le domaine du gardiennage de la paix. Lorsqu'il y a mission de paix, nos soldats nous représentent, ils sont nos ambassadeurs et doivent se conduire et agir avec beaucoup de dignité et de professionnalisme. Leurs agissements doivent être à toute épreuve. Ils n'ont pas le droit de nous décevoir.

Un autre événement qui a été rendu public est celui des manoeuvres de la Citadelle de Québec qui a été autorisé par les dirigeants des forces et qui aurait pu tourner à un bain de sang. En tant qu'élus, que devons-nous penser de telles manoeuvres improvisées?

À ce moment-ci, les Canadiennes et les Canadiens perdent de plus en plus confiance en l'intégrité de la chaîne de commandement des forces canadiennes. Je tiens à vous rappeler que pour l'exercice 1996-1997, on dépensera 10,7 milliards; 10,7 milliards, c'est beaucoup, beaucoup d'argent.

Je demande au ministre de prendre ses responsabilités. Il doit tout faire pour rétablir la crédibilité des Forces armées canadiennes. Il doit faire toute la lumière sur les agissements inacceptables de certains membres des forces et enrayer le mal qui ronge l'armée. Il doit avoir le courage d'aller jusqu'en haut de la chaîne de commandement. Si le ministre est incapable de rétablir complètement la réputation des forces, il n'aura d'autre choix que de partir.

Au moment où je vous parle, rien ne m'indique que le ministre réussira.

[Traduction]

M. John Richardson (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le député d'en face a demandé que les Forces canadiennes soient tenues de rendre des comptes. La reddition de comptes est l'un des principes fondamentaux des Forces canadiennes.

1623

Les Forces canadiennes ne tolèrent absolument pas le bizutage et autres activités du genre, qui ne sauraient être qualifiées de militaires. La politique de tolérance zéro existe, elle a été bien diffusée et les militaires doivent agir en conformité de cette politique. Comme tous les Canadiens, ils sont responsables et doivent rendre compte de leurs actions.

Si un membre des Forces canadiennes ne respecte pas les consignes très claires qu'il a reçues, des mesures appropriées à la gravité de la transgression sont prises. Que le député sache que toute infraction à la politique des Forces canadiennes est traitée fermement et efficacement.

À cause de cet incident, certains militaires feront l'objet de mesures disciplinaires et administratives. Des mesures administratives seront prises dans le cas des témoins de l'incident, qui recevront des avertissements formels indiquant qu'ils ne devront plus jamais participer à de telles activités sous peine de conséquences graves pour leurs carrières.

Les autres membres des Forces canadiennes qui ont participé à divers degrés et de diverses façons aux événements du camp de Gagetown seront accusés de «conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline» en vertu de l'article 129 de la Loi sur la défense nationale. L'officier responsable de leur a le choix entre diverses sanctions.

Les procès des soldats accusés seront bientôt terminés et toute mesure prise à la suite de ces procès sera immédiatement rendue publique. Je ne commenterai pas davantage les cas en question puisqu'il ne faut pas nuire à l'application régulière de la loi.

Il semble que les députés de l'opposition tentent souvent d'amener le gouvernement à passer outre à l'application régulière de la loi, au nom de l'opportunisme politique. Le député d'en face a déjà dit à la Chambre qui étaient les responsables de l'incident du camp de Gagetown selon lui, mais il me semble que la justice sera mieux servie si nous laissons le processus juridique suivre son cours.

* * *

(1835)

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, le 11 mars dernier, je posais une question à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration à propos de ce que l'enquêteur Roger Tassé qualifie «d'honoraires de facilitation» et que j'appelle pots-de-vin versés par des agents de renvoi de son ministère à des fonctionnaires étrangers pour qu'ils acceptent leurs propres ressortissants. La ministre n'a jamais agi face à ces allégations très graves, malgré notre demande d'ordonner une enquête spécifique à cet effet.

La ministre devrait s'engager clairement à suivre les recommandations du rapport Tassé. Il faut mettre fin aux méthodes répréhensibles utilisées par les agents de l'immigration pour expulser des ressortissants étrangers. C'est inadmissible, voire illégal, que des fonctionnaires aillent jusqu'à falsifier ou fabriquer des faux documents dans le but de rendre possible ou d'accélérer la déportation des demandeurs d'asile.

De plus, certains agents de renvoi administrent des drogues pour calmer des personnes déportées. Hier j'ai été saisi du cas d'un Algérien, M. Bedj, qui a été menacé récemment d'administration de médicaments s'il causait du trouble lors de son départ. L'agent a ouvert son sac de voyage et lui a montré une seringue neuve et une boîte de médicaments.

Je dénonce également la mentalité policière de certains agents du service des renvois. Souvent, sans motif, ils utilisent la force ou de l'équipement non nécessaire, par exemple en mettant des menottes aux détenus. Parfois, ils violent les droits et les libertés de la personne. Beaucoup de ces actions ne sont jamais connues du public. Le CIC devrait permettre l'accès à tous les renseignements sur la fonction de renvoi.

Dans le domaine de la détention et de la libération des personnes détenues, c'est l'arbitraire absolu. Il n'existe nulle part des critères précis pour procéder à une détention ou à une libération. Parfois, des ressortissants étrangers demeurent des mois et des mois dans des centres de détention, sans aucune justification, souvent dans des conditions déplorables, hommes et femmes, adultes et enfants ensemble. Moi-même, j'ai rencontré, au Centre de détention pour immigrants de Mississauga, une fille kurde, mineure d'âge, qui s'y trouvait depuis plus de huit mois, sans qu'aucune accusation ne soit déposée contre elle.

Je profite de cette occasion pour dénoncer le comportement à mon endroit des responsables du centre de détention situé sur la rue Saint-Jacques, à Montréal. Malgré les arrangements préalables à cet effet, ils m'ont fait attendre un quart d'heure à l'extérieur, en décembre dernier, avant de me permettre d'y entrer avec mon adjointe et une représentante du Comité d'aide aux réfugiés. Nous avons eu à attendre à l'extérieur alors que la température était très froide. J'ai demandé une enquête sur cet incident. Je ne suis pas satisfait des explications données jusqu'ici par la ministre et par le directeur de CIC au Québec.

De plus, je demande à la ministre de reconsidérer sa décision de déménager ce centre de détention à Laval, car c'est trop loin pour les avocats, les intervenants et les familles des détenus.

D'autre part, je suggère à la ministre de réviser toute la fonction d'accompagnement des expulsés, qui coûte très cher au Trésor public. Pourquoi deux ou trois agents doivent-ils escorter un individu qui n'est pas un criminel?

Depuis quelques années, le gouvernement du Canada et des États-Unis discutent d'une entente pour contrôler, diminuer et décourager les revendicateurs d'asile. En novembre 1995, ils ont paraphé un projet d'entente dont le texte final devait être signé d'abord en février dernier, ensuite en avril.

Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration a tenu des consultations publiques sur ce document. Presque tous les organismes et personnes, tant du Canada que des États-Unis, qui ont comparu devant ce comité se sont prononcés contre ce projet.

1624

Maintenant, les gouvernements canadien et américain ont décidé de reporter les négociations de cette entente jusqu'à l'été prochain, après que les États-Unis auront adopté une nouvelle législation encore plus dure contre les réfugiés.

Je m'oppose vigoureusement à cette entente qui empêchera des milliers de personnes persécutées de venir au Canada à travers les États-Unis déposer une demande de statut de réfugié.

Il faut savoir qu'un tiers des quelque 20 000 demandeurs d'asile transitent par les États-Unis. Vous savez, le niveau de protection des réfugiés offert par notre voisin du Sud est considérablement inférieur à celui du Canada.

Cette volte-face des libéraux est incompréhensible et injustifiée. Le prédécesseur de la ministre, aujourd'hui ministre de l'Environnement, disait, en novembre 1993, juste après sa nomination au Cabinet:

[Traduction]

«À mon sens, il faudra s'assurer que toute entente est équitable et respecte nos normes.»

[Français]

En tant que premier député d'origine latino-américaine en cette Chambre, je suis très inquiet des conséquences que pourrait avoir cette entente. En pratique, les personnes persécutées d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud ne pourront plus venir demander la protection du Canada. Il n'y a presque aucun vol direct entre l'Amérique latine et le Canada.

Je demande au gouvernement de renoncer et d'oublier purement et simplement ce projet d'entente.

Finalement, je demande à la ministre d'accorder la résidence permanente au Canada à M. Victor Regalado, un réfugié salvadorien qui vit ici depuis maintenant 13 ans sans statut, qui travaille ici et qui a deux enfants, nés au Québec, avec sa conjointe également citoyenne canadienne.

La ministre devrait solutionner ce cas dans les plus brefs délais.

[Traduction]

Mme Maria Minna (secrétaire parlementaire de la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le député a posé sa question pour développer ce qu'il avait demandé dans une question adressée à la ministre concernant le rapport Tassé, et a expliqué ses motifs.

Or, le député a passé le plus clair de son temps à évoquer toutes sortes d'allégations et de prétendues irrégularités, et à parler de questions dont est actuellement saisi le comité, ce qu'il sait pertinemment puisqu'il siège au comité. Il sait également très bien que, n'étant pas encore achevé, le rapport n'a pas pu être déposé à la Chambre. Voilà pourquoi il est assez difficile de débattre de quelque chose dont la Chambre n'est pas saisie. Et puis le député cite des cas particuliers, encore une chose que l'on ne doit pas faire.

Je vais toutefois prendre quelques minutes pour discuter de la question que le député a posée à la ministre à la Chambre. Je crois que c'est précisément l'objet de ce débat d'ajournement. Le député a formulé des préoccupations, des allégations et des allusions au sujet des pots-de-vin.

En fait, nous avons entrepris une enquête dans les cas où nous avions suffisamment d'informations le justifiant. Nous ne pouvons toutefois faire cela en nous fondant sur de simples allégations générales.

Le gouvernement reconnaît qu'il faut faire respecter les dispositions en matière d'immigration avec un niveau de professionnalisme élevé, en respectant les individus et la loi. C'est quelque chose que le gouvernement a vraiment à coeur. Voilà pourquoi, alors que nous nous employons à renouveler et à améliorer la fonction d'application des règlements, nous prenons très sérieusement en considération les recommandations contenues dans le rapport de M. Tassé.

Comme je l'ai dit la dernière fois que nous avons abordé la question, tous les cas graves d'illégalité ou de comportement inadéquat font l'objet d'une enquête et d'un suivi par un fonctionnaire du ministère. On ne peut toutefois entreprendre une enquête sur la foi de simples allégations. Il faut avoir certaines preuves. C'est pour cette raison que, au moment de la publication du rapport Tassé, le sous-ministre a invité toute personne pouvant prouver ses allégations d'inconduite à présenter ses preuves. Comme nous l'avons déjà dit, les directeurs généraux régionaux du CIC feront enquête et traiteront comme il se doit toute preuve qui leur sera présentée.

Comme je l'ai déjà dit, nulle part dans le rapport Tassé est-il question de pots-de-vin visant des fonctionnaires ou toute autre personne. En fait, le rapport Tassé mentionne bien des choses, mais rien en ce sens.

J'aimerais parler de certaines observations très positives qu'il contient.

[Français]

Le vice-président: Je suis désolé, mais le temps de parole de la secrétaire parlementaire est maintenant écoulé.

La motion portant que la Chambre s'ajourne est réputée adoptée. En conséquence, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à 10 heures.

(La séance est levée à 18 h 44.)