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ENSU Rapport du Comité

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[ Introduction ]

[ Contexte ]

[ Des faits sur le changement climatique ]
[
Engagements canadiens et internationaux antérieurs ]
[
Travaux antérieurs du Comité permanent de l'environnent et du développement durable ]

[ Mesures Fédérales Actuelles pour réduire les émissions ]

[Ressources naturelles Canada ]
[
Travaux publics et Services gouvernementaux Canada ]
[
Finances Cananda ]
[
Autres Ministères ]

[ Conclusions ]

[ Recommandations ]

[ Coordination des mesures gouvernementales ]
[
Plan étapiste de mise en ouvre de l'engagement ]
[
Contrôle et évaluation ]
[
Mieux comprendre les changements climatiques ]
[
Encourager le changement dans l'utilisation de l'énergie ]
[
Promotion des énergies de remplacement, de l'innovation et de l'écotechnologie ]
[
Travailler avec les municipalités ]

[ Adoption du modèle du Toronto Atmospheric Fund ]
[
Capture et utilisation du méthane des décharges ]

[ Transport ]
[
Éducation ]
[
Autres Questions ]


KYOTO ET APRÈS : RELEVER LE DÉFI DU CHANGEMENT CLIMATIQUE

INTRODUCTION

Depuis le milieu des années 80, quand le changement climatique a commencé à éveiller des craintes, le Canada a été en première ligne dans les efforts internationaux pour stabiliser la concentration atmosphérique des gaz à effet de serre à un niveau qui soit sans influence néfaste sur le climat du globe. Ces efforts ont culminé au Sommet de la Terre à Rio en 1992, où 36 pays dont le Canada ont conclu une entente volontaire visant à ramener, d’ici l’an 2000, les émissions de gaz à effet de serre au niveau de 1990.

Cependant, il est clair aujourd’hui que la majorité de ces pays n’atteindront pas cette cible. En outre, le leadership du Canada est remis en cause par le peu de progrès réalisés chez nous.

Le Secrétariat de la Convention cadre sur les changements climatiques (CCCC) des Nations Unies signale que, parmi les pays développés, les États-Unis, le Japon et le Canada sont responsables de 85 p. 100 de l’augmentation des émissions de CO2 entre 1990 et 1995 (États-Unis, 56 p. 100; Japon, 21 p. 100; Canada, 8 p. 100). Compte tenu de l’importance relative de notre économie et de notre population par rapport à celles des États-Unis et du Japon, le bilan du Canada est médiocre. Si aucune autre initiative n'est prise, les projections indiquent que nos émissions totales de gaz à effet de serre pourraient encore dépasser de 8 à 13 p. 100 celles de 1990 en l’an 2000.

Inquiète du manque de progrès réalisés à ce jour, la Conférence des parties de la CCCC a tenu des rencontres pendant toute l’année 1997 pour préparer une séance importante de négociations à Kyoto au début de décembre, où on espère adopter un ensemble d’échéanciers et de cibles exécutoires.

Par conséquent, et à cause de la piètre performance du Canada et des négociations de Kyoto, le Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes s’est senti obligé d’examiner la situation actuelle de la lutte contre le changement climatique au Canada, et d’offrir une série de suggestions concrètes sur la façon d’améliorer notre performance. Plus précisément, le Comité a examiné les programmes et les mesures fédéraux existant de lutte au changement climatique afin de relever les lacunes et les politiques contradictoires qui pourraient gêner notre effort national de stabilisation et de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

CONTEXTE

a) Des faits sur le changement climatique

Depuis 10 000  ans, la concentration du gaz carbonique (CO2) dans l’atmosphère est demeurée stable &ag rave; environ 280 parties par million (ppm). Cependant, depuis la révolution industrielle, cette concentration a augmenté de 30 p. 100 et atteint maintenant 364 ppm; selon des prévisions prudentes, elle pourrait atteindre 500 ppm en l’an 2100, soit presque le double de ce qu’elle était à l’époque préindustrielle. De plus, l ’on sait que les concentrations des autres grands gaz à effet de serre, soit le méthane et l’oxyde d’azote, sont également en train d ’augmenter.

Ces faits, et la hausse de la température moyenne de l’air en surface de la planète de 0,3 à 0,6oC dep uis 100 ans, ont alerté les climatologues puis les décideurs face à la possibilité d’un important réchauffement de l’a tmosphère terrestre durant le prochain siècle, phénomène qui pourrait entraîner de nombreuses conséquences néfastes.

Face à ces inquiétudes, on a réagi, partout dans le monde, en augmentant les fonds et les recherches consacrés aux changements climatiques. On a notamment jugé essentiel de déterminer si l’activité humaine avait con tribué à l’augmentation de la concentration des gaz à effet de serre, et donc à la tendance au réchauffement de la planète. En 1988, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) a été créé, sous l es auspices de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Tous l es pays membres des Nations Unies peuvent participer aux travaux du GIEC et plus de 120 pays l'ont fait. Quelque 2 500 scientifiques, économistes et spécialistes de toutes sortes ont pris part à ce processus, soit en y soumettant des documents, soit en les revoyant.

Le mandat du GIEC est d’évaluer, sur une base exhaustive, objective, claire et transparente, l’information scientifique, techni que et socioéconomique pouvant aider à comprendre les dangers des changements climatiques produits par l’être hum ain. Dans le monde, les évaluations du GIEC représentent le «consensus scientifique». En 1995, le GIEC a conclu que l’ensemble des indices sug gère que l’être humain exerce une influence marquante sur le climat de la planète

b) Engagements canadiens et internationaux antérieurs

En juin 1988, le Canada a accueilli la Conférence mondiale sur l’atmosphère en évolution : implications pour la sécurité du globe, à Toronto. Cette conférence réunissait des scientifiques et des décideurs de 46 pays qui ont mis en oeuvre la première mesure internationale pour protéger l’atmosphère. Lors de cette conférence, un certain nombre de pays, dont le Canada, se sont engagés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 20 p. 100 par rapport au niveau de 1988, et ce d’ici l’an 2005(1). En 1990, Le Plan vert du Canada a été publié; on y déclarait que : «Le Canada se donne pour but de stabiliser, d’ici l’an 2000, les émissions de CO2 et des autres gaz à effet de serre aux niveaux de 1990(2)».

À la conférence de Bergen en Norvège, en 1991, on a adopté le «principe de prudence» qui renforce le consensus scientifique voulant que les indices confirmant le phénomène soient assez convaincants pour appeler des mesures correctives. Entre 1991 et juin 1992, l’attention internationale s’est portée sur les préparatifs de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement, le Sommet de la Terre. Ce Sommet a eu lieu à Rio de Janeiro en juin 1992, et un grand nombre de députés canadiens, y compris les membres du Comité permanent de l’environnement, y ont assisté. On y fit la promotion d’une intervention mondiale sur l’environnement et le développement; ce qui a débouché sur les principes énoncés dans Action 21, la Déclaration de principes sur les forêts et la Déclaration de Rio. Mais, par-dessus tout, le Sommet de la Terre a permis de conclure deux conventions, la Convention sur la biodiversité et la Convention cadre sur les changements climatiques.

Le Canada a donné le ton aux négociations d’une convention sur le changement climatique. Étant donné que les conséquences potentiellement graves du changement climatique étaient apparues depuis un certain temps au Comité de l’environnement, aux ministères fédéraux ainsi qu’aux environnementalistes et décideurs provinciaux, territoriaux et municipaux, la délégation canadienne arrivait aux négociations avec un savoir et une base scientifique de haut niveau.

La position du Canada s’inspire des engagements du Plan vert, soit de stabiliser les émissions de gaz à eff et de serre aux niveaux de 1990 d’ici l’an 2000. Lors des négociations, le Canada a réclamé des cibles et des &e acute;chéanciers et a visé deux buts :

a) conclure une convention cadre qui servirait d’instrument d’action internationale efficace, coopérative et concr& egrave;te, qu’approuverait un maximum de pays et qui serait équitable pour tous, et réalisable au moindre coût;

b) prévoir des étapes de mise en oeuvre qui commenceraient le plus tôt possible.

De plus, le Canada visait trois objectifs aux négociations : (i) conserver sa compétitivité; (ii) fournir des occasions aux entreprises canadiennes; (iii) mobiliser le plus grand nombre de pays possible dans une démarche commune qui permettait toutefois à chacun de prendre ses propres mesures.

Même s’il y avait entente sur bien des points, les États-Unis et un certain nombre de pays producteurs de pétrole se sont objectés aux premières versions de la CCCC. Aux termes de multiples négociations, une convention dépourvue d’objectifs et d’échéanciers fermes fut rédigée répondant à leurs objections. La version finale de la Convention représente donc un compromis, comme en témoigne le passage suivant :

L’objectif ultime de la présente Convention et de tous instruments juridiques annexes que la Conférence des Parties pourrait adopter est de stabiliser, conformément aux dispositions pertinentes de la Convention, les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique. Il conviendra d’atteindre ce niveau dans un délai suffisant pour que les écosystèmes puissent s’adapter naturellement aux changements climatiques, que la production alimentaire ne soit pas menacée et que le développement économique puisse se poursuivre d’une manière durable. (3)

Dans la Convention, les pays développés ont convenu : (i) d’aider les pays en développement à obtenir la technologie et les ressources nécessaires pour respecter les obligations découlant du traité; (ii) de limiter les émissions de gaz à effet de serre; (iii) d’élaborer un plan d’action national et de faire rapport publiquement des progrès marqués. L’un des principaux objectifs de la Convention précise que les politiques et mesures de lutte au changement climatique doivent garantir des avantages globaux au coût le plus bas possible. Le premier ministre du Canada a signé la CCCC le 12 juin 1992, et la Convention fut ratifiée le 4 décembre de la même année.

De tous les documents issus du Sommet de la Terre, la CCCC est sans doute celui qui a donné lieu au débat le plus animé. Selon ses détracteurs, l’absence d’objectifs et d’échéanciers la rend tout à fait inutile. Par contre, les tenants de la Convention affirment que cette absence d’objectifs arbitraires et d’échéanciers rigides constitue sa principale qualité : seul un document aussi souple pouvait être signé par tant de pays. Devant ce débat, et pour renforcer les mesures et faire preuve de leadership, un certain nombre de pays, dont le Canada, se sont engagés volontairement à ramener les concentrations de gaz à effet de serre aux niveaux de 1990 d’ici l’an 2000.

L’année suivante, durant la campagne électorale fédérale, le Parti libéral du Canada a publié son livre rouge, Pour la création d’emplois, pour la relance économique : le plan d’action libéral pour le Canada. Ce document traite précisément des changements climatiques : «Un gouvernement libéral s’associera aux autorités provinciales et municipales pour améliorer le rendement énergétique et développer la consommation des énergies renouvelables. Notre priorité immédiate sera d’élaborer [...] un plan visant à réduire de 20 % par rapport aux concentrations de 1988 les émissions de gaz carbonique d’ici à 2005(4)».

À la première rencontre de la conférence des parties du CCCC, à Berlin au printemps 1995, on a conclu que les engagements contre le changement climatique qui allaient au-delà de l’an 2000 étaient inadéquats. Par conséquent, la conférence des parties a lancé le mandat de Berlin, processus ouvert visant à renforcer les engagements des pays industrialisés envers une réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre au-delà de l’an 2000, par l’adoption d’un protocole ou d’un autre outil légal. Plus précisément, le groupe ad hoc du mandat de Berlin, par un série de rencontres, a entrepris une ronde de négociations visant l’établissement de politiques et de mesures, et fixant des plafonds et des cibles de réduction chiffrés à l’intention des pays développés, selon des échéanciers précisés. La conférence de Kyoto, du 1er au 10 décembre, représente l’aboutissement du travail du comité ad hoc.

Plusieurs pays avaient annoncé leur position de négociation bien avant la conférence de Kyoto. Ainsi, en mars 1997, les pays de l’Union européenne ont annoncé leur volonté de réduire leurs émissions totales de gaz à effet de serre à 15 p. 100 en deçà du niveau de 1990 d’ici 2010. Les pays du G-77, plus la Chine, demandent une réduction de 15 p. 100 d’ici 2010, tandis que l’Alliance des petits États insulaires demande une réduction plus rigoureuse de 20 p. 100 d'ici 2010.

Mêmes les États-Unis, qui figuraient parmi les plus récalcitrants lors du débat sur les changements climatiques, ont annoncé leur position avant la conférence, et préconisé le plafonnement des émissions dans les pays développés, principalement celle du CO2 provenant des combustibles fossiles, aux niveaux de 1990 d’ici l’an 2008 à 2012, et des réductions par la suite. Les États-Unis ont également annoncé un programme de 5 milliards de dollars pour stimuler l’efficacité énergétique et le développement de nouvelles technologies; cependant, ce programme n’est pas encore approuvé.

Le 13 novembre 1997, à une réunion du Conseil canadien des ministres de l’Environnement et de l’Énergie à Regina, ces derniers, à l’exception de celui du Québec, ont convenu qu’il serait raisonnable de ramener les émissions totales de gaz à effet de serre au niveau de 1990 d’ici 2010 environ. Le 1er décembre 1997, le gouvernement fédéral annonçait que la position canadienne serait la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 3 p. 100 par rapport au niveau de 1990 d’ici 2010, et une réduction supplémentaire de 5 p. 100 d’ici 2015. Les provinces n’étaient pas toutes d’accord avec cette position : l’Alberta et la Saskatchewan ont indiqué que l’objectif était trop rigoureux, tandis que le Québec a réclamé une cible plus exigeante.

c) Travaux antérieurs du Comité permanent de l’environnement et du développement durable

L’accumulation d’indices montrant que l’activité humaine commençait à modifier les processus naturels de la planète a convaincu le Comité permanent de la Chambre des communes sur l’environnement d’entreprendre en 1989 une vaste étude sur les changements climatiques planétaires, qui a mené à la publication de deux rapports : le rapport provisoire Pas de temps à perdre : il faut trouver une solution au réchauffement de la planète, déposé au Parlement en octobre 1990, suivi d’un rapport détaillé, En rupture d’équilibre : le risque de changements climatiques irréversibles, présenté en mars 1991. Ce dernier contenait 25 recommandations et préconisait l’intensification des mesures prises au Canada pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, particulièrement le CO2.

Après le Sommet de la Terre de 1992, le Comité s’est penché de nouveau sur le changement climatique, mais cette fois dans le contexte des conventions de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement. En avril 1993, il a déposé au Parlement un rapport intitulé Un partenariat à l’échelle de la planète. Ce document contenaient 23 recommandations dont 9 portant expressément sur les changements climatiques et proposant des mécanismes que pouvait adopter le gouvernement fédéral afin de réaliser l’engagement de Rio.

En 1995, le Comité, rebaptisé Comité permanent de l’environnement et du développement durable, a entrepris une série de discussions générales et sectorielles sur les désincitatifs fiscaux fédéraux à l’adoption de pratiques écologiques, avec l’objectif ultime de contribuer au processus budgétaire. Le Comité a constaté que «le plus important instrument de pouvoir dont disposent les décisionnaires de l’État, en matière d’environnement et de développement, se trouve dans le budget annuel du gouvernement(5)».

Le rapport du Comité, Tenir parole : un budget dans une perspective de développement durable, fut déposé au Parlement en décembre 1995. Dans les 18 recommandations que contient le rapport, le Comité présente les désincitatifs fiscaux, les ministères fédéraux compétents et les changements de politiques nécessaires pour encourager les saines pratiques environnementales. Bon nombre de ces recommandations, une fois en oeuvre, entraîneraient une importante réduction des émissions de gaz à effet de serre au Canada.

MESURES FÉDÉRALES ACTUELLES POUR RÉDUIRE LES ÉMISSIONS

Le Comité a entendu plusieurs témoignages faisant le point sur les mesures fédérales destinées à lutter contre le changement climatique. On a entendu beaucoup d’exemples positifs, mais il faut noter qu’il y a aussi des secteurs où on ne progresse guère. En outre, l’inégalité du bilan de certains ministères révèle souvent le problème patent du manque de coordination.

Néanmoins, il faut souligner que bien des témoins ont révélé un niveau encourageant de conscience de la gravité du problème. Quand c’était possible, le Comité a tenté de souligner les «bonnes nouvelles» apportées par les témoins, témoignant que les progrès réels dans la réalisation de nos engagements ne sont pas seulement désirables, mais qu’ils sont possibles et s’accompagnent souvent de bénéfices économiques considérables.

a) Ressources naturelles Canada (RNCan)

Selon les fonctionnaires du ministère, l’engagement de RNCan contre le changement climatique se concrétise par trois mesures : le Programme de l’efficacité énergétique et des énergies de remplacement (PEEER); le financement de la recherche sur les économies d’énergie, le rendement énergétique, les énergies de remplacement et les énergies renouvelables; le programme Défi-climat.

Défi-climat est considéré par le gouvernement comme un élément clé du Programme national concernant les changements climatiques du Canada. En vertu de Défi-climat, le ministre des Ressources naturelles a demandé aux organismes et aux entreprises du pays, incluant tous les paliers de l’État, d’établir des plans de limitation ou de réduction volontaire des émissions de gaz à effet de serre. Selon les dires des fonctionnaires, le ministère tient un registre des engagements, des plans et des progrès accomplis. Depuis sa mise en oeuvre en 1995, plus de 700 organismes en sont devenus membres. Cependant, certains témoins — individus ou organismes — estiment que ce programme est un peu de la poudre aux yeux, alors que le gouvernement fédéral et l’industrie affirment que c’est un succès.

Quant au premier programme (PEEER), le Rapport du vérificateur général du Canada d’avril 1997 examine les mesures prises par RNCan pour accroître l’efficacité énergétique et note :

Les 16 initiatives actuelles d’efficacité énergétique RNCan qui ne sont pas axées sur la recherche et le développement constituent un élément clé de la stratégie que s’est donnée le Canada pour parvenir, comme il s’y est engagé, à stabiliser, d’ici l’an 2000, les émissions de gaz à effet de serre au niveau de 1990. Nous avons constaté que l’information sur le rendement dont le ministère dispose actuellement, qu’il s’agisse des attentes ou des réalisations, n’est pas suffisante pour nous permettre de juger du succès global de ses initiatives d’efficacité énergétique, plus précisément de leur apport à l’objectif de stabilisation(6).

RNCan estime que ses programmes d’efficacité et d’énergie de remplacement contribueraient pour 20 à 30 p. 100 de l’effort de stabilisation des émissions au Canada. Le Comité était donc un peu inquiet d’apprendre que le ministère n’a pas les moyens de mesurer l’atteinte de son objectif. En outre, selon les fonctionnaires de RNCan, la plus grande partie de la réduction attribuable à l’extraction du pétrole et du gaz est imputable au programme Défi-climat.

Mme M. Barrados, vérificatrice générale adjointe au Bureau du vérificateur général, affirme que les dépenses engagées par RNCan dans les 16 mesures vérifiées ne totalisent que 16,5 millions par an. Elle estime qu’on ne peut savoir si les mesures portent fruit, pour la simple raison qu’elles sont si modestes qu’il est très difficile d’établir quelle est véritablement leur contribution. Dans ce contexte, il serait difficile pour RNCan de se payer le luxe de bien les évaluer car on ne veut certainement pas dépenser plus pour l’évaluation que pour la mesure elle-même. La chose a été confirmée par Bill Jarvis, directeur général de l’efficacité énergétique à RNCan, qui note qu’il est souvent difficile de décider quelle part on dépense aux programmes et quelle part on réserve à l’analyse des résultats. Par conséquent, le Comité considère que ce n’est pas la capacité d’analyse des programmes qui fait défaut chez RNCan, mais plutôt le financement des initiatives.

La vérification de programme n’était sans doute pas en mesure de déterminer l’atteinte des objectifs des mesures de RNCan, mais les données présentées par M. Jarvis sur la demande énergétique au Canada ont rassuré le Comité sur le fait que le gouvernement en avait effectivement pour l’argent investi. M. Jarvis a informé le Comité que, de 1990 à 1995, la demande énergétique avait augmenté de 500 pétajoules au Canada. Durant cette période, le Canada a connu une croissance démographique et une économie relativement prospère en expansion. L’analyse des données révèle que si les mesures d’efficacité énergétique et de conservation n’avaient pas été instaurées, la croissance de la consommation d’énergie durant cette période de cinq ans aurait été de 650 pétajoules. On peut donc supposer que les mesures de RNCan ont contribué à cette économie de 30 p. 100 dans la croissance de la consommation. Selon M. Jarvis, le fait de ne pas consommer 150 pétajoules d’énergie correspond à un bénéfice de 4 milliards de dollars par an pour l’économie canadienne; comme les gains de rendement deviennent permanents, le bénéfice revient chaque année. En outre, comparée à un scénario de laisser-faire, cette réduction de consommation d’énergie procure également des bénéfices indirects : émissions plus faibles de CO2, moins de pollution de l’air, meilleure santé pour l’environnement, et mise au point de techniques environnementales qui accroissent la compétitivité du Canada sur le marché mondial.

M. Jarvis a en outre affirmé que RNCan pouvait certainement faire plus avec plus de fonds :

[...] il est vrai que des ressources supplémentaires pourraient favoriser l’adoption de plus des technologies favorisant l’efficacité, de plus d’énergies renouvelables. [...] Je pense que nous pourrions aller au-delà de notre cible actuelle, constituée des occasions économiquement intéressantes qui se trouvent sur le marché, et fournir une aide directe à l’introduction de nouvelles technologies plus rapidement, peu importe d’où l’argent viendrait. Mais c’est là une décision qui appartient au Cabinet.

b) Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC)

TPSGC a la responsabilité de fournir des services centralisés et communs aux autres ministères du gouvernement, d’une façon rapide et efficace. À ce titre, il occupe une position unique pour faciliter la réalisation des priorités de l’État en matière de développement durable et, en particulier, pour appuyer l’engagement du Canada à réduire ses émissions.

Le Comité s’est fait dire que TPSGC fait une promotion vigoureuse de l’efficacité énergétique et des énergies de remplacement dans les immeubles fédéraux et dans le parc de véhicules de l’État. Depuis 1979, le coût du chauffage des immeubles gouvernementaux a chuté du quart. Un des éléments clés qui favorise les gains d’efficacité énergétique est le mécanisme qui permet aux ministères de financer les améliorations à cet égard à partir de l’argent économisé sur la consommation de l’énergie. Il y a d’autres retombées à cette mesure : des milieux de travail plus sains et un renforcement des industries canadiennes de l’environnement. D’ici l’an 2000, on s’attend que les rénovations visant les économies d’énergie auront valu au secteur privé des contrats totalisant 60 millions de dollars, qui permettront une économie annuelle d’énergie de 12 millions. On prévoit un rendement annuel sur l’investissement de 20 p. 100.

En outre, par la mesure ÉcoRoute qu’il a instaurée, TPSGC a élaboré un plan d’action permettant de réduire sa flotte de véhicules, d’en améliorer l’efficacité énergétique, d’augmenter le recours à des combustibles plus propres et d’établir des systèmes améliorés de cueillette de données et de contrôle. On insiste davantage sur l’achat de véhicules plus petits et plus économes d’énergie, ainsi que sur le recours aux carburants de remplacement. TPSGC estime que ces mesures lui permettront d’atteindre les objectifs de la Loi sur les carburants de remplacement.

Le Comité note que les efforts de TPSGC ont été remarquables, en particulier dans le domaine des rénovations à des fins d’économie d’énergie. Cependant, il considère également qu’il reste du travail à faire, en particulier pour la flotte de véhicules, où on en est encore à l’étape de la planification.

c) Finances Canada

Les fonctionnaires de Finances Canada ont dit au Comité que le rôle de ce ministère en est essentiellement un d’appui. On a signalé que dans ses budgets récents, le gouvernement s’est éloigné des subventions traditionnelles à l’industrie pour passer aux investissements dans les secteurs clés de croissance économique : recherche et développement (R-D), éducation et commerce international. Depuis le budget de 1996, on a introduit des mesures visant à uniformiser le traitement fiscal des énergies renouvelables et non renouvelables, et à encourager l’efficacité énergétique :

  • en resserrant les critères d’admissibilité pour les actions accréditives(7) émises par les sociétés minières, pétrolières et gazières;
  • en permettant l’usage des actions accréditives dans le secteur de l’énergie renouvelable, par l’introduction des frais renouvelables et de conservation du Canada et par l’inclusion des frais des éoliennes expérimentales;
  • en changeant la catégorie 43.1(8) : élargissement des règles de propriété énergétique favorisant les investissements dans l’énergie renouvelable, élargissement de l’admissibilité aux amortissements de la classe 43.1 à certains achats d’équipement usagé, réduction du seuil de qualification pour les piles photovoltaïques; et
  • enfin, à partir de l’exercice 1998-1999, en consacrant 20 millions de dollars chaque année pendant trois ans à la promotion d’investissements dans les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique.

Le Comité est encouragé par l’action gouvernementale visant à éliminer rapidement l’aide financière aux mégaprojets pétroliers. Par ailleurs, des hauts fonctionnaires de Finances Canada ont également informé le Comité que le gouvernement accorde encore d’importantes subventions à la mise en valeur des sables bitumineux sous la forme de dépenses fiscales. M. Bill Toms, chef de l’impôt sur les ressources à Finances Canada a donné un exemple de cette aide. Si les dépenses en immobilisations pour les sables bitumineux devaient atteindre 15 milliards environ sur dix ans, alors près de 4 p. 100 de cette somme, soit jusqu’à 600 millions, seraient mis à la disposition des promoteurs comme amortissement rapide au titre de frais d’exploration au Canada ou de frais d’aménagement au Canada. Cette dépense fiscale de 600 millions pourrait être épuisée après un certain nombre d’années; cependant, il faut noter que la subvention au développement des sables bitumineux dépasse plus de dix fois le financement annuel que reçoit RNCan pour toutes ses mesures d’efficacité énergétique, de conservation d’énergie, d’énergies renouvelables et d’énergies de remplacement.

En décembre 1995, le Comité avait recommandé que les subventions à l’industrie pétrolière soient éliminées le plus vite possible. Il avait également recommandé des changements au budget de 1996 afin de réduire les avantages fiscaux de l’industrie minière, et offrait au gouvernement les options suivantes :

  • réduire le taux de déduction des frais d’exploration au Canada;
  • exclure les frais de préparation des mines du calcul des frais d’exploration au Canada; et
  • exclure les frais d’exploitation des mines du calcul des frais d’aménagement au Canada(9).

Malgré ces recommandations et l’adoption de deux budgets fédéraux, le Comité note que, durant l’exercice 1997-1998, les sables bitumineux et le pétrole souterrain sont encore admissibles à un amortissement accéléré de l’ordre de 0,5 à 4 p. 100 des dépenses en capital. Ces incitatifs pervers sont encore en vigueur et il n’y a aucun doute qu’ils sont responsables, jusqu’à un certain point, de l’expansion rapide de l’exploitation des sables bitumineux. L’an dernier seulement, cinq compagnies ont annoncé l’expansion ou le démarrage d’opérations d’exploitation (Shell Canada Ltd., 3,2 milliards de dollars; Syncrude Canada, 3,0 milliards; Suncor Energy Inc., 2,2 milliards; Mobil Oil, 1,0 milliard; Gulf, 1,0 milliard). Outre ces incitatifs fiscaux connus également sous le nom de dépenses fiscales, le secteur de l’énergie reçoit de l’aide financière sous forme de subventions à des projets, de contributions et de participation au capital(10).

Pendant la présente étude, le Comité a cherché à connaître le montant exact des dépenses fiscales faites chaque année par le gouvernement fédéral au profit de l’exploitation des sables bitumineux. Les fonctionnaires de Finances Canada nous ont expliqué que le montant varie beaucoup d’une année à l’autre, et que les chiffres de 1994 ne sont pas encore disponibles. En réponse à une question du Comité sur l’ordre de grandeur de ces dépenses, le ministère a répondu par une note intitulée Dépenses fiscales relatives au secteur des sables bitumineux qui est jointe à l’Annexe A.

Dans le domaine de l’énergie, on est loin de jouer à armes égales. Le gouvernement fédéral fournit une aide inégale aux diverses sources d’énergie au Canada. Plus précisément, la politique fiscale continue de favoriser l’énergie classique basée sur le carbone aux dépens de l’économie d’énergie et des sources renouvelables. Ce constat alarmant vient contrecarrer l’objectif énoncé dans le livre rouge de 1993 du gouvernement libéral : réduire les émissions de CO2 à 20 p. 100 en deçà du niveau de 1988 d’ici 2005.

Le bilan des efforts du Canada pour atteindre les réductions d’émissions auxquelles il s’est engagé au Sommet de la Terre n’est pas très brillant : il est clair qu’il faut consentir un effort beaucoup plus grand. Le Comité est confiant que d’autres réductions importantes de consommation d’énergie peuvent être atteintes sans alourdir la fiscalité. À ce propos, le Comité est quelque peu encouragé par ces mesures budgétaires mais craint qu’il s’agisse d’une goutte d’eau dans l’océan. Si le Canada doit se mobiliser contre le réchauffement planétaire, le ministère des Finances doit commencer à tenir compte de l’environnement, en particulier de la menace qui pèse sur le climat, dans ses décisions économiques.

d) Autres ministères fédéraux

Le Comité a reçu des mémoires de Transports Canada, d’Industrie Canada et d’Agriculture et Agroalimentaire Canada. Chaque ministère a traité du rôle que son secteur joue dans la production de gaz à effet de serre. On nous a indiqué où les réductions seraient le plus profitables et on nous a présenté un survol de leurs projets sur les changements climatiques. Cependant, ces ministères n’ont pas traduit l’analyse claire de leur rôle et responsabilités en un effort national global pour réduire les émissions gazeuses. Si certains de ces ministères ont de toute évidence dépensé temps et argent à la lutte au changement climatique, il n’y a là ni sentiment d’urgence, ni indice que ces mesures avaient déjà permis quelque réduction d’émission de gaz que ce soit. Les mesures de lutte contre le changement climatique semblent progresser jusqu’à ce que le ministère rencontre une limite ou un obstacle, auquel cas on attend qu’un autre intervenant facilite les choses.

Industrie Canada, par exemple, a fait un bon travail de promotion de la R-D en technologie de réduction du CO2 et de polluants qui agressent l’environnement. Deux exemples retiennent notre attention. Le projet Dynamotive contribue au développement et à la commercialisation d’additifs à l’essence qui proviennent de la biomasse et qui déboucheront sur des carburants plus propres; cependant, personne n’en a encore mis dans son auto, sa tondeuse ou sa fournaise. Ballard Power Systems de Vancouver est reconnu comme le leader mondial du développement de piles à l’hydrogène mais les autobus qui roulent à l’hydrogène n’ont pas encore été beaucoup commercialisés.

L’histoire est à peu près la même pour Transports Canada. Le ministère est bien conscient que le secteur du transport est responsable d’environ 27 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre au Canada et que ce pourcentage devrait augmenter. Le ministère est également conscient des solutions : passer de l’auto au transport en commun, passer du transport des marchandises par camion au transport ferroviaire, plus efficace, obtenir une meilleure pénétration des voitures et des camions légers à haut rendement dans le marché. En fait on pourrait réduire beaucoup plus les émissions si l’industrie automobile améliorait volontairement le rendement énergétique de ses modèles chaque année.

De nombreux témoins ont dit au Comité que leur ministère travaillait de concert avec d’autres ministères pour élaborer des solutions constructives au défi du changement climatique. Si cela était vrai, les règlements et les incitatifs fiscaux requis par les mesures pour contrer le changement climatique seraient, dans une grande mesure, déjà en place. Le Comité a trouvé que peu de ministères manifestent un niveau élevé de responsabilité dans la lutte contre le changement climatique; aucun ministère n’a fourni d’exemple ou d’analyse de ce que les autres pays font pour contrer le changement climatique. En outre, personne, ni aucun ministère, ne semble investi de l’autorité nécessaire pour réunir toutes les initiatives en un plan national de mise en oeuvre.

M. Brian Emmett, commissaire à l’environnement et au développement durable, a déjà porté cette faiblesse à l’attention du gouvernement :

Dans mon premier rapport, monsieur le Président, j’ai identifié une lacune au niveau de la mise en oeuvre, dont la cause principale est le manque de coordination horizontale, l’incapacité des ministères à travailler ensemble; cela se répétera à nouveau dans notre rapport de mai, j’en suis sûr.

CONCLUSIONS

Le défi du changement climatique présente une convergence remarquable d’objectifs économiques et écologiques : l’économie ne peut que bénéficier de l’efficacité et de l’innovation énergétiques, ainsi que du prolongement de la durée de nos réserves fossiles découlant d’une consommation plus modeste. Relever le défi climatique pourrait exiger de nombreux changements à notre façon de vivre, mais il nous offre aussi la promesse d’un environnement plus sain, l’occasion de devenir plus efficaces et plus concurrentiels, ce qui permettra de créer de l’emploi.

En effet, l’économie et l’efficacité énergétiques entraîneront dans leur sillage l’amélioration de la qualité de l’air, de notre santé et de celle de la nature. Ainsi, une utilisation nettement accrue du transport en commun, le recours aux carburants de remplacement pour les voitures et les camions, et le passage à des véhicules moins énergivores réduiront les émissions non seulement de CO2 mais aussi des polluants responsables du smog.

Le Canada peut compter sur de vastes réserves de gaz naturel, un combustible propre à pouvoir calorifique élevé. À mesure que les équipements vieillissants qui utilisent du charbon et du pétrole seront remplacés par d’autres alimentés au gaz naturel, la qualité de l’air s’améliorera et les pluies acides diminueront considérablement. Le besoin d’innovations techniques dans les secteurs des transports et de l’industrie stimulera la recherche et le développement de technologies à haut rendement énergétique. La nouvelle écoindustrie du Canada aura ainsi la possibilité de devenir un chef de file mondial, ce qui créera richesse et emplois. Les recommandations qui suivent visent l’atteinte de ces objectifs.

RECOMMANDATIONS

À la suite des témoignages et des données présentées devant le Comité, de même que des conclusions qu’il en tire, le Comité en arrive à plusieurs recommandations qui devraient, à son avis, aider le gouvernement à répondre aux engagements du Canada en matière de changements climatiques.

Ces recommandations sont divisées en deux catégories. Les premières concernent les problèmes structuraux au sein de l’État fédéral, et surtout le manque de coordination auquel les témoins ont fait référence à maintes reprises. La deuxième série de recommandations se compose de mesures concrètes que le gouvernement pourrait adopter pour améliorer rapidement son bilan dans ce dossier. Notons que bien des recommandations s’inspirent d’exemples réussis au Canada et ailleurs.

a) Coordination des mesures gouvernementales

D’abord, le Comité a été frappé par le manque évident de coordination parmi les ministères et organismes dans la gestion de notre programme de lutte au changement climatique. En outre, comme l’ont révélé les efforts précédents visant de grands changements à l’échelle de la fonction publique, comme la politique sur les langues officielles ou l’action positive, le leadership est nécessaire au plus haut niveau, afin de démontrer une volonté politique. Par conséquent, le Comité est d’avis que la lutte au changement climatique doit relever du premier ministre personnellement, avec l’aide de hauts responsables bien choisis et assignés spécialement à cette tâche.

Recommandation no 1

Le Comité recommande que le premier ministre assume la responsabilité de mettre en oeuvre les engagements du Canada en matière de lutte au changement climatique et confie à une petite équipe de haut niveau le mandat de coordonner les actions de tous les ministères et organismes concernés.

b) Plan étapiste de mise en oeuvre de l’engagement

La position canadienne sur les réductions d’émissions exige une réduction de 3 p. 100 sous le niveau de 1990 d’ici 2010, suivie d’une autre réduction de 5 p. 100 d’ici 2015. Cela ne veut pas dire simplement réduire nos émissions à 3 p. 100 sous le niveau de 1990, mais demande également que nous limitions les émissions issues de notre croissance économique qui devrait varier entre 20 et 30 p. 100 d’ici 2010.

Étant donné l’importance de la tâche, on a suggéré de diviser l’objectif en petites cibles assorties d’échéances. On pourrait jalonner les 12 ans séparant le 1er janvier 1998 du 1er janvier 2010 d’une série d'échéances, et exercer un suivi continuel. Les cibles à court terme permettraient de mesurer et d’évaluer le succès de diverses mesures de lutte et, en cas d’échec, de leur substituer rapidement une mesure de rechange. En outre, l’approche étapiste permet de progresser à petits pas et encourage la persévérance dans l’action.

Recommandation no 2Recommandation no 3

Si les mesures destinées à réduire les émissions totales de gaz à effet de serre commençaient à dépasser l’objectif et à devancer l’échéance, le Comité recommande que le gouvernement canadien fasse preuve de leadership devant le monde en relevant l’objectif, en raccourcissant l’échéance, ou en faisant les deux.

c) Contrôle et évaluation

Les membres du Comité ont jugé qu’il fallait un groupe d’experts indépendant du gouvernement pour évaluer les mesures de lutte au changement climatique, signaler celles qui échouent et suggérer où réorienter les efforts et les ressources. Certains membres du Comité préfèrent un groupe consultatif formé d’experts indépendants. Par ailleurs, on peut prétendre que le Bureau du commissaire à l’environnement et au développement durable possède déjà les qualités requises, puisqu’il est indépendant du gouvernement et qu’il est chargé d’évaluer tous les programmes de développement durable de l’État, y compris ceux touchant le changement climatique. De plus, le Bureau du commissaire peut réaliser à la demande du Parlement des analyses spéciales, notamment évaluer le plan national de réduction des émissions de gaz. Il n’est pas de son ressort de proposer des orientations, mais s’il fournissait aux responsables de la lutte au changement climatique des analyses précises et opportunes, ceux-ci seraient en mesure de décider comment réorienter les efforts et les ressources en cas d’échec d’un projet. Le Bureau du commissaire pourrait avoir besoin de crédits budgétaires supplémentaires pour analyser avec exactitude et rapidité les projets liés aux cibles à court terme.

Recommandation no 4

Le Comité recommande que le gouvernement garantisse au Bureau du commissaire à l’environnement et au développement durable assez de ressources pour qu’il analyse avec exactitude et rapidité tous les programmes de lutte au changement climatique.

d) Mieux comprendre les changements climatiques

On a souvent affirmé que les politiques relatives au changement climatique doivent être fondées solidement en science. À l’heure actuelle, si l’unanimité scientifique sur la réalité du réchauffement planétaire et le rôle fondamental qu’y jouent les gaz à effet de serre fait peu de doute, il en va tout autrement de la valeur des divers modèles mathématiques et informatiques destinés à en prévoir les conséquences. Par ailleurs, il fait peu de doute également que la fiabilité et la complexité de ces modèles ont progressé grandement ces dernières années, et que les efforts supplémentaires destinés à les améliorer en vaudront la peine.

M.  Gordon McBean, sous-ministre adjoint du Service de l’environnement atmosphérique, a dit que le modèle de circulation générale (MCG) du Centre climatologique canadien est un modèle mathématique sophistiqué qui tient compte de l’influence de l’atmosphère, des océans et de la glace. Or, d’après deux océanographes qui ont témoigné, M. Allyn Clarke, gestionnaire intérimaire, Division des sciences de l'océan, Institut océanographique de Bedford, et M. Roger Pocklington de la Station biologique des Bermudes, les MCG actuels ne tiennent pas suffisamment compte de l’influence des océans sur le climat de la planète.

On croit que l’océan constitue la principale cause de variabilité du climat pour des périodes variant des mois aux décennies parce qu’il est en mesure de stocker et de redistribuer de la chaleur durant ces périodes. Un petit changement au volume d’eau douce qui parvient dans une région limitée de l’Atlantique peut déclencher un bouleversement rapide du système climatique jusqu’à un nouvel équilibre. Selon M. Allyn Clarke, «il s’agit là de l’une de ces «surprises» dont nous préviennent les évaluations du GIEC.»

Il apparaît clair au Comité qu’il faut déployer plus d'efforts pour améliorer les MCG, en particulier par une meilleure connaissance scientifique de l’effet des océans et des courants océaniques sur le climat. Compte tenu de l’expertise canadienne dans ce domaine, et de l’importance des océans pour notre climat, il nous semble que cette question doit être prioritaire.

Recommandation no 5

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada fasse de la climatologie océanique une priorité de recherche et l’encourage, dans les secteurs public et privé, en fournissant des fonds suffisants.

À ce jour, le gouvernement canadien a financé des projets de recherche intra-muros et extra-muros sur les MCG qui doivent prévoir les changements physiques. On a cependant porté à notre attention que si le gouvernement veut mettre au point des mesures de lutte efficaces et réalistes, il est tout aussi important qu’il dispose de modèles économiques sophistiqués intégrant les coûts et les avantages sociaux, écologiques et économiques des mesures de lutte au changement climatique .

Le besoin de meilleurs modèles est concrétisé par un rapport du Conference Board du Canada paru en 1997. The Economic Impact on Canada of Greenhouse Gaz Reduction: A Comparative Review compare 14 modèles économiques et leurs effets. Le plus pessimiste indique qu’en vertu d’un scénario de laisser-faire, l’économie canadienne pourrait croître de 30 p. 100 de 1997 à 2010; avec le recours à des mesures de lutte au changement climatique, la croissance pourrait se limiter à 27,7 p. 100, soit 2,3 p. 100 de croissance de moins.

Par ailleurs, les modèles utilisés par d’autres groupes font état de bénéfices à la fois pour l’environnement et l’économie. Un autre témoin, M. Jim Bruce, de la Société royale du Canada affirme ce qui suit :

Les résultats du modèle dépendent beaucoup des hypothèses qu’on y met au départ. Aucun des modèles examinés par le Conference Board ne tient compte des bénéfices sur la qualité de l’air ou sur le ralentissement du changement climatique d’une réduction de l’utilisation des combustibles fossiles. Ce sont simplement des analyses de coûts, non de bénéfices, pour la société, ces coûts pouvant d'ailleurs être assez limités si nous faisons preuve de prudence.

Recommandation no 6

Le Comité recommande que les modèles futurs visant à évaluer l’impact économique de la réduction des émissions imputables à la consommation d’énergie au Canada incorporent la notion et les objectifs du développement durable et ne reposent pas uniquement sur des considérations économiques générales.

e) Encourager le changement dans l’utilisation de l’énergie

Les dépenses fiscales, les subventions directes et indirectes, et les autres mesures financières au bénéfice de l’industrie pétrolière, des sables bitumineux et des charbonnages sont considérables. En plus de priver l’État de revenus importants, elles entravent la mise en oeuvre d’une politique destinée à stabiliser et à réduire les émissions de gaz. Même si les fonctionnaires ont reconnu que le mouvement en ce sens est amorcé, le Comité estime qu’il faut de toute urgence réduire ces subventions au profit des sources d’énergie qui produisent moins de gaz à effet de serre ou qui n’en produisent pas du tout.

À moins qu’on y prenne garde, le coût et les avantages des mesures de lutte au changement climatique risquent d’être répartis inéquitablement. En outre, quand on prendra des mesures pour limiter les émissions, il est essentiel qu’aucun segment de la population canadienne n’ait l’impression d’en payer injustement le prix. L’élimination d’incitatifs financiers favorables à l’industrie des combustibles fossiles pourrait avoir un impact négatif sur les provinces productrices de pétrole et de charbon. Dans la même veine, le passage d’Hydro Ontario de l’énergie nucléaire au charbon pour la production d’électricité pourrait placer les Ontariens devant un choix difficile entre leurs besoins en électricité et leur responsabilité face à la réduction des émissions.

Le Comité s’est fait dire que la meilleure façon peut-être de distribuer les coûts, c’est en mettant en oeuvre une vaste gamme de mesures de lutte. La mesure par excellence, le passage à d’autres combustibles, offre un double avantage. La réduction graduelle de la dépendance envers le charbon et le pétrole assurera la stabilité économique, et une utilisation plus parcimonieuse de ces ressources prolongera la durée des réserves. Le méthane brûle à haut rendement, ce qui en fait un combustible idéal pour les usages industriels et résidentiels, alors que l’environnement bénéficie d’une réduction de la pollution et des émissions de gaz à effet de serre.

Recommandation no 7

Le Comité recommande que, conformément à ses engagements internationaux visant la stabilisation et la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le Canada élimine graduellement ses dépenses fiscales et autres subventions en faveur de l’industrie des combustibles fossiles. Les fonds dégagés par les changements fiscaux devraient être dirigés vers la promotion de nouvelles technologies de production d’énergie, et servir à aider les populations touchées par la conversion des combustibles.

Recommandation no 8

Le Comité recommande que des incitatifs financiers soient élaborés pour encourager la conversion du charbon et du pétrole au gaz naturel.

f) Promotion des énergies de remplacement, de l’innovation et de l’écotechnologie

L’étape fiscale, qui, selon le Comité, découle logiquement des deux recommandations précédentes, consiste à encourager le développement et l’utilisation des énergies de remplacement et de l’écotechnologie, comme les centrales de district et la cogénération. Outres les avantages évidents de ce changement pour l’atteinte de nos objectifs de lutte au changement climatique, le Comité s’est fait expliquer à maintes reprises les avantages pour l’économie canadienne d’une telle stratégie.

Le Comité a noté avec beaucoup de satisfaction plusieurs développements récents à cet égard. Ainsi, Mohawk Oil vend de l’essence contenant de l’éthanol, ce qui montre l’aptitude de l’industrie à prendre l’initiative dans le secteur des sources d’énergie de remplacement. L’annonce récente, par Environnement Canada, d’une entente avec ENMAX, l’entreprise électrique de Calgary, pour le chauffage des bureaux fédéraux en Alberta à partir de l’énergie éolienne, devrait permettre une réduction des émissions de CO2 de 2 000 tonnes par an. Une autre annonce, faite par Petro-Canada, concerne un investissement dans les carburants de remplacement avec la participation d’Iogen Corporation d’Ottawa. Selon le président de Petro-Canada, M. Jim Stanford, «la société croit que les technologies nouvelles comme celle-là peuvent jouer un rôle important dans la lutte au réchauffement climatique tout en créant de nouvelles occasions pour l’économie canadienne. Nous sommes heureux de nous joindre à Iogen, qui est à la fine pointe de la technologie des carburants de remplacement». Le Comité note également des progrès dans l’utilisation de la biomasse comme combustible de remplacement, et les développements de ce genre méritent qu’on s’y attarde. Par conséquent, et particulièrement à la lumière de ces développements positifs :

Recommandation no 9

Le Comité exhorte le ministère des Finances à introduire de nouveaux incitatifs fiscaux pour promouvoir les écotechnologies, l’innovation, comme les centrales de district et la cogénération, et les sources d’énergie de remplacement.

g) Travailler avec les municipalités

La Constitution canadienne accorde au gouvernement fédéral le pouvoir de mener des négociations internationales ainsi que de signer et de ratifier des ententes. Cependant, pour donner suite aux obligations et aux engagements contenus dans une entente internationale, le gouvernement fédéral est généralement obligé de collaborer avec les provinces et les territoires. On considère également comme essentiel le rôle des municipalités. Pour les objectifs de la CCCC, cette exigence sera particulièrement importante, car la production et l’utilisation de l’énergie, qui sont en grande partie du ressort des provinces, constituent les principales sources de gaz à effet de serre. Afin d’en arriver à une entente fédérale-provinciale-territoriale dans un domaine partagé comme l’énergie et l’environnement, on a créé le Conseil canadien des ministres de l’environnement et le Conseil canadien des ministres de l’énergie. Depuis un an, les ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux de l’Énergie et de l’Environnement se sont maintes fois réunis pour convenir d’ententes sur la question du changement climatique et pour contribuer à la position de négociations du Canada à la rencontre de Kyoto.

Les mécanismes nécessaires sont donc déjà là pour permettre au gouvernement fédéral, aux provinces et aux territoires d’en arriver à un consensus et de convenir des responsabilités et des mesures partagées dans la lutte contre le changement climatique. Par contre, les municipalités sont largement laissées pour compte dans la consultation. Cela fait problème puisque, comme le Comité se l’est fait dire, bien des leviers nécessaires à la réduction des gaz à effet de serre se trouvent entre les mains des municipalités.

Comme un témoin l’a signalé, la planification urbaine actuelle des municipalités contrevient souvent aux objectifs du développement durable. Les règlements de zonage facilitent généralement la construction à faible densité dans des banlieues étendues en périphérie des grandes villes. Les politiques d’affectation du sol favorisent à leur tour l’utilisation de plus d’un véhicule par ménage et contribuent à l’accroissement des émissions de gaz à effet de serre. Freiner l’étalement urbain n’est qu’une des actions qu’il faut encourager chez les élus municipaux et les planificateurs régionaux. Parmi les autres mesures à encourager, mentionnons l’amélioration du transport en commun et l’accroissement de son utilisation, le piégeage et l’utilisation du gaz naturel généré dans les décharges, la promotion de la cogénération dans les industries locales et, enfin, la promotion de centrales de district pour la production d’énergie et le chauffage. Le Comité note avec intérêt que des centrales de ce genre et la récupération de l’énergie des déchets fonctionnent avec succès dans plusieurs villes canadiennes dont Oujé-Bougoumou, Cornwall, Windsor, Edmonton et Charlottetown.

1) Adoption du modèle du Toronto Atmospheric Fund

Étant donné le rôle crucial que peuvent jouer les municipalités dans la réduction des émissions de gaz, le Comité a été bien content d’entendre parler du Toronto Atmospheric Fund.

Toronto est une des villes canadiennes qui a accepté le défi de réduire ses émissions de gaz à effet de serre à 20 p. 100 en deçà du niveau de 1990 d’ici l’an 2005. En 1992, on a créé ce fonds avec 23 millions de dollars obtenus de la vente de terrains municipaux. Ce capital n’est jamais épuisé; il est plutôt placé de façon classique, ou prêté pour des projets qui mènent à la réduction des émissions de gaz. Le fonds prête à un taux préférentiel et offre une longue période de remboursement. Les prêts sont remboursés avec intérêt, et cet intérêt, de même que celui qui provient des placements, est accordé chaque année en subvention aux groupes communautaires qui réalisent des projets de réduction des émissions de gaz. Le total des sommes disponibles pour les subventions est passé de 500 000 $ en 1992 à plus de 1 million en 1997.

Grâce au succès du Toronto Atmospheric Fund, on prévoit que Toronto pourrait atteindre son objectif de réduction des émissions de 20 p. 100 par rapport au niveau de 1990 d’ici l’an 2000, plus tôt que prévu à l’origine. Dans une étude mondiale de l’International Council for Local Environment Initiatives (organisme fondé par 300 municipalités membres dans le monde), Toronto s’est classée première parmi 150 villes pour la réduction de ses émissions de CO2. De 1990 à 1996, la ville a coupé ses émissions de 7,8 mégatonnes, tandis que Berlin est arrivée deuxième, avec une réduction de 7,5 Mt, laissant Leipzig loin derrière en troisième place avec 2,6 Mt.

Le fonds a procuré des bénéfices multiples. Les mesures visant à réduire les émissions ont amélioré la qualité de l’air, permis des économies d’argent par l’efficacité énergétique et la conservation d’énergie, développé l’industrie de gestion de l’énergie et créé des emplois. Les organisateurs du fonds sont particulièrement fiers de deux projets. La ville recueille maintenant le méthane généré par les décharges pleines et le brûle pour produire de l’électricité qu’on revend à la compagnie d’électricité. Le fonds a fourni l’argent requis pour changer toutes les ampoules de l’éclairage de rue en ampoules plus économes d’énergie, ce qui permet maintenant une économie de 2,2 millions de dollars par an.

On a proposé le Toronto Atmospheric Fund comme modèle pour un programme qu’on appellerait le Fonds national contre le changement climatique (FNCC). Ce fonds financerait des programmes fédéraux-municipaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre et servirait de levier pour leur financement. Organisme d’État, le FNCC rechercherait un rendement positif modeste, à long terme, sur ses placements. Il prêterait de préférence aux participants qui ont eu le plus l’occasion de faire des réductions d’émissions considérables. Il parrainerait également la R-D relative aux outils, techniques, normes et méthodes de réduction des émissions gazeuses, et les disséminerait. Étant donné l’appui dont jouit le récent programme d’infrastructures municipales, ce genre d’approche nous semble très réalisable.

Recommandation no 10

Le Comité estime que le Toronto Atmospheric Fund est un modèle remarquable que les villes canadiennes pourraient adopter pour réaliser des économies d’énergie et innover dans les secteurs public et privé, et recommande de créer un fonds atmosphérique canadien sur ce modèle.

2) Capture et utilisation du méthane des décharges

Les principaux gaz produits par les décharges sont le méthane et le CO2 qui sont produits par la décomposition de la matière organique. On trouve également des traces de sulfate d’hydrogène, de mercaptans et de composés organiques volatiles, qui ont des odeurs désagréables, peuvent altérer la qualité de l’air et nuire à la santé. Ce méthane présente un risque d’explosion et est un gaz à effet de serre qui pourrait, à masse égale, réchauffer 24,5 fois plus le climat mondial que le CO2 , d’ici 100 ans.

Les décharges sont une des principales sources canadiennes d’émissions de méthane dans l’atmosphère, qui comptent pour 26 p. 100 environ de nos émissions totales. Toutefois, le méthane est une source potentielle d'énergie. Au Canada, les systèmes de captage des gaz de décharge recueillent environ 25 p. 100 du méthane, mais 17 p. 100 seulement sert à la production d’énergie. Empêcher sa libération dans l’atmosphère devrait être un volet important des efforts canadiens visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Comme des fonctionnaires d'Environnement Canada l'ont confirmé, il est possible et il peut être rentalbe d'utiliser le méthane pour le chauffage de district.

Recommandation no 11

Étant donné la contribution des décharges aux émissions totales de méthane au Canada et la valeur du méthane comme source d'énergie de remplacement pour le chauffage de district, le Comité recommande la mise en place d’un programme national afin de promouvoir son captage dans les décharges et son utilisation pour les centrales thermiques de district là où la chose est réalisable. Ailleurs, les municipalités devraient récupérer le gaz et le brûler, ce qui serait moins dommageable pour l’environnement.

h) Transport

Le besoin d’encourager le transport en commun aux dépens de la voiture particulière exigera des politiques de promotion et des incitatifs financiers aux niveaux provincial et fédéral. De nombreuses villes canadiennes comme Edmonton, Calgary, Vancouver et Ottawa, ont créé des pistes et des voies cyclables entre les quartiers résidentiels et le centre-ville, ce qui facilite la circulation de ceux qui vont travailler à vélo.

Plusieurs témoins ont suggéré que le gouvernement fédéral favorise l’utilisation du transport en commun en modifiant la fiscalité. Ainsi, le coût des titres de transport en commun fournis par l’employeur pourrait être considéré comme une déduction. Cette mesure existe depuis plusieurs années aux États-Unis et dans plusieurs pays d’Europe occidentale; elle est proposée avec enthousiasme depuis plusieurs années par la Fédération canadienne des municipalités, l’Association canadienne du transport en commun, la Table ronde sur l’environnement et l’économie et le présent Comité.

Recommandation no 12

Le Comité recommande que Finances Canada entreprenne une étude exhaustive des outils fiscaux et réglementaires dont dispose le gouvernement fédéral pour encourager le transport en commun, incluant la déductibilité des titres de transport en commun fournis par l’employeur.

En outre, les fonctionnaires de Transports Canada ont affirmé devant le Comité que le Canada ne serait pas capable de réaliser des réductions importantes des émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports. Le Comité conclut donc qu’il faut élaborer une Stratégie nationale des transports.

Recommandation no 13

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral élabore une Stratégie nationale des transports afin de réaliser des réductions considérables dans les émissions de gaz à effet de serre.

i) Éducation

De nombreux témoins ont plaidé de façon persuasive devant le Comité en faveur de mesures favorisant des comportements qui vont dans le sens du développement durable, de la prévention de la pollution, de la conservation et de l’efficacité énergétiques, au niveau de l’école et des collectivités. Afin que chaque Canadien fasse sa part dans la limitation des émissions de gaz, il est essentiel que tous deviennent conscients des risques posés par le changement climatique et que la population développe un sentiment de responsabilité personnelle. Le Programme canadien des changements à l’échelle du globe a déjà préparé d’excellentes publications sur ce sujet, comme Canada and the State of the Planet dans lequel on accorde beaucoup d’attention au rôle de l’individu. Au Québec un programme intitulé Planèt’ERE a été lancé par un groupe d’enseignants et d’individus afin d’informer sur l’environnement et le développement durable. Un autre groupe exceptionnel est la Green Communities Association, qui entre autres activités, vise les économies financières et écologiques à la maison. Les foyers participants ont atteint une réduction totale de 15 p. 100 de la consommation d’énergie, de 20 p. 100 de la consommation d'eau et de 15 p. 100 de la production de déchets.

Le gouvernement également a fait un certain travail : ainsi, Santé Canada et Environnement Canada ont réalisé des trousses éducatives pour les écoliers, comme la campagne très réussie qui enseigne aux enfants les manières de se protéger contre les rayons ultraviolets du soleil. En réponse au besoin d’information du public sur le changement climatique, Environnement Canada a publié récemment une série intitulée Canada Country Studies. On y examine l’effet éventuel du changement climatique sur les terres, les eaux, et les populations qui en dépendent dans six régions (le Québec, l’Arctique, les Prairies, l’Ontario, l’Atlantique, la Colombie-Britannique et le Yukon) y sont examinées. Le Comité estime que c’est un bon début, mais qu’il faut faire plus.

Recommandation no 14

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral, de concert avec les autres paliers de gouvernement, les groupes et les individus, élabore et dissémine une trousse éducative complète sur le rôle des individus dans la lutte contre le changement climatique dans les écoles, les groupes communautaires et le grand public. À cet égard, le gouvernement devrait examiner les programmes existants susceptibles de favoriser l'information et la participation du public.

j) Autres questions

Le Comité estime qu’il faut que le gouvernement fédéral agisse promptement dans son champ de responsabilités. Les États-Unis ont déjà annoncé un programme de 5 milliards de dollars visant à favoriser l’efficacité énergétique et le développement de nouvelles technologies énergétiques, et le Comité estime que le Canada doit lui aussi fournir un effort financier important à la lutte au changement climatique.

Dans les champs de responsabilités partagées, le Comité estime que le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces, les territoires, les peuples autochtones et les municipalités, doit reconnaître qu’il faut des discussions et des consultations étendues pour que le Canada puisse atteindre ses cibles nationales et internationales de réduction des émissions. Il faut notamment discuter à fond des avantages et des inconvénients de diverses mesures comme la différenciation, la transition, la mise en oeuvre conjointe, les pièges, les réservoirs et les bourses de droits d’émission. Il faut accorder une attention particulière à ces mesures afin que les accords convenus débouchent sur des réductions réelles d’émissions de gaz à effet de serre et ne servent pas d’échappatoire permettant d’esquiver les réductions réelles.

Recommandation no 15

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral prenne rapidement des mesures, dans son champ de responsabilités, afin d'appuyer les efforts déployés pour lutter contre le changement climatique. Dans les champs de responsabilités partagées, le Comité recommande que le gouvernement fédéral entreprenne des discussions et des consultations afin de garantir une mise en oeuvre efficace et complète des engagements du Canada.