Passer au contenu
;

FAIT Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.


PROCESSUS ET PRIORITÉS EN VUE DU PROCHAIN CYCLE DE NÉGOCIATION

« Ce qu'en disent les Canadiens »

... il ne faut pas attendre que d'autres décident des questions qui vont faire l'objet des négociations en espérant que le Canada continuera à jouer son rôle traditionnel « d'intermédiaire ». C'est le moyen le plus sûr de nous faire avoir. (Mémoire)

Gerald E. Shannon
Shannon et associés
Mardi, 2 mars 1999
Ottawa

Nous déplorons les tactiques d'intimidation et les menaces de mesures de rétorsion unilatérales des États-Unis. Nous pensons que les risques d'un nouveau type de guerre commerciale sont très réels, et cette situation nous consterne, car elle risque de porter atteinte à l'intégrité de l'OMC et de l'ALENA et des processus afférents. (Mémoire)

Jayson Myers
Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada
Vendredi, 30 avril 1999

Les entreprises canadiennes ont confiance en leur compétitivité dans un monde plus ouvert. La mondialisation n'est pas un gros mot, elle représente une occasion... Nous ne pouvons nous cacher derrière le protectionnisme. Il nous est impossible d'arrêter le monde de tourner et d'en descendre, comme certains semblent le vouloir. Il faut absolument un programme de libéralisation du commerce et de l'investissement qui soit prospectif pour que la réussite de nos membres se poursuive et pour assurer la prospérité canadienne. (Mémoire)

Nancy Hughes Anthony et Milos Barutciski
Chambre de commerce du Canada
Mercredi, 28 avril 1999
Toronto

Si le prochain cycle de négociation porte essentiellement sur l'agriculture et les services, le Canada n'aura pas assez de latitude et de poids pour obtenir des résultats avantageux. De tels résultats ne seront possibles que dans un cadre plus large de négociation, qui offre plus de latitude pour les compromis. Autrement dit, nous pensons que si le Canada est forcé de s'en tenir à une question particulière, comme l'agriculture, nous allons y perdre. Il faudrait que ces réunions portent sur toute une gamme de secteurs où le Canada est plus solide, car ainsi nous pourrions aboutir à un accord beaucoup plus avantageux pour l'industrie canadienne. (Témoignage)

Lorne Janes
Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Canada
Lundi, 22 mars 1999
St. John's

Revenir à des modèles mal conçus de protectionnisme sectoriel ne constitue pas la voie de l'avenir. Pour éviter que le grand marché américain n'absorbe à long terme les investissements stratégiques, le Canada doit relever un défi énorme. En Amérique, les forces protectionnistes sont aujourd'hui puissantes, et elles gagnent en vigueur. À mon avis, le Canada n'a d'autre choix que de faire de la politique commerciale une urgence et une priorité nationales. Tout demi-effort ne produira que des demi-résultats. Nous risquons ici d'amorcer une dégringolade en ce qui concerne le classement mondial que nous vaut notre rendement économique. (Témoignage)

David Emerson
"Free Trade Lumber Council"
Mardi, 27 avril 1999
Vancouver

Le statut de membre a ses privilèges et ses responsabilités; le Canada a un rôle de chef de file à jouer. Il devrait suivre les recommandations contenues dans le rapport produit par l'OMC suite à son examen de la situation chez nous : réduire le protectionnisme dans l'agriculture, les textiles et le vêtement, les véhicules automobiles et les services. Le Canada devrait donner l'exemple. Il devrait suivre les décisions de l'OMC et travailler à l'élimination de toute nouvelle forme de protectionnisme. (Mémoire)

professeur Eugene Beaulieu
Département d'économie, Université de Calgary
Jeudi, 29 avril 1999
Calgary

Les initiatives futures devraient clairement se situer dans le plus vaste intérêt du public, et non seulement dans l'intérêt d'un nombre restreint d'intervenants. À tout le moins, en ce qui concerne les négociations prochaines de l'OMC et de la ZLEA, il est important que le texte préliminaire soit mis à la disposition du public pour examen. La portée de ces ententes est tellement vaste qu'il est impératif que ce texte soit entièrement diffusé et qu'il donne lieu à un débat démocratique. (Témoignage)

Marc Lee
Centre canadien de politiques alternatives
Lundi, 26 avril 1999
Vancouver

Si les composantes de ces nouvelles négociations ne sont pas bien équilibrées, ces dernières sont vouées à l'échec; et comme nous l'avons vu au cours de l'Uruguay Round, les pays en voie de développement ont suffisamment de pouvoir pour décider du succès ou de l'échec des négociations. Le Canada devrait s'assurer que suffisamment de propositions sont présentées, propositions qui mèneront à un équilibre dans les négociations. (Mémoire)

professeur Gil Winham
Département de sciences politiques, Université Dalhousie
Mercredi, 24 mars 1999
Halifax

C'est l'une des raisons pour lesquelles ce nouveau cycle sera long et difficile et que l'invitation américaine à conclure d'ici trois ans est quelque peu optimiste et naïve. C'est même encore plus qu'optimiste et naïf, si l'on considère de plus que ce cycle devra également tenir compte d'un domaine encore plus difficile et c'est celui qui vise à trouver un équilibre en l'équité et l'efficience ... il me semble qu'il incombe désormais au système commercial mondial de s'occuper également des questions d'équité, et par cela je veux dire les questions qui portent sur la protection de l'environnement, des droits de la personne, des droits des travailleurs, et du droit d'utiliser l'OMC à titre de véhicule non pas pour établir ses droits-à mon sens, l'OMC n'est pas le meilleur endroit pour négocier les détails de ses droits-mais plutôt pour établir un pont entre le système commercial et des ententes internationales existantes qui portent sur ce type de question. (Témoignage)

professeur Michael Hart
Centre des politiques de commerce et de droit
Lundi, 26 avril 1999
Vancouver

Processus et priorités en vue du prochain cycle de négociation

La démarche

Lorsqu'il a comparu devant le Comité le 9 février, le ministre du Commerce international a souligné l'importance que le gouvernement attachait à son approche stratégique à l'égard des négociations de l'OMC devant être engagées à Seattle en décembre. La question n'est pas de savoir si le Canada doit ou non participer. Étant donné que des négociations vont se dérouler de toute façon sur les services et l'agriculture pour régler les questions restées en suspens depuis le Cycle d'Uruguay du GATT, la question est plutôt de savoir où doit se situer la participation du Canada à la lumière des transformations rapides de l'économie mondiale et de la nécessité de trouver le bon équilibre stratégique entre les intérêts nationaux et commerciaux.

En mai 1998, à la deuxième conférence ministérielle de l'OMC, les ministres se sont entendus sur une démarche à suivre pour garantir la mise en oeuvre complète de tous les accords de l'OMC et pour se préparer à la réunion de Seattle de la conférence ministérielle. Selon la démarche retenue, le directeur général recommanderait, pour le programme de travail de l'OMC, de nouveaux efforts de libéralisation suffisamment étendus pour répondre à la gamme d'intérêts et de préoccupations de tous les membres à l'intérieur du cadre de l'OMC, afin qu'on puisse prendre des décisions sur le mandat de négociations à la troisième conférence. La priorité devait être accordée à la mise en oeuvre, notamment aux négociations prévues sur l'agriculture et les services, aux travaux déjà prévus comme l'examen des accords sur les mesures sanitaires et phytosanitaires, le règlement des différends, les marchés publics et la décision sur le commerce et l'environnement. Une priorité moins grande a été consentie aux nouvelles questions qui pourraient être soulevées comme l'investissement et la politique sur la concurrence. Sans décider de la portée éventuelle des négociations, les ministres ont laissé entrevoir la perspective de négociations étendues et générales.

Le travail préparatoire à la réunion de Seattle a déjà commencé à Genève. Certaines délégations, dont celle du Canada, ont déposé des propositions et celles-ci sont examinées en ce moment. Durant l'été et l'automne, on cernera les sujets qui pourraient être débattus et on rédigera des recommandations à l'intention des ministres. Ceux-ci ont, à cet égard, donné instruction au Conseil général de l'OMC de préparer aussi des recommandations de décisions concernant l'organisation et la gestion futures des nouvelles négociations, y compris la portée, la structure et les échéanciers des négociations, afin que l'on puisse commencer à temps et conclure rapidement le programme de travail.

La Commission de l'Union européenne a été le premier membre à demander de nouvelles négociations après avoir obtenu l'appui des États membres et elle a continué de réclamer des négociations élargies. Les États-Unis et le Japon se sont aussi déclarés en faveur d'un nouveau cycle de négociations et un certain nombre de pays en développement, appelés les amis du nouveau cycle, se sont réunis pour exprimer leur appui au projet. Certains pays en développement, tels l'Égypte, le Pakistan et l'Inde, ont exprimé des réserves, mais ne se sont pas opposés formellement. Ainsi, l'idée de négociations plus importantes que le minimum nécessaire pour traiter de l'agriculture et des services a gagné du terrain; elle traduit jusqu'à un certain point le sentiment qu'il faut élargir les négociations si l'on veut réaliser des progrès dans l'agriculture et les services.

Le contexte changeant du commerce mondial

La dynamique du régime commercial international est phénoménale depuis quelques années. La conjoncture des présentes négociations est bien différente de celle qui régnait au début du Cycle d'Uruguay du GATT en 1986. Premièrement, jusque-là, les services et l'agriculture ne faisaient pas partie intégrante du régime commercial comme ils le font aujourd'hui à l'OMC, tandis que cette année leurs négociations ont déjà été prévues. Deuxièmement, les résultats du Cycle d'Uruguay ont été adoptés globalement si bien que tous les membres de l'OMC participent à tous les accords et qu'il existe une seule catégorie de membres au sein de l'Organisation. Troisièmement, l'OMC compte maintenant quelque 134 pays-membres, dont presque les quatre cinquièmes sont en développement, et elle continue de croître presque quotidiennement. En 1986, on comptait moins de 100 membres. Les opinions varient chez ces pays en ce qui concerne la nature du nouveau cycle de négociations à l'OMC. Bon nombre en préconisent la tenue tandis que d'autres, n'ayant pas fini de digérer les résultats du Cycle d'Uruguay, s'interrogent sur sa nécessité. Les grandes économies, comme la Chine, la Russie, l'Arabie saoudite, Taïwan et l'Ukraine, font partie de la trentaine d'autres pays qui négocient pour adhérer à l'OMC. Même s'ils ne siègent pas à la table de négociations au début du prochain cycle, leurs idées et leur position sur l'échiquier commercial mondial sont importantes pour déterminer l'envergure et la couverture des prochaines négociations.

Par ailleurs, de nouveaux arrangements commerciaux bilatéraux et blocs commerciaux régionaux ont vu le jour. Le gouvernement canadien accorde la plus haute importance au maintien du système multilatéral et tient à ce que les accords régionaux soient structurés de manière à contribuer au système multilatéral ainsi qu'à la libéralisation des échanges et des investissements. Le Comité n'a pas entendu d'objections à cette approche stratégique durant ses consultations. Le Canada s'est pour sa part surtout efforcé d'améliorer l'accès de ses exportations par des initiatives telles que les accords bilatéraux conclus avec le Chili et Israël, l'ALENA et le débat sur la ZLEA, le plan d'action Canada-Union européanne, l'APEC, l'AELE, et par sa participation aux accords sectoriels de l'OMC portant, par exemple, sur la technologie de l'information, les services financiers et les télécommunications de base.

Il semble de plus en plus acceptable de penser que la politique commerciale et les négociations commerciales concernent également la politique de réglementation. Cette tendance n'est pas nouvelle à l'OMC puisque l'Accord sur les obstacles techniques au commerce du Cycle de Tokyo et l'Accord sur les mesures sanitaires et phytosanitaires du Cycle d'Uruguay ont été conçus pour empêcher que des règlements et des normes techniques qui visaient d'abord à répondre à des objectifs du marché national, ne servent pas de mesures protectionnistes contre l'importation. Les dossiers actuels ayant trait aux hormones dans la viande, aux organismes modifiés génétiquement et aux règles d'étiquetage sont à la fois nationaux et internationaux. Dans ce contexte, le Comité a été informé que l'établissement de règles internationales n'enlevait pas aux gouvernements le droit d'établir des règles d'intérêt public pour le marché national. Cependant, les règlements qui sont sanctionnés par la communauté internationale ont probablement plus de chances d'être efficaces.

Les intérêts du Canada dans les négociations

L'ALE, l'ALENA et les Accords de l'OMC constituent un vaste cadre de réglementation qui régit les intérêts du Canada en matière de commerce et d'investissement. À certains égards, cette évolution reflète la transformation spectaculaire des objectifs et des attitudes du Canada à l'endroit du marché international depuis une dizaine d'années. Avant le Cycle d'Uruguay, la politique commerciale canadienne visait avant tout à obtenir un meilleur accès aux marchés étrangers pour les produits canadiens tout en assurant le plus de protection possible aux produits de chez nous. Depuis, les avantages d'un commerce libéralisé, à savoir des facteurs de production à faible coût, une compétitivité accrue et de meilleurs prix pour les consommateurs, ont fait leur chemin dans l'économie.

Même si les ajustements nationaux que ces initiatives commerciales nécessitent n'ont pas été exempts de difficultés, le Comité estime que les principaux réaménagements requis ont eu lieu, particulièrement dans le contexte nord-américain et vis-à-vis les États-Unis. Le souci de protéger l'industrie manufacturière nationale par des droits de douane ou d'autres mesures de restrictions à la frontière a cédé le pas à une approche plus positive, à savoir ouvrir les marchés étrangers aux produits et aux services canadiens pour permettre aux industries canadiennes de pointe fondées sur le savoir de prendre de l'expansion et à l'assise manufacturière d'être solide, stable, tournée vers l'extérieur et compétitive. Au cours des consultations, le Comité a été frappé par la volonté presque unanime d'améliorer l'accès aux marchés étrangers à la faveur des négociations de l'OMC et par l'absence de voix réclamant le statu quo ou la protection des industries manufacturières secondaires en concurrence avec les importations.

La preuve soumise au Comité donne à entendre que le public canadien en général et le milieu des affaires en particulier sont maintenant bien conscients que leur prospérité est liée aux échanges commerciaux et que les exportations apportent de solides contributions à la croissance globale de l'économie, à la réduction du déficit et à la création d'emplois. À cet égard, le Ministre a fait remarquer que « le commerce est essentiellement local et que le commerce international fait maintenant partie intégrante du programme d'action national ». Les exportations canadiennes de biens et de services ont augmenté au rythme de 8,1 % en 1998, supplantant la croissance du PIB (3 %), tandis que les importations de biens et de services se sont accrues de 6,1 % par suite de solides investissements faits au pays et de la demande des consommateurs. L'accroissement des exportations de marchandises a créé des débouchés d'affaires dans toutes les régions du Canada. L'Ontario et le Québec ont enregistré les meilleurs résultats d'exportation en 1998, ayant représenté ensemble 71,2 % de toutes les exportations canadiennes de marchandises. Les États-Unis ont été le marché d'exportation le plus important, absorbant quelque 92 % des exportations de l'Ontario et plus de 80 % de celles du Québec, de l'Alberta, de l'Île-du-Prince-Édouard et du Nouveau-Brusnwick. La Colombie-Britannique et la Saskatchewan se sont en revanche distinguées en Asie en y envoyant 27 % et 18 % respectivement de leurs exportations. Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse ont enfin acheminé 19 % et 13,3 % de leurs exportations en Europe.

Dans le commerce des marchandises, c'est le secteur automobile qui a affiché la meilleure tenue au Canada et ses retombés positives ont été clairement signalées au Comité par Christopher Sands à Windsor (Témoignage, 30 avril 1999). On a toutefois observé une forte augmentation des exportations dans les industries de la machinerie et de l'équipement, qui produisent une multitude de biens allant des machines et outils industriels au matériel de technologie de l'information en passant par les télécommunications, l'équipement agricole, la machinerie de construction et les appareils médicaux ainsi que leurs pièces et composants. En 1998, 85,2 % de ces exportations sont allées aux États-Unis; la demande est donc forte sur ce marché pour les produits de pointe spécialisés du Canada qui font beaucoup appel au savoir. Le phénomène a été facilité par la politique d'ouverture commerciale des années 1990.

L'ambassadeur du Canada auprès de l'Union européenne, M. Jean-Pierre Juneau, a fait remarquer au Comité que l'UE est notre deuxième partenaire commercial en importance après les États-Unis; le Canada y a exporté pour plus de 15 milliards de dollars l'an dernier. Il a souligné également que, puisque la plupart de nos échanges avec les États-Unis sont régis par l'ALENA, l'UE sera l'un de nos principaux partenaires de négociations dans le nouveau cycle à l'OMC. Dans ce contexte, outre les questions agricoles, le Comité a été informé que le Canada continuait de faire face à des droits de douane élevés sur le poisson, les produits forestiers à valeur ajoutée et les métaux non ferreux. Par ailleurs, l'UE accorde à d'autres pays certaines préférences tarifaires qui désavantagent beaucoup les produits canadiens. Le nouveau cycle de négociations devrait permettre de demander des réductions dans les taux tarifaires NPF de l'UE en vue de rendre les règles du jeu plus équitables pour les exportateurs canadiens.

Pour ce qui est des services, le segment le plus dynamique du commerce mondial, les obstacles sont moins visibles que pour les biens et peuvent consister en des exigences et procédures de qualification, des normes techniques, des accords d'octroi de licences et des règlements administratifs nébuleux. De nombreux témoins ayant comparu devant le Comité ont préconisé l'élaboration et l'application de règles et de conditions franches et plus sûres pour améliorer le commerce international des services et l'accès des fournisseurs canadiens de services. Les services commerciaux à forte concentration de savoir, comme le génie, la technologie des communications, les finances, la recherche et le développement, les redevances et les services de gestion, ont représenté 47,6 % de nos exportations de services et 45,7 % de nos importations de services en 1998. Que ce soit à l'échelle continentale ou mondiale, le Canada a d'importants intérêts à défendre dans le domaine des services, comme nous l'expliquons de manière plus détaillée au chapitre 6. Les services de transport et de voyage ont aussi apporté une forte contribution à l'essor des services en 1998. Les États-Unis sont le principal marché du Canada en matière de services.

Les prochaines négociations agricoles porteront probablement sur la mise en oeuvre des engagements passés, notamment à l'égard des subventions à l'exportation, et viseront à améliorer l'accès aux marchés des produits touchés par des niveaux de protection élevés. Ce ne seront pas des négociations faciles. Toutefois, en l'absence de nombreuses difficultés associées qui furent à l'arrivée de ce secteur dans le système commercial au moment du Cycle d'Uruguay, le domaine agricole ne devrait pas être aussi déterminant cette fois dans l'équilibre des concessions. L'Union européenne conserve néanmoins des intérêts directs et des vulnérabilités importantes dans ce domaine et cherchera à obtenir un équilibre équitable des concessions à l'intérieur d'un cycle de négociations de grande portée. De même, l'industrie canadienne a bien fait valoir, lors des audiences, que les partenaires commerciaux du Canada n'avaient pas honoré leurs engagements passés dans ce secteur et que, tant qu'ils ne le feraient pas, le Canada ne devrait pas faire d'autres concessions. Les mêmes représentants ont aussi insisté sur l'importance, durant les négociations, de ne pas sacrifier un domaine du secteur agricole au profit d'un autre, par exemple en offrant des concessions dans le secteur à gestion de l'offre pour obtenir un meilleur accès pour les grains, les oléagineux, etc. Nous traitons de cet aspect plus en profondeur au chapitre 4.

La relation entre le commerce et l'investissement étranger direct (IED) a été évoquée par de nombreux témoins. Depuis une dizaine d'années, les mouvements d'IED dans le monde ont augmenté plus que le commerce international ou le PIB. La progression de l'IED effectuée au Canada entre 1993 et 1997 a été d'environ 11,5 milliards de dollars par année. En 1998, il a augmenté de 22,9 milliards de dollars. L'investissement direct du Canada à l'étranger a lui aussi été vigoureux : 17,8 milliards de dollars par année entre 1993 et 1997 et 39,8 milliards de dollars en 1998 - c'était la troisième année de suite que les sorties dépassaient les entrées. Ces investissements sont dans l'ensemble avantageux en ce qui a trait aux débouchés d'exportation des biens et des services, à l'accès aux nouvelles technologies, ressources et compétences ainsi qu'à la productivité et à l'emploi.

Un consensus général semble s'être dessiné parmi les témoins ayant comparu devant le Comité : pour le Canada, le plus commerçant des pays du G8, il est vital de disposer de règles commerciales efficaces pour assurer une croissance économique stable et empêcher les autres économies de recourir à des pratiques inéquitables, exclusives, discriminatoires et imprévisibles. À ce titre, le Canada devrait jouer un rôle dirigeant et constructif dans les négociations afin de garantir la transparence des nouvelles règles et procédures de l'OMC et leur application objective pour la facilitation et la libéralisation du commerce. Nos négociateurs devront s'appuyer sur des directives claires, cohérentes et harmonisées si nous voulons atteindre cet objectif.

La portée et le calendrier des négociations

Il n'existe pas de consensus à l'échelle internationale sur l'étendue des prochaines négociations. Ce n'est sans doute pas encore avant quelques mois que les principaux participants feront connaître leur position. L'UE et le Japon ont suggéré une approche globale couvrant toutes les questions, où rien n'est décidé tant que tout n'a pas été décidé, et un échéancier de trois ans pour mener à bonne fin les négociations. Les États-Unis ont en revanche préconisé des accords rapides secteur par secteur. L'obtention de la procédure accélérée (Fast Track) pour permettre à l'administration américaine de s'engager dans ces négociations est toutefois loin d'être acquise. Même si les représentants n'ont pas besoin de cette autorisation pour entamer les discussions, les efforts qu'ils font pour inscrire des questions délicates à l'ordre du jour ou conclure des ententes seront directement influencés par leur capacité d'obtenir l'approbation du Congrès à l'égard de la procédure accélérée. De plus, sans cette autorisation, les gouvernements des autres pays hésiteront à signer un accord avec les États-Unis.

Le ministre du Commerce international s'est dit d'avis que les négociations devraient porter sur des grappes de sujets au lieu de couvrir maladroitement tous les sujets ou de procéder secteur par secteur. À la réunion des ministres du Commerce de la Quadrilatérale, tenue dans la semaine du 10 mai 1999 à Tokyo, il a été convenu d'engager les négociations en novembre ou en décembre, de les faire porter sur l'agriculture, les services, les règles mondiales de non-discrimination de l'investissement étranger et d'autres sujets allant de la culture à l'environnement, à condition que la liste demeure « gérable » et que les négociations soient conclues d'ici trois ans. À cet égard, même s'ils n'ont pas encore parlé de la portée souhaitable des négociations, les pays en développement semblent juger de la plus haute importance la poursuite de la libéralisation des échanges pour faciliter la réalisation de leurs objectifs de développement. Voilà pourquoi on peut s'attendre à ce qu'ils jouent un rôle important dans la décision qui sera prise à ce sujet à Seattle.

Le Comité a entendu différents points de vue concernant la portée et l'orientation des négociations. Le professeur Winham (Dalhousie) préconise un ordre du jour général afin de maximiser les possibilités de négociation et le professeur Wolfe (Queen's) croit que les négociations devraient être exhaustives et non séparées en grappes et qu'elles devraient s'échelonner sur au plus quatre ans. Notre ancien ambassadeur au GATT, M. G. Shannon, nous a dit que l'un des enseignements du Cycle d'Uruguay est que les négociations sectorielles ne peuvent pas réussir à cause de la difficulté d'établir un équilibre et que l'idée des grappes de sujets se heurtera sans doute à l'opposition des pays en développement. La Chambre de commerce du Canada estime, pour sa part, que les négociations devraient être exhaustives, mais ne devraient pas empêcher de parvenir à des décisions en début de processus, si cela est possible, ni de les appliquer. D'autres intervenants ont exprimé un certain scepticisme à l'égard d'un échéancier de trois ans pour des négociations exhaustives, et Jeffrey Schott, attaché supérieur de recherches de l'Institute for International Economics à Washington, a laissé entendre que l'OMC devrait instituer un système de négociations continues permettant d'ajouter à la liste de nouveaux points de discussion à mesure que les pourparlers prennent fin sur un sujet. Selon lui, il faut se détacher du concept, propre au GATT, des négociations spécifiques portant sur des sujets particuliers au profit d'une approche plus générale où les pays peuvent mener une série de négociations commerciales sans coupure et où chaque cycle s'inscrit dans le prolongement de l'accord précédent.

Comme nous l'avons déjà fait remarquer, l'ordre du jour intégré de l'OMC prévoit déjà des négociations d'ici la fin de l'année sur l'agriculture et les services et contient également un certain nombre d'autres sujets importants découlant des accords existants et allant des marchés publics aux subventions. L'Organisation connaît également des problèmes de croissance et manque de ressources pour mener à bien les nombreuses fonctions qui lui sont imposées par suite des accords du Cycle d'Uruguay, notamment les examens de la politique commerciale, les épineuses négociations sur l'accession, le règlement des différends et les appels en faveur d'une plus grande transparence dans ses activités, y compris un rôle pour les organisations non gouvernementales. On s'interroge sérieusement aussi sur la structure de gestion et sur sa capacité de faire avancer l'Organisation en collaboration avec le FMI, la Banque mondiale et d'autres organisations internationales alors que se poursuit la mondialisation des échanges, des investissements et des flux financiers avec leurs effets sur la production, l'emploi et les politiques de réglementation des pays. Ce sont tous des sujets importants sur lesquels il faut se pencher et qui finiront probablement par figurer à l'ordre du jour des prochaines négociations.

Un certain nombre de délégations ont proposé que les négociations portent sur les droits de douane pratiqués sur les biens industriels, lesquels constituent, avec les services et l'agriculture, les ingrédients d'une négociation majeure. Cependant, tout indique en ce moment que le cycle du millénaire s'aventurera sans doute lui aussi sur un territoire relativement vierge à l'heure où les pays membres de l'OMC sont confrontés à la difficile relation entre le commerce et d'autres secteurs d'activité stratégiques comme l'environnement, les normes du travail, la concurrence, la propriété intellectuelle, le commerce électronique et l'investissement. De nombreux témoins ont dit au Comité que tous ces domaines sont interreliés au même titre que les questions économiques nationales sont liées inextricablement à l'économie internationale et ne peuvent plus être traitées isolément ou individuellement.

Sylvia Ostry a fait remarquer lors de sa présentation à Toronto que « les efforts d'intégration visent les mouvements du commerce, des investissements et de la technologie, et incluent une pression intrinsèque dans le sens de la convergence ». Elle ajoute plus loin que « dans un monde marqué par l'intégration, le commerce ne se limite pas aux échanges commerciaux. Aucun ministre du Commerce n'est responsable des services; en fait, il n'existe nulle part de ministre des Services. Aucun ministre du Commerce ne possède non plus les compétences nécessaires pour s'occuper de la politique relative à la propriété intellectuelle, à l'environnement ou à la concurrence. La politique sur le « commerce » repose en fait aujourd'hui sur un système administratif et juridique complexe, qui doit inclure des mécanismes de coordination efficaces et l'accès aux connaissances techniques. » (Témoignage, réunion nº 122, Toronto, 27 avril 1999)

Les nouvelles questions

Les nouvelles questions que l'on parle d'inscrire à l'ordre du jour sont litigieuses et ne recueillent nullement l'appui de la majorité. Les principales sont l'investissement, la politique de concurrence, le travail et l'environnement. Le commerce électronique serait aussi un sujet possible. Ces thèmes ne sont pas entièrement nouveaux à l'OMC et leur lien avec le commerce est connu depuis un certain temps. La principale difficulté que pose leur inscription à l'ordre du jour est le fait que ces domaines sont généralement considérés comme l'apanage exclusif des politiques nationales. Élargir le champ d'application des règles de discipline internationale pour englober ces domaines suscite une appréhension certaine sans parler des arrangements institutionnels internationaux qu'il faudrait mettre en place pour les régir.

Depuis quelques années, la politique de concurrence figure assez haut sur la liste des nouvelles questions de négociation à l'OMC et fait déjà l'objet de discussions bilatérales. Il est fait état abondamment, dans les ouvrages, du lien entre le commerce et la politique de concurrence, et l'accord de l'OMC sur les télécommunications de base contient des engagements réglementaires préconcurrentiels. De plus, les fusions et les acquisitions entre sociétés transnationales permettent de constater l'absence de mécanisme international efficace pour trancher les points en litige qui surviennent alors. La politique de concurrence liée au commerce est un point majeur qui n'est pas susceptible de se prêter rapidement ou facilement à une incorporation à l'OMC. En effet, de nombreux pays membres n'ont pas de lois régissant les pratiques commerciales restrictives ou les affaires antitrust. On peut néanmoins s'attendre à certaines percées dans cette direction au cours des prochaines négociations. Comme l'ambassadeur Weekes l'a fait remarquer au Comité, la question n'est pas de savoir si nous aborderons la politique de concurrence, mais plutôt comment nous l'aborderons.

L'investissement constitue lui aussi une question épineuse, comme l'a bien fait ressortir l'an dernier le débat sur l'Accord multilatéral sur l'investissement (AMI) à l'OCDE. Le sujet de l'AMI avait été abordé à des audiences du Comité. Celui-ci avait alors exprimé certaines réserves et, en fin de compte l'AMI, n'a pas abouti. Il fait peu de doute que la politique sur l'investissement est de plus en plus une question commerciale. Dans la réalité, les deux sont pour ainsi dire inséparables, et des règles sur l'investissement sont prévues dans certains accords régionaux comme l'ALENA. L'OMC contient, dans sa forme actuelle, des dispositions sur l'investissement dans le domaine des services (télécommunications et services financiers) et, dans le domaine des biens, l'Accord sur les mesures concernant les investissements et liées au commerce (Accord sur les MIC) a été convenu durant le Cycle d'Uruguay. Serait-il possible ou non de négocier un accord multilatéral sur l'investissement à l'OMC, étant donné la composition beaucoup plus large de l'Organisation et la plus grande variété d'opinions qui alimenteraient sans doute le débat? La question demeure entière pour l'instant, mais retiendra beaucoup l'attention au cours des prochains mois. Nous examinerons cette question en détail au chapitre 10.

La crise financière en Asie a eu et continue d'avoir un effet important sur la stabilité financière et sur le commerce de la planète. De même, l'incertitude qui découle de la situation économique de la Russie et de certaines économies latino-américaines met en lumière l'interrelation entre le commerce et les facteurs économiques et politiques. La situation de ces pays, conjuguée à celle non moins difficile de nombreux pays en développement, et notamment des pays les moins avancés, fait ressortir la nécessité de nouvelles initiatives internationales pour favoriser un redressement et une croissance soutenus de l'économie. On pourrait se servir des nouvelles négociations de l'OMC pour libéraliser encore davantage le commerce et franchir un pas important dans cette direction. Le Comité livre d'autres commentaires sur ces sujets dans la partie IV.

Le Canada n'est pas insensible aux bouleversements qui se sont produits au cours des dernières années sur les marchés internationaux. Les exportations, surtout dans l'Ouest du Canada, ont beaucoup souffert de la crise asiatique et le dollar canadien a fait l'objet de pressions inhabituelles malgré la solidité de l'économie canadienne. Notre pays étant très dépendant du commerce international pour la croissance de son économie et ses emplois, nous ne pouvons pas nous permettre de laisser les autres pays fixer le périmètre et les conditions du nouveau cycle de négociations. Il ne faut pas oublier non plus que nous sommes une économie relativement petite et que nous devons, pour cette raison, bien déterminer nos domaines de priorité et nous concentrer sur l'atteinte des objectifs dans ces domaines.

Les questions environnementales sont particulièrement sensibles dans le contexte du système commercial mondial. Les préoccupations environnementales peuvent certainement recouper les principes généraux de l'OMC destinés à abolir et à diminuer les obstacles au commerce international des biens et services. Ces dernières années, des groupes spéciaux de l'OMC n'ont pas réussi à apaiser les préoccupations du milieu de l'environnement dans plusieurs affaires très médiatisées. À la conclusion du Cycle d'Uruguay, l'OMC a créé un Comité sur le commerce et l'environnement pour étudier les rapports entre les deux et des possibilités de résolution des problèmes. Plus récemment, l'OMC a organisé une réunion de haut niveau sur le commerce et l'environnement qui a permis aux milieux du commerce et de l'environnement de discuter d'une foule de sujets. Les travaux sont restés sans résultat jusqu'à présent et, même s'il est important de faire preuve de réalisme quant à ce que l'OMC peut ou doit faire dans ce domaine, tout indique que ce sera un point prioritaire qui pourrait être inscrit à l'ordre du jour des nouvelles négociations. Nous nous sommes donc penchés de manière attentive sur ces questions dans le chapitre 12.

Toute la question du travail lié au commerce suscite des incertitudes graves et délicates : jusqu'à quel point peut-on faire appel aux règles de discipline du commerce international pour renforcer les normes internationales du travail et les mécanismes d'application? Mais avant cela, il faut d'abord se demander si l'OMC doit avoir un rôle à jouer dans un domaine déjà desservi par une autre organisation, l'Organisation internationale du travail (OIT). Ce point suscitera lui aussi une multitude de points de vue parmi les membres de l'OMC, d'abord pour ce qui est de l'opportunité d'en discuter dans les négociations et, le cas échéant, de la façon d'aborder la question. Nous examinons ce débat au chapitre 13.

Le commerce électronique pourrait lui aussi figurer à l'ordre du jour en raison de la croissance déjà enregistrée et de l'expansion phénoménale prévue. Ce secteur du commerce national et international n'est pour ainsi dire pas réglementé. À la Conférence ministérielle de mai 1998, le statu quo a été déclaré à l'égard des droits de douane applicables aux transmissions électroniques et un programme de travail a été mis en marche. Le Comité a l'impression qu'un solide travail d'éducation est nécessaire pour cerner les conséquences du commerce électronique sur la production, la distribution, le marketing, les ventes et la livraison de biens et de services. On ne sait pas du tout jusqu'à quel point il serait possible d'aborder la question à Seattle, même si les participants à la conférence ministérielle de l'OCDE tenue à Ottawa en octobre 1998 ont conclu qu'il fallait y prêter attention à l'échelle internationale et nationale. On s'attend à ce qu'elle soit soulevée à la réunion de Seattle et les négociateurs canadiens devront être prêts à réagir.

Certains témoins ayant comparu devant le Comité ont fait valoir que l'ajout à l'ordre du jour de l'OMC de sujets non traditionnels serait une erreur (Polaris Institute) et surchargerait le système de règlement des différends de l'OMC relativement nouveau et fragile avant qu'il ait eu la chance de prendre racine (Institut international du développement durable). À cet égard, même si l'on s'entend généralement pour dire que le Canada tire profit d'un système réglementé, certains remettent en question la capacité de l'OMC de réglementer tous les domaines de la vie économique internationale (Robert Wolfe) ou craignent que l'OMC adopte une approche trop légaliste (Lawrence Herman) et soit pour cette raison mal préparée pour réagir aux préoccupations de politique générale associées aux questions paracommerciales. L'Alliance des manufacturiers et exportateurs du Canada a indiqué au Comité que, en raison de l'importance de l'investissement direct, des services et de l'innovation dans l'économie mondiale, le Canada a intérêt à élargir les prochaines négociations au-delà du champ d'application traditionnel de l'OMC, mais que les questions sociales ne devraient être abordées à l'OMC que dans la mesure où elles ont trait à l'accès aux marchés ainsi qu'au commerce et à l'investissement. La Chambre de commerce du Canada a fait savoir que, même si les questions non commerciales, comme l'environnement et le travail, ne peuvent pas être absentes des accords commerciaux, la façon de les aborder n'est pas évidente. « Les questions sociales ne sont pas l'activité de base de l'OMC et devraient être laissées aux organisations qui en sont spécialistes » (Traduction).

Consultations et société civile

Le ministre du Commerce international a pour sa part affirmé au Comité que le gouvernement préconisait des contacts réguliers entre les organisations multilatérales et la société civile, conscient que les intérêts publics doivent être entendus et que la population doit mieux comprendre les enjeux et les processus. Le Comité est tout à fait en faveur d'inclure la société civile le plus possible dans le processus, étant donné que cette négociation englobera de nombreux domaines de politique commerciale non spécifiques qui pourraient toucher la politique de réglementation nationale, dont une grande partie est de compétence provinciale. À ce titre, il est impératif que les gouvernements provinciaux, les ONG et les autres parties intéressées participent, même si le Comité admet que cela ne sera ni facile ni possible à certaines étapes et pour certains sujets. Le travail du Comité n'est qu'un des éléments de la consultation actuelle. Il faudra prendre soin tout au long des négociations d'effectuer des consultations aussi vastes que possible auprès de tous les segments intéressés de la société canadienne. Nous croyons que la recommandation faite dans le chapitre précédent contribuera grandement à l'atteinte de cet objectif.

Une approche stratégique

Comment le Canada devrait-il procéder pour déterminer quelles questions seront débattues dans les prochaines négociations de l'OMC et à la Conférence ministérielle prévue pour le mois de décembre à Seattle? Comme nous l'avons déjà indiqué, il est peut-être trop tôt encore pour se prononcer à ce sujet. D'après le volume de mémoires et de présentations au Comité, cependant, il est évident que les Canadiens ont des opinions et veulent les faire entendre. Dans les chapitres subséquents du rapport, nous nous pencherons sur des sujets précis qui feront probablement l'objet des prochaines négociations. La gamme des questions, qu'elle concerne la libéralisation des droits de douane, les marchés publics, l'agriculture, les obstacles techniques au commerce, les recours commerciaux, la facilitation des échanges, les règles d'origine, l'un quelconque des nombreux services commerciaux qui sont ou pourraient être régis par l'OMC, ou les questions nouvelles de la concurrence, du travail, de l'investissement ou de l'environnement, doit être examinée en toute objectivité dans le contexte d'une approche stratégique globale qui cherche à équilibrer les besoins économiques et sociétaux à long terme du Canada.

Le Comité a néanmoins décidé qu'il n'est pas trop tôt pour établir au moins certains des grands principes de base et le périmètre qui devraient guider le Canada et ses négociateurs au cours de ce qui s'annonce à l'horizon comme l'une des plus importantes et ambitieuses initiatives en matière d'économie internationale. Nous soumettons à l'attention du gouvernement les lignes directrices suivantes :

En raison de la taille du marché et de la population du Canada, il est clair que le Canada doit compter beaucoup sur les marchés étrangers pour continuer de croître et de prospérer. C'est pourquoi la grande priorité dans les négociations de l'OMC doit être d'améliorer l'accès aux marchés mondiaux pour tous les produits et services canadiens, ainsi que pour les produits, les innovations et les services de haute technologie fondés sur le savoir qui amélioreront la productivité et la compétitivité de l'industrie canadienne et lui permettront de mieux pénétrer et servir les marchés mondiaux. Il sera particulièrement important pour le gouvernement de déterminer le plus rapidement possible, en étroite collaboration avec le milieu des affaires et les gouvernements provinciaux, les marchés, les produits et les obstacles au commerce que le Canada devrait viser dans les négociations.

Le Canada étant un pays relativement petit, il doit continuer de compter sur le système de réglementation des échanges de l'OMC pour protéger ses intérêts en matière de commerce international. Le Canada doit donc viser, dans les négociations, à éclaircir au besoin les Accords de l'OMC et à les rendre le plus transparents possible. Si un nouvel accord est conclu sur un nouveau sujet, il devra lui aussi être clair, précis et exempt d'ambiguïté. Le Canada doit continuer à conclure des ententes commerciales bilatérales et régionales, mais celles-ci devront être parfaitement conformes aux règles commerciales négociées à l'OMC.

Le Canada a joué un rôle déterminant durant le Cycle d'Uruguay pour l'élaboration du système actuel de règlement des différends. Ce système est l'une des grandes caractéristiques de l'OMC et, même s'il n'est pas parfait, son efficacité le rend très intéressant aux yeux des autres organisations internationales qui ne possèdent pas une telle méthode pour résoudre les différends. Il faudra veiller, dans le nouveau cycle de négociations, à ne pas surcharger le système, et le Canada devra faire preuve d'une grande vigilance pour maintenir l'intégrité du système à mesure que des améliorations seront négociées.

Dans une économie mondialisée et interdépendante, le commerce des marchandises et des services est étroitement lié aux investissements étrangers, à l'accès aux innovations, aux idées et aux technologies nouvelles ainsi qu'aux mouvements des personnes et des compétences en gestion. Une augmentation du commerce des marchandises est généralement accompagnée d'une augmentation du commerce des services, des investissements, etc., particulièrement dans les secteurs de la haute technologie et des services. Le cycle du millénaire pourrait multiplier les débouchés du secteur privé canadien dans tous ces domaines de l'activité économique et cet objectif devrait figurer à la tête de l'ordre du jour canadien avant et pendant les négociations.

Le gouvernement devrait rester quelque peu flexible en ce qui a trait à l'échéancier, puisque les principaux acteurs n'ont pas encore indiqué clairement leur position. Même si les appuis semblent converger vers un échéancier de trois ans, le Comité se rappelle que des témoins ont laissé entendre que trois ans ne suffiraient peut-être pas pour terminer tous les travaux envisagés. Le Comité ne serait pas défavorable à d'autres formules qui permettraient de prendre des décisions sur des points particuliers au fur et à mesure que les ententes seraient intervenues, mais à l'intérieur d'un échéancier global gérable qui se situerait entre trois et quatre ans.

Le Comité n'est pas encore prêt à se prononcer définitivement sur les nouvelles questions qui devraient ou ne devraient pas figurer à l'ordre du jour des négociations proprement dites. Le champ d'application des négociations est encore très flou. Il le restera probablement jusqu'à la réunion de Seattle. Comme nous l'avons indiqué, le Comité croit que l'ordre du jour englobera un certain nombre de nouvelles questions, toutes complexes et délicates sur le plan politique. Il reste à savoir jusqu'à quel point l'un ou l'autre de ces sujets pourrait être abordé à la réunion de Seattle et, en fait, l'effort initial dans ces dossiers pourrait porter surtout sur l'étude et l'exploration et non sur des négociations officielles. De toute façon, qu'il s'agisse d'entreprendre des négociations ou de s'engager à un degré moindre, comme définir le mandat d'un groupe d'études, les négociateurs du Canada devront être bien préparés à discuter de tous les sujets qu'on propose de négocier, car le pays a un intérêt vital dans tous ces domaines.

Les principaux pays auprès de qui le Canada cherchera à obtenir des concessions dans les négociations sont en faveur de grandes négociations. Même si les questions tarifaires avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis, sont régies principalement par l'ALENA, les questions non tarifaires, les services, l'agriculture et les nouvelles questions occuperont une place prédominante dans les pourparlers bilatéraux. Au sein de l'UE et au Japon, les exportateurs canadiens continuent à faire face à d'impressionnants obstacles tarifaires et non tarifaires aux biens et aux services comme ils le font dans d'autres pays développés et en développement. Par ailleurs, nos négociateurs devront tenir compte des préoccupations de certains intervenants nationaux, notamment dans le domaine de l'agriculture, voulant qu'on ne sacrifie pas un secteur au profit de l'autre et qu'aucun secteur important de l'économie ne voit sa situation empirer par suite des négociations. Le Comité estime que les ingrédients de négociations globales à l'OMC sont présents et que cette formule offre au Canada les meilleures chances de parvenir à un résultat équilibré. Par conséquent, le gouvernement doit étudier attentivement les différentes propositions soumises en prévision des négociations et les étudie en toute objectivité par rapport aux intérêts globaux du Canada.

Le Comité a entendu de nombreux commentaires des témoins concernant la nécessité de faire participer la société civile aux consultations et aux négociations. Le Comité est d'accord avec ce point de vue et est conscient que les mécanismes existants ne permettent peut-être pas d'atteindre cet objectif. Le problème n'est pas unique au Canada et il n'y a pas de solution unique qui pourrait le résoudre. Une des suggestions avancées préconisait un changement d'attitude au gouvernement : ne plus considérer la société civile et le gouvernement comme deux camps opposés, mais plutôt traiter véritablement tous les intervenants comme des partenaires dans un processus coopératif. La question a été discutée à fond dans l'introduction du présent rapport et les recommandations du Comité découlant de ce débat devraient faire partie intégrante de l'approche stratégique du gouvernement à l'égard des négociations.

Recommandation 5

Le gouvernement devrait adopter une approche stratégique fondée sur les lignes directrices suivantes afin d'être en mesure de promouvoir et de défendre les intérêts du Canada durant la totalité du processus de négociation :

· chercher à élargir l'accès des produits et services canadiens aux marchés mondiaux au moyen de réductions des droits de douane et d'ententes nouvelles améliorées sur les questions non tarifaires;

· soutenir des mesures visant à élargir le plus possible la portée des négociations, car c'est là la meilleure façon pour le Canada d'obtenir des résultats équilibrés lors du prochain cycle de négociations, en particulier dans les domaines de l'agriculture et des services;

· faire preuve de souplesse à l'égard des échéances concernant le prochain cycle de négociations, du moins jusqu'à ce qu'on se soit entendu sur le programme des négociations;

· continuer de s'en remettre aux règles de l'OMC pour protéger les intérêts commerciaux du Canada;

· chercher à améliorer le mécanisme de règlement des différends de l'OMC et à en protéger l'intégrité;

· faire participer davantage les représentants de la société civile aux processus de consultation et de négociation.