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FINA Rapport du Comité

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CHAPITRE 4 : RÉDUCTION DES IMPÔTS : BÂTIR SUR LES MESURES DÉJÀ PRISES

La meilleure façon de s'assurer que l'imposition récente d'une discipline aux finances du pays entraîne des améliorations durables dans le niveau de vie des Canadiens, c'est d'utiliser les biens acquis pour bâtir l'économie du Canada. Le gouvernement affirme que toutes les initiatives entreprises dans un budget équilibré doivent contribuer à solidifier l'économie de concurrence. Les mesures à court terme devront rester relativement modestes et être soigneusement choisies. Une économie forte et concurrentielle est nécessaire pour assurer la prospérité et la santé du pays.

Maintenant que le budget est équilibré, les Canadiens et les Canadiennes méritent d'avoir plus d'argent dans leurs poches. Il s'agit d'un moyen essentiel d'améliorer le niveau de vie et d'accroître le revenu disponible de toutes les familles canadiennes.

L'honorable Paul Martin, Mise à jour économique et financière,
14 octobre 1998

L'un des avantages de la nouvelle ère où commence le budget équilibré du gouvernement fédéral, c'est la perspective d'une réduction des niveaux d'imposition. Bon nombre des témoins qui ont comparu devant le Comité sont d'accord avec nous pour dire qu'une réduction du niveau d'imposition serait avantageuse pour tous les Canadiens. Les questions critiques à considérer sont la façon dont les réductions devraient être distribuées et la mesure dans laquelle elles devraient l'être.

[L]e gouvernement doit diminuer les impôts et les taxes. C'est la principale réponse qu'on a trouvée, nous, à la deuxième question qui était posée par le Comité. On nous demandait quels changements et nouveaux investissements stratégiques qu'il faudrait dans le système fiscal pour aider le gouvernement à réaliser ses priorités... l'écart entre les fiscalités américaine et canadienne ... est considérable. Alors, nous croyons qu'il est temps précisément que le gouvernement agisse à ce sujet.

Michel Audet (Chambre de commerce du Québec)

Même s'il peut paraître simple, l'allégement fiscal offre en réalité au gouvernement un large éventail d'options possibles. Devant ces options, le gouvernement fixe ses priorités comme suit. Premièrement, il a allégé dans tous ses budgets le fardeau fiscal des plus démunis même avec un déficit, car de telles mesures s'imposaient de toute urgence. Ces mesures visaient, entre autres, les étudiants, les dons de charité, les personnes handicapées et les enfants. Deuxièmement, lorsqu'il s'est mis à dégager un léger excédent, le gouvernement a accordé des réductions d'impôt générales d'abord aux Canadiens à revenu faible ou moyen. Troisièmement, il a pris des dispositions pour augmenter la portée et l'ampleur des réductions d'impôt générales à mesure qu'il disposerait des ressources nécessaires.

Le temps est venu d'appliquer des dégrèvements plus généraux. Les témoignages entendus par le Comité ont confirmé la croyance selon laquelle les Canadiens versent une trop grande partie de leur revenu en impôts. Le ministre des Finances est de cet avis. Et le Comité le croit aussi. Toutefois, nous devons veiller à ce que l'allégement soit durable, afin d'éviter une balade fiscale en montagnes russes, c'est-à-dire des réductions suivies d'augmentations fiscales si la situation budgétaire devient menacée par des bouleversements financiers ou un ralentissement de l'économie.

[N]ous considérons que les contribuables canadiens ont fait d'énormes sacrifices ces dernières années pour nous amener là où nous en sommes aujourd'hui. Il faudrait alléger ce fardeau.

Michael Murphy (président, Groupe de travail prébudgétaire, Chambre de commerce de Saint John)

La seconde priorité consiste à nous doter du régime fiscal le plus efficient et le plus efficace possible. Certains pourraient dire que notre compétitivité générale est entravée par le régime fiscal actuel. Étant donné que la prospérité future de notre pays repose sur une économie compétitive, le Comité se sent tout à fait justifié d'inscrire l'efficience économique en très bonne place dans sa liste de priorités.

Outre les réductions fiscales, un autre moyen de mettre plus d'argent en circulation est de réduire les cotisations d'assurance-emploi. On sait que les contributions récentes à l'AE ont dépassé les versements d'environ six milliards de dollars par année.

Réductions d'impôt ciblées

L'an dernier, le Comité a recommandé toute une série de mesures fiscales dans son rapport sur les consultations prébudgétaires. Il a soutenu qu'avant de réduire le fardeau fiscal global, on devait d'abord réinvestir dans certains programmes sociaux et faire profiter de cet investissement ceux qui en ont le plus besoin.

Le gouvernement a suivi le conseil du Comité à cet égard. Par exemple, il a augmenté de 500 $ l'exemption personnelle de base ainsi que l'exemption pour personne mariée et l'équivalent du montant pour conjoint au moyen d'un montant supplémentaire non remboursable qui limitait cette mesure aux contribuables à faible revenu. Il s'est ensuivi qu'environ 400 000 particuliers à faible revenu n'ont plus eu à payer d'impôt, tandis que 4,6 millions d'autres contribuables ont bénéficié d'un certain allégement fiscal (jusqu'à 85 $ pour un particulier et 170 $ pour une famille).

Il en coûterait 1,1 milliard de dollars par année pour réduire d'un point de pourcentage le taux de 26 p. 100 auquel sont assujettis les Canadiens à revenu moyen.

En outre, la surtaxe générale de 3 p. 100, une mesure « temporaire » mise en oeuvre par le gouvernement précédent en 1986, est entièrement éliminée pour les particuliers qui ont un revenu annuel d'au plus 50 000 $ et partiellement réduite pour ceux qui gagnent entre 50 000 $ et environ 65 000 $. Quelque 13 millions de contribuables ne paieront plus la surtaxe, tandis qu'un million d'autres verseront une somme réduite. Ensemble, ces nouvelles mesures réduiront de façon marquée le fardeau fiscal des déclarants à revenu faible ou moyen. Par exemple, une famille de quatre personnes ayant un revenu annuel unique de 30 000 $ devrait voir diminuer de près d'un tiers son fardeau fiscal fédéral.

Le gouvernement a également présenté un allégement fiscal qui vise précisément à améliorer l'accès à l'éducation et à soutenir le concept d'un apprentissage permanent. Par exemple, tous les étudiants pourront maintenant réduire de leur revenu les paiements d'intérêt sur leurs prêts d'études. Le crédit pour études est élargi aux étudiants à temps partiel, tout comme la déduction pour frais de garde d'enfants, et les Canadiens peuvent retirer de l'argent de leur RÉER afin de financer leurs activités d'apprentissage.

On a augmenté de 40 p. 100 la déduction pour frais de garde d'enfants, et on a haussé de 850 millions de dollars les dépenses fédérales consacrées à la prestation fiscale pour enfants.

En outre, afin d'égaliser le traitement fiscal des travailleurs indépendants et des entreprises constituées en société, les travailleurs canadiens autonomes pourront déduire de leurs revenus d'entreprise leurs cotisations d'assurance-santé et d'assurance dentaire.

Outre ces mesures touchant l'impôt sur le revenu des particuliers, les employeurs obtiendront à compter de 1999 une exonération de cotisations d'assurance-emploi afin d'encourager le recrutement de jeunes âgés de 18 à 24 ans.

Le budget de 1998 comprenait des mesures fiscales accordant aux Canadiens à revenu faible ou moyen des allégements fiscaux cumulatifs la quasi-totalité des 7 milliards de dollars sur les trois prochaines années. Ces initiatives sont compatibles avec nos recommandations et représentent un sage investissement de la part du gouvernement fédéral. Nous croyons que les choix du gouvernement font ressortir la valeur de ce processus de consultation prébudgétaire et du rapport du Comité.

Une réduction de 100 dollars de l'impôt de tous les contribuables reviendrait à environ 1,5 milliard par an. - (Mise à jour économique et financière, 14 octobre 1998)

L'an dernier, l'état des finances du gouvernement limitait la marge de manoeuvre de ce dernier. Il est toujours tentant de décréter une réduction générale des impôts, comme certains le proposent. Toutefois, pour avoir un véritable impact, cette mesure devrait être d'une ampleur telle que les gains réalisés jusqu'ici en seraient compromis.

Les Canadiens doivent bénéficier des réductions fiscales les plus élevées que le gouvernement peut offrir. Ils ont fait de grands sacrifices afin de permettre la remise en ordre des finances de l'État. On doit leur accorder une pause... Plus que toute autre solution, les réductions d'impôt pour les particuliers permettront à plus de gens d'avoir plus d'argent.

Thomas d'Aquino (président-directeur général, Conseil canadien des chefs d'entreprises)

L'an dernier, nous avons souligné que « la patience est une vertu ». Nous avons alors dit qu'en attendant un peu plus longtemps, il serait possible d'offrir des réductions d'impôt durables. Le Comité croit que les Canadiens ont attendu assez longtemps. Le temps est venu de planifier et de réaliser ce que le Comité a préconisé dans le passé.

Maintenant que sa situation financière est plus stable, le gouvernement fédéral est beaucoup mieux placé pour accorder des réductions d'impôt additionnelles. Comme nous l'avons mentionné, étant donné que des mesures fiscales ont déjà été adoptées pour les Canadiens à revenu faible ou moyen, le Comité croit que le gouvernement doit offrir un allégement de portée plus générale.

Le Canada figure présentement en tête de liste parmi les pays ayant le plus haut taux d'imposition. Cette charge importante limite considérablement le pouvoir d'achat des consommateurs, tout en encourageant l'évitement fiscal et le travail au noir. Nous croyons qu'il serait fort souhaitable que le prochain budget fédéral contienne des mesures concrètes de réduction des impôts pour les particuliers...

Lise Bergeron (présidente, Chambre de commerce régionale de Sainte-Foy)

C'est uniquement parce que le gouvernement a agi de façon responsable au cours des dernières années et parce que les Canadiens d'un océan à l'autre ont accepté de consentir d'importants sacrifices qu'il semble que nous puissions mettre en oeuvre des mesures d'allégement fiscal qui soient à l'avantage de tous les Canadiens.

Réductions d'impôt générales

Il est temps que le gouvernement fédéral examine le fardeau fiscal que doivent porter tous les Canadiens. Par exemple, par suite d'un sondage fait récemment auprès de ses membres, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a constaté que leurs priorités avaient changé au cours de l'année. À l'heure actuelle, 80 p. 100 des répondants estiment que l'on devrait se concentrer sur la réduction du fardeau fiscal total. Mais s'il veut effectuer des réductions à grande échelle, à qui le gouvernement fédéral doit-il s'attaquer?

Nous ne pouvons nous permettre un système fiscal qui ne soit pas concurrentiel par rapport à nos partenaires économiques clés.

Peter Rollason (président, Comité des affaires gouvernementales, Institut des dirigeants financiers du Canada)

On peut aborder la question en se demandant quels éléments de notre régime fiscal sont les moins efficients et concentrer les efforts à cet endroit. Ce n'est pas une tâche facile. Il y a beaucoup de débats non concluants sur les conséquences pour l'économie des différents impôts, et le présent rapport n'est pas le lieu où il convient de régler ces questions. Toutefois, comme le montre le tableau suivant, la situation internationale est riche d'enseignements.

Dans l'ensemble, notre régime fiscal n'est pas disproportionné par rapport à celui des autres pays industrialisés (voir le Tableau 1, Recettes fiscales en tant que pourcentage du PIB - 1996). Au Canada, les impôts sont beaucoup plus bas qu'en France et en Italie. Le fardeau fiscal des Canadiens est plutôt comparable à celui des citoyens du Royaume-Uni. De fait, lorsqu'on compare les données de 1996 à celles de 1995, on constate que l'écart entre le Canada et le Royaume-Uni va en diminuant. Il en est de même pour l'écart entre le Canada et les États-Unis. Le Canada continue de se situer au milieu des pays du G7.

Tableau 1
RECETTES FISCALES EN TANT QUE POURCENTAGE DU PIB 1996





Source: OCDE

Une réduction de 1 p. 100 dans les 3 taux de l'impôt, soit 17, 26 et 29 p. 100, coûterait au-delà de 3,7 milliards de dollars par année.

Selon toute évidence... nos taux d'imposition des particuliers ne sont pas compétitifs à l'échelle internationale, et nous devons faire quelque chose pour que les gens hautement qualifiés demeurent dans notre pays.

Barry W. Pickford (président, Comité fiscal Stentor, et vice-président, Fiscalité, Bell Canada - Stentor politiques publiques Télécom Inc.)

Le défi qu'il nous faut relever ne concerne pas nécessairement notre fardeau fiscal global ou notre fardeau comparativement à celui d'autres pays industrialisés, qu'ils fassent partie du G7 ou de l'OCDE. Le problème canadien réside principalement dans la comparaison avec ce qui se passe aux États-Unis, notre principal marché pour la vente de biens et services et notre premier concurrent aux chapitres du capital et de la main-d'oeuvre. Non seulement le poids de la fiscalité est plus élevé ici qu'aux États-Unis, mais l'impôt sur le revenu des particuliers occupe environ 30 p. 100 plus de place au Canada qu'au sud de la frontière12. Cela rend notre régime fiscal non compétitif.

La grande priorité du gouvernement fédéral doit être, sans contredit, la reconnaissance de l'importance de la recherche scientifique et du développement technologique comme moteurs de la nouvelle économique. Les milieux de recherche canadiens sont la ressource la plus précieuse dont nous disposons pour être davantage compétitifs à l'échelle mondiale, pour préparer plus de jeunes Canadiens et Canadiennes à entreprendre des carrières en recherche ou dans des secteurs axés sur l'innovation, et pour transférer le savoir et la technologie vers le secteur privé qui constitue la plus grande source d'emplois au Canada.

Denis Gagnon (vice-président principal, Fondation canadienne pour l'innovation)

La disparité de la charge fiscale sur les travailleurs canadiens par rapport à leurs homologues américains, en ce qui touche les revenus personnels, a toujours milité en faveur d'un examen et d'une rationalisation de notre régime afin de le rendre plus compétitif. De nombreux travailleurs canadiens qualifiés (p. ex. des infirmières et infirmiers, des techniciens en radiologie ou des ergothérapeutes) sont très en demande aux États-Unis, où leur fardeau fiscal est moindre. En outre, le Sud attire des professionnels très qualifiés et très bien payés, comme des médecins, des pilotes, des ingénieurs en logiciel et des informaticiens. Outre des rémunérations plus élevées, une charge fiscale beaucoup moins lourde les attend de l'autre côté de la frontière.

Dans une étude publiée par Statistique Canada, on conclut que le soi-disant « exode des cerveaux » est en fait un « gain » net de compétences si l'on considère que le Canada reçoit plus d'immigrants qualifiés en provenance du reste du monde que ce qu'il perd en compétences aux mains des États-Unis13. Toutefois, on ne sait pas encore exactement dans quelle mesure la théorie du gain de compétences s'avérera juste.

La majorité des entreprises manufacturières de notre industrie sont des filiales de multinationales essentiellement basées aux É.-U., de sorte que leurs patrons se trouvent aux É.-U. et qu'ils viennent très souvent chercher les meilleurs éléments des entreprises canadiennes. Ce sont ces personnes qui obtiennent les promotions et se font offrir de déménager au sud. Je ne suis pas en train de dire que leur départ tient nécessairement aux impôts moins élevés, mais je puis vous garantir que c'est la raison pour laquelle ces gens ne reviennent pas.

Dean H. Wilson (président, Association des industries de l'automobile du Canada)

L'Institut C.D. Howe a publié récemment une étude qui concluait que l'exode de Canadiens doués vers les États-Unis est réel et coûteux. Cette étude a notamment révélé que le nombre de gestionnaires, de médecins, de scientifiques et d'infirmiers et d'infirmières qui ont émigré du Canada aux États-Unis en 1993-1994 équivaut respectivement à 18 p. 100, 14 p. 100, 14 p. 100, et 40 p. 100 des classes de diplômés canadiens en 1991. De 1982 à 1996, cela a représenté pour la société canadienne une perte nette de 6,6 milliards de dollars. Les auteurs ont souligné que le revenu après impôt et avant impôt que les émigrants qualifiés pouvaient gagner en déménageant aux États-Unis n'était que l'un des facteurs déterminants. Ils n'ont pas conclu que les impôts relativement élevés étaient le facteur dominant.

Il existe également une bonne quantité de renseignements non scientifiques indiquant que certains Canadiens parmi les plus doués quittent le pays pour les États-Unis. Depuis 1993, le pourcentage des travailleurs du Laboratoire de logiciels d'IBM Canada à Toronto qui choisissent un employeur américain au moment de quitter l'entreprise a progressé à environ 25 p. 100. D'après Nortel, il est difficile de retenir au Canada les travailleurs hautement qualifiés. Il est difficile de garder les travailleurs qualifiés, dont il y a déjà une pénurie, compte tenu de l'écart entre les charges fiscales. L'Association médicale canadienne a présenté des statistiques indiquant qu'en 1996, 522 médecins, 1 103 infirmières et infirmiers et 352 autres travailleurs de la santé, pour un total de 1 977 personnes, sont déménagés aux États-Unis.

La Coalition pour la recherche biomédicale et en santé a fait une enquête sur ce sujet auprès des universités canadiennes dotées d'une faculté de médecine. Les données rassemblées indiquent qu'au cours des 6 dernières années, 5 facultés de médecine ont perdu 62 postes de cliniciens et professeurs, 232 techniciens de recherche, 39 boursiers en clinique et en études postdoctorales et 68 étudiants diplômés.

Nous sommes préoccupés par la nécessité de faire mieux pour ce qui est de former et de retenir au Canada des gens compétents, en particulier dans le domaine de la haute technologie, et de ne pas les laisser s'échapper.

Barry W. Pickford (président, Comité fiscal Stentor et vice-président, Fiscalité, Bell Canada - Stentor politiques publiques Télécom Inc.)

REMÉDIER À L'ÉCART FISCAL

Une chose est sûre : nos éléments les plus brillants nous quittent pour les États-Unis, ce qui jette une ombre sur l'avenir économique du Canada. Dans une économie axée sur le savoir, la ressource la plus précieuse, ce sont les gens. Ce phénomène ne peut que nuire à nos perspectives économiques à long terme et compromettre notre niveau de vie. Le Canada doit composer avec une concurrence accrue de pays comme les États-Unis, riches en capital et en connaissances. La main-d'oeuvre qualifiée et les connaissances n'ont jamais été aussi importantes. Afin de tirer parti des débouchés économiques futurs, non seulement le Canada doit attirer des investissements en capital, mais il doit également compétitionner pour attirer des travailleurs qualifiés de l'étranger et, par-dessus tout, investir adéquatement dans son propre capital humain.

Une réduction de l'impôt sur le revenu des particuliers contribuerait, entre autres, à enrayer l'exode des cerveaux14. Même si les impôts étaient moins élevés au Canada, les travailleurs très qualifiés pourraient tout de même succomber aux charmes des É.-U., où se trouvent l'économie la plus productive et la plus novatrice du monde, donc un niveau de vie très élevé pour cette tranche de la population, et le meilleur environnement de recherche au monde. Mais une baisse des impôts ne nuirait certainement pas.

L'impôt sur le revenu représentait 20,5 % du revenu familial total en 1996, dépassant le sommet de 19,8 % atteint en 1990. La proportion du revenu versée sous forme d'impôt atteint également un niveau record pour les familles du quatrième quintile et celles du quintile supérieur.

Le Quotidien (Statistique Canada) le 22 juin 1998

Le temps est venu pour nous de rendre notre régime fiscal plus compétitif et de le faire concorder avec celui des États-Unis. La mondialisation ne se limite plus à des échanges de biens et de services; elle signifie également une plus grande mobilité de la main-d'oeuvre et du capital. Les travailleurs canadiens n'ont jamais eu autant de perspectives de carrière sur la scène internationale. Au Canada, le capital humain est presque aussi mobile que le capital financier. Nos concitoyens les plus brillants peuvent aller là où les conditions de travail et la rétribution financière sont les meilleures. Et justement, les États-Unis offrent ces conditions.

Néanmoins, le gouvernement doit s'occuper de l'écart fiscal qui existe actuellement entre nos deux pays. Il doit également reconnaître qu'à long terme, des impôts élevés ne peuvent être que préjudiciables à notre économie.

Comparativement à leurs collègues américains, les travailleurs canadiens qui gagnent un modeste revenu se voient imposer des taux marginaux combinés extrêmement élevés. Le contraste des revenus après impôt est frappant. En 1998, un contribuable canadien ayant un revenu (salaire et intérêts) d'environ 63 400 $ se verra imposer un taux marginal fédéral-provincial combiné oscillant entre 45,4 p. 100 et 53,3 p. 10015, tandis qu'aux États-Unis, on appliquait en 1996 un taux marginal de 45,26 p. 100 sur un revenu de 263 750 $ U.S., en utilisant comme base un taux d'imposition de 5 p. 100 au niveau de l'État. Cela fait abstraction des impôts sur les gains en capitaux, qui sont deux fois plus élevés ici qu'aux États-Unis. Au Canada, plus de 53,2 p. 100 de l'impôt sur le revenu des particuliers perçu par le gouvernement fédéral est versé par des contribuables qui déclarent un revenu supérieur à 50 000 $, même si ces derniers ne représentent que 11,7 p. 100 des déclarants. Il n'est pas non plus surprenant que des Américains dans la même situation, par exemple des cadres d'entreprise, exigent des bonis considérables pour venir au Canada, en guise de compensation pour la charge plus lourde de la fiscalité.

L'image statistique que dépeint le tableau ci-joint est compatible avec celle qui ressort des témoignages entendus par le Comité. Tout indique que les mesures de réduction fiscale du gouvernement fédéral devraient viser l'impôt sur le revenu des particuliers et non les cotisations d'assurance-emploi.

Pour nous, il importe énormément de s'attaquer au problème des taux d'imposition trop élevés. Dans notre industrie, nous avons plusieurs entreprises membres qui constituent en fait l'administration centrale d'opérations exécutées tant au Canada qu'aux États-Unis. Il est parfaitement logique qu'elles veuillent à l'occasion faire venir un gestionnaire des É.-U. au siège social, afin d'y accomplir une tâche importante, mais cela devient très difficile si les taux de l'impôt sont tellement élevés que la personne en question subirait en acceptant un déclin marqué de ses conditions de vie.

Jean Van Loon (président, Association canadienne des producteurs d'acier)

Le Canada a le régime d'impôt sur le revenu des particuliers le plus progressif des pays du G7. Cette progressivité a augmenté sensiblement au cours des 20 dernières années alors que les autres pays du G7 ont eu tendance à aplatir leur régime fiscal pendant la même période.

Ces taux marginaux d'imposition élevés produisent toutes sortes d'effets qui peuvent nuire à notre économie. En réduisant la productivité, ils réduisent notre niveau de vie.

Ce n'est pas parce que les taux marginaux élevés réduisent le pouvoir d'achat des ménages qu'ils ont des conséquences négatives. C'est plutôt parce qu'ils découragent l'épargne et l'effort. Ces effets réduisent directement le taux de croissance économique et limitent par conséquent le relèvement de notre niveau de vie.

Autrement dit, la réduction des taux marginaux d'imposition cadrerait avec les critères du pacte de productivité dont il est question au début de ce chapitre.

Par conséquent, nous concluons que le temps est venu de revoir le fardeau fiscal imposé à tous les Canadiens. Le Comité recommande que, dans le prochain budget, on instaure des réductions d'impôt pour tous les Canadiens. En outre, il recommande que le gouvernement s'engage à effectuer d'autres réductions d'impôt, en présentant un plan triennal à cet égard.

Afin de rendre notre régime fiscal plus compétitif face à celui des É.-U., on pourrait réduire nos taux marginaux et/ou les niveaux de revenu auxquels ils s'appliquent. Par exemple, le taux marginal du milieu pourrait être réduit de 26 à 23 p. 100, comme on l'avait annoncé en 1987 dans l'ensemble de mesures de réforme fiscale. Appliquée d'un seul coup en 1999, cette option coûterait 3,3 milliards de dollars au gouvernement fédéral. Si ce montant est trop élevé, le gouvernement pourrait répartir la réduction sur une période de trois ans et annoncer dans le prochain budget un échéancier pour les baisses en question.

L'économie canadienne aurait tout à gagner de la mise en oeuvre de taux d'imposition sur le revenu comparables à ceux de notre plus important partenaire commercial, les États-Unis, étant donné que cela permettrait aux citoyens et aux entreprises d'être plus concurrentiels. Sur le marché ouvert et fortement concurrentiel d'aujourd'hui, les pays doivent veiller de près à conserver leurs atouts pour attirer des entrepreneurs et les garder, car ce sont eux les premiers à créer des emplois. Des nombreux pays industrialisés réduisent leurs taxes, et le Canada ne peut pas se permettre de ne pas le faire.

Helmut Pastrick (économiste en chef, Credit Union Central of British Columbia)

Une autre option consisterait à hausser le niveau de revenu où le taux d'imposition marginal supérieur commencerait à s'appliquer. Il en coûterait 280 millions de dollars au gouvernement fédéral pour augmenter de 12 500 $ à 23 092 $ le niveau où la surtaxe de 5 p. 100 devient applicable. Il lui en coûterait près de 860 millions de dollars pour hausser de 59 180 $ à 100 000 $ le seuil supérieur de revenu imposable. Faire passer ce dernier à 250 000 $ coûterait 1,4 milliard de dollars au gouvernement. À supposer que le gouvernement hausse le seuil en question, comme on le propose dans les deux derniers scénarios, tout en réduisant de 26 à 23 p. 100 le taux marginal du milieu, la note serait beaucoup plus élevée, soit 5 milliards et 6,1 milliards de dollars respectivement.

L'an dernier, le Comité a recommandé que le gouvernement élimine progressivement les surtaxes temporaires instaurées par le gouvernement précédent. Le Comité continue de croire qu'il s'agit de la meilleure option pour les Canadiens qui souhaitent un allégement fiscal plus large. Les taux marginaux, y compris le plus bas, sont plus élevés que ce qu'on avait envisagé à l'origine. C'est pourquoi, comme on l'a déjà noté, des mesures à cet égard ont été prises dans le budget de 1998.

Une réduction d'un point de pourcentage de la surtaxe de 5 p. 100 coûterait 130 millions de dollars.

Dans le budget de 1998, on a éliminé entièrement la surtaxe générale de 3 p. 100 pour les particuliers gagnant jusqu'à 50 000 $, et partiellement pour ceux dont le revenu se situe entre 50 000 $ et 65 000 $. Il est maintenant temps de terminer le travail et d'éliminer entièrement cette surtaxe.

Une réduction d'un point de pourcentage de la surtaxe générale de 3 p. 100 coûterait 350 millions de dollars.

Le Comité recommande qu'on supprime entièrement la surtaxe temporaire de 3 p. 100 dans le prochain budget.

La surtaxe temporaire de 5 p. 100 pour les revenus élevés avait aussi été adoptée comme mesure temporaire de réduction du déficit. Il faudrait également l'éliminer, car elle crée une distorsion dans le régime fiscal, telle qu'elle a été conçue. Il en coûterait au gouvernement environ 665 millions de dollars par année pour l'éliminer entièrement. Le Comité estime que cette mesure a servi les fins pour lesquelles elle avait été établie et qu'elle devrait être éliminée de façon progressive.

Une augmentation de 100 $ au montant personnel de base coûte 250 millions de dollars. Une augmentation de 100 $ au montant pour conjoint coûte 40 millions de dollars.

Le Comité recommande que le gouvernement dresse un plan afin d'éliminer la surtaxe de 5 p. 100 en la réduisant d'un point de pourcentage par année à compter de 1999.

Comme nous l'avons déjà mentionné, le budget de l'an dernier prévoyait également une augmentation de 500 $ de l'exemption personnelle de base et de l'exemption pour personne mariée. Ce relèvement ne visait toutefois que les particuliers dont les revenus sont inférieurs à 7 500 $ et les couples dont le membre qui travaille gagne moins de 13 500 $.

Une augmentation de l'exemption personnelle d'environ 700 $ entraînerait une réduction maximale de l'impôt à payer de 180 $, en supposant un taux d'impôt provincial de 50 p. 100 pour le contribuable célibataire. Un contribuable marié ou un parent célibataire pourrait recevoir jusqu'à 360 $ de réduction.

Le Comité estime que cette mesure devrait être étendue à tous les contribuables canadiens et ne pas s'appliquer uniquement à ceux ayant des revenus faibles. Une augmentation de l'exemption personnelle de base de 700 $, coûterait au gouvernement environ 1,7 milliard de dollars par année. Un relèvement de la même ampleur de l'exemption pour personne mariée coûterait au gouvernement fédéral 295 millions de dollars. Comme les contribuables ayant des revenus plus modestes bénéficient déjà de cet avantage, le gouvernement ne perdrait qu'un peu plus de 1,8 milliard de dollars par année.

Le Comité recommande que l'augmentation de 500 $ de l'exemption personnelle de base et de l'exemption pour personne mariée prévue dans le budget de 1998 pour les contribuables à faible revenu soit augmentée de 200 $, ce qui porterait à 700 $ le revenu supplémentaire pouvant être gagné en franchise d'impôt.

Le Comité recommande en outre que cette augmentation de 700 $ de l'exemption personnelle de base et de l'exemption pour personne mariée soit accordée à tous les contribuables canadiens.

Assurance-emploi

Le Programme d'assurance-emploi est l'un des plus importants programmes établis par le gouvernement fédéral. L'assurance-emploi est la seule charge sociale sur la rémunération perçue à l'échelon fédéral. Comparativement aux autres pays, le fardeau total des charges sociales (cotisations d'assurance-emploi plus les cotisations du RPC/RRQ) par rapport au PIB au Canada est peu élevé, soit seulement 6 p. 100. (Voir le Tableau 1) De fait, en 1996, de tous les pays du G7, le Canada était celui qui avait le plus bas niveau de charges sociales par rapport à son PIB.

Le gouvernement a déjà réduit considérablement le fardeau des cotisations d'AE. Le taux de cotisation d'AE pour 1998 a été ramené de 2,90 $ à 2,70 $ par tranche de 100 $ de rémunération assurable.

Pour 1998, la diminution de 20 cents combinée à la diminution du maximum des gains assurables et au Programme pour l'embauche de nouveaux travailleurs a réduit les cotisations d'AE de 2,6 milliards de dollars. Ces mesures ont signifié une réduction des cotisations d'AE pour 14 millions de travailleurs canadiens et s'inscrivent dans une longue série de réductions graduelles des cotisations d'AE qui ont commencé en 1993, lorsque les cotisations ont été fixées à 3,07 $ par opposition à 3,30 $ comme l'exigeait la loi. Dans l'ensemble, le gouvernement a déjà réduit les cotisations d'AE d'environ 5 milliards de dollars. Le Comité reconnaît qu'il faut faire plus encore mais que d'une autre manière, cette façon de procéder est prudente et ne met pas en péril l'équilibre budgétaire du gouvernement.

Bon nombre de témoins ont recommandé avec vigueur une réduction importante des cotisations d'AE. Ils ont soutenu que l'excédent actuel du compte d'assurance-emploi est plus que suffisant pour contrer toute nécessité d'ajuster les cotisations lors d'une prochaine récession. Ils ont ajouté que l'« excédent » du compte d'AE dépasse le montant de réserve que l'actuaire en chef du programme avait qualifié d'idéal. Par conséquent, ils ont réclamé une réduction de 60 cents du point d'équilibre actuariel de 2,10 $. Cela coûterait 4,2 milliards de dollars. D'autres sont allés encore plus loin et ont recommandé une réduction de 90 cents. Pour aller à 1,80 $, il faudrait réduire les revenus du gouvernement de plus de 6,3 milliards de dollars, ce qui, à notre avis, serait très imprudent.

Le congé de cotisations à l'assurance-emploi pour les employeurs qui embauchent des jeunes équivaut à un allégement fiscal de 200 millions de dollars pour 1999 et 2000.

Le fait de réduire les cotisations d'AE ne serait pas avantageux pour tous les Canadiens. Premièrement, cela rapporterait davantage aux entreprises qu'aux travailleurs. Une réduction de 60 cents signifierait des économies de 2,6 milliards de dollars pour les employeurs mais seulement de 1,76 milliard de dollars pour les travailleurs. Deuxièmement, le fait de réduire les cotisations d'AE ne ferait rien pour les citoyens plus âgés, les étudiants ou les travailleurs autonomes. Le Comité estime que des réductions plus générales de l'impôt sur le revenu des particuliers présenteraient des avantages pour un plus grand nombre de Canadiens.

La FCEI recommande vivement que le gouvernement fédéral annonce et réalise un programme triennal pour ramener les cotisations à l'assurance-emploi en équilibre avec les coûts de réalisation du programme.

Comme nous l'avons déjà mentionné, les charges sociales au Canada sont faibles et déjà compétitives comparativement aux autres pays du G7. Là où la concurrence pose un problème, c'est au niveau de l'impôt sur le revenu des particuliers. Le Canada compte plus que tout autre pays du G7 sur les recettes tirées de l'impôt sur le revenu des particuliers.

Réduire considérablement les cotisations d'AE aurait pour effet de limiter notre capacité de diminuer davantage le ratio de la dette au PIB. Cela enlèverait une certaine souplesse au gouvernement. On sait que c'est la hausse des taux de cotisation, et non le taux de cotisation comme tel, qui entraîne une augmentation du chômage. Étant donné que la stabilité est si importante, tout ralentissement de l'économie obligerait le gouvernement à faire des réductions non désirées dans les programmes de dépenses ou à augmenter d'autres taxes pour éviter un nouveau déficit. Dans le contexte changeant actuel, un retour au financement d'un déficit n'est pas une option viable.

Plusieurs témoins étaient d'avis que l'excédent du compte d'assurance-emploi devrait servir non pas à réduire les cotisations mais bien à augmenter les prestations. Auparavant, entre 66 et 80 p. 100 des chômeurs recevaient des prestations, comparativement à seulement 40 p. 100 de nos jours; ceux qui contribuent au régime ne touchent donc pas tous les prestations auxquelles ils ont droit.

Le Comité estime que le phénomène est mal compris. Si bon nombre de chômeurs ne touchent pas de prestations, ce n'est pas à cause des réformes apportées à l'assurance-emploi, mais bien parce qu'ils ne répondent pas aux critères qui ont toujours existé; en d'autres mots, ils ne reçoivent rien parce que le système n'a pas été conçu pour eux. Figurent dans ce groupe les quelque 500 000 chômeurs qui n'ont pas travaillé au cours des 12 mois précédents, les travailleurs autonomes et les personnes qui quittent un emploi pour retourner à l'école. Ce nombre compte également les 100 000 personnes qui ont laissé leur emploi sans « motif valable ».

Après examen, le Comité estime que le régime de l'assurance-emploi remplit la fonction pour laquelle il a été conçu, et il ne voit aucune raison d'augmenter pour l'instant les prestations. Les réformes apportées à l'assurance-emploi ont été conçues principalement pour améliorer le fonctionnement du marché de l'emploi. Or, le fait d'élargir la couverture pour couvrir un plus grand nombre de chômeurs annulerait les avantages obtenus.

Le compte d'assurance-emploi et les primes d'assurance-emploi

Le surplus pour le compte d'assurance-emploi atteindra probablement 19,58 milliards de dollars à la fin de l'année civile. Il n'y a pas si longtemps, c'est-à-dire en 1993, le déficit dans le compte cumulatif d'assurance-emploi s'élevait à 5,9 milliards de dollars. Le compte d'assurance-emploi national fait partie des comptes publics depuis 1986, comme l'a recommandé le vérificateur général; par conséquent, s'il y a un déficit dans le compte d'assurance-emploi, le gouvernement le couvre. Or, c'est justement ce qui s'est produit pendant 10 des 17 dernières années. Pendant les années d'excédent, la position financière du gouvernement est donc meilleure. Cette approche s'est avérée utile tant pour l'ensemble de la population canadienne que pour les cotisants au régime et ses bénéficiaires.

Les cotisations doivent être fixées à un niveau permettant des recettes suffisantes pour payer les dépenses autorisées et pour maintenir des taux de cotisation stables. Pour établir un niveau de cotisation, les prévisionnistes ont recours à divers taux de chômage hypothétiques. La Loi sur l'assurance-emploi ne fixe ni les taux des cotisations ni le solde qui doit demeurer dans le compte. Selon l'actuaire en chef, une réserve de 10 ou 15 milliards de dollars serait suffisante pour couvrir les coûts et pour que l'on n'augmente pas les charges sociales au cours des périodes de récession. Cette évaluation est fondée sur une simulation des coûts des 15 prochaines années pour le programme actuel, en supposant une récurrence des récessions semblable aux deux dernières.

La prudence s'avère peut-être de mise toutefois, car au cours des 50 dernières années, le taux de chômage a eu tendance à augmenter de façon inéluctable. La conjoncture économique mondiale oblige aussi à une certaine circonspection.

Aux États-Unis, les programmes d'État doivent conserver des réserves valant entre 100 et 150 p. 100 des coûts en période de récession. Au Canada, les réserves correspondent à entre 110 et 150 p. 100 des prestations habituelles prévues. Par conséquent, l'excédent accumulé ne témoigne pas vraiment d'une prudence excessive.

Nombre de témoins représentant des organismes comme la Chambre de commerce de Charlottetown, le Conseil canadien des chefs d'entreprises et le Bureau de commerce de Toronto ont déclaré qu'il fallait procéder graduellement pour réduire les cotisations d'assurance-emploi. De nombreuses entreprises sont prêtes à attendre un peu avant d'en arriver au point d'équilibre pour les taux de cotisation, alors que de nombreux Canadiens attendent depuis longtemps d'importantes réductions générales de l'impôt sur le revenu des particuliers. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI) appuie également une telle approche. Ses membres s'inquiètent davantage du fardeau fiscal global que de ses éléments particuliers. Au printemps de cette année, un membre sur quatre estimait qu'il fallait accorder une plus grande priorité aux réductions de taxes. Aujourd'hui, 80 p. 100 des membres tiennent ce discours. Viennent ensuite, en ordre de priorité, les cotisations à l'assurance-emploi et la dette du gouvernement.

Les cotisations d'assurance-emploi inquiètent les membres de la FCEI car, combinée à l'augmentation des cotisations au RPC/RRQ, la charge des cotisations sociales des employeurs aura plus que doublé au cours des 20 dernières années.

Une réduction de 10 p. 100 des cotisations d'assurance-emploi coûte au gouvernement fédéral 700 millions de dollars par année.

La FCEI recommande vivement que le gouvernement fédéral annonce et réalise un programme triennal pour ramener les cotisations à l'assurance-emploi en équilibre avec les coûts de réalisation du programme.

Une réduction de 15 p. 100 des cotisations d'assurance-emploi coûte au gouvernement fédéral 1,05 milliard de dollars par année.

Pour satisfaire à cette demande de la FCEI, il faudrait réduire les cotisations de 60 cents sur 3 ans, pour les ramener à 2,10 $ par 100 $ de gains assurables, ce qui n'est pas incompatible avec les mesures que le gouvernement a prises dans le passé ou les recommandations du présent Comité. Nous continuons de croire que les cotisations doivent être réduites sans toutefois compromettre l'équilibre budgétaire du gouvernement. La recommandation de la FCEI, une fois complètement mise en oeuvre, réduirait de 4,2 milliards de dollars par année les recettes fédérales provenant des cotisations d'assurance-emploi.

Une réduction de 20 p. 100 des cotisations d'assurance-emploi coûte au gouvernement fédéral 1,4 milliard de dollars par année.

La hausse des impôts est également attribuable au fait que les échelons d'imposition n'ont pas été ajustés pour tenir compte de l'inflation. Ces hausses n'ont pas été aussi importantes que celles enregistrées durant la reprise ayant suivi la récession du début des années 80, alors que l'impôt a connu une augmentation annuelle moyenne de 504 dollars entre 1984 et 1990.

Le Quotidien (Statistique Canada) le 22 juin 1998

Par conséquent, le Comité recommande que le gouvernement réduise les cotisations d'assurance-emploi d'au moins 10 cents par 100 $ de gains assurables.

RECONSIDÉRER L'INDEXATION INTÉGRALE

Les mesures proposées jusqu'ici ne s'adressent essentiellement qu'aux soutiens de famille gagnant des revenus moyens ou élevés. Malgré les mesures fiscales ciblées prévues dans le budget de 1998, une approche équilibrée s'impose encore pour que l'ensemble des Canadiens améliorent leur situation en cette nouvelle ère d'excédents budgétaires.

L'an dernier, le Comité s'était prononcé contre le rétablissement de l'indexation intégrale, en raison des effets qu'une telle mesure pourrait avoir, soit la perte d'une certaine souplesse pour le gouvernement et l'anéantissement de recettes importantes dans les années à venir16. Par prudence, le Comité a recommandé plutôt que l'indexation intégrale ne soit remise en place que lorsque la situation budgétaire le permettrait. Maintenant que l'excédent budgétaire semble durable, le Comité estime que le gouvernement pourrait de nouveau se pencher sur la question.

Sur la base d'un taux annuel d'inflation de 1,5 p. 100, il en coûterait 840 millions de dollars dans la première année et 1,7 milliard de dollars dans la seconde pour rétablir l'indexation des paramètres fiscaux.

La règle de l'« IPC moins 3 points », adoptée en 1986, a encore cours. Comme chacun sait, un régime fiscal qui n'est pas indexé a trois effets pervers.

Premièrement, il élargit l'assiette fiscale, puisque le revenu imposable progresse plus rapidement que le revenu global en raison du recul de la valeur en termes réels des exemptions et des crédits au fil du temps. Les Canadiens à faible revenu finissent donc par être assujettis à l'impôt sur le revenu par suite de l'érosion de la valeur réelle de leurs crédits d'impôt. Deuxièmement, à mesure que le revenu croît sous l'effet de l'inflation, une proportion plus importante en est imposée à des taux plus élevés; le taux moyen d'imposition augmente donc. Et, troisièmement, du fait de ce que l'on appelle la progression par tranche, le taux d'imposition marginal s'élève à mesure que le seuil diminue en termes réels. Un régime fiscal qui n'est pas indexé sur l'inflation est donc régressif.

À un taux annuel d'inflation de 1,5 %, l'indexation du système d'impôts et des transferts coûterait 840 millions de dollars durant la première année, 1,7 milliard durant la deuxième année, 2,6 milliards durant la troisième année et 3,4 milliards durant la quatrième année.

Dans une étude qu'elle a publiée l'an dernier, l'OCDE recommande l'indexation intégrale17. Selon ce document, 1,4 million de particuliers à faible revenu sont devenus contribuables au cours de la période de 10 ans qui s'est terminée en 1998, et ce en raison de l'indexation partielle. Plus de 1,9 million de particuliers sont passés de la tranche fiscale la plus basse à la tranche fiscale moyenne18, tandis que 600 000 autres sont passés de la tranche fiscale moyenne à la tranche fiscale la plus élevée.

Faute d'indexation intégrale, le Canada dépend plus que les autres pays du Groupe des Sept des recettes provenant de l'impôt sur le revenu des particuliers (voir Tableau 1). Le rétablissement de l'indexation intégrale ne constitue pas tant une réduction d'impôt que la fin des augmentations d'impôt « automatiques » attribuables exclusivement à l'inflation.

Le Comité recommande que le gouvernement rétablisse l'indexation intégrale lorsque la situation financière le permettra et que des mesures soient prises entre-temps pour compenser l'impact de la désindexation.

Pour un meilleur rendement : La règle des 20 p. 100 de biens étrangers

Depuis 1994, le Canada applique une règle qui limite à 20 p. 100 la proportion des placements en biens étrangers pouvant être détenus dans un régime d'épargne-retraite ou de pension bénéficiant d'une aide fiscale. Ce plafond, qui était de 10 p. 100 avant 1990, a été haussé graduellement depuis lors. Un certain nombre de témoins pensent que cette limite contraignante de 20 p. 100 est préjudiciable, parce qu'elle restreint la rentabilité éventuelle que pourraient avoir des portefeuilles plus diversifiés et accroît le niveau du risque associé aux portefeuilles de retraite.

Même si le marché canadien des actions représente moins de 2,5 p. 100 de la capitalisation boursière mondiale, les Canadiens sont tenus d'y investir 80 p. 100 de leur épargne-retraite bénéficiant d'une aide fiscale. Ils sont donc très limités dans leurs possibilités de diversifier leurs portefeuilles à travers le monde et entre les secteurs économiques - il importe de se rappeler que l'économie canadienne demeure axée en bonne partie sur les ressources naturelles. C'est précisément en raison de la taille relativement restreinte du marché canadien des capitaux qu'il faut prévoir un contenu étranger assez important pour assurer une diversification importante. Les investisseurs avertis peuvent recourir à des moyens dérivés pour accroître réellement leur part de biens étrangers et dépasser les 20 p. 100 sans contrevenir aux règlements de l'impôt sur le revenu. Maintenant, certains fonds communs de placement offrent également cette possibilité.

Le Comité estime que le fait de restreindre la diversification a pour effet d'accroître les risques et, éventuellement, de réduire la rentabilité générale des portefeuilles. L'Institut des fonds d'investissement du Canada a fait réaliser une étude sur les conséquences de la règle relative aux biens étrangers pour le rendement des investissements. Cette étude a révélé que, si le plafond qui restreint le contenu étranger avait été fixé à 30 p. 100 au cours des 25 dernières années, les investisseurs canadiens auraient gagné jusqu'à 1,6 p. 100 par année de plus sur leurs portefeuilles d'épargne-retraite. Cela suppose des effets cumulatifs énormes, puisque l'investisseur moyen y perd 32 000 $ en capital, au moment de la retraite. Donc, la règle existante ne fait que rendre certains aînés plus pauvres qu'ils ne le seraient autrement.

Il n'est ni sage ni prudent d'obliger les Canadiens à placer 80 p. 100 de leur épargne-retraite dans 3 p. 100 des marchés financiers du monde. (Retirement Income Coalition)

À mesure que la population canadienne vieillit, elle épargne de plus en plus, et je peux facilement imaginer que nous présenterons constamment un excédent courant et deviendrons des prêteurs nets pour le reste du monde; dans une telle situation, je pense que vous voudrez permettre aux Canadiens d'élargir leurs possibilités de placement.

Gordon Thiessen (gouverneur, Banque du Canada, 17 novembre 1998)

La règle des 20 p. 100 ne concerne que les régimes d'épargne-retraite bénéficiant d'une aide fiscale, comme les REER, les RPA et le Fonds de placement du RPC. Elle pénalise donc surtout les personnes dont les économies sont en majeure partie investies dans ce type d'instrument. Les contribuables qui placent la plupart de leurs économies en dehors des régimes d'épargne bénéficiant d'une aide fiscale sont moins touchés par la règle des 20 p. 100. Ils peuvent diversifier leurs portefeuilles au maximum pour se protéger contre les risques et obtenir de meilleurs taux de rendement.

Le Comité recommande que le plafond de 20 p. 100 sur les investissements en biens étrangers soit haussé par tranches de 2 p. 100 de manière à atteindre 30 p. 100 en 5 ans. La diversification permettra aux Canadiens d'obtenir un meilleur rendement de leur épargne-retraite et de réduire les risques qu'ils courent, ce qui profitera à tous les Canadiens au moment où ils prendront leur retraite.

Certains témoins se sont prononcés contre le relèvement du plafond de 20 p. 100, jugeant que les troubles constatés sur les marchés mondiaux risquent de compromettre les épargnes des Canadiens et qu'une telle mesure priverait l'économie canadienne de capitaux fort nécessaires.

Il est tout à fait à l'honneur du ministre des Finances qu'il ait résisté aux fortes pressions exercées par le lobby financier pour qu'il relève et même supprime le plafond de 20 p. 100 sur les investissements en biens étrangers pour les fonds de pension bénéficiant d'une aide fiscale [...] Nous préconisons depuis longtemps une diminution graduelle du plafond

Bruce Campbell (directeur executif, Centre canadien de politiques alternatives)

Nous soulignons, à l'intention de ceux qui craignent que l'investissement en biens étrangers ait un effet préjudiciable sur l'économie canadienne et ses marchés de capitaux, que l'augmentation du plafond, lequel est passé de 10 à 20 p. 100, n'a eu aucun effet néfaste (Conference Board of Canada). De plus, les trois quarts des investissements canadiens échappent à cette règle, soit ceux qui ne bénéficient pas d'une aide fiscale. L'augmentation du plafond en biens étrangers pour le porter à 30 p. 100 n'aurait une incidence que sur 2,4 p. 100 du total des investissements canadiens. Même si toute cette proportion était investie dans des biens étrangers, l'effet sur le marché financier canadien serait minime.

À l'intention de ceux qui craignent qu'une exposition accrue aux marchés financiers des capitaux n'augmente les risques pour les Canadiens, le Comité cite en exemple le témoignage de nombreux groupes, y compris le Retirement Income Coalition, voulant qu'une diversification accrue ait pour effet non seulement d'accroître les recettes, mais aussi de réduire les risques. Le plafond de 20 p. 100 qui a protégé les Canadiens contre les entreprises comportant des risques élevés sur les nouveaux marchés les a aussi « protégés » contre les actions de premier ordre aux États-Unis. D'ailleurs, sur une période de 15 ans, rares sont les pays qui auraient donné aux Canadiens un rendement aussi faible que celui que ces derniers ont obtenu sur leur propre marché toujours selon le Retirement Income Coalition.

Le Comité appuie les arguments de ceux qui estiment que le plafond devrait être augmenté et par conséquent réitère sa recommandation de l'an dernier.


12 Le Canada dépend davantage de l'impôt sur le revenu des particuliers que tous les autres pays du G7, et l'écart est souvent énorme. Par exemple, il est plus du double de celui de la France et du Japon.

13 Dans son exposé intitulé Brain Drain or Brain Gain? (Statistique Canada, 1997), Ivan Fellegi admet qu'il existe une fuite des cerveaux vers les États-Unis et d'autres pays. En 1995, environ 11 000 travailleurs intellectuels auraient quitté le Canada, dont 5 600 pour les États-Unis, y compris 1 600 professionnels de la santé. Mais les faits démontrent globalement qu'il y a un gain net de compétences. En 1995, 34 300 travailleurs intellectuels sont venus dans le pays de partout dans le monde (42 600 en 1996).

14 De nombreuses variables agissent sur la décision de déménager aux États-Unis, des variables sur lesquelles le gouvernement a très peu ou point de contrôle, comme le climat, la géographie, le coût de la vie et la qualité de vie. Des variables importantes influencées par les décideurs entrent également en jeu, notamment l'existence d'une concentration vigoureuse et stimulante de connaissances (par exemple, une concentration d'entreprises semblable à celle de la Silicon Valley ainsi que la présence de laboratoires, d'hôpitaux de recherche ou d'universités importantes). Ce groupement de connaissances dépend de dépenses publiques (comme celles consenties par les trois conseils subventionnaires au Canada ou les stimulants fiscaux pour la R-D) ainsi que d'investissements privés dans la R-D (par les Biocherma, Nortel, Newbridge, Corel, JetForms, etc.). Les deux derniers éléments qui influent dans la décision d'un particulier de traverser ou non la frontière sont la rémunération globale et la charge fiscale. La rétribution des travailleurs hautement qualifiés est dictée par le marché. Aux États-Unis, le revenu réel a augmenté à cause d'une plus forte productivité. Si l'on applique le taux de change, l'écart est encore plus grand entre les deux pays au chapitre de la rémunération. L'impôt fédéral-provincial combiné sur le revenu des particuliers a des conséquences importantes en ce qui touche le revenu disponible des Canadiens.

15 Le taux marginal d'imposition pour les résidents de la C.-B. ayant un salaire de plus de 79 500 $ atteint 54,2 p. 100.

16 Le Comité a recommandé plutôt d'augmenter l'exemption personnelle de base, l'exemption pour personne mariée et l'équivalent du montant pour conjoint. Le gouvernement a accepté cette recommandation et a prévu dans son budget de 1998 un relèvement de 500 $ de tous ces montants.

17 OCDE, Étude économique de l'OCDE - 1996-1997, Canada, 1997.

18 Cela a un effet particulièrement remarquable, car le taux d'imposition moyen est supérieur de neuf points de pourcentage au taux d'imposition le plus faible.