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HEAL Rapport du Comité

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DON ET TRANSPLANTATION D'ORGANES ET DE TISSUS RAPPORT MINORITAIRE AU RAPPORT DU COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ DE LA CHAMBRE DES COMMUNES NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE

Judy Wasylycia-Leis, députée - Winnipeg-Nord-Centre

Il est bien connu que le secteur des dons d'organes au Canada vit une situation difficile. La proportion de Canadiens qui font un don d'organes est parmi le plus faible dans le monde occidental. Il y a présentement plus de 3 000 Canadiens et Canadiennes qui attendent un don d'organes solides. Et pourtant, moins de la moitié d'entre eux obtiendront avant la fin de l'année l'organe dont ils ont besoin. Des vies sont ainsi perdues et les coûts d'attente sont élevés. L'absence d'un programme national et d'une réglementation fédérale sont au coeur du problème. Nous avons décidé d'émettre ce rapport minoritaire en raison de l'incapacité du Comité de la santé de proposer une stratégie nationale précise en la matière et de favoriser ouvertement la sécurité.

Nos connaissances scientifiques dans le domaine de la transplantation avancent plus rapidement que notre capacité à établir des règles pour assurer la sécurité etdes procédures. Rétablir l'équilibre entre d'une part l'évolution rapide du savoir et d'autre part la poursuite des transplantations dans un cadre sûr constitue un objectif crucial de notre présente mission. Il avait été demandé au Comité de déterminer que le gouvernement fédéral pourrait faire pour soutenir l'élaboration de normes relatives à la sécurité, aux résultats et au processus en matière de dons d'organes et de tissus, et de sensibiliser les gens encore plus à l'importance des dons et de la transplantation d'organes et de tissus et à leur gestion.

Le Comité a pu entendre et interroger une vaste gamme de témoins qui ont partagé leurs connaissances et expertise acquises depuis les premières expériences de transplantation d'organes et de tissus jusqu'à maintenant. Je tiens à remercier les témoins - des scientifiques oeuvrant dans des secteurs de pointe, des intervenants du secteur de la santé, et des citoyens ordinaires qui ont relaté leurs histoires personnelles.

À la lumière des témoignages entendus, il est évident que les Canadiens sont actifs dans tous les secteurs du don et de la transplantation d'organes. Il est aussi certain qu'il est nécessaire de regrouper de toute urgence ces secteurs au moyen d'un système national coordonné de dons d'organes qui serait assujetti au cadre de réglementation de Santé Canada. Les Canadiens veulent que des mesures précises soient prises et que le gouvernement fasse preuve de leadership, et non qu'il publie un autre rapport qui viendra s'ajouter à la pile d'études déjà faites sur cette question d'une très grande importance. En conséquence, le NPD demande au gouvernement fédéral de coordonner immédiatement l'élaboration d'une stratégie nationale de dons d'organes en collaboration avec les provinces, et formule les recommandations suivantes :

1. Un registre national de dons d'organes

Il est absolument prioritaire et nécessaire d'accroître le nombre de dons d'organes au Canada. Cela ne surviendra pas seulement en sensibilisant encore plus la population sur la question et en améliorant le système hospitalier. Il sera nécessaire d'adopter des approches innovatrices et proactives dont le premier volet devrait être la création d'un registre national de dons d'organes pour accroître le bassin de donneurs potentiels et d'un mécanisme simple pour permettre d'exprimer leurs souhaits. Il est important de donner la possibilité aux Canadiens de dire : i) Oui, je veux faire un don d'organe; ii) Non; ou iii) Je suis encore indécis. Cette approche combinée à un registre national de dons d'organes accessible 24 heures par jour et fournissant rapidement de l'information serait un moyen raisonnable pour tenter d'accroître l'offre d'organes.

2. Le fédéral doit appuyer financièrement le secteur et montrer la route à suivre.

Avoir dans les hôpitaux mêmes du personnel affecté à la sollicitation d'organes et de tissus ainsi que des équipes fonctionnelles de dons constituent des moyens prometteurs pour accroître les dons d'organes. Nous devons former ces travailleurs pour qu'ils connaissent les critères des dons d'organes, sachent parler aux familles de donneurs potentiels, puissent répondre d'une façon informée aux questions et être le point de contact du registre national de dons. Il n'est pas nécessaire d'expliquer pourquoi il est important d'assurer la formation des intervenants sur le terrain et de tenir des campagnes nationales de sensibilisation et d'éducation. Les gouvernements provinciaux sont intéressés à promouvoir un tel programme de travail. Il ne manque qu'une seule chose, soit une volonté claire d'agir et un engagement financier sérieux de la part du gouvernement fédéral. Il appartient donc au fédéral d'offrir des incitatifs pour créer un système national coordonné de dons d'organes, de rétablir pleinement les paiements de transfert au titre des services et soins de santé pour veiller à ce qu'une personne ayant besoin d'une transplantation ne se voit pas refuser un organe en raison de la fermetures de lits ou de la pénurie d'infirmières, et enfin d'accorder plus d'importance à la promotion de la santé et la prévention pour ainsi réduire l'incidence de la maladie et la demande d'organes.

3. La protection de la santé et non la gestion du risque

L'omission la plus flagrante dans le rapport du Comité est le peu d'importance qui est accordée à la sécurité. À cet égard, les auteurs du rapport ne suggèrent qu'une approche fondée sur des normes ainsi qu'un modèle passif de réglementation. Ils ne s'objectent pas au cadre de gestion des risques concernant le don d'organes et de tissus que propose Santé Canada et ils négligent totalement les leçons de la tragédie du sang contaminé. Les organes et les tissus ne sont pas différents du sang. Rejeter un modèle hautement réglementé va à l'encontre du principe de prudence et mercantilise la sécurité publique. De même, la poursuite de la xénotransplantation en l'absence d'un cadre réglementaire soulève de graves questions sur le plan de l'éthique et de la sécurité. Un système national de dons d'organes doit veiller à ce que la sécurité soit un critère déterminant et comporter les volets suivants :

  • Une réglementation active et non passive concernant les organes et les tissus, y compris des inspections fréquentes, des mécanismes pour assurer le respect de toutes les exigences réglementaires et des mécanismes d'intervention face aux dangers pour la santé;
  • Le rejet de toute notion selon laquelle il est nécessaire d'offrir une protection contre des poursuites comme Santé Canada l'a proposé;
  • Le respect de la réglementation canadienne relative à l'importation d'organes ainsi que des contrôles des exportations de tissus devant être transformés;
  • L'établissement d'un inventaire exhaustif de la recherche en xénotransplantation et la tenue d'une enquête sur l'importation et la propagation de porcs transgéniques au Canada dont les tissus sont utilisés au pays pour la xénotransplantation;
  • La convocation immédiate d'une tribune nationale sur la recherche en xénotransplantation et sur la reproduction d'animaux transgéniques à cette fin;
  • De concert avec la population, l'élaboration de lignes directrices strictes concernant la recherche pré-clinique et clinique en xénotransplantation; et
  • La tenue d'une enquête publique indépendante sur la Direction générale de la protection de la santé dans le but de veiller au rétablissement du rôle fondamental de la Direction, c'est-à-dire la protection de la santé, - la sécurité des organes et des tissus est une dimension incontournable.

4. Égalité d'accès et imputabilité publique

L'accessibilité et l'imputabilité doivent être des aspects fondamentaux de toute stratégie relative au don d'organes. S'inspirant du juge Krevor et de son rapport sur le système d'approvisionnement en sang du Canada, il est recommandé que plusieurs principes fondamentaux régissent une stratégie nationale : les organes et les tissus sont une ressource publique; il n'y a aucune place à la mercantilisation du don d'organes et de tissus; les Canadiens et Canadiennes devraient avoir un accès universel aux organes et tissus; et la prise de décisions devrait être ouverte et transparente. Les recommandations suivantes découlent de ces principes :

  • Que tous les aspects du don et de la transplantation d'organes et de tissus relèvent d'instances publiques et à but non lucratif;
  • Que soient établis des programmes et normes nationales concernant les résultats des programmes de transplantation, l'attribution des organes disponibles et le partage des organes entre les provinces;
  • Que soit entièrement rejetée l'idée d'un système à deux niveaux comme cela se fait dans d'autres secteurs des services de santé, notamment la chirurgie de la cataracte et l'arthroplastie de la hanche et du genou;
  • La participation de la population à tous les volets du dossier de la transplantation et de la biotechnologie pour tenir compte des dimensions éthiques, médicales et liées à la sécurité.

Le Canada peut devenir un leader mondial dans le domaine de la transplantation et du don d'organes. En prenant immédiatement des mesures pour concevoir une stratégie nationale reposant sur le principe de la sécurité, nous pourrons atteindre cet objectif.