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36e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 162
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 30 novembre 1998
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LA PÊCHE ARTISANALE |
Motion |
M. Peter Stoffer |
M. Wayne Easter |
M. Gary Lunn |
M. Bill Matthews |
M. Paul Steckle |
M. Peter Stoffer |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI SUR L'EXTRADITION |
Projet de loi C-40. Étape du rapport |
Motion d'approbation |
L'hon. Marcel Massé |
Troisième lecture |
L'hon. Marcel Massé |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
Motion |
L'hon. Don Boudria |
LOI SUR L'EXTRADITION |
M. Peter Adams |
M. John Reynolds |
M. Réal Ménard |
M. Daniel Turp |
M. Gordon Earle |
M. Peter MacKay |
M. Derek Lee |
M. Chuck Cadman |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LA SOCIÉTÉ ALLELIX BIOPHARMACEUTICALS INC. |
M. Gurbax Singh Malhi |
L'AGENTE LAURIE WHITE |
M. Mike Scott |
LA SEMAINE NATIONALE DE LA SÉCURITÉ-INCENDIE CHEZ SOI |
M. Lynn Myers |
LE MOIS DE LA SENSIBILISATION AU DIABÈTE |
Mme Karen Redman |
FEU CASEY SMITH |
M. Ted McWhinney |
LES HUSKIES DE L'UNIVERSITÉ DE LA SASKATCHEWAN |
M. Roy Bailey |
LE DÉCÈS DU PÈRE DAVID JOHN CORKERY |
Mme Marlene Catterall |
LA CRISE FINANCIÈRE DANS LE SECTEUR AGRICOLE |
M. Paul DeVillers |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Leon E. Benoit |
LES AGRICULTEURS DU CANADA |
Mme Rose-Marie Ur |
LES LÉSIONS CÉRÉBRALES |
M. Gordon Earle |
LA PLAQUETTE INFO MEDIC WATCH |
Mme Pierrette Venne |
LA LOI SUR LES ARMES À FEU |
M. Peter MacKay |
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DE L'HÉMOPHILIE |
M. Réginald Bélair |
LA COLLECTE DE DENRÉES DES STAGIAIRES PARLEMENTAIRES |
M. Jean-Paul Marchand |
LES INSTITUTIONS FINANCIÈRES |
M. Gary Pillitteri |
NETHERLANDS MILLS |
M. Dick Harris |
LE CONTRÔLE DE LA CIRCULATION AÉRIENNE AU YUKON |
Mme Louise Hardy |
LE CHINESE CULTURAL CENTRE DE VANCOUVER |
Mme Sophia Leung |
QUESTIONS ORALES |
LA SANTÉ |
M. Preston Manning |
L'hon. Allan Rock |
M. Preston Manning |
L'hon. Jim Peterson |
M. Preston Manning |
L'hon. Jim Peterson |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Jim Peterson |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Jim Peterson |
LA POLITIQUE DU DÉGLAÇAGE |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. David Anderson |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. David Anderson |
Mme Suzanne Tremblay |
L'hon. David Anderson |
Mme Suzanne Tremblay |
L'hon. David Anderson |
LA CULTURE CANADIENNE |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Sheila Copps |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Sergio Marchi |
L'AGRICULTURE |
M. Rick Borotsik |
L'hon. Lyle Vanclief |
M. Rick Borotsik |
L'hon. Lyle Vanclief |
LE COMMERCE |
M. Charlie Penson |
L'hon. Sheila Copps |
M. Charlie Penson |
L'hon. Herb Gray |
LA POLITIQUE DU DÉGLAÇAGE |
M. Gérard Asselin |
L'hon. David Anderson |
M. Gérard Asselin |
L'hon. David Anderson |
LE COMMERCE |
M. Inky Mark |
L'hon. Herb Gray |
M. Inky Mark |
L'hon. Herb Gray |
LA POLITIQUE DU DÉGLAÇAGE |
M. Stéphane Bergeron |
L'hon. David Anderson |
M. Stéphane Bergeron |
L'hon. David Anderson |
LA JUSTICE |
M. Garry Breitkreuz |
L'hon. Anne McLellan |
M. Garry Breitkreuz |
L'hon. Anne McLellan |
LE PROJET DE LOI C-55 |
M. Benoît Sauvageau |
L'hon. Sergio Marchi |
L'EMPLOI |
M. Murray Calder |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Mike Scott |
L'hon. Jane Stewart |
M. Mike Scott |
L'hon. Jane Stewart |
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES |
M. Peter Stoffer |
L'hon. Alfonso Gagliano |
M. Peter Stoffer |
L'hon. Alfonso Gagliano |
LA PAUVRETÉ |
M. André Harvey |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
M. André Harvey |
L'hon. Pierre S. Pettigrew |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Sarkis Assadourian |
L'hon. Christine Stewart |
LA JUSTICE |
M. Eric Lowther |
L'hon. Lawrence MacAulay |
LA RECHERCHE ET DÉVELOPPEMENT |
Mme Francine Lalonde |
L'hon. John Manley |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
Mme Bev Desjarlais |
L'hon. Jane Stewart |
LES TRANSPORTS |
M. Bill Casey |
L'hon. David M. Collenette |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Hec Clouthier |
L'hon. David Kilgour |
LES TRANSPORTS |
M. Roy Bailey |
L'hon. David M. Collenette |
LA COMPAGNIE SPEXEL |
M. Daniel Turp |
M. Julian Reed |
LA SANTÉ |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
L'hon. Allan Rock |
PRÉSENCE À LA TRIBUNE |
Le Président |
AFFAIRES COURANTES |
DÉCRETS DE NOMINATIONS |
M. Peter Adams |
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Peter Adams |
LA LOI SUR LES SOCIÉTÉS D'ASSURANCES |
Projet de loi C-59. Présentation et première lecture |
L'hon. Jim Peterson |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-459. Présentation et première lecture |
M. Randy White |
LE RÈGLEMENT |
Motion |
L'hon. Don Boudria |
PÉTITIONS |
Le mariage |
M. Roy Bailey |
Les armes nucléaires |
M. Bill Blaikie |
L'Accord multilatéral sur l'investissement |
M. Bill Blaikie |
La fiscalité |
Mme Karen Redman |
La chasse aux phoques |
Mme Karen Redman |
Les droits de la personne |
M. Paul Szabo |
Les aliments transgéniques |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Le mariage |
M. Peter Stoffer |
Les délinquants sexuels |
M. Peter Stoffer |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Peter Adams |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI SUR L'EXTRADITION |
Projet de loi 40. Troisième lecture |
M. Chuck Cadman |
Report du vote sur la motion |
LA LOI SUR LA MONNAIE ROYALE CANADIENNE |
Projet de loi C-41. Étape du rapport. |
Motion d'approbation |
L'hon. Anne McLellan |
Projet de loi C-41. Troisième lecture |
L'hon. Anne McLellan |
Mme Carolyn Parrish |
M. Werner Schmidt |
M. Ghislain Lebel |
M. John Solomon |
M. Howard Hilstrom |
M. Rick Borotsik |
M. Ken Epp |
M. Gilles Bernier |
M. Werner Schmidt |
Mme Carolyn Parrish |
M. Rob Anders |
M. Ken Epp |
M. Philip Mayfield |
M. Werner Schmidt |
M. Rob Anders |
Mme Carolyn Parrish |
M. Werner Schmidt |
M. Ken Epp |
Mme Carolyn Parrish |
Report du vote sur la motion |
Suspension de la séance |
Reprise de la séance |
DÉBAT D'URGENCE |
L'AGRICULTURE |
M. Gerald Keddy |
Motion |
M. Rick Borotsik |
L'hon. Lyle Vanclief |
M. Joe McGuire |
M. Preston Manning |
M. Howard Hilstrom |
Mme Hélène Alarie |
Mme Alexa McDonough |
M. John Solomon |
M. John Harvard |
M. Larry McCormick |
M. Garry Breitkreuz |
M. Jake E. Hoeppner |
M. Paul Steckle |
Mme Rose-Marie Ur |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Peter Stoffer |
M. John Maloney |
Mme Jean Augustine |
M. John Herron |
M. Scott Brison |
M. John McKay |
M. Murray Calder |
M. Charlie Penson |
M. Leon E. Benoit |
M. Jim Abbott |
M. Peter Adams |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 162
CHAMBRE DES COMMUNES
Le lundi 30 novembre 1998
La séance est ouverte à 11 heures.
Prière
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
LA PÊCHE ARTISANALE
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD) propose:
Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait créer une semaine internationale de la sensibilisation aux avantages de la pêche artisanale pour l'environnement et pour le développement durable des collectivités.
—Monsieur le Président, je remercie la Chambre ainsi que les Canadiens de me permettre de prendre la parole sur cette motion.
Essentiellement, la motion déclare que nous devons respecter et honorer les pêcheurs et les travailleurs d'usine des localités côtières de nos trois océans ainsi que ceux qui pêchent dans nos eaux intérieures des Grands Lacs et dans les eaux intérieures des provinces comme la Saskatchewan, l'Alberta et le Manitoba.
Tout a commencé dans les années 50 avec l'invention du chalutier congélateur et du dragueur-usine congélateur. Ces progrès technologiques qui permettent une nouvelle manière de pêcher le poisson ont littéralement détruit différentes espèces dans le monde entier.
En 1977, le gouverneur général actuel, Roméo Leblanc, qui était alors ministre des Pêches du Canada, a étendu nos limites de 12 milles à 200 milles. Ce changement visait notamment à nous assurer une plus grande maîtrise de nos ressources océaniques.
L'aspect malheureux de ce changement, c'est ce que le ministre des Pêches et des Océans a signalé, avec raison, que les gouvernements antérieurs, libéraux ou conservateurs, ont favorisé les grandes sociétés plutôt que le secteur de la pêche côtière. Je le remercie de l'avoir admis.
La motion dont nous sommes saisis n'est pas une réaction à une politique monétaire du gouvernement. Elle n'est pas une réaction à une idéologie politique. C'est un hommage aux pêcheurs, qui risquent quotidiennement leur vie sur les océans pour assurer notre subsistance.
On a annoncé aujourd'hui dans le golfe du Saint-Laurent que des équipes de recherche et de sauvetage tentent de retrouver trois autres pêcheurs que l'on croit morts noyés. Ils étaient cinq pêcheurs à bord du chalutier. Deux corps ont été retrouvés et on en cherche encore trois. Les pêcheurs passent leur vie entière à travailler pour assurer notre subsistance. Tout ce que fait cette motion, c'est leur rendre hommage et reconnaître leur contribution.
Le 21 novembre est la Journée internationale des océans. Ce jour-là, nous prenons le temps de réfléchir à ce que les océans représentent pour nous en tant qu'espèce humaine. Nous pensons aussi à tous ceux qui, dans le monde entier, vivent de cette ressource.
Les ressources qui se trouvent dans les océans n'appartiennent pas uniquement au Canada. Elles appartiennent à tous les Canadiens, à tous les êtres humains qui vivent dans des pays situés en bordure des océans.
En Nouvelle-Écosse, à Terre-Neuve et dans d'autres régions côtières, les maisons sont souvent coiffées d'une curiosité architecturale, une galerie de guet qui permettaient aux femmes, particulièrement les femmes de pêcheurs, de faire les cent pas en espérant que leurs époux ou leurs fils allaient revenir de la pêche. On peut encore voir ces galeries de guet en Nouvelle-Écosse et dans d'autres provinces. Elles ont été construites pour que les épouses puissent surveiller le retour de leurs maris et de leurs fils après des journées, voire des semaines passées à pêcher au péril de leur vie.
La pêche n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui. Ce n'est pas la pêche à la ligne et à l'hameçon à bord d'un doris qui a décimé les stocks de poissons, c'est la technologie de pointe. Cette technologie permet de prendre en quelques minutes ce qui prenait des semaines à pêcher.
C'est aujourd'hui l'ouverture de la pêche au homard dans l'ouest du comté de Nova et des milliers de petites embarcations vont prendre la mer. La possibilité qu'un certain nombre de ces bateaux ne reviennent pas est très réelle. Ces pêcheurs vont risquer leur vie pour nourrir leur famille. On dit que l'agriculture est l'un des métiers les plus dangereux. La pêche la suit de près. Chaque année, dans les localités côtières, des douzaines de personnes perdent la vie.
L'objet de la motion est de rendre hommage aux pêcheurs à l'échelle internationale. C'est une occasion de réfléchir aux avantages de la pêche artisanale pour le Canada.
Ce serait une tragédie si nous devions perdre nos localités côtières en raison de la disparition de la ressource. Une conférence d'une semaine a lieu en ce moment à Halifax, Elle porte sur les océans. Cette motion arrive à point nommé vu les débats qui s'y tiennent sur le sort des ressources océaniques.
Récemment, un avion de la SwissAir s'est abîmé au large de la Nouvelle-Écosse. Les premières personnes sur les lieux étaient des pêcheurs côtiers de Sambro Head, Blandford et de la baie St. Margarets. Ils ont été les premiers à arriver sur les lieux après l'écrasement de l'avion Swissair.
Si on persiste dans cette voie et qu'on force les pêcheurs et leurs familles à abandonner ces localités, il n'y aura bientôt plus personne pour répondre à l'appel en pareil cas.
On aurait tort d'expulser ces gens de leurs collectivités pour les réinstaller dans des centres urbains. Il faut éviter cela à tout prix.
Je le répète, cette motion vise essentiellement à réserver une semaine dans l'année pour honorer ces gens, leurs contributions, leurs ancêtres et leurs collectivités. Un peu plus tard dans le courant du débat je vais solliciter le consentement unanime pour que cette motion puisse être mise aux voix.
Les députés de mon caucus reconnaissent que les collectivités côtières, les collectivités de l'intérieur, les petites collectivités font la force de ce grand pays. Elles ont façonné ce pays et elles en assureront le maintien.
Tout ce que je demande à la Chambre des communes, à cette auguste assemblée, c'est d'honorer les pêcheurs côtiers et la pêche artisanale qui est une activité très durable. Cela fait des siècles et des siècles qu'elle se poursuit.
De nos jours, depuis 1956, on a détruit de nombreux aspects du secteur de la pêche. On en a mis du temps avant de songer à consulter les protagonistes de cette industrie et à travailler de concert avec eux pour reconstituer les stocks décimés et pour rétablir l'équité pour les travailleurs de ce secteur.
Nous savons qu'il y a eu des changements dans le secteur des pêches, certains bons, d'autres mauvais. Tout ce que demande cette motion, c'est qu'une semaine soit désignée pour rendre hommage au travail de ces pêcheurs et à leur apport à l'environnement et à notre subsistance. N'oublions pas encore une fois que ces pêcheurs risquent leur vie chaque jour dans ces petites embarcations, essentiellement pour approvisionner des citadins.
Les enfants de ces pêcheurs ne se rendent pas compte de ce que c'est de partir en bateau avec leur père, leur mère, leur oncle ou leur frère car, au moment même où nous parlons, de plus en plus de pêcheurs sont forcés d'abandonner la pêche artisanale. Le gouvernement lui-même admet que la solution, c'est la pêche industrielle. Je ne veux pas en discuter ici. J'attendrai pour cela les audiences de notre comité.
Je sais que le secrétaire parlementaire, qui est ici aujourd'hui, se rend compte que l'Île-du-Prince-Édouard compte des milliers de pêcheurs artisanaux, des gens qui risquent aussi leur vie. Les députés réformistes, dont celui de Saanich—Gulf Islands, qui fait partie du comité, savent aussi que dans leurs circonscriptions, la pêche artisanale fait vivre des milliers de gens.
Lorsque nous nous sommes rendus dans la circonscription du député de l'Île de Vancouver-Nord, qui faisait autrefois partie de notre comité, des milliers de gens sont venus nous parler de la faisabilité et de la possibilité de préserver la pêche artisanale pour maintenir leur collectivités en vie. Plusieurs de ces collectivités sont des collectivités côtières. Elles n'ont pas accès à la route et n'ont pas un grand nombre des avantages qu'ont les grands centres urbains.
C'est pour moi un honneur et un véritable plaisir de visiter, à titre de parlementaire, des communautés comme Sointula, Alert Bay, Port Hardy et Prince Rupert, en Colombie-Britannique, Burgeo, à Terre-Neuve, Malpeque, dans l'Île-du-Prince-Édouard, Sheet Harbour, Sambro et Shelburne, en Nouvelle-Écosse, Broughton Island, sur l'île de Baffin, dans les Territoires du Nord-Ouest et des milliers d'autres localités.
Les habitants de ces communautés ne demandent qu'une chose, demeurer dans leur secteur de pêche. Ils ne veulent pas devenir riches, mais seulement gagner de quoi subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants. Ce n'est pas tant demander.
Cette motion vise à reconnaître une semaine symbolique. En posant ce geste, la Chambre des communes leur ferait savoir qu'elle les respecte, qu'elle apprécie ce qu'ils ont fait dans le passé et ce qu'ils feront dans l'avenir. En instituant une semaine internationale, nous reconnaîtrions la détermination des pêcheurs d'assurer la subsistance de la population en tant qu'espèce. Leur travail serait reconnu sur la scène internationale.
Certaines personnes diront que la création d'une semaine internationale pourrait poser une difficulté. La question des mines antipersonnel posait un problème sérieux, mais nous l'avons surmonté assez rapidement. Le ministre des Affaires étrangères mérite toute notre reconnaissance pour les efforts qu'il a déployés, avec d'autres pays, afin de signer un traité interdisant les mines antipersonnel.
Si nous avons pu faire cela, nous pouvons certainement rendre hommage aux pêcheurs de toutes les régions côtières du monde, notamment ceux de l'Inde, du Bangladesh, de la Namibie, des États-Unis, du Chili, du Canada, et ainsi de suite. Tous les pays qui comptent des communautés côtières peuvent joindre leurs efforts, que ce soit par le truchement des Nations Unies ou du Parlement, pour reconnaître ces communautés, les pêcheurs et leurs familles, non seulement au Canada mais partout dans le monde. Nous poserions un geste symbolique et ferions ainsi beaucoup pour honorer leur engagement envers les économies des pays et la survie de leurs communautés.
C'est un plaisir de prendre la parole aujourd'hui. J'espère que le gouvernement actuel et les gouvernements futurs sauront respecter notre pêche artisanale et les gens qui vivent dans ces collectivités.
Il y a eu de nombreuses manifestations contre le gouvernement. Je me rappelle de celles de février 1996 où de nombreux pêcheurs côtiers ont occupé les bureaux du ministère des Pêches et des Océans parce qu'ils avaient l'impression qu'on leur prenait leur gagne-pain pour le donner aux grosses sociétés. Cet argument est toujours valable et la lutte continue.
Ce qui est regrettable maintenant, c'est que les gens ont abandonné tout espoir et ils ont perdu leur dignité. La motion veut simplement redonner aux gens l'espoir et restaurer une certaine dignité dans leur vie. Je n'ai pas à m'arrêter sur le nombre de suicides parmi les pêcheurs côtiers et les travailleurs d'usines de transformation qui ont eu lieu récemment dans South West Nova. Il y a aussi un grand nombre de suicides sur l'île de Vancouver. Ces gens étaient, à une époque, des gens fiers, qui travaillaient dur dans les pêcheries et gagnaient un peu d'argent et pouvaient ainsi subvenir aux besoins de leur famille.
Ce qui est regrettable, c'est qu'ils ont l'impression, et c'est parfois vrai, que le gouvernement ou les gouvernements passés, en collaboration avec la grande industrie, leur ont pris leur gagne-pain. Tout montre que le gouvernement actuel favorise encore certains secteurs de l'industrie de la pêche au détriment des pêcheurs artisanaux. On discutera de cette question à une autre occasion.
Je demande l'indulgence de la Chambre. Je vais, à la fin de mon discours, demander que cette motion fasse l'objet d'un vote. Il ne s'agit pas d'une motion financière. Elle ne lie en aucune façon le gouvernement actuel ou les gouvernements futurs. Il s'agit simplement d'un geste symbolique pour dire à ces gens qui vivent dans les collectivités côtières que nous les respectons, que nous respectons leur mode de vie, et que nous ferons tout en notre pouvoir, en tant que gouvernement et à titre d'opposition, pour respecter ce mode de vie et leurs familles.
Je remercie tous les députés qui participent à ce débat que je trouve très important.
Le vice-président: Je pourrais peut-être poser une question au député pour éclaircir une chose. Demande-t-il le consentement maintenant ou va-t-il le faire durant sa réponse de cinq minutes?
M. Peter Stoffer: Je le ferai durant ma réponse de cinq minutes.
M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de traiter de la motion du député de Sackville—Eastern Shore:
Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait créer une semaine internationale de la sensibilisation aux avantages de la pêche artisanale pour l'environnement et pour le développement durable des collectivités.
J'ai eu l'occasion de me rendre dans bon nombre des petites collectivités, en compagnie du député de Sackville—Eastern Shore, avec le Comité des pêches. Je crois fermement que les collectivités rurales, notamment celles qui pratiquent la pêche ou qui s'adonnent à l'agriculture, font vivre les Canadiens. Nous devons faire tout notre possible pour assurer leur viabilité.
Déclarer une semaine de la sensibilisation n'est pas la solution. À la toute fin de son discours, le député d'en face en est vraiment arrivé aux faits lorsqu'il a dit que ce n'était rien de plus qu'un geste symbolique. Il faut que ce soit beaucoup plus que cela. Nous, de ce côté-ci de la Chambre, croyons à l'action. Le symbolisme ne suffit pas.
Si nous voulons déclarer une semaine internationale de la sensibilisation, nous devons demander à des gens de se charger de la question. Nous devons embaucher des gens. Nous devons produire des publications. Cela prend de l'argent et du temps. Nous tentons de consacrer nos efforts à améliorer le secteur de la pêche, au lieu de faire ce qui est caractéristique chez le Nouveau Parti démocratique. Ce parti veut théoriser, effectuer des études pendant des années. De ce côté-ci de la Chambre, nous croyons aux décisions difficiles et à l'action. Nous avons commencé à constater des améliorations au cours de la dernière année. Le premier ministre Tobin l'a mentionné il y a quelques jours.
Cette sensibilisation se fait déjà de façon vivante. La semaine dernière, au Conseil canadien des pêcheurs professionnels, tribune nationale qui a eu lieu du 21 au 23 novembre, le ministre, des représentants élus, des représentants de l'industrie et des pêcheurs se sont réunis pour travailler davantage à une vision des pêches qui reconnaisse les secteurs des engins et ouvre les voies de communication. Ils ont tenté de collaborer de concert avec l'ensemble de l'industrie. C'était une reconnaissance par les gens du secteur de l'importance qu'il a, et aussi la reconnaissance que l'industrie de la pêche a un avenir.
Lorsque le premier ministre Tobin...
Une voix: Qui?
M. Wayne Easter: Le député d'en face demande «Qui»? Le premier ministre Tobin est bien connu. On l'avait même surnommé capitaine Canada à l'époque où, au nom du gouvernement, il avait réussi à mettre un frein aux activités des pêcheurs étrangers. Il avait fait son possible pour que les pêches profitent au pêcheurs canadiens.
Dans ses remarques, le premier ministre Tobin disaient que beaucoup de gens au Canada pensent que les pêches sont un cas désespéré, mais il n'en est rien. La principale raison pour laquelle l'économie de Terre-Neuve devrait être florissante cette année, ce sont les pêches. Elle se sont améliorées et elles sont en bonne santé. Il y a des problèmes en ce qui concerne la pêche à la morue de l'Atlantique, mais d'une façon générale la situation des pêches s'améliore. La valeur des quantités débarquées augmente. Je pense que dans la province de Québec la valeur des quantités débarquées est 39 p. 100 supérieure à celle de 1982.
Un des points les plus importants que je voudrais faire valoir, c'est le fait que la conservation est la première priorité du gouvernement en ce qui concerne la gestion des pêches canadiennes. Cela signifie que la conservation vient avant les autres priorités, aussi valables soient-elles, par exemple la création d'emploi et le développement économique.
Même si les députés d'en face l'admettent rarement, nous travaillons à la création d'emploi et au développement économique, par l'intermédiaire des initiatives rurales du gouvernement du Canada, plutôt que dans le seul cadre de la politique des pêches. Nous faisons ce que nous pouvons en matière de politique des pêches.
Le ministre des Pêches et des Océans a dit plusieurs fois que le poisson vient en premier. Cela devrait maintenant être évident pour tout le monde. Les raisons de cela doivent apparaître clairement aujourd'hui. Le débat sur la politique concernant les pêches serait nettement plus productif si chacun reconnaissait que des changements s'imposent, aussi bien dans la manière de penser que de pêcher. Nous devons reconnaître que les choses ont changé et que la situation actuelle exige à la fois des mesures à court terme, dont un grand nombre ont d'ailleurs été prises, et une volonté de changement durable.
S'il y a une chose à remarquer, c'est bien la disparition de l'ancienne philosophie des pêches et l'avènement d'une nouvelle fondée sur la conservation. Cette philosophie en est encore au stade de la conception et de l'élaboration. Plusieurs députés font partie du Comité des pêches. Celui-ci entend ce que les membres des collectivités de pêcheurs ont à dire et en fait rapport à la Chambre, même s'il s'agit de critiques du MPO, afin d'alimenter le débat et d'élaborer une politique concernant les pêches qui tienne compte des collectivités. La conception et l'élaboration d'une philosophie des pêches fondée sur la conservation se poursuivent continuellement et avec dynamisme au ministère des Pêches.
L'objectif ultime que poursuit le gouvernement est d'assurer une pêche durable. Autrement dit, le gouvernement veut une industrie rentable et respectueuse de l'environnement, capable de faire vivre des collectivités et de permettre aux pêcheurs de gagner de bons revenus, toujours d'une façon durable.
Pour y parvenir, le gouvernement a pris des mesures pour réduire le nombre de gens qui comptent sur les pêches pour vivre, par exemple des programmes de protection temporaire du revenu, d'encouragement à la retraite anticipée et de rachat de permis, ainsi que d'autres mesures pour aider les collectivités à s'adapter au changement.
Il nous faut aussi réduire la capacité de capture, et le gouvernement travaille également dans ce but. Comme toujours, le gouvernement accueille toute proposition visant à améliorer le sort des collectivités.
Pourquoi le gouvernement a-t-il pris ces mesures importantes? La réponse est simple: pour que ceux qui restent dans l'industrie des pêches puissent décemment gagner leur vie sans devoir compter sur des subventions gouvernementales et pour qu'il n'y ait plus jamais de surpêche.
La conservation vient au premier rang des priorités de Pêches et Océans en matière de gestion des pêches. La pratique de la conservation et les mesures visant à la faire respecter sont tout ce qui nous sépare de la perte de nos stocks de poisson. Nous ne pouvons pas laisser se répéter les erreurs du passé. Nous, de ce côté-ci de la Chambre, avons tiré la leçon des erreurs du passé et nous ne pouvons pas permettre qu'elles se perpétuent dans les pêches de l'avenir.
Si les gens pensent qu'un moratoire est pénible, imaginons ce que ce serait de vivre dans un monde sans poisson. Telle était clairement la voie dans laquelle nous étions engagés jusqu'à ce que le gouvernement prenne l'initiative d'élaborer de nouvelles politiques et prenne des mesures pour veiller à ce qu'il subsiste des pêches pour l'avenir.
L'enjeu ne correspond pas à ce que le député d'en face laisse entendre dans sa motion. L'enjeu ne tourne pas autour de l'opposition entre la pêche à grande échelle et la pêche artisanale. Il ne s'agit absolument pas de cela. Il s'agit plutôt de pêcher autant de poisson que la ressource peut le permettre et autant qu'un environnement bien géré peut en produire.
La pêche de l'avenir doit pouvoir accommoder aussi bien la pêche à grande échelle que la pêche artisanale, et l'élément le plus constituant doit en être les collectivités dont la pêche constitue la principale source de revenu. Voilà les principes directeurs que suit notre gouvernement.
L'industrie de la pêche doit pouvoir s'exercer en respectant des lignes directrices rigoureuses de conservation sans avoir à compter sur le soutien de l'État. Cela signifie que l'industrie doit pouvoir soutenir les hauts et les bas du commerce, les fluctuations des prix et le flux et le reflux de l'offre et de la demande sans subventions de l'État. Cela veut dire que l'industrie doit changer, ce qui explique pourquoi le gouvernement parle d'une réduction des permis de pêche, de l'octroi de permis pour pêcher plusieurs espèces, et de pêche professionnelle.
Je tiens à citer quelques extraits d'un éditorial publié dans Fishing News sous la plume de James Pugsley, qui y parle du plan fédéral. Il y indique que, bien qu'il ne soit pas parfait, le plan fédéral est ce qu'il y a de mieux à faire présentement. Il y affirme aussi que les mesures du ministre des Pêches et des Océans visant à implanter un modèle d'exploitation durable, dans lequel l'effort de pêche reste prudent et ne menace pas les stocks, viennent après deux décennies d'avertissements formulés par le service des pêches du ministère lui-même. L'auteur de cet éditorial soutient que c'était la meilleure façon d'agir. Nous croyons dans l'action concrète.
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Réf.): Avant d'aborder les questions soulevées dans la motion, je voudrais revenir sur quelques observations de mes deux collègues.
Le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans a dit que ce côté de la Chambre croit à l'action concrète, qu'il devait faire paraître des publications et dépenser de l'argent. Il a absolument raison. C'est exactement ce que le gouvernement a fait. Les députés ministériels parlent de la conservation des stocks et reviennent sans cesse sur la notion de pêches durables. Mais lorsqu'on s'interroge sur les mesures concrètes de l'État, et je vais donner des exemples très précis tout à l'heure, elle ne sont pas au rendez-vous.
Nous avons applaudi aux mesures de conservation du coho que le gouvernement a prises en Colombie-Britannique. Lorsque nous y regardons de plus près cependant, le gouvernement dépense plus en publications qui redorent l'image du ministre des Pêches et des Océans qu'il ne le fait pour gérer cette ressource.
Je dois féliciter le député de Sackville—Eastern Shore qui a proposé la motion à l'étude. Je ne suis peut-être pas d'accord sur toute la ligne, mais j'approuve ce qu'il essaie de faire, et je pourrais donc l'appuyer.
Tout comme le député d'en face, je crois que nous avons besoin de plus qu'une semaine ou un geste symbolique. Ce sont là des mots qu'il a utilisés. Il est sérieux quand il dit que des mesures s'imposent. Il ne suggère pas simplement que l'on honore les pêcheurs, qu'on souligne leur travail et qu'on leur dédie une semaine. Il reconnaît qu'il est grandement temps qu'on intervienne.
La motion prévoit «Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait créer une semaine internationale de la sensibilisation aux avantages de la pêche artisanale pour l'environnement et pour le développement durable des collectivités.» Il parle de la pêche artisanale, ce qui compte davantage que ses préoccupations relativement à la consécration d'une semaine. C'est là la question.
J'ai soulevé la question auprès du ministre en comité la semaine dernière. Je lui ai dit que les gens des deux secteurs, partout au pays m'avaient fait savoir que le programme de retraite volontaire écrase les petits. Cela écrase ceux qui ne peuvent se permettre de se faire écraser. Les seuls qui restent, ce sont les grandes compagnies, les gens qui ont le dos large et qui peuvent supporter la tempête.
Le gouvernement tente de réduire la capacité. Sa deuxième tentative qui s'inscrivait dans le cadre du plan Mifflin n'a pas fonctionné. Elle a permis de réduire l'importance de la flotte, mais on a par la suite permis aux gens d'acheter plusieurs licences. Notre capacité n'a pas changé même s'il y a moins de bateaux. Ce sont là des préoccupations bien réelles sur les deux côtes.
Le ministre a proposé le rachat volontaire des licences. Cela permettrait de réduire la taille de la flotte et peut-être aussi sa capacité. J'appuie cette mesure. En le prévoyant strictement volontaire, il ne donne d'autre choix à la personne qui tire le diable par la queue dans une petite localité de pêche, au pêcheur qui a son propre bateau, au gars qui exploite une entreprise familiale et qui emploie trois ou quatre personnes de profiter de cet achat volontaire. Je parle du gars qui ne sait pas comment il arrivera à nourrir sa famille. On tire le diable par la queue au nord de l'île de Vancouver.
Je conviens que le secteur des pêches peut être reconstruit. Je crois qu'il y a du poisson. Si nous faisons bien les choses, nous aurons un secteur des pêches fantastique dans trois ou quatre ans. Les seuls qui feront alors encore de la pêche et qui pourront exploiter cette ressource seront les riches, les Seafreez et toutes les grandes entreprises de pêche de ce monde qui possèdent de gros chalutiers-usines. Ils ont les moyens de tenir le coup.
C'est ce que j'ai dit au ministre. Le ministre a catégoriquement nié cela dans sa réponse. Il a dit ceci: «Deuxièmement, vous avez dit catégoriquement que la retraite ne devrait pas être volontaire, que nous ne devrions pas venir en aide aux personnes qui veulent se retirer.» C'est absolument faux. Ce n'est pas ce que je dis. Il nous faut un système pour aider ces personnes, mais il ne faut pas les forcer à abandonner leur permis, à renoncer à des générations de tradition familiale et de gagne-pain pour la famille. Il faut être en mesure d'aider ces gens-là à tenir le coup comme les riches peuvent le faire par eux-mêmes.
Le gouvernement doit mettre au point un plan qui obligera à répartir les réductions de capacité également entre tous les secteurs, soit entre les grands navires, les bateaux avec filet à maille, les chalutiers et les senneurs. La répartition devrait être proportionnelle et égale. Les petits pêcheurs à la cuiller de la côte ouest de l'île de Vancouver ne se sont pas vu allouer de poisson cette année. Et pourtant, la flotte de senneurs est allée faire de la pêche là-bas. On veut se débarrasser des petits pêcheurs.
La réduction s'applique aux autres secteurs aussi. Mon vis-à-vis reconnaîtrait probablement que la pêche sportive doit subir une réduction égale. En fait, la réduction doit s'appliquer à tous ces secteurs de l'industrie de la pêche de façon juste et égale afin que la flotte des petits navires ne soit pas la seule à en subir les conséquences.
Le ministre en second des Pêches et des Océans a déclaré que la pêche durable est l'objectif ultime. Je suis tout à fait d'accord. J'ai travaillé avec le député au sein du comité et en privé. Nous avons étudié la question à fond. Nous avons eu des discussions très fructueuses. Le problème, c'est que le ministre n'a pris aucune mesure et mon collègue le sait fort bien. Si le député était ministre des Pêches, j'ai l'impression, après avoir travaillé à ses côtés, que nous aurions droit à beaucoup plus de mesures concrètes de sa part que de celle du ministre actuel.
Permettez-moi de vous donner des exemples précis. Pas plus tard que la semaine dernière, le ministre des Pêches et des Océans a, encore une fois, cédé à des étrangers des centaines de tonnes de poisson canadien se trouvant dans les eaux canadiennes. Il a assoupli la politique de canadianisation. Le gouvernement a acquiescé à la demande de la société Seafreez, une grande compagnie de la Nouvelle-Écosse qui affirmait être incapable de garder son usine ouverte, à moins qu'une exemption soit accordée, autorisant les navires étrangers à pêcher 40 p. 100 du quota qui restait. Je parle ici de la pêche au flétan.
Aucune tentative n'a été faite pour envoyer des bateaux canadiens sur l'eau. Pourquoi? Nous savons qu'aucune tentative n'a été faite à cet égard. J'ai parlé aux pêcheurs à Terre-Neuve et dans tout le Canada atlantique. Ils demandent qu'on leur donne accès à cette ressource. Le ministre a choisi la voie la plus facile et a cédé aux pressions des grandes sociétés.
Le député d'en face connaît la recommandation. Il est membre du comité et a appuyé le rapport sur la côte est. La recommandation 2 du rapport sur la côte est, également connu sous le nom de rapport Baker, dit ceci:
Le Comité recommande que le Canada ne permette plus aux sociétés canadiennes d'affréter des bateaux et des équipages étrangers pour pêcher dans les eaux canadiennes tant que des pêcheurs et des bateaux canadiens sont disponibles.
Des pêcheurs canadiens sont disponibles. Nous avons besoin de mesures concrètes. Il ne suffit pas de diffuser des publications. Les mesures que nous souhaitons voir ne consistent pas à dépenser 5 millions de dollars en Colombie-Britannique pour redorer l'image du ministre, ce qu'on a fait. Nous avons besoin de mesures qui feront en sorte que toutes les réductions de la capacité soient réparties de façon juste et équitable entre tous les secteurs, qu'il s'agisse de la pêche sportive ou de la pêche commerciale. Il ne faut cibler aucun secteur en particulier.
Même si cette politique ne cible personne de façon explicite, elle a pour effet net de faire disparaître complètement les petits bateaux de pêche sur les deux côtes, les pêcheurs qui n'emploient que trois ou quatre personnes.
Je félicite le député de Sackville—Eastern Shore d'avoir saisi la Chambre de cette question. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de créer une semaine internationale de sensibilisation. Nous avons besoin de mesures concrètes de la part du gouvernement, qui doit cesser de se limiter à parler de conservation. Nous avons vu certains progrès, mais il reste encore beaucoup à faire. Il y a 21 sociétés qui veulent avoir accès à cette ressource, mais on leur refuse cet accès.
Le programme de rachat volontaire des permis est en train de détruire la flotte de petits bateaux. Je demanderais au ministre en second des Pêches et des Océans, car c'est comme ça qu'il aime qu'on l'appelle, de parler au ministre de la restructuration du programme de rachat volontaire des permis afin que cela se fasse de façon équitable, pour ne pas détruire les petits...
Le vice-président: Reprise du débat. Le député de Burin—St. George's a la parole.
M. Bill Matthews (Burin—St. George's, PC): Monsieur le Président, je tiens à dire quelques mots sur la motion présentée par le député de Sackville—Eastern Shore et le féliciter d'avoir présenté cette motion. Je n'ai aucune hésitation à appuyer la motion du député. Or, le débat entre le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans et le porte-parole réformiste sur les questions de pêche s'est beaucoup éloigné du sujet.
La pêche côtière en petites embarcations a toujours eu une grande importance dans l'industrie de la pêche dans le Canada atlantique. La pêche côtière et la pêche hauturière ont toujours coexisté dans cette région, et je parle particulièrement de Terre-Neuve et du Labrador. Dans cette province, on tient beaucoup à ce que cette coexistence se perpétue.
Évidemment, la pêche hauturière est très limitée en ce moment en raison de la diminution radicale des stocks de poisson de fond. La plupart des chalutiers des grandes sociétés de pêche ont été désarmés. En ce moment, nous constatons que les pêcheurs en petites embarcations de Terre-Neuve et du Labrador doivent aller plus loin en haute mer pour parvenir à assurer leur subsistance. Cela nous ramène aux paroles du député, qui a dit qu'il y avait actuellement une opération de recherche et de sauvetage pour retrouver des pêcheurs perdus sur l'Atlantique.
Ces dernières années, un nombre effarant de personnes ont perdu la vie à bord de petits bateaux dans le Canada atlantique. Cela nous ramène directement à une recommandation du Comité permanent des pêches, qui a demandé au ministre des Pêches et des Océans et au ministère qu'il dirige de procéder à un examen du programme de remplacement des bateaux. Le ministre a répondu que pareil examen a été effectué il y a quelques années et que, à son avis, c'est suffisant.
À cause de la baisse des ressources halieutiques, les pêcheurs à bord de petits bateaux s'aventurent plus loin des côtes pour essayer de gagner leur vie. Ils se rendent donc dans des eaux plus dangereuses. Ils vont plus loin des côtes. Or, comme tout le monde le sait, dans l'Atlantique, les conditions climatiques changent très rapidement, et bon nombre de pêcheurs sont prisonniers sur l'eau, dans des bateaux trop petits pour se trouver aussi loin des côtes.
En réponse au député de Sackville—Eastern Shore, je dirai que je n'ai absolument rien contre l'idée de créer une semaine internationale de sensibilisation aux avantages de la pêche artisanale pour l'environnement et pour le développement durable des collectivités. Des centaines de petites collectivités du Canada atlantique sont menacées de disparition. L'exode de ces collectivités est renversant.
Lorsque je me rends, toutes les semaines, dans la circonscription de Burin—St. George's, ce que j'ai encore fait le week-end dernier, et que je visite bon nombre de ses collectivités, je ne vois pas beaucoup de personnes de moins de 45 ou 50 ans. Tous les jeunes ont quitté leur localité et leur province pour aller chercher du travail ailleurs. Cette situation est principalement attribuable au ralentissement dans l'industrie de la pêche. Il est très difficile d'aller dans ces collectivités et d'y rencontrer les quelques personnes qui habitent encore là, celles qui ont un emploi au sein de la fonction publique, qui enseignent ou les rares qui pratiquent encore la pêche. Le principal employeur de la plupart de ces localités a disparu à cause de la diminution des stocks de poisson.
Le secteur des petits bateaux de pêche est toujours une partie importante de notre industrie de la pêche, et il devrait le rester. Cela étant dit, quand on examine les possibilités d'emploi actuelles, il ne fait pas de doute que nous devons nous servir des plus grands bateaux pour les zones moyennement éloignées et les zones plus hauturières pour accéder à nos ressources halieutiques.
Le député réformiste est membre du Comité permanent des pêches et des océans. Il a fait une observation au sujet de la question du flétan noir et de Canso, ainsi que de la question de savoir si le ministre des Pêches aurait dû permettre à un navire étranger pêcher cette espèce. Le ministre des Pêches et des Océans avait le choix entre permettre à un navire étranger de pêcher cette espèce et faire traiter les prises à Canso, créant ou sauvant ainsi entre 125 et 150 emplois, ou laisser le poisson dans l'eau. C'était le choix qui s'offrait au ministre des Pêches et des Océans.
À mon avis, il aurait était souhaitable de trouver un bateau canadien ou une entreprise canadienne pour pêcher cette espèce. Mais, je crois savoir qu'aucune entreprise canadienne, aucun bateau canadien n'a été trouvé pour le faire. En conséquence, le ministre a été forcé de choisir entre permettre à un bateau étranger de pêcher le poisson et de le faire transformer à Canso afin de sauver les 125 emplois en cause ou laisser le poisson dans l'eau.
À mon avis, le ministre des Pêches n'avait qu'un seul choix, celui de faire pêcher le poisson. Aurait-il mieux valu laisser le poisson dans l'eau? Le poisson n'aurait pu être réattribué parce qu'il l'avait déjà été à l'entreprise chargée de le transformer à Canso.
Je voudrais intervenir là-dessus parce que nous favorisons tous les pêcheurs et les bateaux canadiens pour pêcher le poisson. Telle est la situation, telle que je la comprends.
Une voix: Parlez-en à votre ami Crosbie.
M. Bill Matthews: Crosbie?
Une voix: Oui, John.
M. Bill Matthews: Ça fait tellement longtemps qu'il est parti que j'ai du mal à me souvenir de son nom. Pourquoi parler de John Crosbie? Pourquoi ne pas plutôt parler de Roméo LeBlanc, de Pierre DeBané et de Brian Tobin, de tous ceux-là?
Le secrétaire parlementaire a soulevé la question de la pêche étrangère et de l'expulsion des flottes étrangères. Il faut que je fasse attention à ce que je dis. J'ai remarqué qu'il ne s'était pas attardé sur l'affaire de l'Estai et je suppose que nous en saurons la raison sous peu.
Nous réévaluerons alors la rôle joué par le premier ministre Tobin dans la lutte contre la pêche étrangère et ce qu'il va en coûter aux Canadiens et à leur gouvernement.
La conservation est essentielle car il y a encore trop de questions sans réponse, trop d'inconnues, en ce qui concerne l'état de santé des stocks de poissons. Il y a encore trop d'inconnues relativement à la biomasse, trop d'inconnues sur les conséquences que différents types d'engins risquent d'avoir sur les stocks de poisson, trop d'inconnues sur les répercussions que les phoques risquent d'avoir, trop d'inconnues sur les effets que la pêche de certains stocks de poisson risque d'avoir sur la chaîne alimentaire.
À une période où nous avons besoin d'une aide financière accrue pour soutenir la recherche et les efforts scientifiques, le gouvernement a réduit le financement de la science et de la recherche au MPO à un minimum inacceptable. Si nous voulons prendre au sérieux la compréhension du secteur de la pêche, la conservation, l'avenir du secteur de la pêche, la protection des collectivités côtières, il est temps, dès maintenant, d'accroître les efforts du MPO en matière de recherche et de science, au lieu de les réduire.
Je dis au secrétaire parlementaire que, effectivement, le gouvernement a pris de bonnes décisions. Il continue toujours d'en prendre de mauvaises. Mais si nous voulons prendre au sérieux la reconstitution des stocks de poisson, si nous voulons prendre au sérieux la régénération, si nous voulons prendre au sérieux l'avenir du secteur de la pêche, ce n'est pas le temps de réduire les efforts que le MPO consacre à la recherche et à la science. Il faudrait les accroître, pour que nous puissions diminuer le nombre d'inconnues au sujet du secteur de la pêche, le nombre d'inconnues à l'égard de la biomasse halieutique et le nombre d'inconnues en ce qui concerne la chaîne alimentaire.
Je dis donc au secrétaire parlementaire d'aller voir le ministre des Pêches et ses collègues du Cabinet et de les supplier de rétablir le financement de la science et de la recherche au MPO, car nous traversons une période cruciale de notre histoire, où nous devons vraiment comprendre l'océan, l'environnement, les diverses espèces de poisson et la biomasse.
En terminant, je tiens à dire au député de Sackville—Eastern Shore, porte-parole du Nouveau Parti démocratique en ce qui concerne la pêche, que j'appuierai sa motion.
M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole ce matin sur la motion présentée par le député de Sackville—Eastern Shore. Ayant siégé au Comité des pêches aux côtés de ce député, je dois dire qu'il a apporté une contribution très valable au comité. J'apprécie beaucoup les interventions qu'il a faites.
C'est une motion intéressante, mais je ne l'appuierai pas, parce qu'elle ne sera probablement pas mise aux voix. Je crois qu'il importe d'avoir ce débat et de discuter de son importance pour les pêcheurs du Canada. Je tiens au moins à manifester mon appui à cet aspect de la question.
La motion traite de l'avis de la Chambre sur le fait qu'on devrait créer une semaine internationale de la sensibilisation aux avantages de la pêche artisanale pour l'environnement et pour le développement durable des collectivités.
Nous avons souvent entendu à la Chambre que la grande priorité, en matière de gestion de la pêche, devait être la préservation de la ressource. Nous sommes tous en mesure de voir ce que ça donne que de faire passer autre chose en premier lieu. Les effets sont évidents quand on pense à l'état des stocks de poisson des deux côtes et les effets dévastateurs que des fermetures d'usines pourraient avoir sur les gens qui tirent leur subsistance de cette industrie.
Quelle que soit l'importance des autres facteurs à prendre en compte, ils ne peuvent pas être prioritaires par rapport à la préservation. Sans la préservation, il n'y aurait plus de poisson, plus d'industrie de la pêche et plus d'emplois, ce qui serait tragique pour les localités côtières et entraînerait des pertes annuelles de 2,8 milliards de dollars d'exportations dans ce secteur.
En plaçant la préservation au sommet de la liste des priorités, comme il se doit, on obtient un tout autre tableau. Toute proposition doit être examinée en fonction de ses effets sur la préservation. Par exemple, que préfère-t-on? Préfère-t-on voir de plus en plus de pêcheurs en mer se faisant mutuellement concurrence et exploitant des stocks de poisson de plus en plus réduits, faisant de moins en moins d'argent chaque année, comptant sur les subventions gouvernementales et exterminant éventuellement les stocks de poisson? Ou voulons-nous plutôt que le gouvernement instaure un régime de gestion des stocks conçu pour assurer leur préservation à long terme? La bonne réponse n'est pas difficile à trouver.
Il nous faut un secteur de la pêche qui soit durable et un réseau de pêcheurs professionnels et responsables qui utilisent des technologies de capture favorables à la conservation. Il nous faut un secteur de la pêche qui assure une vie décente à ceux qui en vivent et une industrie qui soit en mesure de s'adapter aux variations des stocks de poisson et des marchés, sans quémander constamment des subventions gouvernementales.
La conservation doit constituer la première de nos priorités. Une gestion fondée sur la conservation nous permettra de créer les conditions qui permettent au secteur de la pêche de prospérer. La pêche ne sera plus jamais ce qu'elle a déjà été. Comme partout ailleurs, les choses ont changé. On ne peut plus se servir de la pêche comme d'un outil de développement social et économique. C'est précisément cet état de fait qui est responsable de la situation actuelle. Un changement s'impose.
Certes, renoncer à l'ancien régime ne sera pas chose facile pour de nombreux Canadiens vivant sur les deux côtes. Le gouvernement ne s'est pas attelé à la tâche tout de go, sans tenir compte du coût humain d'un tel changement. Il a tout mis en oeuvre pour que la transition soit la moins douloureuse possible pour les collectivités de pêcheurs.
Le 19 juin, le ministre des Pêches et des Océans, le ministre du Développement des ressources humaines et le ministre responsable de l'APECA ont annoncé un train de mesures totalisant 730 millions de dollars pour venir en aide aux personnes touchées par la crise dans les pêcheries de la côte est. Simultanément, le gouvernement a annoncé une restructuration majeure de la pêche au saumon du Pacifique dont le coût s'élèvera à 400 millions de dollars.
Parmi les mesures destinées à la côte est, on compte le versement d'un montant de 250 millions de dollars dans le cadre d'un programme de rachat des permis, le versement d'un montant de 180 millions de dollars au titre de paiement forfaitaire final aux bénéficiaires de la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique, ainsi que l'affectation d'un montant de 135 millions à diverses mesures visant à donner aux pêcheurs les outils et les programmes dont ils ont besoin pour reprendre une vie normale. On a ainsi consacré jusqu'à 100 millions de dollars au développement économique des collectivités et des régions, et jusqu'à 65 millions de dollars à un programme d'encouragement à la retraite anticipée.
Sur la côte ouest, le montant de 400 millions de dollars incluait 200 millions de dollars pour un projet de restructuration des pêches. Ce projet devait favoriser l'élaboration de pratiques de pêche sélectives et équilibrer la dimension de la flotte avec la ressource en saumon. Un montant de 100 millions de dollars était affecté à des programmes d'encouragement à la retraite anticipée et d'adaptation à l'intention de pêcheurs déplacés, ainsi que de développement des collectivités. Le dernier montant de 100 millions de dollars était alloué à des mesures de protection et de remise en valeur des habitats de saumon. Ce projet subventionnait des initiatives concernant les habitats, favorisait la mise en oeuvre de programmes de gestion axés sur la collectivité et visant à empêcher les habitats de se détériorer davantage, et assurait la prolongation des partenariats pour la restauration et la mise en valeur des collectivités.
Il faut aussi rappeler que, dans le budget de 1998, le ministre a augmenté le financement de base du Programme de lutte contre la lamproie marine pour le porter de 5,3 à 6 millions de dollars. C'était une excellente initiative pour les gens du centre du Canada. À ceux qui l'ignorent, je souligne que la lamproie marine nuit à l'industrie de la pêche sportive depuis de nombreuses années et que, grâce à la bonne volonté du gouvernement précédent et à notre collaboration avec les Américains, nous avons réussi à empêcher que cette espèce devienne tellement dominante qu'elle détruise complètement notre industrie de la pêche sportive.
Le ministre a jugé bon de porter cette subvention à six millions de dollars. J'espère que le ministre augmentera encore le financement de base au cours des années à venir, pour que l'on puisse compter sur cet apport et pour que l'industrie de la pêche sportive puisse progresser. Elle procure au Trésor canadien, au seul titre de la TPS, au moins 65 millions de dollars et peut-être même davantage. La subvention gouvernementale est essentielle à la survie de la pêche sportive.
Le gouvernement comprend qu'un changement s'impose. Les gens touchés doivent participer à ce changement et obtenir de l'aide à cet effet. Conformément aux meilleures traditions canadiennes, le gouvernement a pris des mesures pour aider les collectivités de pêcheurs à faire face aux répercussions des changements. Dans la meilleure des traditions canadiennes, le gouvernement a pris des mesures afin d'aider les collectivités côtières au Canada à faire face aux conséquences qu'entraînent ces changements. Ce n'est pas toujours facile.
Le gouvernement continue également à appuyer le développement de l'aquaculture. Cette industrie, qui accuse une forte croissance et offre de bonne perspectives, contribue de façon substantielle à créer des emplois durables dans les collectivités rurales et côtières. Le gouvernement annoncera prochainement la nomination d'un commissaire à l'aquaculture pour aider au développement durable de cette industrie.
Le gouvernement fait très attention à aider les collectivités rurales au Canada, pour beaucoup des collectivités de pêcheurs. Les questions rurales faisaient partie du programme électoral du gouvernement en 1997. Le gouvernement a mis en place toute une série d'initiatives, notamment une initiative nationale à l'intention des collectivités rurales. L'initiative de partenariat rural, un programme de 20 millions de dollars étalé sur quatre ans, à raison de 5 millions de dollars par année a été annoncée dans le budget fédéral de 1998. Ce programme a permis de financer des projets-pilotes conçus par des groupes et des résidents locaux afin de tester de nouvelles idées en partenariat avec les ministères.
Ce programme constitue aussi le cadre de la stratégie du gouvernement du Canada pour le développement rural. Il relève du ministre de l'Agriculture et a pour but de veiller à ce que les programmes, les politiques et les activités mis en places par le gouvernement fédéral assurent un réseau coordonné d'aide aux collectivités rurales.
Le ministre des Pêches et des Océans appuie énergiquement cette initiative, étant donné surtout qu'elle répond aux besoins des localités côtières du Canada. Le programme est conçu et mis en oeuvre par un groupe de travail interministériel, mais les idées et l'énergie dont s'inspire le projet viennent des Canadiens ruraux.
En 1998-1999, une somme de 3,2 millions de dollars servira à financer une série de projets pilotes qui renforceront un réseau rural existant et soutiendront une participation accrue de la base au développement axé sur la collectivité. Ces projets mettront à l'essai de nouvelles façons de répondre aux problèmes ruraux, comme la nécessité d'un meilleur accès aux fonds d'investissement et aux soins de santé.
Le programme a pour but de financer des projets qui aideront les localités rurales à se doter des outils dont elles ont besoin pour améliorer leur qualité de vie et soutenir la concurrence sur le marché mondial.
Pas plus tard qu'en septembre dernier, le ministre de l'Agriculture se trouvait à Terre-Neuve pour annoncer 12 projets pour la région de l'Atlantique. Ces projets s'étendaient de la géographie du littoral au tourisme culturel et sont entrepris avec une aide de près de 500 000 $ de l'initiative canadienne de partenariat rural.
Des 12 projets pour la région de l'Atlantique, deux sont destinés à Terre-Neuve, quatre à l'Île-du-Prince-Édouard, cinq à la Nouvelle-Écosse et un au Nouveau-Brunswick. Ces projets visent à trouver de nouveaux moyens de diversifier l'économie et de stimuler la croissance économique.
Le gouvernement fédéral a donné une grande priorité aux localités rurales, et nous pouvons constater qu'il prend des mesures pour les aider à survivre et à prospérer en tenant compte des réalités du monde d'aujourd'hui.
Ces projets, combinés à l'aide déjà accordée aux pêches de la côte est et de la côte ouest, démontrent que le gouvernement fait le nécessaire pour assurer la durabilité des localités de pêche canadiennes.
Encore une fois, je dois dire à mon collègue que j'apprécie l'effort qu'il a déployé pour nous saisir de cette motion et nous donner ainsi l'occasion de tenir ce débat. Son initiative aura contribué à nous sensibiliser à l'importance de la pêche.
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je remercie sincèrement tous les députés qui ont participé aujourd'hui au débat, y compris les députés ministériels. Les députés ne cessent de parler de conservation. Le fait est que, sur la côte est et notamment à Terre-Neuve et au Labrador, les Canadiens connaissent les techniques de conservation depuis 450 ans, soit depuis bien avant que le gouvernement ne se rende compte de la nécessité de conserver la ressource.
Le député de l'Ontario parle de la LSPA et des programmes d'adaptation. En fait, les pêcheurs côtiers qui vivent de la pêche depuis près de 500 ans reçoivent de 3 000 $ à 6 000 $ et se font dire que le temps est venu pour eux de déménager. Il suffit pour s'en convaincre d'aller à Catalina, à Terre-Neuve, voir les maisons que leurs habitants ont abandonnées. Imaginez que des gens de Toronto ou d'Etobicoke, par exemple, se fassent dire d'abandonner leur maison. On leur donne 3 000 $ et on leur dit de s'en aller ailleurs. C'est absolument honteux.
Le secrétaire parlementaire comprend ce que vise à faire cette motion et le député de Burin—Saint-Georges s'en est fait parfaitement l'écho. L'an dernier, j'ai proposé au comité une motion demandant que le ministère des Finances renonce à imposer des compressions au MPO parce que celui-ci avait besoin de fonds pour financer ses activités scientifiques de recherche et de développement dans les localités côtières et de pêche intérieure. Les membres libéraux du comité n'ont malheureusement pas appuyé cette motion. Si je comprends bien, ils ne s'engagent pas à financer davantage le MPO à cet égard.
Je m'en voudrais de ne pas mentionner nos localités de pêche intérieure du Manitoba, des Grands lacs, de la Saskatchewan, de l'Alberta, des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon, puisqu'il y a moins de saumons qui remontent le fleuve Yukon par suite de notre différend avec les Alaskiens.
Je vais solliciter le consentement unanime pour que cette motion fasse l'objet d'un vote. Je sais pertinemment que si j'accompagnais cette proposition d'une valeur monétaire, elle n'aurait aucune chance de déboucher sur quelque chose de concret. Il s'agirait simplement d'un geste symbolique. Le comité permanent a publié six rapports, mais le gouvernement n'a pris aucune mesure pour y donner suite jusqu'à maintenant. En fait, certains rapports ont même été totalement ignorés. Il s'agit d'un geste symbolique en vue de donner espoir aux pêcheurs côtiers, à ces pêcheurs qui veulent simplement gagner leur vie afin d'assurer le bien-être de leur famille et de leur collectivité.
Les sociétés ont des comptes à rendre à leurs actionnaires et elles doivent afficher des bénéfices sans cesse croissants. On a racheté le permis de beaucoup de pêcheurs côtiers et on a conseillé à ces derniers de quitter la pêche, alors que les allocations de ressources ont été accordées à de grandes sociétés. Il est tout simplement déchirant d'aller dans ces collectivités et de voir ce qui s'y passe. Tout cela n'est qu'un geste symbolique pour rendre hommage à ces pêcheurs et pour leur témoigner notre respect.
Je demande à la Chambre de se montrer indulgente et d'accorder son consentement unanime afin que cette motion puisse faire l'objet d'un vote.
J'aimerais que les députés du parti ministériel acceptent cette motion afin que nous rendions hommage aux hommes et aux femmes, aux travailleurs et aux travailleuses de cette industrie qui risquent leur vie quotidiennement afin que nous ayons quelque chose à manger.
Je remercie les députés de Burin—St.George's, de Saanich—Gulf Islands, de Huron—Bruce et de Malpeque d'avoir participé au débat sur cette motion aujourd'hui.
Le vice-président: Le député de Sackville—Eastern Shore a-t-il le consentement unanime de la Chambre afin que sa motion puisse faire l'objet d'un vote?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Le temps prévu pour l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulé et l'article est rayé du Feuilleton.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Français]
LOI SUR L'EXTRADITION
La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-40, Loi concernant l'extradition, modifiant la Loi sur la preuve au Canada, le Code criminel, la Loi sur l'immigration et la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, et modifiant ou abrogeant d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.
L'hon. Marcel Massé (au nom de la ministre de la Justice) propose: Que le projet de loi, tel que modifié, soit agréé à l'étape du rapport.
Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
[Traduction]
Le vice-président: Quand le projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? Avec votre permission, maintenant?
L'hon. Marcel Massé (au nom de la ministre de la Justice) propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je pense que si vous le demandiez, vous constateriez qu'il y aurait consentement unanime au sujet de la motion suivante:
Que le débat prévu pour plus tard aujourd'hui, conformément à l'article 52 du Règlement, ait lieu immédiatement après la fin de la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement; Que, pendant le débat, la présidence n'accepte aucune demande de quorum ni motion dilatoire ni demande de consentement unanime en vue de la proposition d'une motion; Que, lorsque aucun député ne demande la parole ou, au plus tard, après quatre heures de débat, le débat prenne fin et la Chambre s'ajourne jusqu'au prochain jour de séance.
Autrement dit, le débat se terminerait vers 10 h 30. Je voudrais ajouter également qu'il est entendu que les députés peuvent partager leurs 20 minutes de la manière habituelle. Cela dit, je soumets cette motion à la Chambre.
Le vice-président: Est-ce que le leader du gouvernement à la Chambre a le consentement unanime pour présenter sa motion?
Des voix: D'accord.
Le vice-président: La Chambre a entendu la motion, lui plaît-il de l'adopter?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
LOI SUR L'EXTRADITION
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-40, Loi concernant l'extradition, modifiant la Loi sur la preuve au Canada, le Code criminel, la Loi sur l'immigration et la loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, et modifiant ou abrogeant d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-40, qui porte sur l'extradition et qui établit un cadre moderne et global pour l'extradition au Canada ou dans un autre pays.
La loi canadienne en matière d'extradition datant de la fin du XIXe, le projet de loi constitue une révision nécessaire et opportune de la loi pour qu'elle soit adaptée à la réalité du XXIe siècle. Le projet de loi établit donc un cadre pour l'extradition au Canada ou dans un autre pays. Il permettra l'extradition aux termes de traités bilatéraux ou multilatéraux ou dans les cas où l'État faisant une demande d'extradition est désigné comme un partenaire d'extradition en vertu de l'annexe de la loi. Il permettra également aux ministres des Affaires étrangères et du Commerce international de conclure une entente autorisant l'extradition dans un cas particulier.
Une très importante caractéristique des fondements élargis pour l'extradition est que le projet de loi donnera au Canada le pouvoir d'extrader des personnes devant les tribunaux de criminels de guerre existants aussi bien que devant tout futur tribunal pénal international.
Le projet de loi C-40 traite d'un urgent problème en matière d'extradition, c'est-à-dire les exigences coûteuses relatives à la preuve imposées aux États qui font une demande d'extradition au Canada. À l'heure actuelle, les États doivent soumettre des preuves suffisantes pour se conformer aux normes juridiques canadiennes et à nos complexes règles en matière de preuve.
Pour les pays à tradition différente, comme nombre de pays européens et même des pays disposant d'un système semblable, cela fait de la préparation d'une demande d'extradition une tâche très coûteuse, voire impossible dans certains cas.
Le projet de loi C-40 vise à régler ce problème, et il le fait d'une manière équilibrée, reconnaissant également la nécessité d'un processus d'extradition efficace et de garanties adéquates pour la personne à extrader.
Dans la nouvelle loi, la norme régissant l'extradition sera maintenue. Un juge canadien devra encore acquérir la conviction que la preuve présentée est suffisante et que, si les actes ayant donné lieu à la demande d'extradition avaient été commis au Canada, ils auraient justifié le renvoi à procès. Les avocats parlent à ce propos du critère de présomption prima facie.
Ce qui serait modifié, c'est le type de preuve à présenter au juge qui doit se prononcer sur la demande d'extradition. Cette approche permet de régler le problème des exigences difficiles de l'affidavit rédigé à la première personne et sans ouï-dire, ce qui est le principal problème éprouvé par les États qui adressent des demandes d'extradition au Canada. L'expérience nous apprend qu'il est déjà extrêmement difficile aux États de satisfaire à ce critère pour certains types de crimes modernes, par exemple les fraudes compliquées. Compte tenu de la complexité croissante du crime transfrontières et international, cela deviendra probablement impossible.
Dans l'état actuel des choses, certains pays décident tout simplement de ne pas demander l'extradition de fugitifs parce qu'ils ne peuvent satisfaire à nos exigences. Ces fugitifs restent donc en liberté dans nos villes parce qu'il est légalement impossible d'obtenir des affidavits ou que c'est presque impossible.
Aux termes de la nouvelle loi, le juge acceptera en preuve des documents contenus dans le dossier de la cause. Ce dossier sera certifié par les autorités compétentes de l'État qui fait la demande d'extradition et accompagné d'assurances relatives à la disponibilité de la preuve, à son caractère suffisant pour les poursuites ou à son exactitude.
L'acceptation d'un dossier est conforme à des décisions récentes de la Cour suprême du Canada sur les ouï-dire, où le tribunal a abandonné l'application stricte de la règle du ouï-dire pour adopter une norme plus souple, fondée sur la nécessité et la garantie indirecte de vérité. À certains égards, cependant, les éléments de preuve exigés pour une audience d'extradition du Canada sont plus formels et plus onéreux à obtenir que ce qui est exigé pour un procès au Canada.
L'option du «dossier d'extradition pour tous les États» est le meilleur compromis entre une prétention à première vue fondée avec déclarations sous serment et le fait de n'exiger aucune évaluation juridique des éléments de preuve, comme c'est le cas en Australie et au Royaume-Uni, ainsi que dans les pays qui sont ses partenaires européens. Avec cette option, le critère juridique demeurerait le même. Ce qui changerait, c'est la forme sous laquelle les éléments de preuve seraient présentés. On serait donc plus sûrs que la demande est fondée, on aurait l'assurance que les personnes dont l'extradition est demandée sont traitées équitablement et on disposerait de meilleures garanties en matière de procédure.
Tout d'abord, comme je l'ai déjà dit, en présentant un dossier dans le cas d'une personne dont on demande l'extradition pour lui faire subir un procès, l'autorité qui intente les poursuites devrait donner au Canada l'assurance que le résumé des éléments de preuve est disponible pour le procès et que ces éléments de preuve suffiraient, dans notre système de common law par exemple, pour justifier des poursuites.
Deuxièmement, la personne recherchée bénéficiera de la divulgation de davantage de renseignements, puisqu'il y aura un résumé de tout son dossier plutôt que de simples déclarations sous serment sur certains éléments de ce dossier.
Troisièmement, le ministre de la Justice peut refuser d'autoriser l'audience d'extradition s'il ne juge pas le dossier assez étoffé.
Enfin, si la demande paraît fondée à première vue, le juge ordonnera que l'individu soit mis sous garde en attendant l'extradition à la condition expresse que l'infraction, si elle avait été commise au Canada, justifie la tenue d'un procès.
Nous croyons qu'en adoptant une approche aussi équilibrée, le Canada respecte ses obligations internationales et évite de devenir un refuge pour les individus qui cherchent à se soustraire à la justice.
Le projet de loi C-40 maintient un régime d'extradition en deux étapes, la première étant un processus juridique, la deuxième un processus exécutif. Le projet de loi énonce un code de procédure applicable aux deux étapes.
Le projet de loi comporte des dispositions sur l'arrêt, le cautionnement, les appels et l'audience d'extradition elle-même. Il définit également les fonctions et les pouvoirs du juge, du procureur général et du ministre. En clarifiant la procédure et le rôle des autorités qui doivent intervenir, on rend le système plus efficient et plus juste.
Autre aspect important, le projet de loi dresse la liste des motifs en vertu desquels le ministre doit ou peut refuser l'extradition, par exemple une infraction à caractère politique, le défaut de compétence, la peine de mort, des considérations humanitaires, un acquittement ou une condamnation antérieurs et un procès par contumace.
En tout temps, le ministre sera tenu de refuser l'extradition s'il est convaincu qu'elle serait injuste ou tyrannique ou si la demande a été présentée dans le but de poursuivre ou de punir l'intéressé pour des motifs de distinction illicite, sur lesquels je reviendrai dans un instant. Ces motifs de refus tendent à protéger la personne visée et correspondent à la pratique moderne d'extradition.
Je signale que le projet de loi propose d'harmoniser les procédures d'extradition et de traitement des cas de réfugiés étant donné qu'il peut y avoir conflit lorsque quelqu'un dont l'extradition est demandée demande le statut de réfugié. Par conséquent, le projet de loi C-40 modifie la Loi sur l'extradition et la Loi sur l'immigration afin d'éviter le chevauchement de procédures et de réduire le délai du processus d'extradition. Il prévoit aussi un moyen de consultation entre le ministre de la Justice et le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration en ces matières.
Le comité permanent a entendu plusieurs témoins, dont la ministre de la Justice, le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international, des porte-parole d'Amnistie internationale ainsi que des représentants du Conseil canadien pour les réfugiés et de la Criminal Lawyers Association. Le comité a proposé des amendements utiles au projet de loi, qui sont surtout de nature technique. Toutefois, l'un des plus intéressants de ces amendements a trait aux motifs de refus de l'extradition.
Lorsque le projet de loi lui a été renvoyé, le comité a été prié d'examiner en particulier l'article 44, selon lequel le ministre refuse l'extradition s'il est convaincu que la demande d'extradition est présentée dans le but de poursuivre ou de punir l'intéressé pour des motifs de distinction illicite.
À l'origine, le projet de loi reprenait les motifs énoncés dans le traité type de l'ONU sur l'extradition. Après l'étude en comité, les motifs ont été élargis et le paragraphe 44(1)b) parle maintenant de:
—motifs fondés sur la race, la nationalité, l'origine ethnique, la langue, la couleur, la religion, les convictions politiques, le sexe, l'orientation sexuelle, l'âge, le handicap physique ou mental ou le statut de l'intéressé, ou il pourrait être porté atteinte à sa situation pour l'un de ces motifs.
La disposition modifiée tient compte des motifs de discrimination additionnels prévus dans la Charte canadienne des droits et libertés, la Loi canadienne sur les droits de la personne et le Code criminel.
Je tiens à souligner encore une fois que, comme je l'ai dit plus tôt, un aspect très important du projet de loi C-40 est que le Canada sera en mesure d'extrader une personne devant les tribunaux des crimes de guerre existants et de futurs tribunaux pénaux internationaux, comme celui dont le statut a été adopté à Rome l'été dernier, et de fournir de l'aide à ces tribunaux sur le plan de la preuve.
Comme ces organismes ont pour mandat de juger les personnes accusées des crimes les plus sérieux, il est essentiel que le Canada se dote des instruments qui lui permettront d'assurer son entière collaboration à ces tribunaux et au futur tribunal pénal international. Le projet de loi C-40 donnerait au Canada ces instruments.
Ce projet de loi apporte des changements importants et nécessaires à notre régime d'extradition. À une époque où la menace du crime organisé transnational est de plus en plus présente, il est essentiel que le Canada ait un mécanisme de collaboration internationale moderne et efficace pour lutter contre ce genre de crime. Le projet de loi sur l'extradition est un élément important de ce mécanisme. Il nous aidera à empêcher que le Canada ne soit un refuge sûr pour ceux qui cherchent à échapper à la justice.
Je suis certain que nous aurons un débat constructif sur cet important projet de loi et j'exhorte tous les députés à l'appuyer après en avoir fait un examen approfondi.
M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi dont nous sommes saisis. Nous y avons consacré passablement de temps à l'étape de l'étude en comité, où nous avons eu le plaisir de proposer plusieurs amendements. Celui dont mon collègue vient de parler a été présenté par le Parti réformiste afin d'améliorer le projet de loi.
L'extradition est un élément indispensable du système judiciaire. Aucun Canadien ne doit pouvoir éviter un procès en s'enfuyant vers un autre pays. Le Canada ne doit pas davantage être un refuge pour des criminels recherchés dans d'autres pays. Le processus d'extradition doit être équitable et rapide.
C'est pourquoi des modifications favorables à la réalisation de ces objectifs sont proposées à la loi. Le projet de loi propose notamment d'élargir les motifs d'extradition en exigeant que les actes constituent un crime grave dans les deux pays, en permettant l'utilisation de matériel vidéo et audio durant les auditions, et en liant les processus de demande du statut de réfugié et d'extradition afin d'établir plus rapidement si la demande du statut de réfugié est justifiée ou non.
En ce qui concerne les crimes de guerre, le projet de loi apporte des modifications qui étaient attendues depuis longtemps. Les Nations Unies ont créé le tribunal des génocides du Rwanda en 1994 et le tribunal des crimes de guerre en Yougoslavie en 1993. Un nouvel organisme, la Cour criminelle internationale, doit également être créée, mais son mandat demeure imprécis.
Le Canada a signé, avec 119 autres pays, un traité prévoyant la création d'une Cour criminelle internationale qui sera habilitée à faire enquête, poursuivre, mettre en accusation et juger dans le cas de crimes internationaux les plus graves, notamment les génocides, crimes contre l'humanité, crimes de guerre et crimes d'agression.
Il s'agira clairement d'une cour ou d'un tribunal international correspondant à la définition d'État ou d'entité. Le tribunal aura donc des pouvoirs d'extradition. Le traité constitue sans doute une bonne mesure même si les États-Unis ont refusé de le ratifier. Il aurait dû faire l'objet d'audiences publiques et d'un débat plus poussé au Parlement.
La majeure partie des problèmes liés à la loi actuelle ont trait aux multiples niveaux d'appels, des tribunaux au ministre, puis à la commission du statut de réfugié et de nouveau au ministre, puis de ce dernier aux tribunaux. Les retards avantagent les accusés parce qu'ils savent que les témoins auront le temps de mourir ou de voir leurs souvenirs s'estomper. En prévoyant de multiples étapes au processus d'appels, le projet de loi ne fait rien pour accélérer le processus.
C'est pourquoi la Cour suprême exige, dans l'affaire Askov, que les procès aient lieu rapidement. Le délai proposé de six mois me semble raisonnable, pourtant les procédures d'extradition prennent souvent de nombreuses années. Le projet de loi à l'étude ne fait rien pour remédier aux deux principaux problèmes que sont les appels logés en vertu de la Charte et le pouvoir discrétionnaire du ministre.
Les appels fondés sur le droit, reconnu dans la Charte, à la protection contre les traitements ou peines cruels et inusités, permettent aux appels de se multiplier. J'en ai cité plusieurs à l'étape de la deuxième lecture. Le dossier des contestations qui ont trop traîné a six pouces d'épaisseur. Les appels aux termes de la Charte devant la Cour suprême prennent trop de temps à être entendus. On ne rend pas justice aux Canadiens et à ceux que nous cherchons à extrader.
La Cour suprême entendra, en novembre, à Ottawa, l'affaire Rafay et Burns, un meurtre commis en Colombie-Britannique en 1994. La Cour d'appel de la Colombie-Britannique a jugé que la ministre devait refuser l'extradition parce que les intéressés faisaient face à la peine de mort pour avoir battu à mort avec un bâton les parents de Rafay. On ne devrait pas se demander au Canada si nous les renvoyons ou non dans leur pays.
Pierino et Michael Divito, des mafiosi, sont recherchés par les autorités américaines pour avoir conspiré en vue d'importer 300 kilos de cocaïne. Étant donné que les peines imposées aux trafiquants de drogue sont beaucoup plus sévères aux États-Unis, leur avocat jure qu'il va aller jusqu'à la Cour suprême. Ils ne veulent pas être jugés aux États-Unis. Ils veulent être jugés ici, car ils pourraient très bien s'en tirer avec une peine d'emprisonnement de cinq ans au Canada. Par contre, aux États-Unis, ils seraient probablement condamnés à perpétuité, car ils sont membres du crime organisé, de la mafia. Au Canada, nous les traitons bien et leur disons qu'ils peuvent sortir après avoir purgé un sixième de leur peine, même s'il est question d'un tiers de leur peine aux termes du nouveau projet de loi adopté.
Salvatore Cazzetta, un dirigeant de la bande de motards des Rock Machine recherché aux États-Unis où il doit répondre à des accusations de trafic de drogues, a réussi à retarder son extradition pendant quatre ans en portant sa cause jusqu'à la Cour suprême du Canada.
Michael Gwynne, un fugitif qui purge une peine de 120 ans, a été appréhendé en 1993. Il a plaidé sa cause pendant cinq ans et cela, jusque devant la Cour suprême du Canada.
Le projet de loi ne fait rien pour mettre un terme à ce type d'appels.
Le projet de loi maintient le pouvoir discrétionnaire du ministre, qui explique en partie les retards et fait participer le ministre au processus judiciaire. Le ministre ne devrait avoir aucun pouvoir discrétionnaire d'obtenir des garanties quant aux peines imposées. On essaie d'imposer des normes qui varient nécessairement d'un ministre à l'autre et d'un pays à l'autre. Nous n'accepterions pas une telle ingérence dans notre système judiciaire. Jeffrey Simpson a publié dans le Globe un très bon article intitulé «Les folies de la Charte» sur cette question.
Le rôle du tribunal devrait être simple. Il s'agit de déterminer si la conduite dont on se plaint est un crime au Canada. Nous devons nous protéger contre des dictateurs comme Suharto essayant de faire extrader les partisans de la démocratie. La personne recherchée est-elle, en fait, la personne accusée? S'agit-il d'Ivan le terrible? Il faut s'assurer qu'il y a un traité valide. La sévérité de la peine dans un autre pays ne devrait avoir aucune incidence sur ce projet de loi, mais le gouvernement n'est pas prêt à changer cela.
Nous avons étudié ce projet de loi de près en comité. Les témoins se sont dits préoccupés par plusieurs articles du projet de loi. L'une des plus importantes inquiétudes soulignées provenait de la Criminal Trial Lawyers Association. Au cours du débat de deuxième lecture, le Parti réformiste et moi-même avons fait part de nos préoccupations en ce qui touche la participation de la ministre dans le processus d'extradition.
D'un côté, le Canada s'engage dans un noble processus qui est attendu depuis longtemps et qui permettra de se pencher sur le cas de personnes passibles d'extradition, par exemple les responsables de génocides, et il conclut un pacte avec 119 autres pays en vue de créer des cours criminelles internationales comme dans le cas du Rwanda et de la Yougoslavie, ce qui laisse présumer un processus judiciaire. De l'autre côté, nous permettons à la ministre de la Justice d'intercéder et d'intervenir dans le processus.
Le Parti réformiste a présenté des amendements au comité pour tenter de faire modifier les articles 3, 12, 15 et 16 dans le but de garantir que toute personne passible d'extradition soit réellement extradée du Canada. Nous voulions que l'expression «peut être extradée» soit remplacée par «doit être extradée» pour empêcher la ministre d'intervenir. Nous n'avons pas réussi. Cette question continue de nous préoccuper au plus haut point et nous ne pouvons appuyer un projet de loi qui permet à un ministre d'exercer sa discrétion.
Le ministre ne devrait que recevoir l'ordre d'extradition et amorcer le processus. Le ministre ne devrait pas être en mesure d'exercer sa discrétion. Nous aurions beaucoup aimé que l'article 38 de la loi prévoie simplement que le ministre devrait recevoir une copie de l'ordre, c'est tout.
Le Parti réformiste n'est pas satisfait des articles 40, 41, 42 et 43 du projet de loi C-40. Comme nous l'avons souligné en comité, nous aurions préféré que le ministre ne soit pas inclus dans le processus et nous avons d'ailleurs proposé des amendements à cet égard.
En principe, le projet de loi reste le même et nous ne pouvons être d'accord avec cela. Il laisse entendre qu'il y a une nuance politique dans ce projet de loi alors que nous devrions essayer d'en faire une affaire purement judiciaire. Les articles 44, 45, 46, 47 et 48 du projet de loi offrent des garanties importantes, mais elles ne devraient pas relever d'une décision du ministre.
Nous n'avons pas réussi, à l'étape de l'étude en comité, à obtenir les modifications que nous jugions nécessaires. Nous avons cependant réussi à faire ajouter, à l'article 44, certains motifs pour nous assurer que toutes les garanties possibles soient évidentes. Nous avons proposé d'amender l'article afin d'y inclure «la nationalité, l'origine ethnique, la langue, la couleur, la religion, les convictions politiques, le sexe, l'orientation sexuelle, l'âge, le handicap physique ou mental ou le statut de l'intéressé».
Nous avons proposé cet amendement au projet de loi, qui vise les droits des personnes reconnus par la Charte. Nous avons constaté avec beaucoup d'étonnement que le gouvernement avait oublié ces motifs lors de la rédaction du projet de loi. Nous avons réussi à faire apporter cet amendement avec l'aide de notre service de recherches et des juristes criminalistes.
Le comité a accepté sept propositions d'amendement du Parti réformiste. Fort heureusement, nous avons eu la prudence de proposer ces amendements. Si nous n'avions pas agi de la sorte, le projet de loi aurait probablement été contesté à plusieurs égards devant la Cour suprême du Canada, ce qui aurait coûté beaucoup d'argent en plus aux contribuables canadiens. La plupart des amendements que nous avons proposés se rapportaient à la Charte et aux applications du projet de loi. Le projet de loi n'avait pas été bien rédigé. Les rédacteurs du projet de loi, dans les rangs ministériels, l'ont reconnu en acceptant les propositions d'amendement réformistes.
Nous ne pouvons pas appuyer le projet de loi C-40 tant qu'il contiendra des dispositions comme le paragraphe 44(2). Nous ne devrions pas avoir à tenir compte, au Canada, des sanctions prévues dans un autre pays. Chaque pays a le droit de punir tel ou tel crime par la peine capitale. Nous ne devrions pas interdire l'extradition en invoquant le motif de la peine capitale. Le Parti réformiste a de sérieuses réserves au sujet de l'article 46, qu'on a appelé l'article Mandela.
Nous avons bien fait les choses durant le débat et à l'étape du comité. En réussissant à faire adopter sept propositions d'amendement, l'opposition a fait du bon travail pour la population canadienne.
Nous voterons contre le projet de loi parce que nous n'avons pas obtenu tout ce que nous voulions, mais aussi pour protester en faveur d'une séparation du pouvoir ministériel et du pouvoir judiciaire. Nous ne voulons pas retarder indûment le vote au sujet du projet de loi, car nous devons avoir une nouvelle loi sur l'extradition au Canada. Il s'agit probablement d'une des lois dont l'étude a duré le plus longtemps. Il est l'un des deux projets de loi que le Parlement a étudiés pendant plus de 100 ans. Il était grand temps que nous mettions ces mesures à jour. Nous sommes très heureux d'avoir présenté des propositions d'amendement qui seront bénéfiques pour tous les Canadiens.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je veux simplement indiquer que si le Règlement le permet, je souhaite partager mon temps de parole avec mon collègue de Beauharnois—Salaberry, qui a également travaillé en comité sur le projet de loi.
Nous avons eu l'occasion d'exprimer, lors de la deuxième lecture, que nous étions favorables à...
Le président suppléant (M. McClelland): Je m'excuse d'interrompre l'honorable député, mais je tiens à lui souligner que nous requérons le consentement unanime de la Chambre pour procéder de cette façon.
[Traduction]
Le député d'Hochelaga—Maisonneuve demande à la Chambre si elle consent à l'unanimité à ce qu'il partage son temps en deux périodes de 20 minutes, sans questions ni observations. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
[Français]
M. Réal Ménard: Monsieur le Président, je remercie les députés de cette Chambre de nous permettre de procéder de cette façon.
Nous avons eu l'occasion d'exprimer, en deuxième lecture et lors des travaux en comité, que nous étions favorables à l'économie générale du projet de loi ainsi qu'à la philosophie qui le sous-tend. C'est un projet de loi qui va finalement apporter deux grandes conséquences à la Loi sur l'extradition.
D'abord, on va fusionner, en une seule et même loi, la Loi sur les criminels fugitifs et la Loi sur l'extradition, une loi qui était centenaire et qui n'avait pas été révisée substantiellement depuis bon nombre d'années.
Deuxièmement, les procédures concernant la preuve ont été changées. Il sera désormais possible, dans le cadre d'ententes avec des États ou dans le cadre d'ententes pour des individus spécifiquement concernés par l'extradition, d'admettre comme preuves des éléments qui, autrement, n'auraient pas pu l'être en vertu du droit canadien. Pour ces raisons, nous sommes favorables à ce qu'il y ait une révision de la Loi sur l'extradition.
Cela n'est pas sans nous rappeler que la Loi sur l'extradition touche à la question de la mobilité des gens. Cela renvoie évidemment au fait que les gens se déplacent de plus en plus et qu'il y a de plus en plus de commerces et de transits entre les États. C'est pour cela qu'il est important d'avoir une loi qui soit la plus à jour possible.
Une des difficultés que l'on rencontrait dans la Loi sur l'extradition, c'est qu'elle ne tenait pas compte de la nouvelle façon de vivre le droit international, qui n'a d'ailleurs pas échappé au député de Chambly qui, je le répète, est un juriste émérite. La Loi sur l'extradition ne permettait pas au Canada de diriger les extradés vers les tribunaux internationaux.
Au cours des dernières années, il est arrivé à plusieurs reprises qu'il y ait consensus à la Chambre pour participer à différents tribunaux concernant des violations de crimes internationaux. La loi, dans sa nouvelle version, va permettre cela.
Donc, il y avait des difficultés, pour le Canada, de respecter ses obligations internationales envers une cour internationale ou un tribunal pénal. C'est évident que dans le projet de loi C-40, les collègues le savent, on prévoit un seul et même régime. Mais il s'est trouvé certains esprits, en comité—nos collègues qui ont participé aux travaux vont s'en rappeler—pour dire qu'il devrait y avoir deux régimes juridiques distincts.
Je vais laisser le député de Beauharnois—Salaberry s'expliquer là-dessus, car je pense qu'il a été séduit par ce point de vue, même si ce point de vue n'a pas réussi à s'imposer au niveau du gouvernement. Le gouvernement craint que cela soit discriminatoire et qu'on puisse éventuellement invoquer la Charte en se demandant pourquoi une telle disposition serait possible si on est extradé en vertu d'un accord avec un autre État et qu'il ne s'agirait pas du même régime s'il s'agissait d'un tribunal international.
J'ai adopté le point de vue qu'il était souhaitable d'avoir un seul et même régime, mais je me fais un devoir, par souci de rigueur, de mentionner qu'en comité, nous avons eu des représentations à cet égard.
Je disais donc que c'est une législation centenaire. Souhaitons que cela vous arrive aussi, monsieur le Président. C'est important de revoir la loi, parce que les moyens de communication qui existaient, il y a 100 ans, ne sont évidemment pas les mêmes. Cela nous renvoie aussi à toute la notion de la criminalité.
Si un député de cette Chambre a été préoccupé par la criminalité, c'est bien celui qui vous parle. Je remercie mes collègues par leur enthousiasme réservé, mais réel.
Des voix: Bravo!
M. Réal Ménard: Le crime organisé, c'est important. C'est une réalité qui est inéluctable. Dans certains milieux—mon collègue le sait—on a évalué que c'était près de 200 millions de dollars que représentaient les activités du monde interlope en économie parallèle.
Je ne peux m'empêcher de dire que le crime organisé procède par phase. La première phase, c'est d'abord le contrôle d'un territoire. La deuxième, c'est cette tentative de contrôler pour y écouler des stupéfiants. La troisième phase, qui est celle qui guette le Canada, de l'avis des gens qui suivent cette question, ce sont des investissements dans des activités licites et illicites.
C'est pour cela que plusieurs analystes prétendent qu'il n'y a pas de secteur d'activité où le crime organisé n'a pas fait valoir ses ramifications. Le crime organisé est possible dans une société, parce qu'il y a des connivences, parce qu'il y a des accointances, parce qu'il y a des prolongements avec l'ensemble des milieux, que ce soit les notables, les avocats, l'ensemble des gens qui sont dans des situations d'autorité.
Cela nous amène à faire le lien avec le projet de loi C-40, parce que ce projet de loi permettra des procédures plus diligentes d'extradition et cela va concerner, dans un certain nombre de cas, bien sûr, des gens qui auront été coupables d'activités reliées au monde interlope.
Il y a 100 ans, vous ne le savez peut-être pas, mais on vous en a certainement parlé, on ne parlait pas de fraude par télémarketing. Aujourd'hui, c'est une réalité qui existe. C'est là un exemple moderne d'activités criminelles qui prennent un visage éminemment contemporain.
Il y a 100 ans, on ne parlait pas de vol d'informations par ordinateur. Évidemment, cela n'existait pas. Pouvez-vous imaginer, un seul instant, le curé Labelle avec un Macintosh? Ce serait d'un anachronisme absolument ridicule. Aujourd'hui, on parle de fraudes par télémarketing. On parle de vols par ordinateur, et on parle, évidemment, de l'utilisation de l'Internet à des fins frauduleuses.
Alors, toutes ces raisons militent dans le sens d'une révision de la Loi sur l'extradition. Je le rappelais, en début d'analyse, on va fusionner deux lois, la Loi sur les criminels fugitifs et la Loi sur l'extradition et sa portée globale.
Comme parti politique, nous avons également travaillé très fort en comité. Je remercie à nouveau mon collègue de Beauharnois—Salaberry qui a été d'une collaboration et d'un concours très précieux. On sait qu'il a une formation en droit international et en droit constitutionnel et qu'il connaît ces questions.
Nous nous sommes partagé le travail, dans un sain esprit d'équipe. J'ai présenté un amendement à l'article 44 du projet de loi. Je veux attirer l'attention de mes collègues sur cet aspect du projet de loi.
Il est possible, pour la ministre, de refuser d'accepter une demande d'extradition d'un État x, qui figure à l'annexe II du projet de loi à titre de partenaires reconnus du Canada, si on a des motifs ou des raisons de penser que la personne qu'on va extrader subira des sévices ou fera l'objet de discrimination. À l'article 44, on mentionne un certain nombre de motifs de discrimination qui ne sont pas permis.
Je trouvais que cette liste était extrêmement restrictive. Nous ne nous sommes pas trompés. Nous avons vu juste en proposant un amendement comme celui-là. Ce matin, je n'étais pas peu fier, en me préparant, de lire une lettre qui avait été adressée à la ministre de la Justice. Une lettre qui a été envoyée pas par n'importe qui, mais par le Haut-commissaire pour les réfugiés.
Cet illustre individu disait dans sa lettre qu'il partageait nos préoccupations. J'espère que cela convaincra la Chambre à l'effet que nous avons travaillé très fort pour bonifier le projet de loi. Dans la correspondance du Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, on attire justement l'attention des parlementaires sur l'article 44.
Je voudrais en citer un extrait:
Le Haut-commissariat ne cherche pas à empêcher les poursuites contre les réfugiés qui auraient commis des infractions criminelles [...]
[...] mais plutôt à faire en sorte qu'ils ne soient pas exposés à la persécution à cause de leur race, de leur religion, de leur nationalité ou de leur appartenance à un groupe social.
L'article 44 du projet de loi C-40 assure une protection d'une importance cruciale, mais insuffisante. Cet article 44 ne précise pas que quatre des cinq motifs de persécution, énoncés dans la définition de réfugié proposée dans la Convention de 1951, ne figurent pas à l'article 44 du projet de loi.
Comme opposition responsable, il était de notre devoir de bonifier le projet de loi. Nous n'avons fait aucun mystère de cela et avons présenté un amendement que les libéraux ont accepté à 90 p. 100.
On sait toutefois comment cela se passe. Il y a toujours, de la part de certains collègues, des petits péchés. Je ne sais pas si ce sont des péchés véniels ou mortels, mais il y a quelquefois le péché d'orgueil qui fait qu'on refuse d'admettre que l'opposition a raison. On le reconnaît en partie, mais non en totalité. Toujours est-il que notre amendement a été accepté à 90 p. 100. Nous avons le sentiment d'avoir bonifié le projet de loi.
En plus, on nous a parlé d'un certain nombre de choses. Je disais que nous avons entendu des présentations de la part de témoins qui auraient souhaité que ce soit deux régimes juridiques distincts. Je sais, à cet égard, que mon collègue de Beauharnois—Salaberry y fera allusion. Il y a eu également d'autres interventions qui ont été portées à notre connaissance.
Ainsi, un beau matin, par un jeudi un peu semblable à tous les autres, on a vu défiler en comité une pléiade de criminalistes, tous plus avocats les uns que les autres. Ces gens sont venus en comité nous faire part d'une interrogation qui va intéresser le député de Chambly parce que, je le répète, c'est un éminent juriste.
Ils nous ont dit qu'en vertu de ce projet de loi, il sera possible d'admettre une preuve par ouï-dire. Certains le savent, je me suis moi-même également intéressé au droit. On m'avait bien dit et bien enseigné que la preuve par ouï-dire n'était pas juridiquement ce qu'il y avait de plus solide. Même si, en vertu du projet de loi, à chaque fois qu'on déposera une demande d'extradition, il devra y avoir un dossier certifié et conforme, où les éléments de preuve seront censés exister et que les autorités judiciaires du pays en question devront certifier le dossier qui fera l'objet d'un début de procès, il reste que maintenant il sera possible d'admettre des éléments de preuve par ouï-dire et qu'on ne sera pas obligé de faire une déclaration solennelle.
On comprendra que des avocats s'en sont inquiété. Les criminalistes qui, habituellement, sont assez résistants, n'ont pas l'habitude de s'énerver pour des éléments de détail. Alors, on a cherché à comprendre pourquoi le ministre allait dans un tel sens.
En comité parlementaire, nous avons posé plusieurs questions aux hauts fonctionnaires et on nous a expliqué que dans le régime actuel, tel que la loi existe, il était extrêmement difficile, dans un cadre bilatéral, avec les traités qui étaient signés, de reconnaître certains éléments de preuve en se limitant stricto sensu au droit canadien.
C'est un élément qui m'a convaincu. On verra pour la suite des événements, mais je dis tout de suite qu'un des éléments importants du projet de loi, c'est un changement significatif au niveau de l'admission de la preuve, puisqu'il sera maintenant possible d'admettre certains éléments de preuve par ouï-dire.
Non seulement la loi va permettre des mécanismes d'extradition plus diligents de façon bilatérale, par des ententes avec des États qu'on retrouve à l'annexe de la loi, mais il sera également possible d'avoir des ententes spécifiques. C'est une question que nous avons posée en comité, puisque nous nous sommes dit: «Que va-t-il se passer si on veut extrader une personne dans un État ou vers un État avec lequel on n'a pas de traité, qui ne figure pas à l'annexe?» On s'est fait rassurants. On nous a dit qu'il serait possible de faire de conclure des ententes spécifiques de gré à gré.
On sait également que dans cette loi, il y a deux grands processus qu'il faut avoir présents à l'esprit. Il y a tout l'appareil judiciaire, puisqu'en bout de piste, le processus va commencer lorsqu'un juge à l'extradition aura à apprécier le contenu d'un dossier et à faire des recommandations si, pour la suite des événements, il faut oui ou non extrader.
Dans un deuxième temps, la ministre de la Justice a un pouvoir considérable. C'est elle qui décide, en bout de piste, s'il faut ou non remettre à l'État qui en fait la demande la personne que l'on désire voir extrader.
Certains collègues, au comité parlementaire, particulièrement les réformistes, se sont inquiétés de cela. Ils ont dit: «Oui, mais ce n'est pas possible. Le processus devrait être entièrement judiciaire. Cela ne devrait être que des juges en extradition ou des juges de paix qui décident de l'appréciation de la preuve que l'on aura pour amorcer le processus d'extradition. En bout de ligne, seuls les juges devraient décider de cela.»
On s'est dit, au Bloc québécois, que ce n'était peut-être pas sage, parce que si on élit des gens, si on forme des gouvernements, s'il y a des parlementaires, c'est un peu normal que l'autorité exécutive soit associée au processus et qu'il soit possible pour la ministre, en bout de ligne, de refuser.
Par exemple, que se passe-t-il s'il y a une demande d'extradition d'un pays qui est reconnu pour les violations des droits de la personne, qu'on veut extrader quelqu'un dont on sait qu'il pourrait ultimement vivre des représailles terribles et qu'on veut l'extrader exclusivement sur des motifs de convictions politiques?
C'est très important qu'il y ait des mécanismes quelque part dans le projet de loi qui viennent apporter un contrepoids et qu'il y ait des garanties de données pour que jamais le Canada ne participe à un processus où on va extrader des gens qui, ultimement, pourraient vivre des représailles sur la base de leurs convictions politiques. Cela n'a pas de bon sens.
Nous croyons que nous avons, dans un projet de loi comme celui-là, les garanties.
Les convictions politiques, c'est sacré. Il n'y a rien de plus vrai, il n'y a rien de plus authentique dans la vie que les convictions politiques.
Qu'il me soit permis de prendre quelques secondes pour inviter mes concitoyens du Québec à aller voter. Je pense qu'on conviendra—et je suis convaincu que le président du Conseil du Trésor va partager mon analyse—que c'est important que les gens exercent leur droit de vote aujourd'hui. C'est important qu'on donne un mandat clair à ceux qui vont nous représenter. Les bureaux de scrutin sont ouverts jusqu'à 20 heures, sauf preuve du contraire. Je termine en disant que j'ai confiance, et que cela devrait plutôt bien aller.
Je continue en disant que ce projet de loi a également modifié la Loi sur l'immigration. Cette loi a été modifiée et il sera possible, si jamais une personne en instance d'extradition dépose également une demande de revendication du statut de réfugié—ce sont des choses possibles—dans le cas où on rendrait une décision en vertu du projet de loi C-40 et qu'on refusait à cette personne le statut de réfugié politique, cette décision sera réputée s'appliquer à la CISR, à la Commission de l'immigration sur le statut de réfugié.
C'est donc un projet de loi plutôt positif auquel le Bloc québécois s'est associé. Je sais que mon collègue en parlera plus abondamment, mais je veux préparer le terrain en disant que ce qui est important pour nous, dans tous les gestes que nous posons comme parlementaires, c'est de s'assurer que le Parlement soit associé aux décisions que prend l'exécutif.
Nous avons été un peu déçus de constater que dans les différents traités d'extradition—par exemple, à l'instant où on se parle, le Canada a des ententes bilatérales, des traités réciproques avec 49 États—il est possible d'admettre des éléments de preuve existant dans le pays avec lequel on transige et que des éléments de preuve soient réputés s'appliquer au droit canadien. Nous souhaiterions que l'ensemble des traités qui concernent l'extradition, l'ensemble des traités bilatéraux, ou pour le cas où cela concerne également un tribunal international, un tribunal pénal pour les droits de la personne, fassent l'objet d'un débat à la Chambre.
On a été plutôt surpris de voir une obstination assez mal venue, voire une impolitesse assez cavalière, pour ne pas dire une fin de non-recevoir totalement grossière de la part du gouvernement. Avec mon collègue, le député de Beauharnois—Salaberry, éminent juriste s'il en est, que le Conseil privé gagnerait à consulter davantage d'ailleurs, nous avons déposé un amendement pour s'assurer que tous les traités faisant l'objet d'une signature par le Canada et d'un autre pays puissent être débattus ici à la Chambre. Quelle ne fut pas notre surprise de constater que les députés ministériels, les libéraux, refusaient ce genre de débat.
Est-ce qu'on pourrait me dire quelle en est la raison? Pourquoi faudrait-il que le Parlement ne soit pas associé à la conduite des traités, à la négociation des traités, et ce faisant, à la diffusion de l'information relative aux traités?
Cela a été un peu un point faible des ministériels. Cela nous a beaucoup déçus, et on a compris jusqu'à quel point ces gens étaient mus par des réflexes démocratiques assez limités, finalement.
Je conclus là-dessus, et mon collègue, le député de Beauharnois—Salaberry, va enchaîner avec énormément d'éloquence.
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, comme mon collègue, j'invite les électeurs et les électrices de ma circonscription de Beauharnois—Salaberry, qui comprend deux circonscriptions québécoises, celle de Beauharnois—Huntingdon et de Salaberry—Soulanges, d'exercer leur droit de vote. C'est un grand jour pour la démocratie québécoise. Ce sera une grande journée pour nous, certainement. Il est important d'exercer ce droit, puisqu'il s'agit d'un droit fondamental que nos Chartes, que les grandes conventions internationales reconnaissent comme étant un des droits les plus fondamentaux.
Je souhaite donc la participation record que souhaite le premier ministre du Québec à cette consultation qui sera décisive pour la suite de l'histoire du Québec et du Canada. Comme mon collègue d'Hochelaga—Maisonneuve, et comme mes autres collègues ici, j'ai confiance.
Je désire également remercier le député d'Hochelaga—Maisonneuve de m'avoir associé aux travaux du Comité de la justice et des droits de la personne, et de m'avoir permis de participer aux délibérations du comité sur le projet de loi C-40 qui m'intéresse au plus haut point. Ce projet de loi concerne l'extradition, les traités d'extradition qui ont été conclus par le Canada, ainsi que certains traités multilatéraux qui voient à permettre l'extradition de criminels pour les fins de la mise en oeuvre du droit criminel, à la fois national et international.
Ce débat a été serein. Nous étions accompagnés dans ces débats, non seulement des parlementaires des autres partis, mais également de la secrétaire parlementaire du ministre de la Justice ainsi que de juristes réputés des ministères de la Justice et des Affaires étrangères, qui ont su parfois éclairer convenablement les députés.
Je voudrais par ailleurs souligner, avec du respect et de l'admiration, le travail assez intéressant et les commentaires toujours aussi pertinents du fonctionnaire Yvan Roy, un avocat principal au ministère de la Justice, qui a su répondre à de nombreuses questions que nous avions posées.
Mais il arrivait parfois que nos questions demeurent sans réponse ou que nos propositions n'aient pas de suite, même si nous croyions qu'il s'agissait de propositions qui visaient à améliorer ce projet de loi, à nous assurer que ce projet de loi ne soit pas modifié éventuellement à la suite de contestations judiciaires ou à la suite de l'entrée en vigueur, par exemple, d'un statut de Rome instituant une cour criminelle internationale, et qui auraient dû inciter les membres du Comité à privilégier, comme l'a suggéré mon collègue d'Hochelaga—Maisonneuve, que deux voies distinctes soient proposées en matière d'extradition. C'est le premier point sur lequel je commenterai le projet de loi C-40.
Il aurait été préférable, à notre avis, de distinguer le régime d'extradition en vertu de traités multilatéraux ou traités bilatéraux d'extradition, de créer un régime particulier en ce domaine et de créer un régime distinct lorsqu'il s'agirait, non pas d'extradition, mais de remise de personnes accusées de crimes internationaux à des tribunaux ad hoc, qu'il s'agisse du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie ou le Tribunal pénal international pour le Rwanda.
Bientôt, je l'espère, après que 60 États auront ratifié le statut de Rome instituant un tribunal pénal international, il faudra ajouter celui-ci à la liste des tribunaux où l'on pourra remettre des personnes qu'on voudra traduire en justice pour des accusations de crimes internationaux.
Il aurait été souhaitable, à mon avis, comme c'était l'avis de plusieurs avocats et criminalistes qui ont comparu devant le comité, de créer un régime distinct, de façon à ce que le Canada et son ministre, puisqu'en dépit des amendements demandés par les réformistes, on a voulu continuer de permettre l'exercice de la discrétion au ministre en cette matière, il aurait été préférable de diminuer la discrétion du ministre lorsqu'il s'agissait de remise à un tribunal pénal international. Le ministre, dans l'état actuel du projet de loi, garde la même discrétion que lorsqu'il s'agit d'extrader quelqu'un à la demande d'un État étranger.
Donc, nous aurions été d'avis que le projet de loi aurait été amélioré si on avait accepté de créer ces deux régimes distincts. Ce qui nous préoccupe, c'est qu'à l'avenir, il est vraisemblable que l'on doive revenir devant ce Parlement pour instituer un tel régime distinct, ce que l'on aurait pu empêcher, si la loi avait été amendée dans le sens où le souhaitait le Bloc québécois.
Le deuxième point sur lequel je veux commenter le projet de loi est celui qui concerne les traités, leur publication et leur dépôt. Nous avons beaucoup insisté, pendant les délibérations du comité permanent, pour que les traités d'extradition, qu'ils soient bilatéraux ou multilatéraux, soient non seulement publiés, comme le prévoit le projet de loi, mais qu'ils soient déposés au Parlement.
Cela était d'autant plus acceptable, à notre avis, que le projet de loi que vise à remplacer le projet de loi C-40 prévoyait, lui, le dépôt des traités d'extradition devant les deux Chambres du Parlement. C'est une obligation qui est abrogée par le projet de loi C-40, ce qui diminue d'autant la transparence du gouvernement en la matière, qui était minimale, lorsqu'il s'agit des traités internationaux.
Depuis le début de cette nouvelle législature, les députés du Bloc québécois—c'est le cas des députés qui siègent au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international—ont constamment utilisé les occasions qui leur étaient données pour demander au gouvernement plus de transparence en la matière, pour lui demander qu'il accepte, non seulement de déposer les traités devant le Parlement, comme c'était le cas pour les traités relatifs à l'extradition et que c'est aussi le cas pour les accords de sécurité sociale, mais que ce soit aussi le cas pour l'ensemble des traités.
À ce sujet, le gouvernement hésite encore à choisir une pratique qui est pourtant retenue aujourd'hui par les parlements d'autres pays du Commonwealth, qu'il s'agisse des parlements australien, néo-zélandais et même britannique qui, les uns et les autres ont, au cours des dernières années, accepté d'être plus transparents en déposant de façon systématique les traités devant les parlements.
Le Bloc québécois souhaite que cette pratique du dépôt des traités au Parlement soit revue et étendue à l'ensemble des traités. Il souhaiterait aussi que le Parlement soit associé à la conclusion des traités, et qu'il puisse les approuver avant même leur signature, pour que les élus du peuple aient un droit de regard sur le contenu des traités qui auront été négociés par le pouvoir exécutif.
En ce domaine, on voit une réticence certaine du gouvernement et de son ministre des Affaires étrangères qui, à l'occasion de débats relatifs à la mise en oeuvre de certaines conventions internationales, qu'il s'agisse de la Convention sur l'élimination des mines antipersonnel ou de la Convention sur l'interdiction complète des essais nucléaires, ont refusé de s'engager à ce que le Parlement soit consulté et approuve ces traités avant qu'ils ne soient signés ou avant qu'ils ne soient ratifiés.
Le Bloc québécois est revenu à la charge là-dessus et il a eu une mince consolation parce que la présidente du comité a accepté d'écrire au président du Comité permanent des affaires étrangères ainsi qu'au ministre lui demandant qu'un débat sur cette question ait lieu. C'est donc une porte entrouverte, mais trop légèrement, puisque c'est une question qui mérite d'être débattue à fond pour que l'on démocratise la politique étrangère du Canada, comme le gouvernement s'est engagé à le faire, et qu'on associe le Parlement à la conclusion des traités, lesquels sont de plus en plus importants dans la vie quotidienne des citoyens et des citoyennes d'un pays.
La troisième remarque que je veux faire sur ce projet de loi concerne la peine de mort, puisque le projet de loi comporte une disposition, soit le paragraphe 2 de l'article 44, qui permet au ministre de refuser d'extrader une personne dans un autre pays si cette personne peut se voir imposer la peine de mort. On aurait voulu qu'il s'agisse d'une obligation, puisqu'il faut être cohérent avec ses convictions.
Si le Canada ne croit pas à la peine de mort et estime qu'il s'agit d'une pratique équivalente à la torture ou aux traitements cruels, inhumains et dégradants, il devrait même obliger le ministre à ne pas extrader une personne si la peine de mort peut lui être imposée.
Le pouvoir de refuser lui est encore conféré par l'article 44(2), mais, quant à nous, on aurait voulu ajouter, au paragraphe 3 de l'article 40, une autre référence à la peine capitale dans un article concernant la demande d'assurance que peut faire le ministre à un État qui requiert l'extradition d'un individu. De façon surprenante, le comité et ses membres, sauf un député du parti gouvernemental, nous ont appuyés et ont donc accepté que l'on fasse référence à la peine capitale dans l'article 40.
Même si cet amendement ne s'y trouve pas, il faut quand même constater que dans certains traités d'extradition, y compris le traité d'extradition entre le Canada et les États-Unis, le ministre doit demander de telles assurances. Ce qui fait que ce traité, qui est en quelque sorte un modèle parmi les traités d'extradition du Canada, aurait dû faire l'objet d'une illustration concrète dans le paragraphe 3 de l'article 40.
Le député de Hochelaga—Maisonneuve et moi-même ne cachons pas notre déception de voir des députés refuser un tel amendement, d'autant plus que les fonctionnaires du ministère de la Justice et que la secrétaire parlementaire ne semblaient pas avoir d'objection à ce qu'une telle référence à la peine capitale soit incluse dans cet article 40.
Un quatrième commentaire me permettra de dire, comme mon collègue d'Hochelaga—Maisonneuve, que nous étions heureux d'être ceux qui ont pris l'initiative d'élargir la portée de l'alinéa 44(1)b) du projet de loi C-40, qui présente et énumère les motifs autorisant le ministre de la Justice à ne pas extrader. La liste des motifs qui était contenue à l'origine dans le projet de loi C-40 s'inspirait de la liste que l'on retrouve au traité modèle des Nations unies, traité que les États sont invités à examiner lorsqu'ils adoptent leurs propres traités d'extradition.
La liste contenue dans ce traité modèle, intégrée à l'origine dans ce projet de loi, était fort incomplète, selon nous. Nous avons cherché à y intégrer les motifs que l'on retrouve à la fois dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi que la liste des motifs, plus complète encore, que l'on retrouve dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, à l'article 10.
Le résultat de notre initiative a été que cette liste de motifs a été allongée pour inclure la langue, la couleur, l'orientation sexuelle, le gouvernement ajoutant, quant à lui, le handicap mental. La disposition, dans l'état actuel, est nettement plus conforme aux obligations internationales du Canada. Nous sommes satisfaits que certains motifs aient été ajoutés et que la Charte québécoise ait, par conséquent, inspiré les législateurs fédéraux, dont nous sommes jusqu'à preuve du contraire, pour que cette disposition soit améliorée.
Ce sont donc des amendements constructifs, apportés par le Bloc, à un projet de loi qui a tout de même comme avantage de rajeunir, de rafraîchir deux lois relatives à l'extradition qui avaient été trop longtemps oubliées, parce qu'on n'avait pas fait l'effort de rajeunir le droit canadien de l'extradition.
À cet égard, on peut penser qu'un ancien juge de la Cour suprême, celui qui a récemment pris sa retraite, le juge La Forest, serait heureux, lui qui a été l'auteur de grands ouvrages sur le droit d'extradition, parce qu'il s'est fait l'avocat d'un droit plus clair, plus simple, et sans doute ses désirs auront été exaucés dans une certaine mesure par le projet de loi C-40.
Je termine en rappelant que cette loi, comme la loi actuelle, est une loi sur laquelle le Canada pourrait se fonder pour demander l'extradition d'un dictateur, d'une personne qui est aujourd'hui entre les mains de la justice britannique. Comme on le sait, je fais référence au jadis général, aujourd'hui sénateur, celui que beaucoup continuent de qualifier de dictateur, dont on dit qu'il est à l'origine d'au-delà de 4 000 morts et de disparitions plus nombreuses encore au Chili, Augusto Pinochet.
Cette loi, comme celle qui la précède, autoriserait le Canada à demander l'extradition du dictateur Pinochet au Canada, comme l'ont fait récemment l'Espagne, la France, la Suisse et la Belgique.
De mon siège, comme mes collègues—je crois qu'ils m'appuient dans cette demande—je pense qu'il faut insister davantage encore pour que la ministre de la Justice fasse comme les ministres de la Justice d'autres pays européens, et demande l'extradition du général Pinochet auprès des Britanniques. La pression doit continuer d'être exercée sur ce gouvernement, de façon à ce que M. Pinochet n'échappe pas à la justice, qu'il puisse être traduit devant un tribunal national, qu'il s'agisse du tribunal espagnol, belge, français, suisse, ou même d'un tribunal canadien, pour répondre des crimes contre l'humanité qui lui sont reprochés par tant de Chiliens. Le Canada est en mesure de le faire.
J'ai déjà posé trois questions à la Chambre sur cette affaire. Je n'ai pas encore eu de réponse, ni de la ministre de la Justice, ni du ministre des Affaires étrangères. Une réponse est dans l'ordre des choses et avant que le ministre britannique de l'Intérieur rende sa décision, il serait très utile que le gouvernement du Canada, par l'intermédiaire de sa ministre, donne suite à une requête qui lui a été présentée par une citoyenne canadienne résidant à Montréal qui, en 1973, a été victime de torture, comme tant d'autres personnes, et de sévices corporels qu'elle a décrits dans un affidavit qui démontre jusqu'à quel point des crimes auraient été commis, crimes qui ne doivent pas rester impunis.
Je pense que ce régime doit permettre d'atteindre l'objectif qui est le sien, soit de faire en sorte que des crimes, qu'ils soient internationaux ou nationaux, ne restent pas impunis.
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, je suis très honoré aujourd'hui d'avoir l'occasion d'intervenir sur le projet de loi C-40, Loi concernant l'extradition, modifiant la Loi sur la preuve au Canada, le Code criminel, la Loi sur l'immigration et la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, et modifiant ou abrogeant d'autres lois en conséquence.
[Traduction]
Je vais d'abord dire un mot sur la raison même qui nous amène à débattre de ce projet de loi. Si nous sommes saisis de cette mesure législative, c'est parce que les lois actuelles du Canada concernant l'extradition sont désuètes, lentes et complexes.
Ce sont là trois caractéristiques indésirables en matière de justice. En fait, ce devrait être tout le contraire. Les cas devraient être traités rapidement, simplement, sans complication aucune.
Nous avons tous à l'esprit les nombreux retards qu'accuse le système judiciaire, retards qui constituent autant de préjudices car qui dit justice différée dit déni de justice.
J'ai eu moi-même affaire aux tribunaux au printemps 1996. L'affaire traîne encore. Nous voici en décembre 1998. Je suis sûr que cette affaire va se prolonger une bonne partie de l'année prochaine, sinon jusqu'au prochain millénaire ou presque.
Je suis essentiellement un homme patient. J'ai heureusement les moyens de payer les frais d'avocat. Mais je pense souvent aux gens, nombreux, dans notre société qui ne sont pas aussi fortunés que moi et aux affres par lesquelles ils doivent passer lorsqu'ils ont à faire face à des poursuites aussi longues, lorsque l'affaire traîne et que les choses durent indéfiniment tout cela à cause de notre système judiciaire.
C'est l'une des raisons pour lesquelles nous discutons aujourd'hui des mesures d'extradition. Ces mesures sont dépassées, le processus est lent et complexe.
Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui à la Chambre regroupe la Loi sur les criminels fugitifs et la Loi sur l'extradition en une loi unique afin de simplifier le processus d'extradition au Canada. Simplifier est le mot important.
Ce projet de loi a pour but de mieux aligner notre politique et notre procédure d'extradition sur celles d'autres pays et d'empêcher que le Canada ne devienne un asile sûr pour les criminels fugitifs qui ne veulent pas affronter la justice du pays où ils ont commis leur crime.
L'un des principaux problèmes de la loi actuelle est qu'elle ne permet pas vraiment au Canada de remplir ses obligations internationales près un tribunal pénal international comme le Tribunal pénal international des Nations Unies.
La loi en vigueur ne permet pas au Canada d'extrader un criminel fugitif pour répondre de ses actes devant un tel tribunal. Nous sommes en faveur de pouvoir extrader des personnes afin qu'elles répondent de leurs actes devant un tribunal pénal comme celui établi pour juger les personnes présumées responsables d'actes de génocide ou d'autres violations graves du droit humanitaire international sur le territoire du Rwanda et sur celui de la Yougoslavie.
L'idée d'un tribunal international avec des pouvoirs indépendants pour la poursuite des criminels de guerre n'est pas nouvelle et a besoin de notre appui. Une caractéristique importante de ce projet de loi est qu'il va permettre l'extradition vers des États, mais aussi vers les tribunaux sur les crimes de guerre des Nations Unies et vers tout organisme futur de cette nature, notamment un tribunal pénal international des Nations Unies. Le projet de loi nous permettra de remplir nos obligations internationales et de nous conformer aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies créant les tribunaux criminels internationaux pour le Rwanda et l'ancienne Yougoslavie.
Selon ces résolutions, nous devons fournir de l'aide à ces tribunaux et leur remettre les fugitifs s'ils les demandent. Dans l'état actuel de notre droit, nous pourrions être en violation de nos obligations en tant que membre des Nations Unies si des personnes recherchées par ces tribunaux se trouvaient sur notre sol, car nous ne pourrions pas les extrader.
Le NPD appuie également les mesures visant à moderniser la loi de façon à combattre le crime organisé et le crime utilisant la haute technologie. La loi actuelle ne peut pas être utilisée pour cette dernière forme de criminalité et elle n'est pas assez souple pour tenir compte des changements découlant de la mondialisation des activités criminelles. Pourtant, il y en a beaucoup actuellement. Nous savons que les trafiquants de drogue et le crime organisé opèrent à l'échelle mondiale. Ce qui se passe dans nos collectivités aujourd'hui n'est pas indépendant du reste du monde. Assez souvent, les crimes sont planifiés ailleurs et franchissent nos frontières.
De nos jours, les gens voyagent de plus en plus facilement. J'ai vu un bel exemple de cette mobilité accrue il y a peu de temps. J'étais assis dans l'antichambre de l'opposition et, en levant la tête, j'ai vu le leader du gouvernement à la Chambre en conversation avec certains de nos députés. J'ai baissé la tête, pris une autre bouchée de mon repas et lorsque j'ai relevé la tête de nouveau, le même leader du gouvernement faisait un discours à la Chambre sur le débat d'urgence de ce soir. En un clin d'oeil, il peut passer d'un endroit à l'autre.
C'est vrai pour les députés et également pour presque toute notre société. La mondialisation nous permet de nous rendre d'un endroit à l'autre très rapidement. Il est donc très important que nos lois puissent nous permettre de faire face à toutes sortes de situations qui incluent ce genre de mobilité et de flexibilité accrues entre les frontières.
Nous du Nouveau Parti démocratique sommes également en faveur d'une protection accrue des droits fondamentaux des personnes visées par une demande d'extradition. Il est très important que nous traitions ces personnes qui viennent dans notre pays et qui pourraient être passibles d'extradition avec autant de justice et d'équité que nos propres citoyens. La législation canadienne en matière de droits de la personne est excellent et j'ai été très heureux de constater que ce projet de loi a été amendé pour y ajouter certaines garanties liées aux droits de la personne dans les cas d'extradition.
L'article 44 du projet de loi prévoit que le ministre refuse l'extradition s'il est convaincu que la demande d'extradition est présentée dans le but de poursuivre ou de punir l'intéressé pour des motifs fondés sur la race, la nationalité, l'origine ethnique, la langue, la couleur, la religion, les convictions politiques, le sexe, l'orientation sexuelle, l'âge, le handicap physique ou mental ou le statut de l'intéressé, ou qu'il pourrait être porté atteinte à sa situation pour l'un de ces motifs.
Cet article reprend les mêmes droits fondamentaux de la personne que ceux qui figurent dans les législations des droits de la personne du Canada et de toutes les provinces. Nous appuyons cette modification. Nous estimons qu'il est très important d'assurer ce type de cohérence en matière d'extradition.
Par ailleurs, nous sommes préoccupés du fait que, même s'il subsiste une discrétion ministérielle considérable pour refuser l'extradition, il y a des domaines où la loi n'est pas aussi contraignante que nous le souhaiterions, par exemple dans le cas de l'extradition d'une personne vers un État qui risque d'imposer la peine capitale. Mon collègue du Bloc québécois en a parlé. Si nous, au Canada, pensons que la peine capitale est contraire à ce que nous considérons comme un traitement humain de nos semblables, il est tout aussi important de s'assurer que le même principe s'applique pour les personnes qui pourraient être visées par une ordonnance d'extradition.
Nous aurions des réserves au sujet du pouvoir discrétionnaire laissé au ministre à cet égard. Nous croyons que des dispositions exécutoires seraient préférables. C'est néanmoins un progrès de préciser cette considération.
Le projet de loi permet au ministre de la Justice d'accorder l'extradition s'il a reçu l'assurance que la peine capitale ne sera pas envisagée. Nous souhaiterions des garanties plus solides et exécutoires pour prévenir l'imposition de la peine capitale.
Le projet de loi nous inspire certaines inquiétudes. Nous nous inquiétons, par exemple, des changements permettant d'admettre des preuves qui ne sont pas normalement acceptées au Canada, comme la preuve par ouï-dire. Cela allège la charge de la preuve pour les pays étrangers qui demandent une extradition. Il convient, à notre avis, de respecter des normes élevées en la matière, voilà pourquoi la question nous préoccupe quelque peu.
Le pouvoir d'exclure, dans certaines circonstances, des personnes des audiences en matière d'extradition, les dispositions prévoyant la non-publication des preuves et les garanties concernant l'imposition de la peine de mort, je le répète, ne lient pas les parties intéressées. Par conséquent, il pourrait y avoir une certaine lacune au niveau des dispositions touchant au principe de la sanction réciproque.
Malgré ces réserves, nous appuyons le projet de loi. Il s'agit d'un pas dans la bonne direction. La mesure législative permettra d'éviter que le Canada devienne un refuge sûr pour les fugitifs. Elle accorde une meilleure protection des droits de la personne et de meilleures garanties pour les personnes visées par une demande d'extradition. Elle renferme aussi des dispositions permettant l'extradition de personnes pour qu'elles puissent comparaître devant des tribunaux internationaux.
On modernise la loi pour s'attaquer au crime organisé et aux crimes de haute technologie. Certaines dispositions du projet de loi tendent à protéger les jeunes contrevenants, d'autres à favoriser les consultations entre le ministre de la Justice et le ministre de l'Immigration au sujet des cas de réfugiés. Ce sont là des dispositions très importantes. Il arrive trop souvent, à la fonction publique, que la main gauche ne sache pas ce que fait la main droite, que des personnes tirent profit de certaines dispositions quand elles traitent avec un ministère et se soustraient ainsi à leurs responsabilités sous un autre ministère. Grâce à cette collaboration et aux consultations entre le ministre de la Justice et le ministre de l'Immigration, les dossiers d'extradition seront traités plus rapidement et de façon plus juste, plus équitable et plus appropriée.
Je conclus en exhortant les députés à appuyer cette mesure législative, qui est un grand pas dans la bonne direction.
[Français]
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de participer à ce débat.
[Traduction]
C'est toujours un plaisir de participer au débat dans cette enceinte, surtout en ce qui concerne une mesure législative importante comme le projet de loi C-40.
C'est une mesure qui va, je le répète, modifier la Loi sur la preuve au Canada, le Code criminel, la Loi sur l'immigration et la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, ainsi que modifier ou abroger d'autres lois en conséquence.
Là encore, je voudrais souligner que je suis heureux de participer à un débat sur une mesure législative de fond comme celle-ci parrainée par un gouvernement qui a la réputation bien méritée d'avoir un programme législatif léger. De plus, l'actuelle ministre de la Justice et le solliciteur général du Canada et son prédécesseur sont bien connus pour prendre bien longtemps à répondre à l'appel des Canadiens souhaitant des mesures législatives tout à fait nécessaires pour assurer la loi et l'ordre.
Pour présenter les choses de façon plus simple et moins partisane, je tiens à dire que ce projet de loi fusionne fondamentalement la Loi sur l'extradition vieille de 100 ans et la Loi sur les criminels fugitifs dans une nouvelle Loi sur l'extradition moderne. À l'instar du secrétaire parlementaire, je crois que les objectifs de ce projet de loi sont certes positifs, bénéfiques et louables.
Plusieurs événements justifient la révision et la mise à jour de la Loi sur l'extradition. Comme notre collègue néo-démocrate l'a mentionné précédemment, l'aspect pratique est un élément important de cette mesure législative, tout comme il est nécessaire, selon moi, d'accélérer le processus en matière d'immigration, ce qui est également un domaine qui nous préoccupe beaucoup au Canada.
Non seulement la loi actuelle a plus de 100 ans, mais elle ne s'attaque pas à la criminalité moderne comme le télémarketing frauduleux et l'utilisation d'Internet pour commettre des infractions qui ne sont pas de notre ressort. Malheureusement, les activités criminelles suivent sinon devancent l'évolution de notre société et les crimes technologiques ne sont que trop courants dans notre monde moderne.
La loi actuelle n'est pas suffisamment souple pour permettre des changements découlant de la mondialisation des activités criminelles comme le trafic de drogue, le crime organisé et les crimes transnationaux. Comme d'autres députés l'ont déjà dit, nous faisons face à une crise en ce qui concerne le crime organisé au Canada. Selon nos forces policières et de sécurité, il faut absolument intervenir.
À l'heure actuelle, le gouvernement libéral a l'impression que le Canada, surtout dans nos ports, a une attitude favorable au commerce. Il est évident qu'on a besoin d'une mesure législative pour endiguer la vague de crimes.
La Loi sur l'extradition a été modifiée pour la dernière fois en 1991 par l'ancien gouvernement progressiste conservateur. Grâce au projet de loi C-31 les délais ont été considérablement réduits. À l'époque, des voix demandant une révision complète du système s'étaient élevées dans les milieux des renseignements de sécurité et de la police.
L'ancien gouvernement conservateur avait également adopté une mesure législative intitulée Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, loi que la Chambre chercher à modifier dans le cadre de ce projet de loi.
La mesure législative de notre gouvernement avait permis au Canada de coopérer plus efficacement avec les pays étrangers en ce qui concerne les enquêtes et les poursuites relatives aux crimes internationaux ou transnationaux tels que les actes de terrorisme, le trafic de drogues et le blanchiment de fonds.
Malheureusement, le plus récent rapport annuel international du département d'État américain, qui porte sur la stratégie de lutte internationale contre les narcotiques, place le Canada parmi les pays les plus attrayants au chapitre du blanchiment de fonds illégaux. Sous les libéraux, notre pays se retrouve dans la même catégorie que le Brésil et les îles Cayman pour ce qui est du crime international.
Il ne fait aucun doute que le moment est venu de s'arrêter de parler de la lutte contre le crime international et le crime organisé et de passer à l'action, ce que j'espère que le nouveau solliciteur général fera dans sa déclaration annuelle sur le crime organisé prévue plus tard cette semaine. Je sais que tous les députés de l'opposition attendent ce moment avec impatience.
Comme on l'a déjà mentionné, le projet de loi C-40 propose de fusionner la Loi sur l'extradition et la Loi sur les criminels fugitifs. La nouvelle loi permettrait au Canada de respecter ses obligations internationales puisqu'elle rendrait possible l'extradition vers des tribunaux pénaux internationaux, notamment les tribunaux sur les crimes de guerre. Il semble que, depuis quelque temps, la notion de crime de guerre englobe plus de choses et qu'elle a évolué. C'est pourquoi il faut des mesures internationales énergiques.
En vertu de ce projet de loi, une personne serait extradée si l'acte dont elle est accusée avait été commis hors du Canada mais qu'il était aussi considéré comme un crime au Canada. C'est ce qu'on appelle couramment la double criminalité. Il y a des spécialistes du droit constitutionnel et des avocats qui considèrent cela comme un problème potentiel dans notre pays, du point de vue de l'interprétation judiciaire.
Il faut que l'interprétation des preuves soit plus souple dans certains cas. Cela rendrait aussi les procédures et les pratiques canadiennes d'extradition plus conformes à celles d'autres pays. Certes, il doit toujours y avoir des garanties concernant certains types de preuves, surtout s'il s'agit de ouï-dire qu'on ne peut vérifier ou entendre sous la forme d'un témoignage assermenté.
Toutefois, le gouvernement espère que la nouvelle loi empêchera les fugitifs de considérer le Canada comme un refuge où ils pourront éviter de faire face au système de justice pénale dans leur propre pays ou dans le pays où le crime a été commis.
Le nouveau projet de loi a conservé les modifications que proposait le Parti progressiste conservateur dans le projet de loi C-31 pour maintenir un processus d'extradition efficace.
Les Canadiens se sont toujours dits préoccupés par les lois du Canada sur l'extradition. Ils veulent éviter que ce pays devienne un refuge pour des criminels qui réussissent ainsi à éviter les poursuites dans leur propre pays.
Au cours des dernières années, plusieurs cas ont fait beaucoup de bruit, comme les affaires Ng, Kindler, Maersk Dubai et l'attentat à la bombe de l'aéroport Narita. Tous ces cas sont bien connus au Canada. Ils ont aussi été remarqués chez nos partenaires internationaux en matière d'extradition, et ceux-ci ont exprimé des préoccupations. Ces cas ont également montré qu'il y avait lieu de réformer et de moderniser nos lois sur l'extradition.
J'ai été ravi d'ajouter mon nom à la liste de ceux qui, cet été, se sont opposés à l'expulsion prévue d'anciens membres de l'équipage du Maersk Dubai, en Nouvelle-Écosse. Erminie Cohen, sénateur du Parti conservateur et originaire du Nouveau-Brunswick, a joué un rôle clé en sollicitant l'appui des gens à l'égard de ces braves hommes. Nous devrions tous l'en remercier et la féliciter.
Les députés qui dénigrent constamment la Chambre haute devraient peut-être suivre l'exemple du sénateur Cohen et regarder au-delà du sectarisme. Mme Cohen compte parmi de nombreux sénateurs qui s'efforcent de soulever des questions qu'on expédie parfois sans ménagement à la Chambre des communes.
Une des grandes préoccupations que suscite le projet de loi, c'est que le Canada exige que les pays qui veulent qu'un fugitif soit extradé présentent leur demande selon une approche passablement étroite de ce que constituent des éléments de preuve acceptables.
Les règles de la preuve sont assouplies et l'on compte beaucoup sur la preuve par ouï-dire. On peut obtenir des documents de pays étrangers pour les examiner au cours d'une audience d'extradition. La certification de ces documents et leur acceptation d'office, sans possibilité de contre-interroger les personnes mentionnées dans les affidavits ou les documents, soulève une préoccupation.
Il existerait cependant des garanties. On insiste beaucoup sur le grand pouvoir discrétionnaire qu'aurait le ministre pour décider de la recevabilité de ces documents.
Cela crée quelque difficulté, cependant, notamment pour les pays dotés d'un régime de droit civil, dans lequel ils se fient aux faits et en acceptent une plus grande diversité, sous forme d'éléments de preuve admissibles devant les tribunaux. Des torts risquent d'être causés, et les représailles contre des condamnations injustifiées transcendent les frontières.
Parmi d'autres préoccupations, on compte la difficulté qu'aurait le Canada à honorer ses obligations à l'égard de cours ou de tribunaux pénaux internationaux, car, selon le régime actuel, le Canada ne peut pas extrader un fugitif à un organisme de ce genre. Il y a plus d'un siècle, quand la Loi sur l'extradition a d'abord été adoptée, il n'y avait aucun des moyens de télécommunications qui existent aujourd'hui au Canada; ni l'avion ni les autres modes de transport modernes n'existaient.
La loi actuelle ne prévoit aucune disposition portant sur les actes criminels de l'ère moderne, tels que la fraude par télémarketing, le vol de données informatiques ou le recours au réseau Internet pour commettre une infraction dans une autre juridiction. De même, la loi n'est pas assez souple pour permettre de faire face aux modifications qu'entraîne la mondialisation des activités criminelles. Il suffit évidemment de penser à la hausse des statistiques sur le trafic de stupéfiants, le crime organisé et les crimes transfrontaliers. Ce projet de loi va donc dans la bonne direction.
La mobilité plus grande des personnes est une réalité nouvelle, dont il faut en tenir compte quand on rédige une nouvelle mesure législative. Le projet de loi fait aussi ressortir qu'il est nécessaire, en matière d'extradition, d'établir des relations efficaces avec nos partenaires internationaux. C'est même devenu essentiel. Notre monde est petit, mais les criminels sont très habiles quand ils ont besoin d'un refuge pour échapper à la justice. À la suite d'une étude exhaustive et de consultations auprès de nos nombreux partenaires, il est apparu indispensable de revoir nos lois sur l'extradition et sur les criminels fugitifs, pour veiller à ce qu'elles reflètent les procédures et les pratiques d'aujourd'hui.
Le projet de loi présenté pas le gouvernement libéral simplifiera le processus d'extradition du Canada. Il sera désormais plus simple pour nos partenaires de rapatrier un des leurs qui s'est enfui au Canada et pour le Canada de faire revenir un fugitif de l'étranger. En même temps, le projet de loi améliore la protection et les garanties des personnes visées par des demandes d'extradition, et se trouve ainsi à hausser la norme de protection.
Le projet de loi rendrait notre processus d'extradition plus accessible pour les États étrangers en faisant correspondre davantage nos processus et nos pratiques en matière d'extradition avec ceux d'autres pays. Plus important, cela éviterait aux Canadiens de faire l'objet de demandes injustes d'extradition.
Il y a un aspect du projet de loi où l'on constate de la négligence, et c'est là un sujet habituel de plainte à l'endroit du gouvernement actuel, à savoir le financement. Nous avons vu souvent au cours du mandat actuel et au cours du mandat précédent le gouvernement faire adopter des mesures législatives sans comprendre les coûts qu'elles entraîneraient. Le gouvernement libéral a tenu maintes fois des propos sévères à l'égard du crime organisé, mais, comme nous l'apprend le rapport du vérificateur général, il a réduit de 74 millions de dollars pour le dernier exercice financier le budget de l'unité de la GRC chargée de la lutte au crime organisé. Cela paraît contradictoire. Le gouvernement ne semble pas savoir joindre le geste à la parole.
Le gouvernement libéral ne peut plus nier que les coûts de mise en application de la loi C-68 grimpent en flèche. Certains calculent que lorsque le lourd appareil nécessaire pour l'application de cette mesure sera devenu opérationnel, les coûts de mise en oeuvre auront atteint 350 millions de dollars, et certains calculent même qu'ils pourraient s'élever à un demi- milliard de dollars.
Nous discutons d'une mesure législative très importante, parrainée par la ministre de la Justice, et pourtant nos services de police nationaux continuent de déplorer un sous-financement de 200 millions de dollars. Nous savons que, depuis 1993, le SCRS a perdu plus de 20 p. 100 de ses effectifs généraux. Aussi bien intentionnées que soient la mesure à l'étude ou d'autres mesures analogues, le gouvernement doit reconnaître que les organismes d'application de la loi ont besoin des ressources nécessaires pour s'acquitter de leur tâche. Je ne peux vraiment pas comprendre comment le gouvernement peut s'attendre à ce que ses agences d'application de la loi puissent y parvenir autrement.
Un certain nombre d'amendements positifs ont été proposés au Comité de la justice. Je félicite mes collègues pour leur participation au comité. Certains des amendements très sensés apportés à cette mesure législative ont fait ressortir de façon marquante la nécessité d'un examen équilibré et objectif, particulièrement lorsqu'il est question de justice.
La participation de criminalistes au Comité de la justice a joué un rôle important relativement à certains de ces changements. Certains autres changements ont été proposés par des députés de l'opposition. Je reconnais l'ouverture dont le gouvernement a fait preuve relativement à ces amendements. Malheureusement, toutefois, seulement certains de ces amendements ont été acceptés.
Mon collègue réformiste a parlé de la participation de son parti. Il y a un changement en particulier qui portait sur la nécessité de modifier l'article 44 du projet de loi C-40, où sont énumérés les motifs de refus. Celui-ci énumère notamment les motifs suivants:
...la nationalité, l'origine ethnique, la langue, la couleur, les convictions politiques, le sexe, l'orientation sexuelle, l'âge, le handicap physique ou mental ou le statut. . .
Il fallait évidemment modifier cette disposition. L'amendement assure une définition conforme aux autres mesures législatives en vigueur dans notre pays, notamment la Charte des droits. Il convient toutefois de signaler que ce n'est pas là exactement l'amendement que le Parti réformiste avait proposé. En fait, l'orientation sexuelle n'était pas incluse dans l'amendement proposé par les réformistes.
Le gouvernement a fait preuve d'ouverture à l'égard de ces amendements. Cela montre à quel point il est important que l'opposition fasse son travail, qu'elle soit prête à participer et à proposer des amendements utiles.
Un amendement dont on a déjà parlé dans ce débat concerne le pouvoir discrétionnaire accru accordé au ministre dans ce projet de loi. Il s'agit de la capacité du ministre d'évaluer la situation et de déterminer le bien-fondé de la demande d'extradition. Il doit y avoir un équilibre très subtil et très important entre le pouvoir politique du ministre pour ce qui est de décider des arrêtés d'extradition et son rôle relativement à l'exécution de ces arrêtés.
Des amendements proposés, qui ont été rejetés au comité, auraient beaucoup contribué à établir cet équilibre. Il y aurait eu à un moment donné une révision judiciaire ou peut-être un groupe spécial qui aurait examiné le scénario factuel pour déterminer la pertinence de la demande du pays d'extradition.
Ce projet de loi oblige le ministre à faire preuve d'une plus grande diligence. Une extradition injustifiée entraîne des conséquences importantes. À l'inverse, les conséquences sont importantes pour les Canadiens qui doivent quitter le pays.
Le ministre doit donc s'efforcer de bien s'informer et de s'assurer que la demande est justifiée et que la documentation fournie est en tout point conforme à la loi. J'espère que c'est bien l'intention du ministère de la Justice.
Il est quelque peu contradictoire que le ministère de la Justice, d'un côté, restreigne le pouvoir du ministre en ce qui concerne les changements que l'on propose d'apporter au processus d'appel final prévu à l'article 690 du Code criminel et, de l'autre côté, accroisse avec ce projet de loi le pouvoir discrétionnaire du ministre dans la détermination des arrêtés d'extradition.
Je tiens à signaler une autre anomalie qui s'est produite au Comité de la justice. Il s'agit de la participation de Kimberly Prost, qui a agi à titre d'avocate-conseil auprès du groupe international d'aide, une division clé du service d'extradition du ministère de la Justice. À ce titre, si je comprends bien, elle a participé à la rédaction de ce projet de loi ou du moins de parties de celui-ci, mais elle n'a pas officiellement comparu devant le comité. Le gouvernement sait sans aucun doute pourquoi.
Je suis aussi préoccupé par les répercussions sur la charte. Ces répercussions ont déjà été signalées et ont été mises en évidence par les criminalistes qui ont comparu devant le comité. Il est particulièrement difficile de comprendre comment, aux termes du projet de loi C-40, on appliquera les critères liés aux droits de la personne que notre pays a adoptés en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. Malgré les lacunes et même si le gouvernement a fait preuve d'intransigeance lorsqu'il s'est agi d'accepter certains amendements proposés par l'opposition, le projet de loi est assez important et, à mon avis, il mérite que nous l'appuyons.
D'autres intervenants avant moi ont parlé de la question du dépôt de documents. De toute évidence, ce n'est plus exigé par le projet de loi à l'étude, ni par d'autre mesures législatives, du reste. C'est curieux, mais c'est tout à fait conforme à l'approche du gouvernement actuel, qui prône la transparence, mais qui, au moment de mettre cela en pratique, semble être assujetti à une obligation de rendre compte différente.
Comme je l'ai déjà mentionné, le caucus conservateur appuiera le projet de loi. Celui-ci est conforme à l'approche activiste du dernier gouvernement progressiste conservateur, approche qui visait à moderniser nos lois en matière d'extradition. Par le biais de son Comité des affaires juridiques et constitutionnelles, le Sénat sera peut-être plus à même d'envisager des amendements au projet de loi C-40.
En conclusion, les aspects positifs du projet de loi C-40 sont, somme toute, supérieurs à ses inconvénients, et nous estimons que cette mesure législative mérite d'être appuyée.
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes saisis maintenant du projet de loi C-40, la nouvelle Loi sur l'extradition. Comme mes collègues l'ont déjà dit, nous étudions aujourd'hui une refonte substantielle d'une loi vieille d'un siècle. Les rédacteurs ont fait du bon travail, à mon avis. Le projet de loi modernise la loi, la simplifie, la codifie correctement, tient compte de la Charte, bref propose une foule de choses intéressantes. Je tiens à féliciter la ministre d'avoir présenté cette loi.
Le travail de refonte de cette loi a commencé il y a un bout de temps. À ma connaissance, la refonte de la loi figure au programme du ministère de la Justice depuis un certain nombre d'années, et remonte même aux années 1992-1993 lorsque l'on a modifié la loi actuelle pour simplifier les procédures d'appel.
Mes collègues ont fort bien décrit les nombreuses qualités de cette nouvelle loi. Je voulais attirer l'attention des députés sur trois articles de la loi. Lorsque nous rédigeons des lois et que nous les adoptons à la Chambre, nous les concevons, nous les passons dans l'ordinateur et nous faisons de notre mieux pour qu'elles soient efficaces et soient dans l'intérêt des Canadiens. Nous devons tenir compte de la possibilité qu'en passant de la planche à dessin à la pratique, certaines lois renferment des éléments qui clochent. C'est inévitable. Il y a donc trois éléments que je voulais commenter tout en étant entièrement d'accord avec le projet de loi.
Le premier est l'effet possible de la renonciation à l'extradition prévue à l'article 72 sur l'adaptation prévue à l'article 96 pour accommoder la loi avec les dispositions de la Loi sur l'immigration. L'article 96 établit une plus haute priorité à la Loi sur l'extradition qu'à la Loi sur l'immigration, pour qu'il n'y ait pas deux procès en même temps.
Les dispositions de l'article 96 supposent qu'une procédure d'extradition peut avoir deux résultats: une libération ou un arrêté d'extradition. C'est très bien. Il est important de souligner que l'arrêté d'extradition s'assortit d'une disposition d'exemption. Lorsque l'infraction pour laquelle on demande l'extradition d'un individu est passible, au Canada, d'une peine d'emprisonnement de plus de 10 ans, l'individu est réputé ne pas être un réfugié aux termes de la Loi sur l'immigration et des procédures d'examen du statut de réfugié. Mes collègues au sein du comité et à la Chambre ont accepté cette disposition.
Même si un individu est réputé ne pas être un réfugié avant l'exécution d'un arrêté d'extradition, le ministre de la Justice évaluera chaque cas à la lumière des formalités relatives aux réfugiés et empêchera que des individus soient extradés dans des pays où ils pourraient s'exposer aux difficultés qui sont définies dans la convention internationale sur les réfugiés.
Quoi qu'il en soit, les deux résultats possibles en vertu de l'article 96 ne tiennent apparemment pas compte des dispositions de renonciation de l'article 72. Les dispositions relatives à l'immigration contenues dans l'article 96 ne permettent apparemment pas à une personne de décider de renoncer à l'extradition. C'est comme s'il n'avait pas été tenu compte de cette possibilité. On pourrait soutenir que c'est un élément qui posera des problèmes pratiques pouvant être réglés dans le cadre des processus prévus. Si des difficultés surgissent, je suis sûr qu'un juge pourra aider les parties à interpréter les dispositions.
Il y a un autre élément que je veux souligner à la Chambre. Avant que le ministre de la Justice ne rende ces décisions, des consultations officielles et officieuses devront avoir lieu entre le ministre de la Justice qui s'occupe des procédures prévues dans la Loi sur l'extradition, le ministre de l'Immigration et de la Citoyenneté et le ministre des Affaires étrangères. Entre ces ministres sont prévus, outre ces consultations, des échanges de renseignements sur le pays qui demande l'extradition, la personne ou les organismes intéressés du pays demandeur.
Or, la mesure législative qui nous occupe fait peu état des renseignements qui sont divulgués à la personne faisant l'objet d'une demande d'extradition, renseignements qui revêtent une très grande importance pour elle. Cela me préoccupe en tant que député qui s'apprête à se prononcer sur ce projet de loi. Selon moi, tous les renseignements mis à la disposition du ministre de la Justice par les ministères des Affaires étrangères et de l'Immigration devraient être communiqués à la personne dont l'extradition est demandée.
Ce principe pourrait ne pas s'appliquer lorsque sont soulevées des questions touchant la sécurité nationale ou d'autres enjeux importants. J'estime toutefois qu'il y a lieu d'insister là-dessus. Je suis sûr que les personnes chargées de l'application de cette loi ne vont pas dissimuler les renseignements dont le ministre de la Justice s'est servi pour rendre des décisions en matière d'extradition conformément à cette mesure législative. Je verrais mal qu'au beau milieu de l'audition d'une demande d'extradition, un citoyen ou un étranger se voit contraint d'invoquer la Loi sur l'accès à l'information.
Mon troisième point a trait au concept d'accord spécifique tel qu'il figure dans le projet de loi. Jusqu'à présent, les pays ont donné suite aux demandes d'extradition dans la mesure où il existait entre eux un traité ou un accord d'extradition. Ce projet de loi prévoit des accords spécifiques au sujet de l'extradition dans un cas entre un pays et le Canada. Cet accord précisera simplement qu'un pays donné souhaite obtenir l'extradition de M. Untel et que le Canada accepte dans le cadre de cet accord spécifique d'extradition pourvu qu'on respecte dans cet accord les critères relativement minimums déjà établis dans la Loi sur l'extradition.
Cet accord spécifique ne sera pas traité comme un accord ou un traité d'extradition. Il ne sera pas publié dans la Gazette du Canada. Il ne sera pas publié dans le Recueil des traités du Canada. Il ne sera pas déposé à la Chambre des communes. Il ne sera publié nulle part. Il sera signé par les deux pays et nommera l'individu en cause.
Je craignais qu'avec le temps, on n'utilise les accords spécifiques en plus grand nombre que les traités d'extradition. Je crois que ce devrait être l'exception à la règle. Il me semble, à partir de la lecture de cette mesure législative, qu'on pourrait même conclure des accords spécifiques pour extrader une personne alors qu'un traité d'extradition existe. Rien ne semble empêcher de conclure un accord spécifique pour extrader une personne même s'il existe déjà un autre traité d'extradition entre les deux pays.
Pourquoi voudrait-on éviter le traité d'extradition? Je n'en suis pas certain, mais parfois, les accords existants régissant des circonstances générales deviennent un peu lourds ou désuets et il est possible que les autorités des deux pays décident qu'il est plus facile de conclure un accord spécifique et d'éviter l'application du traité en vigueur. On utilisera le formulaire B, on le remplira, on l'enverra, on le fera signer, on inscrira le nom de la personne et cela constituera notre accord spécifique, notre moyen d'extrader cette personne. Avec le temps, j'ignore comment cela va évoluer. J'espère simplement que nous n'aurons pas une prolifération des accords spécifiques, mais que nous continuerons plutôt à négocier les traités appropriés et d'autres accords.
Ce sont les trois domaines que je voulais porter à l'attention de la Chambre. Je ne pense pas que ce sont des questions suffisamment importantes pour justifier de proposer des amendements à la Chambre. Je crois que les fonctionnaires qui administrent la loi, les processus mis en place par les nouvelles dispositions permettront une évolution équitable en ce qui concerne ces trois domaines et que la nouvelle loi servira bien les Canadiens et les partenaires du Canada dans l'administration de la justice pénale pendant un autre siècle peut-être, comme la loi précédente l'a fait.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre part à ce débat sur le projet de loi C-40, Loi sur l'extradition.
Cette actualisation de notre législation en matière d'extradition a pour but de rendre plus difficile aux criminels fugitifs de se réfugier au Canada pour se protéger contre la justice d'autres pays et contre le tribunal pénal international.
Notre législation en matière d'extradition date d'il y a environ 120 ans. Elle ne nous permet pas d'extrader des criminels fugitifs afin qu'ils répondent de leurs actes devant une instance comme le Tribunal international des crimes de guerre de La Haye ou le Tribunal pénal international pour le Rwanda.
Depuis quelques années, l'une de nos juges, Mme Louise Arbour, de la Cour d'appel de l'Ontario, agit à titre de procureure générale du Tribunal. Nous n'avons jamais été capable de remplir l'obligation que nous avons de veiller à ce que les criminels de guerre soient traduits en justice. La performance catastrophique du Canada dans ce domaine ne devrait pas, je suppose, nous étonner. Le fait que cet endroit ait débattu du projet de loi C-42 en 1996 pour permettre à la juge Arbour de travailler légalement pour les tribunaux des crimes de guerre et que nous essayons seulement maintenant de nous assurer que le Canada soit légalement en mesure de contribuer aux objectifs de ces tribunaux montre combien l'ordre des priorités du gouvernement est à l'envers.
C'est malheureux que Madame le Juge Arbour soit là-bas. Elle a peut-être quelque chose à voir dans cette tentative du gouvernement de mettre en place une procédure adéquate. C'est elle qui a dit que la loi canadienne laissait beaucoup à désirer et qu'à son avis, une structure devait être mise en place pour éviter qu'un pays comme le Canada ne se trouve dans une situation terriblement embarrassante.
Le gouvernement et ses doreurs d'images sont les seuls à avoir le toupet de promouvoir et d'appuyer des organes internationaux comme les tribunaux chargés de juger les crimes de guerre alors qu'ils n'ont pas le pouvoir d'extrader les criminels fugitifs pour qu'ils soient traduits devant ces tribunaux.
Nous ne pouvions extrader vers d'autres pays que si nous avions des accords bilatéraux et encore seulement pour des infractions précises.
Pour être juste, il faut dire que d'autres pays étaient dans le même cas, mais il y a longtemps qu'ils ont adopté des mesures correctives. Une fois de plus, ce gouvernement a mis du temps à réagir et il est maintenant déphasé par rapport au reste du monde.
Même les responsables fédéraux pensent qu'il y a plus de trois cents criminels de guerre modernes au Canada. Ils estiment que nous sommes un refuge pour d'anciens membres d'escadrons de la mort, d'anciens tortionnaires et d'anciens membres de régimes corrompus et meurtriers comme ceux de Somalie, de Bosnie, d'Iraq, d'Afghanistan, d'Haïti, d'Éthiopie, du Guatemala, du Rwanda et du Salvador.
Normalement, nous avons été prompts à répondre aux demandes d'aide humanitaire venant de la plupart de ces lieux de conflit et c'est certainement une chose admirable. Mais on peut nous reprocher, à tous autant que nous sommes, de permettre que le Canada devienne un refuge pour les criminels de guerre.
Il y a une disposition dans ce projet de loi qui est une bonne nouvelle. Je crois comprendre que si un arrêté d'extradition a été pris contre un demandeur du statut de réfugié, cette personne sera déclarée inadmissible et l'extradition pourra se faire immédiatement. Autrement dit, l'arrêté d'extradition aura préséance sur la demande de statut de réfugié. Cela évitera que les personnes dont l'extradition est demandée ne présentent des demandes bidon de statut de réfugié, lesquelles peuvent prendre des années à étudier en raison de tous les niveaux d'appel disponibles.
Cette disposition du projet de loi C-40 rendra le processus d'extradition plus efficace et moins sujet aux abus. Le juge chargé de la demande d'extradition étudiera la revendication du statut de réfugié en tenant compte de l'arrêté d'extradition.
La décision finale revient bien sûr au ministre, mais j'y reviendrai plus tard. Malheureusement, cette disposition ne s'applique que dans les cas où le délit qui justifie la demande d'extradition est punissable par au moins 10 ans d'incarcération en vertu des lois canadiennes.
C'est regrettable parce que nos propres criminels nous causent déjà suffisamment de problèmes. Nous devrions voir à ce qu'il n'y ait pas davantage de failles pouvant donner l'occasion à des gens qui arrivent au Canada d'abuser de notre système.
Je passerai maintenant à quelques-unes des mes préoccupations principales à l'égard de cette mesure législative. Je m'inquiète des frais et des retards. Là encore, le gouvernement semble avoir tout fait pour créer du travail pour les avocats.
Les avocats auront certainement beaucoup d'occasions de consacrer des heures et des heures à la préparation d'arguments juridiques. Notre Charte des droits et libertés ainsi que l'obligation pour le juge de s'assurer que l'acte reproché aurait été de nature à faire traduire son auteur devant la justice canadienne s'il avait été commis au Canada y veilleront. Comme nous le savons tous trop bien, c'est souvent le contribuable qui finit par payer la note d'un bon nombre de ces avocats.
Les procès que nous avons tenus contre des criminels de guerre ont montré combien il est difficile de recueillir suffisamment de preuves pour tenir un procès au Canada. Ils ont aussi montré que notre système n'est pas du tout efficace pour examiner des éléments de preuve historiques ou provenant de l'étranger. Le projet de loi ne fait rien pour améliorer la situation.
Les parties de la mesure législative qui permettent au ministre d'intervenir me préoccupent aussi. Tout cela entraîne également des coûts et des retards. Le ministre peut décider de ne pas prendre d'arrêté d'extradition, même après l'audience d'extradition et tous les coûts et les retards que cela implique, et même une fois que le juge a décidé de rendre une ordonnance d'incarcération en vue d'une extradition.
Une fois que toute l'affaire a fait l'objet d'une décision, le ministre peut refuser d'autoriser l'extradition. Pourquoi dépenserions-nous des milliers, voire des centaines de milliers de dollars si, à la fin du processus, le ministre opte pour une solution politique?
Aux termes de l'article 44 du projet de loi, le ministre peut refuser l'extradition pour trois raisons, la première étant qu'il juge l'extradition injuste ou tyrannique. Je ne vois pas pourquoi cette décision relèverait du ministre. Le juge pourrait certainement, durant l'audience d'extradition, statuer sur cet aspect en se fondant sur la déposition. Il s'agit là d'un cas d'immixtion du pouvoir politique dans le processus judiciaire.
Le ministre peut également refuser l'extradition s'il est convaincu que la demande d'extradition est présentée dans le but de poursuivre ou de punir l'intéressé pour des motifs fondés sur la race, la nationalité, l'origine ethnique, la langue, la couleur, la religion, les convictions politiques, le sexe, l'orientation sexuelle, l'âge, le handicap physique ou mental ou le statut de l'intéressé, ou qu'il pourrait être porté atteinte à sa situation pour l'un de ces motifs.
Là encore, le ministre intervient dans le processus judiciaire. Les tribunaux canadiens statuent tous les jours dans des cas de discrimination fondés sur ces motifs. Après avoir entendu les dépositions, les juges décident s'il y a discrimination et, par conséquent, injustice. Pourquoi faudrait-il priver les juges de ce pouvoir et le remettre aux mains du ministre? Qu'est-ce qui justifie cette ingérence politique dans le processus judiciaire?
Troisièmement, le ministre peut refuser d'extrader une personne s'il est convaincu que les actes à l'origine de la demande d'extradition sont sanctionnés par la peine capitale en vertu du droit applicable par le partenaire. Cette disposition confère un pouvoir discrétionnaire au ministre, dans la mesure où ce dernier «peut» refuser. Dans le cas des deux premiers motifs de refus, le texte ne laisse aucune discrétion au ministre, puisqu'il stipule que ce dernier «refuse».
Je fais humblement remarquer que ce troisième motif permet rien de moins qu'une ingérence dans des champs de compétence qui ne sont pas les nôtres. Les pays n'ont pas tous les mêmes lois. Leurs cultures, comme leurs institutions politiques, varient. Il ne nous appartient pas de dire aux autres pays que nous refuserons de leur renvoyer des accusés parce que nous ne sommes pas d'accord avec la façon dont ils sanctionnent les actes criminels. De quel droit pouvons-nous nous opposer aux lois que d'autres pays adoptent, souvent de façon démocratique?
Je vais donner quelques exemples de problèmes causés par l'ingérence ou le refus d'accepter les lois d'autres pays. Sans donner de noms, je dirai que nos tribunaux sont actuellement saisis d'une affaire dans laquelle le Canada refuse d'extrader aux États-Unis deux personnes accusées de meurtre. L'État intéressé peut imposer la peine de mort si ces personnes sont reconnues coupables. Notre refus s'explique en fait par un désaccord entre la loi canadienne qui interdit la peine capitale et la loi d'autres pays qui croient que la peine capitale est une option appropriée pour les meurtriers.
Je ne commenterai pas beaucoup le sujet de la peine capitale. J'ai peu de temps, et ce n'est pas le sujet du débat d'aujourd'hui. Je ne commenterai pas non plus le fait que la majorité des Canadiens sont d'avis que la plupart des meurtres devraient entraîner la peine de mort. Nous savons tous que les libéraux sont responsables de la suppression de la peine capitale. Ils essaient maintenant d'imposer leur point de vue à tous les pays du monde. C'est inacceptable.
Une autre affaire que je ne nommerai pas non plus, puisqu'elle est actuellement devant les tribunaux, met en cause un individu dans la soixantaine qui se cachait parmi nous et qui pourrait purger plus de 100 ans de prison pour avoir commis plusieurs actes criminels reliés au monde des affaires. Il a déjà été reconnu coupable, et sa peine a été déterminée. En vertu des dispositions du projet de loi C-40, une audition de la demande d'extradition pourrait très bien mener à la conclusion que cet individu doit être extradé. Cela risque de devenir coûteux et complexe. C'est toujours le ministre qui conserve le pouvoir au bout du compte. En vertu du paragraphe 44(1) du projet de loi, le ministre peut décider que l'extradition est injuste ou tyrannique parce que nous n'avons pas coutume d'imposer des peines aussi longues au Canada. Il s'agit encore une fois d'un ressortissant des États-Unis.
Le Président: Il vous reste 11 minutes, et je ne veux pas vous presser de conclure. Vous aurez donc de nouveau la parole à la fin de la période des questions, quand rien ne pressera. Nous passons maintenant aux déclarations de députés.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LA SOCIÉTÉ ALLELIX BIOPHARMACEUTICALS INC.
M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je souligne le rôle essentiel joué par une firme de ma circonscription dans l'étude sur le vieillissement avec la participation de l'astronaute chevronné, John Glenn, pendant sa récente mission à bord de la navette spatiale.
En collaboration avec l'Agence spatiale canadienne, la société Allelix Biopharmaceuticals Inc., située dans ma circonscription, Bramalea—Gore—Malton—Springdale, a participé directement à l'une des trois expériences sur l'ostéoporose qui ont été faites pendant la mission.
C'est donc avec grand plaisir qu'aujourd'hui je félicite Allelix et l'Agence spatiale canadienne pour avoir collaboré à cet intéressant projet.
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L'AGENTE LAURIE WHITE
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, aujourd'hui, jour de ses 29 ans, Laurie White, gendarme de la GRC, gît dans un lit d'hôpital à Vancouver.
Vendredi après-midi, à Kitimat, en Colombie-Britannique, Laurie White, en compagnie de gendarmes de son détachement, s'apprêtait à effectuer une perquisition au domicile d'un individu soupçonné de délits sexuels. Alors qu'elle s'approchait de la résidence du suspect, ce dernier a tiré sur le gendarme White, la blessant grièvement. Elle fut transportée par hélicoptère à Vancouver où les chirurgiens tentèrent pendant des heures, mais en vain, de sauver sa jambe.
Quand des jeunes décident qu'ils ont la vocation d'être policiers, ils savent qu'ils risquent un jour d'être grièvement blessés, ou même pire, dans l'exercice de leurs fonctions. Cela n'en rend pas moins choquants les événements de vendredi.
Nous sommes chaque jour reconnaissants aux agents de police qui servent et protègent le public au risque de leur vie. Nous sommes choqués et profondément attristés quand nous apprenons que l'un d'eux a été abattu dans l'exercice de ses fonctions.
Nous sommes fiers de l'agente White. Je demande à la Chambre et à tous les Canadiens de se joindre à moi pour lui offrir nos meilleurs voeux de prompt rétablissement en ce jour où elle célèbre son anniversaire.
Des voix: Bravo!
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LA SEMAINE NATIONALE DE LA SÉCURITÉ-INCENDIE CHEZ SOI
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): La Semaine nationale de la sécurité-incendie chez soi a lieu du 24 au 30 novembre. Cette semaine, parrainée par le Conseil canadien de la sécurité, souligne l'importance des détecteurs de fumée dans tous les foyers canadiens.
La plupart des incendies mortels prennent naissance la nuit, lorsque la maisonnée est endormie. Comme la fumée provenant d'un incendie peut entraîner un sommeil encore plus profond, il est extrêmement important de vérifier régulièrement que tous les détecteurs de fumée fonctionnent bien.
Les Canadiens commencent à s'apercevoir que les détecteurs de fumée sauvent des vies. La plupart des ménages canadiens possèdent maintenant au moins un de ces dispositifs. Il importe donc, tout au long de l'année et, particulièrement, au cours de cette semaine, que tous les Canadiens en profitent pour se sensibiliser à cette question cruciale. J'exhorte tous les Canadiens à se rappeler la phrase thème de cette semaine: «Êtes-vous sûr que votre détecteur de fumée fonctionne?»
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LE MOIS DE LA SENSIBILISATION AU DIABÈTE
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui marque la dernière journée du Mois de la sensibilisation au diabète. Toutes les huit minutes, on diagnostique cette maladie chez un Canadien.
Le diabète est une cause principale de décès prématuré, de cécité, de maladie du rein et d'accident cérébrovasculaire. Il est également une cause principale des maladies cardiaques prématurées chez les femmes. Le diabète tue deux fois plus de femmes que le cancer du sein.
Le diabète s'accentue avec l'âge et touche plus de 10 p. 100 des Canadiens de plus de 65 ans.
À Kitchener et dans les environs, on estime que 5 p. 100 de la population souffre du diabète.
Cette maladie peut frapper n'importe qui. Elle touche ma propre famille.
Je tiens à exprimer mes meilleurs voeux et mes remerciements à l'association de Kitchener-Waterloo, qui a atteint son objectif de 30 000 $.
La recherche sur le diabète connaît un élan renouvelé et suscite un nouveau sentiment d'urgence qu'il faut trouver un remède. On réalise actuellement des progrès.
Avec les efforts de l'Association canadienne du diabète et de tous les Canadiens, nous trouverons un remède pour Megan Fitzpatrick et les 1,1 million de diabétiques au Canada.
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FEU CASEY SMITH
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, mercredi dernier, le 25 novembre, Casey Smith, entraîneur bien aimé de l'équipe de football de l'Université de la Colombie-Britannique, les Thunderbirds, est décédé des suites du cancer à 39 ans.
Avant de suivre les traces de son père, Frank Smith, qui était entraîneur des Thunderbirds de l'Université de la Colombie-Britannique lorsque ceux-ci ont remporté la coupe Vanier en 1982 et en 1986, Casey Smith avait joué plusieurs années pour cette équipe.
Casey Smith avait pour le sport une véritable passion qu'il partageait volontiers avec les autres. Son courage au cours des derniers mois de sa vie ont été une source d'inspiration pour les joueurs de son équipe. Il sera beaucoup regretté.
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LES HUSKIES DE L'UNIVERSITÉ DE LA SASKATCHEWAN
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, les Huskies, l'équipe de football de l'Université de la Saskatchewan, peuvent maintenant être déclarés l'équipe canadienne de football des années 1990.
Les Huskies ont remporté leur troisième coupe Vanier au SkyDome samedi dernier en défaisant l'équipe talentueuse de l'Université Concordia.
Les Huskies dominent le football universitaire canadien depuis de nombreuses années. L'entraînement professionnel, la loyauté envers l'équipe et, par-dessus tout, la tradition que l'on a en Saskatchewan de ne jamais renoncer devant des conditions défavorables ont permis à l'équipe de s'illustrer.
Nous félicitons les équipes de football universitaire canadien. La tradition continue de croître et les Canadiens d'un océan à l'autre apprécient le dévouement et l'esprit d'équipe des jeunes joueurs de football.
Encore une fois, je félicite les Huskies de l'Université de la Saskatchewan, l'équipe de football des années 1990.
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LE DÉCÈS DU PÈRE DAVID JOHN CORKERY
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, toute la communauté catholique de la région d'Ottawa-Carleton est aujourd'hui en deuil, à la suite du décès du père David John Corkery.
Même s'il a été honoré pour son apport important à l'Église, il restait tout simplement le père Corkery pour bon nombre d'entre nous qui l'ont côtoyé pendant la majeure partie de notre vie adulte.
Ceux qui ont servi la messe à ses côtés lorsqu'il venait d'être ordonné se souviendront qu'il ne fallait jamais le bousculer, parce que, pour lui, chaque célébration de la messe était une façon importante d'exprimer sa foi.
Tout au long de sa vie parmi nous, il a réellement été un homme plein de bonté, humble et gentil. C'est avec le sentiment d'avoir perdu un proche que nous lui disons adieu et que nous offrons à sa famille, à ses amis et à ses paroissiens, nos plus sincères condoléances.
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[Français]
LA CRISE FINANCIÈRE DANS LE SECTEUR AGRICOLE
M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, de nombreux agriculteurs canadiens font maintenant face à une grave crise financière. Outre les producteurs céréaliers des Prairies, les producteurs de porcs, notamment ceux de ma circonscription, sont particulièrement éprouvés. Ces événements me rappellent la crise agricole qui a sévi en Ontario au début des années 1980.
Je comprends les angoisses des agriculteurs et ce que de telles difficultés peuvent causer. Une crise agricole met en péril les entreprises agricoles familiales canadiennes et a un impact négatif considérable sur toute l'industrie agroalimentaire.
[Traduction]
Cette crise nous oblige à examiner non seulement les solutions à long terme aux problèmes auxquels les agriculteurs sont confrontés, mais aussi, et surtout, à travailler en collaboration avec les milieux agricoles, afin de trouver une solution à court terme pour surmonter la crise.
Je répète que mes collègues libéraux et moi-même sommes en faveur de l'adoption d'une solution adéquate et dans les plus brefs délais aux besoins des agriculteurs.
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LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, le week-end dernier, la conférence des Nations Unies sur les droits de la personne a eu lieu à Edmonton, alors que se déroulait, dans la même ville, un sommet autochtone organisé par un nouveau groupe qui défend les intérêts des simples autochtones et qui s'appelle Aboriginals for Accountability.
Alors que la ministre de la Justice a parlé des droits de la personne pour la forme, lors de l'événement bien en vue, les simples autochtones du Canada ont dressé la liste des droits de la personne qui leur sont refusés par leurs dirigeants, par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et par le gouvernement actuel.
Parmi les droits qui leur sont refusés, mentionnons la liberté d'expression ainsi que le droit de ne pas être persécuté pour ses opinions politiques ni en raison de sa race. Les autochtones sont privés de ces droits par leurs dirigeants et par des non-autochtones.
Ils ont aussi parlé de leurs conditions de vie pitoyables, de la piètre qualité des soins de santé qui leur sont dispensés et des emplois qui sont accordés aux amis et aux parents des chefs de bandes.
Le gouvernement actuel ferme les yeux sur ces problèmes depuis des années. La situation se détériore. De toute évidence, le gouvernement parle beaucoup plus qu'il n'agit.
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LES AGRICULTEURS DU CANADA
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, à cause d'une offre nettement excédentaire, d'une faible demande et de subventions par les pays étrangers qui accentuent davantage la distorsion du marché, les éleveurs vendent leurs porcs à des prix qui correspondent à peu près à la moitié du coût de production.
C'est un problème complexe qui ne se règle pas aisément. D'ailleurs, au cours des audiences du comité de l'agriculture, cinq témoins feront valoir cinq solutions différentes.
Comme de nombreux agriculteurs de ma circonscription me l'ont dit, ils veulent une solution qui soit équitable, qui soit juste partout au Canada, qui ne serve pas à renflouer les entreprises mal gérées, mais qui reconnaisse pleinement les effets dévastateurs de la chute des prix. Notre filet de sécurité est conçu de manière à permettre aux agriculteurs de faire face aux fluctuations normales des prix, mais pas à une crise de cette ampleur.
Nous exhortons le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire ainsi que ses homologues provinciaux et les producteurs à aider l'industrie à traverser cette crise en pensant aux intérêts du contribuable canadien.
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LES LÉSIONS CÉRÉBRALES
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, chaque année en Nouvelle-Écosse, plus de 1 200 personnes sont victimes de lésions cérébrales. Les suites directes de ces tragédies vont de l'affaiblissement physique marqué au traumatisme cognitif, tel que la perte de mémoire et les troubles du jugement, en passant par des modifications du comportement et des troubles psychologiques, incluant la dépression et un changement dramatique de personnalité. De plus, 12 p. 100 des victimes de lésions cérébrales ne peuvent jamais plus vivre seules ou être autonomes. Une victime sur cinq ne peut retourner sur le marché du travail.
Le gouvernement a le devoir et la responsabilité de faire tout en son pouvoir pour ne pas empirer la situation. Il doit examiner attentivement ses politiques en matière de santé, les dispositions sur la retraite, y compris le RPC, et les questions de justice susceptibles d'avoir un effet sur la lutte que livrent les victimes de ces lésions.
En terminant, je voudrais féliciter l'association de la Nouvelle-Écosse en faveur des victimes de lésions cérébrales pour ses efforts continus.
* * *
[Français]
LA PLAQUETTE INFO MEDIC WATCH
Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, il y a beaucoup d'ingéniosité dans ma circonscription de Saint-Bruno—Saint-Hubert.
En effet, une résidante de Saint-Hubert a inventé un produit nommé Info Medic Watch. C'est à Louise Dodier que l'on doit cette invention. Ce bijou se veut une alternative pour les personnes qui doivent porter un bracelet destiné à prévenir, en cas d'urgence, qu'elles souffrent d'une allergie aux médicaments ou d'une maladie nécessitant des précautions particulières, tel l'épilepsie ou le diabète.
Le produit Info Medic consiste en une pièce fabriquée en or ou en argent qui s'attache solidement au bracelet des montres. À l'endos de cette plaquette, les renseignements médicaux concernant la personne y sont gravés. Plus de 80 bijoutiers au Canada offrent cette invention québécoise.
Je tiens à féliciter Mme Dodier pour sa réussite et lui souhaite encore beaucoup de succès.
* * *
[Traduction]
LA LOI SUR LES ARMES À FEU
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, le règlement d'application de la loi mal conçue que le gouvernement libéral a fait adopter concernant les armes à feu entrera en vigueur au Canada à compter de demain.
Malgré l'absence de preuves que la loi du gouvernement permettra de réduire la criminalité, malgré les coûts de mise en place d'une nouvelle bureaucratie qui grimpent en flèche et malgré le fait que quatre provinces et deux territoires contestent la loi devant la Cour suprême, le gouvernement libéral va de l'avant à pleins gaz. Pire encore, les libéraux ont dépensé insidieusement l'argent des contribuables pour faire subrepticement la promotion de la Loi sur les armes à feu en assurant qu'il s'agit d'une mesure de réduction de la criminalité alors qu'il serait plus juste d'en parler comme de la loi du faux espoir.
Le gouvernement a pourtant la possibilité de se retirer de cette entreprise futile et coûteuse. Aussi bien intentionnée que puisse être cette loi, on devrait se concentrer sur de véritables initiatives de prévention de la criminalité et de lutte contre la criminalité, en s'attaquant aux causes profondes de la criminalité, en améliorant les systèmes informatiques d'enquête des services canadiens de police, en mettant en place une banque de données génétiques et en attribuant plus de ressources aux services de police de première ligne. Rétablissons l'ordre des priorités et abandonnons dès maintenant cette mesure coûteuse.
* * *
[Français]
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DE L'HÉMOPHILIE
M. Réginald Bélair (Timmins—Baie-James, Lib.): Monsieur le Président, le mois de novembre a été le Mois de l'hémophilie.
Celle-ci est un trouble de la coagulation du sang qui frappe environ un individu mâle sur 5 000. Le tiers de tous les nouveaux cas d'hémophilie survient dans des familles qui n'ont aucun antécédent de cette maladie.
La Société canadienne de l'hémophilie offre du soutien et des services aux Canadiens et Canadiennes qui sont aux prises avec cette maladie ainsi qu'à leurs soignants. Elle sensibilise également le public et les professionnels à cette affection et encourage le soutien par les pairs dans la communauté hémophile.
En 1998-1999, Santé Canada a versé la somme de 50 000 $ à la Société canadienne de l'hémophilie afin de l'aider à développer ses services à l'avenir. Elle est également très active sur la scène nationale où elle milite en faveur d'un approvisionnement en produits sanguins sûrs au Canada.
Je vous prie de vous joindre à moi pour féliciter la Société canadienne de l'hémophilie pour son travail inlassable auprès de ces malades.
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LA COLLECTE DE DENRÉES DES STAGIAIRES PARLEMENTAIRES
M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, environ 120 000 personnes de la région d'Ottawa ont un revenu inférieur au seuil de la pauvreté et environ 35 000 d'entre elles ont recours à une aide alimentaire chaque mois. Près de la moitié des personnes qui bénéficient de l'aide alimentaire sont des enfants.
Pour aider ces personnes dans le besoin pendant la période des Fêtes, les stagiaires parlementaires ont décidé d'organiser une collecte de denrées. Celle-ci aura lieu du 30 novembre au 11 décembre. Des boîtes qui serviront à recueillir ces aliments non périssables seront placées dans les cafétérias des édifices du Centre, de l'Est, de l'Ouest, Wellington et Confédération.
Les stagiaires parlementaires iront également rendre visite au personnel dans les bureaux, afin de leur rappeler la tenue de cette collecte, pour recueillir des aliments et de l'argent pour la Banque alimentaire de l'Outaouais et d'Ottawa-Carleton.
De nombreuses familles comptent sur nous et nous comptons sur la générosité de tous et toutes.
* * *
[Traduction]
LES INSTITUTIONS FINANCIÈRES
M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Monsieur le Président, je suis au nombre des 54 députés et sénateurs qui ont signé le rapport publié récemment par le groupe de travail du caucus libéral national, intitulé «A Balance of Interests». Je trouve maintenant révoltant de faire l'objet de lettres d'intimidation qui me sont adressées par des cadres des banques.
Les auteurs de ces lettres allèguent que, en ayant signé ce rapport, en tant que membre du Comité permanent des finances, je suis maintenant en conflit d'intérêts et devrais démissionner.
Je ne veux pas justifier mes actes en quoi que ce soit. Je dirai cependant que, tout comme mes collègues, j'ai signé le rapport parce qu'il reflétait très fidèlement, à notre avis, les points de vue des Canadiens ordinaires, hommes et femmes, qui sont les principaux actionnaires des banques et du Canada.
Cela ne veut absolument pas dire que nous ne sommes pas ouverts à d'autres suggestions ou que nous n'écouterons pas d'autres arguments qui seront présentés dans les intérêts bien compris de tous les Canadiens.
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NETHERLANDS MILLS
M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, les travailleurs canadiens croient pour la plupart qu'ils contribuent à la caisse d'assurance-emploi en prévision de futures interruptions de travail, baisses de cadence et diminutions de traitement.
Toutefois, on ne convaincra pas de cela les employés de la société Netherlands Mills, à Prince George. Ceux-ci viennent de voir leur programme de supplément de revenu arbitrairement annulé par le gouvernement en dépit d'une promesse que ce programme durerait jusqu'en mars 1999.
Quel cadeau de Noël de la part du gouvernement libéral!
Non seulement les libéraux vont écumer l'excédent de 7 milliards de dollars de la caisse d'assurance-emploi, mais ils reviennent sur leur promesse aux travailleurs de la scierie de la Netherlands Mills à Prince George.
Ces travailleurs seront à court d'argent à Noël, mais il est à parier qu'il ne manquera pas de dindes au party de Noël des libéraux, cette année.
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LE CONTRÔLE DE LA CIRCULATION AÉRIENNE AU YUKON
Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Monsieur le Président, lorsque la société Navigation Canada a été privatisée, le ministre a promis qu'il n'y aurait aucune réduction de services.
Toutefois, la seule tour de contrôle de la circulation aérienne du Yukon sera fermée par suite de cette privatisation. Cela laissera tous les employés sans travail et les voyageurs aussi bien que les travailleurs de la circulation aérienne vulnérables aux accidents.
D'une façon ou d'une autre, le gouvernement libéral a réduit les services de base dans le Nord tels que les alertes d'inondation. La station de modification du temps n'existe plus, pas plus que l'initiative L'école avant tout, et voici que la tour de contrôle de la circulation aérienne sera fermée.
Je veux faire savoir au gouvernement que nous voulons la ravoir.
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LE CHINESE CULTURAL CENTRE DE VANCOUVER
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai participé vendredi à la célébration du 25e anniversaire du Chinese Cultural Centre de Vancouver. Cet organisme de Vancouver construit depuis 25 ans avec succès des ponts de compréhension et d'échange interculturel en Colombie-Britannique.
J'ai eu l'honneur de remettre à cet organisme une subvention de 250 000 $ pour la construction d'un théâtre dans ses nouvelles installations de 3,7 millions de dollars. La subvention a été octroyée dans le cadre du programme fédéral-provincial de modernisation des infrastructures qui a financé la réalisation de plus de 400 projets évalués à 675 millions de dollars et qui a créé plus de 9 000 emplois.
Toutes mes félicitations au Chinese Culture Centre pour sa célébration de la diversité canadienne!
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LA SANTÉ
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, les infirmiers et infirmières dans 41 hôpitaux de la Colombie-Britannique menacent de faire la grève, et des centaines d'interventions chirurgicales ont dû être retardées. Leur syndicat dit que la province a besoin d'au moins 1 400 infirmiers et infirmières pour répondre à la demande en soins de santé, et la province dit qu'elle n'a pas les moyens d'en avoir plus de 600 à cause des réductions dans les transferts fédéraux au titre des soins de santé.
N'est-il pas vrai que chacune des provinces canadiennes éprouve des difficultés dans le secteur des soins de santé à cause des politiques du gouvernement actuel dans ce domaine?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a dit clairement que notre prochain réinvestissement majeur sera dans le secteur des soins de santé, et ce sera effectivement le cas.
Les problèmes que le député a mentionnés sont entre la province et les syndicats représentants le personnel infirmier. C'est à la Colombie-Britannique de déterminer quelles sont ses priorités en ce qui concerne ses relations avec les syndicats représentant le personnel infirmier.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, près de 200 000 Canadiens sont sur des listes d'attente, et maintenant, à cause de cette menace de grève des infirmiers et infirmières en Colombie-Britannique, des milliers d'autres doivent attendre.
Le gouvernement semble croire que les malades et tous les Canadiens se laisseront duper par l'argument selon lequel les utilisateurs du système de soins de santé sortiront gagnants si le gouvernement réinvestit 2 milliards de dollars dans ce secteur après avoir réduit les paiements de transfert de 7 milliards de dollars. C'est un tour de passe-passe qui ne marche tout simplement plus avec les Canadiens.
N'est-il pas vrai que le véritable bilan du gouvernement dans le secteur des soins de santé se solde par des fermetures d'hôpitaux, des listes d'attente, des grèves et maintenant une pénurie de médecins et d'infirmières?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, il est vrai que nous avons dû faire des réductions dans tous les programmes, mais il ne faut pas oublier qu'il y a eu en même temps une augmentation des points d'impôt. Grâce à nos politiques budgétaires prudentes, nous avons été capables de maintenir les taux d'intérêt à un niveau beaucoup plus bas qu'auparavant, ce qui a donné aux provinces une marge de manoeuvre beaucoup plus grande. Nous avons augmenté les transferts de 1,5 milliard de dollars afin de protéger le système de soins de santé.
S'ils examinent la situation, les députés verront que les provinces ont réduit leur contribution aux soins de santé plus que le gouvernement fédéral...
Le Président: Le chef de l'opposition.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, c'est un tour de passe-passe. En 1993, lorsque les libéraux ont accédé au pouvoir, le gouvernement fédéral assumait 16 p. 100 du coût des soins de santé en Colombie-Britannique. Aujourd'hui, sa contribution n'est plus que de 10 p. 100. Les listes d'attente des hôpitaux n'ont jamais été aussi longues, et elles continueront de s'allonger en Colombie-Britannique.
Ma question s'adresse à quiconque peut me répondre. Le gouvernement ne voit-il pas le lien entre ses politiques en matière de soins de santé et la détérioration des soins de santé dans toutes les provinces du Canada?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, nous sommes prêts à accepter notre part de responsabilité pour toute réduction dans le secteur des soins de santé, mais soyons bien clair. Nos réductions dans ce secteur ont été de 1,5 p. 100, ce qui est très peu lorsqu'on considère que les dépenses globales au titre des soins des santé atteignent environ 80 milliards de dollars par année.
Oui, nous sommes prêts à accepter notre part de responsabilité à un moment où nous avons dû faire des compressions budgétaires à cause du terrible gâchis que nous avons hérité, mais nous n'acceptons pas de porter le blâme pour toutes les coupes...
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, la Colombie-Britannique a augmenté ses dépenses en santé pour la septième année consécutive. Elle tente de réparer le gâchis causé par le gouvernement fédéral.
Qu'a fait le premier ministre à propos de ces hausses de coûts? Il vient d'admettre que c'est en partie sa faute. Les transferts à la Colombie-Britannique sont passés de 16 à 10 p. 100.
Or, il était une fois, dans un conte de fées, des libéraux qui ont promis de ne jamais payer moins que 50 p. 100 des coûts de santé de la Colombie-Britannique et de toute autre province.
Pourquoi le premier ministre a-t-il insulté tous les Britanno-Colombiens, leur gouvernement provincial, les infirmières et tous les patients qui attendent de se faire soigner?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens partagent les préoccupations de notre gouvernement pour l'état des soins de santé au pays et c'est pourquoi, en dépit de très difficiles circonstances, nous avons insisté pour accroître la portion du TCSPS représentée par les versements au comptant.
Nous avons créé le TCSPS afin de protéger les principes de la Loi canadienne sur la santé. C'est notre parti qui s'est fermement opposé à toute érosion des principes de la Loi canadienne sur la santé et c'est le vôtre qui a plutôt choisi de...
Le Président: Chers collègues, je vous prie de vous adresser la parole par l'entremise de la présidence.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, les paiements sont passés de 50 à 10 p. 100. Voilà l'érosion dont est responsable le gouvernement.
Les libéraux ont complètement ravagé le régime des soins de santé. Ils ont fait fermer des milliers de lits dans les hôpitaux. Ils ont abandonné des milliers de victimes de l'hépatite C. Quelque 200 000 personnes figurent sur les listes d'attente. Ce ne sont pas ces gens-là qui font les manchettes.
Voilà le résultat des compressions de 7 milliards de dollars du premier ministre dans la santé. C'est le premier ministre qui est responsable de ce gâchis. Comment va-t-il le réparer, et quand?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, je voudrais simplement dire quelques mots au sujet de nos engagements en matière de santé.
Depuis notre arrivée au pouvoir, en dépit d'une situation financière très difficile, nous avons prévu le versement de 65 millions de dollars, sur cinq ans, au fonds de recherche en matière de services de santé; le versement de 150 millions de dollars, sur trois ans, au Fonds de transition en matière de santé; le versement de 50 millions de dollars, sur trois ans, au Système canadien d'information sur la santé; le versement de 35 millions de dollars à la mission canadienne de lutte contre le cancer du sein; le versement de 45 millions de dollars à l'initiative visant la santé des autochtones; et le versement de quelque 200 millions de dollars, sur deux ans, à des initiatives d'assurance-dentaire privée.
* * *
[Français]
LA POLITIQUE DU DÉGLAÇAGE
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier du déglaçage, le ministre a affirmé, il y a deux semaines, qu'il avait accepté les barèmes proposés par la Garde côtière.
Depuis, il est confronté jour après jour avec les incohérences et les iniquités de cette grille tarifaire, si bien que la semaine dernière, il a fini par dire que sa décision n'était pas prise et qu'une nouvelle grille était à l'étude.
Puisque cette nouvelle tarification doit entrer en vigueur d'ici à trois semaines, et que de toute évidence, le ministre n'est pas prêt, la décision la plus sage ne serait-elle pas de décréter un moratoire pour lui permettre de finir ses devoirs?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, peut-être que l'honorable député n'a pas écouté clairement, mais je n'ai eu aucun changement de position.
J'ai dit, dès le commencement, qu'il y avait en place un barème de droits et que nous allons le réexaminer après les interventions de l'industrie. L'industrie a fait des contre-propositions et nous sommes en train de les lire.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, je n'ai pas fait que l'écouter, j'ai pris le temps de le lire, parce que ce n'est pas toujours clair quand il parle.
Que retrouve-t-on dans le hansard du 17 novembre? Je cite:
Ils ont proposé un barème de droits. Nous l'avons accepté. C'est exactement de cette façon que c'est arrivé.
Est-ce qu'il pourrait nous dire clairement s'il disait vrai le 17 novembre, ou s'il dit vrai aujourd'hui, ou la semaine prochaine? Quand va-t-on savoir ce qu'il dit, si, par hasard, il le sait lui-même?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, ce que je dis aujourd'hui, c'est exactement ce que j'ai dit pendant plusieurs semaines. On est en train d'examiner les contre-propositions de l'industrie. Je peux vous assurer que même l'industrie n'a pas proposé un moratoire sur les droits.
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier du déglaçage, cela fait six mois que le ministre a rendu public son nouveau barème de tarification. Deux semaines avant l'ajournement des travaux de la Chambre et trois semaines avant l'entrée en vigueur de cette tarification, il nous déclare tout simplement qu'il est en train d'étudier une nouvelle proposition de grille tarifaire.
Le ministre est-il en train de nous refaire le même scénario qui se répète à chaque fois que le gouvernement a un mauvais coup à commettre, c'est-à-dire de faire une annonce inacceptable une fois que la session est terminée pour éviter qu'on ne le questionne à ce sujet?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le préambule de l'honorable députée contient la même erreur que l'on retrouvait dans le préambule de l'autre député du Bloc québécois qui a pris la parole à ce sujet.
Il n'y a aucun changement de position. Nous avons reçu une proposition de barème de droits qui a été établie par un comité de l'industrie. Nous examinons maintenant une contre-proposition qui nous a été fournie il y a deux semaines. On l'examine, et aussitôt que nous aurons pris une décision, nous allons la communiquer.
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, il y a quand même des limites. Je vais citer le hansard du 17 novembre 1998 où le ministre disait:
Ils ont proposé un barème de droits. Nous l'avons accepté.
«Nous» étant lui, est-ce qu'il l'a accepté, oui ou non?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, c'est exactement ce que je viens de dire. On l'a accepté comme proposition. On a par la suite reçu une contre-proposition de l'industrie et on l'a prise au sérieux. On l'examine. J'ai même examiné les critiques formulées par les députés du Bloc québécois.
Que voulez-vous que l'on fasse? Ignorer l'industrie et ignorer les politiciens de la région? À cela, je dis non. Aussitôt que nous avons eu une contre-proposition, nous l'avons examinée. Aussitôt que nous en aurons complété l'examen, nous ferons part de la décision du gouvernement.
* * *
[Traduction]
LA CULTURE CANADIENNE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, au printemps dernier, le ministre du Commerce international a déclaré qu'il était prêt à se battre pour protéger la culture dans l'Accord multilatéral sur l'investissement. Aujourd'hui, ce même ministre demande à la ministre du Patrimoine d'édulcorer son projet de loi sur les périodiques.
Quel ministre est le porte-parole du gouvernement, la ministre du Patrimoine, qui tente de protéger la culture, ou le ministre du Commerce, qui préconise davantage de concessions pour calmer les intérêts américains?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, le ministre du Commerce international et moi sommes du même avis lorsqu'il s'agit de protéger la culture canadienne et de faire en sorte que la voix des Canadiens puisse se faire entendre jusque dans la prochaine génération.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ce sont des propos bien braves de la part d'un gouvernement qui a vendu la GRC à Disney.
Le ministre du Commerce veut maintenant négocier le projet de loi sur les périodiques directement avec les Américains. Voilà pour la souveraineté canadienne. Pas étonnant que les Canadiens aient participé nombreux à l'enquête des citoyens sur l'AMI. Pas étonnant qu'ils ne fassent pas confiance au gouvernement pour protéger la culture canadienne.
Le gouvernement va-t-il assurer aux Canadiens une vraie protection culturelle au lieu de céder encore une fois aux intérêts américains?
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le NPD vient de confirmer mes pires craintes: il ne sait pas lire ou, en tout cas, il ne sait pas aller au-delà des grands titres.
Si le chef de ce parti avait lu l'article, elle aurait constaté que je suis en faveur d'amendements constructifs, tout comme la ministre du Patrimoine, pourvu que cela ne change pas le projet de loi en profondeur. J'ai dit dans cet article que l'ambassadeur américain devait reconnaître que nous nous sommes pleinement conformés à la décision de l'OMC. Il doit reconnaître aussi que c'est notre droit souverain de promouvoir et de protéger notre culture.
* * *
L'AGRICULTURE
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, la semaine dernière, je me suis rendu dans l'ouest du pays pour écouter les agriculteurs me raconter les épreuves qu'ils doivent traverser à cause de la crise du revenu agricole. Dans certains cas, les agriculteurs m'ont dit qu'ils voulaient un gouvernement qui saurait les écouter, un gouvernement qui mettrait sur pied les programmes nécessaires pour les aider à travailler de nouveau la terre le printemps prochain.
Le ministre de l'Agriculture n'a pas encore obtenu, en théorie, l'accord de ses collègues au Cabinet. Quand le gouvernement du Canada trouvera-t-il la volonté politique d'appuyer le secteur agricole et d'agir avant qu'il ne soit trop tard?
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a prouvé et continue de prouver qu'il a la volonté politique d'appuyer le secteur agricole, non seulement l'exploitation agricole, mais également tout le processus agroalimentaire, et il continuera de le faire.
Le député a peut-être discuté avec des agriculteurs, mais je peux lui dire que j'ai consulté plus que des agriculteurs. J'ai examiné la question avec les leaders agricoles et mes homologues provinciaux et je continuerai de collaborer avec eux afin de pouvoir offrir une aide efficace.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, le gouvernement sait pertinemment que les collectivités agricoles sont en situation de crise depuis plus d'un an. Cela illustre à merveille ce qui ne va pas avec le gouvernement. Il attend qu'une crise éclate avant d'agir. Il ne fait rien pour la prévenir. Il réagit au lieu d'agir. C'est d'ailleurs ce qu'il a fait avec le dossier des hélicoptères, les problèmes au ministère des Pêches et la réforme du Régime de pensions du Canada.
Le ministre de l'Agriculture peut-il nous dire pourquoi le gouvernement attend toujours si longtemps et fait si peu pendant qu'une crise secoue l'industrie agricole?
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je pourrais donner plusieurs raisons pour lesquelles le gouvernement étudie si attentivement la question. Premièrement, le problème est grave. Deuxièmement, le gouvernement n'examine pas les choses de la même façon que le Parti progressiste conservateur. Les députés progressistes conservateurs voulaient abolir le ministère de l'Agriculture afin d'épargner 600 millions de dollars. S'ils étaient au courant de la situation il y a un an, pourquoi voulaient-il éliminer le ministère et l'appui au secteur agricole?
* * *
LE COMMERCE
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, aujourd'hui, le ministre des Affaires étrangères est allé humblement à Washington pour essayer d'éviter un autre blocus dans le secteur de l'agriculture. Le problème, c'est que la ministre du Patrimoine a miné la bonne volonté des Américains avec sa loi protectionniste sur les tirages dédoublés.
Qui a laissé autant de corde à la ministre du Patrimoine et en quoi cela peut-il aider les agriculteurs canadiens?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, le fait est que quatre des cinq partis politiques à la Chambre soutiennent la position du gouvernement. Il n'y a qu'un seul parti au Parlement du Canada qui prenne la défense des Américains, et c'est le Parti réformiste.
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, pourquoi mettre en danger d'importantes relations commerciales avec les Américains pour un projet de loi que même les députés ministériels d'arrière-ban n'approuvent pas?
Quand le premier ministre rappellera-t-il à l'ordre la ministre du Patrimoine et ses cerbères de la culture et s'intéressera-t-il plutôt aux intérêts des agriculteurs? N'est-ce pas cela qui devrait être la grande priorité?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous travaillons ensemble à la protection de la culture canadienne. C'est honteux que les députés du Parti réformiste ne partagent pas cette volonté. Son engagement à l'égard de la culture canadienne est tellement faible que cela enlève toute crédibilité à ce qu'il dit au sujet de l'agriculture du Canada, qui est non seulement un secteur important de notre économie mais aussi un élément fondamental pour le Canada.
Le Parti réformiste sape les grands principes du Canada en posant ce genre de questions idiotes.
* * *
[Français]
LA POLITIQUE DU DÉGLAÇAGE
M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, le traversier entre Baie-Sainte-Catherine et Tadoussac constitue un lien essentiel et unique entre les deux parties du comté de Charlevoix.
Le ministre peut-il nous dire si ce traversier sera exempté de frais de déglaçage et considéré comme celui de Québec-Lévis, compte tenu qu'il effectue de très nombreuses traverses quotidiennes et qu'il est le seul lien routier dans mon comté entre les deux rives du Saguenay?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, j'accepte avec intérêt les représentations de l'honorable député, qui sont beaucoup plus utiles et efficaces que les protestations des deux autres députés qui sont intervenus.
Il faut dire que les traversiers opérés par la province où les clauses des termes de l'union ne paieront pas, dépendant des eaux, dans le cadre de la proposition actuelle, eux, ils devront payer comme les traversiers de Marine Atlantic, entre North Sydney et Port-aux-Basques.
M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, toujours dans le comté de Charlevoix, le traversier Saint-Joseph-de-la-Rive—Île aux Coudres est le seul lien routier existant pour les insulaires.
Le ministre a-t-il prévu exempter ce traversier des droits de déglaçage?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je remercie à nouveau l'honorable député pour cette intervention très utile.
Il faut dire que l'industrie elle-même n'a pas proposé un moratoire. L'industrie a plutôt proposé de payer pour une partie du service que la Garde côtière offre au secteur commercial et a présenté une proposition en ce sens. C'est la contre-proposition que nous sommes en train d'examiner à ce moment-ci.
* * *
[Traduction]
LE COMMERCE
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Monsieur le Président, une querelle de famille couve entre le ministre du Commerce et la ministre du Patrimoine. Le ministre du Commerce pense que nous devrions négocier avec les États-Unis, mais la ministre du Patrimoine a déclenché une guerre commerciale avec son projet de loi sur les périodiques à tirage dédoublé.
Ma question s'adresse au premier ministre. Quel membre de la famille appuie-t-il? Le ministre du Commerce ou la ministre du Patrimoine?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous travaillons en équipe pour le compte des Canadiens, contrairement au Parti réformiste qui ne croit pas à la culture canadienne et dont on se demande s'il croit vraiment au Canada.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Monsieur le Président, nous avons entendu dire que les Américains avaient l'intention de prendre des mesures de représailles contre le projet de loi de la ministre du Patrimoine dès la semaine prochaine.
Est-il raisonnable de s'attendre à ce que les Américains mettent fin à leur guerre commerciale contre les agriculteurs canadiens, quand la ministre du Patrimoine les irritent avec son projet de loi sur les périodiques à tirage dédoublé?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi a été présenté au nom du gouvernement, qui est composé, entre autres, du ministre du Commerce et de la ministre du Patrimoine.
J'aimerais que le député me dise pourquoi le Parti réformiste est si timide quand il s'agit de protéger les intérêts des Canadiens, que ce soit concernant la culture ou l'agriculture.
* * *
[Français]
LA POLITIQUE DU DÉGLAÇAGE
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, la question du déglaçage commercial ne pose pas des problèmes qu'aux traversiers. C'est aussi un sérieux problème pour toute l'activité économique des ports du Saint-Laurent.
Ma question s'adresse au ministre des Pêches. En faisant payer 80 p. 100 des coûts de déglaçage commercial par les usagers des ports du Saint-Laurent, alors qu'ils n'occasionnent que 33 p. 100 des frais, le ministre des Pêches ne crée-t-il pas un désavantage considérable qui risque de compromettre leur compétitivité et, par conséquent, la survie même de certains ports du Saint-Laurent?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, la proposition originale faite par le comité prévoyait que l'industrie paierait 17,5 p. 100 des coûts encourus par la Garde côtière pour l'utilisation des brise-glaces.
Il a maintenant présenté une contre-proposition indiquant que l'industrie veut payer la moitié des coûts. Les porte-parole de l'industrie n'ont jamais refusé l'idée de payer une partie des coûts liés à l'utilisation des brise-glaces dans le fleuve Saint-Laurent.
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, compte tenu du fait que ce dossier sent l'improvisation à plein nez, le ministre acceptera-t-il que sa future proposition de grille tarifaire soit examinée par un comité parlementaire chargé d'en évaluer toutes les conséquences, et ce, avant qu'elle n'entre en vigueur?
L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, si un comité de la Chambre veut examiner cela, je veux bien lui demander de le faire.
Mais il ne faut pas oublié qu'on a examiné ce barème de droits depuis trois ans. On a eu des propositions et des contre-propositions. C'est bien connu, et l'industrie elle-même n'a jamais indiqué qu'elle voulait avoir un moratoire. Elle savait qu'il était nécessaire de défrayer au moins une partie des coûts encourus par le gouvernement pour les brise-glaces.
* * *
[Traduction]
LA JUSTICE
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, il n'appartient pas au ministère de la Justice de dire à la police comment faire son travail. C'est pourtant ce qu'a fait un fonctionnaire du ministère, vendredi dernier. Le directeur des relations publiques du Centre canadien des armes à feu a déclaré que la police pourrait faire une interprétation souple ou rigoureuse de la nouvelle loi sur le contrôle des armes à feu.
Pourquoi le ministère de la Justice dit-il à la police comment interpréter le Code criminel?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le député a une compréhension foncièrement fausse du Code criminel et des compétences en matière de droit criminel au Canada.
À l'heure actuelle, les représentants de la loi et les procureurs de la Couronne peuvent choisir la façon dont ils appliquent les articles du Code criminel. La police peut choisir, tout particulièrement dans les cas d'infractions mineures, de servir une mise en garde en bonne et due forme ou un avertissement, au lieu de porter des accusations. Il n'y a là rien de nouveau.
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, la malheureuse loi de la ministre concernant le contrôle des armes à feu fait partie du Code criminel du Canada. Ce n'est pas la même chose que d'obtenir une contravention pour excès de vitesse.
Le ministère de la Justice agit à l'encontre du Code criminel en conseillant à la police de ne pas appliquer pleinement la loi adoptée par le Parlement, ce qui inclut l'ensemble du Code criminel. Or, c'est précisément ce qu'a fait le fonctionnaire du ministère de la Justice.
Pourquoi le ministère de la Justice dit-il à la police comment appliquer le Code criminel?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous ne disons ni à la police ni aux procureurs de la Couronne comment administrer la législation pénale au Canada.
Comme je l'ai déjà dit, les agents de la paix et les procureurs de la Couronne ont un pouvoir discrétionnaire dans la mesure où ils peuvent décider, dans certains cas, de porter des accusations en bonne et due forme ou servir une mise en garde ou un avertissement.
Je trouve très étrange que le député et son parti, qui s'opposent si énergiquement à la loi sur le contrôle des armes à feu, réclament maintenant une application rigoureuse des dispositions qu'ils contestent.
* * *
[Français]
LE PROJET DE LOI C-55
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Commerce international a déclaré, en fin de semaine, que le gouvernement serait prêt à diluer sa politique sur la publicité canadienne dans les magazines étrangers, contredisant ainsi non seulement la ministre du Patrimoine, mais aussi ses propres fonctionnaires.
Pourtant, au bureau de la ministre du Patrimoine, on affirme que le projet de loi C-55 ne sera pas dilué par le gouvernement.
À quel lobby le ministre du Commerce international est-il en train de céder pour être ainsi en contradiction avec son propre gouvernement?
[Traduction]
L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je ne cède aux intérêts de personne. Si le député prend la peine de lire l'article, il verra que j'y indique que la ministre du Patrimoine a publiquement déclaré la semaine dernière qu'elle était disposée à accepter, comme le comité, des propositions qui amenderaient le projet de loi de façon significative tout en préservant l'essentiel. J'ai dit que s'il n'était pas trop tard pour parler de ces amendements, pourquoi ne pas parler à notre meilleur client, notre meilleur partenaire et, en fin de compte, notre meilleur ami? C'est tout à fait conforme aux intentions du gouvernement.
* * *
L'EMPLOI
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.
La semaine dernière, Statistique Canada a publié un rapport sur l'emploi au Canada de 1989 à 1997. Nous savons tous que le chômage doit encore baisser. Que fait le ministre pour aider les Canadiens à trouver de bons emplois?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, depuis 1993, date de la venue au pouvoir du gouvernement, il y a 1,4 million de Canadiens de plus qui travaillent, et le chômage est passé de 11,4 p. 100 à 8,1 p. 100, une baisse de plus de 3 points. Il faut faire plus, mais nous avons le sentiment d'être dans la bonne voie.
Le gouvernement a un certain nombre de programmes pour aider à créer des emplois. Même notre régime d'assurance-emploi a été revu pour incorporer des mesures destinées à aider les gens à retourner au travail. Quelque 245 000 Canadiens sont retournés au travail grâce à des mesures actives...
Le Président: Le député de Skeena a la parole.
* * *
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, aujourd'hui, l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique va entreprendre le débat sur le traité conclu avec les Nisga'as, mais la population ne participera pas à ce débat, tout comme elle n'a pu participer aux négociations.
Étant donné que près de 70 p. 100 des gens de la Colombie-Britannique affirment qu'ils n'ont pas été bien consultés et souhaitent la tenue d'un référendum provincial sur ce traité, la ministre des Affaires indiennes va-t-elle accéder à leurs souhaits et s'engager aujourd'hui à la tenue d'un référendum provincial sur ce traité?
L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, le traité avec les Nisga'as est le fruit de négociations historiques entre les Nisga'as, la Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral.
Ces négociations durent depuis bien plus de 20 ans. Je me suis rendue dans la circonscription du député et j'ai parlé aux citoyens de cette région de la Colombie-Britannique. Ils ont le sentiment d'avoir été inclus dans le processus. Je crois qu'ils veulent que le traité soit mis en oeuvre.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, contrairement à ce que la ministre prétend, les gens de la Colombie-Britannique n'ont absolument pas le sentiment d'avoir eu leur mot à dire dans ce processus.
Ils affirment qu'ils ont été exclus et plus de 70 p. 100 disent vouloir un référendum sur cette entente qui crée un précédent.
La ministre ne croit-elle pas qu'imposer aux gens de la Colombie-Britannique un traité qui n'a pas un large appui dans la population est la pire chose qu'elle puisse faire pour tous les gens de la Colombie-Britannique, y compris les Nisga'as?
L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'on examine le libellé de ce traité, on s'aperçoit qu'il y a de nombreux aspects qui sont bons pour les Nisga'as, les gens de la Colombie-Britannique et le Canada dans son ensemble.
Comme je l'ai dit à de multiples reprises, il s'agit d'une initiative historique. Il a fallu 20 ans pour en arriver à ce stade-ci.
Ce traité fera l'objet d'un débat complet à la Chambre. J'attends avec impatience d'entendre ce que le député aura alors à dire.
* * *
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, par l'intermédiaire de la Société canadienne des postes, le gouvernement a fermé des milliers de comptoirs postaux, puis il a autorisé la vente de timbres par de petites entreprises.
Voici que la Société canadienne des postes ne se contente plus d'ordonner la restructuration des comptoirs postaux, mais qu'elle est sur le point d'autoriser les grandes banques, notamment la CIBC, à vendre des timbres.
Pourquoi le gouvernement laisse-t-il la Société canadienne des postes pousser des milliers de PME à la faillite, augmenter les profits déjà excessifs des grandes banques et perturber encore davantage les services postaux au Canada?
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, depuis son arrivée au pouvoir en 1993, le gouvernement n'a pas fermé un seul comptoir postal.
Nous avons le service postal le plus efficace au monde. Nous collaborons avec tous les franchisés pour qu'ils continue de fournir le meilleur service possible.
Je suis certain que, lorsque le député prendra connaissance de tous les détails de ce dossier, il sera d'accord avec moi.
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, le ministre sait parfaitement que le moratoire qu'il a imposé prend fin demain.
Je voudrais lui donner l'occasion de dire directement à ces milliers de petits entrepreneurs qu'il va demander à la Société canadienne des postes de mettre fin à sa politique dévastatrice une fois pour toutes.
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, depuis deux mois, la Société canadienne des postes a rencontré plus de 600 franchisés pour discuter des mesures à prendre. Elle va présenter un programme qui verra à ce que tous les fournisseurs de services postaux qui exploitent, moyennant commission, une franchise dans leur magasin ne subissent aucune perte.
Le député et d'autres gens prédisent la fin du monde. Quand ce programme sera complètement mis en oeuvre, ils verront que les franchisés feront encore plus d'argent.
* * *
[Français]
LA PAUVRETÉ
M. André Harvey (Chicoutimi, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor.
Toutes les villes du pays sont aux prises avec des problèmes de pauvreté qui se manifestent tous les jours par l'ouverture de nouvelles soupes populaires et de maisons pour sans-abri. Ce n'est que la pointe de l'iceberg. Malheureusement, le gouvernement fédéral n'a aucun programme pour aider financièrement ces organismes qui aident les plus démunis.
Est-ce que le président du Conseil du Trésor peut s'engager à tout mettre en oeuvre pour créer un tel programme afin d'aider ces organismes qui, tous les jours, font face à cette réalité qu'est la misère de leurs semblables?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il est évident que comme gouvernement, nous sommes extrêmement préoccupés par la situation de la pauvreté au Canada et que manifestement, au cours des dernières années, nous avons établi la pauvreté comme l'une de nos priorités sociales les plus élevées, notamment la pauvreté chez les enfants.
Comme on le sait, nous avons investi 1,7 milliard de dollars dans la Prestation nationale pour enfants pour aider les familles avec des enfants à leur donner le meilleur départ possible dans la vie.
Nous avons mis en place la Stratégie canadienne pour l'égalité des chances. Nous avons également mis sur pied le Supplément au revenu familial pour aider les familles qui sont dans le besoin.
M. André Harvey (Chicoutimi, PC): Monsieur le Président, je constate que le gouvernement ne sait pas comment s'y prendre pour combattre la pauvreté.
Il y a à la fois des mesures ponctuelles spécifiques qu'il faut prendre, ainsi qu'une réforme fiscale majeure qu'il faut faire.
Le ministre ne serait-il pas intéressé à travailler à la création d'un comité mixte spécial de la Chambre des communes et du Sénat pour inventorier à la fois les problèmes réels de la pauvreté et les moyens pour s'en sortir?
L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous avons établi, depuis deux ans et demi, une table de négociations avec les provinces. Cela fonctionne très bien. Nous avons le Conseil ministériel sur l'union sociale, auquel le gouvernement du Québec nous a fait le plaisir de se joindre au cours de l'été dernier, un peu tardivement, on le reconnaîtra.
Nous travaillons avec les provinces et la coopération entre les deux niveaux de gouvernement est meilleure qu'elle ne l'a été depuis des années et des années. Les ministres responsables des services sociaux dans les provinces et moi-même coopérons d'une façon étroite et très productive pour combattre la pauvreté à travers le pays.
* * *
[Traduction]
L'ENVIRONNEMENT
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de l'Environnement.
Tout le monde reconnaît que les questions environnementales sont l'affaire de tous les Canadiens, tant à l'échelle locale que nationale. Comment Environnement Canada s'y prend-il pour créer des partenariats avec les collectivités et pour accroître la portée des initiatives environnementales locales? Dans quelle mesure ces initiatives influent-elles sur notre environnement?
L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens des quatre coins du pays ont à coeur leur environnement. Ils s'attendent à ce que le gouvernement fédéral mette tout en oeuvre pour les protéger, eux, leur santé et leur environnement.
Mais il appartient également à chaque Canadien de prendre l'initiative de protéger l'environnement. C'est précisément ce qui m'a amenée à lancer une initiative baptisée les Éco-collectivités du millénaire. Ainsi, chaque député pourra créer au sein de sa circonscription un groupe de citoyens chargé d'établir et de réaliser des objectifs concernant l'assainissement de l'air, la salubrité de l'eau, les changements climatiques et la nature.
* * *
LA JUSTICE
M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière, j'ai demandé au nouveau solliciteur général comment il pouvait expliquer qu'on ait pu réhabiliter 700 délinquants sexuels qui, par la suite, se sont rendus coupables d'agressions sexuelles sur de nouvelles victimes. Il a répondu à cela que 700, c'était un nombre relativement petit. C'est absolument terrible. C'est n'avoir aucune pitié pour les victimes.
Il a eu toute la fin de semaine pour réfléchir à la question. Quand va-t-il arrêter de réhabiliter des délinquants sexuels et permettre aux Canadiens de protéger leurs enfants?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la sécurité publique fait partie de mon mandat.
Le ministre fédéral et les ministres provinciaux se sont rencontrés à Regina et ont publié un rapport détaillé. On appuie ce rapport d'un bout à l'autre du pays. La recommandation no 7 du rapport indique que même s'ils sont réhabilités, ces délinquants sexuels sont signalés. Quand la police examine son dossier, elle sait que l'individu en question a commis une agression sexuelle.
* * *
[Français]
LA RECHERCHE ET DÉVELOPPEMENT
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.
David Caplan, président de Pratt & Whitney Canada, attribue à la réduction des investissements fédéraux dans le domaine de la recherche et du développement la baisse de 18 p. 100, en trois ans, de la valeur ajoutée dans le secteur aérospatial canadien.
Quand le ministre de l'Industrie aura-t-il le courage de dire haut et fort qu'il faut augmenter d'au moins 100 millions de dollars les investissements dans le programme Partenariat technologique Canada pour maintenir, au Québec et dans la région de Montréal, les emplois structurants...
Le Président: L'honorable ministre de l'Industrie a la parole.
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été cité dans les journaux disant que je croyais qu'une augmentation des fonds pour le PTC est un bon investissement de la part du gouvernement du Canada. C'est tellement important pour la région de Montréal que nous continuerons à investir dans les secteurs clés pour cette région, y compris dans l'aérospatial, mais aussi dans le secteur de la biotechnologie, dans le secteur pharmaceutique ainsi que dans celui des télécommunications. Ce sont des secteurs gagnants pour la grande région de Montréal.
* * *
[Traduction]
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.
L'infrastructure en matière de transport est essentielle au développement économique des premières nations. Le gouvernement du Manitoba a dit au chef de la première nation Mosakahiken que les voies de raccordement entre Moose Lake et Cormorant relevaient du gouvernement fédéral puisque 80 p. 100 de la population appartient à une première nation.
Si le gouvernement compte réellement promouvoir le développement économique pour mettre un terme à la misère des premières nations, est-il prêt à engager les fonds nécessaires pour la construction des chemins en collaboration avec les gouvernements provinciaux et les administrations des premières nations?
L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, l'un de nos plus grands défis est sans contredit la mise sur pied de communautés de premières nations autonomes et économiquement viables.
Par suite de nos efforts dans le cadre de l'initiative Rassembler nos forces, nous avons pu déterminer qu'il y a bon nombre de groupes, non seulement au niveau des provinces, mais aussi des tierces parties, qui sont prêts à nous aider au chapitre du développement économique. C'est un défi pour nous tous. Si nous rassemblons toutes les ressources, je suis persuadée que nous arriverons à aider les premières nations à atteindre l'autonomie.
* * *
LES TRANSPORTS
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. La société Price Waterhouse et le directeur général de l'aviation civile ont tous deux déclaré que la pénurie d'inspecteurs de l'aviation présentait une grave menace pour la sécurité aérienne à l'avenir. Le directeur général de l'aviation civile prévoit des répercussions négatives à long terme pour la sécurité aérienne. Price Waterhouse confirme que le transport sera effectivement aux prises avec un problème à long terme. Les négociations syndicales n'ont rien à y voir. Il s'agit là de deux sources indépendantes très dignes de foi. Elles critiquent toutes deux le nombre d'inspecteurs en poste.
Quelles mesures le ministre met-il en place pour corriger cette situation qui risque de nuire à la sécurité?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à assurer au député que Transports Canada n'a jamais réduit le nombre des inspecteurs de l'aviation. En fait, ce nombre a augmenté de 179 ces cinq dernières années.
Il est important de comprendre que cette étude a été commandée par le ministère des Transports et qu'on peut en prendre connaissance aux termes de la Loi sur l'accès à l'information. Le ministère était préoccupé par les conséquences qu'un grand nombre de changements effectués ces quelques dernières années risquaient d'avoir pour la sécurité.
Nous avons donc mis en place un programme de reclassification des employés et de recrutement d'inspecteurs de l'aviation. En fait, l'OACI vient de terminer une étude de notre système d'inspection de l'aviation et, selon les rapports préliminaires, ce système est...
Le Président: Le député de Renfrew—Nipissing—Pembroke.
* * *
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Hec Clouthier (Renfrew—Nippissing—Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, le week-end dernier, des progrès importants ont été réalisés, à Paris, au sujet d'une situation qui concerne le Congo. Le secrétaire d'État chargé de l'Amérique latine et de l'Afrique pourrait-il expliquer clairement à la Chambre l'orientation générale que prend le gouvernement à l'égard de cette question fort importante?
[Français]
L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, le Canada se réjouit de l'engagement pris à Paris, par les pays concernés, de respecter le cessez-le-feu.
Le Canada est très inquiet par les allégations de l'existence d'une alliance entre les ex-FAR et Interahamwe, qui sont à l'origine du génocide de 1994, et le gouvernement Kabila.
Le Canada souhaite que toutes les parties au conflit poursuivent les discussions et respectent immédiatement un cessez-le-feu.
* * *
[Traduction]
LES TRANSPORTS
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre des Transports. L'industrie des transports aériens au Canada est en croissance, mais le nombre d'inspecteurs de la sécurité diminue. Voilà la conclusion du groupe auquel on a commandé une étude, comme le ministre vient de le dire. On compte actuellement 80 postes vacants et, tous les mois, cinq inspecteurs qualifiés s'en vont tandis qu'un seul est engagé. Il y a donc une perte nette de quatre inspecteurs par mois.
Le ministre est au courant de la situation depuis des mois. Selon des observateurs indépendants, l'industrie est au bord de la crise. Quelles mesures le ministre prend-il en ce moment...
Le Président: Le ministre des Transports.
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je viens tout juste de parler de ce problème. Nous avons pris des mesures afin de recruter, de reclasser du personnel et d'améliorer la formation. C'est le Canada qui a demandé à l'OACI d'être l'autorité internationale en aviation chargée de vérifier nos procédures de sécurité. Elle le fait depuis un ou deux mois. Le rapport provisoire que nous avons reçu est extrêmement favorable et il sera rendu public en 1999.
* * *
[Français]
LA COMPAGNIE SPEXEL
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.
Le ministre a pu prendre connaissance d'une lettre que la compagnie Spexel lui faisait parvenir, le 6 novembre dernier, et qui démontrait que cette compagnie de Beauharnois est victime d'une exclusion inacceptable d'un appel d'offres de fourniture de papier pour les passeports du Canada.
Le ministre peut-il maintenant donner des assurances à la compagnie Spexel qu'elle pourra enfin participer à cet appel d'offres et qu'elle ne continuera pas d'être victime d'une exclusion injustifiée de ce contrat gouvernemental?
[Traduction]
M. Julian Reed (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, si le député veut bien me communiquer les détails du problème, je me ferai un plaisir de lui répondre.
* * *
LA SANTÉ
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, la semaine dernière, le Parlement a obtenu copie du rapport de rendement du ministre de la Santé.
Fait à remarquer, le nom de la direction générale qui a été fort malmenée ces derniers jours est disparu. La Direction générale de la protection de la santé n'existe plus et est remplacée par une sorte de service de gestion des risques pour la santé. La DGPS est morte; vive la GRS!
Pourquoi le gouvernement a-t-il abandonné toute l'idée de la protection de la santé, pourquoi a-t-il adopté la langue des multinationales pharmaceutiques et orienté ses efforts sur la gestion des risques?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, si la députée y avait prêté attention, elle saurait que nous avons entrepris un examen complet de la Direction générale de la protection de la santé.
Au fil des ans, des problèmes se sont posés au sein de la direction générale. Ils remontent à de nombreuses années. Nous nous sommes attaqués à ces problèmes et nous avons proposé des approches et des modèles différents que nous avons soumis à la population afin de connaître son opinion. Des assemblées publiques ont été organisées partout au Canada.
Nous sommes en train d'examiner diverses solutions qui permettront à la Direction générale de la protection de la santé de s'acquitter plus efficacement de ses responsabilités afin d'assurer la sécurité du public.
* * *
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le Président: Je signale aux députés la présence à notre tribune d'un membre du Sénat des États-Unis, le sénateur Baucus.
Des voix: Bravo!
AFFAIRES COURANTES
[Français]
DÉCRETS DE NOMINATIONS
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il me fait grand plaisir de déposer aujourd'hui à la Chambre, dans les deux langues officielles, des décrets annonçant des nominations faites récemment par le gouvernement.
Conformément au paragraphe 110(1) du Règlement, ces décrets sont réputés avoir été renvoyés aux comités permanents indiqués en annexe.
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RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 11 pétitions.
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[Traduction]
LA LOI SUR LES SOCIÉTÉS D'ASSURANCES
L'hon. Jim Peterson (au nom du ministre des Finances) demande à présenter le projet de loi C-59, Loi modifiant la Loi sur les sociétés d'assurances.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
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LE CODE CRIMINEL
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-459, Loi modifiant le Code criminel (peines consécutives).
—Monsieur le Président, le projet de loi d'initiative parlementaire que je présente aujourd'hui prévoit une mesure de dissuasion à l'endroit des détenus qui s'évadent de prison, qui sont illégalement en liberté ou qui s'évadent d'une garde légale. Je suis résolu à faire modifier la loi de sorte que ces individus soient tenus de purger leurs peines consécutivement. Autrement dit, ils devront purger une peine de prison s'ajoutant à celle à laquelle ils avaient été condamnés pour leurs infractions.
Ma décision est motivée par le nombre sans précédent d'évadés de prison et d'individus illégalement en liberté, notamment dans ma circonscription. Quelqu'un doit y mettre le holà et faire comprendre clairement aux Services correctionnels canadiens et aux tribunaux que de véritables mesures de dissuasion s'imposent pour assurer la sécurité publique.
Nous devrions établir des mesures de dissuasion à l'intention des évadés de prison afin d'aider nos forces policières, qui méritent le maximum de soutien que nous puissions leur accorder dans leur mission de protection du public. Si le gouvernement libéral ne propose pas de mesures de dissuasion, je le ferai. La Chambre peut être assurée que je ferai tout en mon pouvoir pour faire adopter le projet de loi.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LE RÈGLEMENT
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je propose: Que l'on modifie le Règlement en y ajoutant un certain nombre de points concernant l'heure réservée aux initiatives parlementaires.
Je crois que tous les leaders parlementaires ont une copie de l'avant-projet de Règlement en question. La présidence peut-elle le considérer comme lu? Dans ce cas, je demanderais que la présidence demande le consentement unanime pour qu'il soit adopté sans débat.
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre a entendu la motion proposée par le leader parlementaire du gouvernement. Le leader parlementaire du gouvernement a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
PÉTITIONS
LE MARIAGE
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de plaisir que je présente, conformément à l'article 36 du Règlement, une série de pages provenant du sud-ouest de ma circonscription.
J'en ai reçu des centaines. Les pétitionnaires y précisent très clairement que, pour eux comme pour la majorité des Canadiens, le mariage n'est pas autre chose que l'union volontaire d'un homme célibataire et d'une femme célibataire.
LES ARMES NUCLÉAIRES
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'ai deux séries de pétitions à présenter. La première série concerne la suppression des armes nucléaires.
Les Canadiens qui ont signé cette pétition font remarquer qu'il existe encore plus de 35 000 armes nucléaires dans le monde. Ils signalent que ces armes menacent la survie de l'humanité et l'environnement de toute la planète. Ils conviennent avec le secrétaire général de l'ONU que le moyen le plus sûr, le plus certain et le plus rapide de supprimer la menace nucléaire est de supprimer tout simplement les armes nucléaires.
Ils demandent au Parlement d'appuyer le lancement immédiat et la conclusion, d'ici à l'an 2000, d'une convention internationale fixant un calendrier exécutoire de suppression totale des armes nucléaires.
L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, comme je l'ai déjà fait à maintes reprises ces derniers mois au Parlement, je présente des pétitions portant sur l'Accord multilatéral sur l'investissement.
Les pourparlers ont récemment échoué à Paris, mais ces pétitionnaires n'en demandent pas moins au gouvernement de ne pas reprendre les négociations sur l'AMI, de rejeter plutôt le cadre actuel des négociations sur l'AMI et de rechercher la conclusion d'un accord entièrement différent sur un régime de commerce international fondé sur des règles et qui protégerait les travailleurs, l'environnement et la capacité des gouvernements d'agir dans l'intérêt public.
LA FISCALITÉ
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour présenter des pétitions au nom de mes électeurs de Kitchener-Centre.
La première pétition vient de la Christ Lutheran Church de Kitchener, en Ontario. Ces pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada d'autoriser que les droits de scolarité d'établissements d'enseignement primaire et secondaire privés soient déductibles d'impôt au même titre que ceux des collèges, des universités et des écoles de métiers.
LA CHASSE AUX PHOQUES
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter au sujet de la chasse au phoque au Canada.
La première est parrainée par le groupe Canadians for Animal Rights and the Environment. Ces pétitionnaires demandent au gouvernement de modifier les dispositions de la Loi sur les pêches portant sur les mammifères marins de manière à interdire le massacre commercial des phoques et de cesser de subventionner la fabrication de produits faits avec des parties de phoques et l'Association canadienne des chasseurs de phoques.
La deuxième pétition vient du groupe Canadians Against the Commercial Seal Hunt. Ces pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada d'adopter une loi pour faire cesser la chasse commerciale au phoque au Canada.
LES DROITS DE LA PERSONNE
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition rédigée à l'occasion du cinquantenaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme.
Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur les violations des droits de la personne qui continuent dans de nombreux pays, notamment en Indonésie. Ils soulignent également que le Canada demeure un pays respecté par la communauté mondiale parce qu'il défend les droits de la personne à l'échelle internationale.
Les pétitionnaires exhortent donc le gouvernement à continuer de dénoncer les pays qui tolèrent les violations des droits de la personne et à faire tout son possible pour amener devant les tribunaux ceux qui portent atteinte à ces droits de la personne.
LES ALIMENTS TRANSGÉNIQUES
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureuse de présenter une pétition au nom de douzaines de Canadiens qui ont pris le temps de présenter leur opinion dans le cadre de la journée mondiale d'action contre les aliments et les plantes transgéniques.
Les pétitionnaires expriment leur préoccupation et exhortent le gouvernement à tenir compte des effets négatifs possibles de la modification génétique des aliments. Ils ajoutent que l'absence de preuve d'effets nocifs sur la santé et l'environnement ne doit pas servir à justifier la production de substances non testées susceptibles d'avoir des effets dévastateurs.
Les pétitionnaires se disent préoccupés par l'attitude du gouvernement face au Codex Alimentarius et le fait qu'il n'ait adopté aucune position ferme dans le domaine des modifications génétiques. Ils exhortent le gouvernement à interdire les aliments et les plantes transgéniques, le projet sur la diversité du génome humain, le gène terminateur et l'exploitation des connaissances des peuples autochtones à des fins commerciales privées.
LE MARIAGE
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions aux termes de l'article 36 du Règlement.
La première porte sur le projet de loi C-255, Loi modifiant la Loi sur le mariage (degrés prohibés) et la Loi d'interprétation.
LES DÉLINQUANTS SEXUELS
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, la deuxième pétition émane de Lower Sackville dans ma circonscription et d'ailleurs en Nouvelle-Écosse. Elle compte actuellement 66 signatures. Nous espérons faire signer des milliers d'autres citoyens.
Les pétitionnaires prient le Parlement d'adopter une loi qui protégerait encore mieux les enfants contre les délinquants sexuels reconnus coupables, comme le fait le projet de loi d'initiative parlementaire du député de Pictou—Antigonish—Guyborough.
Et puis j'ai reçu aujourd'hui les bulletins scolaires de mes deux filles et leurs résultats sont fantastiques.
Le président suppléant (M. McClelland): C'était probablement là une autre pétition.
* * *
[Français]
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.
Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI SUR L'EXTRADITION
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-40, Loi concernant l'extradition, modifiant la Loi sur la preuve au Canada, le Code criminel, la Loi sur l'immigration et la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle, et modifiant ou abrogeant d'autres lois en conséquence, soit lu une troisième fois et adopté.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je parlais du cas d'un homme condamné à plus de 100 ans de prison pour des actes liés à la criminalité dans le monde des affaires.
En vertu du paragraphe 44(1) de cette mesure législative, le ministre peut estimer que l'extradition serait injuste ou tyrannique puisque le Canada ne prévoit pas des peines aussi longues. C'est un autre cas qui nous vient des États-Unis. La peine de mort n'est pas l'enjeu ici, mais un ministre pourrait encore profiter de l'occasion pour imposer ses opinions politiques à des pays étrangers et là aussi c'est mal.
Si, en tant que pays, nous ne sommes pas d'accord avec les méthodes utilisées par d'autres pays pour punir, nous ne devrions peut-être pas conclure des accords d'extradition avec eux. Nous ne devrions pas accepter d'extrader des gens et dicter ensuite à ces pays comment ils doivent punir leurs criminels. Nous ne voudrions certes pas que ces pays nous dictent notre conduite. Nous n'apprécierions pas que d'autres pays nous ordonnent de punir nos criminels d'une certaine façon avant qu'ils ne soient extradés vers le Canada. En fait, nous n'accepterions probablement pas cela. Nous ne devrions donc pas essayer d'imposer les mêmes restrictions à d'autres pays.
J'ai d'autres observations au sujet du pouvoir du ministre de refuser de délivrer un arrêté d'extradition. On a beaucoup parlé du fait que cette mesure législative modernise le processus d'extradition. On a beaucoup reproché à notre système actuel d'être trop lent et trop complexe.
Le projet de loi C-40 vise à rendre le processus plus efficient et plus efficace, mais les articles portant sur les motifs permettant de refuser l'extradition, qui commencent à la page 17 du projet de loi et qui donnent au ministre, en fait, le pouvoir d'opposer un veto aux décisions de nos tribunaux, nous posent encore un problème.
Nous avons déjà vu l'actuelle ministre reconnaître son inefficacité relativement à nos propres demandes aux termes de l'article 690 du Code criminel. Il lui faut parfois des années pour décider si une injustice a été commise dans le cadre de notre processus judiciaire. Elle cherche une façon de se décharger de ses responsabilités.
Nous avons déjà vu comment la ministre peut prendre un arrêté d'extradition et voir cette décision faire l'objet d'un appel auprès de notre tribunal de dernière instance. Il faudra des années simplement pour décider en fin de compte si oui ou non deux personnes soupçonnées de meurtre seront extradées vers les États-Unis. Notre système bureaucratique fait peu de choses pour rendre justice aux familles des victimes de ce crime. Il fait très peu pour régler une fois pour toutes cette question dans cette collectivité.
Le projet de loi laisse beaucoup à désirer. Il laisse beaucoup trop de pouvoirs discrétionnaires au ministre. On a des exemples frappants de la ministre étant incapable de bien traiter des décisions dans le cas de demandes présentées aux termes de l'article 690, dans le cadre de notre processus actuel d'extradition. Le projet de loi ne changera rien à cette difficulté.
Le gouvernement a décidé qu'il valait mieux donner l'impression de faire quelque chose plutôt que de prendre vraiment les mesures qui s'imposent. En tant que membre de l'opposition officielle, tout ce que je peux faire, c'est signaler les lacunes et espérer qu'à un moment donné, le gouvernement écoutera et commencera à faire ce qui est bon pour les Canadiens, au lieu d'agir simplement à des fins politiques.
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.
Et la sonnerie s'étant arrêtée:
Le président suppléant (M. McClelland): Le vote est reporté jusqu'à demain, à la fin de la période prévue pour les initiatives ministérielles.
* * *
LA LOI SUR LA MONNAIE ROYALE CANADIENNE
La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-41, Loi modifiant la Loi sur la Monnaie royale canadienne et la Loi sur la monnaie, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.
L'hon. Anne McLellan (au nom du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux) propose: Que le projet de loi modifié soit agréé.
Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les oui l'emportent.
Une voix: Avec dissidence.
(La motion est adoptée.)
Le président suppléant (M. McClelland): Quand le projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? Avec la permission de la Chambre, maintenant?
L'hon. Anne McLellan (au nom du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux) propose: Que le projet de loi soit lu pour la troisième fois et adopté.
Mme Carolyn Parrish (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole sur le projet de loi C-41, Loi modifiant la Loi sur la Monnaie royale canadienne et la Loi sur la monnaie.
Il y a plus de 10 ans, la loi a été modifiée pour faire de la Monnaie royale une société d'État commerciale. Le projet de loi C-41 vise à améliorer le fonctionnement de la Monnaie royale et à améliorer sa capacité d'exploitation du marché, qui a changé considérablement depuis 1987.
Je n'ai pas l'intention de m'attarder sur les détails du projet de loi. Je veux toutefois rappeler brièvement à la Chambre l'objet fondamental du projet de loi, qui se présente en trois volets: rationaliser le processus d'approbation de l'émission et du dessin de la monnaie; donner la souplesse nécessaire à la structure d'administration de la Monnaie; et augmenter les pouvoirs de la Monnaie dans le cadre de la structure de reddition de comptes actuelle, de manière à lui permettre d'assumer un rang de chef de file dans la frappe de monnaie à l'échelle mondiale. L'adoption de ce projet de loi est indispensable pour l'avenir de la Monnaie.
Une chose m'a frappée au cours du débat précédent ainsi qu'au cours de l'examen du comité, c'est l'intensité de la concurrence sur le marché international de la monnaie. Ces marchés internationaux de la Monnaie, qui représentent 70 p. 100 de ses revenus, permettent aussi de réduire le coût, pour les Canadiens, de la mise en circulation de leur propre monnaie. L'an dernier seulement, la Monnaie a frappé un milliard de pièces de monnaie pour 16 différents pays. D'ici la fin de l'année, ce chiffre aura atteint la somme stupéfiante de 2,5 milliards de pièces.
Nous étudions les dispositions du projet de loi C-41 qui proposent que la Monnaie ait les pouvoirs d'une personne physique et, ainsi, la souplesse nécessaire pour qu'elle puisse adopter l'orientation stratégique à long terme qu'elle s'est fixée et assumer un rang de chef de file dans la frappe de monnaie à l'échelle mondiale. Ses pouvoirs de personne physique lui permettront de jouer pleinement le rôle qui lui a été confié en vertu de la politique gouvernementale, soit de produire la monnaie du Canada et de faire des bénéfices.
La Monnaie va continuer à exercer tous les pouvoirs que lui confère la loi actuelle, mais elle acquière des pouvoirs généraux supplémentaires qui lui permettent de mieux s'acquitter de son mandat. Elle continue toutefois à être assujettie au cadre existant de reddition des comptes trouvé dans la Loi sur la gestion des finances publiques. C'est à dire que l'examen du Conseil du Trésor et l'approbation du ministre des Finances et du gouverneur en conseil seront toujours requis. En outre, le vérificateur général continuera à faire une vérification annuelle de la Monnaie royale canadienne ainsi qu'un examen spécial tous les cinq ans.
Avec les pouvoirs d'une personne physique, la Monnaie sera plus proactive et pourra réagir plus rapidement aux nouveaux débouchés commerciaux. Ces pouvoirs donneront à la Monnaie la souplesse nécessaire pour être partie à des structures commerciales différentes, notamment des alliances et des partenariats, et pour constituer des filiales. Avec ces pouvoirs, la Monnaie sera dans une position plus avantageuse par rapport à tous ses concurrents au sein d'un marché international extrêmement compétitif.
À l'heure actuelle, la Monnaie fonctionne extrêmement bien dans un environnement en évolution constante et où la concurrence est féroce. Ces nouveaux pouvoirs donneront à la Monnaie la souplesse accrue dont elle a besoin pour réagir à l'évolution du marché, profiter des débouchés nouveaux et être encore plus rentable pour le plus grand bien de tous les contribuables canadiens.
Une autre disposition-clé du projet de loi accroît le montant que la Monnaie peut emprunter, ce qui lui permettra d'anticiper les besoins financiers et lui donnera la capacité de saisir rapidement les occasions qui semblent attrayantes et avantageuses du point de vue commercial. Les experts indépendants ont jugé que cette augmentation était prudente et réaliste et qu'elle correspondait aux pratiques et aux conditions actuelles.
La Monnaie emprunte pour le court et le long termes. Elle fait des emprunts à long terme pour investir dans la technologie et les immobilisations. Les emprunts à court terme permettent à la Monnaie de financer des soumissions plus concurrentielles et d'accroître ses marchés. Il est important de souligner que le montant des emprunts continuera à être sujet à l'approbation du ministre des Finances et du gouverneur en conseil.
Ces pouvoirs mettent la Monnaie sur un pied d'égalité avec d'autres sociétés de la Couronne qui réussissent en affaires, mais qui plus est, ils mettront la Monnaie sur un pied d'égalité avec ses principaux concurrents, les Monnaies d'autres pays tels que le Royaume-Uni, l'Autriche et l'Allemagne.
Cette mesure législative va donc améliorer considérablement l'avantage concurrentiel de la Monnaie royale canadienne et assurer qu'elle réalise son ambition de devenir un leader mondial dans la frappe de la monnaie. Toutefois, comme il a déjà été dit au cours du débat sur ce projet de loi, la Monnaie continuera à être assujettie au même cadre comptable rigoureux qu'à l'heure actuelle.
Je rappelle aux députés que le projet de loi a été amendé à l'étape de l'étude en comité pour conserver le rôle du Parlement relatif à l'émission et au retrait de la monnaie de circulation.
Le projet de loi C-41 permet à la Monnaie royale de modifier les caractéristiques de la monnaie de circulation par règlement plutôt que dans le cadre d'un long débat à la Chambre des communes. Le gouvernement serait ainsi en mesure de réagir rapidement aux fluctuations des coûts de production et de la disponibilité des métaux, tout en permettant une pleine consultation et participation des Canadiens au sujet de l'émission et du retrait de pièces de monnaie. De fait, la proposition d'amendement vient améliorer le projet de loi.
En terminant, les Canadiens ont tout lieu d'être fiers de la réussite qu'a connue la Monnaie royale canadienne. Elle est l'une des meilleures au monde. Les pièces de monnaie canadiennes sont réputées partout dans le monde pour leur grande qualité et leur magnifique motifs artistiques.
Je profite de l'occasion pour rendre hommage à la Monnaie royale canadienne, un concurrent de niveau international qui applique des principes commerciaux solides sur un marché de plus en plus concurrentiel. Je crois qu'en adoptant le projet de loi à l'étude, nous donnerons à la Monnaie royale canadienne les moyens les plus efficaces de remplir sa mission. Les Canadiens n'attendent rien de moins que cela.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur de prendre la parole au sujet du projet de loi C-41.
Comme l'indiquait la secrétaire parlementaire, le projet de loi apporte des modifications majeures à la Monnaie. Je suis cependant moins enthousiaste qu'elle au sujet de ce projet de loi.
Je tiens à donner l'assurance à ma collègue comme à tous les députés et à la présidente de la Monnaie que je ne veux aucunement dénigrer la façon dont la Monnaie est administrée. Je crois que la présidente fait de l'excellent travail et qu'elle est très compétente. Si je portais un chapeau, je saluerais bien bas l'excellent travail qu'elle accomplit. La présidente est une excellente administratrice. Elle est déterminée, vigilante et elle sait ce qu'elle fait. Elle s'acquitte de son travail avec capacité et compétence. Elle a également su faire de la Monnaie une entreprise rentable. Je tenais à le signaler et à marquer mon soutien au travail de la présidente. Je partage entièrement l'avis de la secrétaire parlementaire, qui affirmait que la Monnaie royale canadienne est entre de bonnes mains.
Les questions dont je veux parler n'ont rien à voir avec l'administration ou les priorités actuelles de la Monnaie. Je veux plutôt parler des aspects de la politique gouvernementale contenus implicitement dans les modifications proposées par le gouvernement. Il me semble très important de reconnaître de façon précise les éléments sous-jacents aux modifications contenues dans le projet de loi C-41.
Je voudrais analyser ce projet de loi sous trois angles: premièrement, le rôle du gouvernement pour ce qui est d'assurer des programmes et des services aux Canadiens; deuxièmement, le rôle du gouvernement pour ce qui est de déterminer les conditions qui régissent l'économie; troisièmement, le mécanisme des sociétés d'État et la place qu'elles occupent dans l'économie compte tenu du rôle du gouvernement et de la façon dont il se présente.
Il est important de se rappeler que la Monnaie royale canadienne est une société d'État, au même titre que la Banque de développement du Canada, la Société canadienne des Postes, la Société canadienne d'hypothèques et de logement, et tout un tas d'autres sociétés. La Monnaie royale canadienne fait partie de la même catégorie.
Le premier angle sous lequel je veux analyser ce projet de loi est le rôle du gouvernement pour ce qui est d'assurer des services et des programmes aux Canadiens. C'est la première mise en garde. Les personnes qui nous écoutent se demandent peut-être ce que cela a à voir avec le projet de loi C-41. Au fur et à mesure que j'avancerai dans mes remarques, ils comprendront clairement que ces principes s'appliquent et devraient s'appliquer non seulement à la Monnaie royale canadienne mais aussi à toutes les autres sociétés d'État. Nous voulons être sûrs de reconnaître que c'est là le problème. Nous devons ensuite aller plus loin et affirmer que les principes appliqués ici devraient s'appliquer non seulement aux sociétés d'État mais aussi à la fourniture de services et de programmes gouvernementaux adaptés aux besoins des Canadiens.
Quel est le rôle du gouvernement en ce qui concerne les conditions dans lesquelles l'économie fonctionne? Le premier principe que je voudrais énoncer clairement est celui de la liberté. Le gouvernement du Canada doit garantir la liberté aux particuliers et aux entreprises. De quel genre de liberté parlons-nous? De la liberté d'expression, il faut être en mesure d'avoir et d'exprimer des points de vue conformes à nos valeurs et croyances. Nous voulons que les gens appliquent leurs talents, leurs compétences, leurs innovations d'une manière qui réponde au mieux à leurs besoins et leur permette de tirer le maximum de profits, financiers ou autres, de leur savoir faire.
Monsieur le Président, vous êtes parmi ces entrepreneurs. Vous savez exactement comment cela fonctionne. Vous vous exprimez de façon puissante dans votre secteur d'activité. Le secteur dans lequel vous êtes, celui dans lequel vous étiez auparavant et celui dans lequel vous serez à l'avenir. Ce n'est pas seulement vous, monsieur le Président, il y a d'autres gens, des deux côtés de la Chambre, qui veulent aussi avoir la liberté d'exprimer leur créativité et d'expliquer ce qu'ils font de la meilleure manière possible afin d'en tirer profit. Cela leur permettrait, en même temps, de fournir des services au public et de répondre à ses besoins.
Il y a aussi un autre type de liberté que nous voulons. Nous la voulons dans l'entreprise. Nous la voulons pour les particuliers. C'est la liberté de croire ce que nous voulons croire.
Ce matin, j'avais l'honneur et le privilège d'être à la célébration de la paix par Sri Chinmoy, au Château Laurier. Sri Chinmoy parcourt le monde pour promouvoir la paix. Des représentants de la Nouvelle-Zélande, du Zimbabwe, de l'Afrique du Sud et de nombreux pays du monde entier étaient réunis ce matin, au Château Laurier. Ils étaient là avec un objectif en tête, celui de célébrer la désignation du Canada à titre de premier pays pacifique de l'Amérique du Nord, dans le cadre du projet du Sri Chinmoy. Il est extraordinaire d'adhérer à ce projet. J'ai été témoin de cet événement. Il est nécessaire et indispensable que nous puissions exprimer notre opinion, quelle qu'elle soit, librement et d'une manière positive si nous voulons pouvoir faire ce qu'il faut.
Nous avons parlé un peu des entrepreneurs et de leur capacité d'utiliser leurs capitaux comme bon leur semble, non seulement dans leur propre intérêt, mais aussi pour participer à la croissance de l'économie et à l'édification du pays.
Cette question ne se limite pas à cela, elle est aussi associée à celle de la propriété. La propriété s'accompagne d'une certaine fierté. Les personnes qui possèdent des biens en sont fières et cela les incite un peu plus à entretenir ces biens, à les garder en bon état, etc.
Le premier principe que le gouvernement doit garantir, c'est celui de la liberté. Nous avons ensuite besoin de sécurité et de stabilité. Comme on peut le constater pendant la période des questions, les députés se demandent parfois pourquoi certaines personnes voient leur sécurité personnelle, leur vie et leur confort attaqués.
Nous voulons être protégés et nous sentir en sécurité. Nous voulons avoir l'assurance de pouvoir vivre ainsi, maintenant et dans l'avenir. Nous voulons aussi que nos biens soient protégés. Il arrive souvent que des individus s'en prennent aux biens d'autrui.
Nous devons faire en sorte que notre société et le gouvernement assurent un environnement où nous pourrons garder nos biens en sécurité, où nous pourrons rentrer chez nous sans craindre que quelqu'un endommage nos biens pendant que nous sommes à la maison à nous occuper de nos enfants ou à faire d'autres activités avec ceux qui nous sont chers, pendant que nous jouons avec nos enfants, et ainsi de suite. Nous voulons qu'on veille sur nos biens lorsque nous sommes absents de notre foyer.
Voici une question tout à fait fondamentale quand il s'agit de propriété, d'expertise et d'entreprise. Le gouvernement doit légiférer pour encourager l'entrepreneuriat. Multiplier les sociétés d'État ne stimule pas l'entrepreneuriat. Nos lois qui établissent ces sociétés n'encouragent pas l'entrepreneuriat. J'entrerai dans les détails dans le cas de la Monnaie.
Nous devons agir de cette manière dans divers domaines. Il doit y avoir une juste concurrence. Il y a aujourd'hui toutes sortes de mécanismes qui nous permettent d'assurer cette équité, de voir si une société n'abuse pas de sa position dominante sur le marché.
Au Canada, nous avons le Bureau de la concurrence, et son directeur a aujourd'hui des décisions fort difficiles à prendre sur les recommandations à formuler au gouvernement. Cela a à voir avec la fusion des grandes banques. Nous voulons avoir l'assurance que les lois que le gouvernement adopte assurent une concurrence équitable.
Le député d'en face laisse entendre que le Bureau de la concurrence n'a aucun pouvoir, qu'il ne peut rien faire. Dans ce cas, le gouvernement a commis une autre erreur en créant un bureau de la concurrence qui est censé avoir un certain pouvoir. Le député dit que le bureau n'a pas de pouvoir réel. Par conséquent, le gouvernement devrait légiférer pour lui donner des pouvoirs. Je suppose que le député répondra qu'il faut le faire, dans ce cas. Voilà exactement de quoi il est ici question.
M. John Solomon: Je suis d'accord pour que le Bureau de la concurrence ait un certain pouvoir pour agir. À l'heure actuelle, il n'a aucun pouvoir réel.
M. Werner Schmidt: Nous avons raison. N'est-ce pas intéressant? Voilà que deux députés de partis différents s'entendent. Je trouve cela fantastique. Il est grand temps que les députés d'en face reconnaissent qu'il est possible de s'entendre lorsqu'on fait preuve de bon sens. L'ennui, c'est que les députés d'en face ne semblent pas faire preuve de beaucoup de bon sens.
M. John Solomon: Je suis d'accord là-dessus.
M. Werner Schmidt: Voilà deux accords dans un après-midi, dans un seul discours. C'est fantastique. Je félicite le député d'apprendre aussi rapidement.
Le troisième aspect où nous voulons nous assurer que le gouvernement créera de la sécurité, c'est celui des conditions dans lesquelles les entreprises peuvent exercer leurs activités, c'est-à-dire l'accessibilité du capital.
Nous avons eu toutes sortes de discussions à la Chambre, ces quatre ou cinq dernières années, au sujet de l'accès à du capital, notamment pour les petites entreprises.
Si l'on ne peut pas avoir accès à du capital, il est très difficile, voire impossible, de faire des affaires, de se lancer en affaires, d'exploiter et de faire croître une entreprise. L'accessibilité du capital est le prochain aspect dont le gouvernement doit assurer l'existence.
Il faut également prévoir l'élaboration de lois du travail justes et équitables, qui fonctionnent. L'expression à retenir ici est «qui fonctionnent». Il faut des lois du travail qui n'entraînent pas de grèves, qui créent un climat où l'employeur et les employés peuvent collaborer, où l'organisation peut atteindre ses objectifs et où l'employeur et les employés peuvent travailler en équipe au bon fonctionnement de ces lois. À cette fin, nous avons besoin de lois du travail qui soient bonnes, solides, justes et équitables.
Nous avons besoin de plus encore. Nous avons aussi besoin de règlements gouvernementaux raisonnables, et non de règlements trop encombrants, qui font que les entreprises passent plus de temps à chercher comment remplir tous les formulaires qu'à exercer leurs activités.
La confidentialité et la protection de la propriété intellectuelle doivent être garanties. Cette garantie est particulièrement importante aujourd'hui que l'industrie est surtout fondée sur le savoir. Il faut absolument protéger la propriété intellectuelle.
Nous devons aussi garantir la protection de la vie privée. Il faut protéger le caractère privé des personnes, des entreprises et du gouvernement. Les députés sont sûrement au courant de ce qui s'est passé en juillet dernier. Une entreprise devait détruire des documents, mais, au lieu de les déchiqueter, elle les a vendus pour réaliser un profit. Certains documents étaient très importants, de sorte qu'il y a eu de graves violations des dispositions sur la protection de la vie privée dans cette entreprise. Nous avons des lois mais quelque chose a mal tourné, parce qu'il n'y avait personne pour surveiller et veiller à ce qu'elles soient observées. Il ne suffit pas d'avoir de bonnes lois et de bons règlements, il faut qu'ils soient appliqués.
Il faut qu'il y ait des emplois. Pour cela, nous savons, après avoir été témoins de nombreux cas, qu'il faut à tout prix réduire les impôts. Selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, de grandes sociétés et des individus qui créent des emplois, la création d'emplois dépend avant tout d'une baisse des impôts. Une hausse des impôts entraîne inévitablement une baisse des emplois. C'est un fait pour lequel il existe des preuves irréfutables.
La structure fiscale est à la hausse au Canada. Les taxes et impôts que nous acquittons sont en hausse. Il y a les taxes d'accise, la TPS, les taxes et impôts provinciaux, les impôts sur le revenu, les impôts fonciers et d'autres encore.
Il y a aussi un autre problème. Les gens disent qu'il nous faut des filets de sécurité solides. Le meilleur filet de sécurité du revenu possible, c'est que les gens puissent avoir des emplois bien rémunérés. Voilà le filet de sécurité qui donne vraiment des résultats. Quels que soient les filets de sécurité que nous ayons à offrir aux gens qui ont le malheur d'en avoir besoin, nous devons nous assurer que les prestations offertes par ce programme ne soient pas plus élevées que le revenu provenant d'un emploi rémunéré.
Quand des gens occupant un emploi rémunéré gagnent moins que ce qu'ils pourraient obtenir d'un programme social, cela n'incite pas à chercher un emploi rémunérateur.
Je crois que l'État a le devoir de veiller à ce que les conditions dans lesquelles fonctionnent les entreprises permettent de soutenir l'esprit d'entreprise pour exercer un emploi rémunérateur, créer des emplois et ainsi de suite.
Nous devons passer à ce que je considère comme le caractère superficiel de la réflexion que le gouvernement a consacrée à la préparation et à la présentation de la mesure à l'étude. Nous venons d'entendre la secrétaire parlementaire dire que la Monnaie royale avait été constituée en société il y a environ dix ans. Comme il n'y a eu aucun examen de la loi depuis dix ans, nous ferions mieux de bien l'examiner. Cela doit être une des raisons les plus profondes de faire une chose que j'aie jamais entendue.
Nous avons une loi. Elle donne de bons résultats. La secrétaire parlementaire a reconnu que la présidente de la Monnaie royale accomplit un travail excellent, et je suis d'accord avec elle. La Monnaie royale fait ce qu'elle a à faire. Elle est profitable. Nous devons examiner la loi pour nous assurer de bien connaître le texte sous l'égide duquel elle fonctionne. Elle fonctionne très bien. Voilà cependant la raison pour laquelle on présente la mesure à l'étude. Comme nous n'avons pas examiné cette loi depuis dix ans, il vaudrait mieux nous y appliquer.
Nous devons augmenter le pouvoir d'emprunt de la Monnaie royale. À l'heure actuelle, elle a le droit d'emprunter jusqu'à 50 millions de dollars. Le projet de loi propose de porter son pouvoir d'emprunt à 75 millions de dollars. Pourquoi? Pour tirer profit de tous les débouchés commerciaux qui pourraient se présenter.
En comité, j'ai été renversé de voir mes vis-à-vis écouter les arguments présentés. Devinez un peu de quoi il s'agissait? On a déclaré qu'à un certain moment au cours des dix dernières années, la Monnaie royale canadienne a eu la possibilité d'acheter un hôtel de la monnaie dans un autre pays. Cependant, elle n'a pas pu, parce qu'il lui aurait fallu emprunter plus de 50 millions de dollars.
Il n'a jamais été question de savoir si la Monnaie royale avait raison de vouloir acheter des hôtels de la monnaie dans d'autres pays. Ce serait pourtant un débat utile.
Pourquoi la Monnaie royale canadienne aurait-elle besoin d'acheter un hôtel de la monnaie à l'étranger? Cette question fondamentale n'a pas été abordée.
Examinons un autre aspect de la question. Parlons du nombre de membres du conseil d'administration. Selon le projet de loi, leur nombre varierait entre neuf et onze. La loi actuelle fixe ce nombre à onze. Dans le projet de loi, on parle de neuf à onze. Pourquoi? Est-ce pour se donner de la souplesse et économiser?
Si le véritable but de la mesure est d'économiser, je crois que l'on devrait fixer ce nombre à neuf. Pourquoi aller jusqu'à 11? S'il est parfois bon d'avoir neuf membres et parfois 11, pourquoi ne pas fixer ce nombre à neuf, surtout si le but est d'économiser?
M. John Solomon: Est-ce que cela vaut la peine d'être débattu? C'est un point plutôt banal.
M. Werner Schmidt: Oui, c'est important et voici pourquoi: il ne s'agit pas simplement d'argent, mais aussi de la manipulation possible des décisions par le conseil. S'il semble que la question doit être réglée et qu'ils voient qu'ils n'auront pas gain de cause avec neuf membres, ils pourront en nommer rapidement deux autres qu'ils savent appuyer leur position.
M. John Solomon: Faut-il s'en étonner?
M. Werner Schmidt: Cela ne me surprend pas du tout.
Ce que j'essaie de signaler, non seulement au député, mais aussi aux députés d'en face, c'est qu'il ne s'agit pas d'une réflexion approfondie. Il s'agit d'une pensée superficielle, manipulatrice et opportuniste qui permet à des personnes de tourner quelque chose à leur avantage, d'obtenir que leur volonté soit faite. Ce n'est pas dans l'intérêt de la population canadienne. C'est là ce que je veux faire valoir. Voilà pourquoi il vaut la peine de débattre de ce point, qu'il soit banal ou pas.
Je veux maintenant passer au quatrième point que je veux faire valoir, soit le rôle des sociétés d'État dans leur ensemble. C'est sans doute l'une des plus importantes questions dont la Chambre a été saisie depuis un bon bout de temps.
Je suggère à la secrétaire parlementaire de lire ce document. Il traite des institutions financières de la Couronne. Il a été publié par le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce.
Ce comité a examiné en profondeur les structures des sociétés et celles des sociétés d'État notamment. Le rapport traite de la nécessité de trouver des moyens rentables de fournir au public des programmes gouvernementaux axés sur l'entreprise. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement doit veiller à ce que les objectifs des politiques soient clairs; à ce que les mandats des organismes et des employés qui mettent en oeuvre les programmes soient clairs; à ce que les ressources publiques ne soient pas gaspillées à cause d'inutiles chevauchements au sein du gouvernement; et à ce que le gouvernement et le secteur privé agissent de concert le plus souvent possible, le gouvernement s'occupant de ce qu'il fait le mieux tout en laissant le secteur privé faire ce qu'il fait le mieux. Tels sont les quatre principes fondamentaux que nous devons respecter.
Il est révélateur que le comité en soit arrivé à une conclusion globale après avoir entendu tous les témoins et examiné toutes les études. Il a conclu que le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer quand le secteur privé ne répond pas à tous les besoins des entreprises qui le méritent. Autrement dit, le gouvernement doit intervenir pour combler les vides. À cette fin, le gouvernement doit employer un certain nombre de stratégies pour combler les vides. Cependant, quand les stratégies mènent à d'inutiles chevauchements et doubles emplois entre divers organismes gouvernementaux ou à la concurrence avec le secteur privé, l'inefficacité qui en résulte est préjudiciable à tout le monde.
C'est une déclaration assez puissante qui cadre fort bien dans le débat d'aujourd'hui sur le projet de loi C-41.
Depuis cinq ou six ans, et peut-être plus longtemps, le gouvernement incite les sociétés d'État à se financer elles-mêmes. Cela ne signifie pas simplement qu'elles doivent gérer leurs affaires efficacement. Cela va beaucoup plus loin. Non seulement elles doivent être efficaces et atteindre les objectifs supérieurs qui leur ont été fixés à l'origine, mais elles doivent enregistrer des bénéfices, afin de pouvoir verser des dividendes à l'actionnaire, qui se trouve à être le gouvernement.
Cela devient évident à la lecture de l'objet et de la mission de Postes Canada, de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, de la Monnaie royale canadienne et de la Banque de développement du Canada, pour n'en nommer que quatre. Il est évident que l'un des facteurs de motivation est le fait qu'une société qui se finance elle-même doit enregistrer des bénéfices.
Une voix: Une société qui se finance elle-même ne correspond pas nécessairement à une société qui enregistre des bénéfices. Elle ne fait que se financer elle-même.
M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, le député dit qu'une société qui se finance elle-même ne va pas nécessairement enregistrer de bénéfices. Il a tout à fait raison, mais ce n'est pas ainsi que le ministre des Finances, le premier ministre, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux ou le ministre de l'Industrie voient les choses. De l'avis de ces ministres, une société qui se finance elle-même doit enregistrer des bénéfices et verser des dividendes au gouvernement du Canada. C'est ce que les sociétés d'État doivent faire.
Une société d'État est un organisme tout à fait unique. Elle n'est ni publique ni privée. C'est une sorte d'hybride. Nous devons examiner la confusion que cette situation a suscité au sein de la fonction publique. Les sociétés d'État ne savent plus très bien ce que devraient être leur rôle, leurs objectifs, leur philosophie, leur style de gestion et leur vision. Nous considérerons chacune d'entre elles de façon plus précise.
Pour ce qui est du rôle et des objectifs des sociétés d'État, ces dernières doivent dans chaque cas se poser les questions suivantes. Nos services sont-ils axés sur la clientèle ou plutôt sur des intérêts politiques? Qu'est-ce qui importe le plus pour nous, nos clients ou nos maîtres politiques? Quel est notre but? C'est le deuxième point de confusion. Notre but est-il de combler un vide laissé par le secteur privé ou plutôt de faire croître nos bénéfices et de concurrencer directement avec le secteur privé en nous lançant dans des affaires plus lucratives? J'ai des exemples de chacun de ces cas.
Au chapitre de la philosophie, les sociétés d'État doivent se demander si elles devraient servir le public et leurs clients au meilleur de leurs connaissances ou si elles devraient plutôt se pencher sur les intérêts politiques de leur associé, c'est-à-dire le gouvernement.
En ce qui concerne le style de gestion, elles doivent se demander si elles devraient favoriser le travail d'équipe constant et attentionné qui permet à l'employé et à l'employeur de travailler ensemble à la réalisation d'objectifs d'entreprise qui bénéficient aux uns comme aux autres ou si elles doivent plutôt représenter l'autorité du gouvernement et déterminer ce qu'il convient que les employés fassent quoi qu'il advienne.
On l'a vu de façon plus précise dans le conflit qui a opposé récemment la Société canadienne des postes et ses franchisés. Tout a commencé le 1er avril lorsque la Société a dit à ses franchisés que les offres qu'on leur avait faites étaient finales. Ces derniers n'ont pas apprécié cela du tout; ils ont trouvé la situation très troublante. La Société des postes a repoussé sa décision jusqu'au 1er octobre. Elle a dit qu'elle mènerait de nombreuses consultations. Elle n'a pu respecter cet objectif et a donc décidé d'attendre au 1er décembre, soit demain.
Nous ne savons toujours pas ce qu'elle fera. Elle a réalisé les diverses consultations. J'ai parlé à des franchisés d'un bout à l'autre du pays, et chacun d'eux a affirmé que ces consultations étaient à sens unique, que le programme était établi, qu'on leur disait comment le présenter et qu'on leur expliquait ce qu'il allait changer pour eux. On n'y a fait aucune modification particulière, à moins qu'on le fasse aujourd'hui et qu'on en entende parler demain.
Ce n'est pas exactement dans ses intérêts.
Une voix: Vous faites du très bon travail.
M. Werner Schmidt: Je suis très content. J'ai réussi à impressionner au moins une personne. La secrétaire parlementaire devrait vraiment écouter.
Une voix: Ils dorment tous.
M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, ils dorment tout le temps. C'est pour cette raison qu'ils n'ont pas analysé cette mesure en profondeur. Ils ne savent toujours pas de quoi il retourne dans ce projet de loi.
Une voix: Je parlais des sénateurs libéraux.
M. Werner Schmidt: Je suis très heureux, monsieur le Président, que le ministre chargé du commerce se soit finalement réveillé et qu'il écoute ce qui se dit de ce côté-ci de la Chambre. Il était temps.
M. Howard Hilstrom: Monsieur le Président, avec toutes les conversations qui se poursuivent parallèlement à l'intervention du député, j'ai de la difficulté à suivre le débat et j'aimerais bien y participer.
Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Selkirk—Interlake a le droit de participer au débat comme tous les autres.
M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir remis un peu d'ordre à la Chambre.
Ce qu'il faut reconnaître, c'est qu'il y a des questions d'intérêt supérieur concernant les objectifs, l'idéologie, le centre d'intérêt et le style de gestion. Il y a d'autres questions qui doivent vraiment être examinées.
La société d'État vient-elle compléter les entreprises du secteur privé ou est-elle en concurrence avec elles?
Un fait revêt une importance toute particulière dans le cadre de cette question, à savoir le récent accroissement des pouvoirs des sociétés de la Couronne dans le but de les rendre autonomes. La seule façon pour elles de le devenir est d'aller chercher des contrats lucratifs dans le secteur privé.
Permettez-moi de donner un exemple, la Banque de développement du Canada. Récemment, elle a fait paraître une réclame dans le Globe and Mail offrant aux Canadiens un CPG garanti par des titres cotés sur la bourse japonaise. La banque dit que si le CPG est encaissé à maturité, soit dans sept ans, le capital est garanti. Quoi qu'il arrive sur le marché, l'investisseur récupérera son capital. Dans l'entremise, l'intérêt que rapportera le CPG dépendra directement de la performance de la bourse japonaise.
Que fait la Banque de développement du Canada sur ce marché? Ce n'est pas une institution de dépôt. Elle a été créée pour venir en aide aux PME et, plus particulièrement pour développer le secteur du savoir.
Si on compare les capitaux fournis par la Banque de développement du Canada aux PME à ceux que leur ont fournis les banques à charte, on s'aperçoit que la Banque de développement du Canada fait piètre figure. En fait les banques à charte font du meilleur travail que la Banque de développement du Canada.
C'est une société de la Couronne. Et que fait-elle? Elle n'atteint pas l'objectif pour lequel elle a été créée. Elle fait autre chose. Elle se lance dans un secteur qui est desservi par d'autres organisations du secteur privé.
Il faut se poser une seconde question. Est-ce que les sociétés de la Couronne délaissent les secteurs à haut risque ou à bénéfices peu élevés au profit de secteurs plus lucratifs? J'ai une ou deux choses à dire à ce sujet.
Je voudrais citer ici le cas des coopératives de crédit et celui de la Société du crédit agricole. Voici ce qu'ont dit les porte-parole des coopératives de crédit lorsqu'ils ont comparu devant le comité: «Aujourd'hui, la Société du crédit agricole étant elle-même aux prises avec des pressions voulant qu'elle atteigne son propre seuil de rentabilité, elle cherche à percer les marchés qui ont été les nôtres traditionnellement. Cela nous pose de sérieux problèmes. Ce n'est pas que nous nous refusons à nous asseoir et à travailler avec elle là-dessus. Cependant, c'est une chose de parler de partenariat et c'en est une autre de discuter dans le détail de ce que signifie le partenariat et du rôle qui reviendra à chacun.»
Voici donc les coopératives de crédit, des organismes privés, qui sont en concurrence directe avec la Société du crédit agricole, une société d'État. Elles oeuvrent essentiellement dans le même domaine. La SCA s'aventure dans un secteur moins risqué qu'à l'accoutumée et qui n'était pas le sien à ses débuts.
Les cas de cette nature sont évidemment beaucoup trop nombreux pour que nous puissions les évoquer tous ici. Nous devons nous pencher très sérieusement sur le véritable rôle des sociétés d'État.
Je voudrais maintenant m'arrêter à la dernière partie de ce rapport. Deux personnes ont fourni des avis d'experts et il faut en savoir gré à la secrétaire parlementaire.
Le professeur Trebilcock, de l'Université de Toronto, a affirmé, devant le comité chargé de la question dont nous sommes saisis:
Il ne suffit pas, dans la plupart des circonstances, y compris celles qui vous intéressent, de repérer un cas où le gouvernement peut intervenir et de conclure, parce qu'une forme d'intervention gouvernementale est nécessaire, que cette intervention devrait se faire par le biais d'une société d'État. Les gouvernements disposent d'une vaste gamme d'outils d'intervention. Dans chaque cas, nous devons demander: est-ce que cet outil constitue le choix approprié pour atteindre cet objectif en particulier?
Dans notre étude de 1982, nous nous sommes particulièrement intéressés à la question des frontières institutionnelles. Au lieu de se servir des sociétés d'État, pourquoi le gouvernement ne recourt-il pas davantage au régime fiscal, à la réglementation ou à l'octroi de subventions, de façon que les entreprises du secteur privé respectent les objectifs établis dans la politique gouvernementale? Pour dire les choses plus crûment: y a-t-il jamais une justification à l'existence d'une société d'État, dans quelque contexte que ce soit? Par contre, ne peut-on pas imaginer que les gouvernements puissent atteindre leurs objectifs en recourant au régime fiscal, aux subventions ou aux outils de réglementation destinés au secteur privé?
Ensuite, il est allé encore plus loin. Il a déclaré:
Pour déterminer s'il y a une lacune à combler (et pour choisir l'outil le plus pertinent), je crois qu'il faut prouver clairement que le marché ne fonctionne pas bien—monopoles, biens publics, externalités, manques sur le plan de l'information—et toujours se demander a) si le gouvernement peut faire mieux que le secteur privé et b) quel outil sera, pour combler cette lacune, le plus rentable et le moins susceptible d'avoir des effets fâcheux sur d'autres objectifs. Il faut se demander par exemple si le marché des PME suscite une concurrence suffisamment vive entre les institutions financières du secteur privé. Un organisme public est-il mieux outillé que le secteur privé pour évaluer les perspectives d'avenir d'une entreprise de haute technologie? Certaines activités de haute technologie ont-elles des retombées économiques et sociales (externalités) favorables que les agents privés ne sont pas en mesure d'exploiter pleinement, de telle sorte que les investissements du secteur privé dans celles-ci sont inférieurs au niveau optimal? Un organisme gouvernemental peut-il réduire les frais de transaction fixes que doivent assumer les prêteurs privés qui font affaire avec les petites entreprises?
Voilà les questions clés que pose un érudit important dans ce domaine.
Vient ensuite une application d'ordre pratique de Peter Kemball de la société Acorn Partners. Il déclare: «C'est, au fond, un problème fondamental qui relève de l'économique et, après avoir suivi la situation pendant des années, j'en conclus que, même si ces organisations»—ces sociétés d'État—«ont donné d'excellents résultats, ces derniers se seraient concrétisés autrement.»
Il a poursuivi en ces termes: «En fait, c'est aussi ce qu'a soutenu le ministre des Finances dans un contexte différent. En principe, nous n'avons pas besoin du secteur public pour que ces résultats se concrétisent. Dans un sens précis, il est parfaitement exact qu'une transaction précise ne se serait pas produite en l'absence d'une telle organisation. Mais, en gros, c'est un échec de la politique. Nous n'avons pas établi correctement les règles générales. C'est pourquoi nous avons maintenant ces organisations.»
Le comité a recommandé que des politiques d'intérêt public, certains aspects du régime fiscal par exemple, des programmes publics tels que la Loi sur les prêts aux petites entreprises et des institutions publiques comme les institutions financières fassent l'objet d'un examen, afin que des modifications soient apportées pour encourager l'élaboration de nouvelles initiatives sur les marchés de capitaux.
En terminant, je dirai qu'il est important ici de reconnaître que la Monnaie est une société d'État et qu'il n'y a pas eu d'analyse approfondie sur la nécessité de modifier la loi. Personne n'a démontré qu'il était nécessaire d'augmenter le pouvoir d'emprunt pour le porter de 50 à 75 millions de dollars. Pourquoi? Parce que, en ce moment, il y a seulement un prêt de 14 millions de dollars à rembourser, dont un prêt à long terme de 9 millions de dollars et un prêt à court terme de 5 millions de dollars.
Bien sûr, il est possible d'emprunter jusqu'à un certain point et il est nécessaire d'emprunter de temps à autre pour satisfaire des besoins de liquidités. J'en conviens entièrement. Toutefois, cela ne signifie pas qu'elle peut emprunter 25 millions de plus, sauf pour une chose, la Monnaie va maintenant entrer en concurrence directe avec des institutions, des organismes et des entreprises privées comme Westaim. C'est dans ce but que l'on a construit à Winnipeg une addition de 30 millions. Surprise, si l'on prend les 14 millions actuels et les 30 millions de l'usine de Winnipeg, on se trouve au maximum autorisé, d'où les 25 millions supplémentaires.
Je peux comprendre cela, mais cela signifie que la Monnaie s'éloigne de son but premier, la frappe des pièces, et entre dans la fabrication et le placage des blancs, ce qui concurrence directement le travail d'une entreprise privée de Fort Saskatchewan. Les électeurs ne sont pas d'accord.
On étend ses pouvoirs. Nous n'avons pas encore parlé de la façon dont on a étendu les pouvoirs de la Monnaie. En lui permettant d'avoir les pouvoirs d'une personne naturelle, elle peut créer des filiales et acheter d'autres entreprises. Elle peut faire à peu près tout ce qu'elle veut. C'est fondamentalement mauvais et contraire au but et au rôle des sociétés d'État qui sont de suppléer aux lacunes dans le secteur privé et de servir des besoins qui ne sont pas satisfaits.
C'est pour cela que nous ne sommes pas d'accord. Cela n'a rien à voir avec l'administration de la Monnaie ou son fonctionnement actuel.
[Français]
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir à la Chambre, en ce beau jour du 30 novembre, pour parler de questions monétaires.
Avant d'aborder ce sujet, je veux rappeler à mes concitoyens de Chambly de ne pas oublier d'aller voter, parce que pour eux, comme pour tous les Québécois, c'est aujourd'hui une journée très importante. Les sondages démontrent que les Québécois et Québécoises sont anxieux d'aller voter, qu'ils ont le goût de faire cet effort démocratique.
Je les invite à le faire avant l'émission très populaire, La petite vie, qui est diffusée ce soir et qui attire autant d'intérêt, en une journée comme celle-ci, que le vote au Québec. Donc, je les invite à aller voter avant La petite vie, et après cela, ils auront tout le loisir de regarder leur émission favorite.
Le projet de loi C-41, celui dont on discute aujourd'hui, répond à des impératifs, et on en convient. Par exemple, la Monnaie royale canadienne, «la Monnaie», comme on l'appelle dans le projet de loi, se lance en affaires, en «business», comme on dit. Sa présidente, Mme Lépine, dit que la Monnaie est très bien cotée dans le monde et qu'elle frappe de la monnaie, non seulement pour le gouvernement canadien, mais elle a également des contrats avec d'autres pays pour frapper leur monnaie.
On a donné l'exemple de quelques pays qui n'ont pas les moyens techniques et le soutien nécessaire pour émettre leur propre monnaie. Ils font donc appel à un contractant, qui est le gouvernement du Canada, c'est-à-dire la Monnaie royale canadienne, pour imprimer leurs billets et frapper leurs pièces de monnaie.
Comme le disait la secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics, le Canada peut être fier de la monnaie qu'il produit. Elle est, incidemment, une des plus belles au monde. J'ai participé aux mêmes voyages que la secrétaire parlementaire et on a vu que notre Monnaie royale ne nous fait pas honte à l'extérieur du Canada. Pour ce qui est du pouvoir d'emprunter, qui choquait un peu l'intervenant précédent et qui passera de 50 à 75 millions, j'estime que c'était nécessaire.
C'est nécessaire parce que le Canada, étant donné qu'il accepte des contrats pour la fabrication de monnaie pour des pays étrangers, doit être compétitif. En comité parlementaire, Mme Lépine nous disait que, malheureusement, une entreprise impliquée dans la frappe de la monnaie—je pense que c'était en Angleterre—fut récemment mise en vente. La Monnaie royale canadienne n'a pas pu présenter d'offres et s'en porter acquéreur parce qu'elle n'avait pas, d'une part, la capacité juridique de le faire et, d'autre part, les moyens financiers pour le faire. Si la première condition n'avait pas existé, on aurait pu le faire avec la deuxième, c'est-à-dire avoir les capitaux nécessaires pour se porter acquéreur de cette entreprise qui était, apparemment, une très bonne affaire. Finalement, ce sont les Allemands, qui sont nos compétiteurs dans ce genre d'entreprises, qui l'ont acheté et qui vont probablement en bénéficier et en profiter largement.
On peut être pour un projet de loi et trouver, comme c'est le cas pour le projet de loi C-41, des motifs de se réjouir. Malheureusement toutefois, lorsqu'on commence l'étude de ce type de projet de loi, c'est souvent ce qui ne s'y trouve pas qui pose des problèmes. C'est souvent ce que le projet de loi ne contient pas ou ne modifie pas qui crée un problème.
Je pense par exemple à l'article 3.1(2) de la Loi sur la Monnaie royale canadienne qui donne à cette institution le pouvoir de racheter ses actions qui avaient été émises il y a plusieurs années. On parle ici de 4 000 actions à 10 000 $ chacune en faveur d'un seul actionnaire, soit le gouvernement canadien. Cela fait un capital-actions de 40 millions de dollars. Le projet de loi C-41 est muet là-dessus.
L'article 3.2 de la loi actuelle, qui n'est pas modifié par le projet de loi C-41, stipule, et je cite:
Sur demande du ministre et après consultation du conseil, la Monnaie rachète au ministre tout ou partie des actions qu'elle a émises en faveur de celui-ci, selon les directives de ce dernier.
Le prix de rachat est identique à la valeur des actions au moment de leur émission.
Donc, en 1969, lorsqu'on a émis les 4 000 actions à 10 000 $ chacune, on a gelé le prix à ce niveau. Cela pouvait être compréhensible, comme nous le disait la présidente de la Monnaie royale canadienne, Mme Lépine. Le seul actionnaire était le gouvernement et tous les membres du conseil d'administration de la Monnaie royale canadienne étaient également des mandataires du gouvernement. Il y avait donc peu ou pas de chance que la valeur des actions ne soit modifiée. Si éventuellement elle devait l'être, c'est le gouvernement qui, d'une façon ou de l'autre, en bénéficierait.
Par le projet de loi C-41, on confère la personnalité juridique à la Monnaie royale canadienne, avec le pouvoir de racheter ses propres actions.
Mon collègue, le député d'Hochelaga—Maisonneuve, a entrepris des cours de droit, cet automne, pendant ses moments libres. Il est quand même un universitaire diplômé et qualifié, mais il a voulu parfaire ses connaissances. Je suis sûr qu'il va se qualifier au terme de ses brillantes études avec un certificat de très grande distinction. Pour son bénéfice, puisque c'est un ami, et aussi pour le bénéfice des députés d'en face, notamment le député de Winnipeg qui a le nez dans ses livres actuellement, je veut dire que l'achat et le rachat, en droit corporatif, sont deux choses complètement différentes.
Le rachat s'exécute sans l'accord du racheté. La Monnaie royale canadienne, dans le cas présent, pourrait dire au ministre: «Voici, nous avons des surplus et nous avons décidé de racheter nos actions. Les 4 000 actions à 10 000 $ qu'on a émises en 1969, voici 40 millions de dollars cette année et remettez-nous les actions.» C'est ce qu'on appelle le rachat. La volonté du racheté, du gouvernement ou du ministre dans ce cas-ci, n'est pas absolument nécessaire à la transaction.
C'est donc la différence entre l'achat et le rachat. Dans l'achat, on s'entend, c'est une transaction qui est faite de gré à gré. Il y a un élément d'accord, de «consensualisme», qui fait que l'achat comparativement au rachat, ce n'est pas tout à fait pareil.
On dit, à l'article 3.2 qui n'est pas modifié par le projet de loi C-41, que «le rachat se fait à la valeur de l'émission». Du même souffle, on confère à la Monnaie royale canadienne ce qu'elle réclame depuis longtemps, c'est-à-dire les pouvoirs d'une personne physique, la capacité juridique et les pouvoirs y afférents, donc le pouvoir d'acheter—le projet de loi le dit—une ou plusieurs corporations, peu importe, au Canada ou à l'extérieur du Canada.
Si la Monnaie royale canadienne fait des placements heureux et des acquisitions heureuses, ses actions peuvent prendre de la valeur. Les 4 000 actions à 10 000 $ chacune qu'elle a émises en 1969, si elle acquiert des compagnies, des distributeurs, des affineurs d'or ou des gens qui oeuvrent dans le domaine, forcément, ces actions vont prendre de la valeur. Je vois le député d'en face, mon ami du comté où sont situées les bases militaires de Petawawa, dont j'oublie le nom précis, qui opine du bonnet. Il sait que j'ai raison d'affirmer ce que j'affirme, et je l'en remercie d'ailleurs.
Si un jour la Monnaie royale décide de se privatiser, c'est là qu'est le danger. Pendant deux, trois, quatre, cinq, dix ans, la Monnaie royale canadienne fait des acquisitions, fusionne et transige à gauche et à droite et ses actions valent un bon montant. On n'aura peut-être pas toujours des ministres avec la probité de ceux qu'on connaît, notamment le ministre actuel des Travaux publics qui gère tout cela et qui en a la responsabilité. Les Canadiens pourraient se faire avoir, parce qu'on leur dirait: «Nous avons racheté nos actions à 10 000 $ l'action, même si leur valeur véritable est supérieure, et nous les avons revendues 10 000 $ chacune. Il n'y a pas eu de perte pour nous.» Cependant, il aurait pu y avoir un gain.
C'est ce genre de mouvement qu'il faut prévoir lorsqu'on discute d'une législation importante comme le projet de loi C-41.
Qu'on ne me dise pas que ce genre de choses que je dénonce est impossible. J'ai entre les mains le rapport du vérificateur général du Canada d'octobre 1997, au chapitre 20, qui traitait justement de la privatisation du Groupe Communications Canada, l'Imprimerie nationale, comme on se plaisait à l'appeler jadis ici.
Les conclusions du vérificateur général sont loin de faire l'éloge du gouvernement actuel et du ministère des Travaux publics de l'époque, même si ce n'était pas le ministre actuel qui en était le ministre à l'époque. Mais on a fait une transaction qu'on a présentée sans doute au Conseil des ministres comme étant une bonne transaction, quelque chose qui ne conduisait pas directement au ciel, mais sur la bonne voie du ciel, et on devait réussir avec cela.
On a présenté des chiffres qui n'étaient malheureusement pas à la fine pointe de l'actualité dans ce domaine. On a présenté des projections sur trois ans, signale le vérificateur général, des projections qui étaient moins intéressantes, parce que l'Imprimerie nationale, c'est-à-dire le Groupe Communications Canada, avait investi dans des nouvelles technologies, et ces amortissements, pris dans les trois premières années, faisaient que le bénéfice espéré des opérations était moindre. Le vérificateur général dit que si on l'avait calculé sur cinq ans, après avoir pris des amortissements, les données auraient été très différentes.
On a vendu les presses, et on a donné à l'acheteur éventuel une espèce de préférence d'achat pour cinq ans de tous les contrats gouvernementaux de moins de 100 000 $. Donc, dans les ministères, on peut dire qu'on fait imprimer, par exemple, le rapport du vérificateur. Cela coûte moins de 100 000 $; donc, on appelle le Groupe Saint-Joseph qui a acheté les presses et il va le faire sans appel d'offres pour 100 000 $. Actuellement, 95 p. 100 des travaux d'impression accordés par le gouvernement canadien coûtent moins de 100 000 $. Cela veut dire que le Groupe Saint-Joseph, qui s'est porté acquéreur de Groupe Communications Canada, s'est vu conférer un avantage que tous ses compétiteurs dans le marché n'ont pas.
Je pense que je rejoins le député du Parti réformiste qui s'inquiétait de ce genre d'attitude, et à bon droit. Le vérificateur général du Canada n'est pas tendre non plus pour ceux qui ont décidé de vendre le Groupe Communications Canada, les presses nationales.
Entre le moment du dépôt des soumissions et le moment de la conclusion de la transaction, c'est-à-dire l'acte de vente, entre novembre 1995 et mars 1996, par exemple, lorsque vient le moment de signer l'acte définitif de vente, on s'aperçoit qu'il y a un petit montant de 454 000 $ qui est à l'avantage de l'offrant. Est-ce que tous les autres soumissionnaires étaient au courant de cela? Il semble que non. Celui qui a été retenu comme offrant le plus voit son prix diminuer de 454 000 $.
En faisant le même calcul, en examinant ces choses-là, on s'aperçoit qu'ailleurs également, il y a une petite imprécision de 150 000 $. On est rendu à 604 000 $. C'est au-delà du demi-million de dollars qui favorisent le Groupe Saint-Joseph. Et le vérificateur général continue pendant des pages et des pages à dénoncer cette transaction. Il ne la condamne pas, parce que c'était la première privatisation d'importance que ce gouvernement avait décidé de faire. Mais on voit qu'il est en train de mettre la table à plusieurs privatisations.
Ce qui m'inquiète actuellement, c'est le jour de la privatisation de la Monnaie royale canadienne, parce qu'on sait que traditionnellement, quand une entreprise est en difficulté, on en fait une entreprise publique, on l'achète. Quand elle fait de l'argent, on la revend à ses chums. On fait assumer le déficit par la population en général, et on fait partager les bénéfices à une gang d'amis qui, comme par hasard, sont rarement des partis d'opposition. Ce sont plus souvent des amis du bon côté.
C'est ce genre de critique qu'il faut arrêter. Il faut mettre en place les dispositions faisant que ce genre de critique ne puisse pas se reproduire, que ces affaires soient loin de la pensée des politiciens et des législateurs.
C'est pourquoi je dis que si on avait été animés de la plus entière bonne foi, on aurait dû modifier, dans le projet de loi C-41, le fameux paragraphe (2) de l'article 3.2 et dire que le prix de rachat sera égal à la juste valeur marchande des actions au moment du rachat.
Si le prix fluctue, s'il va à la hausse comme on l'espère, le gouvernement en profite. S'il va à la baisse, déjà le gouvernement étant le seul et unique actionnaire, si la valeur des actions allait à la baisse, c'est le gouvernement qui épongerait le déficit, qui comblerait dans la cagnotte le manque à gagner.
Si, actuellement, on ne parle pas de privatiser la Monnaie royale canadienne, il n'est pas impensable que dans un avenir pas trop lointain, on en parle un jour. Il faudrait faire en sorte que ce genre de transaction, si elle est désirée et souhaitée par les Canadiens et les gouvernants, se fasse en ayant l'apparence de la plus transparente et la plus translucide des transactions. On s'éloigne de cela.
On s'en éloigne davantage lorsqu'on dit que la Monnaie royale canadienne pourra acheter des entreprises, des biens, des immeubles, toutes sortes de choses, mais qu'on ne précise pas dans le projet de loi que le vérificateur général du Canada aura le pouvoir de faire la vérification de ces entreprises possédées par la Monnaie royale canadienne.
Une autre affaire boiteuse, une autre chose qui peut nous permettre de nous questionner, car on ne l'a pas fait là-dedans. Une bonne journée, je m'interrogeais. Il y avait, dans mon comté, un bureau de poste qui a le malheur d'être foutu dans le milieu du stationnement d'un centre commercial. Les propriétaires de ce centre commercial, de part et d'autre, ont les yeux sur le bureau de poste depuis toujours. Ils se disent: «Si jamais on vend cela, on voudrait bien être informés. On voudrait bien le savoir. On serait intéressés à l'acheter.» Je ne sais pas d'où était partie la rumeur, mais la même matinée, je reçois deux appels téléphoniques à mon bureau, des deux propriétaires du centre commercial qui me disent avoir entendu dire que le bureau de poste serait à vendre. J'étais surpris, je n'avais pas moi-même entendu cette rumeur.
J'ai appelé la Société canadienne des postes et on m'a confirmé que c'était une rumeur qui venait d'on ne sait où. Ils ont ajouté que si la Société canadienne des postes décidait de donner le bureau de poste, à un organisme de charité, je présume, même là, les parlementaires et le gouvernement n'auraient pas un mot à dire. Le seul moment où le gouvernement peut dire quelque chose, c'est lorsque la Société canadienne des postes présente son bilan annuel et qu'elle dit au gouvernement: «Je vous ai donné x millions de dollars en bénéfices, ou je vous réclame tant de millions de dollars en déficit.» C'est là seulement que le gouvernement peut intervenir et faire valoir son autorité, ou sa mollesse, un des deux.
Dans la gestion courante, dans le contrôle des actifs et du passif, le gouvernement n'a pas un mot à dire. Cela arrive de plus en plus fréquemment avec des sociétés de la Couronne. C'est ce qu'il faut limiter. Cela ne devrait même pas exister. Malheureusement, je ne sais pas en vertu de quel principe, mais le gouvernement lance des projets de loi comme ça. On sait qu'on est minoritaires, on ne se fait pas d'illusions, mais en vertu des principes d'une saine gestion, on devrait avoir un mot à dire.
Je vois mon ami, le député de Charlevoix, qui est un homme prospère et qui gère ses choses comme il faut; loin de lui l'idée de garrocher ses chiffres dans le fond d'un tiroir et de ne jamais rendre des comptes ni à son épouse, ni à ses enfants, ni à lui-même.
Un bon gestionnaire doit, d'abord et avant tout, rendre compte à lui-même de sa gestion et, ensuite, diffuser l'information aux citoyens du Canada surtout lorsqu'on est un gouvernement qui se dit responsable.
Que l'on ne puisse pas racheter les actions à leur juste valeur marchande, et aussi que le vérificateur général du Canada n'ait pas l'autorité de vérifier les filiales des compagnies possédées par la Monnaie royale canadienne, étaient pour nous des préoccupations majeures.
Je m'inquiète moins de la compétition. Mon ami du Parti réformiste disait qu'il y a une compagnie dans l'Ouest canadien—il l'a nommée, mais je ne me rappelle plus le nom—, qui a les connaissances et les techniques pour frapper de la monnaie. Toutefois, la Monnaie royale canadienne vient concurrencer cette compagnie qui paie des impôts à Ottawa. Donc, on se sert des impôts de cette compagnie pour la concurrencer et la sortir du circuit.
Si cela est vrai, je suis d'accord avec le député pour dire qu'il y a là quelque chose d'anormal. À propos de ce cas particulier, j'ai entendu les gens de la Monnaie royale dire: «Cette compagnie-là est débordée et ne suffit pas à la demande. Récemment, on avait une commande de pièces de 10 cents qu'on a été obligée d'envoyer à un contracteur à l'extérieur du Canada parce que la compagnie en question—celle mentionnée par le député—ne pouvait pas nous fournir nos pièces de 10 cents dans le temps voulu et au moment voulu».
La Monnaie royale canadienne ne devrait pas faire concurrence aux entreprises, mais encore faut-il qu'elles soient concurrentielles. Lorsqu'on a besoin de pièces de 10 cents pour le 1er décembre ou de pièces de 1 $ pour le 1er janvier, il ne faut pas qu'elles arrivent le 30 mars parce que là, cela ne fonctionne plus. Il faut respecter les échéanciers. Tous ici savent que dans le domaine de l'argent, les échéanciers sont très importants. C'est une reprise de la maxime qui dit que le temps, c'est de l'argent.
Je veux parler un peu des sociétés de la Couronne qui n'ont de compte à rendre, ni au Parlement, ni au vérificateur général, ni vraiment à personne, si ce n'est que de produire un rapport annuel montrant l'état de leur situation. Parfois, certaines d'entre elles ont le pouvoir de soustraire leurs chiffres, leurs données et leurs livres comptables à l'analyse du vérificateur général.
Parlons de la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Elle a été créée, en vertu de la Loi nationale sur l'habitation, au lendemain de la dernière guerre. L'économie était en progression et allait donner les familles de «baby boomers». Nos parents, qui arrivaient du Canada ou du Québec rural, allaient vers les grandes villes et voulaient participer à l'effort de reconstruction de l'économie. Ils voulaient s'inscrire dans le contexte d'une économie bouillonnante. Ils sont arrivés dans des villes comme Montréal et Québec.
C'est à ce moment-la que la Loi nationale sur l'habitation a été établie pour venir en aide à ces gens qui, autrement, n'auraient pu répondre aux critères des banques ou des prêteurs hypothécaires. Cela prenait par exemple une proportion de 25 p. 100 de paiement initial, en espèces sonnantes et trébuchantes, pour se porter acquéreur d'une propriété ou d'une maison. À l'époque, ces gens-là n'en avaient pas. Donc, la Loi nationale sur l'habitation a créé la Société canadienne d'hypothèques et de logement qui pouvait autoriser et garantir des prêts en fonction d'une mise de fonds initiale beaucoup moins élevée. On parlait à l'époque de 10 p. 100 de paiement comptant par rapport à la valeur totale de la propriété et, récemment, cette mise de fonds a été ramenée à 5 p. 100.
Si on demande de l'argent, un prêt à une société, et qu'elle ne possède pas 25 p. 100 de mise de fonds, on lui dit: «On va faire approuver, on va faire sécuriser, approuver ton prêt par la Société canadienne d'hypothèques et de logement. Si tu ne paies pas, c'est un moindre mal, on se retourne vers la Société canadienne d'hypothèques et de logement pour se faire payer. On t'enlève ta maison, on la remet à la SCHL et nous, on rentre à 100 p. 100 dans notre argent. La Société canadienne d'hypothèques et de logement s'organise avec ta maison.»
Tout cela ne se fait pas gratuitement. La Société canadienne d'hypothèques et de logement, pour étudier le dossier, charge 235 $. Il y a quelques semaines, compétition oblige, ils ont décidé de réduire cela pour un certain temps, à une époque ou personne n'achète de maison, de passer de 235 $ à 185 $, soit une réduction de 50 $.
On dit aux gens: «Vous versez 235 $, parce qu'on va évaluer votre dossier, on va évaluer la maison que vous vous promettez d'acheter et on vous dira si on vous prête.» Et cela ne s'arrête pas là, il y a d'autres frais. Il y a un barème: si vous empruntez moins de 50 000 $, c'est 1 p. 100; si vous empruntez de 50 000 $ à 100 000 $, c'est 1,5 p. 100; de 100 000 $ à 150 000 $, c'est 2 p. 100. Finalement, cela peut aller jusqu'à 3,5 p. 100. L'emprunteur, l'acheteur, qui n'est déjà pas riche, qui n'a déjà pas son 25 p. 100 de mise de fonds, on le poigne comme il faut, et on lui prête.
Par exemple, si on prête 100 000 $ à l'emprunteur, on dit: «On va te prêter 103 000 $, mais là-dessus on retient 3 000 $ pour ton assurance hypothécaire.» On réalise maintenant, et c'est de plus en plus fréquent, c'est presque une règle, que la Société canadienne d'hypothèques et de logement, qui endosse véritablement les emprunteurs, ne procède pas à l'évaluation de la propriété sur laquelle elle garantit les prêts. Tant et si bien que, fréquemment, la Société canadienne d'hypothèques et de logement prête 100 000 $ sur une maison, elle la reprend et s'aperçoit qu'elle vaut 45 000 $. C'est vrai, c'est courant.
On dit: «Ce n'est pas grave; on a chargé 2 000 $, 2 500 $, 2 800 $ à l'emprunteur. Tous ces montants accumulés font que même si on perd, ce n'est pas grave, on en a suffisamment pour payer le créancier hypothécaire et absorber une perte de 50 000 $, 60 000 $ ou 70 000 $ dans certains cas.» Il s'agit donc de 30 p. 100, 40 p. 100 ou 50 p. 100.
Je pense que la Société canadienne d'hypothèques et de logement fait preuve d'une mauvaise gestion. Lorsqu'on garantit quelque chose, il faut savoir à quoi on s'engage, comment on s'engage, ce qu'il va nous en coûter si cela tourne au vinaigre. Mais non. On a de l'argent en masse. On mange le beurre à la poignée à la Société canadienne d'hypothèques et de logement. On se dit que si l'emprunteur ne paie pas, ce sont les autres qui paieront.
Mais si la Société canadienne d'hypothèques et de logement faisait son travail, qu'elle évaluait toutes et chacune des bâtisses, ou si elle évaluait 50 p. 100 des bâtisses, alors qu'elle n'en évalue que 5 p. 100 actuellement au Québec, au lieu de charger entre 2 p. 100 et 3,5 p. 100 de frais à un emprunteur, peut-être que ces frais seraient réduits à 0,5 p. 100, ou au maximum à 1 p. 100. La Société canadienne d'hypothèques et de logement jouerait véritablement le rôle qu'on a voulu lui confier lorsqu'on l'a créée.
Mais non, c'est toujours sous la gouverne du ministre des Travaux publics. On est laxiste là-dessus, sans compter que souvent, on induit des gens en erreur, qui, de bonne foi, se retrouvent entre les mains de la Société canadienne d'hypothèques et de logement et présument de l'intérêt du gouvernement à les sauvegarder. Les gens disent: «J'offre 100 000 $ sur une propriété, si je me fais avoir, si vraiment elle ne vaut pas cela, la Société canadienne d'hypothèques et de logement me le dira; elle me refusera mon prêt. Elle va voir que je paie trop cher.» Mais non, ce n'est pas cela. La Société canadienne d'hypothèques et de logement ne les évalue pas.
C'est bon de faire confiance à un ministre, c'est bon de mettre ses espoirs et ses rêves dans les mains d'un ministre, mais il faut quand même être prudent.
Les ministres passent, comme les jours, mais ils ne se ressemblent pas tous, ce qui est rassurant. Lorsqu'on parle de grosses finances, par exemple, généralement, ils ont plutôt tendance à se ressembler. J'ai remarqué cela. Leur clientèle est souvent la même, quel que soit le parti politique au pouvoir et quel que soit celui qui gère les fonds publics.
Donc, je vais conclure là-dessus, mais je demande au ministre des Travaux publics que la prochaine fois, lorsqu'il déposera un projet de loi de nature purement technique et administrative comme celui qui est devant nous, le projet de loi C-41, d'aller plus à fond et de s'assurer des impacts véritables d'un tel projet de loi sur l'ensemble de la législation qui gère ou qui caractérise une activité quelconque du gouvernement.
Le Bloc québécois reconnaît quand même l'importance, pour la Monnaie royale canadienne, d'avoir des moyens de compétitionner et des possibilités d'avancement. Le Bloc québécois va appuyer le projet de loi en troisième lecture, mais avec beaucoup de réticence.
[Traduction]
M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de faire part à la Chambre cet après-midi du point de vue du Nouveau Parti démocratique sur le projet de loi C-41, Loi modifiant la Loi sur la Monnaie royale canadienne et la Loi sur la monnaie.
Je voudrais faire quelques remarques concernant notre position, ce que nous pensons qui est arrivé, et ce qui risque de se produire à l'avenir. Je voudrais faire part à la Chambre d'avis exprimés un peu partout par les Canadiens à propos de l'argent, de la monnaie, en particulier des pièces de un dollar et de deux dollars.
Le projet de loi modifie la Loi sur la Monnaie royale canadienne pour mettre à jour la terminologie en matière de pièces de monnaie de façon qu'elle reflète les marchés visés plutôt que les métaux qui entrent dans leur composition. Les modifications rendent plus souple le processus d'émission des pièces de monnaie en accordant des pouvoirs additionnels à la Monnaie et au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux à cet égard.
On donne à la Monnaie la capacité d'une personne physique; elle peut constituer des filiales, ainsi qu'acquérir ou aliéner des droits sur d'autres entités. Je ferai des commentaires à ce sujet le moment venu. D'autres modifications apportées sont de nature administrative. Je ferai référence à l'une d'elles en particulier. Ce n'est pas une modification de nature administrative, quoique le gouvernement puisse la considérer comme telle.
Certains de mes collègues dans l'opposition ont fait remarquer que la capacité de la Monnaie de porter son capital de 50 à 75 millions de dollars est un changement important car cela veut dire essentiellement qu'elle va faire des emprunts supplémentaires pour étendre ses opérations.
Nous appuyons la plupart des dispositions de ce projet de loi. Il est important d'actualiser les pouvoirs de la Monnaie royale au fur et à mesure que le temps passe pour faire en sorte qu'ils correspondent à ceux des autres sociétés d'État. Nous sommes heureux d'un changement en particulier qui a été apporté à l'étape du comité, entre les deuxième et troisième lectures.
Le député Winnipeg—Transcona a pris la parole au cours du débat de deuxième lecture. Il a dit craindre que les pièces en circulation continuent de l'être, mais que toute nouvelle émission de pièces vienne après un avis de 15 jours. Je constate que le comité a apporté des amendements pour préserver le pouvoir du Parlement de décider s'il y a lieu ou non de créer des pièces d'une nouvelle valeur.
Je souligne les efforts du député de Winnipeg—Transcona. Je crois que c'est là une importante fonction démocratique et une importante fonction de la Chambre des communes et du Parlement, et qu'il ne faut pas que cela relève d'un simple règlement. Il y a ainsi plus de temps pour étudier la question et pas seulement la quinzaine de jours précédant la prise d'un règlement. Le projet de loi comporte cette disposition. Je me réjouis de voir cette modification. Cependant, tous les Canadiens seront touchés par l'addition ou la suppression de pièces de monnaie. Nous devons veiller à ce qu'ils puissent faire connaître leurs besoins et leurs sujets de préoccupation.
Nous avons été témoins de l'introduction de la pièce de un dollar sous le gouvernement conservateur précédent. On estimait généralement à l'époque, et cela s'est avéré exact, que le gouvernement Mulroney transformait le billet de un dollar en simple pièce de monnaie. Les gens ont jugé cette décision plutôt fâcheuse jusqu'à ce que les libéraux se fassent élire. Ils ont fait mieux que les conservateurs, qui ont été carrément chassés du pouvoir par les contribuables en 1993. Ils ont transformé le billet de deux dollars en pièce de monnaie. Cela veut dire que les contribuables doivent maintenant gagner beaucoup plus d'argent pour acheter les biens et les services qu'ils achetaient auparavant, et que c'est au gouvernement libéral qu'ils le doivent.
La Monnaie royale pourra chercher à obtenir des contrats additionnels à l'étranger. Avant d'aborder ce point, je veux parler du fait que le Parti réformiste s'est dit très préoccupé par deux questions, dont la nécessité d'une concurrence loyale. Bien sûr, tout le monde appuie en principe la concurrence loyale au Canada.
Le député du Parti réformiste a évoqué le fait que le Bureau de la politique de concurrence assure qu'il y a concurrence. Dans les régions que je parcours, on ne parle pas de Bureau de la concurrence, mais de l'absence d'un bureau de la concurrence.
Maintes fois, qu'il s'agisse de la fixation des prix des médicaments ou des prix de l'essence, le Bureau de la concurrence n'a pas su défendre les intérêts des consommateurs canadiens ni assurer une bonne concurrence. En fait, il a accompli le contraire s'il faut en croire les milliers de personnes avec lesquelles je me suis entretenu.
Cette loi a été présentée par les conservateurs. Les libéraux l'ont appuyée chaudement. La loi contre les coalitions, qui existait avant l'élection de M. Mulroney, en 1984, conférait au Bureau de la concurrence le pouvoir d'examiner la fixation des prix, l'établissement de prix abusifs sans qu'il soit nécessaire qu'un président d'entreprise demande par écrit à un autre de fixer les prix. Il lui conférait le pouvoir d'aller sans préavis enquêter dans une entreprise afin d'établir si les allégations de fixation des prix ou de prix abusifs étaient fondées.
J'abonde dans le même sens que les députés du Parti réformiste, en ce qui concerne la nécessité d'une juste concurrence. À mon avis, la seule façon d'y parvenir, c'est de pouvoir compter sur un bureau de la concurrence qui a certains pouvoirs et qui peut examiner certaines de ces allégations très graves.
Je suis originaire de la Saskatchewan. Selon les années, il y a à peu près 25 sociétés d'État qui sont en place. Je trouve incroyable qu'au sein du gouvernement fédéral, il n'y ait aucun comité chargé de demander des comptes aux sociétés d'État.
En Saskatchewan, j'ai eu l'honneur de présider les travaux du comité permanent de l'assemblée législative de la Saskatchewan sur les sociétés d'État. Ce comité avait le pouvoir de convoquer annuellement les présidents des sociétés d'État et leurs gestionnaires, ainsi que les ministres responsables. Nous pouvions examiner la situation de chaque société d'État aussi longtemps que nous le souhaitions, notre étude n'étant pas limitée à deux heures par société, et nous pouvions interroger les représentants et les ministres responsables de ces sociétés sur des questions publiques ou sur les responsabilités de ces sociétés d'État.
À ma connaissance, la Saskatchewan est le seul palier de compétence du Commonwealth à avoir formé un comité permanent sur les sociétés d'État. Voilà pourquoi, en Saskatchewan, il y a des sociétés d'État très importantes qui dispensent des services d'une grande portée à la population de la province, cela, à des coûts fort raisonnables et d'une manière responsable et transparente.
Ce que je voudrais que le gouvernement actuel fasse à l'égard de la Monnaie royale canadienne et d'autres sociétés d'État, c'est mettre en place un comité permanent des sociétés d'État et permettre ainsi aux parlementaires d'inviter les présidents, leurs proches collaborateurs et les ministres responsables de ces sociétés à comparaître devant eux, pour qu'ils répondent à des questions qui sont importantes et qui concernent leur champ d'activité.
On a ainsi l'occasion, dans le cadre de la réunion d'un comité public, de veiller à ce que les objectifs et les missions des sociétés d'État soient respectés et transparents et à ce que ces sociétés rendent à la population les services pour lesquels elles ont été créées. Je pense que c'est ce dont nous avons besoin à la Chambre des communes.
Je suis persuadé que mes collègues réformistes appuient cela. Il y a beaucoup d'appuis en Saskatchewan pour un tel comité. Je pense que la Monnaie royale canadienne, une société d'État, pourrait non seulement continuer de fonctionner de façon bien organisée, mais que sa productivité, son efficience et sa rentabilité s'en trouveraient accrues. Je pense que c'est une proposition extrêmement importante.
Les rapports annuels seraient examinés. Nous pourrions poser des questions au sujet de ces rapports annuels. Nous pourrions poser des questions sur les activités d'une société d'État donnée sauf dans le cas de questions dont les tribunaux sont saisis et de questions touchant les ressources humaines, des cas particuliers. Ce sont des choses logiques dont on ne peut pas parler en public.
C'est une recommandation semblable à celle que j'ai faite de faire du Bureau de régie interne un organisme public. En Saskatchewan, c'est le cas. Les journalistes et les députés peuvent assister aux travaux de ce bureau. Ils ne peuvent poser des questions, mais ils peuvent voir comment ce bureau fonctionne plutôt que de le laisser travailler en secret comme nous le faisons à la Chambre des communes. C'est une question de responsabilité. Il s'agit de rendre davantage de comptes aux contribuables et de s'assurer que toutes les activités sont transparentes.
Je veux également parler des préoccupations des petites entreprises au sujet de ce projet de loi. Je suis un chef de petite entreprise. Même si je crois que les sociétés d'État jouent un rôle important dans notre économie, j'appuie en général les initiatives du gouvernement tendant à utiliser les sociétés d'État comme des instruments économiques pour offrir un programme ou un service nécessaire. Il s'agit de l'offrir collectivement plutôt qu'individuellement, si c'est le mandat du gouvernement.
La Monnaie royale est située à Winnipeg, d'où vient le ministre responsable des petites entreprises. Je crois que c'est dans sa circonscription. J'ai déjà vécu dans sa circonscription il y a de nombreuses années, lorsque j'étais jeune étudiant. Je sais où la Monnaie royale est située. C'est une excellente société d'État, qui offre un très bon service. Elle emploie un grand nombre de personnes qu'elle paie relativement bien. Je pense que c'est une chose que nous devons continuer à faire.
Les petites entreprises m'ont fait savoir qu'elles veulent être avisées et consultées convenablement, aux termes de la loi, si des changements sont apportés. Le député de Saint-Boniface, qui est également ministre responsable des petites entreprises, le sait très bien. Durant les consultations qu'il a tenues auprès de la petite entreprise, on lui a dit la même chose, en particulier en ce qui a trait aux activités de la Monnaie royale canadienne dans son district.
Cette question nous préoccupe beaucoup. Lorsque les pièces de 1 $ et de 2 $ ont été émises, les exploitants de petites entreprises ont exprimé leurs inquiétudes au sujet de la brièveté de la période de préavis et du fait qu'ils n'avaient pas été consultés à l'avance et ne pouvaient préparer leurs distributeurs automatiques. Ces machines jouent un rôle important de nos jours. On peut y obtenir du café, des boissons gazeuses, des aliments comme des sandwiches et autres genres de collations. Ces machines sont installées dans des endroits où il n'y a pas de cafétéria. Je crois qu'il est très important qu'il y en ait.
Les gens d'affaires m'ont dit que lorsque de nouvelles pièces de monnaie sont frappées, ils devraient en être avisés à l'avance car il peut en coûter jusqu'à 300 $ pour adapter une machine à une nouvelle pièce de monnaie. Certaines entreprises ont recours à des adaptateurs de coffrets-caisses qu'elles ont fait breveter et vendent 10 $ l'unité. Ces coffrets offrent une solution plus abordable, mais il leur faut néanmoins suffisamment de temps pour modifier les distributeurs automatiques.
J'aimerais également soulever brièvement un point concernant ce qu'ont dit les réformistes. Les réformistes ont parlé de la nécessité d'avoir une saine concurrence, ce sur quoi je m'entends avec eux. Je recommande la création d'un comité permanent sur les sociétés d'État et les réformistes m'appuient probablement. Ils ont un peu parlé de privatisation. Il y a une bonne et une mauvaise façon de privatiser. Lorsque le Parti réformiste commence à promouvoir la privatisation, mes collègues et moi ainsi que les Saskatchewannais en avons de gros frissons dans le dos.
Nous avons eu un gouvernement de style réformiste en Saskatchewan de 1982 à 1991. C'était un gouvernement conservateur qui était un hybride entre les libéraux, les conservateurs et les réformistes. Beaucoup de membres de ce gouvernement sont maintenant membres du Parti réformiste de la Saskatchewan, appelé le Saskatchewan Party et dirigé par l'ancien leader parlementaire réformiste, Elwin Hermanson. Les membres du caucus qui formaient le gouvernement de la Saskatchewan de 1982 à 1991 se retrouvent dans ce parti. Ils ont assisté au congrès du Saskatchewan Party.
Je voudrais parler des privatisations en Saskatchewan à la lumière du projet de loi sur la Monnaie royale. La Saskatchewan a subi un gouvernement de style réformiste. Ce gouvernement a été formé en 1982. Nous avions alors le taux d'imposition le plus bas du Canada. Nous avions des soins dentaires gratuits pour les enfants de 18 ans et moins. Nous avions le régime d'assurance-médicaments le moins cher au monde. Nous avions le taux de chômage le plus bas du Canada. La province n'avait pas de dette. Après neuf ans de gouvernement de style réformiste, notre province, qui compte un million d'habitants, avait accumulé une dette de 15 milliards de dollars en raison du programme de privatisations.
Lorsque les réformistes parlent de privatisation, les résidents de la Saskatchewan secouent la tête en se demandant s'ils apprendront jamais quoi que ce soit. Après avoir suivi le débat aujourd'hui, je constate que les députés réformistes n'ont rien appris, qu'ils n'ont tiré aucune leçon de la privatisation et des faillites dans la province de la Saskatchewan. Ils veulent maintenant étendre cette expérience à la Chambre des communes et pousser le Canada à la faillite par leurs initiatives.
Les Canadiens examineront la situation de très près et y penseront à deux fois avant d'appuyer un parti semblable et ses projets de privatisation.
Voici un exemple de privatisation survenu en Saskatchewan. Une société de production de potasse, d'une valeur de plus de 2 milliards de dollars, a été privatisée mais ce sont les contribuables qui ont assumé la dette. On a cédé l'actif aux actionnaires. Cette privatisation a fait perdre environ 100 millions de dollars de recettes par année, que le Trésor public aurait pu affecter à des choses comme les soins de santé et l'éducation. La privatisation de cette entreprise a engendré une dette supplémentaire d'un demi-milliard de dollars, que les contribuables devront maintenant rembourser pendant 40 ou 50 ans.
Le nombre d'employés de la société a diminué et ses profits ont augmenté, mais ils quittent la province et se retrouvent ailleurs dans le monde. C'est formidable. Autre fait intéressant, lorsque la société était une entreprise d'État, le président touchait un revenu de 150 000 $ canadiens par année. Depuis qu'elle a été privatisée, le président, un Américain, touche 2 millions de dollars US par année. D'où croyez-vous que viennent les vice-présidents? Des États-Unis. Ils touchent tous des millions de dollars US en traitement, mais ils travaillent au Canada pour une société d'État canadienne. C'est l'héritage que nous a laissé le gouvernement de style réformiste de Grant Devine dans les années 80 en Saskatchewan.
Voilà la mauvaise façon de privatiser. Il y en a peut-être une bonne. Dans le cas d'une société d'État qui serait en difficulté et qui ne fournirait pas de services particuliers ou de programmes aux Canadiens, le gouvernement pourrait envisager la privatisation afin d'obtenir de meilleurs services ou programmes.
Nous pouvons plus ou moins appuyer le projet de loi C-41 dans sa forme actuelle. Le Parti réformiste ne l'appuiera pas. La privatisation est une chose. Le député réformiste d'Elk Island a aidé une entreprise qui fait concurrence à cette société d'État. Il a accordé son appui à cette entreprise. C'est très bien. Mais lorsque le Parti réformiste adopte une politique, il se garde toujours de le faire ouvertement. Il agit dans les coulisses, ou ne présente pas les deux côtés de la question, même s'il a de temps à autre des idées relativement bonnes. Cependant, lorsqu'on examine plus attentivement leurs idées ou leurs recommandations, on peut voir que les réformistes ont d'autres motifs derrière la tête. Je ne sais pas quels liens quiconque a avec l'entreprise de la circonscription réformiste de Elk Island, mais c'est une autre raison que les gens devraient connaître et qui explique l'opposition des réformistes à ce projet de loi. Il s'agit d'un article de presse, mais le député veut entendre davantage parler de la façon merveilleuse dont le gouvernement de style réformiste a procédé à la privatisation en Saskatchewan, en ce qui concerne la Loi sur la Monnaie royale canadienne.
Une voix: Parlez-nous du gouvernement de style néo-démocrate de la Colombie-Britannique.
M. John Solomon: Le gouvernement de style néo-démocrate de la Saskatchewan et mon collègue réformiste font du très bon travail. Ce gouvernement a pris la dette de 15 milliards de dollars accumulée par le Parti réformiste de 1982 à 1991 et a réussi à redresser la situation financière de la province. Il a précisé assez clairement qu'il continuerait de rendre des comptes au sujet de ses actions, contrairement au gouvernement de style réformiste de Grant Devine.
Une voix: Dites-nous comment ils ont détruit l'économie de la Colombie-Britannique.
M. John Solomon: Un député réformiste nous parle de la Colombie-Britannique. Je voudrais savoir comment il recommande de gérer une économie provinciale lorsque la population s'accroît sur une période de dix ans de 85 000 ou 90 000 personnes par année et qu'aucune recette supplémentaire n'est affectée à l'infrastructure ou aux programmes de santé. Il n'est pas au courant de cela, car il ne sait probablement pas compter jusqu'à 85 000 ou 90 000. S'il le savait, il comprendrait alors que lorsque la population augmente d'un million de personnes sur dix ans, on doit prévoir des programmes et des initiatives supplémentaires par le gouvernement en matière d'infrastructure ou de transport.
Une voix: Tous les socialistes du pays vivent aux crochets de la province.
M. John Solomon: Mon collègue réformiste ne sait pas ce qu'est le socialisme, car autrement, il ne ferait pas une telle affirmation.
Cependant, malgré cela, je suis heureux de voir les modifications prévues par le gouvernement pour maintenir le pouvoir du Parlement dans le cas de ce projet de loi. Ainsi, nous allons appuyer ce projet de loi lorsqu'il sera mis aux voix.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, je vais répondre au député de Regina—Lumsden-Lake-Centre.
En ce qui concerne la politique économique du Parti réformiste, je rappellerai au député que lors des élections de 1997 le NPD a présenté son point de vue sur la situation économique du Canada et proposé sa solution. Le Parti réformiste a ses propres politiques. Nous sommes une soixantaine à siéger ici après les élections, eux sont une vingtaine. La population a estimé que les politiques économiques du Parti réformiste étaient de beaucoup supérieures à celles du NPD.
Le député soutient que le Parti réformiste est lié au Parti progressiste conservateur de la Saskatchewan. Mes parents sont tous originaires de la Saskatchewan. Si le député s'était le moindrement renseigné sur les politiques économiques du Parti réformiste et sur le bilan de Grant Devine en Saskatchewan, il saurait qu'il n'y a aucune comparaison possible. Il ment outrageusement quand il parle de la sorte.
Le vice-président: L'honorable député sait que ce langage est inapproprié. Je suis persuadé qu'il acceptera volontiers de retirer ces propos immédiatement.
M. Howard Hilstrom: Monsieur le Président, ça m'a échappé et je m'en excuse. C'est vrai que ce sont des mots qui ne doivent pas être prononcés dans cette enceinte.
En tout cas, j'aimerais que le député de Regina—Lumsden—Lake Centre explicite davantage la comparaison qu'il fait entre le comportement du gouvernement conservateur de Grant Devine et les saines politiques économiques du Parti réformiste.
M. John Solomon: Monsieur le Président, je remercie le député de Selkirk—Interlake de sa question. Je m'étonne de ce que le député ne comprenne pas la situation qui a prévalu entre 1982 et 1991 en Saskatchewan sous l'influence de la coalition Devine-réformistes-libéraux qui était alors au pouvoir. Son ignorance s'explique sans doute par le fait qu'étant agent de la GRC à l'époque il était partout au pays sauf en Saskatchewan.
Une voix: Quelle sorte de coalition?
M. John Solomon: Une coalition entre Elwin Hermanson, Grant Devine et Grant Schmidt, qui sont tous aujourd'hui membres du Parti de la Saskatchewan. Ce sont tous des réformistes et des partisans du régime de Grant Devine, et c'étaient tous des ministres du cabinet.
Je sais que c'est un point sur lequel le Parti réformiste est très sensible. Vingt-deux députés réformistes, conservateurs et libéraux et gros légumes du gouvernement Devine, cette coalition, étaient accusés d'abus de pouvoir et d'autre choses absolument terribles dont l'ancien agent de la GRC de Selkirk—Interlake serait mieux en mesure de vous parler que moi. À cette époque j'étais seulement un député à l'Assemblée législative et je ne faisais pas partie de la police. Ce sont ses collègues qui ont enquêté sur ces personnes.
Je ne suis pas sûr du nombre, mais je crois qu'une quinzaine ont été reconnus coupables. Le Saskatchewan Party est un nouveau parti constitué de réformistes. Elwin Hermanson, ancien leader du gouvernement à la Chambre, en est le chef et a l'appui de tous les copains de Grant Devine qui ont échappé à la prison.
L'autre jour, ils ont assisté à un congrès qui réunissait environ 150 personnes. À propos, samedi, il y a eu un congrès d'investiture dans la circonscription de Regina—Qu'Appelle Valley. À un congrès d'investiture dans une circonscription de la province, il y avait un peu moins de 300 personnes et seules deux personnes étaient candidates. C'est dire l'importance du Parti réformiste de la Saskatchewan.
Le Parti réformiste et le parti de Grant Devine en Saskatchewan sont essentiellement les mêmes. Ils ont les mêmes politiques, les mêmes politiques magiques qui consistent à réduire les impôts, à accroître les services et à créer des emplois. C'est ce qu'ils promettent. Grant Devine l'a fait, le Parti réformiste aussi. Cependant, Grant Devine a été élu et nous avons fini avec moins d'emplois, des augmentations de taxes incroyables et peu de travailleurs. Je pense que c'était une partie du problème.
Le Parti réformiste vient d'adhérer à la politique de Grant Devine. Je ne devrais pas l'avertir de ne pas continuer dans cette voie. Je devrais l'encourager à cultiver cette politique, car ce faisant, il ne sera jamais en mesure d'être élu. Toutefois, ce qui m'inquiète c'est que les réformistes ne connaissent pas leur histoire. Quelqu'un a dit que si l'on oublie les leçons de l'histoire on est sûr de répéter les mêmes erreurs.
Je ne suis pas enseignant de profession, mais je pense qu'il est important de leur rappeler leur histoire. Leur histoire en Saskatchewan est vraiment mauvaise et corrompue. On a démontré dans toute la province que tout ce qu'ils ont entrepris s'est soldé par la diminution des emplois, l'augmentation du chômage et des taxes, ce qui fait que l'argent quittait la province et que le contribuable s'est retrouvé avec une dette énorme.
Dans l'Ouest, nous craignons cela. Oui, les mathématiques du député sont correctes. Il y a eu plus de réformistes d'élus aux dernières élections que de néo-démocrates. C'est ainsi, nous respectons la démocratie. Venant de Saskatchewan, le député sait qu'il y a un vieil adage qui dit que si l'on jette une pierre dans le noir et qu'un chien hurle, c'est que la pierre a frappé un chien.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, j'apprécie l'intervention du député du NPD, mais je ne vois pas tellement la pertinence de ses propos dans le contexte du projet de loi C-41 sur la Monnaie royale canadienne.
Le député a parlé du gouvernement de la Saskatchewan et de son efficacité dans cette province. Puisque nous faisons déjà une digression, le député accepterait-il de commenter deux autres gouvernements provinciaux, celui de Bob Rae et peut-être aussi celui de Glen Clark?
Je sais que ce sont tous deux des gouvernements du NPD qui ont peut-être aussi eu des problèmes sur des questions comme les impôts, les pertes d'emplois ou encore, au moment présent, une perte de confiance des électeurs dans ces deux provinces. Je pense surtout à Bob Rae qui, malheureusement ou heureusement pour beaucoup d'entre nous, ne semble plus être actif dans le monde politique. Le député pourrait-il commenter ces deux gouvernements?
M. John Solomon: Monsieur le Président, j'apprécie cette question du député de Brandon—Souris. Ses questions sont toujours intéressantes, et je pense que c'est là une très bonne question.
Je ne peux parler que de ce que je connais. Par exemple, je sais que le gouvernement néo-démocrate en Saskatchewan n'a envoyé personne en prison, tandis que la coalition réformiste-conservatrice a envoyé 18 personnes en prison. C'est un exemple, mais je suppose que ce n'en est pas un très bon.
Le gouvernement de Bob Rae n'a envoyé personne de son caucus en prison. La coalition réformiste-conservatrice en Saskatchewan a envoyé 17 ou 18 personnes en prison. Je peux me tromper à une ou deux personnes près. C'est un chiffre approximatif.
Pour ce qui est du gouvernement néo-démocrate en Colombie-Britannique, aucun de ses représentants n'est en prison, du moins pas encore. Les conservateurs et les réformistes de la Saskatchewan ont envoyé 17 ou 18 députés provinciaux conservateurs ou réformistes en prison. Je suppose que je ne peux comparer que ce que je connais. Cela me semble assez équilibré.
Je sais que le NPD a été assez malmené en Ontario. Le député de Brandon—Souris doit comprendre tout à fait ce que je veux dire, puisqu'il est membre d'un parti qui a aussi été plutôt malmené au Canada, en 1993. Ce parti qui formait le gouvernement ne comptait subitement plus que deux députés. Il peut comprendre l'angoisse et l'anxiété du NPD de l'Ontario.
Si l'on se fie aux sondages, le NPD va très bien partout au pays. Nous arrivons aux premiers rangs dans les sondages en Saskatchewan. Nous sommes aux premiers rangs en Nouvelle-Écosse. Nous sommes aux premiers rangs au Manitoba. Bref, nous sommes aux premiers rangs dans trois provinces. Nous avons un gouvernement au Yukon. En Colombie-Britannique, nous en avons encore pour deux ans, et j'ai bon espoir que le NPD dans cette province se ressaisira.
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je n'ai pas vraiment de question à poser, seulement un commentaire à formuler.
Nous sommes à la Chambre des communes. C'est l'endroit où les élus siègent. L'une des choses qui me dérangent le plus dans cet exposé, ce sont les insinuations et les sous-entendus du député. Cela porte atteinte au respect qui est dû à cet endroit.
Par exemple, il y a un certain nombre de partisans du Nouveau Parti démocratique qui m'ont appuyé lors des deux élections auxquelles j'ai participé, y compris le candidat du NPD. Je ne crois pas que ce dernier aimerait m'entendre dire que, parce qu'il y a un partisan du NPD dans mon bureau, je devrais automatiquement être considéré comme un méchant. C'était là mon commentaire. Je crois que le député est tout à fait dans l'erreur.
M. John Solomon: Monsieur le Président, je crois que le député de Elk Island a mal interprété mes propos. Je ne l'ai pas nommé personnellement. Je n'ai fait aucune référence à son bureau. S'il y a des partisans néodémocrates qui en font partie, ce doit être un très bon bureau.
Au cours d'un débat, nous devons nous pencher sur les faits. En Saskatchewan, nous avons eu au gouvernement une coalition entre réformistes, conservateurs et libéraux. Il y avait beaucoup de corruption. Certains ont fini en prison et ils étaient par hasard réformistes.
M. Gilles Bernier (Tobique—Mactaquac, PC): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends une fois de plus la parole pour commenter le projet de loi C-41, Loi modifiant la Loi sur la Monnaie royale canadienne et la Loi sur la monnaie. J'aimerais que nous puissions faire ce pour quoi nous sommes ici au lieu de passer notre temps à nous critiquer mutuellement.
Quand le ministre responsable a présenté ce projet de loi, le 7 mai, j'ai pris soin de le passer au peigne fin. J'y ai vu de nombreux changements importants, mais j'y ai également trouvé deux choses qui m'inquiétaient grandement.
Depuis, j'ai assisté à un grand nombre de réunions et j'ai pas mal travaillé sur ce projet de loi de telle sorte que je puis dire maintenant que la majorité de mes préoccupations ont été dissipées. J'ai donc le plaisir d'annoncer que nous appuierons le projet de loi C-41 à l'étape de la troisième lecture.
J'aimerais aujourd'hui parler du processus qui nous a conduits au point où nous en sommes aujourd'hui, rappeler quelles étaient mes préoccupations et dire pourquoi je pense qu'il est important que les députés appuient ce projet de loi.
Quand il a été présenté pour la première fois, le projet de loi C-41 contenait deux dispositions qui m'empêchaient de l'appuyer immédiatement sans l'avoir au préalable étudié plus en détail. Le premier des changements proposés à l'article 3 aurait privé le Parlement du pouvoir de mettre de nouvelles pièces en circulation ou d'en retirer certaines. Il était question de remettre ce pouvoir au Cabinet et de rationaliser le processus décisionnel.
J'ai toujours jalousement défendu l'autorité de la Chambre. Les députés sont les représentants du peuple.
Comme nous avons été investis de ce pouvoir, nous sommes en droit de jouer un rôle important dans le processus décisionnel de l'État. À moins qu'il n'existe une raison claire et convaincante de transférer quelque pouvoir que possèdent les députés, je m'oppose à tout effort pour réduire le pouvoir des Communes.
Cette discussion n'est pas théorique. Il est fort probable que, à un certain moment, dans un avenir rapproché, on demande aux députés s'il serait souhaitable de remplacer l'actuel billet de 5 $ par une pièce de 5 $. Il est également fort concevable que nous soyons appelés à décider si la pièce d'un cent en circulation est utile ou s'il y aurait lieu de la retirer. Dans l'état actuel des choses, si le gouvernement désire retirer une pièce de la circulation ou en adopter une nouvelle, il doit soumettre un projet de loi à l'étude du Parlement.
Dans le cas de tous les projets de loi, comme celui dont nous sommes saisis aujourd'hui, il doit y avoir un débat public complet et des audiences en comité et, enfin, un vote public avant qu'un changement de la sorte ne puisse se concrétiser. Ce projet de loi propose de confier cette décision au Cabinet. Il exigerait que le ministre donne un avis de 15 jours de séance avant que le Cabinet ne rende la décision. Mais il ne pourrait annuler toute décision jugée non souhaitable par la population et c'est à cela que je m'oppose. Le gouvernement fonctionne mieux lorsqu'il fait reposer ses décisions sur un examen public complet. Ce n'est pas toujours agréable, mais cela fonctionne.
Prenons, par exemple, la décision qu'on a prise en 1987 de remplacer le billet d'un dollar par la pièce d'un dollar. Je me rappelle qu'on avait beaucoup discuté de l'utilité du huard. D'un côté, il y avait le lobby des exploitants de distributeurs automatiques et les représentants des compagnies d'autobus, qui faisaient valoir l'aspect pratique des pièces de un dollar. De l'autre côté, il y avait divers groupes qui disaient craindre le remplacement des billets pour des raisons allant de la nostalgie à la nécessité de renforcer les poches de pantalon, à cause du poids plus lourd des pièces. Peu importe la position de chacun sur la question, il a été excellent de pouvoir en débattre à la Chambre. On ne peut souhaiter une tribune plus ouverte. Il est tout à fait approprié d'en débattre à la Chambre si l'on envisage d'apporter des modifications semblables à la monnaie canadienne. Il va sans dire que la proposition du projet de loi C-41 visant à retirer au Parlement cette décision me trouble beaucoup.
En juin, j'ai pu bénéficier d'une séance d'information donnée par les fonctionnaires de la Monnaie royale canadienne, dont la présidente de la Monnaie, Danielle Wetherup. Quand j'ai demandé à Mme Wetherup pourquoi le gouvernement envisagerait de retirer aux députés le pouvoir d'autoriser un changement à la monnaie du pays, elle m'a expliqué la raison d'être de cette partie du projet de loi.
Il semble que, lorsque le Parlement a étudié le projet de loi C-82, visant à remplacer par une pièce le billet de deux dollars, la présidente de la Monnaie a été informée des réactions négatives des députés concernant le processus d'amélioration de la nouvelle pièce. C'était en juin et il faisait très chaud. Le menu législatif du gouvernement était très chargé. Dans la salle où le comité des opérations gouvernementales étudiait le projet de loi, il n'y avait pas de climatisation.
Compte tenu de la chaleur et des nombreux projets de loi à approuver avant l'ajournement de la Chambre pour l'été, des députés ont fait remarquer que le projet de loi C-82 n'était pas la mesure la plus importante à étudier. Ils se sont demandé à haute voix s'il n'y avait pas une façon plus facile d'aborder ce qui leur paraissait un changement bien simple.
Naturellement, les responsables de la Monnaie en ont pris note. Quand vint le temps de mettre à jour la Loi sur la Monnaie royale canadienne, comme cela se fait environ tous les 20 ans, ils décidèrent de proposer des changements pour simplifier le processus d'approbation des changements dans la frappe de la monnaie en réponse aux suggestions que les députés avaient faites à l'époque. Cela a donné l'article 3, tel que libellé dans la première impression du projet de loi C-41. Les députés noteront cependant que l'article 3 a changé.
Pour des raisons que j'ai déjà expliquées, il me paraissait inacceptable que la décision de changer les pièces de monnaie du Canada doive venir des parlementaires. Par conséquent, au nom de mon parti, j'ai rédigé un amendement pour remettre la décision à qui de droit, c'est-à-dire aux représentants du peuple.
J'ai fait part de mon idée à Mme Wetherup, présidente de la Monnaie royale, à deux reprises, lors de notre première véritable séance d'information à l'intention des députés et lors des audiences du Comité des ressources naturelles et des opérations gouvernementales consacrées au projet de loi C-41. Tout au long de la séance du comité, elle a soutenu avec raison que c'était au ministre que revenait la décision finale quant à savoir si le gouvernement appuierait l'amendement. Elle a laissé entendre lors de notre première séance que, puisque l'idée initiale touchant l'article 3 était venue des députés, la Monnaie ne s'opposerait pas à laisser le processus de décision tel qu'il était si, à la réflexion, les députés estimaient qu'il devait demeurer tel qu'il était.
J'ai parlé également de mon amendement aux collaborateurs du ministre et aux porte-parole des autres partis en la matière. J'ai fait valoir l'importance de mon amendement en disant que les députés doivent continuer de jouer un rôle important dans le processus de décision du gouvernement. Ils ont dû trouver mes arguments convaincants, car, lorsque j'ai présenté mon amendement au comité mardi dernier, il a reçu l'appui unanime des députés présents. Je remercie tous les membres du comité et le ministre, qui, après y avoir mûrement réfléchi, ont donné un appui dénué d'esprit de parti à mon amendement.
L'article 7 est une autre disposition du projet de loi C-41 qui me préoccupait. Il propose d'augmenter le pouvoir d'emprunt de la Monnaie royale en le faisant passer de 50 à 75 millions de dollars. Ce changement m'inquiétait à cause d'une nouvelle opération que la Monnaie entreprend en faisant construire une nouvelle usine à Winnipeg pour fabriquer des flans de pièces de monnaie.
L'article 7 m'inquiétait, surtout parce que je pensais que la Monnaie royale allait se servir de ce nouveau pouvoir d'emprunter pour financer cette initiative mal préparée et faire dérailler une entreprise canadienne qui réussit bien. Je ne me rendais pas compte à l'époque que la société d'État avait financé cette entreprise de 30 millions de dollars en mars et que le bâtiment qui abritera les installations de placage était presque terminé. Il est clair désormais que le projet de loi C-41 n'a aucun rapport avec la décision de bâtir de nouvelles installations. Je dois donc dissocier mon opposition à cette entreprise et ma position sur le projet de loi et évaluer l'article 7 pour ce qu'il vaut.
Il ne faut pas voir dans l'appui que j'accorde au projet de loi une approbation de la décision de la Monnaie royale de se lancer dans la fabrications de flans. Je m'y oppose pour deux raisons. Tout d'abord, ces nouvelles installations concurrenceront directement un fabricant canadien de flans qui réussit bien, Westaim, de l'Alberta. Cette société fournit les flans depuis 35 ans. Elle emploie 110 personnes à son usine de Fort Saskatchewan. L'entrée de la Monnaie royale sur ce marché va compromettre cette division de Westaim et ses 110 employés.
Deuxièmement, c'est là une aventure risquée pour la Monnaie royale. Comme elle a emprunté l'argent en tablant sur le crédit des contribuables, les Canadiens doivent aussi assumer ce risque. Il y a actuellement sur le marché mondial des flans de monnaie une offre qui est excédentaire de 30 à 40 p. 100. Si, en entrant sur le marché, la société d'État ne force pas Westaim à se retirer et ne fait pas perdre leur emploi à ses 110 travailleurs, elle pourrait faire un flop monumental, ce qui ferait perdre des millions aux contribuables. Les spécialistes de l'industrie conviennent qu'il y aura une légère hausse de la demande au moment du lancement de la nouvelle monnaie européenne, mais que le mouvement constant à la baisse se poursuivra, étant donné que les transactions électroniques gagnent en popularité et qu'on a besoin de moins de pièces et de billets.
Comme si la faiblesse du marché ne suffisait pas, les coûts qu'il faut engager pour faire entrer la Monnaie royale dans le secteur du placage de pièces sont énormes. Les 30 millions de dollars que la Monnaie royale a empruntés en mars n'ont servi qu'à la construction de l'usine de Winnipeg. Les coûts d'établissement sont substantiels pour un nouveau concurrent faisant son entrée dans un marché parvenu à maturité ou en déclin. La Monnaie royale canadienne devra se mesurer à des concurrents expérimentés, bien établis, qui ont eu des années pour acquérir de l'expérience et faire des économies d'échelle.
Songeons, par exemple, aux coûts de main-d'oeuvre. La fabrication de flans de pièces de monnaie requiert des travailleurs hautement qualifiés. Il n'y a que deux façons d'obtenir des travailleurs semblables. La première consiste à les former, ce qui exige beaucoup de temps et d'argent. L'autre option consiste à faire du maraudage chez les concurrents et à offrir de meilleurs salaires. D'une façon ou d'une autre, les coûts de main-d'oeuvre vont être plus élevés que ceux des concurrents dans une industrie de matière première sensible aux prix. Ce n'est pas de bonne augure.
Non seulement la Monnaie royale devra-t-elle se contenter d'une structure de coûts plus élevés, mais encore, comme toute entreprise néophyte, elle fera inévitablement une foule d'erreurs.
Ainsi, je crains pour la Monnaie royale canadienne. Je crains pour les employés de Westaim et je crains pour les contribuables, qui risquent de perdre 30 millions de dollars.
Je me rends compte, après bien des débats et des consultations sur le projet de loi C-41, que ce sont deux combats séparés. Même si je vais continuer à rechercher une solution pour l'entrée de la Monnaie royale canadienne dans la fabrication de flancs de pièces de monnaie, je me réjouis que nous ayons remporté la bataille du projet de loi C-41. Maintenant que le comité a réparé le problème, il a enlevé les derniers obstacles à l'appui du projet de loi par mon parti.
En guise de conclusion, je voudrais de nouveau remercier les membres du Comité permanent des ressources naturelles et des opérations gouvernementales aussi bien que le ministre d'avoir contribué à faire accepter mon amendement.
Je voudrais remercier aussi Danielle Wetherup et les autres représentants de la Monnaie royale canadienne, qui ont eu la gentillesse de me rencontrer à diverses reprises, tant en privé qu'en public, pour examiner le projet de loi et discuter de mes préoccupations en détail.
Certes, comme je l'ai déjà dit, je ne suis pas d'accord sur tout ce que fait la Monnaie royale, mais je le suis sur les modifications qui sont proposées, dans ce projet de loi, à la Loi sur la Monnaie royale canadienne et à la Loi sur la monnaie.
C'est donc sans hésitation que j'appuie le projet de loi et que j'invite les députés à faire de même.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député qui vient de se joindre au débat et de présenter ses observations. J'ai trouvé que son analyse du rôle de la Monnaie était très intéressante et très bonne.
Ne trouve-t-il pas, toutefois, que son appui du projet de loi est en général contraire à sa critique de ce que fait la Monnaie?
Ne conviendra-t-il pas que l'article 2 du projet de loi modifiant l'article 4 de la Loi sur la Monnaie royale canadienne accroît de façon plutôt considérable le pouvoir de la Monnaie? Il permet exactement ce qu'il vient de dire dans son allocution. Le député n'est pas d'accord surtout pour que la Monnaie s'occupe du placage des pièces de monnaie. Le projet de loi permet que cela arrive et donne à la Monnaie le pouvoir de faire exactement cela.
Le député n'est pas d'accord pour que la Monnaie fasse cela, mais le projet de loi tel que proposé permet à la Monnaie de faire exactement cela.
C'est exactement ce qu'il faut faire valoir et la raison pour laquelle je conteste personnellement cette disposition sur la Monnaie. D'une part, le député dit ne pas approuver cela; d'autre part, il appuie la modification. Peut-il clarifier ce qui semble être contradictoire ici?
M. Gilles Bernier: Monsieur le Président, je tiens à remercier le député réformiste de poser la question. C'est une excellente question.
Je suis en affaires depuis plus de 20 ans. J'ai toujours dit que le gouvernement ne devrait pas être en affaires. Le mandat du gouvernement est de gérer l'argent des contribuables et je n'ai pas encore vu le gouvernement faire cela.
Lorsque la Chambre est saisie d'un projet de loi, les députés ne sont pas obligés d'approuver tout ce qu'il contient. Ils peuvent s'efforcer avec les collègues de leur parti d'apporter au projet de loi des amendements qui le rendront acceptable. C'est ce que j'ai fait.
Le projet de loi comporte des lacunes. Or, comme j'ai 43 ans, je sais que la vie est faite de compromis. Mon père m'a toujours dit que pour obtenir quelque chose, il fallait céder quelque chose en retour. Je crois fermement que c'est vrai.
Il est vrai que le projet de loi comporte encore certaines lacunes. Or, même s'il comporte des lacunes, que nous votions pour ou contre le projet de loi, celui-ci sera adopté de toute manière.
J'ai lutté pour obtenir l'amendement que je voulais et je l'ai obtenu. C'est bon pour les députés, car cela laisse le pouvoir à la Chambre des communes et c'est bon pour les Canadiens en général.
Mme Carolyn Parrish (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais intervenir pour féliciter le député. Il est rare qu'un député puisse laisser sa marque à la Chambre. Le député l'a fait aujourd'hui et au comité. Il a accompli, à mon avis, un travail fort raisonnable.
Comme le député vient de l'expliquer, il y a certains aspects du projet de loi qu'il n'aime pas et il a tenté de négocier pour les faire modifier au lieu de se contenter de critiquer. Je lui en suis vraiment reconnaissante et je voudrais le remercier de sa collaboration au nom du ministre. Félicitations.
M. Gilles Bernier: Monsieur le Président, je voudrais commenter les propos très flatteurs que la secrétaire parlementaire a tenues à mon endroit. Cela n'arrive pas souvent à la Chambre.
Peu importe notre allégeance politique, nous sommes élus à la Chambre des communes par les Canadiens pour représenter les Canadiens. Je suis ici pour représenter les habitants de Tobique—Mactaquac, au Nouveau-Brunswick, et à titre de porte-parole de mon parti en matière de travaux publics et de services gouvernementaux, je cherche à représenter tous les Canadiens qui font affaire avec les organismes relevant de ce ministère, que ce soit Postes Canada ou la Monnaie royale canadienne. C'est là un des plus gros au Canada. Il encadre la Société canadienne d'hypothèques et de logement et beaucoup d'autres organisations.
Tous les députés, qu'ils soient réformistes, néo-démocrates, bloquistes, conservateurs ou libéraux, doivent unir leurs efforts pour réaliser de grandes choses pour les Canadiens. C'est ce que méritent les Canadiens et c'est ce que nous devons faire pour eux. D'ici les prochaines élections, j'espère que les Canadiens pourront constater le travail que j'accomplis et qu'ils décideront d'élire un plus grand nombre de députés conservateurs.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, j'ai suivi le débat toute la journée et on voit bien à quel point Ottawa recours à des méthodes insidieuses. On présente un projet de loi qui instaure une concurrence avec le secteur privé en utilisant l'argent des contribuables. Des députés l'appuieront, il sera adopté et des entreprises privées devront fermer leurs portes.
Ce n'est pas la première fois que l'on assiste à un tel scénario. Postes Canada utilise l'argent que les députés et les autres contribuables lui donnent pour faire livrer leur courrier régulier pour monter des plans d'interfinancement d'entreprises qui entrent en concurrence avec les entreprises de messagerie et les entreprises de courrier électronique, puisque Postes Canada se lance dans ce secteur.
En l'occurrence, c'est la Monnaie royale du Canada qui utilise l'argent des contribuables pour faire concurrence au secteur privé. C'est ce genre de décisions mal inspirées qui ont créé notre immense dette, cette dette qui limite les possibilités des entreprises et des entrepreneurs canadiens.
Je ne vois pas comment des gens peuvent raisonnablement être en faveur de mesures qui acculent des entreprises privées à la faillite.
M. Gilles Bernier: Monsieur le Président, encore une fois, le député réformiste pose une bonne question, mais il a tout de travers. Il ne sait pas de quoi il parle.
Je dis cela parce que la Monnaie royale du Canada est en train de construire une usine à Winnipeg au coût de 30 millions de dollars sans utiliser l'argent des contribuables. La société d'État a un pouvoir d'emprunt. Elle emprunte aux banques. Si une personne veut acheter une automobile, elle ne s'adressera pas au gouvernement, mais à une banque. C'est exactement ce que la Monnaie royale a fait.
Elle demande au Parlement de faire passer son pouvoir d'emprunt de 50 millions à 75 millions de dollars. Elle a commencé à construire ses installations de Winnipeg en mars dernier, bien avant la présentation du projet de loi. La Monnaie royale s'est adressée à je ne sais trop qui et a emprunté l'argent. Ce n'est pas l'argent des contribuables. Au risque de reprendre un cliché, je dirai que, si la Monnaie royale réalise des profits, c'est tout le Canada qui gagne. Si la Monnaie royale du Canada, qui est une société d'État, perd de l'argent, c'est le gouvernement qui doit payer et ce sont les contribuables qui perdent. Cependant, pour ce qui est de la construction des installations de Winnipeg, la société d'État a emprunté sur le marché.
M. Rob Anders: Monsieur le Président, il est question d'une société d'État. Qu'elle emprunte la somme ou qu'elle l'obtienne autrement, il s'agit, au bout du compte, d'une dette publique.
Il y a, au Canada, de nombreuses autres sociétés d'État. Selon ma définition des sociétés d'État, je ne comprends pas qu'un député puisse aujourd'hui prendre la parole et affirmer que celles-ci n'ont rien à voir avec les deniers publics. Si ces sociétés ont des problèmes, c'est le contribuable qui finit par payer la note.
M. Gilles Bernier: Monsieur le Président, ce que j'ai dit, c'est que nous discutons du projet de loi C-41, lequel modifie la Loi sur la Monnaie royale canadienne et la Loi sur la monnaie. Je ne parle pas des autres sociétés. Je parle de la Monnaie royale canadienne, qui est une société d'État.
Cette société n'obtient pas, à proprement parler, d'argent du gouvernement. La Monnaie royale a obtenu du gouvernement une autorisation d'emprunter l'argent dont elle a besoin auprès de sources extérieures. Je ne vois donc pas pourquoi le député réformiste parle de l'argent des contribuables. Cela n'a rien à voir avec l'argent des contribuables. La Monnaie royale emprunte l'argent à une banque. C'est la banque qui est propriétaire de la Monnaie royale canadienne jusqu'à ce que le prêt consenti soit remboursé. Qu'est-ce qu'il y a de mal à cela? C'est une entente commerciale.
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je suis honoré encore une fois de pouvoir prendre la parole à la Chambre des communes pour représenter ce qui, à mon avis, est bon pour les Canadiens et pour représenter aussi les besoins et les aspirations d'un certain nombre de gens de ma circonscription. Cela s'applique certainement aussi dans le cas du projet de loi C-41.
Je ne peux pas faire autrement que de commencer mon discours en disant que le député néo-démocrate qui a parlé s'est beaucoup écarté de l'essence même de ce projet de loi. J'ai été très déçu de voir qu'il s'est permis de faire toutes sortes d'insinuations qui n'ont tout simplement pas leur place à la Chambre. C'est un manque de respect envers la Chambre des communes en tant qu'institution et envers le rôle que les députés sont appelés à jouer ici.
Je veux parler des diverses répercussions de ce projet de loi. Je suis certain que la plupart des députés sont bien conscients du fait que, comme c'est le cas pour presque toutes les mesures législatives, il y a du bon et du mauvais dans ce projet de loi. Je vais prendre les quelques premières minutes de mon temps pour parler un peu du processus, c'est-à-dire comment les projets de loi sont présentés et comment les décisions sont prises.
Il est très important pour le gouvernement, quel que soit le parti au pouvoir, d'écouter très attentivement les gens qui ont des réserves à l'égard d'un projet de loi ou d'une motion. Il s'agit habituellement de projets de loi d'initiative ministérielle. Le gouvernement devrait prêter une oreille attentive lorsque nous exprimons des préoccupations légitimes.
Je veux féliciter le député de Tobique—Mactaquac. Il est un membre honorable du comité. J'ai beaucoup aimé travailler avec lui, même si je dois admettre que je n'étais là qu'à titre de substitut, n'étant pas membre régulier de ce comité. En acceptant de faire un compromis, le député a réussi à gagner un point.
Je veux seulement poser la question suivante: est-ce vraiment ce que nous devrions faire? Devrions-nous vraiment céder sur cinq points pour obtenir une seule chose? C'est pourtant ce à quoi nous sommes réduits. Peu importe que nous soyons députés de l'opposition ou députés libéraux de l'arrière-ban. Les instructions que reçoit le comité viennent du ministre, du sous-ministre ou d'autres fonctionnaires. Nous l'avons constaté dans ce projet de loi comme nous l'avions déjà fait auparavant.
Oui, cet amendement a été présenté et oui le député a parlé aux autres membres du comité et a réussi à les persuader. Mais le député lui-même dit vouloir remercier le ministre de s'être montré ouvert à son amendement. Une seule personne. Je sais, nous avons équilibré les choses. Le ministre est responsable du fonctionnement de son ministère. C'est vrai. Il a de nombreuses obligations. Mais, dans ce cas précis, il faut également reconnaître qu'il y a des considérations autres que celle-ci qui ont fait l'objet de marchandages. J'aurais aimé voir plus d'ouverture d'esprit.
J'hésite à le dire si peu de temps avant Noël, qui est une occasion joyeuse, mais je dois admettre que parfois je désespère du processus suivi en cet endroit. J'aimerais vraiment que les choses se fassent de façon beaucoup plus démocratique.
En ce qui concerne ce projet de loi, la première chose dont je vais parler est celle qui m'inquiète le plus. La Monnaie est une société de la Couronne, mais ce projet de loi lui donne des pouvoirs et des droits qu'elle n'avait pas auparavant. Il serait peut-être utile, à titre d'exemple, de lire l'amendement dont nous savons qu'il va être adopté. Lorsque le gouvernement décide que tel amendement n'est pas bon et que tel autre l'est, l'expérience nous a appris que les députés libéraux l'adopteront.
Le projet de loi stipule que «la Monnaie a, pour l'exécution de sa mission, la capacité d'une personne physique; à ce titre, elle peut notamment:». Suit une liste de choses que peut faire la Monnaie. Elle peut notamment assurer la constitution, la dissolution ou la fusion de filiales et en acquérir ou aliéner les actions.
La Monnaie royale, en tant que société-mère, peut compter de nombreuses filiales. Ce genre de situation est très dangereuse. La multiplication des filiales réduit l'obligation de rendre des comptes au ministre et, partant, au Parlement et à la population.
Le projet de loi permettra également à la Monnaie d'acquérir et d'aliéner, par tous moyens, des droits sur une entité. Je trouve inquiétant qu'on donne à quelqu'un le droit de faire tout ce qu'il veut, en prenant tous les moyens de son choix.
Bien entendu, le préambule indique que la Monnaie doit exercer ce pouvoir dans son intérêt, pour l'exécution de sa mission. Elle pourra acquérir une société ou en constituer une en prenant les moyens qu'elle voudra. Elle pourrait, par exemple, payer 29 $ l'action pour acquérir une petite filiale, puis l'aliéner comme elle l'entend. On peut imaginer toutes sortes de choses qui pourraient se produire.
Ce qu'il y a de très subtil dans tout cela c'est que la loi permettrait à la Monnaie, en se servant du gouvernement comme bâilleur de fonds, d'acquérir n'importe quelle entreprise qui oserait lui faire concurrence, puis de l'aliéner en mettant un terme à ses activités. Ça m'inquiète. Nous devrions nous montrer prudents à cet égard.
Suit la liste de tout ce que la monnaie royale peut fabriquer, c'est-à-dire tout. En effet, elle peut prendre toute mesure accessoire ou utile à l'exercice de ses pouvoirs, et le projet de loi se lance dans une énumération: des pièces de monnaie canadiennes, des pièces de monnaie étrangères, de l'or, de l'argent et d'autres métaux, de médailles, de plaques, de jetons et d'autres objets fabriqués de métal en tout ou en partie. Voilà pour les mesures accessoires.
Si je donnais libre cours à mon imagination—ce que je fais rarement, ayant un esprit très discipliné—, mais si je me laissais aller pour une fois, voici comment les choses pourraient se passer. La Monnaie royale doit évidemment assurer la distribution de ce qu'elle fabrique. Elle pourrait songer à se doter d'une entreprise de camionnage ou encore s'acheter un ou deux chemins de fer. J'exagère bien sûr, mais le projet de loi l'y autoriserait si elle le jugeait bon. Voilà jusqu'où cela peut aller si on n'y prend pas garde en accordant à une société d'État ce genre de pouvoir. La responsabilité et l'imputabilité doivent clairement établies en fonction des intérêts de la population.
Certaines dispositions ont trait à la monnaie hors-circulation. Chaque année, on fabrique un certain nombre de pièces de monnaie, médailles et autres pièces commémoratives. J'imagine que nous serons inondés de pièces de monnaie l'année du millénaire. J'ai lu quelques articles à ce sujet. Notre pays naquit en 1867 et, en 1967, nous avons frappé une pièce de monnaie pour chaque province afin de commémorer l'événement. C'était une série de vingt-cinq cents. J'imagine qu'on va récidiver.
Le gouverneur en conseil peut fixer les caractéristiques et la valeur nominale de pièces hors circulation, de médailles et de pièces de collection, ce qui veut dire que le ministre peut autoriser l'émission de ces pièces. Ce sera proclamé, un point c'est tout.
Heureusement, l'amendement proposé par mon collègue du Parti conservateur en ce qui concerne les pièces de circulation a été bien accueilli et a aussi notre appui. Le risque, c'est que l'on ne tienne pas compte des gens lorsqu'on décide de mettre des pièces en circulation ou d'en retirer de la circulation. Le degré de débat public et l'obligation de rendre compte lorsque l'on modifie les caractéristiques des pièces est un problème qui nous préoccupe. C'est un problème très important aux yeux des Canadiens qui s'intéressent à ce secteur. Les gens qui utilisent des machines à sous se comptent littéralement par milliers. Quand on modifie le dessin ou la composition d'une pièce, cela a des conséquences pour les machines qui fonctionnent avec des pièces.
Ainsi, on envisage, par mesure d'économie, de frapper des pièces d'acier plaquées nickel. Quand on fait cela, la densité des pièces change. Les mécanismes dont sont dotées les machines pour détecter s'il s'agit d'une vraie ou d'une fausse pièce de 25 cents ne vont plus fonctionner. J'ai parlé aux responsables administratifs de la Monnaie. Ce sont des gens très bien. Ils sont sympathiques. Je les trouve très faciles d'accès et je suis sûr que, de leur propre initiative, ils feraient attention à ce détail lorsqu'ils modifient la composition ou la forme d'une pièce. Cependant, rien ici ne les y oblige. Il est dit simplement qu'ils peuvent faire ce qu'ils veulent pour poursuivre leurs propres objectifs, lesquels sont probablement de faire de l'argent pour la Monnaie.
Notre pièce d'un cent a changé depuis quelques années. D'abord, elle est complètement ronde au lieu d'avoir 12 côtés. Naturellement, on n'utilise plus de sous, sauf à Swift Current, Saskatchewan. Je ne sais pas si, même là-bas, ils en utilisent encore.
Dans les parcomètres autour d'ici, vous pouvez payer un dollar pour 10 minutes de stationnement. À Swift Current, on obtenait 12 minutes de stationnement pour un cent. Je n'ai pas pu résister à la tentation. Même si j'allais au bureau de poste pour quelques minutes, j'ai mis cinq sous, car obtenir une heure de stationnement pour ce prix-là était vraiment une sensation extraordinaire. C'était il y a quelques années.
Les municipalités qui ont des parcomètres doivent les faire régler pour qu'ils acceptent la nouvelle pièce si la composition, la forme ou le poids changent.
En passant, je crois que l'on pratique un vol éhonté à l'aéroport d'Ottawa. On stationne avec la carte de crédit, mais cela coûte un dollar les 10 minutes. C'est vraiment voler les gens qui vont là prendre des passagers. Ce sont des tarifs inacceptables.
Je m'écarte du sujet presque autant que mon collègue du NPD, je ferais donc bien d'y revenir.
Ce projet de loi présente une définition de «monnaie légale» et quelques modifications de ce que cela constitue. De temps à autre, nous entendons parler de quelqu'un qui est exaspéré d'avoir reçu une grosse facture et qui décide de la payer à l'aide de cinq seaux remplis de pièces de un cent. La personne à qui il paie cette facture n'est pas obligée d'accepter cette monnaie, car, depuis toujours, la monnaie légale est limitée. Habituellement, elle l'accepte et le payeur a son jour de gloire et sa photo paraît dans le journal.
Cependant, les limites sont également énoncées. Par exemple, monsieur le Président, si vous me deviez 40 $, vous pourriez me les rembourser avec des pièces de 2 $, mais pas avec des pièces de 1 $. Ces limites sont énoncées dans ce projet de loi. On peut utiliser des pièces de 2 $ jusqu'à concurrence de 40 $ et des pièces de 1 $ jusqu'à concurrence de 25 $. On peut utiliser des pièces de 10 cents, de 25 cents et de 50 cents jusqu'à concurrence de 10 $. On peut utiliser des pièces de 5 cents jusqu'à concurrence de 5 $ et des pièces de un cent jusqu'à concurrence de 25 cents. La personne peut exiger une monnaie autre que des pièces de un cent dans le cas de toute dette supérieure à 25 cents. Je prévois que, bientôt, nous assisterons à une démarche pour retirer la pièce de un cent, car j'estime que, en cette époque où la monnaie est surévaluée, sa valeur a baissé. Je ne suis pas sûr que nous devrions la maintenir. Peut-être devrait-elle devenir une grande pièce de collection. Je serais certes en faveur de cela.
Je voudrais maintenant parler de la Monnaie royale et de sa production de pièces de monnaie brutes. Cette production empiète sur les activités de la Westaim Corporation, qui est située dans ma circonscription. J'ai déjà parlé de cette question et elle continue de me perturber. Je me suis entretenu avec les gens des deux camps. J'ai discuté avec des employés de la Westaim et je pense que ce sont des gens très bien, tout comme ceux de la Monnaie royale.
Il y a deux aspects à ce débat, mais il y en a un sur lequel, à mon avis, il faut vraiment insister. Même s'il ne s'agit vraiment pas d'un emprunt du Trésor ni d'argent puisé dans les poches du contribuable, il reste que c'est un emprunt garanti par le gouvernement. Le projet de loi augmente le montant maximal qu'il est possible d'emprunter soit du Trésor ou d'une autre source, pour le porter de 50 à 75 millions de dollars.
Bien sûr, pour la construction de l'usine à Winnipeg, on a recouru à d'autres sources. On a emprunté 31 millions de dollars en vendant des instruments financiers à un prix avantageux. Pourquoi pas? Si je voulais investir, je considérerais la Monnaie comme un endroit vraiment sûr. J'accepterais même un taux d'intérêt moins élevé. La Monnaie tire un avantage d'un tel investissement et de l'appui qu'elle reçoit du gouvernement et l'investisseur y gagne puisqu'il sait que la Monnaie ne fera pas faillite à moins que le pays tout entier fasse faillite. Je suppose que c'est toujours un risque, mais il est beaucoup moins élevé que celui d'autres sociétés.
L'usine de placage de la monnaie concurrence l'entreprise privée et compromet le travail que 100 personnes de ma circonscription font avec brio depuis 30, avec l'appui de fonds canadiens, y compris les fonds publics qui ont été perçus auprès de Westaim et de ses employés.
Ces contribuables sont forcés d'appuyer la concurrence qui force les entreprises à s'installer ailleurs. Je trouve cela affligeant. Ce principe est mauvais. Le gouvernement se retire. Il a privatisé par la création de NavCan. Il a privatisé plusieurs aéroports. Il y a même des divisions des Forces canadiennes qui sont dirigées par des groupes privés en vertu de contrats. Dans ce cas particulier, le gouvernement va dans le sens contraire. Il se trompe. Le gouvernement ne doit pas livrer concurrence.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Elk Island de son analyse réfléchie et approfondie du projet de loi et des explications qu'il nous a fournies.
Il y a certains points qui me préoccupent et que j'aimerais soulever aux fins de discussion. Le député a parlé de NavCanada, issue de Transports Canada. Les pilotes privés devront maintenant débourser 60 $ par année pour pouvoir utiliser le système de navigation dans leur appareil. Mais ils n'en retirent rien du tout. Ils paient toujours le même montant de taxes sur le carburant aviation.
Un autre cas que j'aimerais souligner est celui de la Société canadienne des postes. Nous avons vu comment cette société d'État s'est lancée dans le service de messagerie, entrant ainsi directement en concurrence avec d'autres services de messagerie privés. La société des postes a l'avantage d'être la seule à livrer du courrier de première classe. Elle dispose des ressources du gouvernement pour faire concurrence.
Le gouvernement fédéral a tendance à cumuler de plus en plus de pouvoirs discrétionnaires et à les utiliser pour faire concurrence à l'entreprise privée. Mon collègue a souligné le pouvoir que cette mesure législative confère au ministre de prendre des décisions sans s'en remettre au Parlement. L'envers de ce genre de mesures discrétionnaires est qu'elles réduisent les pouvoirs du gouvernement qui est comptable au peuple.
Ce manque de latitude et l'ouverture de la concurrence face à l'entreprise privée me préoccupent beaucoup. Cela semble aller à l'encontre des meilleurs intérêts des entreprises canadiennes, mais également des particuliers qui tentent de gagner leur vie et de faire vivre leur famille.
J'aimerais que le député nous parle de cette nouvelle tendance du gouvernement à assumer de plus en plus de pouvoirs discrétionnaires, réduisant du même coup l'autorité et la responsabilité du Parlement face aux Canadiens qu'il représente.
M. Ken Epp: Monsieur le Président, il y a un juste équilibre à atteindre. Je ne suis pas homme à dire que le gouvernement ne devrait pas faire telle ou telle chose. Je me suis élevé contre la construction de cette usine de placage de pièces de monnaie car il existe déjà une excellente usine qui fonctionne. Elle produit depuis très longtemps des flans non seulement pour le Canada, mais pour d'autres pays. Je ne vois aucune utilité pour le gouvernement de se lancer dans ce secteur.
Il y a une chose que le gouvernement devrait faire. En tant que peuple, il y a des choses que nous pouvons faire collectivement de façon plus efficace par l'entremise de notre gouvernement que par l'entremise du secteur privé. Ainsi, Postes Canada, en tant que société d'État, peut faire de l'excellent travail pour les Canadiens. Dans certains cas, des comptoirs postaux sont privatisés. Ils font l'objet d'appel d'offres.
J'ai entendu les deux versions. Certains disent que c'est merveilleux, qu'ils peuvent aller à la pharmacie du coin à 22 heures et obtenir des services postaux alors qu'ils ne pouvaient le faire auparavant. Pourtant, il y a d'autres personnes qui disent qu'elles ne peuvent obtenir le service auquel elles étaient habituées parce que les employés ne sont pas formés parfois et parce que les employés réguliers des bureaux de poste sont partis et sont remplacés par des représentantes des produits de beauté par exemple qui n'ont pas les réponses. Il y a des problèmes.
En tant que parlementaires et à titre de gouvernement, il nous incombe de montrer aux Canadiens comment nous administrons leurs deniers publics et comment les sociétés administrées en leur nom fonctionnent. Ce n'est pas tout l'un ou tout l'autre.
Je ne veux pas qu'on privatise tout au Canada, mais je m'oppose certes au fait que le gouvernement utilise l'argent des contribuables et des sociétés pour concurrencer directement des gens qui ont versé des impôts au départ.
Je me rappelle ce qui s'est passé il y a de nombreuses années, en Saskatchewan, où j'ai grandi. Il y avait là un homme qui avait une excellente entreprise. Il faisait vivre sa famille en offrant un service d'autobus de Battleford jusqu'à Meadow Lake. Il faisait le trajet une fois par jour et il y avait toujours suffisamment de passagers et de marchandises pour remplir son autobus. Il offrait ce service et tout le monde était heureux. Il gagnait sa vie ainsi.
Pourtant, le gouvernement de la Saskatchewan, le gouvernement néo-démocrate qui aime administrer tout au nom des gens, a acheté l'entreprise. Il a offert un excellent service à ma connaissance. Le service n'a jamais été réduit, mais la compagnie a sans cesse perdu de l'argent par la suite. Chaque année, elle enregistrait une perte sur cet itinéraire et on a fait perdre son travail à cet homme. Ce fut une décision répréhensible.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, j'ai beaucoup apprécié les observations du député étant donné la façon rationnelle dont il a analysé le projet de loi.
Comment appliquerait-il le principe général voulant que le gouvernement doive se charger des choses que les gens ne pourraient pas faire mieux ou aussi bien eux-mêmes, et uniquement de ces choses? C'est un principe fondamental. Le gouvernement doit faire ces choses. Je suis d'accord avec le député pour dire qu'il y a des choses que le gouvernement peut faire que les gens ne pourraient pas faire d'eux-mêmes ou ne pourraient faire aussi bien. Peut-il nous en dire davantage là-dessus?
Certaines sociétés d'État deviennent une fin en soi. Elles servent leurs propres fins. Elles ne comblent plus une lacune. Elles ne sont plus chargées d'un rôle que la population ne pourrait jouer elle-même. Elles enlèvent des emplois à la population.
C'est ce principe que nous devons examiner, surtout dans le contexte du projet d'article 2 de la Loi sur la Monnaie royale canadienne, qui élargit les pouvoirs de cette société au point que la Monnaie pourrait dorénavant acheter ou faire n'importe quoi.
M. Ken Epp: Monsieur le Président, c'est un véritable défi parce que c'est vraiment une décision qui repose sur l'équilibre.
Quelques principes généraux pourraient être appliqués en l'occurrence. L'un d'eux, c'est que s'il y a déjà une ou plusieurs entreprises privées dans ce secteur, le gouvernement ne devrait pas leur faire concurrence. Si l'entreprise privée exerce son activité dans ce secteur et si elle le fait bien, le gouvernement ne devrait pas lui faire concurrence. C'est une question de principe gouvernemental. Ce principe existe, mais les libéraux n'en tiennent pas compte.
Un principe gouvernemental veut que celui-ci n'entre pas en concurrence avec le secteur privé. D'autre part, il y a des situations où le gouvernement est mieux placé. Je pense à un cas en particulier, dans ma jeunesse. C'était il y a longtemps. Quand je grandissais en Saskatchewan, mon père était président de la Bode Telephone Company.
Les députés ont sans doute entendu parler de la compagnie de téléphone de l'Alberta et de celle de la Colombie-Britannique. Maintenant, ces compagnies portent différents noms. Nous avons Telus. Avant l'établissement de la compagnie de téléphone de la Saskatchewan, il y avait des milliers de petites compagnies de téléphone dans toutes les provinces. Mon père était président de la compagnie locale, qui comptait cinq abonnés. C'était une grande compagnie. Il y avait cinq abonnés sur la ligne, et notre signal était deux sonneries longues et une courte.
Mon grand-père était abonné à une compagnie différente, la Peel Telephone Company. Pour téléphoner à mon grand-père, il fallait faire sonner un coup long pour avoir la téléphoniste. Celle-ci entendait la sonnerie dans son petit bureau, à Swift Current. Tout le monde a vu Lily Tomlin le faire. Donc, la téléphoniste, à Swift Current, retirait un fil et le raccordait à Peel. Puis, elle composait le numéro de grand-papa, et celui-ci ou grand-maman répondait. Et nous pouvions leur parler.
C'était très inefficace et cela n'allait nulle part. Voici ce qui est arrivé dans toutes les provinces, du moins dans l'Ouest. Toutes ces petites compagnies se sont regroupées pour n'en former qu'une seule à l'échelle de la province. Le tout s'est fait sous les auspices du gouvernement. C'était une excellente initiative coopérative de la part de la population. En ce temps-là, c'était une façon tout à fait légitime de procéder.
Ce n'est sans doute plus le cas. Les communications étant ce qu'elles sont, il vaut sans doute mieux laisser faire la libre entreprise et la règle de la concurrence.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais ajouter mon grain de sel dans ce débat. Toute la journée, j'ai entendu des députés justifier qu'une société d'État puisse avoir accès aux fonds du Trésor. Comme je suis aujourd'hui de service, je dois intervenir et donner mon avis.
Le projet de loi dans sa forme actuelle ne me plaît pas pour trois raisons. Aux termes du projet de loi, 75 millions de dollars de l'argent des contribuables serviront à un prêt garanti sur le Trésor ou toute autre source. C'est ainsi que le projet de loi est libellé. Au bout du compte, cela veut dire qu'on utilise l'argent des contribuables pour soutenir cette initiative. En cas d'échec, ce sont les contribuables qui écoperont.
Ce qu'il y a de tellement insidieux et de retors, c'est qu'on se sert de l'argent des contribuables pour desservir leurs intérêts. J'ai souvent soutenu qu'il était préférable de brûler un million de dollars plutôt que de le donner au gouvernement. Il s'agit ici d'un cas relativement mineur, mais c'est tout de même un exemple classique de ce qui se passe ici.
Les contribuables versent au fisc de l'argent durement gagné, et on l'utilise contre eux. Les employés de Westaim verront le gouvernement utiliser cet argent pour les évincer du marché. Ce qu'il y a de retors, là-dedans, c'est qu'une entreprise privée produit déjà ces flans et que le gouvernement va l'évincer, l'écarter.
Si c'était un exemple isolé, ça pourrait aller et on ne s'en apercevrait pas. Des gens comme moi n'interviendraient pas. Malheureusement, les exemples sont légion. Il y a donc l'exemple de la Monnaie royale canadienne. Il y a aussi celui de Postes Canada qui essaie d'écarter la concurrence avec le courrier électronique. Et Postes Canada qui essaie d'écarter les concurrents du secteur privé dans le domaine de la livraison des colis. Et Postes Canada qui essaie d'écarter ses concurrents dans le domaine de la messagerie. Postes Canada a réussi à faire fermer Overnight Express, à Calgary, une entreprise qui livrait le courrier dans la zone postale T2P au centre-ville pour une fraction de ce que demande Postes Canada pour le même service et qui garantissait la livraison du courrier pendant la nuit. Postes Canada y a réussi parce qu'elle exerce un monopole.
Il y a un autre exemple dans le domaine des programmes de formation. Le Henderson Business College exerçait ses activités dans la ville de Calgary. Durant des décennies, cette institution a fourni une bonne formation à ceux qui cherchaient à améliorer leurs habiletés en dactylographie et en diverses disciplines commerciales. Vinrent les subventions de l'État, et les universités et les collèges qui ont eu accès à tous les fonds publics dans la ville de Calgary, dans la province de l'Alberta, ont délogé progressivement les entreprises du secteur privé. Ils ont continué à aller de l'avant et à élaborer des programmes d'études. Ils ont grignoté le champ d'activité des entreprises du secteur privé et ont fini par les faire fermer. Le Henderson Business College a rapetissé, puis a fermé ses portes. Il avait autrefois deux immeubles. Puis il est passé à un, et enfin il a cessé ses activités. C'est à cause de l'état de choses insidieux que nous avons quand l'État se sert de l'argent des gens pour les faire fermer. Il se sert de l'argent de ces contribuables pour leur faire abandonner leurs activités.
Je me rappelle très bien ce genre de choses dans la ville de Calgary lorsque Petro-Canada a été nationalisé et que Petrofina a été amalgamé avec d'autres sociétés. Le gouvernement est allé de l'avant et il s'est servi des fonds publics pour ériger le plus haut édifice appartenant à une pétrolière dans la ville de Calgary, cela, pour que le premier ministre de l'époque, Pierre Elliot Trudeau, puisse signaler avec fierté que Petro-Canada s'était élevée au-dessus de ses concurrents du secteur privé qui, eux, n'avaient pas accès aux deniers publics, contrairement au gouvernement libéral alors en place.
Voilà le genre de réserve que j'ai par rapport à ce projet de loi, aux garanties de prêts et aux entreprises du secteur privé qui se font rayer de la carte. Le projet de loi va nuire aux entreprises du secteur privé en se servant de l'argent que les contribuables ont si durement gagné.
Un autre aspect dont je veux parler, c'est le fait que le gouvernement tente d'établir une relation sans lien de dépendance. Il fait cela constamment, que ce soit par rapport à Revenu Canada ou à toutes sortes d'autres organismes. Il n'aime pas le principe de l'obligation de rendre compte ministérielle. Il n'aime pas l'idée de la suprématie du Parlement qui peut remettre en question certaines décisions gouvernementales. Il va donc de l'avant et repousse continuellement les limites.
Les libéraux se distancent de plus en plus des organismes et, lorsque des problèmes se posent, que l'opposition le signale et qu'elle propose des amendements, le gouvernement lui dit de ne pas s'inquiéter et de lui faire confiance. Dans quelques années, une fois que le principe de la relation sans lien de dépendance sera établi, si nous signalons au gouvernement les problèmes que nous avions prévus. Il nous dira alors que ce n'est plus de son ressort, qu'il s'agit d'un organisme ou de quelque chose de plus indépendant qu'une société d'État. Nous ne pourrons plus le blâmer. Le ministre n'a pas de comptes à rendre.
Il y a trois bonnes raisons de s'opposer au projet de loi. Premièrement, le gouvernement utilise les deniers publics pour garantir un prêt. Deuxièmement, en utilisant les deniers publics, l'argent des contribuables, il oblige des entreprises privées à fermer leurs portes et il fait en sorte que le secteur public leur dame le pion. Troisièmement, il veut réduire l'obligation de rendre compte et se distancer davantage en établissant des relations sans lien de dépendance et en restreignant l'obligation de rendre compte ministérielle.
Mme Carolyn Parrish (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'impression de siéger depuis une heure parmi les bons, les mauvais et les méchants. Les bons sont là-bas, et les mauvais et les méchants sont ici.
Je ne comprends pas pourquoi, si la société que l'on défend tellement est forcée de fermer ses portes, ne peut-elle satisfaire que 20 p. 100 des besoins de la Monnaie, obligeant la Monnaie à aller chercher à l'étranger les flans plaqués dont elle a besoin. Si on l'oblige à fermer ses portes, le député pourrait peut-être me dire pourquoi elle ne peut pas fournir 100 p. 100 des flans dont nous avons besoin à l'heure actuelle.
M. Rob Anders: Monsieur le Président, si je comprends bien, la société Westaim pouvait produire tous les flans dont le gouvernement a besoin, mais ce contrat ne la fait travailler qu'au tiers de sa capacité à l'heure actuelle. La secrétaire parlementaire ne devrait pas invoquer la capacité de production de la Westaim pour essayer d'obliger l'entreprise à fermer ses portes. Cela n'a rien à voir.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue d'être intervenu dans le but et d'avoir abordé la question comme il l'a fait. Il a présenté des arguments très lucides et très concis sur les trois points qu'il a fait valoir. Ses arguments étaient excellents.
Je voudrais qu'il nous parle plus en détail du vent de changement qui pourrait souffler sur l'administration actuelle de la Monnaie. Il conviendra, je crois, que le rendement des gestionnaires actuels de la Monnaie est exemplaire. Ces gestionnaires ont complètement transformé la Monnaie, qui est devenue un organisme rentable entretenant de bonnes relations de travail. L'usine fonctionne très bien. Le travail effectué est fort convenable.
Avec une gestion aussi cohérente et efficace partout, nous n'aurions pas à nous préoccuper de la politique, mais le projet de loi modifie la politique et confie des pouvoirs à tout le monde.
On est alors en droit de se demander qui prendra en main la gestion de la Monnaie qui fonctionne très bien actuellement. Je n'ai que du respect pour la présidente de la Monnaie, mais je me demande ce qu'il adviendra si elle quitte son poste.
Le député pourrait peut-être nous dire brièvement ce qu'il en pense.
Je voudrais aussi que le député nous dise ce qui se produira si quelque chose va de travers, si l'un des scénarios envisagés aujourd'hui se réalise. Comment faire pour renverser la vapeur une fois qu'une mesure législative a été adoptée et a lancé une tendance, qui est devenue presque une culture au sein d'une société d'État? Comment faire pour modifier cette culture une fois qu'elle est ancrée?
M. Rob Anders: Monsieur le Président, cela fait partie du problème. Le gouvernement est convaincu que ses interventions sont la solution à tout. Cependant, nous constatons trop souvent que le problème, c'est justement le gouvernement. Le gouvernement croit qu'en devenant plus gros, il va faire disparaître les problèmes. Souvent, plus le gouvernement se mêle de quelque chose, plus les problèmes deviennent gros.
Le député soulève une très bonne question. Que se passera-t-il si un président de la Monnaie royale très compétent part et est remplacé par quelqu'un d'autre?
Le gouvernement et les contribuables affirment avec fierté que c'est une initiative tout à fait rentable, car à qui pourrait-on prêter de l'argent si on ne peut pas prêter à la Monnaie royale, l'organisme qui le fabrique? J'imagine que l'on ne peut trouver meilleur emprunteur. On ne saurait trouver meilleure garantie que celle que peuvent donner les gens qui produisent l'argent.
Cependant, tout cela est vrai sous la présidence actuelle. Mais si la présidente que nous avons était remplacée par quelqu'un qui n'est pas aussi compétent, ce sont les contribuables qui devraient payer la note en cas de pépin.
Le gouvernement tient à établir un système qui donnera un dur coup à un concurrent du secteur privé. Je me souviens des discussions que nous avons eu sur l'hépatite C, sur le sang contaminé et sur la question de savoir si le gouvernement devait détenir des monopoles. Lorsque le gouvernement pose des gestes malheureux, il est coupable et il devrait en assumer l'entière responsabilité.
Les concurrents du secteur privé sont capables de fonctionner dans un système de marché et, s'ils rencontrent des problèmes, ce n'est pas entièrement la faute du gouvernement parce qu'il y a d'autres acteurs. Cependant, lorsque le gouvernement occupe un champ d'activité à lui seul, il est le seul coupable en cas de problèmes et il doit assumer ses responsabilités.
Je ne pense pas que le gouvernement veuille assumer de telles responsabilité, mais avec le projet de loi à l'étude, il devra le faire.
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une autre petite remarque à faire au sujet de la concurrence réelle.
Qu'arriverait-il si la Monnaie produisait elle-même toutes ses pièces à l'usine de Winnipeg? Nous avons entendu dire que 20 p. 100 de ses approvisionnements venaient de Westaim et que 85 p. 100 venaient d'ailleurs, à cause du processus d'appel d'offres, de l'ALENA et de la présence d'autres fournisseurs. Il y a eu des occasions où, si j'ai bien compris, le délai imposé était trop court pour que Westaim puisse livrer le produit à temps. La Monnaie avait une commande qui devait être exécutée très rapidement et, comme Westaim a dit qu'elle avait besoin d'un peu plus de temps, elle est allée ailleurs. C'est juste et équitable, mais ce n'est pas arrivé très souvent.
Le problème est que, selon Westaim, en construisant cette usine à Winnipeg, la Monnaie sera capable de satisfaire à tous ces besoins même si l'usine n'a qu'un tiers de la capacité de l'usine de la Westaim à Fort Saskatchewan. Cela n'a tout simplement pas de sens. Il y a concurrence.
L'autre chose qui me dérange vraiment est que le ministre a dit que nous ne ferions pas concurrence au secteur privé. Selon les documents de la Monnaie elle-même, on s'attend à retirer 3 millions de dollars de recettes non pas des ventes canadiennes, mais bien des ventes à des pays étrangers qui achètent ces flans.
L'idée de ne pas faire concurrence au secteur privé est tout simplement très mal communiquée. Je crois qu'il y aura concurrence, et ce n'est pas bien.
L'autre chose qu'il faut reconnaître, c'est que beaucoup de pays étrangers aiment faire affaire avec des gouvernements, et cela donne à ces derniers un avantage extrêmement injuste.
M. Rob Anders: Monsieur le Président, ce genre de mesure insidieuse et condamnable qui consiste à mêler l'argent du secteur privé à l'argent du secteur public existe au delà de nos frontières. Non seulement va-t-on aller accaparer une part du marché et frustrer une entreprise privée canadienne qui crée des emplois dans ma circonscription pour certains de mes compatriotes, mais on va aussi nuire au secteur privé à l'étranger. On ne va pas causer du tort uniquement aux entreprises du secteur privé au Canada, mais aussi à celles du monde entier.
La secrétaire parlementaire secoue la tête en jubilant. Les libéraux ne se formalisent absolument pas de faire concurrence aux entreprises du secteur privé et de leur nuire sur le marché en se servant des dollars payés par celles-ci. Le gouvernement s'assure des surplus inacceptables en se servant de l'argent versé par ces entreprises, y compris des contributions en trop versées au régime d'assurance-emploi, au régime de pensions du Canada et à une foule d'autres programmes. Les libéraux ne sont que trop heureux de prendre l'argent versé par le secteur privé et de s'en servir contre les entreprises pour leur enlever une part du marché, tant ici qu'à l'étranger. Honte aux libéraux.
Mme Carolyn Parrish (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, l'autre député signalait que le gouvernement fédéral ne devrait pas intervenir quand il existe une ou deux sociétés qui excellent dans un domaine donné.
Je voudrais que le député me dise comment la Monnaie, dont la fonction est de produire des pièces de monnaie, ferait pour survivre si ces excellentes sociétés qui fournissent la matière première décidaient d'en tripler ou d'en quadrupler le prix? Que pourrions-nous faire en pareil cas? Ce que j'ai entendu venant d'en face tenait du conte de fée.
M. Rob Anders: Monsieur le Président, s'il y a une chose à laquelle les libéraux n'entendent rien, c'est bien la concurrence. Il est question d'appels d'offres ouverts. S'ils sont disposés à tirer des recettes de trois millions de dollars de ventes à l'étranger, ils peuvent tout aussi bien décider de se procurer ce dont ils ont besoin à l'étranger.
[Français]
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.
Et la sonnerie s'étant arrêtée:
Le président suppléant (M. McClelland): Le vote par appel nominal sur la motion est différé jusqu'au mardi 1er décembre 1998, à la fin des ordres émanant du gouvernement.
[Traduction]
SUSPENSION DE LA SÉANCE
M. Peter Adams: Monsieur le Président, je propose que la séance soit suspendue jusqu'à 18 h 30.
Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
( La séance est suspendue à 18 h 24.)
REPRISE DE LA SÉANCE
La séance reprend à 18 h 30.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la Chambre passe maintenant à l'étude d'une motion portant que la Chambre s'ajourne pour discuter d'un sujet précis et important devant faire l'objet d'un débat urgent, à savoir l'industrie agricole.
DÉBAT D'URGENCE
[Traduction]
L'AGRICULTURE
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, je propose:
Que la Chambre s'ajourne maintenant.
Le Président: Avant de céder la parole au député de South Shore, je signale à tous que la durée des discours est fixée à 20 minutes. Vous pouvez répartir les discours comme il vous plaira. Tout orateur peut partager le temps de parole qui lui est alloué. Il s'agira d'un débat de quatre heures.
M. Gerald Keddy: Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi ce soir de prendre part à un débat d'urgence sur l'agriculture. J'aimerais vous remercier, monsieur le Président, d'avoir autorisé ce débat vendredi dernier.
Je signale que je partagerai mon temps avec notre critique en matière d'agriculture, le député de Brandon—Souris.
Tous les députés ici présents ne sont pas sans savoir qu'une crise frappe le secteur agricole au Canada. Cette crise est très réelle et elle frappe à notre porte aujourd'hui. Elle a cours dans le secteur agricole depuis quelques années déjà et nous ne nous attendons pas qu'elle disparaisse comme par magie. Il faudrait de la détermination de la part du gouvernement. Il faudrait de la détermination de la part du ministre de l'Agriculture, de même que de la part du ministre des Finances, pour trouver les moyens de s'attaquer à ce problème.
Plusieurs facteurs internationaux se sont conjugués pour menacer une foule de secteurs de l'industrie agricole canadienne. Les énormes subventions versées par la Communauté européenne et le gouvernement américain aux agriculteurs, conjuguées à la crise financière en Asie, ont eu un effet dévastateur sur les milieux agricoles et la vie rurale au Canada.
En 1997, le revenu agricole net a chuté de 55 p. 100. En 1998, les recettes agricoles dans l'Ouest du Canada ont chuté de façon phénoménale. Il y a actuellement dans l'industrie du porc une crise qui a des répercussions sur toutes les provinces grandes productrices de porc, comme le Québec, le Manitoba et l'Ontario. Pour ajouter à ce problème, l'industrie agricule en Nouvelle-Écosse chancelle après deux années de sécheresse qui ont coïncidé avec d'importantes coupures dans les programmes de soutien gouvernementaux.
Beaucoup de gens dans le secteur de l'industrie agricole estiment que les programmes de soutien agricole ne sont pas suffisants pour mettre les agriculteurs à l'abri de nouvelles chutes du revenu agricole.
Il convient de rappeler les statistiques. Je suis sûr, que d'ici la fin de la soirée, on va répéter à plusieurs reprises le chiffre que je vais citer. Une fois de plus, car je tiens à souligner l'importance du problème, en 1997, le revenu agricole net a chuté de 55 p. 100. Le revenu agricole net a baissé de moitié. C'est impossible. C'est une chose que la plupart de nous, petits entrepreneurs, avons beaucoup de mal à comprendre. En 1998, les recettes agricoles dans l'Ouest du Canada ont encore chuté et on craint que les programmes de soutien agricole ne résistent pas.
L'an dernier, le Canada s'est classé avant-dernier sur la liste des pays de l'OCDE, pour ce qui est de l'aide gouvernementale aux agriculteurs. Au Canada, le producteur reçoit une subvention équivalente à 2 p. 100. Aux États-Unis, cette subvention est de 16 p. 100, et dans les pays de l'Union européenne, elle est de 49 p. 100.
Nos agriculteurs sont parmi les meilleurs au monde. Ils peuvent équitablement faire concurrence aux agriculteurs de n'importe quel pays du monde. Toutefois, lorsque les agriculteurs et producteurs des États-Unis touchent des subventions correspondant à 16 p. 100 de leurs revenus et que ceux de l'Union européenne ont des subventions de 49 p. 100, il est bien difficile pour nos agriculteurs de soutenir leur concurrence.
Il n'est pas raisonnable de penser que l'Union européenne va abandonner ses subventions à brève échéance, pas plus d'ailleurs que les États-Unis. La seule pensée raisonnable est de songer à donner à nos agriculteurs le même genre d'appui que les Américains donnent à leurs agriculteurs et les Européens aux leurs.
La crise asiatique a eu des conséquences importantes et dramatiques pour les revenus agricoles. Pour combattre les effets de la crise asiatique, les États-Unis ont annoncé une nouvelle aide de 6 milliards, ce qui porte les subventions totales à plus de 14,5 milliards de dollars américains, ou 22,2 milliards de dollars canadiens pour 1998 seulement.
Cela continue comme cela. Mais ce qu'il faut réaliser, c'est que la situation canadienne est désespérée. Des milliers d'agriculteurs risquent la faillite et le CSRN ne contient pas assez d'argent pour les protéger. Il appartient au Parlement du Canada de trouver une solution à ce problème.
La crise asiatique a aggravé la situation. Parallèlement, l'Union européenne a considérablement accru sa production depuis deux ans en dépit de la chute du prix du blé. L'Union européenne fournit une aide directe de 175 $ l'acre pour le blé. Par ailleurs, elle soutient le prix plancher de 205 $CAN la tonne. Les subventions à l'exportation de l'UE sont de 55 $CAN la tonne de blé, 119 $CAN la tonne d'orge et 137 $CAN la tonne de malt. Un agriculteur européen reçoit au moins 5,58 $ le boisseau alors que nos agriculteurs canadiens n'en tirent que 40 cents environ.
Nous sommes forcés de reconnaître que c'est là un problème de taille et un grave affront à l'économie canadienne. Nous devons adopter une certaine forme d'aide pour protéger nos agriculteurs et les aider dans des situations de ce genre.
Le plus important programme de soutien au agriculteurs, le Compte de stabilisation du revenu net, a été mis sur pied par un gouvernement progressiste conservateur à titre de fonds de prévoyance. Il permet aux agriculteurs de mettre jusqu'à 2 p. 100 de leurs profits de côté pendant les bonnes années, ce qui ne représente pas un montant très élevé, les gouvernements fédéral et provinciaux contribuant une somme équivalente. Le revenu de ce compte permet de venir en aide aux agriculteurs au cours des années difficiles. Ces derniers ont commencé à retirer de l'argent de ce compte. Les retraits ont augmenté de 70 p. 100 au cours d'une période de six mois en 1998. Il y a actuellement 2,5 millions de dollars dans le CSRN.
Parmi les autres mesures de soutien, on retrouve l'assurance-récolte et les programmes connexes comme les paiements anticipés pour les récoltes. Le gouvernement fédéral verse 600 millions de dollars et les provinces 400 millions au programme de soutien en général. Ce n'est pas assez. C'est loin d'être suffisant.
Depuis 1993, l'appui des gouvernements fédéral et provinciaux aux agriculteurs a diminué de plus de 60 p. 100. Les agriculteurs veulent que le gouvernement fédéral s'engage à les aider dans les bonnes périodes comme dans les mauvaises. Les économistes ont estimé que les producteurs de blé canadiens reçoivent moins de 40 cents le boisseau d'aide du gouvernement. Comment peut-on soutenir la concurrence quand d'autres pays versent 2,60 $ et même jusqu'à 5,69 $? C'est impossible.
J'aimerais présenter quelques faits qui seront versés au compte rendu de la Chambre et qui pourraient intéresser les députés des autres partis qui, je l'espère, appuieront le débat de ce soir.
Le Parti progressiste conservateur a toujours apporté beaucoup d'appui aux agriculteurs en période difficile. Entre 1984-1985 et 1988-1989, les versements d'assurance-récolte et d'assurance-revenus ont totalisé 21,7 milliards de dollars. Nous avons mis sur pied un programme spécial pour le grain afin de compenser les effets de la baisse des prix entraînée par la guerre commerciale entre l'Union européenne et les États-Unis, et nous avons versé 2 milliards de dollars sur deux ans. Entre 1988 et 1993, les agriculteurs canadiens ont reçu 800 millions de dollars pour compenser les pertes dues à la sécheresse, grâce au Programme canadien d'aide aux agriculteurs victimes de la sécheresse.
Le Parti progressiste conservateur a déclaré que l'excédent budgétaire fédéral devrait être partagé de la manière suivante: un tiers pour réduire la dette, un tiers pour alléger les impôts et un tiers pour les dépenses du gouvernement. Étant donné la crise des revenus agricoles, il est nécessaire d'accroître les dépenses de ce côté.
Il faut aux agriculteurs des engagements à long terme quant aux mesures de protection. En ce moment, le ministre de l'Agriculture se contente de négocier avec ses homologues provinciaux un prolongement d'un an. Il faut aux agriculteurs l'assurance que le gouvernement reste engagé à l'égard d'un programme national de protection. Il faut un programme national qui s'adapte à toutes les régions d'est en ouest et soit offert à tous les producteurs. Les programmes d'aide doivent être appliqués avec justice et équité.
Dans le peu de temps qu'il me reste, je lance un appel aux députés réformistes. Ils appuient certainement ce débat d'urgence et ils comprennent la crise. Nombre d'entre eux sont de l'ouest du Canada. Ils comprennent aussi que, par le passé, notre parti a défendu avec force et cohésion les intérêts des producteurs de l'Ouest.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, je veux remercier à mon tour le Président de la Chambre des communes d'avoir permis la tenue de ce débat d'urgence ce soir. Je remercie mon collègue de South Shore d'avoir présenté la motion en mon absence.
Comme mes collègues le savent ainsi que, j'en suis sûr, le ministre de l'Agriculture et les ministériels, j'ai passé la semaine dernière à parler et, surtout, à écouter les producteurs de l'ouest du Canada. Franchement, j'ai entendu trop d'histoires d'horreur que j'aimerais bien rapporter à la Chambre, mais je me contenterai de dire que ce secteur est en crise et que c'est une urgence. Un débat d'urgence est vraiment nécessaire, parce qu'il faut en discuter.
Quand, le 4 novembre, le ministre de l'Agriculture a rencontré ses homologues provinciaux et des dirigeants du secteur de l'agriculture pour discuter du soutien du revenu agricole, il a déclaré qu'il s'agissait d'une réunion de discussion et non d'une réunion de décision. Jeudi dernier, le ministre était également censé rencontrer le Comité des affaires sociales et économiques du Cabinet afin de mettre au point sa proposition pour combattre la crise du revenu agricole. Il n'y a toujours aucune proposition. Vendredi, le ministre n'avait toujours pas d'entente de principe sur la proposition d'aide d'urgence de 2 milliards de dollars qui aurait été faite, selon ce que rapportait Radio-Canada mercredi dernier.
Le ministre est censé rencontrer de nouveau le Cabinet cette semaine pour tenter de convaincre ses collègues de soutenir l'agriculture. Encore une réunion qui servira de prétexte pour retarder une décision sur la crise du revenu agricole. Le gouvernement a même fait des tentatives de dernière minute pour reporter le débat de ce soir. C'est un autre prétexte que le gouvernement emploiera pour remettre à plus tard les discussions et délibérations sérieuses.
Le ministre a eu l'occasion de faire preuve de leadership le 16 juillet dernier lorsqu'il a rencontré ses homologues provinciaux et territoriaux à Niagara-on-the-Lake pour discuter du filet de sécurité agricole, mais il a refusé d'offrir quoi que ce soit de plus que ce que prévoit déjà le programme.
Mis à part la rencontre de l'été dernier, le ministre est au courant de la situation depuis que le premier ministre l'a nommé à la tête de son ministère l'an dernier. Cette question ne devrait pas être nouvelle pour le ministre ni pour personne à la Chambre.
Le ministre avait accès à l'information de son ministère concernant les revenus agricoles depuis plus d'un an. Il dispose de ressources, mais le gouvernement a choisi de ne rien faire et s'en tient toujours à ce choix.
Le gouvernement libéral semble avoir pour politique d'attendre que la situation dégénère en crise avant de tenter d'y remédier, comme il l'a fait dans le cas des contrats d'achats d'hélicoptères, du ministère des Pêches et des Océans et du Régime de pensions du Canada, pour n'en nommer que quelques-uns.
Nous ne serions pas dans cette situation si le gouvernement faisait preuve de volonté politique. Ce ne semble toutefois pas être le cas. Comme on l'a dit tantôt, nos concurrents ont-ils cette volonté?
Les Américains ont mis très peu de temps à accorder une aide supplémentaire de 6 milliards de dollars à leurs producteurs. Le Royaume Uni a récemment annoncé la création d'un programme d'aide de 250 millions de dollars. Voici ce que disait le ministre de l'Agriculture de Grande-Bretagne, M. Brown: «L'industrie a traversé une période difficile, mais j'ai bon espoir qu'elle connaîtra un avenir prospère. Elle a cependant besoin, pour y arriver, d'une aide immédiate et c'est ce que je lui offre.»
Voilà ce que déclarait le ministre de l'Agriculture du Royaume Uni, notre concurrent sur le marché mondial et un pays qui a, de toute évidence, la volonté politique de dépenser son argent là où il faut, c'est-à-dire au profit des producteurs.
Comme nous l'avons vu en octobre, nos voisins du Sud ont annoncé un programme d'aide de 6 milliards de dollars, en plus des 8,25 milliards de dollars prévus dans la Federal Agriculture Income Reform Act, ce qui porte à 14 milliards de dollars l'aide totale accordée aux agriculteurs américains.
Je tiens à être parfaitement clair. Ni le Parti progressiste conservateur ni moi-même ne suggérons que nous accordions à nos agriculteurs la même aide que les États-Unis l'ont fait pour les leurs. Ce serait impensable. Nous n'avons pas les moyens de concurrencer les États-Unis ou l'Union européenne à ce chapitre. Il serait aussi futile de croire que le Canada parviendra, au cours de la prochaine semaine, à convaincre les États-Unis ou l'Union européenne à ramener le soutien qu'ils offrent à leurs producteurs aux niveaux canadiens. Ils refuseront tout simplement de le faire. Pourtant, il faut réagir.
Voilà pourquoi nous devons accorder une aide financière immédiate et à court terme pour éviter que ne soit détruite davantage la base même du secteur agricole canadien. En plus de l'aide financière à court terme versée cette année, il faut trouver des solutions à long terme. Nous devons chercher à protéger notre industrie de deux façons, au moyen de l'aide financière à court terme accordée cette année et au moyen d'un programme agricole à long terme que ne pourront contester les États-Unis à la prochaine ronde de négociations commerciales.
Si nous ne proposons qu'une solution à court terme, notre secteur agricole aura par la suite des problèmes à long terme à régler.
Je m'en voudrais de ne pas signaler à quel point je trouve la situation ironique, puisque le ministre de l'Agriculture n'a cessé de répéter qu'il n'aurait jamais recours à un programme d'aide spéciale et pourtant c'est exactement à quoi songe actuellement le Cabinet. À l'instar des autres députés du Parti progressiste conservateur, je ne crois pas que nos producteurs ont besoin de programmes spéciaux, mais c'est malheureusement tout ce que le gouvernement leur offre après avoir sabré le programme de soutien de revenu. Nous ne serions pas dans cette position malencontreuse, si le gouvernement avait eu la bonne idée de remplacer un programme à long terme lorsqu'il a aboli le RARB en 1995.
En 1995, le gouvernement a opté pour un avantage passager qui apportait un dommage permanent. Certaines provinces ont refusé d'emboîter le pas. L'Alberta a le FIDIP, un programme de soutien de revenu, et l'Ontario a un programme d'assurance-revenu du marché qui est similaire au RARB, mais qui a été ficelé de façon à éviter toute mesure de représailles.
Lorsque le prix des produits était bon et tout semblait bien se dérouler sur les exploitations agricoles, pourquoi aurait-on pensé à mettre l'accent sur des programmes de protection du revenu agricole? Le problème avec ce genre de façon de penser, c'est que, plus souvent qu'autrement, les périodes de vaches grasses ne durent pas à jamais. Nous sommes maintenant placés devant cette situation. Si le gouvernement fédéral avait vraiment fait preuve de leadership dans la défense de l'industrie, nous ne ferions pas face à ces problèmes.
Les gouvernements provinciaux conservateurs déploient des efforts pour combler le vide dans le cadre de la crise actuelle relativement à la protection du revenu agricole. Vendredi, le gouvernement albertain s'est engagé à porter de 15 000 $ à 50 000 $ les prêts sans intérêt pour les éleveurs de porcs. Le Manitoba a offert de participer à un programme national et je viens tout juste d'apprendre que le ministre de l'Agriculture de la province, M. Harry Enns, vient d'annoncer qu'il a demandé à la Société du crédit agricole du Manitoba de collaborer avec les producteurs au cas par cas, au besoin, pour reporter les paiements prévus, afin d'éviter que des agriculteurs ne soient acculés à la faillite. L'Île-du-Prince-Édouard a également annoncé récemment un programme de soutien du revenu pour ses éleveurs de porcs.
Le temps des réunions est terminé. Il faut maintenant prendre des mesures concrètes. Les producteurs vendent à perte. Selon Statistique Canada, le revenu agricole net a chuté de 55 p. 100 au niveau national entre 1996 et 1997.
On a prévu qu'il baisserait encore de 35 p. 100 en 1997-1998. L'année prochaine, la situation devrait être encore pire. Cette industrie devrait perdre 170 millions de dollars l'année prochaine. Ce sera alors la première fois qu'on a un revenu négatif depuis la Grande crise des années 30.
Les agriculteurs ne peuvent pas attendre. Ils ont besoin de notre aide et ce, dès maintenant. Nous savons qu'il y a un problème et il s'agit maintenant de s'y attaquer.
Je rappelle au ministre de l'Agriculture ce qu'il a dit le 9 février 1993 à la Chambre: «Je veux m'adresser aux contribuables qui se demandent la raison pour laquelle les gouvernements consacrent des milliards de dollars à l'agriculture. Le contribuable, qui est dans la même situation que nous tous en période de récession, trouve difficile de comprendre qu'on procède à de grosses dépenses. Il se demande pourquoi on continue de soutenir l'agriculture. Eh bien, c'est parce que le jeu en vaut la chandelle. Le soutien de l'agriculture est coûteux, mais les Canadiens devraient se demander quelles sources d'approvisionnement ils souhaitent. Je crois qu'ils veulent des produits canadiens.» Je suis d'accord avec ces observations. Faisons quelque chose.
Je voudrais pouvoir aider dans le cadre de ce débat. Je voudrais m'assurer que le ministre de l'Agriculture sait qu'il a l'appui du Parti progressiste conservateur. Je l'implore de s'adresser à ses collègues du Cabinet pour veiller à ce que ce programme soit mis en place avant la fin de l'année, le plus tôt possible, afin que mes producteurs puissent retourner aux champs, au printemps.
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec mon secrétaire parlementaire.
Il ne fait aucun doute que nous sommes tous conscients, et beaucoup d'autres Canadiens ont pris conscience cette semaine et au cours des derniers jours, de l'anxiété extrême qui règne dans les collectivités agricoles du Canada, notamment chez les agriculteurs qui travaillent dans le secteur de la production de porc et dans celui des céréales.
J'ai passé ma vie dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Je connais la situation dans laquelle se trouvent actuellement un trop grand nombre d'agriculteurs canadiens. Je peux dire en toute sincérité que je n'ai jamais travaillé aussi fort à une question qu'à celle-ci, et je continuerai de le faire. Je suis reconnaissant de l'appui que m'ont apporté dans ce dossier mes collègues du Cabinet, mes homologues des provinces, les agriculteurs, les organisations agricoles, mes collègues de ce côté-ci de la Chambre et tous les autres députés.
Nous devons trouver un programme, une aide et la solution la plus efficace que possible pour répondre aux besoins du secteur agricole et de l'ensemble du pays.
Je remercie également tous les députés à la Chambre de continuer de soumettre ce dossier à l'attention de tous les Canadiens. Les producteurs agricoles sont de durs travailleurs. Ils représentent un des piliers de notre économie.
Cependant, parfois, je pense que beaucoup de Canadiens qui vivent dans les régions urbaines oublient à quel point le secteur agricole est important. Je remercie le député qui m'a précédé d'avoir relu à la Chambre certaines observations que j'ai faites à ce sujet, il y a quelques années.
Une motion comme celle dont la Chambre est saisie ce soir peut être très utile pour informer le public de la grave situation dans laquelle se trouvent les agriculteurs aujourd'hui. Je suis personnellement très au courant des tribulations de certains producteurs et de la gravité de la situation actuelle. J'ai rencontré un grand nombre d'agriculteurs, d'organismes qui les représentent, de collègues provinciaux, et la liste continue. Ces derniers jours, ces dernières semaines, je me suis entretenu avec un grand nombre d'entre eux, d'un bout à l'autre du pays.
Je sais à quel point certains agriculteurs sont désespérés. L'avenir leur fait peur et ils craignent de ne pas pouvoir subvenir aux besoins de leur famille.
Outre les craintes que m'inspire leur situation personnelle, je m'inquiète également des répercussions de la situation actuelle sur une industrie qui était jusqu'à présent très robuste, qui avait pris des risques calculés et qui, ces dernières années, a contribué de façon importante à la croissance économique du Canada.
N'oublions pas qu'elle représente 8 p. 100 du produit intérieur brut. Elle a grandement contribué à l'assainissement des finances publiques de ce pays. Nos agriculteurs n'ont pas hésité à prendre des risques et nous en avons profité. Ils se sont lancés sur le marché de l'exportation avec un enthousiasme non mitigé. Cela a contribué à stimuler l'économie nationale.
Je crains que si les agriculteurs s'aperçoivent qu'ils ne peuvent pas compter sur nous quand ils sont dans le besoin, ils seront moins enclins à l'avenir à prendre des risques. Permettez-moi de dire aux députés que cela aurait un effet négatif sur chacun d'entre nous. Les gouvernements fédéral et provinciaux ont à leur disposition des instruments pour aider les agriculteurs à gérer les risques qu'ils prennent. Servons-nous-en.
De même, par suite d'entretiens que j'ai eus avec les représentants des agriculteurs et des provinces, je sais que les programmes en place ne permettront pas de satisfaire les besoins de certains producteurs, surtout dans les circonstances actuelles. Je tiens à ce que nous apportions l'aide nécessaire sans tarder, pour que des agriculteurs efficaces et productifs ne soient pas victimes d'un effondrement des cours du marché mondial dont ils ne sont absolument pas responsables.
Je sais que plusieurs députés d'en face insistent en disant qu'il faut faire quelque chose tout de suite. Ils peuvent croire que nous travaillons le plus vite possible dans ce but. Comme tout le monde le sait, j'ai eu des discussions exhaustives sur le sujet avec mes collègues du Cabinet. Ils comprennent la gravité de la situation et ils m'aident à déterminer la meilleure façon d'agir.
Nous avons pris des mesures pour que les agriculteurs puissent recourir aux programmes déjà en place, pendant que nous élaborons le meilleur plan d'action possible. Nous avons établi un processus permettant aux agriculteurs d'effectuer des retraits provisoires de leurs CRSN d'ici la fin de l'exercice. Nous avons pris des mesures pour que les producteurs sachent bien les montants du programme des paiements anticipés pour les récoltes, qui allégera leur problème de liquidités.
De plus, j'ai rencontré les représentants des organisations agricoles et des provinces. Nous avons convenu d'étudier de concert les solutions à court terme et d'accélérer l'examen de solutions durables qu'effectue actuellement le comité consultatif chargé d'étudier le filet de sécurité. Depuis, j'ai reçu le rapport du comité et j'en ai discuté avec les membres du Cabinet. Nous continuons de réunir les renseignements nécessaires pour mettre sur pied un programme efficace et équitable qui ne compromette pas les investissements que nous avons faits.
J'ai aussi parlé aux fournisseurs d'intrants, comme l'Institut canadien des engrais dont j'ai rencontré les représentants il y a un peu plus d'une semaine. Vendredi dernier, j'ai rencontré des représentants de la Banque royale du Canada. Je rencontrerai des représentants d'autres institutions financières pour m'assurer qu'ils comprennent la situation à laquelle nos agriculteurs sont confrontés. Je profite de chaque occasion qui m'est offerte pour encourager tous ceux qui traitent avec les agriculteurs à faire preuve de compassion et à travailler avec les producteurs pour arranger les échéanciers de paiement de la meilleure façon possible durant cette période difficile.
Demain, je prévois m'entretenir avec des représentants de l'industrie agricole américaine à Washington pour essayer de les convaincre de la nécessité de mettre un terme à cette guerre des subventions qui est en train de reprendre de plus belle. Il est clair dans mon esprit, et dans l'esprit des députés d'en face j'en suis certain, qu'une autre guerre avec les Européens et les Américains comme celle que nous avons eue dans les années 80 ne fera que nuire à tout le monde.
C'est pourquoi, même malgré les problèmes de revenu actuels, nous devons continuer de travailler à la formulation d'une position ferme en vue de la prochaine ronde de négociations sur le commerce mondial. Entre-temps, je vais demander la collaboration des provinces, du secteur et de mes collègues du Cabinet. Avec l'appui des députés d'en face, je consacre toute mon énergie à essayer de trouver des solutions viables pour aider à alléger le fardeau des producteurs canadiens.
Mes collègues du caucus n'épargnent aucun effort. Ils se sont empressés de me signaler la nécessité de régler ce problème. Le gouvernement veut faire son possible pour aider nos agriculteurs. Nous sommes aussi conscients de la nécessité de faire ce qu'il y a de mieux pour tous les Canadiens. Aider une industrie aussi importante que l'agriculture est ce qu'il y a de mieux pour les Canadiens. Cela ne fait aucun doute dans mon esprit. Il reste maintenant à déterminer ce que nous avons les moyens de faire financièrement et quelle forme donner à notre aide pour qu'elle aille à ceux qui en ont le plus besoin. Il faut aussi parler aux ministres provinciaux pour mettre au point certains détails. Je compte sur les provinces pour faire leur part. Le secteur agricole canadien mérite notre appui à tous en cette période difficile.
C'est un honneur pour moi de représenter les agriculteurs canadiens et je prends cette responsabilité très au sérieux. Je peux promettre à la Chambre et aux agriculteurs d'un bout à l'autre du pays que je ferai tout ce que je peux pour voir à ce que ces derniers aient l'aide dont ils ont besoin.
M. Joe McGuire (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat de ce soir.
Je crois que, avant d'aller plus loin, nous devrions rappeler ce que le cinquième parti et l'opposition officielle disaient il y a quelques mois à peine sur l'avenir de l'agriculture au Canada. Je vais donner des citations tirées directement du programme du Parti progressiste conservateur, le cinquième parti.
Je cite directement le programme conservateur: «Dans des domaines comme l'agriculture et le transport...»
Des voix: Oh, oh!
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. La présidence éprouve beaucoup de difficulté à entendre le député. Ses remarques ont de toute évidence suscité des protestations, mais je les ai difficilement entendues. Je vous serais reconnaissant de rétablir l'ordre pour que la présidence puisse suivre le débat. La présidence aussi s'intéresse à ce débat.
M. Joe McGuire: Monsieur le Président, je crois que nous avons touché un point très sensible. Je cite le programme de 1997. Je ne veux que lire à la Chambre le contenu de leur programme.
Il dit ceci:
Dans des domaines comme l'agriculture et le transport, il y a de sérieux chevauchements entre les paliers provincial et fédéral et il en résulte des dédoublements. Dans le domaine de l'environnement, les responsabilités sont partagées entre quatre ministères fédéraux. En fusionnant les ministères de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, de l'Environnement, des Ressources naturelles, des Pêches et des Océans en un ministère du Développement durable, nous pouvons veiller à ce que la priorité soit mise sur les responsabilités entre générations que nous portons tous à l'égard de la préservation de notre environnement, tout en réussissant à faire les économies dont nous avons besoin pour répondre à nos autres objectifs principaux.
À cet égard, ils devaient pratiquer dans le ministère de l'Agriculture des coupes qui devaient permettre des économies de 608 millions de dollars.
Ils ajoutent:
Nous avons l'intention de réformer ce ministère dans le but d'aligner plus étroitement ses objectifs avec ceux des grands ministères provinciaux de l'Agriculture qui sont bien financés.
Je ne sais pas très bien ce que les ministres provinciaux en disent maintenant.
Le document poursuit:
Conformément à la tendance observée dans les récentes négociations commerciales multilatérales, nous allons prendre des mesures en vue de réduire et d'éliminer éventuellement les programmes de subventions agricoles.
Ils allaient les éliminer tous.
Ils poursuivent:
Conformément à notre engagement en faveur de la libéralisation des marchés, nous allons également accélérer la suppression graduelle en cinq ans des subventions laitières.
Les relations entre le ministère et le secteur privé vont également changer. Par exemple, nous allons élargir le champ du transfert des activités de recherche et de développement vers le secteur privé. En échange, nous chercherons à accroître notre recouvrement des coûts, l'inspection des aliments et la surveillance de l'application des règlements.
Je sais que cela est très difficile à accepter pour eux après cette première intervention dans laquelle ils demandent au gouvernement de proposer des subventions à long terme et à court terme pour venir en aide aux agriculteurs, chose que nous prenons très au sérieux.
Je vais cependant résumer ce qu'ils allaient faire s'ils réussissaient à siéger de ce côté-ci de la Chambre. Premièrement, le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire devait disparaître. Le budget en serait réduit de 608 millions de dollars, soit 40 p. 100.
Les activités de recherche et développement auraient été transférées au secteur privé. Les coûts liés à l'application de la réglementation et à l'inspection des aliments auraient été récupérés dans une plus large mesure. Les subventions aux producteurs laitiers auraient été supprimées progressivement sur une période de trois ans, et non pas sur cinq ans, sans qu'aucune indemnité ne soit versée à ces producteurs, et les programmes de subventions agricoles auraient été réduits et éliminés.
Ce programme ressemble énormément au programme réformiste. Les réformistes voulaient faire en sorte que l'agriculture relève d'un ministère responsable du développement durable. Ils n'ont pas prévu que, dans un avenir prévisible, l'agriculture pourrait connaître un déclin.
Le gouvernement et le ministre actuels recherchent des solutions à court et à long terme pour résoudre les problèmes que connaissent aujourd'hui les agriculteurs.
Dans l'ensemble, le système est excellent. Cependant, le ministre a aussi reconnu clairement que la baisse actuelle est peut-être trop importante et trop aiguë pour que certains producteurs puissent la surmonter en se prévalant des mesures présentement en place.
Certains agriculteurs n'ont peut-être pas suffisamment de fonds dans leur CSRN pour pouvoir survivre à l'année 1999. C'est peut-être parce qu'ils sont nouveaux dans ce secteur ou parce qu'ils ont connu quelques mauvaises années en raison de circonstances indépendantes de leur volonté. Quelle que soit la raison, ils n'ont pas pu économiser suffisamment dans leur CSRN. Nous voulons pouvoir aider ces agriculteurs.
Nous voulons aussi concevoir un programme qui ne minera pas le système déjà en place. Autrement dit, nous voulons mettre au point un programme qui encourage les agriculteurs à se prévaloir du CSRN conformément à son objectif, mais aussi prévoir un système à l'intention de ceux qui sont le plus dans le besoin.
Le Comité consultatif national sur le filet de sécurité a examiné les programmes de secours en cas de désastre adoptés par la Colombie-Britannique, l'Alberta et l'Île-du-Prince-Édouard. Il a recommandé qu'un programme fondé sur ces modèles, avec quelques modifications, soit mis en oeuvre au niveau national.
Le comité veut que le programme soit fondé sur les revenus et offert de façon générale afin d'être conforme à nos obligations commerciales et de ne pas faire l'objet de contestation réussie. Une telle approche générale est essentielle pour que le programme soit efficace et qu'il soit un succès. Je le dis parce que certains députés pourraient se souvenir avec nostalgie des versements forfaitaires énormes des conservateurs ou confondre une telle approche avec les recommandations du comité.
Le programme que préconise le comité sur le filet de sécurité serait un supposé programme vert, qui traite toutes les fermes équitablement et ne fait pas de discrimination contre un produit donné. Voilà une bonne nouvelle pour les agriculteurs du pays.
Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a dit que ses homologues provinciaux et lui étudiaient très sérieusement ce modèle. Pareille proposition est conforme aux résultats d'une rencontre qu'il a tenue à Niagara-on-the-Lake avec ses homologues provinciaux en juillet dernier.
J'ai commencé mon discours en demandant d'où viendront les solutions au problème de la crise des revenus agricoles. Elles ne viendront pas de la plate-forme du Parti conservateur ou du Parti réformiste.
Le CSRN et ses fonds connexes fournissent une réponse partielle. Je ne doute pas que le travail continu du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et de son cabinet de concert avec les agriculteurs et les gouvernements provinciaux fournira l'autre partie de la réponse.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, je tiens à participer à ce débat d'urgence sur la crise du revenu agricole, qui est préoccupante non seulement pour les agriculteurs, mais aussi pour nous tous, députés.
Je vais partager le temps mis à ma disposition avec le porte-parole de l'opposition officielle en matière agricole, le député de Selkirk—Interlake.
La question n'est certes pas ici de savoir s'il y a une crise du revenu agricole. Cela a été clairement établi à la Chambre, le 3 novembre, au cours du débat du jour désigné, lorsque l'opposition officielle a exhorté le gouvernement à s'engager immédiatement à protéger les intérêts des agriculteurs canadiens contre les subventions et les pratiques commerciales injustes des pays étrangers qui ont transformé le problème de la stagnation des revenus agricoles en une véritable crise généralisée.
Je veux donc me concentrer ce soir sur deux questions. D'abord, pourquoi le gouvernement met-il tellement de temps à agir? Ensuite, le gouvernement va-t-il proposer une vraie solution ou simplement une solution symbolique?
Il y a plus d'un an, Statistique Canada et Agriculture Canada avaient prédit que le revenu agricole net réalisé chuterait de 46 p. 100 dans tout le Canada. Le gouvernement n'a pas vraiment réagit à l'époque à cette prédiction. Plus tôt cette année, Agriculture Canada a prédit une autre chute de 30 p. 100 du revenu agricole net, mais à nouveau il n'y a eu aucune véritable réaction à long ou court terme de la part du gouvernement. J'estime que c'est devenu une tendance pour le gouvernement. Il est lent à agir, un point c'est tout.
Par exemple, on savait depuis des années que les stocks de morue au large de la côte de l'Atlantique ne cessaient de décliner et on sait désormais depuis des années que les stocks de saumon au large de la côte ouest n'ont cessé de décliner en termes absolus. Le gouvernement se dit alarmé. Le gouvernement mène des études. Le gouvernement se tord de désespoir. Mais le gouvernement ne fait jamais rien tant qu'il n'est pas confronté à une véritable crise et, même là, il recours habituellement à des solutions symboliques.
Par conséquent, la Chambre prie le gouvernement de réagir au plus vite à la crise du revenu agricole, mais lui demande aussi pourquoi il attend toujours d'être confronté à une situation d'urgence pour vraiment faire quelque chose.
La question est de savoir si le gouvernement va proposer des solutions de fortune ou de véritables solutions à long terme. Le gouvernement peut bien parler d'une aide d'urgence de 450 millions de dollars cette année et de 450 millions autres l'an prochain, comme les médias l'ont laissé entendre. Le gouvernement peut bien mettre en oeuvre un programme non contributif ne portant sur des produits précis, qui permettrait de compenser une partie du manque à gagner des agriculteurs si leurs marges brutes tombent sous un certain pourcentage d'une moyenne quinquennale, comme d'aucuns l'ont proposé, soit essentiellement un régime d'assurance-revenu brut sans les primes. Quant à nous, nous pensons que l'agriculture canadienne a besoin de plus que des solutions de fortune. Elle a besoin de vraies solutions à long terme.
L'opposition officielle a souligné à maintes reprises lors du débat sur la motion présentée au cours d'une journée de l'opposition plus tôt ce mois-ci, que ces solutions à long terme supposent deux éléments. D'une part, une stratégie plus dynamique pour réduire, au moyen de la pression politique et des négociations commerciales au niveau international, les subventions versées aux agriculteurs américains et européens. Notre pays a fait sa part afin de réduire les subventions à l'agriculture. Il s'attend à ce que ses partenaires commerciaux en fassent autant, et il devrait insister pour qu'il en soit ainsi.
Nous proposons une stratégie à deux volets: un effort spécial doit d'abord être fait pour régler nos différends commerciaux avec les Américains, par l'entremise de l'ALENA, puis un effort coopératif doit être fait conjointement par le Canada et les États-Unis pour s'attaquer aux subventions européennes, qui sont véritablement à la base du problème.
Deuxièmement—et c'est le point principal que je veux faire valoir et la raison pour laquelle je participe au débat— l'agriculture a besoin de ce que chaque Canadien, chaque famille et chaque secteur a besoin, particulièrement ceux dont les revenus sont réduits, c'est-à-dire un allégement fiscal général et substantiel.
Quelle a été la politique fiscale des gouvernements libéraux et conservateurs au pays, depuis plus de 30 ans? Si ça bouge, taxons. Si ça continue de bouger, taxons encore plus. Et si ça cesse de bouger, subventionnons.
J'ai ici un tableau publié par Statistique Canada et intitulé: «Impôts payés par les agriculteurs canadiens, 1993- 1996». Au cours de ces quatre années, les agriculteurs ont versé, au total, 4,2 milliards de dollars, soit environ un milliard de dollars par année. De cette somme, 2,75 milliards de dollars sont allés au fédéral.
J'aimerais que ce soit le ministère de l'Agriculture qui s'en occupe. Cela devrait faire partie de son exposé au ministère des Finances et au Cabinet. On devrait calculer tous les impôts et taxes que paient, dans le milieu agricole, les particuliers, les familles et les sociétés sur les facteurs de production, depuis la taxe de vente sur les biens de consommation et sur le matériel jusqu'aux taxes sur les carburants et sur l'engrais. Par exemple, on sait que, en 1997, en une seule année, les agriculteurs canadiens ont dépensé 2,037 milliards de dollars pour acheter de l'engrais. La taxe prélevée sur cette somme était de 15 p. 100. Cela fait donc 306 millions de dollars que le gouvernement a pris aux agriculteurs à l'égard d'un seul facteur de production pour une seule année.
Le gouvernement fait un tour de passe-passe avec les taxes, impôts et subventions. Il donne d'une main et reprend de l'autre. Et il prend toujours plus qu'il ne donne.
Si le gouvernement avait considérablement réduit les taxes et impôts dans ce secteur au cours des cinq dernières années , comme le lui avaient conseillé l'opposition officielle et les agriculteurs de partout au pays, je pense bien que le solde du compte de stabilisation du revenu net aurait été beaucoup plus élevé, et les agriculteurs auraient été en bien meilleure position pour faire face, aujourd'hui, au fléchissement du cours des produits de base, car ils auraient pu mettre beaucoup plus d'argent de côté.
Quelle est la position de l'opposition officielle en ce qui concerne l'aide d'urgence que le gouvernement se propose d'apporter? C'est difficile à dire, car le gouvernement n'a rien mis sur la table ce soir. Nous voudrions examiner la proposition gouvernementale dans le détail et voir à combien cela revient.
Notre position est essentiellement la suivante: si le ministre des Finances s'engageait à annoncer, dans son prochain budget, une réduction générale des impôts pour tous les Canadiens, y compris le secteur agricole, alors l'opposition officielle serait prête à appuyer l'idée que le versement d'une aide temporaire fasse partie de la solution à long terme. Nous insisterions également pour que cette aide temporaire soit présentée comme une façon d'indemniser les producteurs qui ont subi, à cause de subventions étrangères, un préjudice pouvant être démontré, pour faire clairement voir qu'il s'agit d'une mesure antisubventions.
Par contre, si tout ce que le gouvernement a à offrir, c'est une solution temporaire, nous allons déclarer cette aide insuffisante et continuerons de nous battre pour obtenir une solution à long terme, véritablement capable d'assurer la prospérité à long terme de l'agriculture canadienne.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, je tiens bien sûr à participer au débat de ce soir. C'est une question de la plus grande importance pour beaucoup de mes électeurs et de Canadiens d'un bout à l'autre du pays.
Le débat de ce soir s'est déjà tenu à la Chambre, en ce sens que le Parti réformiste a consacré une journée de l'opposition à toute la question du revenu agricole. Essentiellement, nous reprenons le même débat que le Parti réformiste a lancé il y a quelques semaines.
Au Comité de l'agriculture, encore une fois, une motion du Parti réformiste a obligé le comité à tenir des audiences et à présenter un rapport et des recommandations au ministre. Ce rapport sera prêt le 7 décembre, pour le bénéfice du ministre de l'Agriculture.
Le débat de ce soir est important, parce que nous voulons discuter de la question le plus possible et réunir tous les faits, mais la triste réalité, c'est que les conservateurs sont une fois de plus à côté de la question, avec leur nouveau chef, M. Joe Clark.
Comme le député de Calgary-Sud-Ouest le mentionnait, le gouvernement libéral savait depuis au moins un an que cette crise était sur le point d'éclater. Il a continué à ne pas se préoccuper des agriculteurs jusqu'à ce que le téléjournal commence à montrer des cochons morts et des agriculteurs en faillite, ce qui l'a forcé à faire quelque chose. Sans les pressions du Parti réformiste au comité et à la Chambre des communes, je me demande si le traitement de cette question serait aussi avancé qu'il l'est aujourd'hui. La crise est réelle. Elle est de portée nationale et ne se terminera pas bientôt. La chute du revenu avait été prévue par Statistique Canada et par Agriculture Canada, il y a quelque temps.
Pourquoi les libéraux ont-ils négligé de prendre des mesures? La question a déjà été posée, mais il faut la poser encore. Si une chute du revenu aussi accentuée était prévue pour n'importe quelle autre grande industrie, par exemple dans le secteur de l'automobile, le gouvernement aurait-il négligé de prendre des mesures ou n'aurait-il pas réagi comme il aurait pu le faire?
Nos producteurs doivent avoir plus qu'une aide provisoire. Ils ont besoin d'une solution à long terme. Ni le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire ni le ministre chargé de la Commission canadienne du blé n'a assisté aux réunions du syndicat du blé de la Saskatchewan il y a deux semaines. Il y avait bien des agriculteurs, pour la plupart des producteurs qui avaient de tristes histoires à raconter au sujet de la crise des revenus au Saskatchewan. Après avoir eu à subir le questionnement assidu des agriculteurs membres de l'United Grain Growers lors de leur congrès annuel, je suppose que le ministre éprouvait des réticences à assister à une autre manifestation agricole. Je crois toutefois que le ministre en second de l'Agriculture y était.
Comment le gouvernement peut-il prétendre comprendre la problématique ou y proposer de vraies solutions s'il ne se donne pas la peine d'écouter les producteurs aussi bien que les représentants de l'industrie? Comment peut-il prétendre se soucier du sort des agriculteurs quand même les ministres qui devraient s'occuper des questions rurales ne trouvent pas le courage de s'éloigner d'Ottawa?
Parlons un peu d'une manifestation d'agriculteurs qui s'est déroulée à Neilburg, en Saskatchewan. Tous les élus et le grand public y furent invités pour discuter de la crise des revenus. Aucun libéral fédéral était du nombre. Aucun député fédéral du NPD non plus. Aucun député conservateur n'assistait à cette réunion ouverte non plus.
Plus de 500 producteurs préoccupés ont organisé une réunion à laquelle tout le monde était convié. Il n'a pas été seulement question du revenu, mais aussi de la grave sécheresse qu'a connue une grande partie de l'Alberta et de la Saskatchewan. Ces gens sont des gens authentiques qui voient leur gagne-pain menacé. Le ministre de l'Agriculture de la Saskatchewan a fait l'effort de se déplacer mais, encore une fois, à l'exception de deux députés du Parti réformiste, il n'y avait personne du palier fédéral.
Les réformistes ont assisté à la réunion du Saskatchewan Wheat Pool et au rassemblement de Neilburg afin d'entendre de leurs propres oreilles ce que les agriculteurs avaient à dire. C'est parce que les réformistes ont écouté les agriculteurs que, depuis le début des travaux de cette législature, nous faisons pression sur le gouvernement afin qu'il prenne des mesures.
Malheureusement, le gouvernement n'écoute pas et c'est pourquoi nous avons maintenant ce débat d'urgence. Pourquoi les libéraux ont-ils repoussé d'un mois les audiences du Comité de l'agriculture? Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pratiquement rien fait pour donner suite à la motion présentée par le Parti réformiste lors de la journée d'opposition du 3 novembre?
Les agriculteurs réclament plus que de l'aide. À ces réunions, les agriculteurs n'ont cessé de me répéter qu'ils avaient besoin d'aide dès aujourd'hui. Ils ne peuvent faire chaque fois appel au gouvernement. Le gouvernement fédéral doit créer des conditions qui leur permettent de survivre et de prospérer sans attendre un chèque de sa part.
À la liste des plaintes s'ajoutent les problèmes de commercialisation du blé et de l'orge, qui sont endémiques dans l'Ouest. Beaucoup d'entreprises céréalières et de céréaliculteurs ont des idées novatrices sur la façon de commercialiser ces grains et ils ne peuvent les mettre à exécution à cause de la Commission canadienne du blé. C'est triste de lire chaque jour dans les journaux que des agriculteurs se voient imposer des dizaines de milliers de dollars d'amendes, voire vont en prison, pour commercialiser leur propre grain.
C'est tout cela qui est à la source du plan élaboré par le Parti réformiste pour nous sortir de la crise. Ce plan doit cependant s'inscrire dans un programme plus vaste encore. Il s'agira de s'attaquer aux deux grands facteurs qui nous valent cette crise du revenu agricole: les facteurs internationaux et les facteurs intérieurs.
Sur le plan international, il faut faire en sorte que le commerce étranger soit libre et équitable. Pour cela, notre gouvernement doit adopter des mesures qui soient de nature à provoquer une réduction des subventions étrangères. Par exemple, les subventions de l'Union européenne sur la production du blé sont de 773 p. 100 supérieures à celle du Canada et celles des États-Unis sont de 480 p. 100 supérieures aux subventions canadiennes. Nos agriculteurs ne peuvent pas attendre l'issue des pourparlers de l'OMC pour voir baisser ces subventions.
Et qui sont ceux qui iront parler de ces subventions en Europe? Des sénateurs, des représentants non élus, qui dépenseront 107 750 $ pour se rendre en Europe et en reviendront bredouille. On ne peut pas compter sur eux pour exercer la moindre influence sur les Européens. Ce serait plutôt l'affaire d'un ministre de l'Agriculture et d'un ministre du Commerce. Au moins ils ont été élus. S'ils ne font rien pour aider la cause des agriculteurs, on peut leur donner leur congé aux élections suivantes.
Bien des gens nous ont suggéré d'engager des négociations bilatérales avec les États-Unis de façon à créer une coalition nord-américaine contre les subventions élevées de l'Union européenne. Malheureusement, les libéraux n'ont rien fait en ce sens. Notre gouvernement doit veiller à ce que nos partenaires commerciaux respectent leurs signatures au bas des accords. L'Union européenne paralyse encore nos exportations de boeuf et de colza canola vers ses membres. Les tribunaux internationaux ont donné tort aux Européens sur ce point, mais cela ne les empêche pas de poursuivre leurs manoeuvres, alors que notre gouvernement semble impuissant face à eux.
Le 16 septembre, le gouverneur du Dakota du Sud a commencé à bloquer les exportations canadiennes de produits agricoles. Le Dakota du Sud avait donné au ministre un préavis de deux semaines, mais la frontière est restée fermée jusqu'à la première semaine d'octobre. D'après le gouvernement, ce différend était dû entièrement à la surenchère électorale, mais ce n'était pas le cas, puisqu'on voit que ces différends commerciaux continuent. Les agriculteurs du Dakota du Nord ont de nouveau indiqué leur intention de bloquer la frontière le 6 décembre. Quelles mesures a-t-on prises pour éviter que cela ne se produise?
Les agriculteurs qui voient certains des prix des produits agricoles les plus faibles des dernières années ne peuvent pas se permettre de laisser compliquer leurs problèmes de revenu par l'incompétence du ministre du commerce.
Je vais prendre quelques minutes pour parler de ce qu'il faut faire à l'interne. Il faut un régime à court terme d'aide aux sinistrés pour redresser le tort que causent les subventions au commerce d'autres pays. Les agriculteurs ont besoin non seulement d'une réduction des subventions à l'étranger, mais aussi d'une baisse de taxes et d'impôts au Canada.
Le député de Calgary-Sud-Ouest a mentionné que le gouvernement peut réduire de trois façons le fardeau qu'il impose aux producteurs. Il pourrait suspendre pendant un an les frais d'utilisateurs de 138 $ million par année qu'exige le ministère de l'Agriculture, suspendre la taxe fédérale d'accise de 4 p. 100 le litre sur le carburant agricole et suspendre les taxes sur les intrants agricoles. Les taxes fédérales représentent quelque 15 p. 100 du coût au détail des fertilisants.
Les rumeurs sur la quantité d'aide qui sera fournie par le gouvernement fédéral parlent d'un montant de cet ordre. Nous n'aurions pas ce problème si le gouvernement voulait bien procéder à une réforme de la fiscalité. Le gouvernement envisage de donner aux agriculteurs une aide d'urgence, mais en même temps il leur prend directement plus de 500 millions de dollars en taxes. Cela ne paraît pas sensé à une personne raisonnable.
Le plan du Parti réformiste pourrait être mis en oeuvre dès aujourd'hui. La mise en oeuvre des autres propositions prendra du temps et certains agriculteurs disparaîtront entre temps. Contrairement aux paiements ad hoc, le plan réformiste de réduction ciblée du coût du gouvernement aurait des effets durables sur la viabilité de l'agriculture. Notre plan permettrait aux producteurs de concurrencer les producteurs étrangers sans intervention du gouvernement fédéral.
Le plan du Parti réformiste, qui vise à réduire le coût du gouvernement, aurait un effet immédiat non seulement sur les producteurs agricoles, mais aussi sur les industries qui soutiennent nos producteurs. Notre plan aurait des effets immédiats sur l'économie de tout le secteur agricole et agroalimentaire.
Par dessus tout, je demande avec insistance que le gouvernement ne mette pas en place un programme que les Américains considéreraient comme contraire aux règles de l'Organisation mondiale du commerce et de l'ALENA et pour lequel ils imposeraient des droits compensateurs. Si le gouvernement prend ce genre de mesure, le dommage pour l'agriculture, en particulier les porcs et le bétail, sera 1 000 fois plus important qu'il ne l'est déjà.
J'encourage le gouvernement à considérer cette crise, mais je l'invite à être très prudent. Je lui demande de ne rien faire qui porterait atteinte à ce qui reste de l'économie dans l'ouest du Canada.
[Français]
Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, c'est avec un sentiment de responsabilité et d'émotion que je prends la parole dans le cadre de ce débat d'urgence sur la crise des revenus qui affecte les fermiers.
C'est une crise qui ressemble à celle du début des années 1980. À cette époque, le gouvernement donnait trois fois plus de soutien financier que maintenant eu égard à la sécurité du revenu. On parlait à ce moment-là de 3,5 milliards de dollars, alors qu'aujourd'hui on ne consacre que 727 millions de dollars pour la sécurité du revenu. Il y a donc urgence d'agir.
Il y a urgence d'agir parce que le revenu agricole est en chute de 20 à 40 p. 100 et, dans certaines productions, cette chute va jusqu'à 70 p. 100. Il y a urgence d'agir parce que, à titre d'exemple, le prix de vente du porc se situe à la moitié de son coût de production. Que reste-t-il aux producteurs?
En novembre 1997, le prix du porc était de 168 $ le 100 kilogrammes alors que vendredi dernier il était à 67 $ du 100 kilos. Le prix des grains suivent les mêmes tangentes.
On demande donc un plan d'urgence qui viendra en aide aux agriculteurs ayant connu cette année une réduction historique de leur niveau moyen de l'ordre de 70 p. 100.
En plus des prix du marché, il y a les règles du commerce international à considérer ainsi que le soutien que l'Union européenne accorde, en subsides, à l'exportation, sans oublier le soutien direct aux agriculteurs. Aux États-Unis, c'est une injection de 6 milliards de dollars donnés directement aux producteurs, soit 2,6 milliards de dollars en cas de désastre, et le reste pour compenser pour les bas prix du marché. Et ce n'est pas fini.
Dans une rencontre tenue à Montréal dans le cadre des prochaines négociations de l'OMC, autant les Américains que les Européens ont manifesté leur désir de continuer de soutenir leurs agriculteurs. Il faut donc agir de toute urgence, en toute équité, maintenant, pour la production de 1998, et à l'avenir, selon l'état de la crise.
Quels sont les effets de cette crise? Il y a les effets directs et il y a aussi les effets pervers. Les effets directs, c'est l'abandon des fermes, la crise agricole qui entraîne très souvent une crise familiale, le déplacement de gens de la campagne à la ville et les drames humains qui sont à l'échelle des drames qui se vivent à la ferme.
Quand on est producteur agricole, on voit loin devant soi. On a le sens de la pérennité. C'est une vocation, c'est un mode de vie. On ne manipule pas des boîtes de conserve qu'on peut mettre de côté pour grossir les inventaires en attendant que les prix soient bons.
Il y a aussi les effets pervers. Les deux plus importants sont l'attaque directe à la ruralité et la perte d'expertise des acquis. L'attaque à la ruralité est très simple. Quand on vide une campagne, on déstructure le milieu. Quant à la perte d'expertise, il y a des cas concrets où on s'aperçoit qu'en déstructurant le milieu agricole, on perd des connaissances qui ont pris bien du temps à être acquises et qui sont difficiles à renouveler.
On a entendu un exemple d'effet pervers, la semaine dernière, quand on recevait, au Comité de l'agriculture, les représentants de l'Association de canola du Canada, qui mentionnaient que plusieurs agriculteurs voulaient s'orienter dans le canola, parce que les prix sont bons.
Quels en sont les effets pervers? Il y a d'abord une diminution de la productivité, parce que de la part de certains producteurs, il va y avoir un manque de connaissances—quand on est débutant, c'est normal—parce que les sols ne sont pas propices dans toutes les parties du pays, et que la rotation peut se faire de façon moins adéquate, si on connaît moins son affaire.
Un deuxième effet pervers, c'est que si on augmente l'offre, on diminue les prix. Donc, une production qui était bonne devient une production comme les autres, parce qu'on a inondé le marché. Il y a aussi des augmentations de maladies à cause d'une plus grande concentration de culture. Donc, personne ne sort gagnant de cette combinaison.
La solution au problème, c'est une aide directe basée sur les besoins des agriculteurs et à la hauteur de plusieurs centaines de millions de dollars. C'est ce qu'on appelle l'opération sauvetage. D'autres gestes peuvent être aussi posés, cependant.
En mentionnant un autre geste, je pense à une idée qui a été élaborée par le Conseil canadien du porc, soit la banque alimentaire. On s'y arrête peu, mais on devrait s'y arrêter davantage, parce qu'il y a des pénuries de nourriture, par exemple, en Amérique centrale, après le passage de l'ouragan Mitch, en Russie, qui subit une crise économique qui déborde ses frontières, et en Corée du Nord, qui connaît une famine. Mais tous ces pays, selon leur religion et selon leur manière de vivre, mangent du porc.
Quel est le contexte de la crise que nous vivons? Ce n'est pas le contexte d'une surproduction, mais un manque de devises de certains de nos clients, notamment l'Asie et la Russie. Alors, il ne s'agit pas de paniquer et de ralentir notre rythme, sinon gare à la compétitivité.
Donc, pourquoi accumuler des stocks, alors qu'une partie de la planète ne mange pas à sa faim? Le Canada doit s'engager à créer sa banque alimentaire. Les États-Unis y sont allés cette année de 50 000 tonnes de viande de porc et, toutes proportions gardées, on pourrait poser le même geste pour 10 000 tonnes de viande de porc.
Ce n'est donc pas un problème chronique de l'offre et de la demande, car avec des devises chez nos clients, la demande serait toujours grossissante.
Enfin, qu'il me soit permis de parler de la problématique québécoise qui est différente de celle des autres provinces. L'industrie porcine québécoise génère près de quatre milliards de dollars en retombées économiques par année et crée quelque 30 000 emplois directs et indirects, surtout en régions. Tous les porcs vendus sont abattus, donc, subissent une première transformation au Québec, et n'engorgent pas les abattoirs de nos voisins du Sud.
Les producteurs participent à l'ASRA, l'assurance-stabilisation des revenus agricoles, qui comble la différence entre le coût de production et le prix du marché. Par exemple, si, présentement, le coût de production est de 140 $ le 100 kilos et que le prix du marché est de 67 $, la différence entre 67 $ et 140 $ sera versée par le programme de l'assurance-stabilisation des revenus agricoles.
Quand ce sont des bonnes années, et que le prix du porc est à 225 $, évidemment, personne ne reçoit d'argent de l'assurance-stabilisation des revenus agricoles. Au contraire, celle-ci constitue une banque pour les mauvais jours. Évidemment, on ne s'attendait pas à ce que les mauvais jours soient si mauvais que ceux que nous vivons.
Dans ce programme, le tiers des coûts est payé par l'agriculteur lui-même et l'argent que le gouvernement fédéral verse dans le compte du CSRN dans les autres provinces va directement, chez nous, dans le compte de l'ASRA. C'est une différence majeure avec les autres provinces.
Le gouvernement du Québec vient de verser 30 millions de dollars au compte de l'ASRA pour soutenir le revenu des producteurs de porc. Il s'attend donc de recevoir sa part équitable dans la présente crise, qu'elle couvre les pertes de l'année 1998 et que cela perdure tant que la crise sera là.
Au Québec, en matière agricole, on a présentement une crise de confiance. On est sortis assez malheureux, pour ne pas dire malchanceux, de la crise de la tremblante du mouton où on ne considère pas avoir eu la part équitable des compensations que nous devions recevoir. J'ai aussi en tête quelques ingérences que le ministre de l'Agriculture vient de faire qui me laissent amère.
Je pense à la convocation d'une réunion, ici à Ottawa, alors qu'on tenait une réunion à Montréal avec les mêmes dirigeants dans le cadre des négociations de l'OMC. La même chose va se répéter cette semaine durant le congrès de l'Union des producteurs agricoles et demain, pour la visite à Washington, on a invité les quatrième et cinquième partis, mais on a oublié d'inviter le troisième parti. Cela nous rend amers, inquiets et soucieux et, c'est le bon endroit pour le dire.
Le congrès de l'Union des producteurs agricoles qui regroupe tous les représentants des producteurs agricoles du Québec, qui est donc la voix unique pour leurs représentations, a pour thème, la semaine prochaine, «Ensemble pour cultiver l'avenir». Comment cultiver l'avenir si nos producteurs ne peuvent vivre au présent?
En guise de conclusion, j'aimerais dire que le nouveau plan du gouvernement fédéral, quel qu'il soit, devrait tenir compte de l'initiative du gouvernement québécois ainsi que des particularités propres au Québec en matière de programme de sécurité du revenu. En ce sens, le Bloc québécois n'acceptera pas que le plan d'urgence qui sera bientôt connu pénalise d'une quelconque façon les agriculteurs québécois et, plus particulièrement, les producteurs de porc de chez nous.
Notre formation politique n'acceptera pas non plus que le gouvernement fédéral favorise une région au détriment d'une autre par le biais du type d'aide qu'il entend fournir. Ce que je veux dire par là, c'est qu'en aidant davantage les producteurs de porc vivant que les producteurs de porc transformé, le fédéral favoriserait l'Ontario qui exporte des porcs vivants au détriment du Québec qui exporte des porcs transformés.
Quoiqu'il arrive aujourd'hui au Québec, le Bloc québécois sera très vigilant. Il faut agir très rapidement dans cette crise.
Pour tenir compte de la particularité du Québec et du fait que le gouvernement a déjà posé des gestes concrets pour venir en aide aux producteurs de porc touchés, diverses solutions pourraient être envisagées et une de celles-ci pourrait tout simplement être de rembourser au gouvernement québécois l'argent qu'il aura décidé de consacrer aux producteurs de porc.
[Traduction]
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je participe au débat de ce soir. Je partagerai mon temps de parole avec le député de Regina—Lumsden—Lake Centre, qui a été le premier à réclamer un débat d'urgence sur la crise à laquelle doivent faire face les familles d'agriculteurs et les localités agricoles.
Depuis, notre caucus réclame que le gouvernement prenne rapidement des mesures. Il est regrettable de constater que le gouvernement fédéral libéral ne donne pas le moindre indice qu'il se rend compte de la gravité de la situation et de l'urgence de prendre des mesures immédiates pour parer à la tragédie qui se déroule sous nos yeux. Que ce soit clair, cette crise est d'une magnitude telle qu'elle n'est surpassée que par la dépression des années 30.
Nous avons essayé de convaincre le gouvernement qu'il devait prendre des mesures immédiates avant qu'un plus grand nombre de vies ne soient dévastées, avant que les investissements de toute une vie ne disparaissent et qu'un plus grand nombre de personnes ne perdent leur gagne-pain. Malheureusement, les agriculteurs et leurs familles attendent toujours.
La baisse du prix des denrées agricoles sur le marché international, particulièrement le grain et le porc, et l'effondrement des marchés asiatiques menacent le gagne-pain de dizaine de milliers d'agriculteurs canadiens. Il n'a jamais été plus clair qu'aujourd'hui dans le milieu agricole que les règles de la mondialisation inventées pour répondre aux exigences des mega sociétés assoiffées de profits ne serviront jamais les intérêts des familles d'agriculteurs laborieux. Nous devons nous assurer que la mondialisation accrue est accompagnée de mesures de protection à l'échelle internationale.
Toutefois, les propositions visant à mettre un frein à la spéculation sur les devises et les denrées de base et à rendre plus humaine l'économie internationale ne peuvent être mises en place du jour au lendemain. L'imposition d'une taxe Tobin sur la spéculation internationale ne soulagera pas les agriculteurs aujourd'hui. Les promesses d'une gestion économique internationale plus rationnelle n'apportera pas de soulagement demain. Comme je l'ai dit en cette enceinte la semaine dernière, on ne nourrit pas les cochons avec des promesses et on ne fait pas pousser le grain dans l'incertitude.
Les agriculteurs canadiens font actuellement face à une crise. Il ne suffit pas pour les libéraux de faire le moins possible, et le plus tard possible. Il n'est pas très utile non plus pour le Parti réformiste de se cacher encore une fois derrière leur éternelle théorie pavlovienne pour affirmer que la réduction des impôts devrait permettre de régler cette crise. C'est faux. Et il ne servira à rien de réclamer des subventions internationales à cor et à cri.
Ces agriculteurs ont un urgent besoin d'aide. Ils ont besoin qu'on prenne des mesures rapides et décisives. Ni le gouvernement, ni l'opposition officielle ne semblent comprendre cela. Ou, s'ils le comprennent, ils ne semblent pas prêts à adopter les mesures urgentes qui s'imposent.
Il ne faut pas se leurrer. Il y a une crise. En 1998, le revenu des agriculteurs de la Saskatchewan chutera de près de un demi-milliard de dollars. C'est une réduction de plus de 70 p. 100 du revenu global. Au Manitoba, on prévoit une baisse de plus d'un quart de milliard de dollars, 300 millions pour être précis. À l'Île-du-Prince-Édouard, les revenus seront de 33 p. 100 inférieurs cette année à ce qu'ils ont été en moyenne entre 1993 et 1997.
Depuis 1995, le prix de départ du blé a chuté de 40 p. 100. Les prix du porc ont chuté de 60 p. 100 par rapport aux niveaux de 1997. Dans ma province de la Nouvelle-Écosse, il faudra environ 50 millions de dollars pour compenser les pertes de revenus. Les pertes de revenus au Manitoba et en Saskatchewan seulement sont comparables aux pertes attribuables à la tempête de verglas de janvier dernier.
Qu'en coûte-t-il d'attendre? Quel est le coût pour les libéraux d'attendre jusqu'à la dernière minute pour payer le moins possible à ces familles en détresse?
D'abord, cela signifie qu'il y aura moins d'exploitations familiales et plus d'industries agro-alimentaires. Si la tendance se maintient, le Manitoba aura perdu 7 500 fermes en moins de 10 ans. La réduction du nombre d'exploitations agricoles familiales est une catastrophe pour la petite entreprise qui s'appuie sur l'économie agricole locale. De plus, la réduction du nombre de familles agricoles signifie que les pressions exercées sur l'infrastructure rurale seront plus encore fortes. On assistera à des fermetures d'écoles et d'hôpitaux, on réduira les services et tout un genre de vie sera détruit.
Ensuite, en raison du retard causé par les libéraux, des milliers d'exploitations agricoles qui pourraient survivre si on les aidait à tenir le coup ne seront plus là à la fonte des neiges. Elles n'auront les moyens d'acheter ni les semences, ni les aliments pour animaux ni les engrais dont elles ont besoin pour survivre jusqu'à l'année prochaine.
À la Chambre comme ailleurs, le député de Palliser et d'autres députés néo-démocrates préviennent le ministre depuis mars dernier de l'aggravation de la crise du secteur agricole. En octobre, les néo-démocrates ont proposé un programme d'aide d'urgence pour faire contrepoids au programme d'aide récemment annoncée par les États-Unis. En réponse à nos questions, le ministre s'est simplement vanté que les Américains enviaient nos programmes de soutien agricole et que son gouvernement examinait le problème.
Les Américains ne se sont pas bornés à effectuer des études. Ils ont agi dès le premier signe de difficulté. Entre-temps, notre ministre de l'Agriculture n'a pas encore convaincu ses collègues de l'urgence de la crise. C'est une honte et un scandale national qu'un gouvernement qui se vante de disposer d'un excédent de 10,5 milliards de dollars n'ait ni la compassion ni la compétence voulues pour s'attaquer à cette crise.
Depuis que les États-Unis ont mis en oeuvre leur programme d'aide aux agriculteurs, qu'a fait le gouvernement fédéral? Soixante jours supplémentaires d'inaction, de faillites, de saisies, de stress et d'incertitude paralysante pour les familles d'agriculteurs.
Seulement en Saskatchewan, les demandes de médiation et de consultation à l'égard de la dette agricole ont augmenté de 76 p. 100. Dans l'intervalle, les réformistes préconisent comme solution une réduction des taxes sur les engrais et sur les machines agricoles. Une goutte dans l'océan! Quelques centaines de dollars en allégement fiscal provenant de la réduction des taxes de vente ne compensera ni la perte de 60 $ pour chaque porc produit ni la diminution de plus de 70 p. 100 du revenu agricole.
Le Parti réformiste parle de subventions déloyales. Nos agriculteurs se trouvent dans cette crise en partie parce que le gouvernement libéral a suivi aveuglément et sottement la proposition des réformistes de réduire le soutien agricole de 600 millions de dollars. En fait, les libéraux, poussés par la mesquinerie des réformistes, ont retranché près de 2 milliards de dollars de cette aide. Les libéraux ont imposé des compressions plus lourdes que celles que préconisait le Parti réformiste lui-même, et c'est pourquoi nous assistons à un tel gâchis aujourd'hui.
Pendant que les Européens et les Américains réduisaient prudemment et graduellement de 25 p. 100 en cinq ans les subventions versées à leurs agriculteurs, se pliant ainsi aux directives de l'OMC, le Canada, lui, a choisi de réduire de plus de 60 p. 100 les subventions versées pour les cultures. À elle seule, l'abolition de la subvention du Nid-de-Corbeau représente 700 millions de dollars par année en moins pour les agriculteurs des prairies.
Le chef du Parti réformiste a dit qu'il n'était pas convaincu de la nécessité de créer un programme d'aide d'urgence. Je l'invite à s'ouvrir les yeux et à se déboucher les oreilles. Qu'il écoute les agriculteurs de partout au Canada, qui voient leur gagne-pain menacé par une crise internationale dont ils ne sont pas les auteurs et par un gouvernement qui a sabré dans les subventions agricoles bien au-delà de ce qu'ont fait nos concurrents et bien au-delà des exigences établies par l'OMC.
Les agriculteurs voient leur existence menacée. C'est d'aide qu'ils ont besoin, et non pas de voir les députés réformistes pousser les hauts cris contre des subventions internationales.
Que devrait faire le gouvernement pour redonner espoir aux agriculteurs canadiens? Voici un plan d'action en quatre points qui doit être mis en oeuvre immédiatement.
Premièrement, créer un programme d'aide d'urgence d'au moins 700 millions de dollars, pour faire contrepoids à l'aide accordée aux agriculteurs américains. Deuxièmement, imposer de concert avec les banques un moratoire sur les saisies agricoles. Troisièmement, améliorer les modalités de gestion de la dette pour les familles d'agriculteurs et les entreprises qui en dépendent. Enfin, nous devons nous assurer que la nourriture n'est pas détruite, enterrée, abattue et laissée à pourrir sur place durant la crise actuelle. Cette ressource pourrait nourrir des personnes affamées aussi bien au Canada qu'à l'étranger. Nous devons adopter cette approche humanitaire.
Nous devons créer un programme national qui réponde aux besoins de tous les agriculteurs canadiens. Le gouvernement national doit prendre l'initiative et fournir la part du lion, tout en laissant aux provinces une marge d'action qui leur permette de créer des programmes supplémentaires.
En terminant, je tiens à dire que l'agriculture est l'une des occupations qui offrent le plus d'espoir et de vision. Plus qu'une occupation, c'est une vocation.
Chaque année, le printemps apporte un optimisme renouvelé. Une température plus clémente permet d'avoir des récoltes plus abondantes et des prix plus avantageux. Nous devons faire en sorte que le printemps prochain soit porteur d'espoir. Si nous échouons, il apportera plutôt le désespoir. Nous pouvons en faire un printemps d'espoir, mais nous devons agir rapidement et immédiatement.
M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat ce soir.
Je suis le député qui, le 5 octobre dernier, demandait la tenue d'un débat d'urgence sur la crise qui devenait imminente dans le secteur agricole. Mon collègue, le député de Palliser, avait abordé la question à la Chambre des communes pendant des semaines avant mon intervention. Aujourd'hui, la crise nous frappe de plein fouet, notamment pour les raisons que je vais vous énumérer.
En Saskatchewan, le revenu agricole net a diminué de 70 p. 100 en 1998 par rapport à 1997. Le prix du porc s'est essentiellement effondré au cours des quatre ou cinq derniers mois. Le prix qu'en obtient l'éleveur a chuté de 60 p. 100, même si, au supermarché, le porc se vend le même prix. Il doit y avoir des intermédiaires qui exploitent la situation. Le gouvernement devrait peut-être étudier la question. Chose certaine, les consommateurs ne profitent pas de cette chute du prix du porc, pas plus que les éleveurs. Je suis sûr que certaines des grandes entreprises concernées appuient financièrement le Parti libéral et le Parti réformiste.
D'autres signes nous parviennent de la Saskatchewan et de certaines régions de l'ouest du Canada.
Une agricultrice de Fillmore, Donette Elder, s'occupe depuis 15 ans d'une ligne d'aide téléphonique aux agriculteurs en détresse. Elle affirme n'avoir jamais été aussi occupée que cette année. Le gouvernement de la Saskatchewan a aussi des fonctionnaires qui prennent les appels des agriculteurs en détresse. Le nombre d'appels a augmenté. En Saskatchewan, nous avons également un service de médiation en matière d'endettement agricole de même qu'une organisation qui offre des services de consultation aux agriculteurs qui sont en difficulté financière. Elles s'occupent des agriculteurs avant qu'ils ne fassent faillite. Leurs activités ont malheureusement augmenté de 72 p. 100 par rapport à celles de l'an dernier. À ce jour, 371 agriculteurs ont demandé des services de médiation concernant leur situation financière, soit 155 exploitations agricoles de plus que l'an dernier.
J'ai rencontré des centaines d'agriculteurs, dans ma circonscription et ailleurs au Canada, à Tugaske, Lumsden, Craik, Nokomis et Brownlee. Je n'ai pu me rendre à la grande assemblée de Neilberg, qui se trouve un peu loin de ma circonscription. J'étais à Ottawa à ce moment. Je sais que le ministre de l'Agriculture de la Saskatchewan, Eric Upshall, y a très bien représenté le NPD.
Les agriculteurs de Tugaske et d'ailleurs me disent qu'ils se heurtent à de graves difficultés. Il y a de grandes fermes autour de Craik, qui est une petite ville, voire un village, où 22 producteurs n'ont pu payer leurs factures de produits chimiques du 1er novembre, pour la dernière campagne agricole. Cela ne devrait-il pas sonner l'alarme? Ces terres agricoles comptent parmi les plus belles de la Saskatchewan; ce sont les plus productives qui donnent un rendement très élevé.
Le coût des engrais a grimpé de 57 p. 100 entre 1992 et 1997. Quant aux produits chimiques, les prix ont augmenté de 63 p. 100 au cours de la même période. Il a fallu 130 millions de dollars de plus pour la récupération des coûts, par exemple la privatisation des installations pour l'inspection de la viande qui sont allées aux agriculteurs. Le plus gros problème auquel font face les agriculteurs, en particulier les céréaliculteurs et les producteurs de blé, c'est la perte de la subvention du Nid-de-Corbeau.
Je suis allé au Conseil de l'Europe, à Strasbourg, en France. Il existe dans ma circonscription une localité appelée Strasbourg, qui s'épelle de façon identique. Je me suis rendu à Strasbourg, en France, pour prendre la parole devant le Conseil de l'Europe en 1995. J'y suis allé en qualité de délégué du Parlement, et j'ai eu l'occasion de rencontrer des délégués des 38 pays européens qui sont membres du Conseil de l'Europe. Ils se réunissent tous les trois mois pour discuter de dossiers comme celui de l'agriculture.
J'ai rencontré les membres du comité de l'agriculture et j'ai demandé, en 1995, à tous les députés des 38 pays d'Europe et d'Europe de l'Est membres du comité, ce qu'ils allaient faire pour régler le problème des subventions agricoles dans leur pays. Je leur ai dit à l'époque que le gouvernement libéral du Canada était en train de supprimer le tarif du Nid-de-Corbeau, qui constituait une subvention, à cause des exigences de l'OMC. Je leur ai dit: «Qu'allez-vous faire? Nous avons éliminé notre tarif du Nid-de-Corbeau, qui représente une subvention d'environ 700 millions de dollars par année à l'intention de nos producteurs de grain, garantie par la loi. Nous éliminons cette subvention afin de pratiquer une bonne concurrence. Que comptez-vous faire à cet égard?»
Ils m'ont répondu, premièrement: «L'OMC nous donne cinq ans pour aborder le problème des subventions, non le régler, mais l'aborder. Si vous croyez qu'après cinq ans nous allons sacrifier nos agriculteurs pour les États-Unis, vous êtes fou, nous ne ferons jamais une chose pareille.» Trois ans après que nous avons éliminé le tarif du Nid-de-Corbeau, les pays de la Communauté européenne et les États-Unis offrent non seulement les mêmes subventions qu'ils accordaient il y a trois ans, mais des subventions plus généreuses. Entre-temps, nous avons abandonné nos agriculteurs.
Nous ne pouvons tirer que deux conclusions de cela. Ou le gouvernement libéral s'est fait embobiner dans cette négociation et a accidentellement trahi les agriculteurs canadiens, ou il l'a fait sciemment parce qu'il ne tenait pas à appuyer les agriculteurs de notre pays. J'ai l'impression que les deux affirmations sont valables. Les libéraux n'aiment pas vraiment les agriculteurs de l'Ouest parce que les agriculteurs ne semblent jamais voter pour les candidats libéraux. C'est là de la négligence de la part du gouvernement. Je demande au gouvernement d'y réfléchir.
Le dernier mot m'est venu d'un certain John Germs, qui est le président des producteurs de porc de la Saskatchewan. Celui-ci m'a écrit que les producteurs de porc de la Saskatchewan et des autres régions du pays sont suicidaires, compte tenu des pertes qu'ils essuient. C'est une question très grave.
Il faudrait avoir des solutions à long terme et des solutions à court terme. Je propose cinq solutions à court terme.
Il faut prévoir le plus tôt possible un secours aux agriculteurs sinistrés de quelque 700 millions de dollars, disons. Le NPD considère qu'il faut commencer par cette somme. C'est une bonne somme pour les producteurs de céréales et de porc.
Il faudrait accélérer ou avancer la date des paiements définitifs sur le blé et l'orge afin que les agriculteurs reçoivent du comptant plus rapidement.
Si l'on a recours au CSRN—et je ne le préconise pas—mais si l'on y a recours, il faudra que les sommes soient offertes le plus vite possible aux agriculteurs sans toute la paperasserie habituellement nécessaire. Les agriculteurs devraient être autorisés à employer la partie libre d'impôt de façon à ne pas devoir payer des impôts sur leur compte CSRN.
Le gouvernement du Canada devrait s'occuper du coût des intrants dont j'ai parlé. Beaucoup d'agriculteurs ne sont pas aussi lourdement endettés auprès des institutions bancaires que lors de la crise des années 80, mais ils ont des comptes plus élevés à payer à leurs fournisseurs d'engrais, de semences, de produits chimiques et de machinerie.
Le gouvernement aurait intérêt à suivre mes conseils et à se pencher sur la question de la fixation des prix de l'essence et du carburant diesel en Saskatchewan. À lui seul, ce coût d'intrant éreinte les agriculteurs, et le gouvernement devrait faire quelque chose à cet égard.
Je pense que le ministre de l'Agriculture a déjà dit que le gouvernement s'occupera des institutions financières, qu'il travaillera en collaboration avec elles, pour faire en sorte que nos agriculteurs ne soient pas victimes de ces institutions.
Il y a deux solutions à long terme. Nous devrions régler le problème des subventions que l'UE et les É.-U. accordent à leurs agriculteurs. S'ils ne se conforment pas aux règles d'ici un certain temps, d'ici 12 mois, par exemple, nous devrions peut-être envisager la possibilité de rétablir une sorte de programme agricole concurrentiel pour venir en aide à nos agriculteurs.
L'autre question à long terme dont je veux parler concerne la simultanéité de l'élimination de la subvention du Nid-de-Corbeau et de la déréglementation du secteur ferroviaire. Les coûts de transport que les agriculteurs doivent assumer ont doublé, voire triplé à la suite de cette déréglementation et de l'élimination de cette subvention.
Le secteur agricole connaît de graves difficultés économiques. Le NPD a présenté au gouvernement du Canada des recommandations très solides, qui l'invitent à aller au fond des choses et à s'assurer que nos agriculteurs bénéficient d'une certaine protection.
Je veux revenir sur certains points soulevés par le Parti réformiste. Bien des gens me disent que les réformistes sont déconnectés de la réalité quotidienne des électeurs qui, à l'origine, les ont envoyés à Ottawa pour qu'ils les y représentent. À la Chambre des communes, le 3 novembre, j'ai demandé au chef de l'opposition si, compte tenu de la crise du revenu agricole, il appuierait un programme de secours d'urgence pour les agriculteurs. Il a dit, dans cette enceinte, qu'il n'appuierait aucun programme d'aide financière d'urgence pour les agriculteurs.
Le député réformiste de Selkirk—Interlake, le porte-parole de son parti pour l'agriculture, a assisté à la réunion du Saskatchewan Wheat Pool vendredi dernier, où j'ai moi-même pris la parole. Les agriculteurs nous ont demandé à tous deux d'appuyer un programme de secours d'urgence. Le porte-parole du Parti réformiste pour l'agriculture a dit que non, qu'ils profiteraient de réductions d'impôts et que s'il y avait des revenus, ceux-ci seraient imposables et qu'ils feraient toutes sortes de choses merveilleuses.
Pour mettre les choses au clair, le Parti réformiste n'est pas l'ami des agriculteurs. Au contraire, je pense qu'il est celui des sociétés pétrolières et chimiques parce que le chef de l'opposition a travaillé pour les pétrolières pendant de nombreuses années. Ces sociétés financent son parti et décident quelles politiques le Parti réformiste préconisera et appuiera à la Chambre.
De plus en plus de gens me disent que les députés réformistes laissent l'idéologie l'emporter sur le bon sens. Agriculteur après agriculteur, gens d'affaires après gens d'affaires, femme de maison après femme de maison, tous ceux à qui je parle en Saskatchewan me disent l'un après l'autre que le Parti réformiste a perdu contact avec la réalité. C'est une bien étrange situation quand on tente de défendre et de soutenir un secteur agricole qui est attaqué non seulement par la Communauté européenne et les États-Unis, mais encore par le Parti réformiste dans notre propre pays.
M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai le temps dont je dispose avec le distingué député de Hastings—Frontenac—Lennox and Addington.
J'ai écouté tout à l'heure l'intervention très intéressante du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Grâce à ses 25 années d'expérience en agriculture, il comprend très bien le problème que certains agriculteurs canadiens vivent en ce moment. Comme les agriculteurs canadiens, j'ai été très heureux et rassuré de constater que le ministre avait la situation bien en mains et qu'il agissait. Il fait tout en son pouvoir pour apporter des solutions. Il a tenu tous les députés bien informés de la situation. Il est en contact permanent avec l'industrie, la communauté financière, les provinces, ses collègues du Cabinet et les députés afin d'inviter tous les intervenants à collaborer avec lui à la recherche de solutions concrètes aux graves problèmes des agriculteurs.
Nous nous entendons tous à dire que le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire est crucial pour l'économie canadienne. L'agriculture est l'une des cinq premières industries canadiennes et le troisième employeur en importance au Canada. Nous ne pouvons pas nous permettre de la laisser dépérir. Nous convenons tous que, à court terme, les agriculteurs canadiens ont besoin d'aide pour surmonter la situation. Ils ont besoin d'un programme qui leur permettra de poursuivre leurs activités jusqu'à ce que la grave crise qu'ils traversent aujourd'hui se soit résorbée.
On parle d'une combinaison de programmes. Le ministre et le Cabinet sont à étudier la combinaison qu'il faut, ce qui inclut le recours au filet de sécurité déjà en place et l'adoption d'un programme d'aide national spécial.
Nous reconnaissons tous que notre plan d'action ne doit pas se limiter au court terme, ce dont le gouvernement s'occupe sous la direction du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, mais doit aussi apporter des solutions efficaces à long terme. Lorsque les marchés mondiaux se raffermiront, comme nous savons qu'ils le feront, les agriculteurs canadiens doivent être en mesure de profiter de cette relance économique.
Nos résultats records des quatre ou cinq dernières années reviendront. Nous avons une industrie hautement concurrentielle et, malgré les ralentissements actuels, nous faisons ce qu'il faut pour nous positionner. Le meilleur exemple est celui des consultations qui se poursuivent dans l'industrie pour préparer une solide position en vue des prochaines négociations à l'Organisation mondiale du commerce.
À titre de président du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, je peux dire que les organisations agricoles d'un bout à l'autre du pays sont heureuses que nous les ayons invitées à venir donner leur point de vue sur la position de négociation que nous devons adopter au début des négociations de l'OMC, dans un peu plus d'un an.
Ces négociations sont une importante occasion pour le Canada de conserver et même d'accroître son avantage concurrentiel. Les pourparlers sont une chance unique de poursuivre ce que nous avons amorcé il y a plus de quatre ans en adhérant à l'accord de l'OMC au terme de l'Uruguay Round. Ces dernières négociations ont mis un semblant d'ordre et imposé quelques règles dans le commerce mondial des produits alimentaires et agricoles.
Cependant, les problèmes actuels en ce qui concerne le revenu agricole sont attribuables en grande partie à de mauvaises conditions sur le marché mondial, conditions qui ont été aggravées par les mesures protectionnistes adoptées dans certaines régions des États-Unis et par l'utilisation continue de subventions par l'Europe.
Les agriculteurs canadiens craignent à juste titre ce qui pourrait arriver. Je veux leur garantir que le gouvernement fait tout en son pouvoir pour dissuader les États-Unis et l'Europe de se livrer une autre guerre de subventions. Nous n'entendons pas ménager nos efforts à cet égard.
Les députés ont entendu le ministre dire qu'il allait continuer de s'entretenir de façon bilatérale avec les dirigeants des États-Unis et de l'Europe. Nous entendons également utiliser pleinement la prochaine ronde de négociations à l'OMC pour mettre un terme aux tactiques utilisées par les grandes puissances qui perturbent les échanges commerciaux.
Les subventions frappent surtout les pays petits et moyens comme le Canada. Elles nuisent à une économie agricole forte et saine. Le Canada ne ménagera pas ses efforts dans le cadre de ces négociations pour obtenir un engagement multilatéral d'élimination progressive des subventions agricoles à l'exportation une fois pour toutes. De telles subventions ont été interdites pour les produits industriels au milieu des années 50.
Après un demi-siècle, il est sûrement temps de débarrasser le secteur agricole de ce soutien gouvernemental très fort et tout à fait inéquitable. Les producteurs d'un pays ne devraient pas avoir à concurrencer le Trésor d'un autre pays.
Qu'il s'agisse de producteurs de blé de la Saskatchewan, de l'Argentine ou des États-Unis, les agriculteurs forment un élément essentiel de notre société. Peu importe qui nous sommes ou l'endroit où nous vivons, nous avons tous les mêmes objectifs, nous voulons des économies agricoles fortes, des collectivités rurales prospères et un niveau de vie décent pour ceux qui font fructifier la terre.
Au cours de l'année qui vient, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire poursuivra ses consultations auprès des représentants de l'industrie, afin de forger une solide position de négociation concertée, qui tient compte du vaste éventail d'intérêts que l'on retrouve dans notre industrie agricole et agroalimentaire très diversifiée.
Cette ronde de négociations constitue un autre outil important de notre stratégie à long terme dans ce secteur. Comme les députés le savent, les négociations de ce genre prennent du temps. Elles font assurément partie de notre stratégie à long terme.
Le gouvernement a entendu l'appel des agriculteurs, qui demandaient que soit mis en oeuvre un programme d'aide permettant de compenser, dans l'immédiat, de très graves manques à gagner, et nous avons l'intention de combiner mesures à court et à long terme.
Je conclurai en vous rappelant un point extrêmement important que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a soulevé à maintes occasions depuis que la crise du revenu agricole a commencé.
Nos stratégies à court et à long terme doivent d'abord et avant tout être complémentaires. Elles ne doivent pas se nuire les unes les autres et aucune ne doit primer sur les autres. Nous devons adopter, pour remédier à cette situation exceptionnelle, une solution dite «verte du point de vue de l'OMC».
Le Canada ne peut pas se permettre d'inviter quelque autre mesure de compensation de la part de ses concurrents. C'est pourquoi le gouvernement et ses représentants que sont le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et le ministre du Commerce international, s'appliquent à faire en sorte que toutes les mesures que nous prenons soient utiles, sans nuire à nos producteurs ou aux contribuables en attirant des représailles commerciales.
Je rappelle aux députés que les mesures compensatoires ont fait perdre beaucoup d'argent à l'industrie du porc dans le passé, et aucun d'entre nous ne souhaite voir cela se reproduire.
C'est pour cette raison que le gouvernement prend le temps qu'il faut pour élaborer le meilleur programme possible, un programme qui répond aux besoins des agriculteurs et de l'ensemble des Canadiens, un programme «vert» du point de vue de l'OMC, et dans le cadre duquel l'argent aboutira dans les poches des agriculteurs.
M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Monsieur le Président, j'apprécie beaucoup l'occasion de participer dans le débat d'urgence sur les revenus agricoles.
Je me réjouis que notre comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire entende depuis plusieurs semaines des porte-parole de presque tous les groupements de producteurs de produits de base au Canada.
Cette crise étant des plus réelles, nous voulons collaborer avec tous les intéressés pour venir en aide à nos agriculteurs.
Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire s'est déjà exprimé avec passion et conviction au sujet de cette crise des revenus agricoles. Je constate sa volonté sincère de résoudre le problème et sa réaction reflète l'importance du défi.
La demande en Asie et en Russie de nos principaux produits agricoles a connu une baisse importante à la suite de la diminution du pouvoir d'achat de leurs consommateurs. Tout le monde reconnaît le lien entre la crise financière mondiale et la chute des revenus agricoles au Canada.
Ajoutons à cela les baisses cycliques des prix des céréales, du porc et du bétail des productions médiocres à certains endroits et nous nous nous retrouvons avec une situation où de nombreux producteurs connaissent une baisse assez marquée, voire drastique, de leur revenu
Certains députés soutiennent peut-être que la solution consiste à isoler l'économie canadienne du reste du monde, mais c'est faire preuve d'une vue simpliste du monde, plutôt que de compassion pour les victimes de la crise. Ce n'est pas en se plaignant qu'on trouve des solutions et nous avons besoin de solutions valables.
C'est bien beau de parler de retirer le Canada des marchés mondiaux, du commerce international et des exportations, mais cela n'améliorera pas la sécurité financière de nos agriculteurs. Inutile également de se plaindre de ne pas tout gagner dans les négociations commerciales.
Rendons justice à nos agriculteurs en laissant tomber les beaux discours et en travaillant plutôt ensemble pour trouver des solutions pratiques à un problème complexe.
La responsabilité liée au fait de gouverner exige que l'on soit pragmatique et non dramatique. Nous continuerons la tradition de ce gouvernement, qui a toujours travaillé avec les agriculteurs et les gouvernements provinciaux pour mettre en place des programmes équitables et accessibles à tous ceux qui sont dans le besoin, peut importe la province dans laquelle ils vivent.
Nous allons aussi travailler avec ces mêmes partenaires pour définir une position forte, unie et convaincante aux fins des négociations sur le commerce international. Le fait de proposer des solutions à court et à long termes face à cette grave situation témoigne de notre engagement à collaborer et à coopérer.
Les agriculteurs canadiens ont le droit de s'attendre à une telle approche face au problème. Il ne s'agit pas de faire du cinéma ou de voler la vedette, compte tenu de la nature et de l'ampleur du problème.
Les plus récentes données sur le revenu agricole— et je souligne que ces chiffres ont été établis de concert avec les provinces— révèlent que le niveau national du revenu agricole global net a baissé de 4 p. 100 par rapport à la moyenne des cinq dernières années, et de 20 p. 100 par rapport à 1997.
Il va de soi que ce chiffre global cache les problèmes qui existent. Certaines régions du pays souffrent plus que d'autres et, dépendant des produits, certains producteurs ne sont pratiquement pas touchés, alors que d'autres sont très durement éprouvés.
Nous savons qu'il existe de graves problèmes dans l'industrie du porc et celle du grain. La majorité des producteurs de porcs sont au Québec, en Ontario et au Manitoba, mais le Canada atlantique a une production importante de porcs, de sorte que toutes ces régions sont touchées.
La majorité des producteurs de grain sont en Saskatchewan, au Manitoba et en Alberta, mais il y en a aussi dans certaines régions de l'Ontario. Ainsi, il y a des producteurs de blé dans ma circonscription. Pourtant, il ne faut pas oublier les producteurs qui ont vécu d'importantes sécheresses et même des épidémies de maladies comme la tremblante du mouton. Il faut tenir compte de la situation des revenus agricoles dans son ensemble et reconnaître tous les facteurs qui sont en jeu. Ainsi, nous comprendrons mieux les chiffres.
Si on regarde le problème par région, on voit que la situation est particulièrement grave à l'Île-du-Prince-Édouard, en Saskatchewan et au Manitoba. Le revenu net réalisé des agriculteurs de l'Île-du-Prince-Édouard et du Manitoba est censé chuter de plus de 40 p. 100 cette année et celui des agriculteurs de la Saskatchewan pourrait baisser jusqu'à 70 p. 100 par rapport à la moyenne des cinq dernières années. Malheureusement, d'après les prévisions, ceux qui ont de la difficulté cette année ne verront vraisemblablement pas d'amélioration l'année prochaine.
Je sais qu'il y a énormément de gens à travers le Canada qui font face à des difficultés et qui se tournent vers le gouvernement du Canada pour obtenir de l'aide. Il y a d'autres questions urgentes qui nécessitent l'attention du gouvernement fédéral. Mais il n'y a pas de choix à faire. Nous devons faire de notre mieux pour tous ces gens.
La crise du revenu agricole n'est pas une situation devant laquelle le gouvernement va reculer, pas plus qu'il ne reculera en face de n'importe quel autre défi. Nous voulons régler le problème aussi rapidement que possible afin de rétablir un certain calme dans le secteur qui est devenu de plus en plus désespéré ces jours derniers.
Progresser, et non reculer, exige un partenariat entre les paliers de gouvernement. Ce principe a été établi lors d'événements antérieurs. Comme cela est arrivé dans le cas de la tempête de verglas au début de l'année, le gouvernement fédéral paiera sa part. Les provinces peuvent compter là-dessus.
En concevant notre réponse immédiate à la crise du revenu agricole, nous allons assumer notre fardeau. Il est clair que les gouvernements provinciaux dans les régions touchées auront eux aussi un fardeau à porter, c'est inévitable. Le défi consiste à concevoir une réponse qui répartisse le fardeau et serve au mieux l'intérêt public. Là encore, il s'agit d'une approche sincère et pragmatique qui reflète la responsabilité du gouvernement.
Il n'y a jamais de place pour des rapports de confrontation entre les gouvernement fédéral et provinciaux. Cela est particulièrement vrai dans la situation actuelle. Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a fait clairement savoir qu'il voulait travailler avec les provinces pour remédier à la situation. Les organisations agricoles et les deux paliers de gouvernement travaillent maintenant à des solutions qui remédient aux conditions dans les régions touchées et qui répondent aux besoins des gens le plus durement frappés.
Le ministre a également souligné la nécessité de maintenir des communications ouvertes et un processus transparent pour que les gens puissent savoir ce qui se passe. Ce travail acharné produira des solutions. Cette approche produira des programmes efficaces. Cela sera-t-il spectaculaire? Non. Cela résoudra-t-il tous les maux? Je ne le pense pas. Il n'existe pas de solutions rapides, faciles ou totales.
Des solutions réalisables et sérieuses n'ont pas à être spectaculaires ou miraculeuses afin de changer quelque chose. Changer quelque chose fait partie de l'art de gouverner. Le gouvernement du Canada s'est engagé à changer quelque chose dans la crise du revenu agricole.
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'ai préparé un discours d'une heure, mais je suppose que vous n'allez pas m'accorder autant de temps. J'ai préparé d'avance une grande partie de mon discours car je savais que ce débat allait avoir lieu. Mais puisque je ne dispose pas d'une heure, je laisserai mon discours de côté et je vais partager mon temps de parole.
Je ne suis pas ici pour me faire un capital politique comme l'ont fait certains autres partis. Je voulais décrire la situation dans le secteur agricole. Au lieu de cela, je vais lire ce soir à la Chambre certains commentaires que m'ont fait des agriculteurs.
Je commencerai par la lettre de Bill Lozinski, que j'ai reçue la semaine dernière. J'espère que le gouvernement écoutera parce les gens dont je vais parler à la Chambre aujourd'hui ont besoin qu'on les entende. Voici ce que dit M. Lezinsky dans sa lettre:
Cher Monsieur,
Je ne me sens ni coupable ni honteux de réclamer d'être justement payé pour ce que je produis. La situation dans laquelle se trouve aujourd'hui le secteur agricole est absolument injuste.
Un boisseau de blé permet de produire environ 125 pains, ce qui représente un montant de 250 $ à peu près...
C'est-à-dire si nous les achetons à l'épicerie. Il poursuit en disant que les agriculteurs obtiennent 2,50 $ sur ce montant. Sur les 250 $ qu'il en coûte aux gens pour acheter le pain, les agriculteurs obtiennent seulement 2,50 $. Il poursuit:
...alors que si on calcule le carburant, l'engrais, les produits chimiques et les semences, il faut compter entre 75 et 100 $ l'acre pour produire ce pain. Et je ne mentionne même pas le coût des machines agricoles.
Je ne mentionne même pas le coût de la machinerie. J'arrête une minute. J'ai utilisé ses chiffres. La Chambre sait-elle qu'une acre peut produire assez de blé pour fabriquer 3 750 miches de pains? Voilà ce que les agriculteurs produisent. Il disait que les agriculteurs n'en tiraient rien, mais que toute la population du Canada en profite. Je reprends la lecture de cette lettre.
Lorsque les agriculteurs ont de l'argent, l'économie est florissante. J'ai lu un jour qu'un dollar entre les mains d'un agriculteur est multiplié par 15, parce qu'il entre dans l'économie de diverses façons.
Nous ne sommes pas un fardeau pour le contribuable. Nous subventionnons tous ceux qui achètent des produits alimentaires. La politique des bas prix dans l'alimentation tue le Canada rural. Lorsque les prix montent au magasin, les agriculteurs n'en voient pas la couleur. En fait, c'est l'inverse, nous faisons toujours moins d'argent.
(Le prix d'un boisseau de blé en 1929 était de 2,65 $.)
Aujourd'hui il est de 2,50 à 3,00 $. Il n'a donc pas changé, mais tout le monde sait ce qui est arrivé aux coûts. Laissez-moi revenir à cette lettre. Elle est très intéressante. Elle dit encore:
Mon beau-frère vivait en Suisse depuis trois ans. Leur facture d'épicerie était d'environ 50 p. 100 de leur revenu brut. Une livre de viande hachée coûtait 15 $. Une demie miche de pain valait 3,50 $. Une dinde, 85 $ (et même pas une belle, selon ma belle-soeur). Les agriculteurs reçoivent d'excellents prix pour leurs denrées. Je suis sûr que vous avez déjà entendu l'histoire des 12 $ pour un boisseau de blé. En réalité, ils font beaucoup plus. Leurs fermes sont petites et ils en ont plusieurs. Ils sont plus nombreux que la plupart des fermes familiales que l'on retrouve ici.
Je ne peux lire toute la lettre, mais je vais en lire la fin.
Il en va de l'intérêt de tous de pouvoir compter sur une économie forte et diversifiée. Il ne sert à rien de se demander si on peut se permettre de verser 50 $ l'acre pour compenser la faiblesse des prix des denrées. Il faut plutôt reconnaître que nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas le faire.
C'est là le point principal. À 50 $ l'acre, nous ne pouvons pas passer à côté. La lettre se poursuit ainsi:
M. Breitkreuz, je vous remercie de vos efforts. Nous ne pouvons pas seulement imaginer l'importance que cette question peut avoir aujourd'hui et celle qu'elle pourra avoir demain. Il est essentiel pour chacun d'entre nous de pouvoir compter sur des produits alimentaires à prix abordables. Assurons-nous que cela ne devienne pas un élément qui finira par nous tuer à la longue.
Écoutons ce qu'il a à nous dire. Je m'adresse tout particulièrement aux gens des villes qui nous écoutent aujourd'hui.
J'ai consacré beaucoup de temps et d'efforts à essayer de comprendre ce que les agriculteurs de ma circonscription ont à dire à ce sujet. J'ai reçu plus de 1000 réponses au cours de la dernière semaine seulement. Au cours des quelques dernières heures, j'ai essayé de faire un résumé de ce que ces gens avaient à dire.
Tout d'abord, à la question de savoir s'il y a une crise dans l'agriculture, 92 p. 100 des personnes qui ont communiqué avec mon bureau, agriculteurs et autres, ont répondu qu'il y a en effet une crise. Environ 70 p. 100 des gens qui ont communiqué avec mon bureau sont des agriculteurs. Quatre-vingt-sept pour cent de nos interlocuteurs affirment d'ailleurs que cette crise les touche personnellement.
Nous avons également cherché à connaître les causes de cette crise. Un fort pourcentage des répondants ont affirmé que les facteurs de production étaient beaucoup trop coûteux. La deuxième chose sur laquelle ils ont insisté, ce sont les prix des céréales qui sont trop bas. Ces deux facteurs étaient les principaux facteurs de la crise.
Comment le problème se manifeste-t-il? Les agriculteurs ne peuvent pas payer leurs comptes. Ils sont obligés de renoncer à leur travail d'agriculteur, ce qui crée beaucoup de stress. Les entreprises se plaignent que les agriculteurs ne dépensent plus d'argent dans les villes à proximité et que leurs revenus ont grandement diminué. C'est ce que me disent mes électeurs. J'essaie de résumer toutes les réponses à ce sujet.
J'ai également demandé à beaucoup de gens si le Compte de stabilisation du revenu net et l'assurance-récolte étaient suffisants. Les réponses m'ont choqué. Les répondants ont dit dans une proportion de 90 p. 100 que ces programmes ne suffisaient pas à contrer le problème. J'espère que le gouvernement écoute, parce que ce n'est ni moi ni le Parti réformiste qui le dit. C'est ce que les agriculteurs me disent.
Quelles sont les solutions? Qu'allons-nous faire? Environ 50 p. 100 des répondants disent que nous avons maintenant besoin d'une aide d'urgence. Un fort pourcentage disent avoir besoin d'aide pour le transport. Ils insistent pour qu'on réduise les impôts. Près de la moitié d'entre eux disent avoir besoin d'une réduction d'impôts sous une forme ou une autre.
Le résultat suivant m'a passablement surpris. Il y en a très peu qui disent qu'ils aimeraient pouvoir emprunter plus d'argent. Ils ne voient pas cela comme une solution à la crise. Un grand pourcentage d'entre eux disent aussi que les frais d'utilisation doivent disparaître parce que qu'ils sont en train de les tuer. Je suppose que tout le monde sait qu'ils représentent environ 138 millions de dollars.
Je leur ai demandé, s'il devait y avoir une certaine aide d'urgence, comment ils aimeraient qu'elle soit distribuée. Je pense que c'est important et j'espère donc que le gouvernement écoute. Plus de 50 p. 100, une vaste majorité, croient que les versements devraient être calculés à l'acre ou en fonction de la production des élevages. Selon eux, ce serait l'approche la plus équitable.
Le CSRN n'a pas obtenu une bonne cote. Moins de 5 p. 100 sont d'avis qu'une amélioration de ce programme serait utile. Environ 10 p. 100 estiment qu'il nous faut un prix garanti pour notre grain. Dans l'ensemble, ils pensent qu'un versement à l'acre ou en fonction d'une certaine production d'élevage est ce qu'il faut.
J'ai tenté de résumer un grand nombre des observations. Les députés doivent se rendre compte que, quand on reçoit un millier de lettres et de réponses de ses électeurs sur une question semblable, il est très difficile de transmettre l'opinion de chacun à la Chambre des communes. Je vais résumer rapidement.
La plupart des agriculteurs jugent le CSRN inutile. Ceux qui y ont placé de l'argent se demandent pourquoi ils devraient être forcés de l'en retirer en ces temps difficiles puisqu'ils veulent le garder pour leur retraite. Les autres agriculteurs qui ont vraiment des problèmes disent avoir déjà retiré tout leur argent ou bien en avoir bien peu dans leur compte, pas assez en tout cas pour assurer la survie de leur exploitation.
Certains agriculteurs pensent qu'il faut améliorer le CSRN. On pourrait augmenter les contributions du gouvernement fédéral et réduire les pénalités pour des retraits à la mauvaise période de l'année.
Un autre groupe d'observations est venu des hommes et femmes d'affaires. Ils s'inquiètent des mesures d'aide aux agriculteurs, disant qu'ils ne l'ont pas facile non plus. Les temps sont difficiles. Les entreprises ne reçoivent pas de cadeaux du gouvernement, alors pourquoi les agriculteurs en auraient-ils lorsque les temps sont durs? Ils ajoutent cependant que, si l'économie agricole s'effondre, leurs entreprises vont tomber aussi. De ce point de vue, les subventions ne sont pas une si mauvaise idée.
La plupart des agriculteurs voient la solution dans un train de mesures d'aide agricole axées sur la production par acre. Ils veulent cependant s'assurer que les montants ne soient pas versés aux propriétaires, mais bien à celui qui loue la terre pour produire une récolte. Quant à la production mise à part, les agriculteurs prônent une formule adaptée à chaque producteur de bétail en fonction de ses coûts de production.
Enfin, certains agriculteurs évoquent les prix absurdes des intrants: les engrais, les semences et les produits chimiques. Ils souhaitent une forme de plafonnement de ces coûts. Quand j'ai proposé une réduction des impôts comme mesure d'aide, les producteurs ont répliqué que les fabricants de produits chimiques ne vont pas abaisser leurs prix. Ils vont augmenter leur marge bénéficiaire, tout simplement.
Je dispose encore de 50 minutes. Je vais conclure en souhaitant que le gouvernement me parle. J'ai parlé aux agriculteurs à titre individuel. J'ai obtenu plus de mille réponses. J'exhorte le gouvernement à rester ouvert. J'aimerais travailler en coopération avec le gouvernement dans le but de trouver une solution à cette crise.
M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, si j'ajoutais ces 50 minutes à mon temps de parole, nous pourrions peut-être venir à bout de la question. C'est pour moi un plaisir de me lever et de dire quelques mots, mais c'est également une occasion triste pour moi.
Il y a une crise dans l'agriculture. Cela ne fait aucun doute. Mais il y a une crise encore pire chez les libéraux des banquettes de devant. Je n'en vois pas un seul. C'est là que sévit la crise. Je suis presque aveugle, mais je n'ai pas pu ne pas m'en apercevoir.
Je vais lire une ou deux citations. Depuis que j'ai été élu, en 1993, je suis membre du Comité de l'agriculture. Nous avons signalé au gouvernement que nous avions besoin d'un programme de soutien du revenu agricole. Le 9 février 1994, le député d'Haldimand—Norfolk a posé la question suivante au ministre de l'Agriculture.
«Dans le livre rouge, le Parti libéral promet un programme d'aide au revenu agricole pour les agriculteurs canadiens en difficulté». C'était en 1994. Le ministre de l'Agriculture a répondu:
Je remercie le député pour sa question. Le gouvernement conservateur, avec la collaboration des gouvernements provinciaux, avait entrepris l'examen et la restructuration des programmes canadiens de protection du revenu agricole.
Cela n'a jamais été terminé. Pourquoi? En 1994, tout le monde savait que les Européens versaient des subventions énormes. Ils n'allaient pas laisser leurs agriculteurs éprouver des problèmes financiers. Ils allaient continuer à les subventionner. Il fallait, pour notre part, que nous mettions en place un filet de sécurité.
Quelle est l'ampleur de cette crise agricole?
Je remercie le député de Yorkton—Melville d'avoir donné certains chiffres. Je sais qu'il y a ici beaucoup de partisans de la gestion de l'offre qui sont en faveur d'un tel système. Voici le prix de leurs produits. Un oeuf mimosa qui coûte 1,60 $ rapporte 10 cents à l'éleveur. Une quiche qui coûte 12,50 $ et qui contient trois oeufs, deux onces de fromage et 16 onces de lait rapporte 92 cents à l'agriculteur. Pour un blanc de poulet grillé de six onces, qui se vend 8,20 $, l'agriculteur reçoit 29 cents. Ça, c'est dans le secteur soumis à la gestion de l'offre. Dans le cas du blé et du porc, comme l'a dit le député de Yorkton—Melville, c'est le désastre.
J'ai pris connaissance d'une lettre d'un agriculteur qui disait: «Essayez d'imaginer que, en 1981, j'ai obtenu 4 $ net le boisseau pour du blé dur de printemps no 3. Aujourd'hui, j'obtiens 1,80 $ pour le même genre de blé.» Cet agriculteur n'obtient même pas la moitié de ce qu'il obtenait en 1981.
Nous savons ce qui est arrivé au prix des engrais. Nous savons ce qu'il est advenu du prix du matériel. Nous avons une assez bonne idée de ce signifie être coincé entre la hausse des coûts et la chute des prix.
Comment ces agriculteurs sont-ils censés s'en sortir? Les agriculteurs ont longuement cherché un moyen d'obtenir de meilleurs prix. Il est étonnant que l'industrie des cultures spéciales ne s'en soit pas tirée trop mal. Cette année, les prix du colza sont tels que, n'eût été de ce revenu, je crois que la totalité des exploitations agricoles seraient en crise. Au moins, certains produits provenant du secteur des cultures spéciales leur rapportent un revenu qui leur permet d'accroître leur revenu habituel.
Lors de la campagne agricole de 1992, en Saskatchewan, les céréales ont été endommagées par le gel. Il semblait que toutes les céréales seraient transformées en fourrage. Les agriculteurs de la Saskatchewan se sont tournés vers les États-Unis et y ont trouvé un marché où ils ont constaté qu'ils pourraient facilement doubler le prix de leur blé fourrager. Qu'on fait les sociétés céréalières et la Commission du blé? Ils ont vendu à bas prix 1,5 million de boisseaux sur ce marché et l'ont ruiné.
En 1993-1994, lorsque le Manitoba a eu un problème avec le fusarium, que s'est-il passé? Les agriculteurs qui ont trouvé un débouché pour ce produit n'ont pas été autorisés à le vendre sur ce marché. On a exigé qu'ils obtiennent un permis d'exportation de la Commission du blé, et ils ont dû payer 40 $ à 50 $ de plus la tonne pour ces céréales qu'ils n'ont reçu en retour.
Les agriculteurs qui n'ont pas respecté la loi et qui ont vendu eux-mêmes leur produit ont écopé de pénalités énormes, d'amendes et même de peines d'emprisonnement. Peut-on parler de démocratie quand les agriculteurs se heurtent à des difficultés financières et connaissent l'existence d'un marché à une ou deux douzaines de milles de distance auquel ils n'ont pas droit sous peine d'emprisonnement?
Un des agriculteurs qui se sont rendus en automobile de la Saskatchewan jusqu'au poste frontière du Manitoba pour manifester son opposition a été encore plus maltraité que les manifestants au sommet de l'APEC, à Vancouver. Il n'a pas pu s'en retourner sans payer d'amende. On lui a imposé une amende de 1 500 $ et saisi son véhicule. Andy McMechan avait de l'orge, de l'orge spéciale, que personne ne pouvait vendre pour lui. Il a abouti en prison.
Les agriculteurs trouveront une solution. Au moins une demi-douzaine d'agriculteurs m'ont téléphoné depuis une semaine. Ils m'ont dit: «Je n'ai pas besoin d'argent. Si vous pouvez me garantir que je peux vendre mon grain, ne venez pas m'ennuyer avec des paiements. Nous allons nous en sortir Nous allons trouver un marché et nous allons traverser la crise.»
Comment faut-il s'y prendre? D'une part, des marchés sont apparus par suite de la crise, mais d'autres ne peuvent se développer au point de permettre des prix raisonnables. Cela incite plus ou moins les agriculteurs à se diriger vers les marchés où les prix sont assez élevés pour permettre leur survie, leur rentabilité et leur surproduction.
Les producteurs de porcs du Manitoba, de la Saskatchewan et de l'Alberta ne voulaient pas de grosses exploitations parce qu'ils savaient qu'il leur faudrait une petite fortune pour construire les étables, mais il n'y avait pas d'autre solution. Le prix des céréales fourragères était tellement élevé qu'ils ne pouvaient assurer la rentabilité de leur exploitation. Avec l'encouragement des provinces, ils ont agrandi et diversifié leur production. Aujourd'hui, ils perdent entre 50 et 60 $ le porc.
Ce matin, lorsque j'ai commandé des oeufs et du bacon au petit déjeuner, je croyais bien qu'on me servirait toute une assiettée de bacon, étant donné la chute du prix du porc, qu'on remplacerait les pommes de terre par du bacon. Le peu de bacon qu'on m'a servi aurait pu être prélevé sur un porc vivant et la bête ne s'en serait jamais aperçu. C'était si peu que c'en était ridicule. Que faire dans une telle situation? C'est drôle, mais c'est vrai. Je n'ai fait qu'une bouchée des deux petites tranches de bacon qui se trouvaient dans mon assiette, puis je me suis attaqué aux deux oeufs qui restait et à mes rôties.
Devinez combien coûte une rôtie au restaurant? Un boisseau de blé donne environ 120 pains, ce qui revient à quelque 2¢ le pain. Comme un pain donne 24 tranches et que j'ai mangé deux tranches de pain, je calcule que le blé qui entrait dans la fabrication des rôties n'a coûté que le douzième d'un cent. Comment expliquer alors que le petit déjeuner a coûté 5 dollars? Je sais que les pommes de terre qu'on m'a servies ne coûtent pas cela. Je suis abasourdi. Les agriculteurs sont censés survivre et non pas être subventionnés.
M. Hehn est venu témoigner devant le comité permanent. Je lui ai demandé pourquoi nous n'obtenons pas de meilleurs prix pour notre blé. Il a répondu que le prix était établi à Thunder Bay. Je lui ai demandé si la situation serait différente si le prix était établi au Manitoba et il m'a répondu que c'était le prix qui avait été fixé. Le prix d'un boisseau de blé s'élevait à 1,57 $ au silo. Le prix de rachat atteignait 3,95 $ à Morris, et non pas à Thunder Bay.
Cela n'a aucun sens. Les agriculteurs ne peuvent survivre. Les subventions sont un élément du problème, mais la politique et le régime de commercialisation y contribuent probablement davantage que le comportement des Européens et des Américains mis dans le même panier.
M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai le temps qui m'est attribué avec le député de Lambton—Kent—Middlesex.
Je suis heureux d'avoir la possibilité d'intervenir dans le débat sur la motion à l'étude.
Chaque jour, à la Chambre, nous étudions collectivement de nombreux sujets dont l'importance varie énormément. Le sujet de notre débat est peut-être l'un des plus importants sur lesquels nous avons eu à nous pencher. Je ne voudrais pas tomber dans le mélodrame, mais nous aimons tous manger chaque jour. C'est pour cette raison que nous devons poser dès maintenant un geste décisif.
Ce soir, nous tenons un débat d'urgence. Il y a urgence parce que les agriculteurs canadiens ne peuvent pas attendre six mois que nous agissions.
Il n'est pas exagéré de dire que l'agriculture canadienne se trouve aujourd'hui à la croisée des chemins. La crise actuelle, si on ne fait rien, aboutira à un désastre, sinon à la perte pure et simple des parts de marché des petits et moyens entrepreneurs d'une industrie fondatrice au Canada.
J'irais jusqu'à dire qu'il ne devrait pas y avoir un seul député à la Chambre qui n'est pas informé des défis financiers de taille que doivent relever les agriculteurs canadiens.
La sécheresse, le gel, la maladie, les frais généraux élevés et la concurrence féroce sont tous des facteurs dont doivent régulièrement tenir compte nos producteurs primaires.
Toutefois, il ne faudrait pas donner l'impression que ces défis n'ont rien rapporté. En tant qu'agriculteur de carrière, je puis franchement dire que, en partie à cause de ces complications quotidiennes, le secteur agricole canadien est devenu l'un des plus concurrentiels et des plus rentables du genre au monde.
Cela étant dit, lorsqu'on tient compte des problèmes nouveaux et complexes tels que les baisses marquées du prix des produits qui s'ajoutent aux difficultés déjà lourdes de nos agriculteurs, doit-on s'étonner le moindrement de la crise actuelle?
Je représente une des plus grandes circonscriptions agricoles à l'est du Manitoba. Dans mon comté natal, soit le comté de Huron, dans le sud-ouest de l'Ontario, il y a près de un demi-million de porcs, c'est 7 fois plus de porcs que d'électeurs dans la circonscription de Huron.
Avec cela à l'esprit, on peut comprendre que la chute actuelle du prix du porc a ruiné ce groupe de producteurs. Pour les personnes qui ne le savent peut-être pas, je dirai qu'un producteur de porc recevait il y a quelques mois à peine à peu près 2 $ le kilo de porc. Le même producteur se compte chanceux de toucher aujourd'hui 60¢ le kilo.
Le problème, c'est que le coût de production est resté le même. On estime que les producteurs de porc perdent en moyenne 60 $ par porc engraissé qu'ils vendent aux prix d'aujourd'hui. Je crois savoir qu'ils perdent encore plus que cela.
Ces derniers jours, j'ai entendu et lu un nombre incalculable de producteurs de porc de la circonscription de Huron—Bruce. Ils me disent et m'écrivent que si nous n'agissons pas maintenant, si nous ne les aidons pas tout de suite, ils fermeront boutique avant Noël. Ils n'auront pas d'autre choix. Ils n'ont pas les moyens de garder leurs porcs ni ceux de les vendre.
C'est une triste réalité, mais le pire, c'est qu'il est statistiquement probable que la crise s'étendra à d'autres secteurs. Les cultures commerciales et l'élevage du boeuf et du mouton sont tous menacés.
Les députés seront sûrement d'accord pour dire que l'échec n'est absolument pas envisageable pour nous. Bien entendu, le fait de pouvoir nourrir adéquatement notre population devrait être primordial dans l'esprit de tout législateur responsable. De plus, il faut aussi être conscient que l'agriculture est actuellement une énorme entreprise au Canada. Elle a non seulement employé des milliers de personnes l'an dernier, mais elle a aussi représenté quelque 20 milliards de dollars de notre production nationale.
La population de la planète devrait franchir la barre des sept milliards de personnes d'ici l'an 2000, ce qui signifie que la production de nourriture à l'échelle mondiale devra connaître une croissance exponentielle. S'il en a la chance, le Canada pourra jouer un rôle de premier plan à ce chapitre.
Le potentiel est illimité si nous réussissons à nous imposer solidement sur les marchés. Notre industrie agricole a déjà progressé à pas de géant au cours du XXe siècle, et je crois fermement que nous devrions encourager le maintien de cette tendance.
Malheureusement, à l'aube du prochain millénaire, les petites exploitations agricoles familiales risquent fort de disparaître. Nous approchons d'une croisée des chemins très importante.
Alors que l'économie mondiale connaît une expansion rapide, nous ne pouvons plus injecter aveuglément des fonds publics dans des programmes spéciaux controversés et assortis de nombreuses tracasseries administratives.
Les agriculteurs ont besoin d'un coup de pouce, pas de charité. Il est essentiel de faire des investissements stratégiques dans des secteurs clés. Sinon, on risque fort de sonner le glas de l'exploitation agricole familiale.
Les députés doivent comprendre que les fermes familiales ont été le pivot du secteur agricole pendant plus d'un siècle, un pivot dont l'effondrement nuira considérablement à la capacité de notre pays d'assurer certains contrôles de qualité et de sécurité ainsi que la disponibilité de denrées.
Si nous n'agissons pas sans tarder, je vois l'industrie agricole canadienne se diriger vers la même pente glissante où se trouvent déjà nos voisins américains. Les Tyson, les Perdue Poultry, les Archer Daniels Midland et d'autres grandes sociétés semblables ont su dominer et contrôler l'approvisionnement en aliments pour prendre le consommateur américain en hôtage. Nous devons empêcher qu'une chose semblable se produise ici au Canada.
On n'a qu'à regarder chez notre voisin du Sud, notre plus important partenaire commercial, pour comprendre le risque éventuel qui nous attend. Là-bas, l'agriculture est devenue une activité corporative contrôlée exclusivement par les fluctuations du marché, les actionnaires et les multinationales, une réalité pour le moins inquiétante.
Certains d'entre nous croient que la grandeur prime sur tout autre qualité. Tout ce que j'ai à leur dire, c'est que la grandeur peut être souhaitable à l'occasion, mais cela ne veut pas nécessairement dire que l'on est plus efficace. En effet, quand une société atteint le statut de multinationale, elle devient puissante, mais elle n'est pas nécessairement responsable ni efficace.
Il suffit d'examiner l'énoncé de mission de grandes sociétés comme ADM, Monsanto ou ConAgra pour se rendre compte de leur but principal: accumuler le maximum de profits pour leurs actionnaires plutôt que de faire avancer l'agriculture pour le mieux-être de la population.
Je voudrais faire remarquer que 38 compagnies américaines du secteur de l'aviculture possèdent entre elles 240 usines de transformation qui fournissent à peu près 98 p. 100 de la volaille au pays. C'est-à-dire qu'il n'y a en fait que 38 éleveurs de volaille dans tous les États-Unis.
Il y en a 150 rien que dans ma circonscription de Huron—Bruce. En fait, les éleveurs de poulet américains gagnent un peu plus qu'un manoeuvre, soit seulement 3 ou 4 cents la livre pour élever des poulets à griller, un prix qui ne serait sûrement pas acceptable pour nos propres éleveurs de poulet.
Il importe également de mentionner que ce chiffre est resté virtuellement inchangé depuis le milieu des années 80. La stabilité est une chose, mais la réalité est, malheureusement, que les coûts engagés par les agriculteurs américains ne sont pas restés statiques. Les hypothèques, les impôts et les coûts des terrains sont à la hausse. Par conséquent, les agriculteurs sont soumis aux caprices des sociétés dominantes tout en étant forcés de courir tous les risques financiers liés à la gestion de ce genre d'exploitation. Même avec leur facteur de risque élevé, ils n'ont aucune chance d'accroître leur propre rentabilité, contrairement à nos secteurs soumis à la gestion de l'offre au Canada.
Si inintéressante soit-elle, ce genre de situation ne se limite pas à l'industrie américaine de la volaille. Au contraire, c'est la règle et non l'exception dans presque tous les secteurs de l'industrie agricole américaine. Dans le secteur du mouton, les quatre principaux éleveurs nationaux contrôlent près de 70 p. 100 de la production. IBP, ConAgra, Cargill et Beef America dominent pas moins de 78 p. 100 de tout le secteur du boeuf américain. Aux États-Unis, 20 parcs d'engraissement commercialisent plus de la moitié du boeuf engraissé. Dans le secteur de la dinde, les quatre grands américains, Rocco Turkeys, Hormel, Carolina Turkeys et ConAgra représentent 35 p. 100 du secteur, et je pourrais citer d'autres chiffres.
En tant qu'habitant d'une région rurale canadienne, je trouve effrayant que nous pourrions nous diriger dans la même direction, mais telle est la réalité à laquelle nous sommes confrontés. Bref, si nous n'agissons pas immédiatement, nos petits et moyens producteurs disparaîtront. Une fois qu'ils seront écartés, leurs gros concurrents entreront en jeu et envahiront tout le secteur. Le Canada rural deviendra un peu plus qu'une succursale des sociétés américaines.
Je demanderais simplement à tous nos collègues d'être conscients de la gravité de la situation. Les paroles ne valent rien, et le porc, encore moins. Dans un monde où les intrants sont élevés, où les conditions de croissance sont imprévisibles, où l'on doit composer avec des choses comme El Nino, les impôts et la crise asiatique, la marge de profit des agriculteurs se rétrécit à vue d'oeil.
La vraie question est la suivante: faut-il se demander aujourd'hui ce qu'on veut comme agriculture canadienne dans le prochain millénaire? Nous avons la réputation d'offrir des produits de qualité. On peut dire qu'en dépit de la nouvelle intégration de haute technologie et des pressions massives qui s'exercent sur eux, les agriculteurs canadiens sont considérés dans le monde entier comme étant les meilleurs et les plus brillants. Notre engagement envers l'excellence est ferme, mais de l'aide est nécessaire pour que nous puissions maintenir notre réputation d'excellence.
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, le débat de ce soir est important et je félicite le député de South Shore de l'avoir proposé.
Comme les députés le savent, tous les jours les manchettes des journaux et les grands titres des informations nous rappellent que les revenus agricoles sont en chute libre. Les exploitations familiales sont menacées. Toute approche raisonnable exige que l'on examine les raisons de cette crise, car il n'y a pas d'agriculteur qui désire vivre de subventions, et les contribuables s'opposent en général à des opérations de sauvetage coûteuses qui ne servent qu'à neutraliser les informations alarmistes.
Le problème est de nature internationale et nous devons donc examiner la situation d'ensemble. Pour moi, un céréaliculteur de Saskatchewan est aussi important qu'un éleveur de porcs de Lambton—Kent—Middlesex, en Ontario. Je suis persuadée que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, en collaboration avec ses homologues provinciaux et les producteurs, saura parvenir à une solution équitable qui satisfasse le secteur et les contribuables canadiens.
Comme je l'ai mentionné à la Chambre cet après-midi, les producteurs de porcs, par exemple, vendent leurs porcs moitié moins chers qu'ils ne coûtent à produire. Il y a actuellement une forte surproduction. Du fait d'une augmentation de production de 15 p. 100 ces deux dernières années, d'une baisse de la demande et de subventions étrangères qui perturbent les marchés, la crise des revenus agricoles est un problème complexe sans solution évidente.
On parle d'une combinaison de programmes incluant notamment le système existant, à savoir le filet de sécurité. Les agriculteurs ont certainement exprimé très clairement leur désir de voir un programme national d'aide en cas de catastrophe. Dans les situations très graves, ce programme assurerait une aide aux agriculteurs lorsque les programmes de soutien du revenu existants ne sont pas suffisants. Les prix des céréales et du porc n'ont jamais été aussi bas ou presque. Le revenu agricole a aussi diminué pour beaucoup d'autres producteurs également. Même si l'effet n'est pas visible dans les estimations provinciales du revenu agricole total pour les provinces où le secteur agricole est diversifié comme l'Ontario, les dommages sont tout aussi grands pour les agriculteurs touchés en Ontario que pour ceux de n'importe quelle autre province.
Le comté de Middlesex, dans ma circonscription, produit plus de denrées agricoles que la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard. C'est un secteur d'activité important. Ma circonscription à elle seule produit près d'un demi-million de porcs par année. L'industrie du porc rapporte 4,51 milliards de dollars à la seule économie de l'Ontario.
Le programme proposé d'aide en cas de catastrophe devrait être très efficace pour de nombreux éleveurs de porcs de l'Ontario s'il pouvait être mis en oeuvre rapidement. À 56 cents le kilogramme, les éleveurs de porcs perdent entre 55 $ et 60 $ pour chaque bête qu'ils envoient au marché. Un éleveur qui a 300 truies perd actuellement 1 000 $ par jour. Pour trouver des prix aussi bas, il faut remonter jusqu'en 1972, mais ce n'est même pas là une comparaison réelle à cause de l'inflation. En 1972, une camionnette coûtait 5 000 $. Aujourd'hui, elle peut coûter 25 000 $.
Il y a plusieurs années, les économistes agricoles avaient prédit que le marché asiatique serait un excellent débouché pour le porc de l'Ontario. La Saskatchewan a même versé des subventions à des producteurs pour qu'ils se tournent vers l'élevage des porcs. Non seulement les producteurs ontariens et canadiens ont pris de l'expansion, mais les Américains aussi. Durant la troisième semaine d'octobre 1998, les producteurs de l'Ontario ont expédié 104 000 porcs, le plus grand nombre de porcs jamais vendus en une semaine. Aux États-Unis, le chiffre d'affaires hebdomadaire des producteurs de porc bat également les records. À cause de la faiblesse de la demande, les prix sont maintenant à la baisse, et il y a surcapacité. Pendant ce temps, les profits des épiceries ont augmenté de 20 p. 100 dans le cas de Loblaws, de 21 p. 100 dans celui d'Empire et de 38 p. 100 dans celui du groupe Oshawa. Il s'en trouve encore pour s'enrichir, mais ce ne sont certes pas les agriculteurs qui s'enrichissent.
Certains agriculteurs m'ont dit que leurs CRSN étaient vides, et leurs REER aussi.
Je vous signale qu'il y a également des gens qui m'ont fait valoir que l'industrie du porc avait pris de l'expansion et qu'il y a des entrepreneurs qui continuent d'agrandir leurs porcheries. Pourquoi leur venir en aide, s'il n'y a pas de débouché pour leur produit?
Un producteur de culture commerciale de ma circonscription m'a fait parvenir aujourd'hui un message électronique dans lequel il disait ceci:«Je n'en reviens pas. L'industrie nord-américaine du porc, est une grosse industrie. C'est une industrie efficace qui a déjà été rentable. Mais à la première difficulté qui surgit sur le marché, on fait appel à l'argent des contribuables. Je suis de tout coeur en faveur de notre secteur agricole, mais il s'impose que nous, producteurs agricoles, réévaluions notre position. Lorsque le cours du maïs est bas et que les champs de nos voisins américains en sont pleins, il vaut parfois mieux que les producteurs canadiens sortent leurs machines et plantent quelques acres de plus de haricots. L'aide gouvernementale sera-t-elle suffisante? Ce n'est pas ce programme d'aide qui va rendre nos producteurs de porc concurrentiels à l'échelle mondiale.»
La situation est très différente en ce qui concerne les céréales et les oléagineux. Dans ce cas-là, le problème commercial est attribuable aux énormes subventions américaines et européennes, qui risquent fort de faire baisser les prix sur de plus longues périodes.
Un programme d'aide d'urgence comme celui que propose la Fédération canadienne d'agriculture permettrait d'accorder une aide correspondant à 70 p. 100 de la moyenne des trois dernières années. Les producteurs de céréales ne bénéficieraient ainsi que d'une aide à court terme. On utilise une moyenne de 15 années dans le cas du régime d'assurance-revenu brut.
Les anciens programmes de stabilisation concernant le grain, qui assuraient un soutien à 100 p. 100 dans les provinces des Prairies et à 90 p. 100 dans le reste du pays, ont été supprimés en 1991, parce que la période d'établissement de la moyenne de cinq ans était trop courte lorsque les prix du grain sont maintenus bas pendant plusieurs années consécutives à cause des subventions accordées à l'étranger. C'est incontestablement une situation difficile, pour laquelle il n'y a pas de réponse facile. Cela dit, j'ai confiance que le ministre et ses fonctionnaires sauront adopter une approche sensée face à cette question.
Il faut aussi regarder ce qui se passe au delà de nos frontières. Comme les députés le savent, il a fallu 45 ans avant que l'agriculture ne fasse officiellement partie de l'accord de l'OMC. Mais même avec un pied dans la porte, il reste encore beaucoup à faire. Il existe encore un grand nombre de barrières tarifaires importantes. Les modalités visant à assurer l'exécution des ententes sont très floues et il n'est pas rare que l'on revienne sur des engagements.
Le GATT a fait l'objet d'une refonte. Le nombre de ses membres est maintenant plus élevé et continue d'augmenter. Parce qu'il est un exportateur efficace et rentable, notre pays a tout intérêt à ce que s'effectue une réforme des barrières commerciales qui touchent le secteur de l'agriculture. Il est tout aussi vrai que les pays qui protègent leurs producteurs agricoles inefficaces ont intérêt à maintenir les barrières commerciales. Les États-Unis et l'Union européenne en particulier défendent leurs subventions, alors qu'en réalité ils nuisent autant à leurs producteurs qu'aux nôtres.
Si nous comprenons les raisons de cette contradiction, nous aurons fait un grand pas pour régler un bon nombre des difficultés liées au commerce international. Nous devons élaborer une série de mesures qui mèneront à des ententes commerciales plus libérales pour l'agriculture, dans les années qui viennent. Ce n'est qu'alors qu'on peut éviter le marché faussé actuel.
Nous devons trouver des réponses, car elles serviront de base à l'établissement de nouvelles règles pour le commerce mondial dans le domaine de l'agriculture et à un avenir plus prospère pour tous les agriculteurs que nous représentons.
En 1941, la Charte de l'Atlantique, qui est devenue la base du GATT, a précisé que son objectif était, après la guerre, «d'ouvrir également à tous les États, grands ou petits, vainqueurs ou vaincus, l'accès aux matières premières du monde et aux transactions commerciales qui sont nécessaires à leur prospérité économique.»
De nos jours, cela semble toujours être un très grand objectif. À l'instar de tous les agriculteurs, les agriculteurs canadiens comprennent qu'ils doivent nourrir le monde et garantir un approvisionnement sûr à l'avenir en denrées alimentaires. Ce faisant, il nous incombe de soutenir nos agriculteurs pour leur permettre de traverser cette période difficile et non de les abandonner.
Le défi pour le Canada et d'autres pays au cours des 52 prochaines années est tout simplement de savoir comment nous allons nourrir un monde de 10 milliards d'habitants, la population estimée d'ici l'an 2050. Cela veut dire que nous devrons produire deux fois plus de denrées qu'à l'heure actuelle. Même dans les 25 à 30 prochaines années, le monde devra produire 300 millions de tonnes de plus de blé, 260 millions de tonnes de plus de maïs, et 16 millions de tonnes de plus de poisson.
Les agriculteurs comprennent que c'est un objectif réalisable, si on leur verse un prix raisonnable et équitable pour leurs efforts. Les gens qui se nourrissent de ces denrées doivent comprendre cela également.
La libéralisation des échanges est la clé d'un système mondial de commerce des denrées efficace et abordable. Des subventions déloyales de la part des États-Unis et de l'Europe perturbent le marché. Nous devons tous nous engager à réduire les subventions commerciales et le reste du monde, s'il veut être nourri, devra tôt ou tard le comprendre.
Sur le marché mondial, il est très difficile de concurrencer les États-Unis, l'Europe et le Japon notamment, mais le Canada y réussit bien. Nous faisons maintenant face à un obstacle alors que certains prix atteignent des niveaux jamais vus depuis la crise des années 30. Beaucoup affirment que c'est un ralentissement de l'activité économique bien spécial qui exige un effort collectif national.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, je voudrais moi aussi dire quelques mots au sujet de la crise qui frappe l'agriculture au Canada et qui a des effets plus graves dans ma province, la Saskatchewan, que n'importe où ailleurs au pays.
Le revenu agricole en Saskatchewan a baissé de 70 p. 100 à 80 p. 100. Sauf erreur, le revenu agricole net des producteurs de grain a baissé d'environ 300 millions de dollars. La Saskatchewan subit une très grave crise qui exige que nous prenions des mesures immédiates et à long terme. C'est ce qui explique la grande importance du débat de ce soir.
Ces derniers mois, beaucoup d'agriculteurs de ma circonscription m'ont parlé. Le territoire de ma circonscription se trouve à peu près pour moitié dans la ville de Regina et pour l'autre moitié à l'extérieur. Ma circonscription compte environ 1 500 fermes familiales.
Nous avons reçu de nombreux appels et lettres de ces personnes, qui nous disaient qu'elles se trouvent dans une situation très difficile. La majeure partie des problèmes qui se produisent actuellement ne sont pas le fait des agriculteurs. La situation très difficile qu'ils vivent a deux causes. Elle est principalement attribuable à la guerre commerciale et à la guerre des subventions que se livrent l'Europe et les États-Unis.
Pour bien faire comprendre aux députés ce que je veux dire, les agriculteurs américains sont cinq fois plus subventionnés que les agriculteurs canadiens. Cet automne seulement, le Congrès américain a adopté un projet de loi prévoyant une aide supplémentaire de 6 milliards de dollars pour les agriculteurs américains. En tout, ces derniers ont reçu 22 milliards de dollars en subventions, cinq fois plus que l'aide accordée aux agriculteurs canadiens.
Les agriculteurs de l'Union européenne sont subventionnés à raison de 205 $ la tonne. Voilà pour les subventions en Europe. Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que les cours du grain, si on ne tient pas compte de la subvention, soit très bas. En fait, ils sont inférieurs au coût de production. C'est précisément pour cette raison que tant d'agriculteurs sont mal en point.
À Balcarres, dans ma circonscription, il y a un dénommé Lloyd Pletz. Il a affirmé dans les médias qu'il serait ruiné au printemps, que sa situation était désespérée. Il a raconté une anecdote à la conférence de presse du 16 octobre que j'avais organisée en compagnie du député de Palliser. Il a parlé des agriculteurs de son voisinage qui déclaraient faillite. Il leur faudrait vendre leurs fermes et abandonner l'agriculture si personne ne leur venait en aide. Il a également parlé du stress des agriculteurs et des difficultés au sein des familles.
Mme Elder tient une tribune téléphonique à l'intention des agriculteurs désespérés. Elle a dit que sa ligne n'a jamais été aussi occupée que cet automne. Partout, ce ne sont que mariages rompus, difficultés financières, stress au sein de la famille, maladies, et j'en passe.
Nous sommes confrontés à une crise bien réelle. Cette crise, ce n'est pas nous les Canadiens qui l'avons provoquée. La question est de savoir comment nous allons nous en sortir. Trois mesures s'imposent. La première, nous sommes à l'instaurer: à court terme, une aide financière d'urgence pour les agriculteurs. Je parle surtout des céréaliers, des producteurs de grain et de blé, mais je n'oublie pas les producteurs de porc.
Leur problème est quelque peu différent. La baisse sensible des cours du porc s'explique principalement par la situation en Asie, et plus précisément par la perte de ce marché par suite de l'effondrement des devises et des économies asiatiques. Ce marché est fermé pour l'instant. Il est à espérer que les choses s'amélioreront bientôt de ce côté-là. De faibles signes de rétablissement économique se profilent à l'horizon dans cette partie du monde.
Nous avons besoin d'une aide d'urgence pour les agriculteurs, afin de garantir que leur entreprise survive et qu'ils puissent semer le printemps prochain. Nous pouvons nous payer cela en tant que pays. Nous ne pouvons pas nous en passer en tant que pays.
Le ministre des Finances a annoncé, il y a quelques semaines, que notre excédent atteignait 10,5 milliards de dollars pour les six premiers mois de l'année en cours. Il devrait aussi annoncer très rapidement que plusieurs centaines de millions de dollars seront versés d'ici le printemps en secours d'urgence aux agriculteurs. Cela permettrait non seulement de garder les agriculteurs sur leurs terres, ce qui est important, mais cela fournirait aussi des emplois dans l'économie canadienne et des retombées pour les habitants des petites villes et des villages des quatre coins du pays.
Des secours d'urgence de plusieurs centaines de millions de dollars sont nécessaires pour garder les agriculteurs sur leurs terres. Nous avons actuellement un excédent de quelque 10 milliards de dollars. Ce chiffre atteindra peut-être même 15 à 25 milliards d'ici à la fin de l'année, qui sait? Nous pouvons certes fournir 700 ou 800 millions de dollars à des agriculteurs d'ici à la saison des semences, au printemps.
C'est essentiellement la demande que je voulais faire ce soir. Nous devrions procéder ainsi et annoncer un programme d'aide avant Noël afin que les agriculteurs, leurs banques et les coopératives de crédit qui financent les prêts agricoles sachent longtemps d'avance qu'un paiement s'en vient. Les agriculteurs pourront alors se permettre de faire les semences au printemps, ce qui est extrêmement important.
Nous avons aussi besoin d'une politique agricole à long terme, d'un programme qui nous permettrait de réagir à ce genre de crise. Je sais qu'on en discute au Comité de l'agriculture et dans d'autres assemblées un peu partout au pays. Cela devrait être un programme fondé sur les coûts de production, de telle manière que si le coût de production chute radicalement et abruptement comme c'est le cas maintenant, le programme assurerait automatiquement à l'agriculteur un soutien financier le ramenant au seuil de rentabilité.
C'est ce dont nous avons besoin en fait de programme de soutien agricole à long terme afin qu'il y ait quelque chose de prévu. Ce serait un peu comme l'ancienne assurance-chômage pour les travailleurs. En temps de crise, les travailleurs pouvaient compter là-dessus. Si une personne perdait son emploi, il y avait quelque chose de prévu. Nous avons aussi besoin d'un tel programme à long terme dans le secteur de l'agriculture.
Je veux aussi parler ce soir de toute la question des guerres commerciales. Je sais que le gouvernement s'est exprimé à ce sujet. Je sais que le ministre des Affaires étrangères et le ministre de l'Agriculture sont en route pour Washington aujourd'hui et demain. Cependant, je pense que nous devons nous montrer très agressifs sur la scène internationale, à l'OMC, au GATT, en Europe et au Conseil de l'Europe, nous devons dénoncer ces subventions qui tuent les agriculteurs de ce pays. Nous devons le faire et je sais que le gouvernement le fait.
Tous les partis à la Chambre devraient s'exprimer très clairement. Les ministres devraient se faire aussi souvent que possible les porte-parole des agriculteurs de ce pays. C'est extrêmement important.
Ce qui arrive aujourd'hui n'est pas la faute des agriculteurs. C'est la faute de l'Europe et de Washington qui subventionnent à tel point leurs agriculteurs que les nôtres doivent abandonner. Il existe une crise que vous ne pouvez imaginer si vous n'êtes jamais allé dans les Prairies. C'est la crise la plus grave à laquelle ont été confrontés les agriculteurs de ma province depuis la grande dépression des années 30. Je l'affirme sans exagération.
Cela a des retombées terribles sur l'ensemble de l'économie, sur les petites villes, sur toutes les villes dans tout le pays. Quand les agriculteurs perdent leur travail ou qu'ils sont dans une telle situation financière qu'ils ne peuvent plus dépenser d'argent, tout le monde s'en ressent.
Pourquoi ne pas adresser ensemble un message très clair au ministre des Finances et au Conseil du trésor afin qu'une partie de l'excédent budgétaire prévu cette année serve à verser une aide d'urgence aux agriculteurs de ce pays?
Des voix: Bravo!
L'hon. Lorne Nystrom: J'entends des bravos du côté libéral, et j'en suis heureux. Je serais même plus heureux si on pouvait s'entendre ici à la Chambre pour envoyer un message, sous forme de vote unanime, au ministre et à ses collègues ministériels. À l'issue de ce débat, nous devrions peut-être envisager une entente de tous les partis. Cela serait peut-être un geste utile. Je viens tout juste d'y penser.
La partisanerie ne devrait plus exister dans de telles circonstances. Les partis ne voient pas toujours les choses du même oeil, mais cette crise nécessite la collaboration de tous les Canadiens. Comme nous l'avons fait pour les inondations du Saguenay et de la rivière Rouge et pour la tempête de verglas, nous devons venir en aide à nos concitoyens touchés par cette crise, et ce, dès maintenant.
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir le privilège de prendre la parole, mais je suis triste de devoir parler ici de cette crise de proportions bibliques qui frappe nos agriculteurs, pas seulement dans l'ouest ou le centre du Canada, mais aussi dans les provinces atlantiques.
Je suis porte-parole en matière de pêches et d'océans et certains se demanderont peut-être pourquoi j'interviens pour parler de la crise agricole. Je peux dire, pour l'avoir vécue, que la crise qu'a connue la population de Terre-Neuve, de Nouvelle-Écosse et d'ailleurs dans les provinces atlantiques est exactement la même que celle que vit aujourd'hui la population agricole de l'ouest et du centre du Canada. Nos agriculteurs vivent exactement la même crise.
Les agriculteurs sont d'excellentes personnes. Je ne parle pas seulement de leur travail de la terre, mais du fait qu'ils risquent aussi leur vie tous les jours, car l'agriculture est une des professions les plus difficiles. Les agriculteurs méritent notre aide et en ont besoin maintenant.
Durant les 10 minutes qui me sont allouées, je vais vous lire une lettre du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire de la Saskatchewan, une lettre qu'il a envoyée à tous les députés à la Chambre des communes. Comme il ne peut pas la lire ici lui-même, je voudrais la lire en son nom, car elle expose parfaitement le problème.
À la Chambre des communes,
C'est avec regret que je dois me résoudre à vous écrire pour vous informer des graves problèmes auxquels doivent faire face les agriculteurs de la Saskatchewan.
Je dois dire pour commencer que les agriculteurs de cette province sont parmi les plus productifs du monde. Ils sont prêts à livrer concurrence dans le monde entier, mais dans des conditions équitables. En ce moment, les marchés mondiaux sont tout sauf équitables. Les États-Unis et l'Union européenne continuent de subventionner massivement leur production et leurs exportations. Cela a largement contribué à faire baisser les prix du grain au cours de la dernière année.
On peut se faire une idée des subventions américaines et européennes en étudiant les données de l'Organisation de coopération et de développement économiques. En ce qui concerne le blé, la subvention, mesurée en équivalence pour le producteur, était de 10 p. 100 au Canada, de 32 p. 100 aux États-Unis et de 36 p. 100 dans l'Union européenne. Par conséquent, l'agriculteur de la Saskatchewan qui produit du blé doit concurrencer des producteurs qui touchent une aide de 3,2 à 3,6 fois plus élevée.
Les répercussions de la faiblesse des prix se font sentir dans le secteur agricole et dans toute l'économie provinciale. Les revenus agricoles de 1998 devraient diminuer de 407 millions de dollars par rapport à une moyenne quinquennale. En 1999, elles devraient être de 766 millions inférieures à cette moyenne. De toute évidence, notre agriculture ne peut affronter cette situation avec ses seuls moyens.
Il y a deux problèmes à régler. Tout d'abord, on doit mettre sur pied une stratégie à long terme pour faire face aux désastres qui s'étendent sur plusieurs années. À l'été 1998, lors de la réunion annuelle des ministres fédéral et provinciaux, la Saskatchewan a demandé qu'on se penche sur la question dans le cadre des négociations d'une nouvelle entente quinquennale devant commencer en l'an 2000. Le deuxième point, plus urgent, est la nécessité d'adopter une solution à court terme au problème de liquidité auquel les producteurs de la Saskatchewan font face aujourd'hui.
Je demande votre appui à l'égard d'un programme de soutien en cas de désastre qui permettrait de protéger nos agriculteurs contre la baisse importante des revenus. Le programme devrait pouvoir compter sur des subventions du gouvernement fédéral, comme c'est le cas aux États-Unis et dans l'Union européenne. Seul le gouvernement fédéral a les moyens de financer un tel programme d'aide. La Saskatchewan est prête à aider le secteur agricole. Nous participons dans une proportion de 40 p. 100 au coût des programmes comme l'assurance-récolte et le Compte de stabilisation du revenu net. Nous finançons déjà les programmes agricoles à un niveau plus élevé que tous les autres gouvernements provinciaux par rapport à notre assiette d'imposition. En réalité, notre participation est de quatre fois plus élevée par habitant que celle du gouvernement fédéral et de la moyenne des provinces. La Saskatchewan n'a certainement pas les moyens supplémentaires pour financer ce genre de programme de soutien.
La crise actuelle du revenu agricole est du ressort du gouvernement fédéral. Le problème des revenus est dû en grande partie à l'utilisation de subventions par les autres pays et le commerce international est de compétence fédérale. Les subventions accordées à nos concurrents le sont principalement par les gouvernements des États-Unis et de l'Union européenne. Seul le gouvernement fédéral a les fonds nécessaires pour régler ce genre de problème et il a décidé d'éliminer complètement les subventions à l'exportation au Canada avant de recevoir les mêmes engagements d'autres pays lorsqu'il a aboli la subvention du Nid-de-Corbeau. Cette décision fédérale a privé les producteurs de la Saskatchewan de 320 millions de dollars par année.
Une province seule ne peut pas résoudre des problèmes d'une telle envergure. La Saskatchewan ne peut pas demander aux agriculteurs qui ont perdu près de 70 p. 100 de leur revenu net cette année et aux 40 p. 100 de résidents de la Saskatchewan dont le gagne-pain dépend indirectement de l'agriculture de la province, de payer davantage d'impôts pour résoudre un problème créé par le gouvernement fédéral.
J'ai appuyé le gouvernement fédéral lorsqu'il a décidé d'utiliser l'argent des contribuables pour venir en aide aux pêcheurs de la côte est dans le cadre d'un programme de financement provisoire sélectif. J'étais d'accord lorsque le gouvernement fédéral a accordé une aide aux victimes des inondations survenues au Manitoba; j'ai approuvé l'aide accordée à l'Ontario et au Québec après la tempête de verglas. J'espère maintenant que le gouvernement acceptera d'aider les producteurs des Prairies à traverser cette période de grandes difficultés financières, difficultés dont ils ne sont aucunement responsables.
Le gouvernement fédéral doit presser l'Union européenne et les États-Unis de mettre un terme à leurs subventions qui faussent les échanges commerciaux. Le gouvernement fédéral doit accepter de protéger l'industrie pendant cette période de baisse des revenus, si les États-Unis et l'Union européenne continuent d'accorder des subventions. J'ai besoin de votre aide pour faire en sorte que le Canada exerce le plus de pressions possible pour amener l'Union européenne et les États-Unis à réduire leur production et à mettre un terme aux subventions qui faussent les échanges.
Je suis optimiste quant à l'avenir de l'industrie agricole canadienne, mais elle a besoin d'aide pour traverser les périodes où les revenus sont faibles. Je vous demande votre appui pour obtenir la mise en place d'un programme de secours avant les semailles du printemps de 1999.
Cette lettre est signée par le ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation de la Saskatchewan, M. Eric Upshall. Il s'agit des meilleurs agriculteurs au monde. En fait, la crise actuelle est tout à fait comparable à celle qui a frappé l'industrie de la pêche sur la côte est.
En terminant, je rappelle que l'industrie porcine a traversé récemment la pire crise de son histoire. Qu'ont fait les agriculteurs? Certains d'entre eux ont donné des milliers de livres de viande de porc aux banques d'alimentation de leurs localités. Ce sont les meilleurs agriculteurs au monde mais aussi les meilleures personnes au monde.
M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Monsieur le Président, ce soir, je vais partager mon temps de parole avec ma collègue d'Etobicoke—Lakeshore. Plus tard ce soir, la Chambre entendra également mon collègue de Scarborough-Est. Il est important de noter que ces deux députés, qui viennent du plus grand centre urbain du Canada, sont aussi inquiets et anxieux au sujet des difficultés éprouvées par nos agriculteurs de nos jours que nos députés des circonscriptions rurales.
L'industrie ontarienne du porc traverse une grave période en ce qui concerne les prix par rapport aux coûts de production. Les perspectives d'avenir pour les six à dix prochains mois semblent très défavorables.
Beaucoup de nos éleveurs de porcs éprouvent des problèmes financiers. Certains font face à la faillite et à la ruine. La semaine dernière, j'ai rencontré plus de 70 représentants de l'industrie du porc des régions de Haldimand et Niagara. Je voudrais parler aux parlementaires et aux Canadiens de la crise qu'ils traversent.
La semaine dernière, le prix était de 62¢ le kilogramme. La moyenne quinquennale des prix est de 1,65 $ le kilogramme. Les porcs abattus qui sont vendus pèsent en moyenne 84 kilogrammes. Pour rentrer dans leur argent, si on inclut l'engraissement plus les coûts fixes, les éleveurs doivent obtenir environ 1,50 $ le kilogramme. À 62¢ le kilogramme, cela ne couvre même pas les coûts d'engraissement des porcs. Or, les agriculteurs doivent s'occuper du bien-être des porcs, plus couvrir les coûts fixes et variables. Les chiffres expliquent la situation.
Dans les régions de Niagara et Haldimand où ma circonscription d'Erie—Lincoln est située, les éleveurs de porcs produisent plus de 38 000 porcs par année, plus les porcelets et les truies. La production injecte plus de 4 millions de dollars directement dans l'économie de la région. La valeur ajoutée de la transformation, des transports, des emplois, etc., fait passer les avantages économiques bien au-delà des 4 millions de dollars. C'est une industrie que ma circonscription peut difficilement se permettre de perdre.
En Ontario, les éleveurs de porcs injectent directement 668 millions de dollars dans l'économie de leurs collectivités locales. Cela représente 13 p. 100 du Produit intérieur brut de l'Ontario. L'industrie porcine de l'Ontario représente au total 43 000 emplois et 4,5 milliards de dollars pour l'économie de notre province. L'industrie du porc représente un emploi sur sept dans le secteur agricole. Comme la Chambre peut le voir, le secteur du porc joue un rôle très important dans l'activité économique de l'Ontario.
Les prix déprimés actuels entraînent une énorme perte de 64 000 $ par semaine pour ma région et une perte incroyable de 8 millions de dollars pour l'économie de l'Ontario chaque semaine. Cela touche non seulement les producteurs, mais également les fournisseurs d'aliments pour animaux, les vendeurs d'équipement, les services publics, etc.
Qu'entraîne la grave chute des prix? La réponse est simple: une offre excédentaire de porcs sur le marché nord-américain. Une expansion rapide aux États-Unis et au Canada a causé un surplus de porc qui ne peut être absorbé ni sur le marché national ni sur les marchés internationaux.
En Ontario, la croissance a été somme toute assez modeste, et s'est faite à la demande des transformateurs et du gouvernement qui poussaient les producteurs à tirer profit des marchés asiatiques. Ces marchés ne se sont pas développés aussi rapidement qu'on l'espérait, en raison surtout de la crise économique qui secoue la région Asie-Pacifique, phénomène inattendu qui n'est pas de la faute des éleveurs de porcs. Heureusement, la qualité des porcs produits en Ontario reste en demande à l'étranger, mais pas dans les quantités espérées.
Les éleveurs de porcs ontariens sont concurrentiels. Ils ont les connaissances, la base génétique, l'infrastructure et les terres pour continuer à produire un produit de haute qualité apprécié dans le monde entier. Toutefois, ils ne peuvent concurrencer des produits subventionnés venant de l'extérieur de l'Ontario, que ce soit une autre province ou les États-Unis.
En Ontario, les éleveurs de porcs ne reçoivent que peu d'aide du gouvernement, voire aucune. Le Compte de stabilisation du revenu auquel contribuent les producteurs et le gouvernement ne disposent de fonds que pour couvrir les perte des producteurs moyens pendant deux à trois semaines. Dans les circonstances actuelles, c'est totalement insuffisant.
Quand j'ai rencontré les représentants de l'industrie du porc dans mon bureau de circonscription à Smithville, ils m'ont demandé de transmettre plusieurs requêtes au gouvernement fédéral.
Au niveau fédéral, les éleveurs de porcs sont représentés par le Conseil canadien du porc. Ils ont demandé que les députés fédéraux parlent à leurs collègues du Cabinet, surtout ceux qui ne viennent pas de régions rurales, afin de promouvoir l'adoption d'un programme d'aide d'urgence afin que les fonds puissent parvenir aux agriculteurs d'ici janvier 1999. C'est ce que j'ai fait.
Les producteurs de porc sont habitués à composer avec un marché cyclique. Cependant, la situation actuelle ne constitue pas un cycle normal dans l'industrie du porc. La crise a pris tout le monde par surprise et dépasse de loin le stade du désastre. Elle est devenue une catastrophe.
Je crois que le gouvernement peut et devrait venir en aide aux producteurs de porc en cette période de nécessité sans précédent. J'exhorte également les Canadiens de tout le pays à faire leur part et à incorporer davantage de porc dans leur régime alimentaire. C'est un truisme de dire que chaque élément compte.
J'ai axé mon propos sur l'industrie du porc, mais elle n'est pas la seule à être touchée. Permettez-moi de parler de la crise générale.
Aux nombreux Canadiens qui regardent peut-être ce débat important ce soir, je tiens à souligner qu'un grand nombre de liens unissent les Canadiens des régions rurales et ceux des régions urbaines et que nous serons tous touchés par les problèmes que connaît actuellement le secteur de l'agriculture.
Les agriculteurs canadiens cultivent des aliments comestibles abordables et sains, ainsi que de nombreux produits non comestibles comme l'éthanol, un carburant qui contribue à un environnement sain et durable.
Maintenant que cette combinaison de facteurs, dont les excédents de stocks de céréales et l'instabilité financière et politique en Asie, en Amérique latine et en Russie, a réduit la demande à l'égard de nos produits et fait baisser les prix à un niveau sans précédent depuis 20 ans, aujourd'hui, certains agriculteurs connaissent une crise du revenu qui risque d'être désastreuse.
Le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire est le troisième employeur en importance au Canada. Outre les agriculteurs, il regroupe les fournisseurs, les responsables de la transformation, les transporteurs, les épiciers et les travailleurs de restaurant. L'industrie de l'agriculture et de l'agroalimentaire génère un chiffre d'affaires d'environ 95 milliards de dollars par an aux chapitres des ventes au détail et des services. Les céréales et les oléagineux comptent parmi nos principales exportations de produits agricoles. En 1996, la valeur de ces exportations, dont la moitié était destinée aux États-Unis, a atteint un chiffre record de 19,9 milliards de dollars.
Les Prairies, grenier du Canada, ont été particulièrement victimes de la chute des prix. Les céréaliculteurs, surtout ceux du Manitoba et de la Saskatchewan, sont touchés, mais les éleveurs de bétail et de porcs de l'Ontario le sont également, comme je l'ai dit plus tôt.
À l'échelle nationale, le revenu agricole devrait baisser de 20 p. 100 par rapport à 1997. Les agriculteurs du Manitoba s'attendent à une baisse de 40 p. 100 par rapport à la moyenne de cinq ans. En Saskatchewan, le revenu devrait se situer à presque 70 p. 100 sous la moyenne de cinq ans. Comme les problèmes devraient persister au cours de 1999, la situation exige des solutions à court terme aussi bien qu'à long terme. C'est un problème national qui exige une solution nationale.
À la demande du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, les dirigeants de l'industrie et les représentants des gouvernements fédéral et provinciaux se sont rencontrés à Ottawa, le 4 novembre, pour étudier les prévisions concernant le revenu agricole et envisager des solutions.
Le gouvernement canadien est très inquiet de la situation financière des agriculteurs et se rend bien compte qu'il a un caractère urgent et important. Le problème est urgent et très grave. C'est pourquoi le revenu agricole figure actuellement au haut de la liste des priorités qu'étudie le Cabinet. Je remercie le ministre et les membres de son personnel qui nous tiennent au courant de la situation.
Je sais que le ministre discute avec les représentants de l'industrie et ses homologues provinciaux des problèmes auxquels se heurtent les producteurs canadiens. J'ai confiance que la collaboration avec tous les intéressés se poursuivra et que des solutions seront en place au plus tôt.
J'espère que le ministre comprend qu'il faut dire aux agriculteurs, avant Noël si c'est possible, s'ils peuvent compter sur une aide additionnelle et quels seront au juste les détails du programme de soutien si nécessaire.
Quand le programme sera annoncé, j'invite tous les députés à lui donner l'appui qu'il méritera. J'exhorte le gouvernement à tendre la main à nos agriculteurs, soit un groupe qui est en difficulté et qui mérite vraiment qu'on les aide.
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat sur le revenu agricole.
Le week-end dernier, les électeurs de la circonscription d'Etobicoke—Lakeshore ont suivi avec un grand intérêt les divers bulletins de nouvelles sur la grave situation à laquelle sont confrontés les agriculteurs de tout le pays.
Oui, nous constituons une circonscription urbaine. La base économique de la circonscription d'Etobicoke—Lakeshore ne comporte aucun secteur agricole. Les activités économiques sont concentrées dans le service aux secteurs manufacturiers. Néanmoins, le problème dont nous discutons nous touche tous en tant que Canadiens. La circonscription d'Etobicoke—Lakeshore compte énormément sur la constituante agricole de l'économie canadienne pour s'approvisionner en produits frais et autres produits.
Compte tenu de cette réalité, j'offre le soutien des gens d'Etobicoke—Lakeshore à tous les agriculteurs du Canada frappés par cette crise.
L'agriculture est une de ces activités qui forment le soutien de nombreuses localités. En effet, sans l'agriculture dans diverses régions du pays, de nombreuses localités cesseraient d'exister économiquement.
Les habitants d'Etobicoke—Lakeshore se soucient des moyens d'existence de ces localités. Les problèmes auxquels elles font face nous concernent tous. Les localités d'un bout à l'autre du pays font toutes partie de notre système économique. Quand un élément est touché, cela peut entraîner un détraquement de tout le système.
Il y a dans la circonscription d'Etobicoke—Lakeshore un marché de produits alimentaires qui distribue des denrées alimentaires venues de toutes les parties du pays aux diverses entreprises locales qui approvisionnent à leur tour les habitants de la circonscription. Je ne puis qu'imaginer l'impact de cette crise sur les activités à l'heure actuelle.
Je suis encouragée par les paroles que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a dites avec passion et avec conviction. La conviction avec laquelle il s'attaque à la crise du revenu agricole m'a inspirée et m'a fait comprendre qu'il collaborait avec tous les intervenants pour trouver une solution au problème. Je sais à quel point il est dévoué. Je l'ai écouté et mes électeurs l'ont écouté. Nous savons qu'il répondra à l'appel et qu'il offrira aux agriculteurs l'aide dont ils ont besoin.
Un électeur âgé de ma circonscription m'a demandé pourquoi le secteur agricole était en pleine crise. Permettez-moi de vous donner quelques éléments de réponse, tels que je les comprends.
La demande en Asie et en Russie pour certains produits agricoles clés a périclité à mesure que le pouvoir d'achat des consommateurs a diminué. On ne peut faire abstraction du rapport entre la situation financière internationale et la crise du revenu agricole au Canada. Ajoutons à cela les fluctuations cycliques du prix des céréales, du porc, des bovins et la piètre production dans certains domaines et nous nous retrouvons avec de nombreux producteurs dont le revenu est grandement réduit cette année.
Selon certains députés, la solution à ces problèmes consiste à isoler le Canada de l'économie mondiale. Cela illustre une vision simpliste du monde et un manque de compassion envers les victimes de la crise. Il ne suffit pas de se plaindre, il faut offrir des solutions, et les gens ont besoin de solutions pratiques.
On peut bien songer à protéger le Canada des marchés mondiaux, du commerce international ou de la nécessité d'exporter nos produits, mais cela n'améliorera aucunement la sécurité financière des hommes et des femmes qui travaillent dans les fermes canadiennes, pas plus que les plaintes des mécontents qui voudraient que le Canada obtienne tout ce qu'il demande, dans le cadre de négociations commerciales.
Soyons justes envers nos agriculteurs en modérant nos propos et en unissant nos efforts pour trouver des solutions pratiques à un problème compliqué. Les responsabilités qui incombent au gouvernement le force à tendre vers le pragmatisme et non les convulsions dramatiques.
Comme notre gouvernement l'a fait dans le passé, nous allons continuer à collaborer avec les agriculteurs et les gouvernements provinciaux à mettre en place des programmes équitables et accessibles à toutes les personnes dans le besoin, quelle que soit la province où elles vivent. Nous allons collaborer avec ces mêmes partenaires à établir une position forte, unie et convaincante en vue des négociations commerciales internationales.
Pour apporter des solutions à long et à court terme à cette grave situation, nous devrons compter sur la collaboration et la coopération. Nous avons la parole du ministre et je sais que ce n'est pas rien.
Les agriculteurs canadiens ont le droit de s'attendre à ce que l'on aborde le problème de cette manière. Compte tenu de la nature et de l'ampleur du problème, il n'y a pas de place pour les effets théâtraux et la technique de l'avantage. Il faut que tous les députés de tous les partis représentés à la Chambre travaillent ensemble.
En examinant cette question, j'ai découvert des choses. Les données les plus récentes sur le revenu agricole—et je signale qu'elles ont été mises au point en collaboration avec les provinces—montrent que le revenu agricole net au plan national a baissé en moyenne de 4 p. 100 au cours des cinq dernières années et de 20 p. 100 depuis 1997. Ce sont là des nouvelles vraiment terribles pour une fille de la ville.
Bien sûr, cette donnée globale cache les problèmes que nous savons. Des parties du pays souffrent plus que d'autres. Dépendant des produits, des producteurs ne sont presque pas touchés alors que d'autres sont extrêmement éprouvés.
Nous savons qu'il existe de très graves problèmes dans les secteurs du porc et des céréales. Mes collègues qui viennent de ces secteurs m'en ont parlé. Les producteurs de porc se trouvent surtout au Québec, en Ontario et au Manitoba, mais l'Île-du-Prince-Édouard a aussi une importante production porcine et a aussi été touché. La majorité des producteurs céréaliers sont en Saskatchewan, au Manitoba et en Alberta. Il y en a aussi en Ontario.
Entre-temps, il ne faut pas oublier que d'autres producteurs canadiens ont subi des pertes importantes à cause de la sécheresse et même de maladies comme la tremblante du mouton. Telle est toute la situation du revenu agricole et il faut reconnaître toutes les forces à l'oeuvre. Cela nous aidera à donner un sens aux statistiques.
Si l'on examine les problèmes à l'échelle régionale, on constate que la situation est particulièrement grave à l'Île-du-Prince-Édouard, en Saskatchewan et au Manitoba. En fait, on prévoit que le revenu agricole net en espèces baissera de 40 p. 100 cette année à l'I.-P.-É et au Manitoba, et qu'il pourrait chuter de près de 70 p. 100 en Saskatchewan, comparativement à la moyenne des cinq dernières années. Malheureusement, selon les prévisions actuelles, ceux qui éprouvent des difficultés cette année risquent peu de voir leur situation s'améliorer l'an prochain.
Je sais qu'il y a énormément de gens dans les localités d'un océan à l'autre qui sont aux prises avec des difficultés et qui se tournent vers le gouvernement du Canada pour obtenir du secours et de l'aide. Il y a aussi d'autres problèmes urgents dont le gouvernement fédéral doit s'occuper.
La politique, c'est l'art de prendre des décisions et non pas de s'affronter les uns les autres. Nous devons trouver une façon de concilier au mieux les intérêts de tout le monde. Le gouvernement ne reculera pas plus devant les problèmes liés au revenu agricole que devant tout autre défi. Nous voulons résoudre le problème sans tarder afin d'apaiser un peu un secteur qui est devenu de plus en plus désespéré ces derniers jours.
Pour aller de l'avant et non pas reculer, il faut que tous les paliers de gouvernement travaillent en partenariat. Voilà ce que nous devons faire. Les gouvernements fédéral et provinciaux ne doivent jamais entretenir de rapports antagonistes. Dans la situation actuelle, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a dit clairement qu'il veut s'employer à résoudre les problèmes avec toutes les parties concernées.
Nous devons trouver une solution avec toutes les organisations agricoles et tous les paliers de gouvernement. Il faudra travailler d'arrache-pied, conjuguer nos efforts et former des partenariats pour ce faire. C'est de cette façon que nous pourrons mettre en place des programmes efficaces.
La solution sera-t-elle éblouissante? Non. S'agira-t-il d'une panacée? Je pense que nous devons faire preuve d'humilité. Il n'y a pas de solutions instantanées, faciles ni universelles. Les solutions pratiques et efficaces n'ont pas à être éblouissantes ni miraculeuses pour produire un effet. Gouverner, c'est notamment produire un effet.
Le gouvernement du Canada s'est engagé à améliorer la question du revenu agricole. Les députés devraient tous, indépendamment de leur allégeance, conjuguer leurs efforts afin de trouver des solutions à court et à long terme pour nos agriculteurs.
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, je suis très heureux de pouvoir prendre part au débat de ce soir.
Je félicite mon collègue, le député de South Shore, d'avoir présenté la motion à l'étude. Je voudrais également féliciter mon collègue de Brandon—Souris, qui est notre porte-parole dans le domaine de l'agriculture, de l'excellent travail qu'il a fait pour attirer notre attention sur le sujet et nous faire comprendre les besoins urgents des agriculteurs canadiens.
Le débat d'aujourd'hui touche tout le Canada. Il ne s'agit pas d'une simple fluctuation du marché ou d'un fléchissement de la demande. Les problèmes de revenus agricoles sont attribuables à un véritable effondrement du marché. Nous traversons une crise.
Les députés utilisent souvent beaucoup de mots qui ne décrivent pas vraiment la situation dont ils parlent. Toutefois, la situation dans laquelle se trouvent les agriculteurs d'un océan à l'autre, que ce soit les céréaliculteurs des Prairies ou les producteurs de porc de ma région du Canada atlantique, est vraiment une crise.
Je parlerai ce soir de l'industrie du porc, qui a été dévastée par la crise du prix des produits. Des agriculteurs risquent de perdre leur entreprise. Tout récemment, Charles Keats disait qu'il risquait de perdre l'exploitation agricole que possède sa famille depuis six générations. Il s'attend à perdre 200 000 $ cette année seulement. C'est ce que lui coûte le fonctionnement de ses installations.
J'ai travaillé dans une industrie où il fallait commercialiser des produits. Je comprends que, lorsque vous devez vendre un article 130 $ uniquement pour couvrir vos frais, mais que vous ne le vendez que 82 $, il ne faut pas trop longtemps avant que votre entreprise s'en ressente.
En fait, cette situation n'a pas seulement un effet négatif sur leur entreprise, mais elle menace leur existence même.
L'élevage des porcs est une industrie importante au Nouveau-Brunswick. Cette province compte 80 grands éleveurs qui produisent plus de 200 000 porcs par année, ce qui représente 25 millions de dollars pour l'économie de la province.
Cela touche les gens de ma circonscription, Fundy—Royal. Près de la moitié des éleveurs de porcs du Nouveau-Brunswick sont dans un rayon de 30 milles de la ville de Havelock, qui est située au coeur de ma circonscription. Cette crise ne touche pas seulement les gens du secteur agricole. Une entreprise qui s'appelle Hub Meat Packers emploie 700 personnes de ma circonscription et des circonscriptions voisines, dont celle de Moncton.
Il y a quelques minutes à peine, je parlais avec mon collègue, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough. Je mentionnais quelques statistiques qui en disent long sur la situation dans cette industrie en ce qui concerne les prix. Je vais vous donner une idée de la situation.
Le prix que nos éleveurs de porcs obtiennent dans le moment est le même que celui qui avait cours en 1944. Le prix de la nourriture pour les animaux n'a pas baissé. Ce ne sont pas les prix de 1944. Et il y a d'autres intrants dont les éleveurs de porcs ont besoin pour exploiter leur entreprise qui ne sont pas aux prix de 1944.
J'ai peut-être commis une erreur en parlant de statistiques. L'enjeu ici, c'est que nous avons, d'un bout à l'autre du pays, des familles qui sont en train de perdre leur gagne-pain, de perdre leur capacité de subvenir à leurs besoins et de payer leur maison et leur voiture. Elles perdent tout espoir de pouvoir aider leurs enfants qui veulent aller à l'université ou embrasser une autre carrière.
Le revenu agricole a tout simplement fondu. Il incombe au gouvernement fédéral, de concert avec les gouvernements provinciaux, de veiller à la survie de l'agriculture canadienne. C'est une crise. Les agriculteurs ne touchent plus que 55 p. 100 de leur revenu de 1997.
Je voudrais parler, plus particulièrement, de deux programmes mis en oeuvre par le gouvernement progressiste conservateur entre 1984 et 1993. Ces deux programmes étaient le Programme de stabilisation du revenu net, le PSRN, et le Régime d'assurance-revenu brut, le RARB.
Je voudrais bien que cette crise ait montré à nos vis-à-vis que nous avons vraiment besoin d'un programme comme le RARB. Dans son programme de rationalisation, le gouvernement a choisi de conserver le PSRN, pour stabiliser les prix, mais a annulé le RARB. Le RARB était un régime d'assurance, de sorte qu'en cas de chute de prix catastrophique, le gouvernement fédéral pouvait fournir un pont à l'industrie. Le gouvernement a choisi d'abandonner ce programme.
Je vais reconnaître le mérite du gouvernement actuel. Il semble y avoir consensus chez nos collègues du Parti libéral quant à l'existence d'une crise, et je les félicite de le reconnaître. Je puis dire que les agriculteurs le savent depuis trop longtemps.
Le Cabinet libéral est sur le point d'annoncer une intervention. Cette annonce doit être monnayable. Lorsque les agriculteurs iront voir les marchands d'aliments de bétail auxquels ils doivent de l'argent ou leur institution bancaire, ceux-ci sauront qu'ils peuvent leur accorder un financement provisoire pour que leurs activités agricoles continueront d'être viables.
Il y a quelques heures seulement j'ai eu le privilège de parler à un certain nombre d'agriculteurs qui habitent ma circonscription. J'ai parlé à M. Bill Hart, de Norton, qui m'a dit que c'était grave vu qu'il se réveillait chaque matin en sachant qu'il allait perdre un millier de dollars. M. Hart n'est pas une personne riche qui a nombre de denrées commercialisables. Un millier de dollars c'est perte très personnelle pour lui et sa famille.
J'ai également eu une conversation avec M. Stephen Moffett, qui est un des plus gros producteurs de porcs de la région atlantique. Il a fait allusion à ce dont nous avons parlé, c'est-à-dire le fait que les compressions imposées dans le secteur agricole correspondaient à la réalité telle que le monde rural la connaît au Canada: le gouvernement semble toujours s'en prendre au monde rural en premier.
Le Parti progressiste conservateur est très fier de signaler que son nouveau chef national, le très honorable Joe Clark, a fait de cette question son premier cheval de bataille. Je pense que la population canadienne devrait lui être très reconnaissante d'avoir fait preuve de leadership en cette matière.
Je partage mon temps avec le député de Kings—Hants. J'ajouterai en guise de conclusion qu'il a été beaucoup question du cours des produits de base, car il touche tous les producteurs, que ce soit chez nous, dans les prairies, sur la côte atlantique ou au Québec. On s'y perd dans les chiffres, mais ceux-ci signifient qu'une industrie est complètement dévastée.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, je félicite le député de Fundy—Royal pour son discours de ce soir.
Je représente la circonscription de Kings—Hants, où se trouve la vallée de l'Annapolis, célèbre au Canada et dans le monde entier pour son agriculture. La Nouvelle-Écosse a connu les deux pires années consécutives de sécheresse en 50 ans et la vallée de l'Annapolis a beaucoup souffert des conditions météorologiques.
Cette situation a grandement affecté l'industrie agricole de notre province. À l'heure actuelle, les gouvernements fédéral et provincial se blâment mutuellement. Au moment où ils devraient prendre des mesures déterminantes et venir en aide aux agriculteurs, les gouvernements fédéral et provinciaux se font des récriminations mutuelles. La Nouvelle-Écosse blâme le gouvernement fédéral et les libéraux fédéraux blâment les libéraux de la Nouvelle-Écosse. Ce n'est pas très efficace.
À l'échelle nationale, les revenus des agriculteurs ont baissé de 55 p. 100. En 1998, les recettes agricoles dans l'Ouest canadien, par exemple, ont subi une baisse dramatique. Le député de Fundy—Royal parlait de l'industrie porcine. En Nouvelle-Écosse, cette industrie, qui représente un chiffre d'affaires de 110 millions de dollars, compte 1 500 emplois. Si nous laissions l'industrie porcine disparaître, cela représenterait une lourde perte pour la province de la Nouvelle-Écosse.
Voilà où nous en sommes. La question n'est pas de savoir si nous pouvons attendre ou si l'industrie agricole nationale peut attendre d'obtenir de l'aide. Les agriculteurs en ont besoin immédiatement. L'heure n'est pas aux tergiversations pour le gouvernement fédéral. Heureusement, le Cabinet fédéral discute actuellement d'un programme et je l'en félicite, mais nous devons le mettre en oeuvre immédiatement.
J'ai écouté avec intérêt les libéraux, ces saints patrons de l'hypocrisie, qui ont renié tous leurs engagements importants et les promesses du livre rouge, notamment leur opposition à la TPS, au libre-échange, à la déréglementation et la privatisation. Comment osent-ils accuser un autre parti d'avoir renié sa plate-forme électorale? Ils sont les inventeurs de cette expression. Le Parti réformiste est dans une boîte idéologique. Il parle de réductions d'impôt pour les agriculteurs au moment où ces derniers font face à la faillite. C'est comme jeter une ancre à un homme qui se noie. Les réformistes disent qu'il faut tordre le bras aux Américains ou aux pays membres de l'Union européenne pour les forcer à réduire leurs subventions.
Je reconnais avec le Parti réformiste qu'à long terme, ces mesures doivent être prises, mais le fait que cette situation dure depuis des décennies. Les Européens et les Américains subventionnent de façon marquée leurs produits. Cela va exiger du travail, mais cela ne va pas aider les agriculteurs qui font face à une crise maintenant.
Ils affirment être contre des renflouements. Ils auraient probablement été opposés au «New Deal» de Roosevelt. Le fait est que les agriculteurs ont besoin d'aide maintenant. Alors que les libéraux tergiversent et les réformistes pontifient sur Adam Smith, les agriculteurs ont besoin d'aide.
La capacité d'une nation de produire des denrées est fondamentale. En toute franchise, les programmes actuels de soutien du revenu ne répondent pas aux besoins. Il faut agir de façon décidée. L'heure n'est pas aux guerres idéologiques. Les agriculteurs ont besoin d'aide.
Le député de Fundy—Royal a parlé du RARB que les libéraux ont éliminé. Au niveau national, si on examine certains des programmes du passé, en fin de compte, si nous n'avons pas les programmes durables à long terme pour veiller à ce qu'il y ait des fonds et des programmes disponibles pour les agriculteurs faisant face à une crise, nous serons toujours confrontés à ce type de situation et nous devrons sans cesse régler des crises.
C'est une crise sans précédent dans l'histoire récente. Nous en sommes conscients. Nous exhortons les libéraux à agir rapidement. Ce n'est pas une question qui doit faire l'objet de luttes idéologiques. Il est temps pour nous de faire ce qui s'impose et d'aider les agriculteurs.
Dans la vallée de l'Annapolis, les agriculteurs font faillite à un rythme sans précédent. Toutes les semaines, nous recevons des appels à notre bureau de comté et entendons des histoires absolument déchirantes au sujet d'exploitations agricoles familiales qui sont aux mains de la même famille depuis des générations. Des exploitations laitières qui ont vu défiler sept ou huit générations font face à une catastrophe à cause de la situation actuelle.
L'industrie du porc est en chute libre. L'industrie de la pomme dans la vallée de l'Annapolis doit relever des défis importants. Nous avons besoin d'un programme global. Nous devons adopter une politique étrangère visant à nous attaquer sur la scène mondiale à la question des subventions. Nous devons nous pencher sur nos politiques fiscales au Canada et veiller à ce que les agriculteurs et tous les gens d'affaires ne souffrent pas d'un fardeau fiscal beaucoup trop lourd. Cependant, à court terme, nous devons faire ce qui s'impose. Il faut faire ce qui est important, aider les agriculteurs qui doivent traverser une crise à l'heure actuelle.
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai le temps qui m'est alloué avec le député de Dufferin—Peel—Wellington—Grey, aussi connu sous le nom de ministre des plumes. Tout ce que l'on veut savoir sur les plumes, c'est à lui qu'il faut le demander.
Je suis seulement le deuxième député d'une circonscription urbaine à prendre la parole au cours de ce débat. J'aimerais répondre tout de suite au commentaire formulé par un des députés d'en face qui se demandait ce qu'un député d'une circonscription urbaine pouvait bien avoir à dire dans un débat sur l'agriculture.
La dernière ferme est disparue de la région de Scarborough il y a environ une génération et demie. C'était probablement celle de mon père. Ma famille produisait autrefois des porcs et nous avons par la suite converti notre ferme à la culture maraîchère. Je me souviens très clairement d'avoir repiqué de la rhubarbe en novembre.
C'était épouvantable. Ca ne prenait pas très longtemps pour comprendre qu'il devait sûrement y avoir une autre façon de gagner sa vie. L'attrait du nouveau ne subsiste pas longtemps.
Je fais en fait partie de la première génération de ceux qui ne possèdent pas de terre et qui ne gagnent pas leur vie sur la terre. Je dois d'ailleurs décider d'ici la fin de l'année de la vente de la ferme familiale.
Je peux vous dire clairement que les gens de Scarborough-Est ne sont pas opposés à payer un prix raisonnable pour acheter leur nourriture des agriculteurs canadiens. C'est en quelque sorte la question qui se pose. Bien que je parle à titre de député d'une région urbaine et d'ancien agriculteur, je voudrais me pencher sur la question de savoir s'il s'agit d'une crise ou bien d'une catastrophe comme l'ont répétés les députés qui m'ont précédé.
Je signale l'aperçu des prévisions revenu agricole publié le 30 octobre par le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. En consultant les chiffres de certaines provinces on peut se demander où est la crise. Les revenus en espèces pour 1998 de l'Ontario s'élèveront à 6,7 milliards de dollars, soit environ 400 millions de mieux que dans les prévisions des cinq années précédentes. En 1998, les revenus seront supérieurs à ceux des années précédentes. Cette année, ils s'établiront à 625 millions de dollars. Le revenu net s'élèvera à 674 millions de dollars, ce qui est sensiblement supérieur aux 540 millions réalisés en moyenne au cours des quatre années précédentes.
Les chiffres cachent des problèmes sectoriels, notamment dans le secteur de la production du porc. On constate effectivement que les chiffres devraient avoir décliné de quelque 270 millions de dollars en un an. C'est concentré dans un seul secteur. Je crois que c'est là que se trouve la crise.
Plus on se déplace vers l'ouest, plus la crise s'aggrave. Au Manitoba, le revenu net au cours des quatre dernières années était de 287 millions de dollars. Cette année, il sera de 143 millions, et il passera ensuite à 134 millions. Il s'agit d'une chute de 40 p. 100 par rapport aux moyennes de l'année précédente. En Saskatchewan, les chiffres sont alarmants. Le revenu net moyen de 1993 à 1997 était de 715 millions de dollars. L'an prochain, il sera de 72 millions, estime-t-on. La chute est de l'ordre de 70 p. 100 par rapport à la moyenne des cinq années précédentes. Il est clair qu'il y a une crise. La situation est très pénible pour les agriculteurs individuels.
Les chiffres ne mentent pas, dans le cas présent. Il y a eu une sérieuse détérioration dans les trois provinces de la Saskatchewan, du Manitoba et de l'Île-du-Prince-Édouard. Elle touche directement deux secteurs, celui du grain et celui du porc.
La question est de savoir si le gouvernement devrait paniquer. Les agriculteurs du Manitoba et de la Saskatchewan en particulier ont de sérieux problèmes. Le secteur du grain et celui du porc sont gravement touchés. Cela va avoir des retombées sur d'autres régions et d'autres secteurs. Aux États-Unis, des groupes d'autodéfense ont décidé de faire la loi et de bloquer l'accès aux marchés. Le gouvernement devrait-il cependant paniquer comme les députés d'en face le suggèrent?
Apparemment la solution du Parti réformiste qui consiste à réduire les impôts va apaiser tous les problèmes. C'est une panacée. Réduire les impôts n'est guère utile pour un agriculteur qui n'a pas de revenu. Dans les circonstances, c'est une solution qui n'a aucun sens.
Pour sa part, le NPD a comparé cette crise à ce qui s'est produit dans les années 30. À mon avis, il s'agit là d'une hyperbole dont il ne faut pas tenir compte. La solution du NPD est d'examiner les programmes nationaux et les subventions. Cependant, si nous regardons les subventions de plus près, ce n'est pas vraiment la solution. Si mon interprétation est bonne, les mesures équivalentes à des subventions mises en place par le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire font ressortir que c'est dans le secteur du porc, que nous subventionnons le plus, que le problème est le plus grave.
Toutefois, si nous prenons le secteur du blé, qui est celui que le Canada subventionne le moins après l'Australie, il y aussi des problèmes. La même chose dans le cas du maïs, un secteur que nous ne subventionnons guère. Nous subventionnons très peu la culture de l'orge et, pourtant, nous avons toujours des problèmes dans ces secteurs.
Les statistiques nous montrent bien que, même lorsque nous accordons de fortes subventions, elles n'ont aucune incidence sur la prospérité ou l'absence de prospérité des agriculteurs. Il ne faudrait pas encourager le gouvernement à subventionner ces secteurs.
Le gouvernement a réagi de façon mesurée à ce problème. À mon avis, c'est la bonne voie à suivre. Sa première réaction a été de mettre en oeuvre le programme CSRN, un simple compte de prévoyance auquel les agriculteurs ont le droit de contribuer au cours des bonnes années et auquel le gouvernement ajoute une contribution. Il est temps de puiser dans ce compte, et nous avons entendu le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire laisser entendre qu'il sera plus facile de le faire dans cette situation.
Le deuxième secteur est l'assurance-récolte, également un programme volontaire. Elle offre une protection contre le risque aux producteurs agricoles qui paient le tiers du coût du programme. On estime que des paiements directs de 430 millions de dollars seront versés aux agriculteurs cette année.
Il y a certains autres programmes que le gouvernement met en place de concert avec le gouvernement provincial. Inutile de les mentionner de nouveau.
Le ministre s'est réuni avec des représentants des institutions financières pour leur demander d'assouplir leurs conditions et d'élaborer des programmes cohérents pour gérer la dette agricole.
Voilà toutes des réactions mesurées et appropriées à une question sérieuse. Je suis donc d'avis que le gouvernement du Canada s'est montré préoccupé par la situation financière du secteur agricole et se rend compte de son urgence et de son importance. C'est pourquoi le revenu agricole est une des priorités qu'examinent actuellement les ministres. Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a tenu ses collègues et le gouvernement informés de la situation et nous fait entrevoir une solution raisonnée et mesurée.
Il n'y a pas lieu de paniquer, de crier au désastre, d'employer des hyperboles. Il n'y a pas lieu de dire que nous allons revivre la crise des années 30. Il faut plutôt parler d'une réaction mesurée et raisonnable.
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de Scarborough-Est de partager son temps de parole avec moi et je félicite le député de South Shore d'avoir proposé ce débat d'urgence ce soir.
Je suis dans l'agriculture depuis 1974. De 1974 à 1985, j'ai été éleveur de porcs. Nous avions une entreprise de naissage-finition de 80 à 90 truies, et je me souviens d'avoir traversé une crise agricole à la fin des années 70 et au début des années 80. Je n'ai pas oublié la douleur, l'humiliation, l'embarras. Certains en perdaient même le goût de vivre. C'est une expérience très triste. Je ne l'oublierai jamais, et je ne veux pas non plus que nous la vivions de nouveau. Mais je crois que nous sommes au bord de la crise.
C'est l'une des raisons pour lesquelles le gouvernement fait de son mieux, et le plus rapidement possible, pour trouver une solution.
Le Globe and Mail, sous la rubrique des informations nationales, finit par s'intéresser à la situation et écrit: «La crise agricole va empirer», puis il cite des données de Statistique Canada. Je vais lire un passage, car c'est plutôt effrayant.
En 1997, le revenu agricole net a été d'un peu plus de 2 milliards de dollars, soit 53,4 p. 100 de moins que les 4,3 milliards de 1996. On ne connaît pas encore les résultats de cette année. Selon les données de Statistique Canada, les récoltes de blé ont diminué de 43,3 p. 100 au troisième trimestre de cette année. Les recettes ont été coupées de près de moitié, soit de 45,5 p. 100. Dans le cas de l'orge, elles ont chuté de 48,8 p. 100. Pour ce qui est du porc, la baisse enregistrée a été de 26,1 p. 100. Il convient aussi de noter que le prix initial, au printemps, de la Commission canadienne du blé était de 130 $ la tonne, ce qui correspond à une diminution de 24,4 p. 100 par rapport à l'année précédente.
Lorsque nous en sommes arrivés à la onzième heure des négociations en 1993 et que l'accord commercial fut signé, on croyait que des prix peu élevés allaient mettre fin aux prix peu élevés. Si c'est le cas, comment se fait-il que les prix actuels soient peu élevés? De toute évidence, un producteur ne peut produire quelque chose pour rien pendant très longtemps avant d'être financièrement à sec. J'ai vu un bon nombre d'agriculteurs à la fin des années 1970 et au début des années 1980 qui ont connu ce sort.
Je faisais partie de la Société du crédit agricole et les emprunts contractés pour ma ferme l'avaient été à un taux d'intérêt fixe de 12,5 p. 100. J'ai vu les taux d'intérêt grimper à 22 p. 100. C'est à ce moment que nous avons connu les actions cotées en cents. Nous avons vu des shérifs s'amener sur des fermes et sceller la porte. Essentiellement, les gens devaient partir avec ce qu'ils avaient sur le dos, c'est tout. C'était une époque épouvantable.
C'est en partie à cause d'une combinaison de choses. D'abord l'instabilité financière et politique en Europe, en Amérique latine et en Russie. Cette année, par exemple, la récolte russe, qui n'est par bien brillante en moyenne, est 22 p. 100 inférieure à la normale.
Nous vivons une autre guerre commerciale. Je voudrais vous lire quelques chiffres du ministère américain de l'agriculture que j'ai glanés sur Internet. Je peux aussi vous donner des renseignements sur la situation en Europe. Aux États-Unis, la FAIR Act de 1998 cachait 6 milliards en contrats de flexibilité des produits, 1,5 milliards en paiements de réserve de conservation, 750 millions en paiements d'insolvabilité, soit un total de 8,25 milliards injectés dans l'économie agricole en vertu de cette seule loi.
En plus, sous la rubrique des paiements de soutien supplémentaires il y avait 2,8 milliards en paiements pour les pertes de marchés, 1,5 milliard pour les pertes de la saison 1998, 875 millions pour les pertes sur plusieurs années, 200 millions d'aide pour l'achat d'aliments pour le bétail, 200 millions de paiements aux producteurs laitiers, 27 millions d'indemnisation pour d'autres catastrophes, soit un total de 5,975 milliards. C'est ce que l'on appelle l'ensemble de six milliards d'aide.
Il y a aussi 1 milliard de taxes en vertu d'une nouvelle loi pour les producteurs. Le total aux États-Unis, pour l'année 1998, est donc de 15,225 milliards. C'est une des raisons pour lesquelles la production a augmenté et les prix ont baissé. Ce sont les subventions, des subventions que les États-Unis avaient promis d'éliminer. De toute évidence, ils ne l'ont pas fait.
Regardons maintenant la situation en Europe. Les subventions à l'exportation, au 19 novembre 1998, sont de 47 $CDN pour le blé.
Il y a une subvention de 105 $ la tonne d'orge et une subvention de 138 $ la tonne de malt.
Une voix: Et la luzerne?
M. Murray Calder: Je ne sais pas. Pour le blé, l'Union européenne accorde une subvention moyenne de 116 $ la tonne ou 3,15 $ le boisseau. Les États-Unis le subventionnent à raison de 72 $ la tonne ou 1,95 $ le boisseau alors que le Canada accorde une subvention de 15 $ la tonne ou 40 cents le boisseau et l'Australie,13 $ la tonne ou 35 cents le boisseau. Là est le problème.
Les États-Unis disent qu'ils sont les champions mondiaux du libre échange et qu'ils veulent éliminer les subventions. Pour ma part, je pense que c'est de la foutaise. Nous avons besoin immédiatement de ce que nous réclamons, un programme national de secours qui entrerait en jeu pour venir en aide aux agriculteurs quand le filet de sécurité actuel serait insuffisant.
En tant qu'agriculteur, je reçois des appels des agriculteurs de ma région. J'ai parlé à des types qui étaient agriculteurs comme moi à la fin des année 70 et au début des années 80. Il n'y a pas que l'opposition qui reçoit des appels. Les ministériels aussi en reçoivent. Nous sommes parfaitement au courant de ce qui se passe.
Au cours des six dernières semaines, j'ai abordé la question à maintes reprises aux réunions du caucus national. J'en ai parlé non seulement avec le premier ministre, mais aussi avec tous les ministres présents à la réunion du caucus national qui a lieu tous les mercredis. Ils sont tous parfaitement au courant de ce qui se passe. En tant que gouvernement nous devons nous assurer que les mesures que nous prendrons, et nous allons en prendre, pour sauver nos agriculteurs, quelles qu'elles soient, soient conformes au GATT et ne déclenchent pas de mesures de rétorsion.
Du temps où j'élevais des porcs, entre la fin des années 70 et le milieu des années 80, les mesures de rétorsion étaient un arrêt de mort pour notre industrie car elles paralysaient la production. Je suis la production de près dans ce pays. Nous nous sommes tournés vers les marchés internationaux et nous avons augmenté la production de porcs de 16 à 19 millions par an, ce qui veut dire que nous devons exporter trois millions de porcs où le marché s'effondre. C'est en fait ce qui est en train de se passer.
M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je vais partager les 20 dernières minutes avec les députés de Lakeland et de Kootenay—Columbia. Je suis heureux de prendre part au débat ce soir parce qu'il revêt une grande importance pour ma circonscription, celle de Peace River, en Alberta, qui est une circonscription en grande partie agricole. Les agriculteurs de la région connaissent parfaitement les répercussions des guerres commerciales qui ont eu lieu par le passé dans le domaine agricole.
Pour aborder cette question, il faut revenir sur l'énorme guerre commerciale qui faisait rage au moment des négociations de l'Uruguay Round sur l'agriculture. L'agriculture a toujours été par le passé un secteur rebelle, non soumis à des règles commerciales. Depuis plus de 50 ans, nous avons des règles commerciales qui s'appliquent aux produits industriels et à certains services dans le monde entier. Mais l'agriculture n'a été assujettie à ces règles qu'en 1992, et encore, seule une petite partie l'a été. En arrière-plan se dessinait la grande guerre commerciale des années 80. J'ai vécu cette expérience, puisque je cultivais à cette époque. Je ne veux certainement pas y revenir et être de nouveau victime de la guerre des subventions entre Américains et Européens. Je ne veux pas, et mon fils non plus, revenir à une situation où il faut faire toutes sortes de contorsions pour être admissible aux programmes agricoles, et cultiver du blé année après année en faisant une rotation de cultures qui n'était pas utile. Ce n'était pas une bonne pratique agricole.
Nous ne voulons pas revivre cela. C'est dans ce contexte qu'ont eu lieu les négociations de l'Uruguay Round qui ont abouti à l'accord signé en 1992.
Je rappelle aux députés que ce n'était qu'un modeste départ. Tous les pays membres de l'industrie agricole reconnaissent d'ailleurs que nous devions au moins permettre un bon départ. Pour calculer les subventions, on a utilisé l'année 1986, soit une des années où les subventions agricoles ont été les plus élevées.
L'idée était de permettre un bon départ à l'agriculture, d'abaisser les tarifs, de réduire les subventions à l'exportation à des niveaux modestes et de bâtir un avenir comme celui que nous envisageons pour 1999-2000, afin de réaliser un véritable progrès. Je devrais dire qu'il est possible de comprendre pourquoi nous sommes dans cette situation aujourd'hui.
Plus de 85 p. 100 du commerce de produits agricoles n'est toujours pas assujetti à un contrôle faisant appel à des règlements. De plus, il en a résulté un revenu agricole net très stagnant. C'est le cas au Canada depuis 10 ou 12 ans. Dans l'Est asiatique, la situation est encore pire.
Voici ce qui se passe. Les agriculteurs sont en difficulté, leur revenu net a chuté et l'Europe et les États-Unis continuent de verser des subventions énormes, même s'ils respectent les limites de leur programme respectif. J'en arrive ainsi aux mesures à prendre pour corriger la situation.
Il est question d'un programme d'aide à court terme, mais ce n'est pas une solution durable pour les agriculteurs. Nous devrions collaborer comme des pays déterminés à faire avancer les négociations à l'Organisation mondiale du commerce.
Le Groupe Cairns a été très actif pour libéraliser le commerce. Je suis d'avis que nous devrions aussi nous allier aux Américains pour faire réclamer la réduction des subventions massives des Européens. Je suis d'avis que les Américains ne font que réagir aux subventions européennes, qu'ils ne veulent pas le faire eux-mêmes, mais que c'est l'Europe qui est aux prises avec un problème généralisé de subventions au commerce et à l'agriculture. Je crois que son problème s'explique par un certain nombre de raisons, dont les deux guerres mondiales au cours desquelles l'Europe a manqué de nourriture.
Cela n'excuse pas l'Union européenne de produire plus que ce dont elle a besoin. C'est ce qu'elle fait ces temps-ci. Elle surproduit. La demande mondiale de blé a baissé de 8 p. 100 l'an dernier. Qu'a fait l'Union européenne? Elle a accru sa production de 30 p. 100. Pourquoi? Parce que les agriculteurs sont lourdement subventionnés.
J'estime qu'il faut collaborer avec les États-Unis. Ce pays est un des plus grands producteurs de céréales au monde. Il est dans notre intérêt de collaborer pour essayer de convaincre l'Union européenne de réduire progressivement ses subventions au cours de la prochaine série de pourparlers de l'Organisation mondiale du commerce qui aura lieu au cours de la prochaine année.
Nous aurons peut-être à sortir du bloc agricole pour faire cela. Il faut exercer des pressions sur ces gens-là. Il faudra peut-être parler de tarifs douaniers industriels. Il faudra peut-être parler de choses comme l'OTAN, la propriété intellectuelle, les services, toutes choses que l'Union européenne voudrait probablement. Nous devons nous montrer très convaincants, car nos agriculteurs ne peuvent tout simplement pas concurrencer les Trésors étrangers. Nous pouvons concurrencer les producteurs de n'importe quel pays du monde, mais pas les Trésors des États-Unis et de l'Europe. Nous avons intérêt à essayer d'obtenir une certaine libéralisation des échanges.
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, je vais parler d'une question assez précise.
Le député de Peace River a fort bien résumé la situation commerciale, ce qui ne s'est pas produit et ce qui aurait dû arriver dans ce secteur, même si les négociateurs canadiens de l'Accord de libre-échange nord-américain et de son prédécesseur, l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, se sont très bien acquittés de leur travail de négociateurs.
Nous leur en sommes très reconnaissants. Le Canada a toutefois adopté une position très faible dans le cadre des négociations du GATT qui ont pris fin en 1992 et qui ont reçu l'aval du gouvernement en 1993. En fait, au chapitre de l'agriculture, le Canada n'a pas négocié ce qu'il aurait dû et, à cause de cela, nous avons abouti aux piètres résultats qui sont actuellement préjudiciables aux agriculteurs canadiens.
Les réformistes ont été élus à la Chambre en 1993. La campagne électorale avait débuté en 1992, l'année avant les élections. Nous avions alors proposé une politique agricole globale. Si l'on examinait aujourd'hui cette politique, on constaterait qu'elle pourrait fort bien résoudre le problème actuel des agriculteurs. Pendant cette campagne électorale, puis à la Chambre, de nombreux députés réformistes ont parlé de cette politique qui aurait pu éviter la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui.
Je ne parle pas des difficiles négociations commerciales, mais d'un programme particulier, le programme de rajustement des distorsions commerciales. Ce programme aurait pris une partie de la valeur de la subvention du Nid-de-Corbeau dont nous préconisions l'élimination, subvention que les libéraux ont effectivement éliminée, mais en omettant un aspect clé de notre proposition. Ils n'ont pas versé une partie de la valeur capitalisée de la subvention du Nid-de-Corbeau dans ce programme d'ajustement des distorsions commerciales, ce qui aurait fourni des fonds pour la situation dans laquelle nos agriculteurs se trouvent aujourd'hui. On aurait des fonds pour compenser directement la baisse des prix des produits de base attribuable à des pratiques commerciales déloyales et à des subventions injustes dans d'autres pays.
La principale cause de la crise dans le secteur des céréales, ce sont les pratiques commerciales déloyales de l'Europe et, dans une certaine mesure, des États-Unis, combinées aux restrictions des importations au Japon, en Corée et dans d'autres pays asiatiques. Ce sont ces facteurs, plus que tous autres, qui sont à l'origine de la crise d'aujourd'hui.
Dans mon premier discours à la Chambre, j'ai proposé que le gouvernement libéral adopte ce programme d'ajustement des distorsions commerciales. D'autres députés réformistes ont soulevé la question des douzaines de fois les années suivantes jusqu'à la suppression de la subvention du Nid-de-Corbeau. Mais le gouvernement n'a pas versé de fonds dans ce programme. Un paiement politique de 1,2 milliard de dollars a été fait aux agriculteurs, ce qui ne les a guère aidé. Je crois même que ce paiement a divisé le secteur agricole en deux: les bailleurs et les agriculteurs qui cultivent en fait le sol.
Le gouvernement libéral est maintenant confronté à une situation et il doit y faire face. Il a fait la sourde oreille à ce que je considère comme un excellent conseil, qui lui a été présenté à maintes reprises au fil des ans. On lui a présenté un avis très sensé qui l'aurait clairement aidé à régler la situation actuelle.
En vertu du plan que nous avons proposé, la valeur capitalisée de la subvention du Nid-de-Corbeau s'élèverait quelque part entre 7 et 9 milliards de dollars. Nous avons reconnu la situation déficitaire. Le Parti réformiste, plus que tout autre, a reconnu que le déficit devait être éliminé, et nous avons fait pression pour qu'il le soit. Nous avons reconnu que les impôts étaient trop élevés. Plus que quiconque, le Parti réformiste a réclamé une réduction des impôts. Reconnaissant tout cela, nous avons demandé qu'une partie seulement de la valeur capitalisée de la subvention du Nid-de-Corbeau soit versée dans ce fonds, soit peut-être une somme de 3 ou 3,5 milliards de dollars.
Avec les intérêts qui se seraient accumulés sur ce montant, nous aurions à l'heure actuelle une fort jolie somme qui aurait été à la disposition des agriculteurs pour les indemniser pas seulement d'une façon ponctuelle. Ce n'est pas ce que veulent les agriculteurs. Ils ne veulent pas de cadeaux. Ils veulent des pratiques commerciales loyales. Quand les autres pays ne commercent pas d'une façon loyale, les agriculteurs veulent une certaine aide pour remédier à cela. C'est précisément ce qu'aurait fait le programme d'ajustement aux distorsions des échanges.
Les libéraux n'ont cependant pas accepté notre avis. Cet avis ne venait pas seulement des députés réformistes, mais également du monde agricole. Ils n'ont pas accepté notre avis et, résultat, nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation où nous parlons d'un autre paiement spécial sans rien qui remédie au problème à long terme.
Nous ne pouvons laisser ce genre de situation se répéter à tous les dix ans. Cela fait trop longtemps que cela se produit. Les agriculteurs ne devraient pas avoir à faire face à cette situation encore et toujours. Avant d'entrer dans la vie politique, je travaillais comme économiste agricole et j'offrais des services de consultation aux agriculteurs. Je me suis assis à la table familiale de 100 à 200 agriculteurs qui étaient, eux et leur famille, aux prises avec une crise comme celle dont nous parlons aujourd'hui. La plupart d'entre eux ont perdu leur ferme. Il n'y a rien que je souhaite moins revoir dans ma vie que d'avoir à m'asseoir à la table familiale de gens qui perdent de nouveau leur ferme.
Que faut-il faire? Les libéraux doivent proposer une réponse. Comme ils n'ont pas agi de façon responsable depuis cinq ans, il leur incombe de proposer une réponse ou une solution. Il ne peut pas s'agir seulement d'un paiement à court terme. Il faut proposer une solution à long terme au problème. C'est ce qu'ils doivent faire, et je vais les regarder faire. Les agriculteurs de ma circonscription vont regarder pour voir ce que les libéraux vont faire.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, je suis fier de représenter les agriculteurs et les éleveurs de Kootenay—Columbia qui sont confrontés à un problème créé par le gouvernement libéral, qui touche tous les agriculteurs et bien d'autres citoyens.
Être éleveur ou agriculteur, tout le monde le sait, ce n'est pas un travail de 9 à 5. Il faut travailler dur pendant de longues heures, souvent sept jours par semaine. Bien des agriculteurs doivent aller travailler en ville pour financer l'exploitation agricole.
Je pense à ce que fait Revenu Canada, sous la conduite et la gouverne du gouvernement libéral, pour aider les agriculteurs en dehors de la ferme. Quel sanguinaire! Il apporte des modifications à la loi de façon rétroactive. Il ne manifeste aucune compassion, il n'a aucun scrupule à voler aux agriculteurs l'argent dont ils ont besoin pour rembourser les prêts et éviter tout juste la faillite année après année.
Je vais vous décrire un cas concret. À mon avis, il est typique de ce qui se passe chez tous les éleveurs et les agriculteurs du Canada. Dans ma circonscription, il y a des éleveurs et des agriculteurs qui coupent du bois pour améliorer le pâturage ou les terres agricoles. Ils ont consulté des firmes comptables locales et nationales sur la façon dont Revenu Canada traiterait ce revenu supplémentaire. Celles-ci ont fondé leur avis sur des informations touchant la coupe de bois fournies par Revenu Canada.
Les comptables ont confirmé auprès de Revenu Canada que, pour l'année 1996 et les années antérieures, ce revenu devait être déclaré comme des gains en capital et être imposé en conséquence. Il s'agit de producteurs agricoles qui ne dépendent pas normalement de l'abattage du bois pour leur gagne-pain, mais qui peuvent exercer cette option une fois ou deux durant la période où la propriété leur appartient. Il convient de signaler que, d'après les cas examinés par mon bureau, aucun de ces producteurs n'a acheté la propriété dans l'intention d'abattre le bois de façon continue ou comme source de revenu.
Durant l'exercice 1996-1997, Revenu Canada a décidé d'examiner un certain nombre de déclarations de revenus où l'on avait déclaré des revenus provenant de la vente de bois et a envoyé une cinquantaine de questionnaires à des éleveurs et des agriculteurs qui avaient déclaré de tels revenus. Cinquante autres questionnaires ont été envoyés au début de 1998 et on prévoit qu'il y en aura d'autres encore. Les destinataires de ces questionnaires ont été déterminés grâce au couplage des noms inscrits sur la liste du bureau de marquage du bois à Victoria et des fichiers de Revenu Canada. La liste du bureau de marquage du bois a été obtenue en vertu d'un protocole d'entente entre Revenu Canada et la province de la Colombie-Britannique.
Les années d'imposition 1993, 1994, 1995 et 1996 ont été examinées et réévaluées selon la nouvelle interprétation de Revenu Canada. En juin 1998, la Cour canadienne de l'impôt a entendu une affaire appelée l'affaire Larsen, et une décision a été rendue en juillet en faveur du contribuable Larsen.
Le ministre du Revenu national a décidé d'en appeler de la décision, ce qui veut dire que l'affaire devrait être entendue par la Cour d'appel fédérale. Mon bureau a récemment reçu une lettre concernant une autre affaire. La lettre, signée par le ministre, dit que lorsqu'un contribuable n'accepte pas la décision du ministère, il peut interjeter appel auprès de la Cour canadienne de l'impôt.
La Cour canadienne de l'impôt est un tribunal indépendant qui permet de régler une divergence d'opinion honnête entre Revenu Canada et le contribuable. Il est à signaler que ce tribunal a rendu une décision en faveur de mon contribuable.
Des affaires semblables ont été entendues par la Cour canadienne de l'impôt au début des années 1950 et 1970, et les décisions ont également été en faveur du contribuable. Magré cela, Revenu Canada a insisté pour renvoyer l'affaire devant les tribunaux et dépenser l'argent des contribuables pour se battre contre eux.
Revenu Canada maintient que la loi en question n'a pas été modifiée. Si des vérifications ont été effectuées en 1996 et en 1997 et qu'elles se poursuivent en 1998, c'est qu'avant cela, les sommes recueillies de la vente de bois provenant de la propriété étaient insignifiantes selon la définition de Revenu Canada et que, par conséquent, on ne s'était jamais posé la question de savoir s'il fallait les traitait comme un gain en capital par rapport au prix de base de la propriété.
Dans les années 90, ces sommes ont augmenté. Par conséquent, Revenu Canada ne les considère plus comme insignifiantes. Il est donc douteux que les sommes en question puissent être traitées comme un gain en capital par rapport au prix de base de la propriété.
À l'origine, les agents de Revenu Canada ont avisé notre bureau que des vérifications étaient menées partout au pays et que la Colombie-Britannique était la dernière province à être visée. Je tiens à signaler que ce problème ne touche pas simplement la Colombie-Britannique ou ma circonscription, mais également les Maritimes.
Le point que je veux faire valoir est que les libéraux affirment sans cesse qu'ils aident les gens, qu'ils servent la population. Pendant le mandat de John Turner, qui fut temporairement premier ministre du Canada, on a rappelé que servir le public, c'est parfois s'en servir.
Prenons comme premier scénario le cas d'un partenariat entre trois personnes qui font l'objet d'un avis de nouvelle cotisation. On a rejeté le premier appel au sujet du traitement des gains en capital. Revenu Canada a signalé au comptable que l'argent aurait dû être considéré comme des recettes plutôt que des pertes. Ces gens sont donc dans une situation où ils vont devoir dépenser davantage pour lutter contre Revenu Canada que ce qu'ils auraient dépensé pour se plier au nouvel avis de cotisation.
Deuxième scénario, celui d'un retraité tout simplement incapable de payer le supplément qu'exige Revenu Canada. Nous parlons ici d'une intervention possible des libéraux pour régler un problème particulier. Revenu Canada semble échapper à tout contrôle lorsqu'il applique des ponctions fiscales rétroactives à tous les éleveurs et les agriculteurs du Canada. Voilà le problème dont je parle.
Les libéraux doivent corriger le problème. Ils doivent traiter les éleveurs, les agriculteurs et tous les contribuables de façon équitable.
M. Mark Muise: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le député acceptera-t-il de répondre à des questions?
Le président suppléant (M. McClelland): Selon le Règlement, il n'y a ni question ni autre motion pendant cette partie du débat. Il reste deux minutes au débat.
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, l'effondrement des prix des céréales et du porc mettent beaucoup d'agriculteurs et leurs familles dans l'embarras. Si aucune aide gouvernementale n'est offerte bientôt, une situation déplorable risque de tourner à la catastrophe.
J'ai reçu des appels et des suggestions de la fédération des agriculteurs du comté de Peterborough et je me suis entretenu avec des éleveurs de porc de ma circonscription. Tous insistent sur l'extrême gravité de la situation et sur le fait qu'elle s'aggrave tous les jours. Ils réclament une intervention immédiate avant que la situation dégénère en catastrophe. Les éleveurs du comté de Peterborough perdent des dizaines de milliers de dollars en vendant leur porc. Les agriculteurs eux-mêmes n'exercent plus aucun contrôle sur la situation.
Les prix réels n'ont pourtant pas changé. Il serait intéressant de savoir ce que les transformateurs, les grossistes et les détaillants font avec leurs profits accrus pendant que les agriculteurs souffrent. J'exhorte le ministre de l'Agriculture à mettre sur pied très bientôt un plan de soutien du revenu. Je l'exhorte à orienter ce plan vers les producteurs agricoles en mettant tout particulièrement l'accent sur les petits agriculteurs. J'exhorte également le ministre à concevoir son plan afin qu'il serve de point de départ à l'élaboration future d'un vaste régime de sécurité du revenu des agriculteurs.
Divers groupes, y compris la Fédération canadienne de l'agriculture, ont fait d'excellentes suggestions pour l'établissement d'un type de programme qui ne donnerait pas lieu à des droits compensateurs.
Il s'agit là d'une question à la fois provinciale et fédérale. J'exhorte toutes les provinces à appuyer toute initiative proposée par notre ministre. Il importe que le ministre agisse le plus tôt possible. Juste la nouvelle d'un plan efficace donnerait aux banques la confiance nécessaire pour soutenir nos agriculteurs.
J'en ai discuté à quelques reprises avec le ministre. Je sais qu'il est de tout coeur du côté des agriculteurs touchés par cette crise et de leurs familles. Je sais qu'il travaille fort pour mettre au point un plan d'action efficace et d'une grande envergure. Je le prie d'agir aussi vite qu'il est humainement possible de le faire.
Nos pensées et nos prières accompagnent tous les agriculteurs et leurs familles qui, d'un bout à l'autre du Canada, sont actuellement aux prises avec de terribles difficultés financières.
Une voix: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.
Le président suppléant (M. McClelland): Je suis désolé, mais il n'est pas possible non plus d'invoquer le Règlement au cours de ce débat.
Comme il est 22 h 30, conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, je déclare la motion adoptée.
La Chambre s'ajourne donc à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 22 h 30.)