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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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36e Législature, 2ième Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 11
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 26 octobre 1999
RECOURS AU RÈGLEMENT |
La Constitution |
M. Paul Steckle |
M. Svend J. Robinson |
AFFAIRES COURANTES |
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Derek Lee |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-263. Présentation et première lecture |
M. Svend J. Robinson |
LA LOI SUR LE PRÉLÈVEMENT D'ÉCHANTILLONS DE SANG |
Projet de loi C-264. Présentation et première lecture |
M. Keith Martin |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-265. Présentation et première lecture |
M. Keith Martin |
LOI SUR LES CONTRAVENTIONS |
Projet de loi C-266. Présentation et première lecture |
M. Keith Martin |
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA |
Projet de loi C-267. Présentation et première lecture |
M. Ted White |
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA |
Projet de loi C-268. Présentation et première lecture |
M. Ted White |
LA LOI SUR LA RÉVOCATION DE DÉPUTÉS |
Projet de loi C-269. Présentation et première lecture |
M. Ted White |
LE CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-270. Présentation et première lecture |
M. Jim Pankiw |
PÉTITIONS |
La pornographie juvénile |
M. David Chatters |
L'irak |
Mme Libby Davies |
Le droit de propriété |
M. Garry Breitkreuz |
L'enregistrement des armes à feu |
M. Garry Breitkreuz |
Le mariage |
M. Gilles Bernier |
La Constitution |
M. Svend J. Robinson |
La Loi canadienne sur la santé |
M. Svend J. Robinson |
Les affaires autochtones |
M. Ted White |
L'immigration |
M. Ted White |
La Société canadienne des postes |
M. Réginald Bélair |
La Loi sur le mariage |
M. Grant McNally |
La pornographie juvénile |
M. Grant McNally |
Le Code criminel |
M. Randy White |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Derek Lee |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI SUR L'ACCORD DÉFINITIF NISGA'A |
Projet de loi C-9. Deuxième lecture |
L'hon. Robert D. Nault |
M. Preston Manning |
Amendement |
M. Claude Bachand |
Mme Alexa McDonough |
M. Svend J. Robinson |
M. Gerald Keddy |
M. Derrek Konrad |
M. Howard Hilstrom |
Mme Nancy Karetak-Lindell |
M. Keith Martin |
M. Philip Mayfield |
M. Wayne Easter |
M. Keith Martin |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
HISTORICA |
M. Bryon Wilfert |
LES PARTIELLES DANS SASKATOON—ROSETOWN—BIGGAR |
M. Jim Pankiw |
L'ÉPIDERMOLYSE BULLEUSE |
M. Tony Valeri |
LE SERVICE TÉLÉPHONIQUE |
M. Peter Adams |
LA SEMAINE DE LA PETITE ENTREPRISE |
M. Denis Paradis |
LE CANCER DU SEIN |
M. Keith Martin |
L'ASSOCIATION LÉGISLATIVE CANADA-CHINE |
M. Reg Alcock |
LE BASSIN DES GRANDS LACS |
Mme Karen Kraft Sloan |
LES PARCS NATIONAUX |
M. Pierre de Savoye |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Rahim Jaffer |
MAURICE RICHARD |
Mme Eleni Bakopanos |
DIWALI |
M. Gurbax Singh Malhi |
LA LIGUE NATIONALE DE HOCKEY |
M. John Solomon |
LE TRANSPORT DE DÉCHETS NUCLÉAIRES |
M. Maurice Godin |
LA SOCIÉTÉ IRVING OIL |
M. John Herron |
LE MOIS DE L'HISTOIRE DES FEMMES |
Mme Raymonde Folco |
QUESTIONS ORALES |
L'ENQUÊTE SUR LA CONFÉRENCE DE L'APEC |
M. Preston Manning |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Preston Manning |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Preston Manning |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Jim Abbott |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Jim Abbott |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE TRANSPORT AÉRIEN |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. David M. Collenette |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. David M. Collenette |
L'hon. David M. Collenette |
L'hon. David M. Collenette |
L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC |
Mme Alexa McDonough |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Alexa McDonough |
Le très hon. Jean Chrétien |
LES ANCIENS COMBATTANTS |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. George S. Baker |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. George S. Baker |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Mike Scott |
L'hon. Stéphane Dion |
M. Mike Scott |
L'hon. Stéphane Dion |
LE TRANSPORT AÉRIEN |
M. Michel Gauthier |
L'hon. David M. Collenette |
M. Michel Gauthier |
L'hon. David M. Collenette |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. John Cummins |
L'hon. Robert D. Nault |
M. John Cummins |
L'hon. Robert D. Nault |
LES PRODUCTIONS AUDIOVISUELLES |
M. Stéphane Bergeron |
L'hon. Sheila Copps |
M. Stéphane Bergeron |
L'hon. Sheila Copps |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. David Chatters |
L'hon. Robert D. Nault |
M. David Chatters |
L'hon. Robert D. Nault |
LE SPORT PROFESSIONNEL |
M. Pierre Brien |
L'hon. John Manley |
L'IRLANDE |
M. Pat O'Brien |
L'hon. Lloyd Axworthy |
L'INDUSTRIE DU TRANSPORT AÉRIEN |
Mme Val Meredith |
L'hon. David M. Collenette |
Mme Val Meredith |
L'hon. David M. Collenette |
L'AGRICULTURE |
M. Dick Proctor |
L'hon. Lyle Vanclief |
M. Dick Proctor |
L'hon. Lyle Vanclief |
LES SANS-ABRI |
M. Gilles Bernier |
L'hon. Claudette Bradshaw |
M. Gilles Bernier |
L'hon. Claudette Bradshaw |
LE CRIME ORGANISÉ |
M. Sarkis Assadourian |
L'hon. Anne McLellan |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Rahim Jaffer |
L'hon. David Anderson |
LES SANS-ABRI |
Mme Christiane Gagnon |
L'hon. Claudette Bradshaw |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Yvon Godin |
Mme Bonnie Brown |
LES SANS-ABRI |
Mme Diane St-Jacques |
L'hon. Claudette Bradshaw |
LA SANTÉ |
Mme Sophia Leung |
L'hon. Allan Rock |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Rahim Jaffer |
L'hon. David Anderson |
LES ALIMENTS MODIFIÉS GÉNÉTIQUEMENT |
Mme Hélène Alarie |
L'hon. Lyle Vanclief |
L'ÉGALITÉ |
M. Gordon Earle |
L'hon. Lucienne Robillard |
LES SANS-ABRI |
Mme Diane St-Jacques |
L'hon. Claudette Bradshaw |
LES PARCS NATIONAUX |
Mme Nancy Karetak-Lindell |
L'hon. Sheila Copps |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. John Nunziata |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LES DÉLINQUANTS DANGEREUX |
M. Randy White |
L'hon. Lawrence MacAulay |
PRÉSENCE À LA TRIBUNE |
Le Président |
LE REGRETTÉ IAN WAHN |
Mme Carolyn Bennett |
M. Werner Schmidt |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
M. Bill Blaikie |
Mme Elsie Wayne |
RECOURS AU RÈGLEMENT |
Propos tenus à la Chambre |
Mme Angela Vautour |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI SUR L'ACCORD DÉFINITIF NISGA'A |
Projet de loi C-9. Deuxième lecture |
M. Mike Scott |
Mme Libby Davies |
Mme Raymonde Folco |
Mme Raymonde Folco |
M. Réal Ménard |
M. Philip Mayfield |
Mme Louise Hardy |
Mme Libby Davies |
M. David Iftody |
M. Derrek Konrad |
M. Ted McWhinney |
M. Gerald Keddy |
M. Jason Kenney |
L'hon. Ethel Blondin-Andrew |
M. Mike Scott |
M. Jason Kenney |
M. Peter MacKay |
M. Svend J. Robinson |
M. Mike Scott |
M. Réal Ménard |
M. Derrek Konrad |
M. Svend J. Robinson |
M. Darrel Stinson |
M. Gerald Keddy |
M. Jim Gouk |
M. Jim Hart |
M. Gerald Keddy |
Mme Libby Davies |
M. Jim Gouk |
M. Reed Elley |
LOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET LES |
Adoption de la motion |
(Le projet de loi est lu pour la troisième fois et adopté.) |
MOTION D'AJOURNEMENT |
L'agriculture |
M. Rick Borotsik |
M. Joe McGuire |
Les pêches |
Mme Angela Vautour |
M. Lawrence D. O'Brien |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 11
CHAMBRE DES COMMUNES
Le mardi 26 octobre 1999
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
[Traduction]
RECOURS AU RÈGLEMENT
LA CONSTITUTION
M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens ce matin en invoquant le Règlement afin de clarifier certains propos que j'ai tenus à la Chambre le 8 juin 1999 au sujet de notre collègue, le député de Burnaby—Douglas.
Plus tôt cette année, le député de Burnaby—Douglas a présenté à la Chambre une pétition controversée au nom d'un groupe marginal qui cherchait à faire supprimer la référence à Dieu dans notre Constitution.
Dans ma déclaration initiale à ce sujet, j'ai affirmé que j'appuyais fermement la référence à Dieu dans toutes les lois et toutes les proclamations conçues par la Chambre. J'ai également cité des propos qu'un article du Citizen d'Ottawa attribuait au député de Burnaby—Douglas.
Bien que j'appuie toujours fermement la référence à Dieu, je voudrais aujourd'hui clarifier ma déclaration initiale. Je dois dire au préalable que j'ai été très heureux de recevoir plus tôt ce mois-ci un appel téléphonique du député concerné. Je crois comprendre qu'il n'a pas l'intention d'intervenir à la Chambre pour rectifier cette déformation apparente de sa position de la part des médias. Il m'a assuré qu'il ne partage pas l'opinion exprimée dans la pétition qu'il a présentée.
Cela dit, et étant donné son appui tout neuf pour la référence à Dieu dans la Constitution, je demande qu'on modifie ma déclaration antérieure pour tenir compte de cette nouvelle réalité.
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, je tiens à remercier le député d'avoir mis les choses au clair. Il a reconnu que la déclaration initiale qu'il a faite se fondait sur une information inexacte. Sans aucunement approuver la prémisse de sa déclaration d'aujourd'hui, je tiens à le remercier d'avoir corrigé sa déclaration antérieure inexacte.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à quatre pétitions.
* * *
LE CODE CRIMINEL
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD) demande à présenter le projet de loi C-263, Loi modifiant le Code criminel (propagande haineuse).
—Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui ce projet de loi qui étendrait la définition de «groupe identifiable» utilisée dans le Code criminel à l'égard de la propagande haineuse à toute section du public qui se différencie des autres par l'orientation sexuelle.
Les dispositions actuelles du Code criminel font référence à la couleur, à la race, à la religion et à l'origine ethnique. Le but de cet amendement est d'étendre les protections prévues contre la propagande haineuse aux gais, aux lesbiennes, aux personnes bisexuelles et aux transgendéristes de sorte à protéger ces groupes contre l'incitation publique à la haine.
Enfin, je voudrais faire remarquer que ce projet de loi donnerait aux agents chargés d'exécuter la loi le pouvoir d'empêcher des personnes comme le révérend Fred Phelps de traverser notre frontière pour diffuser son message de haine et d'homophobie.
Trop de gais et de lesbiennes sont victimes de crimes fondés exclusivement sur leur orientation sexuelle. Ce projet de loi serait un important signal, à savoir que le Canada condamne tous les actes de violence, y compris ceux à l'encontre des gais, des lesbiennes, des personnes bisexuelles et des transgendéristes.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI SUR LE PRÉLÈVEMENT D'ÉCHANTILLONS DE SANG
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-264, Loi permettant le prélèvement d'échantillons de sang dans le but de détecter la présence de certains virus.
—Monsieur le Président, ce projet de loi est le premier des trois que je présenterai aujourd'hui.
Le projet de loi donnerait aux personnes exerçant des fonctions d'agent de police, de pompier ou de membre d'une équipe d'intervention d'urgence, ou qui agissent en bon samaritains, le droit de connaître l'état sanitaire des individus au sang ou autres liquides organiques desquels ils auraient été exposés lors de leur intervention, notamment si ces individus sont porteurs du VIH, du virus de l'hépatite B ou du virus de l'hépatite C.
Cette disposition serait équitable en ce qu'elle permettrait de protéger les personnes qui, dans l'exercice de leurs fonctions, peuvent sauver des vies.
(Les motions sont adoptés, le projet de loi est une lu une première fois et imprimé.)
* * *
LE CODE CRIMINEL
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-265, Loi modifiant le Code criminel (crimes violents).
—Monsieur le Président, ce projet de loi relativement simple est de grande portée cependant.
Essentiellement, si un individu se rend à trois reprises coupable d'un crime violent, notamment un viol ou un meurtre, à la troisième infraction, il est d'office condamné à une peine d'emprisonnement à vie, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu une première fois et imprimé.)
* * *
LOI SUR LES CONTRAVENTIONS
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-266, Loi modifiant la Loi sur les contraventions et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (marihuana).
—Monsieur le Président, c'est le dernier projet de loi que je présente aujourd'hui. Il porte sur la simple possession de marihuana.
Fondamentalement, ce projet de loi dit qu'on va décriminaliser et non légaliser la simple possession de marihuana. Une personne trouvée en possession de marihuana recevrait une amende. Il y aurait trois niveaux d'amendes. Les amendes seraient ensuite utilisées pour financer la prévention et la sensibilisation des enfants afin de les dissuader d'utiliser des drogues illicites.
Je présente ce projet de loi en raison de l'énorme engorgement de nos tribunaux, surtout en Colombie-Britannique. Il épargnerait de l'argent aux contribuables, améliorerait les programmes de prévention visant à dissuader les enfants de consommer des substances illégales et permettrait dans une large mesure de remédier à la congestion de nos tribunaux. Il préviendrait également la consommation de substances illicites.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA
M. Ted White (North Vancouver, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-267, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (enregistrement des partis politiques).
—Monsieur le Président, il s'agit de présenter à nouveau un projet de loi d'initiative parlementaire qu'on avait soumis au cours de la dernière session. Il vise à s'attaquer au problème de la règle des 50 candidats qui, comme les députés le savent, a été jugée inconstitutionnelle par les tribunaux de l'Ontario. Le tribunal ontarien a déclaré que deux membres suffisaient pour former un parti. Il est question de 12 dans mon projet de loi, ce qui est conforme à ce qui se fait à la Chambre des communes.
J'espère que les députés adoreront discuter de cette question.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA
M. Ted White (North Vancouver, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-268, Loi modifiant la Loi électorale du Canada (vote par téléphone).
—Monsieur le Président, comme les députés le savent, il y a environ trois ans, le gouvernement de l'Ontario a inscrit le vote électronique dans sa loi électorale. Il est maintenant très courant que les membres de conseils municipaux et les maires votent électroniquement.
Il n'y a pas de disposition de ce genre dans la Loi électorale du Canada. Le directeur général des élections a demandé la permission d'inclure cette disposition, et ce projet de loi ne ferait qu'insérer cela dans l'actuelle Loi électorale du Canada.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI SUR LA RÉVOCATION DE DÉPUTÉS
M. Ted White (North Vancouver, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-269, Loi concernant le droit des électeurs de demander la révocation de députés.
—Monsieur le Président, ce projet de loi est quelque peu menaçant pour certains députés qui n'arrivent pas à se mettre dans la tête que les électeurs qui les ont envoyés ici devraient également avoir le droit de les révoquer s'ils ne font pas leur travail.
Le projet de loi instituerait le droit de révocation, lequel existe dans d'autres administrations dont la Californie qui, en passant, n'a révoqué personne depuis sans doute 25 ans. C'est néanmoins un instrument qu'il est utile d'avoir à sa disposition.
J'ai hâte que nous puissions engager un débat fructueux sur ce projet de loi.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LE CODE CRIMINEL
M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-270, Loi pourvoyant à la protection de toute personne accusée d'un crime des conjectures et des soupçons injustifiés dont elle peut faire l'objet de la part du public avant que sa culpabilité ne soit établie.
—Monsieur le Président, ce projet de loi a pour objet de protéger toute personne accusée d'un crime ainsi que sa famille des répercussions des reportages qui suscitent chez le public des soupçons, des conjectures et un sentiment d'indignation avant même que sa culpabilité ait été établie. La publication précoce des détails des poursuites criminelles peut causer des préjudices irréparables qui ne se justifient pas dans le cas d'un accusé qui est plus tard acquitté.
J'aimerais préciser que ce projet de loi ne porte en rien atteinte au droit du public à assister à un procès. La restriction de l'exercice de la liberté d'expression résultant de l'exigence de retarder la publication des détails de ce dernier se justifie dans une société libre et démocratique et ce, afin de respecter le principe de la présomption d'innocence.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
PÉTITIONS
LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE
M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, je présente une pétition aujourd'hui au nom de mes électeurs et de nombreux Albertains.
Les pétitionnaires se disent abasourdis par le fait que la loi détermine que la possession de matériel pornographique exploitant des enfants n'est pas criminel. Ils estiment que l'existence même de la pornographie juvénile constitue une preuve tangible de la perpétration d'un acte criminel à l'encontre d'un enfant. Ils voudraient exprimer cette opinion.
L'IRAK
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, je voudrais présenter une pétition qui attire notre attention sur les terribles conséquences des sanctions contre l'Irak.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'exiger le retrait de tout le personnel et le matériel militaires canadiens servant au blocus contre l'Iran et d'exhorter les Nations Unies à mettre fin aux sanctions.
Les pétitionnaires soulignent les effets dévastateurs de l'embargo sur les enfants, notamment. Par suite de l'embargo, 650 000 enfants iraquiens ont perdu la vie.
LE DROIT DE PROPRIÉTÉ
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'ai un nombre assez élevé de pétitions à présenter.
La première série de pétitions que j'ai l'honneur de présenter contient 11 pages renfermant 158 signatures de Canadiens des provinces de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique. Pour ceux qui tiennent le compte, on en arrive à un total de 15 415 personnes qui demandent une meilleure protection du droit de propriété dans les lois fédérales.
Les pétitionnaires sont des plus préoccupés par le fait que rien dans la Charte des droits et libertés n'empêche le gouvernement d'adopter des lois interdisant la capacité d'être propriétaire, d'utiliser et de jouir de biens privés ou réduisant la valeur de ces biens.
Ces Canadiens s'inquiètent également du fait qu'il n'y a rien dans la Charte qui empêche le gouvernement de saisir de façon arbitraire ces biens acquis de façon tout à fait légale, et ce sans compensation aucune.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'appuyer mon projet de loi d'initiative parlementaire qui permettrait de renforcer la protection du droit de propriété dans le régime légal fédéral en amendant la Déclaration canadienne des droits.
L'ENREGISTREMENT DES ARMES À FEU
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, le prochain groupe de pétitions que je suis heureux de déposer comprend 154 pages et a été signé par 3 649 habitants de huit provinces et un territoire du Canada qui se disent très préoccupés.
Les Canadiens de partout au pays s'opposent à l'unisson au programme fédéral d'enregistrement des armes à feu qui coûte des milliards de dollars et qui renferme des lacunes irrémédiables.
Mes électeurs m'ont demandé de faire le calcul du nombre de pétitions que j'ai déposées pour demander l'abrogation de la loi C-68. Depuis avril 1998, j'ai déposé 2 009 pages de pétitions comprenant au total 49 914 signatures.
Les pétitionnaires demandent que le gouvernement mette un terme à son fiasco au sujet de l'enregistrement des armes à feu pour les raisons suivantes: premièrement, l'enregistrement ne permettra pas d'enrayer l'usage des armes à feu par les criminels; deuxièmement, l'enregistrement ne permettra certainement pas de régler le problème de la violence criminelle au Canada; troisièmement, la grande majorité des policiers de première ligne sont opposés à l'enregistrement; et enfin, quatrièmement, six provinces et deux territoires réunissant plus de la moitié de la population du Canada contestent l'enregistrement des armes à feu devant la Cour suprême.
LE MARIAGE
M. Gilles Bernier (Tobique—Mactaquac, PC): Monsieur le Président, je présente une pétition au nom des gens de ma circonscription.
La pétition est adressée à la Chambre des communes et au Parlement réunis et précise que les citoyens du Canada soussignés désirent attirer l'attention de la Chambre sur la question suivante: Attendu que, pour une majorité de Canadiens, le mariage ne s'entend que de l'union volontaire d'un célibataire, soit un homme non marié, et d'une célibataire, soit une femme non mariée; et attendu qu'il est du devoir du Parlement de veiller à ce que l'institution du mariage, au sens où on l'a toujours connue et où elle a toujours été comprise au Canada, soit préservée et protégée.
Par conséquent, les pétitionnaires prient instamment le Parlement d'adopter une mesure législative, comme le projet de loi C-225, en vue de statuer qu'il ne peut y avoir mariage qu'entre un homme et une femme célibataires.
LA CONSTITUTION
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition au sujet de Dieu et de la Constitution. Cette pétition est signée par des résidents de ma circonscription de Burnaby—Douglas ainsi que de nombreuses autres circonscriptions au Canada.
Les pétitionnaires soulignent que les lois de notre pays ont toujours été fondées sur la morale et les valeurs judéo-chrétiennes qui ont été transmises au fil des siècles par l'entremise de la civilisation occidentale; que la majorité des Canadiens ont foi dans le Dieu qui a créé les cieux et la terre et qu'ils ne sont pas offusqués par l'évocation de son nom dans le préambule de la Charte des droits et libertés; que le préambule de la Charte des droits et libertés sert de fondement aux articles subséquents et détermine la compréhension transcendantale de base de nos droits et libertés.
Par conséquent, les pétitionnaires prient instamment le Parlement de s'opposer à l'adoption de tout amendement à la Charte canadienne des droits et libertés ou à toute autre mesure législative fédérale qui préconiserait l'exclusion de la mention de la suprématie de Dieu dans notre Constitution et nos lois.
LA LOI CANADIENNE SUR LA SANTÉ
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, je dépose une autre pétition concernant l'assurance-maladie. Elle a également été signée par des résidents de ma circonscription, Burnaby—Douglas, et d'autres circonscriptions.
Les pétitionnaires prient instamment le gouvernement fédéral de maintenir et de mettre en oeuvre la Loi canadienne sur la santé, le fondement du régime de soins médicaux, dans chacune des provinces et régions du Canada, et de conserver les cinq principes clés de l'assurance-maladie.
Ils demandent au Parlement d'enchâsser la Loi canadienne sur la santé et les cinq principes de l'assurance-maladie dans la Constitution du Canada afin de garantir à chaque citoyen canadien le droit à des soins de santé financés par le gouvernement et répondant à des normes nationales de qualité. Ils veulent que ce droit soit enchâssé dans la Constitution du Canada.
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter aujourd'hui.
La première pétition porte 120 signatures. Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait qu'une majorité de Canadiens sont favorables à une entente équitable avec les Nisga'as qui soit globale et juste pour l'ensemble des Canadiens.
La pétition signale qu'il y a actuellement des causes en instance concernant le traité avec les Nisga'as et que certaines d'entre elles—dont celle introduite par le Parti libéral de la Colombie-Britannique—qui contestent la constitutionnalité de l'accord et qu'il faudrait consulter les habitants de la Colombie-Britannique par voie de référendum avant de modifier notre Constitution.
Les pétitionnaires prient le Parlement de rejeter ce traité parce qu'il risque de diviser les Canadiens à tout jamais.
L'IMMIGRATION
M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte 629 signatures. Elle fait partie d'une série de pétitions totalisant des milliers de signatures et se rapportant a trait à l'arrivée, plus tôt cette année, d'un bateau transportant des migrants chinois illégaux.
Les pétitionnaires font valoir que le traitement des cas de faux demandeurs du statut de réfugié cause des préjudices indus aux réfugiés de bonne foi, que le système d'immigration actuel favorise les trafiquants internationaux d'êtres humains et qu'il n'existe pas un système efficace qui fasse rapidement la distinction entre les demandeurs d'asile légitimes et les migrants illégaux.
Les pétitionnaires prient le Parlement d'apporter immédiatement des modifications à la législation canadienne régissant les réfugiés et d'autoriser l'expulsion de tous ceux qui abusent manifestement du système.
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
M. Réginald Bélair (Timmins—Baie-James, Lib.): Monsieur le Président, je présente ce matin une pétition signée par les messagers ruraux qui travaillent pour la Société canadienne des postes. La plupart d'entre eux gagnent moins que le salaire minimum et travaillent dans des conditions qui datent d'une autre époque.
De plus, il n'est pas permis à ces employés de la Société canadienne des postes de négocier une convention collective qui leur aurait permis d'améliorer leurs salaires et leurs conditions, contrairement aux autres travailleurs.
Les pétitionnaires demandent donc au Parlement d'obliger la Société canadienne des postes à les traiter sur le même plan que les employés permanents.
LA LOI SUR LE MARIAGE
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition signée par un grand nombre d'habitants de ma circonscription et d'autres qui demandent que le Parlement s'assure de préserver et de protéger le mariage tel qu'il a toujours été connu et compris au Canada.
Ils demandent que le Parlement adopte le projet de loi C-225, Loi modifiant la Loi sur le mariage et la Loi d'interprétation, de façon qu'il prévoie qu'un mariage ne peut être contracté qu'entre un homme célibataire et une femme célibataire.
LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition, qui est également signée par certains de mes électeurs et d'autres personnes, demande que le Parlement protège, au moyen de l'adoption et de l'application d'une disposition prévue dans le Code criminel, les membres les plus vulnérables de notre société contre les sévices sexuels et, notamment, contre la pornographie juvénile.
Les pétitionnaires demandent que le Parlement prenne toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que la possession de matériel de pornographie juvénile demeure une grave infraction pénale et que les forces policières fédérales aient pour directive d'accorder la priorité à l'application de cette disposition législative afin de protéger les enfants.
LE CODE CRIMINEL
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition aux termes de laquelle, selon l'article 43 du Code criminel, tout instituteur, père ou mère, ou toute personne qui remplace le père ou la mère, est fondé à employer la force pour corriger un élève ou un enfant, selon le cas, confié à ses soins, pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances. On ajoute que l'article 43 reconnaît que les parents ont un rôle de premier plan à jouer pour éduquer et discipliner leurs enfants.
Les pétitionnaires demandent que le Parlement réaffirme le devoir des parents d'élever leurs enfants de façon responsable, selon leur conscience et leurs convictions, et qu'il maintienne le libellé actuel de l'article 43 du Code criminel.
* * *
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
Le vice-président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI SUR L'ACCORD DÉFINITIF NISGA'A
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) propose: Que le projet de loi C-9, Loi portant mise en vigueur de l'Accord définitif nisga'a, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Monsieur le Président, c'est pour moi un grand honneur de présenter ce projet de loi, la Loi sur l'Accord définitif nisga'a. Cette mesure législative et le traité qu'elle reconnaîtra marquent la fin d'un long voyage que la nation nisga'a a entrepris il y a plus d'un siècle.
Depuis 1987, le peuple nisga'a cherche activement à régler les questions relatives à ses terres, à sa culture et à son gouvernement. Des générations se sont succédé sans qu'on puisse trouver des solutions.
Pendant que le reste du Canada devenait une société moderne et prospère, la nation nisga'a était laissée pour compte, incertaine de la place qui lui revenait dans notre pays, incertaine d'avoir même une place dans notre pays.
Le débat d'aujourd'hui marque un pas en avant pour la nation nisga'a, pour la Colombie-Britannique et pour le Canada. Ces jours-ci, nous ressentons la fébrilité qui naît de l'arrivée prochaine d'un nouveau millénaire et de toutes les possibilités que cela représente pour notre nation. Toutefois, à l'aube du XXIe siècle, il nous reste encore à régler des problèmes qui datent du XIXe siècle.
Le projet de loi C-9 nous permettra de régler certaines questions qui traînent depuis un siècle. Il annonce une ère de renouveau et de réconciliation entre le Canada et les peuples autochtones. Ce faisant, il met tout en place pour que le Canada puisse réaliser encore de plus grandes choses au cours du prochain siècle.
Pendant six générations, la nation nisga'a a gardé l'espoir et a refusé de douter qu'elle atteindrait ses objectifs. Le fait que nous étudiions le projet de loi aujourd'hui témoigne de son attachement à sa cause et de sa persévérance, et je suis convaincu que l'histoire prouvera que les efforts des Nisga'as ont fait du Canada une nation plus forte et plus complète.
Je reconnais également les efforts de mes prédécesseurs et collègues à la Chambre qui ont beaucoup fait pour que nous puissions arriver où nous en sommes aujourd'hui. Je rends hommage au gouvernement et à la population de la Colombie-Britannique qui ont su montrer que le Canada peut combler les besoins et répondre aux aspirations de tous ceux qui vivent à l'intérieur de ses frontières.
Le projet de loi C-9 est une réalisation nationale. Il est un jalon, non seulement pour le peuple nisga'a, mais aussi pour tous les habitants de la Colombie-Britannique et du Canada. Le traité nisga'a marque une réconciliation entre le passé et le présent, entre les autochtones et les non-autochtones. Il nous permet de laisser derrière nous les erreurs du passé. En définissant clairement nos rapports, il favorisera la croissance économique locale pour les Nisga'as et pour les autres citoyens canadiens.
Le traité représente une étape importante dans le long processus d'édification de la nation canadienne. Comme Joe Gosnell, président du conseil tribal nisga'a, l'a souligné à maintes reprises, nous négocions une intégration au Canada, pas une séparation.
Avec l'appui de la Chambre, un objectif vieux d'un siècle est à notre portée. Le traité nisga'a représente un point tournant dans les rapports entre le Canada et les Nisga'as. Il nous donne l'occasion de faire la preuve de notre confiance et de notre respect mutuels.
Les Nisga'as vivent dans le nord-ouest de la Colombie-Britannique depuis des milliers d'années. Quand les Européens sont arrivés sur les côtes du Pacifique, ils y ont trouvé une société bien établie, autonome et capable de prendre soin de ses membres. Les Nisga'as étaient prospères et animés d'un esprit d'entrepreneur. Ils vivaient dans des collectivités organisées et observaient les anciennes lois d'Ayuukhl Nisga'a, dictant à chacun ses obligations et sa conduite en société.
L'arrivée des colons européens a eu un effet dramatique sur les populations autochtones, dont celle des Nisga'as de la Colombie-Britannique. Comme ailleurs au Canada, l'imposition de lois, de coutumes culturelles et religieuses étrangères a eu un impact terrible qui se fait encore sentir aujourd'hui.
Des maladies jusque là inconnues en Amérique du Nord ont dévasté des collectivités entières. La population nisga'a a chuté, passant de plus de 30 000 à seulement 800 membres. Aujourd'hui, elle compte presque 6 000 membres, mais elle est nettement moins nombreuse qu'elle l'a déjà été.
En Colombie-Britannique, les conditions de vie des autochtones ont été encore plus touchées à cause de l'absence de traités exhaustifs avec la Couronne. Ailleurs au Canada, il fallait conclure de tels traités avant de s'établir, pour conférer plus de certitude à un droit foncier et définir la relation entre la Couronne et le peuple autochtone en cause.
À cause de l'absence de traités en Colombie-Britannique, la plupart des autochtones de la province ne savent toujours pas au juste quelle est leur place au Canada. De même, il règne beaucoup d'incertitude dans l'esprit de tous les habitants de la province.
Pendant plus d'un siècle, les Nisga'as ont voulu corriger la situation. Ils n'ont pas laissé les événements passés prendre le dessus sur leur désir d'occuper une place honorable et précieuse au sein du Canada. En dépit des sérieux obstacles qu'on leur opposait, des générations de leaders nisga'as ont continué à poursuivre leurs objectifs en observant des méthodes pacifiques et légales.
Plus récemment, les efforts des Nisga'as ont coïncidé avec une évolution dans la perception qu'ont les Canadiens et leurs gouvernements de leur relation avec les autochtones. Ils conviennent généralement que les politiques passées ont échoué et qu'il faut adopter une nouvelle approche fondée sur le respect mutuel et la confiance. Ils reconnaissent également qu'une telle approche avantagera tous les Canadiens.
Cette évolution dans la façon de penser a donné lieu à un certain nombre d'initiatives, y compris la création de nombreux groupes de travail et commissions royales chargés d'examiner les questions autochtones, le lancement en 1985 d'une politique de négociation de l'autonomie gouvernementale avec les collectivités, l'adoption par le Parlement de la Loi sur l'autonomie gouvernementale de la bande indienne sechelte et le dépôt en 1995 de la ligne de conduite du gouvernement du Canada concernant la négociation et la mise en application du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale des autochtones.
Le gouvernement estime que l'autonomie gouvernementale est, à l'instar des autres droits des autochtones, reconnue et confirmée par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Comme les tribunaux l'ont mentionné, il vaut mieux négocier ces droits que de laisser la question être portée en justice, et c'est justement ce que nous avons fait. Le traité conclu avec les Nisga'as est le résultat logique de l'évolution de la pensée et de la politique canadiennes et il constitue un accord pratique qui peut être mis en application dans la structure constitutionnelle du Canada.
Le traité conclu avec les Nisga'as établit un protocole d'entente sur la façon dont les Nisga'as et les autres Canadiens peuvent coexister et atteindre des objectifs communs. Il s'agit d'un accord juste, abordable et honorable qui tient compte des intérêts de tous les Canadiens, qui favorisera la stabilité et qui multipliera les possibilités pour tous les habitants de la vallée de la Nass.
En énonçant clairement les droits des Nisga'a par rapport à la propriété et à l'utilisation des terres et des ressources, le traité établit des certitudes. Ces certitudes favoriseront un climat économique propice aux investissements et à la création d'emplois tout en permettant aux Nisga'as de protéger leur culture.
Je ne saurais trop insister sur l'importance de ces certitudes pour l'avenir de la Colombie-Britannique. Lors des quelque 500 séances de consultation et d'information qui ont eu lieu en Colombie-Britannique pendant les négociations avec les Nisga'as, le milieu des affaires a établi très clairement une chose: les certitudes sont essentielles à la prospérité économique future de la province.
Quel est le coût du statu quo? Une étude menée par la firme Price Waterhouse en 1991 a conclu que le non-règlement des revendications territoriales en Colombie-Britannique coûte à la province un milliard de dollars en investissements et 1 500 emplois par année, et cela, seulement dans les secteurs de la foresterie et de l'exploitation minière. Le traité conclu avec les Nisga'as est un progrès important en vue d'éviter la disparition de pareille activité économique pour les futures générations de Britanno-Colombiens.
Tant que ces certitudes existeront, je sais que le milieu des affaires sera heureux de travailler en partenariat avec les autochtones. Cela est vrai dans ma propre région tout comme en Colombie-Britannique, où les partenariats se multiplient dans toute la province, le secteur privé et les collectivités autochtones collaborant au sein d'entreprises économiques.
Ceux qui me connaissent depuis un certain temps savent quelle importance j'attache à ces partenariats et à la capacité de tous, autochtones et non-autochtones, de collaborer. Dans l'ensemble du Canada, mais surtout dans les régions rurales, les Canadiens autochtones et non autochtones vivent aux côtés les uns des autres. Ils partagent un grand nombre de défis et de rêves, mais, depuis trop longtemps, ils restent isolés les uns des autres.
Dans le monde d'aujourd'hui, cet isolement ne peut continuer. La collaboration est, pour les deux groupes, le seul moyen de réaliser leur plein potentiel. Le traité nisga'a encouragera ce processus dans le nord-ouest de la Colombie-Britannique. Il me semble important que les députés et tous les Canadiens sachent ce que fera ce traité et ce qu'il ne fera pas. Permettez-moi de donner quelques exemples.
Le plus important, c'est que le traité prévoit un règlement complet et définitif de toutes les revendications des Nisga'as à l'égard des droits et titres autochtones. Les Nisga'as recevront un règlement qui comprendra le versement de 196,1 millions de dollars sur 15 ans, quelque 2 000 kilomètres carrés de terres dans la vallée de la Nass, avec les droits de superficie et les droits d'exploitation du sous-sol, et une partie des prises de saumon de la Nass et du prélèvement sur les ressources fauniques de la région de la Nass.
L'estimation totale du coût non récurrent du traité, valeur foncière, mise en oeuvre et autres coûts connexes compris, est de 487,1 millions de dollars, en dollars de 1999. La part des coûts assumée par le Canada est de 255 millions de dollars. Quant au coût de l'accord, que les choses soient bien claires. Il ne suppose pas, comme certains l'ont laissé entendre, un transfert de fonds d'un demi-milliard de dollars. Je suis persuadé que le comité fera une étude approfondie de la question, mais il est important de souligner ce point pour dissiper toute incertitude dans l'esprit des Canadiens.
Une économie solide exige des terres et des ressources. Ces actifs une fois acquis, les Nisga'as seront plus à même de participer pleinement aux économies locale et provinciale. Les Nisga'as auront donc les outils nécessaires pour subvenir à leurs besoins. Ils pourront abattre des arbres sur leurs terres pour se construire des maisons ou à des fins commerciales. Compte tenu de la beauté naturelle de la vallée de la Nass, il est probable que les Nisga'as exploreront des occasions d'affaires comme les pourvoiries, le camping sauvage, l'écotourisme et la pêche sportive.
D'autres habitants de la vallée de la Nass en profiteront aussi. Une activité économique accrue entraînera d'inévitables retombées dans toute la région. À mesure que l'infrastructure et les routes sur les terres des Nisga'as seront améliorées, des emplois seront créés et les entreprises locales profiteront de l'injection d'argent frais. Un peuple nisga'a prospère contribuera au renforcement de l'économie du nord-ouest de la Colombie-Britannique.
L'Accord nisga'a est d'une grande importance et il importe de souligner qu'il a été conclu dans le cadre constitutionnel actuel du Canada. Il ne modifie pas directement ou indirectement la Constitution et il ne nécessite pas non plus une modification constitutionnelle pour prendre effet. L'Accord nisga'a est un arrangement pratique qui définit les droits que la nation nisga'a exercera aux termes de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Ces droits seront certes protégés en vertu de l'article 35, mais cela ne signifie pas qu'ils seront absolus. Les tribunaux ont confirmé que ces droits peuvent être enfreints si cela se justifie.
Bien des gens comprennent mal la nature du gouvernement nisga'a envisagé dans l'accord. Le gouvernement nisga'a sera tout simplement un gouvernement démocratique pour la nation nisga'a. Il protégera la langue, la culture et les biens des Nisga'as tout en faisant la promotion de la prospérité et du bien-être futurs de la nation nisga'a. Il donnera aux Nisga'as la maîtrise de leur vie et de leur destinée, ce qui va de soi pour la plupart d'entre nous.
L'accord ne crée pas un palier de gouvernement à part dans la société et le droit canadiens. Soyons clairs à cet égard. La Charte des droits et libertés continuera de s'appliquer à la nation nisga'a
Une voix: Faux.
L'hon. Robert D. Nault: Je répète donc que la Charte des droits et libertés continuera de s'appliquer à la nation nisga'a, au gouvernement nisga'a et à tous les gens vivant sur les terres nisga'as. La Charte s'appliquera à toutes les mesures prises par le gouvernement nisga'a, y compris lorsqu'il adoptera des lois et prendra des décisions comme délivrer des permis et des licences. Le gouvernement nisga'a pourra adopter uniquement des lois qui sont conformes à la Charte des droits et libertés.
Non seulement la Charte continuera de s'appliquer, mais rien dans le traité ne réduit les pouvoirs conférés aux gouvernements fédéral et provincial en vertu de la Constitution, et la souveraineté de la Couronne est clairement reconnue. Les lois fédérales et provinciales comme le Code criminel et la Family Relations Act de la Colombie-Britannique s'appliqueront. Dans les domaines où le gouvernement nisga'a peut faire des lois, celles-ci viendront s'ajouter aux lois fédérales et provinciales. Aucun secteur ne relèvera uniquement de la compétence des Nisg'as.
Tout au long de l'histoire, on a eu recours aux traités pour définir les relations entre les peuples. Ces traités représentent des engagements solennels. Ils ne peuvent donc pas et ne doivent pas être modifiés selon les caprices d'un partie ou d'un autre. Pour cette raison, le traité nisga'a et la Loi sur l'Accord définitif nisga'a l'emporteront sur toute loi fédérale ou provinciale en cas de conflit. Cela est conforme à la protection constitutionnelle des droits issus des traités.
Cela ne veut pas dire que les lois nisga'as l'emporteront nécessairement sur les lois fédérales et provinciales. Le traité précise de façon claire les secteurs où le gouvernement nisga'a aura le droit d'adopter des lois. Ces lois l'emporteront sur toute autre loi seulement lorsqu'il s'agit de questions internes propres aux Nisg'as et à leur culture et essentielles au fonctionnement de leur gouvernement.
Pour les autres secteurs, le traité établit clairement les règles qui serviront à résoudre tout conflit entre les lois nisga'as et les lois fédérales ou provinciales. De façon générale, les lois fédérales et provinciales l'emporteront, ou encore la loi nisga'a devra atteindre ou dépasser les normes fédérales ou provinciales existantes pour être valide.
En plus de donner des pouvoirs clairs dans certains secteurs, le traité nisga'a est un arrangement sensé et pratique qui assurera la responsabilité politique, juridique et financière du gouvernement nisga'a. Le traité, les ententes financières connexes et la constitution nisga'a contiennent tous des dispositions obligeant le gouvernement nisga'a à rendre des comptes à ses membres et aux gouvernements d'où il tirera une partie de son financement.
Le gouvernement nisga'a sera tenu de préparer et de présenter des états financiers vérifiés à ses membres ainsi qu'au Canada et à la Colombie-Britannique. Ces états financiers doivent être conformes aux principes comptables généralement reconnus, et tout financement fourni par le Canada pourra faire l'objet d'un examen par le vérificateur général. Les dirigeants nisga'as ont adopté cette norme de responsabilité. Au delà de l'obligation morale qu'a n'importe quel gouvernement de rendre des comptes aux personnes qu'il représente, il y a aussi une réalité pratique.
Les arrangements prévus dans le traité avec les Nisga'as précisent les responsabilités en matière de gestion des terres de toutes les personnes qui font affaire avec le gouvernement nisga'a et de toutes les personnes qui vivent sur le territoire nisga'a. Si les Nisga'as veulent promouvoir le développement économique, leurs lois et leurs décisions devront être ouvertes et transparentes, et leurs politiques administratives et procédures de révision et d'appel devront être claires et équitables.
Même si le gouvernement nisga'a représente seulement les Nisga'as, il fonctionnera comme tous les autres gouvernements locaux et régionaux au Canada selon les principes d'une administration publique démocratique, représentative et responsable.
Nous devrions être fiers du fait que ce traité établit enfin les droits des Nisga'as. Nous devrions aussi être fiers des mesures qu'il prend pour concilier les droits des Nisga'as et les droits des non-Nisga'as. Le traité protège les droits des autres peuples autochtones et les droits des non-Nisga'as qui résident sur les terres nisga'as.
Si l'on devait constater que le traité porte atteinte à un droit d'une autre première nation, il serait revu de manière à tenir compte des droits de cette première nation. Les parties seraient alors obligées de faire tout leur possible pour modifier le traité afin de corriger la situation.
Les droits des non-Nisga'as résidant sur des terres nisga'as sont mieux protégés par le traité que par la Loi sur les Indiens. Ces personnes continueront de jouir du droit de vote aux élections fédérales, provinciales, régionales et municipales. Elles auront aussi le droit de voter pour des membres d'institutions publiques élues, comme les commissions scolaires et les conseils de santé, ou de devenir membres de ces institutions.
Le traité stipule également que les non-Nisga'as établis sur les terres nisga'as devront être consultés pour toutes les décisions susceptibles de les toucher directement et de très près. Le gouvernement nisga'a sera tenu de prendre en compte leur avis. À l'instar des Nisga'as, les non-Nisga'as auront pleinement accès aux procédures d'appel des décisions administratives du gouvernement nisga'a, notamment au contrôle judiciaire.
Lors des négociations ayant mené à ce traité, toutes les parties étaient très conscientes des droits et intérêts des tiers. À titre d'exemple, les personnes ne faisant pas partie de la Nation nisga'a mais résidant sur des terres nisga'as, pourraient très bien se prévaloir des services offerts par le gouvernement nisga'a. Elles ne seraient cependant pas assujetties à l'impôt prélevé par le gouvernement nisga'a.
Les Canadiens continueront d'avoir, pour leurs loisirs et autres activités non commerciales, un accès raisonnable aux terres nisga'as. Les autorisations d'accès requises pour construire et exploiter des infrastructures homologuées d'approvisionnement en eau sont protégées, et les réserves d'eau nisga'as, équivalant à seulement 1 p.100 du débit des eaux charriées par la rivière Nass, sont suffisamment importantes pour répondre à d'autres besoins dans l'avenir.
Ce ne sont là que quelques-uns des aspects de la protection assurée par le traité nisga'a dans lequel les droits des tiers sont également protégés. Cette protection, je le rappelle, n'est pas prévue dans la Loi sur les Indiens.
L'Accord nisga'a constitue un traité complexe et soigneusement équilibré. Si certains de mes collègues n'en ont pas encore lu le texte, je les exhorte à le faire afin qu'ils constatent dans quelle mesure on a tenu compte des préoccupations et des aspirations de tous les Canadiens. Quiconque se donne la peine de le lire se rendra compte que, comme dans toutes les négociations, il y a eu des concessions mutuelles de la part de toutes les parties, y compris les Nisga'as.
Cela s'est notamment produit dans le domaine de la fiscalité. Une fois que l'accord sera ratifié, les Nisga'as entameront une période de huit ans pour la suppression graduelle des exemptions de la taxe de vente et une période de douze ans pour la suppression graduelle des exemptions de l'impôt sur le revenu. À la fin de ces périodes, les Nisga'as paieront des impôts de la même façon que les autres Canadiens.
Les Nisga'as assumeront également en partie la responsabilité de financer leur gouvernement. La dépendance des Nisga'as à l'égard des paiements de transfert sera réduite avec le temps et ils contribueront au financement des programmes et des services grâce à l'application d'un accord sur leur propre source de revenu.
Plus les gens en apprennent vraiment à propos de cet accord, plus ils l'appuient solidement. D'autres députés aborderont certainement plus en détails les éléments de l'accord auxquels ils portent un intérêt plus particulier. J'encourage cependant les députés à se rappeler à quel point ce débat est important sur les plans historique et symbolique. À bien des égards, ce débat a trait à la façon dont nous, les Canadiens, nous percevons nous-mêmes et percevons notre pays. Le fait que nous ayons un accord à débattre témoigne de l'esprit et de l'intention dont s'inspire le document intitulé Rassembler nos forces—Plan d'action du Canada pour les questions autochtones, dans lequel nous nous sommes engagés à répondre aux besoins des collectivités en bâtissant un véritable partenariat avec les peuples autochtones.
On n'en serait pas là aujourd'hui si les Canadiens ne nous avaient pas fait comprendre qu'il est grand temps de finir ce qui a été commencé avant de regarder vers l'avenir. Certes, les Nisga'as n'oublieront peut-être jamais ce qu'ils ont souffert, mais ils ont appris à connaître un Canada qui a changé depuis quelques générations. C'est un Canada qui respecte et accueille les gens de toutes origines, qu'ils soient autochtones ou non autochtones, un Canada qui reconnaît la contribution que les peuples autochtones ont apportée et continueront d'apporter, un Canada qui fait appel à la réconciliation et au renouveau, un Canada qui est bien conscient que sa force réside dans sa capacité de créer des partenariats avec tous ceux qui vivent sur son territoire.
Le traité conclu avec les Nisga'as en dit long sur le chemin que le Canada a parcouru depuis le siècle dernier et sur nos possibilités de faire bien davantage dans les années à venir. C'est une étape importante vers un Canada encore meilleur. C'est une bonne chose que nous nous apprêtions à ratifier ce traité pendant que les Nations Unies célèbrent la décennie internationale des populations autochtones. Y a-t-il meilleure façon de souligner cette occasion que de mettre en oeuvre un traité qui est devenu un exemple pour les autres pays et un signe d'espoir pour les autochtones du Canada et d'ailleurs?
En guise de conclusion, je voudrais citer à nouveau Joe Gosnell: «Il faut ratifier le traité conclu avec les Nisga'as pour le bien des autochtones et des non-autochtones afin d'écrire ensemble un nouveau chapitre de l'histoire de notre nation, de notre pays, voire du monde.»
M. Randy White: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Étant donné l'importance de la question pour les Canadiens et la nécessité de clarifier certaines affirmations faites par le ministre dans son discours de présentation du projet de loi, je me demande s'il y aurait consentement unanime pour avoir une période de questions et d'observations de 15 minutes.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour avoir une période de questions et d'observations de 15 minutes sur le discours du ministre?
Des voix: D'accord.
Une voix: Non.
M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens dans le débat sur le projet de loi C-9, Loi portant mise en vigueur de l'Accord définitif nisga'a. Je tiens à affirmer au peuple nisga'a, à la population de la Colombie-Britannique et à la population du Canada que tout ce que nous visons dans le débat c'est d'assurer des relations harmonieuses entre les membres de la nation nisga'a et entre les Nisga'as et les autres Canadiens.
Nous comprenons que, après des années de négociations à l'intérieur du cadre défini par la Loi sur les Indiens et régi par le gouvernement fédéral, dont le ministère des Affaires indiennes, la plupart des chefs nisga'as estiment qu'ils n'ont pas d'autre choix que d'accepter cet accord et les principes sur lesquels il se fonde. Pour eux, c'est cela ou rien. Nous le comprenons. Nous comprenons qu'ils doivent appuyer cet accord.
L'opposition officielle n'est pas dans la même position. Nous nous opposerons au projet de loi parce que nous ne croyons pas que l'entente à laquelle il donne effet soit à long terme favorable ni pour les Nisga'as, ni pour les habitants de la Colombie-Britannique ni pour les Canadiens en général.
Mon collègue le député de Skeena et d'autres députés de l'opposition officielle expliqueront, preuves à l'appui, ce qui nous pousse à le croire. Nous devrions prêter une attention toute particulière au point de vue du député de Skeena parce que ce dernier représente une circonscription qui comprend 2 300 Nisga'as et 20 500 autres autochtones, en plus de 62 500 non autochtones et chacun d'entre eux sera touché d'une façon ou d'une autre par ce projet de loi.
Le député a eu des contacts étroits avec ces gens qu'il connaît beaucoup mieux que notre tout nouveau ministre. Ce sont les gens de la circonscription de notre collègue de Skeena qui devront subir les conséquences pratiques et immédiates de l'entente finale avec les Nisga'as et nous devrions donc être attentifs à ses propos. Son discours n'a pas été rédigé par les fonctionnaires du ministère. Il l'a sûrement préparé lui-même en se basant sur son expérience personnelle.
Les députés devraient également reconnaître que le gouvernement néo-démocrate de la Colombie-Britannique qui a appuyé ce projet de loi n'est plus au pouvoir pour très longtemps parce qu'il est loin d'avoir l'appui des électeurs de la Colombie-Britannique. Je suis d'avis qu'il ne faut donc pas trop tenir compte de leur appui au projet de loi et à l'entente. Il y aura sans doute bientôt en Colombie-Britannique un nouveau gouvernement provincial dont les membres s'opposeront à l'entente tant à l'Assemblée législative que devant les tribunaux.
J'espère également que, à la fin du débat, les Canadiens de toutes les régions du pays et les députés représentant toutes les régions du pays comprendront que ce projet de loi et l'accord qu'il met en vigueur auront des conséquences pour eux. À notre avis, bon nombre de ces répercussions sont négatives. Les conséquences financières seront négatives. L'entente aura des effets négatifs sur la gestion des ressources, un peu comme on l'a vu dans l'affaire Marshall, ainsi que sur les relations entre autochtones et non-autochtones.
Nous ne sommes pas saisis ici d'un simple projet de loi ou d'une entente qui touche un groupe particulier d'autochtones en Colombie-Britannique. Il s'agit d'une loi et d'une entente qui auront des répercussions sur l'ensemble de la Colombie-Britannique et du Canada. Voilà pourquoi nous sommes ravis de l'attention et de l'importance que les médias nationaux et les médias de diverses régions du pays accordent à ce projet de loi et à cette entente qui auront des effets bien au-delà de la vallée de la Nass et de la Colombie-Britannique.
L'accord dont il est question ici régit l'administration de la nation nisga'a, l'administration de son économie locale et l'administration de ses relations avec ses membres et avec des non-autochtones. Ce matin, je tenterai de faire valoir deux grands points.
Premièrement, toute la manière de traiter la question de l'autonomie gouvernementale des autochtones et de leur développement économique au Canada, qui est consacrée dans ce projet de loi, est boiteuse. Toute cette façon de faire, tous ces principes sous-jacents laissent à désirer et ne donneront pas les résultats espérés. C'est ce que nous avons l'intention de prouver de façon concrète.
De plus, on a absolument besoin d'une approche tout à fait différente à l'égard de l'autonomie gouvernementale des autochtones et du développement économique autochtone, une approche basée sur de meilleurs principes pour le XXIe siècle, et c'est ce que nous allons essayer de décrire.
Le projet de loi et l'accord qu'il reflète sont basés sur une mauvaise approche. Il n'y a sûrement personne au Parlement qui a le culot d'affirmer que l'approche adoptée par le gouvernement du Canada à l'égard des autochtones au XXe siècle a été une réussite. Personne ne le croit. C'est la raison pour laquelle les Canadiens sont embarrassés lorsque nous soulevons la question, car ils savent qu'il y a quelque chose de tout à fait répréhensible dans tout cela. Chose certaine, il n'y a personne ici qui est fier de l'ancien système des traités et de la façon dont on en est arrivé là, lorsqu'on étudie le processus qui a conduit à la conclusion de ces traités.
Y a-t-il quelqu'un ici qui va défendre le système des réserves comme une grande invention sociale du XXe siècle qui a été un grand succès pour les autochtones? Un seul député va-t-il défendre la Loi sur les Indiens? Si la Loi sur les Indiens n'existait pas, un parlementaire interviendrait-il aujourd'hui pour proposer qu'elle soit adoptée par le Parlement afin de bien montrer comment nous entendons aborder le XXIe siècle? Je ne pense pas qu'il y ait un seul député, quel que soit son parti, qui soit fier de ce système, de l'approche retenue et du bilan de tout cela, qui se résume à la pauvreté, à l'éclatement des familles, à la violence, à la maladie, à une espérance de vie moindre et au désespoir que le système a entraîné pour des milliers et des milliers de personnes.
Les taux de chômage, de mortalité, d'analphabétisme, de suicide et d'incarcération sur les réserves, parmi les autochtones, surtout les jeunes, sont la conséquence de tout cela. C'est le résultat d'un système vieux de 130 ans pour s'occuper des autochtones au Canada. Il a été établi et mal géré au cours du siècle par des gouvernements libéraux et conservateurs successifs.
Bien entendu, il y a des exceptions. Des bandes ont été en mesure d'accroître leur niveau de vie et ont réussi dans diverses entreprises économiques. Des bandes et des dirigeants autochtones ont amélioré les services pour leur peuple et administrent leurs gouvernements de façon responsable. Certains autochtones réalisent de grandes choses dans les domaines des arts, des affaires, du sport et d'autres domaines d'activités. Cependant, il est regrettable de dire que c'est l'exception plutôt que la règle. Souvent ils ont réalisé tout cela malgré le système et non grâce au système.
Je trouve certaines des réalisations de ces gens incroyables étant donné les obstacles qu'ils ont dû surmonter à toutes les étapes de leur carrière et ce, dès l'enfance. Si la Loi sur les Indiens n'existait pas, quelle personne sensée oserait la présenter à la Chambre en tant que cadre ou solution à quelque problème que ce soit? Si le système des réserves n'existait pas, quelle personne sensée oserait le présenter à la Chambre comme solution? Personne n'oserait car le système ne fonctionne pas et que les choses vont de mal en pis. Il est fondé sur un principe défectueux.
Je vais décrire les trois plus grands défauts du système. Pour commencer, l'approche actuelle accorde un statut spécial aux autochtones en raison de leur race. C'est le sens de l'expression «Indien ayant un statut légal», lequel est décrit dans une loi qui est censée avoir été approuvée par le Parlement.
Le statut prévu dans la Loi sur les Indiens n'est pas, bien sûr, un statut privilégié. Loin de là. Ce statut prive les autochtones d'un grand nombre des outils politiques et économiques dont disposent les autres Canadiens, en commençant par l'autonomie gouvernementale et la responsabilité civique jusqu'à la panoplie des instruments du marché et de l'entreprise privée nécessaires au développement économique. Essentiellement, ce statut prive les autochtones des outils que la vaste majorité des Canadiens tiennent pour acquis. Au lieu de jeter des ponts entre les autochtones et le reste de la population canadienne, ce statut érige des barrières.
Le deuxième défaut de l'approche actuelle est qu'elle donne naissance à des gouvernements qui ne sont ni démocratiques ni responsables. L'approche actuelle en ce qui concerne le développement politique des autochtones n'impose aux gouvernements autochtones locaux aucune obligation réelle de rendre compte de leur gestion financière et de leur application des principes démocratiques.
Comment les Britanniques ont-ils obtenu un gouvernement démocratique? Comment les habitants du Haut-Canada et du Bas-Canada ont-ils obtenu un gouvernement démocratique, il y a 150 ans? C'est qu'ils détenaient les cordons de la bourse. Pourtant, en vertu du régime créé et géré par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, les gouvernements autochtones locaux reçoivent leur argent, non pas des gens à qui ils devraient rendre des comptes, mais du gouvernement et des Affaires indiennes. Par conséquent, les autochtones n'ont pas la moindre prise sur leurs propres institutions gouvernementales, à cause de la façon dont elles sont subventionnées.
Il est inutile de fournir des exemples, il font légion. Ils figurent dans le rapport du vérificateur général. Les quotidiens signalent les abus auxquels donnent lieu dans les réserve chaque exercice financier et chaque élection. Le gouvernement fédéral n'a pas mis en place le moindre gouvernement autochtone responsable au niveau local, tant sur le plan financier que démocratique.
On voit des signes de changement. On perçoit un mouvement de la base chez les autochtones ordinaires, qui demandent que leurs gouvernements et les Affaires indiennes soient tenus responsables financièrement et démocratiquement. Jusqu'à maintenant, leurs appels restent en grande partie sans réponse et je ne vois aucune prise en compte de leurs préoccupations dans cette mesure qu'on nous demande d'adopter cette semaine.
Le troisième gros défaut de l'approche qu'on utilisait dans le passé à l'égard du développement économique des autochtones et que ce projet de loi perpétue, c'est qu'elle se fonde en grande partie sur une économie socialiste, sur la propriété collective de terres et de ressources, sur la propriété publique des terres et des ressources, et sur une réglementation excessive de toute activité économique.
Dans les réserves, il n'y a pas le moindre droit foncier. Il n'y a pas le moindre droit contractuel. Il n'y a pas le moindre marché libre en matière de logement, de main-d'oeuvre et de capitaux. La tragédie de l'approche actuelle est que, pour réussir économiquement, de nombreux autochtones ont dû quitter leur réserve afin d'obtenir les outils que les autres Canadiens tiennent pour acquis.
J'ai passé 20 ans dans une firme d'experts-conseils en gestion. Un des aspects de mon travail consistait à faciliter les relations d'affaires entre les entreprises d'autochtones et celles du secteur des hydrocarbures. Je pourrais rapporter à la Chambre une série d'incidents où des entrepreneurs autochtones qui avaient tous les moyens pour réussir devaient surmonter toutes sortes d'obstacles seulement pour établir leur entreprise à l'extérieur des réserves. Simplement en ce qui concerne les capitaux, ils ne pouvaient contracter un emprunt en offrant leur propriété en garantie, car si cette propriété se situait dans une réserve, la banque refusait. C'était aussi simple que cela.
Combien de petits entrepreneurs du pays ont donné le peu d'avoirs qu'ils avaient en garantie en vue d'obtenir un prêt qui leur a permis de se lancer en affaires? Le simple instrument qui a probablement permis le démarrage de la majorité des petites entreprises au pays n'est pas accessible aux entrepreneurs autochtones en raison du système.
Où cela nous a-t-il menés? Où nous ont menés le statut particulier, la gestion sans reddition de comptes et l'économie socialiste? Ces mesures ont-elle donné la paix, l'ordre, la prospérité et une saine gestion publique pour les autochtones? Non. Elles se sont traduites pour les milliers d'autochtones que je viens de décrire par un record de pauvreté, de détresse et de désespoir. Elles ont mené à de sérieuses revendications territoriales, à des affaires judiciaires et à des recours devant les tribunaux qui empoisonnent encore davantage les relations entre autochtones et non-autochtones dans les secteurs des forêts et des pêches de la Colombie-Britannique et, désormais, de la côte est. De plus, les milliards de dollars que les Canadiens affectent chaque année aux Affaires indiennes se traduisent maintenant par une nouvelle responsabilité qui pourrait coûter jusqu'à 200 milliards de dollars à la population du pays.
Je vais vous lire un passage d'un article dont j'ai pris connaissance dans les journaux ce matin. Les députés peuvent-ils s'imaginer l'enthousiasme que cela a soulevé chez les investisseurs ou les gens qui songent à faire affaires dans des secteurs qui dépendent des terres autochtones et des traités? Le titre est le suivant: «Exigences autochtones: facture de 200 milliards de dollars.»
Le gouvernement fédéral a établi qu'il en coûterait 200 milliards de dollars pour satisfaire à toutes les exigences des autochtones.
Ce montant est supérieur au budget global du gouvernement du Canada pour toute une année. L'article ajoute:
Le chiffre de 200 milliards de dollars est la première estimation officielle du gouvernement fédéral faisant suite à la possibilité d'accorder aux autochtones absolument tout ce qu'ils réclament. Il comprend toutes les revendications autochtones en suspens à l'endroit du gouvernement, petites ou grandes, sérieuses ou fallacieuses.
«Il existe des milliers de cas et on nous en communique chaque jour,» déclare un fonctionnaire du ministère des Finances.
«On expliquera davantage le montant astronomique aujourd'hui dans les comptes publics de 1998-1999» a dit un fonctionnaire des Finances du gouvernement.
L'article traite plus loin de l'incidence de la décision Delgamuukw rendue par les tribunaux. En gros, presque chaque acre de terrain de la Colombie-Britannique se trouve à faire l'objet d'un privilège. L'article décrit ensuite le chaos suscité au sein du secteur des pêches de la côte est par une décision de la Cour suprême fondée sur une interprétation de l'approche erronée du développement économique que je viens tout juste de décrire.
Lorsque ceux qui songent à investir ou à faire des affaires avec les autochtones ou qui que ce soit d'autre lisent ce genre d'article, ils sont portés à faire preuve de prudence plutôt qu'à aller de l'avant.
Le drame, c'est que ces trois défauts dans l'approche du développement autochtone, du développement économique, sont maintenus, perpétués et même aggravés par l'accord à l'étude. Ce n'est pas un accord digne du XXIe siècle. Il perpétue une approche du gouvernement autochtone et du développement économique qui rappelle le siècle dernier. Elle a été inefficace au cours du XXe siècle et elle le sera tout autant à l'avenir.
Permettez-moi de signaler divers éléments de l'accord nisga'a qui montrent que cette approche évoque plus le XIXe siècle que le XXIe. Tout d'abord, l'accord perpétue un statut spécial au lieu de favoriser l'évolution vers l'égalité. Je vais donner trois exemples.
Le premier concerne la forme de gouvernement établie par l'accord pour les Nisga'as. Si l'accord leur donnait une forme d'administration municipale à charte fédérale analogue aux administrations locales que connaissent la plupart des Canadiens non autochtones, on pourrait y voir une façon de renoncer au statut spécial pour évoluer vers l'égalité, en donnant aux Nisga'as les mêmes outils d'administration locale qu'aux autres Canadiens. Le gouvernement lui-même a dit que l'accord nisga'a accordait une autonomie gouvernementale de type municipal.
Je soutiens quant à moi que c'est là une interprétation grossièrement erronée des faits, et le gouvernement le sait. Quelle administration municipale exerce un pouvoir suprême sur 14 sphères de compétence exclusive et des pouvoirs partagés sur 16 autres champs de compétence fédérale et provinciale?
Selon l'accord, les lois nisga'as l'emporteront sur les lois provinciales et fédérales—rappelons-nous que le statut des lois nisga'as découle d'une approche fondée sur la race—dans les secteurs suivants: citoyenneté nisga'a; structure, administration, gestion et fonctionnement du gouvernement nisga'a; terres et biens nisga'as; réglementation, octroi de permis et interdiction d'entreprises, de professions et de métiers; préservation, promotion et mise en valeur de la langue et de la culture nisga'as; imposition directe des citoyens nisga'as; services d'adoption, services destinés aux enfants et aux familles, enseignement de la maternelle à la 12e année; enseignement supérieur; organisation et structure de la prestation des soins de santé; autorisation de guérisseurs autochtones et octroi de permis; plans annuels de pêche nisga'a pour la capture et la vente de poissons et de plantes aquatiques; et allocations nisga'as de chasse au gibier et aux oiseaux migrateurs.
Ensuite, le régime fiscal établi par l'accord perpétue un statut spécial fondé sur l'ethnicité, au lieu de passer au régime fiscal auquel tous les Canadiens sont assujettis. Il est vrai que, d'ici 12 ans, les Nisga'as paieront des impôts sur le revenu comme d'autres Canadiens, ce que les députés de l'opposition officielle appuient, mais là s'arrête le mouvement vers l'égalité du régime fiscal. Le gouvernement nisga'a sera exempté de toutes sortes de taxes et de droits de coupe provinciaux. Il ne sera pas tenu de payer la TPS. Les citoyens nisga'as seront exemptés en permanence de l'obligation de détenir des permis fédéraux et provinciaux, et de payer des frais, des droits et des redevances sur les allocations de pêche et de chasse au gibier prévues aux termes de l'accord.
À première vue, ces aspects peuvent sembler mineurs pour certains, mais lorsque nous considérons que l'accord est censé devenir le modèle pour la conclusion de 50 accords ou plus en Colombie-Britannique, on créé un précédent en prévoyant des exemptions fiscales fondées sur la race dans toute la province et partout au Canada.
Troisièmement, je voudrais signaler les droits de pêche commerciale qui seront conférés aux Nisga'as dans la rivière Nass. Ils pourront capturer 26 p. 100 du total des prises admissibles dans cette rivière. Le parallèle avec ce qui se passe actuellement sur la côte est est évident. Dans sa décision, la Cour suprême du Canada a dit que le droit des autochtones de là-bas n'est pas limité lorsqu'il s'agit de tirer un revenu de subsistance raisonnable de la pêche du homard. Cette décision a donné lieu à des scènes de violence entre les pêcheurs autochtones et non autochtones et si l'on en étend l'application, elle provoquera la destruction de la base biologique halieutique.
La grande différence entre cette situation et celle qui résultera de l'adoption de l'accord et du projet de loi dont nous sommes saisis, c'est que, dans le cas présent, le gouvernement ne peut se cacher derrière la Cour suprême du Canada. Sur la côte ouest, en particulier dans le cas de l'accord conclu avec les Nisga'as, le gouvernement crée, de son propre chef, un précédent en reconnaissant un accès particulier à la pêche commerciale, accès qui est fondé sur des considérations raciales. Voilà un autre exemple de situation où l'on perpétue un accès aux ressources fondé sur des considérations raciales, ce qui, comme on a pu le constater sur la côte est et dans la pêche autochtone catastrophique sur la côte ouest, ne peut faire autrement que de perpétuer dans le XXIe siècle un conflit et une mauvaise gestion des ressources.
Permettez-moi de revenir sur le fait que l'accord en question n'est pas transparent sur les plans budgétaire et démocratique. Les différents paliers gouvernementaux nisga'as, le gouvernement central nisga'a lisims, les quatre administrations villageoises et les trois localités urbaines auront une vaste gamme de pouvoirs. Conformément aux modalités de l'accord, chaque Nisga'a dépendra beaucoup du gouvernement actuel pour diverses questions comme le logement, l'aide sociale et l'emploi. En fait, la majeure partie des emplois sur les terres nisga'as seront soit au sein du gouvernement nisga'a, soit au sein des sociétés appartenant au gouvernement nisga'a.
Le peuple nisga'a est peut-être dirigé de façon honorable, et c'est là quelque chose que je n'ai jamais nié, mais il n'en reste pas moins que la concentration du pouvoir politique entre les mains du gouvernement sur les terres nisga'as est inquiétante en partie à cause du fait que le gouvernement se trouvera à dépenser en grande partie des fonds qui viennent des contribuables canadiens et à cause du précédent que cet arrangement crée pour le règlement d'autres traités.
Gordon Gibson, ancien conseiller de M. Trudeau et ancien chef libéral en Colombie-Britannique, a écrit que les petits gouvernements qui ont de grands pouvoirs peuvent en venir à contrôler les citoyens au lieu que ce soit le contraire.
Le fait de constitutionnaliser un tel arrangement comme le fait l'Accord définitif nisga'a est un précédent très troublant. Je dirais que ce sont les Nisga'as de la base, les autochtones ordinaires, qui, depuis des temps immémoriaux, souffrent de la non-responsabilisation des gouvernements établis en vertu de mandats du gouvernement du Canada. Ce ne sont pas les chefs et les conseils qui souffrent dans un tel système, même si c'est le cas pour certains. Ce sont les citoyens ordinaires qui souffrent. Encore une fois, ce traité donne le pouvoir aux gouvernements sur les terres autochtones, et non à la population.
Aussi troublant que ces dispositions puissent être, ce n'est rien à côté de l'effet du sous-alinéa 9k)(ii) du chapitre 11 de l'accord, dont voici le texte:
...les citoyens Nisga'a sont admissibles à voter aux élections Nisga'a et à exercer une charge au sein du gouvernement Nisga'a.
Cette disposition prive de leurs droits les non-Nisga'as qui vivent sur les terres nisga'as. Ils n'auront pas le droit de voter dans les élections locales ou d'exercer une charge publique.
Dans l'accord de principe que le gouvernement fédéral a récemment signé avec les Inuit du Labrador, les non-Inuit ont au moins obtenu jusqu'à 25 p. 100, mais pas plus, des sièges au sein des conseils locaux. Même cette disposition n'a pas été reprise dans l'accord nisga'a.
Le ministre des Affaires indiennes a prétendu que les élections locales n'ont pas d'importance. Il a déclaré que les non-Nisga'as auront encore le droit de voter lors des élections fédérales et provinciales et qu'ils auront certains droits dans les procédures judiciaires et autres. Les locataires de la bande de Musqueam aussi ont ces droits et voyez à quoi cela leur a servi. Le droit de voter aux élections fédérales et provinciales ne les a pas mis à l'abri des décisions prises par le conseil de bande local avec l'appui enthousiaste du ministre des Affaires indiennes. Il n'est pas étonnant que les paroles du ministre réconfortent si peu ceux qui sont privés de leurs droits.
Le gouvernement fédéral entrevoit-il vraiment l'avenir des gouvernements autochtones en Colombie-Britannique et ailleurs au Canada comme des enclaves réservées à certains groupes raciaux où le droit de voter est déterminé par le droit du sang? Il est étonnant que, à l'aube du XXIe siècle, un gouvernement accepte de signer un tel accord. Pas étonnant que le gouvernement fédéral refuse de laisser la population de la Colombie-Britannique se prononcer par voie de référendum sur cet accord, puisqu'il sait parfaitement bien ce qu'elle aurait dit.
Je voudrais faire une petite digression pour répondre au ministre qui a dit que les droits démocratiques et politiques des gens seraient protégés parce que la Charte des droits et libertés s'appliquera au peuple nisga'a. Le ministre a raison lorsqu'il dit cela, mais il oublie que, en plus de définir ces droits et libertés, la Charte contient aussi l'article 25, qui est le suivant:
Le fait que la présente charte garantit certains droits et libertés ne porte pas atteinte aux droits ou libertés [...] des peuples autochtones du Canada, notamment...
...aux droits ou libertés existants issus d'accords sur des revendications territoriales ou ceux susceptibles d'être ainsi acquis. Cela fait également partie de la Charte, et j'estime que cela laisse sans protection une foule de gens assujettis à l'accord.
Je voudrais maintenant aborder le troisième vice de la démarche actuelle, qui se manifeste dans l'accord, à savoir le recours à la démarche socialiste en matière de développement économique. En vertu du modèle de développement économique proposé dans l'accord, presque tous les revenus viennent des gouvernements fédéral et provincial et sont versés au gouvernement nisga'a. Rien ne va aux chefs d'entreprise, aux travailleurs, aux contribuables ni aux citoyens nisga'a, tout va au gouvernement afin de stimuler l'activité économique.
L'ex-premier ministre de la Colombie-Britannique Glen Clark se réjouissait du fait que ce serait les contribuables canadiens qui paieraient la part du lion. En effet, le 14 décembre, l'an dernier, il a carrément déclaré que la Colombie-Britannique serait la bénéficiaire de l'argent venant d'Ottawa. Peut-être que cela explique son enthousiasme à cet égard. Cela n'avait rien à voir avec les Nisga'a, mais plutôt avec l'injection de 200 millions de dollars par le gouvernement fédéral; plus de 200 millions de dollars pour le traité nisga'a seulement venant des contribuables canadiens des autres provinces et territoires.
Non seulement les revenus viendront de l'extérieur, mais encore ils seront versés au gouvernement nisga'a. La presque totalité des 2 000 kilomètres carrés du territoire nisga'a appartiendra collectivement au gouvernement en pleine propriété. Ce sera le gouvernement nisga'a qui décidera quelles terres, s'il en est, seront vendues, louées ou détenues en propriété privée par les citoyens nisga'as ou non nisga'as.
Ainsi, le traité fait fi de l'individu et concentre le pouvoir, tant économique que politique, dans les mains du gouvernement nisga'a. En effet, l'entente conclue avec les Nisga'as inscrit un des pires aspects du système des réserves dans ce qui se veut un traité moderne.
Je vais toucher un mot sur la responsabilité à l'égard de ces lacunes. Quiconque cherche une approche de l'autonomie gouvernementale et du développement économique des autochtones qui soit digne du XXIe, se demanderait comment se fait-il que ces lacunes que tout le monde connaissait et qu'aucun député des deux côtés de la Chambre ne défendrait se retrouvent pourtant dans ce traité.
Pour commencer, ce n'est pas la faute des Nisga'as, bien entendu. On ne leur a jamais offert une autre approche au cours de toutes ces années qu'ont duré les négociations, et ce, pour la bonne raison que les Nisga'as négociaient avec le ministère dont la philosophie est entachée des trois lacunes dont je viens de parler.
Cette approche découle des législatures actuelles et passées, du gouvernement fédéral et du ministère des Affaires indiennes. Elle est proposée et renforcée par une nuée de bureaucrates, de politiciens, de consultants et de groupes d'intérêts qui tiennent mordicus au statu quo, même si le statu quo n'est pas bon pour les autochtones, les habitants de la Colombie-Britannique et les autres Canadiens.
Après avoir consulté le milieu des affaires et examiné le dossier du développement économique des autochtones, j'ai pu constater l'armée de consultants et d'avocats d'Edmonton et de Calgary qui se conduisent en véritables parasites du système. Ils ne s'intéressaient aucunement au bien-être économique des autochtones. Ils disposaient d'une liste de noms d'administrateurs et de chefs de bande. Quand ils étaient chassés d'un endroit pour cause de corruption, ils s'en allaient ailleurs. Ils vivaient de ce système. Ce sont des malades qui veulent perpétuer ce système. Il y en a encore beaucoup trop qui sont actifs et influents au sein du gouvernement actuel.
Pourquoi le Parlement ne reconnaît-il pas ces défauts dont j'ai parlé et ne recommence-t-il pas? Pourquoi le gouvernement ne l'a-t-il pas fait quand il en avait la chance avec les Nisga'as? Je vais dire pourquoi à la Chambre. Faire cela, pour les libéraux, ce serait admettre qu'ils font fausse route depuis près de 130 ans.
Une des choses qu'il nous est très difficile de faire, nous, politiciens fiers et égocentriques, c'est admettre que nous avons fait erreur, surtout quand nous avons pris décisions après décisions qui perpétuent la mauvaise décision initiale.
L'éclair de génie—et je me rappelle avoir lu ça il y a 30 ans—qui aurait pu nous mener dans une autre direction, c'est quand M. Trudeau a reconnu ce défaut en 1968, où nous menait un statut spécial fondé sur des droits. Il a fait un effort pour s'écarter de cette position quand le premier ministre actuel était son ministre des Affaires indiennes. Je voudrais prendre un instant pour lire deux ou trois choses que M. Trudeau a dites en 1969. Tout d'abord:
Nous pouvons continuer à traiter les Indiens comme s'ils avaient un statut spécial...
C'est ce que fait cet accord.
...en ajoutant des briques de discrimination autour du ghetto dans lequel ils vivent. [...] Ou nous pouvons leur dire qu'ils sont à une croisée des chemins, que le temps est maintenant venu de décider si les Indiens formeront une race à part au Canada, ou s'ils seront des Canadiens à part entière.
Voici ce qu'il a dit en 1968 à la Chambre:
Le gouvernement a depuis longtemps l'intention—et je suppose que la question viendra sur le tapis lors du débat sur notre politique vis-à-vis des Indiens—d'en arriver à un point où, en définitive, les Indiens seront traités comme tous les autres citoyens canadiens de la province où ils vivent.
Il a ajouté: «Nous ne pensons pas qu'il existe diverses catégories de Canadiens. Nous croyons que tous les Canadiens devraient être égaux.» Or, nous nous faisons critiquer sévèrement à la Chambre quand nous parlons de l'égalité de tous les Canadiens devant la loi. C'est l'ancien premier ministre qui a dit cela, un libéral plus influent que n'importe quel autre libéral aujourd'hui.
Le 30 avril 1982, M. Pierre Trudeau a dit à la Chambre des communes, je cite: «Nous croyons que tous les Canadiens doivent être égaux, de sorte qu'il serait préférable d'essayer de définir les droits de manière à n'établir aucune distinction entre les groupes ethniques.»
Je voudrais vous citer quelques remarques de l'actuel premier ministre. Certains députés à la Chambre se souviendront que le premier portefeuille qu'a occupé l'actuel premier ministre était celui des Affaires indiennes. Il occupait ce portefeuille à l'époque où M. Trudeau préconisait l'égalité. C'est à lui que l'on doit le fameux «livre rouge» qui contient cette déclaration, une tentative en vue de prendre une autre direction.
À l'époque, et je suppose que le premier ministre exprimait son propre point de vue et ne reprenait pas simplement les paroles de M. Trudeau, il a dit que ce traitement spécial avait fait des Indiens une communauté défavorisée et distincte et qu'il fallait manifestement changer le cours de l'histoire.
En 1969, il a déclaré à la Chambre des communes:
Pour de nombreux Indiens, la voie existe—la seule voie qui ait existé depuis la Confédération et avant—la voie d'un statut différent, cette voie qui a mené...
Où le premier ministre a-t-il dit que la voie d'un statut différent avait mené? Il a ajouté:
...à une sombre impasse de privations et de frustrations. Cette voie [...] ne peut, ni en pratique ni en théorie, mener à une pleine participation, à l'égalité. ...le gouvernement devra proposer une autre voie qui, graduellement, s'écartera de celle de statut différent pour se rapprocher de la pleine participation sociale, économique et politique à la société canadienne. C'est ça la solution.
Que s'est-il passé entre 1968 et 1999? Le premier ministre sait en son for intérieur que le système actuel ne fonctionne pas et qu'il est urgent de le réformer. Il le savait en 1968 et il doit en être encore plus conscient aujourd'hui alors que le système trahit les Canadiens autochtones, qui, de toute évidence, occupent une place spéciale dans le coeur du premier ministre. Il a lui-même adopté un petit garçon autochtone. Ce n'était pas une décision uniquement politique. C'était un élan du coeur. Ne reste-t-il pas éveillé la nuit, regrettant de ne pas avoir défendu avec plus de vigueur la cause de l'égalité quand il en a eu l'occasion, pendant les années 60, et ne se demande-t-il pas s'il est trop tard pour trouver une solution?
Il n'est pas trop tard, mais nous disposons de moins de temps qu'il y a 30 ans. Comme dans le cas de la dette nationale, la règle cardinale pour sortir du trou est de s'arrêter de creuser. Si nous voulons nous engager sur la voie de l'égalité, le premier pas consiste à mettre fin à la discrimination, contrairement à ce que fait ce traité.
L'Accord nisga'a était l'occasion de s'engager sur une voie différente, mais apparemment le gouvernement libéral est trop profondément enraciné dans le passé et dans le statu quo pour faire preuve du leadership nécessaire.
Passons maintenant aux autres groupes à la Chambre et aux raisons probables pour lesquelles ils appuient cet accord. Le Bloc ne s'opposera pas à ce projet de loi, car il accorde une forme de souveraineté-association à un groupe d'autochtones de la Colombie-Britannique. Le Bloc voit dans le principe de la souveraineté-association le début de la réalisation de son objectif ultime pour le Québec. Incidemment, ce document est donc diamétralement opposé à la position que prend le gouvernement pour réfuter les arguments en faveur d'un statut spécial pour le Québec.
Le NPD ne s'opposera pas à ce projet de loi parce qu'un grand nombre de ses députés sont, en leur for intérieur, encore partisans des principes économiques socialistes. Ces principes ont été abandonnés par la plupart des pays développés ou en voie de développement et pourtant le NPD s'y cramponne encore; il semble penser que le seul endroit où le socialisme existe encore à l'aube du XXIe siècle est dans les réserves indiennes, que ce serait un signe de progrès.
Le seul parti dont je n'arrive pas à expliquer la position dans ce dossier est le Parti progressiste conservateur. Il est vrai que les conservateurs sont autant à blâmer pour le système actuel que les libéraux à cause de leur complicité à l'époque de la conclusion des traités et de l'établissement du système de réserves.
Mais ce projet de loi était pour eux une occasion de se défaire de tout ce bagage. Personne à la Chambre n'aurait critiqué les conservateurs s'ils s'étaient levés à la Chambre pour dire: «Nous avons appuyé le système des traités, le système des réserves et la Loi sur les Indiens à l'origine. Nous pensions, nos ancêtres pensaient, que c'était la bonne chose à faire. Nous nous rendons compte aujourd'hui que ce n'était pas la bonne chose à faire, que ces principes sur lesquels ces systèmes étaient fondés n'étaient pas bons. Nous allons reconnaître notre erreur et changer de voie.» Personne à la Chambre ne les aurait hués. En fait, nous les aurions applaudis, mais ils n'ont pas fait cela.
Les conservateurs devraient rejeter l'élément souveraineté-association et les caractéristiques socialistes de ce traité parce que cela va à l'encontre de leurs principes, par exemple la création d'une autre pêche autochtone fondée sur la race, problème qui crée déjà d'énormes difficultés au Canada atlantique, d'où viennent la plupart des députés conservateurs. Nous aurions pensé que ces derniers auraient été sur le qui-vive. Mais les conservateurs à la Chambre semblent avoir décidé d'appuyer le projet de loi malgré tout cela.
Heureusement que ces conflits et ces restrictions n'ont aucun effet sur l'opposition officielle. Nous ne sommes pas responsables de l'approche actuelle. Nous n'avons absolument rien à voir avec cela. Nous n'étions pas là à l'époque. Nous sommes donc libres de la critiquer et de chercher des solutions de rechange.
Nous ne croyons pas et n'avons jamais cru en l'idée d'accorder un statut spécial à qui que ce soit. Nous nous sommes élevés contre cela dans le grand débat constitutionnel. Nous ne croyons pas à un statut spécial pour les anglophones ou les francophones. Nous ne croyons pas à un statut spécial pour les autochtones. Nous ne croyons pas à quelque statut fondé sur la race. Cela nous mènerait à la catastrophe.
Nous ne croyons pas au socialisme. Nous comprenons pourquoi les Prairies ont embrassé le socialisme agraire au plus fort de la dépression. Nous comprenons cela. Nous n'avons rien à redire à cela. Mais nous n'y croyons pas. Nous ne croyons pas que ces instruments économiques conviennent à notre époque. Si nous cherchons à développer des économies aujourd'hui, la dernière chose à faire est d'offrir à la population la propriété collective, des entreprises d'État, une telle approche au développement économique.
J'ajouterai que, comme par hasard, les réformistes représentent la majorité des circonscriptions fédérales en Colombie-Britannique. Par conséquent, personne ne devrait croire qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui sont en accord avec la position que nous faisons valoir.
L'opposition officielle est donc en mesure de se dissocier de l'ancienne approche. Nous n'en avons que faire. Nous n'avons que faire de la Loi sur les Indiens, si ce n'est que nous la supprimions avec le temps. Nous n'avons que faire du ministère des Affaires indiennes, sauf que nous voudrions le démanteler avec le temps et transférer ses fonctions et ses responsabilités de financement à des gouvernements autochtones qui sauraient rendre des comptes.
Nous n'avons que faire de l'approche traditionnelle à la conclusion de traités. Nous ne voulons pas que notre nom y soit associé pour des raisons historiques ou politiques. Cette approche n'a été qu'un désastre pour les autochtones et un embarras pour les autres Canadiens, et avec raison.
Les réformistes sont donc en mesure d'explorer et de présenter une tout autre approche au gouvernement autochtone et au développement économique. Cette approche repose sur des principes différents et meilleurs pour le XXIe siècle, sur des principes meilleurs que ceux qui sont énoncés dans l'accord. Je voudrais maintenant exposer ces principes.
Le premier principe qui devrait, à notre avis, régir les nouvelles relations avec les peuples autochtones, c'est le principe de l'égalité de tous les Canadiens devant la loi. Au lieu d'accorder un statut spécial et des droits fondés sur la race, nous proposons l'égalité de tous les Canadiens devant la loi comme principe directeur.
Soyons clairs, nous ne prétendons pas qu'il sera facile dans la situation actuelle d'atteindre cet objectif, mais le but consisterait à appliquer la même loi aux autochtones et aux non-autochtones. Au niveau pratique, nous aurions une loi pour régir la gestion des pêches et des ressources, pas une série de lois s'appliquant aux autochtones et une autre s'appliquant aux non-autochtones.
Permettez-moi de répliquer à deux objections que font souvent les gens d'en face lorsque nous parlons de notre engagement envers l'égalité.
Le premier argument qu'avancent certains de nos amis qui ne réfléchissent pas vraiment sérieusement à la question est le suivant: le concept de l'égalité ne prend pas en considération le caractère unique de certains groupes. Certains libéraux vont jusqu'à dire: «L'égalité devant la loi est impossible, parce que les gens ne sont pas tous pareils.»
Nous répondons à cela qu'il est possible de donner à tous les Canadiens les mêmes droits et les même pouvoirs devant la loi, tout en leur donnant la liberté de les utiliser différemment. Il est possible pour le gouvernement de traiter tout le monde de façon égale devant la loi et pour les Canadiens d'exercer leurs droits de manière à exprimer leur caractère unique, leur diversité ou toute autre caractéristique qui leur est propre.
C'est précisément la question qu'abordaient les premiers ministres provinciaux dans la déclaration de Calgary. Ils voulaient simplement affirmer le principe de l'égalité devant la loi et de l'égalité des provinces. Ils voulaient reconnaître le caractère unique du Québec. Comment fallait-il s'y prendre, à leur avis? En conférant à tous les mêmes pouvoirs.
Il n'y a rien à reprocher au fait que le Québec utilise ces pouvoirs pour bâtir d'une façon différente de celle de l'Alberta ou de la Nouvelle-Écosse. C'est ce qui permet de préserver la diversité du Canada. Or, on ne la préserve pas en conférant des pouvoirs différents à différentes administrations. C'est pourquoi les libéraux soutiennent que tout pouvoir conféré à une administration devrait être conféré à tous. On peut répliquer que, d'une façon ou d'une autre, l'égalité élimine la diversité, que ce soit à l'échelle canadienne ou parmi les autochtones.
Toujours au sujet de l'approche préconisant l'égalité, les libéraux ont prétendu qu'ils ne pourraient pas accorder une aide spéciale à ceux qui en ont besoin. S'il faut accorder un traitement égal à tous, on ne peut accorder une aide spéciale à quelqu'un sans l'accorder à tous, même si tout le monde n'en a pas besoin. On perpétue l'inégalité ou alors, on ne fait rien. Mais tout cela repose sur une fausse hypothèse. L'égalité permet l'aide spéciale. Il suffit de veiller à ce que le droit à cette aide ne soit pas lié à la race, la culture, la langue ou la religion, par exemple.
Par exemple, supposons que tous les députés conviennent qu'un grand nombre des habitants du nord de la Colombie-Britannique ont besoin d'une aide spéciale en matière d'éducation. Disons qu'un grand nombre d'entre eux ne se sont pas rendus jusqu'à la 10e année. L'économie moderne étant fondée sur le savoir, il est très difficile de faire son chemin sans d'abord s'assurer une solide éducation de base. Pourtant, de nombreux Canadiens ne sont toujours pas très instruits.
Supposons que nous convenions entre nous d'accorder une aide spéciale aux personnes défavorisées au plan des études. Nous pourrions, avec la coopération des provinces et du gouvernement fédéral, bien qu'il s'agisse d'une compétence provinciale, concevoir un programme d'aide spécial. Tous ceux qui n'ont pas fait leur dixième année auraient droit à ce service. Mais ce critère ne serait pas lié à la race. Il serait offert à tous. Dans le nord de la Colombie-Britannique et de l'Alberta, la majorité des participants seraient peut-être des autochtones, mais à cause de leurs besoins, non à cause de leur race.
On me dira que, pour un autochtone, cela ne fait pas la moindre différence. D'une façon ou de l'autre, il reçoit de l'aide. Je vais expliquer aux députés où est la différence. Si nous voulons obtenir le soutien de toute la collectivité pour ce programme, il faut l'offrir à tous. Si des non-autochtones demandent des renseignements sur le programme spécial qui permet d'aider les autochtones défavorisés au plan des études, s'ils font remarquer que les trois quarts des participants sont autochtones et demandent si nous leur accordons un privilège particulier, on pourra leur répondre par la négative, en ajoutant que tout enfant qui n'a pas fait sa dixième année aura droit au programme comme tous les autres. Le principe d'égalité est utile non seulement pour répondre aux besoins particuliers, mais aussi pour obtenir l'appui de la collectivité parce que tout le monde est traité équitablement.
Nous reconnaissons les erreurs de nos ancêtres. Par exemple, les vieux traités fondés sur la race compliquent la recherche d'égalité, puisque nous avons pris des engagements fondés sur la race. Lorsque des droits accordés en fonction de la race entrent en conflit avec les droits d'autres Canadiens, avec une saine gestion des ressources ou avec autre chose, il faut le reconnaître et au moins offrir un dédommagement en échange de l'extinction de ces droits. Voilà l'orientation que nous adopterions, au lieu de perpétuer ces droits.
Il est vraiment très dommage que le gouvernement fédéral n'ait pas profité de l'occasion pour adopter cette nouvelle approche basée sur l'égalité.
La Colombie-Britannique est le seul endroit où les autochtones ne sont pas encore soumis aux faiblesses de l'ancien système de traités. Comme nous le savons, aucun traité n'a jamais été négocié avec les autochtones de la Colombie-Britannique. Il était possible, surtout en Colombie-Britannique, de faire autrement. Et que fait le gouvernement fédéral? Plutôt que d'avoir recours à de nouvelles méthodes, ou à tout le moins de les essayer, le gouvernement s'en remet à un système qui n'a pas fonctionné dans toutes les autres parties du pays et il l'impose à la Colombie-Britannique. À mon avis, c'est tout à fait inexplicable.
Passons maintenant au second principe qui, selon nous, devrait favoriser un arrangement plus moderne avec les autochtones. Au lieu d'accepter le système actuel déficient et les liens qui unissent les gouvernements autochtones au ministère des Affaires indiennes, nous sommes d'avis qu'il faudrait adopter ce principe. Tous les Canadiens, y compris les autochtones, ont droit aux services de gouvernements locaux qui sont tenus de rendre des comptes aux gens qu'ils représentent, tant au niveau fiscal que démocratique. Qui aurait pu croire qu'au cours de la dernière année du XXe siècle, quelqu'un devrait se lever en Chambre pour défendre le droit de certains citoyens canadiens à être représentés par un gouvernement responsable, ce sur quoi le reste d'entre nous pouvons compter depuis 150 ans.
Où ce principe nous mènera-t-il? Il nous mène droit à la disparition du ministère des Affaires indiennes et au transfert éventuel de ses fonctions et de ses responsabilités financières à des gouvernements autochtones locaux et responsables. Mais il y a un hic et il est à l'avantage des peuples autochtones: les gouvernements locaux et autochtones doivent être responsables tant au niveau financier que démocratique face à leur peuple.
Je dis aux autochtones que leur affranchissement du ministère des Affaires indiennes dépendra de leur capacité à établir des gouvernements locaux en mesure de rendre des comptes sur les plans budgétaire et démocratique. Le plus tôt ils pourront établir de tels gouvernements, le plus rapidement on leur transférera les pouvoirs et le financement nécessaires. Plus ils mettront de temps à établir ces administrations au niveau local, plus le processus traînera en longueur, car les gens ne font pas confiance à un gouvernement qui ne peut rendre des comptes, qu'il soit autochtone ou non.
Cela nous amène à proposer des réformes concernant la procédure et les modalités d'élection des gouvernements autochtones locaux dans les réserves, et notamment à proposer qu'Élections Canada soit disponible pour se pencher sur les allégations concernant le trucage du vote et l'intimidation dans certaines réserves.
Cela nous amène à proposer une réforme des méthodes comptables des gouvernements autochtones locaux, et notamment à proposer que le Vérificateur général du Canada soit disponible pour garantir la responsabilité en matière budgétaire.
Nous proposons une troisième chose, difficile à mettre en oeuvre, mais que nous devrions cependant faire. C'est l'octroi d'une plus grande part des fonds du ministère des Affaires indiennes aux autochtones dans les réserves, de manière que ce soit aux gouvernements autochtones locaux que revienne la tâche d'exiger des impôts de leur population pour que celle-ci ait accès aux différents services. De cette façon, ce sont ceux à qui les gouvernements autochtones locaux doivent rendre des comptes qui tiendront entre leurs mains les cordons de la bourse de ces administrations gouvernementales.
Pour que ce principe de responsabilité budgétaire et démocratique s'applique aussi aux relations entre les autochtones et les non-autochtones, il faut cesser de négocier le règlement des revendications territoriales et les accords sur les administrations locales autochtones de façon tortueuse, derrière des portes closes et en étant hanté par l'idée de conflits d'intérêts, ce qui s'est malheureusement produit lorsqu'on a élaboré l'accord dont nous sommes saisis. Il faut plutôt privilégier un mode de négociation ouvert et transparent, dans le cadre duquel tous les intérêts sont bien représentés et où le ministère des Affaires indiennes n'est pas placé en situation de conflit d'intérêts.
Comment le ministère des Affaires indiennes peut-il se lancer dans ces négociations et proposer de transférer le pouvoir fiduciaire aux autochtones tout en prétendant défendre les intérêts fiduciaires des autres Canadiens qui ont des intérêts différents? C'est impossible de faire cela. Quand on demande à certains de s'acquitter de pareille tâche, on finit par obtenir des accords qui laissent à désirer, des accords au sujet desquels on met en doute l'intégrité des personnes concernées.
Je veux faire remarquer qu'à cause de cette lacune, parce que cet accord a été imposé par les dirigeants à la suite d'un long processus à huis clos entaché par les conflits d'intérêts, en fin de compte, on n'obtiendra pas l'appui de la majorité des gens de la Colombie-Britannique. Ceux qui suivent les sondages comme nous, de la classe politique, ont remarqué que l'appui pour l'Accord nisga'a en Colombie-Britannique suit exactement la même trajectoire, pour précisément les mêmes raisons, que l'Accord du lac Meech, qui a été jugé inacceptable dans cette province en fin de compte.
Les députés vont se rappeler que, comme dans le cas de l'Accord du lac Meech, lorsque cet accord a été annoncé, soit dit en passant, avec toute la campagne des relations publiques et tous les communiqués de presse, toutes les grandes déclarations de la ministre etc. qui ont entouré cela, l'appui de la population était au départ supérieur à 60 p. 100 contre 40 p. 100 qui s'opposaient à cet accord. Il y avait donc 60 p. 100 des gens en faveur de cet accord, car beaucoup de gens ne connaissaient pas ses dispositions. Les autres s'y opposaient. En mars, un sondage effectué par la Feedback Research Corporation montrait que cet appui était tombé à 42 p. 100, que 32 p. 100 étaient contre et que 36 p. 100 connaissaient à peine cet accord. En août 1999, un sondage effectué par la firme Market Trends Research montrait que 45 p. 100 étaient contre, 36 p. 100 étaient pour et 12 p. 100 étaient indécis. Cet accord suit la même trajectoire descendante que l'Accord du lac Meech qui a commencé à 60 p. 100, 65 p. 100 pour être enfin rejeté. Pourquoi? Pour la même raison qu'on a rejeté l'Accord du lac Meech, parce que les dirigeants ont pris les décisions à huis clos sans consultation de la base. Les gens n'ont pas confiance dans ce qui se passe à huis clos, surtout s'ils pensent qu'il y a des membres de la classe politique en cause, malheureusement.
Plus la population en apprend sur le contenu de ces accords, plus on assiste au même phénomène qu'avec l'Accord du lac Meech. Lorsqu'il s'agissait simplement d'un communiqué de presse, les gens voyaient cela d'un bon oeil, mais plus ils en apprennent sur ce qu'il prévoit moins ils l'appuient.
Le refus des gouvernements fédéral et provincial de permettre aux Britanno-Colombiens d'exprimer leur approbation ou leur désapprobation de cet accord, les Canadiens étant ce qu'ils sont quand ils se font dire qu'ils n'auront pas voix au chapitre, se traduit par un renforcement, et non par un fléchissement, de leur opposition à ce qui est voulu.
Que le ministre affirme que c'est trop difficile à comprendre pour les Britanno-Colombiens constitue une insulte à l'intelligence des électeurs. La nation nisga'a a tenu un référendum sur la question et elle a, semble-t-il, compris de quoi il retournait. Je félicite les Nisga'as des efforts qu'ils ont déployés pour tenter d'informer les leurs.
Le ministre a dit que les Nisga'as arrivent à comprendre la question grâce aux explications qui ont été faites, mais que le reste de la population de la Colombie-Britannique en est incapable, de sorte qu'elle ne pourra pas donner son avis. Cela ne peut que susciter l'opposition à l'accord.
J'en viens maintenant au troisième principe qui, à notre avis, devrait être incorporé à une nouvelle démarche en matière de développement économique autochtone. Au lieu d'offrir aux Nisga'as, ou à toute autre nation autochtone, les moyens dépassés et discrédités que constituent la propriété collective des terres, la planification gouvernementale centralisée, la propriété d'État et la réglementation excessive, nous devrions commencer à trouver des moyens d'adapter l'entreprise privée et les moyens de développement économique fondés sur le marché aux besoins des peuples autochtones. Autrement dit, il faut favoriser la propriété privée et les droits contractuels dans les réserves. Cela stimulerait davantage le développement économique que tout le collectivisme que l'on trouve dans l'accord. Il faut commencer à développer de vrais marchés du logement et des emplois dans les réserves et à accorder aux hommes et aux femmes des droits économiques égaux.
Le gouvernement prétend s'intéresser de très près à l'égalité des droits économiques égaux dans la fonction publique fédérale. Pourquoi n'observe-t-il pas ce qui se passe dans les réserves qui relèvent de sa compétence en vertu de la Loi sur les Indiens? Personne ne conteste cette compétence. Il y a un écart plus grand encore entre les droits civils et économiques des hommes et ceux des femmes dans les réserves que dans la fonction publique, et on sait que l'écart est grand dans cette dernière.
Le gouvernement semble s'intéresser de très près à ce principe quand il s'applique aux non-autochtones, mais pas beaucoup quand il s'agit des autochtones.
Le gouvernement devrait songer à éliminer les barrières commerciales et réglementaires qui nuisent aux entreprises autochtones plutôt qu'à en ajouter d'autres.
Le projet de loi C-9 est truffé de références aux pouvoirs de réglementation ou au droit d'établir des pouvoirs de réglementation. N'avons-nous pas appris de notre propre expérience en matière de développement économique que la réglementation gouvernementale tue l'activité économique? Plus il y a de règlements, plus il y a d'entreprises qui meurent. Rien dans l'accord ne reconnaît ce fait.
Que faut-il faire? Personne n'a toutes les réponses, mais cela n'empêche pas de commencer à appliquer des solutions, ce que ne fait pas le projet de loi. Le projet de loi et l'accord qu'il met en vigueur font la même erreur que le ministère des Affaires indiennes a faite dans les Prairies lorsqu'il a décidé que les autochtones seraient transformés en agriculteurs. Qu'a fait le ministère? Il leur a donné des chevaux alors que les non-autochtones obtenaient des tracteurs. Il leur a donné une technologie en retard d'une génération. C'est exactement ce que fait le gouvernement aujourd'hui.
Je voudrais maintenant parler de responsabilisation à l'égard du projet de loi et de l'accord nisga'a. Nous, de l'opposition officielle, reconnaissons que nous ne pouvons pas à nous seuls faire appliquer les principes de l'égalité devant la loi, de la responsabilisation financière et démocratique, de la libre entreprise et de la liberté des marchés par les gouvernements autochtones ou dans le développement économique des autochtones. Il faudrait pour cela que la majorité des députés à la Chambre souscrivent à ces principes et il est évident que nous n'avons pas cette majorité.
Cependant, nous pouvons préconiser de faire avancer d'au moins un cran le principe de la responsabilisation des gouvernements autochtones et du développement économique. Le vote sur le projet de loi et sur l'accord qu'il met en oeuvre forcera les députés à déclarer s'ils veulent perpétuer une approche du XIXe siècle qui ne fonctionne pas ou s'il veulent chercher une nouvelle approche digne du XXIe siècle.
Les articles de fond sur le projet de loi diront à la population à quelle enseigne logent les commentateurs et les éditorialistes. Personne, sauf les historiens peut-être, ne se rappelle qui était responsable des traités initiaux qui n'ont pas fonctionné, qui était responsable du système de réserves qui n'a pas fonctionné, qui a créé le système des pensionnats, qui a peut-être été conçu avec les meilleures intentions, mais qui n'a pas fonctionné. Personne ne se rappelle qui s'était. Les historiens le savent, mais les souvenirs se sont estompés.
Cependant, en cette ère de l'information et de la révélation complète, nous pouvons être certains que les noms de ceux qui perpétuent ce système seront connus partout. Ils seront connus dans toutes les collectivités autochtones. Ils seront connus dans toute les collectivités au Canada, et ils seront tenus responsables de cette décision.
Je tiens à signaler que la population portera une attention toute particulière à la façon dont sept députés libéraux de la Colombie-Britannique vont voter: le député de Victoria, le député de Richmond, le député de Vancouver-Sud—Burnaby, la députée de Vancouver-Centre, la députée de Vancouver Kingsway, le député de Vancouver Quadra et le député de Port-Moody—Coquitlam—Port Coquitlam.
Dans ces circonscriptions, je crois que la majorité des gens appuieraient l'argument que nous avons fait valoir ici. Ces députés auront à décider, et je sais que les libéraux n'aiment pas ce genre de dilemme, s'ils représenteront leurs électeurs à la Chambre sur un principe fondamentalement important ou s'ils suivront la ligne de parti en se rangeant derrière une façon d'aborder le développement autochtone qui date du XIXe siècle. Nous regarderons ce qui se passera et verrons à ce que tous les électeurs de chacune de ces circonscriptions sachent si leur député est du côté du XIXe siècle ou du côté du XXIe siècle.
Je vais raconter une histoire à la Chambre pour terminer. Je n'ai pas eu beaucoup d'amis proches chez les autochtones. J'en ai eu quelques-uns, et la plupart d'entre eux étaient des gens d'affaires. La meilleure amie autochtone que j'ai eue s'appelait Ernestine Gibot. C'était une Indienne chippewa qui a passé les premiers 45 ans de sa vie dans le nord de l'Alberta, à l'ouest de Fort McMurray. Elle a fait du piégeage et a vécu selon le mode de vie traditionnel. Elle a souffert de toutes les choses dont les femmes autochtones et les autochtones en général peuvent souffrir dans ces collectivités. Je pourrais retenir longtemps la Chambre ici si j'énumérais toutes ses souffrances.
Un jour, pour une raison que je ne connais absolument pas, elle est sortie de la forêt du nord de l'Alberta. Elle arrivait à la fin de la quarantaine et elle avait décidé qu'elle allait entreprendre une nouvelle vie et se trouver un emploi. Elle s'est installée à Edmonton. Elle a longtemps tourné en rond, passant des programmes sociaux, aux organismes d'aide et à tous les services de soutien d'Edmonton pendant sept ans, jusqu'à ce qu'elle trouve enfin un vrai emploi. Je pourrais raconter toute ses péripéties, mais cela prendrait trop de temps.
J'ai fait sa connaissance parce que j'exerçais des fonctions d'expert-conseil auprès de l'usine de pétrole lourd d'Esso située à Cold Lake. Comme le savent certains députés de l'Alberta, il y a une bande de Chippewyans tout près de cette usine. Nous y effectuions des études d'impact socio-économique. J'en sais assez long au sujet des Cris, des Cris des bois et des Cris des Prairies. Toutefois, je ne connais pas bien le peuple Chippewa et j'ai mentionné à quelqu'un que je cherchais une personne qui serait en mesure de me conseiller et de m'apprendre les façons de faire de ce peuple.
Un travailleur social d'Edmonton qui savait que je cherchais quelqu'un a amené Ernestine Gibot à mon bureau. Elle m'a raconté son histoire. Elle m'a dit qu'elle était en chômage. Je lui ai dit que nous, les blancs, lorsque nous sommes en chômage, nous ne l'affichons pas publiquement. Nous imprimons de petites cartes sur lesquelles figure la mention expert-conseil. Nous nous donnons un air très industrieux et nous distribuons ces cartes. Et miracle, au bout d'un certain temps, quelqu'un nous donne effectivement du travail. Elle a dit qu'elle ne croyait pas que cette façon de procéder fonctionnerait, mais qu'elle était prête à l'essayer. Nous avons imprimé des cartes qui portaient la mention «Ernestine Gibot, Services de consultation.» J'ai donné mon nom en guise de référence parce qu'elle me fournissait des services de consultation. Elle a distribué les cartes.
Elle pouvait parler anglais, cri, slave et chipewyan. Elle avait l'habitude de faire la tournée des hôpitaux parce qu'elle savait qu'on y avait besoin de services d'interprète. Elle visitait les autochtones. Elle distribuait sa carte. Quelqu'un à qui elle la donnait lui a dit un jour qu'il y avait un poste à pourvoir dans le domaine des études autochtones à la commission des écoles publiques d'Edmonton et qu'elle devrait aller voir car la commission scolaire pouvait peut-être avoir besoin de ses services. De fil en aiguille, elle a réussi à obtenir un emploi.
Son histoire m'a tellement impressionné que je me suis fait un devoir d'étudier comment elle était passée de la brousse à ce premier emploi. À l'époque, je coordonnais un groupe de discussion de questions économiques qui réunissait des représentants d'environ 15 sociétés pétrolières, des durs à cuire, mais qui avaient à coeur le développement des autochtones. Le groupe avait l'habitude de se réunir une fois par trimestre pour voir s'il y avait quelque chose qu'il pouvait faire pour créer plus d'emplois ou de possibilités de développement pour les autochtones.
Au nom de ce groupe, je me suis engagé à étudier comment Ernestine était passée de la brousse du nord de l'Alberta à ce premier emploi, car il y avait peut-être des leçons à tirer de son histoire. J'ai retracé son cheminement d'un organisme à l'autre, du médecin au travailleur social, au prêtre, au consultant, d'un point à l'autre du dédale qui incluait peut-être 50 ou 60 contacts avec des organismes et ainsi de suite.
J'ai découvert qu'elle avait obtenu de l'aide le long de son cheminement. Si elle ne s'était pas trouvée dans le système que j'ai décrit, elle aurait pu ne pas rencontrer ces personnes, mais dans presque tous les cas, la personne qui l'avait aidée avait dû sortir de la case définie par le système des Affaires indiennes pour pouvoir l'aider.
Le médecin des Affaires indiennes qui lui a conseillé de quitter le Nord a dit qu'il ne lui appartenait pas de lui dire où aller vivre, mais qu'il allait oublier un instant sa fonction de médecin des Affaires indiennes pour lui parler comme un ami. Il lui a dit de quitter la région sinon elle mourrait en moins d'un an.
Le prêtre qu'elle est allée voir lui a dit: «Je suis censé maintenir le caractère sacré du mariage et je ne peux pas vous dire de quitter votre mari, qui vous a beaucoup maltraitée, mais en tant que citoyen ordinaire, je vous conseille de sortir de cette relation, sinon vous serez morte d'ici un an.» Il a dû s'écarter de son rôle traditionnel pour lui offrir cette aide.
Puis, il y a eu la travailleuse sociale qui m'a amené cette femme. Elle était censée faire connaître aux gens les projets d'emploi bidon créés par le gouvernement. C'était son travail. Elle n'était pas censée aller discuter avec des experts-conseils qui faisaient affaire avec la méchante industrie pétrolière, mais elle s'est écartée de son rôle traditionnel parce qu'elle voulait vraiment apporter son aide.
Bref, si les députés veulent lire l'histoire d'Ernestine Gibot, elle est racontée dans l'édition d'octobre 1984 du Reader's Digest.
J'exhorte les députés à changer leur façon de penser s'ils veulent vraiment venir en aide aux autochtones sur le plan de la structure du gouvernement ou du développement économique. Nous devons nous écarter de nos vieux schèmes de pensée, ce que le projet de loi ne fait pas. Il enferme les Nisga'as dans le même vieux système et les empêche d'en sortir. C'est pourquoi j'exhorte les députés à s'opposer au projet de loi. C'est également pourquoi je présente un amendement pour favoriser une discussion ultérieure. Je propose:
Que la motion soit modifiée par substitution aux mots suivant le mot «Que», de ce qui suit: «le projet de loi C-9, Loi sur l'Accord définitif nisga'a, ne soit pas maintenant lu une deuxième fois mais que l'ordre soit révoqué, le projet de loi retiré et l'objet renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.»
Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je voudrais obtenir le consentement unanime de la Chambre pour poser quelques questions au chef de l'opposition officielle au sujet de son opposition à l'accord nisga'a.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour que des questions soient posées au chef de l'opposition à la suite de son allocution?
Des voix: D'accord.
Une voix: Non.
M. Monte Solberg: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Ce dossier est d'une importance extrême. Je suis déçu que les libéraux ne permettent pas la poursuite de ce débat. Nous aimerions que l'on puisse poser des questions au chef de l'opposition, et j'aimerais savoir pourquoi le ministre s'oppose à ce que l'on pose au chef de l'opposition officielle des questions portant sur ce dossier.
Le vice-président: Je suis désolé, mais il n'y a pas là matière à un recours au Règlement. Il a été demandé à la Chambre si elle donnait son consentement pour qu'il y ait une période de questions. Le consentement a été demandé et il a été refusé. Le Règlement de la Chambre prévoit que les trois premiers orateurs qui prennent la parole sur un projet de loi de cette sorte n'ont pas droit à une période de questions ou d'observations. Sans le consentement de la Chambre, nous ne pouvons donc pas le faire. S'il y a des députés qui désirent modifier le Règlement, il a des modalités à suivre, et je suis certains qu'ils le feront.
M. Randy White: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Étant donné la nature et l'importance de ce dossier, je me demande si je pourrais demander le consentement de tous les députés de la Chambre pour demander au gouvernement de faire venir en cette enceinte au moins un député libéral de la Colombie-Britannique...
Le vice-président: Le leader parlementaire de l'opposition officielle sait pertinemment qu'il n'y a pas là matière à un recours au Règlement et qu'il est interdit de mentionner l'absence d'un député, tout aussi agréable que cela puisse être pour lui.
M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. La députée, chef du NDP, a demandé pour elle-même la permission de poser des questions au chef de l'opposition, mais elle lui a été refusée. Je me demande si nous pourrions demander la permission pour les députés de tous les partis de poser des questions au chef de l'opposition. Les députés libéraux aimeraient peut-être aussi pouvoir le faire.
Le vice-président: Je croyais avoir demandé, à la suite de l'intervention de la députée de Halifax, si la Chambre était d'accord pour que les députés interrogent le chef de l'opposition sur son discours. Je réitère la question.
Y a-t-il consentement unanime pour la tenue d'une période de questions à la suite du discours du chef de l'opposition?
Des voix: D'accord.
Une voix: Non.
Le vice-président: Le débat porte sur l'amendement.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que j'interviens aujourd'hui sur le projet de loi C-9.
Permettez-moi de faire un petit aparté en commençant et de faire quelques remarques au chef de l'opposition officielle. On ne peut peut-être pas lui poser de questions, mais on peut quand même réagir à l'ensemble de son discours. Je l'entendais prêter des intentions à chacun des partis politiques de la Chambre des communes.
Je tiens tout d'abord à m'inscrire en faux contre l'ensemble de l'argumentation du chef de l'opposition. Il y a seulement un point sur lequel je suis en accord avec lui, c'est que probablement seul le Parti réformiste votera contre le projet de loi sur les autochtones à l'étude aujourd'hui.
Plus tôt, le chef de l'opposition racontait l'histoire d'une femme qui était sortie de la forêt pour conquérir le marché du travail. L'attitude du Parti réformiste et son intransigeance sur la question autochtone, sur la question des immigrants, font que c'est peut-être pour cela que ce parti est le seul à voter contre des propositions, des projets de cette ampleur qui concernent les autochtones, les immigrants, etc.
J'ai moi aussi une histoire à raconter au chef de l'opposition. Lorsque j'étais jeune, que j'avais neuf ou dix ans, je n'étais pas dans les cadets de l'armée, mais mes amis en faisaient partie. Je me souviens qu'il y avait une revue annuelle une fois par année et qu'on se regroupait le long de la rue pour voir défiler tous les jeunes au pas militaire.
Je me souviens très bien d'avoir été avec ma mère, à regarder passer le défilé, lorsque la voisine, dont le fils faisait partie du défilé, s'était s'exclamée: «Mon Dieu, ça n'a pas de bon sens, il y a uniquement mon fils qui est au pas.» Alors, à ce moment-là, je regarde ma mère, je la vois sourire et elle semble comprendre ce que je pense, c'est-à-dire que c'est probablement juste son fils qui n'est pas au pas.
C'est un peu la même chose pour le Parti réformiste. Ils sont à peu près les seuls à ne pas être au pas sur la question autochtone et c'est probablement à cause de leur intransigeance excessive à l'égard de ce genre de projets de loi relatifs aux autochtones et aux immigrants. Il m'apparaissait important de raconter ma petite histoire dès le départ.
J'aimerais aussi, en commençant, saluer tous les Nisga'as qui, aujourd'hui, doivent suivre le débat parlementaire à la télévision. Je tiens aussi à féliciter et à saluer les Nisga'as qui sont venus ici, sur la Colline parlementaire, au cours de l'été pour donner leur appui et leurs explications. Ils sont encore ici pour le débat. Je tiens à leur dire que je suis extrêmement fier du travail qu'ils ont accompli, entre autres Joe Gosnell qui est ici, sur la Colline parlementaire, depuis quelques jours, ainsi que Harry Nyce qui se trouve dans la tribune actuellement et qui suit le débat attentivement.
Finalement, après au-delà d'une centaine d'années, il ne faut pas se décourager. Je reprends l'expression de Joe Gosnell: «Il reste quelques jours avant l'arrivée du canot sur la rive.» Ils seront parvenus à une entente d'autonomie gouvernementale. Là-dessus, ils pourront certainement compter sur l'appui du Bloc québécois.
Ici, à la Chambre, on a souvent des débats sur la portée légale de tel article, la portée politique de telle décision qu'on prend comme parti, mais j'aimerais aussi porter à l'attention de mes collègues de la Chambre qu'il y a aussi une portée humaine à l'ensemble des débats. Comme députés du Parlement, nous défendons des points de vue, nous défendons le point de vue de nos électeurs et nous défendons aussi celui de certaines personnes qu'on peut représenter dans des dossiers spécifiques comme celui des affaires autochtones.
Mais ce qui m'apparaît important aussi, c'est qu'il faut toujours regarder cela dans notre grille d'analyse lorsqu'on examine le projet de loi. Il faut voir de quelle façon les gens qui bénéficieront ou non de nos décisions vont réagir.
C'est pour cela que le dossier des affaires autochtones en est un, à mon avis, absolument extraordinaire pour celui qui le détient, parce qu'il y a différentes façons de procéder. Personnellement, je suis un de ceux qui croient énormément aux relations interpersonnelles. Il n'y a rien de mieux que d'aller sur une réserve autochtone pour comprendre le vécu autochtone.
J'ai eu l'occasion d'aller sur plusieurs réserves autochtones, J'ai aussi eu l'occasion, le privilège et l'honneur de visiter à deux reprises les territoires nisga'as. Je suis heureux de dire que la première fois que j'y suis allé, il n'était aucunement question d'un projet de loi ici à la Chambre. C'était tout simplement à la suite de mes lectures sur le sujet que j'avais considéré qu'il s'agissait d'une des grandes nations autochtones du Canada. Je me suis dit: «Je connais un peu les nations autochtones du Québec, et j'aimerais peut-être connaître les nations autochtones du reste du Canada.»
Je suis donc allé en territoire nisga'a. J'ai été très impressionné, entre autres, par le paysage. Cela fait deux fois que j'y vais et je suis toujours impressionné. On peut comprendre l'attachement que les autochtones ont face à la mer, à la terre, aux cours d'eau, dont la rivière Nass, et à toutes les ressources fauniques qui font partie de leur philosophie.
Quand on se rend dans la vallée du Nass, on voit la rivière et sa couleur qui est très impressionnante. On ne retrouve pas cela ici au Québec et en Ontario. L'eau de la rivière est cristalline et un peu verdâtre. C'est de l'eau qui coule des glaciers. J'ai compris que non seulement c'était un paysage extraordinaire, mais qu'il a une portée importante dans la vision que les autochtones ont de leurs terres.
J'ai été très impressionné de voir non seulement ce paysage, mais les gens qui habitaient là. C'est là qu'on commence à comprendre l'importance du projet de loi qui est devant nous aujourd'hui.
Je ne pourrais pas m'exprimer aujourd'hui avec autant de connaissances si je n'avais pas vécu l'expérience sur le terrain et vu ce qui se passait. Ces voyages m'ont permis de découvrir non seulement la grande nation nisga'a, mais aussi toute la portée humaine de leurs intentions eu égard à une plus grande prise en charge de leur autonomie. C'est très important pour moi de le dire.
Parmi les paysages qui m'avaient impressionnés, il y avait les «lava beds»—j'imagine que la traduction doit être les «lits de lave»—, où presque 2 000 Nisga'as ont péri lors d'une éruption, il y a plusieurs centaines d'années. Aujourd'hui, c'est un parc national. Il faut voir comment le territoire fut dévasté et aussi voir de quelle façon la nature est maintenant en train de reprendre son emprise sur une dévastation qui a eu lieu il y a plusieurs centaines d'années.
Les Nisga'as respectent le terrible malheur qui est arrivé à ces communautés. Il y avait deux communautés, et ce sont 2 000 Nisga'as qui ont péri lors de cette éruption.
C'est intéressant de voir comment on explique cela en territoire nisga'a. C'est un peu mystique et il y a beaucoup de symbolisme. Entre autres, on nous explique qu'avant le désastre, les jeunes enfants avaient commencé à ne pas respecter la nature et à faire souffrir la faune. Maintenant, les sages et les aînés expliquent aux générations montantes nisga'as qu'il faut toujours respecter la nature et tout ce qui l'habite. Ils attribuent le désastre au fait que ce respect ait été perdu à un moment donné.
Cela en dit long sur la philosophie et l'importance que les autochtones accordent à la nature, à ce qu'ils appellent la Mère Terre.
J'ai eu la grande opportunité d'aller dans un village où, à mon point de vue, il y avait les plus beaux totems qu'on puisse voir. J'ai vu beaucoup de villages autochtones, mais je n'ai jamais vu d'aussi beaux totems que dans le village nisga'a où je suis allé. Près de la rivière Nass, des artistes bâtissent des totems d'une cinquantaine de pieds. Ils peuvent prendre jusqu'à un an pour les bâtir. Encore une fois, le grand respect de la nature y est très bien représenté avec des sculptures d'animaux comme le loup, le hibou, l'épervier, et aussi les baleines, pour lesquelles ils ont un énorme respect. Tous les animaux sont représentés dans ces grands totems, et c'est tout à fait intéressant de découvrir leur culture.
On découvre aussi de grandes personnes. Mon chauffeur est d'ailleurs présentement sur la Colline parlementaire. C'est lui qui m'avait guidé la dernière fois. Éric avait pris soin de me faire visiter tout cela et de m'emmener chez sa mère, de me faire rencontrer sa famille, de me conduire à la maison où on fume le saumon, où on peut le manger et où on le partage, avec encore une fois un grand respect des ressources halieutiques. Ces choses-là me touchent et me permettent maintenant, quand j'ai un projet de loi devant moi, de dire: «Il n'y a pas seulement là un beau paysage, il y a aussi des gens extraordinaires qui l'habitent». Il faut aujourd'hui faire en sorte de permettre à ces gens-là de voler de leurs propres ailes. À cet égard, je reprend à peine l'aspect symbolique de l'oiseau.
Actuellement, et c'est là un des premiers désaccords que j'aurai avec le chef de l'opposition officielle, la Loi sur les Indiens ne peut plus rester comme cela. C'est une cage pour eux. Le peuple nisga'a est un oiseau d'une grande fierté, comme un aigle, qui est enfermé dans une cage appelée la Loi sur les Indiens. La clé pour ouvrir cette cage, c'est le projet de loi qui est devant nous aujourd'hui en vertu duquel les Nisga'as pourront s'envoler, se donner des structures, élire leur gens et faire en sorte que l'ensemble des valeurs qui vont être véhiculées leur seront particulières et spécifiques. Je crois que c'est la façon pour eux de s'intégrer.
Je vais abondamment parler tout à l'heure de l'aspect de l'égalité. Le Parti réformiste n'a pas compris que l'aspect de l'égalité n'est pas la panacée qui va tout régler. D'ailleurs, nous les Québécois, on n'aime pas se faire dire que le Québec est une province comme les autres. Je ne pense pas que les Nisga'as aiment se faire dire que ce sont des Canadiens comme les autres. Les Nisga'as, je m'excuse, ne sont pas des Canadiens comme les autres. Il y a eu plusieurs tentatives, même du gouvernement libéral, en 1969, pour essayer d'assimiler ces personnes. Le gouvernement de l'époque avait été obligé de faire marche arrière parce qu'il aurait eu une révolte sur les bras s'il avait continué.
C'est important de ne pas dire que par l'égalité on va tout régler. Ce n'est pas vrai. Les Québécois ont toujours demandé un statut distinct et on n'a jamais voulu le leur donner. Pour ce qui est des autochtones, c'est maintenant un statut distinct qu'on leur accorde. Bien sûr, ils vont continuer d'évoluer à l'intérieur de la Constitution que l'on connaît et d'être des citoyens de la Colombie-Britannique et du Canada, mais ils vont être en premier lieu des citoyens nisga'as. Il ne faut pas être expert en affaires indiennes pour comprendre que la première réaction qu'ont ces gens-là, c'est de reconnaître d'abord leur propre nation.
Personnellement, quand je vais dans différentes réserves, je demande par exemple aux Indiens: «Comment vous considérez-vous? À ceux du Québec, par exemple, je leur demande vous considérez-vous Québécois ou Canadiens?» Ils me répondent toujours: «Je me considère Montagnais», ou «Je me considère Inuit» ou «Je me considère Abénaquis». Ensuite, ils font une certaine identification graduelle, mais ils commencent d'abord par reconnaître leur propre statut.
Je veux également expliquer le cheminement démocratique et pacifiste des autochtones, parce que cela fait quand même au-delà de 100 ans que cela dure et que des tentatives ont été faites de la part des Nisga'as pour régler le problème et acquérir une plus grande autonomie. Aussi loin qu'en 1880, des gens entreprenaient des démarches pour dire au Parlement canadien: «Nous, on aimerait avoir plus de contrôle sur notre avenir.» Cela a pris beaucoup de temps avant que le tout puisse commencer à déboucher. Au cours des années 1970, on a commencé à avoir un peu de reconnaissance des titres autochtones et des droits ancestraux.
J'ai rencontré un grand Canadien et un grand Nisga'a dans le bureau du Président, soit M. Calder. En 1973, il a réussi pour la première fois à faire une brèche dans la reconnaissance des droits ancestraux et autochtones. C'est un grand Canadien, c'est un grand Nisga'a, et il a fait avancer de façon considérable la philosophie et la jurisprudence des tribunaux sur la reconnaissance des droits ancestraux.
En 1973, il y a eu l'arrêt Calder et, lors des négociations, le gouvernement fédéral a été obligé de dire: «On va être obligés de négocier avec les Nisga'as parce que la cour a rendu une décision.» D'ailleurs, je l'ai reproché au gouvernement et je le lui reproche encore à la Chambre, il est toujours à la remorque des décisions des cours. Il serait temps qu'il fasse preuve d'un peu plus de leadership et règle fondamentalement certains problèmes autochtones. Mais on le voit toujours réagir à des décisions de la Cour Suprême. On vient encore de le voir avec l'arrêt Marshall.
Avec l'arrêt Calder, il y avait eu la même approche. Aussitôt que cette décision a été rendue, quelques années plus tard, en 1976, le gouvernement a dit qu'il allait commencer à négocier avec les Nisga'as. Comme ce sont des ententes tripartites, il a essayé de faire participer la Colombie-Britannique. En 1990, cette province a fait partie des négociations. Finalement, une entente de principe a été signée en 1996, et l'accord définitif, en août 1998.
Une fois que l'accord définitif a été réglé, il y a eu un cheminement parlementaire, tripartite aussi. Les Nisga'as se sont prononcés les premiers par référendum; 61 p. 100 des électeurs admissibles ont dit oui à ce traité. Ceux qui veulent rejeter le traité du revers de la main, sans connaître l'histoire qui a plus de cent ans, sans connaître l'histoire récente, alors que les gens insistent depuis une trentaine d'années, que les négociations sont commencées, qu'on a peaufiné cela tranquillement entre trois parties, je pense que ces gens-là ne reconnaissent pas cette histoire ou qu'ils ne la connaissent tout simplement pas.
C'est pour cela que je pense qu'il est important de faire le cheminement démocratique et le cheminement parlementaire. La Colombie-Britannique, j'en conviens, l'a aussi adopté avec beaucoup de difficulté. Il y a peut-être aussi des gens dans le milieu qui font en sorte de jouer les épouvantails à moineaux, de provoquer des prises de conscience un peu négatives. Je réfère, entre autres, au chef de l'opposition. J'ai lu divers articles de presse de Colombie-Britannique et je sais qui attise les feux de l'opposition dans ce type de projet de loi.
Finalement, c'est à nous maintenant. Nous sommes les derniers. Aussitôt que ce sera fait, que le Sénat aura donné son accord, l'entente entrera en vigueur. On verra justement ce que je disais tout à l'heure, les autochtones, les Nisga'as voler de leurs propres ailes.
Il y a bien sûr des questions constitutionnelles et il y a eu des débats constitutionnels en Colombie-Britannique à savoir si nous sommes en train de faire un amendement à la Constitution. Nous ne sommes pas de cette école. Nous disons que la Constitution n'est pas modifiée. La balance des pouvoirs entre les provinces, le Canada, et la Colombie-Britannique n'est pas modifiée.
Les articles 25 et 35 de la Constitution restent intacts avec ce projet de loi. C'est notre prétention. Nous ne disons pas que nous détenons la vérité absolue, mais on peut comprendre que des gens le contestent. Mais pour nous, notre école de pensée est là, et je veux la situer tout de suite.
À mon avis, c'est écrit en toutes lettres dans l'entente, la Charte des droits et libertés a priorité. Personne ne peut, sur une terre nisga'a, violer la Charte des droits et libertés sans s'exposer à être corrigé par les tribunaux. C'est très clair dans l'entente.
Finalement, ce ne seront plus des réserves, au sens de la loi, ce seront dorénavant des terres nisga'as avec un gouvernement nisga'a.
Il y a aussi la validité et les décisions judiciaires. Si on veut tester, il y aura toujours les tribunaux communs pour venir à la rescousse. Il n'est pas question que les Nisga'as décident 56 affaires et qu'on puisse dire qu'on ne peut pas en appeler. Personne ne peut en appeler en territoire nisga'a. Ce n'est pas du tout l'approche. La Cour supérieure de la Colombie-Britannique, la Cour suprême, la Cour fédérale auront toujours un droit d'appel. On a mis des balises judiciaires et elles sont là.
Pour la deuxième ou troisième fois, hier, je relisais le traité. Je me disais que, finalement, après cent ans de tentative, 30 ans de négociations serrées, il me semble qu'on est arrivé au mariage parfait entre la tradition autochtone et la modernité. J'ai pris en compte plusieurs points et je veux faire cette démonstration.
Sur la question des terres, les Nisga'as seront maintenant propriétaires de leurs terres en fief simple. D'ailleurs, dans l'entente, on a l'ensemble de tous les lots. Ils sont tous là. Ces lots sont déjà octroyés à certaines personnes. Ils deviendront directement propriétaires de ces terres. Ce n'est plus une propriété collective comme c'était le cas avec la Loi sur les Indiens, il est très important de le savoir.
On se fait souvent dire: «En vertu de la Loi sur les Indiens, c'est un bien collectif.» Quand c'est un bien collectif, les gens ne font pas attention, ils sont dépendants; la décision vient d'Ottawa, à savoir à qui ira la maison, et c'est souvent le conseil de bande qui décide. Maintenant, c'est bien clair, l'ensemble des terres sera propriété en fief simple. Donc, ces gens seront propriétaires de ces terres. C'est un pas important. C'est aussi une nuance très importante.
Les ressources forestières et la question des ressources naturelles seront un cheval de bataille de mes amis réformistes de l'Ouest. Il diront: «Il y a tellement d'incertitudes, c'est tellement épouvantable.» Eh bien moi, j'ai regardé les ressources forestières et les pêches, tout ce qui concerne les ressources souterraines, et il y a des dizaines de pages qui expliquent la façon dont cela procédera.
Mais au sujet de la façon dont cela va procéder, je rappelle aussi à la Chambre que ceci a été signé par les Nisga'as et la Colombie-Britannique, et bien que la ministre ait déjà signé, il manque la loi d'application que nous sommes en train de discuter aujourd'hui.
Donc, selon moi, la certitude est là. Quant aux ressources forestières, on voit que tout est prévu dans l'entente, et c'est beaucoup mieux que ce qui y était précédemment. Je suis déjà allé en territoire nisga'a, comme je le disais plus tôt, je suis allé aussi en territoire chilcotin en Colombie-Britannique et j'ai également visité le territoire des Carrier Sekani. Qu'est-ce que j'y ai vu? De beaux paysages, j'en conviens, mais qui se détérioraient rapidement.
Je me rappelle m'être rendu en territoire chilcotin et avoir croisé une centaine de camions qui s'empressaient de sortir les ressources forestières au plus vite, avant qu'il y ait des ententes avec les autochtones. Et cela, je l'ai souvent dénoncé au ministre de même qu'aux principaux ministres provinciaux comme étant ce que je qualifie de «course aux ressources naturelles».
Cela, il faut le dénoncer, parce que les papetières, bien que je les respecte beaucoup, quand elles savent qu'une entente sur l'autonomie gouvernementale est imminente, dans laquelle il y aura de la certitude et qu'on dira aux autochtones: «Ces terres sont à vous; vous faites ce que voulez de vos forêts», il est bien évident que là, les papetières se préparent à vider le paysage de leurs arbres.
Ce ne sont pas les autochtones qui font ça. J'étais offusqué de voir que dans une démarche d'autonomie gouvernementale, on s'empressait de vider les ressources naturelles, et qu'ensuite, curieusement, les négociations débloquaient. C'était facile après, car on leur disait: «On va vous céder ce territoire-là», mais étrangement, il ne reste plus rien dedans.
Alors là, il y a de la certitude avec l'entente nisga'a. Il y est mentionné en toutes lettres que tout est déterminé: la gestion riveraine, la configuration et la répartition des secteurs de coupe; la construction, l'entretien et la désactivation des routes; la reforestration, la conservation des sols, la biodiversité, la réduction des risques et la préparation à la lutte aux incendies; le système de sylviculture, les méthodes d'opérations forestières et la santé des forêts.
Je dois avouer bien candidement que je fais entièrement confiance aux autochtones, parce que comme je l'ai mentionné au début de mon allocution, la Mère Terre pour eux, c'est leur vie. Il s'agit de voir de quelle façon ils considèrent la terre pour comprendre que ce ne sont pas là des gens qui vont faire des coupes à blanc dans les forêts. Ce ne sont pas des gens qui vont mettre en péril l'avenir de leurs forêts pour essayer de faire une passe d'argent. Cela, pour moi, c'est acquis.
Ils auront aussi à répondre à certaines normes et les normes actuelles de la Couronne vont s'appliquer à tout cela. Donc, nous avons certaines garanties, selon moi, et si on pense le contraire, c'est tout simplement qu'on veut agiter des épouvantails.
Maintenant, quant à l'accès et aux routes, puisque c'est un territoire qui va devenir nisga'a, il est mentionné dans l'entente qu'il y aura un accès raisonnable au public. Naturellement, il y a accès aussi aux propriétaires en fief simple qui ne sont pas des Nisga'as, parce que c'est une autre particularité que les Nisga'as ont très bien comprise, c'est-à-dire que les non-autochtones, les non-Nisga'as, qui restent sur les terres nisga'as ne seront pas mis dehors pour autant. On va continuer à leur dire: «Vous avez un terrain; il est à vous. Vous avez des taxes à payer de même que des impôts, vous allez les payer à vos paliers respectifs: au fédéral et au provincial.» Donc, dans l'entente, on stipule bien que ces gens doivent avoir accès à leur propriété.
Aussi, j'ai été heureux de constater qu'on faisait beaucoup état, dans le traité, du «Nisga'a Highway». C'est là une question que je qualifierais de moderne. Comme je le mentionnais plus tôt, on concilie les traditions à la modernité, et le «Nisga'a Highway» en est un exemple; on est en train de relier, par un réseau routier des plus intéressants, les quatre communautés nisga'as.
Du côté des pêches, il y a encore une fois une certitude. Je ne comprends pas que l'on essaye de faire un rapprochement entre ce qui se passe avec l'arrêt Marshall. Le problème avec l'arrêt Marshall, c'est qu'il n'y avait pas de dispositions qui étaient prévues. Ici, dans l'entente, nous avons de la page 111 à la page 143 une explication claire, point par point, sur la façon dont les pêches autochtones seront gérées.
Entre autres, les gens n'auront pas besoin de permis. Il faut bien comprendre que dans la tradition Nisga'a, la pêche, la cueillette des fruits et la chasse sont des traditions implantées depuis des temps immémoriaux.
Il faut comprendre que s'ils décident d'aller pêcher, on est certainement pas pour leur dire d'aller acheter un permis de pêche ou de chasse auprès du gouvernement provincial. Ils s'adresseront naturellement au gouvernement nisga'a. Et quand je dis que tout est explicité, il faut toujours se rappeler qu'il s'agit d'une entente tripartite. La Colombie-Britannique, le Canada et les Nisga'as sont d'accord.
Ce qui est prévu, ce sont des pourcentages pour la pêche au saumon Sockeye, c'est-à-dire quel pourcentage de saumon pourra être pris. On prévoit également des pourcentages pour le saumon rose.
S'il y a des surplus, comment seront-il répartis? Cela aussi est prévu. Pour ce qui est de la truite arc-en-ciel anadrome, là aussi il y a des dispositions prévues à cet effet, comme c'est le cas pour la remontée d'été et celle d'hiver, parce que ces poissons remontent deux fois par année.
J'ai trouvé que la roue à saumon était une façon très ingénieuse de capturer le saumon. Je l'avais d'ailleurs vue au au Yukon et je pensais que c'était d'origine yukonnaise autochtone. Les Nisga'as m'ont toutefois mentionné que c'était eux qui avaient inventé la roue à saumon. Il faut bien comprendre de quelle façon cela fonctionne. Le saumon remonte toujours le courant et les gens installent une roue avec des palettes. Ces palettes sont dans l'eau et, vu que le courant descend toujours, la roue tourne. Lorsque le poisson remonte le courant, il se fait prendre dans ces palettes qui l'amènent dans une boîte. Les autochtones capturent leur poisson vivant en utilisant ce système. J'ai trouvé que c'était très ingénieux et je me suis laissé dire que c'était un moyen utilisé depuis très longtemps par les autochtones.
Il y a aussi beaucoup de dispositions sur les plantes aquatiques, de même que sur les trois types de crabes qu'on y retrouve. On n'a rien laissé au hasard. Il y a le crabe dormeur, le crabe des neiges et le crabe royal. Il y a des dispositions dans l'entente à ce sujet, de même que pour le flétan, la crevette et le hareng.
Il y a aussi un plan annuel de pêche où le ministre des Pêches et des Océans participe et tient compte des besoins autochtones et de l'ensemble des gens. Il s'agit d'un plan annuel, parce que les ressources au niveau de la pêche peuvent changer.
Finalement, ce n'est pas bien bien compliqué. C'est à peu près le contraire de ce qui se passe actuellement sur la côte Est, où il n'y a presque pas de dispositions et où justement, à cause d'une décision de la cour, on est en train d'interpréter ce que cela veut dire et où tout le monde l'interprète en sa faveur. Là, il n'y aura pas d'interprétation possible puisque tout est dans l'entente.
Il faut aussi voir une préoccupation de conservation dans le fait que le gouvernement nisga'a, la province et le gouvernement fédéral ont convenu de créer une fiducie pour la conservation. Ce sera la Lisims Fisheries Conservation Trust.
Les buts recherchés par cette fiducie sont de promouvoir la conservation et la protection des espèces. Les autochtones ont toujours été, comme je l'ai dit tantôt, très respectueux. Ils ne sont pas intéressés à ce qu'on vide un lac ou une rivière et que, par la suite, leur tradition ne puisse plus s'exercer. C'est là une bonne démonstration de ce à quoi ils veulent parvenir.
Et il y a même une disposition sur les usines de transformation. On ne veut pas jeter par terre l'économie locale. Il y a donc une période de transition où les autochtones se sont engagés à ne pas établir d'usines de transformation. Pour une période de huit ans, ils vont laisser les usines existantes continuer à faire le traitement du poisson. Elles seront toutefois informées que dans huit ans, les autochtones pourront être en mesure d'avoir leurs propres usines de transformation.
Du côté de l'évaluation environnementale, ce n'est pas compliqué puisque le contenu des lois provinciales et fédérales doit s'appliquer en territoire nisga'a. Par exemple, pour ce qui est des études sur l'évaluation et la protection de l'environnement, on doit respecter les normes provinciales et fédérales. Toutefois, si on veut en faire plus, il n'y a aucune objection. Encore une fois, c'est une très bonne barrière de sécurité.
Je vais maintenant parler brièvement du gouvernement nisga'a. La reconnaissance d'un gouvernement nisga'a est conforme avec l'autonomie gouvernementale. Il y aura un gouvernement central et on décrit très bien dans l'entente de quelle façon la nomination des élus sera faite. Il y aura quatre gouvernements. Un gouvernement local dans chacun des villages qui aura juridiction sur les pouvoirs qui lui seront dévolus. Ils ont préparé leur constitution, qui est un peu leur raison d'être, qui parle, entre autres, du partage de l'ensemble de ces pouvoirs.
Ils ont aussi déterminé la relation avec les citoyens qui ne sont pas des Nisga'as. Ce sera l'objet de mon prochain point. Il y a dans l'entente un projet de citoyenneté nisga'a. Une personne qui n'est pas nisga'a et qui vit sur ces territoires aura accès aux terres, aux bâtiments, aux avoirs, ainsi qu'aux institutions publiques. Le ministre en a parlé plus tôt. Les gens qui ont des enfants seront peut-être intéressés à les envoyer à l'école du village nisga'a. Naturellement, les parents auront un droit de vote et un droit de parole au conseil de l'école. Ils auront aussi un droit de parole au conseil de l'institution de santé, parce qu'il est peut-être plus rapide d'aller se faire soigner à l'hôpital ou au dispensaire du village nisga'a que d'aller à Terrace ou à Rupert.
Là-dessus, ils font preuve d'une grande ouverture en permettant la participation de ces gens qui ne paient pas de taxes. Ils paieront peut-être des taxes scolaires, mais vont continuer à payer leurs impôts au provincial et au fédéral. Il y a quand même une ouverture de la part des Nisga'as en ce qui a trait à la participation de ces personnes à ce type de conseil d'administration.
Bien sûr, le gouvernement nisga'a sera en charge d'établir les institutions nisga'as. Il aura la juridiction complète pour établir sa petite fonction publique nisga'a. Qui de mieux que les Nisga'as eux-mêmes pour administrer les pouvoirs qui leur sont dévolus? Oublions l'ancien système, où tout était prévu dans la Loi sur les Indiens. Autrefois, lorsqu'on décidait qu'on faisait, par exemple, un petit changement sur la réserve, il fallait appeler l'agent de liaison à Ottawa pour demander: «Est-ce que je peux faire cela?»
Maintenant, il faut comprendre qu'on a ouvert la cage dans laquelle on retenait prisonnier cet aigle majestueux et il peut maintenant s'envoler. Il faut lui donner de l'espace pour s'envoler. C'est ce que le projet de loi et l'entente prévoient, entre autres des institutions nisga'as et la rémunération des fonctionnaires nisga'as.
Il est certain que le gouvernement fédéral va toujours garder une oreille attentive pour donner certains conseils. Toutefois, il faut au moins leur donner cette capacité de se gérer eux-mêmes. Le gouvernement nisga'a va justement établir cette capacité.
Il aura aussi un pouvoir législatif. Quand on dit: «On va vous laisser, par exemple, complète juridiction sur ce qui s'appelle culture et langue», il faut s'attendre à ce que le gouvernement nisga'a fasse des lois sur la culture et la langue nisga'as. Il ne faut pas se surprendre de cela.
Il faut quand même reconnaître que les Nisga'as ont fait preuve d'une grande ouverture en permettant la participation des non-autochtones aux institutions publiques, et aussi le fait que maintenant ils devront se débrouiller entre eux et voler de leurs propres ailes.
La citoyenneté nisga'a est peut-être le principal point d'accrochage en ce qui concerne le Bloc québécois. Il faut comprendre la situation des Nisga'as. Au Québec, nous avons une approche de la citoyenneté qui est très inclusive. Il faut aussi comprendre qu'on a un territoire et une population beaucoup plus vastes qu'eux.
On retrouve environ 2 500 Nisga'as dans les réserves et environ 2 500 ailleurs. Qu'on se mette dans la peau d'un Nisga'a qui se dit: «Comment vais-je pouvoir protéger mon origine nisga'a? Comment vais-je faire cela?»
Des dispositions seront prises dans un code de citoyenneté où il y aura une loi sur la citoyenneté nisga'a. Les gens disent: «Oui, mais c'est une loi raciste.» Certaines personnes sont tentées de dire cela. Je l'ai entendu de la part du Parti réformiste: «C'est une loi raciste et c'est un gouvernement ethnique, parce que c'est basé sur le sang.»
Je veux simplement rappeler aux collègues qui emploient cette argument que cela fait 100 ans que c'est ainsi. Je suis d'accord avec le chef de l'opposition que cela fait peut-être 100 ans que cela ne fonctionne pas bien, mais on ne peut pas, du jour au lendemain, dire: «On abolit la Loi sur les Indiens et maintenant, tous les citoyens sont égaux.»
Je l'ai dit au début de mon discours, et je le répète: le Bloc québécois ne peut pas être d'accord avec une société canadienne égalitaire. Le Bloc québécois a toujours été convaincu, avec ses collègues du Parti québécois, qu'il y a eu deux peuples fondateurs. Eh bien, s'il y a eu deux peuples fondateurs, il faut quand même leur reconnaître des droits. Si on est tous égaux, tous noyés dans une mer d'égalité, on ne fait plus cette distinction.
C'est là qu'on est capables de comprendre la position des Nisga'as. Nous avons une masse critique de 7 millions de Québécois, dont 80 p. 100 sont francophones, alors on est capables de résister à des tentatives égalitaires. Mais les Nisga'as ne seront peut-être pas capables de résister à une tentative égalitaire, alors qu'ils ne sont qu'environ 5 000. Il faut résister aux tentatives égalitaires. Au Québec comme au Canada, je pense que c'est une mosaïque qui habite ces territoires. Ce sont des gens de cultures différentes qui viennent meubler une culture commune. Personnellement, je le vois ainsi pour le Québec, et je le vois de la même manière pour le Canada.
Il faut reconnaître que la culture autochtone a eu son importance et qu'elle l'a toujours. Si on décide de tout égaliser, comme le Parti libéral voulait le faire en 1969 avec son Livre blanc dans lequel il disait: «Il faut assimiler les autochtones, il faut les rendre égaux», cela va devenir une société bien platte, elle va être égale et il n'y aura plus de traits distinctifs et de traits culturels particuliers d'un groupe à un autre.
Il faut les reconnaître, ces traits distinctifs, et leur permettre de s'exprimer. Je crois que le projet de loi et l'entente qui sont devant nous y contribuent. Cela permet de dire à ces gens-là: «Oui, on reconnaît que vous n'êtes pas comme les autres; vous allez évoluer cependant dans un climat de négociations avec nous, dans un contexte où on va s'entendre, mais vous n'êtes pas comme les autres.»
Je crois que les Québécois et les Nisga'as sont fiers de ne pas être comme les autres. C'est pour cela qu'on est capables de les suivre. C'est évident qu'on aimerait beaucoup mieux une approche inclusive, où on inclut tout le monde. C'est ce qu'on veut faire au Québec, mais pour des raisons de masse critique et d'importance de nombre, je comprends que les Nisga'as soient obligés d'agir ainsi. Je comprends que cela fait 100 ans que c'est ainsi, sinon, qui serait Indien aujourd'hui, qui pourrait déterminer qui est Indien? La Constitution canadienne le détermine un peu puisqu'elle le reconnaît à l'article 35.
Mais ensuite, il y a des règles où un registraire des affaires indiennes est responsable de reconnaître qui est Indien ou pas. Et ne devient pas Indien qui veut. Malheureusement, la loi est ainsi faite et les autochtones en sont victimes. Cela fait 100 ans qu'on leur dit que s'ils se marient avec des Blancs, leur sang sera dilué et après un certain nombre d'années, ils ne pourront plus être autochtones. On ne peut détruire cela du jour au lendemain, sinon la nation nisga'a finira par disparaître.
Je pense que les gens ont inclus les dispositions nécessaires pour sauvegarder leur culture, leur langue et leur nation. C'est la raison pour laquelle, même si on a eu certains problèmes avec la définition de leur citoyenneté, on va être d'accord, parce qu'on a l'ouverture d'esprit nécessaire pour comprendre qu'ils ont besoin de cela s'ils veulent perpétuer la nation nisga'a dans le futur.
Il faut également dire que ce n'est pas un désastre pour les non-Nisga'as, j'en ai parlé tantôt, car ils ont toujours leur droit de possession sur le terrain. Il y a environ une centaine de personnes non nisga'as qui sont sur place.
Vous me signalez qu'il ne me reste plus qu'une minute, madame la Présidente, alors je vais conclure ici. J'aurais aimé parlé également de rupture de mariage, parce que c'est une préoccupation qui a été soulevée par le Parti réformiste. On aura peut-être l'occasion d'y revenir, mais je voudrais dire en terminant qu'on est capables de comprendre la démarche d'autonomie des Nisga'as, nous, Québébois, parce qu'on en a une également. Je veux leur dire que nous allons les accompagner dans leur marche vers l'autonomie, parce que le Bloc québécois y croit.
Je termine avec la traduction en nisga'a de ce que signifie «Le Bloc va marcher avec les Nisga'as», parce qu'ils sont en train de nous écouter et je suis sûr que cela va leur faire plaisir.
[Note de la rédaction: Le député s'est exprimé en nisga'a]
[Traduction]
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Madame la Présidente, je signale au départ que je partagerai mon temps de parole avec mon collègue, le député de Burnaby—Douglas.
Je suis à la fois fière et ravie de pouvoir exprimer l'enthousiasme que la ratification du traité nisga'a m'inspire ainsi qu'à tous les députés néo-démocrates.
En 1887, les Nisga'as ont parcouru plus de 1000 kilomètres en canoë-kayak jusqu'à Victoria pour obtenir justice et se réconcilier avec les blancs. Ils souhaitaient négocier un traité, mais ils sont rentrés chez eux bredouilles.
Le traité nisga'a à l'étude aujourd'hui constitue un exploit historique. Pour les Nisga'as, cela met un terme à 111 ans de déni de justice. Aujourd'hui, nous leur donnons enfin la place qui leur revient de droit dans la grande famille canadienne.
[Français]
Ce traité procure aux Nisga'as le plan qui leur revient de droit.
[Traduction]
L'accord se fonde sur un respect mutuel en vertu duquel on reconnaît les erreurs et les injustices du passé et on amorce l'important processus de réharmonisation. Ce traité est une étape importante pour les Nisga'as, mais aussi pour les Britanno-Colombiens et tous les Canadiens.
Les Canadiens sont à même de constater que, à bien des égards, le statu quo ne fonctionne pas. Il ne fonctionne certainement pas pour les peuples autochtones, comme l'indiquent les niveaux élevés de pauvreté, de chômage et de santé déficiente au sein de la population autochtone de la vallée de Nass et d'autres régions du Canada.
Avant l'arrivée des premiers européens, il y avait 30 000 Nisga'as. Aujourd'hui, après les ravages causés par la maladie, la pauvreté et les attaques contre leur mode de vie, on en dénombre moins de 5 000. Comme le chef nisga'a Joe Gosnell l'a dit, les Nisga'as qui restent sont les survivants de la marche vers le progrès.
Le statu quo n'a pas non plus toujours fonctionné pour les non-autochtones. L'instabilité et l'incertitude ont nui au développement économique et, dans certains cas, les investissements ont empêché un grand nombre de collectivités de développer pleinement leur potentiel. Cet accord reconnaît que nous devons laisser derrière nous cette période dévastatrice d'incertitude et de conflit, et que nous atteindrons à la paix et au contentement par la compréhension, la reconnaissance et le respect mutuels.
Il suffit de regarder ce qui se passe sur la côte est pour voir ce qui se produit lorsqu'il y a un manque de leadership, lorsque nous négligeons de négocier de bonne foi, en faisant preuve de respect et de prévoyance. Nous sommes à même de constater le chaos qui s'ensuit lorsque les tribunaux sont contraints de trancher parce que le gouvernement ne s'est pas acquitté de sa responsabilité de négocier de bonne foi.
Les Canadiens ne veulent pas d'un autre siècle de conflit. Nous devons régler les questions qui nous divisent et aller de l'avant dans un climat de respect et de certitude. Or, c'est précisément ce que l'accord conclu nous aidera à réaliser.
[Français]
Les Nisga'as auront maintenant en main les outils nécessaires au développement de leur communauté.
[Traduction]
Les autochtones auront maintenant les outils dont ils ont besoin pour bâtir les collectivités autonomes qu'ils souhaitent avoir pour eux-mêmes et leurs familles.
Malheureusement, certains utilisent la désinformation et des insinuations et soulèvent de fausses craintes pour discréditer le traité nisga'a afin de persuader les Canadiens qu'on a trop donné aux Nisga'as, que ce traité menace les Canadiens non autochtones. Il faut contrer cette campagne de tromperie en exposant la vérité aux gens.
C'est un fait que, aux termes de l'accord, tous les droits sont protégés par la Constitution canadienne, le Code criminel et la Charte canadienne des droits et libertés. C'est un fait que, aux termes du traité nisga'a, les questions de gestion des terres et des ressources sont réglées et que d'importantes protections environnementales sont assurées. C'est un fait que les propriétaires fonciers non autochtones conservent des droits garantis. C'est un fait que les traditions et la culture nisga'as pourront enfin se développer pleinement sans rien enlever à qui que ce soit.
Ces réalisations importantes ont été obtenues à la suite de 20 années, deux décennies, de consultations et de négociations de bonne foi. Comment ces réalisations peuvent-elles donc être mauvaises pour le Canada? Il est certes irresponsable et intolérable que certains choisissent d'utiliser ce débat pour diviser les autochtones et les non-autochtones au lieu de s'en servir pour combler le fossé qui existe entre les deux communautés depuis longtemps.
Contrairement à ce que certains députés réformistes affirment, le traité ne vise pas à isoler les Nisga'as. Il s'agit plutôt pour eux d'assumer la place qui leur revient au sein du Canada.
Nous avons tous été témoins des merveilleuses festivités qui ont entouré l'adoption du projet de loi touchant les Nisga'as en Colombie-Britannique. En marchant dans les rues pour célébrer, les Nisga'as portaient dans une main le drapeau de la Colombie-Britannique et dans l'autre celui du Canada. C'est un symbole important d'union après des années de conflits et d'injustice.
Le traité ne vise pas la séparation. Il s'agit plutôt d'accueillir comme il se doit au sein de la famille canadienne les autochtones qui ont été pendant trop longtemps traités comme des citoyens de seconde zone.
Aujourd'hui, à la Chambre, nous avons la possibilité de participer à l'histoire. Avec la ratification du traité nisga'a, nous faisons un premier pas important vers la réconciliation et la réalisation du rêve d'une véritable égalité.
Assumons tous dans cette enceinte le leadership qu'on réclame de nous. Assumons la responsabilité qui nous incombe de donner l'exemple, comme les Canadiens s'y attendent à juste titre de notre part en tant que parlementaires. Unissons-nous pour appuyer le traité nisga'a et, ce faisant, jouons un rôle modeste mais important sur le plan historique pour ce qui est d'ouvrir une nouvelle ère de coopération et de respect mutuel entre les autochtones et les non-autochtones au Canada.
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, le 4 août 1998, j'ai eu le grand honneur d'assister à la cérémonie de signature du traité conclu avec les Nisga'as. Lors de cette cérémonie qui avait lieu à New Aiyansh, le chef Joseph Gosnell s'est exprimé en ces termes:
Regardez autour de vous. Regardez nos visages. Nous sommes les survivants. Nous voulons vivre ici à tout jamais et, sous le traité, nous prospérerons.
J'ai regardé les visages des gens présents à cette cérémonie. J'ai regardé les anciens dont plusieurs avaient les larmes aux yeux, des larmes de joie à l'idée que leur long voyage était enfin terminé, bien qu'un autre commençait.
J'ai regardé les visages des jeunes et des enfants et j'ai vu l'espoir, espoir en l'avenir, espoir en un renouveau, espoir en des conditions économiques décentes.
Le chef Gosnell a parlé de ce voyage. Comme mon chef l'a mentionné, ce voyage a commencé il y a bien des années. Le peuple nisga'a était installé dans la vallée de la Nass à l'arrivée des Européens. On leur a volé leurs terres et leurs ressources, sans leur offrir aucune espèce de compensation.
Voilà bien des années qu'ils ont entrepris le voyage pour obtenir compensation et justice. En 1887, les chefs se sont rendus à Victoria en canot, mais on a refusé de les recevoir.
Pendant toutes ces années, les chefs nisga'a ont travaillé sans relâche au nom de leur peuple, même si c'était interdit par la loi. En effet, de 1927 à 1950, la loi interdisait au peuple nisga'a et à tous les autres peuples autochtones du Canada d'embaucher un avocat pour faire valoir leurs revendications territoriales.
Enfin, en 1973, la Cour suprême du Canada, dans la décision concernant Frank Calder, a affirmé certains droits tout à fait fondamentaux du peuple nisga'a. L'actuel premier ministre, alors ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, a convenu en août de cette même année d'engager un processus de négociations. Voici où nous en sommes des années plus tard.
Je rends hommage à plusieurs avocats qui ont travaillé inlassablement, main dans la main aux côtés du peuple nisga'a: Tom Berger, qui a invoqué la décision rendue à l'origine dans l'affaire Calder devant la cour suprême du pays, et d'autres qui l'ont suivi, comme James Aldridge, qui depuis des années défend inlassablement les droits du peuple nisga'a.
Je me souviens de l'éloquent plaidoyer que des dirigeants nisga'as, des gens comme le chef James Gosnell, Rod Robinson et d'autres avaient fait en faveur de la justice en hiver 1980-1981, alors que j'étais nouveau député à la Chambre et membre du comité historique chargé d'examiner la Constitution. Ils ne réclamaient pas de droits spéciaux ou un traitement spécial, mais seulement l'égalité et la justice, le pansement des blessures et la réconciliation.
Je suis très fier que ce soit l'ancien chef du Nouveau Parti démocrate qui, le 17 février 1981, ait annoncé que le gouvernement acceptait d'apporter un changement à la Constitution afin de veiller à ce que les droits des autochtones et les droits issus des traités soient inscrits à l'article 35 la Constitution comme tous les autres droits. Ed Broadbent, les Néo-démocrates et le gouvernement libéral de l'époque peuvent être très fiers de leur réalisation.
Soyons précis. L'Accord nisga'a ne prévoit aucun amendement à la Constitution parce que déjà l'article 35 reconnaît et confirme les droits autochtones et les droits issus de traités des premières nations du Canada. Les droits autochtones qui ont été reconnus dans les traités sont les droits fondamentaux du peuple nisga'a aux revendications territoriales et à l'autonomie gouvernementale.
Certains, dont le Parti libéral de la Colombie-Britannique et le Parti réformiste fédéral, demandent la tenue d'un référendum sur cette question. Non seulement est-ce là une idée offensante puisque le concept même des droits fondamentaux des minorités ne devrait pas être soumis à un référendum, mais demandons-nous un peu qui serait appelé à voter dans un tel référendum?
Il ne faut pas oublier que c'est le gouvernement fédéral qui paie 80 p.100 du coût de ce traité. C'est l'un des rares cas où le gouvernement fédéral transfère réellement des fonds à la Colombie-Britannique. Un referendum exigerait donc un vote au niveau national. Il serait absolument scandaleux que les Ontariens, qui disposent de plus de voix, puissent à eux seuls l'emporter sur les habitants de la Colombie-Britannique sur cette question fondamentale.
J'aimerais reconnaître et souligner le leadership personnel des néo-démocrates de la province, dont l'ancien premier ministre Mike Harcourt, l'ancien premier ministre Glen Clark ainsi qu'un certain nombre de ministres qui ont été responsables des Affaires indiennes, John Cashore, Andrew Petter et Dale Lovick, pour ne nommer que ceux-là.
Le traité jouit d'un solide appui en Colombie-Britannique, dans de nombreuses collectivités diverses. L'Assemblée législative de la province l'a ratifié par un vote libre à l'issue du plus long débat de son histoire. De nombreuses audiences publiques ont eu lieu dans toute la province. Le comité des affaires autochtones de l'Assemblée législative, présidé avec compétence par un ancien collègue au Parlement fédéral, Ian Waddell, a donné aux habitants de la province l'occasion de se faire entendre. Le traité a été ratifié par 72 p. 100 des Nisga'as qui ont voté, et il a été appuyé par 61 p. 100 de tous ceux qui avaient le droit de voter.
Permettez-moi de dire un mot de la question, car le député de Skeena s'en est pris au processus de ratification. Il a écrit dans une lettre adressée au Globe and Mail en mai que près de la moitié des Nisga'as n'appuyaient pas le traité. Outre le fait que cette affirmation est complètement fausse, je signalerai que le député de Skeena lui-même a été élu avec un pourcentage de 42,4 p. 100 des voix, et qu'il a obtenu l'appui de 27 p. 100 des électeurs qui pouvaient voter dans sa circonscription. Si j'applique ses propres critères, les trois quarts des personnes qui pouvaient voter dans sa circonscription n'ont pas voté pour lui. Les réformistes abordent le traité avec une profonde hypocrisie, et les habitants de la Colombie-Britannique le savent.
Le porte-parole du Parti réformiste, le député de Skeena, n'a même pas eu la décence de rencontrer les dirigeants des Nisga'as depuis la signature du traité. Ce sont ses électeurs et il ne les a pas rencontrés une seule fois depuis la signature du traité. Il a dit avoir discuté avec le chef Joe Gosnell en 1995. Cela fait déjà quatre ans. Qu'a fait le député de Skeena depuis ce temps? Il n'a que manifesté du mépris envers la nation nisga'a et les autres autochtones de sa collectivité.
J'ai mentionné que des représentants de diverses couches de la société de la Colombie-Britannique ont grandement appuyé le traité. Je pense notamment au milieu des affaires qui espère enfin obtenir certaines assurances. Je pense aussi au milieu ouvrier. Le président Dave Haggard du Syndicat international des travailleurs unis du bois d'Amérique a envoyé une lettre éloquente à l'ex-ministre pour l'informer que ses membres appuyaient sans réserve la mesure législative, à l'instar de la British Columbia Federation of Labour et bien d'autres organismes. L'initiative jouit donc d'un appui solide. Les dirigeants religieux appuient eux aussi fortement le projet de loi et le traité.
Permettez-moi de citer un message transmis à la population de la Colombie-Britannique par l'ex-premier ministre Glen Clark qui disait que le traité nisga'a n'a rien à voir avec la politique et tout à voir avec les gens, avec un peuple qui a perdu les terres de ses ancêtres sans jamais avoir signé de traité, avec un peuple qui a vu ses enfants être confiés à des écoles de réforme, sa culture anéantie de façon systématique, ses familles décimées par la maladie, l'alcool et des troubles sociaux, un peuple encore régi par une Loi sur les Indiens désuète, un peuple qui a négocié pacifiquement, patiemment et de bonne foi pendant de nombreuses années, un peuple qui veut faire partie du Canada, qui a négocié sa réinsertion dans la société canadienne et qui est prêt à céder plus de 90 p. 100 de ses terres traditionnelles et ses exonérations fiscales pour pouvoir réaliser son rêve.
L'accord traite de politique, il traite des gens, il traite de la justice et il tombe à point nommé.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi C-9, Loi portant mise en vigueur de l'Accord définitif nisga'a. Ce projet de loi marque la fin d'un long processus pour les Nisga'as, puisque c'est en 1887, soit il y a plus d'un siècle, que leurs représentants ont fait le trajet en canoë de la vallée de la rivière Nass à Victoria, pour entreprendre ce processus.
J'ai rencontré des Nisga'as à plusieurs reprises et, chaque fois, ils ont fait remarquer que, non seulement ils étaient prêts à mettre en oeuvre cet accord, mais qu'ils l'envisageaient avec hâte et impatience. Ils soutiennent que les pourparlers ont assez duré et qu'ils ont bien accueilli les parties intéressées qui voulaient voir à quel point ils étaient prêts pour cette initiative.
Le traité nisga'a est le premier traité moderne à être signé en Colombie-Britannique et le 14e au Canada. Il établit un solide précédent pour d'autres traités qui sont peut-être l'objet d'une négociation. En même temps, toutefois, le traité établit clairement qu'il n'a aucun effet sur la négociation d'autres traités en Colombie-Britannique. Au contraire, chaque première nation négociera selon son propre mérite, en vue de réaliser ses buts et ses aspirations.
Ce traité montre qu'il est possible de négocier un règlement à la satisfaction de toutes les parties et de prévoir un moyen pacifique, éclairé et efficace de tracer les limites de la responsabilité et l'obligation de rendre compte du gouvernement fédéral, de la province et de la nation nisga'a. Chaque partie doit faire des concessions. C'est l'objet de la négociation. Le résultat final est un traité qui a déjà été ratifié par la nation nisga'a et le gouvernement de la Colombie-Britannique.
Les Nisga'as ont accepté le traité par voie d'un référendum tenu les 7 et 8 novembre 1998. Le traité devait être ratifié par une majorité de tous les électeurs inscrits, peu importe la manière dont ils se sont réellement prononcés. Il y a eu 1 451 personnes représentant 61 p. 100 de la nation nisga'a qui se sont prononcées en faveur des modalités de l'accord définitif. Il y a eu 558 votes contre le traité et 11 bulletins de vote détériorés, ce qui veut dire que le taux d'approbation a été de 72 p. 100, même si le taux de participation a été de 85 p. 100. Compte tenu du fait que 356 personnes n'ont pas voté, cela veut dire que le traité a été approuvé par 61 p. 100 de la nation nisga'a.
Il est important d'expliquer le mécanisme de votation parce qu'il y a eu à ce sujet de nombreuses discussions et, très franchement, de nombreuses critiques tout à fait injustifiées. La constitution nisga'a, qui a fait l'objet d'un vote durant le référendum, exigeait un taux d'approbation de 70 p. 100. Ce taux a été de 73 p. 100, soit 1 480 votes en faveur de la constitution et 525 contre la constitution. Cela veut dire que le traité et la constitution ont été approuvés par plus de 70 p. 100 des Nisga'as qui ont voté au référendum.
Les critères d'admissibilité au vote de ratification sont énoncés dans l'Accord définitif nisga'a, à l'article 6 du chapitre 22, qui porte sur la ratification. Cet article précise qu'un individu est admissible à voter s'il satisfait aux critères du comité d'inscription, s'il a au moins 18 ans, s'il a sa résidence habituelle au Canada et s'il n'est inscrit en vertu d'aucun autre accord sur des revendications territoriales. Pour déterminer qui satisfait aux critères du comité d'inscription, l'article du chapitre 20, qui porte sur l'admissibilité et l'inscription, précise que cette personne doit être d'ascendance nisga'a, que ce soit par adoption ou par marriage.
Ce qu'il est important de remarquer, c'est qu'on ne dit pas que la personne doit avoir sa résidence habituelle dans une réserve, une condition de la Loi sur les Indiens qui a récemment fait l'objet de l'arrêt Corbière. Dans cette affaire, le tribunal a jugé que les membres de la bande qui vivent en dehors de la réserve devraient avoir la possibilité de voter sur certaines questions lorsque leurs intérêts sont en cause. À cause de l'obligation de vivre dans la réserve, un certain nombre de membres de la bande ne peuvent voter, même lorsque les décisions du chef et du conseil peuvent avoir des répercussions sur des ressources ou des biens qui appartiennent à l'ensemble des membres de la bande.
Pour être ratifié, l'Accord définitif nisga'a doit être approuvé par trois parties: la population nisga'a, la province de la Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral. La Colombie-Britannique a approuvé l'accord lorsqu'elle a ratifié les dispositions législatives le 23 avril 1999, en adoptant le projet de loi 51. Le gouvernement de la province a alors eu recours à l'attribution de temps pour mettre un terme au débat et permettre l'adoption du projet de loi 51 à l'assemblée législative.
Nous sommes maintenant saisis d'un projet de loi qui permettra la ratification du traité. Je suis heureux de participer à ce débat. Le gouvernement a dit qu'il pourrait encore une fois recourir à l'attribution de temps pour limiter le débat sur cette question. Je reviendrai là-dessus plus tard.
Le Parti réformiste a exprimé clairement, à un certain nombre d'occasions, ses réserves au sujet de certaines dispositions du traité et de l'idée même du traité. Or, ce parti s'enorgueillit des liens qu'il dit entretenir avec les gens de la base. Pourtant, il refuse de reconnaître que les Nisga'as se sont eux-mêmes prononcés par voie de référendum en faveur de ce traité, et que 61 p. 100 d'entre eux ont accepté le traité et l'Accord définitif nisga'a.
Le Parti réformiste reproche notamment au traité conclu avec les Nisga'as de modifier la Constitution canadienne. L'Accord définitif nisga'a mentionne ce qui suit:
Attendu que la Constitution du Canada est la loi suprême du Canada;
Attendu que l'Accord définitif nisga'a déclare qu'il ne modifie pas la Constitution du Canada;
Espérons que cela réglera la question une fois pour toutes.
C'est clair que le traité nisga'a ne modifie pas la Constitution canadienne. Celle-ci, en vertu de l'article 35, reconnaît et affirme les droits ancestraux et issus des traités. Ces droits, qui sont énoncés dans l'Accord définitif nisga'a pour la nation nisga'a, continuent d'être affirmés par la Constitution. Le traité ne fait pas partie de la Constitution, mais il est plutôt reconnu par celle-ci.
En modifiant les dispositions du traité dans ce dernier, on établit les exigences devant être remplies pour apporter pareille modification. La nation nisga'a et les autres signataires reconnaissent la possibilité réelle que des changements seront apportés au traité, et un processus a été institué à cet égard. C'est un processus qui ne requiert pas le consentement d'un certain nombre de provinces, lequel est nécessaire pour des modifications constitutionnelles.
L'Accord définitif nisga'a énonce les dispositions du processus de modification dans le chapitre sur les dispositions générales, article 36, et je cite:
Sous réserve de toute disposition du présent accord prévoyant que toute modification requiert uniquement le consentement de la nation nisga'a et du Canada ou de la Colombie-Britannique, les modifications de l'accord requièrent le consentement des trois parties.
Le consentement de la nation nisga'a à une modification de l'accord définitif requiert l'appui des deux tiers des membres élus du gouvernement nisga'a.
La constitution d'un gouvernement fondé sur la race est un autre argument utilisé par le Parti réformiste pour s'opposer à ce traité. Ce dernier permet à la nation nisga'a de se gouverner elle-même et d'adopter des lois dans des domaines où elle est le mieux placée pour le faire, comme la protection de ses objets ayant une valeur culturelle. Parallèlement, les lois provinciales et fédérales renferment des normes minimales auxquelles les Nisga'as doivent se conformer, voire qu'ils doivent dépasser.
En outre, les non-Nisga'as habitant sur les terres des Nisga'as seront représentés dans les régions où ils sont touchés. Les citoyens non nisga'as continueront d'élire leurs représentants municipaux, provinciaux et fédéraux, au même titre que les Nisga'as. Ceux-ci ont également le pouvoir d'établir des règles précisant qui peut devenir un citoyen nisga'a. Cela n'empêche pas l'inclusion de non-Nisga'as.
L'Accord définitif nisga'a énonce clairement que la Charte des droits et des libertés continue de s'appliquer à la nation nisga'a. Les interprétations peuvent varier quant à la façon dont la Charte s'applique aux peuples autochtones. Cependant, les Nisga'a conviennent, comme le confirme le traité, que la Charte continue de s'appliquer à eux. Quand j'ai rencontré les représentants de la nation nisga'a, ils ont dit sans équivoque que la Charte s'applique au gouvernement nisga'a. L'Accord définitif nisga'a énonce:
La Charte canadienne des droits et libertés s'applique au gouvernement nisga'a concernant toutes les questions relevant de sa compétence, eu égard au caractère libre et démocratique du gouvernement nisga'a, comme le stipule l'accord.
Le peuple nisga'a élira les membres du gouvernement nisga'a de sorte qu'il s'agira d'un gouvernement démocratique.
On peut aussi voir le traité et le projet de loi sous un autre angle et admettre que, sans eux, les Nisga'as n'auraient pas d'accord définitif. En vertu du traité, les terres nisga'as ne seront plus des réserves aux termes de la Loi sur les Indiens. Cela donne beaucoup plus de possibilités en termes de gestion des ressources et de diversification ou de développement de l'économie.
La Loi sur les Indiens obligeait les Nisga'as à obtenir l'autorisation du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien dès qu'ils voulaient mettre une ressource en valeur ou s'adonner à une activité susceptible d'accroître leur autosuffisance. Tout changera avec le traité.
En outre, les droits des autochtones et les droits issus de traités sont énumérés au complet dans l'accord définitif. Nous savons tous que la décision dans l'affaire Delgamuukw a encouragé la négociation de règlements pour mettre fin aux litiges perpétuels. C'est exactement ce que le traité représente en l'occurrence: un accord négocié par toutes les parties en cause.
Avec un accord définitif sur les droits issus des traités, l'industrie sera encouragée à conclure des partenariats avec les Nisga'as puisque la question des droits de propriété sur les ressources sera maintenant claire. En Colombie-Britannique, les industries forestière et minière ont souffert de l'incertitude entourant la propriété des ressources dans la province. Le gouvernement provincial et les premières nations ont subi les conséquences économiques du refus des entreprises d'investir dans l'exploration et la mise en valeur des ressources parce qu'elles ne savaient pas trop avec qui elles devaient négocier. Selon des estimations, jusqu'à concurrence de 1 milliard de dollars et de 1 500 emplois ont été perdus en Colombie-Britannique en raison de ce climat d'incertitude et du refus des secteurs forestiers et miniers d'investir dans un tel contexte.
Dans le cas des Nisga'as, le traité lève cette incertitude. Il devrait y avoir un plus grand nombre de projets d'aménagement des ressources sur les terres des Nisga'as lorsque le processus de ratification du traité sera terminé. Les Nisga'as seront en mesure d'exploiter leurs propres ressources selon les modalités qui leur conviendront. Parallèlement, les normes fédérales et provinciales en matière d'environnement serviront de lignes directrices aux fins de l'extraction et de la mise en valeur de ces ressources.
Je consacrerai quelques minutes à la question des avoirs forestiers sur les terres des Nisga'as. Ces terres ont fait l'objet d'une intense exploitation forestière à compter de 1958, et le bois non récolté est situé dans des secteurs difficiles d'accès. À l'heure actuelle, de 230 000 à 250 000 mètres cubes de bois sont récoltés chaque année sur ce qui deviendra les terres des Nisga'as en vertu de l'accord final. Les Nisga'as sont d'avis que si la récolte est ramenée à 115 000 mètres cubes, l'exploitation pourrait s'étendre sur 250 ans moyennant regénération des forêts. Au rythme actuel, elle n'est pas viable. Le taux viable de 115 000 mètres cubes ne représente cependant pas une grande quantité de bois selon les critères en vigueur en Colombie-Britannique.
Lorsque j'ai parlé avec les Nisga'as, ils ont mentionné qu'ils prévoient faire la récolte du bois selon le taux viable de 115 000 mètres cubes prévu dans le traité. Il se peut cependant qu'à un moment donné ils souhaitent exercer d'autres options, comme investir dans des avoirs forestiers situés hors des terres nisga'as.
Parallèlement, l'accord final conclu avec les Nisga'as précise explicitement que la nation nisga'a, un village nisga'a ou une société nisga'a s'abstiendra d'établir une installation primaire de transformation du bois pendant dix ans à compter de la date effective d'entrée en vigueur du traité. Cette mesure accordera aux utilisateurs de bois de la Nass une plage de temps pour conclure leurs propres accords avec la nation nisga'a ou pour trouver d'autres fournisseurs.
Un autre article de l'Accord définitif Nisga'a qui présente de la pertinence par rapport à la disposition dont je viens de parler a trait à la propriété de l'eau. En vertu de l'accord, la Colombie-Britannique établira aux profits de la nation nisga'a une réserve d'eau de 300 000 décamètres cubes par année provenant de la rivière Nass et d'autres cours d'eau situés entièrement ou en partie sur les terres nisga'as. Cela représente 1 p. 100 du débit moyen du Nass et devrait permettre aux Nisga'as d'utiliser l'eau à des fins industrielles le cas échéant. Cela accroîtra leurs possibilités de développement économique.
Ce traité a été négocié comme un accord entre deux nations. Il reconnaît les droits inhérents d'un peuple autochtone, en l'occurrence les Nisga'as, et le Parti progressiste conservateur reconnaît aussi le droit inhérent des peuples autochtones à l'autodétermination. L'accord conclu répond à ces attentes et crée un climat de certitude.
Il suffit de regarder ce qui se passe avec les pêches sur la côte est pour comprendre l'importance de signer des traités. Dans l'arrêt Delgamuukw, et maintenant Marshall, la Cour suprême du Canada a confirmé que les droits ancestraux et issus de traités sont des droits importants pour les peuples autochtones et pour tous les Canadiens. L'exercice de ces droits a une incidence, tant sur les activités des autochtones que des non-autochtones.
À l'heure actuelle, il y a une grande controverse en Nouvelle-Écosse relativement à l'arrivée de pêcheurs autochtones et à la façon dont ce changement va s'effectuer tout en protégeant les droits des pêcheurs non-autochtones et la ressource comme telle. Ce sont là des questions complexes pour lesquelles il n'y a pas de solutions faciles. Les pêcheurs autochtones et non-autochtones sont en train d'essayer de trouver, avec l'aide du négociateur fédéral, des réponses à ces questions et de voir comment appliquer la décision rendue par la Cour suprême le 17 septembre.
Il y a lieu de noter que la présence du négociateur fédéral dans ce dossier n'a vraiment pas été productive. Ce qui s'est produit, c'est que les représentants des pêcheurs non-autochtones ont rencontré des pêcheurs, des chefs et des membres de conseils autochtones et ont conclu un accord temporaire.
Le traité nisga'a est le résultat du même processus, mais à l'inverse. Au lieu de demander au tribunal de déterminer quels droits ils avaient sur quelles ressources, puis de devoir ensuite négocier un accord, les Nisga'as ont négocié leur propre traité. Les gouvernements fédéral et provincial ont négocié avec les Nisga'as. Les parties ont soigneusement examiné toutes les questions qui devaient être réglées pour permettre aux Nisga'as d'accéder à l'autodétermination, tout en réglant une revendication territoriale et en affectant des ressources. Quiconque participe au processus visant les pêches sur la côte est peut témoigner de la persévérance qui a dû être déployée pour en arriver à un tel résultat.
Enfin, je voudrais signaler le fait que le traité Nisga'a est un document final qui a déjà été accepté par la nation Nisga'a et le gouvernement de la Colombie-Britannique. Qui plus est, ce traité ne peut être modifié. L'accord définitif a été signé par le gouvernement fédéral et nous sommes actuellement saisis de la loi portant ratification. La loi peut être modifiée, mais le traité ne fait pas partie intégrante de la Constitution; il est plutôt reconnu et confirmé par la Constitution. Voilà pourquoi l'acceptation des provinces n'est pas nécessaire pour ce faire. Les trois parties à l'accord peuvent toutefois modifier le traité si le besoin s'en fait sentir.
Comme je l'ai dit au début, ce traité a déjà fait l'objet d'un vaste dialogue. Il a fallu aux Nisga'a plus de 100 ans pour atteindre cet objectif ultime et ceux-ci ont eu amplement le temps de se fixer des objectifs et de voir dans quelle mesure ce traité prend en compte ces objectifs. Et puis la nation Nisga'a a accepté très volontiers d'expliquer le traité et de réponses aux questions que je me posais sur certaines dispositions de l'accord définitif.
J'encourage tous mes collègues à communiquer avec la nation Nisga'a s'ils se posent des questions à propos de ce traité. Par ailleurs, je crains que le débat sur le traité Nisga'a ne soit écourté. Comme je l'ai mentionné, la nation Nisga'a a mis 100 ans à formuler et à établir les objectifs qu'elle compte atteindre dans le cadre d'un traité et à présent les autres Canadiens ont besoin de temps pour évaluer tout ce que cela implique. Je sais que la nation nisga'a a hâte de se lancer dans cette nouvelle aventure, mais la tenue d'un débat raisonnable et éclairé devrait encourager ceux qui ne comprennent pas exactement ce que renferme le traité à l'accepter.
L'une des répercussions les plus positives de l'accord final tient probablement au fait que, selon l'entente, les Nisga'as ne seront plus régis par la Loi sur les Indiens. Les terres des Nisga'as ne seront plus considérées comme des terres de réserve aux termes de la Loi sur les Indiens et le gouvernement fédéral ne décidera plus comment et quand les ressources seront extraites et exploitées sur les terres des Nisga'as. Les Nisga'as seront plutôt appelés à prendre leurs propres décisions et à en subir les conséquences. Il est évident qu'ils commettront des erreurs, tout comme le gouvernement fédéral en a commises. Toutefois, la liberté de prendre ces décisions et d'être autonomes compense tous les inconvénients qui peuvent en résulter.
Les Nisga'as se préparent à l'autonomie gouvernementale depuis fort longtemps et ils m'ont avoué qu'ils se réjouissaient des possibilités que cela va leur offrir. Ils ont hâte de se lancer dans cette aventure et ce débat au Parlement du Canada représente la dernière étape à franchir.
J'espère que la Chambre tiendra un débat éclairé, raisonnable et illimité sur ce traité.
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, je ne sais par où commencer après ce discours.
Le député a déclaré de façon présomptueuse qu'il n'était pas nécessaire de tenir un référendum en Colombie-Britannique. La question est entre les mains des tribunaux, mais il a décidé pour les tribunaux; de toute évidence, il a la réponse.
Il a dit que le traité avait été négocié comme un accord entre deux nations. Je me demande s'il croit que la nation nisga'a constitue une nation souveraine au même titre que le pays connu sous le nom de Canada.
Il a parlé d'un traité définitif et d'autres choses du genre. Qu'il aille parler aux habitants de Burnt Church. Ses paroles apaisantes ne leur seront pas d'un grand secours.
Si ce n'est pas un gouvernement fondé sur la race, qu'est-ce que c'est alors? Est-ce un projet de loi gouvernemental d'intérêt public? Non ce n'est pas un projet de loi d'intérêt public. Il ne s'applique qu'aux Nisga'as et personne n'a de choix en la matière. C'est la race qui décide. Je ne peux pas entendre ça et me taire.
Le député a dit que ce n'était pas un document constitutionnel. Selon lui, le traité découle-t-il des articles 25 et 35 et la portion du traité qui porte sur le gouvernement fait-elle partie de l'accord?
J'aimerais qu'il réponde à la question que voici. Nonobstant le fait qu'il a déjà tranché au nom des tribunaux de la Colombie-Britannique, quelle est sa position sur un référendum pour les habitants de cette province? Les Nisga'as ont pu se prononcer car la mesure législative les touche. C'est équitable. Mais ne touche-t-elle pas également les autres habitants de la Colombie-Britannique?
Les libéraux prétendent que le traité est trop complexe pour être compris par des non initiés. Le Britanno-Colombien moyen serait incapable de le comprendre. Le député est-il d'accord? Empêcherait-il le commun des mortels en Colombie-Britannique de se prononcer sur un traité qui va toucher tous les habitants de cette province et qui va servir de modèle à plus de 50 autres traités du même genre?
M. Gerald Keddy: Monsieur le Président, j'ai mis six questions par écrit. J'en ai peut-être manqué une ou deux. Je vais donc commencer par le concept de nation à nation.
Je suis tout à fait stupéfié que les députés réformistes puissent parler constamment à la Chambre de la Constitution du Canada et de la Charte des droits et libertés sans jamais arriver à comprendre comment l'une ou l'autre s'applique à la citoyenneté canadienne, aux Canadiens et aux autochtones du pays. C'est tout à fait stupéfiant.
Je suis sûr que nous aurons une occasion de poursuivre ce débat. Bien honnêtement, j'ai hâte que cela se fasse, car certaines calomnies proférées par le Parti réformiste du Canada ne tiennent tout simplement pas debout. Il faut les examiner et les expliquer une à la fois.
En ce qui concerne un référendum pour les habitants de la Colombie-Britannique, l'assemblée législative de la province a approuvé et ratifié le traité. Elle s'est prononcée contre un référendum pour les habitants de la Colombie-Britannique. C'est la raison pour laquelle un référendum n'a pas eu lieu dans la province. Le Parlement du Canada n'y est pour rien. À mon avis, il est improbable et impossible, voire immoral, que toute la population canadienne puisse être appelée à se prononcer sur cette question. Il ne revient pas aux Ontariens, aux Québécois, aux Néo-Écossais ou à tout autre groupe de dicter leurs opinions à cet égard.
Nous traitons avec les premières nations d'après le concept de nation à nation. Nous n'aimons ou n'approuvons peut-être pas cela. Chaque député peut avoir son opinion à ce sujet, mais le fait est que les premières nations sont protégées par la Constitution et que nous traitons avec elles de nation à nation. C'est ce que nous faisons avec 630 premières nations. C'est pourquoi nous avons ce traité.
Quiconque se donne la peine d'examiner les événements de Burnt Church constatera qu'ils résultent directement de la négligence à résoudre la question autochtone au Canada, de l'absence d'un traité moderne, de la nécessité de remonter à un document qui avait été établi en 1760 et de l'imposition de ces lois aux Canadiens en 1999 par la Cour suprême du Canada.
Le Parti réformiste veut croire que nous acceptons les jugements de la Cour suprême uniquement quand ils font notre affaire. Quand on s'adresse aux tribunaux, on court toujours le risque de perdre sa cause.
Nous avons laissé la Cour suprême du Canada se prononcer sur une question concernant la réserve de Burnt Church et le jugement rendu par un tribunal de la Nouvelle-Écosse à l'égard de Donald Marshall, une question qui aurait dû faire l'objet de négociations entre les chefs micmacs et les gouvernements provinciaux de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick, de l'Île- du-Prince-Édouard et de Terre-Neuve. Les tribunaux n'auraient jamais dû être saisis de la question.
Dans le jugement Delgamuukw, la Cour suprême a clairement déclaré qu'elle n'est pas l'endroit où devaient se régler tous les problèmes et tous les litiges au Canada, et que nous devrions négocier de bonne foi pour régler les différends.
Cet accord est protégé par la Constitution, mais il n'a aucune incidence sur la Constitution et ne la modifie pas. Voilà comment il s'applique. Le député devrait en lire le texte et comprendre quelle incidence la Constitution a sur l'accord.
L'accord est complexe. Le Parti progressiste conservateur n'a jamais dit qu'il ne l'était pas. Nous tenons cependant à dire très clairement que nous sommes favorables à un débat complet et ouvert au Parlement du Canada et que nous n'approuvons pas que l'on impose la clôture au débat de ce projet de loi comme de n'importe quel autre projet de loi. Nous sommes favorables à un débat clair, informé et ouvert, et nous continuerons de l'être.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, au nom des habitants de Selkirk—Interlake, je voudrais moi aussi dire que cette question est si importante pour tous les Canadiens que je ne suis pas d'accord pour que nous la tranchions avec précipitation.
Si le débat est limité, comment les Canadiens ou les électeurs que je représente peuvent-ils comprendre la question de l'accord nisga'a? Du reste, je crois que ce dossier à des conséquences plus vastes pour le reste du pays.
Je suis d'accord pour que nous négociions des traités avec les premières nations. Dans ma circonscription, on achète des terres qui sont ajoutées aux réserves, et cela ne pose aucun problème sinon quelques questions mineures de fiscalité.
Dans le cas du traité des Nisga'as, il est vrai que les Nisga'as ont eu leur mot à dire, ce qui est bien, mais je ne comprends pas pourquoi les autres autochtones qui habitent à proximité de la vallée du Nass n'ont n'a pas été consultés. Je ne comprends pas pourquoi nous achevons ce débat avec précipitation ni pourquoi on demande aux Canadiens de rester bien tranquilles dans l'ignorance tandis que le gouvernement libéral, qui ne s'est pas fait élire en parlant de cette question, prétend être le porte-parole de tous les Canadiens.
Il n'y a conclusion de traité qu'entre nations, en somme. Par conséquent, il faut que nous tenions ici un débat exhaustif et que les Canadiens comprennent le dossier à fond.
Le député ne convient-il pas que, si tous les Canadiens comprennent parfaitement le traité et l'appuient sans réserves, nous aurons un avenir paisible, non seulement pour les habitants de la vallée du Nass, mais aussi pour leurs voisins et même pour l'ensemble des Canadiens?
M. Gerald Keddy: Monsieur le Président, je conviens que tous les Canadiens doivent comprendre parfaitement ce traité et ses répercussions. Je suis favorable à la tenue d'un débat éclairé, exhaustif, ouvert et permanent sur cette question. J'ai déclaré plus tôt que le Parti progressiste-conservateur du Canada s'opposait à l'imposition de la clôture concernant cette mesure, sous quelque forme que ce soit.
Le député de Selkirk—Interlake a posé plusieurs questions, dont une, en particulier, que j'ai eu un peu de mal à comprendre parce qu'elle soulevait certainement une contradiction. Il a déclaré qu'il appuyait le dialogue de nation à nation avec les premières nations et je pense qu'il comprend parfaitement comment la Constitution canadienne s'applique aux premières nations et le fait que nous traitons réellement de nation à nation avec les 630 premières nations du Canada.
Toutefois, il semble également d'avis que le référendum et le vote des Nisga'as auraient dû donner lieu à un dialogue ou autre chose du genre pour permettre de formuler des observations. Il parlait peut-être de revendications territoriales qui se chevauchent ou d'autres premières nations du nord de la Colombie-Britannique. Si l'on accepte le principe selon lequel il faut traiter sur la base de nation à nation avec les premières nations au Canada, on ne peut pas dire que les autres premières nations ont un mot à dire sur le traité nisga'a. On ne peut pas jouer sur deux tableaux. Il faut choisir.
Il est important de comprendre que la Charte des droits et libertés aura toujours préséance, que la Constitution du Canada aura toujours préséance, que le gouvernement nisga'a sera comme un gouvernement municipal jouissant de droits provinciaux et fédéraux et qu'au bout du compte, nous allons donner au peuple nisga'a l'occasion de progresser, d'entrer dans le second millénaire et d'occuper la place qui lui revient en tant que partenaire égal au sein de la fédération canadienne.
Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Monsieur le Président, je suis très fière d'appuyer le projet de loi proposé afin de ratifier l'Accord définitif nisga'a. Je vais partager mon temps de parole avec le député de Malpeque.
L'une des caractéristiques les plus impressionnantes du traité nisga'a réside dans l'équilibre auquel il parvient. Les Nisga'as ont démontré pendant plus de 20 ans de négociations pacifiques qu'ils abordent les questions de façon équilibrée. Ils ont cherché à régler leurs différends grâce à la discussion, la compréhension mutuelle et les concessions. Cette approche se reflète dans tout ce traité.
Aujourd'hui, je voudrais parler d'un aspect du traité nisga'a où il était particulièrement important d'atteindre un tel équilibre, et où les parties ont réussi à le faire. Ce traité protège non seulement les droits des Nisga'as, mais il respecte également les droits de ceux qui ne sont pas des Nisga'as et qui vivront sur le territoire nisga'a.
En tant que Canadiens, nous sommes très chanceux, car notre pays est le meilleur endroit du monde où vivre. En grande partie, cela s'explique par l'importance que nous accordons aux valeurs démocratiques et par notre volonté de célébrer et de respecter les différences.
Le respect des droits des Nisga'as ainsi que ceux des gens qui ne sont pas des Nisga'as, mais qui vivront sur le territoire nisga'a était l'un des principaux objectifs visés par le gouvernement dans le cadre de la négociation de ce traité. Les Nisga'as vivent dans la vallée de la Nass et ils gèrent leurs propres affaires depuis très longtemps, chose que nous avons tendance à oublier.
Dans ce traité, nous nous entendons sur des dispositions pratiques qui donnent aux Nisga'as une forme appropriée d'autonomie gouvernementale à l'intérieur de la fédération canadienne.
Le gouvernement nisga'a est pour les Nisga'as. Il est conçu de façon à donner aux Nisga'as la possibilité de protéger leur culture, leur langue et leurs biens. En tant que tel, il est différent des autres gouvernements locaux.
Alors que les autres gouvernements locaux sont élus par tous les habitants sur leur territoire, aux termes du traité nisga'a, seuls les citoyens nisga'as pourront voter pour élire les membres du gouvernement nisga'a. Il y a une très bonne raison à cela. Le recours au critère de résidence pour déterminer le statut d'électeur Nisga'a pourrait avoir pour effet de miner la protection que le traité est censé offrir. Si, à un moment donné, des résidents qui ne sont pas des citoyens Nisga'a constituent la majorité, ils pourraient dominer le gouvernement Nisga'a et prendre des décisions concernant les droits issus du traité. À mon avis, voilà qui irait à l'encontre de la fin poursuivie.
Que cette possibilité puisse se réaliser irait à l'encontre de l'esprit et de la lettre de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 qui reconnaît et protège les droits autochtones et les droits issus de traités des peuples autochtones du Canada. Seuls les Nisga'a devraient avoir un droit de regard sur le gouvernement Nisga'a.
Par ailleurs, nous vivons dans un pays démocratique. Les droits individuels des citoyens canadiens sont également protégés par la Loi constitutionnelle de 1982 et la Charte des lois et libertés. Si le traité Nisga'a permet aux Nisga'a de protéger leur culture, leur langue et leurs terres, il y a également lieu de protéger les droits de ceux qui ne sont pas Nisga'a mais vivent sur une terre Nisga'a.
Par-dessus tout, les droits de tous les résidents d'une terre Nisga'a seront protégés par la Charte des droits et libertés qui s'applique au gouvernement Nisga'a, de même qu'à tous les autres gouvernements du Canada. Les résidents de la terre isga'a qui ne sont pas des citoyens nisga'a ne seront pas privés de leur droit de voter. Ils continueront de pouvoir voter aux élections fédérales, provinciales et régionales. Ils auront également leur mot à dire au sujet des institutions publiques qui intéressent tous les résidents d'un territoire nisga'a, comme les conseils scolaires et les conseils de santé par exemple, et ils auront le droit de s'y faire élire.
L'accord définitif confère d'autres droits particuliers aux résidents d'un territoire nisga'a qui ne sont pas des citoyens nisga'a. Par exemple, ils ont le droit d'être avisés et d'obtenir les renseignements pertinents lorsque le gouvernement nisga'a compte prendre une décision qui pourrait avoir des répercussions directes et importantes sur eux. Ils ont également le droit à une période raisonnable pour préparer leur point de vue à l'intention du gouvernement, qui devra alors en tenir compte de façon juste et intégrale.
J'aimerais souligner à nouveau le fait que les gens qui vivent à l'intérieur des terres nisga'a, mais qui n'appartiennent pas à la nation nisga'a ont le droit de savoir que leur point de vue sera pris en compte de façon juste et équitable. Et ce n'est pas tout. Tous ceux qui vivent sur des terres nisga'a pourront se prévaloir des mêmes mesures d'appel ou de révision des décisions administratives prises par les institutions publiques nisga'a. Ces mesures de protection sont beaucoup plus fortes que celles qui sont actuellement prévues par la Loi sur les Indiens.
Il importe également de souligner que les pouvoirs législatifs ne s'appliqueront pas tous à ceux qui vivent sur les terres nisga'a sans appartenir à ce peuple. Par exemple, bien que les pouvoirs législatifs en matière de contrôle de la circulation s'appliqueront à tous les résidents des terres nisga'a, dans le domaine des services sociaux et de l'adoption, il ne s'appliqueront qu'aux Nisga'a. C'est logique.
Plus important encore, bien que ceux qui habitent sur les terres nisga'a ou au sein de leur territoire, mais qui ne font pas partie de la nation nisga'a pourront retirer certains avantages du gouvernement nisga'a, le traité ne permet pas à ce gouvernement d'exiger d'eux le paiement d'impôts. Contrairement aux déclarations qui ont été faites par les opposants au traité qui semblent ne pas le connaître beaucoup, le gouvernement nisga'a n'aura que le droit conventionnel d'imposer les citoyens nisga'a et ce uniquement sur les terres nisga'a.
Tous les aspects de l'Accord final ont été étudiés en détail pour assurer la protection des résidents non nisga'a.
On peut trouver un autre exemple de cela dans le chapitre sur l'administration de la justice qui prévoit la mise sur pied d'un tribunal nisga'a. Un tel tribunal ne pourra fonctionner que s'il prend la forme d'une cour provinciale et qu'il est approuvé par la Colombie-Britannique dans le cadre du traité. Le traité conclu avec les Nisga'as prévoit expressément que le tribunal nisga'a ne peut infliger à une personne qui n'a pas la citoyenneté nisga'a une sanction ou une peine de nature différente de celles qui sont généralement imposées par les tribunaux provinciaux ou les cours supérieures du Canada, sans le consentement de la personne.
Pendant la négociation du traité nisga'a, les négociateurs fédéraux et provinciaux ont informé et consulté abondamment les habitants de la vallée de la Nass et d'autres personnes qui ont des intérêts dans le secteur que l'on propose de transformer en territoire nisga'a. On a tenu compte de leurs opinions au moment de conclure l'accord définitif. Aucune des propriétés appartenant à des intérêts privés ne deviendra territoire nisga'a. Le gouvernement du Canada a pour politique que les terres qui appartiennent à des intérêts privés ne sont pas négociables pendant la négociation d'un traité.
L'accord définitif oblige en effet le gouvernement nisga'a à accorder, à la date d'entrée en vigueur du traité, un intérêt de remplacement à tous ceux qui avaient, avant l'entrée en vigueur du traité, des intérêts fonciers dans des secteurs du territoire nisga'a. Non seulement ces intérêts seront-ils remplacés, mais ils ne pourront jamais être expropriés par les Nisga'as aux termes de l'accord.
Les députés constateront que, pendant la négociation de l'accord définitif nisga'a, on a veillé à ce que les droits de tous les habitants des terres nisga'as continuent d'être protégés dans l'avenir.
Qui plus est, comme on peut le constater depuis plus d'un siècle, les Nisga'as traitent leurs voisins non nisga'as d'une manière juste et respectueuse. Les propos récents du chef Joseph Gosnell témoignent de cette haute considération.
La citoyenneté nisga'a et la capacité de faire partie du gouvernement nisga'a ne sont pas limitées à ceux qui satisfont aux critères d'admissibilité. Le gouvernement nisga'a peut accorder la citoyenneté à d'autres personnes et leur conférer les droits et les responsabilités de tous les citoyens nisga'as. Les Nisga'as ont insisté sur ce pouvoir, parce qu'ils savent qu'il y aura chez eux des personnes qui seront à tous les égards des membres à part entière de leur collectivité et qui devraient pouvoir participer aux fonctions démocratiques du gouvernement nisga'a.
Pour que les Nisga'as puissent prospérer et se développer économiquement, il faudra que leurs lois et leurs décisions soient ouvertes et transparentes et que leurs politiques administratives sur les mécanismes d'examen et d'appel soient limpides et équitables pour tous. L'accord définitif nisga'a est une base solide qui permettra aux Nisga'as d'atteindre ces objectifs.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je remercie ma collègue pour son bon discours. Nous connaissons tous l'intérêt profond qu'elle porte à cette question.
L'accord nisga'a, la Loi sur les Indiens, la décision Delgamuukw et la décision Marshall font tous partie d'un ethos que le reste de la Chambre accepte, mais que nous n'acceptons pas pour les raisons suivantes.
La députée ne trouve-t-elle pas étrange le fait que l'argent et les ressources provenant de l'accord nisga'a iront à la collectivité et non aux individus? Nous avons vu que 3,5 milliards de dollars, soit la moitié du budget, ont été versés à plus de 600 bandes dans notre pays. Beaucoup de ces bandes, mais pas toutes, font de la mauvaise gestion, et les autochtones de la base sont exclus du processus décisionnel.
Dans la réserve Pacheedaht, située dans ma circonscription, on cache au chef des décisions très importantes qui sont prises au sujet de la réserve. Lorsqu'il a demandé au ministère d'intervenir en son nom et au nom des siens, le ministère lui a répondu qu'il ne le pouvait pas parce que les leaders l'en empêchaient. Les autochtones de la base sont exclus parce qu'ils n'ont pas le pouvoir.
La députée ne croit-elle pas que l'indépendance politique est nécessaire pour atteindre l'émancipation économique? L'Accord nisga'a ainsi que les décisions Marshall et Delgamuukw et toutes les autres décisions ne représentent-ils pas la balkanisation du Canada? La députée voit-elle l'accord nisga'a comme un modèle pour les décisions concernant les traités avec les autochtones et les revendications des autochtones d'un bout à l'autre du pays? Comment paierons-nous tout cela? Enfin, comment allons-nous nous assurer que, ensemble, nous serons capables de créer des conditions économiques qui donneront de la certitude, du pouvoir et un avenir prometteur aux autochtones et aux non-autochtones?
Mme Nancy Karetak-Lindell: Monsieur le Président, il faut comprendre que jusqu'ici les peuples autochtones ne se sont pas vus accorder une juste possibilité d'exercer leurs droits au Canada. Nous sommes malheureusement obligés, dans les circonstances actuelles, de conclure des accords et des traités pour veiller à la mise en place d'un mécanisme qui permette aux peuples autochtones d'exercer les droits qui sont les leurs en vertu de la Constitution.
Comme l'a dit le député conservateur, les traités comme celui conclu en Nouvelle-Écosse n'ont pas fonctionné jusqu'à présent. Cela fait deux cents ans que nous faisons l'essai d'un système qui ne fonctionne pas. Nous sommes tous, je pense, d'accord là-dessus. Nous devons mettre en place un mécanisme qui permette à ces Canadiens de s'autogouverner, ce qu'ils n'ont pas eu la possibilité de faire jusqu'ici.
Je suis très déçue de certains commentaires faits ce matin par des députés de l'opposition. Les députés de l'opposition pensent que ces gens ne peuvent pas s'occuper de leurs propres affaires en vertu de ce nouveau traité. Je sais que, dans ma propre région, ils s'autogouvernent depuis des années et ils ont un système qu'ils veulent mettre en place.
Comme je l'ai dit plus tôt, les systèmes que nous avons eus jusqu'ici n'ont pas fonctionné. Nous devons donc conclure de nouveaux traités pour veiller à ce que ces gens puissent participer pleinement à la vie économique, politique et sociale au Canada et jouir des mêmes avantages que les autres Canadiens.
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais apporter un rectificatif à l'observation de la députée. Le parti réformiste n'a jamais prétendu que les autochtones n'étaient pas en mesure de s'autogouverner. En fait, nous avons affirmé précisément le contraire. Nous voudrions que tous les autochtones du Canada puissent s'occuper des affaires les concernant et s'assumer pleinement, au même titre que tous les autres Canadiens.
L'accord relatif aux revendications territoriales prévoit le droit à l'autodétermination, en vertu de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. D'après la Cour suprême, on ne peut pas le modifier.
Le vice-président: Je demanderais au député de bien vouloir poser sa question. Je lui en ai laissé le loisir. Je lui ai rappelé que sa question devait être brève; or il parle depuis plus de 60 secondes. Nous manquons de temps. Pourrait-il poser sa question assez rapidement?
M. Philip Mayfield: La députée peut-elle m'expliquer en quoi ce texte ne modifie pas indirectement la Loi constitutionnelle?
Mme Nancy Karetak-Lindell: Monsieur le Président, cet accord est conforme à la législation canadienne. Je ne vois pas sur quoi se fonde le député pour poser sa question.
Il a également fait une observation à propos d'une inexactitude. Je ne me rappelle hélas plus ses paroles exactes. Je sais cependant qu'il a été décidé, dans le cadre de cet accord, que ces personnes seraient assujetties à l'impôt comme tous les autres Canadiens. Je ne comprends pas que le député s'y oppose.
Un groupe de personnes a décidé de devenir des contribuables canadiens en un laps de temps donné. Je ne vois pas ce que ces gens pourraient faire de plus pour prouver qu'ils tiennent à faire partie du Canada.
M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Monsieur le Président, comme tous les députés le savent, les pêches sont importantes pour nombre de peuples autochtones canadiens habitant sur la côte. Comme il le fait dans bien d'autres domaines, l'Accord définitif nisga'a concilie et met en équilibre les droits de la nation nisga'a et les intérêts de tous les Canadiens. On trouve un article important dans le document sur les pêches. Ce qui importe le plus, l'Accord définitif nisga'a protège les riches ressources halieutiques de la vallée du Nass. Sans conservation, nous éprouverions tous des difficultés.
Quand j'occupais la fonction de secrétaire parlementaire du ministre des Pêches, j'ai eu l'occasion de discuter à quelques reprises avec des Nisga'as de l'importance des pêches et de l'application de l'Accord définitif nisga'a. Je leur ai posé une foule de questions auxquelles ils répondu cordialement et directement.
Cet accord prévoit le partage des ressources halieutiques et assure un avenir à tous ceux qui dépendent de cette industrie. Il prévoit aussi, et c'est très important, un rôle coopératif pour les Nisga'as dans la gestion des pêches, tout en maintenant le pouvoir général du ministre en matière de réglementation de l'ensemble des pêches de la Nass.
Je voudrais esquisser un historique des événements qui ont abouti à cet accord sur les pêches. Les Nisga'a pêchent depuis fort longtemps le saumon et d'autres espèces de la rivière Nass pour assurer leur survie. Ils pêchent toujours le saumon aussi bien que d'autres espèces comme le flétan, les crustacés et coquillages et le crabe. Quiconque a visité la vallée du Nass sait l'importance qu'ont les pêches pour les Nisga'a. Le poisson constitue la base de leur alimentation et il est représenté dans toutes leurs fêtes et cérémonies.
Depuis 1992, les Nisga'a jouent un rôle de plus en plus important dans les sciences halieutiques. Dans le cadre du programme des pêches nisga'a sanctionné par un prix, élaboré en consultation avec les scientifiques du ministère des Pêches et des Océans et financé dans le cadre de la stratégie des pêches autochtones, les Nisga'as ont contribué aux activités de gestion des stocks de saumon de la rivière Nass. Un comité technique conjoint formé de Nisga'as et de membres du personnel du ministère des Pêches coordonne le programme des pêches nisga'as.
Une de ces activités, par exemple, est le programme du tourniquet, qui relève le nombre de saumons sockeye qui reviennent frayer. Depuis 1994, le ministère des Pêches et des Océans utilise ces estimations pour gérer le stock de saumon sockeye du Nass. Auparavant, il arrivait assez fréquemment qu'il y ait beaucoup plus de sockeye que nécessaire qui se vendaient dans les frayères. L'initiative des Nisga'as a aidé le ministère à gérer la pêche commerciale et à récolter le plus grand nombre de poissons possible tout en respectant ses objectifs en matière de conservation.
De 1977 à 1992, au-delà de 800 000 saumons sockeye qui auraient pu être récoltés sans danger ont échappé à la flotte de pêche et se sont rendus dans les frayères. Ces poissons sont là pour l'avenir. Cette pratique profitera à tous ceux qui gagnent leur vie grâce à la pêche au saumon sockeye du Nass, y compris aux pêcheurs commerciaux. D'autres programmes nisga'as fournissent aussi des renseignements précieux qui contribuent à la gestion et à la conservation du saumon.
En 1995, les Nisga'as se sont vu décerner le prix de gestion du ministère des Pêches et des Océans pour ces efforts. C'est là ce que nous entendons lorsque nous parlons de gestion des pêches. C'est là un excellent contexte pour amorcer un lien durable comme celui qui est prévu dans le traité.
Je parlerai maintenant de conservation. J'ai dit que l'accord final conclu avec les Nisga'as donne la priorité à la conservation. Je m'explique. L'accord final précise clairement que le droit de pêcher des Nisga'as est assujetti à la conservation. Dans le cas du saumon, le ministre des Pêches et des Océans peut fixer les taux de remonte minimums nécessaires pour assurer la santé des stocks de saumon en deçà desquels les Nisga'as ne peuvent pêcher.
Tant le Canada que les Nisga'as voulaient poursuivre l'excellent travail accompli dans le cadre du programme des pêches nisga'as. Dans le traité, le Canada a consenti à verser 10,3 millions de dollars et les Nisga'as, 3,1 millions de dollars, en vue de créer une fiducie destinée à promouvoir la conservation et la protection des espèces de poisson du secteur du Nass. La surveillance étroite des migrations anadromes des saumons exigée dans l'accord final conclu avec les Nisga'as fournira au ministre des Pêches et des Océans l'information dont il a besoin pour veiller à la protection des ressources halieutiques si jamais des mesures s'imposent.
La conservation demeure la principale priorité. Les allocations de saumon mentionnées dans l'accord définitif se fondent sur un pourcentage de la remonte au Canada, sous réserve d'une limite de conservation et d'un plafond. Ces allocations de saumon se fondent sur une modeste hausse par rapport aux niveaux de prise actuels des Nisga'as. Par exemple, l'allocation pour l'espèce la plus précieuse, le saumon sockeye, correspondra à 10,5 p. 100 de la remonte au Canada, avec un plafond de 63 000 prises. Il n'y a pas d'incertitude. L'allocation est fixée à 10,5 p. 100 et la question est réglée.
L'accord définitif établit de façon précise la part des Nisga'as en ce qui a trait au saumon de la rivière Nass, indépendamment des changements qui peuvent survenir au sein de la population nisga'a, des changements à long terme au niveau de l'abondance de la ressource, ou de tout autre facteur. Tous sauront à quoi s'en tenir et il y en aura pour tous les utilisateurs de la ressource. Il est extrêmement important que tous connaissent les règles et que celles-ci soient bien établies.
Une entente distincte sur les prises, qui ne fait pas partie du traité, traite des allocations commerciales de saumon rose et de sockeye. Lorsque ces espèces feront l'objet d'une pêche commerciale, les Nisga'as se verront attribuer une part de l'allocation. Dans le cas du saumon sockeye, cette part est fixée à 13 p. 100. La part attribuée aux Nisga'as aura la même priorité que celles attribuées aux pêcheurs commerciaux et récréatifs, ni plus ni moins.
Le système comptable prévu dans l'accord définitif joue un rôle important pour ce qui est d'assurer la certitude que nous recherchons tous. Grâce à ce système, les prises des Nisga'as vont correspondre à la part qui leur est attribuée et ceux-ci ne vont pas s'approprier la part d'autres groupes.
Les pêches sont l'un des débouchés économiques les plus importants visés par l'Accord définitif nisga'a. Le saumon capturé en vertu de l'entente sur les prises pourra être vendu conformément aux lois qui réglementent la vente du poisson, et sous réserve des conditions fixées par le ministre dans le plan annuel de pêche nisga'a.
Le poisson capturé par les Nisga'as en vertu de leurs droits conférés par le traité ne peut être vendu que lorsque les pêcheurs commerciaux peuvent vendre le saumon du Nass. J'aimerais également souligner que les Nisga'as ont dit qu'une portion de leurs revenus provenant de la pêche commerciale servira à financer leurs activités de protection des pêches.
Le traité et l'accord sur la récolte donnent lieu à une nouvelle répartition des prises qui accorde aux Nisga'as des quantités supérieures à celles auxquelles ils ont droit actuellement. Afin que la pêche continue à être une activité rentable pour les autres pêcheurs, l'augmentation des prises des Nisga'as sera compensée par un programme volontaire de retrait de permis.
Cela signifie que, pour les pêcheurs au saumon de la côte nord de la Colombie-Britannique, les prises individuelles ne diminueront pas à la suite de ce traité. Comme je l'ai déjà dit, par l'entremise de ce traité, nous protégeons les intérêts de tous les Canadiens.
Par souci de clarté, permettez-moi de répéter que l'Accord définitif nisga'a confirme que le ministre continue d'être responsable de la gestion des pêches et de l'habitat du poisson. Les Nisga'as ont un rôle consultatif en tant que membres du comité mixte de gestion des pêches. Ce dernier fera des recommandations au ministre afin de faciliter la planification et la gestion coopérative des pêches nisga'as. Rien n'empêche le ministre de demander conseil à d'autres sur l'utilisation de cette ressource et de tenir compte de ces conseils.
Les pêches nisga'as seront réglementées par la Loi et les règlements sur les pêches et par un plan de pêche annuel nisga'a approuvé par le ministre. Le plan fixera la saison de la pêche, les méthodes de pêche et les lieux de pêche. Le plan de pêche devra être accompagné, si nécessaire, d'un plan de conservation et être compatible avec les plans de pêche des autres utilisateurs.
Le respect du plan de pêche annuel nisga'a relèvera de la Loi sur les pêches et du droit nisga'a. Les agents de surveillance provinciaux et fédéraux peuvent faire respecter la loi nisga'a.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, nous nous entendons tous pour dire que le processus actuel de négociation des traités n'a pas fonctionné. Nous convenons aussi que les droits des peuples autochtones ont été bafoués.
Ma question est la suivante: le traité nisga'a n'est-il qu'un prolongement de la loi ségrégationniste sur les Indiens que nous avons au Canada à l'heure actuelle? Ne pourrait-on pas améliorer plus efficacement la santé et le bien-être social des autochtones—un but auquel souscriraient tous les députés—en responsabilisant les individus plutôt que des groupes sélectifs?
Ce n'est qu'en responsabilisant les individus et en leur donnant les outils nécessaires pour assurer leur autonomie qu'ils pourront faire quelque chose pour eux-mêmes, pour leur famille et pour leur collectivité. Ce processus est nécessaire pour leur redonner la fierté et le respect de soi essentiels pour qu'ils puissent avancer avec nous vers un avenir meilleur.
Ne devrions-nous pas faire en sorte que les peuples autochtones aient les mêmes pouvoirs que tous les autres, les mêmes droits dans la loi que le reste de la population et les mêmes droits individuels que tous les autres Canadiens? Ne devrions-nous pas faire en sorte que les peuples autochtones soient en mesure de profiter de tous ces droits comme tous les autres?
M. Wayne Easter: Monsieur le Président, je crois que cette question permet de voir le dédain qui caractérise la position du Parti réformiste dans ce dossier ainsi que ses motifs.
Le député a parlé des autochtones qui s'avancent avec le reste de nous vers l'avenir. L'accord parle justement de progresser ensemble. J'ai donné l'accord sur la gestion des pêches comme exemple de la collaboration avec les Nisga'as qui nous permet à tous de progresser. Nous ne sommes pas dans la situation où nous nous sommes vus et qui a conduit à l'arrêt Marshall de la Cour suprême.
Nous sommes devant un accord négocié avec la nation nisga'a et cet accord permettra une meilleure utilisation des ressources et un meilleur partage des ressources du Canada. Au bout du compte, nous nous en trouverons tous mieux.
Le Président: Il reste environ trois minutes. Nous reprendrons ce débat après la période des questions. Si le député est présent, il y aura trois minutes pour les questions et les observations sur son intervention.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
HISTORICA
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, je tiens à remercier et à féliciter les co-fondateurs de Historica, M. Charles Bronfman et M. Red Wilson, et ceux qui les appuient.
Ils viennent tout juste de lancer Historica, une nouvelle fondation qui fera la promotion de l'étude de l'histoire du Canada dans nos écoles. La fondation agira comme organisme-cadre représentant d'autres groupes de promotion du patrimoine canadien et utilisera la télévision, le cinéma et le service Internet pour aider les gens à parfaire leurs connaissances de l'histoire du Canada.
La fondation créera un site Web qui donnera accès à une encyclopédie du Canada et à des groupes de discussion afin que les Canadiens d'un océan à l'autre puissent discuter en direct en anglais ou en français. Il offrira également un répertoire des adresses Internet canadiennes afin que les étudiants puissent trouver des liens directs avec d'autres sites traitant de l'histoire du Canada.
Au moment où les sondages nous apprennent que les jeunes ne savent plus vraiment qui est Pierre Trudeau et que seule la moitié d'entre eux savent que sir John A. Macdonald a été le premier à occuper les fonctions de premier ministre du Canada, j'applaudis à cette initiative qui vise à promouvoir l'étude de l'histoire du Canada.
Le site Web parle de célébrer notre passé et de partager notre avenir. Y a-t-il quelque chose de plus important?
* * *
LES PARTIELLES DANS SASKATOON—ROSETOWN—BIGGAR
M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Monsieur le Président, je veux souhaiter la plus chaleureuse des bienvenues à un homme qui vient d'être parachuté en Saskatchewan.
Denis Greunding, bien connu de ses voisins d'Orléans, en banlieue d'Ottawa, visite Saskatoon où il a généreusement permis au NPD d'inscrire son nom comme candidat néo-démocrate aux élections partielles qui auront lieu dans la circonscription de Saskatoon—Rosetown—Biggar.
M. Greunding a loué une magnifique maison dans le quartier huppé de Silerwood Heights, à Saskatoon. Malheureusement, il n'a pas encore découvert que la maison qu'il loue n'est même pas située dans la circonscription où il se porte candidat. Au moins, il se trouve dans la bonne province.
Je veux lui dire d'avance que je suis désolé pour le revers qu'il encaissera aux élections du 15 novembre 1999 et qui l'obligera à réintégrer sa luxueuse résidence d'Ottawa. Heureusement, ce sera un deuxième échec pour cet opportuniste d'Ottawa, qui s'était présenté encore là en touriste aux élections d'il y a à peine deux ans dans la circonscription de Saskatoon—Humboldt et que j'avais eu le plaisir de battre.
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L'ÉPIDERMOLYSE BULLEUSE
M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Monsieur le Président, je signale à la Chambre que la période du 25 octobre au 1er novembre est la Semaine de sensibilisation à l'épidermolyse bulleuse. L'épidermolyse bulleuse est une maladie cutanée héréditaire rare qui affecte les enfants, indépendamment de la race ou du sexe.
La rareté de cette maladie, combinée au manque de recherche et d'information, a comme résultat qu'un grand nombre de jeunes victimes se sentent isolées et désabusées.
Je veux aujourd'hui attirer l'attention du public sur cette maladie dévastatrice en soulignant les efforts de DEBRA Canada. La Dystrophic Epidermalycis Bullosa Research Association of Canada est un organisme de bienfaisance fondé par un groupe de victimes de cette maladie, leurs familles et leurs amis.
DEBRA Canada et sa présidente, Francesca Molinaro, travaillent sans relâche afin de sensibiliser la population et de promouvoir la recherche sur cette maladie rare.
J'encourage tout le monde à appuyer DEBRA Canada et son objectif, qui est de sensibiliser le public à cette terrible maladie tout en apportant un soutien à tous les enfants qui en souffrent.
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LE SERVICE TÉLÉPHONIQUE
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, le croiriez-vous? À l'aube du XXIe siècle, il y a des familles dans le comté de Peterborough qui n'ont pas de service téléphonique.
On m'a fourni les indications suivantes pour me rendre chez l'une de ces familles: «Suivez les routes de comté 8 et 40 jusqu'à l'endroit où il n'y a plus de lignes téléphoniques, puis suivez les poteaux jusqu'à notre maison.» Il y a des poteaux de téléphone qui vont jusqu'à ces maisons. Des voisins ont un téléphone, mais ils ne peuvent obtenir de service.
Cette situation est impensable dans les régions rurales du Canada, le pays le plus branché au monde. Le gouvernement fédéral a fait en sorte que toutes nos écoles aient accès à l'Internet, mais les enfants de ces familles n'y ont pas accès à la maison. Ils ne peuvent même pas téléphoner à leurs amis.
J'exhorte le gouvernement à intervenir auprès de Bell Canada et du CRTC afin que ces familles de Peterborough aient bientôt un service téléphonique.
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[Français]
LA SEMAINE DE LA PETITE ENTREPRISE
M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine est la Semaine de la petite entreprise.
Les PME constituent le fer de lance de notre économie, et dans Brome—Missisquoi, elles s'activent en agriculture, en tourisme, aussi bien que dans le secteur des services. Les PME sont d'importants agents créateurs d'emplois et représentent une nouvelle façon de développer les économies modernes.
À Sutton, à Magog, à Knowlton, aussi bien qu'à Farnham et à Bedford, nos jeunes entrepreneurs, ceux de la petite entreprise, sont imaginatifs, travaillants, impliqués, autant chez eux que dans leur communauté.
Jeunes entrepreneurs, d'où que vous soyez, le gouvernement du Canada est fier de vous. Vous contribuez à faire de votre environnement un monde meilleur.
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[Traduction]
LE CANCER DU SEIN
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, octobre est le Mois de sensibilisation au cancer du sein.
Le cancer du sein est l'une des causes principales de décès chez les Canadiennes, et les statistiques ne sont pas encourageantes. Le nombre de cas de cancer du sein augmente de 1,5 p. 100 par année depuis 1981. Cette maladie frappera une Canadienne sur neuf. Il y a cependant des signes encourageants.
Beaucoup de personnes à la Chambre ont participé à la Course à la vie de la CIBC, qui a permis de recueillir des millions de dollars pour la recherche sur le cancer du sein. Des groupes de soutien se créent pour venir en aide aux personnes atteintes du cancer du sein et à leur famille. Il existe également des techniques chirurgicales qui laissent moins de marques et de nouveaux traitements qui, espérons-le, pourront prévenir le cancer du sein à l'avenir.
Cela ne suffit pas. Nous devons trouver un remède au cancer. Nous encourageons le gouvernement à accroître son engagement à stimuler la recherche sur le cancer du sein.
J'encourage également les femmes à consulter leur médecin pour le dépistage du cancer du sein. Les femmes qui sont atteintes du cancer du sein devraient veiller à ce que leurs filles se fassent examiner elles aussi.
Faisons en sorte qu'octobre soit non seulement un mois où nous nous soucions du problème du cancer du sein sous tous ses angles, mais aussi un point de départ pour l'éradiquer.
* * *
L'ASSOCIATION LÉGISLATIVE CANADA-CHINE
M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Monsieur le Président, il y a un peu plus d'un an, la Chambre, conjointement avec l'autre endroit, a créé l'Association législative Canada-Chine afin de bâtir des liens spéciaux entre l'Assemblée nationale populaire de Chine et notre Parlement.
Cette semaine, nous recevons à Ottawa le président de la section chinoise de l'Association législative, M. Jiang Xinxiong; le vice-président, M. Zheng Yi; et deux membres de l'association, MM. Tao Xiping et Wang Shuming.
Nous venons de terminer deux journées de rencontres fructueuses. Nous avons eu des discussions franches et entières sur un large éventail de dossiers, de Taïwan aux immigrants illégaux. Nous bâtissons sur les fondations très solides qui ont été établies entre nos deux pays.
* * *
LE BASSIN DES GRANDS LACS
Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Monsieur le Président, 31 citoyens préoccupés du Québec, de l'Ontario et des États-Unis sont à Ottawa aujourd'hui pour rencontrer des parlementaires et leur faire part des problèmes liés au bassin des Grands Lacs.
En 1996, 321 millions de livres de toxines ont été déversées en toute légalité dans les Grands Lacs. Les budgets de recherche et de surveillance ont été sensiblement réduits et la réglementation a été affaiblie.
Ces citoyens préoccupés demandent aux parlementaires de protéger la santé humaine et de restaurer l'intégrité écologique du bassin des Grands Lacs.
Il s'agit d'un appel à l'action et, si nous n'y répondons pas, c'est à nos risques et périls.
* * *
[Français]
LES PARCS NATIONAUX
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, tout récemment, on apprenait que les parcs nationaux, dont le gouvernement fédéral a la responsabilité, sont dans un état lamentable. Parcs Canada, passivement, assiste à un triste spectacle: la disparition totale de plusieurs espèces animales.
Le problème ne se limite pas à un ou deux parcs, il est généralisé. On parle d'une véritable crise au sein des parcs fédéraux. Un expert en la matière n'hésite pas à pointer du doigt Parcs Canada pour expliquer ce désastre.
Par ailleurs, le gouvernement a déposé un projet de loi pour créer des aires marines de conservation dont Parcs Canada aurait la responsabilité.
Comment le gouvernement peut-il vouloir ajouter de nouvelles responsabilités à un organisme qui, noir sur blanc, a démontré son incapacité à s'acquitter correctement de son mandat actuel?
Parcs Canada doit d'abord stopper la disparition des espèces menacées dans les parcs fédéraux actuels avant que le gouvernement songe...
Le Président: L'honorable député d'Edmonton—Strathcona a la parole.
* * *
[Traduction]
L'ENVIRONNEMENT
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de l'Environnement est fier de son pouce vert, mais c'est de sa main de fer dont les Canadiens devraient s'inquiéter.
Après ses déclarations ridicules concernant la taxe spéciale sur les véhicules de sport utilitaires, le ministre s'intéresse maintenant aux émissions émanant des vaches et des cochons. C'est vrai. Alors même qu'on pensait que la science-camelote entourant le réchauffement de la planète avait dépassé les bornes, voilà qu'on en rajoute. Les exploitants de ranchs et les agriculteurs qui élèvent nos délicieux amis à quatre pattes sont les nouveaux méchants de l'environnement.
Voilà qui donne une nouvelle dimension à la proposition des libéraux concernant la taxe sur le carburant. Le ministre va-t-il instituer une taxe anti-flatulence, soit un dollar par animal qui lâche un vent?
Si le ministre s'intéresse au mythe du réchauffement planétaire, j'ai un conseil à lui donner. Qu'il dise au caucus libéral de ne pas exhaler.
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MAURICE RICHARD
Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu hier soir à Montréal une soirée tout à fait spéciale.
[Français]
Hier soir, nous avons honoré et rendu hommage à un héros d'Ahuntsic, de Montréal et du monde du hockey, Maurice Richard.
Maurice Richard est un exemple de ténacité, de travail acharné et de professionnalisme au hockey. Il est aussi un héros pour des gens comme mon frère et tous les jeunes de sa génération, mais cela dépasse les générations.
Bref, il est un modèle à suivre sur la glace, mais aussi dans la vie.
[Traduction]
Je remercie Maurice Richard d'avoir su être un modèle pour tous les jeunes et d'avoir fait en sorte que notre sport national, le hockey, continue d'être honoré de la même façon et de traduire l'esprit d'équipe, l'esprit sportif que nous souhaitons voir régner dans notre pays.
[Français]
Chapeau Maurice, et merci beaucoup.
* * *
[Traduction]
DIWALI
M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, sur la colline du Parlement, la collectivité sud-asiatique célèbre Diwali, le festival des lumières.
Diwali, c'est la victoire de la lumière sur l'obscurité, la victoire de la connaissance sur l'ignorance, la victoire du bien sur le mal, la victoire de la vie sur la mort. C'est la célébration de la lumière éternelle.
Diwali est un festival national que souligne une importante partie de la collectivité sud-asiatique aux quatre coins du monde.
Je tiens à remercier le premier ministre, ses ministres et les députés qui ont déjà confirmé leur présence à la grande célébration de ce soir, organisée par les membres de la collectivité indo-canadienne, dans la salle 237-C, entre 16 h 30 et 18 heures.
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LA LIGUE NATIONALE DE HOCKEY
M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, la LNH et les joueurs refusent de faire quoi que ce soit pour garder le hockey professionnel au Canada. S'ils ne sont pas disposés à collaborer, le contribuable fédéral ne devrait pas l'être non plus.
Ce serait un énorme travestissement de la justice si le gouvernement envisageait un seul instant de puiser un cent de plus dans les recettes fiscales pour venir en aide à la LNH, alors que des milliers d'agriculteurs font faillite pendant la pire crise agricole depuis les années 30. Si le gouvernement aide des propriétaires et des joueurs de hockey millionnaires à se sortir d'un déficit financier, mais refuse d'aider les agriculteurs à se sortir d'une guerre internationale de subventions, c'est que quelque chose va terriblement mal dans notre pays.
Investir d'autres recettes fiscales dans les sports professionnels avant de le faire dans l'alimentation, la santé, l'éducation, le logement ou même dans des allégements fiscaux déséquilibrerait tellement les priorités des Canadiens que les électeurs ne pardonneraient jamais cette stupidité aux libéraux.
Selon les propres sondages du gouvernement, une aide fiscale au hockey professionnel vient en dernier dans les priorités de dépense des Canadiens. Dans un sondage effectué dans ma circonscription, quelque 94 p. 100 d'électeurs ont dit qu'il ne fallait pas subventionner davantage la LNH, car nous lui accordons déjà des millions de dollars. Quelqu'un a trouvé la meilleure formule: «Qu'on aide les agriculteurs, d'accord, mais pas le hockey professionnel.»
* * *
[Français]
LE TRANSPORT DE DÉCHETS NUCLÉAIRES
M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, il y a quelques jours, je recevais à mon bureau de comté copie de résolutions des villes de Delson, Saint-Constant et Châteauguay, adressées au premier ministre du Canada, au sujet du transport de déchets nucléaires de Russie et des États-Unis par la Voie maritime du Saint-Laurent.
Dans mon comté, environ 100 000 personnes vivent le long du Saint-Laurent dans les municipalités de Delson, Sainte-Catherine, Saint-Constant, Kahnawake, Châteauguay, Mercier et Léry et sont très inquiètes de la possibilité d'accidents écologiques. De plus, ces villes puisent leur eau potable près ou dans le Saint-Laurent.
Ce gouvernement, qui dépense des millions en consultations auprès de la population dans certains dossiers, aurait tout intérêt, sans que ça ne lui coûte un sou, de sortir de son mutisme, accuser réception de ces résolutions et arrêter ce projet dangereux pour la population riveraine du Saint-Laurent.
* * *
[Traduction]
LA SOCIÉTÉ IRVING OIL
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, récemment, la société Irving Oil, du Nouveau-Brunswick, a relevé les normes de tous les producteurs d'essence du Canada en introduisant une nouvelle sorte d'essence à faible teneur en soufre pour les consommateurs canadiens.
En tant que député du Nouveau-Brunswick et porte-parole du Parti conservateur en matière d'environnement, je suis fier que la société Irving Oil soit la première à atteindre les nouveaux niveaux cibles d'Environnement Canada, à savoir 150 parties par million, trois ans avant le délai prévu.
Cet investissement sain montre également que la société Irving Oil honorera probablement l'engagement qu'elle a pris envers Environnement Canada d'atteindre le prochain niveau cible, soit la réduction de la teneur en soufre à 30 parties par million, bien avant le délai prévu, en 2005.
Les personnes âgées et celles qui souffrent de maladies cardiaques ou pulmonaires sont particulièrement sensibles à la pollution atmosphérique. Cette initiative d'assainissement de l'air contribuera grandement à remporter la bataille pour aider tous les Canadiens à respirer un air plus pur.
Félicitations à Irving Oil pour sa prévoyance et ses convictions. Les Canadiens sont reconnaissants de son engagement à protéger l'environnement et la santé humaine.
* * *
[Français]
LE MOIS DE L'HISTOIRE DES FEMMES
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, pour la huitième année consécutive, les Canadiennes et les Canadiens célèbrent ce mois-ci le Mois de l'histoire des femmes.
Octobre a été désigné en commémoration de l'importance historique de l'affaire «personne». Le 18 octobre 1929, à la suite d'une longue lutte politique et juridique menée par un groupe de cinq femmes, le Conseil privé britannique a rendu une décision déclarant que le terme «personne», à l'article 24 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, incluait également les membres du sexe féminin, et que, par conséquent, les femmes étaient donc admissibles à des nominations au Sénat.
En cette Année de la Francophonie, le thème du Mois de l'histoire des femmes est: «D'hier et d'aujourd'hui: les femmes francophones du Canada».
Près de sept millions de citoyennes et de citoyens vivent en français au Canada, dont plus de la moitié sont des femmes. Je suis fière que le gouvernement fédéral rende un hommage particulier aux femmes francophones partout au pays pour leur apport exceptionnel à l'évolution de la société canadienne.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
L'ENQUÊTE SUR LA CONFÉRENCE DE L'APEC
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre a dit à maintes reprises qu'il n'avait pas participé à l'organisation des mesures de sécurité pour la conférence de l'APEC. La Commission des plaintes du public contre la GRC dispose maintenant de preuves concrètes selon lesquelles le surintendant Wayne May, de la GRC, aurait dit que le premier ministre avait participé directement à l'organisation de ces mesures. Hier, le bouclier humain du premier ministre, le vice-premier ministre, a été tout à fait incapable d'expliquer cette contradiction.
La version du premier ministre contredit-elle directement les preuves présentées à la Commission des plaintes du public contre la GRC?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, une enquête est en cours depuis plus d'un an déjà. La commission chargée de cette enquête a reçu des milliers de pages de documents et entendu de nombreux témoins. L'enquête se poursuit toujours. Laissons la commission faire son travail. C'est aussi simple que cela.
Il ne peut pas y avoir deux enquêtes, une à la Chambre des communes et celle qui est actuellement en cours. Je suis certain que le juge Hughes examinera tous les faits et présentera son rapport aux Canadiens.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, la commission fait son travail, et une des choses qu'elle a découvertes est justement cette déclaration du surintendant Wayne May, de la GRC, qui disait, et je cite: «Le premier ministre de notre pays est directement impliqué.» Le surintendant May n'avait aucune raison d'inventer cela.
Le premier ministre est-il en train de nous dire que c'est le surintendant May qui ne dit pas la vérité?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, M. May a témoigné devant la commission, et si elle veut le rappeler, elle est libre de le faire.
Je sais exactement ce que j'ai dit hier et je répète que nous devons laisser la commission faire son travail. Je répète, et les preuves sont là, que je n'ai jamais donné d'instructions et que je n'ai jamais discuté de quoi que ce soit ayant trait à la sécurité avec quelqu'un de la GRC.
M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, nous savons que le premier ministre ne peut pas expliquer pourquoi il a choisi de protéger l'image d'un dictateur étranger au lieu de protéger les droits des étudiants canadiens, alors nous ne lui posons pas cette question.
Nous lui posons une question plus simple et lui demandons, en l'occurrence d'expliquer la contradiction entre sa version des faits et les preuves présentées à la commission. Nous n'obtenons pas de réponse là non plus, alors peut-être devrions-nous modifier notre tir.
Le premier ministre dit qu'il fait entièrement confiance à la commission des plaintes du public contre la GRC. S'il est si certain de sa version des faits, acceptera-t-il de la répéter sous serment devant cette commission?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'un député ou un ministre ou un premier ministre parle à tous les électeurs du Canada de sa place à la Chambre des communes, c'est comme s'il avait la main sur la Bible.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, je répète les propres paroles du premier ministre: «Je n'ai jamais discuté de sécurité avec qui que ce soit de la GRC.» Ces mots ont été soigneusement choisis par un avocat d'expérience, mais, malheureusement, les faits ne corroborent pas cette déclaration.
Pourquoi le premier ministre ne se rend-il pas à Vancouver pour témoigner sous serment et subir un contre-interrogatoire en bonne et due forme?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la commission a entendu de nombreux témoins. Pour ma part, je maintiens ce que j'ai dit et mes paroles ont d'ailleurs été corroborées par tous les intervenants et les témoins. On nous a remis 10 000 pages de documentation. Tous ceux qui ont été invités à comparaître l'ont fait.
Je le répète devant tous les Canadiens et devant Dieu, si vous le voulez, parce que mon nom est Chrétien et que je n'y vois aucun mal, je n'ai jamais discuté de sécurité avec qui que ce soit de la GRC.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, on commence à voir un peu l'image que le premier ministre a de lui-même.
Le premier ministre a dit qu'il fallait laisser la commission faire son travail. Avant toutes choses, la commission devrait chercher qui a exercé des pressions sur la GRC pour qu'elle prenne les mesures qu'elle a prises. Moi, je réponds que c'est le premier ministre. Pourquoi ne comparaît-il pas devant la commission, qui pourrait alors faire son travail?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je l'ai dit et je le répète: la GRC avait un travail à faire et elle l'a fait. Maintenant, la question est de savoir si elle a commis une erreur ou non.
Comme tous les Canadiens, je voulais garantir la sécurité de tous les leaders pendant leur séjour au Canada. La GRC devait y voir. Je l'ai laissée faire son travail et elle l'a fait.
Si quelqu'un a commis une erreur, la commission en fera rapport à la population canadienne.
* * *
[Français]
LE TRANSPORT AÉRIEN
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, en laissant planer de sérieux doutes sur les intentions du gouvernement quant à la règle de propriété, le ministre des Transports sème à dessein la confusion. En effet, les actionnaires d'Air Canada doivent sous peu prendre une décision et ils doivent être en possession de tous les éléments pour prendre une décision éclairée.
Le ministre des Transports s'engage-t-il à clarifier son point de vue quant aux règles de propriété avant l'assemblée des actionnaires prévue pour le 8 novembre prochain?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je parlerai de ce sujet dans une heure devant le comité.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, j'espère que nous allons en apprendre un peu lors de la réunion du comité qui se tiendra tantôt.
L'an dernier, dans le débat sur la fusion des banques, le gouvernement invoquait la trop grande concentration pour justifier la règle du 10 p. 100 dans la propriété des banques, et ce, au nom de l'intérêt public. Or, dans le cas du transport aérien, il s'agit d'un éventuel monopole. Le danger de concentration est donc bien réel.
Est-ce que le même gouvernement ne devrait pas garder la même logique et conserver la même limite de propriété de 10 p. 100 au nom du même intérêt public?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, j'ai dit auparavant que j'allais aborder ce point cet après-midi à la réunion du comité.
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, bien que la proposition d'acquisition d'Air Canada et de Canadien par Onex ne réponde pas à la loi existante, son président, M. Gerald Schwartz, n'hésite pas à investir beaucoup de temps et d'argent afin d'en faire la promotion partout au Canada.
Le ministre des Transports peut-il nous garantir que l'espoir sur lequel se fonde le président d'Onex pour faire accepter sa proposition n'est pas la conséquence directe de garanties personnelles qu'il aurait reçues de la part de certains membres du gouvernement dès le début de cette affaire?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, il n'avait pas de discussions avec les membres du gouvernement sur ce sujet.
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Transports ne convient-il pas qu'à chaque fois qu'il s'ouvre sur son intention de modifier les règles de propriété, il prend partie pour l'offre d'Onex, comme le lui rappelle le président d'Air Canada dans le Globe and Mail de ce matin?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le point très important est de permettre aux actionnaires d'Air Canada et de Canadien International de faire un choix sur l'avenir des compagnies. Nous allons ensuite examiner la proposition pour déterminer si elle est dans l'intérêt public.
* * *
[Traduction]
L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le premier ministre a dit que la commission d'enquête sur le sommet de l'APEC pouvait rappeler May. Peut-être pourrait-il expliquer pourquoi les avocats du gouvernement fédéral se sont opposés à ce rappel?
Contrairement à ses fonctionnaires, le premier ministre ne s'adresse pas à la bonne tribune pour dissiper les doutes quant à son rôle au sommet de l'APEC. La semaine dernière, le premier ministre était à Vancouver, non pas pour témoigner devant la commission d'enquête, mais pour assister à une soirée-bénéfice pour les libéraux.
Il a parlé hier des questions se rapportant à la sécurité du sommet de l'APEC, non pas devant le juge Hughes, mais devant des journalistes.
Pourquoi le premier ministre ne veut-il pas faire comme ses fonctionnaires et témoigner devant la commission d'enquête sur le sommet de l'APEC?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le commissaire est un homme très expérimenté qui a pris en considération tous les besoins. Il a demandé à certaines personnes de témoigner et ces personnes l'ont fait. Nous lui avons donné tous les renseignements qu'il a demandés. Je le laisse faire son travail. Il est là pour cela de même que les avocats de toutes les parties. Laissez-les faire leur travail et rendre compte de leurs conclusions aux Canadiens.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, depuis la conférence de l'APEC, il y a deux ans, les Indonésiens ont réussi à renverser deux dictateurs et pendant ce temps, les Canadiens attendent encore la réponse à leurs questions.
Le premier ministre a-t-il jamais discuté avec les membres de son personnel de la présence de manifestants au sommet de l'APEC? Dans l'affirmative, n'est-il pas responsable quand les membres de son personnel discutent de cette question avec la police?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, un témoin du nom de Bartleman m'a posé des questions au sujet de l'Indonésie. J'invite la députée à lire le témoignage. Elle y constatera peut-être la présence de termes qui ne sont pas tout à fait parlementaires. Lisez ce témoignage, vous y trouverez votre réponse, et arrêtez de faire des sous-entendus sans fondement sur l'Indonésie.
Le Président: Je rappelle aux députés qu'ils doivent s'adresser à la présidence.
* * *
LES ANCIENS COMBATTANTS
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, la semaine dernière, j'ai posé une question au ministre des Anciens combattants relativement à l'indemnisation des anciens combattants de la marine marchande. Le ministre et ses collègues se sont amusés à tourner la question en dérision en refusant d'y répondre honnêtement. Le ministre est-il prêt à faire savoir à la Chambre aujourd'hui quand ces anciens combattants peuvent s'attendre à recevoir une juste indemnisation?
L'hon. George S. Baker (ministre des Anciens combattants et secrétaire d'État (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): Monsieur le Président, nous étudions actuellement la question des officiers de la marine marchande et de tout le programme d'indemnisation à l'intention de nos anciens combattants. La députée est tout simplement jalouse que son parti ne l'ait pas fait au moment où il était au pouvoir.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, les libéraux ont été au pouvoir pendant 38 ans depuis 1945 et ils n'ont absolument rien fait avant le mois de mars dernier. Notre parti n'a été au pouvoir que pendant 16 ans et nous avons réussi pendant cette période à inclure les anciens combattants de la marine marchande dans les dispositions de la Loi sur les pensions et allocations de guerre pour les civils.
La situation actuelle est grave. Je demande donc de nouveau au ministre s'il est prêt à faire savoir à la Chambre quand les anciens combattants de la marine marchande peuvent s'attendre à recevoir une indemnisation de 20 000 $. Le fera-t-il immédiatement, avant le 11 novembre?
L'hon. George S. Baker (ministre des Anciens combattants et secrétaire d'État (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): Monsieur le Président, lorsque cette question a été soulevée au moment où le parti de notre collègue était au pouvoir, son chef a répondu non et il répond toujours non. Il répond non quand on lui propose de joindre les rangs de la députation, non quand on lui parle de l'Alternative unie, non quand on lui propose de se présenter à une élection partielle. Joe Qui est devenu Joe Non.
* * *
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, le traité nisga'a n'est rien de moins qu'un accord de souveraineté-association. Le ministre des Affaires intergouvernementales a voulu le nier au printemps dernier, mais aujourd'hui l'affaire éclate au grand jour.
Dans une entrevue accordée hier, le Bloc Québecois a indiqué que le traité pourrait jeter les bases des relations futures entre les citoyens d'un Québec souverain et le reste des Canadiens.
Pourquoi le gouvernement n'admet-il pas qu'il s'agit ici de souveraineté-association, et rien de moins? Pourquoi se prête-t-il à ce jeu?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, il est un exercice auquel nous ne pourrons jamais nous prêter, c'est de banaliser le morcellement du Canada.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, à l'évidence, le ministre n'a pas compris la question. Je vais la reformuler.
Au printemps, il a déclaré que le traité nisga'a n'était pas un accord de souveraineté-association. Il l'a soutenu. Hier, le Bloc Québecois a indiqué que le traité était fort intéressant et qu'il comptait s'en inspirer pour son projet de souveraineté-association.
Encore une fois, voici ma question au ministre des Affaires intergouvernementales: pourquoi le gouvernement semble-t-il disposé à accorder aux Nisga'as ce qu'il refuse, et à juste titre, d'accorder aux Québecois?
L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, les Nations Unies ne reconnaîtront pas un statut de pays au territoire des Nisga'as. Ce territoire ne sera pas reconnu comme pays indépendant par les Nations Unies. Le Québec non plus n'aura pas le statut de pays indépendant auprès des Nations Unies.
* * *
[Français]
LE TRANSPORT AÉRIEN
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, depuis quelques années, le gouvernement est intervenu, notamment dans l'attribution des meilleures routes internationales, et cela en faveur de ses amis de Canadien International. Aujourd'hui, le ministre s'apprêterait à changer les règles de propriété, toujours pour avantager Canadien International.
Est-ce que le gouvernement n'a pas démontré, en deux occasions distinctes, par son comportement à l'endroit de Canadien International, qu'il est prêt à tout faire pour sauver cette compagnie et que pour lui les dés sont déjà jetés?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je vais démontrer au comité, cet après-midi, que notre politique favorise le peuple canadien, pas une compagnie mais le peuple canadien et les voyageurs du Canada.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, quel message le ministre des Transports lance-t-il aux actionnaires d'Air Canada, lorsqu'il se dit prêt à changer la loi pour accommoder Onex et Canadien International? Est-ce que le message à ses amis n'est pas de dire qu'il est plus important d'être un ami du gouvernement pour faire affaire avec lui que d'agir selon la loi?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, c'est très important que les actionnaires d'Air Canada et ceux des Lignes Aériennes Canadien International décident de l'avenir de ces compagnies.
Après une décision, si nous recevons une proposition, nous allons l'examiner dans l'intérêt public.
* * *
[Traduction]
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales devrait savoir que, dans 16 secteurs, le pouvoir du gouvernement nisga'a aura préséance sur celui des gouvernements provincial et fédéral.
Dans l'affaire Marshall, le tribunal a fondé sa décision sur une interprétation fautive d'un témoin clé du gouvernement. Le traité conclu avec les Nisga'as est beaucoup plus complexe que celui conclu avec les Mi'kmaq. Même s'il reste plus de 50 points à régler, le gouvernement est prêt à signer l'accord. Le gouvernement donne aux tribunaux un chèque en blanc.
Après tout le tollé soulevé par l'arrêt Marshall, pourquoi le gouvernement veut-il adopter à la hâte un traité comportant autant d'éléments non réglés?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je vais rappeler au député et à la Chambre ce que notre parti dit depuis des mois.
Le premier mythe, c'est que le gouvernement nisga'a ne sera pas assujetti à la Charte. C'est faux.
Le deuxième mythe, c'est que les droits des femmes nisga'as ne sont pas protégés. C'est également faux.
Le troisième mythe, c'est que le traité prévoit l'imposition sans représentation. C'est faux cela aussi.
Si l'on souhaite la tenue d'un débat sérieux à la Chambre, les députés doivent commencer par lire tout le traité.
M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Monsieur le Président, le ministre a prouvé encore une fois que la période des questions n'est pas la période des réponses.
Le traité conclu avec les Mi'kmaq a limité le droit de commercer de ces derniers. La Cour suprême a déformé cela en permettant une pêche prioritaire fondée sur des considérations raciales. Le traité conclu avec les Nisga'as accorde, sur la côte ouest, un droit de pêche prioritaire fondé sur des considérations raciales.
L'arrêt Marshall a tout bouleversé sur la côte est. Le traité conclu avec les Nisga'as fera de même sur la côte ouest.
Pourquoi le gouvernement perpétue-t-il le chaos causé par la décision d'un tribunal en proposant un projet de loi qui laisse à désirer?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de revenir sur les mythes que le Parti réformiste entretient. Un des mythes que les réformistes essaient de perpétuer, c'est que le traité ne reconnaît pas la validité des lois fédérales et provinciales. C'est faux.
* * *
[Français]
LES PRODUCTIONS AUDIOVISUELLES
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, dans l'affaire CINAR, la ministre du Patrimoine canadien accuse le Bloc québécois de faire des allégations et évite soigneusement de répondre à nos questions.
Comment la ministre peut-elle expliquer qu'elle reste fermée comme une huître à toutes nos questions, sous prétexte qu'il y a enquête, alors que ses fonctionnaires donnent des séances d'information privées à certains journalistes, reconnaissant que Téléfilm Canada connaît des problèmes?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, si on parle de briefings donnés aux journalistes, ce ne sont certainement pas des briefings secrets.
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, je le réitère, les fonctionnaires admettent l'existence de pratiques douteuses à Téléfilm Canada, alors que la ministre refuse de répondre ici aux questions qui lui sont posées par l'opposition.
Considérant que Laurier LaPierre, président du conseil d'administration de Téléfilm Canada, serait mis en cause dans cette affaire, la ministre ne considère-t-elle pas qu'elle devrait demander, au nom de l'éthique, à M. LaPierre de se retirer temporairement jusqu'à ce que toute la lumière soit faite?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je pense que cela fait à peu près huit jours que le député d'en face fait des allégations contre CINAR et contre des membres de Téléfilm Canada. Je pense qu'il doit suivre les conseils de son chef à Québec, qui a dit de réfléchir sur ces questions et de laisser justement la GRC faire son travail.
* * *
[Traduction]
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, par suite de la décision Marshall, les autochtones ont maintenant repris l'exploitation forestière sur des terres de la Couronne provinciale.
Le ministre des Affaires indiennes pourrait-il préciser à la Chambre si, selon lui, la décision Marshall confère aux autochtones le droit de faire de l'exploitation forestière sur les terres de la Couronne? Oui ou non?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes en train de négocier avec les gouvernements provinciaux et les premières nations. Nous définirons, dans le cadre de ces négociations et à la lumière de la décision Marshall, quels sont au juste les droits des autochtones.
M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, le ministre n'a pas vraiment répondu à ma question.
L'alinéa 92a) de la Loi constitutionnelle du Canada confère clairement aux provinces la propriété des ressources naturelles et le droit d'administrer celles-ci. De l'avis du ministre, qu'est-ce qui a préséance: le droit constitutionnel des provinces ou un traité numéroté datant de 239 ans qui a été conclu avant même que le Canada n'existe?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, si le député lisait la Constitution, il saurait que les gouvernements fédéral et provinciaux ont chacun une responsabilité fiduciaire envers les premières nations.
* * *
[Français]
LE SPORT PROFESSIONNEL
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, selon les propos du ministre de l'Industrie, il semble clair que le gouvernement canadien n'aidera pas les clubs sportifs professionnels. Pourtant, le secrétaire d'État au Sport amateur ouvrait hier la porte à une aide indirecte.
Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. Comment le ministre explique-t-il les propos du secrétaire d'État au Sport amateur qui, lui, continue d'affirmer que le gouvernement va venir indirectement en aide aux clubs sportifs professionnels? Qui dit vrai, le ministre de l'Industrie ou le secrétaire d'État au Sport amateur?
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, il y a un problème avec les équipes de la Ligue nationale de hockey. C'est un problème dans lequel on a investi beaucoup de temps en discutant avec les autres paliers de gouvernement. Je sais que tous les députés sont préoccupés par ce problème mais, à ce moment-ci, on n'a pas encore de solution à formuler.
* * *
[Traduction]
L'IRLANDE
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, ces quatre derniers mois, nous avons observé une impasse frustrante dans le processus de paix en Irlande du Nord.
Le ministre des Affaires étrangères voudrait-il dire à la Chambre quelles mesures le gouvernement canadien a adoptées pour faciliter l'aboutissement du processus de paix?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, l'initiative la plus importante a été la visite que le premier ministre a effectuée en Irlande du Nord cet été. Il a ainsi apporté sa présence et le fort appui du Canada dans ce dossier. Il a également profité de l'occasion pour annoncer l'octroi d'un montant d'un million de dollar au fonds irlandais pour la réconciliation du pays.
Je rappelle également que le général de Chastelain siège à la commission de l'environnement, que le professeur Shearing travaille à la commission Patten et que le professeur Hoyt fait partie de l'enquête sur le dimanche sanglant. Ce sont trois éminents Canadiens qui oeuvrent activement au rapprochement des deux camps dans le cadre de ce processus.
En l'occurrence, je pense que le Canada montre très clairement que nous souhaitons ardemment la paix en Irlande du Nord.
* * *
L'INDUSTRIE DU TRANSPORT AÉRIEN
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, pendant des mois, le gouvernement a affirmé qu'il aurait recours au secteur privé pour trouver une solution au problème de l'industrie du transport aérien du Canada. Nous constatons maintenant que le ministre des Transports décidera ce qu'est un accord acceptable.
Le ministre dira-t-il aux Canadiens quelles politiques et quelles lois exactement il modifiera pour accommoder l'une des deux offres qui lui ont été présentées?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, nous avons toujours dit qu'il revenait au secteur privé de déterminer quels arrangements financiers sont acceptables pour lui. Dès que les actionnaires d'Air Canada et des Lignes aériennes Canadien international auront accepté une proposition, celle-ci sera présentée au gouvernement afin qu'il puisse déterminer si elle satisfait aux conditions que j'ai énoncées à plusieurs reprises.
J'invite donc la députée à attendre. Dans quelques minutes, je serai certainement en mesure de lui fournir d'autres informations et de répondre à ses questions plus en détail.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens suivent davantage la période des questions que les séances des comités. Je voudrais savoir si le ministre, qui a eu une semaine pour étudier tant la proposition d'Onex que celle d'Air Canada, sait si ces propositions satisfont à ses critères.
Le ministre est-il prêt à appuyer ou à rejeter l'une des deux offres qui lui ont été présentées?
L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, la députée a peut-être raison de dire que davantage de Canadiens suivent la période des questions plutôt que les séances des comités. Je devrais annoncer que les délibérations du comité en question seront diffusées en direct, dans les deux langues officielles, à 15 h 30, heure de l'Est.
* * *
L'AGRICULTURE
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, la semaine dernière, en réponse à la députée de Halifax, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a parlé des changements apportés aux programmes d'assurance-récolte et de protection du revenu, au CSRN, à l'ACRA et, sans aucun doute, à d'autres programmes du genre. Ce qu'il n'a pas dit à la Chambre, c'est si oui ou non cette nouvelle souplesse de la part du gouvernement fédéral se traduirait par de l'argent neuf, surtout pour les agriculteurs des Prairies qui sont dans une situation financière catastrophique. Les agriculteurs veulent une réponse franche.
Le ministre pourrait-il donc nous dire si on va consacrer de nouveaux crédits à l'un ou l'autre de ces programmes?
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, dans le cadre du débat d'hier à la Chambre, j'ai signalé que nous cherchions continuellement de nouvelles façons d'appuyer les agriculteurs canadiens de façon permanente.
Le gouvernement a démontré qu'il l'a fait dans le passé et qu'il continuera de soutenir les agriculteurs de toutes les façons possibles au fur et à mesure qu'il en aura les moyens à l'avenir.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, si le ministre a besoin d'un nouveau programme pour justifier des dépenses, puis-je lui suggérer le programme de soutien à l'agriculture de la Saskatchewan, mieux connu sous le nom de programme de versements.
Les premiers ministres du Manitoba et de la Saskatchewan rencontreront les ministres du Cabinet plus tard cette semaine. Les agriculteurs au bord du désespoir veulent savoir si le gouvernement va leur venir en aide. Étant donné qu'on prévoit un excédent fédéral, les agriculteurs savent qu'on a les moyens voulus pour ce faire. Ce qu'ils ignorent, c'est s'il existe la volonté politique nécessaire.
Une fois de plus, le ministre pourrait-il nous dire s'il est disposé à apporter son aide dans ce cas-ci?
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, nous avons clairement démontré que nous étions prêts à agir et nous avons donné l'exemple. Nous avons mis en place, il y a moins d'un an, un programme grâce auquel les agriculteurs vont recevoir plus de 900 millions de dollars du gouvernement fédéral et 600 millions de dollars du gouvernement provincial.
Selon son programme électoral, le parti du député a déclaré en 1997, qu'il consacrerait 11 millions de plus au ministère de l'Agriculture et à l'industrie agricole au Canada. C'est loin des 900 millions que nous versons.
* * *
LES SANS-ABRI
M. Gilles Bernier (Tobique—Mactaquac, PC): Monsieur le Président, en mai, la ministre responsable des sans-abri a embauché en secret 18 nouveaux employés à un coût dépassant le million de dollars. Ni la ministre ni son personnel d'un million de dollars n'ont produit quoi que ce soit pouvant aider les sans-abri. Un million de dollars aurait pu procurer du logement à 30 000 Canadiens sans abri. Est-il plus important pour la ministre de dépenser un million de dollars pour embaucher du personnel que pour fournir un toit à 30 000 Canadiens?
L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, j'informe la Chambre que la ministre responsable de la coordination pour les sans-abri a embauché une seule personne. Tous les autres employés sont en détachement parce qu'ils sont des spécialistes dans le domaine.
M. Gilles Bernier (Tobique—Mactaquac, PC): Monsieur le Président, même s'il s'agit de détachement, cela coûte tout de même un million de dollars. Le personnel de la ministre compte trois adjoints chargés de la correspondance et ceux-ci s'ajoutent aux six qui travaillent déjà pour elle en tant que ministre du Travail. Son personnel compte aussi six adjoints chargés des programmes même si elle n'a aucun programme à administrer.
La ministre fera-t-elle travailler son personnel d'un million de dollars à l'élaboration d'une stratégie pour les sans-abri ou va-t-elle laisser des milliers de Canadiens geler dans les rues de nos villes encore cet hiver?
L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, j'ai embauché une personne. Tous les autres employés sont des employés prêtés.
Le personnel qui m'a été prêté a étudié tous les rapports écrits sur les sans-abri. Ce personnel a aussi fait une synthèse de toutes les recommandations que j'ai reçues des collectivités l'été dernier et il met ces recommandations en oeuvre.
Je tiens à affirmer que ce personnel prend son travail très au sérieux. Nous nous soucions sincèrement de la situation des sans-abri et nous allons nous y attaquer.
* * *
LE CRIME ORGANISÉ
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Justice et procureur général du Canada.
Le blanchiment d'argent, la corruption et d'autres activités criminelles menacent sérieusement la stabilité de la démocratie naissante dans l'ex-Union soviétique et favorisent le crime organisé au Canada.
Compte tenu de la récente rencontre des pays du G-8 en Russie, la ministre pourrait-elle expliquer à la Chambre quelles mesures le gouvernement prend pour contrer les activités d'organisations criminelles multinationales?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député soulève une question très importante. Permettez-moi de donner encore une fois à la Chambre l'assurance que le gouvernement est déterminé à lutter contre le crime organisé transnational au Canada comme à l'étranger.
Par exemple, en juin 1997, le gouvernement a modifié le Code criminel pour faire en sorte que nous puissions enquêter sur les personnes mêlées à des activités criminelles organisées et les traduire en justice. Plus tôt cette année, le gouvernement a modifié la Loi sur l'extradition afin d'accélérer l'extradition de présumés criminels. En outre, au cours des prochaines semaines, mon collègue, le ministre des Finances, présentera à nouveau le projet de loi C-81, qui vise à lutter contre le blanchiment d'argent.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, il ne reste qu'une semaine avant le début de la sixième conférence sur l'accord de Kyoto et les Canadiens ne connaissent toujours pas les mesures que le gouvernement entend prendre pour respecter les objectifs imposés par les Nations Unies en matière d'émissions. Le seul message transmis aux Canadiens par le gouvernement au sujet du réchauffement de la planète, c'est qu'il n'aime pas les véhicules de sport utilitaires ou le bétail qui émet des flatulences.
Le ministre prévoit-il revenir sur la promesse faite par le premier ministre, qui a dit qu'aucune nouvelle taxe ne serait levée pour atteindre les objectifs de Kyoto?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, l'opposition officielle a de nouveau raté le coche. Le Bloc a posé cette question hier et j'y ai répondu.
Nous avons maintenant des comités regroupant 450 représentants du secteur privé, des gouvernements provinciaux et du gouvernement fédéral qui collaborent à l'établissement d'une stratégie. La position adoptée par le gouvernement canadien est presque identique à celle qui a été annoncée hier par le chancelier Schroeder d'Allemagne. Nous sommes en voie d'atteindre les objectifs de Kyoto.
* * *
[Français]
LES SANS-ABRI
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, la ministre du Travail a reconnu hier que le gouvernement fédéral avait fait des coupures et que celles-ci avaient contribué à accroître la pauvreté.
Ma question s'adresse à la ministre du Travail. Puisque c'est la première fois qu'une ministre de ce gouvernement admet que les coupures du gouvernement fédéral ont fait mal aux plus démunis et aux sans-abri, peut-elle nous dire ce qu'elle entend faire pour corriger la situation?
L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, lorsque j'ai voyagé cet été, ce que j'ai entendu, c'est que les coupures au niveau fédéral ainsi qu'au niveau provincial ont eu un effet sur la pauvreté au Canada et sur la situation des sans-abri.
Ce gouvernement m'a demandé de faire la coordination. Tout l'été, j'ai visité des communautés à travers le Canada, parce qu'on veut faire quelque chose au niveau des sans-abri. On va le faire en partenariat avec des comités, les municipalités et les provinces.
* * *
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, le gouvernement dit qu'il est préoccupé par la pauvreté, mais ses actions démontrent le contraire.
Alain Boudreau, un jeune travailleur saisonnier, reçoit des prestations d'assurance-emploi de 50 $ par semaine, parce que la méthode de calcul considère seulement ses 26 dernières semaines de travail.
Si le calcul avait été basé sur an, Alain aurait reçu des prestations de 272 $. C'est toute une différence pour un jeune qui débute.
Ma question s'adresse au premier ministre. Est-ce qu'il pense que 50 $ par semaine est un revenu suffisant pour survivre?
[Traduction]
Mme Bonnie Brown (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il faut se rappeler que l'assurance-emploi n'est pas une industrie ou une entreprise. C'est un programme de soutien du revenu accessible aux personnes admissibles. Celles qui le sont présentent une demande et touchent des prestations qui sont fondées sur les gains tirés des emplois qu'elles ont occupé.
Si le député veut bien me communiquer les détails de cette affaire, je les analyserai avec lui.
* * *
[Français]
LES SANS-ABRI
Mme Diane St-Jacques (Shefford, PC): Monsieur le Président, le 25 mars dernier, la ministre responsable des sans-abri avait promis de mettre en place, dans les 30 jours, une stratégie en faveur de ces pauvres Canadiens. Cela fait maintenant 215 jours que la promesse a été faite.
Pourrait-elle nous dire où est la stratégie, ainsi que le budget?
L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, pendant 31 ans, j'ai travaillé au niveau de la pauvreté.
Lorsque je suis allée à Toronto, j'ai promis de rencontrer le maire Mel Lastman dans les 30 jours, certainement pas de trouver dans cette période de temps une solution à long terme pour les sans-abri.
* * *
[Traduction]
LA SANTÉ
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé. Quelque 30 p. 100 des Canadiens vivent dans des collectivités rurales, mais seulement 14,3 p. 100 des médecins généralistes y exercent leur profession. Moins de 3 p. 100 de tous les spécialistes exercent leur métier dans les collectivités rurales.
Quelle mesure immédiate le ministre entend-il prendre pour corriger la situation tragique dans laquelle se trouve le Canada rural sur le plan des soins de santé?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement s'emploie activement à aider les provinces à s'acquitter de leurs responsabilités, soit de rendre les services accessibles aux Canadiens peu importe où ils habitent, y compris au tiers des Canadiens qui vivent en milieu rural et dans des régions éloignées du pays.
Par exemple, nous avons nommé pour la première fois un directeur exécutif de la santé rurale qui aura pour tâche de collaborer avec moi à l'élaboration de politiques en matière de santé qui seront adaptées à ce réel problème.
La fin de semaine dernière, nous avons financé la tenue d'une conférence nationale très réussie portant sur les stratégies à adopter en matière de santé et de recherche dans les milieux ruraux. Nous avons prévu dans le budget des crédits pour les stratégies en matière de santé rurale. Nous avons à coeur d'apporter une solution au problème.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Monsieur le Président, le ministre n'a toujours pas révélé quelle était la position du gouvernement sur les objectifs de réduction des rejets imposés par l'ONU.
Tout ce que nous savons, c'est que le ministre va priver les Canadiens soit de leur voiture en imposant une taxe sur l'essence soit de leur emploi en imposant une taxe sur les hydrocarbures.
Le ministre va-t-il mettre fin au suspense et déposer aujourd'hui la proposition du gouvernement en vue d'atteindre les objectifs fixés au sommet de Kyoto?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, contrairement à ce qu'a dit le député, l'accord de Kyoto a été conclu par 160 pays. Il n'a pas été imposé par les Nations Unies.
Quant à ce qu'il a dit au sujet d'une taxe, tous les ministériels sont très clairs là-dessus: nous ne pensons pas qu'une taxe générale sur les hydrocarbures soit une solution appropriée.
Il existe toutefois beaucoup d'autres mesures possibles, comme par exemple des incitatifs qui nous encourageraient à travailler de concert en vue d'atteindre les objectifs fixés à Kyoto. Il est d'une importance primordiale que nous atteignions ces objectifs.
* * *
[Français]
LES ALIMENTS MODIFIÉS GÉNÉTIQUEMENT
Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, la semaine dernière, une offre d'emploi d'Agriculture et Agroalimentaire Canada paraissait dans les journaux. On recherche une généticienne ou un généticien pour les produits transgéniques, afin de planifier, amorcer et diriger un programme sur ce sujet.
Ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture. Doit-on comprendre que cette offre d'emploi pour planifier, amorcer et diriger un programme sur les aliments modifiés génétiquement est la confirmation qu'un tel programme n'existe pas actuellement dans son ministère?
[Traduction]
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, les centres d'excellence et le personnel de recherche considérable que nous avons à Agriculture Canada ne cessent de travailler en vue de trouver de nouvelles technologies, de faire avancer la science et de l'améliorer, travaux qui ont toujours été garants de progrès dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire au Canada.
Nous avons des chercheurs spécialisés dans ces domaines et nous faisons ce genre de recherche. Quand les travaux de recherche sont terminés, nous en vérifions les résultats pour nous assurer qu'ils sont sans danger et à la fine pointe de la science. C'est ainsi que sont prises les décisions sur les résultats des travaux de recherche.
* * *
L'ÉGALITÉ
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, dans le discours du Trône, on dit que les Canadiens puisent dans leur diversité la force et la créativité.
Appelé à combler récemment un poste en Nouvelle-Écosse, le gouvernement a omis de songer à la candidature possible de la juge noire Corrine Sparks, membre pourtant chevronné et compétent de la magistrature. Le gouvernement a avivé le racisme en gérant très maladroitement le conflit des pêches en Nouvelle-Écosse. Il a aussi lamentablement échoué dans sa tentative de promouvoir les minorités visibles au sein de la fonction publique fédérale.
Que fait le gouvernement pour réparer les injustices raciales de sa propre politique et pour abolir le racisme qui entache les pratiques d'embauche à la fonction publique?
[Français]
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, contrairement à ce que le député affirme, notre gouvernement a pris des mesures pour, justement, rendre la fonction publique encore plus inclusive. Dès que nous avons été saisis des problèmes, mon prédécesseur a mis sur pied un groupe externe de consultation, sous la présidence de M. Perinbam, pour conseiller le gouvernement afin d'en arriver à une fonction publique encore plus inclusive.
Je ne pense pas que notre gouvernement ait de leçons à recevoir du Nouveau Parti démocratique dans ce domaine.
* * *
LES SANS-ABRI
Mme Diane St-Jacques (Shefford, PC): Monsieur le Président, le 24 mars dernier, dans cette Chambre, la ministre responsable des sans-abri avait affirmé que c'était sa responsabilité de s'assurer que, et je cite: «Tous les enfants du Canada auront un lit où dormir en toute sécurité.»
La ministre n'a malheureusement pas tenu sa promesse. Pourquoi condamne-t-elle ainsi les enfants sans abri à subir un autre hiver canadien dans nos rues?
L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais assurer tous les enfants pauvres à travers le Canada qu'il y a ici une voix qui parle pour eux. Je peux assurer que tous les jours, je travaillerai et continuerai à travailler pour m'assurer que les enfants aient un lit chaud où ils peuvent dormir tous les soirs.
* * *
[Traduction]
LES PARCS NATIONAUX
Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Monsieur le Président, il y a dix ans, le gouvernement s'est engagé à créer plus de parcs nationaux.
La ministre du Patrimoine canadien peut-elle nous dire comment l'engagement pris il y a dix ans sera respecté?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée pour sa question. Je suis particulièrement heureuse d'avoir pu participer, en compagnie de la députée du Nunavut, à une célébration organisée à Pond Inlet, où le gouvernement du Canada a officiellement signé une entente avec les Inuit de l'Arctique de l'Est pour créer trois nouveaux parcs nationaux.
Les parcs nationaux d'Auyuittuq, de Quttinirpaaq et de Sirmilik n'auraient jamais vu le jour sans l'aide de la députée et des Inuit. Nous tenons à remercier la députée et le peuple inuit pour cette entente de gestion très progressiste qui s'applique à trois nouveaux parcs nationaux.
* * *
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. John Nunziata (York-Sud—Weston, Ind.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Le ministre part tout à l'heure pour le Pakistan pour y rencontrer les chefs de la dictature militaire à la tête d'une délégation de ministres des Affaires étrangères.
Le ministre peut-il dire à la Chambre quelle position il adoptera au nom du Commonwealth? Au cas où la junte militaire ne donnerait pas de date pour un retour à la démocratie, le ministre peut-il dire à la Chambre quelles seront alors la position du Commonwealth et celle du Canada?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. J'apprécie d'avoir le plaisir de sa compagnie durant ce voyage. Je sais qu'il sera un grand atout. Il est très important que les députés participent à ces affaires.
Je vais répondre en mots simples à la question. Je tiens à faire remarquer que le Commonwealth nous a autorisés à faire savoir que, en vertu de la Déclaration de Harare, nous n'acceptons pas le renversement militaire de gouvernements démocratiquement élus. Nous aimerions que le régime établisse un calendrier précis des mesures qu'il compte prendre pour rétablir la démocratie et protéger les droits des personnes arrêtées durant cette période.
* * *
LES DÉLINQUANTS DANGEREUX
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, Glen Galbraith, délinquant sexuel reconnu coupable, est devenu en janvier 1998 le 49e prisonnier du centre correctionnel communautaire Sumas illégalement en liberté. Ce toxicomane endurci et criminel de carrière a agressé sexuellement deux adolescentes de Victoria, en Colombie-Britannique.
S'est-il évadé en creusant un tunnel? Non. En escaladant un mur? Non. Il a pris sa canne à pêche et son sac de golf, et il a sauté dans sa voiture.
Ma question s'adresse au solliciteur général. Comme la dernière période de détention de cet individu a duré neuf ans, pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas préparé ce délinquant sexuel en prévision de sa libération?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la Commission nationale des libérations conditionnelles a accordé la semi-liberté à ce délinquant. Lorsqu'on a constaté qu'il ne rentrait pas au centre, on a émis un mandat d'arrestation contre lui dans tout le Canada. Je puis garantir à mon collègue que la GRC collabore avec toutes les forces policières du Canada pour appréhender cet individu le plus rapidement possible.
* * *
[Français]
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le Président: Je veux souligner la présence à la tribune de Son Excellence Madame Esperanza Aguirre, Présidente du Sénat du Royaume d'Espagne, et sa délégation.
Des voix: Bravo!
[Traduction]
Le Président: Je signale aux députés la présence à la tribune de M. Jiang Xinxiong, dirigeant de la délégation du Congrès national populaire de Chine.
Des voix: Bravo!
Le Président: À l'ordre. Avant la reprise du débat, nous allons rendre hommage à un ancien député qui est décédé, M. Ian Wahn. Le porte-parole du Parti libéral sera la députée de St. Paul's.
* * *
LE REGRETTÉ IAN WAHN
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Monsieur le Président, je veux rendre hommage à un ancien député de la circonscription de St. Paul's, Ian Wahn.
M. Wahn est né à Herbert, en Saskatchewan. Il a étudié à Swift Current et a obtenu son baccalauréat en droit à l'Université de la Saskatchewan. Il a ensuite obtenu une bourse de la fondation Cecil Rhodes pour étudier à l'Université d'Oxford, en Angleterre, où il a obtenu une maîtrise en droit jurisprudentiel. Il fut admis au Barreau au Osgoode Hall Law School, à Toronto, en 1943. C'était pendant la Seconde Guerre mondiale, et M. Wahn a servi avec les Queen's Own Rifles of Canada, aux Pays-Bas et en Allemagne. Il avait obtenu le grade de capitaine avant la fin de la guerre.
En 1942, il avait épousé Pearl Lychak, qui est décédée en 1988 et qui lui a donné deux enfants, Ian et Gordon.
M. Wahn fut élu à la Chambre des communes pour la première fois en 1962, lorsqu'il a défait le candidat progressiste conservateur Roland Michener, qui était alors le Président de la Chambre. M. Wahn fut réélu en 1963, 1965 et 1968. Il fut membre de nombreux comités de la Chambre, notamment ceux des banques et des finances, de la justice, des affaires juridiques, de l'industrie et l'énergie, des privilèges et des élections. Après sa réélection en 1968, il fut nommé président des comités de la défense nationale et des affaires extérieures.
À titre de député, M. Wahn a parrainé des projets de loi visant à modifier les lois ayant trait à l'immigration, au divorce et au contrôle des naissances. Il est aussi l'auteur du rapport Wahn publié par le comité des relations canado-américaines et ayant trait au contrôle canadien de l'économie et la culture.
En 1972, M. Wahn perdait son siège aux mains de Ronald Atkey, qui fut élu sous la bannière des conservateurs de Robert Stanfield. M. Wahn retourna à sa pratique et travailla pour le cabinet Borden et Elliot. En 1961, il aida à créer le cabinet Wahn, Mayer, Smith, Creber, Lyons, Torrance et Stephenson, maintenant appelé Smith Lyons.
Ce matin, j'ai demandé au député de Davenport, qui a travaillé dans l'association de comté de M. Wahn en 1964, de me faire part de ses souvenirs. Il était d'avis que M. Wahn jouait un rôle important à titre de parlementaire. Il disait de lui qu'il était une personne libérale de premier ordre et qu'il comprenait bien la démocratie. Il disait également qu'il avait un talent naturel pour organiser les rencontres communautaires ou les groupes de consultation des citoyens et pour expliquer certaines des questions les plus complexes qui touchent le pays. Chaque année, entre novembre et juin, il rencontrait régulièrement des collègues invités d'Ottawa.
Il était considéré comme un lien privilégié entre Ottawa et Toronto, une personne dotée d'une conscience sociale très développée qui était bien en mesure de représenter ses électeurs dans des dossiers comme les pensions, la situation des handicapés ou les services aux immigrants.
C'est au niveau des services aux immigrants qu'il a tout particulièrement fait sa marque. Le vice-premier ministre m'a rappelé qu'à cette époque un grand nombre d'électeurs de St.Paul's étaient d'origine chinoise. M. Wahn disait que certains de ses électeurs croyaient qu'il était aussi chinois, mais que lorsqu'ils apprenaient qu'il ne l'était pas, ils votaient tout de même pour lui. Je crois qu'il a tout particulièrement fait sa marque par les services qu'il a rendus aux immigrants et en représentant si bien les gens de sa circonscription.
Nous qui sommes constamment à la recherche d'antidotes au cynisme et à l'apathie face au gouvernement, à la politique et aux politiciens, nous devons tenter de suivre l'exemple d'un véritable représentant de circonscription comme le député Ian Wahn. Il a fait preuve tous les jours d'un réel respect pour le rôle des citoyens dans une démocratie efficace.
À titre de députée de St. Paul's, la réussite d'Ian Wahn au chapitre de l'engagement des citoyens et de la justice sociale est pour moi une source d'inspiration quotidienne.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Madame la Présidente, je prends aujourd'hui la parole à la Chambre afin de rendre hommage au regretté Ian Wahn. Même si je n'ai pas eu le plaisir de rencontrer M. Wahn, je sais qu'il a été un parlementaire dévoué pendant 10 ans, de 1962 à 1972.
Lorsqu'il siégeait à la Chambre des communes, il a fait partie de plusieurs comités, dont ceux des banques et des finances, de la justice et des affaires juridiques, de l'industrie, de l'énergie ainsi que des privilèges et élections. Il a aussi été président du comité de la défense nationale et de celui des affaires extérieures.
Il a été un brillant avocat, aussi bien avant qu'après sa carrière de parlementaire. Sa réussite professionnelle a découlé tout naturellement de ses succès scolaires. Il a été boursier de la fondation Cecil Rhodes et a obtenu son baccalauréat et sa maîtrise de l'Université d'Oxford. Il est ensuite revenu au Canada et il a terminé ses études de droit à Osgoode Hall, à Toronto. Il a été un patriote et un ancien combattant qui a servi dans les Queen's Own Rifles of Canada pendant la Seconde Guerre mondiale. Il a obtenu le grade de capitaine avant la fin de cette guerre.
C'est avec un immense respect que j'honore la mémoire de Ian Wahn. J'exprime mes sincères condoléances à la famille et aux amis d'un véritable gentleman, d'un universitaire exceptionnel et d'un grand patriote.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Madame la Présidente, il y a un peu plus d'un mois, le 14 septembre 1999, M. Ian Grant Wahn s'éteignait à l'âge de 83 ans.
Originaire de la Saskatchewan et juriste de profession, M. Wahn a servi en Hollande et en Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale. Il a fait carrière en politique fédérale de 1962 à 1972. Élu à quatre reprises, c'est sous la bannière libérale qu'il a représenté la circonscription torontoise de St-Paul's, défaisant ainsi le conservateur Roland Michener qui allait devenir ultérieurement gouverneur général du Canada.
Au cours de sa carrière politique, M. Wahn s'est notamment intéressé aux finances, à la justice et à l'industrie. Durant son dernier mandat, il a été président du Comité permanent de la défense et des affaires étrangères.
Un de ses deux fils lui a rendu hommage en soulignant son charisme, sa bonté et la considération qu'il avait des gens. Son souhait le plus grand était de contribuer à corriger ce qu'il jugeait mauvais. Rien d'étonnant qu'il ait présenté des projets de loi relevant de sa vision sociale au chapitre de l'avortement, du divorce, du contrôle des naissances et de l'immigration.
Au nom du Bloc québécois, je salue un homme politique qui, durant 10 ans, a consacré son énergie au service de ses concitoyens et de ses concitoyennes. Ses enfants, ses petits-enfants et ses amis peuvent être fiers de lui.
[Traduction]
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Madame la Présidente, au nom du groupe des députés néo-démocrates, je voudrais moi aussi rendre hommage à M. Ian Wahn et exprimer nos condoléances à sa famille.
Bien qu'aucun de nous n'ait eu l'occasion de le connaître, nous rendons hommage à M. Wahn parce que nous constatons qu'il a eu une carrière remarquable au service de ses concitoyens à la Chambre des communes et au service de son pays en temps de paix comme en temps de guerre. Il a eu également une remarquable carrière universitaire et juridique.
Nous rassemblons tous ces traits et rendons grâce pour la vie et le travail d'un éminent citoyen canadien.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Madame la Présidente, je me joins à mes collègues du caucus progressiste conservateur pour rendre hommage au regretté Ian Wahn.
On l'a décrit avec raison comme un politicien gentleman et un patriote canadien. Boursier Rhodes, il a répondu à l'appel de son pays et a servi en Hollande et en Allemagne au sein des Queen's Own Rifles of Canada au cours de la Seconde Guerre mondiale.
Après la guerre, il a exercé la profession d'avocat et travaillé à des projets comme le pipeline Transcanadien. Son sens du service envers le public l'a cependant amené à solliciter une charge publique, où il a accompli un travail exemplaire dans le domaine de l'immigration. Bien qu'il ait siégé sur les banquettes d'en face à la Chambre, il s'est acquis le respect des deux côtés grâce à sa personnalité remarquable, à sa gentillesse et à son assiduité.
Le Canada est un endroit meilleur parce qu'il a consacré toute sa vie à son service. Nous nous joignons à tous les députés pour adresser nos condoléances aux membres de la famille Wahn, qui peuvent être très fiers de leur père et de leur grand-père.
* * *
RECOURS AU RÈGLEMENT
PROPOS TENUS À LA CHAMBRE
Mme Angela Vautour (Beauséjour—Petitcodiac, PC): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement.
Une question a été posée aujourd'hui à propos d'un grave problème concernant un bénéficiaire de l'assurance-emploi du Nouveau-Brunswick. Le député de London-Centre-Nord, en se portant à la défense du gouvernement, a dit à la Chambre: «Les gens de l'Ontario paient vos factures», en parlant des gens du Nouveau- Brunswick. Il est le président du caucus libéral national. Une observation aussi discriminatoire devrait à mon avis l'obliger à démissionner de ce poste, car il ne représente pas l'opinion nationale de tous les Canadiens...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Ce n'est pas un rappel au Règlement. Nous passons au débat.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI SUR L'ACCORD DÉFINITIF NISGA'A
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-9, Loi portant mise en vigueur de l'Accord définitif nisga'a, soit lu pour une deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Madame la Présidente, j'interviens aujourd'hui pour parler du traité nisga'a qui pourrait être considéré, à mon avis et de l'avis de bon nombre de mes collègues, comme l'un des plus importants projets de loi que la Chambre ait jamais étudiés. Chose certaine, c'est le plus important projet de loi que j'aurai à examiner en tant que parlementaire durant mon mandat à titre de député à Ottawa.
J'ai déjà parlé longuement du traité nisga'a dans le cadre de débats précédents à la Chambre. J'ai parlé de nombreux aspects différents de ce traité. Je vais poursuivre aujourd'hui et parler des questions comme les coûts du traité. Le gouvernement a essayé au départ de nous persuader que le coût du traité serait de 200 millions de dollars. Il reconnaît maintenant qu'il est question de 500 millions de dollars. Cependant, une étude indépendante conclut qu'il est probable qu'on atteigne le chiffre de 1,3 milliard de dollars et plus.
Je pourrais parler de questions comme l'attribution des ressources et les entreprises forestières de la Colombie-Britannique. L'industrie forestière a examiné cet accord et ses représentants affirment que contrairement à ce que le gouvernement prétend, il ne donne aucune certitude et aucune assurance au secteur forestier et qu'il crée, en fait, plus d'incertitude qu'auparavant.
Je pourrais parler des questions de pêche, telles que la création d'un nouveau droit commercial de pêche exclusif aux Nisga'as. Nous avons dit au gouvernement dans le passé que nous n'avions rien contre l'accroissement de la participation des Nisga'as à la pêche, mais faisons-le de la bonne façon, en achetant les bateaux et les permis actuels et en s'assurant que tout le monde soit régi par les mêmes règles du jeu, plutôt que d'accorder un accès aux ressources seulement aux Nisga'as et pas aux autres Canadiens.
Le gouvernement continue de ne pas vouloir écouter. Il refuser d'écouter les conseils de l'opposition officielle. Il fait la sourde oreille à ce que disent les gens de la Colombie-Britannique. Il se moque de ce qu'on peut penser en Colombie-Britannique. Dans une entrevue, il y a deux jours, le ministre a déclaré que l'intérêt pour cette question ne se limite pas à la Colombie-Britannique, mais qu'elle en dépasse largement les frontières. Nous en convenons, mais cette mesure aura directement un effet sur la province, qui est la mienne incidemment.
Le ministre a déclaré qu'il se moquait vraiment de ce que pensent les habitants de la Colombie-Britannique et qu'il verra à ce que le traité entre en vigueur d'une façon ou d'une autre. C'est le comble de l'arrogance. Comment le gouvernement peut-il penser convaincre la population d'appuyer une telle mesure quand le ministre d'État chargé du traité affiche cette attitude?
Je pourrais aborder d'autres questions, par exemple le fait que l'accord confère au gouvernement central nisga'a la suprématie législative dans au moins 14 domaines qui se situent au-delà de la compétence du Parlement canadien ou des provinces. Pensons-y un instant. Des pouvoirs qui se situent au-delà de la compétence du Parlement canadien. Autrement dit, désormais, en cas d'incompatibilité, les lois nisga'as auront préséance sur les lois fédérales ou provinciales.
Cela n'a certainement pas échappé aux députés bloquistes puisque, au cours d'une entrevue hier, leur porte-parole pour les affaires autochtones a déclaré qu'ils appuieraient le traité nisga'a en grande partie parce qu'ils y voient des similitudes avec leur vision de l'association-souveraineté entre le Québec et le reste du Canada.
Avec raison, le gouvernement refusera au BQ et au PQ le genre de relation, ou d'arrangement, qu'il prévoit à l'égard des Nisga'as du nord de la Colombie-Britannique.
Si le gouvernement croit vraiment que c'est une bonne idée, est-il prêt à offrir à Lucien Bouchard les mêmes concessions qu'il accorde au peuple nisga'a et au gouvernement nisga'a dans le nord de la Colombie-Britannique? Est-il prêt à faire exactement les mêmes concessions?
Je soupçonne que le gouvernement ne le fera en aucun cas. Si c'est bon pour la Colombie-Britannique, pourquoi est-ce que ça ne le serait pas pour le Québec? Je garantis à la Chambre que le gouvernement ne s'engagera jamais sur cette voie avec Lucien Bouchard et les souverainistes du Québec, même s'il le fait dans le cas de la Colombie-Britannique. Les ramifications sont énormes.
Je pourrais continuer à satiété sur ce sujet. Je pourrais parler du caractère anticonstitutionnel du traité. À l'heure actuelle, en Colombie-Britannique, il fait l'objet de deux contestations différentes, et on en annonce d'autres. La constitutionalité de l'accord même est en doute. En acceptant de transférer et de céder des pouvoirs législatifs dans 14 domaines, le gouvernement fédéral fait quelque chose qu'il n'a constitutionnellement pas le droit de faire.
Je renvoie les députés à une décision rendue par la Cour suprême du Canada en 1950 dans l'affaire de l'hôtel du Lord Elgin. Elle y dit que la Constitution canadienne n'appartient ni au Parlement, ni aux assemblées législatives provinciales, mais au peuple de ce pays. Le Parlement du Canada n'a pas le droit de céder des pouvoirs législatifs dans quelque domaine que ce soit.
Les articles 91 et 92 de notre Constitution énoncent exhaustivement les compétences et les pouvoirs législatifs du gouvernement fédéral et des provinces. Or, le gouvernement libéral tente de recourir à des moyens extraconstitutionnels pour contourner ces articles, afin d'accorder au gouvernement central nisga'a un pouvoir législatif suprême dans au moins 14 secteurs.
Nous estimons que c'est une erreur. Cela va à l'encontre de la décision que la Cour suprême du Canada a rendue en 1950 dans l'affaire de l'hôtel Lord Elgin. Cela va à l'encontre de ce que les Canadiens ont dit en 1992 lorsqu'ils ont rejeté l'accord de Charlottetown.
Le gouvernement ne se soucie guère de ce que pensent et disent les Canadiens. C'est l'évidence même. Depuis que l'accord de Charlottetown a été rejeté, le gouvernement cherche des moyens détournés de faire toutes les choses prévues dans l'accord de Charlottetown auxquelles les Canadiens se sont opposés. C'est ainsi que le gouvernement libéral agit. En tant que Canadien, je suis très offensé de voir que le gouvernement puisse agir ainsi. Je sais que les habitants de la Colombie-Britannique en sont extrêmement offensés.
Je peux dire aux députés que, dans le débat sur l'accord de Charlottetown qui a eu lieu en Colombie-Britannique et qui a mené au vote sur le référendum, le principal facteur dont un grand nombre de Britanno-Colombiens ont tenu compte pour décider d'accepter ou de rejeter cet accord a été les dispositions de l'accord concernant l'autonomie gouvernementale des autochtones. Si cet article n'avait pas été inséré dans l'accord de Charlottetown, il est fort probable que beaucoup plus de gens auraient appuyé l'accord, certainement en Colombie-Britannique et peut-être aussi dans bien d'autres provinces du Canada.
Le gouvernement entend refaire lentement l'accord de Charlottetown, sous les yeux des Canadiens qui l'ont rejeté. Je n'arrive pas à comprendre comment le gouvernement peut être arrogant à ce point. Mais c'est la marque du gouvernement libéral.
Je parlerai de l'incidence que cela aura sur les gens. Le ministre des Affaires indiennes a dit à deux ou trois reprises que le traité conclu avec les Nisga'as constitue une façon d'intégrer ces derniers dans le Canada. Je dois donc me poser la question suivante: où se trouvaient-ils avant la conclusion du traité? Étaient-ils à l'extérieur du Canada? Je ne le crois pas.
Vendredi soir, j'ai eu l'occasion de prendre un café à l'aéroport de Vancouver avec une dame qui s'appelle Mazie Baker. Elle est membre de la bande indienne de Squamish et elle m'a posé les mêmes questions. Elle a entendu le ministre des Affaires indiennes dire que c'est là une façon d'intégrer les Nisga'as dans le Canada. Elle m'a demandé: «Est-ce que cela signifie que je ne suis pas Canadienne? Est-ce que cela veut dire que je ne serai pas Canadienne tant que la bande indienne de Squamish n'aura pas conclu un traité avec le gouvernement fédéral?» Elle a toujours eu l'impression d'être Canadienne et elle voulait que je demande en son nom au ministre si elle l'était.
Je ne comprends pas que le ministre ait pu faire une déclaration semblable sans en peser les conséquences et sans tenir compte de son incidence sur la façon dont elle affecterait la façon de penser de gens comme Mazie Baker. Mazie m'a aussi demandé, comme beaucoup d'autres femmes autochtones de la Colombie-Britannique l'ont fait, pourquoi le gouvernement est disposé à concentrer un pouvoir d'une telle ampleur entre les mains du gouvernement central des Nisga'as ou de tout autre gouvernement.
C'est un problème qui ne se limite pas aux autochtones. Il existe aussi à l'échelle nationale. Nous devons toujours mettre en place des automatismes régulateurs chaque fois qu'il s'agit de gouvernements afin de veiller à ce que le pouvoir ne soit pas exercé trop étroitement. De fait, c'est l'un des principaux volets de la politique du Parti réformiste. Nous estimons que le pouvoir est trop concentré à Ottawa. Nous avons des idées constructives à proposer concernant la façon de le décentraliser et de le répartir sur une plus vaste base au lieu de faire face à la concentration que l'on connaît au sein du Cabinet du premier ministre.
Les gens de la base nous demandent pourquoi le gouvernement fédéral est disposé à faire abstraction de nos droits en tant qu'individus et à favoriser uniquement les droits collectifs. Ils n'ont rien contre la notion de droits collectifs, mais ils veulent que l'on tienne compte de leurs droits individuels. Ils veulent savoir ce qu'ils retireront du traité sur le plan individuel, s'ils pourront être propriétaires d'un terrain et prendre des décisions avec les membres de leur famille quant à l'usage qu'ils en feront.
Ils veulent savoir s'ils obtiendront des avantages financiers réels et significatifs qu'ils pourront utiliser pour prendre une longueur d'avance ou démarrer une entreprise. Ils disent qu'au lieu de cela ils obtiendront un gouvernement disposant d'un pouvoir énorme sur les ressources, les terres, l'argent, etc. Pareille perspective n'est guère réjouissante pour eux.
Nous avons parlé à des femmes autochtones d'un bout à l'autre du Canada, mais surtout de la Colombie-Britannique. Ce printemps, j'ai rencontré Marilyn Buffalo, qui est présidente de l'Association des femmes autochtones du Canada. Marilyn exprime fort bien le point de vue voulant que les femmes autochtones du Canada, notamment celles qui habitent dans des réserves, ne jouissent pas de beaucoup de droits. Elles n'ont certainement pas les mêmes droits que les femmes non autochtones vivant à l'extérieur des réserves.
En cas de rupture de mariage, une femme non autochtone jouit de la protection de la loi pour l'accès au foyer marital et de la garantie d'être propriétaire de la moitié des biens familiaux, y compris le foyer marital. Dans les réserves, parce qu'il n'y a pas de droits à la propriété privée, il est impossible de garantir ces droits aux femmes autochtones.
S'il y a rupture de mariage, ce sont, le plus souvent, la mère et les enfants qui se retrouvent à la rue. Le traité conclu avec les Nisga'as, qui est censé s'attaquer aux problèmes qui existent actuellement au Canada, ne fait rien à cet égard. À mon avis, il sera extrêmement plus difficile pour le gouvernement de corriger un jour la situation, s'il choisit de le faire, en raison du pouvoir législatif définitif prévu dans l'accord.
J'entends constamment des autochtones parler de leurs droits et de leur manque de responsabilisation. Nous recevons très souvent des appels, des lettres et des fax de simples citoyens autochtones vivant dans des réserves qui nous demandent de l'aide. On nous a posé de sérieuses questions et on nous a parfois présenté de sérieuses allégations sur le détournement de fonds et d'actifs appartenant à des bandes et sur des cas de népotisme.
Lorsque les autochtones écrivent une lettre au ministre des Affaires indiennes, celui-ci leur répond qu'il s'agit de questions que la bande doit régler elle-même. Le ministère des Affaires indiennes se lave les mains des problèmes autochtones, mais il verse tout de même très généreusement les fonds aux dirigeants de bandes mis en cause en leur imposant très peu de mesures de contrôle. Très souvent, les simples citoyens autochtones qui nous appellent ont de la difficulté à trouver l'argent nécessaire pour faire un appel téléphonique parce qu'ils vivent dans un très grand dénuement. Ils n'ont pas de ressources et n'ont pas accès aux ressources dans les réserves. On ne leur rend pas les comptes qu'ils attendent qu'on leur rende.
Je n'arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement ne tient jamais compte des plaintes et des appels à l'aide de ces gens. Vendredi soir, je prenais le café avec deux membres de la bande de Squamish, Mazie Baker et Wendy Lundberg, et je pouvais sentir leur irritation lorsqu'elles ont demandé pourquoi le ministre ne tenait jamais compte de leurs lettres. Pourquoi, demandaient-elles, ne peuvent-elles jamais se faire entendre?
Quand le projet de loi C-49 a été débattu au printemps, ils sont venus à Ottawa témoigner devant le Comité sénatorial des peuples autochtones. Ils ont essayé de convaincre le Sénat d'apporter à cette mesure législative des changements qui protégeraient leurs droits. Leur témoignage devant le comité sénatorial et devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord de la Chambre des communes a été très convaincant. Aucun des deux comités n'en a tenu compte. Leurs droits n'ont pas été protégés. Les amendements qu'ils ont proposés ont été rejetés. Ils sont venus jusqu'ici pour repartir les mains vides.
Ils appellent encore au secours. Ils veulent que leurs droits individuels soient respectés et protégés mais n'arrivent pas à obtenir qu'ils le soient. Ils m'ont dit qu'ils avaient examiné l'accord avec les Nisga'as. Ils le considèrent comme une façon de maintenir le statu quo qui rend encore plus difficile la possibilité de voir un jour leurs droits individuels et ceux des autres peuples protégés.
Les Nisga'as de la base sont de plus en plus nombreux à adresser des lettres ouvertes aux médias pour faire part de leurs points de vue. Le vote de ratification a eu lieu deux mois seulement après que l'entente a été rendue publique. Jusque là, l'entente était restée secrète. Les Nisga'as de la base comme le reste de la population non autochtone en Colombie-Britannique n'avaient vraiment aucune idée de ce que contenait cette entente.
Ils ont eu seulement une période de huit à neuf semaines après la publication de l'entente pour étudier un accord de 220 ou 230 pages, plus 400 pages et quelques d'annexes, avant qu'on ne leur demande de prendre part à un référendum.
Je rappelle à la chambre que les résultats du vote indiquent que seulement un peu plus de 60 p. 100 des Nisga'as approuvent l'entente. Il est très important de rappeler aux députés que bien des Nisga'as trouvent à redire à cet accord pour une raison ou pour une autre et qu'ils ont refusé leur appui.
Je n'en reviens pas que le gouvernement tienne à voir les Nisga'as, ou n'importe quelle autre bande autochtone, du reste, comme un groupe homogène dont tous les membres pensent la même chose, veulent les mêmes choses et s'entendent sur le même ensemble de principes et de conditions. Rien ne saurait être plus éloigné de la vérité. Les autochtones ont chacun leur personnalité, comme nous.
Cela m'amène au point principal de mon intervention. Le gouvernement actuel et les précédents encouragent depuis longtemps les autochtones à se percevoir comme un groupe à part du reste du Canada, au point que, maintenant, les autochtones, et surtout leurs dirigeants, considèrent le principe de l'égalité comme une sorte de menace, comme quelque chose de négatif.
C'est regrettable, car rien n'est plus éloigné de la vérité. Une égalité vraie est non seulement le meilleur moyen de préserver l'harmonie dans notre société, mais aussi le meilleur moyen que nous connaissions de garantir les droits démocratiques de l'individu, de veiller à ce que chacun ait des possibilités au plan économique, de faire en sorte que les autochtones de notre pays puissent mener leur vie comme ils l'entendent et décider eux-mêmes de ce qu'ils veulent faire, au lieu d'être parqués dans des réserves d'où ils ne doivent pas bouger s'ils veulent être considérés comme un Nisga'a, un Tsimshian, un membre de la bande Tsuu T'ina. Ils y vivent dans des conditions abjectes, sans droit à la propriété. Mais c'est la seule façon de préserver leur identité.
Nous disons que l'égalité, c'est l'égalité aux yeux de la loi, ce qui laisse toute latitude pour respecter et même célébrer les différences culturelles. Je ne pense pas qu'un seul député soit indifférent au fait que les Canadiens ont un précieux patrimoine. Les langues, coutumes et costumes traditionnels des autochtones font partie de la culture canadienne. Ils l'expriment de bien des façons différentes, mais le fait pour un groupe de célébrer sa diversité culturelle ne devrait pas mener à une ségrégation de droit. C'est pourtant la position que défend le gouvernement fédéral depuis fort longtemps.
Comme le faisait remarquer mon chef ce matin, en 1968-1969, sous la direction de Pierre Trudeau, le Parti libéral fédéral a semblé être sur le point de s'éloigner de cette politique. Le Parti libéral semblait vouloir changer sa façon de faire, mais il a perdu courage. En perdant courage, il a aussi rompu les liens de confiance qu'il entretenait avec les autochtones de la base. Les conditions épouvantables et catastrophiques dans lesquelles vivent actuellement les gens sur certaines réserves auraient pu, en grande partie, être évitées si le Parti libéral avait modifié sa politique. Nous l'incitons aujourd'hui à le faire.
J'invite les députés libéraux à suivre le raisonnement appliqué au XIXe siècle. Comme le disait mon chef ce matin, cela nous oblige à faire preuve de créativité et à chercher une nouvelle option qui accorde la priorité aux droits individuels et non aux droits collectifs et qui fait profiter les particuliers et non les collectivités des possibilités que leur offre le gouvernement fédéral.
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Madame la Présidente, je suis déroutée par les propos tenus par le député de Skeena et ses collègues réformistes qui persistent à nous abreuver d'informations erronées. Leurs arguments sont truffés de contradictions.
Il y a quelques minutes, le député de Skeena a affirmé que ses collègues et lui-même étaient convaincus que les autochtones, notamment les Nisga'as, devraient pouvoir se prendre en main et qu'ils méritaient d'être traités avec autant de respect et de dignité que les autres Canadiens.
Si le député, son chef et les autres députés réformistes en sont persuadés, pourquoi refuseraient-ils de sanctionner ce traité à l'élaboration duquel les Nisga'as ont participé de plein droit, dans le respect et la dignité, et qui a fait l'objet de consultations publiques conduites en bonne et due forme?
Les réformistes agissent avec grande hypocrisie dans ce débat. D'une part, ils prétendent défendre le droit à l'égalité des autochtones, tandis que, de l'autre, ils s'apprêtent à saboter cet accord. Je voudrais entendre le député là-dessus.
J'ai été stupéfaite d'entendre ce matin le chef du parti réformiste déclarer qu'il voulait ouvrir la voie à une nouvelle façon d'élaborer les traités futurs. Il entendait faire adopter aux Nisga'as une idéologie de marché. C'est ce qu'il a enjoint aux Nisga'as de faire.
Si le député est effectivement persuadé de l'individualité et des droits des autochtones, il doit logiquement admettre et reconnaître que, s'agissant de la détermination de leur avenir, ces peuples ont le droit de s'appuyer sur les points de vue, l'histoire, l'expérience et les arguments qui leur sont propres pour déterminer leur avenir. Pourquoi le Parti réformiste veut-il que ce soit tout ou rien, et pourquoi affirme-t-il que si l'idéologie de marché n'est pas retenue, il fera en sorte de tout démolir? Je voudrais que le député réponde à cela.
M. Mike Scott: Madame la Présidente, je réfute l'allégation voulant que le parti réformiste, moi-même personnellement ou toute autre personne reliée au parti, ait l'intention de s'en prendre à qui que ce soit. C'est là le genre de mauvaise interprétation qui ne fait rien pour faciliter le débat.
Dès que quelqu'un s'oppose à une politique du gouvernement sur les autochtones ou l'immigration, les ministériels ont tendance à attaquer sa personnalité, son caractère, ses motifs ou sa réputation. Ils peuvent ainsi mettre de côté la substance même du dossier.
J'aimerais apporter quelques précisions à l'intention de notre collègue qui a parlé des tribunes publiques. Il n'y a eu aucune tribune publique avant la présentation officielle de ce traité, absolument aucune. Je vis moi-même dans la région visée par le traité. Nous avons supplié les négociateurs de discuter ouvertement de ce processus. Ils ont refusé. Ils nous ont dit avoir signé une entente de non-divulgation et vouloir la respecter. Ils n'avaient pas l'intention de rendre le processus public.
En ce qui a trait à l'idéologie commerciale, je sais qu'à titre de néo-démocrate, la députée reconnaît l'importance de la doctrine socialiste, mais elle doit certainement comprendre que cette doctrine a échoué partout où elle a été mise en oeuvre dans le monde.
Combien de fois devons-nous constater un échec avant de conclure que cela ne fonctionne peut-être pas? Pourquoi le gouvernement du Canada encouragerait-il un système économique qui est un échec évident partout où il a été mis à l'essai et l'imposerait-il aux Nisga'as?
La députée devrait réfléchir très soigneusement et convenir que ce qui est dans l'intérêt supérieur à long terme des Nisga'as, c'est quelque chose qui fonctionne. Après 132 ans de politiques et de traités qui ne fonctionnent pas, les députés devraient sûrement s'intéresser à quelque chose qui fonctionne.
J'ai une autre observation à faire. Si les traités étaient une si bonne chose pour les autochtones, on devrait pouvoir affirmer que les régions du Canada auxquelles s'appliquent des traités et tous les autochtones qui y habitent devraient être dans une meilleure position qu'en Colombie-Britannique où ils ne vivent pas sous le régime de traités.
Pour l'information de la députée, si elle n'a pas visité de réserves dans d'autres régions du Canada, elles ne sont pas dans une meilleure position. Je dirais même que, dans bien des cas, elles se trouvent dans une moins bonne position là où elles ont des traités. La députée ne devrait pas nous dire que les traités sont la solution. Ils ne l'ont certainement pas été depuis 132 ans.
[Français]
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, je sens que le député de Skeena a le coeur bien proche de ces questions, mais je me demande si ses informations sont vraiment correctes.
[Traduction]
Il y a quelques minutes, le député nous a parlé des femmes autochtones en disant qu'elles ne bénéficient pas de droits égaux. Je lui rappelle, voire même je l'informe, puisque je doute qu'il ait lu le traité, que les droits des femmes autochtones sont entièrement protégés dans ce traité, qui s'insère dans le cadre juridique canadien.
Aux termes du paragraphe 35(4) de la Loi constitutionnelle de 1982, les droits issus de traités sont garantis également aux personnes des deux sexes. Il ne faut pas oublier que la Charte canadienne des droits et libertés s'applique à toutes les décisions du gouvernement nisga'a. Toutes les décisions doivent être indirectement acceptées, aux termes de la Charte des droits et libertés.
Je rappelle également au député que les droits politiques sont garantis également aux personnes des deux sexes, en vertu de l'Accord définitif nisga'a et de la constitution nisga'a.
Enfin, et il est important de le signaler, les lois fédérales et provinciales sur les droits de la personne s'appliquent au gouvernement nisga'a et au peuple nisga'a.
Parlons maintenant de l'éclatement des mariages, qui se produit malheureusement trop souvent. Dans le cas des membres de la nation nisga'a, c'est en vertu de la Family Relations Act de la Colombie-Britannique que se fera la division de tous les biens matrimoniaux, et non de la loi nisga'a. On voit donc encore une fois que les femmes nisga'as, au même titre que les hommes nisga'as, sont protégés par la Constitution canadienne et par les lois fédérales et provinciales. Je suis curieuse d'entendre les observations du député.
M. Mike Scott: Monsieur le Président, je remercie la députée de ses questions. D'après le ton de ses propos, il est clair que ce dossier lui tient à coeur. Il me fait plaisir de répondre à ses questions.
En ce qui a trait aux droits des femmes, il est vrai que l'accord dit que les compétences ou les lois provinciales s'appliquent. Or, la députée doit comprendre que le partage des biens matrimoniaux présuppose un droit de propriété. À l'heure actuelle, dans les réserves du Canada, c'est le conseil de bande qui décide qui va habiter dans telle ou telle maison, parce que les maisons n'appartiennent à personne à titre individuel. Elles sont la propriété de la bande.
Certes, l'accord Nisga'a pourrait donner lieu à la création d'un droit de propriété privée, mais il n'existe aucun engagement en ce sens. Or, sans cet engagement, on ne peut pas conférer ces droits matrimoniaux aux femmes Nisga'a.
La députée a évoqué les droits de la Charte. C'est vrai, il en est question dans l'accord, et c'est là un point où le ministre des Affaires indiennes et du Nord a tendance à donner, sciemment ou non, une impression incorrecte de l'accord. Le préambule de l'accord Nisga'a dit que la Charte des droits et libertés s'appliquera, c'est vrai. Nous l'admettons. C'est écrit noir sur blanc. Mais il faut également comprendre que l'article 35 de la Constitution reconnaît et affirme les droits autochtones, lesquels sont des droits collectifs.
L'article 25 de la Loi constitutionnelle stipule que les tribunaux doivent prendre ces droits en considération advenant un conflit entre les droits individuels garantis par la Charte aux Nisga'as et les droits collectifs des Nisga'as en tant que peuple. En outre, les tribunaux doivent donner préséance aux droits collectifs par rapport aux droits individuels.
J'exhorte la députée à lire les articles 25 et 35 de la Loi constitutionnelle. Il est très facile d'en arriver à la conclusion que nos droits en vertu de la Charte sont mis en péril par l'exigence renfermée à l'article 25, à savoir que les tribunaux doivent juger que l'article 35 l'emporte sur les droits individuels. J'exhorte la députée à lire ces dispositions, parce qu'elles sont très importantes. Si nous ne le faisons pas, nous verrons que, dans cinq, dix ou quinze ans, certaines causes entendues par les tribunaux sembleront tout à fait ridicules aux yeux de la plupart des Canadiens. Des particuliers nisga'as seront déboutés en Cour suprême lorsqu'ils essaieront de faire valoir que leurs droits en vertu de la Charte sont violés. Ils ne seront pas sur le même pied que tous les autres Canadiens et cela est vraiment regrettable.
[Français]
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, c'est avec un grand plaisir que je m'adresse à la Chambre aujourd'hui pour exprimer mon appui au projet de loi C-9, la mesure législative déposée par le gouvernement pour rendre exécutoire l'Accord définitif nisga'a.
Le peuple nisga'a vit dans la vallée de la Nass au nord-ouest de la Colombie-Britannique depuis des centaines, si ce n'est des milliers d'années. Lorsque les colonisateurs européens sont arrivés sur leur territoire, ils y ont trouvé une société bien organisée, qui se gouvernait elle-même. Cette société subvenait à ses besoins en récoltant les abondantes ressources de la terre qu'elle occupait et en faisant du commerce avec ses voisins. Riches étaient sa culture et ses traditions.
Lorsque la Colombie-Britannique est devenue une province et s'est jointe au Canada en 1871, les autochtones composaient la majorité de la population de la province. Et pourtant, ils ne jouissaient d'aucun droit reconnu dans le processus décisionnel politique.
L'adoption de la Loi sur les Indiens a eu comme conséquence que le régime d'administration fondé sur les bandes était imposé aux premières nations qui devaient dorénavant faire l'objet d'une étroite supervision par des représentants fédéraux. Ainsi, les gouvernements ont interdit le potlatch, une tradition qui était au coeur du régime politique et social des premières nations. De plus, les enfants étaient séparés de leur famille et envoyés loin d'elles dans des pensionnats religieux.
En dépit de ces changements dramatiques, les Nisga'as et d'autres premières nations de la Colombie-Britannique ont survécu comme culture et comme peuple. Ils tenaient à leurs valeurs traditionnelles, à leur identité et à leur conviction profonde qu'ils détenaient toujours des droits de propriété sur leurs territoires traditionnels.
Déjà en 1880, les dirigeants des premières nations ont exigé des traités qui établiraient une juste relation entre leur peuple et les gouvernements. Les Nisga'as figuraient comme chefs de file parmi les premières nations de la Colombie-Britannique dans les pressions exercées auprès des gouvernements pour négocier des traités. Je rappelle aux députés de cette Chambre que les Nisga'as ont toujours usé de diplomatie et ont eu recours à des moyens pacifiques pour ce faire, même si les gouvernements ont continué à rejeter leurs requêtes.
En 1927, le Parlement amendait la Loi sur les Indiens pour rendre illégales les dépenses ou les levées de fonds par les Indiens qui leur permettraient de faire progresser leurs revendications. Ainsi, on refusait aux autochtones un droit dont jouissaient tous les autres Canadiens.
Lorsque ces dispositions de la Loi sur les Indiens ont été abolies en 1951, les premières nations ont recommencé à s'organiser en vue de poursuivre leurs revendications pour être reconnues et pouvoir négocier des traités.
En 1968, les Nisga'as, dirigés par le chef d'alors, Frank Calder, ont intenté une poursuite devant les tribunaux qui s'est conclue en 1973 par une décision de la Cour suprême du Canada. Par cette décision qui s'est révélée d'importance capitale, la Cour a reconnu que les Nisga'as pourraient avoir eu des titres ancestraux à l'époque précédant la colonisation. Cependant, les juges étaient partagés de façon égale sur la question de l'existence continue de ces titres.
Dans le prolongement de cette décision, le gouvernement fédéral a adopté une politique concernant les revendications territoriales globales et, en 1976, a entamé des négociations de traité avec les Nisga'as.
En 1982, lors du rapatriement de la Constitution canadienne, les droits des autochtones du Canada étaient enfin reconnus. L'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît et confirme les droits ancestraux existants et les droits issus des traités des autochtones du Canada.
Cependant, l'article 35 ne prévoit pas la définition des droits que comportent «les droits ancestraux existants», qu'il reste à déterminer par la négociation ou le recours aux tribunaux.
Ces traités ont pour but la conciliation des droits historiques des autochtones dans un contexte contemporain, reconnaissant qu'ils vivaient ici et se gouvernaient eux-mêmes avant l'arrivée des Européens.
Oui, les autochtones du Canada ont des droits uniques qui sont protégés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Ces droits uniques concernent leur occupation antérieure de ce territoire.
Ceux qui allèguent que le traité des Nisga'as établit un gouvernement qui crée l'inégalité devraient examiner plus attentivement ce qui est véritablement accompli. Ce traité précise clairement quels sont les droits nisga'as qui existeront dans le futur.
Il a été constaté que les premières nations du Canada comptaient au nombre des groupes les plus défavorisés dans notre société. Dans tous les domaines, notamment l'alphabétisation, l'emploi, la santé et le développement, les conditions dans leurs collectivités tirent fortement de l'arrière par rapport aux normes canadiennes. Dans un pays comme le Canada, il est inexcusable qu'un groupe de personnes soit si désavantagé.
Le traité des Nisga'as contribuera à assurer que les Nisga'as aient véritablement accès aux avantages et privilèges auxquels ils ont droit en tant que Canadiens, tout en préservant leur identité d'autochtones.
C'est ce qu'accomplit le traité des Nisga'as. Ce traité reconnaît que l'histoire des Nisga'as est antérieure à l'instauration de la souveraineté canadienne et il le fait de manière entièrement conforme aux principes d'égalité enchâssés dans la Charte.
Donc, tout en respectant les plus hautes instances juridiques de ce territoire, il confirme les droits uniques des Nisga'as. Ce faisant, il établit un juste équilibre entre ces droits et les intérêts des autres Canadiens et insère fermement ces droits dans la trame constitutionnelle et juridique du Canada.
Le Canada, selon moi, n'est pas un pays où les autochtones doivent cesser d'être autochtones pour être Canadiens. Nous démontrons, par ce traité, que l'on peut être Canadien tout en continuant à vivre dans la culture nisga'a. Voilà ma vision, une vision canadienne.
Ce traité établit les droits qu'auront les Nisga'as dans un certain nombre de secteurs, notamment concernant les terres et les ressources. Il précise aussi un ensemble pratique de droits législatifs auxquels ont convenu les trois parties aux négociations, soit les gouvernements fédéral, provincial et les Nisga'as. Le gouvernement des Nisga'as sera assujetti à la Charte canadienne des droits et libertés et le Code criminel du Canada continuera de s'appliquer sur les terres nisga'as, tout comme les lois fédérales et provinciales.
Les compétences législatives prévues dans le traité sont conçues pour donner la possibilité aux Nisga'as de protéger leur culture, leur langue et leur propriété.
Les droits égaux des femmes, par exemple, seront protégés à la fois par la Charte canadienne des droits et libertés, ainsi que par le traité lui-même, nonobstant ce que le député vient de dire dans son dernier discours. La loi provinciale sur les divorces continuera aussi de s'appliquer.
L'Accord définitif nisga'a protège les droits des Nisga'as tout en reconnaissant les droits de ceux qui ne sont pas Nisga'as. Les pouvoirs législatifs des Nisga'as seront limités par les dispositions de l'accord définitif qui garantit également que des mécanismes spéciaux sont en place pour protéger les droits des non-Nisga'as vivant sur les terres nisga'as.
Les critiques à l'effet que ce traité confère aux Nisga'as le pouvoir de retrancher des droits aux autres citoyens canadiens sont simplement absurdes. Par exemple, l'accord définitif prévoit que les Nisga'as auront le droit à une réserve d'eau. Cette réserve ne représente qu'un p. 100 du débit moyen de la rivière Nass. Pour exploiter cette eau, les Nisga'as doivent présenter une demande de permis d'utilisation du gouvernement de la Colombie-Britannique, comme doit le faire tout autre citoyen. N'importe qui peut demander un permis pour utiliser les autres 99 p. 100 du débit.
En ce qui a trait aux pêches, le traité des Nisga'as garantie le partage de cette ressource entre les Nisga'as et les autres Canadiens. De fait, les dispositions du traité des Nisga'as relatives aux pêches précisent que le droit des Nisga'as de pêcher le poisson sera lui-même assujetti aux mesures de préservation.
Si, par exemple, les mesures de conservation exigeaient un moratoire sur la pêche, les Nisga'as ne pêcheraient pas, même à des fins domestiques, car le ministre des Pêches et des Océans conserve le pouvoir ultime de gérer les pêches de la région de la Nass. La Loi sur les pêches continuera de s'appliquer autant aux pêcheurs Nisga'as qu'aux autres pêcheurs. Partout, dans chacune de ses dispositions, le traité des Nisga'as protège les droits et les intérêts de tous ceux qui travaillent, habitent dans la région de la Nass, ou la visitent.
Ce gouvernement sait très bien que la ratification du traité des Nisga'as représente la démarche qui s'impose afin de regarder devant nous plutôt que de rester prisonniers du passé.
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Madame la présidente, je veux féliciter ma collègue pour son discours.
Comme on le sait tous, nous participons avec la majorité gouvernementale à l'appui du traité des Nisga'as parce que nous croyons que c'est là un juste retour des choses. Nous croyons certainement que le traité est équilibré. Il permettra d'offrir la protection d'un certain nombre de lois importantes, dont entre autres le Code criminel auquel ma collègue a fait référence. Ce traité m'intéresse, ayant déjà eu l'occasion d'en discuter au moment où j'étais membre du Comité permanent de l'immigration, dont je garde un très bon souvenir. Malheureusement, je dois vous informer que je ne serai plus membre de ce comité. Je sens déjà qu'un voile de tristesse s'est déposé sur le visage de ma collègue.
Je lui demande donc ceci. Le traité des Nisga'as reconnaît le droit à une forme de citoyenneté pour les résidants Nisga'as. J'avais moi-même déposé, lors de la précédente législature, un amendement à la Loi sur la citoyenneté pour permettre également que l'on reconnaisse la citoyenneté québécoise. Comme on le sait, il y a une citoyenneté québécoise. Nous voulions que cet amendement fasse en sorte que lorsque il y a une cérémonie d'assermentation, nous puissions remettre un certain nombre de documents qui expliquent la citoyenneté québécoise.
Je veux demander à ma collègue, au-delà de son impatience un peu déplacée, si elle accepterait d'appuyer ce genre d'amendement, puisqu'on reconnaît aux Nisga'as une forme de citoyenneté. Je crois qu'il serait de bon aloi d'admettre qu'il y a aussi une citoyenneté québécoise
Mme Raymonde Folco: Madame la Présidente, la seule réponse que je puisse donner à l'honorable député, c'est que lorsque nous étions tous les deux membres du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, nous avions plusieurs formes de désaccord.
Je dirais que mon rôle ici aujourd'hui est de répondre aux questions sur cette loi qui est devant nous à la Chambre des communes. C'est la seule réponse que je puisse donner là-dessus.
Je pense que la question de l'honorable député n'est pas pertinente au débat qui a lieu dans cette Chambre aujourd'hui. Je me ferai toutefois un plaisir de le rencontrer en privé et de discuter avec lui des questions relatives à la citoyenneté et à l'immigration.
[Traduction]
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Madame la Présidente, je remercie la députée de son intervention et de son analyse du traité.
Il y a un aspect qui me préoccupe. Il s'agit du premier accord territorial moderne dans lequel le droit à l'autonomie gouvernementale est expressément reconnu. Aussi, conformément à l'interprétation que la Cour suprême a donnée de l'article 35, le gouvernement qui a accordé les droits dont il est fait état dans l'accord sur les revendications territoriales ne pourra jamais revenir unilatéralement sur ces droits dans l'avenir.
De ces droits découle la capacité de légiférer. Jusqu'à maintenant, le pouvoir de légiférer avait été la prérogative exclusive du gouvernement fédéral et des provinces.
Comment la députée explique-t-elle que le gouvernement prétend ne pas modifier la Constitution de façon détournée alors que la Constitution s'en trouvera irrémédiablement modifiée sans le consentement des provinces, comme le prévoit la formule de modification?
[Français]
Mme Raymonde Folco: Madame la Présidente, ma compréhension de cette clause n'est pas la même que celle de l'honorable député qui vient de parler. Il nous dit que le gouvernement fédéral n'aura pas la possibilité de réclamer les territoires dont il vient de confirmer la possession aux Nisga'as.
Mais une fois qu'on a signé un traité, il me semble que ce traité est bon ad vitam aeternam. En d'autres termes, c'est une entente entre le peuple nisga'a de la Colombie-Britannique et le gouvernement canadien. Je ne vois pas sous quel prétexte le gouvernement canadien pourrait revenir sur sa parole et revenir sur sa signature pour reprendre les termes d'un traité qu'il a accepté de signer avec le peuple nisga'a. Pour moi, il n'est pas question pour le gouvernement de revenir sur sa décision. Une fois qu'une loi a été entérinée, elle est entérinée et doit être respectée. Je ne vois pas du tout pourquoi il faut avoir recours à la Constitution. Ce traité va être entériné par cette Chambre, sans avoir recours à la Constitution du Canada.
[Traduction]
M. Philip Mayfield: Madame la Présidente, je crois que la députée n'a pas saisi la question.
Dans la Constitution, le gouvernement fédéral a déjà prévu une formule de modification qui a été acceptée par les provinces et les Canadiens. Il a maintenant accepté une formule de modification différente sans respecter les dispositions constitutionnelles prévues à cet égard.
Le gouvernement ne peut adopter ces deux lignes de conduite et légitimer ses façons de faire. Les Canadiens ont le droit de s'attendre à ce que la Constitution soit modifiée seulement en conformité de la formule de modification qu'ils ont acceptée.
Avec le traité actuel, on modifie la Constitution sans respecter la formule de modification adéquate. À mon avis, on modifie ainsi la Constitution de façon détournée, au mépris des règles que les provinces et le gouvernement fédéral ont convenu de respecter.
J'aimerais savoir ce que la députée en pense. C'est une façon illégitime et inacceptable de traiter la Constitution.
Mme Raymonde Folco: Madame la Présidente, ce n'est pas parce que je ne suis pas d'accord avec le député que je ne comprends pas sa question. Je la comprends suffisamment bien, mais je ne suis pas d'accord avec les conclusions qu'il en tire.
Ce que j'ai dit, c'est qu'il ne s'agit pas là d'une question constitutionnelle. Le fait que je ne considère pas cette question comme une question constitutionnelle ne veut pas dire que j'ai mal compris.
L'accord qui va être signé à la Chambre et adopté en tant que loi ne nécessite aucun changement direct ou indirect à la Constitution du Canada. J'en ai assez de le répéter.
Peut-être le député interprète-t-il la loi à sa manière. Dans ce cas, c'est son interprétation. Ce n'est ni la mienne, ni celle de mon parti, ni celle du gouvernement.
Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec la députée de Vancouver-Est.
Le NPD appuie ce traité. Le gros problème, c'est qu'il ne sera pas appliqué. Nous venons d'en avoir un exemple avec la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire Marshall sur la base d'un traité de 1760 qui n'avait pas été appliqué. La Convention sur l'inondation des terres du nord du Manitoba qui n'a pas été respectée et a conduit des gens à une extrême pauvreté, alors qu'on s'enrichissait énormément en s'appropriant leurs terres et leurs ressources.
Nous voyons les traités comme une attribution de compétences qui permet de donner un certain pouvoir à la base, aux gens qui sont directement touchés par les décisions prises. Cela va aider les Nisga'as, car c'est ce dont ils ont besoin. Ils ont besoin de certains pouvoirs et ils ont besoin de leurs terres et de leurs ressources pour pouvoir vivre comme ils le veulent et prendre des décisions à ce sujet.
Aussitôt que ce traité sera ratifié, tout le processus de mise en oeuvre sera mis en branle. Je le répète, ma plus grande crainte, c'est que la mise en oeuvre force les Nisga'as à reprendre les négociations et à s'adresser à nouveau aux tribunaux pour s'assurer que leurs traités soient mis en oeuvre comme ils le souhaitent. C'est ma plus grande crainte et j'espère que cela ne se produira pas. Je crois qu'en tant que Canadiens nous devrions respecter les traités, que les Canadiens ne se considèrent pas comme des conquérants et que, en fait, nous devons indemniser les gens pour ce que nous leur avons pris.
Les Indiens du Canada ont été visés par une décision reposant sur des fondements raciaux. Il s'agissait de la Loi sur les Indiens. Elle leur a pris leur langue, leurs terres, leur culture et même leurs enfants. Nous les avons expulsés de chez eux et, à la suite de négociations, nous leur avons dit, au fond, qu'ils pouvaient peut-être revenir dans le sous-sol, que nous leur ferions un petit peu de place à cet endroit-là, mais qu'ils ne devaient pas s'attendre à beaucoup. Je pense que c'est tout à fait honteux de notre part.
Je crois honnêtement que les Canadiens veulent réparer les torts causés, mais on ne pourra jamais effacer le passé. Nous ne pouvons pas redonner à ces gens leurs enfants et leurs terres, mais le moins que nous puissions faire, c'est leur rendre une partie de ce qu'ils possédaient.
Au niveau international, ce que le Canada a fait n'est pas du tout une folie, contrairement à ce que certains députés voudraient nous faire croire. Il y a des régions autonomes nordiques et il y a des régions autonomes au Danemark et en Finlande, qui sont basées sur le droit historique ancestral d'une culture différente à l'intérieur d'un pays. Ces gens ont leur propre parlement et certains ont leur propre drapeau, leur propre timbre et leur propre gouvernement, qui ont le pouvoir d'adopter des lois qui décideront du destin de leur peuple, mais n'ont aucun pouvoir de décision en ce qui concerne les affaires étrangères, la défense ou le système monétaire. Le gouvernement fédéral ou le gouvernement d'État doit financer la mise en oeuvre des mesures qu'il prend. Cela veut dire que les gouvernements du Groënland, des Îles Féroé et des îles d'Aland doivent trouver l'argent nécessaire pour mettre en oeuvre leurs propres lois.
Dans un des groupes d'îles, les îles d'Aland, la citoyenneté est déterminée par le lieu de naissance, la langue et la culture. Il faut parler la langue. Si on veut obtenir la citoyenneté, on doit rester là pendant au moins cinq ans et être capable de parler la langue de façon adéquate. Fait intéressant, on peut perdre sa citoyenneté si on quitte les îles pendant une période de cinq ans.
Il existe, dans le monde entier, diverses façons de reconnaître différentes cultures et différents groupes à l'intérieur d'une entité plus vaste.
Au niveau national, nous avons vu récemment la création du Nunavut, événement qui est directement lié aux traités et à la reconnaissance de cultures, de langues et d'histoires différentes à l'intérieur du Canada.
Le Yukon a récemment signé un accord général définitif pour entreprendre la mise en oeuvre des accords définitifs sur les revendications des 14 premières nations de ce territoire, dont huit ont déjà signé des accords d'autonomie gouvernementale. Ce sont des gouvernements qui ont un territoire, des lois et la capacité de décider de la façon d'éduquer leurs enfants et de leurs droits en tant que groupe. C'est le fruit d'une lutte amère au Yukon. C'est ma génération qui a vu les négociations concernant les revendications arriver à un point où nous pouvions vraiment changer les choses pour les premières nations.
Depuis que ces ententes ont été signées, le ciel ne nous est pas tombé sur la tête, le monde ne s'est pas effondré et, en fait, les premières nations et ceux qui n'appartiennent pas aux premières nations s'entendent mieux que jamais. La capacité d'un peuple de devenir maître de sa propre destinée a fait une différence énorme pour tout le monde au Yukon.
Cela se rapproche davantage du traité conclu avec les Nisga'as et concorde très bien avec le document de l'ancienne ministre des Affaires indiennes. Intitulé Rassembler nos forces: le plan d'action du Canada pour les questions autochtones, le document disait que nous préférions négocier plutôt que d'aller devant les tribunaux. Nous avons constaté à maintes et maintes reprises que chaque fois que les premières nations vont devant les tribunaux, cela est onéreux pour elles et pour leur population. Au lieu d'employer l'argent aux fins de l'éducation et de la santé, elles doivent le dépenser sur les procès, ce que personne ne voudrait faire.
Compte tenu des décisions très claires rendues par la Cour suprême, il est devenu de plus en plus important de négocier au lieu de laisser les tribunaux prendre des décisions touchant la vie des gens, des décisions ou des répercussions du genre de celles dont nous avons été témoins sur la côte est à la suite de la décision Marshall, peuvent être évitées. Les réactions vraiment néfastes et la violence de gens désespérés auraient pu être évitées si notre gouvernement avait été disposé à négocier avant que la situation atteigne le stade de la crise. Malheureusement, ce n'est certainement pas terminé sur la côte est.
Le jugement Marshall devrait nous donner un avertissement nous faisant comprendre qu'il est indispensable que nous respections des traités qui étaient fondés sur l'amitié et la paix. Ils ne reposaient pas sur la conquête de qui que ce soit. Ils se fondaient sur le principe du partage du pays. De toute évidence, les pèlerins et les colons qui sont venus en Amérique du Nord n'avaient pas l'intention de retourner en arrière.
Le traité prévoit que les Nisga'as peuvent légiférer, mais uniquement pour le peuple nisga'a. Ils ne peuvent taxer que des Nisga'as. Leurs lois ne s'appliquent pas aux gens qui ne font pas partie de leur peuple et ils ne peuvent exiger de taxes d'un non-Nisga'a. Des lois s'appliquant notamment aux déplacements sur les routes s'appliqueront aux résidents non nisga'as. Ce n'est là qu'une question de gros bon sens.
Nous traiterons de nation à nation avec les Nisga'as. Ils ne seront pas inférieurs à d'autres. Avec la disparition de la Loi sur les Indiens, ils ne seront plus considérés comme des gens ne méritant pas de faire leur propre testament, de tenir des cérémonies de mariage et de prendre même au sujet de leur vie les décisions les plus fondamentales, ce que bon nombre d'entre nous tiennent pour acquis mais ce qui leur a été refusé. Historiquement, on ne considérait même pas qu'ils étaient aptes à voter au pays.
Le traité est vraiment utile dans la mesure où il permet d'éliminer la Loi sur les Indiens et d'accorder aux Nisga'as le pouvoir de prendre leur vie en main et de vivre dans la dignité.
J'ai hâte que la mesure législative aboutisse au comité où nous pourrons l'analyser très étroitement avant de la ratifier.
Le Nouveau Parti démocratique soutient sans réserve la vision des Nisga'as, du gouvernement provincial et du gouvernement fédéral qui a consisté à négocier le traité afin de permettre à ces gens de vivre leur vie.
[Français]
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Brandon—Souris, L'agriculture; l'honorable députée de Beauséjour—Petitcodiac, Les pêches.
[Traduction]
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Madame la Présidente, c'est pour moi un honneur de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui pour participer à une occasion véritablement historique, le premier jour du débat sur le traité nisga'a.
J'aimerais remercier ma collègue, la députée du Yukon, pour ses observations très réfléchies, particulièrement en ce qui a trait à la situation internationale concernant les terres autochtones et à ce qui s'est produit dans d'autres administrations. Elle nous a montré que ce qui est en train de se passer au Canada est tout à fait conforme à ce qui se produit dans d'autres régions du monde.
Je dois dire, en ma qualité d'habitante de la Colombie-Britannique, que les dirigeants nisga'as sont réellement remarquables de par leur travail, leur endurance et leur patience, Cela fait plus de 20 ans qu'ils négocient le traité. Cela fait plus de 100 ans qu'ils ont entrepris ce processus, en dépit d'une oppression et de conflits énormes, pour en arriver au point où ils sont aujourd'hui. Le leadership qui a émané de la base et l'appui qu'elle a prodigué à ses dirigeants font de cet événement une occasion réellement historique.
En guise d'introduction, j'aimerais citer Joseph Gosnell, président du conseil tribal nisga'a. Hier, en arrivant à Ottawa, il a demandé au chef du Parti réformiste de veiller à ce que les députés réformistes arrêtent leurs allégations mensongères au sujet du traité nisga'a dont le Parlement est saisie en ce moment. Je trouve très significatif que le président du conseil tribal ait fait une telle déclaration. Il a dit:
Nous sommes conscients que le rôle de l'opposition officielle est de s'opposer aux initiatives du gouvernement...
Cela fait partie de notre tradition démocratique. Il poursuit en ces termes:
...et nous ne craignons pas un débat véritable au Parlement. Cependant, nous croyons également qu'il incombe à tous les parlementaires de présenter des renseignements exacts, au lieu de critiquer le traité conclu avec les Nisga'as en se fondant sur des allégations tout simplement inexactes.
Je voulais que cette déclaration soit consignée au compte rendu, car j'avais espéré qu'en ce premier jour de débat sur ce traité qui fera date, ce débat serait honnête, il susciterait certes des critiques et des questions, mais il reposerait sur des renseignements factuels et réels.
Au lieu de cela, le chef du Parti réformiste, le chef de l'opposition, a décidé de ne pas écouter les judicieuses paroles du président du conseil tribal des Nisga'as. Ce qu'il a décidé de faire, et ce que le député de Skeena, porte-parole du Parti réformiste en matière de questions autochtones a décidé de faire il y a moins d'une heure, c'est de poursuivre leur campagne de désinformation en se basant sur des allégations carrément inexactes. Ils ont choisi de poursuivre une campagne pour susciter la crainte et la division au sein de la collectivité.
Les députés du Parti réformiste devraient avoir honte d'agir ainsi. Ils devraient avoir honte de ne pas s'en tenir aux faits et de refuser de tenir un débat honnête à la Chambre. Ce qu'ils ont décidé de faire aujourd'hui revient à un outrage au Parlement. Je voudrais que les choses ne soient pas ainsi, mais il semble que ce soit le cas.
C'est une chose que de débattre une question et de faire des critiques intelligentes, mais c'en est une tout autre que de délibérément fabriquer et transmettre de faux renseignements, des allégations entièrement fausses au sujet de ce traité.
Je voudrais juste passer en revue certains propos qu'a tenus le chef de l'opposition ce matin. Il a dit que les réformistes cherchaient uniquement à faire en sorte que de meilleures relations soient nouées avec la collectivité autochtone et entre ses membres. Il a ajouté qu'il n'était pas dans l'intérêt à long terme des Nisga'as de se doter de ce traité. Le député de Skeena a répété ces propos.
Ensuite, le chef de l'opposition a déclaré que ce traité perpétuait une façon de faire qui date du XIXe siècle. Je dirais que c'est la Loi sur les Indiens qui constitue une loi distincte pour un peuple distinct.
M. Mike Scott: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je crois avoir entendu la députée dire de moi au cours de son intervention que je tentais délibérément de faire une déclaration trompeuse ou de travestir les faits. Je vous renvoie au Beauchesne qui précise que ce langage n'est pas autorisé à la Chambre des communes. Je vous demanderais de bien vouloir demander à la députée de retirer ses paroles et de s'excuser.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Si la députée de Vancouver-Est a effectivement utilisé ces mots, je lui demanderais de bien vouloir les retirer.
Mme Libby Davies: Madame la Présidente, je ne crois pas avoir utilisé ces mots. Si c'est le cas, je vous assure que je n'avais nullement l'intention d'avoir recours à des expressions contraires aux usages de la Chambre. Cependant, je suis d'avis que des renseignements inexacts ont été présentés à la Chambre et c'est consigné. Je n'avais pas du tout l'intention d'utiliser des expressions non parlementaires et je retire toute parole qui pourrait être considérée non parlementaire.
J'aimerais revenir à certains des arguments qui ont été présentés ce matin par le Parti réformiste. L'un de ces arguments était que l'on ne faisait que perpétuer une approche utilisée au XIXe siècle. Je tiens à dire très clairement que ce que nous avons observé dans le passé sous le régime de la Loi sur les Indiens correspond sûrement à une telle approche.
Ce traité représente plutôt un effort véritable de la part de toutes les parties concernées, les Nisga'as, le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral, pour produire un traité moderne dans les limites de la Constitution du Canada, dans les limites des lois du Canada, pour donner aux Nisga'as l'autodétermination et un sentiment de fierté et d'avenir.
Le chef du Parti réformiste déforme à mon avis la réalité en soutenant le contraire. Nous avons également entendu les porte-parole du Parti réformiste soutenir ce matin que ce traité deviendra le modèle unique et universel pour tous les traités à venir, dont une cinquantaine en Colombie-Britannique et je ne sais combien d'autres dans le reste du Canada. C'est complètement faux. Cela n'a été dit nulle part.
Nous avons suivi un très bon processus pour en arriver à ce traité et j'espère qu'il sera reproduit et servira de modèle pour d'autres traités. Cependant, le traité lui-même est un document qui vaut par lui-même et il n'est écrit nulle part dans ce traité ni dans aucune autre politique ni aucune autre loi qu'il sera reproduit. Je tiens à dissiper cette impression.
Nous avons également entendu dire que le traité avec les Nisga'as permettra une répétition de la situation très tragique que nous avons observée dans le secteur de la pêche sur la côte est. Là encore, le Parti réformiste et la position qu'il exploite à ce sujet font complètement fausse route. Le Parti réformiste induit les gens en erreur et présente des renseignements qui ne se vérifient aucunement. En réalité, le traité dit clairement que, si d'autres groupes ne peuvent pêcher pour une raison quelconque, les mêmes dispositions s'appliqueront à tous. De toute évidence, cette information est complètement erronée.
Le député de Skeena a dit que le traité allait coûter très cher. Sauf erreur, il a avancé le chiffre de 1,2 milliard de dollars. Je me trompe peut-être un peu, mais c'est du même ordre de grandeur. Je tiens à dire que, là encore, l'information est tout simplement inexacte.
Le traité prévoit un déboursé fédéral non récurrent de 253 millions de dollars sur 15 ans en faveur des Nisga'as. Il y a également des contributions du gouvernement de la Colombie-Britannique: des terres d'une valeur de 108,6 millions de dollars et un manque à gagner de 37,5 millions de dollars en recettes provenant de l'exploitation forestière. Une fois de plus, l'argumentation est fausse.
On nous a dit aussi que l'accord a été conclu dans le secret, et que le processus s'est déroulé derrière des portes closes. Ce traité a fait l'objet de nombreuses audiences publiques par divers comités. Le seul comité parlementaire de la Colombie-Britannique a tenu plus d'une quarantaine d'audiences publiques. Quiconque voulait se faire entendre a eu la possibilité d'exprimer son point de vue sur le traité. Là encore, c'est de la désinformation.
En fin de compte, nous avons ici un choix à faire: négocier des traités de bonne foi, dans un monde moderne, et reconnaître les autochtones comme des citoyens à part entière, ou bien perpétuer le chaos et les procès. Je crois que la plupart des députés ont pris la bonne décision. Il est déplorable que le Parti réformiste ait choisi de ne pas faire ce que dicte l'honneur.
M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Madame la Présidente, je remercie la députée pour son intervention, pour sa réflexion toujours intelligente et perspicace, pour l'intérêt qu'elle manifeste envers ce dossier. Elle défend une opinion qui circule en Colombie-Britannique et qui diffère de celle que répètent sans cesse les réformistes concernant ce projet de loi et d'autres mesures ayant trait aux autochtones et aux premières nations.
Comme Britanno-Colombienne et comme députée, elle se prononce sur les dossiers au nom de ses électeurs, mais aussi au nom de tous les habitants de la Colombie-Britannique. Je le dis, parce que les réformistes disent constamment qu'ils se préoccupent des questions féminines, qu'ils parlent au nom des femmes et qu'ils veulent protéger les droits des femmes. Permettez-moi de citer quelques articles du traité concernant les droits des femmes et demander à la députée si elle approuve les dispositions de la Charte et du traité, ou la position du Parti réformiste.
Le préambule du projet de loi stipule ce qui suit:
Attendu que l'Accord définitif nisga'a déclare que la Charte canadienne des droits et libertés s'applique au gouvernement nisga'a concernant toutes les questions relevant de sa compétence, eu égard au caractère libre et démocratique du gouvernement nisga'a, comme le stipule l'accord;
Aux termes de l'article 28 de la Charte, indépendamment des autres dispositions de la présente charte, les droits et libertés qui y sont mentionnés sont garantis également aux personnes des deux sexes. De même, l'article 35 de la Loi constitutionnelle contient une disposition sur les droits issus des traités autochtones. En ce qui concerne la protection des droits des femmes autochtones, le paragraphe 35(4) prescrit ce qui suit:
Indépendamment de toute autre disposition de la présente loi, les droits—ancestraux ou issus de traités—visés au paragraphe (1) sont garantis également aux personnes des deux sexes.
La députée approuve-t-elle ces dispositions protégeant les femmes ou le Parti réformiste qui semble vouloir faire peur aux femmes autochtones et aux autres femmes de la Colombie-Britannique?
Mme Libby Davies: Madame la Présidente, je remercie le député d'en face pour ses observations bien réfléchies. De toute évidence, il a mené d'assez grandes recherches sur les questions soulevées par les députés réformistes. Ceux-ci laissent encore une fois entendre, haut et fort, que le traité mine les droits des femmes nisga'as. Il n'y a rien de plus faux.
Je suis parfaitement d'accord avec ce que le député a dit au sujet de la Constitution canadienne, de la Charte des droits et libertés et du traité lui-même, qui reconnaît de façon encore plus nette la citoyenneté des hommes et des femmes nisga'as. Voilà à quoi rime le traité. Essentiellement, il vise à reconnaître la citoyenneté et l'égalité pleine et totale des Nisga'as. Si les réformistes ne peuvent comprendre cela, ils devraient consulter de nouveau leurs recherchistes ou les gens qui leur fournissent leurs renseignements et vérifier les faits.
Lorsque je les ai entendus prétendre pour la première fois que le traité nisga'a minait les droits des femmes, j'en ai été bouleversée. Je me suis demandé si cela pouvait vraiment être le cas. Puis, j'ai décidé de vérifier moi-même ce qu'il en était. Naturellement, les réformistes faisaient fausse route.
Il nous faut bien préciser que les droits des femmes autochtones aux termes du traité nisga'a sont totalement protégés. Le traité lui-même confirme la citoyenneté et la participation de tous les Nisga'as.
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Madame la Présidente, la députée voudrait que le débat porte sur les faits. Elle a mentionné l'oppression dont ont été victimes les Nisga'as. J'aimerais bien que la députée présente à la Chambre des preuves illustrant l'oppression dont les Nisga'as ont été victimes sous les régimes des gouvernements néo-démocrates provinciaux, des gouvernements libéraux fédéraux et des gouvernements conservateurs fédéraux qui ont gouverné le pays et cette province pendant plusieurs années.
Mme Libby Davies: Madame la Présidente, si nous en sommes là aujourd'hui, c'est à cause du sort qui a été réservé aux autochtones dans le passé. Cet accord revêt une très grande importance historique parce qu'il met un terme à une façon de légiférer et à une administration coloniale paternaliste qui opprimaient les autochtones de notre pays. Grâce au traité, cette façon de faire sera chose du passé, et les Nisga'as pourront se tourner vers l'avenir.
M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Madame la Présidente, je partagerai mon temps avec un autre député du parti ministériel. Je suis heureux de participer à ce débat. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt et de plaisir les remarques de la très sérieuse députée de Vancouver-Est.
En réalité, le traité conclu avec les Nisga'as n'est pas et n'a jamais été un modèle. Les députés du parti ministériel ont dit pendant six mois au premier ministre de la Colombie-Britannique qu'il ne s'agit pas d'un modèle et qu'il repose sur ses propres données historiques. Celles-ci sont très réconfortantes. Les Nisga'as ont effectué à bord de leurs canots un long périple qui les a menés jusqu'à Victoria. Ils ont attendu un siècle et ils ont négocié pendant 20 ans de bonne foi, dans un bon état d'esprit et en faisant preuve de beaucoup de patience et de dignité.
Je pense que nous devons rendre hommage aux négociateurs des Nisga'as et à Joe Gosnell, l'une des personnalités les plus exceptionnelles de la vie publique moderne, ainsi qu'aux négociateurs du gouvernement. Ce ne sont pas tous les mêmes pour tous les traités. J'ai rencontré les négociateurs du gouvernement dans ce cas en particulier, et j'ai été impressionné par leur dévouement, leur ardeur au travail et leur ouverture d'esprit.
Le traité nisga'a est un cas spécial. À mon avis, il méritait un traitement plus rapide que celui qui lui a été accordé. Je pense qu'un délai d'un an après la conclusion du traité est beaucoup trop long, compte tenu du temps déjà consacré dans le passé à cette affaire.
Quelle sont les caractéristiques si distinctives de ce traité? L'une d'elle est l'aspect constitué par la négociation, et j'en ai déjà parlé et j'aurai l'occasion de le faire de nouveau, la négociation de bonne foi et dans un esprit de bonne volonté. Ces expressions sont empruntées au droit international. Le tribunal international les a utilisées. La Cour suprême du Canada l'a fait aussi dans un arrêt récent. Mais c'est l'essence même du processus continu de négociation des quelque 50 traités qui restent à venir en Colombie-Britannique. Nous nous attendons à ce que les parties, les pouvoirs publics et les autochtones négocient de bonne foi. C'est ce qu'ont fait les Nisga'as.
Nous nous attendons également à la tenue d'audiences publiques en bonne et due forme, soit en temps opportun à l'endroit qui convient. La députée de Vancouver-Est a décrit bien mieux que je ne pourrai jamais le faire le caractère approfondi des audiences, compte tenu de l'éloignement de la région en cause. Ce n'est pas une ville que l'on peut traverser en taxi en quelques minutes. Le Comité des affaires autochtones et les autres ont accompli un travail remarquable.
Je tiens en outre à souligner le fait qu'aucune demande d'indemnisation n'a été présentée devant les autorités ayant négocié ni devant le comité de la Chambre. C'est un point capital.
Je tiens à souligner de nouveau ce point qui se trouve dans le traité et à ajouter que les Nisga'as ont fait preuve d'une retenue admirable. Ils ont accepté et inclus dans le texte que la Constitution et la Charte des droits s'appliquent.
Si quelqu'un a des doutes sur cet aspect particulier et veut être rassuré, qu'il sache que le caucus gouvernemental de la Colombie-Britannique, les sénateurs et les députés fédéraux avaient demandé à l'ancienne ministre et à son secrétaire parlementaire que cet aspect soit confirmé hors de tout doute, même de la part de la plus déraisonnable des personnes. C'est pourquoi cela est expressément mentionné dans le projet de loi. En passant, les mêmes garanties ont été incluses de bonne grâce par la ministre dans le projet de loi C-49, sur l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des premières nations, à la demande de la Colombie-Britannique, de députés et de sénateurs.
Je voudrais rendre hommage à l'ancienne ministre ainsi qu'à son secrétaire parlementaire, qui est encore avec nous et qui suit attentivement le débat.
La question constitutionnelle a été soulevée. À mon avis, l'application de la Constitution au traité nisga'a ne donne prise à aucune critique parce que, comme je l'ai expliqué, on a très bien fait les choses à cet égard. Il a par ailleurs été question des articles 25 et 35 de la Charte.
La situation me rappelle le juge en chef Bryan, qui était un juge de l'époque médiévale. Lorsque les gens lui posaient une question au sujet d'une loi, il répliquait: «Vous n'avez pas à me dire de quoi il retourne, j'ai écrit la loi. Je sais ce qu'elle contient». Il a été souligné que le sénateur Perrault et moi avons suggéré que cette précision soit incluse au moment de la rédaction du texte original.
Cependant, il faut préciser que les articles 25 et 35 ne créent aucun nouveau droit. Ce sont des clauses d'exemption. Elles protègent des droits qui existent déjà, qu'il s'agisse de règles de droit coutumier ou de droits issus de traités, et rien d'autre. Il existe une expression latine, ex abundanti cautela, ce qui signifie simplement répéter une chose «par excès de prudence». Par sens pratique, et dans l'esprit de la common law, nous attendrons que des causes concrètes permettent de définir la teneur et la portée de ces droits.
On a parlé du paragraphe 35(3) et de la question de la modification déguisée. Il s'agissait d'une modification apportée à la charte un an après son adoption. J'étais à l'extérieur du pays à l'époque, mais à mon retour, je me souviens d'en avoir discuté avec le nouveau ministre de la Justice, qui succédait à l'actuel premier ministre. Je lui ai dit que certains traités avaient des répercussions imprévisibles et lui ai demandé si cela posait un problème. Nous étions d'accord pour dire qu'il serait très déraisonnable d'interpréter cette disposition comme une manière de modifier la Constitution. Cela aurait été une interprétation absurde, mais cela nous avait traversé l'esprit.
C'est en réponse à cette sorte de craintes, aussi déraisonnables qu'elles puissent être, que le caucus de la Colombie-Britannique a passé trois ou quatre mois à discuter avec la précédente ministre des Affaires indiennes et son secrétaire parlementaire l'ajout de dispositions voulant que le traité, nonobstant le fait que ce soit déjà explicite en vertu de la loi fédérale de mise en oeuvre, soit légalement assujetti à la Constitution et à la Charte des droits.
C'est prévu. Ça fait partie des travaux préparatoires dont les tribunaux doivent tenir compte dans l'interprétation qu'ils feront des traités. On a dit au cours du débat parlementaire sur ce projet de loi—non seulement je l'ai dit, mais aussi, je pense, tous les députés ministériels qui ont pris la parole avant moi ainsi que des députés néo-démocrates et d'autres partis—que l'intention du Parlement était de faire en sorte que le traité soit assujetti à la Constitution et à la Charte des droits. C'est déjà clairement précisé, mais c'est aussi l'intention du Parlement.
Je reviens maintenant à des enjeux de plus grande portée. Il s'agit d'un processus historique pour la Colombie-Britannique. C'est le premier traité conclu en Colombie-Britannique. Nous sommes chanceux que les gens concernés, les Nisga'as, aient été raisonnables, qu'ils aient négocié de bonne foi. Je m'attends à un comportement semblable de la part de ceux qui participeront à la négociation d'autres traités. C'était un modèle de négociation.
L'autre aspect, c'est que ce n'est pas simplement une négociation de bonne foi. Il y a également toute cette notion de bon voisinage. C'est une expression que la Cour d'appel britannique a rejetée en 1935 et selon laquelle on doit traiter ses propres droits comme on voudrait qu'ils soient appliqués si on était un voisin. La cour mondiale a repris la notion de bon voisinage. Cela fait également partie, soit dit en passant, du droit civil français, mais selon moi, la notion revient, je le répète, dans le traité nisga'a.
On comprend ici qu'il n'existe pas de droits absolus dans le vide. Tous les droits existent dans un contexte social. On reconnaît qu'il est peut-être nécessaire d'équilibrer ces droits avec d'autres droits. Je pense que c'est au coeur du processus de négociation avec les Nisga'as.
Il est question de notions d'équité comparative lorsque de bons citoyens, de bons voisins, travaillant ensemble essaient de régler leurs différends par la négociation. S'il y a des différends qu'on ne peut surmonter, du fait qu'on applique la Constitution et la Charte, on peut alors compter sur les principes constitutionnels, sur l'application régulière de la loi, y compris l'examen judiciaire.
Je m'attends à ce que les tribunaux soient saisis longtemps de traités comme celui-ci. Je ne veux pas dire par là que cela donnera lieu à des litiges. Je veux dire que les parties chercheront à obtenir l'avis et l'interprétation des tribunaux, alors qu'il est question de ce qui est au coeur de la nation britannique d'équité, c'est-à-dire un processus continu et une collaboration entre les parties pour essayer d'interpréter des principes généraux dans l'intérêt d'une collectivité plus large qui, au Canada, comprend ce qu'on appelle les deux nations fondatrices qui sont, en fait, établies depuis relativement peu de temps au Canada, les premières nations initiales et d'autres.
C'est dans cet esprit que j'accueille avec plaisir ce débat et les assurances de tant de députés qui sont intervenus dans le débat pour dire qu'ils considèrent qu'il s'agit là d'un signe encourageant. Il n'y a aucune raison d'avoir peur. Il s'agit d'un processus d'engagement complet de la collectivité dans lequel nous nous sommes lancés.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Madame la Présidente, le député qui me précède a soulevé plusieurs questions relatives à la Loi constitutionnelle et à la Charte des droits et libertés. Le paragraphe 52 (1) de la Loi constitutionnelle de 1982 dispose très précisément ceci:
La Constitution du Canada est la loi suprême du Canada; elle rend inopérantes les dispositions incompatibles de toute autre règle de droit.
Je crois savoir que la Constitution du Canada s'applique au traité nisga'a et que la Charte des droits et libertés s'applique elle aussi au traité nisga'a. Nous sommes en mesure de présenter différents arguments tendant à le confirmer, et le parti réformiste l'a fait à diverses reprises.
Je voudrais que le député nous dise si, à son avis, la Charte des droits et libertés et la Loi constitutionnelle s'appliquent effectivement à ce traité.
M. Ted McWhinney: Madame la Présidente, je me félicite de pouvoir confirmer de façon catégorique au député qu'il a raison. La Constitution et la charte s'y appliquent et rendraient inopérantes les dispositions incompatibles de toute autre règle de droit.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Madame la Présidente, en ce qui concerne la question qui vient d'être posée au député de Vancouver Quadra, j'aimerais citer un article publié aujourd'hui dans le National Post par un homme que le député de Vancouver Quadra connaît, Mel Smith, ancien conseiller constitutionnel principal auprès du gouvernement de la Colombie-Britannique, fonction qu'il a exercée pendant 15 ans. À propos de l'accord, il écrit notamment:
Il représente une diminution importante des pouvoirs législatifs conférés aux gouvernements supérieurs par la Constitution canadienne au profit d'un nouveau genre de gouvernement non reconnu dans la Constitution.
Pour être plus précis, l'accord Nisga'a donnerait préséance, du point de vue constitutionnel, aux lois nisga'as dans au moins 17 secteurs qui relèvent normalement des provinces. Ces secteurs comprennent l'éducation, [...] l'enseignement supérieur, [...] la prestation des services de santé, les services aux enfants et aux familles, les métiers et les professions, [...] l'utilisation des terres, l'enregistrement foncier, la pêche nisga'a, les plantes aquatiques et la faune. La liste ne s'arrête pas là.
Il faut ajouter à la diminution des pouvoirs législatifs le fait que ces droits du gouvernement autochtone ne pourront pas être retirés plus tard [...] et que les responsables du traité ont dépassé les limites de la Constitution. À cet égard, ils ont cédé à tout jamais le droit constitutionnel de l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique d'adopter des lois qui s'appliquent à la grandeur de la province. Ils n'ont tout simplement pas le droit de faire cela.
Comment le député de Vancouver Quadra répondrait-il à cet argument éclairé présenté par M. Smith, ancien conseiller constitutionnel principal auprès du gouvernement de la Colombie-Britannique?
M. Ted McWhinney: Madame la Présidente, je remercie le député de sa question. Je connais très bien M. Smith et le respecte en tant qu'ancien conseiller constitutionnel auprès de deux premiers ministres de la Colombie-Britannique.
Le fait est que le traité nisga'a donne lieu à une délégation des pouvoirs, mais il ne peut pas annuler la répartition des pouvoirs prévue aux articles 91 et 92 de la Constitution et les deux niveaux de gouvernement créés en vertu de ces articles. Il ne crée pas un troisième niveau de gouvernement. Les Nisga'as n'ont jamais demandé cela, et le traité ne crée pas un troisième niveau de gouvernement.
L'hon. Ethel Blondin-Andrew (secrétaire d'État (Enfance et Jeunesse), Lib.): Madame la Présidente, je suis très honorée en tant que députée de Western Artic de participer à cet important débat sur le projet de loi visant la ratification de l'Accord définitif nisga'a.
Ce que nous allons ratifier, c'est la réconciliation du Canada et du peuple nisga'a, un peuple dont la culture, la langue, les terres et le mode de vie remontent avant la création du Canada. En fait, le peuple nisga'a et sa culture remontent à des dizaines de milliers d'années, aux tout débuts de la mémoire de l'homme.
Depuis la première tentative d'intrusion des colons européens il y a 150 ans, les Nisga'as ont patiemment fait en sorte de faire reconnaître et respecter leur droit à leur existence collective. Cet accord leur reconnaît les droits—modestes et cependant fondamentaux—nécessaires pour assurer leur existence en tant que peuple, leurs droits à la terre, à l'autonomie gouvernementale et à une base économique.
Comme beaucoup d'autres premières nations, les Nisga'as ont essayé d'arriver à un partenariat et à un compromis avec la fédération canadienne. La route a été longue et difficile. Cet accord symbolise la volonté du Canada d'accepter les Nisga'as en tant que partie intégrante du Canada et la volonté des Nisga'as de se joindre au Canada en tant que partenaires.
Pendant plus d'un siècle, le peuple nisga'a a patiemment et pacifiquement défendu ses droits. Ce faisant, les Nisga'as ont combattu pour ce pays. Ils ont attendu qu'on leur accorde le droit de vote. Ils ont attendu qu'on leur reconnaisse le droit de s'exprimer dans leur propre langue et de s'adonner librement à leurs traditions spirituelles. Ils ont dû se battre pour avoir le droit de contrôler l'éducation de leurs enfants. Enfin, le moment est venu pour le Parlement du Canada de reconnaître, d'accepter et de saluer leur existence à titre de nation et de partenaires dans cette fédération en ratifiant cet accord.
Autrement dit, cet accord constitue une reconnaissance du droit fondamental de la nation nisga'a à survivre en tant que peuple et à continuer d'occuper une place unique au sein de la grande famille humaine. C'est là un droit protégé par les instruments de défense des droits de la personne. Puisque toutes les nations du monde ont évolué, nous devons maintenant reconnaître que le colonialisme constitue une violation fondamentale du droit des peuples à l'existence. Nous comprenons aujourd'hui que les droits collectifs à la terre et à l'autonomie gouvernementale font partie intégrante du droit des premières nations à exprimer leur identité collective et leur existence comme peuple au sein du cadre constitutionnel du Canada.
Ce sont des droits auxquels tous les peuples du monde peuvent aspirer. Tous les peuples ont droit à une certaine forme d'autonomie gouvernementale et à un certain développement économique et social.
Dans la lutte pour la reconnaissance des droits des peuples autochtones, les Nisga'as occupent une place unique et bien spéciale dans l'histoire du Canada.
Nous devons nous montrer reconnaissants envers la nation nisga'a pour son courage, sa persistance et son esprit de direction dans la lutte pour les droits autochtones au pays. Les Nisga'as ont joué un rôle important dans le développement politique du Canada. C'est la nation nisga'a qui a pris contact avec le premier gouvernement colonial de la Colombie-Britannique en 1887 pour tenter d'obtenir la reconnaissance de ses titres fonciers traditionnels et proposer la négociation d'un traité. Ce sont les Nisga'as qui ont demandé au conseil privé Britannique en 1913 d'établir leurs droits fondamentaux. Ce sont encore les Nisga'as qui ont tenu le fort au cours des années sombres de l'histoire du Canada alors que les premières nations n'avaient aucun droit juridique devant les tribunaux. Ce sont les Nisga'as qui ont saisi la première occasion qui s'est présentée pour reprendre leur quête de justice. Lorsque ces lois discriminatoires furent finalement abrogées, ce sont les Nisga'as qui ont consacré du temps et des ressources, mais surtout toutes leurs énergies afin que la cause Calder soit enfin entendue par la Cour suprême du Canada, en 1969.
J'étais une toute jeune fille la première fois que j'ai été frappée par le pouvoir et la conviction des Nisga'as. Ce fut un point tournant pour moi que de constater que les autochtones n'étaient pas des gens sans pouvoirs, sans abris, sans lois et sans leaders. J'ai senti cette force dans les paroles de Frank Calder, grand leader nisga'a et grand leader canadien.
Grâce aux efforts des Nisga'as et à la cause Calder, le système juridique canadien a finalement reconnu que les peuples autochtones ont des titres ancestraux leur conférant des droits collectifs traditionnels sur leurs terres. C'est en réponse à la décision Calder que le gouvernement fédéral a établi une politique moderne de revendication territoriale, de façon à créer un processus pour enfin trouver des accommodements avec les premières nations de ce pays.
Un grand nombre d'accords fructueux ont été conclus en vertu de la politique fédérale sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale.
L'accord traite des deux aspects d'une façon juste et équilibrée. Les ententes modernes telles que celle-ci permettent aux premières nations de participer de façon concrète au développement politique, économique et social du pays. Ces accords permettent aux premières nations de vivre au Canada non pas comme des peuples conquis, mais bien comme des partenaires à part entière au sein de la Confédération.
C'est maintenant au tour des Nisga'as de profiter de ces politiques et de voir certains droits fondamentaux être enfin reconnus. Il convient de souligner que cet accord permet d'atteindre l'objectif très important qui consiste à fournir un cadre juridique clair et précis pour l'exercice des droits des Nisga'as. Il le fait d'une façon qui complète et respecte les compétences fédérales et provinciales, tout en accordant une certaine autonomie gouvernementale locale aux Nisga'as relativement aux questions qui les touchent directement. Les terres des nisga'as cesseront d'avoir le statut de réserves en vertu de la Loi sur les Indiens. L'Accord définitif nisga'a prévoit que les Nisga'as en seront propriétaires en fief simple et qu'elle seront enregistrées dans le cadre du système provincial d'enregistrement.
Dans le domaine des ressources naturelles, l'Accord définitif nisga'a accorde aux citoyens nisga'as le droit de prendre du poisson et d'autres ressources dans le respect des principes de conservation et des lois adoptées pour protéger la santé et la sécurité publiques.
Les Nisga'as pourront légiférer en matière d'évaluation et de protection environnementale. Les lois fédérales et provinciales l'emporteront en cas de conflit. Afin d'éviter le double emploi, l'accord prévoit la négociation d'un accord d'harmonisation. En attendant, les processus d'évaluation provinciaux et fédéraux continuent à s'appliquer.
Le gouvernement nisga'a aura le pouvoir d'adopter des lois dans les domaines touchant le gouvernement, la citoyenneté, la langue et la culture nisga'as. Le gouvernement nisga'a sera obligé de consulter tous les non nisga'as résidant sur les terres nisga'as sur toutes décisions touchant ces derniers directement ou de façon majeure.
Je ne veux pour preuve de ce que nous avons accompli que le fait qu'il est précisé explicitement dans l'accord qu'il constitue le règlement définitif et complet de la question des titres ancestraux des Nisga'as et autres droits protégés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Pourrait-on faire une démonstration plus claire de la certitude juridique et d'un règlement définitif?
Comme on peut le voir d'après ces quelques exemples, l'Accord définitif nisga'a établit un équilibre délicat entre droits et pouvoirs. Cet équilibre est le résultat d'un processus détaillé et exhaustif de négociation qui a débuté en 1976, quand le gouvernement fédéral a accepté initialement la demande de négociation des Nisga'as. Toutes les dispositions de l'Accord définitif nisga'a ont fait l'objet d'un examen attentif et de discussions de la part des représentants des Nisga'as, du gouvernement de la Colombie-Britannique et du gouvernement du Canada.
Ma collègue, l'ancienne ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, et le ministre actuel ont tous deux examiné soigneusement l'accord et en ont recommandé la ratification par le Parlement. En tant que parlementaires et en tant que Canadiens, nous pouvons tous être fiers de cet accord et en appuyer la ratification sans hésitation.
Les Nisga'as ont confiance que le gouvernement du Canada respectera l'accord et ouvrira un nouveau chapitre de notre histoire commune. Nous devons répondre en ratifiant l'accord et en nous efforçant de l'appliquer fidèlement en partenariat avec les Nisga'as.
L'accord pose des fondements pragmatiques et solides pour l'avenir. Il renferme les ingrédients essentiels des nouvelles relations auxquelles le gouvernement s'est engagé dans le document intitulé Rassembler nos forces, soit notre réponse au rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones.
L'Accord définitif nisga'a est le tout dernier d'une série de règlements importants conclus avec les premières nations d'un bout à l'autre du pays.
Bien que la situation de chacune des premières nations soit unique, chaque accord fructueux comme celui-ci encourage les premières nations et les gouvernements de tous les coins du pays à engager le dialogue et à s'accommoder tandis que nous bâtissons ensemble le pays.
J'exhorte tous les parlementaires à appuyer la ratification de l'Accord définitif nisga'a, à en reconnaître la force dans la diversité et à saluer l'existence collective des Nisga'as au sein du Canada. Je félicite les Nisga'as et je leur adresse mes meilleurs voeux pour l'avenir.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Madame la Présidente, on accuse constamment les réformistes de déformer les faits. J'invite la députée à lire le chapitre 16 sur la taxation, à la page 235 de l'accord qu'elle a peut-être en face d'elle. Elle n'a peut-être pas l'accord sous les yeux ou elle ne le connaît peut-être pas, mais ce n'est pas le cas des réformistes. Or, à la page 235, le paragraphe 3 du chapitre 16 est le suivant:
De temps à autre, le Canada et la Colombie-Britannique peuvent, ensemble ou séparément, négocier avec la Nation Nisga'a et tenter de parvenir à un accord sur:
a. la mesure, s'il en est, dans laquelle le Canada ou la Colombie-Britannique attribuent au gouvernement Nisga'a Lisims ou a un gouvernement de village Nisga'a le pouvoir de taxation directe des personnes, autres que les citoyens Nisga'a, sur les Terres Nisga'a;
Il s'agit là de la taxation sans représentations, peu importe la façon de lire. Ce sont les termes mêmes de l'accord. Il n'est pas question d'une interprétation du Parti réformiste. Je viens de lire les termes de l'Accord.
La député approuve-t-elle ce principe de la taxation sans représentation, ou partage-t-elle notre avis que cet accord devrait être modifié de manière à supprimer cet article?
L'hon. Ethel Blondin-Andrew: Madame la Présidente, je ne pense pas qu'il y a lieu de modifier l'accord. À mon avis, le député devrait se réveiller. On peut se montrer tatillon sur divers aspects de l'accord. Le député devrait lire la liste des faits et des mythes. Les députés d'en face ont fait un certain nombre d'allégations. Tout est écrit; il suffit de lire l'accord. Il y est aussi question de la taxation.
Je pense sincèrement que les intentions du député ne sont pas aussi louables qu'elles le devraient. Si le député passait du temps avec les Nisga'as, ils lui présenteraient des arguments convaincants, comme ils m'en ont présenté à moi, qui suis autochtone.
Au fil des ans, j'ai beaucoup appris des Nisga'as. Bien des gens dans notre pays ont appris énormément des Nisga'as, mais pas le député qui les représente.
M. Mike Scott: Madame la Présidente, la députée prétend que c'est se montrer tatillon que de dénoncer la taxation sans représentation et je trouve cela inacceptable. J'invite la députée à relire, par exemple, l'histoire de la guerre d'indépendance des États-Unis. Elle constatera que c'est ce qui a amené les Américains qui vivaient dans cette colonie que constituait l'Amérique à s'affranchir de la Grande-Bretagne. C'est ce qui les a poussés à devenir indépendants. Je puis dire qu'il y a un principe fondamental de la démocratie selon lequel il ne saurait y avoir de taxation sans représentation. La députée n'est pas très bien renseignée si elle considère que c'est tatillon de dénoncer pareille situation.
La députée estime-t-elle que le principe de taxation sans représentation inclus dans cet accord est acceptable? Pourrait-elle simplement répondre à la question?
L'hon. Ethel Blondin-Andrew: Madame la Présidente, ce que je ne connais pas très bien, c'est ce qu'on appelle les principes et les enseignements du Parti réformiste. Je n'ai jamais fréquenté l'école de Mel Smith, qui dicte aux réformistes la façon dont ils doivent traiter les autochtones. Je suis ravie d'avouer que je n'ai pas ces connaissances et que je ne les posséderai jamais.
Je suis également ravie de confirmer qu'il y a eu de nombreuses consultations. Je suis contente que le gouvernement appuie l'Accord nisga'a. Si le député avait le sens de la réalité, il l'appuierait, lui aussi.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Madame la Présidente, j'ai énormément de respect pour la ministre et députée des Territoires du Nord-Ouest, mais malheureusement, pas pour sa contribution au débat d'aujourd'hui, puisqu'on lui a posé deux questions et qu'elle a refusé d'y répondre.
La question est pourtant fort simple. Est-elle d'accord sur le principe énoncé au chapitre 16 de l'accord qui prévoit la taxation sans représentation? Croit-elle qu'il s'agit-là d'un principe que nous devrions insérer dans les lois qui régissent les citoyens canadiens?
L'hon. Ethel Blondin-Andrew: Madame la Présidente, la nation nisga'a s'est vue accorder certaines responsabilités et certains pouvoirs. Sinon, à quoi aurait servi tout cet exercice? Pourquoi négocier un accord, s'il ne prévoit aucun changement et ne fait que maintenir le statu quo?
Les pouvoirs fiscaux du gouvernement et de la province ne sont pas touchés par les pouvoirs accordés aux Nisga'as et aucun nouveau pouvoir fiscal n'est confié au gouvernement nisga'a dans l'accord définitif. Même les municipalités et même les conseils scolaires ont le droit de prélever des taxes. Cela veut-il dire qu'il faut ramener ce document, l'accord nisga'a, au niveau des pouvoirs confiés à un conseil scolaire ou à une municipalité? C'est l'opinion du député et il a bien le droit de la défendre, mais je ne la partage certainement pas.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Madame la Présidente, je suis très heureux de prendre part à ce qui sera, peut-être, un âpre débat, mais qui, je l'espère, s'avèrera en définitive très utile et constructif.
[Français]
C'est pour moi chaque fois un grand plaisir de prendre la parole à la Chambre. Malheureusement, mon français n'est pas parfait.
[Traduction]
Le projet de loi C-9 est une mesure portant mise en vigueur de l'Accord définitif nisga'a, et mon collègue néo-écossais de la circonscription de South Shore a exposé très éloquemment la position de notre parti sur ce projet de loi.
Je suis heureux d'avoir l'occasion d'intervenir sur quelques-unes des questions concernant ce très historique accord. Je félicite la députée qui vient de parler, qui représente la circonscription de Yellowknife et qui a prononcé un discours très passionné et très instructif. Je sais qu'elle se sent tout à fait concernée par ce débat et très liée aux Nisga'as, en raison de ses origines, et je respecte beaucoup son travail sur ce projet de loi et à la Chambre.
Les Nisga'as vivent en Amérique du Nord depuis des temps immémoriaux. L'Accord définitif nisga'a n'a été ratifié que cette année, mais l'histoire de ce peuple remonte à des générations et à des siècles. Les Nisga'as ont approuvé cet accord, à l'instar du gouvernement provincial de la Colombie-Britannique, quand le projet de loi 51 a franchi toutes les étapes du processus législatif en avril dernier.
Je ne dirais pas que tout s'est fait en douceur. Bien au contraire, les débats ont été âpres et le gouvernement de la Colombie-Britannique a même invoqué la clôture. Le gouvernement néo-démocrate de la Colombie-Britannique a été la cible de bien des critiques pour son traitement du débat. Espérons, pour le bien de la démocratie, que ce genre de comportement ne sera pas adopté par le gouvernement fédéral à Ottawa.
Le débat sur le traité a pris fin de façon abrupte selon certains. Nous espérons que cela n'arrivera pas ici et il nous tarde vraiment de tenir un débat approfondi, informé et ouvert sur le projet de loi C-9 à la Chambre.
Le traité nisga'a, comme je l'ai dit et comme d'autres avant moi l'ont laissé entendre, est un document historique très important qui fera l'objet de débats. Il nous incombe, en tant que parlementaires, d'adopter un esprit ouvert devant toutes les vues qui ont été exprimées à la Chambre. Il nous incombe aussi de nous arrêter à la réalité plutôt qu'aux mythes lorsque nous parlons d'un traité d'une telle importance. Nous ne devons pas non plus, en aucun cas, dresser un groupe contre un autre au cours d'un débat aussi crucial et ayant de telles répercussions.
Très récemment, la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Marshall nous a montré les répercussions des traités. Avec cette décision, nous nous sommes rendu compte qu'un traité signé il y a 230 ans avait des répercussions encore aujourd'hui, en 1999. Il n'est donc pas besoin de longues démonstrations pour nous convaincre que l'accord nisga'a qui sera signé, ratifié et adopté par la Chambre est susceptible d'avoir des effets sur les prochaines générations de Canadiens et sur la nation nisga'a.
Il y a 5 500 Nisga'as et environ 2 400 d'entre eux vivent dans la vallée supérieure de la Nass, en Colombie-Britannique. Le traité leur accorde des droits de propriété sur 1 930 kilomètres carrés de terres et 190 millions de dollars en argent, dont le paiement est étalé sur quelques années. Ce ne sont là que des détails du traité. Il s'agit d'un traité très complexe qui porte sur une série d'aspects de la vie quotidienne, mais le règlement lui-même représente une étape vers l'indépendance et l'autonomie des peuples autochtones du Canada.
L'accord définitif nisga'a sera le premier traité de l'ère moderne conclu en Colombie-Britannique, mais ce n'est certainement pas la première fois que les Nisga'as participent à des activités innovatrices. La députée qui a pris la parole avant moi a aussi mentionné ce fait.
Ce sont une décision rendue en 1969 dans l'affaire la Reine et Calder au procureur général de la Colombie-Britannique et ensuite une décision rendue en 1973 par la Cour suprême du Canada dans cette affaire qui ont ouvert la porte au règlement négocié des revendications territoriales des Nisga'as. C'est Frank Calder, un Nisga'a, qui a porté l'affaire devant les tribunaux en invoquant le fait qu'il n'y avait jamais eu extinction du titre autochtone sur la vallée de la Nass. La Cour suprême n'a pas décrété que le titre autochtone portant sur ces terres existait réellement. Elle a cependant reconnu l'existence des autochtones qui avaient été propriétaires des terres avant l'arrivée des colons européens, ce qui leur avaient fourni des arguments pour soutenir qu'il y avait des accords sur les revendications des terres.
Le gouvernement fédéral de l'époque s'est rendu compte des conséquences de la décision et a amorcé une politique globale en matière de revendications territoriales avec l'intention de négocier des accords sur les revendications territoriales relativement aux endroits où les autochtones prétendent avoir vécu traditionnellement.
Malheureusement, c'est souvent ce qui se produit encore aujourd'hui au pays. Il est triste de constater que les négociations intervenant entre le gouvernement fédéral et nos premières nations aboutissent rarement à un accord pacifique et équitable. Le plus souvent, et cela ne se veut pas une affirmation partisane, les gouvernements du pays ont tendance à procéder par litige plutôt que par la négociation.
Je me reporte à des commentaires antérieurs et à l'affaire Marshall, décision à la suite de laquelle le pays, et en particulier la côte est du Canada, ont été plongés dans un abîme de confusion et de malentendu en ce qui concerne les droits qui ont effectivement été accordés par la Cour suprême du Canada. J'admets volontiers que ce débat devra se faire à un autre moment, entre les Communes et la Cour suprême du Canada, pour savoir qui doit légiférer dans un domaine aussi important, qui a des conséquences aussi considérables dans tout le pays.
L'Accord définitif nisga'a sera un traité moderne, en Colombie-Britannique. Ce sera le 14e de l'histoire du Canada. Parmi les autres accords modernes, on remarque la Convention de la Baie James et du Nord québécois, la Convention du Nord-Est québécois, la Convention définitive des Inuvialuit, l'Entente finale des Gwich'in, l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, l'Entente sur la revendication territoriale globale des Dénés et Métis du Sahtu et les accords définitifs avec les sept premières nations du Yukon.
Permettez-moi de me reporter à deux autres mesures législatives concernant les autochtones qui ont été discutées récemment et qui ont une certaine similitude avec le projet de loi à l'étude. Il s'agit du projet de loi C-39, Loi modifiant la Loi sur le Nunavut et la Loi constitutionnelle de 1867, et le projet de loi C-57, Loi portant modification de la Loi sur le Nunavut relativement à la cour de justice du Nunavut et modifiant diverses lois en conséquence.
Ces lois ont contribué à créer le nouveau territoire du Canada, le Nunavut. Quel est le rapport avec le débat d'aujourd'hui? Selon moi, il s'agit d'une approche extrêmement innovatrice de l'application moderne du système de justice canadien dans ce nouveau territoire. Le temps ne nous permet pas d'entrer dans les détails, mais il s'agit d'un système de justice très progressiste et répondant aux besoins de tous qui allie les deux cultures dans une approche très pratique et moderne. Il comporte certaines des notions de justice réparatrice, système qui, à bien des égards, a été emprunté aux autochtones, qui est très inclusif et orienté vers la collectivité en ce sens qu=il inclut la victime et la collectivité et qu=il privilégie une approche de face à face, parfois même de confrontation, entre l=auteur d=un crime et les victimes.
Chez nous, on a toujours adopté une approche très traditionnelle de la justice et pris modèle sur le système britannique, lequel fait peser le fardeau de la preuve sur la victime, et ce, trop souvent au détriment de la victime, ce qui en fait une approche très stérile, voir non inclusive, qui n'en fait pas un processus de guérison des plus efficaces. Les autochtones ont adopté une approche plus pratique et plus inclusive qui, à mon sens, correspond à l'esprit du nouveau système de justice qui aura cours dans le Nunavut et qui, dans une large mesure, sera mis en oeuvre par l'accord nisga'a.
L'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut ne portait aucunement sur l'autonomie gouvernementale. Il établissait plutôt un système de gouvernement public semblable à celui que l'on trouve aujourd'hui au Nunavut. Cet accord établissait également un système judiciaire qui permettait aux Inuit du Nunavut de mettre en oeuvre un ensemble de dispositifs qui répondent mieux à leurs propres objectifs. C'est un mécanisme plus inclusif combinant la justice autochtone ou Inuit avec notre système de justice moderne qui reconnaît que tous les Canadiens doivent être assujettis aux mêmes lois.
Je trouve qu'il est très encourageant et très excitant, du point de la justice, de voir comment il est possible de fondre ces deux cultures et de les mettre au service de tous les Canadiens. Je suis convaincu que ceux et celles qui oeuvrent dans le domaine de la justice au Canada voudront jeter un regard très attentif à l'application moderne qui sera faite de ce système de justice au Nunavut.
On peut en dire autant de la mise en oeuvre de ce traité puisque que les Nisga'as auront la possibilité d'instaurer leur propre appareil judiciaire. Ils peuvent très bien désirer surveiller de près le système que l'on est en train de mettre en place au Nunavut. La nation nisga'a elle-même va sans aucun doute profiter de cette expérience.
Les dispositions de ce traité vont permettre au gouvernement nisga'a de nommer les juges du tribunal nisga'a. Ce traité prévoit également la supervision des juges du tribunal nisga'a par le conseil de la magistrature de la Colombie-Britannique ou par un moyen semblable. Il s'agit d'une approche inclusive très proactive qui permettra à notre système de justice actuel de s'insérer dans ce nouveau système de justice.
De plus, les Nisga'as auront leurs propres services de police. La commission de police du gouvernement nisga'a assume cette responsabilité. Dans tous ces cas, les lois provinciales et fédérales continueront cependant de s'appliquer. Les règles nisga'as doivent cadrer avec les lois fédérales actuelles.
Je ne veux pas laisser à qui que ce soit l'impression qu'il s'agira d'une forme de dérogation à la loi. Il s'agit simplement d'incorporer à notre système actuel un nouveau système de justice qui va, on l'espère, l'améliorer. Je m'attends à ce qu'à l'avenir, d'autres provinces adoptent certaines des notions qui pourraient découler de la mise en oeuvre de ce nouveau système de justice.
Les relations de travail et les relations industrielles ne seront pas régies par la loi nisga'a. Elles demeureront plutôt de compétence provinciale et fédérale et s'appliqueront de façon uniforme dans tout le pays.
Je me reporte aux observations de notre collègue de South Shore qui a laissé entendre que cette mesure législative présente de nombreux avantages. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas matière à amélioration. Comme toutes les mesures législatives soumises à la Chambre, celle-ci pourra faire l'objet d'un débat ouvert, et nous aurons amplement l'occasion de présenter des idées dans le cadre du processus dans lequel nous nous lançons aujourd'hui.
Il faut espérer que le gouvernement sera assez ouvert pour accepter de modifier la loi pour tenir compte des idées qui pourraient être présentées à la Chambre des communes, mais surtout, selon moi, au comité, où les députés de l'opposition siégeront avec les ministériels dans le cadre normal des travaux du comité et discuteront de ce traité plus en détail. Je sais que tous les députés de l'opposition et du gouvernement attendent avec impatience de se lancer dans ce processus.
Les Nisga'as ne seront plus régis par les règles de la Loi sur les Indiens que l'on considère souvent comme astreignantes, voire régressives. Au lieu de cela, l'Accord définitif nisga'a précisera, outre la façon dont la nation nisga'a continuera de fonctionner, les pouvoirs et la responsabilité du Lisims Fisheries Conservation Trust. C'est une chose à laquelle le peuple nisga'a travaille depuis plus d'un siècle.
La mesure législative antérieure qu'avait appuyée le Parti conservateur en ce qui concerne la gestion des terres des premières nations exposait exactement les raisons pour lesquelles il est important que les premières nations ne soient plus assujetties à la Loi sur les Indiens, surtout en ce qui concerne la gestion des ressources.
En vertu de la Loi sur les Indiens, les premières nations doivent demander au ministre fédéral des Affaires indiennes l'autorisation d'exploiter les ressources sur une réserve. Avec l'Accord définitif nisga'a et la Loi sur la gestion des terres des premières nations, cela ne sera plus le cas et cela ne sera plus nécessaire. Le peuple nisga'a sera en mesure de décider où, quand et comment utiliser ses ressources. À mon avis, le peuple Nisga'a ne sera pas le seul à tirer avantage de cette autonomie accrue, la Colombie-Britannique aussi.
Les sociétés minières et forestières qui ont souvent hésité à investir, ces dernières années, dans des opérations liées à l'exploitation des ressources, surtout après la décision rendue dans l'affaire Delgamuukw qui réaffirmait le droit ancestral, verront maintenant sous un autre jour la possibilité de faire des affaires dans cette région de la Colombie-Britannique.
Compte tenu de l'incertitude qui existait, et qui continue d'exister, quant à savoir qui est propriétaire des terres et des ressources dans une grande partie de la province de la Colombie-Britannique, l'industrie primaire a été très lente à investir dans la prospection et dans la mise en valeur des ressources, ce qui a entraîné une perte de revenu de près d'un milliard de dollars. La stabilité et la confiance économique devraient, espérons-le, être l'un des principaux résultats de ce projet de loi dans ce secteur de la gestion des ressources.
Les Nisga'as pourront participer plus activement à la mise en valeur des ressources, mais ce n'est là qu'un des aspects favorables de l'Accord définitif. Nous savons bien que tous les Canadiens, et pas seulement les Nisga'as, aspirent à l'autonomie et à l'autodétermination.
La Colombie-Britannique fait l'objet de revendications territoriales autochtones. Le traité nisga'a sera le premier à associer un accord sur les revendications territoriales à des accords d'autodétermination dans un seul et même texte qui traitera également de fiscalité. Cette question a d'ailleurs animé le débat tout à l'heure. L'accord dont nous sommes saisis aujourd'hui prévoit l'assujettissement progressif des Nisga'a, c'est-à-dire sur une période de huit à douze ans, à la fiscalité canadienne. À longue échéance, cette disposition devrait leur permettre d'accroître leur autonomie et de réduire leur dépendance des financements et des services fournis par le gouvernement fédéral. Les Canadiens ne peuvent faire autrement que de s'en féliciter.
Nous savons aussi combien il est intimidant et inhibant de dépendre du gouvernement, d'avoir le sentiment de ne pas avoir vraiment voix au chapitre et l'impression qu'on ne pourra pas bénéficier à part entière des retombées futures de l'économie nationale, comme cela semble être le cas dans les provinces maritimes. Qu'on ne s'imagine par que je cherche à établir un parallèle entre la population des Maritimes et la population des Premières nations. J'affirme cependant que nous devrions être prompts à favoriser chez nos compatriotes le sentiment de contribuer à l'unisson au bien commun. J'espère que cet accord nous y aidera.
Je voudrais aborder très rapidement le sujet de la consultation. Nous menons un exercice de consultation simplement en discutant de ces questions, mais je crois comprendre qu'il y a déjà eu plus de cinq cents consultations indépendantes avant d'en arriver à la rédaction de la version définitive de l'accord qui a été signé par la nation nisga'a et le gouvernement de la Colombie-Britannique. Certains diront que c'est là un très grand nombre de consultations. Toutefois, un accord qui a des répercussions aussi vastes et importantes que celui-ci mérite qu'on tienne de nombreuses consultations. Il suffit de lire l'accord lui-même pour se rendre compte qu'il s'agit d'un document très approfondi et très détaillé qui tient compte d'une bonne partie des subtilités existant entre le gouvernement du Canada, les gens de la Colombie-Britannique et le peuple nisga'a.
L'Accord définitif nisga'a est sans aucun doute un document historique qui précise les droits autochtones de la nation nisga'a. Il renferme une définition détaillée des droits et responsabilités auxquels les trois partis seront soumis une fois l'accord ratifié, ce que nous tentons de faire à l'heure actuelle.
Le traité est reconnu et confirmé par l'article 35 de la Constitution canadienne, mais il ne fait pas partie de la Constitution. Des précisions s'imposent ici également. Cela n'exclut aucunement la nation nisga'a des dispositions de la Constitution. Cela ne lui accorde pas non plus de droits spéciaux en dehors de la Constitution. Il s'agit tout simplement d'un accord qui sera restreint et soumis à l'application des dispositions de la Constitution canadienne et de la Charte des droits.
Je parle tout particulièrement des article 1, 15, 24 et 25 qui traitent de l'application générale des droits de et libertés dans ce pays. Le fait que la Charte garantit certains droits et libertés ne porte pas atteinte aux traités ou aux droits ou libertés des peuples autochtones. Elle ne déroge pas aux lois du pays qui s'appliquent à tous les Canadiens. La Loi constitutionnelle de 1982 sera appliquée entièrement et, en dernière analyse, elle le sera conjointement avec cet accord.
Le traité est reconnu et confirmé par l'article 35 de notre Constitution. Un processus d'amendement de l'accord est exposé dans le traité et nécessite le consentement de la nation nisga'a et des gouvernements fédéral et provinciaux, selon l'amendement. Cet article est important. Comme dans le cas de tous les accords, nous savons qu'il évoluera.
Souvent, des situations se présenteront, des causes seront portées devant les tribunaux, et certaines le sont peut-être actuellement. Il est juste de dire que ces causes pourraient avoir un effet dévastateur ou très positif sur des accords à venir. Mais un article de l'accord traite de la formule d'amendement.
Pour que la nation nisga'a approuve un amendement, il faut que les deux tiers des représentants élus du gouvernement nisga'a acceptent l'amendement. Comme je l'ai dit plus tôt, le projet de loi représente, espérons-le, un accord ouvert auquel on pourra, le moment venu, apporter des amendements non controversés. Mais l'avenir le dira.
Nous en sommes à la dernière étape du long processus qui a abouti à cet accord, un processus qui a débuté en 1887, lorsque les Nisga'as se sont rendus pour la première fois à Victoria pour présenter leur proposition d'autonomie gouvernementale.
La décision rendue en 1997 dans l'affaire Delgamuukw a souligné la nécessité de négocier des règlements avec les autochtones. Dans cette affaire, la cour a laissé entendre que des litiges constants n'étaient ni le bon moyen ni le moyen le plus efficace pour en arriver à une entente.
L'Accord définitif nisga'a montre bien que des ententes négociées peuvent être conclues et que les négociateurs méritent des éloges pour leur persévérance dans cette longue démarche. Ainsi, la Chambre est aujourd'hui saisie d'un accord qui peut fonctionner et qui devrait être considéré comme une indication, pour les autochtones et les autres Canadiens, que nous devons continuer de collaborer pour bâtir le magnifique pays que nos ancêtres nous ont légué.
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, je félicite le leader parlementaire du Parti progressiste conservateur pour l'appui qu'il a si éloquemment manifesté à l'endroit du traité nisga'a.
Permettez-moi de commenter le point qu'il a fait valoir au sujet de la décision rendue dans l'affaire Delgamuukw. Quand les représentants du Parti réformiste disent qu'il faut annuler ce traité et revenir à la case départ, ils ne tiennent pas compte du mandat confié aux parlementaires par le plus haut tribunal au pays dans la décision Delgamuukw, c'est-à-dire l'obligation d'honorer et de respecter les droits des premières nations du Canada.
J'aimerais que le député nous dise ce qu'il pense des suggestions qu'a faites, en particulier, le député de Skeena, celui-là même qui a discuté pour la dernière fois avec les chefs nisga'as en 1995, soit bien avant la signature du traité, et qui refuse depuis trois ou quatre ans de rencontrer les leaders nisga'as. C'est quand même incroyable pour le député qui représente ces autochtones. Il affirme que le traité prévoit, en fait, la taxation sans représentation, qu'il consacre l'inégalité des femmes autochtones et qu'il reconnaît un gouvernement fondé sur la race.
Le traité précise que le gouvernement nisga'a lisims peut faire des lois concernant la taxation directe des citoyens nisga'as sur les terres nisga'as, rien de plus, et qu'il ne peut taxer les citoyens qui ne sont pas nisga'as que si la province ou le gouvernement fédéral délègue ce pouvoir à la nation nisga'a.
Le député voudra peut-être commenter cette allégation erronée des réformistes ainsi que la déclaration du Parti réformiste selon laquelle le traité consacre l'inégalité des femmes autochtones.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Ce représentant de la Colombie-Britannique a derrière lui une carrière longue et distinguée aux Communes. De toute évidence, il peut avoir sur la question des points de vue plus pénétrants que ceux de la plupart d'entre nous.
Au sujet des propos et de l'affirmation concernant l'imposition sans représentation, je pense que bien des gens les trouveront choquants. Lorsqu'ils examineront les détails de l'accord, ils y trouveront une disposition garantissant la représentation. Le régime fiscal lui-même est équitable. Bien qu'il y ait certainement des nuances par rapport à notre système fiscal actuel, je dirai que la confrontation sans consultation ni information, qui inspire certains des propos que nous avons entendus à la Chambre, est également choquante.
La dernière chose dont nous ayons besoin ou que nous souhaitions, c'est qu'on fasse intervenir un élément de racisme dans le débat sur cet accord. Nous devrions nous attacher aux faits, au lieu de répandre de fausses vérités ou d'exagérer les conséquences de l'accord. Il faut nous en tenir à la réalité et nous occuper des faits qui permettront d'appliquer cet accord de façon constructive.
M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, tout d'abord, le député a dit qu'il y avait eu des consultations publiques. Je ne me rappelle pas l'avoir vu dans le nord de la Colombie-Britannique. Je ne crois pas qu'il se soit jamais rendu dans cette région.
Qu'il sache qu'il n'y a pas eu de réunions d'information pour demander l'avis de la population avant que l'accord ne soit annoncé. Ce n'est qu'après que le gouvernement provincial a organisé une petite tournée dans la province, soi-disant pour connaître le point de vue des gens ordinaires de la Colombie-Britannique. Pas un seul mot de l'accord n'a été changé suite à cette tournée, pas un seul mot.
Ces consultations publiques ne voulaient absolument rien dire. C'est le genre de consultations qu'on attend du gouvernement néo-démocrate provincial, ainsi que du Parti libéral fédéral. Il est intéressant de voir que ces partis sont tous sur la même longueur d'ondes lorsqu'il est question de consultations publiques. Il suffit de faire semblant qu'on consulte, mais on n'est pas vraiment intéressé à connaître l'avis du public sur ces questions.
La question que je veux poser au député concerne le principe de la taxation sans représentation. Le député est avocat. Il sait que le libellé des accords est explicite.
Au chapitre 16, qui porte sur la taxation, on lit à la page 235:
3. De temps à autre, le Canada ou la Colombie-Britannique peuvent, ensemble ou séparément, négocier avec la Nation Nisga'a et tenter de parvenir à un accord sur la mesure, s'il en est, dans laquelle le Canada ou la Colombie-Britannique attribuent au gouvernement Nisga'a Lisims ou à un gouvernement de village Nisga'a le pouvoir de taxation directe des personnes, autres que les citoyens Nisga'a, sur les Terres Nisga'a;
On envisage clairement ici de donner au gouvernement nisga'a le pouvoir de taxation sur les personnes autres que les citoyens nisga'a qui habitent dans la vallée de la Nass. C'est un cas de taxation sans représentation, car les députés savent très bien que les non-Nisga'as qui habitent dans la vallée de la Nass ne pourront pas se présenter aux élections. Ils ne pourront même pas voter pour le représentant qu'ils veulent.
Je demande au député de répondre à cela. Ne reconnaît-il pas que ce libellé est explicite?
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je commencerai par dire que j'ai beaucoup aimé le voyage que j'ai fait à Castlegar il y a un peu plus d'un mois. J'ai fait un merveilleux séjour à Victoria. J'ai vraiment apprécié la période que j'ai passée à Prince George quand, étudiant, j'étais allé planter des arbres dans la belle province de la Colombie-Britannique. Je trouve donc offusquant que le député dise que je ne connais pas la région.
À propos de la question portant plus précisément sur la représentation et la taxation, nous savons que ce processus et les 500 consultations dont j'ai parlé dans mon intervention représentent du temps qui a été passé après qu'un accord initial a été mis en place. On a ensuite pris du temps pour consulter, pour négocier et, dans certains cas, renégocier des éléments de l'accord. L'accord lui-même, dans la section dont le député a parlé, n'est pas arrêté. Il est question de la possibilité d'autres consultations ou de remaniement.
Quant au manque de représentation, l'accord remédie certainement à cela en permettant la tenue d'élections directes aux commissions scolaires et à tous les genres d'organismes qui seront créés à l'intérieur de la région. Les gens pourront donc voter directement pour les représentants qu'ils veulent se donner.
Je ne sais pas très bien de quoi le député veut parler en disant que les gens ne pourront pas voter. Non, une personne ne peut voter pour le chef de bande, mais elle aura son mot à dire dans ces organismes qui régiront tous les habitants de cette région de la Colombie-Britannique.
Il n'est pas exact de dire qu'il s'agit de taxation sans représentation. La représentation existe. Les dispositions de l'accord parlent de futurs changements qui pourraient survenir. C'est un accord très facile à appliquer. Il est flexible. Il est ouvert. Je suis étonné que le député ne l'appuie pas.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je veux féliciter notre collègue, le leader parlementaire du Parti progressiste-conservateur, pour son excellent exposé.
J'aimerais lui demander s'il partage mon opinion à savoir qu'il est extrêmement impératif pour tous les députés de cette Chambre d'appuyer le traité des Nisga'as qu'il est impératif en ce sens de suivre l'exemple que le Québec a lui-même tracé au début des années 1980 puisque, comme on le sait, l'Assemblée nationale du Québec—et je sais que tous les députés vont se rappeler ce fait—a reconnu des droits aux nations amérindiennes dès le début des années 1980.
Lorsqu'on assiste au débat et qu'on entend le discours que le Parti réformiste tient, qu'on observe la fermeture d'esprit qu'on lui connaît et qu'on regarde l'ouverture d'esprit du Parti progressiste-conservateur, est-ce que ce n'est pas la preuve—et le député pourrait nous le confirmer—qu'il n'y a pas d'entente possible et qu'il n'y a pas d'alternative unie qui pourrait être envisagée sur cette base-là?
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je remercie mon collègue du Québec. Malheureusement, il m'est impossible de répondre exactement à sa question en français.
[Traduction]
Je serais le premier à reconnaître que, dans bien des cas, le Québec a une feuille de route exemplaire en ce qui concerne la manière dont il traite les autochtones. Pour ce qui est des négociations avec ces derniers, dans bien des domaines, il fait figure de chef de file. À bien des égards, le droit québécois est différent du fait qu'il appartient à la tradition du droit civil. Peut-être que, d'une certaine façon, le Québec est plus versé dans ce genre de négociations du fait que le droit civil s'y prête plus facilement.
J'épouse l'idée que la solidarité est ce qu'il y a de plus nécessaire dans un dossier comme celui-ci. C'est un signal très important que cet accord et son esprit envoient aux peuples autochtones du Canada. La dernière chose que nous souhaitons voir, ce sont d'autres débats acerbes et houleux. La dernière chose que nous souhaitons voir, c'est une décision de la Cour suprême qui, dans bien des cas, oblige carrément le gouvernement à négocier, le couteau à la gorge.
Nous le savons, à chaque fois que le gouvernement fédéral a saisi la Cour suprême ou la Cour fédérale d'une affaire concernant des autochtones, les résultats ont été plutôt désastreux. Par conséquent, je pense que le député est sur la bonne voie quand il dit que négocier de bonne foi est ce qu'il a de plus nécessaire et de plus souhaitable.
C'est en tout cas l'esprit de cet accord. C'est d'ailleurs pour cette raison que les députés du Parti progressiste conservateur l'appuient. Nous avons hâte de l'envoyer au comité, où nous espérons pouvoir y apporter quelques modifications nécessaires et de faire avancer le dossier pour le plus grand bien de tous.
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, je partage mon temps de parole avec le député de Kootenay—Columbia. Je suis heureux d'intervenir dans le débat d'aujourd'hui sur le projet de loi C-9, Loi portant mise en vigueur de l'Accord définitif nisga'a. Je suis presque certain que l'accord définitif même sera connu comme la mesure législative fantôme ayant changé la nation. Je le dis parce que nous ne pourrons jeter un oeil sur le véritable traité qui fait toute la différence.
Il serait peut-être intéressant de noter que l'accord, les annexes et l'accord sur la taxation ont 50 millimètres d'épaisseur en anglais et en français seulement, tandis que la motion des voies et moyens dont la Chambre est saisie est rédigée dans les deux langues officielles et n'a qu'un millimètre d'épaisseur. Autrement dit, la Chambre aura étudié en gros le centième de toute la documentation dont il est question.
Le traité que doit mettre en vigueur ce projet de loi est le premier du genre. Il doit servir de modèle à plus de 50 traités que doit encore négocier la Colombie-Britannique. Il doit établir et inscrire dans la Constitution les caractéristiques d'un gouvernement, du régime fiscal, de la représentation, des pêches et de la gestion des ressources, qui sont uniques du fait qu'elles sont fondées sur la race.
Il ne s'agit pas d'un gouvernement public, mais bien d'un gouvernement privé qui se fonde non pas sur la résidence, mais sur l'appartenance à la nation nisga'a. On ne peut obtenir la citoyenneté nisga'a, peu importe pendant combien de temps on vit sur les terres de cette nation. On sera toujours un invité qui ne peut exercer les droits qui appartiennent aux membres de la nation.
Incidemment, permettez-moi de rappeler la déclaration d'un rapporteur spécial qui présentait aux Nations Unies le rapport d'un groupe de travail sur les populations autochtones. L'auteur déclarait: «C'est la première fois de notre vie que nous voici sur des terres sur lesquelles l'homme blanc exerce un droit et, en tant qu'autochtones, nous ne sommes que des invités. Je suis donc fort reconnaissant envers la population de la Suisse qui nous permet d'être ici.» Cette déclaration traduit l'état d'esprit auquel nous sommes confrontés.
Les personnes autres que les Nisga'as ne peuvent obtenir la nationalité nisga'a. 0n ne devient citoyen nisga'a que par hérédité. Ces personnes ne participeront pas à l'élection du corps législatif qui fixera les niveaux d'imposition ou le montant des frais pour les services. Elles seront à la merci d'un système qui, quelle que soit la bonne volonté des participants, les privera de leurs droits démocratiques, et ce, de façon permanente.
Si la loi créant le gouvernement nisga'a était distincte de la revendication territoriale garantie par la Constitution, comme elle devrait l'être, le traité en tant que tel serait plus acceptable. De plus, s'il ne faisait pas partie intégrante de l'accord final, il serait possible de faire l'expérience du modèle gouvernement proposé. On n'achète pas une voiture sans l'avoir d'abord essayée pour voir comment elle marche, si elle répond à ses besoins et si sa garantie couvre les coûts de réparation si elle n'est pas aussi fiable que l'a prétendu le vendeur.
En dépit de ces préoccupations, ce nouveau modèle de gouvernement ne peut être modifié par la Chambre. L'attribution de temps limitera sans doute le débat. Il n'y a pas moyen d'apporter des modifications qui pourraient se révéler nécessaires pour un gouvernement fondé sur les pratiques infructueuses du XIXe siècle.
Dans le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui, on nous dit qu'il contribuera à stimuler l'économie. Cela est dit non pas tant comme un fait, mais comme une profession de foi sans la moindre preuve à l'appui. La triste histoire des Affaires indiennes sur laquelle l'accord est fondé ne me donne aucune raison d'être confiant, et cela devrait être le cas pour tous les députés.
À moins d'être dans la négation la plus complète, tout député est au courant des conditions de vie épouvantables dans les réserves indiennes, celles-ci vivant en marge de la société habituelle. Les indicateurs généralement acceptés montrent qu'il s'agit d'un échec sur toute la ligne. À maintes occasions, les statistiques ont montré que tous les indicateurs sociaux dans les réserves indiennes sont bien pires que dans la population en général. Le taux de mortalité infantile y est supérieur à ce qu'il est dans l'ensemble de la population. La consommation de drogue y est affligeante. Le diabète est un fléau. Les taux d'incarcération et de chômage, les logements inadéquats et l'absence d'activité économique témoignent tous de l'échec du système en place depuis les années 1800.
Si vous me permettez de faire une brève digression, je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur le rapport provisoire du Comité permanent des Affaires indiennes et du développement du Grand Nord. Ce rapport porte sur le développement économique des collectivités autochtones. Dans son rapport, le comité exhorte le gouvernement à investir dans le logement social dans les collectivités indiennes et les localités du Nord où vivent surtout des Inuit.
Je signale à la Chambre ce qu'il y a de contradictoire dans cet appel. Le logement social n'est pas un facteur de croissance ni un indice de développement économique. S'il prouve quoi que ce soit, c'est l'absence d'économie à stimuler ou à développer. Le fait que le gouvernement libéral voit dans le logement social un indice de santé économique plutôt que la preuve d'un échec monumental montre bien qu'il n'a pas la moindre idée de ce qui serait une réussite ni de la façon d'y arriver. Il faut donc prendre avec un certain scepticisme, et je dirais même avec un scepticisme certain, la croissance économique que le gouvernement prévoit dans les collectivités nisga'as.
L'accord propose une approche collective au lieu d'être axé sur l'entreprise privée. Il réunira donc toutes les conditions d'un échec.
Le gouvernement fédéral et le gouvernement de la Colombie-Britannique nous présentent le traité comme étant un fait accompli. Nous savons que les libéraux n'ont pas l'ombre d'un doute et sont convaincus qu'eux et les néo-démocrates de la Colombie-Britannique ont raison sur toute la ligne et que la population n'a pas besoin d'examiner ce qu'ils ont produit. C'est, dans une perspective historique, l'attitude des libéraux devant les grandes questions auxquelles le Canada est confronté.
Il y a 30 ans, le premier ministre Pierre Trudeau présentait son livre blanc sur les affaires indiennes où les difficultés auxquelles les autochtones étaient confrontés en raison des murs dressés autour d'eux par des lois discriminatoires comme la Loi sur les Indiens étaient définies avec précision. Il proposait des solutions qui apparaissaient visionnaires pour leur époque et impressionnantes par leur portée. Son ministre des Affaires indiennes l'approuvait sans réserve. Ce ministre, c'était le premier ministre actuel.
Il faut demander ce qui a causé l'échec de cette grande vision des questions autochtones. Qu'est-ce qui a bien pu conduire à une telle déroute du gouvernement de l'époque et à un rejet aussi catégorique de sa vision, laquelle n'a pas encore été réhabilitée?
Je crois que c'est la propension des libéraux à élaborer de grandes doctrines, mais à ne se parler qu'entre eux. C'est cette tendance à exclure la population de leurs processus d'élaboration qui cause l'échec des grands projets d'intérêt public qu'ils annoncent sans préparation à une population qui en ignore tout. En trente ans, rien n'a changé. Le gouvernement libéral n'a rien appris sur les processus démocratiques et la nécessité de consulter largement.
Si l'accord est si bon que cela, il devrait pouvoir être soumis avec succès à la population de la Colombie-Britannique tout comme il a été soumis aux membres de la bande nisga'a. La population de cette province ne devrait pas être empêchée de se prononcer sur une affaire qui la touche d'aussi près. Je propose aux députés d'appuyer l'amendement proposé par le chef de l'opposition. Il y prie le gouvernement de retirer le projet de loi et de renvoyer la question devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.
Je passe maintenant à une disposition du projet de loi qui, dans une certaine mesure, nous éclaire sur l'attitude du gouvernement lorsque nous abordons ces questions. Le préambule du projet de loi C-9 précise ce qui suit:
Attendu que les tribunaux canadiens ont déclaré que la meilleure façon de réaliser cet objectif est de procéder par négociation et accord plutôt que par le litige ou la confrontation;
On y trouve ensuite bon nombre d'autres «attendu». Cette disposition du projet de loi n'a d'autre but que de dire au monde que l'administration libérale a dû se faire gronder par la Cour suprême et être envoyée en punition. Nous serions certes d'accord avec ce sentiment de ce côté-ci de la Chambre. Toutefois, nous reconnaissons à regret que le gouvernement libéral constitue le niveau supérieur de gouvernement du Canada en ce moment et qu'il devrait se comporter en adulte et ne pas accepter aussi facilement sa punition.
À titre d'exemple de ce que je viens de dire, arrêtons-nous à l'accord de taxation. À l'article 37, à la rubrique «Autres accords sur les revendications territoriales», on précise que:
Si, dans les 15 ans qui suivent la date d'entrée en vigueur, le Canada ou la Colombie-Britannique édicte une législation donnant effet à un autre accord sur des revendications territoriales applicable dans le nord-ouest de la Colombie-Britannique qui prévoit que toutes les terres mises de côté comme réserves indiennes d'une bande indienne dont les membres étaient représentés par une partie à l'accord cessent d'être des réserves et prévoit dans l'accord sur les revendications territoriales mentionné dans cet accord sur des revendications territoriales:
a) des pouvoirs de taxation dont ne disposent pas le gouvernement nisga'a Lisims ou les gouvernements de villages nisga'as; ou
b) des exemptions de taxe dont ne disposent pas la nation nisga'a ou les villages nisga'as;
Le Canada et la Colombie-Britannique, à la demande de la nation nisga'a, négocient et tentent de parvenir à un accord avec la nation nisga'a afin d'apporter des ajustements appropriés aux pouvoirs de taxation du gouvernement nisga'a Lisims et aux exemptions de taxe dont disposent la nation nisga'a et les villages nisga'as, en tenant compte des circonstances particulières de l'autre accord sur des revendications territoriales.
Le texte plutôt long que je viens de lire ne signifie qu'une chose. L'accord n'a absolument pas la finalité tant vantée, du moins en ce qui concerne les taxes. Si une autre bande négocie un meilleur accord, et c'est là inévitable, les gouvernements fédéral et provincial doivent se présenter à la table de négociation à la demande du gouvernement nisga'a afin d'ajouter les pouvoirs et les exemptions qui n'étaient pas inclus dans cet accord.
Pour les motifs que j'ai énumérés, je m'opposerai à l'adoption de cette mesure législative et je prie les autres députés de voter en faveur de l'amendement proposé par le chef de l'opposition.
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, le député de Skeena, qui appartient à la même formation politique que le député, a mentionné à plusieurs reprises que, selon lui, l'accord nisga'a consacre l'inégalité des femmes autochtones.
Compte tenu du paragraphe 35(4) de la Loi constitutionnelle de 1982, qui garantit que tous les droits prévus à l'article 35, à savoir les droits issus de traités des peuples autochtones, y compris les droits des Nisga'as en vertu de l'accord, s'appliquent également aux personnes des deux sexes, comment le député peut-il dire que l'accord nisga'a est injuste de quelque façon que ce soit?
M. Derrek Konrad: Madame la Présidente, je remercie le député de Burnaby—Douglas de sa question. Il existe déjà des inégalités dans les réserves indiennes, autrement les femmes autochtones ne parleraient pas de la nécessité d'obtenir un traitement égal.
Lors du débat sur la dernière mesure législative semblable qui a été adoptée à la Chambre, à savoir le projet de loi C-49, le gouvernement et tous les partis ont insisté sur le fait que les femmes étaient traitées de la même façon.
Selon nous, les droits des femmes ne seront pas adéquatement protégés en vertu de l'accord et ce n'est pas de cette façon que des droits devraient être traités. Lorsqu'on dit dans l'accord que celui-ci respecte le caractère libre et démocratique du gouvernement nisga'a, que veut-on dire au juste? Ce n'est pas là une simple déclaration de fait. C'est aussi une réserve qu'un bon avocat sera capable de contourner.
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais interroger mon collègue au sujet de l'accord et des droits de propriété.
Nulle part dans l'accord on ne donne aux Nisga'as des droits de propriété individuels. C'est un des aspects fondamentaux, en cas de rupture d'un mariage, d'abandon du domicile conjugal ou toute autre chose de ce genre. Comme le droit de propriété n'est pas inclus dans l'accord, le conjoint abandonné ne sera-t-il pas placé dans une situation très difficile?
M. Derrek Konrad: Madame la Présidente, le député a très bien exposé le problème. La plupart de nos droits découlent de la capacité de posséder des biens, d'en disposer ou de les investir comme bon nous semble, lorsqu'il ne s'agit pas de biens détenus en commun. C'est un bon point. Comment va-t-on traiter les droits individuels quand deux personnes s'adressent à un tribunal pour en venir à une sorte d'accord aux termes duquel des biens seront donnés à un conjoint ou à l'autre?
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Madame la Présidente, on dit très clairement dans l'Accord définitif nisga'a que les droits des hommes et des femmes nisga'as sont égaux et protégés aux termes de la loi. C'est très clair. Mettons de côté l'affirmation selon laquelle il y a inégalité entre les hommes et les femmes dans cette accord.
Il faut également écarter l'affirmation selon laquelle il ne s'agit pas d'un processus démocratique ou pas assez démocratique. Le gouvernement nisga'a s'est adressé à son peuple, et 61 p. 100 des électeurs sur les terres nisga'as ont voté en faveur de l'accord. Si on prend le nombre total de gens vivant sur les terres nisga'as, 75 p. 100 ont voté en faveur de l'accord. Le Parti réformiste lui-même s'est entendu pour modifier son mode de fonctionnement. Quelque 25 p. 100 de ses membres ont voté en faveur et cela a suffi. Je voudrais que le député me dise ce qu'il en pense.
M. Derrek Konrad: Madame la Présidente, nous parlons d'un manque réel de démocratie, parce que l'accord touche tous les gens de la Colombie-Britannique. Or, on leur a refusé d'avoir leur mot à dire dans la mise en oeuvre du traité. Ils en ont entendu parler de façon indirecte. Je l'ai dit dans mon discours. D'autres députés ont dit et vont répéter à de multiples reprises que les gens de la Colombie-Britannique n'ont pas eu voix au chapitre dans tout le processus démocratique. On a fait fi de leurs droits.
M. Jim Gouk (Kootenay—Boundary—Okanagan, Réf.): Madame la Présidente, devrait-il y avoir une entente avec les Nisga'as et d'autres peuples autochtones? Certainement.
Il y a eu par le passé des motifs indéniables de plainte et ils doivent être réglés, réglés de façon juste. La question est de savoir comment on peut les régler. Il y a un certain nombre d'étapes à suivre.
Tout d'abord, il faudrait fixer des délais pour la présentation des plaintes elles-mêmes. C'est là une mesure essentielle pour deux raisons. Nous ne pouvons conclure une entente si de nouvelles plaintes sont constamment déposées. De plus, il est impossible de conclure des ententes justes et définitives si les communautés autochtones ont plusieurs plaintes à l'étude en même temps.
Les Nisga'as ne sont que l'un des 50 groupes autochtones de la Colombie-Britannique, et un tiers d'entre eux ne participent pas aux négociations à l'heure actuelle. Il est absolument impossible de conclure des ententes réalistes alors que nous ne savons même pas ce que certains groupes sont prêts à accepter.
Le traité nisga'a n'est pas encore conclu et des membres de la bande Gitanyow prétendent déjà qu'une bonne partie de la terre cédée aux Nisga'as en vertu d'un traité appartenait à leurs ancêtres. Ils sont prêts à livrer bataille devant les tribunaux pour le faire reconnaître. Devinez qui devra payer les frais juridiques pour les deux parties?
Le règlement d'ensemble devra être abordable. Il ne faudrait pas qu'on en arrive à proposer un règlement qui aurait pour effet, par lui-même ou en le combinant à ceux qui suivront, de détruire ou d'anéantir l'économie de toute une province. Il faut prendre en considération les engagements financiers, les coûts du peuplement du sol et les coûts liés aux pertes de revenus au chapitre des ressources naturelles. Il s'agit là de ce que je crois être la première des grandes illusions quant à l'incidence du traité proposé.
Le matériel publicitaire que la province a concocté pour vendre le traité à la population laissait croire à un coût de 312 millions de dollars. C'est tout à fait inexact et, à mon avis, délibérément trompeur. Ce chiffre ne représente que l'indemnisation en argent qu'il faudra verser. Il ne tient pas compte d'éléments tels que la valeur de la terre à transférer ou de pertes de revenus de la province en matière d'exploitation forestière.
Le gouvernement provincial a tenté d'apaiser ses citoyens en déclarant que la plus grande partie des coûts seraient assumés par les contribuables canadiens, et non par les habitants de la Colombie-Britannique. À ma connaissance, la Colombie-Britannique fait encore partie de la Confédération et nous sommes des contribuables canadiens. Or, le prix sera fort élevé.
Il faut consulter la population sur le processus et sur tout règlement éventuel. Des règlements, cela ne se fait pas à la pièce. Avant qu'un traité ne soit conclu, la population devrait connaître ce qu'il lui en coûtera au bout du compte et savoir quelles seront les incidences de tous ces règlements. Or, on a très peu consulté la population et rien n'indique qu'on a tenu compte de son avis.
Une entente de principe a été conclue en 1996. Depuis lors, malgré les grands motifs de préoccupation exprimés par la population, on n'a pas changé un iota au traité à l'issue des audiences publiques.
Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, les Nisga'as constituent un des 50 groupes autochtones que compte la Colombie-Britannique. Le règlement proposé, c'est le plancher, et non le plafond, de tous les règlements à venir.
Étant donné le coût du traité nisga'a, je voudrais examiner deux aspects du traité: les coûts financiers et le contrôle des ressources forestières de la Colombie-Britannique.
Selon une analyse financière du traité, le coût serait d'environ 1,3 milliard de dollars. La population nisga'a représente au total 3,74 p. 100 de toute la population autochtone de la Colombie-Britannique. Seul un tiers de cette proportion vit sur le territoire nisga'a et tirera donc avantage de ce traité.
Ce traité va servir de modèle pour tous les futurs accords. Le coût final de tous les accords dépasserait 35 milliards de dollars. Si nous pensons que c'est exagéré, posons-nous la question: quel groupe autochtone va se satisfaire de moins que ce que le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial accordent aux Nisga'as?
En ce qui concerne le contrôle des ressources forestières, si l'on tient compte des mêmes proportions, ce traité accorderait ultimement à une population autochtone représentant moins de 5 p. 100 de la population de la Colombie-Britannique des droits d'exploitation pour près de 20 p. 100 des possibilités de coupes annuelles.
Nous ne pouvons nous permettre ni l'un ni l'autre.
Quand on signe un traité, c'est dans un but d'égalité et il doit être définitif. Chaque peuple autochtone doit pouvoir tirer avantage du traité. Autrement, ce serait étendre le système féodal qui existe actuellement, un système qui finira par échouer, en fait qui est en train d'échouer.
À l'heure qu'il est, le gouvernement fédéral dépense à lui seul 9 000 $ pour chaque homme, femme et enfant qui vivent dans une réserve dans ce pays. Malgré cela, de nombreux autochtones dans ces réserves vivent dans un état de pauvreté abjecte. Tout cela parce qu'une grande partie de l'argent sert à la bureaucratie et que le reste va à certains dirigeants de la bande. Dans certains cas, les personnes réellement nécessiteuses ne voient pas la couleur de l'argent qui leur est destiné. En vertu de cet accord, les droits et les avantages de l'individu demeurent inexistants.
En vertu de l'accord nisga'a, le territoire appartiendra au gouvernement central, qui aura la main haute sur les fonds et les ressources. Tout individu qui ne serait pas d'accord risquerait d'être privé des avantages de tout ce que contrôle le gouvernement. C'est un mécanisme de gestion pyramidale et il comporte de graves lacunes. Il fait totalement fi des principes de l'examen public et de l'égalité des citoyens. Du fait qu'il donne le pouvoir au gouvernement, et non au peuple, l'accord nisga'a est voué à l'échec.
Cet accord fait penser au régime féodal du Moyen Âge. Le suzerain possédait la terre et tout ce qu'elle produisait. Les paysans étaient autorisés à y vivre, à y construire leur demeure, à cultiver les champs, mais le domaine appartenait au seigneur. Ces gens ne possédaient rien et n'avaient aucun droit, si tel était le bon plaisir de leur seigneur. C'était un régime oppressif, antidémocratique, criblé de lacunes, source de rancoeurs, qui a connu une fin bien méritée il y a longtemps déjà. Alors pourquoi envisageons d'entrer dans le XXIe siècle avec un régime analogue pour les autochtones du Canada?
Nous en avons déjà vu des exemples. La bande des Indiens de Stoney, à l'ouest de Calgary, compte 3 300 individus dans trois réserves. Nombre de ces gens vivent dans des conditions sordides, parfois dans le sous-sol de maisons irréparables, même si la bande de Stoney a un revenu annuel de 50 millions de dollars. Cet argent va tout d'abord aux trois dirigeants de la bande qui, à eux trois, touchent une rémunération d'un demi-million de dollars et ont des comptes de dépenses illimités, tandis qu'un grand nombre de leurs administrés sont réduits au désespoir. Est-ce là un système qui va résoudre les problèmes des autochtones? Je ne le pense pas.
D'aucuns diront que ces dirigeants ont été élus et qu'ils peuvent se faire éjecter s'ils ne font pas du bon travail. Je suis un député élu. Si quelqu'un n'aime pas ce que je fais, il peut me dénoncer. Il peut se présenter aux élections et essayer de m'infliger la défaite. S'il y parvient, très bien. Sinon, la vie continue comme si de rien n'était. Mais que se passerait-il si j'étais le propriétaire de la maison où habite celui qui s'est plaint et a essayé de me faire mordre la poussière? Si j'avais la haute main sur son compte en banque? Si je contrôlais toutes ses activités principales? Il pourrait tout de même se présenter contre moi et, s'il gagnait, tout irait bien. Mais s'il perdait, il aurait de gros problème.
Voilà la difficulté inhérente à l'actuel système des réserves. En grande partie, les fonds publics que les dirigeants de bande reçoivent et continueront de recevoir même après l'adoption de cet accord sont calculés d'après la population de la réserve. Il est dans l'intérêt des dirigeants de conserver une forte population et de décourager les membres de la bande de partir.
Ceux qui ne sont pas des Nisga'as et habitent sur des terres qui ont été cédées aux Nisga'as n'auront pas voix aux décisions qui les toucheront. On dit qu'ils pourront voter pour le conseil scolaire. Ils ne pourront pas voter sur ce qui se rapporte à leur imposition. Ils n'auront pas de droits de propriété. Ils ne pourront pas voter pour le gouvernement nisga'a. Ils ne seront pas autorisés à poser leur candidature à un poste du gouvernement. Ne parlons pas du conseil scolaire. J'ai entendu les réponses désinvoltes des députés d'en face. Ils ne pourront pas se présenter à des postes du gouvernement. Ils ne seront pas autorisés à voter pour l'administration locale, celle qui impose les terres qu'ils habitent. Mais ils seront assujettis aux taxes que l'administration locale décidera de leur imposer, ce qui revient à de la taxation sans représentations.
Selon des documents publicitaires qui appuient l'accord nisga'a, les Nisga'as seront assujettis à tous les impôts et taxes provinciaux et fédéraux. Ce n'est pas vrai. L'accord nisga'a met fin à un traitement spécial accordé aux Nisga'as après huit à douze ans, mais il laisse en place de nombreuses exemptions, par exemple celles de la taxe foncière, des impôts sur le capital et bien d'autres. Les entreprises nisga'as sont exemptées d'impôts, tout comme les entreprises forestières. Cependant, les Nisga'as, ainsi que tous les autres autochtones inscrits, continuent de recevoir des avantages comme des études postsecondaires gratuites, et seront exemptés des frais d'usager sur divers services médicaux. Ces avantages sont fondés sur la race, alors que l'objectif ultime de l'accord doit être l'égalité entière de tous les Canadiens.
J'ai plus, madame la Présidente. Je ne vais même pas me rendre à mon cinquième point, faute de temps. Il est déplorable, lorsque nous tentons de faire intervenir le plus grand nombre de députés possible, que le gouvernement ait déjà décidé de couper court au débat.
Et l'utilisation du mot «débat» est une imposture. Ceci n'est pas un débat. Le gouvernement n'entend pas modifier un seul projet de loi, un seul article, peu importe les preuves qui lui sont présentées. Il va adopter un accord qui, avec son annexe, est plus volumineux que l'annuaire téléphonique de la ville d'Ottawa.
M. Grant McNally: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je m'excuse d'interrompre mon collègue, mais ce qu'il dit est tellement important que je trouve qu'il faudrait qu'au moins un membre du Cabinet soit présent pour écouter cet important débat sur les Nisga'as.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il n'y a pas là matière à un recours au Règlement.
M. Jim Gouk: Madame la Présidente, j'aimerais conclure en disant que nous sommes en train de débattre un projet de loi qui a des conséquences incroyable pour la Colombie-Britannique, un document qui est plus épais que l'annuaire d'Ottawa, et pourtant le gouvernement refuse de même envisager d'y apporter le moindre changement. Si le gouvernement voulait ne serait-ce que prétendre qu'il fait les choses démocratiquement, il tiendrait des audiences en Colombie-Britannique, il prendrait en compte les inquiétudes des Britannos-Colombiens et veillerait à ce que l'Accord définitif soit juste envers tout le monde.
M. Darrel Stinson: Madame la Présidente, aujourd'hui, j'ai beaucoup entendu parler, surtout de la part des gens d'en face, des consultations qui ont eu lieu dans la province.
Je veux que tout le monde sache que nous avons contacté Victoria au sujet de ces soi-disant consultations. Pas une seule annonce n'avait été faite. J'ai pris moi-même l'initiative de placer des annonces. Avant cela, personne n'était au courant. C'est pour vous dire à quel point le gouvernement néo-démocrate de la Colombie-Britannique est ouvert. Il l'est, comme l'a dit le député, presque autant que celui-ci.
Le député a-t-il participé directement aux consultations et aux sondages qui ont eu lieu en Colombie-Britannique?
M. Jim Gouk: Madame la Présidente, il est important de comprendre que nous sommes ici pour représenter les gens.
J'ai participé à un débat télévisé en direct d'une durée de deux heures avec un ministre du gouvernement néo-démocrate provincial. À cette occasion, j'ai offert de payer pour faire tenir un sondage scientifique dans sa circonscription, s'il acceptait de voter selon les résultats du sondage. Il a refusé, mais j'ai fait effectuer le sondage quand même.
Dans sa circonscription et dans la circonscription voisine représentée par un autre député néo-démocrate, le sondage a révélé que la majorité des gens y étaient opposés. Plus intéressant encore, nous avons effectué une ventilation des données du sondage, comme cela se fait souvent dans les sondages, et nous avons identifié qui, parmi les personnes interrogées, étaient des partisans néo-démocrates. Soixante-dix pour cent de ceux qui disaient appuyer le NPD provincial ont répondu qu'ils voulaient un référendum, qu'ils voulaient se prononcer à ce sujet. Le gouvernement provincial ne les a pas écoutés, et c'est maintenant au tour du gouvernement fédéral de ne pas écouter.
J'ai des documents de la ministre fédérale précédente des Affaires indiennes et de son homologue provincial. Ils ont tous deux dit aux gens qu'ils espéraient qu'on reconnaîtrait leur tenure, mais que, dans le cas contraire, ils espéraient qu'on leur offrirait une indemnisation. Voilà un exemple typique de ce qui se passe en Colombie-Britannique à cet égard. Cela arrive également aux éleveurs.
Nous avons reçu une autre note d'information du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire qui nous apprend que le ministre a déclaré que, dans la seule région de l'Okanagan, 1 000 fermes seraient touchées par l'accord nisga'a, et pourtant ces gouvernements sont tous prêts à aller de l'avant. Je ne sais pas si c'est à cause d'un sentiment de culpabilité à l'égard du passé, mais ils refusent d'écouter la voix de la raison. Il est ironique de penser que cet accord est non seulement mauvais pour les non-autochtones en Colombie-Britannique, mais il n'est même pas bon pour les Nisga'as.
M. Gerald Keddy: Madame la Présidente, j'ai écouté les interventions des réformistes dans le débat. Franchement, il semble qu'on en arrive toujours au même point chaque fois que les réformistes adoptent cette attitude destructrice dans un débat portant sur une politique d'intérêt public. Quand ça ne fonctionne pas, le Parti réformiste démolit tout jusqu'au plus petit dénominateur commun et veut tout reconstruire, même s'il n'a pas les matériaux pour le faire.
Ils ont souvent fait allusion à la Cour suprême du Canada. Or, il nous est arrivé beaucoup trop souvent d'avoir recours à la Cour suprême pour traiter avec les premières nations au Canada. Chaque fois, nous avons finalement été aux prises avec une décision qui nous liait légalement, que nous devions appliquer et avec laquelle nous devions composer.
S'il pense aux arrêts Sparrow, Delgamuukw, Simon, Gladstone, Smokehouse et à toutes les décisions rendues par la Cour suprême depuis une décennie et même de la décennie précédente, le député voudrait-il vraiment continuer de s'en remettre à la Cour suprême? Certains ont fait des commentaires sur ce qui se passe sur la côte est du Canada.
N'est-il pas nettement préférable de débattre d'une politique d'intérêt général en réunissant les premières nations, le gouvernement fédéral et les provinces, afin d'établir un processus visant à conclure un traité qui, même s'il n'est pas parfait pour tout le monde, l'est pour la majorité et à arriver à une décision avec laquelle tous les Canadiens peuvent composer?
Le député ne croit-il pas qu'il est nettement préférable de recourir à ce processus au lieu de laisser la Cour suprême dicter aux Canadiens les lois à observer?
M. Jim Gouk: Madame la Présidente, le député réclame un débat public et la participation du public, et pourtant la population a été exclue du processus. Si toute la population avait été consultée, l'accord serait bien meilleur.
Fait intéressant, le député a mentionné la décision rendue dans l'affaire Delgamuukw. J'oublie toujours si s'était son parti ou le NPD qui était en cause, car ils sont tous les deux liés de très près ces jours-ci. Lorsque l'affaire Delgamuukw a éclaté en Colombie-Britannique, c'est le gouvernement provincial qui a remporté la cause. Toutefois, au moment où la décision a été rendue, un gouvernement néo-démocrate venait d'être élu et il a encouragé les intéressés à faire appel. Il a ensuite licencié tous les avocats qui avaient remporté la cause pour lui et concédé un certain nombre d'arguments qu'il avait pourtant remportés. Le tribunal a finalement décidé de rappeler les avocats licenciés et d'en faire des intervenants désintéressés afin d'avoir quelqu'un pour défendre les intérêts de la population de la Colombie-Britannique.
Oui, la décision rendue dans l'affaire Delgamuukw pose un grand problème, mais la cause de ce problème, c'est le gouvernement qui a signé ce sacré rapport.
M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Madame la Présidente, je partagerai le temps qui m'est accordé avec le député de Nanaimo—Cowichan.
Au nom des habitants d'Okanagan—Coquihalla, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-9, Loi portant mise en vigueur de l'Accord définitif nisga'a. La Chambre est saisie aujourd'hui d'une question très importante, et les députés doivent être en mesure de représenter leurs électeurs.
Aujourd'hui et pendant toute la durée du débat, nous verrons le gouvernement libéral fédéral tenter d'entraver le débat. Il utilisera tous les moyens à sa disposition, y compris la clôture et toutes les tactiques imaginables, pour éviter que l'Accord définitif nisga'a fasse l'objet d'un examen exhaustif. La population de la Colombie-Britannique n'a pas eu l'occasion d'exprimer son opinion sur l'Accord définitif nisga'a.
Il faut absolument que les députés de notre parti en particulier, mais aussi tous les députés de la Colombie-Britannique puissent se prononcer sur cette question et rapporter ce que les électeurs de leur circonscription leur ont dit, car il s'agit d'un accord très important. C'est probablement l'un des accords les plus importants à avoir été conclus avec les autochtones du Canada depuis un certain temps.
Aux termes de cet accord, plus de 5 500 Nisga'as deviendront propriétaires de terres dont la superficie équivaut à la moitié de la région d'où je suis originaire, la vallée de l'Okanagan. Plus de 200 000 personnes vivent dans la vallée de l'Okanagan, comparativement à 5 500 Nisga'as. Ces 5 500 Nisga'as seront non seulement propriétaires de ces terres, mais ils auront aussi des droits relatifs aux ressources forestières et minières et aux ressources en eau; ils auront aussi leur mot à dire dans la gestion des ressources fauniques.
On versera également aux Nisga'as des paiements en espèces. Selon une analyse indépendante menée par la firme R.M. Richardson and Associates, le coût total de l'accord sera d'au moins 1,3 milliard de dollars, soit l'équivalent de 260 000 $ par Nisga'a. La conclusion de cet accord est d'autant plus dramatique que le gouvernement fédéral compte s'inspirer de l'entente intervenue avec les Nisga'as pour plus de 50 autres accords à venir.
Il n'y rien d'étonnant à ce que les Britanno-Colombiens s'inquiètent. Je tiens à dire que jusqu'à maintenant, à titre de député d'Okanagan—Coquihalla, j'ai reçu, à moi seul, des pétitions signées par des milliers de personnes qui sont préoccupées par cet accord. Elles veulent qu'on réponde à leurs questions. Voilà pourquoi il est important d'avoir un débat en bonne et due forme, même si le gouvernement libéral fera tout en son pouvoir pour tenter d'empêcher la tenue de pareil débat.
Des consultations populaires menées en Colombie-Britannique révèlent que plus de 90 p. 100 des Britanno-Colombiens s'opposent à l'accord. Il convient aussi de signaler que seulement 60 p. 100 des Nisga'as ont donné leur aval à l'Accord définitif nisga'a.
En proposant des accords comme celui-ci, on veut aider à résoudre les problèmes sociaux et économiques persistants qui accablent les autochtones de notre pays. Si nous avions l'impression que cet accord allait résoudre ces problèmes, mes collègues et moi l'appuierions sans réserve. Malheureusement, ce n'est pas le cas. L'accord laisse planer encore plus d'incertitude qu'auparavant pour les Nisga'as.
Quand tout aura été dit et fait, et je ne doute pas un instant que le projet de loi sera adopté par la Chambre, l'histoire nous montrera que le Parti réformiste a été le seul de tous les partis politiques à la Chambre des communes, le seul face aux libéraux, aux bloquistes, aux conservateurs de gauche et aux néo-démocrates à s'opposer au projet de loi.
En bout de ligne, après le décompte des voix et une fois que l'accord aura été adopté, les problèmes sociaux et économiques des Nisga'as seront exactement les mêmes. En fait, l'accord garantit encore cent ans de pauvreté aux collectivités nisga'as.
L'accord ne donne pas aux Nisga'as les outils dont ils ont besoin pour bâtir une économie moderne au XXIe siècle. Il ne fait pas cela. C'est malheureux. C'est pourquoi les députés de la Colombie-Britannique et les députés du Parti réformiste sont ici aujourd'hui. En tant que parti politique nous faisons cavalier seul, mais nous appuyons entièrement la nation nisga'a et tous les autres groupes autochtones du Canada.
Nous voulons des règlements définitifs qui leur donnent les outils leur permettant d'élire démocratiquement leurs gouvernements au XXIe siècle et nous voulons qu'ils aient les outils économiques nécessaires pour participer à l'activité économique. Ce sont là les solutions aux véritables problèmes.
Une question très importante, c'est l'inexistence de droits de propriété sur les réserves. C'est là un des obstacles auxquels se heurtent les peuples autochtones. Les droits de propriété sont un élément capital de toute économie. Sans le droit à la propriété privée, il est pratiquement impossible de recueillir du capital pour démarrer une entreprise ou l'agrandir. Les peuples autochtones ne peuvent pas non plus profiter du dur labeur des générations précédentes parce qu'ils ne peuvent hériter de biens. Aux termes de l'Accord définitif nisga'a, toutes les terres appartiendront collectivement au gouvernement nisga'a, qui aura le droit de déterminer quelles terres, s'il en est, seront vendues à des intérêts privés.
En concentrant le pouvoir dans les mains du gouvernement nisga'a, les Nisga'as n'obtiennent pas de droits individuels ni l'égalité avec les autres Canadiens. Étant donné qu'une bonne partie de son pouvoir de dépenser lui sera conféré par le gouvernement fédéral, le gouvernement nisga'a ne deviendra pas financièrement comptable. Les Nisga'as n'obtiendront pas la possibilité et la responsabilité de pourvoir à leur propre avenir et de transmettre les fruits de leur travail à leurs enfants.
Avant que la Chambre étudie cet accord, ou tout autre accord, nous devrions tenir un débat en bonne et due forme sur la question des droits de propriété des peuples autochtones. Les droits de propriété devraient être la pierre angulaire de toute entente au XXIe siècle avec les peuples autochtones. Sans eux, nous condamnons les autochtones du Canada à répéter le XIXe siècle et tout ce que cela comporte.
N'oublions pas quel parti a été au pouvoir pendant la plus grande partie de ce siècle. Ce sont le Parti libéral du Canada et les conservateurs libéraux à l'autre bout de la salle qui ont conclu pareilles ententes qui ont condamné les peuples autochtones à une honteuse pauvreté.
À titre de solution, je voudrais proposer trois critères auxquels l'accord nisga'a devrait à tout le moins satisfaire. Il faut assurer une protection adéquate aux occupants des terres nisga'as avec une garantie d'occupation et de droits de propriété qui se comparent à ceux des Canadiens non-autochtones. Il faut prévoir des mesures spéciales pour s'assurer que les personnes ont les mêmes droits relativement au partage des biens matrimoniaux, peu importe qu'elles vivent ou non sur les terres nisga'as. Il faut garantir un droit de propriété individuelle sur les terres nisga'as.
Les lois fédérales et provinciales devraient s'appliquer aux terres indiennes afin de protéger les personnes qui vivent sur ces terres. Les députés d'en face ne cessent de nous dire que tous ceux et celles qui vivent sur ces terres seront visés par les lois et ententes fédérales et provinciales qui sont en place.
J'aimerais vous faire part d'une situation qui existe dans ma propre circonscription d'Okanagan—Coquihalla. Les députés se souviendront que j'ai déposé un projet de loi à la Chambre, relativement à la situation du parc de maisons mobiles Driftwood. Les 51 familles qui y résidaient ont été évincées. On leur a dit qu'elles devaient quitter leurs maisons.
Pourquoi? Parce que leur fosse septique a fait défaut. Ces personnes ont payé un loyer durant des années pour avoir leurs maisons mobiles dans ce parc, puis leur fosse septique a fait défaut. Pourquoi? Nous avons découvert qu'elleci était située dans la réserve et que les inspections nécessaires n'ont pas été faites. La loi sur la location immobilière ne s'appliquait pas à ces personnes, parce que celles-ci vivaient sur des terres de réserve. Une grave injustice a été commise.
Avons-nous vu le gouvernement libéral défendre la cause de ces 51 familles à faible revenu à ce moment-là? Non, il ne l'a pas fait, pas plus que les néo-démocrates ou les conservateurs rouges à l'autre bout ont appuyé ces 51 familles à faible revenu qui ont perdu leurs maisons et dont certaines n'ont reçu que 50 cents pour chaque dollar qu'elle avaient investi. Ces gens sont encore des Canadiens à faible revenu. Ils n'ont plus de maisons. Ils vivent dans ma circonscription. Quatre autres parcs de maisons mobiles risquent de subir le même sort. Pourquoi? C'est parce que le gouvernement libéral compte sur des accords qui sont voués à l'échec.
Cela ne résoudra pas le problème. Je voudrais bien que la Chambre réexamine toute cette question. En bout de ligne, je peux garantir que je serai là pour appuyer les Nisga'a en ce qui a trait à leur avenir et à leur développement économique lorsque tous ces autres gens les auront abandonnés depuis longtemps.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Madame la Présidente, j'ai une question à poser et un point à soulever. Le député a dit que le droit privé de propriété n'est pas protégé dans l'Accord nisga'a alors que, en réalité, s'il avait lu l'accord, il verrait que ce droit est protégé.
Les propriétaires fonciers non-nisga'as qui habitent dans la vallée de la Nass ne sont pas assujettis à l'Accord nisga'a. Ils détiennent toujours tous les droits fonciers à l'égard de leur propriété. L'accord leur donne même des droits fonciers à l'égard de l'assiette des routes menant à cette propriété. Par conséquent, le droit privé de propriété est certainement protégé.
Je trouve cela un peu incongru que les ministériels ne prennent pas la parole pour défendre l'Accord nisga'a. Ils ont choisi de laisser ce débat entre les mains des partis de l'opposition à la Chambre, qui peuvent être ou ne pas être d'accord les uns avec les autres. C'est certainement le gouvernement du Canada, qui représente la population canadienne, qui devrait défendre le traité. C'est un bon traité, et je voudrais entendre davantage de remarques de la part des ministériels. J'aimerais savoir ce que le député en pense.
M. Jim Hart: Madame la Présidente, je suis heureux qu'on me pose la question. Malheureusement, le député ne vient pas de la province de Colombie-Britannique, ce qui fait que son argument est théorique.
Les résidents de la Colombie-Britannique veulent un accord qui a du bon sens, un accord qui ne protège pas les droits de propriété des Nisga'as. Nous parlons des Nisga'as et de leurs droits de propriété. Cet accord ne leur accorde pas de droits de propriété. C'est ce qui doit être protégé. Ils doivent être protégés dans l'accord.
Si nous ne disposons pas des outils voulus, et l'accord ne les comprend pas, pour accorder aux Nisga'as des droits de propriété au XXIe siècle, que nous leur donnons-nous? Nous continuons de leur donner ce à quoi ils ont maintenant été habitués, ce qu'ils ont eu au cours des 200 dernières années, soit de la misère noire. Ils ne pourront participer de façon active à l'économie du pays et de la Colombie-Britannique.
Comme je l'ai dit dans mes observations, ils n'ont pas le droit de propriété. Ils n'ont pas le droit de la léguer à leurs héritiers. Ils n'ont pas le droit de participer par l'entremise d'une entreprise.
Le député dit qu'il aimerait que des députés du Parti ministériel prennent la défense de l'accord nisga'a. Ils ne le font probablement pas parce qu'il est indéfendable.
L'accord n'est pas bon. Il n'a pas de sens pour les Nisga'as. J'espère tout simplement qu'en bout de piste lorsque cette entente sera signée, car elle le sera immanquablement, le député sera disposé à se rendre en Colombie-Britannique et à l'expliquer dans cinq ans au moment où son incidence se sera vraiment fait sentir sur les Nisga'as. J'espère que le député sera encore là pour expliquer qu'il a appuyé l'accord.
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Madame la Présidente, je demanderais à notre collègue de préciser ses commentaires sur la question des droits de propriété. Toute la journée, nous avons entendu les députés réformistes nous dire que ce traité ne reconnaît pas les droits de propriété des Nisga'as.
Le député n'est-il pas d'accord pour dire, s'il a lu le traité bien sûr, que ce document prévoit le transfert de propriété des terres aux Nisga'as en tant que peuple et qu'il prévoit plusieurs façons qui permettraient aux gens d'être propriétaires de la terre sur laquelle ils vivent à titre privé? Le traité précise que les gens ne pourront avoir moins de droits de propriété qu'ils n'en ont actuellement. Ils ne peuvent qu'en avoir davantage. J'aimerais que le député confirme que c'est bien ce que le traité prévoit.
M. Jim Hart: Madame la Présidente, l'accord ne confère aucun droit de propriété individuel aux Nisga'as.
M. Jim Gouk (Kootenay—Boundary—Okanagan, Réf.): Madame la Présidente, la question m'intéresse tout particulièrement, surtout que le dernier orateur est mon voisin de circonscription dans l'Okanagan. Je représente la partie sud alors qu'il en représente la majeure partie.
J'ai en main une copie d'une note documentaire qui fait partie d'une communication entre le ministère provincial de l'agriculture et le ministre de l'Agriculture, Corky Evans, lequel participe à la course à la direction du gouvernement néo-démocrate de la province. On y précise clairement que le traité nisga'a établit un précédent qui aura des répercussions sur tous les grands éleveurs de la province de la Colombie-Britannique qui vivent dans un rayon de 10 kilomètres de la réserve. Seulement dans la région d'Okanagan, environ 1 000 grands éleveurs pourraient être touchés.
J'aimerais entendre les commentaires à ce sujet de mon collègue qui représente une bonne partie de cette région, dont ces 1 000 grands éleveurs.
M. Jim Hart: Madame la Présidente, comme je viens d'une région qui possède un secteur d'élevage de bestiaux et un secteur de culture de la pomme, les ressources naturelles revêtent une très grande importance à nos yeux. Or, dans sa forme actuelle, cet accord a une incidence directe sur les exploitants de ranchs, les arboriculteurs fruitiers et le secteur des ressources naturelles.
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Madame la Présidente, le Parti réformiste a toujours cru que les traités négociés avec nos peuples autochtones devraient être conclus dans les plus brefs délais. C'est pourquoi j'aimerais bien pouvoir intervenir à la Chambre pour exprimer mon appui à ce projet de loi. Malheureusement, ce projet de loi aurait de profondes conséquences non seulement pour ma province natale, la Colombie-Britannique, mais également pour tout le pays.
Bon nombre d'autochtones de ma circonscription et d'ailleurs au Canada vivent dans des conditions épouvantables. J'ai vu des maisons sans eau courante et sans chauffage adéquat. Je me suis entretenu avec des gens désespérément pauvres qui ont presque toujours été au chômage et vivent exclusivement d'aide sociale. J'ai vu les émotions qu'éprouvent ces gens quand ils tendent la main. J'ai ressenti leur désespoir et leur détresse. J'ai vu des enquêtes policières moins que rigoureuses, à la suite de plaintes, sur des malversations sur les réserves.
Il faut vraiment du courage aux autochtones pour se faire connaître dans ces circonstances. Après les témoignages, les photos et toutes les formalités administratives, il est vraiment frustrant et révoltant de voir l'affaire étouffée.
De nombreux autochtones, je l'ai observé de mes yeux, manquent de cette initiative personnelle et de ce dynamisme qui nous donnent à tous une raison de nous lever du lit le matin et de nous efforcer de faire de notre mieux durant la journée.
Pourquoi les autochtones sont-ils si nombreux à manquer d'un tel dynamisme? La raison est simple. C'est à cause de leurs pairs, de la Loi sur les Indiens ou des deux.
Ces dix dernières années, quelque 60 milliards de dollars ont été confiés au ministère des Affaires indiennes et du Nord. Si l'argent pouvait à lui seul régler ces problèmes, ces problèmes auraient dû à mon avis avoir été réglés il y a des années.
Le problème, ce n'est pas l'argent. Le MAINC en a plein. Le problème, c'est que les ressources n'ont jamais atteint les personnes à la base qui en ont le plus besoin. La réalité, c'est que le gouvernement et plusieurs dirigeants autochtones ont fait un tas de promesses qu'ils n'ont pas tenues. La paperasserie administrative a rendu pratiquement impossible à l'autochtone de la base d'avancer.
Au cours de l'été 1988, j'ai assisté à une réunion des autochtones de la base à Airdrie, en Alberta, une initiative du Parti réformiste. À la suite de cette réunion et après avoir entendu plusieurs autochtones, j'ai organisé une réunion sur la responsabilité des autochtones dans ma circonscription, Nanaimo—Cowichan. J'attendais 25 personnes. Voilà le nombre des invitations qui ont été envoyées. Une cinquantaine de personnes, représentant 15 bandes indiennes de tous les coins de l'île de Vancouver, se sont réunies dans une salle.
À maintes et maintes reprises, ces autochtones de la base qui assistaient à la réunion ont exprimé de sérieuses inquiétudes à propos de leurs conseils et leurs chefs de bande respectifs. Parmi tous ceux qui se trouvaient là, les seuls qui ne trouvaient pas qu'il y avait un problème de reddition de comptes étaient les rares personnes qui travaillaient elles-mêmes pour un conseil de bande ou pour le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
De nombreuses personnes sont intervenues les unes après les autres pour dire qu'elles partageaient au sein de leur bande les mêmes inquiétudes que les autres orateurs avaient exprimées. Elles ont également ajouté qu'elles croyaient être les seules à éprouver ce problème jusqu'à ce qu'elles se présentent à cette réunion. Elles étaient heureuses de voir que d'autres étaient prêts à s'avancer pour parler publiquement de ces problèmes. Leur principal sujet de préoccupation était la reddition de comptes de la part de leurs propres dirigeants. Ce n'est pas nouveau. Je vais citer quelques phrases que j'ai entendues au cours de cette réunion:
Il est triste de voir nos semblables nous faire cela à nous.
Si des Blancs nous avaient fait cela, nous pousserions les hauts cris.
Cela m'a vraiment ouvert les yeux.
Les réformistes sont les seuls qui écoutent.
Je me méfie de cet accord, et le manque de détails fermes sur la reddition des comptes à l'intérieur de la bande m'inspire des craintes. Je m'inquiète aussi beaucoup du bien-être des femmes et des enfants. Contrairement à ce que disent les députés d'en face, les droits des femmes nisga'as ne sont pas garantis dans le document.
Il faut veiller sérieusement sur les droits des femmes. J'ai eu l'occasion de discuter avec beaucoup de simples autochtones dans les centres d'amitié et les associations des femmes autochtones. Nous avons parlé de bien des choses, allant des règlements fonciers à l'égalité d'accès aux services de santé en passant par les questions familiales.
Je vous parle ici du fond du coeur. J'ai vu de mes propres yeux le prix terrible que les femmes et les enfants doivent payer dans le système patriarcal autochtone. Le plus souvent, l'élite des conseils de bande leur octroie fort peu de droits. Si le gouvernement libéral se soucie tellement de la famille, pourquoi ne joint-il pas le geste à la parole? Il est temps de le faire.
Une autre de mes préoccupations concerne les droits de propriété de l'individu. Aux termes de l'accord, ce sont le conseil nisga'a, le village ou la société qui seront les propriétaires des terres et donc des ressources aussi.
Je suis fermement convaincu que le fait d'assumer pleinement la responsabilité de ses actes a à la fois ses avantages et ses conséquences. Les conséquences n'importent guère, lorsqu'il n'y a aucun risque personnel, aucun coût à assumer pour la personne même. Les avantages reposent sur le même principe: on risque quelque chose pour réussir s'il y a un avantage personnel à le faire. En un mot, on se soucie de ce qu'on possède.
D'après moi, ce problème n'affecte pas seulement notre communauté autochtone, mais bien toute notre société. Pour plus d'efficacité, j'exhorte le gouvernement à mettre en place des droits de propriété individuels pour tous les Nisga'as.
L'accord présente plusieurs aspects positifs. L'un d'eux consiste à soustraire la nation nisga'a des mesures oppressives de la Loi sur les Indiens. J'espère que les Nisga'as ne passeront pas d'un régime oppressif à un autre. Je me suis interrogé à cet égard. Si je devais être assujetti à cet accord, serais-je satisfait? Je réponds simplement non. Je ne voudrais pas être assujetti aux termes de l'accord et je doute que tous les membres de la nation nisga'a l'acceptent volontiers.
Même si une majorité des Nisga'as approuvaient l'accord, cette majorité ne serait certainement pas écrasante. Au total, 61 p. 100 des Nisga'a ont approuvé l'accord, 39 p. 100 s'y sont opposés et 15 p. 100 des électeurs admissibles ont refusé de se prononcer.
Ma plus grande préoccupation peut-être, c'est que cet accord établit le cadre de tous les traités au Canada. Il reste beaucoup d'accords à négocier. Cependant, je crains que l'utilisation de cet accord en tant que pierre angulaire n'entraîne notre pays sur la voie de la confrontation et le recours devant les tribunaux. J'espère que ce n'est pas ce que mes collègues d'en face attendent. Il suffit de voir ce qui se passe sur la côte ouest et de se pencher sur les conflits liés aux terres de Musqueam. Il suffit de voir ce qui arrive sur la côte est et d'essayer de trouver un sens au fiasco que le gouvernement a créé dans le secteur des pêches.
Tous les Canadiens méritent un accord bien meilleur et je crois que cet accord ne va pas faire entrer les Nisga'as dans le giron canadien, mais créer un mini-État à l'intérieur de notre pays, une nation au sein de notre nation qui, dans 14 domaines différents, a le droit de passer outre aux dispositions de la Constitution canadienne et des lois de la Colombie-Britannique.
Ma famille comprend trois enfants autochtones. Je les aime beaucoup, chacun, tout comme j'aime mes cinq enfants qui ne sont pas autochtones. On a réussi à faire fonctionner notre famille en nous aimant les uns les autres. Je veux que mes enfants grandissent dans un pays où...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je crains de devoir interrompre le député. Il aura environ deux minutes et demie encore à sa disposition lorsque la Chambre sera à nouveau saisie du projet de loi.
* * *
[Français]
LOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET LES DOCUMENTS ÉLECTRONIQUES
La Chambre reprend l'étude interrompue le 22 octobre, de la motion: Que le projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois, soit lu pour la troisième fois et adopté.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Comme il est 18 h 30, conformément à l'ordre adopté le vendredi 22 octobre 1999, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé sur la motion à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-6.
Convoquez les députés.
(La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)
Vote no 45
POUR
Députés
Abbott | Adams | Alcock | Anderson |
Assadourian | Augustine | Axworthy (Winnipeg South Centre) | Bailey |
Baker | Bakopanos | Barnes | Beaumier |
Bélair | Bélanger | Bellemare | Bennett |
Benoit | Bertrand | Bevilacqua | Blaikie |
Blondin - Andrew | Bonin | Bonwick | Boudria |
Bradshaw | Breitkreuz (Yorkton – Melville) | Brown | Bryden |
Bulte | Caccia | Cadman | Calder |
Cannis | Caplan | Carroll | Casson |
Catterall | Cauchon | Chamberlain | Chan |
Charbonneau | Chatters | Clouthier | Coderre |
Comuzzi | Copps | Cullen | Cummins |
Davies | Desjarlais | DeVillers | Dion |
Discepola | Dockrill | Dromisky | Drouin |
Duhamel | Duncan | Earle | Easter |
Eggleton | Elley | Epp | Finlay |
Folco | Fontana | Forseth | Fry |
Gagliano | Gallaway | Gilmour | Godfrey |
Godin (Acadie – Bathurst) | Goldring | Goodale | Gouk |
Graham | Gray (Windsor West) | Grewal | Grose |
Guarnieri | Harb | Harris | Hart |
Harvard | Hill (Macleod) | Hill (Prince George – Peace River) | Hilstrom |
Hubbard | Iftody | Jackson | Jaffer |
Jennings | Johnston | Jordan | Karetak - Lindell |
Karygiannis | Kenney (Calgary Southeast) | Keyes | Kilger (Stormont – Dundas – Charlottenburgh) |
Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson | Konrad | Kraft Sloan |
Lastewka | Lavigne | Lee | Leung |
Limoges (Windsor – St. Clair) | Lincoln | Longfield | Lunn |
MacAulay | Mahoney | Malhi | Maloney |
Mancini | Manley | Mark | Marleau |
Martin (LaSalle – Émard) | Martin (Winnipeg Centre) | Matthews | Mayfield |
McCormick | McDonough | McGuire | McKay (Scarborough East) |
McLellan (Edmonton West) | McNally | McTeague | McWhinney |
Meredith | Mills (Broadview – Greenwood) | Mills (Red Deer) | Minna |
Murray | Myers | Nault | Nunziata |
Nystrom | O'Brien (Labrador) | O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly |
Obhrai | Pagtakhan | Pankiw | Paradis |
Parrish | Patry | Penson | Peric |
Peterson | Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pillitteri |
Pratt | Proctor | Proud | Provenzano |
Ramsay | Redman | Reed | Reynolds |
Richardson | Ritz | Robillard | Robinson |
Rock | Saada | Scott (Fredericton) | Scott (Skeena) |
Sekora | Serré | Shepherd | Solberg |
Solomon | Speller | St. Denis | St - Julien |
Steckle | Stewart (Northumberland) | Stinson | Stoffer |
Strahl | Szabo | Telegdi | Thibeault |
Torsney | Ur | Valeri | Vanclief |
Volpe | Wappel | Wasylycia - Leis | Whelan |
White (Langley – Abbotsford) | White (North Vancouver) | Wilfert | Wood – 200 |
CONTRE
Députés
Alarie | Bachand (Richmond – Arthabaska) | Bachand (Saint - Jean) | Bellehumeur |
Bergeron | Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) | Bernier (Tobique – Mactaquac) | Bigras |
Borotsik | Brien | Cardin | Casey |
Chrétien (Frontenac – Mégantic) | Dalphond - Guiral | de Savoye | Debien |
Duceppe | Gagnon | Gauthier | Girard - Bujold |
Godin (Châteauguay) | Guay | Guimond | Harvey |
Herron | Jones | Keddy (South Shore) | Laurin |
Lebel | Loubier | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Marchand |
Ménard | Mercier | Muise | Picard (Drummond) |
Plamondon | Power | Price | Rocheleau |
Sauvageau | St - Hilaire | St - Jacques | Thompson (New Brunswick Southwest) |
Tremblay (Lac - Saint - Jean) | Tremblay (Rimouski – Mitis) | Turp | Vautour |
Wayne – 49 |
«PAIRÉS»
Députés
Assad | Canuel | Collenette | Crête |
Desrochers | Dhaliwal | Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière) | Dumas |
Fournier | Ianno | Lalonde | Marceau |
Mifflin | Mitchell | Normand | Perron |
Pettigrew | Stewart (Brant) |
Le vice-président: Je déclare la motion adoptée.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
L'AGRICULTURE
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Madame la Présidente, je remercie le secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire d'être présent à la Chambre ce soir.
Le 18 octobre, j'ai eu le plaisir de poser au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire une question sur un dossier qui m'intéresse vivement et qui intéresse aussi mes électeurs de Brandon—Souris et les agriculteurs de toutes les régions du Canada.
Comme on l'a mentionné à maintes reprises à la Chambre, le ministre de l'Agriculture et son ministère ont mis sur pied un merveilleux programme appelé ACRA, qui doit régler tous les problèmes des producteurs de l'ouest du pays.
Le 18 octobre, j'ai demandé au ministre de l'Agriculture pourquoi seulement 90 millions de dollars avaient été distribués aux quatre provinces pour lesquelles le gouvernement fédéral administre le programme ACRA.
Pour ceux d'entre vous qui ne le sauraient pas, et c'est peut-être le cas du secrétaire parlementaire, il y a quatre provinces qui laissent au ministère fédéral de l'Agriculture le soin d'administrer le programme ACRA en leur nom. Ces provinces sont la Saskatchewan, le Manitoba, Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse.
Dans le contexte de la crise des denrées qui frappe actuellement l'ouest canadien, il ne fait aucun doute que le Manitoba et la Saskatchewan sont les provinces les plus durement touchées, parce qu'elles dépendent plus des céréales et des oléagineux que d'autres provinces, et parce que d'autres denrées sont produites ailleurs au Canada.
Ce montant de 90 millions de dollars est très important parce qu'au 18 octobre c'était la somme qui avait été distribuée à ces quatre provinces. Cependant, le ministre de l'Agriculture s'est levé et, répondant à ma question, il a dit que plus de 200 millions de dollars avaient déjà été versés dans les quatre provinces où le gouvernement fédéral applique le programme. Je l'ai vérifié dans le hansard. Ce n'est pas vrai et j'aimerais que le secrétaire parlementaire m'explique comment on peut confondre un déboursement de 90 millions de dollars et un déboursement de 200 millions de dollars.
Si je soulève cette question, c'est non seulement par ce que cet argent n'a pas été distribué, mais aussi parce que les demandes d'aide en vertu de l'ACRA sont rejetées. Dans ces quatre provinces, 8 000 demandes ont été approuvées et quelque 10 000 ont été rejetées.
En complément à ma question, j'ai demandé au ministre s'il pensait que ces 10 000 agriculteurs dont la demande avait été rejetée n'avaient pas besoin d'aide pour faire face à la crise. Est-il besoin de préciser que c'était la période des questions et non la période des réponses et que le ministre est parti sur une tangente sans répondre à ma question.
Le secrétaire parlementaire pourrait peut-être me dire ce soir si, en fait, ces 10 000 agriculteurs avaient fait une demande par plaisir. Ont-ils fait une demande parce qu'ils pensaient qu'il y avait 900 millions à distribuer, ce qui ne s'est toujours pas produit, comme on l'a vu? Ont-ils fait une demande parce qu'ils n'avaient pas besoin d'aide, ou parce qu'ils voulaient se faire rejeter parce que le programme est mal fait?
Le programme est très mal fait, nous avons pu le constater. Il ne tient pas compte des marges négatives. Le secrétaire parlementaire pourrait peut-être nous expliquer pourquoi, quand le programme a été conçu et mis sur pied, on n'a pas pensé à inclure les marges négatives.
Je dois vous dire, madame la Présidente, que la marche à suivre pour faire une demande est très...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je dois maintenant interrompre le député puisqu'il a épuisé son temps de parole.
M. Joe McGuire (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Madame la Présidente, je sais que le député a été très persévérant dans ses questions sur ce sujet. Il s'agit d'un sujet très important pour sa province et pour toutes les collectivités agricoles des quatre coins du Canada.
Le gouvernement comprend les causes profondes des problèmes financiers auxquels font face certains agriculteurs. Ces causes sont la faiblesse des prix de certains produits dans le monde et, récemment, les mauvaises conditions météorologiques au Canada.
La faiblesse des prix a été accentuée par le recours, par certains de nos partenaires commerciaux, à des mécanismes de soutien qui entraînent des distorsions commerciales. Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire déploie beaucoup d'efforts, sur la scène internationale, pour montrer que ces actions répétées mineront les efforts qui visent à réformer le commerce des produits agricoles.
Les chiffres que j'ai en main concernent l'ensemble du Canada, et non seulement les quatre provinces. Au 21 octobre 1999, des paiements totalisant 220 millions de dollars ont été effectués. Cela représente en moyenne un paiement de 14 034 $ par agriculteur. Actuellement, le bureau d'administration du programme ACRA traite quelque 1 200 demandes par semaine. Les agriculteurs ont toujours accès au programme CSRN et le gouvernement continue de verser des fonds dans les CSRN des producteurs. Il a déjà versé plus de 126 millions de dollars cette année. Plus de 135 000 agriculteurs ont quelque 2,7 milliards de dollars dans les comptes. Il s'agit là d'une réserve considérable où puiser.
Nous avons pris les mesures voulues pour résoudre rapidement les problèmes causés par les mauvaises conditions météorologiques et par la faiblesse des prix de certains produits, et nous posons les assises pour faire en sorte que nos partenaires commerciaux participent aux négociations de l'OMC en s'engageant à apporter des changements importants. Forts de notre collaboration avec les gouvernements provinciaux pour renforcer notre système de soutien du revenu à long terme, nous offrons aux agriculteurs canadiens l'aide à court terme et à long terme dont ils ont besoin.
LES PÊCHES
Mme Angela Vautour (Beauséjour—Petitcodiac, PC): Madame la Présidente, le 14 octobre dernier, j'ai posé une question au ministre des Pêches et des Océans. La question était très claire. La non-réponse que j'ai obtenue l'était tout autant.
Le rejet du moratoire de 30 jours de la pêche dans la région de l'Atlantique illustre clairement que le ministre continue de ne pas tenir compte de la gravité et de l'importance de la situation. Le gouvernement a montré aux gens les plus directement touchés qu'il n'a absolument aucun leadership. Par sa bêtise dans le dossier de la pêche, le gouvernement a propagé une véritable peur dans les villages de pêcheurs de tout le Canada atlantique. Ma question était très claire. Qu'a fait le gouvernement ou que fera-t-il pour que les gens des communautés autochtones et non autochtones retrouvent la sécurité et la tranquillité d'esprit?
Le manque de sérieux dont fait preuve le gouvernement dans ce dossier prouve qu'il ne comprend pas la gravité de la situation. Le ministre a choisi de ne pas répondre à la question et a même tenté de la ridiculiser. La réponse était pourtant claire: le gouvernement n'a rien fait et ne compte rien faire pour ces collectivités.
Il n'a fait aucune démarche pour discuter avec la population touchée. C'est clair. En discutant avec la population, on s'aperçoit qu'on a besoin de mesures concrètes et de ressources pour établir un rapprochement entre les collectivités. Nous ne pouvons laisser la situation empirer comme le fait le gouvernement, faute de leadership.
[Français]
Les pêcheurs commerciaux de Fundy, Richibucto, Richibouctou-Village, Sainte-Anne, Saint-Thomas, Cap-Pelé et Port Elgin se demandent s'ils ont toujours un avenir dans le secteur de la pêche.
Les communautés ont besoin de voir se manifester du leadership de la part de ce gouvernement. C'est quelque chose qui n'existe pas présentement.
[Traduction]
Il faut que le gouvernement fasse preuve de leadership maintenant, pas dans un an. Les collectivités autochtones et non autochtones ont besoin d'un gouvernement fort qui veillera à leur bien-être. Pour y parvenir, il faudra mettre en application des mesures de conservation et adopter des règles et des règlements qui assureront le maintien des stocks de homards, de pétoncles et de crevettes. Si nous ne prenons pas de mesures pour assurer la conservation de nos ressources naturelles, la victoire que les autochtones ont remportée devant la Cour suprême ne sera plus une victoire, car dans 10 ans, il n'y aura plus de ressources.
Il y a des pêcheurs sérieux qui sont inquiets. J'ai parlé à des pêcheurs hier. Ils se demandent s'ils pourront encore pêcher le printemps prochain. Ils se demandent s'ils pourront partir en mer pour pêcher. Ils se demandent quels règlements et règles seront en place.
Il convient aussi de parler du nombre insuffisant de fonctionnaires du MPO présents sur nos eaux, non seulement pendant la crise, mais aussi avant celle-ci. Cet automne, je suis allée sur les quais m'entretenir avec des pêcheurs pendant qu'ils préparaient leurs poissons. Bon nombre se sont plaints de l'absence de fonctionnaires du MPO qui devraient patrouiller nos eaux pour protéger les espèces. Maintenant que cette nouvelle crise a éclaté, nous savons que le personnel du MPO n'est pas en mesure de gérer le problème et qu'il peut encore moins le faire en l'absence de leadership de la part du ministre fédéral.
J'espère que le problème sera réglé dans quelques mois parce qu'il y a d'autres...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je suis désolée, mais le temps de la députée est écoulé.
M. Lawrence D. O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Madame la Présidente, je vous remercie de me donner l'occasion de décrire les mesures que nous prenons pour planifier la mise en oeuvre de la décision Marshall en tenant compte des préoccupations très réelles des pêcheurs et des collectivités de pêcheurs des provinces de l'Atlantique.
Je voudrais faire une brève digression. Je voudrais dire au député que nous prenons cette question au sérieux. M. Mackenzie est dans le Canada atlantique et travaille là-dessus en ce moment. M. Mackenzie est le représentant en chef du gouvernement fédéral. Il est né en Nouvelle-Écosse et il y a grandi. Il était le négociateur en chef des revendications territoriales du gouvernement fédéral pour les revendications de l'association des Inuit du Labrador. Il a travaillé sur le volet principal des pêches. Il y a aussi la question du nickel à la baie Voisey, sur laquelle nous sommes parvenus à une entente de principe. Je ne doute pas que M. Mackenzie contribuera au règlement du problème.
Sa tâche immédiate consiste à conclure des arrangements pour la gestion des pêches à court terme. La première tâche est en bonne voie. Il a eu des discussions avec des groupes d'autochtones et des groupes de pêcheurs commerciaux de toutes les Maritimes. M. Mackenzie se concentre pour l'instant sur la pêche au homard. Le député a parlé d'autres espèces. Il a raison. Il y a d'autres espèces dont il faut se préoccuper dans les zones où l'ouverture de la pêche commerciale est imminente, mais il faudra dans chaque cas avoir des ententes.
À la fin d'avril 2000, et je crois que c'est le plus important, un plan sera en place pour...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je crains que le temps dont disposait le député ne soit écoulé.
[Français]
La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 14 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 19 h 16.)