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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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36e Législature, 2e Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 117
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 19 septembre 2000
AFFAIRES COURANTES |
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Derek Lee |
LA JUSTICE |
M. John Maloney |
LA LOI SUR L'ACCÈS À L'INFORMATION |
Projet de loi C-494. Présentation et première lecture |
M. Bill Casey |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Derek Lee |
Motion |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Derek Lee |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL |
Projet de loi C-33. Deuxième lecture |
M. Gurmant Grewal |
M. Loyola Hearn |
M. Peter Stoffer |
M. Daniel Turp |
Mme Louise Hardy |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
M. Peter Stoffer |
M. Myron Thompson |
M. Jean-Guy Chrétien |
M. Jim Abbott |
Mme Christiane Gagnon |
M. Lee Morrison |
M. Jean-Paul Marchand |
M. Leon E. Benoit |
M. Peter MacKay |
M. Paul Mercier |
M. Roy Bailey |
M. Maurice Dumas |
M. Ted White |
M. Pierre Brien |
M. Keith Martin |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LE JOURNALISTE JEAN V. DUFRESNE |
Mme Raymonde Folco |
LA FISCALITÉ |
M. Ken Epp |
ROBERT S. K. WELCH |
M. Walt Lastewka |
LES SPORTS |
M. Jerry Pickard |
LE PRIX DE L'ESSENCE |
M. Guy St-Julien |
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES |
M. Gurmant Grewal |
LES JEUX OLYMPIQUES |
M. Peter Milliken |
LA GUERRE DE CORÉE |
M. Paul Mercier |
LES PARTIS POLITIQUES |
M. John Bryden |
LE CRIME ORGANISÉ |
M. Jim Abbott |
LE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL |
M. Eugène Bellemare |
L'ALLIANCE CANADIENNE |
L'hon. Lorne Nystrom |
LE LEADER DU GOUVERNEMENT À LA CHAMBRE DES COMMUNES |
M. Ghislain Lebel |
LE DÉPUTÉ DE MISSISSAUGA-OUEST |
M. Steve Mahoney |
LE DÉPUTÉ DE KINGS—HANTS |
M. Bill Casey |
AFFAIRES COURANTES |
LES NOUVEAUX DÉPUTÉS |
Le Président |
PRÉSENTATION DE NOUVEAUX DÉPUTÉS |
Le très honorable Joe Clark (Kings—Hants) |
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla) |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Gilles Duceppe |
Mme Alexa McDonough |
M. Stockwell Day |
Le très hon. Joe Clark |
QUESTIONS ORALES |
LES TAXES SUR LES CARBURANTS |
M. Stockwell Day |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Stockwell Day |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Stockwell Day |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Stockwell Day |
Le très hon. Jean Chrétien |
M. Stockwell Day |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE CRIME ORGANISÉ |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Anne McLellan |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Anne McLellan |
Mme Pierrette Venne |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Pierrette Venne |
Le très hon. Jean Chrétien |
LE PRIX DE L'ESSENCE |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Ralph E. Goodale |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Ralph E. Goodale |
LA SANTÉ |
Le très hon. Joe Clark |
Le très hon. Jean Chrétien |
Le très hon. Joe Clark |
Le très hon. Jean Chrétien |
LES PÊCHES |
M. John Cummins |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
M. John Cummins |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
LES JEUNES CONTREVENANTS |
M. Michel Bellehumeur |
L'hon. Anne McLellan |
M. Michel Bellehumeur |
L'hon. Anne McLellan |
LES PÊCHES |
M. Derrek Konrad |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
M. Derrek Konrad |
L'hon. Robert D. Nault |
LES SURPLUS BUDGÉTAIRES |
M. Yvan Loubier |
L'hon. Paul Martin |
M. Yvan Loubier |
L'hon. Paul Martin |
LE CRIME ORGANISÉ |
M. Randy White |
L'hon. Anne McLellan |
M. Randy White |
L'hon. Anne McLellan |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Paul Crête |
L'hon. Jane Stewart |
LA LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL |
M. Gar Knutson |
L'hon. David Anderson |
LE TRANSPORT DU GRAIN |
M. Jay Hill |
L'hon. Ralph E. Goodale |
M. Jay Hill |
L'hon. Ralph E. Goodale |
LE LOGEMENT |
Mme Libby Davies |
M. Paul Szabo |
Mme Libby Davies |
M. Paul Szabo |
LES PÊCHES |
M. Gerald Keddy |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
Mme Angela Vautour |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
L'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL |
Mme Jean Augustine |
L'hon. Maria Minna |
LE VIETNAM |
M. Monte Solberg |
L'hon. Lloyd Axworthy |
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES |
M. Jean-Paul Marchand |
L'hon. Jane Stewart |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Svend J. Robinson |
L'hon. David Anderson |
LA FISCALITÉ |
M. John Herron |
L'hon. Paul Martin |
LES COMMUNICATIONS |
L'hon. Charles Caccia |
L'hon. John Manley |
PRÉSENCE À LA TRIBUNE |
Le Président |
Le Président |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES ADOLESCENTS |
Projet de loi C-3—Motion d'attribution de temps |
L'hon. Don Boudria |
Adoption de la motion |
LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL |
Projet de loi C-33. Deuxième lecture |
M. Keith Martin |
M. Ghislain Lebel |
M. Bill Gilmour |
M. Pierre de Savoye |
M. Deepak Obhrai |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
M. Grant Hill |
M. Louis Plamondon |
M. Réal Ménard |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU |
Projet de loi C-289. Deuxième lecture |
M. Eric Lowther |
M. Roy Cullen |
M. Gilles-A. Perron |
Mme Louise Hardy |
Mme Angela Vautour |
M. Maurice Vellacott |
M. Eric Lowther |
MOTION D'AJOURNEMENT |
Les affaires étrangères |
M. Svend J. Robinson |
M. Denis Paradis |
L'assurance-emploi |
M. Greg Thompson |
Mme Raymonde Folco |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 117
CHAMBRE DES COMMUNES
Le mardi 19 septembre 2000
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
AFFAIRES COURANTES
[Français]
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 10 pétitions.
* * *
[Traduction]
LA JUSTICE
M. John Maloney (secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, un livre blanc intitulé «Application de la loi et responsabilité criminelle».
* * *
LA LOI SUR L'ACCÈS À L'INFORMATION
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC) demande à présenter le projet de loi C-494, Loi modifiant la Loi sur l'accès à l'information.
—Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de présenter, aujourd'hui, ce projet de loi.
Il a pour effet d'assujettir Nav Canada aux dispositions de la Loi sur l'accès à l'information, car les informations concernant la sécurité des systèmes de navigation aérienne au Canada sont devenues inaccessibles aux porte-parole de l'opposition, aux ministres et aux directeurs d'aéroports.
Avant l'aliénation de la société, quand le système de contrôle de la circulation aérienne était encore du ressort de Transports Canada, ces informations étaient mises à la disposition des porte-parole de l'opposition et des directeurs d'aéroports pour les aider à élaborer et à mettre en place une réglementation en matière de sécurité. Aujourd'hui, il n'est plus possible de consulter les mémoires relatifs à la sécurité, les rapports sur les conditions d'exploitation établis par les contrôleurs eux-mêmes et les rapports techniques de Nav Canada.
J'estime que nous sommes nettement handicapés par l'impossibilité d'accéder à ces informations alors que nous le pouvions auparavant. J'espère que le projet de loi sera adopté et qu'il bénéficiera de l'appui de tous les députés.
(Les motions sont réputées adoptées et le projet est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, après consultation entre les leaders parlementaires, vous constaterez qu'il y a consentement unanime sur la motion suivante, qui traite de l'ordre du jour de la Chambre pour aujourd'hui. Je propose:
Que, nonobstant les dispositions de l'article 30(5) du Règlement, les déclarations de députés aux termes de l'article 31 du Règlement se fassent aujourd'hui de 13 h 45 à 14 heures, suivies de la présentation des nouveaux députés et des formalités connexes et de la période de 45 minutes réservée aux questions orales.
Le vice-président: Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion?
Des voix: D'accord.
Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
Le vice-président: Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 13 juin, de la motion: Que le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends la parole au nom des citoyens de Surrey-Centre sur le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.
Il faut tout d'abord songer à ce que les Canadiens veulent lorsqu'il s'agit de protéger les espèces en péril. Tous les Canadiens veulent contribuer à l'environnement. Tous les Canadiens veulent protéger les espèces qui sont en péril et protéger ou rétablir leur habitat fragile. Le plan de l'Alliance canadienne permet de réaliser ces objectifs.
Les Canadiens reconnaissent la nécessité d'adopter une approche proactive pour protéger les espèces en péril, c'est-à-dire une approche fondée sur le respect: respect pour les espèces qui vivent sur nos terres et dans nos eaux et respect les personnes qui habitent ces mêmes terres. Notre plan visant à protéger les espèces en péril consiste en une politique pleine de bon sens qui tient compte des besoins de tous les intervenants. Notre plan est équilibré, conciliant, pratique et réalisable.
L'Alliance canadienne entend protéger l'environnement naturel et les espèces en danger du Canada et assurer le développement durable de nos abondantes ressources pour les générations actuelles et à venir.
Aux yeux de l'Alliance canadienne, pour être efficace, une loi concernant la protection des espèces en péril doit respecter les droits fondamentaux des propriétaires de terres privées.
Les quatre aspects que je considère importants dans le projet de loi sont l'indemnisation des propriétaires; la mise en oeuvre des programmes de rétablissement des espèces en péril; le rôle du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada; et, enfin, le respect et l'application de la loi et la résolution des différends. Examinons ces questions en détail.
Le premier élément touche la question de l'indemnisation. Il n'est pas juste d'offrir une indemnisation en deçà de la valeur marchande pour les terres expropriées. Le projet de loi sur les espèces en péril dont nous traitons aujourd'hui ne fait qu'effleurer la question clé de l'indemnisation. Il ne prévoit pas précisément de formule de calcul de l'indemnisation. Cette question sera précisée dans un règlement par suite de l'adoption de la loi, et nous savons tous comment fonctionnent les règlements. Le ministre se trompe. Il ne risque pas d'y avoir beaucoup de collaboration entre les actionnaires à moins que l'on puisse garantir une juste valeur marchande aux propriétaires pour toute terre expropriée dans le but d'assurer la protection ou le rétablissement d'une espèce ou d'un habitat.
Le deuxième élément clé touche la planification du rétablissement de certaines espèces. Les stratégies de rétablissement devraient prévoir les activités nécessaires. Tout plan de rétablissement devrait tenir compte des coûts estimés du rétablissement pour une espèce ou un habitat particulier. L'inscription et les plans de rétablissement devraient être intégrés dans la loi. Sans une telle planification, nous en viendrons à inscrire des espèces que nous ne sommes pas en mesure de protéger. On ne devrait pas inscrire une espèce comme étant en péril à moins de pouvoir prouver de façon scientifique qu'elle est réellement en péril. De plus, on ne devrait pas exproprier de terres à moins de pouvoir prouver scientifiquement que les espèces en cause pourront être rétablies.
Le troisième élément a trait au rôle du Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril. Pour ce qui est du processus d'inscription de la liste des espèces en péril, l'Alliance canadienne appuie la création d'un organisme scientifique indépendant, tel le Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril, tout en reconnaissant le rôle et les pouvoirs du Parlement au chapitre de la planification du rétablissement.
Le dernier point, qui porte sur l'application, l'exécution et le règlement des différends, est fort important. Les libéraux ne devraient pas proposer de lois qui font planer la menace de sanctions criminelles, en plus du recours au pouvoir fédéral d'expropriation.
Toute expropriation de biens privés par le gouvernement devrait être assujettie à un processus comprenant un mécanisme de révision qui offre aux propriétaires une forme d'arbitrage ou de règlement des différends. Au besoin, et seulement au terme d'un examen équitable et d'un processus de règlement des différends, l'expropriation de terres privées, à leur juste valeur marchande, peut être raisonnable. Le processus devrait prévoir également que tout recours au droit pénal par le gouvernement contre des propriétaires privés est déraisonnable. Un mécanisme fonctionnel de règlement des différends rendrait le recours au droit pénal presque complètement inutile.
La majorité des producteurs et des propriétaires fonciers estiment que le gouvernement pourrait obtenir de meilleurs résultats avec les agriculteurs et les éleveurs en collaborant plutôt qu'en brandissant des menaces de sanctions.
Jusqu'à maintenant, je m'en suis tenu aux problèmes que l'opposition officielle relève dans le projet de loi.
Les habitants de Surrey-Centre, que je représente, habitent loin des grands centres urbains et des banlieues. Nous ne courrons pas le risque que nos terres soient confisquées sans une indemnisation correspondant à leur juste valeur marchande, mais nous ne voulons pas qu'un seul Canadien soit soumis à un traitement injuste. Dans Surrey-Centre, nous sommes nombreux à être propriétaires de nos maisons. Nous avons un prêt hypothécaire à rembourser comme tout le monde. Nous ne voudrions pas que les libéraux s'emparent d'une partie du territoire qui entoure nos maisons sans nous indemniser pour ces terres qu'ils disent devoir nous prendre pour des raisons évidentes.
Mes électeurs ne veulent pas que je reste assis à la Chambre à ne rien faire pendant que les libéraux menacent de prendre à des citoyens canadiens de grandes portions de terre, des milliers d'acres dans certains cas, sans leur offrir aucune indemnisation.
Les libéraux sont loin d'aider de façon démocratique les propriétaires de ranch canadiens à contribuer aux efforts nationaux visant à sauver nos espèces en péril. De fait, ils promettent de les punir. Je sympathise de tout coeur avec les agriculteurs et les propriétaires de ranch qui sont surimposés par le gouvernement et qui souffrent déjà. Le coût de leurs intrants est très élevé, par la faute du gouvernement et de son manque du vision. Ils sont dans une position désavantageuse sur les marchés mondiaux à cause de la piètre feuille de route du gouvernement au chapitre du commerce international. À l'heure actuelle, les libéraux prévoient prendre à des Canadiens des portions de terre, parfois des milliers d'acres, m'a-t-on dit, sans leur offrir une indemnisation et en les menaçant de porter sur eux des accusations au criminel.
J'ai reçu une lettre d'un de mes électeurs, M. David Pope, dont je voudrais faire part. Il dit que les peines insultantes s'appliquant à des gestes posés contre des plantes, des animaux ou des organismes jugés être des espèces en péril et contre les terres qui forment leur habitat ne ressemblent à aucune peine prévue par les lois pénales canadiennes. Les peines vont de 50 000 $ et/ou une année d'emprisonnement à un million de dollars et/ou cinq ans d'emprisonnement pour chaque infraction. Elles sont doublées s'il y a récidive. Il ne s'agit pas de meurtre, d'incendie volontaire, de vol ou de viol, mais bien de blessures infligées à une plante, un animal ou un organisme ou de destruction d'une partie de son habitat sur des terres appartenant au coupable. C'est scandaleux.
Selon M. Pope, ces infractions sont des infractions de responsabilité stricte. Quelqu'un n'a qu'à accuser une personne d'une infraction, et celle-ci doit prouver son innocence. C'est une inversion de la charge de la preuve, comme le disent les avocats, qui est rarement utilisée au criminel.
Normalement, dans le cas d'une infraction pénale grave, une personne est présumée innocente jusqu'à preuve du contraire et l'on doit faire la preuve de sa culpabilité hors de tout doute raisonnable. Ce n'est pas le cas aux termes du projet de loi C-33. M. Pope ajoute que l'agriculteur ne peut accuser les intéressés d'intrusion. Ils peuvent prendre tout ce qu'ils veulent sans payer. Les maisons peuvent être fouillées aux termes d'un mandat de perquisition qui n'a absolument rien à voir avec les mandats de perquisition émis normalement en cas de meurtre, d'incendie criminel ou de viol ou pour d'autres infractions pénales graves. Ce mandat sera beaucoup plus facile à obtenir. C'est tout à fait honteux.
Lorsque les agents chargés de l'application de la loi commencent à poser des questions aux éleveurs ou aux agriculteurs au sujet d'une infraction présumée, ces derniers doivent prêter aux agents concernés toute l'assistance possible. Ils devront répondre aux questions sous peine autrement d'être accusés d'entrave à la justice. Ils devront témoigner contre eux-mêmes. Or, aux termes du droit canadien, une personne accusée n'a pas à s'incriminer elle-même. C'est pourtant le cas aux termes du projet de loi C-33. On viole une autre liberté civile.
Une autre disposition du projet de loi C-33 prévoit que toute personne âgée d'au moins 18 ans et résidant au Canada peut faire procéder à une enquête contre un éleveur ou un agriculteur pour n'importe laquelle des infractions que je viens d'énumérer. Tout groupe d'intérêt ou toute personne en voulant à un agriculteur ou à un éleveur peut faire déclencher une enquête qui pourrait fort bien coûter à l'agriculteur en cause des milliers de dollars en frais et en amendes, voire l'amener derrière les barreaux. C'est une personne qui s'en prend à son voisin. Voulons-nous vraiment ce genre de société au Canada dans le cas de ce type d'infractions?
Le projet de loi C-33 prévoit que l'éleveur ou l'agriculteur accusé ne pourra jamais savoir qui a fait déclencher une enquête contre lui. Il ne pourra jamais faire face à son accusateur dans le cadre d'une audience publique. Les Canadiens et les gens libres du monde entier ont le droit de faire face à leurs accusateurs dans le cadre d'audiences publiques, mais il n'en est rien aux termes du projet de loi C-33.
Il n'est pas non plus question d'une indemnisation équitable dans le projet de loi. Il y a une disposition portant sur l'indemnisation, mais à en juger par le libellé, il semble que toute indemnisation prévue à la suite d'une restriction réglementaire sur une terre agricole utilisée pour protéger l'habitat d'espèces en péril sera difficile à obtenir et inférieure à la juste valeur marchande. Ce sont les questions qui nous préoccupent.
Les gens que je représente croient qu'il devrait y avoir une façon juste et démocratique de protéger les espèces en péril. Par contre, nous ne croyons pas que, pour ce faire, on devrait avoir recours à des conflits et à des sanctions gouvernementales très lourdes. Le gouvernement aboutit à un gâchis avec tout ce processus.
J'ai quelques recommandations à faire à propos du projet de loi C-33. Cette mesure devrait être fondée sur la coopération volontaire et sur le partenariat entre les parties intéressées et le gouvernement. La chose est possible. Cela peut se faire.
Tous les Canadiens, y compris les éleveurs et les agriculteurs des régions les plus isolées, veulent protéger notre environnement, nos végétaux et nos animaux. Ils veulent protéger la flore et la faune de notre pays. Les gens de Surrey-Centre veulent que le gouvernement travaille de concert avec les parties intéressées en s'assurant leur coopération et en les faisant bénéficier des mesures visant à protéger nos espèces en voie de disparition. Cela peut se faire. Un gouvernement de l'Alliance canadienne le fera. Le gouvernement libéral actuel cherche à procéder de manière indirecte, au moyen de la réglementation. Il a tort d'agir ainsi. Je le sais parce que je siège au Comité mixte d'examen de la réglementation. Il y a un certain nombre de règlements en cours d'examen qui ne devraient pas exister. Ils sont en cours d'examen depuis des années, certains depuis 25 ans, parce que lorsque le Comité écrit aux ministres du gouvernement, ces derniers ne répondent pas ou ne répondent pas d'une manière permettant de résoudre les problèmes. Les règlements reviennent sans cesse au point de départ et continuent d'exister alors qu'ils ne devraient pas exister pour commencer.
Le gouvernement utilise projet de loi après projet de loi. Le projet de loi est de portée très limitée, mais il y a énormément de règlements qui guident la mise en application de cette loi. Ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder. C'est procéder par des moyens détournés, et ce n'est pas correct.
Les libéraux devraient être francs et proposer un véritable projet de loi. Ils devraient décrire en détail comment se fera la protection de ces espèces, mais ils ne le font pas. Les gens de Surrey-Centre n'appuieront pas ce que font les libéraux avec ce projet de loi. Nous trouvons honteux ce que font les libéraux. C'est pourquoi nous ne pouvons pas appuyer le projet de loi C-33.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, je désire faire quelques commentaires concernant cette mesure législative très importante. Je parlerai en faveur de la motion de renvoi.
À notre avis, on fait adopter ce projet de loi à toute vapeur sous la menace d'un retrait de celui-ci par le ministre si jamais se dessinent des possibilités d'amendements ou d'ajustements. Ce n'est certainement pas là la façon d'agir avec une mesure législative aussi importante et névralgique que celle à l'étude, pas plus qu'avec toute autre mesure législative.
On pourrait dire que cette mesure législative disparaîtra tout aussi rapidement que certaines des espèces en péril si nous ne nous ressaisissons pas sous peu et si nous n'agissons pas. Le gouvernement ne peut faire adopter à toute vapeur une mesure législative uniquement parce qu'il est au pouvoir et arrogant, alors qu'un aussi grand nombre de gens et d'espèces sont affectés.
Bon nombre d'organismes manifestent de graves préoccupations concernant le sort réservé aux espèces sauvages. Ce ne sont pas des gens ayant uniquement des préoccupations d'ordre environnemental. Bon nombre de ces personnes sont des citoyens très ordinaires qui ne sont pas nécessairement rattachés aux groupes de protection. Ce sont des gens qui aiment ce que le pays a à offrir. Ce sont des représentants de l'industrie qui commencent à se rendre compte que, s'ils veulent préserver ce magnifique pays et continuer à en tirer leur subsistance, et bien que leur subsistance dépende parfois d'atteinte à l'environnement ou de la destruction d'habitats, ils devront être très conscients de l'environnement et des habitats qui les entourent.
Nous assistons à un regroupement plus rapide que jamais des différents groupes fractionnés dans un souci de préserver nos acquis et ce que nous perdons rapidement. Ces organismes ont beaucoup à offrir si nous leur en accordons la possibilité, si nous les écoutons et si le comité se déplace et écoute leurs présentations. Si nous tenons compte de ce que chaque groupe a de mieux à offrir, si nous prenons la peine de chercher à réunir les vigoureuses recommandations que l'on nous fait, et que nous donnons suite aux préoccupations qui ont été exprimées, nous pouvons certes aboutir collectivement à une mesure législative qui permettra non seulement de faire le travail, mais aussi de bien le faire.
Lorsque nombre d'entre nous ont grandi dans ce magnifique pays qui est le nôtre, surtout dans ses régions rurales, on travaillait et on fonctionnait dans le respect de la nature.
Lorsqu'on prend le temps d'écouter les anciens, on apprend qu'ils vivaient pratiquement de la terre. Ils y arrivaient non pas en pillant celle-ci, mais en prenant seulement ce dont ils avaient besoin et en s'assurant toujours qu'il restait quelque chose pour le lendemain, car ils savaient que la nourriture qu'ils mettaient sur leur table, leur subsistance et celle de leurs enfants en dépendaient.
À l'époque de la colonisation de notre pays et de la traite des fourrures, on croyait peut-être que les animaux étaient tellement nombreux qu'on pouvait en chasser plus qu'on n'en avait besoin ou plus qu'il ne fallait pour assurer la protection des espèces. On a vite compris que c'était une erreur, toutefois, et, au fur à mesure que les animaux qu'on chassait se faisaient rares dans une région, on passait dans une autre.
Nous pourrions sans doute féliciter les gens d'alors d'avoir pris soin de ne pas exterminer les différents groupes d'animaux. Ils ont été forcés d'aller vers l'Ouest et partant, d'ouvrir le pays, poussés non seulement par la curiosité de savoir ce qu'il y avait derrière la prochaine montagne, mais par la nécessité, surtout dans le domaine de la traite des fourrures, de gagner leur vie et de ne pas détruire l'environnement où ils s'étaient d'abord installés.
Nous devrions tirer des leçons du passé. Pendant des années, nous avons laissé prospérer les différentes espèces qui étaient déjà ici à l'arrivée des Blancs, mais au fil du temps, il semble que nous ayons oublié d'y voir. À mesure que nous nous concentrions sur la création de villes et de villages et la construction d'autoroutes, nous n'avons pas tenu compte des dommages que l'intervention de l'homme causait aux habitats de bon nombre de ces espèces.
Tous les habitants de Terre-Neuve se souviennent du grand pingouin, cette espèce aujourd'hui aussi disparue que le seront les libéraux de Terre-Neuve après les prochaines élections. Les seuls qui parviendront à survivre seront ceux qui ne se porteront pas candidats.
Mon bon ami de Bonavista—Trinity—Conception doit être ravi ce matin que les efforts qu'ont déployés les libéraux provinciaux pour se débarrasser de ses collègues ont échoué. Le député de Humber—St. Barbe—Baie Verte sera de retour à la Chambre pour un certain temps de même que le député de Labrador, si je ne m'abuse. Tous les deux ont facilement été élus candidats de leur parti, comme il se doit. C'est donc dire que l'autre système qui est en place n'a certainement pas profité à ceux qui l'appliquaient.
L'hon. Fred Mifflin: Parlez-vous toujours des animaux?
M. Loyola Hearn: C'est au député de décider si je parle encore de faune, puisqu'il connaît beaucoup mieux ses collègues que moi, mais je peux lui assurer que nous ne nous sommes pas tellement éloignés du sujet.
Mais revenons au projet de loi comme tel. J'ai vécu mon enfance à Terre-Neuve, quelques années après mon distingué collègue de Bonavista—Trinity—Conception, et, à l'époque, il semblait y avoir abondance de tout. Jeune, je passais mes soirées aux quais. Nous pouvions apercevoir les anguilles et les jeunes morues dans les ports près des quais. Nous lancions nos lignes à l'eau pour tenter de les attraper.
Il est désormais pratiquement impossible de trouver de la morue à Terre-Neuve. Pendant la récente période de pêche sportive dans des zones où la morue était autrefois abondante, nous n'en avons aperçu aucune. Heureusement, il subsiste encore quelques stocks dans les baies et, si nous agissons avec prudence, ils pourraient peut-être se régénérer pour rebâtir le secteur de la pêche. Cependant, vu le peu de données scientifiques dont nous disposons, la situation est très inquiétante.
Lorsque j'étais enseignant, je roulais un matin vers la localité où j'enseignais. Je m'étais arrêté sur le bord de la route pour admirer une petite zone de pêche, non loin de la côte. J'ai compté 127 bateaux qui pêchaient dans une zone très abondante, à un mille de la côte. Dans cette seule petite zone, la morue était si abondante que 127 bateaux en pêchaient. Il s'agissait de bateaux de 20 à 40 pieds, de petits bateaux de pêche côtière, et non de gros dragueurs. Cet automne, à la fin d'août et en septembre, période qui devrait être excellente pour la pêche, personne n'a pu apercevoir une seule morue dans cette zone. Cela montre bien ce qui se passe lorsque nous ne prenons pas soin de protéger des espèces qui peuvent facilement être détruites.
Dans la plupart de nos localités rurales, les campagnes ont toujours regorgé de canards, de castors, de rats musqués, d'orignaux, de caribous, et les agents chargés de protéger la faune y travaillent avec dévouement. Sans l'appui des gouvernements comme tels, ces agents ont pris sur eux d'assurer la protection des espèces sauvages. Grâce à eux, Terre-Neuve en possède encore abondamment.
Je signale au député de Bonavista—Trinity—Conception que, dans notre grand pays, Terre-Neuve peut être considérée comme la dernière province pionnière. Elle est rapidement en passe de devenir la destination touristique de bien des visiteurs du pays et de l'étranger. Nous attirons beaucoup de touristes européens simplement avec les habitats naturels où on trouve différentes espèces d'animaux et de plantes sauvages. Ces habitats attirent beaucoup d'amateurs de faune et de flore qui sont prêts à parcourir de longues distances pour venir admirer des habitats sauvages.
Dans quelle autre capitale canadienne que St. John's, à Terre-Neuve, pouvons-nous trouver dans un rayon de quatre heures de voiture des troupeaux de caribous qui broutent le long de la route et voir des baleines...
M. Peter Stoffer: Whitehorse.
M. Loyola Hearn: J'ai posé la question et j'ai obtenu une réponse: Whitehorse. Je le crois, mais je dirai donc qu'il n'y a pas beaucoup d'endroits où on peut voir cela. Nous nous y attendons un peu dans le cas du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest. Cela ne surprend pas. Cependant, nous ne nous attendons pas à cela dans le reste du pays. On peut toutefois le voir à Terre-Neuve. On peut conduire sa voiture et voir des caribous au bord des routes. On peut descendre de voiture et regarder les baleines dans la mer. On peut aussi voir des phoques pendant que des canards nous survolent.
Il y a aussi les sentiers en forêt. On est en train d'aménager un magnifique sentier, le East Coast Trail, qui part de St. John's et fait le tour de la péninsule d'Avalon. Beaucoup de travailleurs dévoués sont actifs sur ce chantier où le gouvernement investit beaucoup. Il faut d'ailleurs féliciter le gouvernement d'investir dans de tels projets. Il unit entre eux les sites historiques et culturels de la région et donne aussi à la population la possibilité de pénétrer au coeur des habitats sauvages. La variété des espèces est telle que quiconque ne l'a pas vue de ses propres yeux nous croit difficilement lorsque nous tentons de l'expliquer. En saison, on peut aussi s'arrêter pêcher dans les rivières à saumon. On peut cueillir pratiquement tous les types de baies en marchant dans cette région.
Après une journée, nous avons pu voir des caribous, des baleines, des phoques, des orignaux, des lapins en abondance, toutes sortes d'espèces d'oiseaux. C'est peut-être dans la petite région que constitue la péninsule d'Avalon qu'on trouve la plus grande variété d'oiseaux au Canada.
Nous avons trois ou quatre grandes réserves fauniques dont le sanctuaire d'oiseaux du Cap Saint-Mary's, connu dans le monde entier. Il y a aussi deux ou trois merveilleuses îles au large d'une collectivité appelée Witless Bay où on retrouve un certain nombre d'espèces d'oiseaux qui attirent l'attention des gens du monde entier.
Sans parler des nombreuses autres choses qu'on retrouve dans cette région, il y a des régions où la faune est abondante grâce au dévouement des agents de la faune et peut-être à la sensibilisation des gens.
Le public a compris à quel point il est important de préserver cela. Beaucoup de gens ont vu notre faune en danger. Ils ont même constaté la disparition de certaines espèces. Ils s'inquiètent maintenant au point qu'ils comprennent que nous avons peut-être une autre chance de prendre les mesures qui s'imposent.
Le gouvernement essaie de donner suite à une mesure législative présentée au départ par le gouvernement conservateur. À l'époque, la mesure a été fort bien accueillie par tout le monde. Maintenant, après plusieurs années, le gouvernement présente un projet de loi pour veiller à bien préserver notre faune. Cependant, il se base simplement peut-être sur ce que le ministre croit nécessaire. Or, ce n'est peut-être pas ce qui s'impose et chose certaine, ce n'est pas ce que réclament la plupart des organismes concernés au Canada.
Ce projet de loi devrait faire l'objet d'audiences publiques. Nous devrions prendre notre temps. Nous devrions écouter les groupes et les organismes qui ont tant à nous offrir. Nous avons vu un grand éventail de groupes. Beaucoup n'ont pas réussi au fil des ans à collaborer. Ils ont en fait suivi des voies diamétralement opposées. Quand ils seront disposés à unir leurs efforts pour parvenir à une bonne mesure législative pour tous, on peut alors espérer qu'il sera possible d'adopter une mesure législative dont tout le monde au Canada pourra être très fier.
Je suis en faveur d'un report de l'étude de cette mesure législative importante pour que nous ayons le temps de l'évaluer afin que lorsque la Chambre sera finalement appelée à se prononcer, ce projet de loi puisse être adopté à l'unanimité, car nous saurons alors qu'il aura le mordant voulu pour faire ce qu'une bonne mesure législative devrait faire.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je remercie mon collègue de St. John's pour son exposé. Il a dit que Terre-Neuve était l'une des dernières régions où l'on trouvait encore une abondance d'animaux sauvages. Il a tout à fait raison, c'est vraiment l'un des plus beaux endroits au monde.
Récemment, on a annoncé l'exploitation prochaine de forêts situées tout près de rivières à saumon pourtant jugées très vulnérables. Il est également question de la baie Voisey ainsi que de l'expansion, en coopération avec le Québec, des installations hydroélectriques sur le fleuve Churchill. Que pense-t-il de l'effet de ces soi-disant mégaprojets sur la faune de Terre-Neuve et du Labrador et sur son habitat?
M. Loyola Hearn: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Les sujets qu'il a abordés sont extrêmement importants. Il est actuellement question de deux grands projets de développement dans la province de Terre-Neuve et Labrador. L'un touche la baie Voisey, l'autre concerne l'aménagement hydro-électrique du cours inférieur du fleuve Churchill.
Relativement au projet de loi, je dis au député que c'est le moment où l'on voit les principaux acteurs unir leurs efforts pour offrir des solutions.
Nous ne pouvons pas agir comme des écologistes et suspendre tout projet de développement. Nous ne pouvons pas non plus faire comme les promoteurs du bon vieux temps quand on pouvait encore sauter sur un bulldozer et tout défricher devant soi.
Pour survivre, il faut deux choses. Il faut pouvoir gagner sa vie et il faut voir à ce que la vie se poursuive autour de nous. Il n'y a aucune raison qu'on ne puisse pas réaliser tous ces grands projets tout en se souciant de l'ensemble des habitats et de la faune qui nous entoure. Il n'est pas nécessaire de détruire des régions entières d'un pays ou d'une province juste pour faire place à un mégaprojet. Avec les connaissances scientifiques que nous possédons de nos jours, avec une bonne planification et avec la participation de tous les groupes, on peut certainement trouver des manières de travailler de concert.
Je dis au député, tandis qu'on pousse et qu'on élabore ces projets, qu'ils peuvent être réalisés d'une façon respectueuse de l'environnement. Je ne suis pas convaincu que ce soit impossible. En fait, je suis sûr que c'est possible.
[Français]
M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, j'ai le plaisir, en ce début d'une nouvelle saison politique, de prendre la parole au nom du Bloc québécois. Je veux profiter de l'occasion pour saluer les citoyens et les citoyennes de ma circonscription de Beauharnois—Salaberry, saluer mes collègues de la Chambre et leur souhaiter un automne chaud.
Nous aurons droit aujourd'hui à la présence à la Chambre de nouveaux chefs. Il y aura également plusieurs questions intéressantes à l'ordre du jour. J'espère que les travaux de la Chambre seront à la hauteur des attentes des citoyens et citoyennes du Canada et du Québec en particulier.
Le projet de loi C-33, qui porte sur la préservation des espèces sauvages au Canada, mérite d'être débattu devant ce Parlement pour un certain nombre de raisons, notamment parce qu'il cherche à mettre en oeuvre un certain nombre d'obligations internationales du Canada au titre de certaines conventions qui ont été adoptées, notamment la Convention sur la biodiversité et d'autres, comme la Convention de Ramsar, qui vise à protéger les espèces et à assurer une préservation de la flore et de la faune de cette planète.
Ce débat m'intéresse en particulier puisque dans ma circonscription de Beauharnois—Salaberry, il y a une réserve faunique, celle du Haut-Saint-Laurent, où plusieurs espèces sont présentes et dont certaines d'entre elles sont menacées. C'est une question qui m'intéresse d'autant plus que certaines personnes m'ont fait des représentations, notamment celles qui conservent des espèces et veulent les faire connaître dans le Parc safari d'Hemmingford. Ils considèrent que la législation actuelle est inadéquate et mérite d'être complétée et bonifiée par des normes visant à assurer une meilleure protection de ces espèces.
Le Bloc québécois souhaiterait une meilleure protection et une loi qui assurerait une telle protection aux espèces sauvages en péril. Toutefois, dans un débat comme celui-ci, il s'inquiète de la volonté du gouvernement d'adopter une loi sans que nous puissions y apporté des amendements.
On a récemment entendu le ministre de l'Environnement dire que ce projet de loi était bon comme il était, comme il avait été présenté et dans l'état où il avait été déposé à la Chambre. À quoi sert alors le débat qui se poursuit aujourd'hui, et qui se poursuivra au Comité permanent de l'environnement et du développement durale, si déjà on sait que le gouvernement ne souhaite pas d'amendement et ne souhaite pas que ce projet de loi soit bonifié?
Pourtant, ce projet de loi semble loin d'être parfait. On peut d'ailleurs, à cet égard, évoquer certaines critiques que font les députés du parti gouvernemental lui-même, qui espèrent qu'il y aura des amendements apportés au projet de loi lorsque nous l'aurons adopté ou lorsque nous serons appelés à l'adopter.
Je cite, par exemple, la députée de York-Nord qui, le 12 juin de cette année, disait:
Nous n'arriverons à vraiment protéger les espèces en péril que si ce projet de loi sort bonifié [...] de l'étude au comité. La Chambre doit appuyer une mesure législative qui est solide, juste, efficace et qui a du sens au plan biologique.
Le député de Lac-Saint-Louis, qui est d'ailleurs un spécialiste des questions environnementales, qui a déjà été ministre de l'Environnement du Québec au sein du gouvernement de Robert Bourassa, disait aussi ce même jour, au sujet du projet de loi C-33, et je le cite:
Au lieu d'être la liste finale produite par les scientifiques de la plus haute réputation qui ont travaillé sans relâche pendant les vingt dernières années, la liste sera maintenant établie à la discrétion du Cabinet [...]
Le député de Lac-Saint-Louis d'ajouter:
C'est totalement ironique à mon avis [...]
Nous n'utilisons même pas la liste des 339 espèces nommées par le COSEPAC comme point de départ. C'est un défaut manifeste du projet de loi. Sans liste, il ne peut y avoir de protection.
On constate donc que ce projet de loi mériterait des amendements, mériterait d'être bonifié, comme le suggèrent deux députés libéraux. Et ils ne sont pas les seuls à penser que le projet de loi pèche par certaines lacunes, par certaines faiblesses.
Plusieurs écologistes, plusieurs groupes environnementaux ont aussi émis l'avis que le projet de loi n'éliminait pas les échappatoires laissées par certaines provinces et que cette législation qui, selon le ministre, était la plus sévère au monde, pour ces groupes, notamment pour le Sierra Club, elle mettait le Canada dans l'embarras aux yeux du monde.
Selon Elizabeth May du Sierra Club, les espèces menacées n'étaient pas convenablement protégées par ce projet de loi. Au nom de son groupe et de plusieurs groupes environnementalistes, elle disait que les politiciens et non pas les scientifiques—et c'est certainement un domaine où les scientifiques et la voix des scientifiques doit avoir préséance sur celle des politiciens—qui auraient le dernier mot sur la sélection des espèces considérées comme menacées, alors qu'il devrait s'agir plutôt d'un groupe d'experts indépendants auxquels on devrait faire appel pour établir une liste annuelle.
Cette critique des groupes environnementalistes doit être écoutée. Elle doit donner lieu à des débats, à une réflexion approfondie de la part des députés de cette Chambre. J'espère que lors des travaux en comité, ces critiques apportées par certains députés libéraux, notamment par le député de Lac-Saint-Louis, et les groupes environnementalistes seront entendues.
Ici, comme cela se produit rarement sur des questions de nature environnementale, l'industrie est aussi opposée au projet de loi dans l'état où il est. Ainsi, pour prendre l'exemple d'un groupe qui a voulu commenter le projet de loi C-33 dans l'état actuel, l'Association canadienne des pâtes et papier, à qui on pourrait joindre aussi le nom de l'Association minière, ces deux organismes indiquent que le gouvernement aurait pu adopter une approche beaucoup plus forte en ce qui concerne les terres fédérales, les terres domaniales et les aires naturelles dont la responsabilité constitutionnelle appartient au gouvernement fédéral, qui n'est pas remise en cause par aucune province, notamment par notre parti, le Bloc québécois.
Cela m'amène d'ailleurs à parler des aspects intergouvernementaux et constitutionnels du projet de loi C-33. En tant que porte-parole de mon parti pour les affaires intergouvernementales, il est nécessaire, voire impérieux, que les questions de nature constitutionnelle évoquées dans ce projet de loi soient abordées à cette étape-ci de la discussion.
En matière environnementale, le partage des compétences au Canada est établi de telle sorte qu'à la fois le Parlement fédéral et les parlements des diverses provinces peuvent les exercer. Cette réalité est affirmée dans le préambule de ce projet de loi. Mais le projet de loi lui-même, dans plusieurs de ses dispositions, semble faire échec à ce partage des compétences en matière d'environnement et, accessoirement, sur la question de la protection des espèces sauvages.
On assiste ici, comme dans d'autres domaines, à une volonté du Parlement et du gouvernement qui présente cette législation devant le Parlement d'en faire une question d'intérêt national ou de dimension nationale.
D'ailleurs, ce projet de loi vise à mettre en oeuvre un traité international, à savoir la Convention sur la diversité biologique. Celle-ci, qui est également mentionnée au troisième Attendu de ce projet de loi, pourrait être invoquée, comme cela a déjà été fait par le passé, devant les tribunaux, notamment devant la Cour suprême du Canada, pour laisser entendre que puisque ce projet de loi vise à mettre en oeuvre un traité international et les obligations internationales du Canada, il a une dimension nationale. Et, puisqu'il a une telle dimension nationale, la législation appropriée pour assurer la mise en oeuvre de ces obligations est la législation fédérale.
Nous, au Bloc québécois, et tous les gouvernements successifs du Québec, avons toujours contesté cette théorie de la dimension nationale. Les tribunaux ont hésité à appliquer cette théorie, mais ils ont parfois eu la tentation d'élargir le champ des compétences fédérales en invoquant cette théorie et en le faisant notamment dans le domaine de l'environnement.
Il semble que ce soit ici à nouveau le cas puisque certaines dispositions de ce projet de loi laissent clairement entendre qu'on veut appliquer cette législation aux provinces et l'appliquer sans le consentement de celles-ci. Plusieurs dispositions du projet de loi vont d'ailleurs dans ce sens.
Ainsi, le paragraphe 34(2), celui qui est le plus explicite en la matière, vise très précisément à faire appliquer une législation fédérale dans une province et de l'appliquer alors qu'une province peut ne pas nécessairement vouloir que ce soit le cas. Je cite ce paragraphe car il mérite d'être lu dans sa version complète:
(2) Sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil peut, par décret, prévoir l'application des articles 32 et 33 dans une province, [...]
Lequel décret porte sur l'inscription d'une espèce disparue du pays.
[...] à l'égard des individus d'une espèce sauvage inscrite, autre qu'une espèce aquatique ou une espèce d'oiseau migrateur protégée par la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs.
Une législation fédérale peut ainsi trouver application dans une province sans qu'elle n'y ait consenti.
D'ailleurs, cela laisse entendre que le gouvernement ne se préoccupe guère des chevauchements qu'il peut y avoir entre cette loi fédérale en devenir et certaines lois provinciales qui ont été adoptées dans les années qui ont précédé et qui ont permis aux provinces de s'acquitter aussi de certaines de leurs obligations, notamment des obligations internationales qui résultent de la ratification, par le Canada, de certains traités relatifs à la diversité biologique ainsi qu'à la protection et la préservation de la flore et de la faune.
C'est notamment le cas du Québec, puisque le Québec a adopté, quant à lui, deux lois d'importance: la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables et la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. L'Assemblée nationale a considéré utile et nécessaire d'adopter ces lois afin de préserver les espèces sauvages en péril au Québec.
En ce sens, le gouvernement du Québec, par l'intermédiaire de son ministre de l'Environnement, M. Paul Bégin, a déclaré que le dépôt du projet de loi C-33 ne constituait en quelque sorte qu'un nouveau dédoublement inutile pour le Québec et qu'il visait à mettre en place un filet de sécurité pour les espèces menacées et leurs habitats sur les sites de juridiction fédérale. Cela est conforme à la Constitution et conforme à l'attribution de compétences en matière d'environnement que la Constitution accorde à ce Parlement, mais le gouvernement fédéral voulait aussi le faire sur l'ensemble du territoire québécois, ce qui était inacceptable aux yeux du gouvernement du Québec. C'est également inacceptable aux yeux des représentants légitimement élus du Bloc québécois en cette Chambre, dont les voix devraient être écoutées.
J'ajoute que certaines autres dispositions du projet de loi sont également susceptibles d'être déclarées inconstitutionnelles, comme étant incompatibles avec le partage des compétences. Je pense notamment aux articles 36, 39 et 57 à 64 qui, eux aussi, cherchent à véritablement permettre l'empiétement du Parlement fédéral et de cette législation sur les pouvoirs accordés à l'Assemblée nationale du Québec et aux législatures des autres provinces.
Je profite de l'occasion pour vanter les mérites de notre-parole en matière d'environnement, ma collègue de Jonquière qui, dans ce domaine comme dans plusieurs autres, démontre non seulement un intérêt pour l'environnement, mais un intérêt pour la défense de ce droit à l'environnement, un droit de troisième génération, qui veut que nous devions protéger les espèces, nous devions protéger la nature, la flore, la faune contre les dangers que l'homme, que la femme, que les institutions lui causent, et les préjudices qui peuvent lui être portés.
Je souligne notamment le travail que ma collègue a fait dans ce débat qui entoure l'importation du MOX, ce carburant entré au Canada à l'encontre de la volonté de plusieurs groupes environnementaux, dont certaines quantités pourraient à nouveau entrer par le territoire du Québec ou de l'Ontario, sans qu'il y ait eu de débat valable, sans qu'il y ait eu de consultations, d'études d'impact qui soient satisfaisantes à nos yeux et aux yeux de plusieurs autres parlementaires et groupes de la société civile.
Le Bloc québécois n'acceptera pas et ne votera pas en faveur d'une législation dont on dit déjà qu'elle ne pourra être amendée, dont on sait qu'elle est inadéquate, selon même les députés libéraux, notamment d'après le député de Lac-Saint-Louis dont je signale la présence à la Chambre. Elle est vue comme inacceptable par plusieurs groupes environnementaux, par plusieurs personnes de l'industrie qui souhaitent que le gouvernement fédéral agisse dans ce domaine, mais qu'il agisse dans les domaines et sur les territoires à l'égard desquels il a une compétence acceptée et reconnue.
Le Bloc québécois n'acceptera donc pas que par une législation fédérale, on crée des chevauchements, des dédoublements, qu'on le fasse dans ce domaine comme on le fait dans tant d'autres.
Nous apprenions d'ailleurs, hier après-midi, que le gouvernement voulait, à l'aide d'un autre bâillon—et nous avons un mauvais souvenir des bâillons si on se rappelle l'hiver des bâillons auquel nous avons eu droit et ce printemps de l'an 2000, lorsque le gouvernement cherchait à faire adopter son projet de loi sur la clarté en utilisant bâillon après bâillon—faire adopter son projet de loi sur les jeunes délinquants en imposant un bâillon et en mettant fin au débat de façon prématurée.
C'est un débat où nous, du Bloc québécois, cherchons à nouveau à défendre les intérêts du Québec et ses compétences dans un domaine où il a fait ses preuves, où il a fait la preuve que des lois souples, intelligentes et qui faisaient la promotion de la réhabilitation des jeunes étaient bien meilleures que des lois fédérales qui visent et qui pourraient autoriser l'incarcération de jeunes enfants de 12 ou 13 ans, qui ne méritent pas cela, mais à l'égard desquels on doit faire des efforts de réhabilitation.
Le gouvernement ne semble pas vouloir le faire ou inviter les autres à le faire, laissant quelque part planer le doute sur la capacité des jeunes de se réhabiliter et répondant peut-être à des voeux de citoyens que représentent beaucoup de députés de l'Alliance canadienne aujourd'hui, qui veulent un traitement dur pour les jeunes.
Le projet de loi sur les jeunes délinquants, comme ce projet de loi C-33, comme d'autres projets de loi, des programmes comme les bourses du millénaire ou des programmes qui sont du ressort des provinces démontrent encore jusqu'à quel point le gouvernement fédéral, qui se prétend un gouvernement national, qui veut l'être, qui le dit d'ailleurs à nouveau dans ce projet de loi lorsqu'il parle de «la volonté de défendre l'identité nationale et son histoire», dont le patrimoine naturel du Canada fait partie, ne pratique n'est pas du vrai fédéralisme. C'est la raison pour laquelle tant de Québécois représentés par les 44 députés du Bloc québécois réfutent et récusent ce fédéralisme et veulent un pays.
[Traduction]
Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Monsieur le Président, je voudrais que le député du Bloc nous en dise un peu plus long sur le fait que les scientifiques ne participeront pas à l'établissement des listes d'espèces en péril. Nous devons nous rendre compte que ce ne sont pas seulement les espèces qui sont en péril, mais aussi leur habitat.
Les gens qui partagent cet habitat avec les animaux sont des scientifiques, des biologistes, des anciens, des chasseurs, des pêcheurs et des trappeurs. Ce sont ces gens qui connaissent les habitudes des espèces sauvages.
Il est tout à fait inacceptable et vraiment choquant qu'il n'y ait aucune participation des scientifiques qui ont évalué les habitudes et l'histoire de la faune et de la flore des régions visées.
M. Daniel Turp: Monsieur le Président, pour répondre à la question de la députée, nous partageons les mêmes préoccupations qu'elle. J'espère que le NPD restera fidèle à la position qu'il a exprimée, soit que cette mesure législative est incomplète. Elle est certainement faible lorsqu'il s'agit de mieux protéger la faune et la flore.
Une des faiblesses les plus flagrantes du projet de loi, c'est qu'il ne permet pas que la communauté scientifique ait le dernier mot sur la question des espèces sauvages à protéger. Dans ce sens, nous devrions travailler ensemble pour voir à ce que le gouvernement modifie les dispositions du projet de loi afin que les experts aient le dernier mot à cet égard.
Aux termes de la mesure législative proposée, c'est le Cabinet qui aura le dernier mot. Je crois que ce genre de décision ne devrait pas être laissée à la discrétion du Cabinet. Ce ne devrait pas être aux ministres de prendre cette décision. Nous devrions nous fier aux experts. Ce n'est pas quelque chose d'inhabituel et c'est quelque chose qui pourrait se faire dans ce cas.
Espérons que le gouvernement comprendra que cette loi est imparfaite et qu'elle devrait être modifiée, contrairement à ce que dit le ministre de l'Environnement. Celui-ci dit que le projet de loi est bien sous sa forme actuelle.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, je profite de cette occasion pour remercier mon collègue, le député de Beauharnois—Salaberry.
Mon collègue a parlé d'une dimension très importante du projet de loi C-33. La dimension dont il nous a fait part, ce matin, touche le partage des pouvoirs des provinces et du gouvernement canadien.
Au-delà de ce que dit ce gouvernement, il bafoue complètement la Loi constitutionnelle du Canada. Je pense que nous sommes le seul parti au sein de la Chambre des communes, depuis l'élection du Bloc québécois, à défendre le droit constitutionnel des provinces édicté dans la Constitution canadienne.
J'aimerais entendre mon collègue nous donner des faits précis, nous prouvant hors de tout doute que présentement, avec ce projet de loi, ce gouvernement bafoue encore la Constitution et fait en sorte d'avoir une autre guerre avec les provinces.
M. Daniel Turp: Monsieur le Président, quelque part, il y a un tabou au sujet de la question constitutionnelle. On ne doit pas parler de Constitution, on ne doit pas s'interroger à savoir si elle est respectée ou non, on ne peut pas la modifier, alors qu'elle devrait l'être pour répondre à de nombreuses aspirations au Canada, que ce soient celles de la nation québécoise, des nations autochtones ou de certaines personnes qui souhaiteraient que des dispositions de cette Constitution soient modifiées.
C'est l'échec du constitutionnalisme canadien qui fait qu'on ne veut pas aborder ces questions. On dit qu'elles ne doivent pas être abordées, même dans nos débats parlementaires, ici. Et lorsqu'on les aborde, on parle d'«obsession constitutionnelle».
Le ministre des Affaires intergouvernementales et député de Saint-Laurent—Cartierville a toujours tendance à parler d'obsession constitutionnelle lorsque nous parlons de Constitution, lorsque nous cherchons à défendre les intérêts du Québec, lorsque nous cherchons à défendre la Constitution, dans l'état actuel où elle se trouve, et qui reconnaît des compétences au Québec et aux autres provinces et notamment des compétences en matière d'environnement qui sont mises en péril par le projet de loi C-33.
Mais il n'y a pas d'obsession constitutionnelle lorsqu'il s'agit, pour ce ministre et d'autres, d'asseoir cette législation, comme d'autres législations, sur le pouvoir de dépenser, par exemple, ou le pouvoir de faire des lois, parce qu'il s'agit de questions transfrontalières ou de pollution transfrontalière. Non, il n'y a pas d'obsession constitutionnelle lorsqu'il s'agit d'asseoir l'exercice des compétences fédérales sur la Constitution. Mais il y a de l'obsession constitutionnelle lorsqu'il s'agit de protéger et de défendre l'intégrité des compétences du Québec, dans cette Chambre et devant ce Parlement.
Ce n'est pas une obsession. Et aussi longtemps que les députés du Bloc québécois seront présents dans cette Chambre, la défense des intérêts du Québec passera par la défense du respect de la Constitution actuelle avant qu'un jour, et ce jour est prochain, nous décidions, du fait des nombreuses violations de cette Constitution, de nous donner un pays, de nous donner l'ensemble des compétences qui nous permettront de développer le Québec, sans avoir à subir constamment, par l'intermédiaire de ce Parlement, les violations de la Constitution.
D'ailleurs, pour répondre à la question de ma collègue, j'aimerais rappeler aussi que la Cour suprême du Canada est une alliée stratégique du gouvernement et du Parlement du Canada en ces matières.
Cette théorie sur la dimension nationale à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure est une théorie que la Cour suprême du Canada a tenté, en toutes sortes de matières, d'appliquer. En matière d'environnement, dans l'affaire Crown Zellerbach, qui est une affaire très importante dans l'histoire constitutionnelle canadienne, en ces mêmes matières environnementales, en matière de pollution transfrontalière, la Cour suprême est allée très loin dans la reconnaissance d'une compétence législative en matière d'environnement et de protection de l'environnement, d'une compétence législative fédérale.
Cette façon, pour la Cour suprême, de bonifier, d'interpréter largement la Constitution du Canada en faveur d'un élargissement des compétences fédérales en matière d'environnement est très inquiétante. Elle inquiète le gouvernement du Québec qui, dans d'autres matières, et notamment lorsqu'il s'est agi d'adopter une loi sur l'environnement et une loi qui permettrait des études d'impacts fédéraux, a eu tendance à vouloir s'arroger à nouveau des compétences et d'élargir sa sphère de compétences dans une matière qui pourrait, à travers une législation fédérale et la façon dont les tribunaux vont l'interpréter, lui conférer une valeur constitutionnelle, vider de sa substance la compétence des provinces et du Québec en cette matière.
Cela est inacceptable. Si ce projet de loi n'est pas modifié de façon à respecter les compétences du Québec et des provinces, le gouvernement n'aura pas l'appui du Bloc québécois. Les groupes environnementaux et les industries qui s'objectent à ce projet de loi sauront que notre objection réside, non seulement dans les critiques qu'ils partagent avec nous, mais aussi dans une critique plus fondamentale encore, celle qui veut que l'on n'adopte pas des lois. Ce Parlement ne doit pas adopter de telles lois lorsqu'il n'a pas la compétence pour le faire.
[Traduction]
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je suis ravi d'intervenir sur cette question très importante.
Je signale au député bloquiste que la protection de l'environnement ne devrait jamais être traitée à part. Le problème est notamment causé par les polluants et les espèces migratrices d'outrefrontière. La meilleure façon de protéger nos espèces réside dans une collaboration de tous les intéressés à tous les niveaux. On n'y parviendra pas si chacun travaille de son côté.
Notre parti s'oppose énergiquement à ce projet de loi, parce qu'il est simpliste. Il est absolument insensé de dire que nous allons protéger les animaux, mais pas leur habitat. Le projet de loi ne fait rien pour protéger l'habitat.
La politique du Nouveau Parti démocratique est la suivante:
L'identification et l'inscription des espèces en péril par un comité indépendant de scientifiques, mission qui doit d'abord et avant tout s'appuyer sur des preuves scientifiques et non sur l'interprétation des données à des fins politiques;
La protection nationale intégrale de l'habitat naturel, y compris la protection des espèces qui migrent à l'intérieur et à l'extérieur du territoire canadien;
L'inclusion de tous les intéressés dans le processus de formulation des plans de rétablissement des espèces, pour s'assurer que ceux dont les moyens de subsistance risquent d'être perturbés par ces plans reçoivent une aide adéquate et que les travailleurs et les collectivités touchés bénéficient d'une période de transition juste.
Cette approche est nettement plus proactive à l'égard des espèces menacées.
Je m'arrête sur un petit incident qui s'est produit juste à l'extérieur de ma circonscription, dans le refuge de gibier de Liscomb. C'est un sanctuaire bien que les deux tiers ont déjà fait l'objet d'une coupe forestière. Quand un groupe a demandé à protéger cet endroit, les fonctionnaires du MRN de la Nouvelle-Écosse ont dit: «Comprenez-nous bien, notre travail consiste à protéger les espèces sauvages, pas l'habitat.» Voilà une illustration de l'illogisme de ronds-de-cuir gouvernementaux qui ne comprennent pas qu'en l'absence d'un habitat sain et vivant, les espèces ne seront pas menacées, elles seront disparues. Avec le projet de loi C-33, c'est précisément ce qui arrivera.
Il est regrettable que le ministre, qui est sûrement animé de bonnes intentions, ne comprenne pas cela.
Il y a quelque temps, le Fonds international pour la protection des animaux a confié à chaque député à la Chambre une espèce dans la liste des espèces inscrites. La mienne était la baleine à bec commune, une baleine au front large et au sourire engageant. J'ai trouvé ce geste fort intéressant. Chaque député à la Chambre a reçu une espèce.
Cette association voulait souligner et faire valoir à chaque député qu'il nous appartenait de faire tout ce que l'on pouvait pour protéger les espèces associées à chacun de nous. Si nous travaillons ensemble, en partant de la base, alors nous pourrons réussir. Nous sommes certainement capables d'y parvenir, mais si les mesures viennent d'en haut, elles se heurteront à des refus. Nous assisterons à un effort futile de la part du gouvernement quand il discutera de la question. Entre-temps, la destruction de la planète se poursuit.
En ce moment même, dans l'État de Washington, juste au sud de Sumas dans la région d'Abbotsford en Colombie-Britannique, on prévoit construire une nouvelle centrale électrique. Ses émissions quotidiennes représenteraient environ celles de 480 000 véhicules automobiles. Que fait notre gouvernement à ce sujet? Absolument rien.
Il dispose de nombreuses avenues juridiques qu'il pourrait emprunter. Il pourrait confier le dossier à un tribunal d'arbitrage. Il pourrait demander de plus amples clarifications. Pourtant il ne fait rien et ne dit rien à l'État de Washington. Si cette centrale est construite, je prévois le pire pour l'environnement et pour la santé des Britanno-Colombiens et même pour les gens de l'État de Washington et tout ceux qui se trouveront sous le vent qui portera ces terribles émissions.
On peut aussi examiner le bilan de l'ancien gouvernement conservateur et du gouvernement libéral actuel en ce qui concerne les espèces de poisson de notre pays. Ce n'est pas un hasard si le saumon de la côte ouest et de la côte est et si les stocks de morue et de crabe au large de Terre-Neuve s'appauvrissent très rapidement. De l'avis de nombreux scientifiques indépendants, les stocks de morue au large de nos côtes pourraient ne plus jamais se rétablir.
Pourtant, à l'heure actuelle, des méthodes d'exploitation terribles sont encore utilisées. Nous continuons de draguer le fond de nos océans. Chaque année, nous continuons de rejeter par-dessus bord des millions de livres de poisson. C'est une politique catastrophique du gouvernement.
Prétendre que nous protégerons maintenant les espèces en péril est tout simplement insensé. Le gouvernement actuel et son prédécesseur conservateur n'ont pas la moindre idée de ce qu'il faut faire, ni le leadership nécessaire pour protéger notre planète. Lorsque nous protégeons la flore et la faune, fondamentalement, nous nous protégeons aussi nous-mêmes.
On conçoit mal que l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers, lorsqu'il accorde, par l'entremise de la province, des concessions et des autorisations permettant aux sociétés gazières et pétrolières d'exécuter des travaux sismiques au large des côtes du Cap-Breton et en Nouvelle-Écosse, dise simplement aux entreprises qu'elles doivent procéder à une évaluation environnementale. C'est tout simplement insensé.
Le gouvernement dit à l'entreprise qu'elle doit faire sa propre évaluation environnementale, qu'elle doit lui en faire rapport et que, neuf fois sur dix, tout fonctionnera normalement. Il faudrait faire d'abord une évaluation complète indépendante et exhaustive axée sur ces régions. À la lumière des discussions et des paramètres de l'évaluation, des concessions pourraient alors être accordées si cela ne cause aucun préjudice à l'océan ni aux habitats halieutiques.
Le mandat du MPO et du ministre des Pêches et Océans est très clair: protéger le poisson et son habitat. Toutefois, on fait passer la charrue devant les boeufs lorsqu'on cède une compétence à une commission indépendante qui attribue des baux avant la tenue d'une évaluation environnementale. Rien dans cette mesure législative ne va à l'encontre de cette pratique. Des milliers de pêcheurs dans leur collectivité sont très préoccupés par cette situation.
Je ne prétends pas que la coexistence de l'exploration pétrolière et gazière et des pêches est impossible; toutefois, nous avons d'abord besoin, en matière d'environnement, de preuves indépendantes, scientifiques et solides qui permettront de veiller, le cas échéant, à ce que tous les poissons et leurs habitats soient protégés par le secteur en plein essor du pétrole et du gaz.
J'aimerais à ce stade-ci vous signaler un des trois livres principaux que j'ai lus, soit Silent spring, de Rachel Carson. Malheureusement, bon nombre de députés ne l'ont pas probablement pas lu. Je sais que les fonctionnaires du gouvernement ne l'ont jamais lu. Il a été écrit au début des années 1960 par une environnementaliste américaine qui a prédit ce qui se passe à l'heure actuelle, soit le déclin des espèces, l'augmentation des cas d'asthme chez les enfants, ainsi que l'épandage généralisé de pesticides agricoles sur les récoltes et les produits partout dans le monde.
Ce n'est pas une coïncidence si, à l'Île-du-Prince-Édouard, il y a chaque année des cas de mort de poissons directement liés à l'utilisation de pesticides agricoles dans les champs de pommes de terre. Que font-on devant ce phénomène? Rien, absolument rien.
On ne veut pas mécontenter les agriculteurs. Les groupes de protection des rivières à saumon et les groupes de pêcheurs disent également qu'ils ne veulent pas contrarier les agriculteurs. Nous devons travailler ensemble non seulement afin d'être en mesure d'obtenir une récolte suffisante dans le secteur de la pomme de terre, mais aussi afin de protéger les plans d'eau et l'habitat du poisson. Il ne sert à rien de faire la promotion d'un secteur si cela entraîne la destruction d'un autre. Ce genre d'attitude doit changer et il doit y avoir un niveau plus élevé de collaboration.
Je tiens ici à remercier quelques grandes organisations du pays qui accomplissent un travail remarquable dans la protection de notre habitat pour les générations futures. La Sackville Rivers Association de ma circonscription accomplit un boulot remarquable dans les domaines du nettoyage des rivières, de la protection de l'habitat et autres avec un budget de misère. La Fédération du saumon atlantique tente de promouvoir une pêche au saumon récréative durable. Elle tente également de protéger les rivières, les frayères ainsi que les stocks océaniques afin que le saumon revienne.
Je remercie également les membres de la Burns Bog Society de Steveston, Richmond, en Colombie-Britannique. Ces gens-là tentent de protéger la région de Burns Bog pour les espèces d'oiseaux migrateurs. Malheureusement, tous les niveaux de gouvernement ne les écoutent pas vraiment, mais je tiens à les remercier des efforts qu'ils déploient dans la protection de ces espèces.
Je remercie aussi un merveilleux organisme en Nouvelle-Écosse qui s'appelle Ecology Action Centre. Cet excellent organisme est formé d'environnementalistes qui travaillent à peu de frais à la protection de secteurs spécifiques de la Nouvelle-Écosse, comme les récifs coralliens, les forêts, afin que les générations à venir puissent en profiter.
Je remercie aussi la David Suzuki Foundation du formidable travail qu'elle accomplit, non seulement au Canada, mais encore dans le monde entier, ainsi que, évidemment, le Nova Scotia Nature Trust. Créé par un habitant de Chester du nom de Rudy Haase, le Nova Scotia Nature Trust acquiert essentiellement des terres et tente de les sauvegarder pour les générations à venir.
Je dis au gouvernement et aux autres députés de l'opposition qu'il est inutile de parler de la protection d'espèces particulières si on ne commence pas par protéger leur habitat. Cela peut être fait de façon coopérative à l'aide des connaissances autochtones, notamment au sujet du Nord. Cela peut être fait avec les municipalités, les provinces, l'industrie, les travailleurs et tous les groupes intéressés travaillant ensemble, non seulement à la protection de notre pays, mais encore à celle de notre planète tout entière.
M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur ce projet de loi, qui a été présenté en avril dernier, si je ne m'abuse. Cette mesure législative sur les espèces en péril s'est fait attendre. Bien que tous les Canadiens soient en faveur de mesures prudentes pour protéger les espèces en péril, ce projet de loi va simplement trop loin.
Cette mesure législative fédérale a été présentée par notre ministre de l'Environnement. Elle aura un impact profond sur les propriétaires fonciers. Elle en fera essentiellement des criminels s'ils ne protègent pas les espèces en péril ou les habitats essentiels sur leurs terres. Elle donne au gouvernement fédéral le pouvoir et la capacité de prendre des ordonnances d'urgence qui forceront les propriétaires fonciers à cesser des activités économiques qui pourraient avoir un effet néfaste sur les espèces ou les habitats en question.
De plus, le projet de loi ne prévoit aucune formule claire d'indemnisation. En agissant de cette façon, le ministre vient d'anéantir tout espoir de collaboration entre les propriétaires fonciers, les groupes écologiques et le gouvernement. L'indemnisation versée pour des terres expropriées n'est tout simplement pas équitable si elle ne correspond pas à la juste valeur marchande. Cela désavantagera les propriétaires de ranchs et d'exploitations agricoles, pour n'en nommer que quelques-uns.
Je connais bien la situation qui existe aux États-Unis dans certaines régions où l'on a essayé de mettre en oeuvre ce genre de loi. Malheureusement, cela s'est fait au détriment des espèces en péril. Ce genre de loi est à l'origine d'un phénomène courant dans bien des régions américaines qu'on appelle communément «tue, enterre et tais-toi». Ce phénomène reflète le sentiment de bien des propriétaires fonciers aux États-Unis, qui estiment préférable de se débarrasser en douce de ces espèces en péril au lieu de les protéger au moyen de mesures moins draconiennes.
D'aucuns sont allés jusqu'à détruire des terres ou des habitats de peur qu'ils ne logent ou attirent des espèces en danger. C'est qu'on ne veut pas avoir un jour des problèmes avec le gouvernement fédéral.
Bien des gens que je connais ont perdu leurs terres au profit du gouvernement fédéral. Ces terres sont devenues la propriété de l'État, et ce, sans qu'on songe le moindrement du monde à indemniser leurs propriétaires. On ne saurait se comporter ainsi envers ces gens.
Cela ne manquera pas de susciter des poursuites devant les tribunaux et obligera les familles touchées à prendre des mesures draconiennes pour être indemnisés des pertes ainsi subies. Si le gouvernement est prêt à aller constamment devant les tribunaux pour régler ces différends parce que notre Constitution et la Charte des droits ne reconnaissent pas les droits de propriété, il y aura de réels problèmes. Cette mesure législative est de nature à faire apparaître ces problèmes.
Les éleveurs et les propriétaires fonciers de l'Alberta sont de bons gestionnaires de l'environnement et ils ont à coeur de protéger notre patrimoine naturel. Ils prennent la chose vraiment au sérieux. Il existe plus de 100 groupes environnementaux qui font un excellent travail dans la gestion de millions d'hectares de sanctuaires de la faune.
Les Canadiens reconnaissent la nécessité d'adopter une approche proactive pour protéger les espèces en péril qui soit fondée sur le respect: respect pour les espèces qui vivent sur nos terres et dans nos eaux et respect pour les personnes qui habitent ces terres et y travaillent. Nous n'avons pas besoin d'une loi qui fait de nous des criminels.
L'Alliance canadienne s'est engagée à protéger et à préserver le milieu naturel et les espèces en péril du Canada et à assurer le développement durable de nos abondantes ressources naturelles afin que les générations actuelles et futures puissent en profiter. L'Alliance canadienne soutient que toute loi efficace sur les espèces en péril respecte les droits fondamentaux des propriétaires fonciers privés. Ce n'est pas ce que fait le présent projet de loi.
C'est tout simplement injuste de verser une indemnisation pour expropriation qui ne correspond pas à la juste valeur marchande de la terre en question. Le projet de loi ne comporte aucune formule claire en matière d'indemnisation. Ce sont les règlements qui feront état de l'indemnisation versée une fois le projet de loi adopté. Combien de fois avons-nous été témoins de cette façon de faire du gouvernement? Il adopte un projet de loi, fait entrer en vigueur la loi, puis assomme les Canadiens.
Le gouvernement n'a pas le courage d'inclure dans le projet de loi les détails concernant l'indemnisation. Les ministériels aiment claquer la porte habituellement en adoptant un projet de loi à toute vapeur. L'important, c'est de le faire adopter. Ils imposent la clôture puis font entrer en vigueur les règlements.
Le ministre et ses homologues comprennent de travers. Pour pouvoir élaborer un bon projet de loi, les parties concernées doivent collaborer. Cette collaboration ne se produira pas tant que les propriétaires fonciers n'obtiendront pas la garantie que toute expropriation aux fins de la protection des espèces ou de leur habitat recevra une indemnité correspondant à la juste valeur marchande de leur terre. Si une telle garantie n'est pas incluse dans le projet de loi avant son adoption, nous pouvons dire adieu à la collaboration des parties concernées. Elles attendront que les règlements draconiens fassent d'eux des criminels.
Je pourrais nommer d'autres lois qui font sentir aux gens qu'ils sont soudainement des criminels. Les citoyens respectueux des lois sont d'avis que s'ils en sont venus à être considérés comme des criminels, c'est que le gouvernement n'a pas effectué les consultations nécessaires ni collaboré avec les autres intéressés.
Il n'existe pas de plan de rétablissement. Un tel plan devrait être intégré dans toutes les activités. Il devrait y avoir un plan de rétablissement qui tienne compte des coûts liés au rétablissement de toute espèce ou de tout habitat. Sans cette mesure de planification, nous en arriverons à inscrire des espèces que nous ne sommes pas en mesure de protéger.
L'Alliance canadienne appuie la mise sur pied d'un organisme scientifique indépendant qui serait chargé de l'inscription, tel le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Nous reconnaissons également le rôle et les pouvoirs du Parlement au chapitre de la planification du rétablissement. C'est là notre rôle.
Cependant, les libéraux ont adopté une mesure législative qui leur permettrait d'appliquer des sanctions pénales en plus d'exercer leurs pouvoirs d'expropriation. Toute tentative en vue d'exproprier une terre privée devrait être soumise à un processus d'examen offrant aux propriétaires une certaine forme d'arbitrage ou de règlement de différends. Il n'existe rien de tel dans ce projet de loi. Le cas échéant, et uniquement après une étude approfondie ou la tenue d'un processus de résolution de différends, l'expropriation d'une terre privée à une juste valeur marchande serait considérée comme une mesure raisonnable.
La majorité des producteurs et des propriétaires sont d'avis que le gouvernement pourrait beaucoup plus facilement remplir sa mission de protection des espèces sauvages et des espèces en péril en abandonnant ses menaces de punition et en collaborant davantage avec les agriculteurs et les grands éleveurs
J'exhorte le gouvernement à se pencher sur cette mesure législative et à reconnaître qu'elle ne permet pas d'établir de liens entre les divers intéressés à ce chapitre. Elle crée plutôt des barrières en raison des menaces qu'elle laisse constamment planer sur les honnêtes citoyens par ce genre de mesure législative qui dit essentiellement: «Nous vous poursuivrons en justice si vous ne faites pas ce que nous vous disons de faire.» Ce genre de menaces et d'abus auprès des propriétaires est inacceptable, et nous, de ce côté-ci de la Chambre, ne sommes pas disposés à appuyer cette mesure législative à moins que des amendements y soient apportés dans ce sens.
[Français]
M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, en 1867, lorsqu'une vingtaine de Pères de la Confédération ont édicté les fondements mêmes de la société canadienne, ils étaient, à cette époque, bien loin des préoccupations relatives aux animaux en voie d'extinction ou des préoccupations environnementales. Si bien que, aujourd'hui, aussi bien dans le cas de l'environnement que dans ce cas-ci, portant sur les espèces en voie d'extinction, on joue dans un dossier qui relève de la juridiction des provinces.
Dans le cas de l'environnement, avec des ententes entre les provinces et le gouvernement fédéral, on arrive à la conclusion que lorsque cela touche plus d'une province ou encore un pays voisin, par exemple les États-Unis, c'est de juridiction fédérale. Lorsque le problème environnemental est localisé à l'intérieur d'une province, c'est celle-ci qui en a la juridiction. On s'est bien entendu, et cela va bien. On doit reconnaître que parfois, cela déborde des juridictions, non seulement celles de deux pays, mais de tous les pays de cette planète, puisqu'on respire le même air et qu'on boit la même eau.
Dans le cas des animaux en voie d'extinction, il faut bien se rappeler que quatre provinces, dont le Québec, ont adopté dans le passé des lois sévères, qui sont à propos et supérieures au projet de loi C-33, qui est le défunt projet de loi C-65, mort au Feuilleton, qu'avait piloté le ministre du temps, M. Sergio Marchi.
Depuis 1989, donc depuis plus de 11 ans, le Québec possède une loi de protection des animaux en voie d'extinction. En l'an 2000, le gouvernement fédéral arrive avec ses gros sabots et veut s'immiscer, encore une fois, dans des champs de compétence provinciale et, encore une fois, il va utiliser le pouvoir de l'argent.
Si on regarde le projet de loi C-33 avec les yeux d'un profane, on ne peut pas être contre, puisqu'au Canada, il y a plus de 70 000 espèces animales vivant sur le territoire. De ces 70 000 espèces, 340 sont en péril. Or, il faut leur donner toutes les chances de survie. Je n'ai qu'à penser, entre autres, au faucon pèlerin. Dans les dernières années, on estime que 12 espèces seraient disparues.
Évidemment, si j'étais un professeur d'écologie s'adressant à des élèves de secondaire I, tous les élèves me diraient: «Mais monsieur, il faut faire quelque chose.» Soit, il faut faire quelque chose; eh bien, le Québec l'a fait et a été imité par trois autres provinces, dont l'Alberta. Donc, on a notre loi, on l'applique et cela va bien.
Alors que le fédéral ne s'occupait même pas de protéger les animaux en voie d'extinction sur ses propres terres, les parcs fédéraux, maintenant, il arrive subitement et il veut empiéter dans un champ de compétence. Jamais le Québec n'acceptera cela, parce qu'on s'est fait avoir avec des chevauchements et on s'est fait avoir aussi par le vol direct que le gouvernement fédéral a fait dans le passé.
Rappelons-nous durant la guerre, lorsqu'on s'était arrogé un pouvoir, seulement pour quelques années, le temps de la guerre, pour sauver le pays, disait-on, le droit de l'impôt direct. La guerre est terminée depuis plus de 55 ans, depuis 1945, et on paie de plus en plus d'impôts directs au gouvernement d'Ottawa.
Alors, en ce qui concerne le projet de loi C-33, le gouvernement libéral va encore essayer de s'immiscer par la porte arrière dans le champ des compétences provinciales. Pis encore, ce projet de loi vise également à protéger les habitats. Je suis bien d'accord qu'il faut protéger les habitats. Le gouvernement de Québec protège actuellement les habitats des animaux, principalement les animaux en voie d'extinction. S'il fallait que ce projet de loi soit adopté, le droit de coupe, par exemple, les arbres, les épinettes, qui sont une richesse naturelle, donc, de juridiction des provinces, eh bien, les Québécois devraient éventuellement demander l'autorisation à Ottawa pour avoir le droit de couper une forêt mature.
On connaît la bureaucratie fédérale: ça ne prend pas une semaine, ça prend deux ans avant d'avoir une réponse. On écrit à des ministres et cela prend parfois six mois avant d'avoir une réponse, un accusé de réception. Alors, pour avoir l'autorisation d'un droit de coupe, ça va bien prendre deux, trois ou quatre ans.
Non, il ne faut pas que le projet de loi C-33 soit adopté dans sa forme actuelle. Pire encore, l'article 34 du même projet de loi prévoit que le ministre, avec le gouverneur en conseil, pourrait décréter la juridiction sur une province si, après des discussions sommaires, il juge lui-même que cela ne va pas à son goût, que la province se traîne les pieds.
Il traiterait, ni plus ni moins, une province un peu comme une grosse ou une petite municipalité, dépendant de la province. Pire encore, on serait ici en face d'un autre bel exemple de dédoublement de structures. Habituellement, cela crée du mécontentement et coûte beaucoup d'argent.
Je le rappelle toujours à mes producteurs laitiers qui ont une vache et qui possèdent un quota. On sait qu'aujourd'hui, les quotas sont mixtes, c'est-à-dire qu'il y a le lait nature et le lait de consommation. Alors que le lait de consommation est de juridiction provinciale, donc du Québec, le lait qui sert à la transformation pour faire du beurre ou autre chose relève de la juridiction du ministère de l'Agriculture d'Ottawa. Or, vous avez la même vache et deux ministres de l'Agriculture pour la diriger.
Mme Christiane Gagnon: Pauvre vache.
M. Jean-Guy Chrétien: Vous avez le même lait, la même vache et deux ministres de l'Agriculture. On va avoir des animaux en voie d'extinction et ils vont regarder les deux ministres de l'Environnement, celui d'Ottawa et celui du Québec. Cela va prendre tellement de temps à s'entendre que ces animaux en voie d'extinction auront justement le temps de disparaître du Canada ou du Québec. Ce n'est pas un endroit où il faut créer des chicanes sur le dos des animaux en voie d'extinction.
Un bel exemple d'harmonie, j'en ai vécu un, il y a deux semaines, à Stratford, dans la MRC du Granit, où il y a eu une belle concertation entre la société Cambior, le groupe Canards illimités, entre la municipalité de Stratford et son maire, Gaétan Côté, et la MRC du Granit. On a restauré, avec 2,5 millions de dollars d'investissement, les sites miniers appartenant autrefois aux intérêts Sullivan. Aujourd'hui, on a restauré le site et on peut compter plus de 170 espèces qui avaient complètement cessé de fréquenter l'endroit. Cela s'est fait sans le fédéral, cela s'est fait sans chicane.
Il y a assez de problèmes présentement. Dans le domaine de la santé, on est arrivés à une entente parce que, justement, le problème émanait du gouvernement fédéral qui voulait encore une fois s'immiscer dans des champs de compétence provinciale. Heureusement, l'entente entre M. Harris et M. Bouchard a réussi à faire plier l'échine du député québécois de Saint-Maurice qui ne voulait rien savoir et qui voulait encore une fois semer la zizanie entre le Québec et Ottawa pour pouvoir augmenter son prestige au Canada anglais. On connaît sa recette: toujours frapper sur le dos du Québec pour aller chercher des appuis au Canada anglais. Heureusement, cela n'a pas fonctionné cette fois-ci.
On voit que tous les partis d'opposition de la Chambre, que la très grande majorité des groupes environnementaux, que les grandes entreprises liées directement à des grands espaces, comme les producteurs de pâtes et papier et l'Association des mines, dénoncent à l'unisson le projet de loi C-33. J'avertis d'avance les députés que nous allons tout faire pour que ce projet de loi ne passe pas les étapes à la Chambre.
[Traduction]
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis ravi de prendre la parole aujourd'hui sur cette question, au vu notamment des préoccupations des habitants de ma circonscription de Kootenay—Columbia. La région est privilégiée en ce qu'on y chasse le plus gros gibier en Amérique du Nord et même au monde.
Cette question me désespère, à vrai dire, car elle semble susciter beaucoup de malentendus chez les gens qui ne vivent pas dans une circonscription comme la mienne. Je trouve particulièrement regrettable que certains soutiennent que les personnes préoccupées par la question et désapprouvant certaines des dispositions de ce projet de loi font fi de l'environnement.
Depuis 1974, j'ai le privilège de vivre en bordure d'un lac dans les Rocheuses. Le matin, nous assistons au lever du soleil sur les montagnes. Des huards, des balbuzards pêcheurs, des rats musqués, des castors et d'autres animaux sauvages peuplent la région que j'apprécie énormément, tout comme j'apprécie d'avoir eu la chance de faire vivre ma famille dans un endroit aussi enchanteur. C'est donc avec beaucoup d'enthousiasme que je prends la parole à ce sujet.
Les gens des villes qui regardent certaines émissions de télévision ou lisent certaines publications peuvent finir par avoir une perspective particulière. Cette perspective est parfois fidèle à la réalité, mais le plus souvent, elle ne l'est pas. Je songe par exemple à la situation où nous avons vu divers groupes environnementalistes extrémistes intervenir dans le dossier de la forêt pluviale des grands ours de la Colombie-Britannique.
Or, il n'existe pas de forêt pluviale des grands ours de la Colombie-Britannique. Cette forêt n'a jamais figuré sur une carte. C'est pure fabrication et le concept a été créé à des fins de marketing pour faire entrer plus d'argent dans les coffres de ces groupes. Malheureusement, les entreprises qui achètent des produits du bois, du bois d'oeuvre et des articles de ce genre tirés du bois provenant de cette région ont fini par succomber à ce programme de marketing. Nous voyons maintenant à l'intérieur de la Colombie-Britannique les groupes environnementalistes extrémistes américains s'activer discrètement et pénétrer à l'intérieur de la province.
Je vais citer un exemple précis. Je lis à cet égard des notes que j'ai prises au cours d'une réunion de deux jours qui s'est tenue le week-end dernier, samedi et dimanche, dans la petite ville de Revelstoke, située dans ma circonscription. Cette localité existe depuis 100 ans. Elle a donné naissance a beaucoup de citoyens éminents, dont le moindre n'est pas le député de York-Sud—Weston, qui est né et a grandi à Revelstoke. Nous prenons bonne note de cet événement très important.
Blague à part, cette localité de 8 500 habitants est complètement entourée de forêts. Trois vallées convergent vers cette localité. La population de 8 500 habitants est stable. Les gens y ont toujours traité l'environnement avec énormément de respect, car c'est de cet environnement qu'ils tirent leur gagne-pain.
Les changements, excellents pour la plupart d'ailleurs, qu'ont apportés aux pratiques forestières les gouvernements provinciaux d'allégeance différente et divers ordres de gouvernement ont entraîné une réduction de l'extraction des ressources à des niveaux considérés responsables pour ce qui est de la récolte du bois d'oeuvre et des produits du bois dans la région.
On s'est donc tourné vers des produits à plus grande valeur ajoutée, et la masse actuelle de fibre extraite des forêts a diminué. Il y a toutefois une limite au nombre de tables d'harmonie de guitare et de caisses de résonance de violon qu'on peut fabriquer et cela ne suffit pas à employer la population active de la région. Je dois dire toutefois que dans l'ensemble, je suis frappé par l'équilibre auquel on est parvenu entre les préoccupations environnementales et des pratiques de coupe responsables.
Du fait d'un ralentissement dans le secteur forestier et de la beauté spectaculaire de la région, on mise maintenant davantage sur ce qu'on appelle l'éco-tourisme. Nous parlons de pistes de motoneige et d'installations connexes, et de faire du ski sur les nombreux glaciers magnifiques de la région qui ne sont accessibles que par hélicoptère. Tout d'un coup, sans aucun préavis, le ministère de l'Environnement, des Terres et des Parcs a décidé d'interdire la région aux motoneiges après que le ministère fédéral de l'Environnement ait mis les caribous de la région sur la liste rouge. On peut comprendre cette décision et on la comprendrait encore mieux si on possédait une base de données scientifiques solides pour l'étayer. J'ai d'ailleurs pris note, d'après ce que je suis en train de lire, que, en ce qui concerne les caribous de la région, il fallait étudier les questions de l'impact sur l'habitat et de la perturbation de la faune.
On n'arrête pas de nous dire que le grizzly est une espèce en danger, ce qui est vrai dans certaines régions du Canada. Toutefois, il n'en est rien dans cette partie de ma circonscription pas plus que dans l'extrême sud-est de cette dernière. Ce sont des prédateurs qui s'en prennent aux chevreuils et, après avoir épuisé cette ressource, ils s'en prennent aux caribous et aux élans. Quel genre de pression les loups ont-ils exercé sur les troupeaux de caribous dans leur rôle de prédateurs? C'est le genre de questions auxquelles le ministère provincial de l'Environnement, des Terres et des Parcs, ou METP, ne semble pas pouvoir répondre. Toutefois, cela résulte du fait d'avoir été inscrits sur la liste par le ministère de l'Environnement du Canada.
Par exemple, le METP a-t-il tenu compte du fait que l'on trouve le parc national du Mont-Revelstoke et le parc national des Glaciers, endroits adjacents à Revelstoke et Golden entre lesquels ils se trouvent, et offrant de toute évidence une zone sans aucune perturbation où peut se rendre le caribou? Le METP a-t-il précisé dans son sondage l'existence de cette zone sans aucune perturbation? Lorsque nous avons posé cette question au cours de la rencontre, la réponse a parfois été oui et dans d'autres cas, non.
Ce que les gens de Revelstoke, de Kootenay—Columbia et tous les Canadiens qui comprennent ces questions se demandent, c'est sur quoi nous fondons ces jugements et si l'on a tenu compte de toutes les répercussions.
Je veux aussi me prononcer de façon énergique en faveur de l'utilisation responsable de l'environnement et des espèces par les chasseurs. Je vais vous citer un extrait d'un document. Voici:
S'il fallait en croire les propos de bon nombre des prétendus environnementalistes modernes, les chasseurs sont un anachronisme.
On nous dit que les espèces sauvages diminuent pendant que le chasseur insensible et sans pitié se rend dans les bois animé du seul désir d'abattre un animal, sans accorder quelque pensée que ce soit à l'avenir de la ressource.
Un nouveau sondage rendu public par Habitat faunique Canada dément cette image soigneusement façonnée.
Le sondage révèle que sur une période de 15 ans, les chasseurs ont apporté une contribution directe de plus de 335 millions de dollars à des projets de conservation des habitats au Canada. Bien que ce montant soit en lui-même impressionnant, l'étude souligne qu'il ne comprend pas les montants que les chasseurs ont versés à des groupes nationaux comme Canards illimités Canada et la Société canadienne pour la conservation de la faune. Il ne comprend pas les 600 millions de dollars en droits de permis versés par les chasseurs au cours de la même période, ni les 600 millions de dollars que les chasseurs investissent chaque année dans l'économie canadienne sous forme de frais d'équipement, de déplacement et d'hébergement et d'autres dépenses connexes. Il est aussi important de souligner que ces montants ne comprennent pas les contributions tout aussi significatives des pêcheurs à la ligne en ce qui concerne leur ressource.
En Colombie-Britannique seulement, au cours de cette période de 15 ans, les chasseurs ont investi plus de 106 millions de dollars et consacré près de 2,5 millions d'heures de travail bénévole à la conservation de l'habitat des espèces sauvages.
C'est un bilan impressionnant pour un groupe de citoyens qui sont souvent dépeints par les médias populaires comme un groupe de personnes mal dégrossies prêtes à tirer sur tout ce qui bouge et à massacrer l'environnement.
Je dois m'exprimer au nom des gens de ma circonscription, et il ne s'agit pas uniquement de chasseurs, mais de gens comme moi, qui ont choisi de vivre dans la région parce qu'ils ont énormément de respect pour l'environnement, l'écologie et les espèces. Notre voix doit être entendue et nous devons participer au processus.
Lorsque nous offrirons notre aide concernant la Loi sur les espèces en péril, si c'est effectivement la volonté de la Chambre, nous devrons tenir compte de toutes les questions que j'ai soulevées aujourd'hui ainsi que de nombreuses autres, afin de créer un équilibre pertinent et de veiller à ce que nous nous entendions sur ce que devrait être cet équilibre.
Bon nombre de mes collègues et moi-même, qui représentons des gens comme les citoyens de ma circonscription, défendrons leurs points de vue.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.
Mon intérêt pour ce projet de loi est de deux ordres: d'abord, il y a la préoccupation pour l'environnement, mais aussi la préoccupation quant à l'efficacité de l'application de cette loi. Je me soucie également de la manière dont le gouvernement fédéral voudrait intervenir dans des domaines qui relèvent de la compétence des provinces, et de la centralisation mise de l'avant par le gouvernement fédéral dans ce dossier, au lieu d'en arriver à une vraie collaboration et de signer des ententes parallèles avec des provinces en regard de ce qui se fait dans chacune des provinces. On le voit encore dans ce dossier, il n'a aucune volonté de respecter les particularités des provinces.
Ce qu'il faut savoir dans ce dossier, c'est que la biodiversité dans son ensemble est le résultat de l'évolution terrestre et cela se fait depuis plus de 4,5 milliards d'années. Ce processus évolutif a fourni une large sélection d'organismes vivants et d'environnements naturels. Il est important de les préserver pour assurer l'équilibre de notre planète.
Ces organismes composent les écosystèmes que nous connaissons aujourd'hui, jouent tous un rôle au sein de la chaîne alimentaire et participent à l'équilibre biologique de la planète. Toutefois, depuis quelques années, les scientifiques indiquent qu'on assiste à une extinction grandissante de certaines espèces, ainsi qu'une augmentation des espèces menacées d'extinction ou fortement vulnérables.
Je vais donner l'état de la situation. Il y a 340 espèces en péril au Canada, 15 disparues, 87 en voie de disparition, 75 sont menacées, 151 sont vulnérables, et 97, dont 27 sont en réévaluation, qui seront, dans les années à venir, en voie de disparition. La situation est alarmante et il faut, dès aujourd'hui, regarder ce que le projet de loi C-33 va permettre de faire de façon réaliste.
Avec l'augmentation des rythmes de disparition de certaines espèces comme je viens de le mentionner, je reconnais que la situation est sérieuse et, aujourd'hui, le Bloc québécois, par son opposition au projet de loi C-33, le démontre par l'intervention de plusieurs collègues ici à la Chambre. Il est vraiment urgent de réagir, mais de façon efficace.
Avant de réagir, il faut se poser certaines questions. Le ministre de l'Environnement dit: «Aucune modification ne pourra être apportée au projet de loi.» C'est faire fi du comité qui sera mis sur pied pour étudier le projet de loi C-33. C'est faire fi de l'opposition ici dans cette Chambre. Aujourd'hui, tous les partis d'opposition sont contre le projet de loi. Ils veulent faire entendre certaines réalités vécues dans certaines régions. Les groupes environnementalistes sont contre ce projet de loi et voudraient apporter certaines nuances. Le ministre de l'Environnement fait fi de toutes ces oppositions, ainsi que des industries reliées de près ou de loin à l'impact environnemental inhérent à leur pratique quotidienne.
On doit se poser certaines questions fondamentales. Est-ce que le projet de loi C-33 ajoutera une protection additionnelle et aura une application réaliste? Est-ce que le projet de loi contribuera réellement à améliorer la protection de nos écosystèmes et des espèces menacées qui les composent? Ce sont les premières questions qu'on doit se poser, et à mon avis, et c'est celui de plusieurs intervenants, de plusieurs groupes de différents secteurs impliqués dans cette sérieuse question de la survie des espèces en voie de disparition, la réponse est non. C'est ce dont le Bloc québécois veut, par son opposition, faire part à ce gouvernement.
Le principe de protéger davantage nos espèces est en lui-même un principe que le Bloc québécois endosse aisément, contrairement à ce que veut nous donner comme image le parti gouvernemental qui, soit dit en passant, est très silencieux aujourd'hui sur le projet de loi C-33.
Toutefois, nous ne croyons pas que le projet de loi C-33 puisse permettre d'améliorer la protection des espèces menacées. Nous doutons de cela. En fait, nous sommes opposés à ce projet de loi puisqu'il constitue une intrusion directe dans de nombreux champs de compétence du Québec, mais aussi d'autres provinces, au lieu d'établir un véritable dialogue et d'avoir un véritable respect de ce qui se fait dans les autres provinces.
Dans les faits, il constitue un chevauchement avec la loi québécoise en vigueur depuis 1989, loi qui fonctionne bien et qui a eu des effets très significatifs au Québec. Cela constitue donc un pouvoir démesuré du fédéral au détriment, encore une fois, du Québec.
Malgré l'indication, dans le préambule du projet de loi, que la responsabilité est partagée en matière de protection des espèces, tout porte à croire que le ministre détient le pouvoir d'imposer sa vision, la vision de son cabinet, lorsqu'il le jugera nécessaire. Le ministre se place également dans une situation de vulnérabilité.
On sait très bien qu'il y a différents lobbies qui sont là pour expliquer d'abord et avant tout les intérêts de certaines compagnies qui pourraient, par leur façon de procéder, mettre en péril certaines espèces menacées. Le Cabinet et le ministre seront là pour décider si, oui ou non, ils jugent nécessaire d'appliquer ou de ne pas appliquer la loi. C'est très dangereux.
En d'autres termes, sa législation aura de facto préséance sur les législations provinciales existantes et cela, même lorsque les habitats sont entièrement de juridiction provinciale. On sait que cette façon de faire est inacceptable et n'apportera pas l'équilibre tant souhaité pour protéger nos espèces en voie de disparition.
L'article 10 du projet de loi stipule que le ministre peut conclure un accord relatif à l'application des dispositions de la présente loi.
Plus précisément, dans la section sur les interdictions générales, au paragraphe 34(2), il est clairement dit:
(2) Sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil peut, par décret, prévoir l'application des articles 32 et 33 dans une province, ailleurs que sur le territoire domanial [...]
C'est avec cela que le Bloc québécois n'est pas d'accord. Et comme si cela n'était pas suffisant, il est dit, au paragraphe (3) du même article:
(3) S'il estime que le droit de la province ne protège pas l'espèce, le ministre est tenu de recommander au gouverneur en conseil la prise du décret.
Ce sera donc le Conseil des ministres qui influencera le ministre. Par ricochet, le ministre et son cabinet pourront être très influencés par différentes sociétés qui déverseront des produits chimiques dans les eaux ou dans les lacs. Nous ne pouvons donner notre appui à ce projet de loi.
On peut voir comment le parti au pouvoir fonctionne, même avec la présente législation pour protéger les espèces en voie de disparition. On sait qu'il a obtenu la note D moins, mais il veut donner des leçons aux provinces. C'est quand même assez rigolo.
Lui qui a obtenu la note D en ce qui concerne la protection des espèces en voie de disparition, il veut donner des leçons, tout comme le premier ministre qui assistent à des conférences internationales et qui veut donner des leçons sur la pauvreté. Pourtant, dans son propre gouvernement, cela fait sept ans qu'on sape le filet de sécurité sociale, qu'on met la hache dans le programme d'assurance-emploi, qu'on ne donne plus aux provinces des sommes suffisantes pour le logement social, et j'en passe. Je pourrais faire une liste assez exhaustive de tout le désinvestissement du fédéral en ce qui concerne sa politique sur le filet de sécurité sociale. C'est un donneur de leçon qui n'a pas de leçon à donner.
Dans le projet de loi C-33, ce sont des leçons qu'on veut donner aux provinces. Certaines provinces n'en ont assurément pas besoin, car elles pourraient être des leaders et démontrer au gouvernement fédéral comment il pourrait faire mieux sur son propre territoire.
Donc, on ne dénote aucune flexibilité de la part du ministre pour apporter des modifications au projet de loi C-33. C'est ce son de cloche qu'a donné le ministre de l'Environnement. On sait que l'industrie des pâtes et papier, les groupes environnementaux, l'opposition ici aujourd'hui et même certains députés du Parti libéral du Canada ont dit au ministre que ce projet de loi n'apportera rien de concret s'il ne subit pas des changements majeurs et même que ce projet de loi laisse à désirer.
Deux députés du Parti libéral du Canada disent qu'on fait également fi d'une liste qui contient 333 espèces identifiées par un comité qui a été mis sur pied en 1978.
On veut donc donner des leçons, sans savoir comment les provinces ont appliqué certaines dispositions pour la survie des espèces en voie de disparition.
[Traduction]
M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je constate que les députés d'en face semblent quelque peu embarrassés face à ce projet de loi, car les libéraux ne lèvent pas le petit doigt à la Chambre pour le défendre. Je ne suis pas trop étonné qu'ils ne veuillent pas être associés publiquement à cet exercice.
Les dispositions concernant l'application de la loi et d'autres prévoyant les peines reflètent le mépris que le gouvernement a pour l'application de la loi et les droits individuels. Pourquoi le gouvernement doit-il toujours avoir recours aux grands moyens pour présenter une mesure législative qui, il faut l'admettre, poursuit un objectif admirable? Ses intentions sont irréprochables et je les partage. Le problème, c'est plutôt les moyens, à savoir ce que le gouvernement propose de faire et les menaces qu'il fait peser sur le monde rural. Les agriculteurs, les grands éleveurs et les propriétaires de boisés vont devoir composer avec cette loi draconienne qui contient des dispositions contraires à tous les cas de jurisprudence que j'ai trouvés et, à n'en pas douter, contraires à l'esprit de la common law.
Pourquoi est-ce que je dis cela? C'est que les dispositions de la loi relatives aux perquisitions sans mandat dans un lieu autre qu'une maison d'habitation reprennent presque mot pour mot le texte de la fameuse loi concernant les armes à feu, le projet de loi C-68. On y retrouve même le cas où on peut décerner un mandat autorisant à procéder à la visite d'une maison d'habitation s'il y a des motifs raisonnables de croire qu'un refus sera opposé. De même, le projet de loi reproduit les dispositions du projet de loi C-68 selon lesquelles «constitue une infraction criminelle le fait de ne pas aider un agent qui procède à la visite de sa propriété privée ou de lui cacher des renseignements qui pourraient être compromettants».
Les articles 86 à 91 ont sûrement été rédigés par les mêmes personnes qui ont rédigé la loi sur les armes à feu, car tous les paragraphes de la section sur l'application sont absolument identiques du point de vue du libellé à ceux de cette loi. Ce n'est pas une coïncidence.
Nous disons que le projet de loi vise à protéger les espèces en péril. Je crois qu'il vise à protéger une espèce prédatrice, celle des avocats qui l'ont rédigé pour des avocats. Ces derniers deviendront énormément riches en essayant de défendre les propriétaires fonciers innocents contre les dispositions de ce projet de loi insensé.
Non seulement les dispositions en matière de perquisition et saisie et tous ces bons éléments vont totalement à l'encontre de l'esprit du droit canadien, mais les peines prévues pour avoir tué ou agressé des espèces en péril ou pour en avoir fait le trafic seront extraordinairement sévères. Le Canada est réputé pour son indulgence dans la punition des crimes. Pourtant, en vertu de ce projet de loi, une personne peut recevoir une amende de 250 000 $ et/ou une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à cinq ans, même si elle n'a pas commis délibérément l'infraction. Qu'il s'agisse de négligence ou d'un accident, ces peines s'appliquent dans les deux cas.
Les même peines sont imposées pour avoir détruit le nid ou la tanière d'une créature en péril, même, encore une fois, si c'est par négligence. Si une personne écrase accidentellement le nid d'un oiseau prétendument en péril, elle pourrait avoir des ennuis.
Si je me rends à mon ranch, qui pullule de gibier, pour jeter un oeil sur mon bétail et que j'écrase par accident une espèce de plante jugée être en péril, ou même si le cheval que je monte marche sur une telle plante, des accusations pourraient être portées contre moi en vertu de cette loi. Je pourrais être accusé d'avoir commis, non pas une infraction prévue par un texte législatif, mais bien un crime. Pourquoi le gouvernement veut-il faire de simples citoyens des criminels chaque fois qu'ils font un pas?
Les conséquences du projet de loi pour les agriculteurs sont alarmantes. Ce qui est tout aussi alarmant que la possibilité qu'une personne puisse accidentellement détruire un nid ou une tanière, c'est la disposition voulant que les sanctions que je viens de citer s'appliquent à toute personne qui détruit toute partie d'un habitat jugé essentiel pour une espèce en voie de disparition. Il n'est même pas nécessaire qu'une espèce en voie de disparition soit présente pour que cette disposition entre en vigueur.
Je demande à la Chambre de bien vouloir me permettre de lire une analyse du projet de loi qui a été préparée par M. David Pope, avocat bien connu de Calgary qui, tout comme moi, chérit les libertés civiles et la common law. Voici ce que M. Pope avait à dire:
Les infractions et sanctions prévues pour des actions contre des plantes, des animaux et des organismes qui sont considérés comme des espèces en péril et les terres qui constituent leur habitat ne ressemblent à rien de ce qu'on retrouve ailleurs dans le droit criminel canadien. Il n'est pas question de meurtre, d'incendie criminel, de vol ou de viol, mais de torts causés à une plante, un animal ou un organisme ou de la destruction d'une partie de son habitat.
M. Pope décrit ensuite les crimes environnementaux énumérés comme des «infractions de responsabilité stricte». Cela veut dire qu'un accusateur n'a qu'à déclarer qu'une infraction a été commise et la personne accusée doit alors prouver qu'elle n'a pas commis ce crime. En termes juridiques, on appelle cela l'inversion du fardeau de la preuve. Ce n'est presque jamais utilisé en droit criminel. Dans le passé, on n'avait pratiquement jamais entendu parler de cela. Le critère de preuve nécessaire pour obtenir une condamnation est bien moins strict que celui qu'on exige normalement en droit criminel. C'est un changement dangereux, surtout lorsqu'on se rend compte qu'il touche directement les éleveurs et les agriculteurs qui ne sont généralement pas perçus comme des criminels dans notre société.
Le ministre compétent a le pouvoir de nommer des agents chargés de faire appliquer la loi qui ont les mêmes pouvoirs qu'un agent de la paix mais n'ont pas la formation voulue. Ces agents n'ont des comptes à rendre qu'au ministre.
Enfin, étant donné que mon temps de parole est pratiquement écoulé, je tiens à préciser qu'il y a une disposition dans le projet de loi C-33 qui permet à toute personne âgée de moins de 18 ans et résidant au Canada de faire déclencher une enquête contre un éleveur ou un agriculteur pour n'importe laquelle des infractions que nous avons mentionnées. Tout groupe d'intérêt ou toute personne en voulant à un agriculteur en particulier peut faire déclencher une telle poursuite et ce, de façon tout à fait anonyme.
La loi dit que le ministre ne peut rendre public le nom du plaignant. En justice pénale au Canada, tous les autres prévenus ont le droit de connaître leur accusateur. Même les meurtriers ont ce droit, mais il est refusé à quiconque peut avoir, accidentellement ou par négligence, porté atteinte à l'habitat d'une espèce en danger. Il ne peut confronter son accusateur au tribunal.
J'ignore s'il est encore possible, à ce stade-ci, d'améliorer le projet de loi. Il faudrait éliminer tant d'articles pour que les dispositions sur l'application et les sanctions soient conformes à la coutume canadienne et aux autres lois que nous viderions le projet de loi de toute sa substance ou presque. À mon avis, c'est ce qu'il faudrait faire. C'est peut-être pour cela que les députés ministériels ne se portent pas à la défense du projet de loi. C'est peut-être ce qu'ils veulent. Je le souhaite.
Il faut retourner à la case départ et rédiger un bon projet de loi. Protégeons les espèces en danger, mais sans nous en prendre aux Canadiens.
[Français]
M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui sur ce projet de loi tellement important.
Ce projet de loi ne traite pas d'espèces en voie de disparition comme le Parti progressiste-conservateur ou le Nouveau Parti démocratique, il porte effectivement sur la disparition d'espèces sauvages, qui est un sujet extrêmement important.
Nous discutons aujourd'hui du projet de loi C-33. C'est un projet de loi très important. Le contenu et le but de ce projet de loi répondent à un besoin criant. On sait qu'il y a au Canada à peu près 340 espèces d'animaux sauvages en péril. Il y en a un certain nombre qui ont déjà disparu. Il y en a d'autres qui sont à un stade assez critique. Il y en a 87 qui sont considérées en voie de disparition, 75 qui sont menacées, 151 qui sont vulnérables, pour un total d'à peu près 340 espèces sauvages en péril au Canada.
Nous savons d'ailleurs que ce problème est non seulement important au Canada, mais également à travers le monde. Il y a eu plusieurs conférences, dont le Sommet de Rio, en 1992, qui avait réuni un certain nombre de pays pour étudier ce problème des espèces en voie de disparition.
La pollution de l'environnement et toutes les questions qui ont trait à la pollution de l'eau et de l'air contribuent à faire en sorte que nous perdions des espèces animales. Il faut faire tous les efforts pour assurer que nous puissions conserver ces animaux. C'est la raison pour laquelle il y a eu cette conférence à Rio, en 1992, où le Canada avait signé la Convention sur la biodiversité.
D'ailleurs, cela avait inspiré le Canada à tenir, en 1996, une conférence pour conclure avec les provinces une entente sur l'environnement. Nous avons eu l'Accord pour la protection des espèces en péril, qui a par la suite inspiré le ministre de l'Environnement à présenter le projet de loi C-65, Loi concernant la protection des espèces en péril au Canada.
C'est en fait ce projet de loi qui est à la base de celui que nous examinons aujourd'hui, soit le projet de loi C-33. C'est plus ou moins le même projet de loi, avec quelques modifications. C'est en fait, il faut le souligner, la première fois que le gouvernement fédéral tente d'adopter un projet de loi pour répondre au problème des espèces menacées.
C'est son premier projet de loi et il tombe carrément à côté de la barre. On se demande même pourquoi le gouvernement fédéral a présenté un projet qui manque autant de précision et qui provoque autant d'opposition de part et d'autre.
Même l'ancien projet de loi—ce n'est pas comme si le gouvernement fédéral n'avait pas eu d'avertissements que son projet de loi était tout croche—au début, quand il a été présenté sous le numéro C-65, l'opposition, à ce moment-là, provenait de presque toutes les provinces, pas uniquement du Québec, mais de la Nouvelle-Écosse, de Terre-Neuve, du Nouveau-Brunswick, du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest. Tous, en fait, s'opposaient au principe qui semble être encore réincarné dans le projet de loi C-33, c'est-à-dire que cela manquait d'harmonisation avec les provinces.
Le projet de loi présentait une approche qui ne respectait pas les juridictions provinciales et il n'arrivait pas à harmoniser les juridictions fédérales et provinciales. Nous savons que le gouvernement fédéral a quand même des pouvoirs dans le domaine, et il a légiféré dans le domaine, mais les provinces également. Les provinces sont même outillées pour mieux protéger les habitats des espèces en péril.
Le gouvernement fédéral, bien sûr, a une certaine juridiction, mais l'idéal, c'est évidemment d'avoir une certaine harmonisation entre ces deux pouvoirs. Mais le gouvernement fédéral semble être incapable, encore une fois, même quand c'est très important de le faire, de s'entendre avec les provinces. Encore une fois, ce n'est pas uniquement le Québec qui critique l'approche du gouvernement fédéral dans le projet de loi C-33. Il est à se demander d'ailleurs si le gouvernement fédéral n'est pas toujours en train de vouloir créer des conflits fédéraux-provinciaux. Ce projet de loi en est une autre illustration.
Donc, l'opposition est assez imposante, assez importante à l'endroit de ce projet de loi. Sans nécessairement citer tous les articles du projet de loi, parce qu'il y a quand même 141 articles qui portent sur diverses définitions, il semble y avoir deux points majeurs qui nous dérangent et qui dérangent d'ailleurs tous les partis d'opposition, tous les groupes environnementaux et même certains députés libéraux. Le gouvernement fédéral s'est approprié trop de pouvoirs dans l'application de cette loi, ce qui risque de compromettre l'efficacité de la loi et peut-être même les espèces en péril.
Donc, le fédéral veut imposer sa vision qui, encore une fois, ne respecte pas la juridiction provinciale et semble faire en sorte que toute l'application de la loi aurait préséance sur les juridictions provinciales.
Cela commence mal, évidemment, parce qu'on ne peut pas avoir une loi qui agit de façon efficace si elle crée déjà un problème au niveau fédéral-provincial. Déjà, ce n'est pas sur la bonne voie du tout et c'est très évident. Ce n'est pas une question politique, il s'agit de répondre à un besoin qui a été établi dans d'autres pays auparavant, et ce, depuis plusieurs années. Ça presse. Plus on retarde l'application de ce genre de lois, plus les espèces menacées disparaissent. Donc, c'est ça, le problème.
Encore une fois, le gouvernement fédéral, à partir de ce projet de loi, ne respecte pas les juridictions provinciales, se donne des pouvoirs discrétionnaires trop importants, et même, comble de l'absurde, c'est que le pouvoir de déterminer les espèces en voie de disparition relève du Cabinet plutôt que d'experts, de gens qui connaissent le domaine. Il faut quand même être déboussolés en quelque sorte pour vouloir politiser un projet de loi qui a ses assises dans des juridictions extrêmement scientifiques.
Bien sûr, on ferait appel aux gens qui s'y connaissent. Les gens qui s'y connaissent dans le domaine environnemental et la protection des espèces en voie de disparition sont opposés à ce projet de loi. Tous les groupes environnementaux ou presque, ou la grande majorité, s'opposent carrément à ce projet de loi, parce qu'il est inefficace, il est inutile. Ils disent même qu'il est dangereux. Il est dangereux dans la mesure où il ne répond pas aux besoins de protéger les espèces en voie de disparition. Plutôt que de protéger les espèces en voie de disparition, il crée encore une fois un conflit fédéral-provincial.
Même des intervenants du milieu, par exemple, les gens qui travaillent dans le domaine des pâtes et papier et l'Association minière s'opposent également à ce projet de loi. Il y a même des libéraux qui s'interrogent sur ce projet de loi. Je ne parle pas de n'importe qui; la députée de York-Nord, par exemple, le 12 juin 2000, a dit, et je cite: «Nous n'arriverons à vraiment protéger les espèces en péril que si ce projet de loi est bonifié lors de l'étude en comité.» Le ministre a déjà mentionné qu'il n'avait aucune intention de modifier le projet de loi.
La députée de York-Nord, qui est très impliquée dans le milieu environnemental, disait également: «La Chambre doit appuyer une mesure législative qui est solide, juste et efficace et qui a du sens au plan biologique. Malheureusement, le projet de loi C-33 laisse à désirer.» C'est ce que disait la députée de York-Nord.
Le même jour, le député de Lac-Saint-Louis, qui fut autrefois ministre québécois de l'Environnement au sein du gouvernement du premier ministre Bourassa, disait également, et je cite: «Au lieu d'être la liste finale produite par les scientifiques de la plus haute réputation qui ont travaillé sans relâche pendant les vingt dernières années, la liste sera maintenant établie à la discrétion du Cabinet.» Que vient faire le Cabinet dans ces décisions qui doivent relever évidemment d'une expérience scientifique? C'est le bon sens qui veut que ce soit scientifique.
Le député de Lac-Saint-Louis poursuivait en disant: «C'est totalement ironique, à mon avis. Nous n'utilisons même pas la liste des 339 espèces nommées.»
C'est un défaut manifeste du projet de loi. Sans liste, il ne peut y avoir de protection. Cette façon de procéder a fait dire au Sierra Club que si ce projet de loi était adopté, ce serait un embarras international pour le Canada. De plus, tous les partis d'opposition sont également contre le projet de loi, tout comme évidemment le gouvernement du Québec. On trouve, encore une fois, que ce sont des dédoublements et des empiètements. Le gouvernement fédéral ne semble pas savoir où est sa juridiction. Il faut absolument retirer ce projet de loi.
[Traduction]
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis très heureux de vous entretenir de ce projet de loi aujourd'hui. Je suis d'accord avec bon nombre des observations formulées par le député bloquiste, notamment en ce qui concerne l'ingérence du gouvernement fédéral dans des sphères de compétence provinciale. Nous partageons un grand nombre de ces préoccupations dans ce domaine. Je dirai bien honnêtement que le gouvernement ne respecte pas les sphères de compétence provinciale énoncées dans notre Constitution. C'est bien dommage, car, à mon avis, cela n'est pas très productif.
Nous parlons aujourd'hui de la protection des espèces en péril. Je prends certes la question au sérieux, et les gens de ma circonscription en font autant. Je sais que mes collègues de l'Alliance canadienne prennent aussi cette question au sérieux. Nous voulons que soient protégées les espèces en péril. Or, la façon de faire du gouvernement ne permettra pas d'atteindre cet objectif. Le gouvernement ne réussira tout simplement pas à protéger les espèces en péril, car, au lieu de faire appel à la collaboration, au lieu de veiller à ce qu'il y ait une indemnisation équitable pour toute perte d'une propriété ou perte d'utilisation d'une propriété, il agit maladroitement, en décidant d'imposer dans la loi de lourdes sanctions et amendes et de longues peines d'emprisonnement éventuel. Il les menace de sévir vigoureusement, au lieu de demander leur collaboration, ce qui constituerait de loin la façon de faire la plus productive.
Je pourrais citer des dizaines d'exemples de cas, dans le monde entier, y compris au Canada et aux États-Unis, où une collaboration s'est révélée extrêmement efficace pour protéger une espèce chère à un groupe en particulier. Cela s'est révélé efficace.
Les lois des États-Unis sur les espèces menacées d'extinction prouvent que cette approche maladroite et importune qui suppose l'imposition de lourdes peines ne fonctionne pas. Elle ne donne pas de bons résultats parce que ceux qui constatent la présence d'une espèce en péril sur leur propriété ou sur une propriété qu'ils utilisent ne le signalent pas au gouvernement et ne collaborent pas avec lui pour protéger l'espèce en question, par crainte de perdre leur propriété, leur droit de jouir de leur propriété ou le revenu qu'ils tirent de leur propriété.
Je suis ici depuis sept ans, et c'est la troisième tentative du gouvernement de faire adopter une telle mesure législative. Malgré deux essais infructueux, le gouvernement adopte toujours la même approche pour légiférer afin de protéger les espèces en péril, une approche inefficace, qui ne fonctionne pas.
Je me permets de parler un peu de mon expérience et d'expliquer un peu pourquoi ce projet de loi m'inquiète vivement. Dans ma circonscription de Lakeland, située au centre-est de l'Alberta, les fermes sont nombreuses. C'est une circonscription rurale. De plus, il y a une industrie pétrolière et gazière, qui est une industrie primaire et qui s'inquiète également de ce projet de loi.
J'ai grandi sur une ferme mixte près de Lloydminster. J'ai acheté une ferme en 1974. J'ai étudié l'agriculture à l'université, où j'ai obtenu un baccalauréat en science agricole. L'achat de ma ferme était totalement financé, de sorte que je sais ce que signifie gagner sa vie sur une ferme. Je sais que c'est extrêmement difficile. Certaines années, je me suis demandé si j'allais persévérer une autre année.
J'ai aussi travaillé en tant qu'économiste agricole et conseiller en gestion d'entreprise auprès d'agriculteurs, d'abord comme travail saisonnier puis même comme travail à plein temps pour aider à boucler le budget de la ferme. Trop souvent, j'ai rencontré les agriculteurs autour de la table de cuisine où les enfants et leur mère étaient en pleurs et le père me regardait les yeux hagards parce qu'ils savaient très bien qu'ils allaient perdre leur ferme. Trop souvent, je me suis assis à une table de cuisine dans de telles circonstances.
Je me suis engagé alors à veiller à ce que la situation s'améliore pour les agriculteurs afin que les gens ne se trouvent plus jamais dans une telle position. Cela demeure ma mission encore aujourd'hui.
Je ne vais pas rester silencieux devant un projet de loi préconisant une approche intransigeante, qui pourrait amener les agriculteurs à perdre leurs fermes alors qu'ils pourraient la sauvegarder autrement—et qui le fera certainement s'il est adopté—et qui pourrait entraîner une perte de revenus pour des agriculteurs qui ne peuvent vraiment pas se le permettre. Je ne vais pas me taire et laisser une telle chose se produire car je suis ici pour me battre contre de telles mesures législatives, au nom des agriculteurs et de certains autres particuliers. Nous souhaitons tous des projets de loi qui protégeront les espèces en péril. Celui-ci ne le fera pas. Il envenimera la situation.
Les agriculteurs ont prouvé au fil des ans que, si nous coopérons et collaborons avec eux, ils feront tout leur possible pour protéger les espèces en péril. Ils l'ont déjà fait; ils ont donné des preuves à cet égard. Ce projet de loi va dans le mauvais sens.
Des agriculteurs m'ont avoué confidentiellement que, si ce projet de loi était adopté, et s'ils venaient à trouver une espèce en péril sachant qu'ils pourraient perdre leur propriété sans recevoir d'indemnisation ou encore qu'ils pourraient perdre le revenu provenant d'une partie de leur terre désignée comme habitat d'une espèce en péril, ils ne seraient vraiment pas disposés à coopérer. Rien ne garantit une indemnisation et surtout pas une indemnisation équivalente à la valeur du marché.
Cette mesure risque en fait de produire l'effet inverse et d'amener ces gens à fermer les yeux sur la présence d'espèces en péril, ou pire. On irait à l'encontre du but recherché et ce n'est pas ce que nous voulons. Ce projet de loi ne contribue pas à améliorer les choses. Ce n'est pas la solution idéale pour régler le problème. L'initiative a échoué à deux reprises déjà pour cette même raison et voilà que le gouvernement revient avec une initiative semblable. L'échec est assuré et ce n'est pas ce que nous souhaitons.
J'en ai parlé avec des cultivateurs et des personnes travaillant dans les industries d'exploitation des ressources; tous seront touchés par ce projet de loi s'il venait à être adopté dans son libellé actuel. Je voudrais que le ministre de l'Environnement l'explique à ses amis qui sont peut-être propriétaires d'un chalet au bord d'un lac ou qui, après des années, et même toute une vie de labeur, auraient enfin réussi à se construire la maison de leurs rêves, en bordure d'un plan d'eau, sur un site magnifique qui leur tient maintenant à coeur. Qu'arriverait-il si une espèce en péril se trouvait sur leur terrain? Que le ministre explique à ces gens qu'il ne connaît pas quelles seraient les conséquences de la découverte d'une espèce en péril sur leur propriété, aux environs de leur chalet ou dans tout autre endroit qui leur appartiendrait ou dont ils tireraient leur gagne-pain. Je voudrais que le ministre leur explique comment ils seraient indemnisés.
Bien qu'on lui ait maintes fois posé la question, si la propriété en cause devait être confisquée, ou son exploitation restreinte, pour protéger lesdites espèces en péril, le ministre a refusé de garantir qu'une indemnisation serait accordée en fonction de la juste valeur marchande du bien en cause.
Le message est très clair: il n'y aura pas d'indemnisation selon une juste valeur marchande. J'aimerais bien voir le ministre expliquer la situation à ses amis lorsqu'ils perdront leur chalet ou l'utilisation de leur chalet ou encore leur propriété ou même l'utilisation de la propriété sur laquelle est située leur entreprise. J'aimerais le voir leur expliquer pourquoi ils perdraient ce droit et pourquoi ils perdraient leur propriété sans obtenir au moins une indemnisation calculée en fonction d'une juste valeur marchande. Pourtant, aucune garantie en ce sens n'est offerte. Au contraire, il est dit très clairement qu'aucune indemnisation calculée selon une juste valeur marchande ne sera accordée.
Le projet de loi effleure vaguement la possibilité d'une indemnisation. Il ne dit pas clairement qu'il va y avoir indemnisation et surtout ne garantit pas d'indemnisation selon une juste valeur marchande.
Je veux que soit insérée non pas dans un règlement mais dans la mesure législative avant son adoption à la Chambre une disposition offrant une garantie absolue selon laquelle toute personne qui perdra une propriété ou le droit d'utiliser une propriété en raison de l'application d'une stratégie de protection des espèces en péril sera indemnisée selon une juste valeur marchande. D'autres amendements similaires devraient également favoriser la collaboration. Dans de telles conditions, nous pourrions protéger de façon efficace les espèces en péril.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je présente à mon tour des observations sur ce projet de loi important et opportun. Il y a au Canada et à la Chambre quelques personnes qui se préoccupent peu des espèces en péril dans notre pays.
Le projet de loi vise essentiellement à empêcher des espèces sauvages du Canada de disparaître de leur milieu naturel et, à bien des égards, à assurer leur rétablissent dans leur milieu naturel.
Petit historique du projet de loi: en 1992, l'ancien gouvernement progressiste-conservateur a fait que le Canada a été le premier pays industrialisé à ratifier la Convention des Nations Unies sur la biodiversité. Cette convention prévoyait que l'on s'engage à adopter une loi et/ou un règlement visant à protéger les espèces menacées et en péril. La cause était certes valable à l'époque et elle l'est toujours autant aujourd'hui.
En 1996, le gouvernement libéral a présenté un projet de loi visant à tenir l'engagement pris plus tôt par le gouvernement progressiste-conservateur. Cet engagement a été réalisé avec la présentation du projet de loi C-65, la Loi sur la protection des espèces en péril au Canada, qui a été sévèrement critiqué à l'époque par les environnementalistes, les scientifiques et les propriétaires fonciers et qui, à cause de la prorogation du Parlement, est malheureusement resté au Feuilleton à l'étape de l'étude au comité de la Chambre.
Le projet de loi C-65 est repris dans le projet de loi C-33, qui constitue la deuxième tentative législative du présent gouvernement de remplir l'engagement pris par le Canada. Selon le gouvernement, le projet de loi C-33 vise à compléter les lois provinciales et territoriales sur la protection des espèces en péril. Il vise aussi à remplir l'engagement pris par le gouvernement fédéral dans le cadre de l'accord fédéral-provincial de 1996 sur la protection des espèces en péril.
Le projet de loi prévoit essentiellement la protection des diverses espèces qui sont nommées et considérées comme en péril et interdit de tuer un individu d'une espèce sauvage inscrite officiellement dans un document, de lui nuire, de le harceler, de le capturer ou de le prendre. Sont énumérées dans la liste les espèces qui sont en péril ou menacées par suite de leur destruction ou de la destruction de leur habitat au Canada.
Le projet de loi sur les espèces en péril prévoit l'adoption de décrets d'urgence énumérant les espèces à protéger et les mesures à prendre pour empêcher la destruction d'habitats essentiels aux espèces énumérées et à celles qui sont déclarées menacées de façon imminente. Le projet de loi prévoit également l'adoption de programmes de rétablissement et de mesures de délimitation des habitats essentiels des espèces en péril ou menacées.
De toute évidence, il faut adopter une démarche globale reposant sur l'identification de l'espèce en voie de disparition et aussi sur la définition des endroits où elle vit et l'élaboration d'une stratégie propre à empêcher toute nouvelle atteinte à cet habitat, à protéger l'espèce et à assurer son rétablissement.
Le projet de loi confère un statut juridique au Comité sur la situation des espèces en péril au Canada. Ce comité restera indépendant du gouvernement. Il évaluera la situation des espèces sauvages et les classera dans les différentes catégories en fonction du degré de risque. Le projet de loi fait place à une grande participation des personnes de l'extérieur du gouvernement. Les évaluations seront publiées et serviront de fondement aux recommandations sur les espèces à inscrire sur la liste des espèces en péril que le ministre soumettra au Cabinet.
Du point de vue du Parti progressiste-conservateur, c'est là que le projet de loi comporte de larges failles. C'est à toutes fins utiles le Cabinet qui déterminera quelles espèces seront inscrites sur la liste. Le Cabinet pourra faire ce qu'il veut puisqu'il s'arroge un pouvoir exclusif sur l'établissement de la liste. Cette façon de faire ne pose aucun problème dans certains cas, mais les espèces menacées constituent une question très spécialisée qui nécessite l'intervention d'organismes non gouvernementaux.
Je voudrais parler des membres du groupe de travail qui s'opposent vivement à ce que le gouvernement préserve ses pouvoirs décisionnels exclusifs à cet égard. Ils comprennent notamment l'Association canadienne des pâtes et papier, l'Association minière du Canada, le Sierra Club du Canada, la Fédération canadienne de la nature et la Fédération canadienne de la faune.
Ces organismes estiment qu'ils sont bien mieux placés pour déterminer quelles espèces devraient figurer ou non sur cette liste. Ils estiment qu'en conservant son pouvoir décisionnel exclusif, le Cabinet fait en sorte que cette question demeure politique, alors que ce ne devrait pas être le cas. Pareille décision devrait être essentiellement fondée sur des preuves scientifiques concrètes qui peuvent être documentées et exposées afin de déterminer si les espèces s'inscrivent dans la catégorie particulière des espèces en voie de disparition.
Les représentants de l'industrie minière et des pâtes et papier ainsi que les écologistes ont souvent des opinions divergentes. Certains iraient même jusqu'à les considérer comme étant à couteaux tirés. Si tous ces gens peuvent arriver à un consensus et s'entendre pour dire qu'ils peuvent travailler ensemble afin de rendre cette liste viable, il est dans l'intérêt de notre pays qu'ils le fassent et le gouvernement devrait vraiment leur confier cette tâche.
Il est presque banal de dire que le Parti progressiste-conservateur reconnaît que l'extinction, c'est pour toujours. Quand une espèce est disparue de la planète, on ne peut pas revenir en arrière. Ainsi, nous estimons que tous les Canadiens appuient fermement toute loi qui assure la survie d'une espèce et, dans certains cas, qui prévoit des mesures très draconiennes pour assurer la survie d'une espèce.
Le statut qui serait accordé repose sur des données scientifiques et non pas sur des facteurs politiques. C'est pourquoi le Parti progressiste-conservateur croit que pour être efficace, la loi doit prévoir des mesures fondées sur la science et des preuves scientifiques. Ce n'est pas une question politique ou partisane, c'est une question de la plus haute importance. Le pouvoir de déterminer quelle espèce est en danger doit donc être confié à ceux qui sont le mieux placés pour le faire.
Nous tenons également à protéger les droits des propriétaires fonciers et des utilisateurs, qui sont d'avis que personne ne devrait assumer seul le fardeau du rétablissement lorsque les avantages de la protection d'une espèce profitent à toute la société. Il peut arriver que l'habitat naturel d'une espèce se trouve sur les terres d'une personne en particulier. Le gouvernement devrait alors offrir des accommodements ou une compensation au propriétaire en cause afin de tout faire pour assurer la survie de l'espèce et protéger son habitat.
C'est pourquoi notre parti croit que le gros des décisions devrait être laissé aux intéressés et non au Cabinet lorsqu'il s'agit d'établir ce programme de rétablissement. Notre parti reconnaît également que si on retrouve une espèce en voie de disparition dans une région donnée, c'est que les propriétaires fonciers doivent sûrement faire ce qui s'impose et qu'on doit, dans certains cas, leur fournir les outils nécessaires pour poursuivre leurs efforts en ce sens ou parfois, faire en sorte que ce milieu réponde aux besoins de l'espèce en question.
Nous reconnaissons que beaucoup de volontaires souscrivent pleinement à l'intendance comme moyen de protéger les espèces dans leur habitat essentiel. Nous souscrivons à une approche graduelle à l'intendance et nous sommes en faveur de tout un ensemble de mécanismes destinés à faire participer les intéressés de façon positive au processus. Il doit y avoir un processus permanent d'examen des facteurs comme l'examen de l'habitat des espèces et la surveillance du nombre de membres d'une espèce en particulier.
Je le répète, cela sera évidemment basé sur des preuves scientifiques qui peuvent être recueillies sur le terrain par ceux qui ont une formation, dans certains cas, très spécialisée. Il est tout à fait évident pour moi et pour tous, à mon avis, que des personnes ont passé pratiquement toute leur vie à étudier certaines espèces. Je sais que c'est vrai dans les Maritimes pour certaines espèces de poisson. Je soupçonne qu'il est vrai que dans le monde entier, des gens, se sont engagés très clairement et avec véhémence à préserver certaines des espèces naturelles les plus belles de la planète.
Le Parti conservateur croit que le simple fait de traiter des propriétaires fonciers comme des criminels ne sauvera pas les espèces en voie de disparition. Nous devons plutôt faire participer les intéressés au processus. Cela vise les scientifiques, les propriétaires fonciers et les gouvernements, qui ont un rôle à jouer dans l'application de la loi. Nous ne pouvons simplement laisser cette décision entre les mains de maîtres politiques.
Selon moi, c'est un cas qui justifierait qu'on sorte du domaine politique et qu'on se base seulement sur les données scientifiques fournies par des gens qui ont les connaissances voulues et comprennent la situation des espèces qui sont littéralement sur le point de disparaître.
Ce sont quatre éléments du projet de loi lui-même, mais il y a certes des améliorations possibles dans le cas de certains problèmes et relativement à certains domaines. J'espère, et c'est certes une attente, que le ministre interviendra sur cette question dans un avenir très rapproché.
Une des questions controversées a été l'intransigeance du ministre qui a refusé de céder sur ce point. Il a déclaré publiquement que, sous sa direction, aucune modification ne serait apportée à la loi et qu'on allait appliquer la politique du tout ou rien. Tout semble indiquer maintenant qu'il revient sur sa position. Nous comptons bien travailler avec lui au comité pour améliorer cet important projet de loi.
[Français]
M. Paul Mercier (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur le Président, malgré que le préambule de la loi affirme que la responsabilité est partagée entre les deux niveaux de gouvernement en matière de protection des espèces, le projet de loi n'est pas rédigé sur ce ton. Il ne reflète pas la réalité, à savoir que l'essentiel de la protection des habitats concerne les provinces.
En effet, cette législation aura, de facto, préséance sur les législations provinciales existantes et ce, même lorsque les habitats sont entièrement de juridiction provinciale.
Un exemple: à l'article 34, il est clairement écrit que: «sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil peut, par décret, prévoir l'application de certains articles dans une province ailleurs que sur le territoire domanial.» Qui plus est, on indique que si le ministre estime que le droit de la province ne protège pas l'espèce, il est tenu de recommander au gouverneur en conseil la prise d'un décret. Certes, il est aussi écrit que le ministre ne recommandera la prise du décret qu'après avoir consulté le ministre territorial compétent. Néanmoins, on ne parle que de consultation.
Donnons un autre exemple. En ce qui concerne les programmes de rétablissement, le choix des termes est lui aussi troublant en regard des compétences des provinces en la matière. En effet, à l'article 39, il est écrit que le ministre compétent élaborera le programme de rétablissement en collaboration avec le ministre provincial compétent, dans la mesure du possible.
Il en va de même pour la question des plans d'action où l'on répète que la collaboration se fera dans la mesure du possible. Plus particulièrement, l'ensemble de la section portant directement sur la question de l'habitat essentiel permet au gouvernement d'élaborer des règles de pratique et d'imposer des normes ou directives nationales, alors que le fédéral n'a aucun droit de regard sur la majeure partie des territoires concernés et aucun pouvoir sur la gestion des ressources dans ces milieux.
Ce projet de loi empiète carrément sur les compétences des provinces et exclut ces dernières de tout apport réel et direct dans le processus. Les lois déjà existantes sont ignorées.
Voilà donc un point acquis: à l'image de tant d'autres législations récentes et de tant d'autres législations futures, n'en doutons pas, cette loi ne respecte pas les compétences provinciales.
Il y a un autre point à souligner. La plupart des groupes environnementaux s'opposent au projet de loi du ministre de l'Environnement, eux qui devraient pourtant être ses alliés.
La plupart des intervenants jugent le projet de loi trop faible. Même des organismes représentant l'industrie jugent que ce projet de loi ne permettra pas de protéger davantage les espèces, ni de préciser la ligne de conduite qu'elles devraient adopter en ce qui a trait à la protection des espèces résidant sur les lieux de leur exploitation.
Toutefois, le problème principal soulevé par l'ensemble des groupes environnementaux repose plutôt sur le fait que les décisions concernant la désignation des espèces seront prises par le ministre et le Cabinet plutôt que par les scientifiques eux-mêmes.
Une des avocates du Sierra Club dénonce une chose qu'elle considère comme une ignominie. Elle dénonce le fait qu'un tel pouvoir discrétionnaire soit accordé aux politiciens quant à la désignation des espèces et non pas aux scientifiques. On reproche au ministre de privilégier, par son projet de loi, une approche à la pièce, évaluée à la discrétion du Cabinet, plutôt qu'une approche d'ensemble appuyée de recours légaux contraignants si les ententes ne sont pas possibles.
Quelle est la position du Québec, qui est le premier concerné en ce qui a trait au projet de Loi C-33? Le ministre de l'Environnement, Paul Bégin, a déclaré, dès le dépôt du projet de loi de son homologue fédéral, que celui-ci ne constituait qu'un nouveau dédoublement inutile pour le Québec. En effet, le ministre québécois a indiqué que le projet de loi C-33 visait non seulement à mettre en place un filet de sécurité pour les espèces menacées et leurs habitats sur les sites de juridiction fédérale, mais aussi sur l'ensemble du territoire québécois, de juridiction fédérale ou non.
Bien qu'il soit du ressort du gouvernement fédéral de légiférer pour protéger les espèces migratrices, il ne détient aucun pouvoir constitutionnel en ce qui a trait à la gestion des habitats en territoire provincial. Il ne peut évidemment être question, pour le Québec, que le fédéral envahisse des champs de compétence qui ne sont pas les siens et vienne lui dicter la marche à suivre pour la protection de ses écosystèmes, alors même que le Québec possède déjà des législations visant à protéger les espèces menacées en leur milieu.
En fait, le gouvernement du Québec croit qu'une législation comme celle proposée dans le projet de loi C-33 pourrait être recevable si elle excluait toute espèce ou habitat sous la juridiction des provinces et qu'elle était instaurée en territoires provinciaux si, et seulement si, la province ou le territoire en faisait explicitement la demande.
Le gouvernement du Québec a adopté sa propre loi sur la question à la fin des années 1980. En fait, le projet de loi C-33 constitue un chevauchement direct avec la loi québécoise en vigueur depuis 1989 et qui fonctionne bien, tout en produisant déjà des résultats concluants.
Donc, ce projet de loi risque de créer de nouvelles lourdeurs administratives plutôt que de permettre que les ressources limitées soient bel et bien canalisées aux bons endroits. Le gouvernement du Québec légifère déjà sur les domaines touchés par le projet de loi C-33.
Alors que nous reconnaissons que l'environnement est une responsabilité partagée, il nous apparaît de plus en plus clairement que le fédéral fait fi de cette réalité, allant complètement à l'encontre d'une véritable harmonisation environnementale entre les différents paliers de gouvernement. Il nous présente une législation dépassant ses champs de compétence et de nature à provoquer une fois de plus des dédoublements inutiles dans des domaines qui sont déjà traités par les provinces et qui concernent leur territoire et leurs ressources.
Ce que le fédéral appelle un «double filet» de protection, c'est-à-dire deux paliers de gouvernement qui agissent dans le même champ de compétence, diminue en fait l'imputabilité des deux paliers de gouvernement et complique inutilement l'attribution des responsabilités.
Alors, rien de nouveau sous le soleil à Ottawa: arrogance, incompétence, mépris des législations provinciales, le projet de loi C-33 est bien dans la ligne de la politique libérale traditionnelle. Jusqu'à présent, toutefois, soyons justes. Les baleines, espèces protégées, semblaient manquer à l'appel des êtres sur lesquels Ottawa prétend régner de façon exclusive au mépris des compétences provinciales. C'était un oubli, sans doute. Les baleines nageront désormais avec, je suppose, une feuille d'érable sur le dos. C'était un oubli, le voilà corrigé.
Inutile de dire que notre parti se prononcera contre ce projet de loi où l'incompétence et l'arrogance de ce gouvernement s'affirment une fois de plus. Seule la souveraineté nous fera sortir de ce bourbier qu'est devenu le régime fédéral du Canada.
[Traduction]
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, à l'approche de la série mondiale de base-ball, c'est une troisième prise pour le gouvernement. C'est la troisième fois qu'il tente de présenter une mesure législative de ce genre, et il échouera pour la troisième fois.
Je crois que le gouvernement a délibérément conçu ce projet de loi pour provoquer les gens. Aucune personne saine d'esprit ne concevrait un projet de loi qui provoque de cette façon les habitants de ma circonscription et ceux de la circonscription du député de Cypress Hills—Grasslands, qui a fait de l'excellent travail à cet égard. Ce projet de loi connaîtra le même sort que ses deux prédécesseurs. Il créera la même animosité que le projet de loi C-68 parmi les gens innocents. Les députés peuvent être certains de cela.
Les Canadiens d'un bout à l'autre du pays reconnaissent qu'il est important de protéger nos espèces sauvages. Les Canadiens sont enragés lorsque les gens font de la surpêche. Ils sont enragés lorsqu'on chasse les animaux hors saison. Ils sont enragés lorsqu'on chasse les animaux le soir. Les Canadiens sont en faveur de la conservation de la nature. Ces mêmes Canadiens sont ravis de travailler avec tout gouvernement pour protéger les espèces en voie de disparition. Cela ne doit pas être une démarche descendante, comme c'est le cas de ce projet de loi.
Ce dernier fera des criminels de gens qui sont tout à fait innocents. Il y a d'énormes ranchs dans ma circonscription. Je suppose que, sans que l'éleveur le sache, il est fort possible qu'il y ait des espèces végétales en voie de disparition sur son ranch. Si, par pur hasard, ce même éleveur érige une nouvelle clôture et, sans le savoir, détruit une plante en voie de disparition, il est automatiquement un criminel. C'est de cette façon que le projet de loi est rédigé.
Contrairement à la plupart des lois, aux termes de celle-ci, une personne doit essayer de prouver son innocence bien qu'elle ne sache rien de l'infraction qu'elle est censée avoir commise. Ce n'est pas comme le droit ordinaire en vertu duquel nous sommes tous présumés innocents tant que notre culpabilité n'a pas été établie. Les amendes sont tellement énormes que si elles étaient mises en vigueur, un éleveur serait obligé de vendre non seulement tout son troupeau mais également son ranch.
Après qu'un déséquilibré en crise eut tué des étudiantes à l'École polytechnique, le gouvernement a réagi de manière excessive et a fait adopter le projet de loi C-68. À ce jour, il n'a servi à rien d'autre qu'à faire des criminels de beaucoup de chasseurs de canards. Il n'a pas permis d'élucider un seul crime. Cependant, plusieurs jeunes hommes parfaitement innocents se sont vu refuser le droit d'avoir un certificat d'enregistrement pour leurs armes à feu parce que leur femme a dit qu'ils étaient dangereux. Le gouvernement se vante d'avoir privé de leurs armes à feu ces gros méchants qui, de toute leur vie, n'ont même pas commis la moindre infraction au code de la route.
Ce projet de loi est promis à l'échec. Il va permettre au gouvernement d'utiliser contre des innocents les pouvoirs que lui confère le droit pénal. J'aimerais que tous les Canadiens entendent les craintes exprimées par certains environnementalistes qui n'ont probablement jamais vu une seule de ces plantes. C'est un petit groupe qui a encouragé le ministre à prendre cette mesure législative. Or, où le ministre a-t-il choisi d'annoncer le dépôt du projet de loi? Il n'en a pas fait l'annonce dans les Prairies, ni dans une ville, ni pendant que le Parlement siégeait, mais dans le nouveau territoire du Nunavut pendant l'été.
La dernière fois que la Chambre a été saisie du projet de loi, Dan Gardner, membre du comité de rédaction du Citizen d'Ottawa, a écrit ce qui suit: «Tout gouvernement qui prend au sérieux la protection des espèces en danger doit dédommager les propriétaires terriens en cas de pertes économiques, faute de quoi il dresse les êtres humains contre les animaux et quand cela arrive, ce sont toujours les animaux qui perdent.»
J'aimerais que toutes les personnes que la question préoccupe se rendent compte que si le projet de loi est adopté c'en est fini de la coopération. Si le gouvernement revient sur sa décision et consulte les personnes qui seront touchées par le projet de loi, il obtiendra leur entière coopération.
En ce moment, face à la confrontation, le ministre des Pêches et des Océans prêche la coopération. Ce projet de loi n'est pas un exemple de coopération. À ma connaissance, le gouvernement n'a pas consulté un seul agriculteur, une seule organisation agricole ni une seule organisation représentant l'industrie du bétail, avant de proposer cette mesure législative. C'est pourquoi elle est vouée à l'échec.
Pas loin de chez moi se trouve une région où niche la chouette des terriers. Un agriculteur a enlevé le panneau qui disait «espèces en voie de disparition» parce qu'il savait que ce projet de loi s'en venait et qu'il finirait par perdre cette propriété. Ce n'est pas de la collaboration; c'est de la dictature.
J'exhorte le gouvernement à ne pas adopter ce projet de loi. On a beau apporter tous les amendements qu'on voudra, ce n'est pas ce qui va rendre ce projet de loi plus acceptable. Qu'on lise le projet de loi pour voir les pouvoirs qu'il accorde au gouvernement. Il pourrait du jour au lendemain ruiner la vie de certaines personnes. On pourrait saisir des biens du jour au lendemain.
J'exhorte les députés, y compris ceux de l'arrière-ban, à lire le projet de loi et à manifester assez de courage pour voter contre, et ce, pour le bien de l'humanité, pour le bien de nos agriculteurs et pour le bien de toutes les personnes que ce projet de loi pourrait jeter en prison pour rien. Est-ce que j'exagère? Absolument pas. J'exhorte les députés à lire attentivement le projet de loi.
Quand ce projet de loi fera l'objet d'un vote, je sais bien qu'un bon nombre de députés d'en face seront rappelés à l'ordre et seront forcés de se prononcer en faveur de ce projet de loi. Pour avoir parlé avec eux, je sais que bon nombre d'entre eux n'appuient pas cette mesure.
Pour la protection de notre gagne-pain, pour le bien de notre pays, pour la survie de la faune, concentrons-nous sur la conservation. Ce projet de loi mise sur la confrontation et c'est pourquoi il est voué à l'échec.
[Français]
M. Maurice Dumas (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui à la Chambre sur le projet de loi C-33 en deuxième lecture, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.
Avant de débuter mon intervention, j'aimerais souligner que le Fonds international pour la protection des animaux a présenté un événement avant-coureur lors du dépôt du projet de loi C-33 à la Chambre des communes.
En effet, ils ont permis aux députés fédéraux d'adopter officiellement une espèce menacée. Le Dr Rick Smith, directeur canadien du Fonds international pour la protection des animaux et des plantes, a remis à chacun des députés fédéraux un certificat concernant une espèce menacée, ainsi qu'un feuillet de renseignements, son habitat et les dangers qui menacent sa survie.
Il informait les députés du sondage suivant: un sondage Pollar mené en mai 1999 confirmait que 97 p. 100 des Canadiens croient que les lois de protection des espèces menacées sont importantes. De plus, 85 p. 100 estiment qu'une loi canadienne devrait être la plus forte et la plus complète au monde. Les résultats du sondage étaient constants partout au Canada.
J'ai personnellement reçu un certificat d'adoption qui me donne la responsabilité de la protection de l'aster d'Anticosti, espèce dont la survie et le rétablissement dépendent de l'adoption d'une loi globale et vigoureuse pour la protection des espèces en péril. L'aster d'Anticosti est l'une des 313 espèces canadiennes en danger de disparition.
Puis-je rappeler que deux de nos éminents collègues de l'autre côté de la Chambre avaient également adopté des mammifères très connus, soit le béluga et le béluga bleu. Pour tous les deux, évidemment, la guerre des bélugas n'aura pas eu lieu. Les députés n'auront qu'à consulter leur liste.
La biodiversité, dans son ensemble, est le résultat de l'évolution terrestre ayant cours depuis près de 4,5 milliards d'années.
Il est à noter que le Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique a son siège social à Montréal depuis novembre 1995. La décision fut prise lors de la deuxième Conférence des Parties organisée à Djakarta.
Le Secrétariat assure le suivi des décisions prises sur la conservation de la diversité biologique lors de la signature de la Convention. Par la signature de cette Convention, les nations du monde s'engagent à conserver la diversité biologique de la planète, à utiliser les ressources biologiques de façon durable et à partager équitablement les ressources génétiques.
À partir des années 1970, des conventions internationales ont été signées dans le but de restreindre le commerce de certaines espèces ainsi qu'à restreindre l'augmentation de celles menacées d'extinction ou fortement vulnérables.
Depuis quelques années, les scientifiques indiquent qu'on assiste à une extinction grandissante de certaines espèces ainsi qu'à une augmentation de celles menacées d'extinction ou fortement vulnérables.
Dans le rapport des Nations Unies sur la biodiversité, on fait état de plusieurs facteurs pour expliquer le déclin de la biodiversité. Parmi ceux-ci, citons l'augmentation de la population et du développement économique qui, à leur façon, contribuent à l'épuisement des ressources biologiques.
L'augmentation des migrations humaines, des voyages et du commerce international constitue aussi une menace pour la biodiversité, tout comme l'accroissement de la pollution.
Notons que le gouvernement fédéral a déjà déposé à la Chambre des communes le projet de loi C-65, Loi concernant la protection des espèces en péril au Canada. Ce projet de loi est mort au Feuilleton.
Le fédéral dispose de certaines lois qui lui permettent d'intervenir pour la protection des espèces, comme celles sur les pêcheries ou encore celles sur les parc nationaux, mais aucune législation fédérale n'est directement vouée à cet objectif.
Le projet de loi C-33, s'il était adopté, serait le premier instrument légal canadien portant directement sur la protection des espèces menacées.
On estime à près de 70 000 le nombre d'espèces connues vivant au Canada, et un bon nombre de celles-ci ne seraient présentes qu'en sol canadien. À ce jour, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, le COSEPAC, a désigné 340 espèces sauvages comme étant en péril au Canada.
Rappelons que cet organisme a été créé en 1978 et se compose de représentants de chaque agence gouvernementale, des provinces et des territoires, ainsi que de quatre organismes de conservation. Il est l'acteur principal en matière de protection des espèces et son mandat est de répertorier les espèces en péril sur le territoire canadien.
De plus, la teneur de l'article 36 du projet de loi C-33 oblige les provinces qui identifient certaines espèces comme étant en voie de disparition, mais qui n'apparaissent pas sur la liste des espèces désignées par le COSEPAC, à appliquer les mêmes interdictions à leurs espèces que celles imposées aux espèces désignées.
Ainsi, le fédéral s'arroge à nouveau le droit d'imposer sa façon de faire pour la protection des espèces. En octroyant au ministre de l'Environnement un pouvoir discrétionnaire, le projet de loi ne respecte pas le partage juridictionnel tel qu'établi au sein de la Constitution.
Le projet de loi C-33 empiète sur les compétences des provinces et exclut ces dernières de tout apport réel et direct dans le processus. La protection des espèces ne peut être assurée que si les habitats sont également protégés. Les provinces doivent gérer ces questions, en collaboration avec divers intervenants du milieu.
Bien qu'il puisse être du ressort du fédéral de légiférer pour protéger les espèces migratrices, il ne détient aucun pouvoir constitutionnel en ce qui a trait à la gestion des habitats en territoire provincial.
Il ne peut évidemment être question, pour le gouvernement du Québec, que le fédéral, à nouveau, envahisse des champs de compétence provinciale. Le Québec possède déjà des législations visant à protéger les espèces menacées et leur milieu.
Le principe de protéger davantage nos espèces est, en lui-même, un principe que le Bloc québécois endosse. Toutefois, nous ne croyons pas que le projet de loi C-33 puisse permettre d'améliorer la protection des espèces menacées.
En fait, nous sommes opposés à ce projet de loi puisqu'il constitue une intrusion directe dans de nombreux champs de compétence du Québec. En fait, il constitue un chevauchement direct avec la loi québécoise en vigueur depuis 1989.
Ce projet de loi risque de créer des lourdeurs administratives. Le gouvernement du Québec légifère déjà dans les domaines touchés par le projet de loi C-33.
Nous reconnaissons la nécessité de fournir une protection additionnelle à nos écosystèmes et aux espèces floristiques et florales en danger qui les composent, mais nous ne croyons pas que le projet de loi C-33 soit la voie à emprunter pour le faire. Le Bloc québécois s'oppose aujourd'hui au principe du projet de loi.
Je termine en mentionnant l'opinion émise par le député libéral de Lac-Saint-Louis, le 12 juin dernier, et je cite:
Nous n'utilisons même pas la liste des 339 espèces nommées par le COSEPAC comme point de départ. C'est un défaut manifeste du projet de loi. Sans liste, il ne peut y avoir de protection.
[Traduction]
M. Ted White (North Vancouver, Alliance canadienne): Monsieur le président, je veux intervenir brièvement à propos du projet de loi C-33, car il est très facile pour les citadins qui sont les ardents partisans de cette mesure de promouvoir l'adoption de dispositions législatives faisant que d'autres perdront leur propriété.
Je voudrais donner lecture d'une lettre que m'a envoyée un de mes électeurs, Earl Campbell, qui sera particulièrement touché par les dispositions du projet de loi C-33 lorsque celui-ci sera adopté. Il a envoyé au ministre une fort belle lettre en date du 25 avril.
Il est vraiment dommage que nous ne jouissions pas des mêmes droits de propriété que les Américains. Malheureusement, la Constitution ne nous reconnaît pas de droits de propriété et il est donc loisible à un gouvernement comme le gouvernement libéral de fouler aux pieds les droits de propriété des particuliers, de leur enlever une propriété qui leur aura coûté une vie de labeur et sur laquelle ils comptaient se retirer pour leurs vieux jours, pour s'apercevoir un beau matin qu'un gouvernement peut leur confisquer ce bien sans envisager de les en indemniser convenablement.
Je vais donner lecture de la lettre de M. Campbell. Elle s'adresse au ministre de l'Environnement et est datée du 25 avril 2000. M. Campbell déclare qu'il a pris connaissance du projet de loi. Il a pu le lire sur le site Web La Voie verte. Il a relu le sommaire publié par le gouvernement en décembre 1999 et lu la documentation que le ministre lui avait fait parvenir dans l'espoir, à l'évidence, de le convaincre du bien-fondé du projet de loi.
M. Campbell écrit ceci:
Les principales raisons pour lesquelles je ne suis pas d'accord avec le libellé détaillé demeurent les mêmes. L'éditorial ci-joint du National Post résume assez bien ma pensée. Les droits individuels sont entièrement éliminés.
Je lirai l'éditorial du National Post le moment venu, mais je poursuivrai pour l'instant la lecture de la lettre de M. Campbell, qui dit:
Il est manifeste que vous ne vous attendez pas à ce que cette mesure législative concernant l'utilisation des terres influe sur vos activités personnelles, ou limite votre revenu ou votre mode de vie dans l'avenir, sinon vous seriez davantage préoccupés par la nature draconienne des règlements déjà proposés, ainsi que par l'absence de tout processus d'appel.
Tous les discours au monde concernant ce que vous ou le gouvernement canadien pouvez faire pour l'environnement me laissent toujours dans la même position peu enviable, c'est-à-dire qu'une partie de ma propriété est fréquentée de façon saisonnière par des espèces dont le nom figure dans les listes de l'article 129 du règlement déjà établi, et qu'il est assez ironique de constater que c'est parce que j'ai protégé certains de leurs habitats sous mon contrôle.
Le projet de loi C-33 précise que le ministre peut indemniser un particulier dans un cas où l'utilisation de sa propriété peut ou devra être modifiée, ce qui se traduira par une différence sur le plan économique pour le propriétaire. Nulle part ne dit-on que le ministre doit indemniser les particuliers de façon pertinente, complète et rapide en cas de perte d'utilisation ou de jouissance de leurs terres. Nulle part non plus ne trouve-t-on de dispositions prévoyant l'indemnisation du propriétaire lorsqu'il y a des coûts découlant des dommages causés par des fonctionnaires habilités qui pénètrent sur une propriété privée ou la franchissent pour accéder à une autre propriété où ils peuvent souhaiter se rendre ou mener une inspection, ni d'autres coûts.
Il se peut que cette différence vous semble infime.
Ce n'est pas le cas pour moi. C'est la différence entre profiter de façon modeste et prudente de mes années de retraite et mener une existence misérable.
Je suis convaincu que je ne suis pas le seul dans ce cas.
En outre, le projet de loi comprend des pouvoirs autorisant le ministre (ou, semble-t-il, même des personnes déléguées par le ministre de l'Environnement) à prendre à l'occasion d'autres règlements. Ces derniers ne feraient pas nécessairement non plus l'objet d'un débat public. C'est potentiellement plus dangereux.
J'ai déjà vu les conséquences de tels pouvoirs omnibus mis en application par le ministère des Pêches et Océans. De toute évidence, tout propriétaire doit faire preuve de vigilance et de chance s'il ne veut pas que des infractions perçues en vertu de ces règlements provoquent un important problème avec des fonctionnaires chargés de l'application de la loi.
J'ai peu d'espoir que vous, monsieur le Ministre, preniez un jour connaissance de cette lettre...
Aujourd'hui, parce que j'en donne lecture, le ministre en prendra connaissance.
«ou qu'elle contribue à modifier de quelque façon que ce soit l'orientation que vous et les libéraux avez adoptée.
C'est pourquoi mes faibles louanges se trouvent à la deuxième page.
Je crois que vous déployez un honnête effort, non seulement d'un point de vue politique, pour protéger réellement l'habitat d'au moins certaines espèces en péril.
En outre, je suis d'avis que le gouvernement doit décider en définitive quelles espèces et même quelles portions des habitats doivent être protégés et préservés. Ainsi, je crois qu'il est prudent d'inclure les facteurs socio-économiques dans les facteurs influençant toute décision. Les mesures de protection absolues énoncées dans les lois américaines, bien qu'elles adoucissent les critiques des plus fervents écologistes, ne laissent aucunement place à la prise de décisions rationnelles pour l'intérêt public. Le simple fait de parler d'abandonner certaines mesures de protection équivaut à ouvrir une boîte de Pandore, j'en suis sûr. Mais on doit l'ouvrir.
Voilà une lettre sincère qui provient d'une personne qui sera touchée directement par le projet de loi. Il n'est pas juste qu'un gouvernement propose de prendre à quelqu'un une chose qu'il a mis toute sa vie à bâtir, c'est-à-dire une ferme pour sa retraite qui pourrait lui être enlevée à court préavis, particulièrement s'il s'est donné la peine de fournir un habitat à une espèce protégée.
Comme je l'ai mentionné, la position qu'il a adoptée était étayée par l'éditorial du National Post du 14 avril 2000. Je ne suis pas certain d'avoir le temps de le lire en entier, mais je vais tout de même commencer. L'article a été publié sous le titre «Insoutenable». On peut y lire que:
La protection des espèces en péril et de leur habitat est une mesure très sensée sur le plan pédagogique, esthétique, écologique et même spirituel. Toutefois, pour le grand propriétaire terrien ou le bûcheron qui trouve ces espèces sur ses terres, cela peut prendre des allures de menaces. Ce dernier se demande aussitôt s'il ne risque pas de subir de grandes pertes si le gouvernement se rend compte qu'il travaille dans un habitat en péril, si ses terres peuvent être saisies, ou encore, s'il pourrait arriver qu'on lui interdise d'utiliser ses terres, tout en lui permettant de les garder, ce qui ne serait guère mieux.
Ce ne sont pas là des préoccupations purement théoriques. Aux États-Unis, on a adopté une mesure législative très sévère qui a mené à une attitude de dissimulation laquelle pousse les propriétaires terriens à considérer les espèces en péril comme des créatures à détruire plutôt qu'à protéger.
Tout effort de conservation digne de ce nom devra permettre de rallier les propriétaires à la cause environnementale.
C'est justement ce que disait mon électeur. Selon le ton de sa lettre, il est évident qu'il appuie le principe de la protection de ces espèces. Tout ce qu'il veut, c'est que le gouvernement le traite de façon juste et raisonnable. L'éditorial évalue la situation dans le cadre de la nouvelle loi fédérale sur les espèces en péril.
L'indemnisation des propriétaires terriens n'est pas garantie. Le projet de loi prévoit que le gouvernement «peut» décider d'indemniser un propriétaire et non pas qu'il «doit» le faire. Cela a beaucoup d'importance. Cela suffit pour faire comprendre à un propriétaire terrien que la protection des espèces menacées représente pour lui un adversaire économique de taille.
Tout comme mon collègue allianciste qui a pris la parole avant moi, j'exhorte les représentants du gouvernement à lire attentivement ce projet de loi. Ils devraient songer un peu aux conséquences que cela pourrait entraîner pour les gens de leurs circonscriptions qui ont économisé toute leur vie pour acheter un lopin de terre en prévision de leur retraite et qui risquent maintenant de voir ces terres expropriées sans qu'on leur verse une indemnisation raisonnable. Je les exhorte à voter contre ce projet de loi et à le renvoyer pour qu'on le révise.
[Français]
M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-33, Loi concernant les espèces en péril au Canada.
L'environnement préoccupe beaucoup plus les citoyens lorsque l'économie se porte un peu mieux. Heureusement, c'est le cas dans plusieurs régions du Québec et du Canada. Cette préoccupation devrait être permanente, et tout le monde est d'accord avec cela. Toujours est-il qu'il faut avoir des lois et des mesures qui soient efficaces mais qui aient aussi des applications dans la réalité.
D'entrée de jeu, je dois dire que ce n'est pas un dossier dans lequel j'ai travaillé énormément, mais je suis au courant. Ma collègue de Jonquière a suivi ce dossier pour le Bloc québécois. J'ai été très surpris, en voyant tout le matériel que contient ce dossier, de constater que le gouvernement n'a pas réussi, après autant de temps, parce que ce n'est pas la première fois qu'il tente d'avoir une telle loi, d'aller chercher plus d'appuis pour une loi qui, normalement, devrait répondre à des objectifs quelconques en pratique.
C'est une belle cause de protéger les espèces en voie de disparition, mais il réussit plutôt à faire une coalition contre lui dans ce dossier. Plusieurs provinces—de mémoire le Québec, l'Ontario, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, la Saskatchewan, et j'en oublie, je crois qu'il y en a une sixième—ont déjà des lois pour protéger les espèces en voie de disparition.
L'intervention fédérale, s'il y en a une, ne devrait pas nuire à ce qui existe déjà ou occuper un espace qui permettrait de protéger davantage notre environnement, notre écosystème et toute la protection environnementale nécessaire. Comme bien d'autres, le gouvernement du Québec n'est pas très à l'aise avec cela, puisque pour lui, cela semble seulement constituer un nouveau dédoublement.
Tout cela, ce n'est pas parce qu'on le répète que c'est moins pertinent: pour les individus, pour les organisations, pour ceux qui travaillent dans ce domaine, ce n'est pas facile de s'y retrouver lorsqu'ils ont à composer avec deux législations. Laquelle a prépondérance? Laquelle s'occupe de tel volet en particulier? Ce n'est pas très simple. Si l'information est simple et compréhensible, les citoyens vont être davantage vigilants, mieux informés et cela va mettre une pression très saine.
Si le gouvernement fédéral voulait aussi s'occuper de ce qui est de sa juridiction, il pourrait faire beaucoup de choses en matière d'environnement. Il pourrait, lui aussi, donner l'exemple dans sa façon de traiter l'environnement. Il pourrait être plus transparent dans son approche avec les citoyens.
Je pense encore au dossier du transport du MOX qu'on a essayé de faire en cachette: moins on informe les gens, mieux c'est. Ma collègue et des gens de sa circonscription ont réussi à rendre cela public et à dire: «Un instant!» Le gouvernement a été obligé de dire qu'il allait devoir respecter certains principes gouvernementaux. S'il n'y avait pas eu la vigilance de quelques personnes, cela aurait peut-être été fait en cachette. Donc, le gouvernement fédéral n'est pas exemplaire.
Pendant qu'on parle d'environnement au sens plus large, dans ma région, les gens sont très préoccupés, de même que dans le nord-est de l'Ontario, de voir ce qui s'en vient. Quand on parle du Témiscamingue, il y a le volet québécois, mais il y a aussi le Témiscamingue ontarien qui a la même appellation, parce que le lac Témiscamingue est frontalier, la moitié au Québec, l'autre en Ontario.
Le nord-est de l'Ontario aura le grand privilège de devenir l'hôte du plus grand dépotoir, ou presque, en Amérique du Nord. Dans sa grande générosité, la Ville de Toronto a décidé d'envoyer ses déchets dans une ancienne mine à ciel ouvert du nord de l'Ontario; il y a aussi trois municipalités régionales, celles de Peel, de York et celle de Durham. C'est 20 millions de tonnes, au minimum, qu'on enverra dans la région du nord-est ontarien, à côté de cours d'eau qui se déversent directement dans le lac Témiscamingue.
Pour ceux qui ne se sentent pas concernés, le lac Témiscamingue se déverse dans la rivière des Outaouais, et éventuellement, dans le fleuve Saint-Laurent. C'est à la tête des eaux. Nous habitons au partage des eaux, donc, à la hauteur où l'eau se sépare pour couler vers le nord et vers le sud. Ce projet-là sera à la hauteur où l'eau coule encore vers le sud, à la limite, par exemple, mais qui coule encore vers le sud.
Je vais expliquer cela brièvement. On va prendre des déchets et on va les mettre dans le fond d'une mine. Évidemment, on va mettre une bande de sable tout le tour, pour protéger les parois extérieures de la mine. On va faire une prière pour que le sol soit étanche. On va prendre de l'eau potable à la surface pour laver les déchets qu'on va envoyer dans le fond, qu'on va re-pomper à la surface et qu'on va traiter. Ensuite, on va envoyer les eaux traitées dans les rivières. Donc, on va contaminer de l'eau pure pour la traiter par la suite, alors qu'on connaît toute la sensibilité des gens par rapport l'eau potable, et avec raison.
C'est un désastre environnemental et le gouvernement fédéral est demeuré silencieux jusqu'à ce jour dans ce projet. Il ne s'est pas prononcé, alors que sa propre loi le lui permettrait de le faire, en vertu de critères, comme l'aspect interprovincial et la question autochtone, parce que c'est sur un territoire revendiqué par les autochtones. Donc, dans ses champs d'action, il pourrait s'occuper de ses affaires plutôt que de toujours chercher à faire des dédoublements ailleurs et aller chercher à la marge des espaces d'interventions. Qu'il exerce ses propres compétences de façon plus efficace, et ce serait déjà un plus.
D'ailleurs, j'en profite pour éveiller un peu plus les libéraux de la région de Toronto, parce que je sais qu'il y en a plusieurs, par rapport à ce projet d'envoyer tous ces déchets chez nous.
Quand on parle d'environnement, il faut parler davantage de recyclage, de récupération. Imaginez-vous que la ville de Toronto et trois municipalités voisines vont avoir un bonus, parce que le contrat a été signé avec un entrepreneur privé. On va leur donner 20 millions de tonnes garanties et s'ils en fournissent plus, on va leur donner une ristourne de 1,50 $ la tonne.
Pensez-vous que les municipalités, là-bas, vont faire des pressions pour du recyclage? Pensez-vous qu'on va aller dans le bon sens? Et pour 20 ans, on met des menottes, un contrat ferme, avec un entrepreneur privé qui va devenir un grand gestionnaire de déchets.
Donc, l'Ontario, le sud de l'Ontario envoie ses déchets dans le nord, il s'en lave les mains. Loin de nous les odeurs, etc.
Cela a beaucoup d'impact aussi. Cela rejoint le débat sur la protection des espèces et tout le reste. Quelles seraient les conséquences sur notre écosystème, sur notre équilibre environnemental, et pas seulement sur nos eaux, d'avoir un méga-dépotoir, le plus grand dépotoir en Amérique du Nord, dans une région comme celle-là? Je prédis qu'on va avoir aussi la plus grande concentration de mouettes et de pigeons en Amérique du Nord dans notre région éventuellement. Ces oiseaux-là voyagent aussi. Ils contaminent d'autres secteurs.
Donc, nous sommes extrêmement inquiets chez nous, très inquiets aussi face au gouvernement provincial de l'Ontario qui semble peu préoccupé par l'environnement. Nous sommes aussi très inquiets par rapport à un gouvernement fédéral qui est demeuré silencieux, jusqu'à ce jour, dans le projet.
Quand je vois un débat comme celui-ci aujourd'hui, où on veut se donner bonne conscience et adopter un projet de loi pour la protection des espèces sauvages en péril au Canada, alors qu'il y a déjà six provinces qui occupent ce champ-là, qui essaient de faire du travail—ce n'est probablement pas parfait ce qu'elles sont en train de faire, mais elles essaient d'aller dans le bon sens—quand je vois le gouvernement fédéral qui dépose un projet de loi qui ne réussit même pas à contenter plusieurs groupes environnementaux très sensibles à la question, je me dis que ce n'est certainement pas un pas dans la bonne direction.
Donc, je ne répéterai pas les arguments que mes collègues ont soulevés précédemment, mais j'aimerais que le gouvernement fasse preuve d'un peu plus de réalisme. Qu'on adopte des lois qui sont pratiques et que celles qui existent déjà, comme la Loi environnementale, qui permet au gouvernement fédéral d'intervenir lorsque c'est nécessaire, eh bien, qu'il l'utilise aussi, lorsqu'on voit des oppositions comme on le voit dans le nord-est de l'Ontario et dans le nord-ouest du Québec, qui se trouve à être chez nous.
Juste pour vous donner une idée de l'ordre de grandeur, chez nous, 5 000 citoyens ont signé une pétition s'opposant au projet de Toronto d'envoyer ses déchets. Cinq mille personnes chez nous, c'est le tiers de la population. À Toronto, il en faudrait un million pour être équivalent. Je vous défie de trouver un million de personnes qui vont appuyer le projet d'envoyer les déchets.
Je suis content de voir qu'on parle de plus en plus d'environnement. On va devoir éventuellement parler aussi des vrais problèmes, comme la surconsommation de certaines ressources. Nous ne contribuons pas non plus à maintenir un équilibre sain pour notre environnement et nos gestes et nos actions ne contribuent pas toujours à protéger des espèces nécessaires à l'équilibre de notre écosystème.
Ce n'est pas en adoptant des lois qui auront très peu de portée en pratique et qui vont semer plus de confusion que de proposer des solutions concrètes qu'on va aller dans la bonne direction.
Je conclus en demandant aux députés libéraux un éveil de conscience. Il faut qu'on fasse de véritables actions. J'espère que dans les prochaines étapes de l'étude de ce projet de loi, on reviendra dans une perspective un peu plus réaliste.
[Traduction]
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai le plaisir aujourd'hui d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-33. S'il y a une chose que les Canadiens ont à coeur, c'est bien la conservation des espèces en péril. Ils considèrent cela comme un héritage que non seulement ils ont reçu, mais qu'ils doivent transmettre à leurs enfants et leurs petits-enfants.
Le gouvernement a eu l'occasion de traiter ce dossier urgent à deux reprises au moins. Malheureusement, avec le projet de loi C-33, il manque encore son coup. Comme l'ont fait remarquer d'autres députés au cours de ce débat, parce que ce projet de loi a des lacunes, nous ne pourrons pas protéger nos espèces les plus vulnérables.
Il faut comprendre l'ampleur du problème auquel nous sommes confrontés. Dans ma province, la Colombie-Britannique, seulement 6 p. 100 des forêts pluviales tempérées sont réellement protégées. Aujourd'hui, au Canada, près de 350 espèces sont menacées d'extinction. Malheureusement, cette situation n'ira qu'en empirant.
Il y a plusieurs facteurs à cela, mais d'une façon générale, disons que ce sont la disparition d'habitats, le recours aux pesticides, les pratiques agricoles et les pratiques forestières de coupe à blanc. Nous en avons été témoins surtout dans les Prairies, où de grandes étendues de terres indigènes ont été détruites. Cela a entraîné la destruction et l'extinction de nombreuses espèces, allant du grand pingouin à la tourte.
Nous tenons une occasion de nous attaquer au problème d'une façon globale, et je vais aborder les solutions une par une. Le premier enjeu, et le plus urgent, est la protection d'un habitat central. Mes collègues et moi aimerions que le gouvernement prenne une position plus agressive à cet égard en cherchant à protéger l'habitat tout en comprenant que les propriétaires et les droits de propriété doivent aussi être protégés.
Il est intéressant de noter que les propriétaires fonciers, de même que le secteur privé, aimeraient bien que le gouvernement propose un plan distinctif pour remédier au problème. Ils veulent des règles qui leur permettent de fonctionner. Ils veulent également une indemnisation équitable pour les terres dont ils sont expropriés.
Le secteur privé s'est dit très désireux de voir les habitats névralgiques protégés, mais il veut aussi s'assurer que ses terres ne seront pas expropriées bon gré mal gré par le gouvernement. Mes collègues réclament depuis longtemps une indemnisation équitable. La façon la plus raisonnable de l'assurer consiste peut-être à établir l'indemnisation en se fondant sur la juste valeur marchande.
Il n'est pas toujours nécessaire, et ça ne l'est en fait que dans une minorité des cas, d'exproprier des terres du secteur privé. Comme nous l'avons vu en Saskatchewan, la plupart des agriculteurs et autres propriétaires fonciers du secteur privé aimeraient travailler de concert avec le gouvernement pour veiller à ce que leurs terres soient protégées et que ces terres puissent être utilisées raisonnablement sans mettre en danger les espèces en voie d'extinction.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Français]
LE JOURNALISTE JEAN V. DUFRESNE
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, Le Journal de Montréal a été durement éprouvé au cours des derniers jours.
Après l'attentat commis contre le chroniqueur Michel Auger, voilà que l'ancien journaliste montréalais, Jean V. Dufresne, est décédé, samedi matin, à l'âge de 70 ans, des suites d'une maladie pulmonaire.
M. Dufresne, qui était doté d'une plume remarquable, a connu une longue carrière, autant dans les médias écrits qu'électroniques. Il a travaillé au sein des trois quotidiens de langue française de Montréal, La Presse, Le Devoir et Le Journal de Montréal. Il a aussi été journaliste à Radio-Canada. La qualité de son travail lui a valu le respect de ses collègues et de ses lecteurs.
«Jean V.», comme l'appelaient ses collègues, avait pris sa retraite, il y a cinq ans, alors qu'il était chroniqueur au Journal de Montréal.
Qu'il me soit permis d'offrir, au nom de mes collègues, mes plus sincères condoléances aux membres de sa famille, ainsi qu'à ses proches et à ses collaborateurs.
* * *
[Traduction]
LA FISCALITÉ
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, examinons les faits concernant la solution 17 que propose l'Alliance canadienne. Selon cette solution, une famille composée d'une mère, d'un père et de deux enfants ne paierait aucun impôt sur sa première tranche de revenu de 26 000 $. Les libéraux arrachent 6 milliards de dollars par année aux familles de ce genre.
Faisons la comparaison entre deux familles. La première gagne 60 000 $ et, avec la solution 17, ses impôts baisseraient à 6 000 $. Toutefois, la deuxième, qui a un revenu de 30 000 $, verrait ses impôts passer à 680 $. Avec deux fois moins de revenus que la première famille, elle ne paierait que le dixième des impôts. Il s'agit là d'un régime progressif équitable, et ce sont là les faits.
Ce programme fonctionnera. Il est abordable. Il est avantageux pour les familles, et pour l'économie. Un examen minutieux montre que notre programme est de loin supérieur à celui des libéraux. Les Canadiens découvriront la vérité et, lorsqu'ils voteront pour nous, cette vérité les libérera de nombreuses années d'esclavage fiscal auquel les ont réduits les gouvernements conservateurs et libéraux.
* * *
ROBERT S. K. WELCH
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, je suis attristé, mais honoré de rendre hommage aujourd'hui à un grand homme, M. Robert S. K. Welch, qui est décédé cet été.
Il est difficile de quantifier les réalisations énormes d'une personne aussi respectée et aussi accomplie. M. Welch était un éducateur pour nos jeunes, un leader politique, un membre respecté de sa collectivité et un mari, un père et un grand-père bien-aimé.
M. Welch avait de longs antécédents de service dans la fonction publique et des racines profondes dans la collectivité de Niagara. Au fil des ans, il a occupé les postes de chancelier de l'Université Brock, de ministre de l'Éducation de l'Ontario et de vice-premier ministre de l'Ontario, et il est devenu officier de l'Ordre du Canada en 1994.
Robert Welch était un homme aimé et respecté, dont le travail et l'engagement nous manqueront. J'offre mes condoléances à ses enfants, Robert, Beth Kerley et Mary-Jane Mete, et à ses quatre petits-enfants.
Le souvenir de Robert S. K. Welch restera gravé dans nos coeurs et dans les nombreux témoignages de son dévouement de toute une vie envers les siens et la collectivité.
* * *
LES SPORTS
M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage à deux athlètes extraordinaires de Chatham—Kent. La première est Meaggan Wilton. Meaggan était pratiquement inconnue en 1998 lorsqu'elle a marqué le point gagnant qui a permis au Canada de se qualifier pour les Jeux olympiques. Elle est maintenant à Sydney avec l'équipe féminine nationale de softball du Canada. Elle a réalisé son rêve.
La deuxième, Shae-Lynn Bourne, n'en est pas à ses premières Olympiques. Sur la glace, Shae-Lynn et son partenaire Victor Kraatz ont émerveillé les foules et remporté sept championnats canadiens et quatre médailles de bronze consécutives aux championnats mondiaux.
Dans la vie courante, la position que Shae-Lynn a courageusement adoptée en faveur de pratiques plus justes de la part des juges dans les sports a donné lieu à des changements positifs dans les règles pour tous les concurrents. Les efforts de Shae-Lynn ont récemment été récompensés par la Croix du service méritoire du Gouverneur général.
Je tiens à féliciter Meaggan et Shea-Lynn, deux ambassadrices hors pair du Canada.
* * *
[Français]
LE PRIX DE L'ESSENCE
M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Monsieur le Président, depuis des mois que je réclame une baisse de la taxe d'accise fédérale et de la taxe routière du gouvernement de Lucien Bouchard sur l'essence et le diesel, que les pétrolières canadiennes affichent, sur les pompes à essence et sur la facture, le prix brut d'un litre d'essence, et que toutes les taxes y figurent séparément.
Cette année, j'ai demandé un débat d'urgence, mais il m'a été refusé. Pourquoi les partis d'opposition ne réclament-ils pas ce débat d'une journée de l'opposition sur l'essence, le diesel et l'huile à chauffage?
* * *
[Traduction]
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier la Chambre a tenu un débat sur le crime organisé, mais aujourd'hui nous devons parler de timbres en l'honneur de terroristes. Postes Canada songe à émettre un timbre de collection à l'effigie de Velupillai Prabhakaran, chef des Tigres tamouls, une organisation terroriste cruelle.
Le gouvernement a déjà autorisé l'émission d'un timbre pour Kumar Ponnambalam, un fidèle notoire des Tigres tamouls. Ce timbre a été émis en dépit des règles du programme de Postes Canada sur les timbres de collection exigeant le consentement et la permission de la personne à paraître sur un timbre. Kumar Ponnambalam était décédé, alors il ne pouvait pas donner sa permission. Malgré cela, les libéraux lui ont accordé un timbre.
Non contents d'accorder l'exonération fiscale et de faire du Canada un refuge pour les terroristes, les libéraux vont maintenant émettre des timbres à leur effigie. Au lieu d'oblitérer le terrorisme, ils affichent des terroristes sur nos timbres.
Le ministre des Finances a-t-il promis d'approuver ce timbre lorsqu'il a assisté à l'activité de financement des Tigres tamouls où il s'est rendu avec son homologue responsable de l'ACDI? Combien de timbres sur des terroristes...
Le Président: Le député de Kingston et les Îles a la parole.
* * *
LES JEUX OLYMPIQUES
M. Peter Milliken (Kingston et les Îles, Lib.): Monsieur le Président, mes électeurs de Kingston et les Îles se réjouissent du triomphe de Simon Whitfield, de Kingston, dans l'épreuve du triathlon masculin aux Jeux olympiques de Sydney.
La médaille d'or qu'a remportée M. Whitfield témoigne bien de la passion qu'il voue à un sport où il excelle depuis de nombreuses années. Tous les Canadiens ont été émus par la fin remarquable de sa course, où il a réussi à dépasser tous ses adversaires pour monter sur la plus haute marche du podium.
Sharon Donnelly, une autre athlète de Kinsgton, participait au triathlon féminin à ces Jeux olympiques. Mme Donnelly aspirait à une médaille, mais a été victime d'une chute provoquée par d'autres cyclistes. Même si elle savait qu'elle ne finirait pas parmi les premières et qu'elle était blessée, Sharon a enfourché de nouveau son vélo et a montré énormément de courage pour terminer l'épreuve.
Je sais que mes collègues des deux côtés de la Chambre voudront se joindre à mes électeurs et à moi pour féliciter Simon Whitfield et Sharon Donnelly pour leurs hauts faits.
* * *
[Français]
LA GUERRE DE CORÉE
M. Paul Mercier (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur le Président, on dit de la guerre de Corée qu'elle est une «guerre oubliée» au Canada, bien que 27 000 militaires canadiens y aient pris part. De ce nombre, 516 Canadiens, dont 113 Québécois du 22e Régiment, y ont trouvé la mort. Il ne doivent pas tomber dans l'oubli.
Je désire souligner le dévoilement, dimanche dernier, à Québec, d'une plaque commémorative en hommage à ces Québécois. Le 22e Régiment a fourni une garde d'honneur lors de cette cérémonie marquée par la présence de la lieutenant-gouverneur du Québec, Mme Lise Thibault. J'estime regrettable que le ministère des Anciens combattants n'ait pas cru bon de participer financièrement à cet hommage, comme on le lui demandait.
En mon nom, ainsi qu'au nom du Bloc québécois, je félicite l'Association canadienne des vétérans de la Corée, en particulier M. Roland Boutot et son épouse Carmen, de cette heureuse initiative qui rappellera aux générations futures le sacrifice de ces Québécois disparus à la guerre de Corée.
* * *
[Traduction]
LES PARTIS POLITIQUES
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens en ont assez de ces chefs de parti politique qui ne cherchent qu'à dénigrer le gouvernement, qui réclament des réductions d'impôt favorisant les riches, qui sont prêts à mettre la santé de leurs concitoyens en péril en privatisant les services publics et qui pensent que les députés d'arrière-ban sont plus utiles dans leur circonscription à solliciter l'appui de leurs électeurs qu'à participer aux débats parlementaires pour que soient adoptées les meilleures lois possibles.
Les Canadiens ne se laissent pas berner par ces chefs de parti qui sont convaincus qu'on peut gouverner en se contentant de poser pour les photographes, de participer à des opérations de relations publiques, d'organiser des conférences de presse privées et de planifier des campagnes de dénigrement. J'en ai d'ailleurs la preuve irréfutable. Le 8 septembre dernier, dans une élection partielle provinciale tenue dans ma circonscription, le candidat libéral a subtilisé 20 000 voix aux conservateurs ontariens dans ce qu'on peut considérer comme un rejet total des politiques du premier ministre de l'Ontario, Mike Harris.
C'est dans les pas de Mike Harris que marche le chef de l'Alliance canadienne. Il faudra peut-être du temps...
Le Président: Je rappelle aux députés d'utiliser le nom des circonscriptions et pas le nom des députés.
* * *
LE CRIME ORGANISÉ
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier soir, la Chambre a siégé jusqu'à minuit et des poussières pour débattre le dossier du crime organisé au Canada. Cette force insidieuse qui est un cancer pour la société canadienne a envahi nos vies au cours des sept ans de pouvoir du gouvernement libéral.
Dans leurs discours d'hier, la ministre de la Justice et le solliciteur général ont fait la preuve qu'ils n'ont pas la moindre idée de la complexité du problème. Ils ne saisissent pas que le crime organisé présente une menace non seulement pour la sécurité personnelle des Canadiens, mais également pour la sécurité nationale à cause des liens que les terroristes entretiennent avec le crime organisé. Des forces dangereuses tentent de saper la liberté d'expression et d'association des Canadiens quand elles menacent, contraignent ou tentent de corrompre des personnalités publiques.
Quand le gouvernement va-t-il enfin prendre la chose au sérieux et reconnaître le lien solide qui existe entre le crime organisé et la sécurité nationale? Il est grand temps que le gouvernement adopte une stratégie qui englobe les affaires étrangères, l'immigration, les forces armées, le SCRS et notre police nationale. Un front solidement uni est la seule chose qui puisse protéger les Canadiens de ces forces de destruction.
* * *
[Français]
LE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL
M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Monsieur le Président, le 5 septembre dernier, la ministre de la Coopération internationale présentait un plan quinquennal qui cible quatre secteurs clés du développement social dans les pays en voie de développement.
Des sommes totalisant 2,8 milliards de dollars seront investies dans ces secteurs prioritaires d'ici cinq ans. Le financement pour la santé et la nutrition va plus que doubler, tandis que les sommes allouées à l'éducation de base, à la lutte contre le VIH/sida et à la protection des enfants vont quadrupler.
[Traduction]
Les priorités de l'ACDI en matière de développement social permettront au Canada de mettre davantage l'accent sur ses programmes de développement international et d'investir ses ressources là où les besoins sont les plus pressants.
Ce cadre d'action se veut une vision claire grâce à laquelle le programme canadien d'aide au développement sera mieux en mesure d'assurer une meilleure qualité de vie aux plus démunis et aux plus défavorisés de la planète.
* * *
L'ALLIANCE CANADIENNE
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, bienvenue aux Olympiques de l'auge d'or de Bay Street où le Parti libéral, le Parti conservateur et l'Alliance se font une lutte féroce pour remporter l'or corporatif.
Les convives de Bay Street ont vu les conservateurs demander 500 $ le couvert, les libéraux 1 000 $ et les alliancistes 5 000 $ pour un pique-nique dans la région de Muskoka. Mais, cette année, c'est l'Alliance canadienne soi-disant populaire qui remporte l'auge d'or pour avoir demandé 25 000 $ la table, lors d'un dîner de financement auprès des sociétés tenu à Toronto.
Vingt-cinq mille dollars, c'est le salaire annuel d'une famille ouvrière moyenne de ma circonscription. C'est au moins deux fois le salaire minimum en Alberta.
Voilà le prix que l'Alliance accorde à la démocratie. C'est le prix qu'il faut payer pour accéder à son programme corporatif. Dans ce parti-là, Bay Street paie les violons et choisit la musique.
* * *
[Français]
LE LEADER DU GOUVERNEMENT À LA CHAMBRE DES COMMUNES
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, le leader du gouvernement croit que l'on s'oppose à sa venue au Québec, parce qu'il est franco-ontarien.
Je désire rappeler au leader que le Bloc s'est prononcé contre les visites de tous les ministres fédéraux qui se baladent au Québec, aux frais du Bureau d'information du Canada, le fameux BIC, dans des tournées organisées par la grande amie du ministre des Travaux publics, Mme Michèle Tremblay, et par un ex-candidat libéral, Serge Paquette, auxquels les libéraux ont versé globalement plus de 4,2 millions de dollars depuis 1997.
Pourquoi des visites qui n'ont lieu qu'au Québec? Pourquoi diable ces visites sont-elles organisées par le BIC et non pas par les cabinets respectifs des ministres? Pourquoi les contrats liés à l'organisation de ces visites sont-ils donnés à des amis du Parti libéral du Canada?
Le leader du gouvernement ferait mieux de se tenir debout pour défendre sa minorité, plutôt malmenée par les temps qui courent...
Le Président: L'honorable député de Mississauga-Ouest a la parole.
* * *
[Traduction]
LE DÉPUTÉ DE MISSISSAUGA-OUEST
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis un député et je suis un libéral. Je crois dans des soins de santé universels et dans la Loi canadienne sur la santé, et non dans le système de soins de santé à deux vitesses à la mode américaine de l'Alliance canadienne.
Je suis en faveur de réductions d'impôt, et non de l'impôt uniforme que propose l'Alliance canadienne. Je porte un complet, et non une combinaison de plongée, Dieu merci. Je ne possède même pas de moto marine. Je travaille sept jours par semaine, et non pas quatre. Je crois dans une majorité claire à un référendum ayant une question claire, et non au projet du Bloc de confondre les Québécois et les autres Canadiens.
Je crois dans une saine gestion financière, et non dans la démangeaison néo-démocrate de dépenser, dépenser, dépenser. Je crois que, lorsqu'on place les chariots en cercle, c'est pour tirer vers l'extérieur, et non les uns sur les autres comme le font les conservateurs.
Et, soit dit en passant, je crois dans le rêve olympique du Canada. Notre équipe va remporter d'autres médailles et le Canada sera l'hôte des Jeux olympiques de 2008. Oui, monsieur le Président, je suis un Canadien et je suis un libéral.
* * *
LE DÉPUTÉ DE KINGS—HANTS
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, je suis progressiste conservateur et, au nom du caucus progressiste conservateur, je suis heureux de souhaiter un bon retour à la Chambre au nouveau député de Kings—Hants.
J'ai eu l'honneur et le plaisir de servir à la Chambre avec ce député de 1988 à 1993, époque durant laquelle il s'est révélé un leader international exceptionnel qui a fort bien représenté notre pays.
Plus récemment, je l'ai accompagné durant ses tournées porte-à-porte dans la circonscription de Kings—Hants et je n'ai pu m'empêcher d'être impressionné quand les gens sortaient de chez eux pour lui serrer la main. Ils amenaient leurs enfants de l'autre côté de la rue pour lui dire: «Je veux que ma fille fasse la rencontre de Joe Clark. Je veux que mon fils fasse la rencontre de Joe Clark.» Ce n'est là qu'une indication du respect que les gens vouent à cet homme.
Il y a un vide dans la politique canadienne. Sous la direction du nouveau député de Kings—Hants, le Parti progressiste conservateur comblera maintenant ce vide. Nous serons tous là pour marcher sous sa houlette et répondre aux besoins des Canadiens.
Au nom de tout notre caucus, je souhaite bon retour à la Chambre des communes au très honorable Joe Clark.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LES NOUVEAUX DÉPUTÉS
Le Président: J'ai l'honneur de faire savoir à la Chambre que le Greffier a reçu du Directeur général des élections les certificats et les rapports d'élection des députés suivants:
Le très honorable Joe Clark, pour la circonscription électorale de Kings—Hants;
M. Stockwell Day, pour la circonscription électorale d'Okanagan—Coquihalla.
* * *
PRÉSENTATION DE NOUVEAUX DÉPUTÉS
Joe Clark, député de la circonscription électorale de Kings—Hants, est présenté par Mme Elsie Wayne et M. Peter MacKay.
Stockwell Day, député de la circonscription électorale d'Okanagan—Coquihalla, est présenté par Mme Deborah Grey et M. Chuck Strahl.
Le Président: Comme on dit aux Jeux olympiques, que les jeux commencent.
Des voix: Bravo!
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous pouvons attendre quelques minutes parce qu'il nous faut être sérieux avant la partie de plaisir des quelques prochaines semaines.
Je souhaite au chef de l'opposition officielle une bienvenue toute spéciale à la Chambre des communes et à la politique fédérale. Il découvrira rapidement que nous faisons les choses un peu différemment ici, sur la terre ferme. Il n'y a pas de veste de sauvetage à la Chambre des communes.
Je suis toujours très heureux d'accueillir de nouveaux chefs de l'opposition officielle. En fait, le député d'Okanagan—Coquihalla est le sixième chef de l'opposition à me faire face. C'est un poste très dangereux.
J'ai eu des discussions avec mon caucus et je peux garantir au chef de l'opposition que nous travaillerons très fort pour faire en sorte qu'il ait une carrière de chef de l'opposition longue et fructueuse.
Sérieusement, ce qui se passe à la Chambre des communes est très important. Nous avons peut-être des points de vue, des programmes et des méthodes différents, mais tous les députés à la Chambre des communes travaillent pour faire du Canada un pays encore meilleur. C'est pourquoi je souhaite la bienvenue au chef de l'opposition à la Chambre.
[Français]
Je sais que le nouveau chef de l'opposition entre ici avec de très bonnes dispositions. Il va travailler très fort, avec beaucoup d'énergie, pour mettre de l'avant ses idées. Nous aurons des débats sérieux, parfois un peu corsés, mais au bout de la ligne, chacun d'entre nous travaillera pour s'assurer que le Canada entre sur le bon pied dans le XXIe siècle.
Je veux souhaiter la bienvenue au chef de l'opposition à la Chambre des communes et, comme je le disais en anglais, je sais que les députés de ce côté-ci de la Chambre lui souhaitent une très longue carrière comme chef de l'opposition.
[Traduction]
Je souhaite la bienvenue au nouveau député de Kings—Hants et chef du Parti conservateur. Il a longtemps siégé à la Chambre. J'étais ministre, en 1972, lorsque ce jeune député est arrivé de l'Alberta et a immédiatement fait sa marque aux Communes.
On lui a confié une tâche redoutable. Il est devenu porte-parole de son parti pour les affaires indiennes lorsque j'étais ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien. Deux députés étaient chargés de me critiquer à l'époque, l'actuel député de Kings—Hants et Flora MacDonald, alors députée de Kingston. Je disais qu'ils étaient la flore et la faune.
Sur un ton plus sérieux, je dois dire que le député était un excellent parlementaire. Il jouait son rôle efficacement dans l'opposition car il était toujours bien préparé et ne ménageait pas ses attaques. En bon soldat, il savait aussi essuyer des attaques.
Il était très jeune lorsqu'il est devenu chef de l'opposition, puis premier ministre. Il a ensuite servi le Canada avec grande distinction à titre de ministre des Affaires étrangères. Je suis très heureux qu'il soit de retour parmi nous, car il est un parlementaire de la trempe des Ged Baldwin, Stanley Knowles et Jack Pickersgill, qui ont su se faire un nom à la Chambre des communes.
[Français]
Pour ma part, il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à un guerrier avec lequel j'ai eu beaucoup de combats dans ma vie, mais que je respecte énormément. C'est un homme entièrement dédié à la vie publique, engagé très sincèrement à toujours faire du Canada un meilleur pays.
Je suis sûr que la Chambre des communes, aujourd'hui, gagne beaucoup avec le retour de l'honorable député dans cette Chambre. Je lui souhaite bonne chance.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, je joins ma voix aux autres députés de cette Chambre pour souhaiter la bienvenue aux deux nouveaux élus des circonscriptions de Kings—Hants et de Okanagan—Coquihalla.
Bien qu'ils soient fraîchement élus, ces deux nouveaux députés ne sont pas des nouveaux venus en politique. L'expérience que M. Clark a acquise à titre de chef de parti, de ministre et de premier ministre sera très utile à cette Chambre.
Quant à M. Day, il pourra désormais défendre ses idées dans cette Chambre, des idées, précisons-le, que je ne partage pas pour la plupart, mais qui permettront d'avoir un débat démocratique dans cette Chambre, ce qui améliorera la qualité de celui-ci, puisque c'est par le débat qu'on peut mieux saisir les idées.
Je ne doute pas que nous nous engagerons, au cours des prochaines semaines et des prochains mois, dans des débats fort animés qui témoigneront du niveau élevé de la Chambre et des procédures parlementaires de notre démocratie parlementaire. La venue de nouveaux élus au Parlement est toujours un événement marquant de la vie parlementaire, car elle est la manifestation tangible du choix des électeurs et des électrices. Elle nous rappelle avec éloquence que nous sommes tous ici des représentants de la population dont nous avons le devoir de défendre et de véhiculer les intérêts, les valeurs et les espoirs.
Je ne doute pas que la venue des deux chefs de parti contribuera à garder vivante cette tradition parlementaire qui nous est si chère et à laquelle ils sauront apporter leur énergie, leur talent et leur détermination.
Messieurs, bienvenue dans cette Chambre. Je vous souhaite bonne chance.
[Traduction]
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je prends moi aussi la parole pour participer à la tradition parlementaire consacrée qui consiste à souhaiter la bienvenue aux nouveaux députés. Pour la première et peut-être la seule et unique fois de cette session, je voudrais joindre ma voix à celle du premier ministre du Canada et souhaiter sincèrement la bienvenue aux nouveaux députés, aux nouveaux leaders à la Chambre, sans toutefois leur souhaiter des succès électoraux trop éclatants. Je pense que c'est la chose la plus honnête à faire.
Comme chacun le sait, les deux députés qui assument aujourd'hui leurs fonctions à titre de leaders de leurs partis respectifs ne sont pas des nouveaux venus sur la scène politique, ce ne sont pas des néophytes de la politique, et je me garderai donc de leur dispenser des conseils aujourd'hui ou, à tout le moins, de leur en donner trop. Tout d'abord, ils n'accepteraient pas les conseils en provenance de ce coin-ci de la Chambre.
Je tiens à adresser un message spécial au leader du Parti conservateur, comme les habitants de la Nouvelle-Écosse souhaiteraient que je le fasse, je pense, afin de lui souhaiter la bienvenue à titre de Néo-Écossais honoraire, du moins pour l'instant. Je me contenterai de lui dire que, s'il s'efforce de traduire les vraies valeurs et d'exprimer les espoirs et les rêves véritables des Néo-Écossais dans l'exercice de ses fonctions au nom de la population de Kings—Hants, il aura alors servi extrêmement bien les intérêts des Canadiens.
Au nouveau député qui assume aujourd'hui son rôle de chef de l'opposition officielle, je tiens à dire que, pour avoir moi-même vécu la transition de la politique provinciale à celle de la scène fédérale, je pense qu'il ne devrait pas avoir trop peur des points de presse. Croyez-en quelqu'un d'expérience. C'est parfois difficile, mais les choses ne peuvent que s'améliorer.
Notre univers télévisuel d'aujourd'hui compte quelque 500 chaînes. Ce ne sont pas les émissions de sport ou de divertissement qui manquent sur notre petit écran. Alors, avec tout le respect que je vous dois, monsieur le Président, bien que je comprenne le contexte et l'esprit dans lesquels la présidence a déclaré «Que les jeux commencent», je voudrais tout de même souhaiter que ce soit là le début d'une ère nouvelle dans la vie de la session parlementaire en cours. J'ose espérer que nous nous efforcerons d'amorcer un véritable débat.
Certains ont voulu savoir si, d'après moi, la dynamique de cet endroit était susceptible de changer par suite de l'arrivée en Chambre des deux chefs de parti. J'ose espérer qu'il en sera effectivement ainsi. Espérons que les choses changeront pour le mieux car, somme toute, il n'est qu'un seul défi que nous sommes tous appelés à relever, faire en sorte que le Parlement du Canada oeuvre dans l'intérêt des Canadiens et veille à responsabiliser le gouvernement national.
Je tiens encore une fois à féliciter les deux chefs de parti qui nous ont rejoints dans cette enceinte. Que le véritable débat commence.
[Français]
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je vous remercie beaucoup pour ce chaleureux accueil à la Chambre.
[Traduction]
Je reconnais que c'est en fait une Chambre historique où s'est écrite une grande partie de l'histoire du Canada et où il reste tant à écrire.
Je voudrais tout d'abord remercier ceux grâce à qui je suis ici, et peut-être aussi ceux grâce à qui nous sommes tous ici. C'est dans cette Chambre que fut adoptée une constitution qui dit en préface que nous reconnaissons la suprématie de Dieu et que c'est par la grâce de Dieu que nous sommes ici.
C'est également grâce à mon épouse et à ma famille. Ils m'ont enduré au fil des ans et m'ont encouragé et ils me font savoir, lorsque je suis trop sérieux, qu'il est temps pour moi de relaxer, de troquer le costume rayé pour une combinaison de plongée. Je reconnais que c'est en grande partie grâce à eux que je suis ici.
Je voudrais remercier mes électeurs d'Okanagan—Coquihalla qui m'ont donné un mandat si merveilleux. J'ai reçu tout un appui des gens dans l'ensemble des exploitations agricoles, des ranchs, des villes et des villages, ainsi que des vignobles de cette merveilleuse circonscription. Je leur dois des remerciements.
Oui, c'est une Chambre historique. J'ai été témoin d'un moment historique juste à l'extérieur de la Chambre. Jeune adolescent, je me tenais à l'extérieur de ces portes lorsqu'un drapeau a été amené et remplacé par le nouveau drapeau à feuille d'érable. À ce moment-là, à titre de jeune, captivé par cet événement, j'ai senti un grand sentiment de fierté. J'avais des grandes attentes pour l'avenir. J'ai vu un ancien premier ministre, M. Diefenbaker, qui avait les larmes aux yeux. À ses côtés se trouvait le premier ministre de l'époque, M. Pearson. J'ai respecté le respect de M. Pearson à ce moment-là pour un grand changement qui se produisait. J'ai appris à connaître le pouvoir du changement, mais également l'importance de respecter des moments comme ceux-là.
J'ai également appris des choses à l'extérieur de la Chambre, au bout du couloir de ciment qui conduit jusqu'au trottoir. J'ai participé à ma première manifestation. J'avais environ 15 ans et j'étais avec un ami. Nous nous sommes joints à d'autres manifestants. Je ne me rappelle pas quel était l'objet de cette manifestation. Nous y avons participé parce que cela nous paraissait amusant. Alors que les caméras s'approchaient, j'ai eu une pensée terrible. Qu'allait-il se passer si mes parents me voyaient aux nouvelles? Je me suis donc enfui et ma peur des caméras remonte à ce moment-là.
Monsieur le Président, je tiens à dire par votre entremise à notre premier ministre que nous aurons des débats dans cette enceinte. Nous débattrons davantage dans le grand creuset des prochaines élections. Il est vrai que mon parti et moi-même mettrons en doute ses politiques et ses plans. Je l'ai observé au fil des ans, et je tiens à assurer tous les députés que je ne mettrai jamais en doute son amour et son dévouement à l'égard de notre pays et des hautes fonctions qu'il occupe.
[Français]
C'est le début d'un temps nouveau, un temps où les citoyens et les citoyennes veulent avoir des gouvernements qui seront respectueux de la démocratie, de la Chambre des communes, de la législature et des contribuables, des gouvernements respectueux de la liberté.
[Traduction]
C'est avec ce respect, que nous proposerons les plans et les priorités qui, selon nous, contribueront à améliorer et à renforcer notre pays et à offrir davantage d'espoir et de possibilités. Nous ferons preuve de respect et d'optimisme.
[Français]
Le très hon. Joe Clark (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, ce sera inhabituel pour moi d'avoir le dernier mot à la Chambre, du moins d'ici à la prochaine élection.
[Traduction]
D'abord, je tiens à exprimer ma profonde appréciation aux habitants des comtés de Hants et Kings en Nouvelle-Écosse. Je dirai à la chef du Nouveau Parti démocratique que, même si je suis un citoyen honoraire de cette province, mon arrière-arrière-arrière-arrière grand-père venait d'un endroit non loin de là. Je prends très au sérieux la confiance qu'ils m'accordent en tant que député. J'ai hâte de travailler avec vous et les autres députés à la Chambre afin de faire valoir les intérêts des citoyens canadiens que je représente et des autres citoyens représentés par d'autres députés ici.
Je crois que les députés me permettront de faire une parenthèse pour remercier une personne présente à la tribune et lui témoigner ma reconnaissance. Il s'agit de M. Scott Brison, l'ancien député de Kings—Hants. Il y aura peut-être moins d'applaudissements pour ce que je vais dire, à savoir que je m'attends tout à fait à ce que M. Brison soit de retour à ce siège-ci après les prochaines élections.
[Français]
Comme la Chambre le sait, c'est dans la circonscription de Kings—Hants qu'on observe les plus hautes marées du monde. Elles ont balayé de la Nouvelle-Écosse le Parti libéral lors de la dernière élection fédérale, et je peux vous affirmer que ces marées sont plus puissantes que jamais.
[Traduction]
J'aimerais également féliciter le nouveau chef de l'opposition officielle des victoires qu'il a remportées dans la circonscription d'Okanagan—Coquihalla et à la direction de son parti. Je lui souhaite la meilleure des chances dans cet univers de concessions qui régit le débat démocratique.
J'ai remarqué qu'il avait parlé de sa famille. Je me permettrai donc de dire quelques mots de la mienne. J'aimerais souligner que mon épouse et ma fille sont présentes à la tribune, tout comme elles l'ont fait tout au cours des quelque vingt années que j'ai passées en politique active. Je n'ai aucunement l'intention de me mêler de la vie de famille du chef de l'opposition, mais j'ai remarqué qu'il a affirmé à quelques reprises que les membres de sa famille lui avaient déjà dit de relaxer un peu et j'aimerais lui dire de ne pas s'inquiéter parce que dorénavant, ses collègues de la Chambre s'en chargeront.
Les souhaits de bienvenue que m'ont adressés les autres chefs de parti m'ont fait chaud au coeur. Le premier ministre a souligné que j'étais le porte-parole qui lui était attaché lorsque je suis arrivé à la Chambre il y a bien des années. J'espère que le premier ministre ne le prendra pas en mauvaise part, mais je dois dire que le critiquer n'est pas une tâche trop difficile.
À la Chambre, nous avons le devoir parlementaire de demander au gouvernement de rendre des comptes. C'est une tâche que je remplirai avec plaisir. Mais à titre de citoyens canadiens, nous avons également le devoir de chercher à réunir les intérêts diversifiés épars d'un bout à l'autre de notre extraordinaire pays. La Chambre des communes est le seul endroit au pays où toutes les collectivités canadiennes peuvent se sentir bien représentées. C'est ici que réside le siège de la nation. J'espère être en mesure d'aider à tirer le maximum des meilleurs instincts de ce pays et à pousser le Parlement à insister davantage sur ce que nous pouvons réaliser ensemble que sur ce qui nous sépare.
C'est pour moi un honneur de revenir parmi vous et d'occuper de nouveau un siège à la Chambre des communes.
Des voix: Bravo!
Le Président: C'est tellement une belle journée que je serais presque tenté d'annuler la période des questions pour aujourd'hui.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LES TAXES SUR LES CARBURANTS
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, pas plus tard qu'hier, le ministre des Finances disait qu'il ne pouvait pas prendre l'initiative de voir à ce que les taxes sur les carburants soient réduites parce qu'il n'y avait aucun intérêt à cet égard de la part des provinces. Je sais que deux ministres provinciaux des Finances, et j'étais l'un d'eux, ont écrit au ministre fédéral des Finances pour exprimer leur intérêt à cet égard.
Même si cela avait pu être une excuse—et on voit que ce n'est pas le cas—, pourquoi le ministre des Finances ne s'engage-t-il pas à voir à ce que les taxes sur les carburants soient réduites?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme le ministre des Finances répond souvent à des questions à ma place, aujourd'hui, c'est moi qui répondrai à une question à sa place.
Nous avons un problème grave et nous sommes en train de l'examiner. Le ministre des Finances a demandé aux gouvernements provinciaux de collaborer avec lui, mais, comme il l'a souligné, nous devons nous assurer que toute réduction profitera aux consommateurs.
Je pourrais peut-être citer les paroles d'un expert en la matière, qui a dit un jour: «Si nous réduisons la taxe sur l'essence, comment pouvons-nous être certains que les détaillants réduiront également le prix au lieu de simplement mettre l'argent dans leur poche?»
Une voix: Qui a dit cela?
Le très hon. Jean Chrétien: C'est le chef de l'opposition lorsqu'il était trésorier de l'Alberta.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est absolument vrai.
Premièrement, je suis surpris que le premier ministre n'ait pas laissé un de ses plus loyaux partisans répondre lui-même à la question qui lui était posée. Je vais quand même continuer.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le chef de l'opposition peut commencer à poser sa question.
M. Stockwell Day: Monsieur le Président, je ne croyais pas que la loyauté était un sujet aussi délicat chez les députés d'en face.
[Français]
Il y a deux ans, les députés libéraux ont donné leur appui à la réduction des taxes sur l'essence.
Est-ce que le premier ministre va permettre à ses députés jeudi de voter librement sur la motion de l'Alliance canadienne portant sur la réduction des taxes sur l'essence?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout le monde sait que lorsqu'il y a une mesure budgétaire, si l'honorable député veut avoir une élection tout de suite, il n'a qu'à demander aux députés de voter avec lui. Mais il y a des députés, comme les journalistes me disaient, qui ont peur d'avoir une élection.
La question à ce moment-ci est la suivante. D'abord, les relations entre le ministre des Finances et moi-même sont très bonnes. Il a été un excellent ministre des Finances. Parce qu'il est un homme responsable, il n'essayait pas de faire des changements à la courte semaine. Il a pu, en travaillant avec le caucus, le Cabinet et moi-même, faire avancer l'économie canadienne, réduire le déficit à zéro, produire un surplus budgétaire...
Le Président: L'honorable chef de l'opposition officielle a la parole.
[Traduction]
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je comprends que mon français n'est pas parfait, mais je ne pensais pas que le premier ministre comprendrait mal au point de passer complètement à côté de la question.
Je tiens à informer le premier ministre que, pas plus tard que ce matin, j'ai parlé au président de l'Association canadienne du camionnage, qui m'a dit que si la motion visant à réduire les taxes sur les carburants était adoptée jeudi, il n'y aurait pas de grève des camionneurs.
Pourquoi le premier ministre ne s'engage-t-il pas à permettre ce vote afin d'empêcher que le pays ne soit paralysé par cette grève?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'on forme le gouvernement, on doit agir de façon responsable. On ne prend pas des décisions à caractère financier à cause de pressions exercées d'un côté ou de l'autre.
Nous avons un plan. Nous savons que la priorité des Canadiens dans le moment est une bonne gestion de l'économie, et la priorité de notre parti est d'abord et avant tout de continuer à réduire l'impôt sur le revenu des Canadiens.
Je vois que le chef de l'opposition est déjà passé de l'impôt uniforme à la taxe sur l'essence. On voit tout de suite que son avenir politique est lourdement taxé.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'attends avec impatience l'occasion d'expliquer à la Chambre au cours des jours qui viennent, que nous ne proposons pas un impôt uniforme, mais bien un taux d'imposition uniforme, en fait il s'agit de deux taux: 17 p. 100 et zéro.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le chef de l'opposition a la parole.
M. Stockwell Day: Monsieur le Président, j'étais heureux d'entendre le premier ministre parler de responsabilité parce que je veux poser la question suivante. Compte tenu du fait que le pays pourrait être paralysé par une grève des camionneurs, le ministre responsable de ce secteur pourrait-il nous dire quel genre de plan d'urgence est actuellement en place?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens sont très responsables et ils savent que nous avons des problèmes à cause de la hausse du prix du pétrole sur les marchés internationaux. Le ministre des Finances participera à des réunions du FMI et de la Banque mondiale au cours des prochains jours. Tous les ministres des Finances du monde seront là et discuteront des conséquences de la hausse du prix du pétrole par les pays producteurs. C'est là que se situe le problème à ce moment-ci.
Nous espérons que la situation se rétablira, que les gens comprendront que, lorsqu'un secteur comme celui-là est trop vorace, cela peut ralentir l'activité économique et provoquer une récession. J'espère que tout le monde se rendra compte à quel point la collaboration internationale est importante à cet égard.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je comprends maintenant pourquoi cela s'appelle la période des questions et non la période des réponses.
Le problème ne vient peut-être pas du fait que le premier ministre ne se soucie pas des Canadiens, mais bien du fait qu'il ne sait pas l'effet que cela a sur ses électeurs que d'avoir à payer si cher pour faire le plein.
[Français]
Est-ce que le premier ministre peut dire quel est maintenant le prix de l'essence dans sa circonscription de Saint-Maurice?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout le monde sait que le prix du pétrole a augmenté considérablement au cours de l'été. Tout le monde réalise que c'est un problème.
Ce que le ministre des Finances et le gouvernement veulent faire à ce moment-ci, c'est rencontrer les gouvernements provinciaux, discuter avec eux d'une solution collective et, en même temps, s'assurer que le système fonctionne bien et que le gouvernement puisse continuer avec son programme de créer de la croissance économique et de réduire les impôts.
Ce faisant, si on réduit les impôts, cela aidera les consommateurs en leur permettant d'acheter les produits qui ont malheureusement augmenté au cours des derniers mois.
* * *
LE CRIME ORGANISÉ
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, la ministre de la Justice hésitait, hier, à utiliser tous les moyens pour criminaliser l'appartenance à une organisation criminelle.
Je lui demande aujourd'hui si elle accepterait de définir ce qu'est une organisation criminelle, en tenant compte de l'article 1 de la Charte canadienne des droits et libertés.
Si elle croit que cette méthode ne pourrait pas passer le test de la Charte, pourrait-elle procéder par renvoi à la Cour suprême?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je serai parfaitement claire. L'article 1 de la charte, qui prévoit la garantie des droits dans des limites raisonnables, est invoqué très fréquemment.
Je signale à mes collègues que, ce matin, mes collaborateurs, les solliciteurs généraux et les représentants du Québec ont eu une réunion très constructive, marquée par un esprit de collaboration. Nous examinons tous les aspects du crime organisé. Nous envisageons une réforme des dispositions actuelles du Code criminel qui concernent le crime organisé. Nous examinons des dispositions concernant les actes d'intimidation commis à l'endroit des responsables du système de justice. Nous examinons le problème du recrutement dans des organisations criminelles. Nous allons collaborer avec la police, tant au Québec que dans les autres provinces, pour discuter de l'application de la loi.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, est-ce que la ministre peut convenir et admettre que d'enlever le droit d'association à des bandes criminelles identifiées ne cause, d'aucune façon, de préjudice quant au droit d'association des organisations démocratiques de notre société, et, qu'en ce sens, il ne faut exclure aucun moyen, si jamais les moyens choisis ne passent pas le test de la Charte, et que l'on recevait un avis de la Cour suprême?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit clairement hier, nous envisageons toutes les mesures possibles pour relever les défis que pose le crime organisé. J'ai dit clairement hier que nous croyons pouvoir accomplir beaucoup, tant sur le plan de l'application de la loi que sur celui de la législation, sans pour autant devoir invoquer la disposition de dérogation.
[Français]
Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, la Déclaration des droits de l'homme de l'ONU garantit, à l'article 20, le droit de réunion et d'association pacifique.
Le premier ministre pourrait-il s'inspirer de la Déclaration des droits de l'homme de l'ONU en rendant illégal le fait d'appartenir à une bande criminelle?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en ce qui nous concerne, nous avons une Charte des droits qui sert à protéger tous les droits de tout le monde.
Comme vient de le dire la ministre de la Justice, il y a moyen d'avoir une législation qui peut aider à régler ce problème. Ce n'est pas seulement une question de législation, c'est également une question qui concerne les activités policières.
L'article 1 de la Charte accorde certaines libertés. Mais invoquer immédiatement la clause nonobstant serait, à mon avis, tout à fait hors portée. Le gouvernement canadien ne s'est jamais servi, jusqu'à maintenant, de la clause nonobstant. Je pense qu'il ne serait pas recommandable qu'on commence à le faire à ce moment-ci.
Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, contrairement au premier ministre, la ministre de la Justice a déclaré hier à la Chambre que la loi serait modifiée si nécessaire.
La ministre de la Justice peut-elle nous assurer qu'elle a réussi à convaincre le premier ministre et le gouvernement d'agir en ce sens?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit hier et je le répète, s'il y a possibilité de changements législatifs, nous serons très heureux de le faire.
C'est pourquoi le sous-ministre de la Justice et le sous-ministre du Solliciteur général se trouvent à Québec présentement pour discuter des possibilités d'amendement à la législation. Je n'ai rien contre cela.
Mais je tiens à répéter encore une fois qu'avant de se servir de la clause nonobstant, il faut avoir recours à tous les autres moyens législatifs et administratifs pour réussir.
* * *
[Traduction]
LE PRIX DE L'ESSENCE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.
Ces derniers jours, les amis des grosses compagnies pétrolières, qui sont là-bas, parlent beaucoup de la TPS. Il est évident que les consommateurs éprouvent des difficultés. Il est tout aussi évident que les pétrolières amassent des bénéfices sans précédent.
Au printemps, le NDP a déposé un projet de loi visant à demander des comptes aux pétrolières et à enrayer l'escalade artificielle du prix de l'énergie.
Ma question au premier ministre est la suivante: le gouvernement va-t-il emboîter le pas au NPD et créer une commission d'examen du prix de l'énergie?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement est déjà passé à l'action pour essayer de rendre plus transparents le fonctionnement du marché et les tendances relatives à l'établissement des prix au Canada.
Nous avons demandé au Conference Board du Canada, organisme totalement indépendant, d'entreprendre une étude extraordinaire afin de faire la lumière sur la situation de manière à ce que tous les Canadiens sachent exactement ce qui se passe sur le marché et pourquoi.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je pense que les Canadiens savent déjà ce qui se passe sur le marché et pourquoi les prix sont artificiellement gonflés. Le problème, c'est que si on fait trop souvent semblant d'être impuissant, on finit par le devenir.
Le problème est national. Il exige un leadership au niveau national. Pendant que les consommateurs se font exploiter, les pétrolières se taillent la part du lion et profitent de l'augmentation du prix de l'énergie. Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de prendre la défense des consommateurs?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a hâte d'être en possession de l'information que le Conference Board pourra lui communiquer de façon à ce que tous les Canadiens, tant les décisionnaires du secteur public que les gestionnaires du secteur privé qui dirigent les divers éléments industriels de notre économie ainsi que les consommateurs, puissent suivre de près les tendances exactes du marché de manière à ce que lorsque, par exemple, les prix montent en flèche de manière inexplicable avant les longs week-ends, ils soient en mesure de réagir.
* * *
LA SANTÉ
Le très hon. Joe Clark (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. L'accord sur les soins de santé conclu la semaine dernière retarde de 18 autres mois le plein rétablissement du financement fédéral des soins de santé aux niveaux de 1994. Ce retard coûte aux Canadiens plus de 3 milliards de dollars, soit les 3 milliards de dollars correspondant à l'écart entre ce que le premier ministre avait promis de donner et ce qu'il a donné.
Le premier ministre conviendra-t-il aujourd'hui même à la Chambre de rétablir immédiatement les niveaux de financement de 1994?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le chef du Parti conservateur devrait savoir que, si nous avions gardé la formule qu'avait adoptée son gouvernement, le financement ne serait pas rétabli à 18,7. Les paiements comptants seraient aujourd'hui de 11 milliards de dollars parce que la formule était fondée sur la prémisse que les paiements comptants baisseraient si les recettes fiscales augmentaient.
Nous avons mis fin à cela et c'est pourquoi nous sommes aujourd'hui en mesure de verser davantage d'argent que n'auraient jamais pu le faire les conservateurs s'ils étaient restés au pouvoir.
Le très hon. Joe Clark (Kings—Hants, PC): J'en déduis, monsieur le Président, que la réponse est non.
[Français]
Les coupures unilatérales que le gouvernement libéral a faites dans le financement de la santé ont dévasté le système de santé de ce pays. Même Monique Bégin dit que cela a «déprofessionnalisé» la profession d'infirmière. Il est impossible de créer un nouveau système de santé sans l'assurance d'un financement stable.
Est-ce que le premier ministre s'engagera aujourd'hui à présenter une loi pour garantir la stabilité du financement fédéral de la santé?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le très honorable député devrait savoir que dans l'accord que nous avons signé avec les provinces, nous leur avons garanti un financement stable pour les prochaines années. Tous les premier ministres des provinces étaient très heureux. Ils ont signé avec enthousiasme.
À un moment donné, je leur avais proposé de retourner à la formule du gouvernement conservateur. L'un d'entre eux a dit: «Peut-être.» Il s'est informé auprès de ses fonctionnaires et immédiatement il a dit: «Non, je préfère le régime libéral.»
* * *
[Traduction]
LES PÊCHES
M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les pêcheurs de la baie Miramichi sont en colère. Plus de 1 000 casiers sont actuellement immergés, et non pas 40. Plus d'un demi-million de livres de homard ont été récoltées. C'est plus de dix fois la limite autorisée par le ministre.
Il a cédé aux menaces et il a autorisé la pêche. Il a cédé aux menaces et il a refusé de faire enlever les casiers illégaux. C'est fini. Les petits jeux sont terminés. Le ministre a le dos au mur. Quand va-t-il s'acquitter de ses fonctions et faire enlever les casiers illégaux?
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, contrairement au député, nous estimons que c'est le dialogue et la collaboration qui nous permettront de régler ces problèmes.
C'est pourquoi nous avons conclu avec les premières nations 29 ententes qui donnent d'excellents résultats. Nous comptons sur les services d'un Canadien éminent, M. Bob Rae, qui travaille avec acharnement au rapprochement des parties.
Le parti d'en face veut diviser les Canadiens. Nous voulons rapprocher les Canadiens et résoudre les problèmes réels de la nation.
M. John Cummins (Delta—South Richmond, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les hésitations du ministre sont à l'origine du problème. La crise de la baie Miramichi a été créée par le ministre. Il était mal préparé à la décision Marshall. Il n'a pas tenu compte des éclaircissements qui y ont été apportés. Il a refusé de faire de la conservation sa priorité. Il a refusé d'appliquer la loi.
Va-t-il une fois pour toutes faire son travail, faire respecter la loi et voir à ce que soient enlevés les casiers illégaux?
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a pris un énorme engagement afin de veiller à ce que nous respections pleinement la décision de la Cour suprême, y allant d'un investissement initial de 160 millions de dollars pour que les autochtones participent pleinement à la pêche commerciale.
Cette mesure donne d'excellents résultats. Il reste deux bandes, soit celles d'Indian Brook et de Burnt Church. Nous cherchons à collaborer avec elles afin qu'elles puissent aussi participer pleinement à la pêche commerciale. Nous leur offrons des possibilités d'intégrer le secteur de la pêche, mais nous devons veiller à prendre tous les moyens possibles pour rapprocher les parties.
En bout de piste, je veux donner l'assurance au député que la loi du pays sera appliquée.
* * *
[Français]
LES JEUNES CONTREVENANTS
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, aujourd'hui, le gouvernement s'apprête à utiliser des moyens exceptionnels pour faire adopter à tout prix son projet de loi pour criminaliser des adolescents, et cela, malgré l'opposition de tous les intervenants au Québec.
Comment le gouvernement peut-il expliquer son empressement à mettre des enfants de 14 ans en prison, alors qu'il fait les gorges chaudes avec les droits et libertés des membres des groupes criminels affichés?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous l'avons dit à maintes reprises à la Chambre, la nouvelle loi sur le système de justice pour les adolescents insiste sur la reddition de comptes. Elle insiste sur la responsabilité et vise à assurer à des provinces telles que le Québec la flexibilité nécessaire pour poursuivre, de concert avec les jeunes, leurs programmes déjà existants.
Je pense qu'il y a lieu de signaler qu'aujourd'hui même la Commission des droits de la personne du Québec indique que son système de justice pour les adolescents est perfectible. Par conséquent, forte des nouvelles ressources fédérales, je suis impatiente de collaborer avec le député pour faire en sorte que, même au Québec, nous travaillions ensemble en faveur des jeunes de tout le Canada.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, je pense qu'il y a quelque chose que la ministre ne comprend pas dans ce dossier.
Comment la ministre peut-elle nous expliquer sa logique? Alors que tout le monde au Québec désire une loi antigang, la ministre hésite. Mais de l'autre côté, pour son projet de loi qui fait des jeunes adolescents des criminels, elle va de l'avant, elle est pressée. Elle fait cela en bafouant le consensus québécois.
Comment la ministre explique-t-elle sa logique, ce deux poids, deux mesures, dans le domaine de la justice?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a pas deux poids, deux mesures. Dans les deux cas, nous avons écouté et nous avons consulté, et non pas seulement la province et la population du Québec, mais toutes les provinces, tous les territoires et l'ensemble des gens du pays qui s'intéressent à cette question.
Permettez-moi de tendre, une fois de plus, le rameau d'olivier au député. Nous savons que le système de justice pour les adolescents du pays ne sert pas nos jeunes aussi bien qu'il le devrait. Je demande donc au député ainsi qu'à l'ensemble des députés à la Chambre de collaborer avec nous afin d'assurer l'adoption de la nouvelle loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
* * *
LES PÊCHES
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le 28 août, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien a déclaré ceci:
Mon collègue, le ministre des Pêches et des Océans, et moi-même jouons des rôles complémentaires afin de répondre aux attentes des Premières nations vivant sur la côte est [...]
Deux semaines plus tard, le ministre faisait la tournée d'un musée de la côte ouest, à 6 000 kilomètres de l'action. Monsieur le Président, je ne crois pas que le ministre des Affaires indiennes ait un rôle complémentaire ou autre à jouer.
Le premier ministre peut-il confirmer que le ministre des Affaires indiennes n'a aucun rôle à jouer dans le règlement de la crise de Burnt Church?
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je peux donner l'assurance au député que le ministre des Affaires indiennes et moi-même travaillons ensemble au règlement de la question des pêches autochtones sur la côte est à la suite de la décision de la Cour suprême.
Nous consacrons énormément d'énergie à la question des pêches et nous travaillons également ensemble à des questions à long terme. Le ministre a joué un rôle très actif lors du congrès sur la politique atlantique où ont été examinées dans une perspective à long terme les questions de droits issus de traités soulevés dans l'affaire Marshall. Nous pourrons présenter à l'automne un plan conjoint qui apporte des solutions aux questions à long terme. Nous continuerons notre collaboration.
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux que le ministre des Pêches et des Océans ait répondu à la place du premier ministre.
L'an dernier, le ministre des Affaires indiennes et du Nord a fait une déclaration spontanée sur les conséquences de la décision Marshall:
Tout droit de pêche reconnu dans la décision Marshall est étendu à d'autres ressources comme la forêt, le pétrole et le gaz.
J'aimerais que le premier ministre réponde à ma question. Est-ce que c'est ce genre de commentaires de la part du ministre qui est à l'origine de l'escalade à Burnt Church?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, ce sont les commentaires comme ceux du député qui expliquent pourquoi les peuples autochtones dressent des barricades afin de porter leurs doléances à l'attention du gouvernement. Ce sont les peurs inutilement créées par le député dans le dossier des droits des autochtones, et particulièrement des droits issus de traités.
Il est de notoriété publique que le gouvernement a offert aux premières nations du Canada atlantique la possibilité de discuter de toute les questions liées aux traités sans se limiter à la question de la pêche. Nous avons fait une offre. Nous sommes prêts et nous attendons que les premières nations et nos partenaires viennent s'asseoir à la table.
* * *
[Français]
LES SURPLUS BUDGÉTAIRES
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Finances s'apprête à annoncer les vrais résultats budgétaires pour le dernier exercice financier et admettre enfin qu'il a fait une erreur de prévision des surplus de 300 p. 100, du jamais vu au Canada.
Est-ce que le ministre des Finances va admettre que son refus de donner les vrais chiffres lorsqu'il fait ses prévisions n'est qu'une stratégie pour éviter les vrais débats et pour justifier les coupures sauvages aux programmes sociaux et à l'assurance-emploi, malgré des surplus considérables?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député doit savoir que je vais faire un énoncé demain, et c'est à ce moment-là que je vais donner les chiffres.
Je peux assurer le député que, oui, c'est bien vrai, les surplus seront plus importants que ce que nous avions prévu, et ça, c'est le vrai succès du Canada.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, justement, nous avions prévu le surplus à tout près de 12 milliards.
Pendant que le ministre des Finances prenait des décisions en se basant sur des prévisions erronées de 300 p. 100, les citoyens continuaient de payer trop d'impôt.
Est-ce que le ministre va admettre que cette erreur de prévision volontaire, hypocrite, a eu des conséquences...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Il faut être très judicieux dans le choix de nos mots.
M. Yvan Loubier: Est-ce que le ministre va admettre que cette erreur de prévision volontaire a eu des conséquences sociales importantes et que ce sont les malades et les chômeurs qui paient toujours pour son incompétence?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, si on a des surplus, c'est parce qu'on a une croissance économique tout à fait incroyable, que nous avons une excellente création d'emplois, et que cela va très bien au Canada.
Je comprends très bien que le député de l'opposition ne soit peut-être pas heureux, mais les Canadiens sont très heureux.
* * *
[Traduction]
LE CRIME ORGANISÉ
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier, le procureur général de l'Ontario a écrit à la ministre de la Justice. Il lui a dit notamment ceci: «De façon répétée, l'Ontario a exhorté le gouvernement fédéral à améliorer sa loi antigang. Je vous demande de présenter immédiatement les modifications qui s'imposent dans le Code criminel.»
Les modifications du Code criminel viendront-elles un peu plus rapidement que la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, que nous avons attendue pendant sept longues années?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je tiens tout d'abord, au nom des députés ministériels, à saluer le retour parmi nous du député de Langley—Abbotsford.
Pour répondre à la question du député, je dirai que j'ai discuté du crime organisé avec mon collègue, le procureur général de l'Ontario. Nous rencontrons aujourd'hui les représentants du procureur général et du ministre de la Sécurité publique du Québec. Nous aurons aussi des entretiens avec d'autres provinces et territoires.
J'ai déjà dit à la Chambre que nous serons en mesure d'apporter aux dispositions du Code criminel sur les gangs des modifications qui refléteront un grand nombre des préoccupations soulevées par le gouvernement du Québec, le gouvernement de l'Ontario, les forces policières...
Le Président: Le député de Langley—Abbotsford a la parole.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la difficulté, c'est que la ministre dit qu'elle va étudier la question et en discuter. Le problème ne date pas d'hier. Plus de 400 personnes sont mortes d'overdose à Toronto et à Vancouver l'an dernier seulement, et c'est la même chose depuis des années.
Quand la ministre de la Justice va-t-elle agir? Avant les élections, ou veut-elle que l'Alliance canadienne le fasse après les élections?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le Bloc québécois nous reproche d'aller trop vite dans le cas du système de justice pour les jeunes et l'Alliance nous reproche d'être trop lents. Au bout du compte, nous allons faire les choses comme elles doivent être faites.
Il est curieux qu'un parti attaché aux droits et à l'autonomie des provinces refuse de consulter les provinces et les territoires. De ce côté-ci de la Chambre, nous comprenons que la justice est une compétence partagée, et nous allons consulter avant de légiférer.
* * *
[Français]
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, la ministre du Développement des ressources humaines fait preuve d'une insensibilité inacceptable face aux travailleurs saisonniers et leurs familles, notamment quand elle déclare, et je cite:
Nous appliquerons graduellement les modifications des limites des régions de l'assurance-emploi sur les trois prochaines années, afin que les travailleurs de la région du Bas-Saint-Laurent—Côte-Nord puissent s'y adapter.
Quand la ministre déclare que les travailleurs devront s'adapter, est-ce qu'elle veut dire qu'elle condamne ces travailleurs à la pauvreté et à la misère?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, encore la semaine dernière, nous avons annoncé des mesures qui vont aider les travailleurs saisonniers à s'ajuster aux changements d'ici quatre ans.
Mais tous les niveaux de gouvernement doivent aussi travailler entre eux et avec le patronat afin de créer de nouveaux débouchés pour ces travailleurs.
Contrairement au Bloc, de ce côté-ci de la Chambre, nous voulons travailler avec le patronat afin d'améliorer la situation de ces travailleurs saisonniers.
* * *
[Traduction]
LA LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL
M. Gar Knutson (Elgin—Middlesex—London, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Environnement.
Les Canadiens sont préoccupés par la disparition des espèces et de leur habitat. Ils sont heureux de voir la présentation d'une mesure législative portant sur ce problème, mais ils ont encore beaucoup d'inquiétudes.
Étant donné que le comité permanent entendra bientôt des témoins ayant des points de vue très différents sur la meilleure façon de protéger les espèces en péril, le ministre peut-il nous garantir que les modifications qui seront proposées par le comité de l'environnement ne seront pas simplement rejetées du revers de la main, mais prises en considération par le gouvernement avec un esprit ouvert?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de garantir au député que les recommandations du comité et les témoignages qu'il entendra seront examinés très attentivement par le gouvernement.
Il va de soi que, tant que le projet de loi n'a pas passé l'étape de la deuxième lecture, où il en est actuellement, le comité ne peut amorcer ses travaux. Quand il les amorcera, qu'il aura entendu les témoins et qu'il présentera ses recommandations bien pensées, nous les examinerons soigneusement.
* * *
LE TRANSPORT DU GRAIN
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous sommes en pleine saison des moissons et les agriculteurs ont besoin de liquidités. Pour maximiser les recettes des céréaliers, le Canada doit vendre et exporter le plus de céréales possible au cours de la présente saison. Les querelles entre la Commission canadienne du blé, les entreprises céréalières et les compagnies de chemins de fer gênent le transport des céréales et ce sont les agriculteurs qui en paient le prix. L'industrie céréalière a demandé au gouvernement de nommer un médiateur pour tenter de régler les différends et les conflits.
Le ministre des Transports nommera-t-il aujourd'hui même un médiateur pour dénouer l'impasse?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, à la fin du mois d'août, les entreprises céréalières ont déclaré que, à leur avis, leurs négociations avec la Commission canadienne du blé, en étaient arrivées à une impasse. Bien qu'elles n'aient pas à ce moment-là précisé en quoi consistait l'impasse, le gouvernement leur a immédiatement demandé des détails. Les renseignements nous sont parvenus la semaine dernière. Leur position est actuellement analysée en profondeur et nous avons l'intention de leur répondre très bientôt.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, on ne saurait répondre assez tôt pour satisfaire aux besoins des agriculteurs. Ces désaccords pourraient mener à l'échec complet du système, comme ce fut le cas en 1993-1994 et en 1996-1997. Ces querelles ont terni la réputation du Canada en tant qu'exportateur fiable et a coûté en frais de surestaries et amendes des millions de dollars que les agriculteurs ont dû assumer.
Les auteurs des rapports Estey et Kroeger recommandaient que la commission du blé se retire des négociations entre les compagnies de chemins de fer et les entreprises céréalières. Pourtant, le ministre a décidé de ne pas tenir compte de ces recommandations.
Je répète, le ministre nommera-t-il un médiateur pour régler ce gâchis dont il est partiellement responsable?
L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, comme je viens de le dire, le ministre des Transports, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et moi-même transmettrons sous peu aux entreprises céréalières une réponse réfléchie et appropriée.
Je tiens à dire une chose à tous les intervenants du secteur du transport et de la manutention du grain. Ni les agriculteurs ni le gouvernement ne toléreront des comportements qui pourraient alourdir le fardeau des agriculteurs en ces temps difficiles.
* * *
LE LOGEMENT
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, tandis que le ministre des Finances se félicite d'avoir réalisé un énorme excédent budgétaire, des milliers de Canadiens, dont des enfants, n'auront d'autre endroit où aller ce soir que la rue et les refuges d'urgence.
Comment le ministre des Finances peut-il se réjouir d'avoir édifié cet énorme excédent au détriment de tant de Canadiens qui sont privés des choses essentielles à la vie, dont l'abri et le logement? Comment peut-il faire cela?
M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada a une stratégie pour remédier aux problèmes que la députée vient d'évoquer. La SCHL offre partout au Canada une assurance-prêt hypothécaire qui a permis d'assurer 376 000 unités de logement en 1999. Elle fournit environ 1,9 milliard de dollars par année en aide au logement à environ 640 000 ménages à faible revenu.
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, il est intéressant de voir que le gouvernement donne la même réponse toute faite niant la réalité de ce qui se passe. Le fait est que la crise des sans-abri s'aggrave, comme le montre l'appel lancé par les représentants des gouvernements provinciaux et municipaux qui se réunissent aujourd'hui à Fredericton.
Je veux revenir au ministre des Finances pour lui poser une question toute simple. Prendra-t-il les mesures qui s'imposent pour faire partager cette richesse avec les Canadiens sans abri et investira-t-il des fonds fédéraux dans un programme national de logement? Voilà ce qu'il faut faire.
M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, la députée a raison. Les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux responsables du logement se sont effectivement réunis aujourd'hui. En fait, j'ai ici leur communiqué conjoint dans lequel les ministres disent qu'ils ont discuté de la pénurie de logements locatifs à prix abordable et qu'ils ont convenu de travailler à un plan qui comporterait un programme commun de recherche ainsi que des consultations multisectorielles avec les parties intéressées afin d'examiner et de formuler des plans d'action en matière de logement social.
* * *
LES PÊCHES
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, le gouvernement actuel confirme qu'il n'a pas de plan B en cas d'échec des négociations à Burnt Church. Les gens qui vivent autour de la baie Miramichi ont droit à un plan. Quel est-il?
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (Vancouver-Sud—Burnaby, Lib.): Monsieur le Président, je passe mon temps à répéter que nous préférons négocier dans un esprit de collaboration. Dès le départ, j'ai dit que nous allions exiger le respect des lois. Les pêcheurs commerciaux ont été très actifs et leur point de vue a été pris en considération. Ils ont vraiment participé au travail de M. Rae. Ce dernier les rencontre donc pour veiller à ce que leurs opinions soient prises en compte. Nous suivrons la situation de très près. Nous allons veiller à réagir de telle sorte que la loi du pays soit observée.
Mme Angela Vautour (Beauséjour—Petitcodiac, PC): Monsieur le Président, dans 50 minutes, Bob Rae pourrait se retirer du processus de négociation. La tension atteint un point critique dans les collectivités de Neguac, Burnt Church et Baie-Sainte-Anne. Cela ne peut pas continuer. Le gouvernement n'était pas prêt pour la décision Marshall. Serait-il en train de nous dire aujourd'hui qu'il n'a pas de plan pour éviter toute confrontation dans les collectivités de Neguac, Baie-Sainte-Anne et Burnt Church? Il nous faut une réponse.
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (Vancouver-Sud—Burnaby, Lib.): Monsieur le Président, ce sont les députés du Parti conservateur qui ont dit que j'en faisais trop lorsque nous avons acheté des bateaux afin que les autochtones soient inclus. Les conservateurs ont dit que j'en faisais trop lorsque nous leur avons donné la formation. Les voilà maintenant qui disent que nous n'en faisons pas assez. Ils devraient se montrer constructifs au lieu d'essayer de diviser les Canadiens et d'envenimer la situation. Ils devraient rassembler les Canadiens et veiller à ce que le problème soit réglé au niveau de la collectivité. C'est précisément ce que nous faisons.
* * *
L'AGENCE CANADIENNE DE DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, bon nombre de Canadiens et d'ONG nous ont demandé de faire en sorte que l'ACDI s'assure que les populations vulnérables reçoivent l'aide dont elles ont besoin pour améliorer leur sort. Je sais que la ministre de la Coopération internationale a annoncé récemment un changement important dans les priorités de l'ACDI. La ministre pourrait-elle nous dire en quoi ce changement va aider les gens les plus vulnérables dans le monde entier?
L'hon. Maria Minna (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, le 5 septembre dernier, j'ai lancé un plan quinquennal pour renforcer le programme de l'ACDI dans quatre domaines clés: la santé et la nutrition, l'éducation, le VIH et le SIDA et la protection des enfants. L'augmentation sur cinq ans sera de 2,8 milliards de dollars. En fait, les programmes destinés à répondre aux besoins humains fondamentaux représenteront dorénavant 38 p. 100 plutôt que 19 p. 100 de l'ensemble des programmes.
J'ai fait cela pour m'assurer que nous utilisons l'argent dont nous disposons pour maximiser les répercussions sur le terrain, car ce sont des éléments fondamentaux du développement.
* * *
LE VIETNAM
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le gouvernement a envoyé des dizaines de millions de dollars au Vietnam soi-disant pour améliorer son système de justice, mais au printemps dernier, ce même système de justice a exécuté de façon injuste une citoyenne canadienne. Or, à peine cinq mois plus tard, le gouvernement est déjà en train de normaliser nos relations avec le Vietnam.
Pourquoi rétablissons-nous nos relations alors qu'il n'y a pas la moindre preuve que ce type de travestissement de la justice ne se reproduira pas?
L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Tout d'abord, permettez-moi de souhaiter la bienvenue au député dans son rôle important de porte-parole de l'opposition en la matière. Je voudrais dire que je promets de travailler en étroite collaboration avec lui pour récupérer le plus rapidement possible la politique étrangère de l'Alliance dans le bureau du sénateur de la Caroline du Nord.
Pour répondre à sa question, je signale au député que le Canada a pris des mesures très sévères au moment de l'exécution. C'était un événement tout à fait tragique. Nous avons insisté pour obtenir une série de réponses très claires comme le retour de la mère au Canada et la possibilité pour la police de Toronto d'envoyer des représentants sur place afin d'entreprendre des négociations sur le trafic de stupéfiants. Ces conditions ont maintenant été respectées. Nous n'avons pas rétabli des relations normales, mais nous avons commencé à communiquer et à dialoguer avec les Vietnamiens pour nous assurer que cela ne se reproduise plus.
* * *
[Français]
LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, 21 travailleuses de la coopérative Confection Haut de Gamme de Vanier, à Québec, ont réussi à monter leur entreprise avec l'aide de plusieurs intervenants, dont un agent du ministère du Développement des ressources humaines qui a jugé l'entreprise admissible au programme de création d'emplois.
Or, à la suite d'une erreur d'interprétation du ministère, la contribution prévue de 105 000 $ a été refusée.
La ministre est-elle prête à réviser la décision de son ministère afin de rendre justice à ces travailleuses et sauver les 21 emplois?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je vois que le député reconnaît que le gouvernement du Canada a un rôle à jouer dans les secteurs où nous voulons trouver des occasions d'emploi pour les citoyens canadiens. Je ne connais pas la situation précise dont il est question, mais je vais m'informer à ce sujet.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Environnement.
Les Britanno-Colombiens sont très préoccupés par la pollution de l'air, non seulement celle que produisent les bruyantes motoneiges nautiques, mais aussi la pollution massive que produirait l'éventuelle centrale électrique Sumas 2.
Étant donné les graves menaces pour la santé et l'environnement, ainsi que la pollution déjà présente dans la vallée du bas Fraser, le ministre va-t-il enfin se joindre aux collectivités locales et au gouvernement de la Colombie-Britannique pour s'opposer à l'ouverture de cette centrale? Plus précisément, va-t-il user des pouvoirs que lui confèrent la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et l'entente canado-américaine sur la qualité de l'air pour essayer d'empêcher la construction de cette désastreuse centrale électrique?
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le député n'est pas au fait des derniers développements. Le 2 mai, nous avons présenté au comité d'évaluation du site de l'État de Washington l'analyse de la proposition pour la centrale électrique Sumas 2. À cette date, nous avons fait état des lacunes du projet. Pour le moment, je crois savoir que nous attendons une réponse complète. Entre temps, nous avons aussi procédé à une étude sur la qualité de l'air, en collaboration avec la province de la Colombie-Britannique et le district régional de la région métropolitaine de Vancouver.
Le député doit se rappeler que ce qui menace avant tout la qualité de l'air, dans la vallée du Fraser, ce sont les gaz d'échappement des automobiles. De même, il ne doit pas oublier que le gouvernement provincial a autorisé deux autres centrales électriques dans le cadre de la même proposition qui portait sur la centrale Sumas...
Le Président: Le député de Fundy—Royal a la parole.
* * *
LA FISCALITÉ
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, de grâce, donnez-moi un répit en ce qui concerne la taxe sur le carburant! Le ministre des Finances réduira-t-il la taxe sur l'essence à faible teneur en soufre? Le ministre sait que, lorsque nous avons adopté de telles mesures à l'égard du plomb, le Canada s'est tourné plus rapidement vers les carburants sans plomb. Le ministre réduira-t-il la taxe sur l'essence à faible teneur en plomb afin d'améliorer l'environnement et la santé des êtres humains et de donner aux contribuables canadiens le répit qu'ils méritent à la pompe?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, en coopération avec le ministre de l'Environnement, nous examinons un certain nombre de solutions. En fait, le ministre de l'Environnement a été très clair quant à l'importance de l'essence à faible teneur en soufre au Canada. Nous continuerons d'examiner les options et nous prendrons une décision.
* * *
LES COMMUNICATIONS
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.
Le ministre de l'Industrie peut-il nous dire si le Bureau de la concurrence enquêtera sur les récentes acquisitions dans le domaine des médias, y compris l'acquisition par CanWest Global Communications des journaux du groupe Hollinger et d'autres actifs dans le domaine des médias, acquisitions qui pourraient entraîner une concentration massive du pouvoir dans ce secteur, au détriment de l'intérêt public dans les régions et à l'échelle du pays?
L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, cette transaction peut faire l'objet d'un examen aux termes de l'article 92 de la Loi sur la concurrence.
* * *
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le Président: Je signale aux députés la présence à notre tribune du très honorable Peter Mandelson, député et secrétaire d'État de l'Irlande du Nord.
Des voix: Bravo!
Le Président: Je signale aussi aux députés la présence à notre tribune de l'honorable Dato Haji Abdul Rahman, ministre de l'Industrie et des Ressources primaires de Brunéi.
Des voix: Bravo!
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES ADOLESCENTS
PROJET DE LOI C-3—MOTION D'ATTRIBUTION DE TEMPS
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je propose:
Que, relativement au projet de loi C-3, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, au plus dix autres heures soient accordées aux délibérations de ce projet de loi à l'étape du comité; et qu'à l'expiration du temps attribué à l'étape du comité, tel qu'indiqué dans cette motion, toutes délibérations devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne sur ce projet de loi soient interompues, s'il y a lieu, aux fins de cet ordre et, par la suite, toute question nécessaire pour disposer de cette étape du projet de loi soit mise aux voix immédiatement et successivement, sans plus ample débat ni amendement.
Le Président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le Président: À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le Président: Convoquez les députés.
(La motion, mise aux voix, est adoptée.)
Vote no 1386
POUR
Députés
Adams | Alcock | Anderson | Assad |
Assadourian | Augustine | Axworthy | Baker |
Bakopanos | Barnes | Beaumier | Bélair |
Bélanger | Bellemare | Bennett | Bertrand |
Bevilacqua | Blondin - Andrew | Bonwick | Boudria |
Bradshaw | Brown | Bryden | Bulte |
Caccia | Calder | Caplan | Catterall |
Cauchon | Chamberlain | Chan | Charbonneau |
Chrétien (Saint - Maurice) | Clouthier | Collenette | Comuzzi |
Cotler | Cullen | DeVillers | Dhaliwal |
Dion | Dromisky | Duhamel | Easter |
Eggleton | Folco | Fontana | Gallaway |
Godfrey | Goodale | Graham | Gray (Windsor West) |
Grose | Guarnieri | Harb | Harvard |
Hubbard | Ianno | Iftody | Jackson |
Jennings | Jordan | Karetak - Lindell | Karygiannis |
Keyes | Kilger (Stormont – Dundas – Charlottenburgh) | Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson |
Kraft Sloan | Lastewka | Lavigne | Lee |
Leung | Limoges | Lincoln | Longfield |
MacAulay | Mahoney | Malhi | Maloney |
Manley | Marleau | Martin (LaSalle – Émard) | McCormick |
McGuire | McKay (Scarborough East) | McLellan (Edmonton West) | McTeague |
McWhinney | Mifflin | Mills (Toronto – Danforth) | Minna |
Mitchell | Murray | Myers | Nault |
Normand | O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Pagtakhan |
Paradis | Parrish | Patry | Peric |
Peterson | Pettigrew | Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) |
Pillitteri | Pratt | Price | Proud |
Proulx | Provenzano | Redman | Reed |
Richardson | Robillard | Rock | Saada |
Scott (Fredericton) | Sekora | Serré | Sgro |
Shepherd | St. Denis | St - Jacques | St - Julien |
Steckle | Stewart (Brant) | Stewart (Northumberland) | Szabo |
Telegdi | Thibeault | Torsney | Ur |
Vanclief | Volpe | Wappel | Whelan |
Wilfert | Wood – 142 |
CONTRE
Députés
Abbott | Ablonczy | Alarie | Anders |
Asselin | Bachand (Richmond – Arthabaska) | Bachand (Saint - Jean) | Bellehumeur |
Benoit | Bergeron | Bigras | Blaikie |
Borotsik | Breitkreuz (Yorkton – Melville) | Brien | Cadman |
Canuel | Cardin | Casey | Casson |
Chatters | Chrétien (Frontenac – Mégantic) | Clark | Crête |
Cummins | Dalphond - Guiral | Davies | Day |
de Savoye | Debien | Desjarlais | Dockrill |
Doyle | Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière) | Dubé (Madawaska – Restigouche) | Duceppe |
Dumas | Duncan | Earle | Elley |
Epp | Fournier | Gagnon | Gauthier |
Gilmour | Girard - Bujold | Godin (Acadie – Bathurst) | Godin (Châteauguay) |
Goldring | Gouk | Grewal | Grey (Edmonton North) |
Gruending | Guay | Guimond | Hardy |
Harris | Harvey | Hearn | Herron |
Hill (Macleod) | Hill (Prince George – Peace River) | Hoeppner | Jaffer |
Johnston | Jones | Keddy (South Shore) | Kenney (Calgary Southeast) |
Konrad | Lalonde | Laurin | Lebel |
Loubier | Lowther | Lunn | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) |
Mancini | Marceau | Marchand | Mark |
Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Martin (Winnipeg Centre) | Mayfield | McDonough |
McNally | Ménard | Mercier | Meredith |
Mills (Red Deer) | Morrison | Muise | Nystrom |
Obhrai | Pankiw | Penson | Perron |
Picard (Drummond) | Plamondon | Proctor | Ramsay |
Reynolds | Riis | Ritz | Rocheleau |
Schmidt | Solberg | Stinson | Stoffer |
Strahl | Thompson (New Brunswick Southwest) | Thompson (Wild Rose) | Turp |
Vautour | Vellacott | Venne | Wasylycia - Leis |
Wayne | White (Langley – Abbotsford) | White (North Vancouver) | Williams – 120 |
«PAIRÉS»
Députés
Le Président: Je déclare la motion adoptée.
* * *
LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité, et de l'amendement.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, pour récapituler ce que j'étais en train de dire, nous vivons à une époque où les espèces n'ont jamais disparu à un rythme aussi effréné. En fait, nous connaissons en ce moment même la sixième vague d'extinction dans le monde. Les espèces en danger disparaissent à un rythme mille fois supérieur au rythme normal de l'extinction des espèces, au point que l'on recense aujourd'hui au Canada quelque 350 espèces qui sont susceptibles de cesser d'exister au moment où l'on se parle. La liste s'allonge de jour en jour.
La destruction de l'habitat est en fait la cause principale de l'extinction des espèces, principalement du fait de l'agriculture et de l'industrie, de l'utilisation de pesticides, des coupes à blanc et des pratiques de foresterie, sans compter la construction de l'infrastructure.
Comment protéger les habitats fragiles? Voilà le coeur du problème. Au lieu de présenter un projet de loi faible, en l'occurrence le projet de loi C-33, en fait la troisième tentative du gouvernement en ce sens, nous avons proposé au gouvernement d'envisager le problème avec pragmatisme. En fait, le secteur privé souhaite vivement coopérer avec le gouvernement, et nous aussi d'ailleurs, à l'élaboration d'un plan qui serait équitable non seulement pour les espèces en péril, mais aussi pour les propriétaires de biens fonciers et autres intéressés.
Nous pouvons y arriver par la participation. Il faut veiller à la bonne intendance de l'environnement. Des groupes peuvent travailler avec le gouvernement pour gérer volontairement ces habitats fragiles.
Si l'on doit retirer des terres à leur propriétaire ou en restreindre l'exploitation, il faut tout simplement le dédommager en le remboursant à la juste valeur marchande. Ce dédommagement doit être accordé à ceux qui perdent le bénéfice de leur propriété privée dont l'exploitation se trouve compromise. Nous devons aussi examiner les pratiques forestières et agricoles et trouver d'autres moyens d'arriver aux mêmes objectifs.
La protection de l'habitat est un élément important. L'inscription des espèces est également un élément important. Il est essentiel de faire l'inscription des espèces en voie de disparition selon des données purement scientifiques. Le gouvernement ne le fait pas dans le projet de loi actuel. Le Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada, un groupe de scientifiques, fait un excellent travail à ce chapitre. Il remettra au gouvernement une liste dressée selon une base scientifique des espèces qui sont menacées d'extinction. Le présent projet de loi devrait forcer le gouvernement à tenir compte des inscriptions faites par ce groupe et à suivre leur exemple en protégeant ces espèces.
Nous devons également faire appliquer la loi. Bon nombre de Canadiens seraient étonnés d'apprendre que notre pays est l'une des principales filières en ce qui a trait au trafic des produits reliés aux espèces menacées dans le monde entier. La raison en est que même si nous avons de très longues frontières, nous avons fait un excellent travail pour les protéger, autant pour les produits dérivés des espèces en voie de disparition que pour d'autres.
Parce que le gouvernement n'a pas appuyé nos valeureux employés des ports qui oeuvrent en première ligne, notre pays est maintenant reconnu comme un refuge pour ceux qui sont prêts à enfreindre la loi pour faire le trafic de ces produits dérivés.
En conséquence, de nombreuses espèces sont exterminées à l'échelle internationale, des tigres et autres grands félins jusqu'aux oiseaux sans oublier les plantes, et sont en passe de disparaître. Il est triste que dans un pays comme le nôtre, où il y a tant de régions sauvages et qui se vante d'être en faveur d'une législation sur la protection des espèces en danger, nous soyons incapables de produire une loi fédérale applicable et de faire notre part au niveau international.
Le 11 avril 2000, j'ai présenté le projet de loi C-475, qui porte sur la façon d'avoir un projet de loi efficace et pragmatique sur les espèces en danger. En gros, mon projet de loi ferait ceci: premièrement, il obligerait le gouvernement à protéger les espèces qui sont sur la liste du COSEPAC; les listes existent et les espèces déclarées en danger l'ont été sur la base de données scientifiques et non pour des raisons politiques.
Deuxièmement, il obligerait le gouvernement à travailler en collaboration avec les intervenants du secteur privé et avec les provinces pour protéger l'habitat. Ce n'est pas une option. Le gouvernement a l'obligation de protéger l'habitat, car s'il ne le fait pas, la disparition de ces espèces est assurée.
Troisièmement, il obligerait le gouvernement à travailler en collaboration avec les provinces pour rémunérer les propriétaires de terrains privés en fonction de leur valeur actuelle lorsqu'un accord négocié est impossible au lieu d'accorder tous les pouvoirs au ministre qui rémunérera les propriétaires de terrains privés en fonction du prix qu'ils en demandent.
Dernièrement, j'aimerais parler d'une expérience personnelle. La province sud-africaine de Kwazoulou-Natal constitue le meilleur modèle au monde pour ce qui est de protéger les espèces en danger. On y a sauvé des espèces comme le rhinocéros blanc, qui est passé de 24 sujets à plusieurs milliers en l'espace de 50 à 60 ans. On y est parvenu en confiant la gestion de ces espèces au secteur privé. On a convaincu les propriétaires terriens qu'ils tireraient plus d'argent de leurs terres en y pratiquant l'écotourisme, en chassant les animaux en trop, et en utilisant les terres à d'autres fins telles que la récolte responsable de plantes à usage médicinal.
En fin de compte, l'argent qu'on parvient à tirer de ces terres est non seulement réinvesti dans les programmes de conservation, mais également dans les régions avoisinantes afin d'aider la population. Il faut compter sur la collaboration des populations locales pour pouvoir protéger les habitats des espèces menacées. La meilleure façon d'obtenir leur appui est de leur prouver qu'elles bénéficieront directement des programmes de conservation.
Si l'on pense qu'il vous suffit de déclarer qu'il est bon de protéger les habitats, on échouera car les programmes de protection des espèces et de leurs habitats doivent malheureusement s'autofinancer pour survivre. Là où de tels programmes ont été appliqués dans la province de Kwazoulou-Natal, ils ont réussi à sauver de nombreux animaux et de nombreuses plantes de l'extinction. Ils ont également profité aux populations avoisinantes. Résultat: des animaux sauvés de l'extinction, un plus grand nombre d'habitats préservés, des espaces sauvages agrandis et une utilisation durable de ces régions à d'autres fins.
Tout cela a fait du Kwazoulou-Natal un leader mondial dans le domaine de la conservation. Permettez-moi d'assurer le ministre et le gouvernement de l'entière collaboration de notre parti dans ce dossier. Ils doivent toutefois proposer une mesure législative efficace qui protégera les habitats de la façon que je l'ai décrite. Il ne s'agit pas seulement de préserver le patrimoine qui nous a été légué, les espèces menacées de notre pays; il est aussi de notre devoir de préserver ce patrimoine pour pouvoir le léguer à nos enfants et à nos petits-enfants.
[Français]
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi C-33 qui traite des espèces en voie de disparition.
Je vois que le gouvernement fédéral se soucie beaucoup des espèces animales en voie de disparition. Malheureusement, il n'a pas eu les mêmes soucis pour l'espèce canadienne-française qui a été assimilée depuis 150 ans, tant et si bien qu'elle est passée de 50 p. 100 de la population canadienne à environ 25 p. 100.
Je sais que pour certains députés d'en face nouvellement arrivés au Canada, cela signifie très peu. Mais je peux dire à la dame qui me regarde avec des yeux charmants et grands ouverts, qu'effectivement, au Canada, si elle l'ignore, les francophones étaient aussi nombreux que les anglophones au moment de la Confédération.
Malheureusement, on voit que le gouvernement fédéral veut intervenir au niveau des espèces en voie de disparition pour leur donner la chance de croître, de se multiplier et de survivre, ce qu'il a, je le répète, toujours refusé aux Québécois, n'en déplaise à ma collègue.
Je crois que l'intention du projet de loi est bonne, sauf qu'on tombe ici dans le domaine du double emploi, de la double intervention, du chevauchement. Je pense qu'il aurait fallu—même le préambule du projet de loi le dit—que ce projet de loi instaure une consultation avec les provinces pour justement éviter ce double emploi.
Il y a, au Canada, six provinces, soit le Québec, l'Ontario, l'Alberta, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et la Saskatchewan, qui ont établi une loi et qui ont une liste qui a été dressée par des scientifiques et par les leurs gouvernements pour déterminer quelles sont chez eux les espèces en voie de disparition ou menacées.
Le gouvernement fédéral, avec ses gros souliers, va venir patauger ici dans un champ de compétence exclusif des provinces. Je sais que pour la députée qui criait tout à l'heure comme quelqu'un pris dans une clôture de broche, barbelée de surcroît, que ce genre de débat qu'on soulève souvent sur le respect des compétences législatives, c'est du chinois et que cela ne signifie pas grand-chose.
Quand on vient dire ici aux Communes, dans l'enceinte même du Parlement, que le droit constitutionnel et la Constitution, ce n'est rien, alors qu'il s'agit dans l'esprit des députés du Bloc québécois de la loi fondamentale qui régit les relations entre les provinces et les citoyens, c'est faire preuve d'un mépris qu'on n'aurait jamais imaginé des politiciens modernes.
La Constitution était la loi de notre pays. C'est ce que les Pères de la Confédération avaient bien voulu faire, soit de départager le pouvoir des uns du pouvoir des autres. On voulait donner au gouvernement fédéral les relations internationales, les postes, la défense nationale et le télégraphe, qui faisait en sorte que les communications étaient transmises d'une province à l'autre.
Cependant, de précédent en précédent, de transformation en transformation, en passant par les décisions judiciaires, surtout avec l'abolition des renvois au Conseil privé de Londres, c'est devenu la quintessence de la bouffonnerie.
La Cour suprême du Canada, qui a toujours penché du même bord, a commencé à établir des principes de droit constitutionnel et d'interprétation du droit constitutionnel, ce qui a fait qu'on s'est retrouvé avec une Constitution qui ne veut à peu près plus rien dire.
Je vous donne quelques exemples. Il y avait les articles 91 et 92, l'un concrétisant les pouvoirs du gouvernement fédéral, l'autre, ceux du gouvernement provincial. Eh bien là, la Cour suprême du Canada est arrivée avec toutes sortes de théories plus loufoques les unes que les autres, comme par exemple la théorie des champs inoccupés dans le domaine du droit successoral.
Pour un bon bout de temps, on a dit: «La province n'exerce pas sa compétence de percevoir des impôts en cas de décès dans le droit successoral.» C'est la théorie des champs inoccupés; donc, le fédéral peut venir empiéter dans ce domaine tant que le provincial en est absent. Mais c'était justement l'une des prérogatives de l'autorité de la province dans un domaine que de ne pas exercer, précisément, cette autorité.
Voyez comment on s'est conduit. On est sorti récemment avec l'arrêt qui venait traiter de l'empiétement du pouvoir fédéral dans celui des provinces, comme la propriété et les droits civils, notamment le droit successoral encore, avec le renvoi sur la Loi sur le contrôle des armes à feu. La Cour suprême du Canada vient encore d'élaborer une théorie nouvelle en disant: «Oui, le fédéral peut encore empiéter dans le domaine des compétences provinciales, lorsqu'il s'agit, par exemple, de sécurité publique.»
La construction des édifices en hauteur, cela a aussi une incidence sur la sécurité publique. Le transport, que ce soit les poids lourds, les camions, les bateaux, même tout simplement le transport terrestre, cela peut aussi avoir une incidence sur la sécurité publique. De fil en aiguille, on est en train de dépouiller les provinces de toutes les compétences qu'elles s'étaient pourtant réservées lorsqu'on a négocié cet Acte confédératif à la Conférence de Charlottetown, à partir de 1864.
On arrive aujourd'hui avec cette loi portant sur les espèces en voie de disparition. Les espaces où vivent ces espèces souvent en voie de disparition ou d'extinction, qu'il s'agisse de fonds quelconques ou de terres humides, tout cela relève souvent de la compétence provinciale.
Dans le projet de loi C-33, on dit souhaiter qu'il y ait une harmonisation, une entente entre les scientifiques des provinces et ceux du gouvernement fédéral. Malheureusement, dans les articles du projet de loi, on voit qu'on vient s'approprier, presque manu militari, proprio motus, un droit de chapeauter, de surveiller, un droit de préséance en faveur du gouvernement fédéral dans le domaine des espèces menacées.
C'est regrettable, parce que c'est encore un affrontement qui se dessine. Je vois la députée d'en face, une championne de l'affrontement; elle va certainement y participer, en venant nous dire qu'au Québec, on n'a pas le droit de regard sur nos propres ressources, sur nos habitats où vivent ces espèces en voie de disparition.
Je pense que la modération et la conciliation auraient eu bien meilleur goût dans ce domaine. Le gouvernement fédéral aurait dû établir, dans son projet de loi, qu'après consultation avec les provinces, on pouvait élaborer et établir une liste des espèces menacées, de concert avec les provinces.
M. Réal Ménard: Ils y sont allés ultra petita.
M. Ghislain Lebel: Je vois que mon ami, le député de Hochelaga—Maisonneuve, qui suit des cours de droit, le soir, est passablement avancé. Il me tient des propos latins. Il dit que cela a été accordé ultra petita.
On a demandé au gouvernement fédéral de s'impliquer, mais comme c'est son habitude, et comme le souligne le député de Hochelaga—Maisonneuve—qui est brillant et qui va réussir un cours de droit à faire rougir même la ministre de la Justice d'en face—il est allé au-delà de ce qu'on demandait, de ce qui était nécessaire pour exercer sa prérogative d'intervention dans le domaine des espèces menacées.
C'est regrettable. On va voir là dédoublement dans l'intervention, double intervention, double dépense, double ministère, tout l'appareil qui gravite autour. Le Bloc québécois ne peut souscrire à ce genre d'intervention. C'est pourquoi nous allons voter contre ce projet de loi.
Le président suppléant (M. McClelland): Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Burnaby—Douglas, Les affaires étrangères; et l'honorable député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, L'assurance-emploi.
[Traduction]
M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis ravi de vous entretenir du projet de loi C-33. C'est la troisième fois que le gouvernement présente un projet de loi sur les espèces en péril. J'étais porte-parole en matière d'environnement lorsque quelques-uns des autres projets de loi ont été présentés. Le dernier était tellement faible que même les simples députés ministériels n'ont pas pu l'appuyer. Celui-ci n'est guère mieux. Il semble que le gouvernement va tout de même le faire adopter précipitamment, ce qui est répréhensible.
Il semble que le gouvernement continue, comme d'habitude, à n'en faire qu'à sa tête, au lieu de parler de mesures volontaires et de tenter d'amener les gens à collaborer pour se doter d'une mesure législative efficace sur les espèces en péril. Le gouvernement a décidé de recourir à la manière forte.
Ce projet de loi prévoit des peines qui sont énoncées dans le Code criminel. Par exemple, un bûcheron s'exposera à un châtiment si, pendant qu'il abat un arbre, un oiseau ou une bestiole en péril se trouve sur les lieux. Si un agriculteur circule en tracteur dans un habitat quelconque ou si un propriétaire de ranch laisse ses vaches entrer dans un champ où poussent des plantes menacées, ils s'exposeront également à un châtiment et les peines infligées seront sévères.
Je me suis entretenu avec des gens qui ont dit que, s'ils découvrent une espèce en péril sur leurs terres, elle disparaîtra. Ils ne peuvent pas se permettre de laisser le gouvernement la voir, parce qu'il leur retirerait leurs terres sans les indemniser. Ils ne peuvent pas se le permettre. Ce serait regrettable.
Dans l'intérêt supérieur de tout le monde, je crois que nous le reconnaissons tous. Admettons, par exemple, que des espèces en péril se trouvent sur une parcelle de terre. Nous convenons tous qu'il faudrait garder cette parcelle. Cependant, il faudra indemniser équitablement son propriétaire. On ne peut s'attendre à ce qu'ils l'abandonnent tout simplement. Cette mesure législative précise que le gouvernement peut indemniser une personne, et non qu'il devra le faire. C'est tout à fait répréhensible et c'est pourquoi les gens sont, à juste titre, craintifs.
Cette mesure législative empiète également sur les compétences provinciales. Pendant la période des questions, il fut intéressant de voir la ministre de la Justice faire état de l'étendue des consultations du gouvernement avec les provinces. Le gouvernement n'a pas consulté les provinces. Ces dernières doivent être mêlées directement à ce dossier. Elles doivent avoir une mesure législative parallèle ou encore être partie à ce dossier. À l'heure actuelle, elles ne le sont pas.
Un aspect qui laisse à désirer est la façon de faire porter le nom d'une espèce sur la liste. Qu'en est-il des ours polaires, par exemple? Quel critère faut-il respecter pour qu'ils soient inscrits soit sur la liste des espèces en danger, soit sur la liste des espèces en péril? Un organisme scientifique doit être chargé d'établir ces critères. Le COSEPAC est cet organisme, et il peut effectuer un travail assez incroyable s'il dispose des critères voulus. La situation s'envenime lorsque les politiciens s'en mêlent.
Une espèce dont le nom ne sera jamais inscrit sur la liste des espèces en danger tant que les politiciens seront mêlés au dossier est la morue de l'Atlantique. Les députés savent que les stocks de morue ont beaucoup diminué. Ils sont très bas, et il ne devrait pas y avoir de pêche. Qu'arrive-t-il? Des élections sont déclenchées. Il y avait sur la côte est une industrie morutière qui était presque à l'agonie. C'est ce qui se produit lorsque les politiciens s'en mêlent.
Il faut une mesure législative sur les espèces en danger qui soit indépendante des politiciens. Elle doit reposer sur une base scientifique et être à l'abri des manipulations des politiciens.
J'étais dans le secteur forestier et j'ai exercé pendant 25 ans les fonctions d'expert-forestier avant d'entrer en politique. Un des enjeux qui existait au sud de la frontière, dans les États de Washington et de l'Oregon, mettait en cause la chouette tachetée. Les députés s'en rappellent. Toutefois, mais la chouette tachetée ne constituait l'enjeu. C'était simplement un véhicule dont se servaient les gens pour stopper l'exploitation forestière. C'était là l'enjeu.
Je ne sais pas comment on peut aborder cette question dans la loi, mais il faut une mesure législative qui servira à la protection des espèces et non à des fins de manipulation comme ce fut le cas pendant des années dans les États de Washington et de l'Oregon. Cela n'avait pas grand-chose à voir avec la chouette tachetée, mais beaucoup à voir avec l'arrêt de l'exploitation forestière.
Il faut également protéger l'habitat. Cela ne figure pas dans le projet de loi. Comment peut-on dire que l'on va protéger une espèce alors qu'on ne protégera pas l'endroit où elle vit? C'est insensé.
En résumé, le projet de loi présente de nombreuses lacunes, à tel point que je crois qu'il faut tout recommencer. Au cours de la période des questions, le ministre a dit qu'il préférait le voir renvoyer au comité. Le projet de loi me paraît tellement imparfait qu'il faut tout recommencer. Le comité de l'environnement aura du pain sur la planche.
Le projet de loi est tellement imparfait depuis le commencement que son orientation même doit être repensée. J'ai dit plus tôt que ce qui devait nous guider dans notre examen est de savoir si ce sera par des mesures de nature volontaire, en faisant travailler les gouvernements fédéral et provinciaux de concert avec les agriculteurs et avec les éleveurs, que la loi s'appliquera, ou si ce sera au moyen de l'appareil répressif de la justice pénale. La deuxième méthode ne marchera pas. Les gens passeront outre tout simplement.
Le projet de loi est mauvais, à tel point qu'il faut en reprendre la rédaction. Notre parti et mes électeurs n'appuient pas ce projet de loi.
[Français]
M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, la question des espèces sauvages en péril ou en voie de disparition est certainement importante. C'est une question qui mérite qu'on trouve des solutions, à la fois opérationnelles et respectueuses des arrangements constitutionnels qui prévalent entre les provinces et le gouvernement central.
Le problème avec le projet de loi que nous avons devant nous est que, sous divers aspects, les effets qu'il provoquera ne sont pas nécessairement ceux qu'on voudrait espérer. De surcroît, il entre de plain-pied dans des champs qui relèvent des juridictions provinciales.
Certains députés de la Chambre, et particulièrement ceux du gouvernement, ont l'impression que le gouvernement fédéral est le mieux placé pour décider de ce qui est bien et bon pour les citoyens, pour les ressources et pour la faune et la flore. Or, c'est mon expérience depuis que je siège à la Chambre, soit depuis 1994, de façon systématique, le gouvernement fédéral a démontré une incompétence notoire dans tous ces domaines.
Il ne suffit pas, pour régler le problème, de présenter à la Chambre un projet de loi prétendument pour protéger les espèces sauvages qui seraient menacées de disparition. Il faut d'abord et avant tout avoir une stratégie complète pour s'assurer que ce que la main droite veut faire ne sera pas défait par la main gauche.
Laissez-moi citer quelques exemples d'une main gauche qui est particulièrement gauche dans certains domaines. Vous me permettrez de rappeler à cette Chambre qu'il y a environ un an, le vérificateur général annonçait, à la suite d'un rapport qu'il déposait et aux recherches qu'il avait effectuées, qu'un bon nombre d'espèces sauvages, végétales et animales, avaient disparu des parcs nationaux, gérés, on le sait, par Parcs Canada.
Ce n'était pas un phénomène fortuit, ce n'était pas un accident de parcours, c'était une mauvaise gestion écologique qui était entrée dans les moeurs de Parcs Canada. Une commission a fait des recommandations, une nouvelle loi a été adoptée. On ne peut qu'espérer que cette situation ne se reproduira plus.
Tout cela pour illustrer que ce gouvernement fédéral, avec son projet de loi, ne propose rien qui garantisse les résultats recherchés. On a tout lieu de croire que ce projet de loi, en réalité, ne réglera rien, puisque bien souvent, les problèmes sont ailleurs.
Je vais citer un autre exemple d'un problème qui est ailleurs. Nous allons parler des organismes génétiquement modifiés. Il ne s'agit pas, en principe, de modifier génétiquement des plantes ou des organismes sauvages. Mais voici ce qui pourrait se passer et, à toutes fins pratiques, ce qui va se passer.
Laissez-moi rappeler à cette Chambre que toute l'évolution biologique de cette planète repose dans une grande mesure sur des mutations génétiques qui ont été orchestrées par la nature elle-même au moyen de croisements, particulièrement du croisement par la pollinisation. Qu'est-ce que ce croisement?
Tout le monde sait ce qu'est une plante, ce qu'est une fleur, et tout le monde sait qu'à un moment donné, la fleur possède un pollen qui va se déplacer et féconder une autre fleur, de manière à créer une graine qui poursuivra l'espèce. Je parle ici des végétaux, bien sûr.
Il arrive que des espèces voient leur pollen croisé. À ce moment-là, une nouvelle espèce vient au monde. C'est ce qui a créé la diversité qui nous entoure. La nature, par les choix sélectifs qu'elle a faits, a produit un équilibre qui nous permet de jouir d'un environnement qui, si on le protège bien, est sain.
Revenons aux organismes génétiquement modifiés. Je vais inventer une petite histoire d'horreur qui, dans le fond, n'est pas vraiment une invention. Des compagnies mettent actuellement sur le marché des graminées. Le cultivateur, le fermier plante les graines, elles vont germer et produire leurs fruits. Mais si le fruit peut être consommé, il ne peut pas se répliquer, la graine est stérile.
J'aime mieux ne pas penser à ce qui pourrait se passer si cette caractéristique de stérilité était, d'une façon ou d'une autre, transmise ou acquise par une autre espèce, sauvage celle-là, une graminée sauvage. On verrait à ce moment-là cette espèce, tranquillement, arrêter de se reproduire au fur et à mesure que les pollens transmettraient cette caractéristique. C'est peu probable, me direz-vous. Dans la nature, il n'y a rien qui soit totalement improbable.
La stricte preuve de notre présence en tant qu'être humain est une démonstration radicale de cette capacité qu'a la nature de produire des choses d'une extrême improbabilité. À jouer avec les organismes génétiquement modifiés, il n'est pas évident que nous ne produirons pas des résultats à la fois inattendus et malheureux.
Je vais parler du saumon. Il est une espèce de saumon génétiquement modifiée qui a une capacité de croissance redoutable. Il devient rapidement un gros saumon. Ce saumon, bien sûr, est conservé dans des piscicultures. Tant et aussi longtemps qu'il est conservé à l'intérieur de son bassin, il n'a aucune chance d'aller se reproduire à l'extérieur, dans nos cours d'eau ou dans les océans. Il est toutefois arrivé de nombreuses fois que des poissons s'échappent des piscicultures et aillent dans la nature. Je ne verrais pas pourquoi le saumon génétiquement modifié aurait le privilège de ne jamais pouvoir s'échapper comme tant d'autres l'ont fait.
Le jour où ce saumon s'échappera et se reproduira dans la nature, compte tenu de sa capacité extraordinaire à croître rapidement et à être plus gros que les autres, il va, comme le dit le dicton, manger les plus petits poissons, les plus petits saumons et, éventuellement, éliminer de la carte de la planète les saumons sauvages que l'on connaît, les remplaçant par ce saumon génétiquement modifié.
Le gouvernement n'agit pas de façon responsable pour protéger notre environnement. Ce n'est pas ce projet de loi qui va changer le cours des choses. Il y aurait d'autres mesures bien plus importantes à prendre.
Je termine en donnant l'exemple d'un organisme qui n'est pas issu d'une loi du type de celle qu'on nous présente, mais qui a fait des miracles pour préserver notre environnement sauvage. C'est un organisme présent partout en Amérique, et qui l'est dans mon comté, je parle de Canards Illimités. Cet organisme pose des gestes positifs qui permettent de protéger des habitats, des environnements et des espèces. Ce sont des gestes qui pourraient être aidés et appuyés sur une plus large échelle, plutôt que de nous proposer un projet de loi qui, à toutes fins pratiques, va choquer tout le monde et ne va évidemment pas livrer les résultats qu'on en attend. Le gouvernement devrait retirer ce projet de loi.
[Traduction]
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir, au nom de mes électeurs de Calgary-Est, dans le débat sur le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada
Le projet de loi a pour titre Loi sur les espèces en péril. Il n'y a pas un Canadien qui refuserait de faire quelque chose pour corriger la situation des espèces menacées de disparition. Dans ma circonscription, un grand nombre d'électeurs m'ont écrit pour me faire part de leur inquiétude à cet égard et me demander d'appuyer ce projet de loi. Pourquoi? Parce que le terme «Espèces en péril» leur rappelle qu'ils risquent de perdre une espèce. Les Canadiens s'y opposent et ils voudraient que l'on prenne des mesures pour corriger la situation. Quand des électeurs m'écrivent, c'est au député qu'ils s'adressent pour qu'il agisse.
Je viens de Calgary, qui est très près d'un des plus beaux parcs nationaux au monde: le parc national Banff. La vie sauvage qu'on y trouve et la nature sont très précieuses pour les Albertains, ainsi que pour tous les Canadiens. Les gens ont goûté aux joies que la nature et les bêtes leur procurent, de là leur intérêt pour la question.
J'ai grandi dans un pays qui a certains des plus beaux parcs nationaux au monde, notamment le cratère du Ngorongoro et le parc national du Serengeti. Au fil des ans, j'ai vu le déclin des espèces sauvages qui vivaient dans ces parcs nationaux. Je trouve désolant de voir que des espèces qui y erraient en grands nombres sont aujourd'hui sur la liste des espèces en péril. Bien des raisons expliquent ce fait, mais au premier chef, il y a la disparition d'habitat due à la chasse, au braconnage et à d'autres activités illégales.
L'humanité devrait avoir honte d'être responsable de la disparition d'espèces. De nombreuses espèces sur la planète, même dans la forêt amazonienne, sont en danger pour les raisons que j'ai mentionnées et il faut se demander ce qu'on devrait faire.
Au Canada, la question a été soulevé car la liste des espèces en voie de disparition est longue et les Canadiens aimeraient que l'on prenne des mesures à cet égard. Naturellement, ils ont eu le sentiment qu'ils devaient approuver le projet de loi sur les espèces en péril lorsque celui-ci a été présenté.
En principe, je ne crois pas qu'un seul député à la Chambre pourrait être en désaccord avec le projet de loi qui affirme que les espèces sont en péril. Cependant, comme mes collègues l'ont indiqué plus tôt, l'Alliance canadienne a du mal à accepter ce projet de loi, non pas à cause de son objectif, mais à cause de son libellé. Nous aimerions que notre position soit limpide. Nous ne nous opposons pas au projet de loi pour des raisons futiles, je tiens à le préciser. Nous approuvons l'objectif du projet de loi qui vise à protéger les espèces en péril. Nous croyons cependant qu'il existe une façon différente de parvenir à cette fin, qui n'est pas ce que le gouvernement propose dans cette mesure législative.
Permettez-moi de souligner certains points. Le principal, c'est que le projet de loi donne au gouvernement le pouvoir d'exproprier des terres. Il pourrait aussi éventuellement autoriser le gouvernement à porter des accusations criminelles contre des propriétaires fonciers privés.
Essentiellement, au lieu d'adopter une attitude de coopération, le gouvernement a déterminé que pour protéger les espèces il pouvait fouler au pied d'autres droits. Le problème que pose ce projet de loi, c'est que le gouvernement a essayé de faire quelque chose, mais que, ce faisant, il a ajouté à l'objectif original certaines autres mesures qui créent une situation inacceptable pour certaines personnes qui s'opposent au projet de loi.
On constate le même phénomène dans le cas du projet de loi C-68. Nous approuvons l'objet du projet de loi C-68, qui est de tenir les armes à feu loin des criminels. Toutefois, la mesure qu'a présentée le gouvernement va faire des délinquants potentiels de citoyens ordinaires respectueux de la loi. Telle est la grave lacune du projet de loi C-33. C'est comme avec le projet de loi C-68.
Le gouvernement va exproprier les terres. Il va venir dire aux propriétaires fonciers qu'il a besoin de prendre leurs terres afin de protéger les espèces sans préciser comment il va les dédommager. Il n'est dit nulle part dans le projet de loi comment le gouvernement va exproprier ces terres. Que va-t-il offrir en échange? Va-t-il payer ces terres à leur juste valeur marchande?
Dans notre pays, le droit à la propriété est un droit fondamental. Conformément à la Constitution, nous avons le droit d'être propriétaires. Avec ce projet de loi, toutefois, le gouvernement reconnaît le droit à la propriété, mais se permet d'exproprier celle-ci. Le projet de loi s'arrête là. Il ne parle d'aucune méthode d'indemnisation juste. Cela crée un problème, car, au bout du compte, les propriétaires fonciers n'auront peut-être pas envie de collaborer parce qu'ils voudront garder leurs terres.
Le projet de loi comporte une grave lacune. Nous voudrions l'adopter mais notre porte-parole et nous avons l'intention d'y proposer des amendements. J'espère que le gouvernement écoutera les Canadiens et modifiera le projet de loi de telle sorte qu'il soit acceptable pour tous.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens aujourd'hui, à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.
Nous savons tous que le développement industriel de nos sociétés a entraîné, et continue d'entraîner des conséquences désastreuses et souvent irréversibles sur notre environnement.
Depuis le début du XXe siècle particulièrement, nombre d'espèces, tant végétales qu'animales, ont disparu. Mais ce n'est que depuis quelques décennies que la nécessité de protéger notre environnement et de préserver notre patrimoine environnemental est devenue une réalité concrète, exigeant des gouvernements la mise en place de mesures législatives appropriées.
Comme on le sait, je suis députée d'une circonscription urbaine, Laval étant la deuxième ville en importance au Québec. Suite à l'initiative de citoyens sensibilisés à l'importance de la protection de la diversité de notre faune et de notre flore—et il me fait plaisir de saluer ici le sens visionnaire et l'exceptionnelle ténacité de Jean Lauzon et de Michel Aubé dans ce domaine—un organisme de ma circonscription, Éco-Nature, a multiplié les efforts pour préserver les caractéristiques fauniques de la rivière des Mille-Îles. De concert avec le ministère de l'Environnement et de la Faune du Québec, Éco-Nature contribue, depuis plus de 15 ans, grandement à la protection des espèces menacées.
Cette partie de la grande région de Montréal est déjà fortement urbanisée et ce développement s'intensifie. Alors qu'environ 75 p. 100 des berges de la rive nord de la rivière des Mille-Îles sont urbanisées, à Laval, de l'autre côté de la rivière, c'est 65 p. 100 des berges qui le sont. Évidemment, ce qui reste comme milieu relativement intact doit faire l'objet de protection.
Le parc de la rivière des Mille-Îles compte ainsi, depuis 1998, une dizaine d'îles ayant le statut de refuge faunique. Le parc de la rivière des Mille-Îles, c'est un environnement protégé en plein coeur de la grande région métropolitaine. Il reçoit plusieurs dizaines de milliers de personnes chaque année.
Grâce à la motivation et à la compétence de nombreux naturalistes, les jeunes et les moins jeunes renouent connaissance avec les habitats des tortues, celui des grands hérons appelés aussi hérons bleus. Ils découvrent les barrages de castors, des essences de feuillus presque introuvables ailleurs, et tout cela, dans un cadre idyllique, quelle que soit la saison.
C'est un exemple de ce qu'une législation comme celle du Québec sur la protection des espèces menacées peut produire comme résultat.
J'ai mentionné, il y a quelques instants, le ministère de l'Environnement et de la Faune du Québec. Il me faut maintenant dire que ce ministère a, depuis 1989, comme outil de protection la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables, ainsi que la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune.
Au Québec, ces outils législatifs servent à identifier les espèces en péril, à les désigner légalement comme espèces menacées ou vulnérables, à protéger leur milieu et à élaborer la mise en oeuvre de plans de rétablissement afin de protéger adéquatement les espèces et les habitats dont la situation est précaire.
On peut alors se demander le pourquoi d'une mesure législative fédérale. Qu'est-ce que cette loi va apporter de plus aux mesures législatives déjà en place au Québec? Rien.
Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que le gouvernement fédéral tente une incursion législative en ce domaine. Voici donc un bref historique de ce projet de loi.
C'est en 1995 que le ministre de l'Environnement de l'époque, devenu aujourd'hui ministre du Patrimoine canadien, annonçait son intention de légiférer dans le domaine des espèces menacées. Son projet de loi a suscité un tollé unanime, tant chez les gouvernements provinciaux que chez les groupes environnementaux.
Un an plus tard, son successeur a convoqué les ministres de l'Environnement des provinces à une rencontre. La date était le 2 octobre 1996—il y aura bientôt quatre ans—et l'endroit était à Charlottetown, une ville mythique quand on parle d'accord. Que les ministres de l'Environnement en viennent à un accord de principe concernant les espèces menacées, c'était un souhait. C'est donc l'Accord pour la protection des espèces en péril.
Pourtant, lors du dépôt du projet de loi C-65, qui est en quelque sorte l'ancêtre du projet de loi actuel que nous avons devant nous, le ministre de l'Environnement du Québec et ministre régional de Laval, mon ami David Cliche, constatait avec justesse que le projet de loi du gouvernement fédéral ne reflétait pas complètement l'accord intervenu.
Comme d'habitude, le gouvernement fédéral proclame la nécessité de collaboration entre les paliers de gouvernement, mais comme d'habitude, quand vient le temps d'agir, il ne connaît ni n'applique qu'une seule façon: entrer de plain-pied dans les champs de compétence des provinces. Dans une lettre datée du 2 décembre 1996, le ministre de l'Environnement du Québec faisait remarquer à son vis-à-vis fédéral, et je cite:
Il n'a jamais été accepté non plus que la conclusion d'un traité par le Canada modifiait la répartition des compétences et attribuait au gouvernement fédéral la compétence exclusive pour mettre en oeuvre l'objet du traité.
Au nom de la conservation des espèces en péril, le projet de loi veut, en fait, réécrire ou réinterpréter la Constitution canadienne et la répartition des pouvoirs qu'elle accorde à chaque ordre de gouvernement.
À cette époque, le Bloc s'était opposé à ce projet de loi en raison de son caractère d'intrusion dans les champs de compétence des provinces.
Le projet de loi C-65 est mort au Feuilleton en avril 1997, lors du déclenchement des élections.
Le projet de loi C-33 est pratiquement la copie conforme du défunt projet de loi C-65. Avec le même climat préélectoral en prime, on peut même se demander si ce projet de loi ne mourra pas lui aussi au Feuilleton pour des raisons électorales.
Ce projet de loi fait fi des juridictions des provinces et il ne tient compte d'aucune façon des lois existantes comme, par exemple, celles en vigueur au Québec. C'est encore un nouveau dédoublement inutile dans un champ où le gouvernement du Québec a fait ses preuves. Pour illustrer ces intrusions, mentionnons que le paragraphe 34(2) prévoit que:
(2) Sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil peut, par décret, prévoir l'application des articles 32 et 33 dans une province ailleurs que sur le territoire domanial.
Par territoire domanial, on entend les terres de la Couronne fédérale. La volonté est claire, les interdictions prévues aux articles 32 et 33 de la loi pourront s'appliquer sur des terres de juridiction provinciale sur simple décret du ministre.
De plus, si le ministre estime que les lois d'une province ne protègent pas suffisamment une espèce donnée, le ministre peut recommander au gouverneur en conseil la prise d'un décret en ce sens. Si ce n'est pas là de l'ingérence dans la façon dont les provinces s'acquittent de leurs responsabilités au chapitre de la protection de l'environnement, je me demande ce que c'est.
Nous comprenons tous que la protection de l'environnement et plus particulièrement des espèces menacées est un enjeu important. Mais le gouvernement fédéral ne peut agir dans ce domaine en niant le rôle que les provinces y jouent déjà. Comme le précisait l'actuel ministre de l'Environnement du Québec, Paul Bégin:
Le Québec a toujours agi de façon responsable et adéquate dans le domaine de la protection de ses espèces floriatiques et fauniques les plus fragiles et il entend continuer à assumer sa juridiction en cette matière. En aucun moment nous n'accepterons une législation parapluie couvrant l'ensemble des actions dans ce domaine.
Le projet de loi C-33 ne fait que dédoubler ce que certaines provinces comme le Québec font déjà au lieu d'harmoniser ce que chacun des paliers de gouvernement pourrait faire dans son domaine de compétence. Mais nous savons tous aussi que c'est hélas la façon de faire du gouvernement fédéral. Croire que le fédéralisme tempéré, le fédéralisme respectueux des compétences est à nos portes, c'est une illusion qui ne bernera ni le Québec, ni les Québécois, ni les Québécoises.
[Traduction]
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, parce que je suis un amoureux du plein air et que je passe beaucoup de temps dans la nature, cette question m'intéresse particulièrement et c'est dans cette optique que je vais l'aborder.
Je passe beaucoup de temps dans la nature. J'ai fait de la randonnée, de l'escalade, de la chasse et de la pêche dans des coins où la présence humaine s'est faite rare. Je crois qu'il est dans l'intérêt public des Canadiens de protéger les espèces en péril et je pense que c'est nécessaire. C'est certainement le cas dans ma circonscription, qui s'étend de Calgary jusqu'à la frontière américaine et des montagnes jusqu'à l'extrémité sud-ouest de l'Alberta.
Je vais vous donner l'exemple d'un grand éleveur, d'un propriétaire foncier qui, à mon avis, est représentatif du point de vue des habitants de l'Ouest sur cette question. Cet homme vit à l'ouest de High River. Il s'appelle Francis Gardiner. C'est un exploitant de ranch grand et maigre, un gars qui porte un chapeau et des bottes de cow-boy. Si vous le croisiez dans le rue, vous ne lui marcheriez pas sur les pieds. Pourtant, c'est un être qui a un coeur tendre lorsqu'il est question des espèces en péril.
Il possède une bande de terres de contreforts immense et magnifique, une bande de terres au paysage très diversifié. Des castors, des chevreuils et des orignaux vivent dans les collines à l'ouest. Il y a des cerfs de Virginie et des cerfs mulets dans ses prairies. Sa famille et lui sont installés là depuis longtemps.
On a reconnu une partie du travail qu'il a accompli pour les espèces en péril. Il a essayé de privilégier une intendance de l'environnement très naturelle sur ses terres. Il s'agit de terres cédées et visées par des revendications, mais il se considère l'intendant de ces terres.
Autrefois, des incendies ravageaient régulièrement la région. Les feux réglaient le problème des broussailles. Il n'y a pas eu de feux dernièrement. Nous sommes efficaces pour prévenir les incendies. Nous prenons des mesures de prévention des incendies là-bas, de sorte qu'il a introduit des animaux qui se nourrissent d'une partie de la végétation, afin de sauvegarder les prairies parce que la diversité l'exige. Ses terres auraient été envahies par les broussailles. Faire venir un bulldozer pour enlever les broussailles, détruisant du même coup les plantes herbacées, est contraire à ses principes. Cela peut sembler bizarre, mais pendant certaines périodes de l'année, il fait venir des chèvres pour manger la végétation et préserver les prairies. Les prairies constituent l'habitat naturel d'espèces susceptibles d'être déplacées.
À mon avis, Francis Gardiner est un gardien de la terre. L'a-t-on forcé à le faire? A-t-on adopté une loi pour le forcer à le faire? Non. Il l'a fait de son propre chef et avec enthousiasme. Je le répète, la contribution de cet homme a été soulignée. Et une partie de cette reconnaissance vient tout juste de lui être accordée à la Chambre.
Une autre chose qui n'est pas mentionnée souvent, c'est que les espèces ne sont pas statiques. Elles se déplacent. Dans ma région du pays, nous n'avions jamais vu de ratons laveurs. Or, il y a quelques années, ces animaux ont fait leur apparition chez nous. La présence des ratons laveurs a eu des répercussions sur d'autres espèces comme les faisans. J'aime bien les faisans, mais l'arrivée des ratons laveurs a eu des effets sur eux. Il y a donc de l'activité entre les espèces. Je pense que nous ne nous en rendons pas toujours compte.
J'estime que nombre de gens ont des intérêts communs. J'ai dit que je me considérais comme un adepte des activités de plein air. Je crois que j'ai les mêmes intérêts qu'un entrepreneur qui veut exploiter la forêt de façon durable. J'estime que, si tous les intéressés ne s'occupent pas de certaines de ces espèces, ils ne pourront plus exercer leur activité et il n'y aura pas de récolte. Évidemment, l'exploitation forestière, si elle est bien faite, se traduira par la pousse d'une nouvelle forêt qui servira de refuge à des espèces parfois en péril.
La coopération est le mot clé. Je n'entends pas critiquer le projet de loi comme tel, mais je ne crois pas que la collaboration y soit particulièrement valorisée. Je pense ici à une collaboration avec quelqu'un comme Francis Gardiner, par exemple. Il est évident que si une espèce en péril vit sur sa propriété, et qu'on lui en donne la possibilité, il fera tout ce qu'il peut pour empêcher que cette espèce disparaisse. S'il lui est impossible d'en faire suffisamment—souvenez-vous que j'ai dit que c'était pour le bien de la société—et que l'on détermine que ses terres doivent lui être retirées, que ce soit en lui interdisant de les utiliser, en les lui achetant ou même en l'expropriant, s'il n'obtient pas une indemnisation correspondant à la juste valeur marchande de ses terres on transformera ce gardien de la terre en un ennemi de l'espèce en péril.
Il y a une chose que j'exhorte mes vis-à-vis à accepter et c'est la modification de la disposition où on dit qu'une indemnité peut être versée. Une indemnité doit être versée. Je ne saurais trop insister sur le fait que l'usage qui est fait des terres n'a aucune importance dès que le bien public exige qu'elles soient retirées à l'agriculteur, à l'éleveur de bétail ou au promoteur qui veut construire un immeuble à logements en ville—et même si ce ne sont que des pâturages.
J'ai des vis-à-vis qui ont des oeillères et prétendent que les espèces en péril sont tout ce qui importe. Ils savent pourtant que, dans d'autres pays, dès qu'une espèce menacée est découverte, on se hâte d'imposer le silence sur cette découverte, d'exterminer cette espèce en catimini et d'en faire disparaître les carcasses. Selon moi, cette attitude va complètement à l'encontre de ce que feraient les gardiens de la terre s'ils avaient l'impression d'être traités décemment.
Le processus scientifique est important lorsqu'il est question d'espèces en péril. Nous avons un groupe assez large qui doit décider quelles espèces doivent être protégées. Ce groupe devrait également examiner la façon de protéger l'habitat. Il devrait aussi établir le coût pour la collectivité dans son ensemble de la protection des espèces en péril et voir à quel moment les chiffres nous permettent de cesser d'appliquer ce programme propre à cette espèce en péril.
On a obtenu des succès remarquables. Le Canada a eu un rôle à jouer dans certains d'entre eux. Je pense à la grue blanche. Nous connaissions le nombre de ces oiseaux dans le monde, mais nous ignorions où ils nichaient ni où leur migration les conduisait. Au début de nos efforts de conservation, nous avons utilisé des méthodes de localisation qui étaient plutôt primitives par rapport à celles d'aujourd'hui. Nous avons également capturé et élevé en captivité certaines de ces grues blanches avant de les relâcher dans la nature. C'est un exemple de réussite qui est le fruit d'une certaine collaboration.
Heureusement, la grue blanche n'avait pas un impact important sur les propriétaires fonciers, car elle nichait très loin au nord, là où les effets étaient très faibles. En fait, cela se résumait simplement à des grues tuées de façon accidentelle et à des activités gênant les mouvements migratoires de cet oiseau.
Il y a de l'espoir pour les espèces en péril. Les gens sont maintenant sensibilisés à la question. L'Alliance va s'opposer vigoureusement à certains des principes de ce projet de loi, surtout à l'indemnisation insuffisante prévue. Si le gouvernement pense pouvoir régler cette question par règlement, il se trompe grandement, car il ne pourra plus compter alors sur la bonne volonté de beaucoup de personnes, chose certaine dans ma circonscription de Macleod.
Les sanctions criminelles prévues nuisent extrêmement à la coopération que je crois nécessaire. On devrait encourager les gens à être de bons fiduciaires des terrains et leur accorder la reconnaissance qu'ils méritent. Nous procéderions ainsi. Si on doit exproprier des terres dans l'intérêt public, on doit alors prévoir une indemnisation équitable.
Je pourrais parler bien longtemps sur ce projet de loi. Il est important pour des gens comme moi et les habitants de ma région du pays. C'est un privilège de parler brièvement de cette question. J'encourage le gouvernement à se pencher sur la question de l'indemnisation, car c'est certes là où le projet de loi va échouer.
[Français]
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole en ce début de session de septembre 2000. Vous me permettrez d'offrir mes félicitations aux deux nouveaux chefs qui ont été élus et qui ont été présentés à la Chambre aujourd'hui.
Ils ont été élus avec une majorité assez forte; ils représentent donc un courant d'opinions important au Canada de l'est et de l'ouest. Il sera important qu'ils fassent connaître leur point de vue et que des débats animés, mais respectueux cependant de chacune des personnes qui siège ici, s'effectuent au cours de la session qui vient. Je pense que la venue de ces deux chefs dans ces deux comtés différents de l'est et de l'ouest fera en sorte que le gouvernement pourra peut-être, à certains moments, comprendre qu'il va dans la mauvaise direction dans bien des domaines.
On le sait, au niveau économique, il y a une grande demande en ce qui regarde une nouvelle réflexion quant à l'impôt des particuliers et ceux de la classe moyenne. Également, au niveau économique, ce gouvernement prend des orientations qui ne vont pas du tout dans le sens des intérêts des Canadiens et des Québécois.
Dans le domaine de la santé, il y a eu une entente qui a pourtant été difficilement arrachée par les provinces, à tel point qu'aujourd'hui, on pouvait lire dans les journaux qu'on cherchait encore des poux, du côté fédéral, pour dire que cette entente ne dit pas ce qu'elle devrait. Pourtant, on aurait simplement pu, comme le demandait l'opposition depuis longtemps, revenir aux crédits accordés depuis 1994, et le problème aurait été réglé.
On a vu ce gouvernement dans le domaine des arts, dans celui de la santé, comme je viens de le dire, et dans plusieurs autres domaines, agir continuellement de façon maladroite. J'espère que ces nouvelles forces qui sont arrivées ici à la Chambre laisseront voir au gouvernement qu'il a à faire une nouvelle réflexion sur ses législations. Une de ses réflexions devrait justement porter sur le projet de loi qu'il présente, c'est-à-dire la Loi concernant les espèces en péril.
Encore là, malhabilement, il s'ingère dans des juridictions provinciales. Nous, comme députés du Québec, sommes principalement touchés, parce que nous savons à quel point le gouvernement du Québec, depuis 1989 surtout, a fait des efforts remarquables, justement pour pouvoir protéger ces espèces, réclamer des changements de zonage dans certains coins, réclamer également des changements dans le domaine environnemental pour protéger certaines rivières contre des rejets de liquides non bienvenus.
Tout cela a fait en sorte que la législation québécoise sert très bien les espèces en voie de disparition et sert très bien le monde environnemental qui s'en dit très satisfait. Bien sûr, ils veulent plus, bien sûr, ils attendent plus, mais ils ont une juridiction, un endroit où revendiquer.
Le gouvernement fédéral a un coin pour agir, s'il le veut, pour les espèces qui ne sont pas de sa juridiction. Encore une fois, pourquoi ce gouvernement met-il ses grands sabots dans la cour des provinces? C'est une maladie qu'a le chef de ce parti, et il l'a communiquée à tout son parti, de ne pas respecter la Constitution canadienne, de ne pas respecter la juridiction des provinces. Dans ce domaine, cela s'avère flagrant.
Il est triste de voir que les députés de ce gouvernement restent silencieux pendant que les vaillants députés du Bloc, députés du Québec, défendent les intérêts des Québécois. On a entendu le député de Chambly parler de l'aspect juridique, le député de Portneuf également. On a aussi entendu le magistral discours de la députée de Laval-Est un peu plus tôt.
Ces députés nous disent clairement l'importance de faire une réflexion sur ce projet de loi pour en venir à un meilleur respect des juridictions, de celles des provinces et nécessairement de celles du Québec. Le fait que l'on demande le respect de la Constitution que ce gouvernement a adopté n'est pas nouveau. C'est simple et clair. Pourtant, à chaque fois, c'est à refaire. À chaque fois, il faut répéter.
Ce qui est pire, c'est qu'aujourd'hui, pendant que nous réclamons à grands cris ce respect des juridictions provinciales et de la Constitution canadienne, eh bien, les députés du Québec de l'autre côté de la Chambre restent silencieux et muets. Ils ont la tête basse. Je les vois de l'autre côté. Ils ont honte de ne pas avoir la permission de leur parti de dire un mot là-dessus. Ils sont obligés de se taire pour pouvoir servir un gouvernement qui travaille pourtant à l'encontre des intérêts du Québec.
Je suis surpris que deux nouveaux députés qui ont traversé le parquet de la Chambre aient dit: «Nous allons aller de l'autre côté car nous allons mieux servir le Québec.» Ces deux députés ont-ils changé de camp pour aller dire au caucus libéral: «Vous allez changer vos méthodes, vous ne comprenez pas, vous allez respecter les juridictions, vous allez respecter le Québec.» Mais non, ils ont traversé le parquet de la Chambre depuis quelques jours et déjà ils sont devenus de gentils petits moutons qui attendent un signe pour lever le bras, pour parler, qui ne réfléchissent plus. Depuis qu'ils ont traversé le parquet, on réfléchit pour eux. Ils font donc partie d'un parti muet, le parti des silencieux.
Je pense que le Parti libéral va changer de nom. On va maintenant l'appeler «The Muffler Party». Ce serait un titre, il me semble, qui lui irait très bien, le parti des silencieux.
Je fais donc appel aux députés du Québec de l'autre côté de la Chambre qui prétendent défendre les intérêts du Québec. C'est clair que le gouvernement du Québec, dans ses déclarations, que ce soit de la part des ministres sous un gouvernement péquiste ou sous un gouvernement libéral, a toujours dit que dans ce domaine, la loi que le Québec possède déjà depuis 1989 sert très bien ses intérêts. La déclaration de M. Bégin, citée tout à l'heure par la députée de Laval-Centre, se lit comme suit:
Le Québec a toujours agi de façon responsable et adéquate dans le domaine de la protection de ses espèces floriatiques et fauniques les plus fragiles et il entend continuer à assumer sa juridiction en cette matière. En aucun moment nous n'accepterons une législation parapluie couvrant l'ensemble des actions dans ce domaine.
Ce sont les propos que citait la députée de Laval tout à l'heure. C'est simple. Le gouvernement du Québec demande au gouvernement d'Ottawa: «Mêlez-vous de vos affaires, nous allons nous mêler des nôtres et il n'y aura pas de chicane.» Mais qui provoque encore la chicane, les débats inutiles, les pertes d'énergie? C'est ce gouvernement qui en a fait sa marque de commerce, sa raison d'être.
Je vois des députés du Québec de l'autre côté de la Chambre, que ce soit la députée de Shefford qui vient justement, comme je le disais tout à l'heure, de traverser d'un parti à l'autre pour crier qu'elle voulait défendre les intérêts du Québec, mais qui ne dit pas un mot sur ce dossier. Pire encore, elle s'apprête à voter contre le Québec dans le premier geste qu'elle va poser officiellement comme membre du Parti libéral, alors qu'occasionnellement, quand elle était membre du Parti progressiste-conservateur, elle votait pour le Québec, pour les intérêts du Québec. Par exemple, dans le cas du projet de loi C-20, elle a eu du courage. Mais là, elle a tout perdu. Elle a perdu le courage. L'élection s'en vient, il faut gagner. Mais est-ce que les électeurs penseront la même chose? Ce sera à voir.
La même chose s'applique pour les députés du Québec, ceux de Pierrefonds—Dollard, de Beauce. Que dit le député de Beauce, qui est président du caucus? Comme président du caucus du Québec, il doit défendre les intérêts du Québec? Comment se fait-il qu'il reste muet devant une infraction si grande contre la juridiction provinciale? Qu'en pensent les députés de Brossard—La Prairie, de Lac-Saint-Louis, ce dernier étant un ex-ministre de l'Environnement au Québec? Jamais comme ministre de l'Environnement du Québec il n'aurait permis une telle intrusion dans la juridiction provinciale. C'était un grand défenseur à l'époque. C'est d'ailleurs lui qui a fait adopter la loi en 1989.
Je ne sais pas quelle sorte de piqûre on reçoit lorsqu'on devient libéral, mais c'est un liquide qui endort très bien. On devient muet, on ne se lève plus, on ne défend plus les intérêts, on reçoit son salaire et on espère que le premier ministre va nous faire réélire.
Qu'il s'agisse du député de Verdun—Saint-Henri—Saint-Paul—Pointe Saint-Charles, du député de Gatineau, du député de Vaudreuil—Soulanges, je fais appel à vous, les députés du Québec. Levez-vous debout avec nous pour dire au gouvernement de se mêler de ses oignons et de laisser les provinces gérer de façon efficace, comme elles le font, cette juridiction.
Le député d'Abitibi—Baie-James—Nunavik, le député de Brome—Missisquoi, le député de Laval-Ouest, où êtes-vous? Le ministre des Affaires intergouvernementales, le ministre des Travaux publics, le ministre du Sport amateur, le ministre du Revenu, le ministre des Finances, le président du Conseil du Trésor, le ministre du Commerce international, vous qui êtes tous des députés du Québec, comprenez donc que l'intérêt du Québec, c'est d'être contre cette proposition-là, c'est de la modifier s'il le faut. Mais au moins, dites quelque chose. Ne restez pas silencieux pour vous faire appeler les députés du «Muffler Party». Non, vous allez être autre chose que ça, j'espère.
En terminant, je fais appel à vous en vous demandant un dernier réveil. Réveillez-vous et travaillez avec nous à faire en sorte que cette juridiction provinciale soit respectée et qu'on n'embarque pas encore dans une chicane fédérale-provinciale provoquée par ce gouvernement.
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, je veux d'abord féliciter le député de Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour qui est un excellent parlementaire. Nous sommes évidemment très fiers de l'avoir avec nous au Bloc québécois. C'est un homme expérimenté, au jugement assuré.
Je crois que le député nous a bien fait voir à quel point la situation est triste quand on constate le silence des gens d'en face.
Mais rappelons-nous les prouesses du leader parlementaire du gouvernement, le député de Glengarry—Prescott—Russell. Je n'exclus pas la possibilité, avec mes collègues du Bloc québécois, d'aller faire du porte-à-porte dans sa circonscription pour que ses électeurs comprennent et voient le vrai visage de ce leader parlementaire.
Il faut se rappeler les prouesses du leader parlementaire avec l'actuelle ministre du Patrimoine canadien; je comprends qu'elle, comme le leader parlementaire, n'appuient pas le ministre des Finances, mais l'actuel premier ministre, et c'est pourquoi elle est toujours au Cabinet. Il faut se rappeler combien, lorsqu'ils étaient dans l'opposition, ces gens-là ont déploré les motions de censure, ces gens-là ont appelé de tous leurs voeux une réforme du parlementarisme, ces gens-là ont appelé de tous leurs voeux la liberté d'expression à l'intérieur des partis politiques. Mais où est-elle, cette liberté d'expression, lorsque des députés québécois doivent défendre les intérêts supérieurs du Québec?
Eh bien, non. C'est toujours le même scénario, cruellement prévisible, où on s'effondre, sans le moindre courage politique et où on laisse le rouleau compresseur passer sur le Québec, au détriment des intérêts supérieurs du Québec. Cela doit prendre fin. Heureusement que le Bloc québécois est là. Quel est le premier parti en tête dans les intentions de vote au Québec? C'est le Bloc québécois. Aux prochaines élections, quelle va être la force du Bloc? Nous serons toujours là pour défendre les intérêts du Québec.
Mon collègue, le leader du gouvernement, souhaite-t-il s'exprimer? Non. Il est à l'image de son parti, cruellement silencieux lorsque vient le temps de défendre le Québec.
Je le dis en toute amitié, parce qu'en cette Chambre, l'amitié doit prévaloir. Mais nous ne pouvons pas accepter une autre intervention du gouvernement fédéral dans un domaine qui n'est pas de sa juridiction.
Je demande aux députés ministériels: qui appuie un projet de loi comme celui-là? Le gouvernement du Québec est contre, les groupes environnementaux sont contre. Pourquoi le gouvernement s'entête-t-il à intervenir avec un outil comme celui-là, alors qu'il aurait pu le faire à l'intérieur de ses propres juridictions?
Comme si ce gouvernement avait un bilan positif en matière d'environnement! Qu'a dit le vérificateur général, s'agissant de la décontamination des terres et des sites fédéraux? Que ce gouvernement se traîne les pieds. Qu'a dit le vérificateur général lorsqu'il s'est agi de ratifier la Convention de Rio et particulièrement son cadre réglementaire? Que ce gouvernement avait tardé à ratifier.
Je sais que mon temps s'épuise, et j'en suis malheureux, parce que j'aurais tellement de choses à dire sur le sujet.
Comme l'ont dit mes prédécesseurs et mes collègues du Bloc, nous n'accepterons pas que ce gouvernement intervienne, une fois de plus, dans un domaine de juridiction qui n'est pas le sien. Je compte sur vous pour que, à la prochaine séance de la Chambre sur ce débat, vous me permettiez de continuer mon discours.
Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 17 h 30, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU
M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne) propose: que le projet de loi C-289, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (frais relatifs à l'adoption d'un enfant), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Monsieur le Président, c'est bon de vous revoir après l'été. Je sais que le vôtre a été chargé. Je suis heureux de prendre la parole sur le projet de loi C-289, une mesure législative qui a été tirée il n'y a pas très longtemps. Je suis heureux que la Chambre en soit saisie. Malheureusement, même si nous avions présenté une recommandation solidement appuyée par des Canadiens d'un océan à l'autre, le projet de loi n'a pas été choisi comme pouvant faire l'objet d'un vote. Quoi qu'il en soit, je suis heureux que ce débat ait lieu à la Chambre. Je sais que beaucoup de ceux qui sont intéressés à cette question nous regardent en ce moment à la chaîne parlementaire.
Dans le sommaire du projet de loi il est dit que la mesure a pour objet de permettre au contribuable de déduire dans le calcul de son revenu pour une année d'imposition les frais relatifs à l'adoption d'un enfant, qui ne peuvent être supérieurs à 7 000 $. Les frais doivent avoir été engagés au cours de l'année d'imposition ou des deux années précédentes. Voilà ce qu'on peut lire dans le sommaire du projet de loi.
En gros, le projet de loi reconnaîtrait que les parents adoptifs font une contribution importante à notre société en adoptant des enfant qui ont besoin d'une famille et que cette activité devrait être encouragée et soutenue pour le bien des enfants et pour le bien de la société dans son ensemble.
J'estime que c'est un projet de loi très important et qui mérite de faire l'objet d'un vote. Malheureusement cela n'a pas été possible, mais j'espère que dans un proche avenir le Parlement verra à faire davantage pour les parents adoptifs. Je crois que nous sommes tous d'accord pour dire que l'adoption est une bonne option qui donne à un enfant la chance de grandir entre des parents généreux et aimants.
Toutefois, il arrive souvent que les parents adoptifs doivent faire face à des dépenses énormes au moment d'adopter un enfant et ces dépenses ne sont pas admises en déduction. Le projet de loi à l'étude pourrait constituer une première étape nous permettant d'alléger certaines des préoccupations des parents adoptifs.
Ces derniers doivent souvent relever des défis énormes et faire face à des dépenses importantes lorsqu'ils décident d'adopter un enfant. Même dans les cas d'adoption publique pour lesquels les provinces défraient depuis toujours les dépenses connexes, il arrive souvent que les parents adoptifs doivent assumer certaines dépenses nouvelles de plus en plus élevées, comme les frais de 1200 $ qui s'appliquent à l'évaluation familiale.
Dans le cas d'une adoption privée ou internationale, les parents doivent souvent assumer des dépenses de plusieurs milliers de dollars pour couvrir les honoraires d'avocat et les évaluations familiales et autres. Ces dépenses peuvent dissuader les familles de songer à l'adoption. Il irait donc dans le meilleur intérêt du public de permettre aux parents adoptifs de déduire de leur revenu imposable les dépenses reliées à l'adoption d'un enfant, encourageant et facilitant ainsi cet acte de générosité et d'amour dont nous profitons tous.
Le projet de loi C-289 visant à autoriser la déduction des dépenses d'adoption propose de permettre aux contribuables de déduire un maximum de 7 000 $ de leur revenu pour couvrir les dépenses relatives à une adoption.
Ce projet de loi a été déposé par suite d'une consultation effectuée auprès de bon nombre d'organismes d'adoption et de Canadiens ayant eux-mêmes déjà adopté des enfants. L'enquête longitudinale nationale menée par Statistique Canada sur les enfants et les jeunes a clairement démontré, en termes empiriques, clairs et mesurables, que les enfants se développent bien dans une famille qui compte un père et une mère. Les enfants qui n'ont pas de parents n'ont pas cette chance. À mon avis, nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour venir en aide aux familles qui désirent adopter un enfant et les encourager au lieu de leur rendre la tâche encore plus difficile.
Nous devons remercier les parents adoptifs pour la contribution qu'ils apportent à la société en reconnaissant leurs difficultés particulières.
L'adoption est du ressort des provinces, mais le projet de loi C-289 nous offre le moyen d'encourager financièrement cette institution importante, en acceptant que soient déduits de l'impôt fédéral les frais relatifs à une adoption. Le projet de loi C-289 est donc fidèle à la Constitution, une autre des conditions établies par le sous-comité pour qu'un projet de loi puisse faire l'objet d'un vote.
Je voudrais expliquer quelques-uns des aspects de cette initiative. Je le répète, elle a vise à permettre au contribuable de déduire les frais juridiques engagés pour adopter un enfant. Les adoptions illégales ou ententes de maternité de substitution ne sont pas admissibles, mais les frais juridiques engagés en vue d'une adoption sont déductibles de l'impôt sur le revenu jusqu'à hauteur de 7 000 $. Le montant de 7 000 $ a été retenu parce que c'est le montant de la déduction maximale pour frais de garde d'enfants prévue dans le code des impôts, la DFGE, essentiellement la déduction du coût de la garde des enfants par des tiers.
Si l'État admet la déductibilité de ces frais, il doit également reconnaître que certains frais sont spécifiquement liés au processus d'adoption d'un enfant. Cette déduction s'applique à toutes les adoptions, qu'elles soient d'origine canadienne ou étrangère. Sont compris les frais engagés pour l'évaluation du foyer, les frais engagés pour offrir des conseils aux parents naturels, et les frais de déplacement relatifs à l'adoption de l'enfant. Tous ces frais sont régulièrement engagés par les parents adoptifs d'aujourd'hui, sans que l'État ne les prenne en compte.
Elle serait offerte dans le cas de l'adoption de tout enfant de moins de 17 ans, ce qui est conforme encore une fois aux dispositions concernant la déduction pour frais de garde d'enfants. Si un employeur ou le gouvernement doivent rembourser des frais, ils ne seraient pas admissibles à cette déduction fiscale. Nous avons bien réfléchi à ces aspects du projet de loi.
Il est difficile de connaître le nombre exact d'adoptions, mais selon la Bibliothèque du Parlement, le nombre total d'adoptions au pays s'est élevé à quelque 2 800 en 1990. Selon les tout derniers chiffres dont nous disposons, environ 1 800 adoptions internationales ont eu lieu en 1997. Le Québec estime que les parents adoptifs doivent débourser en moyenne 20 000 $ pour adopter un enfant à l'étranger.
Selon le document que la Bibliothèque du Parlement a préparé pour mon bureau, le projet de loi C-289 ne représenterait pas un coût élevé pour le trésor public. Si des frais d'adoption de 7 000 $ étaient déduits de l'impôt sur le revenu, et vu le nombre estimatif d'adoptions actuelles, ce projet de loi priverait le gouvernement fédéral d'environ 5 millions de dollars en recettes fiscales.
En plus du message d'appréciation et d'encouragement que le Parlement pourrait envoyer aux parents adoptifs par l'entremise du projet de loi, la déduction des frais relatifs à l'adoption rendrait le régime fiscal plus équitable pour les parents adoptifs, et ce pour deux raisons.
D'abord, les coûts des soins prénataux et postnataux prodigués aux enfants de parents biologiques sont remboursés par le régime d'assurance-santé, mais les parents adoptifs doivent payer les coûts d'adoption directement à l'aide de leur revenu après impôt.
Deuxièmement, les coûts des traitements de fertilité sont déductibles à l'heure actuelle. Selon la Bibliothèque du Parlement, les dépenses associées aux traitements de fertilité sont admissibles au crédit d'impôt fédéral de 17 p. 100 au titre des dépenses médicales en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu. On pourrait donc dire, et je me reporte au document que la Bibliothèque du Parlement a préparé pour moi, que parmi les contribuables qui sont incapables d'avoir des enfants de façon naturelle, la fiscalité actuelle privilégie ceux qui choisissent de suivre un traitement de fertilité plutôt que ceux qui adoptent un enfant. Pourtant, on pourrait avancer que l'adoption est une mesure qui profite plus à la société parce qu'elle a pour but de donner une famille à des enfants qui n'en ont pas.
Il est foncièrement injuste de faire en sorte que les dépenses liées à la fécondation in vitro soient déductibles alors que les frais liés à l'adoption, qui vise un enfant qui a besoin de parents, ne le sont pas. C'est un exemple de piètre politique publique.
Enfin, je soutiens également à la Chambre que l'adoption fait économiser l'argent des contribuables, car de nombreux enfants ayant besoin de parents ne seraient plus sous la garde de l'État avec toutes les dépenses afférentes qui sont toutes à la charge de l'État. Cela assurerait une stabilité à l'enfant, ce qui contribuerait à former une société plus solide et à assurer à l'enfant un développement beaucoup plus sain grâce à une famille de deux parents.
Ce sujet a été abordé dans les médias. Je viens de faire allusion à certains des propos qui ont été tenus dans les médias sur ce sujet. Voici ce qu'on pouvait lire dans le Winnipeg Free Press du 4 janvier 2000 dans un article signé par Leah Janzen:
Face à une pénurie de foyers accueillants pour les enfants plus âgés et les enfants ayant des besoins spéciaux, les Services à l'enfant et à la famille offrent des chèques de paie aux parents adoptifs.
Ce n'est pas une mesure que nous préconisons ici, mais nous proposons de reconnaître par le truchement du régime fiscal la contribution sociale que font les parents adoptifs. Mme Janzen ajoutait:
Jusqu'à présent, cependant, avec 700 enfants nécessiteux sur leur liste d'attente et seulement 125 parents éventuels en vue, l'écart reste malheureusement considérable.
Dans le Citizen d'Ottawa du 3 avril 1999, Derek McNaughton écrivait:
De 1997 à 1998, le taux d'adoption d'enfants de pays étrangers a grimpé d'au moins 30 p. 100. Dans le cas de la Chine, le nombre des enfants adoptés a grimpé de 73 p. 100.
Il ajoutait:
À l'heure actuelle, le Québec est la seule province qui accorde un allégement fiscal aux parents adoptifs. Dans son dernier budget, le gouvernement québécois a fait passer de 2 000 $ à 3 000 $ le plafond du montant que les parents adoptifs sont autorisés à déduire de leur revenu imposable.
Une dame avec qui j'ai communiqué à ce sujet, Judy Grove, directrice exécutive de l'Adoption Council of Canada, a dit que la question de l'allégement fiscal repose sur la valeur que notre pays accorde aux enfants. Elle dit que les politiciens aux niveaux tant fédéral que provincial sont prompts à faire de beaux discours sur les besoins des enfants mais peu pressés de passer à l'action. Elle dit:
Il y a un manque de vision. L'adoption, du point de vue de l'État, est un processus rentable, car l'aide sociale à l'enfance ne s'applique pas aux enfants adoptés. L'allégement fiscal facilite l'adoption et permet ainsi à l'État de réaliser des économies.
Elle fait valoir un point très valable. J'ai aussi reçu à mon bureau de nombreuses lettres de l'Adoption Council of Canada. Dans l'une de ses lettres portant sur ce projet de loi d'initiative parlementaire, cet organisme me signale que plus de 70 000 enfants vivent en familles d'accueil au Canada. De ce nombre, plus de 20 000 peuvent être adoptés. L'un des principaux obstacles à leur adoption est le fardeau financier qui accable les parents adoptifs.
De plus en plus d'adoptions de nouveau-nés et de bébés sont facilitées grâce à des agences d'adoption privées, qui exigent des frais variant entre 6 000 et 10 000 dollars, parfois davantage.
La déduction fiscale proposée facilitera la tâche des familles à faible revenu ou des personnes préoccupées par les coûts qu'entraîne le fait d'adopter un enfant et de s'en occuper. C'est tout à fait sensé. Ce projet de loi constituerait une reconnaissance ou une déclaration publique de la valeur de la contribution qu'apportent ces parents.
Qu'en est-il de l'appui du public? Les Canadiens veulent-ils que le projet de loi C-289 soit adopté? Je dirais que le public l'appuie vivement. Depuis que j'ai présenté le projet de loi lors de la première session de la 36e législature, des pétitions en faveur du projet de loi parviennent régulièrement à la Chambre des communes. J'ai reçu de nombreux messages électroniques et un grand nombre de lettres d'appui, et ce sans que je n'en aie vraiment fait la promotion. J'ai été vraiment étonné de l'appui solide que j'ai reçu pour ce projet de loi, sans même que j'en aie fait la moindre publicité ou promotion.
Au cours de cette législature, des pétitions portant quelque 4 000 signatures ont déjà été présentées à la Chambre des communes en faveur de ce projet de loi. J'ai encore 1 000 signatures qui attendent et, n'ayant pu le faire aujourd'hui, je déposerai demain quelques pétitions toujours en faveur de ce projet de loi.
Je tiens à remercier les nombreux Canadiens qui ont manifesté leur soutien et qui m'ont aidé à présenter ce projet de loi à la Chambre des communes. Je suis reconnaissant envers l'Adoption Council of Canada, Judith Grove et Connie Premont qui ont dressé une liste de courriel et communiqué l'intention de ce projet de loi à de nombreux partisans d'un bout à l'autre du Canada. Je remercie aussi les nombreux parents adoptifs qui m'ont envoyé des photos et des lettres, et qui m'ont encouragé à communiquer avec d'autres députés pour obtenir leur appui.
Ce projet de loi est excellent. J'invite tous les députés à songer sérieusement à présenter un tel projet de loi, au sujet duquel le gouvernement pourrait élaborer une loi reconnaissant la contribution des parents adoptifs, compte tenu surtout du fait qu'on insiste souvent sur la richesse que représentent les enfants et sur le besoin d'axer les lois sur l'intérêt des enfants. Reconnaître la contribution des parents adoptifs ferait beaucoup pour progresser en ce sens.
M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi d'initiative parlementaire présenté par le député de Calgary-Centre permettrait aux contribuables de déduire les dépenses liées à l'adoption d'un enfant jusqu'à concurrence de 7 000 $. Je suis persuadé que le député de Calgary-Centre, en face, n'avait que de bonnes raisons de présenter ce projet de loi à la Chambre des communes, mais un principe de base de notre fiscalité veut qu'on n'accorde en général pas de dégrèvement fiscal pour des dépenses personnelles comme des frais d'adoption.
Le gouvernement sait bien que les gens qui adoptent un enfant doivent absorber des frais relativement élevés, mais ces frais et les autres dépenses personnelles ne donnent pas droit à une aide fiscale parce qu'ils sont engagés volontairement et que leur montant et leur type varient considérablement en fonction des goûts, du style de vie et du statut économique des gens. Plus les contribuables ont un statut socioéconomique élevé et plus ils risquent d'engager diverses dépenses personnelles. Si ces dépenses étaient déductibles, il arriverait que les dépenses personnelles de quelques contribuables seraient absorbées par l'ensemble des contribuables.
[Français]
Lorsqu'une aide fiscale est accordée à l'égard de dépenses, elle s'applique soit à des dépenses encourues pour gagner un revenu, par exemple les frais de garde d'enfants, les cotisations syndicales ou les frais reliés à un déménagement afin d'occuper un emploi à un autre endroit, ou à l'égard de dépenses largement non discrétionnaires, dont des frais médicaux supérieurs à la moyenne.
[Traduction]
Prenons les frais de garde d'enfants, par exemple. Comme le savent les députés, les frais de garde admissibles sont déductibles dans le calcul du revenu. La déduction pour frais de garde d'enfants vise à reconnaître que les contribuables qui doivent payer pour faire garder leurs enfants afin de toucher un revenu d'emploi ou d'entreprise, de fréquenter une maison d'enseignement reconnue ou de suivre un cours de formation professionnelle admissible sont moins en mesure de payer des impôts que les contribuables qui touchent le même revenu sans devoir absorber de telles dépenses.
La déduction pour frais de garde d'enfants peut aller jusqu'à 7 000 $ par année pour la garde d'enfants de moins de sept ans et jusqu'à 4 000 $ par année pour la garde d'enfants de 7 à 15 ans.
[Français]
Étant donné qu'il serait difficile de séparer les composantes personnelles et non discrétionnaires des coûts relatifs aux enfants, une aide fiscale est offerte aux familles qui ont des enfants sous forme d'une prestation dont le montant est déterminé au préalable, plutôt que sous forme de crédits d'impôt ou de déductions pour certaines dépenses spécifiques.
[Traduction]
Les députés savent sans doute que le gouvernement procure un appui financier important aux familles par le truchement de la Prestation fiscale canadienne pour enfants, la PFCE. Plus précisément, ce programme comporte deux volets: la prestation de base et la Prestation nationale pour enfants. La prestation de base donne aux familles jusqu'à 1 020 $ par enfant. À cela s'ajoutent des suppléments de 213 $ pour chaque enfant de moins de sept ans, lorsque les familles ne réclament aucune déduction pour les frais de garde d'enfants, et de 75 $ pour le troisième enfant et les suivants.
Le gouvernement fournit une aide additionnelle aux familles à faible revenu qui ont des enfants, grâce à la Prestation nationale pour enfants, la PNE.
En juillet 1999, les sommes versées en vertu de la PNE s'élevaient à 785 $ pour le premier enfant, 585 $ pour le deuxième et 510 $ pour le troisième et les suivants. Le montant maximum versé en vertu de la PFCE est donc de 1 805 $ pour le premier enfant et de 1 605 $ pour chacun des enfants suivants.
Au cours des dernières années, notre gouvernement a prouvé qu'il était déterminé à investir dans l'avenir de nos enfants. En fait, même avant qu'on parvienne à équilibrer le budget, le gouvernement a consacré 850 millions de dollars à la PFCE pour commencer à instaurer la PNE en 1997. Dans le budget de 1998, le gouvernement fédéral a ajouté une autre somme de 850 millions de dollars à la PNE. Le modèle de croissance de cette prestation a été décrit dans le budget de 1999 qui a aussi proposé un investissement additionnel de 300 millions de dollars pour accorder les suppléments de prestations aux familles à faible et à moyen revenus.
[Français]
En outre, le budget déposé à la Chambre le 28 février 2000 propose un plan quinquennal pour majorer les prestations aux termes de la PFCE de 2,5 milliards de dollars par année d'ici 2004. Les prestations maximales aux termes de la PFCE passeront donc à 2 056 $ en juillet 2000 et à 2 400 $ d'ici 2004.
[Traduction]
Dans les trois budgets qui ont précédé celui présenté en l'an 2000, le gouvernement a investi annuellement un total de deux milliards de dollars pour la prestation fiscale canadienne pour enfants. Avec l'investissement supplémentaire de 2,5 milliards de dollars par année proposé dans le budget de l'an 2000, d'ici 2004, plus de neuf milliards de dollars serviront chaque année à aider financièrement les familles qui élèvent des enfants.
Avant de conclure, je veux aussi souligner le fait que les importantes mesures de réduction fiscale proposées dans les quatre derniers budgets ont été particulièrement avantageuses pour les familles avec des enfants. D'ici 2004-2005, les mesures prévues dans ces budgets se traduiront par une réduction de 30 p. 100 du fardeau fiscal des familles qui ont des enfants, comparativement à une réduction moyenne de 22 p. 100 pour l'ensemble des Canadiens. À elles seules, les mesures présentées dans le budget 2000 se traduiront par une réduction de 21 p. 100 du fardeau fiscal des familles avec enfants, comparativement à une baisse de 15 p. 100 du fardeau de l'ensemble des contribuables.
Le plan quinquennal de réduction du fardeau fiscal annoncé dans le budget 2000 propose de rétablir la pleine indexation de l'impôt sur le revenu des particuliers. Les familles seront ainsi protégées contre les hausses d'impôt automatiques et contre l'érosion des prestations occasionnée par l'inflation.
De plus, le programme propose des réductions généralisées de l'impôt sur le revenu des particuliers. Pour la première fois en 12 ans, on propose une réduction du taux d'imposition. Le taux d'imposition intermédiaire passera de 26 à 23 p. 100 d'ici 2004. En outre, le gouvernement propose de faire passer, d'ici 2004, à au moins 8 000 $ le montant que les Canadiens peuvent gagner sans qu'il soit assujetti à l'impôt, tandis qu'on fixera à au moins 35 000 $ et 70 000 $, respectivement, les niveaux à partir desquels les taux d'imposition intermédiaire et supérieur commenceront à s'appliquer. Il est aussi proposé d'éliminer la surtaxe de 5 p. 100.
Au total, le budget 2000 propose aux Canadiens des allégements de l'impôt sur le revenu des particuliers d'au moins 39,5 milliards de dollars.
Le gouvernement avait dit à l'époque qu'il espérait pouvoir accélérer la mise en oeuvre de son plan quinquennal de réduction d'impôt. Eh bien, le gouvernement est maintenant en mesure de garantir qu'il le fera.
[Français]
En guise de conclusion, le gouvernement croit que les parents devraient recevoir une aide financière pour les aider à combler les besoins de leurs enfants. Et nous la leur accordons.
[Traduction]
Il ne serait toutefois pas indiqué de demander à l'ensemble des contribuables de subventionner les frais d'adoption par l'entremise du régime fiscal, en raison de la nature extrêmement discrétionnaire de ces dépenses personnelles. J'invite donc tous les députés à rejeter ce projet de loi.
[Français]
M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi C-289 déposé par mon collègue de Calgary-Centre, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (frais relatifs à l'adoption d'un enfant).
Ce projet de loi a pour objet de permettre au contribuable de déduire dans le calcul de son revenu, pour une année d'imposition, certains frais relatifs à l'adoption d'un enfant, jusqu'à concurrence de 7 000 $.
Je rappelle qu'en 1998, mon collègue bloquiste de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans avait déposé un projet de loi similaire à celui-ci. Je crois que la seule différence était que nous demandions une déduction de 10 000 $ au lieu de 7 000 $. C'est la plus importante différence entre les deux.
C'est donc un projet de loi avec lequel mon parti, le Bloc québécois, et moi-même sommes d'accord.
On sait que l'adoption relève des provinces. Toutefois, la non-participation du gouvernement fédéral reste une zone grise pour les parents adoptifs.
L'institution d'une déduction fiscale fédérale serait non seulement un encouragement apprécié pour les parents adoptifs, mais représenterait également une mesure plus équitable du régime fiscal.
En effet, les parents biologiques bénéficient du régime d'assurance-maladie et de soins avant et après la naissance d'un enfant, alors que les parents adoptifs doivent payer intégralement tous les frais d'adoption avec leurs revenus.
Il est curieux de constater que les frais de fécondation in vitro sont déductibles, alors que les frais d'adoption d'un enfant ne le sont pas. Ce n'est ni juste ni judicieux de la part du gouvernement fédéral.
D'après une estimation faite par Enfants du Monde, un des plus grands organismes d'adoption canadiens, le coût pour adopter un enfant en Chine s'élèverait à 17 270 $ pour un couple.
Mon collègue, le député de Saint-Hyacinthe—Bagot a adopté, il y a deux ans, une petite asiatique. Il me confirme que les frais d'adoption se sont élevés à plus de 20 000 $ canadiens. Ces chiffres tiennent compte à la fois des frais encourus au Québec et en Chine.
J'aimerais maintenant parler d'un petit tableau que l'organisme d'adoption Enfants du Monde m'a fait parvenir pour détailler certains frais. Il ne faut pas oublier que lorsqu'on veut adopter un enfant au niveau international, il y a des frais d'administration, des frais d'évaluation psychologique, des certificats de naissance des parents, des certificats de mariage, des lettres de médecins, des frais de notaire, des frais légaux, des timbres de loi, l'ambassade, les contacts avec les pays étrangers, l'enregistrement du dossier à l'Association d'adoption Canada-Chine, la traduction des dossiers en chinois. Cela représente des frais de 7 422 $, et ce, avant de quitter le Canada pour aller adopter un enfant. Il faut ajouter à cela les frais encourus là-bas: dons à l'orphelinat, frais de notaire en Chine, frais du passeport pour l'enfant qu'on veut ramener avec nous, frais d'avion, frais d'hébergement; tout cela s'élève à 17 270 $.
Le gouvernement fédéral devrait reconnaître, comme le fait le Québec, l'importante contribution sociale des parents adoptifs à notre société.
On constate que la moitié des adoptions canadiennes sont faites par des familles québécoises. Cela est dû en partie au fait que la politique familiale du Québec est nettement en avance sur celle du gouvernement fédéral.
Les parents adoptifs font face à des frais particuliers, notamment dans le cas d'adoptions privées ou internationales. Je peux en parler en connaissance de cause, car mon épouse et moi-même avons adopté un enfant, Richard, il y a déjà 32 ans.
Bon nombre de couples qui souhaiteraient adopter un enfant sont découragés, ne pouvant assumer ces énormes frais, d'où la nécessité de ce projet de loi.
Depuis bientôt neuf ans, le Québec vit un bouleversement unique en Occident: de 700 à 800 enfants de partout dans le monde y trouvent enfin une famille adoptive chaque année.
Il est indéniable qu'on faciliterait l'adoption en permettant aux parents adoptifs de déduire de leurs revenus, au niveau fédéral, les frais d'adoption, non pas d'un montant jusqu'à concurrence de 7 000 $, comme le propose ce projet de loi, mais d'au moins le double.
Mais on ne peut parler d'adoption sans parler de la famille. Nous sommes fiers d'avoir au Québec une politique familiale intégrée et complète. Elle comprend, entre autres, un crédit d'impôt pour frais d'adoption, l'allocation familiale et le développement de services éducatifs et de garde à la petite enfance qu'on appelle communément les garderies à 5 $.
D'autre part, le Québec est en train de mettre sur pied un régime d'assurance-parentale en fonction des besoins des familles québécoises.
En bref, force est de constater que le gouvernement fédéral est 20 ans en retard dans ce domaine. L'adoption rapide de ce projet de loi serait déjà un pas dans la bonne direction de la part de ce gouvernement fédéral.
[Traduction]
Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre part au débat sur ce projet de loi qui prévoit des déductions pour les frais relatifs à l'adoption d'un enfant.
Je suis surprise par l'argument du député libéral selon lequel il s'agit d'une dépense personnelle. Je pense que les frais relatifs à l'adoption constituent probablement l'une des dépenses les plus impersonnelles que l'on puisse engager parce que les parents adoptifs font des frais pour des enfants dont ils ne connaissent pas les parents. Ils ne connaissent pas d'avance l'enfant. Ils ne savent pas si l'enfant va présenter des problèmes. S'il s'agit d'une adoption internationale, il se peut que l'enfant ait été privé d'amour, de stimulation et de soins. Ils auront du mal à intégrer cet enfant dans leur foyer et dans leur communauté. Ils pourraient adopter un enfant qui souffre du syndrome de l'alcoolisme foetal ou d'autres problèmes attribuables au comportement de ses parents. C'est donc une dépense tout à fait impersonnelle qu'une famille ferait en décidant de l'adopter. On parle ici de familles et de l'incroyable combat qu'elles doivent mener lors d'une adoption.
J'ai des amis qui ont été soumis à une procédure d'adoption qui a duré cinq ans. Ils ont subi des épreuves auxquelles aucun parent biologique n'est confronté. Ils doivent répondre à un questionnaire qui aborde les sujets les plus intimes. Personne n'accepterait de répondre à ces questions, mais eux doivent le faire parce qu'ils veulent adopter un enfant.
Ils doivent se procurer des lettres de référence et aller voir toutes sortes de gens avantageusement connus dans leur communauté pour leur demander s'ils les considèrent comme de bons parents et obtenir d'eux une lettre qui l'affirme. Ils doivent se soumettre à des évaluations psychologiques qui coûtent au minimum 90 $ l'heure. Leurs normes religieuses font l'objet d'un examen approfondi. Leurs revenus sont passés au peigne fin. Leur âge également, car ils peuvent être trop jeunes ou trop âgés. Ils doivent être en bonne santé; ils doivent également faire état de leurs antécédents familiaux en matière de santé mentale. On ne m'a certes jamais posé ces questions quand j'étais jeune et que je suis devenu père. J'ai quatre enfants.
Ce qui m'a coûté le plus cher lorsque j'ai eu mes enfants, ce fut l'achat du berceau, qui a servi pour les quatre bébés. Si j'avais dû débourser à l'époque 20 000 $, 10 000 $ ou même 1 000 $ par enfant, je n'aurais certainement pas pu le faire. Mais nous attendons de ces personnes qui vont contribuer au bien de la communauté, qui vont élever des enfants des autres comme s'ils eussent été de leur chair et de leur sang, qu'elles le fassent sans aucune aide financière.
Encore une fois, je suis très déçue de la solution retenue par les libéraux, soit de considérer comme des frais personnels les dépenses engagées pour adopter un enfant. C'est à la fois choquant et blessant pour quiconque accepte d'engager ces dépenses et de se soumettre aux énormes difficultés de l'adoption.
Comme on l'a déjà dit, les adoptions peuvent être privées ou publiques au Canada, mais les unes comme les autres entraînent de très lourdes dépenses. Comme je le disais, il y a aussi un coût affectif qui s'ajoute au fardeau financier de la famille. Je ne pense pas qu'il faille promouvoir l'adoption de ce projet de loi pour la seule et unique raison que cela permettrait au gouvernement de réaliser des économies. Je pense que nous devons l'appuyer parce que c'est la bonne chose à faire, parce qu'il aiderait les familles et que ce serait un bon ajout à tout programme pour les enfants.
Si nous voulons présenter des mesures sérieuses, il est essentiel de reconnaître les parents qui sont prêts à adopter car ce n'est pas tout le monde qui est capable d'adopter ou de ne pas se décourager avant la fin du long processus d'adoption. Ce n'est pas toujours facile. La situation est différente de celle d'autres familles.
J'ai parlé aujourd'hui encore à une femme qui a adopté trois enfants. Elle l'a fait dans le cadre d'un programme d'adoption internationale. C'est difficile pour une famille d'adopter un enfant qui vient d'un pays déchiré par la guerre et qui est traumatisé. Les familles qui adoptent ne connaissent pas le passé de l'enfant ni ce qui les attend. Je n'ai pas à faire face à ces questions avec mes enfants. Cependant, nous ne sommes pas prêts à donner un petit coup de pouce à ceux qui adoptent des enfants venant d'ailleurs et qui s'en occupent, les aiment, les élèvent et font tout ce que nous ferions pour nos propres enfants, en reconnaissant par exemple les coûts financiers initiaux d'une adoption.
De bien des façons, nous ne pouvons pas réduire les répercussions psychologiques et émotives d'une adoption sur les gens. Il s'agit de toute une épreuve et je pense que tous les gens qui adoptent des enfants devraient être félicités plutôt que pénalisés.
Ce projet de loi d'initiative parlementaire mérite l'appui de tous les députés à la Chambre. Ils devraient intervenir et se dire en faveur d'apporter leur appui de toutes les façons possibles, car les difficultés des intéressés sont différentes des nôtres. Ce serait un autre ajout à nos critères en tant que famille et on ne pourra jamais prétendre qu'il s'agit de dépenses personnelles égoïstes, car il n'en est rien. Les intéressés aident d'autres humains depuis des décennies en accueillant des enfants adoptifs au sein de leur famille.
[Français]
Mme Angela Vautour (Beauséjour—Petitcodiac, PC): Monsieur le Président, ce projet de loi propose une déduction d'impôt pour les frais relatifs à l'adoption d'un enfant allant jusqu'à 7 000 $.
Bien que l'intention de ce projet de loi soit bonne, je crois que le problème des enfants dans ce pays est beaucoup plus grave. Le fait de modifier la Loi de l'impôt sur le revenu pour y ajouter une autre disposition ne fait que compliquer davantage une loi qui est déjà trop compliquée et qui ne règle pas le problème réel. Il y a 2,5 millions d'enfants qui vivent dans la pauvreté au Canada.
Les problèmes que vivent les familles à faible revenu, tout particulièrement les difficultés auxquelles font face les mères seules, doivent être étudiés par ce gouvernement.
La réalité de vivre dans la pauvreté n'est pas une chose facile. L'impossibilité d'offrir à ses enfants les nécessités de la vie pousse parfois certaines personnes à prendre des décisions difficiles.
Dans ce pays, il faut s'assurer de créer un environnement favorable pour reconnaître la bonne volonté des adultes qui choisissent de devenir parents. Être parent n'est pas facile, surtout en l'an 2000, alors que le coût de la vie est très élevé et que nos jeunes ont beaucoup de défis à relever, qu'il s'agisse du problème de la drogue à l'école, ou même de trouver un emploi, une fois que les parents ont pu trouver l'argent nécessaire pour leur éducation.
Beaucoup de coûts sont liés au fait de devenir parent. Comme parlementaires, nous avons le devoir de nous assurer que les parents et les mères seules qui ont des enfants puissent faire un choix. Il faut qu'ils puissent faire un choix, premièrement, lorsqu'ils décident d'avoir des enfants, mais aussi celui de pouvoir garder leurs enfants. Souvent, ce sont les situations économiques qui font que de jeunes parents sont obligés de donner leurs enfants en adoption. Nous avons beaucoup de chance de toujours trouver des parents prêts à prendre ces enfants, à leur donner une bonne vie et à faire en sorte qu'ils puissent vivre sains et saufs avec toutes choses essentielles à la vie.
Il est clair que, comme parlementaires, nous avons le devoir de d'assurer que les Canadiens aient les outils nécessaires pour offrir ce qu'il leur faut.
Je me demande si le député de Calgary-Centre croit vraiment que la réponse aux problèmes des enfants dans ce pays repose sur les réductions d'impôt.
À entendre les députés de l'Alliance canadienne, il semblerait que tous les problèmes de ce pays reposent sur les taxes.
[Traduction]
J'ai été mère célibataire pendant quelques années. Mon fils et moi savons certes, comme nous le savons tous, qu'une réduction d'impôt s'impose. Nous savons également qu'il y a beaucoup de chefs de famille monoparentale ayant besoin de beaucoup d'aide différente. Trop souvent, l'alliance réformiste juge que la solution à tous les problèmes au Canada consiste à réduire les impôts. Je ne crois pas que la réduction des impôts permette de résoudre tous les problèmes. Nous devons aborder des problèmes sous bien des angles.
En raison des changements apportés au programme d'assurance-emploi en 1996 par le gouvernement, bon nombre de chefs de famille monoparentale ont éprouvé de la difficulté au cours des quatre dernières années parce que l'on avait ciblé les familles les moins bien nanties sur les plans du revenu et de l'emploi. Nous savons que le gouvernement a aussi ciblé les familles qui habitent dans des collectivités tributaires d'une activité saisonnière.
La réduction des transferts sociaux aux provinces a entraîné une hausse draconienne du coût de l'enseignement postsecondaire. Que peut-il y avoir de plus dramatique que d'enlever à un adolescent la possibilité de s'instruire qui lui permettrait de se trouver un emploi et de se bâtir un avenir? En notre qualité de parlementaires, lorsqu'une mesure législative est adoptée à la Chambre, nous avons la responsabilité de veiller à ne pas cibler ceux qui n'ont pas les moyens de se défendre. Il est arrivé trop souvent à la Chambre que des politiques soient élaborées, qu'une mesure législative soit adoptée et que nous ciblions des groupes, en particulier les femmes et les enfants, et ce n'est pas la façon d'agir.
Je dois saluer les parents qui ont choisi d'offrir un foyer sûr et accueillant à leurs enfants au pays. Décider de devenir un parent n'est pas chose facile. Tous ceux d'entre nous qui ont des enfants ou qui connaissent des parents ayant des enfants savent que la tâche n'est pas facile dans la société d'aujourd'hui, compte tenu de tous les défis auxquels font face nos enfants. Parfois, les deux parents doivent travailler, qu'ils le veuillent ou non. C'est une obligation de nos jours si l'on veut joindre les deux bouts. Si les deux parents habitent dans une région où le salaire minimum est de 5,50 $, ou encore là où il n'y a qu'une industrie saisonnière, on ne peut qu'imaginer de quoi vivent les enfants en hiver. Le chiffre de 2,5 millions d'enfants vivant dans la pauvreté est à mon avis beaucoup trop élevé. Selon moi, ce sont 2,5 millions d'enfants de trop vivant dans cette situation.
Nous pouvons éliminer certains des obstacles grâce à des réductions d'impôt, mais il faut que le gouvernement s'engage à s'attaquer aux problèmes réels du pays: un trop grand nombre d'enfants ayant faim vivent dans ce pays très riche.
M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai le privilège à titre de membre de l'Alliance canadienne d'appuyer le projet de loi de mon collègue, le député de Calgary-Centre.
J'ai le privilège d'avoir plusieurs neveux adoptés, quatre pour être précis, et une nièce adoptée. À titre de conseiller, j'ai travaillé avec des couples stériles ou qui ne pouvaient concevoir d'enfants de la façon habituelle. La possibilité d'adopter des enfants revêtait une très grande importance pour eux. Il aurait été aussi très important pour eux de bénéficier d'un soutien financier, car certains avaient de faibles revenus. L'adoption d'un enfant aurait épuisé grandement leurs ressources financières.
Malgré une situation financière précaire, bien des couples décident toutefois d'adopter un enfant au prix d'un immense sacrifice, tellement ils aiment les enfants et les considèrent comme une richesse. C'est pourquoi les mesures énoncées dans le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui aideraient grandement les couples à faible revenu désireux d'adopter un enfant.
Le projet de loi C-289, comme on l'a dit, vise essentiellement à permette de déduire du revenu les dépenses liées à l'adoption. Nous ne parlons pas d'une somme faramineuse, comme l'a laissé entendre mon collègue libéral à un moment donné. Un plafond a été fixé à 7 000 dollars.
À l'instar des députés de ce côté-ci, je suis aussi d'avis que l'adoption ne se compare pas au simple achat d'une voiture ou d'un article de luxe. C'est tout autre chose. Ce sont pour la plupart des couples qui, pour cause de stérilité ou autre, ne peuvent avoir d'enfants. Il ne s'agit pas d'un choix que ces gens décident d'exercer de façon purement discrétionnaire comme mon collègue d'en face semblait vouloir le laisser entendre.
La déduction serait autorisée pour toute adoption d'un enfant de moins de 17 ans, et correspondrait aux dispositions relatives à la déduction pour frais de garde d'enfants. Les dépenses devant être remboursées par l'employeur ou par le gouvernement ne pourraient être admises en déduction.
Comme mes collègues l'ont souligné à venir jusqu'à présent dans ce dossier, il est évident que les parents adoptifs doivent assumer de lourdes dépenses et ce, qu'il s'agisse d'une adoption publique ou privée, nationale ou internationale. Dans le cas des adoptions internationales, il faut également prévoir des déplacements et d'autres dépenses beaucoup plus élevées. Ces coûts sont parfois considérables, et même prohibitifs. Voyons un peu. On a déjà souligné certains de ces coûts, mais j'aimerais y revenir.
Il y a d'abord les frais reliés à l'évaluation familiale préliminaire à laquelle le couple doit se prêter. C'est une étape difficile qui constitue un élément dissuasif pour plusieurs. Puis, il faut souvent compter des frais d'agence pour les adoptions privées. Même dans les cas d'adoptions publiques pour lesquelles les provinces défraient depuis toujours les dépenses connexes, il arrive souvent que les parents adoptifs doivent assumer certaines dépenses nouvelles de plus en plus élevées.
Il faut également prévoir dans certains cas les frais de counselling pour les parents naturels qui doivent se remettre de la perte de leur enfant donné en adoption ou la mère célibataire qui est forcée d'abandonner son bébé.
Dans le cas des adoptions à l'étranger, le député bloquiste a mentionné les frais considérables de voyage, de transport, de repas, de logement et d'autres frais qui sont liés à l'immigration de l'enfant au Canada.
Il y a ensuite les frais d'avocats. Nous savons que les services d'avocats ne sont pas bon marché. Il y a aussi l'ordonnance d'adoption, qu'il s'agisse d'une ordonnance d'adoption au Canada ou d'adoption à l'étranger. En outre, les ordonnances d'adoption à l'étranger peuvent exiger que le couple obtienne également une ordonnance de reconnaissance au Canada, de sorte que l'ordonnance d'adoption à l'étranger aura la même force et le même effet qu'une ordonnance d'adoption au Canada.
Ainsi, certains couples devront payer des frais d'avocats deux fois, dans chacun des pays, et n'oublions pas les honoraires qui changeront de mains si plusieurs avocats sont engagés dans tout ce processus. Je pense que les députés comprennent que de grosses sommes d'argent peuvent changer de mains dans un processus d'adoption, notamment dans les cas d'adoption privée et d'adoption à l'étranger.
Le Québec estime que le coût moyen d'une adoption à l'étranger s'élève à au moins 20 000 $. Je trouve inacceptable que ces frais ne soient pas déductibles de l'impôt sur le revenu. Ce qui est inacceptable, c'est que les frais liés aux adoptions sont payés à l'aide du revenu après impôt. À mon avis, le régime fiscal est très injuste à cet égard. Il ne prévoit pas de déduction fiscale pour les frais d'adoption, même s'il offre un allégement fiscal aux couples qui deviennent des parents par d'autres moyens que l'adoption. Je vais donner des exemples de ces cas.
Autrement dit, la Loi de l'impôt sur le revenu réserve un traitement injuste à ces nouveaux parents adoptifs. Je voudrais examiner certains aspects contradictoires et injustes de la Loi de l'impôt sur le revenu.
Tout d'abord, la loi prévoit des dispositions à l'égard des parents biologiques. Les coûts des soins prénataux et postnataux engagés par ces parents sont remboursés par le régime d'assurance-maladie dans tout le pays. À l'heure actuelle, les parents adoptifs n'ont pas l'aide directe des fonds publics ni d'un allégement d'impôt. Tandis que la société assume les coûts lorsqu'une mère donne naissance à un enfant, le parent adoptif doit payer tous les coûts que l'adoption entraîne.
Deuxièmement, on l'a déjà dit, mais il vaut la peine de le répéter pour en souligner l'injustice ou le peu d'équité, la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit des dispositions pour les parents dont les enfants sont conçus et naissent grâce à des traitements de fertilité. Ces frais sont déductibles. D'après la Bibliothèque du Parlement, les frais des traitements de fertilité sont admissibles aux fins de l'actuel crédit fédéral d'impôt de 17 p. 100 pour frais médicaux prévu à l'article 118.2 de la Loi de l'impôt sur le revenu.
On peut ainsi soutenir que, parmi les contribuables qui sont incapables d'avoir des enfants naturellement, le régime fiscal privilégie ceux qui optent pour les traitements de fertilité plutôt que pour l'adoption. Pourtant, on pourrait prétendre que l'adoption est plus bénéfique, socialement, car elle donne des parents à des enfants qui sont déjà là.
Il est intrinsèquement injuste que les dépenses de fertilisation in vitro soient déductibles aux fins de l'impôt alors que les dépenses de l'adoption ne le sont pas. Il n'y a aucune raison logique qui puisse expliquer cette différence de traitement. L'approche n'a aucune cohérence.
Troisièmement, la Loi de l'impôt sur le revenu autorise les parents à déduire les frais de garde. Mon collègue y a fait allusion. Elle ne fait aucune distinction entre les parents adoptifs et ceux qui ont eu des enfants naturellement, ni entre les parents adoptifs et les couples qui ont eu recours aux traitements de fertilité. Ils ont tous droit à la déduction de ces frais aux termes de la loi.
Tous les parents qui ont recours aux garderies ont droit à la déduction. Il y a aussi la question des parents qui s'occupent des enfants au foyer mais qui ne bénéficient pas de déduction, ce qui est inéquitable, mais cela pourra faire l'objet d'un autre débat.
Il est donc illogique de la part du gouvernement de traiter les parents adoptifs et les parents naturels de façon identique quand il s'agit des coûts associés à l'éducation des enfants au moyen de la déduction des dépenses de garderie, mais de les traiter différemment quand il s'agit des coûts associés au fait de devenir parents. En examinant la logique de cette situation, mon collègue comprendra sûrement que toute cette approche est empreinte d'incohérence.
Rien ne justifie en réalité cette inégalité, étant donné que les nouveaux parents font une égale contribution à la société peu importe comment ils deviennent parents, que ce soit par adoption, biologiquement ou par la fertilisation in vitro.
S'il y avait une bonne raison à ce traitement inéquitable, nous pourrions peut-être alors le justifier, mais il n'en existe aucune. Les nouveaux parents apportent une égale contribution à la société peu importe comment ils deviennent parents. L'enfant, ses besoins et son potentiel de contribution à la société sont les mêmes, peu importe qu'il ait été adopté ou qu'il soit venu au monde grâce à la fertilisation in vitro ou par naissance naturelle.
La logique fait donc comprendre qu'une déduction fiscale des frais relatifs à l'adoption d'un enfant a autant de bon sens que les dépenses défrayées par le régime d'assurance-maladie dans les maternités et autant de bon sens que la déduction fiscale actuelle pour les traitements contre l'infertilité.
Songeons aux avantages que présente l'adoption pour la société. Les enfants qui, autrement, grandiraient sans parents bénéficient de parents qui les aiment, qui les disciplinent et qui leur donnent une éducation, des parents qui sont attachés à eux pour longtemps. Il est beaucoup plus probable que ces enfants en retireront des bienfaits. Cela se traduira par une meilleure santé physique et mentale, de meilleurs résultats scolaires et une plus grande contribution au milieu de travail et à la communauté lorsqu'ils seront devenus des adultes.
Les parents adoptifs aiment leurs enfants. Ils ont délibérément fait un choix et consenti des sacrifices. L'adoption est un acte bon pour la société, et il est logique d'encourager l'adoption en accordant des déductions fiscales.
Quelle serait la perte de recettes fiscales pour le gouvernement? Elle ne serait pas très importante. En fait, elle serait compensée de plusieurs façons par une baisse des dépenses gouvernementales. Le soin des enfants non adoptés entraîne des coûts pour l'État. L'adoption permet donc d'économiser des fonds publics, puisque les nouveaux parents assument la responsabilité financière des enfants. Il y aurait une baisse des coûts de la santé mentale, du système de justice pénale et du système pénitentiaire.
Il y aurait aussi une hausse des recettes provenant des taxes de vente, compte tenu des dépenses engagées pour leurs enfants par les parents adoptifs. Ces enfants grandissent pour devenir des adultes en santé qui contribuent à la société et qui versent des impôts.
Ce projet de loi est important. Je propose que, si la Chambre y consent, ce projet de loi fasse l'objet d'un vote.
Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Wanuskewin demande le consentement unanime de la Chambre pour que le projet de loi d'initiative parlementaire dont la Chambre est maintenant saisie fasse l'objet d'un vote. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis encouragé par le débat d'aujourd'hui. De bons points ont été soulevés, notamment de ce côté-ci de la Chambre. J'espère que le gouvernement en a pris bonne note.
J'ai été frappé par le fait qu'on entend beaucoup parler du programme des enfants à la Chambre. On entend beaucoup parler de «l'intérêt supérieur des enfants». Le projet de loi à l'étude traite des enfants qui attendent d'être adoptés. Il y a quelque 70 000 enfants qui sont à la charge de l'État, et 20 000 d'entre eux sont maintenant prêts à être adoptés aujourd'hui.
On parle de l'intérêt supérieur des enfants, mais nous avons un gouvernement qui n'adopte aucune mesure incitative ni n'appuie de lois soulignant la contribution des parents adoptifs.
Nous avons un gouvernement qui parle de donner 2,2 milliards pour des programmes scolaires et pour le soin d'enfants dans des établissements de l'État. Il y a le crédit d'impôt pour enfants. Certes, le crédit d'impôt pour enfants est fort généreux. Je n'ai rien contre cette mesure. On parle du crédit d'impôt pour les traitements de l'infertilité. On parle du crédit d'impôt pour enfants et de la reconnaissance des déductions des dépenses de garderie pour les parents qui choisissent d'aller travailler.
Cependant, on ne pense pas à la reconnaissance des parents qui font sans doute l'une des plus grandes contributions sociales possibles, soit l'adoption d'enfants qui, autrement, n'auraient jamais la chance d'avoir un père et une mère, et seraient condamnés à vivre à la charge de l'État et à passer d'une famille d'accueil à une autre. Nombre d'entre nous savent que les coûts sociaux des dommages causés à ces enfants ne cessent de s'accumuler. Nous pouvons remédier à la situation avec un projet de loi comme celui-ci.
Je suis favorable à l'idée de venir en aide aux parents compatissants qui veulent adopter des enfants, mais qui sont aux prises avec les difficultés et le fardeau financiers que cela entraîne. Nous pourrions faire quelque chose à cet égard à la Chambre aujourd'hui en adoptant un projet de loi comme celui-ci.
Voilà le genre de chose que la Chambre devrait faire. J'en ai assez des discours creux au sujet de l'intérêt supérieur des enfants et du programme relatif aux enfants quand nous oublions une chose aussi simple que celle-ci. C'est totalement évident.
J'ai constaté qu'un consensus se dégage en ce sens chez nos collègues du NPD. J'ai entendu la même chose de la part de notre collègue du Bloc. Les députés de mon propre parti sont de cet avis. Sans trop d'effort, on pourrait même obtenir l'accord des conservateurs.
Je demande aux députés ministériels de réfléchir à nouveau à cette occasion qu'ils ratent. Nous avons assez entendu leurs belles paroles au sujet de l'intérêt supérieur des enfants et du programme des enfants. Qu'ils joignent maintenant le geste à ces belles paroles en approuvant cette mesure législative qui donnerait à un enfant un père et une mère qui pourraient l'aimer dans un cadre familial.
Dans cette optique, je demande le consentement unanime de la Chambre pour que le projet de loi soit renvoyé au Sous-comité sur les enfants et les jeunes à risque du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées. Il n'y a pas meilleur endroit pour l'analyse de cette question.
Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Calgary-Centre demande que le sujet du projet de loi soit renvoyé à un comité permanent. Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): La période réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant expirée. Étant donné que la motion n'a pas été désignée comme pouvant faire l'objet d'un vote, l'article est rayé du Feuilleton.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, en avril dernier, j'ai posé ici une question au ministre des Affaires étrangères concernant les répercussions des sanctions économiques sur la population iraquienne. J'ai demandé au ministre de se décider à assurer la sécurité de la population de l'Irak, où plus de 500 000 enfants sont morts depuis 1990 à cause des sanctions inhumaines de l'ONU.
Quelque temps après, le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international a publié un rapport unanime et solide sur la question des sanctions en Irak.
Dans ce rapport, le comité permanent qui, je le signale à nouveau, se compose de députés de tous les partis représentés à la Chambre, exhorte vivement et unanimement le gouvernement à remédier à titre urgent à la tragédie humanitaire en cours en Irak.
Il signale en outre que, nonobstant l'adoption de la résolution 1284 du Conseil de sécurité, il faut chercher de façon urgente à faire dissocier les sanctions économiques des sanctions militaires en vue de lever rapidement les sanctions économiques dans le but d'améliorer sensiblement la situation humanitaire du peuple irakien tout en maintenant les aspects de l'embargo multilatéral nécessaires pour satisfaire aux impératifs de sécurité et contribuer à l'objectif global de désarmement régional.
Le comité réclamait aussi l'établissement d'une présence diplomatique canadienne en Irak et la poursuite l'étude plus large de la réforme du recours aux sanctions de manière à pouvoir mieux cibler les régimes et les forces militaires plutôt que les populations civiles.
C'est en 1990, soit il y a maintenant dix ans, que des sanctions ont été imposées à l'Irak. Ces sanctions ont eu des effets dévastateurs sur la population irakienne. Le comité des affaires étrangères signale qu'un groupe d'expert des Nations Unies mis sur pied par le conseil de sécurité a déclaré ceci:
le pays est passé d'une relative aisance à la pauvreté massive [...] le taux de mortalité infantile de l'Irak compte parmi les plus élevés au monde [...] la malnutrition chronique affecte un enfant sur quatre [...] seulement 41 p. 100 des habitants jouissent d'un accès régulier à une eau propre [...] la gravité de la situation humanitaire du peuple iraquien est indiscutable et ne saurait être exagérée.
J'exhorte à nouveau le gouvernement à donner une réponse positive au plaidoyer unanime du comité des affaires étrangères, qui compte notamment des députés libéraux, dont la députée de Brampton-Ouest—Mississauga, qui a été particulièrement éloquente sur la question.
[Français]
«Dix ans de sanctions cruelles, cela suffit.» C'est ce qu'a dit un groupe d'ONG du Québec, comprenant les Églises du Québec, les Artistes pour la paix, l'Association québécoise de coopération internationale et beaucoup d'autres groupes très respectés.
[Traduction]
Je lance à nouveau aujourd'hui un appel au secrétaire parlementaire. Qu'il se lève et dise aux Canadiens pourquoi le Canada est prêt à collaborer à cette politique que nul autre que l'ancien coordonnateur de l'aide humanitaire des Nations Unies en Iraq, Denis Halliday a qualifiée de génocidaire. En passant, M. Halliday prononcera une allocution à Vancouver samedi soir.
Il faut faire cesser le génocide. La mort d'enfants doit cesser. Les bombardements barbares qui tuent des civils innocents doivent cesser. Nous devons oeuvrer pour un désarmement régional. Nous devons chercher à faire régner la démocratie et les droits de la personnes. Il ne s'agit pas de soutenir Saddam Hussein, mais il existe beaucoup d'autres dictatures dans le monde. J'exhorte le gouvernement à adopter le rapport, à mettre fin aux sanctions et à agir sur-le-champ. Beaucoup trop de gens ont perdu la vie en raison de ces sanctions.
[Français]
M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, je tiens à féliciter tous les membres du Comité des affaires étrangères pour leur extraordinaire travail, entre autres dans le dossier de l'Irak.
Tout au long de 1999, le Canada s'est employé avec empressement à réintégrer l'Irak au programme du Conseil de sécurité de l'ONU, afin d'améliorer la situation de ce pays sur le plan humanitaire et de forcer le retour des inspecteurs de l'armement.
Comme vous le savez, l'idée de former, en janvier 1999, trois groupes d'experts chargés d'examiner l'état des questions humanitaires, du désarmement et des prisonniers de guerre koweïtiens venait du Canada. Les rapports des groupes d'experts ont joué un rôle déterminant dans l'élaboration d'une résolution du Conseil de sécurité en vue de résoudre l'épineuse question de l'Irak.
Le 17 décembre 1999, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté la résolution de portée générale sur l'Irak. Cette résolution porte sur le rétablissement de la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations Unies—parce qu'on va avec les Nations Unies dans ce cadre—un organisme de l'ONU, en remplacement de la Commission spéciale des Nations Unies, qui a quitté l'Irak au début de la campagne de bombardements en décembre 1998.
La résolution prévoit également des modifications à la nature et à la livraison des produits et fournitures humanitaires autorisés, en vertu du régime de sanctions actuel, et établit des conditions de désarmement claires pour la levée des sanctions.
L'adoption de la résolution a déclenché l'application à terme d'un certain nombre de dispositions humanitaires clés qui peuvent être mises en oeuvre sans concessions réciproques de la part des Irakiens.
Ces dispositions comprennent l'élimination du plafond sur les exportations de pétrole, l'ajout d'une fraction en espèces aux contrats humanitaires afin de faciliter leur exécution sur place, et l'accélération du processus d'approbation des produits et fournitures humanitaires.
Les dispositions d'ordre humanitaire contenues dans la Résolution 1284 contiennent des mesures concrètes visant à corriger la situation à laquelle la population irakienne fait face. La résolution contient également un plan de suspension et de levée des sanctions et d'investissement accru dans l'industrie pétrolière irakienne.
C'est un pas dans la bonne direction.
[Traduction]
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, je prends la parole ce soir pour revenir sur une question que j'ai posée à la ministre au sujet des modifications apportées à l'assurance-emploi, avant que la Chambre ne suspende ses travaux pour l'été. Comme vous le savez, monsieur le Président, c'est notre parti qui a dénoncé cette situation, qui a mené ce combat.
En gros, le gouvernement a modifié les règles d'admissibilité à l'assurance-emploi dans la partie ouest du Nouveau-Brunswick et dans d'autres régions du Canada. Le gouvernement a modifié les règles, de sorte que les gens devaient avoir travaillé 595 heures et non plus 420 heures. Autrement dit, il leur fallait travailler un mois de plus pour être admissibles aux prestations. Ceux qui ont eu droit aux prestations, et bon nombre en ont été privés en raison du ralentissement dans le secteur des pêches, dans l'industrie touristique de ma région et même dans le secteur agricole, cette année, ceux qui y ont eu droit recevaient des prestations pendant 18 semaines, et non pas 28 semaines, ce qui signifie que cet hiver, la plupart n'allaient toucher aucune prestation.
Notre caucus a dénoncé la situation et, il y a environ une semaine, la ministre a admis que le gouvernement avait fait une erreur et a rétabli les anciennes règles. Si le gouvernement a agi de la sorte, c'est seulement parce que notre parti a dénoncé la situation ici même à la Chambre des communes. Le gouvernement a adopté une position indéfendable. Il ne pouvait pas maintenir la décision qu'il avait prise et qui prévoyait l'instauration de nouvelles règles.
La lutte n'est pas encore finie. Ce que le gouvernement veut faire, c'est mettre progressivement en application les changements sur une période de quatre ans et rétablir ces changements draconiens que nous avons réussi à faire annuler.
Un certain nombre de choses pourraient toutefois se produire d'ici là. Il pourrait, et c'est à souhaiter, y avoir un changement de gouvernement. Autrement, nous allons sûrement assister à un changement au niveau ministériel. La ministre a prouvé à la Chambre des communes qu'elle ne comprend pas le reste du Canada. Supposons qu'elle comprend l'Ontario, une province industrialisée, mais elle ne comprend manifestement pas le Canada atlantique, les économies basées sur les ressources et les travailleurs saisonniers.
Le gouvernement punissait les travailleurs saisonniers. Où donc étaient les réformistes, les alliancistes? Ils sont restés silencieux. Ils ne se sont jamais manifestés dans le sud du Nouveau-Brunswick ou ailleurs dans le pays pour défendre les travailleurs saisonniers, les plus démunis des travailleurs.
Nous avons mené le bon combat et fait valoir des arguments tout ce qu'il y a de plus valable. J'ai organisé une assemblée publique dans ma circonscription. Nous avons réussi à réunir tous les politiciens de la place, indépendamment de leur allégeance politique. Sont venus tous les députés provinciaux représentant les gens de ma circonscription, la circonscription de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest. Nous avons réuni dans une même salle des employeurs, des employés, ainsi que des hauts fonctionnaires du ministère. La ministre, croyez-le ou non, n'a pas daigné être présente, mais elle a ainsi fait la preuve que ni elle ni son ministère ne comprennent les travailleurs saisonniers et l'importance d'une main-d'oeuvre saisonnière.
Je tiens à remercier publiquement tous ceux et toutes celles qui m'ont aidé dans ce dossier. Je tiens à remercier les députés provinciaux, les maires, les conseillers municipaux, les employeurs et les employés. Voyez ce qu'on peut faire quand on chante tous d'une même voix. Voyez ce que les gouvernements sont forcés de faire quand ils commettent une erreur.
Nous continuerons de soulever ce genre de questions et de tenir ce genre de débats à la Chambre des communes, l'endroit où il convient de le faire.
[Français]
Mme Raymonde Folco (secrétaire parlementaire de la ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, les nouvelles régions économiques de l'assurance-emploi reflètent la croissance de notre économie ainsi qu'un meilleur marché du travail.
Mais nous comprenons que les travailleurs saisonniers dans certaines communautés sont inquiets de ces nouvelles limites et nous sommes sensibles à ces inquiétudes. C'est pourquoi nous avons été flexibles avant de passer à l'action.
Le 13 septembre, le gouvernement a annoncé des mesures pour mettre en oeuvre graduellement les changements aux limites dans le Bas-Saint-Laurent, au Québec, et dans le nord-ouest du Nouveau-Brunswick.
Les réactions à ces changements ont été favorables. De fait, M. Norman Carrier, le porte-parole du Comité d'étude sur le travail saisonnier au Madawaska a dit, et je cite M. Carrier qui a écrit dans L'Acadie Nouvelle du 15 septembre dernier:
[...] ce qui a été présenté par le gouvernement fédéral est ce à quoi on s'attendait. Ce qui est bien également, c'est que le gouvernement fédéral a déclaré ses couleurs pour les trois prochaines années dans ce dossier.
Mais les défis qu'affrontent les travailleurs saisonniers nécessitent plus que des prestations d'assurance-emploi. Ils exigent la concertation entre les gouvernements, les employeurs, les collectivités, les syndicats et les individus afin d'améliorer la disponibilité des emplois.
C'est pourquoi nous travaillons, tant au niveau local qu'avec nos homologues provinciaux et territoriaux, pour développer des solutions permanentes. Plusieurs orientations sont possibles pour nous, la première étant un meilleur accès à la formation pour les travailleurs saisonniers; la deuxième étant—et là-dessus, j'invite l'honorable député de New-Brunswick-Sud-Ouest à amener ses commettants pour en discuter—une plus grande diversité économique dans la région; et la troisième, la mise en valeur des collectivités.
Ce que nous devons faire, c'est travailler ensemble afin de trouver des solutions efficaces à long terme.
[Traduction]
Le président suppléant (M. McClelland): La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à 14 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 42.)