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FINA Rapport du Comité

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Les horrifiantes attaques terroristes du 11 septembre ont changé la façon dont nous voyons le monde et dès lors, les anciennes préoccupations se sont évanouies.

Les audiences que le Comité a menées dans le cadre de ses consultations prébudgétaires témoignent de cette nouvelle réalité. Tous, groupe ou particulier, avaient travaillé fort pendant l’été à préparer des mémoires conformes à la demande du Comité, afin d’exposer en détail ce qu’ils estimaient nécessaire pour faire du Canada un endroit meilleur; or, quand ils ont finalement comparu, ils faisaient face à un monde transformé. Pratiquement tous ont eu la même réaction : tour à tour, les témoins ont souligné à l’intention au Comité qu’il faut accorder plus d’attention à l’amélioration de notre sécurité nationale. Ils ont compris, tout comme le reste de la population canadienne, qu’à une époque comme la nôtre, il faut mettre de côté certaines initiatives afin de nous pencher sur les urgentes questions de l’heure.

Il y a eu une troublante augmentation du nombre et de la gravité des actes terroristes partout dans le monde, y compris en Amérique du Nord. Le Canada est tout aussi vulnérable à ces actes.

Association canadienne des chefs de pompier

Surtout en période d’incertitude entourant l’économie et la sécurité nationale, l’État doit effectuer ses investissements en visant le meilleur rendement du point de vue de la société.

Assemblée des Premières nations

Les préoccupations relatives à la sécurité sont certes réelles et pressantes, mais un pays se construit à long terme, et non du jour au lendemain. Les témoins ont mis le Comité en garde contre le danger de perdre de vue l’objectif de la prospérité à long terme. Le matin du 11 septembre, nos yeux se sont posés sur un monde transformé, mais notre but ultime, soit d’améliorer le niveau de vie de la population canadienne, n’a pas changé. Les règles fondamentales de la saine gestion économique, qui visent à créer les conditions nécessaires à la prospérité de la population canadienne, restent aussi les mêmes.

La vision qu’a le Comité du budget repose donc sur ces deux impératifs : accroître l’actuel sentiment de sécurité des Canadiens tout en favorisant la prospérité future.

Enjeux touchant la sécurité

La sécurité nationale : la raison de sa priorité absolue

La sécurité nationale — qui relève des organismes militaires, policiers et de sécurité du Canada — est importante pour de nombreuses raisons, mais en particulier parce qu’elle assure la protection des Canadiens et les laissent libres d’élever leurs enfants et de vaquer à leurs occupations. D’un point de vue économique, la sécurité nationale est une forme de capital social : elle protège les conditions nécessaires au fonctionnement efficace de l’économie, ce qui permet aux Canadiens de s’occuper de leurs affaires. Un simple coup d’œil sur le chaos causé par les attaques terroristes — la perturbation de l’activité économique et les avions civils retenus au sol au Canada et aux États-Unis — permet de comprendre le rôle que joue la sécurité nationale. Or, avec la nouvelle menace qui plane, la sécurité nationale devient encore plus importante.

La sécurité physique et économique des Canadiens devrait être la première priorité du gouvernement en matière de politique budgétaire.

Manufacturiers et Exportateurs du Canada

Nous reconnaissons également que les événements récents ont modifié le climat économique et les priorités des Canadiens et nous appuyons totalement les priorités en matière de sécurité et de protection des citoyens.

Laurie Beachell, Conseil des Canadiens avec déficiences

La sécurité nationale sauvegarde les conditions nécessaires à la prospérité. Par exemple, le Canada dépend du transport aérien pour que les Canadiens gardent contact, pour déplacer des biens et des voyageurs de l’Île-du-Prince-Édouard vers la Colombie-Britannique ou la Californie. Il faut protéger l’infrastructure — routes, voies ferrées et voies maritimes — afin de permettre la circulation des personnes et des biens en toute sécurité. D’autres parties de l’infrastructure — comme les systèmes informatiques, les systèmes de paiement électroniques et les centrales électriques — doivent aussi être prises en considération. À la lumière des nouvelles menaces, l’accroissement des dépenses s’impose donc au chapitre de la sécurité nationale.

La sécurité nationale est aussi un véritable bien collectif : tous les Canadiens profitent des services de la police et de la défense nationale. Mais puisqu’il est impossible de facturer à chaque Canadien sa part de sécurité nationale, ce sont les gouvernements qui doivent s’occuper de la fournir. D’ailleurs, le secteur privé n’est pas grandement motivé à assurer cette sécurité, étant donné son caractère de bien collectif.

Sécurité aérienne

Un solide argument économique milite en faveur de la sécurité aérienne en tant que bien collectif. Rappelons qu’un bien collectif en est un qui est profitable pour toute la société et dont il serait coûteux et difficile de restreindre l’utilisation à certaines personnes seulement. Or, la plupart des personnes tuées lors des attaques terroristes du 11 septembre n’étaient pas en avion, mais étaient plutôt à leur bureau au World Trade Centre ou au Pentagone. La sécurité aérienne est donc manifestement importante pour tous, et non seulement pour les passagers et l’équipage. Partant du même argument, il s’ensuit que la sécurité et la fiabilité du transport aérien sont essentielles à notre bien-être national. Il en découle logiquement que le gouvernement doit participer à la sécurité aérienne. De plus, les mêmes arguments s’appliquent à la protection d’autres infrastructures essentielles, comme les barrages hydroélectriques et les centrales nucléaires.

Nous croyons que le gouvernement a un rôle à jouer dans l’offre et le financement de la sécurité [du transport aérien] dans une situation qui a transformé ce qui avait jusqu’ici été un problème propre aux lignes aériennes, et dont on ne faisait que peu état, en une grave question de sécurité nationale. David Paterson

Enfin, nous encourageons le gouvernement à renforcer l’importance du périmètre continental nord-américain, non seulement en raison des problèmes survenus depuis environ un an relativement au transport international et à la réglementation des armements, mais aussi parce que les États-Unis sont pour nous un important partenaire commercial, et qu’il nous faut veiller à ce qu’ils restent nos alliés, tant sur le plan économique qu’à des fins de sécurité.

Peter Smith, Association des industries aérospatiales du Canada

Le renseignement

D’après M. Tony Campbell, analyste de la sécurité au Canada, la collecte et l’analyse de renseignements prennent de plus en plus d’importance, mais la capacité d’analyse est sous-financée (le Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, a subi des compressions budgétaires de 28 % au cours des dix dernières années). Cité dans le Ottawa Citizen du 4 octobre, il a précisé que les analystes sont inondés d’une telle quantité d’information qu’ils ont de la difficulté à tout traiter.

Un des outils de collecte et d’analyse du renseignement est le Centre de la sécurité des télécommunications (CST). Son mandat est de fournir au gouvernement des conseils et un soutien spécialisés en matière de sécurité, en fonction des nouveaux besoins. À l’heure actuelle, le budget du CST s’élève à 107 millions de dollars, et le ministère versera 24 millions de dollars sur deux ans pour financer des mises à niveau essentielles en matière de technologie et d’information.

Selon M. Wesley Wark, analyste de sécurité internationale et professeur d’histoire internationale, le CST doit disposer de plus de ressources et d’une mise à niveau technologique importante pour offrir le même niveau de service que ses pendants aux États-Unis (l’Agence de sécurité nationale ou National Security Agency) et au Royaume-Uni (le Service gouvernemental d’écoute et de transmission ou Government Communications Headquarters). De plus, le CST doit repenser sa politique de procéder à la collecte par haute technologie au détriment de l’analyse. Mais par-dessus tout, il faudra décider si dans le monde actuel, le CST sera habilité à espionner à l’intérieur du Canada, ce que lui interdit actuellement la loi[34] .

Dans le cadre de sa réponse à l’attaque du 11 septembre, le gouvernement a annoncé des pouvoirs accrus pour le CST, lequel pourra, avec l’autorisation du ministre de la Défense, intercepter des communications entre un étranger et quelqu’un au Canada. À l’heure actuelle, le CST ne peut écouter que des communications à l’extérieur du Canada.

D’après le Comité, pour que les services du renseignement du Canada puissent faire plus, ils doivent disposer des ressources additionnelles pour s’acquitter de cette tâche. Il importe parallèlement que ces ressources supplémentaires soient utilisées le plus efficacement possible. En plus de recommander une augmentation des budgets de la GRC et du SCRS, le Comité exhorte les agences de sécurité canadiens et leurs partenaires à entreprendre une étude afin de trouver des façons de rendre leurs pratiques courantes plus efficaces, notamment par une meilleure coopération. La GRC devrait mener cette initiative.

Coordination

Pour bien accroître la sécurité, il faut plus de coordination entre les organismes de sécurité du Canada, à partir des Forces armées, de la GRC et du SCRS, jusqu’aux forces policières locales et provinciales.

D’après M. Douglas Bland, président des Ressources en défense à l’Université Queen’s, les organismes de sécurité nationale de prochaine génération doivent reposer sur trois principes : 1) les politiques et la planification de la défense et de la sécurité sont des activités interreliées et les opérations sont pratiquement continues; 2) on ne peut pas faire de distinction entre les questions de sécurité internes et internationales puisque les problèmes et les opérations se déroulent sans égard pour les frontières ou les juridictions; 3) les opérations de sécurité mèneront régulièrement à travailler ensemble les Forces armées canadiennes, les services policiers, les divers paliers de gouvernement, les organisations internationales ainsi que les fonctions diplomatiques, humanitaires, juridiques, logistiques et du renseignement[35].

M. Bland prône un mécanisme de sécurité continu relevant d’un seul ministre doté des pouvoirs nécessaires et agissant selon une hiérarchie claire des responsabilités afin de pouvoir formuler et gérer une politique de sécurité nationale et de coordonner des opérations de sécurité pluridimensionnelles au Canada et à l’étranger. Ce ministre doit être chargé d’unir les organismes de renseignement disparates du Canada, de créer un centre moderne d’opérations de sécurité nationale et de préparer à l’intention du Parlement des évaluations détaillées des menaces, des vulnérabilités et des ressources nécessaires. Le ministre doit alors recevoir les ressources proportionnelles à ses responsabilités et un personnel permanent qualifié pour aider à les gérer.

M. Wesley Wark préconise aussi un organisme central d’analyse du renseignement, disant que la documentation produite à l’heure actuelle par un tout petit cadre d’agents du renseignement caché au sein du Bureau du Conseil privé, aussi bonne soit-elle, n’exerce que peu d’influence.

Le gouvernement fédéral est en train de prendre des mesures à cet égard, bien que celles-ci ne suivent pas exactement les suggestions de M. Wark. L’honorable John Manley s’est vu confier un rôle de surveillance et de coordination et il s’est montré intéressé à créer une agence de sécurité extérieure.

Infrastructure

Nous estimons que le gouvernement doit aussi se préparer à d’éventuelles attaques terroristes au Canada. Soulignons à cet égard la création en février 2001 du Bureau de la protection des infrastructures essentielles et de la protection civile, créé afin que le Canada soit mieux préparé à réagir au défi des menaces asymétriques[36]. Le Bureau, qui englobe les fonctions de l’ancien service Protection civile Canada, agira comme chef de file à l’échelle nationale pour l’importante question de protection de l’infrastructure, et ce en partenariat avec les ministères et organismes fédéraux et provinciaux et le secteur privé. Sa mission est de promouvoir la sécurité physique et économique des Canadiens; à cette fin, il vise à accroître la capacité des particuliers, des collectivités, des entreprises et des gouvernements de gérer efficacement leur milieu physique et électronique. Son budget s’élève à 24 millions de dollars.

La nature de la menace terroriste nous oblige à repenser qui doit réagir, et comment. Les attaques terroristes en milieu urbain mettent en cause des agents biologiques ou chimiques, et les armes de destruction de masse placent les employés municipaux et provinciaux, comme les pompiers et les policiers, aux premières lignes. Dans le mémoire pratiquement prémonitoire qu’elle a soumis au Comité (le 8 août), l’Association canadienne des chefs de pompier a souligné que dans les premières heures qui suivent une attaque terroriste, les premiers intervenants (pompiers, policiers, ambulanciers et médecins) sont directement aux prises avec les résultats de l’attaque, sans grande aide extérieure. L’Association recommande par conséquent que le prochain budget contienne des fonds et un soutien pour les services d’incendie du Canada afin de leur permettre de se préparer aux actes de terrorisme pour y réagir de façon appropriée.

On ne sait pas si les forces municipales du Canada sont suffisamment préparées pour faire face à une attaque terroriste, mais comme le terrorisme relève de la sécurité nationale, le Comité estime que le gouvernement doit aider à assurer cet état de préparation. Comme nous le soulignons dans la section « Action du gouvernement à ce jour », ce dernier a déjà commencé à participer à la formation aux urgences des premiers intervenants. Avec ce fait présent à l’esprit, nous faisons écho à la recommandation de l’Association canadienne des chefs de pompiers de fournir plus de ressources afin d’aider à la formation des premiers intervenants municipaux et nous recommandons que le gouvernement travaille en collaboration avec les provinces et les municipalités pour faire en sorte que les premiers intervenants et les services médicaux du Canada soient suffisamment préparés pour faire face à une éventuelle attaque terroriste.

Défense nationale

Le Comité des finances s’intéresse depuis longtemps à la santé et à la viabilité financière des Forces armées du Canada. Dans son rapport sur les consultations prébudgétaires de 1999, intitulé Nouvelle ère … Nouveau plan, le Comité avait souligné que les Forces canadiennes, soumises tout à la fois à une multiplication des engagements et à des compressions des dépenses, « éprouvent de plus en plus de difficultés à suivre le rythme des progrès de la technologie militaire. Le Canada étant un fervent partisan des Nations Unies et étant donné notre longue tradition de missions de maintien de la paix, les Forces armées canadiennes se verront sans doute réclamer encore plus leur participation ».

Le Comité avait admis que ces compressions budgétaires nuisaient à nos engagements envers nos alliés et les missions de maintien de la paix des Nations Unies. Il avait donc écrit dans ses recommandations :

« Le Comité appuie les forces militaires du Canada, leurs traditions et leur rôle dans la promotion de la paix et de la sécurité. Il convient d’accorder les fonds voulus au soutien de ce rôle. Le Comité demande que le gouvernement du Canada élabore et mette en œuvre un programme quinquennal de revitalisation et de modernisation des Forces canadiennes qui accorde au ministère de la Défense nationale un budget représentant un pourcentage sensiblement plus élevé du PIB. »

Suite à la recommandation du Comité, le gouvernement a prévu, dans son budget 2000, une augmentation de 2,3 milliards de dollars jusqu’en 2002-2003 et le ministre de la Défense affirme que le gouvernement a versé 3 milliards de dollars au ministère de la Défense (MDN) au cours des trois dernières années.

Selon la Conférence des associations de la défense (CAD), le Canada continue de sous-financer ses forces armées. Dans un rapport intitulé Coincé entre les deux : Une évaluation de la capacité opérationnelle des Forces canadiennes, réalisé avant l’attaque du 11 septembre, la CAD constate qu’une importante partie du budget de la défense ne peut pas servir aux capacités militaires. En outre, le Canada ne consacre que 265 $ par habitant à la défense alors que la moyenne de l’OTAN atteint 589 $. L’étude conclut en soulignant que, malgré les récentes augmentations, une injection supplémentaire au budget de la défense de 1 milliard de dollars par année est nécessaire rien que pour freiner le déclin des Forces canadiennes. En outre, ces dernières se trouvent dans le pire de deux mondes : leurs capacités militaires classiques sont désuètes et les nouvelles sont trop coûteuses.

Toujours d’après la CAD, le Canada peut encore jouer un rôle viable dans les trois engagements fondamentaux énoncés dans le Livre blanc sur la défense de 1994, mais ce rôle est réduit. Sa coopération avec les États-Unis pour défendre l’Amérique du Nord présente de graves lacunes dans les trois services. Mais c’est sa contribution à la sécurité nationale qui présente les faiblesses les plus révélatrices. La participation du Canada à l’OTAN, aux Nations Unies et aux opérations de coalition n’est plus que symbolique, comme en témoignent les opérations dans les Balkans, en Érythrée et au Timor-Oriental.

La CAD a terminé son rapport Coincé entre les deux avant le 11 septembre, mais le Comité estime que ses conclusions sont encore plus valables à la lumière des nouvelles demandes que subissent nos forces. Il juge en outre que le Canada doit aller plus loin et veiller à ce que nos forces armées restent utiles à nos alliés; pour ce faire, il doit adopter la technologie la plus récente et restructurer nos armées afin qu’elles soient à même de faire face à des menaces comme le cyberterrorisme et la guerre nucléaire, biologique et chimique et d’appuyer l’antiterrorisme. Quand il a comparu devant le Comité, le ministre de la Défense nationale, M. Art Eggleton, a déclaré que certains éléments sont déjà en place, comme l’unité commando de la Force opérationnelle interarmées 2 et l’unité d’enseignement sur les armes nucléaires, biologiques et chimiques de la BFC Borden. « Tous ces secteurs font l’objet d’une étude, et nous sommes actuellement en train de revoir nos projets par rapport à chacun d’eux ».

M. Eggleton a informé le Comité que même avant le 11 septembre, le gouvernement était en train de remettre les forces armées à niveau et de revoir le Livre blanc sur la défense de 1994.

Le ministre a déclaré : « Bien entendu, nous n’avons pas encore toutes les réponses en ce qui concerne la crise actuelle. Par conséquent, nous devons procéder — et c’est ce que nous nous apprêtons à faire — à une analyse concernant la voie à suivre, analyse qui sera conduite à l’échelle du gouvernement. Cette analyse englobera donc l’ensemble des ministères et organismes dont le rôle consiste à garantir la sécurité des Canadiens. Je peux vous assurer que le ministère de la Défense nationale, en tant qu’instrument clé de la sécurité nationale, fera partie intégrante d’une évaluation prudente et équilibrée de nos besoins. En bout de ligne, il nous faudra faire des choix difficiles, et il faudra aussi des crédits supplémentaires — de la part non seulement de mon ministère mais de tous les Canadiens ».

Les troupes que le Canada a consenties à l’engagement mené par les Américains contre les forces et les partisans d’Oussama ben Laden représentent une importante proportion de notre capacité de combat (voir la section « Action du gouvernement à ce jour »). En dépit de cela, le rendement qu’offriront certains de nos équipements est douteux en raison de l’insuffisance des mises à niveau effectuées dans le passé. Si nous prenons au sérieux notre participation à cette entreprise militaire, il faudra y mettre le prix.

Le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants à la Chambre des communes en est venu à la même conclusion dans son rapport intérimaire déposé en novembre 2001, intitulé État de préparation des forces armées : Réponse à la menace terroriste. Ce rapport soulève en effet de graves inquiétudes concernant l’état de préparation des Forces armées canadiennes, et de nombreux témoins ont déclaré « qu’aujourd’hui, l’armée ne pourrait pas réunir une brigade au complet. En effet, certains [témoins] ont prétendu que, même si on rapatriait toutes les troupes canadiennes qui servent actuellement à l’étranger, le Canada ne serait toujours pas en mesure de respecter les engagements énoncés dans le Livre blanc sur la défense de 1994 ».

Le Comité des finances convient avec le ministre de la Défense qu’il faut des fonds supplémentaires. Cependant, l’affectation de fonds pour répondre aux nouveaux besoins en matière de sécurité ne doit pas faire dérailler les réalisations des budgets précédents, comme la réduction de la dette, le plan quinquennal de réduction fiscale et le réinvestissement dans les soins de santé. Comme nous l’avons déjà souligné, le gouvernement doit, dans la mesure du possible, trouver les fonds nécessaires à partir de programmes existants.

On ne peut affirmer avec certitude quel sera le coût final de cette guerre nouveau genre. Tout en admettant, comme nous l’avons fait précédemment, la nécessité d’injecter de nouveaux fonds, nous estimons nécessaire aussi de réorienter l’argent en place vers des activités qui conviennent mieux au monde d’aujourd’hui.

Le Comité sait qu’il n’est pas possible d’améliorer du jour au lendemain notre infrastructure en matière de défense et de sécurité. Ce projet prendra de nombreuses années. Nous exhortons par conséquent le gouvernement à considérer la sécurité nationale comme un important projet à long terme.

Le Comité recommande d’accélérer l’examen du Livre blanc sur la défense de 1994 afin de déterminer s’il est toujours pertinent, de remplacer plus rapidement l’équipement désuet et d’accroître les fonds versés au ministère de la Défense nationale.

Je crois avoir indiqué à plusieurs reprises qu’il me faudra plus de crédits, mais en même temps, nous avons l’obligation de faire en sorte que nos opérations soient aussi efficaces et efficientes que possible. L’honorable Art Eggleton
Nous disposons au Canada d’un plan antiterroriste […] nous devons continuer à améliorer ce plan, tout en nous rappelant qu’il n’existe pas de solutions miracles. L’honorable Art Eggleton

La sécurité en Amérique du Nord

Accroître la sécurité n’est pas quelque chose que le Canada peut ou doit faire seul. Il s’agit d’une cause commune avec les États-Unis qui nous poussera à travailler en collaboration avec eux, puisque nous croyons aux mêmes idéaux de base. En outre, les Américains appliqueront diverses mesures conçues pour accroître leur propre sécurité et ils pourront prendre les décisions à cet égard unilatéralement, en tenant compte de leurs seuls besoins, ou de façon bilatérale, avec le Canada, afin que tous les Nord-Américains en profitent.

La sécurité de la partie continentale des États-Unis est prioritaire pour ces derniers. Or, le bien-être économique du Canada dépend dans une large mesure du marché américain. Quel sera donc l’effet sur le Canada du besoin émergent de sécurité continentale aux États-Unis, et que peut faire le Canada face à leurs préoccupations? Comme l’a souligné M. David Stewart-Paterson lors d’une table ronde en 1999 sur les relations bilatérales Canada-États-Unis, les questions de défense et de sécurité mettent en lumière la nécessité d’amorcer au plus tôt des discussions bilatérales sérieuses sur la question de savoir si le Canada veut se retrouver sous la tente américaine ou à l’extérieur[37].

Une approche conjointe à la sécurité frontalière signifie que la frontière est ouverte au commerce, mais fermée à la terreur.

Pierre Pettigrew, ministre du Commerce international

Le Canada et les États-Unis ont toujours eu des préoccupations communes en matière de sécurité. En 1940, le président Roosevelt et le premier ministre Mackenzie King ont signé la Déclaration d’Ogdensburg qui reconnaît la nature indivisible de la sécurité continentale et promet assistance mutuelle en cas d’hostilités. Les États-Unis ont promis de ne pas rester passif si le Canada était attaqué et ce dernier s’est engagé à empêcher de servir de base à une attaque sur les États-Unis. La volonté de coopération canado-américaine en matière de défense a ainsi survécu pendant plus de 50 ans de bouleversements divers. Le système de Défense aérospatiale de l’Amérique du Nord qui comporte des stations d’alerte précoce est un exemple de cette coopération. Mais les événements du 11 septembre nous obligent à nous pencher de toute urgence sur quelques grands problèmes de sécurité.

Le plus grand défi économique auquel est confronté le Canada dans l’immédiat, c’est de maintenir la frontière ouverte. Un tiers de notre PIB résulte directement des exportations aux États-Unis. Soixante-dix pour cent de ces marchandises sont transportées par camion, le mode de transport le plus durement touché par les engorgements à la frontière. Le gros de ce commerce se fait avec des entreprises qui pratiquent le système de livraison juste à temps pour réduire les coûts de production. Pour que le Canada reste un endroit qui attire les investissements, les entreprises doivent continuer d’avoir confiance que la frontière ne sera pas un obstacle au mouvement efficient et en temps utile des marchandises.

Malheureusement pour le Canada, les États-Unis ont maintenant d’autres préoccupations concernant la frontière. Ils sont manifestement plus susceptibles d’être la cible d’attaques terroristes, ce qui les pousse à vouloir une frontière mieux protégée. Par contre, d’importants facteurs économiques poussent le Canada à ouvrir sa frontière, puisque notre prospérité dépend davantage du commerce. Quand il s’agit de frontière, les Canadiens et les Américains n’accordent peut-être pas chacun la même importance à la sécurité et à l’économie, mais les deux facteurs sont importants pour les deux pays. L’insécurité des États-Unis ne saurait servir les intérêts du Canada, et les Américains n’ont aucun avantage à tirer d’une complication des échanges avec leur principal partenaire commercial.

Si la frontière continue d’entraver indûment les mouvements légitimes de personnes et de marchandises, on risque de voir une baisse permanente des voyages d’affaires et des voyages d’agrément à destination du Canada en provenance des États-Unis, de même que des pertes au niveau des activités de fabrication et des investissements au Canada.

Nancy Hughes Anthony, Chambre de commerce du Canada

Sur le plan économique, la réaction du Canada aux attaques du 11 septembre et aux besoins accrus de sécurité doit avoir trois objectifs :

  • 1) rétablir la confiance des consommateurs, des entreprises et des investisseurs;
  • 2) garder la frontière ouverte aux échanges commerciaux avec les États-Unis;
  • 3) et renforcer la position du Canada comme un bon endroit où investir.

Le 11 septembre d’un point de vue économique

La confiance des entreprises

Un des avantages de l’Accord de libre-échange nord-américain a été de rendre le Canada plus attirant aux investisseurs étrangers souhaitant s’y établir pour servir le marché nord-américain. Or, il importe que ce genre de confiance de la part des investisseurs ne soit pas victime des événements du 11 septembre. Comme l’a souligné au Comité l’économiste M. Dale Orr, les attaques terroristes et les fermetures subséquentes de frontières ont « envoyé [un message] à ceux qui construisent des usines au Canada », c’est-à-dire qu’ils seront exposés à plus de perturbations s’ils montent leurs usines au Canada plutôt qu’aux États-Unis. En effet, une plus grande partie de la production totale devra traverser la frontière et sera touchée par toute mesure régressive appliquée à la frontière, alors que l’Accord de libre-échange avait servi à balayer ce genre de mesures.

Il s’agit donc là d’un message très inquiétant pour ceux qui se disent : Je veux monter une usine pour desservir le marché nord-américain. Devrais-je l’installer au Canada ou bien aux États-Unis? C’est une situation qui pourrait nous être extrêmement coûteuse à long terme. […] Je sais que la situation s’est de beaucoup améliorée, et j’espère que cela se maintiendra. C’est là la deuxième source de très grandes inquiétudes pour l’économie canadienne à l’heure actuelle. Dale Orr

Sur le plan microéconomique, la confiance et le sentiment de sécurité sont essentiels au bon fonctionnement de l’économie. M. Peter Smith (président-directeur général, Association des industries aérospatiale du Canada) a parlé au Comité de l’impasse dans laquelle se trouvent les compagnies aériennes en matière de sécurité : « Il faut rehausser la confiance des passagers, s’assurer qu’on fait tout en notre pouvoir pour améliorer la sécurité et leur redonner la confiance nécessaire. Ceci crée, c’est évident, une situation critique sur le plan des retards. Désormais, on commence à constater certaines choses, comme l’imposition d’embargos, par les sociétés, sur le transport aérien commercial à des fins de sécurité, de gains de temps et d’économies. Mais on peut aussi observer chez elles une tendance à utiliser les jets d’affaires pour transporter leurs cadres ».

Il est absolument prioritaire de faciliter la libre circulation des personnes et des marchandises tout en veillant à la sécurité des frontières.

Chambre du commerce du Canada

Comme le montre clairement le témoignage de M. Smith, la sécurité aérienne (et la sécurité en général) est aussi importante sur le plan de l’économie que de la sécurité. D’après M. Anthony P. Pollard (président, Association des hôtels du Canada), la sécurité de la personne est essentielle au bien-être de son industrie, comme à celle de nombreuses autres. « Il faut convaincre la population canadienne qu’elle est en sécurité, un point c’est tout, point final ». M. Pollard a ajouté : « Il faut donner à l’Agence canadienne des douanes et du revenu, à Citoyenneté et Immigration Canada, à Transports Canada et ainsi de suite, les fonds nécessaires. Nous devons renforcer nos relations avec les États-Unis en défendant nos valeurs ».

Garder ouverte la frontière entre le Canada et les États-Unis

Il est vital, pour notre prospérité, que la frontière canado-américaine demeure ouverte. Le Canada est un pays commerçant et notre principal partenaire commercial sont les États-Unis. Nous envoyons au moins 87 % de nos exportations au sud du 49e parallèle. Un tiers du PIB canadien est le résultat d’exportations vers les États-Unis. Le Canada doit convaincre les Américains que notre frontière commune ne constitue pas une menace à la sécurité. Nous devons continuellement leur rappeler qu’aucun des présumés terroristes du 11 septembre n’est entré aux États-Unis via le Canada.

L’intégration de nos deux économies est en cours depuis un certain temps. De plus en plus, les entreprises canadiennes et américaines chevauchent la frontière, répartissant bureaux et entreprises là où c’est le plus commode. D’après le ministère américain du Commerce, environ 43 % des échanges commerciaux entre les États-Unis et le Canada se font entre parties apparentées. L’industrie automobile est un exemple particulièrement probant des échanges internes et intrasectoriels, puisqu’elle représente plus de 30 % des exportations canadiennes vers les États-Unis et environ 25 % des exportations américaines vers le Canada.

Nous croyons que maintenant, plus que jamais, le gouvernement fédéral doit favoriser la création d’un contexte propice à la croissance économique. D’où la nécessité d’une politique frontalière canado-américaine qui permette au Canada de maintenir sa place dans une économie nord-américaine intégrée et d’un cadre financier qui donne aux consommateurs et aux investisseurs la confiance voulue pour faire rouler notre industrie.

Mark Nantais, Association canadienne des constructeurs de véhicules

Il est difficile de calculer les effets des retards à la frontière sur l’économie canadienne puisque le Canada vivait déjà un ralentissement économique. Le Conference Board estime à 1 % (aux taux annuels) la baisse des exportations au cours du troisième trimestre causée par ces retards. Mais même avant le 11 septembre, l’incessante croissance de la circulation transfrontalière rendait impossible le statu quo en matière de gestion de la frontière. Il est clair en outre qu’une frontière fermée aura un effet dévastateur sur notre économie.

Environ 70 % des marchandises que le Canada exporte vers les États-Unis transitent par camion; ce sont généralement des cargaisons à délai de livraison critique liées aux techniques de production « juste à temps » qui permettent aux entreprises de fonctionner avec des inventaires réduits, ce qui amoindrit les coûts. Pour qu’un tel système fonctionne dans un marché intégré nord-américain, il faut que la frontière du Canada avec les États-Unis reste ouverte. M. Christopher Sands, spécialiste des relations canado-américaines relevant du Center for Strategic and International Studies, met en lumière toute la gravité de cette question. Lors d’un exposé donné le 1er novembre à Ottawa, il a souligné que le 11 septembre, la frontière canado-américaine n’a fermé que pendant 20 minutes, mais pendant ce temps, 12 usines de fabrication d’automobiles ont fermé pour l’après-midi et des milliers de travailleurs ont subi une perte de salaire. Notre économie fonctionne d’heure en heure.

À la frontière canado-américaine, particulièrement aux passages routiers, nous devons adopter plusieurs mesures importantes qui faciliteront la circulation des biens à forte valeur et à faible risque, et permettre que les ressources soient canalisées vers les activités où le risque est plus élevé. »

Mark Nantais, Association canadienne des constructeurs de véhicules

L’importance de l’ouverture de la frontière montre à quel point nos intérêts sont liés tant sur le plan économique que sur le plan de la sécurité. Des millions d’emplois, au Canada et aux États-Unis, dépendent de l’efficacité des opérations frontalières. Or, qui dit efficacité dit procédures et installations matérielles propres à prévenir la congestion et mesures de sécurité suffisantes pour éviter d’avoir à imposer inutilement des inspections qui risquent d’être longues. Pour protéger les intérêts commerciaux du Canada et faciliter les mouvements de produits et de services à destination des États-Unis, il va falloir consentir des dépenses à deux chapitres, celui de la sécurité et celui des infrastructures physiques.

Les retards de livraison entraînent des coûts accrus pour les entreprises canadiennes qui doivent tenir des stocks plus élevés. D’après M. David Bradley (président-directeur général, Alliance canadienne du camionnage) : « Des secteurs comme l’automobile, qui représentent une si grande proportion de nos échanges avec les États-Unis et qui dépendent de systèmes juste à temps, tributaires du camionnage, ont augmenté leurs stocks de 5 %. C’est un coût essentiel dont il faudra tenir compte à un moment donné lors des décisions en matière d’investissement. Et quand les actuels contrats d’approvisionnement viendront à échéance, les investisseurs tiendront compte de la fiabilité de l’approvisionnement et de l’effet de la frontière. À ce moment-là, un dollar qui vaut 64 cents ne sera peut-être pas suffisant pour aider le secteur ».

Le Conference Board souligne également qu’une partie du transport routier transite maintenant par rail, puisque les trains ne subissent pas les mêmes retards à la frontière. Il semble finalement qu’un genre de prédédouanement des cargaisons acheminées par camions sera mis en place pour empêcher l’augmentation des coûts causés par les retards à la frontière, non seulement pour les exportateurs canadiens mais aussi pour les clients américains qui attendent la livraison d’articles du Canada. Néanmoins, tout nouveau problème de sécurité pourrait nuire sérieusement au commerce canado-américain.

La gestion efficace de la frontière préoccupe depuis longtemps le gouvernement. En 1995, le Canada, les États-Unis et le Mexique ont signé l’Accord sur la frontière commune, qui a « établi de nouveaux mécanismes pour gérer les mouvements transfrontaliers de produits et de personnes, […] la promotion du recours à des installations conjointes ou communes à la frontière et l’adoption de technologies nouvelles en vue de détecter les drogues et faire l’inspection des voyageurs à distance[38] ».

Pour ce qui est des allégations non fondeés relatives aux préoccupations américaines en matière de sécurité, le secrétaire au Trésor américain, Paul O’Neill, a déclaré : « Nous conduirons ceux qui font courir ces rumeurs aux frontières mêmes et leur prouveront qu’ils ont tort. »

Citons à titre d’exemple des nombreuses mesures économiques prises ou envisagées en octobre 2000, la signature par le ministre des Transports, M. David Collenette, d’un protocole de coopération, avec le secrétaire américain des Transports de l’époque, M. Rodney Slater, afin de renforcer la collaboration sur les questions de transport de surface, dans le but de coordonner les efforts et d’établir des priorités pour les projets frontaliers. Lors d’un discours prononcé le 20 juin 2001 au Forum sur le crime transfrontalier Canada-États-Unis, le solliciteur général, Lawrence MacAuley, a déclaré : « Nous avons maintenant un nombre sans précédent d’étroits partenariats », et il a parlé des nombreuses enquêtes d’exécution de la loi, des groupes de travail regroupant de multiples agences ou même du partage quotidien d’information sur diverses questions de criminalité et de sécurité. La relation entre le Canada et les États-Unis est marquée depuis longtemps au sceau de la coopération. Or, cet esprit de coopération doit se poursuivre, maintenant plus que jamais, pour les questions économiques et de sécurité.

D’après le Montreal Gazette, de nombreux spécialistes de l’immigration estiment qu’il est souvent plus facile pour les étrangers d’obtenir un visa pour entrer aux États-Unis qu’au Canada. Les données du ministère de l’Immigration révèlent que les demandeurs d’asile qui revendiquent le statut de réfugié en arrivant au Canada ont le plus souvent voyagé d’abord aux États-Unis. C’était le cas, il y a dix ans, pour 37 % de tous les demandeurs d’asile, mais cette proportion a atteint 63 % l’an dernier. La proportion est encore plus élevée dans le cas de ceux qui provenaient de pays où l’organisation de ben Laden est active. Il y a cinq ans, 56 % d’entre eux arrivaient au Canada via les États-Unis, et ce chiffre a maintenant atteint 72 %[39]. Il est donc absolument faux de croire que le Canada est nécessairement le maillon faible de notre sécurité commune.

Besoins communs de sécurité

Une plus grande sécurité frontalière est en soi un objectif louable. Le Canada pourrait très bien être la cible d’actes terroristes, bien que la probabilité soit faible d’après les spécialistes de la sécurité et selon le rapport déposé en 1999 par le Comité spécial du Sénat sur la sécurité et les services de renseignements.

Selon le secrétaire au Trésor américain, Paul O’Neill, le gouvernement américain « a convenu de dépenser les sommes nécessaires à l’amélioration des procédures aux douanes et des mesures de sécurité pour mettre un terme aux retards aux frontières causés par le renforcement de la sécurité depuis le 11 septembre. »

Le Comité aimerait se concentrer sur la dimension économique de la sécurité à la frontière. Comme nous l’avons déjà souligné, nos exportations vers les États-Unis représentent un tiers de notre PIB, de sorte qu’il est essentiel au bien-être du Canada de garder ouvert les postes frontaliers terrestres. Il faudra pour cela pouvoir compter sur la coopération des États-Unis, puisque leurs douaniers sont responsables de l’entrée de biens et de personnes. Or, les États-Unis ont déjà augmenté le nombre de douaniers à la frontière. S’il est vrai qu’un accroissement des ressources peut faciliter la libre circulation à la frontière, elle peut tout aussi bien nuire en resserrant les mesures de sécurité. Le ministre des Finances, M. Paul Martin, nous a mis en garde contre cette éventualité lors d’un récent discours prononcé à Ottawa : « L’un des objectifs visés par les terroristes est de faire en sorte que les gouvernements transforment leurs frontières en barrières — bref, qu’ils mettent en place des murs derrières lesquels les peuples vivront dans la peur et les économies stagneront. » Le Canada doit donc prendre les mesures voulues pour assurer la confiance dans la sécurité de sa frontière.

À notre avis, il faut faire en sorte que les Américains continuent de faire confiance aux procédures de vérification canadiennes. Un des solutions consiste à mettre l’accent sur le périmètre externe. Le concept est encore vague, mais on peut se l’imaginer comme une façon d’assurer le même niveau de sécurité des personnes ou des marchandises où qu’ils entrent en Amérique du Nord, que ce soit par voie de la mer à Halifax ou par voie aérienne à Los Angeles, de façon que tous les Nord-américains soient convaincus qu’un point d’entrée ne présente pas plus de risque s’il est situé au Canada que s’il est aux États-Unis. Ce ne sont pas les méthodes ou les techniques utilisées pour assurer un niveau de sécurité uniforme qui importent, mais bien les résultats, c’est-à-dire l’équivalent, en matière de sécurité, de la gestion de la qualité totale. D’un point de vue économique, des vérifications plus rigoureuses aux aéroports et aux ports de mer nord-américains faciliteront les passages à la frontière entre le Canada et les États-Unis.

Il est nécessaire maintenant aussi que le gouvernement prévoit clairement d’aborder les questions touchant la gestion efficace de la frontière canado-américaine. Je ne saurais trop insister sur l’importance, voire sur l’aspect critique, de cette question pour nos membres, et pas seulement pour ceux qui habitent les villes frontalières, mais bien pour l’ensemble de l’économie. L’enjeu ici est une baisse continue au Canada des affaires et du tourisme en provenance des États-Unis, mais aussi la perte possible des investissements manufacturiers et futurs si les stocks et les voyageurs commerciaux légitimes ne peuvent pas traverser la frontière facilement. »

Nancy Hughes Anthony, Chambre de commerce du Canada

Le Comité estime que le Canada peut, pour resserrer la sécurité à la frontière, se montrer plus vigilant lors des vérifications de sécurité, peut-être en recourant davantage à la technologie. Cette mesure n’éliminerait pas la frontière mais permettrait d’améliorer la circulation. Le personnel de l’Agence des douanes et du revenu du Canada et de Citoyenneté et Immigration remplissent bien leurs fonctions, mais il doit absolument recevoir les outils, l’effectif et les fonds nécessaires pour assurer une meilleure sécurité à la frontière. Des témoins ont notamment suggéré que le Canada, pour surveiller plus efficacement la frontière, ait davantage recours à la technologie et au prédédouanement.

Il existe plusieurs solutions pour accélérer les passages entre les deux pays, y compris une plus grande utilisation du prédédouanement. M. Serge Charette (président national, Union Douanes Accise) a recommandé au Comité « qu’on établisse des voies spéciales pour les résidents canadiens qui retournent au Canada, ou peut-être pour les résidents de l’Amérique du Nord qui retournent en Amérique du Nord. Il y aurait d’autres voies où on s’occuperait des passeports et des questions d’immigration. Nous pourrions nous assurer que les personnes dans ces kiosques-là, ou à ces points d’entrée-là, reçoivent plus de formation dans les domaines voulus et soient bien équipées ».

Étant donné l’importance pour le bien-être économique du Canada d’un service efficace à la frontière, et compte tenu des préoccupations légitimes des États-Unis en matière de sécurité, le Comité recommande que le gouvernement apporte les améliorations nécessaires aux modalités à la frontière, aux douanes et à l’immigration pour protéger les intérêts économiques vitaux du Canada. En outre, le Comité recommande des mises de fonds dans les infrastructures afin de faciliter les mouvements des marchandises et des personnes à la frontière. Ainsi, nous protégerons nos intérêts commerciaux tout en permettant l’application efficace des nouvelles mesures de sécurité.

Action du gouvernement à ce jour

Le Comité attend et préconise une attention soutenue mais félicite dès maintenant le gouvernement de sa réaction jusqu’à ce jour à la tragédie du 11 septembre, réaction qui combine judicieusement mesures législatives et projets de dépenses.

Dépenses

On ne sait pas encore exactement quelle forme prendront les dépenses consacrées à la sécurité nationale, mais le gouvernement a déjà annoncé une première injection de 280 millions de dollars en fonds nouveaux dans le cadre de son Plan antiterrorisme. Ce plan porte à 1,8 milliard de dollars la somme que le gouvernement du Canada a investi dans les services policiers, la sécurité et le renseignement depuis le budget 2000.

Les nouvelles dépenses sont réparties comme suit :

54 millions de dollars pour les nouvelles mesures visant à renforcer la capacité du Canada de prévenir et de déceler les menaces à la sécurité nationale, nouvelles ou existantes, et d’y réagir. Ces mesures comprennent :

  • 35 millions de dollars pour améliorer le soutien àl’analyse, au partage de renseignements et aux opérations comme les services médico-légaux touchant la criminalité technologique.
  • 5 millions de dollars pour la protection de personnes et de sites désignés au Canada, s’ajoutant au récent redéploiement de 2 000 agents de la GRC à des fonctions de sécurité nationale.
  • 4,9 millions de dollars au ministère du Solliciteur général pour améliorer le Réseau canadien d’information pour la sécurité publique (RCISP) qui assurera le lien entre les organismes de justice pénale et d’autres agences au Canada et le Programme de préparation opérationnelle en matière de lutte contre le terrorisme, afin d’aider les organisations locales, régionales et nationales à mieux se préparer à d’éventuelles attaques.
  • 9 millions de dollars qui serviront immédiatement à répondre aux besoins de dotation dans les secteurs prioritaires afin de mieux coordonner les interventions en matière d’application de la loi et de mieux cibler l’activité criminelle transfrontalière; c’est-à-dire :
    • les équipes intégrées de sécurité nationale (EISN) chargées de recueillir, d’échanger et d’analyser les renseignements et d’accroître les capacités d’application de la loi, et
    • les équipes intégrées de la police desfrontières (EIPF) chargées d’accroître l’intégrité de la frontière.

Quelque 10,25 millions de dollars ont été attribués à l’amélioration des activités de sécurité dans les aéroports, notamment :

  • l’achat de nouvel équipement à l’usage de la GRC dans les aéroports et les grands centres, aux passages frontaliers et aux ports;
  • l’achat de technologie de conversion de fiches d’empreintes digitales pour moderniser le système canadien de casiers judiciaires;
  • l’accroissement de la capacité du Groupe tactique d’intervention de la GRC d’entreprendre des activités d’intervention tactique.

Sur le plan de l’immigration, le gouvernement a annoncé 49 millions de dollars pour accélérer l’application d’une stratégie de sécurité en cinq parties pour le système de citoyenneté et d’immigration du Canada. Ces mesures comprennent :

  • Environ 18 millions de dollars pour de nouvelles cartes d’identité de haute technologie remises aux immigrants admis au Canada. La carte d’identité plastifiée avec photo — semblable à un permis de conduire ou à une carte d’assurance-santé — remplacera le document papier remis actuellement à tous les immigrants admis au Canada, aussi appelés résidents permanents. Le Comité permanent du développement des ressources humaines de la Chambre des communes a déjà examiné la possibilité de créer des cartes « intelligentes » de NAS (numéro d’assurance sociale) et, en particulier, leur utilisation éventuelle comme carte d’identité nationale. Les conclusions tirées de cette étude pourraient permettre d’établir un modèle de cartes sécuritaires prouvant le statut des nouveaux immigrants. Cette preuve de statut facilitera le voyage international ainsi que l’accès aux services au Canada. Date d’achèvement visé : juin 2002. L’administration du programme coûtera probablement entre 5 et 10 millions de dollars par année. Le Comité recommande que le gouvernement prenne des mesures efficaces pour empêcher la fraude en matière d’identité; ces mesures doivent cadrer avec les objectifs des recommandations 8 et 14 du rapport unanime du Comité du développement des ressources humaines en date de mai 1999 concernant le système de numéros d’assurance sociale.
  • Contrôle de sécurité au début du processus de détermination du statut de réfugié.
  • Capacité accrue de détention.
  • Intensification des mesures d’expulsion.
  • Embauche de nouveaux employés pour mettre en œuvre les mesures de sécurité renforcées aux points d’entrée.

Des ressources additionnelles, dont 9 millions de dollars pour des employés supplémentaires, seront versées en vue de mécanismes clés d’application, comme l’examen et les vérifications de sécurité aux points d’entrée, des vérifications plus approfondies des revendicateurs du statut de réfugié déjà au Canada et l’augmentation des cas de détention et d’expulsion.

Presque 91 millions de dollars pour l’achat de nouvel équipement et des activités de soutien dans les aéroports canadiens, afin que le système d’aviation canadien reste parmi les plus sûrs au monde.

  • 55,7 millions de dollars pour l’achat de systèmes avancés de détection d’explosifs et des capacités connexes de pointe en matière de sécurité électronique pour les aéroports canadiens.
  • Plus de 3 millions de dollars afin de déployer 27 inspecteurs supplémentaires de la sûreté aéroportuaire au Canada et pour le renforcement du pouvoir de réglementation afin de réagir aux nouvelles menaces à la sûreté qui surgissent ainsi que pour appuyer la mise en œuvre de nouvelles technologies grâce à des programmes de formation des employés.
  • 750 000 $ pour une analyse des méthodes et des technologies perfectionnées et émergentes servant aux opérations de sûreté aéroportuaire, notamment la biométrie.
  • 6 millions de dollars pour des systèmes technologiques et d’information de pointe afin de mieux relier les agents de première ligne aux banques de données des douanes et à celles des autres organismes d’application de la loi, tant à l’étranger qu’au pays.
  • 6 millions de dollars pour des technologies, telles que des appareils de radioscopie, pour faciliter un meilleur contrôle des biens.
  • 9 millions de dollars pour 130 agents des douanes supplémentaires, principalement aux ports de mer et aux aéroports.
  • 8 millions de dollars pour du nouvel équipement, tel que des scanners à l’usage de la GRC aux aéroports, aux passagers frontaliers, aux ports et aux bureaux, afin de permettre la transmission électronique et l’analyse des empreintes digitales, des empreintes de paume de la main et des photographies.
  • 1,5 million de dollars pour l’achat de technologies de conversion des fiches d’empreintes digitales pour moderniser le système canadien de casiers judiciaires.
  • Un investissement de 770 000 $ pour accroître la capacité de l’Équipe d’intervention d’urgence de la GRC à entreprendre des activités d’intervention tactique.

De plus, 12 millions de dollars seront versés chaque année à l’Agence des douanes et du revenu du Canada afin de répondre aux besoins en personnel liés à la sécurité du public et aux programmes antiterroristes.

Du montant total de 280 millions, 37 millions de dollars iront au Centre de la sécurité des télécommunications (CST). Cette injection accroîtra du tiers environ le budget du CST, qui s’élève actuellement à 106 millions de dollars par année. Ces fonds comprennent :

  • 26 millions de dollars pour mettre à niveau la technologie de l’information,
  • 6 millions de dollars pour appuyer la recherche et le développement et
  • 5 millions de dollars pour lutter contre les menaces électroniques.

Environ 10 millions de dollars iront au SCRS pour mettre à niveau l’équipement spécial et accroître sa capacité d’enquête et d’analyse.

En dernier lieu, il convient de souligner que des 280 millions de dollars, 64 millions ont été attribués à la GRC.

Dépenses additionnelles

En plus de ce montant, le gouvernement a aussi annoncé ce qui suit :

10 millions de dollars de plus seront versés cette année au Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada. Le Centre a été créé en juillet 2000 et a pour mandat de recueillir, d’analyser, d’évaluer et de divulguer de l’information afin d’aider à détecter, à prévenir et à décourager le blanchiment d’argent. Il fonctionne indépendamment des organismes d’application de la loi. À partir du 8 novembre 2001, le Centre commencera à recevoir des rapports d’opérations suspectes de la part d’institutions financières et de leurs intermédiaires, il analysera l’information soumise et il divulguera aux forces policières et autres autorités les soupçons de blanchiment d’argent en vertu de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité. Le projet de loi C-36 prévoit d’ailleurs d’élargir le mandat du Centre.

16 millions de dollars pour aider à répondre aux besoins des réfugiés afghans et des personnes déplacées dans la région, ce qui comprend :

  • 1,5 million de dollars pour l’aide alimentaire,
  • 1,5 million de dollars pour le Comité international de la Croix-Rouge,
  • 1,2 million de dollars pour le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés,
  • 500 000 $ pour CARE Canada et
  • 300 000 $ pour le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies.

160 millions de dollars à l’industrie aérienne en guise de compensation pour les avions cloués au sol le 11 septembre, dont 105 millions versés à Air Canada. Le reste a été partagé entre les compagnies concurrentes.

Une garantie d’emprunt pouvant atteindre 75 millions de dollars en vue des problèmes de trésorerie que vit Canada 3000, la deuxième plus grande compagnie aérienne au Canada et un concurrent important dans l’industrie aérienne canadienne[40].

20 millions de dollars pour aider la Commission canadienne du tourisme à faire face aux effets du 11 septembre sur l’industrie touristique. De ce montant, 12 millions viseront les États américains bordant la frontière.

Nous appuyons le versement ponctuel de 20 millions de dollars à la Commission canadienne du tourisme annoncé par le gouvernement, pour promouvoir les voyages au Canada auprès des Canadiens et des États américains bordant la frontière. Randall M. Williams, président, Association canadienne des agents de voyages

En réponse à la possibilité de guerre biologique, le gouvernement a aussi annoncé 11,59 millions de dollars en vue de mesures pour améliorer la sécurité de la santé des Canadiens. Ce montant comprend :

  • 5,62 millions de dollars pour acheter des antibiotiques afin de traiter les personnes exposées à des agents biologiques comme le bacille du charbon et des antidotes chimiques pour ceux qui sont exposés à des produits chimiques ou des gaz. Ces achats viendront s’ajouter au stock existant de produits pharmaceutiques dans la Réserve nationale de secours;
  • 2,24 millions de dollars pour l’achat de capteurs et de matériel de détection pour les principales installations au Canada et l’établissement d’une base de données dans laquelle figureront des renseignements permettant de mieux intervenir à la suite d’incidents radionucléaires de nature terroriste;
  • 2,12 millions de dollars pour améliorer un réseau pancanadien de laboratoires et mieux les équiper avec les appareils nécessaires pour diagnostiquer rapidement les agents biologiques;
  • 1,61 million de dollars pour dispenser une formation en intervention d’urgence au personnel d’intervention d’urgence de première ligne afin qu’il puisse mieux reconnaître, diagnostiquer et traiter les maladies suspectes résultant d’un acte terroriste.

Mesures législatives

Le programme législatif antiterroriste du gouvernement n’est pas complet, mais sa principale mesure législative à ce jour est le projet de loi C-36, Loi antiterroriste, lequel, une fois adopté, modifiera plusieurs lois et appliquera de vastes changements au système pénal canadien. Le projet de loi :

  • Définit pour la première fois « l’activité terroriste ».
  • Prévoit une liste de groupes terroristes que dressera le cabinet fédéral. Il sera illégal de participer à un groupe inscrit ou d’aider à le financer. La liste sera revue tous les deux ans par le solliciteur général.
  • Établit des peines d’emprisonnement à vie pour quiconque donne des instructions à quelqu’un de mener une activité terroriste; des peines maximales de 14 ans pour quiconque facilite des activités terroristes; des peines maximales de 10 ans pour la participation à une activité ou à un groupe terroriste ou à quiconque donne refuge à des terroristes ou aide à les financer. Les peines imposées pour de telles infractions peuvent être consécutives. Toute personne coupable d’un acte criminel qui constitue une activité terroriste est passible d’emprisonnement à vie.
  • Oblige les personnes reconnues coupables d’actes terroristes à purger la moitié de leur peine, plutôt que le tiers comme c’est le cas habituellement, avant d’être admissibles à la libération conditionnelle.
  • Autorise la police à effectuer des « arrestations préventives » contre des personnes susceptibles de commettre un acte de terrorisme. La personne ainsi arrêtée comparaîtra devant un juge dans les 24 heures et pourra être détenue pour un maximum de 72 heures. Le procureur général du Canada et les procureurs généraux de toutes les provinces de même que le Solliciteur général du Canada et les ministres provinciaux chargés de la sécurité publique feront rapport une fois par an sur les arrestations préventives dans leur secteur de compétence.
  • Permet des « investigations » par lesquelles la police peut obliger quelqu’un possédant de l’information sur une activité terroriste à comparaître devant un juge et à répondre aux questions. Le procureur général du Canada et les procureurs généraux de toutes les provinces de même que le Solliciteur général du Canada et les ministres provinciaux chargés de la sécurité publique feront rapport une fois par an sur les investigations de ce type dans leur secteur de compétence. Les dispositions du projet de loi C-36 concernant les arrestations préventives et les investigations sont assujetties à une disposition de temporarisation de cinq ans, à moins que la Chambre des communes et le Sénat ne votent pour les reconduire.
  • Autorise la police à obtenir des mandats de surveillance d’un an à l’égard de présumés terroristes, alors que la limite actuelle est de 60 jours. L’obligation qui est faite actuellement d’informer une cible qu’elle a fait l’objet de surveillance pourrait être assortie d’un délai plus long, soit de trois ans.
  • Facilite l’obtention par la police de mandats pour l’écoute électronique.
  • Augmente les pouvoirs du Centre de la sécurité des télécommunications, lui permettant d’intercepter des communications même quand l’un des interlocuteurs est canadien.
  • Crée un mécanisme d’examen permettant aux groupes inscrits de faire appel de leur inclusion dans la liste du solliciteur général. La liste des groupes terroristes sera revue tous les deux ans.
  • Rend plus facile de refuser ou d’enlever le statut d’organisme de charité à ceux qui appuient des groupes de terroristes, en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu.
  • Renforce les mesures contre les crimes motivés par la haine. Crée une infraction assortie d’une peine maximale de dix ans d’emprisonnement pour les méfaits visant les biens appartenant à un organisme religieux. Il sera aussi plus facile de supprimer la propagande haineuse sur Internet.
  • Modifie la Loi sur les secrets officiels afin de tenir compte des nouvelles technologies électroniques et de lutter contre les activités de collecte de renseignements réalisées par des puissances étrangères et des groupes terroristes.
  • Modifie la Loi sur la preuve au Canada pour protéger l’information obtenue d’agences étrangères de renseignement utilisée dans une cour canadienne.
  • Modifie la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité afin d’autoriser le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada à détecter les opérations financières qui pourraient constituer des menaces à la sécurité du Canada et à divulguer l’information au SCRS.
  • Modifie la Loi sur les armes à feu afin d’autoriser l’entrée au Canada d’agents de sécurité armés à bord des avions, principalement en provenance des États-Unis.
  • Étend aux actes terroristes les dispositions relatives aux prélèvements pour analyse génétique et à la banque de données génétiques.
  • Prévoit un examen de la loi dans trois ans.

Le 25 octobre, le Parlement a adopté le projet de loi S-23, Loi modifiant la Loi sur les douanes et d’autres lois en conséquence. Bien que le texte ait été déposé au Sénat bien avant les attaques du 11 septembre, il contient d’importantes mesures permettant de renforcer la capacité de contrôle du Canada à la frontière.

Le financement, essentiel à l’économie légitime, est tout aussi vital aux organisations terroristes. Si on leur coupe les fonds, elles seront affaiblies. Le 2 octobre, le ministre des Finances, M. Paul Martin, et le ministre des Affaires étrangères, M. John Manley, ont mis en application des dispositions réglementaires rigoureuses ayant pour objet de supprimer le financement du terrorisme au Canada. Le règlement dresse la liste des personnes et des organisations qui ont commis des actes terroristes, ont tenté d’en commettre, y ont pris part ou en ont facilité l’exécution, il gèle les avoirs des groupes et organismes inscrits sur cette liste, il interdit la collecte de fonds pour fins de terrorisme et il oblige toute personne ou institution financière à déclarer toute opération portant sur des avoirs des groupes ou organismes inscrits. Ces dispositions mettent en œuvre des mesures clés prévues dans la résolution 1373 des Nations Unies, adoptée à l’unanimité par le Conseil de sécurité des Nations Unies le 28 septembre 2001. Le ministre des Finances, Paul Martin a aussi dit que le gouvernement fédéral a gelé des avoirs d’une valeur de 150 000 $ jusqu’à ce jour dans le but d’interrompre le financement des réseaux terroristes.

Ces dispositions réglementaires s’ajoutent au Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada, conçu pour supprimer le blanchiment d’argent, puisque entre 5 et 17 milliards de dollars sont recyclés chaque année au Canada.

Dispositions militaires

En guise d’appui à la campagne américaine contre le terrorisme, le gouvernement s’est engagé à déployer 2 000 membres des forces armées (y compris un petit contingent de la Force opérationnelle interarmées 2, nos spécialistes antiterroristes), six navires et six aéronefs qui se rendront au Moyen-Orient. Cela représente le plus important déploiement de Forces canadiennes depuis la guerre de Corée.

De plus, des chasseurs CF-18 patrouillent le ciel autour des principaux centres urbains afin d’empêcher les pilotes de dévier de leurs plans de vol et, d’après les rapports des médias, des agents du SCRS travaillent déjà à l’aéroport Pearson pour empêcher les terroristes de pénétrer au Canada. Des agents du renseignement travaillent aussi aux postes frontaliers de Niagara Falls et de Windsor et espèrent établir leur présence dans tous les aéroports et postes frontaliers du pays. Le Canada envisage également la possibilité de placer des agents dans des aéroports outre-mer pour détecter les éventuels revendicateurs du statut de réfugié munis de faux documents.

Options pour la gestion de la frontière : le but ultime est l’efficacité

La préoccupation première du Canada est d’assurer la libre circulation de biens et de services à la frontière canado-américaine, sans délai et sans imprévu. Or, le succès de l’ALENA avait commencé à exercer des pressions à la frontière bien avant le 11 septembre. Les deux tiers des biens qui passent du Canada aux États-Unis traversent au sud de l’Ontario, et le pont Ambassadeur à Windsor est le principal portail commercial du Canada. Ces points d’entrée sont déjà victimes de congestion en raison des volumes élevés et d’une infrastructure désuète et inadéquate. L’inefficacité du traitement contribue aussi à la congestion. Ainsi, 20 % des camions qui traversent la frontière sont vides et un système de prédédouanement pourrait accélérer considérablement la circulation[41]. De la même façon, les transpondeurs et autres appareils de haute technologie pourraient permettre aux transporteurs à grand volume et à faible risque de passer rapidement à la frontière.

Face à l’intégration économique mondiale et à la compétitivité, des relations transfrontalières harmonieuses sont essentielles à la vitalité économique des deux plus importants partenaires commerciaux au monde.

Pierre Pettigrew, ministre du Commerce international

Ces mesures pourraient aider beaucoup à accélérer le franchissement frontalier tout en assurant la sécurité, mais il reste que l’infrastructure et les corridors frontaliers ont au moins autant d’importance. Quarante pour cent des biens commerciaux traversent à Windsor ou Sarnia, et un autre tiers passe par la région du Niagara. Ces quelques postes accueillent de très grands volumes de circulation (40 millions de passages à Détroit, 30 millions à Buffalo et 20 millions à Seattle). La situation tourne facilement à la congestion, surtout que les installations sont désuètes (30 ans à Windsor-Détroit) et que les autoroutes (I-94 à Détroit) tombent en décrépitude. Comme l’a affirmé au Comité M. David Bradley de l’Alliance canadienne du camionnage, ce sont-là les nouvelles rivières du commerce. Il est essentiel que l’on continue d’y circuler librement.

Il y a donc fondamentalement deux façons de régler la congestion frontalière. L’une consiste à améliorer l’infrastructure, soit les routes menant à la frontière et les passages comme les ponts et les tunnels. L’autre consiste à rendre plus efficace le processus de traitement à la frontière.

Les partisans du libre-échange font valoir les réductions tarifaires que permettent de tels accords, mais il y a d’autres coûts importants. Selon le Conference Board of Canada, même avant le 11 septembre, le coût moyen non tarifaire à la frontière pouvait représenter environ 5 % de la facture finale d’un produit donné et même atteindre entre 10 et 13 % pour les industries plus vulnérables aux importations[42]. Conscients de cette situation, les agents canadiens et américains ont convenu d’élaborer un plan d’action concret afin de ramener la circulation frontalière à ce qu’elle était avant le 11 septembre et même de l’améliorer[43].

Lorsque j’étais industriel, je n’ai jamais pensé que vos frontières étaient trop poreuses. En fait, j’aurais vraiment voulu que les échanges entre nos deux pays puissent se faire plus vite.

Le secrétaire au Trésor américain Paul O’Neill

L’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC) a présenté des données récentes sur les retards à certains postes frontaliers, tant au Canada qu’aux États-Unis, au cours des jours qui ont suivi les attaques terroristes. D’après l’ADRC, des retards d’une trentaine de minutes ou moins sont considérés normaux pour entrer au Canada (on ne dispose pas de chiffre comparatif semblable sur l’entrée aux États-Unis). Le cas du pont de Windsor est révélateur puisqu’il s’agit d’un point d’entrée critique pour l’industrie automobile.

Bien que l’on ne s’entende pas sur la durée de ces retards, les données de l’ADRC montrent clairement un écart important dans les retards subis par le trafic commercial selon qu’il entre aux États-Unis ou au Canada. Les retards pour l’entrée aux États-Unis sont plus nombreux et beaucoup plus longs. Au Canada, les délais sont restés en général dans les limites normales de 30 minutes ou moins alors que pour l’entrée aux États-Unis, on a enregistré des retards de quatre à cinq heures pendant la même période (du 13 au 22 septembre). Les retards de plus d’une heure étaient nombreux. En outre, on ne s’entend pas sur un raisonnement pour expliquer les retards de part et d’autre de la frontière, mais ils sont surtout le fait d’alertes imprévisibles et unilatérales à la sécurité. Toute usine canadienne souhaitant livrer des biens au moment voulu dans des délais serrés fera face à d’énormes difficultés et à des coûts plus élevés pour franchir la frontière américaine.

Quelque 70 % des marchandises canadiennes exportées aux États-Unis sont transportées par camion et il s’agit habituellement de cargaisons à délai de livraison critique liées aux techniques de production « juste à temps ». Pour qu’un tel système fonctionne dans un marché nord-américain intégré, le Canada doit conserver une frontière ouverte avec les États-Unis.

Si le Canada ne montre pas qu’il prend toutes les mesures possibles pour aider à assurer la sécurité de l’Amérique du Nord, nous nous exposons à la prolongation et même à l’augmentation des procédures rigoureuses adoptées par les autorités américaines, qui ralentissent les passages à la frontière.

Nancy Hughes Anthony, présidente-directrice générale, Chambre de commerce du Canada

M. Christopher Sands laisse entendre que les États-Unis veulent que le Canada fournisse une importante contribution à la sécurité nord-américaine. Le public américain, obnubilé par les attaques terroristes, juge dorénavant les politiciens à leur réaction à cet événement et a tendance à appuyer toute mesure de sécurité, bonne ou mauvaise. Le Canada doit être proactif et adopter des mesures qui augmenteront la sécurité nord-américaine s’il ne veut pas faire face à des mesures d’origine politique qui condamnent le Canada et nuisent aux passages frontaliers. Le secrétaire du Trésor américain, M. Paul O’Neill, souligne que le plan canado-américain visant la frontière tentera de faire la part entre les plaintes valables et les accusations vagues[44].

Le Canada a déjà pris un certain nombre de mesures, comme le projet de loi S-23, afin d’améliorer le franchissement frontalier tout en améliorant la sécurité. D’après M. David Bradley, « le Canada a quelque chose à offrir à cet égard sans qu’il soit nécessaire d’engager de grandes dépenses. En effet, le Canada excelle dans l’informatisation des formalités douanières. Nous avons très bien réussi à faciliter les importations au Canada ». L’attente à la frontière est plus importante pour entrer aux États-Unis que pour entrer au Canada. Il serait utile de faire profiter les Américains de nos réalisations, de leur montrer nos techniques et de les convaincre du degré de sécurité que confèrent nos méthodes.

Ce qu’il nous faut, c’est travailler avec nos partenaires américains. Leurs préoccupations en matière de sécurité ne sont pas nouvelles. Si nous n’y étions pas sensibles, nous le sommes certainement devenus. Ce qu’il nous faut faire maintenant de toute urgence et sans ambiguïté, c’est amorcer des discussions bilatérales pour élaborer les prochains systèmes douaniers. Et là encore, je pense que le Canada a quelque chose à offrir.
Le projet de loi S-23 fait état de prédédouanement électronique, d’enregistrement électronique des chauffeurs d’entreprise et des importateurs. Ce sont, me semble-t-il, autant de mesures de sécurité. Peut-être devrions-nous leur donner une nouvelle image pour les présenter à nos partenaires commerciaux américains. Mais surtout, il nous faut une approche bilatérale, et c’est ce que nous commençons à voir, même si jusqu’à maintenant, bon nombre des mesures, quoique très bonnes, soient plutôt unilatérales. Nous devons travailler face à face avec nos partenaires. David Bradley

La gestion à la frontière est un élément essentiel des relations entre le Canada et les États-Unis, mais au bout du compte, les relations ne portent pas uniquement sur une frontière. En effet, l’intégration économique et les changements y afférents exigent que les Canadiens examinent la nature, l’orientation et l’avenir de l’ensemble des relations canado-américaines. Ils est donc essentiel que le Canada envisage les idées actuelles et futures en matières de gestion à la frontière (notamment une union douanière) dans le cadre de l’ensemble des relations entre le Canada et les États-Unis.

La Chambre de commerce du Canada

Accord entre le Canada et les États-Unis sur leur frontière commune

En février 1995, le Canada et les États-Unis ont annoncé un accord sur leur frontière commune, conçu afin de gérer la frontière efficacement, tout en améliorant la sécurité, et en se fondant sur les principes de coopération et de coordination.

Les deux gouvernements se sont engagés à promouvoir le commerce, à faciliter la circulation des voyageurs, à fournir une meilleure protection et à réduire les coûts pour les gouvernements et la population. En outre, ils se sont engagés à moderniser les installations, à éliminer les dangers communs et à gérer efficacement les volumes accrus, tout en respectant certains principes directeurs, c’est-à-dire :

« la simplification et l’harmonisation des politiques et de la gestion liée à la frontière, l’intensification de la collaboration à la frontière et au-delà et la collaboration concernant des menaces communes à l’extérieur des États-Unis et du Canada[45] ».

L’accord prévoit également les mesures suivantes :

Processus : Le Centre de traitement des véhicules utilitaires, établi du côté canadien du Peace Bridge en 1999 pour distinguer entre les chauffeurs préparés et ceux qui ne le sont pas qui se dirigent vers les États-Unis. Il s’agit en fait d’une mesure de contrôle de la circulation conçue pour réduire la congestion causée par les chauffeurs qui n’ont pas préparé leurs documents.

Infrastructure : Des installations frontalières communes à la fine pointe de la technologie.

Processus : Le Projet de simplification du transport routier des marchandises en transit qui réduit de moitié le nombre d’arrêts que doivent faire les camionneurs pour traverser la frontière.

Sécurité : L’élaboration et l’utilisation communes de méthodes de haute technologie pour détecter la contrebande, y compris les techniques de détection des vapeurs, les systèmes de détection au potassium, l’équipement radiographique, l’imagerie en infrarouge et la détection par ultrasons.

Processus et infrastructure : Les systèmes CANPASS, PORTPASS et NEXUS qui permettent aux voyageurs préapprouvés et à faible risque d’utiliser des voies spéciales et le recours à la technologie moderne (lecteurs de plaque d’immatriculation, cartes d’identité et cartes par proximité) afin d’accélérer le passage à la frontière.

Étapes possibles pour une frontière canado-américaine plus efficace

En général, le recours à de meilleures méthodes d’évaluation du risque et l’attribution des ressources voulues là où elles sont nécessaires pourraient améliorer l’efficacité à la frontière. Il faut donner la priorité aux étapes suivantes pour l’évaluation et l’interdiction.

Priorité 1 : Évaluer les risques et empêcher l’entrée en Amérique du Nord du trafic indésirable. Cela se fait à l’extérieur de l’Amérique du Nord.

Priorité 2 : Évaluer le risque et prendre les mesures appropriées au premier point d’entrée en Amérique du Nord. Ce processus s’appliquera aux principaux aéroports et ports maritimes.

Priorité 3 : Évaluer le risque et prendre les mesures appropriées à la frontière canado-américaine.

Si des ressources suffisantes sont prévues et déployées efficacement en vue des deux premières priorités, les besoins en ressources et en services d’évaluation et d’inspection à la frontière seront bien moindres.

Options quant aux processus

  • Trier le trafic à faible risque de celui à risque élevé dès que possible dans le processus de passage.
  • Pour le trafic à très faible risque, les inspections pourraient être effectuées au point de chargement et les conteneurs scellés. Quand les chargements qui traversent la frontière intéressent la même entreprise des deux côtés, des dispositions pourraient être prises pour faire préapprouver la marchandise au point de départ. L’industrie automobile serait un excellent choix pour un projet pilote.
  • Déplacer les activités d’inspection de la frontière au premier point possible.
  • Recourir à la technologie pour préapprouver le trafic à faible risque quand c’est possible. NEXUS est un projet pilote conjoint canado-américain qui est suspendu depuis le 11 septembre. CANPASS est un programme de préapprobation canadien qui a aussi été suspendu. De nombreux organismes de contrôle frontalier préfèrent le programme NEXUS parce qu’il offre la possibilité d’un mécanisme unique de préapprobation des véhicules, fondé sur des critères d’admissibilité communs.

Options en matière d’infrastructure

  • Améliorer les corridors de transport menant aux postes frontaliers.
  • Prévoir des voies spéciales pour le trafic fréquent à faible risque, comme les personnes qui font la navette pour le travail ou qui voyagent beaucoup. Les chauffeurs non préparés ne devraient pas retarder les véhicules préapprouvés. Mettre à niveau les postes frontaliers en tenant compte des nouvelles préoccupations en matière de sécurité et des processus de gestion à la frontière.
  • Appliquer la technologie de détection de pointe comme la détection par rayon gamma.

Coopération entre le Canada et les États-Unis

  • Entreprendre les évaluations du risque et les interceptions en mer, en collaboration avec les autorités américaines, en partageant l’information en temps réel. Cette mesure pourrait s’étendre au partage d’installations et de personnel.
  • Créer des points d’entrée unifiés dotés d’un effectif composé tant de représentants des États-Unis que du Canada. Environ les deux tiers des biens qui arrivent aux ports maritimes canadiens sont à destination des États-Unis.
  • Laisser les représentants canadiens et américains travailler en collaboration pour la vérification préalable des ressortissants étrangers.
  • Il serait possible de négocier une entente de sécurité, afin de créer un périmètre extérieur sécuritaire.
  • Une base de données centrale permettrait de partager l’information sur l’immigration et le renseignement.

Une telle approche serait conforme aux priorités 1 et 2 ci-dessus. Les risques seraient évalués à divers points de contrôle en route vers l’Amérique du Nord, dès le moment où une demande d’entrée au Canada est présentée.

Les représentants canadiens et américains devraient se réunir régulièrement pour vérifier l’efficacité et la sécurité à la frontière canado-américaine.

Favoriser la prospérité : Amorcer une discussion sur les relations économiques entre le Canada et les États-Unis$

L’efficacité des opérations frontalières est loin d’être le seul enjeu économique des relations canado-américaines. Les attentats terroristes du 11 septembre ont conféré une urgence nouvelle à toutes sortes de dossiers qui relèvent des relations canado-américaines. Sur le plan personnel, toutes les personnes que nous avons rencontrées durant les consultations prébudgétaires se sont dites horrifiées par les attentats. Toutes avaient le sentiment que cette journée funeste avait marqué un tournant et qu’elle aurait des répercussions multiples et notables sur les relations entre le Canada et les États-Unis.

Dans un premier temps, on a parlé surtout de la possibilité d’une « filière canadienne » et de questions comme la sécurité des frontières, la politique en matière d’immigration et de réfugiés et les coûts économiques des longues files d’attentes aux postes-frontières imputables aux mesures de sécurité adoptées pour répondre aux préoccupations des Américains. Nous pensons cependant que ces sujets ne sont que les diverses facettes d’une question plus vaste : les États-Unis sont en train de redéfinir leurs rapports avec l’ensemble de l’Amérique du Nord (certains diraient en particulier avec le Canada) et avec le monde.

Les relations canado-américaines, variées et complexes, touchent une foule de domaines : sécurité, culture et économie, pour ne nommer que ceux-là. Le Comité pense que les événements du 11 septembre vont nous forcer à revoir toutes nos idées préconçues au sujet de nos relations avec les États-Unis et qu’il est donc vital d’amorcer une discussion et de réaliser une étude à ce sujet si nous ne voulons pas être pris de court par les événements. En notre qualité de Comité des finances, nous voulons aborder en particulier les dimensions économiques des attentats du 11 septembre, d’autant plus que les répercussions de ces attaques ont concentré notre attention sur leurs effets sur la frontière canado-américaine et sur les relations économiques canado-américaines en général.

Pour bien assimiler les événements du 11 septembre, nous croyons nécessaire d’étudier l’ensemble de cette importante relation. Quels doivent être nos buts? Qu’est-ce qui est de l’ordre du possible dans l’après-11 septembre? Ce sont des questions ardues mais auxquelles nous devons répondre si nous voulons redéfinir les relations économiques canado-américaines.

Par contre, certaines querelles, notamment celle concernant le bois-d’oeuvre résineux, s’enlisent dans la complaisance résultant de l’intégration de nos économies. De longues files d’attente à la frontière dans les jours qui ont suivi les attaques du 11 septembre ont fait ressortir le danger du laisser-aller.

Thomas d’Aquino, Conseil canadien des chefs d’entreprise

Conclusion : Programme de discussion

Il est opportun d’étudier les solutions qui s’offrent à nous. Nous devons envisager les solutions qui permettent un fonctionnement plus efficace des politiques courantes. Nous devons envisager les mesures que dicte l’actualité récente et au sujet desquelles des décisions doivent être prises rapidement. Enfin, nous devons réfléchir aux mesures qui nous permettront de composer avec l’évolution de l’économie mondiale et auront un impact sur nos perspectives d’avenir sur le plan économique. Mais il nous faut tout d’abord bien saisir les enjeux, qui touchent entre autres les sujets suivants : la mobilité de la main-d’œuvre, la compétitivité du régime fiscal, les politiques relatives aux ressources naturelles et à l’environnement, l’union douanière, la monnaie et la propriété intellectuelle, pour ne nommer que ceux-là.

Tout bien considéré, l’objectif ultime de tout débat sur la politique publique est de rehausser le niveau de vie des Canadiens. On peut y arriver notamment en faisant en sorte que le Canada demeure un lieu intéressant où faire des affaires et investir dans des installations modernes, un lieu où les esprits les plus brillants souhaiteront vivre et travailler. Les investisseurs considèrent l’Amérique du Nord comme un marché unique et sont à la recherche de moyens simples de servir les consommateurs. La frontière importe davantage aux entreprises qui desservent l’Amérique du Nord à partir du Canada qu’à celles qui le font à partir des États-Unis. L’effet frontière a un effet pernicieux sur le niveau de vie au Canada, et les événements du 11 septembre n’ont fait que l’exacerber.

Le Comité annonce son intention d’effectuer en 2002 une étude approfondie de tous les aspects des relations économiques canado-américaines de manière à informer les Canadiens sur les problèmes à surmonter et sur les choix qui s’offrent à eux.


[34]            Wesley Wark, « Beyond Cloaks and Daggers », Globe and Mail, 3 octobre 2001, p. A17.

[35]            Douglas Bland, « National security is an orphan in the Cabinet », National Post, 2 octobre 2001, p. A16.

[36]            Ce terme désigne les tactiques non conventionnelles utilisées pour contourner la suprématie militaire conventionnelle d’un adversaire, comme dans le cas des attaques du 11 septembre.

[37]            Michael Hart, « Round Table on Canada-U.S. Free Trade: Is it Time for Round Two? », Politique étrangère du Canada, printemps 2000, p. 2.

[38]            Richard Harris, « L’intégration économique de l’Amérique du Nord — problématique et recherche future », document de discussion n° 10 d’Industrie Canada, avril 2001.

[39]            Alexander Norris, « A great wall for North America: Canada-U.S. perimeter debated », Montreal Gazette, 29 septembre 2001, p. A1.

[40]            Canada 3000 est pour l’instant dans l’impossibilité d’utiliser la garantie d’emprunt. La compagnie ayant récemment déclaré faillite, la situation de la garantie d’emprunt est encore plus incertaine.

[41]            À certains postes frontaliers, presque la moitié des camions reviennent vide.

[42]            Andrew Shea, « Border Choices – Balancing the Need for Security and Trade », rapport spécial, Conference Board of Canada, octobre 2001, p. 2.

[43]            Terry Weber, « Canada, U.S. vow action on border », Globe and Mail, 16 novembre 2001.

[44]            T. Weber, « Canada, U.S. vow action on border », Globe and Mail, 16 septembre 2001.

[45]            Accord entre le Canada et les États-Unis sur leur frontière commune, Mise à jour 2000, gouvernement du Canada, 2000, p. 5.