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FINA Rapport du Comité

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CHAPITRE I: LE PROCESSUS BUDGÉTAIRE

Le budget fédéral représente l’événement financier le plus important au Canada. Non seulement permet-il de détailler les dépenses et mesures fiscales des 12 prochains mois, mais il donne aussi un aperçu des perspectives économiques du pays et de la situation budgétaire du gouvernement à court terme.

Les consultations prébudgétaires du Comité jouent un rôle vital dans l’élaboration du budget et ont grandement contribué aux récentes réalisations financières de l’État et à de nombreux autres projets importants entrepris par le gouvernement.

Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes inc.

Le budget est le résultat d’un long processus faisant appel à des législateurs, à des fonctionnaires, à des économistes, aux milieux d’affaires et aux syndicats. Ce processus a évolué avec le temps de manière à tenir compte des circonstances économiques et financières du moment. Depuis 1993-1994, les consultations prébudgétaires permettent de faire participer activement et publiquement des Canadiens de tous les secteurs d’activités et donc d’accroître la transparence du processus. Les Canadiens connaissent dorénavant très bien ces consultations et ils ont démontré leur intérêt en y participant de manière active. Chaque année22, le Comité permanent des finances de la Chambre des communes se déplace dans tout le Canada afin d’aller consulter les citoyens, les milieux d’affaires, les syndicats et d’autres groupes de manière à s’assurer d’être exposé au plus grand éventail possible d’opinions. Cet accroissement de la transparence ici au pays a d’ailleurs été reconnu et applaudi à l’échelle internationale. Ainsi, voici ce qu’écrivaient des représentants de l’OCDE sur ce processus : « Les consultations prébudgétaires ont été un élément important de l’ouverture du processus budgétaire, car elles créent un climat où le public a le sentiment de pouvoir apporter sa contribution »23. Les Canadiens ont pu constater les résultats concrets de cette participation à la suite de l’intégration d’un bon nombre des recommandations formulées par le Comité dans les initiatives budgétaires.

Je tiens personnellement à vous féliciter, les membres du Comité, le ministre des Finances et le gouvernement pour avoir été à l’écoute tout au long de ce processus de consultations prébudgétaires. Nous n’obtenons pas toujours ce que nous voulons, mais c’est un dialogue que nous encourageons. Peter Smith

Cette année, les événements du 11 septembre nous ont montré encore davantage que le processus budgétaire en général et les consultations prébudgétaires en particulier constituaient une recherche d’équilibre. Des Canadiens de tous les secteurs nous ont déclaré que la priorité devait être clairement d’accorder plus d’attention à la sécurité nationale, mais aussi que nous ne devons pas négliger pour autant l’avenir. Durant nos audiences à Vancouver, M. C.T. (Manny) Jules, président de la Commission consultative de la fiscalité indienne et membre de la bande indienne de Kamloops, a résumé de manière éloquente le dilemme du Comité :

L’AMC félicite le Comité de continuer ce processus visible et responsable qui encourage le dialogue public sur l’examen et l’élaboration de politiques financières, économiques et sociales pour le pays.

Association médicale canadienne

C’est l’une des raisons pour lesquelles je suis venu à ce Comité. Je trouve que le Comité des finances a l’un des rôles les plus difficiles de tous les comités fédéraux. … Vous avez demandé… ce qu’il convenait de faire aujourd’hui, après les événements du 11 septembre. Vous recevez toutes ces requêtes et c’est comme ce que j’ai vécu lorsque j’étais chef. « Manny, quelles vont être tes priorités? Tu es le chef, quelles sont tes priorités? Comment vas-tu changer le monde pour que nous puissions vivre mieux? » C’est la responsabilité de chacun de vous qui siégez ici ; comment faire pour que le Canada reste fort et comment faire pour que le Canada reste un véritable partenaire au plan international, tout en se débattant avec l’économie et tout ce que vous voudrez?

Afin de consacrer l’argent nécessaire à la sécurité des Canadiens, il faudra déployer des efforts concertés pour resserrer les dépenses dans les domaines moins essentiels et remettre à plus tard certaines nouvelles initiatives proposées.

Conseil canadien des chefs d’entreprises

Influer sur le processus budgétaire

Non seulement le processus budgétaire a-t-il changé en ce sens qu’on encourage dorénavant la participation du public, mais il a aussi changé dans la façon dont on établit les diverses contraintes du budget, à savoir son calendrier d’application, les modalités de présentation des données, les cibles qu’il fixe pour la politique budgétaire, etc. Il s’agissait là d’éléments cruciaux dans la bataille que le gouvernement a livrée pour éliminer les déficits et stopper du même coup l’accroissement de la dette. Ces changements ont été acceptés d’emblée par le public canadien, de même que les nouvelles mesures budgétaires. Les facteurs clés de la réussite peuvent être résumés par les éléments du plan de remboursement de la dette :

  •  des plans financiers de deux ans basés sur des hypothèses économiques prudentes;
  • l’incorporation annuelle dans les plans financiers d’une réserve pour éventualités afin de faire face aux dépenses imprévues;
  • l’affectation de cette réserve pour éventualités, lorsqu’elle n’est pas nécessaire, à la réduction de la dette publique;
  •  plus récemment, la promesse d’annoncer chaque automne quelle proportion de l’excédent prévu servira, en plus de la réserve pour éventualités, à rembourser la dette de même que l’inclusion explicite d’une marge de prudence.

Un autre aspect important de ce processus est la Mise à jour économique et financière. Ce document contient les données économiques et budgétaires les plus récentes du ministère des Finances, et repose en fin de compte sur une opinion consensuelle concernant les prévisions économiques du secteur privé. Auparavant, c’était à cette époque que le ministre établissait la cible en matière de déficit pour l’année suivante. Ces réformes visaient toutes à améliorer le processus budgétaire de manière à ce que le gouvernement puisse présenter davantage des budgets en mesure de faire face aux réalités économiques et financières du Canada.

Les leçons de l’ancien processus budgétaire

Le secret budgétaire est une vieille tradition au Canada. Le dévoilement des intentions du gouvernement en matière de politique budgétaire n’avait lieu que le jour du dépôt du budget, souvent sans que le public sache le moindrement ce que le document contient. Cela était particulièrement vrai en ce qui concerne les mesures fiscales. Le secret entourait aussi le processus d’élaboration. Si un certain nombre de groupes pouvaient plaider leur cause personnellement auprès du ministre des Finances avant le dépôt du budget, cela se faisait toujours derrière des portes closes. Cette méthode contraste beaucoup avec la tradition qui prévaut par exemple aux États-Unis, où le budget fait l’objet d’un long débat public.

L’échec des tentatives du gouvernement du Canada pour enrayer les déficits budgétaires au cours des années 80 et au début des années 90 tenait, dans une certaine mesure, à cet ancien processus budgétaire qui était plus secret. Les responsables du budget semblaient incapables de fournir des prévisions crédibles. De plus, le recours à des horizons de planification de cinq ans permettait aux gouvernements d’offrir des scénarios optimistes pour l’avenir sans pour autant réussir à respecter leurs engagements à court terme. Les prévisions en matière de déficits ne se réalisaient pas, même en période de forte croissance économique, parce que, disait-on alors, les taux d’intérêt avaient été plus élevés que prévu. Ainsi, que la conjoncture soit bonne ou mauvaise, la dette augmentait à un rythme insoutenable. Bref, les prévisions budgétaires ne se concrétisaient jamais, ce qui réduisait la crédibilité du gouvernement et entraînait par la suite une hausse des taux d’intérêt puisque les investisseurs exigeaient une prime de risque plus élevée pour investir dans la dette canadienne. En d’autres mots, l’argument qu’on invoquait pour expliquer la non-réalisation des prévisions — la hausse des taux d’intérêt — était devenu le résultat et non la cause des déficits continuels.

La nécessaire crédibilité dans un contexte de plus grande incertitude

Les années 90 ont démontré à quel point la crédibilité et la discipline budgétaire sont importantes pour assurer le bien-être économique global du pays, le Canada bénéficiant d’une croissance particulièrement forte au dernier tiers de la décennie, au moment où les compressions dans les dépenses gouvernementales commençaient à donner des résultats sous la forme d’excédents. Dans la foulée du 11 septembre, nous ne devons pas oublier cette leçon apprise à la dure. Le Comité croit que la nécessité d’accroître à court terme les dépenses consacrées à la sécurité et à l’appareil militaire, en mettant l’accent sur la sécurité, vient en fait compléter ces objectifs plus lointains compte tenu du nouveau contexte économique. Les gains de productivité de demain dépendent de la sûreté de l’environnement de nos entreprises aujourd’hui, comme l’ont clairement démontré les événements du 11 septembre. Les gains de productivité de demain exigeront également que nous maintenions notre engagement d’équilibrer les budgets, de réduire les impôts de 100 milliards de dollars comme nous l’avons annoncé l’automne dernier, d’accroître les dépenses de santé et de rendre plus efficace la prestation des soins, et de respecter les objectifs établis à moyen terme pour la réduction de la dette.

Les progrès que nous avons réalisés au cours de la dernière décennie afin de renforcer nos fondations économiques sont remarquables. Et cela devrait nous placer dans une excellente situation, peu importe la turbulence et les incertitudes à court terme. David Dodge

L’une des pierres angulaires de la crédibilité budgétaire du gouvernement a été la création d’une réserve pour éventualités et d’une marge de prudence afin de se prémunir contre les changements imprévus comme ceux que nous vivons en ce moment. La crise actuelle démontre la sagesse de cette politique puisque ces réserves ont procuré au gouvernement toute la latitude nécessaire pour réagir aux événements, soit respecter ses engagements auprès de l’OTAN et relever les défis posés par l’industrie aérienne, et ce, sans s’exposer à un déficit et miner la crédibilité qu’il a mis tant d’efforts à rebâtir. Il est toutefois erroné de penser que ces réserves constituent de « l’argent en banque » puisqu’elles ne représentent en fait que des excédents prévus et non des crédits qu’on peut dépenser sans risquer de replonger dans un déficit.

Si de nouvelles dépenses en matière de sécurité et de défense risquent d’entraîner un déficit, le gouvernement doit les compenser par des réductions des dépenses ailleurs. Le Comité recommande au gouvernement de s’engager formellement à déposer des budgets équilibrés.

Si l’on accroît les dépenses dans le domaine de la sécurité nationale, dans un contexte de prudence budgétaire, il faudra inévitablement réduire le financement d’autres projets.

Association des courtiers d’assurance du Canada

Je dirais qu’il faut laisser à la Banque du Canada le soin de résoudre les problèmes à court terme liés à la confiance, et qu’il ne faut pas modifier la politique budgétaire. David Laidler

Les retombées de l’examen des programmes

Il vaut la peine de se rappeler à quel point le Canada se trouvait dans une situation financière précaire au début des années 90 et pourquoi il est si important que nous déployions de nouveau de sérieux efforts pour éviter un déficit aujourd’hui, en particulier après ces nombreuses années de redressement budgétaire et au moment où les sacrifices imposés aux Canadiens commencent à donner des résultats sous la forme d’une réduction du fardeau fiscal et d’un réinvestissement dans les soins de santé et dans les mesures de soutien de l’innovation. Durant les années 80, les gouvernements ont dû presque continuellement résoudre des problèmes budgétaires liés à l’accroissement du déficit et de la dette publique. En 1990, le gouvernement a tenté de maîtriser ses dépenses et de rétablir sa crédibilité en se dotant d’un Plan de contrôle des dépenses. Ce plan ne visait toutefois que 60 % des dépenses de programme et n’a donc pas empêché le déficit de 1993-1994 d’atteindre 42 milliards de dollars. En 1994, le gouvernement a reconnu qu’il devait agir avec détermination face à la véritable « atmosphère de crise »>24 suscitée par la situation financière du Canada. Il a donc décidé d’établir et de maintenir des restrictions budgétaires rigides en se fixant des cibles à court terme pour le ratio du déficit au PIB. C’est la crise du peso mexicain qui a le plus mis à l’épreuve sa détermination puisqu’elle a eu des effets considérables sur les marchés financiers canadiens, le dollar canadien et l’économie. Le gouvernement a réagi à ces événements dans le budget de 1995 en amorçant un renversement complet de sa situation financière et en aidant le pays à traverser la crise économique asiatique. L’un des éléments majeurs de ce renversement fut l’Examen des programmes qui devait préparer les réductions de dépenses à partir des six questions ou critères suivants, lesquels sont encore plus pertinents aujourd’hui, alors que le pays doit faire face à une crise différente :

  • Le critère de l’intérêt public : est-ce que le programme ou l’activité continue de servir l’intérêt public?
  • Le critère du rôle du gouvernement : y a-t-il un rôle légitime et nécessaire pour le gouvernement dans le domaine du programme ou de l’activité?
  • Les critères du fédéralisme : le rôle actuel du gouvernement fédéral est-il approprié, ou faut-il songer à le transférer aux provinces?
  • Le critère du partenariat : quels programmes ou activités pourrait-on transférer, en tout ou en partie, au secteur privé ou au secteur bénévole?
  • Le critère de l’efficacité : si le programme ou l’activité continue, comment peut-on améliorer son efficacité?
  • Le critère des moyens financiers : peut-on se permettre l’ensemble de programmes et d’activités qui en résultera, compte tenu des objectifs financiers du gouvernement? Sinon, que devrait-on abandonner?
Une augmentation des fonds consacrés à la sécurité est essentielle, mais nous croyons que cette augmentation pourra être compensée par une réduction des dépenses consenties aux programmes moins importants. De nouvelles initiatives pourront être remises à plus tard en attendant que le surplus budgétaire retrouve un niveau plus satisfaisant […] Nous bénéficierions considérablement de certains éléments qui ont été proposés en ce qui concerne le programme d’innovation. Nous estimons cependant qu’il y a à l’heure actuelle des motifs amplement suffisants pour justifier le report du lancement de ces initiatives en attendant que le surplus budgétaire se porte mieux. David Paterson, directeur général, Alliance canadienne de technologie de pointe (CATA)

Cet examen a été l’occasion de mesurer l’utilité des programmes par rapport à l’intérêt public et il a servi de base aux restrictions budgétaires contenues dans ce budget et ceux qui l’ont suivi. Le gouvernement a alors considérablement réduit ses dépenses, et la population a fini par souscrire à sa démarche. Le Comité a déjà recommandé, dans un rapport antérieur, que le gouvernement fédéral limite la progression des dépenses publiques au taux d’inflation augmenté du taux d’accroissement démographique. L’examen des programmes est un outil utile à cet égard.

Le Comité recommande au gouvernement de continuer d’appliquer le processus d’examen des programmes tout en veillant à ce que le budget soit équilibré même s’il lui faut engager de nouvelles dépenses prioritaires.

En 1993, le gouvernement fédéral a annoncé son intention de ramener le déficit à 3 % du PIB. C’était là une cible provisoire. À l’époque, de nombreux analystes ont jugé cette réduction ou bien trop lente ou bien trop facile à réaliser. Dans l’atmosphère de crise de 1994, d’autres l’ont estimée inaccessible, en particulier à la lumière de l’expérience passée. Le gouvernement a néanmoins maintenu son engagement, malgré l’instabilité économique ambiante.

Le gouvernement mérite des félicitations pour ses réalisations au chapitre de la réduction de la dette, en particulier pour la forte réduction de 2000-2001. Il faut l’applaudir aussi pour avoir intégré une réserve pour éventualités à ses budgets annuels, assortie d’un facteur de prudence additionnel, mesures qui servent en quelque sorte de garde-fou contre un retour aux déficits. Cette façon de procéder va sûrement être bénéfique cette année où le ralentissement économique risque d’entamer les recettes fiscales.

Vancouver Board of Trade

On reconnaissait généralement qu’un déficit équivalent à 3 % du PIB ne constituait qu’un objectif temporaire, puisque le but ultime était d’en arriver à un budget équilibré. Toutefois, en continuant de se fixer des cibles renouvelables sur deux ans, le gouvernement a pu se donner des objectifs réalistes et accessibles. De plus, ce système établissait des critères clairs permettant d’évaluer la performance du gouvernement et donc de montrer aux Canadiens s’il déviait de la voie tracée. Selon l’OCDE, en utilisant cette méthode, « …le gouvernement courait — délibérément — le risque de payer très cher en cas d’échec25 ». Il en a résulté un engagement plus ferme à l’égard des cibles et de meilleures chances de succès.

Le fait de restreindre ses prévisions au court terme rendait également la réussite plus probable, et le gouvernement se donnait encore de meilleures chances en ayant recours à ce que certains pontifes ont appelé « une dose libérale d’hypothèses conservatrices ». On s’est en effet fondé sur des hypothèses économiques prudentes, c’est-à-dire plus pessimistes que celles des économistes du secteur privé. En supposant que les taux d’intérêt atteindraient jusqu’à 100 points de base de plus que les niveaux anticipés par les économistes du secteur privé, le gouvernement gonflait les déficits budgétaires projetés en haussant les coûts du service de la dette prévus. De plus, cette méthode réduisait les taux de croissance espérés, en laissant supposer un chômage plus élevé, des dépenses gouvernementales plus fortes et des recettes fiscales inférieures.

Nouveaux défis, nouvelles stratégies

Dans son dernier rapport prébudgétaire, le Comité soutenait que le nouveau contexte économique exigeait un nouveau processus budgétaire mieux adapté à une période où les excédents sont en croissance rapide. L’accent mis sur le court terme dans les budgets précédents visait surtout à rétablir la crédibilité du budget fédéral, un objectif en grande partie atteint.

Les événements du 11 septembre et la possibilité d’une récession et d’un déficit pourraient militer en faveur du maintien des cibles renouvelables aux deux ans, mais il faut ici souligner que la plupart des observateurs s’attendent à ce que l’économie amorce une reprise au milieu de l’an prochain et retrouve le chemin de la croissance en 2003. Cela laisse entendre que les prévisions à long terme établies dans les documents budgétaires de 1999 et de 2000 sont toujours valables, une opinion qui est apparemment partagée par le gouverneur de la Banque du Canada, M. David Dodge, qui, à l’occasion d’un discours récent devant la Chambre de commerce du Grand Moncton, a déclaré ce qui suit : « Il importe de ne pas s’attarder au court terme mais plutôt d’examiner les tendances à long terme et le potentiel de notre économie. La première décennie du XXIe siècle continuera d’apporter au Canada et au reste de la planète d’importants changements technologiques [...] On peut s’attendre à ce que cette transformation permette à notre économie de croître davantage et de générer de nouvelles hausses de revenus au cours de la décennie qui vient […]. De plus, le Canada a fait des progrès remarquables durant la dernière décennie pour renforcer ses bases économiques. L’inflation s’est fermement établie à de bas niveaux, la santé des finances publiques a été restaurée et les entreprises canadiennes ont amorcé d’importantes restructurations ».

En d’autres mots, nous devrions continuer à favoriser les initiatives propices à l’accroissement de la productivité de manière à garantir la prospérité du pays à long terme. De nouvelles priorités immédiates pourraient nous forcer à nous détourner quelque peu de cet objectif lointain, mais elles ne devraient pas nous le faire perdre de vue.

Il faut donc s’en tenir de manière ferme au plan du gouvernement, lequel comporte entre autres les éléments suivants :

  • réduction des impôts de 100 milliards de dollars sur cinq ans;
  • investissement de 23,4 milliards de dollars dans les soins de santé au cours de la même période;
  • financement soutenu de l’aide à l’innovation par l’octroi de crédits aux IRSC et aux conseils subventionnaires;
  • promotion, notamment de la Fondation canadienne pour l’innovation, du Fonds des bourses du millénaire et des chaires d’excellence.

Dans notre rapport Stimuler la productivité pour relever le niveau de vie des Canadiens, nous mentionnions ce qui suit : « Une hausse de productivité susceptible d’entraîner un niveau de vie supérieur ne se produit pas du jour au lendemain. Les résultats ne se feront sentir qu’après un certain temps. Le gouvernement devra donc cibler un horizon plus lointain et résister à la tentation de parer au plus pressé ». Nous soulignions également dans ce rapport que la productivité est réellement le résultat de plusieurs types d’investissements. Ces investissements non seulement produisent des résultats loin dans le futur, mais ils ne fonctionneront réellement que s’ils sont maintenus dans le futur également. Tout cela montre bien que nous devrions porter notre regard par-delà aujourd’hui ou demain et envisager un avenir plus éloigné, et nous interroger sur les objectifs à atteindre et les engagements à prendre.

Je crois que mes collègues seront d’accord avec moi et reconnaîtront que l’un des problèmes que nous constatons souvent, c’est qu’il n’y a pas de planification à long terme. Nous ne parlons pas simplement de planification financière. Le gouvernement actuel a vraiment essayé de mieux planifier son programme financier à long terme. Je crois cependant que ce qu’il nous faut au Canada, c’est une planification à long terme dans bien des secteurs. Il faut étudier par exemple notre infrastructure parce que […] Il ne s’agit pas de savoir si nous allons réinvestir dans notre infrastructure […]. Il faut plutôt se demander quand nous allons réinvestir et combien nous allons réinvestir. Michael Atkinson

Avec la Mise à jour économique et financière déposée en 1999, le ministre des Finances a commencé à présenter des prévisions sur cinq ans des excédents prévus en soutenant que cela faciliterait le débat sur la politique budgétaire future du gouvernement. Ces estimations incluaient par exemple les coûts du plan de réduction des impôts du gouvernement ainsi que des réinvestissements dans les soins de santé et d’autres programmes sociaux. Toutefois, le ministre avait aussi précisé que le gouvernement continuerait de prendre ses décisions en fonction de prévisions sur deux ans, c’est-à-dire que son horizon de planification demeurerait de deux ans. Il jugeait trop risqués les engagements à plus long terme et préférait se garder une marge de manœuvre au cas où les circonstances économiques changeraient.

Le Comité est d’accord en gros avec cette approche, mais il se préoccupe que la Mise à jour économique de mai n’utilise que des prévisions financières sur une période de deux ans. Le Comité estime que les prévisions des excédents sur cinq ans aux fins de la planification offrent un cadre dans lequel peut s’inscrire le débat budgétaire. Elles permettent également au gouvernement de faire connaître ses intentions à plus long terme. Les mesures budgétaires ne seront toutefois mises en œuvre que si la situation économique et financière le permet. Le Comité croit également que le gouvernement doit prendre ses décisions en adoptant un horizon de planification de cinq ans plutôt que deux ans.

Les entreprises auraient ainsi une idée claire des intentions du gouvernement pour les cinq prochaines années et pourraient planifier en conséquence, c’est-à-dire consentir les investissements susceptibles d’améliorer la productivité et de mener à une augmentation du niveau de vie.

Malgré que le Comité préfère un horizon de planification de cinq ans, nous reconnaissons que nous nous trouvons dans des circonstances exceptionnelles. Le caractère urgent de nos besoins en matière de sécurité nous oblige à nous préoccuper de manière particulière du court terme et nous recommandons que le prochain budget adopte cette optique.

Un autre élément important de cette stratégie à long terme devrait être un nouvel effort particulier pour réduire le ratio de la dette au PIB du pays. Après tout, il s’agit-là de l’héritage des budgets passés. Ce ratio nous force à remonter loin dans l’histoire budgétaire du Canada et il est la somme des conséquences de cette histoire. L’énormité de la dette nous rappelle l’époque où le gouvernement n’adoptait pas de cibles fermes et hypothéquait par conséquent l’avenir des prochaines générations.

Il y a eu progrès sur ce plan, mais la dette nette totale de l’ensemble des administrations publiques du Canada (c.-à-d. des gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux) exprimée en proportion du PIB demeure bien supérieure à ce que l’on observe aux États-Unis, comme on peut le constater dans le graphique.

Jusqu’à maintenant, le gouvernement fédéral a hésité à établir un ratio explicite de la dette au PIB même s’il a promis dans la Mise à jour économique et financière de l’automne dernier qu’il annoncerait chaque automne quelle proportion de l’excédent prévu serait consacrée à la réduction de la dette en sus des 3 milliards de dollars mis de côté dans la réserve pour éventualités. En l’absence de cibles, nous nous retrouvons donc simplement avec des projections et un engagement d’au moins équilibrer les budgets. Bien qu’il soit important, en particulier à la lumière des événements récents, cet engagement ne constitue pas en lui-même une garantie d’une saine politique budgétaire à long terme, spécialement si les réserves pour éventualités de cette année et de l’an prochain sont utilisées, comme il semble qu’elles le seront, pour accroître les dépenses de sécurité et militaires, ce qui laissera peu sinon rien pour réduire la dette. Malheureusement, il ne se dégage pas de consensus sur ce qui constitue un ratio de la dette au PIB optimal. Néanmoins, il est important que le ratio d’endettement du Canada tombe par rapport aux États-Unis et aux autres grands pays industrialisés.

Nous recommandons que le gouvernement publie dans chaque budget une analyse des tendances de la dette dans les pays du G-7.

Les arguments en faveur du remboursement de la dette sont très simples. Il est injuste de léguer aux générations futures un fardeau fiscal élevé pour le service de la dette, particulièrement étant donné que la génération issue de la poussée démographique, qui l’a contractée et l’a flambée en consommation, quittera bientôt la vie active et prendra sa retraite. Les frais très élevés du service de la dette par capita auxquels les travailleurs canadiens feront face dans quelques années nécessiteront des impôts plus élevés, accroissant ainsi les facteurs de dissuasion à travailler, économiser, investir et prendre des risques […]. Herbert Grubel, professeur émérite, département d’économie, Université Simon Fraser

Le Comité croit en outre que la réserve pour éventualités devrait être bien plus qu’un filet de sécurité financière et faire partie intégrante des outils de réduction de la dette. En fait, elle devrait constituer une portion garantie de cette réduction. Nous recommandons que toutes les fois où la réserve pour éventualités ne pourra être affectée dans sa totalité à la réduction de la dette, la différence soit ajoutée à la réserve de l’année suivante. Cette approche donnera au gouvernement une certaine marge de manœuvre tout en priorisant davantage la réduction de la dette. On éliminera ainsi les lacunes passées des anciens horizons de planification plus lointains, tout en donnant aux Canadiens une idée des intentions du gouvernement à plus long terme.

Le secteur privé a prouvé qu’il était capable d’établir des projections crédibles de la situation économique, nonobstant les événements récents. Il lui est possible de fournir une vaste gamme de projections dont l’exactitude peut être mesurée au regard de celles des autres prévisionnistes. Recommandons-nous que le ministère des Finances continue d’utiliser la prévision consensuelle du secteur privé pour établir ses propres projections économiques. Ce sera une excellente façon de répondre à ceux qui pensent que le gouvernement cache l’étendue réelle de son équilibre budgétaire pour pouvoir dicter les paramètres du débat sur la politique budgétaire.

… il est essentiel que le gouvernement révise ses projets en matière de dépenses pour être sûr de disposer de réserves en cas d’imprévus et d’une marge de prudence suffisantes pour éponger tout déficit qui pourrait survenir dans son budget sous-jacent.

Manufacturiers et Exportateurs du Canada

Le Comité applaudit l’engagement pris par le gouvernement d’affecter toute portion non utilisée de la réserve pour éventualités à la réduction de la dette. Le Comité appuie également l’engagement pris par le gouvernement d’annoncer chaque automne quelle proportion de l’excédent prévu servira au remboursement de la dette en sus de la réserve pour éventualités.

Examen des programmes/pacte de productivité/vérification réglementaire

L’Examen des programmes a été lancé en 1994, alors que le gouvernement fédéral faisait face à une crise financière ainsi qu’à une augmentation rapide de sa dette et du service de cette dette. Il a été mis en œuvre dans le contexte des réductions de programmes qui devaient répondre aux objectifs fixés dans le budget de 1995 — soit réduire les dépenses engagées pour certains programmes d’un pourcentage variant de 5 % à 60 % sur les trois années suivantes.

Ce genre d’analyse est toujours utile, mais la lutte contre le terrorisme exige une réaction immédiate qui ne peut pas nécessairement attendre la fin du processus d’examen des programmes. Le gouvernement devra continuer à augmenter les dépenses de sécurité et de défense et à aider certaines industries clés, malgré les mesures déjà prises. D’un autre côté, et nonobstant le ralentissement économique et les nombreux appels au maintien de l’intégrité budgétaire, le gouvernement est encore une fois prié de toutes parts de lancer des programmes nouveaux portant sur des problèmes sociaux ou encore sur l’infrastructure matérielle, les soins de santé, la R-D, etc.

Certes, le Comité n’exclut pas automatiquement de telles dépenses, mais il croit qu’elles doivent répondre aux normes très strictes déjà mentionnées. Les programmes de dépenses — y compris pour la sécurité et la défense — devraient être justifiés régulièrement. Le simple fait qu’un programme soit jugé nécessaire à un moment donné ne signifie pas qu’il le demeure infiniment. Le Comité recommande que tout nouveau projet de dépense soit assujetti aux critères rigoureux et détaillés de l’Examen des programmes.

Selon nous, les dépenses de programme devraient également contribuer à la croissance de la productivité. Un bon exemple est le recours à la réglementation pour atteindre certains objectifs gouvernementaux. En effet, la réglementation peut souvent remplacer efficacement les programmes de dépenses du gouvernement. Toutefois, les coûts élevés de la réglementation sont assumés par le secteur privé et non par le gouvernement, et il se peut donc que le gouvernement, qui est préoccupé par sa situation budgétaire, n’adopte pas une stratégie aussi rigoureuse à l’égard de la réglementation. Dans son rapport de 1999 intitulé Stimuler la productivité pour relever le niveau de vie des Canadiens, le Comité recommandait que la réglementation soit évaluée de la même façon que les nouveaux programmes. Le gouvernement devrait justifier les nouveaux règlements (spécifier les objectifs poursuivis), préciser les coûts totaux (sur le plan de l’administration, de l’observation et des comportements), et proposer des solutions de rechange. Il ne devrait avoir recours à la réglementation que lorsqu’elle constitue la meilleure solution et que les avantages dépassent nettement les coûts. Dans le cas contraire, la réglementation n’améliore pas le niveau de vie et devrait être rejetée.

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral lance une vérification de tous les règlements pour s’assurer qu’ils sont utiles et avantageux dans le contexte actuel. Cette vérification devrait être fondée sur un processus clair et prévoir un calendrier d’élimination des règlements indésirables.


[22]              En l’an 2000, les consultations prébudgétaires ont été interrompues par le déclenchement des élections fédérales.

[23]              Budgeting in Canada. 20e réunion annuelle des hauts fonctionnaires responsables du budget, Comité de gestion publique, OCDE, Paris, 1999, p. 9.

[24]              Budgeting in Canada, p. 10.

[25]              Budgeting in Canada, p. 19