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HUMA Rapport du Comité

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CHAPITRE II

FAVORISER LE SUCCÈS : INFORMATION, ÉDUCATION, FORMATION ET ACTION SOCIALE

Presque tous les témoins que nous avons entendus ont fait remarquer que la réalisation de l’équité en matière d’emploi dépendait de nombreuses activités qui débordent du cadre de la loi et visent à faire connaître les principes de l’équité tant dans la population en général qu’en milieu de travail. À cet égard, les activités les plus importantes sont les activités d’éducation et de promotion à l’appui des objectifs exprimés dans la Loi elle-même.

La présente Loi a pour objet de réaliser l’égalité en milieu de travail de façon que nul ne se voie refuser d’avantages ou de chances en matière d’emploi pour des motifs étrangers à sa compétence et, à cette fin, de corriger les désavantages subis, dans le domaine de l’emploi, par les femmes, les autochtones, les personnes handicapées et les personnes qui font partie des minorités visibles […]13

La Loi fait état de l’importance de l’éducation dans la réalisation de cet objectif et charge Développement des ressources humaines Canada (DRHC) de mener des programmes d’information pour mieux faire comprendre au grand public l’équité en matière d’emploi et promouvoir le programme (paragraphe 42(1)). Les porte-parole des quatre groupes désignés, du patronat et des syndicats ont affirmé que DRHC jouait effectivement un rôle important dans la sensibilisation de la population et la promotion de l’équité en matière d’emploi.

La réalisation de l’équité en matière d’emploi ne suffit pas. La sensibilisation du grand public et de la main-d’œuvre à la nécessité de l’équité en matière d’emploi est tout aussi importante que sa mise en œuvre. La sensibilisation permet de dissiper les mythes et les fausses conceptions qui sont rattachés à l’équité en matière d’emploi. (M. Raj Dhaliwal, directeur, Département des droits de la personne, Syndicat des travailleurs unis de l’automobile14).


Changer les attitudes ancrées demeure probablement la clé de l’ouverture du monde du travail aux personnes handicapées. Il faut donc s’attaquer sans répit à ces attitudes. (McLarren Consulting Group, mémoire15).

Nous encourageons le Programme du travail [DRHC] à devenir plus actif en favorisant une compréhension et une reconnaissance publiques plus vastes des principes et des objectifs de l’équité en matière d’emploi. Nous croyons toujours qu’il est nécessaire de fournir plus d’information sur l’équité en matière d’emploi sur la scène publique et dans les écoles. Nous estimons que le Programme du travail a un rôle éducatif à jouer à cet égard. Tous les Canadiens devraient comprendre les objectifs de l’équité. Lorsqu’une personne commence un emploi, elle devrait déjà connaître les concepts de diversité et d’intégrité. Les personnes appartenant à un groupe désigné ont toujours besoin d’être réassurés [sic] […] (Association des banquiers canadiens, mémoire16).


Tout au long de notre étude de la Loi, nous avons souvent eu l’impression que les activités de sensibilisation et de promotion étaient reléguées au second plan par d’autres questions comme les mesures administratives, la collecte des données, les obligations des employeurs et les vérifications de conformité. Quand on a effectivement abordé la question, les groupes désignés reprochaient leur inaction au patronat et aux syndicats, les syndicats blâmaient les employeurs et tout le monde s’en prenait au Ministère. De toute évidence, toutes les parties concernées ont leur part de responsabilité dans le manque d’action efficace.

En ce qui concerne l’information du public, nous sommes extrêmement déçus que le gouvernement fédéral n’ait pas fourni les ressources nécessaires à des programmes d’information afin d’encourager le public à comprendre cette Loi et à en reconnaître l’objectif, tel que prévu dans la Loi. Nous sommes d’avis qu’il s’agit là d’un rôle indispensable que le gouvernement doit jouer. Le gouvernement devrait par ailleurs entreprendre régulièrement des campagnes d’information et de sensibilisation pour contrer les réactions négatives du public relativement à l’équité en matière d’emploi. (M. Harminder Singh Magon, coordonnateur antiracisme, Syndicat canadien de la fonction publique17).

Les employeurs ont cependant fait valoir avec beaucoup de conviction que l’établissement d’un dialogue permanent avec les parties concernées au premier chef serait particulièrement utile. Ils proposent :

 l’échange de renseignements et d’informations sur les réussites, les pratiques exemplaires, etc;
 des séances et colloques de formation pour aider tous les participants à bien comprendre les enjeux;
 la réalisation de travaux de recherche pour promouvoir l’élaboration de meilleures politiques;
 la création d’un site Internet mettant en relief les succès dans le domaine de l’équité en matière d’emploi.

[…] on disait qu’il faudrait que l’on passe plus de temps à échanger nos résultats, pas dans le sens statistique du terme, mais en disant, par exemple, qu’on a essayé un programme coop à tel endroit et que cela a très bien marché, que ça pourrait être utile à d’autres employeurs qui n’ont peut-être pas eu la chance de faire la même chose, et vice versa. (Mme Elisabetta Bigsby, (première vice-présidente, Ressources humaines et affaires publiques, Groupe financier RBC, Association des banquiers canadiens18).

Il y a eu, bien sûr, plusieurs réserves d’exprimées. On a précisé entre autres que les stratégies devaient être adaptées aux besoins locaux et à ceux des groupes désignés. Par exemple, un programme d’action sociale qui fonctionne bien à Toronto ne donnera pas nécessairement les mêmes résultats en Saskatchewan.

Les premières années que nous nous sommes intéressés à l’équité en matière d’emploi, nous avons mis sur pied quatre groupes d’étude qui se sont penchés sur autant de groupes d’employés désignés, afin de signaler les stéréotypes et les mythes. Ils ont examiné nos effectifs, ont fait des constatations qui ont confirmé ou infirmé ces mythes et ont communiqué les résultats, non seulement à nos employés, mais également aux habitants des localités dans lesquelles nous faisons affaire. Cela nous a permis de mettre de côté les stéréotypes et de brosser un portrait de la réalité montrant que ces employés des groupes désignés sont disponibles, sont compétents, qu’ils peuvent obtenir un emploi et que nous les accueillons dans un milieu de travail équitable et positif. (Mme Lesya Balych-Cooper, vice-présidente, Diversité et équité en milieu de travail/Programmes d’aide aux employés, Banque de Montréal19).

Les témoignages que nous avons entendus nous confortent dans notre opinion que certains des problèmes particuliers que nous abordons plus loin dans notre rapport pourraient être résolus, tout au moins en partie, par une meilleure compréhension. L’organisation Employeurs des transports et communications de régie fédérale (ETCOF) propose par exemple la réalisation d’une campagne proactive pour sensibiliser davantage le public et favoriser la compréhension des principes d’équité en matière d’emploi et ainsi surmonter la réticence de certains groupes désignés à s’auto-identifier20.

À ce sujet là aussi on a signalé que DRHC pourrait jouer un rôle plus efficace à l’intérieur du « système » d’équité en matière d’emploi. Le Ministère pourrait entre autres aider les employeurs à combler les lacunes observées relativement aux groupes désignés. Il devrait aussi fournir davantage de conseils et d’assistance technique aux employeurs et aux membres des groupes désignés (par exemple, directives sur la Loi, analyse des écarts sur le marché du travail, analyse typologique; établissement d’objectifs numériques; mises à jour régulières de la jurisprudence, des pratiques exemplaires et des méthodes innovatrices).

Certains témoins abordent la question sous un autre angle et trouvent que les employeurs eux-mêmes devraient être plus actifs au niveau de la sensibilisation et de l’éducation. Pour eux, le succès de tout programme d’équité en matière d’emploi dépend du genre d’activités de sensibilisation exécutées à l’appui du programme. La Loi n’enjoint pas spécifiquement aux employeurs de faire de la sensibilisation à l’équité en matière d’emploi en milieu de travail, et les représentants des syndicats estiment que, là où il y a un syndicat, la prestation de services de sensibilisation et d’information devrait être une responsabilité conjointe. Les employeurs devraient établir des moyens efficaces de diffusion des programmes et politiques d’équité en matière d’emploi et se doter de ressources pédagogiques appropriées à cet égard. Certains spécialistes de l’équité en matière d’emploi ont exprimé des vues analogues.

Il ne se donne pas aujourd’hui beaucoup de formation dans le domaine de l’équité en matière d’emploi. Il y a le manuel d’application qui décrit certaines choses qu’on peut faire pour se conformer aux nouvelles mesures, mais les diverses entreprises ont tendance à affecter à ce poste des employés qui ont peut-être les compétences voulues pour gérer les ressources humaines, mais pas nécessairement celles qu’il faudrait pour donner suite à de telles directives.


Dans bien des cas, la personne chargée d’équité en matière d’emploi devient l’expert de l’entreprise. Les autres vont penser que vous savez tout sur la question alors que vous n’avez reçu aucune formation. C’est donc à vous de vous renseigner. Certaines entreprises vous permettront d’aller assister à une conférence à Toronto sur la diversité ou l’équité en matière d’emploi et sont prêtes à payer pour de telles choses, mais il n’y a pas vraiment de formation sur place. (Mme Crystal Laborero, membre du conseil, Manitoba Women’s Advisory Council21).


Il y a des gens qui, en raison de leurs responsabilités au travail, devraient recevoir une formation sur l’équité en matière d’emploi, en plus des séances d’information et de sensibilisation, qui devraient être offertes aux employés à tous les niveaux dans les milieux de travail visés par la Loi. Ce type de formation devrait porter sur tous les aspects des relations en milieu de travail et être incorporé à tous les programmes de formation, pour donner une information efficace afin de contrer les réactions défavorables. (M. Harminder Singh Magon, coordonnateur antiracisme, Syndicat canadien de la fonction publique22).

Beaucoup de représentants des groupes désignés réclament des programmes de formation pour les employeurs comme pour les syndicats. Pour eux, l’éducation devrait être un élément obligatoire de tout plan d’identification et de suppression des obstacles et de prévention. Ils estiment aussi qu’en sensibilisant les employeurs, on a plus de chances de voir s’instaurer des milieux de travail où les personnes qui ont des problèmes de
santé, physique ou mentale, intermittents n’ont pas peur de s’identifier. À ce sujet, les témoins ont signalé que la Commission canadienne des droits de la personne pourrait fournir de l’information utile aux employeurs.

Nous demandons donc que les attitudes des employeurs et des syndicats soient évaluées, que des programmes de sensibilisation et de formation soient réalisés auprès des employeurs, employés et syndicats […] (Mme Chloé Serradori, directrice générale, Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec23).

L’éducation et la formation sont des aspects clés de l’équité en matière d’emploi. La Loi doit être mieux connue et il faut pour cela mieux renseigner et former les employeurs, les chefs de service, les salariés et le grand public pour dissiper les idées fausses sur l’équité en matière d’emploi et les préjugés. Là encore, on a beaucoup parlé du rôle du gouvernement fédéral, en particulier de DRHC et de sa Direction générale du travail, non seulement sur le plan étroit de l’équité en matière d’emploi mais aussi au niveau de l’étude de la place de certains groupes désignés dans la population active et de la mise en œuvre de politiques externes à l’équité en matière d’emploi mais qui en appuient les objectifs.

Les recherches menées un peu partout dans le monde confirment régulièrement que les organisations qui se sont dotées de programmes consacrés à la gestion de l’incapacité sont beaucoup plus ouvertes et ont généralement un taux beaucoup plus élevé d’embauche de personnes atteintes d’incapacité. (M. Viateur Camire, directeur et vice-président, Ressources humaines, Abitibi-Consolidated Inc., National Institute of Disability Management and Research24).

D’après le National Institute of Disability Management and Research, le gouvernement fédéral devrait promouvoir et soutenir l’adoption et la mise en œuvre du Recueil de directives pratiques sur la gestion du handicap sur le lieu de travail de l’Organisation internationale du travail. L’Institut recommande par ailleurs d’accroître les ressources allouées à la Direction générale du travail de DRHC pour que celle-ci soit en mesure de réaliser des recherches sur la gestion du handicap en milieu de travail et d’encourager la coopération entre travailleurs et employeurs.

On a de toute évidence besoin d’une stratégie plus systématique et complète d’éducation, de promotion et de formation relativement à l’équité en matière d’emploi.

[…] quelle chance ce serait s’il existait un plan de marketing et de communications dans ces deux domaines qui ferait la promotion de l’équité en matière d’emploi dans le pays tout entier, même si nous ne sommes pas visés par la loi […] Mme Mary Margaret Dauphinee (conseillère en matière d’équité, Université Queen’s25).

Il n’est pas nécessaire de modifier la Loi pour répondre à ce besoin, mais il faudrait que toutes les parties concernées affectent les ressources nécessaires à la réalisation des objectifs d’équité en matière d’emploi auxquels elles disent souscrire.

Recommandation 2

Le Comité recommande que la ministre du Travail élabore une stratégie de recherche, de promotion, d’éducation et de soutien technique relativement à l’équité en matière d’emploi qui soit plus circonscrite et qu’il y affecte les ressources voulues. Cette stratégie devrait être bâtie sur des partenariats entre le patronat, les syndicats, la collectivité et les groupes désignés. Elle devrait comporter l’élaboration :

 i.d’une stratégie de communication visant à sensibiliser davantage la population aux avantages de l’équité en matière d’emploi et aux obligations des employeurs aux termes de la Loi;
 ii.d’une stratégie d’éducation qui réunirait employeurs, groupes désignés, organisations de défense des droits, syndicats, et ainsi de suite, pour identifier les problèmes, les solutions et les pratiques exemplaires;
 iii.d’une stratégie de soutien technique en vue de concevoir des outils et des données meilleurs pour aider les employeurs à s’acquitter de leurs obligations relativement à l’équité en matière d’emploi.

Recommandation 3

Le Comité recommande que la Direction générale du travail de Développement des ressources humaines Canada soit la seule source de soutien technique des employeurs du secteur public (y compris les employeurs distincts) et de ceux du secteur privé.


13 Loi sur l’équité en matière d’emploi, 1995, article 2.
14 RHPH, Témoignages (12:55), réunion no 49, 19 février 2002.
15 McLarren Consulting Group, « Mémoire au sujet de l’examen de la Loi sur l’équité en matière d’emploi préparé par McLarren Consulting Group Inc. à l’intention du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées », 9 avril 2002, p. 9.
16 Association des banquiers canadiens, Révision de la Loi sur l’équité en matière d’emploi, Mémoire présenté au Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes, 21 mars 2002, p. 15.
17 RHPH, Témoignages (11:10), réunion no 49, 19 février 2002.
18 RHPH, Témoignages (12:10), réunion no 56, 21 mars 2002.
19 Ibid.
20 RHPH, Témoignages (11:20), réunion no 56, 21 mars 2002.
21 RHPH, Témoignages (12:40), réunion no 50, 21 février 2002.
22 RHPH, Témoignages (11:10), réunion no 49, 19 février 2002.
23 RHPH, Témoignages (11:10), réunion no 58, 16 avril 2002.
24 RHPH, Témoignages (13:05), réunion no 58, 16 avril 2002.
25 RHPH, Témoignages (12:10), réunion no 46, 31 janvier 2002.