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37e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 012
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 13 février 2001
AFFAIRES COURANTES |
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Procédure et affaires de la Chambre |
Motion d'adoption |
M. Derek Lee |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Derek Lee |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI |
Projet de loi C-2—Motion d'attribution de temps |
L'hon. Don Boudria |
Adoption de la motion |
PRIVILÈGE |
Projet de loi C-2—Attribution de temps |
M. Chuck Strahl |
L'hon. Don Boudria |
M. Michel Gauthier |
M. Bill Blaikie |
M. Peter MacKay |
Le vice-président |
M. John Williams |
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI |
Projet de loi C-2. Deuxième lecture |
M. Peter MacKay |
M. Ken Epp |
M. Murray Calder |
M. Rick Casson |
M. Lynn Myers |
M. Mario Laframboise |
M. Bill Matthews |
M. Charlie Penson |
M. Ghislain Fournier |
M. David Chatters |
Mme Wendy Lill |
M. Marcel Gagnon |
M. Geoff Regan |
M. Rob Anders |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
L'INDUSTRIE AUTOMOBILE |
M. Maurizio Bevilacqua |
L'AGRICULTURE |
Mme Lynne Yelich |
LA MÉDAILLE DE LA BRAVOURE |
M. Jerry Pickard |
LA CRÉATION D'EMPLOIS |
Mme Bonnie Brown |
LA FONDATION DES MALADIES DU COEUR |
M. Lynn Myers |
LE CURLING EN SASKATCHEWAN |
M. Roy Bailey |
LES PRIX DE LA MUSIQUE DE LA CÔTE EST |
M. Mark Eyking |
LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE |
Mme Francine Lalonde |
L'AGRICULTURE |
M. Inky Mark |
LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS |
M. Andy Savoy |
LES SOINS DE SANTÉ |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
ELIZABETH GRANDBOIS |
Mme Paddy Torsney |
LES JEUX DE LA FRANCOPHONIE |
M. Benoît Sauvageau |
SAMUEL DE CHAMPLAIN |
M. Denis Paradis |
L'AGENCE D'INSPECTION DES ALIMENTS |
M. Rick Borotsik |
LA PORNOGRAPHIE |
M. Joe Comuzzi |
LE COMMERCE INTERNATIONAL |
M. Keith Martin |
QUESTIONS ORALES |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
M. Stockwell Day |
L'hon. Herb Gray |
M. Stockwell Day |
L'hon. Herb Gray |
M. Stockwell Day |
L'hon. Herb Gray |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Herb Gray |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Herb Gray |
LE COMMERCE |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Lyle Vanclief |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Lyle Vanclief |
M. Pierre Paquette |
L'hon. Lyle Vanclief |
M. Pierre Paquette |
L'hon. Lyle Vanclief |
LES DROITS DE LA PERSONNE |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. John Manley |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. John Manley |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Herb Gray |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Brian Tobin |
M. Joe Peschisolido |
L'hon. Herb Gray |
M. Joe Peschisolido |
L'hon. Herb Gray |
LES JEUNES CONTREVENANTS |
M. Michel Bellehumeur |
L'hon. Anne McLellan |
M. Michel Bellehumeur |
L'hon. Anne McLellan |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
Mme Diane Ablonczy |
L'hon. Herb Gray |
Mme Diane Ablonczy |
L'hon. Herb Gray |
L'ALLOCATION POUR FRAIS DE CHAUFFAGE |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Paul Martin |
Mme Pauline Picard |
L'hon. Paul Martin |
LE MINISTRE DES FINANCES |
M. Brian Pallister |
L'hon. Herb Gray |
M. Brian Pallister |
LE SPORT AMATEUR |
M. Jeannot Castonguay |
L'hon. Denis Coderre |
LA SANTÉ |
Mme Libby Davies |
L'hon. Herb Gray |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
L'hon. Herb Gray |
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA |
M. André Bachand |
L'hon. Herb Gray |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Brian Tobin |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
M. Monte Solberg |
L'hon. Herb Gray |
M. Monte Solberg |
L'hon. Herb Gray |
LES TECHNOLOGIES DE REPRODUCTION |
M. Réal Ménard |
L'hon. Gilbert Normand |
M. Réal Ménard |
L'hon. Gilbert Normand |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
M. Randy White |
L'hon. Herb Gray |
M. Randy White |
L'hon. Herb Gray |
LE COMMERCE |
Mme Judy Sgro |
M. Pat O'Brien |
L'INFRASTRUCTURE |
M. Ted White |
L'hon. Paul Martin |
M. Ted White |
L'hon. David Collenette |
LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA |
Mme Pierrette Venne |
L'hon. Lawrence MacAulay |
LES DROITS DE LA PERSONNE |
Mme Anita Neville |
L'hon. Hedy Fry |
LA RÉFORME PARLEMENTAIRE |
M. Vic Toews |
L'hon. Don Boudria |
QUESTION DE PRIVILÈGE |
Procédure et affaires de la Chambre—Décision de la |
Le Président |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI |
Projet de loi C-2. Deuxième lecture |
M. Joe McGuire |
Mme Francine Lalonde |
M. Loyola Hearn |
Mme Judy Sgro |
Mme Diane Bourgeois |
M. John McKay |
M. Stéphan Tremblay |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Derek Lee |
Motion |
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI |
Projet de loi C-2. Deuxième lecture |
M. Bryon Wilfert |
Mme Monique Guay |
M. Peter Adams |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
Mme Marlene Catterall |
Motion |
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI |
Projet de loi C-2. Deuxième lecture |
M. Gérard Asselin |
M. John Cannis |
M. Ghislain Lebel |
M. Wayne Easter |
Mme Bev Desjarlais |
Mme Diane St-Jacques |
M. Réal Ménard |
M. John Bryden |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
Report du vote sur la motion |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—Le conseiller en éthique |
Rejet de la motion |
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI |
Projet de loi C-2. Deuxième lecture |
Adoption de la motion |
LOI SUR L'AGENCE DE LA CONSOMMATION EN MATIÈRE FINANCIÈRE DU |
Projet de loi C-8. Deuxième lecture |
Adoption de la motion |
LE DISCOURS DU TRÔNE |
Reprise du débat sur l'Adresse en réponse |
Adoption de la motion |
L'hon. Don Boudria |
Motion |
DÉBAT D'URGENCE |
L'AGRICULTURE |
M. Rick Borotsik |
Motion |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Lyle Vanclief |
L'hon. Andy Mitchell |
M. Stockwell Day |
M. Howard Hilstrom |
Mme Suzanne Tremblay |
M. Marcel Gagnon |
M. Dick Proctor |
M. Bob Speller |
M. Wayne Easter |
M. Garry Breitkreuz |
M. David Anderson |
Mme Karen Kraft Sloan |
M. Alex Shepherd |
M. Charlie Penson |
Mme Cheryl Gallant |
M. Jerry Pickard |
M. John O'Reilly |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Peter Stoffer |
M. Jacques Saada |
Motion |
Mme Rose-Marie Ur |
M. John Maloney |
Mme Carol Skelton |
M. Leon Benoit |
M. Gerald Keddy |
M. Loyola Hearn |
Mme Sarmite Bulte |
Mme Susan Whelan |
M. Kevin Sorenson |
M. Grant McNally |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 012
CHAMBRE DES COMMUNES
Le mardi 13 février 2001
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LES COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le premier rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres et des membres associés des comités de la Chambre.
Si la Chambre donne son consentement, je proposerai que ce premier rapport soit adopté sans discussion.
Le vice-président: La Chambre consent-elle à l'unanimité à ce que le secrétaire parlementaire présente sa motion?
Des voix: D'accord.
Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Je demande simplement à la Chambre si elle consent à l'unanimité à ce que la motion présentée par le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre soit adoptée. Je pose donc de nouveau la question. Y a-t-il consentement unanime pour que soit adoptée la motion présentée par le secrétaire parlementaire?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Derek Lee: Monsieur le président, si vous vous reportez au compte rendu, vous constaterez que, lorsque j'ai présenté la motion visant à régler cette question sans qu'il y ait discussion, la Chambre a donné son assentiment, puis j'ai fait la proposition. S'il n'y a pas eu consentement unanime, c'est là une autre question, mais j'ai fait cette proposition.
Le vice-président: Nous avons suivi un processus en deux étapes. Premièrement, j'ai demandé à la Chambre si elle consentait à l'unanimité à ce que la motion soit présentée, et la Chambre a donné son accord. Deuxièmement, j'ai demandé à la Chambre si elle donnait son consentement unanime à la motion proposée, et ce consentement a été refusé.
S'il y a d'autres motions, je vais maintenant en prendre connaissance.
M. Derek Lee: Monsieur le Président, j'ai une autre motion. Je demande le consentement unanime pour proposer la motion suivante aux fins d'adoption sans débat. Si la Chambre y consent, je propose que les députés suivants soient ajoutés à la liste des membres associés du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. On trouvera en annexe une liste d'une douzaine de députés. Je ne vous lirai pas cette liste.
Le vice-président: Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
* * *
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
Le vice-président: Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
Le vice-président: La présidence a été avisée qu'un député soulèverait la question de privilège. Étant donné que ce député n'est pas présent parmi nous, je vais mettre cette question de côté.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
PROJET DE LOI C-2—MOTION D'ATTRIBUTION DE TEMPS
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) propose:
Que, relativement au projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi et le Règlement sur l'assurance-emploi (pêche), au plus un jour de séance supplémentaire soit accordé aux délibérations à l'étape de la deuxième lecture de ce projet de loi; Que, quinze minutes avant la fin de la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement au cours du jour de séance attribué pour l'étude à l'étape de la deuxième lecture de ce projet de loi, toute délibération devant la Chambre soit interrompue, s'il y a lieu, aux fins de cet ordre et, par la suite, toute question nécessaire pour disposer de l'étape à l'étude à ce moment soit mise aux voix immédiatement et successivement, sans plus ample débat ni amendement.
Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le vice-président: Convoquez les députés.
[Français]
(La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)
Vote no 4
POUR
Députés
Adams | Anderson (Victoria) | Assad | Augustine |
Bagnell | Barnes | Bélair | Bélanger |
Bennett | Bertrand | Bevilacqua | Binet |
Bonin | Boudria | Brown | Bryden |
Bulte | Caccia | Calder | Cannis |
Caplan | Carroll | Castonguay | Catterall |
Cauchon | Charbonneau | Coderre | Collenette |
Comuzzi | Cotler | Cullen | Cuzner |
DeVillers | Dhaliwal | Dion | Dromisky |
Drouin | Duhamel | Duplain | Easter |
Eggleton | Eyking | Farrah | Finlay |
Fontana | Fry | Gagliano | Gallaway |
Godfrey | Goodale | Graham | Gray (Windsor West) |
Harb | Harvard | Harvey | Hubbard |
Jackson | Jennings | Jordan | Karetak - Lindell |
Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson | Kraft Sloan | Laliberte |
Lastewka | Lavigne | LeBlanc | Lee |
Lincoln | Longfield | MacAulay | Macklin |
Mahoney | Malhi | Maloney | Manley |
Marcil | Marleau | Martin (LaSalle – Émard) | Matthews |
McCallum | McCormick | McGuire | McKay (Scarborough East) |
McLellan | Mills (Toronto – Danforth) | Minna | Mitchell |
Murphy | Myers | Nault | Neville |
Normand | O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Owen |
Paradis | Parrish | Patry | Peric |
Peterson | Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pratt | Price |
Proulx | Redman | Reed (Halton) | Regan |
Robillard | Saada | Savoy | Scott |
Serré | Sgro | Shepherd | Speller |
St - Julien | Steckle | Stewart | Szabo |
Telegdi | Thibault (West Nova) | Thibeault (Saint - Lambert) | Tirabassi |
Tobin | Tonks | Torsney | Ur |
Valeri | Vanclief | Whelan | Wilfert |
Wood – 133 |
CONTRE
Députés
Ablonczy | Anders | Asselin | Bachand (Richmond – Arthabaska) |
Bachand (Saint - Jean) | Bailey | Benoit | Bergeron |
Bigras | Blaikie | Borotsik | Bourgeois |
Brien | Brison | Burton | Cadman |
Cardin | Casson | Comartin | Crête |
Cummins | Day | Desjarlais | Desrochers |
Doyle | Dubé | Duceppe | Duncan |
Elley | Epp | Fitzpatrick | Forseth |
Fournier | Gagnon (Champlain) | Gagnon (Québec) | Gallant |
Gauthier | Girard - Bujold | Godin | Gouk |
Grewal | Grey (Edmonton North) | Guay | Guimond |
Hanger | Herron | Hill (Macleod) | Hinton |
Keddy (South Shore) | Laframboise | Lalonde | Lanctôt |
Lebel | Lill | Loubier | Lunn (Saanich – Gulf Islands) |
Lunney (Nanaimo – Alberni) | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Marceau | Mark |
Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Martin (Winnipeg Centre) | Mayfield | McDonough |
McNally | Meredith | Merrifield | Moore |
Nystrom | Obhrai | Pallister | Paquette |
Penson | Perron | Peschisolido | Picard (Drummond) |
Plamondon | Proctor | Rajotte | Reynolds |
Ritz | Rocheleau | Sauvageau | Skelton |
Solberg | Sorenson | Spencer | St - Hilaire |
Stoffer | Strahl | Thompson (New Brunswick Southwest) | Thompson (Wild Rose) |
Toews | Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Vellacott |
Venne | Wasylycia - Leis | White (Langley – Abbotsford) | White (North Vancouver) |
Williams | Yelich – 102 |
«PAIRÉS»
Députés
Le vice-président: Je déclare la motion adoptée.
* * *
[Traduction]
PRIVILÈGE
PROJET DE LOI C-2—ATTRIBUTION DE TEMPS
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'invoque la question de privilège au sujet de la motion que vient de proposer le leader du gouvernement à la Chambre relativement au projet de loi C-2. Le gouvernement a donné avis de cette motion hier et cette question a maintenant été examinée à la Chambre.
C'est la deuxième législature d'affilée où le tout premier projet de loi présenté par le gouvernement fait l'objet d'une attribution de temps. Le ministre a déjà restreint le débat d'une façon tout à fait inappropriée. À mon avis, voici ce qui devrait arriver par suite de tout ça.
Le nombre de fois que ce gouvernement a recours à la clôture et à l'attribution de temps atteint un point critique. Cela devient inquiétant. Sous la dernière législature, le projet de loi C-2, la Loi sur le RPC, le tout premier projet de loi débattu par le Parlement, avait fait l'objet d'une attribution de temps après quelques heures seulement de débat. Voilà maintenant que sous cette nouvelle législature, le tout premier projet de loi pro forma, le projet de loi C-2, fait lui aussi l'objet d'une attribution de temps.
C'est le même gouvernement, le même ministre qui, abusant de leur pouvoir, ont recours à l'attribution de temps de cette façon peu orthodoxe.
Le 8 octobre 1997, le député de Winnipeg—Transcona a soulevé une question de privilège concernant la clôture du débat sur le projet C-2 sous la dernière législature. Il a reproché au gouvernement d'enfreindre de plus en plus notre droit d'avoir un débat en bonne et due forme, dans sa hâte de vouloir déterminer le temps nécessaire pour débattre d'un projet de loi donné.
Le commentaire 3 de la sixième édition de Beauchesne résume certains éléments de la Loi constitutionnelle et de notre système gouvernemental qui, à mon avis, se rapportent à la question actuelle. Beauchesne précise:
D'autres traditions parlementaires n'ont pas le même poids cependant. Le respect des droits de la minorité, par exemple, qui interdit au gouvernement d'abuser des pouvoirs considérables dont il dispose pour limiter le débat ou de prendre sur le plan de la procédure des initiatives que l'opposition ou le public pourrait juger peu orthodoxes.
Dans l'argument qu'il présentait le 8 octobre 1997, le député de Winnipeg—Transcona demandait à la présidence d'intervenir au nom des droits collectifs des parlementaires, pour assurer le respect des caractéristiques traditionnelles visées au commentaire que je viens de citer.
La présidence avait alors décidé de ne pas intervenir. Mais comme nous en sommes aujourd'hui à la soixante-neuvième motion d'attribution de temps, soit un nombre record, je crois que le moment est venu de déclarer que les mesures imposées par le gouvernement aujourd'hui correspondent aux mesures excessives et peu orthodoxes visées au commentaire 3 de Beauchesne.
On a fait valoir que la présidence n'avait pas de pouvoir discrétionnaire lui permettant de refuser de mettre à l'étude une motion d'attribution de temps. Je ne suis pas de cet avis et j'entends démontrer que le Président a bel et bien le pouvoir de refuser la motion qui a été présentée.
Le 2 mai 2000, au cours d'une séance du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre où l'on traitait de la règle de l'attribution de temps, le Greffier de la Chambre des communes à l'époque, M. Robert Marleau, a répondu à une question concernant le pouvoir du Président de protéger les droits de la minorité de la façon décrite plus haut. Le Greffier a déclaré:
Cela fait partie intégrante du rôle du Président [...] en tout temps, pour éviter la tyrannie d'un côté ou de l'autre. Il peut s'agir de la tyrannie de la majorité ou de la minorité.
Au cours de la séance du 4 mai 2000, le Greffier a déclaré que la présidence était moins susceptible d'intervenir relativement à l'attribution de temps. Il en est question à la page 570 de La procédure et les usages de la Chambre des communes. Le Greffier s'est cependant gardé de déclarer que le Président n'interviendrait jamais. Il a déclaré que dans un cas extrême, par exemple si le gouvernement avait recours à l'attribution de temps à toutes les étapes d'étude de tous les projets de loi, le Président pourrait intervenir, à juste titre.
Selon moi, le Greffier a voulu dire qu'il existe une limite au recours à l'attribution de temps par un gouvernement majoritaire. L'interprétation est appuyée par le commentaire tiré de Beauchesne que j'ai lu plus tôt et qui dit qu'il est interdit au gouvernement d'abuser des pouvoirs considérables dont il dispose pour limiter le débat.
Le greffier a utilisé un exemple extrême parce qu'il sait qu'il ne lui incombe pas de fixer une limite à ce comportement non orthodoxe. Nous savons, par exemple, que les 68 fois où le gouvernement a eu recours à l'attribution de temps ne constituent apparemment pas un excès. Quel chiffre représente alors un excès?
Hier, le leader du gouvernement à la Chambre a donné avis de son intention de présenter la 69e motion devant un nouveau Parlement et un nouveau Président. Ce nouveau Parlement sera témoin d'une révélation.
Je crois qu'il est excessif que le gouvernement ait proposé 69 motions en sept ans dans le seul but de museler l'opposition au sujet de projets de loi controversés. C'est en effet non orthodoxe, et ce ne devrait pas être toléré.
À la page 369 de l'ouvrage de Marleau et Montpetit, on parle d'une intervention par le Président à propos de l'attribution de temps employée comme tactique par le gouvernement. On y décrit la décision du Président Fraser à l'égard de la tactique utilisée par le gouvernement qui consistait à escamoter les affaires courantes pour passer à l'ordre du jour. Comme nous le savons tous, cette tactique, si elle avait été autorisée, permettrait au gouvernement de proposer l'attribution de temps à son gré.
Bien que le Président Fraser ait jugé une telle motion recevable le 13 avril 1987, il avait jugé non recevable une motion semblable seulement quelques mois plus tôt, comme il est indiqué à la page 369. Autrement dit, le Président Fraser utilisait son jugement dans chaque situation, et prenait une décision en conséquence.
Autrement dit, une activité acceptable aujourd'hui pourrait bien être jugée tout à fait inacceptable dans d'autres circonstances. Le Président doit faire preuve de jugement au moment de décider si ces motions sont appropriées, irrecevables, peu orthodoxes ou excessives. Le Président a le pouvoir de rendre une décision en ce sens et je fais encore une fois aujourd'hui appel au Président dans cet ordre d'idées. Comme l'a démontré le Président Fraser, un Président peut et doit intervenir lorsque le gouvernement abuse de ses pouvoirs et du Règlement de la Chambre.
La disposition régissant l'attribution de temps se trouve à l'article 78 du Règlement. L'article 78 prévoit l'attribution de plus d'une journée de débat si le gouvernement n'exerce jamais cette option, même en ce qui touche l'attribution de temps.
En n'accordant qu'un minimum de temps au débat à chacune des étapes d'un projet de loi controversé, le gouvernement empêche l'opposition de faire son travail à la Chambre. Il empêche l'opposition d'obtenir l'appui du public.
Le droit de l'opposition à mettre une question en relief au cours d'un débat est l'un des principes fondamentaux du droit et de la procédure parlementaires. On retrouve une définition de ces principes dans la sixième édition de la jurisprudence parlementaire de Beauchesne:
«protéger la minorité et tempérer l'imprévoyance ou l'oppression de la majorité; garantir une conduite ordonnée des affaires publiques; permettre à chaque député d'exprimer son avis, sous réserve des restrictions indispensables au maintien du décorum et au bon emploi du temps; faire en sorte que le temps consacré à l'examen de chaque mesure soit amplement suffisant, et empêcher des interventions du législateur inspirées par une impulsion soudaine.
L'une des principales fonctions du Parlement est de permettre la tenue de débats. Il doit également permettre l'expression civilisée de la dissidence. L'opposition politique véritable est un attribut indéniable de la démocratie, de la tolérance et de la confiance face à la capacité des citoyens de résoudre leurs différences de façon pacifique. C'est la raison pour laquelle nous venons en ces lieux pour discuter de certaines questions. L'existence et l'acceptation de l'existence de points de vue divergents sont essentielles au bon fonctionnement du Parlement et de toute démocratie moderne. Le président Fraser a dit à ce sujet:
Il est essentiel pour notre régime démocratique que les sujets controversés puissent faire l'objet d'un débat d'une durée raisonnable, que l'on dispose de toutes les occasions raisonnablement possibles d'entendre les arguments pour et contre les sujets en cause, et que des tactiques dilatoires raisonnables soient permises afin de donner aux adversaires d'une mesure la chance de convaincre le public d'appuyer leur point de vue.
En 1949, lors d'une allocution devant l'Empire Club de Toronto, le très honorable John Diefenbaker avait déclaré:
Si l'on veut sauvegarder le Parlement à titre d'institution, il faudra que la loyale opposition de Sa Majesté joue bravement son rôle. L'histoire nous a montré que, lorsque la critique cesse, la liberté disparaît.
En 1967, un éminent parlementaire, le regretté Stanley Knowles, a ajouté ce commentaire au débat:
Je soutiens donc qu'il ne peut exister de véritable démocratie politique, et encore moins une démocratie économique et politique, à moins qu'on ne reconnaisse entièrement les droits et les fonctions de l'opposition au gouvernement du jour. C'est seulement ainsi qu'on protégera les droits des minorités. De même, c'est seulement ainsi que la force de l'opinion publique aura un impact sur le processus législatif.
L'une des raisons d'être de l'opposition est de remplacer le gouvernement un jour. Elle devrait se conduire au Parlement de manière à convaincre les citoyens du pays qu'elle peut faire mieux que le gouvernement en place.
Notre régime gouvernemental fonctionne mieux lorsque le gouvernement change à intervalles raisonnables. Toutefois, si le gouvernement continue de faire taire l'opposition à chaque occasion, celle-ci ne pourra jamais profiter du débat parlementaire pour convaincre les Canadiens. Bien que, dans le débat actuel, ce soient les droits de l'opposition qui sont le plus visiblement et le plus directement en cause, en bout de ligne, ce sont les droits et les libertés démocratiques de tous qui sont menacés.
J'aimerais faire quelques recommandations à la présidence. Premièrement, il est peut-être temps que la présidence se penche sérieusement sur le degré d'autorité et la marge de manoeuvre que lui confère le fait de siéger au fauteuil présidentiel. La prochaine fois qu'une motion visant à interrompre le débat sera présentée prématurément à la Chambre, il conviendra, je crois, que le Président ne l'entende pas, qu'il ne reconnaisse pas le leader du gouvernement à la Chambre et qu'il affirme que la motion est inadéquate et prématurée et qu'il ne convient pas d'interrompre aussi hâtivement le débat.
J'espère que vous envisagerez une telle option, monsieur le Président. Il faudrait le faire sans tarder, dès le début de cette nouvelle législature, faute de quoi nous serons de nouveau enfermés dans un cercle vicieux, comme cela arrive lorsque le tout premier projet de loi fait l'objet d'une attribution de temps et que l'opposition ne peut en débattre pleinement. Une fois de plus, on nous empêche de proposer d'autres formes de gouvernement aux citoyens canadiens.
Deuxièmement, je propose que le gouvernement envisage sérieusement de réformer la Chambre de façon significative. Le premier ministre devrait cesser de voir les députés comme des machines à voter ou comme des statues de marbre qui lui obéissent au doigt et à l'oeil.
À mon avis, le mieux que vous puissiez faire pour l'opposition à compter de maintenant, monsieur le Président, est de retarder la présentation d'une motion d'attribution de temps, à tout le moins d'utiliser votre pouvoir discrétionnaire pour la retarder, ne serait-ce que d'une autre journée.
Chaque fois que le leader du gouvernement à la Chambre présente une motion d'attribution de temps, il manifeste son intention de restreindre le débat à sa plus simple expression. Il met un terme au débat après une journée. Il pourrait être plus généreux. Il pourrait donner deux jours. Il pourrait donner trois jours tout en limitant le débat. Il pourrait permettre une vaste discussion. Or, il invoque chaque fois la clôture par attribution de temps pour museler l'opposition et étouffer le débat à la Chambre.
J'en appelle à l'autorité que vous confère votre fonction, monsieur le Président, et je vous rappelle l'appui que vous avez de la Chambre pour exercer votre pouvoir discrétionnaire au nom de la démocratie dans cette Chambre. Je vous prie d'agir dans ce sens à compter de maintenant.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais bien que le chef de l'opposition écoute attentivement ce que je suis sur le point de dire. Je ne puis faire allusion à la présence ou à l'absence de quiconque, mais j'espère qu'il m'écoutera.
Je réponds aux propos du leader parlementaire de l'opposition. Je sais que ceux qui ne veulent pas que le projet de loi soit adopté et qui l'ont fait savoir souhaitent que je m'abstienne de dire ce que j'ai à dire. Peut-être tentent-ils ainsi de se sortir de la situation embarrassante dans laquelle ils se sont empêtrés.
M. Monte Solberg: Imposons la clôture à son discours.
L'hon. Don Boudria: Je pense que je viens tout juste d'entendre la réponse à ce que je soupçonnais, et c'est certainement oui. Cela ressemble fort à un aveu de culpabilité là-bas.
Aujourd'hui, l'opposition dit qu'il y aurait lieu d'invoquer la question de privilège. Il est évident que ce n'est pas le cas. Ce serait, au mieux, un rappel au Règlement, si la question était recevable.
Il est demandé aujourd'hui à la présidence de rendre une décision sur le supposé comportement non orthodoxe du gouvernement, qui a invoqué l'attribution de temps à la deuxième lecture d'un projet de loi le troisième jour où il est débattu à la Chambre des communes.
Dois-je rappeler qu'à la Chambre des communes du Royaume-Uni, par exemple, tous les projets de loi sont assujettis à une attribution de temps d'une journée à l'étape de la deuxième lecture, à une attribution de temps d'une heure à l'étape de la troisième lecture, et que maintenant, en vertu de la nouvelle réforme parlementaire au Royaume-Uni, tous les projets de loi sont assujettis à une attribution de temps au comité en vertu d'une procédure appelée programmation.
Si le recours à l'attribution de temps n'est pas orthodoxe, alors un bon nombre de Parlements ne sont pas orthodoxes. Je vais donner un autre exemple, à savoir l'assemblée législative de la province de l'Alberta.
Cette mesure a été prise conformément à notre Règlement. Cette procédure existe dans notre Règlement depuis un bon bout de temps. Hier, j'ai donné avis de mon intention de proposer cette motion aujourd'hui. Or, personne n'a contesté cet avis quand il a été présenté à la Chambre.
Aujourd'hui, la motion a été proposée, et ce n'est qu'après qu'elle ait été mise aux voix, une fois que tout était réglé, que le député a en fait soulevé cela comme étant un problème.
Une voix: Et alors?
L'hon. Don Boudria: Le député d'en face demande: et alors? Et alors quoi, si les règles sont contournées de cette façon? Je voudrais parler à la Chambre des précédents en matière d'attribution de temps. J'invite tous mes collègues à écouter attentivement. En Alberta, pour le projet de loi 19, intitulé School Amendment Act, on a imposé la clôture à la deuxième lecture, à l'étape du comité et à la troisième lecture. Savez-vous quel leader parlementaire a imposé cela, monsieur le Président?
Que dire du Seniors Benefit Act, dans la même province? La clôture a été imposée à la deuxième lecture et au comité. La procédure doit se justifier. Savez-vous qui s'en est servi, monsieur le Président?
Et maintenant, le méprisable projet de loi 11 de l'Alberta. Savez-vous qui a imposé l'attribution de temps à toutes les étapes de l'étude de ce projet de loi, monsieur le Président? Vous auriez raison de penser qu'il s'agit toujours de la même personne, celle qui est chef du parti qui soulève aujourd'hui la question aux Communes.
En Alberta, l'assemblée a été bâillonnée à toutes les étapes de l'étude d'une mesure fermant les jardins d'enfants de cette province. Savez-vous quel leader parlementaire a eu recours à cette procédure, monsieur le Président?
Dans tous ces cas, il y a un élément commun: l'actuel chef de l'opposition à la Chambre est celui qui a proposé les motions dans tous ces cas. Le député d'en face devait sûrement être inspiré par des principes démocratiques, lorsqu'il a agi de la sorte. À Dieu ne plaise que ce soit pour d'autres raisons.
Je signale trois choses à l'attention de la Chambre. Premièrement, il y a eu préavis de motion d'attribution de temps. Deuxièmement, c'était le troisième jour du débat à l'étape de la deuxième lecture. Enfin, ceux qui prétendent qu'on ne devrait pas recourir à l'attribution de temps devraient se regarder dans le miroir.
[Français]
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, vous me permettrez d'ajouter ma voix à celle de mon collègue de l'Alliance canadienne. Je m'inquiète du fait que les arguments avancés par le leader du gouvernement à la Chambre concernent des comportements qui ont eu lieu à la législature de l'Alberta et non pas ce qui s'est passé ici, à la Chambre des communes.
Nous devons ramener le débat dans une juste perspective et regarder ce qui se passe ici, à la Chambre des communes.
Je veux rappeler simplement au leader du gouvernement à la Chambre qu'avant de lancer des pierres dans la cour du voisin, il devrait regarder les chiffres qui concernent les sessions au cours desquelles il a dirigé les affaires de la Chambre.
Mon collègue a tout à fait raison de rappeler l'importance du projet de loi qui est devant nous et qui en est à sa deuxième journée de débat. Il y a eu une partie de journée de débat, soit une heure hier après-midi et, ce matin, nous avons une motion d'attribution de temps.
Alors, le premier argument qui dit que c'est la troisième journée de débat est complètement erroné. En réalité, il y a eu une journée de débat, soit une heure en fin de journée hier et, aujourd'hui, la décision est prise, il y a une motion d'attribution de temps.
C'est complètement inacceptable, quand on considère que le projet de loi qui est devant nous, qui vise à rétablir en quelque sorte et à revoir le régime d'assurance-emploi, a fait l'objet de critiques extrêmement sévères de la part de la population de toutes les régions du Québec et du Canada au cours des dernières années.
De plus, c'est un projet de loi qui est conséquent à un engagement gouvernemental qui date de la dernière campagne électorale. Les citoyens ont le droit de savoir que ce qui faisait l'objet d'un débat extrêmement important au Québec, qui a fait l'objet d'un engagement de la part du premier ministre et de la plupart des ténors de ce gouvernement au Québec, est maintenant discuté pendant quelques heures à la Chambre des communes au terme d'une discussion où on nous impose un bâillon.
Et voilà qu'on nous demande, après quelques heures de débat, de mettre un terme aux discussions. Le gouvernement est tellement pressé de mettre la main, officiellement, sur les 30 milliards de dollars qui appartiennent aux contribuables...
Une voix: C'est ça, la vraie raison.
M. Michel Gauthier: ...le gouvernement a tellement hâte de légaliser le hold-up de la caisse de l'assurance-emploi...
Une voix: C'est ça, le vrai problème.
M. Michel Gauthier: ...le gouvernement a tellement hâte de faire en sorte que ses engagements, pris du bout des lèvres en campagne électorale, soient mis en vigueur, qu'il veut cesser d'en parler.
Ces engagements ont eu pour effet, dans certains cas, d'induire en erreur des personnes qui ont besoin de l'assurance-emploi. On leur a laissé croire que le gouvernement serait ouvert à apporter des améliorations qui feraient en sorte que les citoyens ne seraient plus maltraités. On disait se préoccuper des chômeurs et de ceux qui vivent des problèmes sociaux importants à cause des coupures faites par ce gouvernement. C'est ce qu'il leur a promis durant la campagne électorale. Mais aujourd'hui, après une journée de débat—on pourrait dire une journée et une heure—voilà que le gouvernement veut cesser d'en parler.
Les citoyens du Canada tout entier, et surtout ceux du Québec, envers qui on a pris de tels engagements, ont le droit de savoir qu'aujourd'hui, le gouvernement veut museler les députés de la Chambre des communes, les empêcher de discuter de ces importantes questions, les empêcher de soulever ici les nombreux cas de comtés qui leur sont soumis quotidiennement depuis plusieurs années dans leurs bureaux par des gens qui souffrent à cause de l'appétit de ce gouvernement qui n'en finit plus d'empocher l'argent qui appartient aux autres. Voilà la réalité.
Permettez-moi de rappeler, pour appuyer mon collègue de l'Alliance canadienne, que le gouvernement libéral a bien changé, et dans le mauvais sens du terme.
Je rappelle que de 1968 à 1972, sous le règne du gouvernement Trudeau—ces chiffres sont à votre intention, monsieur le Président, et j'espère qu'ils vous guideront dans vos décisions—lors de la 28e législature, le nombre de motions d'attribution de temps présentées par rapport au nombre de jours de séance était de 0,3 p. 100. Cela signifie qu'il y a eu, à l'époque, 0,3 p. 100 de jours de séance au cours desquels des débats se tenaient en vertu d'une motion d'attribution de temps imposée par le gouvernement.
Au cours de la dernière législature, 7,7 p. 100 des jours de débat dans cette Chambre ont été tenus sous la menace d'un couperet, c'est-à-dire une motion d'attribution de temps.
Lors des sessions sous le règne de M. Trudeau, entre 1968 et 1972, ou encore entre 1974 et 1979, par exemple, le nombre de motions d'attribution de temps imposées par rapport aux projets de loi présentés est de 0,9 p. 100 ou 4 p. 100. C'est le pourcentage. Cela signifie qu'un maximum de 4 p. 100 des projets de loi ont fait l'objet d'une motion de clôture sous le gouvernement Trudeau, comme celle dont il est question présentement.
Lors de la dernière législature, sous ce gouvernement, ce n'est pas 0,9 p. 100, ce n'est pas 4 p. 100, mais 21,6 p. 100 de tous les projets de loi présentés à la Chambre qui sont passés par le bâillon.
Une voix: C'est une honte.
M. Michel Gauthier: Quand mon collègue parle de menace pour la démocratie, quand 21 p. 100 des projets de loi déposés à la Chambre se terminent par un bâillon, on est en droit de se poser des questions, à savoir où on s'en va avec cela.
Si on regarde le nombre de motions d'attribution de temps imposées par rapport aux projets de loi sanctionnés, on constate que 1,3 p. 100 l'ont été sous le règne de M. Trudeau, 6,3 p. 100 lors du troisième mandat, 16 p. 100 sous le premier ministre conservateur et 11 p. 100 sous le règne Trudeau-Turner à l'époque. Et je continue. Combien l'ont été sous les libéraux lors de la précédente session? Pas 1 p. 100, pas 3 p. 100, pas 6 p. 100, mais 30 p. 100! Trente pour cent des projets de loi adoptés par cette Chambre l'ont été en vertu de motions de clôture.
Comment peut-on vouloir, sérieusement, que les citoyens respectent les travaux que nous faisons à la Chambre des communes? Comment peuvent-ils respecter des députés qui sortent à peine d'une campagne électorale et qui ont pris l'engagement de revoir un projet de loi qui fait énormément mal à la société québécoise et à la société canadienne?
Comment veut-on qu'ils prennent au sérieux un gouvernement qui a promis sur toutes les tribunes qu'il réglerait la question de l'assurance-emploi, et que s'il ne l'avait pas réglée avant les élections, c'était de la faute du Bloc québécois qui avait empêché le projet de loi d'être adopté, alors qu'il avait été déposé tout juste avant la fin des travaux de cette session?
Comment veut-on que les citoyens respectent un gouvernement et des députés qui n'allouent qu'une journée de débat pour pouvoir faire main basse officiellement sur 30 milliards de dollars qui leur appartiennent? Comment veut-on que nous puissions respecter un Parlement où 30 p. 100 des projets de loi qui sont adoptés le sont sous la menace du couperet? Comment peut-on parler de démocratie quand l'objectif principal du gouvernement d'en face, c'est d'empêcher les députés de ce côté-ci de la Chambre de s'exprimer sur une chose aussi fondamentale que l'assurance-emploi?
Je demande à mon tour à la Présidence de considérer avec beaucoup de sévérité le comportement gouvernemental à l'avenir. Il est maintenant trop tard puisque nous venons de voter encore une fois. Le gouvernement nous a imposé une motion de clôture. Nous ne pourrons plus débattre d'assurance-emploi à la Chambre, parce que le gouvernement a décidé qu'après une journée, il en avait assez entendu parler.
C'est une honte. Je dirai simplement ceci à la Présidence. «Tâchez de faire en sorte, par vos interventions, de rappeler au gouvernement qu'il est maintenant sur une voie extrêmement dangereuse, celle qui consiste à faire disparaître petit à petit, pas à pas, mot à mot, tout ce qui reste de démocratie dans le Parlement.»
Le gouvernement est non seulement arrogant en vertu de sa forte majorité quant au nombre de sièges mais, de plus, il ne supporte plus, dans un débat comme celui-ci, que l'opposition lui soumette des points de vue divergents. D'ici peu, nous aurons le vote électronique. Les whips se lèveront peut-être pour voter à la place des députés. Nous ne deviendrons même pas autre chose que des pions dans ce Parlement où l'on ne pourra plus parler, ni voter. L'on ne pourra plus rappeler au gouvernement qu'il a fait des promesses aux citoyens qu'il ne tient plus maintenant.
Je tiens à dire à mon collègue, l'honorable leader du gouvernement à la Chambre, qu'au Québec, les citoyens vont se souvenir de cette promesse, faite à la faveur de la campagne électorale, à l'effet que le gouvernement verrait à adoucir la Loi sur l'assurance-emploi. Les citoyens du Québec se rappelleront que ce leader parlementaire et ce gouvernement ont fait en sorte qu'on ne discute pas des vrais problèmes, qu'on ne règle pas la question et qu'on officialise, en moins de cinq heures de débat, le hold-up de la caisse de l'assurance-emploi. C'est inacceptable.
[Traduction]
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je pourrais peut-être être utile à la présidence en lui faisant part de ma réflexion au sujet de quelques-uns des arguments que nous avons entendus jusqu'ici.
On dit que la politique crée parfois d'étranges alliances. Cela n'en est pas moins vrai dans le cas des arguments de procédure, notamment quand le leader de l'Alliance canadienne à la Chambre cite mes propos, quand le leader du Bloc québecois à la Chambre cite Pierre Trudeau et, plus intéressant encore, quand le leader du gouvernement à la Chambre cite le chef de l'opposition, s'appuyant sur les initiatives prises par ce dernier à l'époque où il siégeait à l'Assemblée législative de l'Alberta pour justifier les actions du gouvernement.
Je trouve cet argument des plus étranges qu'il nous ait jamais été donné d'entendre, car il se pourrait fort bien que le chef de l'opposition ait effectivement eu un penchant pour la clôture lorsqu'il siégeait à l'Assemblée législative de l'Alberta.
On ne guérit pas le mal par le mal et ce n'est pas avec 100 maux qu'on y réussira. L'attribution de temps ou la clôture doit être décidée au cas par cas. C'est ce que nous demandons à la présidence de faire. L'attribution de temps peut être décidée après un long débat par exemple. Elle peut être imposée après un débat sans importance, ou qui se révèle insuffisant.
Nous semblons avoir retenu pour cette législature, et je pense que c'est là le motif de la frustration que nous éprouvons aujourd'hui, une tradition, celle de présenter une motion d'attribution du temps après un débat de durée insuffisante. D'importants textes législatifs sont présentés à la Chambre et le gouvernement se montre impatient. Il aurait été impensable à une époque, ce que n'a pas manqué de nous rappeler le leader du Bloc québecois à la Chambre, que l'on ait recours à l'attribution de temps pour un projet de loi aussi important que celui-là, surtout après seulement un ou deux jours de débat.
Ce n'est certainement pas à la Chambre que l'on devrait éviter le débat. Certains ont peut-être remarqué, au mur de la section de l'antichambre réservée au NPD, une citation de l'ancien doyen de la Chambre, le député de Winnipeg-Nord-Centre, Stanley Knowles, qui a dit le 10 décembre 1968, probablement lors d'un débat à propos de la réforme parlementaire ou d'un rappel au Règlement:
Le débat n'est ni un péché, ni une faute, ni une erreur ni quelque chose dont il faut s'accommoder au Parlement. Le débat est l'essence même du Parement.
Tout ce que demande l'opposition, c'est que, lorsque nous le jugeons nécessaire, on nous donne suffisamment de temps pour débattre des questions à l'étude. Ce que nous demandons au Parlement, ce n'est certainement pas une méthode d'obstruction.
Je rappelle à la Chambre qu'un projet de loi de 900 pages a été approuvé hier à la Chambre après un jour de débat et a été renvoyé au comité, exactement comme le gouvernement l'avait demandé. On ne peut donc pas parler à cet égard d'un procédé de la part de l'opposition qui chercherait à empêcher le gouvernement de mener ses projets à bien et à paralyser les travaux de la Chambre des communes pour que rien ne se fasse. Ce n'est pas de cela dont nous parlons en l'occurrence. Nous parlons d'un projet de loi très important visant à apporter des modifications au régime d'assurance-emploi, et les divers partis d'opposition disent qu'ils souhaitent en débattre un peu plus longtemps et qu'ils ont des sujets de préoccupation qu'ils veulent exprimer.
Quand on voit qu'un autre projet de loi, une mesure très importante de l'avis de tout le monde, le projet de loi C-8, sur la réforme du secteur des services financiers, ou quel qu'en soit l'appellation, un projet de loi de 900 pages, je le répète, a fait l'objet d'un débat d'une journée avant d'être renvoyé au comité, on ne peut guère parler d'un procédé d'obstruction.
Je crois, comme je l'ai déjà soutenu, que la présidence devrait avoir et exercer le pouvoir de freiner les ardeurs des gouvernements un peu trop prompts, pourrait-on dire, à invoquer la règle d'attribution de temps, et le gouvernement actuel appartient certes à cette catégorie.
Il est d'autant plus ironique de voir le leader du gouvernement à la Chambre invoquer ce qui se passe au Parlement de Westminster. Au Parlement de Westminster, la situation est tout à fait différente, mais si le gouvernement veut parler du Parlement britannique, parlons alors du pouvoir que le Président détient à Westminster en matière d'attribution de temps. Le leader du gouvernement à la Chambre des communes ne nous a montré qu'un côté de la médaille. Je ne pense pas qu'il soit utile de citer l'exemple de Westminster. Nous avons nos propres traditions dans cette enceinte, mais je pense que nous pouvons apprendre de l'expérience britannique comme celle d'autres parlements.
Nous avons nos propres traditions ici. Une de ces traditions voulait que lorsque la Chambre souhaitait un long débat sur un projet de loi en particulier, on permettait la tenue de ce débat. Or, cette tradition est devenue de moins en moins forte au fil de plusieurs législatures. Le gouvernement actuel tient pour acquis qu'il a le droit d'avoir recours à l'attribution de temps après seulement une journée ou deux de débat et il ne s'attend même pas à ce qu'on le lui reproche.
Par conséquent, monsieur le Président, vous vous devez d'examiner la situation dans le cas présent. Malheureusement, je pense qu'il est vrai de dire que vous ne pouvez rien faire en ce qui concerne l'attribution de temps sur ce projet de loi en particulier, car la question de privilège a été soulevée après la tenue du vote. On aurait peut-être dû en saisir la Chambre auparavant afin que vous puissiez prendre une décision sur cette attribution de temps en particulier, car vous ne pouvez vous prononcer sur l'attribution de temps en général. Vous devez être spécifique. Cela va rendre la tâche difficile à la présidence dans ce cas particulier.
Cependant, je suis tout à fait persuadé que nous aurons d'autres occasions de nous pencher sur la question. Ce sera peut-être avant qu'un vote ne soit pris ou au moment de la présentation d'une motion d'attribution de temps, ce qui donnera davantage de possibilités à la présidence de dire, selon les circonstances, qu'il s'agit d'une motion qu'elle n'entendra pas à ce moment-là, car elle ne croit pas que la Chambre ait eu suffisamment de temps pour discuter de la question concernée.
Enfin, cela ne me surprend pas que le gouvernement ne veuille pas discuter longuement de cette question. Il se peut qu'il ne souhaite pas que les Canadiens sachent en détail, grâce aux discours des députés de l'opposition, ce que contient vraiment le projet de loi. Il est peut-être embarrassé par le fait qu'il vole littéralement les chômeurs depuis des années pour financer son surplus. C'est en fait au détriment des chômeurs, en leur volant des prestations qu'ils auraient dû toucher autrement, que le gouvernement est parvenu à sa prétendue réussite sur le plan financier. Il se peut qu'il ne veuille pas en parler. Dans ce contexte, nous comprenons parfaitement le sentiment de culpabilité qui a poussé le gouvernement à cette extrême sur le plan de la procédure.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, après avoir écouté tous les participants à ce débat sur la question de privilège, je dois dire qu'il y a beaucoup de sagesse dans ce qui a été dit de ce côté-ci de la Chambre, le côté de l'opposition.
Le plus ironique, c'est que le leader du gouvernement à la Chambre avait avancé beaucoup de ces mêmes arguments, si ce n'est tous les mêmes, lorsqu'il était dans l'opposition. J'aimerais citer un document rendu public le 19 janvier 1993. On peut y lire ce qui suit:
Les Canadiens, notamment ceux qui sont élus pour servir au Parlement, s'attendent à ce que la Chambre des communes puisse non seulement discuter ouvertement des problèmes du pays, mais aussi proposer des solutions. Ils s'attendent à ce que les Communes étudient les problèmes du Canada d'une manière rationnelle et établissent des politiques afin de les résoudre. Or, on ne répond à ces attentes.
Plus loin, on peut lire ce qui suit:
Il en résulte que les débats sur les projets de loi controversés sont habituellement caractérisés par du négativisme, des répétitions inutiles et même par de brillantes performances oratoires ayant un effet destructeur. Ce sont là les conséquences inévitables de la perte du rôle significatif que les députés étaient censés tenir lorsqu'ils ont été élus.
Et pour finir:
À l'heure actuelle, le gouvernement peut, à sa guise, organiser les débats et faire rapport à la Chambre sur l'état d'une question. Cette situation entraîne un manque de cohérence flagrant et d'intérêt du public lors des débats sur des dossiers importants.
Ce document, qui porte en couverture le nom distingué du leader du gouvernement à la Chambre avait pour titre Régénérer la démocratie parlementaire: Projet libéral concernant la Chambre des communes et la réforme électorale.
Le leader du gouvernement à la Chambre a complètement fait volte-face par rapport à la position qu'il défendait il n'y a pas si longtemps. De toute évidence, il fut un temps où il avait plus de respect pour la démocratie et pour une institution dont les Canadiens s'attendent à ce moment critique qu'elle devienne pertinente et qu'elle permette à tous les députés de prendre part à des débats de fond.
Suggérer que le projet de loi dont est saisie la Chambre n'est pas suffisamment important pour que l'on prolonge le débat de quelques heures est ridicule. C'est une insulte pour les Canadiens.
Ce projet de loi que le gouvernement amoindrit en imposant l'attribution de temps était suffisamment important pour que, juste avant le déclenchement des élections, il le présente en appât à l'électorat. Permettez-moi de signaler que ce projet de loi, s'il avait été si important à l'époque, aurait pu être adopté à la Chambre des communes avant les élections. Le projet de loi d'initiative ministérielle jouissait d'un appui suffisant. La mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui pourrait, elle aussi, obtenir l'approbation de la Chambre si des changements peuvent lui être apportés au comité.
Les députés de l'opposition trouvent le recours excessif à l'attribution de temps insultant. D'ailleurs, à l'époque où il siégeait dans l'opposition, le leader du gouvernement à la Chambre protestait violemment contre cette tactique. Il s'est donné beaucoup de mal pour décrire ce qu'ont fait d'autres députés et, en particulier, le leader de l'Alliance à l'époque où il était leader parlementaire à une assemblée législative provinciale. Il m'a même paru jaloux du fait que le leader parlementaire de l'Alliance maîtrisait mieux que lui ne l'a jamais encore fait l'art d'avoir recours à l'attribution de temps.
Le fait que le leader du gouvernement à la Chambre ait appliqué l'attribution de temps 69 fois prouve qu'il a la gâchette facile. Il le fait d'ailleurs ici, dès la première occasion, dans le cadre de l'étude de cette importante mesure législative. Mon collègue de Winnipeg—Transcona a déclaré qu'on ne guérit pas le mal par le mal et que ce n'est pas avec 100 maux qu'on y réussira. J'ajouterai que ce n'est sûrement pas avec 69 maux qu'on y parviendra non plus. Il faut toutefois étudier la question au cas par cas et juger d'après la teneur de chacune des mesures législatives.
J'exhorte la présidence à réfléchir à la question suivante dans ses délibérations éclairées à ce sujet: qu'est-ce qui presse tant dans ce cas-ci? Pourquoi est-il si urgent que la Chambre adopte sans tarder cette mesure législative?
M. Chuck Strahl: Ils n'ont pas de comité où le renvoyer.
M. Peter MacKay: Le leader parlementaire de l'opposition fait valoir un point très important. Le comité à qui serait renvoyé ce projet de loi n'est même pas encore formé. Il serait ridicule d'accélérer l'étude du projet de loi pour la suspendre à un stade ultérieur. Le projet de loi serait remisé dans quelque endroit obscur jusqu'à la formation du comité chargé de l'étudier.
Je pense qu'il faut tenir compte de tous les faits. Le leader du gouvernement à la Chambre est trop pressé. Il propose l'attribution de temps et, sans faire la comparaison vulgaire avec ce qui pousse un chien à certains comportements, je dirai qu'il le fait simplement parce qu'il en est capable. On peut d'ailleurs se demander si tout le temps qu'il a passé dans l'opposition ne l'a pas marqué psychologiquement, ce qui expliquerait son profond sentiment d'insécurité, ou alors il s'est peut-être retrouvé trop souvent au vestiaire du gymnase dans son enfance, de sorte qu'aujourd'hui, il n'hésite pas à rudoyer les députés. Voilà ce qui se passe vraiment.
Bref, le leader du gouvernement à la Chambre utilise les règles à son avantage parce qu'il peut le faire. Absolument rien ne justifie sa motion d'attribution de temps dans le cas de ce projet de loi, pas plus que dans la multitude d'autres cas où il a exercé ce pouvoir discrétionnaire.
Monsieur le Président, je ne m'attarderai pas sur le sujet. À ce que je comprends, vous allez prendre en considération les arguments qu'on a fait valoir. Je crois que le leader du Bloc à la Chambre a mentionné que 30 p. 100 des projets de loi adoptés depuis sept ans avaient donné lieu à des motions d'attribution de temps. À mon avis, ce pourcentage est scandaleux vu que c'est ici, à la Chambre, qu'est débattue l'importance des projets de loi.
Tout député doit avoir l'occasion d'intervenir à la Chambre sur les projets de loi. Si nous voulons que les Canadiens aient confiance dans cette institution et dans la pertinence du Parlement, nous devons pouvoir participer intelligemment aux débats, faire de solides propositions et participer de façon constructive au processus législatif, au lieu d'adopter une approche destructive.
La motion d'attribution de temps est prématurée puisqu'il y a amplement de temps pour en débattre. De toute évidence, il n'est pas urgent que le gouvernement adopte ce projet de loi.
Le vice-président: Comme vous tous, j'ai écouté attentivement les interventions sur la question de privilège soulevée par le député de Fraser Valley, soit la sienne, suivie de celles du leader parlementaire du gouvernement, du député de Roberval, de celui de Winnipeg—Transcona et, finalement, du député de Pictou—Antigonish—Guysborough. Vous avez sans doute remarqué que tous ces députés sont les leaders parlementaires des cinq partis politiques représentés dans cette trente-septième législature.
Je crois que la question a été clairement exposée par ces députés, qui ont fait connaître leurs points de vue, arguments et suggestions. Je dirai que, à moins qu'il y ait de nouveaux éléments à porter à l'attention de la Chambre, nous en resterons là et je prendrai la question en délibéré.
M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, si la question a été soulevée aujourd'hui, c'est que nous avons été pris dans une situation intenable au cours de la dernière législature. Nous avons demandé à soulever la question de l'attribution de temps lorsque le gouvernement donnait avis de son intention de proposer une motion en ce sens. La présidence avait alors déclaré que nous ne pouvions pas parce que le gouvernement n'était pas passé à l'acte. En d'autres mots, il fallait attendre que la motion ait été présentée et mise aux voix pour pouvoir en discuter. Cependant, une fois que la Chambre a voté, la Chambre a exprimé son opinion et la présidence ne peut donc plus rendre de décision à cet égard.
La question a été soulevée ainsi aujourd'hui pour que la présidence puisse la prendre sérieusement en délibération en prévision de la prochaine fois où la situation se présentera. Je sais qu'il y a eu une décision à ce sujet aujourd'hui. Cependant, vous pouvez comprendre devant quel dilemme l'opposition se trouve. Le gouvernement annonce une motion, mais on ne nous permet pas d'anticiper sur les gestes qu'il posera, la présidence refusant d'entendre nos préoccupations au sujet de l'attribution de temps parce que la motion n'a pas été présentée. Cependant, une fois qu'elle l'a été, il est trop tard.
Monsieur le Président, cette question est soulevée en prévision de la prochaine fois. Toute la discussion d'aujourd'hui vise à demander au Président de faire jouer son pouvoir discrétionnaire pour la prochaine fois.
Le vice-président: La présidence s'est efforcée de faire preuve de patience et de générosité en ce qui concerne les interventions. Je reconnais la gravité de cette question de privilège. Comme nous sommes au tout début de la nouvelle législature, et pour toutes les raisons mentionnées précédemment, je vais prendre cette question en délibéré.
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la liberté de parole constitue un aspect très important à la Chambre, et il ne faudrait pas couper court à un débat sur des questions sérieuses comme celle-ci.
Je suis totalement en désaccord avec le leader du gouvernement à la Chambre, qui a dit qu'il ne s'agissait pas d'une question de privilège. Nous parlons non seulement de la liberté de parole, mais aussi de la liberté de prendre la parole, ce qui est bien différent. Non seulement la liberté de prendre la parole est un aspect très important à la Chambre, cette liberté a été acquise de haute lutte au cours de centaines d'années.
Nous avons évoqué les précédents à Westminster. C'est là que les batailles pour obtenir le droit de prendre la parole ont été livrées et remportées. Il ne faudrait pas couper court à ce débat. Le gouvernement devrait écouter chacun des députés à la Chambre qui désire s'exprimer sur un projet de loi.
La clôture a été imposée aujourd'hui, et nous savons tous que le débat porte sur cela. La clôture nous a privé du droit de parler. Sans ce droit, nous sommes aussi bien de rentrer chez nous, car il ne nous sert à rien de rester ici si nous ne pouvons pas prendre la parole à la Chambre où nos privilèges sont protégés, et ils sont protégés par vous, monsieur le Président.
Monsieur le Président, votre rôle n'est pas seulement de présider nos délibérations, mais aussi de parler pour les députés lorsqu'ils argumentent contre le gouvernement. Vous savez sans doute comment, au cours de l'histoire, la présidence a dû lutter pour défendre les députés ordinaires contre le gouvernement. Il s'agissait peut-être autrefois de la Couronne et du monarque, mais il s'agit aujourd'hui du gouvernement qui siège ici même, à la Chambre. C'est votre travail de défendre les députés contre le gouvernement. Des députés ministériels ont beau siéger à la Chambre, c'est quand même le gouvernement qui a essayé de priver les députés de leur droit de parler. On ne peut pas les empêcher de parler.
Je tiens à faire valoir un dernier point. Nous avons tenu ce débat il y a un an environ. C'est en mars dernier, je crois, que le gouvernement passait constamment à l'ordre du jour pour éviter les affaires courantes. Je crois que notre leader parlementaire a parlé de la fois où le Président Fraser avait décidé que nous ne pouvions pas passer à l'ordre du jour. L'an dernier, lorsque nous avons contesté le droit du gouvernement, il a retiré sa motion visant à passer à l'ordre du jour.
Je vous dirai donc, monsieur le Président, au nom de tous les députés, que vous avez le devoir de nous défendre et de dire que nous avons le droit de parler et que le gouvernement a le devoir d'écouter.
Le vice-président: Comme je l'ai dit plus tôt, la question de privilège dont la Chambre est saisie est très grave. J'ai décidé de la prendre en délibéré.
La présidence entendra tout autre recours au Règlement, mais cette question de privilège est prise en délibéré.
M. Leon Benoit: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Au cours de son allocution, le leader parlementaire du Parti conservateur a cité un document rédigé en 1993 par le leader parlementaire du gouvernement. Je demande que ce document soit déposé.
Le vice-président: Ce document pourrait être déposé, avec le consentement unanime de la Chambre. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
* * *
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 12 février, de la motion: Que le projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi et le Règlement sur l'assurance-emploi (pêche) soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je poursuis l'intervention que j'ai commencée hier soir. Il est important que tous les Canadiens sachent et comprennent que le régime s'applique à la grandeur du pays et pas seulement à une région.
Il serait très possible de remédier aux lacunes actuelles du système si le gouvernement prenait le temps d'écouter les travailleurs saisonniers et ses propres employés qui traitent les problèmes d'assurance-emploi dans des régions comme les Maritimes. Ils ont fait valoir, à plus d'une reprise, qu'une façon d'améliorer le régime et de déterminer le montant des prestations d'assurance-emploi pour une période de rémunération donnée consisterait à remplacer la règle actuelle par une nouvelle règle qui consisterait à déclarer les heures de travail effectuées sur une base hebdomadaire. Ainsi, les personnes qui n'auraient pas travaillé au cours d'une semaine donnée n'auraient pas à la déclarer.
Il va de soi que le régime d'assurance-emploi comporte de graves lacunes qui obligent les Canadiens qui ont besoin d'aide à s'endetter lourdement. J'ai écrit à la ministre actuelle et à son prédécesseur à plusieurs reprises, mais je n'ai malheureusement jamais eu le plaisir d'obtenir une réponse de leur part.
J'ai écrit à la ministre du Développement des ressources humaines au sujet des gains non déclarés, il y a plus de deux ans, mais elle ne m'a pas répondu. Déjà, à l'époque, cette injustice créée par le système préoccupait de plus en plus la population. J'ai écrit de nouveau à la ministre, mais je n'ai pas obtenu de réponse.
Le Parti conservateur appuie, de façon générale, le projet de loi C-2, mais à condition que le projet de loi soit renvoyé au comité, pour en faire une analyse plus approfondie et, si nécessaire, y apporter des amendements.
Le Parti conservateur appuiera le projet de loi dans la mesure où il abrogera la règle d'intensité et assouplira la règle concernant les demandes répétées de prestations, qui empêchait à toutes fins pratiques une femme qui quittait un emploi pour un deuxième congé de maternité d'obtenir des prestations d'assurance-emploi. Toutefois, le Parti conservateur n'appuie pas l'attitude du gouvernement qui refuse de traiter des taux de cotisation à l'AE artificiellement élevés.
Nous espérons pouvoir, en comité, faire apporter certains des changements que nous avons proposés lors des dernières élections fédérales. Nous sommes notamment en faveur du maintien d'une commission de l'assurance-emploi qui soit indépendante afin de recommander des taux de cotisation raisonnables.
Ce projet de loi confère au Cabinet le pouvoir de fixer, pour les années 2002 et 2003, le taux de cotisation pour les emplois assurables, ce qui laisserait une année de plus au gouvernement pour examiner le système de fixation des cotisations, exactement comme son prédécesseur, le projet de loi C-44. L'idée de retirer ce pouvoir à la commission indépendante et de le conférer au Cabinet et au ministre des Finances est inacceptable.
D'autres groupes, comme l'Association canadienne des restaurateurs et des services alimentaires, s'opposent à cette mesure. Le Parti conservateur appuie l'ACRSA et l'opposition qu'elle manifeste contre cette mesure de la part des libéraux, une mesure qu'elle considère très paternaliste et comme une manoeuvre qui créerait plus de problèmes qu'elle n'en règlerait.
En outre, nous nous engageons, en tant que parti, à examiner avec la commission de l'assurance-emploi une proposition visant l'établissement d'un compte d'assurance-emploi individuel et d'un programme de remboursement de l'AE qui permettrait aux travailleurs, à leur retraite, de transférer une partie de leurs cotisations à l'AE dans un REER.
Il n'y a pas de raison que les taux de cotisation à l'assurance-emploi soient aussi élevés. À la fin de l'an dernier, le compte d'assurance-emploi comprenait un excédent cumulatif de plus de 35 milliards de dollars. Le taux de cotisation de 2,25 $ des employés portera cet excédent cumulatif au titre de l'assurance-emploi au-dessus de la barre des 40 milliards de dollars d'ici la fin de 2001.
Dans son dernier rapport, le vérificateur général condamne vertement la façon dont le gouvernement a géré le compte. Le vérificateur général souligne à juste titre que l'excédent du compte représente plus de deux fois le maximum que l'actuaire en chef de DRHC estime suffisant comme réserve pour le compte. Cela s'explique par les taux de cotisation inutilement élevés que le gouvernement refuse de réduire considérablement.
Alors que les travailleurs saisonniers du Canada atlantique et d'un océan à l'autre sont victimes de la ponction fiscale des libéraux, la situation devient très frustrante pour un député qui représente une région où vivent de nombreux travailleurs saisonniers et où le taux de chômage est élevé, comme dans Guysborough. Il y a énormément de grogne chez ces travailleurs et ces employeurs, car les taux de cotisation qui s'élèvent actuellement à 2,25 $ devraient et pourraient être ramenés à 1,90 $.
Le gouvernement a amplement de possibilités de rectifier les lacunes dans le projet de loi. Nous attendons avec impatience l'occasion de proposer en comité des amendements qui amélioreront cette mesure législative.
M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur les révisions proposées à l'assurance-emploi. Avant de traiter de cette question, permettez-moi de faire quelques commentaires sur le geste déraisonnable du gouvernement qui a présenté une motion d'attribution de temps aujourd'hui.
Les gouvernements avaient l'habitude d'invoquer la clôture. Essentiellement, cela signifiait que la Chambre n'ajournait pas tant que le débat se poursuivait. C'était l'époque où celle-ci siégeait toute la nuit, aussi longtemps qu'il y avait des députés intéressés à prendre la parole.
L'attribution de temps ne permet pas aux députés de rester jusqu'à minuit, deux heures ou quatre heures du matin, pour se faire entendre. Elle établit qu'à 18 h 15, aujourd'hui, ce sera fini. Il n'est vraiment pas raisonnable de la part du gouvernement de nous priver d'exprimer notre opinion passée une certaine heure.
Je me compte très chanceux de me voir accorder maintenant une dizaine de minutes pour livrer mes commentaires. Mais qu'en est-il des autres députés qui veulent se prononcer, au nom de leurs électeurs, sur cet important projet de loi? Ils sont littéralement empêchés de le faire en raison de cette motion qu'a fait adopter le gouvernement il y a quelques minutes.
En outre, je trouve vraiment dommage que tous les députés d'en face votent automatiquement en faveur d'un projet de loi tel que celui-ci tandis que, de ce côté-ci, les députés voteraient très volontiers contre l'attribution de temps ou la clôture. Or, soudainement, nos collègues d'en face semblent se métamorphoser. On dirait qu'ils déposent leur cerveau au vestiaire et deviennent des statues de pierre. Ils ne se servent plus de leur tête. Ils se contentent de faire ce qu'on leur dit.
Je sais que le Parlement exige un certain degré de respectabilité. Il faut parfois céder aux autres. Un couple ne pourrait survivre bien longtemps sans cela. Il y en a dans une certaine mesure à la Chambre. Toutefois, la situation ne peut être défendable lorsque des députés suivent aveuglement des ordres avec lesquels ils ne sont pas d'accord.
Je suis très étonné que les députés libéraux n'aient pas le courage de s'affirmer et de dire ce qu'ils vont faire. Nous allons probablement assister au même scénario ce soir lorsque les députés se prononceront tous contre leur propre plate-forme électorale de 1993.
Les pouvoirs du Parlement se rétrécissent comme une peau de chagrin. Je commence à croire que mon collègue de la législature précédente, Lee Morrison, avait raison lorsqu'il a déclaré que cet endroit ne correspond qu'à une perte de temps en raison de l'ensemble des restrictions et des mesures de contrôle que lui impose le gouvernement.
Je suis désolé que les Canadiens ne s'en soient pas aperçu et que les Ontariens, en raison de l'information erronée qui a été diffusée, ont été persuadés de nouveau d'élire leur candidat libéral au lieu d'opter pour la bonne solution, soit un parlement qui travaille effectivement pour les Canadiens.
Soucieux d'épuiser mon temps de parole, je ferai quelques observations au sujet du projet de loi C-2 qui prévoit des amendements à la Loi sur l'assurance-emploi. Bon nombre d'enjeux revêtent beaucoup d'importance pour les Canadiens, et l'un des plus importants est qu'ils estiment que les règles devraient être les mêmes pour tous au pays.
Je sais que l'on peut soutenir que dans les régions à chômage élevé il est difficile de dénicher un emploi et que, par conséquent, les prestations devraient être augmentées ou accordées sur une plus longue période. C'est une réalité. Toutefois, il existe à l'heure actuelle dans les Prairies un problème d'ordre plus grand en ce qui concerne les agriculteurs.
Lorsque nous perdons notre emploi, nous perdons aussi notre revenu. Sans revenu, nous ne pouvons pourvoir aux besoins de nos familles. Nous éprouvons beaucoup de sympathie à l'égard des gens qui perdent leur emploi ou qui occupent un emploi saisonnier. Toutefois, il y a aussi des agriculteurs occupant des emplois saisonniers et ayant maintenant perdu leur source de revenu en raison de l'inaction du gouvernement. Les coûts des intrants des agriculteurs sont supérieurs à ce qu'ils tirent de la vente de leurs produits.
Leur revenu est donc tombé à zéro. Ces agriculteurs reçoivent-ils de l'aide du gouvernement? Pas qu'on sache. On entend toutes sortes d'annonces à ce sujet, mais il ne se passe jamais rien.
Ce qu'on voit plutôt, ce sont des agriculteurs qui sont obligés de payer leur comptable 500 $ ou 600 $ pour qu'il fasse des calculs afin de déterminer s'ils sont admissibles ou non aux programmes d'aide. Une fois qu'ils ont présenté leur demande, les agriculteurs reçoivent 5 $ ou 10 $ parce que c'est tout ce à quoi ils ont droit, ça et la facture de leur comptable.
C'est tout simplement absurde que le gouvernement n'arrive pas à résoudre ce problème.
Il vient de distribuer 1,3 milliard de dollars en allocations pour frais de chauffage à des gens dont probablement 90 p. 100 n'ont pas de factures de chauffage à payer. Le gouvernement dit que cette allocation vise à aider les Canadiens qui ont des factures de chauffage élevées. Il a carrément mal géré cet argent. En réalité, c'est un gâchis de 1,3 milliard de dollars en ce sens que l'argent est allé à des gens qui n'en avaient pas besoin. Le gouvernement a complètement raté la cible.
La Loi sur l'assurance-emploi ne réussit pas très bien à atteindre la cible. Franchement, si une personne perd son emploi, le fait que 10 ou 100 de ses voisins se trouvent dans la même situation n'a aucune importance pour cette personne. Perdre son emploi est quelque chose de très personnel. Lorsqu'une personne perd son emploi et, du même coup, son revenu, le fait qu'elle vive en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba, à l'Île-du-Prince-Édouard, en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick ou à Terre-Neuve ne devrait avoir aucune importance. Si une personne cotise à l'assurance-emploi et se retrouve sans travail, elle devrait pouvoir toucher des prestations en attendant de trouver un autre emploi.
Nous utilisons le mot «assurance», alors parlons justement d'assurance. Qu'arriverait-il si ma maison était détruite par un incendie et que la compagnie d'assurance refusait de payer en disant qu'il y a eu trop peu d'incendies dans ma région cette année? Les compagnies d'assurance ne tiennent pas compte de ce genre de facteur dans leurs décisions. S'il y a une région où beaucoup de maisons sont détruites par des incendies, la compagnie d'assurance examinera probablement la situation pour voir ce qu'on pourrait faire en matière de prévention. Voilà un autre secteur où le gouvernement a échoué lamentablement. Pour que les gens cessent d'être des chômeurs, ils doivent pouvoir trouver des emplois. Le gouvernement a-t-il fait autre chose que d'annoncer haut et fort, surtout durant la campagne électorale, de minuscules petites réductions d'impôts au lieu de réductions substantielles et de politiques qui inciteraient les entreprises non seulement à rester ici, mais à s'établir ici et à créer de nouveaux emplois? Non, il n'a rien fait d'autre.
Le taux de chômage grimpe et notre économie stagne. Pourquoi? Parce que le gouvernement a totalement omis d'élaborer des politiques grâce auxquelles notre pays pourrait être excessivement solide dans le contexte de l'économie mondiale. Nous tenons le coup avec un dollar faible. C'est le seul facteur qui semble être à l'avantage des Canadiens à l'heure actuelle, car on nous demande à tous d'accepter une ponction de 30 p. 100 dans nos revenus pour pouvoir vendre nos produits à l'étranger. Cette mesure aide à atténuer le problème, mais à quel prix! Ce n'est pas une solution à long terme.
Le projet de loi sur l'AE comporte bien des faiblesses. Un autre élément qui vient à l'esprit est la totale iniquité de la structure des taux de l'assurance-emploi. D'accord, les taux ont baissé légèrement et les libéraux s'en vanteront.
En valeur actuarielle, l'excédent dans la caisse de l'AE se chiffre à 25 milliards de dollars, et atteint peut-être même 30 milliards maintenant. La loi actuelle stipule qu'il appartient à l'actuaire en chef de donner des avis. Présentement, l'excédent dans la caisse de l'AE est deux fois ce qu'il devrait être et pourtant le gouvernement continue à percevoir des sommes considérables des employeurs et des employés. En fait, il recueille 40 p. 100 de plus chez les employeurs que chez les employés. Il n'est pas surprenant qu'ils n'aient pas l'argent nécessaire pour investir et embaucher davantage d'employés. Voilà le noeud du problème.
Que fait ce projet de loi? Il supprime l'obligation de faire appel à l'intervention actuarielle et confère un nouveau pouvoir au ministre, celui de fixer les taux. Il n'est donc pas surprenant que nous soyons contrariés par ce projet de loi. Il n'est pas surprenant que nous voulions en discuter et le modifier. J'aimerais que le gouvernement soit disposé à le faire.
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole au sujet de cet important projet de loi. Il illustre encore une fois l'aspect progressiste du programme du gouvernement.
Le programme a dès le départ été établi sur des bases logiques et il a été suivi de façon régulière par la suite. C'est un programme qui a été bien accueilli par les Canadiens au cours des dernières élections. Les critiques du gouvernement prétendent que le contenu du projet de loi C-2 va à l'encontre des réformes apportées en 1996. Rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité.
Les députés se souviendront que tous étaient d'accord pour dire, au début du mandat du gouvernement actuel, que le programme de l'assurance-emploi devait être remplacé. Tous s'entendaient là-dessus. Après bon nombre de consultations auprès des Canadiens et malgré les fortes protestations de l'opposition, le gouvernement a proposé un nouveau programme d'assurance-emploi.
Le nouveau régime devait être viable, raisonnable et juste, encourager le travail, réduire la dépendance face aux prestations et aider les travailleurs dans le besoin à retourner au travail et à garder un emploi. Le nouveau programme d'assurance-emploi répond à ces objectifs.
Ce programme a été mis en oeuvre bien que nous sachions qu'il n'était pas parfait. Nous savions qu'avec le temps des améliorations devraient y être apportées. La mesure législative proposée prévoyait une période de surveillance permanente et d'évaluation du programme dans le but d'en mesurer les répercussions sur les gens, les collectivités et l'économie.
Ce n'est pas la première fois que des ajustements au régime d'assurance-emploi s'imposent. Le gouvernement a rapidement pris des mesures en 1997 pour lancer le projet pilote des petites semaines en vue corriger l'effet dissuasif pour certaines personnes du travail à temps complet pour de faibles revenus. Les études que nous avons effectuées et les discussions que nous avons eues avec les Canadiens nous ont démontré que si le programme d'assurance-emploi fonctionne bien à de nombreux égards, certaines dispositions manquent d'efficacité ou sont trop sévères dans certains cas, particulièrement en ce qui touche les travailleurs saisonniers.
Il y a toujours eu, et il y aura toujours, des industries saisonnières au Canada. Ces industries sont en fait indispensables au bien-être économique national et, comme ces industries, par définition, emploient des travailleurs pendant une partie de l'année seulement, nous devons veiller à ce que nos programmes socio-économiques en tiennent compte.
L'assurance-emploi a certainement pour objet d'aider les chômeurs, mais nous devons reconnaître aussi que certains groupes, notamment les travailleurs saisonniers, ont des besoins particuliers et que le programme est en fait pourvu de caractéristiques spéciales qui ont été prévues à l'intention justement de ces travailleurs saisonniers. Le système fondé sur le nombre des heures travaillées, pour prendre cet exemple, tient compte du fait que le travail saisonnier comporte souvent de longues heures de travail réparties sur un petit nombre de semaines. En tant qu'agriculteur, je peux en témoigner.
Je le répète, le programme de l'assurance-emploi vise entre autres objectifs celui de réduire la dépendance de tous les travailleurs canadiens à l'égard des prestations, y compris les travailleurs saisonniers. Par conséquent, la règle dite de l'intensité a été instaurée pour décourager le recours fréquent aux prestations de l'assurance-emploi, en réduisant le taux des prestations des prestataires fréquents. Le but était d'encourager les gens à travailler.
Nous avons cependant connu une croissance économique inégalée, mais les Canadiens n'en ont pas tous bénéficié au même titre. Les travailleurs saisonniers tendent à être du nombre de ceux dont la situation ne s'est pas améliorée au même rythme que l'économie en général. Dans certaines régions, le taux de chômage est supérieur à 10 p. 100. Nos rapports d'observation et d'évaluation en témoignent. Ils indiquent que la proportion des prestations versées aux prestataires fréquents est demeurée stable, aux environs de 40 p. 100, depuis l'application de la règle de l'intensité.
Il est cependant inévitable que les travailleurs saisonniers soient nombreux à devoir recourir aux prestations de l'assurance-emploi. Il se peut tout simplement qu'il n'y ait pas suffisamment de possibilités d'emploi pendant l'entre-saison. Autrement dit, ce qui avait été conçu comme une mesure dissuasive pour éliminer la dépendance à l'égard des prestations d'assurance-emploi est devenu une mesure punitive dans les régions où les solutions de rechange sont rares. C'est pourquoi le projet de loi C-2 propose l'élimination de la règle de l'intensité.
Par ailleurs, afin d'offrir une véritable solution aux travailleurs qui se trouvent dans ce genre de situation, le programme de l'AE conserve l'une des dispositions les plus importantes, à savoir les mesures actives prévues à la partie II, c'est-à-dire les prestations d'emploi et les mesures de soutien.
Avec l'aide de ces instruments, le gouvernement continuera à travailler de concert avec les provinces et les territoires, ainsi qu'au niveau local, à l'élaboration de solutions à long terme en vue de diversifier les économies locales et de les rendre autosuffisantes en matière de création d'emplois. Les solutions à long terme requièrent les efforts concertés de tous les ordres de gouvernement, du monde des affaires, des dirigeants communautaires et de l'ensemble des Canadiens afin d'élaborer des mesures efficaces.
Il nous faut des mesures pour offrir aux travailleurs des secteurs saisonniers des possibilités valables de formation et d'éducation. Il nous faut des mesures afin de promouvoir la diversité économique des communautés qui dépendent de l'emploi saisonnier. Il nous faut des mesures pour donner aux communautés la capacité de devenir économiquement autonomes. Le gouvernement continue et continuera à travailler en partenariat avec tous les Canadiens afin que de telles mesures soient élaborées et mises en place. Tel est notre engagement.
En attendant, il ne faut pas oublier que le nouveau régime de l'AE, mis en place en 1996, et amélioré par la suite, est toujours efficace, équitable et responsable. Le régime d'admissibilité selon le nombre d'heures travaillées rend admissibles aux prestations des gens qui auparavant n'étaient pas couverts, entre autres, certains travailleurs saisonniers ou à temps partiel.
L'assujettissement aux cotisations d'AE dès la première heure de travail a supprimé la tentation pour les employeurs de limiter le nombre d'heures des employés à temps partiel afin d'éviter de payer des cotisations. Les modifications envisagées dans le projet de loi C-2 amélioreront encore davantage le régime, ce qui contribuera à en garantir l'équité et à servir les intérêts des Canadiens qui se trouvent sur le marché du travail.
Les réformes apportées à l'AE en 1993 représentent la restructuration la plus fondamentale du régime de l'assurance-chômage en 25 ans. Dans le cadre du présent débat sur les ajustements proposés, il ne faut pas oublier que les éléments de fond de l'AE sont maintenus parce qu'ils fonctionnent. Je tiens à le souligner. Pourquoi se défaire de quelque chose quand on sait que ça marche? Cela ne veut pas dire que le programme est coulé dans le béton.
Le gouvernement continuera à surveiller et à évaluer l'assurance-emploi et à y apporter les changements nécessaires. Le gouvernement fait preuve de souplesse, ce qu'il a toujours fait.
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Madame la Présidente, c'est la première fois que je prends la parole à la Chambre depuis le début de la législature. Je tiens à vous féliciter, vous et les autres présidents, et à remercier les citoyens de ma circonscription qui m'ont fait l'honneur de les représenter au Parlement.
Voilà bien, je crois, le sujet qui nous occupe: les gens qui ont travaillé fort pour que nous les représentions à la Chambre des communes. Or, voici que le débat sur le projet de loi C-2 est visé par la procédure de clôture.
Ce matin, avant la présentation de la motion destinée à limiter le débat sur ce projet de loi, on a demandé aux députés de se prononcer sur une autre motion afin que le rapport d'un comité soit accepté sans faire l'objet de discussion. Nous trouvons cela inacceptable. Une telle situation nous prive de l'occasion de représenter les intérêts de nos électeurs.
Les citoyens qui ont confiance en nous ont travaillé fort pour envoyer des représentants au Parlement. Nous partageons avec nos électeurs des convictions et des principes, et c'est pour cela que nous sommes ici. Bien sûr, nous n'avons pas tous les mêmes idées ni la même façon d'envisager le déroulement des choses. Les citoyens nous élisent pour que nous fassions valoir nos convictions et que nous défendions les principes que nous avons en commun.
La présentation de motions de clôture nous bouleverse toujours autant. C'est la 69e fois que le gouvernement recourt à cette procédure depuis 1993. C'est inacceptable car cela entrave la capacité des députés, qui sont élus pour représenter leurs électeurs, d'exprimer leur opinion.
En soulevant la question de privilège, le député de Fraser Valley, leader de l'opposition à la Chambre, a bien exposé plusieurs points qu'il ne faut pas perdre de vue. Une réforme s'impose à la Chambre, de sorte que nous puissions mieux faire valoir les préoccupations de nos électeurs. Jusqu'à un certain point, le recours à la clôture nous empêche d'agir dans ce sens.
Quand le débat sur le projet de loi C-2 prendra fin à la Chambre aujourd'hui, cette mesure sera renvoyée à un comité qui en sera saisi une fois que les comités auront été établis. Les Canadiens ont besoin de savoir que les comités sont tous établis eux aussi en faveur du gouvernement.
À propos du rapport déposé ce matin de la part d'un comité, le gouvernement a utilisé sa majorité au sein du comité pour rejeter une motion qui aurait permis aux membres du comité d'en élire le président par scrutin secret. C'est peu de chose, mais cela aurait beaucoup contribué à instaurer une certaine crédibilité au niveau du comité. Cette proposition a cependant été rejetée par la majorité ministérielle.
Lorsque nous aurons terminé l'étude du projet de loi à cette étape-ci, il sera renvoyé au comité. Le gouvernement permettra-t-il de tenir un véritable débat au niveau du comité? Acceptera-t-il des suggestions constructives? Laissera-t-il adopter des amendements? Se contentera-t-il d'utiliser le pouvoir de la majorité dont il dispose au comité pour rejeter toutes les propositions qu'on aura présentées?
Nous avons déjà vu cela. Je le sais, j'ai participé à l'examen en comité de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. De nombreux amendements ont été proposés tout au long des nombreuses heures de séance consacrées au projet de loi. À la fin, le gouvernement a fait venir ses députés qu'il a utilisés comme des machines à voter. Ils étaient complètement ignorants des enjeux. Ils n'étaient absolument pas au courant des discussions qui avaient eu lieu. Ils ne savaient absolument rien non plus des amendements sur lesquels ils devaient se prononcer. On leur a simplement fait signe quand est venu le temps pour eux de se lever et de voter. C'est vraiment déplorable.
Les gens qui se prononcent ainsi devraient au moins être au courant des enjeux. Il est vraiment déplorable de voir ainsi des députés convoqués par le whip à venir voter sur une politique dont ils ne connaissent absolument rien.
Cette question de clôture, de réforme parlementaire, toute cette notion de participation aux comités et de nous redonner un peu de responsabilité en tant que députés de la Chambre, ce n'est pas seulement notre parti, l'opposition officielle, qui la fait valoir. C'est tout le monde. Des députés assumant toutes sortes de rôles, des ministériels, des députés d'arrière-ban et des députés du côté du gouvernement ont fait des commentaires sur notre inefficacité en tant que parlementaires et sur l'érosion de notre capacité d'opérer un changement. Ce n'est pas un seul parti, ce sont tous les partis qui soulèvent cette question.
Le leader de l'opposition a dit: «Les Canadiens ont raison d'être fiers de leur Parlement responsable. Cependant, notre démocratie parlementaire n'est pas tout à fait comme elle devrait l'être. Le premier ministre exerce un pouvoir trop grand, pouvoir qu'il devrait partager avec les représentants élus.» On touche maintenant au coeur de la question. La discipline de parti excessive empêche une discussion et un débat ouverts. Les citoyens et les groupes communautaires estiment que leur opinion n'est ni respectée, ni écoutée.
Cela nous amène au vrai motif de cette discussion aujourd'hui. Nous ne pouvons pas transmettre à la Chambre les opinions de nos électeurs, parce que le débat est limité et que les comités sont organisés de façon à rendre impossible un changement important.
Le député de Toronto—Danforth, pour qui j'ai beaucoup de respect, a organisé l'année dernière, à Toronto, un événement pour aider les agriculteurs de tout le pays. C'est pour cela que je le respecte. Tenir cette activité dans le centre-ville de Toronto et en faire une telle réussite a été une bonne chose. Cet événement a attiré l'attention sur la question dont nous sommes saisis. Il ne s'est pas produit beaucoup de changement depuis, mais je lui sais gré de son geste. Il a dit que le Parlement ne fonctionne pas, qu'il est défectueux, qu'il est comme un moteur de voiture qui fonctionne avec deux cylindres.
Mettons en marche les autres cylindres. Faisons en sorte que la présente législature travaille fort et efficacement. Utilisons tous les chevaux-vapeur possibles. Donnons-nous en tant que députés le droit et la capacité d'exprimer nos opinions.
J'ai aussi siégé au comité de l'environnement en compagnie du député libéral de Lac-Saint-Louis, ancien ministre du Cabinet québécois que je respecte beaucoup. Il a déclaré que les députés d'arrière-ban sont d'emblée considérés comme des idiots, comme des machines à voter.
Les propos tenus récemment en Chine par le premier ministre illustrent qu'il considère lui aussi ses propres députés d'arrière-ban, sans parler des autres députés, comme des machines à voter qui lui obéiront, quoi qu'il dise.
Les députés du Parti progressiste conservateur ne sont pas en reste. Ils ont dit dans leur dernier programme électoral que nous devons réévaluer le pouvoir des simples députés afin qu'ils puissent représenter efficacement les intérêts de leurs électeurs et jouer un rôle important dans l'élaboration de la politique gouvernementale.
Nous devons redonner à la Chambre et aux députés élus de façon démocratique la capacité d'en arriver à une politique. Nous ne pouvons pas laisser cela entièrement entre les mains des bureaucrates. Je sais que les bureaucrates ont un rôle à jouer, mais ce rôle devrait être d'appuyer la volonté des députés et ce qu'ils proposent.
Le leader du NPD à la Chambre est un champion de la réforme parlementaire et il saisit chaque occasion qui se présente pour amener le sujet sur le tapis et susciter un débat. Encore aujourd'hui, en réponse à la question de privilège soulevée par le leader de l'opposition officielle à la Chambre, il a expliqué en détail ce qu'il faut faire pour redonner du pouvoir aux députés.
Je me permets de rappeler la déclaration d'un député de premier rang. Le ministre des Finances a conclu une intervention en disant: «Les députés doivent avoir l'occasion de vraiment représenter leur électeurs et d'exprimer leurs idées en leur âme et conscience.» Cette déclaration me plaît parce qu'elle s'inspire en grande partie des politiques et des principes de mon parti, selon lesquels un député doit se prononcer comme le souhaitent ses électeurs et selon sa conscience.
Les Canadiens conçoivent mal que les députés ne puissent pas le faire. Pensons à l'aliénation de certaines régions du pays, où les gens ont l'impression de ne pas participer, de ne pas être représentés dans le débat et se sentent impuissants. Il y a des choses simples à faire pour redonner à la population le sentiment qu'elle doit avoir, qui est le sentiment de participer au processus et que, lorsque qu'elle vote, cela veut dire quelque chose.
La baisse du nombre de personnes qui votent aux élections fédérales au Canada est un crime en soi. Pourquoi les gens ne s'engagent-ils pas dans le débat? Pourquoi ont-ils l'impression que leurs votes ne veulent rien dire? On a vu aux États-Unis à quel point chaque vote compte vraiment. En fait, les Canadiens ont l'impression que ce que pensent ou veulent les gens ordinaires ne fait aucune différence.
Pourquoi celui qui a été élu pour servir ses électeurs n'appuierait-il pas des changements pour améliorer la Chambre? Il faut qu'il y ait des votes libres à la Chambre des communes. En tant que parlementaires, nous devons pouvoir voter comme nos électeurs le souhaitent. J'aimerais bien avoir plus de temps à ma disposition. Il y a tant de choses que nous pourrions faire. La tenue du débat sur le projet de loi C-2, modifiant la Loi sur l'assurance-emploi, sous le coup d'une motion de clôture fait simplement ressortir ce qui ne va pas dans notre système.
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Madame la Présidente, je suis très heureux de pouvoir parler des modifications fort importantes à l'assurance-emploi dont nous sommes saisis aujourd'hui ainsi que des mesures certainement très concrètes que le gouvernement du Canada, de ce côté-ci de la Chambre, propose dans ce domaine capital.
Mais avant tout, je voudrais parler des jérémiades des députés de l'opposition lorsqu'il est question de clôture ou d'attribution de temps. À mon avis, les députés alliancistes sont particulièrement exaspérants. Il n'y a pas si longtemps, le chef de l'opposition faisait partie du Cabinet albertain. Lorsque l'assemblée législative de l'Alberta siégeait, ce qui est très rare dans cette province, il a imposé l'attribution de temps et la clôture à l'égard de toutes sortes de mesures, dont certaines imposant des restrictions aux aînés ou prévoyant la fermeture de jardins d'enfants ainsi que l'infâme projet de loi 11. Il est donc vraiment difficile de suivre les députés d'en face, car ils disent une chose et proposent de faire le contraire. Si quelqu'un est le champion de la clôture, c'est bien le chef de l'opposition.
Cependant, c'est tout à fait typique. J'ai écouté attentivement le député qui a pris la parole avant moi. Je me souviens qu'en 1993, puis en 1997, un député réformiste a mené un sondage sur le contrôle des armes à feu auprès des électeurs de sa circonscription. Devinez ce qu'il a constaté? Il a constaté que les électeurs de sa circonscription appréciaient les mesures que le gouvernement du Canada proposait à ce chapitre. A-t-il voté de manière conséquente? Bien sûr que non. Voici encore un exemple où quelqu'un dit une chose, mais fait le contraire.
Je pourrais citer bien d'autres cas: Stornoway; l'utilisation de voitures officielles; la députée d'Edmonton-Nord, son régime de retraite et les porcs sur la pelouse; le député de Medicine Hat et son régime de retraite; les 50 000 $ versés à Jim Hart pour qu'il cède son siège. Je pourrais parler des 800 000 $. Le député prétend qu'ils sont responsables sur le plan budgétaire, mais il est prêt à dépenser 800 000 $ de l'argent des contribuables.
Cela devient un peu exaspérant à la longue d'écouter les députés alliancistes qui se montrent excessivement zélés dans leurs propos, mais qui se comportent de manière bien différente. Les députés d'en face se font passer pour des petits saints en essayant de condamner un gouvernement qui agit dans l'intérêt supérieur de tous les Canadiens, qui prend des mesures judicieuses concernant les réformes de l'assurance-emploi et apporte les rajustements voulus.
Pourquoi? Après avoir apporté des modifications au régime d'assurance-emploi, après avoir écouté le point de vue des gens et après en avoir tenu compte—ce qu'un bon gouvernement doit faire—c'est exactement ce que nous faisons par le projet de loi C-2. Nous agissons avec célérité.
Pourquoi agissons-nous ainsi? Parce que nous devons appliquer ces changements rétroactivement dans l'intérêt des travailleurs et de ceux qui profiteront des changements que nous proposons, dans l'esprit des valeurs de notre grand pays. C'est précisément ce que nous faisons.
Il est absolument clair, en tout cas pour moi et les députés de ce côté-ci de la Chambre, que les éléments fondamentaux de la réforme, comme un régime fondé sur le calcul des heures et la couverture au premier dollar, marchent bien. Cependant, il y a des éléments à modifier ou à adapter pour que le régime soit efficace et juste.
Il y a déjà quelques années que le gouvernement a succédé aux conservateurs, qui ont laissé le Canada en faillite et dans le pétrin, et nous savons que, grâce à une bonne intendance, à la prudence financière et à des décisions judicieuses, nous avons ramené le Canada dans la voie de la prospérité. Le taux de chômage national est maintenant de 6,8 p. 100. C'est une excellente nouvelle pour le Canada et tous les Canadiens. C'est le taux le plus bas depuis un quart de siècle.
Il reste néanmoins des régions où le chômage reste supérieur à 10 p. 100. Ce sont ce régions-là dont il nous faut nous occuper parce que, en fin de compte, tout ce que nous voulons, c'est que tous les Canadiens profitent de cette nouvelle prospérité, et lorsqu'il y en qui n'en profitent pas, c'est la façon canadienne d'aider les gens qui sont dans le besoin. Je pense, par exemple, aux travailleurs forestiers de la côte ouest. Je pense aux travailleurs de la construction en Ontario et aux pêcheurs dans les provinces Maritimes. Ces Canadiens travailleurs éprouvent souvent des difficultés, mais ils forment l'élément essentiel de leurs collectivités, et partant, de tout le pays. Ce sont ces gens-là que nous tentons d'aider. C'est précisément ce à quoi les Canadiens s'attendent de nous.
Nous devons agir rapidement et dès aujourd'hui. Nous avons débattu la question pendant des heures, pendant des jours. Il est maintenant temps d'agir et de passer à l'action. C'est pourquoi l'attribution de temps est demandée aujourd'hui. Nous voulons agir et agir vite afin que les quelques éléments de nos réformes, comme la règle d'intensité et la disposition de récupération, soient modifiées, comme elles ont besoin de l'être. Le programme doit être adapté aux réalités avec lesquelles sont aux prises les régions du pays qui sont tributaires d'industries saisonnières. Un bon nombre de ces régions offrent des possibilités limitées d'emploi hors saison. Dans ces régions, je crains que la règle d'intensité n'ait pas réussi à réduire la dépendance et ne soit considérée simplement comme une mesure punitive. C'est pourquoi nous faisons ce que nous faisons pour corriger cela.
Comme les députés le savent, le taux de prestations d'assurance-emploi d'une personne est réduite d'un point de pourcentage pour toutes les 20 semaines de prestations ordinaires ou relatives à la pêche qu'elle a touchées dans les cinq années précédentes. Selon le nombre de semaines de prestations versées dans les années précédentes, le taux de prestations d'une personne passerait de 55 p. 100, le taux usuel, à 54 p. 100 , puis à 53 p. 100 et, enfin, comme on le sait, à 50 p. 100.
Notre objectif est simple. Il s'agit de réduire la dépendance envers l'assurance-emploi. Le hic, et c'est une réserve importante, c'est que les analyses que nous avons effectuées dans ce domaine très important montrent que, en pratique, la règle ne diminue pas le recours fréquent à l'assurance-emploi, en particulier dans les régions où les possibilités d'emploi sont rares.
Bref, on craint que la règle d'intensité ne serve qu'à punir certains prestataires. C'est inadmissible. Nous voulons donc abolir cette règle et rétablir le taux de base des prestations à 55 p. 100 pour tout le monde, mesure qui serait rétroactive au 1er octobre 2000. À mon avis, il s'agit d'une bonne décision. Je suis sûr que les électeurs de Waterloo—Wellington partagent mon avis.
Cela ne veut pas dire que nous nous résignons au fort taux de chômage dans ces régions. L'assurance-emploi n'est qu'un élément de solution. Il faut réfléchir à cette question et y réfléchir de façon sérieuse. Il est de plus en plus crucial que tous et chacun, tant les gouvernements que les entreprises, les communautés et les simples citoyens, unissent leurs efforts pour stimuler les économies locales et relancer l'économie dans l'intérêt de tous, mais surtout de ceux qui se retrouveraient sans cela démunis.
Nous devons donc tous collaborer pour créer des emplois durables pour tous les travailleurs. Je signale, à titre d'exemple, le Partenariat pour l'investissement au Canada atlantique, une initiative de 700 millions de dollars visant à aider le Canada atlantique à créer des emplois et à prospérer dans la nouvelle économie. Je me rappelle à quel point j'ai été consterné d'entendre ce que disaient les membres de l'Alliance canadienne à propos des habitants du Canada atlantique. C'était quoi au juste? Ils qualifiaient ces Canadiens de paresseux et d'indolents. Quelle insulte. C'était une insulte à l'endroit non seulement des habitants du Canada atlantique, mais de tous les Canadiens. Voilà ce que pensent les députés d'en face. Voilà le genre de propos tendancieux et stéréotypés qu'ils tiennent.
Dieu merci, nous, du gouvernement, n'avons pas une mentalité de dinosaures du Parc jurassique, mais passons à du positif. Soit dit très simplement, ce qui est positif, c'est ce que fait notre gouvernement pour s'assurer qu'on aide les gens, où qu'ils soient—dans l'Est, l'Ouest, le Nord ou le Sud. Nous nous assurons qu'ils vont de l'avant et que leurs proches et eux-mêmes bénéficient de solides assises économiques.
Pour paraphraser le président du comité de Charlevoix sur l'assurance-emploi, Gilbert Dumont, nous devons trouver des solutions permanentes au chômage dans nos régions. M. Dumont a parfaitement raison et nous, du gouvernement, nous efforçons de veiller à ce que cela se produise bien.
C'est pourquoi notre gouvernement établit de solides partenariats avec des entreprises et des collectivités pour créer de nouvelles possibilités qui soient bénéfiques pour tous à cet égard. Il faut donner à davantage de Canadiens les outils et les possibilités dont ils ont besoin pour soutenir leur famille et bien gagner leur vie.
En conclusion, l'assurance-emploi est un programme social extrêmement important pour les Canadiens. Ce programme est très bien vu et très respecté. Il faut parfois l'adapter pour qu'il soit vraiment efficace, mais c'est un programme qui tient à coeur aux Canadiens. Nous, du gouvernement, allons continuer de nous assurer qu'il est en place pour tous les Canadiens, où qu'ils vivent dans ce magnifique pays qui est le nôtre.
[Français]
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Madame la Présidente, nous sommes tous ici, dans cette Chambre, pour représenter les citoyens et citoyennes de nos circonscriptions électorales respectives. Je crois que je ne suis pas au bout de mes peines dans cette Chambre.
J'ai entendu des collègues, tout au long de la campagne électorale déclenchée par le premier ministre, avouer ouvertement que, finalement, une erreur avait été commise avec la Loi sur l'assurance-emploi. La réforme de 1996 a été une erreur pour les travailleurs et travailleuses du Québec en particulier et du Canada tout entier. Cette réforme n'a servi au gouvernement qu'à se faire des profits sur le dos des travailleurs et travailleuses.
J'écoutais tantôt un député d'en face nous dire qu'il s'agissait d'un programme social. L'assurance-emploi n'est pas un programme social, c'est un montant que les travailleurs et travailleuses paient à toutes les semaines, sur leurs chèques de paie, pour se donner une assurance afin d'être en mesure de faire face aux moments difficiles, advenant un problème.
Durant la campagne électorale, nous avons assisté à un manque flagrant d'humanité de la part de ce gouvernement. Le temps des Fêtes approchant, le chef du Bloc québécois adressait à chacun des chefs des autres formations politiques une lettre demandant à cette Chambre de se réunir dès le 19 décembre pour tenter de régler le problème de l'assurance-emploi.
Nous avons assisté à ce manque d'humanité, alors que le seul chef à avoir refusé de venir discuter du problème de l'assurance-emploi à la Chambre fut celui du Parti libéral. Puisque nous serions venus à la Chambre pour régler une seule question, nous aurions eu le temps de débattre et de régler cette question de l'assurance-emploi, qui est si importante pour tous les Québécois et Québécoises et tous les Canadiens et Canadiennes.
Le gouvernement a refusé, par l'intermédiaire du chef du Parti libéral, de participer à ce débat important que demandait le chef du Bloc québécois.
La position du Bloc québécois dans le dossier de l'assurance-emploi a toujours été la même. Il faut scinder le projet de loi en deux afin de tenir des discussions urgentes sur l'applicabilité du programme et décider ensuite de ce que l'on fera avec les surplus de 32 milliards de dollars amassés par le gouvernement du Canada sur le dos des travailleurs et travailleuses.
Qu'est-ce que l'on fera de ce surplus qui s'accroît de six milliards de dollars par année, au moment où on se parle? Le projet de loi C-2 ne promet de remettre aux travailleurs et travailleuses que 8 p. 100 de tous les surplus accumulés annuellement.
Donc, on a un problème de taille. Le gouvernement a, encore une fois, refusé d'entendre le Bloc québécois et de scinder ce projet de loi en deux afin que l'on puisse discuter d'un projet de loi indépendant qui ne traiterait que du surplus de 32 milliards, d'une part, et d'avoir un autre projet de loi indépendant qui ne traiterait que des situations d'urgence.
Ma circonscription d'Argenteuil—Papineau—Mirabel connaît des problèmes importants d'employabilité. Durant l'été, le taux de chômage se situe autour de 8 à 8,5 p. 100. Quand arrive la pointe de l'hiver, le taux de chômage augmente. Au moment où on se parle, le taux de chômage se situe autour de 14 p. 100.
C'est donc une industrie et des emplois qui sont basés principalement sur les industries forestières, agricoles et touristiques. Nous avons la grande industrie qui s'en vient dans notre circonscription avec, évidemment, des investissements importants à Mirabel qui ont été annoncés dans le cadre de la zone de commerce international. C'est, soit dit en passant, une réalisation du gouvernement du Québec, par l'intermédiaire de son ministre des Finances.
Aucun argent du fédéral n'est investi dans la zone de commerce international. Ce sont tous des crédits d'impôt et des crédits à l'investissement du gouvernement du Québec. Ce sont encore une fois des ratés de la part du fédéral. Mais revenons à nos moutons et au projet de loi sur l'assurance-emploi.
On aura compris que les modifications importantes qui ont été demandées par le Bloc québécois sont toujours d'actualité et méritaient plus que ce qu'on traite aujourd'hui, soit seulement un temps de parole, parce qu'on a décidé de clore le débat. Finalement, le projet de loi C-2 possède toujours le fameux délai de carence de deux semaines.
Dans la rue, chez les travailleurs et les travailleuses, on appelle cela une pénalité. C'est une punition que les travailleurs et les travailleuses subissent par le biais de ce délai de carence de deux semaines. C'est une pénalité. Dans la rue, tous les citoyens, disent: «Il faut attendre nos deux semaines de pénalité.» Quand on a 32 milliards de surplus dans une caisse, n'est-il pas le temps de rediscuter de ce délai de carence, qui est une punition à laquelle on soumet les travailleurs pour un régime qu'ils se paient eux-mêmes?
Est-ce qu'il y a moyen qu'on assoit autour d'une table les associations de travailleurs et de travailleuses du Québec et de tout le Canada pour dire: «Écoutez, il est temps, maintenant qu'on a des surplus dans cette caisse, de rediscuter de cette période de carence, de cette pénalité à laquelle on soumet les travailleurs.»
Ainsi, comme cela a été le cas hier dans ma circonscription suite à un incendie majeur, il y a eu quarante employés qui ont été pratiquement jetés à la rue et pour lesquels les seuls montants d'argent qui seront disponibles sont ceux de l'assurance-emploi. Ils devront donc subir deux semaines de pénalité parce que leur industrie est passée au feu hier.
Il est inconcevable, dans une société moderne, avec des surplus de 32 milliards dans une caisse d'assurance-emploi, que des travailleurs et des travailleuses, qui sont mis à la rue suite à des sinistres, aient à subir une punition, une pénalité de deux semaines. Il était temps et il est temps qu'on rediscute de ce délai de carence de deux semaines.
Pourquoi le gouvernement ne le veut pas? Pour la simple et bonne raison qu'il va faire des surplus dans la caisse de l'assurance-emploi avec ces deux semaines de délai de carence. Encore une fois, évidemment, on a été protégés jusqu'à aujourd'hui. Les 32 milliards de dollars sont restés dans les surplus virtuels du gouvernement. On n'y a pas touché. Avec le projet de loi C-2, le gouvernement va s'approprier ces 32 milliards de dollars de l'assurance-emploi.
Il va donc pouvoir se servir des deux semaines de délai de carence des travailleurs et des travailleuses du Québec et du Canada, des citoyens, des gens qui travaillent à la sueur de leur front. Il sera ainsi capable d'accumuler de l'argent dont il va s'accaparer maintenant pour investir dans des entreprises. On n'a qu'à regarder ce qui s'est passé avec les investissements dans le comté du premier ministre au cours des derniers mois. On aura donc compris qu'on va se servir de l'argent des travailleurs et des travailleuses pour aller plaire aux amis du parti et aux amis des députés d'en face.
C'est une situation intolérable. Il faut que cela cesse. Il faut que, finalement, les travailleurs et les travailleuses du Québec et du Canada puissent bénéficier des surplus de l'assurance-emploi qui leur appartiennent. Il faut qu'ils puissent se doter d'un véritable programme à leur image dans ce Canada moderne, comme le dit le premier ministre.
Il est temps que ces sommes reviennent aux travailleurs et aux travailleuses du Canada, et du Québec en particulier, pour qu'ils puissent se doter d'un programme à leur image, afin que, finalement, ils puissent bénéficier, dans les temps difficiles, d'une vraie assurance qu'ils ont payée. Je ne veux plus jamais entendre en cette Chambre qu'il s'agit d'un programme social. Ce n'est pas un programme social. C'est une assurance qui appartient aux travailleurs et aux travailleuses du Québec et du Canada.
[Traduction]
M. Bill Matthews (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur aujourd'hui de dire quelques mots sur la question des modifications à la Loi sur l'assurance-emploi. J'ai écouté attentivement mes collègues des deux côtés de la Chambre discuter sérieusement et émettre des commentaires sur cette question très importante pour la plupart des députés de cette Chambre.
Je représente une circonscription on ne peut plus rurale sur la côte sud de Terre-Neuve et du Labrador, habitée par des gens qui, bien involontairement, doivent se contenter d'un travail saisonnier. Comme on me l'a expliqué dernièrement, ce ne sont pas les travailleurs qui sont saisonniers, mais bien la nature de leurs occupations, qu'il s'agisse de foresterie, d'exploitation forestière ou de l'industrie de la construction. Ce secteur est tributaire des moyens dont dispose le gouvernement pour financer la construction des routes ou des conditions climatiques, qui peuvent retarder les projets de construction.
Mon coin de pays a été durement touché par la mauvaise gestion des stocks de poisson au large de nos côtes. Des personnes qui travaillaient auparavant 12 mois par année se voient maintenant réduites à travailler pendant des périodes très écourtées. La durée de l'emploi des gens que je représente est déterminée en grande partie par les actions des gouvernements fédéraux qui se sont succédé.
Nous avons apporté nos ressources dans la Confédération. Le gouvernement du Canada était censé s'en porter garant. Ce n'est pas exactement ce qui s'est produit et nous voilà maintenant dans une situation très difficile.
Les gens que je représente sur la côte sud de Terre-Neuve et du Labrador ont toujours travaillé 12 mois par année. Ils ignoraient ce que c'était que des vacances. Les stocks de poisson étaient si abondants qu'ils n'avaient qu'à cueillir le poisson et à le ramener dans nos usines de transformation, qui le transformaient sur place. Puis l'industrie de la pêche au poisson de fond s'est effondrée, ce qui a fait que la durée de la période d'emploi a été passablement réduite.
Lorsqu'on voyage le long de la côte, il est très triste de voir ces gens très fiers qui toute leur vie ont travaillé 12 mois par année dans l'industrie de la pêche à Terre-Neuve et au Labrador se retrouver tout à coup, sans que ce soit leur faute, dans une industrie devenue très saisonnière.
Le projet de loi a été présenté l'automne dernier et le débat a alors commencé. Il y a ensuite eu les élections générales. De toute évidence, les Canadiens ont donné au gouvernement un mandat très clair pour qu'il poursuive dans la direction où il s'était engagé et c'est ce que nous faisons aujourd'hui. C'est pourquoi nous avons présenté à nouveau le projet de loi.
Les modifications qui y ont été apportées nous permettront de mieux atteindre les objectifs originaux de notre réforme de l'assurance-emploi que nous avions présentés avant les élections. Une des principales modifications est l'élimination de la règle de l'intensité.
J'ai rencontré à plusieurs reprises des représentants de syndicats de pêcheurs, de syndicats de forestiers et de syndicats de travailleurs de la construction de collectivités côtières de Terre-Neuve et du Labrador. Une chose que, comme moi, ils ne sont jamais parvenus à comprendre, c'est comment la règle de l'intensité a pu être incluse dans la loi. Nous pénalisons les gens pour quelque chose dont ils ne sont absolument pas responsables, parce qu'ils ont le malheur de vivre dans des régions où ils sont incapables de trouver des emplois à temps plein.
La règle de l'intensité les pénalise chaque fois qu'ils sont mis à pied et qu'ils présentent une demande de prestations d'assurance-emploi. Chaque fois qu'ils demandent de nouvelles prestations, la règle de l'intensité tant redoutée réduit leurs prestations d'un pour cent. Ces gens ont vu leur niveau de prestation passer de 55 p. 100 à 51 p. 100, où il se trouve actuellement dans la plupart des cas. Si cela avait continué, leur niveau de prestation aurait baissé jusqu'à 50 p. 100, mais pas plus bas. Ces gens ne seraient jamais retournés à un taux de prestation de 55 p.100 sans les modifications dont la Chambre est saisie aujourd'hui. J'appuie entièrement l'élimination de la règle de l'intensité parce qu'elle pénalise des gens de toutes les régions du pays qui n'ont vraiment pas les moyens d'être pénalisés de cette façon.
Ce que je trouve vraiment ironique, c'est que le gouvernement du Canada est le gardien de nos ressources halieutiques d'un océan à l'autre. Nous sommes les gardiens de ces ressources. C'est nous qui prenons les décisions concernant la quantité de poisson qu'on peut pêcher et les technologies qui peuvent être utilisées pour pêcher le poisson. Toutes les décisions de gestion relatives à nos ressources halieutiques sont prises par le gouvernement du Canada et plusieurs gouvernements fédéraux successifs ont mal géré nos ressources halieutiques. C'est pourquoi nos stocks de poisson de fond se sont effondrés et nos gens ont perdu leur gagne-pain.
C'était plutôt ironique de voir que, chaque fois qu'ils devaient présenter une demande de prestations d'assurance-emploi, les gens qui avaient perdu leur gagne-pain à cause de la mauvaise gestion du gouvernement et de l'effondrement des stocks de poisson étaient pénalisés par le même gouvernement qui était censé gérer ces ressources en leur nom.
Je suis absolument ravi de voir aujourd'hui que nous allons éliminer la règle de l'intensité et rétablir le taux de prestation à 55 p. 100. Ceux d'entre nous qui ont suivi la réforme de l'assurance-emploi au Canada au cours des six ou sept dernières années savent fort bien que, il n'y a pas si longtemps, le taux de prestation était bien plus élevé que 55 p. 100. Même avec le rétablissement du taux à 55 p. 100, les gens touchent encore beaucoup moins en prestations d'assurance-emploi qu'il y a cinq ou six ans et ils ont un revenu beaucoup moins important sans qu'ils y soient pour rien.
De plus, je suis très heureux de constater qu'on va porter à 48 750 $ le niveau à partir duquel une disposition de récupération des prestations s'applique. C'est très important également pour beaucoup de gens, car avec un plafond de 39 000 $, beaucoup de gens étaient victimes de la récupération lorsqu'ils faisaient leurs déclarations de revenus. C'est une très bonne chose qu'on hausse ce plafond.
L'autre chose encourageante, c'est que cette mesure s'appliquera à l'année fiscale 2000 et que les gens qui font leurs déclarations de revenus à l'heure actuelle vont en profiter pour cette année-là.
Comme je représente une circonscription très rurale de Terre-Neuve et du Labrador, je suis très heureux également de voir qu'on va ajuster le Règlement sur l'assurance-emploi touchant la pêche et prévoyant des prestations spéciales pour s'assurer que les pêcheurs autonomes puissent profiter des prestations de maternité, des prestations parentales et des prestations de maladie qu'on a améliorées récemment. Là encore, cette mesure s'appliquera avec effet rétroactif au 31 décembre 2000.
Ces modifications sont très constructives et j'y souscris de tout coeur. J'ai exercé d'énormes pressions et j'ai déployé beaucoup d'efforts au sein du caucus libéral de l'Atlantique et du caucus national pour obtenir ces changements, car je crois qu'ils s'imposaient. Je me suis engagé à obtenir ces changements. Même si le gouvernement a déclaré en 1996 qu'il allait surveiller et évaluer les réformes à l'assurance-emploi qui étaient mises en oeuvre, et même si nous l'avons fait, j'ai jugé que trois ou quatre de ces mesures étaient tout à fait nécessaires pour rendre le système équitable. Il s'agissait notamment de supprimer les pénalités imposées aux gens qui occupaient des emplois saisonniers sans qu'ils n'y soient pour rien. Je suis vraiment très heureux qu'on apporte ces modifications.
Cela dit, étant donné que je me rends compte que mon temps de parole est pratiquement écoulé, je veux simplement préciser que même à la suite de ces modifications, il y a encore certains aspects de la Loi sur l'assurance-emploi qui doivent, selon moi, être révisés. Nous avons notamment besoin d'autres modifications relativement au dénominateur et quelques autres choses. Nous apportons des modifications très importantes avec ces nouvelles dispositions, mais d'autres modifications majeures s'imposent.
M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part à ce débat. Le député qui est intervenu avant moi a parlé de la nécessité de protéger les travailleurs saisonniers. Je remarque que le projet de loi C-2 présente un problème qui n'est pas nouveau en ce sens que les agriculteurs, pour prendre un exemple, qui travaillent hors de la ferme ont toujours dû cotiser à la caisse d'assurance-emploi mais n'ont jamais été en mesure de remplir les conditions nécessaires pour avoir droit à des prestations. Les agriculteurs font aussi un travail saisonnier. De deux choses, l'une: ou bien, ils ne remplissent pas les conditions requises pour avoir droit à des prestations et dans ce cas, on ne leur demande pas de cotiser. Ou bien, on leur demande de cotiser et ils ont droit à des prestations. C'est une question qui me travaille depuis longtemps ainsi que beaucoup de gens dans le secteur agricole.
Pourquoi ce projet de loi est-il aujourd'hui si important que l'on veuille le faire adopter à toute allure en recourant à l'attribution de temps? C'est un reste de la dernière législature. En fait, c'est probablement la conséquence des sièges qu'ont perdus les libéraux dans les provinces de l'Atlantique en 1997. Je crois que le député qui a pris la parole avant moi sera sans doute d'accord avec moi sur ce point. Il fait partie de ceux qui sont passés dans le camp du Parti libéral à la suite de ces changements, je suppose pour des raisons politiques.
Si le projet de loi était tellement important, pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas fait en sorte de le faire adopter quand il l'a présenté l'an dernier? L'importance de ce projet de loi n'a pas empêché le premier ministre de déclencher des élections anticipées après seulement trois ans et demi. On a laissé mourir le projet de loi au Feuilleton en même temps que d'autres projets de loi considérés prioritaires par le gouvernement.
Pourquoi avoir dissous le Parlement et ne pas avoir procédé à un débat en bonne et due forme sur ce projet de loi? Non, il fallait que le gouvernement ait encore recours aujourd'hui à l'attribution de temps. Je suis à la Chambre depuis 1993 et je crois que c'est bien la soixante-neuvième fois que le gouvernement libéral a eu recours à l'attribution de temps pour des projets de loi de cet ordre.
Ce qui m'ennuie plus que tout au monde, c'est de ne pas savoir ce qui, dans l'emploi du temps du gouvernement, l'incite à agir avec tant de presse et chercher à nous faire adopter le projet de loi C-2 dans d'aussi brefs délais. Huit projets de loi en tout et pour tout ont été présentés jusqu'ici, ce qui ne me semble pas être un programme législatif très lourd. Ce projet de loi est le premier à avoir été présenté par les libéraux pendant cette session et ils ont recours à l'attribution de temps pour le faire adopter à toute vitesse au Parlement. Quel message font-ils parvenir aux Canadiens?
Pourquoi ont-ils déclenché les élections aussi prématurément? Pourquoi ne se s'étaient-ils pas donné comme priorité celle de poursuivre le travail et de régler la question l'automne dernier, au lieu de déclencher des élections et de causer ainsi la dissolution de la Chambre? En fait, ils n'étaient même pas pressés de reprendre les travaux en janvier. Si c'était tellement important, pourquoi n'ont-ils pas rappelé la Chambre en janvier pour s'y atteler? Non, ce n'est pas ce qu'ils ont fait.
Nous voilà aujourd'hui dans une situation ridicule où les libéraux ont surpassé l'exécrable record de Brian Mulroney en matière d'attribution de temps pour les projets de loi. J'ai observé qu'ils avaient, à l'époque, dénoncé vigoureusement cet état de fait, quand ils siégeaient de l'autre côté de la Chambre. Ils parlaient d'affront à la démocratie. Les libéraux ont aujourd'hui surpassé le record de M. Mulroney dans une période de temps à peu près équivalente. Ils ont l'intention de se servir de ce mécanisme à la Chambre comme d'un gourdin.
Ce n'est pas la première fois non plus que j'en ai à souffrir. Le 20 octobre 1999, j'ai pris la parole au sujet du recours à l'attribution de temps et du fait que cette pratique limitait ma capacité, comme celle d'autres députés, de parler d'un projet de loi qui concernait l'industrie, soit le projet de loi C-6 sur la protection des renseignements personnels. Je venais d'être nommé porte-parole de mon parti en matière d'industrie. J'ai en main le hansard. C'était un autre projet de loi qui semble avoir créé des problèmes aux libéraux. Ils n'avaient pas suffisamment consulté les provinces à son sujet. Il a fallu que le Sénat vienne à leur rescousse du gouvernement en apportant au projet de loi de nombreuses améliorations. Je reconnais au Sénat le mérite de l'avoir fait.
Hier, le sénateur Grafstein a vivement reproché à la Chambre des communes d'étudier des projets de loi sans en débattre de façon adéquate, mais plutôt à la hâte, laissant ainsi au Sénat le soin de les rafistoler. Je crois que le projet de loi dont nous sommes actuellement saisis est un projet de loi de ce genre. Pourquoi cet empressement? Pourquoi ne pas débattre adéquatement du projet de loi à la Chambre des communes? C'est insensé. La Chambre est l'endroit tout indiqué pour tenir des débats. De nombreux députés de mon parti souhaiteraient prendre la parole au sujet du projet de loi, mais ils ne le pourront pas.
Il s'agit d'une tactique ancienne. En octobre 1999, j'ai été soumis à une limitation de temps. J'avais alors déclaré que le gouvernement avait eu recours à l'attribution de temps pour une soixante-cinquième fois. Nous en sommes aujourd'hui à la soixante-neuvième. Le temps presse. Je vois mal ce qui oblige les libéraux à agir de la sorte, mais ils semblent vouloir mettre le doigt dans l'oeil à ceux qui souhaitent la tenue d'un débat en bonne et due forme à la Chambre des communes. C'est une attitude insensée.
En ce qui concerne le régime d'assurance-emploi, le gouvernement semble croire qu'il peut mettre en place un programme qui servira de substitut à l'emploi. C'est inacceptable. Il y a 30 ans, c'était avant tout un programme d'assurance. Le gouvernement l'a de plus en plus éloigné de son état initial. Nous voudrions apporter des changements au régime et en confier l'administration aux employeurs et aux employés, mais il semble que ce ne sera pas le cas. En fait, mes notes indiquent que, par le truchement du projet de loi C-2, les libéraux veulent même modifier certaines fonctions de consultation de la Commission de l'assurance-emploi. La commission se voit retirer son rôle consultatif. Il semble que les libéraux veulent contrôler cela.
Le gouvernement a accumulé un excédent de 35 milliards de dollars dans le régime d'assurance-emploi. La population considère qu'il est sage de détenir un excédent de 10 à 15 milliards de dollars. L'excédent actuel dépasse cette fourchette d'environ 20 milliards de dollars. Que fait le gouvernement avec ces fonds? Ils sont versés dans les recettes générales, ce qui permet aux libéraux de jouer avec l'argent durement gagné prélevé des chèques de paye des employés. Les employeurs aussi sont touchés.
Il vaudrait beaucoup mieux pour les Canadiens que les retenues soient réduites et qu'on s'en tienne à un calcul prudent qui permettrait de conserver un excédent de 10 à 15 milliards de dollars. Qu'on cesse d'imposer des charges sociales aux Canadiens qui travaillent d'arrache-pied. C'est ce que le ministre des Finances a dit en 1994. Quand il a eu besoin davantage d'argent, il ne s'agissait soudainement plus d'une charge sociale, mais c'est vraiment ce que c'est.
Certains soutiendront que le gouvernement a équilibré son budget sur le dos des employés et des employeurs qui cotisent au régime d'assurance-emploi. Cet argument se justifie, et on doit l'examiner.
Il n'existe aucun substitut à l'emploi. Le régime d'assurance-emploi que le gouvernement est en train de remanier n'en est pas un. Pour bien faire les choses, le gouvernement doit réduire les impôts, dont les charges sociales et les impôts des particuliers et des sociétés. Les États-Unis ont pris ce virage. Le Canada accuse du retard au chapitre des impôts sur le revenu des particuliers et des sociétés. Nous sommes dans une position réellement désavantageuse. Nos employeurs et nos entreprises le sont aussi par rapport à ceux des États-Unis.
Il y a vingt ans, les taux de productivité du Canada et des États-Unis étaient presque équivalents. Que s'est-il passé en vingt ans? Les États-Unis sont toujours au premier rang au plan de la productivité. Et le Canada? Le Canada occupe le 13e rang dans le monde industrialisé.
Cette situation n'est pas l'effet du hasard. Elle est due à 30 ans de mauvaise gestion par le gouvernement lui-même, elle est due à l'interventionnisme du gouvernement et au nombre croissant de programmes gouvernementaux financés à crédit. Les déficits toujours plus grands nécessitent des paiements pour rembourser les intérêts accumulés sur l'énorme dette nationale.
Le dollar canadien perd du terrain depuis 30 ans. L'investissement étranger direct perd du terrain depuis 30 ans. Même les Canadiens veulent investir à l'étranger parce qu'ils ne peuvent obtenir ici le type de rendement qu'ils souhaitent. Cela est attribuable en partie à la caisse de l'assurance-emploi.
Jusqu'à il y a 30 ans, avant que le Canada effectue ces changements, les taux de chômage au Canada et aux États-Unis étaient prévisibles. Ils ne bougeaient pratiquement pas, année après année, bonne ou mauvaise. Puis, on a vu un écart se creuser entre ces deux pays sur les 30 dernières années. En tout temps maintenant, le taux de chômage au Canada dépasse d'environ 3 à 4 p. 100 le taux de chômage aux États-Unis.
Des réformes s'imposent. Le besoin de débats adéquats se fait sentir. Je suis très inquiet de voir le gouvernement étouffer un débat sur des questions aussi importantes dès le début de la nouvelle législature. Le gouvernement devrait être réprimandé pour avoir agi de la sorte, et il devrait renoncer à suivre cette voie. Les députés d'en face devraient avoir honte d'appuyer ce type d'intervention gouvernementale.
[Français]
M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Monsieur le Président, tout d'abord, permettez-moi à mon tour de remercier mes concitoyens de Manicouagan qui, pour une troisième fois, ont fait confiance au Bloc québécois.
En ce qui me concerne, c'est mon deuxième mandat et les électeurs ont presque triplé ma majorité. Voilà un geste de confiance, et je les en remercie. Les médias locaux parlaient d'une victoire écrasante, parce que j'avais obtenu 54 p. 100 des suffrages contre 28,5 p. 100, disons 29 p. 100 pour être généreux. Donc, il s'agit de 25 points d'avance sur mon plus proche adversaire libéral.
Or, aujourd'hui, je suis bien sûr heureux de prendre la parole sur le projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi et le Règlement sur l'assurance-emploi (pêche). Ce débat a commencé en janvier 1997, lors de la réforme du régime de l'assurance-emploi.
Cette réforme devait répondre aux attentes de la population et aux réalités du marché du travail. L'effet contraire a été observé et c'était bien prévisible.
Le projet de loi C-2 est loin de répondre aux attentes des chômeurs et des travailleurs. Le gouvernement ne corrige que très partiellement les problèmes causés par ses réformes antérieures. Il ne s'attaque pas aux vrais problèmes et les modifications proposées sont bien insuffisantes.
Premièrement, l'admissibilité au régime n'est toujours pas réglée. Ce que le gouvernement fédéral fait avec son projet de loi sur l'assurance-emploi, c'est simplement de légaliser le détournement de fonds de 30 milliards de dollars de la caisse de l'assurance-emploi. Cet argent appartient bel et bien aux travailleurs, aux chômeurs et aux employeurs qui ont contribué au régime d'assurance-emploi.
En légalisant ce détournement de fonds de 30 milliards de dollars, c'est comme si le gouvernement prenait 100 $ dans la poche d'un travailleur et ne lui remettait que 8 $.
Quand on a de tels surplus dans la caisse de l'assurance-emploi, qui ont été pris dans la poche des travailleurs et des travailleuses sans leur permission, selon la définition du dictionnaire, c'est «voler». Ce matin, j'ai fait référence à la définition de «voler» dans le Petit Robert où on peut lire: «voler: prendre quelque chose qui ne nous appartient pas». C'est honteux.
L'hon. Denis Coderre: Quel gros mot!
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je demande à l'honorable député d'être un peu plus judicieux dans le choix de ses mots. Sans vouloir contredire la définition d'un dictionnaire ou d'un autre, il y a certaines expressions qui ne sont pas conformes aux bonnes traditions de cette institution parlementaire, dont le mot «voler».
M. Ghislain Fournier: Monsieur le Président, encore une fois, ce n'est pas moi qui l'ai mentionné, c'est le dictionnaire. Mais je vais, bien sûr, suivre votre recommandation.
Je disais donc que c'est honteux de prendre l'argent des plus démunis de la société, des hommes et des femmes qui perdent ou qui ont perdu leur emploi, qui sont vulnérables et qui parfois, n'ont aucun moyen de se défendre. C'est encore plus honteux de voir que dans le discours du Trône, le gouvernement se vante de veiller à ce que tous les enfants soient à l'abri de la pauvreté.
Pire encore, dans un autre paragraphe, on peut lire ce qui suit:
Il fut un temps où les travailleurs qui perdaient leur emploi n'avaient plus de revenu pour assurer leur subsistance et celle de leur famille. Les Canadiens ont alors créé l'assurance-emploi.
Ce gouvernement ignore les revendications des groupes sociaux qui se sont opposés à la légalisation de ce détournement de 38 milliards de dollars de l'assurance-emploi, qui est maintenant rendu à 30 milliards de dollars.
De toute évidence, cette assurance-emploi est devenue une taxe sur la masse salariale. Le gouvernement refuse de redonner aux chômeurs et aux travailleurs ce qui leur revient et continue d'accumuler les surplus sur leur dos. Le gouvernement ne se préoccupe pas du sort des chômeurs, qui sont laissés avec cette réforme de l'assurance-emploi.
Les mesures de ce projet de loi sont insuffisantes pour solutionner les problèmes causés par ce régime, notamment à l'égard des travailleurs saisonniers des régions, surtout les jeunes, les femmes et tous les travailleurs en général.
Le Bloc québécois est contre le projet de loi C-2 dans sa forme actuelle. Ce que le Bloc québécois propose, c'est une approche favorable et constructive, parce qu'il estime qu'il est essentiel de répondre dans les plus brefs délais aux besoins réels des chômeurs et des travailleurs en demandant le dépôt de deux projets de loi.
Par exemple, le premier projet de loi viserait à pallier les urgences. Voici ce que le Bloc québécois propose dans ce premier projet de loi: l'abolition, bien sûr, de la règle d'intensité; l'abolition de la discrimination relative à la règle de récupération fiscale pour les prestataires fréquents; la hausse de la couverture de la rémunération assurable de 55 p. 100 à 60 p. 100 afin que les chômeurs puissent avoir un revenu plus décent; l'abolition de la clause discriminatoire à l'égard des nouveaux arrivants sur le marché du travail, principalement les jeunes et les femmes. Nous proposons enfin l'abolition du délai de carence.
Le deuxième projet de loi se concentrerait sur les modifications à long terme à débattre en comité, comme la création d'une caisse autonome d'assurance-emploi.
L'automne dernier, avant le déclenchement des élections, le gouvernement a déposé le même projet de loi permettant ainsi aux libéraux d'avoir la mainmise sur la caisse de l'assurance-emploi. À la fin de 1999, les surplus de la caisse de l'assurance-emploi s'élevaient à environ 30 milliards de dollars. Depuis 1994-1995, les libéraux ont pigé plus de 38 milliards de dollars dans la caisse de l'assurance-emploi. D'où l'importance de créer une caisse autonome de l'assurance-emploi.
Ce projet de loi ne répond pas aux demandes essentielles du Bloc québécois. Le gouvernement ne va pas assez loin dans la bonification du régime et dans l'arrêt de la discrimination pour ce qui est des critères de l'assurance-emploi. Le gouvernement a trahi ses promesses électorales lorsque le projet de loi C-44 a été déposé avant la campagne électorale. Les gens disaient que ce projet de loi était insuffisant. Le premier ministre lui-même a avoué, pendant la campagne électorale, que son gouvernement s'était trompé. Il a déclaré: «Il est vrai que l'on a fait des erreurs importantes dans ce projet de loi.» Le secrétaire d'État au Sport amateur s'était personnellement engagé à apporter des correctifs à la Loi sur l'assurance-emploi.
Par exemple, dans le journal Le Soleil du 9 novembre 2000, il avait affirmé, et je cite: «Après l'élection d'un gouvernement libéral majoritaire, nous allons rétablir le processus et nous assurer que les changements soient propices et répondent bien en majeure partie aux réalités et aux besoins de la population du Saguenay—Lac-Saint-Jean et de l'ensemble des Québécois et des Canadiens. Je me suis engagé à ce qu'il y ait des changements dans la loi et on va en faire, des changements.»
Ce même secrétaire d'État au Sport amateur est venu dans mon propre comté parce qu'il y avait une manifestation prévue par les travailleurs et les travailleuses de la FTQ, les métallos et les travailleurs de la CSN. Il est venu leur demander de ne pas faire de manifestation parce que qu'il s'en occuperait personnellement et qu'il y aurait des changements. C'est honteux.
Où est et que fait le secrétaire d'État au Sport amateur? Il ne fait absolument rien en ce moment. Nous ne l'entendons pas parler et nous ne l'avons pas entendu se manifester au cours du débat sur ce projet de loi. Maintenant que les élections sont chose du passé, nous nous retrouvons devant le même projet de loi qu'avant le déclenchement des élections et la question n'est toujours pas réglée. C'est une attitude inacceptable. Nous ne pouvons plus espérer que les politiciens soient maintenant pris au sérieux avec cette attitude que je viens de décrire. Ce n'est plus ce que nous appelons de la démocratie, c'est de tromper la population. Celle-ci s'attend à plus que de simples promesses électorales. Elle s'attend à des mesures correctives importantes et concrètes.
Présentement, dans le cadre de ce régime, les gens gagnant des montants plus importants, par exemple au cours de leur travail saisonnier particulièrement dans le secteur de la construction, sont obligés de remettre cet argent lors de leur déclaration d'impôt s'ils ont gagné des montants supérieurs à des salaires plus élevés selon cette même réforme du régime d'assurance-emploi.
Au cours des cinq ou six dernières années, l'assurance-emploi a été le plus grand facteur de pauvreté au Québec et au Canada. Comme je l'ai déjà dit au début de mon discours, le gouvernement dit vouloir protéger les enfants pauvres. S'il y a des enfants pauvres, c'est parce qu'il y a des parents pauvres. Le gouvernement ne fait rien pour qu'il y ait moins de pauvreté dans ce pays. Le Bloc québécois votera donc contre le projet de loi C-2.
[Traduction]
M. David Chatters (Athabasca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-2. Avant de faire mes commentaires sur le projet de loi lui-même, j'aimerais profiter de l'occasion, puisque c'est la première fois que je prends la parole depuis le début de cette nouvelle législature, pour remercier mes électeurs d'Athabasca de m'avoir choisi pour les représenter à la Chambre des communes pour la troisième fois.
Ce fut sans contredit une campagne électorale difficile, blessante et chargée d'émotivité. Dans ma circonscription, des accusations non fondées ont été lancées de toutes parts, tant contre l'organisation nationale que contre notre organisation locale. J'ai été très heureux de constater que les électeurs ont su faire la part des choses et qu'ils m'ont réélu malgré tout ce qui s'est dit. Je suis très fier de pouvoir les représenter à nouveau ici à la Chambre.
J'ai été très déçu du débat qui a eu lieu ce matin et des mesures prises par le gouvernement en vue d'invoquer la clôture ou l'attribution de temps dans ce dossier. Lorsque je suis arrivé ici il y a quelque sept ans et demi, j'étais peut-être un peu trop idéaliste en ce qui avait trait au Parlement, à son fonctionnement, à la façon dont je pouvais servir mon pays et à mon appartenance à une institution chargée de faire les lois, les directives et les règlements qui régissent notre pays.
Après sept ans, je suis persuadé que la plupart des députés, non seulement de ce côté de la Chambre mais de l'autre côté également, partagent les opinions exprimées par notre ancien collègue Lee Morrison, qui a siégé à la Chambre pendant sept ans. Dans un article très mordant publié hier ou avant-hier dans le National Post, il a exprimé son désenchantement et son extrême déception face à la pertinence de la Chambre et à son fonctionnement.
Je n'ai nullement l'intention de minimiser ses commentaires et accusations. D'ailleurs, à mon avis, bon nombre de mes collègues seraient d'accord avec ces commentaires. Ceux d'entre nous qui ont été réélus vivent sans doute dans l'espoir indéfectible de changements éventuels et d'une réforme qui rendrait cet endroit plus utile et qui nous permettraient d'apporter une contribution concrète et d'exercer une influence réelle sur le cours des événements. À mon avis, ce serait un énorme pas en avant. Toutefois, compte tenu des interventions du gouvernement ce matin, je ne retiendrais pas mon souffle. Bien qu'il semble exister un désir de changement des deux côtés de la Chambre, il est peu probable que cela se produise. Ce pourrait cependant se produire facilement.
Selon un représentant de l'autre endroit, la qualité des mesures législatives adoptées à la Chambre des communes diminue. Je suis convaincu que les commentaires du représentant de l'autre endroit étaient intéressés et visaient à justifier jusqu'à un certain point l'existence même du Sénat. Par ailleurs, il y a sans doute un fond de vérité dans ses propos car, au cours des sept dernières années, le gouvernement a continuellement cherché à consolider le pouvoir entre les mains d'un groupe très restreint au centre.
Les mesures législatives présenteraient une bien meilleure facture s'il existait le moindre espoir qu'un projet de loi, après avoir été soumis au processus en vigueur à la Chambre, puisse en ressortir modifié et amélioré. Le cas échéant, certaines des lacunes susceptibles de se manifester ultérieurement, et qui seraient nul doute soulignées par les tribunaux, pourraient être corrigées avant que le projet de loi soit terminé.
Toutefois, le gouvernement semble entretenir l'attitude selon laquelle, après avoir présenté un projet de loi, il perdra la face si un député de l'opposition ou un membre d'un comité en modifie un volet fondamental. Le gouvernement estime qu'il perdrait la face, et il ne peut tout simplement pas permettre que cela se produise. Le gouvernement fait donc appel à sa majorité à la Chambre et au sein des comités à toutes les étapes, et le projet de loi franchit les étapes par principe et pour sauver la face, plutôt qu'en raison d'une réelle préoccupation d'aboutir au meilleur projet de loi possible à la fin du processus.
Je ne vois vraiment pas pourquoi on ne pourrait pas confier la rédaction du projet de loi ou des amendements au comité formé de députés de tous les partis afin que toutes les parties intéressées puissent apporter leur contribution dès le début. De cette manière, le projet de loi serait peut-être moins la chose du gouvernement. Tous les députés pourraient avoir un certain intérêt dans les dispositions du projet de loi, ils seraient mieux en mesure de l'appuyer et auraient l'impression d'avoir vraiment eu leur mot à dire et d'avoir pu y apporter des modifications.
Je suis déçu. On dirait que les choses continuent tout simplement et que jamais rien ne change. Malgré un vil désir de changement exprimé partout au Canada, la situation ne change pas et je ne m'attends pas à ce qu'elle change un jour d'une façon appréciable.
Le projet de loi C-2 constitue un effort pour modifier la Loi sur l'assurance-emploi. Les rédacteurs du projet de loi ont été vraiment mal inspirés. Nous étions engagés dans cette voie il y a plusieurs années. Nous avions par la suite fait un certain progrès dans la réforme de l'assurance-emploi, qu'on appelait auparavant l'assurance-chômage. On incitait les gens à trouver un emploi plutôt qu'à rester en chômage. Le projet de loi semble retourner à cette époque, notamment dans les régions du pays en proie au marasme économique, quand le régime d'assurance-emploi, ou plutôt d'assurance-chômage comme on l'appelait, incitait à ne pas travailler plutôt qu'à travailler.
J'ai entendu tout à l'heure à la Chambre quelqu'un se demander si l'assurance-emploi était devenue ou non un programme social plutôt programme d'assurance. Or, la mesure à l'étude semble clairement devenir de plus en plus un programme social et de moins en moins un programme d'assurance. Je pense que c'est appuyé simplement par le fait qu'il y a toutes sortes d'aspects du programme d'assurance-emploi qui constituent sans aucun doute des programmes sociaux. Je pense par exemple aux congés de maternité et aux congés parentaux, qui viennent récemment de prendre une place beaucoup plus grande dans le régime d'assurance-emploi. Il est clair qu'il s'agit d'un programme social.
Nous nous sommes éloignés de cela il y a quelques années, en ce sens qu'il était de plus en plus difficile de toucher des prestations d'assurance-emploi et que les intéressés devaient respecter certaines obligations pour toucher des prestations où qu'ils vivent au Canada. Cela nous ramène à la couverture des travailleurs saisonniers qui fait que, si une personne vit dans une région défavorisée sur le plan économique où on trouve beaucoup d'emplois saisonniers et qu'elle est prise en charge par l'assurance-emploi, elle semble être en mesure de toucher des prestations pour une période prolongée sans avoir vraiment à démontrer qu'elle recherche activement un emploi et qu'elle a effectué un nombre de recherches d'emploi par semaine. C'est bien un programme social selon moi, puisqu'il permet à un travailleur de tenir le coup entre deux périodes de travail. Il ne s'agit donc pas d'un régime d'assurance.
L'autre incitatif pervers qui semble inhérent au programme, c'est qu'il semble plus facile d'être admissible à l'assurance-emploi dans les régions où le taux de chômage est le plus élevé. Plus la région connaît des difficultés économiques, plus il est facile de toucher des prestations. Cela ne semble pas très productif.
Dans ma région du pays, des collectivités et des industries réclament en grand nombre des travailleurs, car elles font tout simplement face à une pénurie de main-d'oeuvre. Je reçois une dizaine de demandes par semaine d'entreprises qui souhaitent faire entrer au Canada des travailleurs étrangers, car elles ne peuvent trouver au niveau local des gens pour combler les postes qu'elles offrent. Pourtant, nous avons ce programme qui paie des travailleurs saisonniers dans certaines régions du pays pour demeurer au chômage et continuer de vivre dans la même région au lieu de les inciter à déménager dans une autre région du pays, comme la mienne, où on a besoin de ces travailleurs qui pourraient trouver un emploi bien rémunéré.
Il y a beaucoup d'autres éléments du programme qu'il faut modifier. On doit faire marche arrière et revenir à ce que le gouvernement avait commencé il y a cinq ou six ans. J'espère que le gouvernement écoutera certaines des suggestions des députés de l'opposition, notamment au comité, pour que nous puissions améliorer cette mesure législative.
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir de prendre part au débat sur le projet de loi C-2 et de l'appuyer, mais non sans certaines réserves.
Cela ne veut pas dire que j'approuve les tactiques draconiennes que le gouvernement emploie pour mettre un terme au débat. Ce nouveau bâillon montre une fois de plus que le gouvernement méprise le rôle central du débat tant à la Chambre que dans les comités.
Je me sens obligée d'appuyer les timides mesures proposées dans le projet de loi pour atténuer tout le mal que le gouvernement a fait au régime d'assurance-chômage, mais je le fais à contrecoeur. Je le fais parce qu'une légère amélioration est mieux que rien, pour les habitants de Dartmouth.
Toutefois, je me dois aussi de signaler les lacunes fondamentales du régime actuel, lacunes dont le projet de loi ne tient aucun compte.
Le projet de loi C-2 ne traite aucunement des contradictions fondamentales de notre stratégie nationale d'emploi. Nous avons des centres d'emploi dans presque toutes les localités qui font une promotion active du travail autonome comme solution pour une population active de plus en plus transitoire.
Parallèlement, ces centres d'emploi administrent un programme d'assurance destiné aux chômeurs, programme qui est expressément conçu pour priver les travailleurs autonomes des prestations que reçoivent leurs voisins s'ils se retrouvent au chômage. C'est de la folie furieuse. Pourquoi un travailleur accepterait-il de devenir plus vulnérable au plan économique en suivant les conseils du gouvernement et en devenant travailleur autonome? Pourquoi exposerait-il sa famille à des risques parce que le gouvernement a décidé que le meilleur moyen de gérer notre marché du travail était de priver les travailleurs de prestations d'assurance-emploi?
Ottawa a économisé des milliards de dollars en niant aux travailleurs le droit à une protection adéquate en cas de chômage. Le montant d'argent qu'a perdu ma seule localité se chiffre à au moins 20 millions de dollars par année, tout simplement à cause des restrictions que ce gouvernement a imposées. Il a limité le montant des paiements que les prestataires peuvent recevoir et réduit le nombre de personnes admissibles aux prestations.
J'appuie le projet de loi à contrecoeur parce que certaines de ces restrictions sont supprimées et que ma localité a besoin de l'argent, mais le projet de loi ne fait rien pour s'attaquer aux problèmes fondamentaux que pose notre régime d'assurance-emploi.
Il ne fait rien, par exemple, pour tenir compte du fait que les artistes sont actuellement inadmissibles à l'assurance-emploi. Le gouvernement considère les artistes comme des travailleurs autonomes, réalité que beaucoup adoreraient changer, et leur refuse l'accès à des prestations de maternité et à des prestations de maladie en vertu du régime. Ils n'ont également pas le droit de participer au Régime de pensions du Canada.
Le gouvernement croit-il honnêtement que les artistes ou d'autres travailleurs autonomes n'ont jamais d'enfants, ne sont jamais malades ni ne sont jamais atteints d'un handicap? Il faut rend hommage à nos artistes, qui sont disposés à faire un tel sacrifice pour leur art, mais cela n'est certes pas un aspect nécessaire de notre politique d'intérêt public. Si ça l'est, je veux que le gouvernement le dise tout de suite.
En outre, nous n'avons aucun plan industriel pour faciliter la transition des chômeurs d'un certain secteur vers un autre secteur connexe. Au lieu de cela, on leur dit de devenir entrepreneurs, donc inadmissibles à l'assurance-emploi, ce qui est souvent incompatible.
Je songe à la situation des plus de 100 travailleurs qui sont mis à pied aux cales de construction navale de Dartmouth. Ces travailleurs ont réparé des navires pendant des années. Ils ont écoulé leurs prestations réduites d'assurance-emploi et devront maintenant compter sur l'aide sociale. Ils veulent travailler dans les bases d'approvisionnement des champs de gaz de l'île de Sable. Bien qu'ils puissent compter sur la collaboration des bureaux locaux de DRHC, il est clair que notre régime d'assurance-emploi ne fait pas le lien entre les divers événements qui se produisent en même temps dans une région.
Ainsi, il ne fait pas le lien entre la fermeture d'une usine et l'ouverture, dans la même région, d'une usine semblable. Pourquoi ne pourrait-on pas diriger les travailleurs vers la nouvelle usine et garantir ainsi à leur famille une certaine sécurité?
Notre régime ne le permet pas. Le gouvernement profite d'un excédent de la caisse d'assurance-emploi qui atteint plus de 30 milliards de dollars, tandis que des milliers de travailleurs sont privés de prestations et le seront encore après l'adoption du projet de loi C-2.
Mais il y a pire encore. Il y a les grandes entreprises et l'opposition officielle qui préféreraient non pas que des prestations bonifiées soient versées aux chômeurs ou que le programme s'étende à d'autres personnes en difficulté, mais que les cotisations à l'assurance-emploi que paient les entreprises soient réduites et que le système contraignant actuel soit maintenu. Cela ferait plus d'argent pour les entreprises et moins pour les chômeurs. Voilà le sort qui serait réservé à ce programme social.
J'espère que le gouvernement commencera à utiliser le régime d'assurance-emploi pour régler les problèmes des familles des travailleurs. Il est temps que le gouvernement abolisse les obstacles que doivent surmonter les chômeurs, les artistes, les Canadiens atteints d'une incapacité et les milliers de travailleurs qui se retrouvent sans emploi sans que ce soit leur faute et qui ont besoin de l'aide que pourrait leur procurer un régime d'assurance-emploi juste et équitable.
[Français]
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, durant la période électorale qui vient à peine de se terminer, on a tellement entendu parler des modifications à la Loi sur l'assurance-emploi que je pensais qu'on les présenterait le plus vite possible dans cette assemblée et qu'on permettrait aux gens d'en discuter également le plus vite possible.
On conviendra avec moi qu'en période électorale, on en a parlé partout. On a tenté de gagner des votes avec cette loi et je pense que les libéraux ont réussi à gagner des votes avec la promesse d'apporter des modifications à cette loi pour la rendre plus juste et plus acceptable pour les travailleurs.
Le premier ministre a lui-même avoué qu'il y avait des erreurs dans la Loi sur l'assurance-emploi et qu'il s'engageait à les corriger. Mes collègues ont mentionné que d'autres ministres sont venus dans les régions du Québec et ont mentionné la même chose.
Est-ce à dire qu'il y a véritablement deux façons de parler, soit une en période électorale pour attirer des votes plus ou moins honnêtement, et l'autre, dans la réalité des choses? Dans ce Parlement où on décide de tout pour l'ensemble des Canadiens et des Québécois, on décide que ce qu'on a dit en période électorale, ce n'était finalement plus vrai.
Je pense que plusieurs électeurs de mon comté n'ont pas cru les promesses qu'on leur a faites. Il reste qu'on a espéré. Je pense à la région de La Tuque, dans la Haute-Mauricie. C'est une région touristique. C'est une région qui vit de la forêt. C'est une région qui, naturellement, vit d'emplois assez temporaires, d'emplois saisonniers. Ces gens méritent d'être aidés. Ce mot n'est pas juste car ils s'aident eux-mêmes. Mon collègue de Argenteuil—Papineau—Mirabel a mentionné jusqu'à quel point l'assurance-emploi n'est pas une mesure sociale. C'est de l'assurance que je paie comme travailleur, si je fais bien sûr un travail assurable.
Quand on paie de l'assurance, c'est pour être protégés quand on en aura besoin. Au moment où on a besoin de la protection de l'assurance, c'est toujours lorsqu'on est le plus vulnérable. C'est toujours lorsqu'on a des difficultés.
Dans mon comté, il y a des travailleurs dont l'usine a fermé pour un certain temps et qui espèrent retrouver leur emploi. Une fabrique de papier a fermé temporairement. Quand vont-ils retrouver leur emploi? On parle de pénalités de deux semaines. On parle de punir les gens qui n'ont rien à voir avec cette situation. Cette assurance est un dû qui revient aux travailleurs. Elle n'appartient pas au gouvernement.
Je ne veux pas me faire rappeler à l'ordre en employant des mots qu'on ne peut utiliser à la Chambre, comme on l'a fait observer à un de mes collègues. Je ne dirai pas que c'est du vol, même si, personnellement, j'y pense et que je le crois. Toutefois, je ne le mentionnerai pas.
Le gouvernement dispose d'une caisse qui renferme quelque 32 à 38 milliards de dollars, qui ont été payés par les travailleurs et les employeurs. J'ai été employeur et travailleur également. Quand, à titre d'employeur, j'embauche un employé, les bénéfices que je donne en termes d'assurance-emploi, cette partie que l'employeur paie, c'est déduit de son chèque de paie, c'est déduit de son salaire horaire. Donc, ce sont les travailleurs qui paient l'assurance-emploi à 100 p. 100.
Quand on décide de prendre ces cotisations, de faire main basse là-dessus, de mettre cela dans le fonds commun, dans le tronc commun, et du même coup, de baisser les impôts des plus riches de la société, à mon avis, c'est comme prendre l'argent de celui qui en a besoin, celui qui s'est payé une assurance, et de la donner à l'autre qui n'en a pas besoin ou qui en a moins besoin. À mon avis, si ce n'est pas du vol, c'est quelque chose qui lui ressemble.
J'ai promis aux travailleurs de mon comté, lors de la campagne électorale et encore récemment, d'en parler ici, au Parlement. Cela ne peut pas se passer ainsi. Ce qui est encore plus honteux, à mon avis, c'est qu'on limite notre temps de discussion. Mais je les comprends. Je comprends qu'on ne veuille pas parler trop longuement d'une loi aussi injuste, une loi qui fait main basse sur des fonds qui ont été payés légalement par des gens, et qu'on en fasse autre chose. Je comprends qu'on veuille rapidement adopter cette loi.
Une voix: C'est un scandale.
M. Marcel Gagnon: Je trouve, en effet, que c'est un scandale. On disait un peu plus tôt: «Attendez; lors de l'étude en comité, on pourra modifier la loi.» Je ne rêve pas en couleurs; je sais ce qu'on a promis et ce qui est présenté. Mais on verra bien si, lors de l'étude en comité, on pourra la modifier.
Personnellement, je pense que si on ne peut modifier ce projet de loi de façon à remettre leur dû aux travailleurs, ce sera illogique, surtout pour un Parlement qui se veut le Parlement des Canadiens, des Québécois, le Parlement que le premier ministre vante comme étant celui qui se trouve dans un des pays les plus justes, particulièrement du point de vue social, pour les plus pauvres de la société.
Selon moi, il est urgent de revenir à l'ordre et de trouver un moyen de remettre l'argent à ceux qui l'ont déboursé pour les raisons pour lesquelles ils l'ont fait. Il ne revient pas au gouvernement de dire: «Vous vous êtes payé une assurance avec cet argent-là, mais on considère que vous n'avez pas besoin de cette assurance. On va donc prendre cet argent pour diminuer les impôts des plus riches.»
Si vous aviez eu une malchance et que votre maison ait brûlé, vous iriez voir votre assureur et lui diriez: «Malheureusement, ma maison a brûlé.» Or, vous apprendriez par votre assureur que vous n'êtes pas couvert pour le premier feu, mais que vous le serez si elle brûle une deuxième fois. C'est à peu près ce qu'on dit aux travailleurs. À ce travailleur qui s'attendait, à la suite de la perte subite de son emploi, de bénéficier de l'assurance-emploi pour passer au travers de ces mauvais jours, on dit: «Non, tu n'es pas assuré pour l'instant; tu n'as pas travaillé suffisamment d'heures.»
Ce ne sont plus 300 heures qui sont nécessaires pour obtenir des prestations d'assurance-emploi, ce pour quoi le travailleur était assuré, ce sont maintenant 910 heures. Je me répète en disant que c'est une loi injuste. C'est une loi qui doit être bonifiée. C'est une loi au sujet de laquelle le Bloc est prêt à collaborer si le gouvernement est d'accord pour la scinder.
Nous sommes d'accord avec certaines parties du projet de loi. Par contre, il faut absolument apporter des modifications à d'autres parties. Je dis aux travailleurs de ma région et du Québec que nous continuerons de travailler fort pour améliorer cette loi afin de leur remettre leur dû.
[Traduction]
M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi modifiant l'assurance-emploi. Au cours de mon premier mandat à la Chambre des communes, j'ai participé à l'examen du projet de loi sur l'assurance-emploi. Je peux dire qu'au sein du caucus libéral, il y a eu beaucoup de donnant, donnant dans ce dossier. C'est que la première représentation des propositions a été fort différente de ce qui est finalement devenu la loi, au terme de nombreuses discussions et négociations.
Si le gouvernement a bénéficié de l'appui qu'il a reçu pour cette mesure législative, c'était notamment parce qu'il avait promis qu'il y aurait un processus permanent de surveillance pour examiner son impact partout au Canada, en particulier dans les régions les plus touchées qui dépendaient surtout d'industries saisonnières, comme le Canada atlantique.
Il était important que cette promesse soit faite au moment de l'adoption du projet de loi et que le gouvernement tienne cette promesse et mette en place un processus pour surveiller les résultats et l'impact des modifications apportées à la loi sur l'assurance-emploi.
Cela fait, le gouvernement s'est penché sur la situation, il a évalué l'impact des modifications et il a déclaré qu'une partie des modifications s'étaient révélées excellentes; certains avaient trouvé plus de travail, d'autres avaient changé leur mode de vie ou leur façon de travailler et avaient trouvé du travail pendant des semaines supplémentaires, alors que d'autres encore avaient éprouvé des difficultés. Le gouvernement a voulu voir comment il pouvait améliorer le système pour mieux aider les gens qui en ont besoin tout en encourageant tous les Canadiens à maximiser les emplois qu'ils peuvent décrocher, ce qui correspond, je pense, à ce que veulent tous les Canadiens.
Il est important que le système soit équitable pour les Canadiens et qu'il reconnaisse les situations qui se vivent en matière d'emploi. On trouve des travailleurs saisonniers dans tous les coins du pays, que ce soient ceux des pêcheries dans le Canada atlantique, les ouvriers de la construction dans le Canada central, les travailleurs forestiers dans l'Ouest ou ceux du secteur des hydrocarbures; tous ces gens ne trouvent pas du travail pour l'année complète. Ils doivent avoir recours à l'assurance-emploi pour nourrir et vêtir leurs familles durant les périodes plus difficiles, alors qu'ils préféreraient travailler, mais ne trouvent pas d'emplois. C'est là un aspect important de notre filet de sécurité sociale et je crois que les Canadiens y croient et l'appuient fermement.
Je me pencherai surtout sur un aspect des changements aujourd'hui. Le projet de loi propose plusieurs changements, mais je vais traiter principalement de la règle d'intensité, l'un des principaux changements. La règle d'intensité avait été conçue pour inciter les gens à trouver du travail dans toute la mesure du possible et à ne pas avoir recours, année après année, au régime d'assurance-emploi. L'idée était la suivante: les prestations seraient réduites de un pour cent pour chaque période de 20 semaines de prestations réclamées par un travailleur au cours des cinq dernières, le montant de ses prestations passant de 55 p. 100 de son salaire moyen à 54 p. 100, puis à 53 p. 100 et ainsi de suite. La somme diminuerait de un pour cent par année.
L'impact de cette mesure n'a pas été celui visé ou prévu. Elle semble avoir été plutôt punitive et n'avoir pas produit les résultats escomptés. D'autres aspects du régime et du projet de loi précédent ont eu des effets positifs qui ont incité les gens à trouver du travail à l'année longue ou d'autres genres d'emplois. Cependant, cet aspect du projet de loi n'a pas produit ce genre de résultat. Il n'a pas généré les avantages prévus ou voulus.
Il est encourageant de voir que le gouvernement le reconnaît et qu'il a décidé de modifier le projet de loi et d'éliminer la règle d'intensité afin que les travailleurs saisonniers ne se sentent pas pénalisés parce qu'ils sont coincés dans des emplois saisonniers.
Imaginez une personne de 50 ans qui travaille dans l'industrie gazière, pétrolière, forestière ou dans les pêches depuis 25 ou 30 ans. Cette personne a été formée pour faire ce travail et ne se voit pas faire autre chose. Elle ne peut tout simplement pas devenir programmeur du jour au lendemain. Ce n'est pas une option. Cette personne fait maintenant partie d'une industrie saisonnière.
Il est important de reconnaître comment fonctionne notre économie. Nous ne pouvons appliquer la même recette à tous les secteurs, car chacun est différent. Les industries saisonnières sont importantes pour le Canada. Le secteur des pêches représente des centaines de millions de dollars de recettes pour le Canada et contribue largement à notre PIB. C'est une industrie très importante sur les deux côtes et dans les eaux intérieures.
Il est important que le projet de loi soit modifié. Je suis heureux de voir que le gouvernement va éliminer la règle de l'intensité. Cela rendra le régime d'assurance-emploi plus équitable pour tous les Canadiens. Ayant fait partie du groupe qui a étudié le projet de loi original, je trouve très satisfaisant de voir que le gouvernement, après avoir mené ce processus à bonne fin et examiné l'impact du projet de loi, a décidé d'apporter ces modifications.
Je suis également heureux de voir que le gouvernement a modifié la disposition de récupération. À l'origine, elle était conçue pour que les gens ayant un revenu annuel élevé ne puissent toucher des prestations d'assurance-emploi en plus de leur revenu annuel. Nous avons entendu parler de personnes qui gagnaient 70 000 $ par an et qui, en plus, recevaient des prestations d'assurance-emploi. Cela ne plaisait pas aux Canadiens et c'est pourquoi, entre autres, il était logique de modifier le projet de loi.
Mais comme la récupération des prestations débutait à 39 000 $, il n'y avait pas que les gens à revenu élevé qui étaient touchés par cette disposition, elle touchait également les gens à revenu modéré. La décision de porter à 49 000 $ ou environ le niveau de revenu à partir duquel la disposition de récupération s'applique, comme le propose le projet de loi, signifie que les gens à revenu modéré et moyen n'auront pas à rembourser les prestations. Ce sont deux changements positifs très importants qui surviennent à un moment où d'autres modifications ont été apportées au régime d'assurance-emploi.
Les députés sont au courant des nouvelles prestations pour congé parental. La majorité des Canadiens sont en faveur de cette mesure et reconnaissent que c'est un appui important pour les familles canadiennes.
Le projet de loi présente de nombreux avantages pour les Canadiens. Que l'on habite le Canada atlantique, où vit ma famille, la Colombie-Britannique ou ailleurs au pays, tous les Canadiens ont droit à des prestations du régime d'assurance-emploi. Toutefois, il est important d'apporter ces modifications afin d'améliorer le régime et de le rendre plus équitable pour tous les Canadiens.
J'encourage les députés à se joindre à moi pour appuyer le projet de loi.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais d'abord saisir l'occasion pour remercier les habitants de Calgary-Ouest de m'avoir réélu pour les représenter à la Chambre des communes. C'est un grand privilège pour moi et je les remercie du grand honneur qu'ils me font.
Je voudrais leur expliquer ce qui ce passe à la Chambre aujourd'hui. Les libéraux modifient l'assurance-emploi. Je parlerai de certaines mesures qui devraient être prises mais qui ne le sont pas et de l'impact de ce projet de loi sur les habitants de l'Alberta et du reste du pays.
Je vois aujourd'hui les pages à la Chambre. Nous sommes très satisfaits d'eux, ils font un excellent travail. Je voudrais leur parler des injustices dont ils sont victimes, car eux aussi subissent les conséquences des dispositions de l'assurance-emploi.
Pour l'instant, le gouvernement les engage à titre d'étudiants. Étant donné qu'ils ne sont pas employés à plein temps, mais seulement à temps partiel, le gouvernement va exiger qu'ils cotisent à l'assurance-emploi. L'assurance-emploi est déduite de vos chèques de paie.
Le vice-président: Je rappelle au député qu'il doit s'adresser à la présidence.
M. Rob Anders: Bien sûr, monsieur le Président, c'est vous qui émettez leurs chèques de paie. Vous forcez ces étudiants à cotiser à l'assurance-emploi, mais parce qu'ils travaillent à temps partiel, ils ne seront jamais en mesure de toucher de prestations.
Si, pour une raison ou pour une autre, ils devaient quitter cet emploi ou vous deviez les laisser aller, ils ne pourraient jamais toucher l'argent que vous retenez sur leur paye. Ce n'est pas une assurance, mais bien un impôt. C'est un impôt que vous percevez sur le salaire de ces étudiants qui nous aident aujourd'hui à la Chambre. Ils ne peuvent pas toucher cet argent.
Comme des centaines de milliers d'autres étudiants au Canada, les pages du Parlement paient de l'assurance-emploi croyant que c'est une assurance. Pourtant, ils ne pourraient jamais toucher de prestations s'ils perdaient leur emploi.
Cela ne vaut pas seulement pour les étudiants. Cela vaut pour d'autres travailleurs que des étudiants à temps partiel. Le gouvernement jette de la poudre aux yeux aux coiffeurs, aux travailleurs indépendants et à toutes sortes de travailleurs canadiens qui contribuent à l'assurance-emploi mais qui, compte tenu de la façon dont ce programme est structuré, ne pourront jamais en bénéficier.
Je vais appeler ce programme comme il le mérite. Ce n'est pas de l'assurance-emploi, mais un impôt sur l'emploi. C'est exactement ce que vous retenez sur le salaire de ces étudiants, monsieur le Président, et c'est exactement ce que votre gouvernement prélève sur le salaire de millions de travailleurs de tout le Canada.
Ce qui crée vraiment des emplois et que mon parti et moi-même appuyons, ce sont des réductions d'impôt. Cet impôt que vous prélevez sur le salaire des pages et d'autres travailleurs au Canada est d'autant plus choquant que le gouvernement dispose à l'heure actuelle de quelque 35 milliards de dollars dans la caisse de l'assurance-emploi. C'est un excédent énorme.
Selon l'actuaire en chef de la caissse, un excédent de 15 milliards de dollars suffirait. Par conséquent, votre gouvernement, monsieur le Président, accumule plus de 20 milliards de dollars aux frais de gens comme ces pages, ici présents...
Le vice-président: Je ne comprends pas très bien. Je ne vois pas d'inconvénient à ce que le député parle du Président comme d'un fonctionnaire de la Chambre ayant des responsabilités au sein du Bureau de régie interne, la Chambre des communes étant l'employeur de toutes les personnes travaillant sur la colline, y compris les pages.
Cependant, il ne s'agit ni de mon gouvernement, ni de mon opposition. J'espère que le député pourra faire la distinction. Le Président est le président de la Chambre des communes, et non pas d'un parti ou d'un député en particulier, mais de tous les partis et de l'ensemble des députés.
M. Derek Lee: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai moi aussi entendu les propos du député et je sais que vous y avez répondu. Cependant, j'espère que les députés conviendront qu'il n'est pas approprié pour un député de contester, directement ou indirectement, l'impartialité de la présidence, comme semble l'avoir fait le député d'en face.
J'espère que l'ensemble des députés des deux côtés de la Chambre le reconnaîtront. Si d'autres ou moi-même avons mal compris les intentions du député, j'espère...
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. À ce stade, la présidence n'est nullement offensée; je voulais néanmoins apporter certaines précisions, non pas sur les avis exprimés, les arguments présentés ou le débat comme tel, mais simplement au sujet de la position de la présidence.
Avec tout le respect que je dois au secrétaire parlementaire, j'ai l'impression que nous entrons dans un débat. Or le débat revient à ce stade au député de Calgary-Ouest.
M. Rob Anders: Monsieur le Président, je trouve encourageant qu'une personne qui a déjà assumé la fonction de whip du gouvernement soit capable de se détacher du gouvernement libéral. Je vais continuer à parler de ce que le gouvernement a fait et de ce qu'il continue de faire.
Le gouvernement libéral a accumulé 35 milliards de dollars dans la caisse de l'assurance-emploi. C'est déraisonnable puisqu'un excédent beaucoup moins élevé suffirait.
Je voudrais m'adresser aux Albertains, qui devront se présenter aux urnes très bientôt, pour leur expliquer la vérité à propos de la caisse de l'assurance-emploi. Je demanderai aussi à tous les pages de la Chambre des communes d'écouter attentivement car les chiffres que je vais citer s'appliquent aussi à l'Ontario. Les chiffres valent pour les travailleurs de l'Ontario et de l'Alberta.
Les Albertains cotisent l'équivalent de 1,8 milliard de dollars à la caisse de l'assurance-emploi. Ils en retirent 500 millions de dollars. Ce qui signifie qu'il reste chaque année un excédent net de 1,3 milliard de dollars dans la caisse. L'Alberta compte 1,6 milliard de travailleurs. Si on fait le calcul, cela revient à environ 800 dollars par personne. Ce montant s'applique également aux pages de la Chambre des communes. Leur revenu n'est pas aussi élevé que celui du travailleur moyen, car ils travaillent à temps partiel. Cependant, s'ils recevaient un salaire moyen de l'ordre de 30 000 dollars ou un peu plus par année, ils paieraient un excédent de 800 dollars par année en cotisations au régime d'assurance-emploi compte tenu du montant global qu'ils en retirent collectivement.
C'est fondamentalement injuste, quand on pense que le gouvernement leur enlève près de 1 000 $ en impôt. Les Canadiens versent des cotisations excessives au Régime de pensions du Canada. Les jeunes gens que je vois dans cette salle le savent. Comme moi, comme le gouvernement et comme vous, monsieur le Président, ils savent que ce régime va s'effondrer en 2017 lorsque les changements démographiques prévus se seront matérialisés. Et pourtant, ils continuent de verser des cotisations excessives dans ce régime.
Comme tous les autres, ils contribuent de façon excessive aux deux régimes, soit l'AE et le RPC, à hauteur de 1 000 $ ou plus par année, une somme qu'ils pourraient avoir dans leur portefeuille pour la dépenser à leur guise, plutôt que de la remettre au gouvernement. C'est injuste.
Ce que je propose peut être un peu controversé, si bien que j'espère que les députés d'en face écouteront attentivement. Je propose que 5 p. 100 du salaire des travailleurs, qu'il s'agisse du concierge ou du président d'une société quelconque ou d'un organisme public, soit versé dans un régime d'épargne-retraite obligatoire, un super REER. De cette manière, cet argent n'est pas collectivement gaspillé. Ce n'est pas une combine à la Ponzi ni un système pyramidal. Les cotisations ne vont pas choir dans le Trésor public, d'où on ne sait si elles vont sortir un jour.
L'argent va s'accumuler dans un compte individuel, si bien que chaque travailleur pourra savoir combien d'argent il met de côté chaque année et quel est le taux de rendement de cet investissement. Les cotisations pourront servir à l'acquisition de CPG, de bons du Trésor, d'obligations ou de n'importe quelle combinaison de ces types d'instruments. Les travailleurs sauront toujours ce qu'ils ont accumulé.
Si je demandais à n'importe qui dans cette Chambre—et les gens qui sont ici sont tous brillants puisqu'ils sont censés diriger le pays—de me dire le montant qu'il a versé durant sa vie au Régime de pensions du Canada, je parie que personne, pas même vous, monsieur le Président, ne serait capable de me donner un chiffre, à cent ou à mille dollars près.
S'ils ne le savent pas, bien qu'ils soient censés diriger le pays, et si vous non plus ne le savez pas, monsieur le Président, c'est parce que la caisse de l'assurance-emploi est une caisse collective et que personne n'a un compte distinct. Voilà la tragédie de la Chambre des communes. Voilà une déclaration ironique, la tragédie de la Chambre des communes.
Une autre part de 5 p. 100 serait consacrée à l'assurance-emploi. Mon père a pris sa retraite récemment. J'espère qu'il profite de ses années de retraite et qu'il a mieux à faire que de me regarder à la télévision. Si un homme comme mon père, qui n'a jamais touché de prestations de chômage de sa vie, avait pu bonifier sa pension en y transférant cette part de 5 p. 100 de ses cotisations à l'assurance-emploi quand il prenait sa retraite à 65 ans, il aurait épargné et investi 10 p. 100 des gains réalisés dans sa vie en vue de sa retraite. Cela serait équitable. De cette manière, les gens ne se prévaudraient pas abusivement des pires aspects du régime d'assurance-emploi; ils sauraient que cette somme leur revient et qu'elle est là pour eux.
Je vois les agents de sécurité autour de nous. Je me souviens que, pendant la dernière session, le gouvernement est allé de l'avant et qu'il a sorti de l'argent de leur caisse de retraite, du fonds de pension des fonctionnaires fédéraux. Il s'est emparé de milliards de dollars qu'il a retirés de leurs gains ouvrant droit à pension. C'est inacceptable. Il serait bien plus juste que ces personnes puissent mettre de côté 5 ou 10 p. 100 de leur salaire, qu'elles connaissent le montant qu'elles ont versé et ce qu'elles obtiennent comme rendement de leur investissement, au lieu de laisser le gouvernement leur enlever ces sommes.
J'espère que nous verrons un jour un système comme celui-là, au lieu du régime actuel assorti de toutes sortes de lacunes. Les étudiants qui travaillent à temps partiel cotisent au régime d'assurance-emploi, mais ils ne peuvent jamais s'en prévaloir. Les gens qui sont travailleurs autonomes et qui dirigent leur propre entreprise sont doublement imposés, une fois à titre d'employeur, et une autre, à titre d'employé.
Les libéraux d'en face font les gorges chaudes. Ils se moquent des étudiants à cet endroit. Ils se moquent des agents de sécurité qui travaillent là-haut. Ils se moquent des travailleurs autonomes qui sont doublement imposés. Ils rigolent, malgré le fait qu'ils ont dans leurs coffres 20 milliards de dollars qu'ils ne devraient pas avoir. Cette somme appartient aux contribuables canadiens, pas aux libéraux d'en face qui rigolent.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
L'INDUSTRIE AUTOMOBILE
M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.): Monsieur le Président, le Canada est l'un des principaux producteurs d'automobiles dans le monde, mais l'assemblage de ces dernières n'est pas la seule activité de ce secteur important pour l'industrie manufacturière canadienne. En effet, un grand nombre de petites et de grandes entreprises gravitent autour de ce secteur et elles contribuent beaucoup à faire de l'industrie automobile canadienne une industrie de classe mondiale.
L'Automotive Industry Association of Canada représente ces entreprises, quelque 1 300 au total, des fournisseurs, distributeurs nationaux et grossistes, qui emploient plus de 220 000 personnes.
Ce matin, le conseil d'administration de l'AIA a rencontré des députés pour discuter de quelle façon l'industrie et le gouvernement peuvent travailler ensemble pour relever les défis auxquels l'industrie est confrontée, que ce soit maintenant ou dans l'avenir. Ces discussions font partie de l'engagement de l'AIA à participer de façon constructive au processus d'élaboration des politiques du pays.
L'AIA a fourni aux parlementaires des analyses en temps opportun sur un certain nombre de questions et dans lesquelles elle présente le point de vue de l'industrie d'une manière claire et efficace. Je la remercie de sa contribution et de son engagement à aider à l'élaboration des politiques canadiennes d'intérêt public.
* * *
L'AGRICULTURE
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en tant qu'agricultrice de troisième génération et représentante d'une circonscription largement agricole, je me réjouis de la tenue, aujourd'hui, d'un débat d'urgence sur la crise agricole.
Je tiens à souligner à mes collègues toute la dévastation qu'est en train de subir l'économie rurale et à mentionner que la situation ne va que s'aggraver à court terme si le gouvernement fédéral n'intervient pas énergiquement pour arrêter cette spirale descendante.
Les revenus agricoles devraient encore tomber cette année à 65 p. 100 de la moyenne de cinq ans, laquelle a été établie durant une période de crise. En Saskatchewan, nous avons environ le quart des agriculteurs du pays et, tous les ans, ce chiffre diminue, des agriculteurs étant forcés d'abandonner leur ferme.
Les difficultés de nos producteurs primaires se répercutent sur tout le pays. Par conséquent, le soutien de la Chambre est essentiel si on veut trouver une solution. Saisissons cette occasion pour travailler ensemble à trouver une solution à la crise.
Rappelons-nous ce qu'a dit un jour Eisenhower: «C'est très facile de cultiver quand on a un crayon pour charrue et quand on est à des milliers de milles d'un champ de maïs.»
* * *
LA MÉDAILLE DE LA BRAVOURE
M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Monsieur le Président, lors d'une cérémonie qui a été tenue plus tôt ce mois-ci à Ottawa, cinq personnes ont reçu la Médaille de la bravoure du gouverneur général pour le vaillant sauvetage qu'elles ont exécuté sur les rives du lac Erie dans le parc national de la Pointe-Pelée en août 1998.
Ces cinq personnes sont deux Canadiens et trois Américains: Helmut Dueckman, Mark Major et Juliana Bartel de même qu'Ashley et Marna Getz.
Le jour du sauvetage, lorsque deux jeunes enfants ont été emportés par des vagues de deux mètres, ces témoins n'ont pas attendu avant d'agir. Ils ont mis leur vie en danger pour sauver celle d'autres personnes.
Malheureusement, Helmut Dueckman, âgé de 71 ans, le grand-père des deux enfants, a perdu la vie en dépit des efforts héroïques de sauvetage et de réanimation tentés par Mark Major, un membre du personnel du parc national.
Nous félicitons ces cinq personnes pour leur acte de bravoure et nous nous unissons à la famille d'Helmut Dueckman pour déplorer sa perte.
* * *
LA CRÉATION D'EMPLOIS
Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier, Statistique Canada a rendu publics les résultats de la dernière Enquête sur la population active. Les chiffres confirment une fois de plus l'excellent bilan de notre gouvernement en matière de création d'emplois. Plus de deux millions d'emplois ont été créés depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux en 1993.
Au cours de la dernière année, notre travail de création d'emplois a été particulièrement remarquable chez les femmes et les jeunes. Comparé aux chiffres d'il y a un an, le taux d'emploi des femmes a augmenté de 2,7 p. 100, soit de 154 000. Cela représente le double du taux d'augmentation constaté chez les hommes. Quant aux jeunes, plus de 70 000 emplois ont été créés pour eux au cours des cinq derniers mois.
Dans quel secteur la création d'emplois a-t-elle été la plus forte au cours des 12 derniers mois? Dans le commerce. L'emploi dans le secteur du commerce a augmenté de 4,9 p. 100 au cours de la dernière année, soit le double de l'augmentation dans tous les autres secteurs.
Nous continuerons d'adopter des politiques qui font en sorte que tous les Canadiens peuvent contribuer à un avenir où le Canada sera un des pays les plus innovateurs, inclusifs et entreprenants du monde.
* * *
LA FONDATION DES MALADIES DU COEUR
M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, les maladies cardiovasculaires sont un vrai fléau au Canada. En effet, elle comptent pour 37 p. 100 des décès enregistrés chaque année au pays, en plus de faire souffrir bon nombre de gens et de diminuer la qualité de leur vie. Notre population vieillit et nous pouvons donc nous attendre à une augmentation du nombre de Canadiens qui devront subir les effets dévastateurs des maladies cardiaques et des accidents cérébrovasculaires.
Au cours du mois de février, des représentants de la Fondation des maladies du coeur du Canada passeront aux portes en vue de sensibiliser la population et de recueillir des fonds dans le cadre d'une stratégie nationale visant à combattre les maladies cardiovasculaires. Toutes sortes d'activités sont prévues un peu partout en Ontario et ailleurs au pays et j'aimerais encourager tous les Canadiens ainsi que les députés de la Chambre à y participer.
J'exhorte les députés à sensibiliser les gens de leur circonscription aux bienfaits d'habitudes de vie saines. Nos efforts peuvent permettre de sauver des vies.
* * *
LE CURLING EN SASKATCHEWAN
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, un récent sondage mené par un poste de radio de la Saskatchewan a révélé que le curling était le sport le plus populaire en Saskatchewan, suivi de près par le hockey.
La Saskatchewan est bien connue pour son amour du curling. Non seulement les habitants de la Saskatchewan aiment jouer au curling, mais ils aiment également organiser des tournois, au niveau tant provincial que national.
Il y a un mois, des bénévoles de Weyburn et des environs ont offert tout un spectacle lorsqu'ils ont présenté le Championnat national mixte de curling. Plus tard en janvier, le Estevan Curling Club a présenté le Tournoi de coeurs qui a permis de constituer l'équipe qui représentera la Saskatchewan aux finales nationales.
Je suis bien sûr très fier des régions d'Estevan et de Weyburn, qui ont démontré leur hospitalité sans bornes aux nombreuses personnes qui leur ont rendu visite, et je suis également très fier de vous dire que ces deux régions font partie de la circonscription de Souris—Moose Mountain.
* * *
LES PRIX DE LA MUSIQUE DE LA CÔTE EST
M. Mark Eyking (Sydney—Victoria, Lib.): Monsieur le Président, à titre de fier député de la magnifique île du Cap-Breton, je voudrais féliciter mes concitoyens qui ont été récompensés lors de la remise des Prix de la musique de la côte est, dimanche dernier.
Gordie Sampson, Freddie Lavery, le groupe Barra MacNeils, Natalie MacMaster et Jennifer Rollan ont fait notre fierté en recevant leurs récompenses.
Comme bien des Canadiens le savent, le Cap-Breton a donné d'excellents musiciens et, comme la musique représente une grande partie de notre culture, je vous prie de croire, monsieur le Président, que les habitants du Cap-Breton seront longtemps présents dans le domaine musical au Canada.
* * *
[Français]
LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, 2 000 emplois créés, 5 000 autres pendant la construction d'une nouvelle usine, réouverture d'une usine fermée depuis 1998, près d'un milliard de dollars en investissements, tels sont les résultats, seulement dans le comté de Mercier, de la récente tournée de Mission-Québec en Espagne.
Interquista, un consortium formé de GESPA et de la SGF, construira à Montréal-Est une usine de fabrication de plastique recyclable au coût de 700 millions de dollars. L'industrie pétrochimique de l'est de Montréal, durement touchée par la politique fédérale, renaît. Les recommandations du BAPE, intégrées au projet, vont rassurer les citoyens inquiets.
Mettre en commun l'ouverture du Québec au monde, le potentiel de notre économie, la force persuasive de notre État et la puissance de nos leviers économiques, tout cela, c'est le modèle québécois.
Et il marche. Ce n'est que dans le reste du Canada qu'il dérange. Vivement que nous passions du statut de province pauvre à celui de pays riche.
* * *
[Traduction]
L'AGRICULTURE
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, partout au Canada, la crise s'est installée chez les agriculteurs. Ces derniers supplient le gouvernement libéral de leur venir en aide. Ils sont à court d'argent, même s'ils ne sont aucunement à blâmer. Après des années de bas prix des produits de base et de coûts élevés des intrants dans le secteur agricole, de nombreuses familles sont au bord de la faillite. Cette industrie de 100 milliards de dollars a besoin d'une aide d'urgence de la part du gouvernement.
L'agriculture est le nerf de l'économie rurale. Imaginons un peu la réaction en chaîne qu'entraînerait le départ de tous les agriculteurs. Depuis deux ans, le Manitoba a perdu 20 p. 100 de ses agriculteurs. Cette année, la province en perdra encore 16 p. 100 si le gouvernement n'effectue pas immédiatement une injection d'argent comptant.
En tant que député du Canada rural, j'exhorte le gouvernement à tendre la main à ceux qui mettent des aliments sur nos tables, c'est-à-dire les agriculteurs canadiens.
* * *
LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Monsieur le Président, le dangereux et tristement célèbre tronçon de la Transcanadienne entre Saint-Léonard et Fredericton, au Nouveau-Brunswick, est le principal corridor pour se rendre dans le Canada atlantique. Il est plus qu'urgent de le moderniser et d'en faire une autoroute à quatre voies. Chaque année, des centaines de milliers de voyageurs venant de tout le Canada empruntent ce tronçon de la Transcanadienne.
Depuis les élections fédérales du mois de novembre, il y a eu, sur ce seul tronçon, pas moins de 40 accidents qui ont fait six blessés graves et un mort.
À l'heure actuelle, il reste environ 90 millions de dollars dans la lucrative entente Canada—Nouveau-Brunswick sur l'amélioration des routes. Malheureusement, au cours des deux années qui se sont écoulées depuis les dernières élections provinciales, seule une portion infime de ce financement destiné à l'amélioration des routes a été dépensée et la rumeur veut que pas un sou ne sera dépensé avant la période précédant immédiatement les prochaines élections provinciales prévues dans deux ans.
Au nom de tous les Canadiens, j'exhorte le gouvernement provincial à sacrifier ses visées politiques égoïstes et à consacrer cet argent au dédoublement de ce tronçon de la Transcanadienne, faute de quoi il devra porter la responsabilité de la mort inutile d'enfants et d'adultes canadiens qui perdront la vie sur ce corridor de la mort au cours des deux prochaines années.
* * *
LES SOINS DE SANTÉ
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, le premier anniversaire de la présentation en Alberta du projet de loi 11 approche; depuis, ce projet de loi a été adopté et a reçu la sanction royale et, il y a seulement 11 jours, des normes permettant aux hôpitaux privés de garder les patients qu'ils traitent plus de 24 heures ont été approuvées.
Nous avons tous un an de plus, mais le gouvernement fédéral actuel, lui, n'est pas devenu plus sage. Ralph Klein, qui se prépare à se présenter devant ses électeurs, va certainement défendre ses attaques contre le régime d'assurance-maladie en invoquant le silence du gouvernement fédéral au sujet de la loi 11.
Les libéraux ont fait campagne en se présentant comme les défenseurs de l'assurance-maladie. Depuis, ils n'ont rien fait pour la protéger. Ce week-end, nous avons vu ce qu'était une véritable défense de l'assurance-maladie. Le gouvernement néo-démocrate du Manitoba a dit non aux hôpitaux privés. Il ne s'est pas contenté d'exprimer de sérieuses réserves. Il a opposé une fin de non-recevoir à un régime de santé à deux vitesses dans la province. C'est comme ça qu'il faut faire .
Quand le gouvernement fédéral va-t-il faire preuve du même courage et interdire les hôpitaux privés à but lucratif?
* * *
ELIZABETH GRANDBOIS
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je rends aujourd'hui hommage à une Canadienne courageuse, Mme Elizabeth Grandbois.
Mme Grandbois est une femme animée d'une force et d'une volonté remarquables. En 1997, elle a appris qu'elle était atteinte de sclérose latérale amyotrophique, communément appelée maladie de Lou Gehrig. Depuis ce diagnostic, elle a maximisé l'emploi de son temps et s'est consacrée à sensibiliser davantage les gens à ce trouble neurologique à progression rapide. Le 2 février, Elizabeth a organisé une gigantesque activité de financement doublée d'une fête musicale, appelée le Concert de l'espoir d'Elizabeth.
Elle a fait appel à des artistes canadiens de grand talent, dont les Nylons, Susan Aglukark, Michael Burgess, Ian Thomas et Kevin Hicks, qui ont accepté de participer avec elle à ce remarquable projet. Entourée d'amis et de membres de sa famille, de personnalités politiques et mondaines et de généreux donateurs, Elizabeth a accueilli 750 personnes au théâtre Aquarius de Hamilton. Ensemble, ils ont recueilli la somme incroyable de 250 000 $.
Elizabeth Grandbois est une Canadienne remarquable. Je suis fière qu'elle fasse partie de mes amis et des électeurs de Burlington. Son courage profitera à tous les Canadiens. L'auteur-compositeur Ian Thomas a dit que «Le spectacle témoignait d'un excellent état d'esprit. Dans une situation où la majorité d'entre nous se replieraient sur eux-mêmes et soigneraient leurs blessures, elle affiche un esprit d'humanité auquel aspirent la majorité d'entre nous.»
* * *
[Français]
LES JEUX DE LA FRANCOPHONIE
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, en 2001, le Canada sera l'hôte des IVe Jeux de la Francophonie, qui se tiendront à Ottawa, ville et Capitale unilingue anglaise.
Voici quelques données utiles pour les pays qui viendront nous visiter et qui se feront dire que le «le plus meilleur pays du monde» est bilingue.
Tout d'abord, selon Statistique Canada, 91 p. 100 de la population de la ville d'Ottawa parlent uniquement anglais, pour 9,5 p. 100 de francophones.
Deuxièmement, le taux d'assimilation du français dans la Capitale unilingue anglaise du Canada est de près de 30 p. 100.
À la lumière de ces faits, il semble que l'expression qui reflétera le mieux le visage réel de la Capitale unilingue anglaise du Canada sera, de toute évidence, «Welcome to the Games of la Francophonie».
* * *
SAMUEL DE CHAMPLAIN
M. Denis Paradis (Brome—Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, en 1604, Samuel de Champlain arrive en Acadie. Il explore la côte en vue de trouver un emplacement de colonisation idéal. C'est le début d'une belle et grande aventure.
À l'approche du 400e anniversaire de l'arrivée de Samuel de Champlain en Amérique, je me ferai un devoir de faire plusieurs déclarations à la Chambre afin de souligner cette grande page d'histoire.
Les Canadiens et Canadiennes et plus particulièrement notre jeunesse, doivent garder en mémoire tous ces faits et apprendre à connaître ce grand explorateur qui, en compagnie d'hommes et de femmes, a contribué à bâtir ce nouveau territoire appelé Nouvelle-France.
Samuel de Champlain n'hésitait pas à partir à la conquête de ses rêves. Champlain était un véritable bâtisseur d'empire. Selon l'auteur Samuel Eliot Morison, Champlain est l'un des plus grands explorateurs de toute l'histoire et probablement celui qui a joué le plus grand rôle dans l'histoire du Canada.
J'y reviendrai.
* * *
[Traduction]
L'AGENCE D'INSPECTION DES ALIMENTS
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, le Canada a interdit l'importation de boeuf du Brésil depuis près de deux semaines déjà. Cette décision n'était pas fondée sur des données scientifiques mais reposait plutôt sur des bases politiques. Le cabinet du premier ministre soutient qu'il s'agit d'un enjeu lié à la santé et non au commerce, bien qu'il n'ait pas reçu de ses propres fonctionnaires quelque preuve que ce soit établissant la présence de l'EBS.
Bien que les scientifiques de l'Agence canadienne d'inspection des aliments aient confirmé que rien n'établissait la présence de risques pour les humains, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et le gouvernement fédéral persistent à ternir la réputation du Canada. Le gouvernement libéral compromet encore davantage notre situation commerciale en montrant à d'autres pays la voie à suivre, soit fonder des décisions sur la politique plutôt que sur des données scientifiques.
Le gouvernement libéral a même été jusqu'à museler et à harceler des scientifiques de l'ACIA qui remettent en question les intentions du gouvernement parce qu'ils savent qu'il n'existe pas de preuves suffisantes justifiant le maintien de cette interdiction.
Le premier ministre a permis que le cafouillage du ministre de l'Industrie dans le dossier Bombardier affecte le travail de l'ACIA et la réputation commerciale du Canada à l'étranger. Il est temps de cesser de refiler ses responsabilités aux autres. Le premier ministre et le Cabinet doivent rendre des comptes aux Canadiens.
* * *
LA PORNOGRAPHIE
M. Joe Comuzzi (Thunder Bay—Superior-Nord, Lib.): Monsieur le Président, en octobre dernier, les églises Corpus Christie et St. Margaret de Thunder Bay, sous la direction de leurs pasteurs, le père Pat Stiller et le père Donnelly, et de concert avec leurs comités présidés par Mmes Elizabeth Bortelussi et Rosalie Douglas, ont organisé une campagne du ruban blanc contre la pornographie juvénile.
Des centaines de citoyens ont porté ces rubans blancs, puis les ont signés et retournés à leurs paroisses. À mon tour, je les ai remis récemment à la ministre de la Justice.
Lorsqu'il a adopté la Charte des droits et libertés, le Parlement n'a jamais eu l'intention de permettre quelque forme que ce soit de pornographie juvénile au pays. J'espère que les démarches de ces deux paroisses de Thunder Bay vont interpeller tous les tribunaux du pays et que ceux-ci tiendront compte de l'intention du Parlement lorsque viendra le temps pour eux de prendre des décisions concernant la pornographie juvénile au Canada.
* * *
LE COMMERCE INTERNATIONAL
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en Chine le cancer du poumon et les maladies liées au tabagisme ont pris l'ampleur d'une épidémie. L'Organisation mondiale de la santé a déclaré que, au cours des prochaines années, trois millions de citoyens de ce pays mourront chaque année. Les fabricants de produits du tabac tiennent des soirées de danse gratuites et offrent des cigarettes aux enfants afin de provoquer chez eux la dépendance au tabac.
Pourquoi le premier ministre et les membres du gouvernement ont-ils amené avec eux en Chine des représentants de l'industrie du tabac? Pourquoi le gouvernement prétend-il être en faveur de la protection de la santé et vouloir essayer de prévenir le tabagisme ici chez nous et accepte-t-il en même temps que des représentants de cette industrie l'accompagnent? Est-ce une politique officielle du gouvernement que de dire qu'il lutte contre l'usage du tabac chez lui tout en faisant la promotion du tabac à l'étranger?
Le gouvernement devrait mettre fin à cette hypocrisie, expulser d'Équipe Canada les représentants de l'industrie du tabac et commencer à pratiquer à l'étranger ce qu'il dit avoir l'intention de faire ici au pays.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous savons aujourd'hui que le conseiller en éthique a confirmé que le premier ministre avait effectivement intérêt à ce que le terrain de golf adjacent à l'Auberge Grand-Mère soit une réussite au moment où cette dernière a reçu des millions de dollars. Cela s'appelle un conflit d'intérêts.
Le conseiller en éthique a confirmé ce que nous soutenons depuis le début de toute cette affaire, soit que le premier ministre était dans une position où il aurait perdu de l'argent si la valeur de ce terrain de golf avait diminué.
Pourquoi le premier ministre continue-t-il de nier qu'il détenait des actions dans ce terrain de golf à ce moment-là?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, l'affirmation du chef de l'opposition est complètement fausse. M. Wilson a fait certaines remarques au sujet de situations hypothétiques, mais il a continué de dire qu'il avait examiné la question de façon approfondie et qu'il avait conclu que les agissements du premier ministre étaient tout à fait dans les règles et que ce dernier ne détenait pas d'action durant la période en question.
Je suggère donc au chef de l'opposition de retirer son affirmation parce qu'il ne fait que s'enliser davantage chaque fois qu'il ouvre la bouche pour parler de cette affaire.
[Français]
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le commissaire en éthique a finalement confirmé que le premier ministre avait un intérêt personnel à ce que la valeur de l'Auberge Grand-Mère reste élevée.
Plutôt que de prendre les contribuables pour des valises, pourquoi le premier ministre ne reconnaît pas que toute l'affaire de l'Auberge Grand-Mère n'est rien de moins qu'un conflit d'intérêts?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le conseiller en éthique a maintenu à plusieurs reprises que le premier ministre n'avait aucun conflit d'intérêts dans ce dossier. Il l'a mentionné par écrit il y a quelques semaines au leader. Il l'a confirmé dans des entrevues et il maintient sa position que le premier ministre n'avait aucun conflit d'intérêts dans ce dossier.
[Traduction]
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il devrait revoir ce que le conseiller en éthique a dit hier et aujourd'hui.
L'opposition officielle continue de proposer des idées pour promouvoir la démocratie et la liberté à la Chambre des communes, ce qui serait bon pour tous les Canadiens.
Ce soir, nous voterons sur une motion que j'ai présentée la semaine dernière, motion demandant l'appui de la Chambre à l'égard d'une promesse du livre rouge concernant l'établissement d'un poste de conseiller en matière d'éthique dont le titulaire rendrait compte à la Chambre. C'était une promesse des libéraux, mais il semblerait que les députés libéraux seront forcés de voter contre leur propre promesse.
Qu'y a-t-il dans cette motion qui pourrait nuire au pays de l'avis du premier ministre?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le conseiller en éthique n'a pas confirmé que le premier ministre était en situation de conflit d'intérêts. Le chef de l'opposition a tout à fait tort de dire cela.
J'ajouterai aussi que le chef de l'opposition se trouve ni plus ni moins à demander aux députés de s'en prendre au premier ministre pour avoir donné suite à l'engagement qu'il a pris de créer un poste de conseiller en éthique, ce qui n'existait pas avant les élections de 1993.
Le conseiller en éthique rend compte au premier ministre qui, à son tour, rend compte au Parlement, et c'est pourquoi nous devrions voter contre la motion de l'opposition. Cette motion n'a rien à voir avec la réalité.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je croyais que la question était de savoir si le gouvernement libéral entendait donner suite aux promesses contenues dans le livre rouge. C'était assez simple.
J'ai posé mes premières questions au premier ministre, au sujet de son intérêt pour l'Auberge Grand-Mère en février...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La présidence désire entendre la question posée par la députée d'Edmonton-Nord et je suis sûr que les députés le souhaitent aussi.
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, ma première question au sujet de l'Auberge Grand-Mère remonte au 1er février 1999. C'était il y a deux ans. Le premier ministre et son chien de garde en matière d'éthique ont prétendu que le premier ministre n'avait aucun intérêt financier dans l'Auberge Grand-Mère. Alors que le premier ministre se trouve actuellement en Chine, son conseiller en éthique vient d'avouer. Il reconnaît maintenant que le premier ministre avait un intérêt financier dans cette auberge.
Pourquoi a-t-on caché les faits pendant deux ans?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme toujours, la députée a tout de travers. Le conseiller en éthique n'a pas changé d'opinion. Il s'est acquitté de ses responsabilités, et les partis d'opposition l'en ont d'ailleurs félicité. Il fait son travail avec indépendance et il mérite pour cela des félicitations.
Pendant qu'on parle de dissimulation, combien de temps la députée a-t-elle caché son intention de toucher sa pension?
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ils ont recours à la diversion, mais il n'en demeure pas moins que le premier ministre et le conseiller en éthique...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La députée d'Edmonton-Nord a la parole. Écoutons sa question.
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, lorsque le premier ministre a appelé le conseiller en éthique en janvier 1996, il l'a prévenu que la mise en vente de ses actions n'avait pas réussi. Jusqu'à la vente des actions, en 1999, le vice-premier ministre a déclaré qu'il n'y avait pas de moment opportun pour le faire. Il n'y a rien de plus opportun que le fait que le conseiller en éthique condamne aujourd'hui le premier ministre. Par la suite, l'Auberge Grand-Mère a reçu 3,4 millions de dollars. Si on avait laissé l'hôtel faire faillite, le club de golf aurait évidemment perdu de la valeur, ce que le conseiller en éthique confirme aujourd'hui.
La question est de savoir pourquoi on a utilisé l'argent des contribuables pour renflouer les investissements personnels du premier ministre.
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en ce qui concerne l'aide financière, la députée devra poser sa question au gouvernement du Québec, puisque l'aide a été accordée en vertu d'un programme provincial.
Quant à la situation du premier ministre, le conseiller en éthique a déclaré au Comité permanent de l'industrie que le premier ministre n'est pas propriétaire des actions, dont il s'est départi le 1er novembre 1993. C'est la seule chose qui compte. C'est ce qu'a déclaré le conseiller en éthique à un comité de la Chambre.
Je ne cherche pas à faire diversion. Je n'ai pas parlé à la leader adjointe de sa pension en guise de diversion. Je lui ai porté un coup direct et elle l'a encaissé au menton.
* * *
[Français]
LE COMMERCE
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture nous expliquait, la semaine dernière, que le bannissement du boeuf du Brésil était nécessaire, parce que le Brésil avait omis de remplir un questionnaire et qu'il s'agissait d'une question de santé publique.
Or, on apprenait, récemment, que le Canada, en toute connaissance de cause, a continué d'importer de la viande en provenance de Grande-Bretagne, d'Espagne, de France et de plusieurs autres pays de l'Union européenne, même après qu'on ait connu les risques reliés à la maladie de la vache folle. Je rappelle que ces importations se faisaient encore l'année dernière.
Le ministre peut-il expliquer à cette Chambre en quoi le boeuf brésilien serait une plus grande menace à la santé publique que les milliers de kilos de viande en provenance de l'Union européenne?
[Traduction]
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le Canada n'a pas importé de boeuf de pays où l'on sait que l'ESP sévit depuis plusieurs décennies.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, c'est pourtant ce que révèlent les documents de Statistique Canada.
Je sais que le ministère de l'Agriculture prétend que Statistique Canada ne soumet pas de documents ou de statistiques fiables. Or, pour une fois qu'on n'a pas la meilleure chose au monde, j'imagine qu'il y a un débat entre Statistique Canada et le ministère de l'Agriculture.
Je veux lui rappeler, cependant, que le Brésil fait partie d'une association de libre-échange, le Mercosur, comprenant, entre autres, l'Uruguay et l'Argentine. Sachant que le boeuf brésilien peut transiter par ces deux pays, quelle garantie a-t-il que le boeuf brésilien n'arrive pas au Canada par l'Argentine et l'Uruguay?
[Traduction]
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, voilà exactement pourquoi nous évaluons les risques relativement aux bovins que le Brésil importe depuis plusieurs années. Nous avons besoin de savoir si le Brésil a la capacité de vérifier où ces animaux ont abouti, où ils aboutissent et où ils aboutiront, et s'ils aboutissent dans la chaîne alimentaire. Voilà pourquoi nous effectuons cette évaluation des risques.
Quant à l'autre information, le député devrait mettre de l'ordre dans son information. Les chiffres attribués à Statistique Canada sont ceux que l'Organisation mondiale de la santé a colligés sur les produits à risque émanant de l'Union européenne, et nous n'en avons importé aucun.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, le ministre a fait état d'un questionnaire, qui serait resté sans réponse des autorités brésiliennes, pour justifier son embargo sur le boeuf brésilien.
Le ministre a-t-il pris connaissance du questionnaire et peut-il nous dire s'il a trouvé quelque chose d'anormal qui justifierait ses craintes et l'embargo qu'il a imposé sur le boeuf brésilien?
[Traduction]
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, ce questionnaire a été mis au point par les membres de l'ALENA, le Canada, les États-Unis et le Mexique. En 1998, ces trois pays ont choisi les pays auxquels ils enverraient le questionnaire et ont décidé qu'ils feraient conjointement l'évaluation de l'information ainsi obtenue.
Le Brésil a renvoyé le questionnaire il y a une semaine seulement, vendredi dernier, mais ses réponses étaient incomplètes. Des techniciens se rendent là-bas aujourd'hui pour obtenir des renseignements supplémentaires.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement justifie son embargo en soutenant que le Brésil a tardé à transmettre son questionnaire. Nous savons maintenant que nous avons ce questionnaire. J'imagine que depuis, le gouvernement a pris connaissance du questionnaire rempli par le Brésil.
Le ministre peut-il nous dire s'il y a des différences significatives par rapport aux réponses données par l'Argentine et l'Uruguay et, si oui, lesquelles? Est-ce que ces différences justifient l'embargo total sur le boeuf brésilien?
[Traduction]
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, j'espère que le député ne pense pas que la santé des Canadiens est en danger.
Je le répète, le Brésil n'a pas encore fourni toute l'information aux techniciens. Une équipe de techniciens du Canada, du Mexique et des États-Unis se rendra au Brésil plus tard aujourd'hui afin de pouvoir être sur place demain pour effectuer l'évaluation des risques en collaboration avec les responsables brésiliens.
* * *
LES DROITS DE LA PERSONNE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, cherchez l'erreur. Le premier ministre se rend en Chine. Il affirme que le Canada veut que la Chine...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Il est très difficile à la présidence d'entendre la députée de Halifax et ce n'est pas simplement parce qu'elle est assise loin de la présidence. Nous aimerions pouvoir l'entendre. Je suis persuadé que les députés des deux côtés de la Chambre vont lui permettre de poser sa question.
Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, il est compréhensible que ces députés ne veuillent pas entendre certaines choses.
Le premier ministre se rend donc en Chine. Il affirme que le Canada veut que la Chine respecte les droits de la personne. Or, 48 heures après le début de la mission commerciale en Chine, certains des membres de sa propre délégation se moquent d'étudiants canadiens et leur disent de ne pas parler de violations des droits de la personne.
Ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Est-ce que le Canada a une position crédible en matière de droits de la personne ou est-ce que le premier ministre pose simplement pour la galerie?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, selon moi, l'erreur c'est que la députée ignore tout de ce qui se passe.
Plus tôt aujourd'hui, le premier ministre a prononcé en Chine un discours dans lequel il a souligné très clairement l'importance de la primauté du droit et de l'indépendance du pouvoir judiciaire, en affirmant que «la primauté du droit signifie la subordination de tous les comportements socio-économiques et politiques à un ensemble établi de codes et de règlements». Il a précisé que «personne n'est au-dessus des lois» et que «les règles doivent être la propriété commune de tous les citoyens».
C'est une déclaration très claire en faveur de l'importance de la primauté du droit en matière de droits de la personne en Chine que le premier ministre est en mesure de faire.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, vous parlez d'un ensemble de contradictions et de messages contradictoires. Des gens d'affaires, invités par le premier ministre, se rendent en Chine et condamnent des étudiants canadiens qui défendent les droits de la personne.
Je voudrais poser la question suivante au ministre des Affaires étrangères. Si le premier ministre ne fait pas que poser pour la galerie, va-t-il condamner les gens d'affaires canadiens qui ont déclaré qu'il ne fallait surtout pas parler de violations de droits de la personne en Chine?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, si je suis bien la députée, nous avons le premier ministre qui est en Chine où il défend avec vigueur le respect des droits de la personne. Nous avons des représentants de notre ambassade qui interviennent pour que les étudiants canadiens qui ont eu maille à partir avec les autorités chinoises après avoir émis leur opinion soient libérés et bien traités. En même temps, la députée ne croit pas, pour sa part, que les chefs d'entreprise canadiens aient le droit d'exprimer leurs points de vue.
Quelle place exactement les droits de la personne occupent-ils dans la mentalité de la députée?
* * *
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. Le présumé acheteur des actions que le premier ministre détenait dans le club de golf en 1993 était une société appelée Akimbo, contrôlée par M. Jonas Prince. M. Prince a déclaré au National Post que l'entente n'a jamais porté sur une vente ferme, mais plutôt sur une option ou un droit d'achat. Cela signifierait que les actions ont toujours appartenu au premier ministre.
Le ministre de l'Industrie demandera-t-il le consentement de M. Jonas Prince pour déposer au Parlement tous les documents et accords pertinents dans cette affaire?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le conseiller en éthique a dit, dans son témoignage devant le Comité de l'industrie de la Chambre, que «le premier ministre ne détient pas d'intérêts dans cette entreprise. Il a vendu ses intérêts.»
Il a poursuivi en disant que «c'était une véritable vente, libérant le premier ministre de tout intérêt dans ce terrain de golf. Le premier ministre n'a pas ces actions. Il n'en est plus propriétaire depuis le 1er novembre 1993, ce qui est l'essentiel de la question».
C'est ce qu'a déclaré le conseiller en éthique devant le comité permanent de la Chambre.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, juste pour tenir le vice-premier ministre au fait, le conseiller en éthique vient maintenant de dire que les actions du premier ministre dans le club de golf n'ont jamais été placées dans une fiducie sans droit de regard. C'est ce que le conseiller en éthique a déclaré la semaine dernière.
Le vice-premier ministre confirmera-t-il que les actions du premier ministre dans le club de golf Grand-Mère n'ont jamais été placées dans une fiducie sans droit de regard?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, le chef du Parti conservateur a admis avoir posé des questions à l'aveuglette dans l'espoir de découvrir quelque chose. Hier, il a demandé d'urgence des renseignements sur des agences de recrutement de cadres, disant que les agences de recrutement avaient changé entre la nomination de M. Schroder et celle de M. Vennat. J'ai vérifié et ces déclarations sont fausses.
Il a demandé quelles agences de recrutement de cadres avaient participé au recrutement de cadres de la BDC. Je peux lui dire que j'ai en main la liste, non pas d'une ou deux agences, mais de dix. Il s'agit là de la pratique habituelle pour toute société qui recrute des cadres selon leurs compétences.
Le député pose des questions à l'aveuglette. Ses efforts sont vains. Il fuit...
Le Président: Le député de Richmond a la parole.
[Français]
M. Joe Peschisolido (Richmond, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier, le conseiller en éthique, M. Wilson, a constaté que le premier ministre avait actuellement un intérêt dans la santé financière de l'Auberge Grand-Mère et du terrain de golf de Grand-Mère.
M. Wilson a dit clairement que le premier ministre pouvait perdre de l'argent sur son investissement.
Je voudrais savoir si le premier ministre est d'accord avec M. Wilson et s'il va simplement reconnaître son intérêt financier entre 1996 et 1999 dans l'Auberge Grand-Mère?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, M. Wilson a parlé de façon hypothétique. La chose est claire, et il a statué sur ce dossier. Il a dit clairement, et je le cite en anglais:
[Traduction]
«Le premier ministre ne possède aucune action, il n'en possède plus depuis le 1er novembre 1993. C'est la seule chose importante.»
[Français]
C'est le témoignage du conseiller en éthique devant le Comité permanent de l'industrie de la Chambre des communes.
M. Joe Peschisolido (Richmond, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en 1996, dès que le premier ministre a découvert que la vente de ses actions n'avait pas réussi, il a téléphoné à M. Wilson pour lui demander conseil.
M. Wilson lui a offert un choix clair: déclarer ses actions ou les vendre.
Je veux savoir pourquoi le premier ministre n'a pas suivi les conseils de M. Wilson, son conseiller en éthique?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, selon mes informations, le premier ministre a suivi les conseils du conseiller en éthique.
* * *
LES JEUNES CONTREVENANTS
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, actuellement, dès la première offense mineure commise par un adolescent, le dossier est référé au procureur de la Couronne qui évalue si le jeune a besoin d'aide, et s'il y a lieu, le système québécois le réhabilite immédiatement.
Avec le projet de loi de la ministre, le jeune ne recevra qu'un avertissement. Jamais le procureur de la Couronne ne verra ce dossier, pas plus qu'il ne pourra obliger le jeune contrevenant à suivre un programme de réhabilitation.
La ministre réalise-t-elle que son projet de loi fait échec à l'approche éducative du Québec?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je me suis entêtée à le dire tout au long de cet échange, le projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents laisse aux provinces assez de flexibilité pour maintenir les programmes et les politiques actuellement en place.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, au lieu que la ministre dise n'importe quoi, j'aimerais qu'elle essaie de comprendre l'approche du Québec dans ce dossier. Je lui donne un autre exemple fort simple.
Aujourd'hui, un jeune contrevenant trouvé coupable d'un crime grave sort d'un centre de réhabilitation lorsque les services sociaux du Québec considèrent qu'il est réhabilité. Par contre, avec le projet de loi de la ministre, le jeune sera traité comme un adulte et libéré automatiquement après les deux tiers de sa sentence, qu'il soit réhabilité ou non.
La ministre comprend-elle enfin que le projet de loi empêche l'approche de réadaptation du Québec?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, ce projet de loi n'empêche pas le Québec de poursuivre la voie de la réhabilitation. Au contraire, il favorise une telle approche.
Le gouvernement fédéral octroiera des ressources additionnelles à la province du Québec pour l'aider dans son programme de réhabilitation.
* * *
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, des lézardes sillonnent de plus en plus le mur que les libéraux ont essayé de construire pour camoufler les méfaits apparents du premier ministre.
La semaine dernière, les Canadiens ont appris que, contrairement à ce qu'avait prétendu le ministre de l'Industrie, le terrain de golf du premier ministre n'était pas dans une fiducie sans droit de regard. On admet désormais que le premier ministre risquait de perdre de l'argent si la valeur de son terrain de golf viendrait à baisser. Cela soulève des soupçons légitimes concernant une apparence de conflit d'intérêts.
Pourquoi le premier ministre ne dépose-t-il pas tout simplement les documents pertinents pour que les Canadiens puissent en juger par eux-mêmes?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a donné des réponses complètes à la Chambre. Le conseiller en éthique a comparu devant le comité de l'industrie et a donné des réponses très complètes à cet égard.
La population et la Chambre sont déjà saisies de tous les aspects de cette affaire.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Balivernes , monsieur le Président! Il n'y a pas de réponses complètes, mais beaucoup de questions pointues auxquelles le premier ministre refuse de répondre.
Si des documents montrent qu'il avait vendu ses parts dans le terrain de golf ou pour combien il les a vendues ou quand il les a vendues, pourquoi ne les dépose-t-il pas pour que tous puissent en juger par eux-mêmes? Qu'a-t-il à cacher?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Le premier ministre n'a rien à cacher, monsieur le Président.
Pourquoi l'opposition revient-elle sans cesse là-dessus? Essaie-t-elle de faire oublier qu'elle a perdu les élections parce que les Canadiens ont trouvé qu'elle ne faisait preuve d'aucune clairvoyance en proposant de supprimer le régime de soins de santé et la Sécurité de la vieillesse?
C'est parce qu'elle a beaucoup de choses à faire oublier que l'opposition revient maintenant sur cette question.
* * *
[Français]
L'ALLOCATION POUR FRAIS DE CHAUFFAGE
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, hier, le secrétaire d'État aux Institutions financières internationales a déclaré que la distribution des chèques reliés au coût de l'huile à chauffage avait connu des ratés et que même des personnes décédées et des prisonniers avaient reçu des chèques.
Il a soutenu également que le gouvernement envisageait de récupérer ces sommes, notamment à partir des déclarations d'impôt.
Le ministre cautionne-t-il ces propos et ne craint-il pas que l'opération de récupération des chèques ne ressemble à l'opération de distribution, à savoir qu'elle sera mal faite, qu'elle reposera sur de mauvais critères et qu'elle risque de créer de nouvelles injustices?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à maintes reprises à la Chambre, le secrétaire d'État a dit que les fonctionnaires du ministère du Revenu national et du ministère des Finances sont en train d'étudier la situation. Il y a également des provinces qui sont impliquées. Lorsque la décision sera prise nous allons le faire savoir.
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, au point où en est rendu le gouvernement dans ce dossier, le ministre des Finances ne devrait-il pas envisager des moyens plus efficaces et plus équitables pour compenser réellement les personnes affectées par la hausse des coûts de l'huile à chauffage, plutôt que de tenter de corriger une injustice par une autre injustice?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la raison pour laquelle nous avons procédé de cette façon, c'est pour la même raison que les provinces. La façon la plus efficace, c'était de donner ces chèques aux plus démunis.
Si on avait choisi une autre option, au lieu du mois de janvier, cela aurait été cet été. Mais je dois dire qu'il fait beaucoup plus froid en janvier qu'en juillet.
* * *
[Traduction]
LE MINISTRE DES FINANCES
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est temps qu'une personne occupant les banquettes ministérielles du gouvernement libéral prenne la parole et dise la vérité sur le comportement contraire à l'éthique du premier ministre. Là d'où je viens, celui qui sait qu'un tort a été fait et qui reste silencieux à ce sujet est aussi coupable que celui qui a causé ce tort, et il devient son complice.
Il est temps que le ministre des Finances cesse de défendre, par son silence, la conduite indéfendable du premier ministre. Le ministre des Finances prendra-t-il aujourd'hui ses distances par rapport à la conduite inacceptable de son chef ou restera-t-il silencieux et fermera-t-il les yeux sur celle-ci?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député est un nouveau venu à la Chambre. Il a été...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La présidence n'arrive pas à entendre la réponse du vice-premier ministre.
L'hon. Herb Gray: Monsieur le Président, il existe un usage à la Chambre, et je pense que ce principe vaut même à l'Assemblée législative où le député servait auparavant, un usage selon lequel on doit seulement attendre des ministres qu'ils répondent à des questions relevant de leurs responsabilités administratives. En posant cette question, le député tente de présenter un tableau trompeur de la situation aux téléspectateurs qui suivent nos travaux.
Je signale que le député a fui les rangs du Parti conservateur lorsqu'il n'a pas été choisi comme chef. À mon avis, il n'a de leçon à donner à personne en la matière.
Des voix: Encore, encore!
Le Président: Je sais que de nombreux députés veulent poser des questions ou y répondre. Si nous employons le temps de cette façon, ils ne pourront pas tous le faire.
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie le vice-premier ministre de nous laisser savoir que la vérité ne s'inscrit pas dans le mandat du ministre des Finances. Ma question...
Le Président: Nous allons passer à la question suivante.
* * *
[Français]
LE SPORT AMATEUR
M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État au Sport amateur.
Est-ce que mon honorable collègue peut nous dire ce que le gouvernement du Canada entend faire afin d'aider nos athlètes à se préparer pour les Jeux d'hiver de Salt Lake City en 2002?
L'hon. Denis Coderre (secrétaire d'État (Sport amateur), Lib.): Monsieur le Président, les 27 et 28 avril prochain, le premier ministre du Canada, comme on le sait, va présider le Sommet national du sport afin de mettre en place un nouveau système sportif canadien.
Entre-temps, nous devons répondre à des besoins immédiats afin de créer des conditions propices pour que nos athlètes puissent atteindre leurs objectifs.
Aujourd'hui, j'annonce un investissement supplémentaire de 1,2 million de dollars afin que nos athlètes olympiques et paralympiques puissent réaliser leurs rêves. Appuyons tous ensemble nos athlètes et soyons-en fiers.
* * *
[Traduction]
LA SANTÉ
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, hier soir, le réseau anglais de la Société Radio-Canada a diffusé un reportage des plus alarmants, qui nous apprenait que le traitement des diabétiques canadiens à l'insuline génétiquement modifiée entraînait des répercussions particulièrement graves pour leur santé.
Au moins 121 plaintes sérieuses ayant été portées par des médecins, et je crains qu'il n'y en ait plus, il y a lieu de se demander pourquoi le ministère de la Santé ne fait rien pour ces diabétiques en danger en s'assurant que l'insuline de provenance animale est accessible et disponible chez les compagnies pharmaceutiques.
Que fera le gouvernement pour protéger la santé de ces Canadiens?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée d'avoir soulevé cette question importante. Je vais étudier la chose et lui en reparlerai dans les plus brefs délais.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, si le gouvernement est aussi préoccupé par la salubrité des aliments qu'il l'a prétendu dans l'affaire du boeuf brésilien, pourquoi alors considère-t-il non pertinente l'opinion des scientifiques responsables de la santé humaine et de la salubrité des aliments?
Le vice-premier ministre a déclaré hier qu'il n'y avait pas de mal à bâillonner les scientifiques qui ont exprimé leur point de vue à propos de la santé publique, car ils n'ont aucune responsabilité dans ce domaine.
Ces propos m'amènent à demander pourquoi les scientifiques ont été tenus à l'écart dès le début et s'ils participeront dorénavant à l'élaboration d'un système scientifique infaillible permettant de faire face à la menace potentielle que pose la maladie de la vache folle?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la députée jouirait d'une plus grande crédibilité si elle avait rapporté mes propos correctement. J'ai dit que les fonctionnaires en question ne travaillaient pas directement sur la question de l'interdiction du boeuf du Brésil.
Ils ne travaillent pas à l'Agence canadienne d'inspection des aliments, mais bien dans une section du ministère de la Santé qui ne s'occupe pas du dossier, et je crois qu'il est important de le signaler. La députée devrait réexaminer sa question à la lumière de ce fait et d'autres éléments concernant la question.
* * *
[Français]
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA
M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, dans le dossier de l'Auberge Grand-Mère, le premier ministre a les deux mains dedans.
Il s'est mal servi de sa prérogative de premier ministre en intervenant directement auprès de la Banque fédérale de développement du Canada. Il s'est mal servi de sa prérogative de premier ministre en intervenant pour changer la tête dirigeante de la BDC. Il s'est mal servi de sa prérogative de premier ministre en intervenant directement dans un dossier qui favoriserait indirectement ses intérêts personnels. Il s'est mal servi de sa prérogative de premier ministre en faisant en sorte de ne pas mettre en fiducie les actions dont il était le propriétaire jusqu'en 1999. Pourquoi?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le seul mal que je vois se trouve dans la question farfelue de l'honorable député. Le conseiller en éthique a statué à maintes reprises que le premier ministre n'avait enfreint aucune règle en la matière et qu'il avait agi dans le cadre des règles. Il n'a aucun tort.
[Traduction]
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. Est-il prêt à déposer les documents que j'ai demandés hier quant aux agences de recrutement auxquelles on a recours dans le cas de Bernie Schroder, Michel Vennat et Jean Carle?
Peut-il également confirmer que la suggestion d'avoir recours à l'agence Spencer Stuart pour l'embauche de M. Jean Carle a été faite à M. François Beaudoin au cours d'une partie de hockey par M. Jean Pelletier, chef de cabinet du premier ministre du Canada?
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La présidence doit être en mesure d'entendre la question et la réponse. C'était déjà difficile d'entendre ce qui se passait à la fin de la question et c'est maintenant devenu impossible.
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je me demandais pourquoi le chef du Parti conservateur se dérobait à sa question d'hier. Peut-être est-ce parce qu'il s'est rendu compte que sa déclaration portant sur le changement d'agence était fausse.
Il n'y a pas qu'une seule ni même deux agences de recrutement. J'en connais au moins dix auxquelles on fait appel pour divers postes à combler.
La Banque de développement du Canada ne reçoit aucune directive quand à l'agence avec laquelle elle doit faire affaire pour effectuer le recrutement. Je peux dire que c'est une chose que je ne fais pas. J'ai discuté de la question avec mon prédécesseur et ce n'était pas non plus une de ses pratiques. En ce qui touche les parties de hockey et les expéditions de pêche, je souhaite la meilleure des chances à mon collègue.
* * *
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les auteurs du livre sur l'éthique commencent à dénoncer la conduite du premier ministre.
Gordon Robertson, qui a été greffier du Conseil privé pendant 12 ans tant sous Lester Pearson que Pierre Trudeau, a dit: «Je ne fais pas confiance au gouvernement. Ce qui est arrivé à Shawinigan n'aurait jamais été trouvé acceptable selon les normes établies dans le code d'éthique de Pearson. Je suis bien placé pour le savoir. C'est moi qui ai rédigé ce code.»
Pourquoi le premier ministre accepte-t-il que les normes éthiques que doit respecter son gouvernement soient moins strictes que celles établies durant les gouvernements Pearson et Trudeau?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je pense que je vais devoir vérifier cette prétendue citation dans le contexte où elle a été prononcée. Il arrive souvent que les députés de l'opposition prennent la parole au sujet de choses comme celle qui nous occupe et qu'après vérification on se rende compte que ce qu'ils ont dit est loin d'être conforme à la réalité.
Par exemple, hier, le chef de l'opposition a dit avoir en main des documents du gouvernement québécois au sujet du déplacement de fonds d'investisseurs. Notre bureau a tenté d'obtenir des copies de ces documents. Or, le chef de l'opposition n'a pas encore produit ces copies. Je me demande pourquoi.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, M. Robertson a dit que les entourloupettes à Shawinigan ne se seraient jamais produites du temps de Lester Pearson. Il a dit: «Le premier ministre a réduit les exigences» en matière d'éthique.
Comment se fait-il que, même si la barre en matière d'éthique ne cesse d'être abaissée, le premier ministre trouve toujours le moyen de passer en dessous?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, personne ne peut descendre aussi bas que le député dans ces affirmations injustifiées. Pour ce qui est de s'abaisser, il a su établir un record inégalable.
* * *
[Français]
LES TECHNOLOGIES DE REPRODUCTION
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, hier, les scientifiques ont annoncé que le séquençage du génome humain est presque complété.
Cependant, un problème parmi de nombreux autres se pose: on sait que 99 p. 100 des gènes sont communs à l'ensemble de l'humanité, mais les entreprises privées voudraient posséder des droits sur ce séquençage.
Le gouvernement entend-il légiférer afin que les découvertes sur le génome humain soient accessibles gratuitement et universellement?
L'hon. Gilbert Normand (secrétaire d'État (Sciences, Recherche et Développement) Lib.): Monsieur le Président, la position du Canada dans ce secteur est la même que celle prise par MM. Blair et Clinton, il y a quelques mois.
Nous sommes actuellement à mettre en place nos instituts de recherche en génomique. Nous avons investi 160 millions de dollars pour Génome Canada et nous continuerons cette recherche en tant que pays ayant actuellement le plus grand support pour ce qui est de la recherche en génétique, étant le troisième au monde. La réglementation se veut une réglementation qui va suivre celle qui va au niveau de l'international.
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le gouvernement entend appuyer, auprès de la communauté internationale, la proposition de nombreux scientifiques voulant que le génome humain et son séquençage soient déclarés patrimoine de l'humanité?
L'hon. Gilbert Normand (secrétaire d'État (Sciences, Recherche et Développement) Lib.): Monsieur le Président, je répète ce que je viens de dire: la position du Canada au sujet de la propriété des gènes est la même que celle adoptée par MM. Clinton et Blair.
Nous n'accepterons pas de propriété privée en ce sens, et la réglementation qui suivra à l'échelle internationale se fera conjointement avec tous les pays du G8.
* * *
[Traduction]
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je vous cite les paroles du conseiller en éthique. «Nous ne cherchons pas à prendre des coupables. Ce que nous faisons, c'est conseiller les gens au cours des 120 jours suivant leur élection de sorte que nous puissions prendre ensemble les mesures qui garantiront qu'il n'y a pas de conflits d'intérêts.»
Je voudrais demander à un de mes brillants vis-à-vis ce qui se passe si les infractions au code d'éthique et les conflits d'intérêts surviennent après 120 jours, comme dans le cas du premier ministre.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. S'il y a des éclairs de génie, nous voulons les entendre. Le vice-premier ministre.
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, merci de confirmer que, de temps à autre, je suis encore capable d'éclairs de génie et que je ne fais pas que cracher la cendre comme le député.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, au Canada, on sait reconnaître un éclair de génie. Le conseiller en éthique aurait déclaré qu'il a contribué à persuader le premier ministre de renoncer à la promesse faite pendant la campagne électorale libérale, à savoir que le conseiller en éthique ferait rapport au Parlement. Il a également déclaré qu'il craignait qu'un conseiller en éthique indépendant amoindrisse le devoir d'imputabilité du premier ministre.
Si le premier ministre viole le code d'éthique, à qui devra-t-il rendre des comptes? Au conseiller en éthique? Au Cabinet? À quelqu'un en face? À qui doit-il rendre des comptes au juste?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre doit rendre des comptes au Parlement et, par l'intermédiaire du Parlement, au peuple canadien, qui lui a donné trois majorités consécutives, la majorité obtenue lors des dernières élections étant encore plus forte que les précédentes. Cela est très révélateur.
* * *
LE COMMERCE
Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, l'année dernière le monde a été témoin des protestations et des émeutes qui ont eu lieu à Seattle. Le gouvernement s'est alors engagé à montrer plus d'ouverture et de transparence dans les négociations commerciales.
À l'approche du Sommet des Amériques qui aura lieu à Québec en avril, le gouvernement peut-il nous dire en termes concrets ce qu'il entend faire pour assurer une plus grande ouverture et une plus grande transparence?
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a convenu d'engager un processus ouvert et transparent en vue d'un accord de libre-échange des Amériques.
Le gouvernement recherche activement la participation des ONG ainsi que de tous les intervenants et de tous les Canadiens intéressés. Tous les jours, nous recevons des propositions par la poste et des commentaires par courrier électronique. Le gouvernement se donne beaucoup de mal afin d'assurer que la position que nous suivrons lors des négociations reflètera le point de vue des Canadiens.
* * *
L'INFRASTRUCTURE
M. Ted White (North Vancouver, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le sud-ouest de la Colombie-Britannique est en proie à une crise de l'infrastructure des transports, mais le gouvernement continue de prélever en Colombie-Britannique 360 millions de dollars par an en taxes sur l'essence. C'est plus de cinq fois le budget annuel de la province pour les routes.
Comment le ministre des Transports peut-il justifier cette razzia fiscale de 360 millions de dollars, alors qu'il ne consacre pas un cent de ces recettes aux routes de la Colombie-Britannique?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député sait que le gouvernement, pas plus que n'importe quel autre gouvernement, ne peut appliquer un système de recettes fiscales réservées à des fins particulières.
Si le député regarde ce qui s'est passé ces sept dernières années, il constatera que le gouvernement a consenti des investissements considérables, qu'il s'agisse de la Fondation canadienne pour l'innovation ou du crédit national d'impôt pour enfants. Les universités de la Colombie-Britannique ont reçu beaucoup d'argent. Dans l'ensemble des domaines, nous avons réinvesti des montants énormes dans cette province, et nous continuerons de le faire.
M. Ted White (North Vancouver, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le tableau des dépenses consacrées au réseau routier dans tout le Canada donne une autre image. Le Programme routier national du ministre tombe toujours en panne avant d'atteindre la Colombie-Britannique.
En 2001, sur un budget de 110 millions de dollars, pas un dollar, pas un cent ne va à la province. À partir de maintenant, la Colombie-Britannique réclame sa juste part.
Quand le ministre va-t-il honorer ses obligations et rétablir le plein financement, la juste part de la Colombie-Britannique, pour les routes de la province?
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le député oublie manifestement que, l'an dernier, le ministre des Finances a prévu dans son budget 2,65 milliards de dollars sur six ans pour l'infrastructure, dont 600 millions de dollars pour les routes nationales et plus particulièrement pour les passages frontaliers, ce qui comprend ceux qui sont situés au sud de la région de Vancouver.
Le gouvernement fait beaucoup pour atténuer la crise des transports au Canada, et il fera encore davantage.
* * *
[Français]
LE SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA
Mme Pierrette Venne (Saint-Bruno—Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, déjà dans son rapport de 1998, l'enquêteur correctionnel du Canada qualifiait de discriminatoire l'incarcération de femmes dans des prisons pour hommes.
Pourtant, selon son dernier rapport déposé hier, le même enquêteur constate que cette pratique est à la hausse et que les correctifs tardent à venir.
Sachant que le Service correctionnel du Canada n'est nullement obligé de tenir compte des recommandations de l'enquêteur, quelles mesures le solliciteur général entend-il prendre pour que ces recommandations ne demeurent pas lettre morte?
[Traduction]
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a pris un certain nombre de mesures en ce qui a trait aux délinquantes, telles que la fermeture du pénitencier de Kingston, qui représente à mon avis un geste très important.
En outre, nous avons des établissements à sécurité minimale ou moyenne partout au pays pour accueillir des détenues. Nous sommes en voie de construire des prisons à sécurité maximale à l'intérieur de ces établissements à sécurité minimale ou moyenne, afin d'y loger les détenues à sécurité maximale.
* * *
LES DROITS DE LA PERSONNE
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la secrétaire d'État au Multiculturalisme. Les statistiques montrent que 43 p. 100 des victimes de crimes haineux attribuent à leur race ou à leur origine ethnique les crimes dont elles ont été l'objet.
Elles révèlent également que les risques de victimisation sont plus élevés chez les personnes nées en dehors du Canada, et encore davantage pour les membres des minorités visibles et les jeunes gens. Que fait la secrétaire d'État pour combattre le racisme, la discrimination et les crimes haineux au Canada?
L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, la montée du racisme et de la criminalité haineuse au pays, surtout depuis qu'on se sert d'Internet pour cibler les jeunes, nous inquiète vivement.
J'ai rencontré des milliers de gens un peu partout au pays afin d'élaborer un plan fédéral visant à réduire les crimes haineux, le racisme et la discrimination.
Une conférence des Nations Unies est prévue pour le mois d'août. Nous profiterons de l'occasion pour faire connaître ce que propose le Canada pour régler ces questions, car il s'agit de l'une des principales sources de conflits dans le monde d'aujourd'hui.
* * *
LA RÉFORME PARLEMENTAIRE
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier le premier ministre a déclaré en Chine que la présence de guerriers en terre cuite à la Chambre des communes serait formidable, car ils sont déjà debout pour voter.
Il est clair qu'il n'a pas besoin de guerriers en terre cuite, puisqu'il s'est déjà assuré le même niveau de collaboration de la part de son caucus.
Pourquoi le premier ministre refuse-t-il d'autoriser son caucus à voter pour les réformes démocratiques qui s'imposent à la Chambre des communes?
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, des améliorations très importantes ont été apportées au Règlement ces dernières années. Le gouvernement a promis d'autres améliorations dans le discours du Trône. Nous avons également entendu l'excellent discours du premier ministre dans lequel il a pris ces engagements.
Je vais consulter les leaders à la Chambre des autres partis. J'ai hâte qu'on améliore vraiment la procédure à la Chambre des communes, ce qui ne devrait pas tarder, j'espère.
* * *
QUESTION DE PRIVILÈGE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE—DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE
Le Président: La présidence va maintenant traiter de la question de privilège soulevée par le député de Sarnia—Lambton le 6 février 2001. La question de privilège concernait le départ de la Chambre des communes de deux conseillers législatifs qui ont témoigné le printemps dernier devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
Le député a fait valoir que les témoins avaient demandé et obtenu l'assurance du comité que leurs témoignages seraient protégés et qu'ils seraient eux-mêmes à l'abri de représailles pour avoir témoigné. Il estimait que le départ des deux conseillers est lié directement à leurs témoignages et qu'il y a de ce fait matière à question de privilège.
[Français]
Avant de poursuivre mon examen, j'aimerais remercier le député de Sarnia—Lambton et tous les députés qui ont participé à la discussion. J'aimerais en particulier attirer l'attention sur les interventions du leader de l'opposition à la Chambre, le député de Fraser Valley, le whip du Bloc québécois, le député de Verchères—Les-Patriotes, le leader du Parti progressiste-conservateur à la Chambre, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough et le député de Pickering—Ajax—Uxbridge.
Dans son intervention, le député de Sarnia—Lambton a retracé la chronologie des événements qui se sont produits à la suite des témoignages des deux conseillers législatifs devant le Comité et a suggéré que cette chronologie est la preuve que ce qu'il appelle un «congédiement brutal» de la Chambre des communes est une conséquence directe de leurs témoignages. C'est pourquoi le député estime qu'il y a présomption d'atteinte aux privilèges.
Je tiens d'abord à préciser que je prends cette question très au sérieux. L'allégation, si elle est fondée, comporte des implications sérieuses non seulement pour les deux intéressés, mais aussi pour l'intégrité du système des comités de la Chambre, ainsi que pour la réputation de la Chambre comme employeur juste et équitable.
[Traduction]
Par ailleurs, pour ma part, je suis conscient que dans cette décision je tiens deux rôles différents. En tant que Président de la Chambre, je dois déterminer si le député de Sarnia—Lambton a présenté des arguments convaincants pour établir qu'il y a effectivement matière à question de privilège. Et en tant que président du Bureau de régie interne, qui se trouve à être l'employeur, je suis tenu de respecter la confidentialité des discussions du Bureau de régie interne, en particulier en ce qui concerne les questions de relations de travail qui, par leur nature même, sont entièrement confidentielles.
Cette affaire est particulièrement complexe, car il s'y mêle une question de privilège et une situation compliquée de relations de travail qui date d'avant l'invitation à témoigner devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. S'ajoute à cette situation déjà difficile toute la question de la dotation des postes de conseillers législatifs, sur laquelle bon nombre de députés ont des opinions bien arrêtées. Je vais donc tenter de concilier les divergences d'opinions dans ce cas.
En tant que Président de la Chambre, il est de mon devoir de me faire le gardien des droits et privilèges des députés et de l'institution qu'est la Chambre. Dans la mesure où les privilèges parlementaires s'étendent aux témoins, je me dois aussi de protéger leurs droits et privilèges.
Ainsi, j'aimerais d'abord examiner la question de l'intimidation de témoins comparaissant devant un comité parlementaire. Il est clairement précisé aux pages 862 et 863 du manuel de Marleau-Montpetit intitulé La procédure et les usages de la Chambre des communes que le principe des privilèges parlementaires s'étend aux témoins qui se présentent devant un comité parlementaire. Je cite:
Les témoins qui comparaissent devant un comité jouissent de la même liberté de parole que les parlementaires et de la même protection contre l'arrestation et la brutalité.[...] Le fait de soudoyer un témoin ou de chercher de quelque manière que ce soit à le décourager de témoigner à une séance de comité peut constituer une atteinte au privilège. De même, toute intervention auprès de témoins qui ont déjà présenté leur déposition ou toute menace dirigée contre eux peuvent être traitées par la Chambre comme des atteintes au privilège.
[Français]
Dans l'affaire qui nous intéresse, le député de Sarnia—Lambton a retracé la chronologie des événements et, sur la base de cette chronologie, il avance qu'il y a une relation de cause à effet entre les témoignages des deux conseillers législatifs devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre et leur départ subséquent de la Chambre. Le député signale que les deux témoins avaient demandé et obtenu du Comité l'assurance qu'ils seraient protégés par le privilège parlementaire en cas de représailles par suite de leurs témoignages. Il prétend qu'on aurait fait fi de cette protection et il soutient qu'il y a matière à question de privilège.
[Traduction]
Je n'ai pas l'intention de passer en revue la chronologie des événements présentés, mais je tiens à préciser, avec respect, qu'elle est incomplète. Comme peut le révéler un examen des témoignages des deux conseillers législatifs devant le Comité, la relation entre l'employeur et ces employés était déjà, à ce moment, dans un état de détérioration avancé. Si leur comparution devant le Comité était le seul facteur à prendre en compte dans l'examen de cette affaire, il pourrait certes y avoir un argument convaincant pour conclure qu'il s'agit d'un cas de représailles.
Or, la situation est un peu plus complexe. Au moment où les témoignages ont été présentés le printemps dernier, la relation employeur-employé était déjà caractérisée par l'aigreur et la récrimination. Le conflit entre ces conseillers législatifs et la direction durait depuis longtemps et persistait toujours. Il y avait en fait plusieurs questions qui faisaient l'objet de plaintes au moment où les conseillers législatifs ont comparu devant le Comité. Compte tenu de ces circonstances, la présidence doit conclure qu'il n'y a pas matière à question de privilège.
La présidence tient à porter à l'attention de tous les députés l'intervention judicieuse du leader de l'opposition officielle à la Chambre qui a précisé qu'il fallait éviter de porter un jugement hâtif en n'ayant entendu qu'un seul point de vue dans ce conflit. À la page 309 des Débats, il a affirmé:
Cependant, je vois d'un mauvais oeil qu'on soulève des questions de personnel à la Chambre des communes. [...] Lorsque ces deux employés de la Chambre ont comparu devant le comité permanent et ont demandé la protection de la Chambre, nous ne savions pas à l'époque qu'il y avait des «griefs en instance» entre la direction et les employés [...] En fin de compte, on nous a répété les problèmes qui se posaient et que nous ne pouvions régler faute d'avoir tous les faits en main. [...] Nous ne devrions pas traiter un processus de règlement des griefs à une tribune publique, à un comité, ou sur le parquet de la Chambre des communes.
Le leader de l'opposition à la Chambre, comme tous les autres membres du Bureau de régie interne—et je rappelle aux députés que je faisais également partie de ce bureau lors de la dernière législature au cours de laquelle cette question a été soulevée—étaient légalement tenus de respecter la confidentialité des discussions sur cette question et toute autre question. Toutefois, nous estimons tous que nous avons une responsabilité particulière à l'égard des relations de travail qui, par leur nature même, doivent demeurer entièrement privées et confidentielles.
Pour traiter cette situation malencontreuse, le Bureau de régie interne s'est inspiré des principes habituels de gestion des ressources humaines et, pour trouver une solution, nous n'avons ménagé aucun effort pour tenter d'en arriver à un règlement juste et équitable avec les parties. Dans l'un des deux cas, un tel règlement a heureusement été possible. Dans l'autre cas, cependant, nous n'avons pu en arriver à une entente et la personne tente maintenant d'obtenir réparation auprès d'un tribunal indépendant, la Commission des relations de travail dans la fonction publique. Bien qu'une affaire devant la CRTFP ne soit pas, à proprement parler, sous la considération d'un tribunal judiciaire, je recommanderais que nous n'intervenions pas dans ce processus et que nous laissions la Commission en arriver à ses propres conclusions en temps opportun.
[Français]
De nombreux députés ont été employeurs dans leur vie professionnelle avant d'être élus à la Chambre. Tous les députés sont actuellement eux-mêmes employeurs du personnel qui est à leur service dans leur bureau sur la Colline ou dans leur bureau de circonscription.
Je sais que les députés comprendront, d'après leur propre expérience, que la situation la plus difficile et souvent la plus délicate à laquelle un employeur doit faire face est de traiter avec des employés avec lesquels il y a des incompatibilités insurmontables.
[Traduction]
Le Parlement a défini la relation employeur-employé qui doit exister à la Chambre des communes. Les relations de travail sont régies par des lois—la Loi sur le Parlement du Canada et la Loi sur les relations de travail au Parlement—par des conventions collectives avec des agents négociateurs et, dans le cas présent, par des usages assimilables aux normes professionnelles applicables aux conseillers juridiques de l'administration publique fédérale. Dans ce contexte de travail, les employés ont le droit de porter plainte et de se prévaloir du processus de grief qui comprend le droit de porter l'affaire devant la Commission des relations de travail dans la fonction publique. Les intéressés ont aussi le droit d'obtenir réparation auprès des tribunaux.
À titre d'employeur officiel à la Chambre, le Bureau de régie interne est toujours conscient de ses responsabilités lorsqu'il lui faut traiter des questions touchant les employés en général ou des cas particuliers d'employés. En ma qualité de président du Bureau de régie interne, j'ai la responsabilité d'assurer l'intégrité du régime des relations de travail et le bon déroulement des procédures établies.
Par conséquent, après un examen attentif de tous les faits, je conclus que toute ingérence dans le système de garanties existantes—qu'elles soient prévues par la CRTFP ou les tribunaux—par le biais d'audiences spéciales de députés à la Chambre ou en comité, constitue, à mon avis, une tentative en vue de compromettre l'intégrité du cadre des relations de travail qui a été créé par une décision du Parlement.
En dernier lieu, j'aimerais dire quelques mots au sujet de la nécessité d'accroître les ressources au sein du Bureau du légiste et conseiller parlementaire. Comme l'ont indiqué les présidents précédents, il s'agit là d'une question administrative fondamentale qui doit, à ce titre, être réglée par le Bureau de régie interne.
En particulier, j'attire votre attention sur la décision rendue le 23 octobre 1997 au sujet d'une question de privilège semblable soulevée par le député de Sarnia—Lambton. Mon prédécesseur, le président Parent, a déclaré ce qui suit à la page 1003 des Débats:
Au moment de traiter de questions similaires, mes prédécesseurs ont, à plusieurs reprises, indiqué que celles-ci devraient être portées à l'attention du Bureau de régie interne et qu'elles ne devraient pas être soulevées sur le parquet de la Chambre à titre de rappel au Règlement ou de question de privilège.
[Français]
J'attache une très grande importance aux préoccupations qu'ont bon nombre de députés au sujet de la question des conseillers législatifs et je tiens à répéter que ces préoccupations ont été portées à l'attention du Bureau de régie interne et que le suivi nécessaire est assuré.
[Traduction]
En résumé, la présidence conclut donc qu'il n'y a pas matière à question de privilège dans le cas présent. J'espère avoir réussi à faire la lumière sur ce concours de circonstances complexes et malencontreuses, tout en protégeant la confidentialité des renseignements qui m'ont été confiés en ma qualité de membre du Bureau de régie interne.
En terminant, j'aimerais recommander à tous les députés de faire preuve de prudence lorsqu'ils traitent de questions touchant les relations de travail. Si nous jugeons que les procédures établies pour obtenir réparation ou redressement sont insuffisantes, n'hésitons pas à trouver ce qui fait défaut dans les garanties existantes et à y apporter les correctifs nécessaires. Toutefois, exerçons la plus grande prudence lorsqu'on nous demande d'intervenir à titre d'arbitre ad hoc dans des cas particuliers.
Je remercie les députés de leurs interventions et de leur collaboration dans cette importante affaire.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi et le Règlement sur l'assurance-emploi (pêche), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Monsieur le Président, avant d'aborder la mesure à l'étude, je voudrais vous féliciter de votre élection à la présidence. Je crois que vous êtes le troisième Président élu de notre histoire.
Je voudrais également profiter de l'occasion pour remercier les électeurs d'Egmont de m'avoir élu pour la quatrième fois lors des dernières élections générales. Comme nous sommes entrés à la Chambre en même temps, monsieur le Président, nous devons donc avoir fait quelque chose de bien pour nos électeurs.
C'est la quatrième fois que les gens d'Egmont votent pour moi. C'est avec humilité et reconnaissance que je les remercie de m'avoir accordé l'honneur de les représenter. La circonscription d'Egmont s'étend depuis la nouvelle ville de Summerside à l'est et couvre tout l'ouest de l'île jusqu'à North Cape. Exception faite de l'industrie aérospatiale à Summerside, la plupart des industries de la circonscription d'Egmont ont un caractère saisonnier.
La circonscription constitue un centre de pêche très important dans la région de l'Atlantique; elle compte 12 ports pour petits bateaux et une industrie du homard très lucrative. L'agriculture est un élément très important de l'économie de la circonscription grâce à ses excellentes terres productrices de pommes de terre et ses secteurs de production laitière et d'élevage du porc. L'exploitation forestière y joue un rôle plus modeste mais essentiel. Le tourisme constitue un élément de plus en plus important de l'économie d'Egmont. Le secteur de la construction y joue également un rôle essentiel.
Le programme de l'assurance-emploi est vital pour les gens de ma circonscription car la plupart des industries qui s'y trouvent sont de nature saisonnière. Elles ont besoin de ce programme pour survivre.
Comme je le disais plus tôt, je suis ici depuis 12 ans et j'ai suivi l'évolution de ce dossier, le débat AE-AC, du temps du gouvernement conservateur précédent et de notre propre projet de loi sur l'AE. Maintenant, en tant que membre nouvellement nommé du Comité permanent du développement des ressources humaines, je vais voir de plus près à ce que le programme devienne plus sensible aux besoins des Canadiens.
J'ai entendu des gens dire qu'il était malheureux qu'on impose l'attribution de temps pour faire adopter ce projet de loi par la Chambre, même après les deux dernières élections fédérales qui étaient centrées, entre autres, sur l'assurance-emploi. À chaque fois, les Canadiens ont reporté les libéraux au pouvoir. Ils doivent préférer notre concept de l'assurance-emploi aux propositions des conservateurs, de l'Alliance, du Bloc québécois ou des néo-démocrates.
Les gens des Maritimes se sont fait dire que les Canadiens de l'Atlantique devraient peut-être aller là où se trouvent les emplois. Les gens les plus mobiles au Canada sont les gens du Canada atlantique. Par exemple, quand on va dans les champs pétroliers de l'Alberta, on s'aperçoit que la plupart des travailleurs viennent des Maritimes. Quand on va à Fort McMurray, on s'aperçoit que plus de la moitié de la population de cette ville est originaire de Terre-Neuve et d'autres régions du Canada atlantique.
De tout temps, nous sommes allés là où il y avait du travail, et ce, depuis la Confédération, que ce soit dans les États de Boston, comme nous les appelons, ou à Toronto quand il y avait des possibilités d'emploi dans cette ville, ou à Vancouver du temps où il y avait du travail là-bas, ou en Alberta où se trouvent aujourd'hui les possibilités d'emploi.
Dans ma province, je connais des gens qui travaillent dans les industries saisonnières. Dans le secteur de la pêche, par exemple, les travailleurs pêchent au printemps et en été. Pendant le reste de l'année, ils vont travailler en Alberta. Ensuite, ils retournent au Canada atlantique occuper les emplois qui les ont vus grandir comme fils de pêcheurs, espérant qu'un jour ils pourront remplacer leurs parents dans le secteur des pêches.
Les détracteurs du gouvernement prétendent que le contenu du projet de loi C-2 représente un recul par rapport aux réformes présentées en 1996. Rien ne pourrait être plus faux. Le gouvernement a promis que, si un processus de contrôle révélait que les changements ne produisaient pas les effets escomptés, il modifierait la loi. C'est ce qu'il fait aujourd'hui. Nous avons constaté que le projet de loi adopté à la Chambre il y a quelques années comportait certains défauts. Nous prenons des mesures pour les corriger.
À l'époque où le gouvernement est arrivé au pouvoir, on était généralement d'avis qu'il fallait remplacer le régime d'assurance-chômage. Il ne correspondait pas à la nouvelle économie du XXIe siècle. Après bien des consultations auprès des Canadiens et malgré les protestations outrées de l'opposition, dont certains représentants ne voulaient aucun régime d'AE et d'autres voulaient un revenu annuel garanti, le gouvernement a proposé de remplacer l'ancien régime par le régime d'assurance-emploi.
Ce nouveau régime devait être durable et plus juste, favoriser le travail, réduire la dépendance à l'égard des prestations, aider ceux qui en avaient le plus besoin et aider les travailleurs à retourner au travail et à y rester. Il a été instauré même si l'on savait que, étant nouveau, il ne serait pas parfait. Nous savions qu'au fil des mois nous découvririons des aspects de ce régime qu'il faudrait améliorer. La mesure législative nous a permis de contrôler et d'évaluer continuellement le régime pendant un certain temps et de mesurer son impact sur les gens, les collectivités et l'économie.
Ce n'est pas la première fois qu'il est nécessaire d'apporter des ajustements au régime d'AE. Le gouvernement a agi rapidement en 1997 en lançant un projet de petites semaines afin de corriger une situation qui dissuadait des gens de travailler pendant des semaines qui leur rapportaient de faibles revenus.
En tant que député de la région, j'ai découvert le point faible d'entreprises de calibrage de pommes de terre qui étaient incapables de recruter des travailleurs. Si des gens acceptaient de travailler dans des entrepôts de pommes de terre pendant un, deux ou trois jours de la semaine, leurs prestations s'en trouvaient réduites de moitié. De toute évidence, cette situation dissuadait les gens de travailler. Nous avons agi immédiatement pour la corriger.
Nos études et nos discussions avec les Canadiens ont montré que de nombreuses parties du programme d'assurance-emploi fonctionnent bien. Certaines dispositions se sont révélées inefficaces, particulièrement envers les travailleurs saisonniers. Nous avons toujours eu et nous aurons toujours des industries saisonnières au Canada. Ces industries revêtent une importance vitale pour la santé de notre économie.
Dans le seul comté de Prince, dans l'Île-du-Prince-Édouard, 65 p. 100 de la population active travaille moins de 12 mois par année. Je suis offensé par quiconque laisse entendre que ces modifications permettront tout simplement aux industries de rentabiliser leurs activités en se préparant pour une saison courte. À mon avis, les entreprises saisonnières qui sont rentables lorsque leurs activités sont d'une durée aussi courte ont beaucoup de chance.
Il conviendrait de noter que la saisonnalité est déterminée par une force bien supérieure. Si la nature ne collaborait pas, ces entreprises ne pourraient plus être rentables, et l'existence même de bon nombre d'entre elles serait mise en jeu.
En ce qui concerne les employés, si le programme d'assurance-emploi n'existait pas, que feraient-ils, sans aucun revenu, pour subvenir aux besoins de leurs familles? Nous parlons de ce que vivent les travailleurs saisonniers de tout le Canada, et non seulement de la région de l'Atlantique. Les travailleurs de ces industries n'étant forcément embauchés qu'une partie de l'année, nous devons nous assurer que les programmes économiques et sociaux n'empêchent pas ces gens de vivre et de travailler.
L'assurance-emploi vise à aider tous les chômeurs, mais il ne faut pas oublier que certains groupes, notamment les travailleurs saisonniers, ont des besoins particuliers, et le programme comporte des dispositions spéciales à leur intention.
Par exemple, le système fondé sur le nombre d'heures tient compte du fait que les travailleurs saisonniers effectuent souvent de nombreuses heures de travail par semaine. Cela permet même à une partie de la main-d'oeuvre qui occupe un emploi à temps partiel à longueur d'année d'être admissible aux prestations. Par exemple, un employé qui occupe un emploi saisonnier peut accumuler un nombre moindre d'heures durant la période pré et post-saisonnière, afin d'être admissible aux prestations, ce qui n'était pas le cas précédemment.
Comme je l'ai déjà dit, le programme d'assurance-emploi vise notamment à réduire la dépendance de tous les travailleurs canadiens, y compris les travailleurs saisonniers, à l'égard des prestations. La soi-disant règle d'intensité avait précisément été adoptée pour dissuader le recours aux prestations d'assurance-emploi en réduisant le montant des prestations aux prestataires qui faisaient souvent appel au régime.
De nombreux travailleurs saisonniers n'ont d'autre choix que d'avoir recours aux prestations d'assurance-emploi, puisqu'il n'y a pas suffisamment de possibilités d'emplois hors saison. C'est pourquoi le projet de loi C-2 propose d'abroger la règle d'intensité. L'abolition de cette règle permettra de redonner aux Canadiens jusqu'à 988 $ pour une période de 26 semaines et 1 710 $ pour une période maximale de 45 semaines. Dans le cas d'une période maximale de prestations de 26 semaines, les prestataires ne recevraient que 40 $ de plus par semaine, une fois la règle d'intensité abolie. Ce montant peut sembler peu élevé, mais il représente un pourcentage important du revenu d'une personne qui gagne 200 $ par semaine.
J'invite tous les députés à appuyer ce programme et à adopter ces mesures le plus rapidement possible, dans l'intérêt de tous les travailleurs saisonniers au Canada.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ce projet de loi est honteux. Oui, il comporte des améliorations timides à cette soi-disant réforme dont on a commencé à parler en 1994. Cette réforme nous a fait passer d'un régime d'assurance-chômage, qui avait certes besoin d'être revu mais pas transformé ni réduit, ravalé à un régime qui, en fait, a permis au gouvernement de s'enrichir et aux gens qui en avaient besoin de s'appauvrir.
Ce projet de loi, pas celui que nous vivons, mais celui qui est devenu la loi de la soi-disant réforme de l'assurance-chômage, s'appelait le nouveau régime assurance-emploi, au mépris complet de la réalité de ce qui se passe.
Oui, le taux de chômage a diminué. Si le taux de chômage a diminué, c'est largement parce que l'économie canadienne a été tirée par l'économie américaine. Toutefois, les chômeurs, qui ont continué à souffrir de ne pas pouvoir avoir un emploi décent ou permanent, ont été bien malmenés par ce mauvais régime d'assurance-emploi.
Il faut que les citoyens comprennent que le gouvernement présente à la Chambre un projet de loi où il y a de timides améliorations à des coupures, qui n'auraient jamais dû être faites, qui totalisent environ 8 p. 100 des prestations versées.
D'autre part, en se servant de ses timides améliorations comme d'un autobus, qu'est-ce que le gouvernement veut surtout faire passer? C'est son projet de mainmise définitive sur la caisse, où ont été accumulés près de 36, 37 ou 38 milliards de dollars—on saura le chiffre définitif bientôt—prélevés sur le salaire des travailleurs et travailleuses et sur les revenus des entreprises.
Je tiens à répéter que ces cotisations sont payées jusqu'à concurrence de 39 000 $ gagnés et 39 000 $ payés par les entreprises. Au-delà de cela, on ne paie plus de cotisation à l'assurance-emploi. Cela veut dire que les 37 ou 38 milliards de dollars, qui ont complètement servi à essuyer le déficit, ont été fournis et payés par des gens à faible et moyen revenu et surtout par les PME.
Ils ont été payés surtout par ces gens-là. Ceux et celles qui gagnent un salaire plus élevé paient un pourcentage bien moindre, comme les entreprises à forte intensité de capital, qui paient aussi de gros salaires, se trouvent à payer une partie bien moindre de leur revenu.
Que le gouvernement mette la main définitivement là-dessus, qu'il tasse la Commission dans la recommandation et dans la décision—parce que c'était supposé être cela qui se passait—de détermination du niveau des cotisations, c'est une infiniment mauvaise nouvelle qui alimente le cynisme.
Qu'est-ce qui, pour les citoyens, a l'air de mieux garantir que l'argent servirait à des fins précises que celle où, sur le chèque de paie, on inscrit: «assurance-chômage», «montant prélevé aux fins de l'assurance-chômage»?
Or, depuis que l'assurance-emploi est en vigueur, le nombre de chômeurs couverts qui ont pu avoir droit à des prestations d'assurance-chômage a diminué radicalement, de la moitié environ. Mais ce qui est encore pire, c'est que parmi les personnes touchées, ce sont les jeunes qui l'ont été davantage.
J'ai entendu dire ici, dans de grands élans oratoires, qu'il faut que les jeunes aient des emplois. Oui, absolument. Sauf que le régime d'assurance-emploi est fait pour assurer qu'entre deux emplois, on ne soit pas obligé de dépendre de l'aide sociale ou d'accepter n'importe quoi parce qu'on a absolument besoin d'argent. Ce n'est pas comme ça que les jeunes se préparent un avenir, d'aucune espèce de façon.
Ce projet de loi va ramener le revenu des travailleurs saisonniers au même niveau que celui de tous les chômeurs. Bravo! Il le fallait. Nous avions beaucoup protesté, à l'époque, parce que le projet de réforme de l'assurance-chômage comportait cette pénalité pour les travailleurs saisonniers. Mais nous savons aussi que cela n'a pas été fait par hasard et que le gouvernement a refusé d'écouter, non seulement les gens concernés, mais ceux qui travaillaient avec les travailleurs saisonniers dans ces régions.
Nous savions, nous, qui étions membres du Comité permanent du développement des ressources humaines, à l'époque, qu'à la Direction de l'assurance-chômage du Canada, on visait les travailleurs saisonniers. On pensait qu'en les pénalisant, on les forcerait à déménager.
Ce ne sont pas tous les travailleurs et travailleuses de Terre-Neuve, par exemple, qui veulent déménager. J'en ai entendu, des femmes et des hommes, dire qu'ils tenaient à ce que leurs enfants puissent être élevés dignement sur cette terre qui est la leur. Or, ce qu'on voulait faire, en haut lieu, c'était de forcer les gens à déménager, à aller chercher l'emploi où il était.
Dans ce projet de loi, il y a de timides améliorations concernant l'accès au régime pour les femmes qui vont accoucher. Mais il y a des trous béants.
Je regrette de dire que le principal problème de ces travailleurs saisonniers, ce n'est pas que leurs prestations soient passées de 55 p. 100 à 50 p. 100 de leur salaire, ce qui est grave, c'est la réduction du nombre de semaines qui les conduit, pendant 4, 5, 6, 7 semaines, au «trou noir», comme ils disent dans le coin, parce qu'ils n'auront plus de revenu du tout. Ce qui a pénalisé davantage les travailleurs saisonniers, c'est la réduction du nombre de semaines. Et ce projet de loi ne touche à rien de cela.
Pour ce qui est des femmes qui vont accoucher et qui veulent se servir du régime, est-ce qu'on a ramené l'accès à un nombre décent de semaines de travail nécessaires? La réponse est non, pas une miette. Le régime, qui a été ramené à 600 heures, va toujours comporter cette même exigence qui fait que plusieurs travailleuses sont complètement exclues et je n'ai pas parlé des travailleuses autonomes.
Ce projet de loi, qui comporte de timides améliorations, laisse des trous béants et, surtout, autorise le gouvernement à mettre la main sur de l'argent qui ne lui appartient pas. Le gouvernement devrait au moins convenir qu'il est en dette envers la population afin que, à l'avenir, si nous avons besoin de cet argent parce que la récession peut nous rejoindre, il soit à la disposition des travailleurs et des travailleuses. Notre proposition est de faire une vraie réforme maintenant.
[Traduction]
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je vais dire quelques mots du projet de loi, qui aura certainement une incidence plus grande sur les régions rurales que sur les villes plus riches, et peut-être plus grande aussi sur des régions comme le Canada atlantique et certains secteurs du Québec que sur d'autres régions du Canada.
Le projet de loi propose quelques changements qui sont considérés comme constructifs, notamment l'élimination de la règle de l'intensité; désormais, les prestataires pourront toucher 55 p. 100 de leur salaire régulier. En soi, cela est un peu trompeur, et je vais m'expliquer là-dessus tout à l'heure.
Il est certes intéressant que, après être resté à la maison un certain temps après la naissance des enfants, le père ou la mère puisse réintégrer le marché du travail sans être considéré comme un nouveau venu. Les changements mineurs concernant la récupération seront aussi avantageux pour certains hauts salariés.
Toutefois, ceux qui sont les plus concernés par l'assurance-emploi sont ceux à qui le projet de loi n'apporte aucun soulagement.
Le projet de loi aurait dû traiter de trois problèmes, mais il n'en a pas tenu compte. Premièrement il y a la règle du dénominateur. Il est déjà assez déplorable qu'une personne qui, généralement, vit et travaille dans une région où les emplois sont rares et les salaires souvent peu élevés, doive recourir à l'assurance-chômage, en sachant qu'elle recevra au départ 55 p. 100 de son salaire normal.
Si la règle de l'intensité n'avait pas été modifiée, les prestataires auraient touché des prestations qui auraient diminué d'année en année. Toutefois, outre le fait qu'ils ne touchent que 55 p. 100 de leur rémunération, ils constatent que ce n'est pas leur semaine de travail qui sert à établir le revenu total. Il y a, selon nous, exagération du nombre de semaines. La règle du dénominateur signifie qu'une personne obtenant 12 semaines, ou 420 heures, au moment où le montant d'argent que cette personne devrait recevoir est intégré dans l'équation, le revenu total est divisé par 14. La personne reçoit donc beaucoup moins que les 55 p. 100 que l'on fait miroiter. Cette règle est tout à fait inéquitable et aurait dû être éliminée.
Le deuxième sujet de préoccupation est lié au minimum de 420 heures dans les régions à chômage élevé et au minimum de 520 heures dans les régions à faible chômage.
Il y a dans le pays des îlots entièrement tributaires de l'emploi saisonnier. Les gens qui y habitent s'en tirent assez bien à l'occasion. Il peut y avoir une pêche exceptionnelle, une bonne période de construction ou une excellente année dans le domaine de l'exploitation forestière. C'est cependant l'exception plutôt que la règle ces dernières années pour diverses raisons.
La mauvaise gestion des pêches, et peut-être pourrions-nous ajouter de nos ressources forestières dans une certaine mesure, a mené à une situation où l'emploi est très rare. Le manque d'intérêt concernant la transformation des captures signifie qu'une bonne partie de nos ressources quitte nos provinces et notre pays sous forme de produits non transformés ou semi-transformés.
C'est donc dire qu'il y a moins de travail pour les personnes en cause. L'année dernière à Terre-Neuve, par exemple, la principale source de travail dans les diverses usines de poisson a été la transformation du crabe, qui a remplacé la morue comme espèce la plus lucrative désormais pêchée et transformée dans notre province. Toutefois, il y a eu au cours de la dernière année une réduction globale de 15 à 20 p. 100 des contingents, ce qui signifie 20 p. 100 moins de travail pour les travailleurs de nos usines de poisson.
En outre, au cours de la dernière année, les marchés, et en particulier le marché japonais, ont exigé des sections de crabe plutôt que la chair de crabe extrudée, qui représentait le principal produit d'exportation depuis un certain nombre d'années. L'expédition du crabe en sections signifie qu'il y a eu moins de travail pour le personnel de nos usines. La mécanisation a aussi éliminé de nombreux emplois. Les travailleurs de nos usines de poisson ont donc beaucoup moins travaillé cette année que dans le passé, sans y être pour quoi que ce soit, mais à cause des ressources, des exigences du marché et de la mécanisation attribuable aux employeurs.
Les enseignants ont aussi été touchés. À cause de la situation qui existe dans notre système d'éducation, de la consolidation et des compressions budgétaires, de nombreux professeurs suppléants ne réussissent plus à travailler suffisamment pour être admissibles à l'assurance-emploi.
Dans certaines régions du pays, il y a des périodes où, pour des raisons complètement indépendantes de sa volonté, le travailleur saisonnier moyen ne peut pratiquement pas travailler assez pour avoir droit à l'assurance-emploi.
Je ne préconise certainement pas un retour à l'ancien régime des 10-52, où il suffisait à quelqu'un de travailler pendant dix semaines, quelques heures par semaine, pour pouvoir toucher des prestations d'assurance-emploi pendant le reste de l'année. Je pense que personne ne préconise cela, mais le balancier est allé un peu trop loin dans l'autre sens.
Pendant la campagne électorale, le premier ministre s'est excusé auprès des travailleurs du Nouveau-Brunswick, plus particulièrement auprès des travailleurs saisonniers, parce que le gouvernement avait fait une erreur il y a quelques années en instaurant les nouvelles règles de l'assurance-emploi. Au lieu de les modifier l'automne dernier avant les élections, il a fait campagne en promettant d'apporter les changements nécessaires. La Chambre est maintenant saisie du projet de loi, et les modifications proposées l'automne dernier sont inchangées.
Malgré le fait que bien des gens ont exprimé leurs réserves à cet égard pendant la campagne électorale, le gouvernement propose seulement des modifications mineures, mais pas de changements véritables qui aideraient les gens des régions les plus durement touchées.
Le nombre d'heures de travail exigé est trop élevé dans certains régions de notre pays, pendant les périodes de ralentissement économique. Dans le secteur de la construction, par exemple, parce que les autorités fédérales et provinciales ne participent pas suffisamment aux grands projets d'infrastructure dont nous entendons parler, il n'y a pas suffisamment d'heures ou l'argent est dépensé tellement parcimonieusement que bien des régions moins nanties ne peuvent s'en prévaloir.
Pour ce qui est des ententes de partage des coûts entre le fédéral, les provinces et les municipalités, la plupart des petites municipalités ne peuvent, en raison de leur situation financière, profiter des accords en matière d'infrastructures. Elle sont incapables d'obtenir leur part de la mise totale.
Ces localités sont très durement éprouvées. Il devrait y avoir dans la nouvelle mesure législative des dispositions permettant de modifier les règles lorsque les conditions de travail, un manque de ressources ou toute autre raison empêchent les travailleurs saisonniers de travailler suffisamment longtemps pour se rendre admissibles à l'assurance-emploi.
La durée est un autre problème. Nous ne préconisons pas la formule 10-52, mais nous trouvons que, à mesure que les gens continuent de toucher des prestations d'assurance-emploi, comme ils le feront toujours dans les régions où prédomine le travail saisonnier, ils en viendront un jour à ne plus pouvoir compter sur aucun revenu, à des périodes de l'année où ils en ont le plus cruellement besoin. Assez souvent, les prestations d'assurance-emploi prennent fin en mars ou en avril, en cette période de l'année où les coûts de chauffage sont extrêmement élevés, tout comme le coût de la vie dans les régions rurales.
Ces questions devraient être abordées dans le projet de loi. J'espère certainement que la ministre en tiendra compte lorsqu'elle révisera le projet de loi, et qu'elle nous présentera des amendements que nous pourrons tous adopter.
Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à vous féliciter pour votre nouveau poste. Je suis persuadée que vous servirez bien la Chambre et j'espère que vous vous plairez dans vos nouvelles fonctions. Je remercie aussi les électeurs de York-Ouest, mes proches et mes collaborateurs pour leur appui aux élections du 27 novembre dernier. Je suis contente d'être de retour et je suis très heureuse d'appuyer aujourd'hui ce projet de loi.
De ce côté-ci de la Chambre, nous savons à quel point le régime de l'assurance-emploi est important pour les Canadiens. C'est pourquoi nous sommes très heureux de présenter à nouveau le projet de loi qui a été présenté et débattu à la Chambre l'automne dernier et auquel j'ai contribué.
Les Canadiens nous ont prouvé aux dernières élections qu'ils approuvent notre orientation. Nous savons aussi à quel point il importe que nous, du gouvernement, contrôlions l'assurance-emploi et nous assurions qu'elle continue à faire ce qu'elle est censée faire, soit aider les sans-emploi. Voilà pourquoi j'appuie le projet de loi C-2.
Le projet de loi découle de la surveillance constante de l'assurance-emploi par le gouvernement. Il reconnaît la nécessité que l'assurance-emploi soit adaptée aux réalités de l'économie canadienne. Le gouvernement reconnaît que le projet de loi devait être modifié.
Il y a quatre ans, environ, le gouvernement a présenté des modifications importantes à l'ancien régime d'assurance-chômage. À l'époque, il voulait changer diverses choses. Nous voulions rendre le régime plus juste, diminuer la dépendance à son endroit, réduire le coût du programme et insister sur des mesures actives d'emploi qui aideraient les Canadiens à retourner au travail.
L'objectif fondamental de cette réforme était de produire un système d'assurance-emploi qui soutienne les Canadiens sans-emploi, mais qui les encourage aussi à réintégrer la main-d'oeuvre active aussi vite et aussi bien que possible.
De façon générale, la réforme a très bien fonctionné. Des mesures comme le nouveau système d'admissibilité fondé sur les heures a ouvert l'accès à l'assurance-emploi aux travailleurs qui n'étaient pas admissibles auparavant, comme les détenteurs de multiples emplois qui travaillent pour plusieurs employeurs. Nombre de femmes qui travaillent à temps partiel sont maintenant admissibles à l'assurance-emploi, au besoin.
Par ailleurs, de nouveaux partenariats se sont formés avec d'autres niveaux de gouvernement et le secteur privé pour aider les gens à se préparer à un emploi et à en trouver un. Le régime d'assurance-emploi a été renforcé et amélioré par la réforme. L'économie a également été améliorée depuis. À l'échelle nationale, nous faisons l'expérience de circonstances économiques très encourageantes. Le taux de chômage national est en baisse. Plus de gens travaillent au Canada que jamais auparavant.
En général, les Canadiens n'ont jamais été aussi prospères et notre développement économique n'a jamais été aussi robuste, mais ce ne sont pas tous les Canadiens qui en profitent. Certaines régions du pays continuent de connaître un taux de chômage élevé. Les travailleurs saisonniers en particulier nous disent qu'ils continuent d'éprouver des difficultés à trouver du travail hors saison dans leur région. Nombre de ces travailleurs saisonniers sont touchés par une des mesures figurant dans la loi sur l'assurance-emploi de 1996, à savoir la règle d'intensité.
La règle d'intensité a été créée initialement pour réduire la dépendance envers l'assurance-emploi et encourager les prestataires à trouver du travail. Malheureusement, cette règle réduit le taux de prestations d'assurance-emploi des prestataires habituels. Le taux diminue d'un point toutes les 20 semaines de prestations ordinaires touchées depuis cinq ans. Cette règle a donc pour effet de diminuer les prestations versées aux prestataires habituels, faisant passer le taux de 55 p. 100, le taux usuel, à 50 p. 100.
On a décidé d'appliquer la règle de l'intensité parce que les Canadiens craignaient que des gens ne deviennent trop dépendants du régime d'assurance-emploi. Cependant, il se trouve que cette règle ne parvient pas vraiment à réduire la dépendance et à accroître la recherche d'emplois. Selon notre recherche, cette règle n'a pas réduit le recours répété à l'assurance-emploi, surtout dans les régions où il y a peu de débouchés.
Malgré les gains importants sur le plan de l'emploi dans de nombreuses régions du pays, on constate encore un chômage élevé dans certaines régions et des travailleurs saisonniers trouvent difficile de trouver de l'emploi hors saison. On craint de plus en plus que la règle de l'intensité ne soit devenue une pénalité imposée aux travailleurs saisonniers au lieu d'encourager les gens à trouver de l'emploi comme cela était prévu au départ. Le gouvernement reconnaît qu'il faut remédier à cette situation.
Comment le faire? Il s'agit d'éliminer la règle de l'intensité comme on le propose dans le projet de loi C-2. On va ainsi supprimer la pénalité imposée aux Canadiens qui vivent dans des régions qui offrent très peu de débouchés.
Qui va en profiter? Cela bénéficiera aux Canadiens de toutes les provinces et de tous les territoires. On nous a parlé des avantages pour la région de l'Atlantique et c'est une bonne nouvelle. Cependant, il est vraiment important de se rappeler que les prestataires de la région de l'Atlantique représentent moins de 20 p. 100 des demandes de prestations durant une année donnée. Cette mesure va donc aider les Canadiens de tout le pays.
En réalité, le travail saisonnier est une réalité partout au Canada et dans de nombreuses régions, il est difficile de trouver un autre emploi. Parlez-en aux travailleurs de la construction dans le centre du pays, aux travailleurs forestiers de l'Ouest ou aux nombreux travailleurs saisonniers du Québec ou du Nord. En vérité, l'élimination de la règle de l'intensité apportera des avantages économiques qui seront les bienvenus dans tout le pays.
En même temps, nous savons que l'assurance-emploi n'est qu'une partie de la solution. Nous allons continuer de travailler fort avec les provinces et les territoires ainsi que les entreprises et les leaders communautaires pour stimuler les économies locales, car la meilleure solution au chômage est l'emploi.
Je suis fière de souscrire au projet de loi et j'exhorte tous mes collègues à la Chambre à en faire autant.
[Français]
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas seulement en tant que porte-parole du Bloc québécois en matière de condition féminine que je prends la parole cet après-midi à la Chambre, c'est aussi en tant que femme qui a payé toute sa vie des cotisations à l'assurance-emploi et qui n'a jamais pu en recevoir.
Lors de ma première intervention à la Chambre, en réplique au discours du Trône, je disais que le gouvernement libéral se moque littéralement des réalités et des difficultés que vivent les Canadiennes et les Québécoises.
Je me permets de citer de nouveau une phrase qui m'a marquée lors de l'allocution de l'honorable Adrienne Clarkson, Gouverneure générale du Canada, lors de la lecture du discours du Trône, et dans laquelle elle exprimait la volonté du gouvernement libéral de «garantir à toute la population canadienne une meilleure qualité de vie».
La première preuve de cette réelle volonté de garantir une meilleure qualité de vie, la ministre l'a dévoilée avec une réforme qui propose un programme inadapté, complètement déconnecté des nouvelles réalités économiques et sociales des femmes, tant de celles du Canada que celles du Québec.
La ministre sait très bien que les premières personnes pénalisées par sa nouvelle réforme sont les femmes qui, dans une proportion de plus de 70 p. 100, occupent des emplois précaires et se retrouvent fréquemment au chômage, faute de trouver un emploi stable, un emploi rémunérateur.
Ces femmes, trop souvent, sont le seul soutien de famille monoparentale. Ces femmes qui, sans emploi stable, doivent subvenir aux besoins de leurs enfants, les nourrir, les vêtir, leur accorder une bonne éducation et une bonne instruction, auraient sûrement souhaité un peu plus de compassion de la part de la ministre.
Aussi, certains articles de la Loi sur l'assurance-emploi qui concernent les femmes et la maternité sont discriminatoires envers les femmes, et je m'explique.
Pour avoir droit aux prestations de maternité ou aux prestations parentales, 600 heures de travail sont obligatoires, alors qu'un travailleur, dans une région à fort taux de chômage, peut avoir droit à des prestations d'assurance-emploi après 420 heures de travail. Une femme, dans la même région, ne pourra avoir droit à des prestations de maternité à moins d'en avoir fait 600. Auparavant, c'était l'équivalent de 300 heures, soit 20 heures pendant 15 semaines, qui était exigé.
De plus, les nouvelles mesures quant à l'admissibilité au congé parental sont injustes envers des femmes qui devaient accoucher après le 1er janvier et qui avaient demandé d'avoir droit aux prestations parentales, mais qui, malheureusement, ont accouché avant terme. Elles ne peuvent pas se prévaloir des 35 semaines de congé parental, parce que la loi manque de souplesse. Ce n'est toujours bien pas de leur faute, à ces femmes, si elles ont accouché au début de décembre, alors que leur accouchement était prévu pour le 15 janvier.
Qu'est-ce qu'on fait à ce moment-là? Est-ce qu'on a pensé aux effets pervers d'une telle situation pour la femme et la famille à ce moment-là? Est-ce qu'on a pensé que ces femmes espéraient bénéficier, comme les autres femmes, des nouvelles mesures, si minces soient-elles, mises à la disposition des autres femmes? Et que dire de ces milliers de travailleurs et travailleuses autonomes qui, eux aussi, ont été laissés pour compte?
Selon les données de Statistique Canada, la proportion des travailleurs indépendants par rapport à l'emploi total se situait entre 18 p. 100 et 20 p. 100 en 1999. Le Rapport de contrôle et d'évaluation reconnaît qu'il y a une forte croissance dans ce secteur.
Pourtant, l'assurance-emploi exclut toujours ces travailleurs. On sait qu'au niveau des travailleurs autonomes, plus de 40 p. 100 de cette population est féminine. Le nouveau régime d'assurance-emploi n'est pas adapté pour couvrir près d'un travailleur sur cinq simplement de par la nature de ce travail, qui est de plus en plus important au Canada.
Je disais plus tôt qu'il y avait des travailleurs et des travailleuses qui étaient laissés pour compte, exclus de cette loi. De toute évidence, le gouvernement libéral et la ministre du Développement des ressources humaines manquent de vision et connaissent peu les réalités du marché du travail.
Pourtant, le ministre de Développement des ressources humaines Canada de l'époque, l'actuel ministre du Commerce international, disait, dans un communiqué émanant de Développement des ressources humaines Canada du 12 février 1998, qu'un des objectifs de la réforme de l'assurance-emploi était d'adapter le régime aux nouvelles réalités du marché du travail. La citation suivante en fait d'ailleurs état:
Les objectifs de la réforme de l'assurance-emploi étaient de réduire les coûts et de moderniser le régime pour mieux tenir compte des réalités sociales et économiques avec lesquelles doivent composer tous les Canadiens.
Mais ce n'est pas ce qui se passe, parce que le travail autonome fait aussi partie des nouvelles réalités sociales et économiques.
Le gouvernement libéral et la ministre font également preuve de mauvaise foi. Lors de la dernière campagne électorale, le premier ministre lui-même a reconnu, dans une entrevue accordée à la Presse Canadienne, ce qui suit:
Nous nous sommes rendu compte que ce n'était pas une bonne décision en ce sens que nous n'aurions pas dû le faire.
Il parlait des coupes au régime d'assurance-emploi imposées par son gouvernement.
Même le ministre Coderre disait: «Après l'élection d'un gouvernement libéral majoritaire, nous allons rétablir le processus et nous assurer que les changements soient propices et répondent bien, en majeure partie, aux réalités et aux besoins de la population.»
L'assurance-emploi est devenue un privilège pour les femmes du Québec et du Canada. C'est pourquoi le Bloc québécois conclut à un double constat, que dis-je, à un triple constat d'échec de la réforme de l'assurance-emploi.
Dans le but d'une meilleure responsabilisation envers les plus démunis, d'un partage juste et équitable des milliards de surplus de la caisse d'assurance-emploi que retient le gouvernement libéral, dans le but, toujours, de prendre en considération l'augmentation sans cesse croissante du taux de gens vivant sous le seuil de la pauvreté, dans le but d'aider les familles pauvres dont les besoins sont criants et d'une urgence capitale, dans le but que les enfants québécois et canadiens puissent manger trois repas par jour, le Bloc québécois aurait préféré que le gouvernement présente deux projets de loi distincts.
Le premier projet de loi viserait à pallier les urgences, dont celle à laquelle je faisais état tout à l'heure, à savoir celle d'une femme qui a accouché prématurément et qui ne peut se prévaloir des nouvelles dispositions de la loi. Le second se concentrerait sur la gestion de la caisse de l'assurance-emploi. Cette approche répondrait rapidement aux besoins des laissés-pour-compte, tout en débattant des questions plus techniques en comité.
Le gouvernement, dans son désir de partage et sa grande magnanimité, préfère mettre la main immédiatement sur les énormes surplus de la caisse en oubliant la population, en oubliant les belles promesses, en oubliant les conditions de vie des Québécoises et des Canadiennes et en oubliant qu'il les pousse dans une condition de besoin.
Je vais réitérer auprès du gouvernement, au nom de mes collègues du Bloc québécois, une demande de justice et d'équité sociale. Je veux assurer que le Bloc québécois est toujours disposé à adopter rapidement les bonifications au régime, séparément du débat sur la gestion de la caisse.
Le président suppléant (M. Bélair): J'aimerais tout d'abord rappeler à mes collègues, surtout aux nouvelles et aux nouveaux députés, que l'on ne s'adresse pas à nos collègues à la Chambre en les appelant par leur nom de famille. Les ministres doivent être nommés en fonction des ministères dont ils ont la responsabilité, et les députés, par le nom de leur circonscription.
[Traduction]
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, je m'en voudrais de ne pas vous féliciter pour votre élection à la présidence. J'espère que vos nouvelles fonctions vous plaisent et que vous trouvez tous ces discours fascinants.
J'hésite un peu à aborder la question dont nous sommes saisis aujourd'hui, parce que je viens de Toronto. Toronto est, évidemment, la ville que les gens se plaisent à détester. Il arrive même que certains de mes collègues, particulièrement ceux des Maritimes, expriment des sentiments, disons, peu amicaux envers Toronto.
Permettez-moi de rappeler brièvement les objectifs du régime d'assurance-emploi et la façon dont les changements proposés dans le projet de loi nous aideront à atteindre ces objectifs.
Comme la Chambre le sait, la Loi sur l'assurance-chômage a d'abord été conçue en 1940 comme un filet de sécurité, une mesure de soutien du revenu à l'intention des Canadiens qui se retrouvaient temporairement au chômage. Depuis, le régime a évolué. Il a permis aux travailleurs et à leurs familles de demeurer sur le marché du travail et d'éviter, dans de nombreux cas, une période de bouleversements et d'ennuis financiers.
Au fil des ans, le régime s'est grandement transformé. Il est devenu une entité beaucoup plus complexe en cherchant à s'adapter aux réalités du marché. Certains des changements apportés ont provoqué des distorsions du marché qui ont dû être réglées. En 1996, nous avons réformé le régime pour mieux tenir compte des réalités du marché.
En réformant le régime d'assurance-emploi, nous voulions le rendre plus juste, réduire la dépendance à l'égard de l'assurance-emploi, aider les familles à faible revenu, rendre le régime durable, encourager les mesures actives d'emploi et atténuer les distorsions du marché. Cette réforme a été à l'origine de cas plutôt bizarres où il était préférable pour un travailleur de toucher des prestations d'assurance-emploi. Situation paradoxale s'il en est une lorsque le régime d'assurance-emploi contribue à créer du chômage plutôt que des emplois.
Beaucoup de ces objectifs ont été atteints et ils sont aussi importants aujourd'hui qu'ils l'étaient en 1996. Nous avons promis aux Canadiens de surveiller attentivement les changements et de les évaluer pour voir s'ils donnent les résultats escomptés. Il s'agit en fait d'une disposition de la loi. Nous avons toujours promis d'effectuer des ajustements à mesure que le besoin s'en fait sentir, et le temps de le faire est maintenant arrivé. Depuis la réforme, il est clair que beaucoup d'éléments comme la règle du dénominateur et le supplément familial donnent de bons résultats et que d'autres éléments du programme ont besoin d'une mise au point.
Nous avons écouté attentivement les critiques que les Canadiens ont exprimées à l'égard du programme d'assurance-emploi. En fait, comme d'autres députés l'ont fait remarquer, cela a constitué un enjeu lors des deux ou trois dernières campagnes électorales. Des députés comme celui de Fredericton ont exprimé ici et ailleurs des critiques auxquelles répond le projet de loi. Les Canadiens nous ont parlé de difficultés que leur causaient certains éléments de l'assurance-emploi. Ces éléments doivent être modifiés pour garantir l'efficacité du programme. Nous devons proposer des modifications concrètes et progressives qui traduisent bien la réalité économique moderne.
La disposition de récupération visait à l'origine à dissuader les travailleurs qui gagnaient des revenus élevés de réclamer des prestations chaque année. Le député de Mississauga-Ouest a souligné à maintes reprises à la Chambre et ailleurs également que le seuil était beaucoup trop bas. Une fois le projet de loi adopté, le seuil de revenu net auquel la disposition de récupération s'appliquera aux réitérants passera de 39 000 $ à 48 750 $. À l'avenir, des Canadiens qui gagnent les meilleurs salaires devront rembourser des prestations.
Les travailleurs à revenu moyen qui ont besoin de prestations d'assurance-emploi auront plus d'argent à dépenser parce que nous relevons le seuil de revenu à partir duquel la disposition de récupération s'appliquera. La grande majorité des travailleurs à revenu moyen ont cotisé à l'assurance-emploi toute leur vie sans jamais toucher de prestations. Or, en vertu du système en vigueur, nous appliquons la disposition de récupération la première fois qu'une personne se prévaut de l'assurance-emploi. C'est employer les grands moyens pour bien peu de choses. Par définition, les personnes dont c'est la première demande ne dépendant pas de l'assurance-emploi. Ce ne sont pas des gens qui se servent de l'assurance-emploi comme d'un supplément de revenu.
Nous éliminons aussi la disposition de récupération pour les personnes qui touchent des prestations spéciales. La grossesse ou la maladie ne devrait pas porter atteinte au droit à toucher des prestations. Les prestations spéciales sont conçues pour les Canadiens qui sont trop malades pour travailler et pour les personnes qui restent à la maison pour s'occuper d'un nouveau-né ou d'un enfant adoptif. Ces personnes ne se servent pas de l'assurance-emploi comme d'un supplément de revenu annuel et il n'y a absolument aucune raison de pénaliser les nouveaux parents ou les personnes trop malades pour travailler.
En modifiant la disposition de récupération, nous aidons trois grands groupes de Canadiens. Premièrement, les gens dans le groupe à revenu moyen seront les premiers à profiter de ce relèvement du seuil. Deuxièmement, les Canadiens qui touchent des prestations spéciales ne devront plus rembourser ces prestations. Troisièmement, les personnes dont c'est la première demande seront exemptées du remboursement des prestations.
En outre, la règle d'intensité est éliminée. Cette règle prévoyait que plus une personne se prévalait de l'assurance-emploi, plus ses prestations diminuaient. Elle s'est avérée inefficace, sans compter qu'elle avait pour effet de pénaliser les gens, ce qui n'était pas l'intention. L'élimination de cette règle devrait grandement profiter aux travailleurs saisonniers.
Parallèlement, on espère que le relèvement du seuil du revenu à partir duquel s'applique la disposition de récupération et l'élimination de la règle d'intensité ne signifieront pas un retour aux vieilles habitudes. L'assurance-emploi ne peut pas remplacer un emploi. Elle ne peut pas empêcher un employeur qui paie des salaires bas de s'installer dans une région. Un employeur potentiel ne devrait pas se trouver dans la position où il fait concurrence à l'assurance-emploi, ce serait courir à sa propre perte.
Nous devons envisager d'abaisser les prestations d'AE de 3,07 $ à 2,25 $. Chaque tranche de 10¢ coûte 700 millions de dollars au Trésor fédéral, soit une réduction d'impôt cumulative de 6,4 milliards de dollars.
Certains affirment que le gouvernement a éliminé le déficit et rembourse aujourd'hui la dette nationale avec l'argent des travailleurs. Il est vrai que les cotisations d'assurance-emploi sont versées dans le Trésor, et cela pour une bonne raison. Il n'y a pas de compte bancaire distinct pour l'assurance-emploi, en cas de périodes difficiles, qui surviennent tôt ou tard. Tous les contribuables canadiens, employeurs et employés y compris, doivent venir en aide aux chômeurs. Le gouvernement canadien est le meilleur garant qui soit.
Les Canadiens de toutes les régions du pays bénéficieront des améliorations apportées à la Loi sur l'assurance-emploi. Ces changements s'inscrivent dans la foulée des valeurs chères aux Canadiens, comme le soutien mutuel et l'aide à ceux qui en ont besoin en période de difficultés.
Lorsque nous avons conçu l'assurance-emploi, nous ne voulions pas simplement assurer les salaires des gens. Nous voulions remettre les chômeurs au travail. De nombreux Canadiens ont cependant fait valoir que le régime pouvait être amélioré.
Le projet de loi vise à faire en sorte que le système continue de bien fonctionner et réponde aux besoins de ceux qui ont besoin d'aide. Nous voulons que le système réponde aux besoins et à la réalité des travailleurs canadiens. En définitive, l'assurance-emploi doit exister pour le bénéfice des Canadiens et des personnes qui y ont contribué et qui ont maintenant besoin de notre aide.
Ensemble, les changements apportés à la règle d'intensité et à la disposition de récupération nous permettront de mieux réaliser les objectifs initiaux de l'assurance-emploi, à savoir assurer l'équité, aider les gens à retourner rapidement au travail et réduire la dépendance des gens sans pénaliser ceux qui ont le plus besoin d'aide.
En fait, les changements apportés à l'assurance-emploi allaient dans la bonne direction et c'est encore plus vrai des modifications actuelles. L'assurance-emploi est efficace, mais ce système est en constante évolution.
Je remercie les députés de Fredericton et de Mississauga-Ouest d'avoir soulevé ces questions à de nombreuses reprises au sein de notre caucus. Je félicite aussi les ministres compétents d'avoir fait preuve de réceptivité à l'endroit des députés de notre caucus et des députés des autres partis à la Chambre.
Je voterai en faveur du projet de loi et j'invite les autres députés à en faire autant.
[Français]
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean—Saguenay, BQ): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de fébrilité que je prends la parole aujourd'hui, et ce, pour plusieurs raisons, la première étant que c'est la première fois que j'interviens à la Chambre depuis ma réélection. La deuxième raison concerne la pertinence et l'importance de l'assurance-emploi pour ma région.
Je prends la parole en tant que parlementaire, mais aussi en tant qu'ancien pilote de brousse qui a déjà eu recours à l'assurance-emploi. Je vais situer le problème.
Ce que nous avons vécu au Saguenay—Lac-Saint-Jean et qui a commencé en juillet dernier concerne le fait qu'à tous les cinq ans, la loi prévoit une révision des zones d'appartenance à l'assurance-emploi. Dès lors, je me suis manifesté pour dire qu'il fallait absolument maintenir le statu quo qui consistait à accumuler un minimum de 420 heures de travail pour se qualifier, ce qui permettait d'obtenir des prestations pendant 33 semaines. Je n'étais pas le seul à penser ainsi, car d'autres collègues parlementaires ont fait de même.
Dans ma région, Développement des ressources humaines Canada, par le biais de son économiste, recommandait à la ministre de maintenir le statu quo. Pourquoi? Pas pour le plaisir de le faire, mais parce que cela répondait à notre réalité régionale.
À notre grande surprise, le 1er juillet, lorsque les données de DRHC ont été rendues publiques, il ne fallait plus 420 heures pour se qualifier pour obtenir des prestations pendant 33 semaines, mais 525 heures. Pour combien de semaines?
M. Gérard Asselin: Vingt et une semaines.
M. Stéphan Tremblay: Mon collègue de Charlevoix, qui vit la même situation dans son comté, sait que c'est pour 21 semaines.
Cela semble être une énumération de chiffres très anodins pour nous qui sommes assis ici, à la Chambre, mais pour bien des familles, pour bien des travailleurs et pour bien des employeurs, cela a des conséquences énormes.
J'ai voulu savoir, statistiquement parlant, quel serait le manque à gagner pour ma région en ce qui concerne l'argent et les cotisations que nous allions payer. Je me suis dit, en bon représentant de la population: «Je vais aller chercher ces informations.» Je fais appel à l'économiste du DRHC, qui me renvoie à qui? À l'actuaire en chef du ministère. Ce dernier est venu d'Ottawa nous expliquer les raisons pour lesquelles cette modification surprise, en plein été, lorsque les gens sont en vacances, s'est produite.
À ma grande déception, nous n'avons obtenu aucune réponse pertinente. Les fonctionnaires du ministère nous ont fait croire que c'était les chiffres d'employabilité qui correspondaient à de nouvelles façons de faire. Bref, ce fut une argumentation absolument insatisfaisante.
Bien entendu, les protestations ont commencé, y compris chez mon collègue de Charlevoix, celui de la Côte-Nord, celui du Bas-Saint-Laurent ou celui de la Gaspésie qui vivaient la même réalité. Face à ce tollé de protestations, mais également, malheureusement, probablement aussi à cause d'élections générales imminentes, la ministre est arrivée à la conclusion qu'il fallait des mesures transitoires.
Pourquoi fallait-il des mesures transitoires? Pour que nos travailleurs puissent s'accoutumer. Je n'accepte absolument pas cette phrase qui dit que les travailleurs doivent s'accoutumer à la pauvreté. C'est absolument inacceptable. On ne s'accoutume pas à la pauvreté. De la pauvreté, il y en aura davantage avec cette législation et avec ces nouvelles réalités régionales.
Je discutais avec la ministre qui me disait: «Stéphan, la solution, ce n'est pas le chômage, c'est l'emploi.» Je suis entièrement d'accord. Je crois aussi que la solution, c'est l'emploi.
Dans ce pays, dans certains secteurs, comme on le voit chez nous ou chez mon collègue, la réalité et la structure économique font en sorte que l'assurance-emploi est un instrument de développement puisqu'elle pallie certaines lacunes liées à notre structure économique.
Par exemple, pour le tourisme, la saison forte est l'été. Malheureusement, la saison demeure assez courte. Certains pourraient dire que nous pourrions allonger cette saison. Nous y travaillons. Serge Plourde, président de l'Association touristique régionale, me disait qu'il faut absolument que le gouvernement comprenne que s'il préserve cette nouvelle réglementation qui rend l'assurance-emploi de plus en plus inaccessible, cela aura des impacts majeurs dans l'industrie touristique. Les gens n'arrivent pas à se qualifier ou n'arrivent pas à fermer la boucle.
Quand vous êtes rendu en février, que vous n'avez plus de revenu, que vous avez une maison ou une voiture, ce qui fait en sorte que vous n'ayez pas droit à l'assistance sociale, devez-vous vivre de l'air du temps? C'est ce qui va se passer. Ce que l'industrie touristique prétend, c'est que cela va engendrer un accroissement du roulement du personnel qui aura des conséquences graves sur une industrie en pleine expansion qui tente, comme beaucoup le voudraient, d'allonger la saison.
Il en va de même en agriculture et dans l'industrie forestière. On ne peut pas empêcher le sol de geler; c'est malheureux, mais c'est ainsi. Je suis un ancien pilote de brousse et, dans la brousse, on se pose sur l'eau. Quand les lacs gèlent, on a une saison morte; c'est ainsi.
Il faudra absolument qu'en comité, le gouvernement prenne son rôle au sérieux. En campagne électorale, le secrétaire d'État au Sport amateur l'a mentionné. D'entrée de jeu, le gouvernement se dit prêt à assouplir davantage son projet de loi, à réitérer ce qu'a dit le secrétaire d'État au Sport amateur, «dans la mesure où les citoyens nous apporteront des arguments justifiés et justifiables».
Si on donne la chance à mes concitoyens de venir s'expliquer en comité, je promets qu'ils donneront des arguments justifiés et justifiables.
Dans le même ordre d'idées, le secrétaire d'État au Sport amateur s'est engagé personnellement à apporter des correctifs à la Loi sur l'assurance-emploi. Il affirmait en outre:
Après l'élection d'un gouvernement libéral majoritaire [...]
Je pense que c'est ce qu'on a devant nous.
[...] nous allons rétablir le processus et nous assurer que les changements soient propices et répondent bien, en majeure partie, aux réalités et aux besoins de la population du Saguenay—Lac-Saint-Jean et de l'ensemble des Canadiens. [...] Je me suis engagé à ce qu'il y ait des changements dans la loi et on va le faire.
Le Saguenay—Lac-Saint-Jean, c'est chez moi. Je serais peut-être prêt à pardonner au gouvernement, qui nous a mis un bâillon aujourd'hui dans le cadre de ce débat très important, dans la mesure où on sera sérieux et que, en comité, les citoyens aient l'occasion de se faire entendre et de présenter des arguments justifiés et justifiables.
Ce que je trouve difficilement justifiable, c'est qu'on présente en plein mois de juillet, le 1er juillet de l'an 2000, une nouvelle mesure qui, chez nous, amène de grosses modifications. Pourquoi le gouvernement a-t-il voulu tout d'un coup couper dans l'assurance-emploi? C'est d'autant plus difficile à comprendre lorsqu'on s'aperçoit que la caisse déborde. Nous ne sommes pas en difficultés économiques. Nous le serons dans la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean parce que cela aura des conséquences absolument phénoménales, non seulement chez les travailleurs, mais aussi chez les employeurs.
Pendant la campagne électorale, les entrepreneurs me disaient: «Stéphan, il faut absolument que le gouvernement comprenne cette réalité parce qu'il va y avoir des réalités économiques graves.»
J'ai beaucoup de compassion pour les gens qui, je vais employer l'expression, vont gruger les cadres de portes pour survivre cet hiver. J'en ai aussi pour les employeurs qui auront de la difficulté à maintenir leur personnel en place. Si on veut des arguments très économiques, nous allons en donner.
Je m'intéresse énormément à la question de la mondialisation depuis plusieurs années. C'est une question qui prend toujours davantage d'ampleur, et je m'en réjouis. Je pense que cela pourrait faire l'objet d'un autre débat ainsi d'ailleurs que notre rôle de parlementaires à la Chambre. Que devons-nous faire par rapport au contexte de la mondialisation?
Je ne suis pas contre la mondialisation. Je suis contre certaines formes de mondialisation et j'en présente une, l'Organisation de coopération et de développement économique qui déclarait dans sa stratégie pour l'emploi, et je cite:
Pour accroître la flexibilité du marché du travail dans un certain nombre de pays, il est essentiel de réduire la générosité de l'indemnisation du chômage et d'autres prestations sociales, de durcir l'accès à ces programmes.
Elle déclarait aussi, et je cite:
Le Canada est le seul pays qui paraît avoir appliqué les recommandations formulées lors de la première série d'examens.
Qu'est-ce qui nous gouverne? Est-ce que ce sont des stratégies économiques cohérentes et raisonnables ou une bande de fonctionnaires dans des organisations internationales, qui font des recommandations pour l'emploi qui sont absolument inadéquates et complètement déconnectées de la réalité de nos régions?
J'espère qu'on va pouvoir en débattre sérieusement en comité.
* * *
[Traduction]
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, des consultations ont eu lieu avec les leaders de tous les partis, et je crois que vous constaterez que l'ordre suivant a fait l'objet d'un consentement unanime, concernant les délibérations au cours de la visite du premier ministre du Royaume-Uni, le 22 février.
Que, nonobstant tout article du Règlement ou ordre spécial de cette Chambre, la Chambre se réunira le jeudi 22 février 2001 à 14 heures et l'ordre des travaux sera comme celui d'un mercredi;
Que le discours que doit prononcer le premier ministre du Royaume-Uni dans l'enceinte de la Chambre, ce jour-là, devant les membres du Sénat et de la Chambre des communes, de même que les allocutions de présentation et les discours qui s'y rattachent, soient imprimés en appendice aux Débats de la Chambre des communes de ce jour-là et fassent partie des archives de cette Chambre; et
Que les médias soient autorisés à transmettre et à enregistrer ce discours, les présentations et les remarques d'usage, conformément aux directives établies pour de telles occasions.
Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi et le Règlement sur l'assurance-emploi (pêche), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais vous féliciter pour votre nomination.
C'est pour moi un plaisir de prendre la parole au sujet du projet de loi C-2, surtout parce que les changements qu'il prévoit à la Loi sur l'assurance-emploi feront une énorme différence dans la vie des familles canadiennes.
À titre de président du caucus de la région du grand Toronto, je peux certes garantir que mes collègues du caucus discutent du dossier depuis assez longtemps et qu'ils appuient les changements proposés, en particulier ceux concernant la règle de l'intensité et le remboursement des prestations.
Nous savons que, dans l'ensemble, nos réformes du régime d'assurance-emploi réussissent bien, mais nous savons aussi que nous devons mettre le système à jour afin qu'il réponde mieux aux besoins des familles de travailleurs.
La vaste majorité de ces familles sont confrontées à des défis qu'elles ne peuvent relever aisément d'elles-mêmes. De nos jours, un grand nombre de mères et de pères travaillent à l'extérieur du foyer, et les discussions au sujet des garderies sont courantes. Il ne fait aucun doute que le marché du travail a changé de façon dramatique au cours des dernières décennies et que notre régime d'assurance-emploi doit évoluer à mesure que les besoins changent.
Quand le programme d'assurance-chômage a été créé au cours des années 1940, la plupart des employés étaient des hommes. Aujourd'hui, la moitié des travailleurs sont des femmes. Dans les années 1940, la plupart des femmes restaient à la maison pour s'occuper de leurs enfants. Aujourd'hui, les familles à doubles revenus comptent pour environ 40 p. 100 de la population active. De nos jours, une famille dans laquelle les deux parents travaillent, c'est la norme et non une exception.
En conséquence, les Canadiens et les Canadiennes consacrent beaucoup d'énergie à tenter d'assumer à la fois leurs responsabilités familiales et professionnelles. Quarante pour cent des travailleurs canadiens reconnaissent subir un niveau élevé de stress au niveau tant familial que professionnel. Ces chiffres sont beaucoup plus élevés qu'ils ne l'étaient il y a dix ans.
Si nous écoutons attentivement ce que les Canadiens ont à nous dire sur le programme d'assurance-emploi, il semble évident que nous devons trouver de nouvelles façons de rendre le système plus sensible aux défis que doivent relever les familles d'aujourd'hui.
Le gouvernement reconnaît que les parents modernes ont du mal à s'occuper de leurs enfants tout en gagnant leur vie. Pour que les enfants puissent partir sur le bon pied dans la vie, les parents doivent avoir le temps et les ressources nécessaires pour s'en occuper. C'est pourquoi, le 31 décembre 2000, nous avons accru les prestations parentales afin de permettre à un parent de rester à la maison avec un enfant nouveau-né pendant une période pouvant aller jusqu'à un an.
C'est également la raison pour laquelle nous avons proposé de venir en aide aux parents en éliminant la disposition de récupération pour les Canadiens qui touchent des prestations spéciales dans le cadre de l'assurance-emploi. Les Canadiens peuvent obtenir des prestations spéciales lorsqu'ils sont trop malades pour travailler ou qu'ils décident de rester à la maison pour s'occuper de leurs enfants nouveaux-nés ou récemment adoptés. Nous nous rendons compte que le système de remboursement des prestations limitait injustement l'aide que les familles canadiennes pouvaient recevoir à un moment où elles avaient le plus besoin.
La récupération était conçue pour dissuader les salariés à revenu élevé de toucher des prestations année après année, non pour dissuader les parents de se prévaloir des prestations parentales ou de maternité. Nous ne voulons pas pénaliser les parents qui restent à la maison pour passer plus de temps avec leurs jeunes enfants ni les gens qui sont trop malades pour travailler. Les Canadiens qui touchent des prestations spéciales n'auront plus à les rembourser.
De plus, les travailleurs canadiens à revenu moyen auront plus d'argent à dépenser pour leur famille car nous passons à un seuil unique, soit 48 750 $ de revenu net. Le remboursement ne dépassera pas 30 p. 100 du revenu net excédant ce seuil.
Nous proposons d'éliminer la règle d'intensité qui réduit le taux des prestations d'assurance-emploi d'un point de pourcentage pour chaque période de 20 semaines de prestations dont une personne a bénéficié au cours des cinq années antérieures. En fonction du nombre de semaines de prestations versées au cours des années antérieures, le taux des prestations d'une personne pouvait passer du taux habituel de 55 p. 100 à 54 p. 100 puis diminuer jusqu'à un minimum de 50 p. 100.
En éliminant la règle d'intensité, nous viendrons en aide aux travailleurs qui doivent recourir à l'assurance-emploi plus souvent qu'ils ne le souhaiteraient parce que les possibilités d'emploi dans leur localité sont rares. Ces travailleurs ne seront plus pénalisés, ce qui veut dire qu'ils auront plus d'argent pour leur famille.
Les règles seront également ajustées pour permettre aux parents de devenir plus facilement admissibles aux prestations régulières une fois de retour au sein de la population active après une absence prolongée pour s'occuper de jeunes enfants. Essentiellement, les règles feront en sorte qu'il soit plus facile pour les parents d'être admissibles aux prestations ordinaires de l'AE s'ils perdent leur emploi pendant la difficile période de réinsertion professionnelle.
C'est pourquoi nous prolongeons la période de rétroactivité pour les parents qui réintègrent le marché du travail. Les prestataires qui ont reçu des prestations parentales ou de maternité pendant les quatre années précédant la période actuelle de rétroactivité auront besoin du même nombre d'heures que les autres clients pour être admissibles aux prestations ordinaires. Ces modifications, qui s'ajoutent à la prolongation des prestations parentales, sont une bonne nouvelle pour les nouveaux parents et leur donneront le choix de passer plus de temps à la maison avec leurs enfants.
Enfin, la cotisation a été ramenée à 2, 25 $, soit une réduction de 15 cents, ce qui laisse plus d'argent dans la poche des familles canadiennes. Cette modification peut sembler petite et insignifiante, mais c'est la septième réduction consécutive et elle se traduit par des milliards de dollars d'économie pour les employés et les employeurs.
Ces modifications viennent renforcer plusieurs initiatives importantes prises par le gouvernement pour venir en aide aux familles canadiennes.
Lors de réformes précédentes de l'AE, nous avons instauré le supplément familial. Grâce à ce supplément, les prestataires à faible revenu qui ont des enfants peuvent recevoir jusqu'à 80 p. 100 de leur rémunération assurable. En 1999-2000, presque 200 000 familles canadiennes ont bénéficié de cette mesure. Une autre initiative importante est la prestation nationale pour enfants, qui permet aux familles d'échapper à la pauvreté. En offrant davantage de prestations d'emploi et de mesures de soutien en dehors du système de l'aide sociale, on facilite la tâche aux familles pour qu'elles puissent subvenir aux besoins de leurs enfants tout en continuant à faire partie de la main-d'oeuvre active.
En fin de compte, l'allègement des pressions financières qui pèsent sur les familles canadiennes peut produire un meilleur environnement pour leurs enfants, davantage de possibilités pour les parents et une meilleure chance pour les familles d'améliorer leur qualité de vie en général.
Ces modifications au programme d'assurance-emploi sont une bonne nouvelle pour les familles laborieuses du Canada. Elles reflètent l'engagement ferme de notre gouvernement d'offrir aux Canadiens des possibilités nouvelles qui récompensent le travail et renforcent les familles. Elles permettront à des milliers de mères et de pères de prendre soin de leurs enfants pendant les premiers mois de leur vie, qui sont déterminants. Elles allégeront les pressions économiques qui s'exercent sur les parents qui travaillent et elles rapprocheront davantage les politiques de notre pays des réalités que vivent les familles d'aujourd'hui.
J'appuie ces modifications et je demande à la Chambre de les prendre en considération.
[Français]
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais simplement prendre quelques secondes, avant d'entrer dans le vif du sujet, pour remercier la population du comté de Laurentides pour ma réélection.
Pour la troisième fois d'affilée, les gens de mon comté ont bien voulu me faire confiance pour les représenter, ici, à la Chambre des communes. Je suis profondément touchée par cette autre très belle marque de confiance à mon égard. Comme ce fut le cas lors de mes deux premiers mandats, je vais faire tout ce qu'il m'est possible de faire afin de mieux les servir. Je m'engage à mettre tout en oeuvre afin de défendre leurs intérêts ici, à la Chambre.
Ainsi, mon engagement va se poursuivre de plus belle, dès maintenant, puisque, comme c'est son habitude, ce gouvernement veut, encore une fois, essayer de nous faire avaler une couleuvre indigeste par son projet de loi C-2.
La question de l'assurance-emploi est une priorité pour le Bloc québécois depuis déjà plusieurs années. C'est normal qu'il en soit ainsi, puisque cette assurance aide des gens qui sont dans le besoin ou qui, de façon périodique ou conjoncturelle, ont besoin de cette assurance parce qu'ils sont sans revenu d'emploi. On parle ici et surtout des travailleurs autonomes, des travailleurs saisonniers et des régions, des jeunes et aussi des femmes.
Le Bloc québécois se bat depuis plusieurs années contre l'intention du gouvernement fédéral, qui est maintenant devenue réalité avec le projet de loi C-2, de vouloir s'accaparer les surplus de la caisse de l'assurance-emploi. N'ayons pas peur des mots: avec le projet de loi C-2, le gouvernement fédéral s'apprête littéralement à instituer et à légaliser un détournement de fonds de 30 milliards de dollars. Cet argent ne lui appartient pas. Ce fonds de 30 milliards de dollars appartient aux sans-emploi, aux travailleurs et aux employeurs, un point, c'est tout. Ce n'est pas un fond qui a été conçu pour faire des économies et créer des surplus dans le but de payer le déficit et, maintenant, la dette du pays.
Avec de tels surplus dans la caisse de l'assurance-emploi, la population du Québec et du Canada s'attendait à des changements majeurs au régime d'assurance-emploi. Avec le projet de loi C-44, l'ancêtre du présent projet de loi C-2, qui fut présenté juste avant le déclenchement des élections, l'automne dernier, le Bloc québécois s'était vite aperçu qu'il n'en était rien. Et l'histoire se répète avec le projet de loi C-2. Ce sont uniquement des changements cosmétiques. Le projet de loi C-2 est la copie presque conforme du projet de loi C-44. Il y a quelques petites modifications ici et là, mais presque rien pour répondre aux véritables besoins des travailleuses et des travailleurs.
Le Bloc québécois n'a pas été le seul parti à dénoncer le projet de loi C-2. Les groupes de défense des travailleurs et des chômeurs l'ont également dénoncé. Selon eux, le gouvernement ne s'attaque pas aux vrais problèmes et les modifications proposées sont nettement insuffisantes. Le principal problème, l'admissibilité au régime, n'est toujours pas réglé.
Dans son argumentaire, ce que le gouvernement dit principalement, c'est que le projet de loi C-2 est une réforme majeure de l'assurance-emploi, puisqu'il en coûtera, selon les évaluations du gouvernement, 200 millions de dollars cette année, 450 millions de dollars l'année prochaine et 500 millions de dollars en 2002-2003.
C'est de l'hypocrisie pure et simple. C'est prendre la population du Québec et du Canada pour des imbéciles. Voilà ce que c'est. Imaginez-vous que je vous vole 100 $, directement de vos poches, mais parce que je suis une personne très généreuse, je vous en remets 8 $. Voilà la générosité de ce gouvernement. C'est exactement cela qu'il veut faire avec cette supposée réforme de l'assurance-emploi. De plus, comme je le disais tantôt, il fout le camp avec la caisse de l'assurance-emploi et ses 30 milliards de dollars. Donc, la population et nous-mêmes au Bloc québécois devrions dire merci à ce gouvernement? Jamais.
Concrètement, ce que je viens de dire signifie que, sur la base d'un surplus de 6 milliards de dollars par année dans la caisse de l'assurance-emploi, le gouvernement ne remettrait que 8 p. 100 de ce qu'il vole chaque année aux chômeurs. Et pour cela, nous devrions le remercier.
L'assurance-emploi est devenue une taxe sur la masse salariale parce que le gouvernement refuse de redonner aux chômeurs et aux travailleurs ce qui leur revient et continue d'accumuler les surplus sur leur dos.
De toute évidence, le gouvernement ne se préoccupe pas du sort des chômeurs et des laissés-pour-compte dans la réforme de l'assurance-emploi. Les mesures de ce projet de loi sont insuffisantes pour régler les problèmes causés par le régime, notamment à l'égard des travailleurs saisonniers et des régions, des jeunes, des femmes et des travailleurs autonomes, et je vais expliquer comment.
D'abord, il est clair que le gouvernement a décidé d'oublier les travailleurs autonomes. Pourtant, ils sont de plus en plus nombreux sur le marché de l'emploi. Selon Statistique Canada, la proportion des travailleurs indépendants est passée, de 1976 à 1999, de 12 p. 100 à 18 p. 100 respectivement, soit près d'un travailleur sur cinq. Or, le régime d'assurance-emploi exclut ces travailleurs comme s'ils n'existaient pas, alors qu'ils sont de plus en plus importants dans l'économie canadienne.
Parlons maintenant des étudiants, eux qui sont notre avenir, ceux qui vont forger notre société de demain. Ils ont un besoin vital d'avoir accès à l'éducation supérieure s'ils veulent faire face aux besoins de la nouvelle économie. Entre les voeux pieux de ce gouvernement, qui se dit très soucieux du sort des étudiants, et la réalité, il y a tout un monde. La Loi sur l'assurance-emploi n'encourage pas du tout les étudiants à étudier, au contraire.
Comme on le sait, de plus en plus d'étudiants travaillent à temps partiel et à temps plein l'été pour financer leurs études. Ils paient des cotisations sans toutefois pouvoir bénéficier du régime.
Il y avait plus de 2,8 millions d'étudiants à temps plein lors du dernier recensement en 1996. Le rapport de contrôle et d'évaluation de 1999 fait mention que près d'un million de personnes ont eu une rémunération inférieure à 2 000 $, ce qui leur donnait droit à un remboursement. Cependant, il n'y a eu que 40 p. 100 de ces personnes qui l'ont demandé, dont 42 p. 100 avaient moins de 25 ans. C'est donc près de 2,6 millions d'étudiants qui se sont fait taxer par le régime d'assurance-emploi alors qu'ils essayaient de financer leurs études.
Les règles d'admissibilité à l'assurance-emploi sont une véritable clause orphelin. En effet, les jeunes nouvellement arrivés ont plus de restrictions pour avoir accès au régime. Plutôt qu'un minimum de 300 heures, soit 20 semaines de 15 heures par semaine, il faut maintenant 910 heures pour les nouveaux arrivants sur le marché du travail, soit l'équivalent de 26 semaines de 35 heures pour se qualifier. C'est absolument inadmissible.
De plus, comment expliquer un régime qui est censé bénéficier à ceux et celles qui y contribuent et qui ont subi une chute de 28 p. 100 de leurs prestations entre 1993 et 1999, alors que le nombre de personnes recevant des prestations dites ordinaires s'effondrait de 52,4 p. 100.
Comment expliquer qu'en l'an 2001, avoir un enfant et donner la vie est un événement que, selon le gouvernement fédéral, on doit punir?
Aux yeux du gouvernement, le fait d'avoir un enfant doit maintenant être pénalisé. Pour punir ces femmes, le gouvernement fédéral et la ministre du Développement des ressources humaines, qui est une femme, ont décidé que pour avoir droit aux prestations de maternité ou aux prestations parentales, 600 heures seront bientôt exigées. Alors qu'un travailleur dans une région à fort taux de chômage peut avoir droit à ses prestations d'assurance-emploi après 420 heures, une femme dans la même région ne pourra avoir droit à ses prestations de maternité à moins d'en faire 600. Auparavant, c'était l'équivalent de 300 heures, donc 20 semaines de 15 heures, qui étaient exigées. Voilà le sens moral de ce gouvernement.
De son côté, le Bloc québécois, comme parti politique responsable qui veut répondre aux besoins des chômeurs et des travailleurs et travailleuses, serait donc prêt à voter rapidement en faveur du projet de loi C-2, mais à une condition essentielle, c'est que le projet de loi soit scindé en deux projets de loi distincts.
Le premier projet de loi suggéré par le Bloc québécois aurait pour objet de pallier les urgences, en vue d'aider les travailleurs qui ne sont pas adéquatement couverts par le régime. Le Bloc québécois souhaite que le nouveau projet de loi inclut, entre autres, l'abolition de la discrimination envers les jeunes et les nouveaux arrivants sur le marché du travail—910 heures pour se qualifier—, la hausse de la couverture de la rémunération assurable de 55 p. 100 à 60 p. 100, l'uniformisation des règles d'admissibilité pour les travailleurs saisonniers et l'abolition du délai de carence.
Le deuxième projet de loi concernerait des mesures à long terme à être débattues en comité. Le Bloc québécois préconise notamment la création d'une caisse autonome de l'assurance-emploi et l'assurabilité des travailleurs autonomes.
En terminant, sans cette division, il est hors de question que le Bloc québécois appuie ou donne son aval à un détournement de fonds de 30 milliards de dollars que l'on retrouve dans la caisse de l'assurance-emploi et à un projet de loi discriminatoire qui ne répond en rien aux véritables besoins des chômeurs et des travailleurs du Québec et du Canada.
[Traduction]
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir dans le débat sur le projet de loi ayant pour objet d'améliorer notre programme d'assurance-emploi pour qu'il aide davantage les chômeurs canadiens. À l'instar de mon collègue d'Oak Ridges qui a pris la parole tout à l'heure, je m'arrêterai sur les parties du projet de loi qui traitent de la famille.
Je crois que vous savez, monsieur le Président, que, depuis son élection en 1993, le gouvernement centre l'attention sur les enfants et les familles. En fait, malgré les compressions budgétaires que nous avons appliquées, nous avons consacré du nouvel argent aux programmes de soins prénatals et postnatals, et au soutien aux familles avec enfants. Dans ma circonscription, par exemple, le centre d'enrichissement familial, qui est maintenant le centre des ressources pour la famille, a reçu des fonds considérables à l'époque, de sorte que tout le monde sait que le gouvernement aide les enfants et raffermit les familles. Ce genre d'investissement est encore plus précieux quand les temps sont difficiles, parce qu'il permet d'investir réellement dans l'avenir, c'est-à-dire, nos enfants.
Dans le cas de ce projet de loi concernant l'assurance-emploi, d'importantes modifications sont prévues qui auront un impact sur les familles. Déjà, dans le but d'aider les enfants, nous avons créé la Prestation nationale pour enfants. Ce programme entre le gouvernement fédéral et les provinces et les territoires compte parmi les plus innovateurs des dernières décennies. Il vise directement à lutter contre la pauvreté chez les enfants. Tous les députés conviendront, je pense, que c'est un problème auquel nous devons maintenant nous attaquer. Pour ce qui est du projet de loi concernant l'assurance-emploi, les prestations pour enfants aident les parents à rester sur le marché du travail tout en élevant leurs enfants.
Nous avons amélioré les prestations et les services pour les familles à faibles revenus et leurs enfants. Nous avons diminué le nombre des obstacles auxquels étaient confrontées de nombreuses familles démunies obligées de renoncer à l'assistance sociale et de travailler. Particulièrement en Ontario, ces obstacles sont graves, notamment la discrimination dont sont victimes les familles bénéficiant de l'assistance sociale, surtout quand elles en arrivent au stade où elles doivent accepter des emplois faiblement rémunérés pour accroître leurs revenus.
Les prestations pour enfants portent à 1,7 milliard de dollars le total des prestations fédérales versées au titre des enfants annuellement aux familles à faibles revenus. Avec cet argent, ces familles peuvent mieux nourrir, vêtir et loger leurs enfants. Grâce aussi à cet argent, ces enfants bénéficient de meilleures chances dans la vie.
Afin de nous assurer de faire le maximum pour aider les enfants à sortir du cycle de la pauvreté, nous comptons effectuer un troisième investissement important dans la prestation nationale pour enfants d'ici 2002. Cela signifie que, d'ici à 2004, le plafond des prestations versées aux familles à faibles revenus passera à 2 400 $ pour le premier enfant et à 2 200 $ par enfant pour les suivants.
Une famille avec deux enfants à charge pourrait toucher d'ici à 2004 jusqu'à 4 600 $ pour l'éducation de ces enfants. Beaucoup d'autres programmes aident aussi les familles canadiennes. Dans ce cas, le programme de l'assurance-emploi joue un rôle. Il s'agit de veiller au bien-être des familles et de garder les parents au travail et, s'ils ont perdu leur emploi, de les remettre sur le marché du travail dans les meilleurs délais.
Le supplément familial est une autre initiative qui vient compléter jusqu'à concurrence de 80 p. 100 les prestations versées aux membres de familles gagnant de faibles revenus et comptant des enfants à charge. Encore une fois, l'accent est mis sur les familles avec enfants à charge.
Au 31 décembre 2000, nous avons amélioré les prestations parentales pour permettre aux parents de consacrer plus de temps aux jeunes enfants pendant leurs tendres années.
Grâce aux changements proposés dans le projet de loi au programme d'assurance-emploi, nous avancerons d'un autre pas en procurant plus d'argent aux familles des prestataires et en solutionnant certains problèmes dont les Canadiens ont fait état.
Nous avons appris que la règle d'intensité, qui visait à réduire la dépendance à l'égard de l'AE et à inciter les gens à travailler, n'a tout simplement pas été efficace. Cette règle réduisait le taux des prestations des réitérants d'un point de pourcentage pour chaque période de 20 semaines de prestations reçues au cours des cinq dernières années. Cette caractéristique n'a pas fait baisser le recours répété au régime d'AE, partiellement parce que, dans les régions où le taux de chômage est élevé, bon nombre de travailleurs ne peuvent tout simplement pas trouver un autre emploi en dehors de leur saison de travail.
Le projet de loi dont nous sommes saisis propose d'éliminer la règle d'intensité. J'ai fait campagne en promettant cette mesure et je l'appuie. Cela ne signifie pas que nous acceptons les hauts niveaux de chômage dans les collectivités en cause. Notre défi est maintenant de travailler de concert avec les provinces, les territoires, les groupes de gens d'affaires et les leaders des collectivités pour trouver des solutions locales qui amélioreront les possibilités d'emploi dans ces régions où le taux de chômage est élevé.
Les Canadiens nous ont aussi dit que la récupération réduisait parfois les prestations de gens à revenu moyen. Dans un tel cas, on retire de l'argent à des familles où le budget est serré. Le projet de loi propose de relever de 39 000 $ à 48 750 $ le seuil du revenu net où s'applique la récupération pour les réitérants. Dorénavant, seuls les Canadiens à revenu élevé soient obligés de rembourser des prestations d'assurance-emploi. Cela soulagera les Canadiens à revenu moyen qui sont temporairement sans emploi.
Les Canadiens nous ont aussi dit qu'il n'est pas juste de récupérer les prestations des gens qui sont trop malades pour travailler ou qui veulent s'occuper de leurs enfants nouveau-nés ou nouvellement adoptés. Le projet de loi exempterait donc de tout remboursement de prestations ceux qui reçoivent des prestations de maternité ou de maladie ou des prestations parentales.
Bon nombre de parents réintégrant la population active après s'être occupés de jeunes enfants nous ont aussi dit qu'il leur est difficile d'être admissibles aux prestations régulières en raison des dispositions actuelles du régime d'AE s'appliquant dans leur cas. Par conséquent, le projet de loi uniformiserait les règles du jeu en portant à quatre ans la soi-disant période rétrospective dans le cas des parents qui redeviennent membres de la population active. C'est donc dire que les personnes ayant touché des prestations parentales, d'AE ou de maternité au cours des quatre années ayant précédé la période de référence actuelle de deux ans auront besoin du même nombre d'heures que d'autres personnes pour avoir droit aux prestations régulières. C'est tout à fait équitable.
Ce changement est tout particulièrement bien avisé compte tenu des engagements pris par le gouvernement à l'égard des familles avec enfants dans le cadre d'initiatives, dont la prolongation de la prestation parentale, qui visent à aider les parents à faire l'équilibre entre les exigences du travail et de la famille pendant que leurs enfants sont très jeunes.
Il convient aussi de souligner que nous profitons de ce projet de loi pour proposer une modification du règlement sur la pêche afin que les pêcheurs autonomes puissent tirer parti de l'amélioration des prestations parentales, de maternité et de maladie. Cette mesure aurait un effet rétroactif au 31 décembre 2000, date à laquelle les améliorations sont entrées en vigueur pour les autres prestataires de l'AE.
Beaucoup de parents nous ont dit souhaiter que les taux de cotisation à l'AE demeurent à un niveau modéré afin de pouvoir conserver une plus grande partie de leur salaire pour faire l'acquisition des produits de première nécessité. Par conséquent, le taux de cotisation a été réduit de 15 cents, passant de 2,40 $ en l'an 2000 à 2,25 $ en l'an 2001. C'est la septième réduction de cotisation consécutive, mesure qui se traduit par une économie de milliards de dollars pour les travailleurs et les membres de leur famille.
À mon avis, globalement, ces changements sont une bonne nouvelle pour un grand nombre de prestataires de l'AE et les membres de leur famille. Ils laissent plus d'argent à ces familles. Ils éviteront aux prestataires touchant pour la première fois des prestations spéciales et aux prestataires d'AE à revenu moyen d'avoir à rembourser leurs prestations. Ces changements favorisent aussi la transition cruciale de réintégration de la population active dans le cas des parents qui quittent le marché du travail pour s'occuper de leurs enfants.
Monsieur le Président, ce fut pour moi un plaisir de m'adresser à vous pour la première fois. Je vous félicite de votre nomination et j'ai l'intention d'appuyer cette mesure législative.
* * *
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des discussions entre tous les partis, et vous constaterez que la Chambre consent à ce qui suit:
Que les votes par appel nominal prévus pour aujourd'hui à la fin de la période prévue pour les Affaires émanant du gouvernement soient dans l'ordre suivant:
toutes questions nécessaires pour disposer de la motion de la journée des crédits, inscrite au nom du chef de l'opposition;
toutes questions nécessaires pour disposer de la deuxième lecture du projet de loi C-2;
toutes questions nécessaires pour disposer de la deuxième lecture du projet de loi C-8;
la motion principale portant sur l'Adresse en réponse au discours du Trône.
Je crois savoir qu'il y aura une autre motion, une motion pro forma, une fois la motion adoptée.
Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre a entendu le texte de la motion. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
[Français]
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi et le Règlement sur l'assurance-emploi (pêche), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, c'est mon premier discours en cette 37e législature. J'ai eu l'occasion, à quelques reprises, de poser des questions ou de faire des commentaires, mais c'est mon premier discours, et il porte sur le projet de loi C-2 sur l'assurance-emploi. C'est le deuxième projet de loi déposé à la Chambre des communes depuis le début de la législature.
D'entrée de jeu, je dois tout d'abord remercier les électeurs et les électrices de Charlevoix, tous les travailleurs, tous les chômeurs et chômeuses, tous les travailleurs saisonniers, car nous avons mené une bataille de tous les instants depuis la réforme Axworthy—devenue la réforme Young, devenue la réforme d'autres ministres depuis le temps—au sujet de laquelle le gouvernement s'est pourtant engagé en campagne électorale.
Le premier ministre et son gouvernement reconnaissaient que dès la rentrée parlementaire, ils étaient prêts à corriger leur erreur et à améliorer en profondeur le projet de loi.
Aujourd'hui, on se penche sur le projet de loi C-2, qui remplace le défunt projet de loi C-44. Pourtant, lors de la campagne électorale, le premier ministre disait que si le projet de loi C-44 n'avait pas été adopté en troisième lecture à la Chambre des communes, c'est parce que le Bloc québécois s'était opposé à son adoption à toute vapeur.
Le projet de loi C-44 n'a pas été adopté en troisième lecture à cause d'une stratégie ministérielle. Le premier ministre a décidé de déposer un projet de loi, à la toute fin des activités parlementaires, au mois de juin, afin de faire avaler aux parlementaires les première, deuxième et troisième lectures, et peut-être la sanction royale pendant l'été.
Voyant que cela ne faisait pas l'unanimité à la Chambre des communes, que cela ne faisait pas l'unanimité parmi les travailleurs des régions et des employeurs, que cela ne recueillait pas l'unanimité des organismes sociaux ou des mouvements de femmes et autres, le premier ministre s'est dit que se présenter en campagne électorale avec un tel projet de loi serait comme aller à l'abattoir. Donc, il a décidé de le retirer et de ne pas le présenter en troisième lecture.
Lors de la dernière campagne électorale, il a promis à la population de déposer un projet de loi, celui que nous étudions aujourd'hui, mais on ne permet pas aux parlementaires d'en débattre en profondeur. Ce devait être un projet de loi modifié en profondeur. On a besoin de faire connaître au gouvernement, principalement à la ministre du Développement des ressources humaines et au premier ministre, les inquiétudes des gens face à ce projet de loi qui, selon nous, n'a aucune valeur.
Selon nous, ce projet de loi ne fait que permettre au gouvernement de corriger une partie de son erreur. Dans la réforme, il avait diminué les règles d'intensité et réduit le taux pour le faire passer de 55 p. 100 à 50 p. 100. C'est ainsi qu'il pénalisait les travailleurs saisonniers de 1 p. 100 par année.
La ministre a reconnu cette erreur. Plusieurs régions ont cru aux promesses du gouvernement, devant les surplus accumulés de 30 milliards de dollars, strictement dans la caisse de l'assurance-emploi, et les surplus budgétaires du gouvernement et du ministre des Finances, à cause des coupures dans les paiements de transfert en santé et en éducation, bref, dans un paquet de domaines.
Mais Charlevoix n'a pas cru aux promesses du gouvernement, parce qu'on a vu ce qui s'est passé en Gaspésie. En Gaspésie, il y a eu des fermetures d'usines et une augmentation du taux de chômage. Le gouvernement a essayé de régler le problème ou de l'atténuer, en Gaspésie, au détriment de la Côte-Nord, du Saguenay—Lac-Saint-Jean et du Bas-Saint-Laurent, en enlevant dans une région pour le donner à la Gaspésie.
C'est un peu ce que fait le gouvernement aujourd'hui. Lorsqu'il donne de la main droite, il reprend de la main gauche. Et là, pour essayer de compenser pour la somme d'argent qu'il devait investir pour augmenter le nombre de semaines assurables en Gaspésie, il a décidé de faire un nouveau découpage des régions économiques et de fusionner la Côte-Nord et le Bas-Saint-Laurent, ce qui a eu pour effet de suggérer, comme mesure transitoire, une proposition inacceptable pour les travailleurs saisonniers chez nous. Par exemple, on proposait 525 heures de travail pour 21 semaines assurables.
Déjà avec 420 heures, six personnes sur dix qui paient des cotisations à l'assurance-emploi n'y ont pas droit, c'est-à-dire les travailleurs saisonniers qui travaillent dans le domaine du tourisme, dans le domaine forestier, dans le domaine des pêches et dans différents domaines dans lesquels l'employabilité est saisonnière.
La ministre m'a dit: «Monsieur le député, on aimerait bien, chez vous, essayer de prolonger les saisons.» Eh bien, je voudrais bien, moi, mettre un dôme par-dessus les tourbières pour qu'on puisse en faire la cueillette plus longtemps, mais cela n'est pas possible.
Nous avons également examiné la possibilité de mettre un dôme au-dessus du massif de la petite rivière Saint-François et de réfrigérer la neige artificielle afin de faire du ski jusqu'au mois d'août, mais cela aussi est impossible.
On se penche sur différents moyens de faire de l'exploitation forestière quand il y a 5, 6, 7 ou 8 pieds de neige durant l'hiver, mais cela est tout aussi impossible.
Lorsque la ministre demande de prolonger les saisons dans nos régions, je pourrais également parler de l'industrie touristique. Pour ceux qui possèdent des terrains de camping, lorsque les gens fêtent le Noël du campeur, c'est au mois d'août que cela se fait, pas le 25 décembre. À cette date, ça fait bien longtemps que les terrains de camping sont fermés. On peut développer différents aspects touristiques à différentes saisons, mais lorsqu'on fête le Noël du campeur sur un terrain de camping, c'est au mois d'août qu'on le fait et non au mois de décembre.
La ministre du Développement des ressources humaines, le ministre du Revenu national et le secrétaire d'État au Sport amateur ont sillonné les régions pendant la campagne électorale, pour nous informer des mesures transitoires qui avaient été mises de l'avant. Ils reconnaissaient que ce serait difficile pour ceux qui s'étaient qualifiés aux 525 heures pour 21 semaines, qu'il y avait une zone grise.
Mais nous sommes rendus dans cette zone grise, car à compter du 15 février, les gens n'auront plus de chômage. Actuellement, dans mon comté, les gens n'ont plus de chômage et ils ne reprendront probablement pas le travail avant le 1er juin. Ils se retrouvent donc dans cette fameuse zone grise. Ils n'ont donc aucun revenu. Il y a 30 milliards de dollars dans la caisse de l'assurance-emploi, et les gens ont besoin de leurs chèques de prestations d'assurance-emploi pour payer leur loyer, leur résidence, leur nourriture, le pain et le beurre pour mettre sur la table. Mais en ce moment, les gens se retrouvent dans la zone grise.
On verra probablement, dans les jours qui vont suivre, que selon Statistique Canada, le taux de chômage aura miraculeusement baissé dans Charlevoix. En février, ça va baisser, en mars, ça va baisser également, de même qu'en avril. Statistique Canada va nous produire ces chiffres. Bien sûr, car ce sont des chèques de moins qu'ils donnent, parce que les gens ne se qualifient plus, ils n'ont plus droit à l'assurance-emploi.
Lorsque les gens ne reçoivent plus de prestations d'assurance-emploi—c'est un peu le principe des vases communicants—cela diminue le taux de chômage selon les chiffres de Statistique Canada. Mais la sécurité du revenu au Québec augmente, parce que, souvent, parmi ces gens-là, il y en a qui n'ont d'autres choix que d'avoir recours à l'aide sociale.
Lorsque nous avons recours à l'aide sociale, ce sont les Québécoises et les Québécois qui paient à 100 p. 100. Pourtant, les cotisations d'assurance-emploi ne sont nullement la propriété du gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral a, selon moi, un pouvoir de législateur et non d'ingérence. C'est malheureux qu'aujourd'hui, nous soyons obligés de débattre afin de faire comprendre au gouvernement que le projet de loi qu'il s'apprête à faire approuver va peut-être corriger une partie de ses erreurs.
Cependant, lorsque le gouvernement nous avait promis d'étudier le projet de loi en profondeur, nous, au Bloc québécois, lui avions dit: «C'est de l'argent qui appartient à l'employé et à l'employeur. Nous vous proposons un comité parlementaire pour scinder le projet de loi en deux afin de corriger les erreurs que vous avez commises en diminuant la règle d'intensité de 55 p. 100 à 50 p. 100.» Si nous corrigeons cette erreur, nous pouvons immédiatement améliorer cette règle. Nous serions favorables de l'augmenter à 60 p. 100 au lieu de 50 p. 100 à 55 p. 100. Nous proposons de rendre uniformes les règles d'admissibilité à l'assurance-emploi.
Pourquoi un nouvel arrivant sur le marché du travail doit, pour être admissible à l'assurance-emploi, accumuler 910 heures? Quelqu'un qui travaille de 32 à 35 heures par semaine pendant 10 à 12 semaines et qui paie des cotisations à l'assurance-emploi n'y a pas droit. Nous demandons que cela soit aboli. Nous demandons de fixer le nombre d'heures à accumuler à 300 heures pour tout le monde. À ce moment-là, cela deviendra plus facile.
Nous proposons également d'abolir les deux semaines d'attente. Pourquoi deux semaines d'attente? Nous rencontrons quelqu'un qui vient de perdre son emploi et qui vient de toucher sa dernière semaine de salaire, et il nous dit: «Je suis en semaines d'attente. J'ai deux semaines d'attente.» Cela prend un mois avant que la personne puisse toucher des prestations d'assurance-emploi.
Le Bloc québécois va voter contre le projet de loi C-2 quoique nous sachions qu'il va améliorer les choses et corriger les erreurs du gouvernement qui a pigé dans la caisse. Nous savons toutefois que cela permet au gouvernement de s'approprier les surplus de la caisse de l'assurance-emploi. C'est inacceptable. Nous l'avons toujours dénoncé et les centrales syndicales et les organismes sociaux font de même. Pour notre part, nous allons continuer à dénoncer cette pratique. C'est pour cela que nous, au nom des travailleurs saisonniers de Charlevoix, allons voter contre le projet de loi parce que nous trouvons cela inacceptable.
[Traduction]
M. John Cannis (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'ai félicité les autres occupants du fauteuil, mais c'est la première fois que j'ai l'occasion de vous féliciter de votre nouveau poste.
Tout au long des débats de la journée, les députés des deux côtés de la Chambre ont parlé des détails techniques, des statistiques, des heures, des prestations, de la récupération, etc. Je voudrais quant à moi parler des contributions au régime d'assurance-emploi. Je vais ensuite rappeler ce qu'était le régime il y a 40 ou 50 ans, le comparer au régime actuel, voir quelle a été l'évolution et quel est l'objet du régime, et expliquer pourquoi nous avons dû apporter des changements lorsque nous avons formé le gouvernement, en 1993.
Vous vous en souvenez, monsieur le Président, car vous étiez aussi député à l'époque, Nous avons complètement révisé le système. Mes collègues de Brampton-Centre et de Parkdale—High Park et moi avons travaillé de concert pour moderniser le programme.
Le député de Calgary-Ouest a fait des observations sur lesquelles je voudrais revenir. La députée bloquiste de Mercier a aussi pris a parole concernant le programme. À tous mes collègues, je dis que nous devrions saisir cette occasion, non seulement pour parler du projet de loi même, qui sera renvoyé au comité qui y apportera des amendements, mais aussi pour expliquer à ceux qui nous écoutent et nous regardent ce que représentent les cotisations à l'assurance-emploi.
Tout d'abord, je signale qu'en 1993 les cotisations à l'AE était de 3,30 $ par tranche de 100 $. C'est l'héritage que nous ont laissé M. Mulroney et l'actuel chef du Parti conservateur. Depuis sept ans, ce montant a diminué pour s'établir à 2,25 $ par 100 $, comme mon collègue de Peterborough l'a mentionné plus tôt. Quand on additionne ces cents, comme quelqu'un l'a dit, cette baisse est de plus de 1,05 $ par 100 $. Par ailleurs, deux millions de chômeurs ont décroché un emploi depuis 1993, ce qui représente des milliards de dollars.
Il y a une différence fondamentale ici que l'opposition ne veut pas admettre. En 1993, le taux de chômage au Canada était de 11,4 p. 100. Aujourd'hui, Dieu merci, il est de 6,5 ou 6,6 p. 100. Au cours des sept dernières années, plus de deux millions de Canadiens sont venus grossir le facteur emploi de l'équation. Qu'est-ce que cela veut dire? C'est bien simple. Avant 1993, deux millions de Canadiens retiraient de l'argent du système d'assurance-chômage, qui était dans un piteux état. Aujourd'hui plus de deux millions de travailleurs mettent de l'argent dans le système.
Heureusement, de nos jours, nous sommes en mesure de profiter d'excédents que nous pouvons réinvestir, des excédents auxquels les chômeurs peuvent avoir accès. Le député bloquiste a parlé d'études supérieures tantôt. Ces excédents servent à aider nos jeunes à atteindre des niveaux d'éducation plus élevés ou à se recycler pour devenir peut-être des programmeurs, des ingénieurs ou des graphistes.
De nombreuses personnes voient d'un mauvais oeil les cotisations à l'assurance-emploi. Quand j'étais employeur, je devais contribuer entre autres au Régime de pensions du Canada et au régime d'assurance-chômage. Je suis prêt à parier que la plupart des députés dans cette enceinte conduisent une automobile et possèdent une maison, tout comme le Canadien moyen. Tous ces gens achètent une forme d'assurance. J'en ai assez d'entendre les députés de l'opposition dire, comme l'a fait le député de Calgary-Ouest, que nous volons les gens. Il a parlé des pages, ce qui était tout à fait injustifié.
Je conduis une automobile. Chaque année, je paie mes primes d'assurance automobile. J'espère ne jamais avoir d'accident. Je paie ces primes pour le jour où j'aurai besoin d'une assurance. Personne ne cotise à l'assurance-emploi dans l'intention de s'en prévaloir.
Il se trouve qu'il y a dans la région de l'Atlantique, en Ontario, en Colombie-Britannique et dans d'autres régions du pays des gens qui sont malheureusement des travailleurs saisonniers. Il y a des femmes chefs de famille monoparentale en Ontario, en Saskatchewan et dans d'autres régions du pays qui travaillent à temps partiel pour compléter leurs revenus afin de pouvoir acheter des bottes à leurs enfants pour l'hiver. Elles souhaitent peut-être subventionner des programmes scolaires dans lequel le gouvernement sabre en Ontario, par exemple. Va-t-on pénaliser les mères ou les pères chefs de famille qui essaient de subvenir aux besoins de leur famille? Certainement pas.
Notre collègue bloquiste a déclaré plus tôt que nous réparions aujourd'hui une injustice. Je me rappelle que mon père disait que l'erreur est humaine et le pardon divin. Aujourd'hui, nous essayons de changer cette situation. Nous disons que nous nous sommes peut-être trompés. Durant la campagne électorale, lorsque le premier ministre se trouvait dans les provinces de l'Atlantique, il a déclaré que nous allions remédier à la situation. C'est ce qui se passe aujourd'hui. Nous apportons des ajustements à ce programme par l'entremise du projet de loi C-2.
Je m'offusque d'entendre l'opposition parler des excédents. Je reviens à mon analogie au sujet de l'assurance. Les personnes qui n'ont pas d'accidents voient leurs primes d'assurance baisser dans une certaine mesure au fil des ans. Nous cotisons au régime d'assurance-emploi et en touchons des prestations. Toutefois, si le régime d'assurance-emploi est utilisé sans cesse, on prendra des dispositions pour contrebalancer cela sous une forme ou une autre.
Dans le rapport de contrôle et d'évaluation pour 2000, on disait qu'en 1999-2000, 400 000 emplois environ seraient créés. L'avenir nous dira si cela s'est révélé vrai, une fois que nous aurons les statistiques pertinentes.
Supposons que 400 000 emplois soient créés, principalement des emplois à temps plein. Cela veut dire que 400 000 personnes ne se prévaudront plus de l'assurance-emploi. Elles cotiseront à la caisse d'AE. Personne n'aurait pensé, il y a sept ans, que nous serions aujourd'hui dans cette situation enviable, où l'on parle de réinvestir dans notre pays, de réinvestir dans l'enseignement supérieur pour les jeunes, et de réinvestir dans les soins de santé.
Ils parlent du Régime de pensions du Canada. C'est vrai qu'il y a eu une légère augmentation. À son arrivée au pouvoir, le gouvernement savait qu'il devait faire quelque chose à ce sujet. L'ancien gouvernement conservateur n'avait pas voulu prendre cette responsabilité, pas plus que l'ancien chef du Parti conservateur. Ils avaient la possibilité de faire de tels changements et de s'entendre avec les provinces, mais ont décidé de ne pas le faire. Ils ont eu peur de le faire. Nous avons pris cette décision avec les provinces. Certes, le taux de cotisation a légèrement augmenté, mais quand on compare la réduction du taux de cotisation à l'AE à l'augmentation du taux de cotisation au RPC, je pense que ce n'est pas si mal.
Il faut que les Canadiens sachent que toutes les augmentations du taux de cotisation au Régime de pensions du Canada doivent être faites avec l'accord de toutes les provinces. Le gouvernement ne peut pas seul augmenter arbitrairement le taux de cotisation au RPC. Sans vouloir entrer dans les détails du projet de loi C-2, j'en profite pour le dire aux Canadiens de façon à ce qu'ils le sachent.
Les gens parlent d'excédents. Je suis heureux, en tant que représentant du gouvernement, de pouvoir leur dire à quoi ont servi ces excédents, pour qu'ils sachent que nous ne sommes pas en train de voler les Canadiens. Le système mis en place en 1940 pour aider les Canadiens est un système juste et équitable.
En terminant, j'encourage tous les députés à appuyer ce projet de loi.
[Français]
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup d'intérêt que je suis les débats qui se déroulent depuis ce matin, surtout bien sûr après que le parti au pouvoir nous ait imposé un bâillon, lequel avait pour but de justement nous empêcher de parler davantage et peut-être de scruter plus profondément tout ce régime de l'assurance-emploi qui gouverne les dispositions relatives aux travailleurs et au travail au Canada et au Québec.
Il faut bien comprendre que l'assurance-emploi est un genre d'assurance mutuelle, qui existe beaucoup au Québec, quoique de moins en moins maintenant parce qu'on tente de démutualiser ce qui était mutuel.
Pour le gouvernement fédéral, la façon de procéder et de concevoir le régime d'assurance-emploi au Canada était de garantir une véritable assurance mutuelle. Ainsi, les travailleurs, inquiets de perdre un jour leur emploi, ont décidé de cotiser un certain montant pour se créer un fonds qui, dans les jours un peu plus sombres ou noirs, servirait à leur assurer une certaine continuité dans la vie de tous les jours, c'est-à-dire de pouvoir faire face à leurs obligations, la première étant, primo vivere, de manger. C'était le but de l'assurance-emploi.
Malheureusement, ce gouvernement est incapable de dire aux citoyens et aux citoyennes du Canada ses véritables objectifs. Il est incapable de dire les choses telles qu'elles sont et de dire que, pour enrayer cette dette accumulée et presque incommensurable de 680 milliards de dollars, il faudra hausser soit les taxes de vente, soit les taxes sur le carburant déjà passablement élevées ou carrément augmenter les impôts.
Mais non, le gouvernement fédéral préfère faire main basse sur des fonds accumulés pour le bénéfice des contribuables. Des fonds qui ne sont pas destinés à l'usage du gouvernement pour éponger sa dette, pour éponger les déficits accumulés au cours des années par son souci de prouver que le fédéralisme est rentable, de montrer à tout le monde que cela fonctionne bien de son côté et qu'il marche dans le trèfle jusqu'aux genoux. C'est faux. Il prend l'argent là où il n'aurait jamais dû le prendre. Et le vérificateur général du Canada, récemment, l'a bien dit.
J'écoutais le précédent intervenant dire: «C'est bien. On a réduit, depuis qu'on est au pouvoir, la contribution des travailleurs de 3 $ à quelque 2 $.» Ce sont des sommes considérables réinjectées dans l'économie. Il y a peut-être cinq ans, on aurait pu maintenir le régime actuel d'assurance-emploi sans imposer un sou aux travailleurs, parce que les fonds accumulés étaient tels qu'on aurait pu répondre aux besoins de ceux et celles qui y ont cotisé.
Toutefois, on n'a pas eu ce courage politique, le courage de dire qu'il faut augmenter les taxes, les impôts, pour réduire le déficit accumulé. Au contraire, on a fait comme si de rien n'était. On a changé les règles de l'assurance-emploi; 42 p. 100 seulement y ont droit. Pourtant 100 p. 100 y cotisent, à partir de la première minute travaillée. Mais ça, c'est passé sous silence.
C'est comme si vous preniez une assurance sur votre propriété et que votre assureur vous disait: «Si tu passes au feu, tu as quatre chances sur dix qu'on paie. Mais paie ta prime à 100 p. 100 et prie le bon Dieu pour ne pas passer au feu.» C'est un peu ça.
Le vérificateur général est venu ici, récemment, et a appuyé les dires de l'opposition. Il n'y a aucune base, aucun calcul pour établir scientifiquement la base de contribution des travailleurs et travailleuses au régime d'assurance-emploi. On y va au pif. Ça va pas pire. Comme une grosse partie de notre dette est due à l'extérieur du Canada, selon la fluctuation des taux d'intérêt sur le marché international, on baisse ou on maintient au même niveau, pour un certain temps, les contributions au régime d'assurance-emploi, sans aucune espèce de capacité d'évaluer objectivement et correctement les besoins du régime.
C'est certain que si on engloutit et si on met à la charge du fonds de l'assurance-emploi la dette nationale accumulée de tout près de 600 milliards, on ne pourra jamais cotiser assez pour éponger cette dette-là. Est-ce que c'était le but véritable de l'assurance-emploi lorsqu'elle a été créée? N'oubliez pas qu'elle résulte d'une entente fédérale-provinciale, une modification à la Constitution qui, en 1943, je crois, a transféré de la compétence provinciale au fédéral tout le secteur de l'assurance-emploi.
On leur a fait confiance. Voyez ce que cela donne. Au Québec maintenant, on est habitués de composer avec cela. Et on ne se fait plus d'illusions avec ces gens-là. C'est pour cela que les gens de ce côté-ci préfèrent sacrer leur camp avec le peu qu'il leur reste encore aujourd'hui, parce que dans quelques années, il ne nous restera plus rien.
En ce qui a trait au système de santé, ils contribuaient 50 p. 100 dans le système de santé des provinces auparavant, mais maintenant, ils en sont rendus à contribuer à peine 15 p. 100. Mais ils fixent les normes, par exemple. On les invite au restaurant, c'est nous autres qui paient, mais c'est eux autres qui décident du menu. Il faut avoir un front de boeuf pour faire cela. C'est l'histoire du parti d'en face.
Parlons de la place réservée aux femmes dans ce projet de loi, les femmes et les congés parentaux. Il y a des études—ce n'est pas moi qui le dis, ils les connaissent aussi bien que moi—qui ont prouvé que les moins bien payées, ce sont les femmes. S'il y a quelqu'un qui en sait quelque chose, ce sont bien elles, parce qu'elles sont allées jusqu'en Cour d'appel fédérale pour contester l'équité salariale. Ils payaient leurs femmes moins cher que leurs hommes. Ils se le sont fait dire par plusieurs tribunaux, et des tribunaux administratifs successifs. Ils ont menacé jusqu'à la dernière minute d'aller jusqu'à la Cour suprême du Canada avec cette affaire, pour ne pas reconnaître aux femmes qu'à travail égal, salaire égal.
C'est la même chose en ce qui concerne l'assurance-emploi. Les mêmes vieux principes qui les gouvernent depuis toujours refont surface. Une travailleuse enceinte n'a pas droit aux prestations, à moins d'avoir accumulé 600 heures de travail. Il n'y a aucune exception à cette règle. Il y a des femmes enceintes qui, par la nature même de leur travail, exposées qu'elles sont à certains dangers, aux ordinateurs, aux rayons radioactifs ou à des choses de cet ordre, doivent, même avant d'avoir accumulé les 600 heures, quitter leur travail, sur recommandation de leur médecin.
Il n'y a pas d'exception de prévue dans le projet de loi pour ce genre de cas. Non, ce sont des règles strictes. Il n'y a jamais d'ombre pour le parti au pouvoir. C'est dura lex, sed lex. C'est la loi, ce sont eux qui la font et ce sont eux qui la dictent.
Ce n'est pas vraiment dans la foulée de Salomon. Mon honorable collègue de Hochelaga—Maisonneuve suit, à temps perdu—je le dis bien—un cours de droit, mais ce n'est pas perdu.
Même si c'est à temps perdu, ce n'est pas perdu. Il est devenu un juriste convaincu et convaincant. Il va dire aux députés la même chose que je leur dis présentement. Le vérificateur général nous a dit: «Nous aurions pu anéantir pour plusieurs années à venir encore les cotisations au régime d'assurance-emploi.» Le gouvernement aurait encore été capable de maintenir le programme. C'est 30 milliards de dollars que le gouvernement va prendre dans la poche de ceux qui triment et qui suent le sang de leur coeur pour gagner leur vie. Ces milliards vont servir à éponger la dette accumulée du Canada pour couvrir les dépenses somptuaires et les repas gargantuesques que ce gouvernement s'est payés, au fil des ans.
C'est 2,8 milliards de dollars—je vous vois, monsieur le Président, opiner du bonnet—pour l'ambassade du Canada à Tokyo. On laisse tomber un billet de 5 000 $ qui ne couvre même pas la valeur et la surface du terrain de l'ambassade. C'est incroyable, un faste semblable. Et le gouvernement garde confinées dans une misère perpétuelle des jeunes femmes avec de jeunes enfants qui ont le malheur de perdre leur emploi. Le gouvernement n'a pas de scrupule à laisser crever ce monde-là. C'est cela, la pauvreté.
Quand nous parlons de pauvreté, c'est de celle-là dont il s'agit et non la pauvreté du milliardaire, d'un ami du parti au pouvoir qui, au lieu de faire 500 millions de dollars sur une transaction gouvernementale qui consiste à louer un édifice pour 40 ans, n'en a fait que 250 millions. Ce n'est pas lui, le pauvre. C'est surtout celle qui se présente au travail un matin et qui se fait dire: «Nous n'avons plus de travail pour toi.» C'est celle à qui le médecin dit d'arrêter de travailler parce qu'elle est enceinte et incapable de continuer son travail. Cette femme rend des services à la société. Je sais que mes amis d'en face sont totalement insensibles à ces misères.
[Traduction]
M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Monsieur le Président, je suis ravi de prendre la parole au sujet du projet de loi C-2. Avant de commencer, je voudrais formuler quelques observations au sujet de la dernière intervention concernant nos ambassades dans le monde.
Les ambassades jouent un rôle particulièrement important et le député d'en face le sait pertinemment. Elles sont importantes en ce qu'elles favorisent les échanges commerciaux et la création d'emplois, et c'est précisément ce sur quoi porte ce projet de loi. Peu importe les balivernes servies jusqu'ici à propos de ce que coûtent les ambassades. Il demeure que celles-ci sont un élément important du gouvernement du Canada. Je me félicite de ce qu'elles existent pour représenter le Canada dans le cadre de nos relations commerciales et autres un peu partout dans le monde.
Je me demande aussi pourquoi le député d'en face s'énerve à ce point en ce qui concerne notre ambassade alors que le Québec a entrepris d'ouvrir ses propres ambassades, lesquelles font double emploi avec celles que nous avons déjà en place. C'est là que se fait le véritable gaspillage, lorsque le gouvernement du Québec ouvre ses propres ambassades.
Comme je le disais tout à l'heure, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-2. Je suis particulièrement heureux des modifications proposées à la loi. C'est un gros progrès pour ce qui est d'améliorer le projet de loi présenté initialement.
Passablement de députés de ce côté-ci de la Chambre avaient de sérieuses préoccupations au sujet de certains passages du projet de loi, notamment la règle de l'intensité. Voilà pourquoi, en 1996, nous avons accueilli favorablement la proposition de surveiller les conséquences du projet de loi. Le projet de loi C-2, qui a pour objet d'apporter les modificatifs qui s'imposent, est le fruit de cette surveillance.
Nous tenons à ce que le programme de l'assurance-emploi fonctionne avec l'efficacité escomptée au départ, à savoir qu'il apporte un soutien temporaire aux travailleurs au chômage, pour les aider à réintégrer le marché du travail. Je suis heureux de constater qu'en général les dispositions du régime de l'assurance-emploi fonctionnent comme elles le devraient.
Je participe au débat pour expliquer les changements proposés à la règle de l'intensité. À l'origine, la règle de l'intensité visait à inciter davantage la population à travailler et à ne pas compter sur l'assurance-emploi comme soutien du revenu.
Certains ont pensé que la règle de l'intensité parviendrait à réaliser cet objectif en faisant passer de 55 à 50 p. 100 le taux de prestations chez les prestataires fréquents. Autrement dit, le taux de prestations baisserait d'un point de pourcentage pour chaque 20 semaines de prestations régulières perçues au cours des cinq dernières années.
La règle de l'intensité s'est avérée inefficace. Les rapports de suivi et d'évaluation révèlent que la proportion des prestations versées aux prestataires fréquents est demeurée stable, se maintenant à environ 40 p. 100. Cela s'explique bien sûr par la disponibilité du travail dans certaines régions. Dans un pays comme le Canada, les industries saisonnières sont naturellement nombreuses.
Le gouvernement a fait beaucoup pour créer les conditions économiques propices à la création d'emplois. Nous avons éliminé le déficit et lancé de nouvelles initiatives. Dans ma région, nous avons utilisé à meilleur escient l'agence de développement régionale, l'APECA. Nous sommes en train de mettre en oeuvre le Partenariat pour l'investissement dans le Canada atlantique et nous tentons de créer davantage d'emplois non saisonniers et d'emplois à plein temps et de prolonger les périodes de travail des industries saisonnières.
Ces initiatives et d'autres ailleurs au Canada ont contribué à améliorer le tableau de l'emploi en favorisant la création de plus de deux millions d'emplois depuis 1993. Il n'en demeure pas moins que dans un pays comme le Canada, il y aura toujours des industries saisonnières qui, de par leur nature, ont besoin de travailleurs saisonniers.
Mon collègue, le député d'Egmont, a parlé plus tôt de sa circonscription et des travailleurs saisonniers qui y travaillent. Ce sont des secteurs importants. Dans le secteur de l'agriculture et des pêches, les gens ne travaillent qu'à certaines périodes de l'année en raison de la nature de l'industrie et de notre climat. Toutefois, ces travailleurs sont importants pour notre économie. Ils contribuent grandement à l'économie.
Par conséquent, bien que la règle de l'intensité soit logique en théorie, dans la pratique nous nous sommes aperçus qu'elle n'empêchait pas le recours répété à l'assurance-emploi, spécialement dans les régions où il n'y a que peu de possibilités d'emploi. Nous craignons donc qu'elle soit devenue simplement une mesure punitive. J'appelle la règle de l'intensité une pénalité pour les travailleurs saisonniers. Le projet de loi propose de changer ça et de supprimer cette pénalité.
Le projet de loi propose d'éliminer complètement la règle de l'intensité et de restaurer le taux de prestation à 55 p. 100 pour toutes les demandes. Ces demandes, comme nous l'avons dit à maintes reprises dans le passé, seront rétroactives au 1er octobre 2000.
Le gouvernement demeure fermement déterminé à maintenir les objectifs des réformes de l'AE instaurées en 1996. Le programme s'appelle l'assurance-emploi. Il est conçu pour remplacer temporairement le revenu et pour aider les Canadiens à chercher et à obtenir un emploi.
Oui, l'économie canadienne se porte extrêmement bien, mais tous les Canadiens ne profitent pas pleinement des bénéfices d'une économie florissante. Dans chaque région, il y a encore des poches de chômage élevé. Les travailleurs de ces régions méritent que nous les aidions.
Je demande à tous les députés de noter que les changements que nous proposons ne toucheront pas uniquement les provinces de l'Atlantique. Parfois on nous colle cette étiquette. L'élimination de la règle de l'intensité profitera aux travailleurs forestiers de la Colombie-Britannique, aux travailleurs de la construction de l'Ontario et aux travailleurs du secteur touristique québécois. Ces travailleurs auront davantage d'argent à leur disposition et seront plus à même de nourrir leurs familles.
Je demande aux députés, pendant le débat, de ne pas oublier que l'assurance-emploi n'est qu'un des moyens d'aider les chômeurs. Nous conviendrons tous, certainement, que, pour multiplier les débouchés, il faut faire appel à un partenariat composé des provinces, des territoires, des localités, du monde des affaires et des organisations syndicales.
Je sais que les travailleurs saisonniers tiennent à améliorer leurs perspectives d'emploi. Ils comprennent que les solutions à long terme sont l'amélioration de leurs compétences et le développement économique de leur région. Le gouvernement libéral continuera de faire des efforts en ce sens en collaborant avec ses partenaires pour donner de l'expansion aux économies locales et les diversifier.
Les modifications proposées dans le projet aideront certainement les familles de ces travailleurs, si importants pour notre économie, des industries saisonnières. J'exhorte tous les députés à appuyer ces modifications pour que le projet de loi soit adopté rapidement. Ainsi, ceux qui travaillent pourront contribuer à notre économie, et ceux qui le font dans ces industries saisonnières et qui ont été injustement pénalisés par la règle de l'intensité verront cette règle disparaître et pourront toucher l'intégralité de leurs prestations, comme les modifications le prévoient.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir de prendre la parole sur cette mesure législative très importante, un projet de loi qui s'est fait beaucoup attendre.
Avant de parler du projet de loi proprement dit, je tiens à remercier les électeurs de Churchill pour m'avoir appuyée et avoir appuyé mes collaborateurs. En me réélisant, ils ont aussi montré qu'ils approuvent le travail que mes collaborateurs ont accompli en leur nom au Parlement fédéral, au cours des trois années et demie de la dernière législature. La circonscription de Churchill est immense et très diversifiée. Sa population est presque à moitié autochtone et à moitié non autochtone. Elle comprend des localités industrielles et des localités très pauvres. Je tiens vraiment à remercier les gens de ma circonscription pour l'appui qu'ils m'ont témoigné.
La circonscription abrite 31 localités des Premières nations. Ces localités affichent un taux de chômage très élevé. On ne parle pas ici de 15 ou 20 p. 100 de chômage, mais bien de 70, 80, 90 et même 95 p. 100 dans un certain nombre d'entre elles. La Chambre comprendra que les dernières années ont été très pénibles.
Dans ces localités, nombre de travailleurs ont un emploi saisonnier ou à temps partiel. Beaucoup d'emplois, dans les secteurs de l'exploitation forestière et du transport d'équipement et de marchandises, par exemple, exigent que les routes soient praticables l'hiver. D'autres personnes sont des pêcheurs, des trappeurs et des guides pour des camps de pêche et de chasse parmi les meilleurs au monde. D'autres encore travaillent dans le secteur de la construction au printemps, en été et au début de l'automne, soit les seules périodes de l'année où ce genre d'activités est vraiment possible dans le Nord.
Sans l'avoir mérité, les travailleurs saisonniers et à temps partiel ont beaucoup souffert dans le cadre de la stratégie d'assurance-emploi du gouvernement libéral. Ce n'est pas surprenant, puisque, tout à l'heure, j'ai écouté un député libéral dire que le gouvernement libéral avait planifié son régime de manière à ce que les gens ne deviennent pas dépendants de l'assurance-emploi. Je ne sais pas quels prestataires de l'assurance-emploi il connaît, mais la plupart de ceux que moi je connais préféreraient nettement travailler que toucher de l'assurance-emploi. Ils ne projettent pas de toucher de l'assurance-emploi toute leur vie.
À mon avis, lorsqu'un gouvernement établit des lignes directrices tordues comme celles sur lesquelles repose le régime, on risque fort de concevoir un régime qui ne réponde pas aux besoins des sans-emploi. Voilà pourquoi des personnes qui tentaient tant bien que mal de survivre avec des prestations d'assurance-emploi modestes ont dû se tourner vers l'aide sociale. Qu'on me comprenne moi bien. Lorsque le gouvernement a réduit les prestations d'assurance-emploi, le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale a augmenté, tout comme le nombre de personnes fréquentant les banques alimentaires. Seulement dans ma circonscription, en 1998, les prestations d'assurance-emploi ont diminué d'un peu moins de 17 millions de dollars. Dans une circonscription d'environ 78 000 personnes, les prestations versées ont baissé de 17 millions de dollars. La plupart des bénéficiaires avaient des revenus très modestes.
Qui a fait les frais de ce malencontreux régime libéral? Ce sont justement les personnes les moins en mesure d'encaisser le coup: ce sont les autochtones, les travailleurs saisonniers et les travailleurs à temps partiel, les femmes, enceintes ou pas, qui ont été le plus durement touchés.
Ce programme ne répond absolument pas aux besoins de ces personnes, et ce n'est pas faute de fonds. D'énormes excédents ont été accumulés, et le gouvernement s'est servi de cet argent pour donner l'impression qu'il réduisait le déficit grâce à son excellente planification.
Il n'en est rien. Le gouvernement n'a pas accompli un excellent travail de gestion. Il a toutefois excellé lorsqu'il s'est agi d'arnaquer les cotisants à l'assurance-emploi, les employeurs et les travailleurs qui appuyaient un régime à l'intention de ceux qui n'avaient pas la possibilité de travailler. Les travailleurs ne rechignent pas lorsque vient le moment de cotiser à l'assurance-emploi, mais ils veulent être sûrs que les cotisations d'assurance-emploi iront aux chômeurs et à la formation et qu'elles ne seront pas utilisées par le ministre des Finances ou le premier ministre pour bien paraître. Ils veulent que l'argent serve à ce pour quoi il a été accumulé.
Avant d'exposer plus à fond ma pensée sur la mauvaise utilisation que fait le gouvernement du fonds de l'assurance-emploi, je voudrais commenter un article que j'ai sous les yeux. Mes employés pensent souvent que je suis un peu cinglée parce que je lis tout ce qui se retrouve sur mon bureau. J'y trouve souvent des choses bien faites. L'article, paru au début de l'an dernier sous le titre «Le chômage peut-il vous rendre malade?», est tiré d'un bulletin sur la santé publié à la faculté de médecine de l'Université de Toronto.
Un chômeur ne perd pas qu'un emploi et un revenu. Les gens s'identifient souvent beaucoup à leur emploi, et c'est traditionnellement le cas chez les hommes. C'est pourquoi la perte d'un emploi peut engendrer un traumatisme psychologique. [...] Le stress causé par la perte d'un emploi peut entraîner des changements biochimiques, quoiqu'ils ne soient pas tous négatifs. ...une augmentation du taux de cortisol, de la prolactine, de l'hormone de croissance, du cholestérol et du HDL cholestérol, ainsi qu'un affaiblissement des réactions immunes.
J'ai écouté ceux qui ont parlé de l'assurance-emploi aujourd'hui. Je leur demande de penser aux nombreux hommes adultes dans l'industrie des pêches, aux travailleurs à temps partiel et aux travailleurs saisonniers de ma circonscription. Combien parmi eux tombent dans cette catégorie?
L'article ajoute:
Chez les hommes adultes en particulier, le chômage est associé à un risque élevé de maladies coronariennes. Les chômeurs consultent leur médecin plus souvent et ils sont hospitalisés plus fréquemment que les personnes qui ont un emploi. On a même constaté chez les chômeurs, en particulier les hommes d'âge moyen, un taux de mortalité accru causé principalement par les suicides, les accidents, les maladies coronariennes et le cancer du poumon.
Ces gens avaient-ils besoin du stress et des tracas supplémentaires créés par le régime d'assurance-emploi du gouvernement libéral, qui a réduit le nombre de semaines de travail, a modifié la règle d'intensité et les a empêchés de toucher les mêmes prestations qu'auparavant? Ces gens avaient-ils besoin de cela? Non. De plus, le programme d'assurance-emploi ne répondit pas à leurs besoins. À cause de ces changements, les chômeurs en sont venus à se sentir comme des criminels lorsqu'ils voulaient toucher des prestations de chômage, pour lesquelles ils avaient pourtant cotisé. Par ailleurs, le gouvernement a apporté des modifications au régime pour projeter une image positive de lui-même.
Le gouvernement a déposé un projet de loi, mais il l'a fait longtemps après le travail remarquable effectué par des députés de la Chambre. Je voudrais féliciter mon collègue, le député d'Acadie—Bathurst, ainsi qu'un certain nombre de députés du Bloc québécois, qui ont travaillé très fort pour continuellement soulever la question des changements à apporter au régime d'assurance-emploi.
Il a sans doute fallu deux ans et demi, voire trois ans, avant que le gouvernement n'écoute enfin, qu'il ne présente ce projet de loi et que, oui, il ne détermine certaines dispositions nécessitant des changements. Va-t-il régler le problème? Pas du tout. Le problème est encore tout entier. Encore une fois, ce n'est pas qu'il n'y a pas d'argent dans le fonds d'assurance-emploi. L'argent ne manque pas. Le fonds d'assurance-emploi s'élève, sauf erreur, à 38 milliards de dollars par année. C'est un excédent énorme, qui devrait servir aux travailleurs sans emploi et à ceux qui veulent se recycler. Il est certain que les changements apportés par les libéraux ne vont pas répondre à ces besoins.
Il y a d'autres améliorations possibles. Le gouvernement aurait pu éliminer le délai d'attente de deux semaines applicable aux apprentis. J'espère et je suis certain qu'il présentera ces amendements à l'étape de l'étude en comité ou ultérieurement à la Chambre des communes. Pourquoi donc, compte tenu de l'existence d'un surplus dans la caisse de l'assurance-emploi, le gouvernement ne présente-t-il pas des amendements pour accorder cela aux apprentis qui travaillaient, mais qui veulent retourner à l'école? Ils ont besoin d'argent. Ils ont droit à des prestations d'assurance-emploi, mais il y a le délai d'attente de deux semaines.
Pourquoi ce délai d'attente de deux semaines?. Pourquoi ces gens devraient-ils être pénalisés parce qu'ils poursuivent leurs études tout en travaillant? Pourquoi le gouvernement impose-t-il un délai d'attente de deux semaines et le maintient-il alors qu'il y a un surplus dans la caisse d'assurance-emploi? Il s'agit simplement de faire plaisir au ministre des Finances.
Nous pourrions accroître la rémunération maximale assurable et donner aux gens qui occupent des emplois bien rémunérés la possibilité de payer des cotisations en fonction de cela et d'obtenir ensuite des prestations accrues. En outre, la période ouvrant droit aux prestations devrait inclure toute période d'emploi, 52 semaines dans les 260 semaines précédentes. Donnez une chance équitable aux gens qui essaient de trouver n'importe quel emploi sur le marché. Leur emploi peut être sporadique, durer une semaine ou quelques jours, mais ces gens cherchent à travailler. Donnez-leur une chance équitable de profiter du régime d'assurance-emploi.
Là encore, comme un certain nombre de bloquistes l'ont signalé aujourd'hui, laissez les travailleurs autonomes participer activement au régime d'assurance-emploi. Ce n'est pas comme si ce régime éprouvait des difficultés. Ce n'est pas comme si ces gens ne souhaitaient pas cotiser. Un bon régime d'assurance ne cherche pas à trouver des façons de réduire l'accessibilité et à économiser. Il cherche plutôt à voir comment on peut améliorer les choses. Améliorons le programme et laissons plus de gens y avoir accès. Laissons les travailleurs autonomes cotiser au programme et y accéder.
Il faut permettre aux gens qui touchent des indemnités d'accident du travail de continuer à cotiser au régime d'assurance-emploi. À l'heure actuelle, ils ne peuvent le faire. J'ai des cas dans ma circonscription où des gens qui touchent des indemnités d'accident du travail ne cotisent pas à l'assurance-emploi ou au RPC à cause de la façon dont les choses sont structurées. Ces gens se retrouvent ainsi dans une situation difficile.
Madame la Présidente, je sais que vous me faites signe que mon temps de parole est sur le point d'être écoulé, et je veux donc simplement dire que je souscris à l'établissement d'une commission distincte pour s'occuper de l'assurance-emploi.
Je voudrais également préciser que le ministre des Finances agit comme notre Robin des Bois, sauf qu'avec le prince Jean, ils prennent l'argent aux chômeurs pour le donner aux riches.
[Français]
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Madame la Présidente, j'aimerais d'abord rappeler un point très important. Ce projet de loi a déjà été présenté à la Chambre où il s'était rendu à l'étape du débat de deuxième lecture. Nous avons ensuite eu une élection où les Canadiens et les Canadiennes nous ont donné le mandat de continuer dans la même voie. C'est pourquoi nous présentons de nouveau ce projet de loi.
Il est très important de mettre les choses en perspective. L'établissement du nouveau régime d'assurance-emploi, en juillet 1996, constituait la première grande réforme du programme depuis 25 ans.
L'ancien régime d'assurance-chômage avait bien servi les Canadiens, mais il était évident qu'il ne répondait plus aux besoins de la population active. Lorsqu'on réforme un programme qui date d'aussi longtemps que le régime d'assurance-chômage, on ne peut faire autrement que d'apporter des changements qui nécessiteront par la suite des ajustements. C'est la raison pour laquelle le gouvernement propose les mesures législatives dont nous débattons aujourd'hui.
Nous ne sommes pas, comme certains de mes collègues l'ont laissé entendre, en train de revenir au système d'avant 1996. Les objectifs initiaux de la réforme de 1996 demeurent les mêmes. Le but du gouvernement est de rendre le régime plus équitable, réduire la dépendance, aider les parents des familles à faible revenu, réduire les coûts du programme et privilégier l'adoption de mesures actives favorisant le retour de certains travailleurs sur le marché du travail. Ces objectifs sont aussi importants aujourd'hui qu'ils l'étaient en 1996.
Comme le savent mes collègues de la Chambre, le gouvernement a surveillé et évalué les effets de la réforme de 1996. Nos études nous apprennent que la plupart des éléments du régime d'assurance-emploi, comme le dénominateur et le système basé sur les heures, fonctionnent bien, mais certains éléments ont besoin d'être modifiés.
Donc, dans l'ensemble, le régime d'assurance-emploi respecte sa raison d'être, qui est de servir de filet de sécurité pour les travailleurs temporairement en chômage. Nous surveillons constamment son application et il en ressort que c'est effectivement le cas. Mais il n'est pas parfait. La perfection est difficile, voire souvent impossible à atteindre.
Mais cela ne veut pas dire que nous ne devrions pas faire certains ajustements. C'est pourquoi nous présentons ces propositions à la Chambre. Ce n'est pas la première fois que des changements sont apportés au régime d'assurance-emploi. Nous avons déjà modifié des éléments du régime. Par exemple, nous avons lancé en 1997 un projet-pilote sur les petites semaines de travail, qui aide à faire en sorte que les prestations des personnes qui touchent une faible rémunération durant certaines semaines ne soient pas réduites.
L'étroite surveillance qui est faite de l'application du nouveau régime et l'analyse des opinions exprimées par les travailleurs directement touchés par certaines dispositions nous permettent maintenant d'apporter de nouveaux ajustements.
Dans le cas de la règle de l'intensité, il faut bien admettre que c'est une mesure qui n'a pas fonctionné comme prévu. Parce qu'elle n'a pas permis d'accroître l'effort du travail et de réduire la dépendance et parce qu'elle est perçue comme ayant un effet punitif, nous proposons de l'éliminer.
Par contre, la disposition de recouvrement, ou plus précisément de remboursement, est une question différente. Elle a été adoptée afin de dissuader les gens qui ont un revenu annuel élevé, de multiplier les demandes de prestations d'assurance-emploi. Cependant, la majorité des travailleurs à revenu moyen paient des cotisations pendant de nombreuses années, sans jamais présenter une demande de prestations. Étant donné que l'objectif était de décourager la présentation de demandes répétées par des hauts salariés, les gens qui présentent une première demande ne devraient pas être visés par cette mesure, car il ne s'agit certainement pas de personnes qui abusent du régime d'assurance-emploi.
Nous proposons donc que toutes les personnes qui présentent une première demande soient exemptées de la mesure de recouvrement.
J'ai la certitude que mes collègues de la Chambre conviendront également avec moi que la mesure de recouvrement ne devrait pas s'appliquer aux Canadiens et Canadiennes qui reçoivent des prestations parce qu'ils sont trop malades pour travailler ou qu'ils restent à la maison à la suite d'une naissance, pour prendre soin d'un jeune bébé. C'est pourquoi nous proposons que les gens qui demandent des prestations spéciales en soient également exemptés.
Nous croyons fortement que la disposition de recouvrement ne devrait s'appliquer qu'aux hauts salariés qui font des demandes à répétition et non pas aux Canadiens à revenu moyen.
Nous avons également constaté que les règles qui s'appliquent aux personnes qui réintègrent le marché du travail devaient tenir compte du rôle extrêmement important que jouent les parents dans le développement de leurs enfants durant les premières années de leur vie. Il n'y a pas de responsabilité plus importante que celle d'élever la prochaine génération de citoyens. Les personnes qui l'assument ne devraient pas être pénalisées si elles choisissent de se retirer de la population active pour s'en acquitter.
C'est pourquoi le gouvernement propose d'adapter la règle qui s'applique aux personnes qui reviennent sur le marché du travail. Nous proposons de faire en sorte qu'il soit plus facile pour les nouveaux parents de devenir admissibles à des prestations régulières s'ils perdent leur emploi après avoir réintégré la population active à la suite d'une absence prolongée pour s'occuper de leurs enfants.
Ainsi, l'augmentation des exigences d'admissibilité aux prestations régulières ne s'appliquera pas dans le cas des gens ayant réintégré la population active qui auront touché des prestations de maternité ou parentales durant les quatre années précédant la période de rétroactivité actuelle de deux ans.
Le projet de loi présenté à la Chambre comprend une recommandation qui porte sur le maximum de la rémunération assurable. Voici un chiffre qui a son importance puisqu'il détermine les prestations maximales que le régime peut verser aux demandeurs et limite le montant des cotisations. Le présent projet de loi propose de maintenir le maximum de la rémunération assurable à 39 000 $, jusqu'à ce que le salaire industriel moyen dépasse ce chiffre.
Quand cela se produira, nous proposons que pour les années subséquentes, le maximum de la rémunération assurable soit rajusté annuellement en fonction du salaire industriel moyen.
La Commission de l'assurance-emploi du Canada continuera, jusqu'en 2006, de surveiller et d'évaluer les effets du nouveau régime d'assurance-emploi.
Les changements que nous proposons d'adopter et la vigilance de la Commission assureront la conformité du régime d'assurance-emploi à son objectif de répondre aux besoins des travailleurs canadiens qui ont besoin d'une source temporaire de revenus entre deux emplois. La Commission nous aidera également à voir comment le régime d'assurance-emploi répond aux changements qui surviennent sur le marché du travail.
Les Canadiens savent que leur gouvernement est attentif à leurs besoins. Nous sommes déterminés à faire du régime d'assurance-emploi un des meilleurs programmes de son genre dans tout le monde industrialisé.
Bien entendu, la meilleure garantie de sécurité financière est un emploi stable. C'est pourquoi le gouvernement du Canada poursuivra le travail entrepris avec les provinces et les territoires, les gens d'affaires et les dirigeants locaux pour aider à créer un climat économique qui offre des possibilités d'emploi pour tous les Canadiens et Canadiennes.
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Madame la Présidente, c'est toujours un plaisir de prendre la parole quand vous occupez le fauteuil, mais cela ne doit pas nous empêcher de souligner le caractère extrêmement odieux, antidémocratique et triste pour le gouvernement d'une pratique établie lors de la précédente législature, qui consiste à se comporter cavalièrement en imposant le bâillon sur des dossiers d'importance pour nos concitoyens.
Je sais que les citoyens de Hochelaga—Maisonneuve, comme ceux de Shefford et de partout à travers le Québec, vont se rappeler avec quelle liberté ce gouvernement traite les parlementaires et avec quel espèce de mépris à peine poli dispose-t-il des questions d'importance.
Dans l'histoire du Bloc québécois, la réforme de l'assurance-emploi a toujours été une préoccupation importante. Rappelons que lorsqu'elle était parrainée par Lloyd Axworthy, qui a quitté la vie publique, dès le début des années 1996, la députée de Mercier et mon collègue de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, un homme proprement admirable,—mes collègues vont en convenir et vont vouloir se joindre à moi pour lui offrir une bonne main d'applaudissement pour le travail extraordinaire qu'il a fait dans le dossier de l'assurance-emploi—s'étaient inquiétés de la réduction de la couverture.
Je me rappelle très bien le mépris avec lequel le gouvernement répondait à nos questions, particulièrement le ministre de l'époque, M. Axworthy, lorsque nous disions: «Écoutez, si ce régime est maintenu, ce n'est pas 50 p. 100 de la population qui va être couverte par l'assurance-emploi.» Mais nous passions pour des gens désinvoltes, désincarnés, des espèces de professeurs Tournesol de la politique, tant il apparaissait invraisemblable que nous cheminions vers un scénario semblable.
Pourtant, aujourd'hui, quand nous regardons le rapport d'évaluation soumis par le gouvernement du Canada par l'entremise du ministère du Développement des ressources humaines—le député de Chambly l'a dit, et sachons que quand on pense au député de Chambly, il s'imprime immédiatement dans notre esprit une référence incontournable à la social-démocratie; c'est d'abord et avant tout ce qui caractérise le député de Chambly, bien sûr, sans oublier son extraordinaire érudition juridique qui l'a conduit, dans les années passées, vers une brillante pratique du notariat, et je ne veux pas cacher qu'il demeure une source d'inspiration pour moi—, nous nous rendons compte qu'aujourd'hui, ce ne sont que quatre personnes sur dix qui sont admissibles à l'assurance-emploi, même si 100 p. 100 des gens sur le marché du travail cotisent au régime.
N'y a-t-il pas quelque chose de profondément troublant sur le plan de la démocratie et sur celui du fonctionnement de nos institutions que de faire un tel constat? Il faut saisir la différence entre un régime d'assistance et un régime d'assurance. L'assurance-emploi, ce n'est pas la charité. Les travailleurs, les travailleuses ainsi que les employeurs paient et cotisent à ce régime. Quand nous essuyons un revers de fortune qui fait que nous sommes exclus du marché du travail, cela survient généralement dans un contexte non planifié et non désiré dans la vie d'un individu, par exemple dans le cas d'un licenciement collectif, d'une perte d'emploi ou lorsqu'il y a des restructurations industrielles. Ce sont autant de situations qui échappent à la volonté des individus.
Comment expliquer alors que nous soyons en présence d'un régime—un des seuls en Occident à ce qu'on m'a dit—dans lequel le gouvernement fédéral ne met pas un sou. Ce sont essentiellement les travailleurs et les employeurs qui contribuent de façon pas tout à fait paritaire au régime. Ils ne contribuent pas de façon équivalente, mais tous deux sont mis à contribution. Est-ce là la vision qu'ont nos concitoyens? Est-ce que c'est ce que nous attendons d'un gouvernement responsable?
Nous connaissons la fragilité du marché du travail. Je ne me trompe pas en pensant, madame la Présidente, que vous êtes vous-même dans la jeune quarantaine. Nous avons tous les deux un parcours assez similaire. Nous avons tous les deux été actifs sur le marché du travail, mais nous n'avons pas eu un lien d'employeur unique. Par exemple, mon père, que vous aimeriez beaucoup, qui a 63 ans, a vécu et travaillé toute sa vie pour le même employeur.
Il a élevé cinq enfants. Toute sa vie, il a été à l'emploi d'une entreprise de textile. Il a commencé à travailler lorsqu'il n'avait pas tout à fait 16 ans et il a eu à peu près un lien d'employeur unique.
Aujourd'hui, les vicissitudes du marché du travail font que ce scénario est de plus en plus marginal, irréaliste. Ce n'est plus la réalité dominante.
On sait que les individus vont connaître cinq employeurs au moins dans leur vie et au moins cinq carrières, d'où l'importance, entre deux situations, soit au moment où on quitte un emploi, où on quitte le marché du travail, d'avoir un régime extrêmement bien adapté à cette réalité.
Est-ce que c'est le cas du régime d'assurance-emploi, tel qu'on le connaît en ce moment? Certainement pas. Mais ce qui est le plus invraisemblable, et je ne vous le cacherai pas, cela me donne des haut-le-coeur, c'est l'espèce de complaisance toute servile avec laquelle le parti ministériel appuie le projet de loi. Il n'y a pas une voix dissidente. Qu'ont dit les députés de Montréal, de Québec, des Maritimes face à la représentation que leurs concitoyens leur ont faite? Évidemment, on se rend compte, un peu partout à travers le Canada, à quel point ce régime n'a pas de bon sens.
C'est là qu'on voit qu'il y a une complaisance qui fait peine à voir, quand on appartient à la majorité ministérielle. Les députés ministériels peuvent se lever à la Chambre, parler de justice sociale, de société juste, se réclamer de Pierre Elliott Trudeau, parler de social-démocratie et se péter les bretelles en disant qu'ils sont de vrais libéraux, et dans la même foulée, ces gens-là peuvent, tels des agneaux et des moutons, se lever à la Chambre et voter, sans aucune espèce d'attachement à la pauvreté des gens, en faveur d'un régime qui contribue à appauvrir nos concitoyens.
Il y aura une fin, parce qu'on ne pourra pas supporter éternellement cette arrogance-là de la part de la majorité ministérielle.
Je rappelle que nous avions formulé une revendication—appuyée par à peu près tous les milieux informés du Québec—que le gouvernement présente deux projets de loi, dont l'un aurait créé une caisse autonome de l'assurance-emploi.
Le député de Chambly le rappelait plus tôt, le surplus de la caisse de l'assurance-emploi avoisine les 30 milliards de dollars. Cela n'est quand même pas rien. Même l'actuaire en chef de Développement des ressources humaines Canada convient que c'est une situation qui n'a pas beaucoup de sens. Malgré des surplus à hauteur de ceux que j'explique, on ne trouve pas le moyen de rendre plus généreux le régime d'assurance-emploi.
Nous, du Bloc québécois, avons demandé que soit abolie la règle des 910 heures. Voir si cela a du bon sens qu'une personne, un jeune qui fait son entrée, qui est un premier entrant, qui fait une première demande au régime, doive avoir travaillé 910 heures. Peut-on qualifier cela de vision égalitaire des choses, quand on connaît la condition sociale des jeunes? C'est déjà suffisamment difficile d'avoir un premier emploi dans la vie, comment peut-on justifier, en plus, de compliquer le sort de ceux qui sont éjectés du marché du travail pour une première fois?
Compte tenu des énormes surplus, on avait demandé que l'on puisse hausser le taux de couverture à 60 p. 100. C'est un minimum minimorum, 60 p. 100. On n'a pas l'impression d'être extravagants. On ne se sent pas prodigues quand on dit une telle chose.
Eh bien, nos appels sont demeurés vains. Ce même silence servile de la majorité ministérielle fait en sorte que nos concitoyens les plus mal pris sont laissés dans une situation extrêmement préoccupante.
Une voix: Le Silence des Agneaux.
M. Réal Ménard: En effet, Le Silence des Agneaux. Je pense qu'il y a une seule référence cinématographique qui s'impose, et c'est celle-là.
Je termine en lançant un appel à la négociation. Le gouvernement du Québec souhaite établir un régime bonifié de congé parental. L'article 69 de la Loi sur l'assurance-emploi le permettrait. Comment se fait-il que les négociations achoppent et que l'on tarde à transférer les 600 millions de dollars, dont le Québec pourrait faire une très bonne utilisation, en ayant un régime intégré, unique et beaucoup plus généreux que ce que le gouvernement fédéral offre?
Alors, on comprendra cet appel pressant que je lance. Je mets le gouvernement en garde contre une attitude cavalière, parce que n'oublions pas que les députés du Bloc québécois, qui sont encore la première force politique au Québec, seront là, sur le terrain, pour rappeler à quel point ce gouvernement a une vision injuste de la justice sociale et combien ce projet de loi sur l'assurance-emploi est inéquitable.
Je le dis, et je termine là-dessus, le mépris n'aura qu'un temps.
[Traduction]
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Madame la Présidente, je tenais à intervenir dans ce débat pour faire une affirmation de principe. En tant que député de ce côté de la Chambre, je n'ai pas d'excuses à fournir parce que ce gouvernement a pris, il y a quelques années, des mesures législatives réformant et modifiant l'assurance-chômage, appelée depuis l'assurance-emploi.
Sur la même lancée, j'ajouterai que j'appuie les changements dont la Chambre est maintenant saisie, mais l'aspect important de la question, et je crois que de nombreux électeurs dans ma circonscription sont du même avis, c'est que l'assurance-emploi ne pouvait rester telle qu'elle était depuis des décennies. Elle devait changer, et je pense qu'elle doit subir encore d'autres changements. C'est une solution temporaire tout au plus, et à mon avis ce que le gouvernement a essayé de faire il y a quelques années était parfaitement fondé.
En tant que députés, nous représentons nos circonscriptions et les différentes régions du pays et, ce qui est plus important encore, les différentes perspectives économiques. Je lisais récemment dans un de nos journaux que tout ce débat semblait se situer au niveau régional, avec d'un côté ceux qui affirment que l'Ouest n'a pas besoin de l'assurance-emploi autant que les provinces de l'Atlantique et ainsi de suite et ainsi de suite.
Il ne s'agit pas du tout d'un enjeu régional; il s'agit des perspectives économiques dans des circonscriptions données. Dans la mienne, ces perspectives ont longtemps été très bonnes. Ma circonscription est située à l'ouest de Hamilton, ville où l'industrie manufacturière a été très prospère pendant longtemps. Toute cette région en effet était alors prospère. Bon nombre de gens ont certes touché de l'assurance-emploi à l'occasion, ou la majeure partie du temps, mais ils n'en étaient pas aussi tributaires que ces collectivités peut-être davantage axées sur les ressources, où l'on relève d'énormes fluctuations dans le prix des marchandises, phénomène qui peut aboutir à des intervalles subis de chômage et qui exige effectivement la présence d'un filet de sécurité.
Quand j'étais jeune, et j'aime penser que je le suis encore, et que j'ai joint les rangs de la population active à la fin de mes études secondaires, on nous inculquait avec fierté, mon père était un Anglais de la classe ouvrière, que si l'on pouvait s'en abstenir, on ne s'inscrivait pas à l'assurance-chômage.
J'y ai contribué pendant de très nombreuses années et lorsque j'ai joint les rangs de la population active, j'ai travaillé à la fonderie située dans ma collectivité ainsi que dans bon nombre d'usines de Hamilton, principalement pour gagner de l'argent afin de payer mes études. Toutefois, un emploi était un emploi et, comme notre famille n'avait pas beaucoup d'argent, j'ai dû mettre l'épaule à la roue et faire ma part.
Jamais il ne m'est venu à l'esprit que l'assurance-emploi, ou l'assurance-chômage, comme on l'appelait à l'époque, était un dû. Je n'ai jamais pensé de la sorte et je ne pense toujours pas que ce soit le cas. Le simple fait que j'aie versé des milliers et des milliers de dollars au programme d'assurance-emploi au cours de ma carrière ne signifie pas, à mon avis, que je devrais de ce simple fait avoir le droit de toucher cet argent.
On m'a appris à voir dans l'assurance-chômage un véritable programme d'assurance pour les personnes qui vivent un épisode fâcheux dans leur emploi et qui perdent subitement leur travail. À mon avis, c'est ce que devrait faire le régime actuel et je l'appuie sans réserve dans ce contexte. Toutefois, au fil du temps, le système a fini par faire l'objet d'abus. Dans ma propre collectivité, des abus très manifestes ont été commis au moment des amendements que nous avons apportés à la mesure législative il y a quelques années.
L'un des abus les plus notoires a été fait au titre de l'emploi saisonnier. L'exemple le plus frappant dans ma région est celui des conseils scolaires qui engageaient pour 10 mois par an du personnel de bureau, du personnel pour le nettoyage et l'entretien, et du personnel de garde, et les licenciaient pour une période de deux mois. Ces personnes touchaient alors de l'assurance-chômage pendant ces deux mois au bout desquels elles étaient réengagées. Et le cycle recommençait.
Les employés des écoles ont fini par accepter la situation, par croire que c'était leur lot de travailler pendant 10 mois par an et de toucher l'assurance-chômage pendant 2 mois.
À mon avis, au lieu de verser à ces travailleurs une rémunération équitable calculée sur 12 mois, les conseils scolaires et les provinces qui les finançaient leur versaient en réalité une rémunération amoindrie, obtenant le complément auprès des contribuables, en fait non pas auprès des contribuables, mais plutôt auprès de ceux qui cotisaient régulièrement à la caisse de l'assurance-emploi.
J'ai toujours, et je le crois encore, que c'était injuste, que l'assurance-emploi n'avait jamais été créée à cette fin. Madame la Présidente, vous pourriez trouver beaucoup d'autres exemples de cet acabit, des exemples d'employeurs qui ont délibérément profité du programme de l'assurance-chômage puis de l'assurance-emploi pour verser des salaires inférieurs et, d'une certaine façon, accroître leurs bénéfices, car lorsqu'un employeur économise sur la rémunération qu'il verse à ses employés en ne les payant que pendant six à huit mois par an alors qu'il devrait les engager 12 mois par an, il réduit ses frais de fonctionnement et accroît ses bénéfices.
J'ai pensé qu'il était tout à fait approprié de parler de ce problème de l'emploi saisonnier délibéré dans l'intérêt non pas des travailleurs, mais bien des employeurs, et l'initiative prise il y a quelques années déjà pour régler le problèmes des travailleurs saisonniers m'a paru fort opportune.
Un autre aspect de l'équation se trouve en dehors de ma région, dans d'autres circonscriptions, ça pourrait être en Ontario, en Nouvelle-Écosse, en Alberta ou en Colombie-Britannique, où le travail est saisonnier pasrce ce qu'il dépend des ressources naturelles. Cela crée également un problème, d'un genre différent.
Si on exploite une ressource, que ce soit le bois ou le poisson, et que pour ce faire pendant six ou huit mois de l'année on emploie des travailleurs qui, année après année, sont au chômage pendant quatre mois, ce que nous faisons en fait, c'est subventionner l'exploitation de cette ressource. Dans un sens c'est bien, mais ce qui arrive, c'est qu'on court le danger de surexploiter la ressource. Si les gens coupent des arbres ou pêchent le poisson à un coût inférieur au coût réel et les livrent sur les marchés, nous gonflons artificiellement notre capacité d'exploiter cette ressource.
Par conséquent, comme je crois réellement que nous avons l'obligation de protéger les forêts, les pêches, et toutes ces autres industries qui dépendent de l'exploitation des ressources, je trouve parfois difficile d'accepter l'idée que nous pensions automatiquement que la chose à faire est de subventionner, par le biais de l'assurance-emploi, le secteur de l'exploitation des ressources naturelles.
Madame la Présidente, l'une des raisons pour lesquelles j'appuie ce projet de loi, c'est qu'il y a un autre aspect de cette équation: si on prend cette attitude trop littéralement, non seulement je me ferais traiter d'extrémiste de droite, mais sur un tout autre plan, nous ne donnons pas aux autres régions du Canada la possibilité d'assurer la survie de leurs communautés.
Mettons de côté le régionalisme pour un instant, et voyons ce qui se passe dans le nord de l'Ontario. Dans le nord de l'Ontario il y a un grand nombre de localités qui vivent de l'exploitation minière et forestière. Je pense qu'il est de notre responsabilité à nous tous, en tant que députés, de maintenir ces communautés et leurs traditions culturelles aussi longtemps que nous le pouvons. Madame la Présidente, il faut que nous parvenions à un équilibre quand nous pensons à l'assurance-emploi et à son impact sur le secteur de l'exploitation des ressources naturelles.
J'appuie les changements proposés ici aujourd'hui parce que nous avons essayé de faire des ajustements et que nous n'avions pas tout à fait mesuré l'impact de l'ancien système. Cependant, le temps passe. C'est un autre siècle et nous devons nous rendre compte que même un programme comme l'assurance-emploi doit être revisité et modernisé.
Quelqu'un de l'autre côté a lancé une très bonne idée, à savoir que l'assurance-emploi devrait s'appliquer aux travailleurs autonomes. C'est une idée très valable de la part de l'opposition et on devrait l'étudier.
[Français]
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Madame la Présidente, en ce 13 février 2001, c'est avec tristesse que je prends la parole.
Habituellement, en cette veille de la Saint-Valentin, nous nous préparons à dire à ceux que nous aimons d'une façon particulière combien demain sera une journée importante, et nous nous apprêtons à leur transmettre nos voeux, d'une façon plus particulière encore. Mais aujourd'hui, en ce 13 février, le gouvernement vient d'imposer une motion d'attribution de temps au débat sur le projet de loi C-2. Cela a fait exactement 66 jours, le 2 février dernier, que ce gouvernement a ramené le projet de loi C-44 qu'il a transformé en projet de loi C-2.
Durant la campagne électorale, le gouvernement s'était engagé, surtout envers les travailleurs de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, à apporter des modifications pour faire en sorte que le projet de loi soit acceptable à ces travailleurs. Loin de moi l'idée de vouloir ressasser de vieilles histoires, mais je me souviens, lors de deux visites effectuées, durant les mois de septembre et octobre derniers, par le ministre du Revenu, que des travailleurs de chez nous lui ont dit: «C'est bien de valeur, mais toi, dehors. Nous n'acceptons pas le projet de loi C-44.»
Durant la campagne électorale, le secrétaire d'État au Sport amateur est venu leur dire: «Votez pour nous, donnez-nous une grosse majorité et nous allons répondre à vos attentes.» C'est avec tristesse, aujourd'hui, que je dis aux travailleurs du Saguenay—Lac-Saint-Jean et à ceux de tout le Québec et du Canada que le gouvernement leur a dit un gros mensonge. Le gouvernement leur a dit: «Croyez en ma parole et je vous donnerai tout ce que vous désirez.»
Force est de constater que l'expression «parole donnée, parole reprise» est consacrée dans ce cas-ci. Je constate que ce gouvernement ne veut pas répondre aux vraies attentes des gens.
Le projet de loi C-2, nous l'avons dénoncé. J'ai assisté, lors de la campagne électorale, à un rassemblement de centaine de milliers de travailleurs de la circonscription de Jonquière. Ils venaient dire au gouvernement: «Nous voulons avoir une caisse d'assurance-emploi autonome. C'est nous et les employeurs qui la payons et c'est nous qui devrions l'administrer, parce que nous la payons pour nous assurer une sécurité.» Le gouvernement a fait la sourde oreille, sauf qu'il leur a dit: «Je ne vous entends pas, mais soyez assurés que je vais répondre à vos attentes.»
Le lendemain des élections, bien entendu, comme le dit Félix Leclerc: «Je ne me souvenais plus de ton nom, je ne me souvenais plus des promesses que je t'avais faites.» C'est avec tristesse que je constate que le gouvernement refuse d'entendre la voix des députés démocratiquement élus qui lui disent à la Chambre, de la part de tous les Canadiens et Canadiennes, de tous les travailleurs et travailleuses du comté de Jonquière et de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, qu'ils sont contre ce projet de loi. Ils vont se battre jusque dans leur dernier retranchement pour que les ministres qui sont venus faire la tournée chez nous respectent leur parole.
Chez nous, nous sommes des gens de parole, et les gens de parole n'ont qu'une parole. Que les membres du gouvernement se le tiennent pour dit. Lorsque nous siégerons en comité parlementaire, nous, les députés du Bloc québécois, ferons en sorte que ce projet de loi réponde aux vraies attentes des travailleurs. Les députés ministériels vont être obligés de tenir parole.
Ce n'est que partie remise et nous les attendons en comité parlementaire. C'est là que se tiendra le vrai débat et que les vraies gens seront entendus.
[Traduction]
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Comme il est 18 h 15, conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, je dois maintenant interrompre les délibérations et mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire pour mettre fin à l'étude à la l'étape de la deuxième lecture du projet de loi dont la Chambre est maintenant saisie.
[Français]
Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): À mon avis, les oui l'emportent.
Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, le vote par appel nominal est différé à plus tard aujourd'hui.
* * *
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 8 février, de la motion, ainsi que de l'amendement.
Le président suppléant (Mme Bakopanos): Conformément à l'ordre adopté le jeudi 8 février 2001, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé relatif aux travaux des subsides.
Convoquez les députés.
[Traduction]
Après l'appel du timbre:
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour que l'amendement à la motion de l'opposition soit réputé rejeté à la majorité.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime pour que l'amendement soit réputé rejeté à la majorité, ainsi que le propose le whip en chef du gouvernement?
Des voix: D'accord.
(L'amendement est rejeté.)
Le Président: Par conséquent, le vote porte sur la motion principale. Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le Président: À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
[Français]
(La motion, mise aux voix, est rejetée par le vote suivant:)
Vote no 5
POUR
Députés
Ablonczy | Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) | Asselin |
Bachand (Richmond – Arthabaska) | Bachand (Saint - Jean) | Bailey | Bellehumeur |
Bergeron | Bigras | Blaikie | Borotsik |
Bourgeois | Breitkreuz | Brien | Brison |
Burton | Cadman | Cardin | Casey |
Casson | Chatters | Clark | Comartin |
Crête | Cummins | Dalphond - Guiral | Davies |
Day | Desjarlais | Desrochers | Doyle |
Dubé | Duceppe | Duncan | Elley |
Epp | Fitzpatrick | Forseth | Fournier |
Gagnon (Champlain) | Gagnon (Québec) | Gallant | Gauthier |
Girard - Bujold | Godin | Gouk | Grewal |
Grey (Edmonton North) | Grose | Guay | Guimond |
Hanger | Harris | Hearn | Herron |
Hill (Macleod) | Hilstrom | Hinton | Johnston |
Keddy (South Shore) | Kenney (Calgary Southeast) | Laframboise | Lalonde |
Lanctôt | Lebel | Lill | Loubier |
Lunn (Saanich – Gulf Islands) | Lunney (Nanaimo – Alberni) | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Manning |
Marceau | Mark | Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Martin (Winnipeg Centre) |
Mayfield | McDonough | McNally | Ménard |
Meredith | Merrifield | Moore | Nystrom |
Obhrai | Pallister | Pankiw | Paquette |
Penson | Perron | Peschisolido | Picard (Drummond) |
Plamondon | Proctor | Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) |
Reynolds | Ritz | Robinson | Rocheleau |
Roy | Sauvageau | Skelton | Sorenson |
Spencer | St - Hilaire | Steckle | Stoffer |
Strahl | Thompson (New Brunswick Southwest) | Thompson (Wild Rose) | Toews |
Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Vellacott | Venne |
Wasylycia - Leis | Wayne | White (Langley – Abbotsford) | White (North Vancouver) |
Williams | Yelich – 122 |
CONTRE
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Assadourian | Augustine | Bagnell |
Bakopanos | Barnes | Beaumier | Bélair |
Bélanger | Bellemare | Bennett | Bertrand |
Bevilacqua | Binet | Bonin | Boudria |
Bradshaw | Brown | Bryden | Bulte |
Byrne | Caccia | Calder | Cannis |
Caplan | Carignan | Carroll | Castonguay |
Catterall | Cauchon | Charbonneau | Coderre |
Collenette | Comuzzi | Cotler | Cullen |
Cuzner | DeVillers | Dhaliwal | Dion |
Dromisky | Drouin | Duhamel | Duplain |
Easter | Eggleton | Eyking | Farrah |
Finlay | Fontana | Fry | Gagliano |
Godfrey | Goodale | Graham | Gray (Windsor West) |
Guarnieri | Harb | Harvard | Harvey |
Hubbard | Ianno | Jackson | Jennings |
Jordan | Karetak - Lindell | Keyes | Kilgour (Edmonton Southeast) |
Knutson | Kraft Sloan | Laliberte | Lastewka |
Lavigne | LeBlanc | Lee | Longfield |
MacAulay | Macklin | Mahoney | Malhi |
Maloney | Manley | Marcil | Marleau |
Martin (LaSalle – Émard) | Matthews | McCallum | McCormick |
McGuire | McKay (Scarborough East) | McLellan | McTeague |
Mills (Toronto – Danforth) | Minna | Mitchell | Murphy |
Myers | Nault | Neville | Normand |
O'Brien (Labrador) | O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Owen |
Paradis | Parrish | Patry | Peterson |
Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pratt | Price |
Proulx | Redman | Reed (Halton) | Regan |
Richardson | Robillard | Saada | Savoy |
Scherrer | Scott | Sgro | Shepherd |
Speller | St. Denis | St - Jacques | St - Julien |
Stewart | Szabo | Thibault (West Nova) | Thibeault (Saint - Lambert) |
Tirabassi | Tobin | Tonks | Torsney |
Valeri | Vanclief | Whelan | Wilfert |
Wood – 145 |
«PAIRÉS»
Députés
Le Président: Je déclare la motion rejetée.
* * *
[Traduction]
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi et le Règlement sur l'assurance-emploi (pêche), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
Le Président: Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-2.
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, si la Chambre est d'accord, je propose que vous demandiez le consentement unanime pour que le résultat du vote sur la motion précédente s'applique aussi à la motion dont la Chambre est maintenant saisie, les députés libéraux votant oui.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime pour que nous procédions de cette façon?
Des voix: D'accord.
M. John Reynolds: Monsieur le Président, nous voterons contre la motion.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois votent contre cette motion.
M. Yvon Godin: Monsieur le Président, les députés du NPD votent en faveur de cette motion.
[Traduction]
M. Rick Borotsik: Monsieur le Président, les députés du Parti progressiste conservateur voteront en faveur de la motion.
Le Président: Je vois qu'il y a de nombreux rappels au Règlement. Je présume qu'ils concernent le vote.
M. Tom Wappel: Monsieur le Président, je vote en faveur de la motion.
M. Ivan Grose: Monsieur le Président, je veux qu'on inscrive que je vote en faveur de la motion.
Mme Brenda Chamberlain: Monsieur le Président, je vote en faveur de la motion.
M. Janko Peric: Monsieur le Président, je suis heureux de voter en faveur de la motion.
M. Roger Gallaway: Monsieur le Président, je vote en faveur de la motion.
Mme Rose-Marie Ur: Monsieur le Président, je veux qu'on inscrive que je vote en faveur de la motion.
M. Andrew Telegdi: Monsieur le Président, je vote en faveur de la motion.
M. Paul Steckle: Monsieur le Président, qu'on inscrive que je vote comme le gouvernement sur la motion.
M. Leon E. Benoit: Monsieur le Président, je veux qu'on inscrive que je vote contre la motion.
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, je tiens à signaler que le ministre de l'Industrie n'était pas présent pour le présent vote. Il l'était pour le précédent, alors aucun vote ne devrait être inscrit à son nom.
[Français]
(La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)
Vote no 6
POUR
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Assadourian | Augustine | Bachand (Richmond – Arthabaska) |
Bagnell | Bakopanos | Barnes | Beaumier |
Bélair | Bélanger | Bellemare | Bennett |
Bertrand | Bevilacqua | Binet | Blaikie |
Bonin | Borotsik | Boudria | Bradshaw |
Brison | Brown | Bryden | Bulte |
Byrne | Caccia | Calder | Cannis |
Caplan | Carignan | Carroll | Casey |
Castonguay | Catterall | Cauchon | Chamberlain |
Charbonneau | Clark | Coderre | Collenette |
Comartin | Comuzzi | Cotler | Cullen |
Cuzner | Davies | Desjarlais | DeVillers |
Dhaliwal | Dion | Doyle | Dromisky |
Drouin | Duhamel | Duplain | Easter |
Eggleton | Eyking | Farrah | Finlay |
Fontana | Fry | Gagliano | Gallaway |
Godfrey | Godin | Goodale | Graham |
Gray (Windsor West) | Grose | Guarnieri | Harb |
Harvard | Harvey | Hearn | Herron |
Hubbard | Ianno | Jackson | Jennings |
Jordan | Karetak - Lindell | Keddy (South Shore) | Keyes |
Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson | Kraft Sloan | Laliberte |
Lastewka | Lavigne | LeBlanc | Lee |
Lill | Longfield | MacAulay | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) |
Macklin | Mahoney | Malhi | Maloney |
Manley | Marcil | Marleau | Martin (LaSalle – Émard) |
Martin (Winnipeg Centre) | Matthews | McCallum | McCormick |
McDonough | McGuire | McKay (Scarborough East) | McLellan |
McTeague | Mills (Toronto – Danforth) | Minna | Mitchell |
Murphy | Myers | Nault | Neville |
Normand | Nystrom | O'Brien (Labrador) | O'Brien (London – Fanshawe) |
O'Reilly | Owen | Paradis | Parrish |
Patry | Peric | Peterson | Phinney |
Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pratt | Price | Proctor |
Proulx | Redman | Reed (Halton) | Regan |
Richardson | Robillard | Robinson | Saada |
Savoy | Scherrer | Scott | Sgro |
Shepherd | Speller | St. Denis | St - Jacques |
St - Julien | Steckle | Stewart | Stoffer |
Szabo | Telegdi | Thibault (West Nova) | Thibeault (Saint - Lambert) |
Thompson (New Brunswick Southwest) | Tirabassi | Tonks | Torsney |
Ur | Valeri | Vanclief | Wappel |
Wasylycia - Leis | Wayne | Whelan | Wilfert |
Wood – 177 |
CONTRE
Députés
Ablonczy | Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) | Asselin |
Bachand (Saint - Jean) | Bailey | Bellehumeur | Benoit |
Bergeron | Bigras | Bourgeois | Breitkreuz |
Brien | Burton | Cadman | Cardin |
Casson | Chatters | Crête | Cummins |
Dalphond - Guiral | Day | Desrochers | Dubé |
Duceppe | Duncan | Elley | Epp |
Fitzpatrick | Forseth | Fournier | Gagnon (Champlain) |
Gagnon (Québec) | Gallant | Gauthier | Girard - Bujold |
Gouk | Grewal | Grey (Edmonton North) | Guay |
Guimond | Hanger | Harris | Hill (Macleod) |
Hilstrom | Hinton | Johnston | Kenney (Calgary Southeast) |
Laframboise | Lalonde | Lanctôt | Lebel |
Loubier | Lunn (Saanich – Gulf Islands) | Lunney (Nanaimo – Alberni) | Manning |
Marceau | Mark | Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Mayfield |
McNally | Ménard | Meredith | Merrifield |
Moore | Obhrai | Pallister | Pankiw |
Paquette | Penson | Perron | Peschisolido |
Picard (Drummond) | Plamondon | Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) |
Reynolds | Ritz | Rocheleau | Roy |
Sauvageau | Skelton | Sorenson | Spencer |
St - Hilaire | Strahl | Thompson (Wild Rose) | Toews |
Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Vellacott | Venne |
White (Langley – Abbotsford) | White (North Vancouver) | Williams | Yelich – 96 |
«PAIRÉS»
Députés
Le Président: Je déclare la motion adoptée.
(Le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)
* * *
[Traduction]
LOI SUR L'AGENCE DE LA CONSOMMATION EN MATIÈRE FINANCIÈRE DU CANADA
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 12 février, de la motion: Que le projet de loi C-8, Loi constituant l'Agence de la consommation en matière financière du Canada et modifiant certaines lois relatives aux institutions financières soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
Le Président: La Chambre passe maintenant au vote par appel nominal à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-8.
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, si la Chambre y consent, je propose que vous demandiez le consentement unanime de la Chambre pour que le résultat du vote portant sur la motion précédente s'applique à la motion dont la Chambre est saisie, les libéraux se prononçant en faveur, y compris le ministre de l'Industrie qui est de retour à la Chambre.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime pour procéder de la sorte?
Des voix: D'accord.
M. John Reynolds: Monsieur le Président, les députés de l'Alliance canadienne votent en faveur de la motion.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois s'opposent à cette motion.
[Traduction]
M. Yvon Godin: Monsieur le Président, les députés du Nouveau Parti démocratique votent contre la motion.
[Français]
M. Rick Borotsik: Monsieur le Président, les députés du Parti progressiste-conservateur votent oui sur cette motion.
(La motion, mise aux voix, est adoptée par le vote suivant:)
Vote no 7
POUR
Députés
Ablonczy | Adams | Alcock | Allard |
Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) | Anderson (Victoria) | Assad |
Assadourian | Augustine | Bachand (Richmond – Arthabaska) | Bagnell |
Bailey | Bakopanos | Barnes | Beaumier |
Bélair | Bélanger | Bellemare | Bennett |
Benoit | Bertrand | Bevilacqua | Binet |
Bonin | Borotsik | Boudria | Bradshaw |
Breitkreuz | Brison | Brown | Bryden |
Bulte | Burton | Byrne | Caccia |
Cadman | Calder | Cannis | Caplan |
Carignan | Carroll | Casey | Casson |
Castonguay | Catterall | Cauchon | Chamberlain |
Charbonneau | Chatters | Clark | Coderre |
Collenette | Comuzzi | Cotler | Cullen |
Cummins | Cuzner | Day | DeVillers |
Dhaliwal | Dion | Doyle | Dromisky |
Drouin | Duhamel | Duncan | Duplain |
Easter | Eggleton | Elley | Epp |
Eyking | Farrah | Finlay | Fitzpatrick |
Fontana | Forseth | Fry | Gagliano |
Gallant | Gallaway | Godfrey | Goodale |
Gouk | Graham | Gray (Windsor West) | Grewal |
Grey (Edmonton North) | Grose | Guarnieri | Hanger |
Harb | Harris | Harvard | Harvey |
Hearn | Herron | Hill (Macleod) | Hilstrom |
Hinton | Hubbard | Ianno | Jackson |
Jennings | Johnston | Jordan | Karetak - Lindell |
Keddy (South Shore) | Kenney (Calgary Southeast) | Keyes | Kilgour (Edmonton Southeast) |
Knutson | Kraft Sloan | Laliberte | Lastewka |
Lavigne | LeBlanc | Lee | Longfield |
Lunn (Saanich – Gulf Islands) | Lunney (Nanaimo – Alberni) | MacAulay | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) |
Macklin | Mahoney | Malhi | Maloney |
Manley | Manning | Marcil | Mark |
Marleau | Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Martin (LaSalle – Émard) | Matthews |
Mayfield | McCallum | McCormick | McGuire |
McKay (Scarborough East) | McLellan | McNally | McTeague |
Meredith | Merrifield | Mills (Toronto – Danforth) | Minna |
Mitchell | Moore | Murphy | Myers |
Nault | Neville | Normand | O'Brien (Labrador) |
O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Obhrai | Owen |
Pallister | Pankiw | Paradis | Parrish |
Patry | Penson | Peric | Peschisolido |
Peterson | Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pratt |
Price | Proulx | Rajotte | Redman |
Reed (Halton) | Regan | Reid (Lanark – Carleton) | Reynolds |
Richardson | Ritz | Robillard | Saada |
Savoy | Scherrer | Scott | Sgro |
Shepherd | Skelton | Sorenson | Speller |
Spencer | St. Denis | St - Jacques | St - Julien |
Steckle | Stewart | Strahl | Szabo |
Telegdi | Thibault (West Nova) | Thibeault (Saint - Lambert) | Thompson (New Brunswick Southwest) |
Thompson (Wild Rose) | Tirabassi | Tobin | Toews |
Tonks | Torsney | Ur | Valeri |
Vanclief | Vellacott | Wappel | Wayne |
Whelan | White (Langley – Abbotsford) | White (North Vancouver) | Wilfert |
Williams | Wood | Yelich – 223 |
CONTRE
Députés
Asselin | Bachand (Saint - Jean) | Bellehumeur | Bergeron |
Bigras | Blaikie | Bourgeois | Brien |
Cardin | Comartin | Crête | Dalphond - Guiral |
Davies | Desjarlais | Desrochers | Dubé |
Duceppe | Fournier | Gagnon (Champlain) | Gagnon (Québec) |
Gauthier | Girard - Bujold | Godin | Guay |
Guimond | Laframboise | Lalonde | Lanctôt |
Lebel | Lill | Loubier | Marceau |
Martin (Winnipeg Centre) | McDonough | Ménard | Nystrom |
Paquette | Perron | Picard (Drummond) | Plamondon |
Proctor | Robinson | Rocheleau | Roy |
Sauvageau | St - Hilaire | Stoffer | Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) |
Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Venne | Wasylycia - Leis – 51 |
«PAIRÉS»
Députés
Le Président: Je déclare la motion adoptée.
(Le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)
* * *
[Traduction]
LE DISCOURS DU TRÔNE
REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 9 février, de la motion: Qu'une Adresse soit présentée à Son Excellence la Gouverneure générale en réponse au discours qu'elle a prononcé à l'ouverture de la session.
Le Président: Conformément à l'ordre du vendredi 9 février 2001, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé sur la motion concernant l'Adresse en réponse au discours du Trône.
[Français]
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour que les députés qui ont voté sur la motion précédente soient enregistrés comme ayant voté sur la motion dont la Chambre est actuellement saisie, les députés libéraux ayant voté oui.
Le Président: Y a-t-il consentement unanime de la Chambre pour procéder de cette façon?
Des voix: D'accord.
[Traduction]
M. John Reynolds: Monsieur le Président, les députés de l'Alliance canadienne votent résolument contre la motion.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois votent non sur cette motion.
M. Yvon Godin: Monsieur le Président, les députés du NPD votent non sur cette motion.
[Traduction]
M. Rick Borotsik: Monsieur le Président, les députés du Parti progressiste conservateur votent contre la motion.
(La motion, mise aux voix, est adoptée.)
Vote no 8
POUR
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Assadourian | Augustine | Bagnell |
Bakopanos | Barnes | Beaumier | Bélair |
Bélanger | Bellemare | Bennett | Bertrand |
Bevilacqua | Binet | Bonin | Boudria |
Bradshaw | Brown | Bryden | Bulte |
Byrne | Caccia | Calder | Cannis |
Caplan | Carignan | Carroll | Castonguay |
Catterall | Cauchon | Chamberlain | Charbonneau |
Coderre | Collenette | Comuzzi | Cotler |
Cullen | Cuzner | DeVillers | Dhaliwal |
Dion | Dromisky | Drouin | Duhamel |
Duplain | Easter | Eggleton | Eyking |
Farrah | Finlay | Fontana | Fry |
Gagliano | Gallaway | Godfrey | Goodale |
Graham | Gray (Windsor West) | Grose | Guarnieri |
Harb | Harvard | Harvey | Hubbard |
Ianno | Jackson | Jennings | Jordan |
Karetak - Lindell | Keyes | Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson |
Kraft Sloan | Laliberte | Lastewka | Lavigne |
LeBlanc | Lee | Longfield | MacAulay |
Macklin | Mahoney | Malhi | Maloney |
Manley | Marcil | Marleau | Martin (LaSalle – Émard) |
Matthews | McCallum | McCormick | McGuire |
McKay (Scarborough East) | McLellan | McTeague | Mills (Toronto – Danforth) |
Minna | Mitchell | Murphy | Myers |
Nault | Neville | Normand | O'Brien (Labrador) |
O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Owen | Paradis |
Parrish | Patry | Peric | Peterson |
Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pratt | Price |
Proulx | Redman | Reed (Halton) | Regan |
Richardson | Robillard | Saada | Savoy |
Scherrer | Scott | Sgro | Shepherd |
Speller | St. Denis | St - Jacques | St - Julien |
Steckle | Stewart | Szabo | Telegdi |
Thibault (West Nova) | Thibeault (Saint - Lambert) | Tirabassi | Tobin |
Tonks | Torsney | Ur | Valeri |
Vanclief | Wappel | Whelan | Wilfert |
Wood – 153 |
CONTRE
Députés
Ablonczy | Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) | Asselin |
Bachand (Richmond – Arthabaska) | Bachand (Saint - Jean) | Bailey | Bellehumeur |
Benoit | Bergeron | Bigras | Blaikie |
Borotsik | Bourgeois | Breitkreuz | Brien |
Brison | Burton | Cadman | Cardin |
Casey | Casson | Chatters | Clark |
Comartin | Crête | Cummins | Dalphond - Guiral |
Davies | Day | Desjarlais | Desrochers |
Doyle | Dubé | Duceppe | Duncan |
Elley | Epp | Fitzpatrick | Forseth |
Fournier | Gagnon (Champlain) | Gagnon (Québec) | Gallant |
Gauthier | Girard - Bujold | Godin | Gouk |
Grewal | Grey (Edmonton North) | Guay | Guimond |
Hanger | Harris | Hearn | Herron |
Hill (Macleod) | Hilstrom | Hinton | Johnston |
Keddy (South Shore) | Kenney (Calgary Southeast) | Laframboise | Lalonde |
Lanctôt | Lebel | Lill | Loubier |
Lunn (Saanich – Gulf Islands) | Lunney (Nanaimo – Alberni) | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Manning |
Marceau | Mark | Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) | Martin (Winnipeg Centre) |
Mayfield | McDonough | McNally | Ménard |
Meredith | Merrifield | Moore | Nystrom |
Obhrai | Pallister | Pankiw | Paquette |
Penson | Perron | Peschisolido | Picard (Drummond) |
Plamondon | Proctor | Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) |
Reynolds | Ritz | Robinson | Rocheleau |
Roy | Sauvageau | Skelton | Sorenson |
Spencer | St - Hilaire | Stoffer | Strahl |
Thompson (New Brunswick Southwest) | Thompson (Wild Rose) | Toews | Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) |
Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Vellacott | Venne | Wasylycia - Leis |
Wayne | White (Langley – Abbotsford) | White (North Vancouver) | Williams |
Yelich – 121 |
«PAIRÉS»
Députés
Le Président: Je déclare la motion adoptée.
[Français]
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je propose:
Que l'Adresse soit grossoyée et présentée à Son Excellence la Gouverneure générale par le Président.
Le Président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
DÉBAT D'URGENCE
[Traduction]
L'AGRICULTURE
Le vice-président: La Chambre passe maintenant à l'étude d'une motion d'ajournement en vue de la discussion d'une affaire importante dont l'étude s'impose d'urgence, soit la politique agricole.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC) propose:
Que la Chambre s'ajourne maintenant.
—Monsieur le Président, je voudrais tout d'abord vous remercier d'avoir autorisé la tenue de ce débat important sur l'agriculture. Nous reconnaissons tous que l'agriculture traverse actuellement des moments très difficiles. Je tiens à signaler à la Chambre que je partagerai mon temps avec le député de Calgary-Centre.
Trop souvent dans notre société, des gens de l'extérieur du milieu agricole croient que les agriculteurs et les producteurs agricoles ont tendance à être alarmistes. Ils devraient peut-être penser...
M. Gerald Keddy: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Sauf le respect que je dois à mon collègue, je signale qu'il y a actuellement plusieurs échanges entre députés et que ces échanges devraient avoir lieu à l'extérieur de cette enceinte. Il s'agit d'un problème extrêmement important dont nous devons discuter à la Chambre et d'un débat que nous devons écouter.
Le Président: Je suis parfaitement d'accord avec le député de South Shore. J'ai essayé d'encourager les députés à ne pas poursuivre leurs discussions à la Chambre. Le député de Brandon—Souris a une voix très puissante, et on réussit à entendre ce qu'il dit, mais le bruit est distrayant. J'exhorte les députés à poursuivre leurs conversations à l'extérieur de la Chambre, de manière à ce que nous puissions écouter le débat.
M. Rick Borotsik: Monsieur le Président, je sais que vous contrôlez la Chambre, et depuis de nombreuses années déjà. Je vous en suis reconnaissant.
La question est très importante, non seulement pour mes électeurs, mais pour tous les électeurs canadiens qui travaillent la terre, l'ensemencent et en récoltent les fruits pour que leurs concitoyens bénéficient d'un approvisionnement alimentaire fiable et bon marché.
Je voudrais aborder la question en invoquant trois principes. Dans un premier temps, les Canadiens me demandent constamment pourquoi le secteur agricole se retrouve plongé dans pareille situation aujourd'hui. Pour répondre à cela, il nous faut reconnaître un certain nombre de choses.
La première est que les règles du jeu ne sont pas équitables à l'échelle du monde aujourd'hui. Elles sont injustes en raison des subventions offertes par nos principaux partenaires commerciaux, l'Europe et les États-Unis.
Les Canadiens n'en ont pas autant pour être en mesure de soutenir cette concurrence.
En 1997, pour chaque dollar que les Canadiens consacraient au soutien agricole, les Américains en dépensaient 2,06 $, l'Union européenne, 2,14 $, et le Japon, 3,47 $. Cette disparité avec les programmes de soutien agricole en place ailleurs dans le monde est très lourde à supporter pour les Canadiens.
Le Canada consacre 0,78 p. 100 de son PIB au soutien agricole alors que les Américains y consacrent 1,07 p. 100. Nous ne nous battons pas à armes égales avec les pays qui subventionnent leurs producteurs agricoles.
Le second problème du secteur de l'agriculture tient au fait que les coûts augmentent à une vitesse alarmante. Il en coûte beaucoup plus cher aujourd'hui qu'avant aux agriculteurs et aux producteurs pour cultiver la terre.
Nous reconnaissons tous que les prix de l'essence et du carburant sont montés en flèche. Le gouvernement lui-même le reconnaît puisqu'il a prévu une remise sur le prix de l'énergie. Le coût du carburant pour les tracteurs, les moissonneuses-batteuses et d'autres instruments aratoires est passé de 37¢ à plus de 50¢ le litre au cours de l'année-récolte 2000. C'est exorbitant, compte tenu du nombre d'hectares cultivés au Canada.
L'engrais est un des principaux facteurs de production d'une denrée alimentaire. Et le gaz naturel est une des principales composantes de matières premières comme l'engrais. Or, le prix du gaz naturel a considérablement augmenté dernièrement. Dans certains cas, le prix de l'azote est passé de 16¢ à 40¢ la livre ce printemps.
Cela ne veut peut-être pas dire grand-chose aux personnes qui habitent le centre-ville de Toronto, de Vancouver ou d'Ottawa, mais ces facteurs sont essentiels à la production de denrées alimentaires. Leur coût de production ne peut pas être récupéré, et il est monté en flèche, tout comme les subventions injustes.
Le troisième problème réside dans ce que le produit rapporte au producteur. En 1996-1997, un producteur touchait 5,50 $ le boisseau de blé. Aujourd'hui, il en touche 2,45 $. Compte tenu de la hausse du coût des facteurs de production, des subventions injustes et du prix que touche le producteur pour ses produits, comment un agriculteur peut-il arriver?
Le canola, dont je vois tous les jours les merveilleuses fleurs jaunes, rapportait 10 $ le boisseau en 1996-1997. Il rapporte aujourd'hui 5,18 $ le boisseau. Le prix du produit a chuté.
La moitié du temps que je passe dans ma circonscription est consacrée aux problèmes agricoles. Des gens âgés de 60 ans, des agriculteurs qui ont passé toute leur vie dans ce secteur, viennent à mon bureau pour me dire qu'ils n'auront pas de récolte cette année. Ils ont 60 ans. Ils sont propriétaires de leur ferme. Ils sont fatigués de dépenser toujours plus d'argent tous les ans et de le gaspiller. Ils veulent mettre un terme à cette situation. Des agriculteurs abandonnent leur ferme. Ils la louent.
Un ami à moi qui vit dans un secteur tout juste au sud de ma ville a dit qu'il y a 50 quarts de terre de plus à louer cette année par rapport à l'an dernier. Ces producteurs abandonnent leur ferme et tentent de la louer. La valeur des terres est en baisse. Les prix de location sont en baisse. Ces agriculteurs ne font malheureusement plus partie du monde agricole. Nous avons perdu 21 200 agriculteurs l'année dernière seulement. Il y a 21 200 agriculteurs de moins cette année que l'an dernier et, croyez-moi, quand les gens le disent, c'est que c'est vrai. C'est la vérité. Cessez de vous cacher la tête dans le sable. Créons des systèmes de soutien qui permettront aux agriculteurs de continuer d'exercer leur activité.
J'ai un dernier point à soulever avant de céder la parole au député de Calgary-Centre. Que pouvons-nous et que devons-nous faire?
De ce côté de l'enceinte, avant les élections, le gouvernement a décidé, par volonté politique, d'accorder une remise aux Canadiens sur le prix de l'énergie. Par magie, 1,3 milliard de dollars ont été trouvés et distribués. Je ne vais pas commencer à discuter du bien-fondé de cette mesure, mais le fait est que le gouvernement avait la volonté politique de le faire.
Il y a actuellement de l'argent dans les coffres du gouvernement. Il faut qu'il y ait une volonté politique d'aider les agriculteurs à faire face à la nouvelle époque des semailles. Cet argent peut être distribué de diverses manières.
Je ne veux pas qu'on vienne me dire que cela peut donner lieu à des mesures compensatoires ou qu'il s'agit d'une question commerciale. Nous avons une marge de manoeuvre de 2 milliards de dollars en vertu de l'accord que nous avons négocié avec les États-Unis dans le cadre de l'OMC. Nous avons une marge de manoeuvre. Nous avons l'argent. Nous avons besoin de la volonté politique.
Nous avons besoin de deux choses: d'injecter immédiatement de l'argent dans le secteur agricole, mais bien plus encore d'une vision, de comprendre où va l'agriculture au Canada. Nous avons besoin d'une vision. Nous avons besoin d'un programme d'aide à long terme. Nous avons besoin d'un programme sur lequel puissent compter les agriculteurs pour avoir espoir en l'avenir.
J'ai un cousin de 40 ans qui a été cultivateur toute sa vie. Il se demande s'il devrait le rester ou plutôt abandonner. Il a besoin d'une lueur d'espoir pour pouvoir continuer son métier. Il souhaite continuer, mais il veut qu'on lui donne la possibilité d'assurer la subsistance de sa famille. Il ne veut plus perdre d'argent année après année et avoir affaire à un gouvernement qui ne veut pas aider.
Je remercie le Président de la Chambre d'avoir permis à mes électeurs de faire savoir ce qui arrive à leurs communautés et à l'agriculture. Ce n'est pas seulement l'agriculture qui est compromise. Ce sont les communautés qui vivent de cette agriculture. Les communautés rurales sont en train de disparaître au Canada. C'est au gouvernement de leur redonner les chances, l'espoir, l'aide et l'appui dont elles ont besoin pour demeurer vivantes.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, je remercie la Chambre et mon collègue de Brandon—Souris d'avoir pris l'initiative de tenir ce débat essentiel.
Le présent débat n'est pas axé uniquement sur la vie humaine et les moyens de subsistance, bien qu'on touchera à ces questions. Il porte aussi sur la sécurité du pays et la protection de sa production alimentaire. Nous nous trouvons dans une situation où notre capacité, non seulement à approvisionner les pays étrangers, mais aussi à répondre à nos propres besoins ici au Canada, est de plus en plus compromise.
J'ai entendu il y a un moment un député libéral mettre en doute les chiffres avancés par mon collègue de Brandon—Souris concernant le nombre d'agriculteurs qui ont cessé de cultiver dans les prairies canadiennes, mon coin de pays. Le nombre que j'ai est 22 000.
Que ce soit 22 000, 21 000 ou 20 000, c'est beaucoup trop de Canadiens qui ont laissé leur terre à l'abandon. Cela n'a rien de banal comme statistique. C'est une réalité qui change la nature de l'ouest du pays, celle de l'Ontario et aussi celle de la circonscription que j'ai eu l'honneur de représenter si brièvement l'automne dernier, Kings—Hants en Nouvelle-Écosse. Elle met aussi en péril la capacité du Canada en tant que producteur agricole capable de produire la nourriture dont il a besoin et d'utiliser un jour les produits agricoles à des fins technologiques.
Je ne vais pas ergoter sur le nombre de personnes qui délaissent l'agriculture, mais je dis que la Chambre des communes et le gouvernement doivent porter attention à cette crise et réagir immédiatement, non pas parce que des camions et des tracteurs obstruaient les rues de Cornwall l'autre jour, mais parce que la capacité du Canada à maintenir sa production alimentaire est réellement menacée, et ce, d'un bout à l'autre du pays.
Il faut injecter immédiatement des fonds dans le secteur agricole, et j'insiste sur le mot «immédiatement».
Les agriculteurs ont besoin de savoir tout de suite si le gouvernement leur accordera des fonds. Ils n'ont pas les moyens d'attendre. Au moment même où nous tenons ce débat, ils s'apprêtent à rendre visite à leur banquier pour ouvrir une ligne de crédit auprès de la banque, en mars et en avril, afin de commencer les semailles en mai.
Si nous continuons d'attendre, si le gouvernement n'agit pas, d'autres exploitations agricoles devront être abandonnées dans tout l'Ontario, dans les Prairies, au Québec et dans les provinces de l'Atlantique. C'est la crise qui nous menace. Le ministre de l'Agriculture doit dire tout de suite à la Chambre que non seulement des fonds seront injectés immédiatement, mais que, au-delà d'une aide d'urgence, il y aura également un programme à long terme.
Lors de la dernière campagne électorale, le Parti conservateur a proposé un programme fondé sur les vieux principes du Régime d'assurance-revenu brut. Nous n'avons pas remporté les élections, mais permettez-moi de dire à la Chambre que ces principes, qui ont été critiqués à l'époque, se sont révélés un fondement qui nous permettra d'assurer une certaine sécurité au secteur agricole à l'avenir. Si le gouvernement n'adopte pas un programme comme celui que nous avons proposé, il doit à tout le moins, dans l'intérêt à long terme du pays, agir immédiatement pour injecter rapidement des fonds et assurer la prise de mesures à long terme dans le secteur agricole.
[Français]
Il ne s'agit pas juste d'une région du Canada. Les fermiers d'un bout à l'autre du Canada sont affligés. Nous avons vu les manifestations sur la Colline. Hier, il y a eu un rassemblement à Cornwall en Ontario. Des fermiers ont bloqué des autoroutes afin de s'assurer que l'on porte attention à leur plaidoyer. Les inquiétudes pour le futur de la ferme familiale sont réelles.
Le 9 février dernier, les ministres provinciaux de l'Agriculture se sont réunis à Regina et ont convenu que la situation financière des fermiers est précaire et que ces derniers ont désespérément besoin de l'aide d'Ottawa.
Les prévisions sont à l'effet que les fermiers du Manitoba devront faire face à une chute de 19 p. 100 de leurs revenus nets réalisés pour l'année 2000, comparé à la moyenne de 1995-1996. La Saskatchewan verra une chute de 56 p. 100. L'Île-du-Prince-Édouard devra probablement faire face à une réduction de 60 p. 100 de ses revenus nets comparé à la moyenne des années 1995-1996.
Ces prévisions sont particulièrement décourageantes pour les fermiers canadiens qui tentent de concurrencer les producteurs agricoles d'autres pays qui bénéficient de hauts niveaux de subventions.
[Traduction]
L'autre jour, à la Chambre, avant de partir rencontrer le président Bush, le premier ministre avait promis clairement à la Chambre et aux agriculteurs de tout le pays qu'il agirait au sujet des subventions tout à fait inacceptables que le gouvernement américain accorde à ses producteurs agricoles.
J'ignore quels résultats il a obtenus, mais je tiens à dire au premier ministre, en son absence, que s'il est incapable de persuader les Américains de réduire leurs subventions, comme tout porte à le croire, il lui incombe alors de veiller à offrir un soutien financier aux agriculteurs canadiens qui souffrent en comparaison, qui n'obtiennent pas de leur gouvernement l'aide que le gouvernement américain apporte à ses producteurs.
Est-ce que cela est possible? Avons-nous l'argent nécessaire? Mettons les choses dans leur contexte. Avons-nous l'argent nécessaire pour protéger l'une des principales industries du Canada et empêcher son extinction graduelle, que nous constatons à l'heure actuelle? Oui, nous avons les fonds, mais encore faut-il vouloir le faire. En avons-nous le droit aux termes de l'Organisation mondiale du commerce? Oui, c'est notre droit.
Les fonctionnaires canadiens ont dit très clairement que nous avons un jeu d'au moins 2 milliards de dollars qui nous permettrait d'investir dans l'agriculture au Canada tout comme les pays auxquels nos producteurs doivent livrer concurrence investissent dans leur agriculture.
Je vais conclure. Je suis juste un citadin de Calgary, mais l'une des choses que j'ai apprises à Calgary, dans une circonscription du centre-ville, c'est que même si nous ne cultivons pas le grain et nous ne produisons pas de denrées dans la ville elle-même, l'économie de ma ville dépend de la bonne santé du secteur agricole. L'économie et la sécurité des gens de tout le pays est liée à la bonne santé de l'agriculture.
L'agriculture a déjà été un secteur dominant au Canada. Ce n'est plus le centre de l'intérêt public. Il faut changer cela et cette tâche nous incombe à la Chambre des communes. C'est plus qu'une question de nourriture, quoique veiller à ce que les Canadiens disposent d'un approvisionnement suffisant d'aliments salubres est fondamentalement important. C'est aussi une question de ce que nous pouvons faire d'autre avec l'agriculture.
Aucune autre industrie au Canada ne se tient plus au fait de la haute technologie et de l'innovation que l'industrie agricole. Ce n'est pas une industrie du passé. Elle est largement une industrie de l'avenir et elle le demeurera à moins qu'on ne mette fin à sa vie ou qu'on la laisse dépérir. Le gouvernement l'a laissée dépérir en ne lui offrant pas l'aide urgente nécessaire ni de plans à long terme.
Nous parlons souvent de la qualité de vie et de l'importance de la collectivité. Le Canada a des valeurs dont certaines sont profondément ancrées dans les régions rurales du Canada. Bien qu'elles deviennent de plus en plus diversifiées, les régions rurales du Canada dépendent des industries des ressources et de l'agriculture.
Si nous laissons l'industrie agricole s'affaiblir comme nous le faisons maintenant, nous courons le risque de changer la nature même de notre pays et de miner les valeurs qui sont importantes fondamentalement. Je demande au ministre et au gouvernement d'injecter immédiatement des fonds dans le système pour ceux qui doivent rencontrer leur banquier demain, et je leur demande de présenter à la Chambre des programmes à long terme qui procureront un certain degré de stabilité dans l'industrie agricole afin que nous puissions être dans l'avenir un pays aussi fier et productif que par le passé.
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais d'abord signaler que je partagerai mon temps de parole avec le député de Parry Sound—Muskoka. Je suis heureux d'avoir la chance de faire part de mes commentaires à la Chambre sur cet important secteur de l'économie canadienne et sur le sujet de fond dont nous nous entretenons ce soir.
Tout d'abord, je préciser très clairement que notre engagement envers les agriculteurs canadiens est très fort. Le gouvernement comprend et reconnaît l'importante contribution que les agriculteurs apportent à notre vie et à nos collectivités. Que nous vivions dans les régions urbaines ou rurales du pays, les agriculteurs nous fournissent des aliments nourrissants de haute qualité à des prix raisonnables.
Ils génèrent des ventes de plus de 100 milliards de dollars par année au pays et à l'étranger. Plus de 14 p. 100 de tous les emplois au pays sont dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire, soit un Canadien sur sept. Environ 9 p. 100 de notre produit intérieur brut est relié au domaine agricole. C'est un secteur très important et très productif.
Comme quelqu'un l'a dit, et je suis bien d'accord, l'efficacité des agriculteurs canadiens n'est plus à prouver. Leurs produits font l'admiration de plusieurs pays. Mais tout aussi productifs et efficaces soient-ils, nos agriculteurs ne sont pas à l'abri des caprices de Dame nature et des fantaisies des marchés mondiaux. Ayant moi-même été agriculteur, je sais très bien qu'il y a bon nombre d'aspects qui échappent au contrôle de toute personne ou de tout gouvernement.
Les agriculteurs canadiens font face à bon nombre de défis, que ce soit au niveau de la météo, des marchés internationaux, du rythme de la mondialisation, des questions environnementales, des préoccupations croissantes des consommateurs en ce qui touchent les aliments qu'ils consomment et autres. Toutefois, à l'heure actuelle, c'est le revenu agricole qui occupe tout particulièrement l'attention, surtout dans le secteur des céréales et des oléagineux. En raison de la surproduction dans certaines parties du monde, qui est due dans certains cas à des subventions faussant les échanges commerciaux, les prix du grain sont bas. Nos céréaliculteurs font principalement les frais de la faiblesse des prix. Nous travaillons d'arrache-pied pour trouver diverses solutions au problème, et je parlerai plus en détail de certaines d'entre elles dans un instant.
Je m'en voudrais toutefois de ne pas mentionner que d'autres secteurs de notre industrie agricole se portent relativement bien, comme l'industrie laitière, le secteur de l'élevage de bétail et celui de la volaille. Quoi qu'il en soit, le gouvernement fédéral s'emploie actuellement avec les provinces et les organisations agricoles à résoudre les problèmes des agriculteurs aux prises avec de graves baisses de revenus et il continuera de le faire.
Seulement au cours des cinq dernières années, nous avons investi avec les provinces 7,1 milliards de dollars pour aider à stabiliser les revenus agricoles, dans le cadre des programmes de protection du revenu. Le gouvernement fédéral versera 1,1 milliard de dollars par année pour l'ensemble des programmes de protection du revenu, et ce pour les trois prochaines années. Avec la contribution des provinces, cela signifie que les sommes versées au cours des trois prochaines années atteindront 5,5 milliards de dollars au titre de la protection du revenu. C'est presque le double du montant qui était prévu lorsque je suis devenu ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire en juin 1997.
Très peu de députés de l'opposition ont vécu l'expérience de réunir tous les ministres provinciaux ou les représentants d'un groupe de provinces afin de les faire participer à un projet d'envergure nationale. L'été dernier, nous avons réussi à rallier les dix provinces et à les faire ratifier un accord sur la protection du revenu agricole. Nous avons ainsi accompli quelque chose de concret et d'important.
L'histoire ne se termine toutefois pas là. Nous continuons de travailler fort pour aider les travailleurs dans le besoin. Je rencontre les ministres de l'Agriculture des provinces le mois prochain et, comme les députés le savent pertinemment, aux termes de la Constitution canadienne, l'agriculture est une question qui relève de la compétence à la fois des provinces et du gouvernement fédéral.
Il faut faire plus, et c'est ce que nous ferons. Le gouvernement reconnaît que, si nous voulons avoir une industrie agricole et agroalimentaire prospère et grandissante, nous devons, comme nous l'avons dit dans le discours du Trône, aller au-delà de la gestion de crise.
Il faut nous attaquer au problème immédiat du revenu agricole, mais il faut aussi examiner ce défi dans un contexte plus large. La réputation des produits agricoles et agroalimentaires canadiens repose sur la constance et sur la grande qualité. Après avoir parlé avec des consommateurs dans le monde entier, je puis vous dire que cette réputation de qualité est pratiquement inégalée partout ailleurs dans le monde.
Les consommateurs, au Canada aussi bien que partout dans le monde, posent de plus en plus de questions au sujet de la source de leurs aliments et au sujet de la relation entre la production des aliments et l'environnement, par exemple. Ils ont le droit de poser ces questions. Si, pour une raison ou une autre, les consommateurs perdaient confiance dans nos produits, tout le reste deviendrait discutable. En agriculture, pas moins que dans n'importe quelle autre entreprise, le consommateur est vraiment la clef.
Par conséquent, nous devons continuer d'améliorer et de perfectionner notre système d'inspection des aliments, dont je suis fier de dire qu'il est l'un des meilleurs au monde. Nous devons le garder ainsi. En tâchant de remédier aux problèmes de revenu de certains de nos producteurs, nous devons également nous attaquer aux défis environnementaux très réels de l'agriculture, dont le moindre n'est pas de veiller à assurer la conservation des précieuses ressources de notre eau et de nos sols.
Pour être en mesure de le faire, nous devons continuer de mettre l'accent également sur la recherche et l'innovation. Dans leur détermination à maintenir partout dans le monde leur réputation d'excellence et d'efficience, les agriculteurs canadiens sont constamment à l'affût des toutes dernières technologies et pratiques agricoles pour les adopter. Par conséquent, la recherche n'est pas moins importante pour l'agriculture qu'elle ne l'est pour les secteurs de la technologie de pointe et des communications. L'année dernière, nous avons dépensé 250 millions de dollars en fonds fédéraux consacrés à la recherche dans nos 19 centres de recherche établis un peu partout dans le pays.
Nous travaillons également d'arrache-pied sur le front du commerce international, et nous continuerons de le faire. Au cours de la dernière décennie, les exportations agricoles et agroalimentaires du Canada ont presque doublé. Nous sommes un pays exportateur: nous produisons beaucoup plus que nous ne pouvons consommer et utiliser au Canada. La valeur de nos exportations a donc presque doublé et atteint maintenant 20 milliards de dollars par année.
À l'Organisation mondiale du commerce, et à chaque occasion, nous rencontrons, à tous les niveaux, les représentants des pays commerciaux et agricoles ou des citoyens de ces pays. Par l'intermédiaire de forums internationaux tel que le groupe Cairns, nous nous efforçons d'améliorer l'accès aux marchés étrangers pour les produits canadiens et de modifier les règles commerciales internationales de manière à ce que nos agriculteurs ne subissent pas les conséquences de la politique de subventions agricoles pratiquée par les autres pays.
Notre position à l'OMC consiste en partie à maintenir le droit de garder nos systèmes de commercialisation telle que la Commission canadienne du blé, et les systèmes de gestion de l'offre, qui servent si bien les Canadiens. Ce sont les généreuses subventions à l'agriculture qu'offrent certains de nos partenaires commerciaux qui ont contribué à la surproduction et fait baisser le prix des denrées, dont le grain. J'aimerais souligner que la position du gouvernement canadien aux négociations de l'OMC n'a pas été prise de façon isolée. Notre approche consistait à discuter avec les autres pays et à collaborer avec l'industrie. Je m'engage à poursuivre la concertation.
En conclusion, je tiens à dire que le revenu agricole n'est pas une question que l'on peut traiter séparément de toutes les autres questions qui se posent aux agriculteurs. Elle est importante et il faut continuer à y travailler. Toutefois, il existe d'autres questions telles que la durabilité de l'environnement, la salubrité des aliments, le maintien des marchés existants et la découverte de marchés nouveaux, l'accès à la meilleure science et à la meilleure technologie ainsi qu'aux meilleurs cerveaux, et l'adaptation aux réalités d'aujourd'hui.
Le gouvernement reconnaît que ces questions, tout comme l'agriculture, sont extrêmement complexes et que nous devons être plus proactifs, que nous devons faire plus, aujourd'hui plus que jamais. Nous devons travailler de concert avec les provinces pour nous assurer que les agriculteurs sont en mesure de surmonter les crises, qu'elles soient causées par les forces économiques ou par les forces de la nature.
Le gouvernement et moi-même, en ma qualité de ministre, nous nous engageons à y consacrer tous nos efforts, à mettre à contribution toutes les ressources à notre disposition, et à donner à cette question la priorité la plus élevée possible afin de nous concentrer sur la question du revenu agricole et sur toutes les autres questions connexes qui existent dans ce complexe secteur qu'est l'agriculture. Nos agriculteurs ne méritent rien de moins que cela.
L'hon. Andy Mitchell (secrétaire d'État (Développement rural) (Initiative fédérale du développement économique pour le Nord de l'Ontario), Lib.): Monsieur le Président, je voudrais dire à quel point je suis fier de voir un collègue du nord de l'Ontario au fauteuil. Je vous félicite de votre nomination à ce poste.
Je suis particulièrement heureux d'avoir l'occasion, dans le cadre de ce débat spécial, de parler des problèmes de l'agriculture et des producteurs agricoles et de parler aussi de l'impact des grands dossiers sur le Canada rural et les Canadiens des régions rurales.
Nous procédons à un débat ce soir, mais je crois que nous tenons déjà certains éléments pour acquis. Personne ne remet en question l'importance du secteur agricole pour le Canada, l'économie canadienne et le Canada rural surtout. Nous sommes tous d'accord sur ce point je crois. L'autre point que personne ne remet en question, c'est l'ampleur des défis à relever pour le secteur agricole, et partant, des défis auxquels font face le Canada rural et les Canadiens qui y habitent.
Je suis heureux que nous ayons l'occasion de discuter de ce dossier ce soir et que les députés de tous les côtés soient appelés à participer à la discussion. À mesure que la soirée avancera, j'espère que des députés des deux côtés de la Chambre formuleront des suggestions et proposeront à la Chambre des solutions et des stratégies.
Les députés à la Chambre et les Canadiens qui nous regardent ne veulent pas vraiment que nous nous pointions du doigt en nous adressant des reproches et des blâmes. Il y aura peut-être un moment pour cela. Nous sommes plutôt ici pour trouver des solutions au problème de notre secteur agricole, et j'espère que ce sera l'objet du débat ce soir. Nous devons déterminer comment, à titre de gouvernement et collectivement en notre qualité de députés, nous pouvons ensemble trouver des solutions comme nous nous devons de le faire. J'espère que c'est ce que vise ce débat.
Comme le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire l'a souligné, on a fait énormément au cours des dernières années pour répondre aux besoins de nos producteurs agricoles. Le ministre a parlé des améliorations considérables apportées aux filets de sécurité depuis que le portefeuille lui a été confié. Il a parlé de l'entente avec les provinces. Amener les 10 provinces à signer un accord sur l'agriculture avec le gouvernement fédéral a été une étape importante. En vertu de cette entente, aucune province n'a reçu moins de fonds et plusieurs provinces en ont même reçu davantage et, bien entendu, une aide spéciale supplémentaire a été accordée l'an dernier au Manitoba et à la Saskatchewan.
L'agriculture est importante, extrêmement importante, même, mais le Canada rural compte aussi d'autres composantes. C'est un élément très spécial du Canada. Le Canada rural fait partie de la trame sociale du Canada. Il y a des députés dans tous les partis qui proviennent du Canada rural dont le caractère unique s'exprime par ses traditions et ses institutions propres.
Lorsque nous parlons de l'industrie agricole, il nous faut aussi parler, dans une optique plus large, d'assurer l'avenir du Canada rural. Il est important de penser à tout ce qu'englobe le Canada rural. Oui, il inclut les collectivités rurales agricoles de la Saskatchewan de même que les producteurs laitiers de l'est de l'Ontario. Cependant, il inclut également, comme vous le savez fort bien, monsieur le Président, les collectivités minières du nord de l'Ontario, les collectivités de l'intérieur de la Colombie-Britannique qui dépendent de l'exploitation forestière ainsi que les petits ports de pêches isolés de Terre-Neuve. Le Canada rural est en grande partie tributaire de l'exploitation des ressources, dont l'agriculture, aussi nous ne devons pas nous préoccuper uniquement d'agriculture, mais de tout ce qui concerne les industries liées aux ressources et qui assure la subsistance de beaucoup de gens dans les régions rurales.
Je crois que le gouvernement du Canada a marqué clairement sa volonté de s'occuper des problèmes du Canada rural. Le poste de secrétaire d'État au Développement rural, que j'occupe, n'existait pas avant que le premier ministre m'y nomme. Nous croyons que notre gouvernement peut et doit absolument se pencher sur les problèmes du Canada rural et comprendre que, même s'ils partagent de nombreux problèmes avec leurs compatriotes des villes, les Canadiens des régions rurales doivent relever des défis distincts.
Il faut parler de la géographie et de ce que suppose la prestation de services sur de grandes distances. Il faut parler de la densité de la population et de son influence sur l'investissement dans les régions rurales. Il faut parler de la nature cyclique de nos industries primaires et de la politique publique nécessaire pour soutenir les collectivités rurales.
Voilà ce que le Parlement doit faire, soit examiner la situation spéciale des Canadiens des régions rurales. Le présent débat vise en grande partie à comprendre les défis que doivent relever le Canada rural et le secteur industriel qui y prédomine et d'y réagir de façon logique.
Nous devons nous assurer de fournir deux choses aux collectivités et aux Canadiens des régions rurales. Premièrement, nous devons fournir les outils dont ils ont besoin pour relever ces défis. Deuxièmement, nous devons les doter de la capacité d'utiliser ces outils de façon logique.
Au fil des années, le gouvernement a fourni un grand nombre d'outils aux collectivités et aux Canadiens des régions rurales. Prenez, par exemple, le programme de 2,65 milliards de dollars de modernisation des infrastructures. Le fait est que quand ces accords ont été signés avec les provinces, ces dernières avaient mis certaines sommes de côté pour les collectivités rurales.
Le Programme de développement des collectivités est un programme qui vise uniquement les collectivités rurales. Il a pour but d'aider au développement de ces collectivités. Il fournit aussi de l'aide aux petites entreprises de ces collectivités pour favoriser le dynamisme et la prospérité dans ce secteur. Le gouvernement fédéral a annoncé dans son budget de l'an dernier l'affectation de 90 millions de dollars pour veiller à ce que l'aide aux collectivités rurales soit maintenue et à ce que les sociétés d'aide au développement soient en mesure de faire le travail nécessaire pour aider ces collectivités.
Je pourrais passer en revue plusieurs autres instruments, mais ceux-ci sont les deux plus importants. Il y a aussi le Programme d'accès communautaire, le programme CATRT dans le domaine de l'agriculture et le soutien des revenus agricoles que j'ai mentionné plus tôt.
Il est également important de faire en sorte que les communautés rurales puissent recourir à ces instruments. C'est pourquoi il est important que le gouvernement veille à ce que les collectivités soient habilitées à prendre les décisions nécessaires à leur survie.
Il faut comprendre que les collectivités rurales ne sont pas toutes pareilles et que les problèmes que doit surmonter l'une de ces collectivités en Saskatchewan ne sont pas les mêmes que vous, Monsieur le Président, et moi avons à affronter dans le nord de l'Ontario, ni ceux que certains de nos collègues ont à surmonter au Yukon, au centre de l'Ontario et ailleurs au Canada.
De là toute l'importance d'une démarche ascendante faisant en sorte que les collectivités établissent elles-mêmes leurs priorités et les stratégies précises qu'elles souhaitent mettre en oeuvre. Le rôle du gouvernement fédéral, et celui des gouvernements provinciaux d'ailleurs, est de fournir à ces collectivités les outils dont elles ont besoin pour garantir leur viabilité.
Nous sommes ici ce soir pour parler de l'agriculture. Au sens large, nous sommes ici pour parler du Canada rural. Au sens plus large encore, nous sommes ici pour parler du Canada. Nous sommes ici pour parler de certaines valeurs qui nous sont particulièrement chères.
J'ai eu la très grande chance de voir grandir mes enfants dans une région rurale du Canada, à Gravenhurst, la ville où je suis né, dans la circonscription de Parry Sound—Muskoka. C'est un endroit extraordinaire. Les gens qui y vivent sont extraordinaires eux aussi. Ils croient dans les valeurs communautaires et dans les valeurs familiales. Je crois essentiel que nous profitions de ce débat à la Chambre pour rechercher ensemble des moyens de soutenir le Canada rural, pour rechercher ensemble des moyens qui assureront, pour nos enfants autant que pour nous, la continuité du style de vie que nous avons tous à coeur.
M. Gurmant Grewal: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Comme le ministre est encore à la Chambre, j'en profite pour demander le consentement unanime pour qu'on m'accorde dix minutes réservées aux questions et observations adressées au ministre.
Le président suppléant (M. Bélair): Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je signale que je vais partager mon temps de parole avec mes collègues de l'opposition.
Je voudrais prendre pour argent comptant les hauts cris lancés par le secrétaire d'État chargé du Développement rural, mais je m'inquiète beaucoup quand un député demande au ministre s'il peut poser des questions sur un discours sur l'agriculture que vient de livrer le ministre et que ce dernier refuse. Il est même impossible de lui poser des questions fondamentales sur la crise qui s'oppose à nos agriculteurs.
J'aurais davantage cru en la sincérité du gouvernement si, à un moment donné, depuis novembre ou octobre dernier, le premier ministre, le secrétaire d'État ou le ministre de l'Agriculture avait donné l'assurance que le candidat libéral dans Regina parlait à tort et à travers en disant aux agriculteurs, qui attendaient la visite à Regina du premier ministre—qui, lui, ne voulait pas les rencontrer—que, s'ils ne votaient pas correctement, ils n'obtiendraient pas l'aide dont ils avaient besoin. Jamais cette observation n'a été dénoncée.
Je voudrais bien ne pas douter de la sincérité du gouvernement, mais rien ne m'y encourage. On refuse de répondre aux questions aujourd'hui et d'horribles déclarations n'attirent pas la moindre réfutation ou réprimande.
Le secrétaire d'État chargé du Développement rural a également déclaré que le gouvernement cherchait des stratégies. J'apprécie sa franchise à cet égard. On laisse entendre que le gouvernement ne possède pas les stratégies voulues et qu'il est à leur recherche. Je suis sensible à cette ouverture.
Au moment où nous nous penchons sur la crise actuelle, il est important de souligner que des fonds doivent être injectés. Il importe de mentionner que les agriculteurs de tout le Canada, nos producteurs, sont capables de choses incroyables. Ils peuvent alimenter la planète. Ils ne se contentent pas de demander des subventions. Ils ne font pas que demander plus d'argent.
Les stratégies formulées par l'Alliance canadienne se fondent sur un grand nombre de rencontres avec des producteurs de tout le pays. Nous avons tenu 76 rencontres avec des milliers d'agriculteurs, alors que le comité du gouvernement a tenu des réunions éparses il y a un certain temps. Je crois qu'il a tenu neuf rencontres. Nous parlons de 76 rencontres avec des milliers de producteurs.
Ceux-ci nous ont parlé de stratégies directes. Ils ont demandé une réduction du coût de leurs facteurs de production. Nous avons proposé diverses façons d'y arriver. Nous avons proposé à la Chambre de réduire les coûts des carburants, y compris le coût du diesel. Les députés libéraux fédéraux ont voté contre cette mesure. Il y avait là une stratégie. Nous offrions un rayon d'espoir.
Nous avons parlé de la capacité de réduire les frais d'utilisation. Selon nos estimations basées sur les données d'Agriculture Canada, les frais d'utilisation liés au seul achat des engrais s'établissent dans le cas de la collectivité agricole à quelque 300 millions de dollars. Nous avons demandé une réduction de ces frais afin de les aider à faire face aux coûts des facteurs de production. La réponse est non.
Nous avons parlé de valeur ajoutée. Si nous augmentons la valeur ajoutée correspondant à ce volet de notre économie, le produit sera en plus grande demande, qu'il s'agisse des capacités et possibilités relatives à l'éthanol en Ontario ou des usines de production de pâtes dans l'Ouest. Nous avons suggéré au gouvernement de réduire les taxes frappant les entreprises, de diminuer les coûts de ces entreprises et d'accroître les mesures les encourageant à investir. Nous avons fait de ces propositions des stratégies très précises. Qu'avons-nous obtenu en retour? Rien.
J'ai du mal à croire à la sincérité du gouvernement qui prétend vouloir aider le secteur agricole. Nous avons souligné que nous devrions nous pencher sérieusement sur la nécessité de négocier à la baisse les terribles subventions auxquelles nos agriculteurs sont confrontés. Les députés savent bien que les céréaliculteurs européens reçoivent des subventions qui correspondent à quelque 56 p. 100 de leurs revenus. Aux États-Unis, les subventions offertes correspondent à environ 36 à 38 p. 100 de leurs revenus alors que chez nous, elles ne correspondent qu'à 8 ou 9 p. 100 du revenu total. Nos producteurs ne nous disent pas qu'ils ont besoin de subventions plus importantes, mais ils ont très certainement besoin d'aide dès maintenant. Nous avons proposé des stratégies bien particulières, mais rien ne semble bouger de ce côté.
Nous avons proposé une stratégie assez directe qui offrirait aux producteurs, particulièrement dans le secteur céréalier, un choix en matière de commercialisation touchant la Commission du blé. Il s'agit là de stratégies bien précises. Nous ne proposons pas de faire disparaître la Commission. Elle peut être utile à certains. Encore là nous n'avons pas de réponse. On nous a demandé ces stratégies et nous ne les recevons pas.
Nos députés ont travaillé fort pour préparer des améliorations au système de transport et de manutention du grain. Nous avons proposé des stratégies basées sur le fruit de leurs efforts. Nous sommes mêmes prêts à dire que si nos vis-à-vis, les libéraux, décidaient d'adopter ces stratégies, nous les en féliciterions. Nous leur en accorderions même le mérite. Cette question va bien au-delà des préoccupations partisanes. Il y a à l'heure actuelle des producteurs qui affirment qu'ils ne seront pas en mesure de semer au printemps. Il faut faire quelque chose dès maintenant.
On parle du programme ACRA depuis deux ans. Il y a quelque 1,7 milliard de dollars qui sont toujours bloqués au Cabinet au lieu de se trouver dans les poches des agriculteurs. Près de la moitié des demandes déposées ont été refusées, la plupart pour des détails purement techniques.
Quel est le problème du gouvernement libéral? Il y a des agriculteurs et des producteurs qui font savoir qu'ils on besoin de cet argent et le gouvernement continue de retenir les fonds. Nous avons approuvé l'injection de ces fonds, mais nous ne voyons toujours pas le gouvernement agir. Certains agriculteurs ne savent pas s'ils pourront survivre après ce printemps.
En ce qui concerne la réduction de ces subventions, le gouvernement aurait tous les moyens d'agir s'il en avait la volonté. Les libéraux pourraient miser sur le pouvoir d'achat d'autres pays commerçants et utiliser ce pouvoir collectif pour forcer ces réductions.
Ce problème ne touche pas uniquement l'Ouest ou l'Ontario. Qu'on regarde ce qui se passe dans l'Île-du-Prince-Édouard, dont les chargements de pommes de terre ont été bloqués à la frontière. Les personnes qui avaient effectué des recherches sur la galle verruqueuse qui a attaqué ces pommes de terre nous ont dit qu'elle ne posait pas de problème. Si nous comprenons bien, le ministre se promenait autour du monde, alors qu'il aurait dû s'occuper de ces questions. Des agriculteurs de l'Île-du-Prince-Édouard ont stocké leur produit ou l'ont remis dans le sol.
Nous devons agir et nous devons le faire immédiatement. Les libéraux ont demandé des stratégies et nous les avons présentées. Mes collègues en parleront de façon encore plus détaillée.
Ce n'est pas le temps d'adopter simplement des positions sectaires. Il y a à peine quelques semaines, j'ai rencontré un groupe d'agriculteurs. L'un d'eux m'a tendu la main et, après que je l'eus serrée, il s'est accroché à la mienne. Il a dit qu'il s'accrochait, mais qu'il ignorait s'il pouvait tenir jusqu'à la fin du printemps. Il a dit que les agriculteurs avaient immédiatement besoin des fonds prévus par le gouvernement.
Je mets de côté la politique. Nous parlons de donner à nos agriculteurs les moyens de faire ce qu'ils peuvent faire le mieux, soit être les plus novateurs au monde. Les producteurs et les agriculteurs canadiens ont prouvé qu'ils sont les plus gros travailleurs au monde, qu'ils sont les plus ingénieux au monde. Ils ont prouvé qu'ils peuvent élaborer les meilleures pratiques de préservation au monde. Notre secteur agricole a prouvé qu'il peut être le meilleur au monde. Il est temps qu'il reçoive l'appui d'un gouvernement qui lèverait les obstacles et lui permettrait d'être le meilleur.
Il est temps que nous ayons un gouvernement fédéral qui établisse et maintienne une vision pour le secteur agricole, une vision pour que nos agriculteurs puissent nourrir la population mondiale, tout en nourrissant leurs familles. Telle est la position de l'Alliance canadienne, l'opposition officielle. Le gouvernement a demandé des stratégies et nous les avons présentées.
Nous demandons que le gouvernement y donne suite, parce que l'échéance arrive pour un trop grand nombre d'agriculteurs. Il est temps d'agir en faveur des fermes familiales.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous sommes ce soir rassemblés pour parler de la politique agricole, comme on l'a rappelé un peu plus tôt. En fait, nous sommes ici rassemblés pour dénoncer l'absence de la moindre politique sensée chez le gouvernement libéral en matière d'agriculture.
Le secteur agricole est-il en crise au Canada? S'il s'agit de production de céréales, d'oléagineuses, de maïs, et de pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard, il y a très certainement lieu de parler d'une crise grave, d'une crise qui concerne au premier chef la survie et la trame sociale de beaucoup de localités dans l'ouest du Canada, en Ontario, dans l'Île-du-Prince-Édouard et, en fait, dans toutes les provinces. Ce débat est nécessaire, mais il ne vise pas la politique agricole. Il vise plutôt une crise on ne peut plus réelle et actuelle.
Je voudrais rappeler brièvement l'historique de cette crise qui n'a pas surgi du jour au lendemain. En fait, elle est apparue il y a cinq à dix ans de cela. L'absence de politique depuis une trentaine d'années, l'absence de stratégie agricole à long terme, l'absence de volonté de changer et d'évoluer en fonction des besoins exprimés dans le secteur au fil des ans, voilà ce qui fait défaut et qui explique que nous soyons en crise aujourd'hui.
En 1997, nous avions été saisis d'une initiative, le fameux projet de loi C-4 sur la Commission canadienne du blé. La Commission canadienne du blé n'a jamais été changée en organisme à participation facultative, ce qu'il aurait fallu faire pour que les exploitants agricoles puissent commercialiser leur propre grain et augmenter leurs revenus, du moins ceux qui le souhaitaient. Ceux qui avaient besoin des services de la Commission auraient été libres d'y recourir selon un processus de participation volontaire. Nous aurions bénéficié de la valeur ajoutée, ce qu'essayaient d'obtenir les fabricants de pâtes alimentaires. Cela n'aurait pas nui aux producteurs de blé dur du sud-ouest de la Saskatchewan et du Manitoba, qui voudraient constituer, avec le concours de leurs voisins du Dakota du Nord, un cartel du blé dur.
L'échec du gouvernement est tout à fait évident dans les projets de loi qu'il essaie de présenter et qui maintiennent une réglementation excessive du secteur agricole au lieu de lui laisser les coudées franches. Je vais donner dans un instant deux ou trois exemples de plus qui vont certes montrer que c'est bien le cas.
L'autre projet de loi qui a vraiment fait mal aux agriculteurs était le projet de loi C-34. Que nous ont donné cette mesure catastrophique et les deux ans consacrés en pure perte au rapport Estey-Kroeger, qui présentait toutes ces merveilleuses solutions relativement au réseau de transport ferroviaire et préconisait un système basé sur des contrats commerciaux pour le transport de notre grain jusqu'aux ports? Toutes sortes de règlements, aucune solution concrète et de grands débats et conflits entre les divers intéressés sur la façon de transporter notre grain jusqu'aux ports.
Nous avons fait toutes sortes de tentatives au cours des deux dernières années. Nous avons tenu des débats d'urgence sur le revenu agricole. Les députés peuvent vérifier dans le hansard. Nous avons consacré des jours désignés au revenu agricole. Nous avons tenu un débat d'urgence sur la grève dans le secteur de la manutention du grain à Vancouver. Cette grève s'est répétée à Montréal. Cela touche durement les producteurs comme les producteurs de légumineuses à grain qui déplacent leurs conteneurs sur le réseau.
Je parlerai dans un instant de l'industrie des légumineuses à grain, l'un des rares secteurs dans les Prairies où les producteurs réalisent des profits. C'est un autre exemple de ce que le gouvernement ne fait pas et pourrait certes faire. Les agriculteurs de l'Ouest et de l'Ontario produisent des légumineuses à grain. Le gouvernement, qui parle toujours de recherche, fait très peu de recherche sur cette culture. Il y a un chercheur à Saskatoon qui en effectue un peu. Or, il y a trois chercheurs à temps plein pour le blé.
Ainsi, le gouvernement collabore avec la société Monsanto pour développer un blé contenant des OGM. Il n'en demeure pas moins que le blé va continuer de se vendre au même prix qu'à l'heure actuelle, soit au-dessous du coût de production. Les producteurs de légumineuses à grain peuvent réaliser des profits, mais le gouvernement pourrait leur offrir des fonds de contrepartie pour les aider à financer la recherche dans ce secteur. Or, que fait le gouvernement là-dessus? Il n'offre pas de fonds de contrepartie. Il va encore effectuer des recherches sur le canola et le blé. Il ne met pas ses priorités à la bonne place dans ce secteur.
En ce qui concerne les transports, je viens d'en parler brièvement. Les producteurs ne peuvent garantir à leurs clients à l'étranger, en Inde et dans d'autres pays, qu'ils vont pouvoir leur livrer leurs produits à temps. Voici une autre solution que le gouvernement pourrait envisager. L'arbitrage des offres finales est un bon exemple des mesures que nous pourrions prendre pour nous assurer que les conteneurs sont embarqués à bord de navires et parviennent aux clients. Le rapport Estey Kroeger aurait dû être mis en application et ne l'a pas été. Cela aussi entrave notre capacité d'assurer la livraison de nos produits.
Le gouvernement a laissé la crise s'amplifier. Nous avons parlé de solutions, mais la seule qui soit possible est de faire ce que demandent les regroupements d'agriculteurs, qui disent qu'ils ont besoin d'un milliard de dollars en plus des programmes qui forment le filet de sécurité. Cette injection de fonds doit être immédiate, avant les semailles du printemps. Cela signifie maintenant. Le gouvernement a convenu de tenir ce soir un débat d'urgence et il n'a pas d'autre choix que d'injecter des fonds de toute urgence.
Le problème avec l'ACRA et le nouveau PCRA est qu'ils ne s'appliquent pas aux agriculteurs qui sont en crise, à savoir les producteurs de céréales, d'oléagineux, de maïs et, dernièrement, de soja.
Je sais que mes collègues qui sont agriculteurs auront certainement appris ce qui s'est passé hier, mais est-ce que les autres savent ce qui est arrivé aux prix des denrées? Ont-ils augmenté ou ont-ils baissé? Je parle des céréales, du blé, du canola et des autres cultures qui sont en crise. Le marché à terme est à la baisse pour chacune de ces denrées. C'est clairement là que se trouve le problème.
Il faut que les agriculteurs puissent faire les semailles. Il faut aussi qu'ils s'ajustent à d'autres cultures. Le problème est que lorsque le gouvernement a supprimé toutes les subventions, y compris le tarif du nid-de-Corbeau, il ne les a jamais remplacées par un programme à long terme décent et prévisible qui aiderait tous les agriculteurs plutôt que seulement quelques-uns. L'ACRA semblait aider les producteurs de porc, mais le programme n'a pas aidé les agriculteurs touchés par le problème à plus long terme crée par des années de maigres revenus.
Parlons un instant de questions commerciales. Le gouvernement semble déterminé à irriter les Américains à chaque fois qu'il le peut. Dernièrement, le Dakota du Nord a trouvé bon d'adopter une mesure législative, ou du moins la présenter à son assemblée législative, en partie en raison de l'accord que notre gouvernement a conclu avec les États-Unis il y a deux ans lorsque nous avons éprouvé des problèmes avec le groupe R-CALF, affaire qui a donné lieu à une série de ripostes, dans l'Ouest en particulier. C'était un accord en 40 points qui prévoyait que les parties se rencontreraient pour discuter avant qu'il y ait des différends en règle. Avant qu'il y ait un différend commercial, comme celui touchant les pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard, le gouvernement rencontrerait les représentants des agriculteurs et des politiciens américains afin d'éviter la prise de mesures commerciales.
Or, nous assistons maintenant à la prise de mesures commerciales envers le Brésil. N'est-ce pas là un petit cas intéressant? Nous assistons au paiement de dettes politiques envers la société Bombardier et la province de Québec. Pour s'en prendre au Brésil de toutes les façons mesquines possibles, le gouvernement devait faire intervenir le ministre de l'Agriculture car ses mesures de représailles portaient notamment sur l'importation de boeuf du Brésil. L'importation de boeuf a été interdite à cause d'une ingérence politique, et pour aucune autre considération. D'ici quelques jours, nous verrons une levée de cette interdiction.
Quand nos partenaires de l'ALENA, les États-Unis et le Mexique, constateront une ingérence politique dans des dossiers commerciaux, ils seront plutôt mécontents à l'égard du gouvernement. Je ne suis pas dans le secret de ce qu'ils disent au gouvernement, mais je puis dire que le secrétaire américain à l'Agriculture doit sans doute téléphoner à Ottawa pour dire au premier ministre de lever l'interdiction sur l'importation de boeuf parce que cela nuit au commerce entre les Amériques.
Si le gouvernement tient à irriter nos partenaires commerciaux, tout espoir est perdu pour nos agriculteurs. Il est vraiment dommage que le gouvernement n'aie pas été défait lors des élections du 27 novembre car il a ruiné l'agriculture, et je ne vois pas venir de solutions des banquettes d'en face.
[Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, je partagerai le temps qui m'est alloué avec mon collègue de Champlain.
Ce soir, dans l'enceinte de ce Parlement, nous avons l'occasion de discuter d'un problème extrêmement urgent puisqu'il s'agit, en quelque sorte, de l'état d'urgence dans le domaine de l'agriculture. Ce débat a été réclamé par notre collègue de Brandon—Souris en vertu des dispositions de l'article 52 du Règlement.
Ce qu'il y a d'intéressant dans le Règlement, c'est qu'on dit que lorsque le Président doit rendre sa décision, à savoir s'il accorde ou non le débat d'urgence, il doit tenir compte de la mesure dans laquelle le débat qui est demandé concerne les responsabilités administratives du gouvernement ou pourrait faire partie du domaine de l'action ministérielle. La Présidence devra également tenir compte de la probabilité que l'affaire soit discutée à la Chambre dans un délai raisonnable par d'autres moyens.
Mes premiers mots sont pour remercier le Président d'avoir reconnu le caractère urgent du sujet qu'on doit débattre ce soir et de nous avoir donné l'occasion de pouvoir le faire.
Maintenant, j'en viens aux raisons qu'il doit prendre en compte. Il a bien reconnu qu'il s'agissait d'un domaine qui relevait de la responsabilité ministérielle; on le sait tous. L'autre pendant, c'est qu'il a dû tenir compte des probabilités que l'affaire soit discutée à la Chambre dans un délai raisonnable par d'autres moyens.
Quand on pense que le ministre des Finances, par exemple, a dit qu'il ne songeait pas à présenter de budget à ce moment-ci de l'année, mais qu'il reportait cela à l'automne, on se demande comment le gouvernement va faire pour prendre ses responsabilités ministérielles et trouver les moyens de répondre à cette urgence.
Ce n'est pas d'hier que la situation dans le monde agricole est dévastatrice. Déjà, en décembre 1998, le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire avait mis toutes ses préoccupations de côté et s'était penché sur cette question.
Il avait sonné l'alarme en déposant un rapport qui s'intitulait: «La crise du revenu agricole au Canada». Bien que le titre laisse à penser que le comité avait saisi l'urgence d'agir, les recommandations du comité, pouvait-on lire dans le rapport dissident du Bloc, «ne tenaient nullement compte de l'urgence de la situation».
Force m'est de reconnaître, près de trois ans plus tard, l'exactitude des critiques que le Bloc adressait à ce moment-là aux recommandations du comité. Le secteur agricole canadien n'en finit plus d'être plongé dans une crise majeure.
Dans la lettre qu'il a adressée au Président de cette Chambre pour demander ce débat d'urgence, notre collègue de Brandon—Souris décrit bien la crise. Il souligne que les communautés agricoles à travers tout le Canada avaient tenté de pallier les conditions effroyables qui les affligent aujourd'hui.
En référant à un sondage sur la main-d'oeuvre effectué par Statistique Canada, il rappelait que l'Ouest canadien, uniquement au cours de l'année 1999, avait perdu 22 100 fermiers dans les Prairies, et ce, à la suite de graves pressions de nature psychologique et financière qui pèsent sur l'industrie agricole, sans compter les désastres naturels et les subventions étrangères injustifiées qui aggravent la situation.
Les intervenants, le chef du Parti progressiste-conservateur, le chef de l'Alliance canadienne, les députés, tous ont souligné la même chose. Malheureusement, on ne pouvait pas s'attendre à autre chose de la part du gouvernement que les réactions que nous avons eues du ministre et du secrétaire d'État. Il y eu, sans doute, un peu d'argent d'investi dans le domaine de l'agriculture, mais pas suffisamment, compte tenu de la taille des problèmes.
Ce gouvernement manque de vision, comme le soulignait notre collègue de Brandon—Souris. Probablement qu'il n'est pas le seul non plus à avoir manqué de vision, parce que l'état de l'agriculture est assez lamentable. On a laissé longtemps, et peut-être trop longtemps, les gens de l'Ouest ne pas assez diversifier leurs cultures.
L'Île-du-Prince-Édouard produit des pommes de terre. Bien sûr, quand arrive un problème dans le domaine de la pomme de terre, quand les États-Unis menacent de ne plus laisser entrer la pomme de terre de l'Île-du-Prince-Édouard chez eux et que le Mexique veut emboîter le pas, il est bien évident, si vous avez une seule culture dans votre province, que vous avez des gros problèmes et qu'ils seront accentués.
Une des choses qui, d'une certaine façon, aident beaucoup l'agriculture au Québec—je vois ici de grands financiers et donc, je pourrais utiliser une expression de financiers—c'est que le Québec a un portefeuille agricole varié, de sorte que lorsque se produisent des pépins dans un domaine, on peut se rabattre sur une autre production et essayer d'en moins souffrir.
Quand notre collègue de Brandon—Souris a soumis sa demande au Président, il a souligné une chose extrêmement importante. Il a dit que les subventions que les États-Unis et l'Union européenne, entre autres, accordent à leurs producteurs agricoles font en sorte que les producteurs de chez nous, à qui le gouvernement canadien a coupé énormément de subventions, ont beaucoup de difficulté à assumer une réelle concurrence dans ce domaine.
Ne nous trompons pas, le débat amorcé ce soir par notre collègue est vraiment d'intérêt national et les questions qu'il soulève affectent directement toutes les communautés agricoles d'un bout à l'autre du Canada, comme il l'indiquait d'ailleurs lui-même dans sa lettre du 12 février.
Nous devons discuter en profondeur des problèmes auxquels est confrontée l'industrie agricole et nous devons essayer de trouver des solutions concrètes pour régler ces problèmes à court, moyen et long terme.
Nous avons du retard à rattraper. Je suis députée depuis 1993 et je dois constater, malheureusement, que le gouvernement libéral dirigé par le député de Saint-Maurice a vraiment négligé le secteur agricole.
Nous sommes devenus en quelque sorte—j'utiliserai une expression souvent utilisée dans ma culture—plus catholiques que le pape. Parce que l'OMC disait qu'il ne fallait pas subventionner l'industrie agricole, le gouvernement a sauté sur l'occasion pour couper rapidement le plus de subventions possibles, pendant que les Américains, eux, maintenaient les subventions, déséquilibrant tout à fait la production des producteurs agricoles d'ici.
Quand on parle des difficultés qui frappent surtout l'Ouest, l'Ontario, l'Île-du-Prince-Édouard, je pense qu'il ne faut pas se faire d'illusions. La situation est sinon catastrophique, du moins difficile dans tout le monde agricole canadien. Nous connaîtrons mieux l'étendue des difficultés auxquelles sont confrontés nos producteurs et productrices quand il nous sera possible de prendre connaissance du plan d'action que les ministres des provinces déposeront bientôt au bureau du ministre fédéral de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, suite au consensus auquel ils sont parvenus lors de leur rencontre de Regina.
Nous aurons l'occasion, à ce moment-là, de mesurer la véritable ouverture du gouvernement libéral. Si le gouvernement peut prendre en compte ce consensus et essayer de voir comment il pourrait aider les agriculteurs. Il faut penser, dans ce contexte des marchés qui se mondialisent, comment ce sera nous qui prendrons l'initiative de nous mondialiser et non de se faire avoir, parce que les autres vont nous mondialiser.
Je pense que ce qui est également important, c'est que nous devons trouver le moyen d'être le plus possible autosuffisants dans notre production agricole. Il y a des moyens de comparer la façon dont chacune des provinces vient en aide à ses agriculteurs. Je pense que, du côté du Québec, nous avons réussi à mettre en commun les ressources pour constituer une espèce de cagnotte afin que l'argent soit distribué aux producteurs à l'intérieur de programmes permettant vraiment de venir en aide, selon les besoins et les difficultés que rencontrent nos agriculteurs.
Je souhaite vraiment de tout mon coeur que le gouvernement soit ouvert à une négociation pour apporter une aide au domaine de l'agriculture.
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, je suis tout nouveau à la Chambre et, par la nature du débat ce soir, j'ai une impression de déjà-vu parce que je suis d'abord un fils de cultivateur et que je suis extrêmement impliqué dans le monde agricole, chez nous, au Québec.
Ma collègue disait que la chance qu'on avait peut-être présentement au Québec, c'était d'avoir un genre de filet de sécurité pour les producteurs agricoles. Je sais de quoi elle parle, puisque j'ai été à la base de l'UPA, dans les années 1970, où on travaillait alors pour obtenir ce filet.
Quand je vois des agriculteurs manifester leur inquiétude devant leur industrie qui s'effondre, je sympathise avec eux, parce que j'ai vécu cela moi aussi comme agriculteur. Je trouve dommage que le gouvernement, comme le disait ma collègue, ne puisse prévenir ces situations.
L'agriculture, c'est la base de notre économie. L'agriculture n'existe pas que pour l'agriculteur.
J'écoutais le secrétaire d'État au Développement rural. Il m'a un peu déprimé et m'a ramené à peu près 25 ans en arrière quand il a dit: «Nous voulons protéger le mode de vie des agriculteurs, il faut s'approcher de la base car le Canada rural compte sur son agriculture.»
Je dois dire que l'agriculture n'existe pas pour l'agriculteur. Elle existe parce qu'il y a des consommateurs. Elle n'existe pas pour protéger un mode de vie, ce n'est pas que du folklore. C'est du folklore, bien sûr. Je pense que la plupart des gens aiment aller dans les paroisses rurales pour visiter des agriculteurs. Nous aimons ce genre de vie. Cependant, l'agriculture existe d'abord parce qu'il y a des consommateurs qui ont besoin de sécurité alimentaire, d'avoir des aliments sains et produits près de chez eux.
Ma collègue disait jusqu'à quel point l'agriculture était la base de l'économie. C'est cela qu'il faut comprendre. Quand un agriculteur est obligé de venir manifester avec une moissonneuse-batteuse à la porte d'un Parlement, cela veut dire qu'il est endetté jusqu'au cou. Cela veut dire qu'il voit venir une saison et il ne sait pas comment il va pouvoir la commencer.
Cela veut dire qu'il y a eu un manque de vision, non pas de sa part, mais du gouvernement. Quand les gens viennent ici en masse pour manifester en vue d'obtenir de l'aide, pour demander à tous les partis politiques de venir à leur secours, d'en parler, de demander au gouvernement de faire des choses, on ne leur demande pas une approche de base. Les gens sont là. La base est là et a besoin d'aide. Elle a besoin d'être soutenue et que nous sympathisions un peu avec elle avant que les problèmes n'arrivent. Elle veut qu'on sympathise par rapport à la vulnérabilité de cette profession.
Un agriculteur se lève le matin et se demande souvent ce qui va lui tomber sur la tête. Il est vulnérable à tout ce qui peut arriver, à la température et à l'environnement. Il est vulnérable aux prix du marché parce son gouvernement ne l'a pas bien protégé. Il est vulnérable, parce que nous avons mal planifié la production. C'est lui et c'est toujours lui qui paie en premier et en dernier.
Je remercie ceux qui ont proposé ce débat à la Chambre. Je me retrouve au milieu d'un débat qui se déroulait au Québec, comme je le disais tout à l'heure, dans les années 1970-1980, au cours duquel j'ai lutté très fort personnellement pour obtenir les filets de sécurité dont nous avions besoin. J'imagine qu'un gouvernement responsable, qui se vante d'avoir le plus beau pays, un des pays les plus riches, ne laissera pas crouler l'économie de base qu'est l'agriculture.
Les agriculteurs ont besoin d'un soutien de tous les jours et de programmes agricoles. Ils ont besoin que nous considérions leur travail autrement que comme un mode de vie folklorique qu'il faut conserver. Toutefois, ils ont besoin de sentir que les consommateurs ont besoin de leurs services. Pour qu'ils soient capables de rendre ces services, ils faut qu'ils puissent vivre de leur profession. À ce moment-là, il faut que nous soyons également capables de prévenir les mauvais jours pour qu'ils ne soient pas seuls à faire face aux difficultés comme ils le font présentement.
Il est certain que je demande au gouvernement de venir en aide aux agriculteurs, surtout ceux de l'Ouest, qui sont actuellement dans une situation pénible. À ce moment-ci au Québec, nous ne connaissons peut-être pas les mêmes problèmes.
L'agriculture du Québec a quand même besoin de l'aide du gouvernement fédéral. Dans ce domaine comme dans d'autres, l'argent qui est ici, au fédéral, c'est l'argent de nos taxes. Il faut que le gouvernement arrête de penser que lorsqu'il nous aide, il nous fait des cadeaux. Ce n'est pas vrai. C'est l'argent des taxes, celui des contribuables québécois, des contribuables canadiens. On sera toujours là pour nous assurer que le Québec reçoive sa part des sommes qu'il déboursera pour l'agriculture.
La justice de base, c'est cela: quand on paie des taxes, on est en droit de s'attendre, surtout dans des périodes où cela va mal, à ce que ce gouvernement distribue notre argent, pas le sien. Qu'il place l'argent des contribuables là où il faut pour que le consommateur et le producteur agricole se sentent plus en sécurité, pour que le producteur soit moins vulnérable, lorsque des tempêtes lui tombent dessus, ce qui fait qu'il est constamment inquiet.
[Traduction]
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de prendre la parole à la Chambre à propos du dossier urgent de l'agriculture.
Un grand nombre des députés qui ont pris part au débat ont exprimé leur sentiment de frustration. Mon sentiment de frustration est celui d'un député qui a siégé à la Chambre au cours de la dernière législature. Nous croyions que nous nous étions acquittés, en tant que députés de tous les partis, de la responsabilité qui nous incombait de soulever la question de cette crise et de proposer des solutions au gouvernement. Bref, nous avons assumé notre responsabilité de notre mieux.
Notre sentiment de frustration est probablement moindre que celui que ressentaient les agriculteurs qui sont venus à Ottawa, ont exercé des pressions, ont accroché les députés, ont organisé des réunions dans leur collectivité et ont manifesté sur leur tracteur pour attirer l'attention sur la crise agricole.
Il importe peu qu'il s'agisse des agriculteurs de la Saskatchewan ou du Manitoba, des producteurs de maïs ou de soja de l'Ontario ou du récent problème des pommes de terre à l'Île-du-Prince-Édouard. Je suis certain que mon collègue de la Nouvelle-Écosse parlera de cette question plus tard au cours du débat.
Le sentiment de frustration grandit quand nous entendons le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, dont j'ai écouté attentivement les propos ce soir, admettre que les agriculteurs vivent des difficultés financières. Il a précisément fait référence aux producteurs de céréales et de graines oléagineuses.
Cela n'est pas nouveau non plus. En 1997 et 1998, même le ministre de l'Agriculture a admis que ceux qui avaient le plus de mal étaient les céréaliculteurs et les producteurs d'oléagineux. L'aboutissement de cette prise de conscience, de nos démarches et de celles d'autres personnes a été l'Aide en cas de catastrophe liée au revenu agricole, ou ACRA. Ceux que le programme a le moins aidés? Les producteurs de céréales et d'oléagineux.
Le programme en a aidé d'autres. Il était fondé sur un programme albertain conçu à l'intention de l'industrie de la viande rouge. Il n'était pas fait pour aider les producteurs de céréales et d'oléagineux. La différence essentielle ressort bien sur un graphique. Les changements sont très légers. Dans le secteur des céréales et des oléagineux, il y a de légères baisses depuis quelques années, alors que, dans le secteur de l'élevage, les fluctuations sont très marquées. Une forte hausse de trois ou quatre ans est suivie d'une baisse soudaine et abrupte. C'est alors que le programme intervient pour aider les éleveurs.
Tout cela est exaspérant. Il est exaspérant d'entendre le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire prétendre qu'il fera davantage. Une question surgit immédiatement: quand fera-t-il davantage? Quand le gouvernement fera-t-il davantage?
Le ministre chargé du développement rural, qu'on peut aussi appeler le secrétaire provincial, dit que l'agriculture est extrêmement importante pour tout le monde, à la Chambre. Il devrait dire cela au ministre des Finances et au premier ministre car, malgré tout le respect que je porte au ministre de l'Agriculture et au secrétaire d'État responsable du développement rural, je ne crois pas qu'ils pourront tout faire par eux-mêmes. L'effort doit être collectif. Il faut que tout le Cabinet y participe et surtout les ténors du Cabinet.
Sur ce point, j'aimerais citer une note transmise par courriel, que la plupart de ceux qui participent au débat ce soir ont probablement reçue. Elle disait:
Si le gouvernement avait, il y a trois ans, mis en oeuvre des stratégies visant à réduire les coûts imposés par lui, pour régler le problème de l'endettement croissant des entreprises agricoles, élaborer et instaurer un filet de sécurité efficace pour les grains et les oléagineux et fournir de l'aide bien ciblée à ceux qui en avaient besoin, vous ne seriez sans doute pas appelés à participer à ce débat d'urgence sur l'agriculture ce soir.
Je crois que c'est tout à fait exact.
Je vais prendre quelques minutes pour décrire l'origine de cette crise car si nous ne savons pas d'où est venu le problème, nous aurons beaucoup plus de mal à élaborer des solutions. Essentiellement, je crois que l'année 1993 a été une année déterminante dans ce dossier. Non seulement ce fut l'année du premier mandat du gouvernement d'en face, mais ce fut l'année d'entrée en vigueur de l'accord issu du Cycle d'Uruguay du GATT et ce fut l'année où, pour la première fois, on a discuté d'agriculture lors des négociations du GATT. On a conclu un accord de bonne foi. Les signataires ont accepté de réduire de 20 p. 100 leurs subventions et leurs programmes nationaux de soutien sur une période de cinq ans.
Je crois que le gouvernement, qui tenait à enrayer le déficit le plus rapidement possible, a préféré se cacher derrière l'entente conclue à l'issue des négociations de l'Uruguay Round du GATT pour pouvoir sabrer les subventions. Il a réduit les mesures de soutien non pas de 20, de 30 ou de 40 p. 100, mais bien de 60 p. 100 sur une période de cinq ans, au point où les agriculteurs sont maintenant incapables de soutenir la concurrence en Europe et aux États-Unis.
L'exemple qu'on aime citer dans l'ouest du Canada est l'abolition de la subvention du Nid-de-Corbeau en 1995, qui a fait perdre aux agriculteurs de l'Ouest plus de 600 millions de dollars par année. En Saskatchewan seulement, les pertes atteignent environ 320 millions de dollars.
D'autres participants au débat ont déjà signalé la disparité entre les mesures de soutien. Je n'ai pas à revenir là-dessus. Cela a déjà été mentionné. Je me contenterai de signaler que c'est grâce aux subventions que la journée d'affranchissement de la note d'épicerie est célébrée de plus en plus tôt dans l'année au Canada. Nous payons très peu pour les aliments que produisent nos familles agricoles.
Il s'en trouvera pour contester ces chiffres, mais, selon Statistique Canada, au cours de la dernière année, environ 6 400 exploitations agricoles de la Saskatchewan ont cessé leurs activités. Ceux qui s'y connaissent mieux que moi dans ce domaine vous diront que, bon an mal an, il y a toujours 1 500 exploitations agricoles qui cessent leurs activités chaque année en Saskatchewan depuis les années 30. Il y a moins de fermes, mais celles qui existent encore s'agrandissent. Toutefois, 6 400, cela représente une nette augmentation du nombre d'exploitations agricoles qui disparaissent.
On reconnaît aussi autre chose qu'on attribue aux réductions dévastatrices concédées par les représentants du gouvernement. L'ancien délégué commercial du Canada, Mike Gifford, a déclaré devant le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire que nous pourrions verser immédiatement 2 milliards de dollars en soutien du revenu agricole sans risque de représailles.
Nous avions le programme ACRA, qui n'a pas vraiment fonctionné pour le groupe visé au Manitoba et en Saskatchewan. Il s'agissait surtout de producteurs de maïs et d'oléagineux, alors que le programme s'inspirait du programme d'aide aux éleveurs de bétail de l'Alberta. Nous avons maintenant un programme de soutien du revenu agricole qui dispose de moins d'argent que le programme ACRA. En outre, nous avons tous les problèmes associés à l'obtention de versements pour les agriculteurs en complément de ce programme.
D'après le secrétaire d'État au Développement rural, il importe que le présent débat ne se contente pas d'énumérer les problèmes, mais serve à trouver des solutions. Il a encouragé des députés à proposer des solutions. Je dirai au député que les solutions proposées par nombre d'organisations agricoles et de partis politiques ne manquent pas.
La société Agricore, par exemple, offre un certain nombre de solutions applicables à court terme. Elle estime que le programme ACRA et le programme de soutien du revenu agricole ne règleront pas la baisse des prix à long terme que subissent les producteurs. Elle suggère que le gouvernement conçoive et mette en oeuvre, en collaboration avec des comités de sécurité du revenu, de nouveaux moyens d'appuyer l'économie agricole, comme un versement direct du Compte de stabilisation du revenu net au producteur et une contribution accrue aux provinces pour le financement de programmes complémentaires.
Selon cette proposition, les gouvernements provinciaux décideraient de la façon dont les programmes fonctionneraient dans leurs provinces respectives. Des programmes complémentaires donneraient de meilleurs résultats que des programmes nationaux parce qu'ils tiendraient compte des différences entre les provinces et apporteraient des correctifs en conséquence. On laisserait tomber l'exigence relative à la contribution provinciale. La Fédération canadienne de l'agriculture propose aussi des programmes complémentaires.
Pendant la dernière campagne électorale, le Nouveau Parti démocratique a proposé un programme complet de soutien du revenu agricole nécessitant, à notre avis, l'injection de 1,4 milliard de dollars par année pour chacune des quatre prochaines années. Essentiellement, cela doublerait le montant disponible dans le cadre des programmes de soutien du revenu et permettrait d'octroyer 100 millions de dollars pour un programme qui aiderait de jeunes familles à s'établir sur une terre et pour un autre qui aiderait des agriculteurs plus âgés à quitter leur ferme, leur moyenne d'âge se situant entre 58 et 60 ans.
J'ai parlé de la Fédération canadienne de l'agriculture. Elle suggère d'accorder un financement suffisant aux programmes de soutien du revenu agricole; de mettre en place des programmes complémentaires qui répondent aux besoins des agriculteurs à l'échelle provinciale; et d'assortir le CSRN de règles qui permettent aux agriculteurs de retirer leurs fonds lorsqu'ils en ont besoin.
Si vous me le permettez, monsieur le Président, je voudrais m'attarder un peu sur cette question. C'est extrêmement important. Il me semble que le CSRN est un programme très paternaliste. Des agriculteurs m'ont dit qu'ils ont retiré de l'argent de leur compte du CSRN et que, plus tard la même année, ils ont décidé d'en retirer d'autre. Ils n'avaient pas retiré assez d'argent parce que leur récolte n'avait pas été aussi bonne qu'ils l'avaient imaginée, mais on leur a refusé le droit de le faire, parce qu'on ne peut faire qu'un seul retrait en 12 mois. Ce n'est pas une solution satisfaisante. Il faut confier des responsabilités à ces gens-là. Ils connaissent bien mieux que n'importe lequel d'entre nous ici la nature de leurs problèmes. S'il y a là de l'argent auquel ils ne peuvent avoir accès et qu'ils ne peuvent retirer, c'est sûrement une autre frustration importante, une frustration qu'il faut tout simplement éliminer.
La FCA fait également valoir que nous avons besoin d'un programme en cas de désastres structuré de manière à distribuer des fonds rapidement plutôt qu'à retarder l'aide accordée aux agriculteurs. Cela est une allusion au fait que seulement 51 p. 100 des demandes d'ACRA de 1999 ont été traitées jusqu'à maintenant.
La FCA ajoute que nous avons besoin de 900 millions de dollars par année pour les trois années à venir afin de rétablir les programmes de filet de sécurité.
Nous avons des chiffres de 900 millions de dollars par année à 1,4 milliard de dollars, voire davantage. Il y a des agriculteurs qui me téléphonent. Je pense à Lloyd Pletz de Balcarres, en Saskatchewan, ou à Murray Downing, au Manitoba. Je ne doute pas qu'ils ont appelé d'autres députés aussi pour leur parler des programmes et d'idées particulières qu'ils ont à propos des coûts de production. Ils estiment que nos agriculteurs sont tout simplement incapables de soutenir la concurrence des agriculteurs des États-Unis et de l'Europe, qui reçoivent de riches subventions.
Il existe aussi des solutions à long terme, et pas seulement à court terme. Je suis d'accord avec les orateurs précédents pour dire que oui, nous avons besoin d'un programme à court terme pour remettre les agriculteurs sur leur terre dans un mois, six semaines ou deux mois, mais nous avons certainement besoin d'un programme de filet de sécurité à long terme auquel auront accès tous nos agriculteurs et toutes nos familles d'agriculteurs.
Parmi les propositions, mentionnons la remise de la taxe sur le carburant, le recouvrement des coûts, les frais d'utilisation qui ont fortement augmenté quand le gouvernement a décidé d'éliminer le déficit au milieu des années 90. Je sais qu'ils ont maintenant été plafonnés, mais je pense que le gouvernement devrait les réduire, voire les éliminer dans certains cas. En cette période de crise, la dette agricole totale ces dernières années a augmenté de plus de 44 p. 100 et on doit s'y attaquer également.
La Fédération de l'agriculture de l'Ontario était au centre de la manifestation qui a eu lieu hier à Cornwall, si je lis bien les journaux. Monsieur le Président, vous êtes bien au courant de cette manifestation. La FAO parle de la nécessité d'avoir des filets de sécurité, des aides au transport et d'autres programmes d'aide ainsi que de la nécessité de rétablir les niveaux d'aide de 1993, comme je l'ai dit plus tôt dans mon intervention au sujet des coûts de production, pour compenser l'écart entre la capacité financière des agriculteurs et la production moyenne.
Nous savons maintenant que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire rencontrera ses homologues provinciaux au début du mois prochain à Québec. Nous aimerions beaucoup que des mesures soient annoncées avant cela de sorte que les agriculteurs puissent se préparer pour les semailles du printemps.
Je voudrais parler de l'accord que les ministres provinciaux ont signé la semaine dernière à Regina, lors d'une réunion organisée à leur demande sans la présence du ministre fédéral et de ses fonctionnaires. Dans le communiqué qu'ils ont publié à la suite de cette réunion, ils ont dit:
Il appartient maintenant au gouvernement fédéral de s'acquitter de ses responsabilités et de faire immédiatement les investissements qui s'imposent pour faire face à cette situation d'urgence. Les provinces sont d'accord pour travailler avec le gouvernement fédéral à la préparation d'un cadre prévisible à long terme, efficace et équitable pour toutes les provinces. Ce cadre tiendra compte de plusieurs facteurs, y compris des caractéristiques et des besoins particuliers de chaque province et de l'importance relative de leur secteur agricole au Canada. Les ministres se rendent compte du fait que la gestion du risque intégrée dans le secteur de l'agriculture exigera que l'on fasse front commun. Cela veut dire une importante contribution de la part d'Ottawa. Alors que ce sont les provinces qui sont aux prises avec cette situation urgente, c'est Ottawa qui détient les fonds additionnels requis.
Pour terminer, je voudrais essayer de résumer les messages dont le gouvernement doit tenir compte sans attendre. Ils sont venus de différentes parties de la Chambre au cours du débat de ce soir.
Premièrement, le gouvernement fédéral, qui assumait jadis la plus grande part de responsabilité en ce qui concerne les filets de sécurité sociale et les caisses de secours en cas de catastrophe, en est venu au fil des ans à exiger des provinces qu'elles paient 40 p. 100 de ces coûts. Même si l'agriculture a toujours été administrée conjointement, ce n'est que dans les dernières années que les provinces ont été avisées que si elles voulaient avoir un programme de protection du revenu, elles devaient fournir 40 p. 100 des fonds utilisés à cette fin. Au Manitoba et en Saskatchewan, l'assiette fiscale est relativement peu élevée et il y a de nombreuses terres agricoles, ce qui fait que les gouvernements provinciaux ont beaucoup de difficulté à fournir cette contribution de 40 p. 100 qui garantirait un programme de protection de revenu et une protection générale efficaces aux familles agricoles. C'est un point dont on doit tenir compte.
Deuxièmement, le gouvernement fédéral a, ces cinq dernières années, et aussi probablement dans les 13 ou 14 années précédant l'arrivée au pouvoir du gouvernement actuel, aboli des programmes importants qui aidaient les agriculteurs, notamment le programme de paiements à double prix pour le blé qui, selon mon collègue de Regina—Qu'Appelle, a pris fin en 1988, et le tarif du Nid-de-Corbeau, en 1995.
Troisièmement, les agriculteurs ont dû surmonter un certain nombre d'obstacles et ils continuent de faire face à de nouveaux défis, tels que les subventions internationales provenant des Trésors nationaux de l'Union européenne et des États-Unis. On a fourni des chiffres un peu plus tôt pour indiquer à quel point nos subventions sont à la traîne par rapport à celles de ces partenaires commerciaux.
Quatrièmement, les marges bénéficiaires diminuent à mesure que les coûts des facteurs de production grugent une plus grande part des revenus, et il y a toujours les risques associés à la production et aux prix dans le secteur agricole.
En conclusion, je pense que les agriculteurs canadiens ont simplement besoin de savoir si le gouvernement fédéral entend les aider ou s'il leur faudra régler eux-mêmes leurs problèmes, comme ils ont dû le faire la plupart du temps au cours des dernières années. C'est la grande question que l'on doit se poser ce soir.
M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Malpeque.
Je veux prendre quelques minutes pour parler d'une question que je considère très importante pour la sécurité alimentaire de notre pays. Je crois que l'avenir de nos industries alimentaires et la capacité du Canada à produire des aliments sains à bas prix sont menacés dans le débat de ce soir.
Je ne sais pas vraiment si les Canadiens sont au courant de cela, mais, lorsque nous comparons un panier de provisions normal que nous achetons dans n'importe quelle ville canadienne avec ce qu'il en coûterait pour acheter la même chose dans n'importe quelle autre ville ou n'importe quel autre pays du monde, nous constatons que ce sont les Canadiens qui paient leurs aliments le moins cher. Malheureusement, ces prix ne se rendent pas jusqu'aux producteurs. C'est le problème auquel nous sommes confrontés ici ce soir. En fait, le montant versé aux agriculteurs, à ceux qui produisent ces aliments, a énormément diminué au cours des 20 ou 30 dernières années.
Le problème est que, de nos jours, pour bien des produits, les agriculteurs n'arrivent même pas à récupérer le coût de production. Cela veut dire qu'ils ne récupèrent même pas le coût de la main-d'oeuvre, du carburant et de tous les intrants lorsqu'ils vendent leurs produits.
Il y a un certain nombre de raisons à cela. Le coût des intrants, c'est-à-dire les engrais, les semences, la main-d'oeuvre, le carburant et tout ce qu'il faut acheter pour exploiter une ferme, ne cesse d'augmenter. En fait, le coût de l'ammoniaque qui sert à fabriquer des engrais a augmenté de 56 p. 100, ce qui a fait augmenter le coût des engrais. Nous avons vu ce qui est arrivé au prix du carburant non seulement d'un bout à l'autre du Canada, mais partout dans le monde. Le prix du carburant fait augmenter considérablement le coût de production pour un agriculteur, qui doit utiliser beaucoup de carburant pour produire un produit.
Le cours de certaines denrées agricoles est au plus bas. À titre d'exemple, celui des céréales et des oléagineux a considérablement baissé depuis 1995. Celui du maïs a subi une baisse de 46 p. 100, et celui du blé et du canola, une baisse de 34 p. 100. Ce sont là les données de la Fédération canadienne de l'agriculture. Ces cours sont directement infléchis à la baisse par les subventions à l'exportation et autres subventions accordées par certains pays, lesquelles faussent les échanges, notamment avec les États-Unis et l'Union européenne.
Quelles sont les solutions? C'est d'une solution à deux volets dont nous aurions en fait besoin. Il nous faut dans un premier temps régler le problème à court terme auquel sont aujourd'hui confrontés les agriculteurs, en ce sens qu'ils n'arrivent pas à récupérer leurs coûts de production. Nous devons également régler les problèmes sous-jacents liés à la question du revenu des agriculteurs. Pour ce faire, s'impose une injection de fonds à court terme, par le gouvernement fédéral, certes, mais aussi par les gouvernement provinciaux. En même temps, pour le long terme, il convient que nous continuions à nous manifester avec dynamisme lors des négociations avec nos partenaires internationaux.
Je me suis réjouis de voir que le premier ministre est intervenu à la Chambre puis est parti discuter de la question avec George Bush la semaine dernière. Le premier ministre a rappelé au président américain que la question des subventions aux exportations était prioritaire et qu'il nous fallait nous concerter avec d'autres pays pour réduire ces subventions.
J'ai été heureux d'entendre le premier ministre déclarer que le président Bush était en fait du même avis. Le ministre du Commerce international et le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire ont aussi fait valoir le point de vue des agriculteurs canadiens à la table internationale. C'est en travaillant avec des groupes et des organisations d'agriculteurs et avec les provinces qu'ils pourront pu élaborer un accord international qui pourrait être présenté à la table des négociations, un accord qui serait d'abord et avant tout crédible.
Il faudra du temps. Si nous examinions le déroulement des négociations passées, nous nous rendrions compte qu'il nous faudrait de nombreuses années afin d'en arriver à une forme d'accord. Qu'allons nous faire dans l'intervalle? Nous avons besoin d'injecter un peu d'argent. J'ai été heureux d'entendre ce soir le ministre de l'Agriculture affirmer que davantage doit être fait et qu'on fera effectivement plus.
Les provinces doivent aussi participer. Voyons les dépenses de toutes les provinces. Le gouvernement fédéral consacre environ 2 p. 100 de ses dépenses à l'agriculture; la Colombie-Britannique, 0,4 p. 100, l'Alberta, 2,6 p. 100, la Saskatchewan, 5,7 p. 100; le Manitoba, 2,5 p. 100; l'Ontario, la province la plus riche, la mienne, 0,78 p. 100; le Québec, 1,6 p. 100; le Nouveau-Brunswick, 0,5 p. 100; la Nouvelle-Écosse, 0,9 p. 100; l'Île-du-Prince-Édouard, 2,4 p. 100 et Terre-Neuve, 0,3 p. 100.
La Saskatchewan est une région importante, particulièrement dans le domaine de la production des céréales et des graines oléagineuses. Je crois que les provinces sont en mesure de réaliser des progrès dans ce dossier.
Selon la Fédération canadienne de l'agriculture, les agriculteurs ont besoin de programmes de soutien du revenu agricole dotés de fonds suffisants, des programmes qui peuvent être enclenchés rapidement et efficacement et qui seront là tant que nous ne réussirons pas à avoir des accords internationaux acceptables.
Au cours des dernières années, lorsque nous nous sommes attaqués au déficit, nous avons déclaré qu'il fallait prendre certains engagements. Je crois qu'il nous faut poursuivre sur notre lancée. La question ne touche pas uniquement les collectivités rurales. Je ne suis pas convaincu que tous les Canadiens, notamment les Torontois, savent qu'un emploi sur six à Toronto se trouve dans le secteur de l'alimentation.
Notre souveraineté nationale, notre souveraineté alimentaire et nos aliments à faible prix et sûrs sont en jeu. Il faut que les citadins comprennent bien parce que nous demandons de l'argent au gouvernement et que nous demandons à l'ensemble des Canadiens de prendre un engagement en faveur de l'agriculture.
La question se pose au Canada depuis déjà un certain nombre d'années. Il nous faut examiner la question sous l'angle fédéral et sous l'angle provincial de manière à ce que le gouvernement fédéral et toutes les régions du Canada trouvent ensemble des solutions. Il nous faut une commission royale d'enquête ou un organisme semblable où ne se retrouveraient pas uniquement les ministres de l'Agriculture, mais où des gens de tous les horizons et de tous les ministères se réuniraient dans le but précis de régler le problème.
Nos familles d'agriculteurs attendent que nous présentions des solutions ce soir. Je crois que nous en avons quelques-unes. Le gouvernement examine sérieusement la question. Je crois que le premier ministre accorde beaucoup d'attention à la question. Je demande aux familles d'agriculteurs d'être patientes. Je leur demande de rencontrer leurs concitoyens et amis des régions urbaines, de discuter avec eux et de leur demander leur compréhension, comme nous, à la Chambre des communes, demandons ce soir aux citadins de comprendre.
M. Wayne Easter (Malpeque, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec une grande tristesse que je prends la parole ce soir, à l'occasion d'un autre débat d'urgence sur la crise agricole. Nous avons eu trop de ces débats à la Chambre au cours des sept dernières années.
Y a-t-il une crise agricole dans ce pays? Oui, sans l'ombre d'un doute. Toutefois, avant d'aborder la crise agricole en soi, je tiens à dire que tous les secteurs de l'industrie ne sont pas touchés. La situation est bonne pour les produits visés par la gestion de l'offre. À la fin des années soixante, les agriculteurs canadiens, aidés par le gouvernement, ont élaboré un système de commercialisation de leurs produits grâce auquel ils pouvaient obtenir de bons rendements sur leur investissement en main-d'oeuvre.
Ces systèmes de commercialisation sont toujours en place aujourd'hui grâce au travail des députés de ce côté-ci de la Chambre. Nous avons réussi à protéger nos systèmes de gestion de l'offre dans le cadre des négociations du GATT et de celles de l'OMC. Nous devons continuer de lutter pour les protéger.
Si on s'en remettait au parti de l'opposition, ces types de système disparaîtraient. N'oublions pas que les consommateurs aussi bénéficient des systèmes de gestion de l'offre. Ils peuvent se procurer à bon marché des produits alimentaires de grande qualité, tandis que les agriculteurs obtiennent un bon rendement sur leurs produits. Il y a un équilibre.
Oui, il y a une crise agricole au Canada, et dans une certaine mesure, il y a une crise agricole mondiale. Comme on l'a dit plus tôt, la Fédération canadienne de l'agriculture, la FCA, a fixé au 6 février la Journée d'affranchissement de la note d'épicerie. Ce jour-là, les Canadiens ont gagné suffisamment d'argent pour payer leur note d'épicerie annuelle.
Et à partir de quand leur revenu suffirait-il à couvrir les coûts de production des matières premières des agriculteurs? À partir du 9 ou du 10 janvier. Tout le reste est porté au compte des profits des chaînes d'épiceries.
La FCA a également mentionné qu'au Canada, le ratio du coût de l'alimentation au revenu personnel disponible n'est que de 9,8 p. 100. Autrement dit, la nourriture est trop bon marché au Canada.
Je voudrais aborder la crise agricole dans une certaine perspective. Voici ce qu'affirme le Syndicat national des cultivateurs:
Le marché laisse tomber les agriculteurs un peu partout dans le monde, et cela depuis au moins la fin des années 70. En effet, les agriculteurs ne reçoivent pas leur juste part de l'argent que dépensent les consommateurs. Le marché n'assure pas non plus aux agriculteurs un rendement raisonnable sur la main-d'oeuvre, la gestion et l'avoir provenant de l'énorme apport de recettes du système agroalimentaire. Qui plus est, cette situation est entièrement prévisible. Elle résulte directement de l'énorme déséquilibre entre le pouvoir commercial des sociétés multinationales de l'industrie agroalimentaire et celui des fermes familiales qui doivent transiger avec ces sociétés.
Il est intéressant d'examiner un graphique du SNA et de voir ce qu'il signifie vraiment. Il montre que certaines personnes font des profits aux dépens de la communauté agricole. Si l'on examine la courbe d'augmentation de l'activité commerciale dans le secteur agricole, on constate que les exportations du secteur agricole ont augmenté de 60 p. 100, mais que le revenu net des agriculteurs qui produisent pour tous ceux qui participent au système a diminué d'environ 6 p. 100. Certaines personnes prospèrent grâce à la productivité des agriculteurs.
La deuxième citation que je voudrais vous lire est de Elbert van Donkersgoed, membre de la Christian Farmers Federation. Il déclarait, dans une métaphore évoquant la ville de Pampelune, en Espagne que «l'année 2001 semble devoir être une année où les gens vont courir avec les taureaux». Et il ajoutait:
Pour les agriculteurs, il est devenu nécessaire de courir avec les taureaux. Les énormes conglomérats du secteur agroalimentaire gèrent la chaîne de production alimentaire. De moins en moins de gens achètent de produits de la ferme. Le marché concurrentiel est devenu une espèce menacée. Les agriculteurs savent s'adapter, cependant. Ils suivent le courant pour mieux survivre. Ils sauront trouver une solution: la doctrine économique soutient que la géantification de Tyson Foods devrait produire les efficiences d'échelle tant annoncées. De plus, il est excitant de voir des agriculteurs quasi-indépendants unir leurs efforts sur un marché étroit; les taureaux ne parviendront à en encorner que quelques-uns.
À mon avis, il reste de moins en moins de ces agriculteurs chaque année.
Il poursuit ensuite en disant:
Des camions et des camions de céréales quitteront les fermes du pays, et les profits seront maigres cette année encore. Les gouvernements canadiens ont toujours compté sur les fluctuations des marchés internationaux, ainsi que sur les États-Unis et sur l'Union européenne pour modifier leurs façons d'accorder des subventions.
Je soulève ces questions parce que nombre de gens estiment que les graves problèmes que connaissent les marchés avantagent les agriculteurs. Or, ce ne sont là que deux points de vue.
J'ai écouté attentivement les propos des députés de l'opposition ainsi que ceux du parrain de la motion. Ce qui me dérange, c'est que, comme d'habitude, au lieu de proposer des solutions pratiques, ils ne font qu'attaquer le gouvernement. J'aimerais vraiment beaucoup débattre avec l'opposition de certains des points qu'ils ont soulevés. Il est difficile de résister à la tentation de le faire.
La question de la gestion de l'offre que l'Alliance voudrait faire disparaître me tient réellement à coeur. Celle de la Commission canadienne du blé qui subit les assauts des alliancistes me tient aussi à coeur. En fait, je dois dire que la Commission canadienne du blé a réussi, en ces périodes difficiles, à maximiser le peu de bénéfices disponibles pour les producteurs primaires.
M. Howard Hilstrom: Quel est le prix du blé?
M. Wayne Easter: C'est ce que je voulais dire. Si le député avait écouté ce que je viens de dire à propos des marchés internationaux, il saurait que les prix ont baissé. Par chance qu'il y a la Commission canadienne du blé, car cette dernière arrive à maximiser le peu de profits disponibles sur le marché et à en faire profiter les producteurs primaires.
Le député qui est intervenu juste avant moi a dit que le Canada devait appuyer ses agriculteurs. Je reconnais que le Canada doit le faire. Si les Européens et les Américains continuent de verser à leurs agriculteurs des subventions aussi élevées qu'actuellement, le Canada a l'obligation d'accorder à ses producteurs un soutien équivalent.
Malgré les divergences d'opinions en matière politique, je crois que nous avons un problème plus profond, un problème sous-jacent. Je sais que je fais l'impensable, mais je dois dire une chose à propos des gestionnaires des politiques dans le domaine agricole et agroalimentaire à l'édifice Sir John Carling. Je sais que nous ne devrions pas nous en prendre aux fonctionnaires, car l'opposition et certains de nos propres députés diront que le ministre est responsable, et c'est vrai. J'ai cependant passé 17 années dans le monde agricole et huit années à siéger du côté ministériel. Je sais à quel point nous, les députés d'arrière-ban, nous efforçons vraiment de proposer des solutions, mais je n'ai jamais rien fait d'aussi exaspérant que tenter de résoudre le problème de la gale verruqueuse de la pomme de terre dans l'Île-du-Prince-Édouard.
La gale de la pomme de terre n'est pas un problème, mais trouver une solution semble en être un. Nos fonctionnaires du commerce international sont trop mous pour contester les mesures prises par les Américains. Le ministère semble incapable de trouver une solution sous forme de programme d'aide. Les fonctionnaires semblent toujours capables de trouver une douzaine de raisons pour ne pas agir, mais jamais aucune pour agir.
Le ministère m'exaspère, et je le dis tout de go. En tant que députés, nous pouvons tenir des débats sur les politiques et sur la politique, mais il faut que le ministère les propose de façon positive. Je formule cette critique parce que cela m'exaspère et je pense qu'il faut le dire.
Le Canada doit appuyer sa communauté agricole presque autant que le font les États-Unis et l'Europe.
M. Charlie Penson: Vous pourriez fournir plus de détails.
M. Wayne Easter: Il n'y a certainement aucun détail qui vienne d'en face. La seule chose que savent faire nos vis-à-vis est de critiquer les excellentes politiques que nous avons établies. Ils seraient prêts à saper la gestion de l'offre, à faire disparaître la Commission canadienne du blé.
Nous avons mis des politiques en place. Nous avons investi beaucoup d'argent dans le secteur agricole. Nous savons que ce n'est pas suffisant et que nous devons faire davantage, mais au moins, le gouvernement est disposé à collaborer avec la communauté agricole pour élaborer des solutions constructives.
M. Kevin Sorenson: Vous pensez que les solutions ne peuvent pas venir d'ailleurs.
M. Wayne Easter: J'admets que je n'ai pas toutes les réponses. Monsieur le Président, on m'interrompt tout le temps. Pourriez-vous rappeler la Chambre à l'ordre?
Le vice-président: Bien sûr, je peux rétablir un peu d'ordre à la Chambre, mais, à moins d'obtenir le consentement unanime, le député aura bientôt épuisé son temps de parole.
M. Wayne Easter: Monsieur le Président, je pense avoir exposé une partie du problème, qui est la haute direction installée dans l'immeuble Sir John Carling. Je pense que cela devait être dit. Je regrette de devoir le dire, mais je crois que c'est la vérité.
Depuis cinq ans, le gouvernement fédéral a dépensé quelque 13 millions de dollars pour soutenir le secteur de l'agroalimentaire. Nous avons appuyé fermement sa gestion de l'offre. Certaines industries de ce secteur réussissent bien. Le gouvernement va prendre des mesures plus énergiques pour s'attaquer au problème des céréales et des oléagineux ainsi que de la pomme de terre de l'Île-du-Prince-Édouard.
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne): Monsieur le Président, avant de commencer, je remercie la présidence de nous avoir permis de tenir ce débat d'urgence ce soir. Il est rare que nous puissions obtenir ce genre de chose et je vous en félicite, vous et le Président.
Je félicite également le député d'en face qui vient juste de faire son discours. Ce n'est pas très souvent que nous pouvons féliciter ses collègues, mais certaines des remarques qu'il a faites à la fin de son discours devraient être prises en considération, et elles devraient être écoutées. Il a fait des commentaires que j'approuve. Je crois que très souvent les gens qui administrent les programmes ne comprennent pas les problèmes des agriculteurs. C'est pourquoi j'apprécie ses commentaires.
Aujourd'hui je vais m'adresser surtout aux gens qui ne sont pas des agriculteurs. Les gens qui, dans les villes, suivent nos débats à la télévision ne comprennent peut-être pas le problème. C'est pourquoi j'aimerais essentiellement m'adresser à eux.
La question revêt une importance immense pour ma circonscription. Quiconque suit ce débat doit se rendre compte de l'ampleur du problème, ce qui n'est pas le cas de beaucoup de Canadiens. L'an dernier il y a eu une manifestation dans ma circonscription et l'un des panneaux que brandissaient les agriculteurs m'a sauté aux yeux. Le panneau disait: «Quand vous mangez, ne remerciez pas seulement Dieu, remerciez aussi les agriculteurs.» Ce panneau en disait long. Nous avons tendance à prendre pour acquise la qualité des aliments que les agriculteurs mettent sur nos tables. Si on mange, on devrait appuyer l'agriculture.
Permettez-moi de répondre à plusieurs questions ce soir. Tout d'abord, la question que j'aimerais poser est la suivante: la crise est-elle réelle? Ce soir on nous a donné beaucoup de statistiques, beaucoup de chiffres pour le prouver. La présence d'agriculteurs de ma province à Ottawa ce soir est le signe qu'ils ont besoin d'aide. Ils sont venus ici à leurs propres frais. Ils ne peuvent pas se permettre d'engager les services de lobbyistes professionnels. Ils font de leur mieux pour expliquer à qui veut bien les écouter qu'ils ne peuvent pas survivre.
J'invite quiconque ne croit pas à l'existence d'un énorme problème dans ma circonscription ou dans les régions rurales de la Saskatchewan à venir un de ces jours avec moi dans ma circonscription. Qu'on vienne répondre au téléphone dans mon bureau de circonscription ou même chez moi. Qu'on vienne avec moi au magasin, à la poste, sur la piste de curling ou à l'église. Il n'y a pas un endroit où je puisse aller sans entendre parler de la façon dont la crise touche les gens de ma circonscription. Cela me fend vraiment le coeur d'entendre ces gens fantastiques parler de la sorte.
Le directeur d'un salon funéraire m'a même parlé de deux enterrements très tristes dont il a dû s'occuper, celui d'agriculteurs qui avaient perdu tout espoir. La crise ravage le secteur agricole. Selon un sondage fait dans ma circonscription, 97 p. 100 des agriculteurs disent que le gouvernement fédéral n'en fait pas assez pour les aider à surmonter la crise.
Soixante-dix pour cent des agriculteurs interrogés lors de ce sondage ont affirmé avoir perdu de l'argent l'an dernier. Les gens des villes devraient comprendre que ces agriculteurs n'ont pas seulement encaissé un faible revenu, ils ont perdu de l'argent. Quatre-vingt-cinq pour cent ont dit que la situation de leur entreprise agricole s'était détériorée par rapport à l'année précédente. Soixante-quinze pour cent ont dit songer sérieusement à quitter le secteur agricole.
Voici certains commentaires formulés lors de ce sondage:
C'est troublant d'entendre le gouvernement se flatter d'avoir réalisé un excédent budgétaire alors qu'il ne peut même pas accorder un milliard de dollars par année aux agriculteurs.
Les agriculteurs expédient beaucoup d'argent à Ottawa sous forme d'impôts. Pourtant, lorsqu'ils en ont besoin, ces sommes ne leur reviennent pas. Ils aimeraient bien qu'on réduise les impôts ou qu'on leur vienne en aide. Ils ne reçoivent rien. Voici une autre citation:
Ma famille a vécu une séparation. Nous sommes à nouveau réunis, mais nous supportons un stress émotionnel et financier considérable. Je cultive huit quarts (il s'agit d'une ferme relativement petite), mais nous occupons deux emplois à temps plein pour assurer notre subsistance et payer une partie des factures de la ferme.
Autrement dit, certains agriculteurs travaillent à l'extérieur pour nourrir leur famille, mais ils cultivent du grain qui nourrit les habitants de la planète. Voici une autre citation:
Le stress financier lié à l'agriculture cause de graves problèmes familiaux.
Cette crise ne se manifeste pas uniquement sous l'aspect financier de la situation. Elle se répercute sur les familles et sur la façon de vivre et la qualité de vie des gens des régions rurales.
Il y a une autre question à laquelle je voudrais qu'on réponde. Pourquoi devrions-nous nous préoccuper de cette crise? Pourquoi un citoyen de Toronto, Vancouver, Winnipeg, Montréal ou Halifax devrait-il s'en inquiéter? Qu'arrivera-t-il si l'on perd nos agriculteurs? Doit-on s'en inquiéter? Permettez-moi d'expliquer pourquoi le problème est grave et pourquoi les citadins devrait inviter le gouvernement à agir et à injecter immédiatement 1 milliard de dollars de plus dans l'aide aux agriculteurs.
Voici ce qui se passe. Au fur et à mesure que les exploitations familiales disparaissent, des sociétés rachètent les terres. Si la tendance se maintient, elles se rendront maîtres de la production alimentaire. Si cela arrive, elles ne produiront plus les aliments de qualité que les Canadiens tiennent pour acquis, et elles créeront un monopole. Si cela se produit, les citadins ne pourront plus compter sur des aliments bon marché. La qualité et les prix changent du tout au tout lorsque nous perdons nos exploitations familiales et que les grandes sociétés les remplacent.
Il y a un autre point que je tiens à souligner. Il s'agit de l'environnement. Les petits exploitants se soucient de la terre, puisqu'ils vont la transmettre. Nos agriculteurs se soucient de différentes espèces végétales et animales. Les grandes sociétés ne s'inquiéteront pas du sol, des ressources, ni de la transmission des terres à leurs enfants et petits-enfants.
Il y a donc là une question environnementale à laquelle certains de nos écologistes devraient s'intéresser. En évinçant nos agriculteurs, les sociétés cherchent désespérément de nouveaux moyens de faire plus d'argent. Elles risquent d'utiliser plus de produits chimiques et d'engrais pour pouvoir poursuivre l'exploitation d'une année sur l'autre. Les agriculteurs des exploitations familiales sont ceux qui s'occupent le mieux des terres, parce qu'ils veulent qu'elles restent exploitables pendant des générations.
Je voudrais répondre à une autre question: n'avons-nous pas déjà fait beaucoup de cadeaux aux agriculteurs? On dirait qu'ils reçoivent sans cesse de l'argent. C'est l'impression que le gouvernement a donnée, mais ce n'est pas le cas. Le gouvernement a annoncé une aide de 1,7 milliard de dollars, mais cet argent n'aboutit jamais dans les poches des agriculteurs. Il sert à financer une bureaucratie. Les agriculteurs n'ont reçu que la moitié des crédits que le gouvernement avait annoncés il y a plusieurs années. Les programmes sont complexes et ils sont structurés de telle façon qu'on ne verse pas l'argent à ceux qui en ont besoin.
Les Canadiens doivent savoir que d'autres pays soutiennent leurs agriculteurs, mais pas notre gouvernement fédéral. Comme les Européens et les Américains aident leurs agriculteurs à poursuivre leurs activités et trouvent utile qu'un grand nombre d'agriculteurs produisent des denrées de qualité, cela a amené une baisse des prix des denrées au Canada. Que se passe-t-il alors? Les Canadiens de nos villes sortent gagnants de tout cela, car ils savent qu'ils peuvent profiter de la crise. Ils obtiennent des produits à un prix inférieur au coût de production. Nos agriculteurs méritent d'être payés pour le travail qu'ils accomplissent.
En conclusion, je voudrais dire, et c'est une question très délicate, que ce vendredi, à Yorkton, une manifestation est organisée pour promouvoir l'idée que la Saskatchewan devrait se séparer, car notre province s'en porterait mieux alors sur le plan économique. Le sentiment d'aliénation est un grave problème. Je ne pense pas que ce soit la solution, mais je me rappelle d'une énorme manifestation à Montréal juste avant le dernier référendum sur la séparation du Québec.
Cette manifestation visait à dire aux Québécois qu'on les aimait, qu'on voulait qu'ils restent. Il est peut-être temps de montrer aux agriculteurs que nous nous préoccupons de leur sort. Ils n'ont pas le sentiment que le reste du pays comprend les difficultés qu'ils éprouvent. Il faut espérer que le gouvernement ne reflète pas le sentiment de la plupart des Canadiens.
Pour lutter contre l'aliénation des provinces rurales, il faut procéder à une réforme du Sénat et rendre le Parlement efficace. La Chambre des communes doit devenir plus efficace. Nous devons retirer des pouvoirs au premier ministre qui ne traite pas tous les Canadiens sur le même pied.
La crise agricole ne serait peut-être pas aussi grave si notre régime était démocratique au Canada. Mon appel de ce soir s'adresse aux gens des villes. Les agriculteurs ont besoin de leur aide. Je les en prie, qu'ils exercent des pressions sur leurs députés et leur gouvernement pour qu'on prenne des mesures afin de soutenir nos agriculteurs. Nous avons besoin de leur aide maintenant.
M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le présent débat sur le revenu agricole me tient beaucoup à coeur. J'ai cultivé la terre pendant 25 ans et j'ai connu des périodes où les choses allaient plutôt bien et d'autres où je me demandais si j'allais pouvoir m'en sortir.
La région de Cypress Hills—Grasslands et surtout la localité de Frontier ont été colonisées au début du XXe siècle, principalement par des Scandinaves à la recherche de nouvelles possibilités. Dès le début, certains ont réussi en agriculture et d'autres pas.
Au fil des décennies, en particulier dans les terribles années 30, des gens ont quitté notre région. Le sud de la Saskatchewan a commencé à se dépeupler il y a longtemps déjà. Nous avons déjà traversé ce que d'autres régions commencent seulement à traverser. L'agriculture est un chemin semé d'embûches.
Les agriculteurs ont toujours vécu et combattu des catastrophes. Tous les gens qui ont fait de l'agriculture ont lutté contre la sécheresse, contre les inondations, les insectes et la chaleur. Nous l'avons toujours fait volontiers, mais le problème actuel est différent. Il s'agit d'un problème qui ne dépend par des conditions atmosphériques ni des agriculteurs eux-mêmes. Les agriculteurs ne sont pas responsables de la crise du revenu agricole. Celle-ci découle de circonstances sur lesquelles ils n'ont aucune prise.
Des négociations commerciales menées loin de nous et des subventions étrangères injustes ont réduit notre revenu de façon catastrophique. Le gouvernement décide à nouveau de notre revenu.
Les négociations de l'OMC et les programmes étrangers de subventions ont plusieurs conséquences, dont une chute du revenu agricole. Un journal de ma circonscription a fait remarquer que la litière pour chats coûte maintenant sept fois plus cher que le blé. Il y a quelque chose qui cloche lorsque la litière pour chats vaut plus cher que ce que l'on mange.
D'un côté, notre revenu baisse et de l'autre, les coûts de production augmentent. Si le coût des intrants monte en flèche et que le revenu dégringole, cela ne peut fonctionner. La crise actuelle détruit également la vie des gens. Les Canadiens perdent le goût de pratiquer l'agriculture. Certains abandonnent. Ils ne peuvent s'en sortir sans aide. Ils ne veulent pas vivre aux crochets du gouvernement. Ce sont des gens fiers qui veulent être fiers de leur travail.
Il s'agit de travailleurs autonomes. Ils versent leur part, mais reçoivent très peu en retour. Ils n'ont pas de généreux régime privé d'assurance-maladie et parfois n'ont même pas accès à des soins de santé décents. Ils ne peuvent prendre congé. Ils n'ont pas de grands régimes de pension, mais ils incarnent tout de même l'âme de notre pays.
Il nous faut un nouveau cadre stratégique. Comment faire les choses différemment? Je vous invite à vous rendre dans la circonscription de Cypress Hills—Grasslands que je représente et, en particulier, dans la région de Claydon, Frontier et Climax. C'est là que vivent depuis près de 100 ans des gens qui ont accepté de prendre une chance. Ce sont des gens à la recherche de nouvelles possibilités qui se sont installés dans cette région.
Les habitants de cette région n'ont jamais cessé d'être à l'affût de nouvelles possibilités et ils en ont saisi plusieurs. Au fil des ans, ils ont ouvert des entreprises. Au début des années 1970, notre collectivité a accueilli des manufacturiers d'instruments aratoires, particulièrement Friggstad. Dans les années 1990, la société Honey Bee Manufacturing, qui fabrique entre autres des moissonneuses et des moissonneuses-andaineuses, est venue s'établir chez nous. Des usines de transformation ont commencé à traiter nos produits et même à les vendre. Nous avons même diversifié nos activités en fonction de cultures spéciales. Les gens sont intéressés à vendre au détail le carburant, les fertilisants et les produits chimiques. Les membres de notre collectivité se tournent vers l'avenir. C'est un coin où vivent des centaines de personnes, pas des milliers. Comment cela a-t-il pu se produire dans un endroit comme celui-là? Deux choses m'ont frappé au sujet de ce coin-là. Premièrement, les gens veulent s'affranchir du gouvernement. Ils ne veulent pas dépendre de lui. Ils savent que le gouvernement ne peut les soutenir à long terme. Deuxièmement, ils adoptent l'attitude de gens qui vont survivre. Ils sont déterminés à survivre et ils vont prendre les moyens pour y arriver. C'est ce que nous faisons.
Le gouvernement veut-il des idées? Ce soir, il a demandé qu'on propose des solutions, ce que diverses personnes ont fait. Je ne sais pas s'il veut des solutions précises ou pas. Il n'a jamais été l'instigateur d'un débat sur cette question, et l'agriculture n'a jamais semblé une véritable priorité pour lui.
Quoi qu'il en soit, je vais faire certaines suggestions. À titre de producteur, je proposerais tout d'abord que le gouvernement renforce ce qui subsiste. Je pense à deux choses, soit les régimes d'assurance-récolte qui sont en place, et le SCRN. Pourquoi ne pas utiliser le CSRN, le mettre au point, faire en sorte qu'il fonctionne mieux. Comme l'ont dit ce soir des députés de mon parti et ceux d'un autre parti d'opposition, il faut réduire davantage les impôts et les droits gouvernementaux.
Un des programmes qui a fonctionné l'été dernier, c'est le Programme d'ajustement Canada-Saskatchewan. La Saskatchewan et le Manitoba ont tous deux bénéficié de ce programme. C'est un programme facile à administrer. L'argent a été versé très rapidement, il a été dirigé là où il devait l'être et il a servi à ce à quoi il devait servir.
Deuxièmement, il faut éliminer les échecs. Je pense à deux exemples particuliers. Je pense d'abord à l'ACRA et au PCRA. Ces programmes ont été mal gérés et se sont révélés inefficaces. Ils sont dangereux parce que les gens s'attendent à recevoir un montant donné, puis sont déçus parce que le montant qu'ils touchent est inférieur.
Nous connaissons tous des exemples de gens qui ont reçu des montants, lesquels ont été par la suite récupérés. J'ai des électeurs qui sont venus me voir pour me dire qu'on leur avait demandé de rembourser des paiements qu'ils n'avaient pas encore reçus.
Le deuxième point à régler, c'est que nous devons adopter des positions commerciales beaucoup plus fermes. Nos prises de position sur le plan commercial placent notre secteur agricole en difficulté.
Le gouvernement doit aussi susciter l'espoir. Nous devons fournir une aide d'urgence dès maintenant. Nous disposons de la moitié des fonds du programme ACRA, soit 800 millions de dollars, et nous demandons au gouvernement de fournir encore 1 milliard de dollars avant le temps des semailles. Cette aide doit être versée si nous voulons que les agriculteurs aient de bonnes récoltes dans les secteurs du grain et des oléagineux.
Le gouvernement doit songer à créer des incitatifs pour le changement. Un des problèmes avec le programme ACRA, c'est qu'il récompensait les gens pour ne rien changer à leurs façons de faire. Si le prix d'une culture pratiquée par un agriculteur s'effondrait, rien n'incitait ce dernier à changer de culture parce qu'il avait toujours accès au programme. Nous devons trouver des incitatifs au changement.
Les producteurs de légumineuses constituent un bon exemple d'agriculteurs qui se sont spécialisés et ont obtenu du succès sans l'aide massive du gouvernement. Ils représentent un exemple de producteurs qui favorisent l'essor du secteur agricole.
Je suis d'avis que nous devrons élargir l'accès. Nous devons l'élargir aux chemins de fer pour que nous puissions réaliser une partie de notre travail sur les chemins de fer. Je dirais aussi, comme nous l'avons déjà entendu, que nous devons ouvrir l'accès à la commercialisation, particulièrement pour le grain. Nous devons donner le choix aux agriculteurs pour ce qui est de la commercialisation de leurs propres produits. Nous pouvons commercialiser d'autres produits partout dans le monde et nous pouvons certainement le faire aussi dans le cas du grain.
Si le gouvernement ne veut pas envisager ces solutions, je lui dirai qu'il ferait mieux de mettre au point le plus rapidement possible des programmes de transition efficaces pour ceux qui ne pourront pas continuer d'exploiter leurs fermes. Nous avons entendu plus tôt que, l'an dernier, 6 400 personnes ont quitté les fermes. Ce nombre augmentera très rapidement. Ces gens savent travailler et veulent travailler. Ils veulent travailler sur leurs fermes. Cependant, si nous ne sommes pas prêts à les aider à le faire, nous ferions mieux d'être prêts à les aider à passer à autre chose.
En conclusion, je poserai la question suivante: l'agriculture est-elle une industrie nécessaire et, si elle ne l'est pas, qu'arrivera-t-il? Si elle l'est, le gouvernement doit agir vite. Depuis trois ans, il ne s'est pas occupé de façon efficace de la situation en ce qui a trait aux céréales et aux oléagineux. Il doit commencer dès maintenant à assumer ses responsabilités en répondant à ce besoin immédiat.
Nos ancêtres sont venus ici pour les possibilités que cette terre leur offrait. Essayons de voir à ce que nos enfants aient les mêmes possibilités.
Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec un autre député.
Par une journée enneigée de janvier, je me suis aperçu que le terrain de stationnement du bureau de ma circonscription était jonché d'énormes moissonneuses-batteuses et d'immenses tracteurs. Une délégation d'agriculteurs de la localité m'attendaient dans mon bureau. Nous avons eu une bonne discussion.
En me quittant, chacun des hommes m'a serré la main. Un des derniers à partir m'a pris la main et m'a dit: «Je vous supplie de faire comprendre aux gens d'Ottawa dans quelle situation nous nous trouvons.» Il n'avait rien dit pendant toute la rencontre. Les quelques mots qu'il m'a dit en me quittant m'ont touchée très profondément.
En tant que parlementaires, en tant que députés, la raison principale pour laquelle nous sommes ici, c'est pour faire comprendre aux gens d'Ottawa dans quelle situation se trouvent nos électeurs et tous les Canadiens. Il est de notre devoir de transmettre à Ottawa les récits, les préoccupations, les défis, les espoirs et les rêves des Canadiens. Nous faisons cela pour veiller à ce que les décisions tiennent compte de la réalité que vivent les Canadiens, et en mettant les choses au mieux, ce que nous faisons ici, dans cette Chambre, sert à ceux qui y cherchent du leadership, des réponses et, parfois, de l'aide. Si nous négligeons notre rôle, les lois que nous établissons, les politiques et les programmes que nous élaborons, ne répondront jamais aux besoins des Canadiens. Nous ne résoudrons jamais les problèmes auxquels notre pays doit faire face. Nous ne répondrons jamais aux questions fondamentales auxquelles nous devons répondre en tant que pays.
J'ai l'honneur de représenter la circonscription de York-Nord, une région ontarienne riche en agriculture et connue pour ses fermes laitières, ses céréales et ses animaux d'élevage, et pour les magnifiques légumes cultivés dans nos fermes en terre marécageuse. En fait, lorsque j'étais jeune écolière à Thunder Bay, nous avons étudié le célèbre Holland Marsh dans notre cours de culture maraîchère.
Comme elle est située à proximité de Toronto, York-Nord a l'avantage d'être un peu une circonscription hybride, un bassin agricole en même temps qu'une importante région industrielle. Une partie de ses habitants travaillent à Toronto, d'autres vivent dans les nombreux villages et petites municipalités en milieu rural et beaucoup cultivent la terre dans cette région depuis des générations.
Au cours des années, à cause de la proximité de la plus grande ville du Canada, York-Nord s'est urbanisée. On peut dire la même chose de nombreuses circonscriptions représentées dans cette Chambre. Une bonne partie de nos terres agricoles a disparu. Malgré cela, on peut rapidement écarter le mythe suivant lequel la région du Grand Toronto n'apporte pas une contribution importante au secteur agricole. En effet, une étude récente a révélé que les revenus tirés de l'agriculture dans la région de York seulement s'élèvent à environ 585 millions de dollars.
Il est clair que le secteur agroalimentaire demeure vital pour la région du Grand Toronto et celle de York. Il se compose de gens tenaces et travaillants qui ont cultivé la terre de générations en générations. Ces personnes ont connu des bonnes et des mauvaises périodes, mais elles traversent actuellement la pire des périodes.
Je travaille en étroite collaboration avec les producteurs agroalimentaires dans ma circonscription. L'un d'eux, M. Don Chapman, m'a indiqué, et a déclaré aux journaux, que «les agriculteurs ne veulent pas de subventions, ni de remboursement d'impôt ni d'une assurance-récolte. Ils veulent seulement avoir un prix équitable pour leurs produits.» Le gouvernement doit se montrer sensible à leur besoin d'aide immédiate et de soutien à long terme. Nous produisons certains des meilleurs produits agricoles au monde, et pourtant nos agriculteurs sont dans une situation désespérée.
Les agriculteurs de ma circonscription me disent que les agriculteurs ontariens souhaitent l'ajout de 300 millions de dollars dans le programme national de protection du revenu agricole. Comme la participation provinciale à ce programme est de 40 p. 100, cela signifie que l'Ontario devra fournir une contribution de 120 millions de dollars. Notre secteur agricole est une responsabilité partagée.
Les agriculteurs de ma circonscription réclament aussi des solutions et des mesures à plus long terme. Ils parlent notamment de financement accru de la recherche et du développement de nouveaux marchés. Ils parlent de force et de programmes environnementaux. Mais ce qui est plus important, les programmes de soutien du revenu devraient permettre de veiller à ce qu'ils aient des rendements adéquats de leurs investissements, leurs coûts de production et leur travail.
Les débats sont faciles, mais les solutions à long terme ne le sont pas. Allons-nous convenir de mesures concrètes ce soir? Je ne le crois pas. Je crois que la Chambre a besoin de plus de temps pour discuter des nombreuses facettes de ce problème compliqué qui traîne depuis longtemps.
Une association locale de maraîchers m'a écrit récemment pour m'exposer certaines facettes du problème. En plus des mauvaises conditions météorologiques qu'ils ont eu à subir récemment, les producteurs ont affaire à des marchés affaiblis par suite de la consolidation, d'approvisionnements intérieurs plus abondants, d'une augmentation de l'offre mondiale à longueur d'année et des accords de libre-échange qui obligent les producteurs à faire concurrence aux trésors publics des États-Unis et de l'Union européenne.
Cette même association fait remarquer que, selon une étude pré-récolte effectuée en juillet 2000, les pertes de récoltes pour les producteurs de Bradford, Cookstown et East Gwillimbury se chiffrent approximativement à 3 500 acres, soit, estime-t-on, 40 p. 100 de la surface totale cultivée. C'est alarmant.
Il y a d'autres aspects au problème, des aspects importants dont nous devons discuter, par exemple l'augmentation de l'aide aux producteurs locaux. Comme Wendell Berry, ce célèbre agriculteur, essayiste et poète, l'a écrit un jour:
Le fait d'axer l'agriculture sur les besoins locaux, les possibilités locales et les contraintes locales me paraît indispensable à la survie et de la terre et du peuple, et certainement à la survie des libertés démocratiques.
Pourquoi achetons-nous la laitue qui nous arrive par camions entiers de la Californie, au lieu d'opter pour celle qui a poussé à peut-être quelques kilomètres à peine de chez nous? Ça ne va vraiment pas. Combien d'entre nous s'arrêtent pour réfléchir un tant soit peu aux conséquences qu'un choix aussi simple peut entraîner pour nos agriculteurs?
Voilà pourquoi j'exhorte la Chambre et le gouvernement à organiser un débat national sur l'alimentation. Les Canadiens, à la ville comme à la campagne, doivent savoir comment vivent les producteurs de nos denrées alimentaires. Nous devons comprendre pourquoi le revenu moyen de l'agriculteur continue de baisser tandis que ses coûts de production continuent d'augmenter. Nous devons comprendre pourquoi les agriculteurs de demain ne prennent pas la relève. En fait, d'après certains, cette génération d'agriculteurs a déjà décidé de refuser de prendre cette relève. En fait, c'est la génération suivante que nous devons convaincre pour qu'elle revienne à la terre.
Le député de Calgary-Centre a soutenu que ce débat concernait la sécurité alimentaire. Je suis d'accord là-dessus et j'irai même plus loin. Je pense en effet qu'il s'agit de notre souveraineté alimentaire. Si nous voulons que les Canadiens aient des aliments de qualité à leur disposition et que les Canadiens aient la haute main sur les moyens de satisfaire ce besoin fondamental, nous devons alors comprendre, comme disait encore Wendell Berry, que «quel que soit le facteur qui détermine la prospérité du pays, il détermine également celle du peuple».
Le dynamisme, la viabilité et la rentabilité du secteur agricole détermine un peu qui nous sommes. Si ce secteur pâtit, nous en pâtissons tout autant. Pis, nous en devenons vulnérables.
Je demande instamment à tous les députés de venir en aide aux exploitations agricoles familiales du Canada. J'engage le gouvernement à prendre les dispositions qui s'imposent.
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, je vous remercie d'avoir donné à la Chambre la chance de discuter de cette question très importante.
Certains considèrent que la circonscription de Durham fait partie de la région de Toronto et que nous ne connaissons donc rien dans le domaine de l'agriculture. En fait, nous sommes très fiers de dire que l'agriculture est la deuxième industrie en importance dans notre région. La première place est occupée par la General Motors. L'agriculture constitue donc un secteur important dans la circonscription de Durham.
Sur une note plus personnelle, j'aimerais souligner que j'ai pratiqué l'agriculture à temps partiel pendant huit ans. Je me souviens qu'il y a eu des années où je n'ai pas pu récolter à cause des mauvaises conditions ou parce que les silos n'avaient pas pu me payer un prix décent au printemps. Je me suis même vu forcé de décharger toute ma récolte sur mes terres et de m'en servir pour nourrir les cochons. Je peux donc très bien comprendre toutes les épreuves que les agriculteurs ont subies. Certaines choses sont attribuables aux conditions climatiques, d'autres aux forces du marché. Les décisions sont prises à l'extérieur des limites de la ferme.
Nos agriculteurs vivent une situation de crise. Tous les députés de la Chambre s'entendent pour dire que la crise est grave.
Je me suis justement entretenu avec des agriculteurs de ma circonscription vendredi dernier. Ils appartiennent à un organisme connu sous le nom de Banque de céréales vivrières du Canada. C'est un organisme que bien des gens ne connaissent pas. Les agriculteurs se réunissent et travaillent bénévolement pour faire pousser des céréales qui seront engrangées dans leurs propres silos. L'ACDI achète même de ces céréales pour les envoyer à l'étranger. Malgré la situation de crise dans laquelle elle vit, la collectivité agricole a trouvé le moyen de venir en aide aux plus démunis dans les pays étrangers.
Il n'est que juste que ces gens se tournent vers nous lorsqu'ils ont besoin d'aide. Il est temps que nous nous penchions sur leurs problèmes et que nous voyions à ce qu'ils soient sérieusement étudiés.
Il est inutile de dire aux députés que deux guerres mondiales ont appris à un grand nombre de pays qu'il est dangereux d'être dépendants des autres au plan de l'approvisionnement alimentaire. Bien que l'on puisse soutenir, sans fondement à mon avis, que d'autres pays à vocation agricole pourraient obtenir un meilleur rendement que le nôtre, je ne pense pas que cela soit vrai. J'irais même jusqu'à dire que, si tel est le cas, cela est dangereux. Nous devons soutenir l'industrie agricole canadienne.
Il me semble que le secteur agricole est subdivisé en un certain nombre de domaines. Nous suivons une tendance dangereuse à la Chambre, celle de discuter de l'agriculture comme s'il s'agissait d'une affaire holistique. En réalité, l'agriculture réunit plusieurs secteurs de l'industrie.
Il y a les secteurs soumis à la gestion de l'offre. Certains ont laissé entendre que ces secteurs se portaient bien, alors que d'autres ont dit que leur existence tenait à un fil. En fait, ils croulent sous le poids des prix internationaux et de l'application plus répandue des droits de douane plutôt que d'avoir un système de contingentement comme certaines de nos industries soumises à la gestion de l'offre. Une certaine menace plane aussi sur ces secteurs, qui ont besoin de protection. En tant que législateurs, nous devons y voir.
Toutefois, il est vrai que les industries soumises à la gestion de l'offre ne vivent pas la situation alarmante des producteurs de céréales et d'oléagineux ou d'autres producteurs agricoles qui n'appartiennent pas à un secteur soumis à la gestion de l'offre.
Ces industries voient le gouvernement comme leur gestionnaire d'approvisionnement. Les petits producteurs trouvent difficile de se tailler une place concurrentielle non seulement sur la scène mondiale, mais encore chez eux sur la scène nationale. Après tout, pour tous les éleveurs de bétail du Canada, il n'y a que deux ou trois grands acheteurs. Le marché présente donc une très grande disparité. Je crois qu'un autre député a dit que le marché avait négligé de traiter directement avec les agriculteurs.
Bon nombre des intervenants ont parlé aujourd'hui de la crise et ont laissé entendre qu'il faut injecter des fonds. Je suis d'accord avec ces propos. Toutefois, je désire parler aujourd'hui de la notion d'application des programmes.
Avant de commencer à analyser ce débat, je me suis procuré des statistiques intéressantes sur le revenu des Canadiens. Elles portent sur les gens qui ont déclaré leurs revenus tirés de l'agriculture en 1998. Elles ne sont peut-être pas tout à fait exactes car elles sont tirées des déclarations de revenus des gens. Elles reposent sur l'impôt sur le revenu des particuliers, de sorte qu'elles ne tiennent pas compte des gens qui se sont livrés à l'agriculture dans le cadre d'une société. Toutefois, un peu à la façon d'un baromètre, elles nous donnent un aperçu approximatif de la situation dans l'industrie agricole.
Un total de 439 990 déclarants indiquant que l'agriculture est leur principale source de revenu ont touché un revenu total d' environ 2 milliards de dollars, ce qui correspond à un revenu médian par agriculteur de 4 552 $.
Il y a plus renversant encore, soit le rapport du Conseil national du bien-être social, en 1998, qui parlait d'un seuil de faible revenu applicable aux gens reconnus comme prestataires de l'aide sociale. Il précisait que le seuil de faible revenu d'une famille comptant trois personnes s'établissait à 20 000 $. C'est inférieur au seuil applicable dans le cas d'un citadin car on croit que les impôts et autres dépenses des agriculteurs sont sans doute moins élevés. Ils ont été pris en considération.
Il est renversant de constater que, comme des gens déclarent des pertes liées à leur exploitation agricole, dans le flux des revenus, 214 470 agriculteurs ont des revenus de 20 000 $. Cela veut essentiellement dire que 50 p. 100 des gens ayant produit leur déclaration de revenus en 1998 et déclaré que leur principale source de revenu est l'agriculture vivent dans la pauvreté. C'est un très sinistre testament pour notre pays. Essentiellement, les citadins sont les bénéficiaires nets de cette politique.
Ce n'est pas tant le gouvernement en soi, mais pour une raison ou une autre, nous sommes les bénéficiaires d'une politique d'aliments à bas prix. Nous dépensons 9 p. 100 de notre revenu disponible à nous nourrir. Ce pourcentage est plus faible qu'aux États-Unis où le revenu par habitant est pourtant plus élevé qu'au Canada. Le Canada poursuit une politique d'aliments à bas prix, politique qui se pratique aux dépens des agriculteurs.
Nous avons entendu les gens exprimer leurs préoccupations concernant les divers programmes gouvernementaux. Traditionnellement, à chaque fois qu'il y a un problème ou une crise dans le secteur agricole, on élabore un plan pour l'enrayer, pour s'y adapter, ou pour y apporter une solution. C'est ainsi que nous avons adopté des solutions provisoires au lieu d'un système de soutien du revenu des agriculteurs.
Il a été question d'un filet de sécurité. L'intention des gouvernements, quelle que soit leur allégeance politique, a généralement été bonne, mais ceux-ci n'ont pas pris le temps de s'asseoir et d'étudier les aspects à long terme d'un système de soutien du revenu agricole. Je suggère que l'on cherche ailleurs et que l'on crée un impôt négatif sur le revenu des agriculteurs.
Au Canada, nous avons l'ACRA, le RARB, le CSRN, un régime d'assurance du revenu du marché, et un régime d'assurance-récolte. Nous avons une multitude de systèmes. Normalement, le Canada investit 1,6 milliard de dollars dans le soutien à l'agriculture. À cela s'ajoute un autre milliard de dollars par année, jusqu'à concurrence de 2,5 milliards de dollars. Comme je le disais, le revenu total des agriculteurs en 1998 était de 2 milliards de dollars. Il ne fait aucun doute que nous pouvons nous permettre un impôt négatif sur le revenu pour appuyer le secteur agricole sans que les agriculteurs aient besoin d'être des comptables ou des juristes.
Dans ma circonscription, la moitié des personnes admissibles à ces programmes n'ont pas reçu d'argent, car elles sont incapables de remplir ces foutus formulaires. La première catégorie dans ce groupe a perdu 255 millions de dollars. Ces gens n'ont pas les moyens de payer 1 000 $ pour qu'un comptable ou un juriste remplisse les formulaires, alors ils ne touchent tout simplement rien. L'argent ne parvient pas jusqu'aux gens qui en ont besoin.
Oui, il existe une foule de programmes, mais l'argent ne parvient pas aux gens qui y ont droit. Il faut que nous nous y prenions un peu mieux.
M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, voilà un débat d'urgence comme nous en avons déjà tenus à plusieurs reprises. Je siège à la Chambre depuis huit ans et je trouve cela troublant que nous continuions de réagir sans réfléchir aux difficultés de l'agriculture.
Je voudrais aborder la question dans un esprit non partisan, car le problème actuel nous suit depuis longtemps.
Je crois que les Canadiens doivent se poser une question fondamentale: voulons-nous un secteur agricole au Canada? En définitive, c'est la question qu'il faut se poser. En ce qui concerne les oléagineux et les graminées, les Prairies et d'autres régions du pays en sont aujourd'hui réduites à faire ce choix déchirant parce que ces secteurs vont disparaître, à moins que nous n'abordions l'agriculture de façon différente au Canada.
J'ai pu constater la dévastation dont nous avons d'ailleurs parlé aujourd'hui à la Chambre. Nous avons entendu nombre d'interventions qui résumaient bien la gravité de la situation. Je suis tout à fait d'accord avec ce qui a été dit: le Canada possède une industrie vitale qui est en train de disparaître. Les gens perdent leurs fermes. Cela se produit tous les jours dans ma circonscription.
À mon avis, nous allons devoir, dans l'immédiat, apporter une aide d'urgence, mais si nous ne voulons pas perdre la guerre, nous devons nous doter d'un plan d'action à long terme, et les Canadiens doivent prendre conscience du fait qu'il est dans leur intérêt d'avoir une industrie agricole au Canada. Une des raisons pour lesquelles je le dis, c'est que nous ne faisons tout simplement pas le poids face aux subventions accordées par des pays aussi peuplés que les États-Unis ou l'Union européenne.
Je signale que je partage mon temps de parole avec le député de Renfrew—Nipissing—Pembroke.
Nous ne pouvons pas jouer ce jeu, car nous perdrons à coup sûr. Nous devons faire face à la situation d'urgence, mais je soutiens avec insistance que nous ne pouvons tout simplement pas gagner cette guerre, à long terme.
Que faire? D'abord, je pense que les Canadiens doivent décider s'ils veulent une industrie agricole. Je pense qu'à l'heure actuelle, on pourrait importer des aliments à moindre prix de l'étranger, compte tenu des subventions qui sont versées. Si l'on prenait cette décision, on assisterait à la dévastation de nos collectivités rurales. Et ce ne serait pas tout, j'en ai bien peur.
Je connais une communauté agricole qui a perdu plusieurs concessionnaires d'équipement de ferme. La communauté est en déclin. J'ai tenu une assemblée publique et j'y ai vu des adultes en pleurs. La situation est grave. Ces gens perdent leur ferme. Mais il n'y a pas que les agriculteurs. Des concessionnaires d'automobiles perdent leur commerce. Et ça ne s'arrête pas là. La crise s'étend aux villes parce que, dans l'ouest du Canada en particulier, où je vis, l'agriculture joue un rôle important. La perte d'un emploi en agriculture entraîne la perte de sept autres emplois. Ceux qui doutent que la crise nuirait à tout le pays ne connaissent pas la réalité.
Que faire? Nous connaissons quelques solutions. Il y a l'aide à court terme dont j'ai parlé. D'autres ont proposé des mesures telles que l'allégement des taxes d'accise sur le carburant. Ce sont des mesures que nous pourrions prendre ici. Nous pourrions procéder à une réforme du transport afin de réduire les coûts de livraison. Il faudra faire cela. De bonnes propositions ont été faites.
Le vrai problème qu'il faut régler est au niveau de la communauté internationale. Le Canada a un rôle important à jouer à cet égard. Après tout, qui d'autre le fera? Le Canada a longtemps fait preuve de leadership pour essayer de mettre en place des règles régissant le commerce mondial. Tout de suite après la guerre, nous avons été l'un des principaux pays qui ont réclamé des règles pour encadrer le commerce. Pour une foule de raisons, le commerce des produits agricoles n'a pas été englobé, mais nous avons été présents et nous continuons d'insister pour qu'ils le soient.
Selon moi, nous devons être beaucoup plus intransigeants dans ces négociations. Si nous voulons que notre agriculture survive, nous devons commencer à veiller un peu mieux que maintenant sur nos intérêts. Lorsqu'il arrive par exemple que l'OTAN dise que le Canada ne fait pas sa part et que nous devons relever la barre et injecter plus d'argent, nous devrions répondre que nous sommes prêts à le faire. Nous sommes disposés à en discuter, mais pas si des pays qui font partie de l'organisation appliquent des politiques qui détruisent un secteur vital de notre économie. Nous devons d'abord protéger nos intérêts nationaux, et nous ne le faisons pas.
Ce n'est pas tout. L'an dernier, l'Europe a consacré 150 milliards de dollars aux subventions agricoles. Nous savons que l'Europe produit trop. Elle ne se contente pas d'approvisionner ses propres marchés, ce qui était son objectif au départ. Elle produit en moyenne de 10 à 15 p. 100 de plus que ses besoins. Que fait-elle de cette production? Elle en pratique le dumping sur le marché mondial, simplement pour s'en débarrasser. Ces prix à la baisse sont catastrophiques pour nos exportations, puisqu'il faut concurrencer des prix de liquidation.
La prochaine fois que les Européens s'adresseront à nous parce qu'ils ont un problème près de chez eux, en nous disant que le Canada compte de bons gardiens de la paix dont on a encore besoin en Bosnie ou ailleurs, je leur répondrais que nous sommes prêts à y aller, mais pas s'ils maintiennent ces politiques qui détruisent un secteur vital de notre économie, tout un mode de vie et nos localités rurales.
Il me semble que nous devons être plus déterminés. Nous devons prendre conscience que l'agriculture est pour nous un secteur vital. Grâce aux subventions qui existent, il nous en coûterait probablement moins cher d'importer nos aliments que de les produire, mais qu'arrivera-t-il dans 15 ans si ces subventions n'existent plus?
Que se passera-t-il si notre monnaie perd énormément de sa valeur? Le prix de nos aliments fera soudainement un grand bond. Qu'arrivera-t-il? Les Canadiens se demanderont ce qui est arrivé à nos agriculteurs; pourquoi les décideurs n'ont pas été plus responsables; pourquoi ils n'ont pas encouragé les agriculteurs; et pourquoi ils ne nous ont pas parlé du besoin vital que constituent l'agriculture et les aliments salubres? Ce sont là les questions qu'ils poseront une fois l'industrie agricole disparue.
Nous devons être prévoyants. Ensemble, en tant que pays, nous devons être davantage déterminés. C'est la réponse à long terme. Les gens me disent que le long terme, c'est 10 ou 15 ans, et leurs yeux deviennent vitreux. Ce problème existait quand je suis entré à la Chambre en 1993, ce qui fera bientôt huit ans, et nous continuons de réagir par automatisme. Plus vite nous nous rendrons compte que nos intérêts nationaux doivent être protégés, plus vite nous pourrons chercher une solution.
J'encourage tous les députés à travailler ensemble à cette fin. Je suis désolé de dire que nous n'allons pas dans la bonne direction et que le secteur des céréales et des graines oléagineuses n'existera plus bientôt si nous ne prenons pas une mesure très importante comme celle que je propose.
Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'interviens pour dire moi aussi qu'il est urgent, comme le pense notre parti, de faire comprendre au gouvernement que l'exploitation agricole familiale canadienne est en crise.
Dans les régions rurales de ma province, l'Ontario, le secteur agricole demeure un moteur important de croissance économique. La valeur prévue à la ferme des ventes de produits agricoles, établie à 8,84 milliards de dollars pour l'année 1999, montre que l'agriculture ontarienne continue de croître. De plus, l'augmentation de la valeur à la ferme de ces ventes et la diminution simultanée des emplois agricoles montrent que les agriculteurs continuent de devenir plus productifs à mesure que leurs exploitations ont tendance à devenir des activités à haute intensité de capital.
L'agriculture est une grosse affaire dans la circonscription de Renfrew—Nipissing—Pembroke. Une étude récente englobant également nos membres du parti de l'Alliance canadienne dans le comté de Lanark révèle qu'il y existe 7 021 emplois liés au secteur agricole et qu'il s'y fait pour plus de 240 millions de dollars par année d'échanges commerciaux entre les exploitations agricoles et les entreprises d'autres secteurs qui font affaire avec elles.
L'étude révèle également qu'à chaque emploi agricole correspond 1,3 emploi non agricole dans l'économie des comtés de Renfrew et de Lanark pour répondre aux besoins des exploitants agricoles locaux. Le coefficient multiplicateur des ventes montre qu'à chaque dollar dépensé par un agriculteur correspond 1,45 $ de vente additionnelle de la part des entreprises faisant affaire avec les agriculteurs.
Lors de la dernière campagne électorale fédérale, j'ai eu l'occasion d'entendre personnellement les doléances de nos agriculteurs locaux. Il y a eu une perte de petites exploitations agricoles par consolidation. Il devient plus difficile de trouver des usines de transformation et des débouchés pour leurs produits. Les agriculteurs se voient retirer des services gouvernementaux, et le vide n'est pas toujours comblé par le secteur privé. Il y a une pénurie de travailleurs qualifiés à cause des salaires plus élevés offerts ailleurs. Notre problème le plus tragique est l'exode des jeunes, qui quittent les régions rurales et les fermes familiales parce que certains producteurs sont d'avis qu'il n'y a pas d'avenir sur la ferme familiale.
Mais surtout, bon nombre des agriculteurs auxquels j'ai parlé croient que leurs difficultés actuelles sont liées à une seule chose, soit le faible prix des denrées. La frustration de mes électeurs par rapport à l'ancien député et au gouvernement actuel vient en grande partie du fait que, lorsqu'ils ont essayé d'attirer l'attention sur la crise agricole, on les a repoussés en disant que le problème était dû aux conditions météorologiques.
Nous, députés de l'Alliance canadienne, savons que ce n'est pas le cas. Les agriculteurs quittent la terre à cause du gouvernement libéral qui fait l'autruche devant les pratiques de nos partenaires commerciaux.
Les agriculteurs ne demandent pas un traitement de faveur, ils demandent simplement que les règles soient les mêmes pour tous lorsqu'ils voient des produits étrangers lourdement subventionnés envahir nos marchés. Même si les agriculteurs des États-Unis reçoivent dix fois plus de leur gouvernement que ce que le gouvernement canadien verse à nos agriculteurs, le prix que les Canadiens paient pour leurs aliments est l'un des plus bas du monde industrialisé. Alors que les consommateurs européens consacrent 30 p. 100 de leur revenu à l'alimentation et les consommateurs américains 11 p. 100, les Canadiens n'y consacrent que 9,5 p. 100 de leur revenu.
Les agriculteurs canadiens ont besoin d'un gouvernement qui les appuie. Je suis désolée d'apprendre que, lors de la dernière législature, les députés libéraux, conservateurs et néo-démocrates au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire ont, à deux reprises, refusé que le comité se rende en Ontario pour y entendre les agriculteurs en personne.
En tant que députée ontarienne de l'Alliance, je n'ai pas peur d'entendre parler du triste sort des agriculteurs de ma province, et ceux-ci peuvent être assurés que je défendrai ici leurs intérêts comme personne ne l'a fait depuis au moins 1993.
Ce dont les agriculteurs ontariens, et en particulier ceux du comté de Renfrew, ont besoin, c'est d'une injection immédiate de comptant pour assurer les semailles du printemps. Ils ont besoin d'un programme de soutien du coût de production agricole pour tout le Canada et d'un gouvernement qui protégera les agriculteurs indépendants et les consommateurs contre les grandes entreprises qui achètent toute la concurrence.
Une fois que les grandes entreprises auront poussé les producteurs indépendants à la faillite, les prix monteront en flèche. Tout ce que nous demandons, c'est que le gouvernement appuie les agriculteurs canadiens afin que ceux-ci puissent continuer à mettre des denrées alimentaires canadiennes de qualité sur la table des consommateurs.
M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de Haliburton—Victoria—Brock.
Je suis heureux de participer à ce débat ce soir. De nombreux députés ont pris la parole aujourd'hui et ont fait état de cette crise épouvantable qui sévit dans le monde de l'agriculture, une crise dont aucun député ayant passé un peu de temps avec des agriculteurs ne pourrait nier l'existence. Il nous faut certainement apporter des changements et prendre très rapidement des mesures à court et à long terme.
Un approvisionnement stable et abondant de nourriture à prix très modique est un des bonheurs que nous partageons au Canada. L'industrie agricole et agroalimentaire tient une place énorme dans notre vie de tous les jours. Elle représente le troisième plus gros employeur au Canada et génère chaque année des ventes d'environ 95 milliards de dollars en produits et services à l'échelle canadienne et de 22 milliards de dollars à l'étranger.
L'agriculture et l'agroalimentaire occupent évidemment une place importante dans l'économie du pays, et c'est pourquoi l'état actuel de l'industrie, et son avenir, préoccupent énormément tous les Canadiens. Chacun d'entre eux doit surveiller attentivement la situation.
Les agriculteurs canadiens présentent un dossier impressionnant, malgré les conditions économiques misérables auxquelles ils font face. L'agriculture a toujours été une entreprise hasardeuse, mais jamais comme aujourd'hui. Les prix modiques des denrées, le mauvais temps, les coûts élevés des facteurs de production et la surproduction attribuable aux subventions importantes accordées aux États-Unis et dans l'Union européenne mettent à dure épreuve les agriculteurs canadiens. C'est surtout le cas des céréaliculteurs et des producteurs d'oléagineux, qui ont vu leurs revenus chuter considérablement en raison de circonstances tout à fait hors de leur contrôle.
Les prix payés aux producteurs ontariens et canadiens de céréales et de plantes oléagineuses ont presque atteint des planchers historiques. Si l'on convertit les prix en dollars d'aujourd'hui, on s'aperçoit que, ces quatre dernières années, les prix ont atteint les niveaux les plus bas jamais enregistrés. Cela est directement attribuable aux mesures gouvernementales appliquées en Europe de l'ouest et aux États-Unis. On nous dit qu'un céréaliculteur ontarien qui produit un mélange équilibré de maïs, de soja et de blé obtient la moitié de l'aide gouvernementale qu'il obtiendrait s'il cultivait ces produits aux États-Unis, à peine quelque milles au sud de ma circonscription. C'est la réalité avec laquelle doivent composer les agriculteurs de ma région.
Depuis le 20 décembre dernier, le prix du maïs a chuté de 10¢ pour s'établir à 13¢ le boisseau. Le prix du soja a diminué de 82¢ et il n'est plus qu'à 84¢ le boisseau. Le prix du carburant et des fertilisants est à la hausse. L'été dernier, l'ammonium se vendait 300 $ la tonne métrique. Il se vend maintenant 345 $. Le prix de l'urée est passé de 300 $ à 450 $. On s'attend à ce que l'impôt foncier dans notre région augmente. Les agriculteurs ont du mal à obtenir des prêts auprès des banques qui commencent à songer à saisir les avoirs. D'ailleurs, dans ma région, on parle déjà de saisies dans les médias.
Les agriculteurs se demandent s'ils vont pouvoir faire leurs semis cette année. La déception chez les agriculteurs atteint un sommet.
Le gouvernement a adopté jusqu'à maintenant des mesures à court terme et à long terme. Pour répondre aux besoins immédiats des agriculteurs, nous avons offert un programme d'aide en cas de catastrophe d'abord en 1998, puis en juillet dernier. Nous avons travaillé avec acharnement pour mettre en oeuvre un plan fédéral triennal de soutien aux revenus agricoles au coût de 3,3 milliards de dollars. Cette approche comprend un programme permanent d'aide en cas de catastrophe liée au revenu agricole, que les agriculteurs avaient réclamé. Les montants annuels engagés par le gouvernement fédéral au titre de la protection du revenu agricole ont presque doublé par rapport à ce qu'ils étaient avant cette entente.
Au cours des cinq dernières années, le gouvernement fédéral a dépensé environ 13 milliards de dollars pour appuyer le secteur agroalimentaire, mais les programmes d'aide à court terme ne sont qu'une partie de la solution et, dans le moment, ils n'aident pas notre milieu agricole autant qu'il en aurait besoin. Plusieurs députés de la Chambre ont dit très clairement qu'une injection de fonds était essentielle à ce moment-ci. Il ne fait pas de doute que nous devons assurer une certaine stabilité dans notre secteur agricole. Je crois que c'est extrêmement important.
Nous devons aussi comprendre qu'il nous faut intervenir sur la scène internationale, comme beaucoup de députés l'ont dit et comme la communauté agricole l'a dit également. Nous voulons que toutes les formes de subventions agricoles soient éliminées en Europe, aux États-Unis et dans les autres pays qui font concurrence à nos agriculteurs. Ces subventions nuisent à nos agriculteurs, qui n'ont pas le même genre d'aide. Si nous essayons d'augmenter notre aide, nous créerons tout simplement une spirale qui fera qu'il deviendra impossible d'avoir des prix raisonnables pour les produits.
Nos agriculteurs ont dit très clairement qu'ils ne veulent pas de subventions. Ils veulent de la justice. Ils veulent de bons prix pour leurs produits. Les aliments à bas prix sont une réalité au Canada, mais nous n'appuyons pas nos producteurs agricoles qui produisent ces aliments comme nos devrions le faire. Le plus tôt sera le mieux, a dit le ministre. Débarrassons-nous de ces subventions. Ne nous contentons pas d'adopter une politique des aliments à bas prix, mais mettons fin une fois pour toutes au dumping par les autres pays. Tout le monde pâtit lorsque les étrangers subventionnent leurs denrées agricoles. Il faut établir des règles claires pour empêcher que les formes d'aide à l'exportation ne deviennent des subventions à l'exportation.
La même chose vaut pour l'aide intérieure qui peut entraîner une distorsion commerciale au même titre que les subventions à l'exportation. Si les prix mondiaux qui sont déjà trop bas diminuent encore à cause de ces pratiques déloyales, si ces pratiques font du tort à nos agriculteurs et à ceux de la majorité des autres pays qui produisent des denrées agricoles, ces pratiques devraient être restreintes et éliminées. Des règles qui s'appliquent également à tous sont un volet important de l'équation commerciale. Des règles commerciales qui sont transparentes, sûres et prévisibles et qui s'appliquent à tout le monde sont indispensables pour garantir le caractère équitable de la politique agricole de notre pays et de celles d'autres États.
Voilà pourquoi j'ai été ravi d'entendre le premier ministre dire récemment que nous devons régler le problème des subventions et que nos agriculteurs devraient pouvoir soutenir la concurrence conformément à des règles du jeu équitables. Les guerres de subventions ne présentent aucun intérêt pour les Canadiens et ne leur sont d'aucune utilité. C'est une bataille que le Canada doit gagner. Il faut positionner stratégiquement l'agriculture et le secteur agroalimentaire canadiens à long terme pour aider les agriculteurs canadiens à bénéficier d'une stabilité, d'une rentabilité et d'un soutien à long terme.
Voilà pourquoi j'ai aussi été heureux de constater que le gouvernement a fait mention de l'agriculture dans le dernier discours du Trône et qu'il s'est engagé à aider le secteur agricole canadien à aller au-delà de la simple gestion de crise.
Je suis entièrement d'accord. Il est temps que le gouvernement du Canada et les agriculteurs canadiens se débarrassent du modèle de gestion de crise et travaillent ensemble. J'appuie les efforts du gouvernement qui consistent à soutenir cette industrie vitale, mais nous devons nous engager à faire davantage pour nos agriculteurs à l'heure actuelle, notamment ceux qui sont dans le secteur du grain et des oléagineux.
Nous devons tout faire pour aider les agriculteurs qui mettent du pain sur nos tables au cours de cette période difficile. Nous devons combler l'écart et mettre nos agriculteurs sur un pied d'égalité. C'est ce que veulent les agriculteurs. C'est ce que le gouvernement doit faire et c'est ce qu'ont dit tous les députés qui ont pris la parole aujourd'hui.
Nous devons reconnaître très clairement la crise agricole. C'est important pour des milliers de familles d'un bout à l'autre du pays qui ne cultivent pas la terre. C'est important pour les secteurs d'activité qui vendent des produits aux agriculteurs. C'est important pour les secteurs d'activité qui utilisent les produits de la ferme. C'est important pour les secteurs d'activité qui profitent de l'aide de cette industrie florissante.
N'oublions pas que cette industrie a été à la base du développement du Canada dans le passé, qu'elle l'est toujours et que nous devons l'aider à continuer d'être l'industrie assurant le bien-être des Canadiens dans l'avenir.
M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Monsieur le Président, j'utilise la deusième partie du temps de mon collègue. Je voulais être sûr que la circonscription de Haliburton—Victoria—Brock ait son mot à dire dans ce débat. Ma circonscription et la circonscription avoisinante de Hastings—Frontenac représentent à elles deux un tiers des terres dans le sud de l'Ontario.
Ma circonscription est une circonscription rurale de l'Ontario, avec 24 parades du père Noël, 18 cérémonies à la mémoire des morts et beaucoup d'autres événements qui ont lieu dans les circonscriptions rurales. Je me rends compte, quand je fais le tour des 44 municipalités de ma circonscription, que nous avons affaire à de petits groupes composés principalement d'agriculteurs.
C'est la même chose dans votre circonscription, monsieur le Président, qui abrite une importante collectivité agricole. Il y a eu l'autre jour dans votre circonscription un grand rassemblement auquel je vous remercie d'avoir assisté. Certains agriculteurs de ma circonscription s'y sont rendus pour bien montrer que certains secteurs de l'agriculture sont en crise aujourd'hui. Ce n'est pas un seul secteur qui est touché car les problèmes qui touchent un secteur aujourd'hui en toucheront un autre demain.
Il y a en Ontario 27 groupements de producteurs spécialisés. J'ai essayé de les encourager à unir leurs efforts et à parler d'une seule voix, au lieu d'agir séparément et d'essayer d'obtenir une chose pour leur propre secteur.`
Quand je traite de cette question et que je travaille avec les associations professionnelles agricoles, je me rends compte à quel point ces gens sont fiers. Ces gens ne veulent pas d'une aide. Ce qu'ils veulent, c'est travailler sur un pied d'égalité et pouvoir être mondialement compétitifs.
Les agriculteurs au Canada comptent parmi les plus efficaces du monde. Ma circonscription compte de nombreuses associations de producteurs qui ont opté pour le système de gestion de l'offre. Nous avons plus de 400 fermes laitières dans cette circonscription. Quand je soumets aux agriculteurs des questions susceptibles de les intéresser et que je fais venir sur place quelques-uns des principaux négociateurs pour trouver ensemble des moyens pour améliorer leur productivité, cela attire vraiment beaucoup de monde aux réunions.
Avant ce débat, j'ai assisté à une réunion avec le ministre des Finances. Je voulais m'assurer qu'il était informé de la nature exacte des problèmes, qu'il connaissait les données, qu'il était au courant de ce que nous demandions. Je voulais aussi m'assurer qu'il aurait en sa possession les données exactes lorsque, avec le ministre de l'Agriculture, il rencontrerait les autres ministres du Cabinet, pour que tous sachent ce qu'il faudra faire exactement dans les 60 jours à venir, c'est-à-dire d'ici à la période des semis. Au-delà, l'agriculteur doit s'occuper de calculer ce que le fruit de son labeur lui rapportera en bout de ligne.
Il ne s'agit pas de proposer une solution miracle pour que les agriculteurs puissent ensemencer leurs champs, mais plutôt une solution pour qu'ils obtiennent un bon prix pour leur produit. Le problème est à ce stade systémique en Ontario et dans d'autres provinces.
Cet après-midi, j'ai eu une conférence avec les députés de Malpeque, d'Essex, de Lambton—Kent—Middlesex, de Leeds—Grenville, de Dufferin—Peel—Wellington—Grey, d'Elgin—Middlesex—London et d'Etobicoke-Nord, lequel n'a pas de ferme dans la région, mais, comme il est secrétaire parlementaire, nous avons pensé qu'il pouvait être utile de l'avoir avec nous.
Tandis que nous examinions la question, que nous en discutions, quand nous avons présenté les chiffres, on a bien vu que le problème était généralisé dans le secteur de l'agriculture. Il ne s'agit pas uniquement d'un groupe de produits, bien qu'il y ait à l'heure actuelle de graves problèmes au niveau des céréales et des oléagineux. D'autres secteurs pourraient être touchés puisque le secteur agro-alimentaire du Canada subit les assauts de tous les pays au chapitre de la production de produits alimentaires. Si nous nous laissons contrôler, si nous laissons les marchés décider de tout pour nous, nous pouvons dire adieu aux exploitations agricoles familiales. Nous devons donc agir.
Je félicite certaines personnes de ma circonscription, soit Ed Bragshaw, Bruce Webster, Joe Hickson et Bill Holland, qui ont organisé des manifestations, déposé des pétitions et mis sur pied un campagne téléphonique. Ils luttent contre le problème d'une façon très importante pour eux et pour moi aussi. Ils s'assurent que leurs voix sont entendues.
J'aimerais également féliciter le député de Toronto—Danforth qui est un spécialiste du domaine de la promotion et qui a des idées formidables pour ce qui est d'événements comme le spectacle organisé pour venir en aide à l'agriculture. Il n'y a certainement pas de fermes dans sa circonscription, mais il travaille fort pour rallier les agriculteurs. Il tente de mettre sur pied des genres de programmes promotionnels et il sait bien que les problèmes qui existent aujourd'hui dans le secteur des céréales et des oléagineux se produiront demain dans d'autres secteurs agricoles.
Une organisation agricole reçoit six cents pour le produit qui se trouve à l'intérieur de la boîte de céréales alors qu'un joueur de hockey en tire un dollar. Je n'ai rien contre les joueurs de hockey. Je sais que votre fils joue pour la LNH, monsieur le Président. Je suis heureux qu'il reçoive un dollar pour chaque boîte de céréales vendue. Mais il convient de souligner que si l'agriculteur ne reçoit que six cents pour les céréales alors qu'un golfeur reçoit un dollar pour que sa photo paraisse sur une boîte de céréales, il y a un problème évident dans la façon dont nous menons les affaires agricoles.
Ce soir, les partis à la Chambre sont sur le point de régler les problèmes à court terme, mais les problèmes à long terme demeureront. Une injection instantanée de fonds ne contribue pas à régler le problème systémique qui existe. L'autre facteur aggravanat, c'est que dans les fermes très prospères, l'âge moyen des agriculteurs est de 57, 58 ans. Les difficultés que connaît l'industrie agricole sur le marché n'incitent pas la génération suivante à se lancer dans le domaine.
À court terme, je félicite les agriculteurs d'avoir uni leur voix afin d'attirer l'attention sur le problème. Je vous remercie, monsieur le Président, de permettre la poursuite du débat. Je félicite le député de Brandon—Souris d'avoir signalé le problème à la Chambre.
Je demande à la Chambre de continuer à débattre de notre système alimentaire, non pas uniquement du secteur des céréales et des graines oléagineuses comme ce soir, mais de l'ensemble du problème touchant l'agriculture et de la salubrité de nos aliments, ce qui nous préoccupe le plus. Je crois que ce problème n'est que la pointe de l'iceberg. Nous devons nous y attaquer avec ardeur.
La Chambre doit adopter une approche proactive pour faire en sorte que les agriculteurs soient protégés et qu'ils obtiennent un prix décent pour leurs produits. Les coûts des facteurs de production doivent être pris en considération dans l'établissement du prix du produit final.
J'espère que la Chambre continuera de se pencher sur l'ensemble du problème lié à l'agriculture et non pas sur une partie seulement, comme c'est le cas ce soir.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, j'entends partager mon temps de parole avec notre collègue de la Nouvelle-Écosse qui a un brillant discours à faire au sujet des problèmes qui affligent l'agriculture des Maritimes et notamment l'Île-du-Prince-Édouard.
Nous sommes témoins de la pire crise dans l'agriculture des Prairies depuis les années 30. Je parle plus particulièrement du secteur du grain et des graines oléagineuses. Dans les années 30, beaucoup de gens ont dû abandonner l'agriculture. De nos jours, la même chose se produit et un grand nombre d'agriculteurs se retrouvent dans la même situation.
De l'automne 1999 à l'automne 2000, quelque 22 000 agriculteurs des Prairies ont été forcés d'abandonner leurs activités, soit 6 500 dans ma province, 4 000 ou 5 000 environ au Manitoba et plus de 10 000 en Alberta. Le nombre d'agriculteurs forcés de cesser leurs activités était si élevé qu'au départ, les statisticiens à Statistique Canada ne pouvaient croire les données fournies par leurs ordinateurs. Environ 40 000 personnes qui travaillaient dans le secteur agricole ont été forcées de quitter l'agriculture également.
On n'avait pas vu de crise comme celle-là depuis les années 30 dans les Prairies. Il suffit de parcourir en voiture les petites villes de la Saskatchewan et du Manitoba pour comprendre la gravité de la crise. En Alberta, à l'extérieur d'Edmonton et Calgary, on constate la même chose. En Saskatchewan, Regina et Saskatoon s'en tirent assez bien, mais le reste de la province souffre vraiment de cette crise agricole.
Durant la campagne électorale et l'été dernier, je me suis rendu dans toutes les petites villes et tous les villages de ma circonscription. À l'exception d'une ou deux localités, toutes les villes souffrent d'une baisse de la population. Les gens déménagent et des entreprises ferment leurs portes à la suite de l'effondrement de l'économie agricole. Les villes qui s'en sortent bien, comme ma ville natale de Wynyard ou Fort Qu'Appelle, doivent leur succès à d'autres industries.
Il y a à Wynyard une usine de transformation des poulets, Lillydale, qui emploie environ 500 personnes. Les employés sont syndiqués, ils ont un salaire acceptable et d'assez bonnes conditions de travail. Malgré cela, la ville ne fait que se maintenir.
Fort Qu'Appelle est une ville qui peut compter sur une forte industrie touristique, surtout durant l'été. La population de cette ville ne fait que se maintenir. Celle de la plupart des autres villes diminue à cause de la crise agricole.
Deux choses doivent se produire, et ce rapidement. Premièrement, l'économie agricole a besoin d'une injection immédiate de fonds afin que les agriculteurs puissent faire leurs semailles ce printemps, faute de quoi des milliers d'autres d'entre eux devront abandonner la terre.
Deuxièmement, nous devons nous donner un programme agricole à long terme tenant compte des coûts de production de façon que les producteurs bénéficient de certaines garanties concernant leur future production. Nous pouvons y arriver dans le cadre et le contexte de l'Organisation du commerce international.
Il me semble étonnant que les agriculteurs canadiens ne bénéficient pas du même soutien que les agriculteurs des États-Unis. Le Canada prévoit un excédent de 100 milliards de dollars sur les cinq prochaines années. Nous pouvons nous permettre d'aider maintenant les céréaliculteurs. Washington aide les agriculteurs du Dakota du Nord, du Montana, de l'Oklahoma et de tout le Midwest. Bruxelles vient en aide aux agriculteurs européens. Que fait notre gouvernement? Il ne fait à peu près rien à l'échelon fédéral lorsqu'il s'agit de venir en aide aux producteurs de céréales et d'oléagineux du Canada.
Nous avons besoin d'un programme agricole à long terme fondé sur le coût de production afin que les agriculteurs aient dès le printemps une idée de ce qu'ils toucheront à l'automne. Ils doivent savoir qu'ils récupéreront au moins le coût de production d'une récolte tout en tirant un salaire honnête pour eux-mêmes ou leurs familles. C'est le genre de mesure qui va devoir être adoptée.
Nous devons aussi nous rendre compte que si le gouvernement ne prend pas l'initiative d'intervenir et d'adopter un programme à long terme visant à soutenir la famille agricole et son mode de vie, ces agriculteurs vont disparaître. Les fermes constituées en sociétés prendront leur place. Les petites villes auront disparu et, sous peu, ce seront la Cargill, la Dow Chemical, la Monsanto et d'autres grandes sociétés qui exploiteront tout le secteur agricole dans l'ouest du Canada. La seule institution ayant la taille voulue pour inverser cette tendance est le gouvernement du Canada, qui représente tous les Canadiens.
Nous devrions comprendre que l'agriculture constitue le secteur industriel fondamental de notre pays et que, lorsque l'agriculteur va bien, l'économie et la création d'emplois au Canada ne s'en portent que mieux pour notre bien à tous. Voilà ce que beaucoup de gens au gouvernement ne semblent pas comprendre.
Certains secteurs de l'agriculture ne vont pas si mal. Le député de Malpèque a rappelé tout à l'heure qu'à la fin des années 1960, la Chambre avait adopté des lois pour mettre en oeuvre la gestion de l'offre grâce à la création d'offices de commercialisation pour quatre produits: la Commission canadienne du lait, l'Office canadien de commercialisation des oeufs, l'Office canadien de commercialisation du poulet et l'Office canadien de commercialisation du dindon. Ces organismes de gestion de l'offre garantissent aux producteurs de ces secteurs un coût de production raisonnable pour les produits et les aliments qu'ils produisent et, partant, un niveau de vie convenable. Du côté des consommateurs, les offices de commercialisation établissent un prix stable pour les Canadiens qui achètent du lait, de la dinde, du poulet et des oeufs.
Même ces offices de commercialisation se trouvent menacés à cause de l'Organisation mondiale du commerce et surtout parce que les Américains les considèrent comme une entrave au soi-disant libre-marché. D'après la définition que les Américains donnent du libre-marché, ce qui est bon pour une énorme multinationale est bon pour le peuple américain. Je dis que c'est faux. Nous devons lutter pour maintenir nos offices de gestion de l'offre au Canada. Nous devons lutter pour que la Commission canadienne du blé reste forte. Il est très important d'avoir un organisme de commercialisation à comptoir unique, c'est-à-dire la Commission canadienne du blé.
Je n'arrête pas d'être surpris de voir l'Alliance parler d'un système de commercialisation mixte qui aurait pour effet de détruire la Commission canadienne du blé.
Ce sont des questions fort importantes, si nous voulons préserver l'agriculture au Canada. Si nous avions un système de commercialisation mixte, la Commission canadienne du blé ne survivrait pas, car elle serait en concurrence avec d'énormes céréalières multinationales et transnationales.
Voilà certains des problèmes. Ce soir, nous implorons le ministre des Finances de desserrer un peu les cordons de sa bourse et d'offrir une aide financière d'urgence aux producteurs de céréales de ce pays afin qu'ils puissent faire les semailles. Nous l'implorons d'accorder une aide financière d'urgence aux agriculteurs. On ne cesse d'entendre parler de leurs difficultés et de gens qui sont obligés d'abandonner l'agriculture.
Outre la priorité numéro un, il est extrêmement important d'adopter un programme à long terme basé sur les coûts de production afin que les agriculteurs, y compris les producteurs de céréales, les producteurs laitiers, les producteurs de poulet et de dinde, aient certaines garanties quant au prix de leurs denrées lorsqu'ils font les semailles au printemps. On devrait pouvoir leur garantir un prix décent à l'automne.
J'ignore pourquoi cela n'est pas devenu une priorité du gouvernement libéral. Nous intervenons ici jour après jour pour dire qu'il y a une crise. Il y a des libéraux qui disent jour après jour qu'il y a une crise. Mon Dieu, s'il y a une crise, qu'on fasse quelque chose. Restaurons un peu la démocratie dans cette institution. Séparons le Parlement de l'exécutif. Que le Parlement dise à l'exécutif, au gouvernement du Canada et au Cabinet qu'il y a crise, que cette crise est prioritaire et que, si c'est une priorité, il faut débloquer des fonds et régler les problèmes, non seulement pour le bien des agriculteurs, mais aussi de tous les Canadiens. Voilà ce qu'il faut faire.
Au lieu de cela, nous avons une institution qui est plutôt devenue une sorte de société où on discute, pontifie et se répand en discours. Certains discours sont bons, comme celui du député de Brandon—Souris, qui en a fait un excellent. Nous revenons sans cesse à la charge avec les mêmes discours. Pas étonnant que les Canadiens considèrent cette institution avec un certain cynisme. Pas étonnant que seulement 60 p. 100 des électeurs aient voté aux dernières élections. Malgré les belles paroles, les bonnes intentions et tous les discours, les recherches et l'argent qui sert à faire fonctionner le Parlement, tout le monde fait la sourde oreille: le ministre des Finances, le premier ministre et les mandarins du Bureau du Conseil privé et du ministère des Finances.
Il est temps que la Chambre adopte une motion disant avec insistance que le Parlement tient à avoir un programme à court terme, immédiatement, pour aider les agriculteurs, et un programme à long terme fondé sur les coûts de production pour que nos agriculteurs puissent continuer à cultiver la terre.
Mon temps de parole est terminé, et nous aurons maintenant une intervention de la plus grande éloquence de la part de mon collègue de la Nouvelle-Écosse.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, c'est à la fois avec joie et tristesse que j'interviens à la Chambre pour parler de la crise qui secoue le pays.
Comme je viens de la côte est qui traverse une crise dans le secteur de la pêche, il m'est facile de tracer des parallèles avec la crise actuelle. Mon collègue conservateur de St. John's-Est, le député de St. John's-Ouest et les cinq députés libéraux qui représentent Terre-Neuve et le Labrador pourraient très facilement confirmer que, en 1993, les pêcheurs de notre région et leurs familles ont vécu absolument la même expérience que connaissent les agriculteurs en 2001. Quelles leçons le gouvernement a-t-il tirées de tout cela? Absolument rien.
Il y a deux semaines, des agriculteurs accompagnés de leurs enfants sont venus décrire à notre caucus la crise du secteur agricole. J'ai demandé à un garçon de la Saskatchewan âgé de 12 ou 13 ans s'il allait devenir agriculteur plus tard. Il a répondu par la négative. Je lui ai ensuite demandé s'il y avait parmi ses camarades d'école certains qui allaient cultiver la terre comme son père, son grand-père et ses aïeux l'ont fait. Encore une fois, sa réponse a été négative. Ce jeune est venu à la Chambre des communes. Il était très nerveux. Il s'est adressé à des parlementaires et nous a avoué en toute franchise qu'il n'y avait pas d'avenir dans l'agriculture pour ses camarades de classe.
Je dis à tous ceux qui sont à l'écoute, au parti qui forme le gouvernement, au parti qui est l'opposition officielle et aux autres partis politiques: Pour l'amour, qui voyez-vous donc comme agriculteurs au Canada dans l'avenir? Qui va nous nourrir? Qui va nourrir nos enfants? Qui va s'occuper de nous?
Quand les Canadiens se lèvent le matin et qu'ils donnent à leurs enfants des céréales d'avoine ou de blé, d'où pensent-ils que ces aliments viennent? Ils viennent des agriculteurs. Nous sommes en train de perdre notre souveraineté alimentaire au Canada. Le jour où notre pays perdra sa souveraineté alimentaire, les Canadiens connaîtront l'infamie. Ce sera un jour très triste quand il faudra compter sur les autres pays pour nourrir notre population.
Dans l'Île-du-Prince-Édouard, la population a vraiment eu honte dernièrement. Dans une ferme constituée en société sous le nom de Cavendish Farms, on a constaté que des pommes de terre étaient atteintes d'une maladie, soit la brûlure de la pomme de terre. On les a immédiatement envoyées à l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Dès que les Américains l'ont appris, à l'Halloween, ils ont fermé le marché aux pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard, provoquant une crise dans la province où les producteurs de pommes de terre subissent une perte d'une valeur de 30 à 50 millions de dollars de fonds agricoles.
Qu'est-ce que les Américains ont eu le front de dire aux représentants canadiens? Ils ont dit que non seulement l'Île-du-Prince-Édouard n'a plus le droit de vendre des pommes de terre aux États-Unis à cause de la brûlure de la pomme de terre, mais qu'elle n'a même pas le droit d'en vendre ailleurs au Canada, de crainte que cette maladie ne se répande à d'autres champs au Canada. Peut-on imaginer cela?
Et qu'est-ce que notre ministre a trouvé à dire? Il a dit qu'ils allaient en discuter davantage. Le ministre n'a absolument pas eu le courage de défendre les producteurs de l'Île-du-Prince-Édouard et de dire aux Américains une fois pour toutes, et je le dis en toute déférence pour nos cousins américains, de ne plus nous embêter avec leurs préoccupations agricoles.
Si le Canada ne défend pas ses producteurs, qui le fera? Qui défendra les agriculteurs de l'Île-du-Prince-Édouard? Je tiens à féliciter le député de Malpeque. Cet ami personnel, même s'il siège dans les rangs ministériels, a fait un travail remarquable lorsqu'il était président du Syndicat national des cultivateurs, et aujourd'hui encore comme député libéral d'arrière-ban, pour défendre ce dossier auprès de son gouvernement. Il m'a dit à de nombreuses reprises son mécontentement face au ministère de l'Agriculture et au peu de cas qu'il fait des agriculteurs canadiens et de leurs familles.
Je trouve honteux de devoir, moi qui suis un immigrant, défendre à la Chambre des communes les intérêts des agriculteurs canadiens, comme l'ont fait les excellents orateurs que sont les députés de Regina—Qu'Appelle et de Palliser, et avant eux mon remarquable ami, M. John Solomon, de Regina, qui a si souvent pris la parole à la Chambre pour plaider et négocier et qui a fait tout ce qu'il a pu pour sensibiliser la Chambre à la situation des agriculteurs.
Où en sommes-nous? Nous entendons les mêmes discours: «Nous ne savons pas si nous pouvons faire quelque chose, nous ne sommes pas certains, nous allons devoir téléphoner aux Américains pour savoir ce qu'ils vont faire».
Durant le peu de temps qu'il me reste, je voudrais rappeler que M. John Solomon, l'ancien député fédéral, se trouvait un jour à Bruxelles pour participer à une conférence des Nations Unies. Il y a rencontré un ministre français, avec qui il a discuté des subventions agricoles et des batailles en cours. Le ministre français a clairement expliqué à M. Solomon quelle était la position de l'Union européenne au sujet de ses agriculteurs. Il a expliqué à John qu'il se faisait des illusions s'il croyait que la France n'allait pas défendre ses agriculteurs en raison de l'attitude des États-Unis ou du Canada. Il a aussi affirmé que la France ferait tout ce qui était en son pouvoir pour veiller à ce que ses agriculteurs soient bien traités. La France veut que les agriculteurs français produisent des aliments pour nourrir le pays.
C'est presque une révélation. Il est incroyable de voir que, en France, les ministres prennent la défense des agriculteurs. Que faisons-nous au Canada? Nous jouons au boy-scout. Nous coupons, nous réduisons, finalement nous détruisons les agriculteurs. Nous les forçons à quitter la terre.
À Terre-Neuve il y a bien des années, le premier ministre Joey Smallwood a instauré le programme de réinstallation. Au moins il a eu l'honnêteté intellectuelle d'avouer aux gens qu'il allait les retirer des petits ports isolés pour les amener dans les grands centres et les industrialiser.
Le gouvernement n'a même pas le courage de dire aux agriculteurs qu'il les forcera à quitter leurs terres, alors qu'il a fait exactement la même chose dans le cas des pêcheurs de la côte est. La même crise frappe les pêcheurs de la côte ouest. Ce n'est pas surprenant. Il n'y a rien de secret dans tout cela. Je crois sincèrement que le gouvernement a l'intention de faire disparaître les petites fermes familiales indépendantes et de confier l'agriculture aux grandes sociétés transnationales et aux méga-fermes. C'est ce que le gouvernement souhaite pour l'avenir. C'est tout à fait incroyable.
Sur la côte est, nous avons perdu les pêcheurs indépendants. Nous avons vu les phares disparaître. Au Canada central, ils perdent leurs silos-élévateurs et leurs fermes familiales. Comment le parti ministériel peut-il se targuer d'être un parti national qui s'occupe de tous les citoyens alors qu'il refuse de veiller sur ceux qui nous nourrissent jour après jour?
Je vous le demande, monsieur le Président, ainsi qu'à tous ceux qui écoutent, lorsque vous prenez votre petit-déjeuner le matin, dites une petite prière pour nos agriculteurs et pour les femmes et les enfants qui vivent dans les exploitations agricoles. Ce sont eux qui nous apportent de la nourriture. Ce sont eux qui prennent soin de nous. Si nous ne pouvons pas prendre soin d'eux, nous ne méritons pas de faire partie du gouvernement. Nous ne méritons même pas d'être à la Chambre des communes.
En fait, je pense qu'il serait excellent que la Chambre et le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire sortent de leurs tours d'ivoire. Tout le monde devrait monter sur une moissonneuse-batteuse, enfiler un jeans et un sweat-shirt et se rendre dans une ferme familiale. Nous devrions nous lever à 4 heures du matin pour voir ce que c'est que de planter les graines pour prendre soin de nos agriculteurs et pour produire nos aliments. Nous devons voir d'où viennent ces aliments.
On nous a amenés à penser que nous pouvons tout simplement nous lever le matin, ouvrir le frigo et l'armoire et trouver de la nourriture en abondance. Si nous en manquons, nous n'avons qu'à aller à l'épicerie. Cette nourriture vient directement des exploitations agricoles, de gens qui gagnent un salaire minimum et de gens qui adorent leur travail. Ils se sentent totalement déconnectés de ce qui se passe au sein du gouvernement. Le gouvernement est totalement déconnecté de leur réalité.
Je demande à tous les députés, particulièrement à mes collègues du Parti libéral, pour qui j'ai beaucoup de respect, d'avoir l'obligeance d'agir immédiatement pour aider les agriculteurs. Adoptons les programmes à long terme pour nos agriculteurs, afin que l'agriculture puisse être pratiquée dans notre pays pendant de nombreuses années à venir.
[Français]
M. Jacques Saada (Brossard—La Prairie, Lib.): Monsieur le Président, si vous le demandez, je crois que vous obtiendrez le consentement unanime pour la motion suivante:
Que d'ici la fin du débat, aucune motion dilatoire, telle que l'appel de quorum, ni aucune motion de prolongation de débat en vertu de l'article 26(1) ne soit présentée.
[Traduction]
M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Avant que nous donnions notre consentement à cette demande, j'aimerais signaler qu'elle a été présentée, non pas sur le parquet de la Chambre mais lors d'une réunion précédente, et qu'elle avait été rejetée. J'espère que le fait de l'accepter maintenant ne créera pas de précédent et que cela ne donnera pas au gouvernement l'impression que nous voudrions que ce type d'intervention se fasse plus tôt lors d'un débat d'urgence.
Les députés d'en face ne sont peut-être pas d'accord, mais j'essaie de faire valoir un point.
Lorsqu'il y a un débat d'urgence, il y a fort à parier que les députés de l'opposition ou d'autres qui ont demandé la tenue du débat aimeraient avoir l'occasion de convaincre les députés ministériels qu'il y a bien urgence. Pour cela, il doit y avoir des députés ministériels à qui s'adresser, de l'autre côté. Voilà l'une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas accepté la motion présentée en mode pilote automatique plus tôt, autrement nous aurions parlé dans une Chambre vide toute la nuit.
Au moment où ce débat s'achève, nous donnons notre accord, sans pour autant nous engager à faire de même dans d'autres circonstances.
Le vice-président: Permettez-moi de procéder en deux étapes, selon la coutume. Consent-on à ce que le whip adjoint du gouvernement présente sa motion?
Des voix: D'accord.
Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Est-ce que la Chambre donne son consentement à la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au présent débat d'urgence, mais je trouve malheureux que ce débat doive seulement avoir lieu.
Il faut changer la mentalité de certains hauts fonctionnaires fédéraux qui considèrent l'agriculture comme un secteur démodé de notre économie et qui laissent entendre que la solution à tous nos problèmes réside peut-être dans une meilleure gestion de nos exploitations agricoles. Croyez-moi, ce n'est pas la gestion de nos exploitations agricoles qui pose un problème.
On demande à nos agriculteurs d'affronter les marchés d'exportation très concurrentiels en dépit des subventions dont bénéficient les producteurs des États-Unis et de l'Union européenne. Les règles du jeu doivent être équitables pour que les agriculteurs continuent de produire. Voici, par exemple, la déclaration de revenu d'un agriculteur de la région, au 31 décembre 2000. Cet agriculteur possède et loue environ 600 acres. L'engrais azoté lui a coûté 250 $ la tonne en 2000, soit 67 p. 100 de plus qu'en 1999. Au 31 janvier 2001, l'engrais azoté coûtait 350 $ la tonne, ce qui représente une hausse de 40 p. 100 en un seul mois. Le coût de son carburant diesel a augmenté de 42 p. 100 en un an. Son revenu a été légèrement inférieur à 186 000 $ et ses dépenses, légèrement supérieures à 242 000 $. Il accuse donc un déficit de 55 300 $.
Je dois signaler que je vais partager le temps mis à ma disposition avec le ministre des Ressources naturelles.
Combien de temps encore cet agriculteur tiendra-t-il le coup? Ses difficultés financières ne tiennent absolument pas à de mauvaises pratiques agricoles, mais à des facteurs sur lesquels il n'a aucune prise, tels un coût de production élevé et le bas prix des produits.
J'espère que les décideurs sont à l'écoute, car ce qui se passe dans nos exploitations agricoles ne découle pas d'une mauvaise gestion ni d'idées désuètes. Nous avons survécu jusqu'à maintenant en grande partie en pratiquant une saine gestion et en relevant les défis d'un monde en mutation constante. Pour avoir fait de l'agriculture avant de faire de la politique, je connais bien les tribulations des agriculteurs. Nous n'avons pas de prise sur les conditions météorologiques, pas plus que nous n'en avons sur le soutien financier que le Congrès américain ou la France accorde à son secteur agricole.
Le gouvernement dont je fais partie s'emploie à régler de nombreux problèmes à l'échelle internationale, dont celui des subventions. Ce sont là des questions importantes et capitales pour la survie à long terme de nos exploitations agricoles hautement diversifiées.
Des agriculteurs et des représentants de leurs organisations me font part de leurs préoccupations tous les jours. Les Canadiens des régions rurales sont indépendants et autonomes. L'objectif premier des agriculteurs n'est pas d'organiser des manifestations, de bloquer la circulation et de faire campagne pour souligner la Journée d'affranchissement de la note d'épicerie. Cependant, leur sentiment de frustration s'est accru rapidement.
L'été dernier, la Fédération de l'agriculture de l'Ontario a organisé plusieurs rencontres afin que les agriculteurs puissent discuter de leur situation avec leurs élus provinciaux et fédéraux. Une des plus importantes rencontres a eu lieu dans ma circonscription, où vivent de nombreux chefs de file du milieu agricole de l'Ontario, notamment des producteurs de maïs, des producteurs de soya, des producteurs d'asperges, des producteurs de blé et ainsi de suite.
Nous savons que, selon les multiplicateurs d'emplois et de dépenses, pour chaque emploi qui existe dans le secteur agricole, il y a 1,28 emploi créé à l'extérieur du milieu agricole, et que pour chaque dollar dépensé pour acheter des denrées agricoles, il y a 1,57 $ qui est dépensé dans des entreprises connexes liées au secteur agricole.
Lorsque les agriculteurs sont en difficulté financière, tous les secteurs de l'économie s'en ressentent, notamment dans nos localités rurales. L'agriculture est une vaste entreprise. C'est une science de la vie originale. Ce secteur évolue et s'adapte constamment pour pouvoir atteindre ses objectifs et relever les nouveaux défis définis par les milieux scientifiques, commerciaux et sociétaux. La production alimentaire est devenue plus efficace. Les agriculteurs ont diversifié davantage leurs cultures, et l'agriculture a des répercussions plus grandes sur l'environnement, surtout ces dernières années.
Pour que les critères de qualité élevés du Canada en matière de production agricole continuent d'être respectés, il faut investir dans l'industrie. Le renforcement de l'industrie agricole et agroalimentaire profitera à tous les Canadiens en fournissant des aliments sûrs et abordables, en créant plus d'emplois et de nouveaux usages pour les produits non alimentaires et en améliorant l'environnement. Nous devons garantir les conditions du succès en améliorant le soutien du revenu agricole, en allégeant le fardeau fiscal des agriculteurs, en améliorant la R et D et en investissant dans le développement durable.
Une vision pour l'avenir de l'agriculture a été conçue, mais la voie à suivre reste à tracer. Des progrès ont été faits, mais d'aucuns les oublient souvent en critiquant et en condamnant les mesures prises par le gouvernement. Je félicite le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire de travailler avec les provinces sur la nouvelle entente de 5,5 milliards de dollars relative au filet de sécurité nationale, qui s'échelonnera sur trois ans. Cette entente fait partie de notre augmentation de 85 p. 100 du soutien agricole depuis 1995, pendant que le gouvernement de l'Ontario, par exemple, continue de dépenser moins.
Nouveau programme de filet de sécurité est l'aboutissement de nombreux mois d'intenses discussions. Cela n'a pas été facile. Les provinces des Prairies estimaient devoir être traitées différemment de l'Ontario, pendant que le gouvernement de l'Ontario exerçait des pressions pour obtenir sa juste part des dollars consentis au filet de sécurité national. L'Ontario a reçu un montant supplémentaire de 35 millions de dollars par année par suite de ces heureux changements.
Je crois que nous disposons maintenant des programmes qu'il faut, mais nous devons dégager d'autres fonds. Il importe de souligner que les provinces ont également un rôle à jouer. Celles-ci ont tendance à dénoncer rapidement toute initiative fédérale, mais, comme dans le cas de l'Ontario, elles font preuve de moins de rapidité quand vient le temps de fournir de l'aide.
Le but des filets de sécurité est de servir de solide fondement à un complément de programmes visant à régler une variété de problèmes relatifs au revenu agricole résultant de facteurs comme la fluctuation des prix, le mauvais temps et les subventions étrangères. Cependant, nous devons maintenant songer à faire davantage. Les prix des matières premières sont à un niveau historiquement bas et, pour certains produits, les prix resteront faibles tant à court qu'à long terme. Les subventions étrangères ne diminuent pas. Le coût des intrants agricoles, y compris le carburant et les engrais, ne diminue pas. Ensemble, ces deux intrants représentent environ 3,8 milliards de dollars, ou 13 p. 100 du coût total des intrants.
Nous avons amélioré le CSRN en permettant aux participants d'avoir accès plus facilement à leur compte. Le taux de contribution du gouvernement fédéral est deux fois plus élevé que celui des gouvernements provinciaux. Nous avons renouvelé l'assurance-récolte et nous avons également reconduit et amélioré le programme d'assurance-revenu du marché, dont les paiements devraient dépasser les 200 millions de dollars pour 2000.
Les agriculteurs ont souvent besoin de crédit pour les aider au moment des semailles. C'est pourquoi, en avril 2000, nous avons lancé un programme de crédit printanier d'une valeur de 52 millions de dollars pour 3 000 agriculteurs de l'Ontario.
Nous savons aussi que les agriculteurs ont des factures à payer à l'automne, souvent avant que ce soit le temps de mettre en marché leurs récoltes, et c'est pourquoi nous continuons d'offrir des avances de fonds à l'automne au moyen du programme de paiements anticipés, dans le cadre duquel le gouvernement fédéral paie l'intérêt sur la première tranche de 50 000 $ d'une avance versée à un producteur. Environ 4 000 agriculteurs de l'Ontario ont participé à ce programme au cours des trois dernières années et ont économisé plus de 6 millions de dollars en intérêt.
Les groupes agricoles nationaux et provinciaux disent que le fait d'injecter 300 millions de dollars de plus dans les programmes de protection du revenu agricole pour réagir à la crise qui touche particulièrement le secteur des céréales et des oléagineux, 60 p. 100 venant du fédéral et 40 p. 100 des provinces, contribuerait à rendre les règles du jeu plus équitables.
Nous devons nous assurer que les denrées alimentaires canadiennes continuent d'être produites à un prix raisonnable et que nos producteurs primaires ont un rendement équitable sur leur production. Notre pays a un secteur agricole fort et viable. Travaillons tous ensemble pour voir à ce que l'agriculture demeure un succès au Canada. Nous pouvons et nous devons faire plus.
M. John Maloney (secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le cadre du débat d'urgence sur notre secteur agricole.
Je profiterai de l'occasion pour parler de la sécurité alimentaire, une question qui est très importante pour le secteur agricole et tous les Canadiens. Les médias s'intéressent à la sécurité alimentaire depuis quelque temps à la suite de la décision du Canada de suspendre les importations de produits alimentaires du Brésil.
Je voudrais rappeler à la Chambre que nos denrées sont parmi les plus sûres du monde et, dans le cadre de ce débat, je voudrais expliquer à la Chambre comment les questions actuelles touchant les produits alimentaires brésiliens se sont posées à la suite de nos mesures vigoureuses pour faire passer au premier plan la santé et la sécurité des Canadiens.
Nous avons un système de lois, de règlements, d'inspections et de procédures d'approbation des produits qui protègent la santé des Canadiens et assurent l'innocuité de nos aliments. Le système est basé sur des vérifications qui permettent d'assurer que toutes les parties assument leurs responsabilités. Les produits importés sont assujettis aux mêmes normes rigoureuses de production et d'inspection que nous utilisons pour nos propres produits alimentaires. Les Canadiens s'attendent à rien de moins.
Récemment, les systèmes d'inspection des denrées au Canada et dans d'autres pays ont dû faire face à une nouvelle situation inquiétante, soit la menace croissante des EST ou encéphalopathies spongiformes transmissibles. Les EST sont des maladies mortelles qui touchent le système nerveux central des animaux ou des humains. Cela comprend des maladies comme la tremblante du mouton. Chez l'élan d'Amérique et le chevreuil, elles prennent la forme de l'encéphalopathie des cervidés.
Depuis quelques années, on s'inquiète de plus en plus de la forme que les EST prennent chez les bovins, soit l'encéphalopathie spongiforme bovine, ou ESB, aussi connue sous le nom de maladie de la vache folle. Les chercheurs croient que l'ingestion de boeuf infecté par l'ESB peut avoir un lien avec la maladie de Creutzfeldt-Jakob, la forme que l'EST prend chez les humains.
Le Canada a pris plusieurs mesures pour empêcher l'entrée au Canada de l'ESB ou la propagation des EST. Jusqu'à maintenant, ces mesures se sont révélées efficaces. Nous n'avons aucune raison de croire que l'ESB est présente au Canada. On ne peut cependant pas parler de risque nul et nous ne pouvons garantir qu'un cas d'ESB ne sera jamais décelé au Canada.
Dans le cadre du débat aujourd'hui sur tout ce qui se passe dans le secteur de l'agriculture, je peux garantir à la Chambre que le gouvernement considère comme très important d'empêcher que l'ESB ne fasse son apparition au Canada. Pour se protéger, l'Agence canadienne d'inspection des aliments applique la politique du ministère de la Santé de tenir à l'écart de la chaîne alimentaire les animaux diagnostiqués porteurs de l'encéphalopathie spongiforme transmissible ou soupçonnés d'avoir été contaminés.
Les vétérinaires canadiens et les éleveurs ont été informés des signes de la maladie de la vache folle. Ils doivent signaler les cas suspects à un vétérinaire fédéral. Les animaux adultes manifestant des symptômes de l'encéphalopathie bovine spongiforme sont détruits et soumis à une autopsie en laboratoire. Le Canada procède à de nombreux examens de dépistage de l'EBS chaque année et a examiné plus de 4 800 têtes de bétail en tout depuis le lancement du programme de surveillance médicale de l'EBS. Des opérations de dépistage de cette envergure vont au-delà des recommandations formulées par les instances internationales.
Je rappelle toutefois que les Canadiens ont le droit d'exiger que les aliments importés au Canada respectent les normes de qualité appliquées aux produits locaux. Nous avons donc pour politique de ne pas importer de la viande de ruminants ou d'autres produits carnés en provenance de pays où l'EBS a été diagnostiquée.
Nous avons également en place un programme de contrôle des importations pour d'autres produits et sous-produits animaux en provenance de pays dont le cheptel est réputé avoir été contaminé par l'EBS. En fait, depuis le 7 décembre, nous avons suspendu les importations de produits d'équarrissage de toutes les espèces animales en provenance de ces pays. Il s'agit notamment du Royaume-Uni, de l'Allemagne, de la France, du Portugal, du Danemark, de l'Espagne et de l'Italie.
Cependant, certains signes inquiétants donnent à croire que l'EBS se serait répandue au-delà de ces pays où le problème a vu le jour. Voilà pourquoi le Canada a mis en place une politique à la fois équitable et raisonnable pour obliger nos partenaires commerciaux à nous fournir les informations devant nous permettre d'évaluer la situation. En mai 1998, nous avons informé nos partenaires commerciaux de notre nouvelle politique. Nous leur avons envoyé un questionnaire d'évaluation de la situation de l'EBS sur leur territoire.
Tous nos partenaires commerciaux ont répondu, à l'exception d'un pays, le Brésil. L'Argentine, l'Uruguay, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis ont tous fourni les informations nécessaires à l'Agence canadienne d'inspection des aliments pour procéder à une évaluation efficace. Le Brésil ne l'a pas fait. Tous ces pays ont été reconnus comme n'étant pas touchés par la maladie de la vache folle conformément aux critères établis. Le Brésil ne l'a pas été. En outre, d'autres informations ont fait surface selon lesquelles le Brésil pourrait avoir importé du bétail atteint de la maladie de la vache folle en provenance de pays de l'Union européenne.
Dans l'intérêt des Canadiens, de leur santé et de leur sécurité, nous ne pouvons pas permettre sans rien faire que des produits alimentaires dont on ne peut pas prouver qu'ils ne sont pas contaminés par la maladie de la vache folle entrent au Canada. C'est pourquoi, au début du mois, le Canada a suspendu les importations de corned-beef en conserve et d'extrait de boeuf liquide en provenance du Brésil. Nous avons retiré tous ces produits du marché.
Tant que le Brésil n'aura pas prouvé qu'il satisfait aux critères établis pour déterminer que ses produits à base de boeuf sont sans danger, nous ne pouvons laisser ces produits entrer au Canada. C'est une question de santé. Confondre cette question avec d'autres différends qui opposent le Brésil et le Canada, c'est demander au gouvernement de fermer les yeux. Ce qui passe avant tout, c'est la santé et la sécurité de tous les Canadiens.
Le Canada a pris aujourd'hui une mesure supplémentaire pour aider à régler ce problème.
L'Agence canadienne d'inspection des aliments a annoncé qu'une équipe d'inspection se rendrait au Brésil dans le cadre d'un processus permanent afin d'évaluer pleinement la réglementation brésilienne en ce qui concerne la maladie de la vache folle. Des fonctionnaires des États-Unis et du Mexique, qui travaillent avec le Canada à l'examen de la documentation fournie par le Brésil sur la situation en ce qui concerne l'ESB, se joindront à l'équipe.
Nous évaluerons ensemble trois facteurs de risque précis: les pratiques du Brésil en matière d'alimentation et de récupération animale, ses pratiques en matière d'importation et ses procédures en matière de surveillance et d'analyse de laboratoire. Nous avons besoin de renseignements supplémentaires sur ces facteurs avant d'être sûrs que le système réglementaire brésilien ne laisse pas entrer l'EBS sur son territoire. Une fois que nous disposerons de toute l'information, elle sera revue et vérifiée.
L'Agence canadienne d'inspection des aliments fait tout ce qu'elle peut pour accélérer le processus et effectuer l'évaluation aussi rapidement que possible. Si le Brésil répond aux exigences du Canada pour qu'il soit déclaré exempt d'EBS, la suspension temporaire des importations sera levée.
Les Canadiens peuvent être fiers des normes strictes imposées par son système de contrôle de la sécurité et de la salubrité des aliments. Nous avons l'un des meilleurs systèmes au monde, mais cela ne veut pas dire que nous allons nous reposer sur nos lauriers.
Nous allons continuer à être vigilants, à apprendre, à réévaluer et à réagir en fonction de l'évolution de la science et de l'expérience. Nous imposons des normes rigoureuses aux aliments produits dans notre pays. Nous imposons les mêmes normes aux aliments qui viennent de l'étranger. Dans le cadre du débat d'aujourd'hui sur la situation de l'agriculture au Canada, la force de notre système de contrôle de la salubrité des aliments mérite l'appui de la Chambre.
Dans le peu de temps qu'il me reste, permettez-moi de parler de la crise qui sévit actuellement dans le secteur des céréales et des oléagineux. Un ensemble de facteurs a mis nos producteurs agricoles à l'épreuve. Les subventions accordées par nos concurrents, surtout les États-Unis, des surplus de céréales à l'échelle mondiale et l'instabilité politique et financière de l'Asie, de l'Amérique latine et de l'Europe de l'Est ont fait tomber la demande pour nos denrées, et les prix sont à leur plus bas niveau en 20 ans.
Dans ma circonscription, Erie—Lincoln, le temps imprévisible du printemps et de l'été dernier a fait beaucoup de tort aux agriculteurs. De nombreux champs étaient trop détrempés pour qu'on puisse les ensemencer, malgré les travaux de préparation du sol qui avaient eu lieu et les importants coûts encourus. Le diesel et les engrais azotés ont augmenté de plus de 20 p. 100 au cours de l'année 2000.
Pour ceux qui avaient réussi à faire les semailles, la situation n'a fait qu'empirer. Le temps froid et humide a persisté et la croissance des plantes a été soit arrêtée soit non existante. À la fin du mois de juin, au lieu de champs qui auraient dû être verts et luxuriants, on voyait de vastes étendues de boue séchée, dure comme du béton, parsemées de flaques d'eau. Dans ma région, la campagne agricole de 2000 a été un échec total. Le rendement était médiocre, voire nul.
De ce fait, certains agriculteurs de ma région se trouvent dans une situation financière catastrophique. Je me souviens d'un jeune agriculteur qui a pris le microphone à une réunion de la Fédération de l'agriculture de l'Ontario. Il a dit que, pendant 10 ans, il avait économisé 10 000 $ par an afin d'accumuler un capital suffisant pour acheter une ferme et se lancer dans un métier qu'il adorait. Il a tout perdu en une saison. C'était suffisant pour le faire pleurer. En fait, c'est exactement ce qu'il a fait devant eux.
Ce soir, nous avons entendu parler des nombreux régimes de sécurité du revenu actuels. L'été dernier, les ministres fédéral et provinciaux de l'Agriculture ont conclu un accord de trois ans en matière de régimes de sécurité du revenu. Le programme canadien de protection du revenu agricole fournira jusqu'à 5,5 milliards de dollars pour la durée de l'accord, dont 3,3 milliards de dollars proviendront du gouvernement fédéral et 2,2 milliards de dollars des gouvernements provinciaux.
Les groupes d'agriculteurs demandent depuis longtemps que les régimes de sécurité du revenu prévoient une aide en cas de catastrophe. Le gouvernement libéral a acquiescé à leur demande en consacrant 1,2 milliard de dollars au secours en cas de catastrophe pour la durée de l'accord.
Pour la première fois, les producteurs agricoles disposent d'un régime de sécurité du revenu qui comprend des programmes comme le CSRN, une assurance-récolte et des programmes connexes ainsi qu'une aide en cas de catastrophe.
Le programme d'avance de crédit du printemps mérite aussi d'être mentionné. En vertu du programme de 2000, 356 millions de dollars en avances ont été versés à 31 000 producteurs. Une évaluation du programme de 2000 révèle que le programme a été bien accueilli par les producteurs, car il donnait accès à du crédit à peu de frais. Le programme sera offert à nouveau pour la campagne agricole de 2001.
Pour l'année en cours, le programme de paiement anticipé a versé plus de 925 millions de dollars en avances aux producteurs afin qu'ils disposent de liquidités jusqu'à ce qu'ils aient vendu leur récolte de 2000. Les producteurs peuvent présenter une demande pour obtenir une avance jusqu'au 31 mai de cette année.
Nous ne pouvons laisser dépérir nos producteurs de céréales. La souveraineté de notre approvisionnement alimentaire est trop importante.
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis extrêmement fière de participer à ce débat d'urgence sur l'agriculture. J'en suis fière parce que je suis associée dans une exploitation agricole. Je suis née et j'ai grandi dans une exploitation agricole. J'ai passé mes 36 années de femme mariée à pratiquer l'agriculture. Je sais d'expérience à quel point l'agriculture a changé au cours des 50 dernières années et je connais les défis que doivent relever les agriculteurs d'aujourd'hui.
Je pourrais parler pendant des heures des subventions accordées à l'agriculture, de l'échec du programme ACRA, des coûts de transport et du monopole de la Commission canadienne du blé. Je pourrais parler de la décimation de nos localités rurales, des jeunes familles qui vont s'installer dans les centres urbains, du fait que notre petite ville a du mal à garder son école ouverte, et encore moins à former une équipe de hockey mineur, mais j'ai pensé que ce débat constituerait une occasion pour laisser les agriculteurs parler avec leur propres mots.
L'année dernière, avant d'entrer en politique et pendant la crise du revenu agricole, j'ai agi personnellement. J'étais très découragée par les paroles et les actions du ministre de l'Agriculture et du gouvernement fédéral à l'égard des familles d'agriculteurs qui connaissaient des difficultés. J'ai pensé que, si je pouvais donner un visage au problème, on remarquerait peut-être l'importance de l'enjeu.
Par l'entremise des médias, j'ai demandé aux femmes et aux enfants qui vivaient dans des exploitations agricoles en Saskatchewan, au Manitoba et en Alberta de rédiger des lettres sur leurs difficultés et de me les faire parvenir. Je me suis engagée à tenter, d'une façon ou d'une autre, d'attirer l'attention du ministre de l'Agriculture sur ces gens au moyen de ces lettres.
Le ministre de l'Agriculture n'est pas présent ce soir, mais le hansard consignera leurs propos, que je vais vous transmettre. J'ai reçu des lettres de femmes, d'hommes et d'enfants qui vivent dans des exploitations agricoles. Ce sont des lettres remarquables qui parlent de travail pénible, de sacrifice, de douleur, de sentiment d'être oublié par le pays et par le gouvernement.
Certaines de ces lettres étaient poignantes, mais la plupart d'entre elles ne venaient pas des femmes et des enfants. Elles venaient des hommes.
Ce soir, je veux lire de courts extraits de quelques-unes de ces lettres. J'exhorte tous les députés à se caler dans leur fauteuil, à se fermer les yeux et à écouter. J'aimerais d'ailleurs qu'il y ait davantage de députés présents. je voudrais que les députés écoutent bien les mots que je vais lire. Ce ne sont pas des mots de politiciens. Ce sont des mots qui ont été écrits par des agriculteurs, par leurs femmes et par leurs enfants.
Voici la première lettre:
Je suis l'épouse d'un agriculteur. Nous avons quatre fils âgés de 4 à 15 ans. Je travaille à temps plein. En raison des faibles coûts du grain et de l'humidité excessive, mon mari a dû trouver un emploi permanent à la ville. Mes quatre fils sont donc restés seuls à la ferme pendant de longues heures. Je ne m'étais pas rendu compte du stress vécu par mon fils aîné avant qu'il ne s'en ouvre à moi un soir, après avoir éclaté en sanglots. Il considérait qu'il devait faire fonctionner la ferme pendant l'absence de son père. Il n'a que 15 ans. Il devrait pouvoir vivre sa vie d'adolescent.
Voici la deuxième lettre:
Tous les profits que mon père et ma mère ont réalisés ont été réinvestis dans leur ferme de 12 quarts de section. Ils n'ont jamais fait de folles dépenses pour quoi que ce soit et ne se sont jamais payé de luxes. Il ne nous ont jamais emmenés, ma soeur et moi, en vacances, parce qu'ils n'en avaient pas les moyens. J'ai toujours considéré que ma soeur et moi étions défavorisés parce que nous n'avions pas beaucoup de vêtements et que nous n'avions pas notre propre voiture dès l'âge de 16 ans. Je dois maintenant regarder impuissant tous les efforts que mon père a fait sur cette ferme pendant 37 ans être anéantis. Leur retraite est loin d'être assurée parce qu'ils ont toujours tout réinvesti dans la ferme pour pouvoir soutenir le rythme et rembourser ce qu'ils devaient. Leurs années de dur labeur et leurs larmes n'ont rien donné. Même si ma mère et mon père réussissent à vivre encore une année sur la ferme, les choses ne seront plus les mêmes. La peine ressentie face à cette perspective est inexprimable. La ferme ne passera pas aux mains d'un autre membre de la famille. Et ce n'est pas parce que je ne veux pas poursuivre sur les traces de mon père, mais seulement parce que notre ferme ne peut plus subvenir à nos besoins. Le gouvernement donne une gifle aux agriculteurs. Puis-je accuser le gouvernement de comportement abusif? Il me giflerait à mon tour et me trouverait pitoyable, mais n'en poursuivrait pas moins son objectif, faire du Canada le prochain pays du tiers monde.
Voici la troisième lettre:
Je peux difficilement expliquer à quel point la ferme agricole a affecté mon époux, moi-même et ma famille. Qui aurait jamais cru que l'année 1998 aurait eu des effets si néfastes sur notre famille? Comme d'habitude, nous avons ensemencé au printemps, malgré le manque d'humidité. Comme mon époux devait subir l'ablation de la vésicule biliaire, il a prévu subir l'intervention entre le moment des semailles et le printemps. Mon époux n'a jamais été hospitalisé auparavant. Il devenait de plus en plus stressé en attendant son opération et la croissance des cultures. Seule une femme connaît et comprend la fierté qui empêche un homme d'exprimer ses inquiétudes et ses craintes les plus intimes. C'est ce que le gouvernement ne voit pas. Il ne voit pas les agriculteurs perdre leur fierté et leur estime de soi. Il ne voit pas les épouses tenter de soutenir le moral de leur époux, pour finalement voir ce dernier se retourner contre elle. Le gouvernement ne veut pas non plus voir le désespoir dans les yeux des agriculteurs. Le début de 1999 n'a évidemment apporté aucun espoir: il a fallu obtenir des prolongations de prêts, gagner du temps, espérer une aide du programme ACRA. Mais il y a longtemps que nous n'espérons plus. L'espoir n'est même plus un sujet de conversation chez les agriculteurs. La véritable crise agricole, c'est la perte de l'espoir, le découragement sans fin, la dépression profonde et le mépris du gouvernement, qui n'a pas la moindre idée de ce que subissent les agriculteurs.
Voici la quatrième lettre:
Notre famille est frappée par la crise agricole. Nous cultivons du blé dur sur deux sections de terre dans le sud de la Saskatchewan et nous voulons élever notre famille sur la ferme. Nous n'avons pas hérité d'une ferme familiale et nous connaissons parfaitement le stress engendré par l'exploitation financière d'une ferme. Nous avons demandé l'Aide en cas de catastrophe liée au revenu agricole, mais on ne nous a pas répondu. Nous avons encaissé tous nos REER pour acquitter notre paiement de l'an dernier. Que devrions-nous faire encore? Nous ne demandons pas la charité. Nous voulons une valeur équitable pour notre produit. Il faut que le gouvernement considère que notre famille contribue pour la peine à la société canadienne. Il faut que le gouvernement comprenne que je fais tous les efforts possible pour faire vivre notre famille sur la ferme, comme nous l'avons décidé. Les temps sont durs pour nous actuellement. Les grandes banques sont indifférentes à notre sort, mais le gouvernement ne devrait pas l'être. Nous, les agriculteurs, nous parlons de survivre, pas d'acheter le camion qui vient d'arriver sur le marché, ni d'aller passer l'hiver à Hawaï, ni de construire la maison la plus moderne. De grâce, écoutez-nous. De grâce, comprenez notre situation et aidez-nous à en venir à bout.
Voici la cinquième lettre:
L'agriculture en Saskatchewan n'a jamais été une sinécure. Mes ancêtres sont venus dans ce pays peu après le tournant du siècle avec le sens de l'aventure, le besoin d'une possibilité de réalisation et un vif désir de réussir. Ils ont sans doute connu des difficultés qui ont mis leur endurance à l'épreuve. L'agriculture dans les Prairies canadiennes est caractérisée par des gens déterminés à réussir. Une chose qui n'a pas changé, c'est le sentiment de fierté des agriculteurs, et beaucoup d'entre eux préfèrent encore garder leur flegme peu importe à quel point leur situation devient difficile. Nous conservons notre fierté, mais l'animateur de cette campagne de lettres a amené certains d'entre nous à abandonner leur flegme pour raconter leur histoire. L'insolence et l'insensibilité des réponses des politiciens canadiens révèlent un manque pathétique d'appréciation pour les sacrifices que font les agriculteurs en termes de stabilité économique, de souffrances morales et de discorde familiale.
J'espère que tous les députés, de quelque affiliation politique qu'ils soient, auront vraiment entendu ces paroles. J'ai encore une autre lettre, dont voici le texte:
À qui se soucie de nous. Encore une autre journée pénible. Des larmes au déjeuner et encore au dîner et probablement au souper aussi. Je ressens constamment un poids sur la poitrine et j'ai tout le temps la nausée. Je n'ai jamais été aussi déprimé. J'ai un million de choses à faire, mis à quoi bon? Pourquoi travailler aussi dur pour pratiquement rien? Les coûts de production excèdent de beaucoup ce que vaut notre production. Les factures restent en souffrance.
Je partage mon temps de parole avec le député de la première rangée, mais je tiens à dire que le gouvernement doit tenir compte de ces paroles. Il doit reconnaître à quel point les agriculteurs canadiens ont de la difficulté. Il est temps que le gouvernement fédéral prenne des mesures pour soutenir et stabiliser une industrie qui est si vitale pour l'ensemble de notre pays.
Les paroles que j'ai lues sont mûrement réfléchies et constituent un appel à l'aide sincère. Au nom de ces familles d'agriculteurs, j'aimerais déposer ces lettres à la Chambre aujourd'hui. J'exhorte le gouvernement libéral à s'attaquer immédiatement et sérieusement à la crise agricole au Canada.
M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis très malheureux d'intervenir encore une fois à la Chambre dans le cadre d'un autre débat d'urgence sur l'agriculture. Le présent débat est le sixième ou le septième débat d'urgence lié à l'agriculture auquel je participe depuis sept ou huit ans que je siège à la Chambre.
Après tout cela, pouvons-nous honnêtement affirmer que la situation s'est améliorée? La réponse est non. En fait, la situation est pire que jamais dans le domaine de la céréaliculture. Les choses ne se sont pas améliorées.
Est-ce que les députés de ce côté de la Chambre, du côté de l'opposition, s'en fichent? Non, le problème n'est pas là.
Est-ce que les députés de ce côté de la Chambre dans les partis de l'opposition ne travaillent pas assez fort? Non, le problème n'est pas là.
Est-ce que nous ne faisons pas assez d'efforts de notre côté de la Chambre? Non, le problème n'est pas là.
Nous venons d'entendre une collègue et, d'après ce qu'elle a dit, on voit bien qu'elle se préoccupe de la situation, qu'elle a fait des efforts et qu'elle continue de travailler avec acharnement. Les députés de l'opposition ont fait leur travail et continueront de le faire.
Le problème vient-il du fait que les députés ministériels ne s'intéressent pas à la question? Non, je ne crois pas du tout qu'ils se fichent de la situation. Il n'y a pas un seul député à la Chambre qui n'est pas préoccupé par la situation actuelle des agriculteurs.
Est-ce que les députés du côté ministériel ne travaillent pas suffisamment? Non, là n'est pas le problème. Je sais que les députés du côté ministériel travaillent très fort et je l'apprécie.
Le problème vient-il du fait qu'ils n'essaient pas assez? Non, ce n'est pas le cas. Les députés du côté ministériel travaillent fort, ils sont préoccupés par la situation et ils font tous les efforts possibles.
Quel est donc le problème? Le problème, c'est que, malgré toute notre sollicitude, malgré tout notre dur labeur, malgré tous nos efforts, le résultat est nul, parce que le gouvernement est dirigé par un seul homme, le premier ministre. Tout doit se faire selon les diktats du premier ministre. Et il n'a pas jugé bon de faire quelque chose pour l'agriculture.
Le député de Malpeque a parlé des problèmes qui se posent au ministère et dit que les fonctionnaires ne faisaient pas leur travail. J'ai des nouvelles pour lui. Il appartient au gouvernement de faire en sorte que les fonctionnaires fassent leur boulot dans les ministères. Les fonctionnaires sont au service de l'État. Le problème, c'est que le premier ministre dirige tout et ne comprend pas ce qui se passe dans le secteur agricole.
Il est temps que les députés ministériels prennent position. Il ne suffit pas d'essayer très fort, il ne suffit pas de compatir. Il faut prendre position. Voici le problème sur lequel il faut prendre position. Comme d'autres députés l'ont dit, des agriculteurs vont perdre leur exploitation cette année. Des milliers ont perdu la leur ces dernières années.
Je me suis adonné à l'agriculture pendant 25 ans. J'ai toujours mon exploitation, mais je la loue contre une partie de la récolte. Je compte toujours sur les ventes de céréales pour rembourser mon prêt hypothécaire. J'ai travaillé comme économiste de l'agriculture au ministère albertain de l'Agriculture pendant des années tout en cultivant la terre. C'était une façon de maintenir l'exploitation, et j'aimais travailler avec les agriculteurs.
C'est à cette époque, à la fin des années 80, que j'ai dû m'asseoir à la table de cuisine avec bien des agriculteurs qui étaient sur le point de perdre leur exploitation. La femme et les enfants étaient en larmes parce qu'ils savaient qu'ils allaient la perdre. Souvent, en pareil cas, le mari avait le regard vide, parce qu'il savait qu'il allait perdre la ferme qui était dans la famille depuis trois générations ou plus encore. J'ai dû vivre cette expérience, et j'ai espéré, j'ai prié pour ne jamais plus connaître semblable situation.
Je suis entré en politique pour tenter de changer les choses et faire ma part pour veiller à ce que cela ne se reproduise plus. J'ai proposé des solutions au gouvernement à maintes reprises. Ces suggestions me venaient d'agriculteurs d'un bout à l'autre du pays, notamment de ma circonscription, en Alberta. Ceux-ci s'adressaient à moi en raison de mes antécédents comme agriculteur et économiste agricole. Ces suggestions sont restées lettre morte. Mes collègues ont fait de même.
Il est temps que les députés ministériels prennent position là-dessus. C'est une question importante. Les épreuves que subissent de nouveau les familles d'agriculteurs n'auraient jamais dû survenir. Nous ne pouvons pas revenir en arrière, mais il est temps que les députés ministériels disent au premier ministre et au Cabinet qu'ils ne le supporteront plus.
Ils devraient dorénavant avoir leur mot à dire sur ce que fait le gouvernement et ils devraient commencer par l'agriculture. Le temps est venu pour cela. Je prie pour que les députés d'en face prennent enfin position. Tel est mon espoir et telle est ma prière. Je le dis non seulement en mon nom personnel et au nom de mes collègues et des députés des autres partis de l'opposition, mais encore au nom des agriculteurs de ma circonscription et de ceux à qui j'ai parlé d'un bout à l'autre de l'Alberta, de ceux qui m'ont appelé et que j'ai écoutés d'un océan à l'autre.
Huit ans, c'est déjà assez long. Un bon nombre des ministériels siègent ici depuis huit ans. Ils ont participé aux six, sept ou huit derniers débats spéciaux. Ils savent en leur âme et conscience que la situation ne s'améliore pas. Je crois qu'ils savent en leur for intérieur que le gouvernement peut prendre bien des mesures pour améliorer les choses. Ils savent qu'ils peuvent mettre en application certaines des recommandations formulées non seulement par les députés de l'opposition, mais également par certains de leurs propres députés.
Le temps est venu d'agir. Huit ans, c'est assez long. J'encourage et j'invite les ministériels à agir, à ne pas laisser la question s'éteindre avec la fin de ce débat spécial, à aborder la question à la réunion de leur caucus demain et à faire savoir au premier ministre qu'il est temps d'agir. Au nom des agriculteurs qui vont souffrir encore davantage, au nom de ceux qui pourraient éviter de perdre leur ferme, au nom des agriculteurs qui veulent cultiver la terre pendant encore bien des années, j'exhorte tous les ministériels à prendre position.
Je ne peux faire plus. J'ai proposé des solutions qui me semblaient intéressantes et très utiles au cours des huit dernières années et même bien avant que je ne siège à la Chambre des communes. On n'y a pas donné suite. Il n'y a plus que les ministériels pour intervenir dans ce dossier. Ce sont les seuls qui peuvent faire quelque chose désormais. C'est à eux qu'il incombe d'apporter les changements qui assureront la survie des agriculteurs. À eux d'agir. Ce sont les seuls qui peuvent le faire. En terminant, je les supplie de passer à l'action.
Le vice-président: Avant de donner la parole au député de South Shore, je voudrais présenter mes excuses à la Chambre. Il semble que je n'ai pas observé strictement les tours de parole. Je vais maintenant donner la parole au député de South Shore.
M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends ce soir la parole au sujet de l'agriculture. À l'instar du député de Peace River, je dois dire que je le fais aussi à regret.
Le présent débat d'urgence sur l'agriculture est le deuxième auquel je participe. J'espère que ce sera le dernier, mais le gouvernement ne propose rien, ne promet rien. Le gouvernement en est presque rendu au point de considérer l'agriculture comme un secteur où qui ne risque rien n'a rien, comme un secteur où le statu quo suffit comme toujours, comme un secteur où il n'a rien à faire et qu'il peut oublier.
Cela ne suffit tout simplement pas. Il est à espérer qu'après le débat de ce soir auquel tous les députés auront eu la chance de participer, nous pourrons réexaminer ce qui aura été dit ce soir. Certes, le ministre et son ministère jetteront un autre coup d'oeil sur le secteur agricole et sauront trouver une solution positive à la crise qui ne cesse de secouer un secteur primaire auquel nous sommes nombreux à avoir participé et à vouloir participer à nouveau.
Mon collègue me rappelle de vous dire que je partage avec lui mon temps de parole ce soir. Je sais que je dispose de dix minutes seulement. Je me demande où il faut commencer au juste lorsqu'on dispose de seulement dix minutes pour parler d'une question aussi vaste que l'actuelle crise agricole.
Je voudrais notamment parler de choses dont il n'a pas été question ici ce soir. Non seulement il y a à l'heure actuelle une crise agricole dans l'Est, dans l'Ouest et dans les Prairies, mais une autre crise se prépare.
Le député de Malpeque suit attentivement le débat, comme il se doit, parce que nous sommes aux prises avec une crise qui subsiste dans l'inspection des usines et dans celle des aliments. Nous sommes aux prises avec une crise persistante par rapport aux systèmes d'approvisionnement en eau pour nos récoltes et notre bétail, mais aussi aux systèmes d'approvisionnement en eau de notre population.
Un débat gigantesque s'ouvre sur la sécurité alimentaire dans notre pays, et le gouvernement n'a même pas commencé à l'aborder.
Une voix: Il n'a pas de plan à long terme.
M. Gerald Keddy: Comme le dit le député, le gouvernement n'a malheureusement aucun plan à long terme et, plus grave encore, aucun plan à court terme.
Il y a quelque chose qui est en jeu en l'occurrence. Nous pourrions donner quelques exemples à ce sujet. Plus tôt ce soir, quelqu'un a dit que la production de pommes de terre à l'Île-du-Prince-Édouard a été complètement arrêtée. Il existe à l'Île-du-Prince-Édouard un programme provincial de rachat et de compostage des pommes de terre. Nous ne recevons aucune aide du gouvernement fédéral. Une aide a été promise, mais pas un cent n'a encore été mis sur la table. Tout ce qu'on peut trouver actuellement sur la table d'une ferme de l'Île-du-Prince-Édouard, ce sont, avec un peu de chance, une théière et une paire de coudes. Les agriculteurs sont accoudés là et ils s'interrogent si leur avenir sera dans le secteur de la pomme de terre ou dans quelque autre secteur.
Nous avons un problème persistant. Il n'a rien de compliqué. Nous ne pouvons pas nous attendre à ce que nos producteurs soutiennent la concurrence des agriculteurs du monde entier, et en particulier celle des agriculteurs des États-Unis et de l'UE, si nous ne leur accordons pas de subventions comme celles que les Américains et les Européens consentent à leurs agriculteurs; or, nous ne le faisons pas. À ce chapitre, nous affichons un manque à gagner d'un dollar et quelque par rapport aux Américains et de deux dollars et quelque par rapport aux Européens.
Cela n'a rien de bien sorcier. Nous devons d'abord rendre les règles du jeu équitables et peut-être ensuite pourrons-nous convaincre les Américains et les Européens de réduire leurs subventions. Cependant, nous ne pourrons pas le faire tant que nous serons derrière eux sur la ligne de départ. Nous pourrons le faire seulement lorsque nous serons sur un pied d'égalité avec eux. Il ne fait pas de doute que nous avons une crise dans le secteur agricole.
Je voudrais donner certains chiffres. Les chiffres nous étourdissent après un certain temps et nous commençons alors à dire que ce n'est peut-être pas une question de chiffres, mais c'est toujours une question de chiffres et c'est toujours une question d'argent.
À l'aube du XXIe siècle qui nous amène de nouvelles tendances et de nouveaux défis, dont j'ai mentionné quelques-uns plus tôt, notamment la mondialisation et la libéralisation des échanges commerciaux, le Canada sera obligé de devenir de plus en plus concurrentiel. Les revenus agricoles sont déjà instables. L'infrastructure est en train de s'effondrer. L'accès au capital est limité. Les gouvernements étrangers continuent de subventionner leurs industries agricoles à des niveaux élevés.
J'ai utilisé des chiffres approximatifs il y a un instant, mais j'ai ici un exemple avec de vrais chiffres. En 1997, pour chaque dollar dépensé par le Canada au titre du soutien agricole, les États-Unis ont dépensé 2,06 $, l'Union européenne, 2,14 $, et le Japon, 3,47 $.
Selon Brian Doidge, du Ridgetown College of Agricultural Technology, le Canada dépense 78 p. 100 de son PIB en soutien agricole, comparativement à 1,7 p. 100 pour les États-Unis. Les chiffres sont fondés sur les mesures globales de soutien de l'OCDE. Ils montrent très clairement que nous accusons un retard et que nous ne faisons rien pour rattraper ce retard.
De 1998 à septembre 2000, les paiements versés directement aux producteurs dans le cadre de programmes d'urgence de soutien du revenu ont totalisé 48,2 milliards de dollars aux États-Unis et 3,1 milliards de dollars au Canada. Le débat s'arrête là. Avec ce genre de ratio, il est impossible de rattraper les autres pays à moins que le gouvernement ne soit déterminé à le faire. Lorsqu'il y aura parité, alors nous pourrons parler de règles du jeu équitables et parler d'une réduction des subventions dans tous les pays. En attendant, si nous ne faisons pas cela, nous n'aurons plus d'agriculteurs à protéger. Le secteur des céréales et des oléagineux est sans doute le plus durement touché à l'heure actuelle, mais le problème s'étendra à d'autres groupes de produits. Ce n'est qu'une question de temps.
Selon un rapport de Statistique Canada publié en août 2000, l'analyse des données mensuelles depuis janvier 1997 révèle que le nombre total d'emplois dans le domaine de l'agriculture a dégringolé depuis l'automne 1998. Il y avait auparavant environ 200 000 emplois du domaine de l'agriculture dans les Prairies. Selon un sondage mené en août, ce nombre se situe à 160 000, soit 40 000 personnes de moins travaillant dans le domaine de l'agriculture dans les Prairies. Cela donne 22 100 agriculteurs.
Je n'ai aucune objection à prendre part à ce débat, mais je commence à me demander pourquoi nous sommes ici, pourquoi nous prenons la parole, pourquoi nous continuons de demander au gouvernement de s'attaquer à une situation de crise, de régler un grave problème au pays pendant que les députés ministériels continuent de ne rien faire et de littéralement se croiser les bras.
Notre colossal voisin du sud est un très puissant partenaire commercial. Il ne s'est pas gêné pour nous montrer qu'il est disposé à utiliser un certificat phytosanitaire comme obstacle non-tarifaire au commerce. Il continue d'agir de la sorte. Il l'a fait dans l'industrie des arbres de Noël, qui est mon secteur d'activité. Il l'a fait à maintes reprises dans le cas des pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard. Il l'a fait pour d'autres produits. Il l'a fait dans le cas du bois d'oeuvre.
Nous devons, comme Parlement du Canada, mieux représenter les Canadiens. Nous pouvons encourager le gouvernement à le faire, mais nous ne pouvons forcer cette majorité à bouger si elle ne le veut pas. À mon avis, le député de Peace River a le mieux résumé la situation. Les députés là-bas doivent choisir. Les députés d'arrière-ban du parti ministériel doivent intervenir auprès de leur propre gouvernement, de leur ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire et les forcer à intervenir dans cette crise. S'ils n'agissent pas de la sorte, nous connaîtrons un jour au Canada une situation où, en plus de la disparition des fermes familiales, nous serons obligés d'importer des aliments. Ce n'est pas là une perspective dont je me réjouis.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, les gens se demandent peut-être pourquoi une personne de la province de Terre-Neuve, plutôt connue pour la pêche, participe à ce débat sur l'agriculture.
Il y a deux raisons. La première, c'est la similarité qui existent entre ce qui se passe actuellement dans l'industrie agricole et ce qui s'est passé dans l'industrie de la pêche à Terre-Neuve il y a quelques années. Un député a fait plus tôt au cours de la soirée un parallèle entre les deux. Nous avons assisté, peut-être à cause d'une mauvaise gestion, peut-être à cause de la surpêche, peut-être à cause des conditions climatiques, peut-être à cause des habitudes migratoires, ou peut-être à cause d'une combinaison de tous ces facteurs, à l'effondrement de l'industrie de la pêche au poisson de fond, dans laquelle les gens gagnaient raisonnablement leur vie, donnant et recevant au fil des ans.
À l'époque, le gouvernement, en bon gouvernement conservateur, est intervenu immédiatement pour mettre fin à la crise. À présent, une crise similaire se produit dans l'Ouest. Toutefois, en dépit de la crise et de la nécessité de venir en aide aux agriculteurs, on s'est rendu compte, une fois que le gouvernement est intervenu et a mesuré l'étendue des problèmes, qu'il était plus facile de s'en remettre aux grandes sociétés, comme c'est maintenant le cas dans l'industrie de la pêche. Le petit pêcheur indépendant est maintenant exclu et ce sont les gros qui prennent de plus en plus le contrôle de cette industrie.
Ce dont nous ne nous rendons pas compte quand nous regardons le Canada rural, qu'il s'agisse d'une région agricole ou d'une zone de pêche, c'est que c'est le travail, le produit et le revenu généré dans les régions rurales qui sont à la base de la prospérité des régions urbaines.
Pourquoi nos villes et nos grands centres ont-ils grossi aussi vite? Est-ce du fait des emplois de bureau et des commerces qu'on y trouve? Oui, mais ces bureaux et ces commerces n'existent que parce qu'ils répondent aux besoins de beaucoup de personnes des régions rurales, qui vont dans les grands centres pour tous leurs besoins et tous les services qui leur sont nécessaires. L'un ne va pas sans l'autre.
Nous oublions trop souvent par ailleurs de tenir compte des retombées de l'industrie d'exploitation des ressources halieutiques et agricoles, ne comprenant pas que, lorsqu'une exploitation agricole dépose son bilan et que l'exploitant et sa famille en sont touchés, doivent déclarer faillite ou quitter la région, d'autres en pâtissent également.
À entendre les ministériels ce soir, j'ai eu l'impression d'entendre Néron lorsqu'il jouait du violon pendant que Rome brûlait. Ils ont pris la parole à tour de rôle, avec en main des textes préparés d'avance, pour dresser la liste des initiatives louables proposées par le gouvernement pour aider le secteur agricole.
M. Wayne Easter: Vous ne les avez pas écoutés, de toute évidence.
M. Loyola Hearn: Mon collègue de l'Île-du-Prince-Édouard a dit que je ne les ai pas écoutés. Au contraire, je les ai écoutés très attentivement et je sais que les agriculteurs de l'Île-du-Prince-Édouard nous écoutent eux aussi très attentivement. Ils se demandent encore quand le gouvernement compte intervenir pour les aider dans cette crise, en prenant exemple sur leur gouvernement provincial. Ils veulent savoir si cette aide leur sera accordée avant ou après Pâques. Ils espèrent que ce sera pour très bientôt, que le porteur de cette aide soit le lapin de Pâques ou non, car ils en ont vraiment besoin.
Les agriculteurs de l'ouest canadien qui nous écoutent ce soir se demandent eux aussi d'où viendront les solutions. Nous entendons les problèmes être exposés des deux côtés, mais lorsqu'on entend les excuses venant des ministériels, c'est un signe que le gouvernement entend faire très peu pour aider les agriculteurs à traverser la crise actuelle.
Il faut se pencher sur deux choses. Il y a tout d'abord un plan à long terme pour l'agriculture. Dans ma province, Terre-Neuve, le secteur agricole est également négligé fondamentalement par les gouvernements fédéral et provincial, et pourtant le secteur laitier est extrêmement important et rentable. Nous avons d'immenses terres pour cultiver des légumes. Certaines personnes produisent des cultures spéciales et s'en sortent fort bien, mais les autorités s'occupent très peu du secteur agricole.
Si une entreprise veut créer quelques nouveaux emplois avec un centre d'appel ou avec une autre idée merveilleuse et bizarre, les gouvernements s'empressent de lui faire toutes sortes de cadeaux. Les entreprises malhonnêtes prennent cet argent, durent quelques mois et disparaissent ensuite. Pourtant, nos industries solides et les bons travailleurs qui peuvent créer toutes sortes de nouveaux emplois dans des industries comme l'agriculture n'obtiennent absolument aucun encouragement ni aucune aide. Tout cela doit changer. C'est là où intervient le plan à long terme.
Ce qu'il faut faire immédiatement, toutefois, c'est aider les agriculteurs qui sont dans le besoin maintenant et pas demain ou le mois prochain ou le mois suivant. Ils se préparent maintenant à l'ensemencement du printemps. S'ils ne reçoivent pas une aide financière immédiate, l'année à venir est perdue. Dans ce cas-là, la même chose arrivera aux agriculteurs de la Saskatchewan, de l'Alberta, du Manitoba et de l'Ontario qu'aux pêcheurs des régions rurales de Terre-Neuve. Ces gens plieront bagage et quitteront les régions rurales pour trouver du travail ailleurs. Les régions productrices de denrées du pays mourront et nous savons ce qui arrive lorsqu'on ne produit plus de denrées. Ce ne sont pas simplement les régions qui meurent. Les gens aussi.
Je vais conclure en reprenant les paroles d'un grand chanteur et parolier, Murray McLauchlan, qui a écrit la chanson de l'agriculteur. Il parle de notre époque où tout le monde accapare tout et seul l'agriculteur redonne quelque chose. Il est peut-être temps que nous, dans cette merveilleuse institution, reconnaissions cela.
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir la possibilité de prendre la parole ce soir à propos de la situation financière de certains de nos producteurs agricoles et de la réponse du gouvernement aux difficultés qu'ils vivent. Je partagerai mon temps de parole avec la députée de Essex.
Vous pouvez très bien vous demander, monsieur le Président, pourquoi une députée d'une circonscription des plus urbaines tient à prendre la parole ce soir. Vous pouvez peut-être encore plus vous demander ce qu'une députée d'une région urbaine peut connaître au sujet de la situation que vivent les agriculteurs canadiens.
Eh bien, je dirai aux députés d'en face que mes collègues du côté du gouvernement ont bien fait leur travail, mais permettez-moi d'expliquer pourquoi. Pour ce faire, je ne peux qu'utiliser un exemple tiré d'une conversation que j'ai eue avec la députée d'Essex. Elle m'a dit de façon très éloquente que, quand on parle de la qualité de vie, on parle aussi de la qualité des aliments qu'on mange. C'est ce qui est inhérent à la qualité de vie. Elle commence par les aliments que nous mangeons. Nous devons tous nous rendre compte que le problème ne concerne pas seulement les régions rurales, mais l'ensemble du pays. Aujourd'hui, je suis fière de dire qu'il s'agit d'un problème qui est important aux yeux des électeurs de Parkdale—High Park.
Pendant le débat, mon collègue de Haldimand—Norfolk—Brant a cité une statistique très intéressante. Il a signalé qu'un emploi sur six à Toronto se trouve dans l'industrie de l'alimentation. J'ai d'ailleurs eu l'occasion cet été de visiter la circonscription du député et de m'entretenir avec ses électeurs à propos de leurs préoccupations. J'aimerais dire à ces gens, s'ils nous écoutent, qu'ils ont en lui un fantastique défenseur de la cause agricole. Il ne s'agit pas uniquement de problèmes agricoles, mais bien de problèmes d'ordre national. Il a parlé à d'autres collègues qui s'étaient rendus dans la circonscription. Nous avons rencontré ces gens, nous les avons écoutés et nous leur avons parlé.
J'aimerais vous donner un autre exemple et vous dire quelques mots de ma collègue de Barrie—Simcoe—Bradford. Sa circonscription est à 80 p. 100 urbaine et 20 p. 100 rurale, mais elle nous a aussi parlé, insistant sur ce qui était arrivé aux agriculteurs de sa circonscription par suite des mauvaises conditions climatiques qui ont sévi en Ontario.
Lorsqu'on dit qu'il s'agit là d'une question rurale qui ne préoccupe pas les députés des régions urbaines, ce n'est pas le cas. Le printemps dernier, le député de Toronto—Danforth a organisé un concert en aide aux agriculteurs de la région de Toronto pour attirer l'attention de tous sur leurs problèmes. Il l'a fait pour venir en aide aux agriculteurs et pour faire comprendre à nos collègues des régions urbaines l'importance de cette question nationale.
Un des députés d'en face a parlé ce soir du député de Malpeque et souligné qu'il espérait que les agriculteurs de l'Île-du-Prince-Édouard étaient à l'écoute. Je l'espère également parce que j'aimerais leur dire qu'ils ont en lui un ardent défenseur qui comprend leurs problèmes et qui les présente régulièrement au caucus. J'ai également eu l'occasion de rencontrer ses électeurs l'été dernier.
De plus, lorsque je siégeais au Comité des affaires étrangères et du commerce international et que j'ai eu l'occasion de présider le Comité du commerce international au cours de la dernière session, j'ai parcouru le pays avec le comité. Nous avons entendu les agriculteurs. Nous avons entendu la Fédération canadienne de l'agriculture. Nous avons entendu le Syndicat national des cultivateurs. C'est à ce moment que j'ai appris que le député de Malpeque avait déjà été président du Syndicat national des cultivateurs.
Il est étrange qu'une fille de la ville puisse non seulement en apprendre beaucoup sur ce qui arrive à nos exploitations agricoles et à nos agriculteurs, mais aussi prendre conscience, comme le député d'Essex l'a dit, que l'enjeu, c'est la qualité de vie pour nous tous.
Comment le gouvernement s'y est-il pris pour aider les producteurs qui éprouvent des difficultés financières? Au début du débat, ce soir, le ministre de l'Agriculture et de l'Agro-alimentaire a exposé la démarche du gouvernement. Le gouvernement s'est efforcé de stabiliser les revenus tout en travaillant sur plusieurs fronts pour encourager la croissance à long terme de l'agriculture.
Tout d'abord, nous investissons dans des programmes et des services qui ont des répercussions directes sur la capacité de ce secteur de s'adapter et de se diversifier dans l'économie mondiale d'aujourd'hui, où la concurrence est vive.
Nous investissons dans l'innovation, dans la protection de notre environnement et dans la sécurité de nos approvisionnements alimentaires. Nous investissons dans la promotion du commerce, tellement vital pour l'agriculture et l'agro-alimentaire, et aussi pour l'économie canadienne en général.
Je ne saurais trop insister sur le fait que tous les partis doivent prêter attention à ce que les agriculteurs et leur fédération ont à dire sur la position que nous devons adopter à l'Organisation mondiale du commerce et dans les négociations sur l'accord de libre-échange des Amériques.
D'après ce que j'ai appris ces dernières années, je dois conclure que l'agriculture canadienne réussit bien, que les programmes en place fonctionnent bien et stabilisent les fluctuations des revenus agricoles dans la vaste majorité des exploitations commerciales. Nous reconnaissons en même temps que certains agriculteurs canadiens ont de graves ennuis financiers. Le faible prix des produits, les subventions internationales et les mauvaises conditions météorologiques ont eu d'énormes répercussions sur certains de nos céréaliculteurs, particulièrement les producteurs de céréales et d'oléagineux qui ont vu leur revenu dégringoler.
Nous avons écouté les préoccupations exprimées par la communauté agricole et savons que certains producteurs connaissent des problèmes à cause d'événements qui échappent à leur volonté. Le gouvernement a collaboré avec les organisations agricoles et les autres ordres de gouvernement pour tenter de corriger la situation en créant des programmes de soutien conçus pour que l'aide parvienne à ceux qui en ont le plus besoin.
Mes collègues ne sont pas sans savoir que, après de nombreux mois de discussions avec les provinces et les territoires, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a conclu un accord-cadre national sur un programme de soutien du revenu agricole. Selon l'accord signé par tous les ministres provinciaux et territoriaux en juillet dernier, les gouvernements fédéral et provinciaux devraient investir en tout jusqu'à 5,5 milliards de dollars dans des programmes de soutien du revenu agricole pour les années 2000, 2001 et 2002.
L'accord représente un énorme pas dans la bonne direction. Pour la toute première fois, tous les ministres de l'Agriculture du pays se sont entendus sur une stratégie commune et intégrée pour pouvoir offrir des programmes de soutien du revenu agricole. Parmi les aspects les plus importants de l'accord, mentionnons que l'accord prévoit un programme permanent d'aide en cas de catastrophe, un élément que réclamaient les producteurs.
L'accord prévoit le mode de financement type, avec le gouvernement fédéral qui assume 60 p. 100 des frais, et les provinces, 40 p. 100. Au cours des trois années que durera le programme, le gouvernement fédéral consacrera jusqu'à 3,3 milliards de dollars au financement de l'un des plus exhaustifs programmes de soutien de revenu jamais offerts jusqu'à maintenant.
Je signale à mes collègues que la participation financière annuelle du gouvernement fédéral aux filets de sécurité est près du double de ce qu'elle était avant la signature de l'accord. Les fonds engagés nous permettent d'aider les agriculteurs à gérer les risques liés aux circonstances ou catastrophes naturelles et aux fluctuations commerciales.
Plus précisément, le gouvernement finance une partie importante de l'assurance-récolte et du Compte de stabilisation du revenu net, qui est un programme conçu pour stabiliser à long terme le revenu des producteurs. Les agriculteurs qui versent chaque année un certain montant dans le Compte de stabilisation du revenu net bénéficient d'une contribution équivalente du gouvernement. Les années de faible revenu, les agriculteurs peuvent ensuite en retirer de l'argent.
Le gouvernement du Canada a également créé un programme d'avance de crédits qui permet aux producteurs d'obtenir des prêts sans intérêts pour payer le coût des semences au printemps. La communauté agricole a réservé un très bon accueil à ce programme, qui a permis aux agriculteurs de bénéficier de prêts sans intérêts de 356 millions de dollars durant sa première année d'existence.
Il y a aussi le programme de paiement anticipé, qui permet aux producteurs d'obtenir des prêts d'un montant maximal de 250 000 $, pour l'entreposage de denrées admissibles, le gouvernement fédéral payant l'intérêt sur les premiers 50 000 $. Ce programme permet aux producteurs d'attendre que les prix soient plus avantageux pour commercialiser leurs récoltes, tout en respectant leurs obligations financières à court terme.
Comme je le disais, l'accord-cadre de trois ans conclu avec les provinces comprend une aide en cas de désastre destinée à ceux qui en ont le plus besoin. Dans le cadre du programme canadien de soutien du revenu agricole, un montant de 2,2 milliards de dollars, provenant du gouvernement fédéral et des provinces, a été affecté aux mesures d'aide en cas de désastre pour les années financières 2000, 2001 et 2002. Les formulaires de demandes pour l'année financière 2000 seront disponibles sous peu.
Nous améliorons constamment les programmes existants et nous cherchons des façons d'aider les agriculteurs à gérer les risques. Ainsi, des modifications ont été apportées l'an dernier au Compte de stabilisation du revenu net, afin de faciliter l'accès des producteurs à ce programme. En 1999, des milliers de participants ont puisé plus de 400 millions de dollars dans le compte. Ce programme permet de faire ce pour quoi il a été conçu, c'est-à-dire stabiliser les revenus des producteurs lorsque cela est nécessaire.
En terminant, je crois que nous allons dans la bonne direction. Le gouvernement, avec l'aide de tous mes collègues, continuera de travailler pour les agriculteurs de partout au Canada, afin de permettre au secteur agricole canadien de demeurer concurrentiel et fort.
Mme Susan Whelan (Essex, Lib.): Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à rappeler à tous une leçon d'histoire concernant l'agriculture canadienne et les agriculteurs canadiens.
Premièrement, les agriculteurs canadiens exploitent leur entreprise au Canada dans des conditions géographiques et météorologiques parmi les plus difficiles au monde. Plus de 55 p. 100 de nos aliments sont produits plus au nord que dans tout autre pays de l'hémisphère nord.
Comment en est-on arrivé à cette situation dans ce pays appelé le Canada? Les députés n'ont qu'à penser à l'époque où l'attention du roi de France était retenue par la guerre européenne et où, lorsqu'on lui a demandé ce qui arriverait des colons se trouvant en Nouvelle-France, il a répondu «Qui s'en soucie? Laissez-les survivre du mieux qu'ils le peuvent. Après tout, qui veut de ce territoire couvert de glace et de neige?»
Ils ont effectivement survécu et sont devenus l'élément le plus producteur de notre société. Si tous les autres éléments de notre société étaient aussi productifs que nos agriculteurs, nous n'aurions jamais vécu l'inflation que nous avons connue. Nul autre élément de notre société n'est jamais devenu aussi productif sur une base individuelle que le groupe des agriculteurs.
À une époque, au début de la mise en valeur du Canada, une famille agricole produisait assez d'aliments pour elle-même et une autre famille. De nos jours, une famille agricole produit assez d'aliments pour elle-même et 160 autres familles. Comment la famille agricole réalise-t-elle ce grand exploit? Dès le début, les gouvernements au pouvoir ont établi des fermes de présentation, des stations de recherche et des fermes expérimentales pour aider les nouveaux arrivants de partout dans le monde.
Par l'entremise d'Agriculture Canada, nos scientifiques et nos agriculteurs ont travaillé ensemble. Ils ont mis au point de nouvelles récoltes plus résistantes à cycle court, des céréales résistant aux maladies, une nouvelle variété de soya, de colza canola et de lentilles, ainsi que les meilleurs programmes d'élevage génétique au monde pour notre industrie avicole et du bétail. Ils ont appris à produire des fruits et légumes sur des cycles courts. Ils ont mis au point les meilleurs systèmes d'entreposage au monde; la conservation en atmosphère contrôlée pour les pommes, les oranges, les choux et les carottes. Nommez un produit, monsieur le Président, nous l'avons entreposé.
Nous avons élaboré au Canada des programmes visant à aider nos agriculteurs à bâtir ce genre d'installations d'entreposage. Par exemple, le gouvernement a payé jusqu'au tiers du coût lorsque trois agriculteurs s'associaient pour bâtir une installation d'entreposage. Avec le temps, la Colombie-Britannique a été en mesure d'expédier des pommes de la meilleure qualité dans plus de 30 pays riverains du Pacifique.
Le Canada a tiré parti des lois internationales pour créer la Commission canadienne du blé, la Commission canadienne du lait, l'Office canadien de commercialisation des oeufs, l'Office canadien de commercialisation du poulet et l'Office canadien de commercialisation du dindon, tous ces organismes de commercialisation équitable qui ont permis aux bons agriculteurs d'obtenir un profit convenable pour leurs produits, tout en assurant aux consommateurs un produit à prix très équitable.
Ne serait-ce pas formidable si les producteurs de pétrole et de gaz naturel pouvaient offrir aujourd'hui aux consommateurs leurs produits à des prix aussi équitables?
Quand nous faisons des comparaisons avec d'autres régions du monde, nous devons nous rappeler les différences. Aux États-Unis, par exemple, la Constitution est différente. Le gouvernement fédéral y a entière autorité. Il n'a pas à traiter avec 51 ministres de l'Agriculture. Les secrétaires à l'Agriculture au niveau des États ne sont rien de plus que des services d'appoint en agriculture. Imaginez si le secrétaire à l'Agriculture des États-Unis d'Amérique avait à faire la même chose que le ministre de l'Agriculture du Canada. En vertu de notre Constitution, l'agriculture est un domaine de compétence partagée, très différent et plus difficile à administrer entre les secteurs riches et les secteurs pauvres. Par exemple, l'Alberta est riche en pétrole, mais le Manitoba et le Nouveau-Brunswick ont des ressources très limitées.
Il est presque impossible d'administrer un programme national équitable avec le statu quo. Cependant, je dois dire que nos agriculteurs sont victimes de leur propre succès, parce qu'ils ont fait ce que les économistes leur ont dit de faire: «Produisez, produisez, produisez. Voilà votre réaction à la prospérité économique.» Comme l'agriculture évolue dans un monde où règne la surproduction, cela peut signifier la mort économique.
Je voudrais vous lire un article paru dans le numéro du 24 décembre 2000 du Post de Palm Beach.
Pour quelqu'un qui travaille la terre dans les rudes régions du Nord qui ont connu les charrues des colons il y a moins d'un siècle, la grosse récolte de chèques gouvernementaux se fait généralement à l'automne: 40 000 $ pour être un agriculteur; 40 000 $ de plus si la conjoncture est mauvaise; plus de 100 000 $ pour n'avoir fait aucun bénéfice sur le produit de la terre; et 50 000 $ pour avoir mis d'autres terres en jachère.
Que la récolte soit bonne ou mauvaise, que le rendement soit faible ou élevé, ça n'a pas d'importance. Les chèques du gouvernement fédéral entrent et constituent la masse salariale la plus importante des régions rurales. À la fin de l'année, certains agriculteurs peuvent toucher jusqu'à 280 000 $ simplement en ayant une autre mauvaise année.
Dans huit États, y compris le Montana, l'aide gouvernementale a représenté 100 p. 100 du revenu agricole. Telle est la situation actuelle aux États-Unis. C'est la raison pour laquelle le prix des céréales et des oléagineux est tellement bas que les agriculteurs canadiens, les plus productifs et les plus efficaces au monde, ne peuvent pas relever la concurrence.
Le gouvernement a mis des programmes en place. Toutefois, il faut que le gouvernement étudie la question de savoir comment modifier ces programmes afin de répondre à la crise dans le secteur des céréales et des oléagineux. Il faut que toutes les parties viennent à la table, le fédéral, les provinces et tous les groupes représentant les diverses denrées. Il faut que nous trouvions une façon d'aider les producteurs canadiens à faire face à la concurrence. Nous ne voulons pas devenir, comme le dit l'article, «dépendants du gouvernement fédéral, un pays qui s'éteint lentement, une société qui ressemble à l'assistance sociale». Nous ne voulons pas que notre secteur agricole ressemble à cela. Il faut que nous nous efforcions de faire modifier le droit commercial afin que les règles nous permettent de lutter à armes égales.
En attendant, nous devons faire quelque chose maintenant pour les agriculteurs canadiens. Les agriculteurs et les localités rurales du secteur des céréales et des oléagineux ont besoin d'une aide immédiate. Le gouvernement est à la recherche d'une solution et s'emploie à trouver une solution mais, je le répète, il faut que toutes les parties s'assoient à la table.
Il faut trouver une façon d'aider les producteurs canadiens à relever la concurrence. Ils font partie de la société et contribuent grandement à notre qualité de vie. Nous ne pouvons oublier les leçons que nous a transmises l'histoire sur la façon dont le Canada a été constitué. Nous ne pouvons oublier la place que les agriculteurs occupent dans notre société. Nous ne pouvons oublier à quel point il est important de nous assurer que tous les Canadiens, riches ou pauvres, aient accès à des aliments sûrs, efficaces, de bonne qualité et à bas prix afin que notre pays demeure fort. Nous ne voulons pas être à la merci d'un autre pays. Il faut toujours se souvenir des importantes leçons d'histoire que nous donnent les agriculteurs canadiens. Nous ne devons pas les oublier, et nous ne les oublierons pas.
M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est un privilège que de pouvoir prendre la parole à la Chambre, ce soir, au nom des agriculteurs de l'Ouest, au nom du secteur qui souffre, d'un secteur qui s'effrite et qui disparaît. Nous sommes ici ce soir parce que nous croyons pouvoir apporter des changements. Nous n'avons pas abandonné tout espoir. Nous croyons qu'il y a encore de la place pour les fermes familiales dans l'Ouest et dans tout le Canada.
Je me rends compte, monsieur le Président, que vous êtes un grand amateur de sports. Il nous sera peut-être difficile de nous tenir éveillés. Il est 23 h 45 ici et 21 h 45 en Alberta.
En tant que nouveau député, j'ai déjà réagi au discours du Trône. Demain, je vais me prononcer sur le projet de loi portant sur les jeunes contrevenants. J'ignorais que j'allais prononcer une allocution sur l'agriculture ce soir, mais on m'a dit que, si j'attendais jusqu'à minuit, je pourrais peut-être trouver une occasion de le faire. J'en suis heureux.
La petite anecdote que je vais raconter à la Chambre porte sur une partie de football qui a eu lieu en 1929. L'équipe California devançait Georgia Tech par la marque de 7 à 2. Le quart arrière s'est avancé jusqu'à la ligne et a crié pour qu'on lui lance le ballon. Lorsque le joueur centre lui a passé le ballon, il s'est retourné et l'a lancé à un demi porteur du nom de Roy Regals. Celui-ci s'est emparé du ballon, a traversé la ligne, s'est heurté à ses plaqueurs et à ses arrières, qui lui ont fait faire demi-tour. Il a commencé à courir dans une direction, puis dans une autre. Peu de temps après, il courait dans la mauvaise direction. Pendant qu'il courait dans la mauvaise direction, la foule criait «non, non», mais Roy croyait qu'elle hurlait «vas-y, vas-y». Il a continué de courir dans la mauvaise direction.
L'équipe California avait un joueur appelé Benny Lam. Benny Lam s'est lancé à la poursuite du demi porteur et a tenté de le faire trébucher. Il l'a attrapé à la ligne des cinq verges. Il a expliqué à son demi porteur qu'il courait dans la mauvaise direction. Georgia Tech a tenté de botter le ballon de sa propre zone du but pour se sortir du pétrin. Le ballon a été bloqué par l'équipe adverse, qui a finalement gagné le match.
Je crois que nous avons un gouvernement très semblable au joueur qui courait dans la mauvaise direction. Il fait tous les efforts possibles pour voir à ce que l'agriculture et d'autres secteurs en difficulté reçoivent de l'aide, mais il court dans la mauvaise direction.
Pendant des années et même des décennies, nous avons dit au gouvernement à la Chambre que des problèmes guettaient le secteur agricole et qu'il fallait les régler. Le gouvernement ne faisait que retarder les choses constamment.
L'automne dernier, nous avons parcouru la circonscription de Crowfoot, qui vit de l'agriculture. Nous avons vu des collectivités qui dépendent de la culture du grain et de l'élevage du bétail. On nous a dit que ces collectivités ne s'en sortiraient pas.
J'ai visité beaucoup de petites villes durant la dernière campagne électorale et j'ai vu beaucoup plus de portes fermées que de portes ouvertes sur les rues principales. Lorsque nous parlions aux gens d'affaires, que ce soit à Drumheller, Stetler, Hannah, Camrose ou Killum, ils nous disaient que, si nous voulions aider leurs entreprises, il nous fallait aider les agriculteurs. Si nous voulons que les entreprises restent ouvertes, il n'y a pas d'autre moyen que d'aider le secteur agricole.
Nous avons cherché des façons d'aider le secteur agricole. Les députés ministériels ont cherché des façons d'aider le secteur agricole. Ils allaient cependant dans la mauvaise direction. Ils ont pondu le programme ACRA. Ils ont promis aux agriculteurs des milliards de dollars. Ils leur ont dit que l'argent viendrait, puis ils nous ont fait vivre un cauchemar avec la paperasserie. Les autres qui ont des cauchemars sont les comptables, parce qu'ils sont les seuls qui peuvent remplir les formulaires. Au bout du compte, un plus grand nombre d'agriculteurs acquittent des factures pour la comptabilité qui sont plus élevées que les montants qu'ils reçoivent du gouvernement. Nous ne pouvons plus continuer dans cette direction.
Il a été question des problèmes de transport. Je suis agriculteur. J'ai exploité une ferme pendant 25 ans et je peux dire que l'agriculture est le seul secteur où, sur chaque achat, il faut payer le prix à la consommation. Les agriculteurs paient toujours le prix de détail quand ils achètent. Par contre, toute vente s'effectue au prix de gros. Ils paient aussi le transport dans les deux sens au moment d'une vente. Avant la vente du grain, l'agriculteur paie le transport dès que son produit quitte la ferme. Quand ils achètent de la bouillie de pulvérisation, les agriculteurs paient le prix à la consommation, qui inclut tout cela.
On a parlé de la réforme fiscale. Plusieurs de nos députés ont été élus en raison de notre position sur la réforme fiscale. Un de nos administrateurs, qui vient de Czar, en Alberta, est allé visiter une usine John Deere, aux États-Unis. Un soir, il a échangé avec le président de John Deere et lui a expliqué que le problème qui se pose avec de nombreux fabricants d'équipement et de machinerie, c'est qu'ils ne construisent pas d'équipement pour les petits agriculteurs, celui qui voudrait un tracteur de 40 000 $, par exemple.
Il s'est fait dire que dès que le fer sort de la fonderie et est laminé, il est taxé. Il passe à l'étape suivante où il est à nouveau taxé. Si on enlevait toutes les taxes accumulées dans le cas d'un tracteur de 100 000 $, on obtiendrait un tracteur de 40 000 $. Les taxes sur tous nos intrants sont trop élevées.
La ferme familiale est en train de disparaître. Permettez-moi de vous raconter une histoire vraie qui s'est produite durant la campagne électorale. Je me suis présenté à la maison d'une ferme familiale et je me suis assis à la table avec l'agriculteur. Il me dit qu'il n'y arriverait pas. Il a 72 ans et il a perdu tout espoir. Au cours des années antérieures, il a toujours cru qu'il y avait une lueur d'espoir, mais il voit que ni le gouvernement, ni qui que ce soit d'autre n'offre de solution.
Assis avec moi à la table, il m'a avoué qu'il avait cherché une balle de 22 pendant deux heures le dimanche précédent. Il m'a dit que tout espoir était perdu. Lorsque j'ai quitté la maison, il est resté effondré, en sanglots, assis à sa table.
J'ai alors commis le seul vol de ma vie. Lorsque j'ai quitté cette maison, en passant près du porte-fusils, j'ai pris la carabine et je l'ai mise dans ma camionnette. Cette histoire est vraie. Elle illustre à quel point les gens sont désespérés dans cette région.
Les gens de ma circonscription m'ont téléphoné; ils m'ont écrit. J'ai reçu à mon bureau des agriculteurs qui s'effondraient en larmes. Un agriculteur de 58 ans, d'Edgerton, m'a raconté que son fils de 26 ans et père d'un jeune enfant était venu lui dire la veille au soir qu'il abandonnait la ferme. Cet agriculteur avait finalement payé le plus gros de sa terre et espérait que son fils reprenne l'entreprise familiale. Nous sommes en train de perdre toute une génération, les amis. Toute une génération quitte la terre et ne reviendra pas.
De quoi voulons-nous que les exploitations agricoles aient l'air dans dix ans? De quoi voulons-nous que l'ouest du Canada ait l'air dans dix ans? Les localités de ma circonscription dépendent de l'exploitation agricole familiale. Nous supplions le gouvernement de nous écouter. Le premier ministre a dit à la Chambre l'autre jour qu'il irait aux États-Unis pour encourager M. Bush à supprimer les subventions.
Nous avons besoin d'aide tout de suite dans le secteur agricole de l'ouest du Canada. Nous avons besoin d'un gouvernement qui ne fera pas que demander cela à M. Bush, mais qui exercera des pressions sur les gouvernements d'Europe, sur les États-Unis et sur nos concurrents du monde entier. Nous voulons que nos agriculteurs jouissent de règles du jeu équitables par rapport aux agriculteurs du monde entier.
Trop de gens ont perdu espoir. Au cours de la dernière année, 22 000 agriculteurs ont quitté leur terre pour trouver un emploi quelque part, pour apprendre à se servir d'un ordinateur et aller travailler quelque part en ville, comme le gouvernement les y encourage.
L'exploitation agricole familiale est en voie de disparition. De quoi aura-t-elle l'air dans dix ans? Je n'en ai pas la moindre idée. Mais je me rends compte que, dans les années 30, des mouvements populaires se sont formés en Alberta et dans tout l'ouest du Canada et des gens ont trouvé des raisons d'espérer. Aujourd'hui, les gens placent leur espoir dans le gouvernement. Ils placent leur espoir à gauche et à droite. Prions pour qu'on trouve bientôt des solutions à long terme et qu'on fasse une injection de fonds avant les semailles du printemps.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je considère que c'est un honneur de pouvoir clore le débat de ce soir. Je vous remercie, monsieur le Président, d'avoir accepté la demande de débat d'urgence. Je pense que, de part et d'autre de la Chambre, nous avons expliqué ce soir pourquoi c'est un sujet très important. Je voudrais revenir un instant sur le discours que mon collègue, le député de Crowfoot, vient de faire. Ce qu'il a fait, c'est qu'il a donné une dimension humaine au problème.
Nous pourrions venir à cet endroit discuter de chiffres, de programmes inefficaces et de subventions qui sont en place dans certains pays, mais pas ailleurs, puis rentrer chez nous à la fin de la soirée. Nous aurions ainsi fait notre part pour signaler les problèmes. Cependant, lorsque nous quitterons cet endroit ce soir, il restera encore d'un océan à l'autre des gens qui sont dans une situation désespérée à cause de cette crise du revenu agricole, dont mon collègue et d'autres députés en face ont parlé. Nous devons faire quelque chose immédiatement.
Le gouvernement a pris des mesures, comme l'ACRA, mais nous savons que cela n'a pas complètement réglé le problème. Cela s'explique en partie par le bourbier administratif dans lequel s'est enlisé le programme, les fonds n'ayant pas été versés à ceux qui en avaient besoin. Nous avons entendu des gens ainsi que des députés qui représentent des électeurs de toutes les régions du Canada dire qu'il faut régler ce problème et le régler dès maintenant. Il faut remettre cet argent à ceux qui en ont besoin pour pouvoir ensemencer leurs champs cette année.
Ma circonscription est à la fois rurale et urbaine. Je me considère comme un citadin. J'ai passé la plus grande partie de ma vie en ville, mais j'ai eu l'occasion de passer plusieurs étés à la ferme de mon oncle, à Killarney, au Manitoba, au cours de mon adolescence, et de constater de première main ce que c'est que de vivre à la ferme et que la production de nos aliments nécessite de durs labeurs.
Nous pouvons compter sur tout un réseau de gens qui mettent de la nourriture sur la table de tous les Canadiens. Nous devons garder cela à l'esprit, quelle que soit la région d'où nous venons ou quelle que soit la catégorie démographique à laquelle nous appartenons. Nous devons fournir à ces gens-là une aide immédiate.
Je voudrais corriger certaines affirmations qu'a faites mon vis-à-vis, qui était ici pendant le discours du député de Malpeque et qui a dit que l'Alliance n'appuyait pas le système de gestion de l'offre. Rien n'est plus faux.
Il y a bien des producteurs laitiers dans ma circonscription, à Agassiz. Il y a un centre de recherche à Agassiz qui fait du bon travail ainsi que des producteurs qui travaillent très fort. C'est une question qui concerne tout le monde d'un océan à l'autre.
Nous avons entendu des discours passionnés ce soir quant à ce que le gouvernement doit faire au sujet des subventions que d'autres pays versent à leurs agriculteurs. Il semble que le gouvernement se soit engagé dans un désarmement unilatéral en ce qui concerne les subventions. Nous avons besoin de mesures immédiates à cet égard.
Nous avons demandé la mise en oeuvre de mesures visant notamment à alléger les coûts de production et à réduire les taxes sur l'essence. Comme mon collègue de Crowfoot l'a si éloquemment expliqué, nos agriculteurs payent le prix de détail pour leur production. Ils assument eux-mêmes les coûts de production, y compris le coût élevé du transport, et obtiennent en retour des prix de gros.
Nous savons qu'il existe des solutions. L'un de nos collègues d'en face a dit qu'il fallait aider nos agriculteurs à être concurrentiels. Il y a des idées; il y en a ici, devant nous. Nous en avons entendu au cours du débat, ce soir. Nous demandons au gouvernement de mettre ces idées en pratique, maintenant. C'est quand nous passons de la parole aux actes que nous montrons à quel point nous prenons au sérieux ce qui se dit à la Chambre.
Députés ministériels et de l'opposition, nous devons agir ensemble. Ce n'est pas une question partisane, comme nous le savons tous. Nous avons peut-être des idées différentes quant à la façon d'en arriver à une solution, mais nous savons qu'il y a des gens ce soir qui sont dans le besoin. Il s'agit des producteurs, c'est-à-dire nos agriculteurs et leurs familles, qui ne vont peut-être plus pouvoir ensemencer leurs champs, et qui subissent des pertes personnelles et pas seulement au niveau de leur emploi, parce que c'est plus qu'un emploi. C'est un mode de vie pour un grand nombre d'entre eux, et je pense que chacun d'entre nous a été touché par ceux qui mènent cette vie.
C'est pour cette raison qu'au moment où nous nous apprêtons à quitter la Chambre ce soir, il faut joindre le geste à la parole. J'implore mes collègues ministériels à utiliser toute l'influence qu'ils peuvent avoir sur les ministres et sur les décideurs afin que les mesures nécessaires soient prises en ce qui a trait aux changements à la réglementation, aux taxes sur les intrants et aux subventions étrangères. Je les implore d'appliquer ces mesures et de faire tout leur possible. Partout au Canada, des gens attendent que de telles mesures soient prises. Ils s'attendent aussi à ce que la Chambre fasse preuve de leadership.
Le débat de ce soir a été une belle occasion d'aborder cette question. Chacun d'entre nous doit être conscient de son importance. J'espère sincèrement, comme tous les députés je crois, que nous n'allons pas simplement classer ce débat en nous disant que nous avons fait notre travail. Je souhaite ardemment que nous allions de l'avant avec les initiatives qui ont été proposées et que nous envisagions de vraies solutions pour aider de vraies personnes qui sont dans une situation désespérée en ce moment, partout au pays.
[Français]
Le vice-président: Comme il est minuit, je déclare la motion adoptée.
La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 14 heures, conformément à l'article 24 du Règlement.
(La séance est levée à 24 h 00.)