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37e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 013
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 14 février 2001
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LE CURLING |
M. Joe McGuire |
SUZANNE WILSON |
M. Ted White |
LE DRAPEAU CANADIEN |
M. Alex Shepherd |
MARKHAM |
M. John McCallum |
LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE RÉGIONAL |
L'ALLOCATION POUR FRAIS DE CHAUFFAGE |
M. Philip Mayfield |
LES MALADIES CARDIOVASCULAIRES |
Mme Sue Barnes |
LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
NIAGARA-CENTRE |
M. Tony Tirabassi |
LE COMMERCE |
M. Gary Lunn |
HAZEL MCCALLION |
M. Steve Mahoney |
LE MOIS DE L'HISTOIRE DES NOIRS |
Mme Wendy Lill |
LE GOUVERNEMENT LIBÉRAL |
M. Benoît Sauvageau |
LA FÊTE DE LA SAINT-VALENTIN |
Mme Diane St-Jacques |
LA CONSTRUCTION NAVALE |
Mme Elsie Wayne |
QUESTIONS ORALES |
LES SUBVENTIONS ET CONTRIBUTIONS |
M. Stockwell Day |
L'hon. Herb Gray |
M. Stockwell Day |
L'hon. Herb Gray |
M. Stockwell Day |
L'hon. Herb Gray |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Herb Gray |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Maria Minna |
TÉLÉFILM CANADA |
M. Gilles Duceppe |
Mme Sarmite Bulte |
M. Gilles Duceppe |
Mme Sarmite Bulte |
Mme Christiane Gagnon |
Mme Sarmite Bulte |
Mme Christiane Gagnon |
Mme Sarmite Bulte |
LE COMMERCE |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Herb Gray |
Mme Alexa McDonough |
M. Pat O'Brien |
M. John Herron |
M. Pat O'Brien |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Bill Casey |
L'hon. John Manley |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
M. Vic Toews |
L'hon. Herb Gray |
M. Vic Toews |
L'hon. Herb Gray |
LES SURPLUS BUDGÉTAIRES |
M. Paul Crête |
L'hon. Jim Peterson |
M. Paul Crête |
L'hon. Jim Peterson |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
M. Randy White |
L'hon. Herb Gray |
M. Randy White |
L'hon. Herb Gray |
LE SOMMET DES AMÉRIQUES |
M. Pierre Paquette |
L'hon. Don Boudria |
M. Pierre Paquette |
L'hon. Herb Gray |
LES SUBVENTIONS ET LES CONTRIBUTIONS |
M. Grant Hill |
L'hon. Herb Gray |
M. Grant Hill |
L'hon. Herb Gray |
LES JEUX DE LA FRANCOPHONIE |
M. Dominic LeBlanc |
L'hon. Don Boudria |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Svend Robinson |
L'hon. John Manley |
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA |
L'hon. Lorne Nystrom |
L'hon. Don Boudria |
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Brian Tobin |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Herb Gray |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
M. Scott Reid |
L'hon. Brian Tobin |
M. Scott Reid |
L'hon. Brian Tobin |
LES LANGUES OFFICIELLES |
M. Yves Rocheleau |
L'hon. John Manley |
M. Yves Rocheleau |
L'hon. John Manley |
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE |
M. Brian Pallister |
L'hon. Herb Gray |
M. Brian Pallister |
L'hon. Herb Gray |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
M. Bryon Wilfert |
L'hon. John Manley |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Andy Burton |
L'hon. Robert Nault |
M. Andy Burton |
L'hon. Robert Nault |
LE CRIME ORGANISÉ |
M. Michel Bellehumeur |
L'hon. Anne McLellan |
LES ANCIENS COMBATTANTS |
Mme Paddy Torsney |
L'hon. Ronald Duhamel |
LA SANTÉ |
M. Howard Hilstrom |
L'hon. Lyle Vanclief |
LES ANCIENS COMBATTANTS |
M. Peter Stoffer |
L'hon. Ronald Duhamel |
PRÉSENCE À LA TRIBUNE |
Le Président |
RECOURS AU RÈGLEMENT |
La période des questions orales |
M. Chuck Strahl |
L'hon. Brian Tobin |
M. Benoît Sauvageau |
M. Michel Gauthier |
Le Président |
PRIVILÈGE |
Procédure et affaires de la Chambre—Décision de la |
Le Président |
AFFAIRES COURANTES |
LE DÉVELOPPEMENT DURABLE |
L'hon. David Anderson |
LES DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES |
Mme Sarmite Bulte |
LA LOI SUR LE MARIAGE (DEGRÉS PROHIBÉS) |
Projet de loi C-264. Présentation et première lecture |
M. Svend Robinson |
LA JOURNÉE DU COEUR |
Projet de loi C-265. Présentation et première lecture |
M. Greg Thompson |
LA LOI SUR LE MARIAGE AU CANADA |
Projet de loi C-266. Présentation et première lecture |
M. Jim Pankiw |
LA LOI SUR LES PRODUITS ANTIPARASITAIRES |
Projet de loi C-267. Présentation et première lecture |
Mme Marlene Jennings |
LOI SUR LA MESURE DU BIEN-ÊTRE CANADIEN |
Projet de loi C-268. Présentation et première lecture |
Mme Marlene Jennings |
PÉTITIONS |
RU-486 |
M. Janko Peric |
Les pesticides |
Mme Marlene Jennings |
Les additifs de l'essence |
Mme Rose-Marie Ur |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Derek Lee |
DEMANDES DE DOCUMENTS |
M. Derek Lee |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES ADOLESCENTS |
Projet de loi C-7. Deuxième lecture |
L'hon. Anne McLellan |
M. Vic Toews |
M. Michel Bellehumeur |
M. Bill Blaikie |
M. Myron Thompson |
M. Howard Hilstrom |
M. Peter MacKay |
M. Roy Bailey |
M. John Maloney |
M. Loyola Hearn |
Mme Carole-Marie Allard |
M. Michel Bellehumeur |
M. Stephen Owen |
RECOURS AU RÈGLEMENT |
Le Comité permanent de la procédure et des affaires |
M. Derek Lee |
Le vice-président |
LA LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES ADOLESCENTS |
Projet de loi C-7. Deuxième lecture |
M. Myron Thompson |
M. Pat Martin |
M. Chuck Cadman |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 013
CHAMBRE DES COMMUNES
Le mercredi 14 février 2001
La séance est ouverte à 14 heures.
Prière
[Traduction]
Le Président: Comme nous avons l'habitude de le faire le mercredi, nous allons maintenant chanter l'hymne national sous la direction du député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore.
[Note de la rédaction: Les députés chantent l'hymne national.]
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LE CURLING
M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Monsieur le Président, les athlètes féminines de l'Île-du-Prince-Édouard ont connu une merveilleuse fin de semaine. Lorie Kane gagne régulièrement sur le circuit de la LPGA. Sa plus récente victoire remonte à samedi dernier alors qu'elle a établi un record de tournoi à Hawaï en jouant 11 coups sous la normale. Lorie est la meilleure golfeuse du monde à l'heure actuelle.
Cependant, un événement historique s'est produit la fin de semaine dernière lorsque Suzanne Gaudet, de Summerside, a conduit son équipe à la victoire au Championnat canadien junior de curling féminin. C'était la première fois qu'une équipe de l'île obtenait le titre junior chez les femmes.
Je profite de l'occasion pour féliciter la capitaine, Suzanne Gaudet, la troisième, Stefanie Richard, la deuxième Robyn MacPhee et la première, Kelly Higgins, ainsi que leur entraîneur, Paul Power.
Elles ont fait honneur à leur collectivité et à leur province avec leur performance et avec la grâce dont elles ont fait preuve sous la pression. Je leur souhaite la meilleure des chances lorsqu'elles vont représenter le Canada aux Championnats mondiaux junior de curling 2001, du 15 au 25 mars, à Ogden, au Utah. Elles pourront compter sur l'appui de tout le Canada pour les aider à remporter la médaille d'or.
* * *
SUZANNE WILSON
M. Ted White (North Vancouver, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais féliciter Suzanne Wilson, de North Vancouver, d'avoir terminé son projet de photos du millénaire intitulé Your House/Our Home.
Ce qui va surprendre les libéraux, c'est qu'elle a terminé son projet sans avoir recours à un seul sou des deniers publics. Elle l'a réalisé entièrement avec son argent et des dons de partisans.
Voici ce que Suzanne a dit à ce sujet: «L'objectif de mon projet photographique de l'an 2000, Your House/Our Home, consiste à laisser un document visuel et écrit sur les maisons des familles de la ville de North Vancouver en l'an 2000.»
Elle a réussi son pari. Ce projet, qui comporte 2 000 photographies et textes reflète l'initiative individuelle et la créativité. Je suis fier de souligner aujourd'hui ses réalisations à la Chambre.
L'exposition de Suzanne obtient mon vote comme le meilleur projet du millénaire au Canada, bien avant les dinosaures de béton, les jardins de fines herbes et les pigeons en papier mâché, tous ces projets dont le Bureau du Canada pour le millénaire des libéraux a approuvé le financement en 1999 et 2000.
* * *
LE DRAPEAU CANADIEN
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, chacun sait que c'est aujourd'hui la Saint-Valentin. J'aimerais quant à moi méditer sur un autre symbole cher au Canada et aux Canadiens, le drapeau canadien. Ce sera demain le 36e anniversaire du premier jour où le drapeau est devenu notre symbole national.
Notre drapeau est plus qu'une pièce d'étoffe de couleur, c'est le symbole d'une nation reconnue dans le monde entier. Demain, cela fera 36 ans que le drapeau a été hissé pour la première fois au-dessus du Parlement et est devenu le symbole officiel d'une grande nation.
Il y a plusieurs années, j'ai fait la promotion du Jour du drapeau dans plusieurs écoles élémentaires afin de permettre aux jeunes Canadiens de mieux comprendre l'importance de notre symbole national. Je suis heureux de dire que cette initiative a fait du chemin et que c'est maintenant une tradition annuelle pour moi.
Demain, je célébrerai le Jour du drapeau avec le personnel et les élèves de la Good Shepherd Catholic Elementary School et de la Gordon B. Attersley Public School, dans ma circonscription. J'espère que tous les Canadiens prendront quelques minutes pour méditer sur notre drapeau qui incarne notre héritage commun.
* * *
MARKHAM
M. John McCallum (Markham, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais remercier les habitants de Markham pour cette splendide victoire remportée sur l'Alliance canadienne le 27 novembre et pour la possibilité qu'ils m'ont donnée de les représenter au cours des années à venir.
Je veillerai, avec d'autres, à défendre et à promouvoir la position de capitale de la technologie de pointe qu'occupe Markham au Canada, ce qui veut dire en gros qu'Ottawa doit faire attention. Je m'efforcerai aussi avec d'autres de réduire les problèmes d'engorgement en matière d'immigration et de transports.
Plus de la moitié des habitants de Markham sont des néo-Canadiens et la ville connaît une très rapide croissance démographique. Résultat, nous avons de nombreuses cérémonies de la citoyenneté. Je participerai à l'une de ces cérémonies demain et, je l'espère, à beaucoup d'autres encore au cours des prochaines années.
* * *
[Français]
LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE RÉGIONAL
M. Georges Farrah (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, Lib.): Monsieur le Président, le 5 février dernier, l'honorable ministre du Revenu national et secrétaire d'État de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec a procédé à des annonces d'investissements de notre gouvernement dans 11 projets réalisés en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine.
Cette injection de près de deux millions de dollars dans l'économie régionale entraînera des investissements globaux de quelque sept millions de dollars. De plus, l'intervention de notre gouvernement permettra la création et le maintien d'une centaine d'emplois en Gaspésie et aux Îles.
Ces contributions sont un exemple concret des engagements pris par notre gouvernement envers la population de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine. Elles illustrent bien notre volonté de soutenir adéquatement la relance économique de ces régions.
* * *
[Traduction]
L'ALLOCATION POUR FRAIS DE CHAUFFAGE
M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la tentative du gouvernement de se faire du capital politique auprès des Canadiens en leur remboursant une partie des frais de chauffage s'est soldée par une échec lamentable. Les Canadiens sont tous directement touchés par le coût élevé de l'énergie, mais seulement une poignée d'entre eux ont droit à la toute dernière caisse noire de création libérale. Il est totalement irresponsable d'envoyer des chèques de remboursement à des détenus et à des personnes décédées, alors que des millions de personnes en difficultés financières sont laissées pour compte.
Quelles sont les priorités du gouvernement? Tandis que les Canadiens gèlent, les victimes de l'hépatite C attendent toujours les indemnités promises par le gouvernement; nos braves marins de la marine marchande ont attendu des décennies entières leurs indemnités et visitent régulièrement les banques alimentaires pour tenir le coup; et des familles d'agriculteurs sont forcées d'abandonner leurs exploitations faute de recevoir une indemnisation équitable.
Toutefois, je connais une solution pour régler rapidement le problème du coût élevé du chauffage, et c'est de supprimer la TPS sur tous les le mazout domestique pour que tous les Canadiens puissent souffler un peu. Comme la nourriture et les vêtements, le chauffage domestique est indispensable à tous.
J'exhorte le gouvernement à cesser d'acheter des votes et à offrir enfin des services gouvernementaux légitimes aux Canadiens désespérés.
* * *
LES MALADIES CARDIOVASCULAIRES
Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, les maladies cardiovasculaires sont un véritable fléau au Canada. En effet, elle comptent pour 37 p. 100 des décès enregistrés chaque année au pays, en plus de faire souffrir bon nombre de personnes et de diminuer la qualité de leur vie.
On estime à plus de 20 milliards de dollars par an le coût des maladies cardiovasculaires en dépenses directes de santé, en invalidité, perte d'emplois et décès prématurés.
La Fondation des maladies du coeur du Canada et la Société canadienne de cardiologie nous demandent instamment d'envisager une stratégie concertée pour faire face à des maladies invalidantes comme les maladies du coeur et les accidents cérébrovasculaires. Une telle stratégie constituerait une première étape vers l'élaboration d'une approche nationale intégrée comprenant des actions de prévention et de dépistage de ces conditions chroniques.
Je félicite ces deux grands organismes pour leur énergie et leurs efforts et j'invite tous les députés de cette législature à prendre connaissance de la documentation qui leur a été remise et d'accorder leur appui à ce noble effort.
* * *
[Français]
LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, aujourd'hui, c'est la fête de l'amour, et cette nuit, j'ai rêvé. J'ai rêvé de Cupidon. Dans ce rêve tout à fait étrange, j'en conviens, un charmant chérubin voulait m'offrir des chocolats.
Mais surtaxé par l'éternelle TPS et vivant dans l'ombre d'une insidieuse taxe sur l'emploi, il ne pouvait se permettre cet achat.
Ensuite, il a voulu exprimer son amour, mais des bâillons et un «bill si vain» lui ont envoyé au visage les limites de son droit d'expression.
Puis il a insisté et voulu crier sans retenue. Brave et le coeur rempli d'espoir, il a réussi. Enfin! Il l'a dit. Mais dans la capitale unilingue, personne ne l'a compris.
Déprimé, Cupidon s'en est allé. On l'aurait arrêté un arc à la main, alors qu'il était pris dans un bouchon, attendant après ses ponts. Maintenant, il risque la prison. Mais voyons, Cupidon n'est qu'un gamin! Quelle chance, je me suis enfin réveillée.
En arrivant au bureau, ce matin, on annonçait la seconde lecture du projet de loi C-7. J'ai eu envie de brailler!
* * *
[Traduction]
NIAGARA-CENTRE
M. Tony Tirabassi (Niagara-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter aujourd'hui mes collègues à l'occasion de leur élection ou réélection à la Chambre. Il me tarde de travailler avec tous les députés au cours de cette trente-septième législature.
Je remercie les citoyens de ma circonscription d'avoir voté en ma faveur le 27 novembre dernier. Je remercie tout particulièrement ma famille, mes amis et mes partisans de la ville de Thorold, où j'habite, pour le dévouement dont ils ont fait preuve à mon égard pendant la période de plus de 15 ans au cours de laquelle j'ai été conseiller municipal. La confiance renouvelée qu'ils m'ont accordée au fil des ans m'a permis d'acquérir l'expérience et la stature politique nécessaires pour prendre du service dans la grande circonscription de Niagara-Centre.
Le gouvernement a présenté un programme qui aborde diverses questions. J'ai l'intention de tirer de ce programme celles qui présentent de l'intérêt pour mes électeurs, ce qui me permettra de dégager une perspective nationale afin que tous les Canadiens puissent bénéficier de mes travaux et décisions.
* * *
LE COMMERCE
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le Canada a envoyé hier une équipe de scientifiques au Brésil et l'a chargée de déterminer si l'interdiction du boeuf brésilien était justifiée. Je sais pertinemment que l'interdiction n'a rien à voir avec le boeuf et qu'elle tient aux subventions illégales que le gouvernement brésilien a accordées à son fabricant d'aéronefs, Embraer.
Le gouvernement du Canada a obtenu le droit d'adopter des mesures de rétorsion à l'endroit du Brésil, mais il refuse de le faire. Néanmoins, il cherche avec insistance à se cacher derrière le voile de la maladie de la vache folle, et à forcer le Mexique et les États-Unis à interdire aussi le boeuf brésilien, ce que ces deux pays refusent de faire.
Si le gouvernement poursuit dans cette veine, il nuira de façon permanente à notre réputation de pays se livrant à une concurrence loyale. La décision d'accuser sans justification un autre pays de fournir des produits porteurs de la maladie de la vache folle ne peut être qualifiée que de trompeuse et malhonnête. Je prie instamment le gouvernement de déposer aujourd'hui tous les documents dont il s'est servi pour accuser le Brésil de faire peser la menace de la maladie de la vache folle.
Je crains que nos partenaires commerciaux ne commencent à croire que c'est le gouvernement canadien qui est atteint de la maladie de la vache folle.
* * *
HAZEL MCCALLION
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, Hazel McCallion, maire de Mississauga, célèbre aujourd'hui son 80e anniversaire.
Née sur la côte de la Gaspésie, Hazel a travaillé dans le milieu des affaires pendant 20 ans puis, en 1967, a opté pour la politique. Elle habitait Streetsville avec son conjoint adoré, Sam; elle est devenue présidente du conseil d'aménagement, puis préfet adjoint et préfet de la municipalité. En 1970, elle a été élue maire de Streetsville.
En 1974, la région de Peel et la ville de Mississauga ont été créées. Hazel a combattu vigoureusement cette mesure et a essayé de conserver l'identité de Streetsville. Elle a perdu la bataille mais gagné la guerre car Streetsville est maintenant un secteur dynamique de Mississauga.
En 1978, elle a été élue maire de Mississauga. Nous avons tous appris à apprécier et à respecter son dévouement et son incroyable éthique de travail.
Ce soir, Mississauga tiendra en son honneur la plus grande soirée d'anniversaire jamais vue, en hommage à une femme qui aime profondément ses gens et sa ville. Les milliers de personnes qui chérissent vraiment Hazel se réuniront pour la fêter. Je souhaite bonne fête à Hazel et lui offre mes meilleurs voeux.
* * *
LE MOIS DE L'HISTOIRE DES NOIRS
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Monsieur le Président, en 1996, le Parlement a déclaré que le mois de février serait le Mois de l'histoire des noirs. J'ai l'honneur, en ma qualité de députée représentant les localités de Preston et Cherrybrook, de rendre hommage à la contribution des noirs de la Nouvelle-Écosse à ce pays.
Depuis que les premiers loyalistes noirs sont arrivés chez nous pour gagner durement leur vie sur nos côtes rocailleuses, les noirs de la Nouvelle-Écosse se battent contre le racisme, la pauvreté, l'injustice et l'ignorance et luttent pour assurer la subsistance de leurs familles et bâtir de solides collectivités.
Au nom de la Chambre, je tiens à rendre hommage à ceux d'hier et d'aujourd'hui qui ont inlassablement porté le flambeau: à des artistes comme Sylvia Hamilton, Jerimiah Sparks et Walter Borden; aux Happy Quilters de Cherrybrook; à la Nova Scotia Mass Choir; à des enseignantes comme Ruth Johnson; aux chefs religieux comme Donald Skier et William P. Oliver; aux politiciens comme Gordon Earle, Wayne Adams et Yvonne Atwell; aux athlètes comme George Dixon, Ray Downey et Kirk Johnson; et aux défenseurs des droits de la personne comme Rocky Jones et Calvin Ruck.
Alors que nous nous efforçons de bâtir un monde meilleur, les Canadiens auraient beaucoup à apprendre des noirs de la Nouvelle-Écosse quant à l'importance de la famille et de la foi.
* * *
[Français]
LE GOUVERNEMENT LIBÉRAL
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, voici une variation sur un texte de Jacques Brel:
Quand on n'a que l'amour
À s'offrir en partage
Et un peu de patronage
Pour seule preuve d'amour
Quand on n'a que l'amour
Les libéraux et moi
Pour qu'éclatent maintes fois
Les scandales au grand jour
Quand on n'a que l'amour
Pour croire à vos promesses
D'abolir TPS
Et d'y croire toujours
Quand on n'a que l'amour,
Des promesses de ponts
Pour unique chanson
Et unique secours
Quand on n'a que l'amour
Patrimoine Canada
Son drapeau, son combat
Le tapisser toujours
Quand on n'a que l'amour
Pour parler en bâillons
Et rien qu'une chanson
Pour convaincre des sourds
Alors sans avoir rien
Que la force d'aimer
Nous aurons dans nos mains
Amis, le pays rêvé
* * *
LA FÊTE DE LA SAINT-VALENTIN
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui la fête de la Saint-Valentin, la journée de l'année où l'on célèbre l'amour sous toutes ses formes, la journée où l'on réalise que l'amour est un besoin et est essentiel à la vie de tout être humain.
Je veux exprimer le voeu que l'on étende cette fête aux personnes moins gâtées par la vie et que l'on ait une pensée toute spéciale pour eux, pour les gens qui sont seuls et n'ont personne avec qui partager leur amour, les enfants qui vivent dans la violence et sont privés de tendresse, de caresses et d'affection, nos aînés que trop souvent on a délaissés et oubliés dans la solitude de leur résidence.
Faisons de ce jour celui de la paix et de l'amour. Laissons voler nos pensées d'un bout à l'autre du Canada pour que la flèche de Cupidon atteigne et rapproche tous les Canadiens et Canadiennes.
* * *
[Traduction]
LA CONSTRUCTION NAVALE
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, au cours de la campagne électorale de l'automne dernier, le ministre de l'Industrie a parcouru toute la région de l'Atlantique en s'engageant personnellement auprès des travailleurs des chantiers maritimes de Saint John, Halifax, Dartmouth et St. John's, à Terre-Neuve, à déposer un rapport sur la construction navale vers la mi-janvier 2001.
Le ministre a malheureusement décidé de reporter à plus tard la publication du rapport sur la construction navale. Des sources gouvernementales proches du ministre ont confirmé que le rapport est terminé et traîne sur le bureau du ministre. Pourquoi le ministre de l'Industrie n'a-t-il pas rendu le rapport public? Pourquoi ne le dépose-t-il pas aujourd'hui à la Chambre?
Pourquoi le gouvernement continue-t-il de méconnaître les graves problèmes auxquels est confronté notre secteur de la construction navale, et pourquoi tient-il à prolonger les difficultés qu'éprouvent nos travailleurs des chantiers maritimes et leurs familles?
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LES SUBVENTIONS ET CONTRIBUTIONS
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, l'opposition officielle croit que les Canadiens veulent des gouvernements qui sont au-dessus de tout soupçon, mais pas au-dessus de la loi. C'est pourquoi, à mesure que l'affaire Shawinigan continue de prendre de l'ampleur, nous continuons d'exiger des comptes.
Les députés se souviendront de M. Claude Gauthier comme étant l'homme qui a acheté un terrain au premier ministre en 1996 et qui a ensuite fait un don de 10 000 $ à la caisse électorale de ce dernier l'année suivante, soit en 1997. C'est le même homme qui a obtenu un contrat de 6 millions de dollars du gouvernement qu'il n'aurait pas dû avoir et une subvention d'un million de dollars du fonds transitoire pour la création d'emplois. Nous découvrons maintenant que M. Gauthier a également eu la chance de bénéficier de 9 millions de dollars de fonds provenant d'investisseurs immigrants suite à une rencontre entre le premier ministre et ces investisseurs.
Pourquoi cette situation de conflit d'intérêts n'inquiète-t-elle pas le premier ministre?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les allégations de conflit d'intérêts faites par le député sont complètement fausses. Je répète que le programme des investisseurs immigrants au Québec est un programme provincial qui est administré par la province. C'est elle qui prend toutes les décisions relatives aux fonds des investisseurs immigrants. Les règles sont établies par le gouvernement du Québec. Le premier ministre n'a rien à voir avec ces questions et il n'a joué aucun rôle à cet égard.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il n'est d'accord ni avec le conseiller en éthique ni avec le vérificateur général. Je tiens à lui rappeler que Claude Gauthier a acheté un terrain au premier ministre et que cette transaction a contribué à faire augmenter la valeur des actions du premier ministre dans le terrain de golf voisin. Il a ensuite fait un don de 10 000 $ à la caisse électorale du premier ministre. Durant la même période, M. Gauthier a reçu 7 millions de dollars dans le cadre de programmes fédéraux, argent auquel il n'avait pas droit pour la majeure partie selon le vérificateur général.
Combien de millions devront-ils être versés à M. Gauthier avant que le solliciteur général n'exige la tenue d'une enquête indépendante sur cette affaire?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je répète encore une fois que ce que le chef de l'opposition dit au sujet des opinions du conseiller en éthique relativement à cette affaire est totalement faux.
Dans une interview, le conseiller en éthique a fait des remarques spéculatives au sujet d'une situation hypothétique. Il a cependant insisté pour dire qu'il n'a pas changé sa position de novembre dernier, qu'il a réitérée en janvier, à l'effet que le premier ministre a agi dans les règles et ne s'est pas mis en situation de conflit d'intérêts. Le conseiller en éthique a maintenu cette position, ce que le chef de l'opposition doit admettre.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est question ici de choses qui peuvent remonter jusqu'à il y a quatre ans. C'est le conseiller en éthique qui trouve l'affaire Gauthier douteuse. C'est le vérificateur général qui a soulevé des questions au sujet de l'octroi de ces fonds. Cela vient du conseiller en éthique et du vérificateur général. Pourquoi ne pas régler une fois pour toutes cette question fondamentale de conflit d'intérêts?
Il est très clair que, à mesure que les documents continuent de s'empiler dans ce dossier, les questions se font de plus en plus nombreuses. Je voudrais savoir si le premier ministre est au courant d'autres choses qu'il ne veut pas que nous sachions et si c'est pour cette raison qu'il ne permettra pas au solliciteur général d'exiger la tenue d'une enquête indépendante.
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la réponse courte est non, absolument pas. Le premier ministre a agi correctement en respectant les règles d'éthique. C'est ce que le conseiller en éthique a conclu et c'est ce qu'il ne cesse de répéter.
Le chef de l'opposition devrait nous dire pourquoi il soulève ces questions. Est-ce parce qu'il ne veut pas que les Canadiens sachent qu'il croit vraiment que nous faisons du bon travail dans des secteurs comme l'économie, la santé et les besoins des enfants? Pourquoi le chef de l'opposition ne nous offre-t-il pas des fleurs à l'occasion de la Saint-Valentin au lieu de faire des affirmations fausses et trompeuses?
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est une véritable blague.
Le premier ministre a bénéficié de la vente du terrain adjacent au terrain de golf, ce qui...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. De toute évidence, la réception d'un valentin excite les esprits. La députée d'Edmonton-Nord a la parole et je suis certain que nous voulons tous l'entendre.
Mme Deborah Grey: Le premier ministre a bénéficié de la vente du terrain qui était adjacent au terrain de golf, ce qui a ajouté de la valeur aux actions q'il détenait dans le terrain de golf et dont il voulait se départir. Le vice-premier ministre essaie d'embrouiller la question, sans parler du bénéfice politique de 10 000 $.
Je suis certaine qu'il est avantageux de connaître M. Gauthier, mais il l'est encore plus de connaître le premier ministre. M. Gauthier a obtenu 7 millions de dollars de programmes fédéraux et un autre montant de 9 millions de dollars des fonds de l'immigrant-investisseur. Il en a tiré un avantage évident. Pourquoi le premier ministre ne reconnaît-il pas qu'il craint la tenue de cette enquête indépendante?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le conseiller en éthique a déjà fait une enquête et a confirmé que le premier ministre a respecté les règles. Si quelqu'un veut faire une enquête, libre à lui de le faire. Ni le premier ministre ni le solliciteur général ne sont intervenus dans un sens ou dans l'autre.
Il a été établi que le premier ministre n'avait pas d'intérêts dans le terrain de golf au moment de l'achat du terrain. M. Gauthier a soumissionné en vue d'obtenir un contrat de l'ACDI et il a obtenu ce contrat parce que sa soumission était la plus basse. Pourquoi l'Alliance refuse-t-elle d'admettre ce simple fait?
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous refusons de l'admettre parce que nous savons que ce n'est tout simplement pas vrai. Ce n'est pas vrai et le vice-premier ministre ne peut absolument pas défendre ce point de vue.
Les directives sur les conflits d'intérêts prévoient qu'il doit non seulement y avoir absence de conflit d'intérêts maiségalement absence d'apparence de conflit d'intérêts. Il peut tourner autour du pot autant qu'il veut, mais ça ne tient tout simplement pas debout. La relation entre Claude Gauthier et le premier ministre paraît très mal.
Si ces transactions sont aussi irréprochables que le dit tous les jours le vice-premier ministre, pourquoi le gouvernement n'ordonne-t-il tout simplement pas la tenue d'une enquête indépendante afin de tirer les choses au clair?
L'hon. Maria Minna (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, la députée continue de parler du projet de l'ACDI. Premièrement, le président de l'ACDI a reçu les soumissions de sept sociétés et la soumission de cette société est de 30 p. 100 inférieure à celles des autres sociétés. Le processus de soumission était simple.
* * *
[Français]
TÉLÉFILM CANADA
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, la nouvelle politique du long métrage de Téléfilm Canada vise principalement à ce que le cinéma canadien augmente sa part de marché de 1 p. 100 à 5 p. 100. Cette politique est coupée de la réalité québécoise, puisque les producteurs et les films québécois atteignent déjà 6,5 p. 100 du marché. Il s'agit donc d'un problème canadien auquel on apporte une solution canadienne, sans aucun égard à l'industrie québécoise.
Je demande à la ministre du Patrimoine si elle réalise que la nouvelle politique de Téléfilm Canada ne rejoint qu'un seul objectif, c'est-à-dire de pénaliser ceux qui sont déjà performants, soit les producteurs québécois?
[Traduction]
Mme Sarmite Bulte (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de dire que la nouvelle politique cinématographique canadienne vise à promouvoir la qualité et la diversité des longs métrages canadiens ainsi que leur accessibilité.
Actuellement, Téléfilm Canada poursuit ses consultations avec toutes les parties intéressées et compte annoncer les nouvelles lignes directrices à la fin février.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, ce qui m'inquiète quant à ce critère de diversité, c'est qu'on va exiger des films canadiens qu'ils rapportent 240 000 $ de recettes aux guichets, alors que les films québécois, eux, devront générer 455 000 $ pour répondre aux mêmes critères.
Je demande à la ministre comment peut-elle expliquer que les producteurs de cinéma québécois devraient faire face à des critères deux fois plus élevés, alors qu'ils opèrent dans un marché trois fois plus petit?
[Traduction]
Mme Sarmite Bulte (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme le sait le chef du Bloc québécois, la politique canadienne sur les téléfilms a été élaborée à la suite de consultations avec un grand nombre de producteurs de films canadiens, dont des Québécois.
La semaine dernière, quand des membres de l'Association canadienne de production de film et télévision se sont réunis ici, ils ont applaudi la ministre à propos des nouvelles consultations qu'elle tient avec Téléfilm Canada.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, la situation que risque de créer le Fonds d'aide à l'industrie du film sera très certainement préjudiciable aux producteurs québécois, parce qu'il leur fixera des objectifs d'entrée au guichets plus élevés qu'ailleurs au Canada.
Le programme de d'aide de Téléfilm Canada ne risque-t-il pas, dans sa forme actuelle, de faire des producteurs québécois des victimes de leur propre succès?
[Traduction]
Mme Sarmite Bulte (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je crois que la députée n'a pas entendu la réponse que j'ai donnée plus tôt.
La ministre poursuit ses consultations. Téléfilm Canada continue ses consultations avec tous les producteurs de films au Canada, y compris ceux du Québec. Les lignes directrices seront annoncées à la fin du mois.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Justement, monsieur le Président, il appert que le président de Téléfilm Canada soit ouvert à l'idée de tenir compte de la situation spécifique du Québec en proposant un programme mieux adapté au contexte.
Je demande donc à la ministre si elle entend appuyer le président de Téléfilm Canada dans son orientation, plutôt que de maintenir un système nettement plus exigeant pour les producteurs québécois?
[Traduction]
Mme Sarmite Bulte (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je vais répéter à nouveau ce que j'ai dit. Lorsque nous aurons terminé toutes nos consultations, nous présenterons la politique.
* * *
LE COMMERCE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, la Cour suprême de la Colombie-Britannique doit bientôt entendre un appel de la décision prise dans le cadre de l'ALENA qui a accordé le versement de 17 millions de dollars en dommages-intérêts à la société Metalclad.
Pourquoi? Parce que l'ALENA a appuyé le désir de Metalclad d'établir un site d'élimination de déchets toxiques contre la volonté des citoyens et de leur représentants démocratiquement élus. Le Canada interviendra dans cette cause sans précédent.
De quel côté le gouvernement se rangera-t-il? De celui des pollueurs ou de celui des citoyens qui ont droit à un environnement sain?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme toujours, nous tenterons de protéger les intérêts de tous les Canadiens.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, la ville de Vancouver a récemment demandé au gouvernement fédéral de refuser de signer toute entente commerciale comprenant des dispositions sur les droits des investisseurs comme celle que l'on retrouve au chapitre 11 de l'ALENA.
Le gouvernement a l'intention d'étendre l'ALENA à tout l'hémisphère ouest. Le ministre du commerce fait allusion à des dispositions liant les investisseurs et l'État, mais des allusions ne suffisent pas pour protéger les Canadiens.
Le ministre est-il prêt à garantir aujourd'hui que le gouvernement ne signera en aucune circonstance quoi que ce soit en vertu de la Zone de libre-échange des Amériques ou de tout autre entente commerciale qui favorise les sociétés par rapport aux citoyens?
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le ministre a indiqué clairement à plusieurs reprises que le Canada appuie un processus ouvert et transparent.
Nous avons reçu un certain nombre de soumissions écrites d'ONG. Nous continuons de recevoir chaque jour des soumissions qui nous sont transmises par divers groupes intéressés et des Canadiens, en réaction à notre site Web. Le Canada verra à ce que sa position ne soit établie qu'après consultation auprès de tous les Canadiens.
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, les exportations canadiennes de potasse vers le Brésil représentent 210 millions de dollars annuellement. Les autorités de Santé Canada ont déclaré publiquement qu'aucune preuve scientifique ne justifie la décision d'interdire les importations de boeuf brésilien.
Les débardeurs brésiliens ont annoncé qu'ils cesseraient dès demain de décharger les bâtiments canadiens, bien qu'il y ait à l'heure actuelle des cargaisons canadiennes de potasse en mer. Pourquoi le gouvernement est-il prêt à mettre en péril l'industrie de la potasse, de Sussex, au Nouveau-Brunswick, à Lanigan, en Saskatchewan?
M. Pat O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, il s'agit de toute évidence d'une question de sécurité alimentaire pour les Canadiens. Cela n'a rien à voir avec le différend que nous avons avec le Brésil.
Nous trouverions déplorable que certaines entreprises brésiliennes menacent de boycotter les produits canadiens avant même de prendre connaissance du rapport de nos experts qui se trouvent actuellement au Brésil.
* * *
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, après les nombreux messages contradictoires qui ont émané du ministère des Affaires étrangères de la Russie, nous avons appris qu'une décision devait être rendue dans un délai de dix jours quant à d'éventuelles poursuites contre Andrei Knyazev pour son implication dans le tragique accident qui a eu lieu à Ottawa.
Le délai a expiré. Le ministre des Affaires étrangères peut-il nous dire si M. Knyazev sera traduit en justice en Russie?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je crois comprendre que le délai était de dix jours ouvrables. Ce délai n'a donc pas encore expiré. J'ai toutes les raisons de continuer à faire confiance au gouvernement russe ainsi qu'à son représentant au Canada dans cette affaire.
* * *
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le conseiller en éthique a dit que les actions détenues par le premier ministre dans le club de golf constituaient une créance irrécouvrable et a admis que le premier ministre risquait de subir une perte.
Le premier ministre veut éviter une perte financière. A-t-il évité une telle perte en recevant des avantages pour l'Auberge Grand-Mère?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, non.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le conseiller en éthique a également dit en parlant du premier ministre que, en fin de compte, la question était de savoir s'il serait pleinement remboursé ou s'il allait devoir se contenter de moins. Un avantage n'est pas seulement un gain pécuniaire. Il peut s'agir aussi d'éviter une perte financière.
Il est clair que le premier ministre a évité de perdre gros dans le club de golf en tenant l'Auberge Grand-Mère à flot. S'il peut expliquer ses gestes, pourquoi s'oppose-t-il à la tenue d'une enquête indépendante?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je crois savoir que le conseiller en éthique a consulté le fiduciaire et un avocat du premier ministre. Les mesures visant à régler la dette en question ont été prises, si je comprends bien, après consultation approfondie et avec le plein accord du conseiller en éthique.
Comme toujours, la prémisse de la question du député est totalement fausse. Il devrait rendre service à la Chambre, et aux Canadiens, et retirer ses insinuations. Pourquoi ne pas soulever des questions qui intéressent vraiment les Canadiens? Pourquoi ne se préoccupe-t-il pas de la santé? Pourquoi ne s'intéresse-t-il pas à notre système juridique? L'opposition n'attache plus d'importance à ces questions.
* * *
[Français]
LES SURPLUS BUDGÉTAIRES
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, les surplus gouvernementaux, après neuf mois d'exercice financier, seraient plus élevés de 59 p. 100 par rapport à la même époque l'an dernier.
Ce qui est plutôt gênant, c'est que ces chiffres soient rendus publics au moment même où le gouvernement s'apprête à adopter la loi qui lui permettra de faire main basse sur la caisse de l'assurance-emploi, sans avoir à rendre compte à personne, une loi qui va retourner à peine 8 p. 100 de ce qu'elle a pris aux chômeurs et chômeuses.
Comment la ministre du Développement des ressources humaines peut-elle accepter que le tiers du surplus gouvernemental qui s'élève à plus de 17 milliards de dollars provienne de la caisse de l'assurance-emploi?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, grâce à nos politiques fiscales, nous allons avoir un grand surplus, c'est évident. Je veux féliciter tous les Canadiens et Canadiennes qui y ont contribué.
Comme nous l'avons toujours dit, il y a eu des baisses dans les prestations et dans les frais, mais nous avons augmenté les bénéfices dans ce dossier. Nous sommes très contents des résultats.
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement n'est-il pas gêné d'utiliser 43¢ de chaque dollar de cotisation payé par les employés et les employeurs à l'assurance-emploi pour payer la dette canadienne?
Ne trouve-t-il pas odieux d'utiliser une assurance payée par les cotisants pour régler la dette accumulée, alors que plus de la moitié des gens sans travail ne sont même pas admissibles aux prestations?
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, les réductions dans le fardeau fiscal pour les employeurs et les employés étaient, avant cette année, de 6,4 milliards de dollars et avec les baisses de cette année, elles ont augmenté d'un autre 1,2 milliard de dollars. Ça, c'est très bon.
* * *
[Traduction]
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier, le vice-premier ministre a dit à la Chambre qu'il était acceptable et même justifiable que le premier ministre, parce qu'il a été réélu, enfreigne un code d'éthique ou soit en conflit d'intérêts.
Ma question intéresse bel et bien les Canadiens. Pourquoi le premier ministre semble-t-il être la seule personne au Canada qui puisse se placer au-dessus d'un code d'éthique, des règles sur les conflits d'intérêts et peut-être même de la loi aussi?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député dénature complètement mes propos. Je n'ai rien dit de tel, et le député devrait se rétracter. S'il ne le fait pas, cela minera et rendra douteux tout ce qu'il dira à la Chambre tant qu'il y siégera, et son mandat ne devrait pas durer bien longtemps.
Le premier ministre se conforme au code d'éthique. C'est un fait, et le conseiller en éthique l'a confirmé.
M. Randy White (Langley—Abbotsford, Alliance canadienne): Monsieur le Président, pareils propos ne peuvent venir que d'en face. Le premier ministre se trouve en Chine en ce moment, et il exprime du mépris pour le système de justice de ce pays, mais, au Canada, on nous dit qu'il est au-dessus de son propre code d'éthique. Comment le premier ministre explique-t-il qu'il ne pratique pas au Canada ce qu'il prêche en Chine?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député se trompe. Le premier ministre ne manque pas à son propre code d'éthique. Il s'y conforme, et le conseiller en éthique le confirme.
Il y a lieu d'être fiers du fait que notre premier ministre défend les droits de la personne en Chine au lieu de débiter des balivernes comme celles que le député de l'Alliance canadienne inflige aujourd'hui à la Chambre.
* * *
[Français]
LE SOMMET DES AMÉRIQUES
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, contrairement à ce qu'avançait le vice-premier ministre, le Bloc québécois, dans le dossier de la Zone de libre-échange des Amériques, est porteur du consensus québécois.
Dans un rapport unanime, et j'insiste sur le terme «unanime», la Commission des institutions de l'Assemblée nationale du Québec demande au gouvernement du Canada de rendre périodiquement compte de l'évolution des négociations aux tables sectorielles.
Comment le gouvernement pense-t-il que la population québécoise et canadienne puisse se faire une idée de la validité des positions canadiennes si elle ne connaît pas ce qui est sur la table, si elle n'a pas les textes de base sur quoi porte la négociation?
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, cela doit faire maintenant quatre ou cinq fois que j'offre au député et à ses collègues une session d'information au sujet du Sommet des Amériques, pour qu'ils puissent se renseigner avant de poser de telles questions.
L'offre est toujours là. On est prêts à lui faire ces sessions d'information, ces sessions de briefing, s'il le veut, en latin. On est prêts à les faire le plus tôt possible pour son propre bénéfice.
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, j'ai déjà mentionné à la Chambre que ce n'est pas d'une séance de briefing dont on a besoin, ce sont des textes de base. Cela dit, la Commission des institutions de l'Assemblée nationale du Québec demande unanimement, et je cite: «Que l'accord final de la Zone de libre-échange des Amériques soit soumis aux assemblées élues du Canada avant sa ratification par le gouvernement fédéral.»
Le gouvernement s'engage-t-il, comme c'est le cas au Congrès américain, à ce que l'accord final de la Zone de libre-échange des Amériques soit débattu et fasse l'objet d'un vote à la Chambre?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, selon nos informations, dès que nos documents sont terminés, ils sont publiés sur Internet. Ils sont publics et nous allons continuer avec cette politique ouverte.
* * *
[Traduction]
LES SUBVENTIONS ET LES CONTRIBUTIONS
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le vice-premier ministre a déclaré encore une fois aujourd'hui que le Québec gère le fonds des immigrants investisseurs.
Ce qu'il a omis de dire, c'est que le Québec ne décide pas où l'argent est investi. Cette responsabilité incombe aux courtiers qui ont rencontré le premier ministre quelques jours seulement avant que des millions de dollars ne commencent à être investis dans Shawinigan. Comment le vice-premier ministre peut-il ne pas voir qu'il y a là conflit d'intérêts?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ne comprends pas que le député ne puisse comprendre que les courtiers exercent leurs activités conformément aux règles établies par le Québec dans le cadre de son programme des immigrants investisseurs?
Le premier ministre a clairement précisé qu'il n'avait jamais discuté avec un des courtiers en cause d'une initiative ou d'un projet quelconque proposé dans le cadre du programme québécois des immigrants investisseurs.
M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le premier ministre a clairement précisé que ses actions avaient été versées dans une fiducie sans droit de regard en 1993. Nous savons maintenant qu'il détenait encore ces actions en 1996. Elles étaient en sa possession jusqu'en 1996.
N'est-il pas juste que ce n'est pas sur cette fiducie mais bien sur le manque d'éthique du premier ministre que les libéraux préfèrent ne pas avoir un droit de regard?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en écoutant les allégations du député, je sais ce que veut dire le vieil adage: «Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir».
Il refuse de reconnaître que, au cours de la période en question, soit en 1996, le premier ministre ne détenait plus les actions. Le conseiller en éthique a confirmé au Comité de l'industrie de la Chambre que le premier ministre ne détenait plus ces actions.
Si le député veut préserver le respect que lui voue la Chambre, il devrait retirer ces allégations injustifiées et incorrectes.
* * *
[Français]
LES JEUX DE LA FRANCOPHONIE
M. Dominic LeBlanc (Beauséjour—Petitcodiac, Lib.): Monsieur le Président, quelle est la réaction du ministre responsable des IVe Jeux de la Francophonie d'Ottawa-Hull, face aux déclarations d'hier du Bloc québécois, selon lesquelles les Franco-Ontariens ne sont pas dignes d'accueillir les Jeux de la Francophonie l'été prochain?
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand regret que j'ai appris la déclaration d'un député du Bloc hier, qui prétendait que parce que nous vivions en milieu minoritaire à Ottawa, nous n'avions pas le droit, comme francophones dans ce pays, d'accueillir les Jeux de la Francophonie. Nous sommes des citoyens à part entière, nonobstant ce que veut faire de nous le Bloc.
* * *
[Traduction]
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères et concerne la plus grave menace aux droits de la personne, soit la possibilité d'une guerre nucléaire.
Le gouvernement chinois a fermement dénoncé le projet américain du système national de défense antimissile, qui violerait le Traité ABM, annulerait le Traité de non-prolifération et déclencherait une nouvelle course aux armements à l'échelle internationale.
Au cours de sa rencontre avec les dirigeants chinois, hier, le premier ministre a-t-il clairement dit que le Canada aussi s'opposait à ce projet destructeur d'une nouvelle guerre des étoiles et que le Canada n'y participerait d'aucune façon? S'il ne l'a pas dit, pourquoi? Quand le Canada cessera-t-il de tergiverser et s'opposera-t-il au projet du système national de défense antimissile?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, à ce que je vois, le Nouveau Parti démocratique dit non à tout ce qui vient des États-Unis, sauf peut-être au commerce des automobiles.
Cela dit, je pense pouvoir affirmer qu'il convient de donner aux Américains, comme ils nous l'ont demandé, le temps de définir le projet du système national de défense antimissile. Ils ont déclaré que ce n'était pas encore fait. Avant de discuter de leurs plans, non seulement avec leurs alliés, mais aussi avec les Russes et les Chinois, les Américains ont convenu avec nous que l'idée était d'assurer la sécurité du monde entier, pas seulement celle du continent.
* * *
LA LOI ÉLECTORALE DU CANADA
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au leader parlementaire du gouvernement. Aux élections de novembre dernier, des milliers de gens de tout le Canada n'étaient pas inscrits sur la liste électorale. Je crois que tous les députés conviendront que cela pose un problème.
Le ministre est-il disposé, par conséquent, à présenter des modifications à la Loi électorale du Canada pour régler ce problème et s'assurer qu'aucun citoyen canadien ne sera privé de son droit démocratique au cours d'une future campagne électorale?
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour son excellente question. Beaucoup de Canadiens, en particulier des candidats et d'éventuels députés, se sont offusqués à juste titre de ce que trop de Canadiens n'avaient pas été inscrits sur la liste électorale.
Une fois que le directeur général des élections aura déposé son rapport à la Chambre, celui-ci sera renvoyé au comité parlementaire. J'ai moi-même demandé au président du comité que cette question soit examinée en vue d'améliorer la liste. Je suis d'accord avec le député qui a soulevé la question.
* * *
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, il y a un instant, le vice-premier ministre a parlé de garder le respect de la Chambre. L'une des façons d'y parvenir serait de déposer sur le Bureau les faits qui aideraient la Chambre à se faire une idée claire des activités du premier ministre.
Le vice-premier ministre va-t-il déposer les recommandations issues de toutes les campagnes de recrutement de cadres effectuées au cours des quatre dernières années par l'agence Spencer Stuart Canada pour le compte de la Banque de développement du Canada?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, on dirait que le chef de l'Alliance et le chef des conservateurs se livrent un combat aujourd'hui pour déterminer qui va être le véritable chef de l'opposition.
L'un d'entre eux est bien connu pour sa combinaison de plongée et l'autre patauge carrément. Il y a deux jours, il a posé plusieurs questions sur ce même sujet et a découvert que le nombre des équipes de recrutement engagées n'était pas de deux mais de dix.
Le chef du Parti conservateur continue à faire des allégations qui n'ont aucun fondement. Qu'il pêche, qu'il joue au hockey ou qu'il s'amuse simplement à perdre son temps, il est temps de revenir à la réalité dans cet important dossier.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, nous n'arrêtons pas de poser des questions auxquelles on évite de répondre. Par respect pour les Canadiens et pour le Parlement, le gouvernement se doit de déposer à la Chambre les faits concernant le comportement du premier ministre.
Permettez-moi de citer le premier ministre qui, en 1994, disait dans l'un de ses discours: «J'ai promis aux Canadiens que nous leur donnerions un gouvernement honnête, et nous l'avons fait.»
Le vice-premier ministre va-t-il, afin de préserver l'honnêteté du gouvernement, déposer tous les documents concernant la transaction entre le premier ministre et la société Akimbo Development Corporation relative aux actions dans le club de golf de Grand-Mère?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la simple vérité est que le premier ministre a vendu ses actions avant de devenir premier ministre.
On me dit que tous les documents pertinents ont été examinés par le conseiller en éthique, qui a dit, le 6 mai 1999, devant le Comité de l'industrie de la Chambre, qu'il avait vu le contrat de vente. Il le décrit en ces termes: «Son libellé est très clair et relativement simple. Personne ne saurait prétendre qu'il y avait une possibilité d'options. Il s'agissait d'une vente, d'une vente sans garantie. Je sais que le premier ministre n'a pas ces actions. Je sais qu'il n'en est plus propriétaire depuis le 1er novembre 1993, ce qui à mon avis, est l'essentiel de la...»
Le Président: Le député de Lanark—Carleton a la parole.
* * *
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il y a plusieurs jours, le conseiller en éthique a déclaré que les parts du premier ministre dans le terrain de golf de Shawinigan n'étaient pas dans une fiducie sans droit de regard.
Pourquoi alors le ministre de l'Industrie a-t-il déclaré publiquement que ces parts étaient dans une fiducie sans droit de regard?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, lors d'un point de presse à l'extérieur de la Chambre, j'ai dit que les parts étaient dans une fiducie sans droit de regard, et deux phrases plus tard, j'ai fait une rectification en disant que des fiduciaires s'occupaient des avoirs.
Pour ce qui est de la demande de dépôt d'information, je tiens à dire au chef du Parti conservateur qu'il sait fort bien qu'une grande partie de cette information est assujettie à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Il sait également que si je déposais cette information, je devrais remettre ma démission dix secondes plus tard.
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les Canadiens veulent s'assurer que la population de toutes les provinces a également accès aux nominations gouvernementales et aux programmes gouvernementaux.
Le ministre de l'Industrie considère-t-il équitable ou conforme à l'éthique le fait que le premier ministre puisse intervenir auprès de la Banque de développement, du fonds des investisseurs immigrants ou de toute autre organisation pour orienter l'octroi de fonds dont il bénéficie personnellement?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je ne trouverais pas cela équitable et je suis heureux de dire que cela ne s'est pas produit. Telle est la situation.
Ce qui se arrive actuellement, c'est qu'en l'absence de preuves et de nouvelles informations, certains tentent d'utiliser systématiquement le Parlement, par le biais d'allégations et de propos diffamatoires, pour salir la réputation de quelqu'un qui sert la Chambre et son pays depuis 38 ans. Voilà ce qui se produit. Les députés d'en face le savent pertinemment et, de ce côté-ci de la Chambre, nous le savons aussi.
* * *
[Français]
LES LANGUES OFFICIELLES
M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.
Une visite des sites web des missions diplomatiques établies à Ottawa nous révèle que 75 p. 100 de ces sites n'ont aucun contenu français, alors que pour les autres 25 p. 100, le contenu français est inférieur au contenu anglais.
Le ministre est-il conscient que cette situation ne respecte pas la réalité des deux langues officielles du Canada?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le député sait très bien qu'il n'y a pas longtemps, le site web avec la plus grande portion de contenu français au monde était le site Rescol. Il acceptera alors l'idée que je suis très conscient de l'importance de notre réalité bilingue. Nous allons essayer de nous assurer que les deux langues soient également représentées sur le site web.
M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, je rappelle au ministre que la question porte sur les ambassades établies à Ottawa.
Dans cette veine, le ministre peut-il nous dire s'il entend intervenir auprès des ambassades pour leur suggérer l'utilisation des deux langues officielles du Canada, permettant ainsi aux Québécois et aux francophones du Canada de communiquer dans leur langue avec ces ambassades?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Absolument, monsieur le Président.
* * *
[Traduction]
LE CONSEILLER EN ÉTHIQUE
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le vice-premier ministre se souviendra peut-être d'avoir dit hier: «Le premier ministre ne détenait pas d'actions durant la période en question.» Il fait erreur.
Les Canadiens savent que le premier ministre a détenu des actions à l'époque où il rencontrait des immigrants investisseurs. Les Canadiens savent qu'il détenait des actions au moment où il a tenté d'obtenir le soutien financier du président de la Banque de développement du Canada.
Ma question s'adresse au vice-premier ministre. Quelles autres preuves lui faut-il?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député est aussi à côté de ses pompes dans l'Alliance canadienne qu'il ne l'était dans le Parti conservateur.
Il se trompe tout à fait en disant que le premier ministre a sollicité des fonds d'investisseurs ou de la Banque de développement du Canada. Cela a été confirmé par le conseiller en éthique. Ce que j'ai dit hier est exact et ce que dit le député aujourd'hui est erroné.
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, voyons voir s'il y a autant de brume au-dessus des Grands Bancs. La semaine dernière, nous avons posé des questions au sujet des intérêts du premier ministre dans l'hôtel Grand-Mère, et le ministre de l'Industrie a répondu et je cite le hansard: «Le premier ministre n'a tiré aucun avantage de cette situation.»
Cette affirmation contredit les mots du conseiller en éthique. Elle ne fait qu'accroître les soupçons que nourrissent les Canadiens à l'endroit du premier ministre, le chef du député. Pourquoi le député ne clarifie-t-il pas les déclarations erronées qu'il a faites à la Chambre la semaine dernière?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, à mon tour, je demande au député pourquoi ne clarifie-t-il pas et ne retire-t-il pas les affirmations erronées sur lesquelles il fonde sa question?
Le conseiller en éthique n'a pas trouvé ce que prétend le député. Le conseiller en éthique a trouvé que le premier ministre a agi de façon parfaitement correcte et légale.
* * *
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Le Canada a établi dernièrement des relations diplomatiques avec la Corée du Nord. Le régime de Pyongyang se dit intéressé à moderniser son économie par l'utilisation d'une technologie de pointe.
Étant donné que le programme nucléaire et de déploiement de missiles de la Corée du Nord a contribué au climat d'incertitude qui règne dans cette région et que la Corée du Nord s'est retirée de l'Agence internationale de l'énergie atomique, comment le Canada envisage-t-il ses liens avec ce régime sous le rapport du commerce et de la sécurité régionale, ainsi que le besoin d'encourager la Corée du Nord à réintégrer l'Agence internationale de l'énergie atomique?
L'hon. John Manley (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, en premier lieu, je pense que tous les députés savent que le président Kim Dae-Jung de la Corée du Sud a remporté le prix Nobel de la paix pour avoir favorisé l'ouverture de la péninsule coréenne et y avoir rétabli la paix. C'est un honneur bien mérité.
Le Canada a suivi son encouragement à établir des relations diplomatiques avec la Corée du Nord, augmentant ainsi nos possibilités de travailler avec les Nord-Coréens à la promotion des valeurs canadiennes, y compris les droits démocratiques et les droits de la personne, et de favoriser le commerce et le développement économique.
Pour ce qui a trait à la question de l'Agence internationale de l'énergie atomique, le Canada coordonne chaque année la présentation d'une résolution à l'Agence au cours d'une réunion annuelle concernant la Corée du Nord. Nous continuerons de le faire.
* * *
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Andy Burton (Skeena, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien. Le conseil de bande de Morricetown, dans ma circonscription, touche de son ministère un financement en fonction de la liste nominative d'étudiants inscrits dans l'arrondissement scolaire no 54.
Cet argent a été transféré à la bande par le ministère, mais la bande a refusé d'honorer son engagement de plus de 750 000 $ qui sont dus au conseil scolaire.
Pourquoi le ministère ou ses fonctionnaires ne sont-ils pas intervenus dans ce cas-ci pour forcer le conseil de bande à respecter ses engagements au lieu de retenir les crédits fédéraux destinés aux coûts de la formation scolaire?
L'hon. Robert Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je ne connais pas les détails de cette affaire, mais je tiens à dire au député que la politique du gouvernement fédéral en ce qui concerne les affaires indiennes et l'accord que nous avons conclu avec le gouvernement de la Colombie-Britannique prévoient que, si une première nation ne paie pas les frais de scolarité dus à un conseil scolaire, le gouvernement du Canada, par l'entremise du ministère des Affaires indiennes, interviendra et s'assurera que l'argent est bel et bien versé.
À ce stade-ci, il se peut que certains détails ne nous permettent pas de régler le dossier. Je vais prendre en note cette question et donner plus tard une réponse au député.
M. Andy Burton (Skeena, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre devrait être au courant. Nous avons essayé de nous mettre en rapport avec son ministère, à Vancouver, sans obtenir de réponse ni de règlement du dossier. Je me préoccupe de l'éducation des 120 enfants de la bande de Morricetown qui sont touchés par cette situation et par l'énorme manque à gagner auquel le conseil scolaire doit faire face.
Si le ministre ne peut forcer le conseil de bande à utiliser les crédits fédéraux destinés à l'éducation pour payer les droits de scolarité qu'il doit, pourquoi donner alors au conseil de bande la responsabilité d'administrer cet argent? Que fait-on de la reddition de comptes?
L'hon. Robert Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, sans connaître les détails de l'affaire, je veux préciser très clairement au député et à son parti que nous savons tous, pour avoir entendu ces affirmations durant la dernière campagne, qu'ils considèrent automatiquement qu'une première nation a tort, peu importe ce qui se produit au Canada. Ce parti croit, sans connaître au préalable les détails, que les premières nations ne peuvent administrer leurs propres affaires.
Parfois, le conseil de bande d'une première nation retient ces fonds, car le conseil scolaire lui-même ne respecte pas ses engagements à l'égard des enfants.
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[Français]
LE CRIME ORGANISÉ
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, la guerre que se livrent les bandes de motards criminels, loin de s'atténuer, est entrée dans une nouvelle phase. La fusillade d'hier après-midi, en pleine autoroute, est le signe le plus évident que ces groupes sont prêts à tout pour arriver à leurs fins.
La ministre a déclaré qu'elle entendait déposer une loi antigang rapidement. Est-ce qu'elle peut nous dire, elle qui semble plus encline à mettre les jeunes contrevenants en prison que les vrais criminels, quand exactement elle va déposer un projet de loi antigang pour doter le Canada d'une véritable loi?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député sait très bien que mon collègue, le solliciteur général, et moi consultons nos homologues provinciaux et territoriaux. Nous consultons aussi la Gendarmerie royale du Canada.
Le solliciteur général et moi avons déclaré clairement que nous présenterions une série d'amendements au Code criminel et proposerions des mesures sur les ressources et l'exécution dès que nos consultations seraient terminées.
* * *
LES ANCIENS COMBATTANTS
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, on lisait hier dans le Sun d'Ottawa que M. Norman Ryan, un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale, n'avait reçu ses médailles du ministère des Anciens combattants que récemment, soit 55 ans après la fin de la guerre.
Le ministre des Anciens combattants peut-il dire à la Chambre pourquoi cet ancien combattant a dû attendre si longtemps et pourrait-il aussi nous dire ce qu'il entend faire pour que personne d'autre ne vive une expérience semblable?
L'hon. Ronald Duhamel (ministre des Anciens combattants et secrétaire d'État (Diversification de l'économie de l'Ouest canadien) (Francophonie), Lib.): Monsieur le Président, la situation est regrettable. Il est clair qu'Anciens combattants Canada tient à ce que tous les anciens combattants qui ont mérité des décorations et des médailles les reçoivent le plus rapidement possible.
Parfois, nous n'avons pas l'adresse postale d'un ancien combattant, mais je peux garantir à la députée que chaque fois que nous recevrons une nouvelle demande, nous y donnerons suite sur-le-champ. J'invite également tous les anciens combattants qui n'ont pas reçu leurs décorations ou leurs médailles à communiquer avec le ministère des Anciens combattants où on fera en sorte qu'ils les reçoivent sans délai.
* * *
LA SANTÉ
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les propres chercheurs du gouvernement disent que le boeuf brésilien ne présente aucun danger pour la santé des Canadiens. Il s'agit d'une affaire politique et non pas de la salubrité des aliments.
Des années d'efforts pour faire en sorte que les décisions commerciales soient fondées sur des données scientifiques et non sur des questions politiques s'envolent ainsi par la fenêtre. Est-ce le ministre de l'Agriculture qui a eu l'idée de cette mesure imprudente, ou bien est-ce Capitaine Canada, autrement dit le ministre de l'Industrie? Lequel des deux?
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait vérifier les faits. Les deux personnes qui se sont exprimées à ce sujet font partie d'un ministère qui n'a rien à voir avec cela. Cette question ne les regarde pas et, honnêtement, ils n'auraient pas dû en parler.
Si nous avons pris cette décision, c'est parce que nous nous soucions de la santé des Canadiens, ce qui manifestement n'est pas le cas des députés de l'autre côté. Nous nous en tiendrons à cette décision et au besoin évaluerons les risques.
* * *
LES ANCIENS COMBATTANTS
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Anciens combattants. Les vétérans de la marine marchande canadienne luttent depuis plus de 55 ans pour obtenir une indemnisation convenable. Avant les dernières élections, le gouvernement a bien essayé de faire adopter à toute vapeur un projet de loi, mais cette mesure est morte au Feuilleton.
Le ministre des Anciens combattants aurait-il l'obligeance de dire à la Chambre et à tous les Canadiens, et plus spécialement aux vétérans de la marine marchande, quand ils pourront espérer recevoir le dernier versement de l'indemnisation qui revient si justement à ces héros, hommes et femmes, de la marine marchande?
L'hon. Ronald Duhamel (ministre des Anciens combattants et secrétaire d'État (Diversification de l'économie de l'Ouest canadien) (Francophonie), Lib.): Monsieur le Président, nous avons reçu et traité plus de 14 000 demandes. Un peu moins de 7 000 chèques, correspondant à environ la moitié des demandes, ont été envoyés à titre de premier versement.
Nous allons examiner environ 2 500 demandes et, une fois que nous saurons de quel ordre sont les chiffres, nous saurons combien d'argent il nous faudra pour faire un second versement. Je puis cependant m'engager à vérifier à ce moment-là s'il restera de l'argent.
* * *
PRÉSENCE À LA TRIBUNE
Le Président: Je signale aux députés la présence à la tribune de Son Excellence Karen Moustgaard Jespersen, ministre de l'Intérieur du Danemark.
Des voix: Bravo!
* * *
RECOURS AU RÈGLEMENT
LA PÉRIODE DES QUESTIONS ORALES
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, aujourd'hui, pendant la période des questions, le ministre de l'Industrie s'est reporté à un document qu'il avait en main et qui contient les noms des agences de recrutement de cadres dont la Banque de développement du Canada retient les services.
Il a ajouté que les agences avaient été saisies des questions qui ont été posées ces deux derniers jours. Il s'agissait de savoir qui avait fait des recherches pour la banque afin de combler des postes de direction.
Le ministre aurait-il l'obligeance de déposer ces listes à la Chambre dès aujourd'hui?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, comme la liste des noms a déjà été communiquée aux médias, je me ferai un plaisir de la déposer à la Chambre.
[Français]
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, pendant la période des questions orales, il s'est passé quelque chose qui, à mon avis, est très grave.
Le député de Beauséjour—Petitcodiac, dans une question qu'il adressait au leader du gouvernement à la Chambre, le député de Glengarry—Prescott—Russell, a déformé sciemment les propos que j'avais tenus, hier, à la Chambre, propos que je pourrais vous relire en entier, si vous me le permettez, puisqu'il s'agissait d'une déclaration en vertu de l'article 31.
Par la suite, je vais exiger que ces propos, où on m'a fait dire que la région n'était pas digne de recevoir les Jeux de la Francophonie, soient retirés du hansard, et j'exige aussi des excuses des deux députés qui ont interprété des propos que je n'avais pas tenus.
Je cite la déclaration que j'ai faite hier en vertu de l'article 31 du Règlement:
En 2001, le Canada sera l'hôte des IVe Jeux de la Francophonie, qui se tiendront à Ottawa, ville et capitale unilingue anglaise.
Cela, c'est vrai. Ces Jeux se tiendront à Hull et à Ottawa, donc, à Ottawa, c'est vrai.
Tout d'abord, selon Statistique Canada, 91 p. 100 de la population de la ville d'Ottawa parlent uniquement anglais [...]
C'est selon Statistique Canada. En outre, selon Statistique Canada, moins de 10 p. 100 de la population de la ville d'Ottawa parlent français.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Évidemment, il y a un désaccord, à tout le moins, concernant les faits dans ce cas. Mais l'honorable député a soulevé un recours au Règlement, et je lui demande quel article du Règlement est en cause ici. Je n'ai pas encore compris cela.
M. Benoît Sauvageau: Monsieur le Président, l'article du Règlement qui est en cause ici, c'est tout simplement qu'on a induit la Chambre en erreur en me faisant tenir des propos que je n'ai jamais tenus et en visant ma déclaration en vertu de l'article 31, que l'on retrouve à la page 598 du hansard d'hier, le lundi 13 février 2001.
Vous pourrez voir, monsieur le Président, que ce qui a été véhiculé à la Chambre, ce sont des faussetés, une atteinte à mon intégrité et à mon honnêteté. Je demande à ces deux députés de retirer leurs paroles et de s'excuser.
Le Président: Je crois que l'honorable député a indiqué son point de vue. Malheureusement, à la Chambre, il y a souvent des moments où un député en cite unautre et ne donne pas toute la citation, tout le discours. Nous en avons eu plusieurs exemples pendant la période des questions orales d'aujourd'hui. Souvent, dans les questions et les réponses, on cite des choses différentes d'une même lettre ou d'un même article.
Je crois que ce n'est pas un recours au Règlement si un député, à la Chambre, dit quelque chose concernant ce qu'on a dit ailleurs ou même ici à la Chambre. C'est peut-être une discussion entre les députés concernant l'interprétation de ces remarques, mais il ne revient pas au Président de juger cela comme un recours au Règlement ou de faire dire autre chose aux autres députés.
Si les deux députés qui ont dit quelque chose sur ce sujet veulent retirer leurs paroles, c'est à eux d'en décider, mais à mon avis, il n'y a pas là matière à un recours au Règlement.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, dans la sagesse de votre décision, j'aimerais simplement présenter un élément qui n'a pas été soulevé par mon collègue.
Le député de Beauséjour—Petitcodiac a mis dans la bouche de mon collègue des mots qu'il n'a jamais prononcés, à l'effet que la région d'Ottawa, que les francophones d'Ottawa étaient indignes de présenter les Jeux de la Francophonie.
C'est une accusation d'une gravité extrême qui est susceptible d'induire en erreur tous les gens qui nous écoutent en ce moment, qui n'a pas ses origines chez mon collègue, qui prend origine uniquement dans le goût de ce député et du leader du gouvernement de déformer nos propos, de nous faire mal paraître face aux francophones du reste du Canada, alors que c'est rigoureusement faux, injuste, incorrect, et ils doivent s'excuser.
Le Président: Le Président ne se souvient pas de la référence à un député en particulier pendant la question ou pendant la réponse.
J'examinerai les «bleus» d'aujourd'hui, et s'il y a autre chose à dire sur ce sujet, je reviendrai à la Chambre demain ou après-demain.
* * *
PRIVILÈGE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE—DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE
Le Président: Étant donné que quelques députés m'ont signalé que la décision que j'ai rendue hier sur la question de privilège soulevée par le député de Sarnia—Lambton suscitait une certaine confusion, j'aimerais apporter des éclaircissements sur-le-champ.
[Traduction]
Comme on peut le lire à la page 609 du compte rendu de nos délibérations, j'ai dit:
Pour traiter cette situation malencontreuse, le Bureau de régie interne s'est inspiré des principes habituels de gestion des ressources humaines...
La suite du texte devrait se lire ainsi:
...et, pour trouver une solution, l'administration de la Chambre n'a ménagé aucun effort pour tenter d'en arriver à un règlement juste et équitable avec les parties.
Je remercie les députés de leur attention.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
LE DÉVELOPPEMENT DURABLE
L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 24(2) de la Loi sur le vérificateur général, j'ai l'honneur de présenter, au nom du gouvernement et dans les deux langues officielles, 28 stratégies de développement durable.
Ces stratégies représentent l'un des moyens retenus par les ministères et organismes du gouvernement fédéral pour mener des actions décisives destinées à nous assurer de la prise en compte intégrée des questions intéressant l'environnement, l'économie et de la société, dans les futures décisions relatives à nos politiques et programmes. Cette initiative témoigne clairement de l'intérêt sérieux que porte le gouvernement à la promotion du développement durable au Canada et à l'étranger.
Dans l'esprit du développement durable, j'ai décidé de ne pas donner aux députés et sénateurs copie de ces stratégies sur support papier, sauf sur demande expresse. Les députés et les sénateurs recevront une brochure expliquant comment consulter ces documents sur l'Internet, s'ils ne le savent pas encore, mais, s'ils le souhaitent, ils pourront en obtenir une copie papier.
* * *
LES DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES
Mme Sarmite Bulte (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 34 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre les rapports de la section canadienne de l'Association parlementaire du Commonwealth concernant la 46e Conférence parlementaire du Commonwealth qui a eu lieu à Londres et à Édimbourg, du 20 au 29 septembre; le 12e colloque parlementaire qui a eu lieu dans les Bermudes, du 14 au 22 octobre; et le 23e colloque régional qui a eu lieu à Halifax, en Nouvelle-Écosse, du 19 au 26 octobre 2000.
* * *
LA LOI SUR LE MARIAGE (DEGRÉS PROHIBÉS)
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD) demande à présenter le projet de loi C-264, Loi modifiant la Loi sur le mariage (degrés prohibés) (mariage entre personnes du même sexe).
—Monsieur le Président, en ce jour de la Saint-Valentin, journée où nous célébrons l'amour et la romance, il est à propos que je présente ce projet de loi qui vise à modifier la loi fédérale sur le mariage de sorte qu'elle reconnaisse clairement les mariages entre personnes du même sexe et le droit des gais et des lesbiennes d'épouser leur partenaire s'ils le désirent.
Le projet de loi reflète l'esprit de la Charte des droits ainsi que des décisions récentes rendues par la Cour suprême du Canada et célèbre la diversité des familles canadiennes. Il ne constitue aucunement une menace au mariage hétérosexuel traditionnel ni aux traditions religieuses. Il établit plutôt que nos relations en tant que gais et lesbiennes sont aussi fortes, aimantes et sérieuses que les autres. Le Canada devrait suivre l'exemple des Pays-Bas, qui reconnaissent les mariages civils entre personnes du même sexe.
Enfin, monsieur le Président, j'ose espérer que vous me permettrez, en ce jour de la Saint-Valentin, de souhaiter une joyeuse Saint-Valentin à mon conjoint Max qui est à l'autre bout du pays, à Burnaby, en Colombie-Britannique.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA JOURNÉE DU COEUR
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC) demande à présenter le projet de loi C-265, Loi instituant la Journée du coeur: Journée de sensibilisation à la cardiopathie congénitale.
—Monsieur le Président, en ce jour de la Saint-Valentin, je crois qu'il est très à propos de présenter ce projet de loi aujourd'hui. La Journée du coeur est le titre abrégé. L'objet du projet de loi est de sensibiliser la population au problème de la cardiopathie congénitale qui touche environ 4 200 nouveau-nés par année au Canada, c'est-à-dire un bébé sur cent.
Ainsi, à compter de 2002, le 14 février de chaque année, nous célébrerons la Journée du coeur: Journée de sensibilisation à la cardiopathie congénitale.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI SUR LE MARIAGE AU CANADA
M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-266, Loi visant à modifier la Loi sur le mariage (degrés prohibés) afin de protéger la définition juridique de «mariage» en invoquant l'article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés.
—Monsieur le Président, comme c'est aujourd'hui le jour de la Saint-Valentin, je suis heureux de présenter un projet de loi visant à modifier la Loi sur le mariage (degrés prohibés) afin de protéger la définition juridique de «mariage» en invoquant l'article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés.
Ce projet de loi s'inscrit dans la suite logique d'une motion adoptée par la Chambre le 8 juin 1999 et confirmant que le mariage est une union entre un homme et une femme, même si cela ne correspond pas à la politique officielle du NPD, ni à la politique énoncée publiquement par le député de Burnaby—Douglas ou le chef du Nouveau Parti démocratique.
J'espère que ce projet de loi sera un jour mis aux voix et adopté à la Chambre afin que soit enchâssée dans la loi la définition de «mariage».
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
[Français]
LA LOI SUR LES PRODUITS ANTIPARASITAIRES
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-267, Loi interdisant l'utilisation de pesticides à des fins non essentielles.
—Monsieur le Président, ce projet de loi intitulé Loi interdisant l'utilisation des pesticides à des fins non essentielles vise à imposer un moratoire sur l'utilisation des pesticides à des fins esthétiques dans les maisons, les jardins et les lieux récréatifs, et ce, jusqu'à ce qu'une preuve de leur innocuité ait été présentée au Parlement et approuvée par un comité parlementaire.
[Traduction]
Le projet de loi vise à transférer à quelqu'un d'autre le dangereux fardeau de la preuve. Dans l'état actuel de la situation, le fardeau de la preuve incombe à la collectivité. Nous pulvérisons dans nos arrière-cours et nos terrains de jeux des pesticides qui sont des produits chimiques ayant un haut pouvoir mortel alors que nous n'avons aucune preuve, scientifique ou médicale, établissant avec exactitude leur caractère sécuritaire. Par conséquent, nous pulvérisons ces pesticides au détriment de la santé des Canadiens.
Le projet de loi permettrait d'inverser la situation en exigeant que l'on fasse la preuve de l'innocuité des pesticides, les données à ce sujet devant être soumises au Parlement et approuvées en comité avant que soit accordée l'autorisation d'utiliser le produit.
[Français]
J'exhorte fortement cette Chambre à considérer ce projet de loi qui cherche fondamentalement à placer la santé et le bien-être des Canadiens et Canadiennes avant tout.
[Traduction]
En notre qualité de parlementaires, souhaitons une joyeuse Saint-Valentin à tous les Canadiens en adoptant ce projet de loi.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LOI SUR LA MESURE DU BIEN-ÊTRE CANADIEN
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-268, Loi visant l'élaboration et la publication d'indicateurs pour informer les Canadiens sur la santé et le bien-être de la population, des collectivités et des écosystèmes du Canada.
—Monsieur le Président, je suis ravie de prendre la parole en cette journée de la Saint-Valentin pour présenter à la Chambre la Loi sur la mesure du bien-être canadien. La plus grande preuve d'amour qui soit consiste à donner à la prochaine génération la protection, l'éducation et les outils dont elle aura besoin pour prendre son envol.
[Français]
Il donc significatif que la loi sur la mesure du bien-être canadien soit présentée à la Chambre le jour de la fête de la Saint-Valentin.
Ce projet de loi vise à élargir la façon dont nous mesurons le bien-être du pays, afin d'y inclure les facteurs sociaux, économiques et environnementaux. En effet, ces facteurs affectent la santé des gens, les communautés et les écosystèmes du Canada.
[Traduction]
En rehaussant la sensibilité à l'égard des défis et des réussites qui se profilent à l'horizon pour notre pays, de tels facteurs permettront à la population canadienne et à la Chambre de mettre le cap de façon plus prudente vers un avenir sûr et satisfaisant.
[Français]
Je présente ce projet de loi comme un cadeau de la Saint-Valentin aux jeunes que nous aimons ainsi qu'à toutes les générations qui les suivront.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
[Traduction]
PÉTITIONS
RU-486
M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir de présenter à la Chambre une pétition soumise par près de 500 citoyens inquiets de ma circonscription de Cambridge.
Ils souhaitent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que la pilule abortive RU-486, qui tue des foetus humains dans les deux premiers mois de la grossesse, est à l'essai au Canada. Divers effets secondaires graves sont associés à la prise de cette pilule qui, par surcroît, menace dangereusement la vie des mères.
Les pétitionnaires prient le Parlement du Canada de ne pas modifier les dispositions législatives actuelles ou le protocole de façon à autoriser l'homologation de la pilule abortive RU-486 au Canada.
Je souhaite à mon épouse, à ma fille et à ma petite-fille une joyeuse Saint-Valentin.
LES PESTICIDES
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur une fois de plus de déposer deux pétitions qui demandent à la Chambre d'imposer un moratoire sur toute utilisation de pesticides chimiques à des fins esthétiques, dont l'une a été préparée par une électrice de ma circonscription.
Comme le souligne mon projet de loi d'initiative parlementaire, l'utilisation des pesticides pour des fins non essentielles, ou ce que nous préférons appeler des fins esthétiques, représente un important danger pour la santé des Canadiens.
À l'heure actuelle, nous n'avons aucune preuve scientifique ou médicale démontrant que cette pratique est dangereuse. Nous mettons la vie de nos enfants et de ceux à venir en danger et c'est pourquoi nous exigeons l'adoption d'un moratoire sur l'utilisation de pesticides à des fins esthétiques.
C'est un grand honneur pour moi de déposer ces deux pétitions à l'appui de mon projet de loi d'initiative parlementaire. J'exhorte la Chambre à adopter rapidement cette mesure.
LES ADDITIFS DE L'ESSENCE
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par des habitants de Grand Bend, dans la région de London.
Les pétitionnaires exhortent le gouvernement à interdire le MMT, un additif de l'essence, en raison des répercussions négatives qu'il a sur la santé humaine et sur notre écosystème en général.
* * *
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.
Le Président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
* * *
DEMANDES DE DOCUMENTS
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les motions portant production de documents soient reportées.
Le Président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES ADOLESCENTS
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) propose: Que le projet de loi C-7, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé au comité.
—Monsieur le Président, le 5 février 2001, j'ai présenté à la Chambre le projet de loi du gouvernement concernant le système de justice pénale pour les adolescents. Les personnes qui ont suivi le dossier sont bien conscientes du travail approfondi qui a mené à cette initiative.
L'engagement du gouvernement à réformer le système de justice pénale pour les adolescents est durable et ferme. Nous avons réitéré cette intention pendant la dernière campagne électorale et, encore une fois, tout récemment, dans le discours du Trône.
Le projet de loi C-7 a bénéficié d'un examen approfondi, comme cela a été le cas pour ses prédécesseurs, le projet de loi C-68 et le projet de loi C-3. Les consultations devant le Comité permanent de la justice et des questions juridiques ont été exhaustives. En ma qualité de ministre de la Justice, j'ai entendu des représentants des provinces et des territoires. J'ai rencontré des personnes et des groupes qui travaillent dans le système de justice pénale pour les adolescents et je les ai écoutés.
Le projet de loi C-7 conserve de ses prédécesseurs l'orientation générale et tous les éléments importants, mais comprend des amendements qui découlent des consultations et qui réduiront la complexité du système, offriront une meilleure clarté et amélioreront la souplesse des provinces.
[Français]
Au cours des derniers mois, nous avons examiné de très près toutes les recommandations mises de l'avant. Nous avons comparé un certain nombre de ces recommandations qui touchent la capacité des provinces de mieux gérer l'administration du système de justice pour les jeunes.
[Traduction]
Je rejette les arguments des députés d'en face et d'autres intervenants qui trouvent que le projet de loi est trop sévère ou encore qu'il n'est pas assez sévère. Ceux qui cherchent à ramener le débat sur la justice pénale pour les adolescents à un paradigme simpliste colportent de fausses idées.
Les Canadiens veulent un système qui prévient la criminalité en tenant compte des circonstances ayant amené un adolescent à adopter un comportement violent, qui veille à la réadaptation des jeunes contrevenants et à leur réintégration dans la société et qui veille à ce que les peines imposées à un adolescent correspondent à la gravité de son crime. Les Canadiens de toutes les régions du pays savent que c'est là la façon la plus efficace de garantir la protection de notre société. Le projet de loi C-7 établit un système de justice pénale pour les adolescents qui atteindra ses objectifs.
Il est très clair que les Canadiens tiennent à offrir du soutien aux enfants et aux adolescents. Ils croient sincèrement que nous devons, en tant que société, faire l'impossible pour aider un jeune à éviter tout démêlé avec la justice ou à retrouver le droit chemin s'il a déjà enfreint la loi.
Je profite de l'occasion pour décrire la stratégie sous-tendant le système de justice pénale pour les adolescents que nous proposons et pour expliquer en quoi elle représente une nette amélioration par rapport au système actuel. Cela fait 16 ans que nous appliquons la Loi sur les jeunes contrevenants et l'expérience nous a permis de déterminer les mesures les plus efficaces et les améliorations à apporter au système.
Permettez-moi d'expliquer pourquoi nous croyons qu'il est nécessaire d'adopter une nouvelle loi sur la justice pénale pour les adolescents. La Loi sur les jeunes contrevenants renferme certaines lacunes, notamment le fait qu'elle ne traduit pas une philosophie cohérente en matière de justice pénale pour les adolescents. Ses principes vagues et contradictoires guident mal les technocrates qui doivent prendre des décisions en la matière.
Contrairement à la Loi sur les jeunes contrevenants, le projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents trace une orientation concernant la priorité à accorder à des principes fondamentaux. Par exemple, le projet de loi précise que, face à la criminalité chez les jeunes, le système devrait réagir en tenant compte des causes sous-jacentes de cette criminalité. Toutefois, les besoins et les problèmes sociaux d'un jeune ne devraient pas entraîner des peines plus longues ou plus sévères; elles devraient être justes et proportionnelles à la gravité du crime commis.
D'autres principes du projet de loi font ressortir que les objectifs du système pénal pour les adolescents consiste à prévenir la délinquance juvénile, à faciliter la réadaptation et la réinsertion sociale des jeunes et à favoriser la responsabilité par la prise de mesures offrant des perspectives positives en cas d'infractions commises par des jeunes. C'est en poursuivant et en atteignant ces objectifs qu'on réussira le mieux à protéger la société.
Le système de justice pénale pour les adolescents doit tenir compte du fait que les jeunes n'ont pas la maturité des adultes. Cela suppose qu'il faut mettre l'accent sur la réadaptation et la réinsertion sociale des jeunes, et exiger d'eux une responsabilité qui corresponde à leur niveau de maturité. Les peines qui leur sont imposées doivent être justes et proportionnelles, les inciter à réparer le mal qu'ils ont commis. De plus, ces mesures doivent inviter la participation des parents et d'autres personnes à s'intéresser à la réadaptation et à la réinsertion sociale des jeunes.
Nous savons aussi que, par suite de l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants, le nombre de jeunes incarcérés au Canada est le plus élevé dans le monde occidental, ce qui comprend les États-Unis. Au Canada, les jeunes reçoivent souvent des peines privatives de liberté plus rigoureuses que celles qui sont imposées à des adultes pour des infractions du même genre. Dans bon nombre de cas, des jeunes reconnus coupables pour la première fois d'infractions sans violence, des vols mineurs par exemple, sont mis en détention préventive.
Le projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents a pour objet de réduire le nombre inacceptable de jeunes incarcérés en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants. Le préambule du projet de loi prescrit clairement que le système de justice pénale pour les adolescents devrait limiter la prise des mesures les plus sévères aux crimes les plus graves et diminuer le recours à l'incarcération des adolescents non violents.
Contrairement à la Loi sur les jeunes contrevenants, le projet de loi réserverait la garde surtout aux délinquants violents et aux récidivistes dangereux. Le nouveau projet de loi sur le système de justice pour les adolescents reconnaît que les peines en milieu ouvert peuvent souvent être assorties de conséquences davantage significatives et être plus efficaces pour la réadaptation des adolescents.
Nous croyons aussi que la Loi sur les jeunes contrevenants a occasionné un recours trop fréquent aux tribunaux pour des affaires mineures pouvant être réglées plus efficacement à l'extérieur des tribunaux. Cela entraîne souvent des retards judiciaires et empêche les tribunaux de mettre l'accent sur les cas plus graves.
Au Canada et à l'étranger, l'expérience a montré que des mesures à l'extérieur du processus judiciaire peuvent constituer une solution efficace et rapide pour des crimes moins graves imputés à des adolescents. Même si la Loi sur les jeunes contrevenants permet le recours à des mesures de rechange, on constate qu'après plus de 15 ans d'application, elle ne renseigne pas suffisamment, du point de vue législatif, sur le recours à pareilles mesures.
L'objectif du projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents est de permettre aux tribunaux d'axer leurs efforts sur les crimes graves imputés à des adolescents, en augmentant le recours à des mesures non judiciaires efficaces et rapides pour des infractions moins graves. Ces mesures extrajudiciaires sont assorties de conséquences significatives, par exemple l'obligation pour l'adolescent de réparer le préjudice qu'il a causé à la victime. Elles permettent aussi d'intervenir tôt auprès des adolescents et de laisser la collectivité jouer un rôle important dans l'élaboration de solutions collectives au problème de la criminalité chez les jeunes.
Certaines dispositions du nouveau projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents encouragent le recours à des mesures extrajudiciaires dans des cas pertinents et moins graves, notamment: une présomption selon laquelle on devrait recourir à des mesures extrajudiciaires à l'égard de contrevenants non violents qui en sont à leur première inculpation, et un pouvoir particulier qui est conféré aux policiers et aux procureurs pour leur permettre de recourir à une gamme de mesures extrajudiciaires, d'avertissements officieux, de mises en garde par la police ou le procureur général et de renvois à des programmes communautaires.
De plus, la Loi sur les jeunes contrevenants actuellement en vigueur a donné lieu à des disparités et à des injustices concernant les peines infligées aux adolescents. Souvent, les peines imposées aux termes de la Loi sur les jeunes contrevenants ne reflètent pas la gravité de l'infraction. Trop souvent, on constate une grande disparité entre les peines infligées pour des infractions comparables, à des adolescents dont la situation est semblable.
Comme je le disais plus tôt, des jeunes se voient souvent imposer des peines plus sévères que celles que reçoivent des adultes pour le même genre d'infraction. Par ailleurs, certains jeunes sont condamnés sur la base de leurs besoins ou de leurs problèmes sociaux et se voient infliger des peines plus longues ou plus sévères que ne l'exigerait la gravité de l'infraction commise.
La nouvelle loi remédiera à cette injustice en exigeant que la peine imposée à un jeune ne soit pas plus lourde que celle qui serait infligée à un adulte dans des circonstances similaires. Les nouvelles dispositions de détermination de peine visent avant tout à favoriser la réinsertion sociale des jeunes. Cela exige de répondre aux besoins du jeune dans le délai prescrit par les tribunaux.
D'autre part, l'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants ne permet pas une réinsertion sociale efficace des jeunes après leur remise en liberté. Une lacune de la loi actuelle fait en sorte qu'un jeune peut être remis en liberté sans faire l'objet d'une surveillance adéquate et sans le soutien nécessaire pour l'aider à réussir sa réinsertion au sein de la communauté. La nouvelle loi contient des dispositions qui permettront d'aider à la réinsertion sociale des jeunes contrevenants.
La nouvelle Loi sur les jeunes contrevenants exige que toutes les périodes de détention soient suivies d'une période de surveillance et de soutien au sein de la communauté. Au moment du prononcé de la sentence, le juge précisera, en cour, quelle partie de sa peine le contrevenant devra purger en détention et quelle partie au sein de la communauté. La violation des conditions de surveillance au sein de la communauté pourrait entraîner le renvoi du jeune en détention.
D'autre part, le processus actuel de renvoi au système de justice pour adultes, prévu dans la Loi sur les jeunes contrevenants, a créé des injustices, des situations complexes et des retards inacceptables. Le processus actuel viole les règles d'équité fondamentales en prévoyant le renvoi d'un jeune devant un tribunal pour adultes avant qu'il n'ait été reconnu coupable d'une infraction. Le processus a également engendré des différences considérables entre les provinces quant au nombre de renvois de jeunes devant des tribunaux pour adultes.
Par exemple, en 1998-1999, le Manitoba a effectué 29 renvois de jeunes devant des tribunaux pour adultes, soit le nombre le plus élevé au Canada. Le Québec se classait au deuxième rang, avec 23 renvois, alors que l'Ontario n'a renvoyé que 6 jeunes devant des tribunaux pour adultes la même année.
Le nouveau projet de loi sur le système de justice des adolescents renferment des modifications qui remédient à l'iniquité du processus de transfert actuel, y compris l'élimination de ce dernier. À la place de ce processus, le tribunal de la jeunesse aurait le pouvoir d'imposer une peine pour adulte dans certaines circonstances. L'audience sur la pertinence d'une peine pour adulte se tiendra uniquement après que l'adolescent aura été trouvé coupable. Si un adolescent se voit imposer une peine pour adulte, nous avons l'assurance que l'on présumera que si l'adolescent est âgé de moins de 18 ans, il purgera sa peine pour adulte dans un établissement pour adolescents.
La Loi sur les jeunes contrevenants en vigueur ne fait pas de distinction claire entre les infractions violentes graves et les infractions moins graves. C'est un des principaux facteurs qui sont à l'origine de nombre des autres problèmes avec la LJC, comme le taux élevé d'incarcération des adolescents et le recours trop fréquent aux tribunaux pour les infractions moins graves. Si le système de justice pour les adolescents ne fait pas la distinction entre les infractions violentes graves et les infractions moins sérieuses, il n'est pas surprenant que le public fasse moins confiance au système.
Le projet de loi sur le système de justice pour les adolescents qui est proposé fait constamment cette distinction importante à titre d'élément clé dans toutes ses composantes. Cette distinction se reflète dans les principes fondamentaux énoncés dans le préambule et la déclaration de principes, dans les options de prévention, les principes de la détermination de la peine, les règles de détermination des peines pour adultes et les dispositions relatives à l'élargissement.
Contrairement à la Loi sur les jeunes contrevenants en vigueur, la nouvelle loi a pour une de ses orientations de base que les infractions violentes graves doivent être traitées sérieusement, et les moins graves, de manière moins sévère, mais toujours significative.
En outre, la Loi sur les jeunes contrevenants en vigueur ne reconnaît pas suffisamment les préoccupations et les intérêts des victimes. Contrairement à la loi en vigueur, la loi sur le système de justice pour les adolescents proposée reconnaît les préoccupations et les intérêts des victimes et clarifie le rôle de ces dernières dans le processus de justice pour les adolescents.
Les dispositions suivantes sont des éléments fondamentaux de la mesure législative. Les principes de base prévoient précisément que les victimes seront traitées avec courtoisie et compassion et qu'on respectera leur dignité et leur vie privée. Elles seront aussi tenues au courant des procédures et auront l'occasion de participer et de se faire entendre si elles le désirent.
Les victimes auront le droit de consulter les dossiers du tribunal pour adolescents et pourront éventuellement avoir accès à d'autres dossiers. On favorise aussi la participation des victimes aux approches axées sur la communauté, comme les groupes consultatifs. Si un jeune reçoit une sanction extrajudiciaire, la victime de l'infraction aura le droit d'être informée de la peine attribuée pour l'infraction commise.
Lorsqu'on élabore une nouvelle loi sur la justice pour les adolescents, il importe d'en reconnaître les limites et d'avoir des attentes raisonnables par rapport à ce qu'elle peut accomplir. Voilà pourquoi la nouvelle loi sur le système de justice pénale pour les adolescents ne représente qu'une partie de l'approche globale du gouvernement à l'égard de la criminalité des adolescents et de la réforme du système de justice pénale pour les jeunes au Canada.
Un financement fédéral accru, des efforts de prévention de la criminalité, des programmes efficaces, des approches innovatrices et du travail de recherche font aussi partie de la grande stratégie du gouvernement visant un renouvellement juste et efficace du système de justice pénale pour les adolescents.
De même, des partenariats avec d'autres secteurs comme l'éducation, les services d'aide à l'enfance et les services de santé mentale, l'amélioration de la situation dans les collectivités autochtones et la mise en oeuvre adéquate par les provinces et les territoires seront tout aussi importants pour la réalisation des objectifs de la loi sur le système de justice pour les adolescents. Le gouvernement est déterminé à veiller à ce que les Canadiens soient bien servis par le système de justice pénale pour les adolescents.
En terminant, j'invite tous mes collègues des deux côtés de la Chambre à appuyer le projet de loi C-7 qui fait partie intégrante de notre initiative globale visant à assurer à tous les Canadiens, et surtout aux jeunes Canadiens, un système de justice pour adolescents juste et efficace.
M. Myron Thompson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il est rare que des ministres fassent devant la Chambre un discours comme celui que nous avons entendu aujourd'hui. Je pense que nous devrions demander le consentement unanime de la Chambre afin de pouvoir poser des questions à madame le ministre.
Le Président: Il est certainement possible de le demander. Y a-t-il consentement unanime pour permettre la tenue d'une période de questions adressées à la ministre?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends part au débat sur le projet de loi C-7, que la ministre de la Justice a présenté pour remplacer la Loi sur les jeunes contrevenants. La ministre actuelle de la Justice a elle-même décrit la Loi sur les jeunes contrevenants comme étant «facilement la loi fédérale la plus impopulaire».
Bien que le gouvernement fasse tout un plat au sujet du fait que le taux de crimes violents chez les jeunes semble avoir baissé quelque peu au cours des deux dernières années, les Canadiens ne se laissent pas leurrer. Il n'en demeure pas moins que ce taux est supérieur de 300 p. 100 à ce qu'il était il y a 30 ans.
De plus, je sais d'expérience que les citoyens, amères et désillusionnés par l'incapacité de la Loi sur les jeunes contrevenants à dissiper les graves inquiétudes que leur inspire la criminalité, ont tout simplement cessé, dans de nombreux cas, de déclarer les crimes. Faut-il donc s'étonner que les chiffres indiquent une légère baisse du taux de criminalité au cours des deux dernières années?
Avec ce genre de mesures et d'analyses statistiques, je suis surpris que le gouvernement ne finance pas un plus grand nombre d'études sur la manière d'encourager les citoyens à ne plus déclarer les crimes. Si on applique la logique des libéraux, le taux de criminalité serait réduit à zéro si seulement on pouvait trouver un moyen d'empêcher les gens de déclarer les crimes à la police.
Bien que cette suggestion puisse sembler ridicule, c'est souvent comme ça que pensent les libéraux. Au cours de la récente campagne électorale, par exemple, quand le premier ministre a annoncé qu'il était avantageux pour les agriculteurs canadiens que le dollar ne vaille que 65 cents parce que ça leur ouvrait des marchés pour leurs produits, un agriculteur de ma circonscription m'a dit que, si tel était le cas, il faudrait peut-être que le dollar ne vaille que 10 cents, parce que ça rendrait notre économie dix fois plus vigoureuse.
Un autre agriculteur m'a dit qu'il ne se souciait pas de la valeur du dollar si ça lui coûtait 120 $ canadiens pour préparer une acre de terre en vue des semailles et qu'il ne touchait que 60 $ canadiens quand il vendait ce qu'il a récolté sur cette acre. De plus, le premier ministre n'a pas tenu compte du fait que la majeure partie du matériel et des autres fournitures que les agriculteurs achètent viennent des États-Unis. Avec un dollar à 65¢ américains, ces achats sont encore plus coûteux. La pensée économique libérale est bien belle si on peut tout simplement trouver une façon de faire fi de la réalité.
La même chose s'applique à la politique libérale en matière de justice pénale. Comment se fait-il que la Loi sur les jeunes contrevenants, qui a fait l'objet de tant d'études et de consultations avant sa mise en oeuvre, se soit révélée un tel échec? Dans tout le pays, des comités ont essayé de voir comment on pouvait remplacer la Loi sur les jeunes délinquants. Des experts en sciences sociales, des agents d'application de la loi, des procureurs et de simples citoyens ont participé aux audiences de ces comités pour donner leurs points de vue sur une loi qui devait remplacer la Loi sur les jeunes délinquants, qui existait depuis 1908 environ.
En tant que procureur à Brandon, au Manitoba, responsable des poursuites devant le tribunal de la jeunesse dans le district judiciaire de l'ouest du Manitoba, j'ai participé à ces audiences sur l'établissement d'une nouvelle loi. Je me rappelle avoir présenté des instances à Winnipeg au comité présidé, si je ne m'abuse, par l'ancien juge en chef Harold Gyles, qui a maintenant pris sa retraite. Même si je sortais tout récemment de la faculté de droit, il m'est apparu clairement que la Loi sur les jeunes délinquants et même la loi proposée sur les jeunes contrevenants étaient loin d'être parfaites et que tout ce que nous faisions, c'était créer des générations successives de criminels.
À moins que des mesures sérieuses ne soient prises pour briser ce cycle, la nouvelle loi qui allait être la Loi sur les jeunes contrevenants était vouée à l'échec.
La Loi sur les jeunes contrevenants semblait être sur la bonne voie, mais dès sa création, un certain nombre de problèmes apparaissaient déjà. Le plus grave peut-être résidait dans le fait que rien n'était prévu pour les jeunes de moins de 12 ans. La Loi sur les jeunes contrevenants interdit toute poursuite judiciaire contre des jeunes de moins de 12 ans.
En théorie, cela semblait bien beau; on devait renvoyer les jeunes de cet âge aux organismes de protection de la jeunesse pour qu'ils s'en occupent. Le problème, c'est que ces organismes n'avaient pas et n'ont toujours pas les moyens de s'occuper d'enfants qui ont attiré l'attention des autorités par un comportement criminel. En fait, ce qui s'est passé, c'est que les responsables des organismes de protection de la jeunesse n'avaient pas les ressources appropriées ni le pouvoir juridique voulu pour prendre en charge ces enfants, dont beaucoup étaient violents et souffraient de troubles importants. C'est particulièrement vrai des enfants qui, on le sait maintenant, souffrent du syndrome d'alcoolisme foetal.
Comme le Barreau n'était pas en faveur qu'on puisse traîner des enfants de moins de 12 ans devant le tribunal pour adolescents, ces enfants de 9, 10 et 11 ans sont passés entre les mailles du filet des organismes de protection de la jeunesse, qui n'a pas su régler leurs graves problèmes, et d'une Loi sur les jeunes contrevenants, qui interdit au tribunal de leur offrir la moindre aide.
Je sais de quoi je parle ici. J'ai été procureur au tribunal pour adolescents non seulement à la fin des années 70, mais encore au cours de la première moitié des années 80. Pendant cinq ou six ans, dans le cadre de mes responsabilités pour le compte du procureur général du Manitoba, j'ai agi pour le compte du directeur de la protection de l'enfance dans le nord du Manitoba. D'abord dans la région de Thompson, j'ai eu l'honneur de collaborer avec de nombreux et excellents juges et travailleurs des services à l'enfance qui faisaient de leur mieux dans des circonstances très difficiles.
Un de ces juges, le juge Kimmelman, a passé de nombreuses années dans le circuit, dans le Nord, tant comme juge du tribunal pour adolescents appliquant la Loi sur les jeunes contrevenants que comme juge du tribunal de la famille appliquant la Loi sur la protection de l'enfance. Les gens de la trempe du juge Kimmelman méritent des félicitations. Toutefois, même s'ils employaient des procédures et des dispositions très nouvelles et novatrices, ils ne disposaient tout simplement pas de ressources ni d'outils suffisants.
Les lacunes de la Loi sur les jeunes délinquants ont tout simplement été reconduites dans la Loi sur les jeunes contrevenants.
Conformément à la Loi sur les jeunes contrevenants, des enfants passent entre les mailles du filet des organismes de protection de la jeunesse. Des enfants de moins de 12 ans ne reçoivent pas d'aide des tribunaux ni des organismes de protection de la jeunesse. En dépit de ses lacunes, l'ancienne Loi sur les jeunes délinquants prévoyait une certaine responsabilité pour les jeunes de moins de 12 ans, afin que les tribunaux les aident ou s'en occupent.
Comme la Loi sur les jeunes contrevenants ne prévoit rien de tel, beaucoup d'enfants de 12 ans en sérieuses difficultés ont déjà acquis des comportements antisociaux et même criminels. La Loi sur les jeunes contrevenants n'a servi qu'à faire apparaître un type de délinquant plus jeune et encore plus antisocial. Le temps passé devant les tribunaux de la jeunesse entre l'âge de 12 et de 18 ans ne sert à beaucoup de jeunes qu'à parfaire ce qu'ils ont d'abord essayé lorsqu'ils avaient moins de 12 ans. Lorsque ces jeunes atteignent 18 ans, parfois avant cela, la seule solution, malheureusement, est un système de justice pour adultes beaucoup plus dur et punitif. Le désir mal inspiré que certains ont d'aider ces jeunes en les dispensant d'assumer leurs responsabilités n'a réussi qu'à les amener à sombrer encore plus profondément dans des comportements criminels.
On ne peut pas dire que la Loi sur les jeunes contrevenants ne contenait pas les beaux discours sur la réinsertion sociale, la dissuasion et la dénonciation, c'est-à-dire sur ces principes dont nous reconnaissons tous la nécessité pour garantir l'efficacité de tout système de justice pénale, mais le fait est que la loi était truffée de défauts dès le départ. En outre, ni dans la Loi sur les jeunes contrevenants ni dans le projet de loi qui nous est soumis, le gouvernement libéral ne s'engage à poursuivre la mise en oeuvre des programmes nécessaires pour transposer dans la réalité tous ces beaux discours.
Lorsque la Loi sur les jeunes contrevenants a été adoptée, le gouvernement de l'époque avait conclu un accord de partage des coûts à parts égales avec les provinces. Cependant, il a rapidement renoncé à son engagement dans ce partenariat. Le gouvernement libéral fédéral finance donc maintenant au maximum 25 p. 100 du programme pour les jeunes contrevenants après s'être délesté de la majeure partie de la responsabilité financière et sociale sur les provinces, qui assument en moyenne 75 p. 100 de son coût d'administration.
C'est une situation plutôt étrange. On peut comprendre, du point de vue constitutionnel, pourquoi le gouvernement fédéral s'est désisté de ses engagements financiers envers l'assurance-maladie, où il était autrefois partenaire à parts égales avec les provinces. Cependant, dans le cas de l'assurance-maladie, il est clair que le gouvernement a au moins l'excuse qu'il s'agit d'une responsabilité provinciale, aux termes de la Constitution.
Le gouvernement s'est tout simplement aventuré dans un champ de compétence provinciale et ce, comme diraient à tort nos collègues du Bloc ou d'autres encore, en vertu de son pouvoir de dépenser. Par contre, la criminalité juvénile est nettement une question qui relève du fédéral.
Les provinces participent volontiers aux programmes mis de l'avant dans ce domaine ainsi qu'aux poursuites intentées en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants comme du Code criminel. Je crois qu'elles agissent ainsi pour promouvoir un fédéralisme coopératif, reconnaissant que dans bien des cas, une participation locale et provinciale à l'application de ces programmes est importante pour leur succès.
Puisque la criminalité juvénile est une responsabilité fédérale, il est curieux que le gouvernement fédéral annonce qu'il n'est pas disposé à assumer au moins la moitié des coûts de fonctionnement de ce programme.
La ministre de la Justice a indiqué dernièrement que le gouvernement fédéral n'allait pas contribuer à parts égales avec les provinces parce qu'il ne pouvait se permettre de financer les nouveaux programmes instaurés sous le régime de la loi. Elle a annoncé que le gouvernement fédéral, au lieu de cela, allait tout simplement injecter une somme de 207 millions de dollars sur une période de trois ans pour aider à la mise en oeuvre de la nouvelle loi. Et même en prétendant ne pas avoir d'argent pour assumer les responsabilités fédérales reconnues par la Constitution, elle s'attend à une contribution financière des provinces à son plan.
Les prévisions préliminaires des provinces font état de coûts de mise en oeuvre excédant les 100 millions de dollars. Cela ne comprend pas les frais de fonctionnement supplémentaires que devront assumer les provinces pour administrer la nouvelle loi. Il est évident que les 207 millions de dollars en fonds nouveaux sur trois ans proposés par les libéraux fédéraux suffiront tout juste à couvrir les frais de fonctionnement supplémentaires encourus par les provinces lors des trois premières années et ne seront d'aucune utilité après.
Une fois ces fonds épuisés au bout des trois ans, le gouvernement libéral fédéral ne sera associé à ce programme que dans une proportion bien inférieure à 25 p. 100, laissant à la charge des provinces les nouveaux frais de fonctionnement.
Dans un tel contexte financier, et c'est ce qui explique que je m'y sois autant attardé, la raison véritable motivant le gouvernement libéral à conserver son autorité dans le cas des enfants âgés de moins de 12 ans ressort clairement. En refusant de permettre aux enfants âgés de moins de 12 ans de bénéficier ne serait-ce que des programmes de réadaptation du tribunal pour adolescents, les libéraux essaient de laisser à la charge des provinces la totalité des dépenses engagées pour ces enfants. Cela n'a rien à voir avec le fait de vouloir protéger les enfants contre les pouvoirs punitifs des tribunaux. Il s'agit simplement d'une stratégie empreinte de cynisme, destinée à permettre au gouvernement fédéral de se soustraire à toute obligation financière à l'égard des enfants de moins de 12 ans.
S'il se soucie effectivement d'éviter l'incarcération à ces enfants, le gouvernement n'a qu'à retirer aux magistrats le pouvoir d'imposer des peines de placement sous garde aux moins de 12 ans, tout en permettant à ces mêmes magistrats d'imposer aux autres enfants la participation aux programmes de réadaptation prévus par la loi. Le gouvernement a cependant choisi de n'en rien faire parce qu'il cherche un moyen d'échapper à ses obligations constitutionnelles et financières.
Face à cette cynique tentative du gouvernement d'échapper à ses responsabilités financières en ce qui concerne non seulement les enfants de moins de 12 ans, mais aussi la répartition équitable des coûts pour les enfants de plus de 12 ans, je m'étonne que les provinces n'aient pas tout simplement signifié au gouvernement fédéral leur refus d'appliquer cette mesure législative et d'avoir cette responsabilité financière.
Constitutionnellement, rien n'oblige les provinces à assumer cette responsabilité. Si la ministre veut mon avis, un palier de gouvernement ne peut dans un État fédéral demander à un autre palier de gouvernement d'assumer ses responsabilités financières sans son approbation. Je l'invite donc à consulter ses avocats et à renvoyer cette question aux tribunaux.
Je suis seulement étonné que, face au manque d'engagement du gouvernement à l'égard de ses responsabilités financières et de ses programmes, aucune province n'ait signifié son intention de renvoyer cette question devant la cour d'appel provinciale. Cela montre que, alors que le gouvernement libéral a renoncé au fédéralisme coopératif et continue d'imposer ses politiques aux provinces, les provinces continuent de faire des efforts pour veiller à maintenir le fédéralisme coopératif en vie, même difficilement.
Comme je l'ai dit plus tôt, ce n'est pas que le projet de loi C-7 ne tient pas compte des principes à appliquer dans un système de justice moderne. Il n'y a qu'à lire le préambule. Tout y est. En fait un juge à dit récemment de ce projet de loi qu'il tentait de satisfaire tout le monde. Malheureusement, ce préambule sert seulement à dissimuler une autre initiative vouée à l'échec.
En essayant de satisfaire tout le monde, les libéraux ont produit un projet de loi coûteux, complexe et lourd. Ce projet de loi servira seulement les intérêts de ceux qui veulent tirer avantage des démêlés qu'ont les enfants avec la justice au Canada. Non seulement les enfants souffriront-ils, mais les provinces devront aussi accroître leur budget en matière d'aide juridique, un autre domaine où les libéraux cherchent assidûment à échapper à leur responsabilité financière.
Même si d'autres députés voudront sans aucun doute examiner des dispositions précises du projet de loi et les commenter, je tiens aussi à formuler de brèves observations sur certaines dispositions en plus des remarques que j'ai déjà faites.
La première question que je souhaite aborder est la réticence de la ministre à permettre la publication des noms de jeunes contrevenants qui vivent dans l'anonymat dans la collectivité. Bien que nous soyons tous d'avis que la réadaptation et la dissuasion ne nécessitent pas toujours la divulgation de l'identité d'un jeune contrevenant, il est clair que la disposition très restrictive sur la divulgation sert souvent les intérêts des jeunes prédateurs criminels qui vivent dans notre collectivité.
Les personnes âgées, les professeurs, les administrateurs, les enfants vulnérables et leurs parents tiennent avec raison à savoir qui sont les jeunes prédateurs dangereux de leur collectivité. Pourtant, le projet de loi restreint sans fondement la capacité d'aviser le public du danger. Il favorise les droits des criminels dangereux plutôt que ceux des victimes et des victimes éventuelles.
Passons maintenant à un autre point. Au Manitoba, par exemple, nous possédons un important système de mesures de rechange s'appliquant aux jeunes contrevenants. Je suis fier d'avoir élaboré et développé un grand nombre de ces initiatives à l'époque où j'étais ministre provincial de la Justice. Ces mesures s'avéraient extrêmement efficaces sur le plan du soutien qu'elles offraient aux jeunes contrevenants dans la mesure où ces jeunes étaient maîtrisés avec soin et où les tribunaux conservaient l'autorité et la compétence globales.
Pour la plupart, ces mesures ont été mises en oeuvre avec la participation de policiers, d'agents de probation et de comités de justice pour la jeunesse. Il est ressorti pourtant, après plusieurs années d'expérience, que les contrevenants violents et récidivistes n'étaient pas de bons candidats pour ce type de sanctions extrajudiciaires.
Le projet de loi C-7 passe sous silence l'expérience des provinces comme le Manitoba qui appliquent à grande échelle des sanctions extrajudiciaires. Alors qu'il ignore cette expérience, il donne aux délinquants violents accès à des solutions de rechange et il réduit en peau de chagrin le pouvoir de surveillance des tribunaux. Certes, les solutions de rechange sont souvent appropriées, mais elles doivent être appliquées dans un contexte approprié.
C'est l'appareil judiciaire qui devrait déterminer s'il y a lieu d'appliquer des mesures alternatives. De toute manière, la participation des tribunaux devrait toujours être implicite lorsqu'on envisage de prendre ce type de sanctions contre des contrevenants récidivistes violents. Il en va de la protection de la population.
La dernière disposition sur laquelle je veux émettre des commentaires particuliers est celle qui prévoit la mise en liberté anticipée des contrevenants qui purgent des peines dans des établissements de détention, même s'ils sont susceptibles d'exposer la population à un risque. Bien qu'il soit louable de récompenser les jeunes détenus qui affichent un bon comportement, l'Alliance canadienne est très inquiète quand on veut tenter de reproduire le régime fédéral de libération conditionnelle pour adultes qui ne donne pas de bons résultats.
Toute libération anticipée doit être fonction du bon comportement affiché au préalable par le délinquant et de sa réadaptation à la satisfaction des autorités carcérales.
Comme pays et comme société, nous disposons de peu de temps pour intervenir auprès des jeunes qui sont assujettis à la loi. C'est pourquoi aucun effort ne saurait être ménagé en vue de leur réadaptation lorsque cela est réalisable. La libération conditionnelle d'office ne devrait pas être une option envisagée lorsque le jeune délinquant n'est pas réadapté et qu'il n'a pas fini de purger la peine que lui a infligée le tribunal.
Bref, notre parti a encore de grandes inquiétudes relativement à ce projet de loi. Non seulement il y a eu manque de consultation, mais encore on a délibérément fait en sorte que les procureurs généraux des provinces ne puissent participer à l'élaboration des dispositions du projet de loi. Non seulement le gouvernement libéral a-t-il négligé de fournir les fonds nécessaires à la mise en oeuvre de sa mesure législative, mais encore il a refusé avec obstination de tenir compte de quelque suggestion que ce soit visant à en modifier les dispositions.
Il y a quelques minutes, la ministre de la Justice a continué de défendre le projet de loi en invoquant l'argument simpliste selon lequel des députés soutiennent qu'il est trop rigoureux, alors que de l'avis des députés de l'Alliance canadienne, il n'est pas assez musclé. Par conséquent, elle aboutit à la conclusion que le projet de loi doit être juste comme il convient.
Ce n'est pas le conte des trois petits oursons faisant la dégustation de gruau. Le projet de loi influe sur la sécurité et la qualité de millions de Canadiens. C'est pourquoi il faut une meilleure justification de la part de la ministre que de s'en remettre à l'équivalent politique de l'histoire de Boucles d'or et des trois petits oursons.
Le véritable enjeu ne consiste pas à déterminer si la mesure législative est trop clémente ou trop musclée. Il s'agit plutôt de savoir la mesure législative permettra d'atteindre les objectifs de réadaptation, de dissuasion et de dénonciation de la criminalité.
Pour les motifs que j'ai mentionnés, ainsi que pour les raisons supplémentaires dont mes collègues de l'Alliance vous feront part, le projet de loi ne permettra pas d'atteindre de façon efficace ces objectifs clés et cruciaux.
À mon avis, l'absence de consultation sérieuse avec les autorités provinciales et le fait que les libéraux n'aient pas fourni les crédits appropriés seront les principales causes de l'échec du projet de loi. À moins que l'on tienne compte des préoccupations des provinces et que les ententes de financement pertinentes soient adoptées, il n'est pas loin le jour où le projet de loi sera facilement qualifié, peut-être même par la même ministre de la Justice, de mesure législative fédérale la plus impopulaire qui soit.
Bien que la popularité ne soit pas toujours caractéristique d'une grande mesure législative, les dangers que présente le projet de loi soulèveront de bien plus grandes préoccupations que de savoir si elle est populaire ou non. À mon avis, ces préoccupations influeront de façon néfaste sur la sécurité de nos citoyens et la réadaptation des jeunes contrevenants.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, je vais essayer, dans un autre effort et peut-être au moyen d'exemples, de convaincre la ministre de la Justice qu'elle fait fausse route avec son projet de loi voulant, en quelque sorte, criminaliser les jeunes aux prises avec des problèmes de justice.
Très honnêtement, j'ai écouté avec attention le discours de la ministre et, avec autant d'attention, l'exposé du député de l'Alliance canadienne représentant le comté de Provencher.
Il me semble que cela devrait sauter aux yeux de tout le monde à la Chambre, à savoir qu'il y a vraiment deux visages dans ce Canada. Il y a deux visions complètement opposées. Dans un dossier comme celui des jeunes contrevenants, c'est évident.
Si je comprends le discours du député de l'Alliance canadienne, c'est un projet de loi qui ne va pas assez loin. Il y a des ratés et des choses qui ne fonctionnent pas. On devrait être davantage sévères avec les jeunes aux prises avec des problèmes de criminalité. On devrait même abaisser l'âge de responsabilité en deçà de douze ans. On devrait faire des modifications pour tenter de mettre davantage la main sur ces jeunes. Il y a toute la question de la victime qui entre en ligne de compte. Il faudrait rendre cela plus complexe.
Pour le Bloc québécois, et très honnêtement pour la grande majorité du Québec—je sais que c'est galvaudé par les temps qui courent que de parler de consensus—, s'il y a un sujet qui a véritablement obtenu un consensus, c'est celui du traitement des jeunes contrevenants.
Au Québec—et c'est encore plus vrai à l'Assemblée nationale—que l'on soit péquistes, adéquistes ou libéraux, l'Assemblée nationale a adopté une résolution unanime demandant à la ministre de suspendre l'étude du projet de loi C-3, qui est aujourd'hui le C-7—et j'y reviendrai un peu plus loin—, pour faire le tour des provinces afin d'étudier la question et voir ce qui ne fonctionne pas.
Au Québec, somme toute, la Loi sur les jeunes contrevenants est bien appliquée et donne de bons résultats. J'y reviendrai d'ailleurs un peu plus loin. La ministre, après avoir fait des vérifications autant avec le ministère de la Justice du Québec, celui de la Sécurité publique, ou d'autres organismes au Québec, n'est pas allée voir ce qui se passait dans les provinces, entre autres au Québec.
Il y a des gens du ministère qui ont rencontré les membres de la coalition, des organismes qui appliquent la Loi sur les jeunes contrevenants au quotidien, mais la ministre n'est pas allée voir ce qui se passait au Québec et s'enquérir à savoir pourquoi le Québec obtenait de bons résultats. Pourquoi y a-t-il un consensus au Québec? C'est pour dire à la ministre: «Nous ne voulons pas de vos modifications ou plutôt de l'abrogation de la Loi sur les jeunes contrevenants, parce que la loi fonctionne. Le problème, s'il y en a un, ce n'est pas la loi, mais c'est plutôt l'application de cette loi dans les autres provinces.»
La ministre ne l'a pas fait et les fonctionnaires qui sont venus au Québec pour rencontrer ces gens vendaient une espèce de salade. Ce n'était pas un projet de société. Ce n'était pas une approche éducative. Ce n'était pas de la réhabilitation que l'on offrait. C'était un produit. On essayait de vendre tout simplement un produit. Je reviendrai sur cela tout à l'heure, parce qu'il y a des limites à dire n'importe quoi et tenter de vendre n'importe quoi aux Québécois et aux Québécoises dans un dossier aussi important.
Il est certain qu'à la Chambre on peut quelquefois sembler vouloir faire de la politique. Nous sommes en politique et non en religion. Toutefois, dans ce dossier, je n'ai jamais tenté de m'associer à des groupes et de les amener à faire de la politique. Je les laissais libres de leurs gestes et de leurs opinions. Ces organismes ont fait des conférences de presse et ont écrit dans les journaux. Jamais je n'ai tenté de faire des pressions comme le ministère de la Justice tente de le faire à l'heure actuelle et comme il a tenté de le faire au cours des mois de septembre, d'octobre et de novembre.
En effet, les gens du ministère de la Justice n'étaient pas en élection, ils étaient sur le terrain. Ils promettaient même de l'argent à certains organismes. Il n'y a rien qu'ils n'ont pas tenté de faire pour convaincre certains membres de la coalition, certains groupes qui appliquent au quotidien la Loi sur les jeunes contrevenants, d'appuyer les modifications de la ministre.
À l'heure actuelle, je pense que la ministre n'a pas réussi et que les gens du ministère n'ont pas réussi. L'avenir le dira. Pour ma part, mon opinion n'a pas changé eu égard aux projets de loi C-68, C-3 ou C-7.
Lorsqu'on part tout croche dans un projet de loi, même si on tente par n'importe quel moyen de le redresser, il demeure un projet de loi tout croche. Et c'est ça, le projet de loi C-7.
La ministre part avec de fausses prémisses. L'Alliance canadienne et les libéraux ont vu là un filon pour faire de la politique sur le dos des jeunes aux prises avec un problème de criminalité quelquefois grave. Ils ont réussi, avec la complicité de certains journaux jaunes et de certaines publicités autour d'un crime, à monter en épingle des cas crapuleux, je l'avoue, mais qui sont quand même très rares.
Il est évident que l'image du petit-fils frappant sa grand-mère pour lui arracher quelques dollars est insupportable. Mais au-delà des situations particulières et individuelles rapportées par les médias, la réalité est tout autre. Et cette vérité, il faut qu'elle soit dite.
La criminalité juvénile est en décroissance constante depuis plusieurs années. Selon les statistiques du ministère de la Justice, cette criminalité a même atteint, l'an dernier, en l'an 2000, le record du plus bas taux enregistré depuis les 20 dernières années. Uniquement depuis 1997, les crimes chez les adolescents—j'ai soutiré des chiffres des rapports du ministère de la Justice—en ce qui concerne les homicides, ont diminué de 9 p. 100.
Que l'on ne vienne pas nous dire que ces chiffres sont truqués, parce qu'il n'y a pas eu de dénonciation, comme le député de Provencher semble vouloir le dire, car ce sont des homicides, donc ils ont été déclarés; des dossiers ont été ouverts et des policiers ont fait des enquêtes. Cela démontre que depuis 1997, en ce qui concerne les jeunes contrevenants, les homicides ont baissé de 9 p. 100.
Dans le cas des vols qualifiés, on enregistre une baisse de 8 p. 100. En ce qui a trait aux agressions sexuelles, la baisse est de 1 p. 100. On me dira que ce n'est pas beaucoup, 1 p. 100, mais depuis au moins les quatre ou cinq dernières années, cela diminue. En ce qui concerne les crimes en général, la baisse se situe aux alentours de 1,2 p. 100.
Mais ce qui est le plus frappant quand on regarde ces statistiques, c'est qu'on se rend compte que le taux de criminalité juvénile générale au Québec a chuté, depuis 1997, de 23 p. 100. Ce n'est pas suffisant, je suis d'accord, mais cela commence à faire une baisse importante.
Au Québec—et ce sont toujours les statistiques du ministère fédéral de la Justice que je cite—on note le taux de criminalité le plus bas au Canada. Au Québec, le taux de récidive est le plus bas au Canada. Au sujet du recours à la judiciarisation d'un dossier et à la mise sous garde d'un jeune aux prises avec un problème de criminalité, on a encore le taux le plus bas au Canada. Il y a même eu un ministre de la Justice, maintenant titulaire du portefeuille de la Santé, qui a déjà dit, en parlant du Québec, que le Québec était un exemple en ce qui concerne l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants.
Plus que cela, ce ministre de la Justice a même dit que, compte tenu que le Québec appliquait correctement la Loi sur les jeunes contrevenants, compte tenu que les programmes financiers attachés à la Loi sur les jeunes contrevenants ne favorisaient pas l'approche que faisait le Québec en respectant la loi, le Québec était pénalisé. Aujourd'hui, en dollars constants depuis 1997, c'est environ 850 millions de dollars que le gouvernement fédéral doit au Québec, parce que cette province applique correctement la Loi sur les jeunes contrevenants.
Le programme fédéral lié à cette loi est ainsi fait qu'on encourage à construire des murs de béton, à mettre des barreaux devant les portes et à mettre les jeunes contrevenants à l'intérieur plutôt que de faire de la réadaptation et de la réinsertion sociale.
Au Québec, on ne faisait qu'appliquer la déclaration de principe de l'article 3 de la Loi sur les jeunes contrevenants, où on disait qu'il fallait miser sur le besoin des jeunes. On disait qu'il fallait miser sur la réadaptation et la réinsertion sociale des jeunes pour, en fin de compte, protéger la société à long terme. Nous le faisons depuis des années.
Parce que les Québécois et les Québécoises suivent la loi fédérale, parce qu'on applique correctement et efficacement une loi fédérale, on est pénalisés au plan de la distribution de l'argent pour la mise en application d'une loi qui n'a pas été adoptée par le Québec, mais par le fédéral.
Pour justifier l'alignement du gouvernement libéral, pour justifier la prise de position de la ministre libérale, députée de l'Ouest canadien, députée de l'Alberta, une province où on sait fort bien que l'Alliance canadienne est très forte, compte tenu que de l'aveu même de son ministère et des statistiques de son ministère, il n'y avait pas lieu de modifier un iota de la rédaction de la Loi sur les jeunes contrevenants parce que ce n'est pas la loi qui fait défaut, mais son application, pour justifier ces modifications, ils sont partis en croisade, et depuis fort longtemps.
On fait de la désinformation; on fait de fausses prémisses; on part avec les mauvaises données, sachant fort bien qu'elles ne sont pas adéquates. On fait de l'exagération dans des conférences de presse données entre autres par les fonctionnaires du ministère de la Justice. On fait une tentative de détournement d'une saine compréhension intellectuelle de la loi qu'il faut appliquer. On fait même du tripotage de chiffres, et je m'explique.
Je suis fort peiné de voir que c'est la ministre de la Justice qui utilise ces chiffres, sachant fort bien que cela n'a aucune valeur. Il y a le fameux sondage fait par le ministère de la Justice. Ce sondage a été autorisé par les libéraux, payé par nos impôts et vendu par les fonctionnaires.
Vous me direz sans doute que je n'ai pas votre expérience, monsieur le Président, je suis député depuis 1993. Toutefois, j'ai toujours eu beaucoup de respect envers les fonctionnaires. J'ai toujours eu beaucoup de respect envers eux parce qu'ils faisaient un travail non partisan.
Dans l'ensemble, jusqu'à ce que je vois ce qui se passe au ministère de la Justice, j'étais, de façon générale, très satisfait du travail des fonctionnaires. Mais dans le dossier de la justice, particulièrement dans celui des jeunes contrevenants, leur travail n'est plus un travail équitable. C'est un travail carrément partisan.
En ce qui a trait à Me Yolande Viau—je prends le temps de la nommer et je me sens très à l'aise de le faire puisque j'ai déposé une plainte très formelle à son supérieur, mais semble-t-il qu'elle faisait un travail normal—, lorsqu'elle nous parle du sondage où elle dit qu'il y a 58 p. 100 des Québécois qui sont d'accord avec l'approche du fédéral, elle ment. Ce n'est pas honnête de dire cela.
Lorsqu'on décortique le moindrement ce sondage, lorsqu'on le regarde d'une façon qui est la moindrement réfléchie et honnête, on se rend compte que le ministère, et surtout Me Viau, ne peuvent pas tirer ces conclusions. Pourquoi? Parce que dans le même sondage, on apprend qu'il y a seulement 10 p. 100 des Québécois qui peuvent nommer au moins trois modifications de la Loi sur les jeunes contrevenants. On ne peut pas avoir plus de 10 p. 100 des gens qui approuvent un projet de loi semblable.
Lorsqu'on examine en profondeur ce sondage, on se rend compte que 10 p. 100 des Québécois s'opposent au projet de loi de la ministre. Est-ce que ce sont 10 p. 100 qui connaissent au moins trois éléments de ce projet de loi? Est-ce parce que plus on connaît la loi, plus on est contre? Sans doute.
Mais c'est un manque de rigueur intellectuelle inadmissible dans un ministère comme celui de la Justice, surtout sur un sujet qui touche les jeunes contrevenants, les jeunes aux prises avec des problèmes de justice.
J'ose espérer que Me Viau et la ministre de la Justice n'utiliseront plus ce genre de manoeuvre. Je dis que Me Viau fait carrément de la politique dans l'interprétation des chiffres; elle vend une salade, un bien quelconque, qui est, dans ce cas-ci, un projet de loi.
De plus, elle disait, lors de sa rencontre avec les journalistes: «Allez donc demander à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec s'ils sont si bons que cela dans l'application de la loi.» Oui, parce qu'ils ont eu un problème financier, mais c'est carrément un autre sujet.
Si Me Viau avait été le moindrement intellectuellement honnête, elle aurait pris le mémoire de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, lorsque ses représentants sont venus témoigner devant le comité, et elle aurait vu ce que la Commission des droits de la personne disait à ce sujet relativement à la Loi sur les jeunes contrevenants.
Pour le bénéfice de Me Viau et du ministère, je vais citer un extrait du mémoire que la Commission a déposé au comité:
En centrant la nouvelle loi sur la gravité du délit, on laisse nécessairement entendre que la loi actuelle ne répond pas de manière significative à la délinquance juvénile, particulièrement lorsque le délit est d'une plus grande gravité objective.
Un peu plus loin, on dit ceci:
Le déséquilibre que créerait une nouvelle loi axée sur les seuls principes de protection du public et de responsabilisation du jeune contrevenant est de nature à compromettre tout le travail effectué jusqu'à ce jour auprès des adolescents en difficulté.
C'est là le vrai message de la Commission. Je ne déforme pas la réalité, je prends tout simplement un passage du mémoire que la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a déposé auprès du Comité permanent de la justice et des droits de la personne qui a étudié le projet de loi en question.
Pour faire un bref historique, ce n'est pas la première fois que la ministre tente d'imposer ses vues dans un projet de loi semblable.
Il y a eu le projet de loi C-68, dont tout le monde se souvient sûrement, déposé le 11 mars 1999. Ensuite, ce fut le projet de loi C-3, qui a été déposé en première lecture le 14 octobre 2000, toujours sur le même sujet, toujours pour durcir davantage la Loi sur les jeunes contrevenants, toujours pour abroger une loi qui fonctionne au Québec, toujours pour écouter uniquement le Canada anglais.
Par la suite, la ministre a vu que son projet de loi était tout croche, que son projet de loi ne se tenait pas du tout. Elle a déposé en cette Chambre 172 amendements. Pour étudier tout cela, une soixantaine de témoins se sont présentés devant le comité, dont la moitié venait du Québec.
De ces témoins du Québec, au moins 15 ont déposé des mémoires au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Pas un seul de ces témoins du Québec n'appuie la position de la ministre de la Justice. Pas un seul de ces groupes n'a mentionné que la ministre avait raison de vouloir abroger, mettre au panier une loi qui fonctionne, comme celle sur les jeunes contrevenants.
C'est sûr qu'on a eu des témoins de l'Ouest canadien qui sont même venus nous dire qu'on devrait abaisser encore plus l'âge et qu'on devrait peut-être même permettre que des enfants aux couches aient des dossiers judiciaires. J'exagère, mais c'est quasiment cela que j'ai entendu lors des séances du Comité. Mais ce n'est pas cela qu'il faut faire.
On a eu des débats pendant plusieurs mois. J'ai tenté, par toutes sortes de moyens, par des discours à n'en plus finir, de convaincre la ministre. On a eu d'innombrables éditoriaux. Si j'en avais le temps, j'en ferais la lecture, parce qu'il y a eu beaucoup d'articles dans les journaux, autant au Canada anglais qu'au Québec. Des avocats, des praticiens, des spécialistes, des professeurs, des criminologues, des psychologues et toutes sortes de gens sont venus dire à la ministre qu'elle faisait fausse route.
À la suite des élections fédérales, la ministre a déposé un tout nouveau projet de loi, le projet de loi C-7. Il porte un nouveau numéro, mais ce n'est pas un nouveau projet de loi, car il reprend intégralement le projet de loi C-3. Au lieu d'avoir 172 amendements à côté, ils sont intégrés au projet de loi.
On ne corrige pas un projet de loi tout croche par des amendements. On jette tout le travail à la poubelle puis on recommence. En recommençant le travail, il faut d'aller voir les gens sur place et les consulter au sujet du travail qu'ils font avec les jeunes contrevenants et avec les jeunes aux prises avec la justice.
La ministre verrait qu'elle fait fausse route. J'aurai sûrement l'occasion plus tard de donner des exemples concrets. Chaque fois qu'elle en a l'occasion, la ministre dit: «Le député du Bloc québécois n'a jamais donné d'exemples concrets.» Je lui en ai donné plusieurs. Au cours des 27 heures de débat, dans les discours que j'ai faits en comité, j'ai donné plusieurs exemples où l'approche québécoise ne pourrait pas être utilisée avec le nouveau projet de loi en ce qui a trait aux jeunes en difficulté.
J'ai posé des questions à la Chambre. C'est sûr qu'on est limités dans le temps et qu'on ne peut pas entrer dans les détails. Mais j'utilisais des exemples qui démontraient qu'avec les amendements de la ministre, on ne pouvait plus utiliser l'approche d'éducation et de réhabilitation qu'on a développée au cours des 20 dernières années au Québec.
C'est faux de prétendre qu'il y a une certaine flexibilité. Il y a trop d'automatismes dans ce projet de loi pour donner un soupçon de flexibilité aux provinces. La ministre ne semble pas comprendre ou, plutôt, elle ne veut pas comprendre. Je pense que c'est plus explicable de cette façon.
Pourtant, quelle est l'approche québécoise? Y a-t-il des députés à la Chambre qui connaissent au moins qu'est-ce que l'approche québécoise? On peut dire qu'elle est basée sur la réhabilitation et la réinsertion.
Dans tous les cas, on privilégie le jeune. Chaque dossier est un cas d'espèce. Dans chaque dossier, on regarde ce qu'on donnerait à ce jeune pour le réhabiliter le plus rapidement possible. Ce n'est pas sans raison qu'on fait cela, puisqu'à l'article 3 de la déclaration de principe de la Loi sur les jeunes contrevenants, on dit clairement que les adolescents ne sont pas des adultes et on doit les traiter comme tels. Effectivement, des adolescents, ce sont des êtres humains en formation. On ne peut pas les traiter comme des adultes, même dans des cas très graves.
Oui, il y a des cas qui sont irrécupérables. Oui, il y a des cas où le jeune contrevenant est un «bum» et il va rester un «bum».
Dans certains cas de meurtre, les jeunes ne méritaient pas un traitement comme celui que l'on accorde au niveau de la réhabilitation et de la réinsertion pour les jeunes. Mais à l'heure actuelle, la Loi sur les jeunes contrevenants permet aux provinces de décider que le jeune en question soit traité devant un tribunal pour adultes. Ce n'est pas hypocrite, c'est clair. On sait où on va. C'est vrai qu'au Québec, on l'applique.
On peut peut-être contredire les chiffres de la ministre, parce que selon le ministère de la Justice à Québec, ce n'est pas vrai qu'on a référé 23 cas l'an dernier. Je suis persuadé qu'on en réfère plus que l'Ontario, mais peut-être pas 23. Ce n'est pas cela l'important.
Pourquoi, au Québec, en réfère-t-on plus? Tout simplement parce qu'au Québec, il y a une différence dans le traitement, il y a une différence en bout de ligne. Un jeune qui, en vertu du principe de renvoi, est renvoyé devant une cour pour adultes, une fois qu'il reçoit sa sentence, il ne se retrouve pas au même endroit que le jeune traité comme un adolescent. Tandis que dans les provinces de l'Ouest, bien souvent, qu'il soit traité en vertu de la loi comme un jeune contrevenant ou comme un adulte devant les tribunaux pour adultes, ce même jeune se retrouve au même endroit, avec les mêmes traitements, c'est-à-dire zéro, rien.
Au Québec, il y a une différence. On investit dans un jeune qui a une chance de s'en sortir. C'est pour cela que chez nous, le taux de récidive est le plus bas au Canada, parce qu'on applique la loi. On applique ce que la loi nous permet de faire. On applique la déclaration de principes qui insiste sur le besoin du jeune. C'est cette même déclaration de principes qui a été interprétée par les tribunaux supérieurs et il a fallu à peu près 15 ans avant que cela se rende de façon très claire à la Cour suprême du Canada et que nous ayons une décision, une définition claire de ce à quoi a droit le jeune aux prises avec un problème de criminalité.
Avant de déterminer vraiment ce qu'étaient les besoins des jeunes, cela a pris 15 ans. Aujourd'hui, on fait un x sur tout ce qui a été fait. On change complètement le principe de la loi. Maintenant, le besoin du jeune, comme on le retrouve dans la Loi sur les jeunes contrevenants, ne sera plus le grand principe qui servira à interpréter la loi, qui servira aux juges du tribunal de la jeunesse pour donner des sentences, ou d'infliger des sentences à ces jeunes comme on le disait au début, ce sera la gravité de l'infraction.
Le corpus de cette loi a été rédigé en fonction de la gravité de l'infraction. Qu'on essaie de mettre des «guidis et des hahas» un peu partout et d'insérer le mot «besoin» dans cette loi, cela ne change rien au grand principe que les tribunaux vont interpréter, qui est la gravité de l'infraction. Cela change toute l'approche québécoise qui est axée sur les besoins des jeunes.
En plus, dans la nouvelle loi que la ministre veut imposer au Québec, on parle de gravité d'infraction et on englobe tout cela avec une série d'automatismes pour empêcher ceux et celles qui veulent appliquer efficacement la bonne sanction aux jeunes de le faire, puisqu'il y aura des automatismes. Le jeune aura même des droits, qu'il n'a pas aujourd'hui, pour éviter toute réforme possible.
Dans bien des cas, si on donne le choix à un adolescent d'aller faire son temps «en-dedans», comme ils le disent, ou d'aller dans une maison de réhabilitation et de travailler sur son cas, que va choisir le jeune? Il va choisir de faire son temps. C'est bien plus facile de faire huit ans et de sortir aux deux tiers de sa sentence que d'aller faire huit mois dans une maison de réhabilitation avec des psychologues, des professionnels qui vont l'interroger, qui vont le «travailler au corps», comme ils disent, pour en faire quelqu'un de responsable qui va réaliser le geste qu'il a posé.
C'est bien plus facile pour l'adolescent d'aller faire du temps, de lire des livres et de calculer les jours qui lui restent à passer en prison que de travailler et de tenter de voir quel est son problème, pourquoi il a posé tel ou tel geste.
Maintenant, la ministre offre cela aux jeunes sur un plateau d'argent et les procureurs de la Couronne n'auront même plus la possibilité de vouloir imposer cela à ces jeunes.
Cette loi est inacceptable pour plusieurs raisons. Cette justice des mineurs, telle que proposée par la ministre, ressemble de plus en plus à la justice pour adultes. Cette loi voulant criminaliser les jeunes contrevenants, que l'on appelle la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, ressemble de plus en plus au Code criminel.
Si l'application du Code criminel avait été une grande réussite avec les adultes, je pourrais croire que l'on cherche à faire la même chose avec les adolescents, mais c'est le contraire. L'application du Code criminel est, à bien des égards, un désastre et on veut l'imposer aux adolescents. On a apporté des modifications au niveau d'un certain vocabulaire, mais ce sont des modifications cosmétiques.
En vertu du projet de loi C-7, on encourt plus de peines, «on est passible de». Le projet de loi C-7 n'inflige plus une peine, il impose une peine. On ne parle plus d'«infliction», mais d'imposition. On ne réprimande plus un jeune contrevenant, mais on corrige son comportement. On parle de mesures extrajudiciaires au lieu de sanctions extrajudiciaires. C'est bien beau tout cela, et il est correct d'inclure un jargon moins agressif, mais le sens de la loi reste le même.
Lorsque la ministre dit qu'elle a compris les revendications du Québec, à mon avis, elle n'a absolument rien compris. Ce n'est pas de la sémantique ou des synonymes que l'on voulait dans cette loi. On voulait tout simplement que la ministre ne touche pas à la loi.
De plus, j'ai parlé des automatismes, de l'impossibilité de faire du cas par cas. On a stéréotypé certains crimes et on a compartimenté les crimes: pour tel crime, c'est telle sentence, pour tel autre, c'est une autre sentence. Où est la liberté, pour le Québec, d'avoir son approche?
Tous les experts et même les avocats vous diront que ce projet de loi favorisera les «avocasseries». Ceux qui vont au palais de justice comprennent que cela n'a rien d'avantageux.
C'est un projet de loi extrêmement complexe que personne ne comprendra, parce qu'avec ce projet de loi, on a désapproprié une loi qui était faite pour les jeunes et les parents, entre autres, puisqu'il y a des parents qui suivent les jeunes qui ont des difficultés. Ce ne sont pas juste des voyous qui se retrouvent en cour, ce ne sont pas juste des jeunes sans parents. Mais un projet loi aussi complexe que le projet de loi C-7 ne sera compris de personne, sauf des juges et des avocats qui vont en faire beaucoup.
Ce projet de loi ne fait pas progresser la justice pour les mineurs, ni la société.
Je donne d'autres exemples—et j'espère qu'il y a au moins des fonctionnaires qui écoutent, si la ministre n'écoute pas—dont celui qui démontre que le Québec ne pourra plus avoir son approche avec ce projet de loi.
J'ai parlé plus tôt de la philosophie en général, j'y reviens très sommairement. La Loi actuelle sur les jeunes contrevenants parle des besoins des jeunes. Le grand principe du projet de loi C-7 est axé sur la gravité de l'infraction commise par le jeune contrevenant.
Actuellement, toute la jurisprudence qui a été constituée accorde la priorité aux besoins des jeunes contrevenants et elle s'est toujours dirigée en ce sens. Elle a formulé un certain modèle québécois en ce qui a trait à la réhabilitation. La philosophie de présent projet de loi est tout autre. On tombera dans la gravité et également sur un durcissement des sentences. Qu'on le veuille ou pas, on modifiera la jurisprudence en même temps.
Dans le projet de loi C-3, on retrouvait le principe de l'harmonisation des peines. Aujourd'hui, on ne parle plus d'harmonisation, mais de peines semblables dans la région. Qu'est-ce que cela veut dire, une région, en droit criminel?
Est-ce que le Québec ou l'Ontario est une région. Est-ce que les Maritimes, c'est une autre région? De toute façon, lorsque les tribunaux inférieurs interpréteront ce que le législateur voulait dire avec la gravité de l'infraction, cela ira chez les tribunaux supérieurs et, par la suite, à la Cour suprême. Lorsque cela reviendra devant les tribunaux inférieurs, on sera influencé par cette jurisprudence au Québec si le projet de loi C-7 s'applique intégralement.
J'ai également dit qu'en ce qui concerne les crimes mineurs—parce que c'était très compartimenté—, aujourd'hui, lorsqu'un jeune commet un vol à l'étalage, fait des graffitis et qu'il est pris, les policiers lui font un dossier. Ce dossier sera immédiatement référé au procureur de la Couronne. Celui-ci examinera les rapports qui se trouvent au sein du dossier. Il décidera peut-être que le problème du jeune découle de sa gang de rue ou peut-être de ses parents. Il prendra donc une mesure immédiate pour sortir ce jeune de la problématique dans laquelle il évolue.
Avec la loi de la ministre de la Justice, avec le projet de loi C-7, le procureur de la Couronne ne verra jamais le dossier et pourra encore moins forcer le jeune à suivre un programme de réhabilitation. C'est tout simplement parce qu'il y a là des mesures en cascade prévue par la ministre dans son projet de loi.
À la première infraction, si elle est mineure, un vol à l'étalage, par exemple, le policier ne donnera seulement qu'un avertissement. Si le jeune s'en va dans la municipalité voisine et commet le même vol à l'étalage au cours de la même journée, il aura un autre avertissement. Où cela sera-t-il répertorié? Si à un certain moment donné les infractions sont plus graves et consistent en de gros graffitis associés à un peu de violence, on enverra une lettre aux parents, une mise en garde. Jamais le procureur de la Couronne ne saura cela.
Ce projet de loi va empêcher le Québec de prendre la bonne mesure au bon moment. Il vaut mieux investir dès la première infraction, lorsque ce n'est pas grave, plutôt qu'après trois ou quatre ans de délinquance dans une municipalité, dans un quartier ou dans une région. Si loi de la ministre est adoptée, toute l'approche québécoise au niveau de la réhabilitation et de la réinsertion concernant les cas mineurs et les crimes mineurs ne pourra plus être utilisée.
De l'autre côté, en ce qui concerne les crimes majeurs et les crimes graves, l'approche de la ministre est tout aussi dommageable. En voulant traiter les jeunes comme des adultes, on va également leur appliquer les droits des adultes. Avec la nouvelle loi de la ministre, le jeune qui servira une peine de huit ans d'emprisonnement parce qu'il aura eu une sentence d'adultes fera son temps. Il sortira après avoir servi les deux tiers de sa sentence, qu'il soit réhabilité ou non.
L'approche québécoise consiste à envoyer ce jeune dans un centre de réadaptation. Lorsqu'il en sort, il est réhabilité. Les chiffres démontrent que le taux de récidive est moins de 1 p. cent. Est-ce que c'est cela que la ministre veut? Est-ce que c'est cela que la ministre nous dit, à savoir que l'approche québécoise sera conservée avec son projet de loi, alors qu'on ne pourra pas faire cela? Non, c'est un autre exemple à l'effet que l'approche québécoise ne pourra pas être suivie.
Parlons des délais de la nouvelle législation de la ministre. On parle maintenant de comparution et d'enquêtes préliminaires. On parle de juge et de jury. Il y a une multitude de fictions dans ce projet de loi, parce qu'on dit que c'est le tribunal pour adolescents qui traitera ou entendra les causes de crimes graves. Toutefois, lorsqu'on lit le projet de loi, on se rend compte que ce ne seront pas des juges du Tribunal de la jeunesse qui entendront ces causes, mais plutôt des juges de la Cour supérieure qui, pour ces causes, mettront le chapeau du juge du Tribunal de la jeunesse.
Il y a une foule de fictions que la ministre ne semble pas comprendre. Tout cela fera en sorte qu'on influencera le Tribunal de la jeunesse. On influencera la jurisprudence. On influencera l'approche québécoise qui a été fructueuse.
Je termine mon exposé. À la Chambre, il y a des députés libéraux du Québec, les ministres du Commerce international, du Conseil du Trésor, des Finances, du Revenu national, des Affaires intergouvernementales, la nouvelle députée de Laval-Est qui est devant nous, ceux de Brome—Missisquoi, de Ahuntsic, de Gatineau. J'ose espérer qu'ils sauront défendre les intérêts du Québec, le consensus Québécois relatif à ce projet de loi et qu'ils feront comprendre le bon sens à la ministre.
[Traduction]
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'occasion de participer pour la première fois à ce débat en ma nouvelle qualité de porte-parole du Nouveau Parti démocratique en matière de justice. J'ai écouté attentivement les intervenants précédents et je signale mon intention de faire de même en comité et d'apprendre le plus possible.
Même si je ne serai peut-être pas toujours d'accord avec eux, je compte tirer de mes collègues au sein du Comité de la justice et des droits de la personne, qui ont plus d'expérience que moi, le plus d'enseignements possibles. À cette fin, j'ai écouté la ministre, le député de Provencher, l'ancien ministre de la Justice dans ma province et mon collègue de Québec.
C'est la troisième fois que le projet de loi est présenté à la Chambre. Il a d'abord été connu sous le nom de projet de loi C-68, puis de projet de loi C-3, et on l'appelle maintenant projet de loi C-7. Puisque ce n'est pas la première fois que le projet de loi est à l'étude, je veux saluer la personne qui m'a précédé dans les fonctions de porte-parole du NPD en matière de justice, soit l'ancien député de Sydney—Victoria, M. Peter Mancini. Il n'a malheureusement pas été réélu et n'a donc pas pu continuer d'être notre porte-parole en matière de justice. Il a exposé clairement la position de notre parti la dernière fois qu'il a parlé du projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, le 21 octobre 1999.
Il est malheureux que le projet de loi n'ait pas été adopté. Comme c'est le cas de certains autres projets du gouvernement dans divers domaines, la lenteur du gouvernement, un manque de volonté et la résistance de l'opposition, qui a parfois ses mérites, ont, ensemble, empêché le gouvernement d'agir. Collectivement, nous n'avons pas pu agir pour peut-être améliorer la Loi sur les jeunes contrevenants qui, comme nous le savons tous, a des lacunes.
La Loi sur les jeunes contrevenants existe depuis environ quinze ans et elle n'a pas répondu aux attentes. Je suis l'une des rares personnes à la Chambre qui était là lorsque la Loi sur les jeunes contrevenants a été discutée et présentée pour remplacer l'ancienne Loi sur les jeunes délinquants. On croyait vraiment à l'époque que la Loi sur les jeunes contrevenants constituerait une nette amélioration par rapport à l'ancienne loi qui remontait, sauf erreur, au tournant du siècle.
Le fait que la Loi sur les jeunes contrevenants n'ait pas fonctionné comme de nombreuses personnes croyaient qu'elle le ferait et le fait que la Chambre soit maintenant saisie d'un nouveau projet de loi nous donnent peut-être à réfléchir car on adopte un point de vue un peu plus modeste lorsqu'on se rend compte que la loi n'a pas fonctionné. Même si elle a peut-être baissé à certains égards au cours des dernières années, la criminalité chez les jeunes est certainement en hausse dans l'ensemble par rapport à ce qu'elle était à l'entrée en vigueur de la Loi sur les jeunes contrevenants ou même avant.
Si des lois seules suffisaient, le problème aurait maintenant été réglé, mais il n'en est rien. La ministre a reconnu qu'elle a essayé d'établir un équilibre entre ceux qui veulent qu'elle fasse preuve de plus de fermeté et ceux qui souhaiteraient qu'elle recherche davantage de solutions de rechange à l'incarcération, surtout en ce qui concerne les jeunes délinquants non violents, dans le cas de leur premier contact et, on peut l'espérer, de leur dernier avec le système de justice pénale.
Dans les jours et les semaines à venir, alors que nous discuterons plus en profondeur de cette question à la Chambre et au comité, il s'agira de savoir s'il est vrai que la ministre est parvenue à un bon équilibre ou qu'elle essaie, comme on le lui reproche, de plaire à tout le monde sans vraiment nous présenter une mesure législative efficace. Je vais certes essayer de me faire une opinion à cet égard dans le contexte de notre opposition globale au projet de loi dont je vais parler sous peu.
La ministre a déclaré qu'elle a essayé de rendre le projet de loi plus souple, surtout en ce qui concerne les modifications qui ont été apportées depuis la dernière fois où la Chambre a été saisie de ce projet de loi. Je comprends qu'on essaie de répondre aux préoccupations soulevées par le Bloc québécois quant à la capacité du système de justice pénale pour les jeunes au Québec de continuer à faire ce qu'il fait à l'heure actuelle, qui constitue, au dire de tous, une tentative réussie comparativement pour lutter contre la criminalité chez les jeunes.
Certains disent, et je n'ai aucune raison de ne pas les croire, que le Québec est l'une des rares provinces qui a été capable d'appliquer la Loi sur les jeunes contrevenants dans l'esprit où elle avait été adoptée. Que ce soit vrai ou non, c'est certainement le cas si on regarde le taux de criminalité chez les jeunes et l'approche suivie par le Québec.
Il faut rendre à César ce qui est à César, et on ne peut nier que le Québec sait s'y prendre. Son approche n'est peut-être pas applicable telle quelle aux autres provinces puisque, après tout, le Québec est une société distincte. Il se peut que ce qui est possible au Québec ne le soit pas dans les autres provinces, mais il me semble que nous avons beaucoup à apprendre de la façon dont le Québec fait les choses.
Si le projet de loi n'est pas suffisamment souple, si on peut prouver qu'il est rigide au point d'empêcher le Québec de continuer à faire les choses qu'il fait si bien, il faudra que la ministre prenne la critique au sérieux.
L'une des choses que l'on reproche à la Loi sur les jeunes contrevenants, et dont mon prédécesseur a parlé quand il s'est adressé à la Chambre, est l'absence de pouvoirs discrétionnaires. Le 21 octobre 1999, M. Mancini disait à la Chambre, et je cite:
Nous savons, et là encore, je peux produire mes propres preuves, que ce qui s'est produit, dans bien des cas, avec l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants, c'est qu'elle ne prévoyait l'exercice d'aucun pouvoir discrétionnaire. Des agents de police, des enseignants et des personnes qui se trouvaient souvent en contact avec des jeunes finissaient par renvoyer les cas devant les tribunaux, même si ces cas étaient très simples ou si une mise en garde ou l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire aurait très bien pu les régler.
J'ai vu dans les tribunaux des adolescents accusés de dommages à des biens parce qu'ils s'étaient disputés avec un camarade de classe pour un casier. Ou encore, des adolescents se sont retrouvés devant les tribunaux après avoir été accusés de violation du droit de propriété parce qu'ils avaient traversé la pelouse du voisin. Il est inutile d'encombrer les tribunaux avec des infractions de la sorte lorsqu'ils ont des causes sérieuses à examiner.
Je trouve que c'est une critique particulièrement perspicace de la Loi sur les jeunes contrevenants. Cela va au coeur de la question qui consiste à trouver l'esprit nécessaire pour traiter avec les jeunes.
Je m'intéresse souvent aux questions de justice et cela me rappelle mon grand-père, Alex Taylor, qui a été policier puis chef de police à Transcona pendant des années. Après avoir été chef de police à Transcona, il est devenu juge de paix. Il est décédé depuis 40 ans, mais des gens viennent encore me voir pour me dire: «Votre grand-père m'a donné un coup de pied au derrière au moment où j'en avais besoin», «Votre grand-père m'a ramené à la maison une fois, alors qu'il aurait pu me mettre en prison», ou «Votre grand-père m'a mis en prison un soir que j'avais vraiment besoin d'une leçon» et ce, bien avant qu'il y ait une charte.
Je déduis de tout cela qu'une certaine discrétion, une certaine clémence ou un certain recours au gros bon sens peuvent parfois être le fait de seulement quelques personnes qui connaissent bien la collectivité, la famille ou le jeune.
Dans ce contexte, je préconise un recours accru et amélioré à la police communautaire. Nos jeunes devraient se faire rappeler à l'ordre par des gens qui les connaissent et qui connaissent leur milieu, et non de façon impersonnelle comme ils le sont si souvent dans nos grandes villes par des policiers qui ne travaillent pas au sein de leur propre collectivité, mais qui sont mutés un peu partout, dans des endroits où personne ne se connaît plus.
Il me semble que l'absence d'une certaine discrétion est une cause importante de ce qui ne va pas avec la Loi sur les jeunes contrevenants. Toutefois, il y a une autre absence qui me préoccupe aussi beaucoup. On a manqué non seulement de discrétion, mais aussi des ressources nécessaires pour mettre en application le processus créé par la Loi sur les jeunes contrevenants. Nous voyons la même erreur se répéter ici dans ce nouveau projet de loi sur la justice pénale pour les adolescents. Voilà une de nos principales inquiétudes.
Des députés ont dit plus tôt que cette mesure législative était complexe et lourde à appliquer et qu'elle imposait de nouvelles responsabilités aux provinces. Elle ajoute des paliers au processus mais, au même moment, elle procure davantage de discrétion, ce qui est une excellente chose. Cependant, elle n'attribue pas les ressources nécessaires pour qu'on puisse exercer cette discrétion rapidement et de façon constructive.
Il y a une chose que nous savons tous, et je pense que toutes les études concordent à cet égard, c'est que, lorsqu'on parle de jeunes, il importe que le laps de temps entre l'action et les conséquences soit aussi court que possible. Vu la complexité accrue du processus et l'absence de ressources consacrées à celui-ci, la ministre a peut-être créé une situation où la période entre l'action et les conséquences sera encore plus longue. Il me semble que c'est l'une des principales critiques qui sera formulée à l'encontre de ce projet de loi.
Le porte-parole de l'Alliance canadienne a mentionné la complexité du processus, mais pas aussi explicitement que je l'aurais fait moi-même. C'est peut-être parce qu'il est avocat. Lorsqu'il a fait allusion au fait que tous les litiges seraient portés en appel, il a voulu dire que cette mesure pourrait bien donner lieu à la plus grande opération de création d'emplois pour les avocats que nous ayons vue depuis longtemps. Cependant, ce n'est certes pas le premier programme de création d'emplois pour les avocats que j'aie vu en cet endroit.
Si je ne m'abuse, par exemple, les dispositions portant inversion de la charge de la preuve modifient la situation actuelle où l'État doit plaider en faveur des jeunes de 14 à 17 ans qui sont traînés devant le tribunal pour adultes. Conformément à cette nouvelle loi, ce sont les jeunes eux-mêmes qui devront dire pourquoi ils ne devraient pas y être traînés. C'est une disposition discutable en soi.
Si l'on met cela de côté pour le moment, qui plaidera au nom de ces jeunes de 14 à 17 ans? Vont-ils s'en charger eux-mêmes? Les plaidoiries devront être faites soit par les avocats qu'engageront leurs parents ou, étant donné que les parents d'une grande proportion des jeunes qui ont des ennuis de ce genre ne peuvent pas se payer un avocat, il faudra prévoir toute une nouvelle dimension de l'aide juridique et des coûts que les provinces devront assumer sans ressources additionnelles.
La tendance, pas seulement dans le domaine de la justice malheureusement, veut qu'on se décharge de ces coûts sur les provinces, ce qui est totalement inacceptable. Malheureusement, il n'y a pas que dans le domaine de la justice qu'on voie cette tendance. C'est le cas de l'assurance-maladie, par exemple. Le gouvernement fédéral veut fixer les règles du jeu, mais sa contribution financière à l'administration de ces règles s'érode constamment. À l'heure actuelle, la contribution fédérale est de l'ordre de 25 p. 100 seulement. C'est élevé comparativement à la santé, où le taux est de 9 à 13 p. 100, selon les chiffres que l'on estime les plus crédibles.
J'avais encore bien des choses à dire, mais le temps passe vite quand on s'amuse à parler de la Loi sur les jeunes contrevenants.
L'une des choses que ne fait pas le projet de loi, ce dont je me réjouis—je tiens à le souligner—, c'est qu'il ne traite pas des jeunes de moins de 12 ans. C'est une position qu'a prise et que défend toujours le NPD fédéral, mais il ne faut pas en conclure qu'il n'est pas nécessaire d'élaborer une stratégie relativement aux jeunes de moins de 12 ans. L'une des choses qu'envisage très sérieusement le gouvernement néo-démocrate du Manitoba, c'est de s'occuper des jeunes contrevenants âgés de 10 et 11 ans, tant en ce qui concerne ce qu'ils font eux-mêmes que ce que d'autres les incitent à faire en profitant de leur jeune âge.
Il a été dit plus tôt que l'une des vertus de l'ancienne Loi sur les jeunes délinquants, c'est qu'elle s'appliquait aux jeunes de moins de 12 ans. Nous devons trouver, après l'adoption du projet de loi, un moyen de faire collaborer les gouvernements fédéral et provinciaux et leur faire prendre conscience que nous éprouvons vraiment des problèmes dans plus de cas que nous voulons bien l'admettre peut-être avec des enfants aussi jeunes et que nous avons besoin d'une stratégie fédérale-provinciale commune à cet égard. Cette stratégie devrait, à mon sens du moins, être différente de la façon dont nous traitons les jeunes de 12 à 18 ans.
J'ajoute que nous sommes en faveur de la divulgation des noms dans certaines circonstances, mais nous estimons qu'à cet égard les juges devraient toujours avoir un rôle à jouer dans la détermination des circonstances dans lesquelles les noms seront divulgués et du moment où ils le seront. C'est d'ailleurs pour cela que nous avons des juges. Cela est en droit fil avec notre argument global selon lequel les juges et les policiers devraient avoir une plus grande latitude.
Le reste de mon discours portera sur le fait que non seulement nous devons, de la façon qui convient, être plus sévères pour les crimes commis, mais encore nous devons nous attaquer davantage aux causes de la criminalité. Si je disposais d'encore 20 minutes, je parlerais sûrement de toutes les mesures sociales et économiques qui, à mon avis, contribueraient à soutenir les familles ainsi qu'à créer et à renforcer le genre de valeurs dans notre société qui concourraient de façon marquée à prévenir le crime chez les jeunes contrevenants.
Le vice-président: Je voudrais simplement m'assurer que les députés sont à leur place habituelle lorsqu'ils demandent la parole. Le député de Wild Rose est-il à sa place habituelle?
M. Myron Thompson: C'est ce qui est mentionné ici.
Le vice-président: Le député est donc à sa place. Je n'arrive tout simplement pas à suivre le fil des déplacements qui se produisent à cet endroit de temps à autre.
M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai fait bien des erreurs dans ma vie, mais j'ai toujours été à ma place.
J'apprécie les observations du député de Winnipeg—Transcona. Je trouve dommage qu'il n'ait pas eu plus de temps pour parler des causes. Je vais lui donner l'occasion de le faire.
Je sais que, dans sa région, à Winnipeg, il y a un problème très grave qui est en train de prendre de l'ampleur, celui des bandes, notamment, des bandes de jeunes. Je pense à une bande en particulier. Je crois qu'il s'agit des Deuce. Ce que je sais de ces bandes, c'est qu'un certain nombre d'adultes exploitent réellement ces enfants au profit de leurs activités illicites, leur trafic de drogue, leurs activités de prostitution et ainsi de suite.
Personnellement, j'en ai vraiment assez de voir des souteneurs exploiter des filles de moins de 15 ans et recevoir une petite tape sur la main lorsqu'ils se font arrêter par la police et qu'ils sont traduits devant les tribunaux. J'en ai également assez des trafiquants qui distribuent leur drogue à ces jeunes et qui eux aussi reçoivent une petite tape sur la main. Ils exploitent nos jeunes d'une manière incroyable.
Je voudrais que le député nous parle de cet aspect particulier. Je sais que c'est un problème grave dans la plupart de nos grandes villes.
M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, quoi que puisse penser la présidence du député de Wild Rose, je n'ai jamais pensé qu'il était déplacé.
Je remercie le député d'avoir soulevé cette question. C'est une source de préoccupation pour la population de Winnipeg mais aussi d'autres villes, comme le disait mon collègue.
La présence de bandes de jeunes pose assurément un problème à Winnipeg, mais on n'y trouve pas que des bandes de jeunes. C'est une erreur de croire que tous ceux qui font partie de ces bandes sont d'âge à tomber sous le coup de la Loi sur les jeunes contrevenants. En fait, ces bandes comptent beaucoup d'adultes dans leurs rangs. Ces adultes utilisent des jeunes à leur avantage, aussi bien des jeunes visés par la loi que d'autres encore plus jeunes.
C'est pourquoi, comme je le disais plus tôt, le gouvernement néo-démocrate du Manitoba cherche des solutions à ce problème. C'est aussi la raison pour laquelle j'ai présenté, au cours d'une législature précédente, un projet de loi d'initiative parlementaire concernant une loi antigang. J'estime que c'est là un des problèmes auxquels nous devons nous attaquer. Nous savons que nos collègues du Québec sont très préoccupés par cette question, en raison de leur expérience en la matière. Je crois qu'une des choses que le gouvernement pourrait faire serait d'envisager l'adoption d'une loi antigang quelconque qui nous donnerait des moyens plus efficaces de lutter contre ces problèmes.
Enfin, j'aimerais parler rapidement des conditions qui, selon moi, conduisent à la criminalité. Nous devons reconnaître les liens qui existent entre les conditions sociales et la criminalité, mais il faut aussi travailler à redonner le sens de la responsabilité à chacun. Les ratés d'une éducation peuvent expliquer certaines choses, mais en définitive ils n'excusent pas les actes moralement répréhensibles.
Bien sûr, le chômage, la détérioration des conditions de vie dans les villes, la toxicomanie, la violence faite aux enfants, la pauvreté infantile et l'écart grandissant entre riches et pauvres constituent des facteurs défavorables. Mais il est également vrai que certains des actes de violence les plus effrayants et les plus insensés sont commis par des personnes qui ne viennent pas de milieux socialement défavorisés.
Le véritable problème est que de trop nombreux Canadiens grandissent dans un vide moral, où la notion même de bien et de mal semble être remise en question. Cet environnement moralement défavorisé est, à mon avis, en partie le résultat de la violence et de l'impudence de la programmation télévisuelle et de la publicité dans les médias modernes, mais ce n'est là qu'une partie du problème.
Toute notre culture en est venue à valoriser la loi du moindre effort et l'intérêt personnel plus que toute autre chose. Non pas que certains jeunes qui commettent des infractions n'aient pas de valeurs, car ils en ont. En fait, ils ont assimilé les valeurs vulgaires, matérialistes et individualistes dont ils sont bombardés et qu'ils pratiquent dans leur vie de tous les jours. Cette situation devrait nous préoccuper tous.
M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais poser une question au député de Winnipeg—Transcona à propos des statistiques auxquelles il fait référence. Il a dit ainsi que d'autres députés que dans la province du Québec, le taux de délinquance juvénile était très faible.
Je sais, pour avoir travaillé 30 ans au service de la Gendarmerie royale du Canada, que c'est moi qui ait inscrit les statistiques sur les formulaires en question. Je sais qu'il est très facile de manipuler les chiffres selon les critères et le nombre de programmes de déjudiciarisation où les jeunes qui ont enfreint le Code criminel ou ont commis une autre sorte d'infraction ne sont pas inscrits sur les formulaires statistiques.
Je pense aussi qu'il est faux de dire que le taux de délinquance juvénile est faible au Québec où le crime organisé pose un très gros problème. Le crime organisé s'observe au Québec dans les écoles publiques, dans les écoles secondaires de premier cycle et dans les écoles secondaires.
Je n'ai pas les statistiques, mais, à mon avis, le taux de délinquance juvénile au Québec est terriblement sous-estimé. J'ai indiqué les raisons pour lesquelles je dis cela: c'est à cause des critères à appliquer par la police pour enregistrer les statistiques et du fait qu'il existe un gros problème de crime organisé au Québec. Mon expérience m'a appris que les criminels organisés commencent jeunes et suivent les traces des plus vieux.
Résultat, nous devons être prudents en disant que les programmes et les méthodes de déjudiciarisation appliqués dans la province du Québec devraient être appliqués dans tout le pays.
Le député pourrait-il nous dire ce qu'il pense des points que j'ai soulevés et si c'est bien ce qu'il préconise?
M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, je voulais simplement faire état d'un consensus qui m'avait semblé général quant à l'analyse de la situation au Québec.
Je ne conteste nullement les propos du député quand il dit que le Québec est confronté au problème du crime organisé. Nous en sommes tous conscients, y compris le Bloc québécois. Quant à savoir si cela contredit d'une certaine façon l'autre observation souvent entendue au sujet du Québec, à savoir que son système de justice pour la jeunesse donne des résultats probants, je ne vois pas nécessairement de lien entre les deux. Si le député a une étude à me montrer, je veux bien en prendre connaissance, mais à ce stade, je m'en tiens à ce que j'ai dit.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je tiens tout à d'abord à féliciter le député de Winnipeg—Transcona, également leader parlementaire, pour le premier discours qu'il prononce au sujet d'un projet de loi relatif à la justice en sa qualité de nouveau membre du Comité de la justice.
Je me range très certainement à l'avis que vous avez déjà exprimé, monsieur le Président. Le député n'a jamais été accusé d'être court ou à court de mots.
Ce projet de loi dont la Chambre est saisie est des plus importants. Il avait déjà été présenté lors de la dernière législature, sous une forme apparentée. Ce projet de loi est d'une telle importance que j'espère qu'il fera l'objet d'amendements appropriés lorsqu'il franchira les différentes étapes, que ce soit à la Chambre ou au comité.
Tous les intervenants précédents ont également fait allusion à la position de leur parti et ont exprimé l'espoir que nous aurons une occasion d'améliorer ce projet de loi.
Je tiens à dire d'emblée que la philosophie qui se cache derrière ce projet de loi et l'accent mis sur les efforts pour prendre des mesures d'intervention précoce, des mesures de prévention à l'égard des jeunes qui risquent de devenir des criminels, qui risquent d'avoir des démêlés avec le système de justice, constituent la bonne approche. Le projet de loi tente effectivement de diriger le système actuel de justice vers cette voie. Toutefois, les failles sautent aux yeux lorsqu'on commence à examiner le libellé du projet de loi.
D'abord, il y a l'aspect physique du projet de loi. Il est volumineux comparativement à la loi actuelle. Il fait presque deux fois le double de l'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants, qu'on a vertement calomniée et critiquée au cours de ses 17 années d'existence. Cette loi a mûri et est presque rendue à l'âge adulte, selon l'ancienne définition de ce terme.
Dans sa forme actuelle, le projet de loi dont nous sommes saisis est tellement complexe, compliqué et encombrant que, s'il était adopté tel quel, la quantité de reports, d'interprétations, de jargon juridique et de manoeuvres serait astronomique.
En tant que membres du comité, lors de la législature précédente, nous avons entendu de nombreuses opinions sur l'application du projet de loi dans la pratique. Nous avons entendu des juges chevronnés dire qu'ils ne le comprenaient pas. Des juges possédant des années d'expérience dans l'interprétation de la loi actuelle ont lu le projet de loi et ont dit qu'ils ne pouvaient pas comprendre comment il pourrait être appliqué dans la pratique. C'est effrayant lorsqu'on considère que le projet de loi semble sur le point d'être mis en vigueur.
Il y a d'autres éléments précis du projet de loi dont je voudrais parler dans mes observations, mais je tiens aussi à reconnaître les modifications que le gouvernement et le ministère de la Justice ont tenté d'apporter. Ces modifications portent plus particulièrement sur une des questions que le Bloc québécois a fait ressortir avec le plus d'évidence, soit celle de l'administration de la justice au Québec.
[Français]
Je suis très heureux avec la situation actuelle dans le domaine de la justice au Québec. La situation au Québec est claire. Parmi les autres provinces du pays, la province de Québec est la première en matière d'approche dans le domaine de la justice.
[Traduction]
Il s'agit d'un modèle qui montre comment l'ancien système peut être appliqué d'une manière très positive en raison de l'accent que met le Québec sur la tentative d'identifier dès le début les jeunes qui sont à risque.
Là encore, c'est une lacune dans le projet de loi pour la simple raison que, contrairement à la façon dont la loi actuelle est administrée au Québec, le projet de loi créera un faux sentiment de sécurité. Il n'offrira pas le soutien nécessaire, en dépit du fait qu'il suscite l'espoir que c'est là qu'on mettra l'accent. Il ne met pas en place les ressources qui permettent à cet espoir de se concrétiser et, comme l'a dit mon collègue du NPD, il refile aux provinces le coût de demander aux délégués à la jeunesse, aux policiers, aux juges, aux agents de probation et à ceux participant en première ligne à l'administration de la justice d'intervenir tôt dans la vie d'un enfant, ce qu'ils font déjà.
Toutefois, on ne leur donnera pas les moyens de le faire. On ne leur fournira pas les ressources, le temps, l'effort ni les programmes nécessaires pour administrer le projet de loi. C'est presque pire. C'est presque pire de susciter de l'espoir pour ensuite ne pas offrir les ressources qu'il faut. C'est la principale lacune du projet de loi, outre sa complexité.
Mon collègue et d'autres députés ont signalé la discrétion avec laquelle cette nouvelle mesure législative sera administrée. Il n'y a rien de mal à maintenir un sain degré de discrétion, mais le projet de loi, à de nombreux égards, élimine la discrétion et créé un nouveau niveau de processus, par exemple un nouveau niveau de détermination de la peine, où le concept de mise en liberté anticipée, de libération d'office, qui constitue l'une des principales lacunes du système judiciaire actuel pour adultes, est désormais appliqué au système judiciaire pour adolescents.
Au cours de la dernière législature, nous nous sommes aussi penchés sur la possibilité d'éliminer la libération d'office de l'actuel système pour adultes, c'est pourquoi il est paradoxal que, dans sa sagesse, le ministère de la Justice dépose maintenant à la Chambre un projet de loi qui prévoit une disposition très discutable, dont on peut dire qu'elle est un risque pour les Canadiens. Le ministère met en place un tel mécanisme dans le système pour les adolescents.
Le projet de loi prévoit également un processus très intéressant, mais très mauvais, d'après moi, pour faire la distinction entre les infractions avec violence et sans violence. Il y aura une sorte d'audience informelle pour déterminer si l'affaire fera l'objet d'un procès pour infraction avec violence ou sans violence. Là encore, je ne pense pas que la question doit être laissée à la discrétion de qui que ce soit.
Il y a aussi un autre élément de discrétion intéressant, en ce sens que le projet de loi encouragera les agents de police à exercer leur jugement pour faire observer la justice, ce qu'ils font tous les jours. Ils seront invités à l'occasion à donner un ou deux coups de pieds au derrière d'un jeune qu'ils soupçonnent d'être impliqué dans un délit mineur, disons un acte de vandalisme, comme dans l'histoire que vient de rappeler le député de Winnipeg—Transcona concernant son grand-père. J'ai un ami, Hector MacIsaac, avocat de la défense à Antigonish, en Nouvelle-Écosse, qui appelle cela la justice à la Matt Dillon que, dans leur sagesse, les policiers appliquent souvent avec discrétion, mesure et modération.
Cette méthode fait problème parce que, premièrement, il n'y a aucune moyen de savoir combien de fois un jeune peut être ramené chez lui, confronté à ses parents et conseillé par des policiers.
Deuxièmement, les policiers n'ont aucun moyen de le faire étant donné les contraintes qui leur sont imposées à l'heure actuelle. De nos jours, on demande aux policiers d'être des travailleurs sociaux pour les jeunes, des conseillers et même des parents de substitution dans certains cas; on leur demande de s'asseoir et d'expliquer à un jeune que son comportement est inacceptable et potentiellement criminel. Bien des policiers essaient déjà de jouer tous ces rôles, mais, encore une fois, les attentes à leur égard s'accumulent. Ce projet de loi ne prévoit rien au titre des appuis et des ressources.
Le système actuel ne comporte pas de ces dispositions nouvelles, innovatrices et proactives. Pour le moment, il est financé à moins de 50 p. 100 dans bien des provinces, à beaucoup moins, alors que 50 p. 100 était le seuil prévu dans la Loi sur les jeunes contrevenants. Le Parlement avait décidé à l'origine que le gouvernement fédéral défraierait au moins 50 p. 100 des coûts de l'administration du système de justice pénale pour les jeunes. Ce n'est pas ce qui se passe et, dans certaines provinces, le pourcentage de financement est affreusement bas.
L'uniformité est aussi un élément extrêmement important. Je conviens que, dans le projet de loi, la ministre a essayé de satisfaire aux demandes des provinces qui, comme le Québec, veulent avoir la discrétion. Dans un monde idéal, le Bloc aimerait choisir de ne pas participer du tout à ce projet de loi, et à bien d'autres d'ailleurs. Cependant, ce serait extrêmement inquiétant si c'était permis de faire cela et d'avoir la discrétion de déterminer des peines très variables, surtout dans le contexte d'un système de justice pour les jeunes. L'uniformité est un facteur crucial de l'administration de la justice pour les jeunes. L'uniformité et une approche ferme au besoin sont des facteurs très importants pour transmettre le message approprié à un jeune.
La dissuasion et la dénonciation sont deux mots constamment absents des discussions sur ce projet de loi et pourtant ils ressurgissent quotidiennement dans nos tribunaux au pays. Le projet de loi devrait justement avoir pour objet d'accuser publiquement les jeunes contrevenants, de les empêcher de récidiver et de faire passer un message aux autres jeunes qui voudraient les imiter. Il n'est pas le moindrement interdit de faire passer un message dissuasif particulier ou général. C'est une pratique acceptée, devant les tribunaux pour adultes et dans le langage employé devant les tribunaux pour adolescents.
Un autre aspect important à ne pas oublier ici est le retard mis dans l'administration de la justice. Les jeunes doivent être tenus immédiatement responsables des actes dont on les accuse au criminel. À l'heure actuelle, il se passe beaucoup de temps entre l'accusation, l'interpellation et le procès. Ce nouveau projet de loi va allonger encore ce délai de façon exponentielle. Il est entendu parmi les spécialistes, ceux qui administreront ce projet de loi aux premières lignes, que cela créera d'autres échappatoires. Ils en parlent comme d'un programme de création d'emplois pour les avocats.
Beaucoup de mes amis juristes jubilent. Ils comptent à l'avance les honoraires que cette nouvelle loi leur fera gagner en permettant des retards. Comme le veut le dicton, justice différée est justice refusée. Elle l'est d'autant plus lorsque l'accusé est un jeune.
S'il doit y avoir des poursuites, elles doivent suivre immédiatement les faits reprochés afin de frapper l'imagination du jeune. Il importe de tarder le moins possible à le faire. Cela ne veut pas dire qu'il faille bâcler les affaires, mais il est essentiel qu'une loi de ce genre témoigne de raison et de bon sens. C'et essentiel, pour qu'elle gagne la confiance du public et le respect des administrateurs, des avocats et surtout des juges ainsi que de la police et des agents de probation, qu'elle soit facile à comprendre pour tous. On ne peut certes pas dire cela du présent projet de loi.
J'en conclus que, dans le contexte d'ensemble, nous devrions peut-être nous donner un comité distinct chargé de veiller à ce que toutes les mesures législatives soient plus compréhensibles par les personnes les plus directement touchées. Je rappelle que c'est là une importante lacune de cette mesure législative.
On a comparé sa complexité à celle de la Loi de l'impôt sur le revenu. Une personne a dit qu'elle est plus difficile à comprendre que l'arithmétique chinoise. Le projet de loi comprend beaucoup de références croisées et de nouveaux articles. Il offre toutes sortes de marges de manoeuvre qui entraîneront des retards sans fin et qui contribueront à bien des égards à retarder le cours de la justice.
Dans le cadre du débat, on cite souvent des statistiques concernant la hausse ou la baisse de la criminalité chez les jeunes. À mon avis, le moyen le plus important permettant de déterminer ce qui se passe réellement dans la rue est de parler aux policiers, aux travailleurs sociaux auprès des tribunaux et aux principaux responsables de l'application de la loi. Ils nous apprendront qu'il y a un accroissement des crimes avec violence.
Ce type de crime est à la hausse, en particulier chez les jeunes femmes. On note une hausse du recours aux armes dans les crimes avec violence. C'est une tendance préoccupante qui n'est pas abordée directement dans cette mesure législative. En réalité, on embrouille toute la question en établissant une distinction entre les crimes avec violence, les crimes sans violence et les crimes graves avec violence, à telle enseigne que, dans un des articles, les soi-disant voies de faits simples ne sont pas rangées dans la catégorie des infractions violentes. Cela présente un caractère pervers.
Statistique Canada fait aussi ressortir une autre faiblesse du système. Selon les statistiques du mois d'août 2000, près de la moitié des jeunes reconnus coupables d'une infraction en 1998-1999 ont tout simplement bénéficié d'une probation. Les trois-quarts des peines privatives de liberté étaient pour une durée de trois mois et moins, 90 p. 100 étaient pour une période de six mois et moins, et 2 p. 100 des condamnés ont obtenu une peine supérieure à un an. Seulement 0,1 p. 100 des crimes commis par des jeunes ont été jugés par les tribunaux pour adultes dans le cadre des dispositions de transfert.
Ces renseignements situent la question dans un contexte différent, car une grande partie du débat s'embrouillera autour de la question de savoir s'il s'agit d'un projet de loi plus contraignant ou plus clément. Les statistiques montrent qu'à l'heure actuelle, nous ne jetons pas des jeunes en prison à un taux alarmant, et ce n'est pas l'objet de ce projet de loi.
Cependant, il faut prévoir dans tout cela une certaine responsabilité et une certaine protection de la population. Ce sont deux des pierres angulaires de tout système de justice, surtout un système de justice pour les jeunes.
Cet élément de responsabilité a souvent été mis de côté. À l'heure actuelle, les jeunes et de nombreuses personnes considèrent que le système des jeunes délinquants protège en fait les jeunes qui sont traduits devant les tribunaux plutôt que les victimes de jeunes qui ont violé la loi.
La récidive est un grave problème chez les jeunes. Dans de nombreux cas, j'ai constaté qu'il fallait cinq, six ou sept comparutions devant un tribunal avant qu'un jeune reçoive une peine privative de liberté. En fait, 48 p. 100 des condamnés avaient déjà reçu au moins une condamnation au préalable. C'est très souvent l'enchaînement de comportements de plus en plus graves qui amène des jeunes à devenir des criminels endurcis. Cela montre qu'on devrait prévoir une intervention précoce et peut-être essayer de mettre en place un système de justice réparatrice ou de peines alternatives, ce qui met une fois de plus en lumière la nécessité de ressources accrues.
Les groupes d'aide aux victimes et les policiers de première ligne s'offusquent du fait que les voies de fait simples, dont j'ai parlé plus tôt, ne sont pas considérées comme un crime violent. Il y a un autre élément à cela en ce qui concerne les gens visés par la loi. On dénature beaucoup la position du Parti progressiste conservateur et d'autres qui considèrent que les jeunes de moins de 12 ans devraient être visés de façon à pouvoir profiter des dispositions destinées à permettre à un jeune de cesser d'être un criminel.
Je crois vraiment qu'il est utile de prévoir une intervention précoce et d'offrir à un jeune des programmes destinés à l'aider à lutter contre sa toxicomanie et son comportement violent, car les jeunes sont souvent eux-mêmes des victimes venant de foyers où ils ont subi des mauvais traitements vraiment terribles.
Pourquoi ne pas avoir une disposition de transfèrement qui permette de placer des enfants de 10 ou 11 ans dans un système où ils pourraient bénéficier de ces programmes, non pas pour les démolir, non pas pour les jeter en prison avec d'autres adolescents plus âgés qui, nous le savons, s'emploient souvent à leur apprendre à commettre des infractions plus graves, mais pour qu'ils bénéficient de programmes adaptés?
Un juge dispose déjà de cette discrétion. Elle ne doit pas servir à transférer un adolescent au système judiciaire pour adultes. Nous pouvons actuellement transférer un adolescent au système pour adultes. Pourquoi ne devrions-nous pas pouvoir transférer au système de justice pour adolescents des enfants qui ont commis de graves infractions?
On en a vu des exemples récents. Un garçon de 11 ans est entré en plein jour dans une banque à Edmonton et y a commis un vol. On a rapporté le cas de filles de 12 et de 13 ans qui ont battu une femme âgée dans sa maison à Calgary. Les filles de 12 et 13 ans ont été accusées de cambriolage, mais on n'a rien pu faire dans le cas du garçon de 11 ans.
Il est prévu qu'on s'occupe des enfants de moins de 12 ans et des adolescents dans le cadre de programmes administrés au niveau provincial et censés recevoir un financement du gouvernement. Or ce financement n'est pas assuré.
Les mesures préventives de première ligne constituent un élément très positif du projet de loi. On pourrait apporter d'autres modifications importantes qui enverraient un message de dissuasion. Il faudrait les inclure dans le projet de loi. Il est extrêmement important de prévoir des changements positifs dans ce secteur de la loi et de l'application de la loi.
Nous sommes résolus à travailler de concert avec tous les partis et avec tous les membres du comité pour tâcher d'améliorer le système de justice pour les adolescents; pour tâcher de bâtir des communautés plus sûres, ce qui est censé être le but de tout ce processus; et pour tâcher de donner aux agents d'application de la loi, à ceux qui sont chargés d'administrer la loi et aux intervenants, les ressources dont ils ont besoin. Nous proposerons ces amendements à l'étape du comité où nous les exposerons.
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie le député de son excellent discours. Un comportement s'est répandu à la grandeur du Canada. On le qualifie généralement d'intimidation. Il suppose qu'un étudiant plus âgé ou plus costaud s'en prend à un de ses pairs dans la cour d'école ou sur le chemin de l'école. Souvent, ces écoliers commettent des agressions. Or, dans les cas auxquels je me suis intéressé, aucune accusation d'agression n'a jamais été portée contre les auteurs d'actes semblables.
La liberté d'action des autorités scolaires dans ces cas est limitée. L'intimidation est un phénomène qui se répand. Il est présent à la grandeur du pays, et il faut que ça cesse. J'aimerais savoir ce qu'en pense mon éminent collègue, car les comportements de ce genre sont habituellement suivis d'autres infractions.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je remercie le député de Souris—Moose Mountain de sa question. Mon collègue parle de cas d'agressions qui se produisent dans les cours d'école. J'en ai moi-même été témoin et je crois que nous en avons tous malheureusement entendu parler. Dans la plupart des cas, lorsque le juge prononce la sentence, il émet une ordonnance de probation qui oblige le jeune qui a commis des actes d'intimidation à fréquenter l'école, où il a souvent été à l'origine de problèmes ou a été impliqué dans des agressions contre d'autres écoliers.
La question des attaques en bande me préoccupe aussi. J'aimerais beaucoup que le Code criminel contienne des dispositions précises à ce sujet. Les attaques en bande constituent un comportement extrêmement dangereux, dont les auteurs sont dominés par une mentalité de gang. Des jeunes, agissant de façon anonyme, se ruent par surprise sur leur victime et l'agressent. On se rappellera la triste histoire de Rena Virk, en Colombie-Britannique. Il existe d'autres exemples de ces horribles attaques en bande commises par des jeunes. Je pense notamment au cas tragique de Jonathan Wamback. Nous aimerions beaucoup voir ajouter au Code criminel un article qui viserait expressément ce type de comportement et qui prévoirait l'imposition d'une peine minimale obligatoire à ses auteurs.
M. John Maloney (secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député d'en face voit d'un mauvais oeil la période de supervision faisant suite à une peine privative de liberté. Ne croit-il pas que cela est infiniment supérieur au système actuel où, à la fin de sa période de détention, le détenu est libéré complètement? Ne croit-il pas qu'une période de supervision favorisera l'atteinte des objectifs de réhabilitation et de réinsertion, notamment si cette période n'est pas fixée par la loi, mais plutôt par le juge qui prononce la peine?
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, le secrétaire parlementaire a peut-être mal interprété ma position. Je suis tout à fait d'accord avec lui pour dire que la supervision après la libération est une bonne chose. Le juge a le pouvoir actuellement d'imposer une période d'incarcération et de probation. Cela doit faire partie de la sentence qui est prononcée.
Certes, la question de la libération pure et simple s'inscrit dans celle plus globale de la libération d'office. Toutefois, c'est une des faiblesses. Nous jouons un mauvais tour aux adolescents si nous insérons le système actuel pour les adultes dans le système de justice pour les adolescents.
Je suis certes d'accord sur la période de probation, car la supervision qui est assurée est peut-être aussi importante pour veiller à ce qu'il n'y ait pas récidive, à ce que le délinquant ne revienne pas à son ancien comportement criminel. C'est pourquoi les conditions suivantes sont si importantes: le délinquant ne doit pas s'associer à des criminels; il ne doit pas consommer ou posséder des drogues ou de l'alcool; il doit faire une demande de counselling; et il ne doit pas fréquenter certaines personnes, y compris la victime. C'est pourquoi ces conditions-là existent. Elles font partie du processus de réadaptation.
Cela est tout à fait conforme à la politique du Parti conservateur en cette matière. Nous ne sous-estimons absolument pas l'importance de la réadaptation et celle de la supervision à long terme pour les adolescents, au besoin.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, je voudrais poser une question au député. Nous parlons de répondre aux besoins des jeunes, qui sont de plus en plus nombreux à se livrer à des activités criminelles, particulièrement avec violence. Au lieu de recourir à la loi pour régler ce problème, ne croit-il pas que, du moins en partie, nous pourrions tenter, entre autres, de répondre aux besoins de bon nombre de ces jeunes en matière d'éducation, de services sociaux et de loisirs? À mon avis, les gouvernements en général abandonnent nos jeunes lorsqu'il s'agit de leurs besoins en matière de loisirs et d'activités récréatives. Je voudrais que le député fasse des observations à ce sujet.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je remercie mon ami et collègue de St. John's West. Il soulève une question formidable, qui s'inscrit dans un débat beaucoup plus large sur les mesures de prévention qui peuvent être prises.
Il conviendra d'emblée que les programmes destinés aux jeunes, qu'il s'agisse de programmes de musique ou des activités sportives et récréatives dont il a parlé, constituent exactement l'approche que nous devrions adopter en ce qui concerne l'administration de la justice pour les adolescents. C'est sur ces programmes qu'il faudrait mettre l'accent. C'est dans ces programmes qu'il faudrait investir des fonds.
Les programmes, s'ils sont bien gérés, rapporteront des avantages énormes à l'avenir. L'ennui, c'est qu'on peut difficilement les mesurer. On peut difficilement présenter l'approche préventive en s'appuyant sur des statistiques. On peut difficilement dire que si nous investissons ces fonds aujourd'hui, nous économiserons un certain montant à l'avenir.
Il est très clair que lorsque des jeunes ont des choses à faire et des occupations pour meubler leur temps libre, ils ne sont pas dans la rue à s'embêter. Ils ne consomment pas de drogues. Ils n'entrent pas par effraction dans les logements de personnes âgées. Ces programmes leur inculquent des valeurs importantes. Ils leur enseignent le respect de soi et le respect de leurs concitoyens.
Je suis tout à fait d'accord avec le député pour dire que c'est à cela que nous devrions consacrer la majeure partie du débat et la majeure partie de notre temps, de notre énergie et nos ressources, afin de nous doter d'un système de justice pour les adolescents qui soit efficace pour notre pays.
[Français]
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.): Monsieur le Président, je vais partager le temps qui m'est imparti avec mon collègue de Vancouver Quadra.
Il me fait plaisir de prendre la parole dans le cadre de l'étude du projet de loi C-7, Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Avant de commencer, je veux féliciter mes collègues du caucus du Québec qui ont travaillé d'arrache-pied pour suggérer à notre ministre des modifications au projet de loi C-3. Leur travail, il faut le préciser, et les remarques précieuses des intervenants oeuvrant dans le domaine, nous permettent de présenter un projet de loi qui offre un équilibre entre la nécessité de protéger la société et les besoins de ces adolescents qui auront la responsabilité de gérer la société de demain.
J'ai lu le projet de loi C-7 avec mes yeux d'avocate, ayant déjà plaidé dans le cadre de la Loi sur les jeunes contrevenants, et je constate que ce projet respecte davantage le droit des jeunes, qu'il laisse une plus grande place aux intervenants sur le terrain, dont les policiers et les organismes communautaires qui luttent contre la prévention du crime dans les régions.
Dans le préambule de ce projet de loi, on met en lumière l'obligation de la société de répondre aux besoins des adolescents, de les aider dans leur développement et de leur offrir soutien et conseil jusqu'à l'âge adulte. On y affirme également la nécessité de prévenir la délinquance juvénile en s'attaquant aux causes des problèmes.
J'ai été renversée d'entendre le critique du Bloc québécois en matière de justice affirmer qu'il était préférable que le dossier d'un adolescent soit traité par un procureur de la Couronne. Je le cite: «Actuellement, dès la première offense mineure commise par un adolescent, le dossier est référé au procureur de la Couronne qui évalue si le jeune a besoin d'aide et, s'il y a lieu, le système québécois le réhabilite immédiatement.»
Pourquoi un procureur de la Couronne serait-il mieux placé pour décider de l'avenir d'un adolescent qu'un policier de quartier ou qu'une organisation communautaire qui travaille dans le secteur depuis des années? Pourquoi ces hauts cris lorsqu'on propose, à l'article 6, de donner «aux policiers le choix de ne prendre aucune mesure, de lui donner, soit un avertissement, soit une mise en garde ou de le renvoyer, si l'adolescent y consent, à un programme ou à un organisme communautaire susceptible de l'aider à ne pas commettre d'autres infractions».
Qu'y a-t-il de mal à vouloir que le jeune soit traité dans son milieu plutôt que de le mettre en détention, lorsqu'il commet une infraction mineure?
Pour les sceptiques, j'ajoute que l'article 7 du projet de loi a prévu d'autoriser le procureur général ou tout autre ministre d'une province à établir un programme qui autorisera les corps policiers à mettre en garde un adolescent plutôt que d'entamer contre lui des procédures judiciaires.
Dans ma circonscription de Laval-Est, nous avons le Centre Défi-Jeunesse, à Saint-François. C'est un quartier où la structure sociale est axée sur la famille à 91 p. 100, de milieu économiquement moyen. Les jeunes de 13 à 18 ans forment 10 p. 100 de la population et ils sont particulièrement touchés par des conditions telles l'aide sociale, les familles monoparentales et les personnes seules à faible revenu.
Défi-Jeunesse Saint-François est un organisme qui a été créé en 1992, depuis déjà 8 ans, pour venir en aide justement aux jeunes éprouvant des problèmes affectifs, sociaux ou relationnels, que ce soit d'ordre familial, social, de délinquance ou en toxicomanie.
L'organisme peut compter sur des appuis bien identifiés, comme le service de police de Saint-François, le CLSC des Milles Îles, l'École Fleur Soleil, les commerçants du centre commercial des Promenades de Saint-François, situé à proximité.
Récemment, cet organisme a lancé un projet intitulé Défi sans violence, animé par des policiers communautaires du secteur et des infirmières du CLSC. Ils ont rejoint 400 jeunes. C'est parce que ce gouvernement croit à la prévention qu'il alloue près de 32 millions de dollars dans des programmes de prévention du crime, dont plus de 4 millions de dollars vont au Québec.
Ainsi, Centre Défi-Jeunesse vient de se voir octroyer une somme de 50 000 $ pour piloter un projet intitulé Rassembler les deux mondes. C'est un projet qui va permettre à une intervenante de se rendre à Iqualuit, capitale du Nunavut, afin d'animer des ateliers de Défi sans violence avec des organisations qui sont dans ce secteur.
D'autres projets sont à venir. La directrice, Mme Talbot, à qui j'ai parlé, me disait que grâce à cette expérience, les jeunes ont appris à travailler avec les policiers et que, maintenant, le rapport entre les deux est extraordinaire.
Avec le projet de loi C-7, on ne pourra plus placer sous garde un jeune qui en est à ses premières infractions de moindre gravité. Pourquoi vouloir à tout prix incarcérer un jeune qui commet un délit mineur? Sait-on ce que cela veut dire d'avoir un dossier ouvert au Tribunal de la jeunesse? Est-ce qu'on comprend l'implication pour les parents de ces jeunes qui doivent défiler devant le tribunal, quand il existe d'autres solutions? Si c'est ce qui se passe au Québec présentement, faisons-le le débat.
J'ai connu le milieu des procureurs de la Couronne au Tribunal de la jeunesse. J'avoue que je pense que je ferais plus confiance au policier de quartier. À mon avis, ce dernier connaît certainement mieux le milieu que le procureur de la Couronne, qui est dans sa tour d'ivoire au Palais de justice et qui souvent, en raison des coupures budgétaires, croule sous le poids de sa charge.
Je pense également que le fait de confier le jeune à un groupe d'intervenants dans son milieu, tel que prévu à l'article 6, des spécialistes qui sont bien aux faits des bandes criminelles et des gangs de rue qui oeuvrent dans le secteur pourra nous aider à réhabiliter des jeunes.
Dans Le Devoir de ce matin, on peut lire un titre éloquent, et je cite:
Baril juge durement les services à la jeunesse.
L'article souligne ce qui suit:
[...] le système de protection de la jeunesse pèche par excès de judiciarisation et souffre de «ruptures continuelles» dans la livraison de services.
Le portrait n'est pas rose dans le réseau d'aide à la jeunesse. On parle d'engorgement chronique dans les centres de réadaptation. On fait primer l'administratif sur le clinique, et le judiciaire sur le droit social.
La Commission des droits de la personne et de la jeunesse du Québec a dénoncé en octobre dernier le caractère répressif des conditions de vie imposées aux jeunes adolescents dans les centres de jeunesse. Voilà la situation du réseau au Québec.
J'aimerais que nos amis d'en face réfléchissent à ce constat que fait le ministre québécois Gilles Baril, en voulant protéger une approche qui judiciarise trop rapidement les jeunes.
J'aimerais que nos amis d'en face réfléchissent avant de se faire les porte-parole du statu quo sous prétexte que le Québec a un bas taux de criminalité. C'est un raisonnement trop simpliste de dire que puisque le Québec a un taux de criminalité très bas, le système fonctionne au Québec. Je les mets en garde contre ce raisonnement simpliste.
Qui nous dit que cette baisse de la criminalité pour ce qui est des crimes violents chez les jeunes au Québec n'est pas due au travail de nos policiers de quartier, à nos organisations communautaires qui luttent pour la prévention du crime, à nos intervenants, comme le Centre de défi-jeunesse de Saint-François, qui travaillent depuis huit ans pour la prévention du crime chez les jeunes?
Ce que nous devons réaliser, et c'est primordial, c'est que le crime le plus courant chez les jeunes, c'est le vol. Pour ce qui est des crimes avec violence, ce sont les voies de fait simple qui l'emportent, soit le type le moins grave.
Qui nous dit que l'on ne peut pas attribuer cette baisse de violence à la tolérance zéro appliquée par nos policiers au Québec, aux écoles et à d'autres intervenants?
C'est ce que le Barreau affirmait dans son mémoire présenté sur le projet de loi C-3. Jamais le Barreau n'affirme que la criminalité a baissé en raison de l'intervention des procureurs de la Couronne et de l'incarcération des jeunes qui en sont à leur première offense.
Ce que le ministre Baril dévoile au Québec, c'est non seulement la réalité, mais j'ajouterai que cette réalité est encore pire. Promenez-vous dans les salles des tribunaux de la jeunesse et vous allez voir que le système ne fonctionne pas du tout.
Demandez à des jeunes combien de fois ils ont dû se présenter devant le tribunal. Combien de fois leur cause a dû être remise en raison de l'encombrement du rôle? Combien de fois ont-ils dû s'absenter de l'école et leurs parents du travail pour se présenter au Tribunal de la jeunesse pour se faire dire de revenir une prochaine fois?
En terminant, je pense...
Le vice-président: Je regrette d'interrompre l'honorable députée, mais j'ai tenté, par les moyens mis à ma disposition, d'indiquer que le temps s'écoulait et, de fait, il est maintenant écoulé. L'honorable député de Berthier—Montcalm a la parole.
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, je trouve très désolant qu'une députée du Québec tente, par son discours, de salir une grande réussite québécoise qu'est le système de justice pour les adolescents.
Je trouve très dangereux le discours qu'elle a tenu. De façon délibérée, elle mélange les compétences d'administration de la justice et les juridictions fédérales. Je n'ai jamais dit que le système québécois marchait sur des roulettes. J'ai dit qu'il marchait bien.
Une voix: Qu'il marchait mieux.
M. Michel Bellehumeur: Si aujourd'hui il y a des problèmes administratifs dans les Centres jeunesse, quelle en est la raison? C'est parce que, à l'heure actuelle, le gouvernement d'en face doit 850 millions de dollars pour l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants, de l'aveu même de l'ancien ministre de la Justice.
Qu'elle ne vienne pas faire des leçons au gouvernement du Québec. Qu'elle regarde ce qui se passe dans la boîte du gouvernement libéral.
Lorsqu'elle dit qu'elle a pratiqué le droit de la jeunesse, j'ai des doutes sur son efficacité avec le discours qu'elle tient. Elle vient de dire que la Commission des services juridiques du Québec a menti en disant qu'elle était contre le projet de loi de la ministre.
Que disent le Conseil permanent de la jeunesse, les centrales d'enseignement, l'École de criminologie de l'Université de Montréal, les centres communautaires juridiques, les avocats de la défense, les avocats de la poursuite, l'Institut Pinel, l'Association des chefs de police, l'Association des chefs de pompiers du Québec, et je pourrais en nommer encore plus? Ils disent à la ministre et à la députée de Laval-Est qu'elles font erreur. La Loi sur les jeunes contrevenants est une bonne loi. Le projet de loi C-7 est un projet de loi qui ne devrait jamais voir le jour. C'est cela que le Québec dit.
Le Québec demande une chose fort simple, et si la députée veut vraiment défendre le Québec, défendre des groupes comme Défi sans violence, si elle veut vraiment que ce projet de loi soit adopté très rapidement, qu'elle fasse pression auprès de la ministre pour qu'on y insère un droit de retrait clair, net et précis pour le Québec et, dans cinq minutes, le projet de loi sera adopté et entre ses mains.
Mme Carole-Marie Allard: Monsieur le Président, est-ce que le député de Berthier—Montcalm réalise que l'adoption de ce projet de loi générera, pour le Québec, des sommes additionnelles très importantes, puisque l'on pourra enfin ajuster les sommes qui sont accordées au Québec pour l'administration de la justice, lesquelles passeront de 17 p. 100 à 23 p. 100?
Le Québec ira chercher 200 millions de dollars sur les 951 millions de dollars consacrés au système de justice pour adolescents.
Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le ministre Baril qui dit que des revirements sont nécessaires pour remettre le réseau de justice pour adolescents sur ses pattes.
Ce que je ne comprends pas, c'est que l'opposition se vante de judiciariser les dossiers des jeunes à une première offense et se dise fière de le faire. Je pense qu'il est temps que quelqu'un parle pour les jeunes.
M. Michel Bellehumeur: Monsieur le Président, je ne sais pas si elle le fait de façon consciente, mais la députée mêle certaines choses.
De tout le Canada, le Québec est la province qui déjudiciarise le plus les dossiers des jeunes contrevenants. De tout le Canada, c'est au Québec qu'il y a le moins de mises sous garde. De tout le Canada, c'est au Québec que le taux de criminalité est le plus bas. De tout le Canada, c'est au Québec que le taux de récidive est le plus bas.
Ma question est fort simple. La prochaine fois, avant de faire un discours, je voudrais savoir si la députée prendra au moins le temps, non seulement de lire le projet de loi de la ministre et les notes ministérielles, mais au moins les mémoires que les témoins ont déposés auprès du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Elle verrait bien qu'elle dit des aberrations.
Mme Carole-Marie Allard: Monsieur le Président, je vois que mon collègue est dérangé par ma position. Je pense qu'il est à peu près temps que l'on dise que, lorsqu'un procureur de la Couronne prend une décision concernant un jeune, il ouvre nécessairement un dossier au Tribunal de la jeunesse. Qu'est-ce que cela déclenche par la suite? Cela déclenche l'obligation pour le jeune de comparaître, de plaider, et le reste.
M. Richard Marceau: Non, c'est faux ça.
M. Michel Bellehumeur: C'est faux.
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je regrette, mais la période de questions et commentaires est écoulée.
[Traduction]
M. Stephen Owen (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, mes remarques s'adresseront en premier lieu aux habitants de Vancouver Quadra qui m'ont confié la rssponsabilité de travailler avec le gouvernement sur les questions d'intérêt public importantes pour les Canadiens en mettant le sectarisme de côté. Ce sera l'esprit des remarques que je ferai aujourd'hui.
Vancouver Quadra est une ville d'une beauté, d'une diversité culturelle et d'une prospérité sans pareilles. Cette circonscription abrite la plus grande université de recherche du Canada, qui nous relie à la nouvelle économie, ainsi que trois grands hôpitaux, un pour femmes, un pour enfants et un hôpital universitaire. Et, bien sûr, il ne pleut jamais à Vancouver.
La justice pénale pour les adolescents, la protection du public et les intérêts des enfants et des jeunes sont des questions extrêmement importantes pour les Canadiens. Je voudrais faire aujourd'hui quelques brèves remarques au sujet des principes à la base du projet de loi C-7 ainsi que de la tendance, que je vois se développer depuis une vingtaine d'années, à vouloir traiter la question de la délinquance juvénile d'une façon holistique et réaliste. Le problème n'est pas nouveau. Voilà au moins 25 ans qu'il est débattu, depuis que j'ai commencé à exercer le droit.
Dans les années 70, la commission royale d'enquête sur l'enfance en Colombie-Britannique, la commission Berger, avait parlé de tribunaux unifiés de la famille, de l'importance d'une structure qui regrouperait le système de justice pénale et le système d'aide à l'enfance et ferait recours à des sanctions communautaires. Nous avons essayé avec plus ou moins de succès, je dirais plutôt moins que plus, d'appliquer ces principes. À mon humble avis, ce projet de loi nous permet de promouvoir ces trois grands principes sur lesquels je pense que tous les députés à la Chambre sont d'accord.
Le principe de la prévention est absolument critique. Je voudrais citer un aspect de la prévention qui est la cause profonde de la criminalité juvénile. Quand nous examinons la cause profonde de la pauvreté et le désespoir qu'elle entraîne et le désespoir qui règne dans les régions pauvres et de nombreuses collectivités autochtones, en particulier au Canada, nous comprenons que le désespoir est à l'origine de la surreprésentation des autochtones dans notre système de justice pénale. C'est un problème que le gouvernement a l'intention de régler, comme il l'a affirmé dans son discours du Trône. L'indicateur de désespoir le plus grave dans une collectivité pauvre est le taux de suicide chez les jeunes. Le projet de loi et les services sociaux pour les jeunes doivent contribuer à diminuer ce taux.
La responsabilisation est absolument essentielle. Cependant, il est impératif de cerner quel type de responsabilisation s'avère le plus efficace, la réconciliation avec la victime ou la médiation, la reddition de comptes à la collectivité ou les travaux communautaires. Comme le député l'a dit plus tôt, il peut être bien plus difficile pour le contrevenant de faire face à sa propre collectivité, à sa victime, à sa propre famille ou d'effectuer des travaux communautaires directement liés à son crime.
La responsabilité et la responsabilisation sont aussi très importantes. Nous devons distinguer la punition de la nécessité de réadapter le jeune et de le réintégrer à la société. Peu importe la gravité du crime, et il existe des jeunes qui commettent des crimes très graves comme les députés le savent, certains contrevenants s'en tireront. Nous ne devons pas laisser des monstres revenir dans notre société. Nous devons mettre l'accent sur une sérieuse réadaptation et sur la réintégration. Le projet de loi porte sur quelques-uns de ces points.
Je voudrais aborder brièvement le cas où il y a une cause commune. J'ai entendu aborder cet aspect aujourd'hui selon toute la gamme des opinions. Nous devons aborder la criminalité juvénile en termes de continuums selon plusieurs dimensions. Il y a la dimension de l'âge. Il y a la dimension de la gravité de l'infraction. Il y a la dimension des besoins sociaux et des besoins de santé mentale du contrevenant. Je crois qu'un certain degré de cause commune est en train d'apparaître.
Dans le cas des jeunes de moins de 12 ans, les députés divergent d'opinions à la Chambre, mais ils s'entendent sur les objectifs. Il s'agit de protéger la société et de veiller à servir les intérêts des jeunes, de leurs familles et des communautés.
J'ai lu les débats consacrés l'année dernière au projet de loi précédent. Un député de l'Alliance canadienne parlait de la question des jeunes de moins de 12 ans. J'ai trouvé un véritable raisonnement dans son intervention et la raison qu'il exposait était bonne. Je ne l'ai pas entendu mentionnée aujourd'hui. Il s'agissait de permettre de traduire ces jeunes contrevenants devant les tribunaux afin de pouvoir leur éviter de devenir les victimes de criminels plus âgés. Ce faisant, on les tiendrait éloignés du monde de la criminalité. C'est un point de vue valable. Je ne pense pas qu'on estime généralement que l'on devrait pouvoir traduire les enfants de moins de 12 ans devant un tribunal pénal; il faudrait plutôt qu'on s'en occupe au moyen des services sociaux et de la loi sur la protection de l'enfant. Je note que le Manitoba est en train d'élaborer des critères généraux pour s'occuper du problème.
Il est absolument essentiel de séparer des autres les jeunes contrevenants non violents. Cela fait plus de 20 ans au Canada que des agents de police des services de police communautaire et des substituts du procureur général exercent une discrétion appropriée dans de nombreux domaines, dans des projets pilotes. Le député de Provencher a mentionné qu'il engageait des poursuites en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants dans les années 70.
J'étais défenseur public à l'époque et je pensais que ceux qui exerçaient cette profession pouvaient assurer que justice soit faite. J'ai vite constaté qu'en exerçant correctement leur pouvoir de discrétion, les policiers et les procureurs de la Couronne étaient les mieux placés, en particulier dans le cas de jeunes contrevenants non violents qui en étaient à leurs premières infractions, pour garantir que justice soit faite, que les jeunes rendent des comptes, qu'ils ne deviennent pas des récidivistes et qu'ils ne commettent plus de crimes.
Ce projet de loi mettra à la disposition des juges une série d'outils importants, notamment pour qu'il y ait une approche interdisciplinaire et pour que les parents soient impliqués dans les poursuites et à assumer une responsabilité financière, au besoin.
Les dispositions prévoyant la détermination de peines pour adultes dans le cas de jeunes ayant commis des crimes graves et aux récidivistes sont tout à fait appropriées. Elles sont bien ciblées sur un besoin précis. Si l'incarcération est nécessaire, des services efficaces de réinsertion sociale doivent être en place. De même, il est essentiel qu'en cas de libération, des dispositions soient prises pour assurer une étroite surveillance.
Même si les propos qu'on entend au cours des 20 dernièrs années portent à croire qu'il existe de profondes divergences d'opinions sur ces questions qui sont très importantes pour les Canadiens, il y a une grande cause commune. Ces questions sont absolument cruciales pour nous convaincre qu'il faut absolument aller de l'avant avec ce projet de loi. Il faut savoir que les différences sont marginales, pas fondamentales.
Une disposition particulière a donné lieu à des opinions fondamentalement différentes exprimées par le député bloquiste et les députés de l'Alliance canadienne. Elle concerne la diminution de l'âge dans le cas de peines infligées à l'égard des infractions désignées. Le Québec a la flexibilité voulue pour appliquer ou non cette disposition.
Je suis d'avis que nous devrions aller de l'avant avec ce projet de loi. Notre cause commune est suffisante. Ce dossier est capital et il n'y a plus de temps à perdre. Le projet de loi bâtit sur l'expérience des 20 dernières années. Il s'attaque à des questions essentielles qui ont été soulevées par les députés des deux côtés de la Chambre. Cessons de tergiverser. Nos divergences sont marginales et pourront être éliminées en mettant en oeuvre ce projet de loi, et non en retardant son adoption.
* * *
RECOURS AU RÈGLEMENT
LE COMITÉ PERMANENT DE LA PROCÉDURE ET DES AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Hier, peu après 10 heures, j'ai déposé un avis de motion visant l'adoption d'un rapport de comité et je constate aujourd'hui que cet avis n'est pas inscrit au Feuilleton. Cela pourrait s'expliquer du fait que, quelques minutes avant de déposer cet avis, j'avais également demandé le consentement unanime pour que soit adopté le rapport et le Bureau a peut-être confondu les deux.
Je pense que le Bureau a un exemplaire écrit de l'avis de motion et je demande que Feuilleton soit rectifié de façon à indiquer que l'avis de motion a été effectivement donné hier matin. Cela permettrait au délai d'avis de 48 heures de courir depuis hier en cas de besoin.
Le vice-président: La question concerne nos travaux d'hier, soit le mardi 13 février. Je crois que c'était moi qui occupais le fauteuil quand le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre a demandé le consentement pour présenter sa motion. Le consentement a été refusé.
Vérification faite auprès du personnel de la Chambre, nous reconnaissons qu'il s'est produit une erreur administrative. En fait, l'avis de motion a été donné hier et aurait dû figurer au Feuilleton d'aujourd'hui. J'en conclus que le gouvernement pourra présenter cette motion demain s'il le souhaite. Ce sera possible demain.
S'il y a d'autres questions, j'y répondrai très brièvement, mais j'espère avoir réussi à éclaircir de mon mieux la situation. Je ne voudrais pas qu'on s'étonne si le gouvernement décide demain de se prévaloir de cette possibilité. Il est en droit de le faire du fait d'une erreur administrative que nous regrettons tous. Ce sont des choses qui arrivent, pas très souvent, mais elles arrivent quand même.
* * *
LA LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES ADOLESCENTS
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-7, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai des parents qui sont avocats et aussi bien des amis qui sont avocats.
Je respecte beaucoup les avocats. Le député du Parti conservateur parle de la complexité du projet de loi, de son volumineux contenu, deux fois plus important que celui de la Loi sur les jeunes contrevenants. Il affirme que ce projet de loi est totalement inacceptable et extrêmement difficile à comprendre. Il dit, je crois, que même les juges auraient du mal à le déchiffrer.
C'est assez étonnant. Lorsque nous rédigeons des projets de loi et des mesures législatives, des avocats écrivent les textes, des avocats entament des poursuites en vertu de la loi, des avocats agissent en défense, des avocats siègent au tribunal et déterminent ce qu'il faut faire par rapport à la loi et des avocats interprètent la loi. En vertu du présent projet de loi, des avocats auront à intervenir au nom de jeunes de moins de 14 ans pour s'acquitter du fardeau de la preuve inversé. Les avocats seront incroyablement présents à chaque étape du processus.
Il me semble que quelque chose cloche ici. Un tel projet de loi crée une industrie juridique qui n'a aucun sens pour les gens ordinaires. Toute personne normale ne pourrait agir ainsi. J'affirme à la Chambre qu'il a probablement fallu 17 avocats d'Ottawa pour rédiger le projet de loi et qu'il faudra 15 avocats de Philadelphie pour l'interpréter.
Le député ne voit-il pas une faille dans tout cela? Des avocats, des avocats et encore des avocats. Nous essayons de régler le problème de la criminalité chez les adolescents et de déterminer comment on doit agir avec nos jeunes. En présentant ce projet de loi, le gouvernement crée un excellent mécanisme pour enrichir les avocats encore une fois. Je ne vois pas comment il va régler le problème de la criminalité chez les jeunes.
M. Stephen Owen: Monsieur le Président, le projet de loi doit être complexe pour permettre la flexibilité nécessaire pour tenir compte des jeunes contrevenants et des genres de crimes qu'ils commettent ainsi que des genres de problèmes auxquels ils font face et pour offrir les meilleures ressources possibles à la communauté.
Les policiers avec lesquels j'ai fait affaire au niveau communautaire et les membres des comités de justice pour la jeunesse n'auront aucun mal à comprendre l'importance des renvois et à intervenir en vertu du projet de loi.
J'ai trouvé un peu amusant d'entendre dire que les avocats de l'aide juridique du Nouveau-Brunswick se réjouissaient à l'idée de défendre des causes portant sur cette loi. Les tarifs accordés à l'aide juridique doivent être beaucoup plus élevés au Nouveau-Brunswick qu'ils ne le sont en Colombie-Britannique si une telle perspective les fait sourire.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je remercie le député de Vancouver Quadra de son intéressant discours. Si c'était là son baptême d'orateur, j'en profite pour le féliciter et pour lui souhaiter la bienvenue à la Chambre. Sa réputation l'a certainement précédé. Je suis persuadé qu'il apportera une importante contribution, particulièrement dans le domaine de la justice.
J'ai été très heureux de l'entendre parler de la représentation autochtone et de la surreprésentation du peuple autochtone et de ses jeunes dans le système de justice pénale. C'est un dossier important dans ma circonscription de Winnipeg-Centre. Nous faisons face à un grave problème de bandes de jeunes. Pour toutes sortes de raisons socio-économiques, le problème est plus grave chez nous que dans d'autres régions.
Le député a également mentionné la surreprésentation dans les prisons. Je lisais justement hier qu'il est arrivé au cours des 15 ou 20 dernières années dans deux des prisons pour femmes autres que celle de Kingston que toutes les femmes qui y étaient détenues soient autochtones.
Le député a mentionné le rapport Berger. Je suis persuadé qu'il a lu l'Enquête sur la justice autochtone du Manitoba. Pourrait-il nous faire savoir s'il croit que ce projet de loi tient compte des recommandations ou des meilleurs points de ces deux rapports, que ce soit au niveau du ton ou du contenu?
M. Stephen Owen: Monsieur le Président, pour revenir brièvement au rapport du Manitoba sur la justice pour les autochtones, je ne crois pas que le projet de loi donne suite aux recommandations du rapport.
Cependant, pour ce qui est de la différence entre avoir un système de justice distinct pour les autochtones ou un seul système général assez souple pour faire une place aux méthodes traditionnelles appropriées, qu'il s'agisse de la guérison ou de la détermination de la peine, j'estime que le projet de loi va dans le sens d'une utilisation des pratiques traditionnelles pour renforcer notre système de justice pénale et notre système de justice pour les adolescents, en leur intégrant ce qui s'avère utile, approprié et efficace avec les délinquants autochtones.
J'espère que, au fur et à mesure que nous acquerrons de l'expérience, que nous comprendrons mieux les pratiques traditionnelles et que nous aiderons à les faire revivre, nous saurons voir qu'elles sont un enrichissement pour notre système de justice général.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, comme c'est la première fois que je participe à un débat au cours de la nouvelle législature, je tiens à féliciter le Président et ses collaborateurs de leurs nouveaux postes. Pendant les premières semaines de cette session-ci, je crois que vous vivrez probablement une expérience assez intéressante.
Je remercie les électeurs de Surrey-Nord de m'avoir confié un deuxième mandat, et je remercie de leur appui ma femme, Dona, et ma fille, Jodi. Surtout en cette journée de la Saint-Valentin, je m'en voudrais de les oublier. Je dois aussi exprimer ma gratitude à notre chiot de 55 livres—et j'utilise le terme à bon escient—qui, j'en suis sûr, ne perdra pas de temps à récupérer ma moitié du lit pour les trois prochaines années.
Revenons aux choses sérieuses. Il est regrettable de devoir une fois de plus dénoncer les propositions contestables du gouvernement sur la justice pour les jeunes. Comme les députés le savent, je suis déjà intervenu quelques fois à ce sujet à la Chambre. J'ai assisté à des heures de délibération au comité. J'ai visité de nombreuses collectivités de tout le Canada. J'ai encouragé le gouvernement à être ouvert à la nécessité d'apporter d'importantes modifications à la Loi sur les jeunes contrevenants. La ministre a même dit officiellement que la Loi sur les jeunes contrevenants était certes la moins populaire des mesures législatives fédérales.
C'est dommage que les Canadiens ne puissent pas vraiment voir ce que propose le gouvernement dans sa réforme du système de justice pénale pour les adolescents. Ils pourraient alors constater que, avec le projet de loi C-7, il ne fait que réaménager la Loi sur les jeunes contrevenants, lui donnant une saveur politique et la présentant comme une façon équilibrée et juste de traiter les jeunes qui sont assez malavisés pour avoir maille à partir avec nos lois compliquées.
En vérité, le projet de loi C-7, la nouvelle loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, a toutes les chances de devenir une mesure législative fédérale encore plus impopulaire. Le projet de loi C-7 est presque identique à la mesure législative que la ministre a présentée au cours de la deuxième session de la dernière législature. La ministre n'a fait qu'apporter quelque 150 modifications de forme pour corriger les erreurs et les coquilles de la première version. L'opposition a bien présenté 150 modifications de fond, mais rien ne laisse croire que le gouvernement les a seulement examinées.
Cela ne me surprend pas, toutefois. Depuis cinq ans déjà, le gouvernement fait semblant de vouloir qu'on lui propose des façons d'améliorer le système de justice pénale pour les adolescents. Quelques modifications relativement simples mises à part, le gouvernement ne semble avoir donné suite à aucune des centaines de modifications de fond qu'on lui a proposées.
Depuis cinq ans déjà, on entend dire que le gouvernement fédéral ne remplit pas ses obligations financières quant au financement du système de justice pénale pour les adolescents. Le gouvernement a annoncé qu'il fournira 206 millions de dollars au cours des trois prochaines années, mais cela ne couvrira que le coût initial d'application de la nouvelle loi. Rien ne viendra combler le déficit qui s'accumule depuis des années.
Un des principaux problèmes que pose le système de justice pénale pour les adolescents est qu'il n'y a pas assez d'argent pour couvrir les coûts de formation et de réadaptation. Si on n'aide pas les jeunes délinquants à changer, faut-il se surprendre que beaucoup d'entre eux retournent à leurs tendances criminelles? Tout ce que nous semblons faire, c'est enquêter sur ces jeunes, les poursuivre, les condamner et les punir jusqu'à ce qu'ils aient 18 ans et se livrent au même genre d'activités en tant qu'adultes. C'est seulement de cette façon que beaucoup de ces jeunes cessent de contribuer au problème de la criminalité chez les jeunes.
La situation est encore plus catastrophique chez les jeunes de 10 et 11 ans. Depuis plusieurs années déjà, nous voyons des jeunes de 10 et 11 ans s'adonner à des activités criminelles d'une façon que nous ne voyions que rarement, sinon jamais, auparavant. Nous voyons aussi que les organismes de protection de l'enfance sont souvent incapables de s'occuper de bon nombre de ces cas. Je n'entrerai pas dans les détails de tout cela parce que cette question relève principalement des provinces et des municipalités. Les services de protection de l'enfance n'ont jamais eu pour mission de s'occuper des jeunes qui ont un comportement criminel. Leur mission consiste à protéger les enfants, et non à protéger nos collectivités contre les enfants.
Nous avons également vu comment les ressources des services de protection de l'enfance ont été étirées jusqu'à la limite. On ne peut pas se permettre de dépenser des ressources additionnelles pour voir à ce que le jeune qui commence à avoir des démêlés avec la justice reçoive l'aide nécessaire pour revenir sur le droit chemin. C'est pourquoi l'Alliance canadienne tente d'influencer le gouvernement pour qu'il élargisse le système de justice pour les jeunes afin d'y inclure les jeunes de 10 et 11 ans.
Les juges ont affaire aux jeunes contrevenants depuis des années. Ils ont vu leur charge de travail s'accroître parce que certains cas ne sont pas réglés de façon adéquate dès le début.
Nous ne disons pas que les juges doivent enfermer ces jeunes de 10 et 11 ans. Ce que nous disons, c'est que les juges doivent s'ouvrir aux intérêts d'un tel jeune contrevenant et de la collectivité afin de veiller à ce que le cadre qui convient soit établi pour ramener le jeune sur la bonne voie. Nous disons qu'il faut inciter les juges à participer au règlement du problème. Les responsables de l'aide à l'enfance font du bon travail dans bien des cas, mais ils n'ont pas été formés pour s'occuper de jeunes criminels. Ils n'ont ni l'expérience ni les ressources voulues.
Je m'en voudrais de ne pas mentionner mon initiative parlementaire qui a, encore une fois, été incorporée à ce projet de loi. L'un des objectifs que je poursuivais lorsque j'ai été élu la première fois à la Chambre était de faire présenter une projet de loi traitant plus sérieusement ceux qui manquent sciemment à leur devoir fixé par le tribunal de surveiller adéquatement les jeunes contrevenants après leur libération. La ministre a continué à croire à l'importance de cette proposition.
Notre système de justice est sévèrement critiqué lorsque des parents ou d'autres demandent au tribunal de superviser un adolescent qui est considéré comme un danger pour la société, et que le tribunal laisse en fin de compte l'intéressé sans la moindre supervision. Ceux qui acceptent volontairement de superviser des contrevenants et qui y renoncent sciemment par la suite devraient être tenus responsables.
J'esquisse maintenant un scénario pour que ceux qui nous écoutent puissent mieux comprendre certaines préoccupations relatives à ce projet de loi. Prenons le cas d'un jeune de 14 ans qui commet une agression sexuelle et qui blesse ou défigure sa victime au moyen d'un couteau. Ce jeune peut être accusé d'avoir commis une infraction désignée aux termes de la loi. Il peut se voir renvoyer au tribunal des adultes puisque son crime compte parmi les rares crimes désignés et qu'il était âgé de 14 ans au moment où il l'a commis.
Or, on ne peut pas dire que les dispositions législatives sont bien précises. Il faut d'abord déterminer si la province où l'infraction a été commise a eu recours au pouvoir que lui confère l'article 61 de la loi pour changer l'âge visé par la définition d'infraction désignée. Si l'âge a été porté à 15 ou 16 ans, le jeune en question ne se verra pas nécessairement infliger une peine d'adulte. En fait, il pourrait se trouver chanceux d'avoir commis son crime dans une province plutôt que dans une autre.
De plus, l'article 65 autorise le procureur général à donner avis au tribunal qu'il ne réclame pas une peine d'adulte, même dans un cas comme celui-ci. Le procureur général doit en outre, avant le début du procès, donner avis au tribunal et au jeune contrevenant qu'il réclame une peine d'adulte. S'il ne le fait pas, aucun demande à cet effet ne pourra être considérée.
Conformément à l'article 62, le jeune contrevenant reconnu coupable de l'infraction sera jugé comme un adulte si, et c'est tout un si, il ne conteste pas l'application d'une peine d'adulte ou si le tribunal de la jeunesse est d'avis qu'une peine juvénile ne suffit pas pour le tenir responsable de ses actes.
Quand le tribunal examine la situation, soit de lui-même ou lorsque le jeune conteste l'imposition d'une peine pour adultes, il doit considérer la peine proposée en faisant la part des choses entre la protection de la société par l'application de peines sévères et l'intérêt à favoriser la réadaptation du jeune et sa réinsertion sociale, quoi que cela puisse signifier.
De la manière dont je vois les choses, le tribunal impose des peines pour adultes en dernier recours seulement. Il doit d'abord être convaincu qu'une peine pour les jeunes est insuffisante et, ensuite, faire la part des choses entre la nécessité de protéger la société et celle de réadapter le jeune et de lui faire réintégrer la société.
Comme on peut le constater dans cet exemple, le jeune agresseur recevrait une peine pour adultes en dernier ressort seulement. Le tribunal doit se demander sérieusement si l'incarcération nuira à la réadaptation et la réintégration du jeune. Il pourrait décider qu'un programme quelconque de soutien et de supervision intensifs, sans incarcération, suffirait. C'est une peine pour jeunes parmi d'autres.
Prenons aussi l'exemple du jeune qui commet une agression sexuelle avec un couteau. Même si, comme je l'ai expliqué, il peut être difficile et improbable qu'il reçoive une peine pour adultes avec emprisonnement, supposons que ce soit le cas. Disons que, dans notre exemple, la victime a été blessée et défigurée.
Le jeune sera-t-il identifié quand il retournera dans sa collectivité, ou celle-ci restera-t-elle dans l'ignorance totale du danger qu'il récidive ou commette un crime encore plus grave?
Si le jeune a reçu une peine pour adultes, il peut, je dis bien peut, être identifié aux termes de l'alinéa 110(2)a). Aux termes du paragraphe 75(3), le tribunal peut, par ordonnance, interdire la publication de tout renseignement concernant un crime même de cette gravité, si le jeune présente une demande en ce sens et si le juge estime que c'est indiqué, compte tenu de l'importance de la réadaptation de l'adolescent et de l'intérêt public.
Supposons que nous modifiions le scénario et qu'une infraction moins grave soit en cause. Faisons l'hypothèse que le jeune contrevenant n'a pas utilisé concrètement le couteau. Il s'en est simplement servi pour menacer sa victime. Le contrevenant ne sera probablement pas inculpé d'agression sexuelle grave. Il n'y aurait alors pas d'infraction désignée. Il s'agit alors d'une toute autre histoire, d'une situation où la loi défend encore plus les intérêts du contrevenant et n'est pas favorable à la victime ni à la protection des collectivités.
Malheureusement, je n'ai pas le temps de parler de tous les arguments juridiques, considérations et décisions du procureur général. Comme je l'ai dit, les avocats doivent se frotter les mains et jubiler.
J'espère avoir donné à ceux qui suivent nos travaux un aperçu des préoccupations exprimées quant à la complexité du projet de loi. Comme je l'ai dit, les avocats vont encombrer les tribunaux lorsqu'ils débattront des dispositions de la loi sur le système de justice pour les adolescents.
Cependant, le problème est encore plus grave: comment peut-on s'attendre à ce que les jeunes et les autres citoyens comprennent ce que la loi prévoit si elle comporte autant d'exceptions et qu'elle est rédigée dans un jargon juridique aussi obscur?
Comme je l'ai dit au début, lorsque la loi sera mise en application, les Canadiens vont encore une fois rapidement déchanter et être déçus du système de justice pour les adolescents. Nous avons certainement le devoir et la responsabilité de faire beaucoup mieux.
Le vice-président: Lorsque la Chambre reprendra l'étude de cette question, il restera au Parti de l'Alliance canadienne un créneau de dix minutes, et le député de Wild Rose aura la parole.
Comme il est 18 h 30, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément à l'article 24 du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 30.)