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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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37e Législature, 1ère Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 017
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 20 février 2001
AFFAIRES COURANTES |
VOIES ET MOYENS |
Avis de motion |
L'hon. Jim Peterson |
LOI SUR LES AIRES MARINES NATIONALES DE CONSERVATION DU |
Projet de loi C-10. Présentation et première lecture |
L'hon. Sheila Copps |
PÉTITIONS |
Les droits de la personne |
M. Svend Robinson |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Derek Lee |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—La réforme électorale |
Mme Alexa McDonough |
Motion |
M. Alex Shepherd |
M. John Bryden |
L'hon. Lorne Nystrom |
Amendement |
M. Bill Blaikie |
M. Alex Shepherd |
L'hon. Don Boudria |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Paul Szabo |
M. Ted White |
M. John Bryden |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Paul Szabo |
M. Stéphane Bergeron |
Mme Betty Hinton |
L'hon. Lorne Nystrom |
Mme Elsie Wayne |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. John Bryden |
M. Peter MacKay |
M. Roy Bailey |
M. Ghislain Lebel |
M. Bill Blaikie |
M. Peter Stoffer |
Mme Alexa McDonough |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Sarkis Assadourian |
M. Bob Speller |
M. John Bryden |
M. Scott Reid |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Werner Schmidt |
M. Scott Reid |
M. Sarkis Assadourian |
L'hon. Lorne Nystrom |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES |
Mme Colleen Beaumier |
LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA |
M. Larry Spencer |
PAUL DEMPSEY |
M. Pat O'Brien |
L'HÔPITAL CREDIT VALLEY |
M. Steve Mahoney |
L'ASSOCIATION DES FEMMES EN COMMUNICATIONS |
Mme Sarmite Bulte |
EDUARDO SEBRANGO RODRIGUEZ |
M. John Reynolds |
LA CONTAMINATION DE L'EAU |
M. Ghislain Fournier |
L'AGRICULTURE |
M. Ovid Jackson |
SOPHIE ZEBER |
Mme Judy Sgro |
LES ANCIENS COMBATTANTS |
M. Roy Bailey |
LORIE KANE |
M. Shawn Murphy |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
L'ALLOCATION POUR FRAIS DE CHAUFFAGE |
OEUVRES MAGISTRALES |
Mme Carolyn Bennett |
LA DÉFENSE NATIONALE |
Mme Elsie Wayne |
QUESTIONS ORALES |
L'ÉCONOMIE |
M. Stockwell Day |
L'hon. Paul Martin |
M. Stockwell Day |
L'hon. Paul Martin |
M. Stockwell Day |
L'hon. Paul Martin |
M. Jason Kenney |
L'hon. Paul Martin |
M. Jason Kenney |
L'hon. Paul Martin |
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Pierre Pettigrew |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Pierre Pettigrew |
M. Michel Gauthier |
L'hon. Pierre Pettigrew |
M. Michel Gauthier |
L'hon. Pierre Pettigrew |
LE COMMERCE |
Mme Alexa McDonough |
Le très hon. Jean Chrétien |
Mme Alexa McDonough |
Le très hon. Jean Chrétien |
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Brian Tobin |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Brian Tobin |
LE PREMIER MINISTRE |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Brian Tobin |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Brian Tobin |
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES |
M. Pierre Paquette |
L'hon. Pierre Pettigrew |
M. Pierre Paquette |
L'hon. Pierre Pettigrew |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Rob Anders |
L'hon. Art Eggleton |
M. Rob Anders |
L'hon. Art Eggleton |
LE COMMERCE INTERNATIONAL |
M. Richard Marceau |
L'hon. Pierre Pettigrew |
M. Richard Marceau |
L'hon. Pierre Pettigrew |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Peter Goldring |
L'hon. Art Eggleton |
M. Peter Goldring |
L'hon. Art Eggleton |
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES |
M. Mauril Bélanger |
L'hon. Pierre Pettigrew |
LE COMMERCE |
M. Svend Robinson |
L'hon. Pierre Pettigrew |
M. Svend Robinson |
L'hon. Pierre Pettigrew |
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA |
M. Peter MacKay |
L'hon. Brian Tobin |
Le très hon. Joe Clark |
L'hon. Brian Tobin |
LE COMMISSAIRE À LA PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE |
M. Garry Breitkreuz |
L'hon. Anne McLellan |
M. Garry Breitkreuz |
L'hon. Anne McLellan |
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES |
Mme Francine Lalonde |
L'hon. Pierre Pettigrew |
Mme Francine Lalonde |
L'hon. Pierre Pettigrew |
LA GARDE CÔTIÈRE |
M. James Lunney |
L'hon. Herb Dhaliwal |
M. John Duncan |
L'hon. Herb Dhaliwal |
L'INDUSTRIE AUTOMOBILE |
M. Sarkis Assadourian |
L'hon. Brian Tobin |
L'ENVIRONNEMENT |
M. Rob Merrifield |
L'hon. Ralph Goodale |
M. Rob Merrifield |
L'hon. Ralph Goodale |
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES |
Mme Caroline St-Hilaire |
L'hon. Pierre Pettigrew |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LES CRÉDITS |
Jour désigné—La réforme électorale |
Motion |
M. Steve Mahoney |
Mme Sarmite Bulte |
M. James Moore |
M. André Harvey |
M. Serge Marcil |
M. Jason Kenney |
M. Bernard Bigras |
Mme Diane Ablonczy |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. John Harvard |
M. Paul Szabo |
M. Scott Reid |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Lynn Myers |
M. Jason Kenney |
M. Pat Martin |
Jour désigné—La Zone de libre-échange des Amériques |
Motion |
Rejet de la motion |
LOI SUR LA FONDATION DU CANADA POUR L'APPUI TECHNOLOGIQUE AU |
Projet de loi C-4. Deuxième lecture |
Adoption de la motion |
VOIES ET MOYENS |
La Loi sur la taxe d'accise |
Motion d'adoption |
L'hon. Don Boudria |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
LES SIKHS CANADIENS |
M. Bill Blaikie |
Motion |
Mme Sarmite Bulte |
M. Gurmant Grewal |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
M. Peter MacKay |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Bill Blaikie |
MOTION D'AJOURNEMENT |
Les affaires étrangères |
M. Bill Casey |
M. Yvon Charbonneau |
La santé |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Yvon Charbonneau |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 017
CHAMBRE DES COMMUNES
Le mardi 20 février 2001
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
VOIES ET MOYENS
AVIS DE MOTION
L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 83(1) du Règlement, je veux déposer un avis de motion des voies et moyens visant à modifier la Loi sur la taxe d'accise, avec des notes explicatives. Je demande que l'étude de la motion soit inscrite à l'ordre du jour.
Les amendements qu'il est proposé d'apporter à la Loi sur la taxe d'accise ont pour but de promouvoir les logements locatifs et d'encourager les manufacturiers canadiens actifs sur le marché des importations et des exportations, en plus de traiter des régimes de pension interentreprises. C'est une mesure législative très valable proposée par des députés à la Chambre au nom de leurs électeurs. Nous comptons qu'elle sera rapidement adoptée.
* * *
LOI SUR LES AIRES MARINES NATIONALES DE CONSERVATION DU CANADA
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-10, Loi concernant les aires marines nationales de conservation du Canada.
—Monsieur le Président, je suis heureuse de présenter ce projet de loi concernant les aires marines nationales de conservation du Canada. Cette mesure législative sera un complément au cadre que nous avons déjà mis en place pour veiller à la sauvegarde de notre héritage collectif sur terre mais aussi sur mer.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
PÉTITIONS
LES DROITS DE LA PERSONNE
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par des centaines d'habitants de la Colombie-Britannique qui font remarquer que les Canadiens refusent d'être partie à une politique qui est chaque mois à l'origine de la mort de plus de 5 000 enfants irakiens.
Les pétitionnaires font remarquer que Denis Halliday, l'ancien sous-secrétaire des Nations Unies responsable du Programme humanitaire de l'ONU pour l'Irak et coordinateur du Comité des sanctions créé en vertu de la résolution 661, a déclaré que ces sanctions équivalaient à un génocide.
Les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada d'arrêter de toute urgence de lier les sanctions économiques et les sanctions militaires et de lever sans attendre les sanctions économiques de manière à améliorer les conditions de vie du peuple irakien. J'appuie entièrement cette pétition.
* * *
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions restent au Feuilleton.
Le Président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LA RÉFORME ÉLECTORALE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD) propose:
Que la Chambre constitue un comité spécial multipartite, chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens de réforme électorale, en vue de recommander des réformes qui feraient obstacle à la régionalisation croissante de la politique canadienne et à la participation décroissante des Canadiennes et des Canadiens aux élections fédérales.
—Monsieur le Président, je suis ravie d'être la première à intervenir dans l'important débat de ce matin sur la réforme électorale. Je signale en passant que je partagerai mon temps de parole avec le député de Regina—Qu'Appelle.
Je tiens à féliciter le député de Regina—Qu'Appelle pour sa persistance et sa détermination à faire avancer le dossier de la réforme électorale dont nous avons tant besoin.
Je vais définir brièvement le problème pour lequel nous croyons que des solutions s'imposent à tout prix. J'indiquerai ensuite des moyens qui nous permettraient d'atteindre cet objectif. Nous connaissons tous l'expression: «Si ça marche, il ne faut pas y toucher», or dans ce cas-ci, il y a effectivement quelque chose qui ne va pas et que nous devons corriger.
Une voix: Il n'y a rien à corriger.
Mme Alexa McDonough: Le député dit que nous n'avons pas besoin d'y toucher. Le problème découle du fait que trop de ministériels reconnaissent que, effectivement, le système électoral crée des distorsions et des divisions, et donne des résultats antidémocratiques du point de vue de la composition du Parlement. Pourtant, du même souffle, ces mêmes ministériels se disent qu'il ne peut rien y avoir de mal avec un système politique qui produit trois gouvernements libéraux majoritaires d'affilée.
Notre système électoral s'appuie sur le scrutin majoritaire uninominal à un tour. Ce type de système fait problème, car trop de gens ont le sentiment que leur vote ne compte pas. Ils pensent qu'ils font tout aussi bien de ne pas voter, sachant d'une part que leur point de vue minoritaire ne fait pas le poids par rapport à celui de la majorité et, d'autre part, qu'ils ne peuvent aucunement influencer la composition du Parlement de manière à assurer une représentation équitable et proportionnelle des points de vue minoritaires comme les leurs.
Le scrutin majoritaire uninominal à un tour crée des distorsions et entraîne ce type de non-représentativité. Cela est problématique. Qui plus est, ce système favorise une mentalité de gagnant unique. Cela donne lieu à l'arrogance et à l'insensibilité qu'affichent les gouvernements majoritaires qui ont trop de représentants.
Je sais que certains disent que si le NPD prône une réforme électorale parce qu'il pense pouvoir obtenir davantage de sièges au Parlement avec un système incorporant un élément de représentation proportionnelle. On l'a vu, cela est probablement fondé, mais même les libéraux, sur-représentés, doivent reconnaître que le système est problématique quand ils obtiennent 97 p. 100 des sièges alors qu'ils ne recueillant que 50 p. 100 des votes, comme ce fut le cas lors des dernières élections en Ontario.
Ce n'est pas seulement la sur-représentation des libéraux qui pose problème, le gouvernement libéral affichant un comportement d'unique gagnant. Il y a d'autres distorsions qui font problème.
Permettez-moi de donner d'autres exemples. Lors des élections de 1997, le Parti réformiste a obtenu 19 p. 100 des votes. Le Parti progressiste conservateur en a obtenu 19 p. 100 lui aussi. Ce parti a-t-il obtenu environ le même nombre de sièges? Non. Le Parti réformiste a gagné une soixantaine de sièges à la Chambre des communes et le Parti conservateur, 20. Certains demanderont quel est le problème, puisque c'est ainsi que le système fonctionne. Ils disent que c'est ça vivre dans une démocratie, le gagnant emporte tout.
M. Bill Blaikie: Du moins dans une démocratie canadienne.
Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, mon collègue de Winnipeg—Transcona l'a très justement dit. Le Canada est l'une des rares démocraties dans le monde qui conserve ce genre de système électoral non démocratique.
C'est un fait que le Canada fait partie des trois seules démocraties au monde de plus de huit millions d'habitants qui possèdent un système électoral où le gagnant emporte tout, un système uninominal majoritaire à un tour. Les autres démocraties du monde moderne de plus de huit millions d'habitants ont intégré à leur système électoral une certaine représentation proportionnelle.
Il y a une très bonne raison pour cela. Nous savons que le Parti libéral et ses députés ne voient aucun problème là-dedans parce qu'ils aiment les résultats que ça donne. C'est au niveau de l'électorat que ça crée un problème.
Le nombre de Canadiens qui exercent leur droit de vote diminue de façon constante. En 1958, 75 p. 100 des citoyens en âge de voter se sont rendus aux urnes. Aux dernières élections, ce pourcentage a été de 58 p. 100. On se demande pourquoi les citoyens ne votent plus. Je sais ce qui ne va pas. Les citoyens qui ne partagent pas la vision du gouvernement au pouvoir ont raison de croire que, même s'ils ont voté, ils ne peuvent pas vraiment faire entendre leur voix et exprimer leur point de vue.
Nous avons un problème. La bonne nouvelle, c'est que nous savons ce qu'il faut faire pour le corriger. Il n'est pas question d'une formule toute faite. Permettez-moi de préciser très clairement ce que veut dire la motion que nous soumettons aujourd'hui dans le cadre de cette journée de l'opposition, parce que nous croyons que la question est très importante. Les Canadiens veulent que, de tous les côtés de la Chambre, on fasse preuve de leadership dans ce dossier.
La motion dit qu'il faut tenir un débat et pas simplement à la Chambre. Il s'agit de parler aux Canadiens des diverses formes de représentation proportionnelle possibles; de leurs conséquences pour le Canada; leur préciser en quoi un système de représentation proportionnelle renforcerait l'unité nationale, afin de ne pas aboutir à la Chambre avec des divisions régionales qui menacent l'unité et la solidité du pays à l'avenir. Il faut dire aux Canadiens ce que cela signifierait d'avoir des caucus plus représentatifs, qui auraient un point de vue plus national de notre pays. C'est ce que les gens souhaitent voir dans cette enceinte et ce qu'ils veulent que le gouvernement fasse pour eux.
Ce n'est pas un problème facile à régler pour nous en tant que parlementaires. Pour ceux qui ont bien du mal à payer leurs factures de chauffage de plus en plus élevées, qui doivent choisir entre payer leur épicerie ou leurs médicaments prescrits à cause des promesses non tenues d'un gouvernement libéral arrogant, parler de réforme électorale, de représentation proportionnelle, semble un peu abstrait et ésotérique.
Je pense que non seulement les députés néo-démocrates, qui réclament avec force une réforme électorale, mais tous les parlementaires ont pour défi de parler aux Canadiens de la réforme électorale. Les Canadiens nous demandent à juste titre de faire preuve de leadership dans ce domaine et nous devons leur faire comprendre pourquoi un Parlement plus représentatif répondrait de façon plus concrète et plus efficace aux problèmes auxquels ils doivent faire face, qu'il s'agisse de soins de santé, de revenus insuffisants, de la difficulté qu'ils ont à financer les études ou de toutes ces luttes quotidiennes qu'ils doivent mener.
Permettez-moi, en terminant, de citer un proverbe chinois qui dit: «Si nous ne changeons pas de direction, il est probable que nous aboutissions là où nous nous dirigeons.» Trop de citoyens au Canada ont le sentiment de ne pas être représentés dans cette enceinte et il nous incombe en tant que parlementaires de remédier à cette situation.
M. Alex Shepherd (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, j'ai bien aimé les observations du chef du Nouveau Parti démocratique. Puisqu'elle voit en la représentation proportionnelle la solution miracle aux lacunes de notre régime politique, je tiens à lui souligner qu'il y a probablement eu autant de partisans libéraux qui sont restés à la maison aux dernières élections que de supporters des partis de l'opposition. Même avec un système de représentation proportionnelle, nous aurions probablement obtenu les mêmes résultats. Je suis persuadé que mes propos ne lui plaisent guère.
Je m'inquiète de la représentation proportionnelle dans les régions où elle a été appliquée de façon exclusive. Je pense notamment à l'Espagne avant Franco, à l'époque où il y avait 100 partis, et à l'Ukraine où il y a 60 partis à cause de la représentation proportionnelle. Essentiellement, elle favoriserait la régionalisation au Canada. Elle permettrait la multiplication de partis politiques tendant à représenter divers intérêts bien particuliers, chacune des petites collectivités agricoles, ainsi de suite. Elle contribuerait en fait à miner notre forme de régime gouvernemental.
Le chef du NPD vise à promouvoir l'unité nationale. La solution qu'elle propose affaiblirait plutôt notre fédération et le gouvernement canadien.
Si le chef du NPD tenait à aborder un thème vraiment pertinent, au lieu de soulever à la Chambre des communes la question de la représentation proportionnelle, pourquoi n'a-t-elle pas parlé de soins de santé? Pourquoi n'a-t-elle pas parlé de la pauvreté chez les enfants? Pourquoi n'a-t-elle pas parlé de l'environnement? Voilà des questions qui intéressent la population, pas la représentation proportionnelle.
Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, je dois dire que c'est extrêmement déprimant. Les Canadiens demandent à ce que l'on fasse quelque chose au sujet du fait qu'ils perdent confiance dans les institutions parlementaires. Il est totalement irresponsable de la part d'un député de la Chambre, à quelque parti qu'il appartienne, de prendre la parole et de proposer quelque chose d'aussi absurde que d'adopter un système de représentation proportionnelle totale et de créer 100 partis politiques. Il ne faut pas insulter les Canadiens de cette manière.
Il doit bien y avoir une raison qui explique pourquoi toutes les démocraties parlementaires du monde ayant une population de plus de 8 millions d'habitants estiment que nous devons être plus sensibles, plus représentatifs de nos concitoyens, et que nous avons la responsabilité d'explorer les options existantes.
Il y a diverses formules de représentation proportionnelle, mais pour l'amour du ciel, ne déformons pas ce qui est proposé. Ne faisons pas preuve d'ignorance concernant la raison pour laquelle les autres pays démocratiques ont adopté certains éléments de la représentation proportionnelle
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, la députée de Halifax a dit qu'il n'existait plus que trois pays au monde qui avaient conservé le système du scrutin majoritaire uninominal à un tour à l'exclusion de tout autre, mais elle a omis de nommer ces trois pays et je vais le faire pour elle. Ce sont le Canada, les États-Unis et la Grande-Bretagne, les trois démocraties les plus anciennes et celles qui fonctionnent le mieux.
Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, ce débat est important car il va donner lieu à un grand nombre de déclarations intéressées. Soyons clairs sur un point. Le Canada n'est pas le seul pays à connaître une crise en ce qui concerne le déclin de la participation des électeurs. Les États-Unis traversent une crise encore plus grande en ce qui a trait à l'érosion de la participation de l'électorat au système politique.
Le Royaume-Uni est le deuxième pays. Actuellement au Royaume-Uni, les parlements de l'Écosse, de l'Irlande, et du Pays de Galles sont tous élus avec un certain degré de représentation proportionnelle. En outre, le gouvernement du Royaume-Uni a lancé un processus de réforme électorale, indiquant qu'il était disposé à tenir un référendum sur la question de la représentation proportionnelle.
Je supplie les députés de saisir l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui, journée que nous avons choisie comme notre journée d'opposition, de tenir un débat informé, sincère et honnête. Nous avons expressément choisi de ne pas demander que la motion soit mise aux voix afin qu'elle puisse donner lieu à un débat raisonné. Nous ne demandons pas aux députés de prendre une décision. Tout ce que nous disons, c'est que nous devrions débattre raisonnablement des problèmes que nous avons et des solutions à notre disposition.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, je veux dire quelques mots aujourd'hui sur ce sujet. J'implore les libéraux, en face, d'examiner sérieusement les avantages d'une réforme de notre système électoral.
Le Canada est actuellement en butte à une véritable crise de la démocratie et, à mon avis, nous nous dirigeons inconsciemment vers cette crise. Aux dernières élections fédérales, moins de 60 p. 100 des Canadiens ont exercé leur droit de vote. En 1997, ce taux se situait à 67 p. 100. Il y a des années, il s'élevait à 75, 80 ou 85 p. 100. Les Canadiens sont déçus du régime politique et de la politique.
Il suffit de déambuler dans les rues de n'importe quelle petite ou grande ville du Canada pour rencontrer des gens qui sont coupés du régime politique. Cela s'explique en partie par le fait que, lorsque les Canadiens élisent des députés, leurs votes ne reflètent pas la composition du Parlement. C'est un des grands problèmes que nous avons aujourd'hui.
Par exemple, en novembre dernier, le Parti libéral a recueilli environ 40 p. 100 des suffrages. Seulement quelque 60 p. 100 des électeurs ont voté. Par conséquent, les libéraux ont reçu environ 25 p. 100 de l'appui de l'électorat. Environ le quart des Canadiens ont élu un gouvernement ayant un mandat d'environ cinq ans, en vertu de la Constitution. Cela pose un problème en ce qui concerne la crédibilité de la Chambre des communes et celle du Parlement. C'est pourquoi nous devrions envisager sérieusement de réformer notre système électoral.
C'est ahurissant. Ceux d'entre nous qui siègent à la Chambre sont élus grâce au système uninominal majoritaire à un tour. La dernière fois qu'il y a eu un suffrage à la représentation proportionnelle au Parlement, c'était avant votre naissance, monsieur le Président. C'est en 1923 qu'a eu lieu pour la dernière fois un suffrage à la représentation proportionnelle à la Chambre des communes.
L'automne dernier, ma motion d'initiative parlementaire a été tirée au sort et choisie pour faire l'objet d'un vote. Nous en avons débattu pendant une heure, mais les élections ont été déclenchées avant que nous puissions voter sur la motion.
Nous disons que nous devrions constituer un comité multipartite chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens qui pourraient nous permettre de modifier notre système électoral. Nous devons débattre de cette question. Nous devrions traiter de ce dossier fondamental, mais les parlementaires s'y refusent.
Les gens de toutes les régions s'intéressent de plus en plus à l'idée de modifier notre système électoral. Il existe même une organisation nommée Fair Vote Canada. D'autres organisations font aussi la promotion d'une réforme électorale. Les 30 et 31 mars prochains, je serai hôte d'une conférence à Ottawa où tous les cinq partis politiques prendront la parole pour appuyer l'idée d'une étude sur le genre de représentation proportionnelle qui pourrait s'appliquer dans notre pays. Je prie le Parlement du Canada de se joindre à la cause visant à modifier notre système électoral afin que celui-ci soit mieux adapté au XXIe siècle.
Notre système est désuet. Il n'y a plus que trois pays au monde comptant plus de 8 millions d'habitants où la représentation proportionnelle n'existe pas encore, soit l'Inde, les États-Unis et le Canada. La Grande-Bretagne, origine de notre parlement, a mis en place un certain élément de représentation proportionnelle dans les parlements d'Écosse, d'Irlande et du Pays de Galles. Tous les autres députés de Grande-Bretagne sont élus au parlement de la Communauté européenne selon un système de représentation proportionnelle. Si l'on se fie aux plans établis par le gouvernement Blair, il devrait également y avoir une certaine représentation proportionnelle en Angleterre au cours des élections qui suivront les prochaines. Le Canada restera donc l'un des trois seuls pays au monde à ne tenir aucun compte de la représentation proportionnelle.
L'autre problème avec l'absence de représentation proportionnelle dans le scrutin majoritaire uninominal à un tour, c'est que bon nombre de gens ont l'impression que leur vote ne compte pas. Pour un grand nombre de Canadiens, le candidat pour lequel ils ont voté n'est pas élu à la Chambre des communes en raison du système majoritaire en place. S'il y avait représentation proportionnelle, les électeurs auraient plus de pouvoirs et leur participation serait reconnue parce que leur vote aurait des répercussions ici à la Chambre des communes. Un parti qui recevrait 20 p. 100 des voix devrait occuper environ 20 p. 100 des sièges. C'est loin d'être le cas à la Chambre des communes aujourd'hui.
Le système canadien est également très injuste. Voyons un peu ce qui s'est passé au cours de la dernière campagne. Pour le Parti conservateur, qui est à ma gauche, il a fallu 130 000 votes pour élire un député alors que pour le Bloc québécois, 36 000 votes ont suffi à élire un député. Notre système politique est vraiment très tordu.
Il donne parfois des avantages à un parti au détriment d'un autre, mais le scrutin majoritaire uninominal à un tour fausse toujours les résultats des élections. La composition de la Chambre des communes ne représente pas du tout l'opinion exprimée par les Canadiens le jour du scrutin. C'est la raison pour laquelle il faut changer notre système politique.
Aux élections de 1997, le Parti conservateur a obtenu 19 p. 100 des voix, de même que le Parti réformiste. Toutefois, les conservateurs ont obtenu environ 19 sièges, alors que les réformistes en ont obtenu environ 60. Le NPD et le Bloc ont recueilli chacun environ 11 p. 100 des voix. Nous avons eu 21 sièges et le Bloc 44. Le Parti libéral, avec seulement 38 p. 100 des suffrages, a remporté la majorité des sièges et pouvait, conformément à la Constitution, gouverner durant cinq ans. Ce n'est pas équitable. Ce n'est pas juste.
Quant à l'Ontario, on croirait que tout le monde est libéral. Or, lors des dernières élections, les libéraux ont recueilli à peu près la moitié des suffrages et remporté 97 p. 100 des sièges. En 1997, ils avaient recueilli moins de la moitié des votes, 49,6 ou 49,7 p. 100, mais réunissaient à la Chambre tous les députés de l'Ontario sauf deux. Le système électoral déforme l'opinion des Canadiens.
C'est la même chose dans l'Ouest. On pourrait croire que tout le monde sauf quelques exceptions y vote pour le Parti réformiste ou l'Alliance canadienne. Lors des élections de 1993 et de 1997, le parti réformiste ou de l'alliance était un parti minoritaire dans l'ouest du Canada. Il a recueilli un peu plus de 40 p. 100 des suffrages, mais a remporté une majorité absolument écrasante des sièges.
Voilà l'aspect inéquitable du système. D'autres pays ont remédié à cette injustice en intégrant un élément de proportionnalité dans leur système électoral de sorte que les votes des électeurs comptent dans leur parlement. Il est grand temps que nous que nous rattrapions cette tendance afin de moderniser notre démocratie.
Il y a par ailleurs toute la question de l'unité nationale et du régionalisme. Le Canada prend de plus en plus un caractère régional, qui devient de jour en jour plus évident. Le Canada se régionalise notamment avec les politiques du gouvernement Harris, avec celles du gouvernement Klein et avec celles du Parti québécois. Cela se reflète maintenant à la Chambre des communes, où nous avons essentiellement cinq partis politiques régionaux représentant une ou deux régions du pays.
Si nous avions un système de représentation proportionnelle, tous les partis politiques seraient obligés de concevoir le pays comme un tout et d'avoir une vision nationale des meilleurs intérêts du pays, puisqu'un vote à Terre-Neuve a le même poids qu'un vote en région rurale en Saskatchewan, à Montréal ou à Vancouver. Tous les partis politiques seraient obligés d'avoir une vision nationale afin de préserver l'unité du pays. Le système uninominal majoritaire à un tour, que nous avons actuellement, ne le permet pas.
L'autre question est la responsabilisation des gens. Les Canadiens se sentent exclus du système électoral. Si le système électoral comportait un élément de représentation proportionnelle, le vote de chaque électeur compterait. Aucun vote ne serait perdu, non seulement le soir des élections mais durant toute la durée de la législature. Cela entraînerait un changement radical au Parlement canadien. Comme la plupart des gouvernements seraient presque certainement minoritaires, les politiciens seraient obligés de travailler ensemble afin de parvenir à un consensus, comme cela se fait dans la plupart des pays du monde.
Depuis 1921, seulement trois gouvernements ont obtenu la majorité des voix aux élections. Dans tous les autres cas, une minorité d'électeurs avaient élu une majorité de députés, qui gouvernaient ensuite le pays comme s'ils avaient obtenu la majorité des voix. C'est notamment le cas des trois derniers gouvernements libéraux majoritaires.
Il y a eu très peu de gouvernements majoritaires élus par une majorité d'électeurs: le gouvernement de Mackenzie King en 1945, celui de John Diefenbaker en 1958 et, bien sûr, Brian Mulroney en 1984, qui avait raflé entre 49,9 p. 100 et 50 p. 100 des voix.
Nous avons pris l'habitude d'élire des Parlements dont la composition ne reflète pas véritablement la façon dont les gens votent. Nous recommandons aujourd'hui de constituer un comité multipartite qui aurait pour mandat d'examiner divers modèles de représentation proportionnelle applicables à la fédération unique que constitue le Canada, et de recommander ensuite au Parlement le meilleur système pour les Canadiens.
Les députés d'en face parlent de pays comme Israël ou l'Espagne. Il existe toutes sortes de systèmes de représentation proportionnelle. Ce que nous proposons, c'est de doter le système canadien d'un élément de représentation proportionnelle. Nous ne précisons pas la nature de cet élément; c'est une décision qui revient aux Canadiens. Notre fédération est unique. Peut-être pourrions-nous examiner un système comme le système allemand, où la moitié des députés sont élus dans des circonscriptions tandis que l'autre moitié est choisie selon un système de représentation proportionnelle des partis. L'Allemagne fédérale a un système mixte qui semble très bien fonctionner.
Il y a bien d'autres exemples. Dans d'autres pays, 15, 20 ou 25 p. 100 des députés sont élus selon un système proportionnel et les choses semblent bien aller.
Ce sont là des options que nous devrions envisager lorsque nous parlons d'une réforme de notre système électoral visant à le rendre plus juste et plus représentatif des votes exprimés. Les Canadiens perdent confiance dans nos institutions politiques, dans leurs hommes et femmes politiques et dans le geste démocratique de voter.
Nous disons aussi dans la motion que nous devrions examiner d'autres moyens de réforme électorale et démocratique. Il est temps, par exemple, d'abolir le Sénat non élu et antidémocratique qui n'a de comptes à rendre à personne. Personnellement, j'abolirais sans hésiter le Sénat et je ramènerais à la Chambre des communes les freins et contrepoids en donnant plus de pouvoirs aux comités, en les rendant plus indépendants, en réduisant les pouvoirs du Cabinet du premier ministre et en assurant une meilleure représentation des régions grâce à la proportionnelle.
D'autres préféreraient un Sénat élu, mais peu importe l'option envisagée, tous les sondages montrent que seulement 5 p. 100 environ des Canadiens appuient le Sénat actuel. Pourtant, depuis des années, les députés appuient le maintien du Sénat dans sa forme actuelle. Pas étonnant que les Canadiens fassent moins confiance à ceux qu'ils élisent à la Chambre des communes. C'est une autre raison pour laquelle nous devons modifier le système électoral canadien.
Mon temps de parole tire à sa fin, mais je propose l'amendement suivant. Je propose:
Que la motion soit modifiée en ajoutant le mot «immédiatement» après le mot «constitue».
Le vice-président: L'amendement que propose le député de Regina—Qu'Appelle est recevable. Le débat porte sur l'amendement.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, les propos du député de Regina—Qu'Appelle ont manifestement capté mon intérêt. Je sais qu'il s'intéresse à cette question depuis longtemps. Il est dommage que nous n'ayons pas eu l'occasion de voter, à la dernière législature, sur le projet de loi d'initiative parlementaire qu'il a présenté concernant la représentation proportionnelle. J'ai moi aussi abordé le sujet au cours de la dernière législature. Je me souviens d'avoir posé une question au premier ministre et d'avoir eu droit, pour toute réponse, aux habituelles fadaises partisanes des premières banquettes ministérielles.
Lorsque j'ai demandé, au nom du NPD, la constitution d'un comité composé de représentants de tous les partis, ce que nous demandons encore aujourd'hui, non pas pour trouver une solution particulière, mais pour avoir un système permettant de prendre en compte les préoccupations des Canadiens, le premier ministre a répondu que le NPD faisait cette requête juste parce qu'il avait perdu les élections et que son parti à lui les avait gagnées.
Cependant, il me semble, si j'ai bien compris le député de Regina—Qu'Appelle, qu'il est question ici du pays, et non du NPD, des conservateurs ou des réformistes. Il est question du tissu politique du pays et de la façon dont les divisions se créent entre les régions et dont la confiance des électeurs se perd, à cause du système uninominal majoritaire à un tour, et de la manière dont celui-ci tend à présenter une image homogène de régions données. Ainsi, comme le député l'a indiqué, il semble que toute l'Alberta soit réformiste, que tout le Québec soit souverainiste et que toute l'Ontario soit libérale ou peu importe.
Le député peut-il élaborer là-dessus?
L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, le système uninominal majoritaire à un tour a vraiment tendance à dénaturer la composition de la Chambre des communes. Des élections successives nous donnent de bons exemples de cette situation.
Je pense à l'année 1993, par exemple, lorsque le parti conservateur a été balayé. On aurait pu penser que personne n'avait voté conservateur au pays. Le parti comptait deux députés: le représentant de Saint John, ainsi que Jean Charest. Toutefois, les conservateurs ont reçu quelque 17 p. 100 des voix exprimées. Il a fallu plus ou moins un million de personnes, si je me rappelle bien, pour élire un député conservateur au Parlement.
Il n'y avait pas plus fervent opposant que moi au gouvernement de Brian Mulroney, mais nous aurions dû avoir un système électoral donnant à ce parti la représentation correspondant à la proportion des voix qu'il a recueillies dans le pays. Nous nous retrouvons maintenant dans une situation pire que celle-là. Nous assistons à l'émergence de divisions régionales qui poussent les gens des diverses provinces et régions à voter en bloc pour leur parti privilégié. On compte désormais au Parlement cinq partis régionaux. Le Parti libéral lui-même est essentiellement un parti régional centré principalement dans les provinces de l'Ontario et du Québec. Ce n'est pas bon pour l'unité du pays.
La représentation proportionnelle forcerait tous les partis à se préoccuper des dossiers régionaux. Elle obligerait les libéraux, par exemple, à s'occuper de la crise agricole dans les Prairies, ce dont ils s'abstiennent de faire à l'heure actuelle parce qu'ils ne comptent pas de députés de cette région. Elle obligerait mon parti, le NPD, à s'intéresser aux problèmes du Québec parce qu'un vote du Québec aurait autant de valeur qu'un vote de Regina. Cela ne se produit dans le cadre du système politique actuel.
La représentation proportionnelle entraînerait aussi une modification radicale de la répartition des voix aux pays. Les gens pourraient se permettre de voter pour le NPD dans l'Alberta rurale, pour les libéraux dans la Saskatchewan rurale et pour les réformistes à Terre-Neuve, et leurs voix compteraient. Il y aurait modification de la répartition des voix au Canada, et les Canadiens se retrouveraient subitement en présence d'un parlement reflétant ce qu'ils ressentent sur le plan du bien commun du Canada.
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, je signale à la députée d'Halifax qui a annoncé un débat intellectuel et dit que mes observations faisaient preuve d'ignorance que mon professeur de sciences politiques était Mme Pauline Jewett.
Par ailleurs, dans son intervention, le député de Regina—Qu'Appelle a fait deux déclarations qui sont contradictoires, d'après moi. D'abord, il a traité des gouvernements majoritaires au Canada et soutenu qu'il ne pourrait y avoir de gouvernement majoritaire avec la représentation proportionnelle. C'est précisément l'argument que j'essaie de faire valoir. Il n'y aurait jamais de gouvernement majoritaire au Canada car, au bout du compte, la fédération s'en trouverait affaiblie.
Il a dit que les partis d'opposition prôneraient une grande vision nationale. Pourquoi le feraient-ils, puisque 40 000 votes venant de n'importe où au Canada leur donneraient un seul siège? Il n'y aurait pas cinq partis politiques, mais bien 30 ou 40.
L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, Pauline Jewett a été ma voisine de banquette à la Chambre et je me demande si le député a compris les cours de Pauline ou s'il l'a bien connue.
Le député parle de 40 ou 50 partis politiques différents. De nombreux pays ont adopté la RP, dont l'Allemagne, où les partis politiques sont peu nombreux. Il y a différentes façons d'appliquer un système de RP. Certains pays ont fixé un seuil de 5 p. 100 et d'autres, de 3 ou de 2 p. 100. On peut adopter divers systèmes de représentation proportionnelle.
Pour ce qui est des gouvernements majoritaires, j'ai dit que, selon toute vraisemblance, ils seraient rares dans un système de RP. Seulement trois gouvernements majoritaires ont été élus depuis 75 ou 80 ans au Canada. Qu'y a-t-il de mal à cela, si c'est la façon dont votent les Canadiens? Si les Canadiens veulent des gouvernements minoritaires ou, j'ose même dire, des gouvernements de coalition ou des gouvernements qui collaborent avec les partis d'opposition, ils votent en conséquence. Nous voulons qu'il y ait un Parlement qui reflète la manière dont les Canadiens votent.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends ici la parole au sujet de la motion suivante proposée par la députée de Halifax:
Que la Chambre constitue un comité spécial multipartite, chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens de réforme électorale, en vue de recommander des réformes qui feraient obstacle à la régionalisation croissante de la politique canadienne et à la participation décroissante des Canadiennes et des Canadiens aux élections fédérales
J'ai écouté attentivement la députée de Halifax et le député qui a pris la parole après elle. Je dois dire que ces propositions ne me paraissent pas du tout concluantes.
Notre régime de démocratie parlementaire repose sur notre loi électorale. Depuis la confédération, notre système électoral est fondé sur des circonscriptions géographiques élisant chacune un seul député à la Chambre des communes. Cela assure une chaîne de responsabilité claire entre le député et ses électeurs.
Je suis la personne que les gens de mon comté ont élue pour les représenter. Je n'ai pas été choisi à partir d'une liste de candidats, sans savoir si j'étais le premier, le deuxième, le troisième, le quatrième, le cinquième ou le dernier sur la liste. Les électeurs ont évidemment le droit, à des élections ultérieures, de ne pas réélire leur député s'ils le désirent. C'est ce qu'on appelle la responsabilité directe.
De la même manière, mais à plus grande échelle, les Canadiens peuvent remplacer un gouvernement par un autre s'ils le désirent, comme l'électorat canadien l'a si sagement fait en 1993.
En tant que seul représentant de sa circonscription, un député est directement responsable à l'égard de ses électeurs sur toute question dont traite le Parlement. Dans l'état actuel des choses, le député doit s'occuper d'une foule de dossiers. Il n'est pas un simple porte-parole de son parti. À titre de représentant unique d'une région, il doit chercher à obtenir satisfaction pour tous les griefs ou problèmes et tenir compte des préoccupations et opinions de tous ses électeurs.
Tous les députés, moi le premier, passent beaucoup de temps à s'occuper d'intérêts précis dans leur circonscription, dans une foule de domaines comme l'immigration ou l'agriculture. J'ai été à mon bureau de circonscription hier matin, avant de venir à Ottawa pour m'acquitter de mes fonctions de député et de membre du Cabinet. Par conséquent, le député est encouragé de façon très concrète à répondre aux exigences fondamentales de tout système politique, c'est-à-dire concilier les intérêts très divers qui existent dans chacune des circonscriptions et dans l'ensemble du pays.
À mon avis, les Canadiens veulent être représentés par l'un des leurs, par quelqu'un qui les connaît, à qui ils peuvent parler et qu'ils peuvent voir à la Chambre des communes. S'il en était autrement, comment expliquer que ceux qui ne viennent pas d'une circonscription, d'un district ou d'une ville donnés—il est vrai que dans les villes, les délimitations des circonscriptions sont un peu plus floues—ont beaucoup plus de mal à se faire élire que ceux qui en sont originaires? C'est que les électeurs veulent généralement être représentés par quelqu'un qu'ils connaissent. Ce n'est que normal et, à mon avis, ce n'est que logique.
Comme le député d'en face l'a dit, la représentation proportionnelle fait surgir bien des questions. Notre système électoral actuel donne beaucoup plus de latitude aux électeurs pour juger des mérites d'un candidat populaire que ce n'est le cas dans des pays qui ont la représentation proportionnelle et où, dans certains cas—pas tous, je l'avoue—, les électeurs n'ont guère d'autre choix que d'appuyer telle quelle la liste d'un parti.
Il y a aussi la question de la stabilité politique. Nous avons vu des exemples de pays qui ont opté pour le système électoral à représentation proportionnelle et qui, à la suite d'une élection, ont mis des mois à former un gouvernement. Une fois le gouvernement formé, il arrive souvent que la coalition comprenne des partis aux intérêts particuliers et obtus et que le gouvernement soit incapable de continuer à maintenir la confiance dans l'assemblée législative. Cela s'est produit maintes fois dans des pays comme Israël, l'Italie, voire la France, où il existait un système comme celui-là qu'ils ont par la suite abandonné. La France, évidemment, a renoncé à la représentation proportionnelle il y a plusieurs années et, à ma connaissance, au niveau national, rares sont ceux qui souhaiteraient le rétablissement de ce système.
Les systèmes électoraux à représentation proportionnelle nécessitent fréquemment la formation d'une coalition entre des partis aux allégeances politiques différentes. La représentation proportionnelle peut donc signifier que le gouvernement est formé de coalitions conclues à la suite de négociations politiques menées en coulisses plutôt que par le biais des boîtes de scrutin. Je pense que c'est une façon bien moins efficace de gouverner que notre système actuel.
La représentation proportionnelle permet ainsi à de petits partis à vocation unique de détenir entre leurs mains le sort d'un candidat, ce qui leur donne parfois la possibilité d'imposer leurs priorités à l'ensemble d'un pays, comme cela s'est produit dans certains cas, dernièrement.
Certains pays ont constaté que la représentation proportionnelle exacerbe les disparités et les clivages régionaux dans une société et qu'il est ainsi plus difficile d'arriver à un consensus national sur des questions clés.
[Français]
La représentation proportionnelle peut aussi saper l'indépendance des députés et, bien sûr, leur capacité de servir leurs circonscriptions électorales. En revanche, notre système majoritaire uninominal favorise plutôt la formation de partis importants autour d'une coalition de députés qui représentent différentes régions, différents groupes linguistiques, différents groupes ethniques et ainsi de suite.
Dans sa motion, la députée prétend qu'un système de représentation proportionnelle permettrait, selon elle, de corriger la désaffection de l'électorat. Où en est la preuve? Bien sûr, il n'y en a pas.
La baisse des taux de participation au Canada et dans d'autres démocraties occidentales, puisque ce n'est pas seulement un phénomène canadien, tient à de nombreux facteurs. Nous ne sommes pas les seuls à avoir vu une baisse dans la participation de la population.
Bien sûr, comme je l'ai dit, rien ne prouve que la représentation proportionnelle aurait un effet sur la participation électorale. Je ne connais aucun pays qui a adopté la représentation proportionnelle et qui a vu la participation augmenter tout de suite après. Personnellement, j'irais même jusqu'à dire qu'elle pourrait réduire la participation, comme je l'ai indiqué plus tôt. La représentation proportionnelle nuit à la stabilité politique, à l'efficacité du Parlement, et surtout, à l'imputabilité de l'élu devant son électorat. Il n'y a pas de doute que c'est le prix à payer.
Les apôtres du système de représentation proportionnelle ont soutenu et soutiennent que celui-ci favorise la représentation des principaux segments de la population ou des groupes comme les femmes.
Contrairement à ce que certains ont affirmé, l'expérience internationale nous démontre très clairement qu'une telle amélioration est attribuable à l'adoption, par exemple, de quotas par les partis politiques ou d'obligations que les partis politiques se fixent eux-mêmes d'augmenter la participation de certains groupes, comme les femmes et d'autres, d'ailleurs. Cela permet de renforcer la participation des candidates ou d'autres groupes cibles dans la société.
Enfin, dans notre système électoral, le suffrage est direct. Il suffit pour l'électeur d'indiquer le candidat qu'il préfère, un point, c'est tout. Ce n'est pas compliqué. L'électeur participe, il le fait très rapidement et le choix est clair.
Notre système permet de réduire le nombre de votes nuls. De plus, les dépouillements sont simples et rapides au Canada. En général, quelques heures seulement après la fermeture des bureaux de scrutin, les Canadiens et les Canadiennes savent qui formera le gouvernement et qui sera dans l'opposition.
Ai-je à rappeler l'élection de l'automne dernier au Canada et dans un autre pays en même temps. On a procédé au dépouillement de 17 millions de bulletins de vote au Canada en 90 minutes ou à peu près. On savait qui gagnait, qui perdait, qui était en deuxième place, et ainsi de suite. Ce fut fait en 90 minutes.
Une démocratie au sud de nous, avec un système qui n'est pas proportionnel mais qui est quand même beaucoup plus compliqué que le nôtre, a mis au-delà de deux mois pour savoir qui était le gagnant dans cette campagne électorale.
Ceci me porte à conclure que notre système est supérieur à plusieurs autres. Bien sûr, il n'est peut-être pas parfait, mais il est quand même supérieur à plusieurs autres.
[Traduction]
Un document sur la réforme électorale publié aujourd'hui par l'Institut de recherche en politiques publiques fait état de certains de ces problèmes rencontrés par d'autres pays. L'IRPP est d'avis que la représentation proportionnelle est une bonne idée, mais il ajoute quand même que—c'est ce qu'on peut lire dans son communiqué de presse—«le principal inconvénient» de la représentation proportionnelle est que les grands districts électoraux représentés par plusieurs députés «se prêteraient moins bien au genre de travail de circonscription que les députés canadiens ont toujours fait». Donc, même le groupe qui est en faveur de la représentation proportionnelle croit qu'un tel système favorise moins la reddition de comptes que celui que nous avons maintenant. Je crois que c'est là un inconvénient majeur.
À mon avis, le document de l'IRPP ne fait pas assez ressortir les graves problèmes que la représentation proportionnelle a posés dans d'autres pays. Il minimise l'importance des effets négatifs même s'il reconnaît qu'il en existe. Il ne tient pas compte du fait que les Canadiens s'intéressent peu à la représentation proportionnelle, ce que nous ne devons pas oublier. Cette question n'a pas été soulevée comme telle durant la dernière campagne électorale lorsque je faisais du porte-à-porte. Comme le député de Durham l'a si bien dit tout à l'heure, les Canadiens avaient surtout des questions à poser au sujet des soins de santé, de la pauvreté chez les enfants, des impôts, de l'agriculture et ainsi de suite. Très peu de gens parmi ceux que j'ai rencontrés dans la circonscription de Glengarry—Prescott—Russell ont soulevé la question de la représentation proportionnelle. En fait, si je me souviens bien, personne n'a soulevé cette question.
Le document dit aussi qu'il n'y a pas de consensus parmi les universitaires quant à la façon de mettre en place un système de représentation proportionnelle.
[Français]
Bien sûr, même le meilleur des systèmes a ses critiques, incluant le nôtre. N'oublions cependant pas que le Canada peut s'enorgueillir d'avoir un des systèmes politiques les plus stables et les plus démocratiques du monde, un système qui sert de modèle et qui a même été exporté dans plusieurs autres démocraties.
L'Agence canadienne de développement international, Élections Canada et d'autres—même des parlementaires de cette Chambre—ont participé partout à travers le monde dans des forums de participation au processus démocratique. Nous l'avons tous fait, bien sûr, en croyant que notre système est le bon, et je le crois aussi.
Notre système électoral a résisté à l'épreuve du temps tout en étant suffisamment souple pour qu'il soit possible de l'adapter en fonction des circonstances.
En 1991, la Commission Lortie sur la réforme électorale et le financement des partis politiques a recommandé «le maintien du système actuel de circonscriptions uninominales». Ce n'est quand même pas n'importe qui.
La question de la représentation proportionnelle et de tout le système électoral est, bien sûr, une question difficile et complexe. Mais l'essentiel du courage est la prudence, surtout que la population n'a démontré, comme je l'ai dit, à peu près aucun intérêt à appuyer une représentation proportionnelle et qu'un système national de représentation proportionnelle, si c'était le cas, nécessiterait toutes sortes de changements, y compris des changements à la Constitution.
[Traduction]
En conclusion, je remercie la députée d'attirer l'attention de la population sur cette question. Cependant, je ne partage pas son enthousiasme à l'égard de la représentation proportionnelle. Notre système électoral actuel permet de rendre clairement des comptes dans les circonscriptions et sur le plan national. Ses résultats éprouvés sont reconnus dans le monde entier. Il permet aux députés de représenter un groupe précis et distinct d'électeurs, ceux qui habitent dans les limites géographiques de la région qu'ils représentent.
Enfin, j'ai écouté l'allocution de la députée d'en face, qui repose sur la prémisse que chaque parti prétend vouloir devenir un parti national. Ce n'est pas toujours le cas. Il y a le cas, à la Chambre des communes, d'un parti politique dont je n'approuve pas l'orientation. Il veut représenter une région au lieu de tout le pays. Les progressistes du Manitoba ont agi ainsi à une certaine époque. Les Cultivateurs unis de l'Ontario et d'autres voulaient, par définition, être des partis régionaux. Je ne partage pas ce point de vue, mais ils ont certes le droit de se présenter en s'appuyant sur cette prémisse, s'ils le désirent.
Tout cela pour dire que je crois que nous devrions continuer de moderniser notre système électoral, comme nous l'avons fait lors de la dernière législature, avec l'adoption de la nouvelle Loi électorale du Canada. La Chambre continuera de le faire ce jeudi, lorsqu'elle réagira à la loi électorale en vertu d'une décision de la cour. Probablement plus tard, au cours de la législature actuelle, nous serons saisis d'un autre projet de loi qui donnera suite aux propositions que le directeur général des élections présente régulièrement devant le comité. Nous tâcherons de moderniser encore une fois nos lois électorales.
À mon avis, la modernisation graduelle de nos lois électorales par le gouvernement constitue une approche prudente et équilibrée à une question complexe qui se situe au coeur de notre régime démocratique. Je crois que les Canadiens désirent que tous les députés appuient cette démarche. C'est pourquoi je ne saurais approuver la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, je remercie le leader du gouvernement à la Chambre pour les commentaires qu'il a faits, et je reprendrai quelques-uns des points qu'il a abordés.
Il a dit que les gens veulent être représentés par quelqu'un de chez eux. Je ne m'oppose pas à cela. D'autres pays, comme l'Allemagne, ont un système de représentation proportionnelle où il y a un député par circonscription, la moitié des députés étant élus circonscription par circonscription et l'autre moitié en fonction de la représentation proportionnelle de chaque parti. En Allemagne, par exemple, le scrutin comporte deux tours. Les électeurs votent pour leur député local et leur parti préféré. Ils ont ce qu'on appelle un système de représentation proportionnelle mixte, qui compense les caprices et les distorsions du système électoral. De bien des façons, ces électeurs ont le meilleur des deux mondes.
Je dirais que, même maintenant, les électeurs n'ont pas toujours un représentant local. Il arrive que le chef du député, le premier ministre, parachute des candidats dans certaines circonscriptions. Nous avons donc un système qui autorise le chef d'un parti à refuser de signer une mise en candidature donnée pour nommer quelqu'un d'autre à la place. Cela s'est produit. J'occupais un fauteuil en face lorsque cela s'est produit. Cela s'est aussi produit de ce côté-ci de la Chambre. Cela se produit toujours, donc à mon avis, ce n'est pas un argument pour ou contre un système de représentation proportionnelle.
L'autre point concerne les partis régionaux. Je suis d'accord avec le ministre en face. J'aime les partis nationaux qui ont une vision nationale. C'est bon pour le pays, car cela tisse des liens. Or, on pourrait facilement concevoir un système de représentation proportionnelle, particulièrement dans une fédération où nous pouvons avoir des partis régionaux.
Nous pourrions avoir un système de représentation proportionnelle fondé sur une base régionale ou sur une base provinciale. Je ne voudrais pas d'un système selon lequel les suffrages recueillis à l'échelle nationale seraient ensuite répartis en fonction d'une représentation proportionnelle de chaque parti. Personnellement, j'ai tendance à préférer le modèle allemand qui est un système mixte, et qui pourrait être appliqué région par région ou province par province. Nous aurions toujours les United Farmers of Ontario et le Bloc québécois. Nous pourrions toujours avoir un parti dans l'Ouest du Canada. Quel mal y a-t-il à cela? Nous pourrions concevoir un modèle de représentation proportionnelle répondant à tous les critères.
Pourquoi le leader du gouvernement à la Chambre de l'autre côté serait-il contre la constitution d'un comité spécial multipartite pour, à tout le moins, examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle qui pourraient s'avérer pertinents pour notre pays? Presque toutes les démocraties du monde ont un système de représentation proportionnelle sous une forme ou une autre.
Il y a au Canada une crise en ce qui concerne la participation, le manque d'intérêt des citoyens à l'égard du système politique et l'écart entre la composition du Parlement et la répartition du scrutin populaire. Pourquoi alors ne pas se pencher sur ces problèmes? Ayons une vraie démocratie politique où les députés soient en mesure de débattre des problèmes réels du jour. Est-il une question plus importante que celle, fondamentale, de la démocratie et du vote? Je ne crois pas.
Cela soulève toutes sortes d'autres questions, alors pourquoi ne pas avoir un comité parlementaire pour se pencher sur ce sujet, examiner les différents modèles et faire des recommandations? Nous n'avons jamais fait cela au Canada. Le faire serait, à mon avis, rendre un grand service aux Canadiens.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, je suis tout à fait en désaccord avec ce que le député dit.
Premièrement, son chef et lui ont déclaré que le Canada est l'un des trois pays seulement avec une population supérieure à 8 millions—et j'ignore pourquoi ce chiffre est important—qui n'a pas un système de représentation proportionnelle, selon elle.
Le Royaume-Uni n'a pas de système de représentation proportionnelle. En ce qui concerne l'argument touchant le pays de Galles, depuis quand est-ce un gouvernement national? J'espère que ce n'est pas ce que notre collègue laisse entendre dans cette enceinte. La France n'a pas de système de représentation proportionnelle. En fait, c'est probablement le pays dont le système se rapproche le plus de l'opposé de la représentation proportionnelle. Les Français peuvent aller jusqu'à éliminer au deuxième tour une personne qui a obtenu 49 p. 100 des voix. Ce système est exactement le contraire de ce dont parle notre vis-à-vis. Il ne fait tout simplement pas cela.
Le député prétend qu'il voudrait, en fait, voir une version modifiée du système de représentation proportionnelle, sur une base régionale ou provinciale. C'est la proposition inverse qui a été présentée par son propre chef il y a environ une heure à la Chambre, lorsqu'elle a prétendu qu'on parviendrait à avoir un système de représentation nationale.
Le député nous dit maintenant que c'est une façon de s'assurer que les régions soient davantage représentées par des gens qui représenteraient leur région plutôt que l'intérêt national. C'est exactement la proposition contraire qu'on soumet maintenant. Ce n'est absolument pas la même chose. En fait, je suis d'accord avec le député. Même si ce ne serait pas souhaitable, sa proposition est probablement ce qui résulterait.
Le député cite l'exemple allemand où le grand avantage, selon le député, c'est que la moitié des députés n'ont pas de circonscription. La moitié des députés sont élus dans une circonscription donnée alors que les autres sont élus à la proportionnelle. Ainsi, la moitié d'entre eux n'ont pas de circonscription. Je ne veux pas d'un système où la moitié des députés n'ont pas de circonscription, où ils représentent seulement le whip de leur parti.
Si on se plaint dans cette enceinte que la discipline de parti est trop stricte, peut-on s'imaginer ce qui se passerait si des gens voyaient leur nom monter ou baisser dans la liste en fonction de l'appréciation des autorités de leur parti? C'est ce qui arriverait: la moitié des députés n'auraient pas de circonscription et en plus de cela, ils seraient choisis à partir de la liste d'un parti selon les caprices de quelqu'un, sans tenir compte des souhaits des électeurs.
Est-ce censé être meilleur que notre système? Je n'en crois rien. Notre système n'est peut-être pas parfait, mais on ne va certainement pas l'améliorer en proposant une politique comme celle-là.
M. Paul Szabo (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, pendant que je suivais le débat, j'ai été étonné par la réaction du chef du Nouveau Parti démocratique à l'endroit de mon collègue, le député de Durham, qui a formulé certains arguments au mieux de sa connaissance. Le chef du NPD a qualifié mon collègue d'ignorant, d'arrogant et de quelques autres qualificatifs. Ce genre d'intolérance est précisément ce dont les Canadiens ne veulent pas. Je crois que nous devons faire preuve d'ouverture aux idées.
J'ai une question pour le député. Pourrait-il me dire si, en vertu du système de représentation proportionnelle typique que propose le NPD, un parti politique pourrait désigner une personne provenant d'une région comme représentante de cette région, simplement parce qu'il n'y a fait élire aucun candidat?
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, c'est difficile à dire. Je suppose que tout dépendrait du système adopté, mais je crois que c'est précisément le but de ce système. Autrement dit, un parti qui ne ferait pas élire son candidat en vertu du système de scrutin majoritaire uninominal aurait une deuxième chance qui lui permettrait de désigner quelqu'un à titre de responsable ou comme porte-parole de la région.
Je ne sais pas si c'est mauvais en soi. Je ne crois pas que ce soit soit mauvais en soi. Je suppose que tous les partis politiques qui ne sont pas représentés dans une région y envoient un porte-parole ou font un jumelage avec une autre circonscription. Tous les partis le font à l'heure actuelle. La plupart des caucus à la Chambre le font probablement, à titre officieux, sauf peut-être le Bloc québécois. En raison de son orientation politique, le Bloc québécois a choisi de ne pas appliquer cette méthode. Je le reconnais, mais la plupart des autres partis le font probablement à l'heure actuelle.
Ce n'est pas une mauvaise pratique en soi. Ce qui me semblerait antidémocratique, ce serait que des députés qui n'auraient pas été élus pour représenter une circonscription siègent à la Chambre des communes avec des députés élus et participent à part entière aux travaux de la Chambre, et cela même si personne n'avait voté pour eux.
Certains prôneront l'application d'un second tour de scrutin; c'est une idée qui se défend. Cela n'a évidemment rien à voir avec la représentation proportionnelle; en fait, c'est l'inverse. La question fait l'objet d'un débat.
La représentation proportionnelle dans la version trafiquée présentée dans certains discours ne constitue pas vraiment une représentation proportionnelle. On se demande donc à quoi elle servirait. Une représentation proportionnelle à laquelle s'ajouteraient tous ces éléments de pondération ne serait plus une représentation proportionnelle. Nous en subirions tous les inconvénients sans en retirer de bienfaits.
M. Ted White (North Vancouver, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est le premier discours que j'ai la chance de prononcer ici à la Chambre depuis le début de la présente session, bien que j'aie posé une question il y a une semaine ou deux.
Il me semble approprié de remercier mes électeurs d'avoir renvoyé mon opposant libéral chez lui. J'ai pour la troisième fois amélioré mon résultat en termes de pourcentage du vote, ce qui n'est pas si mal. Le candidat libéral dans ma circonscription, un ancien néo-démocrate de la Colombie-Britannique qui avait changé d'allégeance au milieu du mandat de son gouvernement pour se joindre aux libéraux, a été renvoyé chez lui avec un pourcentage des voix inférieur à ce qu'avait obtenu le candidat précédent, ce qui est aussi très bien. En fait, les députés néo-démocrates provinciaux désertent le navire à un rythme de plus en plus accéléré parce que des élections doivent se tenir bientôt et que l'on s'attend à ce qu'ils subissent une écrasante défaite en Colombie-Britannique.
Je vais lire la motion et l'amendement dont nous sommes saisis aujourd'hui.
Que la Chambre constitue immédiatement un comité spécial multipartite, chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens de réforme électorale, en vue de recommander des réformes qui feraient obstacle à la régionalisation croissante de la politique canadienne et à la participation décroissante des Canadiennes et des Canadiens aux élections fédérales.
Malgré tout ce que le ministre a dit il y a quelques minutes, cette motion traite en fait de justice. Il est bien sûr inutile de parler de justice ou de représentation proportionnelle à ce ministre parce qu'en fin de compte son parti détient 100 p. 100 des pouvoirs même s'il a obtenu moins de 50 p. 100 du vote populaire. Pourquoi voudrait-il accorder quelque attention que ce soit à la notion de justice? Il a obtenu tous les pouvoirs avec moins de la moitié des votes. Que pourraient-ils demander de mieux? Ce n'est pas étonnant.
M. Paul Szabo: C'est ça la démocratie.
M. Ted White: J'ai entendu crier «C'est de la démocratie.» Comment peut-on croire démocratique un gouvernement qui dispose de 100 p. 100 du pouvoir alors qu'il a obtenu moins de 50 p. 100 du vote populaire? C'est insensé.
Le ministre a déclaré tout à l'heure qu'aucune proposition visant à instaurer la représentation proportionnelle ne peut lui plaire, car il n'y a pas de consensus sur les modalités de son application. La Nouvelle-Zélande, mon pays de naissance, nous a donné un excellent exemple de la façon dont nous devrions procéder. Si je ne m'abuse, la Nouvelle-Zélande a tenu en 1994 un référendum demandant à la population si elle souhaitait modifier le système en place. C'est cela, la démocratie.
Les Néo-Zélandais ont opté pour le changement. Pendant les 12 à 18 mois qui ont suivi, Élections Nouvelle-Zélande, du moins je crois que l'organisme qui s'occupe des élections dans ce pays s'appelle ainsi, mais je n'en suis pas sûr, a entrepris d'informer la population sur les différentes options.
Une brochure d'une trentaine de pages a été envoyée à tous les foyers néo-zélandais pour expliquer les différentes formes de représentation proportionnelle et leur résultat à l'issue d'une élection. J'en ai un exemplaire dans mon bureau. À la fin de cette période, un second référendum a été organisé et les Néo-Zélandais ont choisi le système qu'ils privilégiaient. Ils ont opté pour le système proportionnel mixte qui est semblable au système en vigueur en Allemagne.
Ce système comporte de nombreuses variantes concernant le mode d'établissement de la liste des candidats, qui peuvent être élus ou désignés.
Il est ridicule que le ministre déclare qu'il n'y a pas de consensus quant à la façon de procéder. Honnêtement, je suis étonné que le ministre puisse être aussi idiot.
Malheureusement, la motion ne peut faire l'objet d'un vote. Nous savons donc tous qu'il est pratiquement inutile de tenir ce débat. C'est triste à dire, mais c'est la réalité. J'ai entendu le ministre lui-même dire que c'était comme pelleter de l'air. C'est exact. Il est honteux que nous passions une journée entière à débattre de ce sujet et à nous y attarder, car à la fin de la journée nous ne pourrons même pas voter.
Je sais que les députés néo-démocrates peuvent choisir lesquelles de leurs motions feront l'objet d'un vote et lesquelles n'en feront pas, mais je demande: pourquoi existe-t-il des motions qui ne peuvent pas faire l'objet d'un vote? Pourquoi est-il possible qu'une motion dont nous avons débattu ne fasse pas l'objet d'un vote? C'est illogique de débattre pendant une journée entière au coût de centaines de milliers de dollars et, en définitive, de ne pas pouvoir voter sur le sujet.
Cette même logique s'applique aux projets de loi d'initiative parlementaire. Je me suis entretenu ce matin avec un député libéral qui est très déçu que son projet de loi d'initiative parlementaire ne puisse pas faire l'objet d'un vote. Il avait le sentiment que c'est à cause des députés de l'opposition qui siègent au comité qu'il a été décidé que son projet de loi ne pourrait pas faire l'objet d'un vote. Le fait est que ce genre de situation ne devrait pas se produire. Tous les projets de loi d'initiative parlementaire devraient faire l'objet d'un vote, à l'instar des mesures d'initiative ministérielle.
Il est regrettable que la motion à l'étude ne fasse pas l'objet d'un vote, mais ce l'est d'autant plus quand on constate qu'il s'agit d'une motion dont les néo-démocrates ont déjà saisi la Chambre il y a moins d'un an. Je me demande vraiment pourquoi ils reviennent sur un sujet dont nous avons déjà débattu il y a moins d'un an. Pourquoi n'ont-ils pas utilisé la journée mise à leur disposition pour nous saisir d'une motion qui pourrait être mise aux voix à propos de réforme parlementaire? Dieu sait qu'il y a beaucoup de réformes à faire à la Chambre pour la rendre plus démocratique. Pourquoi diantre gaspiller toute une journée à discuter d'un sujet dont ils ont déjà débattu à l'occasion de l'étude d'une initiative parlementaire il y a un an?
Quant au sujet de la motion, j'entends constamment les néo-démocrates dénoncer l'écart grandissant entre les riches et les pauvres. Je les entends parler de pauvreté chez les enfants, de l'ALENA et de la nécessité de mettre sur pied davantage de programmes sociaux. Pourquoi n'ont-ils pas proposé l'un ou l'autre de ces sujets au lieu de cette question dont ils ont déjà débattu il y a douze mois?
Le débat illustre bien la raison du déclin du NPD. On n'y constate pas de réflexion nouvelle. Il n'y a rien de stimulant dans de qu'il fait. Pas étonnant qu'il décline. Comme les néo-démocrates ne souhaitent pas former un jour le gouvernement, je suppose qu'ils peuvent vraiment dire n'importe quoi.
Je vais donner un exemple. Au cours de la dernière campagne électorale, j'ai participé à un débat réunissant tous les candidats de la circonscription au Capilano College, un établissement qui a la réputation d'être un foyer de socialisme dans ma circonscription. Comme le candidat néo-démocrate de North Vancouver n'était pas en mesure de participer, c'est la députée de Vancouver-Est qui l'a remplacé ce jour-là. Je dois dire que j'aime discuter avec la députée de Vancouver-Est. C'est toujours très agréable pour nous deux et pour l'auditoire également.
Lors de ce débat-là, l'auditoire du Capilano College était entièrement du côté de la députée de Vancouver-Est. La députée de Vancouver-Est a fait toutes les promesses possibles et imaginables. Elle a promis à ces étudiants que les droits de scolarité seraient gratuits. Les prêts étudiants seraient sans intérêt. Les étudiants n'auraient pas à rembourser leurs prêts. Les mariages entre homosexuels seraient autorisés. Les étudiants pourraient avoir tout ce qu'ils voudraient. Elle leur a dit qu'un gouvernement néo-démocrate leur donnerait tout ce qu'ils demanderaient.
Certains des étudiants étaient en larmes. Ils étaient tellement heureux de ce que leur promettait le NPD qu'ils en sanglotaient dans leurs sièges. Évidemment, je n'ai pas eu beaucoup de succès. J'ai probablement eu deux sur dix.
Le fait est que les néo-démocrates sont complètement déconnectés; les candidats néo-démocrates savent qu'ils peuvent promettre n'importe quoi à n'importe quel groupe d'intérêt spécial sans jamais avoir à s'exécuter.
L'un des députés néo-démocrates a beaucoup parlé de réforme parlementaire. Une manière dont les néo-démocrates pourraient contribuer serait de proposer aujourd'hui une motion sur la réforme parlementaire et sur ce que nous devons changer dans la manière dont nous faisons les choses à la Chambre. Nous aurions même pu débattre de nouveau de la question de la pauvreté chez les enfants. Le NPD n'est même pas capable de se souvenir de sa propre histoire.
Il y a quelques années, la Chambre a débattu d'une motion dont elle avait été saisie. C'était le 24 novembre 1989. Chaque année, au mois de novembre, on nous rabat les oreilles d'un bout à l'autre du pays au sujet de la promesse faite par le Parlement d'éliminer la pauvreté chez les enfants avant l'an 2000. Le NPD se promène dans tout le pays en disant qu'il a promis d'éliminer la pauvreté chez les enfants avant l'an 2000.
Le fait est que ce n'est pas exactement ce que disait la motion du NPD en 1989. Je vais vous en lire le libellé exact, qui se présente comme suit:
Que la Chambre témoigne de son souci pour le million et demi d'enfants canadiens qui vivent dans la pauvreté et s'emploie à réaliser l'objectif d'éliminer la pauvreté chez les enfants du Canada d'ici l'an 2000.
Il n'est pas question de l'éliminer, mais de s'employer à l'éliminer. La raison pour laquelle la motion était libellée de cette manière est que c'était la dernière journée à la Chambre de M. Broadbent, qui était alors le chef du NPD. La motion devait faire l'objet d'un vote et tout le monde à la Chambre voulait qu'il parte sur une note positive.
Bien entendu, il était difficile de contester la motion puisqu'elle proposait que la Chambre s'emploie à réaliser l'objectif d'éliminer quelque chose à un moment donné dans l'avenir. Tout le monde a voté en faveur de la motion et depuis, tous les ans au mois de février, le NPD la régurgite et rappelle qu'on a promis d'éliminer la pauvreté chez les enfants d'ici l'an 2000.
Franchement, si le NPD arrive à nous montrer un pays qui y est parvenu...
L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je regrette d'interrompre le député, mais il existe une règle de pertinence. La Chambre est saisie d'une motion sur la réforme parlementaire en vue d'adopter la représentation proportionnelle et je me demande, monsieur le Président, si vous pourriez demander au député de s'en tenir davantage à cette motion.
Le président suppléant (M. Bélair): Je suis certain qu'à un moment donné le député de North Vancouver fera le lien entre les propos qu'il a tenus jusqu'à maintenant et la motion dont la Chambre est saisie.
M. Ted White: Monsieur le Président, je vais certainement établir ce lien. Ce que j'essaie de faire valoir, c'est qu'il y a une multitude de sujets que les néo-démocrates auraient pu débattre aujourd'hui et j'essaie de les aider. S'ils avaient proposé un sujet un peu différent, la tribune serait remplie de journalistes prêts à en faire le reportage. Mais il n'y a aucun représentant des médias à la Chambre aujourd'hui et je serais prêt à parier qu'il n'y aura pas un seul mot dans les journaux, pas le moindre reportage sur le débat d'aujourd'hui.
J'essaie d'aider le NPD à se rendre compte qu'il en aurait eu davantage pour son argent s'il avait attiré l'attention sur un de ses sujets favoris plutôt que de revenir sur un débat qui n'a mené nulle part il y a moins d'un an.
Pour ce qui est de la réforme parlementaire, s'il y avait vraiment des votes libres à la Chambre, un système uninominal majoritaire à un tour ne serait pas aussi nécessaire. Le système aurait peu d'importance. Si chacun de nous pouvait vraiment représenter ses électeurs et voter en fonction de leur opinion en cet endroit, il importerait peu qu'on soit élu au scrutin majoritaire uninominal à un tour car le facteur principal serait la représentation et non la façon dont nous avons été élus à la Chambre.
D'autre part, le député de Regina—Qu'Appelle sait bien que mon parti et moi-même appuyons l'objectif global de la motion; d'ailleurs, le porte-parole de mon parti en parlera en détail plus tard. Nous sommes intervenus en faveur de cette idée lorsqu'il a soulevé la question antérieurement. Il ne s'agit pas de savoir si nous sommes ou non en faveur de la présente motion, mais si oui ou non ils obtiennent un impact valable pour leurs efforts aujourd'hui.
Parlons un peu plus de la réforme parlementaire dont ils auraient pu saisir la Chambre, sans parler du vote libre. Si toutes les initiatives parlementaires pouvaient faire l'objet d'un vote, alors il conviendrait de présenter cette motion sous forme d'affaire faisant l'objet d'un vote à la période des initiatives parlementaires.
On devrait pouvoir voter à partir de nos circonscriptions lorsque nous y sommes par affaires, comme on le fait dans certains pays. À l'époque de la technologie, pourquoi devons-nous être ici en personne pour voter sur un point que nous comprenons parfaitement et que nous avons suivi? Un député ne devrait pas être exclu du vote simplement parce qu'il se trouve dans sa circonscription. Ce n'est pas démocratique.
La technologie nous le permet de nos jours. Nous pourrions même utiliser un système de reconnaissance des empreintes digitales; grâce à un petit appareil où l'on place un doigt, on pourrait nous reconnaître même si nous sommes dans nos circonscriptions. Il n'y a donc pas de raison pour que nous ne puissions voter à distance. Lorsque nous nous déplaçons avec des comités parlementaires ou lorsque nous sommes outre-mer pour des raisons importantes liées au travail parlementaire, pourquoi devrions-nous être privés de la possibilité de représenter nos électeurs en votant à la Chambre? C'est tout simplement insensé.
La seule raison qui nous empêche d'adopter certaines de ces réformes est l'intransigeance du ministre d'en face. Il refuse d'accepter quoi que ce soit qui correspond à un degré accru de démocratie. Il parle de moderniser la loi électorale, mais quand vient le temps d'agir, il n'est pas disposé à le faire. Il a résisté de toutes ses forces avant de se résoudre à présenter le projet de loi qu'il a déposé cette semaine. Le projet de loi vise à modifier la Loi électorale du Canada pour que les partis comptant 12 candidats puissent faire inscrire leur nom sur les bulletins de vote.
Lorsque nous avons étudié la nouvelle loi électorale, il y a quelques mois, les petits partis, dont le Parti communiste et le Parti vert, sont venus à Ottawa témoigner devant le comité. Ils ont soutenu que la règle exigeant 50 candidats était injuste, et je me suis rallié à leur point de vue. Nous en sommes arrivés à un compromis, 12 candidats, soit le nombre nécessaire pour qu'un parti soit reconnu à la Chambre.
Nous avons soumis ce compromis au ministre, et il a refusé. Qu'est-il arrivé ensuite? Il a été plongé dans de coûteuses procédures judiciaires dont l'issue a été favorable au Parti communiste du Canada. Le tribunal a statué qu'il suffisait de deux membres pour constituer un parti et insisté pour que le ministre saisisse la Chambre d'une mesure afin de régler le problème avant le 15 février. La veille de l'expiration du délai, il a présenté un projet de loi ramenant le nombre de candidats nécessaire à 12.
Le ministre a soutenu qu'il essayait d'améliorer la démocratie en modernisant les dispositions législatives, mais ce n'est qu'à contrecoeur qu'il avait accepté le nombre proposé à titre de compromis il y a neuf ou douze mois. Entre-temps, il a dépensé des montants considérables de l'argent des contribuables pour défendre cette position.
Je peux dire avec confiance qu'il sera plongé dans les mêmes difficultés à cause de la contestation, par la National Citizens' Coalition, des dispositions de la Loi électorale du Canada sur la publicité par des tiers. Il va dépenser une fortune en procédures judiciaires, probablement des millions de dollars, mais les dispositions seront fatalement déclarées inconstitutionnelles comme elles l'ont déjà été trois fois.
Si le NPD voulait vraiment être avant-gardiste et novateur, c'est là le genre de questions qui nous feraient progresser. Nous devrions parler des choses qui amélioreraient cet endroit pour les gens que nous représentons.
Une autre façon de moderniser nos méthodes, si le gouvernement ne veut absolument pas tenir de votes totalement libres, serait de nous entendre pour tenir un vote secret si 30 p. 100 des députés, par exemple, soit 60 députés à l'heure actuelle, l'exigeaient. Sortons des sentiers battus! Si 60 députés exigent la tenue d'un vote secret sur une initiative parlementaire, une motion du gouvernement ou un projet de loi ministériel, que l'on tienne alors un vote secret! Le ministre rétorquera tout de suite que nous ne pouvons pas faire cela parce que nos électeurs veulent voir comment nous votons. C'est un argument valable.
Toutefois, le fait est que la démocratie serait parfois mieux servie si l'on tenait ici un vote secret. L'exemple que je viens de donner, de la règle des 12 candidats, illustre bien le genre de problème qu'un scrutin secret aurait pu régler. Les députés d'en face se sentaient obligés de voter pour quelque chose que les tribunaux condamnaient. Dans deux ou trois semaines, ils voteront contre quelque chose de complètement différent parce qu'ils sont forcés de voter comme on le leur dit plutôt que selon le bon sens. Nous avons à la Chambre de bons débats où le bon sens l'emporte. Des députés d'en face m'ont avoué aimer l'idée que j'ai lancée dans un projet de loi, mais avoir été obligés de voter contre celui-ci.
Notre processus démocratique est faussé lorsque la situation est telle à la Chambre des communes que des députés ministériels votent contre une mesure qu'ils approuvent parce qu'on les y force.
Une réforme parlementaire décente nous permettrait d'accomplir beaucoup.
Le NPD aurait pu parler d'autres questions que la réforme parlementaire. J'ai mentionné les enfants victimes de la pauvreté. Ils parlent toujours d'imposer les sociétés, il se plaignent toujours de ce que les sociétés ne paient pas suffisamment d'impôts, ils se plaignent de ce que cette année un millier de sociétés n'ont pas payé un sou d'impôts. J'ai participé avec la députée de Vancouver-Est à trois débats publics durant lesquels elle a débité son discours habituel au sujet des sociétés qui ne paient pas d'impôt. À trois reprises, je l'ai mise au défi de nommer les compagnies qui ne payaient pas d'impôt et de me dire pourquoi elles n'en payaient pas. La député n'a jamais pu me donner la liste de ces compagnies ni me dire les raisons pour lesquelles elles ne payaient pas d'impôts. Je sais pourquoi. Dès qu'elle aura obtenu le nom des compagnies et qu'elle aura examiné les raisons pour lesquelles elles ne paient pas d'impôts, elle comprendra qu'il y a d'excellentes raisons pour cela.
On a, je crois, cité une fois à titre d'exemple la Compagnie Trust Royal. Il s'agit d'une filiale d'une autre compagnie qui transférait ses profits à la société mère, laquelle payait les impôts.
L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il existe une règle de la pertinence. Il n'est pas étonnant que les gens n'aient qu'une piètre opinion de notre institution. Nous tenons un débat sur un sujet précis, la représentation proportionnelle, et le député n'en a guère touché un mot. Monsieur le Président, je voudrais que vous rappeliez le député à l'ordre et que vous lui enjoigniez de parler de la motion dont la Chambre est saisie.
Le président suppléant (M. Bélair): Évidemment, nous nous attendons tous à ce que le député de North Vancouver limite ses observations au sujet à l'étude. Par contre, si le député de Regina—Qu'Appelle a des questions ou des observations à formuler, qu'il se sente libre de le faire, je lui accorderai alors la parole.
M. Ted White: Monsieur le Président, comme vous le savez, je réussis toujours à faire un lien avec le sujet, à la fin, et c'est certainement ce que je ferai dans ce cas.
Comme je l'expliquais, cette journée aurait pu être l'occasion de discuter de questions chères au NPD, comme les sociétés qui ne paient pas d'impôt. Je suis certain que, si le député veut m'interrompre constamment, c'est en partie parce que, s'il y a des néo-démocrates qui suivent nos travaux aujourd'hui, ils pourraient voir démolis tous les grands discours qu'on leur sert quotidiennement. Lorsque des gens comme cela viennent me rencontrer à mon bureau, je leur demande toujours des exemples de sociétés qui n'ont pas payé d'impôt et les raisons pour lesquelles elles ne l'ont pas fait. Lorsqu'ils se renseignent, ces gens découvrent que tout cela ne tient pas debout.
Le NPD aurait pu utiliser la journée d'aujourd'hui pour aborder ces autres questions, et nous aurions pu discuter de ces problèmes clés. Au lieu de cela, nous voilà contraints de discuter de cette question dont nous avons déjà débattu auparavant.
Comme le diront d'autres députés de mon parti, nous appuyons le principe de la motion. Si elle était mise aux voix aujourd'hui, nous voterions en faveur de celle-ci. Malheureusement, il ne s'agit pas d'une motion pouvant faire l'objet d'un vote. C'est là un autre exemple du caractère non démocratique de cet endroit.
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, je félicite le député d'en face pour ses observations, puisqu'elles portaient sur la question à l'étude aujourd'hui, la représentation proportionnelle. Je voudrais toutefois lui poser une question assez délicate.
Au cours de son allocution, il a mentionné que, lorsque le vote électronique existera, les députés pourront voter à partir de leur circonscription. Je voudrais lui poser une question à ce sujet. D'après lui, la responsabilité première d'un député n'est-elle pas d'être présent au Parlement, du moins sur la colline sinon à la Chambre même, lorsque le Parlement siège? Autrement dit, ses électeurs ne s'attendent-ils pas à ce que le député soit à Ottawa, au Parlement, lorsque la Chambre siège?
M. Ted White: Monsieur le Président, c'est une excellente question provenant d'un député libéral. Nos électeurs s'attendent-ils à ce que nous soyons au Parlement lorsque la Chambre siège? En fait, il s'agit d'une question très vaste.
J'ai pu constater, tout d'abord, que la plupart des gens ne savent même pas lorsque le Parlement siège. Pendant l'été, on nous demande très souvent quand nous devons retourner au Parlement. Le député se fait probablement poser la même question. Les Canadiens ne savent pas quand le Parlement siège. Ils reconnaissent toutefois, surtout les gens de l'Ouest, que la Chambre n'a pas tellement d'influence sur la façon dont le pays est gouverné.
Malheureusement, en raison du peu de démocratie qui règne ici, les résultats de chaque vote sont connus avant même le début des délibérations. Les Canadiens savent que le discours de 20 minutes que je fais aujourd'hui et les réponses que je donne aux questions qui me sont posées ne changeront rien aux résultats des travaux d'aujourd'hui.
En 1993, j'ai fait une promesse aux électeurs de ma circonscription et je l'ai répétée par écrit dans le North Shore News quatre jours avant la date du scrutin en 2000. J'ai promis que, lorsque le Parlement siégerait, je serais présent trois jours à la Chambre et deux jours dans ma circonscription. Si j'ai fait cette promesse, c'est pour pouvoir rencontrer les électeurs de ma circonscription et m'occuper de leurs préoccupations, aider ceux qui veulent venir témoigner devant les comités parlementaires, discuter de projets de loi à l'étude et me rendre disponible parce que, honnêtement, beaucoup d'entre nous savent que l'on peut en faire beaucoup plus en restant en contact direct avec les électeurs de notre circonscription qu'en étant ici.
Ipsos-Reid et d'autres maisons ont fait beaucoup de sondages au Canada et ont découvert que, plus une personne passe de temps ici, plus elle met l'accent sur l'assistance aux électeurs de sa circonscription parce que c'est un aspect des fonctions qui donne satisfaction tandis que pratiquement rien à la Chambre des communes n'apporte satisfaction.
Par ailleurs, puisqu'il y a toujours beaucoup de députés en déplacement avec des comités ou dans des fonctions officielles à l'étranger pendant que le Parlement siège, ces gens devraient avoir la possibilité de voter à distance.
En 1996, le Parlement de la Nouvelle-Zélande a adopté un Règlement, d'abord expérimental, mais rendu permanent l'année suivante, qui permet au whip de chaque groupe parlementaire de voter par procuration pour les députés de son parti qui sont absents, jusqu'à concurrence de 20 p. 100 du nombre total. Cela permet aux députés de suivre les comités dans leurs déplacements ou de se rendre à l'étranger et il y a toujours 100 p. 100 des députés présents à la Chambre. Certains diront que c'est abuser du système, mais ce n'est pas vraiment différent de la possibilité de voter à partir de sa propre circonscription.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Le député qui vient de parler, monsieur le Président, participe à la campagne reliée aux élections qui auront lieu en Colombie-Britannique dans quelques semaines et je trouve très étrange qu'il parle également des raisons pour lesquelles nous soumettons à nouveau cette motion.
La Bibliothèque du Parlement nous apprend que c'est en 1923 que le Parlement s'est prononcé pour la dernière fois sur la représentation proportionnelle. La dernière fois qu'on en a discuté dans le cadre des initiatives parlementaires avant l'automne dernier, où j'avais présenté une motion pouvait faire l'objet d'un vote, c'est en 1979, lorsque Jean-Luc Pepin, un député libéral à l'époque, a saisi la Chambre d'une motion ne pouvant faire l'objet d'un vote qui proposait que la représentation proportionnelle fasse partie de notre système électoral.
L'automne dernier, la motion no 155 que j'ai présentée pouvait faire l'objet d'un vote et qui était semblable à la motion d'aujourd'hui, demandait de créer un comité multipartite chargé de voir s'il serait bon d'incorporer une mesure de représentation proportionnelle dans le système électoral fédéral. Cette mesure n'a pratiquement pas été discutée au Parlement et ainsi, je suis très surpris que le député nous reproche de présenter une idée dont on n'a pratiquement pas parlé. Le parti du député lui-même a présenté la semaine dernière encore une motion portant sur le conseiller en éthique. Elle était répétitive également, car il s'agissait d'une promesse faite par le Parti libéral dans son livre rouge de 1993. Je pense que son argument est plutôt étrange.
Je voudrais interroger plus particulièrement le député au sujet de la représentation proportionnelle. Il a étudié le système néo-zélandais et je voudrais qu'il nous précise quel type de modèle de représentation proportionnelle il trouverait pertinent pour notre pays. Nous sommes une fédération unique. Nous pouvons compter sur le caractère unique et distinct du Québec. Nous constituons le deuxième pays en importance sur le plan géographique dans le monde, après la Russie. Nous avons des histoires très diverses et le reste. Quel type de modèle voudrait-il que nous examinions si, en fait, un comité multipartite se penchait sur cette question?
Je rappelle également à la Chambre que, si je ne m'abuse, le mandat du directeur général des élections lui permettrait d'examiner la question de la représentation proportionnelle. Ainsi, il suffit de créer un comité chargé d'examiner tous les divers systèmes électoraux. Je me demande quelle contribution le député ferait, en ce qui a trait à ce modèle, si nous avions un tel comité.
M. Ted White: Monsieur le Président, le député de Regina—Qu'Appelle ne devrait pas déplorer que la Chambre n'ait pas pu se prononcer sur la question depuis 1923, alors qu'il a fait en sorte que la motion du NPD ne puisse aujourd'hui faire l'objet d'un vote. Si les néo-démocrates tenaient à un vote, pourquoi n'ont-ils pas permis que leur motion fasse faire l'objet d'un vote aujourd'hui? Pourquoi présenter aujourd'hui une motion ne pouvant faire l'objet d'un vote, s'ils ne peuvent présenter qu'une seule motion pouvant faire l'objet d'un vote?
Tout le monde en rit. N'est-ce pas triste? C'est d'ailleurs ce que j'ai soutenu un peu plus tôt. Pourquoi diable ces motions ne peuvent-elles pas faire l'objet d'un vote? C'est un affront à la démocratie et nous devrions même tous avoir honte qu'une telle situation se produise.
En ce qui concerne notre motion de la semaine dernière, qui faisait l'objet d'un vote, le député doit reconnaître que nous en avons eu pour notre argent cette fois-là. Les libéraux ont voté contre leur propre politique. Les médias en ont fait leurs choux gras. Il est regrettable que le débat d'aujourd'hui ne bénéficiera pas de la même couverture.
Pour ce qui est du système que je privilégierais, comme le sait le député, j'ai préconisé la démocratie directe jusqu'aux dernières élections. J'ai toujours préconisé l'utilité d'une position neutre, car les gens tiennent mordicus en général à une forme ou une autre de représentation proportionnelle. J'ai toujours pensé qu'il me serait difficile de continuer d'être le porte-parole de mon parti dans ce dossier, si les électeurs pensaient que je privilégiais un système par rapport à un autre. Je préférerais rester neutre aujourd'hui, pour le cas où serait enfin constitué ce comité multipartite. Je voudrais y siéger aux côtés de personnes qui sauraient que j'affiche une position de neutralité.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je constate avec intérêt que le député fait allusion à la résolution adoptée par la Chambre en 1989 relativement à la pauvreté des enfants. Il a bonne mémoire. De fait, c'était un vendredi. Seulement 25 députés étaient présents à la Chambre ce jour-là, et on n'a pas tenu de vote.
Peu importe, le député a fait une déclaration sur un thème qu'on entend assez souvent dans cette enceinte. La question est probablement justifiée. Le député a déclaré que cet endroit n'avait pas de raison d'être puisqu'on connaissait l'issue de la plupart des votes avant même que ceux-ci soient tenus. Le député a sans doute raison. Cela est attribuable au fait que 172 députés sur 301 sont du Parti libéral.
Je me demande si le député peut dire à la Chambre combien de députés un gouvernement doit avoir pour pouvoir remporter un vote. Le gouvernement a-t-il besoin de détenir 90 p. 100 des sièges et 90 p. 100 des suffrages? Cela serait-il alors pertinent? À quel moment le député estimerait-il qu'un vote à la Chambre est pertinent lorsque le gouvernement est majoritaire? Il faut trancher quelque part. La tenue d'un vote serait-elle pertinente dans l'hypothèse où un parti détiendrait tous les sièges? J'aimerais bien que le député dise à la Chambre où il faut trancher pour que le résultat d'un vote tenu par les députés démocratiquement élus soit pertinent.
M. Ted White: Monsieur le Président, le fait de connaître le résultat du vote avant le début du débat ne traduit pas le fait que le gouvernement compte 172 députés sur 301, mais plutôt le fait que le vote libre n'existe pas. C'est parce que le vote libre n'existe pas que nous connaissons d'avance le résultat de chaque vote.
Le député m'a demandé de quel nombre le gouvernement a besoin. Si nous étions dans un endroit réellement démocratique, le gouvernement aurait besoin du nombre de députés qu'il pourrait convaincre de voter pour ses mesures de sorte que nous puissions tenir des débats et des délibérations de comité utiles, car le gouvernement devrait relever le défi de convaincre chaque député qu'il propose une bonne mesure. Chacun d'entre nous disposerait de beaucoup plus de pouvoir pour exercer de l'influence et faire apporter de petites modifications. Plus tôt, j'ai donné l'exemple de la règle des 12 candidats. En réglant cette question par un vote libre, des millions de dollars auraient pu être épargnés aux contribuables.
[Français]
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, puisque que l'essence même du débat d'aujourd'hui porte sur la démocratie et sur la façon dont elle est exercée au Canada, vous me permettrez, dans un premier temps, de féliciter le Président de la Chambre pour son élection, puisque je n'avais pas eu l'occasion de le faire. Je tiens également à vous féliciter, monsieur le Président, pour votre nomination.
J'aimerais aussi en profiter pour remercier les citoyennes et citoyens de Verchères—Les Patriotes qui, pour une troisième fois, en novembre 2000, m'ont confié le mandat de les représenter à la Chambre des communes.
J'aimerais maintenant débattre plus précisément de la motion à l'étude. Si je peux me permettre un commentaire, le député de l'Alliance canadienne qui vient juste de prendre la parole semblait se surprendre que les médias demeurent silencieux et ne reprennent pas le contenu des délibérations d'aujourd'hui à la Chambre dans les nouvelles de ce soir, de ce midi ou de demain.
À la lumière de ce que j'ai entendu jusqu'à présent, je dois dire que je ne suis nullement surpris que les médias ne veuillent pas reprendre ce genre de propos.
Tout d'abord, le Nouveau Parti démocratique présente cette motion, argumentant et plaidant en faveur de l'introduction d'un système de représentation proportionnelle. Par la suite, le leader parlementaire du gouvernement à la Chambre se lève et, invoquant toutes sortes de raisons—certaines légitimes, je pense, d'autres carrément fallacieuses—s'oppose à quelque forme de représentation proportionnelle que ce soit. Il va même jusqu'à dire: «Nous ne voulons même pas en débattre et en discuter.» Ensuite, le député de l'Alliance canadienne se lève et dit: «C'est peut-être une question importante, mais vous auriez dû parler de telle ou telle autre chose.»
Très respectueusement pour mon collègue de l'Alliance canadienne, je lui dirais que ce n'est pas de ses affaires. Il ne lui revient pas de décider des sujets que les autres formations politiques veulent bien présenter.
Le Nouveau Parti démocratique a tout à fait le droit de choisir le sujet qu'il veut soumettre à l'attention de cette Chambre sans, en contrepartie, subir quelque critique que ce soit des autres formations politiques.
De plus, lorsque notre collègue de l'Alliance canadienne a dit que les débats ici étaient tout à fait inutiles puisqu'ils n'étaient pas soumis à un vote, je pense qu'il sous-estime, minimise, banalise l'importance des délibérations de cette Chambre.
Bien sûr, il serait éminemment souhaitable que chacune de ces délibérations puisse être suivie d'un vote pour que l'intention des parlementaires soit enregistrée. Mais je pense qu'il est passablement insultant pour nous, parlementaires, de dire que les débats que nous tenons à la Chambre, les discussions et les délibérations que nous avons, sont inutiles, de dire, à toutes fins utiles, si je pousse la logique jusqu'à son ultime limite, que la liberté d'expression serait une perte de temps.
Je pense que nous avons ce privilège ici, à la Chambre tout particulièrement, d'avoir cette pleine liberté d'expression. Je ne voudrais d'aucune façon que nous tentions de banaliser ou de dénigrer cette possibilité de nous exprimer sur une foule de questions d'intérêt public.
Bien sûr, il serait éminemment souhaitable—je le disais tout à l'heure et je le réitère—que nous puissions voter sur chacun des sujets ayant fait l'objet d'un débat, mais le fait est qu'actuellement ce n'est pas le cas. En marge de toute la question de la réforme électorale, peut-être devrions-nous, effectivement, nous pencher éventuellement sur une réforme parlementaire qui pourrait nous amener à pouvoir voter sur chacune des questions qui retient l'attention de la Chambre.
J'aimerais parler plus précisément de la motion du Nouveau Parti démocratique, qui se lit comme suit:
Que la Chambre constitue un comité spécial multipartite, chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens de réforme électorale, en vue de recommander des réformes qui feraient obstacle à la régionalisation croissante de la politique canadienne et à la participation décroissante des Canadiennes et des Canadiens aux élections fédérales».
Notons qu'il y a plusieurs éléments dans cette motion. D'abord, lorsqu'on dit qu'on souhaite créer un comité multipartite chargé d'étudier la question de la représentation proportionnelle et tout autre sujet relatif à la réforme électorale, il n'y a pas là quelque hérésie que ce soit que de dire qu'il soit souhaitable que nous puissions nous réunir, toutes formations politiques confondues, au sein d'un comité, pour débattre de sujets touchant la réforme électorale. C'est le premier point portant sur la question de la création d'un comité. Je pense que c'est une idée qui, en soi, vaut la peine d'être regardée, examinée et analysée.
Maintenant, d'aucuns pourraient prétendre qu'il existe déjà un comité à la Chambre, soit le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, qui est chargé d'examiner toutes les questions afférentes à la Loi électorale.
Si tant est que le gouvernement, pour une raison ou pour une autre, comme cela semble être le cas, décidait de ne pas donner suite au voeu exprimé par le Nouveau Parti démocratique—puisqu'il n'y aura pas de vote—de créer un comité multipartite chargé d'examiner toutes les questions touchant la réforme électorale, peut-être que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, composé de représentantes et de représentants de toutes les formations politiques à la Chambre, pourra-t-il décider éventuellement de donner suite à ce voeu. Cela pourrait être fait dans la foulée du rapport que doit présenter le directeur général des élections à la suite de la dernière élection fédérale et faire en sorte que nous puissions apporter un certain nombre de modifications à la Loi électorale, de telle manière que celle-ci soit plus moderne et qu'elle corresponde davantage aux attentes des Canadiens et des Canadiennes et des Québécoises et des Québécois.
Il y a un autre élément fort important dans cette motion, soit celui d'étudier divers modèles de représentation proportionnelle—j'y reviendrai dans quelques instants—et d'autres moyens de réforme électorale. Bien sûr, depuis le début du débat, les libéraux et l'Alliance canadienne ont bien pris soin de limiter et de restreindre toute la discussion autour de la question de la représentation proportionnelle. Toutefois, je signale à l'attention des députés de la Chambre que la motion du Nouveau Parti démocratique vise également à nous amener à réfléchir à d'autres réformes électorales possibles et envisageables.
Il y a un autre élément dans la motion. On parle des réflexions de ce comité comme étant un moyen de faire obstacle à la régionalisation croissante de la politique canadienne et à la participation décroissante des Canadiennes et des Canadiens aux élections fédérales. J'aurai bien sûr l'occasion de dire quelques mots là-dessus dans quelques instants.
Toutefois, dans un premier temps, je dirais tout simplement qu'il est réducteur de prétendre que la régionalisation croissante de la politique canadienne et que la participation décroissante des Canadiens et des Canadiennes au processus électoral ne reposent que sur le système électoral existant.
Je pense qu'il y a une foule d'autres raisons qui peuvent expliquer ces deux phénomènes, et il serait très simpliste de prétendre que cela se limite uniquement au système électoral.
J'aimerais maintenant dire quelques mots sur la proportionnelle elle-même. Bien sûr que le système de représentation proportionnelle peut sembler attrayant à plusieurs égards, qu'il aurait pour effet de moderniser le système électoral canadien, étant entendu que la plupart des démocraties dans le monde ont intégré, soit une composante de représentation proportionnelle, ou ont carrément adopté le système de représentation proportionnelle pure.
Évidemment, il y a des avantages, et ils ne sont pas négligeables. La représentation proportionnelle, ou du moins l'intégration d'une composante proportionnelle, pourrait permettre une meilleure représentation des groupes minoritaires, qu'on pense simplement aux communautés culturelles, aux personnes handicapées. Elle pourrait également permettre une meilleure représentation des femmes.
Les formations politiques pourraient effectivement choisir d'équilibrer la présence des femmes et des hommes à la Chambre des communes, faire en sorte qu'un plus grand nombre de femmes soit inscrit sur les listes des partis, de sorte à pouvoir augmenter la représentation des femmes. Il en irait de même pour la représentation des jeunes. En termes de représentation, on peut avoir là des innovations fort intéressantes.
Un autre élément fort important et fort intéressant avec le système de représentation proportionnelle pure, ou en partie, est l'idée de faire en sorte que le Parlement reflète davantage les différentes idéologies que partagent les citoyennes et les citoyens, que la Chambre représente mieux l'éventail des idéologies auxquelles s'identifie la population. Cela permettrait aux petites formations politiques, qui peuvent difficilement se faire élire dans un système uninominal à un tour, d'avoir une voix au sein du Parlement.
À cet égard, notons que si le système électoral de l'Allemagne ne comportait pas une composante proportionnelle, les Verts n'auraient jamais trouvé leur place au Bundestag allemand. C'est donc très important pour les petites formations politiques, pour qu'elles puissent avoir une voix au Parlement, de pouvoir compter sur un système de représentation proportionnelle.
Une représentation proportionnelle permettrait également d'éviter les distorsions qu'amène inévitablement le système de représentation uninominale à un tour. Dans un système comme le nôtre, il est paradoxal qu'un gouvernement élu avec 38 p. 100 ou 40 p. 100 des voix puisse diriger un pays et détenir presque 100 p. 100 des pouvoirs concentrés entre ses mains. Un système de représentation proportionnelle permettrait d'éviter les distorsions inhérentes au système actuel.
On l'a dit tout à l'heure, un système de représentation proportionnelle permettrait une plus grande collaboration entre les différentes formations politiques à la Chambre, dans la mesure où la survie même d'un gouvernement, où la composition d'un gouvernement dépend de la collaboration, de la coopération et même de la coalition entre différents partis politiques.
En ce sens, dans les pays où existe la représentation proportionnelle, on retrouve moins cette dichotomie, cette division très rigide entre le gouvernement, d'une part, qui a tous les pouvoirs et se croit investi du pouvoir d'exercer l'autorité de façon presque dictatoriale pendant quatre ans entre les élections, et l'opposition, d'autre part, qui s'évertue, autant que faire se peut, à faire respecter l'intérêt public à travers cela.
Par contre, il y a certains désavantages au système de la proportionnelle. Il faut voir comment on peut, éventuellement, intégrer une représentation proportionnelle au système actuel, tout en essayant d'éviter ces inconvénients. Que l'on pense simplement à l'instabilité qui peut découler d'un système de représentation proportionnelle. On l'a vu, particulièrement dans les pays où le système de proportionnelle pure est instaurée, je pense à Israël. Cela donne lieu à une certaine instabilité. Les gouvernements tiennent en place peu de temps, dépendant de la volonté des différents partis qui composent la coalition de poursuivre l'exercice.
On parlait d'un parlement-pizza ici, à cinq formations politiques. Comment peut-on imaginer la situation dans un parlement à sept, huit ou neuf formations politiques?
Bien sûr, cela occasionnerait un certain nombre de problèmes et il faut donc examiner la situation dans le cadre d'une étude portant sur une réforme électorale, et également une étude portant sur une réforme parlementaire. Il faudrait, dans un tel cas, composer avec plus de cinq formations politiques. Il faudrait pouvoir aménager les règlements de telle sorte qu'on puisse tenir compte de cette réalité.
Le leader parlementaire du gouvernement à la Chambre a souligné les problèmes qui découlent de l'intégration d'une composante proportionnelle dans un système uninominal à un tour comme, par exemple, en Allemagne. Dans ce cas, il y a création, à toutes fins utiles, de deux catégories de députés. Comment arrive-t-on à réconcilier ces deux catégories de députés, celles et ceux qui sont élus par une circonscription et celles et ceux qui sont élus à partir d'une liste fournie par un parti?
Cela nous amène à un autre problème sur lequel nous devrons éventuellement nous pencher, à savoir à qui sont redevables les députés dans un système de proportionnelle pure ou dans un système de représentation mixte. À qui sont redevables les députés? S'ils sont élus par la population d'une circonscription, nous avons tendance à dire qu'ils sont redevables aux citoyennes et aux citoyens qui les ont élus. S'ils sont élus à partir d'une liste fournie par le parti, sont-ils redevables à la population, sont-ils redevables au parti? Il y a là un problème. Comment allons-nous réussir à concilier tout cela?
Je vois un autre problème très sérieux avec le système de représentation proportionnelle pour les mêmes raisons qu'invoquait l'honorable député de Regina—Qu'Appelle tout à l'heure, quant à la possibilité, pour différentes régions et composantes d'une fédération, de faire entendre leur voix si le système électoral a tendance à uniformiser les attentes et les programmes à l'échelle d'un pays tout entier.
Comme le disait le député de Regina—Qu'Appelle: «Un vote à Terre-Neuve a la même importance qu'un vote en Colombie-Britannique, la même importance qu'un vote en Saskatchewan ou qu'un vote au Québec.» Évidemment, pour les membres d'une fédération qui ont des besoins et des attentes particulières et qui veulent les manifester par le biais du Parlement fédéral, cela peut poser un certain problème que d'avoir un système de représentation proportionnelle. Je fais référence, bien sûr, au cas bien particulier du Québec à l'intérieur de la fédération canadienne.
Comment pourrions-nous, si tant est que le système de représentation proportionnelle vise à donner une voix aux idées plus isolées, donner une voix, à travers un régime comme celui-là, à une province qui est, à toutes fins utiles, isolée à l'intérieur d'une fédération parce que seule province majoritairement francophone? Il est clair que pour nous, cela peut occasionner des problèmes non négligeables.
La motion que nous avons sous les yeux vise également l'étude d'autres formes de réforme électorale. Je ne voudrais pas que le gouvernement ferme la porte à cette idée avancée par le Nouveau Parti démocratique simplement parce qu'il ne partage pas l'idée selon laquelle il devrait y avoir un système de représentation proportionnelle.
Actuellement, il y a un système en place au Canada mais, nous le savons pertinemment, il souffre de certaines imperfections. Winston Churchill disait que la démocratie est le moins imparfait des systèmes politiques. Notre loi électorale, fut-elle démocratique, comporte certaines imperfections et il faut certainement y jeter un coup d'oeil.
La dernière élection nous aura démontré à quel point il y a des lacunes dans la loi électorale actuelle. Il faut apporter des correctifs à cette loi. S'il y a une chose sur laquelle devrait éventuellement se pencher un comité multipartite concernant la loi électorale, c'est, d'abord et avant tout, d'apporter des correctifs immédiats à la loi actuelle.
Qu'on pense simplement à la question de la nomination des directeurs de scrutin. Il s'est produit, lors de la dernière élection, plusieurs incidents, à travers tout le Canada, qui, manifestement, découlent directement de l'inexpérience et, dans certains cas, je dirais même de l'incompétence des directeurs de scrutin dans plusieurs circonscriptions. Pourquoi en est-il ainsi? Tout simplement parce que les directeurs de scrutin sont nommés non pas en vertu de leur compétence, mais en vertu de leur allégeance partisane.
Ce n'est pas une question qui fait frémir que les partis d'opposition. La Commission Lortie, que citait abondamment tout à l'heure le leader parlementaire du gouvernement, signalait, à la page 503 de son rapport, et je cite:
Dans tout système démocratique, il est essentiel que le processus électoral soit administré avec efficacité, et la loi électorale appliquée avec impartialité. Le personnel électoral doit être indépendant du gouvernement du jour et être à l'abri de toute influence partisane.
Cela ne vient pas de vulgaires députés de l'opposition. C'est dans le rapport de la Commission Lortie sur la réforme électorale et le financement des partis.
Je m'inspire également d'une déclaration faite par le directeur général des élections lui-même, M. Jean-Pierre Kingsley, lors de sa comparution devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, le 28 octobre 1999, où il disait, et je cite:
[...] quand je suis à l'étranger, je ne recommande pas qu'on s'inspire du modèle canadien quand vient le temps de nommer les directeurs de scrutins. Je dis toujours, comme je le fais au Canada, que le système actuel est dépassé.
Il y a certainement des aménagements à effectuer à la Loi électorale actuelle au niveau de la nomination des directeurs de scrutin et au niveau du financement des partis politiques pour ce qui est de plafonner les contributions et de la limitation des sources des contributions.
Je veux terminer en disant qu'il est inexact de penser ou de laisser entendre que tous les problèmes auxquels faisait référence la motion, que ce soit la régionalisation ou la question du désintérêt de la population à l'égard des institutions et du système politique, ne découlent que du système électoral.
On n'a qu'à penser à la question de l'éthique gouvernementale, au désintérêt de la population ou au dysfonctionnement de la fédération canadienne par rapport au phénomène de la régionalisation.
Je voudrais qu'on ne limite pas, qu'on ne restreigne pas ou qu'on ne tente pas de banaliser cette question en limitant le tout au simple fait de réformer la Loi électorale.
[Traduction]
Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai écouté très attentivement les commentaires provenant des deux côtés de la Chambre. La représentation proportionnelle dont on parle aujourd'hui est quelque chose de très précieux qui méritait qu'on en discute. Je suis heureuse que nous ayons tous pu nous exprimer sur ce sujet aujourd'hui.
Il y a cependant quelques points qui ont été mentionnés avec lesquels je ne suis pas d'accord. L'un d'eux vient d'un député du Bloc, qui a paraphrasé mon collègue au sein du caucus de l'Alliance en lui faisant dire que la liberté d'expression est une perte de temps. Ce n'est pas du tout cela. Mon collègue n'a rien dit de tel. Il a simplement demandé pourquoi on élevait les attentes de la Chambre s'il ne devait pas y avoir de vote sur la question.
Une autre chose qui m'a beaucoup choquée aujourd'hui est que l'on dise qu'on réclame des quotas. Je rejette toute forme de quotas. Je ne crois pas que des gens devraient accéder à la députation en raison de leur sexe, de leur handicap ou de quoi que ce soit de cette nature. Je pense que les personnes qui sont ici pour représenter la population ont été élues pour leur valeur, et cela devrait rester ainsi.
Certains commentaires faits aujourd'hui par le leader du gouvernement à la Chambre, à l'effet que l'on veuille imposer notre programme à toute une nation, m'ont aussi indignée. J'estime que c'est précisément ce dont on parle quand nous réclamons une réforme. Il y a des gens dans certaines parties du pays qui croient avec raison qu'ils se voient imposer le programme d'un parti. N'importe quel genre de changement parlementaire susceptible d'apporter une plus grande liberté au pays serait profitable à tous.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, je remercie ma collègue de ses commentaires. Je dois dire d'entrée de jeu que je suis plutôt favorable avec le dernier commentaire qu'elle vient de formuler quant aux mérites intrinsèques de la réforme parlementaire, de la réforme électorale ou, plus globalement, d'une réforme de nos institutions démocratiques et de ses effets pour le bien public en général.
J'aimerais préciser deux choses par rapport à mon commentaire sur la liberté d'expression. Pour le bénéfice de ma collègue de l'Alliance, j'ai bien compris que ce à quoi elle faisait référence, c'était tout simplement: «À quoi bon soumettre une question à la Chambre si cette dernière ne fait pas l'objet d'un vote?» J'ai déjà indiqué que j'étais d'accord avec ce point de vue.
Cela étant dit, je suis loin de penser, malgré tout, que ce que nous faisons ici aujourd'hui, contrairement à ce qu'elle a dit, est inutile et est une perte de temps. C'est sur ce sujet que j'ai exprimé mon point de vue, à savoir que si on pousse la logique à son aboutissement ultime, on pourrait en venir à dire que la liberté d'expression constitue une perte de temps.
Quant à la question des quotas, je ne sais pas si elle faisait référence à mon propre discours, mais je n'ai pas émis l'hypothèse selon laquelle il devrait y avoir des quotas pour les jeunes, les personnes handicapées, les minorités culturelles et les femmes, loin de là.
J'ai simplement dit que, dans un système de représentation proportionnelle, il serait loisible pour les formations politiques d'augmenter la représentation des femmes, des jeunes, des personnes handicapées ou des communautés culturelles, simplement en choisissant des personnes dont la compétence est tout aussi irréprochable, mais qui répondent également à ces autres critères, si je puis dire, en les plaçant sur leurs listes pour la représentation proportionnelle.
C'est tout ce à quoi je faisais référence, pour répondre à la question de ma collègue sur les quotas.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, je désire poser une question au député du Bloc québécois.
Si je me souviens bien, il y a longtemps, quand René Lévesque était premier ministre du Québec et chef du Parti québécois, il était partisan d'un système de représentation proportionnelle. Je suis certain que tous les députés du Bloc québécois partagent ce point de vue de M. Lévesque.
Mais est-ce que le whip du Bloc québécois favorise un modèle particulier comme système de représentation proportionnelle? C'est ma première question.
Ma deuxième question a trait à l'Australie. Ce pays a le même système pour la Chambre des communes, et il y a aussi un Sénat, lequel est élu par un système de représentation proportionnelle. Ce serait un autre moyen de le faire.
Aujourd'hui, nous avons une discussion sur le principe seulement du système de représentation proportionnelle. Mais plusieurs modèles existent, dont celui de l'Italie, de l'Allemagne, de l'Australie et de l'Angleterre. Il y a donc différents modèles.
Mais si nous avions un accord de principe à savoir que nous pourrions utiliser certains éléments de ce système ici, nous pourrions avoir une importante discussion sur le modèle qui pourrait s'appliquer au Canada. C'est pourquoi je pose ces questions à mon ami et collègue du Bloc québécois.
Est-ce qu'il favorise un modèle maintenant pour le système de représentation proportionnelle et que veut-il faire avec le Sénat, qui n'est pas élu? Est-ce que nous avons besoin d'une élection pour le Sénat? Qu'est-ce que nous pourrions faire avec l'autre institution?
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, je pense que mon collègue a tout à fait raison de souligner que le Parti québécois, et le Bloc québécois également lors de sont dernier congrès, ont appuyé l'idée d'une représentation proportionnelle dans un Québec indépendant. Il n'y a pas l'ombre d'un doute là-dessus.
Maintenant, j'ai bien expliqué plus tôt qu'à l'intérieur du régime fédéral actuel, pour les mêmes raisons qu'il invoquait lui-même au niveau de la protection des groupes plus petits ou moins importants, nous voyons un certain inconvénient—du moins, nous avons certaines appréhensions—par rapport à l'application d'un système de représentation proportionnelle à l'échelle du Canada.
J'ai bien sûr fait état d'autres préoccupations et réserves à l'égard du système de représentation proportionnelle mais, d'une façon générale, nous reconnaissons d'emblée qu'il y a des avantages inhérents à un tel système.
Cela étant dit, pour répondre à mon collègue de Regina—Qu'Appelle, j'en reviens au libellé de la motion, lequel nous invite à réfléchir et à étudier différents modes afin d'en arriver à définir ce qui serait le plus souhaitable pour le Canada et, de façon plus large, non seulement en ce qui a trait à la proportionnelle, mais quelle réforme électorale serait souhaitable pour le Canada.
En ce sens, je suis tout à fait d'accord avec l'idée de créer un tel comité ou, sinon, de confier un tel mandat au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. De façon générale, le Comité a ce mandat de voir à la réforme, le cas échéant, des institutions électorales au Canada.
Maintenant, concernant la question du Sénat, je dirai simplement que justement par rapport à ce désintérêt de la population canadienne à l'égard de la politique fédérale en général—un désintérêt croissant, comme on l'a vu lors des dernières élections fédérales puisque nous avons eu un taux de participation parmi les plus bas dans l'histoire électorale canadienne—, il y a bien sûr, je le disais tout à l'heure, toute cette transparence plutôt opaque, si je peux me permettre cette expression, du côté du gouvernement, cette mainmise du gouvernement sur les affaires de l'État. Il y a cette éthique du gouvernement qui est pour le moins discutable.
Je pense que le Sénat lui-même constitue un irritant perpétuel dans l'esprit et dans l'imaginaire collectif de la population canadienne et québécoise, qui ne voit pas l'utilité, dans un monde moderne, d'une telle institution archaïque. Si elle doit être réformée, je dis oui, qu'elle le soit. Mais comme le dit je crois le député de Regina—Qu'Appelle lui-même, je serais plutôt d'avis qu'on envisage peut-être son abolition.
Il est donc très clair que, dans le contexte actuel, cette institution ne favorise pas, telle qu'elle existe si je puis dire, l'intérêt des électeurs et des électrices à la politique fédérale. Ils ont plutôt l'impression qu'on perpétue là un vieux système qui n'est pas adapté aux nouvelles réalités, qui n'est pas adapté à une politique démocratique transparente et qui n'est pas adapté à une politique de probité publique sans tache.
Le Sénat est perçu, comme on le sait, par la plupart de nos concitoyennes et de nos concitoyens comme une Chambre à patronage.
[Traduction]
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je suis heureuse de partager mon temps de parole avec ce beau jeune homme, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough.
La motion à l'étude soulève le grave problème auquel fait face le régime politique canadien. Je félicite et remercie le Nouveau Parti démocratique d'avoir soulevé un débat à la Chambre sur cette question.
Notre régime politique et notre mode électoral sont en crise. C'est une funeste situation attribuable au cynisme et à l'apathie des électeurs. Je n'ai pas besoin de dire à la Chambre que les taux de participation des électeurs ont diminué. Tout le monde en parle. On semble profondément convaincu qu'il est peu important de voter. C'est ce que j'entends dans ma circonscription.
Ils soulignent qu'un grand nombre de députés ministériels d'arrière-ban doivent obéir aux ordres. Ils doivent voter comme on leur dit. Les gens ne croient plus au régime parlementaire.
L'unique examen du problème auquel fait face notre régime ne suffit pas si nous ne jetons pas un regard critique sur notre façon d'agir afin de déterminer ce qui est à l'origine de l'ombre qui plane au-dessus de notre démocratie. Le directeur général des élections n'a toujours pas rendu public le rapport concernant les élections générales tenues en 2000, mais il est clair que l'on manifeste partout au Canada une indifférence croissante à l'égard du régime politique.
Les Canadiens se tournent vers des groupes à vocation unique au lieu des partis politiques pour exprimer leurs préoccupations. Nous en sommes chaque jour témoins ici sur la Colline. Des gens viennent y protester parce qu'ils estiment qu'ils ne peuvent faire entendre leur voix à la Chambre des communes.
M. John Bryden: On y entend la vôtre.
Mme Elsie Wayne: Je suis ravie d'entendre ce commentaire. Le député libéral vient de dire que l'on entend ma voix. J'aimerais que les gens de Saint John le sachent.
Comme le souligne la motion, on constate la présence perturbante d'une aliénation régionale persistante. C'est triste. Il y a aujourd'hui à la Chambre des communes un régime à cinq partis. On ne voyait pas cela avant 1993. Cette situation a causé beaucoup de problèmes à la Chambre. Un gouvernement qui se préoccupe peu des différences régionales, et dont le Canada est celui des années 60 et 70, a créé une partie de ce problème.
Il y a aussi le problème de l'abus de la confiance et du pouvoir qui nous sont accordés en notre qualité de députés et qui ont été accordés aux députés d'en face, qui ont formé le gouvernement.
Les élections de l'automne dernier n'étaient absolument pas nécessaires. Le gouvernement a déclenché ces élections prématurément, non pas par conviction mais par opportunisme pour le Parti libéral. S'il l'a fait, au moment où l'opposition n'était pas préparée, c'était bien pour défendre des intérêts politiques et non des principes.
Selon Élections Canada, les dernières élections fédérales ont coûté plus de 200 millions de dollars aux contribuables canadiens. On peut aisément imaginer les énormes bienfaits que les Canadiens auraient pu retirer de ces 200 millions de dollars, s'ils avaient été dépensés autrement.
Prenons l'exemple de la crise persistante des soins de santé. Si on suppose un salaire moyen de 150 000 $ par médecin, ces 200 millions de dollars nous auraient permis d'embaucher 1 274 médecins de famille, ou au-delà de 5 000 infirmières. Nous aurions pu utiliser cet argent pour financer un programme d'études médicales de quatre ans à l'Université Dalhousie, pour plus de 6 000 étudiants.
On peut imaginer à quel point les Canadiens auraient été reconnaissants envers le gouvernement fédéral si, au lieu de gaspiller ces 200 millions de dollars, il les avait utilisés pour acheter 80 machines à imagerie par résonance magnétique, à raison de 2,5 millions de dollars l'unité. Dans ma circonscription, l'Hôpital Saint-Joseph et l'Hôpital régional de Saint John auraient été éternellement reconnaissants envers le gouvernement fédéral s'il avait acheté de l'équipement nouveau.
Le gouvernement aurait pu choisir de remettre directement cet argent aux contribuables canadiens. S'il voulait accorder une remise de la TPS sur le mazout, il aurait pu permettre à tous les Canadiens d'en bénéficier et pas seulement à ceux qui sont en prison. Il en aurait coûté 118 millions de dollars en tout.
Le gouvernement aurait pu accorder un crédit d'impôt de 500 $ aux bénévoles des services d'urgence comme nos courageux pompiers volontaires. La taxe d'accise sur le carburant diesel aurait pu être éliminée. L'industrie du camionnage est durement touchée par cette taxe, qui lui coûte précisément 200 millions de dollars, soit le même montant que ce qu'a dépensé le gouvernement pour flatter son ambition.
Il y a 15 minutes, on m'a remis un document qui indique que les fonctionnaires du gouvernement canadien prévoient des réductions considérables, dans les budgets de 2001-2002 et 2002-2003, des fonds affectés au projet d'envoi d'agents de la GRC et des forces policières au Kosovo. Cette situation est attribuable, encore une fois, au gaspillage d'argent. Ce n'est pas ce que veulent les Canadiens.
Je n'ai pas besoin de dire aux députés que beaucoup de nos concitoyens sont beaucoup moins fortunés que nous. Si nous avions affecté ces 200 millions de dollars à des banques alimentaires, ils auraient permis de fournir plus de 36 millions de repas ou 2 millions de paniers alimentaires pour des familles dans le besoin, ou encore de financer 610 banques alimentaires pendant une année complète. Les possibilités sont illimitées.
Il y a trois domaines qui me tiennent à coeur et où cet argent aurait pu être dépensé: une indemnisation complète des vétérans de la marine marchande, l'injection de capitaux dans un nouvel équipement pour nos forces armées et l'élaboration, une fois pour toutes, d'une politique nationale sur la construction navale.
Lorsque les Canadiens voient tout ce gaspillage, lorsqu'ils constatent que nous laissons passer tant d'occasions, faut-il s'étonner qu'ils perdent confiance dans leur Parlement? Je suis profondément navrée que nos concitoyens soient tellement indifférents au choix de nos gouvernants qu'ils refusent de voter. Nos dirigeants sont élus par défaut.
La motion du NPD donne à penser qu'une des solutions serait une forme de représentation proportionnelle, mais elle n'écarte pas d'autres réformes électorales. La porte est ouverte à d'autres changements.
Aux dernières élections, le programme du Parti progressiste conservateur soulignait l'importance de la réforme électorale et promettait l'étude d'un certain nombre de changements possibles, dont la représentation proportionnelle dans des élections avec un second tour.
Nous admettons aussi que bien des gens sont satisfaits du statu quo. Nous convenons qu'il faut un débat approfondi et ouvert avant que quelque changement que ce soit ne puisse être envisagé. Nous devons voir si notre société a envie d'apporter à nos principes fondamentaux de gouvernement les changements radicaux qui peuvent fort bien s'imposer pour corriger notre régime. La motion à l'étude va dans le sens de notre position et invite la Chambre à entreprendre une étude sérieuse de toutes les solutions qui peuvent mériter notre appui.
En m'inspirant du patrimoine du Parti progressiste conservateur, je dois mettre les députés en garde contre les dangers que nous courons en rouvrant des questions qui, au fond, sont d'ordre constitutionnel. Les détails cachent toujours des difficultés.
Des discussions de ce genre ont toujours entraîné autant d'enthousiasme que de discorde et je crois que tous les députés seront d'accord pour dire que, s'il y a une chose dont notre pays n'a pas besoin à l'heure actuelle, c'est de plus d'affrontements.
Mon parti a proposé de restaurer la valeur de notre Parlement pour que les Canadiens puissent avoir confiance en leur système gouvernemental. Il nous appartient de faire en sorte que les Canadiens puissent être fiers de leur gouvernement.
Dans le cadre de cette réforme, on doit entre autres redonner des pouvoirs aux Canadiens ainsi qu'aux représentants qu'ils envoient à Ottawa, et non seulement au premier ministre et à ceux qu'il choisit pour faire partie de son cabinet.
Nos voisins du Sud élisent un président, et je suis très reconnaissante aux Pères de notre Confédération d'avoir résisté à la tentation de structurer notre pays à leur image. De simples questions de compassion et de bon sens sont devenues des questions d'attribution.
Nous avons tous entendu parler de députés du parti au pouvoir qui ont voulu voter contre la ligne de leur parti mais qui ont subi des menaces jusqu'à ce qu'ils s'effondrent littéralement en larmes ou qu'ils soient forcés de changer de côté pour siéger à titre d'indépendants. Ce fut le cas dans les dossiers de la pornographie juvénile, de l'hépatite C et du conseiller en éthique.
Il est important que nous fassions l'éloge de ces quelques députés de l'autre côté qui ont eu le courage par le passé, et même très récemment pour certains, de contester une décision prise par leur gouvernement avec laquelle ils n'étaient pas d'accord.
En fin de compte, à titre de parlementaires, nous devons relever de nombreux défis variés. Nous devons donc également nous pencher sur toutes sortes d'options.
Je félicite à nouveau le Nouveau Parti démocratique et la députée de Halifax d'avoir soumis cette question à la Chambre. Quelle que soit la solution à notre problème, ce n'est que grâce à des discussions éclairées dans cette Chambre comme dans les familles canadiennes que nous la trouverons.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, je voudrais dire quelques mots au sujet de notre régime électoral comparativement aux régimes en vigueur dans les autres pays. J'ai ici une liste de 98 pays qui ont un système de représentation proportionnelle ou de représentation proportionnelle mixte à leur assemblée législative, s'ils ont un Parlement à chambre unique, ou à leur chambre basse, s'ils ont un système bicaméral comme nous avons au Canada.
Il y aussi des pays dont la chambre haute est dotée d'un système de représentation proportionnelle. L'Australie, par exemple, applique un système uninominal majoritaire à un tour à la chambre basse, mais un système de représentation proportionnelle au Sénat. La plupart des pays ont un système qui applique la représentation proportionnelle.
Qu'on me permette de prendre quelques instants pour nommer certains pays qui ont un système de représentation proportionnelle. Ce sont l'Australie, l'Autriche, la Belgique, le Brésil, la République tchèque, le Danemark, la Finlande, l'Allemagne, la Grèce, la Hongrie, l'Islande, l'Irlande, Israël, l'Italie, le Japon, le Mexique, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la Pologne, le Portugal, la Russie, l'Afrique du Sud, l'Espagne, la Suède, la Suisse, l'Ukraine et le Venezuela, pour n'en nommer que quelques-uns. Comme la représentation proportionnelle...
M. John Bryden: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je proteste. La Chambre tient un débat sur une question que le député de Regina—Qu'Appelle juge importante. Je ne vois pas en quoi le fait de lire une liste est pertinente au débat ou à la discussion que nous avons. Je suggère au député de poser sa question.
Le président suppléant (M. Bélair): Il ne s'agit pas vraiment d'un rappel au Règlement, mais je demande quand même au député de Regina—Qu'Appelle d'en venir à l'essentiel.
L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, c'est maintenant la période des questions et des observations. J'ai dit que j'avais une observation à présenter. Cela fait ressortir un besoin au Canada, alors qu'une centaine de pays ont une certaine représentation proportionnelle dans leur Chambre basse ou leur seule Chambre, s'ils ont un système monocaméral. D'autres pays, l'Australie par exemple, l'ont dans l'autre Chambre, soit au Sénat, où tous les parlementaires sont choisis par représentation proportionnelle.
Lorsqu'on examine ce que nous voulons, il est parfaitement pertinent de tirer des leçons de ce qui se fait dans d'autres pays du monde. Il se peut que nous n'ayons pas réponse à tout, au Canada. Il se peut que les Allemands ou les Scandinaves, par exemple, aient trouvé une solution aux problèmes que nous avons.
La députée de Saint John aimerait-elle commenter le fait que beaucoup d'autres pays ont une certaine représentation proportionnelle?
Mme Elsie Wayne: Monsieur le Président, je conviens que d'autres pays ont la représentation proportionnelle. Lorsque j'étais maire, on m'a demandé d'aller en Allemagne étudier le processus d'unification. Je m'y suis entretenue avec de nombreux représentants du gouvernement allemand. J'ai également eu l'occasion de faire cela à Saint-Pétersbourg, en Russie, de même que dans d'autres pays.
Il existe différentes formes de gouvernement mais, lorsque je vois à quel point sont déchirés certains de mes collègues ministériels pour lesquels j'ai le plus grand respect, j'estime qu'il faut modifier le système en place. Il est temps qu'un comité multipartite se penche là-dessus.
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, je suis un député ministériel qui a voté contre le gouvernement à au moins quatre reprises au sujet de mesures législatives importantes, et à d'innombrables reprises à propos de mesures d'initiative parlementaire. Je ne me sens pas déchiré. Je demeure, sauf erreur, un député estimé de ce côté-ci. En réalité, nous avons toujours, en tant que députés, la possibilité de voter comme nous le jugeons nécessaire, non pas seulement pour nos électeurs mais pour les enjeux tels que nous les comprenons.
J'aimerais que la députée de Saint John me dise une chose. Je n'ai pas vu souvent des députés de son parti voter réellement contre la position du parti à propos d'une mesure législative importante. Est-ce qu'elle souhaite que les votes libres se pratiquent uniquement du côté ministériel ou si elle souhaite qu'ils se pratiquement également de son côté?
Mme Elsie Wayne: Monsieur le Président, je suis heureuse que le député pose la question. En 1993, lorsque j'ai été élue et que Jean Charest dirigeait de notre parti, il m'a dit qu'il souhaitait que je reste. Je lui ai dit que j'étais prête à rester et j'ai ajouté que jamais il ne devait me dire comment voter, et il ne l'a jamais fait.
Depuis lors, de ce côté-ci de la Chambre, nous jouissons de la liberté de vote sur toutes les questions morales et importantes. Le député libéral a dit qu'il avait voté contre son gouvernement et qu'il siège toujours du côté ministériel, mais je me demande ce qu'il est advenu de ce pauvre Nunziata après qu'il eut voté contre le gouvernement. Au parti, on lui a dit d'aller siéger au bout de la salle, mais il n'a jamais pu voter de nouveau du côté des libéraux. Il était banni. Nous avons beaucoup de votes libres et nous continuerons d'en avoir parce que nous...
Le président suppléant (M. Bélair): Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough a la parole.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends part au débat sur ce qui est une question très importante, et pour faire écho aux propos de ma collègue, la toujours pertinente et loquace députée de Saint John, au Nouveau-Brunswick. Elle a fait remarquer que le NPD avait présenté une motion très pertinente sur un sujet qui intéresse beaucoup de nombreux Canadiens.
J'ai écouté avec intérêt les propos du leader du gouvernement à la Chambre. Il a dit que ce n'était pas quelque chose qu'il avait rencontré pendant la dernière campagne électorale et qu'il n'avait pas l'impression que la majorité des Canadiens débordaient d'enthousiasme à l'idée d'une réforme parlementaire, de quelque sorte qu'elle soit.
Toutefois, le résultat des élections souligne l'importance de la question. En effet, comme lors des élections précédentes, par exemple celle de 1997, nous nous sommes retrouvés avec un gouvernement majoritaire élu par 38 p. 100 de l'électorat canadien, ce qui nous a donné un gouvernement majoritaire, mais de façon disproportionnée.
M. John Bryden: Vous ne diriez pas ça si c'était un gouvernement conservateur, n'est-ce pas?
M. Peter McKay: Monsieur le Président, quand il était dans l'opposition, le député d'en face, comme la plupart des libéraux, ne cessait de vitupérer contre le gouvernement et de réclamer la représentation proportionnelle. Tant le député que le leader parlementaire du gouvernement défendaient cette position, somme toute plutôt changeante, et disaient qu'il fallait que les choses changent et qu'on adopte un nouveau système.
Maintenant, ils se tiennent cois. On leur donne aujourd'hui l'occasion de procéder à une véritable réforme parlementaire. Va-t-elle avoir lieu? Certainement pas. Vont-ils en parler du bout des lèvres? Vont-ils proposer différentes manières de moderniser le Parlement? Oui, bien sûr.
Ils vont parler aux Canadiens de l'urgence de mettre en place un système de scrutin électronique et ils vont essayer de leur faire croire qu'il s'agit d'une réforme électorale. C'est absolument insensé. Un tel système permettrait aux ministériels de ne pas assister aux délibérations de la Chambre et étoufferait davantage les voix de l'opposition.
Au cours des dernières sept à huit années de gouvernement libéral, nous avons vécu une période sans précédent pendant laquelle le gouvernement a fait tout ce qui était en son pouvoir pour museler l'opposition, pour supprimer les différentes manières dont l'opposition pouvait soulever des questions pertinentes, exprimer des objections importantes, que ce soit au sujet des mesures législatives du gouvernement, de ses orientations politiques ou de questions légitimes que l'opposition transmet de la part de ses électeurs. Nous avons été témoins d'une campagne systématique en vue d'émasculer l'opposition à cet égard.
Je dirais que la motion dont la Chambre est saisie nous a été présentée de façon tout à fait non-partisane. Elle mérite nos éloges car elle recommande de constituer un comité spécial multipartite chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle. En outre, elle ne limite le débat à la représentation proportionnelle. Elle est vaste, couvre toutes les possibilités et prie tous les députés à la Chambre de prendre part au débat, d'y apporter des informations additionnelles et d'enrichir la proposition. Nous savons que c'est bien la dernière chose que souhaite le gouvernement et que c'est bien la dernière chose que nous verrons. Nous ne le verrons pas pour la bonne et simple raison, et le député d'en face peut bien hurler de vertueuse indignation, que ce n'est pas dans l'intérêt du gouvernement de transformer un système qui sert ses intérêts. Il n'est certes pas disposé à instaurer des changements qui nuiront à sa capacité de se faire réélire.
Comme on a pu le constater dans le passé, étant donné le faible taux de présence aux urnes et le faible appui électoral, le gouvernement est nullement intéressé à changer un système qui pourrait perdurer ou à adopter des changements qui pourraient l'empêcher d'être reporté au pouvoir. Ce n'est pas dans l'intérêt du gouvernement en place.
Durant le débat, on pourrait être tentés de parler uniquement de représentation proportionnelle, mais je ne crois pas que ce soit le véritable objectif de la motion. Elle mentionne la représentation proportionnelle, mais elle laisse la porte ouverte à l'étude d'autres moyens de réforme électorale.
S'éloigner du système traditionnel de partis au Parlement constitue un moyen pour la Chambre d'avoir une plus grande pertinence aux yeux des Canadiens. Accorder de l'autonomie à chaque député constitue également un élément très important du débat.
La confiance qu'ont les Canadiens dans leurs représentants est au coeur même de cette question et au coeur même des progrès qui devraient être accomplis tout au long du débat actuel et des débats à venir, si cette motion devait être renvoyée à un comité.
Il importe que les Canadiens saisissent le rôle primordial que jouent les comités. Les comités travaillent parfois loin des médias, sans recourir à des arguments sectaires comme ceux que nous avons tous tendance à adopter à la Chambre. Les comités offrent une occasion d'accomplir vraiment une rude besogne. Ils permettent d'entendre des témoins impartiaux qui s'intéressent à des questions comme celle-ci.
Les travaux des comités sont cruciaux pour le fonctionnement et le succès du Parlement. Il est déplorable que la population n'ait pas accès à tous ces travaux, mais il est important qu'ils s'effectuent dans ce contexte, dans cette tribune où il est possible de discuter de vraies propositions, sans l'esprit de parti parfois empoisonnant qui persiste dans les débats publics.
On a mentionné également qu'une grande partie du pouvoir qu'ont perdu les députés a été récupérée par des groupes de pression, par des groupes d'intérêt qui adoptent une position particulière sur une question précise. C'est très bien. C'est un système naturel qui a évolué également.
Toutefois, les groupes de pression qui ont accès ou qui s'organisent pour avoir accès au gouvernement deviennent un peu plus inquiétants. Lorsque la concentration du pouvoir est de plus en plus forte, comme nous l'avons vu dans le gouvernement libéral, dans le CPM et dans l'entourage du premier ministre, des gens nommés par favoritisme, ce pouvoir devient antidémocratique. Là où cela devient le plus inquiétant, c'est lorsque des gens se servent de leur accès privilégié, lorsqu'ils peuvent provoquer ou infléchir des décisions en raison d'un lien personnel ou antérieur, que ce soit à titre d'ex-ministres ou autrement. C'est là que la démocratie commence à ne plus jouer son rôle. La situation se détériore et les problèmes commencent lorsque les députés de cet endroit n'ont plus l'impression de pouvoir participer de manière légitime à notre système.
Ici, à la Chambre des Communes, le gouvernement a maintes et maintes fois fait des annonces publiques, annoncé des changements de cap et fait des déclarations publiques importantes à la tribune de la presse, de l'autre côté de la rue Wellington, au lieu de le faire ici devant les Canadiens et de respecter ainsi non seulement ses propres députés, mais aussi ceux de l'opposition qui assument le même fardeau, et je n'emploie pas ici le mot fardeau dans sa connotation négative, qui assument la même responsabilité incombant à ceux qui ont été élus par les Canadiens. Pareilles annonces ne sont pas faites à cet endroit. Elles sont plus souvent qu'autrement faites de l'autre côté de la rue, devant la presse, ou alors, elles font l'objet de fuites. Des ballons d'essai sont lancés avant que l'annonce officielle soit faite publiquement. Il faut mettre un terme à cette pratique.
Je reviens à la question des comités. Dernièrement, le gouvernement a eu l'occasion d'accroître les pouvoirs des comités et la confiance qu'ils inspirent en autorisant l'élection de leurs présidents. Encore une fois, cela ne serait pas compatible avec la toute-puissance que le CPM exerce à l'égard des comités, en contrôlant leur ordre du jour et leur composition. Un représentant du CPM ne voudrait pas d'un président indésirable qui pourrait s'écarter de la ligne de pensée du CPM sur un sujet donné. Le gouvernement a laissé filer cette occasion, prouvant encore une fois que j'ai raison de dire que tous ces propos au sujet d'une réforme parlementaire ne sont que des paroles en l'air de la part du gouvernement. Il n'a vraiment aucune intention de réformer cet endroit parce que cela minerait la concentration sans cesse croissante du pouvoir au cabinet du premier ministre.
On n'a pas à me croire sur parole. On n'a pas à croire aucun député sur parole. L'histoire le prouvera. Les professeurs de sciences politiques ont dit maintes et maintes fois que c'est effectivement ce qui se passe dans notre pays. C'est un fait bien documenté.
Je sais que mon temps de parole est limité. Encore une fois, nous avons ici une belle occasion de prendre part à un débat très utile pour discuter de diverses idées concernant la réforme parlementaire et la réforme électorale. J'associe les deux parce que, si nous avons un système dans lequel les Canadiens ont confiance, cela donne encore plus de légitimité au Parlement.
Le député de Regina—Qu'Appelle a énuméré tous les pays, plus d'une centaine, qui ont adopté un système de représentation proportionnelle ou un système semblable. Les Canadiens ont ici la chance d'en apprendre davantage au sujet d'un système qui est parfois perçu comme étant très compliqué, mais qui ne l'est pas. Il y a des systèmes de ce genre qui fonctionnent très bien dans des pays comme l'Australie et l'Irlande, et dans différents pays dont la tradition démocratique est beaucoup plus longue que la nôtre.
Je suis heureux d'avoir la chance de participer à ce débat, mais je n'apprécie pas le chahut incessant qui vient d'en face. Encore une fois, ce débat donne à tous les députés de la Chambre l'occasion de dire ce qu'ils ont à dire sur un sujet aussi important que celui-là.
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai suivi le débat avec grand intérêt. Je me suis penché sur la question à l'occasion, peut-être pas autant que le député de Regina—Qu'Appelle, mais je m'y suis beaucoup intéressé.
Je voudrais poser une question au député. Vous avez déclaré que les libéraux avaient formé un gouvernement avec 38 p. 100 des votes. Là encore, le vote était régionalisé. En quoi la représentation proportionnelle changerait-elle les choses pour mes électeurs, alors que nous n'avons que deux ministériels élus dans la province et 16 ou 14 de plus dans l'ouest? Si la représentation proportionnelle devait être instaurée, il n'y aurait toujours pas de député du parti au pouvoir pour défendre les électeurs dont la situation se détériore à grande vitesse. La représentation proportionnelle pourrait changer la composition de la Chambre, mais, dans un pays aussi vaste que le Canada, je ne pense pas que nous réussirions à amener la Chambre à traiter de questions régionales.
Aujourd'hui, la Saskatchewan compte deux députés libéraux. Pas une seule fois, et j'en suis à mon second mandat, il ne m'a été donné d'entendre un député de ce côté-là de la Chambre préconiser, pour le secteur de l'agriculture, une véritable réforme qui puisse bénéficier aux Canadiens de l'Ouest. Prenons l'exemple des élections de novembre dernier. Selon le député, en quoi la représentation proportionnelle pourrait-elle rassurer mes électeurs et les convaincre que leur avis sera pris en compte par le gouvernement?
Le président suppléant (M. Bélair): Avant de donner la parole au député, je rappelle aux intervenants qu'ils doivent s'adresser à la présidence.
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, pour répondre directement à la question, je pense que le député de Souris—Moose Mountain a soulevé deux questions. Il est question de savoir s'il y aurait une plus forte opposition ou si les députés élus au gouvernement dans le cadre du système actuel auraient davantage leur mot à dire au sujet des questions régionales.
Je pense qu'il est juste de dire qu'il y aura toujours des questions régionales. Je suis très fier de la province d'où je viens, de la région du nord de la Nouvelle-Écosse appelée Pictou—Antigonish—Guysborough, et de tout ce qu'elle a accompli et va accomplir. À l'instar de notre collègue, je soulève ces questions au nom de mes électeurs.
Il y a deux questions distinctes qui se posent dans le cas présent. Il y a d'abord la possibilité d'avoir une voix au gouvernement; la capacité de chaque député de soulever des questions régionales ou des questions d'importance également au niveau national est une chose tout à fait différente. La dynamique qu'on retrouve au sein du gouvernement actuel ne se prête pas à cela. Ce n'est pas encouragé. L'individualisme est rejeté.
L'autre question quant à savoir en quoi cela entraînerait un changement dans la dynamique actuelle ou la composition de la Chambre, d'une part, dans un système de représentation proportionnelle, nous n'aurions pas un gouvernement majoritaire. D'autre part, je prétends qu'il y aurait une meilleure représentation dans le cadre de ce système pour ce qui est d'exprimer vraiment la volonté du peuple. Par exemple, si nous avions non pas un système uninominal majoritaire à un tour mais des scrutins de ballottage, nous n'aurions pas des anomalies comme celle où des députés sont élus avec une si faible proportion des voix exprimées. Je pense que c'est la façon dont la dynamique pourrait différer avec un tel système.
Je remercie le député de sa question. Je sais qu'il s'intéresse de très près à cette question également.
[Français]
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, c'est toujours très intéressant lorsqu'on apporte des idées nouvelles comme celle-ci. Cependant, le danger, ce sont les dérives. À partir d'un bon naturel, d'une volonté «politically correct», on peut en arriver à des dérives.
J'ai milité dans un parti qui parlait de la proportionnelle. De fil en aiguille, on s'est retrouvé, dans la proportionnelle, avec le désir des minorités de toutes sortes d'avoir leurs voix dans les parlements, telles que les minorités visibles et invisibles, les femmes, les dissidents sexuels. Cela finit de telle sorte qu'une personne aurait une possibilité de quatre votes à la fois, soit un de par sa citoyenneté et également en vertu de ses dissidences. N'est-ce pas là un danger?
[Traduction]
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, il ne s'agit pas de s'empresser de prendre une décision au sujet de la modification de notre système, à mon avis. Personne ne prône cela. Même la motionnaire a dit que nous devions procéder de façon tout à fait pragmatique et pratique, en demandant à un comité multipartite d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle possibles ou d'autres modifications qu'on pourrait apporter à notre système électoral.
Je reconnais que les droits des minorités sont toujours importants. Cela fait tout à fait partie de ce débat. Je suis encouragé par l'intérêt manifesté par ceux qui participent au débat aujourd'hui.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je suis ravi que le député de Pictou—Antigonish—Guysborough soit encouragé par le niveau du débat. Je le suis aussi dans une certaine mesure par le niveau du débat du côté des conservateurs, mais non pas par celui du côté d'autres partis à la Chambre. À mon avis, les libéraux sont trop sur la défensive à l'égard de cette question et font preuve d'un manque d'ouverture et de curiosité quant à la façon de s'attaquer à certains problèmes, reconnus de tous, de notre système électoral.
Monsieur le Président, je partagerai mon temps avec la députée de Winnipeg-Centre-Nord.
Je suis déçu de l'attitude défensive manifestée par les libéraux à l'égard de cette motion. Si nous avons décidé que cette motion ne ferait pas l'objet d'un vote, c'est pour une raison. Nous avons pensé que ce serait peut-être une occasion d'avoir un débat neutre dans cet endroit. Tout comme des arguments légitimes peuvent être faits en faveur de l'introduction d'une dose de représentation proportionnelle dans notre système, la représentation proportionnelle telle qu'appliquée dans de nombreux pays peut faire l'objet de critiques légitimes.
Il aurait été bon d'avoir eu un débat neutre à ce sujet. Nous avons voulu aller au-delà des coups bas parfois trop facilement échangés à la Chambre. Je dois dire que certains députés qui, je le reconnais, relèvent parfois le niveau des débats, m'ont déçu aujourd'hui par leur volonté de donner un ton partisan à ce débat.
Quoi qu'il en soit, je relève l'observation faite par le député de Souris—Moose Mountain. Il a tenté d'engager le débat et a posé une bonne question au député de Pictou—Antigonish—Guysborough. Il a dit que même s'il y avait plus de députés ministériels provenant de l'ouest du pays, il n'était pas convaincu qu'ils diraient ce qu'il voudrait entendre.
Sauf qu'il oublie une chose. Il oublie que les régions ont des points de vue divers. Le problème dans notre système actuel, de la façon dont il a évolué, est qu'il donne l'impression que les régions n'ont qu'un seul point de vue: en Alberta, c'est celui de l'Alliance; en Ontario, celui des libéraux; au Québec, au cours des deux dernières législatures, celui du Bloc. Et les exemples ne manquent pas des fois où il semble qu'une région ne soit représentée que par un seul point de vue au Parlement.
La question du député de Souris—Moose Mountain illustre bien le problème. Mon collègue prétend qu'il n'existe qu'un seul point de vue dans l'Ouest. Je trouve déplaisante cette manie qu'a son parti de prétendre parfois parler au nom de tout l'ouest du pays, comme le faisaient jadis les conservateurs de l'Ouest. Même lorsqu'il y avait trois gouvernements néo-démocrates et de nombreux députés du NPD dans l'Ouest du Canada, les représentants de la droite dans les provinces de l'Ouest avaient cette prétention de parler au nom des habitants de l'Ouest. En vérité, ils représentent un point de vue dans l'Ouest, mais ils ne parlent pas au nom de tous les habitants de cette partie du pays.
Ce que nous voulons, c'est un Parlement où la diversité des points de vue qui existe à l'intérieur même de chaque région se reflète ici, à la Chambre des communes, et pas uniquement pour donner un tableau plus précis de la situation, mais parce que cela peut mener, à notre avis, à un Parlement et à une culture politique moins porteurs de dissensions et davantage porteurs d'unité nationale. Cela fermerait certaines portes aux partis politiques, qui pourraient moins jouer sur les sentiments, l'hostilité et les griefs, justifiés ou pas, des régions les unes envers les autres afin de se faire du capital politique dans une région, mais souvent au détriment d'un parti politique plus national.
À une époque où nous parlons d'unité nationale—je pourrais même dire que nous en parlons tout le temps—, à une époque où l'Ouest se sent laissée pour compte et, évidemment, où le séparatisme fait encore la manchette, il est important d'envisager l'examen des moyens de procéder à une réforme électorale afin d'atténuer les problèmes que j'ai mentionnés. C'est tout ce que nous demandons dans la motion. Nous pourrions nous défaire, comme j'ai tenté de l'expliquer plus tôt dans une période d'observation, d'un système politique qui trompe les Canadiens sur la nature hétérogène de la culture politique de leur région en les amenant à croire que cette culture est entièrement homogène.
Je dirai, un peu à la blague, que j'aimerais que toutes les provinces soient comme celles qui ont une culture politique plus diversifiée et élisent des députés de tous les partis. Je pense ici à ma province, le Manitoba, qui fait cela avec plus de constance que les autres. Il y a d'autres provinces, comme la Nouvelle-Écosse, qui font cela aussi, quoiqu'il y arrive qu'un parti soit rayé de la carte, comme l'a été le Parti libéral en 1997.
Ce que je veux faire valoir, sans m'arrêter sur des vétilles en déterminant qui a été élu et quand, c'est que nous avons un problème grave au Canada à cause de la polarisation régionale de la vie politique, de la polarisation régionale de notre Parlement.
La motion à l'étude propose à la Chambre de faire une chose que nous pourrions faire s'il y avait un consensus, mais il est évident qu'il n'y en a pas. Nous avons fait preuve de sagesse à deux égards. Nous avons jugé avec raison que si nous proposions une motion donnant lieu à un vote, cette motion serait défaite parce que le gouvernement ne s'intéresse pas à ce qu'elle propose. Nous voulions que la motion ne donne pas lieu à un vote à ce moment-ci parce que, s'il y avait consensus, nous procéderions évidemment par consensus ou consentement unanime. Nous voulions souligner que nous devrions avoir un débat dans un contexte impartial, dans l'intérêt du pays et non du Parti libéral.
Je ne cherche pas à justifier des propos tendancieux. Je vois sourire des députés libéraux. Au fond, ils répètent ce que le premier ministre m'a dit l'an dernier quand je lui ai posé une question sur cette même idée. Je lui ai demandé s'il envisageait accepter qu'un comité multipartite fût constitué pour examiner la représentation constitutionnelle. Il a répondu: «Le NPD est toujours perdant, ce n'est donc pas étonnant qu'il veut changer de système.»
Oui, il est juste de dire que nous sommes toujours perdants et les libéraux, toujours gagnants. Ils pensent l'être et la plupart du temps, ils ont raison. Leur parti politique connaît beaucoup de succès. Un parti politique ayant autant de responsabilités a bien sûr l'obligation de se demander de temps à autre, une journée comme aujourd'hui par exemple où on discute d'une motion ne faisant pas l'objet d'un vote, s'il y a quoi que ce soit qui pourrait être dans l'intérêt du pays sans être dans l'intérêt à court ou à long terme du Parti libéral.
Si les libéraux s'intéressent à toute la question des gouvernements majoritaires et minoritaires, ce qui est un autre sujet de discussion, je ne suis pas certain que nous aurions toujours des gouvernements minoritaires quel que soit le système choisi. Certaines études ont démontré que même avec un élément de représentation proportionnelle, on pourrait tout de même en arriver à des gouvernements majoritaires, mais ces majorités seraient plus représentatives. Les Canadiens sauraient que les gens qui font partie de ce caucus majoritaire viennent d'un peu partout au pays et non pas uniquement d'une seule région.
Si le blocage majoritaire-minoritaire est un blocage libéral, il suffit de le soumettre à un comité multipartite qui étudierait des façons de permettre de régler cette préoccupation au lieu de rejeter du revers de la main l'idée que cela pourrait être une bonne chose.
Je suis très déçu de la réponse du gouvernement aujourd'hui et de celle de certains députés. Cependant, en fin de compte, c'est en gros le genre de débat que nous espérions obtenir.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je remercie mon honorable collègue, qui siège depuis longtemps à la Chambre des communes. Il préconise depuis toujours des réformes comme celle-ci d'une manière très impartiale. Il ne dit pas que cela sera avantageux uniquement pour notre parti ou que cela réduira le nombre des députés d'un autre parti. Il dit essentiellement que ce débat s'impose pour le bien de tous les Canadiens.
Je voudrais qu'il me dise comment nous pouvons traduire le débat d'aujourd'hui dans la vie des Canadiens moyens pour qu'ils se sentent concernés et fassent pression sur leurs députés afin que l'on discute de cette question plus tard.
M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, pour commencer, ce serait bien si les médias couvraient ce débat plus à fond. Ils le font peut-être vaguement, anonymement.
On nous reproche parfois de nous contenter de colporter des ragots ou de nous livrer à des activités partisanes à la Chambre. Quand un parti politique propose une motion dans le but de susciter à la Chambre un débat constructif et intelligent sur un sujet qui suscite ailleurs dans le pays des discussions intelligentes et impartiales, et dans la mesure où nous y avons réussi, mais pas entièrement, j'espère que c'est le genre de débat qui serait couvert par les médias.
C'est un sujet de préoccupation qui transcende tous les partis politiques. Je le fais remarquer plus spécialement au député de North Vancouver qui est intervenu au nom de l'Alliance canadienne. On me dit qu'il n'était pas à son meilleur quand il a participé au débat.
C'est le genre de question qui unit quelqu'un de la gauche, comme Judy Rebick, et quelqu'un de droite, comme Walter Robinson, ainsi que la National Citizens Coalition. Je suppose que le seul groupe qui ne s'intéresse pas à cette question, ou du moins cela semble être le cas aujourd'hui, c'est celui qui est censé être au centre, soit les libéraux. Je dis que c'est le groupe qui est censé être au centre parce que, en réalité, les libéraux peuvent être considérés comme un parti de droite sur la plupart des questions. Ils se voient comme ayant l'équivalent moderne du droit divin des rois de gouverner. Cette perception qu'ils ont est très illégitime puisqu'ils obtiennent très rarement une majorité des voix aux élections fédérales.
En réponse à la question, nous devons aller parler aux Canadiens de la nécessité d'une réforme électorale et d'un système de représentation proportionnelle afin que le vote de chacun compte. Cela ne serait peut-être pas toujours avantageux pour le NPD. Nous ne devrions pas faire de telles suppositions. Il y a des gens qui aimeraient voter pour le Parti vert, par exemple. Ils votent pour le NPD dans les circonscriptions où le candidat néo-démocrate a des chances d'être élu, parce qu'ils voient le NPD comme un parti qui s'intéresse plus à l'environnement que les autres partis. Cependant, s'ils pouvaient voter pour le Parti vert et avoir une chance d'élire un député de ce parti à la Chambre des communes dans un système de représentation proportionnelle, cela pourrait nuire aux néo-démocrates.
Nous serons tous gagnants ou perdants d'une façon ou d'une autre selon les diverses permutations et combinaisons qui pourront ressortir chaque fois qu'il y aura des élections générales selon un système de représentation proportionnelle. Cependant, la vraie gagnante, si nous faisons les choses comme il se doit, sera la démocratie canadienne.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député de Winnipeg—Transcona pour ce qui est chez lui, à mon avis, un trait caractéristique, soit demander à tous les députés de transcender les motifs partisans à court terme afin de réfléchir à l'objectif de cet exercice et de ce débat.
Je sais que le député de Vancouver-Nord a consacré la moitié de son temps de parole à haranguer le NPD parce que nous n'avons pas présenté une motion pouvant être mise aux voix. Dans le passé, nous avons présenté des motions qui pouvaient l'être. En réalité, nous avons parfois réussi à amener le gouvernement à appuyer certaines de nos motions pouvant faire l'objet d'un vote. Par exemple, nous avons présenté des motions visant à interdire l'exportation de grandes quantités d'eau et à faire progresser la taxe Tobin. Ces motions ont permis de recueillir de l'appui, mais elles ne permettent pas nécessairement d'atteindre l'objectif visé. Nous réussissons à faire appuyer la motion, mais l'exercice a pour objet d'amener les parlementaires à faire ce qu'il faut pour le Canada.
Nous avons aujourd'hui une occasion d'aller dans ce sens et de travailler ensemble, non seulement les partis d'opposition s'opposant au gouvernement, mais bien, faut-il l'espérer, tous les parlementaires qui comprennent que nous faisons face à une crise liée au faible taux de participation des électeurs et à la grande régionalisation de notre politique. Il est très décevant de constater ce qui suit: le parti de l'Alliance dit appuyer la notion de la représentation proportionnelle, mais qu'a fait son porte-parole? Il a consacré la moitié de son temps de parole à haranguer le NPD pour des choses qui n'ont rien à voir avec cette question.
J'ai une brève question pour le député de Winnipeg—Transcona. Elle découle des propos d'un scientifique politique canadien bien connu du nom de Henry Milner, qui a dit: Se plaindre de la polarisation est une chose; insister pour le maintien des institutions mêmes qui en sont à l'origine en est une autre.
Le député pourrait-il préciser en quoi un régime de représentation proportionnelle pourrait réduire le genre de polarisation dont nous avons été témoins au cours des dernières années, polarisation qui contribue sûrement au déchirement du pays et qui nous empêche de progresser?
M. Bill Blaikie: Monsieur le Président, si nous intégrions une certaine représentation proportionnelle à notre système électoral de façon à ce que les régions soient mieux représentées au sein de tous les caucus et que les partis politiques soient moins tentés de jouer la carte du régionalisme, le pays serait alors beaucoup plus porté vers l'unité nationale plutôt que vers l'hostilité nationale ou inter-régionale.
Je tiens seulement à appuyer le sentiment exprimé par la chef de mon parti à l'égard du député de North Vancouver. Je sais qu'il y a des sympathisants chez l'Alliance canadienne. Je me suis entretenu avec certains députés alliancistes. J'ai cru qu'il s'agissait du genre de débat qui les réjouirait sur le plan de la réforme démocratique. Ce débat aurait été l'occasion pour eux de présenter certaines de leurs suggestions. Nous observons plutôt une performance comme celle qu'a donnée le député de North Vancouver.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureuse de pouvoir prendre la parole après mon collègue de Winnipeg—Transcona à propos de cette très sérieuse proposition dont est saisi le Parlement. Je partage ses propos et ses préoccupations à l'égard du mépris avec lequel le Parti libéral et le caucus de l'Alliance ont traité cette motion.
Le député de Winnipeg—Transcona est le mieux placé pour signaler le problème que cela créé pour l'avenir de la Chambre et de la démocratie au pays. Le député siège à la Chambre depuis près de 22 ans. Cse années de service lui donnent certes le droit de s'exprimer avec vigueur. Tous les députés doivent l'écouter.
On pourrait penser qu'après avoir représenté des électeurs et avoir siégé dans cette enceinte pendant 22 ans, un député serait coincé dans ses habitudes, attaché à la tradition et réticent à examiner des approches nouvelles et novatrices. Eh bien, ce n'est pas toujours le cas. En fait, c'est le contraire en ce qui concerne le député de Winnipeg—Transcona qui, tout au long de ces années, a respecté les traditions du Parlement tout en luttant pour l'innovation et l'amélioration.
On peut en dire autant du député de Regina—Qu'Appelle, autre vieux routier à la Chambre qui prône depuis des années une réforme électorale et la représentation proportionnelle à la Chambre des communes et partout où c'est possible au pays. Ce devrait être une leçon et un modèle pour les députés ministériels, du moins ceux qui siègent à la Chambre des communes depuis de nombreuses années et qui devraient être conscients de l'importance de sortir des sentiers battus et de chercher à innover.
Ce n'est pas le cas de l'Alliance. Le dernier venu des partis sur la scène politique semble être le plus réticent au changement et le plus opposé à toute forme de débat et de dialogue entre les parlementaires des divers partis.
J'espère que tous les députés apprécieront le sérieux de cette motion et y verront un moyen, pour les députés, de remédier à un très sérieux problème qui sévit actuellement au Canada. N'oublions pas que cette motion propose une solution à un problème avec lequel la société canadienne est aux prises. La motion ne propose pas de solution précise, elle invite plutôt les parlementaires à examiner le problème et à proposer leurs solutions.
Le problème est très simple. Tous les députés butent chaque jour sur ce problème; il s'agit du sentiment d'impuissance et de désespoir qu'éprouvent les Canadiens vis-à-vis notre système politique et l'économie mondiale en mutation. Si nous prenons le temps de réfléchir à l'apathie, au cynisme, au doute et au désespoir que les Canadiens éprouvent à l'égard du système politique et à l'égard de certains politiciens, cela ne justifie-t-il pas que nous examinions des modifications au système électoral?
Les députés du Nouveau Parti démocratique ne sont pas les seuls à proposer ce changement. La motion n'a pas été présentée dans l'intérêt du NPD, mais, comme le disait mon collègue, pour assurer l'avenir de notre pays et la santé de la démocratie. Je veux citer un extrait du numéro du 18 janvier 2001 d'Opinion Canada, ouvrage publié par un organisme de renom, le Centre de recherche et d'information sur le Canada. Il est dit clairement que:
Il existe un profond malaise politique au Canada. Il a pris graduellement de l'ampleur. Il présente divers signes qui, pris isolément, sont négligeables, mais qui, dans leur ensemble, font ressortir une réalité déconcertante.
Il faudrait certes prendre au sérieux cette description fidèle d'un malaise politique au Canada. Toutes les questions et toutes les propositions avancées pour affronter ce malaise devraient être prises au sérieux, et non écartées du revers de la main, comme les députés du Parti libéral ont tendance à le faire aujourd'hui.
Mes collègues nous ont dit pourquoi nous sommes saisis de la motion, et beaucoup de députés ont dit pourquoi il faut examiner le régime de représentation proportionnelle, compte tenu de ce malaise politique et de l'apathie des électeurs. Des députés ont dit qu'il faut l'examiner en raison des clivages régionaux. Il faudrait remédier au plus tôt à l'évolution aussi dévastatrice et désastreuse de ce malaise.
Il existe une autre raison pour laquelle il faudrait examiner le régime de représentation proportionnelle. Je voudrais me reporter à un article de Denis Pilon paru dans le numéro de novembre-décembre 2000 d'une revue de gauche intitulée Canadian Dimension. M. Pilon y affirme que le Canada a besoin d'un régime de représentation proportionnelle, et non seulement pour tenir compte des clivages et du fait que notre système électoral est devenu foncièrement mauvais lorsqu'il s'agit de répondre aux voeux de la majorité des Canadiens. Il dit également que nous devons envisager le régime de représentation proportionnelle comme moyen de remédier au fait que notre système électoral est médiatisé et vulnérable à la manipulation. Il parle de la politique des médias et de la manipulation, axée sur l'argent. Il mentionne quelques-unes des réformes structurelles qui s'imposent à long terme dans le financement des campagnes électorales, dans les contacts avec les électeurs et dans la communication politique, qui ont rendu la politique canadienne plus médiatisée que jamais auparavant et plus vulnérable à la manipulation. Il parle aussi des outils de publicité commerciale.
C'est une autre raison pour laquelle nous devons étudier l'idée de la représentation proportionnelle. C'est une justification de plus de la nécessité de lancer la discussion sur cette question des plus importantes.
Dans cet article, Denis Pilon a aussi suggéré ce qui suit:
Il est clair que nous devons adopter une forme de représentation proportionnelle. Ce faisant, nous ouvrirons l'espace démocratique à des idées nouvelles, à des modes de représentation nouveaux et même à des partis nouveaux, si c'est ce que veulent les Canadiens. Par ailleurs, la représentation proportionnelle contribuera à l'élaboration d'un processus démocratique d'un genre différent. Les résultats électoraux seront plus transparents et moins susceptibles d'être manipulés et de donner lieu au sensationnalisme. Les gouvernements majoritaires résulteront probablement de la coalition de plusieurs partis et les médias devront commenter leurs délibérations et leurs négociations de façon moins superficielle. Bien sûr, l'argent continuera à avoir une influence sur le processus politique, mais il devra travailler plus longtemps et plus fort. La représentation proportionnelle donnera une plus grande marge de manoeuvre pour résister à ses machinations.
C'est une autre raison très importante pour que cherchions à complètement remanier notre système électoral et que nous envisagions d'adopter le mode de représentation proportionnelle ou une combinaison de ce dernier et de notre système actuel de scrutin majoritaire uninominal à un tour.
Le malaise dont j'ai parlé est grave. Il n'est pas dû uniquement à notre système électoral et à la manière dont nous élisons les députés, bien que notre système actuel alimente le cynisme croissant et l'apathie des Canadiens.
Tout aussi importante est la manière dont notre système électoral actuel dessert nos concitoyens. Plusieurs députés ont parlé, avant et pendant le débat, du grave désenchantement de nos concitoyens à l'égard de la façon dont les élections se passent actuellement.
Plusieurs ont parlé des conséquences néfastes des listes électorales permanentes qui empêchent les Canadiens à faible revenu, les étudiants et les personnes qui doivent déménager régulièrement, d'exercer leurs droits et leurs libertés démocratiques.
Mon collègue de Palliser a décrit l'effet des listes électorales permanentes sur les Canadiens comme étant de la discrimination pure et simple. Venant d'une circonscription où plus de 40 p. 100 des personnes vivent sous le seuil de la pauvreté, je dois dire que je suis tout à fait de son avis. Si le temps me le permettait, je pourrais décrire en grand détail ce que ressentaient ces gens parce qu'ils ne figuraient pas sur la liste électorale, les difficultés qu'ils ont éprouvées à se faire inscrire, et leur sentiment d'être complètement laissés pour compte par le processus démocratique.
C'est là le double inconvénient d'un système électoral qui ne reflète pas la volonté de la majorité des Canadiens. C'est un système qui rend la tâche très difficile aux personnes qui veulent s'inscrire sur la liste électorale et exercer leur droit de vote avec le minimum d'obstacles. C'est un problème qu'il faut régler et c'est l'objet de la motion d'aujourd'hui.
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, la question est très importante, surtout dans un système comme le nôtre.
La députée a dit être favorable à la représentation proportionnelle. Certains pays, en particulier en Europe de l'Est, ont adopté ce système. D'autres favorisent plutôt un mélange de la représentation proportionnelle et du système uninominal majoritaire à un tour.
Si le NPD préconise cette politique, considérerait-il son adoption dans les deux provinces dirigées par des gouvernements néo-démocrates? Le système serait ainsi mis à l'épreuve au niveau provincial avant de l'être au niveau fédéral. Si le NPD prône cette politique, il devrait peut-être envisager l'application du système de représentation proportionnelle par un gouvernement provincial qu'il dirige. Nous pourrions alors constater la réaction de la population. Le gouvernement fédéral pourrait peut-être l'adopter ensuite.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Monsieur le Président, le député libéral fait une proposition intéressante.
Au Parti néo-démocratique, nous préférons faire preuve de leadership au niveau fédéral et c'est pourquoi nous saisissons la Chambre de cette motion aujourd'hui.
La politique du Nouveau Parti démocratique fédéral consiste certainement à préconiser la représentation proportionnelle. Notre système électoral subira ainsi les changements nécessaires pour que les Canadiens ne se sentent pas privés de leurs droits et soient convaincus que leur vote compte réellement et fait une différence. Voilà le genre de leadership que nous attendons du gouvernement fédéral.
Qu'y a-t-il de mal à ce que la Chambre fasse preuve de leadership et trace la voie au reste du pays? Qu'y a-t-il de mal à ce que la Chambre débatte des mérites et des possibilités d'une réforme électorale et de la représentation proportionnelle?
La question du député ne fait que soulever des interrogations sur les députés libéraux qui rejettent du revers de la main une motion qui ne fait que proposer l'examen des possibilités et des mérites de la représentation proportionnelle.
Il y a un grave problème d'apathie et de cynisme à l'égard de la vie politique , ce qui devrait sûrement préoccuper du gouvernement fédéral. C'est notre point de départ. Les Canadiens comptent sur nous pour régler ce problème.
M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté la députée parler de leadership. Je ne conçois pas qu'il s'agisse de leadership en l'occurrence.
Je viens d'une région rurale du sud-ouest de l'Ontario. Je crois que mes électeurs m'ont choisi pour que je les représente à la Chambre. Toute la question de représentation proportionnelle m'inquiète beaucoup car, dans un tel système, le parti pourra alors choisir ceux qui dirigeront. Je crois au principe démocratique selon lequel nous sommes élus à la Chambre à cause du travail que nous faisons dans nos circonscriptions et parce que chacun de nos électeurs a la possibilité de choisir qui il veut comme son représentant au Parlement.
À mon avis, ce n'est pas une question de leadership, comme la députée a voulu laisser entendre. Les opinions diffèrent à la Chambre et partout au pays sur ce point. Dans les régions rurales, nous avons peur d'un tel système parce que les régions rurales sont peu peuplées et comptent surtout des agriculteurs qui comprennent l'importance de la crise agricole. Si nous adoptons un système de représentation proportionnelle comme il existe dans certains autres pays, nous ne profiterons plus du même genre de représentation, à mon avis.
Je dirais à la députée qu'il ne s'agit pas seulement de déterminer si le gouvernement est disposé ou non à faire preuve de leadership. Il a fait preuve de leadership de bien des façons à la Chambre dans ce dossier, surtout en ce qui concerne la réforme électorale et les changements à apporter.
Je ne dis pas qu'on ne pourrait pas faire plus, et j'aimerais d'ailleurs qu'on tienne un débat à ce sujet, mais je dirais à la députée que, dans notre pays, les gens ressentent profondément certaines différences qui n'ont rien à voir avec la politique.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Monsieur le Président, je conviens certes avec mon collègue libéral que les opinions divergent à la Chambre, mais c'est le fondement même de la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui.
La motion reconnaît l'émergence d'une crise imminente de la légitimité politique. Elle signale ce dont nous avons tous parlé et entendu parler: les problèmes de notre système électoral, de la réforme parlementaire et de la nécessité de trouver des moyens pour que les citoyens participent vraiment à l'élaboration des politiques et croient pouvoir faire une différence. Dans ce cas, le député peut certes appuyer la motion.
Enfin, je renvoie le député à l'observation suivante que l'on peut lire dans le numéro de janvier d'Opinion Canada:
La réforme électorale a été qualifiée de «plainte des éternels perdants». Toutefois, une étude commandée par le Bureau du Conseil privé et menée par l'éminent professeur de science politique, C.E.S. Franks, fait ressortir plusieurs aspects du système politique qui laissent à désirer. On y fait remarquer, notamment, que...
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je me suis montré aussi généreux que la présidence peut l'être. On aura peut-être l'occasion d'entendre le reste de ces observations une autre fois.
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Monsieur le Président, j'ai personnellement une excellente raison de contester le principe de la représentation proportionnelle.
Cette raison est bien simple. Si la représentation proportionnelle était en vigueur au Parlement fédéral, je ne serais pas ici. J'entends déjà les applaudissements, monsieur le Président. Il est vrai qu'il s'en trouve, dans tous les partis représentés à la Chambre, y compris le mien, et dans un certain nombre de groupes d'intérêts de la collectivité, qui seraient probablement ravis que je ne sois pas ici, mais le fait est que je suis ici grâce à notre système uninominal majoritaire à un tour.
Je voudrais expliquer aux Canadiens qui nous regardent une caractéristique de la représentation proportionnelle que l'on a tendance à oublier. Peu importe la nature du régime de représentation proportionnelle, le chef ou la direction du parti déterminera d'une façon ou d'une autre qui siège à la Chambre.
Voici comment fonctionnent les choses dans un régime fondé sur le pourcentage, ce qui est le cas de la représentation proportionnelle. Si un parti obtient de 10 à 20 p. 100 des voix, il a alors droit à un nombre proportionnel de sièges. Quel que soit le type de régime de représentation proportionnelle, c'est en bout de piste le chef ou la direction du parti—c'est parfois cette dernière plutôt qu'uniquement le chef proprement dit—qui décide après les élections qui siégera à la Chambre.
Monsieur le Président, je peux vous donner l'assurance que je ne me serais même pas vu accorder la moindre chance par mon parti car, en 1993, lorsque j'ai pour la première fois cherché à me faire élire, j'étais un inconnu au sein du Parti libéral. Je n'avais jamais été associé au Parti libéral. Lorsque j'ai présenté ma candidature dans la circonscription de Hamilton-Wentworth, comme on l'appelait à l'époque, les gens du parti qui travaillaient en coulisse avaient une toute autre personne en vue. La seule raison pour laquelle j'ai été choisi candidat et élu à la Chambre, c'est que je suis né et que j'ai grandi dans la collectivité et que j'ai été en mesure de réunir plus de nouveaux membres que quiconque et d'obtenir plus de voix à la réunion de mise en candidature.
Je suis ici parce que j'avais le soutien de la base, et non pas celui du parti ou du dirigeant du parti, qui était à cette époque notre premier ministre actuel. J'ai obtenu le soutien des gens de ma collectivité. C'est une des grandes forces du système uninominal majoritaire à un tour.
Ça ne s'arrête pas là, si je peux m'exprimer ainsi, car, à mon avis, il est très important que les gens comprennent que la représentation proportionnelle, loin d'améliorer les chances des gens d'être représentés, ou des députés à la Chambre, contribue plutôt à les diminuer. En effet, la représentation proportionnelle, en raison du pouvoir qu'elle confère au chef de choisir qui siège à la Chambre, rend presque impossible l'expression d'une saine dissidence comme c'est le cas de ce côté-ci de la Chambre.
J'ai un souvenir très vivace des élections de 1993. J'ai mené une campagne dans laquelle je me présentais comme un libéral, certes, et je demeure libéral, mais un libéral très indépendant d'esprit. Dans ma propre brochure de campagne, j'ai annoncé que je m'opposais au projet annoncé dans le livre rouge de consacrer un milliard de dollars à un programme national de garderies. Selon moi, ce n'était pas une bonne idée.
Ma brochure dénonçait aussi l'aide financière à l'organisation des groupes multiculturels. J'appuie le multiculturalisme en général, cela ne fait aucun doute, mais je ne crois pas que les organisations aient besoin des largesses de l'État pour exister. J'ai utilisé cette brochure pendant la campagne électorale de 1993.
Des libéraux de ma circonscription étaient très malheureux que j'aie obtenu la candidature du parti. Je n'étais pas celui qu'on préférait. Pendant la campagne, ils ont dénoncé le renégat que j'étais au siège social du parti. J'ai reçu au beau milieu de la campagne un appel très amusant d'un certain Paul Martin. Apparemment, ce Paul Martin, que je ne connaissais ni d'Ève ni d'Adam, était l'un des auteurs du livre rouge.
À l'autre bout du fil, j'entends donc ce Paul Martin. Rappelez-vous, monsieur le Président, que c'était avant que nous ne soyons élus. Ce M. Martin me dit: «Il semble que notre livre rouge ne vous plaît pas tout à fait, monsieur Bryden.» Je réponds: «C'est vrai, monsieur Martin. Il y a une ou deux choses auxquelles je m'oppose vigoureusement et qui ne passeraient tout simplement pas dans ma circonscription. Ça ne marche pas.» Il m'a demandé si je n'étais pas un peu mal à l'aise de tenir de tels propos pendant la campagne électorale. J'ai dit à M. Martin de ne pas s'inquiéter; je lui ai dit que, lorsque je serais élu, je viendrais à Ottawa et que je convaincrais le Parti libéral de ne pas mettre en oeuvre ces programmes qui, j'en étais persuadé à l'époque comme maintenant, ne sont pas les meilleures initiatives prévues dans le livre rouge.
Monsieur le Président, je tiens à vous signaler que le gouvernement n'a jamais dépensé un milliard de dollars pour les garderies et qu'au fil des ans, on a déployé des efforts énormes pour mettre un frein aux dépenses gouvernementales sans obligation de rendre compte. Il y a beaucoup de progrès à accomplir à ce chapitre, mais j'ai énormément confiance en ma capacité d'agir à titre de député d'arrière-ban n'ayant pas peur de s'élever contre des mesures proposées par son parti; je ne m'oppose pas à mon parti, mais je n'ai pas peur de me prononcer indépendamment de celui-ci et de ses dirigeants ni d'émettre mes opinions personnelles.
Dans un système fondé sur la représentation proportionnelle, ce genre d'indépendance dont jouissent les députés n'existerait pas. Tout d'abord, monsieur le Président, il serait impossible de se faire simplement élire comme député, car pas un chef sensé n'accepterait dans ses rangs quelqu'un qui, comme moi, d'entrée de jeu, exprime son désaccord à l'égard de certains aspects du programme électoral de son parti. Pourtant, comme bien d'autres, je me suis fait élire au Parlement lors des élections de 1993.
À mon avis, parce que nous représentons nos électeurs sans pour autant que ce soit dans le cadre d'un régime fondé sur la représentation proportionnelle, nous avons réussi à changer considérablement cette attitude, la façon dont les partis, du moins celui de ce côté-ci, fonctionnent. Comme vous êtes un observateur de longue date de ce qui se passe à la Chambre, monsieur le Président, vous conviendrez comme moi que, jamais dans l'histoire du Parlement canadien, il n'y a eu autant de députés de ce côté-ci de la Chambre que maintenant à se prononcer contre la politique gouvernementale.
Je discutais avec le député de Cambridge pendant le débat et je lui faisais remarquer que j'ai voté, si je ne m'abuse, quatre fois contre de grands projets de loi d'initiative ministérielle. Le député de Cambridge, qui ne siège pas tellement loin de moi, a rougi quelque peu, gêné qu'il était d'admettre qu'il l'avait fait encore plus souvent que moi.
Nous sommes restés des membres estimés de notre parti et nous n'avons jamais hésité à intervenir à la Chambre pour exprimer notre point de vue, malgré ce que peuvent en penser parfois les députés de l'opposition. Nous avons réussi à apporter des changements en exprimant ainsi notre opinion. D'ailleurs, pas plus tard que la semaine dernière, quatre de nos députés se sont prononcés contre le gouvernement en appuyant la motion de l'opposition.
En fait, nous examinons chaque question très attentivement. On parle de vote libre à la Chambre, mais il faut savoir que les députés n'ont pas le temps d'étudier aussi en profondeur qu'ils le voudraient toutes les questions abordées à la Chambre. En fait, s'il est important que nous puissions voter de façon indépendante, et non pas libre, c'est qu'on a l'occasion, lorsqu'on a analysé une question très attentivement, d'envoyer un message au gouvernement en intervenant à la Chambre, monsieur le Président.
Je l'ai fait à quatre occasions. J'ai d'ailleurs réussi à influer sur le cours des événements dans le cas qui me semblait le plus important, il y a environ cinq ans, lorsque le gouvernement a proposé un projet de loi visant à assurer la surveillance électronique des personnes accusées de harcèlement d'ordre sexuel. Selon le projet de loi du gouvernement, ce bracelet électronique aurait été mis aux individus sur une simple requête des autorités policières.
À mon sens, c'était là contraire aux droits fondamentaux de l'accusé. Personne ne doit être arrêté arbitrairement. Même s'il s'agit d'un bracelet électronique avec système de positionnement mondial, s'il est mis à une personne qui n'en veut pas, cela constitue une atteinte aux droits de l'accusé et à la présomption d'innocence. Je n'ai pas réussi à persuader mon gouvernement en caucus ni le ministre de l'époque, aussi me suis-je retrouvé isolé à la Chambre. Monsieur le Président, essayez de défendre seul une position lorsque tout le monde appuie un projet de loi. Vous essaierez pour voir.
Il se trouve que j'étais celui qui avait étudié la question suffisamment en profondeur pour savoir qu'elle était fondamentale. Je suis heureux de dire que le gouvernement m'a finalement compris et a amendé le projet de loi pour en éliminer la disposition en cause. Monsieur le Président, le système actuel vous donne cette possibilité, mais vous l'avez uniquement parce que, en définitive, vous n'avez pas été élu en raison de votre loyauté à un parti. Vous arrivez à la Chambre des communes parce que les électeurs de votre circonscription l'ont voulu.
C'est à eux que vous devez rendre des comptes. Au bout du compte, le premier ministre, peu importe ce qu'il veut, doit toujours composer avec le fait que les députés des deux côtés de la Chambre ont des comptes à rendre aux électeurs de leur circonscription. Au bout du compte, si le Cabinet fait fausse route, les députés du parti ministériel et des partis de l'opposition peuvent défaire le gouvernement lors d'un vote de confiance.
On a dit, à juste titre je crois, que le système parlementaire canadien concentre plus de pouvoir à la Chambre des communes et à la direction du parti, du parti ministériel, que tout autre parlement ou toute autre démocratie dans le monde. Il permet aussi de renverser le gouvernement instantanément.
Je dois tenir compte du fait que certains partis de l'opposition, soit le NPD, le Bloc québécois et l'Alliance Canadienne, mais particulièrement le NPD, n'ont jamais eu l'expérience de former le gouvernement. Ils n'ont aucune idée de la dynamique qui existe de ce côté-ci.
Je peux vous assurer, monsieur le Président, que le premier ministre doit toujours tenir compte de l'opinion de l'ensemble du caucus. Nous voulons toujours appuyer la direction du parti, nous voulons toujours lui donner le bénéfice du doute, et c'est la bonne chose à faire, mais c'est quand même à notre discrétion, et non à la discrétion de la direction du parti.
C'est une des différences fondamentales entre le système que nous avons et le système de représentation proportionnelle. Ce dernier donne le pouvoir discrétionnaire au chef ou à la direction. Ce sont eux qui décident si une personne sera nommée ou non, si une personne siégera durant la prochaine législature ou non. Ainsi, la personne qui ne censure pas ce qu'elle dit ou ce qu'elle fait devant la direction de son parti risque fort de ne pas être nommée pour siéger durant la prochaine législature dans un système de représentation proportionnelle.
Nous avons un système très solide qui n'a pas besoin d'être réformé. Je suis d'accord pour dire qu'il y a certaines améliorations à apporter, mais la chose que nous n'avons pas besoin de faire, c'est bien de passer à un système de représentation proportionnelle.
Je dois aussi, en passant, faire observer que les députés de l'opposition qui ont présenté cette motion ont commodément oublié, lorsqu'ils ont fait le compte de tous les pays qui ont la représentation proportionnelle, que les quatre pays qui ont gardé le système de scrutin majoritaire uninominal à un tour sont les démocraties les plus réussies et les plus vieilles du monde. Les trois premiers, tout au moins, sont les plus vieilles démocraties du monde, soit le Canada, les États-Unis et le Royaume-Uni, auxquels il faut ajouter, comme nous l'avons appris plus tôt, l'Inde.
Remarquez, monsieur le Président, que dans trois de ces cas, il s'agit de pays d'une énorme superficie. Nous ne pouvons raisonnablement rester unis dans un espace démocratique qui va de l'Atlantique au Pacifique, dans des démocraties aussi énormes que le Canada, l'Inde avec un milliard d'habitants, et les États-Unis, qui sont en superficie le quatrième pays du monde. Les trois plus grands pays du monde, ils sont trois sur quatre, sont ceux qui ont conservé le système de scrutin majoritaire uninominal à un tour. Il y a une raison pour cela. C'est que ce système fonctionne.
Si nous avions des gouvernements minoritaires successifs, comme cela se produit dans le cas de la représentation proportionnelle, nous pourrions pas, à mon avis, tenir plus de deux décennies. Nous ne pourrions pas tenir. Nous ne tolérerions pas ce qui se passe dans les parlements d'Israël ou d'Italie, ou de beaucoup d'autres pays dans lesquels des groupes d'intérêts restreints, qui ne réuniraient que 5 à 6 p. 100 du nombre total de députés, contrôlent en fait le débat. Nous serions alors à la merci de petits groupes défendant des intérêts spéciaux. Il nous faut un système, que nous avons d'ailleurs, qui crée d'une façon ou d'une autre le plus grand nombre possible de gouvernements majoritaires.
Il n'est pas de notre faute, ni de celle du Parlement, ni de celle du système si, aujourd'hui, l'opposition est fractionnée en quatre partis. J'irai jusqu'à prédire que, à l'occasion des prochaines élections, la situation changera du tout au tout, car l'équilibre naturel, dans les systèmes parlementaires du Royaume-Uni et du Canada, veut que nous ayons deux ou trois partis tout au plus.
Or la situation actuelle est des plus inhabituelles. Ce n'est toutefois qu'une question de temps avant que l'Alliance canadienne et le Parti conservateur s'unissent et que le NPD se trouve une raison d'être. Quant au Bloc québecois, j'ignore ce qu'il en adviendra. J'imagine que les Québecois seront de plus en plus nombreux à comprendre que le Parti libéral offre au Québec un avenir meilleur que les séparatistes du Bloc, mais loin de moi l'idée de prêcher pour ma paroisse.
Pour ce qui est de la possibilité pour les députés de ce côté-ci de se faire entendre, je voudrais tirer parti du fait que le libellé de la motion est vague et que le député de Regina—Qu'Appelle a parlé du Sénat. Je voudrais aller un tout petit peu plus loin à ce sujet et parler du scrutin électronique, car la question est on ne peut plus pertinente aujourd'hui.
Je voudrais dire officiellement à mes collègues de l'opposition officielle que je suis tout à fait contre le scrutin électronique. J'en dénonce le principe depuis plusieurs années. À l'évidence, mes arguments n'ont pas tous la faveur des députés de ce côté-ci de la Chambre. Je trouve que le danger inhérent au scrutin électronique est précisément ce que le député d'Île de Vancouver-Nord a présenté comme un avantage. Il a dit qu'il pourrait voter depuis sa circonscription, sans avoir à être présent à la Chambre, simplement en appuyant sur un bouton.
Si nous voulons maintenir l'utilité du Parlement et la capacité des députés d'influencer la politique au Canada et le gouvernement, nous devons être présents à la Chambre. La terrible tentation du vote électronique réside dans la possibilité de faire précisément ce que le député d'Île de Vancouver-Nord a décrit. Nous pourrions utiliser le vote électronique uniquement à la Chambre et exiger la présence de chacun, mais cela n'est pas non plus la solution idéale.
Je reviendrai sur ce qui se passe de ce côté-ci. Le fait qu'un député appuie son parti ou non devient terriblement important. Avant 1993, selon la tradition au sein de tous les partis, si un député n'était pas d'accord avec son parti, qu'il soit du côté du gouvernement ou de l'opposition, il refusait simplement de se présenter à la Chambre. Après 1993, certains d'entre nous se sont opposés à cette façon de faire, et je dois avouer que j'ai été un des premiers à m'y opposer.
J'ai dit à mes électeurs et je leur dis maintenant qu'ils ont voté pour moi afin que je vienne ici pour voter et non pour me cacher. Alors si je n'appuie pas un vote, je vais me lever et voter contre le gouvernement. Je n'y peux rien. Il est important pour moi de montrer comment je vote.
Le problème avec le vote électronique, c'est qu'il enlève ce privilège. Je pourrais rester assis, appuyer sur un bouton, et personne ne saurait comment j'ai voté. Le plus beau dans cela, c'est que le gouvernement ne saurait jamais ce que c'est que de sentir la pression des députés d'arrière-ban qui ne seraient pas en accord.
Au cours de la dernière législature, l'année dernière, nous avons été saisis d'un projet de loi qui traitait de la réforme des pensions et des droits des couples du même sexe. Sauf erreur, environ 16 députés du Parti libéral se sont opposés au gouvernement à cet égard. Monsieur le Président, voilà ce qu'est une saine démocratie. C'est important, car cela montre à tous les Canadiens que nous sommes indépendants, que nous votons selon notre conscience. Je regrette de ne pas pouvoir en dire autant de nos vis-à-vis, car il est arrivé bien souvent qu'ils ne votent pas contre la position de leur parti.
Il est très rare, monsieur le Président, que nous voyions des députés du NPD, du Parti conservateur ou du Bloc québécois s'opposer à la position de leur parti. Cela n'arrive jamais. Cela se produit à l'occasion, dans le cas de projets de loi d'initiative parlementaire, mais jamais ils ne s'opposent à des projets de loi d'initiative ministérielle.
En conclusion, j'ignore pourquoi nous, parlementaires, ne pouvons pas nous rendre compte que notre pays a 134 ans et qu'il est doté d'un régime démocratique qui a résisté à l'épreuve du temps et qui est un des plus vieux au monde. Il est un des meilleurs au monde et, à mon avis, il n'a pas besoin de la réforme fondamentale dont parle cette motion.
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je tiens à dire au député qu'il a commis une erreur de fait mineure lorsqu'il a cité le nombre de pays étendus sur le plan géographique qui ont un système majoritaire. Il a mentionné deux des trois principaux. La Russie et la Chine sont tous deux plus étendus que les États-Unis et ainsi, à strictement parler, il s'agit de deux des quatre principaux pays.
Cela dit, il a également affirmé qu'il est difficile de maintenir l'unité d'un pays grand comme un continent, comme le Canada ou les États-Unis, sans un système majoritaire. Je ne suis pas d'accord et je l'invite à répondre à cette observation.
L'Australie, où j'ai vécu pendant plusieurs années, n'a pas un système majoritaire. Elle a un mode de scrutin à vote unique transférable au niveau de la Chambre des représentants, l'équivalent de notre Chambre des communes. Or, le système australien ne nuit pas à l'unité du pays.
Au niveau du Sénat, les Australiens ont un système dans lequel chacun des 6 États a 12 sénateurs. Ces sénateurs sont élus dans le cadre d'un scrutin au cours duquel chaque électeur choisit 12 candidats à partir d'une liste sur laquelle on peut retrouver, selon l'État, jusqu'à 100 candidats ou plus.
On peut signaler certains problèmes propres au système australien. J'y reviendrai plus tard au cours du débat, mais cela ne cause aucun problème d'unité nationale.
Le premier système de scrutin majoritaire a eu un succès remarquable dans d'autres pays. Cependant, nous devrions examiner nos problèmes d'unité actuels et ceux encore plus graves que nous avions à la fin des années 70 et au début des années 80 lorsqu'il n'y avait que deux députés libéraux à l'ouest de la frontière entre l'Ontario et le Manitoba et seulement deux députés conservateurs au Québec, en 1979 et 1980. Nous constatons par conséquent que le scrutin majoritaire dessert vraiment notre pays sur le plan de l'unité nationale.
Les États-Unis sont l'un des échecs les plus graves sur le plan de l'unité nationale dans le monde. Leur système majoritaire a garanti que les démocrates dominent le Sud avant la guerre civile et qu'un éventail de partis, tout d'abord les whigs et ensuite les républicains, dominent le Nord. C'est l'une des principales raisons pour lesquelles nous avons constaté des divisions incroyables au Congrès, et encore plus au Sénat. Cela a constitué l'une des principales raisons de la guerre civile.
Étant donné ce bilan spectaculaire d'échecs, le député serait-il prêt à envisager la possibilité qu'il y ait d'autres solutions qui créent un plus grand sentiment d'unité nationale dans des pays aussi vastes et aussi diversifiés sur les plans ethnique et géographique que le Canada, l'Australie ou les États-Unis?
M. John Bryden: Monsieur le Président, de toute façon, je ne suis pas certain que l'Australie puisse être un bon élément de comparaison. C'est un pays beaucoup plus petit qui est isolé et est loin d'avoir une composition aussi multiethnique que le Canada.
Très peu de pays au monde sont fondés sur deux grandes racines culturelles et linguistiques comme c'est le cas au Canada. J'ai souligné qu'avant la création du Canada, les Français et les Anglais s'entredéchiraient depuis 1066. Les Anglais et les français ont toujours été des ennemis en Europe.
Toutefois, grâce à notre système démocratique, et nous sommes l'une des premières démocraties à avoir adopté le système parlementaire actuel, monsieur le Président, l'une des premières, juste après les États-Unis et la Grande-Bretagne, nous avons réussi non seulement à garder notre pays uni, et je ne comprends vraiment pas où le député veut en venir, parce que nous avons maintenu ensemble l'un des plus vastes territoires au monde ainsi que les deux populations les plus distinctes au monde, soit les français et les Anglais. C'est un succès incroyable.
Je suis toutefois très heureux qu'il ait soulevé ce point parce que je crois que l'une des raisons pour lesquelles cela fonctionne bien, c'est que tous les Canadiens, y compris mes collègues du Bloc québécois ainsi que tous mes collègues du Québec, de la Nouvelle-Écosse, de l'Acadie ou du Nouveau-Brunswick, ont la possibilité de représenter leur région.
C'est là la merveille de notre pays. Ce serait vraiment terrible si un chef devait dire au Bloc québécois, ou si le chef du Bloc québécois lui-même devait dire «Vous devez avoir un représentant à Vancouver». Ce serait stupide.
Non, monsieur le Président, nous sommes dans la bonne voie. Je suis prêt à féliciter l'Australie pour son succès relatif, mais elle ne fait pas mieux que ce que nous faisons ici au Canada.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, j'émettrai quelques commentaires. Le député a affirmé qu'on n'avait jamais vu un député du NPD ou du Parti progressiste conservateur voter à l'encontre de la position de son parti. Il suffit de jeter un coup d'oeil dans le passé pour constater que ce n'est pas le cas.
En 1980, j'étais le porte-parole du parti en matière constitutionnelle. Lorsque M. Trudeau a tenté de rapatrier unilatéralement la constitution, j'ai démissionné de ma fonction de porte-parole. À l'époque, nous étions quatre à nous dissocier de la position du caucus lors du vote. La même situation s'est produite à plusieurs reprises, ainsi qu'au sein du Parti progressiste conservateur.
J'ai une question à poser au député relativement aux gouvernements majoritaires. À l'appui de son désir de statu quo, il invoque notamment le fait d'aimer les gouvernements majoritaires. Je pourrais aussi affirmer que nous avons eu plusieurs gouvernement minoritaires qui ont été très productifs.
Lester Pearson n'a jamais dirigé un gouvernement majoritaire. Il a été élu à la tête d'un gouvernement minoritaire en 1963. Il a été réélu à la tête d'un gouvernement minoritaire en 1965, et il est resté à la tête d'un gouvernement minoritaire jusqu'à sa retraite en 1968. Cette période a probablement été l'une des meilleures dans l'histoire du Canada. Nous avions alors un bon gouvernement progressiste qui représentait l'ensemble du pays.
Entre 1972 et 1974, le gouvernement Trudeau était aussi minoritaire. Durant cette période, M. Trudeau a probablement dirigé ce qui fut sa législature la plus productive. Cette réussite tient en partie à la nécessité de faire intervenir certains compromis et un consensus avec les partis de l'opposition, de manière à représenter le pays comme un ensemble. Les résultats sont bien meilleurs que ceux que peut obtenir un gouvernement majoritaire dont la plupart des représentants sont issus de certaines régions.
J'ai une dernière question à poser au député. Elle concerne le Sénat. Il s'agit là d'une institution qui, par définition, n'est pas démocratique. Quel sort réservons-nous au Sénat? Environ 5 p. 100 seulement des Canadiens sondés appuient le Sénat actuel.
M. John Bryden: Monsieur le Président, tout ce que je peux dire c'est que je suis ici depuis 1993, pas depuis 1980. Je peux assurer le député d'en face que, depuis 1993, je ne me rappelle pas d'une seule occasion où des députés du NPD ont voté contre leur propre parti sur une question de politique à la Chambre des communes. Je n'ai pas beaucoup vu les conservateurs faire cela non plus.
Pour ce qui est de la question des gouvernements minoritaires par rapport aux gouvernements majoritaires au Canada, je pense que le principal n'est pas de savoir si on a affaire à un gouvernement minoritaire ou majoritaire, mais si notre système nous permet d'avoir un gouvernement déterminant ou non.
Notre système empêche un petit parti de cinq ou six députés de détenir la balance du pouvoir, si bien que, même lorsque nous avons un gouvernement minoritaire, cela demeure un gouvernement déterminant. Dans un système de représentation proportionnelle, il risque d'y avoir un grand nombre de partis minoritaires. Un gouvernement minoritaire, dans les circonstances, pourrait bien être un gouvernement non déterminant.
Enfin, parlons du Sénat. J'ai dû changer d'avis au sujet du Sénat en voyant ce qui se passe en Ontario, dont l'Assemblée législative ne comprend évidemment pas de sénat. L'an dernier, le gouvernement de l'Ontario a siégé pendant seulement 40 jours. Pour notre part, nous allons siéger et discuter de long en large de projets de loi pendant 135 jours.
Le gouvernement ontarien étudie en vitesse des projets de loi mal conçus qui, soudainement, obtiennent force de loi. L'avantage du Sénat, c'est qu'il passe tout en revue.
Lorsqu'un projet de loi d'intérêt public ou un projet de loi d'initiative parlementaire est adopté trop vite par la Chambre des communes, et il est possible que, en étant tous d'accord avec un projet de loi, nous l'adoptions trop vite, le Sénat est là pour le revoir. Cela est important à la lueur de ce qui se passe en Ontario, où des lois sont adoptées alors qu'elles mériteraient certainement une seconde réflexion.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le député d'en face m'a beaucoup impressionné. Il m'avait déjà impressionné parce qu'il étudie très à fond la démocratie et le comportement démocratique.
J'ai été frappé par une expression qu'il répétait constamment vers le milieu de son intervention, «en définitive». Je me suis demandé quand est-ce qu'il allait finir par conclure. Il a fini par terminer son intervention, mais il a également soutenu qu'en définitive, lui et tous les députés élus à la Chambre ont des comptes à rendre à leurs électeurs. Je ne saurais mieux dire.
Il a vraiment dit quelque chose d'intelligent à propos de l'autre endroit il y a un instant. C'est bien. Si seulement il pouvait ajouter que nous devrions également élire les sénateurs, nous serions parfaitement d'accord.
Il y a une question que je veux poser au député. Je crois qu'il a été élu sur la promesse que le gouvernement du Canada et le Parlement nommeraient un conseiller en éthique qui rendrait des comptes à la Chambre et au Parlement.
En consultant le hansard pour voir comment il avait voté, j'ai constaté que le député avait voté non sur cette question. Au nom de qui votait-il alors, lui-même, ses électeurs ou le premier ministre?
M. John Bryden: Monsieur le Président, j'aurais aimé que le député se donne la peine de lire mon intervention en plus de vérifier comment j'ai voté, car il aurait vu que j'ai soutenu que nous avions tenu cette promesse du livre rouge puisque cet élément du livre rouge ne concernait que les titulaires de charges publiques et les groupes de pression. Comme les députés n'étaient pas concernés, il n'y avait donc pas de raison de voter contre le gouvernement. J'ai le regret de dire que je ne pense pas que les députés de ce côté-ci de la Chambre qui ont estimé devoir voter contre le gouvernement sur cette question avaient raison. Je pense qu'ils avaient tort. La promesse a été remplie.
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais relire la motion.
Que la Chambre constitue un comité spécial multipartite, chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens de réforme électorale, en vue de recommander des réformes qui feraient obstacle à la régionalisation croissante de la politique canadienne et à la participation décroissante des Canadiennes et des Canadiens aux élections fédérales.
Je parlerai non seulement de représentation proportionnelle mais aussi des autres réformes électorales et de questions connexes.
Je crois que le système canadien est défectueux actuellement. En 1997, le Parti libéral a formé un gouvernement majoritaire avec l'appui de 38 p. 100 des électeurs. En 1993, les libéraux ont fait élire 60 p. 100 des députés à la Chambre, après avoir obtenu 41 p. 100 du suffrage universel. Les conservateurs, qui avaient obtenu 16 p. 100 des voix aux élections, se sont retrouvés avec moins de 1 p. 100 des sièges à la Chambre des communes.
Aux élections de 2000, les libéraux ont fait élire 100 députés en Ontario avec l'appui de 2,3 millions d'électeurs. Mon parti, l'Alliance, qui a obtenu un million de voix, n'a fait élire que deux députés, dont moi-même. Je suis honoré à la pensée de représenter 500 000 Ontariens, mais je ne crois pas qu'on puisse considérer comme acceptable un système qui permet à un parti, qui n'a obtenu qu'environ la moitié des voix, d'occuper 98 p. 100 des sièges.
C'est une question de démocratie. Tout en discutant de démocratie et du genre de réforme démocratique proposée aujourd'hui, nous devons penser aussi à certaines autres importantes questions connexes qui rejoignent la question de la réforme électorale.
J'aborderai certaines de ces questions en faisant valoir que le Canada est aux prises avec un problème qui dépasse de loin les lacunes du système électoral. Comme le faisait remarquer le député néo-démocrate, nous avons un sérieux problème avec le Sénat. Mon collègue proposait d'abolir le Sénat. Ce serait assurément une solution.
Mon parti a proposé un modèle triple e pour le Sénat. Nous avons proposé que les sénateurs soient élus au lieu d'être nommés et qu'au Sénat, la représentation soit égale ou au moins beaucoup plus équitable qu'elle ne l'est maintenant.
Certains pays ont adopté le pur modèle de sénat triple e, notamment l'Australie et les États-Unis. La Suisse a adopté un modèle qui s'en approche. Certains petits cantons sont appelés des semi-cantons et ont droit à une moitié de représentation, mais autrement, c'est tout à fait l'égalité. Cela permet une représentation des régions périphériques et empêche le phénomène du Canada de l'intérieur et du Canada de l'extérieur que nous constatons ici.
À tout le moins, on pourrait croire qu'une certaine équité régionale assurerait à la Colombie-Britannique, par exemple, un nombre beaucoup plus élevé de sénateurs que le Nouveau-Brunswick. Ce serait logique puisque la Colombie-Britannique est nettement plus populeuse.
La représentation au Sénat devrait revenir à ce qu'elle était en 1867 pour garantir une certaine équité régionale. En 1867, il y avait une représentation égale des Maritimes, en tant que région comprenant alors le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse, de l'Ontario et du Québec. Ces trois régions formaient le Canada à l'époque. Le système était satisfaisant et nous souhaitons y revenir.
Des réformes devraient également s'appliquer aux règles de la Chambre. La Chambre devait être une assemblée législative dans un pays qui, même si on l'appelait une monarchie, était en fait une république dans le sens aristotélicien du terme. C'est un pays où sont également présents dans la constitution les éléments démocratiques, oligarchiques ou aristocratiques et monarchiques.
En réalité, ce qui s'est passé, c'est que le premier ministre est devenu notre vrai monarque et que la Chambre siège non pas à titre d'assemblée législative, mais de collège électoral en session perpétuelle. Périodiquement, et même fréquemment, la Chambre doit renouveler son assentiment pour que le roi continue de siéger ici, régnant sur nous tous.
Cette forme de dictature élective ne convient aucunement. Il faut des réformes. Parmi les nombreuses réformes envisageables, j'en mentionnerai une ou deux.
Premièrement, il devrait y avoir l'élection des présidents de comité au scrutin secret, comme cela se fait pour le Président de la Chambre.
Deuxièmement, il faudrait plus de votes libres et il suffirait d'une simple modification du Règlement de la Chambre pour atteindre cet objectif. Beaucoup d'autres propositions sont venues d'un certain nombre d'universitaires, de commissions et de comités.
Des réformes à la Loi électorale du Canada feraient aussi une grande différence. Un exemple de mesure qui va dans la mauvaise direction est l'article 11 du projet de loi proposé par le gouvernement pour modifier la Loi électorale du Canada. Il a pour effet de priver les petits partis de l'accès à la liste des électeurs. C'est une proposition fort peu démocratique. Il faut y faire obstacle pour au moins préserver la démocratie dans l'élection des députés, à défaut de pouvoir la préserver dans le fonctionnement de la Chambre.
Je signale en outre que l'article 17 de ce projet de loi retirerait aux candidats indépendants et aux petits partis l'accès à des heures de diffusion gratuites pendant lesquelles ils peuvent transmettre leur message et renseigner le public, ce qui, après tout, est leur fonction première selon eux. Je parle de petits partis comme le Parti vert, le Parti action canadienne et d'autres, ainsi que de nombreux candidats indépendants. Plusieurs de ces partis et candidats indépendants savent pertinemment qu'ils ne seront pas élus et considèrent les élections comme l'occasion de faire connaître des vérités importantes à leurs yeux. En fait, c'est le seul moment où ils jouissent d'une certaine visibilité publique et ils méritent bien de pouvoir profiter de ce moment.
Une autre mesure qui serait très efficace est la révocation. Si les gens d'une circonscription avaient le droit de demander que leur député soit placé en situation d'élection partielle, de nombreuses mesures très impopulaires et non démocratiques n'auraient jamais été acceptées à la Chambre. La TPS, l'Accord Meech et bien d'autres mesures n'auraient jamais été approuvés. Bien des députés auraient réfléchi longuement avant de continuer à appuyer des interventions du genre de celle qui s'est produite l'autre jour, lorsque le gouvernement a voté contre la promesse faite dans son propre livre rouge en 1993.
On pourrait voter électroniquement. Les référendums commandés par les citoyens pourraient aussi transformer profondément le mode de fonctionnement du Canada à titre de démocratie.
Parlons maintenant de la représentation proportionnelle et du type le plus approprié de représentation proportionnelle.
D'après le libellé de la motion, je crois comprendre que la députée du Nouveau Parti démocratique qui parraine cette motion est d'avis que son parti pourrait appuyer certaines réformes démocratiques du système électoral, sauf s'il s'agit de changements dans la façon de choisir les députés.
Les élections à date fixe pourraient offrir certains avantages et représentent peut-être une option qu'ils pourraient appuyer comme le fait notre parti. Cela nous éviterait de revivre des situations insensées, notamment lorsque le premier ministre, après avoir consulté les sondages, cherche à organiser des élections lorsque le parti au pouvoir a la faveur populaire. C'est une pratique qui est inconstitutionnelle aux États-Unis depuis deux siècles et que d'autres pays dotés d'un régime semblable au nôtre, comme l'Australie, ont cherché à restreindre en tenant des élections à courts intervalles.
Je remarque qu'il existe plusieurs modèles différents de représentation proportionnelle, que j'essaierai de décrire brièvement dans les minutes qu'il me reste. Notre parti ne préconise aucun modèle en particulier. Nous croyons que le système uninominal majoritaire à un tour est boiteux et ne convient probablement plus à la plupart des Canadiens. Toutefois, nous pensons que la décision de remplacer le système devrait être prise par les Canadiens dans le cadre d'un référendum.
Nous pourrions suivre l'exemple de nos amis de la Nouvelle-Zélande. Ils ont tenu un référendum pour déterminer s'ils devaient abandonner leur système uninominal majoritaire à un tour. La population a indiqué qu'elle voulait que le régime change et une commission a parcouru le pays, a tenu de vastes consultations, puis a proposé plusieurs modèles. La population a choisi le système plurinominal à représentation proportionnelle, qui n'était pas la seule option offerte, mais celle qui semble plaire aux Néo-Zélandais.
Je ne pense pas que ce modèle puisse fonctionner chez nous. Je ne suis pas sûr qu'il me revienne de dire que ce modèle devrait fonctionner. Je citerai l'autre exemple possible du suffrage purement plurinominal. Je ne suis pas particulièrement partisan de ce système, mais il est en usage en Israël et il l'a déjà été en Italie. Une version quelque peu différente du système proportionnel plurinominal est en vigueur non seulement en Nouvelle-Zélande, mais aussi en Allemagne. J'ai remarqué qu'en Australie, mon ancienne patrie, plusieurs systèmes différents sont utilisés par les divers ordres de gouvernement de ce pays.
Comme je l'ai signalé tout à l'heure en interrogeant un autre député, la Chambre des représentants de l'Australie emploie le régime de la circonscription uninominale, mais avec un vote transférable, de telle sorte que le choix d'un député donné soit davantage le fruit d'un consensus. Le Sénat australien emploie un système de 12 parlementaires. Chaque État propose des parlementaires et chaque électeur peut choisir les 12 meilleurs de la liste.
La Tasmanie emploie un autre système encore pour sa Chambre. Il s'y trouve des circonscriptions avec cinq ou six députés. Le territoire de la capitale australienne, quant à lui, a choisi un autre système encore qui, d'après moi, conviendrait au Canada, sauf qu'il rend compte du fait que ce pays a une population très homogène et dispersée de façon uniforme. Comme on y courait le risque d'élire encore et encore tous les députés d'un seul et même parti, on a dû choisir une autre méthode afin d'assurer une certaine démocratie, une opposition et un débat au Parlement. Cette méthode fonctionne parfaitement.
J'estime donc que ce qu'il faut au Canada, c'est qu'on tienne un débat vigoureux comme celui que proposent nos collègues néo-démocrates et que le meilleur système soit finalement choisi par le peuple.
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je crois que le député appuie la motion présentée par le NPD. Il a abordé le dossier des questions régionales dans notre confédération mais je suis certain qu'il sait que le siège de l'Alliance canadienne se trouve en Alberta.
Comment peut-il prétendre que l'Alliance est un parti national alors que son siège est en Alberta? Est-il en faveur des idées séparatistes qui circulent dans l'Ouest ou parle-t-il de déménager le siège national de l'Alliance canadienne de l'Alberta et de l'installer là où il devrait être, à Ottawa?
M. Scott Reid: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. Je ne vois pas exactement comment le député peut penser que le fait d'avoir notre siège à Calgary soit l'expression de notre appui au séparatisme de l'Ouest.
Si tel était le cas, lorsque le gouvernement fédéral a pris la décision, dans les années 70, de voter en sa qualité d'actionnaire de Sun Life en faveur du maintien du siège social de Sun Life à Montréal, cela constituait un appui voilé aux séparatistes du Québec. Je ne peux donner d'autre interprétation à cette bizarre affirmation.
La représentation généralisée de tous les partis dans toutes les régions du pays, à moins que le parti soit complètement inacceptable aux yeux des électeurs, est une bonne chose. Presque tous les systèmes, à l'exception de notre système actuel, donnent de meilleurs résultats à cet égard.
Voyons à nouveau l'exemple de la situation en Ontario. Nous savons pertinemment que, en 1998, 97 p. 100 des Ontariens n'ont pas voté pour le Parti libéral et pourtant 100 des 103 députés de l'Ontario étaient des libéraux. Ce bloc a dominé la Chambre. Sous la direction du premier ministre, il avait le contrôle total de toutes les mesures législatives présentées à la Chambre. Il fait preuve d'un manque de sensibilité spectaculaire à l'égard des préoccupations régionales d'un grand nombre de régions, dont l'Ouest.
Il y a un manque perpétuel d'intérêt pour les préoccupations du Québec, ce qui est la raison pour laquelle le séparatisme québécois est passé, au cours de 30 années d'un gouvernement presque exclusivement libéral, de l'état de simple faction à celui d'un mouvement qui a presque déchiré notre pays alors que le premier ministre actuel était à la tête du gouvernement. Le premier ministre Hamm, de la Nouvelle-Écosse, s'est fait carrément renvoyer quand il est venu ici présenter des propositions fort intelligentes pour modifier le système de la péréquation.
Je ne vois pas en quoi les propos du député ajoutent quoi que ce soit au débat. Ils sont typiques du genre d'arrogance à laquelle nous sommes habitués de la part de certains députés ministériels du groupe ontarien. C'est des plus décevant.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, le député qui vient de prendre la parole, mon collègue, le député de Windsor—St. Clair, et un autre député réformiste représentent près de la moitié de l'électorat ontarien, alors que 100 libéraux en représentent l'autre moitié, ce qui montre bien la grande distorsion qui existe dans notre système électoral.
Je vais faire deux ou trois autres observations et demander ce que le député de l'Ontario en pense. Je crois que nous ne devrions recourir aux référendums que très rarement dans notre système politique. Mon parti et moi-même n'y aurions recours que pour de grandes questions d'actualité, comme un enjeu constitutionnel, et peut-être pour une ou deux autres exceptions. À mon avis, il pourrait y avoir trop de référendums.
Je pense que le cabinet du premier ministre dispose de beaucoup trop de pouvoirs lorsqu'il s'agit de nommer tous les juges, les dirigeants des forces armées ou de la GRC, et d'autres titulaires de postes importants. Bon nombre de ces nominations devraient être confiées à un comité parlementaire responsable de questions connexes. Par ailleurs, je crois que les élections devraient avoir lieu à date fixe, prévue dans la Constitution, pour empêcher que pareille décision ne revienne aux premiers ministres fédéral et provinciaux.
J'estime qu'il devrait y avoir moins de votes de confiance à la Chambre des communes et que les comités parlementaires devraient être plus forts et disposer d'une plus grande marge de manoeuvre pour établir leur propre calendrier législatif.
Ce sont là quelques-unes des autres réformes qui devraient aller de pair avec l'idée d'examiner la représentation proportionnelle et l'abolition du Sénat non élu.
M. Scott Reid: Monsieur le Président, je suis d'accord avec à peu près tout ce qu'a dit le député. Je suis personnellement d'avis qu'il faudrait que les référendums aient une plus grande portée, surtout les référendums découlant de l'initiative des citoyens.
Le député conviendra sans doute que le système en vigueur en Suisse et en Australie, en vertu duquel tout amendement constitutionnel doit être avalisé par la population, s'est révélé bénéfique pour ces deux pays et pourrait l'être pour le Canada aussi.
Nous ne sommes pas tout à fait d'accord pour ce qui concerne le Sénat, mais je pense que les députés néo-démocrates ont le coeur à la bonne place quand ils prétendent qu'il s'impose d'apporter des changements au fonctionnement de cette institution bancale.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Monsieur le Président, le Comité des affaires étrangères a demandé à l'unanimité que les sanctions contre l'Irak ne soient plus liées à certaines conditions. Le Canada fait partie du petit groupe de quatre pays qui continue d'insister pour le maintien des sanctions sans modifications.
Cinq mille jeunes enfants meurent chaque mois en Irak en raison des sanctions. Les autorités sanitaires déclarent que, dans le sud de l'Iraq, on retrouve l'un des plus hauts taux de leucémie dans le monde en raison de la présence d'uranium appauvri.
Des travailleurs de haut rang des Nations Unies ont démissionné en invoquant les sanctions. Nous condamnons collectivement les gestes posés par Saddam Hussein, mais nous devons reconnaître que nos sanctions pénalisent davantage les enfants iraquiens que les militaires.
La semaine dernière, les États-Unis ont à nouveau bombardé l'Iraq, cette fois dans une zone peuplée. Je crois qu'il est temps pour le Canada d'exprimer sa position. M. Bush, n'était au pouvoir que depuis 28 jours lorsqu'il a lâché des bombes sur des civils. Peut-être un examen approfondi de sa politique s'impose-t-elle avant qu'il y ait de nouveaux bombardements.
J'encourage notre ministre à examiner des moyens originaux d'aider à régler la grave crise qui fait rage en Iraq.
* * *
LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis honoré d'être à la Chambre des communes pour représenter Regina—Lumsden—Lake Centre. Il existe un magnifique esprit de collaboration et d'entraide communautaire dans ma circonscription. Cet esprit s'étend aux services de police communautaire. La GRC connaît les risques qu'il y a à perdre contact avec les citoyens des collectivités qu'elle sert. Le quartier général de la Division F de la GRC et l'École de la GRC se trouvent dans ma circonscription. C'est dans cette école que toutes les recrues de la GRC sont entraînées.
Devant les coûts croissants des services de police, la population canadienne veut un corps policier responsable, efficace et efficient. Soucieuse d'être à la hauteur des attentes de la population, la GRC a élaboré un programme de services de police communautaire. Je suis fier des efforts déployés par la GRC depuis les années 1980 pour rétablir le contact avec les collectivités qu'elle sert.
Je suis convaincu que le gouvernement est aussi fier de la GRC que tous les Canadiens. Je crois toutefois qu'il est absurde de gaspiller près d'un demi-milliard de dollars pour enregistrer des armes à feu et fabriquer artificiellement des criminels lorsque les forces policières qui doivent arrêter les criminels et protéger les citoyens respectueux de la loi manquent si cruellement de fonds.
* * *
PAUL DEMPSEY
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, je désire rendre hommage à l'ambassadeur d'Irlande au Canada, Son Excellence Paul Dempsey, et à sa femme, Janet. Au cours des cinq dernières années, ce couple merveilleux a représenté remarquablement la République d'Irlande au Canada.
L'ambassadeur Dempsey a beaucoup voyagé au Canada et visité toutes les régions de notre pays. Il a été un ardent défenseur de nombreuses initiatives importantes pour les Canadiens de souche irlandaise, dans tout le Canada.
Les Dempsey ont favorisé et coordonné avec succès les visites au Canada de nombreuses personnalités de l'Irlande, dont sa présidente, Mary McAleese.
Au nom de mes collègues du Groupe d'amitié interparlementaire Canada-Irlande, je remercie l'ambassadeur et Mme Dempsey de leur grande amitié et de leur soutien à notre groupe, ici à Ottawa. Je souhaite à Paul et à Jan une retraite longue et heureuse.
Je vous invite, monsieur le Président, ainsi que tous les parlementaires, à une réception d'adieu en l'honneur de l'ambassadeur Dempsey, aujourd'hui, entre 16 et 18 heures, dans la salle 238-S, la salle du Commonwealth, ici, dans l'édifice du Centre.
* * *
L'HÔPITAL CREDIT VALLEY
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je félicite l'hôpital Credit Valley de Mississauga de sa participation à l'Initiative des Innovateurs énergétiques de Ressources naturelles Canada.
L'Initiative des Innovateurs énergétiques vise à aider des entreprises et des institutions canadiennes à adopter des pratiques, des méthodes et des techniques écologiques. Comptant parmi 850 innovateurs énergétiques, l'hôpital Credit Valley s'est engagé pour le long terme à utiliser l'énergie efficacement, afin de réduire les coûts et de ralentir la croissance des émissions de gaz à effet de serre au Canada.
Le leadership dont font preuve des innovateurs énergétiques comme l'hôpital Credit Valley aidera le Canada à réaliser son objectif de réduire les émissions atmosphériques qui contribuent au changement climatique.
Encore une fois, félicitations à l'hôpital Credit Valley de s'être engagé volontairement à utiliser l'énergie efficacement et de faire sa part pour aider le Canada à atteindre ses objectifs en vue de protéger constamment notre environnement.
* * *
L'ASSOCIATION DES FEMMES EN COMMUNICATIONS
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, l'Association des femmes en communications a célébré hier soir le dixième anniversaire de sa fondation au cours de son gala annuel de remise des prix.
L'Association des femmes en communications est un organisme national bilingue sans but lucratif qui appuie l'avancement des femmes et l'influence qu'elles exercent dans les secteurs des communications et des télécommunications. L'Association regroupe quelque 1 500 membres au pays.
Je profite de l'occasion pour féliciter trois personnes exceptionnelles qui ont été honorées hier soir. Le prix de la femme de l'année a été remis à Denise Donlon, présidente de la société Sony Music du Canada. Le prix de mentor de l'année a été attribué à Michael McCabe, président et directeur général de l'Association canadienne des radiodiffuseurs, qui a aidé à mettre cette organisation sur pied. Le prix de pionnière de l'année a été remis à Michèle Fortin, vice-présidente de la Télévision française de Radio-Canada.
Je félicite toutes ces personnes ainsi que l'Association des femmes en communications pour le travail magnifique qu'elles ont fait en vue de promouvoir le rôle des femmes dans l'industrie des communications. Leurs efforts profitent à l'industrie et à tout le pays.
* * *
EDUARDO SEBRANGO RODRIGUEZ
M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends la parole pour adresser une requête à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et lui demander d'intercéder dans le but de rectifier un oubli ayant entraîné une injustice involontaire pour une personne dont la demande de citoyenneté canadienne doit être traitée rapidement pour qu'elle puisse représenter le Canada dans les rangs d'une équipe canadienne de soccer qui participera à la Coupe du Monde de 2002.
L'appel de Eduardo Sebrango Rodriguez en vue de l'application du processus accéléré de sa demande de citoyenneté a récemment été rejeté parce qu'il a été trop modeste pour expliquer à une juge de la cour fédérale qu'il est un joueur de soccer de renommée internationale qui pourrait représenter notre pays à la Coupe du Monde de 2002. La juge elle-même a reconnu que, s'il avait soulevé ce point, le traitement de sa demande de citoyenneté aurait peut-être été accéléré.
Il serait dommage d'empêcher que le dossier de ce jeune homme talentueux soit étudié par la Cour avant qu'une décision finale ne soit rendue.
J'aimerais faire valoir à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration que Eduardo Sebrango Rodriguez n'a pas eu droit à l'étude complète de toutes les circonstances pouvant militer pour l'étude accélérée de sa demande de citoyenneté. Nous demandons son aide dans ce dossier.
* * *
[Français]
LA CONTAMINATION DE L'EAU
M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Monsieur le Président, en 1993, le ministère des Transports apprend que le produit qu'il utilise pour déglacer les pistes de l'aéroport de Sept-Îles peut contaminer l'eau potable du secteur des Plages et devenir un danger pour la population. Malgré cela, il poursuit son utilisation pendant trois ans.
Ce n'est qu'en 1998 que le ministre des Transports a reconnu sa culpabilité et, depuis, aucune solution durable n'a été mise en oeuvre. Trois ans plus tard, des parents lavent encore leurs bébés avec de l'eau embouteillée, conformément aux directives des experts.
Dans le discours du Trône, le gouvernement fédéral a annoncé son intention d'augmenter les normes quant à la qualité de l'eau potable.
Les résidants du secteur des Plages à Sept-Îles ont soif d'eau et de justice. Il est du devoir du gouvernement fédéral de respecter ses propres orientations et d'apporter de toute urgence une solution permanente à ce désastre qu'il a lui-même causé.
* * *
[Traduction]
L'AGRICULTURE
M. Ovid Jackson (Bruce—Grey—Owen Sound, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens à la Chambre pour la première fois depuis les dernières élections générales. Je remercie les gens de ma circonscription, Bruce—Grey—Owen Sound, de m'avoir élu une troisième fois. Je profite aussi de l'occasion pour vous féliciter, monsieur le Président, de votre élection.
Mon travail consiste notamment à me promener dans ma collectivité en écoutant les propos de mes électeurs. Les agriculteurs de ma circonscription, qui nous fournissent des aliments à bas prix, abordables et sains depuis bien des années, me disent qu'un groupe parmi eux souffre plus que les autres et c'est celui des producteurs de céréales et d'oléagineux.
Ce groupe affirme avoir besoin d'aide dès maintenant et mon devoir à la Chambre est d'intervenir pour dire au gouvernement et à tous mes collègues que nous devrions procurer immédiatement de l'aide à ces gens et, à plus long terme, veiller à ce qu'ils soient protégés contre certaines protections tarifaires pratiquées par d'autres pays.
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SOPHIE ZEBER
Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour féliciter une amie et résidente de ma circonscription, Mme Sophie Zeber, à l'occasion de son 80e anniversaire. Sophie habite ma circonscription depuis plus de 30 ans et est très active et influente dans notre collectivité.
Elle est la voix de bien des gens de diverses origines qui ne possèdent peut-être pas les compétences linguistiques requises pour se faire entendre. Elle défend avec passion les gens du troisième âge de la collectivité et s'efforce d'assurer une meilleure qualité de vie à tous les aînés.
Sophie travaille sans relâche. Elle organise des cours de conditionnement physique et représente constamment sa collectivité. Elle possède une énergie incroyable et continue de lutter en notre nom à tous et au nom des collectivités. Je souhaite un bon anniversaire à Sophie à l'occasion de ses 80 ans.
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LES ANCIENS COMBATTANTS
M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, George Harry Mullin et John Robert Osborn sont titulaires de la Croix de Victoria et leurs noms sont légendaires dans ma circonscription.
Aujourd'hui, je veux parler à la Chambre d'un autre héros. Roy Sweet est un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale, âgé de plus de 80 ans, qui voulait préserver la mémoire de ces héros décorés de la Croix de Victoria. Il y a plusieurs années, on avait érigé en leur honneur des plaques commémoratives dans un coin de la terre que possédaient leurs familles respectives, mais au fil des années les familles sont parties et les plaques ont fini par être recouvertes de mauvaises herbes de sorte que le public pouvait rarement y avoir accès.
M. Sweet et des membres de la section locale de la Légion ont voulu déplacer les plaques pour les installer, l'une au cimetière local de Wapella, et l'autre au cénotaphe de Moosomin. Ils se sont heurtés à de nombreux obstacles, et il semblait bien que les plaques devaient continuer à languir dans l'obscurité de champs rarement visités, mais grâce à l'intervention de plusieurs personnes, les plaques ont fini par être déplacées pour être érigées à leur nouvel emplacement, de sorte que le public peut y avoir accès toute l'année.
J'invite la Chambre à rendre hommage à l'ancien combattant Roy Sweet qui a tenu à préserver la mémoire de deux des titulaires canadiens de la Croix de Victoria.
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LORIE KANE
M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole à la Chambre pour signaler les exploits d'une résidente de la circonscription de Hillsborough, Lorie Kane, la meilleure golfeuse canadienne.
Au cours des douze derniers mois, Lorie a accumulé les victoires dans le circuit des golfeuses professionnelles. En août dernier, elle a remporté la Michelob Light Classic, disputée à St. Louis, au Missouri. En septembre dernier, elle a remporté la New Albany Classic, disputée à New Albany. En octobre dernier, elle a remporté la Mizuno Classic, disputée au Japon. Enfin, il y a deux semaines, elle a remporté le Takefuji Tournament, disputé à Hawaï.
Pour l'année 2000, ses gains ont dépassé 800 000 $, ce qui lui a permis de se classer au cinquième rang sur la liste des boursières de la LPGA. Cette année, elle a déjà gagné plus de 250 000 $, en se hissant au deuxième rang sur la liste des boursières de la LPGA. Je vous ferai remarquer, monsieur le Président, ainsi qu'au ministre des Finances, qu'il s'agit en l'occurrence de dollars américains. Elle a récemment eu l'honneur d'être nommée l'athlète canadienne de l'année pour l'an 2000.
* * *
L'ASSURANCE-EMPLOI
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui, à Winnipeg, que sont entendues les conclusions finales de la première contestation en vertu de la Charte, voulant que la Loi sur l'assurance-emploi adoptée par le gouvernement crée une discrimination contre les femmes et les travailleurs à temps partiel.
Les femmes représentent 70 p. 100 des travailleurs à temps partiel et assument toujours en grande partie la responsabilité d'élever les enfants, de sorte qu'elles peuvent difficilement avoir droit aux prestations calculées selon le nombre d'heures travaillées. En juillet dernier, un sondage du gouvernement fédéral a révélé un écart de 8 p. 100 en faveur des hommes pour ce qui est de l'admissibilité aux prestations.
Kelly Lesiuk, infirmière à temps partiel, n'a pas eu droit à des prestations de maternité en 1998, parce qu'il lui manquait 33 heures de travail. Des problèmes l'avaient forcée à abandonner son travail à cinq mois de grossesse. Pour joindre les deux bouts, elle a dû retourner travailler six semaines après avoir subi une césarienne. Sa famille a dû utiliser toutes ses économies et emprunter.
Plus de 60 cas de ce genre attendent d'être entendus. Il est regrettable que les Canadiennes et les travailleurs à temps partiel doivent intenter des poursuites pour recevoir un traitement équitable. Pourquoi le gouvernement fédéral ne prend-il pas des mesures pour modifier cette loi discriminatoire de manière qu'elle reflète la réalité des travailleurs actuels?
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[Français]
L'ALLOCATION POUR FRAIS DE CHAUFFAGE
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, un grand nombre de commettants m'ont fait part de leur vive désapprobation quant au programme fédéral d'allocation pour les frais de chauffage.
J'aimerais lire un extrait d'une lettre de Mme Lise Arsenault, de Beauport, qui résume bien l'insatisfaction que suscite ce programme:
Lorsque cette promesse a été réalisée, j'ai cru évidemment qu'enfin le gouvernement commençait à nous comprendre, nous, travailleurs à revenu moyen et payeurs de taxes et d'impôt.
Je suis propriétaire d'une maison dotée d'un système à l'huile. Je suis mariée et mère de deux enfants. Mon époux et moi travaillons depuis l'âge de 17 ans pour un salaire moyen. Alors nous payons, comme disent nos ados, «full impôts» et n'avons jamais droit à un programme d'aide.
J'aimerais qu'un jour, vous puissiez aider les bonnes personnes. Cette année, nous avons payé le double du prix pour l'huile à chauffage par rapport à l'an passé et vous avez aidé, pour une grande partie, ceux qui n'utilisent même pas ce système de chauffage.
Le gouvernement explique son échec par son empressement à agir. Le Bloc québécois estime impératif de mettre rapidement en oeuvre des mesures concrètes qui viendront en aide aux personnes touchées par l'augmentation du prix de l'huile à chauffage.
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[Traduction]
OEUVRES MAGISTRALES
Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui attirer l'attention sur le merveilleux programme Oeuvres magistrales et son organisation fondatrice, le Trust pour la préservation de l'AV.
Chaque année, le programme Oeuvres magistrales met en valeur douze oeuvres d'une grande importance culturelle se trouvant dans les archives canadiennes de film, de radio, de télévision, de vidéo et de son. Le programme fournit les fonds nécessaires à la préservation et la restauration des oeuvres choisies.
Cette année, dans la catégorie radio, les oeuvres retenues sont: La diffusion du Jubilé de 1927, L'Heure provinciale et The Solitude Trilogy de Glenn Gould.
Les gagnants de la catégorie film sont: La vraie nature de Bernadette, par Gilles Carle; The Loon's Necklace, par Crawley Films; et The Grey Fox, par le regretté Phillip Borsos, qui met en vedette la merveilleuse Jackie Burroughs et qui a été produit par mon mari, Peter O'Brien.
Dans la catégorie son, les oeuvres choisies sont celles de Robert Charlebois, Raoul Jobin et Gordon Lightfoot. Les oeuvres reconnues dans la catégorie télévision et vidéo sont: Cré-Basile! Télé-Métropole et Femme d'aujourd'hui.
Je félicite tous ceux qui ont été récompensés. J'invite les députés à appuyer les efforts du programme de préservation des Oeuvres magistrales, dont pourront bénéficier les générations futures.
* * *
LA DÉFENSE NATIONALE
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, j'ai en ma possession un document qui décrit en détail, dans des termes sans précédent, les conditions horribles auxquelles sont soumis nos soldats en Bosnie. Il s'agit d'une lettre adressée au ministre de la Défense nationale, en date du 8 février, par le Président national de la Légion royale canadienne, M. Barclay.
M. Barclay décrit dans sa lettre les conditions observées par un groupe concerné qui s'est rendu en Bosnie, financé par la Légion. Les détails choquants donnés dans ce rapport ont incité M. Barclay à se mettre directement en rapport avec le ministre.
Ce rapport fait état du piètre état moral des soldats, de leurs uniformes en loques, horribles à voir, et du manque de matériel. En ce qui concerne les uniformes de combat, l'observateur rapporte qu'ils sont déchirés, élimés, tachés et rapiécés et qu'ils ne sont pas tous identiques.
La Convention de Genève nous oblige à traiter les forces ennemies mieux que nous ne traitons nos propres soldats. C'est totalement inadmissible. Comment le ministre explique-t-il que nos soldats soient si maltraités?
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
L'ÉCONOMIE
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, vendredi, le vice-premier ministre a finalement admis, après l'avoir nié pendant des semaines, que nous étions en plein ralentissement économique. Hier, le ministre des Finances a finalement admis, après l'avoir nié, que nous avions besoin d'une mise à jour financière et qu'il en présenterait une. Cela m'encourage parce que la première étape à franchir pour se remettre sur la bonne voie, c'est d'admettre l'existence du problème.
Puisque le ministre des Finances nous a demandé des suggestions, il a dit dans son mini-budget qu'il allait réduire certains taux marginaux d'imposition, mais qu'il n'augmenterait pas les exemptions personnelles ni les exemptions de conjoint. Augmentera-t-il ces exemptions afin que des milliers de travailleurs à faible revenu n'aient plus à payer d'impôt fédéral sur le revenu?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député sait très bien que nous augmentons le seuil. C'est le gouvernement actuel qui a prévu l'indexation afin que le seuil augmente automatiquement chaque année.
Si je comprends bien le point de vue du député, il veut réduire les impôts. Voudra-t-il aussi réduire les dépenses en même temps pour financer ces réductions d'impôt? S'il doit aussi réduire les dépenses publiques, croit-il qu'une telle réduction contribuera à stimuler l'économie?
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est nous qui posons les questions ici. C'est pour cette raison que nous devons voir cette mise à jour financière. Puisque le ministre ne veut rien faire...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Nous entendrons la question. Le chef de l'opposition pose une question.
M. Stockwell Day: Monsieur le Président, puisque le ministre n'est pas prêt à aider les travailleurs à faible revenu, examinera-t-il le taux d'imposition des sociétés dans notre pays? Ce taux est plus élevé que la moyenne de ceux de nos partenaires commerciaux de l'OCDE.
Accélérera-t-il la réduction annoncée de ce taux, qui doit passer de 28 à 21 p. 100, pour montrer sa confiance dans l'économie?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, pourquoi ne poserais-je pas les questions en plus d'y répondre? Après tout, il faut bien que quelqu'un pose des questions intelligentes à la Chambre.
Le député devrait savoir que, grâce à nos réductions, le taux d'imposition des sociétés sera inférieur de cinq points de pourcentage à celui en vigueur aux États-Unis. L'impôt sur les gains en capital est maintenant moins élevé au Canada qu'aux États-Unis. Notre traitement des options d'achat d'actions est maintenant plus généreux que ce qui se fait à cet égard aux États-Unis. Tout cela constitue le plus important stimulant financier jamais mis de l'avant par un gouvernement canadien.
M. Stockwell Day (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre sait bien que, au Canada, le ratio des impôts au PIB est de 43 p. 100, comparativement à 31 p. 100 aux États-Unis. C'est un point qu'il ne devrait pas oublier.
[Français]
Je pensais que le ministre des Finances était sincère hier lorsqu'il a nous a demandé nos suggestions. Aujourd'hui, je ne sais pas. Peut-il au moins assurer les travailleurs que son énoncé économique annoncera une baisse des cotisations à l'assurance-emploi de 2,25 $ à 2 $?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, depuis que nous avons pris le pouvoir, nous avons baissé les cotisations à l'assurance-emploi d'au-delà de six milliards de dollars. Encore là, en novembre, nous les avons baissées d'un autre 15¢.
Nous avons déjà démontré notre intention de baisser les impôts et les cotisations et d'encourager l'économie canadienne. C'est pour cela que nous allons passer au travers du ralentissement aux États-Unis. C'est pour cela que le Canada va avoir la meilleure croissance de tous les pays du G-7 cette année.
[Traduction]
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre des Finances oublie un détail, c'est que les hausses des cotisations au RPC vont accroître les charges sociales cette année.
L'énoncé politique présenté l'automne dernier par le ministre des Finances prévoyait une croissance économique de 3,5 p. 100. En janvier, le gouverneur de la Banque du Canada prévoyait une hausse de 3 p. 100. La semaine dernière, le secrétaire parlementaire du ministre émettait l'hypothèse d'une croissance de seulement 2 p. 100. Hier, au cours d'une émission à laquelle je participais avec le député de Markham, ce dernier a parlé d'une croissance de 1,5 p. 100.
Où se situe le ministre parmi toutes ces projections à la baisse? Quel sera, selon lui, le taux de croissance de l'économie canadienne cette année? Comment va-t-il concilier la croissance économique avec son plan financier?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député sait que nous nous fondons sur le consensus des économistes du secteur privé et que les résultats de ce consensus seront connus vers la fin de mars. Le député sait également qu'en octobre nous avons constitué une réserve pour éventualités substantielle et que nous avons prévu une marge de prudence en prévision du ralentissement que nous constatons actuellement.
J'aimerais, à mon tour, poser une question au député. Lorsque mon collègue parle des cotisations au Régime de pensions du Canada, s'agit-il des mêmes cotisations que le gouvernement fédéral et les provinces, c'est-à-dire moi-même et celui qui était à l'époque trésorier de l'Alberta et qui est aujourd'hui chef de l'opposition, avons haussées? Le député parle-t-il des mêmes cotisations?
Des voix: Bravo!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je sais qu'il y a beaucoup d'exubérance à la Chambre aujourd'hui, mais la période des questions dure 45 minutes, et nous perdons du temps.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cette exubérance s'explique quand on sait que cette taxe sur le RPC représente l'une des plus fortes hausses de taxe de l'histoire canadienne. L'opposition s'y est opposée et le gouvernement de l'Alberta a cherché à appliquer un système distinct aux Albertains.
Je répondrai au ministre des Finances que, proportionnellement à notre PIB, le fardeau fiscal des Canadiens est encore supérieur de 12 p. 100 à celui des Américains. Comment le ministre peut-il dire aux Canadiens qui participent à l'exode des cerveaux que nous payons moins d'impôt, alors que toutes les statistiques démontrent que notre fardeau fiscal est sensiblement plus lourd que celui de notre principal partenaire commercial?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, et nous avons un bien meilleur système de soins de santé. Mais je reviens au Régime de pensions du Canada. Si ma mémoire est fidèle, les participants à toutes les conférences fédérales-provinciales auxquelles j'ai assisté, y compris la rencontre avec l'ancien trésorier de l'Alberta, ont appuyé le Régime de pensions du Canada.
L'Alliance est-elle aujourd'hui contre le Régime de pensions du Canada? L'Alliance manquerait-elle à sa parole au sujet du passif non capitalisé?
Quelle est la position de l'Alliance au sujet du Régime de pensions du Canada, l'un des piliers de notre système de retraite? Tous les Canadiens l'appuient et le député devrait nous dire si, oui ou non, il en fait autant.
* * *
[Français]
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre a déclaré, le 8 février de cette année, qu'il ne pouvait rendre disponibles les documents de négociation du Sommet des Amériques, parce que certains pays s'y opposaient.
Or, trois semaines avant qu'il ne fasse cette déclaration, les 435 représentants et les 100 sénateurs américains avaient déjà accès à ces mêmes documents.
Comment le premier ministre peut-il expliquer la réponse qu'il a donnée aux parlementaires ici, à la Chambre, sachant que les parlementaires américains, eux, ont accès aux documents?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, au lieu de parler du système américain, parlons donc de notre système ici, au Canada.
Ici, nous incluons les parlementaires dans le développement des politiques et des priorités pour nos négociations commerciales. Nous écoutons les Canadiens, ici, et continuerons à les écouter et à communiquer avec eux de différentes manières.
Notre gouvernement défend sa position de négociation commerciale devant le comité de la Chambre. Ce gouvernement est inclusif comme aucun gouvernement ne l'a jamais été.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, c'est assez extraordinaire. On nous dit qu'il y a de la transparence et qu'on a accès à ces débats, mais on ne peut même pas avoir l'ordre du jour de ces rencontres.
On ne sait pas ce qui sera discuté là-bas, et on nous dit qu'on participe à l'élaboration d'une position.
Je demande à nouveau au premier ministre, qui nous faisait la leçon, le 8 février, en disant qu'il ne pouvait nous montrer les documents parce que certains pays s'y opposaient, comment se fait-il qu'ici, on ne puisse pas les voir, mais qu'ils soient disponibles aux États-Unis?
Et le premier ministre est au courant de cela. S'il ne l'était pas, il y a un problème. Comment peut-il nous dire une telle chose en sachant que c'est contraire à la vérité? Qu'a-t-il fait, sinon dire l'inverse...
Le Président: L'honorable ministre du Commerce international a la parole.
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, nous croyons fermement que tous les Canadiens—pas seulement les parlementaires, mais tous les Canadiens—devraient avoir accès aux ébauches de texte pour négociation, et nous faisons pression sur nos 33 partenaires des Amériques, précisément pour que ces textes soient rendus publics. Nous ne pouvons pas le faire unilatéralement. Nos partenaires doivent être d'accord.
Or, une fois de plus, je peux vous assurer d'une chose: le Canada mène le groupe en ce qui a trait aux initiatives ouvertes et transparentes à travers l'hémisphère.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, avec un défenseur comme ça, le Canada n'est pas sorti de l'auberge.
Sur le même sujet, hier, à la période des questions orales, le ministre du Commerce international a déclaré, et je le cite: «Si un document est communiqué au Congrès, il ne faudra pas longtemps avant qu'il devienne public.» En point de presse, quelques minutes plus tard, il déclarait, et je le cite en traduction libre: «Les membres du Congrès ont un engagement de confidentialité.»
Ma question au ministre du Commerce international est la suivante: n'a-t-il pas un problème sérieux de crédibilité dans le dossier du commerce international, comme il en avait un au Développement des ressources humaines, en disant, à quelques minutes d'intervalle, une chose et son contraire?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, ce que j'ai exprimé très clairement, c'est qu'il y avait des façons différentes de procéder aux États-Unis et au Canada.
Ici, nous avons consulté le comité parlementaire, et les positions de négociation avec lesquelles nous nous engageons à Buenos Aires, à la négociation, reflètent ce que nous avons entendu au comité parlementaire.
Nous avons notre façon de faire les choses. Nous allons continuer de consulter les provinces étroitement et les parlementaires également.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, quelle crédibilité peut-on accorder aux propos du ministre du Commerce international, quand celui-ci explique à la Chambre qu'il est impossible, comme parlementaires, d'avoir accès aux textes de cet accord, parce que, dit-il, nos partenaires ne veulent pas, nous assumons le leadership de la transparence, on est clairs?
Sauf qu'aux États-Unis, ce n'est pas tout à fait une «binerie». Aux États-Unis, les parlementaires ont accès aux documents. Comment peut-on le trouver crédible?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, nous avons été le premier pays à rendre public notre mandat de négociation. Les positions canadiennes ont été les premières à être mises sur le site Internet pour consultation par l'ensemble des citoyens canadiens.
Nous avons offert le leadership des hémisphères à la réunion de Toronto, à la dernière rencontre ministérielle des ministres du Commerce, et nous allons continuer de faire des progrès dans cette voie, mais en respectant nos partenaires, contrairement à ce que nos amis du Bloc nous demandent de faire à la Chambre.
* * *
[Traduction]
LE COMMERCE
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ce site Web ne fait état d'aucune position canadienne sur les services. Dans sa hâte de donner aux multinationales de la santé un accès au marché, le gouvernement fédéral laisse imprudemment tomber notre système universel de soins de santé.
Lorsque les Américains veulent protéger quelque chose auquel ils tiennent, telles des mesures relatives à la sécurité nationale, ils exigent que cela fasse l'objet d'une exception générale avant de signer tout accord commercial. Certes, les soins de santé des Canadiens méritent une protection similaire.
Au lieu de les laisser tomber imprudemment, le gouvernement exigera-t-il que les soins de santé fassent clairement l'objet d'une exception avant de signer tout accord commercial?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons maintes fois dit que le système de soins de santé ne sera pas du tout touché par la négociation de quelque accord commercial que ce soit avec les Américains.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, cela devrait peut-être figurer sur le site Web, où aucune position n'est encore affichée. Le Pacte de l'automobile était censé être sûr, et il est définitivement mort hier. Notre environnement était censé être sûr et pourtant, des particuliers et le gouvernement ont dû aller contester hier devant les tribunaux une décision du tribunal de l'ALENA de laisser les pollueurs polluer.
Les Canadiens veulent des accords commerciaux et des règles commerciales qui protègent ce à quoi ils tiennent le plus. Le gouvernement refusera-t-il de signer tout Accord général sur le commerce des services ou AGCS qui ne protégera pas des priorités comme la santé, l'environnement et de bons emplois?
Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons fixé des règles claires sur la question de l'environnement et j'ai dit clairement que la question de la santé ne pouvait pas être touchée par l'ALENA ni par les accords commerciaux que nous concluons avec les Amériques.
L'AGCS n'exclut pas non plus que nous ayons l'assurance-maladie au Canada. Pour ce qui est de l'environnement, nous avons conclu des accords internationaux et nous les respectons. Il arrive que des appels soient interjetés devant le groupe spécial de l'ALENA ou de l'AGCS et nous y défendons nos intérêts, comme tout pays a le droit de le faire.
* * *
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.
Le premier ministre confirmera-t-il que des collaborateurs du cabinet du premier ministre ont rédigé une note au printemps 1999, note qui a été remise par M. Jean Carle au bureau du président de la Banque de développement du Canada et qui proposait des réponses à donner aux demandes de renseignements sur l'intervention du premier ministre dans le dossier d'Yvon Duhaime et de l'Auberge Grand-Mère?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je pense que la plupart des députés se seraient attendus à ce que, à la suite de la déclaration très claire et catégorique faite hier par la GRC, le très honorable député prenne aujourd'hui la parole et présente ses excuses au premier ministre du Canada.
Sauf le respect que je lui dois, je pense que, s'il persiste à se livrer à ce genre de politicaillerie, Joe Qui risque de se métamorphoser en Joe McCarthy.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, permettez-moi de citer un extrait de cette note destinée au président de la Banque de développement.
[Français]
Je cite:
Jean Carle nous a apporté les questions et réponses que le Bureau du premier ministre a préparées pour le dossier Duhaime.
[Traduction]
Cette note confirme l'implication directe de M. Jean Carle. Pourquoi le premier ministre a-t-il dit si catégoriquement à la Chambre, le 7 février, que M. Carle n'avait rien eu à voir avec le dossier de l'Auberge Grand-Mère?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, le conseiller en éthique a dit catégoriquement que la question a été examinée et que les allégations ne sont pas fondées.
Hier, la GRC a déclaré que les questions soulevées par le député ont été examinées et qu'il n'y a pas lieu de mener une enquête plus approfondie.
Voilà le chef d'un parti dans l'ombre à la Chambre des communes qui s'entête à ne pas accepter une façon de faire juste et raisonnable et qui refuse de s'excuser pour son comportement auprès du premier ministre.
* * *
LE PREMIER MINISTRE
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, même si cela ne fera pas l'effet d'une bombe, tout le monde sait que le premier ministre soutient depuis des années l'Auberge Grand-Mère. Par pure coïncidence, bien entendu, mieux l'hôtel se portait, mieux le terrain de golf adjacent s'en sortait.
Il y a deux hôtels concurrents en ville: le favori du premier ministre, l'Auberge Grand-Mère et bien entendu, l'Auberge des Gouverneurs. Ce dernier hôtel est situé près du bureau de comté du premier ministre et l'Auberge Grand-Mère est de l'autre côté de la ville. Peut-on deviner où les collaborateurs du premier ministre ont séjourné, pour une somme de 33 000 $? À l'Auberge Grand-Mère, bien entendu. Ils ont dépensé moins de 300 $ à l'Auberge des Gouverneurs, même si cela était beaucoup plus pratique pour eux.
Il s'agit de savoir ce qui attire tant les collaborateurs du premier ministre à l'Auberge Grand-Mère.
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'aurais pensé que la députée aurait été sidérée de constater que malgré diverses visites dans la circonscription par le premier ministre et ses collaborateurs pour effectuer tout un travail, la somme en question au total n'était que la moitié de la somme que l'Alliance a obtenue d'un cabinet d'avocats qui a reçu quelque 300 000 $ des contribuables de l'Alberta pour réparer les dernières calomnies venant de ce parti.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suppose que nous pourrions passer les 40 prochaines minutes à nous excuser mutuellement d'un côté à l'autre de la Chambre. Toutefois, de 1999 à 2001...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La présidence ne peut entendre la question. Il est très important que nous entendions tous les questions et réponses. La députée d'Edmonton-Nord a la parole.
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, de 1999 à 2001, les collaborateurs du premier ministre ont passé un grand total de 330 nuits à l'Auberge Grand-Mère pour une dépense totale de 33 000 $. Par opposition, ils n'ont passé que trois nuits à l'Auberge des Gouverneurs et y ont dépensé moins de 300 $. L'Auberge Grand-Mère est de l'autre côté de la ville alors que l'Auberge des Gouverneurs est pratiquement à côté du bureau de comté. Est-ce que c'était la politique officielle qui voulait qu'ils prennent une chambre à l'Auberge Grand-Mère ou simplement une subtile...
Le Président: Le ministre de l'Industrie a la parole.
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, nous apprécions vraiment que la députée explique pourquoi le premier ministre a obtenu une si forte majorité parce qu'il a visité sa circonscription très souvent au cours des dernières années. Toutefois, la députée ne devrait pas s'abaisser à trouver quelque chose de suspect ou de louche à cela. Malheureusement, c'est ce qu'elle fait.
* * *
[Français]
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, des problèmes comme ceux que l'on connaît présentement dans la négociation de la Zone de libre-échange des Amériques se sont déjà posés lors de la négociation de l'Accord multilatéral sur les investissements. Pourquoi? Parce qu'on a voulu, comme aujourd'hui, tout garder secret.
Lorsqu'on interrogeait le gouvernement pour savoir ce qui se passait, il nous disait: «Tout va bien. Faites-nous confiance. Il n'y a rien à craindre.»
Quand les textes ont été connus, on a vu qu'on s'en allait vers une catastrophe et qu'une bonne partie de ce qu'on appelle le modèle québécois y serait passé.
Doit-on comprendre aujourd'hui que le ministre nous demande, encore une fois, de lui faire une confiance aveugle dans le dossier de la Zone de libre-échange des Amériques? Est-ce que c'est ce qu'on doit comprendre?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, ce que nous avons entrepris de négocier est sur Internet. Nous avons rendu notre position absolument publique sur les tables qui sont là.
Le mandat qui m'a été confié par le gouvernement canadien est connu. Les positions ont été discutées avec les provinces. Chaque province a accès à ce site Internet et nous communique ses prises de position sur chacun des points.
Nous avons eu une conférence fédérale-provinciale ici, le 5 février, où il y a eu des discussions précises sur cette négociation. Je peux assurer qu'à Buenos Aires, le Canada va jouer un rôle important dans cet ordre.
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Monsieur le Président, ce que le ministre ne semble pas comprendre, c'est qu'on ne peut pas évaluer les positions canadiennes si on n'a pas les positions qui sont en négociation sur la table.
Est-ce que le ministre comprend que de plus en plus d'organismes de la société civile, de tous les milieux au Canada et au Québec, se mobilisent contre cette négociation? Est-ce que le ministre ne reconnaît pas que son manque de transparence et son attitude cachottière sont responsables de cette opposition qui monte dans la rue?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, nous allons respecter nos partenaires des hémisphères des Amériques. Nous allons continuer de leur demander de bien vouloir rendre publics ces textes, parce que c'est ce que le Canada souhaite et parce que ces textes devraient être rendus publics. Mais le Canada ne le fera pas unilatéralement par respect pour les autres pays avec lesquels nous sommes en négociations.
* * *
[Traduction]
LA DÉFENSE NATIONALE
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale a tenté hier de prétendre que le fait de ramener à 8 000 le nombre d'heures de vol des Aurora ne met pas en péril la défense côtière du Canada. Son chef de la force aérienne n'est pas d'accord. Nous avons en main un document sous la signature du général Campbell, qui précise que toute réduction des heures de vol des Aurora sous le seuil des 11 500 heures entravera sérieusement la capacité de la force aérienne de protéger la souveraineté du Canada.
Compte tenu de cette mise en garde d'un soldat qui doit savoir de quoi il parle, pourquoi le ministre a-t-il favorisé ces réductions?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, c'est ce que le général Campbell et l'état-major de la force aérienne ont recommandé. À leur avis, étant donné que nous sommes en mesure d'investir davantage dans la mise à jour de notre matériel et d'y intégrer une meilleure technologie afin de le rendre plus efficient, nous obtiendrons un produit de meilleure qualité et nous pourrons effectuer autant de patrouilles que c'était auparavant le cas.
Ils réussiront à économiser de l'argent et du temps parce qu'ils pourront faire plus d'entraînement au vol dans des simulateurs au sol. Cela réduira le nombre d'heures pendant lesquelles les aéronefs doivent prendre l'air.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai ici le document. Ils volent ou ils ne volent pas.
Lorsque les libéraux ont pris le pouvoir en 1993, les avions Aurora cumulaient un total de 19 200 heures de vol par année. Le ministre veut maintenant que ce nombre soit ramené à 8 000 heures. Hier, le ministre a rejeté ces chiffres, mais nous en avons ici la preuve. Le général Campbell estime que cette réduction de 58 p. 100 aura une incidence inacceptable sur «la protection des frontières».
Pourquoi devrions-nous nous fier aux propos d'un politicien de carrière plutôt qu'à l'expérience d'un soldat de carrière?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je réitère le fait que ces données ne sont pas de moi ni du gouvernement. C'est une recommandation de la force aérienne. C'est une recommandation du général Campbell et d'autres intervenants de la force aérienne, qui estiment qu'ils peuvent exploiter ce service de façon plus efficace et que nous devrions investir davantage dans la mise à jour du matériel, et c'est exactement ce que nous faisons.
* * *
[Français]
LE COMMERCE INTERNATIONAL
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales et celui du Commerce international nous vantent souvent les mérites du modèle européen.
Or, la Commission européenne, qui négocie les accords commerciaux au nom de l'Union européenne, reçoit son mandat explicitement des États de l'Union européenne.
Est-ce que le gouvernement est prêt à instaurer un mécanisme de coopération semblable avec les provinces, c'est-à-dire de faire en sorte que l'équipe de négociateurs canadiens reçoive son mandat explicitement du gouvernement fédéral et également des provinces?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de voir que le Bloc continue d'aller chercher ailleurs des inspirations de modèles. Après avoir souhaité le modèle américain, il nous revient maintenant avec le modèle européen.
Je peux dire que nous sommes très heureux de la collaboration que nous avons mise sur pied avec les provinces. Nous avons eu une conférence fédérale-provinciale où nous avons discuté de tous les enjeux des négociations, et cette discussion a été très fructueuse. Nous sommes tout à fait sur la même longueur d'onde sur la grande majorité des enjeux.
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, non seulement le mandat du négociateur européen est-il défini et donné par les États qui forment l'Union européenne, mais ces derniers doivent également approuver formellement le résultat des négociations.
Si, encore une fois, ils sont sérieux en vantant les vertus du modèle européen, comme le ministre du Commerce international l'a fait dans les médias récemment, est-ce que le gouvernement est prêt à l'instaurer ici, c'est-à-dire à faire en sorte que le résultat des négociations soit approuvé également par les provinces?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, il est vrai que le modèle européen évolue assez rapidement vers le modèle du fédéralisme que nous avons.
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Pierre Pettigrew: Alors, il est clair que si l'Europe est en train de devenir une fédération, c'est ce que plusieurs souhaitent.
Ce que je peux dire, c'est que nous allons continuer de travailler très étroitement avec les provinces dans ce dossier, parce que c'est extrêmement important pour nous que la position canadienne reflète l'ensemble des intérêts que nous avons à travers le pays.
* * *
[Traduction]
LA DÉFENSE NATIONALE
M. Peter Goldring (Edmonton-Centre-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale veut ramener le nombre d'heures de patrouille des Aurora, qui était de 19 000 lorsque les libéraux ont pris le pouvoir, à seulement 8 000 aujourd'hui.
Lorsqu'il s'agit de déterminer les besoins opérationnels minimaux, qui est le plus compétent, le chef de la force aérienne, qui a 30 ans d'expérience militaire, ou le ministre, qui n'en a que deux?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je le répète, la recommandation ne vient pas de moi. La recommandation vient de la base, c'est-à-dire de la force aérienne, et non du sommet de la hiérarchie.
M. Rob Anders: Ne l'avez-vous pas lue?
L'hon. Arthur C. Eggleton: Les députés d'en face se trompent fréquemment dans leurs recherches, et je suis sûr de trouver où ils ont fait fausse route, cette fois-ci encore.
Tout d'abord, ils ont tort de parler de 19 000 heures, puisque nous en sommes actuellement à 11 000. Nous envisageons maintenant un nombre de 8 000, mais il faudra atteindre cet objectif au moyen d'un système de formation plus efficace et non d'une diminution des patrouilles qui visent à garantir la sécurité du Canada. Les patrouilles seront maintenues.
M. Peter Goldring (Edmonton-Centre-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, récemment, les canons qui ont servi pour la salve d'honneur de la gouverneure générale, à l'occasion du discours du Trône, ont dû être transportés sur la colline du Parlement par des remorqueuses d'automobiles parce que les roues des camions militaires étaient inutilisables.
De toute évidence, la capacité opérationnelle est à son plus bas, et les libéraux n'y attachent pas une grande priorité.
Le ministre nous dirait-il quand les véhicules de notre armée pourront rouler de nouveau?
L'hon. Art Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, lors de la salve d'honneur pour la gouverneure générale, les forces armées se sont fort bien acquittées de leur tâche.
J'ajoute que le gouvernement est en train de remplacer ou de moderniser tout le matériel des Forces canadiennes. Je viens d'aller en Érythrée, en Éthiopie. Nos forces ne tarissent pas d'éloges sur le nouveau transport de troupes blindé LAV III. C'est un véhicule ultramoderne. Même les Américains veulent maintenant acheter du matériel canadien.
* * *
[Français]
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES
M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international.
Étant donné l'importance qu'aurait un accord sur la Zone de libre-échange des Amériques pour la population canadienne, le ministre ne convient-il pas qu'il serait raisonnable que tous les députés de la Chambre puissent faire valoir leur point de vue et celui de leurs électeurs?
Le ministre est-il prêt à recommander la tenue d'un débat exploratoire à ce sujet, avant la tenue du Sommet de Québec au mois d'avril?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier le député d'Ottawa—Vanier de sa question et de son intérêt continu pour ce sujet très important.
Je tiens à annoncer à la Chambre, aujourd'hui, qu'effectivement, je m'engage à ce que notre gouvernement demande à la Chambre de tenir un débat exploratoire spécial sur la ZLEA et ce, avant le Sommet des Amériques.
* * *
[Traduction]
LE COMMERCE
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce. Hier, la société Metalclad défendait devant un tribunal de la Colombie-Britannique son droit, en vertu de l'ALENA, d'installer au Mexique un dépotoir de déchets toxiques qui passe outre aux préoccupations environnementales et sanitaires de la municipalité et du gouvernement élu de l'État en question.
Vu que le gouvernement fédéral est intervenu dans le cadre de cette attaque d'une entreprise contre la démocratie; le ministre peut-il assurer à la Chambre que le Canada ne signera pas d'accords, dans le cadre de la ZLEA, contenant des dispositions relatives aux différends entre investisseurs et États similaires à celles qui se trouvent dans le chapitre 11 de l'ALENA et qui ont conduit un tribunal à rendre cette décision dangereuse et destructive en faveur de la société Metalclad?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le député sait pertinemment que j'ai dit très clairement que nous avions déjà demandé des éclaircissements concernant le libellé du chapitre 11 de l'ALENA.
Nous travaillons de concert avec les Mexicains et les Américains en vue d'obtenir ces éclaircissements et de nous assurer que le chapitre 11 reflète bien les intentions des rédacteurs de l'ALENA. Dans le cadre d'un éventuel accord sur la ZLEA, nous éviterions toute ambiguïté qui nous mettrait dans une situation similaire à celle que nous sommes en train d'essayer de rectifier actuellement.
M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, j'aurais aimé que le ministre dise tout simplement non. Le ministre a dit qu'il ne rendrait pas publics les documents relatifs aux négociations de la ZLEA à moins d'en avoir obtenu l'autorisation de nos 33 partenaires de la ZLEA.
Pourquoi le ministre accorde-t-il à ces pays un droit de veto sur le droit des Canadiens à connaître la teneur de ces importants documents qui ont une incidence sur notre avenir? Pourquoi accorde-t-il plus de respect aux gouvernements de Sainte-Lucie, de la Barbade et du Pérou qu'aux Canadiens? Pourquoi un tel mépris pour les Canadiens?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, lorsque nous négocions avec nos partenaires, nous les respectons et nous respectons les règles du jeu.
Notre pays est le premier à avoir publié sa position sur Internet. Au nom du Canada, j'ai demandé que tous les documents soient rendus publics. Nous allons essayer de persuader nos partenaires de le faire car nous croyons qu'il est dans l'intérêt de nos concitoyens et de tous les parlementaires qu'ils puissent disposer de ces documents.
* * *
LA BANQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CANADA
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, comme la Chambre a maintenant la preuve indéniable que Jean Carle est intervenu auprès de la BDC, au nom du premier ministre, dans le dossier de l'auberge, le premier ministre pourrait-il nous dire si d'autres interventions ont été faites soit par lui, soit par Jean Carle, soit par un membre de son cabinet dans l'affaire de l'Auberge Grand-Mère?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, avec toutes les questions, notamment l'agriculture, l'avenir de l'industrie automobile, le secteur de l'information et de la technologie, qui préoccupent les Canadiens dans leur milieu de vie, la population devrait se demander pourquoi le parti d'en face, malgré les conclusions du conseiller en éthique et de la GRC, qui estiment qu'il est inutile de pousser l'enquête plus à fond, continue de poser des questions qui ternissent la réputation d'un homme qui, après avoir consacré 38 ans de sa vie à la politique, possède toujours une solide réputation et ne mérite sûrement pas d'être ainsi attaqué.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, pourquoi le premier ministre n'a-t-il pas le courage d'intervenir lui-même à la Chambre pour nous expliquer pourquoi il a déclaré que M. Jean Carle n'était pas mêlé à cette affaire quand cette note prouve le contraire? Je serais disposé à déposer cette note à la Chambre des communes.
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, la question que se posent vraiment la plupart des députés et des gens qui suivent les travaux de la Chambre est la suivante: que cherche à accomplir exactement le député?
Hier, il a déclaré ceci, et je cite:
La GRC semble avoir décidé qu'il n'y a pas eu d'activités criminelles et, à la lumière des données dont nous disposons, j'accepte cette décision.
Que s'est-il passé depuis hier? Le député a-t-il eu une autre conversation avec l'ex-président de la BDC?
* * *
LE COMMISSAIRE À LA PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne): Monsieur le Président, après plus de cinq ans, la ministre de la Justice refuse encore de tenir compte des recommandations du commissaire à la protection de la vie privée. Trois millions et demi de Canadiens sont étiquetés comme étant des individus pouvant être dangereux parce que leur nom apparaît dans une banque de données de la police.
La ministre prétend que son registre est un succès en raison des renseignements que contient la banque de données. Tout cela ne tient pas la route. Le commissaire à la protection de la vie privée a révélé que la banque de données de la ministre contenait même les noms de témoins et de victimes d'actes criminels.
Pourquoi la ministre ne tient-elle aucun compte de l'avis du commissaire? Pourquoi n'a-t-elle pas remédié à ce gâchis?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je peux donner l'assurance que nous tenons compte des avis du commissaire à la protection de la vie privée. En fait, nous avons souvent consulté le commissaire au cours des sept dernières années.
Nous lui avons posé des questions et il nous a dit que ces questions étaient parfaitement justifiées.
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ce n'est pas vrai, selon le commissaire. La plupart des trois millions et demi de Canadiens dont les noms sont dans la banque de données de la police ne savent même pas que la police a des dossiers sur eux. Ils ne savent même pas qu'ils peuvent devenir la cible d'actions policières en raison de renseignements erronés que la ministre détient sur eux.
Le commissaire à la protection de la vie privée soulève d'autres préoccupations dans sa lettre, notamment que les renseignements contenus dans la banque de la police ne sont pas pertinents et dépassent les pouvoirs accordés à la ministre par la Loi sur les armes à feu. Des millions de Canadiens doivent se conformer à la Loi sur les armes à feu. Pourquoi pas la ministre?
L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je répète que nous avons consulté le précédent commissaire à la protection de la vie privée à un certain nombre de reprises au cours des sept dernières années.
Si le député parle du nouveau commissaire et si celui-ci désire discuter avec moi de certaines préoccupations, je suis tout à fait disposée à le rencontrer et j'espère qu'il me fera la courtoisie de me contacter directement.
* * *
[Français]
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Commerce international vient de nous dire qu'il souhaitait que la Chambre tienne un débat sur la question de la Zone de libre-échange des Amériques avant la tenue du Sommet de Québec.
En toute logique, pour que nous ayons un débat sérieux avant que les parlementaires se prononcent, s'engage-t-il à ce que nous ayons accès aux textes qui serviront de base à la négociation de la Zone de libre-échange des Amériques?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, on sait très bien que cet accord de libre-échange ressemblera drôlement aux autres accords de libre-échange que nous avons négociés. Il est évident qu'il n'y a rien qui ressemble plus à un accord de libre-échange qu'un autre accord de libre-échange.
La position de négociation du gouvernement canadien est là. Je peux assurer que, sur la base des informations qui sont là, les parlementaires qui ont déjà contribué beaucoup à la position du gouvernement canadien aux comités de la Chambre seront parfaitement capables de nous faire valoir des points de vue très intéressants, et j'ai hâte de participer à ce débat.
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, j'étais tantôt heureuse que le ministre dise oui à un débat, mais ce qu'il vient de nous dire n'est pas sérieux. Si on veut débattre ici de ce que sera le débat qui se poursuivra lors des négociations, il faut avoir les textes.
Pourquoi nous a-t-il dit tout à l'heure que ce serait manquer de respect que de nous les soumettre? Est-il en train de dire que les États-Unis, que les Américains, ont manqué de respect envers les autres pays en faisant ce que le Bloc demande qu'il soit fait?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, les Américains ont un processus qui permet la divulgation d'un certain nombre de documents. C'est un processus différent de celui que nous avons au Canada.
Le système canadien a un grand nombre d'autres avantages également puisque les parlementaires, par le biais du comité, sont déjà consultés par le gouvernement, ce qui n'est pas nécessairement le cas dans d'autres systèmes.
On peut assurer que nous aurons un dialogue continu sur ce sujet très important avec l'ensemble des partis et avec chacune des provinces à travers le Canada pour faire une belle contribution à Buenos Aires.
* * *
[Traduction]
LA GARDE CÔTIÈRE
M. James Lunney (Nanaïmo—Alberni, Alliance canadienne): Monsieur le Président, vendredi, j'ai posé au ministre des Pêches et des Océans une question à propos du démantèlement des activités de plongée de recherche et de sauvetage de la Garde côtière canadienne. Or, dimanche, Paul Sandhu est mort tragiquement quand sa voiture a sauté par-dessus une digue et plongé dans le fleuve Fraser.
L'aéroglisseur de recherche et de sauvetage est arrivé sur place en moins de trois minutes. Les plongeurs auraient pu tenter une opération de sauvetage, mais ils n'étaient pas autorisés à apporter leur équipement de plongée en raison de l'ordre du ministre. Ils ont été forcés d'attendre sans rien faire tandis que les pompiers sortaient le véhicule de l'eau.
Le ministre expliquera-t-il à la Chambre comment il a pu justifier cette décision bureaucratique qui a déjà coûté une vie?
L'hon. Herb Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, de la part de nous tous à la Chambre, j'adresse nos plus vives condoléances à la famille Sandhu à la suite de ce tragique accident.
Le député devrait savoir que la plongée de sauvetage ne constitue pas une mission de base de la Garde côtière. Cette mission appartient en fait au ministère de la Défense nationale. La Garde côtière a cependant exécuté un projet pilote qu'elle évalue depuis six ans. À la suite d'une évaluation globale, elle a décidé d'abandonner ce projet pilote.
C'est une décision d'ordre opérationnel qui a été prise par des spécialistes. À en juger d'après la question que le député a posée auparavant, je pense qu'il veut...
Le Président: Le député d'Île de Vancouver-Nord a la parole.
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le propre comité consultatif du ministre a conseillé et recommandé de ne pas prendre cette décision. L'équipe de sauvetage de la Garde côtière a été mise sur pied en 1994 pour répondre à un besoin pressant, qui subsiste toujours. La capacité d'intervention rapide de l'aéroglisseur Sea Island et de l'équipe de plongée est exceptionnelle et ne peut être égalée par la Défense nationale ou par la GRC.
Le ministre a démantelé cette équipe malgré les recommandations de son propre comité consultatif. Pourquoi le ministre dit-il non alors que ses spécialistes disent oui?
L'hon. Herb Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je me permets de répéter à l'intention du député que, tout d'abord, la plongée de sauvetage n'est pas une mission de base de la Garde côtière. Cela est conforme à ce qui se fait dans les services américains et britanniques de garde côtière.
Il s'agissait d'un projet pilote d'une durée de six ans qui avait été lancé par notre gouvernement. Le projet pilote a fait l'objet d'une évaluation globale. À la suite de cette évaluation, les spécialistes ont décidé, en fonction de considérations d'ordre opérationnel, que ce projet ne pouvait pas se poursuivre. Je puis cependant assurer au député que le ministère de la Défense nationale continuera d'offrir l'excellent service de plongée de sauvetage qu'il a toujours assuré.
* * *
L'INDUSTRIE AUTOMOBILE
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. Hier, une délégation des Travailleurs canadiens de l'automobile dirigée par Buzz Hargrove a rencontré le vice-premier ministre, le ministre de l'Industrie et des membres du caucus pour discuter de la situation qui prévaut actuellement dans l'industrie canadienne de l'automobile à l'approche de l'expiration du Pacte de l'automobile canado-américain.
Le ministre expliquerait-il à la Chambre quelle incidence aura cette rencontre et quelle sera la position du gouvernement dans le contexte de l'ALENA après l'expiration du Pacte?
L'hon. Brian Tobin (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de Brampton-Centre pour sa question. Il ne fait aucun doute que le Canada réussit très bien dans le domaine de l'automobile en Amérique du Nord. En effet, nous fabriquons deux voitures pour chacune que nous vendons au Canada. Il est donc vrai que nous réussissons bien.
Cependant, les Travailleurs canadiens de l'automobile sont venus nous rencontrer pour nous dire qu'il est important de regarder vers l'avenir. Nous avons convenu de remettre sur pied le comité consultatif de l'industrie de l'automobile; d'examiner la possibilité d'investir dans la recherche et le développement afin que le Canada demeure concurrentiel et que l'innovation fasse partie intégrante de l'industrie; de continuer à travailler avec les députés, dont le député de Brampton-Centre, qui représentent leurs électeurs dans le domaine et qui se préoccupent beaucoup du maintien de notre avantage concurrentiel.
* * *
L'ENVIRONNEMENT
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la mine de charbon de Cheviot, qui est située dans ma circonscription, n'a toujours pas reçu de réponse du gouvernement en ce qui a trait à l'évaluation environnementale. Cette décision se fait attendre depuis cinq ans.
L'approbation a été donnée en 1997. Les nombreux appels enregistrés l'un après l'autre ont tellement retardé les choses que les acheteurs ont fini par déchirer leurs contrats et se tourner vers d'autres sources de charbon. Ainsi, 1200 emplois ont été perdus dans ma circonscription. Cela crée un mauvais précédent et jette un froid sur le développement du pays.
Le ministre est-il prêt à s'engager aujourd'hui à simplifier les formalités établies par le gouvernement avant que d'autres emplois ne disparaissent au pays?
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, dans ce cas précis, un groupe spécial fédéral-provincial a examiné la possibilité de répercussions négatives pouvant être issues du projet de la mine de charbon de Cheviot et en est venu à la conclusion qu'il n'y avait probablement aucune conséquence pouvant être atténuée ou compensée par un dédommagement quelconque. Bien sûr, la compagnie a pris entre-temps d'autres décisions en ce qui touche son prochain plan d'activités.
Notre collègue parle de simplifier le processus réglementaire. C'est une suggestion que le gouvernement ne prend pas à la légère. Je suis heureux de dire que nous avons fait des progrès à ce sujet au cours des quelques dernières années.
Le Président: Le député de Yellowhead a la parole.
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est une journée très intéressante. Nous avons perdu pour ce qui est de Cheviot, mais on nous donne maintenant une nouvelle chance. Tout près de Cheviot, il y a la mine de charbon de Grande Cache, qui vit exactement la même situation. Elle veut rouvrir une mine existante et tente d'effectuer une étude environnementale pour que les mineurs puissent retourner au travail.
Le gouvernement a la chance de simplifier ce processus et de donner un coup de pouce à un bon projet. Le gouvernement est-il prêt à faire preuve de leadership et à faire disparaître une partie des formalités administratives pour qu'il soit plus facile de faire des affaires au Canada au XXIe siècle?
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, nous avons fait beaucoup de progrès dans bon nombre de cas complexes portant sur des processus réglementaires depuis quelques années. Je pense par exemple aux mines de diamants dans les Territoires du Nord-Ouest, à la mine Cheviot dont nous avons parlé plus tôt et à certaines autres activités à l'étranger.
Bon nombre d'organismes de réglementation sont engagés dans ces projets. Certains d'entre eux relèvent du fédéral, d'autres des provinces. Nous faisons toujours tout ce qui est en notre pouvoir pour simplifier les processus de façon qu'il y ait un début bien défini, un ensemble de règles bien claires, une fin et une décision sur laquelle les investisseurs peuvent se fier. Nous poursuivrons nos efforts en vue d'améliorer le système.
* * *
[Français]
LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES
Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, à la suite des déclarations du ministre du Commerce international, il semblerait qu'il y ait deux méthodes: une méthode canadienne et une méthode américaine.
Si je comprends bien le ministre, la méthode américaine consisterait à avoir un débat à partir des textes qui vont faire l'objet d'un accord, et la méthode canadienne, elle, consisterait à tenir un débat à partir de ce que le gouvernement ou, en fait, le ministre voudrait bien nous dire. Est-ce que c'est ça qu'il faut comprendre?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, il y a aussi une troisième méthode, la méthode européenne, qui a été évoquée par notre collègue, le député de Charlesbourg—Jacques-Cartier.
Mais ce que je peux dire, c'est qu'il y aura à la Chambre, et je crois que c'est une très bonne nouvelle, un débat exploratoire sur la Zone de libre-échange des Amériques avant le Sommet des Amériques.
Je crois que c'est un débat qui sera extrêmement utile au gouvernement et aux négociateurs qui auront à procéder à Buenos Aires.
[Traduction]
M. Peter MacKay: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je demande le consentement de la Chambre pour déposer les documents dont le député de Calgary-Centre a fait état relativement à la participation de Jean Carle dans le dossier de l'Auberge Grand-Mère et de la Banque de développement du Canada.
Le président: Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LES CRÉDITS
JOUR DÉSIGNÉ—LA RÉFORME ÉLECTORALE
La Chambre reprend l'étude de la motion et de l'amendement.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, il y a pas mal de choses sur le tapis, mais je vais essayer de me concentrer sur ce débat particulier.
L'aspect intéressant de cette motion, dans un sens, est sa provenance. Elle est présentée par le NPD, qui semble soudainement, du moins dans cette enceinte, voir la lumière sur le chemin de Damas, à savoir qu'il y a peut-être une meilleure façon de se faire élire. Je peux certainement comprendre pourquoi le NPD souhaite une meilleure façon de se faire élire, compte tenu de son manque de pot des dernières années.
Monsieur le Président, je partagerai mon temps avec le député de Parkdale—High Park.
Je comprends pourquoi le NPD souhaite voir des changements se produire et pourquoi les députés de l'opposition officielle voudraient appuyer ces changements. La question de la représentation et de la façon dont les gens accèdent à cette Chambre est quelque chose qui occupe généralement le temps et la pensée de ceux qui ne peuvent réussir dans le système actuel.
La preuve étant que, lorsque les néo-démocrates ont été au pouvoir pendant quelques années en Colombie-Britannique, ils n'ont jamais parlé de représentation proportionnelle ni de la nécessité de changer le système. Je soupçonne qu'après les prochaines élections provinciales, le NPD ne sera plus que l'ombre de lui-même et la première chose qu'il mettra à son programme sera de changer le système électoral en Colombie-Britannique de façon à se faire élire.
Prenons aussi pour exemple l'Ontario, où Bob Rae a détenu le pouvoir pendant cinq ans. Les autres ne l'ont pas fait, mais lui l'a fait. Durant cette période de cinq ans où j'ai eu le défi, si je peux m'exprimer ainsi, de servir dans l'opposition au sein du Parti libéral de l'Ontario, je ne me souviens pas que le gouvernement en place, le gouvernement néo-démocrate de l'Ontario ait clamé haut et fort qu'il fallait un nouveau mode d'élection.
Nous entendons cela seulement de personnes amères, confuses, ou en quête d'une solution de rechange à un système qui ne fonctionne pas à leur avantage.
L'autre point que je trouve curieux, venant des partis d'opposition, est cette frénésie perpétuelle au sujet de la réforme parlementaire. Je trouve personnellement déplaisant le dénigrement dont font l'objet les députés, particulièrement du côté ministériel. Je sais le travail formidable que mes collègues ont effectué et continuent d'accomplir. J'en ai déjà parlé dans cette enceinte et je ne vais pas me répéter aujourd'hui.
Je dirais que c'est là un autre exemple de l'amertume que ressent une machine politique ou un parti lorsqu'il arrive ici et se rend compte que plus de 90 p. 100 des Canadiens n'ont pas voté pour lui, qu'il ne forme pas le gouvernement et que ce n'est pas lui qui prendra les décisions concernant le pays, qu'il s'agisse du budget ou de quoi que ce soit d'autre. Ces partis n'ont rien d'autre à faire que d'essayer de mettre des bâtons dans les roues au parti au pouvoir, pour voir s'il ne pourrait pas le faire déraper.
Franchement, c'est ce qui se passe ici. C'est la deuxième motion de l'opposition que nous débattons. Nous n'avons pas encore eu une motion portant sur une question qui préoccupe les Canadiens, comme les changements de politiques en matière de soins de santé qui se produisent au niveau provincial, la nécessité de faire respecter la Loi canadienne sur la santé et le rôle du gouvernement national. Je n'ai pas encore entendu l'opposition dire que le gouvernement devrait faire cela, même si c'est ce que nous faisons. Je n'ai pas encore entendu l'opposition s'indigner au sujet du système de santé à deux vitesses qui est sur le point d'être créé en Alberta et, qui sait, peut-être même en Ontario.
Je ne vois pas de motion de l'opposition concernant la décision de bombarder l'Irak prise récemment par George W. Bush, décision qui devrait peut-être faire l'objet d'un débat à la Chambre des communes. Je ne vois rien venir à ce sujet. C'est une question qui préoccupe les Canadiens, à mon avis. Les Canadiens se préoccupent de ce qui se passe dans cette région du monde.
Je ne vois pas de motion de l'opposition concernant l'annonce faite récemment par le gouvernement au sujet de l'assainissement de l'air. En effet, le gouvernement investira 120 millions de dollars dans la province et au pays pour respecter les engagements qu'il a pris à Kyoto à cet égard.
Au lieu de cela, que nous disent les députés de l'opposition? Ils disent qu'ils doivent chercher un nouveau moyen de se faire élire parce que ça n'a pas marché en 2001, ça n'a pas marché en 1997, ni en 1993. Tout ce qu'ils veulent, c'est discuter de la façon dont ils peuvent changer le système électoral.
Peut-être pourrait-on et devrait-on examiner la possibilité de faire des réformes dans certains domaines. La Commission Lortie a été créée par ce gouvernement et faisait rapport à la Chambre. Des projets de loi ont été adoptés et des réformes ont eu lieu. C'est logique. Nous ne devrions pas dire que tout ce que nous faisons est bien.
Bon sang, il y a certainement d'autres domaines de préoccupation sur lesquels les députés devraient se pencher. Je suis sûr que l'Alliance canadienne serait quelque peu nerveuse si nous devions avoir des réformes parlementaires concernant la politique référendaire dont on a dit tant de bien lors des dernières élections. Celle-ci disait que si 3 p. 100 des gens présentaient une pétition, il pourrait y avoir un référendum sur n'importe quelle question. Puis, bien sûr, le chef du parti a pris ses distances et a dit que ce ne serait pas nécessairement 3 p. 100, que ça pourrait être plus, que ses députés ne savaient pas au juste. En fait, à un moment donné, ils voulaient tenir un référendum sur le pourcentage nécessaire pour décider quand et où tenir un référendum.
Peut-être devrions-nous envisager de réformer des politiques comme ça, de réformer le système électoral de façon à le rendre plus transparent. Et si on divulguait les noms des personnes qui donnent de l'argent pour financer les campagnes à la direction? Ne serait-ce pas intéressant?
Nous le faisons. Cela ne nous gêne pas. Les députés de l'autre côté ne semblent pas vouloir le faire. Pourtant, pas plus tard qu'hier et aujourd'hui, le chef de l'opposition a répondu piteusement aux questions des journalistes au sujet de la contribution de 70 000 $ faite à l'Alliance canadienne par un associé d'un cabinet d'avocats ayant touché 300 000 $ ou 400 000 $ pour assurer la défense du chef de l'opposition dans un procès pour diffamation. Le plus intéressant est que ce paiement de 300 000 $ ou 400 000 $ a été prélevé dans la poche des contribuables albertains. Il y aurait peut-être moyen d'enquêter là-dessus.
Quand le chef de l'opposition, ou de n'importe quel autre parti à la Chambre, est élu à l'occasion du congrès de son parti, convient-il qu'une réforme électorale accorde à ce parti le pouvoir moral et légal d'établir un chèque au montant de 50 000 $ à l'intention d'un député élu pour que celui-ci libère un siège sûr et, dans le cas de l'Alliance canadienne, pour que le chef puisse briguer ce siège? Est-ce que c'est normal?
Une voix: Pourquoi ne pas parler de la motion?
M. Steve Mahoney: Ne serait-ce pas là une chose que le député qui piaille là-bas envisage de recommander pour la réforme électorale à entreprendre? Cela me poserait problème. Il n'est pas normal qu'un député élu soit payé pour libérer son siège afin que son chef puisse tout bonnement s'y installer.
Nous savons que l'Alliance canadienne et son prédécesseur, le Parti réformiste, veulent simplement adopter le système américain. J'ai entendu dire que l'Alliance compte envoyer une délégation en Floride pour apprendre à compter les bulletins de vote. Nous avons...
Le Président: Le député de Lanark—Carleton a la parole.
M. Scott Reid: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je crois savoir que le Règlement de la Chambre demande que tous les intervenants s'en tiennent au sujet du débat. Je ne vois absolument aucun rapport entre les propos du député et le sujet à l'étude. Ce sont des divagations sectaires.
Le Président: La motion dont la Chambre est saisie porte sur la réforme du système électoral. Le député de Mississauga-Ouest, le dernier intervenant que j'ai entendu, parlait de l'adoption d'un système américain, et il allait dire, je présume, qu'il s'agit du système électoral. Mais cette présomption était peut-être trop forte. Le député de Mississauga-Ouest a la parole.
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je sais que les députés de l'Alliance ne sont pas contents lorsque des gens soulèvent les problèmes qu'ils éprouvent dans leur propre milieu. Je comprends cela. Cependant, il s'agit ici de la réforme du système électoral, et non d'une question.
Selon la motion à l'étude, les députés néo-démocrates veulent modifier le système afin de pouvoir être élus un peu plus facilement et en plus grand nombre qu'ils ne l'ont pu jusqu'ici. Si nous procédons à une réforme du système électoral, devrions-nous examiner comment elle permettrait d'être élu chef d'un parti? Je crois que cela a un rapport avec cette motion.
Nous ne pouvons pas siéger à la Chambre avant d'avoir été présentés et élus par le parti, soit pour être le candidat dans une circonscription, soit pour être le chef du parti. Voulons-nous parler uniquement de ce dont le NPD veut parler, ou voulons-nous parler de toute la question?
En conclusion, nous devons comparer des choses semblables. Si nous voulons réformer le système, nous devons examiner quelques-unes des erreurs et des situations inhabituelles des gens d'en face.
Mme Sarmite Bulte (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens à mon tour sur la motion du NPD, selon laquelle la Chambre devrait constituer un comité spécial multipartite, chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens de réforme électorale.
Je suis heureuse de prendre part au débat, parce qu'au cours de la dernière session, j'ai eu l'occasion de discuter de toute la question de la représentation proportionnelle et des systèmes électoraux proportionnels en Alberta. Je représentais alors le gouvernement fédéral au sein de l'Association parlementaire du Commonwealth.
L'Association parlementaire du Commonwealth est la seule au Canada dont chaque province est membre. Une fois par année, mes collègues des gouvernements provinciaux et moi nous réunissons pour discuter de questions d'actualité. C'est ce que nous avons fait en Alberta. Le débat a été animé, mais il n'y a pas eu de consensus. C'était un débat passionné. Les participants avaient des idées bien arrêtées sur le sujet. Il n'y a pas eu de consensus, ni au niveau fédéral, ni au niveau des provinces.
Je sais que la question a fait l'objet d'une conférence internationale de l'Association parlementaire du Commonwealth il y a deux ans, en Nouvelle-Zélande. Le député de Haldimand—Norfolk—Brant présidait alors l'APC et nous avions dirigé une délégation multipartite. Là non plus, il n'y avait pas eu de consensus.
Je voudrais traiter de cette motion en demandant si le système de la RP favorise les femmes. Est-ce qu'il permet d'accroître la participation des femmes au processus politique, d'augmenter le nombre d'élues?
Il y a deux ans, une autre association parlementaire, l'Union interparlementaire, a publié une analyse globale de ce qui avait fonctionné ou non pour les femmes en politique entre 1975 et 1998 et elle a également sondé tous ses membres.
Elle s'est notamment demandé quel système électoral était préférable pour les femmes. Était-ce le système majoritaire, le système proportionnel ou un système mixte? Chose intéressante, après avoir fait enquête dans le monde entier, l'Union interparlementaire a été plutôt prudente dans ses conclusions. Elle a déclaré qu'un système proportionnel était peut-être celui qui favorisait le plus l'élection de femmes, mais à la condition seulement qu'on mette en place un certain nombre de garanties.
Il s'agissait notamment d'inclure au moins une femme ou d'avoir un pourcentage de femmes sur chaque liste électorale et d'inclure au moins une femme à un poste élu dans toutes les listes fermées. Ensuite, on a découvert que cela fonctionnait bien si on prévoyait une alternance entre les hommes et les femmes sur chaque liste. Enfin, il fallait établir qu'une femme serait en tête d'un certain pourcentage des listes.
Ainsi, les questions à régler lorsqu'il s'agit d'inscrire des hommes ou des femmes sur une liste sont très complexes. De plus, chose tout à fait surprenante, l'étude a permis de découvrir que, même avec les garanties dont je viens de parler, un système proportionnel n'était qu'une mesure temporaire pour corriger un déséquilibre qui existait depuis longtemps. Il reste beaucoup de chemin à faire pour nous assurer qu'il y ait autant d'hommes que de femmes à la Chambre des communes, afin de refléter notre population.
Si de prime abord on peut prétendre que le système proportionnel aide à accroître le nombre de femmes élues, je prétends en toute déférence que le système proportionnel en lui-même ne garantit pas une participation accrue des femmes à la politique.
Voici les choses importantes que nous devons décider. Qui choisit les noms figurant sur la liste? Qui décide combien d'hommes ou de femmes sont inscrits sur la liste? Qui détermine quel pourcentage de femmes figureront sur chaque liste électorale? Chose plus importante, qui détermine le pourcentage de listes dont une femme sera en tête?
Ce ne sont pas nos associations de circonscription ni nos électeurs qui décident qui va figurer sur ces listes. Ce sont les partis politiques et les gens de pouvoir qui décident. La base, les électeurs, les associations de circonscription n'ont pas un mot à dire, et c'est pourtant à eux que nous avons des comptes à rendre, pas aux pouvoirs en place.
Je saisis l'occasion qui m'est offerte ici pour expliquer ce qui s'est passé récemment en France. Ces deux ou trois dernières semaines, la une du New York Times a été consacrée à la nouvelle loi sur la parité adoptée en France. L'an dernier, la France a légiféré pour exiger que tous les partis politiques présentent comme candidats un nombre égal d'hommes et de femmes dans presque toutes les élections, à commencer par les élections municipales qui auront lieu en mars.
C'est le premier pays du monde qui impose cette exigence. À mon avis, il est trop tôt pour se prononcer. Nous ne savons ni ce qui va se passer, ni comment cela fera augmenter la participation des femmes au système politique ou le nombre d'élues, mais c'est une nouvelle méthode. Il ne s'agit pas d'un simple système de représentation proportionnelle. La liste doit être composée d'un nombre égal d'hommes et de femmes. L'expérience est intéressante, et nous devrions l'observer de très près.
Revenons-en à l'étude de l'Union interparlementaire sur les formules qui ont été efficaces pour faire augmenter le nombre de femmes élues, ce qui n'a rien à voir avec la proportionnelle. Selon cette étude, les chances des femmes de se faire choisir comme candidates sont meilleures lorsque leur parti considère qu'elles sont ou peuvent être un atout électoral.
Les auteurs de l'étude ont aussi noté une plus grande réussite si le parti avait pris des mesures sur le plan des sexes, notamment la mise sur pied d'un comité sur l'égalité des sexes dont le mandat est d'examiner la politique du parti à cet égard ou la réorientation de l'aile féminine du parti de façon à promouvoir la vision des femmes et à leur garantir du soutien au sein du parti—que ce ne soit pas seulement un soutien des femmes à l'endroit du parti.
Ils ont aussi trouvé qu'il était important que les partis revoient les règles et les pratiques régissant les élections internes pour faire en sorte que les hommes et les femmes puissent avoir accès de façon égale à des postes de direction au sein du parti et à des mandats électifs à l'échelle locale et nationale.
Soit dit en passant, je me suis entretenue aujourd'hui avec mon collègue, le député de Scarborough—Rouge River, qui m'a signalé qu'il venait d'assister à la réunion annuelle de l'association de sa circonscription, dont la majorité des membres de la direction sont des femmes. Je ne crois pas qu'il y avait une liste à l'époque ou que la composition était établie au prorata. Encore une fois, on revient à la manière dont le parti fait la promotion des femmes et démontre qu'il les apprécie.
L'étude révèle aussi de façon intéressante que les quotas fixés par la loi ne fonctionnent pas. Les quotas empêchent la création d'un véritable espace politique pour les femmes. C'est un fait auquel les partis doivent faire face. En outre, l'obligation de respecter un certain pourcentage de candidates féminines ne fonctionne pas, car aucune sanction n'est prévue en cas de manquement à cette obligation.
Selon l'étude, les quotas que les partis s'imposent volontairement sont plus efficaces. Ces quotas découlent du fait que les partis reconnaissent que les femmes ne sont pas seulement un atout sur le plan électoral, mais que leur participation à tous les aspects de la politique est essentiel, non seulement pour le bien de la société, mais aussi pour la démocratie.
Nous en avons la preuve avec le leadership qu'exerce le premier ministre et son engagement à garantir la pleine participation des Canadiennes. C'est le premier ministre actuel qui a nommé la première femme à la tête de la Cour suprême, soit la très honorable Beverley McLachlin, nomination qui a été applaudie non seulement par les femmes et les membres de notre parti, mais par tout le milieu juridique du Canada.
C'est le premier ministre actuel qui a nommé la première femme au poste de commissaire aux langues officielles, Mme Dyane Adam. C'est le même premier ministre qui a nommé la première femme, la très honorable Adrienne Clarkson, au poste de gouverneur général. De plus, depuis son arrivée au pouvoir, le premier ministre a veillé à ce que la moitié des Canadiens nommés au Sénat soient des femmes et à ce que le tiers des Canadiens nommés à la magistrature soient également des femmes.
Nous avons donc un chef qui prêche par l'exemple. Il nous montre le rôle important que jouent les femmes dans notre société, au sein de notre parti, de nos grandes institutions et de notre gouvernement. C'est un homme qui comprend la situation, et je suis fière de faire partie de son équipe.
Enfin, comme je l'ai dit il y a quelques semaines à la Chambre, n'oublions que le premier ministre actuel a encore une fois créé un précédent le 15 janvier 2001 lorsqu'il a nommé la toute première femme, la députée d'Ottawa-Ouest—Nepean, à occuper le poste de whip en chef du gouvernement.
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port—Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'était un excellent discours, vraiment légitime et bien réfléchi comparativement à d'autres interventions entendues aujourd'hui. Elle a parlé de façon claire et honnête. J'apprécie beaucoup cette attitude, tout comme les Canadiens qui liront ou entendront peut-être ces propos aujourd'hui.
Elle a prononcé le mot magique «quotas» à un moment donné dans son discours. Je me demande pourquoi. Comme c'est un comité parlementaire multipartite abordant des aspects de la réforme électorale, ne s'agit-il pas d'un moyen d'aboutir au genre de réforme qu'elle a décrite, soit la mise en place d'un système assurant une meilleure représentation des femmes? Rien ne s'oppose à ce que ce changement soit inclus dans cette motion, ou à ce que cette motion serve de courroie pour amener précisément le genre de réforme dont elle se préoccupe. Tout cela pourrait tenir aussi entièrement dans cette motion. Il est malheureux qu'elle se prononce contre la motion.
Je constate également que, comme d'autres intervenants, elle a simplifié outre mesure la question de la représentation proportionnelle. Elle s'est livrée à une bonne macro-analyse de la représentation proportionnelle, puis elle a ensuite cherché à l'appliquer à des intérêts comme accroître le nombre de candidates et donner aux femmes une voix plus proportionnelle à la Chambre. C'est raisonnable. Toutefois, la simplification à outrance de la représentation proportionnelle n'étant qu'un gros ballon qu'elle lance dans le but d'accroître le nombre de femmes en cet endroit, cela ne rend pas justice à ce débat. Cela ne rend pas justice à la question de la représentation proportionnelle.
Il y a toutes sortes de modèles de représentation proportionnelle. Il se trouve que je ne suis pas un partisan de la représentation proportionnelle.
J'aurais plusieurs questions à poser à la députée. Elle a évoqué la nécessité, pour les partis politiques et peut-être le sien propre, d'établir un système de contingent qui ferait en sorte que 50 p. 100 de leurs candidats seraient des femmes. Certains partis politiques, notamment le NPD de la Colombie-Britannique, ont inclus cette proposition dans leur plate-forme.
Je me demande si la députée accepterait que les partis politiques choisissent leurs candidats en tenant compte de certaines autres caractéristiques, par exemple le revenu. Devrions-nous avoir des candidats ayant des niveaux de revenu différents? Certains partis politiques et des politicologues l'ont proposé. Des candidats des partis politiques devraient-ils être choisis parmi une vaste gamme de personnes handicapées? Faudrait-il avoir des candidats de tous les âges? On l'a proposé.
Si la députée est prête à renoncer au principe de l'égalité afin de permettre que les candidats soient choisis sur la base de leur sexe, serait-elle disposée à ce qu'on tienne également compte de certaines autres caractéristiques auxquelles les gens accordent de l'importance?
Je représente aujourd'hui une circonscription qui était précédemment représentée à la Chambre par un député libéral. Précédemment, une femme, Sharon Hayes, avait représenté ma circonscription, Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam. Elle s'est très bien acquittée de ce rôle. C'est une femme d'honneur et qui a de la classe.
Je lui ai demandé ce qui l'avait le plus déçue lorsqu'elle était députée. Elle a dit que c'était son incapacité d'exprimer le point de vue de ses électeurs, l'absence de pouvoirs législatifs réels en comité et à la Chambre et l'impossibilité d'apporter de véritables réformes au Parlement. Elle a dit que les parlementaires n'avaient pas ces pouvoirs parce que le gouvernement, fidèle à une longue tradition, ne leur permet pas de défendre leurs convictions, et que cela affecte tout le monde, hommes et femmes.
Est-ce que la députée pourrait parler de la question des contingents et d'autres aspects connexes? Pourrait-elle aborder la question de donner plus de pouvoirs aux députés, et nous dire comment cela toucherait les femmes?
Mme Sarmite Bulte: Monsieur le Président, je ne sais pas si j'ai assez de temps pour répondre à toutes les questions, mais je vais faire de mon mieux.
D'abord, j'ai examiné toute la question de la représentation proportionnelle dans le contexte suivant: rehausser la représentation des femmes à la Chambre des communes ou au gouvernement. On semble croire qu'un système de représentation proportionnelle va automatiquement donner lieu à une augmentation du nombre des femmes à la Chambre des communes. Cela est trop simpliste.
J'ai soulevé cette question afin de montrer que tous les partis ont le devoir d'encourager les femmes à participer au système politique. Les femmes de tous les partis confondus comptent pour 21 p. 100 des députés à la Chambre, alors qu'elles représentent la moitié de la population. Il est important d'encourager les femmes à participer en plus grand nombre au système politique, de manière à ce qu'elles puissent exprimer leur point de vue.
L'une des choses les plus merveilleuses que j'ai été à même de constater en tant que députée libérale est que le Parti libéral encourage les femmes à venir grossir ses rangs. Ce parti encourage les femmes à intervenir, à se faire entendre et à défendre les intérêts de nos électeurs.
Je sais que le député en est à son premier mandat, et j'espère qu'il saura m'observer. Lors de mon dernier mandat, j'ai souvent pris la parole au nom de mes électeurs. J'ai vu les préoccupations dont j'ai saisi la Chambre se transformer en mesures législatives et en politiques.
[Français]
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, étant donné que c'est la première fois que j'ai l'occasion de prendre la parole depuis l'élection générale du 27 novembre dernier—j'ai eu l'occasion de le faire à d'autres moments, mais pas sur une motion—j'aimerais donc en profiter pour remercier les citoyens et les citoyennes de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans pour la confiance qu'ils m'ont témoignée et ce, à une troisième reprise.
J'aimerais aussi les féliciter pour la justesse de leur jugement, à l'effet qu'ils ont été capables de départager le travail d'un député et un enjeu qui n'était vraiment pas pertinent à cette élection, à savoir tout le dossier des fusions municipales. On sait que dans la région de Québec, il y a des collègues, malheureusement, qui ont été défaits en raison de la spécialité du Parti libéral du Canada de détourner l'attention des vrais sujets.
Cette mise au point ayant été faite, il me fait plaisir de prendre la parole sur cette motion présentée par le Nouveau Parti démocratique qui vise à constituer un comité spécial multipartite chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens de réforme électorale.
D'entrée de jeu, je précise qu'on ne peut être contre la vertu. Je pense que le fait qu'il y ait des comités qui étudient certains modes de représentation de base, cela peut être intéressant en soi. Mais nous soumettons respectueusement que la question derrière tout cela, qu'il s'agisse d'une élection générale ou d'un scrutin, c'est avant tout une question de démocratie. Il est question avant tout de l'exercice du droit démocratique, il est question d'institutions démocratiques.
Je pense que, avant de penser à créer un comité multipartite, il serait bon que le gouvernement fasse un effort de réflexion sur certains aspects du processus électoral.
J'aimerais, pour les fins de la discussion, soulever trois questions. Demandons-nous—et je pense que cela concerne les citoyens et citoyennes qui nous écoutent présentement—si la démocratie peut être améliorée? Est-ce que le processus électoral, que l'on parle d'un système uninominal à un tour ou d'un système proportionnel, est un élément de démocratie? Troisièmement, nous pourrions nous demander si la représentation proportionnelle est un outil d'amélioration du processus démocratique.
Le temps qui m'est imparti me manquant, je ne pourrai répondre en détail à chacune des questions. Cependant, ce que je veux que soit établi clairement par mon propos, c'est que nous nous devons de considérer cette question beaucoup plus loin, dans une amplitude beaucoup plus grande qu'uniquement le mode de sélection des représentants des citoyens et des citoyennes du Canada.
Entre autres—et c'est là qu'il aurait été utile que la motion du Nouveau Parti démocratique y fasse référence—, nous devrions étudier toute la question du financement des caisses électorales des partis politiques par les corporations. Aujourd'hui, nous remarquons—et je pense que le rapport du directeur général des Élections est clair—les contributions des individus et nous voyons celles des grosses corporations qui contribuent aux caisses des partis pour des montants de plusieurs centaines de milliers de dollars.
En ce qui concerne les six grosses banques qui ont fait des profits de l'ordre de neuf milliards de dollars l'an dernier, si nous examinions leurs contributions aux partis traditionnels, que ce soit au Parti libéral ou au Parti progressiste-conservateur, si nous examinions celles des lobbies de l'industrie pétrolière qui vont allégrement à la caisse électorale de nos collègues de l'Alliance canadienne, nous constaterions que nous avons au Canada une sorte de financement à deux vitesses.
D'une part, il y a les gros contributeurs que représentent les corporations, et ce, au détriment des simples électeurs. Quand je dis «simples électeurs», les députés comprennent très bien que ne ne veux pas minimiser l'importance d'une travailleuse qui fait partie de la classe moyenne, qui milite dans un parti quel qu'il soit, et qui appelle son député, son candidat ou sa candidate pour lui dire: «J'ai étudié le programme de votre parti. Vous êtes mon député depuis x nombre d'années. J'ai regardé ce que vous faites, ce que vous prenez comme positions et j'estime que vous me représentez bien. Il me fait plaisir de vous envoyer un chèque de 20 $ ou 25 $.»
Je pense que les députés comprennent très bien que mon propos ne veut pas juger sur un même pied tous les contributeurs aux caisses électorales. Mais je crois qu'il y a une différence entre une grosse banque, une grosse compagnie pétrolière ou une multinationale qui va investir plusieurs centaines de milliers de dollars dans un parti qui aspire à prendre le pouvoir. C'est bien entendu qu'elles vont s'attendre à un retour d'ascenseur.
C'est pour cela que je dis qu'au Canada nous avons un système de financement à deux vitesses. Quand on a financé une campagne électorale comme celle que nous venons de vivre l'automne dernier, avec l'aide de gens qui nous donnent 2 $, 5 $, 10 $, 20 $ et parfois avec l'aide de quelqu'un qui est un peu plus fortuné et qui nous donne 50 $ ou 100 $, le lendemain de l'élection, à qui rend-on des comptes? Nous rendons des comptes aux citoyens et citoyennes ordinaires qui ont financé la campagne électorale et non les grosses compagnies et les puissants lobbies.
Un autre élément que cette motion devrait toucher concerne toute la question de processus de nomination du personnel électoral.
Cela tombe bien, parce qu'on vient de terminer un processus électoral. Les 301 députés qui sont ici présents à la Chambre ont été élus par la population. Je pense que parmi les citoyens et citoyennes qui ont exprimé leur droit de vote au Canada, personne n'est allé voter avec un revolver sur la tempe ou avec une mitraillette dans le dos. Je pense qu'on doit reconnaître que les députés ont été élus démocratiquement.
Par contre, on pourrait se poser la question suivante: pourquoi le taux de participation a-t-il été si faible lors des dernières élections? Pourquoi? Je pense que nous y voyons là un déficit démocratique qui va en s'accentuant.
Je suis persuadé que même si vous êtes devenu Président, vous êtes présent durant les fins de semaine dans votre circonscription de Kingston et les Îles. Vous êtes à même de constater qu'il est malheureux de voir qu'une certaine proportion de la population a complètement perdu confiance dans le système politique et dans les politiciens. Je pense que c'est réaliste de constater cela.
Mais nous, les 301 élus de la Chambre des communes, devrions nous demander pourquoi il y a des gens qui ont perdu confiance dans la démocratie. Pourquoi y a-t-il des gens qui nous disent: «On ne veut plus rien savoir. Vous êtes tous pareils. C'est du pareil au même. Vous cherchez à remplir vos poches. Vous nous reconnaissez quand c'est le temps des campagnes électorales et après que vous êtes élus, vous ne nous reconnaissez plus»?
Félix Leclerc habitait à l'Île d'Orléans, dans ma circonscription. Dans une de ses chansons, il disait: «La veille des élections, il t'appelait son fiston. Le lendemain, comme de raison, il avait oublié ton nom.» Il a écrit cette chanson dans les années 1950. Je pense qu'en 2001, c'est très d'actualité. C'est encore présent. Pourquoi les gens ne se sont-ils pas déplacés pour aller voter le 27 novembre dernier? Il y a un cynisme, pour ne pas dire un écoeurement, vis-à-vis de classe politique. Cela est inquiétant en démocratie.
Les candidats et les candidates de tous les partis qui ont été défaits, ceux et celles qui ont gagné, comme nous, les 301 députés de la Chambre des communes, ont vécu ce processus dans une certaine mesure. Nous avons été confrontés à la machine du personnel électoral nommé par le gouvernement au niveau des directeurs de scrutin, et relevant du directeur général des élections, M. Kingsley.
Notre objectif à nous, du Bloc québécois, va être de faire en sorte que le gouvernement se prononce sur des améliorations concrètes à la Loi électorale et au processus électoral, entre autres, sur toute la question des nominations du personnel électoral.
Au cours de la 36e législature, nous avons eu l'occasion de déposer des amendements en comité, car nous étions d'avis que le gouvernement ne contribuait pas à favoriser la démocratisation du processus électoral, bien au contraire. Nous étions d'avis et nous sommes encore persuadés, nous du Bloc québécois, que le gouvernement laisse un pouvoir inadmissible au gouverneur en conseil quant au choix des fonctionnaires électoraux.
Qu'est-ce que cela veut dire quand on parle du gouverneur en conseil, pour ceux et celles qui nous écoutent et qui ne sont pas familiers avec ce langage, avec ce jargon? Cela veut dire que le premier ministre, avec son cabinet et son Conseil des ministres, procède à des nominations et c'est rare qu'on voit des nominations qui ne sont pas partisanes. Qu'on regarde les directeurs de scrutin dans chacune de nos circonscriptions.
Quand les libéraux sont au pouvoir, ce sont des gens qui ont été de très bons organisateurs libéraux par le passé, des gens qui ont accompli des tâches dans l'association libérale. Quand les conservateurs étaient au pouvoir, les directeurs de scrutins étaient des conservateurs. C'est ce qu'on appelle la théorie du blanc bonnet bonnet blanc. Quand ce sont les libéraux, ça vire au rouge, puis quand ce sont les conservateurs, ça vire au bleu.
De toute façon, certains députés, comme celui de Chicoutimi—Le Fjord qui a viré du bleu à indépendant et à rouge, arboreront peut-être le vert à la veille de la Saint-Patrick, le 17 mars prochain. Qui sait?
Nous, du Bloc québécois, proposons que la nomination du directeur général des élections se fasse par une résolution de la Chambre des communes, approuvée par les partis d'opposition et non pas uniquement par le parti au pouvoir. Actuellement, le directeur général des élections, M. Kingsley, est nommé par le parti au pouvoir après que ce dernier en ait informé les partis d'opposition.
Je pense qu'il est intéressant de regarder ce qui se fait ailleurs. Considérant l'armée de recherchistes très compétents mis à notre disposition, ceux-ci pourront vérifier ce qui se fait à l'Assemblée nationale du Québec en ce qui a trait aux nominations de ce genre, ce qui se fait dans d'autres parlements et dans d'autres législatures provinciales.
Je vais parler d'une législature que je connais un peu plus. Je sais que la plupart des nominations importantes à l'Assemblée nationale se font par un vote des deux tiers et parfois même par un vote unanime, qu'il s'agisse du protecteur du citoyen, du directeur général des élections ou d'autres hauts fonctionnaires dont les fonctions exigent une très grande crédibilité et une très grande neutralité. Je pense qu'on est loin d'un tel système de nomination.
Ce que nous voulons n'est pas compliqué. On veut que la loi électorale fédérale soit transparente et qu'il n'y ait aucune apparence de conflit d'intérêts.
Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, les postes de directeur de scrutin et des personnes responsables du déroulement du scrutin dans les circonscriptions sont présentement des nominations partisanes. C'est pour cela que le Bloc québécois demande que ces fonctionnaires et directeurs de scrutin dans les circonscriptions soient nommés à la suite d'un concours public, officiel, ouvert, transparent, comme cela se fait dans d'autres juridictions. Encore une fois, je demande à nos recherchistes de regarder ce qui se fait à l'Assemblée nationale.
Ce matin, dans son discours en réponse à la motion présentée par le NPD, le leader du gouvernement à la Chambre faisait référence à la Commission Lortie, la Commission d'enquête sur la réforme électorale et le financement des partis. Dans cette commission, on traitait de la nécessité d'indépendance du personnel électoral. Je cite un bref extrait de la page 503 du rapport de la Commission Lortie, où en vient à la conclusion suivante:
Dans tout système démocratique, il est essentiel que le processus électoral soit administré avec efficacité et la loi électorale appliquée avec impartialité. Le personnel électoral doit être indépendant du gouvernement du jour et à l'abri de toute influence partisane.
Même le directeur général des élections du Canada, M. Jean-Pierre Kingsley, lors de sa comparution devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, soulignait:
[...] quand je suis à l'étranger, je ne recommande pas qu'on s'inspire du modèle canadien quand vient le temps de nommer les directeurs de scrutin. Je dis toujours, comme je le fais au Canada, que le système actuel est dépassé.
Tout cela est inquiétant. Lorsque le premier fonctionnaire responsable des élections au Canada, M. Jean-Pierre Kingsley, se rend à l'étranger, il recommande de ne pas copier le modèle canadien en ce qui a trait à la nomination des directeurs de scrutin.
Pourtant, on sait que le Canada aime bien donner des leçons de démocratie un peu partout dans le monde et aller surveiller des élections au Zimbabwe, en Haïti et un peu partout dans le monde. Il aime s'afficher comme gardien de la démocratie et comme modèle à suivre.
Je pense qu'il faut se poser de sérieuses questions quand on voit qu'Élections Canada, par l'entremise de son directeur général, désavoue ce système qu'il qualifie d'anachronique.
Enfin, toujours sur la question de la transparence, il reste le point majeur de l'identification des électeurs. Le Bloc québécois, lors de l'étude au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, a demandé à ce qu'une procédure d'identification de l'électeur soit introduite dans la loi. L'objectif premier est d'empêcher un électeur d'utiliser le droit de vote d'autrui. Une fois de plus, le gouvernement a rejeté cette requête.
On pourrait poser la question: qu'est-ce que le gouvernement a à cacher? Pourquoi est-on contre la transparence? Pourquoi est-on contre un système qui améliorerait le libre exercice de la démocratie, afin de faire en sorte qu'une personne égale un vote, une personne, un électeur, un vote? Qu'est-ce que le gouvernement a à cacher? C'est inquiétant.
Le Bloc québécois demandait qu'au moins la nomination du directeur général des élections, qui n'est ni plus ni moins que le garant de l'application de la Loi électorale, soit faite sous une nouvelle forme afin de diminuer la mainmise du gouvernement.
Il s'agit de s'assurer que le directeur général des élections soit nommé par au moins la majorité des députés de l'opposition. Si on participait à la nomination, on ne serait pas en mesure de critiquer le gouvernement, parce qu'on y aurait souscrit. Les compétences de la personne devant occuper la tâche seraient de commune renommée parmi tous les partis, aussi bien de ce côté-ci de la Chambre que de l'autre côté.
En conclusion, j'aimerais dire que quoi qu'il en soit, si nous sommes en mesure de nous donner un processus plus transparent pour le libre exercice de la démocratie, une fois qu'on aura corrigé les lacunes du système actuel, bien entendu, il pourra être pertinent d'étudier un autre moyen, d'autres formes de représentation des électeurs, y incluant la proportionnelle. Mais avant d'en arriver là, le gouvernement a pas mal de ménage à faire dans la maison. Pour en avoir parlé avec de nombreux députés libéraux, je sais qu'ils s'attendent, eux aussi, à de l'amélioration dans le processus électoral.
M. André Harvey (Chicoutimi—Le Fjord, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais souligner le travail de mon collègue. Quand il dit qu'il y a toujours place à amélioration, il a raison. Effectivement, beaucoup de députés de ce Parlement souhaitent améliorer le processus électoral pour le rendre plus transparent.
Ce sont des expressions qui reviennent très souvent chez les députés du Bloc québécois: on veut être plus transparents, on veut être plus démocratiques. Mais, avant de voir la paille dans l'oeil du voisin, il faudrait peut-être regarder si on n'a pas de poutre dans le nôtre.
Mon collègue parlait de démocratie électorale. Il est toujours bon de parler de choses que l'on connaît bien. Lors de la dernière élection, dans ma propre circonscription—vous avez suivi cela dans les médias—les bloquistes ont eu de la difficulté à accepter une démarche profondément démocratique. Un de leur membre parmi les plus prestigieux des derniers 10, 15 ou 20 ans avait vendu 600 cartes de membre pour se rendre éligible à la belle fonction de candidat officiel contre André Harvey, lors de la dernière campagne électorale.
Malheureusement, on le sait, on a bafoué les règles élémentaires de la démocratie. On a refusé à un candidat l'accessibilité à une convention normale aux yeux de tout le monde. Des gens qui se disent profondément démocratiques, à la Chambre des communes, très respectueux des règles élémentaires dans la participation des citoyens au processus électoral, se font tasser comme ça par leur chef. Le chef du Bloc est venu, avec son leader parlementaire, l'ineffable député de Roberval, lui dire: «Tasse-toi, tu n'as plus ta place.»
On l'a vu, deux jours avant le scrutin, le chef du Bloc était dans ma circonscription, et à deux reprises, il m'a proclamé gagnant. Il était tellement sûr que j'allais gagner, c'est peut-être pour cela qu'il a décidé de passer outre aux règles élémentaires de la démocratie et de ne pas faire de mise en candidature.
Avant de vouloir réformer le monde entier, que pense mon collègue de la démocratie parlementaire de chacun des partis dans nos propres circonscriptions? Un jeune avait vendu 600 cartes de membre et n'a même pas pu participer à une convention, parce que le Bloc québécois avait décidé que c'était M. Untel qui serait candidat.
M. Michel Guimond: Monsieur le Président, le député de Chicoutimi—Le Fjord est devenu spécialiste dans l'art de l'esquive. Il ferait un très bon boxeur qui esquive la plupart des coups, mais donne des coups de tapette à mouches.
Mais je suis d'accord avec lui, le candidat Sylvain Gaudreault était un excellent candidat, une excellente personne. Cela n'est pas remis en question. La plus belle preuve que le député de Chicoutimi—Le Fjord a une propension naturelle à l'exagération, c'est lorsqu'il dit: «C'est quelqu'un qui milite au Bloc depuis 15 ou 20 ans», alors que le Bloc fêtera son 10e anniversaire le 15 mai.
Selon le député de Chicoutimi—Le Fjord, c'était tellement un bon bloquiste, qu'il militait même avant la formation du Bloc! Est-ce assez extraordinaire? N'est-ce pas être bloquiste dans l'âme, ça? Militer 10 ans avant la formation, c'est un pouvoir de devin extraordinaire.
Cependant, il me revient des cas en mémoire, des choses qui se sont passées de son nouveau côté de la Chambre. On pourrait demander aux citoyens de Markham, à qui on a imposé l'ancien économiste en chef de la Banque de Montréal, s'ils étaient contents de se voir imposer l'économiste en chef de la Banque de Montréal dans Markham. On voit de telles choses de tous les côtés.
Bien sûr, il y a des événements malheureux. Il y a peut-être différentes façons de faire, mais la question n'est pas là. Le député de Chicoutimi—Le Fjord, de 1997 jusqu'à l'élection de 2000, a toujours fait son élection, non pas en vantant les mérites de sa candidature, mais en jouant sur les divisions internes, sur les problèmes des autres partis. Tant mieux, s'il en est capable, je lui souhaite une bonne carrière. Probablement qu'il sera nommé ministre des Transports, car c'est un candidat très ministrable, le député de Chicoutimi—Le Fjord.
Une voix: Il bâtira des routes.
M. Michel Guimond: Il va bâtir des routes et il va bâtir des ponts, même s'il n'y a pas de rivière. On revivra les belles années du duplessisme avec le député de Chicoutimi—Le Fjord.
M. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'intervenir dans le débat sur la motion du Nouveau Parti démocratique concernant la représentation proportionnelle.
J'aime toujours intervenir après un représentant du Bloc à la Chambre des communes, parce que c'est assez comique de voir comment ces gens galvaudent la démocratie. Ils sont très bons dans les discours, mais en pratique, ils ne représentent pas nécessairement le modèle à suivre.
Ils disent: «Posons-nous la question: comment se fait-il que le pourcentage d'expression du vote ait diminué dans l'ensemble du pays?» Eh bien, lorsqu'on fait de tels discours et qu'on lance n'importe quoi, à ce moment-là, on participe à cultiver la perception chez les gens que les politiciens, en fait, ne disent pas grand-chose.
Cependant, le beau côté de notre démocratie—je vais reprendre l'exemple du député bloquiste—c'est que notre candidat dans le comté de Chicoutimi—Le Fjord, qui l'a fait élire? C'est la population. C'est elle qui a décidé que c'était André Harvey que l'on voulait avoir comme candidat pour représenter la population dans cette circonscription.
C'est André Harvey qui personnifiait la personne la plus compétente à ce niveau. La démocratie comme telle a toujours sa façon de s'exprimer dans notre système.
Revenons à la motion du Nouveau Parti démocratique. La question qu'il faudrait peut-être poser au départ, c'est pourquoi remettons-nous en question notre système électoral au Canada? Il y a toujours une idée derrière la tête quand on fait cela. Je n'ai jamais vu un parti au pouvoir faire la promotion de la proportionnelle. Ce sont toujours des partis qui sont dans l'opposition.
Je peux me référer au Québec. De 1970 à 1976, il y avait un parti qui s'appelait le Parti québécois qui faisait la promotion de la représentation proportionnelle. Lorsqu'il a pris le pouvoir de 1976 à 1985, on n'en a plus parlé. En 1985, il est revenu dans l'opposition et il a alors recommencé à en parler.
On sait que cela fut un sujet traité par le Bloc québécois. Même à un de leurs congrès, on voulait l'inclure au niveau du programme. Cependant, j'ai l'impression qu'ils ont reçu des directives de leur maison mère à Québec à l'effet de retirer cela le plus rapidement possible de leur programme.
Pour ce qui est de la représentation proportionnelle, il y a un début et une fin. Lorsqu'on veut parler de proportion, il faudrait être illimité, parce qu'on parle de proportion du nombre de partis. On parle également de l'expression du nombre de voix.
Tout à l'heure, ma collègue parlait aussi des listes de la représentation des candidatures et du nombre de femmes sur les listes. Cela pourrait aussi être les groupes ethniques. Cela pourrait également être le nombre de femmes par groupe ethnique. Cela pourrait être les langues. Cela pourrait être une foule de facteurs. Il ne faudrait donc pas se limiter dans la proportionnelle lorsqu'on parle de ce concept.
La question fondamentale, c'est pourquoi remettons-nous en cause et proposons-nous de créer un comité multipartite et faire en sorte qu'on étudie à nouveau encore cette possibilité d'instaurer une nouvelle forme d'élection ou un nouveau processus électoral, qui ferait en sorte qu'on puisse avoir tout le monde et n'importe qui ici à la Chambre des communes à parler au nom de qui? Serait-ce au nom de la majorité, au nom de la minorité, au nom des minorités des minorités? C'est tout cela qu'il faut se poser comme question.
Le problème est un peu celui-là. On le retrouve à peu près dans toutes les Chambres de presque toutes les législatures. Il y a des études qui se font habituellement après chaque processus électoral. Il y a des commissions qui sont mises sur pied, des comités qui font des études, qui organisent des audiences publiques, qui consultent les partis membres d'un Parlement et qui consultent les populations. Après chaque élection, on revient toujours ici au Canada à la même conclusion, à savoir que le système électoral canadien, notre système électoral, n'est peut-être pas parfait mais, jusqu'à maintenant, on ne trouve pas d'endroits—et c'est Churchill qui le disait—où il y en ait de meilleurs.
La proportionnelle a également été expérimentée dans d'autres pays et les gens sont revenus en arrière et ont modifié leur système. Pourquoi donc toujours revenir en arrière et reposer également toujours la même question?
Est-ce que notre processus électoral répond bien et permet à tous les citoyens et les citoyennes de s'exprimer lors d'une élection? Je peux faire la comparaison entre deux lois électorales. Je peux comparer la Loi électorale du Québec et la Loi électorale du Canada. J'ai été agréablement surpris de voir comment la Loi électorale canadienne suscitait le vote au Canada. Si une personne, un citoyen ou une citoyenne ne veut pas voter chez nous et ne vote pas, c'est parce qu'elle a décidé de ne pas voter.
Les gens peuvent s'inscrire à tout moment. Les gens peuvent s'inscrire en arrivant à la section de vote. Les gens n'ont seulement qu'à s'identifier et à dire: «Je suis un citoyen, j'habite à tel endroit, voici mes cartes d'identité» et on l'inscrit, on lui permet de voter. On ne voit pas cela dans la Loi électorale au Québec. Elle est plus limitative à cet égard.
Donc, en ce qui a trait à la Loi électorale, à mon avis, notre loi est un modèle par rapport aux autres démocraties du monde. Faisons le parallèle avec l'élection du président américain où la population, le vote populaire n'existe pas comme tel. Le président n'est jamais élu directement par vote populaire, mais par un collège électoral. Par contre, chez nous, les gens décident de la personne qui va les représenter à l'Assemblée nationale, si c'est au Québec, et à la Chambre des communes, si c'est à Ottawa. Donc, n'importe qui peut se faire élire, du moment qu'il est citoyen canadien et qu'il s'identifie.
En ce qui concerne la Loi électorale, elle n'est pas limitative, au contraire, elle très permissive. Nous allons référer à ceux qui l'appliquent, nous dirons que c'est le choix des directeurs d'élection de chacune des régions, et que c'est eux qui mènent la barque.
J'ai vécu des expériences, et pourtant, à ce que je sache, je représente le Parti libéral du Canada, mais le responsable de l'élection, le directeur de l'élection du comté de Beauharnois—Salaberry—je ne sais pas ce qui s'est passé le jour du scrutin—ne nous a pas donné gain de cause sur grand-chose dans l'application de la loi.
Lorsqu'on nomme quelqu'un à ce poste, à sa face même, cette personne est objective et n'a qu'à appliquer la loi. Dans l'ensemble, elle le fait de façon très satisfaisante. Le problème se situe souvent au niveau des organisations politiques et des circonscriptions électorales, mais ce n'est pas uniquement dans l'application de la Loi électorale.
En fait, pourquoi la représentation proportionnelle? Je reviens toujours à cette question. Notre système électoral permet à chacun des citoyens de s'exprimer quant au choix des candidats et des candidates dans toutes les circonscriptions électorales du pays. Il n'y a aucune limite au nombre de candidatures dans une circonscription électorale. Nous pouvons retrouver, sur les listes électorales, sur le bulletin de vote de certaines circonscriptions, jusqu'à 12 noms. Donc, n'importe quel citoyen peut, de son propre chef, se porter candidat ou candidate à une élection. Il n'y a donc pas de limite dans ce domaine.
Alors, aujourd'hui, on peut dire: «Oui, c'est évident que dans un comté, dans une circonscription électorale, une seule personne sera élue.» Elle est habituellement élue par la majorité de la population de cette circonscription électorale. Et quand elle est élue, c'est parce que la majorité des gens ont décidé de choisir une personne qui représente une formation politique, laquelle a un message et un programme qui satisfont la majorité des gens—cela s'applique également à l'ensemble du pays—qui satisfont la majorité de la population du pays, une équipe qui compose cette formation politique et un chef qui la dirige. Évidemment, une formation politique se compose de beaucoup de militants et de militantes.
Si nous observons les résultats de la dernière élection, le Parti libéral du Canada a été élu dans toutes les provinces du Canada. Nous retrouvons donc des candidates et des candidats libéraux élus en Alberta, en Saskatchewan, au Yukon, dans les provinces Maritimes, en Colombie-Britannique, en Ontario, au Québec, partout. Cependant, la question qu'il faut se poser—je reviens toujours à la motion—c'est pourquoi voulons-nous étudier à nouveau ou réfléchir encore sur une représentation proportionnelle? De quelle formation politique émane cette motion?
Pour avantager la démocratie, pour permettre à l'ensemble des citoyens et citoyennes d'avoir un meilleur choix, la solution serait peut-être que chacune des formations politiques ait un programme qui s'adresse à l'ensemble de la population canadienne. Nous sommes élus par l'ensemble de la population canadienne. C'est ça, le message. Est-ce que nous avons un message qui passe dans l'ensemble du pays, ou notre message est-il limité à une région du pays?
Donc, le résultat détermine que certains partis politiques ont un caractère régional, alors que d'autres ont un caractère national.
D'abord et avant tout, il faut travailler avec les formations politiques afin que ces dernières développent un message ou un programme qui touche l'ensemble des citoyens. Si la majorité des citoyens de l'ensemble du pays décide de choisir un parti politique, c'est parce qu'elle aura analysé et considéré que le programme présenté par le Parti libéral du Canada était le programme et le message qui correspondait le plus à ses besoins. D'autres partis véhiculaient des messages plus circonscrits qui répondaient davantage à la clientèle d'une région.
Avant de penser à changer le mécanisme, la structure ou le processus électoral, il faudrait d'abord et avant tout réfléchir à ce que nous représentons en tant qu'individus et ce que chacune des formations politiques représente également.
Au Québec, il y a une trentaine de députés bloquistes. Le programme du Bloc québécois ne correspond pas du tout ou n'est pas accepté par l'ensemble des citoyens canadiens.
Si on voulait une loi électorale encore plus démocratique qui s'applique au Canada—je ne devrais pas dire plus démocratique—, on pourrait dire dans la Loi électorale que toute formation politique qui veut se positionner sur l'échiquier canadien devra avoir une vision fédéraliste et non pas une vision séparatiste.
On voit donc jusqu'où la démocratie s'applique au Canada. On permet même à des formations ayant des objectifs contraires à la fédération canadienne de se positionner sur l'échiquier canadien. Allons voir si cela se produit dans d'autres pays, à savoir que l'on permette à de telles formations politiques, à l'intérieur d'un système fédéral, de se positionner sur l'échiquier national. Cela est assez particulier au Canada que notre système électoral permette à un parti, peu importe ses origines ou sa vision, de s'inscrire dans le processus électoral canadien.
En ce sens, je trouve qu'on a fait assez d'études depuis les 20 ou 25 dernières années. Des rapports ont été élaborés et déposés. Ce furent des rapports en carton et d'autres en cinq volumes.
Je pense qu'on devrait d'abord amener les parlementaires ou les membres de partis politiques à réfléchir davantage à ce qu'ils représentent et le message qu'ils veulent véhiculer à l'ensemble de la population canadienne. Laissons les gens et l'ensemble de la population décider.
Un principe chez nous veut que ce soit les gens dans une circonscription électorale qui décident du candidat ou de la candidate qui les représentera à la Chambre des communes. Ils ont voté pour cette personne. Il ne faut pas que ce soit une question de mathématiques qu'on applique par la suite et qu'une formation politique ayant obtenu un certain pourcentage du vote ait un ou deux représentants. Ce n'est pas tout à fait comme cela qu'on devrait organiser notre Chambre.
On dit toujours que, lorsque qu'un député prend la parole à la Chambre, c'est pour parler au nom des gens de sa circonscription électorale. C'est pour cela qu'on aménage également des circonscriptions électorales avec un pourcentage et un certain nombre de voteurs presque identiques. Il y a quelques exceptions mais, dans l'ensemble, il y a environ le même nombre de voteurs, à plus ou moins 10 000 personnes de différence au niveau fédéral, parce que les circonscriptions sont très grandes par rapport au niveau provincial.
Lorsque je me lève à la Chambre, je représente mes citoyens, non seulement ceux qui ont voté pour moi, mais l'ensemble des citoyens et des voteurs qui étaient inscrits sur la liste électorale. C'est cela le principe chez nous.
Donc, il ne s'agit pas développer des règles de calcul qui vont permettre à peu près à n'importe qui de créer n'importe quel parti politique et d'avoir une représentation à la Chambre parce qu'il représente 1 p. 100 de la population. Ce n'est pas cela.
Notre système fonctionne bien puisqu'il y a quand même une alternance. Notre problème est peut-être que certaines formations politiques dans cette Chambre véhiculent un discours ou un message qui ne répond pas aux attentes et aux aspirations de l'ensemble de la population canadienne. À mon avis, c'est cela le problème.
À partir du moment où un parti aura un message qui répondra davantage à la grande majorité des Canadiens, on verra que le parti au pouvoir va changer. Il faut développer des messages et des programmes nationaux, non pas des messages et des programmes régionaux.
En terminant, un de mes bons amis, Michel Bélanger, aujourd'hui décédé, a occupé des postes prestigieux au Québec, tant dans les banques qu'au gouvernement du Québec. Il s'était impliqué dans le référendum. Il avait écrit un message que son fils a lu à l'église lors de ses funérailles, dans lequel il disait: «Ce qui est réalisable n'est pas nécessairement souhaitable.»
Je voudrais terminer sur cette note, mais juste avant de conclure, j'aimerais reprendre quelques éléments soulevés par les députés du Bloc, lorsqu'ils parlent du financement des partis. Au Québec, on a une Loi sur le financement des partis, qui lui est propre, mais les autres ont également des lois sur le financement des partis qui leur sont propres. Au Canada, le système permet à des formations politiques de recevoir des dons personnels, des dons de corporations, mais cela s'applique à l'ensemble des formations politiques.
Ce qui me fait sourire, c'est d'entendre les membres d'une formation politique dénoncer cette forme de financement, alors qu'ils le font indirectement. Au cours de la dernière campagne électorale, une ministre du gouvernement du Québec qui, elle, est assujettie à la Loi sur le financement des partis politiques qui interdit le financement par des corporations, a été invitée par le Bloc québécois à un souper de financement à titre de conférencière. Il faut le faire. Ils ont parfois des discours assez ambigus.
Je termine en citant un article de La Presse dont le titre était le suivant: «Michel Gauthier affirme que le Bloc québécois doit disparaître.» Cela correspondrait peut-être plus au concept de notre processus électoral, notre système de représentation que l'on a développé à la Chambre des communes.
[Traduction]
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je félicite le député d'avoir fait son discours sans notes de la part des représentants gouvernementaux, mais je regrette que ses commentaires aient été aussi redondants et circulaires. Il me semble que ses propos n'étaient qu'un inepte effort en vue de défendre le statu quo, la force motrice préférée du gouvernement.
Le député a demandé aux partis de l'opposition d'appuyer la motion en principe parce que la plupart des Canadiens n'appuient pas leurs programmes. Le député ne reconnaît-il pas que le parti auquel il appartient n'a pas obtenu l'appui de la plupart des Canadiens lors des trois dernières élections?
Le Parti libéral a remporté respectivement 38 p. 100 et 41 p. 100 du vote populaire lors des deux dernières élections, ce qui est bien inférieur à la majorité. Pourtant, même si quelque 60 p. 100 des Canadiens s'opposaient au programme de son parti, celui-ci a réussi à monopoliser complètement le pouvoir politique au pays. Le député croit-il qu'une telle situation sert les meilleurs intérêts de la démocratie?
En outre, ne croit-il pas que ce serait utile pour l'unité nationale que la composition du Parlement reflète la diversité et la pluralité des opinions politiques des régions? Les 25 p. 100 d'électeurs de l'Alberta qui ont voté en faveur de candidats libéraux ne devraient-ils pas avoir droit à une meilleure représentation en cette Chambre?
De la même façon, les quelque un million et demi d'Ontariens, soit 25 p. 100 de la population, qui ont voté pour l'Alliance canadienne ne devraient-ils pas avoir bien davantage que 1,5 p. 100 de la représentation de cette province? Le député peut-il demeurer indifférent au fait que près de la moitié des Ontariens n'ont pratiquement aucune voix ici reflétant leur choix de parti
Songe-t-il le moindrement au fait que le Canada est désormais la seule démocratie multipartite avancée au monde dont le système électoral a été conçu par et pour l'Angleterre du XVIe siècle, soit à une époque où les candidats élus étaient vraiment des représentants impartiaux?
Ne conviendra-t-il pas qu'il faut tenir compte des nombreux précédents qui sont survenus dans d'autres régimes parlementaires, dont ceux de pays frères du Commonwealth comme la Grande-Bretagne, qui a adopté une forme modifiée de représentation proportionnelle pour ses assemblées régionales au Pays de Galles, en Écosse et en Irlande du Nord?
Qu'en dit le député? Ne croit-il pas qu'un plus grand reflet de la pluralité des opinions des diverses parties du pays serait sain pour la démocratie? Ne va-t-il pas s'excuser de ce que son gouvernement exerce de façon éhontée un pouvoir illimité, en dépit du fait que 60 p. 100 des Canadiens n'ont pas voté pour lui? Croit-il que toutes les autres démocraties multipartites complexes du monde sont dans l'erreur et que seul le Canada a raison?
Croit-il qu'une participation électorale de 60 p. 100 est une preuve du succès et de la vigueur de notre démocratie?
[Français]
M. Serge Marcil: Monsieur le Président, tout d'abord, si mon approche est circulaire, elle circule sur l'ensemble du territoire, elle fait le tour du territoire canadien. Elle est plus que régionale.
Lors des dernières élections, le Parti libéral du Canada a récolté 41 p. 100 des voix, alors que l'Alliance canadienne obtenait 26 p. 100, le Bloc québécois, 11 p. 100, le Parti progressiste-conservateur, 12 p. 100 et le Nouveau Parti démocratique, 9 p. 100. Donc, les gens se sont exprimés.
L'Italie applique un processus électoral; ils ont un gouvernement par année environ. Donc, ils sont toujours dans des gouvernements de coalition. Je pense qu'un pays ne doit pas être continuellement bloqué par un jeu de chambres, parce que lorsqu'un parti politique se présente devant les électeurs, il propose un programme, il fait des engagements. Donc, s'il est élu majoritairement, il dispose de quatre ou cinq ans pour respecter ses engagements.
Le fait d'avoir un parti majoritaire au pouvoir fait en sorte que ce dernier a plus de chances de réaliser ses engagements ou son programme électoral. Donc, il est également évalué sur son programme électoral à la fin de son mandat.
Est-ce qu'on devrait fermer les yeux? Le processus électoral fédéral a évolué, de même que le processus provincial. Je me souviens de l'époque où des candidats pouvaient se présenter dans deux ou trois circonscriptions électorales durant une campagne électorale. Cela a changé, et aujourd'hui, il y a un candidat par circonscription électorale. Il ne peut pas se présenter dans plus d'une circonscription électorale.
À l'époque, le système permettait même à des candidats et candidates d'être à la fois député et maire d'une municipalité. Aujourd'hui, on a modifié le système de sorte qu'un député ne peut plus occuper plus d'une fonction, soit sa fonction de député.
Le système électoral et le système parlementaire canadiens ont évolué avec le temps, avec les siècles. C'est par la pression et l'expression de la population qu'ils évoluent. Ce n'est pas uniquement le fait d'individus qui lancent des idées à droite et à gauche. C'est souvent quand ces idées-là sont acceptées ou assimilées par l'ensemble de la population que les changements sont apportés à notre système, de façon graduelle. On en a la preuve, autant dans les provinces qu'ici, à la Chambre des communes.
Je finis toujours par revenir à la phrase: «Ce qui est réalisable n'est pas nécessairement souhaitable.» Il faudrait démontrer que le système actuel ne répond pas du tout aux aspirations des Canadiens et des Canadiennes. Il faudrait demander à l'ensemble de la population si elle désire un changement dans le système parlementaire, car si elle est en mesure de voter, elles est en mesure de s'exprimer.
M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le discours de mon collègue de Beauharnois—Salaberry qui, malheureusement, se retrouve de ce côté-ci de la Chambre. C'est juste pour démontrer quel sort ce gouvernement lui a réservé à son arrivée ici.
Il parlait de transparence, d'ouverture, d'évolution dans le processus électoral et dans la façon, entre autres, de mener des campagnes électorales ou autres.
Je voudrais savoir ce que le député pense de cette approche établie par sa formation politique, lors de la dernière campagne électorale, qui consiste à promettre une poignée d'asphalte et quelques ponts lors d'une élection. Je voudrais avoir ses commentaires là-dessus.
M. Serge Marcil: Monsieur le Président, la différence entre mon collègue à la Chambre et moi-même, c'est que je n'ai pas peur de m'engager à réaliser des choses et de me battre pour les réaliser.
Je pourrais répondre également ceci. Je pourrais prendre tous les bloquistes ici à la Chambre et leur demander d'écrire leur bilan depuis 1993 dans leur comté. Comment la population de chacune de leur circonscription électorale a-t-elle profité de la croissance économique canadienne?
Chez nous, c'est ce qui a été l'enjeu de la campagne électorale. Les gens ont réalisé qu'on vivait une croissance économique au Québec et au Canada et qu'il n'y avait aucune retombée au niveau du comté.
J'irai tellement plus loin que cela. Je les mets même au défi de lire tous les discours que le député bloquiste de Beauharnois—Salaberry, M. Daniel Turp, a prononcé à la Chambre. Je les mets au défi de trouver, dans l'ensemble de ses discours pendant ses trois ans et demi ici, combien de fois il a parlé de l'autoroute 30, combien de fois il a utilisé les mots «comté de Beauharnois—Salaberry», «mes concitoyens», «chez nous»? J'aimerais bien cela. Elle est toute là la différence.
Moi, je vais en parler de chez nous. Ici à la Chambre, je vais parler et représenter les citoyens de mon comté. Je vais représenter l'ensemble des Québécois et des Québécoises. Je vais défendre leurs droits. Je vais défendre les enjeux québécois ici, mais je ne représenterai pas les séparatistes. Je vais représenter l'ensemble de la population.
Je les entends tout le temps dire, à la Chambre et partout en public, qu'ils parlent au nom des Québécois et des Québécoises, alors qu'ils n'ont eu qu'à peine 36 p. 100 du vote par rapport aux fédéralistes qui ont quand même eu jusqu'à 64 p. 100 du vote. Lorsqu'on retourne à l'élection provinciale du Québec de 1998, les libéraux du Québec ont eu 200 000 voix de plus que les péquistes, et ils disent encore qu'ils parlent au nom de la majorité au Québec.
Lorsqu'on veut parler de démocratie, on devrait déjà respecter les règles et surtout les appliquer.
[Traduction]
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, à l'intention des Canadiens qui suivent le débat, je voudrais signaler que, de temps à autre, les partis de l'opposition ont l'occasion de choisir le sujet qui sera débattu un jour donné. Aujourd'hui, le Nouveau Parti démocratique a choisi le sujet du débat en proposant la motion suivante:
Que la Chambre constitue un comité spécial multipartite, chargé d'examiner le mérite de divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens de réforme électorale, en vue de recommander des réformes qui feraient obstacle à la régionalisation croissante de la politique canadienne et à la participation décroissante des Canadiennes et des Canadiens aux élections fédérales.
D'autres avant moi ont présenté certaines statistiques sur la régionalisation constatée à la Chambre: les députés du parti ministériel viennent pour la plupart d'une seule et même province de notre pays; les députés des autres partis viennent surtout d'une région particulière; et le taux de participation aux dernières élections a chuté de manière spectaculaire.
Notre parti a adopté la position suivante en ce qui concerne la réforme électorale. Nous disons depuis longtemps que le système politique canadien a beaucoup de progrès à faire pour respecter les critères de démocratie, de transparence, de représentativité et de responsabilité que nous nous sommes fixés, à titre de Canadiens.
L'Alliance canadienne estime que les élections doivent se dérouler de manière à permettre aux gens de s'exprimer, non seulement sur la personne qu'ils souhaitent avoir pour les représenter à Ottawa, mais aussi sur le genre d'orientations qu'ils souhaitent voir adoptées par le gouvernement fédéral. Nous prenons également la position qu'il existe un autre principe vital, à savoir que les élections doivent avoir lieu de la manière la plus transparente et la plus équitable possible afin que les Canadiens soient absolument convaincus qu'il ne peut y avoir de manipulation du scrutin.
Je pourrais en dire plus long, et sous différents angles, sur les positions de base de l'Alliance canadienne, mais je devrais consacrer plus de temps à la question de la représentation proportionnelle, l'élément de la réforme parlementaire qui est mentionné expressément dans la motion des néo-démocrates. On peut dire sans se tromper que les néo-démocrates ont particulièrement intérêt à ce que ce genre de réforme ait lieu. Si les sièges à la Chambre étaient répartis strictement en fonction de la représentation proportionnelle, au lieu d'avoir 13 sièges, le nouveau parti démocratique en aurait 25, compte tenu du pourcentage de l'appui populaire qu'il a obtenu lors des dernières élections. Les députés peuvent voir pourquoi ce parti se sent quelque peu lésé par le fait que le vote populaire ne se reflète pas dans la proportion des députés à la Chambre des communes.
Il y a quelque temps, notre parti a constitué un groupe de travail sur la réforme démocratique. C'était un excellent groupe car l'un de ses membres n'était nul autre que mon collègue de Lanark—Carleton. Le groupe a rédigé un rapport portant sur plusieurs questions et j'aimerais lire, à l'intention de la Chambre et des Canadiens qui suivent nos délibérations, certaines de nos observations concernant la question de la représentation proportionnelle.
Le principe est que la représentation au Parlement des groupes d'électeurs de même obédience soit proportionnelle à leur force électorale. Par exemple, si un parti remporte 40 p. 100 du suffrage populaire, il obtient 40 p. 100 des sièges. Selon le groupe de travail, la représentation populaire est un peu comme de la crème glacée. Il en existe de nombreuses couleurs et de nombreux parfums, allant de la variété italienne et israélienne, qui a ses défauts, au système proportionnel mixte en vigueur en Allemagne et en Nouvelle-Zélande.
Le principe de la représentation proportionnelle est équitable pour les partis car aucun parti n'est sous-représenté ou sur-représenté. En outre, le principe de la représentation proportionnelle est équitable pour les électeurs puisque presque tous les scrutins exprimés comptent. Les résultats des élections tenues selon le mode de la représentation proportionnelle sont véritablement déterminés par les électeurs et produisent donc des gouvernements qui représentent plus fidèlement les citoyens.
La participation de l'électorat est mentionnée dans la motion présentée aujourd'hui par le Nouveau Parti démocratique. Dans un système fondé sur la représentation proportionnelle, la participation des électeurs augmente de 8 à 11 p. 100. En outre, lorsque peu de votes sont perdus, les électeurs n'ont pas à recourir à un vote stratégique. Il peuvent être fidèles à leurs propres convictions, sans se préoccuper de savoir si leur vote sera perdu ou s'il servira à faire élire par inadvertance le parti le moins désirable. C'est le genre de situation qui se produit particulièrement au Québec, comme l'a mentionné l'intervenant précédent.
Dans un système de représentation proportionnelle, la répartition des sièges refléterait plus fidèlement la diversité politique chez les électeurs canadiens. Aucun parti, probablement, ne détiendrait la majorité des sièges. Il en résulterait une redistribution fondamentale du pouvoir au Parlement, rompant ainsi avec les pratiques qui assurent une concentration excessive du pouvoir au sein de l'exécutif.
Surtout depuis le début de la présente législature, on constate beaucoup de grogne au sujet de la centralisation du pouvoir au niveau de l'exécutif dans le cabinet du premier ministre. Le représentation proportionnelle serait une solution juste et évidente à ce problème.
Certains prétendent, à tort ou à raison, que notre pays est dirigé par une poignée de personne nommées pour des raisons partisanes, la plupart n'ayant jamais été élues, oeuvrant au sein du cabinet du premier ministre. La concentration du pouvoir mène à des abus de pouvoir. La Chambre des communes est incapable de remplir son rôle, qui consiste à tenir le gouvernement responsable.
Vous avez déjà reçu, monsieur le Président, des rappels au Règlement et des questions de privilège où le député se disait préoccupé du fait qu'il était incapable d'accomplir son travail, de se faire entendre dans cette Chambre ou de demander des comptes au gouvernement. Les majorités parlementaires, combinées à la discipline du parti, font que les premiers ministres canadiens constituent ni plus ni moins des dictateurs élus. Ces termes sont forts, mais certains députés jugent qu'ils ont une bonne raison de les utiliser.
Un système de représentation proportionnelle éliminerait de telles tendances dictatoriales et rétablirait l'équilibre du pouvoir au Parlement. Comment cela? Parce qu'aucun parti ne jouirait d'une majorité, ou très rarement en tout cas. Une représentation proportionnelle transformerait le système parlementaire, le dépouillant de son caractère propice à l'affrontement, qui concentre le pouvoir et exclut la participation de la plupart des députés, pour favoriser le consensus et une participation véritable de tous.
Monsieur le Président, vous entendriez beaucoup moins de cris d'indignation et de chahut car, dans un système de représentation proportionnelle, les députés auraient un rôle accru à jouer.
Tout indique qu'un système de gouvernement moins antagoniste et orienté davantage vers le bien public à long terme plutôt que l'intérêt partisan à court terme produirait un gouvernement plus efficace.
L'idée reçue chez les politicologues selon laquelle le modèle britannique de Westminster assure un gouvernement plus fort alors que les gouvernements fondés sur la représentation proportionnelle, la coalition et le consensus sont plus faibles, a été invalidée par les conclusions du politicologue Jankowski, dans une étude qui évalue les résultats et les efficiences économiques selon divers systèmes de scrutin.
L'étude de Jankowski porte sur 12 démocraties au cours d'une période de 100 ans, et mesure le produit intérieur brut per capita. Jankowski arrive à la conclusion suivante:
Les statistiques invalident l'argument en faveur d'un système de partis politiques sur le modèle de Westminster. Les systèmes bipartites centralisés et forts ne favorisent pas l'efficacité économique. [...] En fait, les systèmes de type Westminster réduisent la croissance économique, comparativement aux systèmes à partis multiples et faibles.
Par ailleurs, il existe de nombreuses preuves circonstancielles qui montrent que les systèmes d'éducation et les économies de pays comme le Japon, l'Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et les pays scandinaves ont obtenu des résultats aussi bons sinon meilleurs que ceux du Canada au cours des 40 dernières années.
La plupart des gouvernements ne peuvent résister à la tentation d'influencer l'économie pour des raisons purement politiques. Ils la stimulent avant les élections, puis la freinent ensuite. J'ai du mal à le croire, monsieur le Président, et je suis sûre que c'est aussi votre cas, mais c'est la conclusion à laquelle est arrivé le groupe de travail.
Un théoricien, Edward Tufte, a étudié la fréquence de cette pratique égoïste et a constaté que tous les gouvernements démocratiques du monde sauf huit s'en sont rendus coupables. Or, ces huit pays ont un système de représentation proportionnelle. La possibilité de manipuler l'économie en vue d'un gain politique à court terme est donc moindre lorsque le pouvoir est partagé.
Le groupe de travail est également arrivé à la conclusion que le système de scrutin au Canada n'est pas adapté à sa réalité sociale et à ses différences régionales. Des pays comme la Belgique, la Suisse et l'Afrique du Sud ont réussi à concilier des différences plus nombreuses et plus prononcées qu'au Canada. Ces pays sont dotés d'un système de représentation proportionnelle.
Le groupe de travail a conclu, à plusieurs reprises, que la représentation proportionnelle serait un moyen beaucoup plus efficace pour assurer l'unité nationale. Je sais que d'autres orateurs ont aussi abordé cet aspect.
En somme, le groupe de travail a constaté que la représentation proportionnelle pouvait donner des résultats équitables aux partis, garantir des choix plus nombreux aux électeurs, gâcher moins de votes, instaurer une plus grande diversité politique au Parlement, consolider l'unité nationale, affaiblir le pouvoir du premier ministre et du Cabinet, accroître celui du Parlement, favoriser un gouvernement plus responsable, plus attentif aux besoins changeants de la population, plus efficace, plus étroitement lié à la population, et encourager une culture politique de participation démocratique.
Ne serait-il pas magnifique d'avoir ne fût-ce que la moitié de ces changements dans notre démocratie?
Il faut en peser les avantages et les inconvénients, et il y a différentes façons d'aborder la représentation proportionnelle, mais, selon moi, la motion du NPD, si la Chambre l'appuyait et créait un comité pour le charger d'une étude, servirait les intérêts des Canadiens. Elle aiderait à atteindre les objectifs de notre pays en matière de démocratie, et elle marquerait pour nous un progrès.
De plus, mon collège de Fraser Valley parle beaucoup depuis plusieurs mois d'autres réformes démocratiques que la Chambre, selon nous, devrait appliquer: des votes libres à la Chambre; un conseiller en éthique qui serait un mandataire du Parlement plutôt qu'un employé du premier ministre—ce sur quoi nous avons eu un débat et un vote ces derniers jours; un nouveau comité permanent chargé des questions de respect de la vie privée, d'accès à l'information et d'éthique; une plus grande démocratie dans les nominations d'autres parlementaires; une utilisation plus modérée de la clôture et de l'attribution de temps; plus de rigueur dans la reddition des comptes sur les dépenses du gouvernement.
Il y a place pour beaucoup de progrès dans notre démocratie, si nous examinons ces mesures. J'appuie la motion du Nouveau Parti démocratique et j'exhorte les autres députés à soutenir cette proposition très sensée qui nous permettrait d'étudier sérieusement ces mesures en vue, peut-on espérer, de rendre plus vigoureuse et démocratique les institutions nationales qui sont au service de tous les Canadiens.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, je remercie la députée pour les observations qu'elle a faites au sujet de la motion dont la Chambre est saisie aujourd'hui. Elle a souligné la nécessité qu'un comité examine l'idée d'une représentation proportionnelle, une idée dont l'heure est venue. La plupart des pays ont dans leur système une certaine représentation proportionnelle.
Je voudrais également qu'elle nous parle brièvement des autres types de réformes électorales et parlementaires que nous devrions peut-être envisager. Il semble évident que le sénat doit être réformé, élu ou aboli. Très peu de Canadiens, à peine 5 p. 100 selon les sondages, sont en faveur d'un Sénat non élu, antidémocratique, qui n'a de comptes à rendre à personne.
En vertu de notre Constitution, le pouvoir du cabinet du premier ministre est beaucoup trop grand pour ce qui est de nommer tant de gens sans que les nominations en question soient approuvées par le comité parlementaire pertinent.
Il devrait également y avoir une date établie pour les élections au Canada, pour les discours du Trône et les budgets, pour que nous puissions bien planifier ces événements importants et pour que le premier ministre n'ait plus le pouvoir de décider du moment où cela se passe, pas plus que les premiers ministres provinciaux du pays, car ils jouissent de pouvoirs semblables aux termes de notre Constitution.
Je crois qu'il devrait y avoir moins de votes de confiance et plus de votes libres à la Chambre pour que nous puissions vraiment faire ce qui est le mieux pour notre pays, dans l'intérêt du Canada et de nos électeurs. Cela va sans dire que les comités de la Chambre des communes devraient avoir plus de pouvoirs et d'indépendance pour ce qui est de présenter des projets de loi, d'établir des échéanciers pour les mesures législatives et de la possibilité pour les présidents de comités de voter librement.
Ce ne sont que quelques-unes des mesures importantes. Il faut ajouter à cela la motion présentée l'autre jour par le chef de l'opposition qui souhaitait un conseiller en éthique indépendant, qui ferait rapport à la Chambre des communes et non au premier ministre.
C'est ce que mon parti et moi-même cherchons à mettre en oeuvre pour rendre notre régime plus démocratique sur les plans électoral et parlementaire. De plus, il faut se pencher sur la démocratie économique en ce qui concerne les pouvoirs que les entreprises transnationales prennent aux gens ordinaires et à leurs gouvernements, par le biais d'accords commerciaux et autres choses du genre, mais c'est une autre question qui devra faire l'objet d'un autre débat une autre journée.
La députée pourrait-elle nous résumer davantage sa vision ou celle de son parti pour ce qui est de rendre nos systèmes électoral et parlementaire plus démocratiques?
Mme Diane Ablonczy: Monsieur le Président, notre parti, l'Alliance canadienne, consacre une section complète de son énoncé de principes à la réforme démocratique. Une autre section est consacrée aux thèmes économiques et une autre aux thèmes sociaux. Une section entière est consacrée aux thèmes de la démocratie et de la gouvernance, et notamment à la réforme électorale.
Notre énoncé de principes englobe bon nombre des mesures que le député vient de mentionner, comme les votes libres à la Chambre des communes, des élections à date fixe, un examen de la représentation proportionnelle et la volonté de remettre plus de pouvoir entre les mains du peuple pour qu'il puisse exiger des comptes de son gouvernement et de ses représentants élus.
Comme le député l'a dit, la plupart des pays démocratiques passent à la représentation proportionnelle. Sur 36 démocraties libérales comptant plus de deux millions d'habitants, seulement trois n'ont toujours pas mis en application les principes de représentation proportionnelle. Il s'agit du Canada, des États-Unis et de la Jamaïque. La Grande-Bretagne, l'Écosse et le Pays de Galles ont mis le sujet de la représentation proportionnelle sur la table de négociation politique, et leurs discussions ont débuté en 1999. Le Canada tire un peu de l'arrière pour ce qui est d'envisager des façons plus démocratiques d'arranger ses affaires électorales.
Un point sur lequel je ne suis pas d'accord avec le député qui a posé la question a trait à l'abolition du Sénat. Ce serait une grave erreur, à moins de réformes électorales pour modifier la façon dont la Chambre fonctionne.
Le Sénat représente les question d'intérêt régional, par opposition à la représentation au suffrage universel en vigueur à la Chambre. Si le Sénat était aboli, cela accroîtrait les déséquilibres et les inégalités régionales que l'on observe déjà à la Chambre, où les députés du parti au pouvoir proviennent surtout d'une province, l'Ontario. Il y aurait beaucoup moins de voix et beaucoup moins de vigueur pour défendre et représenter les points de vue des autres parties du pays. Si c'était là le seul arrangement selon lequel on pourrait aborder les questions, il y aurait un véritable déséquilibre dans la façon dont on s'occupe des intérêts régionaux.
C'est parce que nous avons un Sénat que les questions d'intérêt régional ont une bonne chance d'être examinées comme il faut à l'autre endroit. J'exhorte le député à réfléchir aux conséquences de l'abolition du Sénat, à cause de la nécessité de refléter les intérêts régionaux de façon plus appropriée et plus vraie.
M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, je sais gré au Nouveau Parti démocratique d'avoir saisi la Chambre de cette proposition aujourd'hui. Celle-ci aurait été plus crédible si le NPD avait fait l'essai d'un tel système dans les provinces qu'il a dirigées. Que je sache, il ne l'a pas fait.
Même l'Alliance, qui dispose de beaucoup de temps pour cette proposition, compte de nombreux amis en Alberta et, que je sache, l'Alberta n'a pas adopté le système de la représentation proportionnelle. Elle continue de faire appel au système uninominal majoritaire à un tour.
Je n'apprendrai rien de nouveau aux députés. Le député de Calgary—Nose Hill doit sûrement savoir que ce système favorise nettement l'élection d'un gouvernement majoritaire. On est en droit d'attendre d'un gouvernement majoritaire une meilleure reddition de comptes et un plus grand souci de ses responsabilités.
Prenons l'exemple de Bill Clinton et de sa première présidence à la Maison blanche, à partir de janvier 1993. Lors de sa campagne de 1992, il avait plus ou moins promis de mettre en place un régime national de soins de santé. Nous savons tous ce qu'il est advenu de ce projet. Il ne s'est pas matérialisé, le président n'ayant pas obtenu les appuis voulus. Il n'a pas réussi à amener suffisamment de démocrates et de républicains à faire front commun avec lui.
Si M. Clinton avait été premier ministre dans un régime parlementaire, et si son gouvernement avait été majoritaire, il aurait pu faire adopter son projet. Voilà qui prêche en faveur du système parlementaire et d'un système qui aboutit souvent à la formation d'un gouvernement majoritaire. Le député de Calgary—Nose Hill aimerait-il nous donner son avis là-dessus?
Mme Diane Ablonczy: Monsieur le Président, le député soulève un point très important. Son point de vue, si j'ai bien compris, consiste essentiellement à dire qu'un fort gouvernement majoritaire n'ayant pas à faire des accommodements avec d'autres groupes est en mesure d'appliquer un programme avec plus de vigueur et d'efficacité qu'un gouvernement qui est tributaire de l'appui et de l'assentiment de groupes ne comprenant pas que ses propres membres.
Nous devons déterminer quelle a été l'efficacité de ce régime politique au Canada. Depuis le peu de temps où je suis à la Chambre, soit à peine plus de sept ans, j'ai constaté une nette diminution de la capacité des députés de faire un apport efficace, des occasions de forcer le gouvernement à rendre des comptes et des possibilités d'instaurer un mécanisme visant à tempérer ce que le gouvernement souhaite accomplir. Les comités constituent désormais la chasse gardée d'un ministère donné. Les ministres n'ont pas vraiment à rendre de comptes aux comités ou à modifier leurs mesures législatives sous l'impulsion de ces derniers.
Si nous sommes d'avis qu'une dictature ne comprenant pas beaucoup de freins et de contrepoids constitue une façon efficace d'agir, peut-être ne devrions-nous pas hésiter à devenir un état totalitaire. Le chef de l'État pourrait alors faire ce qu'il veut. Toutefois, nous pourrions invoquer le fait que, selon les règles démocratiques, ce n'est pas une façon souhaitable de diriger un pays.
Je serais certes renversée si le député laissait entendre que nous devons nous appuyer davantage sur le pouvoir de la majorité, sans contrepoids, et moins sur le besoin d'établir des consensus et de recueillir du soutien afin d'aboutir à une vaste coalition de pensées et d'appui à l'égard d'une initiative donnée. Je rejette les prémisses du député et, à mon avis, s'il est un démocrate, c'est aussi ce qu'il devrait faire.
Le vice-président: Avant de reprendre le débat, conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les sujets qui seront abordés ce soir au moment de l'ajournement: le député de Cumberland—Colchester, les affaires étrangères; le député de Winnipeg-Centre-Nord, la santé.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Waterloo—Wellington. La motion présentée aujourd'hui par l'opposition concerne la mise sur pied d'un comité multipartite chargé d'examiner divers modèles de représentation proportionnelle et d'autres moyens de réforme électorale. La motion vise à faire obstacle à la régionalisation croissante de la politique canadienne et à la participation décroissante des Canadiennes et des Canadiens aux élections fédérales.
Il s'agit d'une motion importante. J'ai écouté la majeure partie du débat d'aujourd'hui, dont le premier discours prononcé par le chef du Nouveau Parti démocratique. Je ne comprends pas pourquoi ce parti ne veut pas que la motion fasse l'objet d'un vote. Cela semble étrange puisque un de leurs gros arguments, c'est qu'aucun vote n'a eu lieu sur le sujet à la Chambre depuis les années 20.
La motion et la question sont vastes. Elles soulèvent des sujets intéressants dont les députés ont passablement parlé.
La représentation proportionnelle est probablement un concept que les Canadiens en général ne connaissent pas parce qu'il n'est pas facile à définir. Il existe divers modèles, comme les députés l'ont signalé lors de leurs interventions, dont ceux d'Israël, de Russie ou de l'Allemagne. Néanmoins, ces modèles ont tous une caractéristique en commun. Ils partent tous du même principe selon lequel un parti qui obtient 20 p. 100 des voix au cours d'une élection devrait aussi obtenir 20 p. 100 des sièges au Parlement de façon à refléter l'appui reçu à l'échelle nationale.
En principe, les Canadiens seraient probablement d'accord pour dire que la représentation au sein d'un parlement devrait refléter assez fidèlement leurs opinions. Toutefois, dans le système parlementaire que nous avons aujourd'hui au Canada, un député ne représente pas le même nombre d'électeurs, celui-ci variant de circonscription en circonscription. Cela soulève des questions intéressantes.
La plupart des députés ont omis aujourd'hui de parler de la mise en oeuvre d'un système comme celui-ci et de ce que cela signifierait pour le Parlement. J'ai essayé d'y réfléchir un peu. Nous avons aujourd'hui au Parlement 301 députés représentant chacune des 301 circonscriptions. Le Canada compte environ 30 millions d'habitants. Cela veut dire qu'en moyenne, nous représentons chacun environ 100 000 habitants.
Le rôle du député est extrêmement important. La plupart des députés conviendront que la défense des intérêts de leurs électeurs est l'un des rôles les plus importants et les plus pertinents d'un député. C'est un travail difficile car, dans la plupart des circonscriptions, les députés sont élus avec guère plus de 50 p. 100 des voix. En fait, beaucoup sont élus avec seulement 40 p. 100 des voix.
Nous avons cinq partis officiels. Dans la plupart des provinces, il y a au moins quatre candidats représentant les partis officiels et beaucoup d'autres candidats représentant d'autres partis moins connus. Cela veut dire que certains députés à la Chambre n'ont pas la majorité des voix.
Si nous regardons qui, aux dernières élections, a remporté le scrutin majoritaire uninominal à un tour au Canada, ce sont les libéraux avec 172 sièges. Cela donne un gouvernement majoritaire. Il est aussi intéressant de voir que les députés, même si nous nous plaisons à penser que nous sommes élus sur la base de nos propres mérites, se présentent aux élections au nom d'un parti doté d'un programme électoral et dont la politique et la philosophie ont évolué au fil du temps.
Les électeurs ont maintes raisons de voter pour un député qui représente un parti et un programme électoral. Je suis d'avis qu'une grande majorité d'entre eux diraient qu'ils sont prêts à voter pour le parti d'abord, peut-être ensuite pour le programme, puis pour le chef. Enfin, s'il leur restait quelques doutes, qu'ils jetteraient un coup d'oeil au candidat. D'autres admirent tellement leur député que tant qu'ils sont satisfaits de son travail et de la façon dont il les représente et qu'ils ont confiance qu'il fera preuve de bon jugement dans tous les dossiers soumis à la Chambre, ils l'appuieront. Certains experts ont souligné que les députés peuvent assurer jusqu'à 10 p. 100 des votes dans la plupart des circonscriptions.
Le système de la représentation proportionnelle va à l'encontre de la responsabilisation des parlementaires à la Chambre. Nous sommes élus pour représenter des électeurs qui appartiennent à des circonscriptions bien définies. Nous sommes élus, pas tant pour ce que nous promettons de faire comme pour ce que nous avons fait par le passé. Je crois que les Canadiens reconnaîtront que le lien commun d'association entre les députés c'est que la plupart d'entre nous sommes impliqués dans nos collectivités. Nous nous occupons d'oeuvres de bienfaisance, de services bénévoles et autres.
Bon nombre de ces activités ne sont pas rémunérées parce que nous tenons à participer à la vie communautaire, que nous nous préoccupons de nos concitoyens. Nous voulons que notre collectivité soit un endroit accueillant pour nos familles. Ce sont là les choses qui distinguent les députés. Ce sont les choses que nous avons faites, non pas celles que nous promettons de faire, qui importent. C'est une question d'intégrité.
La représentation proportionnelle tente d'établir un nouveau type de parlementaires. Beaucoup de gens disent qu'ils veulent une liste des personnes qu'un parti en particulier voudrait avoir et. Si ce parti recueillait un plus grand pourcentage des voix et obtenait un plus grand pourcentage des sièges, il voudrait que certaines personnes inscrites sur la liste deviennent députés.
Je ne sais pas comment nous pourrions appliquer ce système de façon pragmatique au Canada. Je ne sais pas quelles circonscriptions ces personnes représenteraient. Je ne sais pas si les électeurs auraient un endroit où aller pour s'entretenir avec elles. Je ne sais pas si ces personnes pourraient être élues si elles se portaient candidates à des élections. Je ne sais pas si elles refléteraient la qualité des personnes que les Canadiens voudraient voir dans leur Parlement.
Cela soulève certaines questions. Il y a certes des personnes très compétentes, mais imaginons que nous ayons deux catégories de parlementaires à la Chambre, celle des personnes élues par les électeurs d'une circonscription, et l'autre, de personnes seulement désignées et réputées être à la Chambre simplement parce que l'ensemble du parti a recueilli quelques voix de plus.
Il existe de nombreux exemples des failles du système de la représentation proportionnelle. Imaginons que, dans une région du pays, un groupe quelconque pouvait s'organiser et faire des promesses extravagantes, très alléchantes et très intéressantes, tout en sachant qu'il ne serait jamais obligé de tenir ses promesses parce qu'il ne formerait jamais le gouvernement. Pourrions-nous envisager un parti qui promettrait, s'il était élu, d'éliminer la TPS ou de réduire de 20 p. 100 de plus les impôts sur le revenu, ou de donner à tous les Canadiens 500 $ par année en remboursement des coûts du chauffage, ou de s'occuper de nos familles? La liste pourrait être longue. Il serait bien d'avoir une foule de ces choses, mais ce serait imprudent sur le plan financier.
Se pourrait-il qu'un groupe capable de présenter un programme vraiment attrayant recueille 10 p. 100 des votes d'un bout à l'autre du Canada? Je le pense.
En fait, ce serait étonnant, mais cela voudrait dire que, dans 10 p. 100 des cas, un député ne serait pas élu dans une circonscription en particulier, mais il serait député simplement parce son parti qui défendait un programme imprudent serait tout à coup représenté à la Chambre. Pour moi, ce serait un affront à la démocratie, aux députés et à la responsabilité et à l'intégrité que les députés apportent à la Chambre.
Monsieur le Président, j'ignore ce qui arriverait s'il y avait 20 députés de plus. Est-ce que cela voudrait dire qu'il y aurait 20 sièges de plus à la Chambre, ce qui n'est pas, je pense, un bon programme électoral? Ou alors, est-ce que cela voudrait dire qu'il y aurait le même nombre de députés pour représenter 20 p. 100 de plus de Canadiens? Cela soulève de nombreux problèmes de mise en oeuvre.
Je suis d'avis que de tels systèmes, même s'ils fonctionnent dans d'autres pays, entraînent tous des problèmes importants. Je sais que, dans toutes les circonscriptions au Canada, les gens connaissent et respectent leur député, parce qu'ils savent que tous les députés s'efforcent de représenter leurs électeurs et de défendre les intérêts de ces derniers.
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je sais que le député fait de son mieux pour servir ses propres électeurs, et je le respecte pour cela.
Toutefois, lorsque nous sommes dans une situation où certains députés, et j'utiliserai mon propre exemple, sont élus avec un nombre de voix inférieur à la majorité absolue, 38 p. 100 dans mon cas, et moins de 30 p. 100 dans celui de l'un de mes collègues de ce côté-ci de la Chambre lorsqu'il a été élu pour la première fois, il est difficile de dire que nous avons un système réellement représentatif du bien-être de tous les électeurs, en dépit de tous les efforts que puissent faire les députés en faveur de leurs électeurs.
Cela donne de curieux résultats. Dans l'une des circonscriptions que je connais, en 1993, cette circonscription est passée des néo-démocrates au Parti réformiste, comme il s'appelait alors, à la suite d'un très faible déplacement des voix dans ce qui était essentiellement une course à quatre, il n'y a pas eu chez les électeurs de changement idéologique spectaculaire de la gauche à la droite.
L'une des façons de régler le problème et qui je pense pourrait dissiper les préoccupations du député, et je me demande s'il envisagerait cette possibilité, consiste à employer le mode de scrutin à vote unique transférable. Je ne pense pas que ce soit aller au-delà des suggestions des néo-démocrates. Ce modèle est utilisé avec succès dans plusieurs pays. À nouveau, je cite ma propre expérience en Australie où j'ai assisté à des élections tenues selon ce mode.
Lorsque le vote est transférable, à raison d'un député par district, les électeurs peuvent voter pour leur candidat préféré, puis pour leur deuxième choix, leur troisième choix et ainsi de suite jusqu'à épuisement de la liste. S'il y a quelqu'un qu'ils n'aiment vraiment pas et qu'ils trouvent inapproprié, ils peuvent inscrire le nom de cette personne en bas de liste.
Un candidat finit par émerger par voie de consensus de telle manière que tout le monde, sauf ceux qui ont mis le candidat en bas de liste, peut dire que dans une certaine mesure il ou elle est représenté par ce député. Ce dernier a l'obligation, et en fait s'il veut être réélu, il doit respecter toute la gamme des opinions. Le candidat élu est alors réellement le résultat d'un consensus.
Est-ce que ce genre de proposition permettrait d'atteindre certains des objectifs mentionnés par le député?
M. Paul Szabo: Monsieur le Président, voilà un des nombreux modèles que nous devrions prendre en considération selon le NPD. Il ne fait aucun doute que certains de nos collègues n'ont pas obtenu 50 p. 100 des voix—certains en ont eu aussi peu que 30 p. 100 et même près de 20 p. 100 dans certains cas—, mais tout cela est courant en démocratie. Je pense qu'il existe plus de 150 partis officiels inscrits au Canada et cela fait partie de notre démocratie.
Cela peut certainement entraîner de faibles pourcentages, mais en général, je crois que la vaste majorité des députés ont recueilli un appui assez marqué dans leurs circonscriptions pour faire du bon travail. Nous n'obtiendrons jamais 100 p. 100 des suffrages et nous ne devrions pas être assez naïfs pour croire que c'est le but à atteindre. Nous devons plutôt chercher à faire le meilleur travail possible une fois élus et ne pas oublier que nous appartenons à un parti, que nous avons fait campagne en fonction d'un programme de parti et que, une fois élus à la Chambre, nous devrions appuyer ce programme. Nous devons agir ainsi car, si nous ne pouvons pas appuyer le programme de notre parti, nous devrions démissionner de notre caucus et siéger à titre d'indépendants.
Il y a certains principes fondamentaux en jeu ici que les députés ont tendance à oublier, parfois, dans le vif du débat: nous avons été élus pour certaines raisons et, lorsque nous votons, même en groupe, ce n'est pas pour une autre raison que celles que nous avions défendues devant nos électeurs durant la campagne.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, je veux revenir sur le point qu'a fait valoir le député de l'Ontario. Le député d'en face a parlé de certains députés qui sont tout simplement parachutés. Je m'opposerais certainement à cela. Il y a là un parallèle avec les sénateurs qui sont actuellement parachutés au Sénat.
Je pense que nous pourrions tenter de rendre le plus démocratique possible le mode de scrutin à vote unique transférable, la solution que je privilégie à titre de député, ou le mode de scrutin préférentiel. D'ailleurs, il y a environ un mois, nous avons utilisé ce mode de scrutin lors de la course à la direction du NPD en Saskatchewan, course à laquelle participaient sept candidats. Les gens pouvaient poster leur bulletin de vote et choisir leurs candidats numéros un, deux, trois, quatre, cinq, six et sept. Un candidat qui faisait réellement l'objet d'un consensus est sorti de ce processus.
Nous pouvons utiliser cela aussi par rapport à la représentation proportionnelle. Ainsi, en Saskatchewan, nous avons actuellement 14 députés. Il pourrait y avoir sept circonscriptions dans lesquelles nous ferions élire sept personnes. Nous pourrions faire élire les sept autres députés à partir de listes établies démocratiquement et permettre aux électeurs de s'exprimer par le biais d'un mode de scrutin à vote unique transférable. À mon avis, ce serait là un système véritablement démocratique. Le député d'en face serait-il ouvert à ce genre d'idée?
M. Paul Szabo: Monsieur le Président, j'ai aussi écouté le discours que le député a prononcé ce matin. Je suis conscient qu'il existe de nombreux modèles. Cependant, je pense que l'histoire a prouvé que les Canadiens possèdent un système parlementaire stable. En fait, notre scrutin majoritaire uninominal a tendance à donner lieu à l'élection de gouvernements majoritaires, ce qui permet aux gouvernements de mettre en application le programme qu'ils ont mis de l'avant pendant la campagne électorale. C'est un aspect très important de la question.
J'ai aussi remarqué que, dans le discours qu'elle a prononcée ce matin, la leader du NPD laissait entendre que cela améliorerait la représentation régionale, mais ce que le député a décrit n'accroîtra pas la représentation régionale, tout simplement parce que, dans le cas d'un parti comme le sien, il n'y a pas de nombreuses ouvertures, vu l'appui populaire que son parti reçoit.
M. Lynn Myers (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est pour moi un grand honneur de prendre la parole aujourd'hui au sujet de cette motion.
Je tiens à dire tout d'abord que notre pays, le Canada, a mis au point au fil des années un excellent et solide système électoral. Je crois juste de dire aussi que les Canadiens de tout le pays l'appuient et votent en conséquence. Il est démocratique en ce sens qu'il souligne les valeurs fondamentales des Canadiens, où qu'ils habitent au Canada.
Il vaut la peine de signaler que d'autres pays, me semble-t-il, ont adopté le système électoral du Canada. Il vaut la peine de signaler aussi que notre système électoral est suffisamment souple pour permettre de faire ce qu'il faut, surtout dans un pays aussi jeune et aussi dynamique que le Canada. Ça aussi, il faut le signaler.
Je trouve plutôt paradoxal que le Nouveau Parti démocratique nous saisisse aujourd'hui de cette motion. Après tout, 91,5 p. 100 des Canadiens ont voté contre lui. En système de représentation proportionnelle, il ne serait plus le quatrième parti, mais le cinquième. Il n'a aucun député dans les territoires. Il n'a aucun député dans certaines provinces. Bien franchement, je dirais qu'il a eu plusieurs chances d'implanter la représentation proportionnelle au niveau provincial, mais il ne l'a pas fait. Les néo-démocrates ont le don de dire de belles choses sans y donner vraiment suite.
Je trouve également un peu intéressant de constater qu'en ce qui concerne la régionalisation, les néo-démocrates s'engagent eux aussi dans cette voie. Cela me paraît un peu difficile à accepter mais, après tout, ils sont comme ça. Ils aiment bien s'occuper à des bricoles et tenir de grands discours pour la galerie, mais quand vient le moment de passer à l'action, ils ne semblent pas du tout capables de le faire.
Soit dit en passant, je devrais ajouter que, dans le programme électoral des néo-démocrates, il y avait peut-être une ou deux lignes consacrées à la représentation proportionnelle, de sorte que les voici repartis à ce sujet. Ils n'ont vraiment pas donné à cette question l'importance qu'ils prétendent lui accorder aujourd'hui.
Je tiens à dire ceci: nous avons exprimé au fil des années des critiques à l'endroit de notre système électoral, mais il est important de noter qu'au bout du compte, cela a été un très bon système dont le Canada a bénéficié. Tous les systèmes électoraux ont peut-être adopté les principes de la représentation proportionnelle ailleurs dans le monde, mais là où on les applique, il me semble qu'ils varient énormément quant à leur résultat et quant aux modes de scrutin qu'on y applique.
Je voudrais en énumérer quelques-uns. Premièrement, il y a le mode de scrutin préférentiel, où l'électeur classe les candidats selon un ordre de préférence, et où les votes pour les candidats ayant reçu le moins de suffrages sont transférés aux candidats restants selon la préférence de l'électeur. Il y a ensuite le système de pure représentation proportionnelle, où tout le pays est traité comme une circonscription et les députés choisis sur les listes des partis en fonction du pourcentage du vote populaire obtenu par les partis. Il y a enfin un autre système, un système mixte, où certains députés sont choisis d'après le scrutin majoritaire uninominal à un tour, et les autres choisis à partir des listes des partis.
Comme on peut le voir, c'est une question complexe qui comprend bon nombre d'éléments. Je souligne qu'il y a des avantages et des désavantages dans chaque cas.
J'entends les députés de l'Alliance qui chahutent. Je trouve leur comportement très intéressant. Alors que nous commençons à parler de réforme électorale, souvenez-vous de la question du référendum qu'ils avaient soulevée. Ils étaient prêts à tenir un référendum à la demande de 3 p. 100 des électeurs canadiens. Voyez-vous tout le ridicule de cette situation dans laquelle 3 p. 100 des électeurs pourraient modifier une motion sur une question importante? Il est évident que ces députés sont loin de ce que les Canadiens recherchent et veulent.
Et si la réforme électorale visait par exemple à demander si les partis devraient divulguer le nom des donateurs qui ont contribué aux campagnes à la direction des partis politiques? Nous l'avons déjà fait. Pourquoi ce parti n'est-il pas prêt à le faire? On pourrait aussi penser à payer les anciens députés. N'a-t-on pas versé 50 000 $ pour le siège de Jim Hart, pour que le chef de la loyale opposition—oui, je dis bien «loyale» et permettez-nous de nous pencher sur ce mot quelques instants—puisse siéger à la Chambre? Pourquoi n'examinerions-nous pas ça dans le cadre de la réforme électorale? Et que dire de vérifier la liste des gens de la Gaspésie? Vous souvenez-vous du cafouillis qui s'est produit en Gaspésie lorsque ces gens, ces alliancistes réformés en face...
M. James Moore: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement, je crois que le député de Waterloo—Wellington s'éloigne beaucoup du sujet du débat, qui est la représentation proportionnelle. Il parle de toutes sortes de choses qui n'ont absolument rien à voir avec la motion à l'étude. À dire vrai, il ne manifeste pas pour la motion le respect qu'elle mérite.
[Français]
Le président suppléant (M. Harvey): Je demanderais aux députés de s'en tenir le plus possible au sujet de la motion qui est présentement devant la Chambre.
[Traduction]
M. Lynn Myers: Monsieur le Président, je parle de réforme électorale parce la motion propose une étude, la création d'un comité formé de représentants de tous les partis pour étudier divers modèles.
Je voulais tout simplement dire que, dans sa sagesse, le comité pourrait élargir son mandat de façon à examiner ce genre de question. Cela fait partie des compromis du débat.
Le comité pourrait se demander, par exemple, s'il est légitime ou non qu'un dirigeant dépense 800 000 $ de l'argent des contribuables et que M. Britten, un avocat de l'étude Bennett Jones, fasse un chèque de 70 000 $. De la vraie réforme électorale, c'est ça. Il faudrait peut-être que les feux soient braqués sur les gens du Parti de l'Alliance canadienne.
Je remarque avec un vif intérêt que la motion parle de la régionalisation de la politique au Canada. Peut-on trouver meilleure façon de promouvoir la régionalisation que de participer, comme l'ont fait les députés d'Okanagan—Shuswap et de Wild Rose, à des réunions séparatistes en Alberta? C'est tout un clivage! Le terrain est fertile; les graines du régionalisme, et dans ce cas-ci de la séparation de l'Ouest, peuvent germer.
Est-ce que le député qui est aussi à la tête de ce parti sanctionne de tels agissements? Il ne les a certes pas découragés comme il aurait dû le faire, à mon avis. Il aurait dû taper sur les doigts de ces députés dans l'intérêt du pays, afin d'empêcher, comme ils le font valoir, toute volonté de régionalisation de la politique canadienne.
Il me semble bien que, tout comme leur conseiller national qui a affiché une attitude semblable en déclarant notamment que tous les gens de l'Est sont paresseux et qu'ils veulent qu'on les entretienne, l'Alliance cherche à ménager la chèvre et le chou, comme d'habitude. Ce qu'elle fait dépasse l'entendement.
Revenons au sujet qui nous occupe.
Écoutez-les. Toujours aussi partisans du deux poids deux mesures, ces pharisiens qui trônent en face. Ils continueront leur manège de la semaine dernière, se répandant sur des questions d'éthique et faisant la morale à tous. Ce sont des prêcheurs qui affichent un zèle inégalé.
Pourtant, leur chef a engagé des frais juridiques de 800 000 $ qui ont été couverts avec l'argent des contribuables, alors qu'un règlement à l'amiable n'aurait entraîné des frais que de 60 000 $. Il y a aussi les 70 000 $ versés par le truchement de M. Britton du cabinet Bennett Jones. C'est franchement scandaleux.
M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Pendant que le député de l'autre côté nous servait ses beaux discours, j'ai remarqué qu'il était à son siège, ce qui est inhabituel. En principe, il se place toujours derrière un ministre pour être dans le champ de la caméra.
Il a fait une fois référence à ce projet de loi, ce qui est aussi inhabituel de sa part car normalement, il est toujours à côté du sujet. Je me demande si, pour une fois, il ne pourrait pas s'en tenir au sujet et, pour changer, clore le débat dans les règles de l'art. Une fois n'est pas coutume et je me demande s'il ne pourrait pas le faire.
M. Lynn Myers: Monsieur le Président, je me fais un plaisir de poursuivre à partir de ce siège auquel j'ai été élu pour représenter la circonscription de Waterloo—Wellington.
S'il est des gens qui sont à côté du sujet, ce sont les députés de l'Alliance. Ce sont des hypocrites, des gens qui trompent leur monde, qui se disent d'une moralité à toute épreuve mais qui n'hésitent pas, comme le chef de l'opposition, à accepter 70 000 $ de Britton, cet avocat qui fait partie du cabinet Bennett Jones.
L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Pas étonnant que cette institution soit à ce point dégradée. On s'écarte du sujet. Le député devrait s'en tenir à la motion dont la Chambre est saisie.
Le vice-président: Je suis désolé d'informer les députés que le temps est écoulé et que nous en sommes maintenant aux questions et observations. Je suis sûr que les questions seront toutes très pertinentes.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je laisserai volontiers du temps à mon collègue de Regina—Qu'Appelle puisque nous lui devons cette motion. Je tiens simplement à rendre hommage à sa détermination à promouvoir la réforme électorale, ce qu'il fait avec beaucoup de conviction.
J'ai eu l'honneur d'en discuter avec son ancien chef, M. Broadbent, et nous avons reconnu que nous pourrions, en principe, faire cause commune, que nous soyons de gauche ou de droite, pour promouvoir la démocratie au Canada. Je suis déçu, mais pas le moindrement étonné, et mes collègues d'en face non plus, des propos partisans que vient de nous tenir ce député qui est réputé entre autres choses, pour sa propension à changer de fauteuil. Je vois que le ministre des Finances lui a pratiquement cédé la caméra. C'est déconcertant, il attire les membres du Cabinet.
Le député s'inquiète-t-il le moindrement du fait que la participation des Canadiens au scrutin national, à 60 p. 100, n'a jamais été aussi faible? Est-il préoccupé par le fait que, parmi les pays développés, le Canada est aujourd'hui l'unique démocratie multipartite complexe à faire encore appel à un système électoral datant du XVe siècle et conçu pour l'Angleterre médiévale? Est-il le moindrement préoccupé par le fait que 60 p. 100 des Canadiens ayant voté aux dernières élections ont voté contre le programme proposé par son gouvernement, mais que ce dernier détient néanmoins un pouvoir politique absolu?
Lui est-il possible de s'affranchir un instant de son esprit de parti, d'oublier que son gouvernement préconise le statu quo, et de reconnaître que, effectivement, cette institution, cette tribune du peuple, cette Chambre où nous prenons la parole, le Parlement, devrait envisager un système électoral qui permette d'exprimer adéquatement dans cette enceinte la pluralité et la diversité de nos points de vue politiques?
M. Lynn Myers: Monsieur le Président, il est bon de voir le député d'en face à la Chambre, pour faire changement. Il a été pratiquement invisible dernièrement. Je suppose qu'il sent un peu la soupe chaude après la campagne désastreuse qu'il a menée. En fait, il se trouvait dans ma ville, Kitchener, quand il a fait toutes ces histoires au sujet du système de soins de santé qui, disait-il, était à deux vitesses. Il est sur le déclin depuis.
Pour ma part, je suis profondément attaché au Canada. Malgré ce que nous dirait le porte-parole présomptif en matière de finances, lequel n'a jamais eu à verser des salaires de toute sa vie, le gouvernement a en place un système électoral très dynamique. Nous allons défendre un système qui fait en sorte que les Canadiens, peu importe où ils vivent dans ce grand pays qui est le nôtre, sont bien servis.
Le parti ministériel continuera d'assurer la paix, l'ordre et le bon gouvernement, qui sont le fondement même de ce pays. Pourquoi? Parce que ce sont des valeurs chères aux Canadiens. Nous allons préserver ces valeurs, contrairement aux réformistes-alliancistes, qui changent souvent d'opinion et ne font pas ce qu'ils disent. Ils font preuve d'une grande hypocrisie et d'une grande duplicité. On les voit partout. Leur chef reçoit un chèque de 70 000 $. Ce sont des pharisiens. Ils ne semblent pas être en mesure de se reprendre en main. Malheureusement pour eux, les Canadiens se sont exprimés, et de façon très claire.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je tiens aussi à féliciter le député de Regina—Qu'Appelle qui a consacré la majeure partie de sa carrière à la réforme électorale. Au terme de la dernière législature, il a cru bon de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire qui a suscité beaucoup d'intérêt et de débats. Il utilise maintenant notre motion de journée d'opposition pour débattre de cette même question importante qu'est la réforme électorale au Canada.
Pourquoi effectuer une réforme de notre système électoral? Notre système est dépassé, et il est nécessaire de le modifier afin qu'il soit avantageux pour les Canadiens. Il doit être une institution vivante. À mesure que notre pays évolue et progresse, notre système doit changer. Nous sommes aux prises avec un système périmé qui ne répond pas à nos besoins. Le faible taux de participation électorale, comme l'ont fait remarquer tous les intervenants, en constitue la preuve la plus concrète.
En 1968, 80 p. 100 des Canadiens sont allés aux urnes. Certains prétendent que, lorsque la situation est favorable, les gens ne se donnent pas la peine d'aller voter. L'économie se portait assez bien en 1968, et pourtant 80 p. 100 des Canadiens ont choisi d'exercer leur droit de vote.
Aux dernières élections, environ 60 p. 100 des Canadiens sont allés voter. Soixante pour cent des citoyens inscrits ont voté. La moitié des personnes en âge de voter sont allées aux urnes. C'est un horrible record. Il s'agit d'un niveau de désintérêt aussi élevé qu'aux États-Unis. C'est ce qu'on observe chez nos voisins du sud.
Bien des gens ne croient plus que les élections constituent un moyen d'obtenir satisfaction. Nombre de personnes sont tellement désillusionnées par le système électoral qu'ils ne se donnent même pas la peine d'exercer leur droit de vote. C'est un grave problème. La démocratie est fondamentalement mal en point.
Nous avons entendu tous les types de débats aujourd'hui, des sublimes aux ridicules. Ce qui m'a le plus bouleversé, c'est le refus catégorique, en particulier de la part des députés du gouvernement, de revenir sur la question avec sérieux. On se demande ce qu'ils craignent au juste. Pourquoi s'opposeraient-ils à l'idée de rejoindre un plus grand nombre de Canadiens et de faire en sorte qu'ils soient plus nombreux à participer activement à la vie politique?
Une des observations les plus intéressantes qui ont été soulevées au cours du débat est venue du député de Regina—Qu'Appelle, qui a défendu l'argument, que j'approuve, selon lequel une forme de RP aiderait à accroître le sentiment d'unité nationale. Qu'est-ce qui pourrait intéresser davantage les députés qu'un moyen de rapprocher les Canadiens?
Il a fait valoir que, pour remporter des sièges aux élections fédérales en régime de RP, les partis politiques doivent avoir des programmes électoraux qui plaisent à tous les Canadiens. Autrement dit, si je défends uniquement les intérêts de ma province, le Manitoba, je peux me faire élire à la condition de compter vraiment pour l'équipe de chez nous. Dans un système de RP, je devrais aussi faire campagne et défendre un programme qui présente des solutions aux problèmes de diverses régions. On peut penser qu'en soi, ce serait une raison suffisante pour songer sérieusement à adopter la représentation proportionnelle.
Les choses étant ce qu'elles sont, l'unité est mal servie parce qu'il n'existe pas de vrai parti national. Chaque parti s'occupe de la région du pays où se trouvent ses appuis. Le Parti libéral prend bien soin de l'Ontario. Le Bloc Québécois défend admirablement bien les intérêts du Québec. Les Albertains ont leur parti.
Il semblerait que, si nous voulons sérieusement maintenir l'unité du pays en adoptant une vraie vision de l'unité nationale, un des éléments de cette unité doit être la réforme de notre système électoral. À mon avis, le système de la représentation proportionnelle est le moyen d'atteindre cet objectif.
Si beaucoup de gens ne votent pas de nos jours, c'est parce qu'ils craignent que leur vote ne soit gaspillé. Avec un système de représentation proportionnelle, chaque vote compte également. Même si une personne est un néo-démocrate qui habite au centre-ville d'Edmonton, elle pourrait voter pour le parti de son choix en sachant que son vote ne serait pas un vote gaspillé, mais qu'il sera profitable. C'est logique dans l'intérêt de l'équité et de l'équilibre.
Si une personne est un réformiste vivant à Terre-Neuve, elle pourrait être assurée que son vote ne serait pas inutile. C'est un élément positif. J'ignore pourquoi les députés d'en face ont résisté à cette proposition. Je trouve frustrant qu'ils refusent de l'examiner sérieusement.
Nous sommes également témoins d'une partie de ce cynisme à l'endroit de la politique canadienne. Le faible taux de participation des électeurs est attribuable aux messages qui circulent au cours des élections fédérales de nos jours. On est de plus en plus sensibilisé. Les sondeurs, les Hill et les Knowlton de ce monde, informent les partis politiques que les 15 ou 20 p. 100 des Canadiens dont le revenu est le plus faible ne votent pas. Pourquoi prendre la peine de leur communiquer nos messages?
Autrement dit, les personnes qui ont vraiment besoin d'être le plus représentées, et qui ont sans contredit besoin des services d'ardents défenseurs à la Chambre des communes, ne prennent pas la peine de voter. Nous savons tous comment votent les personnes à l'autre bout du spectre politique, les 15 ou 20 p. 100 des personnes les plus riches. À eux aussi il est inutile de communiquer nos messages.
Tous les messages s'adressent à la classe moyenne. Il s'agit d'homogénéiser le discours politique, car ce sont les gens que nous voulons rejoindre. Même là, la participation au scrutin est extrêmement faible.
Si nous voulons avancer en tant que pays, nous devons rejoindre une plus grande partie de la population. La façon la plus fondamentale de procéder est d'amener les gens à participer au processus politique, qui est manifestement un cadeau dans notre société libre. Il est tout à fait honteux que les gens n'exercent pas leur droit de vote, car il y a des endroits dans le monde où les gens ne jouissent pas de ces droits et libertés.
Je n'ai que de l'admiration pour le député de Regina—Qu'Appelle qui se dévoue corps et âme pour cette cause. Il rend un grand service à tous les Canadiens en essayant de faire avancer les choses dans ce domaine. Si nous pouvions avoir un débat honnête et correct, personne ne pourrait deviner ce qu'en serait le résultat. Cependant, la motion n'essaie pas de dicter une solution en particulier. Elle réclame seulement la création d'un comité pour examiner la question.
Qui sait le type de résultats positifs que nous pourrions avoir si nous souscrivions à cette idée de façon équitable et honnête sans toute la rancoeur ni certaines des attaques et parades que nous constatons aujourd'hui. Le dialogue a tellement dévié de la question en jeu qu'on a rendu un bien mauvais service à tous ceux qui nous écoutaient et à tous les gens qui en profiteraient beaucoup si le Canada adoptait un régime ressemblant de près ou de loin à la représentation proportionnelle.
L'autre chose exaspérante, c'est que les gens qui ont le plus besoin d'être représentés sont maintenant ceux qui sont le moins susceptibles de voter. Ce sont eux qu'il nous incombe de rejoindre, afin de leur demander leur opinion. Dans le cadre de ce système de représentation proportionnelle, leur opinion aurait autant de poids que la nôtre.
Je termine en disant que nous savons tous que le processus démocratique est fondamentalement malade au Canada à l'heure actuelle, alors qu'à peine 50 p. 100 de tous les électeurs admissibles prennent la peine d'aller voter. Nous pourrions leur donner une nouvelle confiance si nous souscrivions sérieusement à l'idée d'une représentation proportionnelle pour parvenir à un niveau acceptable d'engagement.
Le vice-président: Comme il est 17 h 30, je dois faire savoir à la Chambre que les délibérations relatives à la motion sont terminées.
[Français]
JOUR DÉSIGNÉ—LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE DES AMÉRIQUES
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 15 février, de la motion, ainsi que de l'amendement.
Le vice-président: Conformément à l'ordre adopté le jeudi 15 février, la Chambre procédera maintenant aux votes par appel nominal différés relatifs aux travaux des subsides.
Convoquez les députés.
Avant le vote:
Le vice-président: La mise aux voix porte sur l'amendement.
[Traduction]
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour dire que l'amendement dont la Chambre est saisi est rejeté à la majorité.
Le vice-président: Le whip en chef du gouvernement propose que l'amendement soit rejeté à la majorité. Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
(L'amendement est rejeté.)
[Français]
Le vice-président: La prochaine mise aux voix porte sur la motion principale. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion.
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le vice-président: Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
(La motion, mise aux voix, est rejetée par le vote suivant:)
Vote no 9
POUR
Députés
Abbott | Ablonczy | Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) |
Asselin | Bailey | Bellehumeur | Bergeron |
Bigras | Blaikie | Borotsik | Bourgeois |
Breitkreuz | Brien | Brison | Burton |
Cadman | Cardin | Casey | Casson |
Chatters | Clark | Comartin | Crête |
Dalphond - Guiral | Day | Desrochers | Doyle |
Dubé | Duceppe | Duncan | Elley |
Epp | Fitzpatrick | Gagnon (Champlain) | Gagnon (Québec) |
Gallant | Gauthier | Girard - Bujold | Godin |
Goldring | Grewal | Grey (Edmonton North) | Guay |
Guimond | Hearn | Hill (Macleod) | Hill (Prince George – Peace River) |
Hilstrom | Hinton | Jaffer | Johnston |
Kenney (Calgary Southeast) | Laframboise | Lalonde | Lanctôt |
Lebel | Lill | Loubier | Lunn (Saanich – Gulf Islands) |
Lunney (Nanaimo – Alberni) | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Manning | Marceau |
Mark | Martin (Winnipeg Centre) | Mayfield | McDonough |
McNally | Ménard | Meredith | Merrifield |
Mills (Red Deer) | Moore | Nystrom | Obhrai |
Pallister | Pankiw | Paquette | Penson |
Perron | Peschisolido | Picard (Drummond) | Plamondon |
Proctor | Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) | Reynolds |
Ritz | Robinson | Roy | Sauvageau |
Schmidt | Skelton | Solberg | Sorenson |
Spencer | St - Hilaire | Stinson | Stoffer |
Strahl | Thompson (New Brunswick Southwest) | Thompson (Wild Rose) | Toews |
Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Vellacott | Venne |
Wasylycia - Leis | Wayne | White (North Vancouver) | Williams |
Yelich – 113 |
CONTRE
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Augustine | Bagnell | Baker |
Beaumier | Bélair | Bellemare | Bennett |
Bertrand | Bevilacqua | Binet | Blondin - Andrew |
Bonin | Bonwick | Boudria | Brown |
Bryden | Bulte | Caccia | Calder |
Cannis | Caplan | Carignan | Carroll |
Castonguay | Catterall | Cauchon | Chamberlain |
Charbonneau | Coderre | Collenette | Comuzzi |
Copps | Cotler | Cullen | Cuzner |
DeVillers | Dhaliwal | Dion | Dromisky |
Drouin | Duhamel | Duplain | Easter |
Eggleton | Eyking | Farrah | Finlay |
Folco | Fontana | Gagliano | Gallaway |
Godfrey | Graham | Gray (Windsor West) | Grose |
Guarnieri | Harb | Harvard | Harvey |
Hubbard | Ianno | Jackson | Jennings |
Jordan | Karetak - Lindell | Keyes | Knutson |
Laliberte | LeBlanc | Lee | Leung |
Lincoln | Longfield | MacAulay | Macklin |
Mahoney | Malhi | Maloney | Manley |
Marcil | Marleau | Martin (LaSalle – Émard) | Matthews |
McCallum | McCormick | McGuire | McKay (Scarborough East) |
McLellan | McTeague | Mills (Toronto – Danforth) | Minna |
Mitchell | Murphy | Myers | Nault |
Neville | O'Brien (Labrador) | O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly |
Owen | Paradis | Patry | Peric |
Peterson | Pettigrew | Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) |
Pillitteri | Price | Proulx | Provenzano |
Redman | Reed (Halton) | Richardson | Robillard |
Saada | Savoy | Scherrer | Scott |
Serré | Sgro | Shepherd | Speller |
St. Denis | St - Jacques | St - Julien | Steckle |
Stewart | Szabo | Telegdi | Thibeault (Saint - Lambert) |
Tirabassi | Tobin | Tonks | Torsney |
Ur | Valeri | Vanclief | Wappel |
Whelan | Wilfert | Wood – 147 |
«PAIRÉS»
Députés
Bachand (Saint - Jean) | Fry | Regan | Rocheleau |
Le vice-président: Je déclare la motion rejetée.
* * *
[Traduction]
LOI SUR LA FONDATION DU CANADA POUR L'APPUI TECHNOLOGIQUE AU DÉVELOPPEMENT DURABLE
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 19 février, de la motion: Que le projet de loi C-4, Loi créant une fondation chargée de pourvoir au financement de l'appui technologique au développement durable, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
Le vice-président: La Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé sur la motion de deuxième lecture du projet de loi C-4. Le vote porte sur la motion.
Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, si la Chambre le veut bien, je propose que vous demandiez le consentement unanime pour que les députés qui ont voté sur la motion précédente soient enregistrés comme ayant voté sur la motion dont la Chambre est saisie, les députés libéraux votant en faveur de la motion.
Le vice-président: La Chambre est-elle d'accord pour que nous procédions de cette façon?
Des voix: D'accord.
M. John Reynolds: Monsieur le Président, les députés alliancistes présents votent contre la motion.
[Français]
M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois voteront non sur cette motion.
M. Yvon Godin: Monsieur le Président, les députés du Nouveau Parti démocratique votent non sur cette motion.
M. Rick Borotsik: Monsieur le Président, les députés du Parti progressiste-conservateur votent oui sur cette motion.
[Traduction]
(La motion, mise aux voix, est adoptée.)
Vote no 10
POUR
Députés
Adams | Alcock | Allard | Anderson (Victoria) |
Assad | Augustine | Bagnell | Baker |
Beaumier | Bélair | Bellemare | Bennett |
Bertrand | Bevilacqua | Binet | Blondin - Andrew |
Bonin | Bonwick | Borotsik | Boudria |
Brison | Brown | Bryden | Bulte |
Caccia | Calder | Cannis | Caplan |
Carignan | Carroll | Casey | Castonguay |
Catterall | Cauchon | Chamberlain | Charbonneau |
Clark | Coderre | Collenette | Comuzzi |
Copps | Cotler | Cullen | Cuzner |
DeVillers | Dhaliwal | Dion | Doyle |
Dromisky | Drouin | Duhamel | Duplain |
Easter | Eggleton | Eyking | Farrah |
Finlay | Folco | Fontana | Gagliano |
Gallaway | Godfrey | Graham | Gray (Windsor West) |
Grose | Guarnieri | Harb | Harvard |
Harvey | Hearn | Hubbard | Ianno |
Jackson | Jennings | Jordan | Karetak - Lindell |
Keyes | Knutson | Laliberte | LeBlanc |
Lee | Leung | Lincoln | Longfield |
MacAulay | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Macklin | Mahoney |
Malhi | Maloney | Manley | Marcil |
Marleau | Martin (LaSalle – Émard) | Matthews | McCallum |
McCormick | McGuire | McKay (Scarborough East) | McLellan |
McTeague | Mills (Toronto – Danforth) | Minna | Mitchell |
Murphy | Myers | Nault | Neville |
O'Brien (Labrador) | O'Brien (London – Fanshawe) | O'Reilly | Owen |
Paradis | Patry | Peric | Peterson |
Pettigrew | Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pillitteri |
Price | Proulx | Provenzano | Redman |
Reed (Halton) | Richardson | Robillard | Saada |
Savoy | Scherrer | Scott | Serré |
Sgro | Shepherd | Speller | St. Denis |
St - Jacques | St - Julien | Steckle | Stewart |
Szabo | Telegdi | Thibeault (Saint - Lambert) | Thompson (New Brunswick Southwest) |
Tirabassi | Tobin | Tonks | Torsney |
Ur | Valeri | Vanclief | Wappel |
Wayne | Whelan | Wilfert | Wood – 156 |
CONTRE
Députés
Abbott | Ablonczy | Anders | Anderson (Cypress Hills – Grasslands) |
Asselin | Bailey | Bellehumeur | Bergeron |
Bigras | Blaikie | Bourgeois | Breitkreuz |
Brien | Burton | Cadman | Cardin |
Casson | Chatters | Comartin | Crête |
Dalphond - Guiral | Day | Desrochers | Dubé |
Duceppe | Duncan | Elley | Epp |
Fitzpatrick | Gagnon (Champlain) | Gagnon (Québec) | Gallant |
Gauthier | Girard - Bujold | Godin | Goldring |
Grewal | Grey (Edmonton North) | Guay | Guimond |
Hill (Macleod) | Hill (Prince George – Peace River) | Hilstrom | Hinton |
Jaffer | Johnston | Kenney (Calgary Southeast) | Laframboise |
Lalonde | Lanctôt | Lebel | Lill |
Loubier | Lunn (Saanich – Gulf Islands) | Lunney (Nanaimo – Alberni) | Manning |
Marceau | Mark | Martin (Winnipeg Centre) | Mayfield |
McDonough | McNally | Ménard | Meredith |
Merrifield | Mills (Red Deer) | Moore | Nystrom |
Obhrai | Pallister | Pankiw | Paquette |
Penson | Perron | Peschisolido | Picard (Drummond) |
Plamondon | Proctor | Rajotte | Reid (Lanark – Carleton) |
Reynolds | Ritz | Robinson | Roy |
Sauvageau | Schmidt | Skelton | Solberg |
Sorenson | Spencer | St - Hilaire | Stinson |
Stoffer | Strahl | Thompson (Wild Rose) | Toews |
Tremblay (Lac - Saint - Jean – Saguenay) | Tremblay (Rimouski - Neigette - et - la Mitis) | Vellacott | Venne |
Wasylycia - Leis | White (North Vancouver) | Williams | Yelich – 104 |
«PAIRÉS»
Députés
Bachand (Saint - Jean) | Fry | Regan | Rocheleau |
Le vice-président: Je déclare la motion adoptée. En conséquence, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand nord et des ressources naturelles.
(Le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)
* * *
VOIES ET MOYENS
LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu consultation des leaders parlementaires et je crois savoir que la Chambre consentirait à l'unanimité à considérer que la motion des voies et moyens que le secrétaire d'État aux Institutions financières internationales a déposée plus tôt aujourd'hui a été mise aux voix et adoptée avec dissidence.
Le vice-président: La Chambre permet-elle au leader du gouvernement à la Chambre de proposer la motion?
Des voix: D'accord.
Le vice-président: La Chambre a entendu le libellé de la motion. Plaît-il à la Chambre de l'adopter?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
Le vice-président: Comme il est 18 h 6, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
LES SIKHS CANADIENS
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD) propose:
Que la Chambre reconnaisse l'importance du 13 avril pour l'ensemble des Sikhs et les contributions des Sikhs canadiens à notre pays; et que la Chambre reconnaisse aussi l'importance des cinq K: le KIRPAN—épée qui symbolise l'invincibilité d'esprit; le KESH—cheveux longs et barbe naturelle, symboles de la simplicité de vie, de la sainteté et de la dévotion religieuse; le KARA—bracelet d'acier porté en signe du caractère éternel de Dieu; le KANGHA—peigne de bois qui symbolise un esprit et un corps sains; et le KACHCHA—pantalon court, symbole d'hygiène.
—Monsieur le Président, c'est avec un grand plaisir que je présente aujourd'hui cette motion à la Chambre pour en débattre et même, espérons-le, l'adopter à la fin de l'heure réservée au débat.
La motion dont la Chambre est saisie a été initialement adoptée par l'Assemblée législative du Manitoba le 13 juillet 1999 avec l'appui de tous les partis représentés à cette assemblée. C'est avec l'intention ou l'espoir de la faire adopter également ici à la Chambre que j'ai proposé cette motion à la demande de la communauté sikhe.
C'est dans cet esprit que j'ai cherché à faire de cette motion une motion qui puisse faire l'objet d'un vote lorsque j'ai comparu devant le Sous-comité des affaires émanant des députés. Cependant, comme elle n'a pas été choisie pour faire l'objet d'un vote, nous ne ferons maintenant qu'en débattre. J'espère quand même que nous pourrons peut-être trouver le moyen de l'adopter.
La motion comporte trois aspects. Le premier consiste à reconnaître l'importance du 13 avril, le festival de Vaisakhi, qui est l'anniversaire de la création de la Khalsa.
Le deuxième aspect consiste à reconnaître la contribution des Sikhs canadiens au Canada.
Le troisième aspect consiste à reconnaître l'importance des cinq K: 1e kirpan, le kesh, le kara, le kangha et le kachcha pour la communauté sikhe.
Je commence par le 13 avril, l'anniversaire du jour de 1699 où le dernier gourou du sikhisme, le gourou Gobind Singh, a créé la confrérie de la Khalsa. La confrérie a été bâtie sur le sens de la communauté que le premier gourou du sikhisme, le gourou Nanak, avait établie beaucoup plus tôt lorsqu'il avait lancé entre autres choses la tradition de la cuisine communautaire, ou Langar, qui se poursuit jusqu'à aujourd'hui. La Langar est un grand symbole pratique de l'esprit égalitaire qui anime la tradition sikh. C'est un esprit d'égalité qui englobe les hommes et les femmes et qui distingue le sikhisme des valeurs du système de castes, longtemps avant qu'il ne devienne populaire de le faire dans n'importe quel sens moderne du mot.
D'après un livre que je suis en train de lire sur les Sikhs canadiens, écrit par Narindar Singh, l'histoire des Sikhs au Canada remonte probablement au jubilée de diamant de la Reine Victoria en 1897, lorsque des régiments de Sikhs en route pour Londres sont passés par le Canada. Ils y sont repassés en 1902 à l'occasion du couronnement d'Édouard VII.
En 1903, les Sikhs avaient commencé à immigrer au Canada. Entre 1903 et 1908, près de 6 000 Sikhs sont arrivés au Canada, la plupart venant directement en Colombie-Britannique de leur village au Penjab. Malheureusement, leur arrivée en Colombie-Britannique a été mal accueillie par plusieurs groupes. Certains députés de Vancouver et le maire de cette ville ont demandé qu'on interdise toute immigration future de Sikhs.
En avril 1907, les Sikhs ont été privés du droit de vote en Colombie-Britannique et des lois ont été adoptées interdisant aux asiatiques d'entrer dans les professions libérales, de servir comme jurés, d'obtenir des marchés publics et d'acheter des propriétés dans certains quartiers de Vancouver. Les Sikhs récemment arrivés étaient inclus dans cette catégorie et, par conséquent, ces lois s'appliquaient à eux en dépit du fait qu'elles ne les visaient pas directement.
Pour résumer, les Sikhs ont finalement été empêchés d'entrer au Canada en vertu de la règle du voyage ininterrompu mise en place par le ministre du Travail d'alors, un certain William Lyon Mackenzie King. En conséquence, à l'exception des femmes et des enfants des hommes qui étaient déjà ici, l'immigration des Sikhs n'a repris que vers la fin des années 40.
Les Sikhs occupaient de nombreux emplois, mais ils étaient principalement employés dans les scieries de la Colombie-Britannique. Communauté presque exclusivement masculine jusqu'en 1920, les Sikhs ont maintenu leur sens communautaire et leurs traditions en vivant ensemble, en s'appuyant mutuellement et en s'assemblant dans leurs gurdwaras ou temples. Je suis heureux d'avoir maintenant deux temples dans ma circonscription, le Khalsa Diwan Society Temple et le Guru Nanak Darbar Temple. La Khalsa Diwan Society a été créée en Colombie-Britannique en 1907 pour protéger les Sikhs au Canada.
En 1913, le pire incident d'anti-sikhisme au Canada s'est produit lorsque le navire Komagata Maru est arrivé au port de Vancouver, le 21 mai 1913, et qu'il a été empêché d'aborder pendant deux mois pour être finalement renvoyé. C'est une histoire que je n'ai pas le temps de raconter en détails, mais ces derniers sont à la fois fascinants et embarrassants à notre époque, maintenant que nous favorisons le multiculturalisme, la promotion des droits de la personne, la tolérance religieuse et raciale et le pluralisme.
Compte tenu de ce qu'ont vécu les Sikhs quand ils sont arrivés dans notre pays, nous devrions être encore plus heureux de l'attachement qu'éprouvent aujourd'hui tant de Sikhs canadiens pour le Canada. Nous devrions tous être d'autant plus fiers de reconnaître, par l'adoption de cette motion et le débat à ce sujet, la grande contribution qu'ils ont apportée à tout le Canada à mesure que les Sikhs ont immigré vers les provinces autres que la Colombie-Britannique, laissant leur empreinte dans bien des villes canadiennes et dans tous les domaines.
Certes, dans ma propre ville, la communauté sikhe a énormément contribué à la croissance, au développement et à la nature même de la ville. Winnipeg s'est toujours enorgueillie de sa diversité.
Les Sikhs de Winnipeg ont certainement contribué à enrichir et à faire progresser cette diversité en y apportant les valeurs qui émanent de leur mode de vie et de leur religion, soit l'égalité, la responsabilité sociale, le service à la communauté et l'importance de la famille. C'est une morale qui fait écho aux valeurs que les Canadiens veulent sauvegarder en leur qualité de Canadiens, quelles que soient leur origine et leur religion.
C'est dans cet esprit que j'invite les députés à ajouter leurs propres commentaires au débat sur cette motion et à se demander si, après le débat, nous ne pourrions pas trouver le moyen d'adopter cette motion.
Je ne prendrai pas tout le temps qui m'est alloué car je crois qu'il faudrait laisser la parole à autant de députés que possible pour qu'ils participent à ce débat. Je terminerai en récitant des mots souvent entendus dans les gurdwaras du pays et que j'ai eu l'occasion de prononcer moi-même lorsque je me suis adressé aux communautés sikhes de ma circonscription:
Wahe Guru Ji Ka Khalsa, Wahe Guru Ji Ki Fateh
Mme Sarmite Bulte (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de plaisir que je participe ce soir au débat sur la motion no 32, proposée par le député de Winnipeg—Transcona.
Les Sikhs contribuent de bien des façons à la société canadienne. Ils participent de plus en plus au processus politique de tous les ordres de gouvernement. On devrait se réjouir de leur succès, car ils enrichissent par leur expérience et leurs connaissances la scène politique canadienne.
À l'instar des autres communautés ethniques et culturelles du Canada, la communauté sikhe contribue non seulement à diversifier notre société, mais encore à la modifier au moyen d'une compréhension mutuelle. Le Canada se distingue des autres pays par sa diversité. Ses 30 millions d'habitants forment un ensemble culturel, ethnique et linguistique qu'on ne trouve nulle part ailleurs au monde. Quelque 200 000 immigrants de tous les coins du monde continuent de choisir chaque année le Canada, attirés qu'ils sont par sa qualité de vie et sa réputation de société ouverte, pacifique et bienveillante qui accueille volontiers les nouveaux venus et qui fait grand cas de la diversité.
En 1960, la Déclaration des droits interdisait aux organismes fédéraux toute discrimination fondée sur la race, l'origine ethnique, la couleur, la religion ou le sexe. Les modifications apportées en 1962 à la Loi canadienne sur l'immigration prévoyaient spécifiquement que toute personne compétente de quelque partie du monde que ce soit pouvait être admise au Canada peu importe sa race, la couleur de sa peau, son origine ethnique ou le pays d'où elle venait.
Il s'en est suivi que la politique canadienne en matière d'immigration est devenue de moins en moins européenne et qu'on a commencé à considérer les demandes venant du sud de l'Europe, de l'Asie et des Antilles. L'augmentation substantielle, durant les années 70 et 80, du nombre d'immigrants admis comme réfugiés pour des raisons humanitaires a contribué à diversifier encore davantage les origines ethnoculturelles des nouveaux venus au Canada.
Le Canada a beaucoup appris de sa diversité. Le fait d'accepter les différences entre les groupes ethniques, puis d'en reconnaître la valeur, a changé et continue de changer et d'améliorer le Canada. Toutefois, en raison des nouvelles pressions qui se manifesteront dans l'avenir, il deviendra encore plus difficile d'assurer l'équilibre entre la diversité et l'unité.
La pratique nous a permis de comprendre que les différences qui nous caractérisent ne doivent pas nécessairement nous diviser. Cette prise de conscience encourage les Canadiens qui affrontent des défis communs à revendiquer leur droit à une participation pleine et entière à la société canadienne.
C'est ce qui permet à la conception canadienne de la diversité de s'enrichir constamment. La diversité va au-delà du langage, de l'origine ethnique, de la race et de la religion et inclut les caractéristiques transversales comme le sexe, l'orientation sexuelle et l'éventail des habilités et des âges. Les mêmes approches qui ont aidé les Canadiens à créer une société bilingue et multiculturelle nous permettent aujourd'hui d'abattre les obstacles qui empêchent les personnes de s'épanouir pleinement.
L'expérience du bilinguisme et du multiculturalisme a enseigné aux Canadiens que l'acceptation et la compréhension des différences entre les peuples rendent le développement collectif possible. Toutefois, l'expérience de la diversité nous enseigne également que les injustices doivent être reconnues et redressées si l'on veut permettre à un peuple multiculturel de progresser dans l'unité. Il s'agit souvent d'un processus long et ardu, mais néanmoins indispensable pour que tous les Canadiens puissent partager un sentiment commun d'appartenance et d'attachement à leur pays. Ce processus permet également aux Canadiens de se familiariser avec l'histoire qu'ils ont en commun et les obligations qu'elle leur enseigne.
Il faut plus que des mesures constitutionnelles et des lois pour assurer une véritable égalité des chances dans une société diversifiée. Tous les paliers de gouvernement au Canada créent des programmes pour inciter les communautés à promouvoir le dialogue et aider les gens à surmonter les obstacles à leur participation au sein de la société.
Comme dans le cas des langues officielles et du multiculturalisme, le Canada a appris que des mesures constitutionnelles et des lois ne suffisent pas à assurer l'égalité des chances dans une société diversifiée. Pour pouvoir contribuer et s'épanouir pleinement, tous les peuples doivent pouvoir s'exprimer au sein de la société et avoir la chance de façonner l'avenir du pays auquel ils appartiennent.
L'avenir du Canada dépendra de la mesure dans laquelle il saura préserver et renforcer sa capacité de réunir les gens malgré leurs différences nombreuses et leurs griefs, et construire une société pluraliste où personne ne perdra son identité ou son patrimoine culturel.
Notre approche de la diversité, au Canada, repose sur l'idée que le bien commun est bien servi si tous sont acceptés et respectés pour ce qu'ils sont, et que la société devient ainsi plus forte, plus harmonieuse, plus créative. Croire en la valeur de la diversité, c'est reconnaître que le respect du particularisme culturel est intrinsèque au sentiment de sa propre valeur et à son identité, et une société également accueillante pour tous est une société qui encourage la réalisation de soi, la participation, l'attachement au pays et le sentiment d'appartenance.
Tant dans sa politique que dans la pratique, le Canada a opté pour la diversité, ou le pluralisme culturel, comme disent certains. Cette diversité est perçue comme l'un des attributs les plus importants du Canada aux plans social et économique. Les Canadiens attachent de la valeur à la diversité comme moyen d'enrichir l'expression culturelle et de rendre la vie courante plus variée, plus intéressante. Les entreprises et les employeurs reconnaissent que la diversité en milieu de travail favorise l'innovation, stimule le travail d'équipe et la créativité et aide à élargir les marchés des biens et services.
Au fur et à mesure que la diversité s'accentue, de nouveaux liens se forgent avec le monde à un moment où les Canadiens reconnaissent qu'il est de plus en plus important de pouvoir parler de façon crédible dans les affaires internationales et de renforcer les avantages qui sont les nôtres dans l'économie mondiale.
Le Canada est la preuve vivante que les femmes et les hommes de nombreuses races, religions et cultures peuvent coexister. Nous admettons les problèmes qui existent, et nous tentons de surmonter nos différences pour trouver des solutions. Nous montrons au reste du monde que des personnes différentes peuvent s'accepter et se respecter, collaborer pour construire l'une des sociétés les plus ouvertes, fortes, créatives et compatissantes sur la terre.
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en tant que député sikh et porte-parole en chef de l'opposition officielle du Canada en matière multiculturalisme, je suis heureux de donner mon aval à la motion no 32: Que la Chambre reconnaisse l'importance du 13 avril pour l'ensemble des Sikhs et les contributions des Sikhs canadiens à notre pays; et que la Chambre reconnaisse aussi l'importance des cinq K, dont je parlerai plus tard.
J'apprécie les efforts du député de Winnipeg—Transcona et le félicite d'avoir présenté cette motion. En 1999, l'Assemblée législative du Manitoba avait reconnu une motion similaire pour commémorer le 300e anniversaire de la naissance de la nation sikhe, la Khalsa, qui veut dire pureté.
Il est important de respecter toutes les religions, quelle que soit celle à laquelle on appartient. Selon la philosophie sikhe, chacun se doit de devenir meilleur, qu'il soit sikh, hindou, chrétien, musulman, juif ou autre.
Le cabinet du premier ministre a eu tort de s'être interposé en demandant que le nom de Jésus ne soit pas prononcé au cours du service religieux et des prières à la mémoire des victimes de l'accident tragique de la Swissair à Peggy's Cove. Je me suis opposé à cette action du cabinet du premier ministre au nom des chrétiens, mes frères et soeurs.
Surrey-Centre, la circonscription la plus importante du Canada sur le plan démographique, compte de nombreux habitants d'origines ethniques diverses, dont une importante majorité de sikhs. En fait, c'est dans la circonscription de Surrey qu'on trouve la plus forte concentration de sikhs vivant à l'extérieur de l'État du Pendjab en Inde.
Les sikhs habitent principalement l'État du Pendjab, lequel comprend environ 3 p. 100 de la superficie de l'Inde et 2,5 p. 100 de sa population. L'État du Pendjab produit plus de 70 p. 100 de la production alimentaire du pays. Les sikhs ont été nombreux dans les armées britannique et indienne. La Reine a reconnu leur participation aux grandes guerres, la Première Guerre mondiale et la Seconde Guerre mondiale. Par ailleurs, 97 p. 100 de ceux qui ont donné leur vie pour que l'Inde soit libre étaient des sikhs. L'apport des sikhs aux équipes olympiques de l'Inde a aussi été très important. Selon un rapport récent du Congrès au Sénat américain, les Panjabis ont les revenus par habitant les plus élevés et le plus haut niveau de scolarisation de tous les groupes ethniques en Amérique du Nord.
L'histoire des sikhs au Canada remonte à environ un siècle. Pendant cette période, les sikhs ont participé à la construction du chemin de fer, ils ont travaillé dans des scieries et ils ont aussi oeuvré professionnellement dans les domaines de la médecine, du droit, de l'éducation, du génie, etc. Les sikhs sont propriétaires de grandes entreprises et industries et, bien entendu, ils participent à la vie politique, comme nous pouvons le constater à la Chambre.
Les sikhs partout dans le monde ont la réputation d'être des travailleurs acharnés, d'être très courageux et d'avoir l'esprit d'entreprise. Cependant, comme l'a mentionné le député du NPD, l'incident du navire Kamagatamaru a été une page sombre de l'histoire du Canada. La plupart des passagers à bord de ce navire étaient des sikhs qui luttaient pour le respect des libertés et des droits de la personne. À cause de leur pays d'origine et de leur race, le gouvernement libéral ne les a pas autorisés à accoster en terre canadienne et, lorsque le bateau est retourné en Inde, la plupart des passagers ont été tués par l'armée britannique.
L'histoire des sikhs remonte à environ 500 ans. Elle a commencé avec le premier gourou, Nanak Dev Ji, qui est né en 1469. Le 13 avril 1699, devant une immense assemblée, épée étincelante en main, le dixième gourou, Gobind Singh Ji, a lancé un appel à tous ceux qui voulaient protéger la vérité et vivre leur foi, même au prix de leur vie.
Les cinq premiers à s'être présentés devant le gourou ont reçu le titre de panj pyaras, les cinq bien-aimés; ayant été baptisés, ils ont été ensuite priés par le gourou de l'admettre au sein du panth en lui administrant l'amrit, c'est-à-dire en le baptisant. Ce jour-là, quelque 20 000 personnes ont été baptisées et ont dès lors fait partie du khalsa panth. La khalsa est née ce jour-là et depuis nous célébrons le vaisakhi.
L'amrit ne peut être administré qu'aux fidèles ayant adopté les cinq symboles extérieurs essentiels des sikhs, les cinq K, un don exceptionnel du gourou Gobind Singh Sahib. Un sikh ne doit se départir d'aucun de ces symboles.
Pour être membre du khalsa panth, les individus, et même le gourou, doivent recevoir l'amrit, adopter l'uniforme des cinq K, et donner aux garçons le nom de Singh, qui désigne le lion, et le nom Kaur aux filles. N'importe qui peut recevoir l'amrit, peu importe la caste, les croyances, la race, et le reste.
Je voudrais expliquer à présent les cinq K dont j'ai parlé.
Le premier des cinq K est le kes, soit la chevelure. Le kes est un symbole de sainteté et il est considéré comme une partie importante du corps. La chevelure de la Khalsa lui donne un aspect de sainteté.
Le gourou Gobind Singh Ji a dit «La Khalsa est la forme spéciale que je prends. Je vis dans la Khalsa.» Garder la chevelure intacte et ne pas y toucher est le premier et principal devoir d'un sikh. Même le lieu où les cinq bien-aimés ont reçu le baptême, Anadpur Sahib, a été appelé Kesh-Garh.
Tout sikh doit porter un couvre-chef. Les hommes utilisent un turban tandis que les femmes se servent d'un grand foulard appelé chunni ou d'un petit turban appelé keski. Le turban est un élément très important de la tradition religieuse sikhe et aussi une question de respect, de fierté et d'honneur de grande ampleur. C'est pourquoi on ne peut demander à des sikhs de retirer leur turban dans quelque lieu ou quelque circonstance que ce soit.
Dans le passé, des empereurs moghols oppresseurs ont ordonné que l'on contraigne les sikhs à se faire couper les cheveux, de sorte que ceux-ci ont choisi d'être décapités plutôt que de succomber aux ordres des oppresseurs.
Le deuxième K est pour kangha, habituellement un petit peigne en bois. Les sikhs khalsa se peignent deux fois par jour, nouent leurs cheveux sur le dessus de la tête, glissent le kangha derrière le noeud et attachent le turban avec fierté.
Le troisième K est pour kirpan, une épée en acier inoxydable, qui est un symbole de puissance, de dignité, de courage, de confiance en soi et de foi dans la victoire du bien sur le mal. Elle porte aussi l'appellation de sri sahib. C'est une arme de défense et non d'attaque. On considère que c'est le fléau du tyran et du malfaisant. Elle sert à assurer la protection d'une cause bonne ou juste. Les sikhs conservent le kirpan, le symbole actif, dans un fourreau et le portent avec une ceinture appelée gatra.
Les sikhs ont dû lutter en vue d'obtenir des concessions leur permettant de garder ces symboles intacts dans le cadre du code de conduite khalsa en tout lieu, y compris dans l'armée, dans les prisons, dans les avions ou même à motocyclette.
En reconnaissance des loyaux et éminents services rendus par les sikhs à la Reine à l'occasion des grandes guerres, les sikhs ont été autorisés en septembre 1920 à porter le kirpan même dans l'armée, qu'ils soient en uniforme ou en vêtements civils.
Dans le passé, les sikhs ont utilisé le kirpan pour libérer des milliers de jeunes femmes hindoues qui avaient été enlevées et violées par des dirigeants oppresseurs et vendues sur les marchés. Les sikhs les ont libérées et les ont ramenées saines et sauves à leur famille.
Le quatrième K signifie kara, un bracelet en acier inoxydable qui se porte au poignet droit. Il rappelle aux sikhs les voeux du baptême. Il empêche le khalsa de faire quoi que ce soit de mal qui n'est pas digne d'un khalsa. En outre, il protège le bras quand on se bat avec un ennemi. Même les sikhs qui n'ont pas pris d'amrit portent le kara.
Le cinquième K signifie kachcha, kash ou kashehra. Il s'agit de caleçons ou de culottes conçus de façon à bien couvrir les parties génitales et à ne pas restreindre les mouvements du khalsa. C'est un symbole de retenue sur le plan sexuel et de pureté morale. Le khalsa est reconnu pour ne pas commettre l'adultère.
Le jour où est célébré le Vaisakhi, le sangat, fondé par le premier gourou Nanak Dev Ji, a été transformé en panth du khalsa. Le khalsa a pour mandat de répandre le bien, de protéger les droits de la personne des honnêtes gens et de détruire la tyrannie.
Le Vaisakhi amène l'esprit du chardi kala qui est l'esprit supérieur du panth et rappelle aux sikhs leur extraordinaire héritage, leur estime de soi et leur grande détermination. Pour être un membre du panth, il faut suivre la vie de sewa-simran et souhaiter le bien à toute l'humanité.
Au XVIIIe siècle, les dirigeants de l'Empire tyrannique moghol interdisaient à la population de devenir un sikh et ordonnaient à quiconque pouvait trouver un sikh de lui couper la tête et de l'échanger à un poste de police contre environ une année de salaire.
Les sikhs ont non seulement survécu à cette élimination ou génocide, mais ils sont aussi devenus avant le début du siècle les dirigeants officiels du Panjab, de Pishawar à Delhi. Les sikhs étaient reconnus pour leur comportement pur, leur bravoure, leur amour pour l'humanité et pour la protection qu'ils offraient aux pauvres et aux démunis, même au risque de leur propre vie.
Le bon caractère des sikhs a été si populaire auprès des gens que même un historien musulman, Kazi Noor Mohammed, n'a pu que le reconnaître et le consigner aux pages 156 à 159 de son livre intitulé Jang Nama.
Pour conclure, j'aimerais féliciter le député de Winnipeg—Transcona d'avoir déposé cette motion et j'exhorte tous les députés de la Chambre à l'appuyer. Reconnaissant l'importance du Vaisakhi, le Parti réformiste du Canada, et maintenant l'Alliance canadienne, l'opposition officielle du Canada, célèbrent fièrement l'anniversaire du Vaisakhi au Parlement depuis 1998. Cette année, la célébration annuelle du Vaisakhi aura lieu le mercredi 4 avril à la pièce 237-C de l'édifice du Centre, entre 16 et 18 heures. Comme toujours, j'invite les députés de tous les partis ainsi que le public à se joindre à nous.
En 1998, le chef du Parti réformiste a été le premier et le seul chef d'un parti politique canadien de niveau fédéral à visiter le Temple d'or, le temple le plus sacré des sikhs et le Durgiana Mander à Amritsar.
J'aimerais également ajouter que je suis un homme politique et non un leader religieux. Compte tenu de mes connaissances restreintes, de mon manque de sagesse et de temps, je pourrais avoir par inadvertance omis certaines choses ou fait des commentaires qui n'auraient pas exprimé avec exactitude certains principes ou sentiments et je m'en excuse.
Toutefois, je suis fier de terminer mon discours en reprenant le slogan khalsa, Bole So Nihal, Sat Sri Akaal et de partager l'expression de salutation du gourou, Waheguru Ji Ka Khalsa, Waheguru Ji Ki Fateh.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, les États sont appelés à se modifier au fur et à mesure des années.
Le Québec et le Canada n'ont pas échappé à cette réalité et, l'une des causes importantes des changements dans les États est, bien sûr, l'apport de sang nouveau, de communautés nouvelles, de gens différents.
Au Québec et au Canada, nombre de groupes sont venus ici pour avoir une vie meilleure, pour avoir une vie plus digne. Certains sont venus à la suite de famines, d'autres sont venus à la suite de persécutions, d'autres encore sont venus simplement pour avoir l'espoir d'une vie meilleure.
Aujourd'hui, notre collègue de Winnipeg—Transcona nous permet de parler un peu d'une communauté qu'on ne connaît pas beaucoup au Québec, parce qu'il n'y en a pas beaucoup.
La communauté sikh est arrivée au Canada à la fin du XIXe siècle. En fait, ils sont arrivés comme membres d'une unité de l'armée de Sa Majesté britannique. Ils retournaient chez eux, en Inde, après les célébrations du 50e anniversaire de la reine Victoria, mais ils ont décidé de rester au Canada. Ce n'était probablement pas un mauvais choix.
Quelques années après, à la suite du couronnement d'Édouard VII, un deuxième groupe est aussi venu s'installer au Canada. Ils étaient tous des gens qui avaient fait carrière dans le monde militaire.
Actuellement, la communauté sikh compte 300 000 personnes au Canada, et ce que la motion du député de Winnipeg—Transcona nous demande, c'est de reconnaître l'importance du 13 avril pour l'ensemble des Sikhs et leur contribution à notre pays.
La motion dit aussi:
[...] que la Chambre reconnaisse aussi l'importance des cinq K: le kirpan, cette épée qui symbolise l'invincibilité d'esprit; le kesh, les cheveux longs et la barbe naturelle, symboles de la simplicité de vie, de la sainteté et de la dévotion religieuse; le kara, ce bracelet d'acier porté en signe du caractère éternel de Dieu; le kangha, le peigne de bois qui symbolise un esprit et un corps sains; le kachcha, un pantalon court, symbole d'hygiène.
J'ai personnellement beaucoup d'admiration et de respect pour les communautés qui manifestent un attachement aux symboles qui les représentent. Je pense que les symboles, dans la vie de tous les peuples, font partie de la vitalité, de la culture et de l'identité de ces peuples.
Dans ce contexte, je veux remercier notre collègue d'avoir porté cette motion devant nous. Il est clair que je souhaite que la Chambre reconnaisse l'importance du 13 avril, parce que le 13 avril, c'est un peu comme le Premier de l'an pour nous. C'est le premier du nouvel an sikh, et cela s'appelle Vasakhi. C'est hélas tout ce que je peux lire en sikh.
En 1999, Postes Canada a d'ailleurs reconnu la communauté sikh, puisqu'il a émis un timbre-poste. Il faut dire qu'ils en émettent beaucoup, mais celui-là avait quand même un caractère tout à fait particulier, puisqu'il soulignait l'importance de la communauté sikh, l'importance de la fête du 13 avril pour cette communauté et aussi le rôle que ses membres jouent dans la communauté où ils se sont établis.
Ce sera tout de ma part. J'espère que le 13 avril sera pour les Canadiens et les Québécois une date signifiante après le débat d'aujourd'hui.
[Traduction]
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, nous reconnaissons, dans le cadre de cette motion, l'importance de la contribution des sikhs canadiens à notre pays et l'importance du 13 avril en tant qu'anniversaire du khalsa.
Je voudrais féliciter sincèrement le député de Winnipeg—Transcona, un éminent collègue, un leader parlementaire tout comme moi, et un doyen de la Chambre des communes, notamment pour la tentative qu'il fait d'amener toute la Chambre à souscrire à cette motion.
Comme vous le savez sans aucun doute, monsieur le Président, notre pays a une riche histoire marquée par la diversité des nombreuses religions, cultures, langues et ethnies qu'on retrouve au canada. Je crois qu'il est dans l'intérêt du Canada d'appuyer et de célébrer chacune de ces diverses cultures dans la mesure où nous reconnaissons les journées religieuses importantes.
Le Canada dans son ensemble a été bâti grâce aux efforts d'immigrants, appuyés en cela par nos peuples autochtones. En cette journée spéciale, le 13 avril, les sikhs du monde entier célèbrent le Vaisakhi, le Nouvel An sikh. En cette journée, les sikhs rendent hommage à leur foi, tout comme les Chrétiens le font à Noël. De nos jours, au Canada, nous avons près de 300 000 sikhs et nous participons à cette célébration.
Même si la population sikh de ma circonscription de Pictou—Antigonish—Guysborough est relativement petite comparativement à celle de centres plus urbains du pays, nous reconnaissons la contribution que les sikhs font dans toutes les circonscriptions, dans tous les coins du pays.
Je souscris à la motion que nous a présentée le député de Winnipeg—Transcona pour un certain nombre de raisons. Tout d'abord, la diversité du Canada n'est que renforcée lorsqu'on encourage les gens de toutes les religions et de toutes les origines ethniques à participer pleinement à l'essor de la société canadienne et à s'intégrer à notre tissu social, dans notre économie, notre culture et notre mode de vie.
En souscrivant à des motions comme celle-ci, nous donnons, en fait, un exemple historique d'acceptation de religions, d'origines ethniques et de cultures au Canada, soit là encore un principe tout à fait fondamental pour tous les Canadiens.
Ensuite, je souscris sans équivoque à cette motion, comme le font les députés de mon parti, car personne ne remet en doute la contribution importante des sikhs au Canada, dans le monde des affaires, dans le domaine des droits de la personne et dans de nombreux autres domaines.
Lorsqu'ils sont venus s'établir au Canada, les sikhs ont travaillé d'arrache-pied dans les scieries et les cours à bois pour améliorer leur sort et celui des membres de leurs communautés. Certains ont fini par devenir propriétaires de leur propre scierie, comme la Mayo Lumber Company et la Kapoor Lumber Company, en Colombie-Britannique.
La richesse accumulée grâce à ces entreprises a servi à l'avancement de la communauté sikh sur la côte ouest avec la construction d'écoles, de temples, de maisons et d'autres contributions. Vous serez le premier à reconnaître, monsieur le Président, que ce genre de dévouement et de détermination est louable et symbolise pour tous les Canadiens l'innovation, la persévérance et l'esprit d'entreprise.
À la même époque, les sikhs tâchaient activement de promouvoir les droits de la personne dans leur nouveau pays, non seulement pour les sikhs au Canada mais aussi pour les sikhs de partout dans le monde. Nous entendons souvent parler des premières années où les membres des communautés sikhs établies un peu partout au Canada faisaient des collectes d'argent notamment pour venir en aide aux victimes de désastres naturels qui se produisaient dans leur pays d'origine ou ailleurs. Ils manifestaient également un intense dévouement à l'égard des sikhs vivant au Canada.
Dans leur lutte pour l'égalité, les sikhs mettaient du zèle à faire révoquer et réviser les lois discriminatoires auxquels de nombreux immigrants se heurtaient en arrivant sur nos côtes. La Khalsa Diwan Society a été mise sur pied pour mener ce combat pour les immigrants, en faisant du lobbying aussi bien auprès du gouvernement canadien que du gouvernement indien pour qu'ils adoptent des politiques d'immigration équitables. Ces efforts louables ont été suivis de réalisations remarquables. Ce groupe a réussi à faire adopter une politique d'immigration plus équitable et non discriminatoire.
Je crois vraiment que les sikhs ont travaillé d'arrache-pied pour mériter le droit d'appeler le Canada leur pays et d'être pleinement acceptés par tous les Canadiens. Nous, ici au Parlement, pouvons faire un geste important et symbolique en adoptant la motion. Je sais que l'on essaiera plus tard d'obtenir que cette question soit mise aux voix. Nous sommes pleinement conscients de la signification d'un vote de tous les parlementaires sur cette motion.
Je crois, comme tous les Canadiens, que quiconque paie des impôts, respecte les lois du pays et s'efforce de faire du Canada un pays meilleur mérite le respect de nous tous à la Chambre. Je dis ceci dans l'espoir que tous les députés de la Chambre des communes prendront la décision personnelle d'appuyer la motion, reconnaissant l'importance du 13 avril pour tous les sikhs ainsi que l'importance de leurs symboles spirituels.
Tandis que la communauté sikh croît en nombre et que ses membres continuent à observer et à pratiquer les coutumes et les traditions de leur nouveau pays ainsi que de leur pays d'origine, j'estime qu'il n'est que normal que nous fassions preuve de bonne volonté. Par l'intermédiaire de cette motion et d'autres motions semblables, nous pouvons trouver un point commun à tous les Canadiens, qu'ils soient sikhs, chrétiens, musulmans, juifs ou autres, de manière à ce qu'ils aient un sentiment de fierté et d'appartenance. La compréhension et le respect mutuel sont essentiels à la constitution d'un tissu social plus solide et plus équilibré au Canada. Selon moi, les sikhs canadiens, comme tous les Canadiens d'ailleurs, ne devraient jamais se sentir obligés de modifier leurs coutumes ou leurs croyances. Celles-ci devraient être une source de fierté et de beauté.
Je tiens à réitérer l'appui non équivoque du Parti progressiste-conservateur pour cette motion. J'exhorte tous les députés de la Chambre à en faire autant. C'est avec fierté que le Parti progressiste-conservateur s'associe à cette motion. Comme l'a mentionné le député de Winnipeg—Transcona, c'est une motion qui vient de l'assemblée législative de sa province. Un gouvernement progressiste-conservateur au Manitoba a adopté une motion similaire.
Tous les Canadiens, toutes les religions, toutes les croyances spirituelles devraient se voir accorder cette même reconnaissance par cette Chambre dont les Canadiens attendent beaucoup. Le symbolisme serait important. Une motion comme celle-ci, en faisant appel à la concertation, embrasse l'essence même de notre pays, de cette grande culture et cette mosaïque culturelle qui est devenue le symbole du Canada.
Je félicite le député néo-démocrate d'avoir proposé cette motion. Il peut compter sur notre appui.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, permettez-moi, au cours des quelques minutes que j'ai à ma disposition, de dire combien je suis fière d'appuyer la motion parrainée par le député de Winnipeg—Transcona dont nous sommes saisis aujourd'hui.
Tout comme mon collègue, qui représente une région qui compte une forte population de Sikhs, j'ai le bonheur de pouvoir représenter une région où la population sikh est nombreuse et active, et contribue largement à favoriser la santé et le bien-être de toute notre collectivité.
Dans ma région, la circonscription de Winnipeg-Centre-Nord, deux Gurdwaras sont une source d'inspiration pour moi et pour toute la collectivité, soit ceux de Singh Sabha et de la Sikh society of Manitoba. Ces deux Gurdwaras ont joué un rôle très actif pour rassembler la collectivité afin qu'elle comprenne l'importance culturelle du Sikhisme et qu'elle partage avec tous les autres le sens de spiritualité qui caractérise cette communauté et les contributions qu'elle apporte à notre pays.
Moi aussi je suis très heureuse de me joindre à mes collègues de la Chambre pour souligner l'importance du 13 avril et pour remercier le député de Winnipeg—Transcona d'avoir pris l'initiative de présenter la motion à la Chambre.
J'ai bon espoir, et je suis certaine que mes collègues de tous les partis à la Chambre partagent cet espoir, que nous pourrons nous entendre pour appuyer la motion par un vote de confiance et en faire une recommandation unanime de la Chambre des communes.
Rendre hommage au Sikhisme et souligner la contribution des Sikhs à l'évolution de notre pays constitue un événement important. Leur contribution est bien tangible dans ma collectivité, et j'attache une grande importance à la spiritualité des Sikhs. Leur attachement aux valeurs que sont la justice, l'égalité et la dignité est indissociable de la foi et de la culture sikh, au Manitoba comme dans le reste du Canada.
Je cède la parole à mon collègue et j'espère que la Chambre consentira à appuyer la motion à l'unanimité.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je voudrais tout d'abord remercier tous les députés de la Chambre qui ont participé à ce débat. C'est le genre de débat que j'avais en tête lorsque j'ai présenté cette motion. C'est une occasion pour les députés de tous les partis d'exprimer leurs opinions sur l'importance du 13 avril pour les sikhs, sur la contribution que les sikhs canadiens apportent à notre pays et sur l'importance des cinq K pour les sikhs.
J'espère que les sikhs pourront plus tard penser à ce jour, le 20 février 2001, comme étant le jour où le Parlement canadien a jugé bon non seulement de débattre de façon harmonieuse cette motion, mais aussi, comme je le demanderai bientôt, d'aller au-delà de cela et de se servir du pouvoir que nous donne le consentement unanime pour considérer que cette motion peut faire l'objet d'un vote et pour l'adopter à l'unanimité. Nous avons le pouvoir de le faire.
Je sais que c'est quelque peu inhabituel, et je m'excuse à la Chambre pour la nature inhabituelle de cette demande, mais ce n'est pas sans précédent. J'ai vu cela à certaines occasions lorsque les députés estimaient que les circonstances étaient assez spéciales pour que nous utilisions ce pouvoir, et je crois que c'est le cas aujourd'hui.
Encore une fois, je remercie les députés qui ont pris la parole. Je sais gré à M. Kewal Singh, de Winnipeg, qui m'a d'abord suggéré de présenter cette mesure. Je suis heureux de constater l'unanimité qui se fait à la Chambre. Toutes les interventions ont été favorables à la motion.
Si la motion est adoptée, si elle fait l'objet d'un vote, elle n'entraînera aucun fardeau particulier, que ce soit d'ordre administratif ou autre, sauf que les sikhs canadiens sauront qu'à ce moment-ci de notre histoire, nous avons pu nous arrêter pour réfléchir à leur histoire au Canada, à certains faits qui se sont produits et que nous déplorons, ainsi qu'à de nombreuses choses qu'ils ont faites pour le Canada et nous avons finalement exprimé ce que nous pensions en présentant cette motion à la Chambre des communes.
Je connais mal la procédure à suivre dans ce cas, mais je vous serais reconnaissant, monsieur le Président, de demander s'il y a consentement unanime pour que cette motion fasse l'objet d'un vote. Je demande à la Chambre le consentement unanime pour que la motion donne lieu à un vote et soit adoptée.
Le vice-président: Le député de Winnipeg—Transcona a-t-il le consentement unanime pour présenter sa motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
M. Gurmant Grewal: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le député de Winnipeg—Transcona, qui a proposé la motion no 32, a demandé le consentement unanime de la Chambre pour que la motion fasse l'objet d'un vote. Je souligne que les députés du Parti de l'Alliance canadienne ont dit oui, mais qu'un député libéral a dit non.
Le vice-président: La période prévue pour l'étude des initiatives parlementaires est maintenant expirée. Puisque la motion ne fait pas l'objet d'un vote, l'ordre est rayé du Feuilleton.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, j'ai besoin d'éclaircissements sur une question que j'ai posée plus tôt au sujet de la Convention de Vienne et de l'immunité diplomatique qui a été mise en lumière par suite du très malheureux incident survenu à Ottawa, un diplomate russe ayant été impliqué dans un accident qui a entraîné la mort d'une personne et causé des blessures graves à une autre et à un animal familier. Cet accident a certes attiré l'attention de tous les habitants d'Ottawa et d'un grand nombre de Canadiens sur la question de la portée de l'immunité diplomatique.
Même si cela n'a tout d'abord pas semblé être le cas, il appert maintenant que le diplomate russe fera face à des accusations à l'égard de ce décès. Une enquête aura lieu en Russie conformément à l'article 264 du code criminel russe, comme cela semble opportun.
En tout cas, le problème ici est que le diplomate était reconnu comme une personne violente qui avait un dossier de conduite avec facultés affaiblies. L'immunité diplomatique dont jouissent les politiques et les diplomates du monde entier a servi à soustraire cette personne à des poursuites ou même à des sanctions pour avoir conduit avec des facultés affaiblies.
Nous reconnaissons que la Convention de Vienne est très importante, mais nous estimons qu'elle comporte de sérieuses lacunes et nous voudrions que le ministre demande à ce qu'elle soit modifiée. Le Canada n'est pas le seul pays à avoir eu des problèmes avec des diplomates qui abusent de leur immunité. Nous croyons qu'il y a un consensus parmi d'autres pays pour modifier la Convention de Vienne en ce qui a trait à l'immunité afin d'empêcher les diplomates d'abuser du système, de violer la loi encore et encore et de mettre la vie d'autres personnes en danger, comme l'a fait le diplomate russe au Canada.
Je signale aussi que l'administration de l'ambassade de Russie est en partie responsable, à mon avis, car elle savait qu'un de ses diplomates se conduisait de façon dangereuse et était violent chaque fois qu'il était arrêté par la police. Il a profité des règles sur l'immunité diplomatique pour se protéger alors que ces règles n'auraient jamais dû être employées à cette fin. Cela n'a jamais été leur but.
Nous voulons que le ministre prenne l'initiative de faire modifier la Convention de Vienne pour empêcher les diplomates d'en faire un usage abusif dans les cas où ils mettent en danger la vie d'habitants d'autres pays. Nous croyons que le Canada devrait agir en chef de file et piloter la modification de la Convention de Vienne. À notre avis, une telle initiative obtiendrait un appui massif à travers le monde.
Je pose donc la même question que j'ai posée auparavant. Le gouvernement du Canada est-il prêt à lancer une initiative internationale en faveur de la modification des règles sur l'immunité diplomatique, surtout pour qu'on cesse de protéger ceux qui conduisent en état d'ébriété ou de façon dangereuse?
[Français]
M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme tout le monde le sait, un accident tragique, survenu à Ottawa le 27 janvier dernier, a fait perdre la vie à Catherine MacLean et causé des blessures graves à Catherine Doré.
Le conducteur du véhicule qui a frappé les deux femmes était Andrei Knyazev, un diplomate russe qui conduisait apparemment avec des facultés affaiblies.
[Traduction]
Immédiatement après l'accident, le ministère des Affaires étrangères a demandé au gouvernement russe de lever l'immunité diplomatique de M. Knyazev. Conformément à la pratique habituelle dans de tels cas, le gouvernement russe a refusé de lever l'immunité de M. Knyazev, et celui-ci est retourné à Moscou le 29 janvier.
[Français]
Depuis l'accident, le ministre et le ministère des Affaires étrangères, ainsi que l'ambassade du Canada à Moscou se sont employés à obtenir justice en Russie. Nous venons d'apprendre que le procureur général de Russie a annoncé que des poursuites criminelles seraient intentées contre M. Knyazev.
[Traduction]
L'affaire a maintenant été confiée à la police de Moscou, qui doit faire enquête. Le dossier de la police canadienne sur l'accident mettant en cause M. Knyazev a été transmis directement aux autorités russes par la filière policière le 12 février. Il est maintenant rendu à Moscou.
[Français]
Les circonstances tragiques du 27 janvier ont poussé le ministre des Affaires étrangères à demander un examen urgent des politiques et procédures suivies par le ministère des Affaires étrangères. Le résultat de cet examen, qui a été mené par le sous-ministre, devrait être rendu public sous peu.
Le ministère reconnaît que l'immunité diplomatique était indispensable à la conduite des relations entre États et qu'elle existait pour permettre aux représentants diplomatiques de servir convenablement les intérêts de leur pays.
La Convention jouit clairement de l'appui de la communauté internationale.
[Traduction]
LA SANTÉ
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je suis très heureuse de pouvoir revenir sur la question que j'ai posée à la Chambre le 13 février. Elle se rapporte à toute l'affaire du boeuf brésilien. Elle a trait à la façon dont les scientifiques de Santé Canada traitent cette affaire. Et, ce qui est plus important encore, elle a trait à la très grave question de la maladie de la vache folle qui est d'actualité dans notre société.
Sans entrer dans les détails de ce fiasco concernant le boeuf brésilien, qui continue alors même que parlons, je voudrais simplement dire que toute cette affaire met en relief les lacunes du système canadien d'assurance de la salubrité des aliments. Cette affaire nous amène à nous poser de sérieuses questions sur la capacité de notre gouvernement de protéger les Canadiens contre la maladie de la vache folle.
La question que j'ai posée le 13 février faisait suite au fait que deux scientifiques de Santé Canada ont laissé entendre, au début de février, qu'il n'existait aucun argument valable pour exclure les produits du boeuf du Brésil avant ceux des autres pays. Elle concernait aussi la décision du gouvernement de museler les scientifiques qui ont fait ces déclarations.
Quelle que soit la séquence des événements, ce sur quoi les scientifiques nous ont amenés à nous interroger, c'est sur l'état de notre système d'assurance de la salubrité des aliments. Y a-t-il des raisons de s'en inquiéter? Quel mécanisme le gouvernement a-t-il mis en place afin de garantir un système scientifique tout à fait infaillible pour protéger les Canadiens contre la maladie de la vache folle?
Diverses questions ont été soulevées. Les scientifiques eux-mêmes ont demandé pourquoi le Brésil était visé. Que dire du boeuf que nous importons d'autres pays comme l'Australie, l'Argentine, l'Inde et ainsi de suite?
D'autres rapports mentionnent que, contrairement à ce que prétend le ministre de l'Agriculture, le Canada a importé des produits du boeuf et de la farine d'os de la Grande-Bretagne alors même que nous étions au courant de l'existence de la maladie de la vache folle.
Des rapports récents publiés aux États-Unis, en particulier un rapport d'un biologiste associé à la Consumers Union of United States, laissent entendre que les Canadiens pourraient être à risque de contracter la forme humaine de la maladie de la vache folle à partir du boeuf canadien, parce que les tests actuels sont inadéquats. Voilà les questions sous-jacentes à toute cette affaire.
Les scientifiques ont choisi de rompre le silence, ces mêmes scientifiques qui avaient déjà parlé de l'hormone de croissance bovine et qui avaient ensuite été intimidés et muselés par le gouvernement. Ils ont porté cette affaire devant les tribunaux et ont obtenu le droit de parler lorsqu'ils estiment que l'intérêt public est menacé.
Aujourd'hui, nous faisons face à la même situation, c'est le même épisode de notre histoire qui se répète. Pourtant, le gouvernement n'a pas expliqué pourquoi il a confiné au silence ces scientifiques et il n'a pas non plus donné l'assurance aux Canadiens qu'un système scientifique infaillible est en place.
Les questions que j'adresse aujourd'hui au secrétaire parlementaire sont les suivantes: le gouvernement va-t-il donner des détails très précis sur les mesures prises pour protéger les Canadiens de la maladie de la vache folle? Le gouvernement va-t-il dire aux Canadiens que le principe de précaution est vraiment appliqué? Des scientifiques compétents dans le domaine de la recherche sur le boeuf participeront-ils, oui ou non, à l'étude de tout ce dossier?
Les Canadiens doivent avoir une confiance absolue dans la sécurité du boeuf qu'ils achètent au supermarché et n'avoir aucune raison de s'inquiéter de cette maladie très grave et dangereuse.
[Français]
M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, un grand nombre de scientifiques travaillent à Santé Canada et ils sont responsables de la santé des citoyens et de la salubrité des aliments. Mais ils ne travaillent pas tous sur le dossier de la maladie de la vache folle.
Je voudrais vous assurer que Santé Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments ont tous deux une équipe de spécialistes qui surveillent les aspects scientifiques, politiques et administratifs de ce dossier.
Les scientifiques de Santé Canada, qui ont récemment été cités dans les médias et par la députée de l'opposition, n'étaient membres d'aucune de ces équipes.
[Traduction]
De plus, j'ai le plaisir de faire savoir à la Chambre qu'un groupe consultatif de scientifiques indépendants, à Santé Canada, a appuyé la décision controversée du gouvernement d'interdire temporairement le boeuf brésilien parce qu'il risque d'être contaminé par la maladie de la vache folle.
Ce groupe consultatif est dirigé par l'astronaute Roberta Bondar et se compose d'experts dans des domaines comme les sciences, la médecine et la bioéthique. Il a déclaré que la suspension temporaire des importations et le retrait des produits du boeuf venant du Brésil étaient des mesures scientifiquement justifiées.
[Français]
Comme on le constate, la députée de l'opposition erre gravement en laissant croire que cette décision était non fondée sur le plan scientifique.
En matière de santé publique, le Canada possède des politiques claires qui reposent sur une approche scientifique élaborée par des experts, une approche endossée par des experts indépendants, comme on vient de le voir, ce qui nous permet de réduire au minimum toute menace connue ou appréhendée à la santé publique de notre population.
Le vice-président: La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 14 heures, conformément à l'article 24 du Règlement.
(La séance est levée à 19 h 09.)