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HUMA Rapport du Comité

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OPINION DISSIDENTE DU BLOC QUÉBÉCOIS

Rapport sur l’alphabétisation du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées

Le Bloc Québécois ne peut donner son appui au Rapport sur l’alphabétisation du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées intitulé Accroître l’alphabétisation des adultes : la nécessité d’une action pancanadienne. En effet, plusieurs recommandations de ce Rapport ne respectent pas les compétences constitutionnelles des provinces et des territoires, notamment en matière d’éducation et d’acquisition des connaissances. Par exemple, la Recommandation 13 stipule :

[…] que, dans le cadre d’un accord pancanadien sur l’alphabétisation et l’acquisition de capacités au calcul, le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces et les territoires, songe à réorienter une partie des fonds attribués à la Stratégie emploi jeunesse, de manière à favoriser l’enseignement aux jeunes décrocheurs, grâce à une initiative «  apprendre et gagner  » qui les inciterait au moins à terminer leurs études secondaires1.

La question du décrochage scolaire ainsi que l’enseignement au secondaire relèvent exclusivement des provinces et des territoires. Le gouvernement fédéral n’est aucunement concerné par ces questions et les recommandations du Rapport devraient tenir compte du partage des pouvoirs entre les différents paliers de gouvernement.

De plus, le gouvernement du Québec demande depuis quelques années le transfert des fonds (70 millions) alloués à la Stratégie emploi jeunesse car plusieurs programmes de cette Stratégie fédérale dédoublent des programmes québécois. Il serait donc incohérent de demander au gouvernement fédéral de dédoubler davantage ses programmes.

Une action concertée

Le désir exprimé tout au long du Rapport de créer un accord pancanadien afin d’accroître l’alphabétisation des adultes constitue une intrusion dans les champs de compétence des provinces et des territoires et semble manifester une volonté de centralisation du pouvoir fédéral en matière d’éducation. Cette volonté fut exprimée récemment dans un discours du ministre des Finances, John Manley, qui affirmait que le Canada avait désormais besoin «  d’un nouveau ministère national de l’Éducation et de l’Innovation  »2. Cette déclaration faite devant les étudiants et les étudiantes d’une école secondaire de Vancouver en dit long sur le désir du gouvernement libéral de s’immiscer encore une fois dans les compétences réservées aux provinces et aux territoires.

Le Bloc Québécois désire rappeler que la primauté du droit en matière d’éducation appartient exclusivement aux provinces et aux territoires. En vertu de ce droit, il leur revient d’exercer, en matière d’alphabétisation, le leadership pour leur population avec l’appui financier du gouvernement fédéral. Ce dernier n’a donc pas à s’approprier le leadership dans les provinces et les territoires en matière d’alphabétisation ni à faire sien le rôle de premier responsable de l’éducation.

Le Bloc Québécois privilégie d’abord et avant tout l’approche bilatérale en ce qui concerne l’alphabétisation. À ce titre, la Recommandation 1 du Rapport du Comité stipule que «  si un accord pancanadien n’est pas possible, le gouvernement du Canada devra négocier des accords d’alphabétisation bilatéraux avec tous les gouvernements provinciaux et territoriaux intéressés »3. L’approche pancanadienne, préconisée dans ce Rapport, est perçue comme étant une approche mur à mur qui ne tiendrait pas compte des disparités culturelles, linguistiques, sociales et économiques des différentes provinces et des territoires.

Par conséquent, le Bloc Québécois favorise des ententes bilatérales, assujetties au principe de droit de retrait avec compensation, en remplacement de l’idée d’un accord pancanadien. Ces ententes bilatérales permettraient, entre autres, d’agir en matière d’alphabétisation tout en respectant les priorités constitutionnelles des provinces et des territoires en matière d’éducation et d’apprentissage.

Il devient donc impératif de modifier le titre du rapport afin de tenir compte des compétences constitutionnelles des provinces et des territoires. Le titre actuel met de l’avant la nécessité d’une action dite pancanadienne. Le Bloc Québécois suggère plutôt le titre suivant : «  Accroître l’alphabétisation des adultes : la nécessité d’une action concertée  ». De cette façon, le rapport serait annonciateur de la recherche d’une approche de collaboration plutôt que d’une approche qui risque de susciter l’affrontement. De plus, toute référence dans le texte à un accord pancanadien devrait être remplacée par des ententes bilatérales (droit de retrait avec compensation inclus).

Par ailleurs, le Bloc Québécois s’oppose à la création de l’Institut canadien sur l’apprentissage (ICA). Dans le budget de février 2003, le gouvernement canadien annonce 100 millions de dollars avant même d’avoir défini clairement la structure organisationnelle, le mode de gestion et le mandat de cet organisme. Aux yeux des députés et députées du Bloc Québécois, la création de cet Institut est inutile, voire futile. De plus, la création de cet Institut constituerait, à notre avis, un dédoublement avec le SNA, dédoublement qui s’avérerait coûteux et inefficace. Pourquoi créer d’autres structures administratives alors qu’il existe déjà un organisme fédéral, le Secrétariat national à l’alphabétisation (SNA), chargé de distribuer des fonds en matière d’alphabétisation dans le cadre d’ententes bilatérales déjà existantes? Ces fonds pourraient être utilisés à des fins d’apprentissage au lieu d’être gaspillés dans la création de nouvelles structures.

À ce sujet, le Bloc Québécois recommande que les fonds prévus à la création de l’Institut canadien sur l’apprentissage soient redirigés vers le Secrétariat national à l’alphabétisation et que les mandats de ce dernier soient élargis, si nécessaire, pour englober les mandats que le gouvernement avait l’intention de donner à l’ICA. Le SNA semble avoir fait ses preuves si l’on se fie aux différents témoignages entendus lors des réunions du Comité permanent. Plusieurs témoins ont effectivement mentionnés aux membres du Comité que le SNA jouait un rôle efficace, mais qu’il manquait de fonds. Le Bloc Québécois ne voit donc pas la nécessité de créer un nouvel organisme et n’a pas été convaincu de sa pertinence jusqu’à ce jour.

Par ailleurs, le Bloc Québécois se pose certaines questions en ce qui concerne l’Institut canadien sur l’apprentissage qui est en cours de création :

Quelles sont les réelles intentions du gouvernement par rapport à cet Institut?
Où cet Institut trouvera-t-il son budget de fonctionnement au cours des années subséquentes à sa création?
Les chercheurs et les chercheuses de cet organisme seront-ils éligibles aux subventions données par les Conseils subventionnaires ou la Fondation pour l’Innovation?

Cependant, le Bloc Québécois reconnaît l’importance d’augmenter les fonds en ce qui concerne l’alphabétisation au Canada et se réjouit de la volonté exprimée par les membres de ce Comité d’accorder une place prépondérante à l’alphabétisation et à l’apprentissage des compétences essentielles. Et comme l’alphabétisation est intimement liée à la langue et à la culture, qui relèvent des compétences des provinces et des territoires, le Bloc Québécois est d’avis que le gouvernement du Québec est donc en meilleure posture pour évaluer les besoins de ses intervenants et intervenantes.


1Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées, Chambre des communes, Accroître l’alphabétisation des adultes : la nécessité d’une action pancanadienne, juin 2003, p. 155.
2Presse canadienne, « Manley propose la création d’un ministère national de l’Éducation », Le Devoir, 2003-05-30, p. A2.
3Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées, Chambre des communes, Accroître l’alphabétisation des adultes : la nécessité d’une action pancanadienne, juin 2003, p. 145.