NDVA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 3e SESSION
Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 29 avril 2004
¹ | 1530 |
Le président (M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.)) |
Le Major-général Andrew B. Leslie (assistant au chef d'état-major de l'Armée de terre intérimaire, ministère de la Défense nationale) |
¹ | 1535 |
Le président |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
Mgén Andrew B. Leslie |
¹ | 1540 |
M. Jay Hill |
Mgén Andrew B. Leslie |
M. Jay Hill |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ) |
¹ | 1545 |
Mgén Andrew B. Leslie |
¹ | 1550 |
M. Claude Bachand |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.) |
Mgén Andrew B. Leslie |
Adjudant chef Eroll Gapp (adjudant chef du Secteur du Centre de la Force Terrestre, ministère de la Défense nationale) |
Mgén Andrew B. Leslie |
M. Murray Calder |
Mgén Andrew B. Leslie |
¹ | 1555 |
M. Murray Calder |
Mgén Andrew B. Leslie |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
Adjuc Eroll Gapp |
º | 1600 |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD) |
Mgén Andrew B. Leslie |
L'hon. Bill Blaikie |
º | 1605 |
Mgén Andrew B. Leslie |
L'hon. Bill Blaikie |
Mgén Andrew B. Leslie |
L'hon. Bill Blaikie |
Mgén Andrew B. Leslie |
L'hon. Bill Blaikie |
Mgén Andrew B. Leslie |
L'hon. Bill Blaikie |
Le président |
º | 1610 |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
Mme Elsie Wayne (Saint John, PCC) |
Mgén Andrew B. Leslie |
Colonel Mark Hodgson (autorité d'instruction collective d'Armée de terre, système de la doctrine et de l'instruction de la Force terrestre, ministère de la Défense nationale) |
Mme Elsie Wayne |
Mgén Andrew B. Leslie |
º | 1615 |
Mme Elsie Wayne |
Mgén Andrew B. Leslie |
Mme Elsie Wayne |
Mgén Andrew B. Leslie |
Mme Elsie Wayne |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
Mgén Andrew B. Leslie |
º | 1620 |
Le président |
M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.) |
Mgén Andrew B. Leslie |
º | 1625 |
Col Mark Hodgson |
Le président |
M. Claude Bachand |
º | 1630 |
Mgén Andrew B. Leslie |
º | 1635 |
M. Claude Bachand |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
L'hon. David Price (Compton—Stanstead, Lib.) |
Mgén Andrew B. Leslie |
º | 1640 |
L'hon. David Price |
Mgén Andrew B. Leslie |
L'hon. David Price |
Mgén Andrew B. Leslie |
L'hon. David Price |
Mgén Andrew B. Leslie |
L'hon. David Price |
Mgén Andrew B. Leslie |
Col Mark Hodgson |
º | 1645 |
L'hon. David Price |
Col Mark Hodgson |
L'hon. David Price |
Le président |
Mme Elsie Wayne |
Mgén Andrew B. Leslie |
Mme Elsie Wayne |
Mgén Andrew B. Leslie |
Mme Elsie Wayne |
Mgén Andrew B. Leslie |
Mme Elsie Wayne |
Mgén Andrew B. Leslie |
º | 1650 |
Mme Elsie Wayne |
Mgén Andrew B. Leslie |
Mme Elsie Wayne |
Le président |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
Mgén Andrew B. Leslie |
º | 1655 |
Le président |
M. Murray Calder |
Mgén Andrew B. Leslie |
» | 1700 |
M. Murray Calder |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
M. Claude Bachand |
Mgén Andrew B. Leslie |
» | 1705 |
M. Claude Bachand |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
M. John O'Reilly |
» | 1710 |
Mgén Andrew B. Leslie |
Col Mark Hodgson |
M. John O'Reilly |
Col Mark Hodgson |
M. John O'Reilly |
Col Mark Hodgson |
M. John O'Reilly |
» | 1715 |
Col Mark Hodgson |
M. John O'Reilly |
Col Mark Hodgson |
M. John O'Reilly |
Col Mark Hodgson |
M. John O'Reilly |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
Mgén Andrew B. Leslie |
Le président |
Mgén Andrew B. Leslie |
» | 1720 |
Le président |
Col Mark Hodgson |
Le président |
CANADA
Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 29 avril 2004
[Enregistrement électronique]
¹ (1530)
[Traduction]
Le président (M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.)): Je déclare ouverte la onzième réunion du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants. Je commencerai par notre rappel habituel pour les téléphones cellulaires. Veuillez les éteindre, ou les mettre en mode silence, je ne sais pas exactement le terme exacte, afin qu'ils ne nous dérangent pas pendant la réunion.
J'ai le très grand plaisir, au nom du comité, d'accueillir aujourd'hui le major-général Andrew Leslie qui n'a vraiment pas besoin, je crois, d'être présenté après l'excellent travail qu'il a fait, en Afghanistan. Il est accompagné du colonel Hodgson et de l'adjudant-chef Gapp. Messieurs, soyez les bienvenus.
Permettez-moi de commencer par faire ce que tous les députés de la Chambre voudraient faire, j'en suis sûr, vous exprimer notre gratitude au nom du gouvernement canadien, du Parlement canadien et de la population canadienne, à vous major-général ainsi qu'à vous messieurs et à tous les membres des Forces canadiennes qui ont fait et qui continuent à faire un travail extraordinaire pour la cause de la paix en Afghanistan. Nous sommes très heureux et très honorés de vous accueillir aujourd'hui et nous nous ferons un plaisir de vous écouter.
Le Major-général Andrew B. Leslie (assistant au chef d'état-major de l'Armée de terre intérimaire, ministère de la Défense nationale): Merci beaucoup, monsieur le président.
Si cela ne vous dérange pas, je serai très bref.
[Français]
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je voudrais vous présenter mon équipe de commandement, qui était avec moi à Kaboul. Vous avez déjà rencontré le colonel Hodgson et le militaire du rang le plus haut gradé, l'adjudant-chef Gapp.
Mesdames et messieurs, vos soldats, les 2 000 soldats qui sont maintenant à Kaboul et ceux qui étaient avec cette équipe de commandement, font du travail superbe dans un pays qui a été presque complètement détruit par des centaines d'années de guerre d'une intensité féroce.
[Traduction]
Vos soldats aident une population à rester en vie et il n'y a rien de plus satisfaisant que ce genre de travail. C'est un mélange complexe qui est peut-être annonciateur de ce que seront nos missions de demain, un mélange d'opérations de maintien de la paix et de soutien de la paix, de combat, de contre-terrorisme et d'activités de soutien humanitaire, le tout mené dans des délais très brefs.
Kaboul est une ville en ruine d'environ 3,5 millions d'habitants, population qui augmente tous les mois car, bien entendu, tous ces gens recherchent avant tout la sécurité, surtout quand elle n'existe nulle part ailleurs. Comme je vous le dis, nos soldats gardent en vie non pas des milliers mais des centaines de milliers de gens.
Comme vous le savez, la Force internationale d'assistance à la sécurité, la FIAS, est actuellement sous le commandement d'un Canadien, le lieutenant-général Rick Hillier, et tout comme lors de notre premier déploiement en août, toujours sous l'égide de la résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. Donc, au regard du droit international, notre mandat est sans faille.
Plus de 99 p. 100 des Afghans veulent notre présence car ils en ont plus qu'assez de voir leurs enfants, leurs aînés, les faibles et les vulnérables être la proie soit des seigneurs de guerre, soit de querelles intestines, du terrorisme ou des conséquences de la pauvreté qui paralysent cette terre lointaine.
Tous les soldats—près de 4 000 en tout avec les 2 000 sous mon commandement et les 2 000 qui les ont remplacés—mon équipe de commandement, moi, tous ceux qui ont été déployés en Afghanistan et qui continuent à l'être sont très fiers de leur travail.
J'aimerais aussi faire une remarque personnelle. Permettez-moi de vous dire que selon moi vos soldats, surtout les jeunes, ceux qui franchissent les portes du camp dans leur tenue de camouflage léopard, de désert, ou autres en fonction des circonstances, sont excellents pour ce type d'opération. Nous sommes parmi les meilleurs du monde pour remplir ces missions complexes et délicates comme celles que nous remplissons à Kaboul.
Cependant, loin de moi de vouloir vous laisser l'impression que seule l'armée de terre peut remplir ces missions. Les gens comme moi, comme le colonel Hodgson, comme M. Gapp, ne servent strictement à rien s'ils ne peuvent être transportés sur leur lieu de mission. Dans ce cas précis, nous avons bénéficié d'un soutien exemplaire de tout le système de logistique ici au Canada, des politiques qui nous ont donné beaucoup d'argent pour nous rééquiper de matériel répondant aux besoins de la mission sur le théâtre d'opération et bien entendu de l'aviation dont les appareils ont transporté tous nos soldats jusqu'à cette région très troublée du monde. Ce sont ces jeunes hommes et ces jeunes femmes qui selon moi ont permis de couronner de succès cet effort éminemment collectif.
Monsieur, voilà, c'est tout.
¹ (1535)
[Français]
Je serai ravi de répondre à vos questions.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup, major-général Leslie.
Je suis certain qu'il y a des questions. Nous allons commencer le premier tour de sept minutes avec Jay Hill de l'opposition officielle.
Monsieur Hill, je vous en prie.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Merci, monsieur le président.
J'aimerais également souhaiter la bienvenue au major-général Leslie et à ses collègues.
J'aimerais vous dire et par votre entremise dire à tous les braves hommes et les braves femmes qui servent à l'étranger, non seulement en Afghanistan mais dans beaucoup d'autres régions troublées du monde, combien nous sommes fiers de vous, comme le président vous l'a déjà dit. Toutes mes félicitations vont à ceux qui ont servi, qui servent et qui serviront au cours des jours, des semaines, des mois et des années à venir.
Une des préoccupations que j'ai exprimée à ce comité et bien entendu aussi à la Chambre des communes—et qui trouve écho je pense non seulement parmi le public en général mais également parmi ceux qui servent sous notre drapeau—c'est la surcharge de travail qui leur est parfois imposée. Nous semblons manquer d'effectifs, et nous devons constamment demander à ces gens de faire presque l'impossible en termes de rotation et de déploiement. Comme vous le savez, le premier ministre a engagé notre nation à rester au-delà du mois d'août avec un autre contingent de 600 soldats en Afghanistan, en plus des 450 déployés à Haïti et dans beaucoup d'autres lieux, comme en Bosnie, sur le plateau du Golan et en Afrique. Il y aurait même des officiers supérieurs qui auraient dit avant cette dernière annonce qu'ils craignaient qu'une fois le mois d'août arrivé, il nous sera peut-être difficile de trouver plus de 500 soldats déployables pour des missions à l'étranger.
J'aimerais savoir si vous qui avez servi en Afghanistan partagez ces préoccupations à propos de ces rotations constantes et le prix que nos hommes et nos femmes doivent payer ainsi que leurs familles par extension, en étant ainsi constamment déployés.
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, bien entendu, l'Afghanistan est un environnement dangereux et complexe mais s'il n'était pas dangereux et complexe, il n'y aurait pas de raisons d'envoyer nos hommes et nos femmes en uniforme pour y jouer un rôle d'assistance.
Après le mois d'août, notre contingent ne sera plus que d'environ 600—je crois que c'est le dernier chiffre qui a été annoncé—et pour être franc avec vous, c'est une bonne chose. Ceci dit, je suis le premier à admettre que mon point de vue est partial puisque j'ai servi en Afghanistan, et que je comprends son importance stratégique—non seulement pour le Canada, mais aussi pour bon nombre de nos alliés—car, si vous me le permettez, l'Afghanistan est l'épicentre du terrorisme international. Selon moi, dans un rayon de 1 000 kilomètres autour de Kaboul, se trouvent pratiquement tous les points d'origine du terrorisme international. Il va donc de notre intérêt pour tout faire pour que l'Afghanistan ait les trois choses dont il a le plus besoin.
Pour commencer et avant tout, du temps. Ils ont besoin d'une certaine garantie que l'OTAN, que tous les membres de l'OTAN—il y a 33 pays qui composent la Force internationale d'assistance à la sécurité mais bien entendu il n'y a que 19 membres de l'OTAN en tant que tel—que tous les partenaires qui sont actuellement engagés en Afghanistan maintiennent le cap. Un relâchement des efforts est hors de question.
Deuxièmement, de la sécurité. Elle commence à exister mais bien entendu on peut toujours faire plus.
Troisièmement, des fonds de reconstruction.
Sur ces trois plans, je suis heureux de savoir que le Canada restera au-delà du mois d'août avec un contingent de 500 ou 600. En même temps, nous consacrons—quand je dis nous, je suppose qu'en tant que représentants du gouvernement du Canada c'est votre argent—250 millions de dollars aux activités de reconstruction qui ont commencé en août dernier et qui se poursuivront jusqu'en août l'année prochaine.
¹ (1540)
M. Jay Hill: Major-général, je ne voulais pas donner l'impression que moi-même ou le Parti conservateur ne soutenons pas nos efforts là-bas, nos efforts qui se poursuivent et le déploiement. Ce que je voulais savoir c'est si vous partagez ces préoccupations dont il est fait état dans un nombre incalculable d'études de pénurie d'effectifs et si nous ne demandons pas trop à ces jeunes hommes et à ces jeunes femmes qui sont en constante rotation. Je me demandais si vous partagiez ce sentiment, puisque vous avez servi vous-même là-bas, si tout simplement nous n'avons pas besoin d'augmenter nos effectifs.
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, je crois que nous sommes une nation bénie et je crois que nous sommes réellement bons, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, pour ce type complexe de soutien de la paix, de maintien de la paix, de soutien humanitaire et d'activités de combat. Donc, honnêtement, j'aimerais voir le Canada mener encore plus d'activités de ce genre.
Pour ce qui est des effectifs, selon moi, la seule raison pour laquelle le contingent descendra à 500 ou à 600 en août c'est parce que nos soldats sont fatigués.
Un ancien commandant de l'armée de terre a énoncé publiquement une opinion que je partage, à savoir que soit les effectifs de notre armée de terre sont trop importants pour notre budget soit nos effectifs ne sont pas assez importants pour remplir les missions qui nous sont confiées. Il va donc falloir un jour ou l'autre trancher. Ceci dit, nous n'ignorons pas qu'un examen de la politique de la défense doit bientôt avoir lieu et nous comptons sur ses conclusions et ses recommandations pour savoir ce que le peuple canadien attend véritablement de nous.
M. Jay Hill: Il ne me reste plus qu'une minute avant que je ne cède la parole à mes autres collègues.
Suite à la terrible tragédie qui a coûté la vie au sergent Short et au caporal Beerenfenger en octobre dernier, vous avez été cité, je crois, disant que vous aviez quelques doutes concernant les G wagons Mercedes. Je crois comprendre que nous en avons maintenant une centaine sur le terrain. Est-ce que vous avez toujours quelques doutes concernant ces véhicules et en avez-vous parlé à d'autres comme par exemple au ministre de la Défense.
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, nous avons sur place du très bon matériel dernier cri qui a été acheté spécialement pour nous mais nous avons aussi du matériel vieillissant, non seulement en Afghanistan mais ici au Canada qui selon moi, pour être franc, mérite d'être remplacé et remplacé le plus tôt possible.
Le G wagon est certainement largement supérieur au véhicule lltis, mais l'introduction de nouveau matériel prend du temps. Les G wagons ont commencé à arriver alors que nous en étions à la moitié ou aux trois quarts de notre mission. Bien entendu, le G wagon est une bien meilleure version du véhicule de soutien administratif qu'il remplace, c'est-à-dire le véhicule lltis. Le G wagon est mieux protégé.
Mais tout comme mes collègues—vous pouvez leur poser la question—du point de vue professionnel, je ne sais toujours pas exactement quel type de véhicule serait le plus approprié pour nous faufiler dans le labyrinthe étroit de passages, de ruelles et d'allées qu'on trouve dans une ville comme Kaboul parce que pour un blindé comme l'Humvee, par exemple, auquel on avait pensé, c'est beaucoup trop étroit. Il ne peut pas passer dans la majorité de ces passages étroits. En revanche, un véhicule de cette taille et de ce poids—je crois qu'un Humvee blindé pèse dans les 12 000 livres—est vraiment le strict minimum qui puisse vous offrir une protection quelconque contre les mines antiblindés bien que cela ne fasse pas grande différence parce qu'après tout les mines antiblindés sont faites pour détruire les blindés.
Pour répondre directement à votre question, si je peux, le G wagon est largement supérieur au véhicule lltis mais nous n'avons pas encore résolu entre nous de quel type de véhicule aurait besoin l'armée de terre pour des missions dans des théâtres d'opérations analogues à celui de Kaboul. Un blindé léger qui est loin d'être léger est beaucoup trop large pour évoluer dans la majorité des lieux d'habitation de ces trois millions et demi de gens.
Le président: Merci.
Merci, monsieur Hill.
Maintenant, monsieur Bachand, sept minutes.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Merci, monsieur le président.
Je veux, moi aussi, souhaiter la bienvenue au major-général Leslie, ainsi qu'à son équipe. Je voudrais en profiter également pour remercier publiquement le général qui, lors de la tempête de verglas en 1998--il était colonel à l'époque--est venu, à la tête du PPCLI, dépanner grandement les gens de Saint-Jean. Je pense qu'on serait encore mal pris si ce n'avait été de leur contribution. J'avais été très impressionné aussi par son leadership, par l'équipement et par le professionnalisme de ses soldats. Je voudrais donc en profiter pour, comme on dit en anglais, put it on the record.
D'autre part, général, vous auriez aussi dit que vous deviez remplir plusieurs missions à Kaboul, dont le maintien de la paix et le rétablissement de la paix, l'aide humanitaire et parfois être impliqué dans des combats. Cela veut dire qu'il faut que nos soldats soient très polyvalents. J'ai assisté, avec mon collègue M. Price, à Sherbrooke, à une sorte d'entraînement. Nous avons vu la façon dont cela se passe. Nous étions dans la ville de Sherbrooke et on patrouillait, on allait voir les exercices, etc. J'aimerais que vous nous expliquiez quelle est la journée typique d'un fantassin, à quelle heure il se lève, à quelle heure il se couche, ce qu'il fait durant la journée, quelle espèce de danger il doit affronter, comment il fait pour concilier l'approche anti-terrorisme et les missions humanitaires, comme creuser des puits, réparer des édifices et devenir ami avec la population. Il est difficile de devenir ami avec la population lorsqu'on est dans un tank Leopard. Par contre, on est beaucoup plus près de la population dans un véhicule Iltis--c'était probablement à cela que vous faisiez référence un peu plus tôt--, mais on est beaucoup plus exposé aussi.
Pouvez-vous nous décrire une journée typique d'un fantassin? À quelle heure se lève-t-il, en quoi consiste sa journée, ses patrouilles, où va-t-il, quel type de gens rencontre-t-il et quels sont les différents dangers qui le guettent?
¹ (1545)
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, premièrement, cela a été un honneur pour nous de travailler avec vous au moment de la tempête de verglas. Cela a été une expérience unique et vraiment satisfaisante. Merci de nous en avoir donné la possibilité. Tous les soldats de la 1ère Brigade étaient ravis d'être là.
Vous me demandez de décrire une journée typique à Kaboul pour les fantassins. Je vais parler d'une période de 24 heures, car on doit bien comprendre que les jours ne s'arrêtent jamais, que les patrouilles ne s'arrêtent jamais. On travaille 24 heures sur 24.
Par exemple, les soldats se réveillent vers 5 heures et, après le petit déjeuner, ils se préparent à sortir en patrouille. Cette procédure prend environ 90 minutes. Il y a des rehearsals, des discussions en groupes d'environ 10 soldats de la section pour planifier leur action au cas où ils seraient attaqués par les terroristes ou les seigneurs de la guerre. S'il y a des explosions dans les rues, s'ils perdent leur sergent ou le caporal-chef, qu'est-ce qu'ils vont faire? Quelle sera la méthode d'opération s'il y a une tragédie? Ensuite, vers 8 heures ou 8 h 30, ils partent. Chaque patrouille dure environ cinq ou six heures.
Il y a deux types de patrouilles. Il y a ceux qui descendent dans les couloirs de Kaboul, dans les toutes petites rues qui ont une largeur d'environ deux mètres. Pendant la journée, il y a des centaines de milliers de gens qui se faufilent partout. C'est incroyable: il y a des gens partout, partout et il y en a toujours d'autres qui arrivent chaque semaine des autres régions de l'Afghanistan, parce qu'ils cherchent la sécurité que vos soldats leur donnent à Kaboul.
Dans les montagnes, il n'y a presque personne, mais ce sont des régions où se trouvent les éléments terroristes qui essaient de pénétrer le cordon sanitaire qui entoure Kaboul pour disparaître dans la foule et se fondre dans la population.
Donc, les fantassins patrouillent cinq ou six heures. À leur retour, après les patrouilles, ils font encore 60 à 120 minutes d'action environ. Les membres des patrouilles discutent avec les officiers de renseignement et leur chaîne de commandement. Ils parlent de ce qu'ils ont vu dans les rues ou dans les montagnes.
Ils font une toute petite pause pour prendre de la nourriture et, la plupart du temps, ils font une deuxième patrouille qui dure de deux à six heures. La plupart du temps, s'ils font une patrouille le matin, ils partent la même nuit pour une autre patrouille. Pendant la nuit, il n'y a personne dans les montagnes, comment je l'ai dit, et c'est la même chose dans la ville de Kaboul. Les gens là-bas ont si peur d'être dans la rue dès que le soleil se couche que presque personne ne fait de promenades ou de choses semblables. C'est la même situation pour les policiers eux-mêmes et pour les soldats de la milice qui résident à Kaboul. Il faut insister pour que les autorités afghanes accompagnent nos soldats quand ils font leurs patrouilles, parce que c'est un endroit extrêmement dangereux.
Après une journée qui dure environ 18 heures, les soldats font une petite pause pour dormir ou pour faire des activités d'entretien des véhicules ou du système d'armes. Et tout cela recommence sept jours sur sept.
¹ (1550)
M. Claude Bachand: Est-ce que la formation que vous avez avant d'y aller est adéquate et vous prépare bien à ce type d'action que vous venez de nous décrire?
Mgén Andrew B. Leslie: Oui, monsieur, je pense que la formation a été d'un niveau superbe. Je suis responsable de toutes les choses mauvaises, mais je ne suis pas responsable du succès de l'entraînement. La responsabilité du succès de l'entraînement appartient aux gens qui sont autour de moi. Ce sont eux, les grands chefs et ce sont eux qui ont donné le leadership pour s'assurer que les soldats étaient bien entraînés.
Il y a aussi le général Devlin qui était commandant de la 2e Brigade au moment de mon affectation, et c'est maintenant le général Lacroix qui commande la 5e Brigade de Valcartier et qui agit comme commandant de la Brigade multinationale de Kaboul.
L'entraînement pour nous dure environ trois mois et cela se passe à différents endroits. Dans nos rangs, l'entraînement s'est fait en grande partie à Wainwright et à Petawawa. Les excellents soldats du 22e Régiment ont fait la plupart de leur entraînement à un endroit aux États-Unis et aussi à Sherbrooke et à Valcartier.
Une voix: À Fort Bragg?
Mgén Andrew B. Leslie: Exactement, monsieur, à Fort Bragg.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Bachand.
C'est maintenant à M. Calder pour sept minutes.
M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président, et messieurs, je vous souhaite la bienvenue. C'est toujours un grand plaisir de participer à ce comité, car comme je peux le dire pour tout le monde autour de cette table, nous sommes très fiers du travail que vous faites.
En novembre dernier j'ai eu l'occasion de parler à certains réservistes qui avaient été à Kaboul et je leur ai posé quelques questions pour savoir comment cela s'était passé. Ils m'ont montré quelques photos, et chose que j'ai remarquée avec beaucoup d'intérêt c'est qu'au lieu de porter l'uniforme du désert ils portaient la tenue léopard, ils étaient en vert. Nous avions eu un débat très animé sur l'envoi de nos troupes avec des tenues vertes plutôt que havanes. J'aimerais donc que vous nous disiez pourquoi ils sont en tenue verte.
Vous avez aussi parlé des G wagons, des 60 qui sont déjà là-bas. J'espère qu'ils font du bon travail car je sais que les Américains ont connu le même problème lorsqu'il leur a fallu transformer 250 M 150 parce que les Humvee ne passaient pas dans les rues. Vous pourriez peut-être me dire aussi quelques mots à ce sujet.
Ma troisième question... Je sais à quoi ressemble le terrain là-bas et nous discutons actuellement de l'achat de Strykers. Si nous avions déjà ces Strykers, est-ce qu'ils pourraient vraiment jouer un rôle là-bas?
J'en resterai là pour le moment.
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur le président, c'était moi le commandant du groupe d'intervention et c'est moi qui ai décidé de leur demander de porter leur tenue verte. Nous avions aussi des tenues havanes mais pour la majorité des soldats elles sont restées dans les coffres des baraquements. Certains soldats les ont utilisées pour remplir des missions précises, quand le terrain était montagneux, mais je crois que moi-même je n'ai jamais porté la mienne.
Je crois que vous n'avez jamais porté la vôtre, monsieur Gapp, n'est-ce pas?
Adjudant chef Eroll Gapp (adjudant chef du Secteur du Centre de la Force Terrestre, ministère de la Défense nationale): Non.
Mgén Andrew B. Leslie: C'est moi qui ai pris la décision pour toute une série de raisons. Pour commencer, la plus importante, c'est lorsque nous sommes arrivés là-bas, malgré notre excellente réputation internationale de spécialistes du maintien de la paix et du soutien de la paix dans toutes sortes de régions à l'autre bout du monde, la vaste majorité des Afghans n'avaient jamais entendu parler de nous.
Le taux d'analphabétisme est de 80 p. 100 et il y a toutes sortes d'autres gens qui portent des tenues havanes si bien que beaucoup d'entre nous voulaient absolument qu'on sache que nous étions Canadiens—et je crois qu'aujourd'hui ils savent tous reconnaître le drapeau canadien. Quatre-vingt-dix-neuf pour cent de la population était absolument ravie de voir un soldat en tenue verte ou avec le drapeau canadien dans son voisinage. Une toute petite minorité, celle des terroristes, des criminels qui n'aiment pas nous voir là-bas, bien entendu, ne sont pas contents quand ils voient des Canadiens et pour être honnête, cela ne me dérange pas le moins du monde.
Donc, la tenue verte, c'est moi qui en ai décidé et personne d'autre.
M. Murray Calder: C'est exactement ce qu'on m'avait répondu.
Mgén Andrew B. Leslie: Oui, et certains de mes soldats ont pas mal grogné. À peu près une fois par mois avec M. Gapp nous organisions une grande réunion avec les soldats, avec un grand discours et ça marchait dans les deux sens.
Et faites-moi confiance. Je connais, tout comme M. Gapp, certains de ces soldats depuis un temps et ils ne sont pas timides. Par contre, une fois que vous leur avez expliqué exactement pourquoi vous faites telle ou telle chose, la plupart tombent d'accord. Il y en a qui ne sont jamais d'accord. C'est la première raison.
La deuxième raison, dans les labyrinthes que composent les passages et les ruelles dans la majorité des zones patrouillées, l'uniforme vert est pratiquement invisible la nuit. Le jour, nous voulons être vus parce que dans une population de trois millions et demi d'habitants où des centaines de milliers de gens sont dans la rue pendant la journée, que vous soyez en tenue havane ou en tenue verte, vous voulez être visibles pour que les gens sentent la présence de soldats près d'eux, pour les protéger, pour protéger les faibles et les innocents.
La nuit, par contre, c'est une histoire tout à fait différente. Les seuls qui circulent la nuit ce sont nous, ceux que nous appuyons—la police afghane ou l'armée nationale afghane—et des individus très déplaisants. Vous ne voulez pas être pris par surprise; vous voulez plutôt les surprendre. En conséquence, nos jeunes hommes et nos jeunes femmes mettent leurs armures, leurs gilets protecteurs, prennent tout le matériel de vision nocturne nécessaire et ils vont patrouiller dans ces rues en tenue verte. Et il est extraordinairement difficile de les voir car il n'y a pas de lumière pas plus que nous n'en utilisons car quand nous tombons sur ces individus, la plupart du temps le résultat est assez déplaisant.
M. Gapp et moi-même avons participé à je ne sais combien de patrouilles, et je crois qu'au départ certains des soldats posaient des questions à propos des tenues havanes—pourquoi ne les met-on pas?—mais ils étaient en tenue verte.
Le commandant actuel changera peut-être d'idée, et ça, bien sûr, c'est son affaire, mais moi j'avais décidé que ce serait le vert.
Est-ce que cela répond...?
¹ (1555)
M. Murray Calder: Parfaitement.
Mgén Andrew B. Leslie: Le G wagon fait du bien meilleur travail que l'Iltis. Mais si je peux revenir sur les événements tragiques que nous avons vécus, un G wagon ne vous protège pas beaucoup, à mon avis, contre une mine antichar, et il y a beaucoup de mines en Afghanistan—aux alentours de 7 à 11 millions—ce qui en fait, je crois, le pays où il y a le plus de mines au monde.
Nous réfléchissons donc actuellement au type de véhicule, relativement étroit, modulaire, auquel on peut ajouter ou retirer du blindage
[Français]
Mgén Andrew B. Leslie: pour assurer la présence, comme votre collègue l'a indiqué,
[Traduction]
qui permette à la fois de rester en contact avec la population tout en vous offrant la protection de son blindage. Si vous dévalez les rues principales en blindé, vous ne faites pas votre travail.
Le président: Monsieur Gapp, vous vouliez ajouter quelque chose?
Adjuc Eroll Gapp: Monsieur le président, nous savons que les Iltis sont vieux et nous avons maintenant les G wagons. Le seul problème pour nos soldats—je l'ai dit au général Leslie et d'ailleurs je l'ai dit au Conseil de l'Armée de terre la semaine dernière—c'est que le toit ne s'enlève pas. Ils espèrent qu'ils pourront trouver une solution. Les soldats adoraient les Iltis pour une raison. Ils pouvaient descendre les vitres. Ils pouvaient s'y installer à quatre, généralement trois ou quatre, ce qui leur permettait de se protéger de tous les côtés. Il était facile d'en sortir. Ils pouvaient facilement réagir s'ils étaient pris sous le feu ou pris en embuscade. Ils le savaient; ils le savaient toujours quand ils partaient en patrouille.
À propos du Iltis qui a sauté sur la mine qui a tué Short et Beerenfenger, le caporal Stirling a dit, je crois que c'était à Canada AM, que s'il avait été dans un véhicule fermé, il ne serait probablement pas vivant aujourd'hui, vu la couverture antibombes. Ce n'est pas que les soldats... le G wagon leur plaît mais le fait que le toit ne s'enlève pas les embête quand même. Je ne sais pas s'ils les utilisent pour les patrouilles. Mais il n'est jamais arrivé qu'un soldat refuse de patrouiller en Iltis.
N'oubliez pas que c'est simplement un mode de transport. Comme le général Leslie l'a dit, le meilleur moyen pour nous de gagner le coeur et les esprits là-bas, surtout pendant les deux ou trois premières semaines, qui ont été critiques, c'était de nous mêler à la population et de lui montrer que nous étions Canadiens. Ils pensaient que nous étions Américains. Dans un village, avec le général Leslie, nous nous sommes faits traiter de Russes par un boutiquier. C'était un gros problème parce qu'ils haïssaient les Russes. Bien entendu, nous sommes entrés et nous leur avons expliqué, nous leur avons montré notre drapeau et le problème a été réglé.
Donc ces G wagons et ces autres véhicules, monsieur, servent simplement à se déplacer d'un point A à un point B. Mais les soldats, comme vous l'avez dit, ne peuvent pas s'envelopper dans du blindage. À quoi bon aller là-bas si c'est ce que l'on fait.
C'était un point très important, monsieur.
º (1600)
Mgén Andrew B. Leslie: Est-ce que j'ai le temps de répondre à la troisième question?
Le président: Oui, allez-y.
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, vous m'avez posé une question à propos des Strykers. Vous m'avez demandé si au cas où nous aurions eu ces systèmes d'artillerie moyens, j'aurais demandé à les avoir comme matériel pour mon déploiement et la réponse est oui. Peut-être pas en grand nombre, mais comme avec tous ces équipements de combat, on veut avoir le plus large éventail possible pour faire face au pire. Si les choses s'étaient vraiment mal passées à Kaboul... n'oubliez pas qu'il y a un grand nombre de factions armées sous le contrôle direct de plusieurs seigneurs de guerre dans Kaboul et autour de Kaboul auxquels nous sommes confrontés quotidiennement.
Ils ont des chars; ils ont des lance-roquettes; ils ont des fusils. Si la situation empirait, vous n'auriez pas le temps de faire venir par avion du matériel supplémentaire. Très souvent, la seule présence de ce matériel de combat sur place fait que nous n'avons pas à nous en servir. Et d'ailleurs, nous ne voulons pas vraiment nous en servir. Mais si nous l'avons, cela peut permettre de sauver des vies.
Le président: Merci.
Cela ne fait que quelques minutes que vous êtes là et vous avez déjà dissipé un certain nombre de malentendus concernant le matériel et les uniformes. Je crois que nous trouvons tous votre témoignage très intéressant. M. Calder a posé comme d'habitude de bonnes questions.
Nous allons passer au plus ancien, monsieur Blaikie.
L'hon. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Merci, monsieur le président.
Pour commencer, je veux moi aussi exprimer ma reconnaissance aux troupes canadiennes pour l'oeuvre qu'elles accomplissent en Afghanistan, et à vous en particulier, major-général Leslie, qui les avez commandées là-bas.
Et je veux aussi dire que je suis d'accord avec le président. Nous aurions peut-être dû vous entendre plus tôt, et cela démontre à mon avis l'une des faiblesses du débat politique, nous qui avons fait tant de foin sur la question de savoir si les Canadiens auraient dû porter un uniforme vert ou havane, et sur la question de savoir si des uniformes havanes étaient à leur disposition, et tout le reste. Vous nous avez tout expliqué en cinq minutes, et tous les députés ici présents hochaient la tête avec l'air de dire : « À bon, je comprends. » Cela dit, il y a peut-être un élément politique qui explique pourquoi cela n'a pas été dit plus tôt, mais laissons cette question.
En fait, je n'ai que quelques questions. À votre avis, est-ce que la guerre en Irak a modifié l'attitude des gens en Afghanistan à l'égard de la FIAS, ou est-ce que cela n'a eu aucun effet? Est-ce que cela a changé les choses sur le terrain?
Mgén Andrew B. Leslie: Eh bien, monsieur, j'ai la certitude que certaines choses ont changé mais pas aussi profondément que je m'y attendais personnellement. Comme vous savez, les Afghans, particulièrement les quatre grands groupes ethniques—il y en a beaucoup plus que cela, mais les quatre principaux sont les Pachtouns, les Hazaris, les Tagiks, et les Ouzbeks—ne sont pas d'origine d'arabe. Mais ce sont des musulmans très fiers. Ce sont des peuples très fiers, des courageux, des êtres dignes dont la vie est réglée par une éthique bien définie, ce sont des peuples qui ont su survivre au fil des siècles et qui se sont transformés très récemment en factions très fortes. L'essentiel de leur énergie est tourné vers l'intérieur, et ils font abstraction du contexte plus global, particulièrement de ce qui se passe à l'extérieur des frontières de l'Afghanistan et chez leurs six voisins immédiats.
Donc l'effet de la guerre en Irak a été minime, et cela m'a quelque peu surpris. Il y a tant de problèmes qui consument toute l'énergie de la brave autorité de transition Afghane et du président Karzai. Bien sûr, les problèmes que le président Karzai et ses équipes doivent affronter défient l'entendement. Je crois pour ma part que c'est un grand homme dont la marge de manoeuvre est très limitée, lui qui doit conduire son pays vers un destin qui sera marqué par la paix ou la catastrophe. Ce pourrait être l'un ou l'autre, ce qui me ramène aux trois choses dont l'Afghanistan a besoin à mon avis. Nous devons tous nous montrer logiques et patients—je parle de l'OTAN et de tous ces pays qui veulent donner un coup de main—il faut assurer la sécurité du pays et lancer des activités de reconstruction.
L'hon. Bill Blaikie: J'ai reçu récemment des courriels de membres des Forces canadiennes. Je me trompe peut-être sur les détails, donc pardonnez-moi si ce que je dit est inexact, mais est-ce au camp Mirage que nos soldats se croient priver de l'exonération fiscale? À leur avis ils font partie intégrante de la mission en Afghanistan. Vous voudrez peut-être vous abstenir de commenter, du moins au niveau officiel, mais n'y a-t-il pas au camp Mirage, d'où je reçois ces courriels, un système de soutien pour nos troupes en Afghanistan?
º (1605)
Mgén Andrew B. Leslie: Si, monsieur. Le camp Mirage est une base de soutien où l'on retrouve un effectif important qui se compose essentiellement de pilotes de l'aviation, de mécaniciens et de personnel de piste. Son emplacement est classifié, essentiellement à la demande du pays hôte. Cette base fait un superbe travail.
L'hon. Bill Blaikie: J'allais justement vous demander où elle est située mais je n'en ferai rien.
Mgén Andrew B. Leslie: N'en faites rien, s'il vous plaît, parce que je devrai vous répondre que je ne suis pas autorisé à vous le dire.
L'hon. Bill Blaikie: Je ne veux pas le savoir.
Mgén Andrew B. Leslie: Ça me causerait des ennuis, et il n'y aurait pas de quoi rire.
La base fait un travail formidable, j'insiste. Dans mon allocution d'ouverture, j'ai essayé de vous expliquer que même si nous sommes de l'infanterie, nous sommes inutiles si nous ne pouvons pas aller là-bas et si nous n'avons pas de systèmes de soutien, et en l'occurrence, c'est l'aviation qui se charge de cela.
Pour ce qui est de la question fiscale, je vous répondrai franchement que j'en connais peu les détails étant donné que la vaste majorité des soldats qui étaient avec moi n'avaient pas droit en fait à cette exonération. Elle entre en vigueur le 1er janvier, et la plupart de nos gens sont arrivés au plus tard le 20.
L'hon. Bill Blaikie: Oui, c'est à cause de la date d'entrée en vigueur.
J'ai une dernière question, monsieur le président.
J'ai vu un article dans le journal d'aujourd'hui où l'on disait qu'un certain nombre de réservistes, de la 38e brigade de l'Ouest canadien, je crois, iraient en Afghanistan. L'auteur de l'article disait qu'on recrutait des réservistes dans ce but en Saskatchewan. En ma qualité de député de Winnipeg, je veux savoir si l'on ne va pas aussi recruter, former et choisir des réservistes de Winnipeg?
L'article disait que ce ne sont pas toutes les recrues qui iront là-bas étant donné que l'entraînement est rigoureux et que ce n'est pas tout le monde qui va à Kaboul. Se peut-il aussi que des réservistes de Winnipeg aboutissent à Kaboul? En fait, c'est quelque part à l'extérieur de Kaboul, je pense, si je me souviens bien de l'article.
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, nous avions une cinquantaine de réservistes avec nous. Ils étaient essentiellement employés aux efforts de coopération civilo-militaire, au soutien humanitaire et aux activités de reconstruction.
Lorsque la prochaine force sera déployée, vers le mois d'août, l'effectif des réservistes pourrait être un peu plus élevé. Ils proviendront pour la plupart du Secteur de l'Ouest de la Force terrestre, qui comprend non seulement le Manitoba, mais aussi la Saskatchewan, l'Alberta et la Colombie-Britannique. Si leur recrutement prend cette dimension géographique, dans la mesure où la plupart de ceux qui partiront en août seront de l'Ouest, c'est à cause des principes de déploiement de l'armée.
Lorsque nous sommes allés là-bas, nous étions déjà une équipe formée. M. Gapp et moi-même formions l'équipe de commandement du Secteur du Centre de la Force terrestre, qui est basé à Toronto. Le colonel Hodgson commandait le groupe de soutien. Bien sûr, le général Devlin et son équipe étaient de Petawawa, tout comme le RCR 3, qui était en fait au coeur de l'opération. On nous a tous réunis, et après une longue formation, on nous a envoyés à Kaboul. Le même principe s'applique aux groupes-brigades des trois secteurs.
Donc, en réponse à votre question, et pardonnez-moi d'avoir pris tant de temps, j'imagine que ces soldats proviendront tous de l'Ouest canadien.
L'hon. Bill Blaikie: Merci.
Le président: Merci, monsieur Blaikie.
Nous allons maintenant passer au second tour. Avant de ce faire, une clarification à propos du véhicule, je veux m'assurer de bien vous comprendre, général Leslie. Vous avez dit que l'Iltis présentait des limites au niveau de la protection, mais qu'il est très bien pour les déplacements et dans les espaces limités que vous avez là-bas, alors que le VBL dispose de la protection voulue mais est trop difficile à manoeuvrer. Vous avez dit que vous cherchez à déterminer le genre de véhicule qu'il vous faut. J'aimerais que vous donniez plus de précisions au comité, si vous le voulez bien. Que fait-on? Est-ce qu'on procède à une analyse sérieuse en vue de vous donner un autre véhicule qui répondra aux besoins que vous décrivez?
Nous ne voulons pas que nos troupes revivent cette situation, si on peut l'éviter. Pouvez-vous nous expliquer tout cela?
º (1610)
Mgén Andrew B. Leslie: Bien sûr. Diverses armées occidentales se débattent avec les mêmes problèmes. Il s'agit de trouver l'équilibre qu'il faut entre la protection, la mobilité et la capacité, comme M. Gapp l'a dit, d'entrer en contact avec les habitants du pays. Si vous disparaissez derrière vos blindés, qu'il s'agisse de véhicules à roues ou à chenilles, vous ne pouvez pas faire ce que vous avez à faire.
N'oubliez pas que nous ne sommes pas là pour déferler dans les rues et tirer sur les gens. Nous sommes là pour donner aux habitants les structures qu'il leur faut pour remettre sur pied leur pays. Lorsque nous allons dans des endroits comme Kaboul, notre mission consiste à aider les autorités locales à faire respecter la primauté du droit, la magistrature et les forces de l'ordre.
En ce qui concerne les véhicules, comme certains de nos alliés le constatent, il vous faut une plate-forme relativement étroite qu'on peut modifier de diverses façons. Nous ne connaissons pas encore la réponse définitive. J'ai la certitude que le secteur privé s'intéresse à cela, ou que des gens vont faire les efforts voulus pour concevoir les outils qu'il faut aux diverses forces armées, mais nous n'en sommes pas encore là.
Il ne s'agit pas pour moi de dire à mes supérieurs du quartier général de la Défense nationale que je veux ceci ou cela. Le problème existe, mais je ne sais pas quoi dire à mes supérieurs. Je ne peux pas désigner un véhicule et leur dire : « Je veux 50 de ceux-là en stock pour les opérations. » Nous en serons là bientôt, mais il y a toute une série de considérations et de compromis, comme je l'ai dit, à faire entre le poids, la protection, la puissance de feu, la largeur et la hauteur. Nous y serons bientôt, mais entre-temps, nous y allons avec ce que nous avons, et c'est ce que font nos alliés d'ailleurs.
Le président: Merci beaucoup pour cette précision.
Nous allons maintenant passer au deuxième tour, cinq minutes chacun.
Madame Wayne, s'il vous plaît.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PCC): Vous avez dit que tous vos soldats avaient les deux tenues, la verte et la havane, dès le début. Était-ce au tout début, ou était-ce après votre arrivée là-bas que vous avez pu obtenir les deux uniformes?
Mgén Andrew B. Leslie: Non, madame, je suis arrivé là-bas avec les deux tenues havanes, et ce fut aussi le cas de M. Gapp. Bien sûr, nous sommes les patrons, donc si nous les obtenons, cela veut dire que tous nos soldats les ont obtenus auparavant.
J'étais le commandant de l'équipe d'intervention mais ce n'est pas moi qui ai fait le gros du travail. Celui qui a fait tout le travail, c'est Mark Hodgson, et il connaît bien sûr ce genre de détail.
Mark.
Colonel Mark Hodgson (autorité d'instruction collective d'Armée de terre, système de la doctrine et de l'instruction de la Force terrestre, ministère de la Défense nationale): Lorsque les soldats ont été déployés, madame, tous devaient recevoir aussi l'uniforme havane. Quelques-uns ne l'ont pas reçu mais il s'agissait de personnes dont les tailles étaient hors norme. Donc comme il y a des soldats de très forte ou de très petite taille, il se peut que quelques soldats ne les aient pas eus au départ. Mais toute la force a été équipée à Petawawa, sauf quelques soldats pour lesquels nous ne pouvions pas obtenir les tailles voulues. On y a vu plus tard, après la confection de ces uniformes.
Donc, comme vient de le dire le général Leslie, la force est partie avec son uniforme havane.
Mme Elsie Wayne: Vous disiez que 600 de nos hommes et femmes iraient là-bas. Allons-nous passer d'un effectif de 2 000 à 600, ou s'agit-il seulement de 600 des 2 000 qui étaient là-bas qui sont remplacés?
Mgén Andrew B. Leslie: Madame, comme vous le savez, les déploiements sont normalement d'une durée de six mois. Six mille soldats vont rester jusqu'au mois d'août à peu près, la date exacte de leur retour n'ayant pas encore été déterminée, et à ce moment-là, nous n'aurons plus qu'un effectif de 600 soldats. Cependant, ce sera un nouveau groupe de 600 soldats.
º (1615)
Mme Elsie Wayne: Je vois.
Mgén Andrew B. Leslie: Donc tous ces 2 000 hommes et femmes qui travaillent d'arrache-pied seront de retour chez eux en août ou à peu près...
Mme Elsie Wayne: Bien.
Mgén Andrew B. Leslie: ... et ils seront remplacés par un autre groupe qui viendra de l'Ouest. Les 2 000 soldats que nous avons maintenant proviennent essentiellement du Secteur du Québec, et ils se composent surtout de ces excellents soldats du Royal 22e Régiment et d'autres unités, mais ils sont essentiellement du Québec. En août, nos soldats proviendront essentiellement de l'Ouest canadien.
Mme Elsie Wayne: D'accord.
Au sujet du problème en Afghanistan, je sais que vous avez dit qu'il y a quatre groupes ethniques différents là-bas. Comment entrevoyez-vous la stabilisation du pays? Est-ce que ce sont des éléments religieux qui entravent les choses? Ou dites-moi simplement qu'est-ce qui a causé tout le problème en Afghanistan?
Mgén Andrew B. Leslie: Ce sont diverses forces historiques qui ont créé les conditions où se trouvent actuellement ces pauvres Afghans. Retenons tout d'abord que l'Afghanistan a six voisins fascinants—le Tajikistan, l'Ouzbékistan, le Turkménistan, l'Iran, le Pakistan et la Chine—mais mis à part ces voisins, il y a deux considérations essentielles en jeu.
La première, c'est l'image d'un pays qui a été le carrefour de plusieurs empires. Au cours des deux derniers millénaires, l'Afghanistan a été au centre, si vous voulez, de circuits politiques et militaires dont les peuples se servaient pour passer du nord au sud, de l'est à l'ouest, ou du sud au nord dans les tentatives qu'ils faisaient pour acquérir des territoires ou asseoir leur puissance.
Je vais vous donner quelques exemples récents... ou qui sont récents du point de vue de l'Afghanistan. N'oubliez pas que ces peuples disposaient de citernes souterraines et de systèmes d'irrigation à l'époque où mes ancêtres se grimaient encore de bleu et assommaient leurs adversaires à coups de pierres. Ils descendent donc d'une civilisation très avancée jusqu'à l'arrivée de Tamerlan et de la Horde d'or au XIIIe siècle, par exemple, qui a décimé des populations entières, pour empiler ensuite des crânes jusqu'à hauteur de cinquante hommes au pied des statues antiques de Bamian, qui ont été détruites depuis par les talibans. Donc cette notion de carrefour des empires est omniprésente.
La seconde considération a trait à ce qu'on appelle le « grand jeu ». Cette époque correspond à la période qui couvre la seconde moitié du XVIIe siècle et les XVIIIe et XIXe siècles, lorsque l'Empire russe cherchait à s'étendre du nord au sud, et à l'époque, l'Empire britannique, par l'entremise de la Compagnie britannique des Indes orientales et du Raj, cherchait à garder pied sur le sous-continent indien. Bien sûr, le Pakistan n'existait pas à cette époque.
À ce sujet, Andrew, voulez-vous me passer cette carte?
Monsieur le président, m'est-il permis de vous montrer la carte?
Le président: Bien sûr.
Mgén Andrew B. Leslie: La ligne Durand...
Madame, je pourrais poursuivre pendant des heures. Je m'en abstiendrai, mais le fait est que j'adore ce pays, et je mets toute ma passion à expliquer ce qu'il en est et pourquoi il est si important que nous soyons là.
Avec votre permission, monsieur le président, si on me donne quelques secondes...
Le président: Mme Wayne a le génie de poser des questions très intéressantes.
Mgén Andrew B. Leslie: J'ai parlé des voisins—le Tajikistan, l'Ouzbékistan, le Turkménistan, l'Iran et le Pakistan—et je vais maintenant parler du grand jeu. La ligne Durand de 1893, où l'on cherchait à créer une frontière ininterrompue, un bloc si vous préférez, sous influence britannique, a été l'oeuvre de diplomates britanniques qui étaient basés en Inde en 1893 et la ligne unissait la Chine à l'Iran, ce qui avait pour effet d'arrêter l'expansion des Russes du nord au sud. Au cours des quelques décennies qui ont suivi—et je passe sur les quelques incidents qui ont précédé cette époque—les Britanniques se sont rendu compte que l'Afghanistan était un pays facile à envahir mais qu'il était très difficile d'en sortir.
Pour résumer tout cela, au cours des deux derniers millénaires, diverses armées ont traversé l'Afghanistan, et certaines, pendant une période très brève, se sont imaginées qu'elles avaient imposé leur volonté au peuple afghan. Mais ces ethnies, qui renferment elles-mêmes d'autres sous-groupes, parvenaient à s'unir et à faire la vie dure à ceux qui se croyaient temporairement les maîtres du pays. Personne à ma connaissance n'a réussi à imposer un état de droit centralisé en Afghanistan, ou pas encore; mais l'équipe du président Karzai y arrive.
Si je résume la substance de tout cela, l'Afghanistan a encore beaucoup à faire pour recouvrer la tranquillité qu'il a connue à une certaine époque et pour progresser à partir de là. Mais il ne s'agit pas à mon avis de conflits entre l'islam ou la chrétienté. La vaste majorité des musulmans—et je parle ici des musulmans afghans—n'ont que mépris pour al-Qaida. Ils n'ont pas beaucoup d'affection non plus pour les fanatiques talibans.
C'est donc un pays dont l'histoire est très complexe et dont les populations peuvent parfois se montrer très brutales à l'égard de certains visiteurs ou de ceux qui ne sont que de passage. Ce qui m'amène à une autre chose que je veux dire, à savoir que nous sommes là parce que les Afghans veulent nous y voir. Nous sommes là pour les aider. Si le jour vient où le gouvernement afghan ne veut plus de nous, il nous faudra alors partir.
º (1620)
Le président: Merci beaucoup.
Merci, madame Wayne.
Nous allons maintenant passer à M. O'Reilly, cinq minutes, s'il vous plaît.
M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Bienvenue, et merci beaucoup d'être des nôtres, même si je ne suis pas sûr d'être parvenu à vous pardonner, parce que je crois que c'est vous qui m'avez envoyé en montagne dans un véhicule qui était plus large que la route. On m'a donné l'ordre d'enlever ma ceinture de sécurité, de garder la porte presque ouverte et de laisser les fenêtres baissées. Pendant le trajet, je n'ai pas toujours béni votre nom, mais le fait est que nous sommes parvenus à notre destination et que nous sommes revenus. Je ne me confonds pas en remerciements, mais ce fut toute une expérience que de voir tous ces pays s'étaler à 7 000 pieds en-dessous de nous, une fois qu'on a surmonté la peur qu'on a à l'idée qu'il faut redescendre.
Il y a quelques petites choses que j'aimerais mentionner que les gens ne savent pas. Lorsque nos militaires vont outre-mer, ou ailleurs, ils établissent un camp, parce qu'ils veulent tout d'abord un environnement sûr. Mais on m'a dit qu'il leur faut aussi une source d'eau sûre. Donc, évidemment, il vous faut un système de purification d'eau quelconque. Dans ces pays-là, les éboueurs ne passent pas tous les jours. Dans les pays que j'ai visités dans ce bout du monde, il n'y a pas de police, il n'y a pas de tribunaux, il n'y a pas de dépanneur où on peut aller. C'est le chaos total.
En fait, j'ai aperçu deux voitures dans un terrain vacant qui portaient des plaques d'immatriculation de l'Ontario. Elles avaient été cannibalisées. J'ai noté les numéros de plaque, je les ai vérifiés—et vous étiez avec moi à ce moment-là, monsieur le président—et nous nous sommes aperçus que ces véhicules avaient été volés. Ils figuraient sur la liste d'assurance de quelqu'un. Donc je sais que vous vivez des situations que l'on ne peut imaginer au Canada.
Donc vous installez votre système d'égout, parce qu'il n'y en a pas habituellement, vous avez votre installation de recyclage et vous avez votre installation de communication. C'est comme si vous créiez une petite ville. Je pense que les gens ne s'en rendent pas compte.
Je sais aussi que la crème glacée n'existe pas dans bon nombre de ces pays parce que j'ai vu quatre Tchécoslovaques se ruer sur la crème glacée lorsque nous avons visité le secteur. On m'a expliqué que, parce qu'ils n'ont pas de crème glacée, la première chose qu'ils font lorsqu'ils vous rendent visite, c'est se précipiter dans la cuisine pour trouver la crème glacée .
Pourriez-vous nous parler un peu plus de cela. Je voulais savoir pourquoi nous avions les vidéos et la carte de la région. Ma première question devait porter là-dessus, mais vous avez déjà couvert cela. Et je confirmerai que l'une des statues ou l'un des monuments que l'on gardait lorsque nous y étions... commémorait un massacre du XIIe siècle ou quelque part par là. Donc ce n'est rien de nouveau. Si on connaît l'histoire de la région, on se rend compte que presque tous les conflits mondiaux sont nés dans cette région troublée pour une raison ou une autre, et ce, aussi loin qu'au XIIe siècle.
Je veux également savoir dans quelle mesure nous nous approchons d'une entente générale avec les seigneurs de la guerre et ces autres éléments. Mais on entre là dans le domaine politique. De même, où en sommes-nous avec la formation du corps de police?
J'aimerais que vous nous parliez un peu plus longuement de ce qu'il faut faire pour installer un camp là-bas parce que c'est à mon avis un sujet très intéressant que la plupart des Canadiens ne connaissent pas.
Mgén Andrew B. Leslie: Il y a essentiellement deux camps canadiens à Kaboul. Il y en a un qui est presque entièrement canadien. C'est le camp Julien. L'autre est une annexe que nous avons greffée au grand camp multinational qui est principalement géré par les Allemands, et qu'on appelle le camp Entrepôt.
En fait, le colonel Hodgson, en sa qualité de commandant du contingent, était le gérant du camp, si vous voulez. Il faisait des tas d'autres choses mais c'était l'une de ses principales fonctions. Avant de lui céder la parole pour lui permettre de répondre à vos questions précises, monsieur, je dirai que le camp Julien a coûté cher aux contribuables. Et je ne suis pas du tout gêné de demander plus d'argent, si je crois en avoir besoin, ou pour obtenir le maximum pour les soldats qui y sont déployés. Si ce camp coûte très cher... et il offre de belles installations. Les soldats dorment sous la tente mais ce sont des tentes confortables. Le camp coûte très cher parce que si la situation prend une mauvaise tournure à Kaboul, à cause de luttes entre les factions ou d'un retour à la guerre civile, nos soldats n'ont pas d'autre endroit où aller. Il n'y a qu'une seule porte d'entrée et de sortie, et c'est l'aéroport international, parce que ni le Pakistan ni l'Iran ne nous permettront de passer sur leur territoire pour entrer ou sortir. Donc si la situation se dégrade, ce sera le rassemblement général au camp Julian.
Donc ce n'est pas vraiment un camp; c'est plutôt une forteresse. J'ai la certitude que nous nous sentirons tous beaucoup mieux si nous savons que nos jeunes hommes et femmes sont à l'abri dans une enceinte très bien défendue et dans des bunkers et non dans le désert. Le secteur où se situe le camp a été lourdement endommagé par l'artillerie et les roquettes il y a à peine quelques années de cela. Quand je dis lourdement endommagé, je veux dire par là qu'entre 25 000 et 30 000 personnes ont perdu la vie aux abords du camp. Nous tâchons donc de profiter des leçons de l'histoire.
Mark pourra peut-être répondre à vos questions précises concernant l'assainissement de l'eau et des aqueducs, et vous dira comment le camp fonctionne et comment il a été créé.
º (1625)
Col Mark Hodgson: Je serai très bref. Je peux probablement répondre en quelques minutes.
Tout d'abord, je dois mentionner l'équipe d'activation du théâtre. Il s'agit d'une ressource des Forces canadiennes qui a expressément pour but d'établir les nouvelles missions. Comme l'opération ATHENA constituait une nouvelle mission, le sous-chef d'état-major de la Défense a ordonné à l'équipe d'activation du théâtre, qui est normalement basée à Kingston, de se rendre à Kaboul et d'entamer des négociations afin de trouver un endroit où nos troupes pourraient vivre, agir et s'acquitter de leurs devoirs.
Cette équipe était commandée par le colonel Pouliot, et elle a été déployée en reconnaissance vers le mois d'avril, et a commencé à chercher un endroit. Les sites ont été choisis, dont le site du camp Julien, dans la région de Darul Aman au sud de Kaboul, et le camp Entrepôt, cette annexe qui a été greffée à la brigade multinationale de Kaboul.
L'équipe d'activation du théâtre est formée de personnel spécialisé en administration, soutien logistique et sécurité, et elle compte aussi des membres qui sont chargés des contacts initiaux pour le déroulement de la mission, et ce, en fonction des exigences opérationnelles et techniques. Donc pour l'eau, l'équipe a emporté avec elle des installations de purification d'eau; elle a emporté des générateurs pour l'électricité. Elle a emporté toutes les choses qui sont nécessaires pour le logement des troupes et le reste, toutes ces choses que l'on obtient en s'adressant à des entrepreneurs privés ou en utilisant des ressources militaires. Son but est d'établir un camp prêt à recevoir le personnel de la première rotation. Donc lorsque les premiers éléments de l'opération ATHENA sont arrivés en juillet, le camp pouvait leur offrir des abris, des repas chauds et des douches à l'eau chaude. Pour un soldat, c'est le grand luxe. La construction du camp n'était pas terminée, mais du moins, les soldats n'avaient pas à s'inquiéter; ils pouvaient donc descendre de l'avion, se rendre au camp, où l'essentiel était fourni, et s'acquitter tout de suite de leur mission. C'est ce qu'ils ont fait.
Au cours des six mois de notre déploiement, le camp s'est amélioré sans cesse grâce à nos efforts et à l'aide de nos entrepreneurs. Mais les services, comme je l'ai dit, qu'il s'agisse d'électricité, d'exigences administratives ou de roulottes servant au pompage des eaux usées, tout cela était sur place, et nous pouvions tout faire à l'interne. Mais je dois dire aussi que le camp de Kaboul a été créé dans le respect du délai du 1er décembre de la FIAS—ce qui en faisait une mission assez avancée—il y avait donc un grand nombre d'entrepreneurs dans la ville qui étaient capables de nous fournir à peu près tout ce qu'il nous fallait, dont nos aliments, que nous avons obtenus par l'entremise d'un entrepreneur de la ville qui importait ses aliments d'Europe. Donc la crème glacée dont vous parliez a été obtenue par l'entremise d'un entrepreneur et nous parvenait d'Europe par avion. C'est également un entrepreneur qui a installé la station de pompage des eaux usées. Nous puisions notre eau dans des puits que nous avions creusés, mais à l'origine, il s'agissait d'eau en bouteille que nous fournissait un entrepreneur. Donc, une fois que nous étions sur le terrain, ce sont divers entrepreneurs de la ville qui ont répondu à bon nombre de nos exigences.
La sécurité est un aspect important. Je mentionne cela parce que la protection de la force du camp Julien était la meilleure de toute la mission, et les autres pays membres de la FIAS ont été tout à fait à même de le constater. Je crois qu'elle constitue un modèle pour l'avenir. Le grand avantage du camp Julien, c'est que sa taille peut être élargie ou réduite, tout dépend de l'ampleur de la mission. Donc, si nous avons une nouvelle mission, la structure du camp peut être élargie pour avoir une force plus imposante, ou elle peut-être réduite pour recevoir une force plus petite, s'il ne s'agit que d'une compagnie, par exemple.
J'espère que cela répond à vos questions.
Le président: Merci beaucoup.
Merci, monsieur O'Reilly.
Monsieur Bachand, cinq minutes, s'il vous plaît.
[Français]
M. Claude Bachand: Merci, monsieur le président.
Maintenant qu'on nous a décrit la journée d'un fantassin, j'aimerais qu'on passe à un autre sujet, très important pour moi: j'appelle cela de la négociation. Vous avez dit plus tôt, mon général, que si jamais on avait de très mauvaises surprises et que les choses en venaient à mal tourner, il faudrait prendre certaines mesures. Or, je ne sais pas si c'est mon tempérament d'éducateur qui me fait dire cela, mais d'habitude, quand on entre dans une classe, on sait qui va causer des ennuis et qui risque de ne pas en causer. Normalement, on a tendance à tenter de négocier avec celui qui risque de causer des problèmes. Je trouve que c'est un phénomène important dont on ne parle pas assez souvent.
Bien sûr, il est important que les soldats qui font des patrouilles fassent sentir leur présence. Toutefois, d'après ce que vous avez dit plus tôt, il semble s'agir d'un environnement plutôt difficile. Vous parliez entre autres de factions qui ont un code culturel bien à elles. Il y a des seigneurs de la guerre et des factions. Expliquez-nous comment il vous est possible, dans ce contexte, de faire un travail de prévention.
Vous nous avez donné pratiquement un cours d'histoire plus tôt, mais vous devez aussi connaître l'histoire récente. J'aimerais savoir qui, dans ce pays ou aux alentours de Kaboul, a une force de feu suffisante pour créer des problèmes. Quelle stratégie est adoptée à l'égard de ces gens pour éviter qu'il y ait trop de surprises? Est-ce qu'on organise régulièrement des rencontres? Est-ce qu'on les connaît? Ce qu'on rapporte aux services de renseignement, est-ce qu'on le traite, pour ensuite décider d'aller voir un individu donné? Est-ce vous qui conduisez ces négociations?
Les traducteurs sont aussi en cause. Ici, nous apprécions grandement nos traducteurs, mais j'imagine qu'il y a un problème de langue là-bas. Comment procédez-vous en ce qui concerne les traducteurs? Est-ce que ces gens sont engagés? Est-ce qu'on peut leur faire confiance pour ce qui est de bien conduire une négociation? Parlez-nous un peu de la façon dont vous conduisez ces négociations dans le but de faire de la prévention.
º (1630)
Mgén Andrew B. Leslie: Au cours de la période d'entraînement, nous avons obtenu l'aide d'Afghans qui ont émigré ici, au Canada. En outre, nous sommes nombreux à avoir étudié avec beaucoup d'attention la culture, l'histoire, les tensions et les liens qui existent entre les groupes principaux et les seigneurs de la guerre qui coexistent maintenant en Afghanistan. En termes de connaissances historiques, ce n'était pas nouveau, mais pour moi, de même que pour la majorité des soldats, c'était notre première expérience à Kaboul. Ce n'est pas la première expérience à l'échelle canadienne, étant donné que les excellents soldats du 3e Bataillon du PPCLI étaient à Kandahar environ 18 mois avant nous. La plupart d'entre nous, sans être des amateurs, étaient, disons, étudiants en la matière.
En ce qui a trait aux commandants de compagnie et de peloton et, à un niveau plus élevé, aux commandants de bataillon et de brigade, au niveau de la FIAS, mon niveau et celui de mon commandant, environ 30 p. 100 de notre journée se passait en négociations ou en discussions, amicales ou non, selon le cas, avec les seigneurs de la guerre ainsi qu'avec les ministres et représentants de l'Afghan Transitional Authority. Les sujets n'étaient pas entièrement restreints aux affaires militaires. On abordait aussi des questions politiques ou économiques, et les discussions pouvaient porter sur la priorité donnée à l'assistance financière au développement. La plupart de nos journées étaient consacrées à des rencontres avec ces gens.
Pour ce qui est de notre capacité en matière de renseignement, ce que nous avons emmené là-bas est vraiment énorme. C'est nous, les Forces canadiennes, qui possédons le plus important système de renseignement tactique à Kaboul. Ces systèmes sont bien classifiés, mais il reste que la plupart des renseignements proviennent de contacts personnels que nos soldats ont établis avec des citoyens de Kaboul.
C'est le caporal-chef de la patrouille qui, tous les jours, discute avec le chef de la police locale, les mollahs, les anciens et les hommes. Ce sont eux qui informent le caporal-chef et le sergent des activités des seigneurs de la guerre ou des terroristes dans notre région. C'est le fruit de la méthode d'entraînement de nos soldats: ils sont là, auprès du peuple, et participent à la vie des gens.
Pour ce qui est des traducteurs, nous avons employé environ 80 traducteurs locaux. Est-ce qu'on peut leur faire confiance? Pas du tout. Ce sont d'excellentes personnes, mais on doit être très prudents à l'égard de l'information qui passe entre les traducteurs et les citoyens locaux. On en est bien conscients. En effet, pour la plupart de nos soldats, caporaux-chefs, sergents et officiers, il ne s'agit pas d'une première mission, mais d'une deuxième, troisième ou quatrième mission.
Est-ce que j'ai répondu à vos questions, monsieur?
º (1635)
M. Claude Bachand: J'ai entendu dire qu'en Bosnie, on avait invité les principaux seigneurs des clans afin de leur faire une démonstration de force. On leur a dit qu'on les invitait amicalement, avec beignes, café et autre nourriture, à assister à une pratique et qu'on serait honoré de leur présence. J'ai entendu dire qu'ayant constaté la force de feu qui était en cause, ils s'étaient calmés par la suite. Est-ce que vous utilisez aussi cette tactique?
Mgén Andrew B. Leslie: Oui, monsieur. Je remarque que votre connaissance des opérations est vraiment excellente. Nous avons, en effet, beaucoup utilisé cette tactique. Chaque fois qu'on faisait un tir de canon, d'obus, de mitraillette, de missile antichar, de fusée ou de quoi que ce soit d'autre, on invitait les seigneurs de la guerre et les représentants locaux des forces policières et des forces de milice pour leur indiquer qu'on était là pour les aider, mais don't push us around.
Un de nos adages,
[Traduction]
« ferme, juste et amical »,
[Français]
visait à transmettre cette philosophie. On a fait beaucoup de démonstrations, mais on a en outre souvent rencontré les anciens, les mollahs. En général, le colonel Hodgson organisait chaque semaine des rencontres avec les anciens des villages situés aux abords des camps canadiens ou sur la trajectoire de nos patrouilles.
[Traduction]
Le président: Merci.
Merci, monsieur Bachand.
M. David Price est le secrétaire parlementaire du ministre de la Défense, et je sais qu'il a quelques questions à poser.
Monsieur Price.
L'hon. David Price (Compton—Stanstead, Lib.): Merci, monsieur le président.
Et merci à vous, messieurs, d'être des nôtres.
Général Leslie, il est bon de vous revoir. Bien sûr, nous avons tous entendu les éloges qu'on vous a faits pour votre action là-bas, et nous vous en sommes très reconnaissants. Mais je crois qu'il est très important que vous soyez ici aujourd'hui. Je sais que vous avez pris la parole dans de nombreux endroits au pays et que vous avez expliqué notre mission là-bas, mais il est important à mon avis que vos propos soient notés pour mémoire.
Comme vous avez dit, nous allons procéder à un examen de notre politique de défense. Je pense que c'est là une occasion en or parce qu'une fois que cet examen aura été fait par le QGDN, nous en prendrons connaissance, et nous pourrons en discuter et entendre des témoins. Nous aurons ainsi une bonne idée de vos besoins, particulièrement dans le contexte incertain des combats, du maintien de la paix... et cette liste se poursuit jusqu'à l'infini.
Vous étiez l'un des nombreux commandants sous l'égide de l'OTAN. L'OTAN s'emploie en ce moment à normaliser les règles d'engagement de tous ces divers pays membres. C'est là-dessus que porte ma question. Quel bilan faites-vous de votre collaboration avec tous ces pays différents qui avaient des règles d'engagement très différentes aussi?
Mgén Andrew B. Leslie: Il existe un document faisant état d'une règle d'engagement générique pour l'OTAN, mais comme vous le savez, l'OTAN, c'est une bureaucratie militaire colossale, très complexe et parfois lourde.
Soit dit en passant, elle fonctionne mieux à mon avis que n'importe quelle autre alliance militaire complexe de sa taille.
Mais très souvent, il y a une certaine difficulté à faire en sorte que 19 pays, qui seront bientôt plus nombreux, s'entendent sur leurs règles d'engagement. Dans la mesure où les règles d'engagement nationales correspondaient à ce cadre, en ma qualité de sous-commandant relevant de mon commandant pour les opérations quotidiennes des forces placées sous l'égide de l'OTAN, je pouvais m'arranger.
Cela étant dit, les règles d'engagement canadiennes étaient très fermes. Nous disposions donc d'un outil précieux qui permettait à nos soldats de faire ce qu'ils avaient à faire, et je n'aimerais pas voir nos règles d'engagement diluées afin de plaire à un autre pays quelconque. Même si nous avons 2 000 soldats sur le terrain et que cet effectif est le plus important, très souvent, au sein de l'OTAN, avec le principe un pays, un vote, un pays qui n'a peut-être que 15 ou 20 soldats sur le terrain peut s'opposer à certains aspects de nos règles d'engagement. Mais cela ne regarde que ce pays-là.
Je me sentais très rassuré de voir que nos règles d'engagement nous donnaient les outils qu'il nous fallait pour faire ce que nous avions à faire.
º (1640)
L'hon. David Price: Monsieur le président, l'OTAN se donne beaucoup de mal en ce moment pour solidifier ce modèle de l'OTAN qui vous encadrait, pour que ce soit un peu plus facile pour les autres pays qui interviendront à l'avenir.
Mais en fait, vous collaboriez également avec le Partenariat pour la paix. Les pays membres de ce partenariat pouvaient-ils utiliser le même modèle, ou avez-vous eu beaucoup de mal à vous entendre avec eux?
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, la FIAS compte 33 pays membres. Donc certains pays avaient leurs particularités, il y avait des choses qu'ils pouvaient faire et ne pas faire. Vous me pardonnerez de ne pas nommer de pays en particulier parce que je crois que cela nous écarterait de...
L'hon. David Price: Non, n'en faites rien.
Mgén Andrew B. Leslie: Par exemple, il y avait un pays qui interdisait à ses soldats de passer d'une rue à une autre parce que celle-ci était située hors de la juridiction de police où ses soldats devaient assurer la patrouille. C'est extrêmement irritant parce que bien sûr, comme tous les soldats du monde entier, vous avez mis sur pied des plans de rechange. Si un groupe se fait tirer dessus, il veut pouvoir compter sur ses amis d'à-côté pour lui donner un coup de main tout de suite. Si l'on ne peut pas compter sur ses amis, il faut alors trouver d'autres moyens d'agir.
Un autre exemple, certains pays—qui étaient peu nombreux—ne permettaient pas à leurs soldats de sortir la nuit. Mais les criminels, les terroristes et autres éléments désagréables opèrent surtout la nuit. Si on ne permet pas à ses soldats de patrouiller la nuit, on se demande alors ce qu'ils font là. Mais il ne s'agissait pas d'un pays qui avait sur place des forces de patrouille actives, cela n'a donc pas posé de problème
Mais vous pouvez voir certaines contraintes pratiques qui interviennent. Ces contraintes ne font pas partie des règles d'engagement mais elles sont imposées par les autorités du pays à leur contingent, formellement ou informellement.
L'hon. David Price: Après cela, y aurait-il eu un debriefing avec l'OTAN pour leur donner, comment dirais-je, un petit peu d'information afin de les aider dans ce qu'ils font sur le plan de la transformation?
Mgén Andrew B. Leslie: Oui, monsieur, et par ailleurs, la plupart des nations envoyaient leurs officiers supérieurs ou des représentants élus pour une visite dans certains cas. Comme je ne suis pas du tout gêné, j'ai souvent profité de cette occasion pour leur dire ce que je pensais de leurs restrictions.
L'hon. David Price: Vous avez dit que la plupart des réservistes que vous aviez sur le théâtre d'opération avaient été intégrés aux opérations de coopération civilo-militaire. Est-ce qu'il y en a cependant qui ont été entièrement intégrés à des unités et qui faisaient exactement le même travail?
Mgén Andrew B. Leslie: Nous avions des réservistes, monsieur, mais il n'y avait pas d'unités ou de sous-unités exclusivement composées de réservistes. Le temps de préparation était adéquat, mais pas suffisant pour les préparer à passer de leurs activités quotidiennes habituelles aux activités très performantes de Kaboul.
Il y en avait dans le service médical, dans l'infanterie, à l'état-major également, les ingénieurs et, naturellement, dans les affaires civiles. Pour les affaires civiles, les réservistes constituaient la grande majorité. Ils faisaient un excellent travail car ils travaillaient surtout sous le commandement du colonel Hodgson. Ils s'occupaient de toutes sortes d'activités de reconstruction.
Col Mark Hodgson: Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter qu'à l'heure actuelle, l'armée est structurée de façon à ce que les réservistes se spécialisent dans les affaires civilo-militaires. Cela leur facilite énormément la transition dans une nouvelle mission. La majeure partie de l'entraînement est faite. Nous devons assurer un entraînement spécifique à la mission sur le théâtre d'opérations, mais pour les réservistes spécialisés, c'est parfait pour les intégrer à une mission. Comme le général Leslie l'a dit, il n'y avait que très peu de réservistes, en réalité.
º (1645)
L'hon. David Price: L'entraînement supplémentaire qu'ils reçoivent se fait-il sur une période plus courte que pour les réguliers?
Col Mark Hodgson: Non, c'est le même.
L'hon. David Price: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Price.
Madame Wayne, vous avez la parole.
Mme Elsie Wayne: Je dois partir lorsque j'aurai posé mes questions et obtenu vos réponses. J'en suis fort désolée, mais je dois prendre l'avion. Quelqu'un vient me chercher.
J'ai remarqué que le 21 août, après des mois de préparation, le troisième Bataillon du Royal Canadian Regiment a été déclaré prêt pour les opérations. Je dois dire que je suis très heureuse, puisque je suis artilleur honoraire de la Troisième artillerie de campagne, et que l'on ne me demande pas d'aller là-bas avec vous. Je peux vous assurer que si j'allais là-bas, vous ne sauriez pas ce qui vous attendrait.
J'ai remarqué que Rick Mercer est allé là-bas pendant les Fêtes, colonel, et j'ai pensé que c'était merveilleux. Du 10 au 13 décembre, Rick Mercer s'est produit devant les membres des Forces canadiennes au camp Julien et a filmé un spécial de Noël qui a été diffusé à la CBC. J'ai trouvé cela merveilleux.
J'aimerais vous poser quelques questions. La première est la suivante. Je me pose des questions au sujet des enfants en Afghanistan. Toutes les choses qui se passent là-bas ont-elles à votre avis un impact sur ces enfants? Comment pouvons-nous stabiliser l'Afghanistan pour ceux qui se trouvent à Kaboul et ailleurs, pour ces enfants, pour leur avenir?
Mgén Andrew B. Leslie: Madame, nous avons reçu un excellent appui de Canadiens de toutes les conditions. Chaque fois que quelqu'un est venu passer du temps avec les troupes, ça a été une expérience extraordinaire. Réellement, cela faisait chaud au coeur. Je sais que les soldats l'ont vraiment apprécié. Vraiment.
Mme Elsie Wayne: Rick Mercer m'amènera peut-être avec lui la prochaine fois. Je vais communiquer avec lui.
Mgén Andrew B. Leslie: Comme pour n'importe quel pays, l'avenir de l'Afghanistan passe par l'épanouissement de ses enfants. Les talibans ont réussi à s'imposer parce que les seigneurs de la guerre se battaient entre eux et, en l'absence d'un État de droit centralisé, les talibans incarnaient ce que les gens, au début, croyaient être une source relative de stabilité et de sécurité. On s'est rapidement aperçu qu'il n'y avait pas de stabilité ni de sécurité car les talibans avaient une interprétation assez tordue d'une variété de fatwas, qui découlent tous du Coran. Ce n'est donc pas une question de religion en soi. C'est un groupe d'extrémistes qui recherchent le pouvoir personnel, et ce sont les fondamentalistes au sein des talibans.
Je ne veux pas dire non plus que tous les talibans soient mauvais, mais les hauts dirigeants sont de mauvais éléments, la plupart des hommes d'âge moyen qui veulent le pouvoir, le territoire, ou la domination de la femme.
Pour ce qui est des enfants, à Kaboul et dans les environs, nous avons des soldats—non pas nécessairement toujours des soldats canadiens, mais des soldats internationaux—qui escortent les jeunes filles à l'école. Je suis heureux de dire que dans la plupart des cas cela n'est plus nécessaire, là où les enfants, garçons et filles, sont relativement libres d'aller à l'école. La même chose est vraie dans bien d'autres régions de l'Afghanistan. Il faut que la primauté du droit s'étende petit à petit, d'une façon cohérente. Je sais que le président Karzai et ses trois ministres de l'Éducation à différents niveaux travaillent très fort pour mettre en place un programme scolaire plus libéral, normalisé, et il arrive à le faire avec beaucoup de succès. Il y a cependant encore beaucoup de progrès à faire.
Mme Elsie Wayne: Nous tous autour de cette table qui sommes membres du comité sommes ici parce que nous vous faisons confiance et nous croyons à ce que vous faites, et nous sommes ici pour vous appuyer. J'aimerais cependant savoir ce qui suit : en ce qui concerne le nombre d'hommes et de femmes en uniforme, et le nombre a diminué considérablement au cours des dernières années, avez-vous examiné le financement nécessaire pour vous et vos gens en uniforme, et combien de personnes de plus vous aimeriez voir en uniforme pour vous aider? Donnez-nous tout simplement un chiffre—nous ne citerons pas votre nom ou quoi que ce soit.
Mgén Andrew B. Leslie: Madame, vous m'avez posé une question directe. Je travaille pour vous, de sorte que je dois maintenant vous donner une réponse.
Mme Elsie Wayne: Merci. C'est ce que je veux.
Mgén Andrew B. Leslie: Qu'est-ce qu'ils peuvent me faire—me renvoyer à Kaboul? Honnêtement, j'aimerais bien y retourner.
Je ne peux pas parler pour les Forces canadiennes, car ce n'est pas à moi de le faire et, naturellement, je viens tout juste de rentrer, comme nous tous, de sorte que je ne suis pas au courant des autres demandes, et il y en a beaucoup, pour la Force aérienne et la Marine. Naturellement, ma réponse dépend de ce que l'examen de la défense révélera.
Qu'est-ce que vous, les Canadiens, voulez que nous fassions? À l'heure actuelle, si nous voulons garder deux gros bataillons à l'étranger, un en Afghanistan et un autre ailleurs, je pense que nous avons besoin de 5 000 soldats de plus à temps plein. Si nous n'avons pas 5 000 soldats additionnels, alors nos soldats vont continuer de s'épuiser...
º (1650)
Mme Elsie Wayne: C'est ce que je crains.
Mgén Andrew B. Leslie: ... et nous ne pourrons pas, j'imagine, faire tout ce que vous, le gouvernement du Canada, aimeriez que nous fassions. Tout cela dépend en partie de l'examen de la défense.
Mme Elsie Wayne: Je dois partir, mais je tiens à vous remercier personnellement, pour tout ce que vous avez fait, et pour ce que vous continuez de faire. Pour moi, vous êtes très spécial et je ne serais pas restée ici pendant 11 ans si ce n'avait été des militaires, et à me battre pour eux, je peux vous l'assurer. Je tiens donc à vous dire un gros merci.
Le président: Merci, madame Wayne.
Elsie a toujours très bien défendu les Forces canadiennes, comme bon nombre d'entre nous ont voulu le faire également.
J'aimerais poser une petite question avant de donner la parole à mes autres collègues, messieurs, car elle fait suite à ce dont Mme Wayne vient de parler. Bon nombre d'entre nous ont été membres de ce comité à plusieurs reprises au fil des ans, et la dernière fois que j'étais président du comité, nous sommes allés au Kosovo. Ils étaient en train de démonter le camp DK, et nous sommes allés parler aux troupes, qui faisaient une pause-café.
Je n'oublierai jamais le deuxième soldat à qui je suis allé me présenter. Il a dit : « Je vous connais; vous m'avez enseigné à l'école secondaire. » En tant que député et ancien enseignant, on rencontre d'anciens étudiants partout au monde, littéralement, et on peut alors se sentir un peu vieux, mais c'était intéressant. Le fait est que ce jeune homme—je ne le nommerai pas, bien que je me souvienne très bien de son nom—avait un fils qui était âgé de 11 mois à l'époque. Il ne l'avait vu que pendant un mois, ce qui fait qu'il ne l'avait pas vu 10 mois sur 11.
Tout cela pour en venir à la question suivante : nos troupes qui sont en Afghanistan à l'heure actuelle—vos troupes, nos troupes—sont là depuis combien de temps, et ce qui est encore plus important, depuis quand sont-elles loin de leurs familles?
M. Price l'a dit, et l'une des raisons pour lesquelles nous apprécions votre présence ici, ce n'est pas seulement pour nous éduquer en tant que députés, mais dans une certaine mesure pour éduquer les Canadiens qui nous écoutent.
Pouvez-vous nous dire combien de temps les soldats doivent passer loin de leurs familles alors qu'ils se préparent pour une mission, avant d'être déployés pour une période de six mois, et qu'à leur retour ils ne rentrent pas nécessairement tout de suite rejoindre leur femme et leurs enfants? Sur 11 mois, il n'avait été avec son fils que pendant un mois. Pouvez-vous nous donner un peu plus de détails pour nous aider à comprendre ce que cela exige de nos soldats?
Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que nous avons atteint le nombre minimum de soldats, et je pense que l'examen conclura que nous avons besoin de plus de gens. Je voudrais déclarer aux fins du compte rendu que j'espère que ce sera le cas, mais cela reste à voir.
Donc, est-ce que l'un d'entre vous pourrait nous aider à comprendre et nous dire tout simplement pendant combien de temps en tout un soldat est loin de sa famille lorsqu'il participe à une mission comme celle en Afghanistan?
Mgén Andrew B. Leslie: Nous venons tout juste de nous consulter et le consensus c'est environ 10 mois pour une mission de six mois. Certains soldats ont passé davantage de temps loin de leur foyer, particulièrement s'il s'agit de spécialistes venant d'endroits très éloignés du lieu de la mission, dans ce cas-ci Petawawa, mais la moyenne semble tourner autour de 10 mois pour une mission de six mois. Pour la plupart des hauts-gradés et des sous-officiers, il s'agit de leur quatrième, cinquième, sixième ou même septième mission au cours d'une carrière de 20 ans.
Mais si vous me permettez, monsieur...
Le président: Allez-y. J'aimerais bien que vous nous en parliez davantage.
Mgén Andrew B. Leslie: Une mission comme celle qui se déroule à l'heure actuelle en Afghanistan est extrêmement satisfaisante car nous sauvons des vies; si nous n'étions pas là, bien des gens seraient morts. C'est aussi simple que cela. Nous sommes assez convaincus que le Canadien moyen comprend beaucoup mieux aujourd'hui qu'il y a peut-être quatre ou cinq ans ce que nous faisons pour eux lorsque nous allons dans ces endroits éloignés.
Donc, la grande majorité des soldats veulent participer à des missions. Le problème pour moi, à titre d'officier relativement supérieur, et pour M. Gapp et le colonel Hodgson également, est que l'enthousiasme pour les missions fait en sorte parfois que les soldats veulent aller en mission alors que très franchement ils ne devraient pas y aller, et c'est quelque chose que nous devons surveiller de très près. Il y a toute une gamme de mécanismes que nous tentons de mettre en place à cet égard, mais lorsque la sonnerie du clairon se fait entendre, ils ont tous tendance à laisser tomber ce qu'ils font pour aller faire ce que non seulement nous devons faire, mais dans certains cas ce que nous aimons faire car il s'agit d'un travail qui procure beaucoup de satisfaction.
º (1655)
Le président: Merci beaucoup pour votre réponse, et je pense que tous les membres du comité sont du même avis. Je pense que nous sommes tous allés à l'étranger et nous avons pu voir le travail que nos troupes faisaient là-bas; le moral est très bon, et je le dis en tant que non-spécialiste. Peu importe à qui l'on parle dans les forces armées, le moral est très bon et tous croient fermement au travail qu'ils font.
Nous nous en réjouissons, mais je pense qu'il faut reconnaître—et je vous remercie de votre réponse—que si on parle d'un déploiement de six mois, c'est bien, mais en fait il s'agit plutôt de presque toute une année loin de sa famille avec tout le stress et les problèmes que cela comporte. Je vous remercie beaucoup des éclaircissements que vous nous avez apportés.
Les collègues ont encore quelques questions à poser, et je peux comprendre pourquoi.
Monsieur Calder.
M. Murray Calder: Merci, monsieur le président.
Général Leslie, cela a été très intéressant, mais je voudrais voir si nous pouvons sortir des sentiers battus également. Je regarde la situation à laquelle vous devez faire face à l'heure actuelle en Afghanistan, et cela m'amène aux trois interrogations suivantes : C'est quoi? Pourquoi? À quoi bon? La réponse à « C'est quoi? », c'est que nous avons vu des gens s'entretuer dans un pays en plein bouleversement où il y a la guerre civile. La réponse à « Pourquoi? », c'est que nous sommes allés stabiliser la population et mettre fin aux tueries. Mais la réponse à « À quoi bon? », c'est qu'il y a un thème commun en Bosnie, en Afghanistan et en Irak. Ce thème commun c'est que lorsqu'on utilise les termes islam, musulman et démocratie dans la même phrase, il semble y avoir une contradiction.
Avez-vous une idée de la façon dont nous pourrions nous y prendre pour sortir des sentiers battus et séparer l'Église et l'État pour en arriver à une vrai démocratie?
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, d'abord et avant tout, je ne vais même pas tenter d'être un spécialiste de l'islam, mais comme certains d'entre vous l'ont naturellement fait, avant la mission nous avons lu une traduction du Coran. Les cinq piliers de la sagesse que l'on retrouve dans le Coran—ce sont les mots de Mahomet; il a reçu la révélation en 610 et il est décédé 26 ans plus tard—sont tels que le Coran lui-même dans sa version originale, qui de toute évidence n'a pas été écrit en une fois en un seul endroit, est un code élaboré de discours social entre des gens très différents qui partagent un thème commun.
Je crois comprendre dans sa forme pure, le Coran, sans les fatwas subséquents qui ont été ajoutés—les interprétations qui ont évolué au cours des centaines d'années subséquentes—est en fait étonnamment tolérant. Il s'agit en fait d'un code de conduite tolérant dans lequel le christianisme et diverses grandes religions ne sont pas seulement reconnus, mais en fait inscrits pour ce qui est de leur lien avec la parole du prophète.
Je n'accepte donc pas l'idée selon laquelle il s'agit d'un conflit religieux entre les musulmans et les chrétiens. Je rejette tout à fait la thèse de Huntington selon laquelle il s'agit d'un conflit de cultures. Je dirais plutôt qu'il s'agit du problème qui existe depuis toujours lorsque des hommes d'âge moyen veulent le pouvoir personnel, cherchent à dominer leurs subordonnés, c'est-à-dire la même malédiction qui afflige l'humanité depuis des milliers d'années.
Ce qui se passe à l'heure actuelle, c'est que certaines de ces personnes, ces extrémistes, se servent de jeunes hommes âgés de 18, 19 ans ou de 15 et 16 ans, qui—j'ai moi aussi été jeune—ne réfléchissent pas toujours aux conséquences de leurs actes. Ils se tournent vers ces tyrans d'âge moyen qui, au fait, ne semblent jamais être ceux qui se font tuer dans les guerres qu'ils déclenchent. Tous les chefs d'al-Qaïda et des talibans et Gulbuddin Hekmatyar et sa bande en Afghanistan sont toujours bien en vie. Ils présentent leur message de haine sous le couvert du fanatisme religieux.
Donc, la question n'est pas nécessairement « À quoi bon? » au sens que ce n'est pas la démocratie par rapport... Permettez-moi de vous expliquer ce qui suit. Je ne crois pas que la démocratie et l'islam soient nécessairement incompatibles. Pour être franc, monsieur, j'aurais plutôt tendance à rejeter cette thèse. Je pense qu'avec le temps, il y aura un rapprochement entre les deux.
» (1700)
M. Murray Calder: Vous avez dit tout à l'heure que si vous portez la tenue verte, c'est parce que la population, à vrai dire, n'était pas bien éduquée et ne pouvait pas lire. L'éducation serait-elle la clé pour résoudre ce problème?
Mgén Andrew B. Leslie: Oui, c'est la solution. Au cours des quelques dernières décennies, l'invasion russe a causé un énorme problème de réfugiés pour l'Afghanistan. Il y en avait entre 2 et 2,5 millions en Iran, et 2 à 3 millions ou peut-être même 4 millions au Pakistan vivant dans ces conditions affreuses.
Les écoles religieuses, les madrasahs, ce sont retrouvées avec un fardeau—une charge, si vous voulez—étant donné qu'elles pouvaient servir de refuge aux orphelins, aux jeunes hommes et aux familles désespérées. Au fil du temps, le jihad a dû adopter le programme des madrasahs et mettre l'accent sur l'extrémisme religieux. Il y a des jeunes hommes qui sont sortis des madrasahs, des écoles religieuses, qui peuvent citer le Coran ou une série de fatwas, des interprétations du Coran, mais qui ne peuvent pas lire. Ils passent huit ou dix ans—pas tous, en fait—à apprendre ce message d'extrémisme et de haine, mais ils ne savent toujours pas lire.
L'éducation est donc certainement la clé, mais pour progresser sur une voie parallèle, il faut avoir la sécurité. Naturellement, il est nécessaire d'avoir des fonds de reconstruction pour aider l'économie.
Le président: Monsieur Bachand encore une fois, suivi de M. O'Reilly.
[Français]
M. Claude Bachand: J'aimerais vous parler d'un sujet qui est peut-être un peu moins intéressant, mais qui pique ma curiosité. Ce sujet provoque aussi de grandes émotions. Je veux parler des pertes de vie.
Lorsqu'on entreprend ce type de mission, on peut s'attendre à ce que cela arrive. Quand cela s'est passé en Afghanistan, que ce soit lorsque certains soldats ont été tués par des tirs amis ou lorsque des gens sont morts dans la jeep, une vague de sympathie et d'émotion a déferlé jusqu'à la Chambre des communes. Je me rappelle que les députés de chacun des partis ont fait des déclarations. Nous étions vraiment tristes.
Ma question porte là-dessus. Y a-t-il un impact psychologique important sur le contingent quand cela se passe, au point où certains soldats, par exemple, pourraient devenir dysfonctionnels et avoir besoin de services psychologiques?
Cela m'amène à mon autre question. Y a-t-il des services psychologiques pour les gens qui sont près, ces gens qui sont dans la même unité? J'imagine qu'ils doivent être plus affectés que les autres, même si on sait que tout le monde en est affecté. Quelle procédure suivez-vous en cas de perte de vie? J'imagine que lorsque les soldats sont décédés dans leur jeep Iltis, il a dû y avoir un fil jaune tout autour pour permettre l'enquête. Par la suite, comment procède-t-on pour annoncer cela aux familles? Je ne sais pas si vous trouvez la question trop dure. C'est une chose qui arrive forcément, et il faut savoir comment nos troupes vont réagir dans de tels moments
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, comme je l'ai dit, Kaboul en Afghanistan est un endroit dangereux. Il y a des gens qui veulent nous tuer parce que nos soldats, vos soldats y font de l'excellent travail. Les extrémistes comme les talibans et Al-Qaïda font des plans pour tuer nos soldats, non seulement les Canadiens mais aussi les Britanniques, les Allemands, n'importe qui parmi les 33 nations alliées qui sont là.
Dès que les soldats ont été tués... Nous avons le sentiment de faire un travail vraiment important à Kaboul et que c'est nous qui sauvons des vies par notre présence. Je pense bien que la mort tragique du sergent Short, du caporal Beerenfenger et du caporal Murphy a constitué un très grand choc pour tous les Canadiens. C'était comme si on s'attaquait à notre esprit. Je ne m'exprime pas tout à fait parfaitement et je m'en excuse. Nous avions un travail à faire. Par conséquent, même quand l'adjudant-chef Gapp et le colonel Hodgson étaient en train d'organiser la cérémonie commémorative ou la cérémonie d'adieu au sergent Short, au caporal Beerenfenger et au caporal Murphy, les patrouilles continuaient dans les montagnes et dans les villes. Toutes les mesures défensives, toutes les négociations avec les seigneurs de la guerre continuaient. On a pleuré avec nos soldats lors de la cérémonie pour les soldats qui étaient morts. On ne les oubliera jamais. Mais après cela, nous sommes retournés tout de suite au travail. Sinon, on aurait pu perdre d'autres vies, pas seulement des soldats canadiens mais aussi des citoyens de Kaboul.
» (1705)
M. Claude Bachand: Y a-t-il des services de soutien psychologique pour les proches?
Mgén Andrew B. Leslie: Le colonel Hodgson est l'expert à ce sujet. Oui, il y a des services psychologiques pour cela. On a donné aux soldats l'occasion de discuter avec leurs supérieurs et leurs copains. Par exemple, l'adjudant-chef Gapp, qui connaît très bien les trois soldats, a passé beaucoup de temps avec les soldats qui restaient, avec les survivants. En cas de tragédie, il y a des procédures claires à suivre pour résoudre ces problèmes. Nous sommes des soldats et nous savons quel peut en être le prix.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Bachand.
Monsieur O'Reilly, vous avez la parole.
M. John O'Reilly: Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais revenir un instant sur l'aspect humanitaire. Un groupe de gens de Fenelon Falls en Ontario est venu me voir, ayant été motivé par les militaires pour recueillir des livres, des jouets et des vêtements pour les enfants. Ils ont rencontré toutes sortes de problèmes lorsqu'ils ont tenté d'envoyer toutes ces choses là-bas. Je m'en suis occupé, j'en ai parlé, et j'ai fait certains efforts. Ayant été secrétaire parlementaire, j'étais au courant de certains de ces problèmes. Nous avons enfin réussi à envoyer toutes ces choses là-bas. J'ai quelques cartons de crayons de Canadian Crayola que je dois envoyer là-bas également pour les enfants, alors c'est quelque chose que je reviendrai faire.
Je n'ai pas passé par les Forces canadiennes, car j'ai pensé qu'il y aurait une façon facile d'expédier deux ou trois tonnes de vêtements et de jouets en Afghanistan. On m'a dit—ce n'était pas nos militaires—qu'ils ne voulaient pas de livres en anglais. Ils ne voulaient pas de jouets avec lesquels les enfants n'avaient aucun lien culturel, et ne voulaient pas de vêtements occidentaux—et nous leur en avions envoyé cinq tonnes.
J'ai maintenant appris qu'une fois que tout avait été expédié et distribué, les enfants avaient été ravis de recevoir tout cela. J'ai envoyé quelques centaines de petits drapeaux canadiens et ce genre de choses. Les photos qu'on m'a renvoyées étaient vraiment bonnes. Donc je pense que nous pouvons faire quelque chose pour eux, mais nous devons trouver une façon plus efficace et plus efficiente de le faire, car il y a des collectivités partout au Canada qui veulent suivre ce modèle.
Vous souriez, et je sais que vous avez fait votre part, colonel.
Je pense cependant qu'il s'agit là d'un autre domaine que nous pouvons améliorer—l'effort humanitaire que nous faisons. Il s'agit de découvrir comment nous pouvons aider les gens à s'organiser pour bien trier et mettre dans des boîtes toutes ces choses. Cela peut être fait au niveau local, mais que pouvons-nous faire pour nous assurer qu'il ne faut pas trois mois pour expédier toutes ces choses? Voilà pour ma première question.
Mon autre question au sujet de l'aide humanitaire concerne l'ACDI. Y a-t-il une différence dans l'effort humanitaire qui est fait par l'ACDI—qui, naturellement, ne fait pas partie des forces armées—pour aider à la reconstruction? Avez-vous remarqué une différence, ou y a-t-il un effort remarquable de notre part par l'intermédiaire de l'ACDI pour reconstruire le pays?
» (1710)
Mgén Andrew B. Leslie: Je vais demander au colonel Hodgson de répondre.
Col Mark Hodgson: Pour ce qui est de la première partie de la question au sujet de l'aide humanitaire, vous comprendrez qu'il y a de nombreux transports à des fins humanitaires vers l'Afghanistan, mais nous devons établir des priorités. Naturellement, s'il y a une exigence opérationnelle parce que du matériel est en attente à la CFB Trenton, ce sera prioritaire.
Bon nombre de groupes ou d'organisations au Canada ont recueilli des articles. Certains de ces articles ont été expédiés à Trenton et sont restés là pendant longtemps, car c'est une question d'espace disponible. Si nous devons transporter des munitions ou du matériel en Afghanistan, naturellement cela constitue une priorité. Nous avons cependant expédié des choses, et nos soldats à Kaboul ne pouvaient s'occuper de tout ce qui arrivait là-bas. Nous avons cependant des priorités, de sorte que les besoins opérationnels sont prioritaires lors des transports aériens, particulièrement pour les appareils militaires.
Il y a cependant d'autres moyens, et il y a de nombreux vols nolisés sur Kaboul quotidiennement. Si on souhaite faire parvenir des marchandises en Afghanistan, il n'est pas nécessaire de les envoyer là-bas dans un avion des Forces canadiennes. Il y a d'autres façons de les expédier là-bas.
Pour ce qui est de décider ce qui est bon et de ce qui n'est pas bon pour les gens de l'Afghanistan, il ne faut pas oublier que depuis les trois dernières décennies ou presque, ces gens tentent essentiellement de survivre. C'est donc une véritable joie pour eux de recevoir quoi que ce soit, particulièrement les enfants.
À plusieurs reprises, nous avons constaté que des gens qui ne faisaient pas partie des forces armées ont tenté d'anticiper ce que nous faisions ou ce que nous donnions aux enfants en Afghanistan, particulièrement autour des fêtes chrétiennes et ce genre de choses, alors que c'est naturel. Le temps des Fêtes est un très bon exemple. Bien des gens se demandaient si nos soldats devraient distribuer des choses à Noël parce que c'est une fête chrétienne.
Je dois revenir à ce que je disais au sujet de la survie du plus fort. En Afghanistan, les gens ont besoin d'à peu près n'importe quoi, et ils seraient sans doute très heureux de recevoir des livres en anglais même si ce n'était que pour regarder les images. Plus particulièrement pour ce qui est des vêtements, des jouets et des choses de cette nature, il n'y a pas de différence entre leurs enfants et les nôtres. Ils veulent avoir des choses qui les fait mieux paraître, comme des vêtements, des choses pratiques; et des jouets pour s'amuser.
J'espère que cela répond à votre question.
M. John O'Reilly: Cette différence culturelle est-elle fondée sur la religion? Je ne vais pas nommer les groupes que je suis allé voir, car j'ai pensé qu'à Ottawa, avec les groupes civils, avec les 131 ambassades, qu'il ne serait pas très difficile de trouver beaucoup de coopération. Je n'en ai pas trouvé, de sorte que j'ai dû revenir aux forces armées qui étaient notre seule source nous permettant d'envoyer toutes ces choses là-bas.
Je ne pense pas que toutes ces sources soient là, sauf peut-être FedEx, et je ne sais même pas si FedEx va en Afghanistan.
Col Mark Hodgson: Oui, FedEx va...
M. John O'Reilly: Cela est très coûteux, naturellement. Dans la plupart des cas, ce sont des organismes de charité qui recueille ces choses et ces organismes n'ont pas beaucoup d'argent, ils n'ont pas...
Col Mark Hodgson: C'est exact. Ils ne peuvent rien obtenir de la source.
M. John O'Reilly: Et j'en suis parfaitement conscient. J'ai pris part à des évacuations sanitaires. Nous avons fait des choses de ce côté; les choses ont changé.
On se débrouille avec ce qu'on a. Je comprends ça.
Je sais ce que c'est que de vouloir sortir d'un pays lorsque les évacuations sanitaires ont la priorité, et nous devions rester cloués là pendant quelques jours et nous devions passer le temps entre nous dans l'attente d'un autre vol.
Je crois que si nous devons rebâtir ce pays, nous devons nous assurer de rester en contact avec la population, avec les enfants, sans vouloir changer la culture du pays. J'admets cela. Je sais que les jouets, les vêtements et tout ce qui est occidental sont très populaires auprès des gens là-bas. Il y a une telle abondance de ces choses ici, comparativement à ce qu'il y a là-bas.
Nous sommes allés là-bas, monsieur le président, nous avons survolé les vallées du Kosovo au pire moment, il n'y avait pas de toit sur les maisons... on avait tout fait sauter...
Même lorsque je suis rentré à Ottawa, je me rappelle avoir traversé la pelouse de la colline du Parlement et à mi-chemin, je me suis dit : « Mon dieu, mais je marche sur de l'herbe. » Là-bas, on ne ramasse pas les choses qu'on n'a pas jetées soi-même, et on ne marche pas sur l'herbe. C'est un pays infesté de mines terrestres. Les gens sont formés à cela, même les civils. Donc je comprends cela.
J'espère qu'on pourra trouver le moyen d'augmenter notre effort humanitaire. Je pense qu'on ne peut faire cela qu'en passant par l'armée, parce que c'est vous qui êtes sur le terrain là-bas. Vous connaissez les besoins sur place. Si vous voulez passer pour de bons gars, vous devez donner des jouets aux enfants.
Je crois donc qu'il y a des choses à faire de ce côté.
» (1715)
Col Mark Hodgson: Monsieur, j'espère ne pas vous avoir donné à croire que nous n'apportons rien là-bas.
M. John O'Reilly: Non, je sais que vous l'avez fait.
Col Mark Hodgson: Je voulais seulement dire que nous n'avions pas les moyens de tout emporter ce qu'on nous donnait. Il y a de nombreuses organisations au Canada...
M. John O'Reilly: Nos organisations avaient pour cinq tonnes de matériel. Ce n'est pas facile à transporter. J'admets cela, mais je veux seulement attirer votre attention... Les gens sont très contents lorsqu'ils apprennent que leurs cadeaux se sont rendus. C'est formidable.
Col Mark Hodgson: Autre chose, monsieur le président, toujours à ce sujet, c'est que nos équipes chargées de la coopération civilo-militaire sont formées au triage aussi. Donc, essentiellement, elles examinent tout ce qui arrive du Canada à Kaboul, et qui est envoyé par l'entremise de l'armée, et elles décident où l'on pourra faire le meilleur usage de ces choses, ou si certaines choses ne doivent pas être utilisées. Nous avons reçu des choses qui n'auraient pas dû être envoyées. Donc, on trie tout cela, on s'assure que c'est indiqué, que ce soit pour certains groupes d'âge ou pour répondre au besoin d'une installation, ou si certaines choses ne sont pas indiquées, elles ne sont pas distribuées. Chose certaine, ces équipes avaient les bras pleins à Kaboul.
Il faut probablement en faire plus pour acheminer ces choses du Canada vers un théâtre comme celui de Kaboul parce que les stocks sont considérables. Le problème, c'est de les envoyer là-bas et de les distribuer.
M. John O'Reilly: Devrait-on donc augmenter l'effort de l'ACDI, ou recommandez-vous autre chose? L'ACDI est-elle présente là-bas?
Mgén Andrew B. Leslie: Oui, monsieur, absolument.
Le président: Nous entrons là dans une discussion qui constituera peut-être un élément très important de l'examen de notre politique de défense. Je ne crois pas que nos témoins soient en mesure de nous parler beaucoup de l'ACDI.
Si vous voulez aller plus loin...
Mgén Andrew B. Leslie: Eh bien, oui, monsieur, l'ACDI y est. L'argent de vos impôts travaille beaucoup là-bas—il s'agit de 250 millions de dollars sur une période de deux ans. L'ACDI assure le gros des très lourds travaux de reconstruction sociale, de reconstruction des infrastructures. Chose certaine, dans le cadre de cette mission, beaucoup plus que par le passé, il y a une grande coopération sur le terrain entre les représentants de l'ACDI, les équipes COCIM, l'armée, le corps diplomatique et le triumvirat chargé de l'aide—l'approche 3-D, ça marche.
Le président: Bien. Merci, monsieur O'Reilly.
Je veux rester dans le même sujet en ce qui concerne nos troupes sur le terrain. J'imagine que nos soldats creusent des puits artésiens, qu'ils aident les gens à rebâtir leurs maisons, ce genre de choses. Comment est-ce coordonné? Quel pourcentage de leur temps consacrent-ils à ce travail? Y a-t-il une rotation? Y a-t-il des soldats qui sont exclusivement assignés à cette tâche? Quel pourcentage du temps d'un soldat, ou d'une unité, est consacré à ce type de travail, comparativement au temps consacré à la patrouille? Comment décide-t-on de ces choses?
Je veux seulement savoir si les efforts à cet égard donnent des résultats.
Mgén Andrew B. Leslie: Monsieur, les jeunes hommes et femmes qui assurent la patrouille, qui vont dans les montagnes ou sur les routes, font ce travail-là essentiellement parce que c'est extrêmement stressant, et cela exige une concentration et un entraînement incroyables.
Ils font autres choses à l'occasion. Par exemple, le bataillon a entrepris divers projets pour commémorer la présence du sergent Robert Short, du caporal Beerenfenger et du caporal Murphy. C'est un travail que le bataillon a accompli avec plaisir.
Les personnes qui assurent la coopération civilo-militaire et le travail de reconstruction sont maintenant des spécialistes. On ne dit plus à nos gens : « Vous, là-bas, allez aider ces gens à bâtir une école. » C'est beaucoup mieux planifié que par le passé, ce qui explique en partie pourquoi la structure de 2 000 personnes est aussi robuste qu'elle l'est.
Si vous voulez plus de détails, vous pouvez sûrement vous adressez au colonel Hodgson. Si vous voulez des détails sur la perspective canadienne, par exemple, sur un projet typique ou quelque chose de ce genre, Mark peut répondre.
» (1720)
Le président: Je vous remercie.
J'aimerais qu'on m'en dise un peu plus sur l'eau potable, par exemple. Je sais que dans ma ville de London, en Ontario, il existe une entreprise de pointe qui s'appelle Trojan Technologies. Elle se spécialise en purification de l'eau. J'y étais récemment pour annoncer un projet. Je lui ai demandé s'il lui arrivait de travailler pour les Forces canadiennes. Elle m'a répondu qu'elle avait fait du travail de ce côté et qu'elle en ferait peut-être plus.
Chose certaine, l'un des premiers problèmes que vous devez régler avec les gens, c'est leur assurer une source d'eau potable. J'aimerais savoir ce que vous avez à ajouter à ce sujet, monsieur.
Col Mark Hodgson: Oui, monsieur le président, je peux vous résumer brièvement certaines choses que font les diverses équipes chargées de la coopération civilo-miliaire.
On va droit à l'essentiel. Dans la plupart des villages situés autour du camp Julien, lorsqu'on parle aux aînés, ils nous disent que c'est l'essentiel qu'ils veulent, et pas plus. Il peut s'agir de l'eau, ou peut-être de l'électricité ou d'un générateur, mais c'est quelque chose de cette nature. Ce peut être aussi la structure pour une école. Ils ont des attentes réalistes en ce qui concerne notre aide.
L'essentiel, dans tous ces projets, c'est que nous ne pouvons pas leur dire de quoi ils ont besoin. Nous devons aller dans les villages et parler aux anciens pour savoir ce qu'ils jugent être essentiel. Ils s'associent alors au projet et ils nous aident. Nous voulons utiliser leur main-d'oeuvre et leurs ressources pour faire le travail étant donné que c'est toute la communauté ou le village qui en profite.
Le forage de puits artésiens était un bon exemple des projets que nous avons entrepris. Vous savez tous que la sécheresse sévit en Afghanistan depuis presque dix ans. La situation est meilleure maintenant, mais le pays en souffre encore beaucoup. Dans les villages, la plupart des puits étaient peu profonds. On ne creuse pas plus bas que cinq ou dix mètres. Tous les puits sont asséchés, ou la plupart d'entre eux. Il faut aller plus bas que 30 mètres, et il est plus ou moins impossible de faire cela avec une pelle, il faut donc des machines pour creuser. Un puits comme celui-là coûte environ 10 000 $US. Aucun village ne dispose de tels moyens, mais c'est le genre de choses que nous pouvons faire. Je pense qu'on a creusé près de 30 puits artésiens dans les six mois que nous avons été là.
Nous aidons aussi les cliniques. Nous n'assurons pas l'expertise médicale mais nous fournissons les matériaux ou le matériel médical ou nous aidons les gens à rééquiper les écoles. Il peut s'agir d'une infrastructure dans le village, d'une route qu'on restaure ou d'un pont qu'on rétablit.
Nous préférons entreprendre de petits projets parce qu'une rotation ne dure que six mois. L'idéal, c'est que nos projets respectent notre enveloppe économique, et je parle ici de notre budget et du délai que nous avons. Les équipes COCIM sont formées à cela. Elles travaillent à une petite échelle, par opposition aux grands travaux—domaine où l'ACDI est très compétente, et cela devrait rester son domaine—ou d'autres projets d'aide.
À titre d'exemple, les équipes COCIM ont réalisé en six mois des projets totalisant 700 000 $. Il s'agissait dans tous les cas de petits projets comme le forage de puits artésiens, le rééquipement d'une clinique de santé ou d'une école, la construction d'une route, d'un pont, des choses de ce genre, mais qui faisaient un grand bien aux habitants du pays. Nous avons aussi obtenu le soutien de ces gens pour notre mission. Ce qui voulait dire que s'il y avait des éléments hostiles dans la région, les gens étaient plus enclin à nous le dire que si nous n'avions pas réalisé ces projets pour eux.
Le président: Merci beaucoup. Je suis heureux de votre réponse.
Mes collègues ont-ils d'autres questions?
Personne n'a de questions, donc au nom du comité et de tous les députés de la Chambre des communes, je tiens une fois de plus à vous remercier d'avoir été des nôtres aujourd'hui, de nous avoir fait part de votre expérience en Afghanistan. Nous tenons à vous remercier pour votre action là-bas, vous ainsi que tous les hommes et toutes les femmes qui ont servi là-bas, qui y sont toujours et qui y seront un jour. Vous nous avez fait passer un beau moment aujourd'hui.
La séance est levée.