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INDU Rapport du Comité

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CHAPITRE 3
DÉFIS PROPRES À CERTAINES
INDUSTRIES MANUFACTURIÈRES

Aérospatiale

L'industrie aérospatiale canadienne compte plus de 500 entreprises dont les revenus annuels ont atteint 21,7 milliards de dollars en 2004, ce qui place le Canada au 4e rang derrière les États-Unis, le Royaume-Uni et la France. L'industrie canadienne dépend fortement des acheteurs étrangers pour ses produits. En effet, 84 % de ses revenus proviennent des ventes à l'exportation et 75 % des exportations étaient destinées aux États-Unis.

L'industrie aérospatiale mondiale n'évolue pas dans un marché axé sur le laissez-faire. L'intervention de l'État dans le secteur se justifie, premièrement, pour des questions de sécurité nationale et, deuxièmement, en raison des caractéristiques de l'industrie, comme son haut degré de R‑D et les risques afférents, qui sont élevés, et l'importance de la période qui doit s'écouler avant d'en tirer profit. Les gouvernements du monde entier ont recours à divers instruments de politique économique pour soutenir les entreprises aérospatiales actives sur leur territoire, notamment le financement des programmes de défense et des achats, le financement de l'infrastructure de recherche et développement de même que les garanties de prêts et le financement bancaire pour le développement et la production d'appareils. Au Canada, l'industrie aérospatiale profite des initiatives et des programmes fédéraux suivants : 1) Programme de crédits d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental (RS‑DE); 2) Partenariat technologique Canada; 3) Recherche et développement pour la défense Canada; et 4) Institut de recherche aérospatiale du Conseil national de recherche, Centre des technologies de fabrication de pointe en aérospatiale et Programme d'aide à la recherche industrielle (PARI).

Étant donné que la prospérité et la survie à long terme de l'industrie aérospatiale dépendent de l'innovation, dont l'une des pierres angulaires est la R‑D, activité qui représentait de 6 à 15 % des ventes au cours des 10 dernières années, l'industrie juge essentiel que le gouvernement du Canada repense et remplace le programme Partenariat technologique Canada pour rétablir l'équilibre avec les concurrents étrangers. Elle accueillera aussi favorablement toute amélioration aux mesures fiscales en matière de RS‑DE visant à favoriser la R‑D, surtout pour les PME.

Aliments et produits de consommation

La fabrication d'aliments est le deuxième sous-secteur manufacturier au Canada, avec des livraisons s'élevant à 65,8 milliards de dollars en 2005 (après le matériel de transport, dont les livraisons se chiffraient à 123,1 milliards de dollars). La valeur des livraisons de la fabrication d'aliments en 2005 était inférieure de 3,6 % à celle de 2004 (68,2 milliards de dollars); il s'agissait du niveau le plus bas depuis 2002[17]. En 2005, les entreprises canadiennes ont exporté pour 17,9 milliards de dollars de produits alimentaires transformés. Les exportations canadiennes d'aliments constituent environ 29 % de la production totale, contre 18 % il y a 10 ans. En fait, le Canada, qui était un importateur net de produits alimentaires transformés, est devenu un exportateur net à ce chapitre durant cette période[18]. En 2005, la fabrication de produits alimentaires employait 243 950 personnes, en baisse de 2,8 % par rapport aux 250 762 personnes employées dans le sous-secteur en 2004, et le nombre le plus faible depuis 2000.

La transformation de la viande a constamment été la plus importante industrie de transformation des aliments au Canada ; en 2003, les livraisons de viande transformée se sont chiffrées à 18,6 milliards de dollars, soit 2,2 % de moins que le sommet de 19 milliards enregistré en 2001. La transformation de produits laitiers est la deuxième industrie de fabrication d'aliments en importance au Canada; elle a affiché des ventes sans précédent de 10,4 milliards de dollars en 2003, suivie de la mouture de céréales et de graines oléagineuses et de la mise en conserve de fruits et de légumes. Les autres produits alimentaires transformés sont les poissons et les fruits de mer, la volaille et la boulangerie et fabrication de tortillas.

Comme le secteur de la transformation des aliments est fortement axé sur l'exportation, l'appréciation du dollar canadien lui fait du tort. Il doit aussi composer avec la chute des prix entraînée par les excédents de stocks, l'augmentation de la concurrence des produits importés et l'anémie de la croissance de la demande intérieure[19]. Selon cette industrie[20], la plus importante barrière à l'innovation et à la croissance tient au système de réglementation désuet et peu pratique du Canada. Il faudrait d'après elle que l'on réduise les disparités sur le plan de la réglementation entre partenaires commerciaux et que l'on élimine les retards coûteux pour que le Canada conserve un secteur manufacturier économiquement viable. Pour ce qui est des questions de réglementation propres à l'industrie, celle‑ci note l'absence de politique en matière d'enrichissement alimentaire, la durée du processus d'approbation des additifs alimentaires et des nouveaux aliments et l'absence de cadre d'approbation réglementaire pour toute allégation relative aux effets sur la santé.

Automobile

Le Canada a attiré un certain nombre de constructeurs automobiles étrangers (c.-à‑d. DaimlerChrysler, Ford, General Motors, Honda, Suzuki et Toyota) qui ont installé leurs usines de production surtout dans le sud de l'Ontario, où ils produisent pour le marché nord-américain tout en important un nombre considérable de véhicules pour répondre aux besoins variés du marché. La présence de ces usines d'assemblage est associée à un grand nombre de fabricants indépendants de pièces distribués dans tout le pays. Grâce aux salaires relativement plus bas, en moyenne, qu'aux États-Unis, aux services publics (comme les services de santé) et à une aide financière du gouvernement fédéral et de l'Ontario de 434 millions et de 513,8 millions de dollars respectivement, au cours des deux dernières années seulement, les dépenses en capital des usines d'assemblage canadiennes ont été importantes, atteignant en moyenne plus de 3 milliards de dollars par an au cours des 12 dernières années. Grâce à ces investissements, on estime que les usines d'assemblage canadiennes sont en moyenne plus productives de 4,6 % que les usines américaines et de 38,9 % que celles du Mexique. En outre, en 2005, la production canadienne représentait approximativement 17 % de la production nord-américaine et le commerce de véhicules entre le Canada et les États-Unis était évalué à 143,8 milliards de dollars. La consommation canadienne a représenté 8 % environ de la consommation totale en Amérique du Nord, ce qui a abouti à un excédent commercial de 23,5 milliards de dollars pour le Canada en 2005.

Comme beaucoup de pays subventionnent aussi les investissements dans leur secteur automobile, ce qui entraîne une capacité de production excédentaire mondiale et nord-américaine évaluée à 11,5 et 2,5 millions d'unités respectivement, et que le dollar canadien s'est apprécié de 43,7 % par rapport au dollar américain en quatre ans seulement, l'avantage canadien sur le plan du coût de la main-d'oeuvre s'évanouit rapidement. L'appréciation de notre monnaie a eu des répercussions particulièrement fâcheuses pour l'approvisionnement des usines d'assemblage, et l'offre de travailleurs qualifiés possédant des compétences tant générales que techniques fait de plus en plus problème. Ces facteurs menacent la rentabilité de l'industrie, les augmentations de salaire et l'excédent commercial du Canada. Ils ont aussi joué un rôle dans les fermetures d'usines et les restructurations des capacités de production au cours des quelques dernières années, ainsi que dans les expansions prévues pour les deux prochaines années. Par exemple, trois usines de montage de véhicules légers (General Motors du Canada, Ste‑Thérèse (Québec), 1 092 emplois; DaimlerChrysler, Windsor (Ontario), 1 128 emplois; et Ford, Oakville (Ontario), 1 388 emplois) et une usine de véhicules moyens/lourds (Mercedes (Western Star Truck), Kelowna (C.-B.), 675 emplois) ont fermé leurs portes entre 2001 et 2005 et aucune nouvelle usine n'a vu le jour. Ces fermetures d'usines ont réduit de 553 000 unités la capacité de production du Canada; toutefois, compte tenu d'augmentations de capacité totalisant 195 000 unités réalisées ailleurs dans des usines existantes, la capacité de production canadienne n'a reculé que de 358 000 unités au cours des cinq dernières années. Honda, Toyota et General Motors ont également annoncé de nouvelles ouvertures et expansions d'usines pour les deux prochaines années. Honda investira 154 millions de dollars dans une nouvelle usine de fabrication de moteurs qui commencera sa production en 2007. General Motors investira 750 millions de dollars de plus dans la production de la nouvelle Camaro dès 2008. Enfin, Toyota investit 1,5 milliard de dollars dans une nouvelle usine d'assemblage de la RAV4 de Woostock (Ontario), dont la production commencera en 2008.

L'industrie laisse entendre qu'elle serait encore plus menacée par un accord de libre-échange Canada-Corée du Sud si les questions de l'accès au marché sud-coréen et des mesures telles que les barrières non tarifaires sud-coréennes ne sont pas réglées. Elle croit également qu'une réduction du taux réel marginal d'imposition sur le capital, pour le rendre concurrentiel à celui des États-Unis, favoriserait l'investissement.

Construction navale

Au Canada, il y a 203 entreprises de construction navale[21], dont une trentaine de chantiers navals situés essentiellement dans chacune des provinces atlantiques, au Québec, en Ontario et en Colombie‑Britannique. Par chantier naval, on entend les installations fixes comprenant une cale sèche et du matériel d'usine utilisés pour construire des navires ou des embarcations autres que celles servant à des fins personnelles ou récréatives. Le Canada construit des navires depuis bien avant la Confédération, mais ces dernières années cette industrie a souffert du recul de la demande, ce qui a abouti à un déclin de la production. En 2003, dernière année pour laquelle des données sont disponibles, les expéditions se sont chiffrées à 535,5 millions de dollars (contre 969,5 millions en 1994, soit un recul annuel moyen de 6,4 %), sur lesquels les exportations ont représenté 83 millions de dollars. Le Canada enregistre un déficit commercial persistant au chapitre de la construction navale, qui s'est élevé à 304,5 millions de dollars en 2005. Pendant la même période, l'emploi a également chuté, puisque ce secteur employait 7 361 personnes en 1994 contre 3 797 en 2003, ce qui représente un repli annuel moyen de 7,1 %.

Les chantiers navals du Canada ont un marché intérieur limité qui ne peut les soutenir. Contrairement aux États‑Unis, au Canada le gouvernement fédéral ne fait pas construire suffisamment de navires pour assurer une demande constante. Le marché commercial intérieur est relativement stable, et, pour croître, l'industrie doit donc capturer des parts des marchés étrangers. Or, les chantiers navals canadiens estiment extrêmement difficile d'être concurrentiels à l'échelle internationale, car les autres pays ayant des chantiers navals (comme la Norvège et la Corée du Sud) subventionnent leur secteur. Les autres facteurs externes qui nuisent à la compétitivité du Canada à ce chapitre sont notamment la faiblesse de la rémunération à l'étranger, les règlements environnementaux moins stricts et l'amélioration des techniques de fabrication dans plusieurs pays — facteurs que la récente appréciation de notre monnaie a exacerbés.

Les autres défis qui se profilent à l'horizon immédiat sont la conclusion par le Canada de deux ententes de libre‑échange, l'une avec l'Association européenne de libre‑échange (AELE), qui inclut l'Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse, et l'autre avec la Corée du Sud. La Norvège est un concurrent formidable (subventions, notamment), et la Corée du Sud (bas niveau des salaires et subventions, notamment) pourrait aussi devenir un concurrent direct si elle concentre son expertise et ses capacités sur les petits navires plutôt que sur les gros. Si l'on élimine le tarif de 25 % sur les importations de navires au Canada provenant de ces deux pays, sans s'occuper de la question des subventions, les chantiers navals canadiens seraient durement concurrencés ici même.

Énergie

En 2005, la part des industries énergétiques canadiennes au PIB (en dollars de 1997) se chiffrait à 64 milliards de dollars, et, en termes nominaux, ces industries ont exporté pour 87 milliards de dollars et importé pour 34 milliards de dollars. Elles emploient 180 000 personnes directement et plus de 500 000 personnes indirectement selon les estimations[22].

La demande énergétique au Canada provient essentiellement du secteur industriel (39 %). Trente pour cent provient des industries énergétiques (industrie pétrolière et gazière en amont) et 27 % de l'industrie forestière et des pâtes et papier. La demande énergétique a progressé en moyenne par année de 1,4 % entre 1990 et 2003. Les gains sur le plan de l'efficience énergétique et les changements structurels de l'économie (l'augmentation relative de l'activité des industries moins intensives en énergie) ont en partie contrebalancé la hausse de la demande d'énergie. Les principales sources d'énergie sont le gaz naturel (30 %), l'électricité (26 %), les carburants de raffinerie, le coke et le gaz de distillation (23 %), les déchets de bois et la lessive de cuisson (14 %), et le charbon, le gaz de cokerie, le gaz de pétrole liquéfié et les liquides extraits du gaz naturel de raffinerie, le combustible résiduaire et la vapeur (8 %). De tous les secteurs énergétiques (gaz naturel, électricité et produits du pétrole), c'est le secteur pétrolier qui est le plus déréglementé, le plus compétitif et le plus mondialisé sur le plan des marchés. Le gaz naturel est un marché continental très déréglementé. L'électricité est le secteur le moins déréglementé et le plus régional dans sa structure.

Pour l'Energy Dialogue Group, le système énergétique canadien doit faire face aux contraintes suivantes : 1) nécessité d'une nouvelle capacité d'offre et de livraison; 2) nécessité de s'adapter à la hausse des prix et 3) nécessité de trouver des solutions viables aux défis environnementaux. De plus, beaucoup d'industries énergétiques se plaignent de la complexité des processus réglementaires relevant de divers ordres pour les nouveaux investissements en infrastructure énergétique. Elles suggèrent d'adopter un nouveau cadre énergétique national qui reconnaisse les divers ordres de compétence, mais qui insiste sur une collaboration intergouvernementale, ce qui permettrait de régler les difficultés liées aux limites de compétence (p. ex., règlements).

Matériel, appareils et composants électriques

Ce sous‑secteur est composé des fabricants de matériel d'éclairage électrique, d'appareils ménagers, de matériel électrique et d'autres types de matériel et de composants électriques. En 2005, la plupart de ses 1 964 établissements étaient situés en Ontario (47,3 %) et au Québec (25,6 %). Ses expéditions s'élevaient à 9,6 milliards de dollars en 2005, contre 11,6 milliards de dollars en 2001[23].

Pour ce sous-secteur, les obstacles à la compétitivité sont la vigueur du dollar canadien, la hausse des prix de l'énergie et des matières premières et l'émergence des marchés d'Asie et d'Amérique latine. Ces industries notent que le gouvernement chinois a imposé des droits à l'exportation qui se situent entre 20 et 40 % sur les métaux et instauré des crédits d'impôt à l'exportation variant entre 13 et 17 % sur les produits finis, de telle sorte que les fabricants canadiens et américains ne pourraient en bénéficier qu'en implantant leurs usines en Chine. Les fabricants de gros électroménagers soulignent que les importateurs ont un avantage de 11,4 %, étant donné que ces importations ne sont assujetties qu'à la TPS, alors que les fabricants canadiens doivent payer en plus toute une gamme de taxes sur le revenu, d'impôts fonciers et autres. Ils estiment qu'il faut remanier entièrement le mode de perception de ces taxes pour régler le problème et proposent une réduction de l'impôt des sociétés, de l'impôt foncier et des charges sociales et une hausse des impôts à la consommation afin que le fardeau fiscal vise davantage les produits importés.

Matériel ferroviaire

La fabrication de matériel ferroviaire roulant fait partie du sous‑secteur de la fabrication du matériel de transport (plus important sous‑secteur du secteur manufacturier canadien). Les fabricants de matériel ferroviaire roulant conçoivent et fabriquent l'équipement suivant : régaleuse à ballast (équipement de voie ferrée), wagons automoteurs, locomotives diesel électriques, matériel de voie ferrée (poseur de rails, régaleuse à ballaste), locomotives de mines et pièces, wagons de train de banlieue rapide, pose de voie ferrée et dameuse, wagons de métro et trolleybus.

La fabrication de matériel ferroviaire est très fortement spécialisée et axée sur les exportations, puisque plus de 70 % des expéditions de locomotives et d'équipement de transport urbain sont destinées à l'étranger, notamment aux États‑Unis. La quasi‑totalité des systèmes ferroviaires et de transport urbain canadiens et des véhicules connexes sont fournis par des entreprises canadiennes, tandis que les grands systèmes et composants, comme les moteurs ou les ordinateurs, sont importés des États-Unis. Les expéditions de produits de cette industrie sont passées de 1,9 milliard de dollars en 1994 à 2,0 milliards de dollars en 2003, en valeur, ce qui représente un taux de croissance annuel composé moyen de 0,6 % par an. Entre 2002 et 2003, les livraisons de produits manufacturiers ont reculé de 42 %. Les fournisseurs de matériel ferroviaire emploient environ 60 000 personnes au Canada.

Pour cette industrie, les obstacles à la compétitivité tiennent à la concurrence des fournisseurs américains. Au Canada, le taux de la déduction pour amortissement est de 15 % pour le matériel roulant et de 10 % pour les voies ferrées. Il faut donc aux chemins de fer canadiens plus de 20 ans pour amortir complètement le matériel roulant suivant la méthode de l'amortissement dégressif, contre 7 aux États‑Unis. L'industrie estime que cette disparité freine les dépenses en immobilisations qui lui permettraient de se moderniser et de croître par rapport à son homologue américaine. Elle est également d'avis que cette disparité entravera ses efforts à l'égard des objectifs du gouvernement en matière de changement climatique et de qualité de l'air.

Matières plastiques

La croissance rapide de l'industrie canadienne des matières plastiques est due à l'augmentation spectaculaire de la capacité du pays à produire de la résine synthétique dès la fin des années 1970, en réaction à l'embargo pétrolier de l'OPEP et à la crise de l'énergie. À cette époque, les droits imposés par les Américains sur l'importation de résine étaient généralement de 10 à 12 %, alors qu'ils étaient de 3 à 5 % pour les produits du plastique. Cet écart de droits a entraîné une production à intégration verticale de résine et de plastique dans l'Ouest du Canada. Aujourd'hui, le Canada est fier de posséder plus de 2 000 entreprises de matières plastiques, principalement de petites et moyennes entreprises (PME) appartenant à des Canadiens, qui ont réalisé des ventes de plus de 20 milliards de dollars en 2005, dont 50 % à l'exportation (93 % à destination des États-Unis).

L'industrie canadienne doit relever plusieurs défis en matière de concurrence, notamment : 1) la petite taille de bon nombre de ses entreprises, 2) la nécessité d'investir autant en R‑D que ses concurrents américains, 3) un approvisionnement plus sûr de sa charge d'alimentation en gaz naturel canadien et 4) l'augmentation des prix du gaz naturel. Comme le coût de la résine représente généralement de 30 à 50 % de la valeur finale d'un produit du plastique et qu'un dollar de gaz naturel à la source peut donner un produit du plastique de 15 $ — d'où un multiplicateur de la valeur ajoutée de 15 — l'élaboration d'un cadre énergétique fédéral qui assurerait une charge d'alimentation suffisante pour la fabrication (plutôt que d'exporter autant de gaz naturel à l'état brut) et la stabilisation des prix de l'énergie sont perçues par l'industrie comme une façon d'accroître sa compétitivité. L'industrie a aussi indiqué que la déduction pour amortissement étalée sur deux ans tout au plus et la simplification du système canadien de crédits d'impôt pour la R‑D sont les priorités qui lui permettraient de relever les défis en matière d'innovation.

Outils, matrices et moules

Les industries de la fabrication d'outils, de matrices et de moules englobent deux sous‑secteurs : la fabrication de moules industriels et la fabrication d'autres machines à travailler les métaux[24]. Elles regroupent plus de 800 entreprises — surtout de petites entreprises indépendantes — situées dans tout le pays et qui emploient plus de 29 000 personnes. Elles ont expédié pour 4,3 milliards de dollars de produits en 2003 (dernière année pour laquelle on dispose de données). En 2003, il y avait au Canada 637 entreprises de fabrication de moules, dont au moins 1 se situait dans chacune des provinces, mais aucune dans les trois territoires; elles employaient 10 692 personnes, contre 9 360 en 1994. Les expéditions de moules se sont chiffrées à 1,47 milliard de dollars en 2004, ce qui représente une croissance moyenne de 5,7 % par an en 10 ans.

Ces industries misent sur les compétences en transformation de métaux de précision traditionnelles, tout en recourant à de nombreuses technologies de pointe et modernes, notamment la conception et la fabrication assistées par ordinateur (CAO/FAO). En règle générale, les fabricants d'outils, de matrices et de moules emploient moins de 100 personnes, mais ils ont tendance à être plus importants que leurs homologues américains et bénéficient donc des gains d'efficience que procure la spécialisation du travail (les employés des usines américaines doivent souvent jouer plusieurs rôles)[25]. Les huit plus gros fabricants de moules canadiens sont parmi les 20 plus importants fabricants de moules d'Amérique du Nord. Ils se concentrent dans le sud de l'Ontario. Ces industries canadiennes dispensent leurs services à un large éventail de secteurs industriels, et la spécialisation régionale dans certains produits et marchés est manifeste : 1) les entreprises du sud‑ouest de l'Ontario sont spécialisées dans les produits automobiles et les matériaux de construction; 2) les entreprises de Toronto sont spécialisées dans les produits automobiles, l'aérospatiale, l'électroménager, l'emballage, les produits de consommation et les matériaux de construction; 3) les entreprises de Montréal sont axées sur les véhicules récréatifs, l'aérospatiale et les matériaux de construction; 4) les entreprises de Winnipeg s'attachent aux produits de l'aérospatiale et 5) celles d'Edmonton et de Calgary aux produits du pétrole.

Dans cette industrie, les défis que le Canada doit relever sont essentiellement la montée rapide du dollar canadien, l'augmentation des coûts financiers et technologiques liés à la fourniture de services aux fabricants d'automobiles et la concurrence intense des pays où les salaires sont bas, surtout la Chine. Les fournisseurs des fabricants d'automobiles assument une portion plus importante des risques financiers et technologiques, car il peut falloir une année ou plus pour créer outillage et équipement, alors que le paiement (processus d'approbation des pièces) peut prendre jusqu'à 18 mois (tandis que, traditionnellement, les banques donnent aux PME un délai de 60 à 90 jours pour les comptes débiteurs et très peu d'appui pour le travail en cours). Enfin, les fabricants d'automobiles sont de plus en plus nombreux à implanter des usines à l'étranger, notamment en Chine — attirés par les incitatifs financiers — et les pièces qui y sont fabriquées sont de plus en plus souvent exportées aux États‑Unis et au Canada pour y être assemblées ou intégrées aux pièces standard pour former des modules sur mesure pour l'assemblage final.

Produits chimiques de base et de résine

La fabrication de produits chimiques de base et de résine fait partie du sous‑secteur de la fabrication de produits chimiques. En 2005, les expéditions de ces secteurs ont totalisé quelque 23 milliards de dollars, soit 5 % de plus qu'en 2004. Celles‑ci devraient augmenter de 12 % en 2006 pour s'élever à 25,7 milliards de dollars. En 2005, les exportations ont totalisé 17,4 milliards de dollars (en hausse de 17 % par rapport à 2004), sur lesquels celles à destination des États‑Unis ont représenté 13,4 milliards de dollars (ou 77 %). Ces industries ont employé 21 889 personnes en 2005, soit 1 % de plus qu'en 2004, mais 4,6 % de moins qu'en 2003[26].

Ces industries ont subi des pressions considérables en raison de la cherté de l'énergie et des matières premières et de la vigueur relative du dollar canadien. Les fabricants de produits chimiques s'inquiètent également de l'incidence sur leurs opérations des règlements en matière environnementale que pourrait adopter le gouvernement fédéral. En ce qui concerne l'énergie, le coût, l'offre et la fiabilité de l'électricité demeurent préoccupants pour la compétitivité et la sécurité des usines, surtout en Ontario. Les producteurs ont cité comme autres difficultés les transports ferroviaires dans l'Ouest du pays, le cadre de réglementation et les pénuries de main‑d'œuvre en Alberta.

Malgré tout, les usines ont continué de fonctionner à la limite de leur capacité ou presque en 2005 en raison de la hausse de la demande. Par suite du relèvement des prix des produits chimiques, les bénéfices d'exploitation ont été relativement élevés depuis 2004. Cette tenue reflète également les gains de productivité réalisés par ces industries ces dernières années; les niveaux de productivité des fabricants de produits chimiques canadiens dépassant ceux de leurs homologues américains.

Produits de la forêt

En 2005, l'industrie forestière canadienne a vendu quelque 250 produits, d'une valeur estimée à 84 milliards de dollars, à plus de 175 pays, créant un excédent commercial de 32 milliards de dollars. Le Canada est le premier producteur de papier journal au monde et le deuxième producteur de pâte de bois et de bois d'œuvre résineux.

Parce que l'industrie forestière est à la fois à fort coefficient d'énergie et de capital et à vocation exportatrice, la montée rapide des prix de l'énergie et du dollar canadien a représenté pour elle les plus grandes difficultés sur le plan de la compétitivité. Sa fragmentation exacerbe ces difficultés. Les deux plus importantes sociétés forestières canadiennes, Abitibi-Consolidated et Domtar Canada, se classent 21e et 23e dans leur catégorie au monde. D'importantes économies d'échelle découlant de nouveaux regroupements au sein de l'industrie pourraient permettre de réaliser des économies sur le plan du coût du capital, ce qui égaliserait les règles du jeu au profit d'une industrie canadienne confrontée à des rivaux étrangers beaucoup plus puissants qu'elle. L'industrie forestière estime que le gouvernement du Canada peut beaucoup contribuer à améliorer le climat d'investissement, surtout en prenant diverses mesures visant à réduire le taux marginal d'imposition effectif du capital. Elle estime également qu'une application plus souple de la Loi sur la concurrence permettrait de régler certains problèmes de compétitivité et qu'un accord de libre-échange Canada-Corée du Sud fournirait des avantages supplémentaires.

Produits informatiques et électroniques

Ce sous-secteur comprend les établissements dont l'activité principale est la fabrication d'ordinateurs, de matériel périphérique informatique, de matériel de communication et de produits électroniques similaires de même que des composants de ces produits. Ces établissements font appel à des procédés de production caractérisés par la conception et l'utilisation de circuits intégrés et par le recours à des technologies très spécialisées de miniaturisation. En 2005, les 3 681 établissements du sous‑secteur étaient essentiellement situés en Ontario (47,7 %) et au Québec (22,5 %). Leurs expéditions ont totalisé 18,6 milliards de dollars en 2005, contre 27,04 milliards de dollars en 2001, juste avant l'éclatement de la bulle des TIC[27].

Les membres du sous‑secteur estiment que la difficulté qu'ils ont à attirer une main‑d'œuvre spécialisée, la vigueur relative du dollar canadien et les retards dans le passage des produits à la frontière canado‑américaine sont des entraves à leur compétitivité. Pour résoudre certains de ces défis et d'autres difficultés résultant de l'effondrement des cyberentreprises, des entreprises ont éliminé autant que possible le gaspillage (surproduction, délais d'attente, transport, traitement, stocks, déplacement et résidus) et adopté un mélange de méthodes de production allégée et qualité Six Sigma (Lean Six) afin de détecter les lacunes dans leurs méthodes de travail.

Sidérurgie

Le Canada compte actuellement 10 producteurs d'acier, qui sont situés dans cinq provinces (l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, l'Ontario et le Québec). Sur les 15 usines situées au Canada, 4 sont des usines intégrées et 11, des mini‑aciéries. Aciers Algoma Inc., Dofasco Inc. et Stelco Inc. sont les plus grands producteurs, puisqu'ils fournissent près de 60 % de la production nationale. Ces sociétés exploitent de grandes usines intégrées, composées de hauts-fourneaux et de laminoirs. Pour leur part, les petites aciéries utilisent des fours électriques à arc, qui leur permettent d'axer leur production sur les plaques d'acier au carbone, les tôles, les barres et les tiges d'acier, de même que sur les produits d'acier spécialisé et d'acier inoxydable. Vingt autres usines fabriquent tuyaux, tubes, fil et produits dérivés. Les entreprises sidérurgiques sont concentrées en Ontario à proximité de la plupart de leurs clients. Toutes les usines d'assemblage d'automobiles sauf une sont implantées dans le sud de la province, de même que toutes les usines d'emboutissage, la plupart des fabricants d'appareils électroménagers ainsi que bon nombre de fabricants de produits en acier et de constructeurs de bâtiments métalliques. Les autres marchés sont régionaux ou d'un type particulier (cas de l'industrie pétrolière et gazière, dans l'Ouest canadien).

En 2005, la production d'acier au Canada a été évaluée à 15,5 millions de tonnes; les expéditions d'acier canadien ont totalisé 13,5 milliards de dollars et les exportations, 5,5 milliards. L'industrie emploie directement plus de 35 000 personnes, notamment des entrepreneurs, des employés à temps partiel et des étudiants[28].

L'industrie estime que sa compétitivité est entravée par plusieurs facteurs, notamment la présence de concurrents féroces et une expansion rapide des capacités, la montée des prix des intrants, le recul de la base manufacturière au Canada et dans les pays signataires de l'ALENA, le regroupement de l'industrie (concurrence à l'égard des investissements au Canada par rapport aux autres pays) et un besoin croissant d'innovation. Elle s'inquiète en particulier des distorsions du marché qui résultent des subventions et du dumping pratiqués par certains pays producteurs d'acier, dont la Chine.

Textile

Le textile est l'une des plus vieilles industries manufacturières du Canada. Établie il y a plus de 150 ans dans de petites collectivités urbaines qui offraient une main-d'œuvre stable et des rivières qui convenaient particulièrement à la production d'électricité et aux activités de teinture et de finition, l'industrie a fait ses débuts avec la fabrication de fils et de tissus à partir de fibres naturelles. Aujourd'hui, elle est structurée de façon très différente. L'industrie du textile s'est transformée, particulièrement au cours des 25 à 30 dernières années, grâce à d'importants et constants investissements de capitaux. Elle s'est modernisée et est de plus en plus capitalistique, elle utilise beaucoup la haute technologie et fournit des emplois à des milliers de Canadiens. En 2005, les entreprises textiles étaient concentrées principalement au Québec et en Ontario et utilisaient des fibres et des filaments naturels, artificiels et synthétiques, produisant et expédiant pour 6,2 milliards de dollars de textiles et de produits textiles, dont 3,0 milliards ou 48 % étaient exportés.

Le marché canadien des textiles semble avoir atteint un record de presque 11 milliards de dollars en 2000, reculant de plus de 20 % au cours des cinq dernières années. Ce tassement de la demande constitue plus qu'un simple ralentissement de l'économie — il s'agit de facteurs commerciaux. Il est vrai que l'Accord sur les textiles et les vêtements et l'appréciation rapide du dollar canadien ont intensifié les défis qui se posent à l'industrie sur le plan de la concurrence. Cette dernière est prête à relever ces défis, mais elle demande au gouvernement fédéral d'adopter des politiques industrielles et commerciales complémentaires dans le domaine de la stratégie du traitement des exportations et en matière de règles d'origine régissant l'entrée en franchise de droits de vêtements importés de pays les moins développés.

Vêtement

La production de vêtements en série au Canada a débuté au milieu du XIXe siècle dans des centres urbains où se trouvaient la main-d'œuvre semi-spécialisée nécessaire ainsi que les principaux marchés de consommation. Pendant longtemps, la production nationale a très bien répondu à la demande intérieure sur le plan des quantités, des qualités et des exigences de style. La deuxième moitié du XXe siècle, en revanche, a été marquée par un net essor du commerce du vêtement; ces vêtements provenaient surtout de pays en développement où les salaires sont bas et étaient destinés à des pays développés où les salaires sont élevés. Deux tentatives ont été faites pour corriger ces déséquilibres et iniquités causés par ce commerce croissant, et elles ont abouti à deux accords internationaux multilatéraux : l'Arrangement multifibres (AMF), qui permettait aux pays développés d'imposer des quotas sur les importations de textile et de vêtements en provenance de pays en développement, et l'Accord sur les textiles et les vêtements (ATV), par l'entremise duquel les quotas de l'AMF allaient être éliminés graduellement sur une période de 10 ans. En raison de ces deux accords, les années 1975, 1995 et 2005 ont marqué trois régimes distincts qui ont permis de libéraliser davantage les échanges. L'Accord de libre-échange canado-américain (ALE) a également joué un rôle constructif, puisque les exportations à destination des États-Unis se sont envolées et représentent désormais 40 % des expéditions de vêtements canadiens, se chiffrant à 5,6 milliards de dollars en 2005.

En soi, l'ATV a soulevé beaucoup de difficultés sur le plan de la compétitivité du vêtement canadien, en raison essentiellement des exportations de vêtements bon marché de Chine, d'Inde et du Bangladesh. Les entreprises canadiennes de vêtements se sont adaptées au nouveau contexte commercial en orientant leur production vers des marchés à créneaux, puisque la proximité géographique de ces marchés fournira un avantage concurrentiel, comme c'est le cas dans les segments de la mode éphémère. Cependant, l'appréciation de 43,7 % du dollar canadien par rapport à son homologue américain au cours des quatre dernières années a freiné l'application de ce type de stratégie, car les compagnies américaines de vêtements ont adopté la même tactique. On s'attend, si les tendances actuelles se maintiennent, à ce que l'industrie canadienne du vêtement se regroupe et se contracte encore plus, ce qui signifierait d'autres mises à pied. Pour compenser, l'industrie voudrait que le gouvernement agisse sur les plans des politiques tarifaires et de l'approvisionnement et continue de l'appuyer globalement.



[17] Données de Statistique Canada.

[18] Michael Burt, Canada's Food Industry: Industrial Outlook, hiver 2006, Conference Board du Canada.

[19] Ibid.

[20] Mémoire présenté par Produits alimentaires et de consommation du Canada au Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes, 17 octobre 2006.

[21] Selon Statistique Canada, l'industrie de la construction et de la réparation des navires s'entend des établissements œuvrant dans les domaines de la construction, la réfection, la transformation et la modification de tous les types d'embarcations et de navires d'un déplacement de cinq tonnes au moins. Lorsqu'il s'agit de bâtiments plus petits, on parle de construction d'embarcations.

[22] Données fournies par l'Energy Dialogue Group et Ressources naturelles Canada.

[23] Données de Statistique Canada.

[24] La fabrication de moules industriels compte des établissements qui produisent des moules d'extrusion, des moules pour la fonderie des métaux, des moules industriels et de métal (notamment les machines à mouler le plastique et le caoutchouc).

[25] U.S. International Trade Commission, Tools, Dies, and Industrial Molds: Competitive Conditions in the United States and Selected Foreign Markets, octobre 2002, p. 4-4.

[26] Renseignements et statistiques provenant des Fabricants de produits chimiques du Canada à l'adresse http://www.ccpa.ca/files/Library/Documents/Economic/Yrend2005_report_final.pdf.

[27] Données de Statistique Canada.

[28] Données fournies par l'Association canadienne des producteurs d'acier.