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LANG Rapport du Comité

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Chambre des communes
Ottawa, Canada
K1A 0A6

39e législature, 1re session

Le Comité permanent des langues officielles de la Chambre a l’honneur de présenter son

PREMIER RAPPORT

Conformément à l’article 108(3)(f) du Règlement, le Comité a étudié la question sur l’assujettissement de Gestion ACE Aviation Inc. à la Loi sur les Langues officielles suite à la restructuration d'Air Canada.

A. Contexte

Créée par le Parlement en 1937, Air Canada est demeurée une société d’État jusqu’à sa privatisation en 1988. Elle fut donc assujettie aux dispositions de la Loi sur les langues officielles (ci-après LLO) adoptée en 1969, ainsi qu’à sa version révisée de 1988.

C’est la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada (ci-après LPPCAC) qui a encadré la vente des actions d’Air Canada détenues par le gouvernement du Canada, et défini les nouvelles obligations du transporteur. Cette loi précise que le siège social de la société doit demeurer à Montréal, et l’article 10 stipule clairement que la Loi sur les langues officielles s’applique à Air Canada après sa privatisation.

Suite à son acquisition des transporteurs régionaux Air BC, Air Ontario et Air Nova à la fin des années 1990, Air Canada jouissait d’une situation quasi monopolistique qui a amené le gouvernement canadien à procéder à des modifications législatives. Au cours de ce processus, la Commissaire est intervenue à plusieurs reprises afin de demander au gouvernement de clarifier l’assujettissement des nouvelles filiales d’Air Canada à la LLO[1] Diverses modifications ont ainsi été apportées suite à l’adoption en juin 2000 du projet de loi C-26 qui a modifié la LPPCAC en énonçant les critères particuliers relatifs à l’application de la LLO à Air Canada.

Le projet de loi C-26 de 2000 a confirmé l’assujettissement d’Air Canada à la LLO dans son ensemble. L’article 10 de la LPPCAC exige désormais qu’Air Canada veille à ce que les filiales qu’elle contrôle soient en mesure de communiquer avec leurs clients et de leur offrir les services aériens et connexes dans l’une ou l’autre des langues officielles dans le cas où, offrant elle-même les services, elle serait tenue, au titre de la partie IV de la LLO, à une telle obligation. [2] Les filiales ne sont cependant pas assujetties aux dispositions de la Partie V de la Loi relatives à la langue de travail.

Un autre changement important est survenu lorsque, le 1er janvier 2001, Air Canada a officiellement conclu l’achat des Lignes aériennes Canadien International Limitée ainsi que des Lignes aériennes Canadien Régional Limitée. Cette fusion a créé une ambiguïté quant à savoir si la convention collective des employés des filiales d’Air Canada avait préséance sur l’assujettissement de ces filiales à la LLO. Le jugement de la Cour fédérale du Canada, rendu en décembre 2005, a confirmé la préséance de la LLO.

En 2002, le Comité mixte permanent des langues officielles a publié un rapport accablant sur le dossier des langues officielles à Air Canada. Le Comité y recommandait ce qui suit :

Le Comité recommande au ministre des Transports de commander un réexamen de l’article 10, dans le cadre de la révision législative prévue à la Loi sur la participation publique au capital d’Air Canada, afin que le libellé précise que la Société Air Canada et ses filiales doivent être assujetties à la Loi sur les langues officielles, dans son entièreté, au même titre qu’une institution fédérale. [3]

Le 1er avril 2003, Air Canada s’est placée sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et s’est engagée dans un processus de restructuration qui s’est terminé le 30 septembre 2004.

Un élément important de la restructuration d’Air Canada est sa nouvelle structure organisationnelle, qui a été mise en place le 1er octobre 2004. Le transporteur aérien Air Canada est devenu une filiale en propriété exclusive d’une société mère nouvellement créée, Gestion ACE Aviation Inc. Par ailleurs, plusieurs anciennes filiales et divisions internes d’Air Canada ont été converties en sociétés en commandite et relèvent dorénavant directement ou indirectement de Gestion ACE Aviation Inc. Cette restructuration a entraîné un vide juridique quant à la détermination des obligations des nouvelles entités envers la LLO.

À l’heure actuelle, les exigences sur le maintien du siège social d’Air Canada à Montréal et de ses centres de maintenance à Montréal, Winnipeg et Mississauga, ainsi que le maintien de ses obligations en vertu de la LPPCAC et de la LLO, continuent de s’appliquer à Air Canada. Cependant, aucune de ces lois ne s’applique aux activités confiées à des sociétés en commandite qui relèvent directement ou indirectement de Gestion ACE Aviation Inc. et qui sont désormais des filiales d’Air Canada, comme Jazz Air. Par ailleurs, Gestion ACE Aviation Inc., la société mère dont relèvent directement ou indirectement toutes les entités de la nouvelle structure d’Air Canada, n’est pas assujettie aux obligations en matière de langues officielles ni aux exigences relatives à l’emplacement du siège social.

Le 2 mai 2005, le ministre des Transports a émis un communiqué de presse manifestant son intention de déposer un projet de loi visant à :

« assurer que les obligations en matière de langues officielles continuent de s’appliquer à Air Canada ainsi qu’à ses anciennes filiales et divisions internes, et que certaines obligations en matière de langues officielles ainsi que l’exigence sur le maintien du siège social d’Air Canada à Montréal soient étendues à ACE Aviation Holdings, la nouvelle société de portefeuille qui contrôle Air Canada. L’exigence actuelle selon laquelle Air Canada doit exploiter des centres de maintenance à Montréal, Winnipeg et Mississauga continue de s’appliquer. » [4]

Cette intention s’est concrétisée par le dépôt du projet de loi C-47 qui est mort au feuilleton en novembre 2005. Les principaux éléments du projet étaient les suivants :

  • Obligation imposée à Gestion ACE Aviation Inc. de maintenir son siège social à Montréal;
  • Maintien de l’assujettissement d’Air Canada à toutes les parties de la Loi sur les langues officielles;
  • Assujettissement d’Air Canada Jazz à la Partie IV (communications et service au public) de la Loi sur les langues officielles, mais non aux parties V (langue de travail), VI (participation équitable des francophones et des anglophones) et VII (développement des communautés et dualité linguistique), conformément à une modification législative adoptée en 2000;
  • Obligations maintenues pour les anciennes divisions internes d’Air Canada qui ont été scindées et qui sont des entreprises régies par le gouvernement fédéral, c’est-à-dire Services techniques Air Canada, Air Canada Cargo, Services au sol Air Canada et Services en ligne Air Canada, malgré qu’une ambiguïté demeure du fait que ces entités ne sont pas expressément nommées dans le projet de loi;
  • Aéroplan n’aurait pas été assujettie aux mêmes dispositions que les anciennes divisions internes d’Air Canada, car l’entreprise ne relèverait pas de la compétence législative du Parlement;
  • En tant qu’entité distincte avant la restructuration, Vacances Air Canada n’aurait pas été assujettie à la Loi sur les langues officielles.

Selon la Commissaire aux langues officielles, certains éléments de ce projet de loi laissaient place à une interprétation qui aurait possiblement amoindri les obligations linguistiques d’Air Canada, de Gestion ACE Aviation Inc. et de leurs filiales. Suite à son témoignage devant le Comité permanent des Transports de la Chambre des communes le 22 novembre dernier, elle a proposé des amendements visant à nommer précisément les composantes de Gestion ACE Aviation Inc. qui sont assujetties à la Loi sur les langues officielles.

B. Recommandations du Comité

Suite à leur analyse des interventions répétées de la Commissaire aux langues officielles, du rapport de février 2002 du Comité mixte permanent des langues officielles, ainsi que des débats de la Chambre des communes lors du dépôt en deuxième lecture du projet de loi C-47 le 3 novembre 2005, les membres du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes ont été convaincus de la nécessité d’introduire un nouveau projet de loi. Celui-ci reprendrait les éléments essentiels du projet de loi C-47, en y ajoutant les amendements proposés par la Commissaire aux langues officielles.

Par conséquent, le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes recommande :

  1. Que le Ministre des Transports, de l'Infrastructure et des Collectivités réintroduise dans les plus brefs délais un nouveau projet de loi reprenant le contenu du défunt projet de loi C-47, en y ajoutant les amendements présentés par la Commissaire aux langues officielles lors de son témoignage devant le Comité permanent des Transports le 22 novembre 2005;
  2. Que le nouveau projet de loi précise qu'Air Canada continue d'être assujettie à l'ensemble des parties de la Loi sur les langues officielles;
  3. Que le nouveau projet de loi précise que les divisions d'Air Canada qui sont devenues des sociétés en commandite pendant ou après la restructuration (dont Services techniques Air Canada, AC Cargo, Services au sol Air Canada et Services en ligne Air Canada) sont soumises à toutes les parties de la Loi sur les langues officielles;
  4. Que le nouveau projet de loi précise que les sociétés qui étaient des filiales d'Air Canada avant la restructuration, dont Jazz Air, Vacances Air Canada et Aéroplan, sont soumises à la Partie IV (langue de service) de la Loi sur les langues officielles;
  5. Que l'examen législatif du nouveau projet de loi soit renvoyé au Comité permanent des langues officielles.
[1]
La commissaire est intervenue à l’automne 1999 devant le Comité permanent des transports de la Chambre des communes et devant le Comité mixte permanent des langues officielles.
[2]
« Les services connexes comprennent notamment : a) les services de billetterie et de réservation; b) les renseignements relatifs aux trajets et aux tarifs — notamment les avis et annonces — qu’elles publient ou font publier à l’intention de leurs clients; c) les services qu’elles offrent à leurs clients à l’aéroport, notamment le contrôle des passagers à l’embarquement et au débarquement, les annonces faites aux clients et les services au comptoir; et d) la procédure applicable à la réclamation des bagages ou du fret et les services à la clientèle. » Commissariat aux langues officielles, Rapport sur les droits linguistiques 1999-2000.
[3]
« Recommandation 10 » de Air Canada : les bonnes intentions ne suffisent pas, septième rapport du Comité mixte permanent des langues officielles, février 2002.
[4]
« Le gouvernement du Canada maintient la protection en matière de langues officielles au sein de la nouvelle structure d’Air Canada », communiqué de presse du 2 mai 2005.