Passer au contenu

RNNR Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

Rapport dissident — Parti conservateur du Canada
Les sables bitumineux : vers un développement durable

Contexte

Les députés conservateurs qui siègent au Comité des ressources naturelles ont été impressionnés par l’information présentée par les nombreux témoins qui ont comparu devant le Comité durant son étude des sables bitumineux.

Comme on pouvait s’y attendre, cette information nous a souvent donné à réfléchir, quand elle n’a pas suscité d’autres questions dans notre esprit. 

Comme on le dit au quatrième paragraphe du rapport, « les sables bitumineux de l’Alberta constituent indéniablement un avantage économique et stratégique considérable pour le pays. Nous commençons à peine à exploiter cette vaste ressource ».   Par ailleurs, Michael Raymont a fait valoir que, compte tenu de l’importance de la production et de la consommation d’énergie dans le monde et de l’infrastructure courante, les combustibles fossiles demeureront vraisemblablement la principale source d’énergie du monde dans l’avenir prévisible. 

Le Parti conservateur est tout à fait de cet avis. Le Canada possède un potentiel considérable qui pourrait bien le hisser un jour au rang des superpuissances énergétiques.  La mise en valeur responsable de cette ressource exigera une démarche tenant compte des trois volets de la question : l’énergie, l’environnement et l’économie.

Toute politique axée sur un seul de ces volets aura forcément des conséquences désastreuses pour les deux autres.  Ainsi, toute politique qui mènerait à l’arrêt, à toutes fins pratiques, de l’exploitation des sables bitumineux compromettrait notre avenir énergétique et ferait du tort à l’économie. 

Nous avons appris que la valeur du bitume et du pétrole brut synthétique produits durant la période 2000-2020 pourrait atteindre plus de 500 milliards de dollars.  Si le gros des retombées de l’exploitation des sables bitumineux sur le PIB concernera l’Alberta, l’Ontario, le Québec et les autres provinces et territoires aussi bénéficieront de cette activité.  En outre, la mise en valeur des sables bitumineux procurera aux gouvernements des revenus de l’ordre de 123 milliards de dollars entre 2000 et 2020, dont 51 milliards de dollars pour le gouvernement fédéral. 

Toute recommandation se doit donc de tenir compte du potentiel de cette ressource pour l’économie canadienne et de l’éventualité que les activités de mise en valeur s’étendent aussi à la Saskatchewan.  L’autre réalité, c’est que le gouvernement fédéral doit absolument collaborer avec les autorités provinciales pour assurer une mise en valeur responsable et durable de la ressource tout en respectant la compétence des provinces.

Le rapport du Comité, intitulé « Les sables bitumineux : vers un développement durable » contient 22 recommandations dont la plupart ont fait consensus et beaucoup même l’unanimité parmi les membres du Comité.

Malheureusement, sur deux points en particulier, les députés conservateurs membres du Comité estiment les recommandations du Comité des ressources naturelles irresponsables; ils ont donc voté contre ces recommandations.

Sujets de désaccord

Les deux principaux sujets de désaccord sont les suivants :

  • la déduction pour amortissement accéléré
  • Les mesures de protection de l’environnement qui fixent un plafond ferme aux émissions

1.      La Déduction pour amortissement accéléré (DPAA) 

Dans son rapport, le Comité recommande « que le gouvernement du Canada supprime la déduction pour amortissement accéléré dont bénéficient les entreprises d’exploitation des sables bitumineux pour égaliser les règles fiscales entre celles-ci et le reste du secteur du pétrole et du gaz ».

Trois arguments militent contre cette recommandation.

Premièrement, la majorité des membres du Comité, qui ont souscrit à la recommandation, semblent voir dans la DPAA une forme de subvention des promoteurs de projets de mise en valeur des sables bitumineux.  Or, celle-ci a pour effet simplement de différer le paiement de l’impôt et ne constitue en rien une subvention.  Elle a été accordée aux sociétés d’exploitation des sables bitumineux pour stimuler l’investissement et la mise en valeur. Au demeurant, en Alberta, la ressource est exploitée surtout par excavation, un peu comme on le fait dans l’exploitation des mines à ciel ouvert, ce qui justifie un traitement fiscal analogue à celui qui vise les activités minières comme l’extraction du charbon, par exemple.

Deuxièmement, les conditions de la DPAA applicable aux entreprises d’exploitation des sables bitumineux diffèrent de celles qui visent le secteur du pétrole et du gaz en général.  Elles sont plus limitatives, dans la mesure où :

·         la DPAA ne s’applique qu’aux nouveaux projets ou aux expansions représentant plus de 5 p. 100 des recettes totales;

·         la DPAA ne s’applique qu’aux biens concernés par le projet et non à tous les autres biens de la même catégorie comme dans le cas de la DPA habituelle;

·         les sociétés ne peuvent déduire leurs dépenses de mise en valeur qu’une fois l’installation opérationnelle, ce qui veut dire que certaines entreprises engagent des dépenses sur cinq ou six ans avant d’arriver au stade de la production;

·         avec l’augmentation des cours du pétrole, les dépenses en immobilisations sont déduites plus tôt, de sorte que les pouvoirs publics bénéficient plus tôt aussi de recettes fiscales plus élevées – en effet, l’impôt sur les bénéfices s’applique intégralement une fois les dépenses en immobilisations déduites.

Troisièmement, abstraction faite d’informations anecdotiques, rien ne prouve que la DPAA soit vraiment avantageuse pour les entreprises.  En effet, l’analyse des avantages relatifs de la DPA et de la DPAA est complexe et l’on manque de données pour la faire, de sorte qu’il est bien difficile, en tout cas pour l’instant, d’apprécier avec assurance les répercussions d’une modification fiscale sur la mise en valeur des sables bitumineux et sur les revenus du gouvernement fédéral.

Compte tenu de ces facteurs, les députés conservateurs membres du Comité estiment que la recommandation du Comité d’éliminer la DPAA ne s’appuie pas sur des faits suffisants et est donc irresponsable.

Recommandation : En conséquence, les députés conservateurs membres du Comité recommandent plutôt que le Comité des finances et le ministère des Finances effectuent un examen de l’application de la DPAA à la mise en valeur des sables bitumineux de manière à déterminer quelles seraient les répercussions d’une modification des règles fiscales d’une part, sur les entreprises qui envisagent des activités de mise en valeur des sables bitumineux, notamment au niveau des décisions en matière d’investissement dans le contexte des prix courants du pétrole, et, d’autre part, sur les recettes publiques.      

2.      Les mesures de protection de l’environnement qui fixent un plafond ferme aux émissions

Dans les recommandations 14, 15 et 16, le Comité souscrit à l’objectif du Pembina Institute, à savoir rendre l’exploitation des sables bitumineux neutre en carbone d’ici 2020, permettre les échanges de crédits d’émissions et respecter les obligations du Canada aux termes du Protocole de Kyoto par l’imposition de plafonds fermes des émissions pour 2008 à 2012, 2020 et 2050 et ce, en fonction de niveaux absolus et non de « l’intensité » des émissions. 

Là encore, les députés conservateurs membres du Comité estiment que ces recommandations sont irresponsables compte tenu de la situation du Canada, qui non seulement n’a pas réussi à réduire ses émissions de gaz à effet de serre durant le mandat du précédent gouvernement libéral, mais les a en fait vu augmenter de 37 p. 100.

Pour leur part, les députés conservateurs souscrivent à une approche responsable de la mise en valeur des sables bitumineux qui respecte nos besoins sur le plan énergétique et sur celui de la protection de l’environnement sans pour autant handicaper l’économie par des politiques mal pensées.

Comme on l’indique dans le rapport de la commissaire à l’environnement de 2006, le gouvernement libéral précédent a consacré plus de 6 milliards de dollars à des programmes sur le changement climatique sans se soucier beaucoup de mesurer les résultats de ces dépenses, ce qui explique un peu pourquoi le Canada se retrouve dans  la situation que l’on constate. Les recommandations du Comité sont de la frime et visent seulement à faire porter à un bouc émissaire la responsabilité des lacunes des libéraux au chapitre de l’environnement.

Plusieurs arguments militent contre les recommandations précitées du Comité des ressources naturelles :

Premièrement, le Pembina Institute chiffre le coût de l’exploitation neutre en carbone des sables bitumineux à une fourchette allant de 1,76 à 13,54 $ le baril. Comme le Comité n’a entendu que le Pembina Institute à ce sujet, c’est la seule estimation dont il dispose si bien que nous n’avons aucun point de comparaison pour formuler une recommandation éclairée sur une question aux conséquences aussi importantes.  Nous souscrivons bien sûr au principe de la séquestration du carbone et aux autres nouvelles technologies de lutte contre les gaz à effet de serre, et le gouvernement peut effectivement aider les entreprises à devenir neutres en carbone, mais nous estimons qu’il est irresponsable pour un comité parlementaire d’adopter telle quelle la recommandation d’un groupe d’intérêt sans avoir en mains toute l’information voulue sur les coûts et le calendrier d’application optimal d’une telle mesure.

Deuxièmement, en formulant cette recommandation, le Comité fait totalement abstraction de l’autre grand déterminant de la santé humaine, à savoir les émissions qui causent le smog et nuisent à la qualité de l’air.  La nouvelle Loi canadienne sur la qualité de l’air proposée par le gouvernement vise à la fois les émissions de gaz à effet de serre et les émissions sources de smog qui nuisent à la santé.  En tant que parlementaires responsables, nous devons voir à l’adoption de politiques portant sur les grands enjeux et non nous concentrer étroitement sur une question en particulier au détriment des autres.

Troisièmement, les députés conservateurs membres du Comité estiment que les stratégies de réduction des émissions, qu’elles reposent sur l’intensité des émissions ou sur des cibles absolues, relèvent du ministère de l’Environnement et qu’il appartient donc au Comité de l’environnement de formuler des recommandations à ce sujet.  Un comité composé de députés de tous les partis étudie actuellement la Loi canadienne sur la qualité de l’air et formulera des recommandations qui seront ensuite soumises à la Chambre des communes au printemps. En outre, le ministre de l’Environnement cherche avec l’industrie à mettre en œuvre des stratégies réalistes de réduction des émissions qui permettront de faire des progrès concrets en matière d’environnement.  Le fait pour le Comité des ressources naturelles de recommander que l’on respecte nos obligations en vertu du Protocole de Kyoto alors qu’aucun progrès n’a été réalisé en ce sens depuis 13 ans est contraire au bon sens. Il importe de se rappeler que notre étude portait sur les sables bitumineux et que nos recommandations doivent donc être intégrées aux négociations avec tous les groupes d’industries qui appartiennent au groupe des grands émetteurs finals.  Les députés conservateurs membres du Comité estiment que cette recommandation des partis de l’opposition est motivée par des considérations purement politiques, alors que ceux-ci connaissent fort bien les résultats déplorables des libéraux au chapitre de l’environnement.

Quatrièmement, il est instructif de noter, comme on le signale dans l’édition du 1er mars du Globe and Mail, que les députés libéraux et néo-démocrates, de même que le chef du Parti Vert, s’intéressent à l’idée d’une taxe sur les émissions carboniques.  Suivant cette proposition en vue de respecter les exigences énoncées dans le Protocole de Kyoto d’ici 2012, on prélèverait 100 milliards de dollars à raison de 20 milliards de dollars par an sur cinq ans en taxes sur les émissions carboniques auprès des entreprises et des consommateurs.  « Du côté des consommateurs, des taxes comme une augmentation de 10 cents le litre d’essence permettait de financer par exemple des allégements fiscaux pour l’achat de voitures hybrides. [traduction] »  Le coût de ce type de plan serait de l’ordre de 25 dollars par semaine par canadien, soit plus de 1 300 $ par an par personne ou plus de 5 000 $ par an pour une famille de quatre personnes.  Abstraction faite de la question du coût, ce projet pourrait être un nouveau Programme énergétique national. 

Cinquièmement, le gouvernement conservateur a été le premier à s’attaquer à la réglementation des émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques dans tous les secteurs d’activité, y compris dans celui du pétrole et du gaz.  Nous entendons aussi transformer la production et la consommation d’énergie au Canada par la voie de programmes, comme l’Initiative écoÉNERGIE sur la technologie, conçus pour nous doter d’énergies conventionnelles propres.

Recommandation : Les députés conservateurs membres du Comité proposent une position plus responsable, à savoir de remplacer les recommandations 14, 15 et 16 par la suivante : Le Comité recommande que toute expansion future de la mise en valeur des sables bitumineux tienne dûment compte des impératifs à la fois de la protection de l’environnement, de l’approvisionnement en énergie et de l’économie. Nous encourageons le ministre de l’Environnement à négocier des stratégies de réduction des émissions avec les grands émetteurs finals, notamment avec les entreprises de mise en valeur des sables bitumineux, de manière à atteindre des objectifs immédiats sur le plan de l’intensité des émissions et à amener les grands émetteurs finals à atteindre des cibles de réduction absolue des émissions conformes aux objectifs fixés par le gouvernement fédéral et aux engagements internationaux futurs.  Nous encourageons par ailleurs l’entreprise privée et le secteur public à se donner des stratégies qui permettront une exploitation des sables bitumineux neutre en carbone par le développement des technologies comme la séquestration du carbone.