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HESA Rapport du Comité

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1. Qu’est-ce que le PCEM?

A)        Un organisme consultatif auprès des régimes publics d’assurance-médicaments

Le PCEM conseille les régimes d’assurance-médicaments participants sur l’efficacité clinique et le rapport coût-efficacité des médicaments par rapport aux autres pharmacothérapies possibles de manière à permettre un usage optimal des fonds publics. Ce processus est différent du processus d’homologation des médicaments de Santé Canada. Santé Canada a la responsabilité de voir à ce que les médicaments qui sont commercialisés au Canada répondent aux normes établies en matière d’efficacité, de sûreté et de qualité de fabrication. Les décisions du Ministère en la matière reposent sur les informations tirées des essais cliniques effectués par le fabricant. Ces essais cliniques comparent l’effet d’un médicament sur la santé et la sécurité par rapport à un placebo.

Santé Canada ne compare pas les nouveaux médicaments aux autres thérapies et le coût des médicaments n’entre pas en ligne de compte. C’est le rôle du PCEM qui est de déterminer si les avantages thérapeutiques d’un nouveau médicament comparativement à d’autres pharmacothérapies justifient le coût qu’il représente (ou que son emploi est rentable), dans le contexte plus général du système de soins de santé. C’est pourquoi il ne suffit pas que Santé Canada approuve la vente d’un médicament au Canada pour que le PCEM en recommande aussitôt l’inscription.

B)        Objectifs du PCEM

En septembre 2001, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé ont établi la vision et le mandat du PCEM. À l’époque, on lui avait fixé quatre objectifs :

·        instituer un processus uniforme et rigoureux d’évaluation des médicaments;

·        réduire les doubles emplois entre les régimes publics d’assurance-médicaments;

·        maximiser l’exploitation de ressources et de compétences limitées;

·        fournir une égalité d’accès à l’expertise.

Le PCEM a été établi en mars 2002 et a commencé à accueillir des présentations de médicaments en septembre 2003. Jusqu’en avril 2007, il n’a accepté de présentations et effectué d’évaluations que relativement à de nouveaux médicaments. Cependant, son mandat a récemment été élargi pour englober l’évaluation de nouvelles indications pour des médicaments existants, ce dont il commencera à s’occuper plus tard en 2007. La Stratégie nationale sur les produits pharmaceutiques prévoit que le PCEM s’étendra un jour à tous les médicaments.

C)        Gouvernance et financement du PCEM

C’est l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé (ACMTS) qui administre le PCEM. L’Agence est une société indépendante sans but lucratif dotée d’un budget de fonctionnement annuel de 24,2 millions de dollars qui lui est fourni conjointement par le gouvernement fédéral et ceux des provinces et des territoires (Québec excepté). Elle est dirigée par un conseil d’administration de 13 membres nommés par les sous-ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Santé.

Le financement fédéral de l’Agence provient d’une subvention nominative répartie entre ses trois activités commerciales essentielles : le Processus commun d’évaluation des médicaments (PCEM), l’Évaluation des technologies de santé (ETS) et le Service canadien de prescription et d’utilisation optimales des médicaments (SCPUOM). D’après le Rapport sur les plans et les priorités de Santé Canada pour 2006-2007, l’Agence doit effectuer une évaluation indépendante de ses principales activités pour la période allant de 2003 à 2007 et en faire rapport au ministre fédéral de la Santé au plus tard le 30 juin 2007. Cette évaluation fera abstraction du PCEM, puisque celui-ci a déjà été évalué en 2005 par les Associés de recherche EKOS.

Comme on l’a vu, le mode de financement du PCEM est une contribution de 70 p. 100 par les provinces et les territoires et 30 p. 100 de contribution du gouvernement fédéral. Le PMEC bénéficiait à l’origine d’une affectation budgétaire totale de 2 millions de dollars par an, mais son budget a été porté à 3,4 millions de dollars depuis deux ans en raison de l’augmentation du nombre des nouveaux médicaments soumis à examen. Depuis le 1er avril 2007, le mandat du PCEM ayant été élargi pour couvrir les nouvelles indications de médicaments existants, son budget total est de 5,1 millions de dollars. En 2007-2008, cela correspond à un financement fédéral du PCEM d’environ 1,5 million de dollars.

2. Quel processus le PCEM utilise-t-il pour examiner les nouveaux médicaments?

A)        Évaluation initiale du PCEM

La procédure d’évaluation est généralement amorcée quand un fabricant soumet un nouveau médicament à la Direction du PCEM (voir la schématique de la procédure d’évaluation à l’annexe A). Les régimes d’assurance-médicaments participants peuvent aussi présenter une demande. Une équipe d’évaluation (composée d’examinateurs internes et d’examinateurs de l’extérieur) est établie à la Direction. Les noms des examinateurs ne sont pas divulgués, mais la composition de l’équipe est expliquée dans tous les documents du PCEM. Celle-ci comprend généralement des épidémiologistes, des pharmaciens, des médecins, des économistes de la santé et des spécialistes de l’information. Au moins un médecin spécialisé dans le secteur clinique concerné participe à l’évaluation.

L’équipe d’évaluation entreprend un examen systématique des données cliniques et pharmaco-économiques contenues dans la présentation du fabricant ou obtenues par recherche indépendante de la littérature. L’information figurant dans la présentation peut être confidentielle et, pour cette raison, peut faire l’objet d’une protection exclusive. Les résultats de l’évaluation sont communiqués au fabricant qui les commente, après quoi les examinateurs préparent leur réponse.

B)        Examen et recommandation du CCCEM

Le dossier contenant la présentation du fabricant et les résultats de l’évaluation faite par l’équipe d’évaluation est ensuite envoyé au Comité consultatif canadien d’expertise sur les médicaments (CCCEM), qui relève de l’Agence. Ce comité est un organisme consultatif indépendant composé de 13 personnes, des spécialistes des pharmacothérapies et de l’évaluation des médicaments et deux représentants du public. Les noms et les notices biographiques des membres du CCCEM sont affichés sur le site Web de l’ACMTS. Le CCCEM formule des recommandations à l’intention des régimes d’assurance-médicaments participants sur les médicaments à inscrire au formulaire.

Pour chaque nouveau médicament, le CCCEM tient compte des trois critères d’examen suivants : 1) les résultats des études cliniques sur la sûreté et l’efficacité du médicament dans les populations visées; lorsque c’est possible, il compare les données sur l’efficacité du médicament avec les informations sur les pharmacothérapies courantes reconnues; 2) les avantages et inconvénients du médicament par rapport aux pharmacothérapies courantes reconnues; et 3) le rapport coût-efficacité par rapport aux pharmacothérapies courantes reconnues.

Le CCCEM peut : 1) recommander que le médicament soit inscrit sur la liste des médicaments couverts; 2) recommander que le médicament soit inscrit, à certaines conditions; 3) recommander que le médicament ne soit pas inscrit. Il peut aussi différer sa recommandation dans l’attente d’éclaircissements. La recommandation finale accompagnée d’un énoncé des motifs est envoyée au fabricant et aux régimes participants, et aussi publiée. Le PCEM formule des recommandations, mais la décision finale revient aux gouvernements concernés et repose sur les besoins, priorités et ressources de chacun.

Les représentants de l’ACMTS ont déclaré aux membres du Comité que, en avril 2007, après près de quatre années d’existence, le PCEM avait reçu 95 présentations de médicaments, formulé 70 recommandations définitives et recommandé l’inscription au formulaire de près de 50 p. 100 des médicaments étudiés, et que les régimes d’assurance-médicaments participants s’étaient conformés aux recommandations du PCEM pour leurs décisions dans 90 p. 100 des cas.

C)        Lignes directrices du PCEM relatives aux conflits d’intérêts et à la confidentialité

Il faut savoir que tous les examinateurs du PCEM et tous les membres du CCCEM doivent se soumettre à des règles strictes en matière de conflits d’intérêts et à un code de conduite. L’évaluation des conflits d’intérêts met l’accent sur les conflits d’intérêts réels, éventuels et perçus. Les personnes concernées doivent déclarer leurs liens ou intérêts personnels, professionnels et financiers avec des sociétés pharmaceutiques ou des organisations concernées.

Sans doute plus important encore, l’ACMTS a élaboré des lignes directrices relatives à la confidentialité pour protéger l’information confidentielle qu’elle obtient pour le PCEM. Le fabricant est réputé avoir accepté les lignes directrices quand il soumet une présentation ou fournit d’autres renseignements à la Direction du PCEM. Cependant, si, pour une raison ou pour une autre, une recommandation du PCEM repose sur des renseignements confidentiels inédits ou des prix confidentiels, on demande alors au fabricant concerné l’autorisation de les inclure dans la recommandation finale motivée. Cette information peut être retenue à la demande du fabricant, auquel cas le PCEM ne peut pas communiquer au public les prix ou les données cliniques qui expliquent les recommandations du CCCEM.

3. Comment le rapport coût-efficacité est-il déterminé?

A)        La méthode

Le processus d’examen clinique et d’évaluation pharmaco-économique entrepris par le PCEM est complexe. Avant que l’on envisage la question de la rentabilité d’un médicament, il faut en attester l’efficacité clinique et montrer qu’il donne de meilleurs résultats que les autres sur le plan de la santé. Suivant les experts, la rentabilité d’un produit ne se mesure pas simplement à son prix ni même à son coût budgétaire, mais est d’abord et avant tout fonction du rapport qualité-prix. La norme reconnue au niveau international pour exprimer le degré de rentabilité d’un nouveau médicament est le coût par année de vie pondérée par la qualité (QALY) par rapport aux autres pharmacothérapies. Le coût par QALY permet d’estimer le coût d’un nouveau médicament en fonction de l’amélioration de la survie et de la qualité de vie. Un médicament coûteux peut quand même être rentable, s’il est démontré qu’il donne de meilleurs résultats que son comparateur sur le plan de la santé. À l’opposé, un médicament relativement bon marché peut ne pas être rentable si ses effets sur santé sont nuls ou négligeables par rapport à un traitement moins coûteux.

B)        Incorporation d’autres résultats

Les représentants de l’industrie pharmaceutique affirment que le PCEM insiste trop sur les coûts et pas assez sur les résultats pour les patients. D’après les représentants de l’industrie, cela amène le PCEM à recommander que des médicaments innovateurs ne soient pas inscrits au formulaire des régimes d’assurance-médicaments. Suivant leur recommandation, il faudrait que le mandat du PCEM soit révisé afin de prévoir un mécanisme permettant de tenir compte de la valeur de l’innovation dans le domaine de la santé.

Les professionnels de la santé et les groupes de défense des droits des patients ont dit au Comité que l’évaluation clinique et pharmaco-économique devrait consister à comparer l’efficacité d’un médicament non seulement par rapport à celle des autres médicaments de la même classe, mais aussi par rapport à celle des autres thérapies non pharmaceutiques existantes. Ils estiment que l’évaluation devrait prendre en considération les répercussions du médicament sur l’ensemble de la consommation de services de santé. Par exemple, si un médicament réduit les séjours hospitaliers, ou aide des personnes qui seraient autrement handicapées à retourner au travail ou encore remplace des thérapies plus coûteuses ou invasives, il faut en tenir compte dans l’évaluation de sa rentabilité globale.

Les représentants de l’ACMTS ont toutefois précisé que leur évaluation de la rentabilité tenait compte des autres coûts pour le système de soins de santé, comme les visites chez le médecin et les séjours à l’hôpital. Ils ont aussi signalé que le PCEM avait déjà recommandé l’inscription de médicaments coûteux qui donnent de meilleurs résultats, et que, à leur avis, cela montrait clairement que les recommandations du PCEM ne reposent pas uniquement sur le facteur coût.

D’autres témoins ont fait valoir combien il était difficile de se prononcer sur de nouveaux médicaments pour lesquels on n’a évidemment pas encore de preuve claire de leurs résultats à long terme pour la santé. Santé Canada peut approuver un nouveau médicament d’après des effets de substitution (marqueurs de substitution) de l’efficacité et exiger du fabricant qu’il recueille des données sur une longue période. Dans ces cas, l’évaluation initiale d’un médicament peut montrer une évolution favorable d’un aspect particulier d’une maladie ou d’un système de l’organisme. Par contre, l’efficacité à long terme du produit sur le plan de l’amélioration de la morbidité et de la baisse de la mortalité n’est pas connue.

C)        Prise en compte des valeurs humaines dans le processus d’évaluation

La détermination du coût par QALY a suscité considérablement d’intérêt. Plusieurs témoins soulignent qu’il est délicat de procéder à une analyse économique de questions complexes touchant la qualité de vie et de mettre, par exemple, une valeur sur la capacité de se vêtir et de se nourrir seul. De plus, même si la norme QALY est une méthode scientifique largement validée, ces témoins estiment qu’elle n’a aucun lien explicite avec l’analyse des questions éthiques. Beaucoup d’entre eux s’entendent pour dire que l’analyse technique, scientifique et clinique réalisée dans le cadre du PCEM pourrait être adaptée pour tenir compte des valeurs humaines concurrentes à l’intérieur d’un cadre éthique. Certains témoins ont toutefois reconnu par ailleurs la nécessité de concilier les considérations relatives aux valeurs humaines et à l’éthique, d’une part, et les difficultés posées par la répartition des ressources, les pressions exercées par l’industrie pharmaceutique en faveur de la promotion de médicaments innovateurs et les intérêts des patients, d’autre part.

D)        Point de vue du Comité

Le Comité reconnait que l’évaluation pharmaco-économique est une méthode valable lorsque qu’elle comparée à l’efficacité clinique du médicament. Les gouvernements ont la responsabilité de voir à ce que les ressources publiques soient employées de manière avisée. Quand le coût d’un médicament est remboursé par l’État, il est normal de vérifier s’il présente des avantages thérapeutiques et monétaires par rapport aux thérapies courantes. C’est un dilemme auquel les décideurs sont fréquemment confrontés lorsqu’ils doivent décider de la meilleure façon d’utiliser les deniers publics.

D’un côté, si deux médicaments de la même classe donnent des résultats thérapeutiques comparables, il n’est pas déraisonnable de s’attendre à ce qu’on prescrive ou couvre de préférence le moins cher des deux. D’un autre côté, le Comité convient avec les témoins qu’une certaine souplesse s’impose à cet égard. On pourrait envisager de permettre aux malades assurés d’opter pour des médicaments qui ne figurent pas au formulaire si le médecin traitant estime que le produit recommandé ne leur convient pas. En outre, l’évaluation pharmaco-économique doit continuer de tenir compte des économies potentielles qui peuvent être réalisées dans l’ensemble du régime public de soins de santé grâce, par exemple, à la réduction des durées d’hospitalisation ou du nombre d’interventions chirurgicales. Enfin, le Comité voit dans la participation accrue du public une occasion de faire une plus grande place aux valeurs dans le processus d’évaluation, comme il est mentionné dans la partie traitant de la participation publique au CCCEM.

4. Le PCEM a-t-il réduit les doubles emplois?

A)        Examen unique fédéral, provincial et territorial des nouveaux médicaments

Avant l’établissement du PCEM, le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires administraient chacun leur propre processus d’évaluation et de recommandation des nouveaux médicaments pour leurs régimes respectifs d’assurance-médicaments. Les sociétés pharmaceutiques devaient donc, pour chaque nouveau médicament, présenter une demande à chaque régime. En mettant en œuvre un processus d’évaluation unique, le PCEM devait ainsi être avantageux pour les sociétés pharmaceutiques, qui ne seraient tenues de faire qu’une présentation unique au PCEM plutôt qu’à chaque régime individuel d’assurance-médicaments. Par conséquent, en principe, cette nouvelle approche devrait avoir eu un effet positif sur l’industrie pharmaceutique.

Or, les représentants de l’industrie pharmaceutique et les groupes de défense des droits des patients ont dit au Comité que le PCEM représente en fait une étape bureaucratique de plus, qui plus est superflue. Ils affirment que les régimes d’assurance-médicaments participants font encore leur propre évaluation des nouveaux médicaments.

En revanche, les représentants des régimes d’assurance-médicaments fédéraux et provinciaux ont dit au Comité que ce reproche était sans fondement. Ils ont confirmé que les 18 processus distincts d’évaluation de la rentabilité des nouveaux médicaments en vue de leur inscription au formulaire des régimes d’assurance-médicaments avaient bel et bien été remplacés par le processus unique du PCEM. À leur avis, le PCEM fait économiser temps, efforts et argent. Il a réduit les doubles emplois entre les régimes fédéraux, provinciaux et territoriaux, et permis à tous, grands et petits, de bénéficier également d’une information de haut niveau et de conseils de spécialistes de haute qualité grâce au PCEM. Ils ont indiqué aussi que le PCEM s’était vite acquis le respect de ses pairs au niveau international.

B)        Évaluations différentes des régimes d’assurance-médicaments

Les représentants fédéraux et provinciaux ont en outre expliqué que les évaluations qu’ils continuaient d’effectuer (efficacité clinique et rapport coût-efficacité) ne concernaient que les médicaments qui ne relèvent pas du mandat du PCEM. Ils ont précisé aussi qu’ils continuaient effectivement d’évaluer les médicaments afin de déterminer s’ils les inscriraient au formulaire, et ce, d’après les besoins de leurs populations clientes et les particularités budgétaires de chaque régime. En ce qui concerne le régime d’assurance-médicaments des Premières nations et des Inuits, Santé Canada estime que ses activités d’évaluation des médicaments lui coûtent environ la moitié moins cher depuis la création du PCEM.

C)        Point de vue du Comité

D’après l’information recueillie, le Comité constate que le PCEM satisfait manifestement aux besoins des régimes fédéraux, provinciaux et territoriaux d’assurance-médicaments participants et que, le plus souvent, le PCEM offre une évaluation d’une qualité supérieure à ce que pourraient réaliser les régimes individuels chacun de leur côté. Selon les représentants des régimes, le PCEM a réduit les besoins en ressources humaines et financières au niveau de la collecte des données et des évaluations scientifiques. Ainsi, en plus de pallier les capacités limitées des petits régimes d’assurance-médicaments, le PCEM a permis, comme il était prévu, de réduire les doubles emplois dans l’évaluation des nouveaux médicaments.

5. Le PCEM a-t-il entraîné des délais d’inscription pour les nouveaux médicaments?

A)        Délai global d’inscription

Au cours des audiences, les représentants de l’industrie pharmaceutique et de nombreux groupes de défense des droits des patients ont affirmé que le PCEM avait eu pour effet de différer le remboursement de nouveaux médicaments par les régimes publics. Cela se rapporte, a-t-on dit aux membres du Comité, au « délai d’inscription », qui comprend trois étapes : 1) le temps que prend le fabricant pour présenter une demande après que Santé Canada ait accordé un avis de conformité; 2) le temps nécessaire au PCEM pour évaluer le médicament proposé; 3) le temps que met le régime participant à prendre une décision et à l’annoncer.

D’après des données fournies par l’ACMTS, la durée moyenne de la période qui s’écoule entre la délivrance d’un avis de conformité par Santé Canada et l’inscription d’un médicament au formulaire des régimes d’assurance-médicaments est demeurée sensiblement la même : 471 jours avant le PCEM et 479 jours maintenant. L’évaluation du PCEM ne représente que le tiers environ du délai. Une fois que le PCEM a formulé une recommandation, ce sont les régimes d’assurance-médicaments qui décident s’ils veulent inscrire le médicament à leur formulaire. Ce processus-là relève exclusivement de chaque régime et le PCEM n’y joue aucun rôle.

B)        Calendrier de l’évaluation du PCEM

Les représentants de l’ACMTS ont expliqué qu’ils n’avaient la charge que de la seule seconde étape du délai d’inscription et qu’ils n’avaient aucune emprise sur la première, qui dépend du fabricant, et la troisième, qui relève des régimes concernés. Ils ont fait valoir que, bien que détaillé et faisant appel à plusieurs intervenants, l’évaluation ne prenait en général que de 19 à 25 semaines, de la demande à la recommandation (voir l’aperçu du calendrier d’évaluation du PCEM à l’annexe B). Ils ont affirmé que le PCEM s’était donné un calendrier d’évaluation à partir des pratiques exemplaires des régimes d’assurance-médicaments participants et le respectait uniformément. En voici les principales étapes :

·        Les études cliniques et pharmaco-économiques sont prêtes avant neuf semaines.

·        Le résultat des évaluations est alors remis dans les deux semaines au fabricant, qui les commente.

·        Les responsables du PCEM peaufinent ensuite leur rapport, d’après les commentaires du fabricant, dans les deux semaines.

·        La recommandation initiale du CCCEM et ses motifs sont envoyés au fabricant et aux régimes d’assurance-médicaments, et demeurent confidentiels pendant deux semaines.

·        Durant ces deux semaines, les régimes peuvent demander l’éclaircissement de la recommandation, et le fabricant peut demander au CCCEM de revenir sur sa recommandation, auquel cas ce dernier revoit sa recommandation lors d’une réunion ultérieure.

·        La recommandation finale et ses motifs sont rendus publics.

C)        Santé Canada et le PCEM

Certains témoins ont fait mention de l’apparent chevauchement des rôles distincts et séquentiels joués par Santé Canada et par le PCEM pour expliquer le délai global d’inscription des nouveaux médicaments. Ils ont plaidé en faveur d’une plus grande coordination entre le processus d’homologation de Santé Canada et le processus d’évaluation du PCEM. Certains témoins ont affirmé que, si ce dernier pouvait commencer aux derniers stades de la procédure d’homologation des médicaments par Santé Canada (c’est-à-dire avant que le Ministère n’émette un avis de conformité), le PCME pourrait faire ses recommandations aux régimes d’assurance-médicaments participants plus rapidement une fois que le médicament est sur le marché. L’adoption d’une approche plus unifiée et la communication plus rapide de l’information permettraient d’éliminer certains des décalages actuellement observés entre l’un et l’autre processus. À la longue, les décisions des régimes quant à l’admissibilité des médicaments à un remboursement finiraient par être rendues plus rapidement. À cet égard, un représentant du PCEM a justement signalé au Comité qu’une récente collaboration avec Santé Canada avait permis au PCEM d’amorcer son évaluation dès les dernières étapes du processus d’homologation de Santé Canada et même de se servir des conclusions de l’examen réglementaire. Ainsi, dans le cas d’un médicament pouvant servir au traitement de maladies très graves ou mortelles, le PCEM pourrait mener à bien son évaluation et formuler une recommandation quelques mois seulement après l’homologation par Santé Canada.

D)        Régimes d’assurance-médicaments

Les représentants de l’ACMTS et des régimes fédéraux et provinciaux participants ont déclaré au Comité que, avant le PCEM, les évaluations étaient souvent plus longues, et le degré de rigueur variait considérablement d’une administration à l’autre. Ils sont d’avis que la durée totale du processus jusqu’à l’inscription des produits au formulaire des régimes d’assurance-médicaments n’a pas augmenté depuis la création du PCEM en dépit du fait qu’on a institué un processus normalisé plus rigoureux et plus transparent.

E)        Point de vue du Comité

Le Comité comprend bien l’anxiété des bénéficiaires des régimes d’assurance-médicaments participants qui attendent qu’un médicament en particulier soit couvert par leur régime. Le PCEM respecte régulièrement ses échéances, mais le Comité l’encourage néanmoins à réduire ses délais d’attente au moyen de mesures comme une collaboration plus intime avec Santé Canada.

6. Quel est l’effet des recommandations du PCEM?

A)        Accès des patients

Les neuf à dix millions de personnes qui sont concernées par les recommandations du PCEM sont pour la plupart des personnes âgées ou des personnes à faible revenu bénéficiaires des régimes provinciaux et territoriaux d’assurance-médicaments. Elles doivent attendre d’abord la recommandation du PCEM puis la décision de leur régime d’assurance-médicaments. L’industrie pharmaceutique et les groupes de défense des droits des patients affirment que les bénéficiaires des régimes qui participent au PCEM ont moins facilement accès aux nouveaux médicaments que le reste de la population qui peut soit prendre une assurance privée, soit payer le médicament de sa poche.

À leur avis, tout le monde devrait pouvoir se procurer les nouveaux médicaments dès que Santé Canada autorise leur vente et que le fabricant les commercialise. Les représentants de l’industrie ont aussi affirmé au Comité qu’ils trouvaient troublant que le PCEM puisse faire une recommandation défavorable après que Santé Canada a approuvé la vente d’un médicament. Ils estiment que les bénéficiaires de régimes privés d’assurance-médicaments ont plus de choix et un meilleur accès aux médicaments que ceux qui dépendent de régimes publics. D’autres témoins ont signalé que le régime québécois d’assurance-médicaments couvre davantage de médicaments que tous les régimes qui participent au PCEM.

B)        Lignes directrices cliniques et pratique médicale

Certains médecins et groupes de défense des droits des patients ont déclaré au Comité que le processus d’évaluation du PCEM devrait faire intervenir des spécialistes ayant une expérience clinique des maladies que le nouveau médicament à l’étude cherche à traiter. Ils ont cité plusieurs exemples de nouveaux médicaments qui avaient été recommandés par des comités d’experts responsables de l’élaboration des guides de pratique clinique et dont le PCEM n’a pas recommandé l’inscription. À leur avis, le PCEM ne devrait pas formuler de recommandation négative (c.-à-d. de non-inscription) lorsqu’il existe déjà des lignes directrices qui appuient la prescription du médicament en question. Le Comité a toutefois appris que les guides de pratique clinique pour le traitement du cancer, du diabète et d’autres maladies diffèrent actuellement beaucoup d’une province à l’autre. Pourtant, ces guides sont élaborés par des experts à partir de bases de données médicales semblables. Les groupes de défense des droits des patients sont d’avis que l’élaboration de guides nationaux de pratique clinique permettrait d’assurer une plus grande uniformité d’un bout à l’autre du pays et servirait de point de départ aux malades, qui pourraient aussi s’appuyer sur ces guides pour demander aux gouvernements provinciaux de rembourser les médicaments qui y sont recommandés.

Un représentant du PCEM a insisté sur le fait que les données dont disposent les médecins et les spécialistes qui élaborent les lignes directrices pour la pratique clinique ne sont pas les mêmes que les preuves étudiées par le PCEM. Le PCEM a l’avantage d’avoir accès à des renseignements non publiés que les sociétés pharmaceutiques sont tenues d’annexer à leur présentation.

De même, plusieurs universitaires ont fait remarquer qu’il peut arriver que les sociétés pharmaceutiques appuient financièrement l’élaboration de lignes directrices pour la pratique clinique, soulignant qu’il faut faire en sorte que les intérêts des sociétés pharmaceutiques et des groupes de défense des droits des patients n’interviennent pas dans l’élaboration des guides.

C)        Régimes d’assurance-médicaments

On reproche aux régimes participants de ne pas toujours souscrire aux recommandations du PCEM. On a informé le Comité que rien n’obligeait les régimes à le faire. Des témoins ont indiqué que ce genre de décision par les régimes d’assurance-médicaments leur incombait à eux seuls à tous égards : le PCEM ne joue aucun rôle dans le calendrier et la nature des décisions des régimes en la matière. D’après les représentants de l’ACMTS, les décisions des régimes suivent les recommandations du PCEM dans 90 p. 100 des cas. Les exceptions montrent que les régimes d’assurance-médicaments tiennent compte de leurs particularités. Les régimes fédéraux n’appliquent pas tous les recommandations du PCEM de la même manière parce qu’ils ont des clientèles différentes. Pour eux, c’est là en fait un atout du PCEM et non une faiblesse du processus.

Si l’on en croit les représentants de l’ACMTS, rien ne montre que le PCEM complique l’accès aux médicaments par rapport au système antérieur. En fait, dans les cinq ans qui ont précédé l’établissement du PCEM, le plus important régime public d’assurance-médicaments du Canada, le Programme de médicaments de l’Ontario, inscrivait 44 p. 100 des nouveaux médicaments qui lui étaient proposés à son formulaire. Or, jusqu’à présent, le PCEM rend une décision favorable dans environ la moitié des cas.

D)        Régimes d’assurance-médicaments des autres pays

Les représentants de l’industrie pharmaceutique ont présenté une étude commandée dans laquelle on affirme que le PCEM recommande moins de médicaments que ses homologues internationaux. Les représentants de l’ACMTS et les chercheurs des milieux universitaires ont répondu que le taux de recommandations favorables du Canada correspond au milieu de l’échelle pour tous les pays étudiés et est supérieur à celui des pays qui ont des systèmes de santé semblables au nôtre, comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Ils insistent aussi pour dire qu’il faut s’assurer de ne faire de telles comparaisons qu’avec la plus grande prudence, car certains pays peuvent inscrire un médicament sur la liste des médicaments couverts, mais n’en rembourser que la moitié du coût, le reste étant à la charge du malade. La France, par exemple, a un système de remboursement à trois niveaux. D’autres pays se livrent à des négociations de prix à l’échelle nationale, ce qui influe sur les décisions en matière de remboursement.

E)        Point de vue du Comité

Le Comité a entendu que le PCEM constituerait un obstacle entre les patients et de nouvelles pharmacothérapies qui pourraient éventuellement leur sauver la vie. Il comprend la frustration des patients et de leurs défenseurs quand le PCEM se prononce contre le remboursement d’un médicament ou lorsqu’il recommande un médicament, mais que les régimes d’assurance-médicaments refusent de l’inscrire à leur formulaire. Les membres du Comité comprennent ces frustrations; il leur apparaît que la pérennité du système de soins de santé est également une considération importante et valable.