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LANG Rapport du Comité

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HISTORIQUE DU PCJ

            Le Programme de contestation judiciaire est né en 1978 au moment où un vif débat sévissait au Québec suite à l’adoption de la loi 101, devenue la Charte de la langue française. Dans l’affaire Blaikie1, les tribunaux devaient déterminer si cette loi était en contradiction avec les articles 93 et 133 de l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique. La cour avait statué que les lois du Québec devaient être adoptées dans les deux langues officielles. De même, dans l’affaire Forest au Manitoba, la cour avait statué que l’ensemble de la législation manitobaine, adoptée en anglais seulement depuis des décennies, contrevenait à la Loi de 1870 sur le Manitoba et était donc invalide2. Ayant anticipé les répercussions potentiellement très importantes des jugements à venir sur ces causes, le gouvernement fédéral avait choisi d’accorder un appui financier aux requérants dans ces deux causes et de créer un programme de financement visant à faire préciser par les tribunaux la portée des droits linguistiques conférés par la Constitution. De 1978 à 1985, le programme n’a financé que des causes touchant les droits linguistiques, et le gouvernement conservait le plein contrôle sur le financement et les causes choisies3.

            Suite à l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés en 1982, le PCJ a été modifié afin de tenir compte des droits linguistiques couverts par la Charte. En 1985, les droits à l’égalité contenus dans la Charte sont devenus admissibles à un financement par le PCJ, suite à l’entrée en vigueur de l’article 15.

            L’inclusion des droits à l’égalité au PCJ a entraîné la nécessité d’une restructuration administrative. En effet, puisque le programme devait financer des causes contestant des lois ou des décisions du gouvernement fédéral, le gouvernement se serait retrouvé en situation de conflit d’intérêts s’il avait continué d’administrer lui-même le PCJ. L’administration du programme fut donc confiée au Conseil canadien du développement social entre 1985 et 1990.

            Le renouvellement du programme à partir de 1990 a fait l’objet de vives discussions. De juin à novembre 1989, le Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées a procédé à une étude du PCJ et a déposé son rapport le 11 décembre 1989. Il demandait entre autres que le programme soit reconduit pour une période de dix ans, c’est-à-dire jusqu’au 31 mars 2000, que soit abolie la contrainte s’appliquant aux droits à l’égalité limitant le financement aux causes contestant des lois ou des programmes du gouvernement fédéral, et qu’il soit élargi à la protection des droits des autochtones4.

            Dans sa Réponse au rapport, le gouvernement du Canada affirmait qu’il était « disposé à renouveler le Programme pour une période de cinq ans » et, répondant aux demandes d’élargissement du PCJ, que « comme il existe encore bien des aspects des droits linguistiques et des droits à l’égalité qui nécessitent une clarification, le gouvernement du Canada croit préférable, pour le moment, de conserver au Programme son objectif actuel5 ». Un nouvel accord de contribution sera signé le 20 juillet 1990 pour une période de cinq ans, et l’administration en sera confiée au Centre des droits de la personne de l’Université d’Ottawa, conformément à la recommandation du Comité permanent.

            Faisant face à un contexte budgétaire difficile, le gouvernement fédéral resserra ses mesures de contrôle des dépenses dans son budget du 25 février 1992 et annoncera deux jours plus tard l’abolition du Programme de contestation judiciaire. L’honorable Gerry Weiner, ministre du Multiculturalisme et de la Citoyenneté, avait alors déclaré en Chambre : « Il existe maintenant une solide jurisprudence pour les années à venir, et les points plus subtils qui restent relèvent maintenant de la compétence provinciale6 ». Quelques jours plus tard, le solliciteur général du Canada jugeait que le programme avait atteint son objectif et qu’il incombait à d’autres groupes de prendre la relève7. L’idée avait également été évoquée que « pendant une période de restriction financière, il y a des moyens moins coûteux de gérer le financement des contestations judiciaires et qu’un ministère (c’est-à-dire le ministère de la Justice) pourrait, par exemple, s’en charger au cas par cas8 ».

            En juin 1992, le Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées déposait un autre rapport sur le même sujet, dans lequel il s’étonnait que l’argument de la jurisprudence ait été invoqué puisque la Réponse du gouvernement au rapport de 1989 affirmait justement « qu’il existe encore bien des aspects des droits linguistiques et des droits à l’égalité qui nécessitent une clarification9 ».

            Après des mois de vives discussions et la protestation concertée des partis d’opposition, la première ministre Kim Campbell annonçait, le 30 août 1993, son intention de rétablir le programme en le remaniant et le rebaptisant « Programme d’enrichissement du droit de la Charte10 ».

            Suite à l’élection du 25 octobre 1993, le gouvernement libéral annoncera le rétablissement du PCJ lors du Discours du Trône du 18 janvier 1994. L’entente rétablissant le Programme sera signée le 25 octobre 1994 par l’honorable Michel Dupuy, ministre du Patrimoine canadien. Le mandat d’administrer le Programme sera confié à un organisme sans but lucratif créé à cet effet et qui portera le nom de Programme de contestation judiciaire du Canada.



[1]               Procureur général du Québec c. Blaikie, [1979] 2 R.C.S. 1016.

[2]               Voir Procureur général du Manitoba c. Forest, [1979] 2 R.C.S. 1032.

[3]               Voir Programme de contestation judiciaire, Rapport annuel 1994-1995, Les débuts du Programme.

[4]               Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées, Le Programme de contestation judiciaire, décembre 1989.

[5]               Gerry Weiner, Ministre d’État, Multiculturalisme et Citoyenneté, pour le Gouvernement du Canada, Réponse au Premier rapport du Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées.

[6]               Débats des Communes, Questions orales, 27 février 1992, 15 h 00.

[7]               Débats des Communes, Questions orales, 10 mars 1992, 14 h 40.

[8]               Comité permanent des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées, C’est trop cher payer, rapport déposé à la Chambre en juin 1992, p. 4.

[9]               Voir note 10.

[10]             Cité dans le Rapport annuel 1994-1995 du Programme de contestation judiciaire.