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NDDN Rapport du Comité

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Opinion complémentaire
PARTI LIBÉRAL DU CANADA

Il n’y a sans doute pas d’acte plus noble que celui de risquer sa vie pour son pays. C’est ce que font les hommes et les femmes de nos Forces armées. Dans le théâtre des opérations, leur réussite ou leur échec, leur survie ou leur mort, dépend parfois de la réception du bon matériel au bon moment. Notre rapport peut avoir des conséquences importantes sur les réponses que nous apporterons à ces questions. Nous ne devons donc pas ménager nos efforts pour que le système d’adjudication des marchés publics de nos Forces armées soit le meilleur possible. Nous ne devons pas faire de compromis sur nos recommandations.

Nous savons que le système d’adjudication des marchés publics de la Défense canadienne est complexe et que de nombreux organismes y prennent part. Nous devons envisager le système dans son ensemble si nous voulons optimiser son fonctionnement. Nous devons notamment nous intéresser aux cadres industriels et juridiques qui entourent ces mécanismes, et non pas au seul système.

Nous croyons que les recommandations du présent rapport ne vont pas assez loin pour ce qui est de la procédure d’acquisition d’équipements militaires.  Certes, nous croyons que nos militaires méritent ce qu’il y de mieux, mais nous devons néanmoins nous assurer que le rapport qualité-prix est correct. Nous sommes particulièrement inquiets de cette tendance à octroyer des marchés publics sans appel d’offres au nom de soi-disant besoins urgents. On ne peut constamment invoquer la sécurité nationale ou les impératifs d’une mission, surtout si nous savons que les équipements ne seront prêts qu’après la date où lesdites missions prennent fin.

Il faudra également s’assurer que les contribuables canadiens en ont pour leur argent et que les sommes dépensées ont de réelles retombées pour notre industrie et nos régions.

Nous sommes particulièrement inquiets de voir à quel point le présent gouvernement abdique la souveraineté de notre pays en déléguant littéralement à des entreprises étrangères son pouvoir d’adjuger des marchés publics d’entretien de matériels militaires. Ces marchés publics sont une source essentielle de retombées pour notre industrie aérospatiale, qui devient complètement à la merci des entreprises étrangères. Nous appréhendons d’ailleurs un revirement où l’on pourrait se contenter d’un achat  « clé en main » et laisser le soin au fabricant d’entretenir l’équipement vendu à nos Forces armées.

Enfin, nous estimons important de mettre en place des mesures de vérification (« check and balance ») plus adéquates permettant d’évaluer la pérennité de notre politique d’évaluation des acquisitions. Pour ce faire, nous proposons :

  1. de mettre en place une nouvelle structure (l’agence d’acquisitions militaires) ;
  2.  assurer une plus grande transparence du ministre de la Défense ;
  3. Assurer un meilleur équilibre entre les civils et les militaires au ministère de la Défense, surtout en ce qui touche la procédure d’acquisitions ;
  4. Enfin, se donner les moyens d’aller plus loin que les vérifications internes en créant un organisme doté de pleins pouvoirs judiciaires lui permettant de renégocier des marchés déjà attribués et d’engager des poursuites civiles et pénales le cas échéant (l’inspecteur général).

D’après les témoignages que nous avons recueillis, le Parti libéral du Canada recommande que les six mesures suivantes soient prises. Les trois premières concernent le système d’adjudication des marchés des Forces armées, la quatrième concerne le cadre industriel, la cinquième concerne le cadre juridique, et la dernière préconise la création d’un inspecteur général investi des pleins pouvoirs juridiques, de vérification, autorisé à porter plainte le cas échéant et à renégocier des marchés.

  1. SYSTÈME D’ADJUDICATION DES MARCHÉS PUBLICS DES FORCES ARMÉES
  2. Nous avons établi qu’aucun ministre n’est responsable de l’adjudication des m archés publics des Forces armées. Cela est inacceptable. C’est pourquoi :

    RECOMMENDATION 1
    Les organismes chargés des marchés du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux du Canada et ceux qui sont chargés des marchés publics du ministère de la Défense nationale devraient être fusionnés en une seule agence appelée Adjudication des marchés publics des Forces canadiennes (AFC), qui rendrait des comptes au ministre de la Défense nationale.
    Cela permettra de créer enfin une seule agence responsable de l’adjudication des marchés publics des Forces armées. Cela réduira également les coûts et les délais d’approvisionnement pour l’armée. Cette recommandation est essentielle à la réforme du système d’adjudication des marchés publics de la défense canadienne.

    Avec un seul ministère responsable de l’adjudication des marchés publics des Forces armées, il serait possible d’exiger des comptes en matière de rentabilité. C’est pourquoi :

    RECOMMENDATION 2
    Le ministre de la Défense nationale devrait présenter un rapport annuel…
    A)… sur les coûts réels à terme de ses plus importants programmes, en les comparant avec les coûts estimés au départ.
    B)… sur les progrès accomplis grâce à ses plus importants programmes, en comparaison avec les objectifs de départ.
    Tout écart entre les coûts et progrès réels et les objectifs de départ devrait être classé selon les catégories suivantes :
       a) En attente d’approbation du gouvernement
       b) Retards internes
       c) Retards dus au fournisseur
       d) Modification de la portée du programme
    C) … sur le rapprochement entre coûts réels et estimés du marché public national.

    Il est primordial que toute procédure décisionnelle passe le test de la perception (« the smell test »). Il est essentiel que les Canadiens aient l’impression que tout est transparent et qu’il n’y a aucune apparence de conflit d’intérêts à quelque étape que ce soit. Les acquisitions de matériels militaires par des militaires laissent trop souvent, à tort ou à raison, les gens perplexes, voire cyniques, sur la légitimité même de la procédure. Par conséquent,

    RECOMMANDATION 3
    Une plus grande place doit être accordée aux civils dans la procédure des acquisitions au ministère de la Défense. Il est essentiel que nous puissions réé quilibrer le ratio civils/militaires à l’intérieur du ministère de la Défense nationale.

  3. VOLET INDUSTRIEL
  4. Des milliards de dollars sont consacrés chaque année aux marchés publics de la défense. Naturellement, l’industrie militaire canadienne devrait pouvoir récolter d’importants bénéfices, et les Canadiens devraient avoir accès à ces nouveaux emplois qualifiés. Mais notre politique est pratiquement inexistante et date de plusieurs décennies. À l’heure actuelle, seuls les marchés touchant les munitions et la construction de navires ne sont ouverts qu’aux entreprises canadiennes. D’autres pays sont en train de réévaluer leur politique en matière d’industrie militaire, mais nous trainons la patte. Ainsi,

    RECOMMANDATION 4
    Le ministre de l’Industrie devrait mener une évaluation de notre secteur industriel afin de recommander quelles activités devraient être maintenues au Canada.

  5. CADRE JURIDIQUE
  6. Le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE) a reçu comme mission d’entendre les plaintes liées aux marchés publics de la défense. Ce tribunal propose d’importants mécanismes de redressement. Toutefois, nous l’avons vu, sa mission est trop générale (une entreprise n’a pas besoin de présenter d’offres pour un marché public pour porter plainte) et ses normes d’évaluation des activités sont trop sévères (agir de manière raisonnable n’est pas suffisant). En outre, dans les décisions futures sur ces marchés publics importants et complexes, ceux qui prennent des décisions devraient être tenus de s’y connaître en adjudication de marchés publics. Mais aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Ainsi,

    RECOMMENDATION 5
    Le ministre des Finances devrait :

    1. Modifier l’énoncé de mission du TCCE de façon qu’une norme définissant le caractère raisonnable soit la base des règlements, et que le plaignant soit obligé d’avoir tenté d’obtenir un marché public et de montrer que n’eut-été du grief, il aurait obtenu ce marché, pour que sa plainte soit recevable.
    2. Nommer au sein du TCCE des décideurs qui ont de l’expérience dans l’adjudication des marchés publics.
  7. INSPECTEUR GÉNÉRAL

Les marchés publics doivent passer « le test de la perception ». Nous ne pouvons continuer de choisir l’équipement en traçant simplement une « ligne dans le sable », pour reprendre l’expression utilisée par le chef d’état-major, le général Hillier. Nous devons savoir que l’équipement que nous achetons a fait l’objet d’un véritable appel d’offres et qu’il répondra, au mieux et au meilleur prix, aux besoins à long terme.

La meilleure manière d’y parvenir est de nommer au ministère de la Défense un inspecteur général qui aurait tous pouvoirs pour étudier les mesures prises par le gouvernement, le ministère de la Défense et les marchés publics. Cet inspecteur examinerait les activités pour s’assurer qu’elles sont conformes aux politiques générales établies par le gouvernement. Son bureau aurait pour mission de déceler le gaspillage et d’enquêter sur de possibles malversations ou mauvais usages des fonds. En outre, ce nouvel inspecteur général devrait avoir le pouvoir de rouvrir des marchés publics et de porter des accusations si nécessaire.  Ainsi,

RECOMMANDATION 6
Le ministère de la Défense nationale doit créer le poste d’inspecteur général (IG) avec les outils et le financement nécessaires pour qu’il puisse s’acquitter de ses missions. Cette personne relèverait du ministre de la Défense nationale et aurait tous les pouvoirs d’intervention, de vérification et d’enquête afférents, tant sur le plan militaire que sur le plan judiciaire. 

Il est essentiel qu’au sein même des Forces armées canadiennes, nous puissions avoir un organisme indépendant, redevable au ministre, capable d’évaluer et de suivre toutes les étapes de la procédure d’acquisition afin de prévenir tout imbroglio administratif et s’assurer que les intérêts des contribuables et des militaires sont compatibles. Nous avons besoin cependant d’un organisme ayant des pouvoirs plus grands que la simple vérification et recommandation. Il est impératif, dans l’intérêt public, de le doter d’un pouvoir de prévention mais également d’un pouvoir d’intervention et d’enquête judiciaire permettant la réouverture des marchés, voire la capacité de porter des accusations au pénal et au civil dans les cas d’abus, de malversations, de fraude ou d’incapacité à respecter les objectifs fixés dans le marché conclu. Plusieurs pays comme la France, la Grande-Bretagne, la Pologne, la Roumanie et les États-Unis se sont dotés d’un organisme semblable, qui relève soit du ministère des Finances, soit de la Police nationale, soit du ministère de la Défense.

CONCLUSION
Le Parti libéral du Canada propose une série de recommandations supplémentaires au dit rapport afin de nous assurer que la procédure d’acquisition des équipements militaires est plus transparente, plus efficace, plus respectueuse des contribuables. Il s’agit de concilier les besoins légitimes de nos militaires et l’incontournable nécessité d’appliquer des principes moteurs et une procédure de reddition de comptes dans une structure permettant de prévenir les imbroglios et impairs et d’y remédier. Il va de soi que nous pensons que la nouvelle structure proposée doit prévoir une procédure décisionnelle également flexible et pouvoir s’appliquer aux cas urgents (et exceptionnels). Nous croyons que nous devons fournir de bons équipements à nos troupes, mais nous croyons également qu’il faut aussi faire preuve de diligence. Nous devons établir des mécanismes de vérification au ministère de la Défense nationale en réorganisant le ministère afin de rendre plus transparent la procédure d’adjudication des marchés publics et d’assurer la reddition de comptes pour les décisions qui sont prises. Nous avons besoin d’une agence d’experts indépendante qui pourra nous assurer que tous les marchés publics sont accordés selon le mérite et ne sont pas perçus comme la décision d’une seule personne qui aurait choisi ses amis.

Toutes les mesures supplémentaires proposées, chapeautées par l’inspecteur général (IG), permettront d’améliorer la procédure d’acquisition actuelle, de répondre aux objectifs militaires fixés par le gouvernement (et nos Forces armées) et de protéger l’intérêt public.