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PACP Rapport du Comité

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Le Chapitre 3, La Convention définitive des Inuvialuit du Rapport d'octobre 2007 du vérificateur général du Canada

Introduction

En 1984, après 10 ans de négociations, le gouvernement fédéral et les Inuvialuit ont signé la Convention définitive des Inuvialuit (la Convention). Aux termes de celle‑ci, les Inuvialuit ont obtenu quelque 91 000 kilomètres carrés de terres et un paiement total de près de 170 millions de dollars; en contrepartie, ils ont renoncé à 335 000 kilomètres carrés des terres qu’ils revendiquaient initialement.

Les revendications territoriales globales reposent sur l’affirmation de droits ancestraux et du titre autochtone sur des terres qui n’ont jamais été visées par un traité ou un autre acte juridique. Les ententes sur les revendications territoriales visent à procurer une certitude à toutes les parties et à clarifier les droits des groupes autochtones sur les terres et les ressources de manière à faciliter l’autosuffisance des Autochtones et la croissance économique de leurs collectivités. Les ententes sur les revendications territoriales globales confèrent des droits déterminés, des indemnités et d’autres avantages en échange de la renonciation à la revendication du titre ancestral sur l’ensemble ou une partie des terres en question.

Le Bureau du vérificateur général a vérifié la façon dont le gouvernement fédéral s’est acquitté des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention[1]. La vérification a porté sur les mesures prises par Environnement Canada, l’Agence Parcs Canada, Pêches et Océans Canada, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada ainsi qu’Affaires indiennes et du Nord Canada (AINC). Plus précisément, les vérificateurs se sont penchés sur les mesures prises par le gouvernement fédéral pour satisfaire à un certain nombre d’obligations fédérales particulières. Ils ont examiné la façon dont AINC a prévu, mené et surveillé l’exécution des obligations du Canada selon la Convention. Ils ont de plus évalué la mesure dans laquelle AINC a surveillé la réalisation des principes de la Convention et a produit des rapports à ce sujet, et la façon dont il l’a fait.

Le 11 mars 2008, le Comité a consacré une réunion à l’examen du chapitre du rapport du Bureau du vérificateur général portant sur la Convention. Ronnie Campbell, vérificateur général adjoint, et Frank Barrett, directeur principal, du Bureau du vérificateur général, étaient présents à cette occasion. Le Comité a en outre entendu les témoins suivants d’AINC : Michael Wernick, sous-ministre; Michel Roy, sous-ministre adjoint principal, Revendications et gouvernement indien; et Terry Sewell, directeur général, Direction générale de la mise en œuvre.

Plan d’action et rapport d’étape

Le Comité croit que les organisations gouvernementales devraient être en mesure de présenter un plan d’action au Comité avant de comparaître devant lui, en particulier lorsque le dépôt du rapport de vérification date de plusieurs mois. Toutefois, dans ce cas‑ci, M. Wernick a expliqué au Comité que, de concert avec le Bureau du vérificateur général, AINC travaillait à l’élaboration d’un plan d’action comportant des délais réalistes pour l’application des recommandations et que celui-ci serait prêt d’ici le 30 avril.  L’échéance étant dépassée, le Comité attend impatiemment le plan d’action en question. Le Comité souscrit à l’ensemble des recommandations formulées dans le rapport de vérification et estime essentiel que le ministère prépare un plan d’action pour y donner suite. C’est pourquoi il recommande :

Recommandation 1
Que d’ici le 30 juin 2008, Affaires indiennes et du Nord Canada présente au Comité des comptes publics, comme il s’est engagé à le faire, un plan d’action pour expliquer comment il compte s’y prendre pour mettre en œuvre les recommandations énoncées dans le chapitre 3 : La Convention définitive des Inuvialuit, du rapport d’octobre 2007 de la vérificatrice générale.

Étant donné la nécessité de démontrer un réel engagement à l’égard de la Convention, le Comité aimerait être tenu au courant des progrès accomplis par AINC en ce qui concerne la mise en œuvre des recommandations de la vérificatrice générale. C’est pourquoi il recommande :

Recommandation 2
Que d’ici le 31 mars 2009, Affaires indiennes et du Nord Canada présente au Comité des comptes publics un rapport d’étape sur la mise en œuvre des recommandations énoncées dans le chapitre 3 : La Convention définitive des Inuvialuit, du rapport d’octobre 2007 de la vérificatrice générale.

Transferts de terres

La région désignée des Inuvialuit comprend 91 000 kilomètres carrés de terres transférées. Toutefois, certaines terres de ce secteur demeurent la propriété de la Couronne. Le gouvernement fédéral est tenu, aux termes de la Convention, de remettre aux Inuvialuit les terres dont il cesse d’avoir besoin. Les vérificateurs s’attendaient à ce qu’AINC ait recensé les terres ne servant plus à la Couronne, pour les remettre sans tarder aux Inuvialuit. La vérification a révélé que le gouvernement fédéral n’a plus besoin de 11 des 20 parcelles réservées au départ, ni de certaines portions de deux autres parcelles. Entre 1986 et 2005, le gouvernement a cessé d’utiliser ces terres. La vérification a aussi permis de constater qu’AINC n’a jamais établi de processus permettant aux organisations fédérales de remettre aux Inuvialuit les parcelles de terre, et que les agents d’AINC ne sont pas arrivés à s’entendre entre eux sur la façon de procéder, ni sur leurs rôles et responsabilités.

La vérification a également révélé qu’AINC a transféré par inadvertance des terres sur lesquelles se trouvaient des structures municipales appartenant au gouvernement territorial, ainsi qu’une portion de la piste d’un aéroport appartenant à Transports Canada. En 1991, AINC avait convenu de préciser quelles terres pourraient être remises aux Inuvialuit en contrepartie de la piste de l’aéroport. Le ministère n’a toutefois pas fait connaître ses critères de sélection aux Inuvialuit avant 2002. Depuis, AINC a eu de nombreuses discussions avec les Inuvialuit sur les parcelles de terres à échanger en contrepartie de la piste, mais il n’a pas établi de processus permettant la recherche active de terres de remplacement. Au moment de la vérification, les discussions entre les Inuvialuit et AINC étaient dans une impasse et le dossier avait été soumis à l’arbitrage. M. Wernick a appris au Comité que les négociations avec les Inuvialuit et les autres intervenants fédéraux sont maintenant terminées et qu’on s’attend à ce que toutes les parties intéressées donnent leur accord définitif au cours des six prochains mois[2]. Le Comité trouve consternant qu’il ait fallu si longtemps pour corriger cette erreur de transfert de terres et arriver à une entente et il en déduit qu’AINC n’accorde pas une grande priorité à la mise en œuvre de la Convention.  Pour s’assurer que le ministère fait aboutir le transfert de terres, le Comité recommande :

Recommandation 3
Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada fournisse au Comité des comptes publics confirmation que le transfert de terres en contrepartie de la piste de l’aéroport a bel et bien eu lieu après l’approbation finale de l’opération et que toutes les parties concernées sont satisfaites de l’arrangement.

Dans sa réponse à la recommandation des vérificateurs selon laquelle AINC devrait élaborer et mettre en œuvre un processus clair pour garantir l’échange de terres en temps voulu aux termes de la Convention, le ministère a indiqué qu’il allait documenter les processus exposés dans la Convention afin de pouvoir les utiliser dans d’autres échanges de terres et que des lignes directrices allaient être recommandées pour chaque étape du processus d’ici avril 2009. Le Comité trouve désolant de constater que les processus devant orienter le transfert de terres n’ont toujours pas été établis, alors que la Convention date déjà de 23 ans. C’est pourquoi il recommande :

Recommandation 4
Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada élabore les lignes directrices devant orienter le transfert de terres aux Inuvialuit d’ici le 31 décembre 2008 et en remette copie au Comité au plus tard à cette même date.

Obligations en matière de contrats

La Convention oblige les organisations fédérales à aviser les Inuvialuit des contrats relatifs à des activités dans la région désignée, à leur octroyer tous les contrats soumis à des appels d’offres lorsqu’ils présentent la meilleure offre, et à leur concéder une « part raisonnable » des contrats attribués sans appel d’offres, s’ils peuvent fournir les biens et services à des conditions raisonnables. Elle oblige aussi les organisations fédérales à offrir aux Inuvialuit des perspectives économiques dans la région désignée. Au départ, les dispositions de la Convention relatives aux contrats devaient grandement contribuer à faire en sorte que les Inuvialuit deviennent des participants à part entière de l’économie du Nord canadien et s’intègrent à la société canadienne.

Les vérificateurs s’attendaient à ce qu’AINC et Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC) aient recensé les obligations du gouvernement fédéral à ce chapitre, aient prévu la façon de les respecter et y aient donné suite. Ils s’attendaient en outre à ce qu’AINC coordonne les activités de tous les ministères visés afin de respecter les obligations en matière de contrats prévues dans la Convention. Le Comité a pu constater au cours de sa réunion que le respect de ces obligations laissait à désirer à plusieurs égards.

Faire le suivi des contrats

La vérification a révélé que TPSGC a informé les Inuvialuit de la plupart des contrats attribués dans la région désignée, mais que les Inuvialuit n’ont pas été informés de tous les contrats à venir. Parce que TPSGC n’assure pas le suivi des contrats qui sont liés à des ententes sur des revendications territoriales particulières, il n’a pas de moyen pour déterminer le nombre total de contrats pour la région. En fait, aucune des organisations gouvernementales visées par la vérification ne dispose de moyens systématiques pour déterminer si les Inuvialuit sont avisés des contrats attribués dans la région désignée et pour suivre l’attribution de ces contrats. Elles sont donc incapables d’affirmer avec certitude qu’elles respectent leurs obligations en matière de contrats aux termes de la Convention.

Au cours de sa réunion, le Comité a été étonné de constater qu’AINC était incapable de fournir un seul exemple de contrat non soumis à un appel d’offres qui avait été attribué à quelqu’un de la région désignée des Inuvialuit. Ainsi, de l’aveu même de M. Wernick, AINC n’a « pas fait un bon travail de suivi [des contrats] par le passé [3] ».

Le rapport de vérification recommandait que les organisations visées par la Convention collaborent avec le Secrétariat du Conseil du Trésor pour mettre au point des systèmes et des méthodes leur permettant d’établir si elles respectent les dispositions de la Convention relativement aux contrats, ou pour améliorer ceux qui existent. M. Wernick a affirmé au Comité qu’AINC avait « travaillé en étroite collaboration avec le Secrétariat du Conseil du Trésor et avec Travaux publics et Services gouvernementaux Canada pour faire en sorte que les pratiques en matière de contrats reflètent nos engagements gouvernementaux[4] ». Il a aussi indiqué que la politique sur les marchés allait être modifiée au cours du prochain exercice et que les systèmes de surveillance de la conformité allaient l’être aussi pour s’harmoniser avec la nouvelle politique. Le Comité estime que le ministère doit donner suite à cet engagement et recommande en conséquence :

Recommandation 5
Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada remette au Comité des comptes publics une copie de la mise à jour de la Politique sur les marchés du Conseil du Trésor et explique dans son rapport annuel sur la Convention définitive des Inuvialuit en quoi cette mise à jour tient compte des obligations énoncées dans la Convention.

Définir l’expression « part raisonnable »

La Convention stipule que les organisations fédérales doivent attribuer aux Inuvialuit une « part raisonnable » des contrats qui touchent la région désignée et qui ne font pas l’objet d’un appel d’offres. Les vérificateurs ont fait observer qu’AINC n’a pas encore défini l’expression « part raisonnable ». Faute de définir cette expression, AINC ne peut démontrer la mesure dans laquelle les contrats fédéraux attribués dans la région désignée favorisent l’atteinte des objectifs économiques de la Convention.

En décembre 2007, AINC a obtenu un avis juridique du ministère de la Justice relativement à la définition de « part raisonnable ». Le ministère a sollicité un avis juridique parce qu’il ne voulait pas exposer le gouvernement à des poursuites dans ce dossier. Selon M. Sewell, « la prochaine étape consiste à consulter les autres signataires de la Convention afin de déterminer si nous sommes d’accord sur notre interprétation de « part raisonnable[5] ». Selon M. Sewell, il incombe à AINC, en vertu de l’entente sur la revendication territoriale, de consulter les autres partenaires afin de décider ensemble de l’interprétation à donner à l’expression « part raisonnable ». Devant cet état de fait, le Comité estime qu’en toute justice pour les Inuvialuit, le ministère doit régler la question de la définition de « part raisonnable » le plus rapidement possible. C’est pourquoi il recommande :

Recommandation 6
Que d’ici le 31 décembre 2008, Affaires indiennes et du Nord Canada s’entende avec ses partenaires de la Convention définitive des Inuvialuit sur une définition claire de l’expression « part raisonnable » et qu’il communique cette définition au Comité des comptes publics.

Le Comité souscrit à la disposition de la Convention voulant qu’une « part raisonnable » des marchés attribués sans appel d’offres soit accordée aux Inuvialuit, mais il craint cependant les abus. Aux termes de la politique du Conseil du Trésor, les marchés de moins de 25 000 $ peuvent être attribués sans appel d’offres.  Le Comité voudrait avoir l’assurance que la valeur des marchés attribués sans appel d’offres dont une « part raisonnable » doit être accordée aux Inuvialuit est calculée de la même manière que la valeur des marchés de la même catégorie attribués par d’autres entités gouvernementales.  Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 7
Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada veille à ce que la valeur des marchés ne faisant pas l’objet d’un appel d’offres dont une « part raisonnable » doit être attribuée aux Inuvialuit aux termes de la Convention définitive des Inuvialuit soit établie suivant une procédure analogue à celle qui est employée dans le cas des autres marchés attribués sans appel d’offres en ajoutant ce qui suit à la définition de « part raisonnable ».

Le fait qu’AINC a mis 23 ans avant de demander un avis juridique sur le sens à donner à l’expression « part raisonnable » est déjà embarrassant en soi. Lorsqu’on ajoute à cela que le ministère a été incapable de fournir un seul exemple de contrat non soumis à un appel d’offres lors de la réunion du Comité, il est difficile de ne pas conclure qu’AINC ne s’est guère soucié de ses obligations en matière de contrats depuis la signature de la Convention. Le Comité est fermement convaincu que pour pouvoir jouir des meilleures perspectives économiques possible, la population de la région désignée des Inuvialuit doit avoir accès aux contrats qui sont attribués dans la région, comme l’exige la Convention.

Examen des mesures économiques

La Convention exige qu’AINC et les Inuvialuit procèdent en 2000 à un examen de l’efficacité de l’article de la Convention portant sur les mesures économiques. Cet examen doit être répété tous les cinq ans jusqu’à ce que le gouvernement fédéral soit d’avis que les objectifs économiques ont été convenablement atteints.

La vérification a révélé qu’en 2001, AINC a réalisé un examen conjoint des mesures économiques avec les Inuvialuit et qu’il a alors été démontré que l’économie de la région désignée ne s’était pas améliorée depuis la signature de la Convention, que les objectifs des mesures économiques n’avaient pas été atteints et que les Inuvialuit accusaient du retard par rapport à leurs voisins du Nord. Après avoir attendu pendant 17 mois la réponse d’AINC, les Inuvialuit ont proposé 26 recommandations pour faire suite à l’examen économique. AINC a accepté de mettre en œuvre quatre des recommandations et d’en examiner huit autres. Les vérificateurs ont toutefois constaté qu’AINC n’a donné suite à aucun de ces engagements.

Bien que la Convention exige qu’AINC et les Inuvialuit réalisent un examen économique tous les cinq ans jusqu’à ce que les objectifs économiques de la Convention soient atteints, les vérificateurs ont constaté qu’AINC n’a pris aucune mesure pour entreprendre un autre examen économique. Les représentants d’AINC ont dit aux vérificateurs que les Inuvialuit ne souhaitaient pas que le ministère réalise un autre examen avant d’avoir pris au moins quelques mesures pour donner suite au premier.

Les vérificateurs ont recommandé qu’AINC s’acquitte de ses responsabilités en ce qui concerne l’examen économique, c’est-à-dire qu’il évalue les raisons de l’absence de progrès constatée lors du premier examen, prenne des mesures pour donner suite à cet examen et dirige une évaluation conjointe des mesures économiques tous les cinq ans, comme l’exige la Convention. En guise de réponse, le ministère a fait valoir qu’il avait créé un groupe de travail qui, entre autres choses, doit déterminer d’ici mars 2009 les motifs de l’absence de progrès. Le Comité trouve tout à fait inacceptable le temps mis à donner suite au premier examen et comprend mal pourquoi AINC a besoin d’autant de temps, jusqu’en mars 2009, pour évaluer son inaction à la suite d’un examen économique qui date déjà de 2001.

Au cours de la réunion, M. Wernick a dit au Comité qu’AINC avait accordé des fonds aux Inuvialuit afin qu’ils évaluent les débouchés économiques de chacune de leurs six collectivités. L’évaluation devrait être terminée en 2008‑2009. Même si le Comité se réjouit de cette initiative, il n’en demeure pas moins consterné de voir que le ministère n’a pas encore donné suite aux résultats du premier examen, comme il s’y était engagé. Le Comité croit farouchement que la viabilité des collectivités dépend de la vigueur de leur économie. Afin de responsabiliser encore davantage le ministère, le Comité est d’avis qu’il faudrait l’obliger à faire publiquement état de ses progrès en ce qui concerne les évaluations, mais aussi en ce qui a trait aux mesures prises pour remédier aux problèmes relevés lors de ces évaluations. C’est pourquoi il recommande :

Recommandation 8
Que dans ses rapports annuels sur la Convention définitive des Inuvialuit, Affaires indiennes et du Nord Canada fasse le point sur l’état d’avancement de l’évaluation des mesures économiques, et qu’une fois l’évaluation terminée, il produise des rapports d’étape sur les mesures prises pour remédier aux problèmes relevés lors de cette évaluation.

Surveillance de l’application des principes

Le premier article de la Convention énonce les trois principes suivants, qui constituent les objectifs fondamentaux formulés par les Inuvialuit et reconnus par le Canada :

  • sauvegarder l’identité culturelle et les valeurs des Inuvialuit au sein d’une société nordique en voie d’évolution;
  • permettre aux Inuvialuit d’être des participants à part entière de la société ainsi que de l’économie nordique et nationale;
  • protéger et préserver la faune, l’environnement et la productivité biologique de l’Arctique.

Lors de la signature de la Convention en 1984, AINC a reçu le mandat de coordonner la mise en œuvre, tandis que les autres organisations fédérales devaient s’acquitter des obligations liées à leurs portefeuilles respectifs. En 1990, à la suite de sa vérification du Programme des affaires du Nord, le Bureau du vérificateur général a fait observer qu’AINC avait omis de surveiller l’application du principe de la Convention concernant l’économie. En 1994, AINC a réagi en élaborant un cadre d’évaluation économique afin de surveiller la réalisation des objectifs économiques de la Convention. Les vérificateurs ont toutefois constaté lors de leur dernière vérification que ce cadre n’avait pas été mis en application.

Encore une fois, en 2003, dans le cadre d’une vérification du transfert des responsabilités fédérales à la population du Nord, la vérificatrice générale a constaté que, dans sa gestion des obligations prévues aux termes de deux autres ententes sur des revendications territoriales globales, AINC s’en était tenu uniquement à la lettre des obligations, sans tenir compte ni de l’esprit ni de l’intention des ententes. Lors de leur plus récente vérification, les vérificateurs ont encore une fois constaté qu’AINC avait adopté une position semblable en ce qui touche les principes de la Convention.

Les vérificateurs s’inquiètent de ce que le ministère ne se soucie pas d’atteindre les objectifs de la Convention. Selon eux, les représentants du ministère considèrent ces principes comme ceux des Inuvialuit et non comme ceux auxquels le Canada souscrit. C’est pourquoi ils font valoir que rien dans la Convention n’oblige le gouvernement fédéral à atteindre ces objectifs. Au contraire, les représentants du ministère ont exprimé une réticence à suivre les progrès accomplis et à en faire rapport, faisant valoir que cela reviendrait à reconnaître l’existence d’une obligation qui n’est pas expressément énoncée dans la Convention. Le ministère s’inquiète aussi du fait que, s’il faisait le suivi des progrès, on pourrait s’attendre à ce qu’il assume la responsabilité de l’application des principes en cause. Comme l’a déclaré M. Wernick au Comité, « [l]es fonctionnaires ont sans doute appris à faire preuve de la plus grande prudence lorsqu’il s’agit de reconnaître l’obligation, étant donné que nous [AINC] avons souvent fait l’objet de poursuites pour des problèmes de mise en œuvre[6] ».

La réunion a donné lieu à certains échanges au sujet de l’existence ou non d’un désaccord entre le Bureau du vérificateur général (BVG) et AINC au sujet de la nature des principes. Il est mentionné dans le chapitre du rapport consacré à cette vérification qu’AINC « n’a pris aucune mesure pour assurer la surveillance des progrès accomplis dans la réalisation des principes de la Convention. En fait, ses représentants estiment que cette responsabilité n’incombe pas au Ministère[7]. » M. Campbell du BVG a expliqué que le désaccord initial tenait au fait qu’« [à] son avis [celui d’AINC], on mesure le progrès en mesurant la mise en œuvre de chaque objectif, plutôt que de faire une évaluation globale des objectifs de la Convention [8] ». Cette question a toutefois été résolue et AINC a fait part de son intention de surveiller les progrès accomplis à l’égard de l’application des principes de la Convention. M. Wernick a déclaré qu’AINC allait mettre au point des indicateurs de rendement pour mesurer le respect des trois principes, et allait en faire rapport.

Le Comité s’explique mal la crainte d’AINC d’être poursuivi pour avoir adhéré aux principes de la Convention et trouve regrettables les conclusions qu’on pourrait en tirer. Il y a en effet lieu de s’inquiéter de ce que, par le passé, la principale préoccupation d’AINC ait été d’éviter d’être poursuivi plutôt que d’agir dans les meilleurs intérêts des Inuvialuit. Compte tenu du nombre de vérifications du Bureau du vérificateur général qu’il a fallu avant que le ministère n’entreprenne de mesurer les progrès accomplis à l’égard de l’application des principes de la Convention, le Comité aimerait avoir la preuve qu’AINC est maintenant prêt à donner suite aux recommandations du BVG. C’est pourquoi il recommande :

Recommandation 9
Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada fasse rapport des progrès accomplis à l’égard de l’application des principes de la Convention définitive des Inuvialuit dans son rapport annuel sur cette Convention.

Reddition de comptes

Les vérificateurs ont constaté qu’AINC n’assure pas le suivi des progrès réalisés à l’égard des obligations et ne produit pas non plus de rapport à ce sujet. En 1988, le Comité avait recommandé qu’AINC publie un rapport annuel sur la mise en œuvre et y fasse état des activités des participants fédéraux et des autres signataires en ce qui touche la Convention définitive des Inuvialuit. Toutefois, au moment où la vérification a été effectuée, AINC n’avait toujours pas publié de rapports pour les exercices 2004‑2005 et 2005‑2006. M. Sewell a indiqué que l’objectif d’AINC était de terminer le rapport annuel de 2004‑2005 d’ici le printemps 2008[9]. Un rapport qui portera sur deux ans, c’est‑à‑dire 2005 à 2007, devrait aussi être présenté à l’été 2008.

M. Wernick a fait valoir que si le ministère tarde à présenter les rapports annuels, c’est qu’il doit présenter des rapports conjoints. Ainsi, le ministère doit attendre que les autres organisations visées par la Convention aient terminé leurs parties avant de publier son rapport annuel. Le Comité trouve incroyable qu’un rapport pour l’exercice 2004‑2005 soit publié seulement en 2008, c’est‑à‑dire trois ans plus tard. Le Comité croit qu’AINC devrait exhorter ses partenaires à faire preuve de plus de diligence dans la préparation de leur contribution au rapport annuel ou devrait publier son propre rapport annuel en temps opportun en y faisant état des progrès qu’il a accomplis en ce qui concerne la mise en œuvre de la Convention, quitte à ensuite compléter ce rapport avec l’information fournie par les autres organisations. Cette solution a l’avantage d’offrir aux Inuvialuit l’occasion de se faire rapidement une idée de ce que le gouvernement fédéral a accompli dans leur région. C’est pourquoi le Comité recommande :

Recommandation 10
Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada publie son propre rapport annuel en temps opportun pour y exposer en détail les progrès qu’il a lui‑même accomplis à l’égard de la mise en œuvre de la Convention définitive des Inuvialuit même s’il manque des informations concernant les autres organisations parties à la Convention, mais qu’il précise lesquelles n’ont pas fourni les renseignements voulus à temps pour qu’ils figurent dans le rapport.

Pour M. Wernick, un rapport annuel présenté en temps opportun est un outil de reddition de comptes absolument essentiel au ministère pour pouvoir démontrer comment il suit les progrès accomplis à l’égard de l’application des principes de la Convention. Le Comité doute toutefois qu’un outil de reddition de comptes puisse être de quelque utilité, s’il est publié avec trois ans de retard. Pour que les rapports annuels puissent être effectivement utiles au ministère comme outils de reddition de comptes, ils doivent être publiés dans de meilleurs délais.

En 2002, le BVG a examiné le nombre de rapports que les Premières nations devaient présenter aux organisations fédérales. Il a alors constaté que bon nombre des rapports exigés étaient inutiles et que le gouvernement fédéral ne les utilisait pas. Dans un rapport Le point publié en 2006, le BVG s’est fait dire qu’AINC recevait à lui seul chaque année plus de 60 000 rapports préparés par plus de 600 Premières nations. Le gouvernement fédéral impose de nombreuses exigences aux Premières nations en matière de rapports afin d’améliorer leur reddition de comptes à l’égard de l’aide gouvernementale qu’elles reçoivent. Pourtant, AINC semble n’avoir lui-même aucun véritable mécanisme pour rendre compte à sa clientèle. Le ministère est censé publier des rapports annuels sur la mise en œuvre des ententes sur les revendications territoriales, mais sa feuille de route est assez peu reluisante à cet égard puisque ces rapports sont toujours publiés en retard.

Le Comité croit que le ministère doit être tenu responsable de l’apparente nonchalance dont il fait preuve à l’égard de la mise en œuvre des obligations permanentes conférées par la Convention. L’une des façons d’obliger les ministères à rendre compte de leurs activités est le Rapport ministériel sur le rendement (RMR). L’objectif du RMR est de faire rapport des résultats et des réalisations afin de renseigner les parlementaires sur la façon dont le gouvernement gère les fonds publics. Pour être utile, le RMR doit présenter un tableau équilibré : cela exige du ministère qu’il reconnaisse qu’un rendement n’a pas été à la hauteur des attentes, qu’il en explique les raisons et qu’il fasse état des mesures correctives qui seront prises à l’avenir.

Voici ce que signale AINC dans son Rapport ministériel sur le rendement de 2006‑2007 :

  1. […][I]l sera néanmoins nécessaire de trouver de nouvelles stratégies et de nouvelles mesures pour négocier les ententes sur les revendications territoriales globales et sur l’autonomie gouvernementale. Ces stratégies et ces mesures devront tenir compte davantage des besoins des Inuits et des Premières nations et pouvoir s’adapter à l’environnement juridique et politique en constante évolution[10];
  2. AINC reconnaît également qu’il doit travailler plus efficacement avec ses partenaires fédéraux, provinciaux, territoriaux et autochtones à la mise en œuvre des ententes sur les revendications territoriales globales et sur l’autonomie gouvernementale afin de surmonter les différends et les obstacles sans avoir à recourir aux tribunaux [11].

Le Comité ne croit pas qu’AINC donne ici un aperçu équilibré de son rendement en ce qui concerne la mise en œuvre des ententes sur les revendications territoriales globales, compte tenu en particulier des nombreux rapports de la vérificatrice générale qui mettent constamment en évidence la piètre performance du ministère à ce chapitre. Le Comité reconnaît que les RMR ne peuvent faire état dans le détail de tous les défis qui se posent aux ministères, mais il estime que le fait de se limiter à des énoncés du genre de ceux qui précèdent donne une fausse image du rendement du ministère.

Le Comité a appris que le ministère avait un site Internet consacré aux ententes sur les revendications territoriales globales[12]. Ce site ne fournit toutefois aucune information sur le rendement. Sans cette information, il est difficile d’obliger le ministère à rendre compte de son rendement à l’égard non seulement de la mise en œuvre de la Convention définitive des Inuvialuit, mais aussi de toutes les ententes sur les revendications territoriales globales.

Afin de brosser un tableau plus équilibré des activités du ministère en ce qui a trait à la Convention, et aussi des autres ententes sur les revendications territoriales globales, le Comité croit qu’AINC devrait faire un meilleur usage des moyens de diffusion en ligne de ses rapports. La reddition de comptes du ministère s’en trouverait améliorée et les groupes autochtones auraient l’assurance que le ministère reconnaît ses responsabilités dans la mise en œuvre des ententes sur les revendications territoriales globales. C’est pourquoi le Comité recommande :

Recommandation 11
Qu’Affaires indiennes et du Nord Canada inclue dans son Rapport ministériel sur le rendement un lien donnant accès à un rapport en ligne faisant état de son rendement, c’est-à-dire des résultats obtenus, en ce qui concerne la mise en œuvre des ententes sur les revendications territoriales globales.

Conclusion

Le sous-ministre d’AINC, M. Wernick, a affirmé dans son exposé liminaire au Comité que « si on négocie des règlements de revendications territoriales, c’est pour donner aux communautés les outils pour se prendre en main, pour qu’elles puissent être maîtresses de leur destin, profiter des débouchés économiques, y participer et lancer leurs propres entreprises[13] ». Le Comité souscrit de tout cœur à cet objectif et se réjouit d’apprendre qu’AINC s’est acquitté de certaines de ces obligations en vertu de la Convention définitive des Inuvialuit. Toutefois, l’examen de rapports de vérification comme celui portant sur la mise en œuvre de la Convention par AINC fait douter le Comité du sérieux de l’engagement du ministère à l’égard de l’objectif énoncé par le sous-ministre.

Lors de la réunion consacrée à la mise en œuvre de la Convention définitive des Inuvialuit, le Comité a trouvé que les réponses incomplètes données par le sous‑ministre, M. Wernick, étaient pour la plupart insatisfaisantes. Au cours de certains des échanges avec les membres du Comité, M. Wernick a semblé confondre les enjeux examinés. Par exemple, il semble réticent à dire si AINC a effectivement reçu des plaintes des Inuvialuit concernant les progrès accomplis par son ministère en ce qui concerne la mise en œuvre de la Convention. De plus, le Comité a été déçu par le peu d’information que M. Wernick et le directeur général de la Direction générale de la mise en œuvre, Terry Sewell, ont pu fournir, en particulier en ce qui concerne la question des contrats attribués sans appel d’offres.

De même, M. Wernick a affirmé ce qui suit dans son exposé liminaire :

Tout manquement de notre part à l’une ou l’autre des dispositions de la Convention définitive des Inuvialuit mine non seulement les rapports que nous entretenons avec cette communauté autochtone, mais ternit également la crédibilité durement gagnée par le gouvernement fédéral, au moment même où il entame la négociation d’accords avec d’autres communautés autochtones [14].

Le Comité est d’accord avec cette affirmation et craint que le rendement d’AINC jusqu’ici en ce qui a trait au respect de ses obligations à long terme en vertu de la Convention ne mine effectivement la crédibilité du gouvernement fédéral. Compte tenu de l’importance d’établir une relation de confiance avec les groupes autochtones et de préserver la crédibilité du gouvernement fédéral, qui continue à signer des ententes sur des revendications territoriales globales, le Comité espère sincèrement qu’AINC réagira et donnera suite à toutes les recommandations de la vérificatrice générale.

[1]
Bureau du vérificateur général du Canada, Rapport d’octobre 2007, « Chapitre 3 ‑ La Convention définitive des Inuvialuit ».
[2]
Réunion no 21, 1115.
[3]
Réunion no 21, 1200.
[4]
Réunion no 21, 1115.
[5]
Réunion no 21, 1155.
[6]
Réunion no 21, 1205.
[7]
Bureau du vérificateur général du Canada, rapport d’octobre 2007, «  Chapitre 3 ‑ La Convention définitive des Inuvialuit ». Paragraphe 3.83. 
[8]
Réunion no 21, 1140.
[9]
Réunion no 21, 1235.
[10]
Affaires indiennes et du Nord Canada, Rapport ministériel sur le rendement 2006-2007, p. 18.
[11]
Ibid., p. 21.
[12]
Site Internet d’Affaires indiennes et du Nord Canada, « Ententes », http://www.ainc-inac.gc.ca/pr/agr/index_f.html.
[13]
Réunion no 21, 1215.
[14]
Réunion no 21, 1110.