Que, de l’avis de la Chambre, puisque le premier ministre s’est engagé à éliminer le déséquilibre fiscal et qu’une telle élimination ne peut se faire sans l’élimination du pouvoir fédéral de dépenser dans les champs de compétence du Québec et des provinces, le projet de loi que le gouvernement présentera sur le pouvoir fédéral de dépenser devra minimalement prévoir pour le Québec un droit de retrait sans condition et avec pleine compensation financière pour tout programme fédéral, existant ou non, cofinancé ou non, qui empiète dans les champs de compétence du Québec.
— Monsieur le Président, le libellé de cette motion peut sembler compliqué, mais au fond, le sujet est assez simple.
Est-il normal que le gouvernement fédéral se permette de dépenser dans tous les domaines qu'il désire, sans égard pour le partage des pouvoirs au Canada?
Est-il normal que le Québec soit obligé de se plier aux priorités et aux exigences fédérales, y compris dans les domaines où il est censé être entièrement autonome et souverain?
Est-il normal qu'Ottawa perçoive une fois et demie plus d'impôts que ce dont il a besoin pour ses propres responsabilités, et que le Canada se serve de cet argent pour dicter au Québec comment organiser sa propre société?
Est-il normal qu'Ottawa occupe tellement d'espace que la nation québécoise n'a même pas la capacité de cotiser pour réaliser les projets qu'elle choisit, tout simplement parce que l'obèse d'à côté occupe toute l'assiette fiscale?
Eh bien non, rien de tout cela n'est normal.
Comme le disait Robert Bourassa en 1970:
Le Québec continue à croire que [...] ce pouvoir [...] de dépenser dans des matières relevant de la compétence exclusive des provinces devrait tout simplement ne pas exister et que le gouvernement fédéral ferait mieux d'y renoncer tout bonnement.
Nous sommes aujourd'hui au coeur d'un vieux contentieux entre le Québec et le Canada, un contentieux qui existe depuis toujours. En 1867, les Canadiens anglais souhaitaient un Canada centralisé où le gouvernement central pourrait dicter les priorités pour tout le pays — y compris le Québec — et ce, dans tous les domaines. Les discours de John A. Macdonald sont éloquents à cet égard.
Aujourd'hui, on retrouve ce même courant chez ceux qui défendent le pouvoir fédéral de dépenser et de fixer des priorités dans tous les domaines. Mais les Québécois ne voulaient pas être contrôlés par la nation voisine en 1867. Ils n'auraient jamais accepté que le Canada leur dicte comment organiser leur société, et ils ne le veulent toujours pas aujourd'hui. Et c'est pour cela que la Constitution de 1867 prévoit un partage des pouvoirs étanche et qu'Ottawa n'a pas le droit de légiférer dans des domaines qui relèvent du Québec.
Comme toutes les nations, nous avons le droit de contrôler le développement de notre propre société. Sans cela, jamais le Québec n'aurait adhéré à la fédération canadienne. À l'époque, les nationalistes québécois croyaient sincèrement qu'ils avaient obtenu toute l'autonomie nécessaire pour que le Québec assume lui-même son propre développement.
Le journal La Minerve, dans son éditorial du 1er juillet 1867, disait ceci: « [...] comme nationalité distincte et séparée, nous formons un État dans l'État, avec la pleine jouissance de nos droits, la reconnaissance formelle de notre indépendance nationale. »
Mais voilà, cette promesse faite au Québec ne cesse d'être reniée. Ottawa ne peut pas légiférer dans les domaines qui relèvent du Québec? Qu'à cela ne tienne, il le fera par la porte d'en arrière.
En occupant l'espace fiscal comme il le fait, Ottawa a beaucoup trop de marge de manoeuvre financière. Et avec l'argent, vient le pouvoir de l'argent, ne l'oublions pas. Ainsi, puisque l'Assemblée nationale du Québec est seule à pouvoir légiférer dans certains domaines, il suffit qu'Ottawa l'embauche, avec l'argent du déséquilibre fiscal, pour qu'elle implante au Québec les priorités du Canada.
L'autonomie législative du Québec n'est qu'une petite difficulté qu'il peut aisément contourner. C'est simple, c'est logique, c'est même brillant quand on y pense, mais c'est inacceptable. Jamais la nation québécoise n'acceptera d'être reléguée au rang de sous-traitant de la nation voisine, jamais!
« J'ai, pour ma part, beaucoup de mal à concilier les valeurs qui sont à l'origine de la fédération canadienne avec l'idée d'un pouvoir de dépenser qui ne soit nullement soumis au partage des compétences. » Cela, ce n'est pas moi qui le dis, c'est Benoît Pelletier, le ministre québécois des Affaires intergouvernementales canadiennes qui le disait le 24 mars 2004. C'est un fédéraliste bon ton, ne l'oublions pas.
Ce n'est pas abstrait, ce que je dis, c'est une question de dignité. Imaginez un couple dont l'un des conjoints a des revenus plus importants que ce dont il a besoin pour assumer les responsabilités familiales qui lui sont dévolues et dont l'autre conjoint n'a pas de revenus suffisants pour assumer ses responsabilités familiales, même celles qui sont des besoins essentiels. C'est cela, le déséquilibre fiscal. Imaginez que le premier conjoint, bon prince, dise à l'autre: « Écoute, ce n'est pas grave si tes revenus ne te permettent pas de remplir tes responsabilités. Moi, je vais te transférer de l'argent. Bien sûr, comme c'est mon argent, je vais décider de ce que tu vas en faire. » Cela, ce sont les transferts pour la santé, l'éducation et les programmes sociaux.
Et comme si ce n'était pas déjà assez, imaginez que le plus riche membre du couple décide de s'ingérer directement dans les affaires de l'autre, d'aller au magasin pour lui acheter des vêtements selon ses goûts à lui, de commander directement pour l'autre partie au restaurant et de passer par-dessus sa tête pour parler en son nom à ses amis. Au bout du compte, le conjoint le moins fortuné n'a plus aucun pouvoir de décision. Il n'a plus prise sur sa propre vie parce que c'est l'autre qui se sert de son argent pour le contrôler complètement. C'est cela, le pouvoir de dépenser.
Ce sont les transferts qui réduisent l'autonomie du Québec et ce sont les nombreuses ingérences fédérales dans ses affaires. Ce sont ses bourses d'étude ou de recherche universitaire, ou ses interventions malvenues en santé. Ce sont les transferts aux familles, que ce soit la prestation fiscale pour enfants ou les 1 200 $ des conservateurs. C'est la Commission de la santé mentale annoncée cet automne.
Le déséquilibre fiscal et le pouvoir de dépenser dans les champs de compétence du Québec, ce sont les deux facettes d'une même médaille qui s'entretiennent l'une l'autre et empêchent la nation québécoise de contrôler et organiser elle-même sa propre société en fonction de ses propres besoins et de ses propres priorités.
Tant qu'Ottawa a assez d'argent pour s'ingérer dans les domaines qui ne relèvent pas de lui, cela veut dire qu'il y a encore déséquilibre fiscal. Quand j'entends des députés conservateurs dire que le déséquilibre fiscal est réglé, je me dis qu'ils n'ont rien compris. Si le conjoint contrôlant de tout à l'heure décide de transférer plus d'argent à l'autre conjoint, est-ce qu'on règle le déséquilibre de revenus dans le couple? Non. En fait, celui qui a plus d'argent contrôle encore plus l'autre, et celui qui a le moins d'argent a encore moins de pouvoirs de décision sur sa propre vie.
Lors de la dernière élection, le disait que « le déséquilibre fiscal, c'est plus qu'une question de gros sous. » Je conviens de cela. Il disait aussi que le pouvoir de dépenser exorbitant du gouvernement fédéral avait donné naissance à un fédéralisme paternaliste et dominateur. Je conviens encore de cela. Au bout du compte, le déséquilibre fiscal et le pouvoir de dépenser, c'est une question de pouvoir.
Est-ce que ce sont les Québécois ou les Canadiens qui ont le pouvoir d'orienter le développement du Québec? C'est ce dont on discute aujourd'hui car, aujourd'hui, nous donnons au l'occasion d'accorder le geste à la parole, de démontrer que son fédéralisme d'ouverture, c'est plus qu'un slogan électoral, que ses promesses au Québec, ce n'est pas une tromperie.
Permettez-moi d'être sceptique, cependant. Je vois bien que le aime le pouvoir et qu'il n'aime pas le partager. Depuis son élection, il s'en est pris à tous les contre-pouvoirs: les journalistes, les juges, les groupes organisés — de par l'abolition du Programme de contestation judiciaire —, les comités parlementaires dont il voulait saboter les travaux, et le Sénat qui subit ses foudres.
Cet automne, ce sont les représentants du peuple au grand complet qu'il veut conscrits: ou bien les députés conviennent de tout ce qu'il dit ou bien il ordonne la dissolution de la Chambre des communes.
En fait, ce premier ministre s'en est pris à tous les contre-pouvoirs. Tous! Et au sein de son parti, il exerce un contrôle absolu en réduisant ses députés au silence et en ne permettant pas à ses ministres d'effectuer des dépenses qui ne cadrent pas avec les programmes que son bureau a acceptés.
Depuis son élection, il n'a pas partagé un gramme de son pouvoir au Québec. Son pouvoir, il le garde jalousement, y compris le plus important d'entre eux, le pouvoir de dépenser. On verra au moment du vote si le fédéralisme d'ouverture est plus qu'un slogan.
Le pouvoir de dépenser, c'est plus qu'un enjeu symbolique. C'est aussi un frein au développement du Québec. Je donne un exemple. Comme on le sait, j'ai dirigé la Fédération des femmes du Québec au début des années 2000. Il y a 24 ans, la Fédération des femmes du Québec a demandé qu'on mette en place une vraie politique familiale avec de vrais congés parentaux. Cinq ans plus tard, le gouvernement du Québec a acheté l'idée, mais Ottawa s'était déjà ingéré dans ce secteur par l'entremise de l'assurance-emploi.
Quand le Québec a demandé au fédéral de lui transférer les sommes pour qu'il puisse mettre en place un vrai régime d'assurance parentale, Ottawa a dit non.
Quelques années plus tard, le Québec revenait à la charge en faisant accepter le projet d'un sommet socioéconomique réunissant tous les secteurs de la société québécoise. Ottawa a encore dit non.
Puis il y a eu une résolution unanime à l'Assemblée nationale. Ottawa a encore dit non.
Le Québec est alors allé de l'avant en créant par loi son propre régime d'assurance parentale, qui entrerait en vigueur dès qu'Ottawa aurait transféré les sommes. Ottawa a encore dit non. Il y avait consensus au Québec dans un domaine qui relevait exclusivement de lui, mais ce fut non.
En fait, il aura fallu un gouvernement minoritaire à Ottawa, talonné par un fort contingent de députés du Bloc québécois pour qu'Ottawa dise enfin oui.
Celle qui voulait un congé parental pour avoir des enfants au début des années 1990 a dû attendre que sa fille finisse son baccalauréat pour que le programme voie le jour. C'est cela aussi, le pouvoir de dépenser.
On pourrait multiplier ces exemples presque à l'infini. Cela fait 42 ans que le Québec espère qu'Ottawa se retire du développement régional pour pouvoir mettre en place une vraie politique.
C'est la même chose dans le domaine de la culture ou de la recherche universitaire où Ottawa investit plus que le Québec. Il en va de même pour la promotion du français qui se heurte aux dépenses fédérales pour rendre bilingue le Québec.
Comment s'étonner d'ailleurs qu'une vague d'insécurité culturelle et identitaire traverse le Québec actuellement? Il n'est plus un domaine où le peuple québécois peut décider par lui-même de ce qui est bon pour lui, à l'abri des interventions des Canadiens.
Il y a trois ans, le Canada contrôlait 18 p. 100 du budget du gouvernement du Québec. Avec les hausses de transferts, c'est aujourd'hui 22 p. 100 du budget du Québec qui est contrôlé à partir d'Ottawa. Dans trois ans, ce sera le quart. Et le déséquilibre fiscal serait réglé? Non, il empire!
Cela m'amène à parler du discours du Trône. Que contient le discours du Trône sur le pouvoir de dépenser? Il y a des mots, mais des mots vides de sens.
L'engagement du gouvernement se limite aux nouveaux programmes. Or il dépense déjà 55 milliards de dollars dans des domaines qui ne relèvent pas de lui. C'est à peu près l'équivalent de l'ensemble du budget du Québec qu'Ottawa dépense dans les domaines qui relèvent du Québec et des provinces.
Il nous dit: « Oublions tout ça, voulez-vous? » Eh bien non, nous ne l'oublions pas.
Comme si ce n'était pas assez insignifiant, le discours du Trône ne limite même pas le pouvoir de dépenser pour tous les nouveaux programmes dans les champs de compétence du Québec. Non, il ne traite que des nouveaux programmes à frais partagés.
Ces programmes à frais partagés n'existent presque plus. Il y a le Cadre stratégique agricole. Toutefois, comme l'agriculture est une compétence partagée, il n'est pas couvert par l'engagement du discours du Trône.
Et il y a le Programme d'infrastructures. Mais le Québec a déjà obtenu le droit de sélectionner lui-même les projets. Comme le Québec en a déjà la maîtrise d'oeuvre, qu'est-ce que le discours du Trône vient changer? Rien!
Pour le reste, il n'existe plus de programmes à frais partagés.
Il y a des transferts conditionnels, mais sans réel partage des coûts. De plus, il y a des ingérences directes qui ne sont pas à frais partagés. S'il avait été pris dans les années 1940, cet engagement aurait signifié quelque chose. Aujourd'hui, c'est trois générations trop tard. Il n'y a rien, absolument rien, dans le discours du Trône.
L'an dernier, la Chambre des communes a reconnu que la nation québécoise existe. Il était temps. Toutefois, maintenant que le Canada a reconnu qu'on existe, que fait-il? C'est ce dont nous discutons aujourd'hui. Une nation, c'est plus qu'un beau mot. Reconnaître l'existence d'une nation, c'est comme reconnaître l'existence d'une personne: des droits viennent avec cela.
Car les nations, comme les personnes, ont des droits fondamentaux. Le plus fondamental d'entre eux est le droit, pour une nation, de contrôler elle-même le développement social, économique et culturel de sa propre société. C'est ce qu'on appelle le droit à l'autodétermination, que toute nation peut exercer à l'interne ou, si elle n'y parvient pas, en devenant indépendante.
Si ce droit est fondamental et inaliénable, c'est parce qu'il répond à un élan naturel et irrépressible. La nation québécoise existe. Elle a une culture, des valeurs, des préoccupations, des projets, des aspirations et des intérêts qui lui sont propres. Je crois que l'on s'entend sur ce point, puisque la Chambre l'a reconnu l'an dernier.
Cependant, on ne peut pas, d'un côté, reconnaître que la nation québécoise a le droit de faire des choix différents de ceux du Canada et, de l'autre, lui nier ce droit en maintenant le pouvoir fédéral de dépenser. Le pouvoir de dépenser est la négation de ma nation.
Je suis consciente qu'aujourd'hui, comme en 1867, les Canadiens souhaitent que le gouvernement central puisse fixer les orientations et les priorités pour tout le pays dans tous les domaines. Après tout, les provinces ont reconnu à Ottawa le rôle de chef d'orchestre du développement social en signant — sans le Québec, il faut le dire — l'Entente-cadre sur l'union sociale. C'est comme la nuit des longs couteaux, mais en plein jour.
Je sais très bien que les chances sont minces que les Canadiens acceptent de mettre fin complètement aux dépenses fédérales dans les champs de compétence des provinces. Ce serait conforme à la promesse faite au Québec, il y a 140 ans, mais cela ne correspondrait pas à leur vision du Canada.
C'est pourquoi la motion d'aujourd'hui propose un compromis en disant qu'Ottawa, au minimum, devrait accorder au Québec un plein droit de retrait pour toute dépense fédérale dans un domaine qui empiète dans les champs de compétence des provinces. Les Canadiens pourront continuer de nier à volonté l'esprit du pacte fédératif chez eux, mais pas au Québec. La seule chose qu'ils perdent est le pouvoir de conserver le Québec sous leur tutelle. Est-ce si dramatique que cela? Malgré tout, je sais que nous nous heurtons aux visions centralisatrices du Parti libéral et du NPD. Je sais aussi que nous nous heurtons au désir du qui aimerait conserver son pouvoir pour lui seul.
C'est pourquoi je lance ici un appel aux députés québécois, tous partis confondus. La motion d'aujourd'hui va dans le sens de ce que réclament tous les gouvernements du Québec depuis Duplessis, ceux de gauche comme ceux de droite, souverainistes comme fédéralistes. Elle va dans le sens des résolutions unanimes que l'Assemblée nationale du Québec a adoptées pour demander un plein droit de retrait à chaque ingérence fédérale depuis des décennies.
Que ces députés ici, en cette Chambre, soient fédéralistes ou souverainistes, rouges, bleus, jaunes ou verts, de souche ou d'adoption, peu m'importe: ils sont Québécoises et Québécois, et leur premier devoir est de représenter et de défendre le peuple qui les a élus pour parler en son nom. Il y a consensus pour dire que chez nous, c'est le Québec d'abord.
Je demande aujourd'hui à ces députés de passer par-dessus les querelles partisanes. De faire en sorte que le Canada cesse de s'ingérer dans les affaires internes du Québec par l'entremise de son pouvoir de dépenser, c'est redonner aux Québécois le pouvoir de contrôler, du moins en partie, le développement du Québec.
Je peux imaginer ce que c'est que d'être enfermé dans un parti pancanadien où les Québécoises et Québécois sont, par essence, minoritaires. Je présume que leur patron compte sur eux pour défendre les intérêts du Canada au Québec, plutôt que l'inverse...
:
Monsieur le Président, bienvenue à une autre grande mise en scène parlementaire du Bloc québécois.
Le Bloc veut parler des pouvoirs du gouvernement fédéral. Il veut en fait éliminer les pouvoirs fondamentaux exercés par le Parlement canadien depuis longtemps. Or, quel est le seul parti politique en cette Chambre qui n'exercera jamais le pouvoir? Qui est incapable d'exercer le moindre pouvoir, sauf celui de bloquer et de critiquer? Le Bloc, bien sûr.
Le Bloc, c'est le parti de l'anti-pouvoir, c'est le parti de l'impuissance. Son rêve, c'est probablement de voir le gouvernement fédéral devenir aussi impuissant que lui; un gouvernement fédéral qui abdiquerait ses responsabilités et se contenterait, comme lui, de faire des déclarations creuses, de lancer des ultimatums farfelus; un gouvernement de l'imaginaire et de l'impossible.
Je veux dire très clairement aux députés du Bloc que nous ne les suivrons pas sur cette voie. Nous n'allons pas éviscérer le gouvernement canadien parce que les bloquistes sont allergiques à la collaboration fédérale avec le Québec. Ce que le Bloc veut, selon le texte de la motion dont nous sommes actuellement saisis, c'est que le projet de loi que le gouvernement fédéral présentera sur le pouvoir fédéral de dépenser devra « minimalement prévoir pour le Québec un droit de retrait sans condition et avec pleine compensation financière pour tout programme fédéral existant ou non, cofinancé ou non, qui empiète sur les champs de compétence du Québec. »
Dans sa naïveté naturelle, à moins qu'il ne s'agisse de son anti-fédéralisme primaire, le Bloc semble penser que le pouvoir du gouvernement fédéral de lancer des nouveaux programmes soit en soi un mal diabolique, une sorte de perverse conspiration anti-québécoise. En réalité, le pouvoir fédéral de dépenser s'est révélé être, au cours des années et de notre histoire commune, un important facteur de développement social. Il a permis d'établir, de concert avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, des programmes sociaux d'envergure nationale, tels que l'assurance-maladie. Il a également joué un rôle de premier plan dans la promotion de l'égalité des chances pour tous les Canadiens. Enfin, il a contribué à assurer à nos compatriotes un accès à des programmes et à des services sociaux de base, de qualité comparable indépendamment de la région où ils vivent.
Les fondateurs de notre pays ont eu la clairvoyance d'établir un système fédéral souple afin de permettre la diversité et l'égalité partout au pays.
[Traduction]
Comme le l'a déclaré à la Chambre en réponse au discours du Trône:
En fait, la fédération de 1867 a créé l'un des ensembles d'institutions politiques les plus solides du monde qui est libre de toute tyrannie ou conquête, libre du désordre social ou du chaos économique. Le Canada, un pays qui est né en français, qui compte deux langues et de nombreuses cultures, qui célébrera bientôt le 400e anniversaire de la fondation de sa première capitale, Québec, est, nous ne devons jamais l'oublier, l'une des plus grandes réussites de l'histoire: notre Canada.
Bien sûr, je n'affirme pas que le Canada est parfait. C'est pourquoi nous nous engageons à l'améliorer. Notre gouvernement a beaucoup fait pour respecter la division fédérale des pouvoirs, pour renforcer des compétences fédérales depuis longtemps négligées, et pour coopérer avec les provinces.
Comme le l'a aussi dit:
Au cours de la prochaine session, conformément à nos pratiques gouvernementales, nous allons présenter des mesures législatives pour limiter officiellement le pouvoir fédéral de dépenser [...] dans des domaines de compétence provinciale, sans le consentement des provinces et avec la possibilité de se retirer avec une compensation.
Dans le cadre des compétences fédérales, nous allons en outre renforcer l'union économique canadienne, ce qui est une responsabilité fondamentale du gouvernement fédéral, dont il doit s'acquitter dans l'intérêt de l'ensemble des Canadiens.
[Français]
L'élimination brutale du pouvoir fédéral de dépenser, telle que proposée par le Bloc québécois, pourrait avoir des conséquences graves pour l'ensemble des Québécois et des autres Canadiens. Si vous éliminez complètement le pouvoir fédéral de dépenser, vous éliminez en même temps les paiements de transferts fédéraux en matière de santé, d'éducation et de péréquation, par exemple.
Le Bloc québécois nage en pleine contradiction. On l'a souvent entendu ici plaider pour que le gouvernement fédéral verse davantage de fonds au Québec dans divers domaines. Aujourd'hui, il veut l'élimination des transferts fédéraux. Cela doit donc demander beaucoup de souplesse, de l'acrobatie même, pour être député du Bloc québécois. Il est vrai, comme je l'ai rappelé en cette Chambre lundi dernier, que le pouvoir fédéral de dépenser, qui n'apparaît pourtant nulle part dans la Constitution canadienne, hante les relations fédérales-provinciales depuis des générations.
Toutefois, depuis notre élection, nous avons pour notre part clairement signifié notre volonté de limiter l'usage et l'utilisation du pouvoir fédéral de dépenser. Comme l'a dit le le 20 juin 2006 à Montréal: « Aucune proposition ne sera présentée au Cabinet fédéral si elle ne respecte pas la division des pouvoirs entre les gouvernements fédéral et provinciaux ».
Le fédéralisme d'ouverture, c'est de limiter le pouvoir fédéral de dépenser, dont les libéraux fédéraux, comme vous le savez, ont tant abusé.
Le discours du Trône précise par ailleurs que: « Notre gouvernement estime que les compétences constitutionnelles de chaque ordre de gouvernement doivent être respectées ».
Je rappelle aussi que le respect des compétences constitutionnelles de chaque ordre de gouvernement est un principe fondamental du Parti conservateur depuis sa fondation. C'est pourquoi d'ailleurs, guidé par notre vision d'un fédéralisme d'ouverture, notre gouvernement déposera un projet de loi, comme l'a indiqué le , qui imposera des limites explicites à l'utilisation du pouvoir fédéral de dépenser pour des nouveaux programmes à frais partagés dans les compétences exclusives des provinces. Cette loi autorisera les provinces et les territoires à se retirer de ces nouveaux programmes avec juste compensation, s'ils en offrent qui sont compatibles au niveau des objectifs nationaux.
Notre volonté de limiter le pouvoir de dépenser découle directement d'une préoccupation exprimée avec force par tous les gouvernements québécois, de Duplessis à Charest en passant par René Lévesque. D'ailleurs, le chef du Bloc québécois lui-même demandait tout récemment, et je cite: « Est-ce que le gouvernement fédéral agira, comme le veulent les rumeurs persistantes, afin d'encadrer le pouvoir fédéral de dépenser dans les champs qui sont de compétence du Québec? » La réponse au chef du Bloc québécois est oui, mais le chef du Bloc québécois est rendu ailleurs. Fidèle, bien sûr, à son habitude, il a changé d'idée. Aujourd'hui, il ne veut pas encadrer le pouvoir fédéral de dépenser comme son parti le réclame depuis 1990, il veut tout simplement jeter le cadre aux poubelles.
La racine du mal, comme je l'ai mentionné lundi, la cause profonde de l'abus du pouvoir fédéral de dépenser, sera toujours le déséquilibre fiscal. En d'autres mots, si le gouvernement fédéral ne disposait pas de revenus disproportionnés en comparaison des provinces, il serait sans doute moins tenté, et moins capable surtout, d'intervenir ailleurs que dans les domaines d'action strictement fédéraux. C'est précisément pourquoi nous avons, comme gouvernement, voulu ramener l'équilibre fiscal dans la fédération dès le Budget de 2006.
Nous, conservateurs, avons accordé des réductions d'impôt totalisant 26 milliards de dollars et nous avons: réitéré notre appui à un financement à long terme et prévisible pour les soins de santé; effectué de nombreux et de nouveaux investissements considérables dans l'infrastructure; accordé un financement de 3,3 milliards de dollars aux provinces et aux territoires afin d'atténuer des pressions à court terme dans les secteurs de l'enseignement postsecondaire, du logement abordable et du transport en commun; instauré des mesures visant à améliorer la responsabilité financière du gouvernement fédéral et la transparence budgétaire et clarifié les rôles et les responsabilités des gouvernements en axant les dépenses dans des domaines de responsabilité clairement fédérale tels que la défense et la sécurité.
Dans le budget de 2007, nous trouvons aussi: un programme de péréquation renouvelé et renforcé; une nouvelle formule de financement des territoires renouvelée et renforcée; une nouvelle approche visant le soutien du financement à long terme au titre surtout de l'enseignement postsecondaire; une nouvelle approche visant le soutien du financement à long terme au titre de la formation; un nouveau plan d'infrastructure à long terme; une nouvelle approche visant l'affectation des excédents fédéraux imprévus.
Il ne me semble pas déplacé de noter qu'avant de régler un important problème, il faut reconnaître tout d'abord que le problème existe. Ce n'était pas de l'avis du gouvernement précédent, qui niait, comme on le sait très bien, qu'il existait un déséquilibre fiscal au pays.
Quant au Bloc, sur cette question comme dans toutes les autres, il a démontré qu'il pouvait soulever des gros problèmes, mais pas les transporter très loin. Encore une fois, les libéraux ne voulaient pas et les bloquistes ne pouvaient pas. Notre gouvernement a respecté ses engagements et nous avons agi.
Nous sommes très heureux que les mesures que nous avons prises en faveur de l'équilibre fiscal aient été favorablement accueillies dans les capitales provinciales et, en particulier, au Québec. Mais il convient de préciser que cette initiative n'est pas une concession unilatérale au gouvernement du Québec, un quelconque cadeau politique. Si nous avons voulu rétablir l'équilibre fiscal et limiter le pouvoir fédéral de dépenser, c'est avant tout parce que nous sommes convaincus que cela va améliorer le fonctionnement de notre régime fédéral.
Nous savons tous pourquoi le déséquilibre fiscal et le pouvoir fédéral de dépenser constituent invariablement et depuis toujours une préoccupation beaucoup plus immédiate pour les gouvernements québécois — de toutes les formations politiques — que pour ceux des autres provinces. C'est, bien sûr, que tous les gouvernements québécois depuis la Confédération sont investis de la responsabilité de protéger et de développer une société possédant des caractéristiques historiques, culturelles et sociales uniques au sein du Canada.
Cette reconnaissance de la situation particulière de la société québécoise a aussi posé problème à de nombreuses reprises au cours des négociations fédérales-provinciales récentes et moins récentes. Mais, à l'invitation du premier ministre, le Parlement canadien a récemment posé un geste historique en reconnaissant que les Québécois et les Québécoises forment une nation au sein d'un Canada uni. C'est, à mon sens, la consécration de notre politique de fédéralisme d'ouverture envers le Québec. Mais la reconnaissance lucide de la situation unique du Québec ne doit pas déboucher sur une abdication de nos responsabilités envers l'ensemble de la fédération canadienne. Nous voulons en fait renforcer l'union économique du Canada en clarifiant les rôles et les responsabilités de chacun.
La motion présentée par le Bloc québécois révèle la profonde méconnaissance des députés de ce parti non seulement de la réalité canadienne, mais aussi de l'histoire du Québec. Depuis 140 ans, la Confédération canadienne a bien servi les Canadiens et les Canadiennes quand le gouvernement a bien compris et bien appliqué l'esprit qui a animé les pères de la Confédération.
Chaque génération de Québécois et de Québécoises a participé à l'évolution de notre régime politique pour le rendre toujours plus efficace et toujours plus équitable. Je n'ai absolument aucun doute qu'en pratiquant un fédéralisme d'ouverture, nous pourrons ensemble bâtir un Canada meilleur.
C'est pourquoi je demande à tous les députés de cette Chambre qui sont fiers de l'histoire de notre pays et qui croient en son avenir de rejeter la motion mal inspirée du Bloc québécois. En votant contre cette motion, nous votons contre la démission et contre le sabotage de nos institutions. Nous votons contre ceux et celles qui veulent bloquer l'avenir des Québécois au sein du pays qu'ils ont fondé et développé. Ainsi, nous exprimons notre fierté à l'égard de notre passé ainsi que notre confiance dans l'avenir.
:
Monsieur le Président, tout au début, vous me permettrez de dire que j'ai l'intention de partager mon temps avec la députée de .
J'ai le grand plaisir de m'adresser à la Chambre aujourd'hui en tant que porte-parole officiel du Parti libéral en matière d'affaires intergouvernementales, un poste que mon chef m'a confié il y a seulement quelques semaines. J'étais heureux que la députée de soulève devant cette Chambre un sujet aussi important que le pouvoir fédéral de dépenser.
J'ai écouté attentivement le discours de notre collègue, le . Je ne conviens pas de plusieurs choses qu'il a dites quant au succès de son gouvernement, par exemple, avec le supposé déséquilibre fiscal. J'étais d'accord avec lui sur une chose quand il a décrit les raisons pour lesquelles, selon lui, le Bloc québécois aurait proposé une telle motion devant la Chambre aujourd'hui: l'inutilité de la discussion sur une question aussi importante que celle du déséquilibre fiscal, lorsque cette discussion est amenée par un parti qui ne croit pas dans le Canada et dont l'objectif est de séparer le Québec du Canada.
Tout au début de notre discussion, il faut avouer que le pouvoir fédéral de dépenser est constitutionnel. C'est un pouvoir du gouvernement fédéral, de ce Parlement, qui a été à plusieurs reprises confié par la Cour suprême du Canada au gouvernement national. C'est pour nous, le Parti libéral, un instrument essentiel dans le développement et le progrès socioéconomique de notre pays. Malheureusement, le Bloc québécois voit, dans le pouvoir fédéral de dépenser, un complot pour envahir les champs de compétence des provinces et pour s'y ingérer au Québec.
Pour nous, ce n'est pas le cas. Le pouvoir fédéral de dépenser peut être exercé de façon responsable, en partenariat avec les provinces. Je rappelle au député l'exemple parfait à notre avis. Il s'agit du plan libéral de l'ex-gouvernement Martin portant sur les garderies et l'éducation de la petite enfance. L'ex-gouvernement libéral —, monsieur le Président, vous m'avez corrigé en me faisant signe de ne pas utiliser le nom de notre ancien premier ministre qui siège encore comme député, et je m'excuse — avait utilisé le pouvoir fédéral de dépenser exactement dans le sens d'un partenariat pour promouvoir une politique sociale très importante portant sur la petite enfance, l'éducation de la petite enfance et les garderies publiques de qualité partout au pays.
[Traduction]
À notre avis, le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral est un important outil de progrès social. La Cour suprême en a reconnu la constitutionnalité à plusieurs reprises, mais il faut que ce pouvoir soit utilisé de façon raisonnable et responsable et en partenariat avec les provinces.
[Français]
C'est quelque chose à souligner: le Bloc québécois n'a aucun intérêt à favoriser le partenariat entre le gouvernement fédéral et la province de Québec. Comme je l'ai mentionné tantôt, et comme l'a clairement expliqué le , l'intérêt du Bloc québécois est de franchement démontrer que le Canada ne peut être un partenaire positif et responsable dans le progrès social de la société québécoise.
De plus, je dois rappeler à la Chambre que notre chef, le , lorsqu'il était ministre des Affaires intergouvernementales sous un ancien gouvernement, a fait énormément de progrès pour limiter et encadrer le pouvoir fédéral de dépenser.
Dans l'Entente-cadre sur l'union sociale, l'ancien gouvernement libéral, avec l'accord des provinces, a trouvé une façon afin que le fédéral puisse exercer le pouvoir fédéral de dépenser, mais d'une façon responsable et constitutionnelle. C'est une façon qui a d'ailleurs permis des interventions au plan de politiques sociales aussi importantes que l'ancien programme pour l'éducation de la petite enfance et les garderies, un programme qui a d'ailleurs été aboli par le gouvernement actuel.
Selon nous, lorsque le gouvernement libéral a signé l'Entente-cadre sur l'union sociale avec les provinces en 1999, c'était pour préciser les compétences fédérales, provinciales et territoriales en matière, par exemple, de soins de santé, de services sociaux, d'éducation supérieure, d'aide sociale et de formation.
Ce sont des exemples parfaits où le pouvoir fédéral de dépenser peut être utilisé d'une façon responsable, en partenariat avec les gouvernements provinciaux, pour partager les coûts de ces programmes sociaux aussi importants pour le pays, comme par exemple le programme d'assurance-maladie.
Comme je l'ai mentionné, cette initiative a été pilotée par notre chef alors qu'il était ministre des Affaires intergouvernementales. Cette initiative est née du souci de limiter le pouvoir fédéral d'intervenir par des dépenses dans les domaines de compétence exclusivement provinciale, mais également pour assurer le financement suffisant, stable et viable pour ces mesures sociales et d'éviter par exemple le dédoublement, d'accroître la transparence et la reddition de comptes au sein des pouvoirs publics et de gérer les litiges qui pourront peut-être survenir entre les gouvernements.
[Traduction]
Je représente une circonscription située au Nouveau-Brunswick. Pour notre province et pour le Canada atlantique, le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral est un aspect essentiel du progrès social et économique et, en effet, il arrive que ce pouvoir s'exprime, en partenariat avec les provinces, dans des domaines qui, selon la Constitution, relèvent des provinces, dans le but de faire avancer les politiques sociales et économiques partout au pays.
Le nouveau gouvernement libéral du Nouveau-Brunswick a un projet d'autosuffisance très ambitieux. Le premier ministre Graham et son gouvernement ont dressé une liste de mesures qu'ils veulent prendre pour faire du Nouveau-Brunswick une province nantie, qui dépende moins du gouvernement et qui soit autosuffisante.
Je crois que tous les députés conviendront que cet objectif est très valable et louable. Par contre, si le Bloc québécois avait gain de cause et que le gouvernement fédéral n'avait jamais le droit de dépenser, même en partenariat et en collaboration avec les provinces dans les champs de compétences provinciales, alors le plan très ambitieux pour l'enseignement supérieur dont s'est doté le Nouveau-Brunswick ne serait pas réalisable, car la province demande l'aide du gouvernement du Canada à titre de partenaire et l'invite à utiliser son pouvoir de dépenser pour promouvoir les intérêts communs du gouvernement fédéral, des Canadiens et des Néo-Brunswickois.
À notre avis, il n'est pas nécessaire de limiter le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral au-delà de ce que prévoit l'Entente-cadre sur l'union sociale que notre chef avait négociée lorsqu'il était ministre des Affaires intergouvernementales. Ce fut un moment historique lorsque le gouvernement du Canada a accepté que son pouvoir de dépenser dans les champs de compétences provinciales devait être utilisé en partenariat avec les provinces et selon des objectifs convenus par les deux parties et non pas, comme le Bloc voudrait le faire croire, pour intimider les gouvernements provinciaux ou les forcer à faire des choses qu'ils ne veulent pas faire.
Au Canada, nous avons réalisé de grandes innovations sur le plan social: le système de santé public, l'assurance-emploi, le rôle du fédéral dans la protection de la sécurité économique des aînés, le Régime de pensions du Canada, les pensions de la sécurité de la vieillesse et l'enseignement dans la langue de la minorité.
[Français]
Je viens d'une province où l'éducation des francophones en situation minoritaire est essentielle, et le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer en cette matière. Par exemple, il doit assurer la survie d'institutions importantes pour nous, comme l'Université de Moncton. À notre avis, en essayant de limiter ce pouvoir, le Bloc québécois agit de façon franchement irresponsable. Il ne voit aucun intérêt à avoir un gouvernement fédéral actif, en partenariat avec les provinces, pour le progrès social.
C'est pourquoi nous nous opposons à cette motion du Bloc. En effet, le Parti libéral a l'intention de voter contre la motion de la députée de . Nous croyons que le fédéral a un rôle primordial à jouer pour le progrès social et pour le développement économique du pays. Nous ne voyons aucune contradiction entre ce rôle, le respect des compétences provinciales et le bon partenariat entre les gouvernements national et provinciaux, y compris le gouvernement du Québec.
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Monsieur le Président, je suis très heureuse de participer à ce débat au sujet de la motion présentée en Chambre aujourd'hui par le Bloc québécois.
Je suis certaine que cela a déjà été mentionné, mais j'aimerais quand même lire la motion.
Que, de l'avis de la Chambre, puisque le premier ministre s'est engagé à éliminer le déséquilibre fiscal et qu'une telle élimination ne peut se faire sans l'élimination du pouvoir fédéral de dépenser dans les champs de compétence du Québec et des provinces, le projet de loi que le gouvernement présentera sur le pouvoir fédéral de dépenser devra minimalement prévoir pour le Québec un droit de retrait sans condition et avec pleine compensation financière pour tout programme fédéral, existant ou non, cofinancé ou non, qui empiète dans les champs de compétence du Québec.
Comme mon collègue de l'a mentionné plus tôt, les libéraux et, je crois, la majorité des Canadiens, y compris ceux au Québec, ne pourront jamais être d'accord avec le fait d'éliminer le pouvoir fédéral de dépenser. Qu'il soit contrôlé, c'est une toute autre chose. Qu'il soit réglementé, c'est une toute autre chose.
Je crois que le travail que l'ancien gouvernement libéral a fait, soit de négocier avec toutes les provinces — y compris la province de Québec — et les gouvernements des trois territoires pour en arriver à une entente sur la façon dont le gouvernement fédéral pourrait dépenser dans les champs de compétence mixte ou les champs de compétence provinciaux, soit l'entente sur l'union sociale, est un excellent exemple qui démontre comment les Canadiens ont vu un gouvernement s'attaquer à la question pour s'assurer qu'à travers le Canada, lorsqu'il y a des programmes sociaux, les gens qui habitent dans ce pays, peu importe dans quelle province ou dans quel territoire ils se trouvent, auront droit à des services équivalents.
Si nous regardons l'Entente-cadre sur l'union sociale, celle-ci a largement contribué à renforcer les mesures sociales nationales auxquelles tiennent tous les Canadiens, y compris les Québécois. Je pense à des mesures comme l'assurance-maladie. Elle a également été essentielle pour la promotion de l'égalité des services dont bénéficient tous les Canadiens, où qu'ils vivent au pays.
Récemment, cette entente-cadre a été vitale dans la négociation, couronnée de succès, d'accords sur l'éducation préscolaire et les services de garde d'enfants avec les provinces et les territoires, un accord que le gouvernement conservateur actuel a jeté au panier. Ces accords ont été mis au panier par les conservateurs, qui ont ainsi privé des millions d'enfants et de familles de plusieurs milliards de dollars.
Les libéraux ne laisseront pas l'actuel ériger un fédéralisme de cloisonnement ou se croiser les bras tout en donnant des munitions aux séparatistes du Québec. J'ai entendu un député du Bloc parler du fait qu'il y a un grand consensus au Québec sur, premièrement, le déséquilibre fiscal et, deuxièmement, sur l'élimination complète du pouvoir de dépenser du gouvernement. C'est intéressant parce que ce consensus, qui a eu lieu à l'Assemblée nationale, était fondé sur le rapport Séguin. M. Séguin est un économiste respecté à travers le Canada et renommé au moins au Québec, sinon à l'extérieur du Québec, au Canada. Il serait intéressant de voir ce que la Commission Séguin a rapporté et conclu dans son rapport à la suite des consultations menées à travers le Québec au sujet du déséquilibre fiscal.
Il est intéressant de savoir ce que la Commission Séguin propose pour régler ce qu'elle a établi comme un déséquilibre fiscal du côté provincial — elle ne l'a pas constaté du côté fédéral, bien que la dette nationale du Canada dépasse largement celle combinée des provinces et des territoires. En effet, le revenu du gouvernement fédéral est de beaucoup inférieur au revenu combiné de tous les gouvernements provinciaux et territoriaux. Or c'est une question à part; on n'argumentera pas sur la question de savoir s'il existe ou non un déséquilibre fiscal pour les provinces.
La Commission Séguin a conclu que la solution du déséquilibre fiscal réside dans le transfert de points d'impôts. Elle a également avancé certaines autres options de solutions, comme le retrait du gouvernement du champ fiscal de la taxe sur la valeur ajoutée, communément appelée la TPS, pour que les provinces récupèrent ce champ fiscal.
Je cite le rapport de la Commission Séguin de mars 2002, à la page xii:
La Commission marque sa préférence pour l'occupation par les provinces du champ fiscal de la TPS. En raison de l'objectif financier retenu, c'est l'ensemble du champ de la TPS qui devrait être évacué par le gouvernement fédéral au bénéfice des provinces. La Commission ne souhaite cependant pas pour autant rejeter le scénario d'un nouveau partage du champ de l'impôt sur le revenu des particuliers.
Évidemment, compte tenu du fait que le gouvernement conservateur fédéral a déjà réduit la TPS de 1 p. 100 sans que le gouvernement du Québec en profite pour hausser sa propre taxe de vente, la TVQ, afin de récupérer l'espace fiscal ainsi libéré et réduire l'importance du soi-disant déséquilibre fiscal, cela mine l'argument du Bloc.
Quant à l'existence même du déséquilibre, le gouvernement du Québec avait le loisir d'occuper ce champ fiscal que le gouvernement fédéral conservateur venait d'évacuer en réduisant la TPS de 1 p. 100. S'il croyait réellement à un déséquilibre fiscal, le gouvernement du Québec aurait pu immédiatement augmenter la TVQ afin d'occuper ce champ libéré. Le gouvernement ne l'a pas fait. Il est intéressant de constater que le Bloc ne mentionne jamais ce fait. Il ne mentionne pas que la Commission Séguin a annoncé qu'elle préférait l'utilisation de la TPS comme champ fiscal pour régler le soit-disant déséquilibre fiscal. Le Bloc ne mentionne jamais cela.
On doit examiner quelles sont les sources de revenus des provinces. Comme je l'ai déjà mentionné, il y a la taxe sur la vente des produits et services. Au Québec, il s'agit de la TVQ. Cependant, il y a également l'impôt sur le revenu des particuliers. C'est l'impôt que M. et Mme Tout-le-Monde paient proportionnellement à leur revenu, lequel peut inclure le salaire, les pensions, les investissements et les revenus tirés de propriétés en location.
Le fédéral a accès à ces mêmes sources de financement ou de revenus. Toutefois, les provinces ont d'autres sources dont ne bénéficie pas le gouvernement fédéral, comme les loteries, les redevances sur les ressources naturelles et la vente de boissons alcoolisées.
Le fédéral n'a aucun accès à des champs fiscaux dans ces secteurs d'activité. À mon avis, les provinces ont donc leur destinée en main et peuvent utiliser ces champs fiscaux comme bon leur semble afin d'offrir à leurs citoyens les services qui leur sont dus en vertu du partage constitutionnel des champs de compétence.
Je remercie mes collègues de la Chambre de m'avoir écoutée.
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Monsieur le Président, je suis heureux de me lever aujourd'hui pour parler de la motion du Bloc qui a été présentée par la députée de .
L'utilisation du pouvoir fédéral de dépenser est une question importante. De nombreux Canadiens se souviennent des débats sur le pouvoir de dépenser qui ont accompagné l'accord du lac Meech et l'Accord de Charlottetown. Ensuite, il y a eu la négociation de l'Entente-cadre sur l'union sociale en 1999 pour tenter de trouver un consensus sur cette question. Cette question n'a donc rien de nouveau.
Et c'est un débat qui va se poursuivre. Dans le discours du Trône, le gouvernement a promis de présenter des projets de loi au cours de cette session sur le pouvoir de dépenser. Le Nouveau Parti démocratique se réjouit de ce débat. Nous voulons expliquer notre vision d'un fédéralisme coopératif et asymétrique dans le cadre de ce débat. Aussi, nous souhaitons entendre l'opinion des gouvernements provinciaux, y compris celle du gouvernement du Québec, qui doivent absolument se faire entendre sur cette question.
Mais aujourd'hui, nous n'avons pas de mesure législative à débattre, et les gouvernements provinciaux n'ont pas été consultés. Aujourd'hui, tout ce qu'on a, c'est une motion du Bloc. Et il faut se demander pourquoi. Quels sont ses motifs pour nous présenter cette motion, aujourd'hui?
Nous commençons à voir certaines tendances chez les souverainistes québécois, ici à Ottawa et au Québec. Dans les sondages, leur popularité est en baisse. Ils ont mis sur la glace la possibilité d'un autre référendum, mais ils essaient de créer des chicanes. Ils ont déposé un malheureux projet de loi sur la citoyenneté québécoise. Ils cherchent la querelle avec les groupes minoritaires. Ce ne sont pas des actions pour rassembler les gens, ce sont des actions pour les diviser.
Je ne peux m'empêcher de penser que cette motion a le même but. Elle n'a pas l'air d'une tentative sérieuse pour trouver un terrain d'entente. On dirait qu'elle a été conçue pour diviser les députés dans cette Chambre des communes.
Devons-nous être surpris de constater que leurs motifs sont suspects? Bien sûr que non. Nous savons que, sur l'étiquette du Bloc, la date « meilleure avant » est passée depuis un bon bout de temps.
Pouvons-nous nous fier à leur soi-disant tentative de raviver le fédéralisme canadien alors que leur objectif avoué et résolu est de sortir le Québec du Canada? Je ne le pense pas. Ils ne veulent pas que le Canada fonctionne mieux. En fait, ils ne veulent pas que le Canada fonctionne du tout. Comme l'a dit André Pratte, chroniqueur à La Presse: « Lorsqu'il s'agit d'analyser l'évolution du fédéralisme canadien, la crédibilité du PQ et du Bloc est nulle. »
C'est pour ces raisons qu'on ne peut pas appuyer la motion du Bloc.
Mais je suis un homme d'espoir, et le NPD est un parti d'espoir. Le jour où le Bloc dira clairement qu'il veut travailler en collaboration avec le reste du Canada, il sera possible de voir autre chose que des astuces dans leurs propositions. La saison de la pêche aux homards est terminée.
Comme je l'ai mentionné, le NPD a hâte de participer au débat qui accompagnera les mesures législatives que le gouvernement a promises concernant le pouvoir de dépenser.
Le NPD a appuyé depuis longtemps l'autonomie du Québec ainsi que l'identité distincte du Québec à l'intérieur du Canada. Je dis bien « à l'intérieur du Canada ». Nous affirmons que le Canada est meilleur lorsque le Québec est fort, et que le Québec doit être doté des outils qu'il lui faut pour continuer de prospérer au sein du Canada.
La politique du NPD concernant le fédéralisme coopératif et asymétrique reconnaissant le caractère distinct du Québec est en place depuis des décennies.
Nous voyons cette politique comme une question de principe et une question d'application pratique.
Le NPD s'est toujours comporté de façon à respecter les champs de compétence tout en se concentrant sur les résultats. Ce ne sont pas des paroles en l'air; nous joignons le geste à la parole. Voici quelques exemples.
En 2005, le NPD a eu l'occasion de réécrire un budget. Nous avons pris 4,6 milliards de dollars que les libéraux voulaient consacrer aux réductions d'impôt pour les grandes entreprises, et nous avons fait en sorte que ces fonds soient investis dans les priorités des Canadiens, des priorités telles que le transport en commun et la réduction des frais de scolarité. Nous nous sommes assurés d'aborder les préoccupations des provinces en négociant la façon dont ces fonds seraient utilisés.
Dans ce Parlement, ma collègue de a parrainé un projet de loi sur l'éducation de la petite enfance. Jusqu'à présent, ce projet de loi bénéficie d'un grand appui à la Chambre des communes. Il reconnaît explicitement les circonstances spéciales du Québec en ce qui concerne un programme de services de garderie et exempte la province de Québec de son application.
Ce sont des exemples de fédéralisme coopératif, un fédéralisme pratique qui permet l'obtention de vrais résultats pour les familles d'aujourd'hui. Nous espérons que c'est le genre de fédéralisme que tous les partis politiques en cette Chambre appuient.
Cela m'amène aux plans du gouvernement sur le pouvoir de dépenser. Quels sont ces plans? Nous ne le savons pas. Ils n'ont pas encore fourni de détails sur leur proposition dans le discours du Trône. Cela ressemblerait-il à l'Entente-cadre sur l'union sociale? Ce serait un bon début, mais comme les députés de cette Chambre le savent, le gouvernement du Québec ne l'a pas encore acceptée. Qu'est-ce qu'il prévoit donc? On verra.
Pour citer encore le chroniqueur André Pratte, je dirai que « le libellé de l'engagement pris par le gouvernement Harper laisse pour l'instant place à différentes interprétations ».
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Monsieur le Président, je signale que je partagerai le temps dont je dispose avec le député de , notre porte-parole en matière de finances, qui abordera sûrement des aspects plus techniques que je ne le ferai dans mon intervention.
J'aimerais que mon collègue du NPD comprenne bien pourquoi le Bloc québécois amène cette proposition. Dans le discours du Trône des conservateurs, il est question de l'encadrement du pouvoir de dépenser des provinces et du Québec. On n'y vise absolument pas l'encadrement du pouvoir de dépenser du fédéral, on vise à priver les provinces de l'autonomie politique nécessaire pour mettre en place les programmes que choisissent leurs citoyens et leur assemblée nationale, dans le cas du Québec. Si les autres provinces n'en veulent pas et qu'elles aiment vivre sous la tutelle du fédéral, le grand frère d'Ottawa, c'est d'accord. C'est pourquoi nous parlons dans notre motion d'un droit de retrait sans condition et avec pleine compensation pour le Québec. Si les autres veulent vivre sous la tutelle fédérale, cela les regarde. Nous, nous voulons sortir de cette tutelle. On n'a pas découvert cela dans le discours du Trône du gouvernement conservateur. Depuis des décennies et des décennies, les gouvernements à Québec, qu'ils soient fédéralistes ou souverainistes, ont essayé de se sortir de ce carcan qu'est le pouvoir de dépenser du fédéral, un carcan qui n'a aucun fondement sur le plan constitutionnel. Si on encadrait le pouvoir de dépenser du fédéral, cela reviendrait à reconnaître que le fédéral a le droit de dépenser dans les compétences exclusives des provinces et du Québec. Ce n'est même pas dans la Constitution de 1867 et ce serait un recul par rapport à celle-ci. Nous voulons éliminer ce pouvoir qui n'existe pas en fonction des fondements constitutionnels.
Nous n'avons pas à attendre deux ou trois semaines pour voir le projet de loi, nous savons ce qu'il contiendra. Ce sera exactement ce que les autres gouvernements fédéralistes ont fait au cours de l'histoire de la Confédération canadienne: trouver des manières pour rendre le Québec mineur, l'empêcher de grandir selon ses propres choix en posant des conditions. On parle toujours de champs de compétence québécois. Tant qu'on sera à l'intérieur de la Confédération canadienne, on n'empêchera pas le fédéral de dépenser dans ses champs de compétence. Qu'il le fasse! S'il s'en tenait strictement à ces champs de compétence, il n'aurait pas les surplus qu'on connaît actuellement. Le pouvoir de taxation serait beaucoup moins important.
Au fil des ans, le gouvernement fédéral a eu non seulement suffisamment d'argent pour dépenser dans ses propres champs de compétences, mais il a tellement d'argent qu'il s'en est servi pour investir dans les champs de compétence des provinces avec l'agrément des provinces canadiennes autres que le Québec, dans les champs de compétence du Québec, allant parfois à l'encontre même de la vision développée par le gouvernement du Québec, l'Assemblée nationale, et les consensus de la nation québécoise. Il n'est pas question d'encadrement du pouvoir de dépenser du fédéral. Comme je l'ai mentionné, cela n'a aucun fondement constitutionnel. Pourquoi encadrer une chose qui n'a pas de fondement? Nous voulons son élimination pure et simple.
Mais nous avons compris. Les remarques de mon collègue du NPD sont assez claires à cet égard: dans le reste du Canada, il y a un appétit pour que le gouvernement fédéral vienne dans des champs de compétence des provinces, avec les risques que cela comporte.
Prenons l'exemple du logement social. Dans les années 1950 et 1960, le gouvernement fédéral est arrivé avec ses gros sabots et a commencé à financer des programmes de logements sociaux. On a surtout construit des HLM. À un moment donné, il s'est retiré unilatéralement. Que s'est-il passé ensuite? Les provinces sont maintenant prises avec des logements à rénover à leurs propres frais — le Québec en particulier, puisque ses besoins étaient extrêmement importants à ce cet égard —, mais avec des sous-investissements en logement social alors que les besoins sont là. S'il y avait un partage de l'assiette fiscale en tenant compte des compétences, le Québec devrait avoir un champ fiscal autonome beaucoup plus important qui lui permettrait d'assumer toutes ses responsabilités dans ses champs de compétence, que ce soit sur le plan de l'éducation, de la santé, de la culture, de l'environnement et de l'agriculture. C'est la véritable solution au déséquilibre fiscal.
Lorsqu'on lit le discours du Trône, on s'aperçoit que c'est véritablement un miroir aux alouettes. Absolument rien là-dedans ne vise à encadrer quoi que ce soit. Je lis ce que disait la gouverneure générale: « [...] notre gouvernement déposera un projet de loi qui imposera des limites explicites à l’utilisation du pouvoir fédéral de dépenser pour des nouveaux programmes à frais partagés [...] » Tout ce qui a été fait avant ne compte donc pas. Pendant des jours et des jours, les attachés de recherche du Bloc québécois ont cherché à savoir ce qu'étaient les programmes à frais partagés.
On en a trouvé deux essentiellement: le Programme des infrastructures et le Cadre stratégique agricole. Pour le reste, tous les financements sont des transferts dans les domaines de compétence des provinces et du Québec, des transferts qui pourraient être tout aussi bien faits par un transfert de points d'impôt, point à la ligne.
Il n'y a pratiquement pas de programmes à frais partagés. On en demande un depuis des mois et des mois. Il s'agit d'un programme d'aide aux travailleurs âgés, dont une partie serait financée par la caisse d'assurance-emploi qui est malheureusement une compétence du gouvernement fédéral depuis 1942. Je me dis toujours qu'Adélard Godbout doit se retourner dans sa tombe quand il pense au fait qu'il a accepté que le gouvernement fédéral, par un amendement à la Constitution, ait mainmise sur l'assurance-emploi. Il n'y a donc pas ou pratiquement pas de programmes à frais partagés.
Dans La Presse du samedi 20 octobre, Alain Noël écrivait:
La proposition [le nom du premier ministre] sur le pouvoir fédéral de dépenser, c'est un peu comme si Ottawa offrait de laisser aux provinces tout le contrôle sur la production des téléviseurs en noir et blanc
Ce sont des choses qui n'existent plus, et on voudrait nous faire croire qu'il y a là une solution au problème que le Québec pose année après année depuis au moins quatre décennies.
Toujours selon le discours du Trône, « cette loi autorisera les provinces et les territoires à se retirer de ces nouveaux programmes, avec juste compensation, [...] ». On ne parle même pas de pleine compensation. Cela n'a aucun bon sens, mais c'est ce qu'on peut y lire. Les mots signifient quelque chose, en tout cas pour nous, le Bloc québécois.
« Cette loi autorisera les provinces et les territoires à se retirer de ces nouveaux programmes, avec juste compensation, s’ils en offrent qui sont compatibles. » Compatible, cela signifie semblable. Vous aurez le droit de choisir la couleur de votre voiture à la condition de la choisir noire. C'est exactement ce qui nous est dit dans ce discours du Trône, et ce n'est pas du tout la position soutenue par le Québec.
J'ai lu dans ce livre, qui a été publié au moment de la signature de l'Union sociale et qui s'intitulait très correctement L'union sociale canadienne sans le Québec, un article de Claude Ryan où il revient sur la position des différents gouvernements du Québec qui se sont succédé et qui est toujours la même: le droit de retrait avec pleine compensation et sans condition, lorsque le gouvernement fédéral prend des initiatives, que ce soit dans des champs de compétence partagée ou exclusive, que ce soit à frais partagés ou non, lorsqu'il s'agit d'une initiative fédérale dans un champ de compétence du Québec.
On comprend pourquoi, c'est sa façon de construire la nation canadienne. Je la respecte, mais ce n'est pas la façon dont nous, au Québec, concevons la construction de notre nation par l'intermédiaire de notre État qu'est l'État québécois.
C'est donc un droit de retrait sans condition, et c'est tout à fait non négociable. Le Bloc québécois va continuer à se battre en faveur de la position traditionnelle des gouvernements du Québec qui se sont succédé. Aussi bien du côté fédéraliste que du côté souverainiste, je rappelle que ces éléments de position ont toujours été les mêmes.
En outre, je veux revenir sur la promesse qu'avait faite le premier ministre à Québec d'éliminer le déséquilibre fiscal. L'élimination de ce déséquilibre fiscal, qu'est-ce que cela veut dire? C'est l'élimination du pouvoir fédéral de dépenser dans les compétences exclusives du Québec. Je vous lis la phrase du premier ministre lorsqu'il a fait cette promesse le 19 décembre 2005:
J'ai dit à plusieurs reprises, même après l'élection de ce nouveau gouvernement, que je m'oppose et que notre parti s'oppose au pouvoir de dépenser du fédéral dans les compétences des provinces.
Cela peut-il être plus clair que cela?
Le premier ministre n'avait pas dit « l'encadrer » à cette époque, mais bien « l'éliminer ». Il disait aussi:
À mon avis, un tel pouvoir de dépenser dans des compétences exclusives des provinces contredit l'esprit même du fédéralisme. Notre gouvernement est clair sur l'idée que nous n'avons pas l'intention d'agir d'une telle façon.
Cependant, c'est ce que le gouvernement fait, comme tous les autres gouvernements fédéralistes à Ottawa, parce qu'il n'y a eu que des gouvernements fédéralistes, comme vous le savez, et il y en aura toujours, des gouvernements fédéralistes centralisateurs. Le vernis peut changer mais le fond de la question est le même. Ici, au fond, le premier ministre avait promis de régler le déséquilibre fiscal et d'éliminer le pouvoir fédéral de dépenser. Il a renié sa promesse. Il faut que les Québécois et les Québécoises le sachent et qu'ils le sanctionnent lors de la prochaine élection en votant pour les seuls qui soient en mesure de défendre le Québec en cette Chambre, c'est-à-dire les députés du Bloc québécois que je félicite.