PACP Rapport du Comité
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COMPTES PUBLICS DU CANADA 2008 INTRODUCTION Chaque automne, le gouvernement fédéral publie les Comptes publics du Canada, série de documents en trois volumes qui donnent un aperçu détaillé des opérations financières du gouvernement au cours de l’exercice financier précédent et exposent les états financiers du gouvernement, qui sont préparés sous la direction conjointe du président du Conseil du Trésor, du ministre des Finances et du receveur général du Canada, en conformité avec la loi habilitante. Le Bureau du vérificateur général du Canada vérifie les états financiers sommaires des Comptes publics du Canada suivant les normes comptables du secteur public et formule une opinion quant à leur exactitude et à leur conformité. Les Comptes publics du Canada comprennent habituellement une section intitulée « Information supplémentaire : Observations de la vérificatrice générale sur les états financiers du gouvernement du Canada », dans laquelle la vérificatrice générale soulève des « points préoccupants » qui, bien qu’ils soient importants, ne le sont pas suffisamment pour modifier l’opinion générale sur les états financiers. Le Comité a consacré une séance aux Comptes publics du Canada 2007-2008, le 5 février 2009, en présence de fonctionnaires du Bureau du vérificateur général du Canada et du Secrétariat du Conseil du Trésor. Le Bureau du vérificateur général était représenté par John Wiersema, sous-vérificateur général; Douglas Timmins, vérificateur général adjoint; et Tammy Squires, directrice principale, tandis que le Secrétariat du Conseil du Trésor était représenté par Rod Monette, contrôleur général du Canada; John M. Morgan, contrôleur général adjoint, Secteur de la gestion financière et de l'analyse; et Bill Matthews, directeur exécutif, Comptabilité gouvernementale, Politique et Rapport. AMÉLIORATION DE LA GESTION FINANCIÈRE Pour une dixième année consécutive, la vérificatrice générale a conclu que les états financiers du gouvernement fédéral donnaient une « image fidèle » de sa situation financière, qu’ils ne contenaient aucune « inexactitude importante » et que les conventions comptables du gouvernement avaient été appliquées uniformément[1]. Le Comité des comptes publics est très impressionné par le nombre de fois consécutives où la vérificatrice générale a émis une opinion « sans réserve » à propos des états financiers sommaires du gouvernement. Cela veut dire que les Canadiens peuvent avoir confiance dans les chiffres présentés par le gouvernement dans les Comptes publics; c’est‑à‑dire que l’information sur le total des revenus fiscaux, les dépenses, les actifs et les passifs du gouvernement est digne de foi et conforme à la réalité. La qualité remarquable et constante des états financiers du gouvernement témoigne de la conscience professionnelle des fonctionnaires qui les préparent et du soin qu’ils y mettent. À cet égard, le Comité est d’accord avec le sous-vérificateur général, John Wiersema, lorsque celui‑ci affirme que « le Canada continue de montrer la voie en matière de communication de l’information financière au niveau national[2] ». Le gouvernement a aussi pris un certain nombre d’autres mesures ces dernières années pour resserrer la gestion financière. Ainsi, il a renforcé la position des agents financiers supérieurs des ministères grâce à sa Politique sur les responsabilités et l’organisation de la fonction de contrôleur; a adopté une nouvelle Politique sur la vérification interne, qui oblige les grands ministères à se doter de comités de vérification indépendants; et s’est engagé à faire en sorte que les états financiers des 22 ministères les plus importants soient vérifiés. La mise en œuvre de chacune de ces mesures a progressé, mais il reste encore du travail à faire. Le Comité a appris que 21 des 22 agents financiers supérieurs des ministères les plus importants ont maintenant des titres de compétence professionnelle en comptabilité. C’est là un progrès énorme, surtout lorsqu’on sait qu’il n’y a pas si longtemps encore, moins de la moitié de ces agents financiers supérieurs possédaient des titres de compétence professionnelle. Le Comité croit que les comités de vérification indépendants sont un élément important des mesures de contrôle interne et des mécanismes comptables essentiels à toute grande organisation bien gérée. Le Comité a appris que 42 des 46 organisations auront leur comité de vérification indépendant d’ici la date limite du 1er avril 2009, mais seulement 30 d’entre elles en ont déjà un en place. Le Comité trouve quelque peu préoccupant qu’il faille tant de temps pour mettre sur pied ces comités, alors que la politique qui en exige la création est en vigueur depuis avril 2006. Ces comités devraient néanmoins aider à renforcer la surveillance au sein des ministères afin de corriger les lacunes relevées par le Bureau du vérificateur général et par les vérificateurs internes. Les 22 ministères les plus importants s’affairent actuellement afin que leurs états financiers soient prêts pour la vérification, certains d’entre eux estimant qu’ils seront prêts en 2009-2010 et les autres dans les années qui suivront. Le Comité appuie fermement cette initiative puisqu’elle contribuera à améliorer la fonction de contrôleur et les systèmes de contrôle. Dans les observations qu’elle formule dans les Comptes publics, la vérificatrice générale se réjouit de voir que cette initiative progresse, mais elle remarque aussi que bien des ministères ont beaucoup de travail à faire pour être prêts à faire vérifier, de manière efficiente, leurs états financiers. Le Comité trouve les progrès actuels encourageants, mais il continuera à suivre de près cette initiative et les autres mesures visant à améliorer la gestion financière pour que compte soit rendu de leur mise en œuvre effective. INTÉGRITÉ DES DONNÉES Pour préparer les états financiers du gouvernement, les ministères et organismes doivent recueillir, évaluer et regrouper des données provenant de différentes sources. Les états financiers sommaires ne sont toutefois fiables que dans la mesure où les méthodes utilisées pour recueillir les données le sont aussi. À cet égard, la vérificatrice générale entretient depuis plusieurs années des réserves au sujet des systèmes et des usages en vigueur à l’Agence du revenu du Canada et l’Agence des services frontaliers du Canada. L’une des estimations les plus importantes faite par la direction et qui sert à la préparation des états financiers sommaires est l’estimation des créances douteuses, c’est‑à‑dire, le montant des impôts considérés comme irrécouvrables. En 2007-2008, les revenus ont totalisé 242 milliards de dollars, dont 74,6 milliards de dollars d’impôts à recevoir au 31 mars sur lesquels 8,7 milliards de dollars étaient irrécouvrables. Si ce dernier montant est considérablement sous-évalué ou surévalué, cela peut avoir une grande incidence sur la position financière globale du gouvernement. À l’automne 2006, l’Agence du revenu du Canada a entrepris d’élaborer une nouvelle méthode pour estimer la provision pour créances douteuses relative aux impôts à recevoir. La vérificatrice générale fait toutefois observer que ce projet a été marqué par des problèmes d’intégrité des données, des préoccupations au sujet des hypothèses formulées par la direction et des erreurs mathématiques. Elle dit s’attendre à recevoir du gouvernement un plan détaillé pour améliorer le modèle d’estimation actuel ainsi que pour traiter des questions relatives à l’intégrité des données. La vérificatrice générale souligne de plus que l’Agence des services frontaliers du Canada a éprouvé des difficultés à effectuer des rapprochements de comptes entre les créances inscrites au grand livre et les données établies à l’aide des différents systèmes des programmes fiscaux de l’Agence, qui ne sont pas conçus comme des systèmes comptables. C’est ce qui explique qu’il est resté des écarts inexpliqués à la fin de l’exercice. Le Comité s’est fait dire que ce problème était attribuable aux systèmes de technologie de l’information qui ne permettent pas le partage des données et qu’il faudra plusieurs années pour remédier à la situation. Le Comité comprend que les problèmes d’intégrité des données et la difficulté de faire des rapprochements entre les données provenant de différents systèmes sont complexes et qu’il faudra du temps pour y remédier, mais il souhaite néanmoins éviter que ces problèmes ne perdurent. Pour que la direction y accorde suffisamment d’attention et dans un souci de transparence, le Comité recommande : RECOMMANDATION 1 Que l’Agence du revenu du Canada fournisse au Comité des comptes publics, d’ici le 31 mai 2009, un plan détaillé assorti d’échéanciers pour indiquer comment elle compte améliorer ses méthodes de calcul de la provision pour créances douteuses. RECOMMANDATION 2 Que l’Agence des services frontaliers du Canada fournisse au Comité des comptes publics, d’ici le 31 mai 2009, un plan détaillé assorti d’échéanciers pour expliquer comment elle compte améliorer ses systèmes comptables pour les revenus fiscaux. PERTES DE L’ÉTAT Le gouvernement enregistre chaque année des pertes considérables d’argent ou de biens imputables à des infractions, des actes illégaux ou des accidents, lesquelles sont énumérées dans le Volume III des Comptes publics. Travaux publics et Services gouvernementaux, par exemple, signale une perte de 2,7 millions de dollars en raison de la malfaisance d’un employé et une autre de 2,1 millions de dollars résultant de trop-payés sur la Caisse de retraite de la fonction publique. Les organisations gouvernementales doivent être dotées de systèmes de contrôle interne suffisants pour que les pertes de ce genre soient détectées rapidement et maintenues au minimum. M. Monette a dit au Comité que, « afin de minimiser les risques, c’est une bonne pratique de demander à chaque ministère un plan pour améliorer ses systèmes de contrôle interne. Aussi, nous tentons de recouvrer les pertes, et de temps en temps, nous y arrivons. Il s’agit d’un problème sérieux et nous tentons d’éviter de telles situations. Il faut avoir un plan pour tenter de récupérer les pertes dans le cas d’une infraction criminelle[3]. » Le Comité en convient et il recommande : RECOMMANDATION 3 Que le contrôleur général du Canada veille à ce que les ministères fédéraux soient dotés de systèmes de contrôle interne suffisants pour prévenir les pertes de fonds et de biens publics, et de plans de recouvrement des pertes qui résultent d’actes criminels; et que le contrôleur général présente un rapport à ce sujet au Comité des comptes publics d’ici le 31 décembre 2009. AFFECTATION DES CRÉDITS SUIVANT LA MÉTHODE DE COMPTABILITÉ D’EXERCICE Depuis 2002-2003, le gouvernement prépare ses états financiers selon la méthode de la comptabilité d’exercice[4]. Le budget des dépenses est toutefois préparé suivant les principes de la comptabilité de caisse modifiée; ce qui rend difficile toute comparaison directe entre le budget des dépenses et les Comptes publics. Un rapprochement doit donc être fait entre ces deux méthodes comptables différentes et il en est fait état dans les Comptes publics. De même, la méthode de la comptabilité d’exercice permet de se faire une idée plus juste et plus complète de la situation financière d’une organisation et son utilisation est très répandue dans le secteur privé. Le Comité des comptes publics plaide depuis longtemps en faveur de l’adoption de la comptabilité d’exercice et a cherché à faire pression sur le gouvernement pour qu’il applique la comptabilité d’exercice à l’affectation des crédits. En 2006, le Comité des comptes publics avait recommandé que le gouvernement commence à appliquer la comptabilité d’exercice à la préparation du budget et à l’affectation de crédits[5]. De plus, dans son rapport sur la comptabilité d’exercice pour la budgétisation et l’affectation des crédits, le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires avait recommandé que le gouvernement adopte des crédits pluriannuels et mette en œuvre la comptabilité d’exercice pour la budgétisation et l’affectation des crédits sur une période maximale de cinq ans[6]. Dans ses observations, la vérificatrice générale souligne que le gouvernement a maintenant exposé son plan de mise en œuvre de la méthode de la comptabilité d’exercice pour la préparation des budgets, qui commencera par un projet pilote de deux ans auquel dix ministères participeront en 2009‑2010. Toutefois, ce plan vise uniquement l’adoption de la comptabilité d’exercice pour la préparation des budgets et ne comporte aucune date cible précise quant au moment où le gouvernement compte commencer à appliquer la méthode de la comptabilité d’exercice à l’affectation des crédits. Le gouvernement prévoit plutôt évaluer les coûts et les avantages de l’affectation des crédits selon la méthode de la comptabilité d’exercice en 2012‑2013, après l’établissement des budgets selon la méthode de la comptabilité d’exercice. La vérificatrice générale déplore aussi que les modèles proposés par le gouvernement aux parlementaires en vue de la mise en place de l’affectation des crédits selon la méthode de la comptabilité d’exercice n’incluent pas l’établissement de budgets pour les actifs et les passifs à long terme. Le contrôleur général, Rod Monette, a dit au Comité qu’il fallait être très prudent avant d’appliquer la comptabilité d’exercice aux crédits parlementaires. Voici ses réflexions à ce propos : Je commence à croire que nous sommes en train de bâtir un système qui est tellement complexe que les gens ne le comprennent tout simplement pas. J’ai l'impression que nous, les comptables, établissons un système excellent sur papier, toute la théorie y est, et c’est un bon système pour toutes ces raisons, mais il demeure très difficile pour les gens de le comprendre. Je ne dis pas que je suis contre, mais par exemple, pour ce qui est de l’affectation de crédits suivant la comptabilité d’exercice — et je connais votre bagage, je sais que vous avez étudié ce dossier avec le Comité des opérations gouvernementales et que vous connaissez très bien le sujet —, quand on parle de niveau de dépréciation, même moi, en tant que comptable, je dois me demander ce que cela signifie exactement. Je me demande constamment s’il existe un moyen d'atteindre le même objectif, c’est-à-dire une communication de l’information et une meilleure gestion, sans mettre en place un système tellement complexe que très peu de personnes, outre les comptables, pourront l’utiliser[7]. Il a même laissé entendre que certains pays, notamment l’Australie et le Danemark, remettaient en question l’adoption de la méthode de la comptabilité d’exercice pour l’affectation des crédits. Le Comité convient qu’il faut se montrer prudent avant d’adopter des méthodes de budgétisation et d’affectation de crédits entièrement nouvelles, mais il est un peu perplexe devant les réticences du contrôleur général à aller de l’avant dans un dossier qui est à l’étude et débattu depuis des années. Comme l’a indiqué le sous-vérificateur général : Enfin, en ce qui concerne l’affectation de crédits suivant la comptabilité d’exercice, avec tout le respect que je dois à mes collègues ici, la question est à l’étude depuis longtemps. Je crois que c’est la vérificatrice générale qui l’a soulevée la première fois, comme l’a dit M. Kramp, en 2004. Nous sommes maintenant en 2009. Nous n’avons toujours pas encore tout à fait déterminé la marche à suivre. Je comprends la mise en garde du contrôleur général, qui dit que nous devons avancer avec prudence et méthode, mais à notre avis, ce ne devrait pas prendre aussi longtemps[8]. Le gouvernement n’a toujours pas pris d’engagement quant à la date de mise en œuvre de la méthode de la comptabilité d’exercice pour l’affectation des crédits et n’a pas non plus fourni d’explication claire quant aux raisons pour lesquelles il ne serait pas avisé de s’engager de la sorte. S’il existe des préoccupations valables en ce qui concerne, par exemple, les coûts, la formation ou la compréhension, alors il faut en faire état clairement et en discuter. Sinon, le gouvernement doit aller de l’avant. Par conséquent, le Comité recommande : RECOMMANDATION 4 Que le gouvernement du Canada se donne des échéances fermes pour la mise en œuvre de la comptabilité d’exercice pour l’affectation des crédits. CONCLUSION Il y a lieu de féliciter le gouvernement pour la qualité supérieure et constante de ses états financiers sommaires, qui bénéficient depuis 10 ans de l’aval « sans réserve » de la vérificatrice générale. Il y a toutefois encore place pour des améliorations. Les 22 grands ministères ont beaucoup de travail à faire pour préparer leurs états financiers individuels afin qu’ils puissent être vérifiés, de manière efficiente, par le Bureau du vérificateur général. De même, l’Agence du revenu du Canada doit améliorer ses méthodes d’estimation et l’Agence des services frontaliers du Canada doit corriger ses systèmes d’information. Enfin, le Comité s’inquiète des messages contradictoires envoyés par le gouvernement à propos de l’application de la méthode de la comptabilité d’exercice à l’affectation des crédits. Il est temps que le gouvernement prenne un engagement ferme de façon que les ministères et les parlementaires puissent comprendre clairement l’orientation à venir. |
[1] Comptes publics du Canada 2007-2008, Volume 1, p. 2.4. [2] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, 40e législature, 2e session, réunion 2, 15:35. [3] Réunion 2, 16:05. [4] Sous le régime de la comptabilité d’exercice, les charges sont comptabilisées à mesure que les ressources sont consommées plutôt que d’être traitées comme de simples dépenses. De même, les recettes sont comptabilisées dans la période à laquelle elles se rapportent et non dans celle où elles sont perçues. Par exemple, suivant les principes de la comptabilité de caisse, l’achat d’une nouvelle voiture est comptabilisé pour l’exercice au cours duquel l’argent a été dépensé. Par contre, suivant les principes de la comptabilité d’exercice, la voiture sera consignée comme un actif qui sera dépensé au fil du temps, au fur et à mesure que la voiture prendra de l’âge et perdra de sa valeur de revente. [5] Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, Comptes publics 2006, 39e législature, 1re session, décembre 2006. [6] Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre des communes, La comptabilité d’exercice pour la budgétisation et l’affectation des crédits au gouvernement fédéral, 39e législature, 1re session, décembre 2006. [7] Réunion 2, 16:35. [8] Réunion 2, 17:15. |