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RNNR Rapport du Comité

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CHAPITRE 1 — APERÇU

Concept

Traditionnellement, l’énergie est distribuée à des constructions et des installations individuelles où on n’a guère le choix des sources d’énergie et du mode de consommation. Ce système est souvent peu efficace; il n’y a pas d’économies d’échelle et il n’y a pas réutilisation de l’énergie entre les diverses organisations. S’il y a des entités qui utilisent des technologies ou des méthodes d’avant-garde, c’est souvent de manière très limitée faute d’intégration[7].

Figure 1 : Caractéristiques possibles d’un système énergétique intégré

Figure 1 : Caractéristiques possibles d’un système énergétique intégré

Source : Municipalités vertes — Guide d’infrastructure verte pour les municipalités canadiennes, préparé pour la Fédération canadienne des municipalités (FCM) par le groupe Sheltair, mai 2001[8].

Un système énergétique intégré est un système où les décisions concernant l’offre et la demande d’énergie tiennent compte des différents besoins de la population (chauffage, climatisation, éclairage, transport, etc.) et des différents secteurs (aménagement du territoire, transports, eau, gestion des déchets, industrie, etc.) en favorisant les aménagements polyvalents[9], l’utilisation de sources locales d’énergie renouvelable et les petits réseaux collectifs dans le but de gérer efficacement l’énergie[10]. Quelques collectivités canadiennes utilisent déjà une approche intégrée à la planification énergétique, y compris la planification de l’offre et de la demande d’énergie. Toutefois, selon Carol Buckley, directrice générale de l’Office de l’efficacité énergétique, « la raison pour laquelle c’est encore très rare… est que c'est exactement l’opposé du statu quo en ce qui concerne la manière dont l’utilisation de l’énergie est conçue et la manière dont elle est utilisée[11] ».

Avantages et défis

Lorsqu’une collectivité réalise des achats et des installations en groupe, la planification énergétique intégrée lui permet d’être plus efficace en matière d’aménagement du territoire et de planification des transports, de gestion de l’eau et des déchets, de construction, et de pratiques et de méthodes d’utilisation de l’énergie dans les bâtiments[12]. Les systèmes énergétiques intégrés permettent aussi une gestion plus efficace des ressources en maximisant l’efficacité énergétique et la synergie dans des aménagements en circuit fermé (où les déchets d’un secteur servent à alimenter un autre secteur) et en favorisant l’investissement dans des solutions énergétiques souples et variées (dont les énergies renouvelables), ainsi qu’en facilitant l’adaptation aux fluctuations du prix de l’énergie et à un avenir incertain et changeant. Il en résulterait une diminution de la demande et du coût de l’énergie, et des émissions de gaz à effet de serre; des gains en matière d’emploi local et de possibilités de développement économique; et, globalement, une qualité de vie meilleure et plus durable[13].

La mise en œuvre d’un système énergétique intégré relève du défi parce qu’il faut un grand nombre de personnes et d’organisations pour réaliser des projets collectifs intégrés et que les avantages de ces projets sont peu connus. La mise en œuvre est souvent difficile à cause du coût initial élevé de certaines technologies et infrastructures requises, et des obstacles réglementaires. Ainsi, selon Carol Buckley, « beaucoup de règlements d’urbanisation autorisent des projets de faible densité et parfois même pénalisent le réaménagement au centre-ville » et, dans certaines administrations, il est interdit aux services publics locaux de faire partie d’une société de production d’énergie, ce qui limite leur participation comme partenaires et comme bailleurs de fonds potentiels de ce genre de projet[14].

Il y a beaucoup d’avantages à court terme et de petites victoires dans les systèmes intégrés : économie d’énergie immédiate et réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES), par exemple. Cependant, les avantages sont surtout à long terme, et leur progression est difficile à évaluer faute de méthodes de calcul normalisées et à cause de la multiplicité des usages mixtes qui nécessitent un suivi. Des questions de confidentialité se posent lorsqu’il faut réunir de grands ensembles de données à l’échelle de la collectivité. Ainsi, on n’a pas nécessairement accès aux informations des services publics. La fiabilité des mesures augmente avec l’expérience (acquise pour les aménagements existants et les projets pilotes), qui est encore naissante dans le domaine des systèmes énergétiques intégrés[15].

Compétences et responsabilités

Dans son intervention sur les systèmes énergétiques collectifs, Douglas Stout, vice-président, Commercialisation et expansion des affaires, Terasen Gas, distingue deux catégories de « joueurs[16] » :

  • les catalyseurs — tels les gouvernements, les organismes non gouvernementaux et les organismes de réglementation de l’énergie — qui établissent les politiques, fournissent un financement de démarrage, et favorisent la sensibilisation et lancent des initiatives, et
  • les acteurs — tels les municipalités, les promoteurs, les investisseurs privés et les fournisseurs de services publics et de technologie — qui planifient, construisent, possèdent, exploitent et contrôlent les systèmes énergétiques sur le terrain.

La Loi constitutionnelle de 1867 divise les pouvoirs législatifs entre le Parlement fédéral et les législatures provinciales. La Loi assigne des compétences particulières au gouvernement fédéral et aux provinces, comme le montre le tableau 1, mais l’environnement rejoint une multitude de domaines relevant de divers pouvoirs, ce qui en fait un champ de responsabilité partagée. À proprement parler, les municipalités sont des créatures des provinces de qui elles tirent leur pouvoir d’adopter des règlements dans des domaines précis, y compris dans le domaine environnemental. Cependant, la Cour suprême du Canada a récemment adopté une interprétation intentionnelle analogue à son interprétation de la Constitution, afin que les municipalités puissent traiter efficacement des nouveaux problèmes environnementaux. En conséquence de l’interprétation de la Cour basée sur l’objet, outre le fait que les municipalités peuvent excéder les pouvoirs prévus aux lois municipales, leurs règlements peuvent également se situer hors des pouvoirs provinciaux prévus à la Loi constitutionnelle de 1867 et demeurer valides[17].

Tableau 1 : Répartition des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les provinces en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867

Pouvoirs provinciaux

Pouvoirs fédéraux

  • Administration et vente de terres publiques [92(5)]
  • Institutions municipales [92(8)]
  • Droits civils et propriété [92(13)]
  • Questions d’une nature locale ou privée [92(16)]
  • Gestion et perception de revenus des ressources non renouvelables et des forêts, et production locale d’électricité [92A – modifications de 1982 sur les ressources]
  • Terres publiques, minéraux, etc., sauf intérêts de propriété fédérale ou pouvoir fédéral (parcs nationaux, p. ex.) [109]
  • Commerce [91(2)]
  • Fiscalité [91(3)]
  • Navigation [91(10)]
  • Côtes et pêches [91(12)]
  • Affaires autochtones [91(24)]
  • Droit criminel [91(27)]
  • Négociations internationales*
  • Pouvoir général de légiférer pour « la paix, l’ordre et le bon gouvernement » du Canada

* La mise en œuvre d’un accord international par le gouvernement fédéral exige le pouvoir constitutionnel ou l’accord des provinces.

Source : Paul Muldoon et al., p. 21.

La planification énergétique intégrée relève donc des provinces/territoires et des municipalités, et exige en particulier l’engagement de la province étant donné les pouvoirs constitutionnels des provinces. Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer du fait de ses capacités de recherche et de financement, de son expérience dans l’établissement de visions et de programmes nationaux (efficacité énergétique, énergie renouvelable, prix du carbone, etc.) et de son aptitude à rassembler des organismes[18], [19].

Ce sont les administrations municipales, et parfois régionales, qui sont les plus compétentes pour établir des objectifs et des stratégies de gestion des problèmes de planification qui varient d’un endroit à l’autre au Canada. Cela met en valeur une approche de bas en haut à la prise de décisions en planification énergétique communautaire intégrée[20]. Les municipalités interviennent directement, par l’établissement de services énergétiques (services énergétiques collectifs, poteaux, lignes électriques, etc.), et indirectement, par la promotion de certaines formes de développement (forte densité, axé sur le transport, etc.). Les planificateurs, les constructeurs et les urbanistes façonnent l’environnement bâti qui détermine les habitudes de consommation d’énergie de la collectivité[21].


[7]              Carol Buckley, Office de l'efficacité énergétique, ministère des Ressources naturelles, Témoignages, 26 février 2009.

[8]              QUEST, Les systèmes d’énergie intégrés pour les communautés canadiennes : un consensus sur le besoin d’agir rapidement, mars 2008, document présenté au Comité.

[9]              Les aménagements polyvalents permettent les usages multiples dans un même immeuble ou dans une zone donnée. Dans le contexte de la planification, il s’agit de collectivités à usages fonciers combinés : commerces, industries, institutions et divers usages résidentiels.

[10]           QUEST, Collaborer pour promouvoir des systèmes d’énergie urbains intégrés, présentation au Comité, 26 février 2009.

[11]           Carol Buckley, Office de l'efficacité énergétique, ministère des Ressources naturelles, Témoignages, 26 février 2009.

[12]           Ibid.

[13]           QUEST, Les systèmes d’énergie intégrés pour les communautés canadiennes : un consensus sur le besoin d’agir rapidement, mars 2008, document présenté au Comité.

[14]           Carol Buckley, Office de l'efficacité énergétique, ministère des Ressources naturelles, Témoignages, 26 février 2009.

[15]           Kevin Lee, Division de l'habitation, Office de l'efficacité énergétique, ministère des Ressources naturelles, Témoignages, 26 février 2009.

[16]           Douglas Stout, Commercialisation et expansion des affaires, Terasen Gas, Témoignages, 5 mars 2009.

[17]           Paul Muldoon et al. (2009), An Introduction to Environmental Law and Policy in Canada, p. 20-23, Emond Montgomery Publications Limited, Toronto.

[18]           Carol Buckley, Office de l'efficacité énergétique, ministère des Ressources naturelles, Témoignages, 26 février 2009.

[19]           Mel Ydreos, Opérations, Union Gas Limited, Témoignages, 5 mars 2009.

[20]           Douglas Stout, Commercialisation et expansion des affaires, Terasen Gas, Témoignages, 5 mars 2009.

[21]           Institut urbain du Canada, Planification énergétique intégrée : un rôle pour les planificateurs et les collectivités, document présenté au Comité, 26 mars 2009.