propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
-- Monsieur le Président, j'ai l'honneur d'amorcer aujourd'hui le débat en deuxième lecture du projet de loi .
[Traduction]
Les modifications prévues dans le projet de loi ont d’importantes conséquences pour notre pays, pour le Québec et surtout pour les Cris d’Eeyou Istchee, peuple de l’Est de la baie James et du Sud de la baie d’Hudson, dans le Nord du Québec.
Le projet de loi contribue au règlement de différends de longue date entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee. Et, ce qui est encore plus important, le projet de loi prépare la voie à de nouvelles relations entre le gouvernement fédéral et les Cris d’Eeyou Istchee.
Je vais expliquer les dispositions du projet de loi et donner quelques détails sur la façon dont cette mesure législative favorisera la prospérité, le développement social et l’autodétermination des Cris d’Eeyou Istchee. Permettez-moi d’abord de profiter de l’occasion pour parler à la Chambre de ce peuple et de la façon dont nous avons progressé pour aboutir aujourd’hui à cette importante étape.
Le 21 février de l’année passée, je me suis rendu à Mistassini, au Québec, pour signer le nouvel accord sur les relations avec les Cris d’Eeyou Istchee. Mistassini se trouve à environ 850 kilomètres au nord d’Ottawa, dans une région d’une beauté naturelle saisissante, que je classerais parmi les plus spectaculaires du monde.
Mistassini est l’une des neuf collectivités cries du Nord du Québec. Il y a une trentaine d’années, les habitants de ces collectivités se sont fermement opposés aux projets du gouvernement du Québec visant à aménager et à agrandir des installations hydroélectriques sur leur territoire traditionnel.
[Français]
Les Cris d'Eeyou Istchee et les Inuits du Nunavik ont estimé que ce projet, l'un des plus ambitieux ouvrages de génie civil jamais envisagés au pays, menaçait leur mode de vie traditionnel. Pour apaiser les craintes des Cris d'Eeyou Istchee et des Inuits du Nunavik, le gouvernement du Québec et celui du Canada ont entrepris des négociations avec ces peuples.
[Traduction]
Les négociations qui avaient alors été engagées avaient abouti à la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Signée en 1975, la Convention constitue le premier traité moderne conclu au Canada pour régler des revendications territoriales remontant à la fin du XIXe siècle. Elle précisait également les intérêts des Cris d’Eeyou Istchee et des Inuits du Nunavik dans la mise en valeur des ressources naturelles de leurs territoires traditionnels. En 1978, les Naskapis de la région ont signé un accord semblable, la Convention du Nord-Est québécois.
Ensemble, ces deux ententes ont facilité l’aménagement, dans le Nord du Québec, de barrages hydroélectriques et d’installations connexes qui ont marqué le début d’une ère sans précédent de développement économique, non seulement dans la région de la baie James, mais partout dans le Nord québécois. En même temps, les conventions ont établi de nouveaux régimes de gouvernance pour gérer la prestation des services sociaux dans les collectivités cries de la région et administrer les relations de plus en plus étroites entre les autorités cries et les pouvoirs provinciaux et fédéraux.
Il y avait cependant un problème. Les conventions ont été signées en l’absence de politiques cohérentes — comme la politique sur les revendications globales et la politique sur le droit inhérent que nous avons maintenant — et de plans détaillés de mise en œuvre, éléments essentiels du processus de règlement des revendications sur lesquels les négociateurs, les décideurs et les législateurs peuvent compter aujourd’hui.
Parce que les conventions manquaient de la précision que nous souhaitons maintenant voir dans de telles ententes, il y a eu des contestations. Les parties — c’est-à-dire le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial, les Cris d’Eeyou Istchee, les Inuits du Nunavik et la nation naskapie de Kawawachikamach — ont eu des difficultés considérables à interpréter les conventions et à agir en fonction des obligations qui y sont énoncées.
En 1984, le gouvernement du Canada a adopté la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, qui représente la première mesure législative relative à l’autonomie gouvernementale adoptée dans notre pays. C’était une obligation aux termes de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois. Cette loi historique a établi un régime de gestion des terres et a reconnu aux gouvernements locaux cris et naskapis le pouvoir d’adopter des règlements pour protéger l’environnement, gérer les ressources naturelles et dispenser des services de santé aux membres des bandes. Les dispositions de la loi ont également permis au gouvernement fédéral de mieux répondre aux besoins des Cris d’Eeyou Istchee et de la nation naskapie de Kawawachikamach grâce à des programmes publics, à des accords sectoriels de financement et à des mesures conjointes avec le gouvernement du Québec.
Malgré ces efforts constructifs, le gouvernement du Canada a continué à essuyer des critiques et à être accusé de ne pas honorer d’une manière adéquate et opportune ses engagements aux termes de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et de la Convention du Nord-Est québécois.
En 2002, toutefois, l’aube d’une ère nouvelle s’est levée dans les relations entre les Cris d’Eeyou Istchee et les gouvernements provincial et fédéral. En février de cette année-là, en effet, les Cris d’Eeyou Istchee et le gouvernement du Québec ont signé la Paix des braves. Aux termes de cet accord, les Cris d’Eeyou Istchee ont accepté d’assumer des obligations provinciales majeures en matière de développement socioéconomique et d’infrastructure locale dans les collectivités cries.
En contrepartie, le gouvernement du Québec a pris trois engagements: d’abord, verser 3,5 milliards de dollars sur 50 ans à la nouvelle société de développement crie; deuxièmement, fournir des fonds pour financer régulièrement les régimes de santé, de police et de justice cris; troisièmement, partager avec les collectivités cries les revenus et les retombées, sous forme de contrats et d’emplois, de l’exploitation des ressources naturelles dans les terres traditionnelles des Cris.
Les dirigeants cris se sont ensuite adressés au gouvernement du Canada et lui ont proposé un accord similaire pour régler les divergences qui subsistaient encore entre les deux parties. Au bout de presque six ans d’études rigoureuses, de consultations, de négociation et d’efforts de ratification, nous avons signé l’accord prévoyant de nouvelles relations entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee, accord marquant qui fait ce que promet son titre: établir de nouvelles relations entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee.
J’ai eu l’insigne honneur de participer à la cérémonie de signature à Mistissini, en février 2008. C’est avec fierté que je me suis joint à des centaines d’habitants de l’endroit et à plus d’une douzaine de dirigeants et d’anciens dirigeants des neufs collectivités cries de la région pour célébrer l’inauguration de relations renouvelées entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee.
[Français]
Aujourd'hui, plus d'un an après cet événement mémorable, nous sommes réunis ici, dans cette Chambre, pour examiner le projet de loi et enchâsser dans le droit canadien un élément crucial de l’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee. Toutefois, quel est donc le contenu de cette entente et, conséquemment, du projet de loi?
[Traduction]
Quant au deuxième objectif, celui des fonds et du financement courant, l’accord prévoit que le gouvernement versera une indemnisation de 1,4 milliard de dollars aux Cris d’Eeyou Istchee. Ces fonds se subdivisent en trois parties. La première est un versement forfaitaire de 1,1 milliard de dollars. Les fonds ont été transférés au moment de la signature de l’accord, ce qui a mis fin à d’importantes poursuites que les Cris d’Eeyou Istchee avaient entamées contre le gouvernement fédéral.
Le gouvernement fédéral versera encore 100 millions de dollars à l’Administration régionale crie dans les 30 jours suivant la sanction royale du projet de loi . Un troisième paiement de 200 millions de dollars sera fait dans les 30 jours suivant la sanction royale d’un projet de loi à venir qui reconnaîtra le gouvernement distinct de la nation crie.
Grâce à ces nouveaux fonds et à un apport financier régulier, les Cris d’Eeyou Istchee sont prêts à assumer un certain nombre de fonctions régionales essentielles, dont la police, l’hygiène publique, les services de lutte contre les incendies et plusieurs initiatives essentielles de développement économique, comme la formation professionnelle, le recrutement et le placement.
C’est ici qu’intervient le projet de loi . Il faut donner à l’Administration régionale crie, par voie législative, le pouvoir d’assumer ces fonctions. En conséquence, le projet de loi C-28 modifie la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec pour accorder à cette administration des pouvoirs de réglementation analogues à ceux que possèdent maintenant les huit gouvernements locaux cris.
Comme son nom l'indique, l’Administration régionale crie est l'organisme de réglementation des affaires dans toute la région. Le projet de loi accorde à l’Administration régionale crie des pouvoirs qui correspondent vraiment à son titre. Il reconnaît également une neuvième bande crie, les Cris d'Oujé-Bougoumou, et la place sous l'égide de l’Administration régionale crie.
Ces dispositions progressistes rejoignent parfaitement le troisième objectif du nouvel accord de relations, soit la modernisation de la gouvernance crie. L'adoption du projet de loi engage le gouvernement du Canada à collaborer avec les Cris d'Eeyou Istchee afin de poursuivre la transformation de leur régime actuel de gouvernance. Ce processus de modernisation comprend l'élaboration d'une constitution crie et l'établissement d'un gouvernement de la nation crie.
Le projet de loi sert de tremplin pour les Cris d'Eeyou Istchee vers un véritable gouvernement digne de ce nom. En signant ces accords avec les gouvernement du Canada et du Québec, ils ont fait la preuve de leur volonté de prendre leur destinée en main, de doter leurs collectivités de services sociaux de grande qualité, de protéger leur culture et d'établir pour l'avenir une direction claire axée sur l'autosuffisance. Ce faisant, les Cris d'Eeyou Istchee auront gagné le respect et l'admiration de tous les Canadiens, Autochtones et non-Autochtones.
Les noms des grands chefs cris occupent une place de choix dans l'histoire de notre pays. Le grand chef Billy Diamond a signé la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, dont il s'est ensuite servi pour améliorer la prospérité, le développement social et la protection culturelle de son peuple.
Le grand chef Matthew Coon Come s'est battu pour assurer à son peuple une part équitable de la richesse créée grâce au ressources naturelles des terres cries.
Le grand chef Ted Moses a contribué à l'élaboration de la Paix des Braves avec le gouvernement du Québec et l'a signée. Il a puissamment contribué à faire en sorte que son peuple soit officiellement reconnu en tant qu'organisation consultative non gouvernementale par les Nations Unies.
Et aujourd'hui, le signataire de l'accord, le grand chef Matthew Mukash, prend la place qui lui revient aux côtés de ces grands Canadiens. Je félicite le grand chef Mukash pour son leadership inspiré grâce auquel il a piloté le cheminement de l'accord jusqu'à sa ratification et je le remercie pour son énorme contribution, pas seulement à la vie de sa communauté, mais à la prospérité et à la vitalité de tout le Canada.
Je profite de l'occasion pour saluer Bill Namagoose, négociateur en chef du Grand conseil des Cris, et Raymond Chrétien, négociateur en chef pour le gouvernement du Canada. Ces hommes sages, habiles et patients ont joué un rôle crucial en nous aidant à conclure une entente et à forger cette nouvelle relation. En gros, sans leur effort diligent, leur engagement ferme et leur leadership déterminé, aucune entente n'aurait été conclue et nous ne serions pas saisis du projet de loi aujourd'hui.
Enfin, j'aimerais souligner le rôle indispensable joué par les Cris d'Eeyou eux-mêmes. Lors d'un référendum portant sur l'entente, ils ont voté, par une écrasante majorité d'environ 90 p. 100, en sa faveur, exprimant ainsi leur foi profonde en la valeur d'une relation renouvelée avec le gouvernement du Canada et leur ferme intention d'en faire une réalité.
[Français]
Dans ce même esprit d'optimisme, de partenariat et de confiance clairement démontré par les Cris d'Eeyou Istchee, je demande à mes collègues de faire leur part.
[Traduction]
J'invite mes collègues à adopter le projet de loi afin de reconnaître dans la loi de notre pays un élément vital de l'Entente concernant la nouvelle relation. J'encourage tous les députés à jouer un rôle dans la revitalisation de la relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d'Eeyou Istchee, à contribuer à l'inauguration d'une nouvelle ère dans l'histoire remarquable de ce peuple, une ère de plus grande prospérité, d'auto-détermination, d'épanouissement et d'harmonie pour nous tous.
:
Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi de 1984. Je remercie le ministre et le gouvernement d'avoir présenté ce projet de loi de façon plutôt expéditive.
Fondamentalement, le projet de loi découle de revendications territoriales et de la mise en oeuvre de ce que nous appelons les traités modernes. Le premier de ces traités a été la Convention de la Baie James et du Nord québécois, de 1975, dont je parlerai un peu au cours de notre débat.
Les négociations et la mise en oeuvre ont été difficiles. Elles ont été ardues, longues et complexes, mais les traités ont aussi été porteurs d'espoir, de possibilités et de promesses. En 1975, la Convention de la Baie James et du Nord québécois marquait le début d'une nouvelle époque dans l'histoire du Canada et dans les relations avec les peuples autochtones. Cependant, même si de nouveaux rapports et de nouveaux processus ont vu le jour, cela ne s'est pas fait sans un certain tâtonnement et sans douleurs.
Depuis 1975, des revendications territoriales globales ont été réglées, notamment au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut, au Québec et au Labrador, avec de nombreux peuples autochtones: les Teslin Tlingits, les Gwich'ins, les Nisga'as et les Inuits, mais, malheureusement, jusqu'à maintenant aucune revendication territoriale globale n'a été réglée avec le peuple métis.
Si nous jetons un regard sur la mise en oeuvre des traités, nous pouvons dire que les peuples autochtones de tout le Canada les ont signés avec un sentiment profond de leur importance. Je peux rendre compte de ce sentiment en citant une prophétie crie:
Une fois que le dernier arbre aura été abattu,
Une fois que la dernière rivière aura été empoisonnée,
Une fois que le dernier poisson aura été pêché
Vous comprendrez que l'argent ne se mange pas.
Compte tenu de la nature des revendications territoriales où les peuples autochtones ont dû céder des terres ou renoncer à certains droits en échange d'argent, cette prophétie témoigne de l'importance profonde des négociations parce qu'elles créent dans un certain sens une situation permanente. Pour les anciens, on n'a pas le droit de céder des terres parce que nous en sommes les gardiens et les responsables. Cela donne un caractère encore plus émotif aux négociations.
Je dis cela parce que, lorsque nous arrivons à la mise en oeuvre, nous nous heurtons souvent à des problèmes d'interprétation et de cohérence. Nous entendons souvent des Autochtones affirmer qu'ils ont signé les ententes, que les gouvernements fédéral et provinciaux assument certaines responsabilités, mais que les promesses faites par la Couronne ne sont pas tenues, ce qui porte atteinte à son honneur et démontre un manque de sincérité.
Je peux vous dire que c'est ce qui se produit avec les Nisga'as. Je les ai rencontrés et ils m'ont dit: « Nous avons signé une entente et il nous a fallu sept ou huit ans maintenant pour négocier d'autres aspects de l'entente, comme les ententes sur le cadre financier. »
J'ai parlé avec les Tlingits de Teslin et ils m'ont dit qu'après plus d'une décennie maintenant, certains des aspects de leur revendication territoriale globale, comme le transfert des responsabilités en matière de justice et d'application de la loi, n'ont toujours pas été réglés.
J'ai même parlé du gouvernement du Nunatsiavut au Labrador. Le mot « Nunatsiavut » signifie « notre beau pays ». Je connais ces gens. Je les connais bien. J'ai des liens de parenté avec bon nombre d'entre eux. Ils disent que, depuis 2005, il y a eu des problèmes au niveau de la mise en oeuvre de l'entente.
C'est dans ce contexte général que je parle du projet de loi . Je tiens à parler plus précisément du Labrador parce que je le connais bien. Trois dossiers de revendications territoriales sont en cours, à diverses étapes. J'ai parlé de la revendication territoriale globale qui a été signée en 2005, projet auquel j'ai été heureux de participer. J'étais à la Chambre quand l'entente a été ratifiée.
Il y a également les Innus qui ont signé une entente dite de la Nouvelle aube. Ils veulent que cette entente soit intégralement ratifiée, ce qui permettrait de créer un climat de certitude propice au développement, à la prospérité économique et à la progression sociale.
Puis, il y a la nation des Métis du Labrador dont j'ai été le président pendant onze ans. Elle a aussi présenté une revendication qui est à l'étude depuis 1990. Elle a transmis des renseignements supplémentaires en 1996 et elle attend toujours que le gouvernement du Canada se présente à la table pour négocier les points en suspens.
C'est dans ce contexte que s'inscrit le projet de loi . Comme je l'ai souligné, il y a eu en 1975 la Convention de la Baie-James et du Nord québécois qui ne prévoyait pas de plan de mise en oeuvre des ententes, ce qui a donné lieu à toute une série de poursuites et de différends au niveau de l'interprétation.
Il y a eu également la Convention du Nord-Est québécois avec les Naskapis en 1978, puis, en 1984, la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec qui faisait suite à la Convention de la Baie-James et du Nord québécois. La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec a été décrite comme étant la première mesure législative canadienne portant sur l'autonomie gouvernementale des Autochtones. Elle prévoyait des mesures de gouvernance locale pour les bandes cries sur leurs terres.
Au coeur du présent débat se trouvent les précurseurs de ce qui arrive aujourd'hui dans la société: la première revendication territoriale moderne, en 1975, et le premier accord axé sur l'autonomie gouvernementale, en 1984. Une fois ces accords signés, leur mise en oeuvre a été problématique, et une série de poursuites ont été intentées devant la justice. L'accord avec les Inuits et les Naskapis, en 1990, a été conclu pour tâcher de résoudre ces problèmes, mais il n'y a pas eu d'accord avec les Cris d’Eeyou Istchee à ce moment.
En 1992, le Canada et les Cris d’Eeyou Istchee ont conclu l'accord Canada—Oujé-Bougoumou. En 2002, les Cris ont conclu un accord avec le Québec, la Paix des braves, en vigueur pendant 50 ans, au sujet de l'exploitation des ressources, des services de police et des dédommagements à verser pour que certains projets d'exploitation des ressources puissent être réalisés. Si je comprends bien, cet accord prévoit aussi un mécanisme pour résoudre les litiges en suspens.
Puis, en 2008, le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee ont conclu un nouvel accord de relations, qui porte le nom d'accord Chrétien-Namagoose. Les Cris ont ratifié cet accord, tout comme les autres accords avec les Cris que j'ai déjà mentionnés.
Les représentants du peuple eux-mêmes ont pris part aux négociations. Ils ont examiné l'accord, puis sont allés le présenter à leurs populations et l'ont ratifié. Beaucoup de gens ont qualifié cet accord de règlement amiable, et c'est essentiellement ce dont il s'agit. Ce nouvel accord de relations est en vigueur pour 20 ans et prévoit une série de paiements, qui devraient totaliser 1,4 milliard de dollars versés en trois phases distinctes.
Je voudrais conclure mon intervention avec la description que la Commission crie-naskapie a faite de l'évolution du dossier au cours des trois dernières décennies. Ce sont les mots du président de la Commission crie-naskapie, qui a été établie en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec adoptée en 1984:
La Convention de la Baie James et du Nord québécois [...] (qui ne contenait pas de plan de mise en oeuvre), a été signée en 1975. Au cours de trente-cinq années depuis sa signature, il y a eu de nombreuses disputes et de fréquents litiges au sujet des obligations en vertu de la Convention et de la mise en oeuvre de l’entente. À son tour, cette situation a produit une relation difficile entre la Nation crie d’Eeyou Istchee et le Canada et le Québec. Grâce aux efforts des Cris, du Canada et du Québec, cette situation a maintenant changé. L’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Québec et les Cris du Québec [...] a réglé des questions non résolues entre les Cris et le Québec [pendant 50 ans]. L’Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d’Eeyou Istchee de 2008, a abordé d’une manière parallèle, les problèmes non réglés entre les Cris et le Canada. Ces ententes ont été ratifiées par les peuples cris ainsi que par le Québec et le Canada. Elles représentent une réalisation importante visant à régler les problèmes par l’entremise de la négociation.
[...] Il existe certaines preuves que les gouvernements du Canada et du Québec ont appris de l’expérience de la Baie James. Pendant la plus grande partie des plus de trente années passées, les gouvernements, par l’entremise de leurs actions et de leurs paroles semblent avoir traité les Cris selon une approche qui, en fait, en était essentiellement une de confrontation [...] Les structures traditionnelles et les processus décisionnels du gouvernement étaient mal ajustés à la négociation et encore moins à la mise en oeuvre des traités et des revendications territoriales avec les Premières nations [...] Les modifications à la Constitution en 1982 ont changé la situation [...] Les droits des Autochtones et les droits issus des traités (y compris les ententes de revendications territoriales) ont été adoptés au-delà de l’étendue de l’habileté des gouvernements de les ignorer ou de les changer unilatéralement. Maintenant, comme l’a dit la Cour suprême dans la décision Badger, « Les traités…. créent des obligations exécutoires… ».
Lors de la signature de cette Entente concernant une nouvelle relation, le Grand Chef cri Mukash a dit: « Elle lance le processus qui est probablement le plus important depuis 1975, pour la reconnaissance d'un nouveau gouvernement cri. »
L'Entente concernant une nouvelle relation prépare le terrain pour l'avenir et préconise une approche en deux temps: la concrétisation de l'engagement du Canada à modifier la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec de 1984, l'objet du débat d'aujourd'hui, et la négociation d'ententes relatives à l'autonomie gouvernementale de la nation crie, qui serait dotée d'une Constitution crie et de ses propres pouvoirs.
Le projet de loi constitue donc la première phase de cette initiative et se résume sous deux rubriques: les modifications visant l'administration régionale crie et les modifications concernant les Cris de Oujé-Bougoumou. J'aimerais décrire les effets de ces modifications.
Les modifications proposées permettraient à l’Administration régionale crie, qui constitue en fait l’organe administratif du Grand Conseil des Cris, d’agir à titre d’instance gouvernementale régionale sur les terres de catégorie IA, c’est-à-dire les terres qui appartiennent aux Cris en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec de 1984; de réglementer les services d’hygiène essentiels, les logements et les bâtiments utilisés à des fins de gouvernance régionale; d’utiliser, de gérer et d’administrer les deniers et d’autres éléments d’actif; de promouvoir le bien-être général des membres des bandes cries; et de préserver et promouvoir leur culture, leurs valeurs et leurs traditions.
Pour ce qui est des modifications touchant les Cris de Oujé-Bougoumou, il faut préciser qu’ils n’avaient pas été reconnus comme bande distincte dans la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Les membres de cette collectivité étaient énumérés sur la liste de la nation crie de Mistassini et ont bénéficié de la convention depuis sa mise en œuvre. Toutefois, les Cris de Oujé-Bougoumou essaient depuis 1975 de se faire reconnaître comme bande distincte en vertu de la convention et de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. Le gouvernement du Canada s’est engagé à modifier la convention et la loi à cette fin.
Les modifications prévues dans le projet de loi traitent de questions telles que la constitution de la collectivité, les dispositions de transition relatives aux conseils, au conseil d’administration et aux règlements, les droits de résidence et d’occupation, le droit d’accès aux terres, les activités d’exploration, les exemptions fiscales et le caractère insaisissable des biens.
C’étaient là les grandes lignes du projet de loi .
Nous avons eu des entretiens avec des représentants du gouvernement au sujet de la consultation. Ils nous ont donné l’assurance que le gouvernement a procédé à des consultations suffisantes et efficaces. Nous avons parlé aux Cris qui ont participé de près à la rédaction du projet de loi et qui ont également signé l'accord concernant une nouvelle relation. Nous avons également parlé aux Naskapis qui ont dit être satisfaits de ces modifications. Nous avons aussi parlé aux Inuits.
On nous a en outre donné l’assurance que le projet de loi ne porterait pas atteinte aux droits et intérêts d’autres peuples autochtones.
De ce fait, je suis enchanté de donner mon appui au projet de loi au nom du Parti libéral. Je voudrais féliciter toutes les parties intéressées pour leurs efforts. En fin de compte, il s’agit ici d’aider des gens et de soutenir des collectivités. Je n’aime pas dire « accorder » l’autonomie gouvernementale parce qu’il me semble que c’est un oxymore. Ces gens ont et avaient l’autonomie gouvernementale.
Les Cris d’Eeyou Istchee avaient déjà leur propre autonomie gouvernementale. Nous ne faisons maintenant que le reconnaître aux fins de ce qui se fera à l’avenir dans le cadre de l'entente concernant une nouvelle relation. Si j’ai bien compris, ils s’attendent à la conclusion d’un accord d’ici cinq ans. C’est vraiment optimiste compte tenu du fait que certaines négociations sur les revendications territoriales et l’autonomie gouvernementale ont duré une trentaine d’années. Certains diront même qu’elles se poursuivent depuis un siècle. En effet, les Nisga’a disent souvent qu’ils ont commencé à revendiquer à la fin du XIXe siècle.
Cette mesure législative est un pas dans la bonne direction. Je suis heureux de l’appuyer. Il est bon de voir des Autochtones participer pleinement à la rédaction d’un projet de loi. Cela aura une valeur d’exemple pour prouver que, lorsque les Autochtones prennent part à l’élaboration d’une loi qui les touche, les choses se déroulent d’une façon beaucoup plus harmonieuse qu’autrement.
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Monsieur le Président, tout d'abord, j'aimerais que vous me le signaliez lorsqu'il ne me restera qu'une minute parce que j'ai l'impression que j'en ai pour au moins 25 à 30 minutes. Comme je n'ai que 20 minutes, je tenterai d'être bref.
J'aimerais saluer des étudiants de la Polyvalente Natagan, de Barraute, dans mon comté, qui sont ici aujourd'hui dans le cadre d'une visite sur la Colline parlementaire. Je les salue. Je vais leur donner un petit cours de géographie et d'histoire et j'espère que cela fera partie de leur examen du mois de juin.
Nous assistons ici à un moment historique et il m'apparaît important de le souligner. On me permettra de rendre hommage au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien qui a travaillé sur ce dossier, mais également à Matthew Mukash, grand chef et président du Grand Conseil des Cris, à Ashley Iserhoff, vice-grand chef et vice-président du Grand Conseil des Cris, à Roderick Pachano, représentant autorisé de la nation crie de Chisasibi, à Losty Mamianskum de la Première nation de Whapmagoostui, à Rodney Mark de la nation crie de Wemindji, à Lloyd Mayappo, de la bande d'Eastmain, à Steve Diamond, des Cris de la Première nation de Waskaganish, à Josie Jimiken, de la nation crie Nemaska, à John Kitchen, de la bande de Waswanipi, à John Longchap, de la nation crie de Mistissini et à Louise Wapachee, représentante autorisée de Oujé-Bougoumou Eenuch Association.
Ces personnes représentent des centaines de Cris qui ont signé une entente extrêmement importante ayant donné lieu au projet de loi . Dans l'entente que j'ai entre les mains, il était clairement mentionné qu'un projet de loi, et c'est le projet de loi , recommande au gouvernement et au Parlement du Canada des modifications dans les 18 mois suivant l'entrée en vigueur de la présente entente, signée le 21 février 2008.
Il devient extrêmement important et, je n'oserais pas dire urgent, qu'on respecte les signatures qui ont été apposées sur ce document. Il fallait donc qu'on dépose un projet de loi en cette Chambre pour ratifier cette entente. Je dis aux étudiants qu'il faudra que cette entente soit ratifiée. Cette entente couvre un immense territoire qui se retrouve au nord du Québec, au nord de l'Abitibi-Témiscamingue et qui frôle la Baie-James. Ce territoire entoure tous les barrages hydroélectriques que le Québec veut mettre en oeuvre. Par conséquent, il s'agit d'une entente extrêmement importante qui aidera les Cris en ce qui a trait à leur désir d'autonomie.
Il est important que je signale que le Bloc québécois appuiera ce projet de loi tout à fait important. Le Bloc québécois reconnaît le droit à l'autonomie gouvernementale pour les peuples autochtones. Cet accord actualise ce droit de la nation crie. Il est évident que ce projet de loi ne règle pas tous les problèmes. Je crois que nous serions plusieurs à voter rapidement en faveur d'un projet de loi si cela suffisait à enlever la pauvreté, l'alcoolisme, le diabète et les crimes majeurs dans les communautés isolées. Hélas, les choses ne vont pas toujours comme on le veut. Dans les communautés autochtones, il y a bien souvent des difficultés inhérentes à vivre dans des communautés dites éloignées. Il est important qu'on réalise, qu'on s'assoit et qu'on négocie avec les autochtones parce qu'il faudra comprendre un jour que nous sommes sur un territoire autochtone. Même le Parlement d'Ottawa se retrouve sur un territoire autochtone, soit celui des Algonquins.
Il faudra comprendre cela un jour, et accepter de négocier et de partager ce territoire avec les communautés autochtones.
Le Bloc québécois reconnaît que les peuples autochtones sont des peuples distincts ayant droit à leur culture, à leur langue, et à leurs coutumes et traditions, et ayant le droit d'orienter eux-mêmes le développement de cette identité propre.
À mes yeux, ce projet de loi va en ce sens, et c'est la raison pour laquelle j'ai recommandé à mes collègues du Bloc québécois, non seulement d'appuyer ce projet de loi, mais de faire le plus rapidement possible pour accélérer la mise en oeuvre de ce projet de loi. J'espère donc que nos collègues sénateurs l'étudieront rapidement afin que la sanction royale soit accordée avant l'ajournement du mois de juin.
Madame la Présidente, avant votre arrivée au fauteuil, je signalais que j'aimerais que vous m'avisiez lorsqu'il me resterait une minute, sinon j'en aurai pour au moins une demi-heure ou trois quarts d'heure. Je ne suis pas certain que mes collègues apprécieraient que je prenne une partie de l'après-midi pour parler de l'importance de ce projet de loi, qui touche directement les Autochtones dans une région qui a bien besoin des ententes qui découlent de ces projets de loi.
Il est rare que nous puissions souligner que le gouvernement a agi de concert avec les communautés cries. Dans ce dossier, il faut le souligner. Un travail inlassable a effectivement été fait par le Grand Conseil des Cris, mais je crois également qu'un travail a été fait conjointement, non seulement avec les communautés cries, mais avec le gouvernement du Québec et avec les communautés concernées. En effet, il ne faudra pas oublier qu'on affecte les communautés naskapies. À Kawawachikamach — j'ai hâte de voir comment ce sera traduit et écrit —, une communauté naskapie est située sur la frontière du Labrador et est touchée par cette entente.
J'ai posé la question au ministre et j'ai eu la réponse à laquelle je m'attendais. Ce genre d'entente devra être adopté pour la nation naskapie car il en va du développement et de la survie des nations autochtones, surtout celle de Kawawachikamach, une communauté très isolée au nord de Schefferville. J'ajoute, à l'intention de mes étudiants qui devront voir sur une carte où se situe cette communauté, qu'elle est à la pointe extrême est du Québec qui touche le Labrador. Cette nation de Kawawachikamach est très importante dans ce dossier.
Je rappelle que ce projet de loi est issu de la Convention de la Baie James et du Nord québécois, signée dans les années 1970. Le gouvernement du Québec avait fait de l'hydroélectricité sa priorité. Par conséquent, il fallait détourner des rivières et construire des barrages hydroélectriques. Cela a donné les centrales La Grande-1, La Grande-2, La Grande-3 et maintenant La Grande-4. On a donc touché aux rivières qui touchent la Baie-James.
Le problème, c'est qu'on n'en avait pas parlé aux Cris, qui sont sur ce territoire ancestral depuis des millénaires. Il y a eu des poursuites, des injonctions et beaucoup de procédures au tribunal avant que les gouvernements ne s'assoient et reconnaissent qu'ils étaient en plein territoire ancestral des Cris. Ils devaient donc s'asseoir avec eux avant de penser à développer des barrages hydroélectriques. Cela a donné l'accord sur la Baie-James, qu'on appelle maintenant la Convention de la Baie James et du Nord québécois.
Depuis, neuf ans après la signature de cette convention, il y a eu les premiers accords de règlements. Non seulement le gouvernement du Québec était-il concerné à cause des bassins hydroélectriques, mais le gouvernement fédéral l'était directement aussi à cause des terres ancestrales et des revendications territoriales du peuple cri.
Le projet de loi est le résultat de l'entente entre le gouvernement du Canada et les Cris de Eeyou Istchee signée le 21 février 2008. En vertu de cette entente, on dispose de 18 mois pour la mettre en oeuvre et, si je sais compter, ces 18 mois sont presque écoulés. C'est l'une des raisons pour lesquelles le Bloc québécois appuiera sans réserve ce projet de loi et fera en sorte qu'il soit adopté à toutes les étapes.
Je vais expliquer la façon dont cela fonctionne à l'intention de mes étudiants. Une fois le projet de loi adopté ici, il devra être renvoyé en comité pour y être étudié. Nous nous sommes entendus ce matin au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord afin que ce projet de loi soit étudié et adopté très rapidement et qu'il entre en vigueur avant la fin de la session, au plus tard au début du mois de septembre. Il le faut absolument. Des sommes importantes sont en jeu.
Je peux répondre immédiatement à une question posée par mon collègue de sur les sommes concernées. Un milliard cinquante millions de dollars seront versés sur un certain nombre d'années. Par ailleurs, dans les 30 jours suivant la sanction royale — il faut donc que le projet de loi soit adopté —, les parties conviennent que 100 millions de dollars seront versés aux communautés cries concernées. Dans les 30 jours suivant la sanction royale, le gouvernement devra verser encore 200 millions de dollars. Un total de 300 millions de dollars sera donc versé très rapidement après la sanction royale. On pense qu'il s'agit d'énormément d'argent pour les Cris, mais à elle seule, la mise en place de la communauté d'Oujé-Bougoumou a coûté 110 millions de dollars.
Énormément de choses restent à faire et des dossiers importants doivent être réglés. Je répète que l'argent ne réglera pas les problèmes d'alcoolisme, de santé, de décrochage scolaire et de criminalité dans les communautés. L'argent aidera probablement ces communautés isolées à se prendre en main, à se donner des réseaux d'aqueducs plus importants et à aider les écoles à mieux fonctionner. Il faut absolument que les Autochtones se prennent en main. À partir de maintenant, les leaders de demain de la communauté crie seront formés grâce au versement de ces sommes d'argent. Il y en a déjà, mais il en faut encore plus. Ces sommes d'argent serviront à aider ces communautés.
Ces communautés connaissent une croissance phénoménale. Leur taux annuel de natalité varie entre 3 et 5 p. 100. Dans notre beau milieu, tout va bien; on reçoit tous les services nécessaires, les ordures sont cueillies et on n'a qu'à ouvrir le robinet pour avoir de l'eau potable. Dans les communautés autochtones, il faut amener les tuyaux d'aqueduc et bâtir des maisons sur des territoires qui, bien souvent, sont très hostiles. Les sommes d'argent versées serviront à aider les communautés cries à se prendre en main.
Une autre chose est importante: ce projet de loi, qui confirme l'entente, permettra au regroupement cri de faire des règlements dans les domaines qui les touchent directement, à savoir la santé et l'hygiène, la protection de l'environnement et la prévention de la pollution, et tous les autres secteurs d'ordre administratif comme l'administration de la justice ainsi que le développement économique et social. L'année dernière, la Commission Crie-Naskapie qui gère et supervise les ententes entre les Cris et les Naskapis nous a fait des recommandations. Le projet de loi , que je souhaite voir adopter rapidement par cette Chambre, mettra en oeuvre ces recommandations.
Il y a aussi une entente sur ce qu'on appelle les terres. Il y a trois catégories de terres. Je sais que c'est éminemment complexe, mais il y a des terres de catégorie I, de catégorie II et de catégorie III. Si je fais une comparaison, je dirai que c'est comme le poulet. Dans la catégorie I, on trouve le meilleur. Il s'agit des terres les plus proches. Dans la catégorie II, on trouve des terres un peu plus éloignées, de compétence provinciale, par exemple. Les terres de la catégorie III sont des terres publiques du Québec.
J'ai pris un raccourci pour éviter de prendre le temps des membres de ce Parlement pendant plusieurs minutes encore. Ce que je veux dire, c'est qu'on s'est enfin entendus avec les Cris. On a maintenant « L'Entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d'Eeyou Istchee » pour aller de l'avant avec une définition des catégories de terres. C'est probablement l'un des points importants, un point essentiel, le coeur même de l'entente. Il n'y a pas que l'argent. Enfin, on saura que cette parcelle de terre est de catégorie 1, cette autre parcelle est de catégorie 2.
Je donne un exemple. On s'est même entendus que les terres de catégorie 2 couvrent une superficie de 155 000 kilomètres carrés. La gestion se fera entre les Cris et l'autorité régionale. On est sur un territoire du Québec, il faudra qu'il y ait un partage. On devra déterminer qui peut aller à la chasse, à la pêche, quelles ZEC, comment on organisera les zones d'exploitation contrôlée que sont les ZEC, qui aura des permis de pêche, quand ils pourront aller à la pêche. Ce sont celles de catégorie 2.
Les terres de la catégorie 1 sont sous juridiction fédérale et elles seront également sous juridiction des Cris en partie.
Les terres de catégorie 3 — cela devient important — sont des droits exclusifs pour les Cris et les Naskapis. Ces terres couvrent un territoire — on ne peut même pas se l'imaginer, mais essayons de faire un dessin — de 911 000 kilomètres carrés. Mon comté a 152 000 kilomètres carrés, on multiplie cela par cinq ou six, c'est un immense territoire sur lequel les Cris et les Naskapis — des ententes devront être faites, mais pour l'instant parlons des Cris — auront un droit exclusif et où les communautés participeront à l'administration et à la mise en valeur du territoire.
Dans les terres de catégorie 1A — parce qu'on a 1, 1A, 1B —, c'est éminemment complexe et c'est la raison pour laquelle je tiens, personnellement et au nom du Bloc québécois, à féliciter tous ceux et celles qui ont travaillé depuis des années à mettre en oeuvre ce projet. Lorsqu'on parle de catégories de terres, il y a actuellement des négociations avec les Innus et ce sont les mêmes débats qui reviendront.
Les Attikameks, au sud du Lac-Saint-Jean, c'est la même chose. Dans tout le réservoir qui s'en va vers le Lac-Saint-Jean et même un peu plus haut, on est en territoire attikamek. Juste à côté, on est en territoire innu. Tout ce partage, cette définition des terres, deviendra très important et pourra peut-être — on le verra avec le temps — être mis en application auprès des communautés et des grands conseils comme le Grand conseil des Cris. Le Grand conseil attikamek et le Grand conseil des Innus seront également touchés.
Si j'avais un souhait à exprimer, ce serait qu'un jour — et je lance un message à mes amis algonquins —, les Anishnabés puissent également faire un unique grand conseil algonquin anishnabé afin qu'ils puissent mettre ensemble leurs connaissances, leurs efforts et faire en sorte qu'on arrête — et je pèse mes mots — de les exploiter et de les confiner à de petits territoires. Lorsqu'on parle de chasse, de pêche, d'exploration minière et d'exploitation minière, ils ne sont même pas consultés.
Vous me signalez qu'il ne me reste que deux minutes, je vais donc aller un peu plus rapidement. Je terminerai en disant que c'est un projet de loi très important, qui fait suite à une consultation — je le dis honnêtement — bien faite entre les autorités du gouvernement fédéral et les neuf nations cries. Je ne pense pas me tromper en disant que les 10 nations — parce qu'une dixième sera bientôt reconnue —, selon les informations que j'ai eues, sont très fières de cette entente et souhaitent qu'elle soit transmise et adoptée par le projet de loi , et ce, dans les plus brefs délais.
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Madame la Présidente, comme mes collègues à la Chambre, je suis heureuse aujourd'hui d'appuyer le projet de loi . Il s'agit d'une mesure législative importante et je crois que tous les partis seront d'accord pour accélérer le processus.
À l'aide des documents d'information du gouvernement, j'aimerais mettre ce projet de loi en contexte.
La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec est considérée comme la première loi sur l'autonomie gouvernementale des Autochtones à avoir été adoptée au Canada. Elle reconnaît l'administration autochtone locale et a établi un système de gestion du territoire avant que le gouvernement fédéral n'adopte sa politique sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, en 1995.
La loi est entrée en vigueur en 1984 pour permettre au gouvernement fédéral de s'acquitter de ses obligations en vertu de deux conventions historiques: la Convention de la Baie James et du Nord québécois et la Convention du Nord-Est québécois.
La première prévoit des obligations précises envers la nation crie et les Inuits du Nord du Québec, alors que la seconde prévoit des obligations précises envers la nation naskapie.
J'aurais bien plus de renseignements historiques à partager, mais je veux parler des modifications qui sont proposées et dont la Chambre est saisie. Je vous les résume. Les modifications proposées permettraient de remplir deux objectifs: premièrement, conférer à l'Administration régionale crie plus de responsabilités et de pouvoirs, notamment des pouvoirs réglementaires, afin qu'elle puisse mieux accepter certaines responsabilités précises assumées jusqu'ici par le gouvernement fédéral en vertu de la Convention de la Baie James et du Nord québécois et s'en acquitter; et deuxièmement, reconnaître les Cris d'Oujé-Bougoumou en tant que bande et gouvernement local distincts en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.
J'ai exposé ce contexte historique parce que je veux également parler du processus.
Il est important que les personnes qui y participent activement puissent faire entendre leur point de vue à la Chambre par l'entremise d'un député, étant donné qu'il n'est pas permis aux particuliers de prendre la parole en cet endroit. Au lieu de paraphraser, je citerai les propos de quelques-uns des commissaires qui ont témoigné devant le comité le 5 mai. Ceux-ci nous ont brièvement entretenus du processus, de leur appui à l'égard de cette mesure législative et d'autres dispositions à prendre.
Ont comparu devant le comité M. Richard Saunders, président de la Commission Crie-Naskapie, le commissaire Robert Kanatewat, de la nation crie de Chisasibi, à la baie James, et M. Philip Awashish, un Eeyou Istchee de la nation crie de Mistissini.
Les commissaires sont venus nous parler du Rapport bisannuel de la Commission Crie-Naskapie. Les commissaires font valoir depuis nombre d'années, au nom de leur peuple, l'importance de telles modifications. On parle d'un processus qui s'est échelonné sur 19 années.
Si l'on envisage de telles modifications, c'est notamment parce qu'aucun plan de mise en oeuvre n'accompagnait l'accord initial, conclu en 1984, et qu'il n'existait alors aucune exigence législative en cette matière. L'absence de plan a occasionné des retards dans la réalisation de projets dont auraient bénéficié les Cris et les Naskapis.
Dans une note documentaire à l'intention des membres du comité, les commissaires parlaient de ce plan de mise en oeuvre en ces termes:
En général, le processus de mise en oeuvre, comme le prévoit celui de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, consiste en ce que le Parlement promulgue une loi. Ensuite, l’administration et la mise en oeuvre de cette loi incombent au ministre des Affaires indiennes et du Nord Canada.
Il faut que je dise, en passant, que le gouvernement conservateur actuel a hérité de nombreux problèmes qui existaient sous les régimes précédents.
Et ils ajoutent ceci:
Tout au cours de ce mécanisme traditionnel de mise en oeuvre, les peuples cris et naskapis ne jouent pas de rôle significatif dans le processus décisionnel même s’ils (les Cris et les Naskapis) sont les gens les plus touchés par l’application, l’administration et la mise en oeuvre de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. Le mode conventionnel de mise en oeuvre est souvent insensible aux besoins et aspirations actuels des peuples cris et naskapis et a mené à une mise en oeuvre symbolique qui ne produit aucun changement réel à la façon dont les décisions sont prises et la façon dont les choses sont faites.
Quand il a comparu devant le comité pour parler de cette loi ainsi que du rapport et des modifications proposées, le président de la commission a dit:
Personne ne s'oppose vraiment à cela. C'est une modification d'ordre administratif et de nature symbolique et nous sommes heureux qu'elle ait été présentée. Sans vouloir faire preuve de trop de cynisme à l'égard des processus, nous aimerions signaler qu'on nous promet cette modification depuis 19 ans et que nous sommes enchantés de la voir enfin.
Pendant ces 19 ans, il y a eu beaucoup d'occasions manquées. Au fil des années, les gouvernements ont ignoré les nombreux rapports des commissaires, qui demandaient ces modifications.
Le président de la commission a signalé que ce projet de loi était essentiellement un projet de loi d'ordre administratif et que d'autres modifications non contestées et non litigieuses devaient être apportées. Les Cris nous demandent d'adopter cette mesure législative rapidement et de recourir au processus utilisé pour présenter ces modifications, lequel s'est accéléré au cours des dernières années, afin d'examiner le reste des modifications non litigieuses. De cette façon, la population de ce territoire n'aura pas à attendre 19, 20 ou 25 ans pour des modifications qui sont essentiellement d'ordre administratif.
Le président a ensuite parlé d'autres modifications qui pourraient être apportées. Il a dit:
Si vous le permettez, j'aimerais vous dire ce qui nous préoccupe. Cela rejoint dans une certaine mesure ce que les leaders cris nous ont dit à maintes reprises. Certains de ces changements à la loi, comme les modifications d'ordre administratif, sont recommandés depuis 19 ans.
L'un des changements proposés concerne la tenue de référendums. Le président cite un exemple particulier:
Si les Cris veulent céder des terres dans une collectivité au conseil scolaire cri pour y construire une école crie, ils doivent tenir un référendum. Pensez-y. Dans vos collectivités, combien de personnes iraient voter dans le cadre d'un référendum sur la cession d'une terre de la municipalité à un conseil scolaire?
Les Cris reconnaissent qu'il est parfois nécessaire de tenir un référendum, mais font valoir que beaucoup d'autres ordres de gouvernement ne sont tenus ni d'avoir recours à un référendum pour prendre des décisions dans les collectivités de leur ressort, ni d'obtenir les taux de participation prévus aux termes de la loi de 1984. C'est là une des modifications d'ordre administratif qu'ils proposent, et il y en a beaucoup d'autres. Certaines d'entre elles portent sur la tenue des élections des conseils de bande.
J'encourage le gouvernement actuel à profiter du processus qu'il a déjà lancé pour apporter ces modifications et ainsi s'assurer de pouvoir apporter rapidement la prochaine série de modifications.
À propos de ce genre de processus, j'aimerais parler de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qui touche beaucoup d'aspects. Il y est notamment question du consentement préalable donné en connaissance de cause et du droit des Premières nations de prendre des décisions sur leur territoire traditionnel. Le projet de loi dont nous sommes saisis suppose qu'il y a consentement préalable donné en connaissance de cause.
Les commissaires et les autres nous ont dit que les Cris et les Naskapis et les Cris d'Oujé-Bougoumou sentent qu'ils ont participé au processus préalable à la rédaction du projet de loi et que celui-ci tient compte de l'utilisation qu'ils font de leurs propres terres.
Beaucoup de députés ont parlé de l'autonomie gouvernementale. J'aimerais citer ce qu'ont dit les commissaires qui ont comparu devant le comité. Ils ont dit:
Nous insistons depuis des années sur l'importance de voir à ce que les lois reconnaissent et adaptent les coutumes cries, conformément aux dispositions de la Charte et autres, pour donner aux communautés des outils dont elles ont besoin. Ainsi, lorsque la communauté prendrait une décision légitime, elle aurait la capacité législative de concrétiser cette décision et de contrer les attaques de ceux qui pourraient prétendre que l'élection était en retard d'une journée et qu'elle est donc invalide.
Le problème, c'est qu'il arrive souvent que la loi ne donne pas suffisamment de pouvoirs aux communautés. Sauf votre respect, je reconnais qu'il s'agit là d'une grande amélioration par rapport à la Loi sur les indiens, mais elle impose le même genre de carcan que la Loi sur les indiens a toujours imposé, ce qui est inévitable. Il est vrai qu' a été rédigée sur la base de négociations, mais il ne faut pas oublier que ceux qui l'ont rédigée sont les mêmes qui ont écrit des documents du genre de la Loi sur les Indiens pendant des années. Nous devons absolument nous défaire de ce carcan et voir à ce que dans la mesure du possible, le droit traditionnel et coutumier... Nous reconnaissons tous la validité de la Charte, du Code criminel et d'autres instruments que nous respectons, mais dans ce contexte, nous devons voir à faire de cette loi un outil d'émancipation pour la communauté crie, afin de lui permettre d'aller de l'avant.
Le projet de loi ne va pas précisément dans ce sens. La prochaine série de modifications doit tenir compte de la nécessité de lui accorder une autonomie gouvernementale complète. Comme l'a souligné le commissaire, cela correspond très certainement aux dispositions de la Charte canadienne et d'autres cadres législatifs, mais ce que demandent les Cris et les Naskapis, et ce à quoi ils ont droit, c'est une autonomie gouvernementale entière. Ils demandent également, à juste titre, qu'on les traite d'égal à égal.
D'autres nations disent que la grande difficulté, dans les négociations en cours avec le gouvernement actuel, comme c'était le cas avec les gouvernements précédents, est d'obtenir un statut de nation pouvant traiter d'égale à égale avec les autres nations.
Nous avons entendu ce matin, au comité, des représentants des Premières nations visées par le Traité no 1 et du Treaty Land Entitlement Committee. Ils nous ont dit que le statut de nation pouvant traiter avec d'autres nations n'est toujours pas reconnu et que les conditions s'amélioreraient pour beaucoup de collectivités des Premières nations en raison de cette autonomie. Les nations acquièrent ainsi une certaine maîtrise de leur destinée et elles chercheront à utiliser avec le gouvernement le procédé qui a été employé pour mettre au point cette entente définissant la nouvelle relation — pour étudier les modifications qui ont été adoptées. Cela pourrait avoir des répercussions importantes sur les collectivités.
Je veux m'attarder un moment sur la nouvelle relation que cette entente établit entre le gouvernement du Canada et les Cris d'Eeyou Istchee. On est parvenu à établir un cadre définissant cette relation, et le projet de loi dont nous sommes saisis traite de quelques éléments de cette entente cadre.
Le processus de règlement des différends ne figure pas dans ce projet de loi, mais je veux en parler brièvement, parce que c'est un élément important. Nous avons constaté, dans le cas d'autres ententes de règlement des revendications territoriales, que le mécanisme de règlement des différends n'était pas très efficace. Il est arrivé souvent que le gouvernement du Canada se retire ou ne consente pas à participer au processus si ce n'est pas à son avantage.
Le nouveau processus de règlement des différends prévoit la création d'un comité de liaison permanent Cris-Canada. Ce sera le premier palier d'étude des différends en vue de leur règlement. J'ai cru comprendre que les parties en cause, d'après ce qu'elles en disent, sont persuadées que ce processus sera beaucoup plus efficace et qu'ainsi les choses ne traîneront pas pendant des décennies avant qu'on en arrive à une solution. Le comité de liaison permanent Cris-Canada sera une première étape. Si le différend ne se règle pas à ce palier, il sera possible d'obtenir de la médiation et, en dernier lieu, d'avoir recours à l'arbitrage. Si j'ai bien compris, le gouvernement doit s'engager à s'en remettre à l'arbitrage si cela devient nécessaire.
Je voulais en parler, parce que le mécanisme prévu s'est avéré inefficace dans le cas des autres ententes. J'ai hâte de voir comment cela fonctionnera. J'espère que cela accélérera le traitement de certaines revendications et divergences d'opinion afin que les nations puissent s'attaquer aux enjeux économiques et sociaux qui sont si importants pour la survie de leurs collectivités.
Je voudrais aborder une autre question. Bien qu'elle dépasse la portée de la loi, elle mérite d'être soulevée. Quand les commissaires ont comparu devant le comité mardi, ils ont parlé d'un certain nombre de problèmes dont ils avaient parlé il y a environ deux ans au comité. Le logement continue d'être un problème. Dans le cadre de la mesure législative actuelle, un montant considérable d'argent sera investi dans les communautés, mais le gouvernement a encore des obligations à satisfaire dans le domaine du logement.
Je voudrais souligner des différences qui caractérisent ces communautés, dont certaines découlent du fait que, dans d'autres communautés des Premières nations, les gens quittent les réserves. Les commissaires ont pris soin de faire remarquer que cela n'est pas le cas dans les territoires des Cris. Ils disent que 95 p. 100 des jeunes restent dans les communautés cries. Étant donné que ces dernières connaissent du succès, notamment sur les plans de l'économie et de l'éducation, elles doivent faire face à certaines difficultés liées à une forte croissance démographique.
Voilà pourquoi il manque de logements convenables dans les communautés cries. Les commissaires ont tenu à souligner qu'un modèle visant à créer des logements dans d'autres Premières nations ne fonctionne pas dans leurs territoires du fait que 95 p. 100 des jeunes choisissent d'y rester. Nous avons des collectivités dynamiques et saines où les jeunes veulent vivre, étudier et travailler. Par conséquent, nous avons besoin d'autres stratégies que celles qui sont appliquées d'office dans l'ensemble des autres territoires.
Le Québec cherche des formules régionales qui reflèteront réellement les besoins de chaque région. Je crois que ce projet de loi est l'occasion idéale pour nous de parler de certains de ces autres problèmes et d'encourager le gouvernement à être proactif et à collaborer avec les communautés cries en vue de résoudre certains d'entre eux.
Le NPD appuie sans réserve le projet de loi et considère qu'il pourrait servir à encourager d'autres Premières nations et les Cris eux-mêmes en leur donnant l'espoir que des progrès seront réalisés dans les domaines où il existe des problèmes de longue date.
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Madame la Présidente, je vous remercie de me donner la chance de prendre la parole aujourd'hui à l'occasion du débat sur le projet de loi .
J'écoutais les commentaires constructifs d'une membre du Comité des affaires autochtones et du développement du Grand Nord, la députée de . C'est plaisant de voir un tel débat constructif sur un projet de loi déposé par mon honorable collègue, le, député de Chilliwack—Fraser Canyon. C'est plaisant de voir le travail fait par mon collègue, le ministre, dans ce dossier. On vient de le voir, les plus beaux compliments qu'on peut recevoir sont ceux de l'opposition. On vient d'avoir des commentaires très constructifs à cet égard. Il a également été appuyé par l'équipe du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, que j'ai eu le plaisir de servir, malheureusement pas avec le ministre actuel, pour des raisons évidentes. Toujours est-il que je crois que c'est le résultat d'un travail intense sous le leadership de notre ministre.
En ce qui a trait au projet de loi , pourquoi est-il si important? C'est parce qu'il modifie la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec. On pense aux Cris de la baie James et aux Naskapis dans les communautés de Schefferville, par exemple. Cette loi vient enchâsser leurs droits dans le droit canadien avec une nouvelle relation, comme on vient de l'évoquer. Elle est négociée et signée par les représentants du gouvernement du Canada et des Cris du nord du Québec.
L'entente concernant une nouvelle relation n'est pas un document politique ordinaire ni une mesure visant à corriger un oubli ou à éliminer une échappatoire dans une loi existante. Elle n'est pas non plus un contrat commercial normal mis à l'écart aussitôt que l'encre est sèche.
L'entente concerne une nouvelle relation et marque un jalon véritable dans l'histoire de notre pays. Elle règle des désaccords de longue date entre le gouvernement fédéral et les Cris du nord du Québec. Elle transmet à l'administration régionale crie des responsabilités fédérales dans des domaines politiques clés. Elle met à la disposition de tous les gouvernements, fédéraux, provinciaux et cris, une méthode claire, équitable et logique pour réaliser l'objectif essentiel de veiller à ce que les peuples cris du nord du Québec atteignent véritablement une autonomie gouvernementale authentique.
Si elle parvient à réaliser ces trois objectifs importants, l'entente concernant cette nouvelle relation aura justement accompli ce à quoi on doit s'attendre, soit l'établissement d'une assise solide sur laquelle le gouvernement canadien et les Cris peuvent bâtir cette nouvelle relation.
C'est une relation qui est fondée sur des principes comme l'égalité, la confiance et le respect mutuel et qui intègre davantage les Cris à la vie économique et politique du Québec. C'est une relation qui nous libère des salles de tribunal et des cabinets d'avocats et qui nous rassemble afin de consacrer notre temps et nos énergies à ce qui en vaut vraiment la peine, c'est-à-dire de travailler à l'essor des communautés autochtones, de renforcer les familles et bâtir justement des communautés où l'éducation, le logement, la vie professionnelle, récréative, communautaire et économique prennent leur essor. Ce sont donc des objectifs nobles qui sont au coeur de cette entente concernant cette nouvelle relation.
Ce qui est plus important, c'est non seulement qu'elle confère des avantages tangibles à toutes les parties, mais qu'elle va déclencher des forces puissantes chez les communautés des Premières nations, parce qu'elles sont ambitieuses. On pense, comme je le mentionnais, aux neuf communautés de l'est de la baie James et du sud de la baie d'Hudson dans le nord du Québec. Je pense, entre autres, à M. Joe Linklater, qui est le chef de la Première nation des Gwitchin Vuntut, au Yukon, qui a exprimé avec force l'utilité constante de ce type de traités dont on débat aujourd'hui et de son incidence sur les communautés des Premières nations. Voici ce qu'il a mentionné l'année dernière dans son témoignage devant un comité sénatorial: « Je répète sans cesse aux gens que ces ententes n'ont pas été négociées pour nous procurer des ressources, elles ont été négociées pour nous donner la capacité de nous prendre en charge et de devenir autonomes ».
Il parle de se prendre en charge et de devenir autonomes. Ces quelques mots résument exactement ce que les Cris du Nord du Québec attendent concernant une nouvelle relation. C'est précisément ce que le projet de loi les aidera à accomplir en enchâssant dans le droit certains aspects de l'entente concernant la nouvelle relation.
La solidité et la durabilité d'une telle entente, et par extension du projet du loi , n'est pas le fruit du hasard. Elles découlent de consultations authentiques entre les dirigeants du gouvernement fédéral et des communautés cries, et entre les dirigeants cris et les gens qu'ils représentent. C'est donc une vaste consultation en profondeur qui a été effectuée à chaque étape du processus, depuis la négociation de l'entente jusqu'à la rédaction du projet de loi C-28, en passant par la recherche de nouveaux domaines de collaboration.
Voici ce que j'entends par collaboration. Les consultations ont commencé dès le début de la négociation. Elles n'ont pas été menées simplement au niveau supérieur, de négociateur à négociateur. Les dirigeants des neuf communautés cries de la région ont pris une part active aux discussions sur les principales questions qui étaient en jeu et aux conseils prodigués aux négociateurs à cet égard.
Les dirigeants cris se sont particulièrement penchés, avec les négociateurs, sur la question de la gouvernance. Plus exactement, ils ont apporté au processus de négociation leurs expériences et leurs aperçus. Ils ont donné aux directeurs d'opérations communautaires cruciales des exposés sur des sujets donnés et sur d'importantes questions techniques liées à l'entente. De plus, les résidants des neuf communautés cries ont été constamment tenus au courant des projets.
Le soutien presque total accordé par les résidants concernés par l'entente est un témoignage de la valeur de ces consultations. Une majorité des résidants cris se sont prononcés dans le cadre d'un référendum et se sont exprimés par une majorité écrasante de 90 p. 100 en faveur de l'entente. Aujourd'hui, il est clair pour les parlementaires que l'autre partie est tout à fait d'accord avec le type de projet qui a été élaboré par mon collègue l'honorable .
Cette entente est le fruit de rencontres entre les représentants fédéraux et de rencontres avec les dirigeants cris à l'étape de l'élaboration du projet de loi, pour s'assurer qu'il correspond à l'intention des négociateurs et qu'il donne les responsabilités à l'administration régionale afin qu'elle puisse prendre en charge certaines compétences fédérales. Par conséquent, le projet de loi est une promesse d'avenir.
J'aimerais ajouter que cette méthode axée sur la consultation a été maintenue et qu'elle existe encore à ce jour. Les gouvernements du Canada et du Québec, ainsi que les Cris, ont déjà plusieurs tables de discussion. Ces tribunes offrent aux trois gouvernements un processus structuré pour négocier le possible transfert de pouvoirs fédéraux et provinciaux supplémentaires à l'Administration régionale crie.
Je suis persuadé que ce processus de consultation et de participation ouverte dans le nouveau contexte qu'on a d'élaboré depuis deux ans, en basant la nature des relations sur la bonne volonté et la confiance, offre une belle illustration de la collaboration qui s'est instaurée entre le gouvernement canadien et les communautés des Premières nations de notre pays. C'est avec ces valeurs d'égalité, de respect et de confiance qu'on peut favoriser l'autodétermination des communautés autochtones et leur prise en main vers l'autonomie.
En conclusion, j'invite évidemment mes collègues à appuyer ce projet de loi qui fait l'objet d'un large consensus. Il y a d'autres défis, naturellement, mais en collaborant avec les Premières nations, qui sont une force vive — on n'a qu'à penser à tous les jeunes au sein des communautés autochtones qui peuvent faire un apport à notre économie et à notre développement social, culturel et communautaire —, notre société pourra investir et en récolter les fruits.
Je serai heureux de répondre aux questions relatives à cette allocution.
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Madame la Présidente, je me suis toujours posée la question à savoir pourquoi il y avait un manque de travail en Abitibi-Témiscamingue et dans le comté d'Abitibi—Baie-James—Nunavik—Eeyou. Si le collègue du NPD est venu faire le travail, vaillant comme il était dans sa jeunesse, il a exécuté plusieurs tâches et cela a enlevé du travail aux gens de l'Abitibi.
Un projet de loi a été déposé. Le Bloc québécois ne peut faire autrement que d'appuyer ce projet de loi, et ce, compte tenu de l'idéologie du Bloc et de la vision du Québec dans la reconnaissance des Premières nations.
Cependant, des recommandations auraient dues êtres prises en considération, ce qui aurait peut-être retarder un peu le dépôt du projet de loi. D'un autre côté, cela aurait permis de raccourcir les délais pour l'obtention d'un règlement plus avancé. Cela n'aurait pas pris énormément plus de temps et cela aurait été beaucoup plus profitable.
Le projet de loi donne des droits juridiques aux communautés. C'est bien beau de reconnaître une communauté crie et de lui dire qu'elle est la neuvième communauté à faire partie de la baie James et des droits de la baie James. On lui donne le pouvoir de réglementer plusieurs choses sur son territoire, mais quel est son territoire, au juste? On ne lui a pas encore donné de territoire. Je crois qu'il aurait été avantageux, à cet égard, de définir quel était le territoire de cette communauté afin qu'elle puisse réellement réglementer sur celui-ci.
L'une des recommandions que le comité composé de Cris et de Naskapis a faite lors de sa présentation était de signaler l'urgence d'apporter des changements à la loi. Il y a huit recommandations, dont la nécessité de réviser et d'apporter des accompagnements relatifs à la décision Corbière — là où il y a une incidence sur les Cris et les Naskapis. Il faut aussi s'occuper du besoin chronique de logements améliorés, ce que je réclame depuis maintenant quatre ans. De plus, il faut agir afin d'assurer l'exécution efficace et uniforme des règles administratives. Tout d'abord, il faudrait qu'il y ait des règles. En ce sens, il faut envisager et adopter des cadres d'éthique et des règles administratives. Il aurait probablement été de mise d'inclure immédiatement un règlement concernant le désir des Cris de Washaw Sibi Eeyou, qui est aussi un territoire où il faudra légiférer à nouveau. Je viens d'en inclure un. Pourquoi ne pas aussi avoir négocié à propos de l'autre territoire?
Il faut que le Canada, le Québec et l'Administration régionale crie examinent les dispositions de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois qui concernent les trappeurs cris. Cela se fait entre les trois parties. Cette option à elle seule n'aurait pas pu justifier les délais liés à ce projet, mais je crois qu'elle aurait pu être justifiable, ne serait-ce que pour accorder l'ouverture nécessaire à régler ou accorder l'espace nécessaire à pratiquer le pouvoir juridique que nous accordons actuellement aux Premières nations. Je souhaite que nous ne soyons pas amenés à constater une voie sans issue. Réglementer, c'est bien, mais que faut-il réglementer? On arrive devant un mur, un endroit où il n'y a pas d'issue.
Cela dit, les députés du Bloc sont unanimes quant au fait qu'au XXIe siècle, tous les peuples du monde devraient être autonomes, ayant droit ce fait à leur culture, leur langue, leurs coutumes, leurs traditions. Ils ont le droit d'orienter eux-mêmes le développement de leur identité. S'il y a une nation qui a prouvé sa capacité de le faire, c'est bien la nation crie et naskapi, dont je suis très fier. Même incomplet, et malheureusement encore à refaire, le Bloc québécois appuiera ce projet de loi qui mérite d'être étudié en comité.
En 2004, avant même l'élection de ce gouvernement, le chef du Bloc québécois affirmait:
La Paix des Braves ratifiée par le gouvernement du Québec et les représentants de la nation crie a pavé la voie à ce type de négociations en démontrant que les grands projets de développement doivent être négociés dans le respect des intérêts mutuels. Le Bloc Québécois est solidaire des Premières Nations dans leur lutte pour l’émancipation et c’est pourquoi il demande qu’Ottawa s’inspire de cet exemple pour négocier à son tour une entente semblable avec les représentants de la nation crie.
Je profite de l'occasion pour rappeler à cette Chambre qu'en 1966-1967, René Lévesque lui-même négociait à propos du territoire de la Baie-James et du nord du Québec, tant avec les Cris qu'avec les Inuits. Avant le début des travaux hydroélectriques prévus dans la vision que René Lévesque avait du développement du Québec et de son pouvoir hydroélectrique, le temps a manqué et les négociations n'étaient pas terminées. Les Cris mettaient une grande pression sur le Québec aux États-Unis, et on a dû arriver plus rapidement à une entente. C'est sûr que, ce faisant, il y a eu des manques que Bernard Landry, à l'époque où il était premier ministre du Québec, a réussi à corriger en grande partie en signant la Paix des Braves. L'entente a été signée en février 2002. Le gouvernement fédéral devait, depuis un certain temps, faire l'équivalent.
Aujourd'hui, un projet de loi confirme ce règlement. Par ce projet de loi, on confère l'attribut supplémentaire des pouvoirs réglementaires. On reconnaît la nation crie d'Oujé-Bougoumou, et j'en suis très fier. Comme je l'ai dit tout à l'heure, pour réglementer quelque chose quelque part, il faut avoir une terre. Quand aucune terre ne nous est allouée, on peut difficilement réglementer quoi que ce soit.
Il y a trois catégories de terres à la Baie-James. Les terres de la catégorie I sont celles où vivent les Cris. Elles sont situées dans les communautés et autour de celles-ci. Il y a des terres de catégorie IA, qui sont sous juridiction fédérale. La catégorie IB est sous juridiction du Québec, et les lois et les règlements du gouvernement du Québec s'y appliquent. Il y a les terres de catégorie II, qui sont des territoires d'environ 155 000 kilomètres carrés. La gestion de la chasse, de la pêche, du piégeage, du développement du tourisme et de l'exploitation forestière se fait conjointement entre les Cris et les autorités régionales. Les terres de catégorie III sont des terres publiques du Québec où les Cris et les Naskapis ont le droit exclusif d'exploiter certaines espèces aquatiques et animales. C'est un territoire d'environ 911 000 kilomètres carrés, où les communautés participent à l'administration et à la mise en valeur du territoire.
Le projet de loi modifie l'article 9 de la loi. On y retrouve de nouvelles dispositions permettant à l'Administration régionale crie de voter des règlements administratifs et des résolutions dans les limites des terres de catégories IA et III sous certaines conditions.
Voici ce que dit le nouvel article 9.1 créé par ce projet de loi:
Les règlements administratifs de l’Administration régionale crie pris en application de la présente loi peuvent s’appliquer dans les limites:
a) des terres de catégorie IA;
b) des terres de catégorie III situées dans le périmètre des terres de catégorie IA et dont la propriété a été cédée par lettres patentes ou par tout autre moyen avant le 11 novembre 1975.
Pour sa part, le nouvel article 9.2 dit ceci:
Les règlements administratifs de l’Administration régionale crie pris en application de la présente loi peuvent porter interdiction d’une activité donnée.
Et le nouvel article 9.3 se lit comme suit:
La Loi sur les textes réglementaires ne s'applique pas aux règlements administratifs ni aux résolutions de l'Administration régionale crie respectivement pris ou adoptés en application de la présente loi.
Le projet de loi décrit le rôle de l'Administration régionale crie. Il indique qu'elle a pour mission:
a) d'agir à titre d'instance gouvernementale régionale sur les terres de catégorie IA;
b) de réglementer les services d'hygiène essentiels — notamment les services d'adduction d'eau et d'égouts, le drainage et la gestion des déchets solides — et les logements situés sur les terres de catégorie IA ainsi que les bâtiments situés sur ces terres et utilisés à des fins de gouvernance régionale;
c) d'utiliser, de gérer et d'administrer les deniers et d'autres éléments d'actif;
d) de promouvoir le bien-être général des membres des bandes cries;
e) de préserver et de promouvoir la culture, les valeurs et les traditions des membres des bandes cries.
Les Cris d'Oujé-Bougoumou sont des gens très actifs et très fiers. Ils se feront un devoir de promouvoir leur collectivité et d'exercer les pressions nécessaires pour arriver à finaliser cette entente et à s'accorder l'ensemble des pouvoirs qui leur permettront réellement d'obtenir un jour leur autonomie complète — ce que je souhaite. La participation du Québec a été des plus constructives.
On se rappellera que dans un communiqué de presse du 21 juin 2004, le chef du Bloc québécois réclamait qu'à partir de ce moment, Ottawa négocie de bonne foi avec les représentants de la nation crie afin d'en venir à une entente similaire à la Paix des Braves. Il était accompagné de Ted Moses qui était, à l'époque, le grand chef de la nation crie. Les propos tenus à ce moment étaient que la Paix des Braves, intervenue en 2002 entre le gouvernement du Québec et les représentants de la nation crie, est un bel exemple de cette façon de faire les choses au Québec, une façon de faire propre au Québec.
La Paix des Braves ratifiée par le gouvernement du Québec et les représentants de la nation crie a pavé la voie à ce type de négociations en démontrant que les grands projets de développement doivent être négociés dans le respect des intérêts mutuels. Le Bloc québécois est solidaire des Premières nations dans leur lutte pour l'émancipation et c'est pourquoi il n'a cessé de demander qu'Ottawa s'inspire de cet exemple [...]
C'est ce que fait le gouvernement aujourd'hui. En ce sens, je ne vois pas comment nous pourrions nous opposer à un avancement, si minime soit-il. Le pouvoir incomplet empêche ou nuit à l'émancipation rapide d'une nation.
Ted Moses comprend bien l'esprit de cette entente. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle, à ce moment, le grand chef a qualifié d'excellente sa relation avec le Bloc québécois et les représentants du Québec. Il souhaitait la même chose pour l'ensemble du Canada.
Ce matin, c'était presque une horreur d'entendre des résidents du Manitoba témoigner devant le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Le fait de voir à quel point ces gens en sont encore au même point au XXIe siècle renforce ma fierté d'être Québécois et d'être un ami des Premières nations du Québec.