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Monsieur le Président, je vous suis reconnaissant de pouvoir terminer ce que j'ai commencé, car je crois que l'excellent projet de loi dont la Chambre est saisie mérite toute l'attention qu'on lui accorde présentement.
Avant de m'interrompre, je parlais des six mesures contenues dans le projet de loi, et j'en avais déjà abordé trois. La première avait trait aux peines minimales obligatoires, la seconde portait sur les nouvelles circonstances aggravantes qui seront ajoutées au paragraphe 380.(1) du Code criminel, tandis que la troisième prévoyait que les juges devront désormais consigner par écrit les circonstances aggravantes ou autres dont ils auront tenu compte pour déterminer les peines infligées aux accusés trouvés coupables.
La quatrième mesure est en fait un nouvel outil de détermination des peines. Je crois qu'en l'occurrence, c'est une excellente nouvelle, car les tribunaux pourront dorénavant avoir recours à un nouvel outil pour déterminer les peines à infliger aux fraudeurs, l'objectif étant ici de dissuader ces derniers de commettre d'autres fraudes et de faire de nouvelles victimes. Il ne faut pas oublier en effet que, dans bien des cas, les personnes qui commettent ce genre de crimes poursuivront leurs méfaits simplement parce que c'est la seule façon qu'ils connaissent de gagner leur vie.
Les tribunaux pourront ainsi ordonner, comme faisant partie de la peine, qu'un délinquant se voie retirer le droit d'occuper un emploi rémunéré ou de faire du bénévolat, les cas de fraude étant souvent perpétrés contre des organismes bénévoles sans but lucratif, où il exercerait un pouvoir sur les biens immeubles, l’argent ou les valeurs d’autrui.
Cette mesure peut être appliquée ou non, à la discrétion du juge, et peut s'étendre sur n'importe quelle période jugée adéquate. Personnellement, j'ai été particulièrement content d'apprendre qu'elle pouvait être applicable à vie, car il y a certainement des circonstances où il serait justifié de le faire, notamment lorsqu'il y a récidive et que le contrevenant continue de voyager d'un bout à l'autre du pays.
J'ai moi-même eu une cause où cela s'est produit. La personne a escroqué un club de curling quelque part dans la province,. Elle est déménagée à 400 ou 500 milles de là, puis a fraudé un organisme de services pour 50 000 $. Cette fraude aurait pu être évitée si ce type d'ordonnance avait été en place. En fait, compte tenu de la réputation du contrevenant, il a reçu, dans le premier cas, une peine avec sursis de deux ans d'emprisonnement moins un jour, à purger donc dans un établissement provincial, ce qui signifie qu'il n'a pas eu à passer du temps en prison. Il a pu purger sa peine à domicile, ce qui lui a permis de déménager, de trouver un emploi de gérant d'un restaurant et d'escroquer le propriétaire de 50 000 $.
C'est donc un excellent ajout au Code criminel, et je pense que les juges s'en serviront en fonction des besoins.
Les deux dernières mesures visent à améliorer la capacité de l'appareil judiciaire et du processus de détermination de la peine de répondre aux besoins des victimes.
Comme les députés le savent, le gouvernement conservateur défend les droits des victimes et veille à ce que les familles et les citoyens canadiens continuent de profiter des libertés dont ils jouissent tout en évitant d'être victimes d'activités illégales.
D'après des données de 2006-2007, environ 20 p. 100 des condamnations pour fraude se sont soldées par une ordonnance de dédommagement. J'ai été quelque peu surpris d'entendre cela. Toutefois, pour encourager le recours à ces ordonnances, les tribunaux chargés de déterminer la peine seraient tenus de demander au procureur de la Couronne si des efforts raisonnables ont été déployés pour permettre aux victimes de signaler si elles veulent un dédommagement. À mon avis, il doit être rare qu'une victime de fraude ne veule pas être dédommagée. C'est habituellement le contraire. De ce fait, les tribunaux seraient également tenus d'envisager de réclamer un dédommagement dans tous les cas de fraude et de fournir des raisons si un dédommagement n'est pas ordonné. Cela établirait un nouveau précédent, une autre preuve que le gouvernement conservateur défendra les victimes d'actes criminels.
Permettez-moi de m'écarter du sujet un moment pour parler d'un aspect de ma pratique que j'ai trouvé très rafraîchissant. C'était il y a 11 ou 12 ans environ et c'était en lien aux lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants.
À l'époque, des juges de partout dans la province venaient à Fort McMurray. Comme avocat dans le Nord de l'Alberta, j'ai vu, dans des causes semblables, des ordonnances de la cour qui variaient énormément. Certaines étaient le double du montant généralement accordé pour les enfants, d'autres, seulement la moitié. Les lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants, qui donnent des indications claires aux juges de partout au pays pour ce qui est du revenu des gens et de la pension alimentaire qu'ils devraient verser, ressemblent beaucoup à la mesure dont nous sommes saisis.
Je crois que nous allons voir que cette approche sera bien accueillie, non seulement par les procureurs de la Couronne, mais également par les juges, car ils sauront quel est le point de départ, le minimum absolu, et ce que devraient être les circonstances aggravantes, une fois que la jurisprudence aura été établie, ainsi que les peines que les gens devraient recevoir en fonction du type d'infraction qu'ils ont commise.
Trois mises en garde sont nécessaires. Premièrement, aucune réforme du droit criminel ne peut changer l'essentiel, c'est-à-dire que si le contrevenant ne possède pas suffisamment de biens, il ne peut y avoir restitution. En effet, cela devient une impossibilité. C'est un fait que nous déplorons. Voilà pourquoi nous envisageons d'autres règlements et tenons des consultations partout au pays en vue de prévenir la fraude et mettre en place une réglementation qui empêcherait que des fraudes de ce type soient commises.
Il faut aussi tenir compte du fait que c'est la Couronne qui est responsable des représentations au moment de la sentence et les victimes n'auront pas qualité pour faire valoir leurs requêtes de restitution. Elles doivent collaborer avec le procureur de la Couronne et révéler en détail, dans une déclaration de la victime, à quel point la fraude leur a nui à elles et à leur famille. Elles doivent également révéler la somme qui leur a été dérobée en présentant les documents comptables appropriés pour prouver la fraude et c'est le procureur de la Couronne qui présentera leur dossier au tribunal.
La dernière mesure contenue dans le projet de loi stipule spécifiquement que les tribunaux peuvent prendre en considération la déclaration rédigée par le représentant d'une collectivité ou d'un groupe définissable pour déterminer la peine dans les affaires de fraude. C'est nouveau, mais c'est une excellente occasion pour toutes les victimes qui ont été flouées par un criminel ou une organisation criminelle de faire connaître exactement les répercussions de ces actes.
Dans la plupart des cas, comme je l'ai mentionné, les victimes sont principalement des aînés et des retraités, mais il est arrivé que les victimes soient des clubs de curling, des groupes sans but lucratif, des clubs de hockey, des clubs de patinage artistique et même des clubs consacrés aux arts. Il semble que les criminels ne reculent devant rien pour dérober de l'argent et améliorer leur propre existence. C'est particulièrement regrettable lorsqu'ils s'en prennent à des groupes religieux, des clubs d'aviation et, par conséquent, aux contribuables et au gouvernement parce que, au bout du compte, ce sont nous, les Canadiens, les contribuables, qui devons payer la note. Lorsqu'ils fraudent le gouvernement du Canada, ce sont nous, les contribuables canadiens, qui finissons par en payer le prix parce que c'est nous, en réalité, qu'ils volent.
Ce projet de loi est excellent, mais j'aimerais examiner un peu la jurisprudence. Les libéraux et même les bloquistes ont laissé entendre que ce n'est pas le cas, demandant à savoir quand il était arrivé que les personnes qui volent de telles sommes écopent de peines de deux ans ou moins. Par conséquent, on a fait des recherches, et un examen de la jurisprudence a révélé que la peine moyenne pour les cas de fraude importante se situe autour de quatre ans, bien que certaines personnes se voient imposer des peines beaucoup plus longues et d'autres, plus courtes. Lorsque les gens reçoivent des peines moindres, c'est habituellement dans une affaire où le procureur de la Couronne et l'avocat de la défense ont présenté une proposition conjointe. Ils se réunissent et négocient un plaidoyer, fondé sur des preuves habituellement solides, en précisant la peine d'emprisonnement et le présentent ensuite à un juge. Il leur arrive parfois de le négocier pour d'autres raisons, principalement par suite de l'obtention rapide d'un plaidoyer de culpabilité, ce qui évite aux victimes d'avoir à témoigner. Maintenant, notre minimum est de deux ans et il doit être supérieur à cela.
J'aimerais parler de quelques procès qui se sont déroulés. En 2009, dans l'affaire R. c. Cioffi, l'accusée a été condamnée pour fraude. En quatre ans, elle avait détourné plus de 4 millions de dollars au moyen d'un stratagème frauduleux. Le stratagème était très compliqué, avait nécessité de la planification et était fondé sur de nombreuses transactions frauduleuses. Cependant, dans cette affaire, l'accusée n'avait pas de casier judiciaire et n'avait pas personnellement tiré profit de ces transactions. L'accusée a été condamnée à deux ans moins un jour, c'est-à-dire une peine à purger dans une prison provinciale. La peine ne relève même pas de la compétence fédérale. Deux ans moins un jour signifie que la condamnée est admissible à la détention à domicile, ce qui, selon moi, ne devrait pas être permis dans ces circonstances particulières. Dorénavant, les condamnés n'y seront plus admissibles, car le gouvernement établit une peine minimale obligatoire de deux ans d’emprisonnement.
En 2008, dans l'affaire R. c. McCarthy, qui portait sur deux prêts totalisant plus de 3 millions de dollars, les circonstances aggravantes comprenaient évidemment l'abus de confiance et le nombre important de victimes. Là encore, l'accusé n'avait pas de casier judiciaire. Il a été condamné à une peine avec sursis de deux ans moins un jour, suivi d'un an de probation. Donc, pour 3 millions de dollars, il a été condamné à deux ans moins un jour de prison.
En 2008, dans l'affaire R. c. Wilson, en Nouvelle-Écosse, l'accusé a commis une fraude de 1,8 million de dollars en un mois et, aussi incroyable que cela puisse paraître, il a été condamné à 26 mois de prison.
Dans l'affaire R. c. Lafleur, il y avait 28 chefs d'accusation de fraude, étalés sur une période de quatre ans, totalisant 1,5 million de dollars. Le contrevenant a été condamné à 42 mois de prison et le juge a émis une ordonnance de restitution. Dans cette affaire, l'accusé avait plaidé coupable et d'autres facteurs atténuants, comme l'âge et l'absence de casier judiciaire, ont été pris en considération.
En 2006, dans l'affaire de R. c. Coffin, le contrevenant a été condamné à 18 mois de prison pour 15 chefs d'accusation de fraude, totalisant 1,5 million de dollars. Dix-huit mois c'est peu, surtout compte tenu des circonstances et des faits que je mentionnerai à la fin de mon discours.
Dans l'arrêt R. c. Nottingham, l'accusé s'est vu imposer une peine de deux ans moins un jour à purger dans la collectivité. On a permis à l'accusé de rester chez lui pendant toute la durée de sa peine et d'effectuer des activités normale la majorité du temps. Malgré sa détention à domicile, l'accusé avait quand même accès à son téléviseur à écran géant et à toutes les commodités, et cela même s'il avait commis une fraude de plus de 1,1 million de dollars.
La dernière affaire dont je parlerais est l'arrêt R. c. Toman. L'accusé a lui aussi reçu une peine de deux ans moins un jour pour avoir commis une fraude de 2,5 millions de dollars sur une période de six mois. Cela peut sembler une lourde peine pour certains Canadiens, mais je veux que ces personnes se rendent compte qu'une peine de deux ans ne signifie pas que l'accusé va passer deux ans en prison.
En effet, une personne qui reçoit une peine de deux ans passe habituellement un maximum de 15 mois en prison, c'est-à-dire les deux tiers de sa peine. Toutefois, bien souvent, la personne purgera la moitié de sa peine parce qu'elle s'est fait accorder un crédit ou pour une autre raison, ce qui signifie qu'elle passera 12 mois en prison. Comme nous avons entendu nos collègues d'en face le dire plus tôt, certaines personnes purgent souvent seulement le tiers ou le sixième de leur peine, c'est-à-dire qu'elles passent moins de 8 mois en prison.
Une personne peut voler des millions de dollars et passer seulement six mois derrière les barreaux. Quelle belle affaire! Le gouvernement veut mettre fin à ce type de choses. Nous avons apporté beaucoup des changements aux mesures de protection des victimes, mais je voulais parler de ces causes parce que je ne crois pas que les Canadiens les connaissaient.
Franchement, je ne pense pas qu'une peine de deux ans est suffisante pour les personnes qui sont prêtes à voler les aînés et les groupes sans but lucratif. Elles devraient passer plus de temps en prison, et notre gouvernement s'assurera que leur peine est proportionnelle à leur crime.
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Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir sur le projet de loi et je suis aussi heureux que le gouvernement l'ait présenté. Le caucus du NPD appuiera ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture pour qu'il soit renvoyé en comité où nous pourrons peut-être en améliorer le texte.
Le projet de loi prévoit une peine minimale de deux ans de prison pour les cas de fraude dépassant 1 million de dollars. J'ai demandé ce matin au gouvernement comment il était arrivé à ce chiffre de 1 million de dollars parce qu'à mon avis, la fraude est un acte grave quel qu'en soit le montant. C'est le genre de chose dont les avocats font leurs choux gras. Je suis sûr qu'on en verra ergoter pour savoir si la fraude dépassait ou non le million de dollars, et que cela entraînera des débats à l'infini.
Il faudrait peut-être que le seuil soit beaucoup plus bas qu'un million de dollars. Je m'interroge sur la question. Je l'ai posée au gouvernement mais je n'ai pas vraiment eu de réponse satisfaisante. Je sais qu'un des députés ministériels l'a posée lui aussi, mais je ne me souviens pas qu'il ait lui non plus obtenu une réponse satisfaisante.
Le projet de loi prévoit des circonstances aggravantes. Il établit une ordonnance discrétionnaire permettant d'interdire à des délinquants déclarés coupables de fraude d'exercer à l'avenir un pouvoir sur les biens immeubles ou l'argent d'autrui. Il prévoit d'envisager la possibilité d'un dédommagement pour les victimes et il précise que le tribunal peut prendre en considération la déclaration faite au nom d'une collectivité qui a été victime de la fraude.
Je reviens sur l'idée du dédommagement des victimes de fraude. C'est en apparence une bonne disposition. J'espère vraiment qu'on pourra indemniser les victimes grâce à cela, mais il ne faut quand même pas se faire trop d'illusions. Après des années d'expérience, je constate que les possibilités de dédommagement sont très minces quand on a affaire à ces escrocs.
Quand on parle de machinations, de fraudes et de combines à la Ponzi, on parle en fait d'individus qui sont carrément malhonnêtes et qui dépouillent les gens de l'argent qu'ils ont durement gagné pour le faire disparaître dans des paradis fiscaux. En période de prospérité économique, ces machinations prospèrent parce que quand le marché boursier est à la hausse et que l'économie se développe, ils peuvent facilement brouiller les pistes et dissimuler leurs activités frauduleuses.
C'est en période de ralentissement économique comme dans le moment que ce genre de machinations commence à s'effondrer parce qu'elles ne peuvent donner les rendements promis.
J'imagine qu'il y a encore bien des combines du genre sous la surface. Si la récession devait s'aggraver ou durer plus longtemps, davantage de ces combines seraient mises au jour. Malheureusement, au bout du compte, après toutes les procédures judiciaires et les enquêtes, il ne restera rien pour les victimes.
Par conséquent, pourquoi promettre aux victimes qu'elles récupéreront leur argent alors qu'on sait que ce ne sera pas le cas. Ceci dit, j'estime néanmoins qu'il s'agit d'une disposition judicieuse. Le projet de loi doit prévoir le dédommagement ne serait-ce qu'au cas où il resterait de l'argent.
Toutefois, cet aspect de la question comporte énormément de difficultés et je crois que le secrétaire parlementaire en a fait mention dans la dernière partie de son intervention quand il a dit que le fait de présenter une mesure législative de ce genre ne règle qu'une partie du problème.
En fait, le projet de loi vise à régler un problème. Or, le Parlement, le gouvernement et la société veulent s'attaquer à ces questions avant qu'elles ne posent problème. Nous voulons arrêter les gens comme Bernie Madoff avant qu'ils ne commencent à extorquer de l'argent.
Je donne l'exemple de Bernie Madoff et je signale que Harry Markopolos a réussi à le démasquer il y a dix ans. Harry Markopolos travaillait pour la société Rampart Investment Management à Boston, quand on lui a demandé de reproduire la stratégie de Madoff. Dans un marché concurrentiel, il est logique qu'une offre de rendement de 30 p. 100 sur un certificat de placement de 90 jours attire énormément de clients. Cependant, outre le grand nombre de clients, ce genre d'offre amène de nombreuses personnes à vouloir copier le système et à faire concurrence à son instigateur parce qu'il y a beaucoup d'argent à faire.
Quand on a demandé à Harry de copier le modèle, il a immédiatement eu des doutes parce que Madoff n'avait jamais déclaré de perte, pas une seule fois, mois après mois. Dans un pays de 300 millions d'habitants où la commission des valeurs mobilières est censée agir à titre de chien de garde, comment se fait-il que personne n'ait remis en question le fait que Bernie Madoff n'avait jamais déclaré de pertes?
Il lui a fallu environ cinq minutes pour s'apercevoir que des actes frauduleux avaient été commis. Il a transmis l'information à la commission des valeurs mobilières des États-Unis. Lorsqu'il a rencontré des représentants de cette commission, il a essuyé une rebuffade parce que Bernie Madoff était une grosse légume bien connue à l'époque, qu'il entretenait des liens avec l'industrie et qu'il avait une bonne réputation. Je crois qu'en fait, un des gendres de Bernie Madoff était enquêteur à la commission des valeurs mobilières. Comme on peut le voir, cette commission constituait une belle petite famille heureuse.
Lorsque Harry Markopolos a levé le voile sur toute cette affaire devant la commission des valeurs mobilières il y a dix ans, soit en 1999, on lui a dit essentiellement d'aller se faire cuire un oeuf. Malgré tout, il est retourné plusieurs fois à la commission et, à un certain moment, il était tellement inquiet qu'il inspectait sa voiture de crainte qu'elle ne soit piégée. Il aurait dit que Madoff avait environ 65 milliards de raisons de le voir être mis hors d'état de nuire.
Voilà un autre exemple frappant de l'inefficacité du système. Alors, qu'avons-nous appris de tout cela? Nous avons appris qu'il faut pouvoir compter sur des organismes de réglementation appropriés, dont l'effectif n'est pas constitué de gens des secteurs des fonds communs de placement et des valeurs mobilières. Les membres de l'effectif ne doivent pas provenir d'une société où ils ont travaillé pendant 20 ou 30 ans et où ils connaissent tous les intervenants, les recrutant comme s'il s'agissait d'un programme de retraite. On se retrouverait alors avec une commission des valeurs mobilières composées de membres qui surveillent l'entreprise où ils ont travaillé pendant de nombreuses années.
Il s'agit simplement d'un petit groupe de joyeux lurons, qui font la fête ensemble et qui se connaissent bien. Comment peut-on s'attendre à ce qu'ils fassent preuve de diligence raisonnable et qu'ils mènent des enquêtes entre eux? Nous avons besoin de plus de forces qui s'apparentent à des services de police. Nous avons besoin de forces d'enquête.
Voilà ce qu'était la faiblesse de la commission des valeurs mobilières des États-Unis. Des changements ont été apportés. Depuis janvier, des responsables coriaces sont en poste. Espérons qu'ils pourront faire le ménage qui s'impose.
Il semble que tous ces organismes aient tendance à dériver au fil du temps et, à moins que quelque chose se produise, tout le monde est raisonnablement content. Tout à coup, un scandale éclate, et on se rend compte qu'en fait, les mauvaises personnes se trouvaient à la barre du navire.
Arrêtons-nous à la commission ontarienne des valeurs mobilières. Un des grands arguments avancés à la Chambre — et je suis sûr que mon collègue bloquiste le comprend —, c'est celui du régulateur national unique des valeurs mobilières. Étant du Manitoba, je sais que ces dernières années, cette province s'est opposé à cette idée. Je comprends les arguments en faveur d'un organisme national unique de réglementation. Les autres pays du G7 en ont un seul et c'est probablement une bonne idée, mais, dans son analyse, le gouvernement passe à côté de la question qui n'est pas d'avoir un seul organisme national ou 10 organismes provinciaux, mais bien de savoir qui administre cet ou ces organismes. Qui administre le système national de réglementation?
Si nous avions un organisme national de réglementation administré par des gens du milieu, nous n'aurions pas de meilleurs résultats qu'avec la commission ontarienne actuelle. Celle-ci a un bien piètre bilan puisqu'elle ne fait emprisonner pratiquement personne. Elle aura été chanceuse si elle a réussi à prendre trois ou quatre personnes ces 10 dernières années, et cela, même si on lui a présenté des dossiers en béton. Même lorsque tout les faits lui sont présentés, elle n'arrive pas, pour une raison ou une autre, à agir.
Aux États-Unis, cependant, les choses bougent, mais l'action provient du système judiciaire. Prenons le cas de Conrad Black comme exemple. Black qui a d'ailleurs commis ses crimes au Canada. Je crois qu'il s'agissait d'une affaire d'entente de non-concurrence qu'il avait signée avec CanWest lorsqu'il achetait tous ces journaux. Il y avait une entente de non-concurrence jusqu'à hauteur de 40 millions de dollars pour chacune des acquisitions qu'il faisait. Ses actionnaires sont revenus contre lui lorsqu'ils ont constaté qu'il s'appropriait les 40 millions de dollars qui auraient dû appartenir à Hollinger.
Conrad était un Canadien. Je sais qu'il est devenu citoyen britannique, mais il était d'abord Canadien. Il a fait des affaires ici toute sa vie. Ses entreprises étaient établies ici. Pourtant, surprise, il purge sa peine dans une prison de Floride. Je crois comprendre qu'il passe du bon temps là-bas. Il ne semble pas que ce soit une prison très dure et, semble-t-il, il y est suffisamment heureux pour vouloir y rester un peu plus longtemps, selon ses dernières communications. Quoi qu'il en soit, ce que je veux faire valoir, c'est que la population doit croire que son gouvernement la protégera. Quand on voit des gens comme Madoff et Conrad Black s'en tirer sans conséquences ou, s'ils se font prendre, purger des peines légères, c'est un problème. Cela favorise le cynisme de la population.
C'est pourquoi un autre argument du Bloc a éveillé mon intérêt aujourd'hui, soit que les peines réellement purgées devraient durer plus d'un sixième de la peine imposée. M. Vincent Lacroix, un exemple parmi d'autres, s'est vu imposer une peine de huit ans, mais comme les gens peuvent sortir de prison après avoir purgé le sixième de leur peine, cet homme s'est retrouvé libre après deux ans et demi. Encore une fois, la population remet cette pratique en question. Si sa peine était de huit ans, pourquoi est-il de nouveau en train de faire de la sollicitation après seulement deux ans et demi? Quel genre de système avons-nous pour permettre ce genre de choses?
Le Bloc a peut-être l'intention de présenter un amendement au comité pour rectifier la situation ou pour régler le problème d'une manière ou d'une autre, mais si l'on juge acceptable que M. Lacroix purge une peine de deux ans et demi, c'est la peine qui devrait lui être infligée. Comment peut-on laisser un juge dire qu'un homme doit passer huit ans derrière les barreaux et laisser cet homme sortir après qu'il a purgé le sixième de sa peine? J'aimerais savoir ce que le gouvernement entend faire à ce sujet parce que, encore une fois, j'ai trouvé que le Bloc avait là un très bon argument.
Je dois dire d'entrée de jeu que les avocats dans cette enceinte m'impressionnent beaucoup. Je n'ai jamais vu autant d'avocats réunis dans un même endroit, sauf lors d'un congrès. Il y a des avocats très intelligents ici, dont certains font partie du caucus du Bloc québécois. Il y en a également au sein du caucus libéral et du caucus néo-démocrate, tout comme au sein du gouvernement, j'en suis convaincu. Je les ai écoutés très attentivement. Toutefois, leur approche globale de l'aspect juridique du dossier semble être davantage influencée par l'aspect politique. J'imagine que c'est là leur argument, et ils ne tiennent pas compte du point de vue des avocats qui siègent dans l'opposition. Ils ne font qu'adopter la position du gouvernement qui dit que si l'on démontre que le projet de loi permet de lutter contre le crime de façon sévère plutôt que de façon intelligente, ils recevront l'appui de leurs électeurs.
Tout ce qu'il faut faire, c'est de jeter un coup d'oeil sur ce qui se passe aux États-Unis avec les lois sur les peines minimales. C'est le sujet d'un autre projet de loi dont nous débattrons bientôt. Dans les années 1980, la Californie a adopté le programme de Ronald Reagan qui prévoyait l'emprisonnement des criminels à la troisième infraction. Sa solution était de bâtir beaucoup de prisons. Évidemment, ses amis du secteur privé construisaient des privons, alors cela lui permettait également de les récompenser. Ils ont construit des prisons et les ont remplies. Je n'ai pas les statistiques avec moi, mais les États-Unis ont le plus grand nombre de prisonniers par 100 000 habitants. Leur taux de criminalité n'a pas baissé du tout. Il est probablement plus haut qu'il ne l'a jamais été. Dernièrement, en raison de problèmes budgétaires, le gouverneur Schwarzenegger, un républicain loin d'être clément envers les criminels, mais loin d'être un républicain à la George Bush, a été contraint de libérer des milliers de prisonniers, parce qu'il a été démontré que les lois sur les peines minimales ne fonctionnent pas.
Je faisais simplement remarquer au député du gouvernement que ce ne sont pas les données ni les exemples qui manquent pour prouver qu'il n'y a pas qu'une façon de s'attaquer au crime, et que certaines techniques sont plus efficaces que d'autres. J'ai donné l'exemple des vols de voiture à Winnipeg, où l'on a obtenu d'excellents résultats en installant des antidémarreurs dans les véhicules et en chargeant une équipe d'inspecteurs de police de s'attaquer aux quelques voleurs à qui l'on devait la majorité des vols. Voilà un exemple de ce qui marche bien. C'est le genre d'exemple dont le gouvernement devrait s'inspirer. Le gouvernement a reçu du public le mandat de trouver des solutions qui fonctionnent et non de faire toutes sortes de coups d'éclat permettant à tel ou tel député de faire un bond de cinq points dans les sondages du jour au lendemain. C'est toutefois à cela que s'adonnent les conservateurs.
L'autre point important soulevé par le Bloc est celui des paradis fiscaux. Pendant toutes les années où les libéraux ont été au pouvoir, ils auraient eu amplement le temps de s'attaquer à toute la question des paradis fiscaux. Nous avons même été dirigés par un premier ministre dont une bonne partie des navires étaient enregistrés dans un autre pays. Je crois que c'était au Panama.
M. Roger Pomerleau: C'était à la Barbade.
M. Jim Maloway: Bon, on me dit que c'était à la Barbade.
Le fait est que nous devrions faire des efforts pour mettre un frein aux abris et aux paradis fiscaux, car il est temps que nous empêchions les riches de sortir leur argent du pays pour ne pas payer d'impôts. Comment pouvons-nous espérer avoir un bon réseau de santé et des routes en bon état si les gens prennent leur argent et l'envoient à l'étranger pour ne pas payer d'impôts? Il faut s'attaquer une fois pour toutes aux paradis fiscaux. Que font les fraudeurs? Ils sont loin d'être stupides, vous savez. Ils prennent leur argent et l'envoient ailleurs. Aussitôt que ça commence à sentir le roussi, l'argent disparaît.
Ce qui nous amène à la réglementation du secteur bancaire. Le Président m'indique que mon temps de parole est presque écoulé, alors qu'il me reste tant de choses à dire. Mais bref, il faut resserrer la réglementation du secteur bancaire pour s'assurer que les banques signalent toute activité suspecte, et ce, plus qu'elles ne le font actuellement. Je sais qu'elles doivent déclarer tous les dépôts en argent de plus de 10 000 $. Nous pouvons leur imposer d'autres exigences qui nous aideront à trouver une solution au problème. Nous devons réglementer l'industrie. Nous devons exiger plus de cautions. Nous devons exiger de ces sociétés qu'elles se dotent d'organismes de réglementation qui les surveilleraient et à qui elles feraient rapport.
Les courtiers et les agents immobiliers doivent faire rapport de leurs activités chaque année. Ils doivent placer leurs fonds en fiducie...
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Madame la Présidente, je suis ravi de parler du projet de loi qui, nous l'espérons, permettra de lutter contre le crime en col blanc.
Récemment, lorsque le a présenté le projet de loi, il a dit que la fraude pouvait avoir un effet dévastateur sur la vie des victimes, y compris un sentiment d'humiliation à l'idée d'avoir été trompé au point de céder volontairement les épargnes de toute une vie. Trop souvent, ces actes méprisables visent les plus vulnérables. Souvent, les victimes devraient se méfier, mais, malheureusement, elles se font avoir.
Le projet de loi contient six mesures conçues pour améliorer le processus de détermination de la peine pour les contrevenants reconnus coupables de ce genre de fraude. La première est la peine d'emprisonnement obligatoire car les Canadiens sont très préoccupés par les fraudes à grande échelle qui réduisent à néant les économies d'une vie et qui sont la marque d'une avidité extrême et d'une totale indifférence à l'égard d'autrui.
Pour remédier à ce problème, le projet de loi prévoit une peine d'emprisonnement obligatoire de deux ans pour tout acte unique ou multiple de fraude ayant une valeur totale de plus de un million de dollars. La peine d'emprisonnement obligatoire serait un point de départ car divers facteurs aggravants pourraient s'ajouter pour porter la peine bien au-delà des deux années minimales dans de nombreux cas. Nous savons tous que des peines de plus de deux ans sont pleinement justifiées dans bon nombre des cas.
Actuellement, quatre facteurs aggravants à la fraude sont prévus à l'article 380.1 du Code criminel. Ce projet de loi ajoutera de nouveaux facteurs aggravants à cette liste pour tenir compte de caractéristiques additionnelles de la fraude particulièrement troublantes. Les nouveaux facteurs mettront l'accent sur, premièrement, les conséquences de l'infraction pour les victimes, deuxièmement, l’ampleur et la complexité de la fraude commise, troisièmement, le fait que le contrevenant n’a pas satisfait aux lois et règlements applicables et, quatrièmement, toute tentative du contrevenant en vue de cacher ou de détruire des dossiers ayant rapport à la fraude.
Une autre mesure exigera du tribunal qui déterminera la peine qu'il déclare officiellement les facteurs aggravants ou atténuants qu'il aura appliqués. Cette mesure a pour but d'assurer la transparence dans la détermination de la peine et de faire en sorte que les règles énoncées à l'article 380.1, qui définit les facteurs aggravants et les facteurs qu'il est interdit de reconnaître comme atténuants, soient effectivement appliquées.
Le projet de loi donne également aux tribunaux un nouvel outil de détermination de la peine visant à empêcher le contrevenant de commettre d'autres fraudes et de faire de nouvelles victimes. En déterminant sa peine, le tribunal sera en mesure d'interdire au contrevenant d’accepter ou de garder un emploi ou un travail bénévole dans le cadre duquel il exercerait un pouvoir sur les biens immeubles, l’argent ou les valeurs d’autrui. Cette ordonnance est discrétionnaire et peut s'appliquer à vie ou pour une période déterminée.
Les deux dernières mesures visent à améliorer la capacité du système de justice et du processus de détermination de la peine de répondre aux besoins des victimes. Si nous sommes ici, c'est pour défendre les victimes. Nous devons mettre en place ces peines d'emprisonnement obligatoires. Je sais que certains députés de l'opposition sont souvent réfractaires à l'idée des peines d'emprisonnement obligatoires et de leur utilisation comme mesure dissuasive, mais de ce côté-ci, nous sommes pour. Je suis heureux de voir que d'autres partis appuient ce projet de loi. Nous sommes en faveur des peines d'emprisonnement obligatoires et de leur utilisation comme mesure dissuasive.
Lors de la 39e législature, j'avais présenté un projet de loi d'initiative parlementaire qui proposait une peine d'emprisonnement obligatoire. Ce projet de loi avait passé l'étape de la deuxième lecture, et j'étais ravi de voir que les députés de cette législature appuyaient l'utilisation de peines de ce genre comme moyen de dissuasion.
Pour revenir au projet de loi , trois mises en garde sont nécessaires. Aucune réforme du droit criminel ne peut changer l'essentiel, c'est-à-dire que si le contrevenant ne possède pas suffisamment de biens, la restitution devient une solution vide.
Il faut aussi tenir compte du fait que c'est la Couronne qui est responsable des représentations au moment de la sentence. Les victimes n'auront pas qualité pour faire valoir leurs requêtes de restitution.
Enfin, il est impossible d'établir un mécanisme de collecte des biens à restituer en vertu d'une ordonnance faisant partie de la sentence, puisque cela exigerait un immense degré de coopération avec les provinces et des mesures de suivi intensives. Les coûts seraient prohibitifs.
Une autre mesure contenue dans le projet de loi stipule spécifiquement que les tribunaux peuvent prendre en considération la déclaration faite par le représentant d’une collectivité ou d'un groupe définissable pour déterminer la peine dans les affaires de fraude.
Les tribunaux sont déjà assez réceptifs à l'idée de prendre en considération les déclarations décrivant les répercussions d'un crime sur l'ensemble de la collectivité, dans certains cas. Dans les cas de fraude, par exemple, une fraude à grande échelle qui a fait de nombreuses victimes identifiables dans une petite ville pourrait avoir des répercussions économiques sur toute la ville. Nous avons vu ce genre de cas dans de nombreuses collectivités, un peu partout au Canada.
Nous parlons de la peine d'emprisonnement obligatoire et, comme je l'ai dit auparavant, je suis très en faveur de ce type de peines comme mesure dissuasive. Plus tôt aujourd'hui, un député du Bloc québécois a demandé s'il y avait des cas où une personne qui a commis une fraude de plus de 1 million de dollars a écopé d'une peine inférieure à la peine de deux ans proposée dans le projet de loi. En vérité, il y en a. J'aimerais parler de quelques-unes de ces affaires qui ont été jugées.
Il y a eu un cas où l'accusé a autorisé des prêts à des personnes fictives. Il a été accusé d'une fraude de plus de 5 000 $. La fraude s'élevait à plus de 4 millions de dollars et a été perpétrée sur une période de quatre ans. La combine avait été mise en place par quelqu'un d'autre et l'accusé n'a fait que l'appliquer. Les facteurs aggravants étaient l'abus de confiance et le grand nombre d'opérations frauduleuses faites. Les facteurs atténuants étaient que l'accusé n'avait pas de casier judiciaire, qu'il n'avait pas bénéficié personnellement de la fraude et qu'il était aussi une victime de fraude. Dans ce cas particulier, il a écopé de deux ans moins un jour et l'autre partie a reçu une peine de quatre ans. Aucun arrêt n'a été publié.
Il y a eu une autre cas où trois accusations de fraude de plus de 5 000 $ ont été portées contre une personne relativement à deux prêts dépassant 3 millions de dollars au total et à des opérations sur actions. Dans ce cas, il y a eu condamnation avec sursis à une peine de deux ans moins un jour suivie d'une année de probation.
Ce sont les affaires sur lesquelles le Bloc voulait de l'information.
Il y a un autre cas où l'accusé a plaidé coupable à une fraude qui avait porté sur la remise de TPS et de retenues à la source sur une période de cinq ans. Dans ce cas, la peine a été de 42 mois.
Dans une autre affaire, l'accusé a plaidé coupable à des accusations de fraude de plus de 5 000 $ pour avoir soutiré 1,8 million de dollars en un mois à La Banque de Nouvelle-Écosse. Cette personne a été condamnée à 26 mois d'emprisonnement. Je pourrais citer d'autres cas semblables. Dans une autre affaire liée au programme des commandites, l'accusé a plaidé coupable à 28 chefs d'accusation de fraude sur une période de quatre ans, fraude totalisant plus de 1,5 million de dollars. Il y a eu une ordonnance de dédommagement.
Dans une autre affaire liée au scandale des commandites, l'accusé a plaidé coupable à 15 chefs d'accusation de fraude totalisant 1,5 million de dollars. La peine n'a été que de 18 mois d'emprisonnement. Dans une autre affaire encore, un individu accusé de fraude de plus de 5 000 $ et d'avoir escroqué la somme de 1,1 million de dollars au gouvernement a été condamné à des travaux communautaires et à des peines que la plupart des gens considéreraient légères. Dans un autre cas, l'accusé exploitait une entreprise qui a fraudé des banques de plus de 2,5 millions de dollars. Il a été condamné à une peine de deux ans moins un jour et a fait l'objet d'une ordonnance de dédommagement.
Nous pouvons voir que, dans de nombreux cas, s'il existait une peine minimale, les accusés auraient été condamnés à des peines beaucoup plus sévères. Espérons que ces peines d'emprisonnement et sanctions obligatoires supplémentaires auront un effet dissuasif. Je sais que c'est ce que souhaitent les Canadiens. Ils espèrent que cela mettra fin à beaucoup de ces actes répréhensibles.
Permettez-moi de vous en dire un peu plus sur les possibilités réelles de ce projet de loi. Je ne cesse de dire que l'important, dans ce projet de loi, est l'établissement d'une peine minimale obligatoire de deux ans d’emprisonnement. Il ajoutera des circonstances aggravantes aux fins de détermination de la peine et prévoit que le tribunal pourra tenir compte des déclarations faites au nom de collectivités ayant subi des dommages. Les répercussions sur les victimes et les membres de leur famille peuvent être désastreuses.
Dernièrement, il a été question de telles affaires dans les médias. Nous avons entendu le député d' parler de combines à la Ponzi. Nous sommes tous au courant d'une affaire en cours, au Québec, où une telle combine a été employée. Nous connaissons tous également le cas de Bernie Madoff et les conséquences de ses actes sur de nombreuses familles aux États-Unis.
Voilà pourquoi les Canadiens veulent tant qu'un tel projet de loi soit adopté. Notre gouvernement a décidé d'agir. Notre a présenté le projet de loi. J'ai écouté le débat d'aujourd'hui et j'ai entendu les députés de tous les partis dire combien ce projet de loi était important pour les Canadiens.
Parmi les questions posées, on se demande pourquoi les mesures proposées visent seulement la fraude et non les autres types de crime en col blanc. Or, la fraude est une infraction à la définition très large et très souple. Des accusations de fraude peuvent être portées contre les auteurs d'une vaste gamme d'agissements. Bien que de nombreuses infractions définies par le Code criminel puissent s'appliquer dans une affaire donnée, ce sont les accusations de fraude qui sont le plus souvent portées. Ce sont ces accusations qui permettent principalement de poursuivre les gens qui trompent les Canadiens honnêtes.
En tant que députés, nous devons prendre la défense des Canadiens honnêtes et vaillants. Nous devons protéger leurs intérêts. Nous devons protéger ces gens contre ceux qui voudraient s'emparer de l'argent qu'ils ont chèrement gagné et qu'ils ont épargné pour répondre à leurs besoins une fois parvenus à la retraite.
Les procureurs ont tendance souvent à éviter de retenir des accusations concernant des infractions plus précises parce que les accusations de fraude peuvent s'appliquer tout autant et peuvent être plus faciles à étayer par des preuves.
Ce projet de loi s'appliquerait dans bon nombre de cas qui défraient aujourd'hui la manchette.
Je reviens toujours là-dessus, mais une peine d'emprisonnement obligatoire aura un effet dissuasif. Parfois, les auteurs des crimes de ce genre ne sont pas effrayés par des sanctions aussi légères. Ils ne sont même pas certains d'aller en prison, selon le juge auquel ils auront affaires. Certains actes ne seraient pas commis si des sanctions ayant un véritable effet dissuasif étaient prévues.
En 2004, on a augmenté à 14 ans d'emprisonnement la peine maximale, qui était de 10 ans. On a aussi augmenté la peine maximale applicable dans le cas de certaines fraudes particulières liées aux valeurs mobilières. Quatorze ans d'emprisonnement constitue la peine la plus lourde pour les crimes sans violence, et c'est la peine maximale pour les infractions contre les biens.
Il est clair que la fraude est un crime grave. J'espère qu'en pareil cas, les juges infligeraient des peines qui dépassent de loin deux ans d'emprisonnement. Mais, avec ce projet de loi, la peine minimale serait de deux ans.
Des cas récents, dont l'affaire Earl Jones à Montréal, continuent de susciter beaucoup d'intérêt un peu partout au pays. C'est de cela dont je parlais, c'est-à-dire l'intérêt que les Canadiens de partout au pays manifestent à l'égard des lois pénales visant la criminalité en col blanc.
Les Canadiens se préoccupent au plus haut point des fraudeurs à grande échelle qui privent des gens de toutes leurs économies ou de leurs fonds de retraite et qui font preuve d'une extrême cupidité et indifférence envers les autres. Ces réformes sont conçues pour assurer que les peines imposées dans ces cas refléteront adéquatement la gravité des répercussions que ces actes ont eues sur la vie de leurs victimes. Comme je l'ai déjà souligné, c'est une des responsabilités qui nous incombent à titre de parlementaires.
J'ai parlé de certaines des décisions qui ont été rendues par les tribunaux et qui prouvent le besoin de ce projet de loi. J'aimerais parler plus précisément de la peine d'emprisonnement obligatoire et de la façon dont les fraudes à grande échelle seraient punies aux termes de ce projet de loi.
Comme je l'ai dit précédemment, la peine maximale pour les cas de fraude est de 14 ans de détention. C'est la peine d'emprisonnement maximale imposée par nos lois pénales, à part l'emprisonnement à perpétuité.
Nous proposons dans le présent projet de loi une peine d'emprisonnement obligatoire dans les cas où la fraude dépasse le million de dollars. Il n'est pas nécessaire qu'une seule victime soit dépouillée de plus d'un million de dollars puisque les sommes sont cumulatives. Toutes les sommes détournées par un seul fraudeur doivent ensemble excéder un montant d'un million de dollars.
Je crois que la meilleure façon de décrire les cas de ce genre serait de dire que de telles fraudes se font sur une grande échelle; leurs auteurs doivent y consacrer beaucoup de temps, d'énergie et de planification et se livrer à bon nombre de supercheries pour arriver à frauder une ou plusieurs personnes de plus d'un million de dollars. Cela dénote également un fort degré de culpabilité morale. De telles fraudes témoignent d'un mépris et d'un manque de respect évidents pour les citoyens respectueux de la loi qui en deviennent victimes.
La loi dit préciser très clairement que toute fraude de cette ampleur doit être punie par une peine minimale d'emprisonnement. C'est ce qui nous amène à parler de cette peine d'emprisonnement minimale de deux ans. Je ne répéterai jamais assez combien une peine de ce genre est nécessaire comme outil de dissuasion.
Nous constatons que cette peine d'emprisonnement minimale de deux ans est plus faible que certaines des peines que les tribunaux imposent à l'heure actuelle. Certaines peines varient entre quatre et sept ans pour ces fraudes à grande échelle, qui s'élèveraient à bien au-delà du million de dollars, mais le Code criminel ne précise pas de peine minimale.
À l'heure actuelle, le tribunal peut décider, dans un cas donné, de tenir compte de circonstances atténuantes qui ont pour effet de ramener la durée de la peine en deçà de deux ans. Il est donc opportun que le Parlement fournisse aux tribunaux et aux Canadiens des directives précisant clairement que la peine obligatoire devrait être bien claire dans pareils cas et que la peine minimale obligatoire devrait servir de point de départ au calcul de la peine. Toutes sortes de circonstances aggravantes qui sont pertinentes lorsqu'il s'agit d'une fraude d'une telle envergure, notamment sa complexité, sa durée, le grand nombre de victimes et le fait qu'elle s'accompagnait d'abus de confiance, pourraient également être invoquées pour allonger la durée réelle de la peine. J'espère que les juges imposent effectivement des peines beaucoup plus longues que ces deux ans.
Les fraudes qui inquiètent tout particulièrement les Canadiens de nos jours sont celles impliquant des sommes dépassant largement 1 million de dollars, des sommes parfois de 100 fois supérieures et souvent plus élevées encore. De toute évidence, les peines applicables à cette catégorie de fraudes seraient d'une durée nettement supérieure au point de départ qui est de deux ans à l'égard de fraudes d'un montant de 1 million de dollars dont nous parlons. Une telle mesure ferait clairement savoir à tout le monde que quiconque songe à s'enrichir en escroquant des Canadiens s'expose à des conséquences graves.
Comme on peut le constater, il existe des circonstances aggravantes dont les tribunaux qui déterminent la peine tiennent compte actuellement. Le Code criminel prévoit déjà plusieurs circonstances aggravantes applicables aux infractions liées à la fraude. Par exemple, si un grand nombre de personnes ont été victimes de la fraude ou si le délinquant a profité de la haute estime dont il jouissait dans la communauté pour commettre cette infraction, sans compter ce que l'on trouve à l'article 718.2 du Code criminel, des circonstances aggravantes s'appliquent généralement.
Dans les cas de fraude, la circonstance aggravante la plus courante est le fait que le délinquant ait commis un abus de la confiance ou d’autorité en perpétrant l'infraction. Cela arrive beaucoup trop souvent.
Pour conclure, j'ai suivi le débat à la Chambre et entendu des députés de part et d'autre s'exprimer et je constate avec plaisir qu'ils souhaitent que le projet de loi soit renvoyé à un comité et n'ont pas d'objection à ce que des amendements supplémentaires soient proposés afin que ce projet de loi reçoive l'appui nécessaire pour être adopté, de sorte que les fraudeurs et autres escrocs qui voudraient abuser de la confiance de Canadiens vulnérables soient punis en conséquence.
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Madame la Présidente. je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi .
Je crois que c'est une réalité qui a malheureusement touché trop de victimes au cours des dernières années. On est tout à fait en droit de s'attendre, de la part du gouvernement, à ce que les lois soient modifiées pour tenir compte de cette réalité qui n'est pas nouvelle. Toutefois, dans le contexte de la déréglementation des marchés financiers et des changements technologiques permettant certaines opérations impossibles à cacher ou à faire précédemment, il est clair qu'on doit procéder à une modernisation de nos lois à cet égard.
Malheureusement, le projet de loi déposé par le gouvernement rate totalement la cible. En fait, il ressemble plutôt à une opération de relation publique pour montrer que le gouvernement fait quelque chose. Il ressemble plutôt à une opération de relations publiques en lien avec le combat idéologique que mènent les conservateurs pour amener, au Canada, un type de justice calqué sur le modèle américain, un modèle actuellement remis en cause par la dure réalité économique.
En Californie, par exemple, on dépense plus pour l'ensemble du système carcéral que pour le système universitaire parce qu'on a durci les lois au fil des ans de façon automatique et sans réflexion. C'est un sérieux problème. La Californie, qui est d'ailleurs maintenant au bord de la faillite, a dû libérer 40 000 prisonniers parce qu'elle n'était plus capable de les nourrir.
Avant de tomber dans les excès qu'ont connus plusieurs États américains, il me semble qu'on devrait avoir, au Canada, un débat de société beaucoup plus fort et complet sur le type de système de justice qu'on veut, plutôt que ce que nous présentent les conservateurs. En effet, les conservateurs nous présentent des mesures à la pièce qui visent à implanter un système de justice qui n'est pas du tout conforme aux valeurs des Québécois, et des Canadiens, j'en suis convaincu, sans débat public et sans réelle prise en considération de toutes les dimensions.
Ce projet de loi rate donc la cible car il n'aidera absolument pas à combattre les crimes économiques. Par contre, il inclut toute une série de leitmotivs conservateurs néo-républicains, notamment sur la question des peines minimales. J'aurai l'occasion d'y revenir.
On doit initier un débat sur la façon de moderniser nos lois, en justice en particulier, mais c'est vrai pour tout ce qui touche la réglementation du secteur financier. Il est très clair qu'on ne pourra pas continuer dans le même environnement qu'ont créé les années 1990. Il devra y avoir une nouvelle réglementation du secteur financier à l'échelle internationale et à l'échelle de chacun des pays. Le débat doit commencer à se faire. C'est dans ce contexte que le Bloc québécois a décidé de voter en faveur de ce projet de loi, tout en considérant qu'il n'atteint pas la cible qu'il dit vouloir atteindre, afin que ce dernier puisse être étudié en comité. On pourra alors présenter les mesures qui pourraient apporter de véritables solutions en ce qui a trait aux crimes économiques.
Il est très clair qu'on ne pourra pas faire ce type de débat à la pièce, comme tentent de le faire les conservateurs avec près de la moitié des projets de loi devant nous, qui apportent des modifications au Code criminel ou à des lois qui touchent la justice. Il nous faut vraiment un débat où l'ensemble des principes sur lesquels on doit asseoir un système de justice serait au coeur du débat public. Évidemment, les parlementaires ici présents doivent être mis à contribution, mais l'ensemble de la société canadienne et québécoise doit également l'être. On étudiera le projet de loi en comité pour faire un certain nombre de propositions qui nous semblent beaucoup plus prometteuses que ce qu'on retrouve dans le projet de loi. Encore une fois, ce dernier n'atteint pas du tout les cibles qu'il dit vouloir atteindre.
Quand on le regarde de très près, ce que j'aurai l'occasion de faire à l'instant, on s'aperçoit qu'il y a un os dans le fromage, comme disait un de mes amis. Cela veut dire qu'il y a des éléments irritants ou des mesures proposées qui jettent carrément de la poudre aux yeux.
Je commencerai immédiatement par la question des peines minimales. Les conservateurs veulent instaurer des peines minimales partout.
On a actuellement un débat sur le projet de loi où on veut faire disparaître les sentences avec sursis pour créer des pôles tellement opposés. On aura soit des sentences suspendues, soit des sentences avec emprisonnement minimal de deux ans. Cela va devenir extrêmement intenables pour les juges. On aura des situations où des prévenus, qui auraient dû avoir une sentence avec sursis, par exemple, se retrouveront avec des sentences suspendues ou avec carrément pas de sentence pour éviter un emprisonnement minimal de deux ans. Il y aura aussi des gens qui auront des sentences de deux ans et qui mériteraient une autre forme d'approche en termes de réhabilitation. C'est un débat qui traverse l'ensemble de cette législature, une obsession des conservateurs qu'on retrouve dans le projet de loi .
Les peines minimales ne servent à rien. Toutes les études le montrent et je pense que l'exemple américain, étasunien, comme mon collègue le député de le dit si bien, le démontre amplement. On a là une société où le taux d'incarcération est l'un des plus élevés au monde, où ce taux d'incarcération a un effet pervers d'ailleurs parce qu'il fait diminuer artificiellement le taux de chômage. Chaque fois qu'on compare le taux de chômage au Canada et au Québec par rapport à celui des États-Unis, on devrait toujours ajouter 1 à 1,5 point de pourcentage de plus. Il y a tellement de monde en prison pour toutes sortes de délinquances parfois relativement mineures qui pourraient être corrigées par d'autres types d'intervention. Comme je le mentionnais, le taux d'incarcération fait en sorte que tout un pan de la population qui pourrait être actif se retrouve retiré des statistiques de façon artificielle et temporaire.
Cela n'a pas d'effet dissuasif. La société étasunienne n'est pas une société harmonieuse. C'est une société où les gens peuvent se sentir en sécurité, mais ils ne se sentent pas en paix. On voit même maintenant que des gens s'enferment dans des quartiers où ils se créent des murs et s'isolent de la société. Cela ne peut pas être la paix, cela ne peut pas être une société cohérente. Ce n'est pas non plus une sécurité réelle, c'est une apparence de sécurité. Cela se fait dans un pays où on a augmenté le nombre d'infractions avec des peines minimales. Cela n'a pas d'effet dissuasif.
Les fraudes de 1 milliard de dollars et plus sont rares, on le sait. Non seulement elles sont rares, mais quand elles se produisent, elles mènent à des sentences de plus de deux ans. On a créé une disposition dans le projet de loi , comme je le mentionnais, pour faire des relations publiques et dire qu'on va être plus sévère, alors que dans les faits, chaque fois qu'il y a eu des fraudes de 1 million de dollars et plus, les juges, tenant compte de l'ensemble des circonstances, ont donné des sentences qui dépassaient deux ans. On défonce carrément des portes ouvertes, mais encore une fois, on n'est pas dupes. C'est dans le cadre d'une offensive idéologique concernant la justice et la façon de voir la justice que mènent les conservateurs de façon sournoise.
De plus, quand on a demandé au ministre de nous donner un exemple de fraude de plus de 1 million de dollars où il y a eu une sentence de moins de deux ans, il a été incapable de donner un exemple parce qu'il n'en existe pas.
En outre, généralement, comme je le mentionnais, quand on assiste à des fraudes de cette ampleur, les peines sont de l'ordre de six à sept ans.
On a créé une impression de durcissement sur le plan législatif qui, en fait, est tout simplement une opération de relations publiques. Il s'agissait peut-être aussi tout simplement d'un projet de loi improvisé par le gouvernement conservateur devant le dégoût d'une bonne partie de la population et des victimes des différents fraudeurs. On peut penser évidemment à Vincent Lacroix, Earl Jones, mais aussi à un certain nombre d'autres comportements dans les milieux financiers et les milieux d'affaires au cours des dernières années. Je pense par exemple à la manipulation des chiffres comptables dans le cas de Nortel et de Enron, aux États-Unis. Probablement que, sous la pression populaire, le gouvernement a voulu agir et a agi d'une façon qui ne donne pas de résultat. Cela sent énormément l'improvisation.
On a aussi ajouté des circonstances aggravantes. Quand on regarde le jugement rendu par la cour concernant le cas de Vincent Lacroix, on s'aperçoit que tous les éléments que le gouvernement inscrit dans son projet de loi comme étant des circonstances aggravantes — je pense, par exemple, aux effets psychologiques de la fraude sur les victimes — sont déjà présents dans les éléments d'explication que le juge, dans le cas de Vincent Lacroix, a donnés pour justifier sa peine d'emprisonnement. Celle-ci est, si ma mémoire est bonne, de 12 ou 13 ans de prison.
Là encore, on défonce des portes ouvertes. On fait en sorte de donner l'impression de durcir les lois concernant les crimes économiques et les criminels en cravate. Mais dans les faits, on codifie tout simplement ce que les tribunaux utilisent déjà dans le cadre du processus décisionnel existant.
Je donne un autre exemple: les ordonnances de restitution d'argent. Pour ce qui est des fraudeurs, on leur demande évidemment, en toute logique, de restituer l'argent aux victimes quand c'est possible. Cependant, ces ordonnances de restitution d'argent existent déjà. On les élargit un peu dans le projet de loi.
On peut encore se questionner à savoir s'il sera faisable, dans le cas de Vincent Lacroix, d'Earl Jones et de bien d'autres, de récupérer l'argent, d'autant plus qu'on ne s'attaque pas aux moyens que prennent ces fraudeurs pour faire disparaître l'argent, que ce soit les montages financiers ou encore l'existence de paradis fiscaux. J'aurai l'occasion d'y revenir.
De même, les ordonnances restreignant les activités des coupables sont intéressantes. Mais encore là, il s'agit d'une pratique existante qu'on élargit.
Quand on fait le bilan de ce que contient le projet de loi , on s'aperçoit que ce sont des choses qui existent déjà dans le système, qu'on inclut dans une loi et qui, souvent, sont en deçà même de ce qui se fait.
Je donne encore une fois l'exemple de la peine minimale de deux ans. Si la norme est actuellement de six ou sept ans, donne-t-on le signal aux juges et aux tribunaux qu'il faudra être moins sévères? Cela peut tout à fait être l'interprétation que feront certains juges de ce projet de loi, si jamais il devient effectivement une loi.
On a donc raté la cible, et si on l'amène en comité, dans le cas du Bloc québécois, c'est pour élargir le débat aux vrais moyens de lutter contre les crimes économiques. Parmi ces moyens, il y en a un que privilégient l'ensemble des juristes et des chroniqueurs qui s'occupent des questions de crimes ou des questions judiciaires, c'est l'abolition de la libération au sixième de la peine.
Depuis le début de la semaine, on a eu droit à des réponses de la part du et du laissant entendre qu'il s'agit de quelque chose d'extrêmement compliqué, alors que dans les faits, il s'agit d'abolir deux articles dans le Code criminel.
Il y a une dizaine d'années, cette libération au sixième de la peine n'existait pas. Elle est apparue au fil des ans. On peut donc revenir en arrière, considérant que cette façon de procéder ne fait pas en sorte que les criminels reconnus coupables puissent non seulement avoir un jugement de sentence mais puissent purger une bonne partie de cette peine d'emprisonnement. On peut donc revenir très facilement sur la question du sixième de la peine en abolissant les deux articles qui ont permis la mise en place de cette mesure.
On ne comprend pas. Il n'y a aucune logique dans les réponses formulées par le et le . Pourquoi le gouvernement retarde-t-il la mise en place de cette mesure qui fait consensus dans tous les milieux et qui est extrêmement facile à mettre en oeuvre?
Aujourd'hui, à la période de questions, le chef du Bloc québécois a soulevé une hypothèse à savoir si le gouvernement conservateur — et cela me ramène à mon point en introduction — ne voudrait pas utiliser une mesure qui est tout à fait logique, efficace et qui fait consensus, soit l'abolition de la libération au sixième de la peine, pour inclure d'autres mesures qui, elles, sont beaucoup moins consensuelles, efficaces et transparentes.
C'est l'habitude qu'on a eue avec le gouvernement conservateur d'avoir ces petites pilules empoisonnées autour d'une mesure qui est tout à fait valable, qui fait consensus et qui a souvent été proposée par l'opposition. Je rappelle que le Bloc québécois propose l'abolition de la libération au sixième de la peine depuis 2007. Ce n'est pas quelque chose qu'on a inventé à la lumière des crimes économiques des derniers mois. Cela faisait suite à une réflexion en profondeur faite par le Bloc québécois, ses militants et ses militantes au fil des ans. C'est la crainte que nous avons et cette crainte est aussi fondée par l'expérience.
Je me rappelle entre autres ce projet de loi qui mettait en place toute une série de mesures fiscales à l'intérieur duquel le gouvernement avait mis une toute petite clause qui faisait en sorte qu'on pouvait refuser du financement pour des films ou des oeuvres qu'on considérait être non conformes à l'ordre public. Si ma mémoire est bonne, c'était le projet de loi C-10. Personne ne l'avait vue en cette Chambre, malgré le travail effectué par le Comité permanent des finances. Le Sénat s'en est aperçu et le gouvernement, plutôt que de prendre ses responsabilités et éliminer cet irritant, s'est acharné à vouloir le maintenir. Je donne cet exemple, mais on en a eu plusieurs autres au cours des différentes législatures depuis que le gouvernement conservateur est en place.
Cette abolition de la libération au sixième de la peine serait quelque chose d'extrêmement facile à faire. On pourrait l'inclure dans le cadre de ce projet de loi. On pourrait même, dans les cas de Vincent Lacroix et d'Earl Jones, s'assurer que les deux purgent une bonne partie de leur peine plutôt que ce qui sera le cas suite à l'inaction du gouvernement. En effet, en janvier 2011, Vincent Lacroix se retrouvera libre comme l'air ou presque. Je donne encore ces deux exemples parce que ce sont les plus connus au Québec.
Ce projet de loi n'inclut pas ces éléments. Un autre élément majeur dont on n'a pas parlé et dont le gouvernement ne veut pas parler, c'est la question des paradis fiscaux. Je reviens à ce que je disais tout à l'heure. Ce qui fait en sorte que des gens fraudent et pensent pouvoir s'en sortir de belle façon repose non seulement sur le fait qu'ils seront libérés au sixième de la peine, mais aussi sur le fait que par l'entremise de toutes sortes de mécanismes que permet la Loi de l'impôt sur le revenu canadienne, cet argent se retrouvera dans des paradis fiscaux à l'abri du fisc canadien. Le laxisme du gouvernement conservateur dans ce dossier est patent.
Statistique Canada révélait il y a deux semaines qu'il y avait, si ma mémoire est bonne, 146 milliards de dollars provenant de contribuables canadiens. Ce sont surtout des personnes extrêmement riches. Comme on le sait, un contribuable ordinaire n'a pas les moyens de se payer les comptables et les avocats requis pour utiliser l'ensemble de ces mécanismes. On retrouve aussi des compagnies et, parmi celles-ci, les banques. On sait que les banques canadiennes, en particulier, utilisent énormément les paradis fiscaux. C'est donc de l'argent qui, par laxisme de la part des gouvernements libéral ou conservateur, se retrouve dans les paradis fiscaux. Éventuellement, lorsque ces fraudeurs seront libérés, ils pourront récupérer l'argent des victimes à l'abri de la justice canadienne et du fisc canadien et avec, il faut bien le dire, une complicité du gouvernement canadien conservateur.
Je donne un exemple à cet égard que nous donnions cette semaine. Il était question de la signature d'un accord qui vise à assouplir les frontières entre le Panama et le Canada. Il est connu que le Panama est un paradis fiscal. C'est notoire. On vient de signer une entente pour s'assurer qu'il soit encore plus facile de transférer de l'argent du Canada vers le Panama. C'est totalement contraire à l'ensemble des orientations prises actuellement par les gouvernements responsables. Je pense aux gouvernements du président Obama ou du président Sarkozy qui ont dénoncé la situation et qui cherchent des solutions. Dans le cas de notre gouvernement et de notre , non seulement on ne cherche pas de solutions, mais on crée de nouveaux problèmes.
Je donne un autre exemple, outre la signature avec le Panama. On n'a pas touché à l'entente fiscale avec la Barbade. Quand les conservateurs étaient dans l'opposition, ils s'amusaient beaucoup du fait que la compagnie Canada Steamship Lines du ministre des Finances, Paul Martin, qui a aussi été premier ministre, utilisait les mécanismes qui étaient permis par la Barbade pour éviter de payer ses impôts au Canada. Non seulement ont-ils maintenu l'entente fiscale avec la Barbade depuis qu'ils forment le gouvernement, mais ils sont en plus revenus sur une décision qui avait été prise dans un des budgets visant à empêcher la double déduction d'intérêts dans le cas d'investissements à l'étranger. On recule, plutôt qu'avancer comme cela se fait dans presque tous les pays du G20.
On assiste à un spectacle de fumée. On étudiera le projet de loi en comité pour proposer des solutions concrètes en ce qui a trait au système de justice, particulièrement sur la libération au sixième de la peine, mais aussi plus largement, sur les moyens d'endiguer l'utilisation des paradis fiscaux par les fraudeurs qui mettent ainsi à l'abri de la justice et du fisc canadien leurs avoirs, et véritablement trouver les moyens de redonner cet argent volé aux victimes de ces fraudeurs. C'est le travail que le Bloc québécois fera en comité.
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Madame la Présidente, le projet de loi contient des dispositions conçues pour veiller à ce que les individus qui commettent des fraudes graves se voient imposer des peines plus sévères. L'objectif du projet de loi est clair et simple. Il modifierait le Code criminel afin d'améliorer la réponse du système de justice au phénomène des fraudes à grande échelle dont on a tellement entendu parler ces derniers temps.
Les néo-Canadiens figurent au nombre des personnes qui sont vulnérables à la fraude. Ils décident de venir au Canada parce qu'ils ont confiance dans notre système de justice. Ils croient que les personnes qui commettent des crimes sont condamnées et mises derrière les barreaux. Cependant, lorsqu'ils sont malheureusement victimes de fraudeurs, ils sont consternés de découvrir que ces criminels s'en tirent assez facilement et qu'ils peuvent recommencer à commettre les mêmes infractions. Les victimes ne peuvent pas recouvrer leur argent durement gagné et elles ne bénéficient d'aucune protection.
Le projet de loi enverrait un message à tous ceux qui croient pouvoir se montrer malins en amenant par la tromperie des Canadiens à leur remettre leurs économies difficilement amassées. Au contraire, le projet de loi montrerait clairement que la fraude est un crime grave, qui entraîne des conséquences sérieuses.
Le projet de loi vise aussi à faire en sorte que le système de justice tienne davantage compte des victimes de fraude. Les mesures proposées indiqueraient clairement aux victimes que les crimes commis contre elles sont graves et que les torts qu'elles ont subis seront le plus possible pris en compte.
En gros, les mesures contenues dans le projet de loi contribueraient dans une large mesure à rehausser la confiance du public dans le système judiciaire.
Je voudrais parler un peu de la partie du projet de loi sur le dédommagement. Le dédommagement est défini comme étant le fait de redonner certaines choses à leur propriétaire légitime. Ce n'est pas la même chose que l'indemnisation qui, dans le système juridique canadien, est une forme de paiement fait par les gouvernements provinciaux et territoriaux aux victimes d'actes criminels. Le dédommagement est le paiement, par le délinquant, d'une somme déterminée par le tribunal. Le Code criminel prévoit actuellement un dédommagement dans le cas d'actes criminels comme la perte ou la destruction de la propriété, un préjudice physique ou psychologique, des blessures corporelles ou des menaces à un conjoint ou à un enfant.
Une ordonnance de dédommagement est émise au moment de l'audience de détermination de la peine. Elle constitue un élément distinct dans la peine imposée au délinquant ou dans l'ordonnance de probation ou dans la peine avec sursis.
Une ordonnance de dédommagement pourrait être tout à fait indiquée dans le cas d'une fraude. Dans plusieurs causes récentes bien connues, les médias parlent de milliers de dollars détournés par les délinquants. Dans ces affaires, de nombreux Canadiens innocents ont été dépouillés d'économies durement amassées et, dans les cas les plus épouvantables, ils ont été dépouillés des économies faites en prévision de leur retraite. Dans chaque procès, il faudra déterminer s'il est indiqué d'accorder un dédommagement.
Nos propositions feraient en sorte que, dans les affaires de fraude, le juge devrait envisager d'émettre une ordonnance de dédommagement en rendant sa sentence. Le tribunal devrait vérifier auprès de l'État si des mesures raisonnables ont été prises pour accorder aux victimes la possibilité de préciser si elles demanderont un dédommagement. Cette mesure fera en sorte que la peine ne pourra pas être imposée sans que la victime ait eu la possibilité de discuter avec l'État et d'établir le montant de ses pertes.
Les tribunaux ont constaté qu'il n'était pas possible d'émettre une ordonnance lorsque les sommes en jeu ne sont pas établies avec certitude ou lorsqu'il est difficile de répartir les sommes entre les différentes victimes. Afin de venir en aide à celles-ci, nous proposons l'adoption d'un formulaire optionnel pour les aider à établir le montant de leurs pertes. Sur ce formulaire, où la victime s'identifie et établit ses pertes, il est précisé clairement qu'elle doit produire les reçus, les factures ou des estimations afin d'aider le tribunal à établir l'ordonnance de dédommagement. Dans tous les cas, le montant des pertes doit pouvoir être établi avec certitude.
Les propositions accroîtront la probabilité que des ordonnances de dédommagement soient émises. Nous espérons qu'avec nos propositions, le système juridique sera davantage à l'écoute des victimes de fraudes.
Je signale qu'une des premières recommandations de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels à l'intention du portait sur le mécanisme de dédommagement. Les propositions en question sont moins détaillées que celles de l'ombudsman, mais elles contribueront à l'amélioration de l'expérience des victimes au sein du système de justice.
Ce matin, un député d'en face a demandé ce que fait le gouvernement pour empêcher les délinquants de récidiver. Les Canadiens sont profondément préoccupés par le risque que des délinquants condamnés puissent reprendre leurs activités et escroquer d'autres Canadiens.
Pour réduire le risque de récidive, le projet de loi contient des nouvelles mesures de détermination de la peine qui permettront aux tribunaux responsables de la peine d'ordonner qu'une personne reconnue coupable de fraude ne puisse plus mener des activités, rémunérées ou bénévoles, de gestion des biens monétaires ou immobiliers, ou autres valeurs, pour le compte d'autrui. Le tribunal pourrait interdire au délinquant de mener de telles activités pour la période qu'il estime indiquée, y compris pendant la peine d'emprisonnement du délinquant. Toute contravention à une ordonnance d'interdiction constituerait une infraction distincte.
En faisant en sorte que le délinquant n'ait plus la possibilité de commettre une autre escroquerie, le projet de loi réduira le nombre de victimes potentielles.
Le Code criminel prévoit déjà plusieurs ordonnances d'interdiction, comme celle imposée aux personnes reconnues coupables d'infractions sexuelles contre des enfants les empêchant, entre autres, de travailler dans une école ou tout lieu qui pourrait les amener à se trouver dans une situation de confiance ou d'autorité par rapport à des jeunes.
J'ai bon espoir que les mesures prévues dans le projet de loi feront clairement comprendre aux escrocs qu'ils ne pourront poursuivre leurs activités en toute impunité. Je me réjouis également à l'idée que le projet de loi ouvrira la voie à des discussions et accroîtra la sensibilisation à la question de la fraude de façon générale.
J'espère que les députés appuieront le projet de loi et en favoriseront l'adoption dans les plus brefs délais.