Passer au contenu
;

CIIT Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

MISSION À WASHINGTON, D.C. SUR L’ÉTAT DES RELATIONS COMMERCIALES CANADO-AMÉRICAINES

INTRODUCTION

La relation commerciale bilatérale entre le Canada et les États-Unis demeure la plus importante du monde, ce qui explique, en partie, l’importance de veiller à ce que les mouvements légitimes de marchandises, de services et de personnes d’un pays à l’autre demeurent les plus simples et les plus économiques possibles.

Depuis la récente crise économique et financière mondiale, des pressions s’exercent sur l’administration américaine pour que celle-ci adopte des mesures protectionnistes vis-à-vis des partenaires commerciaux des États-Unis. Les dispositions dites Buy American de l’American Recovery and Reinvestment Act of 2009 en sont un bon exemple : elles ont eu pour effet de limiter temporairement l’accès des sociétés canadiennes aux marchés publics des États américains et des administrations locales. Le renforcement des mesures de sécurité aux États-Unis après les attentats terroristes du 11 septembre 2001 est un autre élément expliquant le resserrement de la frontière canado-américaine au cours des dix dernières années.

C’est dans ce contexte que le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes s’est rendu à Washington, D.C. les 1er et 2 mars 2011. Comme ce fut le cas lors de visites précédentes, le principal objectif de la visite du Comité à Washington n’était pas d‘identifier de nouveaux débouchés pour les produits et services canadiens ou des occasions d’investissement, mais plutôt de bien faire comprendre aux élus et aux hauts fonctionnaires américains la valeur de la relation commerciale des États-Unis avec le Canada et le degré d’intégration des marchés, des chaînes d’approvisionnement et des économies de nos deux pays. La visite a aussi fourni l’occasion au Comité de sensibiliser les Américains aux mesures qui nuisent actuellement aux échanges entre le Canada et les États-Unis et de faire valoir les intérêts du Canada sur certaines questions clés.

Ainsi, le Comité avait pour objectif de procéder à des échanges de vues sur l’état actuel et futur des relations commerciales entre le Canada et les États-Unis et de faire connaître la position du Canada sur certains enjeux importants comme la fluidité des mouvements de marchandises et de personnes à la frontière, les marchés publics et certaines questions relatives à l’agriculture. À cette fin, le Comité a rencontré des membres du Congrès américain, des hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral et de l’administration américaine ainsi que les représentants d’un institut de recherche qui s’intéresse aux relations commerciales canado-américaines.

Le présent rapport présente un bilan de la visite de deux jours du Comité à Washington.

LA RELATION BILATÉRALE

Le Canada et les États-Unis sont le plus important partenaire commercial l’un de l’autre. En 2010, le commerce bilatéral de marchandises entre le Canada et les États-Unis a totalisé 501,4 milliards de dollars, soit 298,5 milliards de dollars d’exportations du Canada aux États-Unis et 202,9 milliards de dollars d’importations en provenance des États-Unis. Cela dit, les États-Unis perdent peu à peu du terrain comme partenaire commercial du Canada. En effet, ils ont compté pour 75 % des exportations du Canada en 2010, en baisse par rapport au sommet de 87 % enregistré en 2002. De même, la moitié des importations totales du Canada provenaient des États-Unis en 2010, comparativement au sommet de 68 % atteint en 1998.

Si l’économie canadienne est relativement petite par rapport à l’économie américaine, il n’en reste pas moins que les échanges avec le Canada comptent pour beaucoup dans la prospérité économique des États-Unis. En effet, plus de 1,6 milliard de dollars de biens et de services et 300 000 personnes franchissent la frontière canado-américaine quotidiennement. On estime que plus de 8 millions d’emplois aux États-Unis dépendent du commerce avec le Canada. En 2010, le Canada était la plus importante destination des exportations à l’étranger de 34 États américains. De plus, le Canada est le plus grand fournisseur de pétrole, de gaz naturel, d’électricité et d’uranium des États-Unis.

Le principal message que le Comité retient de sa visite à Washington est que le Canada est perçu favorablement aux États-Unis. La plupart des personnes avec lesquelles le Comité s’est entretenu sont au courant de l’intégration de plusieurs chaînes d’approvisionnement du Canada et des États-Unis et connaissent bien les raisons pour lesquelles il est dans l’intérêt des deux pays de faciliter les échanges.

Cela dit, en ce qui a trait aux enjeux relatifs au commerce, plusieurs membres du Congrès américain que le Comité a rencontrés, en particulier ceux ayant été élus récemment, étaient surpris d’apprendre que le Canada et les États-Unis sont le plus important partenaire commercial l’un de l’autre. Le Comité a aussi noté une certaine méconnaissance de l’importance de la relation commerciale canado-américaine. Actuellement, c’est la Chine qui monopolise l’intérêt des décideurs américains, notamment des membres du Congrès, en matière de commerce comme en témoignent des mesures et projets de loi comme la Foreign Manufacturers Legal Accountability Act of 2010[1].

On a dit à plusieurs reprises aux membres du Comité que la volonté de l’administration américaine de doubler les exportations des États-Unis d’ici cinq ans devrait fournir au Canada l’occasion d’accroître ses échanges avec les États-Unis et encourager une plus grande coopération en vue de la suppression des obstacles qui gênent les échanges bilatéraux. Ainsi, le décret-loi adopté par le président Obama le 11 mars 2010, qui énonce les objectifs de la National Export Initiative, enjoint entre autres aux ministères et agences fédéraux de s’efforcer d’éliminer les obstacles au commerce à l’étranger. On a fait valoir au Comité que cette mesure devrait non seulement faciliter les discussions portant sur les irritants qui nuisent au commerce bilatéral, mais aussi fournir aux deux pays l’occasion de s’entendre sur la manière de surmonter les obstacles qui entravent l’accès aux marchés de pays tiers.

Le Comité a clairement constaté qu’il devra continuer à réitérer l’importance de la relation commerciale canado-américaine, non seulement pour le Canada, mais également pour les États-Unis ainsi que les entreprises et emplois américains. Le Comité devra également continuer de communiquer les faits sous-tendant l’importance de cette relation. Il importe de cibler en particulier les nouveaux membres de la Chambre des représentants. À cet égard, d’après les personnes que le Comité a rencontrées, les rencontres organisées dans le cadre de cette visite représente une façon efficace et efficiente pour les membres du Comité d’atteindre cet objectif.

Sur la question de la sensibilisation des décideurs américains, il importe de noter que le Comité a été informé d’une tournée annuelle organisée depuis 2006 par l’ambassade du Canada à Washington qui permet aux dirigeants montants des États américains de passer de sept à dix jours au Canada et d’y rencontrer leurs homologues, ainsi que des gens d’affaires et des représentants des industries culturelles. Organisé en collaboration avec les gouvernements des provinces, ce programme vise à établir des relations avec les dirigeants des États tout en offrant à ceux-ci l’occasion d’approfondir leurs connaissances sur les relations canado-américaines. Les participants sont choisis par l’ambassade et les consulats du Canada aux États-Unis. Plusieurs membres actuels du Congrès des États-Unis et des législatures d’État des États-Unis ont participé à ce programme.

GESTION ET SÉCURITÉ DE LA FRONTIÈRE

La question du resserrement de la frontière canado-américaine a été au cœur de toutes les réunions du Comité à Washington. Le Comité a d’ailleurs appris que les problèmes de frontière, notamment les mesures de resserrement de la frontière, préoccupent aussi les hauts fonctionnaires américains et de nombreux membres du Congrès. En raison des attentats du 11 septembre 2001 et des nombreux problèmes que présente pour les Américains leur frontière avec le Mexique, les questions de frontière ne sont pas vues sous le même angle aux États-Unis qu’au Canada. À ce sujet, on a dit à maintes reprises au Comité que le Canada est souvent la victime indirecte des mesures prises pour sécuriser la frontière entre les États-Unis et le Mexique.

La sécurité des frontières est une préoccupation dominante dans l’esprit des Américains, mais toutes les personnes que le Comité a rencontrées sont conscientes de l’importance des relations commerciales entre le Canada et les États-Unis. Les discussions à ce sujet ont porté notamment sur l’interdépendance des économies des deux pays, sur les impératifs de sécurité qui l’emportent souvent, et pas toujours à juste titre, sur les besoins du commerce, et sur l’efficience du passage de la frontière pour les personnes et les marchandises, notamment sur la redevance douanière que le gouvernement américain envisage d’imposer aux Canadiens qui se rendent aux États-Unis par voie aérienne ou maritime.

Le Comité a répété aux hauts fonctionnaires et aux membres du Congrès américain que plusieurs chaînes d’approvisionnement du Canada et des États-Unis sont intégrées. Les membres du Comité ont rappelé à leurs homologues américains que, en raison de cette interdépendance, les lois américaines qui touchent le commerce avec le Canada ont aussi des répercussions sur les entreprises américaines. À cet égard, on a mentionné au Comité l’exemple d’une usine de transformation du bœuf du Nebraska qui a dû fermer à la suite de la décision des États-Unis d’interdire l’importation de bétail et de bœuf du Canada en 2003. Le Comité a aussi signalé à ses interlocuteurs que des mesures législatives visant d’autres pays — la Chine, par exemple — peuvent avoir des effets négatifs sur les exportations du Canada aux États-Unis et, par voie de conséquence, sur les entreprises américaines qui approvisionnent les exportateurs canadiens.

Le Comité a pris connaissance de plusieurs exemples démontrant l’intégration de plusieurs chaînes d’approvisionnement du Canada et des États-Unis et de l’importance de faciliter les mouvements de personnes et de marchandises entre les deux pays. Il a été question en particulier du cas de l’industrie américaine du bœuf, où des animaux canadiens sont exportés aux États-Unis pour transformation, celui de la fabrication des camions lourds employés en Alberta dans l’industrie des sables bitumineux, dont les roues sont fabriquées en Caroline du Sud et les moteurs en Indiana, et celui de l’industrie automobile, où les voitures franchissent la frontière canado-américaine plusieurs fois durant leur assemblage.

Le Comité a cherché à faire valoir que, dans de nombreux secteurs d’activité, le marché est nord-américain, si bien qu’il est dans l’intérêt des deux pays de faciliter les échanges tout en veillant à la sécurité de leur territoire. Ce message a été bien reçu, et des membres du Congrès et des hauts fonctionnaires de l’administration se sont engagés à continuer de collaborer avec le Canada à l’élimination des mesures qui entravent inutilement le commerce.

On a dit à plusieurs reprises au Comité que la sécurité de la population était une des grandes responsabilités de tout gouvernement et qu’on voyait d’un bon œil une plus grande coopération entre le Canada et les États-Unis à ce sujet. De plus, on a signalé au Comité que le Canada et les États-Unis devraient collaborer davantage pour trouver
et appréhender les personnes qui s’adonnent à des activités illicites et criminelles. Les membres du Comité et certains de leurs interlocuteurs ont noté que certaines menaces à la sécurité émanaient de l’intérieur. Le Comité a accueilli favorablement ces suggestions en vue d’une plus grande collaboration, mais a réitéré sa conviction que, en matière de sécurité, les États-Unis devraient traiter différemment leur frontière avec le Canada et leur frontière avec le Mexique. Les membres du Comité et leurs interlocuteurs ont convenu qu’il devrait être relativement facile de résoudre certains problèmes, par exemple celui des camions qui sont retardés à la frontière parce qu’un poste frontalier est fermé.

Les relations bilatérales ne se limitant pas au commerce des marchandises, la question des mouvements de personnes a aussi été soulevée. Une des principales questions abordées par le Comité avec de nombreux législateurs concerne le projet d’imposition par les États-Unis d’une redevance douanière de 5,50 $US aux Canadiens qui se rendent aux États-Unis par avion ou par bateau qui figure dans le budget de 2012 du président Barack Obama. Peu de législateurs avaient entendu parler de ce projet, mais tous ceux à qui le Comité en a parlé ont convenu qu’il fallait renoncer à ce projet. On a dit au Comité que les propositions budgétaires sont étudiées par les comités du Congrès et que le Comité des voies et moyens de la Chambre des représentants avait demandé à la Maison Blanche de justifier cette proposition et qu’il attendait une réponse. La plupart des membres du Congrès que le Comité a rencontrés étaient persuadés que cette mesure serait abandonnée, mais ont remercié le Comité de la leur avoir signalée.

COOPÉRATION EN MATIÈRE DE RÉGLEMENTATION

Une autre question a été soulevée à plusieurs reprises durant la visite du Comité : celle des différences de réglementation entre le Canada et les États-Unis. D’après certains hauts fonctionnaires américains, les différences de réglementation constituent un obstacle que doivent surmonter les entreprises américaines souhaitant commercer avec le Canada. On a donné notamment en exemple les différences de réglementation concernant les ceintures de sécurité et l’allumage automatique des phares durant le jour dans l’industrie automobile pour illustrer le problème que posent des différences de réglementation qui entravent inutilement les échanges dans une industrie où plusieurs chaînes d’approvisionnement sont très intégrées entre les deux pays.

Le Comité et les hauts fonctionnaires ont parlé notamment du nouveau Conseil de coopération en matière de réglementation, de cas précis de différences de réglementation entre le Canada et les États-Unis qui peuvent nuire au commerce et de la nécessité d’assurer une plus grande compatibilité de nos règlements et de nos démarches en matière réglementaire, tout en protégeant l’intérêt public.

Le Comité a appris que le gouvernement américain consultait les parties concernées aux États-Unis afin d’identifier les problèmes de réglementation les plus importants et qu’il s’était donné entre autres pour priorité d’améliorer la coopération sur ce plan. On a signalé au Comité que la Maison Blanche avait pris un décret-loi le 18 janvier 2011 visant à améliorer la réglementation; celui-ci enjoint aux organismes de réglementation de produire et soumettre un plan d’examen des règlements existants.

Lors des discussions portant sur les exigences américaines quant à l’étiquetage obligatoire du pays d’origine (Country-of-origin labelling ou COOL) et certains autres sujets, quelques membres du Congrès américain ont dit au Comité qu’ils sont d’avis que les États-Unis souffraient d’un excès de réglementation et qu’ils croyaient que les règlements étaient conçus et mis en œuvre surtout pour gagner des points à court terme dans l’opinion, mais qu’ils avaient souvent des effets négatifs sur l’économie à long terme. On a aussi dit au Comité que les gouvernements devraient mieux quantifier les coûts de mise en œuvre des règlements envisagés.

ÉNERGIE

Le Comité a aussi abordé la question de l’énergie durant ses rencontres puisque le commerce des produits énergétiques représente une bonne part de la valeur des échanges totaux entre le Canada et les États-Unis. Le Canada est le plus important fournisseur de pétrole et de gaz des États-Unis, et les réseaux d’électricité des deux pays sont fortement intégrés.

Le Comité s’est fait dire que l’administration des États-Unis avait l’intention de réduire la dépendance des États-Unis du pétrole en provenance du Moyen-Orient et du Venezuela. C’est dans cet optique que le projet de construction de l’oléoduc Keystone pour transporter le pétrole brut provenant des sables bitumineux de l’Alberta jusqu’aux raffineries des États-Unis a été proposé. La capacité de l’oléoduc équivaudrait aux importations actuelles de pétrole des États-Unis en provenance de l’Arabie saoudite. La plupart des membres du Congrès que le Comité a rencontrés souscrivent au projet de pipeline. On a fait valoir en outre au Comité que les techniques d’extraction des sables bitumineux étaient en constante évolution et qu’un oléoduc est nécessaire en partie pour stabiliser les approvisionnements des États-Unis en pétrole. Le Comité a d’ailleurs constaté qu’une raffinerie de la Pennsylvanie a dû mettre à pied une partie de ses effectifs après qu’un pipeline du Michigan se soit rompu, réduisant ainsi les approvisionnements en pétrole.

La question de la reconnaissance de l’hydroélectricité canadienne en tant que ressource renouvelable a aussi été abordée durant les rencontres du Comité à Washington. Le Comité a appris que les États-Unis avaient récemment adopté des exigences minimales pour que l’électricité soit considérée comme provenant de sources renouvelables et que l’hydroélectricité n’est pas toujours reconnue comme telle. On a dit au Comité que cela tenait au fait que, aux États-Unis, l’hydroélectricité est une industrie mûre, dont la capacité a presque atteint le potentiel maximal. Par conséquent, le fait de considérer l’hydroélectricité comme une ressource renouvelable ne crée pas de nouveaux débouchés dans les États où la production d’hydroélectricité est déjà au maximum de son potentiel. En outre, comme l’hydroélectricité est déjà une source considérable d’énergie dans de nombreux États américains, le fait de la considérer comme une ressource renouvelable réduirait l’incitation à investir dans d’autres formes d’énergies renouvelables plus vertes encore.

Le Comité a remarqué que l’ambassade du Canada à Washington, les consulats du Canada aux États-Unis et les bureaux des provinces aux États-Unis militent en faveur de la reconnaissance de l’hydroélectricité du Canada en tant que ressource renouvelable. Les décideurs au niveau des États américains sont sensibles à ce message et certains États ont d’ailleurs modifié leurs lois et règlements pour reconnaître le caractère renouvelable de l’hydroélectricité.

MARCHÉS PUBLICS

Plusieurs des personnes que le Comité a rencontrées ont parlé des répercussions néfastes pour le Canada des dispositions de l’American Recovery and Reinvestment Act of 2009, qui exigent que le fer, l’acier et les produits transformés employés dans des travaux de construction, d’entretien et de réparation des ouvrages et édifices publics financés par la loi en question soient produits aux États-Unis, disant que c’était là une conséquence non intentionnelle de la loi. Des membres du Congrès et de l’administration américaine ont confirmé que le Canada n’était pas ciblé par ces mesures, bien que celles-ci aient initialement eu pour effet d’écarter les sociétés canadiennes des marchés publics des États et des administrations locales des États-Unis.

Le Comité a tenu à faire valoir, lors de ses réunions à Washington, que, dans de nombreux secteurs, la majorité des exportations canadiennes sont des intrants destinés aux chaînes d’approvisionnement américaines et que le tiers environ des exportations du Canada aux États-Unis concernent des entreprises américaines qui ont une présence au Canada et expédient des marchandises aux États-Unis. En conséquence, les dispositions Buy American sont dommageables pour les intérêts non pas seulement du Canada, mais aussi des États-Unis.

D’après les membres du Congrès et de l’administration américaine que le Comité a rencontrés, le fait que le Canada soit le seul pays qui bénéficie aujourd’hui d’une exemption de l’application des dispositions Buy American démontre que les États-Unis ont effectivement réalisé qu’il était dans leur intérêt de conclure une entente donnant au Canada un accès privilégié aux marchés publics des États et des administrations locales des États-Unis.

Conscient du fait que l’Accord sur les marchés publics entre le Canada et les États-Unis de février 2010 expirera en septembre 2011, le Comité a exprimé le souhait que le Canada et les États-Unis concluent une entente bilatérale sur les marchés publics plus exhaustive, à plus long terme, qui respecte les intérêts du Canada et des provinces et qui est dans l’intérêt de la prospérité des deux pays. Le Comité a constaté que les législateurs et les hauts fonctionnaires américains étaient du même avis.

On a rappelé au Comité que le Canada devra faire des concessions pour obtenir une telle entente. À cet égard, les personnes que le Comité a rencontrées se sont dites satisfaites de l’inclusion, dans l’entente sur les marchés publics, d’engagements de la part des provinces canadiennes au sujet des marchés publics, et ont indiqué qu’elles suivaient de près les négociations entre le Canada et l’Union européenne en vue de la conclusion d’un accord économique et commercial global, en s’intéressant notamment aux concessions que le Canada pourrait faire dans ce contexte au sujet des marchés publics.

Le Comité a aussi saisi ses interlocuteurs des difficultés administratives auxquelles certaines entreprises canadiennes se sont trouvées confrontées quand elles ont soumis des offres relativement à des marchés locaux depuis la signature de l’Accord sur les marchés publics entre le Canada et les États-Unis. Les hauts fonctionnaires de l’administration américaine ont admis que la procédure employée pour informer les États et les administrations locales de leurs obligations aux termes des dispositions Buy American de la American Recovery and Reinvestment Act of 2009 et de l’entente conclue par la suite entre le Canada et les États-Unis étaient imparfaites et qu’elles pouvaient avoir empêché des entreprises canadiennes de présenter une offre à l’égard de marchés auxquelles elles étaient admissibles. Le Comité a noté que la situation était riche d’enseignements pour l’avenir.

AGRICULTURE

La plupart des discussions que le Comité a eues à Washington sur l’agriculture ont porté sur les exigences américaines en matière de salubrité des aliments et d’étiquetage qui nuisent aux exportations de produits agricoles canadiens aux États-Unis.

Certains des membres du Congrès que le Comité a rencontrés ont dit que les États-Unis souffraient d’une réglementation excessive, notamment dans le domaine de la salubrité des aliments. Le Comité a appris que le Food Safety and Inspection Service du département de l’Agriculture des États-Unis et la Food and Drug Administration des États-Unis sont les premiers responsables de la salubrité des aliments aux États-Unis, mais que 15 organismes se partagent les activités de surveillance. En conséquence, il est très difficile pour les États-Unis d’avoir une démarche uniforme et simplifiée de protection de la santé et de la sécurité de la population tout en facilitant les échanges avec les pays étrangers. Cette structure complexe explique aussi pourquoi les membres du Congrès ont du mal à contrôler efficacement le travail de ces entités.

Les personnes que le Comité a rencontrées à Washington ont louangé le Canada pour ses exigences élevées en matière de salubrité des aliments et pour la manière dont il a réagi lorsqu’un cas d’encéphalite spongiforme bovine (ESB) a été découvert en 2003 sur son territoire. Les hauts fonctionnaires de l’administration américaine ont reconnu la nécessité de collaborer avec le Canada pour améliorer la compatibilité des normes et règlements du Canada et des États-Unis en matière de salubrité des aliments.

Les membres du Congrès que le Comité a rencontrés étaient particulièrement impressionnés par les systèmes d’identification des bovins, des bisons et des ovins institués à l’initiative de l’industrie canadienne et par les exigences d’identification appliquées par l’Agence canadienne d’inspection des aliments aux termes de la Loi sur la santé des animaux.

Le Comité a appris que, durant les consultations menées par le département du Commerce des États-Unis auprès des industries concernées, la salubrité des aliments était l’un des domaines où l’on a réclamé une plus grande coopération avec le Canada au niveau de la réglementation. Les hauts fonctionnaires américains sont convaincus que le Conseil de coopération en matière de réglementation dont la création a été annoncée par le premier ministre Harper et le président Obama le 4 février 2011 sera utile afin de remédier à certaines des incompatibilités que présentent les règlements et normes du Canada et des États-Unis en matière de salubrité des aliments.

Durant ses rencontres avec des membres du Congrès américain et des hauts fonctionnaires, le Comité a aussi abordé la question de l’étiquetage obligatoire du pays d’origine imposé par la U.S. Farm Security and Rural Investment Act (Farm Bill) de 2002 et entré en vigueur en mars 2009. Le Comité s’était donné pour objectif à cet égard de saisir ses interlocuteurs de ses préoccupations quant à la mise en œuvre de cette mesure. Le Comité a fait valoir que de nombreuses fermes porcines américaines comptent sur les porcs d’engraissement canadiens en raison de l’insuffisance de l’offre aux États-Unis et que de nombreuses exploitations agricoles américaines, en particulier celles qui se trouvent à proximité de la frontière, sont maintenant dans une situation financière difficile du fait de la perte des porcs d’engraissement canadiens à la suite de l’entrée en vigueur des mesures sur le marquage du pays d’origine.

Le Comité a précisé en outre que, conformément aux dispositions contenues dans l’Accord de libre-échange nord-américain et aux ententes conclues sous l’égide de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), c’est l’endroit où l’animal est abattu qui devrait déterminer l’origine de la viande et qu’il n’est pas justifié d’exiger que l’étiquetage des produits finis mentionne l’origine des intrants.

La plupart des membres du Congrès que le Comité a rencontrés ont convenu que les exigences quant à la mention du pays d’origine sur l’étiquette restreignent indûment les échanges et ont dit qu’ils ne souscrivaient pas à cette mesure. Cela dit, on a fait savoir au Comité que les producteurs de porc et les associations de consommateurs des États-Unis soutiennent ces mesures et que leur inclusion dans le Farm Bill était nécessaire pour obtenir les voix nécessaires à l’adoption de la loi. Les membres du Congrès ont dit estimer que, après la parution du rapport du groupe spécial de l’OMC sur le recours déposé par le Canada contre les États-Unis au sujet des exigences de marquage du pays d’origine sur les étiquettes[2], les deux pays devraient s’efforcer de s’entendre à ce sujet.

Les hauts fonctionnaires de l’administration étaient plus circonspects et ont fait remarquer que le Comité consultatif Canada-États-Unis sur l'agriculture[3] offrait au Canada une tribune où faire connaître ses préoccupations et entamer un dialogue avec les ministères et organismes publics américains concernés en vue de résoudre les différends, comme celui qui concerne les exigences de marquage du pays d’origine, avant de penser à un recours.

CONCLUSION

Comme on l’a dit précédemment, le Canada et les États-Unis entretiennent la plus importante relation commerciale bilatérale du monde, et leurs marchés, leurs chaînes d’approvisionnement et leurs économies sont intégrés à différents degrés. Le Canada est également un important fournisseur d’énergie des États-Unis : il a répondu à 9 % de la demande totale d’énergie aux États-Unis en 2008. Dans ce contexte, il est dans l’intérêt des deux pays d’éliminer les obstacles qui entravent indûment le commerce entre eux et de faciliter les mouvements légitimes de marchandises, de services et de personnes d’un pays à l’autre. La récente crise économique et financière et l’impératif de sécurité depuis les attentats terroristes du 11 septembre 2001 ont entraîné un resserrement de la frontière canado-américaine.

Le Comité est conscient de l’importance de trouver le juste milieu entre le respect des impératifs associés à la protection de la sécurité des citoyens du Canada et des États-Unis et la nécessité de faciliter les mouvements légitimes de biens et de personnes entre les deux pays. Le Comité est d’avis que l’on accorde trop de poids aux préoccupations en matière de sécurité et que certaines des mesures prises par les États-Unis à ce sujet ne contribuent peut-être même pas à améliorer la sécurité. Il espère avoir réussi à rappeler aux hauts fonctionnaires et aux membres du Congrès des États-Unis la valeur de la relation commerciale bilatérale et à les sensibiliser aux conséquences négatives et imprévues de certaines des politiques et mesures adoptées par les États-Unis sur le commerce avec le Canada.

Le Comité est d’avis que des rencontres organisées régulièrement avec les États-Unis sont importantes et bénéfiques et que de telles rencontres devraient avoir lieu fréquemment.



[1]              Proposée par Betty Sutton, membre de la Chambre des représentants, la Foreign Manufacturers Legal Accountability Act of 2010 aurait forcé les fabricants de certains produits importés aux États-Unis à nommer un agent aux États-Unis qui recevrait les mises en demeure adressées à la société en question. Le projet de loi a été proposé en réaction à l’importation de Chine de cloisons sèches défectueuses qui avaient endommagé des maisons et rendu des gens malades, mais il aurait entraîné une augmentation des coûts et un alourdissement des formalités administratives pour les sociétés canadiennes qui exportent aux États-Unis. Le projet de loi n’a pas été adopté avant l’élection de novembre 2010.

[2]              À la demande du Canada et du Mexique, un groupe spécial de l’OMC a été établi sur les exigences américaines de marquage du pays d’origine lors de la réunion du 19 novembre 2009 de l’organe de règlement des différends à Genève. Le groupe spécial est en train de préparer son rapport et sa décision devrait être rendue publique durant l’été 2011. Cette décision pourrait faire l’objet d’un appel, ce qui retarderait d’environ six mois un règlement définitif dans ce dossier.

[3]              Le Comité consultatif Canada-États-Unis sur l'agriculture a été établi en 1998 afin de renforcer les relations commerciales bilatérales dans le secteur de l’agriculture entre les deux pays et pour faciliter la discussion et la coopération sur les questions touchant l’agriculture. Le Comité consultatif se réunit au moins une fois l’an.