:
Monsieur le Président, je suis très heureux de pouvoir prendre la parole sur cette motion présentée par l'éminent député de , qui est au service de la population depuis bon nombre d'années.
Nous sommes saisis d'une motion importante pour beaucoup d'entre nous, et peut-être plus pour les libéraux que pour certains autres députés, étant donné les traditions au sein de notre parti. Je veux faire un préambule pour mettre les choses dans leur contexte. Quand j'ai vu cette motion, cela m'a rappelé les occasions où j'ai voyagé à titre de parlementaire, ce qui est un grand privilège.
L'un des privilèges, pour un parlementaire, c'est la possibilité de voyager à l'étranger, ainsi qu'à l'intérieur du Canada. L'un des premiers voyages que j'aie faits en tant que député, je crois que c'était en 2004, était à destination de Berlin avec le ministre de la Justice de l'époque, le député de , qui est sûrement l'un des plus grands parlementaires de notre pays et l'un des plus grands spécialistes du Canada — et même du monde, à mon avis — en matière de droits de la personne.
J'ai eu la chance de l'accompagner à Berlin à l'occasion d'une rencontre traitant des droits de la personne, notamment des moyens d'équilibrer droits de la personne et sécurité. La liste des invités était vraiment impressionnante. J'étais le seul quidam. Il y avait là des juges de la Cour suprême et des ministres d'autres pays, réunis pour discuter des droits de la personne. J'ai appris énormément au cours de cette rencontre, mais pas tellement à propos des détails techniques des constitutions et des chartes et de choses du genre. Je ne suis pas avocat, mais on m'a déjà accusé d'en être un.
C'est une expérience intéressante que d'aller dans d'autres pays pour parler du Canada. Les gens expriment ce que veut dire, pour eux, être Canadien. Cette conférence a dû avoir lieu en 2005, parce que nous discutions alors du mariage civil. D'autres pays étaient absolument stupéfiés de constater à quel point le Canada est un pays progressiste, qui comprend que la majorité est plus forte quand la minorité est protégée.
C'est à peu près l'image qu'on se fait du Canada à l'étranger. Cette image s'est peut-être ternie au cours des dernières années, mais le Canada a cette réputation.
Je ne voyage pas autant que je le pourrais. Comme tous les députés, je pourrais voyager beaucoup. J'ai récemment eu l'occasion de me rendre en Azerbaïdjan. Cet ancien État russe fait maintenant son possible pour devenir une démocratie. Ce sont les grands défenseurs des libertés dans ce pays qui ont fait que l'Azerbaïdjan est devenue une démocratie. Même si cette démocratie est chancelante, elle apprécie le fait de pouvoir régler ses problèmes en tenant des élections, plutôt qu'en ayant recours à la violence.
L'Azerbaïdjan a opté pour la démocratie et pour les droits de la personne, tout en s'efforçant de comprendre le contexte et les nuances liés à la protection des minorités dans sa marche vers l'avant. Nous parlons d'un pays relativement riche, qui possède du pétrole dans la mer Caspienne et qui se débrouille plutôt bien.
J'ai été invité, avec le sénateur Percy Downe, à agir comme observateur lors des élections qui ont eu lieu dans ce pays et qui étaient très bien organisées. J'ai été impressionné de voir les gens venir voter pour la première fois et se faire tamponner le pouce comme s'il s'agissait d'un insigne d'honneur. Dans bien des cas, ces personnes n'avaient jamais voté auparavant. Elles ne comprennent pas tout le processus, mais elles savent qu'il est important.
Lorsque nous avons rencontré les membres de la commission électorale, nous avons constaté que le Canada est l'un des modèles dont ce pays s'inspire. C'est l'un des pays qui impressionnent les gens, parce que même si nos débats peuvent parfois être houleux, comme cela a été le cas il y a à peine 45 minutes, c'est ici que les décisions sont prises et c'est bien qu'il en soit ainsi.
Si ce système donne de bons résultats, c'est en partie en raison de l'existence de la Charte canadienne des droits et libertés. Nous avons un document de référence qui assure une certaine protection aux Canadiens.
C'est pour cette raison que je suis particulièrement heureux de prendre la parole aujourd'hui. La motion, qui a été lue plus tôt par le député de , dit:
Que la Chambre reconnaisse le rôle crucial que joue la Charte des droits et libertés dans la protection de la justice, de la liberté, de l’égalité et de l’équité pour tous les Canadiens et qu’elle exhorte le gouvernement de rejeter les opinions exprimées par plusieurs membres du Parti conservateur du Canada qui minimisent et critiquent l’influence de la Charte sur la société canadienne.
Il y en a qui ont une telle attitude. Il y a aussi, je pense, un grand nombre de conservateurs qui appuient pleinement la Charte canadienne des droits et libertés. Je songe à des progressistes-conservateurs comme Brian Mulroney et Joe Clark. Je suis certain qu'il y a des députés ici aujourd'hui qui partagent ce point de vue.
L’histoire de la Charte canadienne des droits et libertés est importante. Nous avons eu la Déclaration des droits, qui a été l’une des grandes réalisations de M. Diefenbaker. M. Diefenbaker croyait beaucoup dans les droits de la personne. En tant qu’avocat dans les Prairies, il a défendu bien des gens, dont un grand nombre avaient été accusés injustement, ce qui l’a amené à croire que nous avions besoin d’une Déclaration des droits.
J’avais beaucoup d’admiration pour M. Diefenbaker. Il s’opposait énergiquement à des choses comme la peine de mort, ce qui allait à l’encontre de l’opinion de beaucoup de gens à l’époque. Il croyait qu’une certaine protection était nécessaire.
La Charte dont nous parlons aujourd’hui a été précédée par la Déclaration canadienne des droits, en 1960. Toutefois, la Déclaration des droits n’était qu’une loi fédérale et non pas un document constitutionnel. C’était un document important, une mesure importante pour les Canadiens, mais il est devenu évident que ce n’était pas suffisant. Comme c’était une loi fédérale, sa portée était limitée, elle pouvait être modifiée facilement et il était difficile de l’appliquer aux lois provinciales. D’autre part, la Cour suprême du Canada a interprété de façon étroite la Déclaration des droits. Elle a hésité à déclarer des lois inapplicables. C’était un bon document, mais il nous fallait plus.
Notre grand premier ministre, Pierre Trudeau, est un homme que j’admirais quand j’étais jeune. Il a su comprendre cette nécessité. Il a compris que ce serait difficile. Il n’est jamais facile d’apporter des changements importants au Canada. Il n’est jamais facile de faire adopter quelque chose par le Parlement et c’est normal. Ce n’est pas un endroit où l’on doit adopter des mesures automatiquement. Ce n’est pas un endroit où les choses doivent pouvoir bouger facilement. Un des critères qui témoignent de l’importance d’une mesure est le travail qu’il faut déployer pour qu’elle se concrétise.
Les libertés fondamentales reconnues par la Charte canadienne des droits et libertés comprennent « la liberté de conscience et de religion; la liberté de pensée, de croyance, d’opinion et d’expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication; la liberté de réunion pacifique; et la liberté d’association ».
La Charte parle des droits démocratiques des citoyens. Elle mentionne même le mandat maximal des assemblées législatives. Elle parle du droit à la liberté de circulation: « Tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d’y entrer ou d’en sortir ». Elle parle du droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne, du droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives et de toutes sortes d’autres questions. C’est une réalisation très importante pour le Canada.
Nous avons tous des repères qui marquent des tournants dans l’histoire de notre pays. Pour certaines personnes, il s’agit peut-être de certaines des grandes batailles qui ont eu lieu pendant la Première Guerre mondiale quand le Canada est devenu, comme le disent certains, un leader des nations. Pour d’autres, c’est peut-être la Seconde Guerre mondiale. Pour d’autres encore, ce sera l’obtention de notre propre drapeau, dans les années 1960, ou encore la Commission sur le bilinguisme et le biculturalisme. Les droits des femmes marquent également une étape importante.
Aux yeux de nombreux Canadiens, 1982 est une année charnière, le moment où nous avons dit que nous allions changer les choses grâce à la Charte des droits et libertés.
La Charte parlait des langues officielles. L’anglais et le français sont les langues officielles du Canada. Les deux langues ont un statut et des droits et privilèges égaux.
Les droits qui symbolisent le Canada, à mes yeux, sont les droits à l’éducation dans la langue de la minorité, les droits des Autochtones et les libertés qui ne sont pas touchées par la Charte, ainsi qu’une foule d’autres choses qui ont été abordées au cours du débat national. L’avènement de la Charte des droits et libertés, en 1982, marque un tournant décisif pour le Canada.
J'aimerais parler de mon expérience personnelle, de mon arrivée au Parlement en juin 2004. À l'époque, le mariage civil était l'une des questions d'actualité. Ce dossier avait d'ailleurs provoqué une vive controverse au Canada. Je me rappelle avoir suivi les délibérations de la Cour d'appel de l'Ontario concernant la constitutionnalité du mariage entre personnes de même sexe. Dans sa décision, rendue en 2003, la Cour se référait à l'article 15 de la Charte, portant sur les droits à l'égalité. Permettez-moi de citer la décision:
La plupart des Canadiens prennent pour acquis qu'ils peuvent se marier et, de ce fait, participer à cette institution sociétale fondamentale. Ce n'est pas le cas des couples de même sexe, car on leur refuse l'accès à cette institution simplement en raison de leur orientation sexuelle.
L'orientation sexuelle est un motif analogue à ceux énumérés au paragraphe 15(1) de la Charte.
De plus, la majorité des juges reconnaissent expressément que les gais et les lesbiennes, « à titre individuel ou comme couples, forment une minorité identifiable, victime encore aujourd'hui de désavantages sociaux, politiques et économiques graves ».
La Chambre des communes a débattu de cette question. J'étais très content lorsque l'ancien premier ministre Paul Martin a lancé le débat, même si ce n'était pas une décision facile à prendre. Je me rappelle des discussions que nous avons eues avec lui. Il est l'un des Canadiens que je respecte le plus. Il disait à tout le monde qu'il avait longuement pesé le pour et le contre, parce que pour les gens de sa génération ce n'était pas un sujet facile à aborder. Je connais beaucoup de personnes qui étaient mal à l'aise avec cette question. Je crois que la Charte des droits et libertés est devenue la pierre de touche dans la bataille pour les droits civils et le mariage civil.
Je sais que ce n'était pas facile. J'ai parlé à bon nombre d'électeurs de ma circonscription qui n'étaient pas du tout d'accord avec moi. Ce sont des gens avec qui j'ai grandi, qui fréquentent la même église que moi, des gens bien qui croient à l'égalité, qui croient que toutes les personnes sont égales et qui croient vraiment que les gais, les lesbiennes ou les transgenres sont aussi bien qu'eux, mais le mariage civil leur posait problème. Je comprenais leur point de vue.
Je me rappelle avoir rencontré un prédicateur baptiste de ma circonscription. Il est venu me voir pendant la période de Noël, en 2004. Il voulait prier avec moi à ce sujet. J'ai été ravi de le faire. Je n'ai jamais eu l'impression que je renonçais à ma religion pour appuyer le mariage civil. Je croyais que je pratiquais ma religion, que je faisais ce que dieu me demandait de faire, mais je savais que d'autres personnes voyaient les choses autrement.
Dans cette discussion la Charte des droits et libertés est devenue très importante pour les Canadiens qui avaient des points de vue différents. On a souvent dit à la Chambre qu'il est possible que deux positions fondées sur des principes soient opposées. Une personne qui défend vigoureusement un principe n'a pas nécessairement raison. Un tiers doit intervenir, un tiers objectif, afin de clarifier les choses.
D'aucuns m'ont dit qu'ils avaient de la difficulté à accepter cela, qu'ils ne savaient pas trop quoi faire, mais qu'ils ont accepté la mesure en raison de la Charte. D'autres pensaient autrement. Jusqu'à maintenant, nous avons discuté et je respecte leurs points de vue. Dans mon cas, cela a éclairci bien des choses.
Je vois ici quelques députés qui ont été élus en même temps que moi en 2004. Le député de et d'autres députés se souviendront de ces débats. Mon chef m'avait demandé de siéger au comité législatif spécial chargé d'étudier cette question. Ce n'était pas vraiment facile. Nous avons entendu beaucoup d'opinions différentes. Nous avons dû faire comparaître très rapidement un grand nombre de témoins afin de pouvoir respecter certains délais. C'était une période très spéciale.
Quand les gens me demandent les moments dont je suis le plus fier, je parle entre autres du moment où j'ai voté en faveur du mariage civil et de celui où il a été légalisé au Canada. Je crois que les Canadiens sont fiers de cela. Ce geste n'a pas entraîné de changements radicaux au Canada. Quand je visite d'autres pays, les gens me disent que le Canada a eu raison de prendre les devants dans ce dossier. C'était une époque fascinante. La situation était tendue. Les gens avaient de la difficulté à s'entendre sur cette question. Cependant, nous pouvons penser à cette période et être fiers que, après avoir eu un débat ouvert et libre sur la question où tant de points de vue ont été présentés et après avoir entendu plusieurs centaines de témoins, nous ayons adopté le projet de loi, et le Canada soit devenu le quatrième pays au monde à autoriser les mariages civils pour les gais et lesbiennes. C'était fascinant. C'était une période importante, et la Charte des droits et libertés a joué un rôle crucial dans cette décision.
L'autre question que je veux aborder est le Programme de contestation judiciaire. Je suis certainement déçu que ce programme ait été annulé. Mis en place à la fin des années 1970, il visait à fournir du soutien aux organisations des minorités, souvent des minorités linguistiques, qui ne pensaient pas qu'elles pourraient atteindre la pleine égalité au Canada, mais qui n'avaient pas l'argent nécessaire pour mener par elles-mêmes de grandes batailles juridiques. Le Programme de contestation judiciaire était utile à cet égard. Il a été présenté en 1978. Le premier ministre Mulroney l'a élargi, mais le programme a ensuite été abandonné. Le premier ministre Chrétien l'a rétabli en 1994 mais, en 2006, le programme a perdu son financement.
Le Programme de contestation judiciaire a aidé beaucoup de groupes. Quand nous pensons à certains de ces organismes ou de ces groupes, nous devrions nous demander si nous croyons qu'ils devraient être fiers du dialogue national et s'ils devraient avoir des droits dans ce pays.
Le programme a été utile à bien des égards. Pensons seulement à certains groupes de personnes handicapées, à la modification des prestations d'assurance-emploi qui constituent une discrimination à l'endroit des parents d'enfants handicapés, à l'élargissement, dans la common law, de la définition du mot « mariage » pour englober le mariage entre personnes de même sexe, à la contestation de dispositions de droit pénal, à la lutte contre la discrimination systémique dont sont victimes les Afro-Canadiens dans le système de justice pénale, à la lutte contre l'incidence discriminatoire des certificats de sécurité en matière d'immigration sur les communautés raciales, à l'appui accordé au statut des Premières nations et au droit de vote des détenus.
Carmela Hutchison, qui a été présidente du Réseau d'action des femmes handicapées du Canada, a déclaré ce qui suit:
Plusieurs organismes et individus qui ont invoqué le droit à l'égalité garanti par la Charte n'auraient pas pu prendre ces démarches autrement. Sans le financement offert par le Programme, les Canadiens et les Canadiennes qui ont le plus besoin de la Charte n'ont plus accès à la protection qu'elle offre.
Victor Wong, du Conseil national des Canadiens chinois, a déclaré ce qui suit:
Nous espérons que les efforts de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada porteront leurs fruits. Nous encourageons tous les Canadiens et les Canadiennes à communiquer avec leurs députés fédéraux et à leur parler de l'importance du programme [...]
C'est ce qui a été dit au sujet du Programme de contestation judiciaire. Il allait de pair avec la Charte canadienne des droits et libertés.
La Charte canadienne des droits et libertés est en vigueur depuis 1982. Nous avons franchi une étape marquante en 2007, au cours de la deuxième année au pouvoir de l'actuel gouvernement du Canada. À l'époque, je me souviens que l'ancien premier ministre Jean Chrétien avait dit à quel point il était choqué d'apprendre que le gouvernement conservateur n'avait rien prévu pour célébrer le 25e anniversaire de la Charte canadienne des droits et libertés. Cela m'avait aussi choqué. J'ai trouvé malheureux qu'on ne fasse rien pour souligner ce 25e anniversaire, pour dire à quel point la Charte était importante pour nous et qu'il fallait la célébrer et faire ressortir les réalisations que nous avions obtenues.
Au lieu de cela, on a tenu une conférence de presse le 17 avril 2007. Un des organisateurs a déclaré à Canwest News que le , le ministre de la Justice de l'époque, le ministre du Patrimoine canadien de l'époque et l'ancien ministre de la Justice avaient tous décliné l'invitation d'assister à l'événement.
L'ancien premier ministre conservateur John Diefenbaker était grandement favorable à l'adoption d'une charte des droits. Quant à M. Chrétien, voici ce qu'il a déclaré: « J'espère qu'ils ne mettront pas le drapeau en berne mardi parce que c'est l'anniversaire de l'adoption de la Charte. »
À l'époque, j'ai été choqué de voir qu'on n'avait pas fait davantage pour souligner ce qui, à mon avis, a été un important jalon de l'histoire du Canada. Quand, il n'y a pas si longtemps, le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration a publié le nouveau guide sur la citoyenneté, à l'instar d'autres députés, j'ai été déçu de voir qu'on n'y fait aucune mention de l'important pas que le Canada a fait pour devenir une société vraiment égalitaire en accordant aux gais et aux lesbiennes le droit de se marier.
Je ne vais pas toutes sortes de citations. Je suis certain qu'on l'a déjà fait abondamment aujourd'hui.
De nombreux députés ont déclaré qu'ils vont appuyer cette motion. J'espère que le gouvernement le fera également.
L'ancien chef de police et nouveau député de Vaughan, M. Fantino, a indiqué que la Charte canadienne des droits et libertés lui pose certains problèmes.
Si nous demandions aux Canadiens s'ils pensent que la Charte canadienne des droits et libertés est importante, à mon avis, même les Canadiens qui ne détiennent pas une foule de renseignements sur la question, répondraient par l'affirmative. On pourrait presque comparer la Charte à une assurance d'égalité pour le pays. Elle constitue une importante partie de notre tissu social et nous devrions en être fiers; d'ailleurs, beaucoup de Canadiens le sont. La Charte joue un rôle important. Elle nous rend meilleurs. Elle nous permet de nous démarquer. De jeunes pays qui font de leur mieux pour respecter les principes démocratiques, comme l'Azerbaïdjan, peuvent se tourner vers le Canada et dire « Voilà ce que nous voulons devenir, un pays qui sait qu'il est plus fort quand il protège les faibles, quand il les aide à se protéger ».
Voilà ce que la Charte nous a donné. Voilà ce que nous devrions reconnaître en tout temps. C'est certainement ce que nous faisons aujourd'hui en proposant la motion du député de , que je suis fier d'appuyer.
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Monsieur le Président, je suis ravi de pouvoir prendre la parole cet après-midi au sujet de cette importante question.
Le député de a demandé à la Chambre de reconnaître le rôle primordial que joue la Charte des droits et libertés pour que les Canadiens soient traités avec justice et équité et qu'ils soient libres et égaux.
La Charte a eu des effets indéniables sur la société canadienne, mais les valeurs auxquelles le député fait allusion précèdent la Charte et font partie intégrante de ce que nous sommes, au moins, depuis la Confédération,
Comme on le sait, la Charte des droits et libertés est entrée en vigueur le 17 avril 1982, soit 115 ans après la création du Canada.
J'ai étudié à l'Université Carleton et, ce matin-là, j'étais ici, à Ottawa. J'étais sur la pelouse devant le Parlement. Je me rappelle que la reine était présente lors de la signature de la Charte des droits et libertés, de même que le premier ministre Trudeau et le ministre de la Justice de l'époque, M. Chrétien. La Charte a été signée en grande pompe.
Comme je l'ai dit, beaucoup de choses qui avaient été élaborées précédemment ont été intégrées à la Charte des droits et libertés. La Déclaration canadienne des droits a bien sûr été adoptée en 1960 par un gouvernement conservateur, le gouvernement de John G. Diefenbaker. Ce dernier a souvent dit que c'était l'une de ses réalisations dont il était le plus fier.
Nous savons tous que, selon la Déclaration canadienne des droits, la paix, l’ordre et le bon gouvernement sont les principes fondateurs de notre pays. C'est cela, de même que la Loi constitutionnelle de 1867, qui ont défini les principes en vertu desquels le Parlement canadien pourrait légiférer. Ces principes régissent encore notre façon de travailler de nos jours.
Le Canada a également joué le rôle de champion des droits de la personne. En effet, c’est un Canadien, John Peters Humphrey, qui était responsable de la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies qui a été ratifiée en 1948. C’est de ce texte que s’est notamment inspiré le premier ministre Diefenbaker pour l’élaboration de la Déclaration canadienne des droits qui, comme je l’ai déjà dit, a été promulguée en 1960.
La Déclaration canadienne des droits reconnaît le droit de l'individu à la liberté, à la sécurité de la personne et à la jouissance de ses biens. Elle protégeait le droit à l’égalité devant la loi, assurait la protection de la loi et protégeait la liberté de religion, de parole, de réunion, d’association et de la presse, autant de libertés importantes pour les Canadiens. Elles étaient importantes à l'époque et elles le sont encore aujourd'hui.
La Déclaration canadienne des droits est encore en vigueur aujourd’hui, mais, pour l’essentiel, nos tribunaux se réfèrent à la Charte canadienne des droits et libertés. Ces deux instruments ont été une contribution positive pour le Canada et les Canadiens.
Ils ont également eu des répercussions importantes sur la promotion et la protection des droits de la personne au Canada. La Charte se fonde sur la règle du droit et incorpore dans la Constitution du Canada les droits et les libertés que les Canadiens estiment nécessaires dans une société libre et démocratique. Elle reconnaît des libertés primaires fondamentales comme la liberté d’expression et, comme je l’ai dit, la liberté d'association, de même que des droits démocratiques comme le droit de vote, la liberté de circulation, qui garantit le droit de vivre n’importe où au Canada, des garanties juridiques comme le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne, de même que les droits à l’égalité.
Elle reconnaît également l’héritage multiculturel des Canadiens et protège le droit à l’instruction dans les langues officielles et la langue de la minorité, de même que les droits des Autochtones au Canada.
Les valeurs et les principes qui sont inscrits dans la Charte sont essentiels à la promotion d’une société libre et démocratique. Ces valeurs incluent le respect de la dignité inhérente de l'être humain, la promotion de la justice et de l’égalité sociales, l’acceptation d’une grande diversité de croyances, le respect de chaque culture et de chaque groupe et la foi dans les institutions sociales et politiques qui favorisent la participation des particuliers et des groupes dans la société.
Je crois fermement que ces valeurs sont encore très chères aux Canadiens.
Parlant de la protection des droits constitutionnels au Canada, la juge en chef de la Cour suprême, Beverley McLachlin, faisait remarquer ceci:
On peut affirmer que le droit d’un pays -- en particulier dans le domaine des droits et libertés -- exprime et reflète les postulats sociaux et moraux fondamentaux sur lesquels la nation est fondée, son caractère national. Ce caractère national n’est pas fixe, il est sujet à une constante redéfinition dans le discours public. Mais les frontières de ce discours sont largement tracées par l’histoire nationale de chaque pays.
Cette histoire nationale trouve son expression dans la Charte et il est important de ne pas oublier que les auteurs de la Charte ont déclaré très clairement au moment de sa promulgation qu'elle ne visait pas à créer de nouveaux droits, mais simplement à codifier les droits et les concepts fondamentaux qui existent en droit canadien depuis 1867 et, avant cela, dans la tradition britannique de la common law.
Cela inclut des concepts comme la présomption d'innocence, le critère de la preuve hors de tout doute raisonnable et l'indépendance du pouvoir judiciaire. Ces concepts ont des équivalents dans les systèmes juridiques d'autres sociétés libres et démocratiques, par exemple, la déclaration des droits, ou Bill of Rights, aux États-Unis.
La Charte a fait du système canadien, qui reposait sur la suprématie du Parlement, une démocratie constitutionnelle où l'action du gouvernement est encadrée par une déclaration de droits constitutionnalisée et où les tribunaux ont le pouvoir de désavouer des lois. Cependant, même si les tribunaux exercent une grande influence sur les lois canadiennes, ils doivent néanmoins respecter des règles bien établies d'interprétation de la Constitution et des lois. En outre, les assemblées élues demeurent libres de modifier les lois et d'en adopter de nouvelles dans l'intérêt public, tant qu'elles respectent la Constitution.
D'autres députés ont pris la parole ici aujourd'hui. J'ai écouté très attentivement le député de parler d'autres pays et des répercussions que la Charte avait eue sur certains d'entre eux, qui voient le Canada comme un modèle. D'autres pays s'inspirent de la Charte canadienne au moment de rédiger leur propre déclaration des droits. Par exemple, le texte et la structure de la déclaration des droits de 1990 en Nouvelle-Zélande ont été fortement influencés par notre Charte.
Les tribunaux d'autres pays citent fréquemment la jurisprudence émanant de la Charte lorsqu'ils interprètent les droits de la personne garantis par leurs propres déclarations des droits. Par exemple, l'accord constitutionnel d'Afrique du Sud s'est inspiré du droit jurisprudentiel lié à la Charte canadienne pour interpréter le droit constitutionnel à l'égalité prévu dans la Constitution d'Afrique du Sud: le droit à la vie, le droit à un procès à l'intérieur d'un délai raisonnable, la liberté de religion et la liberté d'expression.
De même, en Nouvelle-Zélande, les tribunaux se sont inspirés de la jurisprudence de la Charte pour interpréter l’application de la Déclaration néo-zélandaise des droits de 1990, ses garanties relatives aux droits de la personne et les limites de ces droits. En fait, les tribunaux de nombreux pays se sont appuyés sur la jurisprudence de la Charte, y compris l’Irlande, le Sri Lanka, l’Ouganda, le Royaume-Uni et le Zimbabwe.
Même si les répercussions de la Charte sont indéniables, le cadre canadien des droits de la personne comprend beaucoup d’autres lois. J’ai déjà parlé de la Déclaration canadienne des droits promulguée en 1960, qui s’applique aux lois et aux politiques du gouvernement fédéral et qui garantit des droits et des libertés semblables à celles qu’on trouve dans la Charte.
Le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux ont également adopté des mesures législatives ainsi que des lois ou des codes sur les droits de la personne qui interdisent la discrimination fondée sur un certain nombre de motifs relativement à l’emploi, à la fourniture de biens, d’installations et de services généralement mis à la disposition du public, et qui prévoient des accommodements. Par exemple, la Loi canadienne sur les droits de la personne contient une obligation d’accommodement raisonnable en cas de différences personnelles, y compris les différences physiques, religieuses et ethnoculturelles, au travail et dans la prestation de services.
La Loi sur les langues officielles est également digne de mention lorsqu’on parle du cadre canadien des droits de la personne. Elle constitue la pierre angulaire du régime législatif et réglementaire de protection des droits linguistiques. Cette loi définit les engagements du gouvernement quant à la pleine participation des Canadiens anglophones et francophones aux institutions fédérales et à la promotion de la dualité linguistique au sein de la société canadienne.
La Cour suprême a décrété que les lois fédérales, provinciales et territoriales sur les droits de la personne ainsi que la Loi sur les langues officielles sont de nature quasi constitutionnelle, ce qui signifie qu’elles prennent le pas sur les mesures législatives contenant des dispositions contraires.
Au chapitre de la protection des droits de la personne, pour que le respect de ces droits continue à faire partie intégrante de la culture canadienne, il est important que le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et territoriaux et la société civile collaborent étroitement pour veiller à ce que chaque citoyen soit traité d’une manière égale et avec dignité, indépendamment de son âge, de ses capacités, de sa race, de ses origines ou de ses croyances.
Je voudrais dire un mot au sujet de demain, le vendredi 10 décembre, Journée des droits de l’homme. Cette journée marque l’anniversaire de l’adoption unanime de la Déclaration universelle des droits de l’homme par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1948. La Journée des droits de l’homme est l’occasion de commémorer les sacrifices consentis par beaucoup de personnes, partout dans le monde, qui ont risqué leur vie et leur liberté pour défendre les droits des autres.
J’espère que nous n’oublierons pas les Canadiens qui ont payé le prix fort pour appuyer le gouvernement de l’Afghanistan et les organisations afghanes et les aider à créer des capacités en vue d’assurer le respect des droits de la personne.
Les Canadiens ont combattu dans de nombreuses guerres pour protéger leurs droits et ceux d’autres peuples.
Je suis heureux d’avoir eu l’occasion de participer aujourd’hui à ce débat. Il y a une chose qui ne figure pas dans la Charte et qui est importante pour beaucoup de mes électeurs. Curieusement, elle a été omise dans la Charte canadienne des droits et libertés. Il s’agit du droit à la propriété privée. Beaucoup de mes électeurs de la circonscription de Leeds—Grenville considèrent que c’est une omission. Ils croient que le Parlement et le pays devraient y remédier.
L’Ontario Landowners Association a proposé une position au sujet du droit à la propriété privée. Permettez-moi de citer un extrait de ce qu’a dit l’association à cet égard:
La seule personne qui ait droit à une propriété privée est le propriétaire. Le propriétaire a le droit de vendre sa propriété à un acheteur consentant à un prix convenu. Si le gouvernement veut acquérir un droit sur cette propriété parce qu'il considère qu'il en va de l'intérêt public, il doit verser au propriétaire, en temps opportun, une indemnisation complète et juste pour la perte de l'usage, de la jouissance et de la valeur de la propriété. La Loi sur l’expropriation établit que le gouvernement peut exproprier une propriété privée si c'est pour le bien public, et qu'il doit pour ce faire verser au propriétaire privé la valeur marchande de cette propriété d'après l'usage le plus rémunérateur — autrement dit, comme si l’usage qui en était fait avait la plus grande valeur.
Quand le gouvernement décide de passer outre aux droits du propriétaire, il décide que la propriété est plus importante que les gens. Le gouvernement a donc oublié son mandat de servir la population et d'assurer sa sécurité. L'assurance du droit à la propriété privée est aussi un facteur de sécurité. L'histoire a clairement démontré que, quand un État abolit le droit à la propriété privée, cette civilisation commence à décliner.
C'est très important pour bien des gens de ma circonscription, qui n'acceptent pas que le gouvernement leur enlève leur propriété privée sans leur donner d'indemnisation. Ils croient que le gouvernement a tort d'agir ainsi. C'est l'une des causes importantes de mes électeurs, dans Leeds—Grenville. Beaucoup d'entre eux m'en ont parlé depuis que je suis député. D'autres députés qui ont été élus en 2004 ont pris la parole. Je suis sûr que leurs électeurs leur en ont parlé également.
Le Canada continuera à traiter de la question des libertés et des droits de la personne dans le monde entier, et nous devons le faire aussi au Canada. Nous devons défendre haut et fort une réforme des droits de la personne et travailler efficacement en partenariat en ce sens, ici et ailleurs dans le monde.
J'apprécie d'avoir eu la possibilité de parler aujourd'hui de cette question importante. Je répondrai avec joie aux questions de mes collègues.
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Monsieur le Président, je veux d'abord vous signaler que je vais partager mon temps de parole avec la députée de .
Je remercie les députés qui ont participé au débat jusqu'à maintenant. C'est un bon débat fort utile. J'ai écouté attentivement certaines préoccupations qui ont été exprimées. Par moments, nous sommes retombés dans les discours politiques, mais à d'autres moments nous en avons beaucoup appris sur ce que cela signifie de vivre, depuis 1982, à l'ère de la Charte canadienne des droits et libertés.
Si nous reculons dans le temps et que nous jetons un coup d'oeil à certains articles, nous constatons que, dans les années 1970, certaines personnes étaient très préoccupées par l'idée d'adopter une telle charte pour la société. Beaucoup se demandaient si ce document serait un outil efficace pour les gens en situation minoritaire, que ce soit en raison de leur race, de leurs croyances, de leur couleur, de leur religion ou de leur sexe. Ces personnes se demandaient si la Charte permettrait à ces gens de sentir, dans notre pays, qu'ils étaient libres d'être des citoyens canadiens et de faire ce qu'ils souhaitaient tout au long de leur vie, évidemment en respectant la loi.
Je veux faire un bref historique de la Charte canadienne des droits et libertés. Celle-ci est entrée en vigueur le 17 avril 1982. L'article 15, qui porte sur les droits à l'égalité, est entré en vigueur trois ans plus tard, soit le 17 avril 1985. Ce délai a permis aux gouvernements provinciaux d'aligner leurs lois sur l'article 15.
La Charte se fonde sur la primauté du droit et elle inscrit dans la Constitution les droits et libertés que les Canadiens jugent nécessaires dans une société libre et démocratique. Elle reconnaît des libertés fondamentales, à savoir la liberté d'expression et d'association et des droits démocratiques, notamment le droit de vote.
La Charte inclut aussi la liberté de circulation et le droit de s'établir n'importe où au Canada. À Terre-Neuve-et-Labrador, du moins dans ma circonscription, ce droit est très important. En effet, un grand nombre de résidants de ma circonscription possèdent de grandes compétences, particulièrement dans le secteur du pétrole et du gaz, et ils peuvent se déplacer partout au pays et dans le monde pour mettre ces compétences à profit. Ainsi, les gens de Terre-Neuve-et-Labrador illustrent bien l'importance de cette liberté fondamentale qu'est la liberté de circulation.
La Charte protège également les langues officielles et le droit à l'instruction dans la langue de la minorité. Par ailleurs, les dispositions de l'article 25 garantissent le respect des droits des peuples autochtones du Canada. Elle traite des interactions au sein de la société, entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et les individus. À certains égards, il s'agit de la loi la plus importante au Canada car elle rend nulle ou inopérante toute loi qui n'est pas conforme à ses dispositions.
Nous avons débattu de cette question pendant toute la journée. Selon certaines personnes, il y a des articles de la Charte qui vont trop loin à l'égard de la manifestation de la liberté et il faut aussi faire preuve de sens des responsabilités.
L'article 1 traite de cette question de façon adéquate. C'est pour cela que la Charte est une mesure législative remarquable et une composante exceptionnelle de la Constitution, parce qu'elle permet de faire preuve de sens des responsabilités. Les responsabilités et les droits d'un individu vont jusqu'à la protection de l'intérêt public.
La Charte a eu une incidence considérable sur la promotion et la protection des droits de la personne au Canada. En ce qui a trait aux droits linguistiques, elle a renforcé les droits des minorités de langue officielle. En ce qui concerne les droits à l'égalité, elle a permis de reconnaître et de faire respecter les droits de plusieurs minorités et de groupes défavorisés. Quant aux questions d'ordre pénal, la Charte a précisé aussi dans une large mesure les pouvoirs de l'État à l'égard des droits des délinquants.
Quant aux lois visant les autres droits de la personne, il existe de nombreuses autres lois qui protègent ces droits dans notre beau pays.
La Déclaration canadienne des droits a été promulguée en 1960 et il en est souvent question ici. Elle s'applique aux lois et aux politiques du gouvernement fédéral et garantit le respect de droits et de libertés semblables à ceux qui figurent dans la Charte, dont j'ai parlé plus tôt. Il s'agit notamment du droit à l'égalité, du droit à la protection de la loi, de la liberté de religion, de la liberté de parole et de la liberté d'association. Cette déclaration ne fait toutefois pas partie de la Constitution du Canada. C'est le 17 avril 1982 que nous sommes passés à une nouvelle étape et que la Charte nous est devenue indispensable.
Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont adopté des lois sur les droits de la personne. Ils ont codifié les droits de la personne. Ils ont interdit la discrimination dans l'emploi pour divers motifs, ce qui est certainement important pour Terre-Neuve-et-Labrador, comme je l'ai indiqué tout à l'heure. La discrimination est interdite aussi dans la vente des produits et des services, dans les installations normalement accessibles au public et dans le logement ou l'hébergement. Cette législation diffère de l'article 15 de la Charte, sur les droits à l'égalité, puisqu'elle protège les gens contre la discrimination dans le secteur privé ainsi que dans le secteur public, y compris dans les autres administrations publiques.
Permettez-moi de dépasser un peu, dans mon propos, notre cadre juridique à nous. Je me permets de vous citer une personne dont les propos ont été rapportés dans une publication il y a un certain temps. Il s'agit de Bruce Porter, du Centre pour la défense de droits sociaux, qui disait ceci à la fin des années 1990:
La Cour suprême a également souligné que les droits définis de manière générale dans la Charte doivent être interprétés en conformité avec les engagements pris par le Canada sur la scène internationale relativement aux droits sociaux et économiques. Bien que les déclarations internationales relatives aux droits de la personne n'aient pas force de loi, la Cour a souligné que les valeurs issues de ces déclarations sous-tendaient la Charte elle-même et que, dans l'exercice raisonnable de leur pouvoir, les autorités chargées de l'appliquer devaient se conformer à ces valeurs.
Voilà qui est clair. Les valeurs considérées dans le monde comme des droits fondamentaux de la personne y sont aujourd'hui appliquées comme telles. Elles sont réunies par un fil conducteur. J'ai pu le constater en personne lorsque je me suis rendu à Strasbourg voir le Conseil de l'Europe, que mon collègue doit connaître assez bien. Les membres du Conseil de l'Europe ont adopté la fantastique Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à laquelle adhèrent plus de 100 États. Ce texte a entraîné, avant tout, l'établissement de la Cour européenne des droits de l'homme, à Strasbourg, mais il définit un certain nombre de droits de la personne et de libertés fondamentales: droit à la vie, interdiction de la torture, interdiction de l'esclavage et du travail forcé, droit à la liberté et à la sûreté, droit à un procès équitable, pas de peine sans loi, droit au respect de la vie privée et familiale, liberté de pensée, de conscience et de religion, liberté d'expression. On voit dans cette convention des points communs avec notre charte, mais en même temps, elle traite d'autres questions, qui concernent des États instables, où les gens sont privés de certains droits fondamentaux: le droit à la mobilité, le droit fondamental qu'a toute personne de se défendre et aussi, bien entendu, la protection des personnes qui sont forcées de vivre dans l'esclavage.
L'Union européenne considère que les droits de la personne sont universels et indivisibles. C'est pourquoi elle en fait la promotion et les défend activement à l'intérieur de ses frontières, elle qui regroupe 27 États membres, et dans le cadre de ses relations avec des pays hors de ses frontières, dont le Canada. Bien que l'Union européenne ait, dans l'ensemble, une bonne réputation au chapitre des droits de la personne, elle ne fait pas preuve de complaisance. Elle lutte contre le racisme, la xénophobie et autres formes de discrimination fondée sur la religion, le sexe, l'âge, les handicaps ou l'orientation sexuelle, et elle se soucie particulièrement des droits des réfugiés et des migrants, qui sont devenus récemment un énorme enjeu puisque nous nous déplaçons de plus en plus à l'extérieur de nos frontières et que nous nous attaquons à des fléaux comme la traite des personnes, ce que certains appellent le passage de clandestins, un dossier qui me tient à coeur.
Dans un tel contexte, non seulement nous avons adopté des mesures universelles, mais, en outre, d'autres pays ont adopté des mesures prévues dans notre propre Charte. Ces pays, comme mon collègue de l'a mentionné plus tôt, comprennent la Nouvelle-Zélande, l'Afrique du Sud, le Zimbabwe et l'Irlande. Toute personne dont les droits et libertés garantis par la Charte ont été lésés par tout ordre de gouvernement peut s'adresser à un tribunal pour obtenir réparation. La personne doit établir qu'on a porté atteinte à un de ses droits ou libertés garantis par la Charte. Si ce droit ou cette liberté a été restreint par une règle de droit, le gouvernement aura l'occasion de montrer que cette limite était raisonnable en application de l'article premier de la Charte, et c'est ce dont nous parlons ici lorsqu'il est question de responsabilité.
Pour terminer, je signale que, lors de la période de questions et observations, j'ai parlé du Programme de contestation judiciaire. Je crois sincèrement que nous avons raté une occasion en or. Depuis le milieu des années 1970, nous avions, dans notre propre pays et au sein de notre propre gouvernement, un programme destiné à aider les gens qui avaient désespérément besoin d'exercer leurs droits parce que, pour une raison ou une autre, ils étaient parmi les plus vulnérables. Ils n'avaient pas les moyens, que ce soit par l'entremise de l'aide juridique ou d'autres programmes, d'exercer leurs droits fondamentaux. Malheureusement, nous avons aboli un programme qui leur était d'une grande aide.
:
Monsieur le Président, je remercie mon collègue de de me précéder dans ce débat, mais c'est avec une certaine tristesse que je m'adresse à vous aujourd'hui sur la motion présentée par mon collègue de .
Presque 30 ans après l'enchâssement de la Charte canadienne des droits et libertés dans notre Constitution, nous voilà encore obligés d'élever nos voix en sa défense. Il m'apparaît fort regrettable que le Canada, un pays jadis reconnu comme un exemple lumineux de la défense et de l'exercice des droits de la personne, soit en train de subir, sous le joug de ce gouvernement outrageusement antidémocratique, les affres de la censure. Je m'insurge très particulièrement contre ce régime de peur et de chantage qui oblige les forces vives de notre société à choisir entre le silence et la survie.
Le Canada auquel j'ai juré ma loyauté et mon allégeance les plus sincères le 17 avril 1982 est un Canada où la liberté d'expression, autant que le droit à la dissidence, sont des facettes inhérentes de notre vivacité démocratique. Par un pur hasard des circonstances, je suis devenue citoyenne canadienne le jour où la Constitution canadienne fut rapatriée, le jour même où la Charte canadienne des droits et libertés était aussi enchâssée dans cette Constitution si fondamentale à notre maturité démocratique.
[Traduction]
Cet heureux hasard, mon stupéfiant épanouissement civique, a déterminé et guidé mon profond dévouement à ce pays que j'appelle le mien. Malgré tout ce que j'ai pu étudier, lire et apprendre au sujet des autres démocraties, je n'en ai pas trouvé une seule qui soit à la hauteur de la norme de réussite si unique du Canada.
Il m'attriste infiniment de constater ici aujourd'hui l'érosion des acquis de notre pays orchestrée par notre qui n'a d'autre ambition que le pouvoir pour le pouvoir. On ne voit pas chez lui la moindre intention d'offrir aux Canadiens le bon gouvernement dont notre Constitution et notre Charte sont les principes directeurs.
Nous ne constatons pas le moindre signe de respect pour l'effort énorme qu'il faut pour concilier nos multiples différences tout en défendant les droits et libertés humains les plus fondamentaux. Au fond, ce qu'on voit, c'est un mépris farouche des principes d'égalité que nous avons mis si longtemps à établir.
Il m'attriste d'en être ici à défendre l'essence du Canada. Notre Charte nous distingue des autres pays. Il y a beaucoup pays démocratiques avec des parlements, des présidents ou des premiers ministres, mais ce qui nous distingue, c'est notre Charte.
L'Afghanistan est censé être une démocratie. Il vient d'avoir des élections et il a un gouvernement, mais sans une Charte pour encadrer ce gouvernement, il n'y a pas grand-chose à en attendre en matière de droits de la personne.
[Français]
Notre Charte est ce qui garantit à nos groupes minoritaires leurs droits et libertés. Le affirme que nous sommes en Afghanistan pour aider les femmes et les enfants à accéder pleinement à leurs droits fondamentaux. Cependant, chez nous au Canada, il n'a aucune difficulté à les ignorer avec insouciance. Où veut-il nous mener?
Il m'attriste profondément qu'en 2010, après tant d'années de lutte pour la reconnaissance de l'humanité qui nous rend tous semblables, nous sommes encore ici aujourd'hui en train de débattre sur le fond et les principes derrière notre Charte. Plutôt que d'aller de l'avant et d'élever la barre, ce gouvernement fait tout ce qui est en son pouvoir pour nous ramener quelques décennies en arrière.
Le peur est le nouveau principe de gouvernance, et les conservateurs savent que la Charte les empêche de concrétiser l'État forteresse qu'ils envisagent. Coupables jusqu'à preuve du contraire, c'est la façon dont le gouvernement juge maintenant les Canadiens. Nous sommes tous devenus des criminels se cachant derrière la Charte.
Il m'attriste de constater que plus de prisons et un programme tough on crime est tout ce que ce gouvernement est capable d'offrir aux Canadiens.
[Traduction]
Il m'attriste de voir qu'on en est arrivé là, que le gouvernement, le soi-disant Parti conservateur, ait entrepris de diviser notre grand pays.
[Français]
Lorsque le gouvernement dûment élu par les Canadiens est le premier coupable d'enfreindre une des libertés enchâssées dans la Charte — liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression —, il devient clair que nous vivons des moments troublants pour notre démocratie.
La Charte protège et encadre le droit de tout citoyen d'exprimer librement ses opinions. Cela comprend aussi l'opinion de tous ceux et celles qui, au nom de l'imputabilité, assurent la bonne gouvernance de nos institutions. Or, depuis janvier 2006, ce gouvernement ne cesse d'infliger des coups, les uns plus vicieux que les autres, aux instances de surveillance dont l'État canadien s'est doté au fil des années. Voici quelques exemples:
[Traduction]
Le contrat de Peter Tinsley, le président de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire de 2005 à 2009, n'a pas été renouvelé parce que:
Trop souvent, disait-il, les « magouilles » politiques et le personnel non élu ont un rôle dans le recrutement ou le renvoi des chiens de garde qui sont à la botte du gouvernement qu'ils sont censés critiquer.
En bref, M. Tinsley est devenu encombrant quand il a commencé à réclamer des documents pour pouvoir faire son travail correctement.
On a envoyé le surintendant principal Marty Cheliak, ancien directeur du Programme canadien des armes à feu, suivre un cours intensif de français, ce qui était manifestement urgent, quand son rapport sur l'efficacité du registre des armes à feu a menacé de jeter une douche froide sur le projet de loi .
Linda Keen, l'ancienne présidente de la Commission canadienne de sûreté nucléaire, a été renvoyée pour avoir pris des mesures de sécurité parce que le réacteur nucléaire de Chalk River donnait des inquiétudes.
[Français]
Paul Kennedy, ex-président de la Commission des plaintes du public contre la GRC, n'a pas vu son contrat renouvelé pour des raisons, encore aujourd'hui, fort suspectes.
Robert Marleau, ex-commissaire à l'information du Canada, a démissionné après à peine deux années et demi de service, lorsqu'il s'est rendu à l'évidence que les conservateurs rendaient son travail presque impossible.
Je pourrais continuer à énumérer plusieurs autres exemples de cette censure sans vergogne instituée par le gouvernement depuis 2006. Toutefois, je crois que l'argument est établi et démontre, sans l'ombre d'un doute, que les conservateurs méprisent de façon éhontée les principes les plus fondamentaux de la liberté d'opinion.
La motion présentée par mon parti aujourd'hui se veut un cri d'alarme lancé aux citoyennes et aux citoyens du Canada: le gouvernement de ce voit la Charte canadienne des droits et libertés comme un obstacle à son règne de division en vue de la conquête.
Il revient à chacun d'entre nous de réclamer avec insistance que le gouvernement respecte la Charte et tous les droits et libertés qui y sont enchâssés.
:
Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir l'occasion de participer à ce débat sur la motion présentée par les libéraux dans le cadre de leur journée de l'opposition.
Je partagerai mon temps de parole avec le député de .
Cette motion de l'opposition présente certes un grand intérêt et elle arrive à point. Je remercie le député de de l'avoir présentée. Ceci dit, je prendrai quelques minutes pour rappeler à mes collègues libéraux les mesures qu'ils ont prises, par le passé mais aussi ces derniers temps, en ce qui a trait à la Charte canadienne des droits et libertés.
Le présent a souvent pour effet d'adoucir le passé, mais je suis étonnée de voir avec quelle rapidité nos collègues du Parti libéral arrivent à oublier combien ils ont eux-même rabaissé la Charte des droits et libertés. Je trouve plutôt étrange qu'ils aient décidé de présenter une telle motion, compte tenu du fait qu'il a été clairement établi cette semaine que leurs homologues de la province de l'Ontario ont fait totalement fi de cette loi des plus importantes.
Le rapport de l'ombudsman de l'Ontario sur le sommet du G20 a clairement démontré qu'on s'était moqué de la Charte. L'ombudsman a affirmé que les mesures prises par le gouvernement de Dalton McGuinty étaient illégales et inconstitutionnelles. Ces mesures prises par le Parti libéral de l'Ontario sont un très bon exemple des agissements d'un gouvernement qui minimise l'importance de la Charte des droits et libertés et qui supprime les droits et les libertés des Canadiens. Pire encore, tout cela s'est fait en cachette, sans que le public ne soit informé de quoi que ce soit. Les gens qui ont manifesté pacifiquement lors du sommet du G20 et qui s'étaient informés de leurs droits fondamentaux n'avaient aucun moyen de savoir que le gouvernement de l'Ontario avait secrètement supprimé ces droits. Il est malheureusement très clair que les libéraux ont violé les droits des Canadiens à Toronto l'été dernier.
On n'a qu'à remonter environ cinq ans en arrière pour avoir un autre bel exemple du mépris du Parti libéral à l'endroit de la Charte des droits et libertés. Je parle du débat sur le projet de loi qui portait sur le mariage et les droits des couples de même sexe de contracter une telle union.
Le 21 février 2005, mon collègue de a déclaré ce qui suit à la Chambre:
À mon humble avis, le projet de loi C-38 ne devrait pas être adopté et la disposition de dérogation prévue à l'article 33 de la Charte devrait être invoquée pour donner au Parlement le temps dont il a besoin pour prendre une décision éclairée.
Cette déclaration présente deux problèmes fondamentaux. D’abord, le député et son parti ont jugé bon de songer à se prévaloir de la disposition de dérogation. Je m’oppose fermement à cette disposition. Pour être honnête, l’existence même de cette disposition m’inquiète, car elle donne à la Chambre le droit de retirer aux Canadiens leurs droits et leurs libertés fondamentales. Je trouve scandaleux que le Parti libéral ait songé à y recourir dans cette situation. Pour reprendre les propos de son ancien chef, l’ancien premier ministre Trudeau: « L'État n'a pas sa place dans les chambres à coucher de la nation. »
Puisqu’il est question de l’ancien premier ministre Trudeau, parlons donc de la création de la Charte des droits et libertés et du respect de Trudeau pour les droits des Canadiens. J’attire l’attention de la Chambre sur le fait que Trudeau a piétiné les droits fondamentaux des Canadiens, lui qui prétendait les appuyer si fermement. Je songe bien entendu à l’imposition de la Loi sur les mesures de guerre pendant la crise d’octobre 1970. Certes, par le passé, des gouvernements ont eu recours à cette loi en temps de crise, mais la plupart des analyses de son utilisation par Trudeau concluent qu’elle a été non seulement inutile, mais aussi fautive.
En octobre 1970, Trudeau a ciblé précisément les milieux séparatistes, les groupes syndicaux et les milieux gauchisants au Québec. Il les a privés de leurs droits de citoyens sans la moindre preuve qu’ils soient mêlés aux événements d’octobre 1970. Il a présumé de leur culpabilité sans aucune preuve. Il est vrai que la Charte des droits et libertés n’avait pas encore été signée, mais il reste que ce fut une atteinte totale aux droits fondamentaux des Canadiens, un manquement à l’esprit de la Charte.
De plus, en 1981, le gouvernement libéral a annulé une conférence sur l’égalité des femmes. Les femmes présentes se sont fait dire que le gouvernement s’occuperait du dossier. La réaction de ces femmes a été immédiate et fulgurante. Doris Anderson, présidente du Conseil consultatif sur la situation de la femme, a remis sa démission et une poignée de femmes influentes ont organisé leur propre conférence à Ottawa, invitant toutes leurs connaissances à y assister. Le jour de la Saint-Valentin, en 1981, plus d’un millier de femmes ont convergé vers Ottawa pour veiller à ce que les femmes soient protégées par la Charte des droits et libertés.
Grâce à une campagne sans précédent menée auprès de la base, ces femmes ont modifié fondamentalement le cours de l’histoire du Canada pour faire en sorte qu’il y ait dans la Charte des droits et libertés de la nouvelle Constitution canadienne rapatriée des dispositions plus solides pour garantir l’égalité, soit les articles 15 et 28.
Bien que je me réjouisse du fait que les articles 15 et 28 figurent dans la Charte, il a été désolant que les femmes doivent se battre si fort pour obtenir cette protection. Il semble en quelque sorte que, peut-être à cause de la décision judiciaire du 18 octobre 1929, les femmes aient eu l’idée erronée que non seulement elles étaient des personnes, mais aussi qu’elles étaient reconnues comme telles par le gouvernement.
Cela dit, je voudrais maintenant tourner mon attention vers le gouvernement conservateur et son bilan.
Le député élu de Vaughan a des antécédents très douteux en matière de respect des libertés fondamentales. Il a déclaré ouvertement qu’il s’opposait à la Charte canadienne des droits et libertés. Au cours de sa carrière dans les forces de l’ordre, il a abusé de façon flagrante de ses pouvoirs en ordonnant la mise sous écoute illégale de membres de groupes minoritaires. Comme titulaire de charge publique, il a manifesté une absence totale de transparence.
En 1992, des rapports internes de la police ont révélé que le député élu de Vaughan avait ordonné la mise sous écoute d’un membre civil de la commission de police de Toronto. Il s’agit d’une instance qui surveille le comportement de la police. Ces actes commis par le nouveau député de Vaughan sont fort contestables dans une société démocratique.
Plus tard, alors qu'il était toujours chef de la police à London, il a autorisé le tristement célèbre et catastrophique Project Guardian, qui était en substance une chasse aux sorcières anti-gais. Au départ, cette opération devait servir à coincer des pédophiles et à démanteler un réseau de pornographie juvénile, mais on n'a jamais trouvé de réseau de pornographie juvénile. Il y a eu des condamnations pour possession de drogue et prostitution, mais pas de réseau de pornographie juvénile.
Malheureusement, à l'époque où il était chef de la police à London, le nouveau député de Vaughan s'en est régulièrement pris aux communautés minoritaires. Cela a suscité une grande méfiance à l'égard des autorités chez les gens que nos services de police sont censés protéger.
De même, la revue Now a signalé que ce même députéavait exprimé son mépris pour la démocratie, quand il était chef de la police à Toronto, en essayant d'exiger que les manifestations publiques soient approuvées par la police. Divers articles d'information montrent que le député de Vaughan a empêché le public d'avoir la moindre information sur les scandales de corruption au sein de la police en agissant d'une manière scandaleusement arbitraire.
Partout où il est nommé, il sème la controverse. C'est toujours la même chose. Le mépris qu'il manifeste pour la démocratie, la transparence, la responsabilité et maintenant la Charte des droits et libertés témoigne d'un sinistre bilan.
Comme l'ont dit de nombreux intervenants aujourd'hui, la Charte canadienne des droits et libertés est essentielle car elle protège les groupes minoritaires. Le gouvernement conservateur lui-même a manifesté son mépris pour cette Charte de multiples façons, que ce soit en négligeant ses devoirs à l'égard de citoyens canadiens comme Omar Khadr ou en annulant le Programme de contestation judiciaire.
Ce programme était essentiel pour permettre aux Canadiens d'obtenir la protection de la Charte. Nous savons bien que les Canadiens des groupes minoritaires n'ont souvent pas les ressources nécessaires pour saisir la justice et ne peuvent donc pas revendiquer la protection de leurs droits en vertu de la Charte.
Le gouvernement conservateur a décidé d'annuler le Programme de contestation judiciaire pour des motifs idéologiques. L'ancien chef de Cabinet du premier ministre, Ian Brodie, a rédigé de multiples critiques sur les failles de ce programme.
En 2008, le Comité permanent de la condition féminine a rédigé un rapport sur les conséquences de l'annulation du Programme de contestation judiciaire. Il avait entendu des témoins qui lui avaient expliqué que le Programme de contestation judiciaire avait fait progresser l'égalité des femmes au Canada. Il servait à défendre les droits des femmes enceintes et à protéger les victimes de viol lors des procès. Ce programme était essentiel pour permettre aux femmes de ne pas redevenir des victimes.
En outre, pour parler des plus vulnérables de notre société, ce programme a beaucoup fait évoluer la vie des femmes autochtones. Des femmes comme Sandra Lovelace, Jeannette Corbiere Lavell et Sharon McIvor ont invoqué ce Programme de contestation judiciaire. C'est à nos risques et périls que nous le sacrifions et que nous le dévalorisons.
Les parlementaires que nous sommes doivent respecter les droits et libertés de nos concitoyens. Il arrive malheureusement qu'on oublie ou qu'on omette les droits et libertés des Canadiens marginalisés. La Charte garantit ces droits et garantit à tous les Canadiens l'égalité en vertu de la loi. C'est pour cela qu'il faut la respecter. Il faut la défendre.
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Monsieur le Président, comme nous le savons tous, le Canada est un pays d'immigrants. Je pense pouvoir dire que chaque député ici est arrivé lui-même au Canada ou est le fils, la fille, le petit-fils ou la petite-fille de quelqu'un qui y est arrivé au cours des 200 dernières années. Évidemment, il y a aussi les Premières nations qui sont là depuis beaucoup plus longtemps, mais je pense qu'on peut dire que la grande majorité des gens qui vivent dans ce pays y sont parce qu'eux-mêmes ou leurs parents ont choisi de venir vivre librement au Canada.
Rappelons pourquoi ces gens-là sont venus au Canada. Ils y sont venus pour chercher la liberté. Souvent, ils y sont venus pour fuir la persécution. Mais dans tous les cas, ils ont été attirés vers ce pays parce qu'ils y voyaient la promesse des droits de la personne, des libertés civiques et la possibilité de rechercher le bonheur dans la sécurité parce que l'État protégeait leur vie, leur propriété et leur sécurité.
Nous vivons aussi évidemment dans un pays qui est un modèle de multiculturalisme pour le monde. Nous avons réussi à créer un pays pacifique au sein duquel des gens venus des quatre coins du monde, de toute religion et de toute opinion politique, de tous horizons culturels et de toutes ethnies sont venus construire ensemble une société de tolérance où nous nous respectons mutuellement, où nous vivons, nous travaillons et nous prospérons tous ensemble.
L'une des clefs de voûte de tout ce rêve, c'est le respect fondamental des droits élémentaires de la personne. Et l'une des manifestations les plus importantes de ces droits de la personne, c'est la Charte des droits et libertés qui codifie ce rêve au Canada.
D'autres ont déjà dit que cette Charte des droits et libertés prend ses racines chez les néo-démocrates. En 1947, un an avant l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme par l'Assemblée générale des Nations Unies, le gouvernement de la CCF en Saskatchewan, dirigé par Tommy Douglas, a adopté la Saskatchewan bills of rights act, montrant une fois de plus ce que les Canadiens ne savent que trop, à savoir que les néo-démocrates sont souvent à la pointe du changement social progressiste au Canada.
Cette loi était l'ancêtre de la Déclaration canadienne des droits adoptée sous le gouvernement du premier ministre John Diefenbaker en 1960 et évidemment de la Charte des droits et libertés de 1982. La déclaration des droits de la Saskatchewan a été la première loi générale interdisant la discrimination au Canada. Il est important que les Canadiens comprennent que, dans ce pays, le parti qui a été le premier à adopter des lois interdisant la discrimination, c'est le Nouveau Parti démocratique.
Le Canada est un pays dans lequel des gouvernements fédéraux, tant conservateurs que libéraux, ont adopté des mesures législatives racistes et des mesures législatives discriminatoires à l'égard des Canadiens d'origine chinoise, des Canadiens d'origine japonaise, des membres des Premières nations et des femmes. Le Nouveau Parti démocratique fut le premier parti à insister pour que soit adoptée une mesure législative garantissant les droits qui servent de fondement à tous ces rêves que caressent les néo-Canadiens lorsqu'ils viennent s'établir ici.
La déclaration des droits de la Saskatchewan a ouvert des perspectives entièrement nouvelles et elle continue de protéger les valeurs des défenseurs des libertés civiles. Elle est, à ce jour, la seule mesure législative au Canada à offrir une telle protection contre les abus de la part de personnes et d'institutions privées puissantes.
Ce courage fut poussé plus loin en 1970, lorsque Tommy Douglas, de nouveau à la tête du NPD, exprima en ces termes la nécessité de protéger nos droits et libertés, surtout face à la violence et en cas d'insurrection civile:
Nous avons tous été consternés et dégoûtés devant l'enlèvement de deux hommes innocents qu'on détient en otage.
Il faisait allusion à l'enlèvement de Pierre Laporte et de James Cross en 1970. Et il ajouta ceci:
Nous ne sommes pas prêts à accepter qu'on utilise le maintien de l'ordre et de la paix comme un écran de fumée pour détruire les libertés et les droits du peuple canadien. Je rappelle au gouvernement qu'on ne peut protéger la liberté démocratique en la restreignant, en la limitant ou en la détruisant.
Ces paroles, prononcées ils y a 40 ans, sont aussi chargées de sens aujourd'hui qu'à l'époque. S'il en est ainsi, c'est parce qu'il est facile de protéger les droits quand ça ne pose pas de problème.
C'est toutefois à leur façon de protéger les droits de la personne et les droits démocratiques, lorsque cela pose problème, qu'on évalue un pays et qu'on mesure le véritable engagement d'un gouvernement.
Je vais lire des extraits de la Charte canadienne des lois et libertés et m'attacher à certains aspects de la Charte. Voici ce que la Charte inscrit dans la loi:
Chacun a les libertés fondamentales suivantes:
a) liberté de conscience et de religion;
b) liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse [...];
c) liberté de réunion pacifique;
d) liberté d'association.
Tout citoyen canadien a le droit de vote et est éligible aux élections législatives [...]
De même que le droit de se présenter à une élection, y compris pour se faire élire à la Chambre.
Je m'arrête ici. Il y a un grand nombre de pays dans le monde qui ne permettent pas aux citoyens de voter et de se présenter comme candidats aux élections. Nous avons inscrit ce droit dans ce texte fondateur.
La Charte dit aussi ceci:
Tout citoyen canadien a le droit de demeurer au Canada, d'y entrer ou d'en sortir.
[Tous] [...] ont le droit:
a) de se déplacer dans tout le pays et d'établir leur résidence dans toute province;
b) de gagner leur vie dans toute province.
Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale.
Comme garanties juridiques, la Charte prévoit ceci:
Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.
Chacun a droit à la protection contre la détention ou l'emprisonnement arbitraires.
Chacun a le droit, en cas d'arrestation ou de détention:
a) d'être informé dans les plus brefs délais des motifs de son arrestation ou de sa détention;
b) d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat et d'être informé de ce droit; [...]
b) d'être jugé dans un délai raisonnable;
c) de ne pas être contraint de témoigner contre lui-même dans toute poursuite intentée contre lui pour l'infraction qu'on lui reproche;
d) d'être présumé innocent tant qu'il n'est pas déclaré coupable, conformément à la loi [...] à l'issue d'un procès public et équitable;
Dans des affaires graves, tout inculpé a le droit « de bénéficier d'un procès avec jury ». Chacun a droit à la protection contre « tous traitements ou peines cruels et inusités ».
Sous la rubrique Droits à l'égalité, on lit ceci:
La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous [...] indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques.
Les droits à l'égalité, l'égalité entre les hommes et les femmes au Canada, sont inscrits dans la loi.
Les langues officielles, de même que le droit à l'instruction dans la langue de la minorité linguistique, sont inscrits dans la loi.
Ce ne sont pas juste des mots. C’est l’expression du rêve qui attire des gens du monde entier et les incite à venir s’établir au Canada.
J’ai entendu quelques commentaires troublants, venant en particulier du côté du gouvernement, au sujet de mots tels qu’« équilibre ». Quand on parle de droits fondamentaux, il est vrai que certains doivent être équilibrés, mais d’autres ne doivent jamais être compromis.
Il n’y a pas d’équilibre qui tienne quand on parle du droit de connaître les accusations dont on fait l’objet lorsqu’on est arrêté. Il n’y a pas d’équilibre qui tienne quand on parle du droit d’appeler un avocat en cas d’arrestation. Il n’y a pas d’équilibre qui tienne quand il est question du droit d’un Canadien de ne pas être soumis à des traitements ou peines cruels et inusités.
Ce sont des choses qui ne souffrent aucune équivoque, des choses auxquelles chaque citoyen du Canada a droit, indépendamment de toute question d’équilibre. Ce sont des droits fondamentaux que personne ne peut retirer. Ce sont des droits fondamentaux de la personne.
Je commence à m’inquiéter lorsque des gouvernements disent que certaines choses ne s’appliquent pas en toutes circonstances. Oui, c’est en toutes circonstances. Si des gens marchent dans la rue au Canada, ils ont le droit de ne pas être arrêtés et de ne pas être soumis à une fouille sans procédure équitable. Les gens ont le droit de marcher dans la rue en toute sécurité s’ils s’occupent de leurs propres affaires. Ils n’ont pas à être jetés en prison et à y rester pendant une semaine ou deux sans qu’on leur dise pour quelle raison ils sont détenus.
Certains députés du parti ministériel semblent croire que cela peut se faire dans des circonstances exceptionnelles. Cela ne peut jamais se faire, et ce n’est pas de la simple théorie.
À Toronto, il y a quatre ou cinq mois, nous avons vu des Canadiens qui ont été privés de ces droits. Ils s’étaient simplement réunis pacifiquement, exerçant le droit que leur garantit la Charte de se rassembler et de s’exprimer en public, mais leurs droits ont été violés de la pire manière. Les députés ministériels n’ont rien dit. Ils parlent de la Charte canadienne des droits et libertés, mais aucun d’entre eux n’a pris la parole pour dire que c’était une injustice. Ils ont dit que ces gens pouvaient porter plainte auprès de la Commission des plaintes contre la police. C’est le droit et le devoir de chaque citoyen de défendre la Charte canadienne des droits et libertés. À titre de parlementaires, nous avons l’obligation de...