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Monsieur le Président, je suis ravi d'intervenir pour appuyer le projet de loi , la Loi visant à empêcher les passeurs d'utiliser abusivement le système d'immigration canadien.
Depuis le moment où il a été élu, le gouvernement conservateur s'est fixé comme priorité de renforcer le système de justice pénale. Nous avons promis aux Canadiens que nous prendrions des mesures pour sévir contre les activités des groupes criminels organisés et autres réseaux dont les activités mettent en péril la sécurité publique et déstabilisent nos collectivités. Nous avons assuré à nos concitoyens que nous veillerions à l'édification de quartiers sûrs pour tout le monde et que les familles pourraient se sentir en sécurité dans la rue et à la maison.
Notre gouvernement est un gouvernement d'action. Nous tenons toujours nos promesses. Nous avons adopté des mesures législatives pour alourdir les peines imposées aux auteurs d'infractions criminelles, notamment les crimes violents commis avec une arme à feu. Nous avons fourni aux organismes d'application de la loi les outils et les ressources dont ils ont besoin pour s'acquitter de leur tâche. Nous avons pris des mesures pour que les contrevenants violents se retrouvent derrière les barreaux, plutôt que dans leur salon.
Aujourd'hui, nous proposons une autre mesure décisive.
En août, les Canadiens ont constaté encore une fois que le Canada n'est pas à l'abri des activités que mènent à l'échelle internationale les groupes criminels organisés qui cherchent à s'enrichir en transportant des centaines de clandestins. L'arrivée de 492 Tamouls sri lankais à bord du Sun Sea est survenue moins d'un an après l'arrivée de 76 Tamouls du même pays, à bord de l'Ocean Lady. Le fait que ces deux navires soient arrivés sur les côtes canadiennes dans un intervalle de moins de 12 mois illustre clairement que d'importants et grandissants réseaux de passage de clandestins étendent leur portée, élargissent leurs capacités logistiques et visent de plus en plus le Canada.
Le passage de clandestins constitue une activité criminelle ignoble; il est carrément inacceptable d'abuser de la générosité du Canada pour faire des gains financiers.
Le Canada a l'obligation de sévir contre les entreprises criminelles dangereuses qui bénéficient uniquement aux organisateurs de ce trafic à grande échelle qui mènent leurs activités avec bien peu de considération pour les êtres humains qu'ils transportent.
Nous savons également que les parcours empruntés pour le passage de clandestins peuvent également servir au trafic de drogue et d'armes à feu. Cette situation constitue une menace pour la sécurité publique et pour nos collectivités.
Les profits découlant du passage de clandestins peuvent également servir à financer d'autres activités criminelles.
Notre gouvernement est déterminé à assurer la sécurité des Canadiens. Nous nous engageons à maintenir l'intégrités de nos frontières et de nos programmes d'immigration et d'accueil des réfugiés. Nous tenons à ce que le système d'immigration du Canada demeure juste. Voilà les objectifs que vise le mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui.
Le projet de loi vise à donner aux fonctionnaires de nouveaux outils pour mieux intervenir face au passage de clandestins.
Nous proposons tout d’abord des modifications ciblées à la définition du crime du passage de clandestins pour inclure les diverses formes d'immigration clandestine.
En vertu du régime actuel, pour accuser une personne de passage de clandestins, nous devons faire la preuve que l’accusé savait que les personnes dont il a assuré le passage n’avaient pas les documents requis par la loi pour entrer au Canada. Les modifications proposées aujourd’hui élargiront cette définition pour inclure toute infraction à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, notamment le fait de faire entrer des gens au Canada de manière à ce qu'ils n'aient pas à se soumettre à un examen, comme l’exige la loi.
À l’heure actuelle, seules les situations où le passeur savait que les clandestins n’avaient pas les documents nécessaires pour entrer au Canada constituent une infraction en vertu de la loi.
Qu’est-ce que cela signifie dans le contexte du passage de clandestins? Cela veut dire que le procureur pourra prouver ce genre d’infraction en démontrant que l’accusé était conscient des risques si le clandestin entrait au Canada en contravention de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, mais qu’il ne s’en souciait simplement pas.
Nous croyons que ces changements amélioreront notre capacité de faire enquête et de poursuivre ceux qui participent à des activités de passage de clandestins.
Deuxièmement, nous proposons un régime de peines minimales obligatoires progressives pour les personnes reconnues coupables de passage de clandestins. Voilà qui témoigne de l’intention de notre gouvernement de dissuader et de dénoncer plus efficacement cette activité criminelle.
En vertu du projet de la loi, le nombre de personnes introduites clandestinement et la présence de circonstances aggravantes détermineraient la peine minimale obligatoire imposée après condamnation. Deux circonstances aggravantes pourront entrer en ligne de compte: l’infraction a été commise au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle ou d’un groupe terroriste ou en association avec l’un ou l’autre de ceux-ci ou en vue de tirer un profit; l’auteur, en commettant l’infraction, a entraîné la mort d'un clandestin ou des blessures à celui-ci ou a mis en danger sa vie ou sa sécurité.
Les peines minimales obligatoires seraient, pour le passage de moins de 50 clandestins, de trois ans d’emprisonnement en présence d’une des circonstances aggravantes mentionnées, ou de cinq ans d’emprisonnement en présence des deux circonstances aggravantes. Les peines minimales obligatoires seraient, pour le passage de 50 clandestins ou plus, de cinq ans d’emprisonnement en présence d’une des circonstances aggravantes, et de dix ans d’emprisonnement en présence des deux circonstances aggravantes.
Ces modifications lancent un message clair: nous ne tolérerons pas d’opérations de passage de clandestins au Canada et une telle conduite sera sévèrement punie.
Nous proposons aussi des modifications à la Loi sur la sûreté du transport maritime. Ainsi, le projet de loi augmentera les peines pour quiconque ne se conforme pas à une directive ministérielle lui interdisant d’entrer dans les eaux canadiennes ou l’obligeant à en sortir ou à se diriger vers un autre endroit dans ces eaux. Des peines accrues s’appliqueront aussi à quiconque refuse de donner des renseignements sur le navire avant son arrivée ou remet aux autorités canadiennes des renseignements faux ou trompeurs.
L’arrivée irrégulière d’un grand nombre de migrants irréguliers qui réclament tous le statut de réfugié peut poser des défis importants aux agents frontaliers à qui il incombe d’examiner chaque personne et de déterminer si elle est admissible au Canada et si elle pose un risque à cause de son association avec des organisations criminelles ou des organisations terroristes.
Le nombre considérable de demandeurs, combiné à l’énorme complexité des examens et des enquêtes, peut dépasser, et de fait dépasse, la capacité des ressources actuelles. C’est pourquoi nous avons besoin d’une nouvelle approche pour le traitement des migrants irréguliers, une approche qui fera en sorte que le Canada reste équitable, mais aussi vigilant.
Le projet de loi permet au de désigner les personnes qui arrivent sur nos rivages, comme celles à bord du navire Sun-Sea ou de l'Ocean Lady, en tant qu’« arrivées irrégulières ». Le ministre pourra effectuer une telle désignation quand il aura des motifs raisonnables de croire que l’établissement de l’admissibilité ou de l’identité de personnes qui entrent au Canada dans le cadre d’une telle arrivée, ou d’autres enquêtes à leur sujet, ne peut être réalisée de manière opportune, ou s’il a des motifs raisonnables de soupçonner que l’arrivée du groupe est liée à une activité de passage de clandestins.
En vertu des règles actuelles, tout ressortissant étranger ou résident permanent peut être détenu à son entrée au Canada. Ces personnes peuvent être détenues si un agent d’immigration juge cette mesure nécessaire pour poursuivre son examen. Elles peuvent aussi être détenues si on a des motifs raisonnables de soupçonner qu’elles sont inadmissibles au Canada, qu'elles posent un danger pour le public ou qu’il est peu probable qu’elles se présentent lors d’une instance en immigration.
La Commission de l'immigration et du statut de réfugié doit toutefois examiner les motifs de cette détention dans les 48 heures et les revoir par la suite dans les sept jours, puis encore au cours de chaque période de 30 jours qui suit. Dans de nombreux cas, cette mesure établit un système de freins et de contrepoids contribuant à prévenir les détentions dont la longueur serait déraisonnable.
Dans le cas d’arrivées irrégulières, le système actuel de révision des examens des motifs de la détention n’accorde pas à l’Agence des services frontaliers du Canada suffisamment de temps pour interviewer et identifier adéquatement chaque personne ni pour déterminer si elle est inadmissible au Canada ou si elle pose un risque pour les Canadiens.
On consacre trop de ressources à la satisfaction des exigences du calendrier des examens des motifs de détention, au lieu de se concentrer sur les enquêtes et les vérifications nécessaires pour garantir l’intégrité des programmes d’immigration et de protection des réfugiés du Canada, ainsi que la sécurité des Canadiens.
Le projet de loi s’attaque à ce problème en prévoyant la détention obligatoire des personnes qui arrivent au Canada dans le cadre d’une arrivée désignée jusqu’à ce que la Commission de l'immigration et du statut de réfugié ait déterminé qu’elles sont des réfugiés ou jusqu’à 12 mois après le début de leur détention. Les personnes toujours détenues après 12 mois subiront un examen des motifs de détention devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, qui établira si leur détention est justifiée. Si la commission maintient la détention, il y aura un examen tous les six mois. Le ministre pourra ordonner une libération anticipée dans des circonstances exceptionnelles.
Les modifications que nous proposons prévoient que toute personne qui vient au Canada dans le cadre d’une arrivée désignée ne pourra, pendant une période de cinq ans, ni demander le statut de résident permanent ni parrainer des membres de sa famille. Elle sera aussi assujettie à des restrictions relativement aux voyages à l’extérieur du Canada pendant cette période. Elle ne pourra pas non plus avoir accès à un régime de soins de santé supérieur à celui que reçoit actuellement le Canadien moyen, ce qu’elle peut faire maintenant dans le cadre du Programme fédéral de santé intérimaire.
Ce sont des dispositions pratiques et raisonnables. Elles répondent à la nécessité de bien identifier les individus qui arrivent au Canada de manière irrégulière. Elles contribueront à assurer la sécurité des Canadiens en aidant à éviter que des criminels dangereux et des terroristes soient libérés dans la société canadienne. Elles dissuaderont les passeurs de cibler le Canada.
Nous devons aussi lutter contre d'autres types d'abus contre le programme canadien d'immigration et de protection des réfugiés. Le statut de réfugié peut être révoqué lorsqu'il est démontré devant la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié qu'un individu a menti pour appuyer sa demande de protection et que les éléments de preuve crédibles restants ne suffisent pas à justifier le besoin d'une protection. C'est ce que l'on appelle dans la loi une « demande d'annulation ».
Le projet de loi modifie la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés afin de prévenir les clandestins d'en appeler des décisions de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Le projet de loi élimine également les appels à la Section d'appel des réfugiés visant les décisions de la Section de la protection des réfugiés déclarant qu'une personne n'a plus besoin d'une protection de réfugié.
Toutes ces mesures accroissent substantiellement notre capacité de lutter contre les passeurs. Elles renforcent notre capacité de protéger les Canadiens de menaces criminelles ou terroristes et elles sont conformes à nos obligations internationales et à nos engagements à offrir aide et refuge aux véritables réfugiés.
Avant de terminer, je veux revenir sur les observations faites la semaine dernière par le porte-parole du NPD sur la sécurité publique. Il a comparé l'altruisme de ceux qui ont aidé des esclaves à échapper à la persécution aux passeurs, qui sont des criminels s'en prenant à des individus vulnérables à seule fin de leur soutirer de l'argent. Le député devrait avoir honte et il devrait présenter des excuses à la Chambre.
Les passeurs ciblent clairement le Canada et traitent notre pays comme un paillasson. Le problème s'aggrave et il faut le contrer.
Les Canadiens s'attendent à ce que des mesures adéquates soient prises pour faire face aux arrivées massives comme celles dont nous avons été témoins récemment. Ils veulent aider ceux qui ont besoin de notre aide et de notre protection, mais les Canadiens ne sont pas naïfs. Ils savent que des menaces existent et que nous devons demeurer vigilants.
C'est pourquoi le gouvernement s'est engagé à agir sur de nombreux fronts, tant au Canada qu'à l'étranger. C'est ce que nous avons fait et c'est ce que nous continuerons de faire.
Nous sommes fiers du projet de loi. J'invite le député de et tous les autres députés à reconnaître que la gravité du problème posé par les passeurs s'accentue et qu'il faut y remédier.
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Monsieur le Président, je suis heureux de participer à ce débat. Mes propos vont porter essentiellement sur deux aspects de ce projet de loi et sur la situation dont a parlé le député qui vient de prendre la parole — et d’autres en ont parlé aussi.
Ce projet de loi me préoccupe grandement, mais non parce qu'il est illégitime ou inapproprié que le gouvernement se préoccupe de la sécurité du Canada. En fait, c'est la responsabilité première du gouvernement fédéral, et une responsabilité que nous prenons tous au sérieux. Toutefois, cette mesure me préoccupe parce que les méthodes et les définitions qu’on y trouve auraient des conséquences importantes pour des gens qui ne sont pas des passeurs, le terme employé par le gouvernement, mais des gens qui se sauvent pour échapper à une situation très difficile et dont la vie est en danger.
Je veux discuter en particulier de la situation au Sri Lanka puisque nous ne tiendrions pas ce débat en ce moment si deux bateaux transportant un certain nombre de Sri Lankais d'origine tamoule n’avaient pas accosté sur nos côtes au cours des dernières années. Nous devons arrêter de faire semblant et admettre que, n’eut été de ces circonstances particulières, nous ne tiendrions pas ce débat, cette discussion, et le gouvernement ne présenterait pas ce projet de loi.
Traiter de ce projet de loi sans aborder ce qui est arrivé au Sri Lanka et ce qui se passe toujours là-bas à l’heure où l’on se parle serait comme parler de Moby Dick en omettant de mentionner la baleine blanche.
Comme les députés le savent, j’ai passé de nombreux mois au Sri Lanka au cours des dernières années. En compagnie d’autres Canadiens et de spécialistes du droit constitutionnel international, j’ai participé, en tant que conseiller, au processus de négociation qui s’est déroulé après le cessez-le-feu proclamé en 2001 au Sri Lanka. Celui-ci avait été négocié par des Norvégiens.
Ces travaux m’ont permis de passer beaucoup de temps dans ce pays. J’ai rencontré, à plusieurs occasions, différents chefs politiques de toutes allégeances, et j’ai pu, depuis ce temps, suivre attentivement les progrès de la situation dans ce pays.
Je ne vais pas revenir sur toute l’histoire politique du Sri Lanka. Je dirai simplement que j'ai fait un séjour dans ce pays pendant la période de cessez-le-feu, qui fut un bref intervalle de non-violence dans le cours d’une guerre civile très difficile et d’une grande violence qui a duré de 25 à 30 ans, pendant laquelle des dizaines de milliers de personnes ont été tuées, surtout dans le Nord du pays, mais aussi dans le Sud où des civils ont péri. Certains actes de terrorisme ont effectivement ciblé des civils. Des bombardements, des dommages et de la destruction à grande échelle, de même qu'un grand nombre de décès, ont marqué la guerre menée par le gouvernement du Sri Lanka et par les Tigres de libération de l'Eelam tamoul, comme on les appelle, mais qui sont mieux connus sous le nom de Tigres tamouls.
La fin de cette guerre a fait l’objet de longs débats à la Chambre. De nombreuses questions ont été posées à ce sujet pendant la période des questions ici, à la Chambre des communes, mais aussi dans les parlements et les assemblées nationales du monde entier.
On se demandait ce qui s’était vraiment passé à la fin de ce conflit. On estime généralement que plusieurs milliers de personnes ont été tuées pendant les derniers jours du conflit. Les estimations vont de quelques milliers jusqu’à 30 000 ou 40 000 victimes. Ces chiffres sont contestés et débattus par toutes les parties, mais il est toutefois clair que bien des vies ont été perdues à la fin de la guerre.
Il est également intéressant de noter que le premier ministre Cameron du Royaume-Uni a demandé il y a quelques jours une enquête sur les crimes de guerre qui auraient pu être commis à la fin de cette guerre.
Le secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, a nommé un panel d’experts pour le conseiller. Ces experts ont été chargés de déterminer ce qui s’est vraiment produit dans ce pays et les conséquences possibles de la conduite du gouvernement du Sri Lanka, de même que de celle des TLET. La création de ce panel d’experts n’a pas été bien accueillie par le gouvernement sri-lankais. En effet, son existence même a été contestée. Elle fait l’objet de nombreux débats au Sri Lanka. Le gouvernement du Sri Lanka a également nommé une commission qui a pour mandat de faire la lumière sur les événements des derniers jours du conflit.
Du point de vue du gouvernement du Sri Lanka, la guerre est tout simplement terminée. Le conflit a été réglé. Il y a encore des milliers de personnes dans de grands camps de réfugiés, mais un grand nombre des 300 000 personnes qui étaient dans les camps à la fin du conflit ont été relogées et déplacées.
Je dois cependant admettre que le pouvoir politique central est en train de se consolider. Mes collègues se rappelleront certainement que, non seulement le gouvernement du Sri Lanka ne s'est jamais montré particulièrement enthousiaste à l'idée d'accueillir les membres du panel d'experts du secrétaire général des Nations Unies, mais il m'a refusé à moi aussi la permission d'entrer au Sri Lanka lorsque j'ai atterri à l'aéroport de Colombo il y a maintenant quelques mois, même si je détenais un visa en bonne et due forme du haut-commissariat du Sri Lanka. J'imagine que, depuis, certains députés, probablement d'autres partis, ont réussi à y aller, mais je regrette sincèrement de ne pas avoir pu moi-même m'y rendre en juin dernier.
Je dois admettre que je n'éprouve pas le moindre ressentiment lorsque je raconte cette anecdote. J'en ai plutôt contre le fait que, si on m'a refusé l'entrée au Sri Lanka, c'est parce que j'était jugé comme une menace à la sécurité du pays. Alors quand j'entends certaines personnes se faire dire qu'elles constituent une menace à la sécurité de notre pays, je sais comment elles se sentent.
J'espère que les gens vont prendre le temps de bien réfléchir et vont tenter de comprendre les raisons, les enjeux, les problèmes personnels, la souffrance, le sentiment de danger imminent qui, depuis toujours, poussent certaines personnes à fuir leur pays pour trouver refuge ailleurs.
Le ministère est parmi nous aujourd'hui. Je lui sais gré d'être ici et d'écouter le débat. J'ai toujours respecté cette façon de faire...
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Je le sais fort bien, monsieur le Président. On pourrait penser qu'après 32 ans, je saurais comment m'y prendre.
Je voulais simplement dire combien j'apprécie la présence de certains députés. Je sais par expérience que d'autres ministres ne sont pas toujours là lorsque nous discutons d'un projet de loi, et je me réjouis donc que le ministre soit respectueux de la tradition parlementaire.
Quoi qu'il en soit, je voulais dire que la Chambre ne peut discuter de la pertinence de ce projet de loi sans savoir ce qui se passe exactement dans le pays d'origine des gens qui sont visés par les sanctions prévues dans ce texte. C'est pour cette raison que nous discutons du projet de loi.
Il est impossible d'avoir un débat sérieux sur le projet de loi si nous ne tenons pas compte du fait qu'en Europe, aux Nations Unies, aux États-Unis, dans pratiquement tous les pays de l'hémisphère occidental, bon nombre de gens se préoccupent des violations passées et actuelles des droits de la personne au Sri Lanka. C'est une illusion de croire que ce n'est pas un problème ou que c'est quelque chose dont nous ne devrions pas discuter.
Le gouvernement conservateur est resté remarquablement silencieux sur le sujet. Il n'a pas fait le moindre commentaire sur les circonstances qui ont entouré la fin de la guerre. Il ne s’est pas davantage prononcé quant à la décision de Ban Ki-moon de nommer un groupe de travail. Il n'a exprimé aucune réaction à l'appel du premier ministre britannique en faveur d'une enquête sur des crimes de guerre.
Je me demande pourquoi le gouvernement est si réticent, d'autant plus qu'en d'autres circonstances tout à fait ordinaires, il s'est prononcé clairement, dans cette enceinte, en faveur de la démocratie et des droits de la personne. En quoi la situation actuelle lui pose-t-elle des difficultés? Il serait impensable que ce soit à cause du violent conflit qui a éclaté, et du fait que les TLET étaient partie à ce conflit. Il serait tout aussi impensable qu'il n’accorde pas au gouvernement sri lankais la même considération qu’aux autres gouvernements. Enfin, il serait impensable que cette réticence soit causée par le fait que nous avons inclus les TLET dans la liste des groupes qui pratiquent la terreur et la violence, qui croient qu'il est justifié de tuer des civils ou de s’en servir comme cibles ou comme boucliers en période de guerre, et qui estiment normal d'accrocher des bombes au dos de jeunes filles de 13 ans pour les faire exploser dans un marché ou dans un bazar. On ne peut ni justifier ni avaliser ce genre de tactique ou d'attitude vis-à-vis des êtres humains. J'ai moi-même perdu des amis chers dans des actes de violence, et je n'ai aucune hésitation à dénoncer ce genre de tactique.
Toutefois, cela ne doit jamais justifier la répression. Cela ne doit jamais justifier l'oppression. Cela ne doit jamais justifier le massacre de civils. Il n'y aurait pas autant de gens sur ces bateaux s'il n'y avait pas un problème au Sri Lanka. Ne pas s'en inquiéter, garder le silence ou encore prétendre que nous n'avons pas besoin d'en parler dans le cadre de ce débat revient tout simplement à refuser de voir la réalité en face.
J'invite le gouvernement à faire appel à ses bureaux d'enquête et à mobiliser ses ressources. Je l'invite à continuer de faire preuve d'une grande sensibilité à l'égard des problèmes que connaît la communauté tamoule au Sri Lanka, et à se tenir informé de la centralisation croissante du pouvoir politique dans ce pays. Tous les observateurs raisonnables de la situation, qu'il s'agisse de l’International Crisis Group, d'Amnistie internationale ou des Nations Unies, ont exprimé leur inquiétude quant à la situation des droits de la personne au Sri Lanka.
[Français]
S'il n'y avait pas un problème de droit civil au Sri Lanka, on n'aurait pas le problème de réfugiés qu'on a maintenant. On ne peut pas discuter à la Chambre des communes du projet de loi qui est devant nous sans parler de la situation au Sri Lanka. Il faut en discuter honnêtement et ouvertement; c'est essentiel.
[Traduction]
Le deuxième point que j'aimerais aborder est le suivant. Le gouvernement nous a dit, et le député qui a pris la parole juste avant moi y a fait directement allusion, que l'objectif de ce projet de loi est d'imposer des sanctions plus sévères contre ce qu'il appelle les passeurs. Dans le contexte de l'immigration et de toute l'histoire des mouvements de population, il est très important que le gouvernement et la population du Canada adopte une position ferme vis-à-vis de ceux qui amènent au Canada des gens qu'ils font passer pour des réfugiés.
Mon collègue, le député d', a rappelé deux exemples parmi les plus spectaculaires de l'arrivée au Canada de ce genre de bateaux. Le député à qui la question était adressée l’a simplement éludée en disant que c'est de l'histoire ancienne. Pas tout à fait. On sait que, lorsque le Komagata Maru est arrivé au large de Vancouver, il n'a pas été autorisé à y accoster et les passagers n'ont pas pu débarquer. Au final, le bateau a fait demi-tour, et à son retour en Inde, des centaines de passagers ont été tués. Nous savons tous ce qui est arrivé aux 900 passagers du S.S. St. Louis, qui n’ont été autorisés à débarquer ni à La Havane, ni à Miami, ni à Halifax, et dont sans doute 300 ont péri dans l'Holocauste. Il existe un grand nombre d'études sur le sujet.
Quand le député dit que nous devrions demander à nos électeurs ce qu'ils en pensent, je me demande, moi, ce que les Canadiens en pensaient en 1914 et en 1939.
Il est évident que ce ne sont pas des questions faciles. Je suis absolument convaincu que, si on leur demandait ce qu'ils en pensent, un grand nombre de mes électeurs diraient que c'est un bon projet de loi. Ce n'est que lorsqu'on commence à réfléchir sérieusement à la chose qu'on se demande si c'est vraiment ce qu'on devrait faire. Et c'est là que j'ai un problème.
J'ai un problème par ce que le projet de loi ne se limite pas aux passeurs. Il concerne également les réfugiés, en ce sens ce qu'il crée deux catégories de réfugiés. Et c'est là le défaut de ce projet de loi. À mon avis, c'est un défaut que les tribunaux vont dénoncer catégoriquement, non seulement à cause de la Charte, mais aussi en raison de nos obligations internationales.
Nous avons signé des pactes sur les droits des enfants et sur les droits des réfugiés. Nous ne pouvons pas nous contenter de dire que, parce qu’ils sont arrivés sur tel ou tel bateau, les réfugiés appartiennent à une catégorie différente. Selon le projet de loi, le ministre aura le pouvoir de les empêcher de faire ce que les autres réfugiés ou demandeurs du statut de réfugié peuvent faire.
C'est la création de ces deux classes de réfugiés qui est le principal défaut de ce projet de loi. À cela s'ajoute le fait que le projet de loi dans son ensemble et le débat dans son ensemble ne portent pas vraiment sur le problème tel qu'il existe.
Il y a aussi la question de la resquille, qui est tout aussi importante. Le fait d’éviter les files d'attente est contraire au principe d'équité qui est si cher aux Canadiens. Ces gens-là obtiendraient de ce fait plus rapidement un statut d'immigrant, alors que d'autres attendent patiemment dans leur pays d'origine.
Il faut bien comprendre qu'il n'y a pas de file d'attente pour les réfugiés. Ce sont deux choses complètement différentes. C'est là, encore une fois, que le gouvernement, à mon avis, a fait preuve de créativité terminologique pour essayer de convaincre les Canadiens que nous devons traiter tout le monde d'une façon équitable.
Je suis d'accord pour dire que nous devons traiter tout le monde d'une façon équitable, mais je dénonce toutefois un projet de loi qui crée deux catégories distinctes de réfugiés, qui traite les gens qui arrivent sur un bateau donné d'une certaine façon, ceux qui arrivent par avion d'une autre façon, et ceux qui arrivent sur un autre bateau encore d'une autre façon. Le gouvernement manque de franchise à l'égard de la population canadienne lorsqu'il prétend que ce qui se passe revient à de la resquille.
Lorsqu’un système d'examen des demandes de réfugiés est bien géré, et qu'il y a suffisamment de fonctionnaires pour gérer le nombre de demandeurs du statut de réfugié, ceux qui n'obtiennent pas ce statut retournent dans leur pays d'origine, un point c'est tout.
Nous avons renvoyé des centaines, voire des milliers de gens. Il ne faut pas se leurrer. Le projet de loi vise moins à s'attaquer à un problème réel qu'à gagner des voix.
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Monsieur le Président, c’est pour moi un honneur et un plaisir de prendre la parole en faveur du projet de loi . Je tiens à féliciter le et le pour tout le travail qu’ils ont accompli pour présenter ce projet de loi à la Chambre.
Les députés n’ignorent pas que, ces dernières années, le passage de clandestins est devenu une activité dont les profits se chiffrent à des millions de dollars et qui a pris une envergure internationale. Selon certaines estimations, le nombre de personnes qui traversent clandestinement les frontières est de 800 000 par année. Les Nations Unies mentionnent que c’est un des secteurs de l’activité criminelle internationale qui connaît la croissance la plus rapide.
Il est difficile de confirmer le nombre exact de personnes à qui les passeurs font franchir les frontières internationales étant donné le caractère clandestin de ces activités, mais il est certain qu'il s'agit d'une vaste entreprise. Le passage de clandestins peut se faire par voie terrestre, par mer ou par avion. Ces activités peuvent être menées par le crime organisé ou par des personnes ayant des liens avec des organisations terroristes. Ce simple fait devrait tous nous inciter à agir. Comme un grand nombre de nos alliés et partenaires internationaux, le Canada est actuellement la cible des activités internationales des entreprises criminelles organisées qui se livrent à cette activité répréhensible qu’est le passage de clandestins.
Les Canadiens ont récemment été témoins de l’arrivée de 492 Tamouls sri-lankais à bord du Sun Sea, moins d’un an après l’arrivée de 76 Tamouls sri-lankais à bord de l’Ocean Lady.
Plus tôt ce mois-ci, un certain nombre de personnes ont été découvertes dans un conteneur dans le port de Montréal et cela pourrait être un cas de passage de clandestins ou de trafic d’êtres humains.
L’année dernière, la Section de l’immigration et des passeports de la GRC pour la région de l’Atlantique a arrêté au Nouveau-Brunswick, en collaboration avec l’Équipe intégrée de la police des frontières, quatre personnes soupçonnées d’avoir facilité l’immigration illégale. Deux de ces personnes ont depuis plaidé coupable et ont été reconnues coupables d’infractions à la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, y compris de passage de clandestins et de fausses déclarations.
Enfin, les Canadiens ont déjà été témoins de la saisie de quatre cargos qui sont arrivés dans des eaux éloignées de la côte Ouest avec à leur bord près de 600 migrants venant du Sud de la Chine. Un grand nombre de ces personnes étaient des enfants et des adolescents dont les parents avaient payé des sommes équivalant à 10 années de leur salaire aux trafiquants qui se spécialisent dans le passage de clandestins.
Le passage de clandestins est un acte criminel grave. Tous les députés en conviendront, je crois, et la communauté internationale a pris des mesures décisives pour y faire face. La Convention des Nations Unies contre la criminalité organisée transnationale et son protocole additionnel contre le trafic illicite par terre, air et mer fournissent un vaste cadre stratégique international pour répondre aux diverses menaces que pose le crime organisé et ses activités de passage de clandestins.
Le Canada a été l’un des premiers pays à signer et à ratifier ces importants traités internationaux et le dépôt de ce projet de loi aujourd’hui reflète l’engagement permanent du Canada à renforcer notre lutte contre le passage de clandestins.
Le passage de clandestins compromet l’intégrité des frontières du Canada ainsi que nos programmes et notre système d’immigration et de protection des réfugiés. Cela constitue une menace pour la sécurité publique étant donné qu’il est souvent difficile d’établir l’identité des clandestins, et c’est aussi une menace pour la sécurité nationale ou la sécurité publique étant donné que les filières de passage de clandestins servent également pour le trafic de stupéfiants ou d’armes, pour mettre à l’abri des criminels et des terroristes et pour lever des fonds finançant une vaste gamme d’activités illicites, y compris le terrorisme dont j’ai déjà parlé.
Le projet de loi fournira aux autorités policières les outils supplémentaires dont elles ont grand besoin pour pourchasser et poursuivre les personnes qui organisent les filières de passage de clandestins ou qui y participent. Cela renforcera également la capacité de la police à enquêter sur les risques potentiels pour la sécurité nationale et la sécurité publique que posent les migrants non identifiés qui entrent au Canada illégalement et parmi lesquels se trouvent peut-être des personnes ayant des liens avec des groupes criminels ou terroristes.
Plus précisément, le projet de loi modifie l’infraction actuelle de passage de clandestins, dont le dernier orateur a parlé et qui figure à l’article 117 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. En vertu de la modification proposée, commet une infraction quiconque organise l’entrée de personnes au Canada, les incite, les aide ou les encourage à y entrer en sachant que cela est contraire à la loi ou en ne se souciant pas de ce fait.
A l’heure actuelle, c’est seulement si le trafiquant sait que le clandestin en cause ne possède pas les papiers nécessaires pour entrer au Canada que son action constitue une infraction à la loi.
Il est clair, du moins pour les députés de ce côté-ci de la Chambre, qu’en élargissant ainsi la portée de l’infraction, nos lois refléteront mieux les différentes méthodes auxquelles les passeurs recourent pour faire entrer des gens au Canada.
Outre la modification de l’infraction, le projet de loi propose des peines minimales obligatoires sévères allant de 3 à 10 ans d’emprisonnement, selon les faits établis devant les tribunaux. Cela fera clairement comprendre aux passeurs et aux criminels qui se soucient peu des clandestins en cause et de notre législation de l’immigration que le Canada ne tolérera plus ces activités illégales.
Le projet de loi propose en outre de plus longues peines pour l’exploitant d’un navire qui omet de se conformer à une injonction ministérielle lui enjoignant de quitter les eaux canadiennes ou de ne pas y entrer, qui omet de fournir des renseignements qu’il est tenu de communiquer avant son arrivée ou qui fournit des renseignements faux ou trompeurs.
Aujourd’hui, les bâtiments de 300 tonneaux ou plus de jauge brute à destination du Canada doivent produire un rapport au moins 96 heures avant d’arriver dans un port canadien. Le ministre des Transports est autorisé à ordonner à tout navire de ne pas entrer dans les eaux côtières canadiennes ou de se rendre à un autre endroit situé dans les eaux canadiennes s’il a des motifs raisonnables de croire que le bâtiment peut constituer une menace à la sécurité.
C’est une infraction à la Loi sur la sûreté du transport maritime de faire délibérément une déclaration fausse ou trompeuse ou de produire des renseignements faux ou trompeurs. À l’heure actuelle, une peine d’emprisonnement maximale d’un an et des amendes sont prévues si une personne omet de se conformer à une injonction ministérielle ou présente une déclaration fausse ou trompeuse, ainsi qu’une peine maximale de six mois d’emprisonnement si elle omet de produire les renseignements prescrits avant l’arrivée.
Le projet de loi propose aussi des amendes sensiblement plus élevées pour dissuader ceux qui envisagent d’organiser le passage en bateau de clandestins à destination du Canada. En fait, les modifications proposées par le gouvernement signifient qu’un exploitant qui omet de se conformer à une injonction ministérielle lui enjoignant de quitter les eaux canadiennes ou qui produit des renseignements faux ou trompeurs se verra infliger une amende beaucoup plus importante et une peine d’emprisonnement plus longue.
Les amendes proposées contre les personnes qui omettent de se conformer à certaines exigences de la Loi sur la sûreté du transport maritime passeront de 10 000 $ à 200 000 $ pour les particuliers, en cas de condamnation après mise en accusation. Dans le cas d’une société, les amendes passeront de 200 000 $ à 500 000 $ s’il y a condamnation après mise en accusation.
Les sanctions seront encore plus élevées en cas de récidive. Une fois de plus, dans le cas des particuliers, la peine d’emprisonnement maximale passera de six mois à un an pour ceux qui omettent de présenter les renseignements requis avant l’arrivée.
Avec des peines plus sévères et des amendes plus lourdes, on espère convaincre les passeurs de clandestins que le Canada ne tolérera plus leurs activités illégales et hautement dangereuses. Le Canada ne se croisera pas les bras pendant que ces trafiquants sillonnent nos eaux, franchissent nos frontières ou atterrissent dans nos aéroports.
Nous prendrons des mesures. Nous collaborerons avec nos partenaires étrangers afin de dissuader, de déceler et de prévenir ces activités illégales. Si les passeurs parviennent quand même à entrer au Canada, nous prendrons toutes les mesures possibles pour les tenir responsables de leurs actes.
De plus, le projet de loi permettra aux agents frontaliers et à la police de disposer du temps nécessaire pour établir l’identité des passeurs et faire enquête sur leurs activités et pour identifier les clandestins qui pourraient constituer une menace à notre sécurité.
En particulier, le projet de loi déposé par le gouvernement prévoit la détention obligatoire des personnes qui arrivent au Canada dans le cadre d’une arrivée désignée jusqu’à ce qu’elles soient reconnues comme réfugiées par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié ou que 12 mois aient passé depuis leur détention, avec des exceptions en cas de circonstances exceptionnelles.
Cette mesure empêchera des personnes pouvant être dangereuses ou inadmissibles d’être relâchées au Canada avant que leur identité et le niveau de risque qu’elles présentent n’aient été clairement établis. Comme l’a mentionné le ministre, ces modifications sont sévères mais justes. Elles contribueront à rendre le Canada moins attrayant comme cible des passeurs de clandestins. Elles permettront aussi de tenir les organisateurs de filières de clandestins responsables de leurs actes répréhensibles.
Par conséquent, j’exhorte les députés à appuyer le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui et à collaborer avec le gouvernement pour assurer son adoption rapide.
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Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre la parole, au nom du Bloc québécois, sur le projet de loi .
D'abord, il faut bien comprendre les objectifs de ce projet de loi. L'un de ces objectifs est que le ministre de la Sécurité publique pourra déclarer une arrivée irrégulière, soit l'arrivée au Canada d'un groupe de personnes catégorisées comme étant des « étrangers désignés ». Les étrangers désignées qui font une demande de statut de réfugiées ou de personnes protégées seront traités différemment des autres demandeurs d'asile
C'est ça la réalité. Mes collègues conservateurs essaient de nous expliquer que ce projet de loi a pour but de sévir contre les passeurs clandestins, mais son vrai objectif est de créer deux catégories de réfugiés, ou plutôt une nouvelle catégorie, soit celle des étrangers désignés. C'est ça la réalité.
Encore une fois, le Bloc québécois s'opposera au projet de loi et votera contre, car il n'a pas uniquement pour but de sévir contre les passeurs clandestins. Il punira plutôt des personnes qui fuient la persécution, y compris des enfants. Les conservateurs utilisent encore une fois un exemple précis ayant marqué l'actualité — cela a fait les manchettes au Québec et ailleurs au Canada — pour faire avancer leur agenda de loi et d'ordre, et ce, même si les mesures qu'il propose ne changeront rien à la situation en cause. La réalité, c'est que ces gens sont arrivés ici, ils sont là, et le projet de loi ne changera rien à la situation vécue lors du dernier arrivage par bateau en Colombie-Britannique.
Le Bloc québécois s'oppose donc à toute nouvelle catégorie de réfugiés qui serait justifiée uniquement par la manière dont arrivent les demandeurs d'asile. En effet, l'arrivée en groupe de personnes ne signifie pas que ces dernières ne sont pas des réfugiées légitimes. Le Bloc québécois estime qu'une nouvelle catégorisation servant à leur imposer un fardeau plus lourd leur porterait préjudice. Nous déplorons également que le gouvernement décide de faire marche arrière, alors qu'un compromis avait été établi à cet égard dans le cadre de la réforme du système d'accueil des réfugiés. Cela fait des années que nous demandons une modernisation, une modification du système d'accueil des réfugiés avec droit d'appel. On en était pratiquement arrivé à une entente avec le gouvernement, mais voilà qu'il décide de pousser en avant son agenda plutôt qu'un compromis, car un événement médiatique a lieu.
Pour le Bloc québécois, il est tout simplement impossible de concevoir que les demandeurs d'asile, parce qu'ils arrivent en groupe, pourront être automatiquement emprisonnés pour une période maximale de douze mois sans avoir la possibilité de contester leur arrestation. Encore pire, le projet de loi dit que cette période peut être prolongée indéfiniment. Cette question en est une de droit fondamental et de démocratie, soit le droit à la liberté. Tout être humain ne mérite pas d'être confronté à cette situation.
Ce projet de loi sur l'immigration illégale est non seulement en contradiction avec la Charte des droits et libertés, mais irait aussi à l'encontre des obligations internationales du Canada au titre de la Convention sur les réfugiés de 1951, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ainsi que de la Convention relative aux droits de l'enfant. Le Bloc québécois est d'avis qu'il serait carrément irresponsable de voter en faveur d'un projet de loi qui contreviendrait à au moins trois traités de protection des droits fondamentaux de la personne.
Pendant des années, les gouvernements, tant libéraux que conservateurs, ont laissé le système actuel des réfugiés s'embourber sans rien faire. Coincé derrière ce constat alarmant, ce n'est pas la première fois que le gouvernement conservateur tente de résoudre le problème en resserrant les règles autour des demandeurs d'asile qui souhaitent se réfugier au Canada. Prenons l'exemple de l'imposition de visas aux Mexicains et aux ressortissants de la République tchèque, ou la volonté inébranlable du gouvernement d'établir une liste de pays considérés comme étant sûrs dans le cadre de la réforme du système d'accueil des réfugiés. Il est effectivement possible d'observer, à travers l'élaboration des politiques d'immigration, une tendance discriminatoire visant à fermer les frontières, notamment à ceux qui désirent obtenir le statut de réfugié. Pour preuve, la fourchette cible du nombre total de personnes protégées est passée de 26 000-31 800 en 2008 à 19 600-26 000 en 2010, sans oublier l'emploi grandissant d'une rhétorique de propagande qui, au nom de la sécurité nationale, sert à justifier l'adoption d'une position plus dure envers cette catégorie d'immigrants.
Bien que le gouvernement affirme sévir contre les passeurs de clandestins avec ce projet de loi, il punit plutôt des personnes fuyant la persécution, y compris des enfants. Encore une fois, le gouvernement agit de façon totalement discriminatoire envers les réfugiés, et il passe de la parole aux actes pour séparer ce qu'il considère les bons et les mauvais réfugiés, comme si la vie de ces derniers n'était pas menacée autant que celle des premiers.
Le système actuel est embourbé parce qu'on n'a pas voulu le moderniser. Lorsque des réfugiés arrivent en grand nombre, la tendance du gouvernement, qui a été concrétisée sous les libéraux et affirmée par les conservateurs, est de resserrer le système et de leur interdire d'entrer au pays. Pourtant, en raison des conventions internationales qu'on a signées, les réfugiés méritent au moins qu'on étudie leur dossier. Va-t-on tous les garder ici? Pas du tout, loin de là. On offrira l'hospitalité à ceux qui en ont vraiment besoin et qui sont persécutés dans leur pays, pour peu qu'on se dote d'un système d'analyse des dossiers efficace et respectueux des droits humains.
À maintes reprises à la Chambre, le Bloc québécois a fait la preuve que le système actuel méritait d'être modernisé. Il n'y avait pas de volonté de le faire chez les libéraux. Il y avait un semblant de volonté du côté conservateur, du moins, on l'espérait, mais voilà que le a été rabroué avec ce projet de loi. Avec ce projet de loi, on vient de rejeter du revers de la main tout ce qu'il avait mis en place avec des discussions et des négociations pour réformer le système actuel. En créant une nouvelle catégorie de réfugiés ou de ressortissants qui font une demande d'asile, on rejette toute bonification du régime existant.
J'aborderai maintenant la question de la sécurité. À l'arrivée du MV Sun Sea, le gouvernement n'a cessé de faire des commentaires publiquement afin de relier l'arrivée de bateaux à la sécurité des Québécois et des Canadiens. Or rien ne vient appuyer le fondement de ce jugement. D'après leur idéologie, les conservateurs se servent d'un événement médiatique pour faire avancer leur programme politique en matière de loi et d'ordre. Rien n'a démontré que l'arrivée du bateau MV Sun Sea mettait en danger la sécurité des Québécois et des Canadiens.
En vertu de la loi actuelle, à son arrivée par bateau, un demandeur d'asile doit faire prendre ses empreintes digitales, être photographié et interviewé. Comme les eaux du Canada sont sous l'autorité de l'Agence des services frontaliers du Canada — l'ASFC —, c'est cette dernière qui a le pouvoir de le détenir, si elle a des doutes sur son identité, et qui doit s'opposer à sa remise en liberté devant la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, Section de l'immigration.
Parmi les 76 autres Tamouls du Sri Lanka arrivés l'an dernier à bord du navire Ocean Lady et demandant l'asile, certains sont restés derrière les barreaux pendant plus de six mois. Aucun de ces derniers n'a été reconnu comme un membre des Tigres tamouls ou d'une autre organisation semblable. Ils ont finalement été libérés, l'ASFC jugeant qu'ils ne posaient aucun risque pour la sécurité nationale.
Il faut garder à l'esprit que l'arrivée des 492 passagers à bord du navire MV Sun Sea représente moins de 2 p. 100 du nombre annuel de demandes d'asile. Le plus haut taux de 5 p. 100 a été atteint en 1999, lors de l'arrivée de quatre bateaux ayant à son bord 600 demandeurs d'asile. Pour 2010, le nombre total des demandes devrait se situer autour de 25 000, ce qui représente la plus faible moyenne depuis 20 ans.
Les arguments voulant que l'arrivée massive de réfugiés pose une menace à la sécurité publique ne tiennent pas la route. Ils ne justifient certainement pas l'adoption d'un projet de loi aussi punitif envers les demandeurs d'asile. On ne dit pas ici qu'il ne faut pas punir les passeurs, mais qu'on se sert de ce projet de loi pour punir les demandeurs d'asile légitimes. C'est là le problème. De plus, la loi en vigueur nous apparaît comporter tous les mécanismes nécessaires pour gérer l'arrivée de ces bateaux.
Pourquoi créer une nouvelle catégorie? Les conservateurs ont simplement décidé de faire avancer leur programme idéologique.
Regardons le compromis du projet de loi . La volonté de catégoriser des demandeurs de statut en fonction de leur arrivée, que ce soit en termes de nombre ou par rapport à leur provenance, semble une obsession du gouvernement conservateur. Une telle mesure avait été largement dénoncée lors de l'étude du projet de loi C-11 sur la réforme du système d'octroi d'asile. Au départ, le gouvernement fédéral cherchait notamment à mettre sur pied un concept de pays désignés selon lequel les demandeurs déboutés provenant de pays jugés sûrs n'auraient pas eu accès à la nouvelle Section d'appel des réfugiés, mesure que le Bloc québécois considérait extrêmement discriminatoire.
Or, le gouvernement conservateur tenait mordicus à cette classification des pays et dans le cas où cette mesure ne serait pas acceptée, il menaçait même de saborder son propre projet de loi. Il faut le faire! En se faisant le fervent défenseur des droits des réfugiés auprès du gouvernement et des autres partis, le Bloc québécois a permis d'établir un compromis de dernière minute visant l'adoption d'une réforme véritablement efficace et, plus important encore, équitable pour tous les demandeurs d'asile.
Encore une fois, il est important de comprendre qu'en vertu des traités internationaux qu'a signés ou qu'a reconnus le Canada — et qu'aurait signés le Québec s'il était un pays —, on est respectueux et tout citoyen demandeur d'asile a le droit d'être traité équitablement, peu importe de quel pays il provient.
En effet, bien que le concept de pays désignés demeure, cette section sera accessible à tous, y compris les demandeurs originaires des pays désignés. Pour compenser, deux autres mécanismes d'accélération ont été mis en place. C'était le compromis du projet de loi . La Section de la protection des réfugiés pourra faire état dans sa décision du fait que la demande est manifestement infondée si elle est d'avis que celle-ci est clairement frauduleuse. Les demandes déboutées de demandeurs en provenance du même pays qui seraient ensuite envoyées à la SAR seraient traitées de façon accélérée. Les délais de traitement seront énoncés par règlement pour les demandeurs d'asile originaires d'un pays désigné. Ils seront plus courts que ceux pour les demandes régulières afin de pouvoir expulser plus rapidement les arrivants dont la demande est infondée.
Le Bloc québécois déplore que le gouvernement décide de faire marche arrière alors qu'un compromis avait été établi dans le cadre de la réforme sur le système d'accueil des réfugiés actuels. En effet, dans le cadre du projet de loi , le gouvernement crée une nouvelle catégorie de réfugiés qui serait justifiée uniquement par la manière dont arrivent les demandeurs d'asile. C'est ce qui est inacceptable.
Le Bloc québécois avait accepté des compromis au niveau du projet de loi . Le gouvernement voulait des pays sûrs. Pour ceux qui arrivaient de ces pays, il n'y avait pas toute une section qui pouvait s'appliquer, alors que ceux qui ne provenaient pas de pays sûrs, il y avait une section qui ne s'appliquait pas. Tout ce qu'on disait, c'est qu'on applique les mêmes normes à tout le monde, sauf que pour certains pays, le délai sera plus court. Évidemment, c'était un compromis que pouvait accepter le Bloc québécois compte tenu de l'intransigeance des conservateurs. Or on voit que, du revers de la main, et parce qu'est arrivé un événement médiatique pour lequel il y avait l'opportunité de faire avancer son programme idéologique, le gouvernement a décidé de tout simplement mettre de côté tous les débats et de nous imposer ce projet de loi , qu'il le nie ou non. Encore une fois, j'écoutais le député conservateur qui a pris la parole avant moi. Il a très bien mentionné que c'était pour lutter contre le système frauduleux des passeurs alors que, finalement, le vrai objectif est de traiter différemment les citoyens qui demandent l'asile et qui arrivent par ce moyen-là.
Donc, on a une nouvelle catégorisation. Le , les citoyens du monde...
Des voix: Oh, oh!
M. Mario Laframboise: J'entends le ministre parce que ces gens-là, évidemment, ne sont pas des citoyens canadiens. Ils sont quand même des gens citoyens du monde qui ont le droit de bénéficier des traités qui ont été ratifiés par le Canada et qui, entre autres, leur permettent de faire une demande d'asile.
Encore une fois, ce dont on s'aperçoit avec le projet de loi , c'est que le ministère de la Sécurité publique pourra déclarer une arrivée irrégulière, soit l'arrivée au Canada d'un groupe de personnes catégorisées, comme étant des étrangers désignés. Les étrangers désignés qui font une demande de statut de réfugiés ou de personnes protégées seront traités différemment des autres demandeurs d'asile. C'est ce qu'on n'acceptait pas dans le projet de loi , soit qu'il y ait des traitements différents pour les différents demandeurs. Présentement, dans le projet de loi C-49, on crée un statut différent pour ces étrangers désignés.
Si on leur refuse le statut de réfugié, ils devront attendre cinq ans avant de présenter une demande de résidence permanente. Entretemps, une réévaluation de la demande pourrait être effectuée afin de déterminer s'ils peuvent retourner dans leur pays.
Pendant cinq ans, ils ne pourront pas voyager non plus à l'extérieur du Canada ni demander la résidence permanente ou la citoyenneté. Par conséquent, ils ne pourront pas parrainer de membres de leur famille tels leur conjoint ou leurs enfants. Les étrangers désignés dont la demande d'asile est déboutée ne pourront pas faire appel auprès de la nouvelle Section d'appel des réfugiés, mais seulement à la Cour fédérale. Ils n'auront pas non plus accès aux mêmes prestations de santé auxquelles les autres réfugiés ont droit grâce au Programme fédéral de santé intérimaire.
Ainsi, non seulement le principe d'équité voulant que tous les réfugiés y aient accès est remis en question, mais les demandeurs d'asile qui arrivent en groupe seront dans une sorte de vide juridique pendant cinq ans, ce qui les privera des mêmes droits que les demandeurs d'asile passant par le processus normal de réfugié. Or qu'il y ait une arrivée d'un groupe de personne ne signifie pas que ces dernières ne sont pas des réfugiés légitimes, et c'est pourquoi le Bloc québécois estime qu'une telle catégorisation leur porterait fortement préjudice.
Le taux d'acceptation des demandes d'asile de Tamouls sri lankais est en moyenne de 80 p. 100, et rien n'indique que la situation changera au Sri Lanka permettant de juger que leur vie n'est pas persécutée.
Il faut donc comprendre que l'objectif du Bloc québécois n'a jamais changé et a toujours été de ne pas créer de catégorisation, soit par la provenance des individus, soit par leur moyen d'arrivée ici, parce que le Canada a signé les traités internationaux. Ces personnes peuvent donc faire une demande, mais cela ne veut pas dire qu'elles seront acceptées. Cela prend un processus d'analyse qui soit efficace et rapide. C'est pourquoi le Bloc québécois a demandé de réviser le processus actuel, a demandé une section de droit à l'appel pour que ces individus aient la chance de faire valoir leurs droits. Il faut donc que ce soit efficace, et il faut investir les sommes nécessaires à cet effet.
L'idéologie conservatrice a été portée par une arrivée massive très médiatisée. Les conservateurs ont décidé d'en faire leur priorité et de laisser de côté toutes les occasions qu'on leur offrait par la modernisation du processus actuel par le projet de loi .
Cela n'augure rien de bon pour les discussions futures. En effet, ce vide juridique créé pour cette catégorie d'étrangers désignés, qui ne sont pas encore catégorisés « réfugiés », maintient dans un vide juridique pendant cinq ans ces étrangers désignés, qui font une demande de statut de réfugié ou de personne protégée. Pendant cette période, ils ne pourront pas présenter de demande de résidence ou de réunification familiale. Par conséquent, ils ne pourront pas parrainer des membres de leur famille ou leur conjoint. De plus, ils ne seront pas libres de circuler ou d'obtenir tous les droits que d'autres demandeurs pourraient avoir.
Les obligations internationales et constitutionnelles du Canada sont importantes, comme je l'ai dit. Ce projet de loi va à l'encontre non seulement de ses obligations internationales en vertu d'au moins trois traités dont il est signataire, mais également de sa propre Constitution. Cela contreviendrait à la Charte canadienne des droits et libertés car le paragraphe 15(1) de la Charte stipule:
La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques.
Ce qui inclut la façon dont ils arrivent.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole pour appuyer le projet de loi , Loi visant à empêcher les passeurs d'utiliser abusivement le système d'immigration canadien.
Le passage de clandestins est une activité criminelle exercée dans le monde entier. Selon Interpol, cette activité est un phénomène mondial en pleine croissance. Cette forme de migration commerciale illégale est très dangereuse et elle exploite les personnes y ont recours. Les passeurs considèrent pratiquement leurs passagers comme du fret, et les bateaux qu'ils utilisent sont de véritables prisons horribles.
Le plus souvent, les migrants sont en mer dans des bateaux surpeuplés. Ils font le voyage dans des conditions insalubres et dangereuses. Ces conditions provoquent souvent des maladies graves ou des accidents mortels. En raison de ces conditions inhumaines, le passage de clandestins entraîne des décès à chaque année. Malgré tout, un grand nombre de migrants illégaux sont prêts à risquer leur vie et à entreprendre un tel voyage périlleux pour se rendre dans leur pays de destination.
En faisant payer des sommes importantes à ces personnes pour les transporter, les passeurs ont créé une activité commerciale lucrative. Ils facilitent la migration illégale, souvent en conseillant aux clandestins de demander asile dans le pays où ils sont amenés. Une fois arrivés à destination, les migrants sont souvent à la merci de leurs passeurs et contraints de travailler illégalement durant des années pour rembourser leur dette envers les passeurs.
L'arrivée du Sun Sea et du Ocean Lady dans une période de moins de 12 mois indique clairement que le Canada est en train de devenir une destination de choix pour les réseaux de passeurs. Selon Interpol, les passeurs profitent d'une législation faible et du risque peu élevé de se faire prendre, poursuivre et incarcérer, comparativement à d'autres groupes transnationaux de crime organisé. Si nous ne prenons pas dès maintenant des mesures énergiques, un plus grand nombre de bateaux vont s'amener ici et un plus grand nombre de vies vont être mises à risque. Nous ne pouvons pas laisser ces opérations se poursuivre sans intervenir.
La mesure législative proposée nous permettrait de sévir contre les passeurs odieux qui profitent des migrants vulnérables, mais elle vise aussi à décourager ceux qui sont tentés de recourir à cette forme dangereuse de migration, grâce à plusieurs mesures dissuasives.
Une mesure dissuasive clé est le fait que les personnes qui débarquent ici dans le cadre d'une arrivée irrégulière ne pourraient présenter une demande de résidence permanente avant cinq ans. Cette mesure s'appliquerait, peu importe que les personnes aient besoin de protection ou non. Durant cette période de cinq ans, les personnes dont la demande de protection aurait été accueillie favorablement ne pourraient pas voyager à l'extérieur du Canada, et elles ne pourraient pas demander la résidence permanente au Canada par d'autres moyens. Ces personnes ne pourraient donc pas parrainer des membres de leur famille pour les faire venir au Canada, et elles ne pourraient pas devenir des citoyens canadiens durant cette période.
La loi propose aussi une période de détention obligatoire d’une durée maximale d’un an qui contribuerait également à assurer la sécurité des Canadiens.
Quand ces migrants arrivent sur nos côtes, nous ignorons totalement qui ils sont ou d’où ils viennent. Souvent, ils arrivent sans papiers et nous ne savons pas s’il ne s’agit pas de criminels ou de terroristes qui représentent une menace pour notre sécurité. La détention obligatoire nous permettrait de vérifier et de confirmer l’identité de ces personnes pour déterminer si elles sont admissibles au Canada ou si elles participent à une activité illégale quelconque. Cette proposition est parfaitement raisonnable et juste.
La priorité du gouvernement est, d’abord et avant tout, de protéger la sécurité des Canadiens. C’est le moins que les Canadiens puissent attendre de leur gouvernement.
Nous prenons aussi des mesures pour que ces personnes aient accès à moins d’avantages sociaux canadiens. Comme chacun sait, les Canadiens bénéficient de services de santé qui figurent parmi les meilleurs et les plus généreux au monde. Nous devons faire en sorte que les migrants illégaux n’obtiennent pas une protection en matière de santé plus généreuse que celle qui est offerte aux Canadiens. Ce ne sera certainement pas le cas pendant que notre gouvernement sera au pouvoir.
À l’heure actuelle, les demandeurs d’asile, les réfugiés réétablis, les demandeurs d’asile déboutés qui attendent d’être renvoyés, les personnes détenues et les victimes du trafic d’êtres humains reçoivent une protection temporaire en matière de santé par l’entremise du Programme fédéral de santé intérimaire.
Aux termes des changements proposés, la portée des services fournis dans le cadre du PFSI sera limitée pour ceux qui arrivent au Canada illégalement dans le cadre d’activités de passage de clandestins. Ils recevront seulement une protection de base, y compris les soins médicaux nécessaires et les examens médicaux d’immigration que les demandeurs d’asile doivent subir à leur arrivée pour qu’ils ne posent pas de risque pour la santé ou la sécurité publique.
La générosité du Canada ne devrait pas faire de notre pays la cible d’une activité criminelle comme le passage de clandestins. Nous devons éliminer les incitatifs qui amènent les gens à venir ici en recourant à des passeurs. Ainsi, nous préserverons l’intégrité de notre processus et de nos programmes d’immigration et de protection des réfugiés et nous assurerons la sécurité des Canadiens.
Cette question a certainement retenu l’attention du public au cours des 12 derniers mois. Nous avons vu deux navires arriver dans notre pays pour y débarquer des clandestins et c’est pourquoi ce projet de loi doit être mis en oeuvre. J’ai entendu des députés de l’opposition prétendre que ce projet de loi est une réaction inconsidérée à ce qui s’est passé. Voilà qui est intéressant, car si nous avons simplement réagi à ces événements, ils doivent admettre qu’en réalité, nous avons mis environ 11 mois à présenter ce projet de loi.
Ce projet de loi a été élaboré au cours des derniers mois pour nous doter d’une loi solide, parfaitement conforme à la Charte et à notre Constitution, et surtout, une loi conforme aux sentiments et aux opinions des Canadiens sur ce sujet.
Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’une question complexe. Nous connaissons tous et, en tant que députés, nous avons entendu, dans nos circonscriptions, les opinions, les arguments et les récits de réfugiés qui ont demandé asile. Nous les avons entendu dire qu’ils avaient du venir au Canada pour échapper aux dangers auxquels ils étaient confrontés dans leur pays. Il ne fait aucun doute que si ces navires sont là c’est parce que notre système est aussi généreux et aussi ouvert et nous voulons faire en sorte que les personnes qui ont besoin d’une protection et qui sont des réfugiés de bonne foi aient un endroit où elles peuvent venir trouver la sécurité, où elles peuvent acquérir la citoyenneté canadienne, trouver un emploi, trouver un nouveau mode de vie et élever leur famille, dans un pays aussi démocratique et ouvert que le Canada.
Cependant, il n'en reste pas moins que ce n'est qu'en ayant recours au processus existant que nous pourrons déterminer clairement qui sont les réfugiés et qui sont les personnes qui souhaitent être ici et qui ont besoin d'être ici.
L'intervenant précédent a mentionné le projet de loi , qui était exactement ce dont le pays avait besoin pour réformer notre cadre législatif touchant les réfugiés. Nous nous sommes donné beaucoup de mal pour y arriver. En ma qualité de secrétaire parlementaire, je sais que nous avons travaillé des heures et des heures, des jours et des jours, pour que le projet de loi soit renvoyé à la Chambre des communes afin d'y être adopté à l'étape de la troisième lecture. Lorsqu'il est revenu à la Chambre, le projet de loi a reçu l'appui de tous les partis. Les dispositions législatives qui permettront de réformer le système de protection des réfugiés seront mises en application au cours des 18 prochains mois.
Avec les projets de loi et , nous aurons procédé à une réforme complète du système et modifié l'orientation que le pays doit prendre en ce qui a trait aux réfugiés et à ceux qui demandent asile au Canada. Ils devront le faire en se conformant au système en place plutôt qu'en resquillant et en confiant leur entrée au pays à des passeurs qui profitent de tous les passagers sur un navire. Ils devront éviter d'acheter leur liberté, mais plutôt la mériter au moyen du processus que nous avons mis en place et qui est l'un des plus généreux du monde. Il faut éliminer ce problème.
Les Canadiens ont exprimé haut et fort leur opinion à ce sujet. Il faut continuellement revenir à l'équité, car les Canadiens comprennent ce principe beaucoup mieux que le reste du monde. Aucun Canadien ne souhaite voir des gens être en danger dans leur pays. Si nous tenons à la liberté, à la sécurité, à la gouvernance et à la démocratie au Canada et croyons que les réfugiés méritent d'en goûter les bienfaits, nous pouvons les accueillir à bras ouverts, mais tout doit être fait conformément à notre processus et à notre système.
Il y a des gens qui profitent de ces personnes et qui leur demandent plus d'argent qu'ils ne pourront en accumuler dans leur vie pour monter à bord d'un bateau et trouver un moyen de se rendre ici. Ils leur font toutes sortes de promesses et les poussent littéralement sur des bateaux qui les emmèneront au Canada en leur disant que le Canada les acceptera, que les lois canadiennes sont si généreuses et si vétustes qu'à leur arrivée, ils obtiendront le statut qu'ils désirent tant.
Les réfugiés qui ont des raisons de chercher un pays où ils pourraient vivre en liberté trouveront ce qu'ils cherchent au Canada, mais les autres leur nuisent.
Cette forme de passage de clandestins qui consiste à emmener des gens au Canada en les entassant sur des bateaux n'est pas acceptable pour les Canadiens. Ces derniers veulent savoir qui sont ceux qui se trouvent sur ces bateaux et qui feront une demande de statut de réfugié.
On ne peut se permettre de laisser ces centaines de personnes entrer ainsi au Canada, ce qui pourrait mettre la santé et la vie des Canadiens en péril. Nous ne savons pas d'où ces gens arrivent. Nous ne savons pas s'ils sont réellement des réfugiés. Nous ne savons pas s'ils sont des terroristes. Ces gens pourraient être des criminels reconnus dans leur propre pays. Ce n'est pas le genre de milieu que nous voulons créer ici.
Le projet de loi à l'étude change tout cela. Il met sur pied un processus qui traitera avec respect ceux qui méritent vraiment le statut de réfugié. Il précisera très clairement aux pays et aux passeurs qui vivent des profits qu'ils tirent de ces gens que notre pays n'a plus l'intention d'accepter un tel comportement.
Le , le et le en ont fait l'annonce devant l'un des bateaux arrivés au pays. L'annonce a été faite sur la côte Ouest, mais le message s'est vite rendu sur la côte Est. Les appuis sont très nombreux . Bon nombre de groupes, d'éditorialistes et de Canadiens ont souligné qu'il s'agit là d'une mesure législative, juste, appropriée et opportune. C'est une mesure que tous les députés devraient appuyer.
Voyons ce qu'en disent les journaux. On peut lire le passage suivant dans l'article du Headline News sur le resserrement des règles que prévoit le projet de loi:
Le projet de loi intitulé Loi visant à empêcher les passeurs d’utiliser abusivement le système d’immigration canadien démontre qu'Ottawa ne tolérera pas les violations et qu'il agira en amont du réseau d'immigration. Par ailleurs, il fait ressortir le fait que le gouvernement fédéral du Canada continuera d'accueillir les immigrants légitimes qui peuvent contribuer à la prospérité du pays.
On peut lire ce qui suit dans un éditorial du Calgary Herald:
Les lois sévères qui visent à empêcher les navires transportant des immigrants illégaux de se rendre aux côtes du Canada punissent les gens qui doivent être punis, à savoir les passeurs.
[...] C'est une bonne mesure qui s'en prend à un crime que la plupart des Canadiens, à n'en pas douter, jugent odieux.
Les exemples sont nombreux. Je reprends un passage d'un autre éditorial sur l'immigration clandestine:
Le gouvernement doit agir pour protéger l'intégrité du système d'immigration du Canada, qui accueille 250 000 nouveaux arrivants chaque année. Les sondages nous ont appris que l'appui de la population à l'immigration, qui est élevé, a chuté de 20 p. 100 après l'arrivée du Sun Sea et du Ocean Lady, et ce, bien que les demandeurs d'asile et les immigrants hautement qualifiés soient des catégories très différentes d'immigration.
Il est très important de comprendre cette réalité. Notre pays accepte actuellement plus d'immigrants par habitant que tout autre pays. Nous sommes ouverts aux immigrants hautement qualifiés et aux immigrants peu spécialisés. Nous sommes ouverts aux travailleurs saisonniers et aux immigrants qui veulent s'établir au Canada pour commencer une nouvelle vie avec leur famille.
Ceux que nous ne sommes pas prêts à accepter, ce sont ceux qui viennent ici pour profiter de notre système, ceux qui veulent resquiller. Les passeurs le savent. Ils savent que, du fond de leur cœur, les Canadiens veulent aider ces gens. Ils en profitent donc.
En adoptant le projet de loi, nous pourrions nous dire au moins que nous ne sommes plus le pays dont les terroristes et les passeurs disent simplement: « Nous allons tous les débarquer au Canada. Nous allons empocher des millions de dollars et nous allons tous les débarquer au Canada parce que le Canada n’a aucune loi qui lui permet de l’empêcher. »
Les Canadiens se sont clairement fait entendre à ce sujet. Ils ne demandent pas mieux que d’accueillir des immigrants. Nous sommes nombreux à la Chambre à avoir des parents ou des grands-parents issus de l’immigration. Il y a même des députés qui sont venus eux-mêmes de l’étranger pour devenir des Canadiens. Tous l’ont fait dans le respect de la primauté du droit au Canada et du système équitable que tous les Canadiens ont fini par accepter.
L’opposition essaie de présenter cette mesure sous un faux jour, de prétendre que c’est une position que nous adoptons pour nuire à des gens. C’est précisément le contraire. Ce genre de discours n’a pas sa place à la Chambre des communes.
Il y a des personnes et des familles qui ont besoin de notre aide, mais ce ne sont pas toutes des demandeurs du statut de réfugié. Ce sont parfois des familles et des personnes qui sont des Canadiens et se trouvent parmi nous.
Nous avons besoin d’un système équitable dans lequel tous sont égaux, d’un système fondé sur l’acceptation et qui protège les Canadiens, d’un système qui fait comprendre aux demandeurs du statut de réfugié que nous sommes un pays libre, un pays qui sait accepter les autres. Mais assurons-nous que nous agissons avec équité, au moyen d’un système qui protège les authentiques réfugiés et qui protège les Canadiens ici même.
Il s’agit d’une mesure législative dont nous avons besoin et que les Canadiens réclament. Elle permettra à notre pays de se faire valoir non seulement comme une destination enviable, mais aussi comme un grand pays où il fait bon vivre.
Il y a des passeurs et d’autres personnes qui exploitent les plus démunis pour s’enrichir, mais il y a peut-être dans l’opposition des députés qui souhaitent que cela continue et qui voteront contre cette mesure législative. De ce côté-ci de la Chambre, personne n’agira de la sorte. Nous allons nous battre aussi longtemps et aussi vigoureusement qu’il le faudra pour faire adopter ce projet de loi et apporter à notre système les améliorations nécessaires.
:
Madame la Présidente, je me lève à la Chambre encore une fois, aujourd'hui, afin de participer au débat concernant le projet de loi , qui affecte en fait trois lois: premièrement, la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés — on revient donc sur le projet de loi —, deuxièmement, la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés — je me demande si elles sont vraiment équitables — et troisièmement, la Loi sur la sûreté du transport maritime.
Ce projet de loi et veut corriger une situation d'illégalité. C'est véritablement la responsabilité d'un gouvernement de protéger la sécurité de ses frontières. C'est l'évidence même que le monde entier est dans un état critique de sécurité.
Qu'on me permette tout de même de faire référence à certains documents internationaux, des ententes, dont le Canada est signataire et par rapport auxquels il a accepté de prendre une entière responsabilité.
Tout d'abord, je voudrais rappeler que le Canada est signataire de la Convention de Genève signée en 1951. Il est également signataire du protocole qui stipule que les individus victimes de persécution après 1951 doivent également être souscrits aux règles de la Convention de Genève. Évidemment, je reviendrai sur tout cela plus tard dans ma présentation.
Cette Convention de Genève et le Protocole qui suit sont à la base de la création de notre système d'acceptation des réfugiés, un système qui, malgré ses défauts et ses faiblesses, et il y en a, est devenu un modèle pour les pays industrialisés.
Ce projet de loi propose plusieurs articles visant à punir les passeurs, des personnes qui profitent de pauvres gens qui cherchent à fuir leur pays et à venir au Canada vivre une vie libre de terreur, de discrimination, de viols ou d'assassinats. Ces passeurs reçoivent des sommes d'argent énormes, et leurs actions vont à l'encontre des lois internationales et de nos propres lois canadiennes.
Le projet de loi , par rapport à cela, propose une amende considérable, par exemple une amende de 1 million de dollars à toute organisation criminelle coupable d'inciter, d'aider ou d'encourager un groupe de personnes à entrer illégalement au Canada. J'ai cité ici le paragraphe 117(3) tel que le modifierait le projet de loi.
Ce montant dépend du nombre de personnes qui arrivent dans ce groupe. Ces individus peuvent également subir l'emprisonnement à perpétuité.
Voilà, à mon avis, une amélioration.
[Traduction]
Ces dispositions pourraient sûrement avoir un effet dissuasif sur les passeurs projetant de faire entrer illégalement des groupes de personnes au Canada. Néanmoins, je pense que la saisie du navire à bord duquel les clandestins ont voyagé aurait également pour effet de dissuader les passeurs. Le coût du passage de clandestins deviendrait ainsi exorbitant et la saisie du navire représenterait une perte économique bien concrète pour les passeurs.
[Français]
Nous voulons également féliciter le ministre pour son intention de travailler avec les corps policiers locaux dans les pays d'origine des passeurs.
Cela n'est pas inclus dans le projet de loi mais représente un élément important de toute action concrète.
[Traduction]
Les demandeurs d’asile ne sont pas des criminels. Combien de fois devrons-nous le répéter? Cependant, le projet de loi les traite comme s’ils étaient coupables d’un crime, du moins c’est ce que porte à croire le libellé de sa première partie. Pourquoi y a-t-il seulement cinq articles du projet de loi qui concernent les passeurs, comparativement à 12 qui concernent les réfugiés? Nous pensions pourtant que ce projet de loi concernait les passeurs. En réalité, un examen du projet de loi permet de conclure qu’il vise à modifier la loi canadienne en ce qui concerne l’admission de réfugiés potentiels.
Je me demande également pourquoi ce projet de loi est parrainé par le . Serait-ce parce que le gouvernement conservateur veut donner l’impression aux Canadiens que les demandeurs d’asile constituent une menace à la sécurité? C'est d'ailleurs ce qu'il a tenté de faire dans le cas du navire qui est arrivé au large des côtes de la Colombie-Britannique il y a quelques semaines. Or, plusieurs semaines plus tard, aucun de ses passagers n’a été détenu en tant que terroriste. Pourtant, la rumeur continue de courir.
Les passagers de ces navires ou d’autres modes de transport recherchent simplement la sécurité et une qualité de vie au Canada. Ils n’ont pas l’intention de contrevenir au droit international ou canadien. Pourtant, le gouvernement présume que c’est bien leur intention lorsqu’il décide, grâce à une mesure législative comme le projet de loi , de garder en détention toutes les personnes désignées comme arrivants irréguliers. Les arrivants irréguliers sont des personnes qui arrivent en groupes plus nombreux, du moins c’est ce qu’on suppose, qu’une famille constituée d’un homme, de son épouse et de ses enfants.
Par conséquent, le projet de loi va directement à l’encontre de l’alinéa 11 g) de la Charte des droits et libertés, qui stipule qu’un inculpé a le droit « de ne pas être déclaré coupable en raison d’une action ou d’une omission qui, au moment où elle est survenue, ne constituait pas une infraction d’après le droit interne du Canada ou le droit international et n’avait pas de caractère criminel d’après les principes généraux de droit reconnus par l’ensemble des nations ».
[Français]
Ces demandeurs de statut, ces gens qui sont partis en exil, sont des femmes, des personnes âgées, de jeunes enfants, des hommes et très souvent, nous le savons maintenant, des femmes enceintes.
La Convention de Genève et le Canada comme signataire sont tenus de protéger ces arrivants. Au contraire, le projet de loi propose de les amener directement en détention. Soyons clairs, « détention », c'est un très beau mot pour la prison, pour l'incarcération.
Cela va à l'encontre de l'article 31(1) de la Convention de Genève qui déclare: « Qu'autant que les réfugiés présentent sans délai des raisons valables, les États contractants n'appliqueront pas de sanctions pénales pour une entrée ou présence irrégulières. »
Même si nous acceptions qu'une détention soit requise, la durée requise par le projet de loi va elle aussi à l'encontre de l'article 31(2) de la Convention de Genève qui dit que: « Les restrictions imposées aux réfugiés irréguliers ne seront appliquées qu'en attendant que le statut de ces réfugiés dans le pays d'accueil ait été régularisé, et ce, dans un délai raisonnable. »
J'insiste sur le qualificatif « raisonnable ».
Mais ce projet de loi propose de garder ces gens en prison jusqu'à une période d'un an, le temps que leur identité soit prouvée.
Ceux et celles d'entre nous qui avons travaillé avec des réfugiés et pour des réfugiés savent bien que très souvent, ces infortunés partent en toute vitesse et souvent sans pouvoir apporter avec eux des documents officiels prouvant leur identité.
Il serait temps aussi de rappeler que la Charte canadienne des droits et libertés, dont nous sommes tous si fiers, protège toute personne présente sur le territoire canadien, quelle que soit sa citoyenneté.
Que dire aussi des conséquences négatives de la détention sur ces personnes? Comme je l'ai dit tout à l'heure, on retrouve souvent parmi ces réfugiés des personnes âgées, de très jeunes enfants et des femmes enceintes. Ce sont souvent des gens qui ont subi de la torture dans leur pays, qui ont subi le viol, qui ont subi la violence. Ils n'ont pas reçu de protection dans leur propre pays. Ils s'en sont enfuis.
Ils n'ont pas reçu de protection auprès des passeurs pendant le dangereux voyage, mais ils gardent l'espoir. Ils arrivent au Canada, et là également, malgré leurs attentes, ils n'ont pas le droit à la protection des autorités canadiennes.
Comment expliquer à ces jeunes enfants pourquoi ils se retrouvent en prison? Quel crime ont-ils commis?
Je voudrais citer maintenant la Convention sur les droits de l'enfant de 1989. L'article 40(2)a) de cette convention stipule:
[...] qu'aucun enfant ne soit suspecté, accusé ou convaincu d'infraction à la loi pénale en raison d'actions ou d'omissions qui n'étaient pas interdites par le droit national ou international au moment où elles ont été commises;
Comment leur expliquer cette violation flagrante?
Selon l'article 9 de la Charte canadienne des droits et libertés:
Chacun a droit à la protection contre la détention ou l'emprisonnement arbitraire.
Cependant, selon l'article 20 du nouveau projet de loi C-49:
Le ministre peut, par arrêté, compte tenu de l’intérêt public, désigner comme une arrivée irrégulière l’arrivée au Canada d’un groupe de personnes [...]
Et selon l'article 55 de ce même projet de loi:
Lorsqu’une désignation est faite, l’agent, selon le cas:
a) détient, à son entrée au Canada, la personne qui est un étranger désigné en conséquence de la désignation;
ou
b) arrête et détient [...]
Ceci est sans aucun doute une détention arbitraire.
Il est regrettable que selon l'article 110, le demandeur de statut n'aura pas la possibilité d'aller en appel sur la décision de la Section de la protection des réfugiés. Au Canada, même les criminels de droit commun ont le droit d'en appeler de la décision du juge.
[Traduction]
La tradition humanitaire voulant que nous permettions à une personne de faire appel d'une décision donnée est bien inscrite dans la loi, du moins le croyais-je. Même le projet de loi , qui a été présenté à la Chambre par le même ministre, respectait ce droit.
[Français]
Le projet de loi contient également des conséquences cachées. Par exemple, l'article 11 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés telle que modifiée stipulerait que l'étranger désigné ne peut présenter une demande de résidence permanente que si cinq ans se sont écoulés. Le paragraphe 25(1.01) de la même loi modifiée stipulerait également que l'étranger ne peut demander l'étude de son cas que si cinq ans se sont écoulés. C'est clair, le projet de loi le dit deux fois.
Faisons donc le calcul. Il y a un an de détention lorsque la personne arrive avant de prouver son identité. Peut-être que le demandeur devient réfugié désigné si cela fonctionne assez bien. À partir de là, il attend cinq ans avant de pouvoir présenter une demande de résidence permanente. Pourquoi? Lorsque la Commission de l'immigration et du statut de réfugié établit que la personne est réfugiée, elle lui permet de demander immédiatement la résidence permanente au Canada. Après ces cinq ans, cette personne fait sa demande, si tout va bien, mais elle ne reçoit pas immédiatement le titre de résident permanent. Nous le savons, je le sais et toutes les personnes qui ont des immigrants dans leur comté le savent tout autant: deux ou trois ans peuvent s'écouler avant que le gouvernement ne réponde à cette demande. Je calcule donc, et je ne pense pas exagérer, qu'un individu pourrait attendre jusqu'à 10 ans avant de recevoir sa résidence permanente au Canada.
[Traduction]
Bref, lui et les membres de sa famille vont devoir passer 10 ans dans l'incertitude, sans savoir ce qui va leur arriver.
[Français]
Le réfugié irrégulier devra donc attendre 10 ans avant de pouvoir parrainer sa famille. C'est là que le projet de loi C-49 comporte des conséquences cachées. Il ne peut pas parrainer sa famille avant de devenir résident permanent du Canada. Comme il n'aura pas, pendant cette période entière, le droit de voyager à l'extérieur du Canada, il ne pourra pas, non plus, voir son conjoint, sa conjointe ou ses enfants. Voilà un gouvernement qui se targue de protéger les valeurs familiales. Or voilà des valeurs familiales qui ne sont certainement pas protégées, bien au contraire.
[Traduction]
Les modifications que le projet de loi propose d'apporter à l'actuelle législation sur l'immigration renforce encore plus l'autorisation légale qu'a le ministre de suspendre l'examen d'une demande pendant cinq années complètes, quelle qu'en soit la nature, qu'il s'agisse d'une demande d'asile ou même d'une demande de protection du Canada pour des motifs humanitaires ou de compassion. Et c'est sans compter les 12 mois que le demandeur aura passé en prison, ou plutôt en détention, avant même que le gouvernement n'entame l'examen de son dossier. Tous ces délais pourraient varier au gré de ce que le gouvernement juge être les fondements des politiques publiques. Cette modification s'intégrerait alors à l'article 25 de la version de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés modifiée par le projet de loi C-11.
Et 10 ans, c'est uniquement si tout va bien. On ne parle évidemment pas ici des demandeurs qui sont renvoyés ou qui se font refuser quoi que ce soit une fois au Canada. On parle de ceux qui pensent rester au pays; ceux-là devront vivre 10 ans dans l'incertitude, à moins d'une intervention du ministre.
Remontons un peu dans le temps. En réalité, le projet de loi nous ramène à l'époque de la Loi sur l'exclusion des Chinois, qui obligeait les hommes d'origine chinoise à vivre leur vie, ici au Canada, sans leur femme, sans leur famille. En fait, de nombreux hommes n'ont jamais revu leur famille de leur vie. Les répercussions économiques étaient trop lourdes.
C'est à cette époque que les Canadiens ont dit qu'ils voulaient que ça cesse et que le concept de réunification familiale a été introduit. Parce que les Canadiens ont jugé qu'il était cruel que des hommes et des femmes puissent vivre au Canada en tant que Canadiens tout en étant séparés de leur famille, de leur femme, de leur mari et de leurs enfants pendant on ne sait combien d'années.
Mais surprise, c'est un premier ministre conservateur, William Lyon Mackenzie King, qui a fait abroger cette loi, en 1947. Quel dommage que l'actuel gouvernement conservateur ne perpétue pas cette tradition humanitaire.
Remontons encore une fois dans le temps, en 1986 cette fois-là...
:
Madame la Présidente, récemment, lors d'une cérémonie de citoyenneté à Ottawa, le a fait un discours à un certain nombre de néo-Canadiens afin de les accueillir dans la famille canadienne.
Le Canada accueille des milliers de nouveaux immigrants et réfugiés tous les ans dans le cadre d'un des systèmes d'immigration les plus justes et les plus généreux au monde. Source de fierté pour notre gouvernement, il reflète aussi la générosité de notre pays. Cependant, nous nous heurtons en ce moment à un grave problème qui menace la sécurité de nos collectivités ainsi que l'intégrité de notre système d'immigration ouvert et généreux.
Le bateau NV Sun Sea est arrivé en août dernier illégalement, et ce, moins d'un an après l'arrivée illégale de l'Ocean Lady. L'arrivée chez nous de ces deux navires, à moins de douze moins d'intervalle, montre bien que les réseaux de passeurs visent le Canada comme destination. Ils pensent que notre généreux système d'immigration peut être utilisé pour faire des profits.
Le Canada accueille et continuera d'accueillir ceux qui attendent leur tour et viennent au Canada à la recherche d'une vie meilleure. Ces gens courageux et travailleurs venus du monde entier enrichissent non seulement notre pays mais aussi notre culture depuis des centaines d'années.
Le gouvernement a déclaré clairement que nous ne pouvons pas tolérer les abus contre notre système d'immigration, qu'ils soient le fait des passeurs ou de ceux qui refusent de respecter les règles. C'est pourquoi le gouvernement a récemment présenté un projet de loi visant à empêcher les passeurs d'abuser du système d'immigration canadien.
Le projet de loi faciliterait les poursuites contre les passeurs, imposerait des peines d'emprisonnement minimales aux passeurs reconnus coupables et tiendrait les armateurs et les exploitants de navires responsables de l'utilisation de ces navires dans l'immigration clandestine.
Je veux citer quelques articles récents des médias.
Logan Logendralingan, rédacteur en chef du journal tamoul Uthayan, déclarait dans un communiqué du 21 octobre qu'il « appuie les mesures que le gouvernement a présentées aujourd'hui pour faire la guerre aux passeurs. »
Dans le même communiqué, publié au nom des éditeurs d'Uthayan, il ajoute également: « Nous croyons que le gouvernement devrait avoir les outils dont il a besoin pour défendre nos frontières et préserver l'équité de notre système d'immigration. C'est pourquoi nous appuyons sans réserve le projet de loi. Les peines d'emprisonnement obligatoires minimales pour les passeurs dissuaderont ceux qui réalisent des profits en mettant des vies humaines en danger [...] Nous voulons encourager les voies légales de l'immigration et nous ne voulons pas que les nouveaux immigrants soient des victimes ou paient de fortes sommes pour réaliser leur rêve de venir au Canada ».
M. Jim Daikos, directeur des opérations canadiennes de la United Macedonian Diaspora of Canada, a déclaré: « Nous sommes heureux de voir le gouvernement prendre des mesures vigoureuses pour dissuader les passeurs de viser les côtes canadiennes et d'abuser de la générosité de notre pays. Ceux qui aident à faire entrer clandestinement des immigrants au Canada rendent notre système d'immigration moins juste pour les immigrants légitimes. »
Cette activité illégale pénalise les gens qui font la file patiemment et en respectant les lois canadiennes.
Récemment, le directeur exécutif du Toronto Community and Cultural Centre a déclaré: « Faire passer clandestinement la frontière à des personnes constitue une activité criminelle qui met la vie de ces personnes en danger. Nous avons affaire à un réseau d'organisations criminelles internationales et le Canada est devenu leur cible en raison de la compassion et du sens de l'équité des Canadiens. »
Dans un communiqué émis le 21 octobre, on lit: « Nous appuyons les propositions du gouvernement parce que nous devons faire clairement comprendre que faire entrer clandestinement des personnes au Canada ne sera pas toléré. Les passeurs doivent comprendre qu'ils seront poursuivis avec toute la rigueur de la loi et les mesures proposées faciliteront cela. »
Il a poursuivi en disant que ceux qui avaient payé pour profiter d’opérations de passage de clandestins devaient comprendre que le Canada n’était pas partie prenante de ces opérations et que nous prendrions des mesures pour protéger nos frontières et assurer la stabilité de notre système d’immigration. Il a dit qu’il était injuste que des gens qui attendent depuis des années d'être réunis à leur famille doivent attendre encore parce que d’autres ont passé devant eux en ayant pris des moyens illégaux. Selon lui, les intéressés doivent comprendre que d’entrer illégalement au Canada ne donne pas automatiquement le droit d’y rester. Il a conclu en se disant heureux que le gouvernement fasse passer ce message.
Le gouvernement prend des mesures pour assurer la sécurité de nos rues et de nos collectivités en prévoyant la détention obligatoire, durant un an, des participants aux opérations de passage de clandestins. Cela laisse le temps de déterminer l’identité de ces gens et de vérifier s’ils sont inadmissibles ou s’ils ont commis des actes illégaux.
J’ai travaillé 18 ans pour la GRC. Pendant toutes ces années, on considérait l’identité comme l’un des éléments clés de la sécurité intérieure. Les prisonniers ne peuvent être libérés s’ils ne peuvent prouver qui ils sont. J’ai eu à traiter avec des personnes qui avaient modifié leur nom illégalement. Nous devions alors envoyer ces gens sous les verrous pour une fin de semaine, ou même une semaine, et il s’agissait de citoyens canadiens.
Avec ce projet de loi, notre gouvernement réduit aussi l’attrait des services de passeurs pour entrer illégalement au Canada. À cette fin, le projet de loi prévoit à l'intention des personnes passées clandestinement des mesures telles que l'impossibilité de demander le statut de résident permanent avant cinq ans, y compris pour celles qui ont obtenu le statut de réfugié; l’impossibilité de recevoir des soins de santé supérieurs à ceux offerts aux Canadiens; une plus grande facilité d’annulation de la demande de statut de réfugié de ceux qui retournent en vacances dans leur pays d'origine ou qui démontrent par d’autres moyens qu’ils n’ont pas véritablement besoin de la protection du Canada; enfin, l’interdiction de parrainer des membres de la famille pour une période de cinq ans.
En outre, notre gouvernement a nommé un conseiller spécial en matière de passage de clandestins et de migration illégale, qui coordonnera l’ensemble des mesures gouvernementales concernant le passage de clandestins.
Ces mesures sont-elles sévères? Oui, sans aucun doute, mais il faut qu’elles le soient si l’on veut que les passeurs et les fraudeurs y pensent à deux fois avant d’agir. Ces mesures sont également justes pour ceux qui attendent — ou ont attendu — légalement et légitimement qu’on leur permette de venir au Canada pour avoir une vie meilleure. Elles sont également justes pour tous les Canadiens qui attendent de nous, avec raison, que nous protégions nos frontières et nos rives ainsi que nos généreux régimes sociaux.
Les habitants de ma circonscription, Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill, m'ont demandé à plusieurs reprises pourquoi nous ne renvoyions pas le navire avec ses passagers. Le gouvernement a envisagé toutes les solutions possibles à ce problème. Nous avons mis en place des mesures extrêmement fermes et efficaces. Nous ne jouerons pas le jeu des passeurs, qui sabordent intentionnellement leurs navires et abandonnent les passagers en haute mer lorsqu'un de nos navires les abordent.
Nous collaborons avec nos partenaires à l'étranger afin d'empêcher ces bateaux de partir vers le Canada. Nous prenons des mesures décisives pour lutter contre le passage de clandestins et les personnes qui abusent de notre généreux système d'immigration.
Certains autres électeurs me demandent s'il est possible pour une personne d'embarquer à bord d'un navire et d'arriver au Canada sans entrave. Au contraire, cette mesure laisse clairement entendre que les passeurs ne seront pas tolérés et que les gens devraient penser à deux fois avant d'avoir recours à eux.
Nous continuerons de collaborer activement avec nos partenaires au Canada et à l'étranger afin de sévir contre les passeurs qui exploitent notre généreux système d'immigration.
Ces mesures amélioreront notre capacité de nous attaquer aux personnes qui se livrent au passage de clandestins et qui tentent d'exploiter le généreux système d'immigration du Canada. Elles renforceront notre capacité de protéger les Canadiens contre les menaces criminelles et terroristes. Elles nous permettront de respecter nos obligations internationales, qui consistent à aider les réfugiés légitimes ayant besoin de notre protection et de notre assistance pour commencer une nouvelle vie, une vie meilleure.
Les Canadiens veulent que nous prenions des mesures sévères, mais justes, pour empêcher les personnes qui abusent de notre générosité de devenir membres de la société canadienne. Nous savons qu'il existe des menaces, et nous devons demeurer vigilants. C'est ce que le gouvernement fait actuellement, et c'est la raison pour laquelle il prend des mesures. Nous continuerons d'agir de la même façon à l'avenir.
:
Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir dans ce débat sur le projet de loi . Comme d'habitude, le gouvernement lui a donné un surnom, la .
Comme d'habitude, ce surnom qu'il a choisi est profondément trompeur car le projet de loi s'en prend en fait beaucoup plus aux réfugiés qu'aux individus qui s'adonnent au passage de clandestins.
Ce projet de loi est malheureusement un profond recul par rapport au progrès que nous avions accompli ici en matière d'immigration et de réfugié. Nous avons eu un excellent exemple de collaboration, de coopération de tous les partis, le parti ministériel et les partis d'opposition, sur le projet de loi , qui a été adopté à l'unanimité dans cette Chambre en juin dernier. Le gouvernement l'avait présenté en réaction aux lacunes du processus de détermination du statut de réfugié au Canada, dans le but de le rendre plus efficace et plus rapide et d'éliminer certains des problèmes qui l'entravaient.
L'opposition n'était pas à l'aise avec ce projet de loi, mais comme le gouvernement était prêt à entendre ses objections, on a amélioré le projet de loi. Nous avons trouvé un consensus, ce qui est rare sous ce gouvernement minoritaire, et cela m'a donné de l'espoir pour le processus. Chose rare de la part de ce gouvernement au pouvoir depuis deux législatures, il s'est montré disposé à collaborer avec les autres formations pour élaborer un projet de loi meilleur, et c'est ce que nous avons finalement obtenu.
Nous faisons maintenant marche arrière avec le projet de loi qui vise à réouvrir des questions que le gouvernement semblait avoir réglées avec le projet de loi . Il essaie de réouvrir des controverses sur lesquelles il avait trouvé un compromis avec les partis d'opposition au printemps.
C'est très inquiétant. Au moment où nous faisons ce que les Canadiens nous ont chargé de faire, c'est-à-dire discuter entre nous pour agir au mieux des intérêts des Canadiens, quand nous avons enfin la possibilité de le faire, le gouvernement fait volte-face radicalement et nous ressort un projet de loi qui remet en question celui que nous avions adopté pas plus tard qu'en juin.
Une voix: Il n'est même pas entré en vigueur.
M. Bill Siksay: Il n'a même pas encore été proclamé, comme le signale un de mes collègues.
C'est très préoccupant, c'est déplorable que nous en soyons là.
Le projet de loi est profondément injuste pour les réfugiés. Nous venons d'entendre le discours d'un conservateur qui ne comprend rien à ce que c'est que d'être un réfugié ou un demandeur de statut au Canada. À l'entendre, tous cens gens-là seraient des criminels ou des criminels en puissance, c'est comme cela qu'il les a décrits. Rien ne saurait être plus loin de la vérité, et même quand on refuse à un demandeur le statut de réfugié, je crois qu'il est très très rare qu'on puisse raisonnablement le qualifier de criminel. Il est lamentable de voir qu'un tel manque de compréhension de l'objet ou de la nécessité de ce projet de loi règne parmi les députés ministériels. C'est très grave et ça donne aux Canadiens une fausse idée de la situation des réfugiés et des demandeurs de statut au Canada.
Même dans les situations qui semblent avoir entraîné la présentation de ce projet de loi, à savoir l'arrivée de navires contenant surtout des réfugiés tamouls sur la côte Ouest du Canada, nous ne pouvons pas encore qualifier ces passagers de criminels. En effet, un grand nombre des personnes qui sont arrivées au Canada à bord de navires, récemment et au cours des dernières années, ont réussi à obtenir le statut de réfugié au Canada. Ce n'étaient pas des criminels. Ce n'étaient pas des gens qui essayaient de passer devant les autres. Ce sont des gens qui ont été désignés comme réfugiés en vertu du processus établi au Canada. La façon dont les gouvernement les décrit est fausse et trompeuse, et il est malheureux qu'il continue à répandre une telle idée.
Le projet de loi comporte de graves lacunes, et il est extrêmement injuste à l'égard des réfugiés. Il ne respecte pas les obligations du Canada en vertu de notre propre loi sur l'égalité, de la Charte et du droit international. C'est triste si on considère que, en 1986, le Haut Commissariat des Nations Unies a décerné au Canada la Médaille Nansen pour les réfugiés en reconnaissance de ses contributions exceptionnelles dans les domaines de la réinstallation des réfugiés et de l'assistance aux réfugiés. Les choses ont vraiment changé depuis.
Le projet de loi priverait les réfugiés de la possibilité d'un examen indépendant. Il préconise la solution coûteuse de la détention, que nous avons essentiellement évitée dans les lois canadiennes sur la détermination du statut de réfugié et sur les réfugiés. Il est beaucoup moins coûteux de laisser vivre les demandeurs d'asile dans la collectivité en attendant la détermination de leur cause que de les placer en détention. C'est un changement de cap radical.
La vérité, c'est que ce projet de loi ne permettrait pas vraiment de s'attaquer au problème du passage de clandestins, malgré toutes les fanfaronnades à son sujet. L'adoption de nouvelles lois ne permettra pas d'arrêter les passeurs, les personnes qui se livrent au genre de choses qui semblent être une source de préoccupation pour le gouvernement.
Les peines minimales obligatoires sont inefficaces pour la plupart des infractions, et je me demande vraiment dans quelle mesure elles pourront avoir un effet dissuasif dans ce genre de circonstances. La seule raison d'être des peines minimales obligatoires est leur effet dissuasif. Personnellement, j'estime qu'elles n'ont pratiquement aucun effet. Je doute fort que les organisations criminelles, qui, selon le gouvernement, sont en train de remplacer leurs livraisons d'armements par des livraisons d'êtres humains, aient conseillé à leurs comparses d'être sur leurs gardes parce que le gouvernement du Canada va imposer des peines minimales obligatoires contre les passeurs. Les peines minimales obligatoires ne vont pas empêcher ces gens-là de poursuivre leurs activités. On n'en tiendra même pas compte. Elles seront inefficaces dans le cas présent. C'est en fait l'un des champs du Code criminel où elles seront le moins efficaces.
Les peines minimales obligatoires sont très nettement inefficaces pour la plupart des infractions criminelles. C'est un leurre de croire, comme le fait le gouvernement, qu'elles permettront de résoudre le problème des passeurs.
Les réfugiés sont généralement des gens qui se trouvent dans une situation désespérée. L'un des critères utilisés pour déterminer si une personne est un réfugié consiste à vérifier si sa vie est menacée dans son pays d'origine, si elle a été persécutée et si elle cherche véritablement asile dans notre pays. C'est de notre devoir d'accueillir ces gens-là et de déterminer leur statut.
Avec le projet de loi , nous avons pris des mesures pour accélérer le processus, qui prenait auparavant trop de temps dans certains cas. Depuis qu'ils ont le pouvoir, les conservateurs n'ont rien fait pour accélérer le processus de détermination du statut de réfugié, en ce sens qu'ils n'ont reconduit aucune nomination aux commissions d'appel de l'immigration et des réfugiés. L'arriéré s'est accru parce qu'ils ont refusé de reconduire le mandat de tous ceux qui avaient été nommés par le gouvernement libéral précédent, et qu’ils ont tardé à annoncer leurs propres nominations. Les conservateurs sont donc directement responsables de l'arriéré qui s'est accumulé.
Dans le projet de loi , nous avions pris des mesures supplémentaires pour garantir l'efficacité du processus. Nous avions notamment veillé à ce que ceux qui n'obtenaient pas le statut de réfugié soient expulsés du Canada. J'ai toujours affirmé qu'une politique d'immigration devait être assortie d'une politique efficace en matière d'expulsion des réfugiés non admissibles. C'est absolument indispensable si nous voulons avoir un système efficace en matière de réfugiés et d'immigration. Or, c'est l'un des secteurs dans lesquels notre politique d'immigration a été insuffisante dans le passé.
J'aimerais maintenant aborder certaines modalités précises du projet de loi.
Je crois sincèrement que le projet de loi punit les réfugiés, si je m'en tiens aux études effectuées par le Conseil canadien pour les réfugiés, en qui j'ai entière confiance. Cet organisme coiffe la quasi-totalité des organisations canadiennes qui s'occupent des réfugiés et des immigrants. Il s'intéresse également de près aux politiques en matière d'immigration et de réfugiés, et c’est le porte-parole des immigrants et des réfugiés de l'ensemble du Canada. Chaque fois que je dois prendre la parole sur des questions relatives à l'immigration et aux réfugiés, je m'inspire de ses travaux.
Le projet de loi a été présenté comme une mesure législative qui ciblera les passeurs, mais en fait, la plupart de ses dispositions ciblent non pas les passeurs, mais les réfugiés, et modifient radicalement les choses pour les réfugiés. La députée libérale qui m'a précédé a fait le compte, et il semblerait que douze articles du projet de loi portent sur les réfugiés alors que seulement cinq portent sur les passeurs. C'est donc un projet de loi qui n'est pas très équilibré sur ce plan-là.
Selon ce projet de loi, les réfugiés, qui comprennent les enfants, seront obligatoirement détenus pendant un an, sans pouvoir avoir recours à un examen indépendant, et ils ne pourront pas se prévaloir de la clause sur la réunification des familles ni du droit de se déplacer pendant cinq ans. Ce sont des restrictions très sévères. La détention obligatoire n'est pas une procédure courante au Canada, et je pense que cela va entacher notre législation sur les réfugiés.
Nombreux sont ceux qui pensent qu’avec le projet de loi , les réfugiés risquent fort d'être triplement victimisés: d'abord par ceux qui les persécutaient dans leur pays d'origine; deuxièmement, par les passeurs sans scrupules auxquels ils doivent faire appel pour fuir la persécution; et troisièmement, par un processus injuste au Canada. C'est tout à fait le contraire de ce que nous devrions faire. Nous devrions essayer de réduire les torts subis par ces réfugiés et par tous ceux qui sont persécutés et qui craignent pour leur vie dans leur pays d'origine. Malheureusement, le projet de loi ne fait qu'aggraver cette victimisation.
Comme je l'ai déjà dit, le texte qui nous est soumis semble aller à l'encontre des engagements que le Canada a contractés en vertu du droit international et de la Charte canadienne des droits et libertés. La Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant est un autre texte qui joue un rôle ici et qui nous préoccupe beaucoup. Le Canada a également pris des engagements en vertu de la Convention des Nations unies relative au statut des réfugiés. Je pense donc qu’en raison de tous nos engagements internationaux, sans parler de la Charte canadienne des droits, le projet de loi sera contesté car, quelle que soit la façon dont on l’aborde, il est problématique. Par exemple, si l'on prend la Convention des Nations unies relatives aux droits de l'enfant, on voit que tout retard apporté à la réunification d'une famille constitue une violation flagrante des droits de l'enfant. Si un parent fait une demande de statut de réfugié au Canada, le risque que l'enfant ne retrouve pas sa famille avant cinq ans est extrêmement grave pour cet enfant, et je crois que cela constitue une violation flagrante des droits de cet enfant.
La pire conséquence du projet de loi est qu'il crée deux catégories de réfugiés: ceux qui seront désignés par le ministre selon le mode de transport par lequel ils sont arrivés, et qui seront traités différemment des autres réfugiés qui arrivent au Canada par d'autres moyens. Je pense que c'est une disposition tout à fait discriminatoire.
En fait, cela nous ramène aux engagements que nous pensions avoir reçus du gouvernement lorsque nous avons négocié le projet de loi , la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés. Dans ce projet de loi, le gouvernement avait déjà essayé de créer deux classes de réfugiés et d'avoir un système de désignation en fonction du pays d'origine, selon qu'il s'agissait de pays sûrs ou non, et nous savons que c'est une distinction pratiquement impossible à faire.
Nous avons donc négocié avec le gouvernement pour faire changer cela, et nous nous sommes débarrassés de ces deux classes de réfugiés qui faisaient partie intégrante du projet de loi .
Aujourd'hui, le gouvernement essaie, avec ce projet de loi, de réintroduire un système de désignation. Cette fois-ci, ce n'est pas en fonction du pays d'origine du réfugié mais plutôt en fonction du mode de transport qu'il ou elle a utilisé pour arriver au Canada. Je pense que c'est une façon de réintroduire un système dont nous pensions nous être débarrassés lors de négociations antérieures, avec le projet de loi précédent.
Je pense également que le pouvoir qui est conféré au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration pour procéder à ces désignations est tout à fait disproportionné. Il est tout à fait excessif de donner à un ministre le pouvoir de déterminer quels réfugiés seront privés de certains droits qui sont pourtant garantis par la législation canadienne sur la détermination du statut de réfugié. J'estime donc qu'il est tout à fait justifié de contester ce projet de loi, ne serait-ce que parce qu'il crée deux classes de réfugiés et qu'il confère un pouvoir excessif au ministre.
Certes, un ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration doit pouvoir jouir d'une certaine discrétion lorsqu'il est question de considérations humanitaires, par exemple, car les dossiers des réfugiés et des immigrants sont souvent le reflet de vies très complexes, et il est nécessaire qu'un ministre, surtout celui qui détient ce portefeuille, jouisse d'une certaine discrétion. Toutefois, je ne pense pas qu'il soit souhaitable d'ajouter à notre loi sur l'immigration et les réfugiés une clause qui donne au ministre le droit de désigner des réfugiés de première classe, des réfugiés de deuxième classe et des réfugiés qui n'appartiennent à aucune classe. C'est très grave.
Ce projet de loi, nous l'avons dit, prévoit la détention obligatoire de ceux que le ministre aura désignés réfugiés de seconde classe, sans possibilité d'examen indépendant. Ce type de détention arbitraire va certainement à l'encontre de la Charte et du droit international. Selon le projet de loi, les enfants aussi pourront être détenus. Si elles ne sont pas admises comme réfugiés ou libérées pour des motifs discrétionnaires par le ministre, dans des circonstances exceptionnelles, les personnes désignées seront gardées en détention pendant un minimum d'une année avant de pouvoir demander un examen des décisions les concernant. Nous avons des exemples dans la jurisprudence canadienne qui montrent qu'une telle façon de faire va à l'encontre de la Charte.
Le projet de loi prévoit aussi des conditions obligatoires accompagnant la mise en liberté et une détention pour une durée indéfinie après 12 mois sans possibilité de mise en liberté si le ministre estime que l’identité de l’intéressé n’a pas été établie. Ces mesures privent sérieusement les gens de leur liberté sans qu’un tribunal indépendant ne puisse examiner si elles sont nécessaires compte tenu de leur situation particulière ou de leur cas particulier.
Le projet de loi refuse également aux demandeurs d’asile de la catégorie désignée le droit de faire appel d’une décision négative devant la Section d’appel des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Il est extrêmement décourageant d’avoir à débattre encore une fois à la Chambre des communes de la nécessité d’une Section d’appel des réfugiés. La Section d’appel des réfugiés, la possibilité d’en appeler de la décision de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, faisait partie de la nouvelle Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés qui est entrée en vigueur en 2001. En fait, sous le gouvernement libéral alors au pouvoir, l’établissement de la Section d’appel des réfugiés est une solution de compromis qui a été adoptée en collaboration avec tous les partis à la Chambre et qui a permis de faire approuver cette loi.
Malheureusement, même si nous avons obtenu la Section d’appel des réfugiés comme important palier d’appel dans le processus de détermination du statut de réfugié, le gouvernement libéral d'alors et les gouvernements conservateurs qui lui ont succédé ne l’ont jamais mise en place. Cela a été adopté et faisait partie de la loi, mais n’est jamais entré en vigueur. Cela a posé un sérieux problème. Nous avons même eu des projets de loi d’initiative parlementaire, des rapports de comités et d’autres motions qui demandaient au gouvernement de rendre ces dispositions législatives exécutoires, mais sans résultat.
Récemment, au cours du débat sur le projet de loi , nous avons cru, encore une fois, que nous avions remporté une victoire et que la Section d’appel des réfugiés, ce palier important permettant d’en appeler du rejet d’une demande d’asile, serait enfin mise en place. Toutefois, nous voyons maintenant que le gouvernement propose sa suppression encore une fois dans le projet de loi . Nous pensions que c’était chose faite, mais cela n’a pas été fait. Nous pensions de nouveau que c’était gagné, mais nous allons maintenant limiter la loi.
Tous les organismes ont dit que c’était un aspect important de la législation sur les réfugiés et que cette section devait exister ici au Canada. Les organisations internationales ont dit que le Canada avait besoin de ce palier d’appel, que le Canada devait maintenir sa loi existante sur les réfugiés et que c’était un élément crucial de ce que devraient être nos lois concernant les réfugiés. Je suis vraiment déçu que le gouvernement cherche de nouveau à limiter la Section d’appel des réfugiés.
La réunification des familles pose un problème. Comme je l’ai mentionné, on empêche les familles de se réunir pendant cinq ans et les réfugiés de s’intégrer dans la société. Cela ralentit ce processus alors que c’était l’un des succès de la loi canadienne sur l’immigration. Nous avons permis aux nouveaux immigrants et aux réfugiés de participer à la société, d’avoir le sentiment d’appartenir au Canada, d’être des membres appréciés de la collectivité, mieux que ne l’ont fait les autres pays, mais voilà que dans cette loi, nous dressons de nouveau des obstacles et cela à nos risques. Nous tournons le dos à une politique qui s’est révélée efficace et dont les autres pays reconnaissent l’efficacité.
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Madame la Présidente, l'arrivée sur les côtes canadiennes des deux derniers navires remplis de réfugiés tamouls a suscité bien des préoccupations au sein du public. Selon les sondages, la vaste majorité des Canadiens souhaitent que les prochains bateaux soient renvoyés et que les réfugiés tamouls soient expulsés, de crainte que notre généreux système ne soit exploité par des éléments criminels.
Comme d'habitude, le gouvernement n'a pas raté une occasion de transformer les préoccupations du public en une mauvaise mesure législative, qui mise sur la crainte et l'incompréhension dans l'espoir de réaliser des gains électoraux.
Le projet de loi est une mesure législative exécrable, mais une publicité très efficace, car il permet au gouvernement de parler de sévir contre les méchants passeurs qui exploitent à des fins criminelles des gens extrêmement vulnérables qui fuient la persécution et l'oppression dans leur pays. Il est toujours payant de proclamer qu'on combat les mécréants afin de protéger la veuve et l'orphelin.
Le problème, c'est que tout cela n'est que du vent. Cette mesure législative ne s'attaque pas vraiment aux criminels et, plutôt que de protéger la veuve et l'orphelin, elle prévoit traquer et punir les demandeurs d'asile.
Permettez-moi d'être très clair sur un point. Les libéraux, et en fait les députés de tous les partis à la Chambre, sont à la fois fermement déterminés à lutter contre les passeurs et grandement préoccupés par notre capacité à le faire tout en protégeant l'intégrité de nos systèmes d'immigration et de détermination du statut de réfugié.
Cependant, il est manifeste que cette nouvelle mesure législative contient peu d'éléments visant à vraiment sévir contre les passeurs. Il y a des dispositions, dont le gouvernement est très satisfait, qui prévoient des peines minimales obligatoires allant jusqu'à 10 ans, mais elles risquent peu d'avoir un effet dissuasif parce que le passage de clandestins peut déjà être passible d'une peine d'emprisonnement à perpétuité.
Il y a quelques dispositions mineures qui visent les propriétaires de navires qui enfreignent les arrêtés du ministre, mais rien qui risque vraiment d'ébranler les activités d'immigration clandestine qui génèrent des millions de dollars. De fait, de nombreuses dispositions entraîneront seulement une augmentation du coût pour les demandeurs d'asile et feront en sorte qu'ils emprunteront des routes maritimes plus dangereuses.
La plupart des dispositions de cette mesure législative visent plutôt à tenter de dissuader les réfugiés eux-mêmes. Plusieurs dispositions pourraient être considérées contraires à la Charte. D'autres sont directement contraires à nos obligations en vertu du droit international. Dans tous les cas, elles causeront de grandes difficultés aux réfugiés qui viennent au Canada en quête de protection.
Cette mesure législative constitue un revirement complet et revient sur la tradition humanitaire qui fait la fierté des Canadiens à l'égard des réfugiés et des personnes déplacées.
[Français]
Avec ce projet de loi, le gouvernement propose de créer deux classes de réfugiés, selon le mode de transport qu'ils ont utilisé pour arriver ici. Qu'on y pense bien: quelqu'un est évalué, interrogé et jugé par notre système pour déterminer s'il est un réfugié légitime, mais il sera traité différemment parce que le ministre n'aime pas la manière dont il est venu au Canada. Cela n'a rien à voir avec la qualité de réfugié; c'est entièrement arbitraire. Ces gens sont reconnus comme des réfugiés, c'est-à-dire qu'ils craignent à juste titre pour leur vie en raison de leur race, leur religion, leur nationalité et leur appartenance à un groupe social, ou de leurs opinions politiques. Ce sont des réfugiés légitimes, mais parce qu'on n'aime pas le moyen qu'ils ont utilisé pour arriver ici, on leur impose des pénalités sévères, qui sont sans doute anticonstitutionnelles et qui contreviennent certainement à nos obligations internationales.
On ne peut pas juger les gens sur leur moyen d'arrivée parce qu'un réfugié utilise des moyens peu orthodoxes pour se rendre dans un pays d'accueil. Dans la plupart des cas, les gens ont su trouver des moyens peu orthodoxes pour arriver au Canada. Or le gouvernement décide de juger ces personnes selon leur pays d'origine. Le fait de désigner les gens qui arrivent par des moyens illégaux revient à pouvoir juger n'importe qui.
En plus de garder ces réfugiés désignés sous clé, le gouvernement leur imposerait également une période de probation de cinq ans, les empêchant de quitter le Canada ou de poser leur candidature pour parrainer la venue d'autres membres de leur famille, qui sont sûrement en difficulté. Il permettrait aussi de détenir les demandeurs d'asile pour une période allant jusqu'à un an.
La présidente du Conseil canadien pour les réfugiés, Wanda Yamamoto, a déclaré ceci:
Des mesures qui prolongent la détention des réfugiés, empêchent la réunification familiale et limitent leur liberté de mouvement sont susceptibles de violer la Charte canadienne et les obligations internationales en matière de droits humains. Les gens qui doivent fuir pour sauver leur vie ont besoin d’un asile et d’un accueil chaleureux, et non d’être punis.
[Traduction]
Voilà ce qui est si inquiétant dans cette capacité à créer deux catégories de réfugiés, tout simplement selon que le ministre approuve ou non leur façon d'arriver ici.
Je suppose que le raisonnement qui sous-tend cette mesure est que, si les gens savent que le ministre peut désapprouver le moyen utilisé pour venir ici, ils n'embarqueront pas dans ces bateaux dangereux et ne risqueront pas leur vie en effectuant une traversée dans un navire surchargé. Toutefois, si on pense aux pressions qu'ils subissent au moment d'embarquer et au fait qu'ils consentent à payer à des criminels des sommes d'argent astronomiques qu'ils n'ont pas, le fait que le ministre risque de les désapprouver ne les arrêtera pas.
En créant deux catégories de réfugiés, selon qu'on approuve ou non le moyen utilisé pour venir ici, on crée des divisions au sein même des gens qui sont les plus vulnérables, des gens dont le Canada a juré de défendre et de protéger les droits. Cela revient à écarter complètement les principes canadiens d'équité et de justice qui définissent le pays depuis des décennies.
La Charte canadienne des droits et libertés stipule que chacun a droit à la protection contre la détention ou l'emprisonnement arbitraires. Chacun a le droit, en cas d'arrestation ou de détention, d'être informé dans les plus brefs délais des motifs de son arrestation ou de sa détention, d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat et de faire contrôler, par habeas corpus, la légalité de sa détention et d'obtenir, le cas échéant, sa libération.
En outre, le fait que les réfugiés n'auraient pas le droit de demander la résidence permanente pendant cinq ans après la décision prise au sujet de leur demande contrevient à l'article 34 de la Convention et du Protocole des Nations Unies relatifs au statut des réfugiés. Cet article prévoit que les États doivent s'efforcer d'accélérer la procédure de naturalisation des réfugiés. Ce projet de loi a pour effet de balayer sous le tapis les obligations internationales du Canada et ses lois.
La Convention de Genève prévoit ce qui suit:
Les États contractants délivreront aux réfugiés résidant régulièrement sur leur territoire, des titres de voyage destinés à leur permettre de voyager hors de ce territoire [...]
C'est très clair. De nouveau, le projet de loi va à contre-courant en interdisant à ces gens de voyager pendant une période pouvant aller jusqu'à cinq ans. Même une fois qu'ils ont obtenu le statut de réfugié, ils doivent attendre d'être résidents permanents avant de pouvoir se procurer des documents de voyage.
La Convention de Genève prévoit également que les États contractants, dont nous faisons partie:
[...] s’efforceront notamment d’accélérer la procédure de naturalisation et de réduire, dans toute la mesure du possible, les taxes et les frais de cette procédure.
Dans une lettre ouverte publiée récemment, Amnistie Internationale a déclaré qu'il s'agissait d'une des choses qui enfreignent les droits des réfugiés. Cette situation ne tient pas compte du fait que de nombreux réfugiés qui craignent avec raison d'être persécutés se tournent vers les passeurs pour obtenir de l'aide. Ils sont désespérés parce qu'aucune autre option ne s'offre à eux et que le gouvernement de leur pays d'origine qui les opprime et les calomnie n'est pas disposé à les aider à émigrer.
[Français]
Une société juste, la Charte canadienne des droits et libertés, les ententes internationales, rien n'est à l'épreuve de ce gouvernement.
Nous avons de bonnes raisons d'avoir de graves inquiétudes au sujet de ce projet de loi. Je comprends et nous comprenons tout à fait qu'on doive s'attaquer au problème du trafic d'humains, mais les conservateurs ont manqué de raffinement, de subtilité et de respect envers la Charte canadiennes des droits et libertés. On est en train de différencier des gens non par les dangers qu'ils vivent chez eux, mais par leur moyen d'accéder au Canada. Ce n'est vraiment pas la bonne façon de faire.
[Traduction]
Les Tamouls qui sont arrivés par navires entiers en 2009 et 2010 sont une nouvelle vague de demandeurs d’asile arrivés de cette façon. La réaction du gouvernement à la venue du premier navire a été relativement discrète. Il n’y a pas eu de très vives réactions de la population contre ces demandeurs du statut de réfugié.
Toutefois, bien avant l’arrivée du deuxième navire, le lançait déjà un avertissement aux Canadiens: ce navire était plein de terroristes et de criminels. Cela, avant même que ces gens ne soient évalués, examinés, interviewés et jugés selon les mérites de leur dossier, comme l’exigent nos obligations dans le cas de chacun des réfugiés.
Cette déclaration a retourné l’opinion publique contre ces demandeurs d’asile avant même qu’ils ne débarquent au Canada, et il y a eu un ressac énorme. L’effet de cette réaction à courte vue a été l’apparition d’un fort sentiment d’hostilité contre les réfugiés et les immigrants.
Ce n’est pas la réaction normale du Canada ni des Canadiens. Nous sommes un pays qui a toujours été ouvert aux immigrants et aux réfugiés, accueillant pour quiconque dans le monde veut venir ici se bâtir une nouvelle vie dans la sécurité, à l’abri de la persécution. Et voici que nous attisons les persécutions et avivons les tensions entre les Canadiens et des personnes qui pourraient devenir des Canadiens.
Il est extrêmement important que le gouvernement du Canada fasse preuve de responsabilité dans sa façon de défendre notre système d’immigration et du statut de réfugié, de faire comprendre aux Canadiens que nous sommes forts grâce à notre diversité et non malgré elle. Nos différences sont ce qui nous définit et fait du Canada un pays de jour en jour plus souple, ouvert, confiant et puissant.
Le gouvernement doit être beaucoup plus responsable dans le choix des moyens d’élever ou de rabaisser le niveau du débat public sur un enjeu comme celui-ci.
Il importe d’attirer l’attention sur ce point, car le ministre et le , en prétendant qu’il faut s’assurer que les immigrants qui suivent les circuits normaux ne sont pas injustement traités à cause des resquilleurs, font de la désinformation.
Permettez-moi d’éventer un secret que le gouvernement veut cacher à tout le monde. Les réfugiés n’ont pas à faire la queue. Il n’y a pas de resquilleurs parmi les réfugiés. Nous avons un processus à leur intention. Quiconque arrive au Canada pour demander l’asile est renvoyé à un processus d’évaluation qui n’a rien à voir avec les quotas que nous établissons pour les réfugiés, les immigrants de la catégorie du regroupement familial et les migrants économiques. Ce dispositif n’a rien à voir avec le processus légitime d’immigration, la file et les délais d’attente.
Le réfugié est évalué selon la valeur de son dossier. Malheureusement, comme nous l’avons vu dans le cas des déserteurs américains et bien d’autres cas, le gouvernement préfère s’ingérer dans le processus d’évaluation au mérite des demandeurs du statut de réfugié. Il juge d’avance. Il encadre le débat de telle manière que les gens confondent immigrants et réfugiés. Ce sont deux catégories bien distinctes.
En attisant nos peurs et l’inquiétude et l’exaspération des immigrants légitimes qui sont ici et se conforment au système, qui considèrent ces autres personnes comme des resquilleurs parce que le gouvernement les qualifie de tels, nous ne rendons pas service au Canada. Nous manquons à notre responsabilité internationale de justice et d’équité. Nous nous écartons des droits et principes que le Canada a toujours défendus.
Nous aurions voulu que, au lieu de faire de la désinformation et de tenir des conférences de presse devant des navires, le gouvernement songe à une approche différente.
Premier élément et le plus flagrant, dans le cas des demandeurs d’asile sri-lankais, il faut chercher par tous les moyens à favoriser un règlement de paix au Sri Lanka.
Des dizaines de milliers de Tamouls sont toujours détenus dans des camps. Le gouvernement fait l’objet d’une enquête de l’ONU, qui cherche à savoir si le gouvernement s’est rendu coupable de crimes contre l’humanité pendant la guerre civile. Malheureusement, il y a toujours des cas de torture et de disparition.
Toutefois, il n’y a pas de doute que de vraies occasions de paix existent. La minorité tamoule souhaite une certaine forme d’autonomie qu’elle pourrait obtenir dans le cadre d’un État fédéral. De plus en plus de Tamouls font partie du gouvernement sri lankais. On peut noter une certaine ouverture quand il s’agit d’améliorer les relations entre la communauté tamoule, la communauté internationale et le gouvernement.
Nous faisons des progrès à cet égard. Le Canada peut jouer un rôle en contribuant à modeler cette paix et en la favorisant. Nous savons ce que c’est que de vivre dans un pays où se côtoient des groupes culturels, linguistiques et religieux différents. Nous savons comment faire marcher une telle société. Nous en sommes la preuve vivante ici, à la Chambre des communes. Nous devons exploiter notre capacité de collaborer avec des partenaires internationaux et de travailler avec les Nations Unies. Malheureusement, c’est un domaine dans lequel le gouvernement n’a pas particulièrement brillé.
Lorsque nous avons invité le gouvernement à collaborer avec des partenaires internationaux, à arrêter le passage de clandestins, à réduire la probabilité de contact avec les passeurs et à les traduire en justice, qu’a-t-il fait? Les conservateurs s’en sont pris à eux de concert avec les services de police locaux. Mais au lieu d’attraper les passeurs, ils ont ramassé les demandeurs d’asile. Ce n’est pas ainsi qu’il faut travailler si on veut vraiment réprimer le passage des clandestins.
Les gens ont parlé de renvoyer les bateaux. Je suis heureux de constater que le gouvernement n’a pas choisi d’encourager cette idée dans le projet de loi parce que ce serait une violation d’un certain nombre de conventions internationales, qui ferait courir d’énormes risques à des gens extraordinairement vulnérables.
Comme le renvoi des bateaux n’est pas légal, la seule possibilité qui reste est de traiter rapidement les demandes de statut de réfugié. Chacun sait que la façon la plus efficace de dissuader les demandes frivoles, irresponsables ou infondées et de ralentir les mouvements de réfugiés consiste à soumettre les personnes en cause à un traitement rapide mais juste et à expulser sans délai ceux dont la demande est rejetée. Malheureusement, le projet de loi ne favorise pas des mesures de ce genre.
La détention des demandeurs d’asile alliée à des auditions rapides mais conformes à la loi constitue un moyen efficace de dissuasion. Dans le cas des Tamouls du Sri Lanka, il est bien possible, compte tenu de la situation actuelle, que certains des demandeurs soient acceptés. Toutefois, il faut que le traitement des demandes soit dans tous les cas rapide et juste.
Ces mesures, accompagnées d’efforts pour régler la situation au Sri Lanka et pour freiner le mouvement des navires en travaillant avec les gouvernements de la région, constituent la réaction la plus efficace à long terme. Il est possible d’agir ainsi sans susciter des sentiments anti-immigrants au Canada et en veillant à respecter nos obligations en vertu du droit international et de la Charte.
Il y a cependant un autre élément qui m’inquiète dans ce projet de loi. Les orateurs successifs de l’opposition ont mis en évidence tous les défis juridiques et tous les manquements possibles aux conventions qu’on trouve dans cette mesure législative. Comme des experts en ont souvent parlé, la chose qui me dérange le plus dans ce projet de loi farci de mesures inefficaces et illégales, c’est qu’il a été rédigé par les bonnes gens d’un ministère généralement considéré comme étant le meilleur ministère de l’Immigration du monde.
Nos braves bureaucrates ont conçu cette mesure législative qui est loin de valoir le travail et l’approche équilibrée qu’on pouvait constater dans le projet de loi que nous avons adopté à l’unanimité à la Chambre. Ce projet de loi était censé améliorer et équilibrer notre processus d’évaluation des réfugiés et assurer à ceux-ci davantage d’équité.
Sous prétexte de dissuader les passeurs ou le passage de clandestins, le gouvernement a introduit de vastes changements dans notre système de détermination du statut de réfugié et dans les droits de ceux qui sont reconnus comme réfugiés.
Soyons parfaitement clairs. Il n’y a pas grand-chose dans ce projet de loi qui contribue à la répression du passage de clandestins. En fait, il ne contient que des mesures de représailles contre les réfugiés qui ont décidé de recourir aux passeurs…