Passer au contenu

COOP Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

SITUATION DES COOPÉRATIVES AU CANADA

CONTEXTE DE L’ÉTUDE

Le 18 décembre 2009, l’Assemblée générale des Nations Unies a résolu de proclamer 2012 « Année internationale des coopératives ». Cette résolution, qui souligne la contribution des coopératives au développement économique et à l’innovation sociale partout dans le monde, était soutenue par le Canada[1]. Les années internationales sont proclamées par les Nations Unies afin d’attirer l’attention sur des enjeux majeurs. En proclamant 2012 « Année internationale des coopératives », l’Organisation des Nations Unies désire encourager les gouvernements à créer un contexte propice au développement des coopératives et à stimuler leurs contributions à l’environnement global dans lequel elles évoluent.

Dans ce contexte, le 30 mai 2012, la Chambre des Communes a adopté unanimement la motion suivante :

Qu’un comité spécial soit créé afin d’examiner la situation des coopératives au Canada et de formuler des recommandations en : a) identifiant le rôle stratégique des coopératives au sein de notre économie; b) précisant une série de politiques sur les questions économiques, fiscales, et monétaires qui permettront à la fois de renforcer les coopératives canadiennes et de protéger les emplois qu’elles créent; c) explorant la problématique de la capitalisation des coopératives, ses causes, ses effets et ses pistes de solutions; d) explorant s’il y a lieu de mettre à jour la Loi sur les coopératives, adoptée en 1998; e) recherchant les moyens à la disposition du gouvernement pour donner davantage de soutien et de place aux coopératives canadiennes; et que le Comité soit composé de douze membres, dont sept membres du parti gouvernemental, quatre membres de l’Opposition officielle, un membre du Parti libéral, pourvu que le président soit issu du parti gouvernemental; qu’en plus du président, un vice-président provienne de chaque parti de l’opposition; que le comité dispose de tous les pouvoirs que le Règlement confère aux comités permanents, en plus du pouvoir de voyager, accompagné du personnel nécessaire, à l’intérieur et à l’extérieur du Canada, sujet à l’autorisation habituelle de la Chambre; que le comité soit composé des députés inscrits sur une liste que le whip de chaque parti déposera auprès de la Greffière de la Chambre, au plus tard le 8 juin 2012; que le quorum du comité spécial soit fixé à sept membres pour toute délibération, sous réserve qu’un membre de l’opposition et un membre du parti gouvernemental soient présents; que les membres de ce comité puissent, à l’occasion, et si nécessaire, se faire remplacer conformément aux dispositions de l’article 114(2) du Règlement; que le comité fasse rapport de ses recommandations à la Chambre au plus tard le 30 novembre 2012.

Le Comité spécial sur les coopératives ainsi créé s’est réuni le 10 juillet ainsi que du 24 au 27 juillet à Ottawa, et a rencontré un total de 46 organisations. De plus, le Comité a reçu plus de 60 documents écrits de la part d’intervenants du secteur coopératif. Le présent rapport procure un compte-rendu de ces témoignages et présente des recommandations au gouvernement du Canada. La structure du rapport s’inspire de la motion adoptée par la Chambre des Communes; les recommandations au gouvernement du Canada sont présentées en guise de conclusion tandis que les quatre chapitres du rapport fournissent le contexte aux dites recommandations. Le chapitre I décrit le rôle stratégique des coopératives au sein de l’économie canadienne. Le chapitre II examine les enjeux fiscaux et monétaires touchant les coopératives au Canada, tandis que la problématique de l’accès au financement pour les coopératives est scrutée dans le chapitre III. Finalement, le chapitre IV présente certains enjeux juridiques concernant les coopératives canadiennes.

CHAPITRE I — LE RÔLE STRATÉGIQUE DES COOPÉRATIVES AU SEIN DE L’ÉCONOMIE CANADIENNE

A. Les coopératives : définition et principes

Les coopératives et les caisses de crédit sont des entreprises dont les affaires sont dictées tant par des considérations d’ordre économique que social[2]. Elles diffèrent des entreprises individuelles et des sociétés par actions sur trois points[3] :

  • leurs principaux objectifs sont de combler les besoins de leurs membres, plutôt que de maximiser leurs profits;
  • le contrôle des coopératives est exercé démocratiquement par leurs membres, qui ont un pouvoir égal (un membre, un vote), et non en fonction du nombre de parts ou d’actions détenues dans l’entreprise;
  • les profits des coopératives sont redistribués à leurs membres en fonction de leur utilisation des services de celle-ci, et non en fonction du capital investi.

Les coopératives de par le monde fonctionnent en respectant les sept principes fondamentaux du mouvement coopératif. Ces principes sont :

  1. Adhésion volontaire et ouverte à tous.
  2. Pouvoir démocratique exercé par les membres et droits de vote égaux.
  3. Participation économique des membres au capital de leurs coopératives.
  4. Autonomie et indépendance dans le but de préserver le pouvoir démocratique des membres.
  5. Éducation, formation et information sur la nature et les avantages de la coopération.
  6. Coopération entre les coopératives au sein de structures locales, régionales, nationales et internationales.
  7. Engagement au développement durable de leur communauté[4].

Les principes présentés ci-dessus sont universels en ce sens qu’ils s’appliquent de façon générale à l’ensemble du mouvement coopératif. Un témoin a donné une intéressante perspective micro-économique à ces principes en illustrant la différence entre le modèle coopératif et le modèle corporatif en ce qui a trait à la redistribution des profits et la gouvernance des entreprises :

Dans notre cas, la coopérative rémunère le travail de ses membres, c'est-à-dire la production laitière qui provient des fermes et qui est livrée à la coopérative.

Quand la coopérative a servi tous les clients, elle partage ses excédents en se basant sur le travail fait à la ferme et sur le volume de lait qui y a été produit. Une entreprise à capital-actions, pour sa part, va rémunérer le capital. Peu importe de quel domaine il s'agit, que vous soyez un financier ou un investisseur, elle va rémunérer le capital que vous avez investi dans l'entreprise. C'est une différence importante.

De plus, le conseil d'administration de notre coopérative est constitué de 15 administrateurs. Pour être administrateur de la coopérative, il faut être un producteur laitier membre de la coopérative. Cela fait en sorte que les membres contrôlent la destinée de la coopérative en fonction de leurs besoins, soit la transformation de leur lait, afin d'en obtenir une plus-value[5].

B. Les organisations nationales

L’Association des coopératives du Canada et le Conseil canadien de la coopération et de la mutualité sont les deux principales associations de coopératives au Canada. L’Association des coopératives du Canada représente les coopératives œuvrant dans les milieux anglophones, alors que le Conseil canadien de la coopération et de la mutualité fait de même pour les coopératives œuvrant dans les milieux francophones. La mission de ces associations est de faire la promotion du modèle coopératif, de soutenir le développement des coopératives et d’être les porte-parole des coopératives auprès du gouvernement.

Pour ce qui est du gouvernement fédéral, plusieurs ministères et organismes jouent un rôle auprès des coopératives :

  • Agriculture et Agroalimentaire Canada

Le Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives a été créé en 1987 et relève d’Agriculture et Agroalimentaire Canada. Il conseille le gouvernement fédéral sur les politiques qui ont un impact sur les coopératives, coordonne la mise en application de ces politiques et encourage l’utilisation du modèle coopératif comme modèle de développement socio-économique des collectivités canadiennes. Il sert aussi de point de liaison entre les coopératives et les nombreux organismes fédéraux avec lesquels elles traitent.

  • Industrie Canada

Industrie Canada est responsable de l’élaboration de la législation fédérale permettant la constitution des personnes morales de régime fédéral, autres que les institutions financières. Notamment le Ministère est responsable de la Loi canadienne sur les coopératives[6].

Une entité d’Industrie Canada, Corporations Canada, est quant à elle responsable de l’administration de la loi et de la constitution en coopérative.

  • Finances Canada

Finances Canada est responsable de la législation fédérale relative aux institutions financières de régime fédéral. Cela inclut, notamment la Loi sur les associations coopératives de crédit[7], permettant la constitution d’associations coopératives de crédit, et de la Loi sur les sociétés d’assurances[8], permettant entre autres la constitution de mutuelles d’assurances. Le Ministère est aussi responsable de la Loi sur les banques[9], laquelle permettra la constitution de coopératives de crédit une fois que la réglementation nécessaire sera adoptée et mise en vigueur par le gouvernement.

  • Bureau du surintendant des institutions financières

Le Bureau du surintendant des institutions financières supervise les institutions financières de régime fédéral et veille à ce qu’elles se conforment aux lois qui les régissent. À ce titre, c’est le Bureau qui applique la Loi sur les associations coopératives de crédit, la Loi sur les sociétés d’assurances et la Loi sur les banques, et qui est responsable de la constitution des coopératives de crédit et des mutuelles d’assurances de régime féderal.

C. Rôles stratégiques des coopératives dans l’économie canadienne

1. Une force économique

Au Canada, les coopératives jouent un rôle important dans de nombreux secteurs de l’économie. Traditionnellement, elles sont importantes dans les secteurs financier (caisses populaires, caisses de crédit) et agricole. Les coopératives sont aussi présentes depuis un certain temps dans plusieurs autres secteurs, tels que le commerce de détail, l’habitation, les services de garde, les télécommunications, les services funéraires et, plus récemment, dans les domaines de la santé, des arts et de la culture. Les coopératives ont aussi récemment intégré de nouveaux secteurs d’activités, notamment ceux de l’énergie renouvelable et du commerce équitable[10].

Les 8 500 coopératives et caisses de crédit canadiennes comptent plus de 17 millions de membres. La figure 1 catégorise les 8 500 coopératives au Canada en fonction de leur domaine d’activité. Les coopératives d’habitation constituent la catégorie comportant le plus grand nombre de coopératives (42 % du total) suivi des coopératives agricoles (21 % du total) et des coopératives de détail (10 % du total). Il y a environ 150 000 personnes qui travaillent pour des coopératives au Canada; ces coopératives ont des actifs d’une valeur approximative de 330 milliards de dollars[11].

Figure 1 — Les coopératives au Canada en fonction de leur domaine d’activité

Source : Association des coopératives du Canada, Le pouvoir de la coopération : les coopératives et les caisses de crédit au Canada, Ottawa.

Une façon d'évaluer l’impact des coopératives est de poser la question contrefactuelle : si les coopératives (ou une forme d’organisation équivalente) n'existaient pas, quelles seraient les conséquences? Selon le Centre for the Study of CO-OPs de l’Université de la Saskatchewan, les implications d’une telle absence pour le développement économique et social des Prairies aurait été significatives. Ces implications incluent notamment :

  • Revenus des producteurs agricoles plus instables, et accès à des intrants agricoles de qualité à prix compétitif incertain;
  • Moins d’autonomie et d’opportunités pour les Autochtones;
  • Moins de choix pour les consommateurs, moins de compétition au niveau du détail et accessibilité à des biens et services plus incertain;
  • Davantage d’incertitude quant à l’accès à des logements à des prix abordables[12].

Ce rôle important des coopératives peut être généralisé à plusieurs régions ou collectivités du pays. Par exemple, plus de 1 100 collectivités canadiennes ne bénéficient de services financiers que de la part d’une caisse populaire ou d’une caisse de crédit[13]. De plus, dans les régions rurales et périphériques, les coopératives réussissent souvent là ou d’autres formes d’entreprise échouent ou sont absentes. Les coopératives sont donc un moteur économique indispensable pour plusieurs communautés au Canada :

Nous souhaitons particulièrement insister sur le fait que les coopératives et les mutuelles sont à la fois d'excellentes créatrices d'emplois, des sources d'innovation, des vecteurs de stabilité financière et de services aux collectivités. Les coopératives et les coopératives financières agissent souvent dans des secteurs d'activités et dans des communautés moins bien servies par l'entreprise traditionnelle[14].

Je n’ai aucune objection à offrir les mêmes choses à d’autres entreprises, mais il se trouve que nous savons que ce sont les coopératives qui survivront dans le milieu rural, là où d’autres échoueront[15].

De nombreuses collectivités du Nord canadien dépendent des services d’une coopérative pour l’approvisionnement en biens et services de toutes sortes. Le système de coopérative de l’Arctique a démontré une résilience hors du commun :

Le système de coopératives dans l'Arctique est un modèle de développement économique communautaire. Ces coopératives, qui sont petites en comparaison des entreprises du reste du Canada, sont des moteurs économiques importants dans les collectivités du Nord. Les premières années ont été très difficiles, le développement des coopératives locales s'est fait très lentement, et le réseau a dû lutter pour survivre. Mais, comme c'est le cas pour les coopératives du reste du Canada, le taux de survie des coopératives dans l'Arctique est exceptionnel. Des 26 coopératives qui ont signé les documents de constitution de Arctic Co-operatives, en 1972, il y a 40 ans, 77 p. 100 sont toujours en affaire aujourd'hui[16].

Les coopératives jouent aussi un rôle essentiel dans le développement économique de nombreuses collectivités autochtones. Le modèle coopératif fut adopté dans plusieurs communautés car il est conforme au mode de vie traditionnel des Autochtones[17]. Les coopératives occupent notamment une place stratégique dans la mise en marché de l’artisanat autochtone, ce qui permet à ce secteur d’activité de mieux naviguer les soubresauts économiques :

Malheureusement, le commerce de l’art suit les fluctuations économiques: lorsque l’économie va bien, le commerce va bien; lorsque l’économie ralentit, le marché ralentit aussi. Par contre, grâce aux coopératives, nous avons réussi à procurer de la stabilité au marché. Sans elles, nous ne savons pas dans quelle situation se trouverait l’industrie aujourd'hui. Le marché éprouve des difficultés en ce moment en raison de la crise économique, mais il survit. Existerait-il encore sans stabilité[18]?

De plus, les coopératives, comme force de développement économique, constituent un actif stratégique pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada :

Les coopératives naissent du désir d’un groupe d’individus de répondre à un besoin collectif. Pour y parvenir, ils regroupent leurs ressources et leurs compétences. Ils se dotent ainsi de moyens et d’expertises auxquels ils n’auraient pas eu accès sans cette association. Historiquement, au Canada, cette pratique a constitué un des fondements des communautés francophones, notamment des communautés de langue officielle en situation minoritaire[19].

On soupçonne que 15 à 20 coopératives fonctionnent en français en Nouvelle-Écosse. Onze de ces coopératives sont établies dans la région acadienne de Chéticamp[20].

2. Une force alternative de développement économique

Les coopératives sont souvent nées de l’impératif de répondre à un besoin de la communauté, que ce besoin soit d’ordre économique, social ou culturel. Ainsi, plusieurs coopératives ont pris leur essor en des temps économiques difficiles, à un moment donc où répondre à ces besoins revêtait une urgence particulière. Les extraits de témoignages suivants illustrent cette assertion.

À l'Île-du-Prince-Édouard, l'histoire du mouvement coopératif remonte à 1864, année où on a créé la Farmers' Bank, à Rustico. La banque a été fondée par les gens les plus démunis de l'île, soit les agriculteurs acadiens de South Rustico, des gens qui avaient trop peu de terres, trop peu d'argent et très peu d'instruction, mais qui ont fini par administrer ce qui fut probablement la première banque populaire d'Amérique du Nord et l'ancêtre des coopératives de crédit d'aujourd'hui[21].

Comme la plupart des coopératives de crédit, nous avons commencé par un petit groupe de personnes qui souhaitaient s'aider elles-mêmes. En 1943, 15 employés d'une compagnie d'électricité ont formé une coopérative de crédit dans laquelle ils pouvaient placer leurs économies et, ce qui est plus important, avoir accès à des prêts s'ils en avaient besoin. À cette époque, il n'y avait pas de filet de sécurité : pas d'assurance-chômage, pas de sécurité sociale, pas d'assurance-maladie[22].

Les coopératives ont donc comme rôle stratégique de procurer des biens et des services et de répondre aux besoins de la population d’une région donnée, dans des secteurs où l’apport des gouvernements et des corporations privées fait défaut. Cela est notamment le cas dans des domaines d’activité où le gouvernement juge que l’initiative privée est le meilleur moyen pour fournir les biens et les services demandés par la population, mais où les entreprises privées traditionnelles manquent justement à l’appel en raison du manque de rentabilité commerciale anticipée. Dans cette optique, les coopératives peuvent donc être vues comme une force alternative de développement économique. Le cas des coopératives gazières de l’Alberta, qui gèrent aujourd’hui plus de 100 000 km de gazoduc, constitue un exemple probant d’une situation où le mouvement coopératif a créé de la richesse dans une sphère d’activité où les entreprises privées étaient absentes en raison de la faible rentabilité financière potentielle des projets.

Au cours des 50 dernières années, un immense réseau de canalisations de gaz naturel à basse pression a été construit dans toutes les régions habitées de la province. Presque tous les Albertains ont directement accès chez eux à du gaz naturel. On en est au point où cela est presque considéré comme un droit.

La raison pour laquelle les Albertains jouissent de ce privilège, c'est qu'il y a 50 ans cette année, un groupe d'agriculteurs du sud de Calgary s'est réuni autour d'une table de cuisine et a décidé de créer la toute première coopérative de gaz naturel. Ces gens en avaient assez d'entendre les sociétés de gaz naturel leur dire qu'il n'était pas rentable de poser une canalisation pour alimenter leur maison[23].

Le Groupe Co-operators, qui gère aujourd’hui 42,9 milliards d’actifs, a été mis sur pied pour répondre à un besoin de la communauté que les compagnies privées traditionnelles ne comblaient pas.

À l'instar des nombreuses coopératives qui ont vu le jour pour répondre à différents besoins socioéconomiques, le Groupe Co-operators a été mis sur pied par un regroupement d'agriculteurs qui recherchaient une protection d'assurance que les marchés financiers privés ne voulaient pas leur offrir. Tout le chemin parcouru depuis nos origines modestes montre bien à quel point le modèle coopératif peut être une formule gagnante en matière d'entrepreneuriat[24].

3. Une force stabilisatrice

L’un des principaux avantages du modèle coopératif serait sa résilience face aux fluctuations économiques. Une étude récente publiée par l’Organisation internationale du travail a noté que les coopératives de partout dans le monde ont mieux résisté à la récente crise financière[25]. De façon similaire, une étude du Fonds monétaire international (FMI) indique que les coopératives de crédit sont plus stables que les banques commerciales, ce qui se reflète par des rendements financiers moins volatiles[26]. Cette étude du FMI est intéressante dans la mesure où elle a été complétée en janvier 2007, donc avant l’éclosion de la crise financière mondiale. Or, plusieurs témoins ont indiqué au Comité que la crise financière mondiale a démontré hors de tout doute cette plus grande stabilité financière des coopératives de crédit à l’échelle internationale, comme en témoignent le Mouvement Desjardins et Coop Altantique :

Les coopératives sont également plus stables grâce à leur structure. Elles ont plus de loyauté et d'enracinement dans la communauté, mais elles ont plus de difficulté à avoir un accès rapide à du capital, puisqu'elles ne peuvent pas émettre d'actions. Elles gardent donc souvent un coussin supplémentaire[27].

(… on ne peut négliger le fait que, pendant la plus récente crise des marchés financiers, les parts des coopératives n'ont perdu aucune valeur, car ces entreprises appartiennent aux gens qui bénéficient de leurs biens et services dans les régions où elles sont exploitées, et qui se sont engagés à veiller au succès à long terme de leurs investissements[28].

Un taux de survie plus élevé des coopératives relativement aux entreprises privées traditionnelles atteste de la résilience et de la stabilité inhérente au secteur coopératif. Une étude publiée en 2008 par le ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation du Québec indique que le taux de survie des coopératives est plus élevé que celui d’autres formes d’entreprises. Les taux de survie des entreprises coopératives (excluant le secteur de l’habitation) étaient de 74,9 % après 3 ans, 62,0 % après 5 ans et 44,3 % après 10 ans. Ces taux de survie pour le secteur coopératif se comparent favorablement aux taux de survie pour l’ensemble des entreprises québécoises qui se chiffraient à 48,2 % après 3 ans, 35,05 % après 5 ans et à 19,5 % après 10 ans[29]. En Alberta, le taux de survie des coopératives après trois ans serait de 82 % alors qu’il serait de 48 % pour les autres formes d’entreprises[30].

De nombreux témoins ont expliqué au Comité que la nature même des coopératives, c’est-à-dire leur enracinement dans la communauté, leur approche multicritères de même que leur vision à long terme, explique cette résilience et cette plus grande stabilité. Les témoignages suivants du Conseil canadien de la coopération et de la mutualité et du Conseil québécois de la coopération et de la mutualité résument cette assertion.

Premièrement, elles sont bien ancrées dans la collectivité. Deuxièmement, elles répondent directement aux besoins de la collectivité. Troisièmement, elles sont démocratiques, ce qui signifie que les personnes qui veulent fonder la coopérative consacrent tellement d'efforts à établir un consensus qu'elles parviennent à un résultat durable. Ce sont, je crois, les trois principales raisons qui expliquent la longévité de ces organisations[31].

(… les coopératives distribuent généralement leurs profits parmi leurs membres propriétaires en fonction de l'importance de leurs transactions avec elles, c'est-à-dire le lien d'usage, plutôt qu'en fonction du nombre d'actions qu'elles détiennent. Ces différences donnent une très grande force à nos entreprises parce que, en situation de fluctuation de marchés, de situation un peu moins prospère, les membres des coopératives ont une patience que n'ont pas les actionnaires qui sont soumis à ce qu'on appelle la tyrannie du trimestre. En effet, à tous les trois mois, les résultats paraissent dans les journaux et les actions ont baissé ou descendu et le capital se promène. Dans les coopératives, il y a beaucoup plus de stabilité[32].

4. Une force qui augmente l’efficacité des marchés : compétitivité et concurrence

Les coopératives, en raison du fait qu’elles mettent en commun les ressources individuelles, permettent un partage des connaissances et une augmentation de la compétitivité. De plus, cette mise en commun des ressources permet d’exercer un pouvoir compensatoire face aux grandes organisations présentes dans un marché donné, ce qui résulte en des prix et un service plus compétitifs.

L’augmentation de la compétitivité peut prendre diverses formes, notamment la fourniture de produits et services novateurs. Ces produits et services novateurs peuvent alors ultimement devenir la norme sur un marché donné et augmenter la compétitivité de l’ensemble des joueurs présents sur ce marché. Dans le secteur des soins de santé, l’expérience de la coopérative Health Connex en Nouvelle-Écosse démontre la capacité des coopératives à apporter des solutions innovatrices par la collaboration. Le succès de ce genre d’initiative du secteur coopératif pourrait un jour rendre ce modèle incontournable et ainsi ultimement profiter à l’ensemble de la population canadienne :

Notre coopérative s'appelle Health Connex — Connecting People for Health — et appartient à des coopératives et à des caisses d'épargne et de crédit de la Nouvelle-Écosse. Nous appartenons à la population de la Nouvelle-Écosse et nous sommes, comme je l'ai déjà mentionné, la seule et unique clinique de santé en ligne du Canada. Nous avons élaboré la technologie, la fonctionnalité et la capacité et nous permettons aux médecins et à leurs patients — c'est-à-dire nos clients, nos abonnés, nos patients en Nouvelle-Écosse qui sont membres de la clinique — de communiquer par le Web[33].

En plus de l’impact potentiel sur la compétitivité d’une industrie, les coopératives peuvent améliorer l’efficacité des marchés par leur effet sur les prix et les débouchés pour un produit donné. Deux conditions de base doivent être respectées afin qu’un marché puisse être considéré efficace : premièrement, le prix doit être déterminé par des forces concurrentielles; deuxièmement, des débouchés suffisants doivent exister à ce prix concurrentiel afin que les producteurs puissent vendre leurs produits. Or, sur certains marchés, la présence de grands oligopoles peut parfois engendrer des prix artificiellement élevés (ou artificiellement bas) et/ou des débouchés extrêmement limités. Les coopératives peuvent donc représenter un pouvoir compensatoire face aux grandes organisations et permettre d’établir un rapport de force concurrentiel. Cet équilibre concurrentiel se caractérisera par des prix et des services plus compétitifs et une augmentation des débouchés. Dans cette optique, la présence de coopératives sur un marché donné peut donc être parfois interprétée comme une réponse aux lacunes qui existaient à l’origine sur ce marché; leur présence augmente l’efficacité de celui-ci ce qui ultimement profite à l’ensemble de la collectivité. Plusieurs témoins ont fait référence à ce rôle stratégique des coopératives sur les marchés. L’extrait suivant du mémoire de l’Institut de recherche et d’éducation pour les coopératives et les mutuelles de l’Université de Sherbrooke et le témoignage de Credit Union Central of Canada décrivent
ce rôle.

Notons également le rôle de chien de garde du marché que jouent les coopératives et les mutuelles. Par exemple, la présence des coopératives funéraires au Québec depuis près de trois décennies a eu et continue d’avoir un effet régulateur en faisant chuter de 50 p. 100 le prix des funérailles au Québec. Donc, malgré la concurrence et la présence de nombreuses entreprises privées traditionnelles, ce secteur économique, qui ne produisait pas une optimisation de l’utilisation des ressources rares au bénéfice de tous, a été transformé par la présence de coopératives (environ 20 p. 100 de marché actuellement) et fait en sorte que l’ensemble des citoyens ait accès à des services à meilleurs coûts. Des dynamiques similaires peuvent être démontrées pour les secteurs de l’habitation, de l’assurance, des services ambulanciers, etc. Des résultats concrets par la coopération dans un marché dynamique[34].

Au départ, les coopératives de crédit, et en fait l'ensemble des coopératives, ont été mises sur pied parce qu'il y avait des lacunes sur le marché. Les communautés locales jugeaient qu'elles n'obtenaient pas les services dont elles avaient besoin[35].

Il est à noter que la mise en commun des ressources et l’exercice d’un pouvoir compensatoire rendant les marchés plus compétitifs ne sont pas nécessairement propres au mouvement coopératif. D’autres types d’organisations peuvent engendrer des résultats similaires. Néanmoins, ces organisations s’inspirent souvent de principes coopératifs :

Notre façon de fonctionner, qui inclut certains principes coopératifs, a fini par permettre aux agriculteurs d'économiser des centaines de millions de dollars du côté des intrants agricoles[36].

D. Santé financière des coopératives au Canada

1. Enquête annuelle sur les coopératives non financières canadiennes

Après avoir décrit l’importance stratégique du mouvement coopératif pour l’économie canadienne dans la section précédente, il est opportun d’examiner certaines données concernant la santé financière actuelle des coopératives au Canada. L’Enquête annuelle sur les coopératives non financières canadiennes permet de donner un aperçu de cette question. Cette enquête décrit les 50 plus importantes coopératives non financières au Canada selon les revenus. En 2010, les 50 plus importantes coopératives généraient des revenus de 24,8 milliards de dollars, et comptaient 38 700 employés. Elles représentaient 4,8 millions de membres et géraient 10,9 milliards de dollars d’actif[37]. Leur ratio moyen d’endettement total sur les capitaux propres était de 0,90[38].

Les 50 plus importantes coopératives non financières étaient constituées de 26 commerces de gros et de détail, 23 entreprises agricoles et d’une coopérative de services. Les coopératives agricoles affichaient les revenus les plus élevés (12,8 milliards de dollars), ce qui représente plus de 51 % des revenus totaux des coopératives sondées. Les coopératives de commerce de gros et de détail affichaient des revenus de 12 milliards de dollars et comptaient 95 % de tous les membres. La coopérative de détail Mountain Equipment Co-op compte le plus grand nombre de membres, soit 3,4 millions[39].

La figure 2 montre la progression du chiffre d’affaires total des 50 plus importantes coopératives non financières au Canada. Si on fait abstraction de la récession de 2008-2009, le chiffre d’affaires a progressé de façon soutenue entre 2004 et 2010. Il en fut de même de la progression des actifs totaux de ces coopératives telle qu’illustrée à la figure 3. Les données de la figure 3 tendent à démontrer que les coopératives ont réussi à augmenter leur actif tout en solidifiant leur situation financière au cours des dernières années. En effet, le ratio d’endettement sur les capitaux propres a diminué entre 2004 et 2010 (voir figure 3) ce qui démontre que l’augmentation des actifs a résulté avant tout de l’augmentation des capitaux propres, et non pas d’une augmentation de l’endettement. Plusieurs témoins ont fait écho à la bonne santé financière générale du milieu coopératif canadien, notamment :

Notre secteur coopératif est solide et stable.

À titre de comparaison, une coopérative sur cinq fait faillite, alors qu'une entreprise privée sur trois connaît le même sort.

(…)

L'an dernier, en Nouvelle-Écosse, malgré la crise économique, les coopératives ont connu une croissance de 1,8 p. 100. Le nombre de membres s'est accru de 2 p. 100. Les 10 coopératives les plus importantes de notre province ont versé à leurs membres une ristourne équivalant à 11 p. 100 du rendement des investissements. À mon avis, il s'agit d'un bon endroit où investir son argent[40].

Figure 2 — Chiffre d’affaires des 50 plus importantes coopératives
non financières au Canada

Source :    Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir de données du Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives, Les 50 plus importantes coopératives non-financières au Canada, Rapports annuels http://www.coop.gc.ca/COOP/display-afficher.do?id=1233009297681&lang=fra.

Figure 3 — Actifs et ratio dette totale/capitaux propres des 50 plus importantes coopératives non financières au Canada

Source :    Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir de données du Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives, Les 50 plus importantes coopératives non-financières au Canada, Rapports annuels http://www.coop.gc.ca/COOP/display-afficher.do?id=1233009297681&lang=fra.

2. Coopératives financières

Le tableau 1 illustre l’évolution de diverses données financières des caisses de crédit canadiennes affiliées à Credit Union Central of Canadaentre le 4e trimestre de 2010 et le 4e trimestre de 2011[41]. Il est important de noter que l’autre grande fédération de coopératives de crédit au Canada, le Mouvement des caisses Desjardins (Mouvement Desjardins), n’est pas affiliée à Credit Union Central of Canada. Les données financières du Mouvement Desjardins ne sont donc pas reflétées dans le tableau 1.

Les actifs des caisses de crédit affiliées à Credit Union Central of Canada ont crû de 10,1 % entre la fin de l’année 2010 et la fin de l’année 2011. Les dépôts auprès des caisses de crédit ont progressé de 7,4 % tandis que le montant des prêts en circulation accordés par celles-ci a augmenté de 9,9 %. Le nombre de succursales est demeuré relativement stable (-0,1 %), mais le nombre de caisses de crédit a diminué de 4,7 %. Le nombre de membres a quant à lui progressé de 1,5 %.

Tableau 1 — Évolution de diverses données financières pour les caisses de crédit affiliées à Credit Union Central of Canada (les montants sont en millions de dollars)

 

4e trimestre 2010

4e trimestre 2011

Changement

Actifs

127 398 $

140 219 $

+10,1 %

Dépôts

114 983 $

123 489 $

+7,4 %

Prêts

105 260 $

115 634 $

+9,9 %

Nombre de coopératives de crédit

386

368

-4,7 %

Nombre de succursales

1 734

1 733

-0,1 %

Nombre de membres

5 056 373

5 132 362

+1,5 %

Source : Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement à partir de données de Credit Union Central of Canada, System Results, 4e trimestre 2011 [ en anglais seulement : http://infocentre.cucbc.com/_html/pdf/4Q11SystemResults.pdf.

Le tableau 2 illustre l’évolution de diverses données financières du Mouvement Desjardins entre le 4e trimestre de 2010 et le 4e trimestre de 2011. Les actifs, les dépôts et les prêts ont progressé respectivement de 6,0 %, 7,4 % et 6,5 %. Le nombre de caisses (succursales) et le nombre de membres ont diminué respectivement de 6,4 % et de 1,9 %. La même tendance quant à l’évolution du nombre de membres et du nombre de caisses fut observée entre 2009 et 2010.

Tableau 2 — Évolution de diverses données financières du Mouvement Desjardins entre le 4e trimestre de 2010
et le 4e trimestre de 2011 (les montants sont en millions de dollars)

 

4e trimestre 2010

4e trimestre 2011

Changement

Actifs

132 655 $

140 665 $

+6,0 %

Dépôts

111 021 $

119 266 $

+7,4 %

Prêts

110 380 $

117 548 $

+6,5 %

Nombre total de caisses (succursales)

451

422

-6,4 %

Nombre de membres

5 723 000

5 617 000

-1,9 %

Source : Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement à partir de données de Credit Union Central of Canada, System Results, 4e trimestre 2011 [ en anglais seulement : http://infocentre.cucbc.com/_html/pdf/4Q11SystemResults.pdf et du Mouvement Desjardins, « Rapport de gestion du mouvement des caisses Desjardins », dans Rapport annuel 2011 http://www.desjardins.com/fr/a_propos/publications/rapports_financiers/rapport_annuel/ra2011-sec2-gestion.pdf.

Ces données démontrent une croissance solide des actifs, des dépôts et des prêts des caisses de crédit canadiennes au cours des deux dernières années, de même qu’une consolidation de celles-ci par voie d’acquisition ou de fusion. Cette croissance, en parallèle à une consolidation des effectifs, font en fait partie d’une tendance lourde observée dans le secteur des coopératives de crédit depuis un certain nombre d’années. Plusieurs témoins ont commenté ces aspects de l’évolution des caisses de crédit au Canada. Voici un aperçu de leurs témoignages.

Les caisses de crédit continuent d'avoir un excellent rendement. Même pendant la crise économique, le système canadien des caisses de crédit a produit d'excellents résultats, et nos caisses de crédit continuent de se classer parmi les institutions financières de classe internationale (…) Ce rendement financier solide a donné lieu à une augmentation continue du nombre de membres. La consolidation du système des caisses de crédit est une tendance qui se maintient. Depuis des décennies, certaines caisses de crédit réagissent à un environnement de plus en plus complexe, aux coûts de conformité et aux changements démographiques en regroupant leurs activités[42].

Au cours des 10 dernières années, le volume du bilan de la coopérative de crédit moyenne a triplé. Il est vrai que la coopérative de crédit moyenne est en expansion, mais il est vrai aussi que les coopératives de crédit les plus importantes se sont taillé la part du lion dans certaines provinces. En Alberta, par exemple, les deux plus grandes coopératives de crédit détiennent 73 p. 100 des actifs des coopératives de crédit de la province, la plus grande institution détenant 58 p. 100 des actifs. En Colombie-Britannique, en Saskatchewan et en Ontario, les parts des deux plus grandes institutions de chaque province sont respectivement de 51, 40 et 37 p. 100[43].

CHAPITRE II — ENJEUX FINANCIERS CONCERNANT LES COOPÉRATIVES AU CANADA

A. L’intervention du gouvernement dans le secteur coopératif

1. Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives

Le Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives (SARC), qui est sous la responsabilité d'Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC), a pour fonction de coordonner le travail du gouvernement du Canada en matière de développement des coopératives. Plusieurs témoins ont reconnu le bon travail que le SARC a accompli depuis sa création. Les représentants d’AAC abondent dans ce sens au sujet de l’accomplissement du SARC :

Il ne fait aucun doute que le Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives a réalisé un solide travail de base qui permet aux collectivités d'interagir plus efficacement et de profiter des possibilités qui s'offrent pour promouvoir leurs propres intérêts[44].

Cependant, beaucoup de témoins craignent que le rôle du SARC ne soit relayé à un rôle de moindre importance en raison des compressions budgétaires. Certains témoins s’inquiètent de la réduction des effectifs du SARC qui pourrait se traduire par une diminution des services offerts. De plus, les témoins redoutent la difficulté d’accéder aux statistiques sur les coopératives, car ces données sont une source précieuse d’information pour le mouvement coopératif :

Le fait d'avoir réduit de façon assez importante l'ensemble des ressources du secrétariat a pour conséquence, notamment, que les statistiques sur lesquelles on s'appuyait pour être en mesure d'avoir une vision globale de ce qui se passait dans le mouvement coopératif canadien n'existeront à peu près plus[45].

Bien que le SARC soit touché par les compressions budgétaires, les représentants d’AAC ont affirmé que le SARC continuera à jouer un rôle d’importance dans le secteur coopératif, et s’est montré rassurant concernant la pérennité de la base données :

Nous avons réduit le rôle du Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives pour le ramener à celui qu'il avait auparavant, soit un rôle de recherche et de coordination de politiques avec les provinces et avec les autres ministères. Nous avons fait cela dans le but de travailler avec ces ministères et nous assurer que ces derniers explorent les différentes avenues avec les régions rurales et les coopératives. La fonction principale du secrétariat vis-à-vis des coopératives sera de maintenir la base de données sur les coopératives, laquelle existe depuis plusieurs décennies. Il s'agit là d'un besoin du secteur des coopératives. Cela nous assure que ce secteur continuera à être en bonne santé[46].

Comme il a été mentionné précédemment, le SARC relève d’AAC. Plusieurs témoins, dont la Coop fédérée, ont souligné qu’il n’est plus pertinent que le SARC soit sous l’égide d’AAC puisque les coopératives ne sont pas uniquement à vocation rurale ou agricole:

Historiquement, le gouvernement du Canada a placé les coopératives sous la responsabilité du ministère de l'agriculture. En effet, il y a 100 ans, le développement du pays passait par l'agroalimentaire. Les Pères de la Confédération pensaient que les coopératives relevaient du domaine agricole. C'était logique à cette époque. Cependant, en 2012, lorsque l'on parle des coopératives d'énergie, cela s'applique mal au ministère de l'agriculture. C'est une réalité différente car c'est une époque différente[47].

Pour cette raison, un grand nombre de témoins, dont Tom Webb, professeur auxiliaire à la Saint Mary's University et le Conseil canadien de la coopération et de la mutualité, ont suggéré le transfert du SARC sous la responsabilité d’Industrie Canada.

J'espère voir une nouvelle orientation, peut-être au ministère de l'Industrie, lequel, à certains égards, serait peut-être un endroit plus adéquat, mais il faut qu'il y ait un endroit au gouvernement fédéral où on s'occupe des coopératives[48].

Assurer le transfert des données statistiques colligées par le Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives à Industrie Canada[49].

2. Les programmes

a. Initiative de développement coopératif

L'Initiative de développent coopératif (IDC) est un programme mis en place en 2003 par le gouvernement fédéral. L’IDC a pour objectif d’aider au développement d’une coopérative. Cette initiative comprend trois volets : les services-conseils, la recherche et développement des connaissances ainsi que les projets innovateurs[50]. L’IDC arrivera à la fin de son terme en mars 2013 après deux mandats de cinq ans et ne sera pas renouvelé.

Plusieurs témoins ont noté que le programme IDC s’est avéré un outil fort utile au fil des années puisqu’il est une des rares sources de financement pour l’aide au démarrage des coopératives. Selon ces témoins, l’IDC a connu un succès éclatant auprès du secteur coopératif depuis sa création. Cela fut le cas, notamment pour les coopératives de l’Arctique, comme l’a souligné Andy Morrison, président-directeur général d’Arctic Co-operatives limited.

L'IDC nous a donc permis de mettre notre expertise à profit dans le cadre de notre travail, principalement auprès de collectivités autochtones, et je crois que cela s'est révélé très bénéfique[51].

En raison de ce succès, des témoins ont déploré le non-renouvellement du programme IDC, mais ont indiqué comprendre que les programmes gouvernementaux sont sujets à des examens périodiques. Ces témoins sont donc demeurés très ouverts à l’idée de nouvelles initiatives gouvernementales afin de soutenir le milieu coopératif. Un représentant d’AAC a contextualisé le non-renouvellement de l’IDC :

Les programmes du Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives ont atteint leurs objectifs et, comme bien des programmes dans presque tous les ministères, ils n'ont pas été renouvelés. Il ne fait aucun doute que le Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives a réalisé un solide travail de base qui permet aux collectivités d'interagir plus efficacement et de profiter des possibilités qui s'offrent pour promouvoir leurs propres intérêts. Cela dit, je pense que pratiquement chaque ministère au sein de l'administration publique a une part de responsabilité dans le développement rural, et en particulier dans le développement économique. Chaque ministère doit veiller à ce que ses programmes et ses politiques tiennent compte des situations particulières des Canadiens des régions rurales[52].

b. Autres programmes

L’IDC est sans doute le programme fédéral le plus connu au sein du secteur coopératif. Néanmoins, un large éventail de programmes destinés aux petites et moyennes entreprises est également offert aux coopératives. Cependant, les coopératives ne connaissent pas toujours la gamme des initiatives gouvernementales à leur portée. Afin d’informer les coopératives des programmes à leur disposition, les ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux ont produit un guide sur les programmes destinés aux coopératives :

Nous nous étions rendu compte que les coopératives ne savaient pas qu'elles pouvaient s'inscrire à plusieurs de ces programmes. Nous avons distribué à toutes les coopératives un exemplaire du guide que nous avons produit, afin, justement, qu'elles sachent qu'elles sont admissibles à ces programmes[53].

Il existe des programmes qui s’adressent aux coopératives selon leur champ d’activité. Notons le Programme de financement des petites entreprises du Canada et le Programme d’affaires du Canada qui viennent en aide aux petites entreprises[54]. Les coopératives d’habitation ont accès à divers programmes de financement par l’entremise de la Société Canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL)[55]. Dans le secteur agricole, de nombreux programmes sont à la disposition des coopératives, notamment le Programme de garantie de prêts qui permet aux coopératives agricoles d’accéder à des prêts à la hauteur de 3 millions de dollars :

(…) je citerais la Loi canadienne sur les prêts agricoles, un programme de garantie de prêts de financement qui facilite l'accès des coopératives au crédit. Aux termes de cette loi, les coopératives agricoles peuvent avoir droit à des prêts à hauteur de 3 millions de dollars pour transformer, distribuer ou mettre en marché des produits agricoles[56].

B. LES ENJEUX SPÉCIFIQUES

1. Coopératives d’habitation

Au Canada, la majorité des coopératives d'habitation sont nées d’un besoin de logement abordable pour les gens à faibles revenus. Dans les années 1970, trois programmes fédéraux ont favorisé le développement des coopératives d’habitation. Actuellement, beaucoup de coopératives d’habitation bénéficient du financement offert par le gouvernement canadien par le biais de la SCHL. Cette dernière, dont la responsabilité relève du ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, joue un rôle important dans le secteur du crédit hypothécaire.

Les témoins des coopératives d’habitation ont fait part au Comité de leur inquiétude à l’égard de ce qu’ils considèrent comme des pénalités qu’impose la SCHL pour un remboursement anticipé aux fins d’un refinancement ou d’une consolidation de prêts :

Un prêteur privé percevrait une pénalité comme trois mois d'intérêt si vous vouliez résilier la première hypothèque et procéder au refinancement. La SCHL a décidé qu'une coopérative qui résilie son premier contrat hypothécaire doit payer une pénalité équivalant à l'intérêt total qui aurait été versé sur l'hypothèque, même si l'hypothèque a cessé d'exister[57].

Je ne dis pas que la coopérative ne devrait pas payer de pénalités. De toute évidence, il y a des coûts de transition pour la SCHL. Cela prendrait un bon bout de temps. Nous sommes prêts à envisager une pénalité raisonnable. Les titulaires d'hypothèque dans le secteur privé font cela constamment, n'est-ce pas? Ce n'est pas une nouvelle idée. Mais nous estimons que le fardeau total de l'intérêt jusqu'à la fusion de la prochaine échéance est tout simplement excessif et compromet la préservation du logement abordable au Canada[58].

Suite aux questions du Comité en lien avec les pénalités de remboursements anticipés imposées par la SCHL, cette dernière a émis un communiqué mentionnant que les coopératives sont libres de refinancer leurs prêts auprès d’institution privée sans pénalité au moment du renouvellement de leurs prêts hypothécaires. Toutefois, lors d’une rupture d’un contrat de créance hypothécaire, une pénalité est prélevée en fonction des modalités du contrat de prêt, du montant du prêt, du taux d’intérêt et de la période d’amortissement résiduelle[59]. La SCHL mentionne également que toute restructuration anticipée de créance hypothécaire risque de lui imposer des coûts :

Pour consentir les taux d’intérêt les plus bas possibles, la SCHL détermine définitivement son coût de financement au même moment qu’elle prête aux promoteurs d’ensemble. Dans ce contexte, toute restructuration de la créance hypothécaire risque de causer une perte réelle à la SCHL, puisque la Société ne peut restructurer la dette sous-jacente[60].

2. Fiscalité

a. Impôt

Les coopératives sont assujetties au même régime d’imposition que toutes les autres sociétés. La Loi de l’impôt sur le revenu fédérale prévoit des mesures spéciales afin d’aider les petites entreprises, comme l’amortissement accéléré et des taux d’imposition moins élevés. Ces mesures s’étendent aussi aux coopératives.

Credit Union Central of Canada indique dans un mémoire écrit soumis au Comité que les banques laissent entendre que les caisses de crédit bénéficient de règles fiscales avantageuses en raison de leur caractère coopératif[61]. Afin de répondre à cette fausse perception, Credit Union Central of Canada mentionne que les coopératives paient autant d’impôt que toutes autres formes d’entreprises. D’autres témoins ont abondé en ce sens en affirmant que les coopératives ne jouissent d’aucune faveur fiscale et sont assujetties aux mêmes règles fiscales que les autres types d’entreprises :

La Loi de l'impôt sur le revenu ne favorise pas les coopératives par rapport aux autres types d'entreprises. Que ce soit un syndicat de blé, une coopérative laitière, une coopérative de détail ou de gros, elles payent toutes des impôts selon les mêmes barèmes et les mêmes règles[62].

Quelques témoins ont signalé que les coopérat ives sont davantage taxées que les sociétés par actions. D’après une étude effectuée par la firme Mallette, les résultats démontrent qu’il existe une disparité importante au niveau fiscal entre les coopératives et les entreprises traditionnelles. En effet, l’étude révèle que la majorité des coopératives porte une charge fiscale plus grande que l’entreprise à capital-actions.

Certains témoins ont indiqué que le régime fiscal canadien pénalise les coopératives, car ces dernières subissent une double imposition. Cependant, les coopératives de grande taille disposent des ressources leur permettant de structurer leurs entreprises de façon à éviter cette double imposition. Un rapport d’Ernst et Young explique en détail cet état de double imposition. En matière d’imposition, il existe une particularité fiscale en ce qui concerne les entités privées par rapport aux entités publiques. D’après la coopérative United Farmers of Alberta, la catégorie d’entreprise à laquelle appartiennent les coopératives est ambigüe :

Les coopératives ne sont, par définition, ni privées, ni publiques, et il y a certaines exemptions qui s’appliquent. Je veux dire par là qu’en réalité, certaines sections de la loi sur l’impôt s’appliquent, d’autres non, et tout est très flou. Dans ce paragraphe, nous disons simplement qu’en qualifiant de modèle commercial, on élimine toute ambigüité. Cette ambigüité aujourd’hui crée pour nous la possibilité de mal interpréter les choses ou de commettre des erreurs tout à fait par inadvertance. Une telle définition dans la loi non seulement éclaircirait les choses, mais aurait l’avantage de mieux faire valoir la pertinence du modèle de coopérative, et ce, sans changer quoi que ce soit d’autre dans l’intention de la loi actuelle. L’ambigüité disparaît et les choses sont plus claires pour nous[63].

b. Régime enregistré d’épargne-retraite (REER)

Plusieurs témoins ont indiqué que les règles de l’Agence du revenu du Canada concernant les REER n’encouragent pas à l’investissement dans le secteur coopératif. En effet, ce qu’on appelle la « règle du 10 % » empêche les membres de certaines coopératives d’utiliser leur REER comme véhicule d’investissement pour la recapitalisation de leur coopérative :

Les mesures visant les REER autogérés dans le budget 2011 ont rendu les parts de coopératives inadmissibles aux REER pour les membres qui détiennent plus de 10 p. 100 de n'importe quelle catégorie de parts émises par la coopérative. Ainsi a disparu un bassin de capital des membres qui était auparavant disponible pour aider à capitaliser les coopératives. De nombreuses coopératives de travail comptent moins de 10 membres. Il n'y avait absolument aucun problème à détenir plus de 10 p. 100 d'une catégorie de parts dans une coopérative à l'intérieur d'un REER, sans dépasser 25 000 $, mais ce n'est plus acceptable. Les particuliers concernés s'exposent à des pénalités fiscales très lourdes, parfois même plus lourdes que dans des cas de fraude délibérée. Nous croyons que ces dispositions mettent des emplois en danger. Nous implorons le gouvernement du Canada de révoquer ces mesures promulguées dans le budget fédéral 2011[64].

Les membres de certaines coopératives se voient donc dans l’obligation d’utiliser leur REER pour des investissements dans des entreprises à capital-actions, même si leur premier choix serait d’investir dans leur coopérative. Cela ajoute au problème de capitalisation des coopératives. Des témoins ont donc demandé l’abrogation de la règle des 10 % dans le cas des coopératives.

Certaines provinces ont mis des mesures en place sur le plan fiscal afin de soutenir le milieu coopératif. Le Québec est souvent cité comme étant la province qui apporte un soutien important à son secteur coopératif. Le Régime d’investissement coopératif (RIC) instauré au Québec permet aux membres et aux employés de coopératives de producteurs et de travailleurs qui investissent dans celles-ci d’obtenir un crédit d’impôt. La Nouvelle-Écosse a créé un mécanisme similaire de soutien qui favorise la capitalisation des coopératives :

Il y a un crédit d'impôt pour l'investissement communautaire grâce auquel nous pouvons investir dans des projets communautaires, des coopératives et des projets du secteur privé et obtenir un crédit d'impôt provincial de 35 p.100. Ces investissements peuvent être inscrits dans un REER[65].

La Alberta Association of Co-operative Seed Cleaning Plants a également mentionné que des modifications aux règles fiscales sont nécessaires afin de faciliter les investissements dans les coopératives :

Lors de notre assemblée générale annuelle de 2010, nous avons adopté une résolution selon laquelle le conseil d'administration provincial militerait en faveur de l'adoption de mesures permettant aux agriculteurs qui investissent dans les coopératives agricoles de se prévaloir du crédit d'impôt à l'investissement remboursable et d'inscrire cet investissement dans leur REER. Les coopératives pourraient ainsi recueillir le capital nécessaire à l'achat d'actifs amortissables. Un tel crédit d'impôt donnerait aux membres des coopératives et aux autres agriculteurs investisseurs des avantages comparables à ceux dont jouissent les personnes qui effectuent d'autres types d'investissements au Canada[66].

En résumé, afin d’encourager l’investissement dans le secteur coopératif, plusieurs témoins ont donc proposé une modification à la Loi de l’impôt sur le revenu qui permettrait la détention de plus de 10 % des parts d’une coopérative dans un REER par un même individu. De plus, des régimes fédéral ou provinciaux similaires au RIC mis en place au Québec pourrait s’avérer un outil efficace qui faciliterait le financement des coopératives. Les extraits de témoignages suivants appuient cette suggestion.

Nous serions aussi favorables à la création par le fédéral d'un programme s'inspirant du régime d'investissement coopératif en place au Québec. De tels programmes favorisent la capitalisation des coopératives en encourageant le membre à être discipliné ou patient et à réinvestir dans sa coopérative[67].

En tant que petite coopérative de travail, nous croyons qu’il n’est plus possible d’utiliser les REER autogérés pour soutenir notre coopérative parce que si deux membres devaient nous quitter, les autres deviendraient propriétaires de plus de 10 p. 100 des parts émises par la coopérative[68].

3. La concurrence de Financement agricole Canada dans le marché des prêts agricoles

La concurrence de Financement agricole Canada (FAC) fut un enjeu maintes fois mentionné en réunions de Comité de même que dans les mémoires écrits envoyés au Comité par les caisses de crédit. Financement agricole Canada est une société d’État commerciale (c’est-à-dire à but lucratif) qui offre des solutions de financement exclusivement aux entreprises œuvrant dans le secteur agricole, ce qui inclut notamment des coopératives :

Nous sommes axés exclusivement sur l'agriculture. Nous prêtons à tous les secteurs de l'agriculture, dans toutes les régions géographiques et aux exploitations et entreprises de toutes les tailles. Notre mandat est de veiller à ce que les producteurs agricoles aient facilement accès à du capital à long terme pour être en mesure de surmonter les difficultés uniques auxquelles ils font face et de saisir les débouchés qui s'offrent à eux, dans les bonnes comme dans les mauvaises périodes. (…)

Beaucoup de nos clients sont des coopératives et représentent une part importante de notre programme de financement. Les coopératives avec lesquelles nous travaillons œuvrent dans la plupart des secteurs agricoles, notamment les intrants de culture, l'élevage bovin, les produits laitiers et l'agroalimentaire[69].

Contrairement à la Banque de développement du Canada (BDC) et à Exportations et Développement Canada (EDC), dont les activités de financement sont complémentaires à celles des institutions financières privées, FAC est une concurrente directe des caisses de crédit qui œuvrent dans le domaine des prêts agricoles. Or, selon les caisses de crédit, le statut de FAC en tant que société d’État lui confère des avantages certains à cet égard :

Les caisses de crédit apprécient le rôle joué par Financement agricole Canada en tant que partenaire engagé qui appuie l'agriculture canadienne et ce, bon an mal an. Toutefois, FAC est dans une position anormale comparativement aux autres institutions financières de l'État. Comme l'organisme n'est pas assujetti à l'exigence de prêter d'une manière qui complète les activités des institutions financières du secteur privé, il peut devenir un concurrent féroce et direct des caisses de crédit tout en profitant des avantages du marché qui sont liés à son statut de société d'État[70].

Un des enjeux liés à la question concurrentielle est la capacité de FAC d’emprunter au taux d’intérêt du gouvernement du Canada (qui est le taux sans risque de référence sur les marchés financiers), ce que n’ont pas les autres institutions financières. FAC a reconnu ce fait, mais a apporté un bémol à cette analyse en indiquant que les taux qu’elle offre à sa clientèle se comparent avec ceux des autres institutions financières :

Nous empruntons des fonds du Trésor à un très bon prix, ça ne fait aucun doute. Mais les banques ont une cote AA et peuvent avoir accès à des fonds à des prix très attrayants aussi. De plus, elles comptent sur des millions de dollars en dépôts. Elles paient très peu d'intérêts, et elles peuvent utiliser ces fonds pour investir dans leur programme de prêt.

Cela étant dit, chaque fois que nous rajustons un prix, lorsqu'il y a des compétiteurs, nous faisons très attention de ne jamais être en deçà des prix de la compétition. Nous croyons que, en gagnant des clients grâce à nos services et nos connaissances, nous pouvons rivaliser de façon très équitable avec nos concurrents sur le marché[71].

Selon un mémoire envoyé par Credit Union Central of Canada au Comité, les avantages conférés à FAC par son statut de société d’État ne se limitent pas à un taux d’emprunt enviable; FAC ne paie pas d’impôt sur le revenu et est sujette à une supervision réglementaire minimale[72]. Toujours selon Credit Union Central of Canada, FAC s’est accaparée près du tiers du marché des prêts agricoles ce qui représente le double des parts de marché qu’elle détenait en 1993. De plus, les rendements sur les capitaux propres de FAC sont passablement plus élevés que ceux de la BDC, ce qui soulève la question de savoir si ce genre de rendement est compatible avec une société d’État ayant un mandat clair en termes de politique publique[73]. Credit Union Central of Canada a donc demandé à ce que FAC soit assujettie à un examen parlementaire régulier de son mandat tout comme le sont BDC et EDC et à ce que le gouvernement envisage de modifier le principe de fonctionnement de FAC :

FAC se trouve également dans une situation unique car, contrairement à Exportation et développement Canada et à la Banque de développement du Canada, elle n'est pas assujettie à un examen parlementaire régulier de son mandat. Centrale du Canada recommande au gouvernement d'effectuer un examen public de la Loi sur le financement agricole afin d'assurer que cet organisme continue à jouer un rôle pertinent sur un marché concurrentiel. Nous recommandons également que le gouvernement envisage de modifier la loi et le principe de fonctionnement de FAC afin de les rapprocher davantage de ceux de la Banque de développement du Canada et d'Exportation et développement Canada[74].

CHAPITRE III — LA PROBLÉMATIQUE DE LA CAPITALISATION DES COOPÉRATIVES

A. Capitalisation : définition et mise en contexte

La capitalisation peut être définie dans sa forme la plus simple comme « amasser de l’argent[75] ». Dans les milieux financiers, la capitalisation peut-être définie de la façon suivante:

Les montants et les types de financement à long terme utilisés par une entreprise. Les types de financement comprennent les actions ordinaires, actions privilégiées, les bénéfices non répartis et la dette à long terme. Une entreprise ayant une capitalisation avec peu ou pas de dette à long terme est considérée comme étant financée de façon très prudente[76].

Il est tout d’abord de mise de mentionner que le capital financier n’est pas à proprement dit rare, c’est-à-dire que l’accès au capital par une entreprise ne crée pas un phénomène de rareté qui compromet l’accès au capital financier des autres entreprises. En ce sens, le capital financier disponible est illimité. Ce qui rend l’accès au capital difficile pour une entreprise donnée, c’est en fait le risque de défaut, c’est-à-dire la perception des risques par l’institution financière ou les investisseurs. Si un défaut de paiement se matérialise, cela veut dire que l’institution financière ne récupérera peut-être pas son argent, et devra encourir une perte sur le prêt :

Au bout du compte, il est facile de donner de l'argent. Il est vraiment, vraiment difficile de le récupérer. Aucune institution financière ne veut réaliser une garantie[77].

L’analyse de risque d’un projet d’une entreprise de la part d’une institution financière repose sur trois facteurs principaux : capacité de repayer, actifs en garantie et la qualité des gestionnaires :

Le rôle de tout prêteur consiste à évaluer le risque lié à une demande de financement, en tenant compte de la qualité de la gestion et de la gouvernance de la coopérative, de sa capacité de remboursement et de la solidité de ses garanties[78].

C’est donc le risque qui fait que le capital financier est souvent perçu comme « rare ». Plus les risques perçus de défaut sont élevés, plus difficile sera l’accès au capital financier. Dans le cas des prêts, une telle situation se traduira souvent par des taux d’intérêt plus élevés. Si les risques perçus sont à ce point élevé, alors l’accès à du capital financier pour l’entreprise sera très difficile, voire impossible. Ce lien entre l’évaluation du risque et l’accès au capital financier vaut pour tout type d’entreprise, qu’elle soit de type coopérative ou non :

Les principes fondamentaux du financement et du crédit sont les mêmes, que l'emprunteur soit ou non une coopérative[79].

Cette mise en contexte est importante lorsque l’on aborde la problématique de la capitalisation des coopératives. Tout examen des causes de la difficulté d’accès au capital se doit de mettre l’emphase sur les facteurs pouvant être à l’origine de cette perception des risques plus élevés dans le cas des entreprises coopératives. Les témoins ont abondamment commenté ces facteurs. Ces facteurs peuvent être catégorisés comme étant institutionnel, c’est-à-dire provenant de la méconnaissance des institutions à l’égard de la nature du système coopératif, ou comme étant structurel, c’est-à-dire lié à la structure même des coopératives. Comme il sera démontré dans les paragraphes ci-dessous, le facteur institutionnel représente une embûche pour tous les types de coopératives, tandis que le facteur structurel est avant tout un obstacle dans le cas des coopératives en démarrage.

B. Obstacle institutionnel : la méconnaissance du système coopératif

Un facteur qui a été abondamment cité par les témoins en réunion de Comité pour expliquer que l’accès au capital financier serait plus difficile pour les coopératives est la méconnaissance des institutions publiques et privées du système coopératif. Cette méconnaissance aurait un effet direct sur l’évaluation des risques que font les institutions financières d’un projet donné dans le milieu coopératif, et donc sur l’accès au financement :

Il semble y avoir tant d'ambiguïté dans le processus décisionnel et la façon dont les décisions sont prises dans les coopératives que les banques et les prêteurs traditionnels, et même certains organismes gouvernementaux tels que la BDC, ont tendance à croire que les activités des coopératives sont risquées, tout simplement parce qu'ils ne connaissent pas bien leur fonctionnement[80].

Des témoins ont noté que la méconnaissance du système coopératif par les institutions fédérales a un impact direct sur l’accès au financement gouvernemental :

Un des principaux facteurs qui empêchent les coopératives d'accéder au financement et aux programmes fédéraux, c'est que les fonctionnaires ne comprennent pas ce qu'est une coopérative. La plupart considèrent que ce n'est pas un modèle d'affaires sérieux. Dans leur langage, les programmes fédéraux actuels s'adressent aux sociétés, aux partenariats, aux entreprises à propriétaire unique et aux organismes à but non lucratif, mais rarement aux coopératives[81].

Il y a beaucoup de gens dans les ministères qui n'ont aucune idée de ce qu'est une coopérative, de la façon dont elle fonctionne ou des raisons qui font qu'il peut s'agir d'un bon modèle d'entreprise. Voilà une partie du problème[82].

Selon les témoins, cette critique s’adresse également aux institutions privées. De plus, il est à noter que la méconnaissance du système coopératif par les institutions représente un obstacle dans l’obtention de financement pour tous les types de coopératives, grandes et petites. Par exemple, Michael Barrett, qui est le chef des opérations d’une coopérative ayant des actifs d’une valeur de 230 millions de dollars et n’ayant pratiquement aucune dette, a indiqué au Comité que ce problème affectait également sa coopérative :

De plus, les banques ne comprennent pas les coopératives et ce que cela signifie d'avoir des membres qui sont aussi investisseurs, et elles sont donc très soupçonneuses et réticentes à accorder un prêt à l'entreprise. Nous éprouvons donc certains problèmes de ce côté[83].

Certains témoins sont allés plus en profondeur sur l’aspect incompréhension des coopératives de la part des institutions financières. Ils ont expliqué que beaucoup de cette incompréhension tenait au fait que les instituions financières ne comprenaient pas le mode de propriété des coopératives. En particulier, les institutions financières auraient tendance à traiter l’investissement des membres dans leur coopérative comme une dette des coopératives, car cet investissement peut être remis au membre lorsqu’il quitte définitivement la coopérative :

Le problème que nous rencontrons constamment est lié à la façon dont les investissements des membres sont envisagés. Les banques les voient comme des dettes, alors qu’ils n’en sont pas. Ce sont des fonds propres, car ces capitaux sont transférés d’une génération à l’autre sans être retirés de la coopérative. Lorsqu’ils calculent combien d’argent ils vous prêteront, ce chiffre tient toujours compte des investissements des membres qui sont considérés comme des dettes[84].

Plusieurs témoins ont mentionné que les caisses de crédit sont plus à même de comprendre le mode de propriété des coopératives. Des coopératives financières ont expliqué qu’elles pouvaient accorder des prêts consortiaux ou consolidés pour répondre aux besoins plus grands de leurs membres. Un témoin a notamment indiqué que l’assistance des caisses de crédit revêtait une importance critique pour sa coopérative :

Il est clair que nous avons reçu énormément d'aide dans le cadre de notre système de coopératives de crédit en général. Nous n'existerions assurément plus si ce n'était du soutien des coopératives de crédit de l'Île-du-Prince-Édouard. C'est grâce à leur énorme contribution que nous avons pu nous maintenir à flot. Pour être tout à fait franc avec vous, vu nos marges de profit et les difficultés qu'a connues le secteur en général au cours des trois ou quatre dernières années, si nous avions fait affaire avec une banque ordinaire, nos 57 années d'existence auraient probablement été nos dernières[85].

Toutefois, étant donné leur taille, les caisses de crédit ne sont pas toujours des prêteurs possibles dans toutes les situations, comme ce fut le cas dans l’exemple de Gay Lea Foods mentionné ci-dessous :

(…) il nous a fallu nous adresser à une banque pour emprunter cette somme. Il a été difficile de les convaincre et, contrairement à toute autre organisation, il a fallu que j’accorde des privilèges sur un grand nombre de mes actifs. Parce qu’ils ne comprenaient pas le modèle, il a fallu que j’offre bon nombre de mes actifs en garantie pour le prêt. Je suis heureux de dire que nous avons remboursé ce prêt en quatre ans et demi afin de nous assurer que les banques ne touchaient pas autant d’intérêts qu’elles le méritaient[86].

De plus, il est difficile d’estimer précisément dans quelle mesure cette meilleure compréhension du système coopératif a un impact sur l’évaluation du risque :

Je sais que les caisses comprennent bien les principes coopératifs et les principes de gouvernance. J'ignore comment elles pondèrent les facteurs pour évaluer le risque et les possibilités de défaut de remboursement, mais elles comprennent cela[87].

Par contre, un témoin a mentionné que la méconnaissance du système coopératif et la difficulté concomitante d’obtenir du financement pour les coopératives, est une critique qui s’appliquait au monde des caisses de crédit aussi. Ce témoin a aussi loué le travail de Financement agricole Canada auprès de coopératives agricoles :

Ce sont surtout les aspects touchant les finances et la capitalisation des coopératives qui sont mal compris. Et c'est le cas dans les coopératives de crédit comme dans les banques ordinaires. Je dois dire que la Financement agricole Canada fait probablement partie des meilleures. Au Canada atlantique, en tout cas, je sais que les responsables de cette organisation accordent beaucoup de place au prêt aux coopératives et qu'ils connaissent bien le domaine. Je pense pouvoir affirmer à juste titre que la Société du crédit agricole vient beaucoup en aide aux gens dont la situation correspond à son modèle agricole. Par contre, elle ne prête évidemment pas d'argent aux coopératives de logement ou aux coopératives de consommateurs, et il y a donc là une lacune[88].

C. Obstacle structurel à l’obtention du capital financier : les coopératives en démarrage

1. Capital de départ : introduction et contexte

Comme l’a illustré un témoin, une caractéristique clé du capital financier est, dans la mesure où il est bien géré, sa capacité à se reproduire et ainsi créer une plus-value :

Nous avons bénéficié d'un financement initial de différents ordres de gouvernement en 1986, et nous sommes partis de là. Au départ, il y avait 10,2 millions de dollars en capital. À la fin de 2011, nous avions fourni un financement de plus de 525 millions de dollars à des coopératives de l'Arctique depuis 1986[89].

Cette plus-value, qui constitue des fonds autogénérés, permettra éventuellement de réduire la dépendance de l’entreprise sur le capital financier externe et ainsi réduire son profil de risque. Or, l’ingrédient indispensable à ce processus de reproduction du capital financier est l’existence d’un capital de départ. Il est important de mentionner ici que le marché du capital de départ (aussi appelé capital de risque) est un marché hautement spécialisé dans le contexte des marchés financiers. Comme l’a imagé un témoin, en raison des risques inhérents à ce marché, l’octroi du capital de départ n’est pas fait pour les cœurs fragiles. En fait, toujours selon ce témoin, les autorités réglementaires ne voient pas toujours d’un bon œil une institution financière traditionnelle s’engager de façon prononcée dans ce marché spécialisé en raison du profil de risque qui s’y rattache[90]. Comme résultat, les institutions financières traditionnelles sont généralement hésitantes à accorder du capital de départ, bien que cela ne signifie pas qu’elles soient complètement absentes de ce marché. Certaines caisses de crédit ont d’ailleurs indiqué que des fonds sont alloués au capital de risque par leur institution :

Lorsque l'on parle de retombées, le Mouvement Desjardins met également de l'avant du capital de risque destiné aux entreprises (…)[91].

Nous offrons également du microcrédit pour le démarrage d'entreprises qui ne pourraient pas autrement satisfaire aux critères des institutions financières conventionnelles[92].

Toutefois, règle générale, l’allocation de capital de départ sur les marchés financiers est surtout l’apanage de joueurs spécialisés dans ce domaine, qu’ils soient privés ou publics (par exemple, la Banque de développement du Canada est un joueur dans le marché du capital de risque au Canada). Le modus operandi de ces joueurs (parfois appelés anges-investisseurs) est souvent de devenir des actionnaires d’importance de l’entreprise en démarrage en faisant l’acquisition d’une partie de son capital action. Ainsi, si les efforts de l’entreprise en démarrage se couronnent de succès, la récompense des anges-investisseurs sous forme de rémunération du capital investi pourrait être appréciable. Ce rendement potentiellement alléchant sur le capital investi rend la participation des anges-investisseurs possible puisqu’il compense les risques très élevés associés à ce type d’investissement.

2. L’obtention de capital de démarrage pour les coopératives

Il fut exposé dans la section précédente que la méconnaissance des organisations publiques et privées à l’égard du mode de propriété coopératif peut affecter l’analyse de risque que font les institutions financières des coopératives et ainsi rendre l’accès au crédit plus difficile pour celles-ci. Comme l’a démontré l’exemple de Gay Lea Foods, l’impact du facteur méconnaissance des coopératives sur l’analyse de risque peut être compensé en laissant davantage d’actifs en garantie auprès des institutions financières. Cette option n’est pas possible dans le cas des coopératives en démarrage, ce qui rend donc le problème de l’accès au capital financier encore plus difficile pour celles-ci :

Je pense que c'est pour cette raison que les coopératives qui existent depuis longtemps et qui sont bien établies sont aussi fortes. Ce sont les nouvelles qui ont des problèmes. Elles ont de la difficulté à trouver le capital dont elles ont besoin pour lancer leurs activités ou à trouver suffisamment d'argent pour donner de l'ampleur à leurs activités[93].

L’obtention de ce capital de départ représente en fait un défi de taille pour tous les types entreprises, et non pas seulement pour les coopératives. Cela étant dit, cette obtention de capital de départ est encore plus problématique pour les coopératives en raison de certaines caractéristiques propres au mode de propriété coopératif. Tout d’abord, il n’est pas possible pour un investisseur externe d’injecter du capital de démarrage dans une coopérative en devenant propriétaire de celle-ci par l’achat de capital-action. L’impossibilité de voir ce capital fructifier comme ce serait le cas dans une entreprise privée conventionnelle, et ainsi réaliser un gain en capital appréciable en se départissant de son actionnariat sur le marché, rend donc les coopératives peu attrayantes pour les anges-investisseurs:

Le fait que les coopératives soient détenues par leurs membres et le fait qu'il ne soit pas possible d'effectuer des transactions avec leurs parts, comme c'est le cas dans les entreprises privées, sont les principaux facteurs qui engendrent la problématique de capitalisation des entreprises coopératives. Le modèle d'affaires coopératif, avec sa règle « un membre, une voix », favorise la propriété et le contrôle des entreprises coopératives. Ce sont les membres, plutôt que les investisseurs externes, qui détiennent les parts sociales de la coopérative. De plus, les coopératives distribuent généralement leurs profits parmi leurs membres propriétaires en fonction de l'importance de leurs transactions avec elles, c'est-à-dire le lien d'usage, plutôt qu'en fonction du nombre d'actions qu'ils détiennent[94].

L’injection de capital de démarrage dans une coopérative sous forme de parts privilégiées ou de dette peut être une option alternative. Toutefois, pour la coopérative en démarrage cette option risque d’être excessivement onéreuse (en termes de taux d’intérêt) en raison de son profil de risque très élevé, à moins qu’elle trouve un moyen de laisser des actifs en garantie. Toutefois, comme il a été mentionné plus tôt, une coopérative en démarrage a typiquement très peu d’actifs à laisser en garantie. Ainsi, elle doit compter sur l’apport de ses membres fondateurs. Or, ces membres peuvent être en très grand nombre et sont tous propriétaires à part égale de la coopérative. Il est très difficile pour ces membres de laisser en garantie des actifs personnels représentant une large part de leur patrimoine matériel pour lancer une entreprise dans laquelle ils sont des partenaires très minoritaires. Un fractionnement des actifs en garantie peut être une option, mais une telle approche n’est pas toujours possible. Ce genre de problème ne se pose pas dans la même mesure pour les entreprises privées traditionnelles dont la propriété est concentrée dans les mains d’un individu ou d’une entité.

Plusieurs témoins ont touché à un ou plusieurs aspects de la capitalisation des coopératives en démarrage abordés dans la présente section. Les deux témoignages suivants résument bien ces aspects.

Pour les petites coopératives, il y a, bien sûr, l'enjeu d'obtenir un petit financement au départ, puisqu'elles n'ont pas toujours la possibilité d'avoir recours à leur valeur nette ou à leurs biens comme le ferait une entreprise de mode traditionnel[95].

Dans la recherche de capitalisation, les coopératives émergentes font face à deux obstacles que les sociétés conventionnelles n'ont pas à surmonter. Premièrement, la structure démocratique « un membre, un vote » et les rendements limités du capital jouent en défaveur des sources habituelles de capital de risque, qui exigent des rendements élevés et un contrôle important de l'entreprise. Deuxièmement, comme la valeur au pair des parts de coopérative ne produit pas de gains en capital, les membres ne reçoivent pas du gouvernement le même encouragement fiscal à réinvestir dans leurs entreprises. (…)

Dans le simple contexte de l’obtention d’un prêt, le processus est essentiellement le même quand l’institution examine les données financières. La différence se situe dans le fait que c’est un groupe d’entrepreneurs, mais que tant les banques que les directeurs de coopératives de crédit — en effet, cela se produit aussi dans le système des coopératives de crédit — sont habitués à ne traiter qu’avec une personne qui garantira le prêt personnellement et prendra le risque de mettre sa maison en garantie. Ils ne sont pas habitués à traiter avec un groupe de 5 à 10 personnes pour un démarrage[96].

CHAPITRE IV —RÉGLEMENTATION ET AUTRES ENJEUX CONCERNANT LES COOPÉRATIVES AU CANADA

Un certain nombre de questions juridiques ont été abordées en réunion de Comité de même que dans les mémoires écrits. Les sections ci-dessous donnent un aperçu de ces enjeux.

A. Coopérative de crédit fédéral et recommandation de la Commission sur la paperasse

Plusieurs représentants des coopératives de crédit ont encensé l’initiative du gouvernement du Canada d’encadrer par une loi la création de coopératives de crédit fédérales. Le principal avantage pour une coopérative de crédit d’être constituée sous le régime des lois fédérales est qu’elle pourra être active dans plusieurs provinces hors de sa province d'attache[97], ce qui l’aidera à atteindre ses objectifs commerciaux et à améliorer les services aux membres[98]. Toutefois, ces témoins ont exhorté les autorités fédérales à adapter le règlement qui accompagnera cette nouvelle législation en fonction de la structure et de la taille des coopératives :

Nous espérons que le gouvernement fédéral continuera d’honorer la structure de gouvernance de ces coopératives d’épargne et de crédit et veillera à ce que les règles respectent les principes de coopération qui ont été à la base de leur création. Si ces coopératives d’épargne et de crédit sont simplement considérées et traitées comme des « banques », alors, la stabilité et l’adaptabilité de leur structure pourraient être compromises, en même temps que les valeurs de coopération et de responsabilité sociale qu’elles représentent[99].

À cet effet, un grand nombre de témoins du secteur des coopératives de crédit ont fait écho au rapport de la Commission sur la réduction de la paperasse qui indiquait qu'une approche universelle en matière de réglementation avait tendance à imposer un fardeau indu aux petites entreprises, comme les caisses de crédit[100]. La recommandation 13 de la Commission sur la réduction de la paperasse à laquelle ces témoins ont fait référence est présentée ci-dessous :

Le gouvernement devrait agir rapidement pour respecter l’engagement qu’il a pris dans le cadre du Budget de 2011 de tenir compte du point de vue des petites entreprises. Il devrait envisager la possibilité d’exiger de la part des organismes de réglementation la mise à la disposition du public des résultats de l’application du point de vue des petites entreprises quant aux règlements nouveaux ou modifiés[101].

Les coopératives de crédit ont donc demandé à ce que le principe énoncé dans cette recommandation soit respecté lors de l’adoption du règlement sur les caisses de crédit. Les coopératives de crédit ont indiqué qu’elles ne s’attendaient pas à des traitements de faveur, mais seulement à ce que la lentille de la petite entreprise soit utilisée par les autorités financières plutôt qu’une approche uniforme :

Nous ne demandons pas des règles spéciales, nous espérons simplement que la lentille des petites entreprises qui était promise dans le rapport de la Commission sur la réduction de la paperasse soit appliquée[102].

Des témoins ont également donné des exemples concrets de réglementations qui ont imposé ou risquent d’imposer des charges excessives si elles ne tiennent pas compte de la structure et de la taille des coopératives de crédit. Ces exemples touchent, notamment à la nouvelle loi mentionnée précédemment, aux exigences du Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), aux règles comptables, à la réglementation entourant la publication de prospectus financiers, aux exigences de la Société d’assurance-dépôts du Canada (SADC) et du Bureau du surintendant des institutions financières Canada (BSIF). Le témoignage de Credit Union Central of Canada décrit bien la situation à laquelle font face les caisses de crédit de petite taille.

Prenons par exemple la Surrey Credit Union (…) Cet établissement compte une dizaine ou une douzaine d'employés et doit satisfaire aux mêmes exigences du CANAFE que la VanCity de Vancouver ou la Banque royale du Canada. Ces exigences ont un effet disproportionné sur les coûts d'administration de cette caisse de crédit. C'est là le fardeau qui nous pose problème[103].

B. L’enjeu de la démutualisation

Une mutuelle est née d’un regroupement de personnes qui souhaite se protéger contre certains risques. En échange de cette protection, les membres paient une prime. Une mutuelle appartient donc aux détenteurs de police[104].

Au cours de la dernière décennie, on a constaté une tendance à la démutualisation dans le secteur de l’assurance-vie[105]. La démutualisation est un processus par lequel une société mutualiste se transforme en société par actions. D’après le Mouvement des caisses Desjardins, quatre facteurs peuvent conduire à la démutualisation[106] :

  • une situation financière précaire;
  • une mauvaise planification dans la gestion du capital nécessaire à la croissance et à la pérennité de la société mutuelle ou coopérative;
  • le désengagement des membres ou mutualistes;
  • la pression de la direction ou de conseillers externes qui recherchent des avantages financiers importants liés à la démutualisation.

Des témoins ont exprimé leur inquiétude face à cette vague de démutualisation. Certains s’opposent à la démutualisation tandis que d’autres ne s’y objectent pas à la condition que cette démutualisation soit bien encadrée par les autorités gouvernementales. Sans encadrement législatif et réglementaire, les témoins redoutent de voir la richesse collective accumulée pendant des générations dilapidée par un nombre restreint d’individus. L’extrait suivant du témoignage du, Groupe Co-operators fait état de cette crainte.

Le processus fait des gagnants et des perdants, généralement à l'avantage d'une faible minorité de titulaires de polices, d'administrateurs, de cadres supérieurs, de courtiers et d'experts-conseils qui touchent des bénéfices inattendus. (…) tous les citoyens ayant contribué au fil des ans à la richesse et aux profits de ces compagnies n'en tireront aucun bénéfice[107].

Le Mouvement des caisses Desjardins et la caisse de crédit VanCity sont d’avis qu’il est essentiel d’encadrer la démutualisation afin de préserver le patrimoine collectif. Au Québec, la démutualisation est encadrée par une règlementation. Toutefois, ce n’est pas le cas partout et dans certains endroits les réserves accumulées par les mutuelles ne sont pas protégées. Le phénomène de démutualisation prend de l’ampleur dans ces situations :

La législation québécoise, pour une, a reconnu le caractère collectif et impartageable des réserves accumulées dans une coopérative, assurant ainsi la pérennité des organisations et une équité intergénérationnelle. Dans plusieurs pays où les réserves ne sont pas suffisamment protégées, on a pu voir des vagues de démutualisation où les membres et les mutualistes du moment ont souvent pu s’accaparer des réserves accumulées par les générations qui les ont précédés[108].

CHAPITRE V — CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

Suite aux réunions qu’a tenues le Comité, et après avoir porté attention aux documents qui lui ont été envoyés, le Comité constate l’importance des coopératives pour les Canadiens et Canadiennes. Il formule les recommandations suivantes, qui permettront à la fois de renforcer leur situation et de protéger les emplois qu’elles créent.

       Le rôle stratégique des coopératives dans notre économie

Recommandation : Que le gouvernement du Canada mette en lumière le rôle stratégique que jouent les coopératives dans notre économie en renseignant les fonctionnaires dans tous les ministères, notamment ceux qui travaillent dans des bureaux de développement régional, ainsi que le grand public, sur la nature et les avantages du modèle coopératif d’entreprise.

       Dégager une série de politiques économiques, fiscales et monétaires pour renforcer les coopératives canadiennes et protéger les emplois qu’elles créent

Recommandation : Que la Société canadienne d’hypothèques et de logement appuie les coopératives d’habitation en continuant à offrir des services de refinancement et des hypothèques raisonnables.

Recommandation : Que le gouvernement du Canada étudie s’il est possible, coûts compris, d’offrir aux Canadiens la possibilité d’investir les fonds de leur REER dans des coopératives.

Recommandation : Que le gouvernement du Canada travaille en étroite collaboration avec les agences de développement économique régional afin de faire ressortir l’importance des coopératives pour le développement économique du Canada, de manière qu’elles puissent promouvoir le modèle de l’entreprise coopérative comme les autres modèles d’affaires et veiller à ce que leurs agents sachent clairement de quelle façon les coopératives sont appuyées par l’intermédiaire des programmes fédéraux actuels et puissent faire valoir ces programmes auprès des coopératives et des entrepreneurs.

       Étudier le financement des coopératives, ses causes, ses effets et les solutions possibles

Recommandation : Que le gouvernement du Canada revoie la question du financement des coopératives, notamment ses causes et ses effets et les solutions possibles.

       Évaluer la nécessité de mettre à jour la Loi canadienne sur les coopératives de 1998

Recommandation : Que le gouvernement du Canada, en consultation avec les provinces et les territoires, de même qu’avec le secteur coopératif, examine la Loi canadienne sur les coopératives afin de savoir s’il est souhaitable de l’actualiser.

       Préciser les outils que le gouvernement peut utiliser pour que les coopératives canadiennes aient plus de soutien et jouent un plus grand rôle

Recommandation : Que le gouvernement du Canada étudie la possibilité de regrouper la responsabilité relative aux coopératives dans un ministère approprié, tel qu’Industrie Canada.

Recommandation : Que le gouvernement du Canada continue à réduire le fardeau bureaucratique pour les coopératives et les entreprises.


[1]         Secrétariat aux coopératives, Le Canada en faveur d’une année internationale des coopératives, communiqué, 3 décembre 2009. http://www.coop.gc.ca/COOP/display-afficher.do?id=1259863762940&lang=fra

[2]         Association canadienne des coopératives, How are co-operatives different? [en anglais seulement : http://www.coopscanada.coop/en/about_co-operative/How-are-Co-operatives-Different-

[3]              Ibid.

[4]              Conseil canadien de la coopération et de la mutualité, Principes coopératifs http://www.cccm.coop/site.asp?page=element&nIDElement=2642 ; Frank Lowery dans la réunion du mardi 10 juillet 2012 a notamment fait allusion à ces sept principes coopératifs.

[5]              Serge Riendeau, président, Conseil d'administration, Agropur, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[6]              Loi canadienne sur les coopératives, L.C. 1998, ch. 1.

[7]              Loi sur les associations coopératives de crédit, L.C. 1991, ch. 48.

[8]              Loi sur les sociétés d’assurances, L.C. 1991, ch. 47.

[9]              Loi sur les banques, L.C. 1991, ch. 46.

[10]           Association canadienne des coopératives, Co-operatives Helping Fuel a Green Economy: A report on Canada’s renewable energy sector, Ottawa, 2011; Association canadienne des coopératives, New futures: Innovative uses of the co-op model, Ottawa, 2009.

[11]           Les informations contenues dans ce paragraphe proviennent de : Association des coopératives du Canada, Le pouvoir de la coopération : les coopératives et les caisses de crédit au Canada, Ottawa.

[12]           Mémoire du Centre for the Study of Co-operatives, daté du 7 août 2012.

[13]           Denyse Guy, directrice générale, Association des coopératives du Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[14]           Bernard Brun, directeur, Relations gouvernementales, Mouvement des caisses Desjardins, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[15]           Bill Dobson, directeur, Cultivateurs unis de l'Alberta, Témoignages, réunion no 7, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 juillet 2012.

[16]           Andy Morrisson, président-directeur général, Arctic Co-operatives limited, Témoignages, réunion no 6, 1re session, 41e législature, Ottawa, jeudi 26 juillet 2012.

[17]           Ibid.

[18]           Ibid.

[19]           Brigitte Gagné, directrice générale, Conseil canadien de la coopération et de la mutualité, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[20]           Extrait du mémoire du Conseil Coopératif Acadien de la Nouvelle-Écosse envoyé au Comité, daté du
26 juillet 2012.

[21]           Dave Whiting, directeur exécutif, Prince Edward Island Co-operative Council, Témoignages, réunion no 4,
1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet 2012.

[22]           Nigel Mohammed, directeur, Business and Community Financial Centre, Assiniboine Credit Union, Témoignages, réunion no 7, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 juillet 2012.

[23]           Peter Harty, directeur, Federation of Alberta Gas Co-ops Ltd., Témoignages, réunion no 7, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 juillet 2012.

[24]           Frank Lowery, premier vice-président, Avocat principal et secrétaire, Groupe Co-operators, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[25]           Johnston Birchall et Lou Hammond Ketilson, Resilience of the Cooperative Business Model in Times of Crisis, Organisation internationale du travail, 2009.

[26]           Heiko Hesse et Martin Cihak, Cooperatives Banks and Financial Stability, Fonds Monétaire International, Janvier 2007.

[27]           Bernard Brun, directeur, Relations gouvernementales, Mouvement des caisses Desjardins, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[28]           Bryan Inglis, vice-président, Division de l'agriculture, Coop Atlantique, Témoignages, réunion no 4, 1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet 2012.

[29]           Québec, Ministère du Développement économique, de l’Innovation et de l’Exportation, Taux de survie des coopératives au Québec, Québec, 2008. Voir à la page 13.

[30]           Richard Stringham et Celia Lee, Co-op Survival Rates in Alberta, BC-Alberta Social Economy Research Alliance, août 2011.

[31]           Brigitte Gagné, directrice générale, Conseil canadien de la coopération et de la mutualité, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[32]           Hélène Simard, présidente-directrice générale, Conseil québécois de la coopération et de la mutualité, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[33]           Dianne Kelderman, présidente et chef de la direction, Nova Scotia Co-operative Council, Témoignages, réunion no 4, 1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet 2012.

[34]           Extrait du mémoire de l’Institut de recherche et d’éducation pour les coopératives et les mutuelles de l’Université de Sherbrooke (IRECUS), daté du 7 août 2012.

[35]           Stephen Fitzpatrick, vice-président, Services généraux et directeur des finances, Credit Union Central of Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[36]           Bob Friesen, Farmers of North America, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa,
10 juillet 2012.

[37]           Sécrétariat aux affaires rurales et aux coopératives, Unité des statistiques, Les 50 plus importantes coopératives non financières au Canada en 2010. http://www.coop.gc.ca/COOP/display-afficher.do?id=1324051838611&lang=fra.

[38]           Comme nous le verrons plus loin, la majeure partie des capitaux propres (aussi appelés avoir total) d’une coopérative est composée du capital social (mise de fond des sociétaires) et des bénéfices accumulés. Plus le ratio d’endettement total sur les capitaux propres est faible, plus forte est habituellement la santé financière d’une entreprise.

[39]           Sécrétariat aux affaires rurales et aux coopératives, Unité des statistiques, Les 50 plus importantes coopératives non financières au Canada en 2010.                http://www.coop.gc.ca/COOP/display-afficher.do?id=1324051838611&lang=fra.

[40]           Dianne Kelderman, présidente et chef de la direction, Nova Scotia Co-operative Council, Témoignages, réunion no 4, 1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet 2012.

[41]           Credit Union Central of Canada est l’association commerciale nationale pour les coopératives de crédit canadiennes. Incorporée en 1953, par une loi spéciale du Parlement, et réglementée en vertu de la Loi sur les associations coopératives de crédit (Canada), elle fournit un forum national, un porte-parole national et des services nationauxpour soutenir et développer le système de crédit coopératif canadien.

[42]           Extrait du mémoire de SaskCentral envoyé au Comité, daté du 19 juillet 2012.

[43]           Marion Wrobel, vice-président, Politiques et opérations, Association des banquiers canadiens, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[44]           Claude Carrière, sous-ministre délégué, Agriculture et agroalimentaire Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[45]           Brigitte Gagné, directrice générale, Conseil canadien de la coopération et de la mutualité, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[46]           Claude Carrière, sous-ministre délégué, Agriculture et agroalimentaire Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[47]           Denis Richard, président, La Coop fédérée, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[48]           Tom Webb, professeur auxiliaire, Sobey School of Business, Maîtrise en gestion des coopératives et caisses de crédit, Saint Mary's University, Témoignages, réunion no 4, 1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet 2012.

[49]           Brigitte Gagné, directrice générale, Conseil canadien de la coopération et de la mutualité, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[50]           Secrétariat aux affaires rurales et aux coopératives, Initiative de développement coopératif 2009-2013. http://www.coop.gc.ca/COOP/display-afficher.do?id=1232543849777&lang=fra.

[51]           Andy Morrison président-directeur général, Arctic Co-operatives limited, Témoignages, réunion no 6, 1re session, 41e législature, Ottawa, 26 juillet 2012.

[52]           Claude Carrière, sous-ministre délégué, Agriculture et agroalimentaire Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[53]           Ibid.

[54]           John Connell, sous-ministre adjoint délégué, Secteur de la politique stratégique, ministère de l'Industrie, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[55]           Nicholas Gazzard, directeur général, Bureau national, Fédération de l'habitation coopérative du Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[56]           Claude Carrière, sous-ministre délégué, Agriculture et agroalimentaire Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[57]           Darren Kitchen, directeur, Relations gouvernementales, Co-operative Housing Federation of British Columbia, Témoignages, réunion no 6, 1re session, 41e législature, Ottawa, 26 juillet 2012.

[58]           Ibid.

[59]           Société canadienne d’hypothèques et de logement, Réponse aux questions du Comité spécial sur les coopératives, lettre au Comité spécial sur les coopératives, datée du 3 août 2012.

[60]           Ibid.

[61]           Gary Rogers, Qui dit que les coopératives ne paient pas d’impôts?, Credit Union Central of Canada, extrait d’un document envoyé au Comité le 2 août 2012.

[62]           Denyse Guy, directrice générale, Association des coopératives du Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[63]           Bob Nelson, président et chef de la direction, Cultivateurs unis de l'Alberta, Témoignages, réunion no 7, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 juillet 2012.

[64]           Hazel Corcoran, directrice générale, Fédération canadienne des coopératives de travail, Témoignages, réunion no 7, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 juillet 2012.

[65]           Dianne Kelderman, présidente et chef de la direction, Nova Scotia Co-operative Council, Témoignages, réunion no 4, 1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet 2012.

[66]           John McBain, vice-président, Alberta Association of Co-operative Seed Cleaning Plants, Témoignages, réunion no 6, 1re session, 41e législature, Ottawa, 26 juillet 2012.

[67]           Lorraine Bédard, secrétaire corporative, Vice-présidente, Relations membres, Agropur, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[68]           Extrait du mémoire de ENERGREEN BUILDERS CO-OPERATIVE LTD, daté du 7 août 2012.

[69]           Lyndon Carlson, premier vice-président, Marketing, Financement agricole Canada, Témoignages, réunion no 6, 1re session, 41e législature, Ottawa, 26 juillet 2012.

[70]           Stephen Fitzpatrick, vice-président, Services généraux et directeur des finances, Credit Union Central of Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[71]           Lyndon Carlson, premier vice-président, Marketing, Financement agricole Canada, Témoignages, réunion no 6, 1re session, 41e législature, Ottawa, 26 juillet 2012.

[72]           Mémoire de Credit Union Central of Canada envoyé au Comité, daté du 7 août 2012.

[73]           Ibid.

[74]           Stephen Fitzpatrick, vice-président, Services généraux et directeur des finances, Credit Union Central of Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[76]           David L. Scott, Wall Street Words: An A to Z Guide to Investment Terms for Today's Investor, Houghton Mifflin Company, 2003.

[77]           John Lahey, président et chef de la direction, Caisse Alterna, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[78]           Nigel Mohammed, directeur, Business and Community Financial Centre, Assiniboine Credit Union, Témoignages, réunion no 7, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 juillet 2012

[79]           Ibid.

[80]           Ibid.

[81]           Denise Guy, directrice générale, Association des coopératives du Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[82]           Tom Webb, professeur auxiliaire, Sobey School of Business, Maîtrise en gestion des coopératives et caisses de crédit, Saint Mary's University, Témoignages, réunion no 4, 1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet 2012.

[83]           Michael Barrett, chef des opérations, Gay Lea Foods Cooperative Ltd, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[84]           Ibid.

[85]           Jeff Malloy, chef de la direction et directeur général, Acadian Fishermen’s Co-operative Association Ltd., Témoignages, réunion no 4, 1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet, 2012.

[86]           Michael Barrett, chef des opérations, Gay Lea Foods Cooperative Ltd, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[87]           Jodie Stark, vice-présidente, Affaires juridiques et corporatives, Association de services financiers Concentra, Témoignages, réunion no 7, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 juillet 2012.

[88]           Bryan Inglis, vice-président, Division de l'agriculture, Coop Atlantique, Témoignages, réunion no 4, 1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet 2012

[89]           Andy Morrison, président-directeur général, Arctic Co-operatives limited, Témoignages, réunion no 6, 1re session, 41e législature, Ottawa, 26 juillet 2012.

[90]           John Lahey, président et chef de la direction, Caisse Alterna, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[91]           Bernard Brun, directeur, Relations gouvernementales, Mouvement des caisses Desjardins, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[92]           Nigel Mohammed, directeur, Business and Community Financial Centre, Assiniboine Credit Union, Témoignages, réunion no 7, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 juillet 2012.

[93]           Bryan Inglis, vice-président, Division de l'agriculture, Coop Atlantique, Témoignages, réunion no 4, 1re session, 41e législature, Ottawa, 24 juillet 2012.

[94]           Hélène Simard, présidente-directrice générale, Conseil québécois de la coopération et de la mutualité, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[95]           Bernard Brun, directeur, Relations gouvernementales, Mouvement des caisses Desjardins, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[96]           Peter Hough, agent financier, Fédération canadienne des coopératives de travail, Témoignages, réunion no 7, 1re session, 41e législature, Ottawa, 27 juillet 2012.

[97]           John Lahey, président et chef de la direction, Caisse Alterna, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[98]           Rob Malli, directeur financier, Vancity Credit Union, Témoignages, réunion no 6, 1re session, 41e législature, Ottawa, 26 juillet 2012.

[99]           Extrait du mémoire de Concentra Financial Services Association envoyé au Comité, daté du 27 juillet, 2012.

[100]         Stephen Fitzpatrick, vice-président, Services généraux et directeur des finances, Credit Union Central of Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[101]         Commission sur la réduction de la paperasse, Éliminer la paperasse pour libérer les entreprises et leur permettre de croître, Rapport de recommandations, 2012.                http://www.coupezlapaperasse.gc.ca/heard-entendu/rr/rr-fra.pdf.

[102]         John Lahey, président et chef de la direction, Caisse Alterna, Témoignages, réunion no 5, 1re session, 41e législature, Ottawa, 25 juillet 2012.

[103]         Stephen Fitzpatrick, vice-président, Services généraux et directeur des finances, Credit Union Central of Canada, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[104]         Desjardins, Mémoire du Mouvement des caisses Desjardins, Consultations au sujet d’un cadre pour la démutualisation des sociétés d’assurances multirisques fédérales, présenté au Ministère des Finances du Canada, juillet 2011.

[105]         M. Frank Lowery, premier vice-président, Avocat principal et secrétaire, Groupe Co-operators, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[106]         Desjardins, Mémoire du Mouvement des caisses Desjardins, Consultations au sujet d’un cadre pour la démutualisation des sociétés d’assurances multirisques fédérales, présenté au Ministère des Finances du Canada, juillet 2011.

[107]         Frank Lowery, premier vice-président, Avocat principal et secrétaire, Groupe Co-operators, Témoignages, réunion no 3, 1re session, 41e législature, Ottawa, 10 juillet 2012.

[108]         Mémoire envoyé au Comité par Desjardins, Les coopératives au Canada : un modèle économique performant mais méconnu, daté du 17 juillet 2012.