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PACP Rapport du Comité

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OPINION DISSIDENTE – NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE DU CANADA – Chapitre 2 du rapport du vérificateur général du Canada du printemps 2012

Le processus d’approvisionnement à fournisseur unique d’avions de chasse F-35 Lightning est géré par le gouvernement Harper, s’avère être la plus grande débâcle d’achat militaire de toute l’histoire du Canada. Les parlementaires et les Canadiens restent dans le noir en ce qui concerne les coûts d’acquisition, les coûts du cycle de vie, les capacités ainsi que le processus de remplacement des CF-18 vieillissants.

Les néo-démocrates pensent sincèrement que le rapport du comité ne reflète pas de manière adéquate ce que ses membres ont entendu des témoins au sujet du Chapitre 2 du rapport du vérificateur général (VG) du Canada de 2012, n« Le remplacement des avions de combat du Canada ». Le NPD demeure profondément préoccupé par le fait que cet examen n'ait pas permis aux parlementaires d’apporter des éclaircissements ou d’achever correctement le processus d’enquête lié à cet enjeu. Seulement sept heures de témoignages ont été consacrées à cette étude et aucun des ministres responsables n’y a participé.

1.       Non-respect du processus d’approvisionnement

Lorsqu’on dépense l’argent des contribuables pour acquérir du matériel militaire, il est essentiel que l'appel d'offres soit ouvert, juste et transparent. Seulement lorsqu’elle est menée de cette façon les forces armées peuvent-elles avoir le meilleur équipement, les contribuables canadiens paient-ils le meilleur prix et les industries canadiennes récoltent-elles les meilleures retombées industrielles possible? Dans le cas de l’acquisition du F-35 par le gouvernement, en plus d'être viciée et manipulée, la procédure n'a pas été transparente. De plus, des témoignages importants portant sur ces enjeux n’ont pas été mentionnés dans le rapport.

A)      CONTRAT À SOURCE UNIQUE

La procédure de l’appel d’offres ouvert exige que l’Énoncé des besoins opérationnels (EBO) soit rendu public et qu’il serve de base pour les soumissions présentées par des fournisseurs. Dans le cas du F-35, c'est le contraire qui s’est produit. Le gouvernement a caché le EBO sous le prétexte de « Sécurité nationale » et les exigences ont été rédigées de telle manière à ce que seul le F-35 puisse y répondre.

La seule justification donnée par le gouvernement pour expliquer pourquoi il avait opté pour un contrat à source unique est basée sur une lettre contenant 60 mots (document classé secret) écrite par le sous-ministre adjoint chargé du matériels, au ministère de la Défense nationale (MDN), le 1er juin 2010, au sous-ministre adjoint de la Direction générale des approvisionnements au ministère des Travaux publics et Services gouvernementaux (TPSGC), seulement deux semaines avant que le gouvernement ne fasse l'annonce qu’il avait choisi le F-35 pour remplacer les chasseurs CF-18. Le terme « Cinquième génération » a été utilisé quatre fois dans la lettre bien que le VG a clairement précisé que ces termes n'étaient pas un descriptif des besoins opérationnels.

Une exception apportée au processus compétitif doit être justifiée et est normalement accompagnée d’un énoncé des besoins (EB) et d’une analyse des options. Or, dans ce cas-ci, la Défense nationale n’a fourni un EB et une analyse des options à TPSGC qu’après que le gouvernement ait annoncé qu’il allait acheter le F-35 sans compétition.

Pendant son témoignage le 26 avril 2012, le VG a déclaré : « Ce qui importe maintenant, pour le nouveau comité qui examinera ce dossier, c’est d’abord d’avoir des directives très claires, à savoir s’il s’agit d’une occasion d’examiner toutes les possibilités ou si le F-35 est la seule option. » Nous sommes d’accord avec le VG qu’il est important de clarifier les options qui sont considérées pour remplacer la flotte des CF-18 et pensons que cela devrait être reflété dans le rapport. Nous croyons aussi fortement qu’un véritable appel d’offre ouvert n’est possible que si le nouveau Secrétariat national d’approvisionnement en chasseurs reçoit un mandat clair pour étudier et modifier l’EB pour remplacer les avions de chasse du Canada afin que d’autres options puissent être considérées.

B)       RETOMBÉES INDUSTRIELLES

Le non-respect de la procédure d’appel d’offres ouverte et transparente a aussi eu un effet négatif sur les retombées industrielles pour les entreprises canadiennes. Le nprogramme conjoint des avions d’attaque interarmés (JSF) ne garantit pas de retombées industrielles. Dans ce cadre, les entreprises canadiennes doivent d’abord faire concurrence à d’autres entreprises d’autres pays afin d’obtenir des contrats. En revanche, un appel d’offres public exige que tous les appelants garantissent des Retombées industrielles et régionales (RIR) d'une valeur égale ou plus grande à la valeur du contrat. Dans le cas du F-35, où le coût total projeté est d’environ 40 milliards de dollars ou plus, les RIR garanties devraient être équivalentes à ce coût.

Le gouvernement a systématiquement réduit le montant des retombées industrielles du programme JSF duquel pouvait tirer avantage l’industrie canadienne en le faisant passer de 16,6 milliards de dollars en 2009 à 9,85 milliards plus tôt en 2012. Le VG souligne dans son rapport que « seulement les scénarios les plus optimistes avaient été mis de l’avant » et que « les estimations étaient basées sur des suppositions concernant le type de travail qui pourrait être mené au Canada. » Lors de son témoignage du 26 avril, il a affirmé être « préoccupé du fait que ces estimations n'incluaient pas un éventail de retombées. Seul le scénario le plus optimiste semblait être proposé. »

2.       Manque de transparence et tromperies

Le gouvernement conservateur a décidé de tromper les parlementaires et le public canadien avant les dernières élections en disant que le coût des F‑35 serait d’un montant de 10 milliards $ inférieur à celui qu’il était vraiment.

A)      DOUBLE COMPTABILITÉ

Dans le rapport du VG et dans les témoignages devant le comité des comptes publics, il est clair que les preneurs de décisions au conseil des ministres ont présenté des coûts de 14,7 milliards$ au public en mars 2011, alors que ce qu’on leur avait présenté en juin 2010 était de l’ordre de 25 milliards$. Cette double comptabilité a créé deux livres comptables : un pour le gouvernement et un autre pour le public et les parlementaires.

Le vérificateur général a clairement indiqué dans son rapport et en comité qu’il était préoccupé par ces renseignements incomplets fournis aux parlementaires. Par exemple, les coûts estimés liés à l’exploitation, au personnel et à l’entretien régulier n’ont pas été inclus, même s’ils avaient été fournis au conseil des ministres.

Pendant son témoignage devant le comité le 26 avril 2012, le VG a signalé : « Nous avons déterminé qu'il manquait des éléments importants dans les coûts du cycle de vie — par exemple, l'usure, les mises à niveau et le fait que ces appareils ont une durée de vie de 36 ans et pas seulement de 20 ans. Quand nous avons soulevé la question des coûts du cycle de vie et que nous avons dit qu'il ne s'agissait pas du cycle de vie complet, nous ne cherchions pas à être pointilleux. Nous disions simplement qu'il manquait des éléments importants. »

Il poursuit en affirmant que le conseil des ministres avaient approuvé un budget de 16 milliards $ pour les coûts d’exploitation sur 20 ans et un budget de 9 milliards $ pour l’acquisition des F-35 : « Le montant de 25 milliards de dollars a été calculé par le ministère de la Défense, et il inclut le coût d’acquisition et les frais d’entretien. De plus, la procédure habituelle a été suivie pour approuver les budgets. »

Cette même journée, M. Ferguson s’est adressé aux médias et a fourni des clarifications : « Je ne peux dire qui était au courant, mais il s’agit de renseignements préparés par la Défense nationale, et j’ai la nette impression qu’il s’agit effectivement de renseignements dont aurait disposé le gouvernement », a affirmé M. Ferguson. Lorsqu’on lui a demandé davantage de précision, il a répondu « certains membres de l’exécutif ».

Il convient de noter que lors de son témoignage du 1er mai 2012, le sous-ministre de la Défense a clairement contredit le VG. Il a clairement affirmé que la DN n’avait jamais eu une estimation de l’ordre de 25 milliards $ en 2008.

B)       INFORMATION INEXACTE QUANT AU COÛT TOTAL DES F-35

Malgré une multitude de rapports du Pentagone et de l’nAccountability Office des États-Unis, de nations membres du programme d’ACI et du directeur parlementaire du budget (DPB), le gouvernement du Canada a ignoré l’augmentation des coûts des F-35 et a décidé de seulement rendre publics les coûts d’acquisition et d’entretien.

Premièrement, les estimations de 5,7 milliards $ du gouvernement pour l’entretien sont fondées sur l’hypothèse que les coûts d’exploitation des F-35 seraient semblables à ceux des coûts d’exploitation actuels des CF-18. Toutefois, dans le dernier rapport SAR du Pentagone, on estime les coûts d’entretien des F-35 à 32 000 $ par heure de vol, comparé à 18 900$ pour les CF-18. Lorsque questionnés par le comité le 1er et le 3 mai 2012, le sous-ministre de la Défense et le sous-ministre adjoint de la Défense responsable du matériel ont exprimé des vues différentes quant aux coûts moyens annuels pour l’entretien et la réparation. De plus, aucune explication valide n’a été donnée pour justifier l’affirmation du gouvernement que les coûts d’exploitation des F-35 seraient semblables à ceux de CF-18.

Deuxièmement, le gouvernement a choisi d’ignorer les demandes répétées de la Chambre des communes et du DPB de fournir des coûts pour le cycle de vie complet des F-35. Le 3 mai 2012, le DPB a déclaré au comité : « il est devenu évident depuis, que les chiffres rendus publics par le gouvernement n'englobaient pas tous les éléments des coûts du cycle de vie comme l'exigeait la motion adoptée en mars 2010 par le Comité des finances de la Chambre des communes. »

Troisièmement, la politique du Conseil du trésor et le guide des coûts de la DN soulignent l’importance de fournir une estimation du coût pour le cycle de vie. La politique du Conseil du Trésor indique : «inhérente à la notion de meilleure valeur est la prise en considération de tous les coûts pertinents que suppose la vie utile de l’acquisition, pas seulement du coût initial ou du coût contractuel de base. » Le guide des coûts de la DN mentionne que les coûts du cycle de vie doivent « être évalués afin de pouvoir avoir une vue d’ensemble des différences entre les options considérées ».

Quatrièmement, le rapport du VG d'automne 2010 portant sur l’achat d’hélicoptères militaires recommandait que « la Défense nationale doit commencer à estimer les coûts liés au cycle de la vie complet lors de la phase d’analyse des options de son processus de gestion des projets. » En réponse à d’autres questions du comité le 1er mai 2012, le ministre adjoint de la Défense a confirmé qu’il avait effectivement lu le chapitre 6 du rapport du VG d’automne 2010 et qu’il était ainsi conscient de la recommandation prescrivant à prendre en compte les coûts liés au cycle de la vie complet. Le NPD est inquiet, car il n’y a aucune référence à ces directives dans le rapport du comité malgré le fait que cela ait été abordé pendant les témoignages.

À la lumière de la preuve entendue en comité, le NPD est profondément préoccupé par le fait que le gouvernement n’ait pas été capable de d’opérer un processus d’approvisionnement ouvert et juste, de fournir des estimations de coût vraisemblables selon la politiques du Conseil du Trésor et d’être transparent avec les Canadiens en ce qui concerne le véritable coût du F-35. Selon le rapport du vérificateur général ainsi que tous les témoignages, il est évident que le gouvernement n’a pas fait preuve de diligence raisonnable.

De plus, le NPD est également préoccupé par le fait que le plan du gouvernement en sept points sous la supervision du nouveau Secrétariat national d’approvisionnement en chasseurs (SNAC) (nommé le Secrétariat F-35 à l’origine) n’a aucune intention d’examiner d’autres options que celle du F-35. Le gouvernement a choisi TPSGC pour superviser le nouveau secrétariat malgré le fait que le VG ait dit que TPSGC n’avait pas rempli son rôle en tant qu’autorité responsable de l’acquisition et n’avait pas fait preuve de diligence raisonnable. En plus, le gouvernement n’a toujours pas fourni de mise à jour au Parlement sur les coûts alors qu’il aurait dû le faire selon le point 3 du plan en sept points et que le programme JSF lui a envoyé ces renseignements il y a sept mois. Finalement, il ne semble pas que le SNAC aura le mandat de revoir ou changer l’EB, ce qui rend  tout simplement impossible l’étude réelle des options autres que celle du F-35. À la lumière de ces faits, nous pensons que le gouvernement a perdu toute crédibilité dans ce processus d’acquisition.