propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Monsieur le Président, j'ai le plaisir d'amorcer le débat sur le projet de loi .
Le projet de loi connu sous le titre de Loi sur la sécurité des rues et des communautés remplit l'engagement pris dans le discours du Trône de juin 2011 de représenter rapidement des mesures législatives sur la loi et l'ordre afin de combattre le crime et le terrorisme. Cet engagement reflète lui-même le mandat fort que les Canadiens nous ont donné afin de protéger la société et de tenir les criminels responsables de leurs actes.
Nous avons regroupé des projets de loi sur la criminalité qui sont morts au Feuilleton lors de la dernière législature en une mesure législative complète et nous avons l'intention de la faire adopter au cours des 100 premiers jours de séance de l'actuelle législature.
Hier, à Brampton, j'ai rencontré des victimes d'actes criminels et des membres de leur famille. En leur parlant, j'ai constaté encore une fois à quel point il était important que cette mesure législative soit adoptée sans tarder. Hier, que ce soit à Brampton ou à Montréal, les gens que nous avons rencontrés, des gens comme Joe Wamback, Sharon Rosenfeldt, Sheldon Kennedy, Yvonne Harvey, Gary Lindfield, Maureen Basnicki ou Line Lacasse, nous ont rappelé l'importance de ces modifications législatives.
Nous avons le devoir de faire quelque chose pour ces victimes, et c'est ce que nous faisons en présentant la mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui.
Ces dernières années, l'objectif de nos réformes du droit pénal a toujours été le même: faire du Canada un endroit plus fort, plus sûr et meilleur. Cette mesure législative complète nous rapproche encore un peu plus de cet objectif.
Chaque fois que je participais à une table ronde ou que je rencontrais des citoyens dans la rue, le même message ressortait de la discussion: les gens veulent que les rues et les communautés soient plus sûres et ils comptent sur nous pour prendre les mesures qui s'imposent pour arriver à cette fin.
Le projet de loi se divise en cinq parties.
La partie 1 propose une série de réformes visant à décourager les actes terroristes en venant en aide aux victimes de tels actes et en modifiant la Loi sur l'immunité des États.
La partie 2 réformera la manière dont sont déterminées les peines infligées aux personnes coupables de crimes sexuels contre des enfants et d'infractions graves liées à la drogue. Elle empêchera également ceux qui commettent des crimes graves avec violence ou contre la propriété de bénéficier d'une peine avec sursis.
De son côté, la partie 3 modifiera les mesures suivant la détermination de la peine en augmentant la responsabilité des délinquants, en supprimant l'admissibilité à la réhabilitation pour les crimes graves et en renforçant le régime de transfèrement international des délinquants.
La partie 4, quant à elle, vise à mieux protéger les Canadiens contre les jeunes contrevenants violents.
Enfin, la partie 5 modifiera la législation en matière d'immigration afin de mieux protéger les travailleurs étrangers vulnérables contre les mauvais traitements et l'exploitation, notamment en ce qui concerne la traite des personnes.
D'aucuns diront que ce projet de loi exhaustif est difficile à comprendre. Je leur répondrai que les réformes qu'il propose devraient déjà être familières aux députés — et aux Canadiens — puisque nous les avons étudiées à la dernière législature, avant qu'elles ne meurent au Feuilleton à la dissolution du Parlement.
Bon nombre de ces réformes ont déjà été débattues, étudiées et parfois même adoptées par au moins une des deux Chambres du Parlement. En fait, cette mesure complète ne fait que présenter de nouveau au Parlement les mêmes réformes qu'auparavant, se contentant seulement d'apporter les quelques modifications de forme nécessaires pour que toutes ces mesures puissent être regroupées en un seul et unique projet de loi.
Quelques autres modifications ont aussi été apportées. Je les décrirai lorsque je résumerai les éléments auxquels elles se rapportent. Je tiens cependant à noter que, comme ces modifications supplémentaires demeurent en droit fil avec les objectifs que poursuivait le gouvernement lorsque, lors de la dernière législature, il a présenté ces réformes pour la première fois, elles devraient obtenir le soutien des députés encore aujourd'hui.
Je vais maintenant passer en revue quelques-uns des éléments du projet de loi pour le bénéfice des députés.
La partie 1 comprend les articles 2 à 9. Les modifications prévues dans ces articles visent à décourager le terrorisme en édictant la Loi sur la justice pour les victimes d'actes de terrorisme.
Comme il est indiqué dans le préambule de la nouvelle loi proposée, les réformes visent à reconnaître que « le terrorisme est une question d'intérêt national qui touche la sécurité de la nation » et que « le fait de prévenir et de décourager les actes de terrorisme contre le Canada et les Canadiens » est une priorité.
Les activités organisées au Canada récemment pour souligner le 10e anniversaire des attentats du 11 septembre à New York, en Virginie et en Pennsylvanie sont un rappel cruel que la menace du terrorisme plane toujours et que nous devons demeurer vigilants.
Ainsi, dans le but de décourager le terrorisme, on propose dans la partie 1 de créer une cause d'action qui permettrait aux victimes d'engager des poursuites contre les auteurs d'actes de terrorisme et ceux qui les soutiennent, notamment les États étrangers, pour les pertes ou les dommages subis par suite de tout acte de terrorisme ou omission survenu au Canada ou à l'étranger à partir du 1er janvier 1985.
On propose également de modifier la Loi sur l'immunité des États afin de retirer l'immunité aux États qui, selon le gouvernement, soutiennent le terrorisme.
Les modifications contenues dans la partie 1 ont déjà été adoptées par le Sénat dans le cadre de l'ancien projet de loi , déposé lors de la dernière session parlementaire. Nous y avons apporté quelques modifications de forme pour corriger des erreurs grammaticales et les renvois erronés.
La partie 2 comprend les articles 10 à 51. On y trouve les modifications qui seront apportées au Code criminel et à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, concernant la détermination de la peine, afin que les peines infligées pour les crimes liés à l'exploitation sexuelle des enfants, les crimes graves liés à la drogue, d'autres crimes violents et des crimes graves contre les biens soient proportionnelles à la gravité de ces crimes.
L'exploitation des enfants est un crime très grave, incompréhensible, qui mérite une sanction appropriée. Les propositions qui se trouvent dans le projet de loi C-10 concernant l'exploitation sexuelle des enfants reprennent celles contenues dans l'ancien projet de loi. Les réformes proposées visent à sanctionner de manière appropriée et uniforme toutes les formes d'exploitation sexuelle des enfants grâce à de nouvelles peines d'emprisonnement obligatoires ou à l'alourdissement de ces peines ou de certaines peines maximales.
Elles visent aussi à prévenir les infractions de nature sexuelle contre des enfants en créant deux nouvelles infractions et en exigeant que les tribunaux envisagent d'imposer des conditions afin d'empêcher des délinquants sexuels soupçonnés de s'en prendre aux enfants, ou condamnés pour de tels crimes, d'adopter des comportements susceptibles de faciliter ces crimes ou d'en permettre la perpétration.
Les réformes visant l'exploitation sexuelle des enfants contenues dans le projet de loi sont essentiellement les mêmes que dans le projet de loi adopté par la Chambre des communes lors de la dernière législature et qui était à l'étape de la troisième lecture au Sénat lorsqu'il est mort au Feuilleton. Malheureusement, des parlementaires ont parlé et parlé à tel point que le projet de loi n'a pas été adopté.
La principale différence c'est que le projet de loi actuel propose également l'accroissement des peines maximales dans le cas de quatre infractions et une augmentation correspondante des peines d'emprisonnement minimales obligatoires proposées de manière à refléter le caractère odieux de ces crimes.
Le projet de loi propose d'augmenter la peine maximale en cas de déclaration sommaire de culpabilité pour différentes infractions. Toutes ces mesures sont conformes avec les objectifs de l'ancien projet de loi , tel qu'il avait été présenté.
Il est également proposé de modifier le Code criminel afin de restreindre davantage le recours aux peines avec sursis, ou la détention à domicile, comme on appelle couramment ces peines.
Comme il était proposé à l'origine lors de la dernière législature dans le projet de loi , qui mettait fin à la détention à domicile de contrevenants violents et dangereux ayant commis des crimes contre les biens ou d'autres crimes graves, les mesures visent à interdire explicitement les peines avec sursis dans le cas des infractions passibles d’une peine maximale d’emprisonnement de 14 ans ou d’emprisonnement à perpétuité; dans le cas de certaines infractions qui entraînent une mise en accusation et une peine maximale d’emprisonnement de 10 ans, c'est-à-dire qui entraînent des lésions corporelles, qui ont trait à l’importation, à l’exportation, à la vente ou à la production de drogues ou qui ont été commises à l’aide d’une arme; de même dans le cas des crimes graves contre la propriété et les infractions avec violence poursuivies par mise en accusation et punissable de 10 ans d'emprisonnement comme le harcèlement criminel, la traite de personnes et le vol de plus de 5 000 $.
Les propositions du projet de loi sont identiques à ce qui avait été proposé dans le projet de loi , qui avait été adopté en deuxième lecture et renvoyé au Comité de la justice, qui ne l'avait pas encore étudié lorsqu'il est mort au Feuilleton.
Le projet de loi comporte des modifications de nature technique à la liste des infractions exclues passibles d'un maximum de 10 ans d'emprisonnement afin d'inclure la nouvelle infraction de vol de véhicule à moteur, pour coordonner l'imposition d'une peine minimale obligatoire d'emprisonnement prévue au paragraphe 172.1(1), le leurre d'enfant, et pour modifier l'enlèvement d'enfant, à l'article 281.
Nous nous attaquons aussi à la grave question des crimes liés aux drogues au Canada, particulièrement lorsqu'ils sont le fait de groupes criminels organisés ou qu'ils visent les jeunes parce que nous connaissons tous les répercussions de tels crimes dans nos collectivités.
Les propositions de la partie 2 pour contrer la criminalité liée aux drogues comprennent des modifications à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances prévoyant des peines d'emprisonnement minimales obligatoires pour production, trafic ou possession dans le but d'en faire le trafic, importation, exportation ou possession dans un but d'exportation des drogues de l'annexe I comme l'héroïne, la cocaïne et la méthamphétamine ainsi que des drogues de l'annexe II comme la marijuana.
Ces peines minimales obligatoires s'appliqueraient en cas de circonstance aggravante, y compris le fait que la production de la drogue a créé un risque d’atteinte à la santé ou à la sécurité, ou que l'infraction a été commise dans une école ou à proximité.
En outre, la loi doublerait la peine maximale pour production des drogues de l'annexe II, comme la marijuana, qui passerait de 7 à 14 ans, et transférerait de l’annexe I à l’annexe III le GHB et le flunitrazépam, qui sont connus sous le nom de drogues du viol.
En conséquence, ces infractions entraîneraient désormais des peines maximales plus élevées.
Le projet de loi permettrait à un tribunal de reporter la détermination de la peine pendant que le délinquant toxicomane participe à un programme de traitement agréé par la province, sous la surveillance du tribunal, ou à un programme judiciaire de traitement de la toxicomanie. Le tribunal pourrait aussi imposer une peine autre que la peine minimale si le délinquant termine un tel programme avec succès.
Le libellé de ces dispositions est le même que lorsqu'elles ont été adoptées par le Sénat dans l'ancien projet de loi .
La partie 3, composée des articles 52 à 166, propose des mesures suivant la détermination de la peine pour assurer un meilleur soutien aux victimes et responsabiliser davantage les délinquants.
Les Canadiens nous ont dit qu'ils attendaient de leur gouvernement qu'il veille à ce que les délinquants soient tenus responsables de leurs actes, parce que c'est la seule chose qui pourrait leur redonner pleinement confiance dans notre système de justice pénale.
La partie 3 propose des changements qui avaient déjà été présentés dans d'autres projets de loi, à la dernière législature. Elle propose entre autres de mettre un terme à la libération anticipée des criminels et d'augmenter la responsabilisation des délinquants dans le cadre de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition en reconnaissant les droits des victimes, en augmentant la responsabilité des délinquants et en modernisant le système disciplinaire des détenus.
Le projet de loi propose aussi des modifications de forme pour supprimer des dispositions adoptées précédemment dans le cadre de la Loi sur l’abolition de la libération anticipée des criminels, et prévoit des précisions sur des aspects comme le calcul de la peine, l'ajout de nouvelles infractions promulguées récemment dans d'autres lois et le changement du nom de la Commission nationale des libérations conditionnelles, qui deviendra la Commission des libérations conditionnelles du Canada.
Il comporte aussi des propositions qui avaient déjà été présentées dans le projet de loi , Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens, ou Loi sur le transfèrement international des délinquants, visant à améliorer la sécurité publique en inscrivant dans la loi un certain nombre de nouveaux facteurs clés dont il faut tenir compte dans la décision d'accorder le transfèrement de délinquants au Canada. Le projet de loi propose ces changements tels qu'ils ont été présentés la première fois.
Elle comprend des propositions incluses dans la Loi supprimant l’admissibilité à la réhabilitation pour des crimes graves lors de la dernière législature. Ces propositions visent à augmenter la période d'inadmissibilité à une suspension du casier, que l'on appelle actuellement une réhabilitation, et de supprimer l'admissibilité à la suspension du casier pour certaines infractions et pour les personnes qui ont été condamnées pour plus de trois infractions dont chacune a fait l’objet d’une poursuite par voie de mise en accusation et qui se sont vues infliger pour chacune une peine d’emprisonnement de deux ans ou plus. Ce projet corrige les incohérences qui se trouvaient dans les anciens projets de loi présentés au Parlement.
J'ai reçu un grand nombre de lettres, de courriels et d'appels sur le secteur du droit criminel qui porte sur les jeunes contrevenants violents et récidivistes. J'ai été particulièrement intéressé par la correspondance que j'ai reçue de jeunes étudiants, et je suis toujours heureux d'entendre l'opinion de tout le monde sur ce sujet.
La partie 4, qui se trouve aux articles 167 à 204, propose des modifications à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents afin de durcir le traitement réservé aux jeunes contrevenants violents et récidivistes.
Ces modifications incluent: souligner la protection du public en tant que principe, ce qui facilitera la détention des adolescents accusés d'infractions graves dans l'attente d'un procès; s'assurer que les procureurs envisagent la possibilité de demander une peine applicable aux adultes pour les crimes les plus graves; empêcher les jeunes de moins de 18 ans d'être emprisonnés dans un établissement pour adultes; et obliger les services de police à conserver des registres des mesures extrajudiciaires. Ces modifications avaient été proposées auparavant dans la Loi de Sébastien, qui avait été longuement étudiée par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes quand il est mort au Feuilleton lors de la dernière législature.
Le projet de loi comprend des modifications visant à répondre aux préoccupations soulevées par les provinces au sujet des dispositions de l'ancien projet de loi concernant l'assujettissement à la peine applicable aux adultes avant la tenue du procès et les ordonnances différées de placement sous garde. Plusieurs provinces ont demandé à ce que les dispositions de détention avant le procès soient moins restrictives que celles qui étaient proposées dans le projet de loi . Les modifications présentées dans ce projet de loi donnent donc plus de latitude pour détenir les jeunes impossibles à contrôler et posant un risque pour le public et pour eux-mêmes.
Le critère applicable à la détention avant le procès prévu par la loi sera autonome et ne renverra à aucun article du Code criminel.
D'autres modifications sont plus techniques, si je puis m'exprimer ainsi, notamment la suppression des deux modifications suivantes apportées par le projet de loi : la suppression de la référence à la norme de preuve pour l'assujettissement à la peine applicable aux adultes, et la portée plus étendue des ordonnances différées de placement sous garde et de surveillance.
Pour finir, la partie 5, qui se trouve aux articles 205 à 207, propose des modifications à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés afin de permettre aux agents d'immigration de refuser d'émettre un permis de travail à des travailleurs étrangers si ce refus les protège contre le risque de subir un traitement dégradant ou attentatoire à la dignité humaine, notamment d'être exploité sexuellement ou d'être victime de traite de personnes. La forme de ces propositions est identique à celle utilisée dans le projet de loi sur la prévention du trafic, de la maltraitance et de l'exploitation des immigrants vulnérables.
Je tiens également à souligner que l'entrée en vigueur des réformes proposées dans l'actuel projet de loi serait semblable à celle proposée dans les projets de loi antérieurs. La partie 1 entrerait en vigueur dès que le projet de loi recevrait la sanction royale, tandis que les autres parties entreraient en vigueur à une date fixée par le gouverneur en conseil. Cela donnerait le temps nécessaire aux provinces et territoires de se préparer à mettre en oeuvre ces réformes en temps voulu.
Je me rends compte que j'ai pris du temps pour passer en revue des détails du projet de loi. Nous avons clairement dit, durant la dernière campagne électorale, que ces mesures sont une priorité de ce gouvernement. Nous avons élaboré ces projets de loi et ils permettent de mieux protéger les victimes. Comme le savent les députés, dans toutes les mesures législatives que nous avons présentées, nous avons toujours mis de l'avant la façon dont les dispositions permettent de mieux protéger les victimes dans ce pays et nous avons toujours défendu les intérêts des Canadiens respectueux des lois.
Je suis ravi et fier que mon nom, comme celui de mes collègues, soit associé à cette importante mesure législative.
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Madame la Présidente, nous voici vraiment à un moment historique en qui concerne ce projet de loi que la Chambre débattra dans les prochains jours et les prochaines semaines.
Je parle d'un moment historique parce que, depuis cinq ans, le gouvernement s'emploie à changer du tout au tout l'approche utilisée au Canada depuis 40 ans en matière de justice pénale.
Il y a environ 40 ans, les gouvernements, pas uniquement ceux dont l'idéologie se situe au centre ou à la gauche du spectre politique, mais également des gouvernements progressistes conservateurs, ont adopté l'approche que nous utilisons actuellement. Par la suite, les Canadiens ont vu progresser le Parti réformiste et l'Alliance canadienne, dont l'idéologie radicale de droite s'inspire surtout de tendances ayant cours aux États-Unis. Or, nos voisins révisent actuellement leur position et s'intéressent maintenant à ce qui se fait au Canada en matière de traitement de la criminalité et des comportements antisociaux, dans le but de rendre leur système pénal plus juste et plus efficace.
Le gouvernement actuel fonde entièrement ses décisions sur l'idéologie, jamais sur les faits, ni sur des données probantes.
Voici une anecdote intéressante dont je me rappelle encore. Dan Gardner, un reporter ou un commentateur au service d'un quotidien d'Ottawa, avait mis au défi le prédécesseur de l'actuel ministre de la Justice, aujourd'hui , de lui faire parvenir des études montrant l'efficacité des mesures dissuasives. Le ministre a relevé le défi et a fait parvenir cinq études à M. Gardner. Toutefois, lorsque le journaliste en a pris connaissance, il a constaté que trois d'entre elles affirmaient que les mesures dissuasives sont inefficaces. Les deux autres études exprimaient une opinion catégorique, axée sur une analyse très subjective. Or, ces études ne sont pas fiables, car elles ne reposent pas sur la méthodologie normalement utilisée en sociologie et en criminologie.
Les conservateurs ne sont jamais arrivés à faire mieux à cet égard.
Aujourd'hui, nous venons d'entendre la même rengaine. Les conservateurs affirment à la Chambre que leur objectif est de défendre la cause des victimes. Ils croient que ce projet de loi, à l'instar des autres mesures législatives qu'ils ont fait adopter depuis cinq ans, aura un effet dissuasif sur la criminalité et qu'il permettra de réduire les coûts liés à la criminalité, évalués à 99 milliards de dollars, ce que je trouve fort peu probable, comme je ne cesse de le répéter. Pour réduire la criminalité, les conservateurs promettent d'alourdir les peines d'emprisonnement, de recourir à des mesures dissuasives et d'incarcérer des milliers de personnes de plus qu'avant.
Il n'existe pas une seule étude, pas seulement au Canada, mais dans tous les pays développés et démocratiques, qui confirme que la dissuasion fonctionne. Au cours des cinq prochaines années, nous dépenserons au moins 2 milliards de dollars de plus, voire 11, 12 ou 13 milliards de dollars, selon les prévisions auxquelles on se réfère, en appliquant une philosophie de la justice criminelle, une conception idéologique, qui ne fonctionne pas. Le projet de loi ne fait que tomber dans le même panneau.
Qu'on me permette un instant de faire parler l'avocat en moi. Au cours des sept dernières années, j'ai été porte-parole de mon parti en matière de sécurité publique et de justice. J'ai fait valoir un certain nombre de fois qu'il faut procéder à une profonde réforme du Code criminel. Or, on pourrait le faire en se servant de projets de loi omnibus. Le projet de loi omnibus dont nous sommes saisis n'est pas le premier à être présenté par le gouvernement. En fait, c'est le deuxième. Lorsque j'ai appris que les conservateurs présentaient un tel projet de loi, j'ai cru qu'ils suivaient enfin les recommandations de ceux d'entre nous qui préconisent la réforme du Code criminel pour éliminer les dédoublements et des contradictions qui s'y trouvent, surtout en ce qui concerne la détermination des peines, mais aussi les infractions.
Ce n'est toutefois pas ce que font les conservateurs. En fait, ils ne font que présenter un ensemble de projets de loi qui n'ont rien à voir les uns avec les autres. Pour réformer en profondeur le Code criminel à l'aide d'un projet de loi omnibus, il faudrait qu'ils le fassent de façon systématique. Dans le projet de loi, certains principes qui gouvernent la détermination des peines, des principes dont ils se serviront comme exemples, manquent de cohérence. C'est ce qu'on pouvait lire dans un des articles parus dans la presse ce matin.
Le projet de loi aura des conséquences de ce genre. Il prévoit une peine minimale obligatoire dans le cas d'une infraction de trafic de drogue qui sera deux fois plus longue que celle prévue pour le viol d'un enfant. Voilà le genre d'embrouillaminis et de contradictions que l'on trouve dans ce projet de loi, et les contradictions de ce genre abondent.
Par conséquent, si nous souhaitions vraiment bâtir un système de justice pénale efficace, qui ne présente pas de telles contradictions, qui nuisent à la capacité des agents de police, des juges, des avocats de la défense et des procureurs de faire respecter la loi, nous aurions amorcé une réforme il y a bien longtemps.
Je vais maintenant me pencher sur le projet de loi proprement dit. Contrairement à ce que le ministre a déclaré, le projet de loi se compose en fait de neuf projets de loi qui avaient été déposés lors de la législature précédente. Même s'il comporte cinq parties, il englobe en fait neuf projets de loi différents. Comme je n'aurai pas le temps de parler de chacun d'entre eux, je vais me concentrer sur la partie du projet de loi qui traite des infractions liées aux drogues, en raison des coûts qui seront engendrés.
C'est la troisième fois que le projet de loi est présenté à la Chambre. Certains changements ont été apportés depuis la première mouture, mais, en gros, on a toujours affaire au même contenu. À l'époque, lorsque le projet de loi a été présenté à la Chambre, le gouvernement conservateur et le Parti libéral l'ont tous deux appuyé. Ils l'ont fait adopter. Je suis presque certain qu'il a ensuite été renvoyé au Sénat. Il est mort au Feuilleton en raison du déclenchement des élections, et nous avons donc dû repartir de zéro.
Lors de la dernière législature, c'est un projet de loi qui a d'abord été présenté au Sénat. En raison d'un changement à la direction de leur parti, les libéraux ont alors fait volte-face et décidé de s'opposer à la mesure législative.
Nous nous opposons à ce projet de loi depuis le début, peu importe sa forme, pour deux raisons: les coûts qu'il engendrera et le fait que ces coûts sont totalement injustifiables, car cette mesure législative ne contribuera pas du tout à la lutte contre le trafic de drogue. C'est facile pour nous de le démontrer.
J'habite dans la partie la plus méridionale du pays. En fait, je vis dans une région qui se trouve au sud de nos voisins américains qui habitent dans le Nord de leur pays. J'ai vu l'assemblée législative américaine essayer de composer avec le problème du trafic de drogue. Il y a environ deux ans et demi, les Américains ont commencé à abroger des lois qui prévoyaient des peines minimales obligatoires. Ils se dirigeaient tout droit vers la faillite en gardant autant de personnes en prison.
Une tendance similaire a été observée en Californie et a atteint son paroxysme au printemps dernier. On s'était mis à placer deux, puis trois, détenus par cellule, jusqu'à ce qu'on se retrouve à en loger dans la cafétéria et le gymnase. Ces prisonniers ne bénéficiaient d'aucun programme de réadaptation sociale ni d'aucun traitement et n'étaient pas à la veille de sortir de prison. Un grand nombre d'entre eux souffraient en plus de problèmes de santé mentale — ce qui est souvent le cas. Les tribunaux ont ordonné à la Californie de libérer de 35 000 à 45 000 détenus au cours de cette année-là. Même si bon nombre de ces détenus avaient été condamnés pour crimes graves avec violence et n'avaient pas bénéficié d'un programme de réadaptation sociale ni d'un traitement pendant qu'ils purgeaient leur peine, ils ont été libérés. C'est le genre de crise qui s'est produit aux États-Unis lorsque ce pays a adopté et mis en vigueur des lois comme celles dont nous sommes saisis. Au cours d'une période de 10 à 15 ans, la population carcérale a doublé.
Nous nous engageons dans la même direction. Pour en revenir au gouvernement, il refuse de tenir compte des faits et d'accepter les preuves de ce que donnent ce genre de mesures législatives. Le gouvernement se dirige dans la même direction qu'ont prise les États-Unis il y a de 15 à 20. Maintenant que nos voisins du Sud font marche arrière, voilà que le gouvernement conservateur les imite.
Et les États-Unis ne sont pas les seuls à faire volte-face. Ailleurs dans le monde, rares sont les pays qui ont tenté l'expérience, je me réjouis de le dire. Aucun autre gouvernement des démocraties occidentales n'a amélioré les choses ainsi. Cette approche ne fonctionne pas. Pourtant, nous nous apprêtons à dépenser de 10 à 13 milliards de dollars uniquement pour ce projet de loi.
La partie du projet de loi qui concerne en particulier les infractions liées aux drogues aura pour effet d'accroître la population carcérale, principalement dans les prisons provinciales. À l'heure actuelle, certaines provinces pratiquent la double occupation des cellules à un taux de 200 p. 100. Certaines prisons provinciales fonctionnent donc au double de leur capacité. Dans toutes les provinces et tous les territoires, les prisons débordent.
La Chambre devrait peut-être se rappeler que nous avons signé un protocole international en vertu duquel nous nous sommes engagés à ne pratiquer la double occupation ni dans les prisons provinciales ni dans les prisons fédérales. Nous contrevenons à ce protocole, et ce, depuis un certain nombre d'années, et les choses n'iront qu'en s'aggravant.
Je sais que j'insiste beaucoup sur la partie du projet de loi portant sur les drogues, mais c'est là que se concentrent surtout les coûts. Il y en a d'autres, mais c'est là que la plus grande partie des coûts se trouve. La vaste majorité de gens touchés par ce projet de loi ne seront pas des Hells Angels, des motards ou des gens que nous associons généralement au crime organisé. Encore une fois, je dis cela parce que nous avons étudié la situation aux États-Unis après l'adoption de projets de loi identiques à celui-ci. Ce sont les proies faciles qui se font prendre, et plus particulièrement les petits vendeurs de marijuana, parce qu'il suffit de posséder six plants et que les plants en question n'ont pas besoin de mesurer six pieds. Le projet de loi dit simplement plus de cinq plants. Une personne qui possède six plants de trois pouces sera considérée comme un trafiquant, en dépit de ce que le ministre a dit précédemment.
Je crois que le ministre n'a jamais participé à un procès pour trafic de drogue. Moi oui, et, la loi est ainsi libellée que toute personne ayant en sa possession plus de six plants sera incapable de démontrer qu'elle n'est pas un trafiquant. Un très grand nombre de jeunes gens qui sont actuellement condamnés pour possession simple iront en prison, y compris des enfants de députés d'en face et de ce côté-ci de la Chambre. Ces jeunes seront emprisonnés pour un minimum de six mois simplement parce qu'ils avaient six plants de marijuana.
Voilà le corollaire de ce projet de loi. En tant que contribuables, c'est nous qui paierons la facture.
J'aimerais discuter plus en détail également de la mesure législative portant sur les jeunes contrevenants, qui était le projet de loi à la dernière législature.
Une histoire fort intéressante s'y rattache. C'était la tentative de la part du gouvernement de nous faire revenir à une ancienne pratique, lorsque nous traitions les jeunes beaucoup plus durement que nous l'avons fait au cours des 15 ou 20 dernières années. Le ministre a répété encore aujourd'hui que le gouvernement justifie cette approche en soutenant qu'il traquera les jeunes contrevenants qui ont déjà commis des infractions graves avec violence. Je m'exprime au nom de tous les députés qui siègent à la Chambre et qui étaient présents à la réunion du Comité de la justice la dernière fois que nous avons tous accepté cette réalité. Je tenais simplement à faire une parenthèse d'ordre historique. Nous avons procédé à une réforme importante de la loi sur les jeunes contrevenants il y a près de six ans. Quand le ministre a présenté ce projet de loi, beaucoup de députés des différents partis ont indiqué qu'il était trop tôt pour amender le projet de loi. Tous les membres du comité, tous partis politiques confondus, ont rejeté le projet de loi. Ce qu'il renfermait était véridique dans l'ensemble, et nous avons refusé certaines des propositions — plus particulièrement, celle de rétablir les mesures de dissuasion pour les jeunes contrevenants. Nous avons dit non. Nous avons soutenu qu'il fallait voir s'il existait des mécanismes, des outils d'application de la loi ou des instruments législatifs que nous pourrions fournir à nos policiers et à nos procureurs et, par le fait même, à nos juges, afin de pouvoir régler le cas du petit pourcentage de jeunes contrevenants qui sont déjà violents et dangereux pour notre société.
Nous avons tous admis que ce groupe existait et nous nous sommes dit que nous pourrions faire quelque chose à cet égard. Fait intéressant, trois procureurs se sont présentés au comité de leur propre initiative. Je n'ai nullement l'intention, et je sais qu'il en va de même des autres partis de l'opposition, de m' attribuer le mérite d'avoir déniché ces procureurs principaux, qui s'occupent des jeunes délinquants dans leur province respective, soit la Nouvelle-Écosse, le Manitoba et l'Alberta. Ils se sont consultés et ont demandé collectivement à témoigner au comité.
La première chose qu'ils ont dite au comité, c'est que la mesure législative proposée par le gouvernement aurait en fait l'effet contraire, c'est-à-dire qu'il serait désormais plus difficile pour eux de poursuivre les jeunes délinquants qui commettent des crimes graves ou violents.
Au cours des dernières semaines, j'ai reçu une lettre du procureur général de la Saskatchewan appuyant les procureurs. Des représentants de deux gouvernements conservateurs et de deux gouvernements néo-démocrates sont venus au comité pour nous dire que nous avions commis une grave erreur, que notre projet de loi allait avoir un effet tout à fait contraire à ce que nous avions annoncé à la population canadienne.
Je leur ai demandé, et je m'en félicite, s'ils pourraient nous communiquer les amendements qu'ils voudraient qu'on apporte, et ils l'ont fait. Je tiens à souligner le travail qu'ils ont accompli. Ils nous ont présenté trois amendements. Essentiellement, ces derniers permettent que le système de justice pénale pour les adolescents tiennent mieux compte des délinquants dangereux et que le reste du système continue de fonctionner comme avant, car le reste du système, d'après tout ce que nous avons entendu au comité, fonctionne plutôt bien. Il est efficace, équitable et juste et il permet de faire efficacement face à la criminalité chez les jeunes, mais on ne peut pas en dire autant en ce qui concerne les délinquants dangereux.
Les procureurs ont proposé trois amendements, et ils sont revenus au comité une deuxième fois pour nous les présenter et les expliquer en détail. J'ai demandé aux députés ministériels s'ils les adopteraient. Ils ont dit non. Le gouvernement était si convaincu que son projet de loi était parfait que malgré l'avis des spécialistes, ses propres spécialistes des poursuites, il a refusé d'accepter ces amendements.
Fait intéressant, dans la version actuelle de ce projet de loi omnibus, les conservateurs ont retenu deux des amendements, et c'est tout à leur honneur. Le troisième amendement porte sur le fait de juger les jeunes comme des adultes, amendement qui est nécessaire. Je ne sais pas pourquoi il ne se trouve pas dans le projet de loi. J'aurais aimé avoir assez de temps pour poser la question au ministre aujourd'hui, mais je le ferai plus tard. Cela dit, cet amendement n'y figure pas.
Ces amendements sont nécessaires. Je répète que les députés du NPD, du Parti libéral et du Bloc étaient disposés à appuyer tous ces amendements, mais le gouvernement les a rejetés tout simplement parce qu'avec les conservateurs, c'est leur façon de faire ou rien du tout. Ils ont catégoriquement refusé d'envisager les amendements.
Le troisième aspect du projet de loi dont j'aimerais parler est celui du transfèrement international des délinquants. Depuis longtemps, le Canada signe des traités avec d'autres pays en vertu desquels nous permettons à leurs citoyens, reconnus coupables d'un crime et purgeant une peine dans notre pays, de présenter une demande en vue d'être rapatriés dans leur pays d'origine. Bien évidemment, ces traités vont dans les deux sens; un Canadien à l'étranger peut ainsi faire une demande pour être rapatrié au Canada. J'ignore depuis combien de temps ces traités sont en vigueur, mais cela fait au moins plusieurs décennies.
Quand les conservateurs sont arrivés au pouvoir en 2006, ils ont pris la décision unilatérale de contrer cette tendance et de rejeter tout un paquet de demandes. Alors que 90 p. 100 de ces demandes étaient acceptées à l'époque, moins de la moitié le sont aujourd'hui. Le gouvernement a même été appelé à expliquer son comportement devant les tribunaux, et il s'est attiré les foudres de la Cour fédérale.
Les conservateurs cherchent maintenant à accorder, dans le projet de loi, un pouvoir discrétionnaire absolu au ministre afin qu'il puisse rejeter davantage de demandes. Ceci a donné lieu à un incident international entre notre pays et les États-Unis, avec lesquels la plupart de ces échanges de prisonniers avaient lieu. Les Américains ont envoyé une note de protestation au gouvernement du Canada en janvier 2010 à cause de ce retournement radical de politique.
Le projet de loi comporte de graves lacunes. Les néo-démocrates seraient disposés à en appuyer certaines parties; je ne pourrai pas en parler en plus grand détail car mon temps de parole est presque écoulé, mais compte tenu de l'attitude du gouvernement, il sera très difficile pour nous d'arriver à des compromis.
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Madame la Présidente, je donne aujourd'hui mon deuxième discours à la Chambre. Cela a été une semaine chargée.
Comme certains des députés le savent peut-être, je suis le nouveau député de la circonscription de , le berceau de la Confédération. J'espère que l'on me permettra de remercier les habitants de Charlottetown de m'avoir accordé l'honneur et le privilège de les représenter ici, à la Chambre.
Madame la Présidente, j'ai très hâte de travailler avec vous et avec mes collègues des deux côtés de la Chambre.
Comme les députés le savent peut-être, notre porte-parole en matière de justice, le député de , qui est un ancien ministre de la Justice, un défenseur des droits de la personne de renommée mondiale, un juriste et un professeur, participe aujourd'hui à des réunions aux Nations Unies. Au moment où la situation du Moyen-Orient retient l'attention du monde, nous souhaitons au député et au des délibérations fructueuses aux Nations Unies.
Je suis ici aujourd'hui pour parler du projet de loi . Le projet de loi est volumineux et il comprend neuf projets de loi présentés au cours de la dernière législature, qui sont regroupés dans un projet de loi omnibus fondé sur la division et la peur. Le titre du projet de loi comporte environ sept lignes. Je peux m'imaginer le temps, les efforts, l'angoisse et les délibérations qui ont été associés à la sélection d'un titre pour ce projet de loi.
J'ai tenté d'imaginer les autres noms qui n'ont pas été retenus. Je vais formuler quelques hypothèses à cet égard: loi visant à semer la division entre les Canadiens et à faire plaisir à la base conservatrice; loi visant à fournir des détenus pour les prisons vides; loi visant à remplir les prisons afin d'en bâtir de nouvelles; loi visant à réduire le nombre d'Autochtones dans les réserves en les mettant en prison; loi visant à mettre en place une stratégie conservatrice sur le logement abordable et globale; loi visant à faire des prisons les plus grands établissements psychiatriques au Canada et loi visant à stimuler le secteur pénal. J'aime particulièrement cette dernière suggestion.
Après une multitude de dîners, de soupers et de réunions tenues tard le soir, les conservateurs se sont finalement entendus sur le titre abrégé du projet de loi. Il paraît que ce titre a fini au deuxième rang et qu'en fait, le titre retenu était le suivant: loi édictant le fait que maintenant que nous formons un gouvernement majoritaire, vous devez nous céder le passage.
Un projet de loi n'a jamais si bien porté le titre qu'on lui confère en anglais, soit « an act », car c'est bel et bien de cela qu'il s'agit. C'est un véritable spectacle. Peu importe les faits, les statistiques sur la criminalité et les mesures efficaces de prévention du crime, le gouvernement est déterminé à en mettre plein la vue. En clair, c'est un geste honteux de la pire espèce.
On peut se demander où on ira chercher le personnel qui sera affecté à toutes les nouvelles prisons qu'il faudra construire en raison de cette mentalité revancharde. Est-ce que ce sera l'occasion d'avoir recours à un mode différent de prestation de services ou à un partenariat public-privé? Il se pourrait que les activités de gestion de ces établissements soient confiées au secteur privé pour qu'il en fasse une entreprise rentable. Est-ce le plan envisagé? Je suis persuadé que la machine à propagande conservatrice évitera cette question et niera que c'est le but visé.
Ce projet de loi prête flanc à la moquerie. Il joue sur la peur au lieu de susciter l'espoir.
Ce projet de loi fait abstraction des éléments de preuve et des faits. Il donne l'illusion que la criminalité est débridée et que les rues sont le théâtre d'insurrections massives. On ne précise pas les coûts qui en découleront. Ce projet de loi ne traduit pas les valeurs des Canadiens, qui forment une société intelligente et compatissante.
Le système de justice canadien semble se rapprocher de plus en plus de celui de nos voisins du Sud. Il ne reflète pas les valeurs d'un pays comme le Canada.
Catherine Latimer, de la Société John Howard, a déclaré ce qui suit:
Nous croyons qu'il mettra en danger les travailleurs correctionnels, qu'il compromettra les droits, qu'il ne favorisera pas les bonnes pratiques correctionnelles, qu'il nuira aux principes de la justice et qu'il aura un effet beaucoup trop négatif sur certains des membres les plus vulnérables de notre société [...] s'aligner aveuglément sur des politiques américaines qui ont échoué n'est pas une façon de veiller aux intérêts de la population canadienne [...]
Comme nos amis républicains des États-Unis semblent avoir exercé une influence sur le contenu de ce projet de loi — peut-être même l'ont-ils carrément rédigé —, permettez-moi de citer un extrait d'un éditorial publié récemment dans ce pays. En ce qui concerne la criminalité et les prisons, il dit ceci:
La Californie consacre plus d'argent aux prisons qu'à l'enseignement supérieur. Le gouverneur a raison lorsqu'il dit que c'est le contraire du bon sens et qu'il faut renverser la vapeur.
Seulement soixante-huit pour cent des élèves terminent leurs études secondaires. Pourtant, nous payons les gardiens de prison beaucoup plus cher que les enseignants.
La peur du crime nous a incités à voter pour de longues peines d'emprisonnement et la règle des trois infractions. Nous n'avions pas l'intention de dépenser 4 milliards de dollars de plus pour les prisons que pour les collèges [...]
Moins notre main-d'oeuvre est instruite [...] plus les prisons se remplissent.
Il est temps d'admettre nos erreurs et de prendre des décisions qui ne sont pas faciles. En canalisant des sommes aussi considérables vers les prisons, nous sommes obligés de couper les vivres au système d'éducation. Nous ne pouvons pas nous permettre de subir les conséquences qui en résultent.
En ce qui concerne le taux de criminalité, on trouve le constat suivant dans un rapport publié cette année par Statistique Canada:
Les crimes déclarés par la police se situent à leur point le plus bas depuis le début des années 1970.
Le rapport dit que « le taux de crimes déclarés par la police, qui sert à mesurer le volume global de la criminalité, était toujours à la baisse » l'année dernière, où il a diminué de 5 p. 100 par rapport à l'année précédente, ce qui fait qu'il « s’est établi à son point le plus faible depuis 1973 ».
Qui plus est, le rapport indique que le taux de crimes violents est à son plus faible niveau depuis 1999.
L'année dernière, le nombre de crimes violents a baissé de 3 p. 100 par rapport à l'année précédente, tandis que l'indice de gravité des crimes violents a baissé de façon encore plus notable, soit de 6 p. 100. C'est la quatrième année de suite où l'on enregistre une baisse de cet indice, et la baisse est la plus considérable depuis plus de dix ans. Dans l'ensemble, les crimes violents constituent seulement le cinquième des infractions. Parmi les crimes violents dont le taux a diminué, on compte les tentatives de meurtre, en baisse de 14 p. 100, les homicides, en baisse de 10 p. 100, les vols qualifiés, en baisse de 7 p. 100 et les voies de fait majeures, en baisse de 5 p. 100. En revanche, les infractions relatives aux armes à feu ont augmenté.
Mon parti croit à l'élaboration de politiques publiques reposant sur des données véritables. Cependant, malgré les faits qui sautent aux yeux, les conservateurs, ou devrais-je dire les chevaliers de l'apocalypse, voudraient nous faire croire que le chaos s'est répandu massivement dans les rues. Il n'y a que dans l'univers des conservateurs qu'après avoir constaté une hausse de 11 p. 100 des infractions relatives aux armes à feu, on décide de se débarrasser du registre des armes à feu.
J'ai parlé tout à l'heure dans mon discours de la population autochtone. Lors du recensement de 2006, 3,1 p. 100 de la population adulte du Canada était composée d'Autochtones. Pourtant, la même année, les adultes autochtones constituaient 18 p. 100 de la population carcérale dans les établissements provinciaux et territoriaux, et 19 p. 100 dans les établissements fédéraux.
Le projet de loi aura beaucoup d'effets néfastes pour le Canada, notamment l'augmentation du nombre de Canadiens autochtones dans nos prisons.
Comment peut-on prendre le gouvernement au sérieux sur quoi que ce soit quand un des résultats probables du projet de loi sera l'emprisonnement d'un plus grand nombre de Canadiens autochtones? C'est une honte nationale.
Je comprends que mes paroles puissent causer un malaise et ne fassent pas l'unanimité chez les députés de l'opposition. Je suis un nouveau député, mais j'ai des opinions, et c'est en partie pourquoi je suis parmi vous aujourd'hui. Mes opinions reposent sur des principes d'équité et de justice. Je veux des lois qui reposent sur des faits, qui sont efficientes et axées sur la prévention du crime, et non sur le châtiment. Je ne tolérerai pas qu'on laisse entendre que moi ou les membres de ce caucus sommes indulgents à l'égard des criminels. Ce n'est pas vrai. Je répliquerai vertement.
Je termine en disant que le gouvernement prétend sévir contre le crime. Il prétend que la question lui importe. Les conservateurs y voient un jeu. C'est une tactique pour détourner l'attention des enjeux réels qui importent aux Canadiens. Cette semaine, le a dit aux Canadiens que le gouvernement s'occuperait de l'économie pendant la session parlementaire. Pourtant, la Chambre n'a pas passé les deux premières journées de la session sur des propositions visant à aider l'économie et la création d'emplois, mais bien sur un projet de loi qui n'est pas fondé sur des faits et qui cherche à diviser les Canadiens. C'est de la poudre aux yeux.
Le gouvernement aime recourir à des slogans et à des expédients. Il aime se montrer intraitable. De ce côté-ci de la Chambre, nous sommes nombreux à nous demander si les conservateurs se décideront à faire montre du même acharnement pour créer des emplois, combattre la pauvreté, lutter contre les changements climatiques, défendre les soins de santé et aider les plus démunis.
La seule chose à l'égard de laquelle le gouvernement se montre intraitable, c'est la vérité, et ce sont les Canadiens qui auront a en subir les conséquences.
[Français]
Je propose, appuyé par le député de :
Que la motion soit modifiée par substition au mot « Que », de ce qui suit:
« cette Chambre refuse de donner deuxième lecture au projet de loi C-10, Loi édictant la Loi sur la justice pour les victimes d'actes de terrorisme et à modifier la Loi sur l'immunité des États, le Code criminel, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et d'autres lois, parce que ses dispositions font abstraction de la meilleure preuve à l'égard de la sécurité publique, la prévention du crime et la réadaptation des délinquants; parce que ses coûts pour le Trésor fédéral et les coûts transférés aux provinces pour le service correctionnel n'ont pas été expliqués clairement à la Chambre; et parce que le regroupement de toutes ces mesures législatives dans un seul projet de loi compromettra la capacité du Parlement d'examiner et d'en analyser le contenu et les répercussions au nom des Canadiens. »
:
Madame la Présidente, la Loi sur la sécurité des rues et des communautés concrétise l'engagement pris par le gouvernement dans le discours du Trône de juin 2011 de présenter à nouveau un projet de loi sur la loi et l'ordre pour lutter contre la criminalité et le terrorisme. Comme l'a mentionné le , le projet de loi se divise en cinq parties et regroupe les réformes du droit pénal qui faisaient partie de neuf projets de loi présentés à la dernière session parlementaire.
Les modifications prévues à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances se trouvent dans la partie 2. Il s'agit des articles 39 à 51 inclusivement. Ces modifications sont les mêmes que celles proposées dans le projet de loi , qui a été présenté au mois de mai 2010 et qui a été adopté par le Sénat en décembre, mais qui est mort au Feuilleton à la dissolution du Parlement en mars dernier.
Je tiens à mentionner également que le gouvernement a proposé ces modifications visant à contrer les crimes graves liés à la drogue pour la première fois en 2007 dans le cadre du projet de loi , et à nouveau en 2009 dans le cadre du projet de loi . Nous sommes résolus à faire adopter ces réformes qui font maintenant partie du projet de loi sur la sécurité des rues et des communautés.
Les modifications proposées ne visent pas à imposer des peines minimales obligatoires pour tous les crimes liés à la drogue. Elles ciblent les crimes graves et visent à s'assurer que les auteurs de ces crimes seront punis. Elles envoient le message clair que ce type de comportement criminel est inacceptable aux yeux des Canadiens.
La peine d'emprisonnement minimale obligatoire constitue le point de référence sur lequel se base un juge lorsqu'il détermine la peine. Si une peine d'emprisonnement minimale s'applique d'office, le juge ne peut imposer une peine inférieure. À l'heure actuelle, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances ne prévoit pas de peines minimales obligatoires. Elle prévoit toutefois des peines maximales établies en fonction de l'infraction criminelle commise et des substances mises en cause. L'emprisonnement à perpétuité constitue la peine maximale pour les infractions les plus graves liées aux drogues les plus dangereuses.
Cette loi sur les stupéfiants prévoit l'imposition de la peine maximale pour les infractions les plus graves comme le trafic, la possession en vue de faire le trafic, l'importation ou l'exportation et la production de substances inscrites à l'annexe I. Quelles sont ces substances? Ce sont l'héroïne, la cocaïne, la méthamphétamine et la morphine. Sont aussi visées les substances inscrites à l'annexe II, notamment le cannabis et ses dérivés.
Ces infractions liées aux substances énumérées à l'annexe I peuvent entraîner l'emprisonnement à perpétuité, dans le pire des cas. Le trafic et la possession de plus de trois kilogrammes de cannabis, en vue d'en faire le trafic, peuvent également conduire à l'emprisonnement à perpétuité, tout comme l'importation et l'exportation de n'importe quelle quantité de cannabis. La culture du cannabis peut entraîner jusqu'à sept ans d'emprisonnement.
Les peines les moins sévères prévues dans cette loi pour les infractions liées aux substances désignées vont jusqu'à 12 mois d'emprisonnement sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et s'appliquent aux infractions liées aux substances inscrites aux annexes IV et V, notamment le diazépam, ou Valium, et le sécobarbital, ou Seconal. Il faut cependant noter que la plupart des activités prohibées dans cette loi sur les stupéfiants sont légales si elles sont menées par une personne titulaire d'une licence, d'un permis ou d'une exemption en bonne et due forme.
Tous ne souscrivent pas aux modifications concernant les drogues que nous proposons dans le projet de loi. Ces personnes estiment que les infractions graves liées à la drogue n'exigent pas des mesures comme celles qui sont prévues dans le projet de loi. Toutefois, ces infractions entraînent de graves problèmes au Canada et nécessitent une approche législative sérieuse. Voilà donc ce que nous proposons pour nous attaquer au problème.
Le nombre d'infractions liées à la culture de marijuana a beaucoup augmenté depuis plusieurs années. Selon une étude sur la culture de marijuana, en 2003, environ 39 p. 100, soit 4 514 cas, de toutes les plantations rapportées se trouvaient en Colombie-Britannique, ma province. Entre 1997 et 2000, le nombre total de ces plantations a augmenté de plus de 220 p. 100. Même si le nombre de plantations en Colombie-Britannique s'est stabilisé entre 2000 et 2003, on estime que la quantité de marijuana produite est passé de 19 729 kilos en 1997 à 79 817 en 2003, en raison de la taille des plantations et des progrès technologiques.
Des enquêtes de BC Hydro indiquent l'existence de milliers de plantations possibles de marijuana. L'accroissement de la production illicite de marijuana ne s'est évidemment pas produit uniquement en Colombie-Britannique, mais dans tout le Canada.
Des données de la GRC indiquent une augmentation des activités de production des drogues synthétiques au cours des 10 dernières années. Selon la GRC, 25 laboratoires clandestins ont été saisis en 2002. En 2008, 43 laboratoires clandestins ont été saisis dans tout le Canada. En 2009, les divers corps policiers du Canada ont saisi 45 laboratoires clandestins. La majorité des laboratoires saisis produisaient de la méthamphétamine et de l'ecstasy.
C'est en partie en raison de l'existence de ces activités illicites que le a dévoilé la Stratégie nationale antidrogue en octobre 2007. Cette stratégie s'accompagnait de nouvelles ressources pour prévenir l'utilisation de drogues illégales, y compris des drogues utilisées par les jeunes, de mesures de traitement des toxicomanes et de lutte contre les crimes liés aux drogues illégales.
La stratégie comporte deux volets: un volet qui vise la fermeté envers les crimes liés aux drogues et un volet qui met l'accent sur les utilisateurs de drogues.
La Stratégie nationale antidrogue se décompose en trois plans d'action: prévenir la consommation de drogues illicites chez les jeunes; offrir un traitement aux toxicomanes; lutter contre la production et la distribution de drogues illicites.
Le plan d'action pour lutter contre la production et la distribution de drogues illicites contient divers éléments, dont la mise en place de peines sévères et adaptées pour les auteurs de crimes graves liés aux drogues. C'est dans ce contexte que les modifications proposées dans le projet de loi au sujet des drogues doivent être prises. De plus, les modifications correspondent à une des grandes priorités du gouvernement, qui est de lutter contre le crime et de rendre nos collectivités plus sûres pour tous les Canadiens.
Comme je l'ai mentionné, le nombre d'installations domestiques liées à la production et à la distribution de marijuana et de drogues synthétiques a beaucoup augmenté, ce qui crée de graves problèmes dans certaines régions du Canada. La situation a atteint un tel point dans certaines régions que les organismes d'exécution de la loi sont débordés.
La production de drogues illicites pose de sérieux risques pour la santé et la sécurité publique. Il peut s'agir de risques pour l'environnement, de problèmes de nettoyage et de risques pour la vie et la santé de collectivités entières. Cette production est une activité lucrative, et j'utilise cette expression dans son sens large, et attire divers groupes criminels organisés. De gros profits peuvent être réalisés avec peu de risques pour le producteur et ces profits servent à financer d'autres activités criminelles.
Beaucoup considèrent que les sanctions pour les infractions liées aux drogues et les peines infligées aux contrevenants sont trop clémentes et ne sont pas proportionnelles aux torts que ces activités causent aux collectivités. Les réformes que le gouvernement cherche à effectuer dans le cadre de ce projet de loi visent à régler ces préoccupations.
Comme les députés le savent sans doute, la Loi réglementant certaines drogues et autres substances définit une structure complexe d'infractions et de peines. Les peines dépendent de la nature des activités interdites et du type de substance en cause. Les substances les plus problématiques et les plus dangereuses figurent aux annexes I et II, et les infractions les plus graves liées à ces substances entraînent les peines les plus sévères, pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement à perpétuité. Comme je l'ai fait remarquer, la LRCDAS ne prévoit pas de peines minimales à l'heure actuelle. Les amendements à la Loi sur la sécurité des rues et des communautés relatifs aux crimes liés aux drogues proposent d'infliger des peines minimales pour des infractions précises.
Les infractions visées sont le trafic, la possession en vue du trafic, la production, l'importation, l'exportation et la possession dans le but de faire l'exportation de drogues.
Les substances qui seraient visées sont celles énumérées à l'annexe I, notamment la cocaïne, l'héroïne et la méthamphétamine, et celles figurant à l'annexe II, telles que la marijuana.
Le régime de peines minimales obligatoires pour les infractions liées aux drogues qui est proposé dans le projet de loi se fonde sur la présence de facteurs aggravants précis qui, pour la plupart, sont associés le plus souvent à des crimes graves liés aux drogues. Le régime ne s'appliquerait pas aux infractions pour possession ou à celles mettant en cause des médicaments comme le Diazepam ou le Valium.
Comme je l'ai souligné au début de mes remarques, les propositions au sujet des infractions liées aux drogues qui sont contenues dans le projet de loi reflètent une approche sur mesure pour les peines minimales obligatoires associées aux infractions liées aux drogues. Nous croyons que, si nous leur fournissons plus de détails au sujet du régime ciblé ou sur mesure, les députés comprendront mieux l'approche et voudront adopter le projet de loi rapidement.
Pour ce qui est des substances énumérées à l'annexe I, à savoir l'héroïne, la cocaïne ou la méthamphétamine, le projet de loi propose une peine minimale d'un an pour la majorité des infractions graves liées aux drogues, et ce, s'il y a présence de facteurs aggravants donnés. Il y a facteurs aggravants lorsque la personne a commis l'infraction au profit ou sous la direction d'une organisation criminelle ou en association avec elle; la personne a eu recours ou a menacé de recourir à la violence, ou a utilisé ou menacé d'utiliser une arme; le contrevenant a été condamné ou a purgé une peine d'emprisonnement pour une infraction grave liée aux drogues au cours des 10 années précédentes. Si l'infraction est commise en présence de personnes mineures ou dans une prison, la peine minimale passe à deux ans d'emprisonnement.
Dans les cas d'importation, d'exportation et de possession dans le but de l'exportation, la peine minimale est d'un an si ces infractions sont commises à des fins de trafic ou si le contrevenant a abusé d'une position de confiance ou d'autorité ou avait accès à une zone réservée aux personnes autorisées et qu'il a utilisé cet accès pour perpétrer l'infraction. La peine passera à deux ans si l'infraction concerne plus d'un kilogramme d'une substance inscrite à l'annexe I, c'est-à-dire, je le répète, l'héroïne, la cocaïne et la méthamphétamine, entre autres.
La durée de la peine minimale applicable à une infraction liée à la production d'une substance inscrite à l'annexe I est de deux ans. La peine minimale passe à trois ans en présence de circonstances aggravantes liées à la santé et à la sécurité. Ces circonstances sont les suivantes: la personne a utilisé un immeuble appartenant à un tiers pour commettre l'infraction; la production constitue un danger potentiel pour la sécurité ou la santé d'enfants se trouvant à l'endroit ou dans les environs de l'endroit où l'infraction a été commise; la production constitue un danger potentiel pour la sécurité du public dans un secteur résidentiel; l'accusé a tendu un piège.
Dans le cas des drogues inscrites à l'annexe II, dont la marijuana et la résine de cannabis, la peine minimale obligatoire proposée pour le trafic, la possession en vue du trafic, l'importation, l'exportation et la possession dans le but de l'exportation est d'un an en présence de circonstances aggravantes telles que la violence, la récidive ou le crime organisé. En présence de facteurs tels que la vente à des jeunes, la peine minimale passe à deux ans.
En cas de production de marijuana, le projet de loi propose des peines obligatoires fondées sur le nombre de plantes en cause. En cas de production de six à 200 plantes à des fins de trafic, la peine est de six mois. Pour la production de 201 à 500 plantes, la peine obligatoire est d'un an. Pour la production de plus de 500 plantes, la peine est de deux ans; et pour la production de résine de cannabis à des fins de trafic, d'un an. Au minimum, la peine pour la production de drogues visées à l'annexe II augmenterait de 50 p. 100 si les circonstances aggravantes liées à la santé et à la sécurité que je viens de mentionner sont présentes.
Il est important de noter que les modifications proposées dans le projet de loi au sujet des drogues n'ont pas comme seul objectif d'imposer des peines minimales. Les amphétamines et les drogues du viol, comme le GHB et le Rohypnol, seraient transférées à l'annexe I, ce qui permettrait aux tribunaux d'imposer des peines plus longues pour les infractions impliquant ces drogues dangereuses.
La peine d'emprisonnement maximale pour l'infraction de production de marijuana passerait de 7 à 14 ans. Quatorze ans est la peine maximale, soit la plus sévère.
En dernier lieu, je voudrais souligner que cette mesure législative ne vise pas uniquement à punir les auteurs d'infractions liées aux drogues en renforçant les dispositions relatives à la détermination des peines. La mesure législative que nous proposons autoriserait les tribunaux, y compris les tribunaux de traitement de la toxicomanie, à ne pas infliger une peine minimale obligatoire qui serait normalement imposée dans la mesure où l'infraction n'est accompagnée d'aucune autre circonstance aggravante autre qu'une condamnation antérieure pour infraction grave liée aux drogues et où la personne a terminé avec succès un programme de traitement de la toxicomanie.
Les modifications que nous proposons à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances exigeraient également que soit fait, dans les cinq ans suivant l'entrée en vigueur de ces dispositions, un examen détaillé de la présente loi et des conséquences de son application, assorti — ce que mon collègue d'en face se réjouira d'entendre — d’une analyse coût-avantage des peines minimales obligatoires par un comité du Sénat, de la Chambre des communes ou des deux Chambres du Parlement.
Selon un principe fondamental du cadre canadien de détermination de la peine, une peine doit être proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant. Le Code criminel dispose que la détermination de la peine vise à imposer aux délinquants des sanctions justes, de façon à contribuer au respect de la loi et au maintien d’une société équitable, paisible et sûre, ce à quoi nous aspirons tous.
Par conséquent, les objectifs de la détermination de la peine consistent à dénoncer les conduites contraires à la loi, à dissuader le contrevenant et d’autres personnes de commettre des infractions et à mettre les contrevenants à l’écart de la société au besoin. Les peines doivent aussi contribuer à la réadaptation des contrevenants, les amener à accepter la responsabilité de leurs actes et à réparer le préjudice qu’ils ont causé à leurs victimes ou à la société.
Je tiens à informer les députés et les Canadiens en général que les peines minimales obligatoires proposées dans ce projet de loi pour des infractions liées aux drogues répondent à ces exigences. Il s'agit de mesures sévères, mais elles sont néanmoins raisonnables et sensées, et elles permettent de régler, de manière sensée, un problème croissant qui afflige nos villes.
En appliquant ces peines minimales, on veut éviter qu'il y ait une grande disparité dans les peines infligées.
Nous, en tant que parlementaires, sommes les législateurs de ce pays. Il nous incombe donc de veiller à ce que nos lois fournissent les outils appropriés pour faire face à ce très grave problème.
Certains députés pensent peut-être que les mesures proposées dans ce projet de loi, pour les infractions graves liées aux drogues, sont exagérées. Cependant, les crimes graves liées aux drogues sont un problème croissant dans les villes et villages canadiens, et une mesure législative sévère s'impose.
La lutte contre la criminalité est une priorité du gouvernement, car il veut rendre nos rues et nos collectivités plus sécuritaires. Ce projet de loi propose une approche raisonnable, équilibrée et rigoureusement structurée, afin de permettre au gouvernement d'atteindre son objectif.
Je suis certaine que la majorité des députés appuieront ces mesures. Je demande à tous les députés de les étudier attentivement.
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Madame la Présidente, les conservateurs ont présenté hier neuf projets de loi en un seul qui fait plus de 100 pages et dont les dispositions relèvent de trois ministères. Il s'agit tantôt d'introduire dans notre système correctionnel de vastes changements inspirés d'une approche étasunienne ayant échoué, tantôt de conférer au ministre le pouvoir d'accorder ou de refuser le transfèrement international d'un délinquant. Ce sont des changements majeurs qui touchent fondamentalement plusieurs éléments du système de justice pénale du Canada.
La manière de présenter ce projet de loi en dit long sur l'approche des conservateurs en matière de criminalité. Ils ont présenté un gros projet de loi pour se donner l'air de vouloir réprimer sévèrement la criminalité, mais ils viennent encore de prouver qu'ils ne sont pas brillants quand vient le temps de lutter contre la criminalité.
Tout changement apporté à notre système de justice pénale devrait se faire premièrement pour améliorer la sécurité publique. Nous devrions avoir pour but de rendre les rues et les collectivités plus sûres. Pour ce faire, nous devrions déterminer quels programmes et quelles politiques peuvent donner de bons résultats tout en étant économiques. Cependant, ce n'est manifestement pas la priorité des conservateurs. Ils ne s'intéressent ni aux statistiques, ni aux effets véritables des mesures contenues dans le projet de loi. En regroupant toutes les dispositions dans un seul projet de loi omnibus, ils nous prouvent qu'ils n'ont aucunement l'intention d'en étudier les conséquences. Ils veulent seulement faire adopter rapidement le projet de loi, avant que le public ne se rende compte jusqu'à quel point il sera coûteux et inefficace.
Certaines mesures contenues dans le projet de loi ont un certain sens, mais, malheureusement, ce n'est pas le cas de la plus grande partie du projet de loi. Nous devons pouvoir examiner les dispositions une à la fois. En outre, le projet de loi est une oeuvre incroyablement irresponsable sur le plan financier. Tout à l'heure, le ministre s'est vu demander le coût à plusieurs reprises, devant la Chambre. Nous ne connaissons pas le coût. Combien cela va-t-il coûter?
Le gouvernement nous demande d'appuyer un projet de loi dont il n'a pas évalué le coût. Il refuse de fournir au directeur parlementaire du budget l'information qui lui permettrait d'estimer le coût des mesures proposées. J'imagine que le gouvernement conserve cette information parce qu'il ne veut pas que ni les Canadiens, ni le Parlement ne connaissent l'ampleur de la facture de ce projet de loi sur la criminalité. La facture sera salée non seulement pour l'État fédéral, mais aussi pour les provinces, qui hériteront d'une grande partie des dépenses. Malheureusement, en fin de compte, ce sont les contribuables du pays qui devront payer la facture de ce gros projet de loi sur la criminalité.
Beaucoup d'études ayant été réalisées, les experts s'entendent pour dire que l'approche des conservateurs en matière de criminalité est mauvaise. Elle ne repose sur aucun fait, et la majorité des mesures proposées ne rendront pas nos collectivités plus sûres.
Un peu partout aux États-Unis, les États qui ont appliqué cette approche en ont constaté l'inefficacité. Voilà ce qui s'est passé chez nos voisins du Sud. Nombre d'États délaissent maintenant cette approche que le gouvernement conservateur propose actuellement au Canada en matière de criminalité. Les Américains abandonnent cette approche parce qu'elle ne fonctionne pas, qu'elle est incroyablement coûteuse et qu'elle n'a pas donné les résultats escomptés.
Je me demande comment les députés d'en face peuvent justifier leur souhait de faire adopter à toute vapeur un projet de loi si peu judicieux, qui risque d'imposer un fardeau financier excessif au gouvernement sans pour autant renforcer la sécurité dans les collectivités. Je vis dans une collectivité où la criminalité, la violence liée aux gangs de rue et les actes criminels liés à la drogue constituent de vrais problèmes. Je voudrais que des changements soient apportés afin d'empêcher les gangs de recruter de jeunes enfants. Je voudrais également qu'il y ait davantage de policiers qui patrouillent dans les rues. Enfin, je voudrais que les gens qui sortent de prison puissent se réadapter et apporter une contribution à la société, mais, de toute évidence, ce n'est pas une priorité pour le gouvernement conservateur.
Certains éléments clés du projet de loi suscitent chez moi de nombreuses inquiétudes, notamment les modifications proposées au système de réhabilitation.
Ce système doit être juste pour l'ensemble des Canadiens et il doit être renforcé. Il doit assurer la sécurité des Canadiens tout en favorisant la réintégration des délinquants réhabilités et en garantissant que le public soit protégé des individus qui constituent toujours une menace pour la société.
Cette partie du projet de loi propose un certain nombre de changements qu'il faudra examiner avec soin.
Les modifications touchant le système de réhabilitation doivent être rationnelles, fondées sur des données probantes et faire primer la sécurité publique. Le système de réhabilitation doit faire l'objet d'un examen approfondi dont les conclusions devraient guider les modifications à apporter. Malheureusement, les conservateurs d'en face semblent plus intéressés à utiliser ce dossier pour se faire du capital politique.
Il va sans dire que des changements s'imposent pour protéger les Canadiens et éviter qu'on octroie la réhabilitation à des individus qui ne la méritent carrément pas, ce qui montre clairement que notre système n'a pas été à la hauteur au fil des ans. Cependant, le fait d'apporter des changements généraux, comme par exemple le refus de la réhabilitation aux personnes ayant commis au moins quatre actes criminels, change complètement la nature de notre système.
La réhabilitation joue un rôle très important. Elle permet aux délinquants qui ont fait des changements positifs dans leur vie et qui n'ont pas récidivé d'être libérés des conséquences négatives liées à un casier judiciaire, notamment lorsqu'il s'agit de se trouver un emploi ou un logement.
Environ 3,5 millions de Canadiens ont un casier judiciaire. Je trouve difficile de croire que le gouvernement a réfléchi aux répercussions des modifications sur ces Canadiens.
Quatre infractions peuvent être commises lors d'un seul événement. Quelqu'un pourrait poser un geste malheureux, mais aux termes du projet de loi, cet individu ne pourrait pas faire suspendre son casier judiciaire. Cette mesure aura des répercussions très préjudiciables sur les gens qui essaient de remettre de l'ordre dans leur vie.
L'emploi est un facteur stabilisant dans la réinsertion des individus et l'incapacité de trouver un emploi ne fait qu'accroître le risque de récidive. Un emploi décent et stable, de même que le revenu, le logement et les réseaux sociaux qu'un emploi permet d'acquérir sont des facteurs non négligeables pour éviter la récidive. Du point de vue de la sécurité publique, ces moyens offerts aux individus qui tentent de se réinsérer dans la société sont tout à fait sensés.
En rendant la réhabilitation plus difficile et en le faisant sans étude préalable et sans motif, le gouvernement conservateur rendra plus difficile la réadaptation et la réinsertion. Si les conservateurs rendent plus difficile aux gens qui le méritent d'obtenir une suspension de leur casier judiciaire, ces gens ne pourront pas réintégrer la société et seront beaucoup plus susceptibles de commettre à nouveau des crimes. Il est tout à fait possible, et même très probable, que le projet de loi fasse augmenter le taux de criminalité.
Les modifications au système correctionnel et à la maise en liberté sous condition proposées dans le projet de loi m'inquiètent également.
Certains aspects du projet de loi ouvriraient la porte à des violations des droits de la personne dans les pénitenciers canadiens. Ces modifications importeraient au Canada l'approche des États-Unis envers le système pénitentiaire, une approche régressive et coûteuse dont la grande inefficacité a été démontrée.
Une partie particulièrement préoccupante du projet de loi, et au sujet de laquelle beaucoup d'experts ont exprimé des inquiétudes, ce sont les modifications à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
Selon la loi actuelle, le Service correctionnel du Canada doit utiliser « les mesures nécessaires à la protection du public, des agents et des délinquants [...] le moins restrictives possible ». L'expression « le moins restrictives possible » a subi l'épreuve du temps et les tribunaux en ont tiré des normes applicables au traitement acceptable des détenus.
Le projet de loi élimine l'expression « le moins restrictives » pour fixer comme norme des « mesures qui [...] ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire et proportionnel » aux objectifs pour lesquelles elles sont imposées. Cette modification ouvre la porte à un traitement plus sévère des délinquants. En l'absence de preuve démontrant que l'expression « moins restrictives » nuit à la capacité du Service correctionnel de s'acquitter de son mandat, cette expression ne devrait pas être aussi négligemment éliminée.
Je suis en faveur de changements dans notre système correctionnel fédéral à condition que ces changements permettent qu’un plus grand nombre de délinquants se réadaptent et réintègrent la collectivité une fois libérés. C’est la façon la plus efficace de promouvoir la sécurité publique et d’offrir aux citoyens des milieux de vie plus sûrs. Toutefois, la réalité est que, dans notre système carcéral fédéral, il n’y a pas suffisamment de programmes pour permettre aux délinquants de se reprendre en main.
Ce projet de loi omnibus oblige les détenus à s’engager sur papier à participer à des programmes de réadaptation qui n’existent pas, puis explique comment les punir s’ils ne se réadaptent pas. Pour moi, cela n’a aucun sens. Des spécialistes dans le domaine ont dit très clairement que cette approche est mauvaise. Le gouvernement fait fausse route parce que cette mesure législative ne permettra pas d’atteindre l’objectif qui y est énoncé, même qu’elle aggravera les choses.
Le projet de loi s’inspire d’une approche carcérale à l’américaine qui est dépassée, qui est source de gaspillage et se traduit par l’emprisonnement d’un plus grand nombre de personnes, plus longtemps. Nous avons vu ce que cela a donné aux États-Unis. Plus important encore, elle ne fait rien pour réduire les récidives. La sécurité publique passe par une approche intelligente de la criminalité. Ces changements ne reflètent pas une telle approche.
Une autre partie de la mesure législative qui me préoccupe est celle sur les changements concernant le transfèrement international de délinquants. Le projet de loi prétend améliorer la sécurité publique, ce avec quoi je suis bien sûr d’accord. Toutefois, le projet de loi donne au ministre seul le pouvoir discrétionnaire de choisir qui reviendra au Canada. La loi doit être améliorée et non empirée. Le projet de loi élimine un processus juridique clair qui est en place depuis 1978 et le remplace par des décisions qui dépendront du bon vouloir du ministre. Ce projet de loi ouvre la voie à l’arbitraire. Il supprime toute transparence et toute responsabilité.
Il ne fait aucun doute que certains délinquants ne devraient pas être ramenés au pays et qu’il faut tenir compte de la sécurité publique en prenant ces décisions. Il y a des cas où la sécurité publique est accrue par le transfèrement, qui donne au Canada le contrôle du programme de réadaptation et de la supervision du délinquant lorsqu’il a fini de purger sa peine, plutôt que de le laisser revenir au Canada sans surveillance après avoir purgé sa peine à l’étranger.
C’est une erreur que de donner au ministre le pouvoir de s’en remettre à son opinion subjective, en faisant fi des critères qu’il considère sans valeur. Cette façon de procéder remplace un processus établi dans des lois par un processus subjectif politisé.
Ce n'est pas la bonne manière de modifier notre système de justice criminelle. Avant d'apporter de tels changements, le Parlement doit en étudier les effets. Nous devons bien cela aux Canadiens. Cela fait partie de notre travail.
Tout laisse croire que les modifications proposées par les conservateurs correspondent en tous points aux erreurs commises par beaucoup de gouvernements d'États américains. Cette façon de faire est tombée en désuétude aux États-Unis. Beaucoup d'États abrogent maintenant ces lois, mais les conservateurs semblent déterminés à reprendre les erreurs commises aux États-Unis. Nous devrions apprendre des erreurs de nos voisins, et non les répéter.
Alors où en sommes-nous? Quel est le but de cette mesure législative? Il semble que l'efficacité ne soit pas son but premier. Le but semble être de susciter la crainte chez les Canadiens et d'exploiter cette crainte à des fins politiques. La façon responsable de modifier une politique en profondeur serait d'étudier attentivement les changements proposés et de demander l'avis d'experts. Les conservateurs semblent déterminés à se passer d'experts et à faire adopter ce projet de loi à tout prix, sans égard aux conséquences.
Pourquoi font-ils cela? On l'a déjà dit souvent dans cette enceinte. Des intervenants clés et des spécialistes sont venus en grand nombre pour dénoncer le type de mesures législatives que nous présentent les conservateurs. Les conservateurs ne veulent même pas dire si vraiment cela rendra nos rues et nos collectivités plus sûres. Ils ne commentent pas le fait que cette façon de faire a été essayée ailleurs et qu'elle a échoué. Ils ne veulent pas parler de l'immense fardeau financier que cela représentera pour notre économie et pour les Canadiens.
Il semble que les objectifs de cette mesure législative aient plutôt trait à la volonté de se faire du capital politique et d'exploiter les craintes de la population. Les néo-démocrates ont dit clairement comment nous devrions procéder. Nous devrions modifier la loi en fonction de preuves, adopter des mesures qui fonctionnent dans nos collectivités, engager plus de policiers et nous appuyer sur un plan qui soit autre chose que le système désuet des mégaprisons. Par-dessus tout, nous devons trouver des mesures qui mettent vraiment au premier plan la sécurité de la population.
J'exhorte le gouvernement à écouter les experts. Au cours de la période des questions, nous avons entendu le dire combien le gouvernement avait besoin d'experts. J'encourage le et le à consulter également des experts, à se pencher sur les faits, à examiner les coûts et, au moins, à permettre que cette énorme mesure législative soit étudiée comme il se doit au Parlement.
Nous avons le devoir envers les Canadiens d'être clairs au sujet des coûts et de l'efficacité de cette mesure législative qui coûtera des milliards de dollars — on ne nous dit pas combien — et qui ne rendra pas nos rues plus sûres. Cette mesure ne réprime pas sévèrement la criminalité, et ne lutte pas intelligemment contre la criminalité. C'est une mesure qui fait fausse route.
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Monsieur le Président, je suis honoré de prendre la parole dans le cadre de la deuxième lecture du projet de loi , la Loi sur la sécurité des rues et des communautés.
Comme bon nombre de mes collègues le savent, ce gouvernement s'est engagé à présenter de nouveau — oui, de nouveau — les projets de loi portant sur la loi et l'ordre qui sont morts au Feuilleton lors de la dissolution de la 40e législature.
Les modifications proposées visent entre autres à protéger les enfants contre les crimes sexuels, à clarifier l'inadmissibilité à l'emprisonnement avec sursis et au pardon ainsi qu'à protéger d'autres membres vulnérables de notre société.
À cette fin, le projet de loi devant nous regroupe en un projet de loi exhaustif les modifications proposées dans neuf projets de loi présentés lors de la dernière législature.
La première partie du projet de loi — les articles 2 à 9 — contient les modifications suggérées dans l'ancien projet de loi , la Loi sur la justice pour les victimes d'actes terroristes.
Les articles 10 à 51 représentent la deuxième partie du projet de loi et renferment les modifications qui étaient contenues dans les anciens projets de loi: , la Loi sur la protection des enfants contre les prédateurs sexuels, visant à protéger les enfants contre les prédateurs sexuels et visant à protéger les enfants contre certaines infractions d'ordre sexuel; , la Loi mettant fin à la détention à domicile de contrevenants violents et dangereux ayant commis des crimes contre les biens ou d'autres crimes graves, visant à limiter le recours à l'emprisonnement avec sursis; et , la Loi sur les peines sanctionnant le crime organisé en matière de drogue, portant sur l'augmentation des peines pour les infractions graves liées aux drogues.
La troisième partie — les articles 52 à 166 — inclut quant à elle des mesures visant à augmenter la responsabilité des délinquants, à éliminer le pardon dans le cas de crimes graves et à modifier les facteurs à prendre en considération lors du transfèrement international des délinquants canadiens. Ces modifications étaient contenues dans les anciens projets de loi , la Loi supprimant la libération anticipée des délinquants et accroissant leur responsabilité; , la Loi supprimant l’admissibilité à la réhabilitation pour des crimes graves; , la Loi sur l’abolition de la libération anticipée des criminels; et , la Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens, transfèrement international des délinquants.
L'avant-dernière partie du projet de loi — les articles 167 à 204 — propose de modifier la Loi sur la justice pénale pour les adolescents afin de mieux protéger les Canadiens et les Canadiennes contre les jeunes contrevenants violents. Ces modifications se trouvent dans l'ancien projet de loi , la Loi de Sébastien (protection du public contre les jeunes contrevenants violents).
La dernière partie du projet de loi, décrite aux articles 205 à 207, propose des modifications qui étaient contenues dans l'ancien projet de loi , la Loi sur la prévention du trafic, de la maltraitance et de l'exploitation des immigrants vulnérables. Ces modifications visent à modifier la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés afin de protéger les étrangers voulant travailler au Canada qui risquent de subir un traitement dégradant ou attentatoire à la dignité humaine, notamment d'être exploités sexuellement.
J'aimerais élaborer en particulier sur l'article 34 de la partie II du projet de loi, qui vise à restreindre le recours à l'emprisonnement avec sursis pour certains crimes contre les biens et autres crimes graves.
Tel que je l'ai mentionné plus tôt, ces modifications étaient contenues dans l'ancien projet de loi , qui est mort au Feuilleton lors de la dissolution de la troisième session de la 40e législature. Il existe toutefois quelques différences de nature technique sur lesquelles je reviendrai plus tard.
Actuellement, le Code criminel prévoit que l'emprisonnement avec sursis, qu'on appelle aussi parfois la détention à domicile, peut être imposé lorsque l'infraction n'est pas punissable d'une peine minimale obligatoire et que le tribunal inflige une peine d'emprisonnement de moins de deux ans.
Par ailleurs, l'emprisonnement avec sursis n'est plus disponible, depuis décembre 2007, pour les infractions punissables sur acte d'accusation et ayant une peine d'emprisonnement maximale de dix ans ou plus qui constitue une infraction de sévices graves à la personne, une infraction de terrorisme ou une infraction d'organisation criminelle.
De plus, le tribunal imposant une peine d'emprisonnement avec sursis doit être persuadé que le fait que la peine soit purgée dans la collectivité ne met pas en danger la sécurité de celle-ci, et qu'une telle peine est conforme à l'objectif et aux principes fondamentaux de la détermination de la peine.
Il est important de mentionner que l'objectif essentiel de la détermination de la peine, tel que le décrit l'article 718 du Code criminel, est de contribuer au respect de la loi et au maintien d'une société juste, paisible et sûre par l'infliction de sanctions justes telles que: dénoncer le comportement illégal; dissuader les délinquants de commettre des infractions; isoler, au besoin, les délinquants du reste de la société; favoriser la réinsertion sociale; assurer la réparation des torts causés à la victime ou à la collectivité; et susciter la conscience de leurs responsabilités chez les délinquants.
Le Code criminel nous renseigne également qu'une sanction juste est celle qui est proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant. Pour ce faire, les tribunaux tiennent compte des facteurs aggravants et atténuants propres à chaque cas. Avant de décrire les éléments principaux des modifications proposées, il est important de se rappeler l'historique des dispositions contenues dans le Code criminel concernant l'emprisonnement avec sursis.
L'emprisonnement avec sursis est entré en vigueur en 1996, à l'époque où le gouvernement voulait, entre autres, réduire le recours excessif à l'emprisonnement pour les crimes les moins graves. Je répète: les crimes les moins graves. D'ailleurs, ce document d'information qui accompagnait ces réformes au régime de la détermination de la peine énonce que l'ajout de l'emprisonnement avec sursis comme une nouvelle peine signifie que les contrevenants ayant commis une infraction moins grave qui, autrement, seraient incarcérés, peuvent, sous réserve de contrôles serrés, purger leur peine dans la communauté.
Les limites que j'ai mentionnées plus tôt ont été établies afin de garantir que seuls les crimes les moins graves soient susceptibles d'être punis par une ordonnance d'emprisonnement avec sursis, et ce, dans le respect du principe et de l'objectif fondamental de la détermination de la peine. Toutefois, on a assisté, au cours des dernières années qui ont suivi la création de cette peine, à un manque de cohérence complète quant aux situations où l'emprisonnement avec sursis est adéquat.
Un bon nombre de décisions des tribunaux à l'époque ont accordé une telle peine pour des crimes violents et graves. Cela a contribué à une perte de confiance du public dans l'administration de la justice. Il va de soi que plusieurs personnes, ainsi que quelques provinces et territoires, se sont demandés si les limites au recours à l'emprisonnement avec sursis prescrites dans le Code criminel étaient suffisamment adéquates.
Afin de pallier cette incohérence dans le recours à l'emprisonnement avec sursis, ce gouvernement a déposé le 4 mai 2006 le projet de loi . Ce dernier proposait d'éliminer l'emprisonnement avec sursis pour toute infraction punissable par voie de mise en accusation et portant une peine maximale d'emprisonnement de 10 ans ou plus. Toutefois, le projet de loi C-9 fut modifié par les partis de l'opposition afin de limiter l'interdiction de l'emprisonnement avec sursis aux infractions punissables par voie de mise en accusation et ayant une peine d'emprisonnement maximale de 10 ans ou plus qui constitue une infraction de sévices graves à la personne, une infraction de terrorisme ou une infraction d'organisation criminelle. Ces modifications sont entrées en vigueur le 1er décembre 2007.
La définition de sévices graves à la personne a été développée dans le contexte des délinquants dangereux. C'est d'ailleurs pour cette raison que cette définition se retrouve à la partie 24 du Code criminel. Selon cette définition, les infractions de sévices graves à la personne sont toutes les infractions autres que la haute trahison, la trahison, le meurtre au premier ou au deuxième degré, poursuivies par voie d'accusation et punissables d'un emprisonnement d'au moins 10 ans et impliquant: l'emploi ou la tentative de l'emploi de la violence contre une autre personne; une conduite dangereuse, ou susceptible de l'être, pour la vie ou la sécurité d'une autre personne ou une conduite ayant infligé, ou susceptible d'infliger, des dommages psychologiques graves à une autre personne.
La deuxième partie de cette définition est, quant à elle, plus claire puisqu'elle qualifie l'agression sexuelle, l'agression sexuelle armée et l'agression sexuelle grave comme des sévices graves à la personne.
Il est important de comprendre que les partis de l'opposition ont emprunté un terme propre au régime des délinquants dangereux afin de circonscrire une peine qui devrait être seulement applicable aux délinquants moins dangereux. Cela a d'ailleurs créé deux approches dans la jurisprudence quant à l'interprétation à prêter à la définition de sévices graves à la personne dans le contexte de l'emprisonnement avec sursis.
Un autre problème concernant la définition de sévices graves à la personne est que seules les infractions avec violence sont visées. La définition de sévices graves à la personne ne peut assurer que l'emprisonnement avec sursis serait écarté dans tous les cas de fraude grave ou de vol de plus de 5 000 $.
Les modifications contenues dans ce projet de loi garantiront que certaines infractions graves qui n'ont pas d'élément de violence seront traitées comme des infractions graves, excluant le recours à l'emprisonnement avec sursis. Les modifications au régime de l'emprisonnement avec sursis proposées dans ce projet de loi visent à établir des balises claires permettant une utilisation cohérente d'une telle peine, et ce, dans le respect de l'intention du Parlement exprimée lors de la création de cette peine.
C'est pour cette raison qu'il est proposé d'éliminer la référence aux infractions de sévices graves à la personne et d'interdire le recours à l'emprisonnement avec sursis pour les infractions pour lesquelles il y a une peine maximale de 14 ans ou plus ou l'emprisonnement à perpétuité.
Il en serait de même pour les infractions punissables sur acte d'accusation et punies par un maximum de 10 ans d'emprisonnement lorsque leur perpétration entraîne des lésions corporelles, met en cause l'importation, l'exportation, le trafic ou la production de drogues, ou met en cause l'usage d'une arme.
La présence de ces circonstances lors de la commission d'une infraction augmente la nécessité de dissuader le délinquant et de dénoncer le crime. Cela justifie l'interdiction de recourir à l'emprisonnement avec sursis dans ces cas-là. Il se pourrait toutefois que les limites que je viens de décrire ne couvrent pas toutes les infractions poursuivies par voie de mise en accusation et punies par un maximum de 10 ans d'emprisonnement.
Il est donc proposé de limiter le recours à l'emprisonnement avec sursis pour le bris de prison, le harcèlement criminel, l'agression sexuelle, l'enlèvement, la traite de personnes, l'enlèvement d'une personne âgée de moins de 14 ans, le vol de véhicule à moteur, le vol de plus de 5 000 $, l'introduction par effraction dans un dessein criminel dans un endroit autre qu'une maison d'habitation, la présence illégale dans une maison d'habitation et l'incendie criminel avec intention frauduleuse.
Tel que je l'ai mentionné au début de mon allocution, il existe des différences de nature technique entre les modifications proposées dans ce projet de loi et celles contenues dans l'ancien projet de loi .
En outre, le projet de loi C-16 proposait d'interdire le recours à l'emprisonnement avec sursis pour le leurre d'enfants mentionné à l'article 172.1. Cela ne fait plus partie de la liste d'infractions qui ne seront plus admissibles à l'emprisonnement avec sursis, puisque l'article 22 du présent projet de loi propose une peine minimale d'emprisonnement d'un an lorsque poursuivie par voie de mise en accusation et de 90 jours lorsque poursuivie par voie sommaire.
Un autre changement au projet de loi est l'insertion dans la liste des infractions qui ne sont plus admissibles à l'emprisonnement avec sursis, la nouvelle infraction de vol d'un véhicule à moteur, décrite à l'article 333.1 du Code criminel.
Le dernier changement vise à rectifier une coquille qui s'était glissée dans le projet de loi . Ce dernier excluait l'infraction d'enlèvement d'une personne âgée de moins de 14 ans par un parent ou une personne en ayant légalement la charge. L'intention était toutefois de viser l'infraction décrite à l'article 281 du Code criminel, soit celle portant sur l'enlèvement, par un étranger, d'une personne âgée de moins de 14 ans.
Par ailleurs, je tiens à rassurer mes collègues que même s'il est proposé d'éliminer la référence aux sévices graves à la personne de l'article 742.1, les modifications contenues dans ce projet de loi assureront que ceux qui sont condamnés pour agression sexuelle, agression sexuelle armée et agression sexuelle grave ne seront pas admissibles lorsque poursuivis par voie d'acte d'accusation.
Mentionnons également que l'emprisonnement avec sursis ne sera plus disponible pour les personnes condamnées pour agression sexuelle commise contre une personne de moins de 16 ans puisque l'article 25 du projet de loi propose une peine minimale d'un an lorsque l'infraction est poursuivie par voie de mise en accusation et de 90 jours par procédure sommaire.
Ce gouvernement est attentif aux préoccupations des Canadiens et des Canadiennes qui ne veulent plus voir l'emprisonnement avec sursis utilisé lors de crimes graves, qu'ils soient commis avec violence ou reliés à la propriété.
Pour les raisons que j'ai soulignées, j'exhorte mes collègues de la Chambre à accorder leur appui unanime aux modifications du régime de l'emprisonnement avec sursis.
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Monsieur le Président, quand nous avons un débat à la Chambre sur des questions relatives au crime et à la sécurité de notre pays, j'aime souvent commencer mon intervention en énonçant des objectifs que, à mon avis, nous partageons tous.
Je crois que tous les députés de la Chambre veulent adopter des politiques qui assureront la sûreté de nos collectivités.
Je pense que chaque député de la Chambre veut sincèrement et légitimement s'assurer que notre système juridique est efficace, qu'il est axé sur des objectifs que nous approuvons tous et qu'il atteigne les objectifs qu'il s'est fixés.
En combinant une politique en matière de crime efficace avec un système juridique efficace, on atteindrait deux objectifs. Premièrement, on adopterait des politiques qui empêcheraient le plus possible les crimes de se produire. Deuxièmement, on s'assurerait qu'une personne ayant commis un crime ne récidive pas.
J'ai eu l'honneur d'être le porte-parole en matière de sécurité publique de notre parti lors de la dernière législature et, pendant presque deux ans, j'ai examiné en profondeur ce qui se passait dans notre système correctionnel. J'ai eu le grand honneur et privilège de visiter 26 établissements correctionnels fédéraux et d'observer directement ce que les agents de correction font tous les jours dans les prisons. Cela m'a permis de prendre connaissance de ce qui se passe vraiment dans les prisons fédérales. C'était une expérience révélatrice. J'encourage tous les députés à aller inspecter nos institutions fédérales et à voir d'eux-mêmes ce qui s'y passe.
Une disposition de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition donne aux députés le droit illimité de se rendre dans nos institutions fédérales et de les inspecter. Nous devons assumer cette responsabilité très importante en tant que législateurs afin de pouvoir superviser, surveiller et inspecter nos prisons fédérales.
J'aimerais communiquer à la Chambre les constats que j'ai faits lors de mes visites dans ces prisons. Comme on l'a mentionné, les détenus sont en général parmi les personnes les plus marginalisées de la société. Il est vrai qu'une petite partie d'entre eux sont des personnes incorrigibles, dangereuses et violentes que nous sommes pratiquement contraints de garder derrière les barreaux. Personne à la Chambre soutiendrait que les Clifford Olson et les Paul Bernardo de ce monde pourraient être libérés sans danger. Ces criminels devraient payer le prix pour leurs crimes en étant détenus à perpétuité.
Toutefois, nous ne pouvons pas prendre de décisions stratégiques en fonction de ce petit pourcentage, car ce que j'ai également constaté, c'est que 80 p. 100 des détenus dans nos prisons fédérales à l'heure actuelle, hommes et femmes, souffrent de toxicomanie. Ce pourcentage est largement reconnu par tous les partis à la Chambre. Le Comité de la sécurité publique a entendu de nombreux témoignages d'agents de correction, de directeurs d'établissements carcéraux, de représentants de la Société John Howard et de la Société Elizabeth Fry, entre autres, qui ont tous confirmé ce pourcentage, à savoir que 80 p. 100 des détenus souffrent de toxicomanie.
Un autre fait qui est généralement accepté par tous les partis de la Chambre, c'est qu'un nombre considérable d'hommes et de femmes détenus dans nos établissements souffrent de troubles mentaux. Par ailleurs, la toxicomanie est en soi une maladie mentale. Les gens affligés de problèmes tels que l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation foetale, des lésions cérébrales, des capacités cognitives limitées, ainsi que ceux qui ont été victimes de traumatismes cérébraux, sont surreprésentés dans notre système carcéral.
Cela m'amène à mon premier argument. Si nous voulions vraiment nous assurer que ces individus ne récidivent pas à leur sortie de prison, alors nous devons affecter des ressources de manière à régler les véritables problèmes auxquels ils sont confrontés.
Il est également vrai que plus de 90 p. 100 des détenus dans nos établissements fédéraux seront libérés et réintégreront nos collectivités. Ils circuleront dans nos rues et ruelles, s'assoiront à la table voisine de la nôtre au restaurant et postuleront des emplois. Ils seront membres de nos collectivités.
C'est une question de bon sens. Lorsque nous élaborons une politique, nous devons veiller — non seulement d'un point de vue moral, mais également dans notre propre intérêt — à faire tout notre possible pour résoudre les problèmes qui, au départ, incitent ces personnes à commettre un crime. C'est pourquoi le Nouveau Parti démocratique répète inlassablement qu'il faut consacrer des ressources à la prévention de la criminalité et aux moyens permettant de s'attaquer, dans la mesure du possible, aux causes fondamentales du comportement criminel de ces personnes.
Ce que je vois, c'est que le projet de loi propose une longue liste de politiques inefficaces et coûteuses pour résoudre un problème décroissant. Je ne vois pas comment cela permettra concrètement de régler le problème auquel nous sommes confrontés dans ce pays.
Au Comité de la sécurité publique nous avons demandé, à un Américain, membre d'une initiative appelée Right on Crime, de comparaître au comité et de nous parler de ce qui se passe aux États-Unis. La personne qui a comparu était le tout premier chef de l'organe de lutte antidrogue des États-Unis. Il avait été nommé par Ronald Reagan. En outre, il était l'architecte principal de la politique de durcissement des peines, mise en oeuvre par les États-Unis au cours des deux dernières décennies.
Il nous a dit quelque chose de très intéressant, à savoir que les politiques visant à durcir les peines et à incarcérer plus de gens aux États-Unis — notamment en imposant des peines minimales obligatoires, en prolongeant la durée de la peine, en privant les juges de leur pouvoir discrétionnaire et en réduisant les options de détermination de la peine — ont donné de piètres résultats. Il a affirmé que, en raison de ces politiques, les finances publiques de tous les États qui mettent en oeuvre ces politiques sont au bord de la faillite et que ces politiques n'ont même pas permis de réduire le nombre de crimes commis. Par conséquent, le résultat, après avoir dépensé des milliards et des milliards de dollars et après avoir incarcéré des centaines de milliers de citoyens, est que les États sont en quasi-faillite et que le taux de criminalité n'a pas baissé.
À l'époque, j'ai demandé aux députés d'en face de s'adresser au ministère de la Justice et au ministère de la Sécurité publique, de s'adresser aux fonctionnaires, lesquels ont accès aux recherches qui — espérons-le — sont réalisées avant qu'une mesure législative ne soit présentée à la Chambre. Je leur ai demandé de me citer le nom d'une autorité compétente, d'un pays, d'un gouvernement ou d'une province, n'importe où sur la planète, où les politiques que le gouvernement veut entériner ont permis de renforcer la sécurité des collectivités et, parallèlement, de baisser le taux de criminalité.
On m'a répondu qu'il n'y en a pas. Aucun pays ne peut servir d'exemple, ce qui en dit long. Avant de nous engager dans une politique qui coûtera des milliards et des milliards de dollars aux contribuables canadiens, les législateurs que nous sommes avons le devoir d'agir pour que nous ayons la possibilité d'accomplir ce pour quoi nous demandons des fonds.
La criminalité n'est pas particulière au Canada. Chaque société dans le monde est aux prises avec ce problème, que ce soit l'Europe, l'Asie, l'Amérique du Sud ou l'Afrique. La criminalité existe partout. Notre situation n'est pas unique. Partout dans le monde, on lutte contre la criminalité de différentes façons. Certaines méthodes sont très dures, comme celles que le gouvernement cherche à faire adopter au Canada, et d'autres sont plus clémentes.
Il existe sans doute dans le monde une foule de données que nous pourrions consulter pour concevoir les politiques qui permettraient le mieux d'atteindre les objectifs que les Canadiens nous ont fixés, à savoir prévenir le plus possible la criminalité et réduire le risque qu'une personne commette un crime une seconde fois.
Je tiens à parler un peu des agents de police, car mon parti, le Nouveau Parti démocratique, a proposé lors des trois dernières campagnes électorales d'accroître l'effectif des services de police du Canada de 2 500 agents. Nous sommes en faveur de l'augmentation du nombre d'agents au Canada et de l'utilisation adéquate de leurs services.
À mon avis, en pratique, il faut affecter des agents dans les collectivités et certains de ceux-ci doivent circuler en bicyclette. On pourrait considérablement resserrer la sécurité à Vancouver en affectant des policiers à des endroits stratégiques où la criminalité est élevée, notamment dans les stations de l'aérotrain.
Lors de la campagne électorale de 2008, le Parti conservateur a promis de créer 2 500 postes d'agents de police. Les représentants de commissions policières et les chefs de police que j'ai rencontrés un peu partout au Canada m'ont tous dit la même chose, soit que seulement une fraction des 2 500 postes d'agents de police promis ont été créés. Cela s'explique du fait que le financement permanent que le gouvernement fédéral avait promis aux provinces pour créer ces postes est devenu un financement de cinq ans, puis de trois ans. Les chefs de police ont déclaré sans ambages aux conservateurs qu'ils ne créeront pas un seul poste s'ils ne disposent que d'un financement de trois ans.
Qui plus est, aucun financement n'est prévu pour le personnel civil qui doit s'occuper des postes d'agents de police créés. Le gouvernement fédéral a transféré des fonds aux provinces sans aucune obligation en contrepartie. Autrement dit, les provinces ont reçu de l'argent mais ne sont pas obligées de créer des postes de policiers et, dans certains cas, les fonds ou une partie de ceux-ci ont été versés dans le Trésor provincial.
Les conservateurs n'ont pas tenu la promesse qu'ils ont faite aux Canadiens de créer 2 500 postes d'agents de police. Je les invite à tenir parole; de ce côté-ci de la Chambre, nous leur donnons un appui unanime à cet égard.
Si on souhaite vraiment améliorer le système de justice et réduire la criminalité dans les collectivités, il faut augmenter le nombre de procureurs et de juges au Canada. Nos tribunaux sont surchargés. Chaque jour, les tribunaux doivent renoncer à entendre des affaires parce qu'il manque de procureurs et que les délais ne sont pas respectés. Je ne vois rien dans le projet de loi qui prévoie l'ajout de policiers, de juges et de procureurs et rien non en ce qui concerne la toxicomanie, les troubles mentaux et la prévention de la criminalité. Ces critiques du projet de loi sont valides car elles reposent sur des faits.
Je vais également parler de ce que j'ai vu dans le système carcéral fédéral. Le programme CORCAN qui était offert dans les prisons fédérales permettait aux détenus d'acquérir des compétences dans des métiers spécialisés et de participer à divers programmes, pour fabriquer des meubles par exemple. Ces meubles étaient ensuite vendus au gouvernement fédéral à prix réduit. CORCAN offrait une formule intéressante pour les détenus et pour le gouvernement. Il donnait aux détenus ne possédant pas de compétences professionnelles l'occasion d'apprendre la discipline du travail et d'acquérir des compétences générales et spécialisées pouvant leur permettre de gagner leur vie dans la collectivité et peut-être davantage de chance d'échapper à la criminalité. Ce programme procurait également au gouvernement fédéral du matériel fort nécessaire à un prix modique.
Les députés savent-il ce qui est arrivé au programme CORCAN? Il a été réduit. Ce n'est pas une métaphore. Si une personne se rend à l'établissement Kent, à 90 kilomètres de Vancouver, elle constatera que les salles du programme CORCAN, trois grandes salles qui rappellent les ateliers d'initiation à la technologie du secondaire, servent désormais de salles d'entreposage. Elles sont vides.
Le gouvernement a fermé les prisons agricoles. Nous avons eu de longs débats à ce sujet que je n'ai pas l'intention de rouvrir. Quoi qu'il en soit, au Canada, nous avions des prisons agricoles dans quatre ou cinq établissements qui étaient de parfaits exemples de réussite. Elles donnaient aux détenus l'occasion d'acquérir des compétences générales et de se lever le matin pour aller travailler. Les prisonniers avaient des responsabilités. Les arguments soulevés à la Chambre en faveur de la fermeture des fermes étaient absurdes, comme celui voulant que ces gens ne travailleraient jamais dans une ferme. Là n'était pas le but des prisons agricoles. Leur but était d'apprendre à coopérer, à assumer des responsabilités, à se présenter tous les jours à la même heure, à travailler avec des animaux, pour réapprendre à des personnes endurcies à créer des liens, à éprouver de la sympathie pour les autres et acquérir le sens des responsabilités. Ces programmes étaient fort efficaces, pourtant le gouvernement a fermé les prisons agricoles.
Le projet de loi a pour titre « Loi sur la sécurité des rues et des communautés ». À mon avis, on devrait plutôt l'appeler la « Loi sur les prisons surpeuplées, l'absence de mesures de prévention du crime et la surimposition des contribuables sans résultat ». Voilà un titre tout aussi exact que n'importe quel autre.
J'aimerais parler de certains éléments du projet de loi . Le Parti conservateur a pris la fâcheuse habitude de réunir dans une très grande mesure législative tout un tas de projets de loi qui n'ont aucun lien les uns avec les autres et de présenter cela à la Chambre. Il s'agit d'une façon très inefficace de gouverner, car nous devons alors démêler tous les morceaux et séparer l'ivraie du bon grain. J'aimerais me pencher sur quelques-uns de ces éléments.
Je voudrais parler des dispositions du projet de loi relatives au transfèrement international des délinquants.
Depuis de nombreuses années, il existe au Canada une disposition en vertu de laquelle les Canadiens qui sont condamnés à l'étranger peuvent présenter une demande afin de purger leur peine au pays. Cette demande n'est pas acceptée automatiquement. Le pays visé doit donner son aval, tout comme le Canada et le délinquant.
En vertu des critères établis, les autorités canadiennes doivent être convaincues que le délinquant ne pourra pas avoir accès à des services de réadaptation appropriés dans le pays où il a été condamné, soit parce que personne ne parle anglais ou français, soit parce qu'aucun programme de réadaptation n'est offert. Il peut aussi arriver qu'il existe des motifs humanitaires incontestables. Nous nous souvenons tous du type qui avait été condamné avec Conrad Black, son compatriote, et qui est rentré au Canada après avoir vu sa demande être acceptée.
Une autre raison majeure fait que ce projet de loi est important pour la sécurité publique. Si un Canadien termine sa peine aux États-Unis, il est renvoyé au Canada aussitôt qu'il sort de prison. Lorsque la personne rentre au pays, nous n'avons sur elle aucun dossier de probation ou de remise en liberté sous condition. Nous ne savons même pas qu'elle est de retour au pays.
Cependant, si la personne est transférée au Canada pour y purger sa peine, nous avons un dossier et nous pourrons lui imposer des conditions lors de sa libération conditionnelle, de manière à pouvoir la surveiller pendant sa réinsertion dans la société canadienne. C'est un programme qui est meilleur sur le plan de la sécurité publique.
Le projet de loi aurait pour effet essentiellement de miner ce programme. Le ministre pourrait refuser une demande de transfèrement de manière tout à fait arbitraire, sans prendre le temps d'examiner vraiment le dossier. Ce n'est pas un bon projet de loi.
Je voudrais parler brièvement du système de réhabilitation.
En juin 2010, les néo-démocrates ont collaboré avec le gouvernement pour resserrer les règles de notre système de réhabilitation. C'est nous qui avons proposé de donner à la Commission nationale des libérations conditionnelles le pouvoir de refuser une demande de réhabilitation si la réputation du système de justice risque d'être entachée. Nous avons ajouté la disposition prévoyant qu'une personne déclarée coupable d'homicide involontaire coupable ne peut pas être réhabilitée avant 10 ans, alors que le délai était auparavant de cinq ans.
Sans cette disposition, Karla Homolka aurait pu obtenir sa réhabilitation, ce que le gouvernement conservateur aurait laissé se produire, n'eut été de notre intervention. Les néo-démocrates ont collaboré avec le gouvernement pour veiller à ce qu'une telle chose ne se produise pas.
Le gouvernement vient de présenter de nouvelles dispositions concernant la réhabilitation qui sont tout simplement injustifiables. Il veut interdire à toute personne ayant été déclarée coupable d'une infraction plus de trois fois dans sa vie d'être réhabilitée. Lors des audiences du Comité de la sécurité publique, nous avons entendu des témoignages de personnes qui étaient dans une telle situation, c'est-à-dire des personnes ayant été déclarées coupables de quatre et même de dix infractions. Nous avons même entendu le témoignage d'une personne ayant été reconnue coupable de 26 infractions, ce qui avait l'air épouvantable.
Cette personne a livré un témoignage fort intéressant. Il s'agissait d'un jeune cadre qui venait tout juste de se marier et de s'acheter une maison quand sa femme a commencé à souffrir de la leucémie et en est morte. Il a sombré dans une dépression. Il a commencé à vendre des stéroïdes, ce qu'il a fait durant six mois. Pendant cette période, il s'est mis à en vendre sur Internet. Il a plaidé coupable aux chefs d'accusation qui pesaient contre lui. Pour chaque transaction mettant en cause la vente de stéroïdes, il a été condamné pour de multiples infractions, notamment de possession et de trafic de drogues, et d'autres infractions parce qu'il faisait le commerce de stéroïdes de l'autre côté de la frontière. Aujourd'hui, il est cadre à Corus Media. Lorsqu'il a comparu devant notre comité, nous avons entendu le témoignage d'un homme intelligent et réadapté socialement, d'un membre productif de notre société. Pourtant, c'est le genre de personnes qui ne pourrait jamais être réhabilitée aux termes de cette mesure législative.
La règle des trois infractions qui était répandue dans des États tels que la Californie est en train d'être abolie en raison du carcan qu'elle a imposé sur leur système judiciaire. Cette approche est inefficace et n'accroît pas la sécurité des collectivités. Elle est par ailleurs coûteuse.
Nous, les néo-démocrates, nous nous opposons à ce projet de loi parce que nous sommes favorables à la création de politiques efficaces, solides, rationnelles et fondées sur des faits, qui sont susceptibles d'améliorer la sécurité de nos collectivités, ce qui, comme je l'ai dit au début de mon exposé, est l'objectif de tous à la Chambre.
J'exhorte le gouvernement à écouter l'avis des experts et à écouter ce que les intervenants du système judiciaire ont à dire. Je l'invite à mettre de côté l'approche idéologique qu'il poursuit aveuglément parce qu'elle risque de provoquer la division et à travailler dans un esprit de collaboration avec tous les députés afin d'élaborer une bonne politique qui assurera la sécurité de tous dans nos collectivités et notre pays.