La Chambre reprend l'étude, interrompue le 19 septembre, de la motion portant que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.
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Monsieur le Président, je suis heureuse de poursuivre les observations que j'avais commencées hier. Encore une fois, je tiens à exprimer ma préoccupation devant le fait que le projet de loi soit présenté comme une mesure de sécurité publique, alors qu'il porte en réalité sur l'immigration et la citoyenneté. Il s'agit là d'un véritable problème. Depuis quand nous, les Canadiens, considérons-nous l'arrivée d'immigrants au pays comme une question de sécurité publique? J'exhorte le gouvernement à renvoyer le projet de loi au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration quand viendra l'étape de l'étude en comité.
Hier, j'ai parlé très brièvement des répercussions possibles du projet de loi sur les familles. Nous, les Canadiens, sommes fiers d'être des gens compatissants et bienveillants. Le monde entier s'attend à ce que le Canada soit compatissant et bienveillant. C'est pourquoi des gens partout dans le monde choisissent de s'établir au Canada. Moi-même, je suis une immigrante de première génération qui a quitté son pays d'origine, l'Angleterre, pour venir s'installer au Canada. Si j'ai choisi le Canada, c'est entre autres parce qu'il s'agit d'un pays inclusif qui accepte les gens des quatre coins du monde.
Or, le projet de loi fait fausse route. Il envoie le mauvais message aux réfugiés. On parle ici de gens qui ont vécu, pendant des années, dans des régions déchirées par la guerre, puis qui ont fini par s'enfuir pour sauver leur vie, en se séparant de leur famille, sans savoir d'où viendra leur prochain repas. Certains ne savent même pas où ils vont dormir le jour d'après, ni même s'ils vont se réveiller le matin ou combien de proches ils vont perdre.
La mesure législative prévoit que les réfugiés devront attendre jusqu'à un an après leur arrivée au Canada pour que leur demande soit examinée. Pendant ce temps, ils seront isolés et on leur accordera une désignation spéciale en fonction de critères qui ne sont pas du tout précis. On semble confier beaucoup de pouvoir au ministre. De plus, nous sommes devant un écran de fumée, car nous ne connaissons pas les critères. Lorsqu'ils auront reçu le statut d'étranger désigné, ils ne pourront pas présenter de demande de résidence permanente avant cinq ou six ans.
Ainsi, les personnes qui arrivent au Canada, qui ont été arrachées à leur famille et qui ont déjà beaucoup souffert, ne pourront pas obtenir de documents de voyage. Elles pourront travailler, mais elles n'auront aucun droit. Elles n'auront pas le statut de résident permanent. Nous rendrons leur existence encore plus difficile et elles se retrouveront dans l'incertitude pendant cinq ou six ans. Elles ne sauront pas si les membres de leur famille seront en mesure de les rejoindre. Elles n'auront pas le soulagement de savoir qu'ils sont rendus en lieu sûr. Il faut se mettre dans leur peau.
Prenons l'exemple d'une jeune mère qui arrive au Canada avec deux de ses enfants, son mari et ses deux autres enfants étant toujours en Somalie. Pendant six ou sept ans, elle ne pourra pas présenter de demande de résidence permanente ni demander que les membres de sa famille puissent la rejoindre. Que doit-elle comprendre du projet de loi? Que sa situation sera mise entre parenthèses pendant cinq ou six ans et qu'elle ne pourra se prévaloir d'aucun droit. Elle ne pourra pas présenter de demande de résidence permanente. En passant, on n'obtient pas le statut de résident permanent au moment où on en fait la demande. Cela aussi prend du temps. Imaginez le temps qu'il faudra avant que le reste de sa famille puisse la rejoindre. Selon les calculs, cela pourrait prendre de 10 à 15 ans.
Ce n'est sûrement pas le genre d'image que le Canada souhaite projeter à l'extérieur du pays. Nous voulons que le reste du monde considère que le Canada est un pays qui fait preuve de compassion et de bienveillance.
En créant deux catégories de réfugiés et en refusant le droit d'appel au cours de la première année, nous démontrons que nous sommes prêts à ne pas respecter les conventions relatives aux droits des réfugiés et aux droits des enfants. En tant que Canadienne, cette situation me préoccupe, et je sais qu'elle préoccupera aussi les Canadiens partout au pays.
Nous sommes fiers de nos valeurs familiales. Nous nous enorgueillissons d'être une nation accueillante. J'exhorte la Chambre à ne pas appuyer cette mesure législative, car, autrement, nous enverrions au monde entier le message que notre pays est maintenant moins ouvert au reste du monde et moins compatissant.
Voyons voir qui s'oppose à ce projet de loi. Il y a d'abord le Conseil canadien pour les réfugiés. J'ai parlé à certains de mes électeurs. Lorsque je leur ai parlé au téléphone, ils m'ont dit: « C'est ridicule. Ce n'est même pas un problème ». Si nous nous inquiétons au sujet des passeurs, nous devons nous rappeler qu'ils sont déjà passibles d'une peine d'emprisonnement à perpétuité. Au Canada, c'est la peine d'emprisonnement maximale pouvant être imposée.
En fait, il s'agit ici de sanctions supplémentaires imposées à des personnes qui ont déjà été victimes d'atrocités et qui ont été aux prises avec des difficultés que la plupart d'entre nous, ici à la Chambre, ne pouvons même pas imaginer.
J'ai eu le privilège, à titre de conseillère, d'oeuvrer auprès d'enfants arrivés au pays en tant que réfugiés, qui avaient passé plusieurs années dans des camps de détention ou dans des conditions très dangereuses et instables. Il est extrêmement difficile de travailler avec ces enfants. Maintenant, nous les laissons sans ressources pendant cinq, six ou sept ans, et parfois même pendant plus longtemps encore.
Le Conseil canadien pour les réfugiés s'oppose à cette mesure législative, tout comme Amnistie Internationale. L'Association canadienne des libertés civiles a pris position dans ce dossier, tout comme l'Association du Barreau canadien et le Centre d'études sur les réfugiés. Ce qui ressort encore et encore, c'est que ce projet de loi est draconien.
J'exhorte tous les députés à se pencher sur les problèmes que nous cherchons à régler. Si nous voulons régler le problème des passeurs, il suffit d'axer nos efforts sur l'exécution de la loi, de fournir des ressources supplémentaires et d'attraper les passeurs. Ne punissons pas les gens qui sont déjà des victimes.
Mettons-nous à la place d'un réfugié. Imaginons un instant comment nous nous sentirions si, en arrivant au Canada, un pays qui devait s'avérer pour nous un refuge, nous risquions d'être placés en détention et de nous retrouver dans l'incertitude.
Je demande aux députés de rejeter ce projet de loi.
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Madame la Présidente, c’est avec plaisir que je vais parler du projet de loi aujourd’hui. Toutefois, comme c’est la première fois que je prends la parole à la Chambre depuis les élections, en mai, j’aimerais prendre le temps de remercier les électeurs de Burlington de m’avoir réélu avec 54 p. 100 des voix. Ce fut une très belle campagne électorale.
Je félicite tous les députés, qu’ils soient nouveaux ou qu'ils reviennent à la Chambre. Je pense aussi qu’il est important de souhaiter la bienvenue aux pages qui entrent en fonction cette semaine. Il n’est pas facile de se rappeler le nom et les particularités de chacun. Ils font un travail formidable et je les en remercie. Je leur souhaite une excellente année.
Je suis heureux de prendre la parole à la Chambre aujourd’hui en faveur du projet de loi. Il contribuera beaucoup à rendre notre pays plus sûr en mettant un frein à l’activité illégale et dangereuse que constitue le passage de clandestins. La est une mesure législative d’une importance capitale qui répond à un besoin crucial.
Le passage de clandestins est un crime qui ne date pas d’hier. En fait, cette pratique a cours partout dans le monde depuis des décennies. Je suis certain que tous les députés ont déjà entendu des histoires de gens qui avaient payé des frais pour contourner les procédures d’immigration légitimes et légales et traverser furtivement la frontière entre le Mexique et les États-Unis.
Ma circonscription, , n’est pas loin de la frontière américaine et toutes les semaines, des gens viennent me voir au sujet de personnes qui franchissent la frontière illégalement.
La première fois que j’ai été élu, j’ai été étonné d’entendre des personnes qui me racontaient comment elles étaient venues au Canada admettre qu’elles étaient entrées illégalement. Elles n’ont pas suivi la filière légale. Elles avaient demandé le statut de réfugié en arrivant à la frontière. Puis, elles venaient à mon bureau parce qu’elles voulaient que je les aide, en ma qualité de député, à poursuivre le processus illégal qu’elles avaient entamé.
Par respect pour ma fonction de député, je leur ai dit que je n’interviendrais pas dans quelque activité illégale que ce soit pour elles. Je leur ai dit de suivre le processus légal pour immigrer au Canada, dans le cadre du système d’accueil des réfugiés et du système d’immigration. Souvent, nous leur téléphonions quelques semaines plus tard pour savoir ce qu’elles avaient décidé de faire, mais elles étaient difficiles à joindre et il arrivait qu’elles soient carrément introuvables. Des cas comme ceux-là, il y en a. Il y en a à Burlington. Il y en a dans tout le pays et ce, depuis de nombreuses années.
Ce qui pourrait surprendre certains, c’est que ce problème n’est pas nouveau pour le Canada. Chaque année, des milliers de demandeurs d’asile tentent d’entrer illégalement au Canada, par voie aérienne ou terrestre, avec l’aide des réseaux de migration clandestine des groupes du crime organisé.
Même l’immigration illégale par voie maritime n’est pas nouvelle: en 1999, près de 600 migrants originaires de la province du Fujian, en Chine, sont arrivés sur la côte Ouest canadienne à bord de quatre navires. Ce qui est nouveau, c’est que les Canadiens prennent maintenant conscience de l’impact direct de cette activité criminelle sur leur pays. Les Canadiens se rendent compte soudainement que leur pays est de plus en plus souvent ciblé par des réseaux organisés de passeurs œuvrant en Asie du Sud-Est, qui considèrent notre système d'immigration comme un système très généreux dont il faut tirer profit.
Au cours des dernières années, deux événements ont sensibilisé les Canadiens à cette réalité. Le premier est l'arrivée récente d'un navire en Colombie-Britannique. Mes électeurs m'ont demandé ce que nous ferions pour empêcher qu'une telle situation se reproduise à l'avenir.
En août dernier, 492 Tamouls du Sri Lanka sont arrivés en Colombie-Britannique à bord du navire Sun Sea. Cela s'est produit moins d'un an après l'arrivée de 76 Tamouls du Sri Lanka à bord de l'Ocean Lady.
Ces deux événements préoccupent les habitants de ma circonscription. Même si nous sommes à Burlington, à des milliers de kilomètres de l'endroit où se sont déroulés ces événements, les habitants de ma circonscription et tous les Canadiens s'inquiètent du fait que nous n'avons pas pu les empêcher.
Bien que ce soit sur la côte Ouest que ces deux navires ont accosté, il s'agit d'un enjeu qui, comme je le disais, touche le pays en entier, car les autorités canadiennes ont déjà eu affaire à des passeurs de clandestins dans l'Est du Canada, y compris au port de Montréal.
Il s'agit en fait d'un problème pancanadien qui menace de compromettre la sécurité nationale. Il soulève aussi son lot de questions relativement à la primauté du droit et aux droits de la personne, ici au Canada.
Ces passeurs de clandestins font des profits considérables grâce à l'immigration illégale. Ce ne sont pas des consultants en immigration, et ils sont loin d'aider les gens dans leurs démarches. Ils soutirent plutôt des milliers de dollars à leurs victimes, qu'ils embarquent sur le premier navire venu avant de les envoyer dans des pays, comme le Canada, où ils croient qu'ils ont de bonnes chances de réussir à contourner le système d'immigration. Ils exigent d'importantes sommes d'argent de leurs victimes sous prétexte d'assurer leur transport vers un autre pays et de les conseiller sur la manière de demander l'asile ou le statut de réfugié à leur arrivée. Ces activités illicites ont des répercussions ici, au Canada, car au bout du compte, ce sont les Canadiens et notre système d'immigration qui en subissent les contrecoups.
Je suis convaincu que les députés sont conscients du fardeau que peut constituer, pour nos systèmes d'immigration et de sécurité à la frontière, le fait de devoir contrôler l'identité et l'admissibilité de plus de 500 personnes débarquant d'un coup d'un seul et même bateau. Et pour être francs, nous ne sommes pas équipés pour répondre à une arrivée aussi massive d'immigrants ou de demandeurs d'asile.
Malheureusement, les coûts du passage de clandestins pour la société vont au-delà de ce que l'on peut mesurer dans un bilan financier. Bien souvent, ces périples illégaux de plusieurs milliers de kilomètres obligent ceux qui les entreprennent à vivre dans des conditions précaires et misérables, voire mortelles.
J'en veux pour preuve les terribles événements qui sont survenus en décembre dernier au large de l'île australienne de Christmas. Trente personnes ont alors perdu la vie lorsque le bateau de bois sur lequel ils s'étaient embarqués, et qui était piloté par des gens que l'on soupçonne d'être des passeurs, a sombré dans une tempête. Le drame de l'île Christmas n'est qu'un exemple des nombreuses catastrophes qui arrivent régulièrement un peu partout sur la planète.
Il ne faut pas non plus oublier que le passage de clandestins est fondamentalement injuste pour ceux qui suivent les règles et attendent leur tour pour venir au Canada, des gens comme nous en recevons tous dans nos bureaux. Nous sympathisons tous avec ceux qui suivent les règles et qui veulent immigrer au Canada en suivant la filière légale.
Je suis un Canadien de la sixième ou de la septième génération, mais mes beaux-parents sont venus d'Italie. Ils ont emprunté la voie légale. Ils ont dû attendre leur tour pour pouvoir s'établir ici. Ils ont respecté la marche à suivre. Ils ne sont pas venus sur un bateau pour demander le statut de réfugié, après avoir payé un passeur des milliers de dollars pour fuir l'Italie. Ils ont suivi les règles. Ils s'attendent à ce que tout le monde suive les règles. Ils sont favorables à l'immigration, évidemment. Dans ma famille, du côté de ma femme, ce sont presque tous des immigrants. Ils ont très bien réussi. Le Canada les a choyés et, en retour, a profité de leur arrivée et de leur contribution. Mais ils y sont parvenus de manière légale, et c'est ce dont il est question dans ce projet de loi.
Le Canada accueille des milliers de réfugiés et d'autres immigrants chaque année. Le système canadien d'accueil des réfugiés est l'un des plus généreux et des plus équitables au monde. Mais, lorsque le Canada est forcé de gérer l'arrivée d'un navire rempli de centaines d'immigrants illégaux, il se produit un arriéré dans l'étude des dossiers qui a pour effet de retarder le traitement des demandes des personnes qui suivent les canaux normaux. Ce n'est pas juste pour eux, pour les enfants ou pour leur conjoint.
Nous n'avons pas l'intention de demeurer les bras croisés pendant que notre pays est la cible d'organisations criminelles qui abusent de notre générosité. C'est pourquoi notre gouvernement a présenté ce projet de loi en octobre dernier, de manière à faire comprendre clairement aux passeurs d'immigrants clandestins que le Canada ne tolérera pas leurs agissements. C'est pourquoi aussi nous venons de présenter de nouveau le même projet de loi, à l'occasion de la présente session. Nous croyons que l'adoption de ce projet de loi ne peut plus attendre.
Ce problème ne disparaîtra pas comme par enchantement. Nous devons agir dès maintenant. Nous devons nous comporter en parlementaires responsables.
Par la présentation de ce projet de loi, nous prenons des mesures fermes et raisonnables pour défendre l'intégrité de nos frontières. Nous sommes résolus à protéger notre système d'immigration et de détermination du statut de réfugié contre les abus et à poursuivre en justice les passeurs de clandestins avec toute la rigueur de la loi.
Bien que, dans l'ensemble, les Canadiens soient favorables à un système d'immigration et de détermination du statut de réfugié généreux et ouvert, nous sommes également conscients qu'il incombe à tout État souverain de protéger ses citoyens et l'intégrité de ses frontières. Ce projet de loi est la preuve que nous ne tolérerons pas les abus contre notre système d'immigration, qu'ils soient le fait de passeurs ou de ceux qui refusent de respecter les règles. Par ailleurs, il nous permettra d'offrir une protection aux réfugiés légitimes.
Le nouveau projet de loi permettra au de déclarer « irrégulière » l'arrivée d'un groupe de personnes et d'assujettir ces personnes aux dispositions de la loi. Le projet de loi reconnaît la gravité de cette décision en énonçant en termes clairs que seul le peut prendre cette décision et que la responsabilité ne peut pas être déléguée à un autre fonctionnaire.
Cette mesure législative facilitera en outre la poursuite en justice des passeurs de clandestins, établira des peines minimales d'emprisonnement à l'égard des passeurs déclarés coupables et responsabilisera les propriétaires et les exploitants de navires ayant servi à des opérations de passage clandestin. Elle réduit l'attrait d'entrer illégalement au Canada pour les services de passeurs.
Le projet de loi comporte des dispositions visant à empêcher les personnes qui arrivent au Canada de façon irrégulière, même celles qui obtiennent par la suite le statut de réfugié, de présenter des demandes de résidence permanente avant cinq ans, y compris ceux qui se voient accorder le statut de réfugié.
Nous voulons qu'il soit plus facile de révoquer le statut de réfugié des personnes qui retournent dans leur pays d'origine pour des vacances ou qui démontrent d'une quelconque façon qu'elles n'ont pas légitimement besoin de la protection du Canada. Nous devons faire en sorte que les personnes qui sont arrivées au Canada par une opération de passage de clandestins n'auront pas le droit de parrainer des membres de leur famille avant cinq ans.
Beaucoup d'alliés et de partenaires du Canada ailleurs dans le monde ont été la cible de groupes organisés de passage de clandestins. Le problème est international, et il faut y trouver une solution internationale. Aucun pays ne peut, à lui seul, régler le passage illégal de clandestins. C'est pourquoi nous avons nommé un conseiller spécial en matière de passage de clandestins et de migration illégale, M. Ward Alcock, qui est chargé de coordonner une approche pangouvernementale de la question. Le rôle de M. Alcock nous permet de nous mettre en contact avec des partenaires internationaux et de parler d'une même voix pour trouver des moyens d'empêcher les navires servant à cette activité de quitter leur pays d'origine.
Depuis sa nomination, en octobre 2010, M. Alcock a rencontré des fonctionnaires en Australie et dans d'autres États d'Asie du Sud-Est, de même que des représentants des Nations Unies, pour discuter des moyens de gérer l'immigration irrégulière, qui existe partout dans le monde. Il a également participé à plusieurs réunions dans le cadre du processus de Bali, qui est un forum régional réunissant plus de 50 pays et organisations internationales qui élaborent des mesures pratiques pour lutter contre le passage de clandestins et les crimes connexes dans le Pacifique Sud.
Afin de donner plus de poids aux discussions internationales, le a exhorté les dirigeants des pays de l'Asie-Pacifique à travailler de concert afin de trouver des solutions concrètes au problème du passage de clandestins. L'automne dernier, le premier ministre a rencontré des représentants de pays alliés lors du forum annuel de Coopération économique Asie-Pacifique et a mis en lumière le besoin impérieux de lois plus rigoureuses et plus efficaces pour régler ce problème mondial. La collaboration permanente est indispensable pour mettre fin aux activités de passage de clandestins et fera bien comprendre aux passeurs potentiels que leurs activités illégales ne seront plus tolérées.
Les mesures que nous présentons aujourd'hui amélioreront sensiblement notre capacité de sévir contre ceux qui s'adonnent à l'activité illégale que constitue le passage de clandestins. Ces mesures respectent nos obligations et nos engagements internationaux en faveur de la fourniture d'une aide et d'un refuge aux réfugiés légitimes qui ont besoin de notre protection. Le Canada ouvre ses portes pour que ces personnes aient la qualité de vie et les perspective qu'elles méritent afin de pouvoir commencer une vie nouvelle et meilleure ici.
Nous exhortons tous les députés à appuyer le projet de loi et à nous aider à le faire adopter le plus rapidement possible.
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Madame la Présidente, j'aimerais tout d'abord féliciter le député de de sa victoire aux dernières élections. Je suis heureux de constater que, six mois après son élection, son chef lui a enfin permis de s'exprimer. J'espère qu'il ne sera pas nécessaire d'attendre aussi longtemps avant de l'entendre de nouveau, mais je crois que cette décision appartient plutôt à son chef.
J'aimerais tout d'abord vous faire part de mes préoccupations au sujet des lacunes de ce projet de loi. Par la suite, j'aimerais suggérer aux députés d'en face certaines façons dont le gouvernement pourrait l'améliorer.
Je m'inquiète d'abord et avant tout des effets que ce projet de loi pourrait avoir sur les enfants et leurs familles. En deuxième lieu, il entraînera, selon moi, le gaspillage de fonds publics en tentant de lutter contre un problème qui n'existe pas et aura des effets négatifs sur notre économie.
Je suis dévoué à ma famille. Ma fille est très importante pour moi. Si je siège dans cette Chambre, c'est notamment pour faire en sorte qu'elle puisse grandir dans un monde meilleur et qu'elle ait une vie meilleure. C'est ce que je souhaite pour tous les enfants, pas seulement pour ma fille ou les enfants canadiens. Je suis persuadé que de nombreux autres députés partagent mon point de vue et ont à coeur le bien-être des enfants.
Comme les députés le savent certainement, le Canada est signataire de la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies. Ce mois-ci, nous avons célébré le 21e anniversaire de la ratification de cet important document qui illustre le consensus international au sujet des droits fondamentaux des enfants. Cependant, je constate avec une vive inquiétude que le projet de loi risque de compromettre l'engagement du Canada aux termes de cette convention.
Je ne peux pas croire que le gouvernement garderait des enfants en détention pour une période allant jusqu'à un an simplement parce qu'ils tentaient de fuir les pires conditions de vie possibles, notamment la guerre, la famine ou la persécution. Malheureusement, le projet de loi entraînerait la détention d'enfants. De nombreux Canadiens ressentiront de la honte lorsqu'ils apprendront que le gouvernement a l'intention de détenir des enfants, sans égard à leur pays d'origine. Le gouvernement envisage peut-être de construire des centres de détention pour que les Canadiens ne puissent être témoins des mesures qu'il prend dans ce dossier. Autrement dit, la détention d'enfants aux termes de ce projet de loi constitue une mesure inacceptable et contraire aux valeurs que chérissent les Canadiens.
Je vais expliquer de quelle façon le gouvernement violerait la Convention relative aux droits de l'enfant. Auparavant, je vais donner de l'information sur cette convention à l'intention des députés d'en face et expliquer à qui elle s'applique.
L'article 1 de la convention dit ceci:
Au sens de la présente Convention, un enfant s'entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable.
Lorsqu'il est question de mesures concernant les enfants, le gouvernement conservateur se plaît à parler de l'âge du consentement. La convention des Nations Unies s'applique à tous les enfants, de la naissance à 18 ans.
Le projet de loi amènerait le Canada à enfreindre les dispositions de l'article 2 de la convention, qui dispose:
Les États parties s'engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans la présente Convention et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou autre de l'enfant ou de ses parents ou représentants légaux, de leur origine nationale, ethnique ou sociale, de leur situation de fortune, de leur incapacité, de leur naissance ou de toute autre situation.
Le paragraphe 2 du même article dit ceci:
Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour que l'enfant soit effectivement protégé contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par la situation juridique, les activités, les opinions déclarées ou les convictions de ses parents, de ses représentants légaux ou des membres de sa famille.
Le projet de loi créerait deux catégories de demandeurs du statut de réfugié, qui auraient chacun des droits différents. En effet, le projet de loi serait discriminatoire à l'égard des enfants qui entreraient dans la catégorie des demandeurs désignés. Or, il s'agit là d'une violation évidente de l'article 2 de la convention.
Le projet de loi contreviendrait à l'article 3 de la convention, qui stipule ceci:
Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale.
Les députés d'en face auront sans doute compris que cette disposition signifie que nous devons traiter les enfants réfugiés de la même manière que nous traiterions nos propres enfants. Je suppose que les députés n'accepteraient pas la détention de leurs propres enfants, surtout si leurs enfants avaient dû fuir une région déchirée par la guerre.
Par ailleurs, le projet de loi enfreindrait le paragraphe 7(2) de la convention, qui dit ceci:
Les États parties veillent à mettre ces droits en oeuvre conformément à leur législation nationale et aux obligations que leur imposent les instruments internationaux applicables en la matière, en particulier dans les cas où faute de cela l'enfant se trouverait apatride.
Même si le projet de loi devait inclure des dispositions permettant la détention d'enfants, le gouvernement aurait du mal à remplir ses obligations relatives à la convention dans ses centres de détention, à cause de l'article 31, concernant le droit de jouer, et de l'article 39, concernant la réadaptation psychologique et physique des enfants victimes, dont voici le libellé:
Les États parties prennent toutes les mesures appropriées pour faciliter la réadaptation physique et psychologique et la réinsertion sociale de tout enfant victime de toute forme de négligence, d’exploitation ou de sévices, de torture ou de toute autre forme de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou de conflit armé. Cette réadaptation et cette réinsertion se déroulent dans des conditions qui favorisent la santé, le respect de soi et la dignité de l’enfant.
En vertu de cet article, il faudrait donc offrir aux enfants des aires de jeu et d'expression culturelle et l'accès à des services psychologiques et de counselling ainsi qu'à des services visant à assurer leur développement. Le se sert de l'ONU pour justifier sa décision d'aller en guerre, sa position sur la scène internationale et ses idées en matière d'affaires étrangères, et pourtant il rejette une convention de la même organisation, convention dont le Canada est signataire.
Il semble que la promotion de la santé maternelle et infantile soit un beau principe, tant qu'il ne s'agit pas de mères et d'enfants réfugiés. Nous devrons construire des établissements à la fine pointe de la technologie dotés de salles de jeu, de salles de classe et de locaux à bureaux pour les psychologues, les éducateurs et le personnel médical.
Voilà qui m'amène au deuxième aspect que je veux soulever, soit les coûts qu'engendrerait cette mesure législative idéologique.
Le gouvernement a-t-il pris en compte le coût des nouveaux centres de détention? A-t-il simplement cru qu'il allait pouvoir placer des enfants en détention sans remplir ses obligations prévues par la convention? Rappelons au gouvernement ses devoirs et obligations. Voici ce que stipule le paragraphe 22(1) de la convention:
Les États parties prennent les mesures appropriées pour qu'un enfant qui cherche à obtenir le statut de réfugié ou qui est considéré comme réfugié en vertu des règles et procédures du droit international ou national applicable, qu'il soit seul ou accompagné de ses père et mère ou de toute autre personne, bénéficie de la protection et de l'assistance humanitaire voulues pour lui permettre de jouir des droits que lui reconnaissent la présente Convention et les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ou de caractère humanitaire auxquels lesdits États sont parties.
Voici ce que stipule le paragraphe 22(2):
A cette fin, les États parties collaborent, selon qu'ils le jugent nécessaire, à tous les efforts faits par l'Organisation des Nations Unies et les autres organisations intergouvernementales ou non gouvernementales compétentes collaborant avec l'Organisation des Nations Unies pour protéger et aider les enfants qui se trouvent en pareille situation et pour rechercher les père et mère ou autres membres de la famille de tout enfant réfugié en vue d'obtenir les renseignements nécessaires pour le réunir à sa famille. Lorsque ni le père, ni la mère, ni aucun autre membre de la famille ne peut être retrouvé, l'enfant se voit accorder, selon les principes énoncés dans la présente Convention, la même protection que tout autre enfant définitivement ou temporairement privé de son milieu familial pour quelque raison que ce soit.
Au lieu de punir les victimes, nous devrions faire preuve de compassion et les aider à s'intégrer à notre société. Je rappelle aux députés d'en face ce qui s'est passé en 1979 et en 1980, lorsque plus de 50 000 Vietnamiens sont arrivés par bateau sur nos côtes. Ces réfugiés venaient d'un pays déchiré par la guerre qui était de surcroît considéré comme un ennemi par nos voisins. Si l'on en croit les reportages publiés par les médias à cette époque, l'arrivée de ces gens ne plaisait pas à tout le monde. Malgré cela, le gouvernement progressiste alors en place a fait preuve de leadership en aidant ces réfugiés à s'intégrer à notre société. Aujourd'hui, les Canadiens d'origine vietnamienne contribuent de façon dynamique à la prospérité économique du Canada. D'ailleurs, deux députés de notre caucus, le député de et la députée de , sont issus de cette communauté.
Je suis stupéfié que l'on ait pu s'abaisser à présenter ce projet de loi ignoble.
Le projet de loi ne fait que démontrer de manière encore plus convaincante que les conservateurs ont laissé tombé l'étiquette « progressiste » et qu'ils sont incapables de mettre de l'avant des politiques progressistes. Plutôt que d'intégrer les gens, ils leur demandent de patienter pendant cinq ans. Ils enferment ces personnes et leurs enfants au lieu de les accueillir.
Nous devrions pourtant aimer notre prochain au lieu de le craindre. Nous devrions inclure dans ce projet de loi des dispositions qui permettront à des enfants et à leur famille de bénéficier d'une exception pour des considérations d'ordre humanitaire.
Dans sa forme actuelle, ce projet de loi est inacceptable. Il devrait être renvoyé à un comité aux fins de modification.
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Madame la Présidente, je me réjouis d'être de retour à la Chambre et de constater que vous occupez de nouveau ce fauteuil.
Avant de commencer mon intervention, j'aimerais dire que c'est toujours un gouvernement conservateur qui, lorsqu'il était au pouvoir, a donné l'exemple en accueillant des immigrants et en assurant leur intégration à notre société et dans notre pays, et qui a été le premier à accueillir dans ses rangs des députés de différentes origines. Le gouvernement conservateur est fier de ses réalisations à cet égard, et nous n'irons pas à l'encontre de celles-ci.
Je suis donc très heureux de prendre la parole aujourd'hui à la Chambre à l'appui de cette mesure législative si importante. J'ai suivi avec grand intérêt le débat qui a eu lieu à la Chambre aujourd'hui sur la Loi visant à empêcher les passeurs d'utiliser abusivement le système d'immigration canadien.
Cela dit, les discussions à ce sujet n'ont pas uniquement eu lieu à la Chambre, et elles ne devraient pas non plus s'y limiter. Il s'agit d'une question qui a suscité un grand intérêt et de nombreuses discussions parmi les Canadiens et chez nos partenaires et alliés partout dans le monde. L'été dernier, c'était l'un des principaux enjeux dont il était question dans ma circonscription.
Les députés ont entendu beaucoup de choses au sujet du projet de loi, au cours de ces débats, et ils se sont beaucoup exprimés à ce sujet. Mais il est important de prendre un peu de recul, de dépasser le stade de la rhétorique et des scénarios catastrophes et de nous rappeler la gravité du crime en question et les raisons pour lesquelles nous devons prendre des mesures pour le prévenir.
Les Nations Unies définissent comme suit le passage de clandestins, ou trafic illicite de migrants:
[...] le fait d'assurer, afin d'en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou un autre avantage matériel, l'entrée illégale dans un État partie d'une personne qui n'est ni un ressortissant ni un résident permanent de cet État.
Autrement dit, il s'agit de faire passer des gens d'un pays à un autre contre rétribution, souvent dans la cale d'un navire ou dans un conteneur exigu.
Il est des plus troublant de constater que personne ne connaît précisément le nombre de personnes qui sont transportées par des passeurs chaque année. Les données sont disséminées à plusieurs endroits et sont incomplètes. Cependant, il y a certaines choses que nous savons.
Nous savons qu'il y a dans le monde entier des réseaux complexes de passeurs de clandestins qui offrent aux gens de les aider à échapper aux contrôles frontaliers, aux règles de l'immigration et aux exigences en matière de visa. Ils ne le font pas par bonté ou parce qu'ils veulent sincèrement aider ces gens. Les passeurs de clandestins cherchent le profit et sont animés par la cupidité.
Nous savons que le passage de clandestins est une activité très rentable qui présente un risque assez faible de se faire prendre et de subir des sanctions. C'est donc une activité de plus en plus attirante pour les syndicats du crime organisé dont les activités s'étendent sur plusieurs pays, au-delà des frontières et des régions.
Ce type de crime est particulièrement alléchant parce qu'il nécessite une faible mise de fonds. Il n'y a ni règles ni mesures de protection à respecter pour garantir la sécurité des clandestins transportés. Et plus les profits sont importants, plus les passeurs sont effrontés et prêts à risquer la vie de leurs passagers.
Nous savons en outre que les passeurs sont très opportunistes et qu'ils savent très bien s'adapter. Ils changent constamment leurs trajets et leurs méthodes pour éviter d'être capturés.
Mais surtout, nous savons que ce problème ne peut être résolu qu'avec une approche à plusieurs volets reposant sur la coordination des efforts avec nos alliés et nos partenaires dans le monde. Voilà pourquoi le Canada a signé, avec plus de 100 autres pays, des conventions et des protocoles internationaux qui condamnent le passage de clandestins et visent à protéger les véritables demandeurs d'asile.
Le problème du passage de clandestins concerne pratiquement tous les pays, à titre de pays d'origine, de transit ou de destination.
Il y a tout juste quelques années encore, la plupart des Canadiens ignoraient l'existence de cette activité criminelle ou croyaient peut-être qu'il s'agissait d'un crime qui se commettait loin de nos frontières. C'était jusqu'à ce que l'arrivée de deux navires à moins d'un an d'intervalle sur la côte Ouest ne sonne le réveil. L'Ocean Lady est arrivé en 2009 avec 76 immigrants à son bord. Le Sun Sea est arrivé moins d'un an plus tard avec près de 500 immigrants à son bord.
La réaction de la plupart des Canadiens a été rapide. Selon un sondage Angus Reid effectué peu après l'arrivée du Sun Sea, près de la moitié des Canadiens interrogés ont déclaré que tous les passagers et membres d'équipage devraient être expulsés même s'il était démontré qu'ils n'avaient aucun lien avec le terrorisme. C'est un chiffre révélateur et, franchement, personne ne peut en faire fi.
Est-ce que cela signifie que les Canadiens sont tout à coup devenus intolérants envers les immigrants ou qu'ils ont commencé à les haïr? Pas du tout. Les Canadiens sont fiers de leur société accueillante et multiculturelle. Ce que les Canadiens nous disent, cependant, c'est qu'ils sont révoltés que des groupes de passeurs exploitent le système d'immigration juste et généreux du Canada pour réaliser un profit rapide. Comme le gouvernement, ils craignent que le Canada continue d'attirer des arrivées irrégulières à moins d'agir maintenant. Ces inquiétudes ne sont pas sans fondements.
Nous continuons d'entendre des rapports sur la possibilité que des navires se dirigent vers le Canada. Tout juste en juillet, nous avons appris que les autorités indonésiennes avaient arrêté un navire rempli d'immigrants qui se dirigeait peut-être vers nos rives.
Il n'y a pas de temps à perdre. Nous devons faire comprendre clairement aux passeurs que le Canada ne tolérera pas leur façon d'abuser de notre système d'immigration. En outre, nous ne tolérerons pas le risque que le passage de clandestins fait peser sur notre sécurité nationale. Il peut être très difficile d'établir l'identité des clandestins, dont beaucoup n'apportent aucun papier.
Devant les faits, il est clair que la Loi visant à empêcher les passeurs d'utiliser abusivement le système d'immigration canadien ne viendra jamais trop tôt. Avec le projet de loi, nous prenons des mesures fermes et raisonnables pour protéger nos frontières, protéger notre système d'immigration et de détermination du statut de réfugié contre les abus et poursuivre les passeurs avec toute la force de la loi.
Le projet de loi renforcera notre réaction juridique devant les arrivées irrégulières à plusieurs égards importants. Il donnera à nos fonctionnaires chargés de l'immigration et de l'exécution de la loi plus de temps pour identifier les individus qui arrivent de façon irrégulière et faire enquête sur eux. Nous croyons que la détention obligatoire pendant une période maximale d'un an est nécessaire et raisonnable pour permettre une enquête rigoureuse sur les individus qui décident d'arriver en groupes importants.
La mesure législative renforcera également la capacité des forces de l'ordre de débusquer les filières de passage de clandestins et de les contrer. Elle permettra notamment d'établir des peines minimales d'emprisonnement pour les passeurs qui ont été reconnus coupables et de prolonger la période pendant laquelle ces contrevenants pourront être poursuivis. Elle nous permettra d'attaquer les passeurs là où cela fait le plus mal, à savoir leur portefeuille. À titre d'exemple, le projet de loi modifiera la Loi sur la sûreté du transport maritime de manière à durcir les sanctions imposées aux propriétaires et aux opérateurs de navires qui ne fournissent pas les renseignements sur les passagers qu'ils transportent avant d'entrer dans les eaux canadiennes, qui refusent de se conformer à une directive ministérielle les obligeant à quitter les eaux canadiennes ou leur en refusant l'entrée, ou qui donnent des renseignements erronés ou trompeurs aux autorités canadiennes. Le fait d'accroître les sanctions, d'alourdir les amendes et de durcir les peines fera comprendre aux passeurs que nous ne resterons pas les bras croisés pendant qu'ils cherchent à faire pénétrer des gens dans notre pays, que ce soit par voie maritime, terrestre ou aérienne.
En fait, notre travail ne se limite pas à nos frontières. En étroite collaboration avec nos partenaires internationaux, nous cherchons à empêcher les activités criminelles de se rendre au Canada.
Ce projet de loi fait comprendre que le Canada est un pays équitable, généreux et accueillant pour les personnes qui veulent une vie meilleure, mais qu'il existe des lois et des règles à suivre. Les dispositions du projet de loi augmenteront considérablement notre capacité de sévir contre l'activité des passeurs. Elles respectent nos obligations et nos engagements internationaux qui consistent à offrir de l'aide et l'asile aux réfugiés qui ont besoin de notre protection pour pouvoir améliorer leur sort.
Le gouvernement cherche à faire adopter ce projet de loi important pour assurer la sécurité des Canadiens et pour protéger les droits des réfugiés qui suivent le processus juridique approprié afin de pouvoir s'établir au Canada.
Je demande à tous les députés d'appuyer l'adoption rapide de cette mesure législative.
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Madame la Présidente, je suis heureuse de participer au débat sur le projet de loi , auquel je propose, dans l'esprit de ma collègue de , de donner le titre abrégé « loi visant à punir les réfugiés ».
Je présenterai d'abord le contexte du projet de loi. Ce projet de loi n'est pas une mesure isolée du gouvernement conservateur. Il s'inscrit dans une approche plus large dont le gouvernement fait la promotion et qui consiste à créer une société axée davantage sur la punition au Canada. Beaucoup de Canadiens n'approuvent pas cette approche, et c'est pourquoi la vaste majorité d'entre eux n'ont pas voté pour le gouvernement conservateur.
Pour mettre les choses en perspective, le Canada se distingue depuis longtemps et avec fierté par les mesures qu'il prend pour devenir un meilleur pays et par le rôle de chef de file que son gouvernement assume. Nous avons eu des gouvernements résolus à faire du Canada un pays juste, où les gens avaient des chances égales et où les droits de la personne et les droits individuels étaient respectés, peu importe l'endroit du pays d'où on venait.
Nous avons également préconisé la mise en place d'une société inclusive, où le Canada ferait partie du concert des nations et où il accueillerait des gens d'autres pays voulant venir au Canada pour bâtir leurs vies, réussir et contribuer à la société canadienne. Cette approche prévoyait aussi l'acceptation par le Canada d'une partie des réfugiés les plus vulnérables d'autres pays.
Les libéraux prônent une approche axée sur une société durable. Cette approche permettra de préserver la bonne santé environnementale, sociale et économique du Canada ou de l'améliorer.
Ce sont des questions importantes qui nécessitent le leadership du gouvernement. C'est notre approche de ces questions qui permet au Canada, ce pays dont nous sommes si fiers et qui est respecté par le reste du monde, de jouir de la réputation qu'il a.
Le gouvernement conservateur tente de mettre en place une société axée sur la punition, une société visant à engendrer des craintes, de la colère et du ressentiment parmi ses propres membres. Il veut utiliser la peur et le ressentiment pour dresser les groupes les uns contre les autres. Nous avons observé un grand nombre d'initiatives qui vont mener progressivement à une société axée davantage sur la punition, et cela m'attriste. Je regrette que le Canada adopte cette approche rétrograde en présentant un projet de loi qui vise à mettre en place une société axée davantage sur la punition.
Hier, le a résumé l'objectif du projet de loi. Il a dit qu'il visait à décourager le passage de clandestins. En quoi consiste une mesure de dissuasion dans ce projet de loi?
Cette dissuasion ne se traduit pas par une collaboration avec la communauté internationale pour empêcher l'immigration clandestine, pour identifier les individus qui tirent profit de ces activités, ni pour les empêcher d'exploiter les réfugiés. Non, la dissuasion consisterait à pénaliser les clandestins tellement durement que les réfugiés y penseraient à deux fois avant de songer à venir chercher refuge au Canada alors que ce sont des victimes qui ont plus que jamais besoin de protection. Ce n'est pas là le genre de Canada que nous souhaitons créer.
Nous reconnaissons que le Canada a commis des erreurs dans le passé. Par exemple, il a fait preuve d'un horrible manque de compassion en renvoyant le St. Louis, qui avait à son bord des réfugiés juifs venant de l'Allemagne. Nous reconnaissons que le Canada a une responsabilité humanitaire à l'égard des réfugiées. Je m'insurge contre ce projet de loi qui vise à punir les réfugiés pour dissuader les passeurs; il s'agit d'une approche inadmissible en matière de politique publique au Canada.
À l'instar de mes collègues du Parti libéral et d'autres députés, je souhaite que le gouvernement sévisse contre ceux qui, pour s'enrichir, profitent de la misère humaine, se livrent au terrorisme et exploitent des gens extrêmement vulnérables qui sont dans le besoin.
Il va sans dire que nous souhaitons nous attaquer à ce genre d'activités et que nous voulons mettre les Canadiens à l'abri de ces passeurs sans scrupules. Toutefois, ce n'est pas vraiment l'objectif que vise ce projet de loi.
Les lois canadiennes comportent déjà des dispositions pour sévir contre les passeurs, mais le projet de loi ne prévoit pas de ressources supplémentaires pour véritablement mettre en application les dispositions législatives existantes, notamment pour imposer des peines d'emprisonnement à perpétuité ou d'énormes amendes à ceux qui sont trouvés coupables de passage de clandestins.
Le projet de loi ne constitue pas une façon efficace de s'attaquer de front à l'immigration clandestine. Il s'agit d'une mesure qui vise davantage à pénaliser les réfugiés. Malheureusement, à cause du processus et du contenu proposé, cette mesure renforce le cynisme, elle engendre des conflits et empêche de faire preuve de compassion à l'égard d'êtres humains extrêmement vulnérables qui traversent les moments les plus difficiles de leur vie.
Pour lutter contre l'immigration clandestine, les libéraux appuient des solutions pragmatiques axées sur des données tangibles. Il va sans dire que nous ne souscrivons pas à cette formule qui pénalise les réfugiés alors qu'ils sont extrêmement vulnérables et qui les victimise de nouveau.
Pour ce qui est de mon affirmation concernant le fait que ce projet de loi renforce le cynisme, je signale que plusieurs députés ont cité des enquêtes qui révèlent que les Canadiens préféreraient qu'on fasse faire demi-tour aux navires comme le Sun Sea et comme ceux qui sont arrivés sur les côtes britanno-colombiennes il y a un an ou deux. Les Canadiens préféreraient qu'ils fassent demi-tour.
Ce qu'il y a de cynique là-dedans, c'est que c'est le gouvernement lui-même qui a suscité, par ses propos, ces craintes, cette colère et le ressentiment qu’on a constatés par les sondages. Le et le ont publiquement associé ces réfugiés qui craignent pour leur vie à des actes illégaux et au terrorisme. Ce sont ces propos qui ressortaient dans les sondages. Susciter la peur, puis faire un sondage et ensuite utiliser les résultats du sondage pour justifier une mesure punissant les réfugiés est une forme de cynisme politique au plus haut degré.
Le projet de loi n’a pas fait l’objet d’une consultation publique. A-t-on demandé aux différents intéressés de participer à la réflexion sur la meilleure manière de contrer le passage de clandestins? Il n’y a eu aucune consultation, parce que le gouvernement ne cherche qu’à se faire du capital politique avec ce projet de loi, en suscitant les craintes, la colère et le ressentiment dans la population canadienne. Voilà la véritable substance de ce projet de loi, et c'est pourquoi le gouvernement n’avait aucune raison de mener des consultations. Effrayer les gens et proposer de prétendues solutions pour s’assurer quelques votes de plus, c'est le comble du cynisme, et le gouvernement conservateur est un spécialiste de cette méthode.
Étant donné l’absence de consultation publique, le projet de loi ne résisterait probablement pas à une contestation en vertu de la Charte puisqu’il crée deux catégories de réfugiés et qu’il enfreint probablement les règles du droit international. Toutefois, rien de cela ne ralentit les députés d’en face, parce cette mesure n’est qu’un élément de leur vaste programme de répression visant à créer une société punitive qui vit dans la peur.
Les Canadiens méritent mieux. Ils méritent une politique gouvernementale réfléchie qui s’attaque à la racine du problème et tente sincèrement d’améliorer la vie des habitants en faisant preuve de leadership, et non uniquement de vile partisanerie.
Le projet de loi favorise aussi les conflits. Selon moi, cela se voyait dans un certain nombre de discours de députés conservateurs qui ont parlé de réfugiés illégitimes. Qu’est-ce qu’un réfugié illégitime? Un réfugié, c'est un réfugié, et quand un réfugié arrive sur nos côtes, nous avons des mécanismes permettant de déterminer s’il tente d'abuser des largesses du Canada ou s'il a dû fuir parce qu'il craignait pour sa vie. Nous avons les mécanismes voulus. Par conséquent, considérer tous les réfugiés arrivant par bateau comme illégitimes, ce n’est rien de plus qu’une facette du programme punitif des conservateurs. Cette mesure favorise le ressentiment chez les Canadiens et crée deux catégories de réfugiés, ce qui est complètement inacceptable.
Selon ce projet de loi, les réfugiés de la deuxième catégorie n’auraient pas le droit de présenter une demande de résidence permanente. Ce projet de loi prévoit aussi une plus grande ingérence d’ordre politique dans l’étude des demandes. Les hommes, les femmes et les enfants seraient tous placés en détention obligatoire sans raison pendant 12 mois. Tous devraient attendre cinq ans avant même de pouvoir demander la résidence permanente, et leur droit de sortir du pays serait restreint durant cette période. Le pire, c'est que, après cinq ans, ils risqueraient l’expulsion, advenant qu’un fonctionnaire ait jugé leur pays d’origine comme n’étant pas suffisamment dangereux.
Nous avons vu des cas tragiques…
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Madame la Présidente, je m'adresse à la Chambre aujourd'hui pour m'opposer à ce projet de loi qualifié de draconien par plusieurs experts, dont l'Association canadienne des libertés civiles. Ce projet de loi est discriminatoire et donne trop de pouvoirs au .
Ce projet de loi autorise le ministre à désigner comme irrégulière l'arrivée au Canada d'un groupe de personnes. Ces mêmes personnes peuvent alors devenir des étrangers désignés. Leur sort est alors entre les mains du ministre. En effet, si le ministre juge que les contrôles n'ont pas été effectués assez rapidement, s'il soupçonne que les personnes sont transportées clandestinement en échange d'argent ou qu'une organisation terroriste ou criminelle est impliquée, ces réfugiés deviennent des demandeurs désignés.
Ces demandeurs désignés deviennent alors assujettis à une panoplie de règles abusives et discriminatoires. Ces mesures iraient à l'encontre des droits énoncés à l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés et violeraient l'article 31 de la Convention relative au statut des réfugiés en imposant des pénalités aux réfugiés pour entrée ou présence illégale.
De plus, ce projet de loi est une violation claire de la Charte. Les demandeurs désignés — et cela inclut aussi les enfants — seront obligatoirement détenus à leur arrivée ou au moment d'être désignés. Une révision de leur détention ne se fera qu'après un an, ou plus si le ministre juge que leur identité n'a pu être établie. La remise en liberté de ces demandeurs désignés peut se faire seulement lorsqu'il est établi qu'il s'agit de réfugiés ou qu'il existe des circonstances exceptionnelles.
Il est clair que ce projet de loi donne trop de pouvoirs au ministre. Ce projet de loi est arbitraire et lui laisse beaucoup de discrétion quant au statut de ces personnes. Ce sont des personnes qui viennent d'arriver au Canada et elles sont tout de suite criminalisées, soupçonnées et, dans le cas des demandeurs désignés, détenues.
La Cour suprême a déjà annulé les détentions obligatoires sans examen des certificats de sécurité. La cour a été claire: les détentions sans raison valable ne pourraient être permises au Canada. Par contre, ce projet de loi semble ignorer la décision de la Cour suprême.
Cette disposition de détention ferait place à des détentions indéfinies en fonction de l'identité. Il n'y aurait aucune remise en liberté tant et aussi longtemps que le ministre jugerait que l'identité d'un demandeur désigné est bien établie.
Le Canada a ratifié de nombreux traités internationaux qui interdisent la détention arbitraire. Pourquoi ce gouvernement veut-il alors adopter un projet de loi qui permettrait aux agents de procéder à des détentions arbitraires? Qui plus est, les conditions de remise en liberté ne sont pas précisées. Il pourrait s'agir d'une lourde tâche administrative que d'émettre les conditions sans tenir compte de chaque cas individuel.
Ce qui me préoccupe, c'est que les décisions prises par le par rapport aux demandes des personnes désignées ne peuvent faire l'objet d'un appel devant la Section d'appel des réfugiés. Cela ajoute à ma crainte que ce projet de loi mette en avant un processus fondé sur des décisions arbitraires. Je me questionne sur les moyens de recours de ces demandeurs désignés.
Cette disposition risque d'enfreindre gravement les dispositions de la Convention relative au statut des réfugiés, qui protège les réfugiés de ce genre de loi. Mes collègues au NPD ont d'ailleurs rappelé au gouvernement les dispositions de la Convention relative au statut des réfugiés, lorsqu'il a tenté antérieurement d'empêcher des réfugiés de certains pays de faire appel d'une décision.
Ce projet de loi s'attaque injustement aux réfugiés et il ne résout pas le problème à la base. Il repose sur des décisions arbitraires du ministre, et ce, sans moyen de recours pour faire appel de la décision.
Ce projet de loi va encore plus loin. Il limite même les demandes pour des motifs d'ordre humanitaire. Une fois que les personnes deviennent des demandeurs désignés, ils ne peuvent présenter une demande pour des motifs humanitaires ni demander un permis de résidence temporaire pendant une période de cinq ans. Cette disposition est un obstacle de plus. Ce projet de loi va beaucoup trop loin.
Malgré la Convention relative au statut des réfugiés, les demandeurs désignés ne peuvent pas recevoir de passeport. L'article 28 de cette convention obligeant les États à émettre des titres de voyage ne s'appliquerait pas aux demandeurs désignés.
Cela veut dire que le gouvernement suspend certains droits des demandeurs désignés. Qu'est-ce qu'il essaie de faire? Se mettre tous les réfugiés à dos? Les criminaliser dès leur arrivée?
Cette loi n'a pas seulement une vaste portée sur les droits des réfugiés, elle s'applique aussi à des cas antérieurs. En effet, en vertu d'une disposition de désignation rétroactive, le gouvernement peut considérer demandeurs désignés des personnes arrivées au Canada depuis mars 2009.
On voit ici l'ampleur des pouvoirs accordés au ministre dans ce projet de loi. Il peut remonter jusqu'à 2009 pour décider qu'un réfugié est un demandeur désigné et lui imposer toutes les dispositions qui accompagnent ce statut.
Cette loi s'attaque aux réfugiés et non aux vrais coupables: les trafiquants et les passeurs. D'ailleurs, il existe déjà une peine sévère pour les personnes reconnues coupables de trafic d'êtres humains, soit une peine d'emprisonnement à vie. Ce projet de loi punit injustement ceux qui tentent de se réfugier au Canada et encourage des pratiques discriminatoires.
Ce qui m'inquiète, ce sont les pouvoirs importants que le ministre pourrait détenir si cette loi était adoptée. Ce projet de loi repose sur les décisions de ce dernier.
C'est à se demander ce que les conservateurs espèrent réaliser avec un tel projet de loi. Ils prétendent vouloir freiner l'ampleur du trafic d'êtres humains. Leur solution, c'est de donner le pouvoir au ministre de prendre des décisions importantes sur le statut de ces réfugiés, mais sans donner à ceux-ci la possibilité de porter la décision en appel. Leur solution est de détenir les enfants le temps nécessaire pour déterminer leur identité.
Le NPD reconnaît le problème du trafic humain, mais propose de vraies solutions qui s'attaquent au vrai problème. Il faut punir les criminels, c'est-à-dire les trafiquants et les passeurs.
Il y a quelques mois, la Chambre a adopté un projet de loi concernant les réfugiés. Elle était forte mais équilibrée et juste. Je crois qu'on devrait se concentrer sur une meilleure application de cette loi.
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Madame la Présidente, comment peut-on en arriver à travailler au projet de loi sans avoir analysé le problème au préalable?
Le projet de loi est basé sur de mauvaises prémisses. Par exemple, on ne peut pas se comparer à des pays comme l'Italie, où les côtes africaines sont situées à 350 kilomètres de l'île de Lampedusa. Il arrive des dizaines de milliers de réfugiés chaque année à cet endroit, à un point tel qu'il y a un débordement de population de l'île. Les gens y vivent pratiquement coude à coude.
C'est un problème grave. L'Union européenne a travaillé à mettre sur pied des solutions humanitaires pour régler ce problème. Ici, on n'est pas du tout dans la même situation. Il y a l'océan Arctique qui fait tout un côté, et personne n'arrivera par là. On n'est pas du tout dans un contexte semblable et on ne fait pas face à une arrivée massive de bateaux pleins de réfugiés. De toute façon, si on faisait face à une telle situation, il faudrait y répondre d'une façon humaine. Cela ne changera rien de tous les emprisonner. Cela prendra seulement plus de prisons.
J'appellerais ce projet de loi « loi pour restreindre l'accès au statut de réfugié ». On ne peut pas s'attendre à ce que les réfugiés du Sri Lanka arrivent en classe affaires sur Japan Airlines avec leur avocat. Pour la plupart, ce sont des paysans et des petits commerçants qui sont partis d'une zone de guerre, qui étaient pris sous le feu des différentes parties au conflit. Ils ont quitté leur pays avec les moyens qu'ils avaient. Ils ont amassé leur argent, ils ont acheté un vieux bateau rouillé et y sont tous montés à bord pour essayer de se sauver quelque part. S'il s'était agi d'un groupe de millionnaires saoudiens, ils auraient acheté un Airbus flambant neuf et seraient arrivés à l'aéroport Pearson ou à l'aéroport Pierre-Elliott-Trudeau avec leurs passeports et de l'argent.
Il faut tout de même être raisonnables. L'aspect le plus terrible de ce projet de loi, c'est qu'on crée une tension sociale; on attise l'animosité d'une partie de la population contre un groupe ciblé. Puis, une fois que la population commence à réclamer qu'on agisse, on prend des mesures. Cela ne fait pas partie d'une vision globale. Cela vient plutôt d'un aveuglement global.
C'est important de regarder notre histoire. Le Canada, dans le passé, a réussi à faire des choses regrettables. Pensons à ce qui est arrivé aux citoyens d'origine japonaise lors de la dernière guerre ou à la taxe qui avait été imposée aux immigrants chinois. Ce sont toutes des choses pour lesquelles on a été obligés de s'excuser collectivement. Avant de faire une autre chose regrettable, il faudrait bien réfléchir et ne pas s'embarquer dans une action qui nous obligerait à nous excuser plus tard.
On a aussi fait de bonnes choses dans le passé. On a accueilli tous les gens qui fuyaient la révolution bolchevique en Europe de l'Est.
On a vu comment ces gens étaient critiqués à leur arrivée. Beaucoup de gens disaient qu'il y avait trop d'Ukrainiens, d'Allemands, etc. Or, à ce jour, on a eu des premiers ministres d'origine ukrainienne et, dans notre société, il y a des gens de toutes les origines qui sont devenus des citoyens parmi les plus productifs. Si on avait commencé à les pointer du doigt, à les identifier comme groupes et à leur mettre des barrières, on n'en serait pas là aujourd'hui. On serait plutôt honteux.
Nous avons maintenant une chance d'agir de façon digne et généreuse et je crois qu'on a les moyens de le faire. Cela coûte moins cher d'envoyer un jeune à l'université que de l'envoyer en prison. Il ne faut surtout pas se laisser guider par la xénophobie et de mauvais instincts. Les gens qui discutent dans des bars au restaurant le matin peuvent dire des choses excessives et prononcer des jugements trop rapides sans réfléchir, mais pas les gens qui sont payés 160 000 $ par année pour être ici. Ils sont censés réfléchir et agir intelligemment.
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Monsieur le Président, le projet de loi est une profonde injustice envers les réfugiés. Cette proposition de loi, telle que présentée par ce gouvernement, est incertaine, arbitraire et discriminatoire.
Comment les conservateurs peuvent-ils justifier la détention arbitraire de jeunes enfants? C'est tout simplement aberrant que dans un pays comme le Canada, un parti politique présente un tel projet de loi en cette Chambre.
Lorsqu'on parle de personnes désignées, j'aimerais bien connaître le processus par lequel ces personnes vont être désignées. Je vois ici un manque flagrant de transparence. Quels seront les pouvoirs du ministre dans tout ça?
Le pouvoir de nomination permet au ministre de diviser et de discriminer deux classes de demandeurs d'asile selon leur mode d'arrivée au Canada. Cela veut dire qu'une personne qui arrive par avion ne serait pas désignée ni touchée par cette loi, mais qu'une personne qui arrive par bateau le serait. L'égalité devant la loi est un principe fondamental au Canada institué par la Charte canadienne des droits et libertés.
Comment peut-on proposer un projet de loi qui impose une série de sanctions contre des personnes « désignées », en violation directe de l'article 31 de la Convention sur les réfugiés, que le Canada a signée, qui interdit explicitement aux États d'imposer des sanctions aux réfugiés pour leur entrée illégale sur le territoire d'un État, surtout lorsque leur vie, leur liberté ou leur sécurité est menacée.
Le gouvernement se donne le pouvoir d'arrêter et de détenir tout non-citoyen, incluant même des résidents, en se fondant sur un simple soupçon de criminalité. On parle que de simples soupçons. Comment de simples soupçons peuvent-ils justifier la détention de personnes, y compris des enfants? Cela constitue de la détention arbitraire — pour le rappeler à ce gouvernement —, une violation de la Charte canadienne des droits et libertés. Je ne sais pas si ce gouvernement pense qu'il peut s'élever au-dessus de la Charte canadienne des droits et libertés, mais comme si ce n'était pas assez, les conservateurs ne se limitent pas aux personnes désignées ni au demandeurs de refuge. Cela s'applique à tout non-citoyen.
Il s'agit d'une atteinte ahurissante aux droits des nouveaux arrivants. Non seulement désignera-t-on les réfugiés de façon arbitraire, mais en plus, on les mettra en détention sans examen indépendant pendant un an. De plus, ces personnes seront désignées de manière arbitraire sans savoir les raisons pour lesquelles elles seront détenues pendant un an. J'aimerais rappeler à ce gouvernement que la plus haute cour de notre pays a affirmé clairement que la détention sans contrôle pendant une longue période de temps est contraire à la Charte canadienne des droits et libertés.
Un pays du Commonwealth a déjà essayé d'adopter un projet de loi comme celui que le gouvernement veut présenter aujourd'hui. Non seulement les conservateurs veulent mettre en prison ou en détention — peu importe le mot utilisé — des enfants, mais leur projet de loi ne vise en aucun cas la vraie problématique qui est de punir les trafiquants et non les réfugiés. Le titre du projet de loi est parfaitement clair, mais quand on lit le projet de loi, on se rend compte que le libellé ne touche en aucun cas l'objectif qui est de punir les trafiquants. Ce qu'on fait ici, c'est qu'on punit les réfugiés.
À ce sujet, le Conseil canadien pour les réfugiés souligne que: « Les peines minimales obligatoires n’auront aucun effet de dissuasion: en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, l’organisation de l’entrée illégale est déjà passible de l’emprisonnement à perpétuité; il a été démontré que les peines minimales obligatoires n’ont pas d’effet de dissuasion. » Il nous rappelle également que l'Australie a essayé de punir les réfugiés afin de les dissuader mais que cela n'a pas fonctionné.
J'aimerais aussi mettre l'accent sur le fait que: « Le public australien a été profondément divisé sur cette question et que de nombreux citoyens se sont joints à un mouvement populaire pour contester le traitement inhumain infligé aux réfugiés par leur pays. » Pourquoi ce gouvernement veut-il aller de l'avant alors qu'on sait pertinemment que le Conseil canadien nous dit que ce type de loi est inefficace?
La Commission australienne des droits humains a mené une enquête nationale sur la détention des enfants et son constat a été, sans étonnement, que des enfants ont subi à de nombreuses reprises des violations de leurs droits humains. Nous demandons que le projet de loi soit retiré. Le gouvernement devrait revoir le projet de loi et s'attaquer au vrai problème.
Comme le disait hier ma collègue l'honorable députée d'Argenteuil—Papineau—Mirabel, entre 2008 et 2009, le gouvernement a déjà dépensé 45 millions de dollars. Je sais qu'il faut parler d'économie aux conservateurs, parce qu'il semble que les droits humains et la justice sociale ne leur disent pas grand-chose.
Pour détenir des enfants, pour détenir des réfugiés, il va falloir construire des centres de détention. Avec quel argent va-t-on construire cela? Avec l'argent des contribuables. Est-ce que cela va nous aider à bâtir notre économie? Eh bien, non, malheureusement, cela va seulement nous donner l'air d'un pays qui ne respecte pas les droits humains.
Parlons maintenant des enfants. On ne peut lire ce projet de loi sans être outré par les dispositions touchant les enfants. Détenir et expulser des enfants, est-ce vraiment des choses possibles dans un pays libre et démocratique comme le nôtre? À moins qu'ils ne soient acceptés comme réfugiés ou libérés pour des motifs discrétionnaires par le ministre sur la base de circonstances exceptionnelles, les enfants resteront détenus pendant au moins un an. Comment cela est-il justifiable?
J'aimerais aussi rappeler aux conservateurs que la Déclaration universelle des droits de l'Homme des Nations-Unies proclame que l'enfance a droit à une aide et à une assistance spéciale. Or elle est complètement ignorée par ce gouvernement, puisque celui-ci prive les personnes désignées, incluant les enfants, de la possibilité de déposer une demande pour des motifs humanitaires pendant cinq ans, et ce, je tiens à le rappeler, sans aucun droit d'appel, qui est un droit institué dans notre Charte canadienne des droits et libertés. C'est un droit fondamental.
Les conventions sur les réfugiés et sur le droit des enfants établissent des exigences spécifiques pour protéger la liberté des enfants. La détention des enfants doit être une mesure de dernier recours, et elle doit être de la plus courte possible. Un enfant ne peut être détenu illégalement ou arbitrairement, et il a le droit de contester la légalité de sa détention devant un tribunal ou un autre organe indépendant.
Les conservateurs ont-ils vraiment à coeur la famille, l'unité fondamentale de notre société? En lisant ce projet de loi, je ne le crois pas. Les conservateurs reconnaissent-ils les engagements passés du Canada sur la scène internationale ou veulent-ils mettre en place un droit discriminatoire injuste et antidémocratique?
Parlons de la réunification familiale. Les personnes désignées, comme je le mentionnais, ne peuvent présenter une demande pour motif d'ordre humanitaire ni demander un permis de résidence permanente durant une période de cinq ans. Cela signifie que leur famille, qui est peut-être en danger dans leur pays, n'aura pas la possibilité de venir au Canada avant cinq ans. Cette disposition constitue un obstacle indu à la présentation d'une demande fondée sur des motifs humanitaires et contrevient directement à la Convention relative aux droits de l'enfant et à la Convention relative au statut des réfugiés. En plus de bafouer allègrement le droit des enfants, le projet de loi prive certains réfugiés de la sécurité et de la stabilité dont ils ont besoin pour s'intégrer au Canada.
J'aimerais aussi rappeler à ce gouvernement que le Canada fait partie des pays à avoir signé ces deux conventions. Aujourd'hui, à la Chambre, on remarque que le Canada fait totalement fi de ses obligations internationales. L'Assemblée générale des Nations Unies a affirmé le principe que les êtres humains doivent être traités « sans discrimination » et ont le droit de jouir de tous les droits et libertés fondamentaux prévus.
En terminant, j'aimerais rappeler à ce gouvernement, qui tient à nous dire et à nous redire que les Canadiens lui ont donné un mandat fort pour les défendre, que seulement 40 p. 100 de la population ont voté pour ce gouvernement, et que 60 p. 100 sont en désaccord avec les politiques qu'il tente d'adopter aujourd'hui à la Chambre.
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Monsieur le Président, c'est un plaisir de prendre la parole après ma collègue de , qui a livré avec passion un discours par ailleurs très réfléchi. Je félicite ma collègue de de ses déclarations ce matin, ainsi que le député de ; je félicite enfin la députée de de son discours, que j'ai eu la chance d'entendre hier.
J'ai également eu la chance d'écouter les interventions du ministre, qui s'est élevé contre certaines des déclarations faites à la Chambre et a insisté que la mesure que prend le Canada s'inscrit dans la grande tradition du respect du droit au Canada. J'aimerais prendre quelques instants pour demander au ministre comment il peut dire de telles choses en toute conscience.
Il a dit qu'après l'arrivée du bateau en provenance du Sri Lanka, les sondages révélaient que le public canadien voulait refuser tout droit d'entrée et que la mesure en question était plutôt modeste comparé à ce que réclamait le public.
J'ai l'avantage de l'ancienneté; j'étais à la Chambre lorsque s'est tenu le débat sur la Charte des droits et libertés. J'étais présent à la Chambre lorsque nous avons voté en faveur de la Charte des droits et libertés. Je ne pense pas me tromper en affirmant que je suis le seul député ici qui puisse prétendre cela. Durant ce débat, il était notamment question des mesures à prendre pour protéger les minorités même quand c'est contraire à l'opinion publique; à ce moment, nous réfléchissions à l'histoire de notre pays.
Nous réfléchissions au fait que si la population avait été sondée à propos de la décision du gouvernement du jour — un gouvernement libéral, qui bénéficiait de l'appui solide de l'opposition officielle, le Parti conservateur de l'époque — d'interner les Canadiens d'origine japonaise sans procès et sans droit d'appel, tout simplement du fait de leur race et de la désignation, par le ministre, d'une personne comme étant d'origine japonaise, la mesure se serait révélée très populaire à l'époque.
Est-il question ici de voir de quel côté souffle le vent? Non. La question qui nous occupe porte plutôt sur la teneur du droit canadien, sur le processus que doit suivre notre pays pour remplir, d'une part, ses obligations nationales en vertu de la Charte et, d'autre part, ses obligations envers d'autres pays. Je vais revenir à l'essentiel. Pour reprendre les mots du député de — l'ancien président du Comité des affaires étrangères de la Chambre avec qui j'ai eu le grand plaisir de travailler pendant un certain temps —, tout le monde est un demandeur d'asile, mais pas nécessairement un réfugié. C'est exact.
Or, le projet de loi donnerait au ministre le pouvoir, voire l'obligation, de classer une personne dans une catégorie particulière, ce qui fait qu'elle serait traitée différemment d'un autre demandeur d'asile qui revendique, lui aussi, un statut de réfugié. En utilisant son pouvoir de désignation, le ministre permettrait du coup la détention de la personne. Cela créerait donc différentes catégories de réfugiés, selon les circonstances dans lesquelles ils viennent au Canada.
[Français]
Soyons clairs: il n'est pas question de la popularité du projet de loi. Les conservateurs nous disent qu'ils sont préoccupés par l'économie, mais cela ne se voit pas dans le débat. Ils touchent à la question des réfugiés et ils présentent des projets de loi sur la criminalité. C'est le parti réformiste qui est toujours là, il n'a pas disparu. Le nom de leur parti a changé, mais les conservateurs n'ont pas changé leurs couleurs. Ils ne sont pas préoccupés par l'économie. Ils sont préoccupés par quelque chose d'autre.
Pour nous, la question est très claire: est-il légal que le gouvernement traite différemment les gens qui cherchent à obtenir le statut de réfugié en fonction de la façon par laquelle ils sont arrivés au Canada? Je suis convaincu que cela n'est pas conforme à la Charte canadienne des droits et libertés. La Charte dit clairement que tous les gens ont les mêmes droits et qu'on doit traiter les cas de la même façon. On ne peut pas traiter des gens différemment à cause de la manière par laquelle ils sont arrivés au Canada, car dans le cas d'un individu, cela peut créer des injustices.
[Traduction]
Prenons notre responsabilité de députés au sérieux. Si le gouvernement avait à coeur cette question, il aurait renvoyé le projet de loi à la Cour suprême du Canada. Il dirait que des gens raisonnables — notamment presque tous les professeurs de droit à qui j'ai parlé, y compris un ancien président de la Commission d'appel de l'immigration — ont dit qu'ils estimaient que cela ne dépasse pas le cadre de la loi.
Mais le gouvernement a décidé de procéder autrement. Il n'a pas modifié le projet de loi. En fait, il s'agit de la même version que celle présentée la dernière fois. À l'époque, le gouvernement n'avait pas réussi à faire adopter le projet de loi à la Chambre parce qu'il était minoritaire. Maintenant qu'il détient la majorité des sièges, il a fait part de son intention d'aller de l'avant pour le faire adopter.
Pour la gouverne des députés d'en face, permettez-moi de signaler clairement la position du Parti libéral. Ce qui nous intéresse, ce n'est pas de savoir si le projet de loi est populaire ou non, mais bien de savoir s'il est légal et constitutionnel et, par conséquent, si c'est la bonne chose à faire.
À l'exception de quelques personnes, notamment la députée de qui la connaît pour l'avoir vécue, ma connaissance de la situation au Sri Lanka vaut sans doute celle de bien d'autres. Si le gouvernement affirmait vouloir sévir à l'endroit des passeurs, nous lui répondrions que le passage de clandestins est déjà illégal, que cela contrevient déjà à la loi. Nous ne vivons pas dans un pays qui ne comporte aucun cadre juridique pour prendre des mesures à l'égard des passeurs. Ce n'est pas comme si nous ne disposions pas de lois pour faire face à cette question ou que nous n'avions pas la capacité, pour peu qu'on dispose d'éléments de preuve, d'arrêter les gens, de porter des accusations contre eux et de les traduire en justice. Toutefois, l'objectif de ce projet de loi, et c'est le ministre qui l'a dit hier, est d'assurer que les gens qui songent à venir au Canada en employant ces moyens y songent à deux fois avant de le faire.
Par conséquent, contrairement à ce qu'a dit le député conservateur de Musquodoboit plus tôt, il ne s'agit pas de traiter les gens qui arrivent ici par ces moyens plus équitablement, ce qui était d'ailleurs un argument absurde, mais bien de faire de la discrimination contre les gens qui arrivent ici par ces moyens.
Le gouvernement se méritera peut-être bien des félicitations de la part de personnes considérant que c'est ce qu'il faut faire, qu'il faut enfermer ces gens et jeter la clé. Bien franchement, il faut qu'un parti politique dise que là n'est pas la question. Ce dont il est question, c'est du droit canadien, qui inclue la Charte, c'est-à-dire la Constitution du Canada. Voilà le point faible du projet de loi. Je pourrais décortiquer cette mesure législative et prouver aux députés que, fondamentalement, elle crée deux catégories de réfugiés. Si les gens arrivent par avion, ils appartiennent à une catégorie. S'ils arrivent en voiture, il sont dans une autre catégorie. Toutefois, s'ils arrivent par bateau, ils ne sont pas les bienvenus. C'est choquant. Dans des cas semblables, les gens qui demandent le statut de réfugié devraient être traités équitablement et honnêtement selon les principes fondamentaux de la justice canadienne.
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Monsieur le Président, je m'adresse à vous aujourd'hui car le projet de loi , contient plusieurs éléments qui, franchement, m'indisposent.
Parmi ceux-ci, il y a l'article permettant la détention d'un résident permanent ou d'un ressortissant étranger sur la seule base de l'existence de motifs raisonnables de soupçonner — j'insiste sur le mot « soupçonner » — qu'il y a une interdiction d'accès au territoire contre ladite personne, soit pour cause de grande criminalité ou de criminalité organisée. Cela peut mener à de grands problèmes et à des abus du système à plusieurs égards.
Dans un premier temps, tout réfugié qui arrive au pays sans avoir obtenu de statut de la part du ministère de la Citoyenneté, de l'Immigration et du Multiculturalisme — Dieu sait qu'il y a beaucoup de délais — serait obligatoirement détenu à son arrivée. Cela va à l'encontre de plusieurs conventions internationales signées par le Canada. Parmi celles-ci, on me permettra de lire le paragraphe 31(1) de la Convention relative au statut des réfugiés des Nations Unies, qui se lit comme suit:
Les États contractants n'appliqueront pas de sanctions pénales, du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers, aux réfugiés qui, arrivant directement du territoire où leur vie ou leur liberté était menacée au sens prévu par l'article premier, entrent ou se trouvent sur leur territoire sans autorisation, sous la réserve qu'ils se présentent sans délai aux autorités et leur exposent des raisons reconnues valables de leur entrée ou présence irrégulières.
Le projet de loi contrevient directement à ce paragraphe de la convention que le Canada a signée.
Dans un deuxième temps, ces modifications à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés donnera beaucoup trop de pouvoir discrétionnaire au . En effet, ces modifications permettront au ministre de procéder à des détentions arbitraires. Comme je le mentionnais antérieurement, le gouvernement pourra procéder à la détention de tout réfugié sous le simple prétexte qu'il est soupçonné, et non accusé, d'activités criminelles. La nuance entre ces deux mots est énorme. Le gouvernement peut donc détenir sans preuve valable n'importe quel réfugié qui apparaît suspicieux aux yeux du ministre de la Citoyenneté, de l’Immigration et du Multiculturalisme. Cela peut évidemment mener à d'énormes dérapages.
La détention arbitraire va également à l'encontre de la Charte canadienne des droits et libertés, comme la Cour suprême du Canada l'a d'ailleurs statué en annulant les détentions arbitraires obligatoires sans examen des certificats de sécurité. Encore une fois, cette modification à la loi contrevient directement aux nombreux traités internationaux signés par le Canada.
Le gouvernement affirme que ce projet de loi permettra de réduire le trafic d'êtres humains. C'est une cause noble, et personne n'est contre la vertu. Cependant, le Nouveau Parti démocratique s'oppose au projet de loi parce que ces modifications donnent en réalité une concentration de pouvoirs beaucoup trop grande entre les mains du . De plus, le projet de loi pénalise l'ensemble des réfugiés qui arrivent au Canada, mais il ne fait rien contre les passeurs.
Ce que nous désirons, nous, au NPD, c'est punir directement les criminels, soit les trafiquants, ceux que nous appelons communément les passeurs. Or le projet de loi , tel que libellé actuellement, punit plutôt les réfugiés légitimes et les personnes qui tentent de les aider. Le processus stipulé dans ce projet de loi est flou, arbitraire et franchement discriminatoire.
En terminant, le gouvernement actuel est en train de détruire la belle réputation du Canada sur la scène internationale, celle d'être, entre autres, une terre d'accueil pour les nouveaux arrivants. Cela doit cesser.
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Monsieur le Président, on étudie aujourd'hui un projet de loi qui modifie d'autres lois. À ce moment-ci, une des premières questions à se poser est la suivante: a-t-on réellement besoin de cette nouvelle loi et en quoi améliore-t-elle les choses par rapport à la loi actuelle? Il faut commencer par examiner le problème de cette façon.
À en croire son titre, le but du projet de loi est d'empêcher les passeurs d'abuser du système d'immigration. Toutefois, quand on regarde les articles du projet de loi et qu'on l'épluche, on se rend compte qu'on a beaucoup plus d'articles portant sur une nouvelle désignation — une nouvelle catégorie — qu'on appelle « étranger désigné », qui est assortie de conditions et de sanctions qui peuvent être très sévères à l'égard des personnes concernées, qu'il y a d'articles sur les passeurs. Ainsi, on peut se demander quel est l'objectif réel du projet de loi.
Je me pose une autre question quant à la façon dont le projet de loi est abordé. Il donne en effet une impression — c'est important les impressions qu'on donne auprès du public — de présomption de culpabilité pour les gens qui arrivent par bateau. C'est comme si, au départ, tous ces gens étaient présumés coupables ou présumés avoir fait des activités criminelles et autres. Honnêtement, je suis mal à l'aise avec cette perception des choses.
Une autre chose m'agace un peu, à savoir qu'on donne un pouvoir à un ministre, un pouvoir qu'on pourrait qualifié d'arbitraire, de décider s'il s'agit d'un étranger désigné ou non. Sur quelle base le fera-t-on? Quelle garantie a-t-on qu'il s'agit d'un processus intègre et que ce n'est pas juste une question d'humeur? Il faut quand même avoir quelque chose sur laquelle s'appuyer pour pouvoir prendre une décision de cet ordre. Si on examine les conséquences liées à cette désignation, c'est une décision très importante. Nous devons avoir l'assurance qu'un ministre va s'appuyer sur un argumentaire très raisonnable pour être en mesure d'appliquer cela. On ne voit pas ce genre de garanties dans le projet de loi. Dans le même ordre d'idée, le ministre n'a aucune imputabilité par rapport à ses décisions. Or, la raison d'être de cette Chambre est justement d'assurer l'imputabilité du gouvernement. Je ne vois pas dans ce projet de loi où le ministre peut être imputable d'une telle décision qui a des conséquences importantes pour des gens. Il faut le rappeler. On ne parle pas de matière morte, on parle d'êtres humains.
Je m'inquiète aussi des conséquences de la désignation. En fait, beaucoup d'autres vont parler de façon plus éloquente que moi des droits suspendus, de la détention potentielle, du fait que des enfants vont être détenus dans certains cas, des interdictions temporaires et de toutes sortes de choses. Ce qui me touche, c'est qu'on marque ces gens. C'est comme un tatouage indélébile sur eux. Pendant plusieurs années, leur vie sera conditionnée par ce genre de décisions. J'ai un peu de difficulté avec cela. Je considère qu'on a présentement entre les mains tout ce qu'il nous faut pour régler ce genre de cas.
Une autre chose me dérange beaucoup, soit la désignation rétroactive. Je ne comprends pas l'intérêt d'une désignation rétroactive. Où va-t-on avec cela? Pourquoi avoir une désignation rétroactive? Je n'ai entendu personne du côté du gouvernement expliciter la raison de cette désignation rétroactive. Veut-on seulement se reprendre pour un projet de loi qu'on a manqué plus tôt, il y a quelques années.
J'espère que non. Cela dit, c'est un petit quelque chose qui n'a pas lieu d'être.
Tous ces réfugiés sont-ils foncièrement malhonnêtes? Pensons-y un instant. Tous ces gens veulent-ils passer au travers des mailles du système, passer à côté et passer en avant des autres? Je n'en suis pas si sûr.
Ici au Canada, les citoyens ont du mal à connaître leurs propres lois, alors on imagine ce que des gens qui viennent de l'autre bout du monde peuvent connaître de nos lois sur l'immigration. Ils peuvent se faire passer des « p'tites vites ». Je suis d'accord qu'on fasse attention au trafic et qu'on s'attaque aux trafiquants, mais j'ai bien du mal à accepter qu'on s'attaque aux victimes du trafic. D'ailleurs, il est assez ironique de voir que, dans ce projet de loi, les victimes ne sont pas protégées.
D'autre part, relativement à ces gens-là, j'aimerais qu'il y ait quelque part une façon de donner le moyen aux autorités — c'est-à-dire à nos fonctionnaires, à nos policiers, à la garde-côtière — de faire respecter les lois. On a l'impression qu'on a de moins en moins de moyens de les faire respecter, et on impose de plus en plus de contraintes aux autorités qui doivent traiter un plus grand volume de dossiers.
D'après ce que je constate dans mon comté, en parlant avec les citoyens que je rencontre, les délais augmentent. Alors si on ajoute encore une fois d'autres procédures et que, d'un autre côté, on ne donne pas des ressources pour traiter ces dossiers, tout ce qu'on fera, c'est augmenter le nombre de gens en détention, pas nécessairement parce qu'ils le méritent, mais parce qu'on n'a pas les moyens de traiter ces dossiers. Or le gouvernement ne s'attaque pas à cette question-là.
Jusqu'à maintenant j'ai parlé de beaucoup de choses, mais pas beaucoup des passeurs. Pourquoi? C'est parce qu'il y a peu de choses dans ce projet de loi les concernant. Fondamentalement, il y a seulement deux choses: on agrandit un petit peu le cercle de la définition du passeur, c'est-à-dire ceux qui incitent les gens à utiliser un passeur ou un trafiquant, et on donne des pénalités supplémentaires pour des circonstances aggravantes. Or, avec ce projet de loi, combien de passeurs seront interceptés? Combien de criminels trafiquants seront arrêtés grâce à ce projet de loi? J'ai l'impression que cela s'approche de zéro parce qu'on ne s'attaque pas au vrai problème.
Je considère qu'on a monté en épingle un enjeu d'immigration autour de ressources qu'on n'a pas lorsqu'arrivent des gens de façon massive, pour en faire un enjeu de sécurité publique, alors que ce n'en est pas un. On doit éviter l'arbitraire ou l'apparence de décision arbitraire. Il est important pour la réputation de notre pays que notre ministre ne donne pas l'impression de prendre des décisions arbitraires. C'est important pour notre système parlementaire.
On a une loi sur l’immigration. Pourquoi ne pas donner au ministère les moyens de l'appliquer correctement, même lorsqu'il y a des surcharges ponctuelles?
En conclusion, on devrait carrément scinder ce projet de loi pour s'attaquer directement aux passeurs. Je crois que le gouvernement aurait alors l'appui de ce côté-ci de la Chambre.
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Monsieur le Président, je suis ravie, à la suite de plusieurs de mes collègues néo-démocrates qui en ont souligné les problèmes et les lacunes importantes, de prendre la parole au sujet de projet de loi . Nous nous rappelons tous, bien sûr, du projet de loi , qui a été présenté lors de la dernière législature.
Je tiens d'abord à exprimer mes inquiétudes en ce qui concerne l'attitude du gouvernements depuis plusieurs années. Il me semble que les réfugiés sont devenus des boucs émissaires. Ils font l'objet de débats politiques qui en font des cibles et qui, à bien des égards, ternissent leur image. C'est ce que le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui, qui reprend le projet de loi , cherche à faire.
J'ai suivi le débat aujourd'hui à la Chambre. Les conservateurs ont dit que les passeurs devraient être poursuivis avec tout la rigueur de la loi et que le projet de loi permettra de s'attaquer à eux. Toutefois, comme mes collègues l'ont souligné, le projet de loi ne porte pas sur cette question.
En fait, il y a quelques mois, le Parlement a adopté un projet de loi portant sur les réfugiés. Les dispositions qui s'appliquent actuellement prévoient une peine d'emprisonnement à vie pour les passeurs. On se demande alors sérieusement pourquoi la présente mesure législative a été présentée et à quoi elle sert.
Lorsque le projet de loi a été présenté pour la première fois, au cours de la législature précédente, de nombreux organismes, tels que le Conseil canadien pour les réfugiés, Amnistie Internationale Canada, l'Association canadienne des libertés civiles, l'Association du Barreau canadien et le Centre d'étude sur les réfugiés, ont examiné le projet de loi et en ont souligné avec discernement les problèmes sérieux.
Ces organismes ont étudié la question non pas d'un point de vue partisan, mais d'un point de vue neutre. Ils ont cherché à déterminer si le projet de loi risquait de nuire au traitement des demandes des réfugiés ou le faciliterait. Tous les députés, y compris certainement les députés ministériels, devraient savoir que les organismes qui s'intéressent de près à la question ont réagi très défavorablement au projet de loi.
Mon parti, le NPD, s'inquiète grandement. Nous craignons que le projet de loi ait pour effet de créer des classes de demandeurs d'asile. Les étrangers désignés et leurs enfants pourront faire l'objet d'une mesure de détention obligatoire. Je pense qu'il est très significatif que de nombreux députés aient exprimé leurs sentiments aujourd'hui sur ce problème en particulier. Quelles seraient les conséquences de l'incarcération et de la détention d'enfants ou du refus de la réunification de certaines familles? C'est un problème sérieux dans ce projet de loi.
Je me souviens du jour où un autre bateau est arrivé près de la côte de la Colombie-Britannique, il y a quelques années, en provenance de la province du Fujian, en Chine. Des dizaines de demandeurs d'asile furent détenus. Je leur avais rendu visite dans leur prison de Burnaby, en Colombie-Britannique. Je me souviens des incroyables difficultés qu'ils rencontraient. Ils n'avaient pas accès à des avocats, ils ne pouvaient pas faire des appels téléphoniques normaux, ils ne bénéficiaient d'aucun accommodement culturel, notamment pour ce qui est de la nourriture, et ils étaient séparés de leur famille. C'était il y a quelques années, et le projet de loi actuel n'était même pas en vigueur à l'époque. Je me souviens d'avoir livré au ministre une série de lettres provenant des femmes de la province du Fujian, qui l'imploraient de donner suite à leurs griefs et qui portaient à son attention la situation dans laquelle elles se trouvaient, alors qu'on les avait obligées à demeurer en prison pendant plusieurs mois.
Si le projet de loi est adopté, le système mis sur pied conférera un pouvoir énorme au ministre. Quelles que soient les autres dispositions du projet de loi, cette particularité devrait beaucoup nous inquiéter. Nous avons vu le gouvernement proposer déjà un grand nombre de projets de loi ayant pour effet de centraliser les pouvoirs entre les mains du ministre, qui est habilité à prendre des décisions discrétionnaires. Pourquoi voudrions-nous donc miner ainsi notre système et conférer au ministre le pouvoir extraordinaire de désigner des étrangers de manière à ce qu'ils soient détenus? Cette disposition rend à elle seule le projet de loi sérieusement problématique.
Le Canada a la réputation d'être un pays juste et raisonnable dans la façon dont il protège les réfugiés et leurs droits, leur offre des services d'établissement et respecte le droit international. Et pourtant, beaucoup de ceux d'entre nous qui, aujourd'hui, expriment leurs impressions et leurs préoccupations à propos du projet de loi font remarquer qu'il pourrait faire l'objet d'une contestation en vertu de la Charte et qu'il pourrait même contrevenir à certains traités internationaux. Je me demande donc pourquoi il a même été présenté.
Pourquoi cibler ainsi le passage de clandestins alors que nous avons déjà des dispositions législatives qui portent sur de telles activités? Nous avons déjà une nouvelle mesure législative sur les réfugiés dont les dispositions produisent un résultat plus équilibré. Pourquoi donc présenter ce projet de loi-ci?
Comme beaucoup d'autres, j'en suis venue à la conclusion que, pour le gouvernement conservateur, il s'agit plutôt de créer une impression. C'est tout comme la ligne dure qu'il a adoptée envers les criminels. Cela n'a rien à voir avec le désir de régler des questions concrètes et des situations complexes. Il s'agit plutôt de définir une approche simpliste qui accorde un plus grand pouvoir au ministre et qui prive les réfugiés des droits dont ils disposent au Canada.
Une autre disposition très problématique est celle qui priverait les étrangers désignés du droit d'appel. Ceux-ci ne pourraient plus faire de demande pour des motifs humanitaires. Il s'agit d'un des éléments centraux du système actuel. Ce sont des dispositions que les parlementaires utilisent. Nous sommes contactés par des électeurs qui souvent sont dans des situations très difficiles, qui viennent de l'étranger, qui suivent le processus, mais qui peuvent finir par présenter au ministre une demande pour des motifs humanitaires. Et voici que nous sommes saisis d'une mesure qui, tout à coup, les empêcherait de le faire.
C'est une décision lourde de conséquences que le gouvernement s'apprête à prendre. Je signale que, durant la précédente législature, les trois partis de l'opposition se sont farouchement opposés au projet de loi; d'ailleurs, le gouvernement ne l'a pas présenté parce qu'il savait qu'il serait rejeté par une majorité de députés. Nous avons maintenant un gouvernement conservateur majoritaire, mais nous continuerons néanmoins de soulever ces objections importantes et d'attirer l'attention du public sur le fait que, malgré l'alarmisme et la propagande politique du gouvernement, il s'agit là d'une très mauvaise mesure législative.
J'aimerais remercier les organisations qui ont pris le temps d'examiner de près le projet de loi afin de nous faire part de leur analyse et de nous faire comprendre à quel point il est mauvais.
Dans le contexte actuel de mondialisation, le gouvernement veut à tout prix que les capitaux circulent librement et il s'est notamment donné comme priorité de conclure des accords commerciaux qui ne comportent à toutes fins pratiques aucunes restrictions. La mondialisation suppose donc une certaine liberté de mouvement. Par conséquent, je trouve très paradoxal que, en ce qui concerne l'élément humain, la ressource fondamentale du monde, dotée de la capacité de produire et de vivre de façon productive, le gouvernement présente cette mesure législative draconienne qui vise à pénaliser des gens qui revendiquent peut-être tout à fait légitimement le statut de réfugié au Canada, pour fuir la persécution, les mauvais traitements et l'exploitation.
Il ne fait aucun doute que nous devons nous concentrer sur les problèmes liés au passage de clandestins, mais comme je l'ai souligné, la loi canadienne comporte déjà des dispositions très sévères concernant ce genre d'activités. Au lieu de s'attaquer à ces problèmes, ce projet de loi cible les demandeurs du statut de réfugié. Il vise les réfugiés qui arrivent par voie maritime. Il s'agit d'une mauvaise mesure législative.
Je suis très fière du fait que les néo-démocrates s'insurgent contre ce projet de loi et qu'ils en dénoncent les éléments inacceptables. J'ose espérer que, s'il est renvoyé au comité, nous aurons l'occasion de l'examiner en détail, d'y apporter des changements de fond et de reconnaître qu'il est inacceptable dans sa forme actuelle.
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Monsieur le Président, je suis ravie d'avoir l'occasion de participer à ce débat extrêmement important. Pour nous tous qui siégeons à la Chambre depuis un certain temps, les questions liées aux réfugiés et à l'immigration continuent de représenter une partie importante de nos travaux au Parlement.
Pour la gouverne des auditeurs, je vais faire un petit historique.
Le 16 juin 2011, le a déposé le projet de loi . Le titre abrégé, si on peut l'appeler ainsi, est la « Loi visant à empêcher les passeurs d'utiliser abusivement le système d'immigration canadien », ce qui est tout à fait ridicule.
En tant qu'ancienne ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, je suis au courant des pressions juridiques et politiques auxquelles sont confrontés les ministres de la Citoyenneté et de l'Immigration. Je sais également à quel point il est difficile d'établir un juste équilibre entre les droits des particuliers et leur besoin d'avoir un système d'immigration sécuritaire et légal. Toutefois, en ma qualité de représentante de l'une des régions les plus multiculturelles au Canada, je crains que le projet de loi ne ratisse trop large. Il permettrait d'arrêter ceux qui souhaitent abuser du système, mais il ferait aussi payer le gros prix à bien des gens honnêtes et respectables qui cherchent légitimement à commencer une nouvelle vie.
Je tiens à bien me faire comprendre et à préciser d'emblée que je suis — et ai toujours été — on ne peut plus favorable aux mesures qui contribuent à assurer la sécurité du Canada et des Canadiens. Cela ne veut pas dire pour autant que je sois disposée à appuyer des mesures qui donneraient un faux sentiment de sécurité aux Canadiens sans rien améliorer de concret. Et c'est justement le cas du projet de loi sur la criminalité et de toutes ces autres mesures destinées à rassurer les gens, alors qu'en réalité, elles sont tout à fait inefficaces et ne font rien d'autre que nous coûter toujours plus cher. Bon nombre des dispositions du projet de loi entrent dans cette catégorie, car en plus d'êtres irréfléchies, elles ne font rien pour la sécurité de ceux qui cherchent refuge sur nos côtes.
Le projet de loi permettrait au ministre, ou à un agent, ce qui est non négligeable, de refuser d'examiner la demande de résidence permanente d'un étranger. Il modifierait la définition juridique de l'expression « organisation criminelle ». Il prévoit en outre que la Section de l'immigration imposerait les conditions réglementaires lors de la remise en liberté de certains étrangers désignés. Tout cela constituent sans aucun doute une forme de discrimination. Enfin, il prolongerait de six mois à cinq ans — rien de moins — le délai de prescription à l'égard des poursuites par voie de procédure sommaire.
Par exemple, le projet de loi permettrait au gouvernement d'étiqueter les gens qui débarquent sur nos côtes en leur attribuant une désignation bien précise. Pour ceux à qui nos complexes lois en matière d'immigration sont peu familières, cette mesure peut sembler toute simple, mais voyons de plus près ce que ça donne quand on l'applique à une situation concrète.
En 2010, le Sun Sea s'est approché de la côte Ouest avec à son bord 500 hommes, femmes et enfants. Il a été déterminé que les responsables étaient impliqués dans le passage criminel de clandestins et même dans des activités terroristes. Il va sans dire que tous ceux et celles qui ont trempé dans de telles manoeuvres méritent d'être châtiés sévèrement. Par contre, il a aussi été déterminé que bon nombre des passagers — notamment les enfants — n'étaient rien d'autre que les innocentes victimes des circonstances.
On peut facilement s'imaginer ce qui arriverait s'il fallait que le gouvernement désigne la totalité des passagers comme des criminels ou des terroristes. Je crois bien que tous les Canadiens — et tous les députés — jetteraient les hauts cris s'il fallait que nous nous mettions à envoyer des hommes, des femmes et des enfants innocents en prison simplement à cause de la manière dont ils sont arrivés au Canada. En effet, s'ils étaient arrivés en avion ou en voiture, la question ne se serait même pas posée; mais parce qu'ils sont arrivés par bateau, là elle se pose. La plupart de ces gens n'ont rien à se reprocher. C'est donc aussi imprudent que mal avisé de les soumettre à une même mesure universelle.
Le projet de loi imposerait également une peine minimale aux passeurs. La plupart des Canadiens, y compris moi-même, voulons que les passeurs soient punis sévèrement. Cependant, il existe déjà des lois pour cela et si elles doivent être renforcées, qu'elles le soient, mais nous ne devons pas punir des innocents qui ont tenté de fuir des mauvais traitements dont beaucoup d'entre nous n'ont aucune idée de la gravité.
Le projet de loi a été rédigé de manière à susciter un sentiment de sécurité plutôt qu'à améliorer l'efficacité du système pour qu'il offre une véritable sécurité aux Canadiens et soit équitable envers ceux qui essaient de venir au Canada pour de bonnes raisons.
Nous pouvons faire beaucoup mieux que ce qui est proposé dans le projet de loi . J'espère que tous les parlementaires auront véritablement la possibilité de travailler au projet de loi pour qu'il fasse ce qu'il vise à accomplir, soit assurer la sécurité du Canada contre les terroristes et éviter d'ouvrir les portes toutes grandes aux individus qui veulent abuser de notre système, tout en garantissant que nous punissons ceux qui méritent d'être punis et pas des innocents qui essaient de venir s'installer au Canada.
La plupart d'entre nous comprennent que, des points de vue du terrorisme, de la sécurité et des cadres juridiques connexes, notre monde a changé radicalement et pour toujours le 11 septembre 2001. Le projet de loi est une réaction aux attentats du 11 septembre, mais il n'est pas adapté aux réalités qui découlent des événements de cette journée-là.
Le projet de loi donne le ton aux relations entre le gouvernement et tous les néo-Canadiens. Le gouvernement a fait tout un plat de ses relations nouvelles avec les minorités du Canada, mais ces actions en disent plus long que ses paroles. Les modifications apportées aux systèmes d'immigration et de détermination du statut de réfugié ne devraient pas avoir pour objectif de diviser les gens. Je ne crois pas que ce soit l’intention, mais il est clair que c’est l’impression générale qui en ressort. Peu orthodoxe ne veut pas dire mauvais. Ce n’est pas parce que des gens arrivent d’une manière inhabituelle qu’ils n’ont rien à offrir au Canada ou qu’ils constituent une menace.
L’ancienne Gouverneure générale du Canada Adrienne Clarkson est arrivée au Canada comme réfugiée, à l'instar de bien d’autres de nos concitoyens. Elle et sa famille avaient fui Hong Kong pour le Canada par des moyens non conventionnels. Ce n’était peut-être pas un bateau, mais c’était un moyen non conventionnel. La famille de Mme Clarkson s’est réfugiée au Canada au cours de la guerre dans le Pacifique, en 1942. Ce n’est que grâce aux relations de son père dans le gouvernement que la famille Poy a pu trouver asile au Canada dans le cadre du rapatriement du personnel du gouvernement du Canada. Elle a eu cette possibilité. Tout le monde n’a pas cette chance.
La Loi de 1923 concernant l’immigration chinoise empêchait la famille Clarkson, qui s’appelait Poy à l’époque, d’entrer directement au pays, jusqu’à ce que le ministère des Affaires extérieures intervienne et lève les obstacles qui l’empêchaient de venir ici. Il semblerait qu’Adrienne Clarkson, une réfugiée qui est venue au Canada en empruntant des voies non officielles puis qui a travaillé dur pour élever sa famille et contribuer à notre société, devenant représentante de la reine, valait qu’on lui donne le bénéfice du doute.
Nous ne pouvons qu’imaginer quelle perte cela aurait été si Adrienne Clarkson avait été refoulée parce qu’elle n’avait pas fait de demande en bonne et due forme. Elle voulait à tout prix quitter son pays.
Nous pouvons faire mieux que cette version du projet de loi Bill que nous débattons aujourd’hui. Comme je l’ai dit, j’espère que tous les parlementaires pourront apporter une véritable contribution à ce dossier, qui est d’une grande importance parce qu’il définit le Canada aux yeux du monde. Le Canada, ce n’est pas un pays où l’on jette les passagers d’un bateau en prison en les traitant comme s'ils étaient des terroristes, sachant très bien que ce n’est pas le cas.
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Monsieur le Président, le projet de loi m'interpelle de façon assez particulière et doit, à mon avis, être rejeté, et ce pour de multiples raisons qui sont principalement d'ordre humanitaire et de justice sociale.
Si je peux me tenir devant vous aujourd'hui, c'est entre autres parce que mes parents ont obtenu le statut de réfugié en 1980, grâce à une ouverture du gouvernement du Canada et à sa compréhension profonde de la situation précaire dans laquelle mes ils se trouvaient à l'époque. Cette intervention plus que positive aura permis à des milliers de Vietnamiens de se sortir des conditions misérables dans lesquelles ils survivaient et de réapprendre à vivre dignement au Canada.
Je n'ose pas imaginer les séquelles supplémentaires qu'auraient subies mes parents si le projet de loi avait été en vigueur à leur arrivée dans notre pays. À travers leur récit, j'expliquerai donc ma position et je démontrerai pourquoi ce projet de loi m'apparaît clairement injuste et surtout mal ciblé.
En 1979, après la guerre du Vietnam, mes parents ont décidé de fuir leur pays à cause des éprouvantes conditions de vie imposées par le nouveau régime politique et dans l'espoir de retrouver ailleurs une meilleure qualité de vie. Ils n'en pouvaient plus de subir les contraintes, les violences et les injustices de l'après-guerre. Ils ont donc saisi la première occasion de se sauver en pleine nuit, en cachette, avec mes deux frères, alors âgés d'un an et de trois ans. Ils se sont dirigés vers un port et ont payé les passeurs avec leurs dernières richesses, c'est-à-dire celles qu'ils avaient pu porter sur eux, soit leurs vêtements et leurs bijoux. Ils se sont embarqués sur un bateau, dans la direction indiquée par une boussole, c'est-à-dire n'importe où, sans savoir si les passeurs les mèneraient à bon port, s'ils les emmèneraient quelque part de dangereux ou s'ils les abandonneraient simplement sur le bord du chemin. Ils risquaient toute leur vie et celle de leurs enfants.
Pourquoi ont-ils choisi le bateau comme moyen de transport? C'est simple: il n'y avait aucun autre moyen de transport à leur disposition. C'est 400 personnes qui se trouvaient aussi à bord de ce bateau.
Ce projet de loi crée deux catégories de réfugiés, dont ceux qui sont désignés en raison de leur mode d'arrivée, c'est-à-dire par bateau. Ces réfugiés risquent la détention plus que ceux qui arrivent par avion. Voilà une disposition qui est contraire à la Charte canadiennes des droits et libertés, qui garantit l'égalité devant la loi, et qui viole la Convention relative au statut des réfugiés, laquelle interdit aux États d'imposer des sanctions aux réfugiés pour leur entrée irrégulière. Quelle est cette entrée irrégulière qui n'est pas définie? C'est encore nébuleux.
De plus, peu de réfugiés pensent à apporter des pièces d'identité. Leur seule préoccupation est de sauver leur peau, de disparaître le plus vite possible sans créer de remous. Or, ces sans-papiers sont automatiquement soupçonnés de ne pas être de vrais réfugiés. Ils pourront dès lors être classés par le ministre comme des « étrangers désignés » et être détenus. On renverse ici le fardeau de la preuve. Le demandeur de statut de réfugié qui arrive ici ne jouit plus de sa liberté en attendant qu'on traite sa demande. Il est détenu et considéré comme un « étranger désigné » jusqu'à preuve du contraire. Il s'agit de détention arbitraire, ce qui est contraire à la Charte et au droit international.
Le parcours des réfugiés est long et pénible. Mes parents peuvent en témoigner. Leur but ultime est de survivre aux multiples formes de dangers et de menaces auxquels ils font face: le manque d'hygiène, le manque de nourriture, le manque d'eau, les nombreuses attaques des pirates qui peuvent soit violer les femmes, soit voler leurs richesses, soit leur infliger des violences gratuites juste pour leur faire peur. C'est exactement pour cela que la plupart des pays du monde, dont le Canada, ont signé la Convention relative au statut des réfugiés en 1951.
Le préambule de la convention affirme que les êtres humains, sans discrimination, doivent jouir des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il semble que les députés du gouvernement conservateur aient oublié ce principe lorsqu'ils ont rédigé ce projet de loi odieux.
À l'époque, mes parents pouvaient choisir leur pays d'accueil, puisqu'on leur a reconnu le statut de réfugiés pour des raisons humanitaires. Ils ont évidemment été interrogés, photographiés puis assermentés. Puisqu'ils n'avaient aucun papier, le Canada leur en a fourni.
Avec le projet de loi , mes parents et mes frères auraient probablement porté le statut de « demandeur désigné » et auraient tous été obligatoirement détenus à leur arrivée, et ce, pour une période d'un an, peut-être plus. Puisque mes parents étaient des sans-papiers, leur identification était très difficile à établir. C'est un emprisonnement complètement arbitraire et discriminatoire, n'est-ce pas?
Avant d'arriver au Canada, ils avaient déjà des séquelles de leur pénible fuite: cauchemars à répétition, peur irrationnelle des voleurs, aucune confiance ou une confiance très difficile à développer envers les gens, suspicion constante envers tous.
Ils voyaient du danger partout, en permanence. Ils ont aussi beaucoup souffert du déracinement de leur pays et de leur famille. D'ailleurs, ils ne parlent jamais de cette expérience tellement ce fut atroce et souffrant, et tellement les souvenirs sont insoutenables. Toutefois, pour les besoins de la cause, mes parents ont accepté, hier, de me rappeler leur histoire.
Il est difficile donc de vivre dans un camp de réfugiés et de traverser les épreuves sur le bateau; il est difficile aussi de s'adapter aux modes de vie du nouveau pays, au choc culturel, à l'intégration sociale, de s'habituer à la température, à l'isolement social, surtout causé par la barrière de la langue et parce qu'ils étaient des étrangers, potentiellement dangereux. À cette époque, mes parents parlaient à peine le français, un français rudimentaire.
S'il avait fallu en plus qu'on les emprisonne sous prétexte qu'ils représentaient une menace potentielle, cela aurait été le comble de l'absurde et de l'aberration, dans leur cas comme dans le cas de milliers d'autres Vietnamiens.
Dans ce cas-ci, pourquoi ne pas s'attaquer de façon plus efficace aux trafiquants et enquêter davantage sur leur cas, ici et à l'étranger, au lieu de s'attaquer aux réfugiés?
Heureusement, par contre, à l'époque, le Canada a ouvert la porte à mes parents et à tous ces gens en détresse qui fuyaient leur pays. Mes parents ont pu s'intégrer petit à petit à la société canadienne. Ils ont appris le français et ont travaillé très fort. À leur arrivée, il leur a fallu cumuler le travail harassant, mal payé, les frustrations et la discrimination. Cependant, ils ont réussi à s'intégrer. Ils ont fait des études, se sont occupés de nous et ils sont tous deux devenus infirmiers. Aujourd'hui, mes parents soignent donc des personnes malades, et ils le font avec la même compassion qu'ont démontrée les Canadiens quand ils sont arrivés ici et qu'ils avaient besoin d'un refuge.
C'est une toute autre histoire qu'auraient pu vivre mes parents si le projet de loi que proposent les conservateurs aujourd'hui avait été en vigueur. Ils auraient pu être détenus avec leurs deux jeunes enfants pendant un an ou plus. On leur aurait enlevé le droit à une intégration sociale et à vivre dignement. C'est toute la société canadienne qui pâtirait de cette situation puisque, emprisonner des demandeurs de statut de réfugié, c'est priver le Canada de plusieurs personnes courageuses et intelligentes qui veulent contribuer au développement du pays.
De plus, si les autorités canadiennes s'étaient trompées et avaient refusé le statut de réfugiés à mes parents, ils auraient pu faire appel. Or ce projet de loi enlève ce dernier recours aux réfugiés puisque les décisions relatives aux demandes présentées par des personnes désignées ne peuvent pas faire l'objet d'un appel devant la Section d'appel des réfugiés. Tout cela est contraire aux dispositions de la Convention relative au statut des réfugiés.
Les conservateurs affirment que ce projet de loi permettra de réduire l'ampleur du trafic des êtres humains, mais, en réalité, dans son état actuel, il concentre trop de pouvoirs dans les mains du et pénalise injustement les réfugiés.
Je suis d'accord pour dire que nous devons punir directement les criminels, les trafiquants et les passeurs. Par contre, le projet de loi, tel que présenté, punit plutôt les réfugiés légitimes et les personnes qui tentent de les aider.
Si le Canada n'avait pas accepté mes parents, nous ne serions pas qui nous sommes aujourd'hui. Ce désir de servir notre pays, mes frères, mes soeurs et moi, nous l'avons hérité de nos parents et des Canadiens qui les ont accueillis. Pour que d'autres belles histoires comme celle-là puissent se réaliser, les droits de ceux qui arrivent après nous doivent être reconnus.
Je demande aux députés ici présents de se mettre à la place de réfugiés. Qu'ils imaginent les conditions précaires que vivent ces gens dans les pays en guerre: la peur, la faim, la détresse et les tortures. Ne tenteraient-ils pas eux-mêmes de fuir, au risque de leur propre vie, en emportant avec eux le strict minimum? Après avoir fui cette violence et cette persécution, ils seraient emprisonnés à leur arrivée au Canada. N'est-ce pas un non-sens? La détention sans examen indépendant imposée aux demandeurs de statut de réfugié est non seulement discriminatoire, mais elle est scandaleuse.
Ce projet de loi prive également certains réfugiés de la possibilité de demander une résidence permanente. Durant cinq ans, les demandeurs de statut ne pourront parrainer ni leur femme ni leurs enfants. C'est une violation claire — une autre — des droits de la vie familiale.
Également, comme nous l'avons dit tout à l'heure, les enfants sont emprisonnés, avec toutes les conséquences négatives que cela peut entraîner sur le développement d'un enfant.
Je terminerai donc en demandant à ce gouvernement et à la Chambre que ce projet de loi soit retiré, et qu'il soit retravaillé, au besoin, pour qu'il s'attaque réellement aux trafiquants et aux passeurs, et non aux droits et libertés des réfugiés.
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Monsieur le Président, en premier lieu, il semble y avoir beaucoup de confusion chez les députés du gouvernement conservateur, notamment en ce qui a trait à la distinction entre l'immigration et les réfugiés. Ce matin, on a entendu le député de faire référence à ses beaux-parents italiens. Loin de moi l'idée de parler contre les beaux-parents — j'en ai d'excellents, dont l'une vient des Philippines et a également immigré ici —, mais je suis persuadé que, dans leur pays, les beaux-parents du député de Burlington n'ont pas eu à subir de persécution, de violations de leurs droits humains, ou de menaces de torture ou de mort. C'est une grande distinction.
On parle ici de réfugiés qui quittent leur pays en affrontant de grands dangers pour fuir ces menaces à leur personne et à leur intégrité. J'ai aussi entendu, du côté gouvernemental, qu'on fait face à une invasion de réfugiés à laquelle il faut mettre fin immédiatement. On fait référence à un cas particulier de 2010, où des réfugiés sri lankais, qui avaient effectivement fait affaire avec des trafiquants ou des passeurs, arrivaient en bateau et demandaient l'asile. Mais il faut réaliser que ce bateau contenait environ 500 demandeurs d'asile. Ces demandes, si elles sont traitées par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, représentent 2 p. 100 de l'ensemble des cas qu'elle traite.
En réponse à un autre député conservateur, qui avance que nous ne voulons absolument aucune étude de leur part, je dirai que nous voulons simplement que tous les demandeurs d'asile, quels qu'ils soient, aient accès au même système, ce qui ne serait pas le cas en vertu projet de loi s'il était adopté.
Le projet de loi démontre aussi tout le mépris du gouvernement à l'endroit des conventions et des traités internationaux dont le Canada est signataire. Par exemple, la Convention relative au statut des réfugiés signée en 1951, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 et la Convention internationale des droits de l'enfant de 1989, sans compter — on va y revenir — la Charte canadienne des droits et libertés.
Le projet de loi comporte quatre problèmes qui font en sorte qu'il devrait être défait ou à tout le moins fortement révisé. Le premier a été mentionné à plusieurs reprises. Il sépare les réfugiés en deux classes distinctes: les réfugiés dont la demande est traitée de façon régulière et les demandeurs d'asile qui pourraient être désignés ou appelés étrangers distincts ou désignés. Si une personne arrive en avion ou par bateau, elle sera un demandeur d'asile qui pourra demander le processus régulier. Si un groupe vient par bateau, ce qui est le cas de ce qui est précisé dans le projet de loi, ces gens deviennent des étrangers désignés.
Il y a deux processus distincts pour deux classes distinctes désignées de façon tout à fait arbitraire par le ministre de l'Immigration. Cette disposition particulière contrevient à l'article 31 de la Convention internationale sur le statut des réfugiés, qui dit notamment que les États contractants n'appliqueront pas de sanctions pénales du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers au Canada. Or c'est exactement ce qu'on veut faire. On veut pouvoir les détenir pendant un an. Cela contrevient à la Convention internationale sur le statut des réfugiés. Cela contrevient aussi certainement à l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui traite des droits de chaque individu, Canadien ou réfugié, à l'égalité devant la loi. Or nous aurons deux classes distinctes qui seront soumises à deux processus distincts.
Le deuxième problème est la détention obligatoire de 12 mois pour les étrangers désignés. Cela contrevient entre autres à la Charte canadienne des droits et libertés, selon laquelle on doit accorder à chaque personne l'assistance juridique dont elle a besoin et qui exige l'habeas corpus. Par le fait même, ça contrevient aussi à l'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui demande la même chose.
Le troisième problème est l'impossibilité pour les demandeurs d'asile de demander la résidence permanente pendant au moins cinq ans. Cela contrevient en particulier à l'article 9 de la Convention internationale sur les droits de l'enfant, puisqu'on ne prend pas en considération les intérêts supérieurs de l'enfant pour cette décision. On semble davantage prendre en considération les intérêts supérieurs et particulièrement politiques du ministre de l'Immigration. C'est également problématique pour une question tout à fait d'actualité: la réunification des familles. Après les beaux mots des conservateurs à ce sujet, lorsque vient le temps d'écrire sur papier des éléments qui permettraient de faciliter la réunification, au bout du compte, ils placent des obstacles pour l'empêcher.
C'est le cas dans le projet de loi .
Le quatrième problème particulier, et je l'ai mentionné à plusieurs reprises ce matin, est l'interdiction de faire appel devant la Section d'appel des réfugiés. Si quelqu'un arrive en avion, son processus est étudié par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada. Cette personne a le droit de faire appel d'une décision qu'elle jugerait inéquitable. Si une personne fait partie d'un groupe qui arrive par bateau et est appelée « étranger désigné », cette possibilité n'est plus permise. Cela contrevient clairement à l'article 16 de la Convention internationale relative au statut des réfugiés. L'article 16 spécifie particulièrement que tout réfugié aura, sur le territoire des États contractants, dont le Canada, libre et facile accès devant les tribunaux. De plus, il est spécifié que dans l'État contractant où il a sa résidence habituelle, tout réfugié jouira du même traitement qu'un ressortissant en ce qui concerne l'accès aux tribunaux, y compris l'assistance judiciaire et l'exemption de la caution judicatum solvi.
Il est clair que ce projet de loi crée deux classes de demandeurs d'asile, ce qui est tout à fait contraire au principe d'équité qui devrait guider les législateurs de cette Chambre.
J'aimerais soulever un dernier point quant à la question portant sur l'appel. Hier, on a entendu le faire référence à l'Australie comme étant le cas à suivre.
Le ministre de l'Immigration a omis de mentionner qu'en novembre 2010, la Cour suprême australienne a rendu un jugement par rapport à une plainte d'un réfugié sri lankais qui jugeait inconstitutionnel, en vertu de la constitution australienne, le fait de ne pas avoir accès à ces tribunaux d'appel. De par le fait même, la Cour suprême de l'Australie a invalidé ces dispositions. La même chose se produira au Canada, pour les mêmes raisons.
Selon moi, il est clair que le gouvernement n'a aucun respect envers les obligations internationales, dont le Canada est signataire et qu'il a librement contractées. Il est clair que le gouvernement tente de politiser la question des réfugiés pour ses propres fins en s'attaquant par pur populisme principalement aux victimes de persécution qui désirent demander l'asile au Canada. En refusant un traitement égal à tous les demandeurs d'asile, il est clair que le gouvernement n'a aucun respect pour la Charte canadienne des droits et libertés.
Pour toutes ces raisons, il m'est impossible d'appuyer le projet de loi , un projet de loi qui me semble inéquitable, qui vise à punir des gens qui sont déjà des victimes et qui, en définitive, n'aura que très peu de conséquences pour les responsables du trafic humain.
Rappelons-le: les trafiquants humains, ou les passeurs, font déjà face, en vertu de la loi canadienne, au maximum de la peine à laquelle ils peuvent être soumis, soit la prison à perpétuité. Ce projet de loi amène quelques éléments supplémentaires qui n'auront absolument aucun effet dissuasif.
L'intention de ce projet de loi est claire. Si on consulte le projet de loi, on constate que dans presque la moitié de celui-ci, on tente de discriminer davantage et de créer des classes distinctes de demandeurs d'asile. Pour toute ces raisons, le projet de loi est mal nommé. Il ne s'agit pas d'un projet de loi qui s'occupe du trafic humain. Ce n'est pas un projet de loi qui s'attaque au principal problème, soit les passeurs qui abusent de la situation et qui prenne avantage du désespoir des gens qui font face à la persécution, à la violation des droits de la personne ou même qui sont menacés de torture ou de mort. Le projet de loi désire simplement pouvoir discriminer entre différents groupes de demandeurs d'asile et rendre inéquitable le traitement canadien dans une situation qui est extrêmement importante. Cela reflète sur nous au plan international.