Que, de l’avis de la Chambre, le gouvernement du Canada, en consultation avec les provinces et territoires, devrait prendre des mesures immédiates menant à l’abolition du Sénat du Canada, qui est non élu et non sujet à la reddition de comptes.
— Monsieur le Président, il est temps de rouler le tapis rouge. Au nom de mes concitoyens de , j'ai l'honneur de prendre la parole au sujet de la motion, que revoici:
Que, de l’avis de la Chambre, le gouvernement du Canada, en consultation avec les provinces et territoires, devrait prendre des mesures immédiates menant à l’abolition du Sénat du Canada, qui est non élu et non sujet à la reddition de comptes.
J'aimerais ajouter qu'en ce qui concerne cette motion, l'opposition officielle est toute disposée à coopérer avec le gouvernement dans le cadre de telles consultations avec les provinces et les territoires. Nous avons beaucoup d'expérience en matière de coopération. Notre chef, le député d', a donné l'exemple en amorçant des discussions avec les provinces conformément au principe du fédéralisme coopératif. C'est la seule avenue possible, si l'on veut abolir le Sénat.
Depuis sa création, le NPD appuie fermement l'abolition du Sénat. D'ailleurs, la Fédération du commonwealth coopératif, l'ancêtre du NPD, en avait aussi réclamé l'abolition. Le NPD croit aussi depuis longtemps qu'il faudrait consulter les Canadiens dans le cadre du processus d'abolition. Cet aspect demeure important, mais nous devons commencer ici, à la Chambre des communes. Il faut signaler sans équivoque que le temps est venu d'agir en ce sens. Nous sommes à la croisée des chemins. La population a pris conscience que le Sénat est une institution archaïque et inutile, mais c'est la Chambre des communes qui doit envoyer le signal et commencer à travailler avec les provinces et les territoires, une chose à laquelle le semble plutôt allergique.
Avant de poursuivre, je dois dire que je partagerai mon temps de parole avec la députée de .
Il importe de préciser que le gouvernement a soumis un renvoi à la Cour suprême, notamment sur la question de l'abolition du Sénat. Dissipons cependant toute confusion: la Cour suprême ne décidera pas s'il faut abolir ou non le Sénat. Il s'agit là d'une décision politique, une décision en vue de laquelle nous posons aujourd'hui les premiers jalons. Cependant, elle indiquera quelle formule employer afin de respecter la Constitution. C'est en effet un point controversé. Il est quasi assuré qu'il faudra au minimum respecter la règle du 7-50, c'est-à-dire compter sur l'appui de sept provinces représentant pas moins de 50 % de la population. Il faudra aussi prendre en considération la Loi concernant les modifications constitutionnelles, qui prévoit que certaines provinces, dont l'Ontario et le Québec, doivent approuver le changement. Par ailleurs, il se pourrait fort bien que le consentement unanime des provinces et du Parlement fédéral soit nécessaire. Attendons de voir comment tranchera la Cour suprême. Nous sommes très curieux de connaître son avis.
Il faut toutefois retenir une chose: quelle que soit la formule qui s'appliquera — le consentement unanime ou la règle du 7-50 —, le Sénat n'aura pas à consentir à sa propre abolition. Dans les deux cas, selon la Loi constitutionnelle de 1982, il pourra exprimer son opposition à l'abolition, mais pas y faire obstacle contrairement à la méthode employée par le dans son projet de loi , par lequel il entend modifier la Constitution en se contentant de soumettre un plan mal ficelé au Parlement, alors qu'il sait qu'il devra aussi obtenir l'assentiment du Sénat. Selon cette formule, celle d'une modification exigeant uniquement l'approbation du Parlement du Canada — ce qui, je le répète, n'est pas concevable, comme le sait très bien le premier ministre puisqu'il s'est enfin résolu à demander à la Cour suprême d'éclaircir les choses —, il faut l'accord du Sénat.
C'est une bonne chose que ce soit la Cour suprême qui décide de la formule de modification qui s'appliquera. Lorsque viendra le temps de collaborer avec les provinces afin de gagner l'appui du nombre voulu d'assemblées législatives, nos amis du Sénat ne pourront pas contrecarrer notre démarche.
Comme la Ford Edsel, le Sénat était pratiquement déjà désuet au moment même de sa création. Or, étrangement, il existe toujours, mais ses phares sont brisés, sa carrosserie est complètement rouillée, ses roues sont chancelantes et son moteur se grippe. Son intérieur a beau être encore superbe, il est temps de l'envoyer à la ferraille.
Depuis longtemps, le Sénat n'est plus en phase avec ce pour quoi il a été créé. Il était notamment censé représenter les quatre régions du Canada ainsi que les provinces qui les constituent.
Dès les années 1930 et, plus tard, dans les années 1950 et 1960, certains observateurs ont signalé que le Sénat n'avait jamais vraiment rempli cette fonction. Il n'a pas été conçu pour ça et ne fonctionne pas de cette façon. En fait, très tôt, c'est le Conseil privé, puis, plus tard, la Cour suprême du Canada, qui a assuré la protection du fédéralisme dans notre cadre constitutionnel. Nous n'avons pas besoin du Sénat pour ça.
Il n'y a qu'un petit groupe de 12 ou 15, voire 20 sénateurs, qui contribuent réellement au second examen objectif, l'autre fonction principale du Sénat. Ils font du bon travail et sont secondés par un excellent personnel. Ils sont consciencieux. Je parie qu'ils déplorent la présence au Sénat de nombre de leurs collègues qui ternissent la réputation de cette institution.
Il y a de bons sénateurs. Nous comptons bien collaborer avec eux, en supposant que le Sénat ne sera pas aboli d'ici à ce que notre parti forme le gouvernement, en 2015. Il y a de bons sénateurs avec qui nous aimerions collaborer, et avec qui, je crois, nous collaborerons. Ils agissent de manière réfléchie et non partisane, mais, surtout, ils se rendent compte, indépendamment de leur allégeance politique — très conservateurs, très libéraux, indépendants —, que le Sénat est un organe qui ne devrait pas pouvoir faire obstacle aux projets de loi adoptés à la Chambre des communes. Ce sont ces sénateurs avec qui nous travailleront à l'abolition et ce, peu importe quand nous serons appelés à gouverner avec le Sénat.
Pendant ce temps, l'année dernière, tandis que les je ne sais trop combien de sénateurs — une centaine, je dirais, compte tenu des quelques sièges encore vacants — se prélassaient dans des conditions qui sont franchement une sinécure, siégeant en moyenne 56 jours par année, nous à la Chambre des communes, nous travaillions pour la population canadienne.
Il est important de souligner toute la controverse à propos de la résidence et tout le reste, dont mes collègues parleront plus en détail. Les sénateurs n'ont pas de comptes à rendre à une circonscription. Or, ils disposent d'un budget et dépensent à vrai dire bien plus que nous, compte tenu de tous les frais de déplacements qu'ils encourent. Ils n'ont pas de comptes à rendre à une circonscription. Personne ne s'attend à ce qu'il en soit ainsi et ils n'en font rien. Pourtant, un grand nombre d'entre eux sillonnent le pays, accumulant les kilomètres au compteur, sans motif ayant une quelconque légitimité et — je veux éviter de dire « mis à part le fait que » — ce sont d'excellents collecteurs de fonds. On sait qu'un grand nombre des sénateurs ont été des collecteurs de fonds travaillant pour un parti. Ils doivent leur présence au Sénat à un retour d'ascenseur de leur parti, qu'ils continuent de servir.
Un des aspects les plus importants de ce que j'appelle la corruption structurelle du Sénat — je ne parle pas de l'éthique personnelle des sénateurs mais de la corruption structurelle de l'entité — est l'utilisation passée et actuelle, par deux partis en particulier, de sénateurs rémunérés par les fonds publics à titre de véritable phalange déployée pour collecter des fonds pour les partis. L'un des partis se porte beaucoup mieux que l'autre ces temps-ci, je l'admets. Le parti au pouvoir utilise ses sénateurs avec une adresse extrême. Je serais très intéressé de savoir ce qu'une vérification du Sénat par le vérificateur général, par exemple, révélerait au sujet de l'utilisation des fonds de déplacement pour activités parlementaires à des fins de collecte de fonds. Disons simplement que le Sénat est très bon pour dissimuler les motifs des déplacements. À l'heure actuelle, nous ignorons les raisons exactes pour lesquelles certains sénateurs accumulent des frais de déplacement incroyables.
J'ai indiqué au début de mon intervention que le Sénat est, en toute franchise, une Edsel. C'est une Edsel à quelques égards. Dès le départ, les commentateurs réfléchis savaient que ce serait une entité hyper partisane qui ne remplirait pas les fonctions originellement envisagées pour elle.
J'aimerais citer, à partir de la page 45 d'un ouvrage merveilleusement bien intitulé, The Unreformed Senate of Canada, une objection formulée en 1866-1867 par David Reesor, alors membre de l'opposition:
[N]ous savons ce qu'est la tendance en Angleterre, et ce qu'elle était en ce pays lorsque le gouvernement avait le pouvoir de nommer le Conseil législatif; cela aura pour effet de trouver une place dans cette Chambre aux hommes qui se seront distingués par leur contribution à l'élection de certains hommes ou partis, et non pour récompenser le véritable mérite ou les capacités législatives.
Rien n'a changé. Les paroles de sir John A. Macdonald demeurent elles aussi tout aussi valables:
Il doit y avoir une importante qualification de propriété dans le cas de la Chambre haute qui représente alors la propriété.
Le Sénat, qui a fait avorter le projet de loi sur la responsabilité en matière de changements climatiques de l'ancien chef de parti, prouve qu'il est la continuation du rôle de défenseur de la propriété que souhaitait sir John A. Macdonald pour l'institution il y a tant d'années. Il est temps que ça cesse.
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Monsieur le Président, je tiens d'abord à remercier de tout coeur le député de de son allocution et du travail qu'il fait dans ce dossier en général, que ce soit sur la réforme démocratique ou sur ce qu'on devrait faire du Sénat.
Il est très érudit. Il réussit à nous éclairer sur d'autres aspects et à nous dire comment réexaminer la question, parce que la situation actuelle n'a pas de bon sens. Il y a vraiment des actions qu'on peut entreprendre.
C'est grâce à des collègues comme lui qu'on réussira à aboutir à une proposition nouvelle et plus intéressante pour tous les Canadiens. Présentement, c'est clair pour tout le monde que le Sénat pose un gros problème.
Notre motion est très claire:
Que, de l’avis de la Chambre, le gouvernement du Canada, en consultation avec les provinces et territoires, devrait prendre des mesures immédiates menant à l’abolition du Sénat du Canada, qui est non élu et non sujet à la reddition de comptes.
Cette motion comprend deux parties très importantes. Il est très important de considérer l'aspect consultatif parce que pour nous, le but n'est pas d'imposer quoi que ce soit, mais de dire qu'on a besoin d'une discussion sérieuse sur l'abolition du Sénat et qu'il faut savoir ce que les provinces en pensent.
Concrètement, je pense que la plupart seront d'accord avec nous que le Sénat est devenu une institution complètement dépassée, non démocratique, tout à fait vétuste dans notre siècle actuel et une vieille relique qui ne sert plus à rien.
À l'origine, le Sénat était censé avoir comme mandat de revoir et d'approfondir la législation, d'être la Chambre du sober second thought, comme on dit en anglais. Il avait été conçu afin de représenter des minorités, des provinces et des régions dans le processus législatif. C'était l'idée fondamentale, sauf que cela ne s'est jamais passé comme cela. En fin de compte, le Sénat n'a jamais assumé ce rôle.
Le Sénat a toujours été un organe extrêmement partisan qui servait simplement à remercier les amis du parti nommés au Sénat pour jouir de quelques privilèges et à bloquer les projets de loi votés par des gens dûment élus. Cela cause beaucoup de problèmes. Au bout du compte, tout cela est très clair quand on parle aux Canadiens.
C'est vrai qu'au départ il y avait cette idée de représentation régionale, comme l'a mentionné notre collègue le . Toutefois, la réalité est que ce n'est pas cela qui se passe. Les sénateurs sont censés représenter des régions et être le poids régional de ces endroits, mais ce n'est pas cela qu'ils font.
À l'origine, l'idée fondamentale de la création du Sénat était qu'il représente les régions. La réalité est qu'il ne l'a jamais fait. On ne peut pas maintenir le Sénat parce que l'idée n'était pas mauvaise au départ. Présentement, il nous coûte 100 millions de dollars. C'est une planque pour les amis du parti qui vont aller ramasser des fonds pour ce dernier. Cela ne fonctionne pas comme cela. On ne peut pas continuer ainsi. C'est trop odieux. On ne peut pas continuer avec une Chambre parlementaire aussi illégitime.
Le Parti conservateur a promis depuis très longtemps de réformer le Sénat. Les conservateurs ont mené leur campagne sur cette réforme en 2005 et ils ont beaucoup insisté sur cela. Je suis convaincue que beaucoup de membres du Parti conservateur ou qui votent pour eux et les appuient, sont d'accord avec nous que le Sénat est une institution qui a énormément de problèmes.
Or les conservateurs sont au pouvoir depuis maintenant sept ans et pratiquement rien n'a été fait à ce sujet. Sur les 789 jours où la Chambre a siégé, on a parlé du Sénat à peine 18 jours. C'est ridicule.
On nous dit ensuite que c'est une priorité et que c'est la faute de l'opposition si la réforme ne passe pas. Veut-on rire de moi? Voyons donc. Après avoir utilisé le bâillon plus de 30 fois, on vient nous dire que cette fois-ci, par contre, c'est la faute de l'opposition si le dossier ne progresse pas. C'est complètement absurde. Les conservateurs n'ont pas du tout cela comme priorité.
Les conservateurs présentent des projets de loi qui n'ont pas de bon sens en ce qui concerne la réforme du Sénat. Ils ont présenté le projet de loi l'année passée. Ils l'ont relégué aux oubliettes et n'en ont pas trop parlé depuis. Le projet de loi pose énormément de problèmes. Ce projet de loi nous dit qu'on fera des élections un peu bidon pour élire les sénateurs. Qui plus est, ces élections seront payées par les provinces, parce que c'est évidemment à elles de s'occuper de cela.
Ensuite, le décidera si oui ou non il nommera les personnes qui seront sur la liste. C'est super! Je suis vraiment ravie. On aura réellement un Sénat qui a du bon sens!
À la base, le principe de les élire peut causer tellement de problèmes, car notre système n'est pas fait pour avoir deux Chambres élues. On n'a aucun mécanisme à notre disposition pour que cela fonctionne de façon efficace et fonctionnelle. On a donc déjà un problème à la base.
Ensuite, on nous propose que les mandats soient de huit ans non renouvelables. Ça, ça va vraiment rendre ces gens redevables à la population. Après s'être fait élire, ils n'auraient plus de compte à rendre à personne pour les huit années suivantes. Ils seront planqués là, avec une belle retraite, de belles affaires, un beau budget. Ils pourraient aller se promener et ramasser des fonds pour le Parti conservateur tant qu'ils le voudront. C'est complètement ridicule. Ils ne seront jamais redevables à la population.
À la lecture de ce projet de loi, il est très clair qu'il a été fait pour ne pas avoir à consulter les provinces. Il contournait chacune des parties de la Constitution. Il apportait des petits changements superficiels pour que le gouvernement n'ait pas à aller dire un mot aux provinces. Ça ne fonctionne pas ainsi au Canada. Un dialogue est nécessaire entre le gouvernement fédéral et les provinces, et entre les provinces, pour pouvoir avancer et faire fonctionner les choses, et voir ce qu'on veut comme pays.
Parlons-en des provinces. Soit elles n'ont jamais eu de Sénat, soit elles l'ont aboli. À ce que je sache, les gouvernements provinciaux ne sont pas en ruine; ils ne vivent pas non plus l'apocalypse parce qu'ils n'ont pas de Sénat. On s'entend pour dire que c'est parfaitement fonctionnel de ne plus avoir cet organe, de remplacer le bon travail parfois fait par le Sénat par autre chose, que ce soit par davantage de travail en comité ou en créant plus de commissions d'enquête, par exemple. Il existe bien d'autres façons de le faire.
Actuellement, on en a l'exemple dans tous nos gouvernements provinciaux. Ils fonctionnent tous très correctement avec leurs assemblées législatives sans avoir besoin d'une Chambre où on place les amis du parti, où on fait des dépenses incroyables et qui, au bout du compte, ne servent vraiment pas à grand-chose.
Parlons des dépenses. Cette année, le budget du Sénat a connu une hausse de 2,5 millions de dollars. Le gouvernement fait des compressions partout. Il informe les prestataires d'assurance-emploi que les enquêteurs auront des quotas les forçant à trouver des gens à qui retirer leur chèque d'assurance-emploi, mais pendant ce temps, il soutient que le Sénat est à sa place et il augmente son budget.
Pourrais-je avoir une explication sur cette question, s'il vous plaît? À mes yeux, quelque chose ne va pas. Ce n'est pas de cette façon que je vois le Parlement du Canada et ce n'est pas là qu'on devrait mettre notre énergie et notre argent.
Certaines personnes partagent notre position. J'allais parler d'un effet de surprise, mais en fait, ce n'est pas vrai, car cette idée est probablement beaucoup plus répandue qu'on ne le pense. L'ex-sénateur, Michael Fortier, a dit très clairement qu'il était favorable à l'abolition du Sénat. Il est vraiment important que je le cite. Il a dit ce qui suit:
Si j'avais à choisir aujourd'hui, je dirais que je suis probablement plus prêt que jamais de vouloir fermer cette place. Je n'en vois plus l'utilité.
J'étais très naïf à l'époque.
Il parle donc du moment où il a lui-même été nommé sénateur en 2006.
Je croyais que ce serait un endroit différent de ce que j'ai vu. J'ai trouvé le Sénat extrêmement partisan des deux côtés, y compris le mien. Je trouvais cela très agaçant parce que ces gens tentaient de jouer le rôle d'un député et ils ne le sont pas.
C'est ça, le problème! Tout ce qu'on fait, c'est qu'on prend des candidats déchus aux élections ou des proches amis du parti, on leur donne une belle retraite dorée et on rembourse leurs dépenses avec l'argent des contribuables. Par exemple, dans le cas de la sénatrice Wallin, elle a dressé une facture de plusieurs dizaines de milliers de dollars pendant la campagne électorale de 2011. C'est complètement ridicule! Notre argent, l'argent de tous les Canadiens, s'en va dans la poche d'un sénateur qui va faire campagne pour un parti politique.
Est-ce bien ça notre Sénat non partisan, qui est censé être la Chambre qui revoit la législation de façon sage? Ce n'est vraiment pas de cette façon que le Sénat devrait être. C'est absolument important d'adopter cette motion pour dire qu'il est temps d'aller consulter les provinces et de discuter sérieusement de l'abolition du Sénat.
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Monsieur le Président, je prends la parole pour prendre part au débat sur la motion qu'a présentée le député de .
Je suis toujours heureux de discuter de changements à apporter au Sénat, parce que notre parti est le seul qui propose un plan de réforme véritable. En effet, nous les seuls à prendre des mesures légitimes pour que le Sénat fonctionne de manière plus démocratique et rende davantage de comptes. Nous sommes les seuls à avoir un plan clair, sous la forme d'un projet de loi présenté à la Chambre.
Le NPD parle d'abolir le Sénat, soit, mais ce n'est que des paroles. Aujourd'hui, ils disent vouloir abolir le Sénat; pourtant, juste le mois dernier, le député néo-démocrate de , celui-là même qui a présenté la motion aujourd'hui, déclarait qu'ils étaient ouverts à toute idée raisonnable de réforme.
Peu de temps après, le porte-parole principal du NPD en ce qui concerne le Sénat a admis qu'il ne savait pas vraiment ce que le chef de l'opposition ferait en 2015. Il ne le sait pas parce que le chef du NPD refuse de dire ce qu'il entend faire en 2015. Hier, lorsqu'on lui a demandé de but en blanc si son parti nommerait des sénateurs dans l'hypothèse où il formerait le gouvernement, le a refusé de répondre. La seule raison pour laquelle le porte-parole principal du NPD en ce qui concerne le Sénat ne peut pas dire ce que le chef de l'opposition pourrait faire en 2015, c'est que le NPD n'a pas du tout l'intention d'abolir le Sénat. Au contraire, il a pleinement l'intention de nommer ses propres sénateurs.
Le NPD a déjà comploté en vue de nommer ses propres sénateurs et il va recommencer. Lorsque le Parti libéral, le NPD et le Bloc québécois ont conspiré pour former une coalition en 2008, le NPD avait conclu un accord afin de pouvoir nommer ses propres sénateurs. En fait, dans sa propre motion, le NPD admet qu'il aura besoin de l'appui des provinces et des territoires pour abolir le Sénat. Toutefois, cet appui est loin de lui être acquis.
Pour abolir le Sénat, il faudra rouvrir la Constitution. Le NPD sait qu'il n'obtiendra pas l'appui des provinces en vue d'abolir le Sénat. C'est pourquoi il n'a jamais présenté de plan légitime sous forme de projet de loi pour ce faire. Le plan véritable du NPD, c'est de nommer ses propres sénateurs. Il va créer une bataille constitutionnelle qui aura pour effet de retarder la réforme du Sénat. Pendant ce temps-là, le NPD va en profiter pour nommer ses propres sénateurs. En provoquant une bataille constitutionnelle, le NPD rejettera le blâme sur les premiers ministres des provinces afin de pouvoir nommer ses sénateurs. Qui plus est, il pourra détourner l'attention des Canadiens de ses mesures dangereuses et irresponsables, comme son projet d'augmenter les impôts et les dépenses, notamment au moyen d'une taxe sur le carbone de 21 milliards de dollars qui fera disparaître des emplois.
Si le NPD voulait vraiment apporter des changements au Sénat, il présenterait un plan concret. Au lieu de cela, il a recours à une motion vide de sens. Plutôt que de discuter d'une réforme concrète et réalisable pour le Sénat, comme le fait de limiter la durée du mandat des sénateurs et de demander aux provinces de tenir des élections sénatoriales, les députés du NPD souhaitent mener une bataille constitutionnelle avec les provinces. Toutefois, l'hypocrisie du NPD ne s'arrête pas là.
Le prétend vouloir abolir le Sénat; pourtant, il a présenté récemment un projet de loi d'initiative parlementaire qui accorderait davantage de pouvoirs à la Chambre haute. Dans le projet de loi du chef du NPD, on peut lire ceci: « Le gouverneur en conseil nomme le directeur parlementaire du budget [...] après consultation du chef de chacun des partis reconnus des deux chambres du Parlement [...] ». Si le chef du NPD souhaite réellement l'abolition du Sénat, pourquoi propose-t-il une mesure qui vise à en accroître les pouvoirs? C'est parce que le NPD sait que, lorsque les sénateurs seront élus par les Canadiens, il ne pourra plus nommer ses propres sénateurs néo-démocrates, comme il l'a comploté en 2008.
Le gouvernement a toujours exposé clairement sa volonté de réformer le Sénat, à savoir de mettre en place les processus permettant aux Canadiens de choisir leurs représentants au Sénat. Nous l'avons promis dans notre dernière plateforme électorale et nous avons réitéré notre promesse dans le discours du Trône. Nous avons même franchi une étape de plus pour rendre le Sénat plus démocratique et plus responsable en demandant des éclaircissements à la Cour suprême.
Le Sénat fait, étudie et adopte des lois qui touchent quotidiennement les Canadiens. Il n'est donc pas juste que les sénateurs n'aient pas de mandat démocratique de la part des gens qu'ils représentent, ni qu'ils puissent siéger à l'autre endroit pendant plusieurs décennies d'affilée.
Le Sénat peut être un endroit où un plus large éventail d'expériences et d'expertises peuvent être mises à contribution pour régler les problèmes du pays. Malheureusement, je crois que le fait que les sénateurs soient choisis et nommés au moyen d'un processus qui n'est pas transparent ni bien défini, et que les sénateurs ne reçoivent pas de mandat démocratique des Canadiens, jette une ombre sur le travail des sénateurs. Qui plus est, il n'y a pas de limite stricte au nombre d'années pendant lesquelles une personne peut siéger au Sénat. Somme toute, l'efficacité et la légitimité du Sénat souffrent de ce déficit démocratique.
Nous devons donc nous poser cette simple question: est-ce suffisant? Notre réponse est « non ». Le gouvernement croit depuis longtemps que le statu quo au Sénat est inacceptable et que ce dernier doit changer pour pouvoir donner sa pleine mesure en tant qu'institution démocratique efficace.
Bien que les recommandations sur la façon d'opérer une réforme au Sénat aient toujours différé et qu'elles diffèrent encore, il y a un thème qui revient tout le temps. Presque tous les rapports et études soulignent que le Sénat est une institution importante de la démocratie et qu'une réforme est nécessaire pour accroître sa légitimité dans le contexte d'un pays démocratique moderne.
Il est clair que, s'il existe différentes approches pour régler ce problème, la réforme demeure la meilleure façon de procéder pour apporter des changements au Sénat.
Toute réforme du Sénat est un processus complexe. En vertu de la Constitution, pour en modifier des aspects importants, par exemple ses pouvoirs ou la représentation des provinces, il faut l'appui de sept provinces représentant la moitié de la population.
Obtenir l'appui nécessaire des provinces pour des réformes fondamentales particulières est un processus complexe et long dont la réussite n'est pas assurée. Pour abolir le Sénat, par exemple, il faut au minimum le consentement de sept provinces sur dix, voire le consentement unanime de l'ensemble des provinces et des territoires.
Les Canadiens ne veulent pas de batailles constitutionnelles interminables qui détournent notre gouvernement de sa priorité absolue pour le Canada, soit les emplois, la croissance et la prospérité à long terme. À une époque où l'économie mondiale est encore précaire et où les Canadiens s'inquiètent à juste titre de leur épargne, de leur retraite et de leur avenir financier, les interminables querelles constitutionnelles entre provinces feraient diversion et détourneraient l'attention du gouvernement de l'économie.
En outre, il n'y a pas de consensus parmi les provinces pour mener une vaste réforme à grande échelle. La motion même des néo-démocrates reconnaît qu'il faut l'appui des provinces et des territoires, appui qu'ils savent ne pas avoir.
Notre gouvernement estime que c'est maintenant qu'il faut réformer le Sénat. Le NPD ne veut pas d'une réforme immédiate. Il souhaite repousser les choses, maintenir le statu quo et empêcher les Canadiens d'élire leurs propres sénateurs. Provoquer des querelles constitutionnelles avec les provinces est un bon moyen pour le NPD de retarder les changements au Sénat, afin que ce parti puisse nommer ses propres sénateurs.
Les Canadiens méritent mieux. Ils méritent d'avoir leur mot à dire dans le choix de ceux qui les représentent au Sénat. Voilà pourquoi nous allons de l'avant avec le projet de loi sur la réforme du Sénat. Avec ce projet de loi, notre gouvernement prend des mesures immédiates et concrètes pour renforcer la démocratie à la Chambre haute et travailler en coopération avec les provinces et les territoires.
Le projet de loi sur la réforme du Sénat comporte deux initiatives qui aideront à vraiment réformer le Sénat. Premièrement, il propose un cadre aux provinces et aux territoires qui souhaiteraient lancer un processus de consultation démocratique permettant aux Canadiens de dire par qui ils souhaitent être représentés au Sénat. Deuxièmement, il prévoit la limitation du mandat des sénateurs nommés après octobre 2008, ce qui permettrait et au Sénat de s'enrichir régulièrement de nouvelles perspectives, et aux Canadiens de choisir leurs représentants au Sénat à intervalles réguliers.
En ce qui concerne un Sénat élu, nous avons systématiquement encouragé les provinces et les territoires à mettre en oeuvre un processus démocratique pour la sélection des candidats sénatoriaux.
Le cadre vise à fournir suffisamment de détails pour faciliter la conception d'une loi provinciale ou territoriale, sans limiter les provinces et les territoires quant à l'établissement d'un processus de consultation ou aux détails de ce processus. Selon les besoins de chaque province ou territoire, les caractéristiques du processus de consultation pourront différer. Après tout, nous voulons travailler en collaboration. Les provinces et les territoires ne seraient pas tenus de respecter le cadre exact. Ils seraient au contraire encouragés à adapter le cadre afin qu'il réponde à leurs besoins précis. Comme nous l'avons vu dans le cadre de la mesure législative qui a été présentée au Nouveau-Brunswick, celle-ci a été adaptée en fonction de la réalité de cette province.
L'approche proposée dans la Loi sur la réforme du Sénat jouit déjà d'un certain appui, notamment au Sénat lui-même. En 2007, le a recommandé la nomination au Sénat de Bert Brown. En 2012, il a nommé la première sénatrice élue, Betty Unger, et en 2013, il a nommé Doug Black au Sénat. Les sénateurs Brown, Unger et Black ont été élus en tant qu'aspirants sénateurs par les électeurs albertains dans le cadre d'un processus de sélection mené en vertu de la loi albertaine sur la sélection des sénateurs, présentée en 1989.
Bien que l'Alberta ait été la première province à adopter une loi de ce genre et à voir ses candidats nommés au Sénat, d'autres provinces ont aussi pris des mesures pour faciliter la réforme. En 2009, la Saskatchewan a adopté la loi sur l'élection des candidats au Sénat, qui permet au gouvernement provincial de tenir des consultations pour la sélection des candidats au Sénat. En Colombie-Britannique, un projet de loi qui autoriserait le gouvernement provincial à tenir des consultations a été présenté. Au Nouveau-Brunswick, un projet de loi a aussi été présenté; il prévoit qu'un processus de nomination des candidats aura lieu d'ici 2016. D'une manière plus générale, j'encourage nos collègues dans toutes les assemblées législatives provinciales et territoriales à nous accorder leur soutien et à présenter des initiatives semblables.
En plus d'encourager la mise en oeuvre de processus de sélection démocratique des candidats au Sénat, la loi limiterait également la durée du mandat des sénateurs, qui peut s'étendre sur plusieurs décennies en vertu des règles actuelles. Aux termes de la loi, les sénateurs garderaient leur qualité de sénateur pour un seul mandat qui expirerait après neuf ans. L'article 44 de la Loi constitutionnelle de 1982 confère au Parlement la compétence de limiter la durée du mandat des sénateurs. En 1965, le Parlement a déterminé unilatéralement que les sénateurs devaient prendre leur retraite à 75 ans, alors qu'ils étaient nommés à vie avant cette date.
Bien que de nombreux députés soient d'accord sur la nécessité d'apporter des modifications au Sénat, je crois qu'il est juste de dire qu'ils ne s'entendent pas sur la façon de le faire. Pour démontrer qu'il est résolu à réformer le Sénat et à en faire une institution plus démocratique et plus responsable, le gouvernement a fait des démarches auprès de la Cour suprême.
Contrairement à la position des autres partis, l'approche de notre gouvernement est de toute évidence la voie pratique et raisonnable. C'est celle qui permettra véritablement d'atteindre des résultats. En fait, les positions présentées par les partis de l'opposition sont essentiellement des arguments qui favorisent le statu quo. Leurs propositions ont si peu de chance de succès qu'ils seraient aussi bien de ne pas les mettre de l'avant.
À titre d'exemple, l'opposition officielle prétend souhaiter l'abolition du Sénat. Bien que cette proposition fasse beaucoup de bruit, elle ne tient pas la route parce qu'il manque un élément essentiel: en effet, il n'y a pas de consensus entre les provinces pour abolir le Sénat. Comme les députés néo-démocrates sont incapables de proposer un véritable plan qui mènerait à l'abolition du Sénat ou refusent d'agir, nous l'avons fait pour eux: nous avons demandé des éclaircissements à la Cour suprême du Canada.
Le Parti libéral, quant à lui, n'a rien fait pour rendre le Sénat plus démocratique et plus responsable pendant les 13 années où il était au pouvoir. Quand il a eu l'occasion de nommer au Sénat des sénateurs élus par les Canadiens, il s'y est refusé, et ce, à trois reprises. Les libéraux ne sont pas favorables à la réforme du Sénat, comme en témoigne leur inaction au cours des 13 années où ils ont été au pouvoir. Ils ont d'ailleurs exprimé clairement leur opposition.
En conclusion, notre parti est le seul qui ait un véritable plan pour la réforme du Sénat. Le gouvernement est déterminé à mener cette réforme à bien afin que les travailleurs canadiens puissent élire les gens qui les représenteront au Sénat.
Mes électeurs me disent qu'ils veulent du changement. Les Canadiens veulent du changement. Je crois que l'heure du changement a sonné au Sénat. Si le NPD voulait vraiment apporter des changements au Sénat, il ne s'opposerait pas à la Loi sur la réforme du Sénat à chaque occasion. En effet, dans le seul but de paralyser le débat concernant la Loi sur la réforme au Sénat, le NPD a fait intervenir 40 orateurs. Depuis 2006, le NPD a bloqué cette mesure législative à 18 reprises, y compris la semaine dernière lorsqu'il a bloqué une motion visant à adopter la Loi sur la réforme au Sénat.
Le député néo-démocrate qui a présenté la motion dont nous débattons aujourd'hui a déclaré que « toute motion portant sur un sujet important doit amener les partis à définir clairement leur position ».
Si le député de ne connaît pas la position de son parti à ce sujet, ce qui semble être le cas, il lui suffit de s'en remettre aux déclarations de son chef, lequel a affirmé, hier, que « seuls des représentants élus devraient avoir le droit de légiférer ».
Les députés néo-démocrates disent qu'ils veulent que les lois soient adoptées par des représentants élus. Le NPD devrait donc arrêter de chercher des faux-fuyants et appuyer notre plan concret visant à réformer le Sénat, lequel prévoit que les sénateurs seront élus. Le NPD a bloqué à 18 reprises nos tentatives d'instaurer des élections au Sénat. J'accepte toutefois de donner une autre chance au NPD d'appuyer notre réforme raisonnable et réalisable.
Je demande le consentement unanime pour proposer que, nonobstant tout article du Règlement ou usage habituel de la Chambre, le projet de loi , soit réputé avoir été lu pour la deuxième fois, renvoyé à un comité plénier, étudié en comité plénier, avoir fait l'objet d'un rapport sans proposition d'amendement, avoir été agréé à l'étape du rapport, lu pour la troisième fois et adopté.
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Monsieur le Président, la réforme institutionnelle, si elle n'est pas réalisée judicieusement, pourrait nuire plutôt que servir. Selon l'un des principes de base en science politique, les difficultés politiques de demain résultent généralement des réformes institutionnelles irréfléchies adoptées aujourd'hui.
[Français]
Je vais démontrer que c'est exactement ce qui arriverait si la Chambre commettait l'erreur d'appuyer la motion présentée aujourd'hui par le député de au nom du caucus néo-démocrate. Cette motion exhorte le gouvernement du Canada, en consultation avec les provinces et les territoires, à prendre des mesures immédiates menant à l'abolition du Sénat du Canada.
Dressons la liste des problèmes que soulèverait la mise en oeuvre de cette motion. Premièrement, il faudrait rouvrir la Constitution. En cette période d'incertitude économique où les gouvernements de notre fédération doivent travailler de concert pour protéger les emplois des Canadiens, le NPD les invite à investir une large part de leur énergie dans la négociation constitutionnelle.
Deuxièmement, le NPD doit nous dire s'il croit vraiment que tous les gouvernements de notre fédération sont disposés à ne rouvrir la Constitution que pour le seul enjeu du Sénat. Si le NPD le pense, je suggère à ce parti d'en toucher un mot, par exemple, à l'actuel gouvernement du Québec.
[Traduction]
Comme l'a déclaré le professeur Benoît Pelletier, de l'Université d'Ottawa, au Hill Times le 18 février 2013:
À mon avis, l'abolition du Sénat n'obtiendrait pas l'aval nécessaire de la majorité des provinces. Je suis convaincu que plusieurs provinces, dont le Québec, profiteraient de l'occasion pour aborder d'autres questions. Au bout du compte, nous nous retrouverions avec un accord aussi large, vaste et substantiel que l'accord du lac Meech ou même celui de Charlottetown.
Le NPD veut peut-être une nouvelle ronde de méga-négociations constitutionnelles, mais les pourparlers constitutionnels sont, à juste titre, au bas de la liste des priorités des Canadiens.
[Français]
Troisièmement, le NPD a-t-il pris en compte que la règle constitutionnelle pour abolir le Sénat est presque certainement l'unanimité des provinces? La grande majorité des experts considèrent que si la règle du 7/50 — sept provinces représentant au moins la moitié de la population des provinces — est nécessaire pour changer le caractère du Sénat, il faut le consentement de la Chambre et l'unanimité des provinces pour l'abolir, ce que confirmera probablement la Cour suprême.
Dans The Hill Times du 18 février dernier, le professeur Bruce Ryder, du Osgoode Hall Law School, le rappelait, lorsqu'il disait qu'il fallait l'appui des 10 provinces. De toute façon, je rappelle à tous mes collègues quelque chose qui n'a pas encore été dit: le Parlement canadien a voté une loi sur les vétos régionaux. Il faudrait donc abolir la loi sur les vétos régionaux pour ne pas donner à chacune des provinces la possibilité d'imposer un veto sur la modification du Sénat ou son abolition.
Quatrièmement, puisque le NPD ne cesse de répéter qu'il veut imposer, à grands frais, aux Canadiens un référendum sur cette question, a-t-il songé à la question à poser et à la majorité requise? Si cette question devait placer les Canadiens devant une seule alternative — l'abolition ou non du Sénat —, elle ne rendrait pas justice à l'éventail des opinions des Canadiens sur le Sénat.
Quant à la majorité requise pour l'abolition, le NPD a-t-il en tête la majorité simple à l'échelle nationale? Cela ne suffira pas, car les gouvernements et les assemblées législatives des provinces qui auraient voté pour le maintien estimeraient, avec raison, que leur devoir constitutionnel est de faire prévaloir le désir de leurs électeurs.
On parle donc de la majorité simple à l'intérieur de chaque province. La probabilité qu'un tel seuil majoritaire soit atteint 10 fois, d'un océan à l'autre, est si faible qu'on se demande bien pourquoi il faudrait dépenser les fonds publics pour tenir un tel référendum.
[Traduction]
L'abolition du Sénat modifierait considérablement la fédération et, aux termes des règles de modification de la Constitution, les provinces devraient l'approuver à l'unanimité. Or, un consensus est très peu probable. En fait, à l'heure actuelle, seules trois provinces approuvent l'abolition du Sénat.
Je pense que la meilleure conclusion qu'on puisse tirer de cette motion peu judicieuse est celle qu'a tirée par Peter Russell, professeur émérite à l'Université de Toronto. Il a été cité dans le Hill Times du 18 février 2013. Voici ce qu'il a déclaré:
Ils [le NPD] n'ont pas vraiment pesé le pour et le contre du bicaméralisme. Je ne sais même pas s'ils savent comment épeler ce terme.
[Français]
C'est le professeur Russell qui le dit. En effet, si l'on suivait le dessein du NPD, le Canada deviendrait la seule grande fédération du monde à ne compter qu'une seule Chambre fédérale. Si l'on devait perdre notre Chambre haute, on perdrait aussi le rôle utile qu'elle joue dans notre système politique, au bénéfice des Canadiens, en particulier au bénéfice des régions et des minorités.
Ce rôle est précisément celui que les Pères de la Confédération lui ont assigné, celui du second examen objectif. Les sénateurs n'étant pas élus, ils jouent leur rôle avec modération et laissent presque toujours le dernier mot à la Chambre élue, la Chambre des communes.
Mais en procédant à un second examen objectif, il arrive aux sénateurs de déceler des erreurs, des imprécisions, et d'inviter les députés à amender leurs projets de loi dans l'intérêt des contribuables et des citoyens.
[Traduction]
Permettez-moi de citer des exemples récents de situations dans lesquelles nos collègues de l'autre Chambre ont effectué un second examen objectif. En 2006, la Chambre a accepté 55 amendements présentés par le Sénat en vue d'améliorer la Loi fédérale sur la responsabilité. En 2008, le Sénat a convaincu le gouvernement de ne pas aller de l'avant avec les changements proposés au crédit d'impôt pour production cinématographique. En effet, une disposition infâme aurait alors permis au ministre d'exercer la censure et de refuser d'accorder le crédit d'impôt pour production cinématographie si, selon lui, la production en question était contraire à un concept flou dans ce domaine, soit l'ordre publique. Cette question a déclenché un énorme tollé partout au pays. Dieu merci, un sénateur libéral a constaté cette erreur, qui a été corrigée à la Chambre.
En 2012, après que les amendements à la Loi sur la sécurité des rues et des communautés proposés par les libéraux ont été rejetés à la Chambre, le Sénat a apporté ces mêmes amendements qui ont par la suite été acceptés à la Chambre. À l'heure actuelle, le projet de loi , qui a été présenté par le NPD, est examiné attentivement par le Sénat, car certaines ligues sportives et plusieurs provinces se sont dites préoccupées par le fait que la Chambre n'avait pas suffisamment étudié la mesure législative avant de l'adopter.
Comme nous pouvons le constater, le Sénat a toujours présenté des amendements et des précisions utiles en ce qui concerne les projets de loi adoptés par la Chambre, en s'opposant rarement à la volonté générale de cette dernière. En fait, mes 10 doigts suffisent à compter le nombre de projets de loi adoptés par la Chambre des communes qui ont été rejetés par le Sénat depuis 1945. Le Sénat joue un important rôle de surveillance dans la fédération canadienne en procédant à un second examen objectif des mesures législatives adoptées par la Chambre. Il joue un rôle complémentaire en procédant à un autre examen et en présentant des amendements. C'est précisément pour cette raison que le Sénat a été créé par les Pères de la Confédération. Il ne serait pas judicieux d'abolir cette chambre de réflexion, d'autant plus que le gouvernement actuel est le plus opaque de l'histoire de notre pays. Les institutions fédérales ont besoin qu'on accroisse la surveillance, et non qu'on la réduise.
[Français]
Pour que le Sénat remplisse correctement son rôle de Chambre de second examen objectif, il faut que le choisisse de bons sénateurs, exceptionnels pour leur ardeur à l'ouvrage, leur rigueur, leurs compétences et leur trempe morale.
[Traduction]
Malheureusement, le a fait certaines nominations très douteuses. Ainsi, au lieu de nommer des personnes très qualifiées, il a choisi des gens dont la seule compétence consiste à accorder leur appui au Parti conservateur. Le premier ministre doit être tenu responsable de ces mauvais choix, et non le Sénat en tant qu'institution. Le premier ministre doit également être tenu responsable du gâchis constitutionnel que sa réforme du Sénat causera. Il veut élire les sénateurs sans rien changer d'autre dans la Constitution. Permettez-moi de vous exposer les torts que cela causera à notre pays.
Beaucoup de Canadiens voudraient que leur sénateur soit élu plutôt que nommé, ce qui est compréhensible. Cette façon de faire serait plus démocratique. Par contre, qu'arriverait-il si, comme le propose le gouvernement conservateur, nous changions les règles de nomination des sénateurs sans changer la Constitution en conséquence?
La réforme du Sénat que proposent les conservateurs aurait plusieurs conséquences: si les sénateurs étaient élus tout comme les députés, il n'y aurait pas de mécanisme de règlement des différends entre le Sénat et la Chambre; l'Alberta et la Colombie-Britannique, qui n'ont que six sénateurs chacune, seraient encore sous-représentées, tandis que le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse, dont la population est cinq à six fois inférieure à celle de ces provinces, compteraient toujours dix sénateurs; si les deux Chambres élues étaient incapables de régler leurs différends, on se retrouverait dans une impasse politique comme aux États-Unis et comme, actuellement, en Italie et au Mexique; il y aurait d'âpres querelles constitutionnelles entre les provinces concernant le nombre de sièges auxquels elles ont droit au Sénat. Heureusement, il y a de fortes chances que la Cour suprême conclue que cette réforme maladroite du Sénat ne peut pas être mise en oeuvre unilatéralement par une simple loi du Parlement.
Donc, prenons les choses dans l'ordre. Les provinces pourront-elles s'entendre au sujet de la répartition des sièges du Sénat? Si elles y arrivent, nous devrons alors définir les pouvoirs constitutionnels qu'il faudra accorder au Sénat pour instaurer de saines complémentarités avec la Chambre, ce qui permettrait d'éviter la sclérose institutionnelle causée par les dédoublements. Par la suite, nous devrons nous entendre sur le processus d'élection des sénateurs et modifier la Constitution en conséquence.
L'abolition du Sénat changerait beaucoup la fédération. Pour modifier légitimement la Constitution, il faudrait obtenir le consentement unanime des provinces, ce qui est très peu probable. En outre, le Sénat joue un rôle utile en améliorant ou en corrigeant les projets de loi qui sont adoptés à la Chambre.
Tant que les provinces n'arriveront pas à s'entendre sur le nombre de sénateurs auxquels chacune a droit, il faut éviter le chaos constitutionnel que causerait l'élection des sénateurs.
Choisissons plutôt de tenir le responsable de la qualité des sénateurs qu'il nomme. Laissons au Sénat le rôle que lui ont conféré les Pères de la Confédération: celui de l'étude approfondie et du second examen objectif des mesures législatives.
:
Monsieur le Président, je veux formuler des observations sur l'excellent discours de la députée de . Ma collègue siège à la Chambre, mais elle n'est pas encore assez âgée pour servir au Sénat. Je pense que cela justifie en soi que l'on appuie la motion. C'est un argument convaincant pour étayer mon point de vue.
Cela dit, il existe d'autres arguments et je ne vais pas en rester là. Je suis convaincu que ma collègue et le député de , qui est le parrain de la motion, en attendent davantage de moi.
Je profite de l'occasion pour dire que c'est un plaisir d'avoir le privilège de représenter les résidants de la partie est de Toronto avec le député de . Nous travaillons ensemble afin de servir les électeurs de l'est de la ville, et aujourd'hui je me range à ses côtés pour appuyer sans réserve sa motion.
La motion d'aujourd'hui s'inscrit dans le plan et dans la vision progressistes plus larges du NPD afin de réformer les systèmes électoral et parlementaire du Canada.
L'objectif consiste à instaurer une démocratie plus étoffée au Canada, à assurer une représentation plus solide et authentique, et à faire en sorte d'avoir un système en vertu duquel les Canadiens auront la certitude de pouvoir nous renvoyer à la maison si nous ne nous acquittons pas convenablement de nos responsabilités. Ce dernier aspect est le plus étroitement lié à la motion d'aujourd'hui, à ce volet de notre projet de démocratie.
Je tiens à dire d'entrée de jeu qu'à titre de député je veux toujours faire preuve de la dignité et du civisme qui conviennent à cette institution. Tout ce que l'on peut dire au sujet du comportement et du langage appropriés à la Chambre n'est pas vraiment important parce que, de toute façon, mes électeurs ont des attentes très claires et très précises pour ce qui est de mon comportement.
Dans ce contexte, prononcer un discours au sujet du Sénat pose un défi énorme, parce que le sujet n'a rien de digne ou de civilisé. Cette institution est devenue laide, vulgaire et sordide. Proposer son abolition suppose donc que l'on braque les projecteurs sur ces aspects et que l'on en discute en termes très clairs.
En tant que nouveau député, je ne me suis pas encore habitué à la Chambre au point de considérer le Sénat et les sénateurs comme des éléments normaux. Il y a quelque chose de très inhabituel dans ce groupe de personnes qui prennent leurs aises dans cet endroit jusqu'à la fin de leurs jours, ou jusqu'à l'âge de 75 ans. Seule la volonté de la population devrait déterminer qui se trouve dans cet un endroit. Nous devrions nous compter chanceux d'être ici. Nous ne devrions jamais tenir pour acquis le privilège que nous avons d'être à la Chambre pour faire valoir la position de nos électeurs sur les grands enjeux actuels.
Nous devrions toujours être tout à fait conscients que les électeurs peuvent nous priver de notre privilège s'ils changent d'idée, si nous manquons à notre devoir, ou si le temps et les événements font en sorte que nous perdons notre utilité à leurs yeux.
Étrangement, je me souviens très bien d'une journée, au début de mon mandat, où je remplaçais un collègue au sein d'un comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat. Je travaillais avec un sénateur, un homme qui était censé être au comité pour la même raison que les autres, qui examinait et étudiait un projet de loi, qui se penchait sur les dossiers d'actualité. Cependant, il n'avait personne auprès de qui retourner, personne à qui rendre des comptes, aucune circonscription à représenter, aucune activité prévue le week-end avec les gens de sa circonscription. Il n'avait qu'à toucher un salaire jusqu'à ce que l'inévitable se produise. Il n'avait aucun compte à rendre.
Voilà qui démontre que cette institution est fondamentalement antidémocratique, et qu'elle illustre une profonde méfiance à l'égard de la démocratie. Voilà ce dont il s'agit. C'est un filet de sécurité réconfortant pour ceux qui doutent de la sagesse des élus et, par le fait même, de celle des électeurs. Au fil du temps, bien des faits ont érodé la pertinence de cette institution.
Il semble un peu naïf de s'en tenir à la question de la reddition de comptes. Les arguments à ce sujet sont incontestables, mais ces arguments plus subtils et plus élaborés perdent un peu de leur pertinence face à une vérité plus grande.
Le a déjà dit du Sénat que c'était une relique du XIXe siècle. Si c'était le seul problème, on pourrait faire valoir des raisons historiques pour le conserver, le réformer, voire le moderniser. Dans cet ordre d'idées, on pourrait opposer à la tradition la nécessité de moderniser les institutions démocratiques.
La situation est toutefois bien pire et bien plus déplorable. L'institution a tellement dégénéré qu'elle est maintenant corrompue à un point irrécupérable. Il ne s'agit même plus du travail des sénateurs, ou des modalités et conditions auxquelles ils sont soumis, mais bien de ce qu'ils ont fait pour obtenir un siège au Sénat.
Le Sénat, c'est la retraite. Le travail a été accompli, on a servi les intérêts du maître, et la nomination au Sénat constitue la récompense différée pour le travail en question.
N'étant pas historien moi-même, j'ignore si l'institution a connu de meilleurs jours. Peut-être a-t-on déjà pris au sérieux la notion du second examen objectif; apparemment, les libéraux y accordent toujours du crédit. Par ailleurs, certaines personnes considèrent qu'il en a toujours été ainsi, et j'ai pris plaisir à entendre mon collègue citer sir John A. Macdonald, qui considérait le Sénat comme la Chambre des possédants. Tout ce que je sais du Sénat, c'est ce qu'il est depuis que je suis d'âge adulte, une institution fruste, rudimentaire et corrompue.
Voyons voir qui se trouve au Sénat.
Nous avons le sénateur Doug Finley, qui a été en 2006 et 2008 directeur des opérations politiques et de la campagne nationale du Parti conservateur. Il a été accusé d'avoir dépassé la limite de dépenses établie en vertu de la Loi électorale et d'avoir falsifié des demandes de remboursement d'impôt pour la campagne électorale de 2006. Au cours des trois dernières années, ce sénateur a coûté aux contribuables près de 730 000 $.
Le sénateur Irving Gerstein a été quant à lui agent de financement principal et président du Fonds conservateur du Canada. Ce sénateur, qui a recueilli le plus d'argent pour le Parti conservateur, a été accusé en 2011 d'avoir enfreint la Loi électorale du Canada, pour avoir soumis de fausses demandes de remboursement et pour avoir dépassé le plafond des dépenses permises pour les publicités en campagne électorale. Au cours des trois dernières années, ce sénateur a coûté aux contribuables près de 1 million de dollars.
Bien sûr, la liste ne s'arrête pas là; le Sénat compte bien d'autres collecteurs de fonds, candidats défaits et autres valets du Parti conservateur.
Les libéraux ne sont pas en reste, car ils ont eux aussi nommé leurs anciens agents politiques au Sénat. Pensons, par exemple, au sénateur David Smith, ancien coprésident d'une campagne nationale des libéraux, à qui les contribuables ont donné 935 000 $ au cours des trois dernières années. Les sénateurs Cowan, Robichaud, Mitchell, Campbell, tous anciens agents du Parti libéral, ont chacun coûté environ 1 million de dollars au cours des dernières années — et la liste ne s'arrête pas là.
Le Sénat n'a jamais eu de fondement justifié, mais au moins la Chambre rouge avait une façade et un aura de dignité. Or, ce n'est plus le cas. Ces attributs ont disparu et avec eux toute possibilité de réforme s'est évanouie. Un siège à la Chambre rouge est la manifestation d'un népotisme grossier et d'un jeu politique tordu et cynique qui se joue entre ces deux partis depuis la Confédération. C'est la récompense des collecteurs de fonds et des membres de l'état-major des libéraux et des conservateurs. Le parti qui remporte les élections gagne accès pour ses initiés à la corne d'abondance du Sénat canadien. Ces hommes et ces femmes assez bien nantis se gavent aux dépens du contribuable pour avoir fait le sale travail de leur parti.
La réforme du Sénat est le maître mot du . Or, nous remarquons son peu d'empressement. En sept ans, il n'a toujours pas rempli cette promesse. Par contre, il a nommé 58 des siens à la sinécure qu'est le Sénat, gagnant ainsi sa place au panthéon du népotisme derrière seulement six autres anciens premiers ministres.
Patrick Brazeau, Mike Duffy, Pamela Wallin et Mac Harb font l'objet de vérifications et d'enquêtes concernant leurs allocations de logement et leurs frais de déplacement. Les sénateurs demeurent-ils vraiment là où ils le prétendent?
Cela nous amène à souhaiter un retour au débat sur les principes et la valeur de la relique. Les conclusions seraient peut-être les mêmes, mais au moins, ce serait un débat d'ordre supérieur. Or, cette relique est pourrie. On ne peut la ranimer ni éliminer la puanteur. Cette relique inconstitutionnelle et non démocratique mérite mieux qu'être devenue une flagrante sinécure.
:
Monsieur le Président, comme toujours, je suis fier de prendre la parole à la Chambre à titre de député élu de Timmins—Baie James, choisi par les habitants de la région de la Baie-James pour les représenter aux Communes.
À écouter les interventions de ce matin sur la motion, qui traite de la nécessité d’amorcer le processus d’abolition du Sénat, je me suis rappelé, grâce à mes collègues conservateurs, qu’il fut un temps où nous discutions de réforme du Sénat, où nous parlions de moderniser cette institution anachronique et de l’adapter au XXI e siècle. Les conservateurs ont promis une réforme. Toutefois, ils convenaient que, si la réforme n’était pas possible, ils aboliraient l’institution, car celle-ci s’est farouchement opposée à toute forme de réforme.
Malheureusement, nos collègues conservateurs ont perdu toute moralité et se retrouvent dans les bas-fonds de la politique de la bouteille de rhum qui se pratique à Ottawa. Ils ont imité les libéraux en faisant au Sénat beaucoup de nominations douteuses: des amis du parti, des politicards, des gens qui font sauter les crêpes aux activités de financement du Parti conservateur. En sept ans, ils n’ont pas pu accoucher d’un vrai plan de réforme démocratique du Sénat. C’est ainsi que nous en revenons à la question initiale de l’abolition.
Mes collègues libéraux sont très en colère ce matin. Ils s’indignent du moindre effort qu’on peut faire pour exiger des comptes de leurs amis non élus, dans un système où les amis du parti n’ont pas de comptes à rendre.
Il ne s’agit pas ici d’un point obscur de débat constitutionnel. Ce qui est en cause, c’est l’essence même de la responsabilité démocratique au Canada en ce XXIe siècle. Il s’agit de savoir si un groupe de gens qui croient posséder certains privilèges et ne pas avoir de comptes à rendre doivent avoir le droit, le pouvoir de faire obstacle aux décisions des membres dûment élus des Communes et, ainsi, à la volonté démocratique au Canada.
Il faut situer la motion dans le contexte actuel. La colère et l’exaspération montent chez les Canadiens, qui constatent que le Sénat refuse de rendre des comptes, que les sénateurs leur font un pied de nez et affichent un mépris total. Et voici que les libéraux, surtout, et les conservateurs nous disent à la Chambre que les députés démocratiquement élus ne peuvent pas exiger de comptes des sénateurs. Ils sont en quelque sorte supérieurs aux députés. Je ne crois pas que ce soit là un principe acceptable pour quelque pays démocratique que ce soit.
Le niveau d’exaspération a maintenant atteint un niveau tel que le Parlement doit exiger des comptes de ces sénateurs. La sénatrice Anne Cools se sert de son poste de sénatrice non élue pour empêcher le directeur parlementaire du budget de fournir de l’information aux députés démocratiquement élus et, par conséquent, aux Canadiens. C’est inadmissible. Elle prétend que cela porte atteinte à son privilège. Voilà de quoi vivent les sénateurs: de leurs privilèges. Elle a parlé de vandalisme constitutionnel. J’admets qu’il existe des vandales, mais ils siègent à la Chambre rouge.
Au long de sa carrière, la sénatrice Anne Cools a été fantasque, et il lui est arrivé de dire des choses assez bizarres. Mais ce que les Canadiens doivent savoir, c’est que nous ne pouvons pas nous débarrasser d’elle. Elle sera en poste jusqu’à 75 ans, qu’elle vienne au Sénat ou non, comme le célèbre sénateur Andy Thompson du Mexique. Pendant sept ans, ce type-là ne s’est jamais présenté au travail. Les Canadiens ne peuvent même pas les relever de leurs fonctions. Par conséquent, la sénatrice Anne Cools peut entraver le travail des députés démocratiquement élus, et il semblerait que soit acceptable, puisqu’elle a le privilège d’agir de la sorte.
Pamela Wallin, qui semble habiter avenue Palmerston, à Toronto, prétend représenter les habitants de la Saskatchewan. Cette sénatrice, qui siège au conseil d’administration d’une société qui exploite les sables pétrolifères, a contribué à faire rejeter un projet de loi qui portait sur les changements climatiques catastrophiques. Elle s’est vantée d’avoir fait échouer ce projet de loi adopté par les députés dûment élus à la Chambre des communes. À son avis, cette mesure était un embêtement. Bien sûr, c’était un embêtement pour elle. Les petites gens l’embêtent probablement aussi. N’empêche qu’elle profite des avantages de son poste aux frais des petites gens qui l’embêtent.
La situation est inacceptable. Et nous n’avons encore rien dit du fait que les sénateurs siègent au conseil d’administration de grandes sociétés, de banques, d’institutions du secteur financier et d’entreprises du secteur des services de santé privés. Pourtant, ils participent au débat et ils modifient des lois canadiennes tout en étant au service de leurs amis du secteur privé.
Le Sénat n’est pas une institution qui a mal tourné en cours de route. Il a été fondé sur de mauvais principes. Il faut qu’il rendre des comptes.
Il y a quelque 140 ans, lorsque le Canada était en train d’établir son système de gouvernance, les dignitaires à rouflaquettes qui étaient réunis à l’Île-du-Prince-Édouard se sont inspirés de la Chambre des lords de l’Angleterre. La Chambre des lords a été créée parce que l’Angleterre avait une longue histoire d’exclusion des classes et de droits héréditaires. Le Parlement britannique a été conçu de telle sorte que la Chambre des lords soit supérieure à la chambre des gens du peuple. Les termes employés sont éloquents: il fallait faire contrepoids aux droits du peuple.
Je précise pour les téléspectateurs que, chez nous, les gens du peuple, ce sont les Canadiens. Nous n’avions pas derrière nous une histoire de noblesse et d’aristocratie. Les Pères de la Confédération ont donc décidé de créer le Sénat pour assurer ce contrepoids. En un sens, ils ont opté pour quelque chose de pire que ce qu’avait l’Angleterre. Au lieu des lords et des gens affublés d’un titre de noblesse, ils ont décidé de choisir les copains, les amis du parti.
Voilà qui me fait penser à G.K. Chesterton. Comparant l’Angleterre et l’Irlande, il a dit que ce qui était pire que d’être sous la coupe des prêtres, c’était d’être sous celle de la petite noblesse. Au Canada, c’est encore pire. Nous sommes sous la coupe des copains des partis. Dans une démocratie moderne, ce n’est pas une façon de ménager l’équilibre dans l’approbation des lois.
Il est intéressant d’entendre les jeunes guides qui amènent les visiteurs voir le Sénat. Ils débitent les balivernes qu’on leur impose au sujet de tout le travail que le Sénat accomplit. Ils racontent que l’un des principes fondateurs de John A. Macdonald était que le Sénat avait pour rôle de protéger les droits des minorités. L’idée semble bonne, mais John A. Macdonald ne voulait pas parler des minorités linguistiques, des Premières Nations ou des Néo-Canadiens. Il disait que nous devions protéger les minorités parce que les riches seront toujours moins nombreux que les pauvres. C’était là le principe fondateur. L’institution était là pour protéger les puissants.
Voici comment on peut résumer aujourd’hui sept années de prétendue réforme du Sénat: Pamela Wallin, Mike Duffy et Patrick Brazeau. Voilà ce que les conservateurs nous ont donné. C’est une mauvaise émission de téléréalité. Ce qui se passe au Sénat fait penser aux Bougon. On se promène en costumes Armani. Au lieu de Honey Boo Boo, nous avons Pamela Boo Boo. Au moins, Honey Boo Boo a parfois quelque chose qui peut paraître charmant.
Il est scandaleux de voir ce qui se passe actuellement au Sénat. Il s'agit là d'un problème d'ordre constitutionnel. Les sénateurs ont été choisis par le . Ce dernier a dit aux Canadiens qu'il pouvait personnellement attester tout ce qu'avaient déclaré les sénateurs au sujet de leur lieu de résidence et, pourtant, Pamela Wallin a une carte d'assurance-maladie de l'Ontario. Soit elle est résidante de l'Ontario, soit elle est en train d'escroquer les Ontariens. Si elle est résidante de l'Ontario, elle ne peut pas dire qu'elle est résidente de la Saskatchewan. Il n'est pas suffisant de dire que son coeur appartient à la Saskatchewan ou d'affirmer qu'elle y retourne de temps en temps. Soit elle est résidante de cette province, soit elle ne l'est pas.
C'est la même chose pour Mike Duffy. Il a d'abord affirmé habiter à Cavendish, alors qu'il n'y avait pas mis les pieds depuis des mois. Puis, il a affirmé qu'il habitait à Charlottetown. Maintenant, il dit qu'il vit à Kanata. Il rembourse l'argent qu'il doit, mais il prétend qu'il n'a pas escroqué les contribuables canadiens. Il n'avait tout simplement pas compris le formulaire qui indique que sa résidence principale se trouve à moins de 100 kilomètres d'Ottawa. Il n'avait pas compris cette nuance et c'est pourquoi, chaque année, il cochait la case et recevait 20 000 $. Nous observons la même situation avec le sénateur Patterson, qui n'a pas d'adresse fixe.
Nous donnons de l'argent à tous ces sénateurs parce qu'ils affirment qu'ils y ont droit. C'est frustrant. Ils prennent l'argent des contribuables. Ils sont membres d'une institution qui se fie aveuglément à leur parole et à leurs promesses et qui les laissent recevoir 20 000 $ en frais de déplacement et représenter des régions dans lesquelles ils ne vivent pas. Ils n'ont rien à prouver aux Canadiens parce qu'ils pensent être supérieurs à nous. Ce n'est pas un système de gouvernance crédible en ce XXIe siècle.
Nous devons nous occuper du système. Année après année, les sénateurs refusent toutes les propositions de réforme. Ils se sont montrés intransigeants à cet égard, C'est donc à la Chambre des communes et à la population canadienne d'agir. Si nous demandions aux Canadiens ce qu'ils veulent faire, ils répondraient qu'ils veulent se débarrasser du Sénat.
:
Monsieur le Président, je prends la parole au sujet de la motion de l'opposition du NPD dont la Chambre est saisie aujourd'hui. Je vais la lire pour le bénéfice de ceux qui regardent ce débat:
Que, de l’avis de la Chambre, le gouvernement du Canada, en consultation avec les provinces et territoires, devrait prendre des mesures immédiates menant à l’abolition du Sénat du Canada, qui est non élu et non sujet à la reddition de comptes.
De nombreux problèmes sautent aux yeux à la lecture de cette motion. Tout d'abord, selon de nombreux experts, l'abolition du Sénat constituerait une modification fondamentale à la Constitution, ce qui nécessiterait le consentement unanime de 11 assemblées législatives au pays, c'est-à-dire le consentement des 10 provinces et du Parlement du Canada. En outre, d'après l'expérience des deux référendums sur la séparation du Québec qui ont eu lieu dans cette province, sans parler du référendum sur l'accord de Charlottetown, il faudrait non seulement l'assentiment des 10 provinces et du Parlement du Canada pour abolir le Sénat, mais aussi procéder à des référendums populaires ou à un référendum national pour appuyer cette décision des 11 assemblées législatives. D'un point de vue pratique, l'abolition du Sénat est tout simplement irréalisable sur le plan politique.
Pensons aux nombreuses provinces qui, à l'instar du Nouveau-Brunswick ou de l'Île-du-Prince-Édouard, ont adhéré à la confédération à condition d'avoir un nombre donné de sénateurs à la Chambre haute. C'est cette condition qui a convaincu Terre-Neuve de se rallier à la confédération, en 1949. C'est cette condition qui a convaincu l'Île-du-Prince-Édouard d'y entrer, en 1871, si je ne m'abuse. C'est cette condition qui a convaincu les provinces du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse de se joindre au Canada-Uni pour créer la confédération, en 1867. Cette condition a été décisive. Les députés de l'opposition qui proposent avec autant de désinvolture d'abolir le Sénat sont ou bien incroyablement naïfs, ou bien complètement irresponsables.
Aujourd'hui, ces provinces ne consentiraient probablement jamais à l'abolition du Sénat, car celui-ci leur garantit une certaine représentation à la Chambre des communes et au Sénat du Canada. La réalité, n'en déplaise à certains, c'est que l'Île-du-Prince-Édouard, avec ses quelque 140 000 Canadiens, a huit parlementaires — quatre sénateurs et quatre députés — qui sont indissociables. Ils sont indissociables parce qu'une province ne peut pas avoir moins de députés que de sénateurs. Pourquoi donc les Prince-Édouardiens consentiraient-ils à l'abolition du Sénat? Non seulement ils seraient privés de quatre représentants à la Chambre haute, ils risqueraient aussi d'en perdre à la Chambre basse et de ne plus avoir que deux députés, voire un député et demi. Cette motion demande aux habitants d'une province comme l'Île-du-Prince-Édouard d'envisager la possibilité de passer de huit parlementaires — quatre sénateurs et quatre députés — à un et demi.
Après analyse des répercussions de la question, les députés seront peut-être d'avis que son auteur est soit ignorant des faits, soit irresponsable.
Je pourrais parler du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve, et je pourrais parler de la province de Québec. Le fait est que la province de Québec demande depuis longtemps des modifications à la Constitution.
Avant même que nous puissions nous pencher sur l'abolition du Sénat et la Constitution du Canada, il nous faudrait aborder les demandes en instance qui découlent de l'accord du lac Meech et ensuite en partie de l'accord de Charlottetown, demandes qui passeraient en premier dans tout exercice de modification de la Constitution. Je ne pense pas que les Canadiens, ni au Québec ni dans le reste du Canada, veulent rouvrir ces débats constitutionnels qui ont semé la discorde à la fin des années 1980 et au début des années 1990. De ce point de vue également, je crois que la motion ne peut pas être prise au sérieux comme proposition de changement.
Enfin, si cette motion ne doit pas être prise au sérieux et ne doit pas être adoptée, c'est aussi parce que le Sénat est une Chambre importante. Hormis les difficultés actuelles, c'est un fait que toutes les grandes démocraties occidentales ont un système bicaméral. Toutes les grandes démocraties comptent deux Chambres qui composent leur parlement national, ou congrès national, ou assemblée législative nationale, et il y a une raison pour cela. Les lois doivent être faites avec diligence et doivent être scrutées à la loupe avant d'être adoptées. Il faut un système de freins et contrepoids pour s'assurer que le pouvoir ne soit pas trop concentré et que l'État n'abuse pas de ses pouvoirs pour fouler aux pieds les droits des minorités, des particuliers et des régions du pays.
La raison la plus importante pour laquelle la motion ne doit pas être adoptée, c'est que le Sénat est un élément important du Parlement du Canada. Il a été créé pour faire contrepoids au pouvoir de la majorité à la Chambre basse. Nous avons adopté il y a environ un an une loi établissant une nouvelle répartition des sièges et créant de nouvelles circonscriptions dans notre pays. L'opposition s'est prononcée contre cette mesure parce qu'elle ne croit pas que notre Chambre doive être représentative de la population.
Notre gouvernement croit que la Chambre des communes doit être représentative de la population, que chaque vote dans chaque circonscription doit avoir le même poids d'un bout à l'autre du pays. Pour contrebalancer le principe de la majorité qui prévaut à la Chambre des communes, nous avons une Chambre haute qui met dans la balance le poids des petites régions du pays pour empêcher les régions les plus peuplées de dominer. C'est le rôle que jouent d'autres Chambres dans d'autres pays démocratiques, par exemple aux États-Unis, où chaque État compte deux sénateurs. Un grand État comme New York, qui a des millions d'habitants, a deux sénateurs, et de petits États comme Hawaï et l'Alaska ont également deux sénateurs chacun. Le but est de compenser ce qu'on a souvent qualifié de majorité tyrannique de la Chambre basse. C'est pourquoi le Sénat est une institution importante et c'est pourquoi on ne peut pas abolir le Sénat.
La solution aux problèmes actuels du Sénat ne consiste pas à abolir cette institution. Il faut plutôt rendre le Sénat plus responsable. Il faut limiter la durée du mandat des sénateurs, qui siègent actuellement jusqu'à 75 ans, et tenir des consultations populaires à l'issu desquelles les sénateurs pourraient être nommés par le gouvernement.
Le gouvernement du Canada a présenté un renvoi à la Cour suprême sur les questions concernant les limites. Le Parlement peut modifier la loi actuelle pour procéder à deux grandes réformes au Sénat, à savoir la limite du mandat des sénateurs et leur élection au suffrage populaire, de manière à ce qu'il ne soit pas nécessaire de rouvrir la Constitution. Il y a quelques mois, le gouvernement a soumis un renvoi à la Cour suprême concernant les limites de la loi quant à la modification de la durée du mandat des sénateurs, à la tenue de consultations populaires pour choisir les sénateurs, aux exigences constitutionnelles en matière de valeur nette et de qualification foncière dans la province que les sénateurs représentent et à l'abolition du Sénat. Dans le dernier cas, la réponse est assez claire.
À mon avis, les nombreux renvois et décisions de la Cour suprême ont assez clairement établi que l'abolition du Sénat exigerait l'accord d'au moins les deux tiers des provinces, ayant une population représentant 50 % plus un de la population de toutes les provinces, ou le consentement unanime des 10 assemblées législatives provinciales et du Parlement du Canada.
Nous espérons que la décision consécutive à ce renvoi sera prise rapidement, pour que le Parlement puisse adopter sans tarder les changements prévus dans le projet de loi , la Loi sur la réforme du Sénat. J'espère que la Cour trouvera le temps d'étudier le renvoi et de communiquer son jugement au gouvernement du Canada d'ici la fin de la présente année.
La solution dans le cas du Sénat consiste à permettre aux Canadiens de porter un jugement sur le rendement de cette institution. Il revient aux Canadiens d'élire les personnes qui leur paraissent les plus capables de s'acquitter des fonctions de sénateur. Il leur revient de demander des comptes aux sénateurs relativement à leurs mandats échus. C'est exactement ce que permettrait la Loi sur la réforme du Sénat. Grâce à elle, la Chambre haute serait tenue de rendre des comptes, continuerait de s'occuper des affaires du pays et de veiller à ce que les lois soient minutieusement étudiées avant d'être adoptées et de recevoir la sanction royale.
La motion du NPD sur l'abolition du Sénat n'est pas sérieuse. Aucun chef, ni aucun parti dignes de ce nom ne peuvent proposer une telle motion. Elle est pratiquement et politiquement impossible à mettre en oeuvre, et l'adopter engendrerait à nouveau des débats constitutionnels et des référendums comme cela s'est produit au cours des années 1990 et à la fin des années 1980. À dire vrai, elle aurait pour conséquence de concentrer davantage de pouvoir entre les mains de l'exécutif, au détriment du Parlement. Pour toutes ces raisons, c'est une proposition qui n'est pas sérieuse. Ce n'est qu'une manoeuvre opportuniste pour tirer profit des controverses actuelles entourant le Sénat, manoeuvre qui montre bien que l'opposition officielle n'est pas prête à occuper le devant de la scène. Elle n'est pas prête à gouverner.
Je pourrais en dire davantage sur les difficultés que vit le Sénat, mais il faut être conscient de la réalité. De temps en temps, peu importe le parti au pouvoir, des controverses surgissent dans cette enceinte à propos d'un député ou d'un ministre. Personne ne pense que nous devons abolir les Communes à cause de ces controverses. Je n'essaie pas de minimiser les controverses au Sénat. Il est vrai que le Sénat doit faire l'objet d'une réforme. Le Parlement de Westminster a apporté des changements à la Chambre des lords. La présente législature est la dernière où les sénateurs sont nommés pour siéger à la Chambre haute sans aucune consultation populaire, ni autre forme d'approbation.
Il est grand temps que le Canada, le Parlement et les Canadiens bénéficient d'une Chambre haute où la durée maximale des mandats serait de neuf ans — c'est ce que prévoit le projet de loi actuel, bien qu'une durée de huit ans serait acceptable pour bon nombre d'entre nous —, et où le choix des sénateurs serait le fruit de consultations populaires ou d'élections. Ces changements ont déjà trop tardé. Nous devons les mettre en place le plus rapidement possible. Je crois franchement que, s'il avait le consentement de tous les députés, le gouvernement serait prêt à adopter ce projet de loi rapidement à la Chambre afin qu'il puisse être confié au Sénat pour y être débattu et adopté.
La réforme du Sénat est essentielle pour une raison très importante: si nous n'agissons pas, c'est la légitimité même du Parlement du Canada qui en sera affaiblie. De moins en moins de Canadiens votent lors des élections. Leur confiance envers les institutions politiques va en déclinant. C'est ce que démontrent des sondages réalisés au cours des dernières années, et cette tendance a été confirmée par un sondage récent. En tant que parlementaires, nous contribuons à cette défaveur quand nous proposons volontairement des mesures qui n'ont qu'un but politique, ne pourraient jamais être adoptées et, pire encore, auraient pour seul effet d'affaiblir cette institution.
Si des députés ont des questions à ce sujet, j'y répondrai avec plaisir. Ce que propose l'opposition est une fumisterie. C'est une proposition irresponsable, voire naïve. Elle révèle que l'opposition ne comprend absolument pas comment les démocraties du monde entier ont structuré leur Chambre haute afin qu'elle fasse contrepoids à la structure de la Chambre basse, fondée sur la majorité.
Il existe une solution si nous souhaitons rendre le Sénat plus responsable et permettre aux Canadiens d'avoir leur mot à dire sur la performance de la centaine de sénateurs qui y siègent. Cette solution, c'est de limiter la durée des mandats et de permettre que les sénateurs soient élus.
Au lieu de débattre de cette motion à la Chambre, nous devrions débattre du projet de loi , la Loi sur la réforme du Sénat, présenté par le gouvernement. Nous pourrions ainsi apporter ces deux changements fondamentaux à la Chambre haute, la moderniser et préserver sa pertinence pour le XXIe siècle et pour la démocratie canadienne.
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Monsieur le Président, c'est pour moi un grand plaisir d'appuyer la motion présentée par l'excellent député de .
Elle vaut d'ailleurs la peine d'être lue à voix haute, tellement elle est savoureuse:
Que, de l’avis de la Chambre, le gouvernement du Canada, en consultation avec les provinces et territoires, devrait prendre des mesures immédiates menant à l’abolition du Sénat du Canada, qui est non élu et non sujet à la reddition de comptes.
On y propose d'abolir le Sénat. Quelle musique à mes oreilles. Nous devrions en effet prendre les mesures nécessaires pour faire du Canada une meilleure démocratie. Je suis fier de représenter un parti qui prône une telle réforme depuis longtemps. J'espère sincèrement que tous les partis vont appuyer la motion dont nous sommes saisis.
Selon moi, quand nous abordons des sujets comme celui-là, nous devons prendre du recul et envisager la situation d'un point de vue romantique. Au lieu de nous attarder aux détails de la vie quotidienne, nous devons regarder les choses en fonction de la période historique dans laquelle nous vivons.
Nous ne devons pas nous arrêter à la manière dont les journaux vont parler du présent débat et de nos discussions et songer plutôt à ce que les gens vont en penser dans 100 ans d'ici. Voilà l'attitude que nous devrions faire nôtre. Il est question d'un changement structurel majeur, et ce n'est pas le premier que connaît notre pays. En effet, le Canada a apporté de nombreux changements structuraux au fil de l'évolution de son régime démocratique. Nous devons songer à la manière dont les Canadiens — d'aujourd'hui comme ceux des générations à venir — se souviendront des efforts que nous faisons en ce moment et que nous ferons au cours des prochains mois.
Pour bien situer les débats dans leur contexte, je trouve les biographies politiques fort utiles. D'aucuns trouveront peut-être qu'il s'agit d'une lecture plutôt aride, mais je rappelle qu'il est essentiel de bien comprendre le contexte. Je viens justement de terminer une biographie merveilleuse, rédigée par Michael Cross, qui enseigne à l'Université Dalhousie. Durant 10 ans, il a fait des recherches et écrit sur Robert Baldwin, à qui l'on doit — ainsi qu'à son père et à LaFontaine — l'avènement du gouvernement responsable au Canada. C'est en effet le tandem Baldwin-LaFontaine que nous devons remercier pour avoir aujourd'hui un gouvernement responsable.
J'invite tous les députés à feuilleter cet ouvrage parallèlement au débat sur l'abolition du Sénat.
Bien des gens voudraient savoir pourquoi ils devaient lire une biographie de Robert Baldwin, l'artisan de la réforme municipale au Canada, l'inventeur du concept de gouvernement responsable. Parce qu'il est important de voir à quel point il s'est dévoué pour transformer et améliorer la démocratie au Canada. Grâce au gouvernement responsable, son triomphe, notre gouvernement rend davantage de comptes à la population que la monarchie.
Tout comme nous remontons à l'époque de Robert Baldwin, du milieu des années 1800 jusqu'au XXIe siècle, si des gens du XXIIe siècle se penchaient sur notre époque, je pense qu'ils constateraient qu'il y a aujourd'hui des personnes tout aussi passionnées que Robert Baldwin, qui présentent des propositions comme celle dont nous sommes saisis.
Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole.
Les réformes liées au gouvernement responsable ont été réalisées d'une façon typiquement canadienne, sans révolution. Cela montre la valeur de la Chambre, en ce sens qu'elle permet le débat. C'est dans son enceinte que ces discussions devraient avoir lieu. C'est cette institution qui devrait prendre les décisions pour le Canada.
Il faut abolir le Sénat car il représente un boulet pour la démocratie canadienne. Même le puissant Parti conservateur, avec ses racines réformistes, a été victime de sa capacité de miner le contrôle public de la politique dans notre pays.
Le et ses prédécesseurs du Parti réformiste et de l'Alliance canadienne ont tous promis de réformer le Sénat. En fait, le premier ministre a qualifié le Sénat de relique du XIXe siècle, de relique de l'époque Baldwin. En 2004, il a promis qu'il ne nommerait personne au Sénat.
Toutefois, je crains que le Sénat ait eu le meilleur sur lui et sur son parti, au point où leur authentique passion pour la réforme a été anéantie. A preuve, ce projet de loi édulcoré qui nous est soumis par l'entremise du Sénat. Chose étonnante, et proprement stupéfiante, les députés d'en face défendent le Sénat, qu'ils qualifient d'institution de grande valeur. Si j'avais entendu cela il y a 10 ans, j'aurais cru rêver.
Après avoir déposé plusieurs projets de loi de réforme du Sénat qui ne sont allés nulle part — surtout en raison d'un manque d'effort —, le a jusqu'ici nommé 58 sénateurs.
Si les fondateurs de ce mouvement réformiste de l'Ouest — alors appelé l'Alliance canadienne, qui a fini par s'unir au Parti progressiste conservateur — avaient promis à l'époque de défendre le Sénat lorsqu'ils obtiendraient un gouvernement majoritaire, les gens auraient quitté la salle et déchiré leur carte de membre. Je trouve absolument stupéfiant que ce soit le discours qu'on entend ici.
Comme l'ont souligné plus tôt mes collègues, à l'instar de la presse écrite et des médias électroniques, le comportement des sénateurs Brazeau, Duffy et Wallin montre bien pourquoi le Sénat n'est plus pertinent et qu'il faut vraiment l'abolir. Il s'agit d'une institution dont les membres ont peut-être, à un moment donné, exécuté un travail important pour le pays. Mais ce n'est plus le cas aujourd'hui, et il n'y a certainement pas lieu d'être fier de cette institution qui, malheureusement, est devenue une vraie caricature.
Faibles et caractérisées par la mollesse, les réformes proposées par les conservateurs n'atteindront pas l'objectif visé.
Le Sénat coûte aux Canadiens 92 millions de dollars chaque année, et ce qui est encore plus important, le Sénat bloque des projets de loi adoptés par la Chambre des communes. Nous sommes la Chambre élue. C'est de notre institution que les projets de loi doivent originer, et le Sénat, aujourd'hui et depuis longtemps, bloque d'importants projets de loi que les Canadiens veulent voir mis en oeuvre.
Ce blocage n'est pas vraiment fondé sur un second examen objectif, comme on disait à l'époque où l'on avait une vision romantique de cette institution. Non, ce qui est vraiment en cause, c'est plutôt la politique partisane.
Certains sénateurs s'efforcent de mettre en pratique cette vision romantique, et j'ai d'ailleurs beaucoup de respect pour le sénateur Dallaire. Je pense qu'il sert bien notre pays. Peut-être est-il un sénateur capable de respecter des valeurs fondées sur l'éthique. Mais je ne crois pas que beaucoup de sénateurs le fassent actuellement, et je crois qu'il n'y a aucun moyen de contrer cela, sinon d'abolir le Sénat.
Les ministériels ont plusieurs fois tenté de légiférer sans succès, bien sûr, mais on a maintenant fait un renvoi à la Cour suprême, laquelle va donner son opinion juridique sur la constitutionnalité de mesures comme la limitation du mandat des sénateurs, l'élection des sénateurs et l'élimination de l'exigence, pour les sénateurs, de résider dans la province qu'ils représentent; et bien sûr, nous proposons maintenant d'abolir le Sénat.
J'ai hâte de prendre connaissance de la décision de la Cour suprême — ça me donnera de la lecture pour meubler mes vendredis soirs —, mais je ne peux m'empêcher de penser qu'il s'agit là d'une tactique dilatoire de la part des conservateurs. Ils ont eu des années pour réfléchir à cette question, mais ce n'est que maintenant qu'ils s'y attaquent, des sénateurs s'étant fait prendre la main dans le sac.
Les conservateurs proposent des motions et défendent énergiquement le Sénat, ce qui est inimaginable aujourd'hui, dans l'espoir que le dossier soit graduellement effacé de l'actualité et que tout revienne à la normale.
Ils espèrent que ces scandales s'évanouiront et seront oubliés avant que la décision ne soit rendue, mais je ne peux m'empêcher de penser que les écarts de conduite qui font les manchettes aujourd'hui seront remplacés par d'autres frasques. Le fiasco des affaires Duffy et Wallin s'effacera peut-être quelque peu de la mémoire collective, mais il y en aura d'autres, parce que le Sénat n'a pas de comptes à rendre. Les sénateurs n'ont vraiment aucune incitation à dépenser judicieusement l'argent des contribuables.
Cela ne s'applique pas à tous les sénateurs. Il y a dans le lot des gens qui ont une réputation extraordinaire, mais je crains que d'autres continuent de porter atteinte au Sénat.
Le moment est venu de faire preuve de clairvoyance. Pour revenir encore une fois à Baldwin et au gouvernement responsable qui, à l'époque, pouvait sembler un rêve inatteignable au Canada, celui-ci a été réalisé à force de volonté politique et, même si l'abolition du Sénat pose des difficultés, nous ne devons pas nous décourager pour autant.
Le même argument vaut pour le droit de vote des femmes, ou encore le droit de vote des Autochtones, la Déclaration des droits au Canada ou la Charte des droits et libertés. Ce sont tous des changements institutionnels majeurs qui étaient nécessaires et qui ont exigé de grands efforts politiques. Nous voulons ajouter une autre réalisation à cette liste, nommément l'abolition du Sénat.
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Monsieur le Président, je suis particulièrement heureuse de prendre la parole aujourd'hui alors que nous débattons d'une proposition néo-démocrate visant à abolir le Sénat.
Je crois que cette institution désuète, archaïque, illégitime et non démocratique doit disparaître le plus rapidement possible. Avec le Sénat actuel, nous avons le pire des deux mondes. Non élus et quasiment irrévocables malgré leurs pires frasques, les sénateurs ont la prétention de représenter les régions du Canada et le pouvoir effectif de bloquer les mesures adoptées par la Chambre des communes qui, elle, est élue. C'est démocratiquement inadmissible.
Avant d'aller plus loin et d'expliquer pourquoi le Sénat devrait être aboli, je voudrais mentionner que notre motion précise que l'abolition devrait se faire en consultation avec les provinces et les territoires. Nous reconnaissons que toute réforme touchant à l'équilibre des institutions de la fédération doit impliquer les parties prenantes. Nous souhaitons la disparition du Sénat le plus rapidement possible, mais cela doit être fait correctement en respectant les provinces. On pense qu'il est possible de s'entendre.
D'une part, nous constatons que, depuis 1970, toutes les provinces ont aboli leur chambre haute reconnaissant ainsi l'inutilité de leur propre Sénat. D'autre part, quant au Sénat canadien, l'Ontario, la Nouvelle-Écosse et le Manitoba se sont prononcés en faveur de son abolition. Pour sa part, la première ministre de la Colombie-Britannique a déclaré que le Sénat n'a plus d'utilité.
Le principal argument en faveur de l'abolition du Sénat, c'est son absence de légitimité démocratique. Les sénateurs ne sont pas élus. Ils ont le pouvoir de mettre en oeuvre, d'amender et de bloquer les projets de loi sans avoir de comptes à rendre à la population.
À mon avis, l'exemple le plus choquant, c'est lorsqu'en 2010, le Sénat, à majorité conservatrice, a bloqué le projet de loi de la responsabilité en matière de changements climatiques que le NPD avait réussi à faire adopter par une majorité de représentants élus de la population. Par un tour de force démocratique, une poignée de sénateurs non élus est parvenue à renverser une décision prise par les députés de la Chambre des communes.
Par ailleurs, en plus de ne pas être élus par la population, les sénateurs sont quasi irrévocables. Même s'ils votent contre les intérêts de la population, même s'ils se comportent mal, comme on l'a vu au cours des derniers mois, même s'ils abusent de leur compte de dépenses, ils ont un emploi à vie à la Chambre haute. Seule une offense criminelle peut les chasser.
Le comportement déshonorant des sénateurs et l'incapacité de l'institution à s'auto-réglementer ont fini par discréditer le Sénat aux yeux des Canadiens. Depuis plusieurs semaines, les révélations concernant l'abus des fonds publics ont dégoûté les contribuables.
Pensons au sénateur Duffy qui prétend habiter l'Île-du-Prince-Édouard afin de bénéficier d'une indemnité pour sa résidence cossue d'Ottawa. Pensons à la sénatrice Wallin qui est censée représenter la Saskatchewan, mais qui habite à Toronto, ou au sénateur Mac Harb, qui a réclamé 31 000 $ en allocation d'hébergement depuis 2010 pour une résidence secondaire à Ottawa, alors qu'en fait, il habite Ottawa depuis toujours.
Je me permets de faire une petite parenthèse. J'ai été abasourdie de voir, en fin de semaine, le sénateur Carignan défendre les dépenses excessives des sénateurs en comparant leurs dépenses de déplacement à celles des députés. Comment peut-on faire preuve d'autant de mauvaise foi? Comment peut-on oser comparer les dépenses de déplacement d'un sénateur à celles d'un élu qui sillonne sa circonscription pour prendre le pouls de la population et pour expliquer les politiques adoptées à Ottawa. Cette déclaration du sénateur Carignan, à elle seule, démontre à quel point les gens de l'autre Chambre sont déconnectés de la réalité.
Pour revenir à la motion dont on discute cet après-midi, en plus de ces cas d'abus de fonds publics, il y a toutes ces aberrations qui ont profondément choqué les Canadiens. Je pense au cas de Patrick Brazeau, qui pourrait encore siéger 36 ans au Sénat, et ce, malgré le fait qu'il se soit absenté très souvent du Sénat, qu'il ait abusé de son allocation de résidence et qu'il fasse face à des accusations de violence domestique et d'agression sexuelle.
On pourrait aussi rappeler le cas du sénateur Lavigne, un libéral qui a fini par démissionner du Sénat après avoir été condamné pour abus de confiance. Il avait fait faire des travaux de jardinage sur sa propriété de Wakefield par un employé du Sénat. Bien sûr, ces travaux ont été faits pendant les heures de bureau, aux frais des contribuables. Curieusement, si l'employé n'avait pas eu l'incompétence de couper les arbres du voisin et de provoquer une bataille juridique, cette histoire n'aurait peut-être jamais été connue et le sénateur Lavigne serait toujours membre du Sénat.
Le fait que les sénateurs ne soient pas choisis au mérite accentue la crise de légitimité de l'institution. De tout temps, ils ont été nommés selon des critères partisans. Mike Duffy, bien avant qu'il ne soit nommé sénateur, décrivait d'ailleurs avec dérision ces récompenses à des amis du régime comme étant « the taskless thanks », par opposition à des « thankless tasks ».
Bien qu'il ait dit qu'il ne nommerait jamais de sénateurs non élus, l'actuel a nommé 58 sénateurs depuis 2006. Comme ses prédécesseurs, il y a nommé des dizaines d'amis du régime conservateur.
Pensons par exemple à Doug Finley, directeur national de la campagne du Parti conservateur en 2006 et 2008; Irving Gerstein, ex-président du fonds électoral des conservateurs du Canada; Don Plett, ex-président du Parti conservateur; Carolyn Stewart-Olsen, ex-directrice des communications du ; Michel Rivard et Leo Housakos, d'importants organisateurs conservateurs au Québec; Stephen Greene, ex-chef de cabinet de Preston Manning. On pourrait continuer avec des sénateurs comme Josée Verner, Claude Carignan, Suzanne Duplessis, Fabian Manning et Percy Mockler, d'anciens députés ou candidats conservateurs.
En fait, ce gouvernement a tellement politisé le Sénat que même l'ex-sénateur Michael Fortier en a eu des haut-le-coeur. Cette fin de semaine, il a d'ailleurs déclaré à Evan Solomon, en anglais:
[Traduction]
« J'étais très naïf à l'époque. [...] Je croyais que ce serait un endroit différent de ce que j'ai vu. J'ai trouvé le Sénat extrêmement partisan des deux côtés, y compris le mien. Je trouvais cela très agaçant parce que ces gens tentaient de jouer le rôle d'un député et ils ne le sont pas. »
[Français]
Je parle des conservateurs, mais les libéraux n'ont pas fait mieux. Les sénateurs Dennis Dawson et Francis Fox, par exemple, deux ex-députés du Parti libéral, ont été nommés au Sénat en août 2005 par Paul Martin. Depuis, ils s'occupent activement d'organisation électorale pour le compte du Parti libéral. C'est honteux.
Depuis 2006, le a tenté de réformer le Sénat à la pièce. Il a proposé de limiter la durée du mandat des sénateurs et de consulter la population pour la sélection des sénateurs. Or, ces propositions ne rendent pas le Sénat plus démocratique. La consultation de la population n'est pas contraignante pour le premier ministre et rien ne peut obliger un sénateur à démissionner après huit ans, comme le propose le premier ministre.
Depuis sept ans, la réforme du Sénat des conservateurs se heurte à un mur constitutionnel. La Cour suprême devra trancher à l'occasion d'un renvoi qui vient d'être fait par le gouvernement conservateur. Le gouvernement peut-il aller de l'avant sans l'accord des provinces? Rien n'est moins sûr.
Le devrait prendre acte du fait qu'il est impossible de réformer cette institution. Depuis 1874, à peine sept ans après la Confédération, le Sénat a fait l'objet de critiques et d'appels en faveur d'une réforme. En fait, le 12 avril 1874, la Chambre des communes étudiait une motion recommandant « que notre constitution devrait être changée de manière à conférer à chaque province le pouvoir de nommer ses propres sénateurs et de définir le mode de les nommer. » Nous voilà 139 ans plus tard à débattre encore de cette question.
Je relisais un discours du devant le Vancouver Board of Trade en 2007. J'en cite un court extrait:
Nous sommes profondément convaincus que le Sénat doit changer. Et s’il ne peut être réformé, je crois que la plupart des Britanno-colombiens, comme d’ailleurs la plupart des Canadiennes et des Canadiens, en viendront finalement à la conclusion qu’il doit être aboli.
J'invite tous mes collègues de la Chambre à appuyer la motion du NPD afin d'abolir le Sénat.
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Monsieur le Président, je suis ravi de participer à un débat portant sur un sujet fort pertinent dans le Canada d'aujourd'hui, car depuis environ un mois, le Sénat semble constamment faire la manchette. De nombreux Canadiens voudront entendre les propos des députés sur la pertinence du Sénat et sur la question de son abolition, comme le propose le NPD, ou de sa réforme, comme le propose le gouvernement.
Je commencerai par formuler quelques remarques personnelles et décrire le cheminement qui, au fil des ans, m'a mené à ma position actuelle sur le Sénat. Je dois dire qu'avant de devenir député, j'étais plutôt en faveur de l'abolition du Sénat. Je ne voyais pas vraiment, alors, la raison d'être du Sénat, car je ne comprenais pas son rôle. Je crois que c'est le cas de la majorité des Canadiens. Malheureusement, si la plupart des Canadiens savent que le Sénat existe et qu'il est non élu, ils ne comprennent pas vraiment le rôle qu'il joue au Parlement et dans la société d'aujourd'hui. J'étais de ce nombre.
Toutefois, depuis que j'ai été élu député, en 2004, j'ai changé d'opinion. Au fil des ans, j'ai constaté que le Sénat joue un rôle important et valable. Toutefois, je crois que sa structure actuelle laisse à désirer.
Depuis la création de la Confédération, il y a plus d'un siècle, il est arrivé — tous les députés pourraient en témoigner — que des comités du Sénat étudient des questions importantes pour tous les Canadiens. Je pourrais énumérer de nombreux rapports produits par les comités du Sénat qui ont influencé non seulement la Chambre, mais aussi la perception de la population à l'égard de certaines questions.
Il n'est pas tout à juste de dire qu'il faut abolir le Sénat parce qu'il n'est plus d'aucune utilité. Je crois que c'est faux, depuis que j'ai vu celui-ci à l'oeuvre. Toutefois, il faut absolument lui apporter certains changements fondamentaux afin qu'il puisse fonctionner de manière optimale. Bien franchement, je parle ici d'une réforme.
À l'heure actuelle, comme tout le monde le sait, les sénateurs sont nommés. Même s'il existe une certaine limite quant à la période qu'un sénateur peut passer à la Chambre haute, celle-ci est beaucoup trop longue. En théorie, une personne pourrait être nommée à la Chambre haute dès l'âge de 30 ans et y siéger sans crainte de représailles pendant 45 ans. C'est inacceptable. Nous devons limiter la durée du mandat des sénateurs. Toutefois, il faudrait débattre de la durée en tant que telle de leur nomination au Sénat. Le gouvernement actuel a suggéré un mandat non renouvelable de neuf ans, mais on pourrait certainement en discuter. Le gouvernement pourrait faire preuve d'une certaine souplesse si on pouvait enfin tenir un débat constructif au sujet d'une réforme sérieuse. Malheureusement, il semble impossible d'entamer un dialogue constructif avec l'opposition sur cette question.
Outre le fait de limiter la durée du mandat des sénateurs — et je reviendrai là-dessus dans un moment —, il y a une autre réforme fondamentale que j'aimerais voir être mise en oeuvre au Sénat. Il s'agit de la façon dont les sénateurs sont appelés à siéger à la Chambre haute. Comme je l'ai mentionné, à l'heure actuelle, les sénateurs sont nommés à la Chambre haute. C'est inacceptable, surtout parce que les sénateurs ne sont pas assujettis à l'obligation requise de rendre des comptes.
À l'heure actuelle, comme nous le savons tous, il incombe surtout aux sénateurs de représenter les régions d'où ils sont originaires. Toutefois, comme ils sont nommés, il semble que la reddition de comptes soit insuffisante. Si un sénateur est nommé, puis qu'il ne représente pas adéquatement sa région, comment peut-on l'obliger à rendre des comptes quant à son comportement?
Ils ne peuvent pas être congédiés. Je suppose qu'ils pourraient être exclus du Sénat s'ils avaient une conduite regrettable. Mais, même en pareil cas, ce n'est qu'en de rares circonstances qu'une personne peut être exclue du Sénat.
À l'inverse, ici à la Chambre, nous avons tous des comptes à rendre à nos électeurs. Pourquoi? Parce que nous sommes élus. Si nous ne représentons pas nos électeurs d'une manière qui les satisfait, nous risquons de perdre nos emplois, car, tous les quatre ans environ, nous devons nous présenter devant l'électorat. Des élections ont lieu, et elles constituent essentiellement un référendum sur notre travail. Si mes électeurs ne sont pas satisfaits du travail que je fais, ils ont le droit, aux prochaines élections fédérales, à la prochaine occasion, d'élire quelqu'un d'autre pour me remplacer et d'exprimer leur insatisfaction. Mais au Sénat, les électeurs de la région représentée par un sénateur n'ont pas cette possibilité. Une fois qu'un sénateur est nommé, les électeurs de la région qu'il est censé représenter ne disposent d'aucun moyen de l'obliger à leur rendre des comptes. C'est tout à fait injuste.
Par conséquent, je crois fermement qu'il devrait y avoir des élections sous une forme ou une autre. On peut toujours débattre pour savoir s'il s'agirait de consultations populaires ou d'élections directes. Mais, une chose est sûre, il nous faut établir des règles faisant en sorte que les sénateurs aient des comptes à rendre aux personnes qu'ils représentent.
Nos mandats de représentants élus ont une durée limitée. Parfois, ces mandats ne sont que de 18 mois et parfois, ils atteignent quatre ans et demi, car ils vont d'élections en élections. Cependant, ils ne peuvent pas s'étirer jusqu'à un maximum de 45 ans.
La première fois que j'ai été élu, en 2004, ma formidable avance était de 122 voix. Vous pouvez être certains que, dès ce moment, j'ai prêté une oreille très attentive aux besoins et aux demandes de mes électeurs; je savais qu'à défaut d'être leur porte-parole fidèle, je courais le risque, aux prochaines élections, de ne pas être réélu. Voilà le vrai sens du mot responsabilité. Et nous avons besoin de ce genre de responsabilité à la Chambre haute. C'est pourquoi il nous faut une réforme du Sénat.
Malheureusement, les projets de réforme que nous avons soumis à la Chambre à quelques occasions, pour qu'elle en débatte, ont été bloqués ou rejetés par les députés de l'opposition. C'est pourquoi nous croyons agir de manière correcte et prudente en demandant à la Cour suprême de nous donner son avis.
Nous avons soumis à la Cour suprême quatre questions fondamentales concernant le Sénat et sa possible réforme. La première concerne la limitation de la durée du mandat. Nous voulons que la Cour suprême indique au Parlement s'il est habilité, en vertu de la Constitution, à limiter la durée du mandat des sénateurs. Nous voulons aussi que la Cour suprême commente le processus de sélection et indique s'il serait possible et viable, sur le plan constitutionnel, de sélectionner les sénateurs autrement qu'au moyen du processus de nomination actuel. En outre, nous voulons que la Cour suprême donne son opinion sur le nombre de sénateurs pour chaque région et sur les exigences en matière de résidence. Nous voulons également que la Cour suprême se prononce sur la question dont nous sommes saisis aujourd'hui, à savoir si le Sénat pourrait être aboli sans qu'il soit nécessaire de modifier la Constitution.
Quiconque a étudié la Constitution — et nous avons un grand nombre d'universitaires à la Chambre qui sont très versés dans le sujet — conviendrait que, bien qu'elle soit absolument nécessaire, elle peut se révéler à l'occasion un document extrêmement complexe. On se demande encore, même pour les questions fondamentales concernant la réforme du Sénat, si des modifications constitutionnelles seraient nécessaires et, dans l'affirmative, quelles devraient être ces modifications.
Certains diraient que, pour certaines initiatives de réforme, la règle 7/50 devrait être respectée. Pour ceux qui l'ignorent, cette règle signifie que, pour que certaines modifications constitutionnelles puissent être proposées, l'assentiment d'au moins sept provinces représentant au moins 50 % de la population du Canada est requis. Toutefois, d'autres, au sujet de la même initiative de réforme démocratique, diraient que nous ne devrions pas suivre la règle 7/50 et qu'il nous faut un consentement unanime. Cette question n'est pas tout à fait claire dans la Constitution même et fait l'objet de débats entre universitaires et experts, même dans le cadre des initiatives de réforme démocratique que nous proposons. Le respect de la règle 7/50 est-il nécessaire ou faudra-t-il un consentement unanime?
Il m'apparaît franchement insensé qu'en tant que parlementaires, nous prétendions savoir comment le Sénat pourrait être réformé. Voilà pourquoi nous avons demandé l'opinion de la Cour suprême à ce sujet. Je crois que, quand la Cour suprême aura répondu à nos multiples questions, nous saurons mieux à quoi nous en tenir pour planifier les prochaines étapes. Mais je ne crois pas que nous soyons actuellement en mesure de traiter la question que soulève l'opposition, c'est-à-dire de déterminer si le Sénat devrait être aboli ou non, puisque nous ne savons pas si la Constitution nous donne le droit d'abolir cette institution. Les députés de l'opposition ont présenté d'innombrables arguments, mais je les mets au défi d'affirmer que la Constitution nous donne le droit d'abolir le Sénat si nous le souhaitons. Je mets les députés de l'opposition au défi de l'affirmer car, à ma connaissance, nous ne savons pas encore si nous avons ce droit.
La Cour suprême se prononcera à ce sujet, idéalement dans les plus brefs délais. Si jamais la réponse laisse entendre que le Parlement a, à l'intérieur de certains paramètres, le pouvoir constitutionnel d'apporter des changements fondamentaux au Sénat, notamment de l'abolir, il sera alors pertinent de lancer un débat sur l'avenir du Sénat. Je crois fermement que nous devons tenter de réformer le Sénat avant de l'abolir et avant même d'envisager son abolition. Comme je l'ai mentionné au début de mon allocution, je crois que le Sénat peut jouer un rôle crucial dans la société canadienne mais que son fonctionnement doit être considérablement modifié.
Les députés de l'opposition semblent prétendre qu'il n'existe plus aucun espoir pour le Sénat, qu'il n'y a plus rien de bon à en tirer. Cela m'apparaît comme un manque de vision de leur part. S'ils regardaient de près ce que le Sénat a accompli au cours des 100 dernières années, ils comprendraient, comme je le comprends moi-même, que le Sénat a un rôle essentiel à jouer. Il a grandement contribué à la société canadienne au fil des ans, et je crois qu'il continuera d'apporter une contribution vitale au Parlement et aux Canadiens de partout au pays.
En raison de la couverture médiatique négative dont le Sénat fait l'objet depuis quelque temps, je sais qu'il est difficile pour les parlementaires de parler d'une réforme de cette institution. J'en suis conscient. Toutefois, pour le moment, je crois que nous devons, dans la mesure du possible, mettre de côté les récentes controverses entourant le Sénat afin de considérer les réalisations de cette institution sur une plus longue période.
Si je n'étais pas persuadé que le Sénat a apporté une contribution essentielle à la démocratie et à la société canadienne, je serais le premier à dire qu'il faut s'en débarrasser. Je ne suis pas de cet avis. Je crois, comme beaucoup de Canadiens, que le Sénat peut continuer de jouer un rôle essentiel dans la société actuelle. Nous devons seulement y apporter certains changements essentiels, c'est-à-dire le reformer.
Par conséquent, comme l'ont fait aujourd'hui certains de mes collègues, j'aimerais demander le consentement unanime de la Chambre pour proposer une motion. Je propose que, nonobstant tout article du Règlement ou usage habituel de la Chambre, le projet de loi , soit réputé lu une deuxième fois et renvoyé à un comité plénier, réputé étudié en comité plénier, réputé avoir fait l'objet d'un rapport sans amendement, réputé adopté à l'étape du rapport et réputé lu une troisième fois et adopté.
Si l'opposition veut vraiment que le Sénat soit utile à la société canadienne, je crois qu'elle appuiera cette motion à l'unanimité.
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Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir aborder un de mes sujets préférés.
J'aimerais préciser que je partagerai mon temps de parole avec la députée de .
J'aborderai le sujet sous un angle quelque peu différent de celui d'autres députés, tout simplement parce que, selon moi, bon nombre des scandales actuels sur les dépenses et le lieu de résidence ne constituent pas le problème, mais un symptôme de ce problème. Je suis heureux que les Canadiens y portent attention, car ces scandales font partie du problème, sans toutefois former le plus gros problème. Le plus gros problème, c'est la direction que nous empruntons. Nous dirigeons-nous vers le statu quo, ou vers un Sénat élu?
Il faudrait reconnaître dès maintenant que les Canadiens croient que le Sénat siège sans trop faire de mal. On pourrait se demander quel bien il fait, mais pourquoi faire des vagues? Il ne faut pas oublier que, en vertu du système actuel, le vote de chaque sénateur nommé pèse plus lourd que celui des députés élus, car les projets de loi doivent être approuvés par les deux Chambres. Comme il y a moins de sièges au Sénat, chaque vote pèse plus lourd selon notre système parlementaire. Il ne s'agit pas là d'une quelconque frivolité de notre système parlementaire, mais bien d'une de ses composantes essentielles.
Nos concitoyens doivent garder à l'esprit que ces scandales impliquent ceux qui adoptent nos lois, et qu'ils n'ont de comptes à rendre à personne. À la fin de la présente législature, ceux d'entre nous qui souhaitent être réélus devront se présenter devant les Canadiens et leur rendre des comptes au sujet des décisions qui auront été prises et des mesures qui auront, ou pas, été adoptées. L'autre endroit ne rend pas de comptes aux patrons, qui sont les Canadiens. Voilà le coeur du problème.
Il est selon moi essentiel de comprendre que nous ne pouvons pas nous permettre d'adopter l'approche canadienne traditionnelle, qui consiste à emprunter la voie du milieu. Nous n'aimons pas ce qui est trop chaud ou trop froid. Nous préférons le confort douillet du juste milieu. C'est la réalité canadienne. Nous recherchons les compromis et les moyens de s'entendre.
Le problème, dans ce cas-ci, c'est que la solution qui semble être la voie du milieu est aussi dangereuse que le statu quo. Je dirais qu'elle est même plus dangereuse. Le vote n'est pas le juste milieu entre le statu quo ou l'abolition. Ce n'est pas la voie du milieu. Je suis outré que des députés de l'Ouest accepteraient d'avoir un Sénat élu, de donner encore plus de pouvoirs aux sénateurs et de les laisser utiliser tous les pouvoirs que leur confère la Constitution. Si je me portais candidat au Sénat et que j'étais élu, j'exercerais tous les pouvoirs que me conférerait mon mandat, comme je le fais actuellement en tant que député.
Voici ce qu'a déclaré la Cour suprême du Canada en 1980 concernant un Sénat élu:
La substitution d'un système d'élection à un système de nomination implique un changement radical dans la nature d'un des organes du Parlement.
La Cour suprême du Canada a déclaré qu'un système d'élection est un changement radical. Voici ce que cela signifierait: la Colombie-Britannique, qui compte plus de 4,5 millions d'habitants, obtiendrait six sièges au Sénat; l'Alberta, qui compte 3,8 millions d'habitants, obtiendrait six sièges; le Manitoba, qui compte 1,2 million d'habitants, obtiendrait six sièges; la Saskatchewan, qui compte à peine plus d'un million d'habitants, obtiendrait six sièges; Terre-Neuve, qui compte 512 000 habitants, obtiendrait six sièges et, juste pour obtenir un chiffre rond, l'Île-du-Prince-Édouard, qui compte 150 000 habitants, obtiendrait quatre sièges.
Pourquoi diable les ministériels, surtout ceux de l'Ouest, voudraient-ils qu'il y ait des élections sénatoriales, quand on sait que les chiffres sont aussi injustes et que ça confirmerait cette disparité? Personnellement, si je représentais une circonscription britanno-colombienne, je commencerais chacune de mes interventions sur le Sénat en rappelant qu'il n'est pas juste et pas démocratique que le nombre de sièges associé à ma province ne soit pas proportionnel à sa population et qu'il faudrait que les choses changent.
En fait, il y a à peine une heure, j'assistais à la séance du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, et toute la question des rapports des commissions de délimitation des circonscriptions électorales se résume au nombre d'électeurs par circonscription, ce qui constitue un élément central de notre démocratie. Or, à ce chapitre, le Sénat défavorise nettement l'Ouest du pays, et voilà que les ministériels s'apprêtent à entériner cet état de fait, à empirer les choses et à perpétuer indéfiniment cette injustice.
Je tiens à faire savoir à mes amis de l'Ouest que, chaque fois qu'il en aura l'occasion, l'Ontarien que je suis va se battre pour qu'ils soient représentés adéquatement, et ce, même si leurs propres députés refusent de le faire.
Quelques points avant de conclure.
On parle souvent des bons coups du Sénat et de son bon travail. Il est en effet possible de recenser une série d'excellentes études qui nous ont certes été très utiles, mais la question n'est pas là. Il faut savoir si les gens qui ont mené ces études devraient avoir le droit de voter les lois du pays.
Voilà le coeur du problème. Il n'est nullement question de la qualité des rapports sénatoriaux ni des bons coups de la Chambre haute. Nous devons déterminer si, oui ou non, les sénateurs devraient avoir le droit de porter un jugement sur nos lois et de les faire adopter, surtout quand on sait que leur voix a plus de poids que la nôtre. Est-ce vraiment ainsi que nous envisageons la démocratie moderne?
Et si les bons coups du Sénat viennent à nous manquer, eh bien il y a énormément de Canadiens qui peuvent être nommés à une commission royale, à un groupe de travail ou à un comité indépendant. Il y a tout plein de gens que ça intéresserait. Ce ne serait pas gratuit, mais ce serait certainement moins cher que les 100 millions que nous coûte le Sénat chaque année. Au moins, nous ne conférerions pas à ces gens le pouvoir de voter nos lois. En démocratie, seuls ceux qui ont des comptes à rendre devraient avoir le droit de voter les lois.
Soit dit en passant, la proposition actuelle du gouvernement visant à élire les sénateurs signifie que, en vertu de la loi, ils ne peuvent pas être assujettis à la reddition de comptes. Ils se porteraient candidats à une élection en disant: « Voici ce que je vais faire; je vous promets ceci, cela et encore cela. » S'ils étaient élus à titre de députés, ils passeraient ici quelques années, puis à la fin de la législature, ils retourneraient voir les Canadiens en disant: « Voici ce que je vous avais promis. Êtes-vous satisfaits de mon travail? Me donnerez-vous le droit de retourner à la Chambre, oui ou non? »
Or, selon la proposition actuelle du gouvernement, les sénateurs peuvent promettre ce qu'ils veulent. Ils siégeraient pour un mandat de neuf ans puis la loi leur interdirait de poser à nouveau leur candidature. Où est l'obligation de rendre des comptes? La proposition n'en prévoit aucune alors que c'est le principe même qui sous-tend la démocratie. Voilà pourquoi cette proposition ne tient pas la route.
Et épargnez-moi la notion selon laquelle le Sénat est une Chambre de second examen objectif. Premièrement, structurellement, les sénateurs ont des whips. Pourquoi a-t-on besoin de whips si tout le monde est indépendant? Pourquoi y a-t-il des whips s'il n'y a pas de position de caucus? Comment justifier la présence des whips si chacun est censé faire un second examen objectif de toutes les questions à l'étude?
Il y a des whips au Sénat parce que cette Chambre a officieusement un régime de caucus. Quelques sénateurs sont vraiment indépendants, mais la plupart assistent aux réunions de caucus hebdomadaires, et ils ne font pas la rotation entre les trois caucus. Ils se présentent à leur caucus d'appartenance, le caucus libéral ou conservateur. À la fin de la réunion, comme tous les autres membres du caucus, ils disent « Oui, mon commandant » au , puis ils marchent au pas jusqu'au Sénat où ils exécutent ce que leur dictent les politiques partisanes.
Monsieur le Président, vous me signalez que mon temps est écoulé, et je ne peux qu'espérer que le temps du Sénat est également compté. C'est la meilleure chose que nous puissions faire pour ce pays, car plus vite nous nous débarrasserons du Sénat, plus forte sera notre démocratie.
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Monsieur le Président, je dois dire que c'est assez difficile de parler après mon collègue d' en raison de son allocution et de son enthousiasme. Toutefois, je suis quand même heureuse de m'exprimer aujourd'hui à la Chambre pour appuyer la motion présentée par mon collègue de .
Cette motion demande que le gouvernement, en consultation avec les provinces et territoires, prenne des mesures immédiates et nécessaires à l'abolition du Sénat.
Le Sénat est une institution coûteuse, dépassée, non redevable et composée de non-élus.
Aujourd'hui, les Canadiens ont perdu confiance en cette institution. Le fait que les libéraux et les conservateurs l'aient utilisée pour récompenser les amis du pouvoir n'y est pas étranger. Le fait que les sénateurs améliorent rarement les choses en est un autre. Depuis la fondation du Canada en 1867, jusqu'à 1992, le Sénat a entériné 99 % des projets de loi qui lui ont été soumis et, dans 95 % des cas, sans les modifier.
Depuis ce temps, les choses n'ont pas beaucoup changé, sauf peut-être en ce qui concerne les projets de loi émanant de l'opposition qui récoltent rarement l'appui des sénateurs.
Lorsqu'il était dans l'opposition, l'actuel avait juré, la main sur le coeur, qu'il allait faire le ménage au Sénat et qu'il ne nommerait aucun sénateur.
Sept ans après son arrivée au pouvoir, plus de la moitié des sénateurs ont été nommés par le , soit 58 des 105 sénateurs.
Les candidats défaits et les collecteurs de fonds du Parti conservateur sont désormais nombreux à siéger à la Chambre haute. Un très bel exemple de cette situation est la nomination par le de Josée Verner et de Larry Smith après leur défaite à l'élection de 2011. Tout le monde s'en rappelle.
Les Canadiens en ont assez de voir les amis du pouvoir bénéficier de passe-droits. Ils en ont assez de payer, alors que le gouvernement dépose budget d'austérité sur budget d'austérité et répète que les caisses sont vides. Ils en ont assez de faire des sacrifices et de se serrer la ceinture.
La ceinture des Canadiens est tellement serrée que des centaines de milliers d'entre eux ont de la difficulté à joindre les deux bouts, malgré le fait qu'ils travaillent à temps plein. C'est carrément inacceptable dans un pays comme le nôtre.
Demandons à ces gens qui se lèvent tôt et travaillent dur chaque jour, s'ils trouvent normal que la sénatrice Wallin ait occasionné des frais de déplacement de 350 000 $. Cette somme suffirait à payer les prestations de la Sécurité de la vieillesse de 57 aînés pendant un an. Pour ceux qui se le demanderaient, Mme Wallin a coûté 1 285 000 $ aux contribuables depuis trois ans.
Pense-t-on que les Canadiens trouvent juste et équitable que le sénateur Duffy, qui a réclamé des frais de logement, alors qu'il n'y avait pas droit, n'a qu'à s'excuser et à rembourser ces frais pour être blanchi et ne plus être inquiété? La réponse est certainement non. Les Canadiens trouvent cela scandaleux, et on les comprend.
Si un chômeur fait une déclaration frauduleuse, on lui coupe les prestations. Si un sénateur fait la même chose, on lui demande seulement de s'excuser et de rembourser. C'est de cette politique du deux poids, deux mesures que les Canadiens veulent se débarrasser.
Je rappelle aux députés de la Chambre que le sénateur Duffy, un représentant non élu, non redevable, comme tous ses collègues sénateurs, a coûté plus de 1 165 000 $ aux contribuables depuis trois ans.
Que répondraient nos concitoyens si on leur demandait s'ils acceptent de payer jusqu'à sept millions de dollars pour que Patrick Brazeau siège jusqu'à sa retraite? M. Brazeau fait actuellement l'objet d'accusations criminelles très graves. Il a été nommé à vie par le premier ministre en 2009. S'il siège jusqu'à 75 ans, les Canadiens devront payer sept millions de dollars.
Il faut se rappeler qu'avant que les conservateurs décident de l'expulser de leur caucus, M. Brazeau était l'un des champions de l'absentéisme au Sénat. Il avait raté 25 % des séances entre juin 2011 et avril 2012. Il avait aussi manqué 65 % des rencontres du Comité permanent des peuples autochtones où il siégeait, et 31 % des rencontres du Comité permanent des droits de la personne dont il était le vice-président. Pendant ce temps, les contribuables continuaient à payer 100 % de son salaire, et le continuait de tolérer les absences répétées de l'un des membres de son caucus.
Mais M. Brazeau n'était pas le seul à ne pas être très assidu au Sénat. Dix-neuf sénateurs ont raté plus du quart des journées de séance en 2011-2012. Le nombre moyen des jours travaillés par un sénateur en 2011-2012 était de 56 jours. C'est beaucoup d'argent qu'on dépense alors que beaucoup de personnes souffrent.
Le Sénat coûte désormais 92,5 millions de dollars par année. Je dis « désormais », parce que les conservateurs viennent d'augmenter le montant du budget alloué aux sénateurs. Sur dix ans, les contribuables canadiens consacreront donc environ 925 millions de dollars au Sénat. Sur dix ans, cette somme pourrait être beaucoup mieux investie. Par exemple, elle pourrait être investie en santé, par l'entremise des transferts aux provinces, que les conservateurs ont coupés. Elle pourrait être investie dans la construction de logements sociaux, pour donner un coup de pouce à ceux qui n'ont même pas de toit dans un pays d'hiver comme le Canada. Elle pourrait être investie dans les PME, pour favoriser leur croissance et leur capacité d'embauche. Elle pourrait être investie pour lutter contre l'insécurité alimentaire qui sévit dans plusieurs communautés autochtones. Elle pourrait être investie pour aider nos régions que le gouvernement est en train de vider et d'abandonner avec sa réforme de l'assurance-emploi. Bref, il y a des dizaines de façons de mieux dépenser l'argent public que le gouvernement consacre en ce moment au Sénat.
Les partis qui continueront de défendre le Sénat devront expliquer aux Canadiens en quoi les coûts associés au fonctionnement de cette relique du XIXe siècle sont justifiés. J'espère entre autres que les libéraux, qui ont pris l'habitude de faire équipe avec les conservateurs, voteront avec nous. D'ailleurs, le député de et chef intérimaire du Parti libéral s'est déjà prononcé en faveur de l'abolition du Sénat. J'espère qu'il aura le courage de ses convictions et qu'il votera en faveur de la motion.
Aujourd'hui, les partis représentés en cette Chambre ont la chance d'envoyer un signal clair à la population. En votant en faveur de notre motion, ils peuvent démontrer qu'ils sont sérieux dans leur intention d'éviter le gaspillage de fonds publics.
Au moins un conservateur partage notre avis, et nous l'en félicitons. Michael Fortier, qui est un ancien ministre, collecteur de fonds et sénateur conservateur, s'est récemment prononcé en faveur de l'abolition du Sénat. M. Fortier a pu voir de l'intérieur le fonctionnement de cette institution et ses commentaires ne sont pas flatteurs. Il a dit entre autres qu'il ne voyait tout simplement pas l'utilité du Sénat et que, selon lui, la pratique qui consiste à nommer des amis du régime n'est pas optimale; un euphémisme pour dire que cela rend le Sénat dysfonctionnel.
Il est temps d'aller de l'avant et de réformer ce pays pour le rendre meilleur, et ce processus passe par l'abolition du Sénat.
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Monsieur le Président, parfois les artistes qui donnent un concert dédient une chanson à quelqu'un en particulier. J'ai pensé dédier mon intervention d'aujourd'hui à la mémoire de l'honorable Stan Waters, le premier sénateur élu du Canada, un homme qui a fait la preuve qu'avoir des sénateurs élus était certainement une amélioration par rapport à un Sénat nommé. Qui plus est, il a montré sans l'ombre d'un doute qu'il est préférable d'avoir un Sénat élu que de ne pas avoir de Sénat du tout, de ne pas avoir de Chambre de second examen objectif.
Je n'ai que dix minutes, mais je souhaite diviser mes commentaires d'aujourd'hui en trois parties. Premièrement, je veux aborder l'idée du bicaméralisme. Deuxièmement, je veux évoquer pourquoi les questions accompagnant le renvoi sont présentées étant donné leur complexité. Et troisièmement, je veux parler brièvement de la façon dont la Cour suprême devrait aborder cette question.
Permettez-moi de commencer par la question du bicaméralisme. La proposition du Nouveau Parti démocratique aurait pour effet de transformer le Canada en une fédération unicamérale, une fédération au sein de laquelle le Parlement fédéral ne compterait qu'une seule Chambre, ce qui ferait de notre pays un cas unique parmi les fédérations du monde. L'Australie, un pays ami légèrement plus petit que le nôtre, a un Parlement bicaméral. Il y a aussi les États-Unis, l'Autriche et la Belgique. L'Allemagne, qui est aussi une fédération, a un Parlement bicaméral. La Suisse également. Certains pays qui ne sont pas des fédérations ont aussi un système bicaméral.
Là où je veux en venir, c'est que nous nous aventurerions dans une voie qui s'écarterait énormément du modèle adopté par d'autres pays, une voie très différente de la vision des Pères de la Confédération. Au cours du débat de 1864 sur la Confédération, ils ont consacré plus de temps à discuter du rôle de la Chambre haute que de toute autre question, et pratiquement de tous les autres sujets réunis. À l'époque, cette question a fait couler beaucoup d'encre dans les journaux.
Même si l'on estime que le Sénat actuel ne reflète pas fidèlement leurs intentions, l'absence de Sénat ne permettrait certainement pas de concrétiser leurs aspirations.
En toute justice, nous pourrions dire que nous modifions la Constitution parce que leur point de vue est désuet et qu'il faut maintenant refléter une vision plus moderne, et ce serait légitime. Cependant, soyons bien conscients du fait qu'il s'agit d'un changement en profondeur. C'était là mon premier argument.
Deuxièmement, je veux aborder la teneur du renvoi. La Constitution canadienne est unique à un autre égard. Elle ne comporte pas une seule et unique formule de modification. Selon la partie de la Constitution que l'on veut modifier, on peut le faire au moyen d'une modification unilatérale adoptée ici ou au Sénat, ou d'une modification unilatérale adoptée dans une seule assemblée législative provinciale; ou bien cela peut nécessiter une loi adoptée à la fois dans une assemblée provinciale et ici; ou encore, cela peut exiger l'approbation de sept provinces comptant la moitié de la population, la fameuse formule 7/50; ou bien, dans certains cas, il faut l'unanimité.
Il y a certains éléments de la Constitution pour lesquels on ne sait pas clairement quelle formule de modification doit s'appliquer. Cette difficulté a ralenti considérablement nos efforts pour faire cheminer nos idées de réforme du Sénat, et il semble probable, quoi que ce ne soit pas certain, que plus d'une formule de modification doive être utilisée, selon le type de modification que l'on veut apporter et la caractéristique du Sénat que l'on veut modifier.
Si, par exemple, nous voulons éliminer l'exigence pour les sénateurs de posséder des biens immobiliers d'une valeur de 4 000 $ dans la province qu'ils représentent, pouvons-nous faire cela au moyen d'une modification unilatérale, ou bien faut-il recourir à quelque autre formule de modification?
Si l'on veut traiter de la question de l'indépendance des sénateurs, à savoir s'ils doivent être indépendants, quelle formule faut-il utiliser?
Si l'on veut abolir le Sénat, comme les néo-démocrates le proposent, que faut-il faire? Là-dessus, nous savons qu'il faut à tout le moins appliquer la formule 7/50. Il est concevable que cela exige même l'unanimité. Voilà quelques-unes des questions dont la Cour suprême a été saisie.
Les questions sont groupées par catégorie, traitant de la limitation du mandat des sénateurs, des consultations pour les nominations au Sénat, des exigences quant à la propriété et de l'abolition du Sénat. Je vais lire la question qui traite de l'abolition du Sénat:
Est-il possible d'apporter à la Constitution du Canada une modification visant l'abolition du Sénat au moyen de la procédure normale de modification établie à l'article 38 de la Loi constitutionnelle de 1982, en ayant recours à l'une des méthodes suivantes:
Suivent trois méthodes distinctes qui pourraient permettre de modifier la Constitution. L'une de ces méthodes pourrait-elle fonctionner? Il s'agit ici de savoir s'il est possible d'utiliser la formule 7/50 ou s'il faudra recourir à la formule du consentement unanime.
Il faut préciser que dans le cas des deux formules, il faudrait déployer des efforts considérables pour obtenir le consentement des provinces. Je suis convaincu que nous constaterions rapidement qu'ouvrir la Constitution de cette manière susciterait bien des demandes pour d'autres choses. Il se pourrait fort bien que des provinces réclament certaines modifications constitutionnelles ou des modifications concernant le Sénat, mais pas son abolition. C'est tout à fait vraisemblable.
Toutefois, au départ, il est inutile de s'adresser aux provinces tant que nous ne savons pas exactement à quoi nous en tenir en ce qui concerne les aspects légaux. S'il faut le consentement unanime, l'Île-du-Prince-Édouard a-t-elle un droit de veto comme toutes les autres provinces, ou pouvons-nous parvenir à une entente si seulement trois provinces se font tirer l'oreille et que les autres représentent la moitié de la population canadienne? Mieux vaut savoir à quoi s'en tenir avant d'opter pour une stratégie donnée. Nous ne devrions assurément pas fermer la porte aux autres possibilités, qui pourraient fort bien correspondre aux souhaits des Canadiens et des assemblées législatives provinciales.
Le dernier point concerne les outils dont dispose la Cour suprême pour aborder ces questions. Voici le genre de questions que nous posons: « Qu'est-ce qui fait qu'un sénateur est indépendant? Un processus électoral représente-t-il un compromis? Faut-il en conclure que la possibilité d'une réélection pourrait entacher l'indépendance des sénateurs? Un mandat de huit ou dix ans, l'un ou l'autre, leur permettra-t-il de faire preuve d'une véritable indépendance? »
Afin de déterminer tout cela, il faut revenir en arrière et examiner ce que le mot indépendance signifiait dans l'esprit de ceux qui, dans les années 1860, débattaient de ce qui allait devenir l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, et de ceux qui discutaient de questions semblables concernant cette institution qui a été remplacée par le Sénat. Je fais référence à l'Assemblée législative du Canada-Uni, constituée en vertu de l'Acte d'Union de 1840, puis modifiée en 1856 afin que ses membres ne soient plus nommés, mais élus. Les comptes rendus des débats de l'époque existent toujours. Il n'est pas facile d'y avoir accès, mais il faut les consulter pour être en mesure de bien présenter les faits aux juges de la Cour suprême dans ce dossier et d'autres dossiers extrêmement complexes.
Je mentionne tout cela parce que je participe aux efforts visant à numériser tous ces documents — dont bon nombre n'existent plus qu'à quelques exemplaires, souvent sous forme documentaire, dans diverses archives — et à les rendre disponibles en ligne, par l'entremise d'un site Web dont l'adresse sera originaldocuments.ca. Nous espérons pouvoir offrir la compilation la plus exhaustive possible de ces documents à temps pour les audiences de la Cour suprême, afin que tant les représentants des deux parties que ceux qui rendront une décision puissent les consulter.
Le fait de laisser se poursuivre le processus entrepris par le gouvernement au sujet de la réforme du Sénat — c'est-à-dire de laisser la Cour suprême examiner les options et présenter des réponses réfléchies à toutes ces questions, comme elle l'a fait dans un précédent jugement sur la réforme du Sénat il y a une trentaine d'années — nous permettra de progresser dans la direction qui semble la meilleure pour les habitants et les provinces du Canada. C'est préférable à la direction que souhaite emprunter le NPD avec la motion qu'il propose aujourd'hui.