IWFA Rapport du Comité
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OPINION DISSIDENTE DU NOUVEAU PARTI DÉMOCRATIQUE DU CANADA« Les peuples autochtones ont le droit de participer à la prise de décisions sur des questions qui peuvent concerner leurs droits, par l’intermédiaire de représentants qu’ils ont eux-mêmes choisis conformément à leurs propres procédures, ainsi que le droit de conserver et de développer leurs propres institutions décisionnelles. […] Les États prennent des mesures, en concertation avec les peuples autochtones, pour veiller à ce que les femmes et les enfants autochtones soient pleinement protégés contre toutes les formes de violence et de discrimination et bénéficient des garanties voulues. » - Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, dispositions 18 et 22(2) Il faut prendre des mesures urgentes et immédiates pour résoudre la crise des disparitions et des assassinats de femmes autochtones et lutter contre la violence à laquelle sont confrontées bien trop de femmes et de filles des Premières Nations, inuites, et métisses. Au début des audiences du Comité spécial, les néo démocrates étaient conscients que les familles et les communautés des victimes s’attendaient à voir aboutir des recommandations concrètes auxquelles le gouvernement fédéral pourrait donner suite immédiatement. En fait, dès le départ, les néo‑démocrates avaient bon espoir quant à la possibilité de présenter des recommandations claires et fermes pour amener le gouvernement fédéral à agir, mais nous avons été déçus du résultat. Un appel à l’action implique une certaine urgence. Or, les recommandations du présent rapport laissent plutôt entendre que le statu quo demeure et qu’aucune mesure extraordinaire n’est nécessaire pour faire face à la crise des disparitions et des assassinats de femmes et de filles autochtones. Le rapport n’explique pas qu’un problème urgent en matière de sécurité publique est en train de s’étendre aux quatre coins du pays et qu’une intervention concertée est nécessaire pour contrer les taux élevés de violence à l’égard des femmes et des filles autochtones. Cette approche déçoit les néo démocrates qui ont siégé au Comité. Une partie de notre travail, à titre de parlementaires, consiste à décider comment affecter les ressources pour atteindre les objectifs sociaux et économiques que nous jugeons hautement prioritaires. Le Comité aurait dû avoir pour objectif de réduire la violence et d’empêcher que d’autres femmes et filles soient assassinées ou portées disparues. Au lieu de cela, nous nous retrouvons avec un autre rapport qui fait fi des témoignages indiquant que l’insuffisance du financement fédéral a affaibli la capacité des organisations et des communautés autochtones à faire face à cette tragédie qui persiste. Les néo démocrates auraient voulu que, conformément aux obligations du Canada au titre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (UNDRIP), les familles et les organisations inuites, métisses et des Premières Nations participent en orientant et en étayant les travaux du Comité; mais ce ne fut pas le cas. Nos préoccupations initiales quant au manque d’inclusion et à l’absence d’une vision claire pour le Comité, que nous avons soulevées dans une lettre adressée à la présidente du Comité le 19 juin 2013, sont malheureusement demeurées sans réponses. En fait, le rapport définitif critique plutôt ceux-là même que le Comité a invité à participer à son étude pour faire part de leur expertise et de leur vécu aux députés. Nous tenons à remercier les nombreux témoins qui se sont présentés devant le Comité pour lui faire part de leurs expériences et de leur travail. Les néo‑démocrates ont constaté beaucoup de cohérence dans les témoignages. Presque tous les témoins ont convenu que la mise sur pied d’une commission d’enquête publique nationale sur les disparitions et les meurtres de femmes et de filles autochtones devrait être une priorité du gouvernement canadien. Une telle enquête ne devrait pas simplement se limiter aux circonstances entourant chaque disparition ou chaque assassinat. Elle devrait aussi se pencher sur les problèmes systémiques du système judiciaire canadien et des systèmes provinciaux de protection de l’enfance, et sur les répercussions de la Loi sur les Indiens qui perpétue et institutionnalise le racisme et le sexisme à l’égard des femmes et des filles autochtones. De nombreux témoins nous ont aussi dit que ce sont les femmes autochtones qui devraient assumer la direction et la mise en œuvre des solutions visant à contrer la violence à leur égard. Pendant des siècles, notre système judiciaire a privé les femmes autochtones de leurs droits et de leur capacité légale, ce qui a contribué à l’essor de la violence qui leur est infligée. Pour prendre conscience des attitudes qui entrainent un accroissement de la violence faite aux femmes autochtones et s’employer à lutter contre ces attitudes, il faut permettre à ces mêmes femmes de prendre des dispositions pour mettre un terme à la violence. Ce genre de démarche est également porteur pour les solutions qui émanent de la communauté. Enfin, les néo‑démocrates tiennent à saluer le travail de l’Association des femmes autochtones du Canada et de l’Assemblée des Premières Nations pour leur projet de plan d’action pour lutter contre la violence faite aux femmes et aux filles autochtones. Nous tenons aussi à remercier l’Association des femmes autochtones du Canada et toutes les familles pour l’expertise qu’elles ont tenté de transmettre au Comité. Nous sommes consternés que le Comité n’ait pas exercé ses pouvoirs pour reconnaître cette expertise et trouver un moyen de mieux l’intégrer à ses travaux. L’absence de reconnaissance de ces organisations et de ces personnes fait ressortir un problème qui devra être réglé par le milieu juridique et politique du Canada avant même qu’une enquête nationale ne puisse être lancée. Comme nous l’avons constaté dans le cadre des travaux du Comité et aussi de l’enquête menée par la Commission Oppal en Colombie‑Britannique, les circonstances particulières des femmes autochtones et de leurs représentant(e)s sont souvent mises de côté durant les procédures judiciaires. L’harmonisation du système législatif et judiciaire autochtone et du système judiciaire canadien est un processus continu. Trouver un moyen d’intégrer l’expérience vécue par les femmes sans les victimiser à nouveau par un système de questionnement accusatoire et en insistant sur le respect à la lettre de pratiques antérieures ferait beaucoup pour nous aider à déterminer la voie à suivre pour nous tous. Comme Mary Teegee de Carrier Sekani Family Services l’a dit lors de son témoignage : « Ce n’est pas un problème qui ne vise que les Autochtones; c’est un problème qui touche l’ensemble de la société canadienne. C’est le seul moyen que nous pourrons le régler : en faisant front commun et en collaborant dans toutes les sphères de notre société. » Les néo démocrates proposent les recommandations suivantes : Première recommandation Que le gouvernement fédéral établisse une commission d’enquête publique nationale chargée d’analyser les violences contre les femmes et les jeunes filles autochtones, notamment celles qui ont disparu ou ont été assassinées, et que, dans la mesure du possible, les femmes autochtones participent à la conception, au processus et à la mise en œuvre de cette enquête ainsi qu’aux décisions qui s’y rapportent. Deuxième recommandation Que le gouvernement fédéral, en fonction de la motion présentée à la Chambre par Niki Ashton (M 444) et de concert avec les collectivités autochtones, en particulier avec les femmes et leurs représentants, élabore et mette en œuvre un plan d’action national de lutte contre la violence infligée aux femmes et aux filles autochtones qui s’attaque aux causes structurelles de la violence et qui prévoit des mesures de reddition de comptes et de coordination des organismes gouvernementaux chargés de prévenir la violence et d’y réagir. Troisième recommandation Que le gouvernement fédéral déploie tous les efforts pour prendre des mesures afin d’habiliter les femmes autochtones à agir en tant que chefs de file dans toute stratégie visant à réduire la violence ou à promouvoir l’égalité des sexes. Ces mesures pourraient comprendre des consultations aux étapes de la conception et de la mise en œuvre des programmes ainsi qu’un financement prévisible et durable des projets, en particulier ceux destinés aux femmes autochtones pour lutter contre la violence sur le plan national, régional, local et familial. Quatrième recommandation Que le gouvernement fédéral s’attaque au sous-financement chronique :
destinés à toutes les femmes autochtones, à leurs familles et à leurs communautés, et qu’il le fasse en étroite collaboration avec les peuples autochtones afin de respecter les obligations du Canada au titre de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et au titre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA). Cinquième recommandation Afin de respecter les obligations du Canada au titre de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et au titre de la DNUDPA, que le gouvernement fédéral, en étroite collaboration avec les peuples autochtones, investisse dans une approche équilibrée axée sur la prévention, les services de police et les poursuites judiciaires pour lutter contre la violence à l’égard des femmes et filles autochtones en assurant un financement durable et constant : des initiatives de prévention, de lutte contre la violence et de sécurité communautaire; des services de police dans les communautés inuites, métisses et des Premières Nations; des programmes destinés aux victimes et des programmes de guérison; et qu’il mette au point une formation pour les policiers afin de contrer le racisme et le sexisme dans les rapports avec les femmes et les filles autochtones. |