Passer au contenu

TRAN Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

MISE À JOUR DES INFRASTRUCTURES AU CANADA :
UN EXAMEN DES BESOINS ET DES INVESTISSEMENTS

INTRODUCTION

Infrastructure Canada est le ministère responsable des investissements fédéraux dans les infrastructures provinciales, territoriales et municipales. D’autres ministères et organismes fédéraux agissent en qualité de partenaires d’exécution pour certains fonds d’Infrastructure Canada, en plus de faire des investissements à partir de leurs propres budgets. Le ministère des Finances, Transports Canada, l’Agence du revenu du Canada, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, l’Agence de promotion économique du Canada atlantique, l’Agence canadienne de développement économique du Nord, l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, l’Agence fédérale de développement économique pour le Sud de l’Ontario, Diversification de l’économie de l’Ouest Canada et la Gendarmerie royale du Canada sont les autres grandes institutions fédérales qui participent aux investissements dans les infrastructures. Selon Infrastructure Canada, en 2013‑2014, environ 1,5 milliard de dollars sur les contributions fédérales totales de 5 milliards de dollars pour les infrastructures provinciales, territoriales et municipales provenaient de ministères et organismes fédéraux autres qu’Infrastructure Canada. [1] De 2015‑2016 à 2022-2023, Infrastructure Canada prévoit investir plus de 5 milliards de dollars par année dans les infrastructures.

Le 23 avril 2015, le Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes (le Comité) a convenu d’entreprendre une étude sur l’ampleur et les effets des investissements du gouvernement du Canada dans les infrastructures fédérales, provinciales et municipales au Canada, ainsi que sur les progrès préliminaires du Nouveau Plan Chantiers Canada.

Aux fins de la motion, le Comité a organisé six réunions durant le printemps 2015. Lors des discussions entourant les questions soulevées dans l’étude, les membres du Comité ont eu l’occasion d’entendre le point de vue des témoins sur :

  • les défis liés aux infrastructures municipales;
  • le financement des transports en commun; et
  • les partenariats public-privé.

Ce dernier rapport du Comité pour la 41e législature fait la synthèse de ce que les témoins et les intervenants qui ont déposé des mémoires ont appris aux membres du Comité sur ces questions.

TENDANCES RELATIVES À LA PROPRIÉTÉ ET AUX INVESTISSEMENTS CONCERNANT LES INFRASTRUCTURES FÉDÉRALES

Depuis 50 ans, on observe une diminution de la part du gouvernement fédéral dans les infrastructures publiques au Canada. En particulier, le stock infrastructurel fédéral, dans les réseaux routiers, d’aqueduc et de traitement des eaux usées, a diminué de 70 à 80 % depuis 1963. Quant à la valeur des investissements fédéraux dans les infrastructures de communications, elle avait plus que triplé durant les années 1980 et 1990, mais elle est retombée depuis au niveau auquel elle se trouvait — en termes réels — avant le début des investissements massifs.

La diminution de la part des infrastructures appartenant au gouvernement fédéral enregistrée depuis 25 ans est largement attribuable aux cessions et privatisations, à tel point qu’en 2013, moins de 2 % des infrastructures publiques de base au Canada étaient propriétés du gouvernement fédéral[2]. Infrastructure Canada a produit des graphiques pour le Comité, afin d’illustrer ces tendances, en utilisant des données de Statistiques Canada présentées dans les figures 1 et 2 ci‑dessous.

Figure 1 : Stock net d'infrastructures publiques de base appartenant au fédéral (en milliards de dollars constants)

Figure 2 : Stock net d'infrastructures publiques de base par niveau de gouvernement 2013 (en milliards de dollars)

Selon Infrastructure Canada, les investissements fédéraux annuels dans les infrastructures publiques ont augmenté pour passer de 400 millions de dollars en 2002 à plus de 4,7 milliards de dollars en 2013. Les contributions fédérales en matière d’infrastructures ont atteint leur sommet dans le cadre du programme de stimulation économique mis en œuvre dans le sillage de la crise financière mondiale en 2009‑2010, comme le montre la figure 3. L’annexe C donne un aperçu des principaux programmes fédéraux d’infrastructures mis en œuvre depuis 2000.

Figure 3 : Dépenses fédérales dans les infrastructures
provinciales, territoriales et municipales

Figure 3 : Dépenses fédérales dans les infrastructures

Sources :          Infrastructure Canada; ministère des Finances.

Selon des données de l’Organisation de coopération et de développement économiques citées par des fonctionnaires d’Infrastructure Canada, les investissements dans les infrastructures publiques de tous les ordres de gouvernement (municipal, provincial et fédéral) au Canada représentent actuellement 3,9 % du produit intérieur brut (PIB), soit une augmentation considérable par rapport au niveau de l’investissement public dans les infrastructures durant les 1990 (une décennie de sous‑investissement), qui était de l’ordre de 2 % du PIB selon des estimations[3].

Des données de Statistique Canada qui ont été fournies au Comité montrent que l’âge moyen des infrastructures publiques canadiennes a diminué de 17,5 ans en 2003 à 14,7 ans en 2013. Les investissements publics ont permis de rajeunir surtout les routes et l’infrastructure d’approvisionnement en eau potable dont l’âge a été réduit de près de quatre ans en moyenne, comparativement à une réduction de deux ans en moyenne pour les autres catégories d’actifs.

Bien que le rapport des dépenses en infrastructures publiques au PIB ou l’âge moyen des infrastructures au Canada ne soient pas des indicateurs de la satisfaction des besoins de l’économie et des résidents, des témoins et des membres du Comité ont souligné que les tendances semblent révéler que les investissements de cette nature ont désormais une priorité plus élevée pour les décideurs canadiens que ce n’était le cas au tournant du millénaire[4].

La Fédération canadienne des municipalités (FCM) a recommandé que le gouvernement fédéral se concentre sur des investissements publics à longue échéance de l’ordre de 5 % du PIB afin de rattraper les retards au chapitre de l’entretien, du renouvellement et de la construction d’infrastructures à long terme[5].

ÉTAT D’AVANCEMENT DU NOUVEAU PLAN CHANTIERS CANADA ET FONDS FÉDÉRAUX COMPLÉMENTAIRES

Le Nouveau Plan Chantiers Canada décennal, annoncé en 2013, est destiné à offrir des options de financement pour aider divers promoteurs de projets d’infrastructures des secteurs public et privé. Certaines enveloppes financières sont réservées à des projets de portée locale, tandis que d’autres fonds sont destinés à des projets d’envergure régionale et nationale, comme le montre le tableau 1. Les conditions de partage des coûts dans le cadre du Nouveau Plan Chantiers Canada prévoient des contributions représentant de 66 à 75 % des coûts du projet provenant d’autres partenaires financiers. Les actifs du secteur public qui favorisent plus directement la croissance économique, un environnement plus propre et une meilleure qualité de vie dans les collectivités canadiennes ont été retenus à titre de catégories d’investissement admissibles. Des créations d’emplois devraient découler de tout projet d’infrastructure. Selon la FCM, chaque tranche de 1 milliard de dollars en investissements dans les infrastructures devrait créer 11 000 emplois[6].

Tableau 1 : Quelques volets du Nouveau Plan Chantiers Canada

Volets

Montant

Portée du projet

Fonds d’amélioration des collectivités

32 G$

 

Fonds de la taxe sur l’essence

21,8 G$

Locale

Remise de la TPSa

10,2 G$

Locale

Nouveau Fonds Chantiers Canada

14 G$

 

Volet de l’infrastructure nationale

4 G$

Nationale

Volet provincial-territorial

10 G$

·         9 G$ pour des projets nationaux et régionaux

·         1 G$ pour des collectivités de moins de 100 000 habitants

Nationale et régionale

Locale

Fonds PPP  Canadab

1,5 G$

Toutes

Notes :             a.         Le remboursement de la TPS est administré par l’Agence du revenu du Canada.

                        b.         Le Fonds PPP Canada est administré par PPP Canada.

Source : Tableau préparé par l’auteur à partir de données tirées de Chambre des communes, Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités, Témoignages, 5 mai 2015 (Jeff Moore, sous-ministre adjoint, Politiques et communications, Infrastructure Canada).

En mai 2015, le financement des projets ci-dessous avait été approuvé dans le cadre du Nouveau Plan Chantiers Canada a [7] :

  • deux projets, dans le cadre du volet Infrastructures nationales, totalisant 207,5 millions de dollars (contribution fédérale de 68 millions de dollars);
  • 18 projets nationaux et régionaux, dans le cadre du volet Infrastructures provinciales-territoriales, totalisant 5,79 milliards de dollars (contribution fédérale de 1,06 milliard de dollars);
  • un partenariat public-privé pour un projet de transport en commun (contribution fédérale de 150 millions de dollars);
  • 2 200 projets, dans le cadre d’ententes relatives au Fonds de la taxe sur l’essence (contribution fédérale de 1,97 milliard de dollars).

Le Comité recommande :

1. Que le gouvernement fédéral continue d'être un partenaire financier important pour les projets d'infrastructure partout au Canada par l’entremise du Nouveau Plan Chantiers Canada.

A.  Infrastructure à large bande

La plupart des catégories d’investissements du Nouveau Plan Chantiers Canada représentent ce qu’on qualifie d’« infrastructures de base », à savoir les routes, les ponts, les transports en commun, les systèmes d’aqueduc et d’égout, ainsi que les infrastructures culturelles, récréatives et sportives. L’infrastructure à large bande est un exemple d’infrastructure « non essentielle » admissible à du financement fédéral dans le cadre du Nouveau Plan Chantiers Canada, ainsi que de programmes gérés par d’autres ministères, comme le programme Canada numérique 150 d’Industrie Canada.

L’un des cinq piliers du programme Canada numérique 150 d’Industrie Canada est Un Canada branché[8]. Il s’agit d’un programme de financement fondé sur le mérite qui dispose de 305 millions de dollars pour soutenir les investissements dans l’infrastructure Internet à large bande dans les régions rurales et éloignées, dont 50 millions de dollars sont réservés aux localités du Nord du Québec (Nunavik) et du Nunavut. Les fournisseurs de services Internet peuvent recevoir des contributions non remboursables pouvant aller jusqu’à 75 % des coûts, pour ceux qui desservent des collectivités éloignées ou autochtones, ou jusqu’à 50 % des coûts admissibles des projets, pour ceux qui desservent n’importe quelle autre collectivité. Les bénéficiaires du programme peuvent demander un montant supplémentaire de 25 % des coûts admissibles des projets à d’autres sources fédérales, jusqu’à concurrence de 100 % des coûts. Avant la clôture, en janvier 2015, de l’appel de candidatures lancé par Industrie Canada dans le cadre du programme Un Canada branché, le Ministère avait reçu plus de 300 dossiers de candidatures de fournisseurs de services Internet de toutes tailles et de partout au Canada[9].

B.  Infrastructures des Premières Nations

La présente étude ne s’étendait pas aux infrastructures des Premières Nations, car c’est Affaires autochtones et Développement du Nord Canada (AADNC) qui est chargé de fournir une aide financière et des conseils pour la construction, l’acquisition, l’exploitation et l’entretien des infrastructures dans les réserves. Il importe toutefois de noter que le Nouveau Fonds Chantiers Canada prévoit de l’argent pour le financement des infrastructures des Premières Nations dans le cadre du Fonds fédéral de la taxe sur l’essence et du volet Infrastructures nationales. Ces sommes seront versées dans le Fonds d’infrastructure pour les Premières Nations, qui est géré par AADNC.

Le Fonds d’infrastructure des Premières Nations (FIPN) aide « les Premières Nations dans les provinces grâce à l’amélioration des infrastructures situées sur les réserves, les terres de la Couronne, les terres mises de côté à l’usage et au profit d’une Première Nation, ou encore à l’extérieur d’une réserve, dans le cas des projets à coûts partagés avec des partenaires ne faisant pas partie des Premières Nations, tels que les municipalités avoisinantes[10] ». Le fonds combine trois sources fédérales : le Fonds sur l’infrastructure municipale rurale d’Infrastructure Canada et le Fonds de la taxe sur l’essence, ainsi que le Programme d’immobilisations et d’entretien d’Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. Les grandes catégories de projets admissibles à du financement au titre du FIPN sont[11] :

  • la planification communautaire et le développement des compétences;
  • la gestion des déchets solides et le recyclage;
  • les routes et les ponts;
  • les filières énergétiques; et
  • la connectivité, dont les réseaux à haute vitesse (transport), les réseaux Internet et la capacité de transmission par satellite.

La Première Nation de Kashechewan a présenté au Comité un mémoire dans lequel elle explique que ses infrastructures vieillisent comme celles des autres municipalités canadiennes, mais que le problème est différent en raison de la croissance rapide de la population autochtone[12].  Le Comité note que le Budget de 2013 prévoyait du financement pour le FIPN : 155 millions de dollars sur 10 ans provenant du Nouveau Fonds Chantiers Canada, en plus des 138,9 millions de dollars du Fonds de la taxe sur l’essence (de 2014 à 2019).

Le Comité fait observer que le Comité sénatorial des peuples autochtones a terminé récemment son étude sur les problèmes liés à l’infrastructure dans les réserves des Premières Nations et qu’il devrait déposer un rapport présentant ses constatations et ses recommandations avant la fin de la 41e législature[13].

DÉFIS DES MUNICIPALITÉS

Comme la part du fédéral dans les infrastructures publiques a diminué, et que les investissements publics ont augmenté pour répondre aux besoins grandissants, la part des municipalités dans les infrastructures a progressé au fil des décennies. Selon Industrie Canada, la valeur des infrastructures routières et de traitement des eaux usées appartenant aux administrations municipales a augmenté respectivement de 41,5 % et de 64,2 % depuis 1963[14]. Infrastructure Canada a produit un graphique (figure 4) pour illustrer ces tendances en utilisant des données de Statistique Canada.

Figure 4 : Stock net d'infrastructures publiques de base appartenant aux municipalités (en milliards de dollars constants)

Infrastructure Canada estime que les infrastructures municipales représentent actuellement 56,8 % de la valeur totale de l’ensemble des infrastructures publiques au Canada, comme l’illustre la figure 2.

A.  Revenus des municipalités

Tous les représentants municipaux qui ont comparu devant le Comité se sont réjouis du fait que le gouvernement fédéral a rendu permanent et indexé sur l’inflation le Fonds de la taxe sur l’essence. Le maire de Gatineau a dit au Comité à ce propos : « Notre capacité de prévoir est précieuse[15] ». Quoi qu’il en soit, les administrations municipales affirment qu’elles n’ont toujours pas les moyens d’effectuer les réparations ou les remplacements nécessaires ni de construire les infrastructures supplémentaires requises. Selon la FCM, les administrations municipales ne perçoivent que huit cents de chaque dollar perçu en recettes fiscales au Canada, provenant essentiellement des impôts fonciers. Le Comité a appris que certaines municipalités, comme les villes de Gatineau et de Burnaby, se sont constitué des réserves pour financer l’entretien de leurs infrastructures, et que la Ville de Gatineau a instauré une taxe de 1 % dédiée aux infrastructures.

Certains témoins, y inclus la FCM, ont recommandé que les pouvoirs de taxation des municipalités soient davantage conformes à leurs responsabilités en matière d’infrastructures. Un expert-conseil indépendant en urbanisme a déclaré : « Je crois que la pratique courante qui consiste à s’attendre à ce que les gouvernements locaux financent le tiers de tels projets — c’est l’attente habituelle, même si ces administrations sont très loin d’obtenir le tiers des recettes fiscales réelles — doit vraiment être repensée[16]. » Le maire de Kitchener a quant à lui dit au Comité que sa ville soutenait la position de la FCM et qu’il se joignait à ceux qui plaident en faveur d’un modèle équilibré de partage des responsabilités.

Plusieurs témoins ont fait valoir que le gouvernement fédéral, avec ses nouvelles exigences relatives aux installations de traitement des eaux usées, fait payer des frais supplémentaires aux propriétaires municipaux de ces installations[17]. D’après la FCM, un quart des municipalités doivent moderniser leurs systèmes d’aqueduc et d’égout pour se conformer à la nouvelle réglementation. On estime que ces municipalités ont besoin de 3,4 milliards de dollars pour atteindre la cible de 2020, et de 14,6 milliards de dollars supplémentaires pour se mettre complètement aux normes. La FCM a recommandé que le gouvernement fédéral approuve des fonds destinés à répondre aux nouvelles obligations fédérales en matière d’épuration des eaux usées[18].

B.  Accès aux fonds fédéraux

Le Fonds d’amélioration des collectivités relevant du Nouveau Plan Chantiers Canada, qui inclut le Fonds de la taxe sur l’essence permanent et indexé ainsi que le remboursement additionnel de la taxe sur les produits et services, permet d’accorder un financement de base de 32 milliards de dollars aux municipalités. Plusieurs catégories d’investissements ont été ajoutées au Fonds de la taxe sur l’essence, notamment les infrastructures sportives, touristiques et culturelles, ce qui porte à 17 le nombre total de catégories admissibles. À quelques exceptions près, le financement accordé aux municipalités dans le cadre du Fonds de la taxe sur l’essence passe par les provinces et les territoires[19].

Les provinces et les territoires établissent chacun une liste des projets les plus hautement prioritaires qui seront présentés dans le cadre du volet Infrastructures provinciales-territoriales de 10 milliards de dollars du Nouveau Plan Chantiers Canada. Le Comité a appris que la façon de procéder pour inscrire les projets municipaux à ces listes varie considérablement d’une administration à l’autre. Par exemple, les décisions des provinces et des territoires quant aux projets présentés en vue de leur financement peuvent se fonder sur un plan d’immobilisations, une affectation minimale pour chaque municipalité ou un processus en vertu duquel les administrations municipales peuvent présenter des demandes pour le financement de leurs projets.

Les promoteurs municipaux peuvent soumettre leurs demandes directement à Infrastructure Canada pour les projets de moins de 4 milliards de dollars du volet Infrastructures nationales du Nouveau Plan Chantiers Canada. Ce volet du plan se concentre sur des projets ayant un impact étendu et notable sur la compétitivité et la productivité de l’économie, plutôt que sur des projets d’envergure locale. Parmi les catégories d’investissements admissibles se trouvent : les autoroutes et routes principales, les transports en commun, les infrastructures de connectivité et à large bande, l’eau potable, les eaux usées, la gestion des déchets solides et l’énergie verte.

Infrastructure Canada rembourse aux municipalités les coûts des projets approuvés dans le cadre des volets Infrastructures nationales et Infrastructures provinciales-territoriales du Nouveau Plan Chantiers Canada après que l’entente est en place, que les travaux sont réalisés et que les dépenses ont été présentées. Selon un représentant d’Infrastructure Canada, « [u]ne municipalité ira de l'avant et mettra en œuvre le projet, la construction sera amorcée, et les responsables soumettront la documentation appropriée à notre organisation, Infrastructure Canada. Nous procédons à des examens, nous nous assurons d'avoir les renseignements appropriés et nous émettons un paiement. C'est un processus assez simple[20]. »

Plusieurs représentants municipaux ont déclaré devant le Comité que certaines collectivités ont du mal à avoir accès à du financement fédéral. Selon la FCM, « c’est difficile pour les municipalités de comprendre comment leurs projets sont approuvés ou refusés, qui prend les décisions et quels critères sont utilisés[21] ». Ensemble, la STO et la Ville de Gatineau ont recommandé que le gouvernement fédéral s'assure que parmi les projets proposés par le gouvernement du Québec pour recevoir des fonds fédéraux figurent les priorités en matière de transport pour la région de la capitale nationale[22]. La FCM a recommandé que le gouvernement fédéral[23] :

  • aide les provinces et les territoires à déterminer les critères pour des projets acceptables; et
  • accorde aux municipalités une proportion du financement fédéral correspondant à leur part des infrastructures.

Le Comité a recueilli des recommandations d’autres témoins au sujet des critères d’admissibilité et de sélection pour les projets d’infrastructures dans le cadre du Nouveau Plan Chantiers Canada.

  • L’Association canadienne des travaux publics a recommandé que le gouvernement fédéral joue un rôle dans la promotion de l’utilisation de systèmes d’évaluation de la durabilité pour les investissements en infrastructures, et qu’il y consacre les fonds nécessaires[24].
  • Un expert-conseil indépendant en urbanisme a recommandé que l’on n’accorde pas la priorité aux projets routiers « prêts à démarrer », parce que ceux‑ci ne permettent pas de régler le problème de la congestion routière. Il préconise plutôt que l’on priorise les projets visant les transports en commun, les marcheurs et les cyclistes, parce qu’ils rendent la circulation des personnes et des marchandises plus efficace et permettent d’obtenir un meilleur rendement sur le capital investi[25]. Le Comité fait remarquer que le Nouveau Fonds Chantiers Canada n’accorde pas la priorité aux projets « prêts à démarrer ».

Deux témoins ont demandé que le gouvernement fédéral accorde du financement pour le fonctionnement et l’entretien des infrastructures. En effet, M. Siemiatycki, de l’Université de Toronto, a expliqué au Comité qu’une proportion importante et prévisible — pouvant aller jusqu’à 80 % dans le cas de certains projets — de la totalité des coûts des infrastructures tout au long de leur cycle de vie est consacrée au fonctionnement et à l’entretien. Il a déclaré : « Si l’on finance la construction de ces infrastructures, mais que leur propriétaire ne dispose pas des sources de recettes ni des possibilités qui lui permettraient de veiller à ce qu’elles demeurent fonctionnelles et en bon état, cela pose des problèmes[26]. » Le maire de Burnaby a également recommandé que des fonds fédéraux soient débloqués afin de couvrir les dépenses de fonctionnement.

Le Comité recommande :

2. Que le gouvernement fédéral continue de fournir un financement, sous une forme souple et fiable, aux municipalités à l’échelle du pays par l’entremise du Fonds de la taxe sur l’essence.

3. Que, une fois les projets identifiés et priorisés par les provinces et les territoires, le gouvernement fédéral continue d'évaluer et d'approuver les projets tels qu’ils lui sont soumis.

4. Que le gouvernement fédéral continue de travailler avec les provinces, les territoires et les municipalités pour mettre en œuvre le Nouveau Fonds Chantiers Canada.

C.  Pratiques de gestion des biens municipaux

La discussion portant sur l’ampleur des besoins en infrastructures partout au pays (c.-à-d. sur le soi‑disant « déficit » en matière d’infrastructures) a permis de constater qu’on ne s’entend pas vraiment sur le concept, sauf pour dire que les données requises pour l’évaluer ne sont pas faciles à obtenir. Un représentant d’Infrastructure Canada a informé le Comité que «[l]es diverses organisations et les municipalités ont un problème de capacité et elles ne sont pas capables de nous préciser le genre d'infrastructures en place, les infrastructures qui leur appartiennent, la valeur des actifs, les travaux d'entretien qui ont été reportés, l'état des actifs, [ni] leur durée de vie restante […] [27]. » La FCM et d’autres représentants de municipalités ont fait référence au Bulletin de rendement des infrastructures canadiennes de 2012, qui indique que près d’un tiers des voies publiques, des aqueducs, des systèmes d’épuration des eaux usées et de traitement des eaux pluviales était dans un état jugé de correct à très mauvais et avait besoin d’investissements majeurs immédiatement[28]. Certains membres du Comité ont fait observer qu’avec le vieillissement continu des installations et l’accroissement constant de la population, il se pourrait qu’il ne soit même jamais possible d’éliminer ce « déficit » en matière d’infrastructures.

Des témoins ont dit au Comité que bien que certaines villes (p. ex. Edmonton et Ottawa) gèrent très bien leurs éléments d’infrastructure, la plupart des administrations municipales ne possèdent ni les capacités ni les ressources nécessaires pour bien suivre l’état de leurs infrastructures et prendre des décisions d’investissement éclairées. Les représentants d’Infrastructure Canada ont fait remarquer que la « création de capacités » figure au nombre des catégories d’investissements admissibles pour le Fonds de la taxe sur l’essence, et que lorsqu’elles le peuvent, les associations municipales des provinces et territoires aident aussi les municipalités dans la gestion des biens. La FCM a recommandé au Comité « que quelqu’un prenne la responsabilité d’établir une orientation nationale en ce qui a trait à la manière générale dont les biens doivent être gérés au pays[29] ».

Le Comité recommande :

5. Que le gouvernement fédéral continue d’encourager le renforcement des capacités dans la gestion d'actifs pour les municipalités.

FINANCEMENT DES TRANSPORTS EN COMMUN

Le Comité a appris que les investissements dans les transports en commun sont des catégories d’investissements admissibles pour tous les volets du Nouveau Plan Chantiers Canada.

Le représentant de l’Association canadienne du transport urbain (ACTU) a parlé au Comité de la vague d’investissements gouvernementaux dans les transports collectifs au cours de la dernière décennie. « En 2013, la quantité de financement versée par tous les paliers de gouvernement pour les immobilisations en matière d’infrastructure de transport en commun a atteint 4 milliards de dollars. Au cours de la dernière décennie, le gouvernement fédéral a investi ou a annoncé plus de 8 milliards de dollars en financement pour l’infrastructure de transport en commun partout au pays, ce qui représente presque 1 milliard de dollars par année[30] ».

Cette étude a permis de discuter en profondeur des avantages économiques, sociaux et environnementaux que procurent les investissements dans les transports en commun. Certains témoins ont attiré l’attention sur le fait que les investissements dans les transports collectifs ont pour effet de réduire la congestion routière dans les grandes villes — dont l’impact sur la productivité économique était d’envergure nationale, car cela représente déjà des milliards de dollars en pertes causées par la baisse d’activité économique[31]. Les projets de transports en commun sont aussi censés attirer des emplois très rémunérateurs dans les collectivités, favoriser le développement de grappes d’entreprises et réduire l’étalement urbain, la dépendance à l’automobile, les gaz à effet de serre et le coût de la vie pour certains ménages. Des témoins ont fait valoir que les projets de transports en commun permettent d’obtenir un rendement du capital investi d’au moins 20 %, grâce à l’accroissement de l’activité économique.

Le représentant de l’ACTU a expliqué au Comité que le nombre d’usagers des transports en commun a fortement augmenté et qu’il continue de progresser plus rapidement que la population dans les zones urbaines du pays. Brent Toderian, un expert-conseil indépendant en urbanisme, a fait remarquer qu’en raison des énormes cohortes de jeunes adultes et de baby‑boomers au Canada, la demande de services de transports en commun augmentera de plus belle. Il a dit au Comité que « les deux plus grands groupes démographiques de l’histoire humaine sont prêts à choisir des priorités différentes en matière d’infrastructures pour le transport en commun, les piétons et les cyclistes[32] ».

D’après le représentant de l’ACTU, ces 10 dernières années, les municipalités ont consacré 2,5 milliards de dollars à des projets de transports en commun, sur les montants provenant du Fonds fédéral de la taxe sur l’essence qu’elles ont perçus. Cinq des plus grandes villes canadiennes, soit Toronto, Vancouver, Ottawa, Calgary et Edmonton, ont dépensé dans les transports collectifs pratiquement la totalité des sommes allouées grâce au Fonds fédéral de la taxe sur l’essence. Les fonds fédéraux destinés aux infrastructures ont aussi permis de réaliser de grands projets de transports en commun, comme la ligne de la Confédération, et d’autres plus modestes, comme l’achat d’autobus à Cornwall, en Ontario, ainsi qu’à Whitehorse, au Yukon, et à l’Île‑du‑Prince‑Édouard.

L’ancien ministre des Transports a précisé, dans sa réponse au rapport de 2012 du Comité concernant les transports en commun au Canada, que le gouvernement fédéral « appuie également le recours aux partenariats public-privé (PPP) par les provinces, les territoires et les municipalités pour des projets d’infrastructure à coûts partagés et il reconnaît que le secteur privé peut apporter des compétences additionnelles dans le domaine du transport en commun, ce dont plusieurs administrations ont déjà profité[33] ».

Le budget de 2015 prévoit 750 millions de dollars supplémentaires sur deux ans, à compter de 2017‑2018, et 1 milliard de dollars annuellement par la suite, pour financer des projets de transports collectifs sélectionnés en fonction de critères fondés sur le mérite. Ces nouveaux fonds consacrés aux transports en commun seront administrés par PPP Canada, le bureau fédéral des PPP, et serviront à financer des projets permettant d’optimiser les deniers publics dans le cadre de partenariats public‑privé. Les modalités d’octroi des nouveaux fonds destinés aux transports collectifs n’ont pas encore été annoncées. D’importants PPP dans le domaine des transports en commun à Edmonton, Winnipeg, Kitchener-Waterloo, York, Toronto et Ottawa sont déjà enclenchés. La section suivante expose plus en détails les témoignages que le Comité a recueillis auprès de divers intervenants au sujet des PPP.

Le représentant de l’ACTU a déclaré au Comité que les membres de son association appuient fermement la nouvelle proposition fédérale en matière de transports collectifs et espèrent que les conditions d’obtention du financement seront souples. En proposant de consacrer 1 milliard de dollars par an aux transports en commun à compter de 2020, « le gouvernement débloque le financement de projets d’infrastructure majeurs partout au pays[34] ». Bien que l’ACTU apprécie le caractère prévisible du nouveau financement annoncé, son représentant a fait remarquer qu’il manquera encore 18 milliards de dollars, sur les 56 milliards de dollars que coûteront les projets de transports en commun prévus au cours des cinq prochaines années. L’ACTU estime que durant cette période, 28 % du financement relatif aux transports collectifs servira à combler les besoins de remise en état ou en remplacement des installations.

La FCM a elle aussi fait savoir que ses membres approuvent le nouveau financement des transports en commun prévu dans le budget de 2015. Au fur et à mesure que les modalités d’octroi sont établies, toutefois, le représentant de la FCM a dit au Comité que la Fédération aimerait « veiller à ce que les gouvernements locaux conservent le pouvoir de déterminer le degré de participation du secteur privé[35] ». Puisque la proposition de nouveaux fonds destinés aux transports en commun vise à permettre la réalisation de grands projets, ce qui prend du temps, la FCM ne considère pas que les retards dans l’octroi des fonds soient un problème, à condition que le processus d’approbation commence rapidement.

Des représentants de certaines municipalités ont exprimé des réserves à l’égard des exigences relatives aux PPP de la proposition de nouveaux fonds destinés aux transports en commun. Par exemple, le maire de Burnaby aimerait avoir la possibilité de ne pas s’engager dans un PPP pour la réalisation d’un grand projet de transport collectif, et des représentants de la Ville de Montréal ont laissé entendre que la proposition de nouveaux fonds destinés aux transports en commun pour les projets en PPP ne profitera qu’aux systèmes de transport des plus grandes villes canadiennes. La Ville de Montréal a recommandé que le mode de financement destiné aux transports collectifs soit flexible, inclusif et à longue échéance. Les représentants de la Ville de Vancouver ont aussi recommandé que les règles entourant le nouveau fonds destiné aux transports collectifs soient souples.

Les représentants de la FCM et de l’ACTU ont demandé que la part de la contribution du gouvernement fédéral dans les projets de transports en commun réalisés en PPP soit augmentée pour atteindre un tiers des coûts admissibles des projets, comme c’est le cas pour les autres fonds fédéraux. Le représentant de la FCM a fait valoir qu’il est essentiel que le gouvernement fédéral investisse pour devenir l’un des trois partenaires à part entière dans ce genre de projets, car les PPP ne diminuent en rien le besoin de financement gouvernemental pour couvrir les dépenses d’immobilisations de biens publics, comme les vastes projets de transports en commun.

Dans un mémoire qu’elle a déposé au Comité, l’Association canadienne des opérateurs de traversiers (ACOT) a indiqué que ses membres sont mécontents du financement consacré aux transports en commun. Seuls les exploitants de traversiers faisant partie d’un réseau de transport urbain sont admissibles à des fonds fédéraux dans le cadre du Nouveau Plan Chantiers Canada, ce qui exclut les exploitants de traversiers en dehors des villes. L’ACOT affirme que les traversiers qui transportent des marchandises et des passagers en périphérie des zones urbaines participent grandement à l’activité économique et que leurs exploitants devraient être admissibles au financement accordé dans le cadre du Nouveau Plan Chantiers Canada.

Le Comité recommande :

6. Que le gouvernement fédéral continue de travailler avec les provinces, les territoires et les municipalités pour fournir des niveaux record de financement pour le transport en commun grâce au Nouveau Fonds Chantiers Canada, au Fonds de la taxe sur l’essence et au nouveau Fonds pour le transport en commun.

PARTENARIATS PUBLIC-PRIVÉ

Les prochaines sections résument les observations des témoins devant le Comité au sujet du recours aux PPP pour la création d’infrastructures publiques.

A.  Partenariats public-privé et marchés publics classiques

Le Comité a appris que le modèle d’approvisionnement en PPP permet au secteur public de regrouper les responsabilités liées à un projet d’infrastructure (c.‑à‑d. de concevoir, de financer, de construire, d’exploiter et d’entretenir l’infrastructure) dans un contrat unique conclu avec le secteur privé[36]. Le représentant de PPP Canada a expliqué au Comité que les « Les PPP ne représentent pas une seule notion, mais une famille d’options en matière d’approvisionnement avec le secteur privé[37] ». Lorsque le secteur privé est responsable du fonctionnement ou de l’entretien d’une infrastructure, le contrat de PPP peut porter sur toute la durée de vie du projet. Le partenaire privé se paie en demandant une contribution aux usagers de l’infrastructure, ou directement auprès du secteur public.

Le modèle de PPP a été élaboré pour surmonter certains problèmes récurrents inhérents au modèle de marché public traditionnel qui permet au secteur public de conclure habituellement des contrats distincts avec différents partenaires privés pour la conception et ensuite la construction d’une infrastructure. Dans un modèle de marché public traditionnel, le secteur public finance généralement le projet, en plus d’assurer son fonctionnement et son entretien pendant toute sa durée de vie. Certains témoins ont expliqué au Comité que ce modèle entraîne souvent des retards coûteux, des frais d’entretien plus élevés que prévu et, parfois, des problèmes opérationnels[38].

Un bon contrat de PPP fait porter au partenaire privé la responsabilité de tous les dépassements de coûts lorsque les échéanciers et les spécifications du projet ne sont pas respectés, lorsque le rendement de l’infrastructure pose problème ou quand il y a des coûts d’entretien inattendus au cours de la durée de vie du projet. Le représentant du Conseil canadien pour les partenariats public‑privé (CCPPP) a dit devant le Comité que ce « qui fait la singularité des PPP, c’est qu’ils permettent de garantir qu’un bien en train d’être construit sera entretenu en fonction de normes fixées d’un commun accord par un gouvernement et le secteur privé et sera restitué au gouvernement 30 années plus tard dans l’état exact qui avait été convenu. Si cette condition n’est pas respectée parce que, par exemple, le bien en question n’a pas été entretenu, une sanction sera imposée aux intervenants du secteur privé[39] ». Le revers de la médaille du financement d’un projet par le secteur privé, c’est que les partenaires privés empruntent à des taux supérieurs à ceux consentis au secteur public, de sorte que les frais d’intérêts additionnels sont payés, au bout du compte, par les utilisateurs ou les contribuables.

En raison de la complexité considérable et des coûts liés à la négociation et à la conclusion d’un contrat de PPP, le modèle est considéré comme une solution de rechange viable à l’approvisionnement traditionnel pour seulement 10 % à 20 % des projets d’infrastructure au Canada[40].

Les projets qui conviennent généralement le mieux à des PPP sont des projets d’envergure et complexes et dont les attentes en matière de rendement sont facilement mesurables et censées demeurer les mêmes tout au long du cycle de vie du projet.

B.  Expérience du Canada en matière de partenariats public-privé

L’expérience du Canada en matière de PPP remonte à quelques décennies et s’étend à de nombreux secteurs et à tous les ordres de gouvernement. Le CCPPP a informé le Comité qu’il y a 224 projets en PPP au pays à l’étape de l’exploitation, de la construction ou de l’approvisionnement. Au Canada, ces projets comprennent des hôpitaux, des écoles, des prisons, des autoroutes, des immeubles fédéraux et des ponts, des usines de traitement des eaux et des déchets solides, des installations récréatives et des projets de transports en commun, le tout totalisant plus de 72 milliards de dollars.

Presque tous les témoins estimaient que les PPP canadiens étaient une réussite en ce qui concerne le respect des délais et du budget. Matti Siemiatycki, un professeur ayant étudié à fond les PPP, a signalé que l’on avait noté aucune défaillance majeure, aucune renégociation majeure des contrats, ni aucune faillite pour les projets en PPP menés depuis 2000 une fois les infrastructures opérationnelles. Il a aussi fait observer que le secteur public avait évité en grande partie la controverse au Canada en assurant lui-même l’exploitation et en payant directement le partenaire du secteur privé pour ses services au lieu d’imposer des frais aux utilisateurs.

Le CCPPP a informé le Comité que, selon une analyse indépendante, les PPP ont permis aux différents ordres de gouvernement au Canada d’économiser 9,9 milliards de dollars, car les projets ont été terminés à temps et sans dépassement des coûts. Selon PPP Canada, l’agence fédérale responsable des PPP, les PPP canadiens génèrent un retour sur investissement de 5 % à 15 % de plus que les méthodes d’approvisionnement traditionnelles.

PPP Canada a dit au Comité que vu sa filière de projets diversifiée et grandissante, la concurrence internationale pour les contrats et le marché d’investissement mûr pour des projets d’infrastructures, le Canada est désormais reconnu comme l’un des chefs de file mondiaux de l’approvisionnement par PPP[41]. Le marché des PPP bénéficie de plus du soutien d’institutions de PPP établies aux échelons provinciaux et fédéral qui produisent et s’échangent des renseignements sur les pratiques exemplaires et guident les promoteurs de projets.

C.  Points de vue des municipalités

Les représentants municipaux qui ont témoigné devant le Comité n’acceptaient pas tous dans la même mesure l’approche de PPP. À une extrémité, le maire de Burnaby rejetait d’emblée les PPP, y voyant une forme de privatisation[42]. Pour sa part, le maire de Gatineau a indiqué que sa ville ne connaissait pas bien cette approche. Il craignait que seules les grandes villes canadiennes aient des projets assez importants pour en profiter[43]. À l’inverse, forts de leur expérience des PPP, les représentants des villes de Vancouver et de Surrey étaient tout à fait favorables au modèle d’approvisionnement en PPP lorsqu’il appert que cette approche offre un meilleur rapport qualité‑prix. La mairesse de Surrey a également insisté sur le fait que l’actif doit continuer d’appartenir au secteur public[44].

Certains représentants municipaux redoutaient que la présélection obligatoire en PPP des projets de plus 100 millions de dollars, selon le Nouveau Plan Chantiers Canada, empêchent les municipalités de se prévaloir des méthodes traditionnelles d’approvisionnement, si elles le souhaitent. Certains témoins craignaient que les critères pour le nouveau Fonds pour le transport en commun aient pour effet  d’exclure toutes les municipalités, à l’exception des plus grandes villes du pays[45]. Les représentants d’Infrastructure Canada et de PPP Canada ont assuré le Comité que 14 milliards de dollars sont prévus pour les projets d’infrastructures sans PPP dans les volets Infrastructures nationales et Infrastructures provinciales-territoriales du Fonds Chantiers Canada.

Le Comité recommande :

7. Que le gouvernement fédéral continue d’encourager l'utilisation des partenariats public-privé (PPP) lorsqu’une analyse prouve qu'il y a une optimisation des ressources.

D.  Réduire les coûts des partenariats public-privé

Comparativement aux méthodes d’approvisionnement traditionnelles, les PPP sont coûteux en raison du transfert des risques financiers au partenaire du secteur privé ainsi que de la complexité et des coûts liés à la négociation et la conclusion des ententes de PPP. M. Siemiatycki a appris au Comité que, selon des recherches effectuées en Europe, les PPP coûtent 25 % de plus (coûts en capital initiaux) que les projets reposant sur un modèle traditionnel d’approvisionnement. Le directeur de la ville de Surrey, une ville maintenant à l’étape de la construction du premier projet de biocarburant en PPP, a déclaré que « tout cela a un prix. Il faut payer le consortium privé qui prend ces risques, mais au moins on sait ce qu’on paye et ce qu’on en retire[46] » M. Siemiatycki a décrit la « prime PPP » comme une police d’assurance qui protège contre les résultats inattendus au chapitre des coûts ou du rendement de l’infrastructure. En effet, dans le cas d’un PPP, les coûts sont connus à l’avance pour toute la durée de vie de l’actif.

M. Siemiatycki a laissé entendre que cela ne vaut peut-être pas la peine de payer davantage pour du financement privé à long terme à l’étape d’exploitation. Il a expliqué au Comité qu’une fois à cette étape, aucun projet récent en PPP n’a échoué ou nécessité des négociations contractuelles. Il se demandait donc si les risques encourus après la construction justifient les coûts liés au financement privé pendant toute la durée du projet. Il a cité un rapport du vérificateur général de l’Ontario selon lequel les PPP ont coûté à la province 8 milliards de dollars de plus que si les projets avaient été menés selon une méthode d’approvisionnement traditionnelle. Bien qu’il ait admis que le secteur public n’ait pas la réputation de respecter les budgets et les délais, M. Siemiatycki estime que des économies peuvent être réalisées si le secteur public prend en charge l’étape de fonctionnement et d’entretien (F et E) dans le contexte des PPP. Pour réduire les coûts des PPP pour le secteur public, M. Siemiatycki a recommandé[47] :

  • que les fonctionnaires apprennent à mieux gérer les risques liés au F et E;
  • que PPP Canada analyse les données recueillies pour les projets de PPP afin de mieux quantifier les risques liés au F et E.

En revanche, PPP Canada a laissé entendre au Comité que le financement du secteur privé est essentiel aux PPP, et même qu’il les définit, car cela encourage le partenaire privé à construire des infrastructures de grande qualité et à bien les entretenir tout au long de leur cycle de vie.

Les représentants des municipalités et des sociétés de transport en commun ont recommandé que la contribution du gouvernement fédéral aux PPP passe à 33 % des coûts de projet admissibles, comme c’est le cas pour les autres programmes fédéraux de financement des infrastructures[48].

E.  Améliorer l’exécution des projets d’infrastructure

M. Siemiatycki a constaté que 85 à 90 % des projets publics reposent sur une approche d’approvisionnement traditionnelle. Il a dit au Comité que « le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle allant bien au-delà de celui qu’il assume dans le cadre des PPP[49] ». Pour améliorer la gestion par le secteur public des projets reposant sur une approche traditionnelle, il a recommandé d’élargir le mandat de PPP Canada pour que l’organisme puisse conseiller tous les ordres de gouvernement sur les différentes options en matière d’approvisionnement[50].

RECOMMANDATION 1

Que le gouvernement fédéral continue d'être un partenaire financier important pour les projets d'infrastructure partout au Canada par l’entremise du Nouveau Plan Chantiers Canada.

RECOMMANDATION 2

Que le gouvernement fédéral continue de fournir un financement, sous une forme souple et fiable, aux municipalités à l’échelle du pays par l’entremise du Fonds de la taxe sur l’essence.

RECOMMANDATION 3

Que, une fois les projets identifiés et priorisés par les provinces et les territoires, le gouvernement fédéral continue d'évaluer et d'approuver les projets tels qu’ils lui sont soumis.

RECOMMANDATION 4

Que le gouvernement fédéral continue de travailler avec les provinces, les territoires et les municipalités pour mettre en œuvre le Nouveau Fonds Chantiers Canada.

RECOMMANDATION 5

Que le gouvernement fédéral continue d’encourager le renforcement des capacités dans la gestion d'actifs pour les municipalités.

RECOMMANDATION 6

Que le gouvernement fédéral continue de travailler avec les provinces, les territoires et les municipalités pour fournir des niveaux record de financement pour le transport en commun grâce au Nouveau Fonds Chantiers Canada, au Fonds de la taxe sur l’essence et au nouveau Fonds pour le transport en commun.

RECOMMENDATION 7

Que le gouvernement fédéral continue d’encourager l'utilisation des partenariats public-privé (PPP) lorsqu’une analyse prouve qu'il y a une optimisation des ressources.


[1]              Infrastructure Canada, Rapport ministériel sur le rendement 2013-2014, p. 5 (voir la figure 1).

[2]              Le gouvernement fédéral a privatisé Air Canada en 1989, la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN) en 1995 et le système de navigation aérienne civile (NAV CANANDA) en 1997. La propriété de beaucoup de petits aéroports et ports a été cédée à d’autres ordres de gouvernement ou à des intérêts privés dans années 1990 et 2000, et certaines installations ont été démantelées.

[3]              Chambre des communes, Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités [TRAN], Témoignages, 41e législature, 2e session, 5 mai 2015, 1530 (Jeff Moore, sous‑ministre adjoint, Politiques et communications, Infrastructure Canada); Témoignages, 12 mai 2015, 1540 (Brock Carlton, chef de la direction, Fédération canadienne des municipalités [FCM]).

[4]              TRAN, Témoignages, 5 mai 2015, 1645 (Moore); Témoignages, 12 mai 2015, 1540 (FCM); Témoignages, 5 mai 2015, 1645 (Ed Komarnicki, député, Souris—Moose Mountain).

[5]              TRAN, Témoignages, 12 mai 2015, 1600 (FCM).

[6]              Ibid., 1615.

[7]              Infrastructure Canada, Réponse écrite, 29 mai 2015, p. 8.

[8]              Canada numérique 150, À propos du programme, Un Canada branché.

[9]              TRAN, Témoignages, 28 mai 2015, 1605 (Corinne Charette, sous-ministre adjointe principale, Spectre, Technologies de l’information et télécommunication, ministère de l’Industrie).

[10]           Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, Fonds d’infrastructure des Premières Nations (FIPN) — Guide du demandeur relatif au programme, p. 1.

[11]           Ibid.

[12]           Mémoire de Hatch Ltd. et de la Première Nation Kashechewan reçu le 8 juin 2015.

[13]           Comité permanent des peuples autochtones au Sénat, « Étude sur les problèmes liés à l’infrastructure dans les réserves des Premières Nations », Études et projets de lois.

[14]           Infrastructure Canada, Réponse écrite, 29 mai 2015, p. 4.

[15]           TRAN, Témoignages, 7 mai 2015, 1710 (Maxime Pedneaud-Jobin, maire, Ville de Gatineau).

[16]           TRAN, Témoignages, 28 mai 2015, 1545 (Brent Toderian, TODERIAN UrbanWORKS).

[17]           Règlement sur les effluents des systèmes d’assainissement des eaux usées, DORS/2012-139.  TRAN, Témoignages, 12 mai 2015, 1540 (FCM); Témoignages, 26 mai 2015, 1535 (Derek Corrigan, maire, Ville de Burnaby).

[18]           TRAN, Témoignages, 12 mai 2015, 1540 (FCM).

[19]           Le financement accordé dans le cadre du Fonds de la taxe sur l’essence est envoyé directement à Toronto, et par l’intermédiaire de l’Association des municipalités de l’Ontario à d’autres destinataires.En Colombie‑Britannique, le financement accordé dans le cadre de ce fonds passe par l’Union des municipalités de C.-B.

[20]           TRAN, Témoignages, 5 mai 2015, 1705 (Bogdan Makuc, directeur général, Intégration des programmes, Infrastructure Canada).

[21]           TRAN, Témoignages, 12 mai 2015, 1620 (FCM).

[22]           Réponse écrite de la Ville de Gatineau et de la Société de transport de l’Outaouais, 2 juin 2015.

[23]           TRAN, Témoignages, 12 mai 2015, 1615 et 1635 (FCM).

[24]           Ibid., 1535 (ACTP).

[25]           TRAN, Témoignages, 28 mai 2015, 1550 (Toderian).

[26]           Ibid., 1620 (Matti Siemiatycki, professeur agrégé, Université de Toronto).

[27]           TRAN, Témoignages, 5 mai 2015, 1600 (Moore).

[28]           Bulletin de rendement des infrastructures canadiennes, « Bulletin d’évaluation des infrastructures canadiennes 2012 ».

[29]           TRAN, Témoignages, 12 mai 2015, 1705 (FCM).

[30]           TRAN, Témoignages, 7 mai 2015, 1535 (Patrick Leclerc, vice‑président, Développement stratégique, Association canadienne du transport urbain [ACTU]).

[31]           TRAN, Témoignages, 28 mai 2015, 1545 (Toderian); Ville de Toronto, Mémoire — Annexe, 3 juin 2015, p. 1.

[32]           TRAN, Témoignages, 28 mai 2015, 1550 (Toderian).

[33]           TRAN,, Étude sur les transports en commun au Canada — Réponse du gouvernement, 41législature, 1re session, juin 2012.

[34]           TRAN, Témoignages, 7 mai 2015, 1535 (ACTU).

[35]           TRAN, Témoignages, 12 mai 2015, 1540 (FCM).

[36]           Le terme PPP désigne les contrats avec le secteur privé pouvant regrouper un ensemble de responsabilités liées à un projet; le financement privé est nécessaire à la réalisation d’un PPP.

[37]           TRAN, Témoignages, 7 mai 2015, 1555 (John McBride, premier dirigeant, PPP Canada Inc.)

[38]           TRAN, Témoignages, 7 mai 2015, 1605 (McBride); Témoignages, 12 mai 2015, 1715 (Mark Romoff, président et directeur général, Conseil canadien pour les partenariats public-privé); Témoignages, 28 mai 2015, 1530 (Siemiatycki).

[39]           TRAN, Témoignages, 12 mai 2015, 1715 (Romoff).

[40]           TRAN, Témoignages, 7 mai 2015, 1600 (McBride); Témoignages, 12 mai 2015, 1550 (Romoff), Témoignages, 28 mai 2015, 1530 (Siemiatycki).

[41]           TRAN, Témoignages, 7 mai 2015, 1530 (McBride).

[42]           TRAN, Témoignages, 26 mai 2015, 1535 (Corrigan).

[43]           TRAN, Témoignages, 7 mai 2015, 1645 (Pedneaud-Jobin).

[44]           TRAN, Témoignages, 26 mai 2015, 1615 (Linda Hepner, maire, Ville de Surrey).

[45]           TRAN, Témoignages, 26 mai 2015, 1535 (Corrigan); Témoignages, 7 mai 2015, 1645 (Pedneaud-Jobin).

[46]           TRAN, Témoignages, 26 mai 2015, 1630 (Vincent Lalonde, gestionnaire, ville deSurrey).

[47]           TRAN, Témoignages, 28 mai 2015, 1540 et 1635 (Siemiatycki).

[48]           TRAN, Témoignages, 7 mai 2015, 1540 (ACTU); Témoignages, 12 mai 2015, 1540 (FCM).

[49]           TRAN, Témoignages, 28 mai 2015, 1635 (Siemiatycki).

[50]           Ibid.