CHPC Rapport du Comité
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Rapport complémentaire des néo-démocrates Introduction Devant la progression des crimes haineux au Canada, la motion M-103 devait rassembler les voix de tous les parlementaires d’Est en Ouest pour dénoncer les formes systémiques de discrimination et de racisme. Mais au lieu de cela, elle a suscité le litige, la partisanerie et la controverse. Les néo‑démocrates ont été déçus, voire consternés de constater que la petite politique a eu raison des députés du gouvernement et de l’Opposition officielle, qui ont catégoriquement refusé de collaborer dans ce dossier, qui aurait dû rallier la totalité des représentants élus. Résultat : la motion, adoptée à la majorité, n’a pas su recueillir le soutien unanime de tous les députés. Le principal sujet de controverse était l’emploi du terme « islamophobie » dans la motion. D’abord, il y a eu un vif débat sur le choix et la signification de ce terme considérant son apparition relativement récente au Canada. Les néo-démocrates sont d’avis que les motions et les projets de loi présentés à la Chambre des communes doivent être écrits de manière simple, claire et concise pour que les institutions démocratiques puissent rejoindre tous les Canadiens. Il aurait donc été souhaitable que le gouvernement et la motionnaire acceptent d’en modifier le texte afin d’y inclure une définition consensuelle de l’islamophobie. D’ailleurs, une telle définition avait déjà été convenue par tous les partis le 26 octobre 2016, lorsque les députés ont appuyé unanimement la motion ci-après du député d’Outremont : Que la Chambre se joigne aux 69 742 Canadiens et Canadiennes qui ont appuyé la pétition électronique de la Chambre des communes (e-411) condamnant toute forme d’islamophobie[i]. La circulation de renseignements erronés au sujet de la motion conjuguée à l’impossibilité de s’entendre d’une manière générale sur le sens du terme « islamophobie » ont eu pour effet d’effrayer la population et certains témoins, qui craignaient que la motion M-103 ne modifie à elle seule l’état du droit ou n’accorde à l’Islam, du fait de l’emploi du terme « islamophobie », une protection supérieure à celle consentie aux autres groupes minoritaires du Canada. Il est très dommage que la motion M-103 n’ait pu bénéficier de l’esprit de collaboration qui régnait le 26 octobre 2016. Selon les néo-démocrates, rien n’empêchait la Chambre d’inclure dans le texte une définition consensuelle du terme « islamophobie » pour permettre l’adoption unanime de la motion et dissiper les craintes de la population quant aux visées de cette dernière. Or, non seulement ils ne l’ont pas fait, mais les manigances ont dégénéré à tel point que l’Opposition officielle a proposé à la Chambre des communes le 16 février 2017 une motion essentiellement identique à M-103 portant que CHPC procède à une étude elle aussi identique. Nous, les néo-démocrates, avons refusé de jouer ce jeu. Nous avons examiné les deux motions indépendamment l’une de l’autre et avons évalué le bien-fondé de chacune. Nous sommes pour toute motion anti-discrimination et croyons qu’en tant qu’élus et représentants de la population à la Chambre des communes, il nous incombe de lutter ensemble contre le racisme et la discrimination sous toutes leurs manifestations. Les néo-démocrates relèvent avec déception une profonde ironie, à savoir que la motion M‑103, qui devait répondre à la nécessité d’« endiguer le climat de haine et de peur qui s’installe dans la population », est elle-même devenue la cible d’une troublante campagne de désinformation en ligne incitant à y voir des visées xénophobes, racistes et islamophobes. Les bureaux de député de tout le pays ont reçu d’innombrables lettres contenant de mauvaises informations. Des députés ont été incités à voter contre la « loi » bien après l’adoption de la motion, et il était manifeste que certains des témoins qui comparaissaient devant le Comité croyaient que l’étude visait à déterminer s’il fallait ou non appuyer la motion M-103. Au cours de l’étude, il est devenu évident que plusieurs témoins ignoraient ce que signifiait l’adoption de la motion M-103 par la Chambre des communes. Il convient de rappeler que la tâche du Comité, d’après le texte de la motion, consistait à examiner la question et à formuler des recommandations au gouvernement sur la façon dont il pourrait « établir une approche pangouvernementale pour la réduction ou l’élimination du racisme et de la discrimination religieuse systémiques » et « recueillir des données pour contextualiser les rapports sur les crimes haineux et pour évaluer les besoins des communautés touchées »[ii]. Nous soulignons par ailleurs que la tâche du Comité s’achèvera avec le dépôt du rapport. Aucune loi n’est édictée du fait de l’adoption de la motion M-103. Outre les difficultés posées par le refus de définir le terme « islamophobie », des réserves ont été formulées par l’Opposition officielle en raison du traitement particulier qui semblait réservé à ce terme, l’islamophobie étant le seul type de discrimination énoncé en toutes lettres dans la motion. Bien entendu, l’incidence des crimes haineux varie d’une communauté à l’autre. Au Canada, c’est la communauté juive qui est la plus touchée. Pour citer Shimon Fogel, président-directeur général du Centre consultatif des relations juives et israéliennes : Confronter la haine est une expérience que les Juifs du Canada connaissent trop bien. Les rapports successifs de Statistique Canada et des services policiers de partout au pays ne cessent de confirmer […] que les citoyens juifs du Canada sont la minorité religieuse la plus ciblée par des crimes haineux, tant en nombre absolu qu'en nombre par habitant. À l'échelle nationale, en 2015, ils ont été la cible de 54 crimes haineux pour 100 000 habitants[iii]. Fait non moins important, les crimes haineux contre la communauté musulmane sont ceux qui connaissent la plus forte augmentation. M. Fogal a ajouté : « En fait, la communauté musulmane a été le deuxième groupe le plus souvent ciblé, soit 15 incidents pour 100 000 habitants[iv]. » C’est ce qu’à confirmé Yvan Clermont, directeur du Centre canadien de la statistique juridique : La hausse de l'ensemble des crimes haineux commis en 2015 était en partie attribuable à une hausse du nombre d'affaires ciblant des musulmans. Le nombre de crimes haineux contre des musulmans ayant été déclarés à la police sont passés de 99 à 159, ce qui représente une augmentation de 61 %. Parallèlement à cela, le nombre de crimes haineux ciblant des juifs a diminué: il est passé de 213, en 2014, à 178, en 2015. Ainsi, les crimes haineux visant la population juive représentaient encore la plus grande partie des crimes motivés par la haine, mais cette proportion était suivie de très près par les crimes ciblant la population musulmane[v]. C’est ce qui explique la présence du terme « islamophobie » dans la motion. Depuis les attaques terroristes du 11 septembre 2001 aux États-Unis, les personnes de confession musulmane ou pouvant être ainsi perçues sont scrutées à la loupe dans leur milieu et par les autorités. À cause de cela, les musulmans et leurs lieux de culte sont devenus la cible d’actes de violence. Les statistiques montrent que les crimes haineux sont en hausse au Canada. M. Clermont a dit ceci au Comité : Entre 2014 et 2015, les incidents de crimes haineux déclarés par la police sont passés de 1 295 à 1 362. De plus grandes augmentations ont été observées chez certains groupes. À cet égard, en 2015, le nombre d’incidents à l’encontre des Arabes et des Asiatiques de l’Ouest est passé de 69 à 92 incidents, et il est passé de 99 à 159 incidents à l’encontre de la population musulmane. Je parle toujours d’incidents rapportés à la police[vi]. C’est en raison de cette tendance, conjuguée à la tragédie de la Grande Mosquée de Québec, où un tireur se proclamant un nationalisme blanc a tué 6 fidèles et en a blessé 25 autres, que les néo‑démocrates défendent la condamnation explicite de l’islamophobie. La motion indiquait clairement que l’étude devait servir à combattre les formes systémiques de racisme et de discrimination religieuse. Vu la nature de l’étude, le NPD avait espéré que la partisanerie et les réponses toutes faites ne viendraient pas ternir les efforts du Comité une fois les travaux lancés, surtout lorsque viendrait le temps de déterminer les recommandations à faire au gouvernement. Après tout, les députés de chaque parti avaient clairement manifesté leur soutien à l’élimination du racisme et de la discrimination. Les néo-démocrates ont travaillé sans relâche avec les autres partis en vue de formuler des recommandations exhaustives comprenant des mesures concrètes et des mesures de responsabilisation. Les néo-démocrates appuient les recommandations du rapport principal; cependant, certaines recommandations importantes sur des sujets clés en sont absentes. C’est dans cet esprit que le NPD présente son rapport complémentaire. Avec le soutien sans équivoque des témoins qui ont comparu devant le Comité, le NPD demande au gouvernement de prendre aussi des mesures dans les domaines suivants :
Les communautés autochtones du Canada La discrimination et le racisme systémiques exercés contre les peuples autochtones du Canada ont été bien documentés au cours de l’histoire. Malheureusement, ils sont toujours d’actualité et, à cause des actes extrêmes perpétrés contre de nombreuses générations d’Autochtones, beaucoup souffrent encore de ce racisme aujourd’hui. Le Comité a recueilli des témoignages très convaincants auprès de dirigeants autochtones tels le chef de l’Assemblée des Premières Nations, Perry Bellegarde; la directrice de la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières nations du Canada, Cindy Blackstock; le directeur général du Metro Vancouver Aboriginal Executive Council, Kevin Barlow; et l’honorable Murray Sinclair, sénateur et président de la Commission de vérité et réconciliation (CVR). Les témoins ont évoqué les formes multiples de discrimination contre les peuples autochtones, qu’elle soit historique, ouverte, systémique ou encore résiduelle. Ils ont également suggéré au Comité des approches réfléchies, à l’échelle entière du gouvernement, pour parvenir à une réconciliation et à une justice réelles. Pour les dirigeants autochtones qui ont comparu et plusieurs autres témoins, il ne faisait aucun doute que les « appels à l’action » contenus dans le rapport final de la Commission de vérité et réconciliation constituaient une première étape importante, tout comme l’adhésion du Canada à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et le soutien manifesté à l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Le chef national Perry Bellegarde a déclaré : « Une des façons les plus importantes d’y arriver est l’adoption et la mise en œuvre complète de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Il s’agit à nos yeux d’une feuille de route vers la réconciliation. C’est une façon de mettre fin à la discrimination et au racisme qui persiste au pays et dans le monde[vii]. » Mme Blackstock a parlé de la discrimination systémique à l’égard des enfants des Premières Nations et des décisions récentes du Tribunal canadien des droits de la personne qui ordonnent au gouvernement fédéral de cesser cette pratique. Elle a dit : Je parle précisément du gouvernement canadien qui continue de faire de la discrimination raciale contre les enfants des Premières Nations. Le gouvernement doit reconnaître sa faute, d’une part, parce qu’il s’agit d’une des mesures prioritaires recommandées par la Commission de vérité et réconciliation du Canada relativement à l’équité et au bien-être des enfants – le but ici est de veiller à ce que la présente génération d’enfants soit élevée en toute sécurité dans leur famille –, et, d’autre part, parce que c’est simplement la bonne chose à faire. Nous devons également réfléchir aux leçons que nous avons tirées du passé. C’est tout aussi important. Des excuses ont été présentées par rapport aux pensionnats et à la rafle des années 1960, mais le Canada déroge aujourd’hui à quatre ordres juridiques du Tribunal canadien des droits de la personne qui concernent l’élimination de la discrimination raciale contre les enfants. Qu’avons‑nous vraiment appris de l’affaire des pensionnats? Quelles leçons avons-nous tirées du passé? Comment pouvons-nous préparer la présente génération d’enfants à tirer des leçons de la discrimination raciale passée contre les Autochtones et d’autres groupes? Comment pouvons-nous les préparer à lutter contre les injustices, autant aujourd’hui que dans l’avenir? Selon les données du recensement, nous savons aujourd’hui que les promesses faites aux survivants des pensionnats n’ont pas été tenues, ce qui va à l’encontre de l’appel à l’action numéro 1 de la Commission de vérité et réconciliation. Aujourd’hui, plus de 40 % des enfants de moins de quatre ans sous la garde des services de protection de l’enfance sont des enfants autochtones. Souvenez-vous de l’effet catastrophique que cela a eu d’arracher à leur famille les enfants – des enfants âgés seulement de 5 ans – pour les envoyer dans des pensionnats. Ce n’était que des tout petits enfants[viii]. Mme Blackstock a aussi parlé des efforts déployés par son organisation pour qu’aucune page de l’histoire ne reste dans l’ombre, puisque souvent, la discrimination perpétrée et perpétuée par des figures historiques est méconnue ou passée sous silence. Nous avons créé des plaques historiques qui racontent de façon exacte l’histoire de ces personnes. Duncan Campbell Scott, par exemple, est reconnu comme étant un poète de la Confédération, mais il est aussi considéré comme l’un des principaux acteurs dans ce que la Commission de vérité et de réconciliation a conclu être un génocide culturel. Sa plaque historique mentionne les deux faits : le fait qu’il était poète de la Confédération et sa participation au génocide culturel. Dans le cas du Dr Bryce, on raconte toute sa carrière, et c’est la même chose pour Nicholas Flood Davin. Je crois que c’est quelque chose de vraiment essentiel : l’enseignement, à une époque où les gens parlent d’enlever des monuments. En fait, je ne suis pas d’accord avec le fait qu’on les enlève. Je crois qu’il faut dire toute la vérité et le faire comme il faut, et j’aimerais bien voir la Commission de la capitale nationale le faire avec plus de vigueur. Par exemple, il y a deux ou trois ans, il y a eu une exposition sur Laurier et Macdonald, et on parlait de la construction du chemin de fer et du premier premier ministre francophone. On n’a rien dit au sujet de leurs rôles respectifs dans le dossier des pensionnats. John A. Macdonald les défendait avec enthousiasme et il a embauché Duncan Campbell Scott. Laurier était premier ministre à l’époque où les réformes du Dr Bryce faisaient les manchettes, et il n’a pas exercé de pression afin que les réformes soient appliquées pour qu’on puisse sauver la vie de ces enfants[ix]. Renu Mandhane, commissaire en chef à la Commission ontarienne des droits de la personne, a fait remarquer que les Canadiens savent peu de choses du passé colonial de leur pays et des injustices qui ont été commises. Elle a dit : « Jusqu’à tout récemment, beaucoup de Canadiennes et de Canadiens, moi comprise, en connaissaient très peu sur l’histoire du colonialisme et les répercussions incessantes des traumatismes intergénérationnels sur les peuples et les familles autochtones[x]. » Les témoins ont fait valoir la nécessité de sensibiliser davantage la population pour freiner la discrimination et la perpétuation des stéréotypes. Il a aussi été longuement question de l’importance de mieux consulter les communautés autochtones, comme l’y incitent les appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation. Le gouvernement s’est maintes fois engagé à restaurer une relation de nation à nation, mais les actes sont plus éloquents que la parole. Plusieurs des recommandations formulées par les témoins qui contiennent des mesures concrètes et des mesures de responsabilisation essentielles à l’éradication de la discrimination systématique contre les peuples autochtones sont absentes du rapport principal. En vue de cela, les néo-démocrates font les recommandations suivantes : Recommandation 1 Que le gouvernement appuie le projet de loi d’initiative parlementaire C-262, parrainé par le député d’Abitibi—Baie-James—Nunavik—Eeyou, qui vise à assurer l’harmonie des lois fédérales avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones[xi]. Recommandation 2 Que les ministères gouvernementaux qui dispensent des services aux enfants et aux familles des Premières Nations soient soumis à une évaluation indépendante et exhaustive dont les résultats seront publiés afin de déceler les idéologies, politiques ou pratiques discriminatoires qui pourraient y avoir cours et de suggérer des moyens d’y remédier. Recommandation 3 Que le gouvernement du Canada se conforme entièrement et immédiatement aux ordonnances du Tribunal canadien des droits de la personne concernant les enfants des Premières Nations. Recommandation 4 Que le gouvernement du Canada mette pleinement et correctement en œuvre le principe de Jordan. Recommandation 5 Que le directeur parlementaire du budget procède à une analyse publique des fonds manquants pour financer les services fédéraux dispensés aux enfants, aux adolescents et aux familles des Premières Nations (enseignement, santé, eau, aide à l’enfance, etc.) et qu’il propose des solutions pour combler ces insuffisances. Recommandation 6 Que le gouvernement du Canada consulte les peuples des Premières Nations pour cocréer un Plan de l’Ourson Spirit qui contiendra des mesures holistiques pour éradiquer les inégalités et sera assorti d’échéances et d’investissements confirmés. Recommandation 7 Que le gouvernement du Canada travaille avec la Commission de la capitale nationale pour installer à Ottawa des plaques relatant les faits historiques véritables se rapportant aux injustices commises contre les peuples autochtones. Recommandation 8 Que tous les fonctionnaires, y compris les cadres supérieurs, reçoivent une formation obligatoire qui les aidera à déceler et à enrayer les idéologies, politiques et pratiques qui entravent la mise en œuvre des appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation. Recommandation 9 Que le gouvernement du Canada déclare l’urgence nationale relativement à la scolarisation des Autochtones et qu’il élabore un plan d’action assorti d’échéances pour ramener les taux nationaux de décrochage chez les étudiants autochtones dans la moyenne nationale de la population étudiante non autochtone. La formation et la sensibilisation Bien qu’il soit important de remédier efficacement à la discrimination et au racisme lorsqu’ils surviennent, il n’en demeure pas moins préférable que nous collaborions, en tant que société, pour prévenir ces problèmes. La formation et la sensibilisation constituent le seul moyen d’y parvenir et, selon les témoins, il faut agir sur les jeunes. Les néo-démocrates croient fermement que le racisme et la haine sont des comportements appris. En enseignant d’autres comportements aux jeunes, nous donnerons aux générations futures les outils et les connaissances nécessaires pour avancer, démonter les obstacles et éliminer les problèmes systémiques qui demeurent. Le chef Bellegarde a recommandé d’accorder une plus grande place à la sensibilisation aux Autochtones dans les programmes scolaires. Il a dit : Je pense que l’éducation et la sensibilisation mènent à la compréhension et à l’action. Les systèmes scolaires d’un bout à l’autre du Canada... Je sais que nous sommes au fédéral, mais faites pression sur les premiers ministres provinciaux et sur l’ensemble du Canada pour changer le programme scolaire de façon à enseigner les droits inhérents, les droits issus de traités et les droits des Autochtones, et à montrer l’histoire et l’incidence des pensionnats indiens et de la Loi sur les Indiens. Le programme doit changer. C’est important[xii]. L’idée de mieux sensibiliser les jeunes a été reprise par Soudeh Ghasemi, vice-présidente du Congrès irano-canadien, qui a déclaré : « Oui, j’ai quelque chose à dire à ce propos. Dans le système d’éducation, je crois qu’il est très important que le programme prévoie d’enseigner aux élèves comment reconnaître la discrimination, comment la combattre et leur expliquer ces principes. La sensibilisation en milieu scolaire est très importante[xiii]. » Les néo-démocrates conviennent de la nécessité de veiller à ce que le gouvernement fédéral soutienne cet élément fondamental. Outre l’élaboration de matériel didactique sur les différentes religions et pratiques culturelles, il faudra veiller à encadrer les fonctionnaires et les enseignants. Pour ce faire, les néo-démocrates recommandent : Recommandation 10 Que le gouvernement du Canada travaille en collaboration avec tous les ordres de gouvernement pour concevoir un plan national de financement et de formation interculturelle et interconfessionnelle à l’ensemble des fonctionnaires et des enseignants dans les écoles. Les questions économiques Plusieurs témoins ont affirmé que le racisme et la discrimination religieuse systémiques ont de vastes conséquences sur les personnes et les communautés ciblées. Bien que les manifestations explicites de racisme et de discrimination soient de moins en moins tolérées dans notre société, les formes subtiles ou implicites demeurent plus difficiles à déceler, à comprendre et à résoudre. Cette discrimination peut aussi se manifester de manière non intentionnelle, vu le préjugé inconscient que peuvent entretenir des personnes en position d’autorité en raison des stéréotypes et des mythes qui entourent depuis longtemps les groupes ethniques ou religieux minoritaires. Des témoins ont signalé au Comité que ce phénomène a été non seulement observé, mais mesuré dans les débouchés professionnels et économiques des groupes minoritaires au Canada. Avvy Yao-Yao Go, directrice de la Chinese and Southeast Asian Legal Clinic, a longuement entretenu le Comité au sujet de l’existence et de la persistance du problème et de son impact générationnel : Il existe des écarts importants dans l’emploi et les salaires fondés sur le sexe et la race au Canada. Par exemple, les données tirées de l’enquête nationale de 2011 sur les ménages révèlent que les femmes de couleur gagnent 32 % de moins que les hommes non racialisés, et que les immigrantes gagnaient 28 % de moins que les hommes non immigrants. Les écarts salariaux augmentent dans le cas des femmes autochtones, des femmes de couleur et des immigrantes détenant des diplômes universitaires. De nombreuses études confirment que les employeurs font une discrimination à l’endroit des demandeurs d’emploi dont le nom semble asiatique, qui sont de 33 à 37 % moins susceptibles de recevoir un appel pour participer à une entrevue. En raison de la discrimination sur le marché du travail, la pauvreté est également devenue racialisée au Canada. Le dernier recensement indique que 18,7 % des familles racialisées vivent dans la pauvreté, comparativement à seulement 6 % des familles non racialisées, et pourtant la stratégie actuelle de réduction de la pauvreté du gouvernement fédéral fait peu, voire, aucunement mention de la façon qu’elle s’attaquerait à la pauvreté vécue par les communautés de couleur[xiv]. Elle a ajouté : Du fait de la discrimination, ces personnes et ces communautés ne sont pas en mesure d’accéder à des emplois décents et bien rémunérés. Elles sont prisonnières de situations d’emploi précaires, où le revenu a tendance à être plus faible, et elles sont plus susceptibles de vivre dans la pauvreté. Leurs chances dans la vie sont moins grandes. L’avenir de leurs enfants est plus limité. Cela devient un problème générationnel, qui est le résultat de cet aspect particulier du racisme systémique. Évidemment, certains appellent cela la filière de la délinquance, dans le cas des Autochtones, de même que pour la communauté afro‑canadienne[xv]. D’autres exemples ont été donnés au Comité, à savoir notamment que des curriculum vitae avaient été laissés de côté en raison de la « consonance ethnique » des noms. Narges Samimi de la Frog Hollow Neighbourhood House a relaté un incident troublant de discrimination dont elle a été victime au travail : J’ai moi-même été la cible de discrimination systémique au travail. Je portais le hidjab auparavant et, un jour, ma supérieure est venue me dire : “Narges, si tu veux ce poste, tu dois renoncer à quelque chose.” Je n’étais pas certaine d’avoir bien compris. Elle m’a fait comprendre qu’elle parlait de mon hidjab, que je ne pouvais pas le porter dans ce milieu de travail. Elle a précisé qu’elle ne me demandait pas de renoncer à ma religion, mais elle ne voulait pas que je me couvre la tête[xvi]. Balpreet Singh de la World Sikh Organization of Canada, a fourni l’explication suivante : C’est vraiment la partie insidieuse de la discrimination. Celle que nous voyions auparavant était flagrante. Vous portez un turban, vous avez une barbe, cela ne va pas fonctionner. Ce que nous voyons, maintenant – comme je l’ai dit –, c’est : “Vous n’êtes pas le candidat idéal” ou “Votre entrevue ne s’est pas aussi bien déroulée qu’elle aurait dû.” J’ai obtenu des données empiriques concernant des personnes qui affirment n’avoir connu aucun succès avant de se mettre à attacher leur barbe, avant de l’avoir arrangée pour ressembler un peu plus à un Occidental. Nous entendons ces genres d’histoires, mais, sans données, il est très difficile de saisir toute l’étendue du problème. Je pense qu’il est très clair que, dans le cas de la communauté sikhe, en tout cas, que vous soyez de la première, de la deuxième ou de la troisième génération, vous allez porter les articles de foi, si vous êtes un sikh pratiquant. Avec le temps, vous perdez votre accent, mais vous avez l’air différent, et c’est parfois problématique[xvii]. Être disqualifié d’office par un employeur ou devoir quitter son poste à cause de son nom ou de son apparence « non occidentale », ou encore quitter son emploi parce qu’on est mal reçu ou qu’on est visé par des manifestations subtiles de racisme ou de discrimination; voilà autant d’incidents lourds de conséquences qui permettent la perpétuation du problème dans notre société. Il faut agir pour rompre les cycles qui font perdurer la discrimination en milieu de travail, elle qui, à son tour, génère une pauvreté générationnelle. Les néo-démocrates reconnaissent l’importance d’avoir des moyens pour aider les personnes privées d’un accès équitable aux services, à l’emploi ou aux outils qui favorisent la diversité et l’équité de l’embauche; cependant il faut rompre les cycles d’une manière plus cohésive. En vue de cela, les néo-démocrates font au gouvernement du Canada les recommandations suivantes : Recommandation 11 Que le gouvernement du Canada améliore les processus pour l’accès au marché du travail et aux débouchés économiques en concevant une stratégie nationale sur l’intégration sur le marché du travail et les débouchés professionnels qui tienne compte des inégalités économiques touchant les immigrants, les membres de minorités visibles ou religieuses et les peuples autochtones. Recommandation 12 Que le gouvernement du Canada suive l’exemple de l’Ontario et du Manitoba et crée des postes de commissaires provinciaux à l’équité pour garantir que les professions réglementées adoptent des pratiques d’agrément qui soient transparentes, objectives, impartiales et justes. Recommandation 13 Que le gouvernement du Canada :
Recommandation 14 Que le gouvernement du Canada travaille avec les provinces et territoires afin :
La cohésion et l’intégration sociales L’objectif visé en accroissant la formation et la sensibilisation relativement à ces questions est d’accroître la cohésion sociale au Canada et d’améliorer le processus d’intégration des nouveaux arrivants dans notre pays. Modifier le système scolaire et faire des campagnes de sensibilisation supposent un engagement à long terme à résoudre le racisme et la discrimination systémique. Dans nos communautés, d’innombrables personnes et organisations œuvrent sans relâche pour aider à créer un sentiment d’appartenance et d’harmonie au sein de divers groupes. Certaines mesures concrètes peuvent être prises maintenant pour accroître la cohésion et l’intégration sociales. Dans leur mémoire intitulé We need to move beyond feelings and look at the systemic impacts of racism on our economic and social status, la Frog Hollow Neighbourhood House et la Kiwassa Neighbourhood House font trois recommandations auxquelles souscrit le NPD en ce qui concerne les mesures à prendre pour accroître la cohésion sociale dans nos milieux. Recommandation 15 Que le gouvernement du Canada mette en place des programmes additionnels pour faciliter l’intégration et réduire la ségrégation par le soutien d’activités et d’organisations communautaires qui ont pour but de rassembler des nouveaux arrivants d’origines diverses, des Premières Nations et d’autres Canadiens. Recommandation 16 Que le gouvernement du Canada ouvre une nouvelle voie de financement pour les programmes médiatiques et artistiques destinés aux groupes de nouveaux arrivants et aux minorités ethniques ou religieuses les plus vulnérables et marginalisées. Recommandation 17 Que le gouvernement du Canada favorise la participation institutionnelle et le leadership en finançant des études pour déterminer comment les membres de certains groupes, en particulier les femmes de couleur, peuvent être encouragés à jouer un rôle de leadership dans leur milieu. La sensibilisation du public Pour les Canadiens qui ont quitté le système scolaire, les néo-démocrates croient qu’il est toujours possible d’en apprendre davantage et de mieux faire, surtout lorsqu’il s’agit de reconnaître nos propres préjugés et de comprendre les conséquences du racisme et de la discrimination systémiques. Le sergent d’état-major David Zackrias du Service de police d’Ottawa a demandé au gouvernement d’appuyer « les campagnes de sensibilisation du public à l’échelon communautaire, de concert avec les organismes d’application de la loi. Nous avons tous intérêt à lutter contre la discrimination pour l’éradiquer[xviii]. » Sikander Hashmi, porte-parole pour le Conseil canadien des imams, a demandé aux dirigeants canadiens de « mener régulièrement des campagnes nationales de sensibilisation du public afin de créer un sentiment de fierté nationale à l’égard de la diversité canadienne et mettre en lumière les contributions positives des Canadiens de toutes origines[xix] ». Le NPD souscrit aux suggestions faites au Comité pour ce qui est de mieux sensibiliser le public aux bienfaits dont nous jouissons collectivement en tant que pays du fait de la diversité et du caractère inclusif de notre société. Recommandation 18 Que le gouvernement du Canada accorde une nouvelle aide financière ciblée aux ONG qui font figure de pionnières pour la formation sur l’intégration des nouveaux arrivants. Ces fonds leur permettraient de donner des ateliers dans les espaces communautaires et les écoles et ainsi favoriser la sensibilisation du public et la tenue de campagnes d’information en vue de combattre le racisme systémique et la discrimination religieuse. Les pratiques exemplaires Le matériel didactique, les campagnes de sensibilisation du public et les efforts de cohésion sociale déployés dans les communautés ne doivent pas exister en vase clos. Des témoins ont indiqué au Comité que la mise en commun des pratiques exemplaires donnera des résultats supérieurs à la grandeur du pays. Les organisations doivent pouvoir savoir ce qui se fait ailleurs, ce qui fonctionne bien et de quelle manière elles peuvent adapter les programmes fructueux pour les rendre les plus efficaces possible dans leur communauté. C’est en mettant en commun les pratiques exemplaires que nous obtiendrons les meilleurs résultats dans ces domaines. En vue de cela, le NPD souscrit à la recommandation contenue dans le mémoire intitulé We need to move beyond feelings and look at the systemic impacts of racism on our economic and social status de la Frog Hollow Neighbourhood House et de la Kiwassa Neighbourhood House. Recommandation 19 Que soit élaboré un portail Web national où les organisations et agences communautaires pourront mettre en commun leurs pratiques exemplaires en ce qui concerne les programmes et les stratégies visant à combattre le racisme et la discrimination religieuse. Recommandation 20 Que le gouvernement du Canada organise une conférence fédérale-provinciale-territoriale en vue de discuter de la hausse des crimes haineux au Canada et d’élaborer des pratiques exemplaires pour contrer cette tendance. Les discours et les crimes haineux Plusieurs témoins ont dit au Comité qu’à l’heure actuelle, le seuil devant être franchi pour qu’un crime soit considéré comme haineux est incroyablement élevé. Aurangzeb Quershi, vice-président de la politique publique et des communications à l’Alberta Muslim Public Affairs Council (AMPAC), a expliqué : « Nous avons conclu qu’il est extrêmement difficile d’accuser une personne d’un crime haineux, et cela exige un seuil qui est irréaliste. Par exemple, l’article 319 exige précisément le consentement du procureur général pour qu’il puisse y avoir des accusations, barre élevée et chose que très peu d’autres articles exigent[xx]. » Renu Mandhane a évoqué l’importance de définir le terme « haine » avec exactitude pour que les lois déjà en place puissent être correctement appliquées. Elle a dit : « Leur application sous le régime du Code criminel a été très timide. Je pense que pour éviter ce qui se passe aux États-Unis, nous devons vraiment commencer à réfléchir à une définition de la haine qui tient compte du vécu de ses victimes[xxi]. » D’autres témoins ont attiré l’attention sur le fait que les groupes minoritaires ne sont pas pris au sérieux par les policiers lorsqu’ils signalent un crime haineux. Ihsaan Gardee, directeur du Conseil national des musulmans canadiens, a déclaré à ce sujet : « [L]es organismes d’application de la loi devraient suivre régulièrement et tenir à jour une formation sur les activités de maintien de l’ordre sans préjugé et les approches axées sur les victimes quand vient le temps de lutter contre les crimes haineux[xxii]. » En outre, des témoins ont fait remarquer que lorsqu’un crime signalé fait l’objet d’une enquête, il arrive parfois qu’on ne tienne pas compte du mobile du crime, c’est-à-dire la haine. David Matas, conseiller juridique principal auprès de l’organisation B'nai Brith Canada a donné l’explication suivante : L’un des problèmes qui se posent avec les services de police dans le cas des crimes motivés par la haine vient de ce que parfois – en fait peut-être un peu trop souvent – ils identifient l’acte criminel sans examiner les motifs. Lorsque quelqu’un peint une croix gammée, ses motifs sont évidents, mais s’il s’agit de voies de fait simples, il se peut qu’ils s’occupent uniquement de l’infraction, sans tenir compte des motifs. Les chiffres peu élevés que nous entendons au sujet des crimes motivés par la haine viennent parfois du fait que les services de police ne prennent tout simplement pas la peine de déterminer s’il s’agit d’un crime motivé par la haine. Parmi les choses utiles du point de vue de la formation figure la sensibilisation des forces de police, ce qui fait que lorsqu’un acte criminel comporte une dimension haineuse, cela est déclaré et donne lieu à des mesures[xxiii]. La difficulté de faire déposer des accusations de crime haineux et de faire traiter les plaintes d’une manière normalisée et réfléchie, conjuguée à l’impression que les plaintes ne seront pas prises au sérieux, fait en sorte, selon des témoins, que les statistiques ne donnent pas la pleine mesure des crimes haineux commis au Canada. Il en est ainsi puisque les statistiques officielles ne recensent que les crimes de haine signalés à la police. Shimon Fogel, président-directeur général du Centre consultatif des relations juives et israéliennes, a recommandé que « le gouvernement établisse des lignes directrices et des normes uniformes à l’échelle nationale pour la collecte et le traitement des données sur les crimes haineux et les incidents à caractère haineux[xxiv] ». D’autres témoins ont recommandé des solutions pour signaler et recenser également les incidents haineux qui échappent aux statiques de la police. Par exemple, M. Quershi a parlé au Comité de la ligne téléphonique d’aide contre l’islamophobie de l’AMPAC : « [Elle] a été lancée en avril 2016 [et] a été présentée comme un outil pour la communauté musulmane qui permet en outre la surveillance des incidents islamophobes se produisant partout en Alberta […] Au cours de la dernière année, la ligne téléphonique a reçu plus de 400 appels[xxv]. » Les néo-démocrates sont convaincus que la clé réside dans la prévention et croient par conséquent qu’aucun effort ne doit être ménagé à ce titre. Mais lorsqu’un crime survient, les lois, les organismes chargés de l’application de la loi et le système judiciaire doivent reconnaître ce qui s’est passé et répondre adéquatement pour que la justice soit rendue. En vue de cela, les néo-démocrates font les recommandations suivantes : Recommandation 21 Que le gouvernement du Canada renforce sa réponse juridique et réglementaire à la discrimination en révisant et en resserrant les lois contre les discours et les crimes haineux par l’ajout d’une définition plus claire et plus englobante de ce qui constitue exactement un crime haineux. Recommandation 22 Que le gouvernement du Canada protège davantage les groupes minoritaires contre les incidents haineux en prenant en considération plus diligemment et plus systématiquement le motif de la haine. Recommandation 23 Que le gouvernement du Canada établisse des normes relatives à l’identification et à la consignation des incidents de haine ainsi qu’à leur expédition dans le système judiciaire. Recommandation 24 Que le gouvernement du Canada mette en place un service normalisé d’assistance téléphonique pour permettre la signalisation des crimes ou actes de discrimination haineux et la collecte de données sur les cas non signalés à la police. Recommandation 25 Que le gouvernement du Canada collabore avec les municipalités, provinces et territoires en vue de financer des unités policières spéciales pour les crimes haineux. Les institutions financières Les néo-démocrates ont été atterrés par le témoignage qu’ont livré au Comité les représentants du Congrès irano-canadien au sujet de la discrimination dont sont victimes les Canadiens d’origine iranienne dans les institutions financières au Canada. Pouyan Tabasinejad a déclaré : Depuis 2012, comme conséquence de sanctions strictes imposées à l’Iran par le gouvernement canadien, les banques ont refusé de faire des affaires avec ceux qui avaient ou étaient considérés comme ayant des liens financiers avec l’Iran, qu’ils soient personnels ou commerciaux. Cela a entraîné la fermeture des comptes bancaires d’Irano-Canadiens, y compris de citoyens canadiens, pour aucune autre raison sinon celle qu’ils étaient Iraniens. Par exemple, le compte bancaire – contenant seulement 700 $ – d’un étudiant en génie iranien au Québec a été fermé. Lorsqu’il s’est présenté à la banque, on lui a seulement dit que son compte avait été fermé parce qu’il avait un passeport iranien. Même aujourd’hui, après que le gouvernement ait assoupli certaines de ses sanctions imposées à l’Iran en février 2016, les institutions financières continuent toujours d’appliquer les mêmes règles discriminatoires, et nous avons reçu plusieurs rapports d’Irano-Canadiens ordinaires qui ont été victimes de discrimination par des banques[xxvi]. Une telle discrimination est simplement inacceptable. Par conséquent, les néo-démocrates font la recommandation suivante Recommandation 26 Que le gouvernement du Canada commence immédiatement à travailler en collaboration avec les organismes réglementaires compétents pour mettre un terme à la discrimination qui prive certaines personnes de l’accès à des services bancaires. Les données Les données sont un élément clé de l’élaboration des politiques. Il est extrêmement difficile d’établir de bonnes politiques lorsqu’on ne sait pas exactement ce qui se passe. Le rétablissement du questionnaire long de recensement a permis de restaurer certains des processus de collecte des données nécessaires pour permettre aux décideurs de prendre des décisions éclairées. Cependant, Mme Go a fait remarquer au Comité que certains ensembles de données administratives complémentaires basées sur l’origine ethnique sont absents des données dont dispose chacun des ordres de gouvernement. Pour cette raison, les divers ordres de gouvernement sont privés des données de haute qualité dont ils ont besoin pour prendre la pleine mesure du racisme et de la discrimination et en comprendre les répercussions sur la société canadienne, surtout lorsqu’il est question de problèmes comme la pauvreté. Souvent, les données disponibles ne sont pas suffisamment détaillées. Par exemple, dans le mémoire qu’elle a présenté au Comité au nom de la Chinese and Southeast Asian Legal Clinic, Mme Go a indiqué que bien que la nouvelle Stratégie de réduction de la pauvreté accorde la priorité aux communautés ayant un risque élevé de pauvreté, elle se borne à évoquer la catégorie générale des « immigrants récents » sans jamais mentionner les « personnes de couleur ». Le NPD croit qu’il faut en faire davantage pour bien comprendre l’impact des politiques sur les différentes communautés. Les néo-démocrates appuient la recommandation formulée par Mme Go dans le mémoire qu’elle a présenté au Comité au nom de la Chinese and Southeast Asian Legal Clinic. Recommandation 27 Que le gouvernement du Canada recueille des données et assure le suivi des données non regroupées sur l’origine ethnoraciale dans tous les ministères, organismes, divisions et institutions pertinentes et qu’il utilise ces données pour élaborer des stratégies pour lutter contre le racisme systémique. Le statut d’immigration ne doit pas servir de catégorie de substitut pour les groupes ethniques, et ceux-ci ne doivent pas être homogénéisés sous la bannière des « minorités visibles ». Les données doivent être recueillies d’une manière qui permet l’analyse des effets concomitants de l’origine ethnoraciale et de l’identité de genre, l’orientation sexuelle, la situation socioéconomique, le statut d’immigration, l’âge et l’existence ou non d’un handicap. Les médias sociaux et les fausses nouvelles Dans notre monde de plus en plus connecté où l’information se dissémine rapidement et pas toujours par des canaux fiables ou de confiance, le phénomène dit des « fausses nouvelles » inquiète désormais beaucoup de personnes. Souvent, les fausses nouvelles ou les informations erronées sont propagées sur les médias sociaux, où les gens lisent et font circuler de l’information provenant de leurs amis ou collègues. Les médias s’étant grandement diversifiés, des sources indépendantes – légitimes ou non – peuvent sembler aussi professionnelles et fiables que les médias traditionnels. De plus, les frontières entre l’éditorial, l’infodivertissement et le journalisme ayant tendance à s’estomper, il n’est que plus difficile d’y voir clair. Comme nous l’avons vu dans l’introduction, la motion M-103 a elle-même déchaîné un torrent de faussetés, principalement sous la forme d’éditoriaux et d’une campagne de désinformation en ligne dont les auteurs ne se proclamaient non pas journalistes, comme on aurait pu le croire, mais experts ou analystes. Pendant l’étude, des témoins ont évoqué l’influence des médias sociaux et de la désinformation sur l’opinion de la population. Frank Huang, secrétaire général national du Congrès national des Chinois canadiens, a parlé de faussetés colportées par les médias sociaux au sein de la communauté chinoise du Canada qui ont influencé négativement la perception des réfugiés : [U]ne nouvelle sensationnaliste a été publiée au sein de la communauté chinoise en ligne. En effet, un compte du site WeChat portant le nom T*T TD Canada Trust a publié le renseignement suivant: « J'ai servi au moins 20 réfugiés qui voulaient ouvrir un compte bancaire aujourd'hui. Je viens juste d'apprendre que le gouvernement leur donne chacun 800 $ par mois et que dans le cas d'une famille composée de quatre adultes et de six enfants, cela fait 8 000 $ par mois, et cette somme n'est même pas imposable. Donc, après impôt, ces 8 000 $ par mois font 200 000 $ par année. » Ce message a été publié par un individu qui affirme être un employé de TD Bank à Montréal. Cette nouvelle a déclenché des réactions intenses au sein de la communauté chinoise et elle a été republiée à de nombreuses reprises. Elle a aussi engendré une réaction défavorable et un tollé général contre le gouvernement chinois et même contre le premier ministre. Ce type de message irresponsable encourage l'hostilité contre les réfugiés[xxvii]. Il a ensuite expliqué : Nous savons que c’est trompeur. Mais, comme ça se trouve dans les médias sociaux, beaucoup s’interrogent et beaucoup ont réagi très vivement en propageant à leur tour ces faussetés et en prenant à partie les réfugiés et le gouvernement canadien. Il est très difficile de régir les médias sociaux[xxviii]. Michel Jeneau-Katsuya, ancien analyste du SCRS et président-directeur général du Groupe Northgate, a parlé de l’impact des fausses nouvelles et de la difficulté à y remédier, indiquant qu’« [i]l faut environ 15 minutes pour écrire une fausse nouvelle, mais il faut des mois pour la neutraliser[xxix] ». Mme Mandhane a suggéré des moyens que les personnes et la société collectivement pourraient prendre pour contrer le phénomène : D’abord, chacun de nous, chaque institution, chaque dirigeant doit réagir par ses propres récits et ses propres opinions. Le terme « racisme » nous fait peur, mais nous devons oser et riposter. Je dois reconnaître que nous vivons dans une époque nouvelle où les idées de chacun ont un poids égal. Dans les médias sociaux, on oublie facilement que ces vociférations représentent rarement la majorité des Canadiens[xxx]. Cecil Roach du Conseil scolaire du district de York a abondé dans le même sens : « Je pense que nous devons adopter les médias sociaux […] Il y a un petit pourcentage d’entre eux qui ont des points de vue sournois. Cependant, la majorité de nos élèves sont de bons élèves qui veulent faire ce qui s’impose […] Utilisons-les comme une force positive[xxxi]. » M. Huang a utilisé des exemples pertinents tirés de sa propre expérience, dont celui que nous avons déjà donné, qui montrent comment les préjugés que nous entretenons personnellement et à l’échelle de nos communautés favorisent un environnement où la désinformation est propagée parce qu’elle est conforme à nos préjugés. Il a dit : « Personnellement, je crois que ce type de discrimination est attribuable à un manque de compréhension et à des préjugés profondément enracinés. Pour surmonter ce type de discrimination, nous devons renforcer la communication et l’éducation[xxxii]. » Les néo-démocrates reconnaissent que les médias sociaux nous permettent de diffuser des idées et des réflexions rapidement et facilement à un vaste auditoire. Cependant, cela peut être utilisé à mauvais escient pour diviser les communautés, exploiter les peurs et disséminer des faussetés. Il est donc important de reconnaître aussi les responsabilités qui viennent avec ces nouveaux outils puissants. Par conséquent, les néo-démocrates font les recommandations suivantes : Recommandation 28 Que le gouvernement du Canada élabore une stratégie pour endiguer la propagation des informations erronées et des fausses nouvelles sur les médias sociaux. Recommandation 29 Que le gouvernement du Canada mette à la disposition des membres du public des outils pour les aider à prendre conscience de leurs propres préjugés. Conclusion Les réactions négatives suscitées par la motion M-103 – qu’elles aient eu pour cadre des jeux politiques ou pour cause des préjugés implicites ou des campagnes de désinformation – montrent précisément pourquoi il était important, aujourd’hui au Canada, d’adopter la motion et de mener cette étude au Comité permanent du patrimoine canadien. Quand on regarde ce qui se passe ailleurs dans le monde, on constate que le Canada a jusqu’ici échappé à la montée dramatique de la xénophobie et des politiques d’extrême droite. La majorité des Canadiens demeurent attachés au multiculturalisme et à l’idée que notre diversité fait notre force. Cependant, à ce moment crucial, il ne faut pas se complaire, mais se promettre d’en faire davantage, individuellement et collectivement, et en tant que gouvernements pour ne pas dévier de la voie. Les membres du Comité ont entendu des témoignages convaincants sur le chemin accompli par le Canada et sur le chemin qu’il reste à faire pour éradiquer le racisme et la discrimination religieuse systémiques. Il nous faut confronter ces questions en faisant preuve de compassion et d’ouverture de cœur et d’esprit et en sachant que nous pouvons et devons faire mieux. Le Comité a reçu des recommandations importantes et réfléchies sur les mesures que peut prendre le gouvernement fédéral et la manière dont il peut montrer l’exemple en la matière. Bien que les néo‑démocrates aient réclamé fermement beaucoup des recommandations du rapport principal, il a ensuite semblé nécessaire de rédiger un rapport complémentaire pour nous assurer que ces recommandations additionnelles concrètes assorties de mesures de responsabilisation seront portées à l’attention du gouvernement dans le cadre du plan d’action pangouvernemental de lutte contre les formes systémiques de racisme et de discrimination, notamment religieuse, vu l’importance de ces questions pour notre nation. Pour éliminer le racisme et la discrimination religieuse systémiques, il faut voir grand et agir avec audace. [i] Chambre des communes, Affaires courantes, 1re session, 42e législature, 26 octobre 2016, 1510. [iii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 18 octobre, 1545. [iv] Ibid. [v] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 8 novembre 2017, 1645. [vi] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 8 novembre 2017, 1635. [vii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er novembre 2017, 1650. [viii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 25 octobre 2017, 1655. [ix] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 25 octobre 2017, 1700. [x] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 20 septembre 2017, 1635. [xii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er novembre 2017, 1700. [xiii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 25 octobre 2017, 1635. [xiv] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 25 septembre 2017, 1540. [xv] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 25 septembre 2017, 1605. [xvi] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 23 octobre 2017, 1540. [xvii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 30 octobre 2017, 1735. [xviii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 6 novembre 2017, 1700. [xix] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 18 octobre 2017, 1650. [xx] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 8 novembre 2017, 1535. [xxi] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 20 septembre 2017, 1720. [xxii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 4 octobre 2017, 1630. [xxiii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 18 octobre 2017, 1615. [xxiv] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 18 octobre 2017, 1550. [xxv] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 8 novembre 2017, 1535. [xxvi] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 25 octobre 2017, 1540. [xxvii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 6 novembre 2017, 1610 [xxviii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 6 novembre 2017, 1630. [xxix] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 20 septembre 2017, 1630. [xxx] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 20 septembre 2017, 1720. [xxxi] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er novembre 2017, 1600. [xxxii] Chambre des communes, Comité permanent du patrimoine canadien, Témoignages, 1re session, 42e législature, 6 novembre 2017, 1610. |