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ENVI Rapport du Comité

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LA CROISSANCE PROPRE ET LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES AU CANADA : FORESTERIE, AGRICULTURE ET GESTION DES DÉCHETS

Introduction

Le 1er février 2018, le Comité permanent de l’environnement et du développement durable (le Comité) a décidé d’entreprendre une étude sur la croissance propre et les changements climatiques au Canada et, pour y parvenir, d’examiner plusieurs sujets prioritaires. Le Comité a également convenu de faire rapport à la Chambre des communes sur les sujets abordés, séparément[1]. Le Comité a examiné comment le gouvernement fédéral peut accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) produits par les industries désignées dans des sections choisies du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques. Le Comité s’est d’abord penché sur la croissance propre et les changements climatiques au Canada : l’environnement bâti. Son rapport sur le sujet, De meilleurs bâtiments pour un avenir à faibles émissions de carbone, a été déposé à la Chambre des communes le 18 juin 2018. Le Comité a ensuite porté son attention sur le thème de la croissance propre et des changements climatiques au Canada : le leadership international.

Le troisième volet de l’étude du Comité, qui porte sur la croissance propre et les changements climatiques au Canada : la foresterie, l’agriculture et la gestion des déchets, a été entrepris le 22 novembre 2018. L’étude s’est échelonnée sur 6 réunions, au cours desquelles les membres du Comité ont entendu 29 témoins et reçu 5 mémoires.

Les membres du Comité tiennent à remercier chacun des témoins d’avoir contribué à leurs travaux.

Contexte

Cette étude du Comité a porté principalement sur les mesures que le gouvernement du Canada pourrait prendre afin de soutenir davantage les initiatives de réduction des émissions de GES qui ont cours dans les secteurs de la foresterie, de l’agriculture et de la gestion des déchets[2]. Ces trois secteurs représentent environ 13 % des émissions canadiennes de GES, mais l’agriculture et la foresterie absorbent aussi du carbone de l’atmosphère et le stockent dans les sols, les milieux humides et les arbres.

Les secteurs de la foresterie, de l’agriculture et de la gestion des déchets relèvent en grande partie de la compétence des provinces. Comme l’a fait remarquer Beth McNeil, sous‑ministre adjointe du Service canadien des forêts à Ressources naturelles Canada (RNCan), même si les programmes fédéraux qui financent la recherche novatrice ou qui facilitent la coordination nationale des efforts de gestion sont importants pour ces secteurs, « les provinces et les territoires jouent le rôle principal, étant responsables de la plupart des terres » et des ressources[3]. Les compétences provinciales et territoriales touchent notamment l’exploitation, la conservation et la gestion des ressources forestières, y compris leur rythme de production[4], tandis que le Service canadien des forêts, un organisme fédéral, « offre une expertise et des avis scientifiques et politiques sur des enjeux nationaux liés au secteur forestier[5] ».

L’agriculture constitue une compétence partagée[6]. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux peuvent adopter des lois concernant divers aspects de la production, de la transformation, du marchandisage, de la commercialisation et de l’inspection des produits alimentaires et agricoles. Le gouvernement fédéral est également responsable du commerce interprovincial et international des produits alimentaires et agricoles. Les partenariats fédéraux‑provinciaux‑territoriaux dans le secteur de l’agriculture montrent la volonté des parties concernées de maintenir leur collaboration à tous les niveaux. Parmi ceux‑ci, le Partenariat canadien pour l’agriculture (PCA) consiste en un investissement à coûts partagés de 3 milliards de dollars sur cinq ans (2018‑2023) visant à favoriser une croissance durable dans les secteurs de l’agriculture, de l’agroalimentaire et des produits agro‑industriels. Comme l’a expliqué Matt Parry, directeur général à l’Agriculture et l’Agroalimentaire Canada, le PCA « harmonise les priorités fédérales, provinciales et territoriales en matière de politiques et de programmes tout en offrant aux gouvernements provinciaux et territoriaux la souplesse nécessaire pour aborder les priorités et les enjeux régionaux[7] ».

La gestion des déchets[8] est également une responsabilité partagée. Dans la plupart des régions du Canada, les municipalités gèrent les déchets tandis que le gouvernement provincial ou territorial met en œuvre des politiques et des programmes de gestion, de réduction et de recyclage des déchets. Le gouvernement fédéral réglemente pour sa part le transport interprovincial et international des déchets dangereux[9].

Les secteurs de la foresterie, de l’agriculture et de la gestion des déchets peuvent tous produire de la bioénergie[10], et le Comité a entendu comment ceux de la foresterie et de l’agriculture peuvent également générer des bioproduits[11]. Le développement de la production de bioénergie et de bioproduits pourrait donner de la valeur à des produits normalement considérés comme des « déchets » dans ces secteurs et pourrait réduire les émissions de GES en diminuant partiellement la nécessité d’utiliser des combustibles fossiles non renouvelables. Don McCabe, directeur de Biological Carbon Canada, voit souvent « des possibilités sous‑utilisées et sous‑évaluées[12] » dans les produits considérés comme des déchets. Pour que les secteurs de la foresterie, de l’agriculture et de la gestion des déchets puissent exploiter leurs potentiels respectifs, il sera nécessaire de miser sur l’innovation.

Le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques

Le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques (le Cadre pancanadien) est un engagement pris conjointement par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux en réaction aux changements climatiques et qui porte sur la réduction des émissions de GES et sur l’adaptation aux impacts causés par les conditions climatiques changeantes. Publié en décembre 2016, le Cadre pancanadien expose comment le Canada prévoit respecter les engagements qu’il a pris en vertu de l’Accord de Paris de 2015 concernant la réduction de ses émissions de GES. Il est le fruit de près d’un an d’efforts concertés des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux[13] et constitue un accord pour ces derniers[14]. Le Cadre pancanadien repose sur quatre piliers : 1) l’instauration d’un prix sur le carbone; 2) des mesures d’atténuation[15] complémentaires s’appliquant à l’ensemble de l’économie; 3) l’adaptation[16] et la résilience; 4) les technologies propres, l’innovation et l’emploi.

La section 3.5 du Cadre pancanadien (voir l’annexe A) indique comment les secteurs de la foresterie, de l’agriculture et de la gestion des déchets pourraient contribuer à atténuer les impacts des changements climatiques au Canada. Quatre champs d’action sont mis en lumière : « 1) renforcement du stockage du carbone dans les forêts et les sols agricoles; 2) soutien de l’utilisation accrue du bois pour la construction; 3) production de combustible à partir de bioénergies et de bioproduits; 4) promouvoir l’innovation[17] ».

Beth MacNeil, sous-ministre adjointe de Service canadien des forêts au ministère des Ressources naturelles, a informé le Comité des analyses réalisées par RNCan et ses partenaires provinciaux et territoriaux sur les possibilités d’atténuation des émissions en foresterie. Ce sont sur ces analyses que repose le Cadre pancanadien. De ces analyses sont ressortis quatre grands débouchés pour la foresterie : mettre en œuvre des mesures d’aménagement forestier stratégiques (p. ex. optimaliser l’utilisation des fibres du bois, améliorer la restauration des forêts à la suite d’incendie ou d’infestations d’insectes, et éclaircir les arbres pour faciliter la croissance des jeunes arbres, qui séquestrent le carbone plus rapidement); créer de nouvelles forêts; utiliser des produits ligneux ayant une longue durée de vie au lieu de matériaux à plus forte intensité d’émissions; et utiliser le bois comme source de bioénergie au lieu des combustibles fossiles[18].

Rapports du Canada à la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques concernant les sources et les puits de gaz à effet de serre

Conformément à la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), ratifiée par le Canada en 1992, le Canada doit produire des rapports annuels sur ses sources et ses puits anthropiques de GES dans le Rapport d’inventaire national[19]. Les méthodes et les lignes directrices applicables à la production des rapports sont établies par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)[20]. Les parties à la CCNUCC déclarent leurs émissions de sept GES : le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), l’oxyde nitreux (N2O), les perfluorocarbures (PFC), les hydrofluorocarbures (HFC), l’hexafluorure de soufre (SF6) et le trifluorure d’azote (NF3)[21]. Afin de tenir compte du potentiel de réchauffement planétaire propre à chaque GES et d’établir une unité de mesure commune, les émissions de GES sont déclarées selon une valeur d’équivalent en dioxyde de carbone (équivalent CO2 ou éq. CO2)[22]. La figure 1 montre la distribution des émissions de GES du Canada en 2016, la dernière année pour laquelle les données ont été déclarées à la CCNUCC en 2018 (au moment d’écrire ces lignes). Le système de tarification du carbone du gouvernement du Canada, qui est fondé sur le rendement, englobe les émissions des sept GES surveillés par la CCNUCC[23].

Figure 1 : Répartition des émissions du Canada par gaz à effet de serre (2016)

Ce diagramme circulaire montre qu’en 2016, les émissions totales de gaz à effet de serre (GES) au Canada étaient de 704 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone. Voici comment se répartissaient ces émissions : 79 % des émissions étaient du dioxyde de carbone (soit 559 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone); 14 % des émissions étaient du méthane (soit 96 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone); 5 % des émissions étaient de l’oxyde nitreux (soit 37 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone); 1,9 % des émissions provenaient des quatre gaz de synthèse suivants : hydrofluorocarbures, perfluorocarbures, hexafluorure de soufre et trifluorure d’azote (soit 13 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone). le méthane (CH4), l’oxyde nitreux (N2O), les perfluorocarbures (PFC), les hydrofluorocarbures (HFC), l’hexafluorure de soufre (SF6) et le trifluorure d’azote

Note : Le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4) et l’oxyde nitreux (N2O) représentent 98 % des émissions canadiennes mesurées en équivalents CO2.

Source : Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d'inventaire national 1990-2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada, 2018, partie 1, p. 4.

Selon le GIEC, la déclaration des émissions de GES doit toucher les secteurs suivants[24] :

  • 1) Énergie – Combustion de sources fixes
    • comprend la combustion de carburant dans les secteurs manufacturier et énergétique, le secteur du bâtiment ainsi que les secteurs commercial et résidentiel;
  • 2) Énergie – Transports
    • comprend les émissions provenant de la combustion, par des sources mobiles, de divers types de carburants dans les principaux moyens de transport (véhicules routiers et hors route, et transports aérien, ferroviaire et maritime);
  • 3) Énergie – Sources fugitives
    • comprend les émissions intentionnelles on non intentionnelles de GES produites par l’extraction et le traitement de combustibles fossiles et leur livraison jusqu’au point d’utilisation finale;
  • 4) Procédés industriels et utilisation des produits
    • comprend les émissions de GES non liées à l’énergie qui sont produites par les procédés manufacturiers et l’utilisation des produits;
  • 5) Agriculture
    • comprend les émissions de GES non liées à l’énergie qui concernent la production de cultures et l’élevage;
  • 6) Déchets
    • comprend les émissions de GES produites par le traitement et l’élimination des déchets liquides et solides;
  • 7) Affectation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie
    • comprend les émissions de GES produites et stockées par les forêts aménagées du Canada (forêts, terres cultivées, prairies, milieux humides et lieux de peuplement) et les émissions liées aux produits ligneux récoltés.

Survol des émissions de gaz à effet de serre dans le contexte des secteurs de la foresterie, de l’agriculture et de la gestion des déchets

Conformément aux lignes directrices du GIEC, les émissions et les puits du secteur Affectation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie (ATCATF) sont déclarés séparément de ceux des autres secteurs et n’entrent pas dans le calcul des émissions totales de GES du Canada. La figure 2 montre les émissions canadiennes de GES produites en 2016 par les secteurs de l’énergie, des procédés industriels ainsi que de l’utilisation des produits, de l’agriculture et des déchets. La quantité totale d’émissions stockées par le secteur ATCATF est indiquée à des fins de comparaison. En 2016, le total des émissions anthropiques de GES du Canada a atteint 704 Mt d’éq. CO2, et le secteur ATCATF a représenté le stockage net de 28 Mt d’éq. CO2

Figure 2 : Tendances des émissions de gaz à effet de serre au Canada, par secteur du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, y compris le secteur Affectation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie (ATCATF) (2005 à 2016)

Cette figure affiche les tendances des émissions canadiennes de GES de sept secteurs du GIEC de 2005 à 2016.

Note :     « ATCATF » signifie Affectation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie. Une description de chacun des secteurs est donnée dans le paragraphe précédant la figure 1.

Source : Environnement et Changement climatique Canada, Sources et puits de gaz à effet de serre : sommaire 2018.

Foresterie

Les « forêts aménagées », qui font partie des données du secteur ATCATF, comprennent toute forêt sous l’influence directe de l’humain, y compris les forêts aménagées à des fins de récolte, celles qui font l’objet de gestion des feux ou d’insectes et les forêts protégées, comme les forêts des parcs nationaux et provinciaux[25]. Les forêts aménagées du Canada s’étendent sur environ 226 millions d’hectares, soit 65 % du couvert forestier total du pays. Toutes les autres forêts du Canada sont considérées comme étant « non aménagées », comme le montre la figure 3[26].

Figure 3 — Zones de forêt aménagée et de forêt non aménagée au Canada

Cette figure montre les zones de forêt aménagée et de forêt non aménagée sur une carte du Canada. D’ouest en est, les zones de forêt aménagée couvrent environ : - moins d’un quart du territoire du Yukon et moins d’un cinquième des Territoires du Nord-Ouest; - la majeure partie de la Colombie-Britannique et du nord de l’Alberta; - la majeure partie du centre de la Saskatchewan et du centre du Manitoba; - la majeure partie des moitiés sud de l’Ontario et du Québec; - la majeure partie du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse; - de petites parties de l’Île-du-Prince-Édouard; - moins d’un quart de Terre-Neuve-et-Labrador; - aucune partie du Nunavut. D’ouest en est, les zones de forêt non aménagée couvrent environ : - de petites parties du Yukon; - un tiers des Territoires du Nord-Ouest; - la majeure partie du nord de la Saskatchewan et le nord du Manitoba;  - de petites parties du Nunavut; - pratiquement tout le nord de l’Ontario et la majeure partie du nord du Québec; - la moitié du Labrador. La figure ne présente pas de manière claire les zones de forêt non aménagée en Colombie Britannique, en Alberta, au Nouveau Brunswick, en Nouvelle Écosse ou à l’Île du Prince Édouard.

Source : Ressources naturelles Canada, Indicateur : Émissions et absorptions de carbone.

Le stockage du carbone – aussi appelé la séquestration du carbone – désigne les processus d’origine naturelle ou humaine qui consistent à retirer du carbone de l’atmosphère. Les puits de carbone sont des systèmes naturels qui absorbent le carbone et le retirent de l’atmosphère[27]. Grâce à la photosynthèse, les plantes capturent du dioxyde de carbone présent dans l’atmosphère; elles agissent alors comme un puits de carbone. À l’inverse, lorsqu’elles brûlent ou qu’elles se décomposent, les plantes relâchent dans l’atmosphère le carbone qu’elles avaient emmagasiné; elles agissent alors comme une source de carbone. Les forêts canadiennes constituent un puits de carbone net dans les années où elles enlèvent plus de GES de l’atmosphère qu’elles n’en relâchent. Par contre, elles constituent une source de carbone nette dans les années où elles relâchent plus de GES dans l’atmosphère qu’elles n’en enlèvent (voir la figure 4).

Le modèle du bilan de carbone des forêts canadiennes est à la base du système national de surveillance, de comptabilisation et de production annuelles de rapports concernant le carbone des forêts, qui est prévu par la CCNUCC[28]. Le Service canadien des forêts de RNCan a élaboré ce modèle en 1989 et n’a cessé de l’améliorer. Aujourd’hui, le modèle fait figure d’outil novateur et jouit d’une belle réputation internationale. Il a d’ailleurs été adopté par d’autres pays[29].

Même si les forêts aménagées du Canada ont été un important puits de carbone net pour la majeure partie des 100 dernières années, l’intensité et le nombre croissants des feux de forêt ont perturbé le bilan de carbone des forêts canadiennes. Les feux de forêt font partie intégrante de l’écosystème de la forêt boréale et revêtent une grande importance pour la régénération, la santé et la biodiversité des forêts[30]. Par exemple, les cônes cireux du peuplier faux-tremble et du bouleau à papier ont besoin de la chaleur intense du feu pour s’ouvrir et libérer leurs graines[31]. Toutefois, les feux de forêt constituent aussi une menace pour les collectivités avoisinantes, les ressources forestières et le climat. Au Canada, depuis 1990, ce sont 2,5 millions d’hectares de forêt en moyenne qui brûlent chaque année[32]. En fait, les forêts ont été une source nette de carbone dans quelques‑unes des dernières années[33]. Les infestations d’insectes (p. ex. la tordeuse des bourgeons de l’épinette dans l’Est du Canada et le dendroctone du pin argenté en Colombie‑Britannique et en Alberta) influent aussi sur la quantité de carbone relâchée par les forêts[34].

La figure 4 montre les émissions nettes de GES au fil du temps des forêts aménagées du Canada, ainsi que les zones touchées chaque année par les incendies, les dommages causés par les insectes et l’aménagement forestier. Les pics dans les émissions de GES, qui coïncident avec les années où de vastes superficies de forêts ont brûlé, montrent l’importance des feux dans les émissions annuelles de GES.

Figure 4 — Émissions nettes de carbone annuelles dans les forêts aménagées du Canada, de 1990 à 2016 (incendies de forêt, insectes et aménagement forestier)

Le tableau présente l’évolution des émissions et de l’absorption de gaz à effet de serre dans les forêts aménagées du Canada entre 1990 et 2016 (en million de tonnes d’équivalent de dioxyde de carbone par année). Un nombre positif indique une émission nette d’équivalent de dioxyde de carbone par les forêts aménagées du Canada. Un nombre négatif indique une absorption nette. Le tableau présente également les zones annuelles de forêts perturbées (en hectare) entre 1990 et 2016 par les trois agents que sont (1) l’aménagement forestier, (2) les incendies de forêt et (3) les insectes.

Note :     Les émissions nettes inférieures à zéro correspondent aux années où les forêts aménagées du Canada constituaient un puits net de carbone (p. ex. 1992), tandis que les émissions nettes supérieures à zéro correspondent aux années où les forêts aménagées constituaient une source nette de carbone (p. ex. 2015).

Source : Ressources naturelles Canada, Indicateur : Émissions et absorptions de carbone.

Le Canada est un chef de file mondial au chapitre des pratiques forestières durables depuis plus de 20 ans. En 1992, le Conseil canadien des ministres des forêts (CCMF) et le secteur forestier canadien ont appuyé l’adoption, à l’échelle nationale, de principes d’aménagement forestier durable[35]. Ces principes sont aujourd’hui inscrits dans les lois, règlements et politiques adoptés par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux[36].

Au fil des dernières décennies, les améliorations continues apportées aux techniques de foresterie durable ont permis de réduire les émissions de carbone par unité de production dans le secteur. Robert Larocque, vice-président principal de l’Association des produits forestiers du Canada, a souligné le fait que l’industrie forestière a réduit de façon impressionnante ses émissions de GES de 66 % depuis 1990. Il a expliqué que pour parvenir à ce résultat, elle s’est tournée vers les déchets de la biomasse et n’utilise plus du tout de charbon et presque plus de pétrole pour produire l’énergie dont elle a besoin[37].

S’exprimant sur les façons d’optimiser le rôle des forêts aménagées du Canada en tant que puits net de carbone pour combattre les changements climatiques, Mme MacNeil a expliqué qu’il faut tenir compte des trois facteurs suivants : « premièrement, la façon dont l’aménagement forestier affecte les émissions [de carbone] et [leur] absorption; deuxièmement, le carbone emmagasiné dans les produits du bois; troisièmement, la façon dont les produits forestiers et la bioénergie peuvent remplacer d’autres produits et carburants fossiles qui, en comparaison, produisent plus d’émissions[38] ».

Le Comité a appris qu’il est utile de prendre en compte le concept d’« énergie grise » d’un matériau donné pour évaluer les avantages des produits ligneux dans l’industrie de la construction. L’énergie grise s’entend de « la somme totale d’énergie requise pour extraire, récolter, transformer, fabriquer, transporter, construire et conserver un matériau ou un produit utilisé dans les applications de construction[39]». Elle englobe aussi l’utilisation de l’eau, les émissions de GES et d’autres polluants atmosphériques. Comme l’explique le CCMF, « [l]e bois d’œuvre, avec une valeur d’énergie grise d’environ 2,5 MJ/kg (mégajoules par kilogramme) a donc un caractère beaucoup plus écologique que les matériaux de construction comme les panneaux de gypse (6,1 MJ/kg), le verre (15,9 MJ/kg), l’acier (32 MJ/kg) ou l’aluminium (227 MJ/kg)[40] ». L’utilisation accrue des produits du bois dans l’industrie de la construction pourrait aider à réduire le recours aux matériaux à plus forte intensité carbonique et, par le fait même, atténuer les émissions de GES dans cette industrie. En outre, tant et aussi longtemps qu’un produit ligneux demeure intact, il conserve le carbone absorbé par l’arbre d’où il provient.

Agriculture

En 2016, l’agriculture représentait 60 Mt d’éq. CO2, ou quelque 8,5 % des émissions canadiennes de GES[41]. Ces chiffres incluent les émissions de GES attribuables à la production agricole et animale, mais ne tiennent pas compte de la consommation d’énergie dans les exploitations agricoles (rapportée à l’ONU comme faisant partie du secteur Énergie – Combustion de sources fixes). La même année, l’agriculture représentait aussi 30 % des émissions nationales de méthane (CH4) et 77 % des émissions nationales d’oxyde de diazote (N2O). Mais surtout, le méthane et l’oxyde de diazote présentent un potentiel de réchauffement planétaire de loin supérieur à celui du dioxyde de carbone. En effet, une unité de méthane équivaut à 25 unités de dioxyde de carbone, tandis qu’une unité d’oxyde de diazote équivaut à 298 unités de dioxyde de carbone[42].

Le Rapport d’inventaire national 1990-2016 du Canada répartit les émissions de GES associées à l’agriculture en cinq catégories : la fermentation entérique; la gestion des fumiers; les sols agricoles; l’incinération des résidus agricoles dans les champs; et le chaulage, l’application d’urée et d’autres engrais carbonés[43]. Comme l’illustre le tableau ci‑dessous, les émissions de GES produites par le secteur de l’agriculture ont augmenté de 1990 à 2005, mais elles sont plutôt stables depuis 2005.

Tableau 1 — Émissions canadiennes totales de gaz à effet de serre dans le secteur de l’agriculture

Années

1990

1995

2000

2005

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Mégatonnes d’équivalent CO2

ÉMISSIONS TOTALES DANS LE SECTEUR AGRICOLE

47

54

57

60

56

55

57

59

58

59

60

Fermentation entérique

22

27

28

31

26

25

25

25

25

24

25

Gestion des fumiers

6,6

7,7

8,5

9,3

8,2

8,1

8,1

8,2

8,2

8,3

8,4

Sols agricoles

17

18

19

19

21

20

22

24

23

23

24

Incinération des résidus agricoles dans les champs

0,23

0,18

0,13

0,05

0,03

0,03

0,04

0,05

0,05

0,05

0,05

Chaulage, application d’urée et autres engrais carbonés

1,2

1,4

1,6

1,4

1,8

2,0

2,3

2,7

2,5

2,6

2,5

Note :     Les totaux peuvent ne pas correspondre en raison de l'arrondissement.

Source : Données du rapport d’inventaire national du Canada à la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. CCNUCC, Rapports d'inventaire nationaux 2018, Cadre uniformisé de présentation des rapports, présenté par le Canada le 13 avril 2018.

La hausse des émissions de GES observée dans le secteur agricole de 1990 à 2005 est surtout attribuable aux populations croissantes de bovins de boucherie et de porcs, qui ont fait augmenter les émissions de GES liées à la fermentation entérique et aux fumiers (les principales sources d’émissions de méthane en agriculture). Entre 1990 et 2005, les populations de bovins de boucherie et de porcs sont passées d’environ 10 millions de têtes chacune à 15 millions de têtes chacune[44]. Les deux populations ont atteint un sommet en 2005, avant d’amorcer une diminution les années suivantes. La population bovine du Canada était revenue à 12 millions de têtes en 2016, tandis que la population porcine avait diminué pour se fixer 12,5 millions de têtes en 2010, avant d’augmenter de nouveau pour atteindre les 14 millions en 2016.

De 1990 à 2016, l’utilisation accrue d’engrais azotés inorganiques (la principale source d’émissions d’oxyde de diazote en agriculture) a fait augmenter les émissions produites par les sols agricoles[45]. Au cours de cette période, les émissions des sols agricoles sont passées de 17 à 24 Mt d’éq. CO2. La figure 5 illustre les tendances observées concernant les trois principales sources d’émissions de GES en agriculture, soit la fermentation entérique, la gestion des fumiers et les sols agricoles.

Figure 5 — Principales sources d’émissions de gaz à effet de serre dans le secteur agricole (1991‑2016)

 Ce graphique montre les émissions de gaz à effet de serre du Canada exprimées en mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone, de 1991 à 2016, dans le secteur agricole selon le GIEC. Les émissions totales de GES provenant de l’agriculture ont augmenté au fil du temps, passant de 47 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 1991 à 60 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2016. Le graphique indique les trois principaux secteurs responsables des émissions totales provenant de l’agriculture : la gestion des fumiers, les sols agricoles et la fermentation entérique. Dans les émissions totales, c’est la part attribuable à la gestion des fumiers qui était la plus faible, passant de 6,7 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 1991 à 8,4 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2016, avec un sommet de 9,2 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2006. Viennent ensuite les sols agricoles. Leur part dans les émissions totales représentait 16 mégatonnes d’équivalent de dioxyde de carbone en 1991 et avait atteint 24 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2016. C’est la part attribuable à la fermentation entérique qui était la plus élevée dans les émissions totales provenant du secteur agricole. Elle était passée de 23 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 1991 à 25 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2016, avec un pic à 30 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2006.

Source : Adapté à partir du document de l’Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d’inventaire national 1990-2016 - Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada : Sommaire, 2018, p. 9; données du rapport d’inventaire national du Canada à la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. CCNUCC, Rapports d'inventaire nationaux 2018, Cadre uniformisé de présentation des rapports, présenté par le Canada le 13 avril 2018.

Les sols agricoles ont émis 24 Mt d’éq. CO2 en 2016, mais ils ont aussi enlevé 11 Mt d’éq. CO2 de l’atmosphère cette même année[46]. Les terres cultivées du Canada[47], comme elles sont désignées dans la partie du Rapport d’inventaire national portant sur le secteur Affectation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie, ont émis 7,2 Mt d’éq. CO2 en 1991. Cependant, en raison de l’évolution des pratiques agricoles, surtout dans les Prairies[48], les terres cultivées étaient devenues un puits de carbone en 1997 (0,86 Mt d’éq. CO2) et ont depuis augmenté leur capacité de stockage[49]. Entre 2005 et 2016, les terres cultivées du Canada ont capturé et stocké de 10 à 12 Mt d’éq. CO2 chaque année[50].

Dans les rapports qu’il présente à la CCNUCC, le Canada ne tient pas compte de la capture et du stockage des GES par les terres cultivées dans le calcul de ses émissions totales de GES dans le secteur Agriculture. Ces émissions sont plutôt comptabilisées dans le secteur ATCATF. Si l’on incluait le stockage du carbone dans le calcul, le secteur Agriculture aurait affiché une baisse de ses émissions nettes, qui seraient passées de 54 à 49 Mt d’éq. CO2 entre 1991 et 2016, même si elles ont augmenté de 47 à 60 Mt d’éq. CO2 durant cette période, comme le montre la figure 6.

Figure 6 — Émissions de GES du secteur agricole du Canada, terres cultivées comprises et non comprises (1991-2016)

Ce graphique compare les émissions totales de GES provenant de l’agriculture sur une certaine période avec la séquestration du carbone dans les terres cultivées (ces données proviennent d’un rapport du GIEC concernant un autre secteur), ce qui donne la production nette de GES attribuable à l’agriculture. Les émissions totales de GES (sans tenir compte des terres cultivées) sont passées de 47 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 1991 à 60 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2016. Au Canada, les terres cultivées étaient une source de GES en 1991, puisqu’elles émettaient 7,2 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone. Avec le temps, les émissions provenant des terres cultivées ont diminué jusqu’à devenir négatives (puits de carbone) à partir de 2001, pour représenter  11 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone en 2016. Lorsqu’on tient compte des terres cultivées dans les émissions totales, les émissions nettes de GES provenant de l’agriculture au Canada diminuent au fil du temps; en 1991, 2011 et 2016, elles représentaient respectivement 54,2, 43 et 49 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone.

Source : Adapté à partir du document de l’Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d’inventaire national 1990-2016 - Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada : Sommaire, 2018, p. 9; données du rapport d’inventaire national du Canada à la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. CCNUCC, Rapports d'inventaire nationaux 2018, Cadre uniformisé de présentation des rapports, présenté par le Canada le 13 avril 2018.

Gestion des déchets

Le traitement et l’élimination des déchets représentaient 2,6 % des émissions canadiennes de GES en 2016 (19 Mt)[51]. Les déchets solides municipaux (12,9 Mt) et les déchets ligneux (3,5 Mt) représentent de loin la majeure partie des émissions de GES pour ce secteur[52]. L’une des grandes préoccupations à propos des déchets tient au fait que la décomposition anaérobique des matières organiques dans les lieux d’enfouissement génère du méthane. Étant donné que le méthane génère 25 fois l’effet de serre d’une quantité égale de dioxyde de carbone, il importe de limiter la production de méthane et sa dissipation dans l’atmosphère pour atténuer les changements climatiques. Il est possible de capter et de brûler les gaz produits sur les sites d’enfouissement pour produire de l’électricité ou chauffer des immeubles, ce qui présente deux grands avantages : d’abord, ce procédé empêche la dissipation du méthane dans l’atmosphère; ensuite, l’utilisation des gaz produits sur les sites d’enfouissement comme source d’énergie permet de remplacer des combustibles fossiles comme le charbon, le pétrole et le gaz naturel[53].

Environnement et Changement climatique Canada observe que, si la récupération des gaz d’enfouissement permet de gérer les émissions des matières organiques déjà présentes dans les sites d’enfouissement, le réacheminement (par le compostage, notamment) de matières organiques comme les résidus putrescibles et verts, lui, aurait pour effet de réduire d’emblée la production de méthane[54]. Le compostage a pour avantage que les matières organiques se décomposent en aérobie, ce qui entraîne la production de dioxyde de carbone au lieu de générer du méthane, un GES beaucoup plus puissant. En conséquence, il est possible de réduire les émissions de GES du secteur des déchets en gérant les déchets organiques de façon à les écarter le plus possible des sites d’enfouissement.

Un autre aspect important de la gestion des déchets est la hiérarchie de gestion des déchets, souvent appelée les « 3R » (réduire, réutiliser, recycler). Tout simplement, les 3R visent à rappeler d’essayer en premier lieu de réduire la quantité de déchets produits, puis de réutiliser les produits dans la mesure du possible et, enfin, de recycler les matériaux plutôt que de les envoyer à la décharge[55].

Observations découlant de l’étude

Introduction

Les sections suivantes présentent les observations du Comité quant à la manière dont le gouvernement fédéral peut contribuer à accélérer la réduction des émissions de GES dans les secteurs de la foresterie, de l’agriculture et de la gestion des déchets. Ces observations sont regroupées par secteur.

Foresterie

Mme MacNeil, sous-ministre adjointe de Service canadien des forêts au ministère des Ressources naturelles, a rappelé au Comité que, en raison de la lenteur des arbres à accumuler leur biomasse, il faudrait mettre en place des mesures rapidement afin de tirer parti de l’une des meilleures pistes d’atténuation des émissions de carbone pour le Canada d’ici 2050[56]. Tony Lemprière, gestionnaire principal des Politiques de changement climatique au Service canadien des forêts à RNCan, a précisé au Comité que l’Accord de Paris encourage les pays à se servir de leurs terres, telles que les forêts aménagées, pour atteindre leurs objectifs de réduction des émissions, et que le Canada entendait suivre cette voie[57]. À la question de savoir comment le Canada pourrait le mieux accroître l’absorption du carbone dans ses forêts, Tony Lemprière a résumé ainsi les observations du Service canadien des forêts :

Créez de nouvelles forêts. Gérez les forêts pour augmenter le puits et réduire les risques d’incendie. Utilisez du bois. Construisez avec du bois et utilisez les déchets de bois comme source d’énergie. Trouvez-lui une utilisation[58].

Le stockage du carbone dans les forêts et le bois

Un certain nombre de témoins ont expliqué en quoi l’exploitation forestière et le maintien des stocks de carbone dans les produits ligneux durables pourraient contribuer à l’atteinte des objectifs de réduction des émissions canadiennes de GES. Mme MacNeil a  souligné que, si la conservation des forêts demeure un élément important, elle « ne constitue souvent pas la meilleure stratégie afin de réduire les impacts des GES à long terme », car les arbres libèrent le carbone qui était séquestré en se décomposant ou en brûlant. Kate Lindsay, de l’Association des produits forestiers du Canada, a apporté des précisions à cet égard, indiquant que le fait de maintenir les forêts dans le paysage fonctionnel – récolter du bois, fabriquer des produits qui stockent le carbone pendant des décennies et des siècles et reboiser les forêts — a pour effet d’optimaliser le potentiel de stockage de carbone des forêts[59]. Stéphane Renou, président et chef de la direction de FPInnovations, a expliqué que « le bois est l’un des rares matériaux à avoir une très faible empreinte de carbone » et souligné que :

[l]e plus important à retenir, c’est que le bois, en construction, séquestre le carbone et contribue à accroître les réservoirs de carbone en forêt[60].

M. Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada, a indiqué que les modifications qui seront apportées au Code national du bâtiment en 2020 permettront la construction de hauts bâtiments en bois comptant jusqu’à 12 étages. Il a ajouté que celles-cifaciliteront le stockage du carbone à long terme et que l’Association des produits forestiers du Canada attend impatiemment la nouvelle version du Code[61]. M. Larocque a observé qu’une aide du gouvernement pour ouvrir les marchés destinés aux bâtiments de bois de grande hauteur permettrait d’accélérer le stockage à long terme du carbone de cette façon[62].

Le Comité a demandé à Werner Kurz, chercheur principal au Service canadien des forêts du ministère des Ressources naturelles, ce que les Canadiens pourraient planter sur leur propre terrain s’ils veulent participer à l’agrandissement du puits de carbone canadien. À cette question, M. Kurz a répondu ce qui suit :

Cinquante pour cent du poids du bois est du carbone, ce qui veut dire essentiellement […] n’importe quelle plante ligneuse qui pousse rapidement et qui a une forte densité dans son bois. Un chêne aura une densité plus élevée qu’un peuplier, mais sa croissance sera plus lente. En fin de compte, tout dépend de la quantité de carbone qu’on peut accumuler dans le bois, dans les forêts, dans les forêts urbaines, dans les forêts-parcs et dans les brise-vent. Nous avons beaucoup d’occasions partout au pays de faire pousser plus d’arbres et d’éliminer davantage de dioxyde de carbone de l’atmosphère[63].

Observation 1

Le Comité encourage les propriétaires fonciers canadiens à tenir compte de la possibilité d’accroître la capacité de stockage de carbone du Canada lorsqu’ils gèrent leurs terres.

Bioproduits et bioénergie dans le secteur forestier

M. Larocque, de l’Association des produits forestiers du Canada, a reconnu que c’est grâce à l’appui à la recherche accordé depuis des années par le gouvernement fédéral que l’industrie des bioproduits se trouve où elle est aujourd’hui[64]. Il a donné des exemples de bioproduits, comme le bois lamellé-croisé (qui facilite la construction d’immeubles en bois à étages multiples), les isolants en fibres de bois, ainsi que les composites en fibres de bois, qui peuvent remplacer les plastiques lourds dans les véhicules[65]. Représentant FPInnovations, M. Renou a signalé que cet organisme à but non lucratif, qui est financé par l’industrie et les gouvernements fédéral et provinciaux, avait été à l’avant-garde de la mise au point du bois lamellé-croisé[66]. Il a souligné que les émissions de GES liées à la production et à l’utilisation de bioplastiques étaient 80 % inférieures à celles liées aux plastiques polypropylènes traditionnels[67].

Pour sa part, M. Larocque a mentionné qu’il n’y avait pas de mesures fédérales visant à encourager la séquestration du carbone dans les biomatériaux ou produits ligneux, qui peuvent pourtant emprisonner le carbone à long terme. Il a décrit plusieurs politiques qui favorisent l’utilisation de la bioénergie forestière, comme la tarification du carbone, mais il a observé qu’il n’y avait pas d’incitatifs comparables pour les bioproduits et les biomatériaux[68]. M. Larocque a invité le Comité à corriger cette lacune[69]. Pour promouvoir l’utilisation de produits offrant une capacité de séquestration du carbone à long terme ou dont l’empreinte carbone est plus faible que leurs équivalents conventionnels :

Recommandation 1

Le Comité recommande que Ressources naturelles Canada envisage la mise en place des mesures encourageant l’utilisation des bioproduits et des biomatériaux, comme c’est le cas actuellement pour l’utilisation de la bioénergie.

Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, de Biocarburants avancés Canada, a parlé du potentiel de réduction des GES que présentent les biocarburants avancés pour notre pays :

Grâce à la Norme sur les combustibles propres, nous nous attendons à ce que les carburants propres remplacent les combustibles fossiles liquides et que cela permette de réduire de 20 millions de tonnes par année les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 […] La réduction se fera en large partie grâce aux biocarburants avancés qui sont vendus aujourd’hui, comme le biodiesel, le diesel renouvelable, l’éthanol et l’éthanol avancé. Les technologies émergentes, comme le biobrut et le captage du carbone n’en sont qu’à l’étape de l’essai et de la démonstration. Elles vont permettre d’accroître les approvisionnements en carburant et une réduction plus prononcée, qui sont nécessaires pour atteindre nos cibles pour 2050[70].

M. Hooper a décrit pour le Comité comment l’industrie des biocarburants évalue la viabilité de ses produits par rapport aux carburants conventionnels. Les producteurs de biocarburants peuvent procéder à une analyse de l’intensité des émissions de carbone tout au long du cycle de vie lorsqu’ils comparent leurs produits avec les autres carburants[71]. En réponse à une question du Comité qui portait sur les préoccupations que soulève l’idée que les récoltes servent à produire des biocarburants plutôt qu’à nourrir des bouches, M. Hooper a expliqué que les producteurs peuvent préciser la teneur en biomasse renouvelable de leurs carburants (p. ex. résidus de récolte) pour éliminer ce genre d’inquiétudes[72].

Susan Wood-Bohm a attiré l’attention du Comité sur une occasion que peut saisir le gouvernement fédéral afin de faire preuve de leadership dans le secteur de la bioénergie. Elle a informé les membres que le chauffage des édifices gouvernementaux compte pour près de la moitié des émissions de GES provenant du gouvernement fédéral. Elle a signalé que les installations militaires au Canada utilisent déjà des systèmes de chauffage distribué, c’est‑à‑dire qu’un seul système sert au chauffage de plusieurs bâtiments. Selon elle, un moyen très simple de réduire considérablement les émissions est de convertir ces systèmes à des sources de combustibles à faibles émissions. Elle a d’ailleurs invité le gouvernement à jouer un rôle de chef de file à cet égard[73]. Mme Wood‑Bohm a également mentionné que les résidus forestiers et agricoles étaient sous-utilisés dans la production de bioénergie au Canada[74]. Pour permettre au gouvernement du Canada de donner l’exemple et réduire les émissions de GES :

Recommandation 2

Le Comité recommande que Services publics et Approvisionnement Canada travaille de concert avec les autres ministères et organismes afin de cerner les possibilités de substitution de carburants et d’autres solutions dans le but de réduire les émissions de gaz à effet de serre associées aux édifices et aux flottes de véhicules fédéraux.

Utilisation des résidus forestiers dans la production de bioénergie

Gordon Murray, directeur général de l’Association canadienne des granules de bois, a expliqué que les granules de bois, qui sont fabriquées à partir de fibre de bois pure et comprimée provenant de déchets de bois ou de résidus des coupes forestières, sont un combustible renouvelable[75]. Il a informé le Comité qu’environ 95 % des granules de bois servent à la production d’électricité, entre autres comme substitut au charbon dans les centrales au charbon pulvérisé[76].

M. Murray a signalé que la part de production mondiale des granules de bois du Canada est inférieure à 10 % et que le marché canadien est très petit. L’Association canadienne des granules de bois aimerait entre autres un meilleur accès aux résidus de coupe forestière. L’industrie forestière est tenue d’éliminer les « rémanents » (résidus de coupe, comme les cimes des arbres) et les résidus de bois, et ce afin de réduire les risques d’incendie[77]. M. Murray a expliqué que les rémanents sont souvent brûlés sur place, et que les principaux détenteurs de tenure forestière préfèrent cette méthode d’élimination, surtout lorsque l’accès aux sites de coupe est difficile[78]. Il a signalé que l’industrie des granules de bois cherche à obtenir un meilleur accès aux résidus de coupe de la part des principaux détenteurs de tenure forestière[79]. L’industrie des granules de bois encourage les gouvernements provinciaux à limiter le brûlis, de manière à laisser plus de résidus pour la production de bioénergie[80]. Le Comité a aussi noté que les arbres tués par des dommages causés par les insectes ou d’autres perturbations naturelles sur des terres fédérales représentent une autre possibilité de production de bioénergie.

Observation 2

Le Comité encourage les provinces, les territoires et les gouvernements intéressés à faciliter l’utilisation d’un plus grand volume de résidus forestiers pour la production de bioénergie.

M. Murray a informé le Comité qu’avec relativement peu de capital, les centrales au charbon peuvent être converties aux granules de bois, un produit durable et renouvelable, ce qui permettrait de réduire de beaucoup les émissions de GES[81]. Selon M. Murray, les granules de bois représentent une solution pour les provinces qui dépendent encore de l’électricité produite à l’aide de charbon, mais qui se sont engagées à éliminer le charbon d’ici 2030 (l’Alberta, la Saskatchewan, le Nouveau‑Brunswick et la Nouvelle-Écosse)[82]. M. Murray a cependant précisé que l’Association canadienne des granules de bois n’a pas réussi à convaincre les entreprises de production d’électricité de convertir les centrales au charbon aux granules de bois, exception faite d’une centrale gérée par Ontario Power Generation[83]. Pour réduire les émissions de GES liées à la production d’électricité, le Comité encourage les provinces et les territoires et leurs compagnies d’électricité à envisager la conversion de leurs centrales au charbon aux granules de bois.

Observation 3

Le Comité encourage les provinces, les territoires, les gouvernements intéressés et les compagnies d’électricité à envisager la conversion des centrales au charbon aux granules de bois.

Selon M. Murray, l’un des obstacles à l’utilisation des granules de bois pour le chauffage au Canada est « l’incompatibilité entre les normes canadiennes et européennes en matière de pression des chaudières[84] ». Il a expliqué que, bien qu’en Europe on utilise des technologies de chauffage avancées et qu’il n’y ait pas de fabricant de chaudières à biomasse en Amérique du Nord, les chaudières européennes ne peuvent pas être utilisées au Canada, car elles ne sont pas conformes aux normes de pression canadiennes[85].

Observation 4

Le Comité encourage l’Association canadienne des granules de bois à continuer de travailler avec l’Association canadienne de normalisation, et en conformité avec les dispositions de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne, afin de régler le problème d’incompatibilité des normes de pression pour les chaudières.

Émissions de gaz à effet de serre liées aux perturbations naturelles des forêts : incendies et insectes

Le Comité a voulu en savoir davantage sur les émissions de GES provenant des feux de forêt et sur la comptabilisation de ces émissions dans l’inventaire canadien des gaz à effet de serre de CCNUCC. Mme MacNeil, du Service canadien des forêts, a déclaré que les changements climatiques ont eu des répercussions troublantes pour les forêts, telles qu’une hausse de la fréquence et de l’étendue des feux de forêt et la pullulation d’insectes, comme le dendroctone du pin argenté[86]. Werner Kurz, chercheur principal du Service canadien des forêts au ministère des Ressources naturelles, a expliqué que les émissions engendrées par les feux de forêt peuvent varier considérablement d’une année à l’autre, et que les émissions directes des incendies peuvent atteindre jusqu’à 250 millions de tonnes d’équivalents de CO2 les années où les conditions sont extrêmes[87]. Il a toutefois précisé qu’il y a eu très peu d’années « extrêmes » depuis que l’on a commencé à produire, à l’échelle internationale, des rapports sur les émissions de GES en 1990. Il a d’ailleurs souligné qu’il faut tenir compte de l’ensemble du cycle forestier lorsque l’on examine les émissions :

[I]l ne faut pas oublier qu’une grande partie de la forêt boréale au Canada se régénère à la suite des feux de forêt. Oui, il y a les émissions directes, mais il y a aussi de vastes zones forestières qui éliminent le dioxyde de carbone de l’atmosphère. Si on ne tient compte que des émissions, on n’obtient pas une vue d’ensemble. Il faut vraiment examiner les deux, les émissions et l’élimination, parce que c’est un processus du cycle de vie : les forêts poussent, les forêts meurent et brûlent, les forêts repoussent[88].

M. Kurz a précisé que les incendies brûlent en moyenne chaque année l’équivalent de 1 % de la superficie des forêts au Canada[89]. Il a ajouté qu’en raison des températures plus chaudes, des précipitations moins abondantes et des périodes de sécheresse plus longues, les surfaces forestières incendiées chaque année ont triplé au cours des 50 dernières années[90]. Comparant les répercussions des incendies et des épidémies d’insectes, il a expliqué qu’en Colombie‑Britannique, la zone ravagée par les insectes est beaucoup plus grande que celle touchée par les incendies. Il a toutefois précisé que les incendies ont un impact beaucoup plus grand que les insectes, puisque les épidémies d’insectes tuent de 30 à 50 % des arbres, alors que les incendies détruisent presque tout sur leur passage[91].

M. Larocque de l’Association des produits forestiers du Canada a porté à l’intention du Comité la possibilité d’accélérer le reboisement des sites ravagés par des incendies et des insectes. Il a expliqué que l’industrie forestière renouvelle les régions récoltées, car ils sont tenus de le faire. Il a cependant fait valoir que « personne n’est réellement responsable de régénérer les régions qui ont été touchées par des perturbations naturelles où les arbres peuvent prendre parfois plus de temps pour repousser. Une telle stratégie permettrait de capturer plus rapidement le carbone de l’atmosphère, grâce à une régénération plus rapide[92] ». Pour favoriser la séquestration du carbone par les forêts du Canada:

Recommandation 3

Le Comité recommande que Ressources naturelles Canada travaille avec les provinces, les territoires, les gouvernements intéressés et les intervenants de l’industrie afin d’élaborer et de mettre en place une stratégie ou un programme de renouvellement pour les forêts touchées par des perturbations naturelles, comme on l’exige déjà pour les zones récoltées.

Suppression et prévention des incendies de forêt

Les membres du Comité ont voulu savoir dans quelle mesure la lutte contre les feux de forêt contribuait à prévenir les émissions directes de GES. M. Kurz a indiqué que la plupart des feux de forêt au Canada sont causés par la foudre et surviennent dans des régions éloignées, où il n’y a pas l’infrastructure nécessaire pour les éteindre[93]. Il a par ailleurs souligné que les conditions climatiques ont augmenté l’intensité des feux de forêt au point où les efforts pour les combattre ne sont pas toujours efficaces[94]. Il a également informé le Comité que dans certaines régions du Canada, les forêts contiennent une charge importante de combustibles, une conséquence imprévue des efforts de suppression des incendies des 100 dernières années[95].

Mme MacNeil a fait remarquer que les ressources consacrées actuellement à la suppression des incendies sont insuffisantes, vu la hausse de la fréquence et de l’étendue des feux de forêt au Canada. Elle a ajouté que, lors de sa réunion de septembre 2018, le CCMF a mandaté les sous‑ministres fédéral et provincial de la Colombie‑Britannique d’élaborer une liste des mesures prioritaires à prendre à l’égard du nouveau régime canadien des feux de forêt. Mme MacNeil a expliqué que RNCan, en collaboration avec ses partenaires provinciaux et Sécurité publique Canada, élabore une stratégie chiffrée de gestion des feux de forêt à suivre en cas d’urgence. Pour qu’il soit possible de réduire les émissions de GES produites par les feux de forêt, qui sont de plus en plus fréquents et importants :

Recommandation 4

Le Comité recommande que Ressources naturelles Canada travaille avec les provinces, les territoires, les gouvernements intéressés et les intervenants de l’industrie afin d’accroître le financement nécessaire à la suppression écologique des feux de forêt.

Le Comité a entendu que dans certaines régions du pays, la gestion du paysage pourrait contribuer à réduire le risque d’incendie. Par exemple, M. Kurz a souligné que dans la région intérieure de la Colombie-Britannique, la présence de vastes étendues de forêts contiguës contribue en partie aux très grands incendies. « La conception d’un paysage comportant davantage de prairies et de forêts peut aider à réduire les risques d’incendie[96] », a indiqué M. Kurz, qui s’attend à ce que d’autres études soient menées sur la question.

Recommandation 5

Le Comité recommande que Ressources naturelles Canada travaille avec les provinces, les territoires, les gouvernements intéressés et des partenaires de recherche afin d’approfondir les études sur la conception de paysages écologiques dans le but de gérer convenablement les feux de forêt.

Agriculture

Plusieurs témoins ont décrit comment les agriculteurs canadiens déploient des efforts considérables en vue de réduire les émissions de GES par acre de terrain ou tonne de bétail[97]. Mike Moffatt, directeur principal de l’Institut pour l’IntelliProspérité, a décrit la situation pour le Comité :

Le Canada est déjà un producteur de cultures et de bétail efficace quant aux rejets de gaz à effet de serre. Le secteur a plus que doublé la valeur de sa production au cours des dix dernières années environ, tout en maintenant ses émissions presque constantes, ce qui a entraîné une diminution de 0,9 % par année de ses émissions de gaz à effet de serre, entre 1990 et 2012. Grâce à des pratiques d’alimentation améliorées et d’autres facteurs, nous sommes également l’un des producteurs de protéines animales les moins polluants au monde[98].

Selon M. Moffatt, l’efficacité agricole du Canada pourrait aussi contribuer à réduire les émissions globales de GES si elle déloge les productions qui sont sources majeures d’émissions : « l’augmentation de la part de marché du Canada à l’exportation pourrait potentiellement réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre si notre production entraînait une baisse de la production dans d’autres pays[99] ».

Changements touchant les pratiques de gestion agricole

Les techniques agricoles novatrices et durables, telles que la culture sans labour, l’épandage localisé de nutriments, l’alimentation améliorée du bétail et la génomique, ont permis de réduire l’intensité en carbone liée aux récoltes et à l’élevage de bétail au Canada. Avec l’évolution des pratiques de gestion agricole, on devrait continuer de voir une réduction des émissions de GES dues à la production agricole et un accroissement de la capacité de séquestration du carbone dans les sols agricoles. De plus, l’utilisation accrue de biocarburants agricoles aiderait le Canada à atteindre les objectifs de la Norme sur les carburants propres pour 2030.

Culture sans labour

Plusieurs témoins ont parlé de l’importance de la culture sans labour ou de la préparation limitée des sols, deux méthodes qui permettent aux agriculteurs de moins utiliser de machinerie et de carburant. Susie Miller, directrice exécutive de la Table ronde canadienne sur la production durable des cultures, a décrit les différentes méthodes de labour ou travail des sols :

[C]e que l’on appelle travail du sol complet, tel que défini par Statistique Canada, correspond au type de labour traditionnel, dans lequel la plupart des résidus de récolte sont réintroduits dans le sol, et le sol est essentiellement nu. Le travail du sol réduit retient la plupart des résidus de culture en surface; ils ne sont pas enfouis, ils sont à la surface. L’absence de travail du sol ou de labour signifie qu’aucune perturbation n’est causée. L’ensemencement s’effectue dans le sol au moyen de l’équipement qui pénètre directement dans le sol[100].

Mme Miller a expliqué que la culture sans labour présente un fort potentiel de réduction des émissions de carbone provenant des sols agricoles et que cette pratique a été adoptée par de nombreux agriculteurs dans les provinces des prairies canadiennes :

L’adoption de pratiques d’ensemencement et de lutte contre les mauvaises herbes qui ne perturbent pas le sol permet de garder le carbone dans le sol. Il n’est pas libéré chaque année, et le processus de croissance continue à ajouter du carbone, jusqu’à une certaine limite. En 1991, seulement 10 % des terres de la Saskatchewan étaient sans labour. En 2016, cette proportion était de 74 %, et 20 % de plus faisaient l’objet d’un travail du sol réduit. Cela représente un changement de 94 % par rapport au travail du sol classique, à aucun travail du sol ou au travail du sol réduit[101].

De même, des représentants de l’industrie du canola ont indiqué que depuis 30 ans, les producteurs de canola sont de plus en plus nombreux à pratiquer la culture sans labour, ce qui a permis de réaliser des progrès considérables en matière de réduction des émissions de GES :

En 1991, seulement 7 % des terres agricoles de l’Ouest canadien ont été ensemencées sans labour. En 2016, ce nombre avait considérablement augmenté pour atteindre 65 %. Ce changement a été déclenché par l’adoption du canola génétiquement modifié résistant aux herbicides. Lorsque les sols sont laissés en friche, ils séquestrent les gaz à effet de serre. Grâce à des pratiques comme l’agriculture sans labour, les terres agricoles canadiennes séquestrent chaque année 11 millions de tonnes de gaz à effet de serre[102].

Des témoins ont souligné que, outre ses bienfaits pour l’environnement, la culture sans labour est aussi avantageuse pour les agriculteurs sur le plan financier. Comme les agriculteurs n’ont plus besoin de laisser en jachère leurs terres durant l’été ils peuvent alors utiliser au maximum leurs terres et accroître la production (de 20 % dans certains cas), ce qui augmente leurs revenus[103].

Des témoins ont rappelé qu’il y a toutefois des limites à l’adoption de la technologie de culture sans labour. Comme l’a expliqué Susie Miller, « [c]elle-ci n’est pas adaptée à certaines cultures. La technologie ne convient pas à certains sols. Les producteurs biologiques ont besoin d’un travail du sol pour lutter contre les mauvaises herbes; cette technique est donc impossible pour des producteurs biologiques. Le coût d’acquisition du matériel spécialisé n’est pas nécessairement possible pour les petites exploitations que vous pourriez trouver dans les Maritimes, dans certaines régions de l’Ontario et en Colombie-Britannique[104] ». Malgré tout, elle a ajouté qu’il « est toutefois réaliste d’espérer une expansion continue de la culture sans labour et du travail réduit du sol, qui contribuent tous deux au carbone organique du sol[105] ».

Amélioration de l’épandage de nutriments

Certains témoins ont préconisé une meilleure gestion des engrais nitriques, lesquels contribuent aux émissions d’oxyde nitreux générées par les exploitations agricoles canadiennes. Une gestion améliorée pourrait aussi aider à réduire les émissions de GES de même que les coûts pour les agriculteurs[106]. Comme l’a expliqué Susie Miller :

Les recherches ont montré qu’une surveillance étroite des besoins en éléments nutritifs du sol et l’adaptation du type et de la quantité de fertilisant, ainsi que du bon moment et de la méthode d’emploi peuvent contribuer grandement à la réduction des gaz à effet de serre. La raison pour laquelle c’est si important, c’est que, en équivalents de gaz à effet de serre, un kilo d’oxyde nitreux équivaut à 298 kilos de carbone. Ainsi, lorsque vous parlez de l’empreinte carbone des gaz à effet de serre, une légère réduction des émissions d’oxyde nitreux peut avoir une incidence importante sur l’empreinte carbone[107].

Quelques témoins ont parlé du protocole mis au point par Fertilisants Canada[108]. Comme l’a expliqué Nevin Rosaasen de Biological Carbon Canada, ce protocole repose sur quatre principes, soit de faire usage du« bon produit, à la bonne dose, au bon moment et au bon endroit[109] ». Il s’agit d’un outil particulièrement efficace de réduction des émissions de GES, surtout s’il est arrimé à un programme de compensation des émissions de carbone, comme c’est le cas en Alberta. Lancé en 2007, le Protocole de réduction des émissions d’oxyde nitreux de la province encourage les producteurs agricoles à adopter ces quatre principes sur leurs terres et ainsi obtenir des crédits compensatoires grâce au marché provincial du carbone[110].

Robert Coulter, vice-président de la First Carbon Credits Corporation, a expliqué au Comité comment le protocole de l’Alberta aide les agriculteurs de la province à obtenir des crédits compensatoires et à accroître leur récolte, et ce, en adaptant leurs méthodes de travail. Voici ce qu’il a dit :

[D]ans notre approche axée sur le marché, le coefficient correspond à un montant d’argent. Plus votre coefficient est élevé, plus vous avez tiré de revenus de vos terres en agrégeant les crédits de carbone […] La gestion de la fertilité des sols, l’élimination de la jachère d’été, les rotations fourragères, les amendements organiques et la gestion de la nappe phréatique ont tous augmenté leur coefficient, ce qui signifie plus d’argent dans les poches des agriculteurs. Nous avons vraiment essayé de leur montrer que tout le monde y gagne. En intégrant ces pratiques à leurs activités agricoles, ils augmentent la teneur en carbone organique de leur sol et, par le fait même, leur capacité de rétention d’eau. Nous pourrions aussi montrer que grâce au rendement accru des terres, ils réaliseraient un meilleur profit. De plus, ils pourraient ajouter une source de revenus supplémentaire en vendant leurs crédits aux grands émetteurs finaux de l’Alberta[111].

Selon Nevin Rosaasen, président de Biological Carbon Canada, le protocole de l’Alberta offre « d’énormes possibilités de réduire les émissions de gaz à effet de serre qui découlent actuellement de l’utilisation d’engrais[112] ».

L’épandage amélioré de nutriments est aussi profitable aux agriculteurs. Mike Moffat de l’Institut pour l’IntelliProspérité a expliqué qu’en adoptant des pratiques agricoles exemplaires, les agriculteurs pourraient réduire du tiers l’application d’engrais, entraînant pour eux une réduction des coûts opérationnels[113].

Recommandation 6

Le Comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada travaille avec les provinces, les territoires et les gouvernements intéressés afin d’encourager l’élaboration de protocoles de réduction des émissions d’oxyde nitreux dans l’ensemble du Canada en fonction du modèle albertain de marché de compensation du carbone.

Pour bien comprendre le potentiel lié à un meilleur épandage des nutriments, il convient de noter que les agriculteurs utilisent des technologies de guidage de précision, comme les GPS. Ainsi, « l’engrais est distribué avec une précision telle, à un pouce de profondeur, le long du sillon, chaque grain d’engrais est utilisé au maximum de son efficacité[114] ». Selon Rick White, directeur général de l’Association canadienne des producteurs de canola, la technologie de GPS « permet de réduire les coûts et les émissions associés à l’utilisation de carburant et à l’épandage d’engrais[115] ».

D’après certains témoins, le gouvernement du Canada pourrait jouer un rôle dans l’amélioration des techniques d’épandage de nutriments à l’échelle du pays. À ce sujet, Nevin Rosaasen a suggéré que « nous avons besoin de financement pour développer et peaufiner la science en évolution et les marchés du carbone. Pour accomplir cela, nous devons également mettre à jour les protocoles sur les semis directs ou la préservation des cultures, pour couvrir toutes les zones de sol du Canada[116] ».

Recommandation 7

Le Comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada soutienne davantage les activités de recherche et de développement de nouvelles technologies agricoles comme les appareils et les techniques d’épandage de nutriments avec guidage de précision et qu’il étende l’application du protocole de préservation des cultures à toutes les zones de sol du Canada.

Séquestration du carbone dans les sols

Diverses pratiques de gestion des terres, comme celles décrites précédemment, peuvent être utilisées pour enrichir et protéger les sols agricoles qui, en retour, captent plus de carbone et préservent les ressources hydriques[117]. Matt Parry, d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, a d’ailleurs expliqué que les « producteurs canadiens ont adopté des technologies et des pratiques qui renforcent la résilience aux changements climatiques et réduisent les émissions en améliorant l’efficacité de la production et en augmentant la teneur en carbone dans les sols agricoles[118] ».

L’Association canadienne des producteurs de canola est optimiste quant à la capacité de stockage du carbone de l’industrie dans les années à venir :

[L]es producteurs de canola se sont fixé comme objectif de presque doubler la séquestration du carbone de cinq millions de tonnes par année d’ici 2025 […] Nous atteindrons cet objectif en maintenant les niveaux actuels de culture sans labour, en investissant dans l’innovation liée à la sélection végétale et en améliorant les pratiques de gestion. La séquestration de 16 millions de tonnes de gaz à effet de serre équivaudrait à retirer plus de 3,4 millions de voitures des routes, et ce, chaque année[119].

Mike Moffat de l’Institut pour l’IntelliProspérité a signalé que « [l]a séquestration améliorée du carbone contribuera également à réduire l’empreinte carbone du secteur[120] ». Il a toutefois exprimé certaines réserves liées à des problèmes de mesure et de permanence, précisant qu’il demeure difficile de s’assurer « que le carbone qui est contenu dans le sol reste réellement dans le sol[121] ». D’après lui, il n’est pas évident, pour cette raison, de créer un marché de crédits pour le stockage de carbone dans les sols agricoles.

Selon Ron Bonnett, de la Fédération canadienne de l’agriculture, le ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire devrait mieux publiciser les programmes visant à aider les agriculteurs à améliorer la gestion du carbone dans les sols agricoles, et il devrait accroître le financement à cet égard au besoin. M. Bonnett estime également que le gouvernement fédéral devrait encourager la conservation par des incitatifs. Il a donné l’exemple du programme communautaire sans but lucratif des services de diversification des modes d’utilisation des sols, que coordonne ALUS Canada et qui « offre des paiements annuels à l’acre aux agriculteurs qui participent à la conservation des puits de carbone comme les terres humides et les peuplements forestiers[122] ». Plusieurs témoins ont affirmé que l’on pourrait réaliser des progrès importants en vue de l’atteinte des objectifs du Canada en matière de lutte contre le changement climatique en encourageant les agriculteurs à séquestrer davantage de carbone dans les sols agricoles et à développer leurs capacités à cet égard. Susan Wood-Bohm a donné en exemple un programme lancé en France et appelé « 4 pour 1 000 », dont le but est d’accroître le carbone dans les sols agricoles. L’hypothèse est la suivante : si les sols agricoles pouvaient séquestrer 0,4 % de carbone de plus chaque année, la France n’aurait plus besoin d’autres stratégies de réduction des GES[123]. Afin d’aider au stockage du carbone par les sols agricoles :

Recommandation 8

Le Comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada veille à ce que les agriculteurs canadiens soient bien informés sur les programmes en vigueur qui sont susceptibles de les aider à faire la transition vers des activités agricoles à faibles émissions de carbone.

Le Comité a pris connaissance, par ailleurs, des possibilités qu’offrent les milieux humides relativement au stockage du carbone. Mme MacNeil, de Ressources naturelles Canada, a indiqué que le drainage des milieux humides peut avoir « de graves conséquences sur les changements climatiques », car ce faisant ils libèrent les GES emmagasinés[124]. Pour sa part, M. Larocque, de l’Association des produits forestiers du Canada, a informé le Comité que le secteur forestier, des universitaires, le gouvernement et des groupes de conservation comme Canards Illimités Canada ont uni leurs efforts pour évaluer les stocks de carbone dans les milieux humides et les tourbières et pour conserver ces milieux. Il a précisé que d’autres recherches sont nécessaires pour quantifier les volumes importants de carbone que ces milieux sont en mesure de stocker. Enfin, la Fédération canadienne de l’agriculture a recommandé que « le gouvernement fédéral collabore avec des organismes existants, comme la Table ronde sur les terres humides du Canada, pour évaluer le potentiel de captage du carbone des efforts de conservation mis en place dans les secteurs canadiens de l’agriculture, de la foresterie et d’autres ressources naturelles[125] ».

Recommandation 9

Le Comité recommande qu’Environnement et Changement climatique Canada, Ressources naturelles Canada et Agriculture et Agroalimentaire Canada travaillent ensemble et avec leurs partenaires, y compris la Table ronde sur les terres humides du Canada, pour soutenir la recherche et la conservation dans le but d’optimiser le potentiel de captage du carbone des milieux humides.

Gestion améliorée du bétail et génomique

Des témoins ont décrit comment il était possible d’améliorer la gestion du bétail pour réduire les émissions de GES, en particulier le méthane[126]. Il a surtout été question des changements à apporter à l’alimentation des animaux et des moyens de réduire les émissions de méthane résultant du processus digestif des ruminants (fermentation entérique).

Javier Gracia-Garza, directeur général de la Région du Québec et de l’Ontario à la Direction générale des sciences et de la technologie de l’Agriculture et l’Agroalimentaire Canada, a décrit des recherches menées par le ministère en vue d’étudier l’incidence des « communautés microbiennes internes des ruminants, ainsi que [d]es aliments qu’on leur donne » sur la production de méthane[127].

Des méthodes novatrices, par exemple l’ajout de certaines algues à l’alimentation des vaches, pourraient contribuer à réduire les émissions de méthane émises par les ruminants. Or, selon des recherches préliminaires réalisées par l’Institut pour l’IntelliProspérité, ce sont les améliorations à la génomique qui mèneront à une grande réduction des émissions de GES provenant du bétail. Comme l’a expliqué Mike Moffatt, « [l]e plus gros gain que nous avons constaté — nos recherches sont très préliminaires — tient davantage à la génomique, à savoir des technologies permettant d’élever des vaches qui produisent moins d’émissions. Il semble que ce soit là où les gains seraient réalisés, plutôt que par de petits changements dans les aliments, mais chaque petit geste compte[128] ».

Le Comité a voulu savoir comment une alimentation davantage axée sur les plantes pourrait permettre de réduire les émissions totales de GES émises par le bétail. Il a demandé à Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) de lui faire part de données de recherches quantitatives sur les impacts que peut avoir la consommation de sources de protéines d’origine végétale plutôt que d’origine animale en matière d’émissions de GES. Dans sa réponse écrite, AAC a expliqué qu’il n’étudiait pas les impacts de régimes alimentaires différents sur les émissions canadiennes de GES. Le Ministère a noté cependant que les éleveurs de bétail canadiens avaient réduit de 15 % leurs émissions de GES par kilogramme de bœuf depuis 30 ans, faisant ainsi de l’empreinte carbone du bœuf canadien l’une des plus faibles du monde[129]. Aucun autre témoin n’a parlé des impacts de la consommation de sources de protéines d’origine végétale sur la production d’émissions de GES.

Recommandation 10

Le Comité recommande qu’Agriculture et Agroalimentaire Canada continue de financer les travaux de recherche et développement aidant à mieux comprendre comment l’amélioration de l’alimentation des animaux, des pratiques agricoles et de la génomique peut contribuer à réduire les émissions de méthane émises par le bétail.

Obstacles à l’adoption de technologies

Les coûts liés à l’adoption de technologies agricoles, par exemple l’épandage de nutriments avec guidage de précision, peuvent être prohibitifs pour les petites et moyennes entreprises agricoles, de même que pour les premiers à les adopter[130]. Selon Kristin Baldwin, directrice des Relations avec les intervenants à l’Institut agricole du Canada,

Il est essentiel d’obtenir du soutien et des mesures incitatives clés de la part du gouvernement, de l’étape de la recherche à celle de l’adoption par l’utilisateur final. La création d’un climat favorable à l’adoption de technologies propres contribuera à ce que les effets souhaités se fassent sentir à plus grande échelle. Cela pourrait se faire par le biais du régime fiscal, par exemple au moyen d’allégements fiscaux, de déductions ou d’un soutien financier direct[131].

D’après les témoins, l’absence de services à large bande dans les régions rurales est aussi un obstacle important qui nuit à l’adoption de nouvelles technologies et qui empêche les agriculteurs de s’informer sur les nouvelles techniques agricoles novatrices. En ce qui concerne l’agriculture de précision, plusieurs témoins ont mentionné qu’un grand nombre des appareils requièrent l’Internet haute vitesse. Ils ont souligné que le manque d’accès à des services à large bande et les problèmes de congestion des réseaux Internet dans les régions rurales expliquent peut-être pourquoi les technologies ne sont pas adoptées[132]. Les agriculteurs n’ont pas les moyens d’acquérir de nouvelles connaissances, puisque les nouvelles informations sont de plus en plus diffusées sur Internet. Comme l’a fait valoir Susie Miller, « si les agriculteurs n’ont pas accès aux cours en ligne parce que leur Internet est trop lent ou qu’il est hors service, ils n’auront pas les mêmes avantages liés à l’adoption de pratiques nouvelles et appropriées[133] ».

Le Comité observe que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes a déterminé, en 2016, que l’accès à des services à large bande dans les régions rurales constituait un service de base[134]. De plus, le Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes a étudié la connectivité à large bande au Canada rural de novembre 2017 à mars 2018. Selon le rapport de l’étude, il existe toujours un « fossé numérique » entre les régions urbaines et les régions rurales du pays. Le rapport recommandait diverses solutions pour combler ce fossé[135].

À l’automne 2018, le vérificateur général du Canada a publié un rapport sur la connectivité Internet dans les régions rurales et éloignées du Canada[136] qui, selon Kristin Baldwin, « dressait un tableau plutôt décevant de l’état de la connectivité du Canada dans les régions rurales et éloignées[137] ». Mme Baldwin a par ailleurs signalé au Comité que « [l]e gouvernement fédéral a pris des mesures à cet égard, notamment en mettant sur pied un comité fédéral-provincial-territorial chargé de la connectivité et en lançant une consultation publique à ce sujet[138] ». Elle a encouragé « le gouvernement à aller de l’avant rapidement et à passer de l’étape des consultations à celle de la mise en œuvre[139] ». Afin de faciliter l’utilisation de nouvelles technologies agricoles permettant de réduire les émissions de GES :

Recommandation 11

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue de travailler avec les provinces, les territoires et les gouvernements intéressés pour que les régions rurales et éloignées puissent bénéficier d’un accès fiable à la connectivité Internet à large bande.

Enfin, cinq témoins ont reconnu explicitement que la déduction pour amortissement accéléré présentée dans l’Énoncé économique de l’automne 2018 était un pas dans la bonne direction[140]. Rick White, directeur général de l’Association canadienne des producteurs de canola, croit que cette mesure « stimulera l’innovation et l’investissement dans l’innovation[141] ».

Recommandation 12

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada trouve d’autres incitatifs et instruments favorisant l’accès des agriculteurs canadiens à des technologies agricoles novatrices.

Bioénergie et bioproduits provenant du secteur agricole

La bioénergie et les bioproduits issus du secteur agricole jouent un rôle important dans la stratégie canadienne de réduction des émissions de GES. La bioénergie représente actuellement 6 % de la production d’énergie au Canada[142]. Agriculture et Agroalimentaire Canada observe que, pour l’heure, la production mondiale de biocarburants repose principalement sur l’éthanol conventionnel (issu des cultures alimentaires telles que le maïs et la canne à sucre) et sur le biodiesel produit à partir de matières grasses, de graisses récupérées et d’huiles végétales. Toutefois, les biocarburants avancés et leurs coproduits, issus de la biomasse provenant du bois, des déchets municipaux et agricoles et des résidus de culture, sont à l’étape de la production et du lancement commercial dans certains pays, dont le Canada[143].

En 2006, le gouvernement fédéral a annoncé le lancement de sa Stratégie sur les carburants renouvelables; en 2010, le Règlement sur les carburants renouvelables pris en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) est entré en vigueur[144]. Selon le Règlement, les producteurs et les importateurs de carburant sont tenus d’assurer une teneur moyenne en carburants renouvelables (biocarburants) d’au moins 5 % dans l’essence et d’au moins 2 % dans le diesel qu’ils produisent et importent[145]. En plus de réduire les émissions de GES résultant de la consommation de carburant, la Stratégie sur les carburants renouvelables est conçue pour « [ouvrir] de nouveaux débouchés commerciaux aux producteurs agricoles et aux collectivités rurales; [favoriser] la croissance du secteur national des biocarburants; et [accélérer] la commercialisation des nouvelles technologies sur les biocarburants[146] ». Dans le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, le gouvernement fédéral préconise l’utilisation de la biomasse provenant du secteur agricole pour produire de la bioénergie ou des biocarburants avancés, ou encore pour créer d’autres bioproduits[147].

Quelques témoins ont parlé de l’importance de la réglementation fédérale sur les carburants renouvelables et des règlements provinciaux complémentaires (p. ex. la norme sur les carburants renouvelables de l’Alberta et la norme sur les carburants à faibles émissions de carbone de la Colombie-Britannique) lorsqu’il s’agit d’encourager l’utilisation de biocarburants au Canada[148]. Doug Hooper, directeur chez Biocarburants avancés Canada, a expliqué au Comité qu’au cours des dernières décennies, « des raffineries ont été construites au Canada pour produire des carburants avancés à faible teneur en carbone, comme le biodiesel à base de canola, d’huile de soja et de gras animaux et l’éthanol cellulosique à base de biomasse et de déchets municipaux afin de respecter les exigences[149] » découlant de ces politiques.

M. Hooper a également décrit l’influence positive de ces politiques sur la réduction des émissions de GES au cours des dernières années :

De 2010 à 2016, la consommation de biodiesel et de diesel renouvelable est passée de 160 millions de litres à 540 millions de litres par année. Pendant la même période, la consommation d’éthanol est passée de 1,7 milliard de litres à 2,8 milliards de litres. La réduction annuelle d’émissions de gaz à effet de serre liée à l’élimination des combustibles fossiles utilisés dans les voitures et les camions est passée de 1,8 million de tonnes en 2010 à 4,1 millions de tonnes en 2016. Ce sont des réalisations remarquables en peu de temps[150].

Conformément au Cadre pancanadien, le gouvernement fédéral élabore actuellement une Norme sur les combustibles propres dans le but de réduire les émissions de GES du Canada de 30 mégatonnes d’ici 2030[151]. Selon certains témoins, le secteur agricole pourrait grandement contribuer à l’atteinte de cet objectif.

Rick White, directeur général de l’Association canadienne des producteurs de canola, a informé le Comité que l’industrie du canola a contribué à la production de biocarburants au Canada par le passé et pourrait accroître encore plus sa contribution dans les années à venir. Il a souligné que :

Le canola représente environ 40 % de la matière première du biocarburant au Canada, soit environ 500 000 tonnes de graines de canola. La nouvelle NCP [Norme sur les combustibles propres] pourrait stimuler la demande d’intrants canadiens, comme le canola. Le biodiesel de canola émet jusqu’à 90 % moins de gaz à effet de serre que le diesel provenant des combustibles fossiles. Il est éprouvé, prêt et disponible. Si la demande de biocarburants atteignait 5 % de la quantité de diesel, la production canadienne de canola pourrait facilement répondre à cette demande, en utilisant 1,3 million de tonnes métriques de canola […] Dans le cadre d’un mandat de mélange de 5 %, selon les niveaux de mélange actuels, le canola contribuerait à réduire de 1,8 million de tonnes d’équivalents de dioxyde de carbone par année[152].

Ron Bonnett, président de la Fédération canadienne de l’agriculture, estime que la bioénergie et les bioproduits présentent de grands débouchés pour le secteur agricole :

En ce qui concerne la bioénergie et les produits biologiques, il y a un immense potentiel dans ces domaines en ce qui a trait à la commercialisation. Les déchets agricoles et les matières premières cultivées à cette fin peuvent réduire considérablement l’empreinte carbone de nombreux produits lorsqu’ils remplacent les matières premières pétrolières et gazières. Cela va au-delà des combustibles pour inclure les composites, les fibres, les produits chimiques spéciaux et les sucres[153].

On a toutefois fait remarquer que le Canada « n’a pas été capable de répondre à la demande en biocarburants uniquement avec des ressources canadiennes[154] ». M. Hooper a expliqué qu’en raison de ce déficit, le Canada a importé de l’éthanol et du biocarburant des États-Unis et de l’Asie au cours des dernières années. Biocarburants avancés Canada s’attend toutefois à ce que « 44 nouveaux projets de production de biocarburants avancés et huit projets d’agrandissements d’usines[155] » soient menés à bien au Canada d’ici 2030. Ces projets représentent des investissements en capitaux de plus de 6 milliards de dollars et « une utilisation de près de 2,1 millions de tonnes par année d’huiles végétales et de gras animaux et de près de 3,5 millions de tonnes de résidus de biomasse et de déchets de l’industrie forestière et agricole[156] ». Comme l’a souligné Doug Hooper, « [c]ela réduira de façon considérable notre dépendance sur les marchés d’exportation et ajoutera de la valeur à nos ressources naturelles[157] ».

Recommandation 13

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada élabore une stratégie en matière de bioénergie afin 1) de cerner les besoins de production au niveau des exploitations agricoles; 2) de financer les activités de recherche et de développement qui sont nécessaires pour produire les récoltes voulues; 3) d’évaluer les possibilités en matière d’investissements et de marchés pour les différents produits qui pourraient être mis au point et; 4) d’augmenter le contenu renouvelable dans les carburants.

Tarification du carbone

Le Comité a entendu d’autres témoignages selon lesquels la tarification du carbone favorise la réduction des émissions de GES produites dans le secteur agricole. Nevin Rosaasen, représentant de Biological Carbon Canada, une organisation qui facilite la vente de crédits d’émissions de carbone produites par des activités menées dans les forêts, les fermes et les fermes d'élevage, a expliqué les possibilités financières qu’un marché du carbone offre aux agriculteurs. Il a indiqué que, depuis que le gouvernement de l’Alberta a créé le premier régime sur les prix du carbone et les crédits compensatoires de l’Amérique du Nord, en 2007, 14,7 Mt d’éq. CO2 de crédits de carbone compensatoires ont été créés, numérotés et vendus[158].

La tarification du carbone a été comparée à d’autres approches visant la réduction des émissions de GES, dont la réglementation et les mesures incitatives. Se fondant sur son expérience, M. Rosaasen a estimé que « les signaux de prix fonctionnent » et que « toutes les industries amélioreront leur efficacité afin de réduire leurs coûts globaux[159] ». Rick White a aussi abordé cette question : « Vous pouvez utiliser la carotte, qui est un incitatif, ou le bâton, qui est la taxe. Au bout du compte, nous examinons les comportements qui doivent être modifiés[160] ». En réponse à une question concernant l’application de règlements afin de limiter les émissions de GES, M. Moffatt, de l’Institut pour l’IntelliProspérité a dit ce qui suit :

Le risque que courent les gouvernements qui utilisent ces instruments, c’est qu’ils choisissent des gagnants et des perdants, et ce, à bien des égards, en établissant de telles normes de rendement et de telles normes technologiques, ce qui revient essentiellement à dire : « faites ceci et ne faites pas cela ». En un sens, c’est un peu comme dire que « le gouvernement a toujours raison ». Idéalement, il faudrait laisser le marché déterminer la façon la plus économique de réduire les émissions. Par conséquent, oui, je dirais que, dans de nombreux cas — dans la plupart des cas —, la façon la plus rentable de procéder sera au moyen de la tarification du carbone. Je ne dis pas que c’est approprié dans tous les cas, encore une fois, parce qu’il y aura des exceptions selon l’industrie et la nature des émissions[161].

M. Moffatt appuie la tarification du carbone, mais il souligne, à propos de la réduction des émissions de GES provenant de l’agriculture, que « la tarification du carbone ne vous mène pas très loin[162] ». Il a expliqué que l’agriculture produit des émissions à partir de sources diffuses[163], qui peuvent être difficiles à mesurer pour les besoins de la tarification du carbone. M. Moffatt a aussi indiqué que, vu ses faibles marges bénéficiaires, l’agriculture est sensible à la concurrence internationale; il y a toujours un risque de « fuites de carbone ». Enfin, il a rappelé que l’innovation revêt une grande importance dans le secteur agricole; l’aide gouvernementale destinée aux projets pilotes ou à l’achat de nouvelles technologies par les agriculteurs pourrait contribuer à réduire les émissions de GES[164]. M. Moffatt a recommandé que la tarification du carbone soit l’un d’une série d’instruments stratégiques visant à réduire les émissions de GES provenant de l’agriculture[165].

Certains témoins se sont dits en faveur de la tarification du carbone dans la mesure où l’on tenait compte des réalités des agriculteurs dans son application. Don McCabe, de Biological Carbon Canada, a convenu de la nécessité de donner un prix au carbone, mais il a prévenu qu’une « taxe sur le carbone » pourrait causer du tort aux industries des ressources naturelles. Afin de générer des possibilités de revenu pour les secteurs agricoles et forestiers, M. McCabe recommande plutôt un système de plafonnement et d’échange qui « doit être pleinement opérationnel en ce qui a trait à l’échange » de droits d’émissions[166]. Ron Bonnett, président de la Fédération canadienne de l’agriculture, veut s’assurer que la tarification du carbone ne place pas l’agriculture « dans une position non concurrentielle ». Au sujet des exemptions consenties par le gouvernement du Canada aux carburants agricoles, il a indiqué : « Nous sommes heureux de voir les exemptions qui ont été accordées. Cependant, elles ne couvrent pas toute l’agriculture[167] ». À propos de la transformation du canola, Brian Innes, du Conseil canadien du canola, a dit :

Pour que le Canada dispose d’un important secteur de transformation du canola, il doit demeurer un pays concurrentiel en matière d’investissement et d’exploitation. Sinon, des usines de transformation seront construites dans un autre pays et nous enverrons nos produits bruts et nos emplois ailleurs. Le système de tarification fondé sur le rendement est positif, mais il doit être conçu avec soin pour qu’une industrie comme la nôtre, qui exporte 90 % de sa production, demeure concurrentielle[168].

Kristin Baldwin, de l’Institut agricole du Canada, a fait savoir que son secteur appuyait la tarification du carbone, mais elle aimerait « que le gouvernement fédéral fasse preuve de plus de leadership en ce qui concerne l’utilisation des recettes découlant de la taxe sur le carbone[169] » :

Compte tenu de l’incidence considérable des technologies propres sur le secteur agricole et l’environnement dans son ensemble, nous recommandons qu’une partie de ces revenus soit spécifiquement consacrée à l’introduction de nouvelles sources d’énergie ainsi qu’à la production de biocarburants. Grâce à des fonds réservés à cette fin, ce secteur obtiendra le soutien dont il a besoin pour prendre de l’expansion [...].

Quelques témoins ont mis en lumière le besoin d’entourer les politiques sur le carbone de clarté et de certitude. M. McCabe a fait valoir que « les politiques doivent donner des signaux clairs, ce qui veut dire une tarification sur le carbone[170] ». Doug Hooper, de Biocarburants avancés Canada a fourni l’explication suivante :

Le risque politique associé à un renversement de politique, à un retard dans l’adoption de la politique ou à la mise en œuvre de la politique ne doit pas être sous‑estimé [...]. Les deux côtés du débat sur la taxe sur le carbone retardent la prise de décisions d’investissement, car les projets requièrent des investissements de centaines de millions de dollars, et de tels capitaux ne peuvent être déployés dans un contexte où les risques sont en évolution. C’est une situation qu’il faut résoudre[171].

Gestion des déchets

Déchets organiques

Lorsqu’on parle d’émissions de GES dues aux déchets, le méthane provenant de la décomposition des déchets organiques dans les sites d’enfouissement est l’une des plus grandes sources de préoccupation. Vincent Ngan d’Environnement et Changement climatique Canada a informé le Comité que le méthane ainsi émis a augmenté depuis 2005 (passant de 970 kilotonnes à 1 027 kilotonnes), et ce, en raison de la croissance de la population[172]. Il a toutefois précisé que cette hausse « a également été compensée par une augmentation de son captage dans les sites d’enfouissement municipaux, qui est passé de 32 % à un total de 44 % en 2016 », ce qu’il attribue aux exigences réglementaires provinciales en matière de captage de carbone dans les grands sites d’enfouissement[173]. Des recherches menées par Environnement et Changement climatique Canada révèlent que des systèmes de captage des gaz d’enfouissement sont en place ou en cours d’élaboration dans 94 des 130 plus grands sites d’enfouissement au Canada et dans 23 des 149 sites d’enfouissement de taille moyenne[174].

Selon Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l’IntelliProspérité, le meilleur moyen de réduire les émissions de GES provenant des déchets ménagers, c’est de garder les matières organiques hors des sites d’enfouissement, en faisant appel, par exemple, à des programmes de bacs verts[175]. Karel Ménard, directeur général du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets, a également indiqué qu’il est essentiel de détourner les déchets organiques des sites d’enfouissement pour prévenir la production de méthane[176]. M. Ngan a souligné que le Fonds pour une économie à faibles émissions de carbone, qui est un fonds de 2 milliards de dollars servant à financer des programmes mis en place dans les provinces et territoires, pourrait servir à appuyer les programmes de gestion distincte des matières organiques[177]. Le Comité reconnaît l’exemple donné par la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles[178] en ce qui a trait à l’interdiction de l’enfouissement des matières organiques. Dans le but de réduire les émissions de méthane provenant des sites d’enfouissement :

Observation 5

Le Comité encourage les provinces, les territoires et les gouvernements intéressés à exiger de plus en plus la mise en place de systèmes de captage des gaz d’enfouissement ainsi que la gestion distincte des déchets organiques.

Déchets non organiques

Karel Ménard du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets a indiqué qu’il était important de tenir compte de l’ensemble des répercussions environnementales (analyse du cycle de vie) des produits et de leurs substituts, pour éviter de faire faux pas en ne faisant que déplacer ces répercussions à une autre étape du cycle de vie du produit[179]. M. Ménard a souligné que certains produits recyclables occasionnent quand même des émissions de GES substantielles, ajoutant que ce n’est pas parce qu’ils sont recyclables qu’ils seront recyclés[180]. Il a aussi rappelé au Comité qu’il ne faut pas seulement mettre l’accent sur le recyclage : les deux autres « R » – réduire et réutiliser – sont aussi importants. Il a insisté sur la nécessité de réduire les déchets à la source en limitant la consommation de produits jetables. Il a aussi préconisé les programmes de réutilisation, comme les programmes de consigne des bouteilles de bière, pour éviter certaines émissions de GES[181].

Selon le Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets, il faudrait élargir la responsabilité des producteurs : il devrait incomber aux fabricants de récupérer les biens à la fin de leur cycle de vie et d’en disposer avec le moins de répercussions possible. Si les biens de consommation incluaient un pourcentage de matières recyclées, on encouragerait la création d’un marché pour le contenu récupéré. M. Ménard a fait observer que la responsabilité « élargie » des producteurs réduirait les coûts d’élimination des déchets pour les municipalités et aiderait les producteurs à comprendre tous les coûts liés à leurs produits jetables[182].

M. Ménard a demandé au gouvernement d’encourager le recyclage et d’exiger que les produits contiennent un minimum de matières recyclées en prenant des règlements et en offrant des incitatifs. Il a également appelé le gouvernement à diriger par l’exemple en remettant en question son utilisation de produits à usage unique et en favorisant les produits réutilisables plutôt que recyclables. Afin de diriger par l’exemple:

Recommandation 14

Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue de déployer des efforts pour éliminer l’utilisation de produits jetables à usage unique dans le cadre de ses activités et de ses processus d’approvisionnement.

Par ailleurs, afin de favoriser la réduction des déchets de manière à réduire les émissions de GES:

Observation 6

Le Comité encourage les consommateurs, l’industrie, les provinces, les territoires et les gouvernements intéressés à réduire leur utilisation de produits jetables à usage unique.

Carolyn Butts, copropriétaire de Bon Eco Design, une entreprise de conception de produits fabriqués à partir de matériaux réutilisés, a parlé de son expérience en matière de réacheminement des déchets. Elle recommande « de boucler la boucle » et de passer à un modèle de « berceau au berceau » selon lequel les produits et les matières sont conçus de manière à être récupérés et réutilisés (ou recyclés) à la fin de leur cycle de vie. Elle a fait observer que les produits actuellement recyclés, comme les bouteilles de plastique, sont habituellement transformés en produits de plus faible valeur que l’original. Selon elle, il faudrait songer, dès la conception du produit original, à comment en accroître la valeur à l’étape du recyclage, notamment en lui donnant des propriétés uniques qui sont commercialisables, avantageuses et désirables. Mme Butts a indiqué qu’il s’agit là d’un défi en matière d’innovation et que des recherches seront nécessaires dans les domaines des sciences, des technologies, du génie, de l’art et du design.

Mme Butts estime que le « nouveau secteur d’exploitation des déchets » présente des débouchés économiques non exploités, tels que la collecte, le tri, la vente, le design et la fabrication des matières récupérées. Cependant, elle a mentionné qu’il faut assurer l’accès aux flux de déchets, qui sont présentement envoyés dans les sites d’enfouissement, pour concrétiser ces débouchés économiques[183]. Elle a constaté que l’enfouissement est une « activité extrêmement lucrative » et essentiellement « une opération de camionnage ». Elle estime que l’enfouissement et le brûlage de déchets ne sont pas des solutions durables au problème des déchets et que ces processus « émettent des tonnes de carbone[184] ». Selon elle, il est grand temps de mener des recherches et d’innover dans le secteur des déchets.

Les membres du Comité ont discuté de la possibilité de détourner des matières des sites d’enfouissement en donnant plus d’accès au public à des centres de recyclage et de réutilisation ou à des répertoires en ligne des résidus. Mme Butts a noté qu’il faut commencer par financer la recherche sur ces possibilités. Par ailleurs, M. Ménard, du Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets, a indiqué qu’il fallait améliorer la communication entre les provinces et les territoires pour qu’ils puissent échanger de l’information sur les difficultés rencontrées, les réussites et les leçons apprises[185].

Recommandation 15

Le Comité recommande qu’Environnement et Changement climatique Canada travaille avec les provinces, les territoires, les gouvernements intéressés et d’autres partenaires afin de cerner les possibilités, pour le gouvernement fédéral, de soutenir la recherche sur la gestion de déchets, par exemple l’élaboration d’une stratégie nationale harmonisée de réduction et de réutilisation des déchets.

W. Scott Thurlow, conseiller principal des Affaires gouvernementales chez Dow Chemical Canada Inc., a expliqué au Comité le programme Hefty EnergyBag de Dow, qui a pour but d’empêcher que les matières plastiques à usage unique difficiles à recycler se retrouvent dans les sites d’enfouissement. Ce programme consiste en la collecte des plastiques difficiles à recycler (p. ex. sacs à croustilles, emballages plastiques, pailles et contenants en mousse), qui sont placés à la rue dans des sacs distincts et ramassés par les services de recyclage habituels[186]. À leur arrivée aux installations locales de récupération, ces sacs sont réacheminés. Une fois que le contenu est trié, des technologies de conversion chimique, comme la pyrolyse, sont utilisées pour convertir les plastiques en diesel, en huiles et en cires[187]. Ces technologies de conversion des plastiques en énergie sont vues, actuellement, comme une solution d’élimination. M. Thurlow aimerait toutefois qu’elles soient reconnues comme des solutions acceptables de réacheminement des déchets[188]. Le programme EnergyBag est actuellement en place dans 13 villes des États-Unis. M. Thurlow a indiqué que Dow étudie la possibilité de lancer un programme pilote au Canada en 2019[189]. Il croit que le programme Hefty EnergyBag devrait faire partie de la solution au Canada en matière de gestion des plastiques difficiles à recycler qui se retrouvent actuellement dans les sites d’enfouissement[190].

Outre le programme EnergyBag, M. Thurlow a déclaré que Dow Canada aimerait voir un système de gestion des déchets qui est mieux harmonisé à l’échelle du Canada et qui est bien compris des consommateurs[191]. Selon lui, une telle mesure pourrait accroître le taux de recyclage, entraîner des économies d’échelle qui réduiront les coûts du recyclage, améliorer la qualité des produits recyclés et réduire en définitive les émissions de GES provenant des déchets. Une telle harmonisation des normes en matière de recyclage à l’échelle nationale pourrait favoriser l’innovation parmi les producteurs de marques nationales, qui chercheront à minimiser le contenu non recyclable de leurs produits destinés aux sites d’enfouissement. Pour faciliter le recyclage et en améliorer les résultats selon la manière des codes modèles nationaux :

Recommandation 16

Le Comité recommande qu’Environnement et Changement climatique Canada collabore avec les provinces, les territoires, les gouvernements intéressés, l’industrie et d’autres intervenants en vue d’élaborer un système modèle national en matière de recyclage, dont les administrations responsables de la gestion des déchets pourraient s’inspirer et qu’elles pourraient adopter et/ou adapter.

Conclusion

Tout au long de l’étude, le Comité a entendu parler des solutions existantes et potentielles en matière de réduction des émissions de GES dans les secteurs de la foresterie, de l’agriculture et de la gestion des déchets. Il existe, dans chacun de ces secteurs, des possibilités de réduire encore plus les émissions à l’échelle du pays. L’adoption de pratiques de gestion exemplaires et de technologies peut faire une différence : en augmentant la productivité agricole pour chaque acre de terre; en aidant à réduire et à réutiliser les résidus forestiers; en séquestrant une plus grande quantité d’émissions de carbone dans les arbres, les produits du bois et les sols agricoles; et en réduisant la quantité de déchets envoyés dans les sites d’enfouissement. Ce ne sont là que quelques exemples. L’innovation est aussi importante. De nombreux témoins ont recommandé que le gouvernement du Canada continue à financer la recherche pour réaliser le plein potentiel de réduction des GES dans les secteurs de la foresterie, de l’agriculture et de la gestion des déchets.

Les efforts déployés par le gouvernement fédéral pour réduire les émissions de GES dans ces secteurs doivent être réalisés en collaboration avec les provinces, territoires et gouvernements intéressés et appuyer ces administrations. Le Comité sait très bien que des mesures doivent être prises dès maintenant pour accélérer la réduction des émissions. Comme l’a recommandé Susan Wood-Bohm au Comité, « [é]tant donné la grande urgence de se pencher sur les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, il est important de se rappeler que le mieux est l’ennemi du bien[192] ».


[1]              Chambre des communes, Comité permanent de l’environnement et du développement durable [ENVI], Procès‑verbal, 1er février 2018.

[2]              Environnement et Changement climatique Canada, « Section 3.5 : Forêts, agriculture et déchets », Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques : Plan canadien de lutte contre les changements climatiques et de croissance économique, Gatineau, Environnement et Changement climatique Canada, 2016.

[3]              ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1535 (Beth MacNeil, sous‑ministre adjointe, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[4]              Article 92A de la Loi constitutionnelle de 1867.

[5]              Ressources naturelles Canada, À propos du Service canadien des forêts.

[6]              Article 95 de la Loi constitutionnelle de 1867.

[7]              ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1545 (Matt Parry, directeur général, Direction de l'élaboration et de l'analyse des politiques, Direction générale des politiques stratégiques, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire).

[8]              Par « déchet », on entend « toute matière, dangereuse ou non, qui ne sert plus et qui est gérée à un site de recyclage, de traitement ou d’élimination finale ». Environnement et Changement climatique Canada, Déchets solides municipaux : une responsabilité partagée.

[9]              Environnement et Changement climatique Canada, Déchets solides municipaux : une responsabilité partagée.

[10]            La bioénergie se définit comme toute source d’énergie utilisable dérivée d’organismes vivants ou de leurs sous‑produits. Elle peut avoir une forme solide, liquide ou gazeuse. Ressources naturelles Canada, Systèmes de bioénergie.

[11]            Les bioproduits sont des « produits renouvelables en dehors des aliments et des aliments du bétail issus des ressources agricoles, aquatiques ou forestières ou des déchets municipaux ». Agriculture et Agroalimentaire Canada, Bioproduits.

[12]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1540 (Don McCabe, directeur, Biological Carbon Canada).

[14]             Note : La Saskatchewan et le Manitoba ont refusé initialement de signer le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, mais le Manitoba l’a finalement signé en février 2018.

[15]             L’« atténuation » se définit comme le fait d’abaisser les émissions de GES dans l’objectif de réduire les changements climatiques ou d’en empêcher l’aggravation.

[16]             L’« adaptation » se définit comme le fait de s’ajuster aux conséquences des changements climatiques.

[17]             Environnement et Changement climatique Canada, Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques : Plan canadien de lutte contre les changements climatiques et de croissance économique, Gatineau, Environnement et Changement climatique Canada, 2016, p. 25.

[18]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1535 (Beth MacNeil, sous-ministre adjointe, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[19]            Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d'inventaire national 1990-2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada, 2018, partie 1.

[20]            Ibid.

[21]            Ibid.

[22]            Environnement et Changement climatique Canada, Potentiels de réchauffement planétaire.

[24]            Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, Lignes directrices 2006 du GIEC pour les inventaires nationaux de gaz à effet de serre, 2006.

[25]            Ressources naturelles Canada, Indicateur : Émissions et absorptions de carbone.

[26]            Ibid.

[27]            Il ne faut pas confondre les puits de carbone et les processus de capture et de stockage du carbone, qui sont des processus anthropiques permettant de retirer du dioxyde de carbone présent dans l’atmosphère et de le stocker dans des réservoirs géologiques, terrestres ou océaniques. Ressources naturelles Canada, Des faits en bref sur le captage et le stockage du CO2 au Canada.

[28]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1535 (Beth MacNeil, sous-ministre adjointe, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[29]            Ibid.

[30]            Ressources naturelles Canada, Feux de forêt.

[31]            Ressources naturelles Canada, Écologie des feux.

[32]            Ressources naturelles Canada, Feux de forêt.

[33]            Ressources naturelles Canada, Carbone forestier.

[34]            Ibid.

[35]            Ressources naturelles Canada, Aménagement forestier durable au Canada.

[36]            Ressources naturelles Canada, Lois forestières du Canada.

[37]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1555 (Robert Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada).

[38]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1535 (Beth MacNeil, sous-ministre adjointe, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[39]            Conseil canadien des ministres des forêts, Fiche d'information – Les forêts du Canada : puits ou sources de CO2?

[40]            Ibid.

[41]            Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d’inventaire national 1990-2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada - Sommaire, 2018, p. 9.

[42]            Environnement et Changement climatique Canada, Potentiels de réchauffement planétaire.

[43]            Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d’inventaire national 1990-2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada - Sommaire, 2018, p. 9.

[44]            Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d'inventaire national 1990-2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada, Déclaration du Canada à la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, partie 1, 2018, p. 150.

[45]            Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d’inventaire national 1990-2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada - Sommaire, 2018, p. 11.

[46]            Ibid.

[47]            Les terres cultivées entrent dans le secteur « Affectation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie » du GIEC. Elles comprennent les pratiques de gestion des terres agricoles (jachères d’été, cultures pérennes, etc.) et les émissions des terres qui sont converties en terres cultivées. Environnement et Changement climatique Canada, Rapport d'inventaire national 1990‑2016 : Sources et puits de gaz à effet de serre au Canada, partie 3.

[48]            Agriculture et Agroalimentaire Canada, Indicateur des gaz à effet de serre d’origine agricole, juillet 2016.

[49]            CCNUCC, Rapports d'inventaire nationaux 2018, Cadre uniformisé de présentation des rapports, présenté par le Canada le 13 avril 2018.

[50]            Ibid.

[51]            Environnement et Changement climatique Canada, Sources et puits de gaz à effet de serre : sommaire 2018.

[52]            Ibid.

[53]            Environnement et Changement climatique Canada, Gaz à effet de serre et déchets solides municipaux.

[54]            Ibid.

[55]            Environnement et Changement climatique Canada, Réduction des déchets solides municipaux.

[56]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1540 (Beth MacNeil, sous-ministre adjointe, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[57]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1700 (Tony Lemprière, gestionnaire principal, Politiques de changement climatique, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[58]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1720 (Tony Lemprière, gestionnaire principal, Politiques de changement climatique, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[59]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1705 (Kate Lindsay, vice-présidente, Durabilité et partenariats environnementaux, Association des produits forestiers du Canada).

[60]            ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1535 (Stéphane Renou, président et chef de la direction, FPInnovations).

[61]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1600 (Robert Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada).

[62]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1620 (Robert Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada).

[63]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1725 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[64]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1630 (Robert Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada).

[65]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1600 et 1705 (Robert Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada).

[66]            ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1535 (Stéphane Renou, président et chef de la direction, FPInnovations).

[67]            Ibid.

[68]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1625 (Robert Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada).

[69]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1625 et 1630 (Robert Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada).

[70]            ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1555 (Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, Biocarburants avancés Canada).

[71]            ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1630 (Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, Biocarburants avancés Canada).

[72]            Ibid.

[73]            ENVI,Témoignages, 6 décembre 2018, 1600 (Susan Wood-Bohm, à titre personnel).

[74]            Ibid.

[75]            ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1540 (Gordon Murray, directeur général, Association canadienne des granules de bois).

[76]            Ibid.

[77]            Gouvernement de la Colombie-Britannique, « Slash and Wood Residue Burning », Industrial Burning [disponible en anglais seulement].

[78]            ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1540 (Gordon Murray, directeur général, Association canadienne des granules de bois).

[79]            Ibid.

[80]            Ibid.

[81]            ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1545 (Gordon Murray, directeur général, Association canadienne des granules de bois).

[82]            Ibid.

[83]            Ibid.

[84]            Ibid.

[85]            Ibid.

[86]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1540 (Beth MacNeil, sous-ministre adjointe, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[87]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1635 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[88]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1640 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[89]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1640 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[90]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1555 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[91]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1700 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[92]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1600 (Robert Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada).

[93]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1650 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[94]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1655 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[95]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1555 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[96]            ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1725 (Werner Kurz, chercheur principal, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[97]            ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1540 (Don McCabe, directeur, Biological Carbon Canada); ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1535 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité); ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1630 (Nevin Rosaasen, président, Biological Carbon Canada); ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1540 (Brian Innes, vice-président, Affaires publiques, Conseil canadien du canola); ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1600 (Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l'agriculture); ENVI,Témoignages, 11 décembre 2018, 1635 (Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, Biocarburants avancés Canada); ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1550 (Kristin Baldwin, directrice, Relations avec les intervenants, Institut agricole du Canada).

[98]            ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1535 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité).

[99]            Ibid.

[100]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1540 (Susie Miller, directrice exécutive, Canadian Roundtable for Sustainable Crops).

[101]          Ibid.

[102]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1550 (Rick White, directeur général, Association canadienne des producteurs de canola).

[103]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1540 (Susie Miller, directrice exécutive, Canadian Roundtable for Sustainable Crops).

[104]          Ibid.

[105]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1545 (Susie Miller, directrice exécutive, Canadian Roundtable for Sustainable Crops).

[106]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1535 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité).

[107]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1550 (Susie Miller, directrice exécutive, Canadian Roundtable for Sustainable Crops).

[108]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1540 (Susie Miller, directrice exécutive, Canadian Roundtable for Sustainable Crops); ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1645 (Nevin Rosaasen, président, Biological Carbon Canada); ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1545 (Brian Innes, vice-président, Affaires publiques, Conseil canadien du canola).

[109]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1645 (Nevin Rosaasen, président, Biological Carbon Canada).

[110]          Agriculture et Forêts Alberta, Nitrous Oxide Reduction Protocol (NERP) For Carbon Offsets [disponible en anglais seulement].

[111]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1540 (Robert Coulter, vice-président, First Carbon Credits Corporation).

[112]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1645 (Nevin Rosaasen, président, Biological Carbon Canada).

[113]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1535 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité).

[114]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1535 (Nevin Rosaasen, président, Biological Carbon Canada).

[115]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1550 (Rick White, directeur général, Association canadienne des producteurs de canola).

[116]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1645 (Nevin Rosaasen, président, Biological Carbon Canada).

[117]          ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1725 (Javier Gracia-Garza, directeur général, Région du Québec et de l'Ontario, Direction générale des sciences et de la technologie, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire).

[118]          ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1550 (Matt Parry, directeur général, Direction de l'élaboration et de l'analyse des politiques, Direction générale des politiques stratégiques, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire).

[119]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1550 (Rick White, directeur général, Association canadienne des producteurs de canola).

[120]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1535 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité).

[121]          Ibid.

[122]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1605 (Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l'agriculture).

[123]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1720 (Susan Wood-Bohm, à titre personnel).

[124]          ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1725 (Beth MacNeil, sous-ministre adjointe, Service canadien des forêts, ministère des Ressources naturelles).

[125]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1605 (Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l'agriculture).

[126]          Agriculture et Agroalimentaire Canada, Gaz à effet de serre.

[127]          ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1550 (Javier Gracia-Garza, directeur général, Région du Québec et de l'Ontario, Direction générale des sciences et de la technologie, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire).

[128]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1550 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité).

[129]          Réponse écrite de Sophie Bédard, directrice, Bureau des relations parlementaires et Secrétariat de la coordination du portefeuille, Agriculture et Agroalimentaire Canada, à M. John Aldag, député, président du Comité permanent de l’environnement et du développement durable, 2019.

[130]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1550 (Kristin Baldwin, directrice, Relations avec les intervenants, Institut agricole du Canada); ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1550 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité).

[131]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1550 (Kristin Baldwin, directrice, Relations avec les intervenants, Institut agricole du Canada).

[132]          Témoignages, 27 novembre 2018, 1600 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité); ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1550 (Kristin Baldwin, directrice, Relations avec les intervenants, Institut agricole du Canada).

[133]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1605 (Susie Miller, directrice exécutive, Canadian Roundtable for Sustainable Crops).

[134]          Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, Politique réglementaire de télécom CRTC 2016‑496, 21 décembre 2016.

[135]          Chambre des communes, Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie, Connectivité à la large bande dans les régions rurales du Canada : combler le fossé numérique, Onzième rapport, 1re session, 42e législature, avril 2018.

[136]          Bureau du vérificateur général du Canada, Rapport 1 — La connectivité des régions rurales et éloignées, automne 2018.

[137]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1550 (Kristin Baldwin, directrice, Relations avec les intervenants, Institut agricole du Canada).

[138]          Ibid.

[139]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1550 (Kristin Baldwin, directrice, Relations avec les intervenants, Institut agricole du Canada).

[140]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1610 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité); ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1625 (Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l'agriculture); ENVI,Témoignages, 11 décembre 2018, 1610 (Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, Biocarburants avancés Canada); ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1630 (Rick White, directeur général, Association canadienne des producteurs de canola); ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1630 (Robert Larocque, vice-président principal, Association des produits forestiers du Canada).

[141]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1630 (Rick White, directeur général, Association canadienne des producteurs de canola).

[142]          Ressources naturelles Canada, Faits sur l’énergie renouvelable.

[143]          Agriculture et Agroalimentaire Canada, Bioproduits.

[144]          Ibid.

[145]          Ressources naturelles Canada, Faits sur l’énergie renouvelable.

[146]          Agriculture et Agroalimentaire Canada, Bioproduits.

[147]          Environnement et Changement climatique Canada, Exploitation forestière, agriculture et déchets, dans Mesures fédérales pour une croissance économique propre : Soutenir le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, 2016.

[148]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1625 (Susie Miller, directrice exécutive, Canadian Roundtable for Sustainable Crops); ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1555 (Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, Biocarburants avancés Canada).

[149]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1555 (Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, Biocarburants avancés Canada).

[150]          Ibid.

[151]          Environnement et Changement climatique Canada, Norme sur les combustibles propres.

[152]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1555 (Rick White, directeur général, Association canadienne des producteurs de canola).

[153]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1600 (Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l'agriculture).

[154]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1555 (Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, Biocarburants avancés Canada).

[155]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1600 (Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, Biocarburants avancés Canada).

[156]          Ibid.

[157]          Ibid.

[158]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1535 (Nevin Rosaasen, président, Biological Carbon Canada).

[159]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1650 (Nevin Rosaasen, président, Biological Carbon Canada).

[160]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1640 (Rick White, directeur général, Association canadienne des producteurs de canola).

[161]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1625 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l’IntelliProspérité).

[162]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1620 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l’IntelliProspérité).

[163]          La pollution ponctuelle provient d’une unique source identifiable, comme l’extrémité d’une conduite d’évacuation. Les sources diffuses de pollution sont en revanche étendues sur une plus grande surface, le ruissellement agricole et les effluents gazeux en étant des exemples. 

[164]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1620 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l’IntelliProspérité).

[165]          Ibid.

[166]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1650 (Don McCabe, directeur, Biological Carbon Canada).

[167]          ENVI, Témoignages, 4 décembre 2018, 1655 (Ron Bonnett, président, Fédération canadienne de l’agriculture).

[168]          ENVI, Témoignages, 4 décembree 2018, 1545 (Brian Innes, vice-président, Affaires publiques, Conseil canadien du canola).

[169]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1555 (Kristin Baldwin, directrice, Relations avec les intervenants, Institut agricole du Canada).

[170]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1720 (Don McCabe, directeur, Biological Carbon Canada).

[171]          ENVI, Témoignages, 11 décembre 2018, 1655 (Doug Hooper, directeur, Politiques et règlements, Biocarburants avancés Canada).

[172]          ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1555 (Vincent Ngan, directeur général, Politiques horizontales, engagement et coordination, ministère de l'Environnement).

[173]          Ibid.

[174]          Ibid.

[175]          ENVI, Témoignages, 27 novembre 2018, 1635 (Mike Moffatt, directeur principal, Institut pour l'IntelliProspérité).

[176]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1605 (Karel Ménard, directeur général, Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets).

[177]          ENVI, Témoignages, 22 novembre 2018, 1710 (Vincent Ngan, directeur général, Politiques horizontales, engagement et coordination, ministère de l'Environnement).

[178]          Éditeur officiel du Québec, Politique québécoise de gestion des matières résiduelles, ch. Q‑2, r. 35.1, Loi sur la qualité de l’environnement, ch. Q‑2, a. 53.4, 12 septembre 2018.

[179]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1600 (Karel Ménard, directeur général, Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets).

[180]          Ibid.

[181]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1610 (Karel Ménard, directeur général, Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets).

[182]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1720 (Karel Ménard, directeur général, Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets).

[183]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1555 (Carolyn Butts, copropriétaire, Bon Eco Design).

[184]          ENVI, Témoignages, 29 novembre 2018, 1545 (Carolyn Butts, copropriétaire, Bon Eco Design).

[185]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1720 (Karel Ménard, directeur général, Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets).

[186]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1615 (W. Scott Thurlow, conseiller principal, Affaires gouvernementales, Dow Chemical Canada Inc.).

[187]          Ibid.

[188]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1620 (W. Scott Thurlow, conseiller principal, Affaires gouvernementales, Dow Chemical Canada Inc.).

[189]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1615 (W. Scott Thurlow, conseiller principal, Affaires gouvernementales, Dow Chemical Canada Inc.).

[190]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1615 (W. Scott Thurlow, conseiller principal, Affaires gouvernementales, Dow Chemical Canada Inc.).

[191]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1620 (W. Scott Thurlow, conseiller principal, Affaires gouvernementales, Dow Chemical Canada Inc.).

[192]          ENVI, Témoignages, 6 décembre 2018, 1600 (Susan Wood-Bohm, à titre personnel).