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HESA Rapport du Comité

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LES DONS D’ORGANES AU CANADA

INTRODUCTION

Le 7 mars 2016, le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes (« le Comité ») a adopté le premier rapport du Sous-comité du programme et de la procédure, et convenu de :

demander à la Société canadienne du sang de venir faire un exposé sur le rapport « Passons à l’action » et sur l’état du système canadien de don et de transplantation d’organes et de tissus; et prier la ministre de la Santé de répondre au Comité au sujet des recommandations du rapport « Passons à l’action » et des mesures prises à cet égard[1].

Dans le cadre de l’étude, le Comité a tenu deux réunions, qui ont eu lieu le 7 et le 9 mai 2018, et a entendu tout un éventail de témoins, dont des représentants de la Société canadienne du sang et d’organismes provinciaux de don et d’acquisition d’organes, des chercheurs, des fournisseurs de soins de santé et des représentants d’organismes de bienfaisance dans le domaine de la santé. Le présent rapport présente un résumé des témoignages et des mémoires découlant de ces réunions, principalement axées sur les dons et les greffes d’organes au Canada. Il commence par fournir des renseignements généraux sur la population pouvant éventuellement faire des dons d’organes au Canada et sur le système canadien de don et de greffe d’organes. Le rapport décrit ensuite les tendances actuelles du domaine du don d’organes et les grands défis que doit relever le Canada dans ce domaine, ainsi que la façon dont le gouvernement fédéral peut favoriser l’amélioration du système.

COMPRENDRE LES DIFFÉRENTS TYPES DE DONNEURS D’ORGANES

Pour aborder la question des taux de dons d’organes au Canada, il faut tout d’abord comprendre le bassin potentiel de la population disponible pour faire un don d’organes[2]. Il existe principalement trois types de donneurs. Le donneur volontaire est une personne qui exprime la volonté de devenir donneur à son décès ou, le cas échéant, de son vivant. Un donneur potentiel est une personne reconnue par un établissement médical comme étant apte à faire un don. Enfin, un donneur réel est une personne dont au moins un organe a été prélevé, attribué et greffé avec succès.

« Nous devons prendre conscience du fait que les donneurs décédés sont incroyablement rares. Chaque année, au Canada, un pour cent seulement des décès se produisent dans des conditions permettant le don d’organes. »

M. David Hartell, directeur général, Programme national de recherche en transplantation du Canada

Un donneur réel peut être une personne décédée ou vivante. Un donneur décédé est une personne qui devient donneur à son décès[3]. Il donne en moyenne quatre organes destinés à la greffe[4]. Au Canada, une personne peut devenir donneur décédé seulement si son décès survient dans des circonstances particulières, et est une mort cérébrale ou cardiaque. La mort cérébrale est définie comme suit : l’arrêt complet de la fonction cérébrale, qui se manifeste par l’absence de conscience, de mouvement spontané, de respiration spontanée et de toutes les fonctions du tronc cérébral. Elle est le plus souvent causée par un événement traumatisant, en particulier un accident de voiture, une blessure par balle ou un accident vasculaire cérébral (AVC)[5].

Au Canada, en plus du don après la mort cérébrale, le don après un décès cardiaque a été adopté au cours des 10 dernières années comme solution pour le don d’organes[6]. Un tel décès tend à survenir dans certaines circonstances, comme à la suite de l’échec de la réanimation après un arrêt cardiaque, ou lors d’un arrêt cardiaque à la suite du retrait des soins médicaux dans une unité de soins intensifs ou après la mort cérébrale[7]. Toutefois, pour qu’une personne soit considérée comme un candidat potentiel au don d’organes, l’arrêt cardiaque doit avoir lieu dans un hôpital qui est équipé pour faire un suivi[8].

Puisqu’une personne ne peut devenir un donneur décédé potentiel ou réel qu’à la suite de sa mort cérébrale ou de sa mort cardiaque, et ce, dans des circonstances très précises, seul un petit nombre de personnes deviennent effectivement des donneurs potentiels ou réels. Comme M. David Hartell, directeur général du Programme national de recherche en transplantation du Canada, l’a expliqué aux membres du Comité :

Nous devons prendre conscience du fait que les donneurs décédés sont incroyablement rares. Chaque année, au Canada, un pour cent seulement des décès se produisent dans des conditions permettant le don d’organes. Environ 270 000 Canadiens meurent chaque année et, pour devenir un donneur décédé potentiel, il faut décéder à l’unité des soins intensifs d’un hôpital, sous respirateur, et il ne doit y avoir aucune complication chronique qui empêcherait le don d’organes[9].

Des donneurs vivants sont des personnes en bonne santé qui donnent un organe ou un tissu à un receveur[10]. Ils ne peuvent donner qu’un seul organe, soit un seul rein, des parties du foie, un poumon unique, ou une partie de l’intestin ou du pancréas.

APERÇU DU SYSTÈME CANADIEN DE DON ET DE GREFFE D’ORGANES

La réglementation et l’administration des dons et des greffes sont une responsabilité que se partagent le gouvernement fédéral et ceux des provinces et des territoires. Un aperçu des rôles et des responsabilités des différents ordres de gouvernement figure ci-après :

A. Lois et règlements fédéraux

Au Canada, le gouvernement fédéral régit la sécurité des organes et des tissus destinés à la greffe en vertu du Règlement sur la sécurité des cellules, tissus et organes humains destinés à la transplantation[11] (Règlement), conformément à la Loi sur les aliments et drogues, qui prévoit des normes uniformes pour la sélection des donneurs potentiels et les tests connexes[12]. Aux termes du Règlement, l’établissement de soins de santé doit prendre les mesures suivantes pour établir l’admissibilité du donneur :

  • Obtenir des renseignements sur le donneur et sur ses antécédents;
  • Effectuer l’examen physique du donneur;
  • Vérifier l’admissibilité du donneur selon certains critères d’exclusion[13].

Les critères d’exclusion comprennent les facteurs de risque de maladie comme le décès de cause inconnue, la démence et l’infection ou un risque élevé d’infection par le VIH, l’hépatite virale ou la rage, ainsi que d’autres facteurs[14]. Toutefois, les articles 40 et 41 du Règlement permettent le recours à des organes de donneurs qui seraient normalement exclus, pourvu que certaines conditions soient remplies, notamment l’obtention du consentement éclairé du receveur[15]. Des témoins ont expliqué au Comité que cela signifie qu’il n’y a pas d’interdiction qui force à exclure automatiquement les dons d’organes d’hommes ayant eu des relations sexuelles avec d’autres hommes[16]. En discutant de la façon dont les exceptions aux critères d’exclusion du Règlement s’appliquent en pratique, les témoins ont expliqué que les progrès de la médecine permettaient aux équipes médicales d’atténuer les risques pour la santé afin de permettre le don et la greffe dans ces circonstances exceptionnelles :

Nous avons fait beaucoup de chemin au cours de la dernière décennie pour comprendre l’importance des risques associés aux diverses infections possibles qu’une personne peut avoir. Même dans le cas d’un toxicomane qui consomme des drogues par voie intraveineuse et qui a peut-être l’hépatite C, nous savons maintenant quel est le risque pour le receveur. L’équipe médicale a la capacité de prendre la décision et de formuler une recommandation à cette personne. La personne, bien sûr, prendra la décision définitive, mais nous savons que, dans une telle situation, par exemple, nous pouvons transplanter un tel patient et le traiter grâce à des médicaments contre l’hépatite C très efficaces par la suite[17].

B. Cadres législatif et gouvernemental pour le don d’organes dans les provinces et les territoires

Les provinces et les territoires sont dotés de lois régissant tous les autres aspects du don d’organes et de tissus. À l’exception du Québec, où des dispositions sur le don d’organes sont prévues dans le Code civil, dans tous les autres gouvernements provinciaux et territoriaux, ces lois sont fondées dans une certaine mesure sur une loi proposée en 1990 par la Conférence pour l’harmonisation des lois au Canada (CHLC)[18]. Cette loi uniforme proposée :

  • établit les exigences pour le consentement au don pour les donneurs décédés et vivants, les adultes et les mineurs;
  • exige la protection des renseignements personnels;
  • prévoit les exigences de détermination du décès;
  • interdit la commercialisation (achat et vente) d’organes et de tissus destinés aux greffes, à la recherche et à l’enseignement médical[19];
  • prévoit des pénalités pour quiconque contrevient à la Loi.

Il incombe également aux provinces et aux territoires d’administrer et de fournir des services de soins de santé, y compris le don et la greffe d’organes[20]. Chaque province établit donc son propre organisme de dons ou ses programmes particuliers de don et de greffe d’organes[21]. Le gouvernement fédéral fournit un appui financier aux provinces et aux territoires pour ces services au titre de la Loi canadienne sur la santé[22].

C. La Société canadienne du sang

Des témoins ont indiqué qu’en 2008, les ministres de la Santé des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux avaient demandé à la Société canadienne du sang (SCS) d’aider à consolider le système de don et de greffe d’organes à l’échelle du Canada[23], et notamment d’accroître l’accès aux occasions de greffe au-delà des frontières administratives pour appuyer un accès équitable aux organes dans l’ensemble du pays. Le Dr Isra Levy, vice‑président des affaires médicales et de l’innovation, SCS, a expliqué que, depuis 2008, l’organisme avait élaboré un plan et plusieurs programmes et initiatives visant à appuyer un système interprovincial de don et de greffe d’organes, par exemple, le programme croisé de dons de rein, qui aide à jumeler des patients avec des donneurs de partout au pays et qui a permis de réaliser 1 000 greffes de reins au cours des 10 dernières années[24]. La SCS, a-t-il aussi expliqué, a mis sur pied le programme des patients hyperimmunisés, un registre qui jumelle les personnes souffrant d’une maladie rénale et dont le système immunitaire est hyperimmunisé avec des donneurs convenables de l’ensemble du pays. Ce programme a mené à la création de plus de 575 occasions de greffe qui n’auraient pas existé autrement. Des témoins ont expliqué que les programmes interprovinciaux de partage d’organes sont mis en œuvre en partenariat avec les responsables des programmes provinciaux et territoriaux de don et de greffe et sont fondés sur des accords interprovinciaux de partage d’organes[25].

En outre, le Conseil canadien pour le don et la transplantation et la Société canadienne du sang avaient créé des lignes directrices nationales normalisées reposant sur des pratiques exemplaires pour favoriser le don d’organes dans tout le Canada, qui comprennent des directives concernant[26] :

  • l’établissement des causes neurologiques du décès;
  • les dons après un décès par arrêt cardiocirculatoire;
  • la gestion des donneurs;
  • l’appui de la famille du donneur dans le cadre de soins de santé de qualité en fin de vie;
  • les dons après l’aide médicale à mourir[27].

La Société recueille également des données sur le don et la greffe d’organes au Canada et produit des rapports sur le rendement national dans ce domaine[28]. Le Dr Levy a expliqué qu’elle mettait en œuvre ces programmes et ces initiatives grâce au financement fédéral, provincial et territorial qu’il reçoit. En effet, Santé Canada fournit 3,58 millions de dollars en appui à l’organisme[29].

TENDANCES ACTUELLES ET STATISTIQUES EN MATIÈRE DE DONS D’ORGANES AU CANADA

Le Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, a expliqué que, de 2006 à 2016, le taux de dons provenant de donneurs décédés avait augmenté de 49 % au Canada, ce qui est mesuré selon le nombre de donneurs par million d’habitants[30]. En 2016, ce taux était de 21 par million d’habitants. Sur les 2 835 greffes effectuées au pays en 2016, 758 ont eu recours à des organes issus de donneurs décédés, et 544, de donneurs vivants[31]. En date de 2017, le taux de donneurs décédés au Canada était de 22 par million d’habitants[32]. Maints témoins ont répété que les critères et les programmes partout au pays qui entourent les dons d’organes après un décès cardiaque constituent l’un des principaux facteurs de la hausse du taux de donneurs décédés[33]. En 2016, les dons effectués après un décès d’origine cardiaque représentaient 23 % du nombre total de dons de donneurs décédés par million d’habitants, mais, en 2006, ils ne totalisaient que 1 % de ceux-ci[34]. En raison de cette augmentation du taux de donneurs décédés, le Canada fait partie des 20 premiers pays du monde à ce chapitre[35]. Toutefois, comme l’a fait remarquer le Dr Isra Levy, vice-président, Affaires médicales et innovation, Société canadienne du sang, le taux de dons de donneurs décédés au Canada demeure deux fois moins élevé que dans certains des pays les plus performants, comme l’Espagne (voir la figure 1)[36].

Figure 1. Comparaison des taux à l’échelle internationale, 2006-2016

Ce graphique montre les changements observés dans le nombre de donneurs d’organes décédés par million d’habitants, de manière comparative entre cinq pays, soit le Canada, les États Unis, l’Australie, l’Espagne et le Royaume Uni, de 2006 à 2016. Au cours de cette période, le taux de donneurs d’organes décédés a augmenté de 28 % en Espagne; de 23 % aux États Unis; de 66 % au Royaume Uni; de 53 % au Canada; et de 112 % en Australie.

Source : Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, « Mémoire présenté au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes : Le rôle du gouvernement fédéral dans l’amélioration de l’accès au don d’organes », 9 mai 2018.

En revanche, le taux de dons d’organes de la part de personnes vivantes par million d’habitants au Canada est demeuré stagnant ou a diminué légèrement entre 2006 et 2015, passant de 17,0 par million d’habitants en 2006 à 15,7 en 2015 (voir la figure 2). Cependant, le Dr Levy a signalé qu’en dépit de l’absence d’amélioration dans ce secteur, « notre taux de donneurs vivants se compare avantageusement à ceux des autres pays[37] ». En 2016, le taux du Canada était de 15 par million d’habitants, et notre pays s’est classé au 14e rang à l’échelle mondiale pour le nombre de donneurs vivants[38].

Figure 2. Taux de donneurs d’organes au Canada par source de donneurs, 2006-2015

Ce graphique illustre les taux de donneurs d’organes vivants et décédés par million d’habitants entre 2006 et 2015. Il montre que les taux de donneurs d’organes décédés ont augmenté et dépassé ceux de donneurs d’organes vivants de 2013 à 2015.

Source : Fondation canadienne du rein, « Mémoire au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes sur le rôle du gouvernement fédéral pour l’amélioration du système canadien de don et de greffe d’organes et de tissus », 9 mai 2018.

PRINCIPAUX PROBLÈMES AUXQUELS SE HEURTE LE SECTEUR DU DON ET DE LA GREFFE D’ORGANES AU CANADA

Au Canada, les taux de dons d’organes par des personnes décédées au Canada se sont améliorés au cours de la dernière décennie, mais il faut se pencher sur les difficultés constantes en matière de dons et de greffes d’organes. Les témoins ont expliqué que ces taux ne répondent pas aux besoins actuels et futurs des patients en matière de don d’organes, que les taux de dons et les programmes varient considérablement d’un bout à l’autre du pays, que les occasions de don et de greffe ne sont pas toutes réalisées, et que le consentement au don et les résultats des greffes posent certains problèmes. Les sections suivantes font le survol de ces questions.

A. Liste d’attente pour un don d’organes

La Dre Lori West, directrice du Programme national de recherche en transplantation du Canada, a expliqué que, malgré le nombre croissant de dons effectués au Canada, ceux-ci ne suffisent pas à répondre aux besoins des patients existants ou à venir, ce qui entraîne le décès de personnes inscrites sur les listes d’attente de dons[39]. En 2016, 4 492 Canadiens figuraient sur la liste d’attente pour un don, et 260 d’entre eux sont décédés en attente d’une greffe[40]. Selon Mme Elizabeth Myles, directrice générale nationale de la Fondation canadienne du rein, 75 % des personnes figurant sur la liste attendent un rein, et le délai d’attente médian pour cet organe est de quatre ans, allant de 5,7 ans au Manitoba à 3 ans en Nouvelle-Écosse[41].

La liste d’attente actuelle pour des dons ne reflète pas le besoin réel d’organes au Canada. Selon Mme Myles, à l’heure actuelle, seulement 16 % des 22 000 Canadiens atteints d’insuffisance rénale figurent sur la liste d’attente pour une greffe[42]. Celle‑ci a aussi expliqué que, si les patients canadiens atteints d’insuffisance rénale ne reçoivent pas de greffe d’organe, le seul autre traitement dont ils peuvent bénéficier est la dialyse, pour laquelle le taux de survie est inférieur de cinq ans à celui pour la greffe d’organe (45 % contre 82 %), et qui leur offre une qualité de vie bien inférieure. Toujours selon Mme Myles, les greffes de reins permettent aussi de réduire les coûts de la santé :

Le coût total annuel de la dialyse varie de 56 000 $ à 107 000 $ par patient. Le coût d’une transplantation est d’environ 66 000 $ pour la première année, et environ 23 000 $ les années subséquentes. Par conséquent, le système de soins de santé peut sauver jusqu’à 84 000 $ par année par patient ayant subi une transplantation[43].

Dans son mémoire présenté au Comité, le Programme national de recherche en transplantation d’organes du Canada expliquait qu’en plus d’être un traitement pour les personnes atteintes d’insuffisance d’un organe, la greffe est aussi « en voie de devenir le traitement de choix pour contrer les maladies telles que le diabète de type 1, les maladies rénales, la fibrose kystique, l’insuffisance cardiaque et les cardiopathies congénitales complexes, les lymphomes, le myélome et la leucémie[44] ».

B. Écarts entre les différentes régions du pays en ce qui concerne le don et la greffe d’organes

Selon le Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, même s’il y a eu majoration des taux de donneurs décédés au Canada depuis plus de 10 ans, celle-ci varie considérablement d’une région à l’autre, s’échelonnant de 112 % en Saskatchewan à 9 et à 11 % au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle‑Écosse respectivement (voir la figure 3)[45].

Figure 3. Nombre de donneurs d’organes décédés PMH par province au fil du temps, 2006‑2016

Ce graphique montre les écarts entre neuf provinces canadiennes en ce qui concerne les taux de donneurs d’organes décédés par million d’habitants, de 2006 à 2016, en comparaison avec la moyenne nationale. Dans la province de la Colombie Britannique, à laquelle a été regroupée le Yukon, les taux de donneurs d’organes décédés ont augmenté de 33 %; en Alberta, ils ont augmenté de 66 %; en Saskatchewan, de 122 %; au Manitoba, de 28 %; en Ontario, de 35 %; au Québec, de 38 %; au Nouveau Brunswick, de 9 %; et en Nouvelle Écosse – à laquelle a été regroupée l’Île du Prince Édouard –, de 11 %. À l’inverse, les taux de donneurs d’organes décédés ont diminué de 42 % à Terre Neuve et Labrador au cours de la même période. Dans l’ensemble du Canada, le taux de donneurs d’organes décédés s’est accru de 33 % pendant la période indiquée. En 2017, il s’élevait à 22,0 par million d’habitants.

Source : Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, « Mémoire présenté au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes : Le rôle du gouvernement fédéral dans l’amélioration de l’accès au don d’organes », 9 mai 2018.

Selon ce qu’ont appris les membres du Comité, l’écart entre le nombre de donneurs décédés des différentes provinces du pays est attribuable à l’inégalité de leur capacité et des ressources leur permettant de refléter les pratiques exemplaires en matière de dons d’organes[46]. Certaines provinces du Canada, comme l’Ontario, la Colombie-Britannique et le Québec, sont considérées comme des centres d’excellence de premier plan en matière de don d’organes, mais d’autres varient du point de vue du genre de programmes mis à la disposition de la population :

Il ne fait aucun doute que le rendement varie en fonction des programmes mis en œuvre par les provinces et même les établissements. À mon avis, c’est un problème auquel nous pouvons réfléchir collectivement. La teneur et la portée des activités, qui sont exercées d’une province à l’autre dans le cadre de programmes de dons d’organes visant à favoriser le processus de don dans les hôpitaux, varient effectivement. Nous constatons que certains programmes ne sont responsables que des dons d’organes après le décès, alors que d’autres s’occupent des facettes des dons provenant de donneurs vivants, des services de transplantation, etc. Certains programmes gèrent les dons de tissus; d’autres, non. Parfois, il n’y a aucun programme de dons d’organes après le décès, et, parfois, il n’y a pas aucun programme de dons d’organes de donneurs vivants[47].

« Il ne fait aucun doute que le rendement varie en fonction des programmes mis en œuvre par les provinces et même les établissements. À mon avis, c’est un problème auquel nous pouvons réfléchir collectivement. »

Dr Isra Levy, vice-président, Affaires médicales et innovation, Société canadienne du sang

Le Dr Levy, vice-président, Affaires médicales et innovation, Société canadienne du sang, a expliqué que les différences entre les programmes et les services de dons d’organes entraînaient des inégalités dans l’accès aux dons : « [J]’ai pensé qu’il serait important de souligner le fait incontournable et regrettable que la probabilité de pouvoir donner ou recevoir des organes dépend de son lieu de résidence au Canada[48] ». De plus, cela signifie que le Canada ne parvient pas à réaliser son plein potentiel en ce qui concerne l’augmentation de son nombre de donneurs décédés et vivants. Le Dr Levy a précisé que, étant donné que les dons d’organes sont rares, « il nous incombe de ne manquer aucune occasion de tirer parti du don d’un organe ou d’un ensemble d’organes, lorsque l’occasion se présente[49] ».

C. Occasions ratées de don et de greffe

« [J]’ai pensé qu’il serait important de souligner le fait incontournable et regrettable que la probabilité de pouvoir donner ou recevoir des organes dépend de son lieu de résidence au Canada. »

Dr Isra Levy, vice-président, Affaires médicales et innovation, Société canadienne du sang

Les membres du Comité ont aussi appris que l’on rate des occasions de don et de greffe de façon plus générale dans le système de santé[50]. Selon un rapport publié en 2014 par l’Institut canadien d’information sur la santé et portant sur les donneurs décédés potentiels au Canada, à l’issue d’un examen des dossiers des hôpitaux, on a trouvé qu’un seul donneur sur six donneurs potentiels ou admissibles devenait un donneur réel[51]. Comme des témoins ont expliqué, divers facteurs sont susceptibles de contribuer à la non-transformation des donneurs potentiels en donneurs réels, comme l’impunité dont bénéficient les hôpitaux qui ne reconnaissent pas les donneurs potentiels, le fait que des donneurs potentiels sont reconnus, mais ne sont pas présentés au service d’approvisionnement en organes pour faire l’objet d’une discussion avec les membres de leur famille, et les difficultés liées à l’obtention du consentement des familles au don d’organes[52]. Selon Mme Amber Appleby, directrice par intérim, Dons et transplantation Canada, Société canadienne du sang, il est nécessaire d’établir des vérifications obligatoires des décès à l’échelle du Canada afin de déterminer le nombre de donneurs potentiels au pays et de mieux comprendre les facteurs qui contribuent au nombre insuffisant de tels donneurs[53]. De même, la Fondation canadienne du rein a reconnu dans son mémoire que, pour régler le problème, il faut accroître le nombre et la qualité des données sur les occasions manquées par les donneurs. L’organisme explique que « l’approche canadienne de la mesure et du rapport de signalement des donneurs potentiels est morcelée, peu uniforme, et l’information y est peu actuelle et accessible[54] ».

« [I]l nous incombe de ne manquer aucune occasion de tirer parti du don d’un organe ou d’un ensemble d’organes, lorsque l’occasion se présente. »

Dr Isra Levy, vice-président, Affaires médicales et innovation, Société canadienne du sang

D. Consentement

Certains témoins ont aussi dit qu’on éprouvait de la difficulté à obtenir un consentement au don d’organes. Mme Ronnie Gavsie, présidente et chef de la direction du Réseau Trillium pour le don de vie, a expliqué que 90 % des Canadiens se disent en faveur du don d’organes, mais que seulement 20 % d’entre eux s’inscrivent à titre de donneurs d’organes[55], et que de nombreux facteurs sont à l’origine de cet écart, notamment les mythes entourant les dons. Certains estiment que leur âge ou leurs croyances religieuses pourraient les empêcher de devenir donneurs d’organes, ou que le fait de donner des organes aurait des répercussions sur les services hospitaliers qui leur sont offerts. En outre, la procrastination empêche également de s’inscrire pour faire un don, et ces problèmes pourraient être évités au moyen d’une meilleure information et d’une plus grande sensibilisation du public, conjuguées à un nombre accru d’occasions de s’inscrire[56].

Selon Mme Gavsie, un autre problème lié au consentement au don est lié aux familles qui infirment la décision de leurs proches de donner leurs organes, ce qui survient dans 10 à 15 % des cas[57]. Elle a expliqué que cela se produisait principalement dans les cas de décès d’origine cardiaque, au moment de la décision de cesser de maintenir les fonctions vitales; cependant, cette décision est prise lorsque les proches sont réunis, ce qui ne donne pas à l’hôpital suffisamment de temps pour mettre en place le processus de don d’organes. La Dre Lori West, directrice du Programme national de recherche en transplantation du Canada, a également expliqué que cela est attribuable à un écart entre le paysage juridique, qui requiert le consentement d’une personne au don, et ce qui se passe en réalité dans l’établissement de soins de santé lorsqu’il s’agit de respecter les désirs de la personne[58]. En outre, même si l’on instaurait une loi établissant le consentement présumé au don d’organes, qui présume que les personnes consentent à donner leurs organes à moins qu’elles aient expressément refusé de le faire, cela ne résoudrait pas le problème. Comme l’a expliqué Mme Gavsie :

Intuitivement, cela nous semble certainement être une solution miracle. Cependant, quand nous approfondissons la question et examinons la question à l’étranger, nous constatons que ce n’est pas le cas, car la famille doit encore donner son accord et qu’elle n’aurait jamais discuté de la question en raison de la présomption de consentement. Les familles n’ayant aucune raison de discuter de la question diront qu’elles ignorent si le parent a vraiment lu les petits caractères et compris qu’il donnait son consentement par défaut, et qu’elles ne pensent pas qu’il aurait voulu faire don de ses organes[59].

E. Résultats de la greffe

Enfin, les membres du Comité ont appris qu’il est également important d’améliorer les résultats des greffes d’organes afin de diminuer la nécessité de procéder à une nouvelle greffe[60]. La Dre West a indiqué qu’il y avait un nombre sans cesse grandissant de personnes dont la greffe d’organes échoue, et qu’il faut poursuivre les recherches pour comprendre les raisons de ces échecs afin de réduire la nécessité de procéder à nouvelle greffe, ce qui a des effets préjudiciables à la fois sur la santé des receveurs et sur la liste d’attente de dons d’organes au Canada[61].

MANIÈRE DONT LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL POURRAIT CONTRIBUER À AMÉLIORER LE SYSTÈME CANADIEN DE DON ET DE GREFFE D’ORGANES

Les témoins qui ont comparu se sont attachés à décrire des façons dont le gouvernement fédéral pourrait remédier en partie aux difficultés et contribuer à renforcer le système canadien de don et de greffe d’organes, tout en reconnaissant le partage des compétences dans ce domaine.

A. Améliorer le rôle de la Société canadienne du sang à titre d’organisme national de coordination des dons et des greffes d’organes

Des témoins ont évoqué la nécessité de se doter d’une approche ou d’une stratégie nationale relative au don et à la greffe d’organes par souci d’uniformité et d’accès à ceux-ci à l’échelle du pays[62]. Selon le Dr Isra Levy, vice-président, Affaires médicales et innovation, SCS, on pourrait y arriver en renforçant le rôle de la Société canadienne du sang à titre d’agence nationale de coordination et en la dotant d’un budget stable[63]. Le Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, a expliqué qu’à l’heure actuelle, la Section des dons et des greffes d’organes de la SCS dispose d’un budget restreint qui n’est renouvelé que tous les trois ans, et sur demande[64]. Si elle était mieux financée, la Société canadienne du sang pourrait jouer un rôle de chef de file national et, entre autres, élaborer une stratégie nationale pour les dons d’organes comportant les éléments suivants : la promotion de l’élaboration et de la mise en œuvre de pratiques exemplaires en matière de don d’organes dans l’ensemble du pays, des programmes de sensibilisation du public et des professionnels et des programmes interprovinciaux de partage des dons[65].

De plus, un financement stable additionnel pour la SCS lui permettrait de renforcer et d’étoffer les programmes interprovinciaux de partage d’organes déjà en place, tels que le Registre canadien pour la transplantation, un outil électronique qui sert à inscrire en temps réel les patients en attente d’une greffe d’organes ainsi que les donneurs potentiels afin de les jumeler rapidement et de surveiller les résultats des greffes[66]. Des témoins ont indiqué que, malgré la mise en place du Registre, il faut fournir lui un financement supplémentaire pour veiller à ce que toutes les provinces disposent de l’infrastructure informatique nécessaire pour participer à ce programme[67]. En outre, la Société canadienne du sang aimerait étendre son Registre des patients hyperimmunisés afin d’y inclure le partage d’autres types d’organes que les reins, tels que des cœurs[68].

B. Éducation et sensibilisation du public

« À la suite de la tragédie de Humboldt, lorsqu’il a été révélé que l’une des victimes de la tragédie était inscrite à un registre de dons d’organes et que, par conséquent, elle avait sauvé six vies, les inscriptions à des registres ont monté en flèche partout au Canada. Lorsque l’on rappelle aux Canadiens la nature altruiste et l’effet salvateur des dons, ils réagissent. »

Mme Ronnie Gavsie, présidente et chef de la direction, Réseau Trillium pour le don de vie

Des représentants tant du Réseau Trillium pour le don de vie, du gouvernement de l’Ontario, que de BC Transplant, de la Colombie-Britannique, ont fait savoir que des campagnes d’éducation et de sensibilisation du public constituent un élément essentiel de l’amélioration du nombre de don d’organes dans ces provinces[69]. Il faut lancer de telles campagnes pour favoriser les conversations publiques relatives au don d’organes et inviter les gens à inscrire leur décision de donner (ou non) des organes à la fin de leur vie. Mme Ronnie Gavsie, présidente et directrice générale du Réseau Trillium pour le don de vie, a souligné les effets des campagnes de sensibilisation du public sur l’amélioration de l’accès au don d’organes, ajoutant :

À la suite de la tragédie de Humboldt, lorsqu’il a été révélé que l’une des victimes de la tragédie était inscrite à un registre de dons d’organes et que, par conséquent, elle avait sauvé six vies, les inscriptions à des registres ont monté en flèche partout au Canada. Lorsque l’on rappelle aux Canadiens la nature altruiste et l’effet salvateur des dons, ils réagissent[70].

Certes, les provinces et les territoires entreprennent eux-mêmes des campagnes de sensibilisation et d’éducation du public, mais Mme Gavsie a expliqué que le gouvernement fédéral pourrait appuyer ces campagnes en élaborant et en mettant en œuvre une campagne multimédia nationale soutenue afin de favoriser les dons d’organes au Canada[71].

C. Créer des occasions de s’inscrire comme donneur

Les membres du Comité ont appris que la Colombie-Britannique avait réussi à promouvoir le don d’organes en créant différentes façons pour les résidants d’inscrire leur décision de devenir donneurs d’organes, telles que par l’entremise des guichets de services provinciaux où ils ont accès à des programmes et aux services gouvernementaux comme le renouvellement des permis de conduire[72]. Mme Gavsie a expliqué que le gouvernement fédéral pourrait aussi favoriser l’accès de quiconque désire s’inscrire pour devenir donneur d’organes. Par exemple, il pourrait faciliter l’inscription des donneurs lorsque ceux-ci accèdent aux services fédéraux offerts par l’entremise de Service Canada, comme l’obtention et le renouvellement d’un passeport, l’inscription à titre d’électeurs et la production d’une déclaration de revenus[73]. Service Canada pourrait rediriger les particuliers vers les registres de donneurs de leur province ou de leur territoire respectif au moyen de liens Web.

De même, des témoins ont dit appuyer le projet de loi d’initiative parlementaire C-316, Loi modifiant la Loi sur l’Agence du revenu du Canada, qui autoriserait l’Agence à conclure avec toute province ou tout territoire un accord sur la collecte et la communication des renseignements requis afin d’établir ou de maintenir un registre des donneurs d’organes dans la province ou le territoire[74]. Ils ont rappelé qu’au moment de l’inscription au don d’organes par l’entremise de l’impôt fédéral, on devrait fournir de l’information en vue d’appuyer un consentement éclairé dans le domaine[75].

D. Mise en commun des pratiques exemplaires de don et de greffe d’organes

Les dons et les greffes d’organes à l’hôpital relèvent des provinces et des territoires, mais le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle dans ceux-ci en favorisant la mise en commun et la mise en œuvre des pratiques exemplaires ou des composantes essentielles des systèmes de don d’organes à haut rendement qui existent dans certaines provinces et certains territoires du Canada, mais pas dans l’ensemble du pays[76]. Mme Gavsie a expliqué que le financement fédéral pourrait servir à créer des outils et des mesures de soutien à l’intention des autorités provinciales et territoriales et des professionnels du secteur de la santé pour les aider à mettre en œuvre les pratiques exemplaires[77]. Les intervenants ont expliqué que le gouvernement fédéral pourrait encourager les provinces et les territoires à adopter les pratiques exemplaires suivantes, au sujet desquelles ils ont établi qu’il s’agissait de facteurs essentiels de la promotion de la culture du don et de la greffe d’organes dans les systèmes de santé :

  • Présence et formation de médecins spécialistes des dons : des professionnels de la santé dont la mission est d’encourager les dons d’organes dans un hôpital.
  • Recommandation obligatoire de tous les donneurs d’organes potentiels : une loi provinciale ou territoriale pour obliger les professionnels de la santé à recommander tout donneur d’organes potentiel à l’autorité provinciale ou territoriale responsable du don et de la greffe d’organes.
  • Mise en œuvre du don après un décès par arrêt cardiocirculatoire[78].

E. Recherche et collecte de données

Enfin, le gouvernement fédéral devrait soutenir la recherche et la collecte de données afin d’améliorer les résultats pour la santé de la greffe d’organes. Selon la Dre Lori West, le Programme national de recherche en transplantation du Canada (PNRRT) est un réseau de chercheurs, de représentants des gouvernements, de l’industrie et d’organisations universitaires, de patients partenaires et d’organisations subventionnaires qui mène des recherches visant à implanter une culture du don, à faire connaître les pratiques exemplaires dans ce domaine, à améliorer les greffons pour les dons, à optimiser le système immunitaire des patients et à rétablir leur santé à long terme[79]. Elle a aussi expliqué que le Programme recevait des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) un appui financier (trois millions de dollars sur trois ans) qui lui permet de maintenir ses activités, mais qu’il lui faut aussi un financement fédéral soutenu à la fois pour maintenir son réseau de recherche de calibre international, et pour atteindre son objectif d’éliminer la liste d’attente pour des dons d’organes et de s’assurer que les patients ne subissent pas plus d’une greffe d’organes au cours de leur vie[80]. Les responsables du PNRRT présentent actuellement une demande de financement dans le cadre du programme fédéral des Réseaux de centres d’excellence.

Les représentants de la Fondation canadienne du rein ont aussi parlé de l’appui que le gouvernement fédéral pourrait fournir pour l’élaboration d’un système national de collecte de données visant à assurer un suivi des résultats des dons d’organes afin de financer les travaux de recherche et l’amélioration des systèmes[81].

OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS DU COMITÉ

Dans son étude, le Comité a souligné l’importance de se doter d’un système solide de don et de greffe pour améliorer la qualité de vie de bon nombre de Canadiens. En plus d’être un don de vie pour le receveur, le don d’organes touche aussi profondément la vie de la famille endeuillée d’un donneur décédé. Pour citer Mme Laurie Blackstock, une bénévole de la Division nationale de la Fondation canadienne du rein :

Je suis ici pour souligner que les dons d’organes et de tissus n’aident pas seulement les receveurs et leur famille. Il ne s’agit pas seulement de réduire le coût énorme des traitements rénaux à long terme. Il peut aussi s’agir d’un cadeau incroyable pour les familles endeuillées comme la mienne, car lorsque la possibilité de don est présentée avec douceur et de façon éthique, au bon moment, lorsqu’il y a peu ou pas d’espoir de survie d’un être cher, c’est un cadeau. Le fait de savoir que la vie de cinq personnes a probablement changé pour le mieux de façon spectaculaire grâce aux poumons, aux reins et aux cornées de Stephen ne change en rien son décès ni l’intensité de notre deuil, mais cela nous donne tout de même des moments de soulagement. Stephen vit dans ces cinq personnes[82].

« Je suis ici pour souligner que les dons d’organes et de tissus n’aident pas seulement les receveurs et leur famille. Il ne s’agit pas seulement de réduire le coût énorme des traitements rénaux à long terme. Il peut aussi s’agir d’un cadeau incroyable pour les familles endeuillées comme la mienne, car lorsque la possibilité de don est présentée avec douceur et de façon éthique, au bon moment, lorsqu’il y a peu ou pas d’espoir de survie d’un être cher, c’est un cadeau. »

Mme Laurie Blackstock, bénévole de la Division nationale de la Fondation canadienne du rein

Certes, le taux de dons d’organes s’est considérablement amélioré au cours des 10 dernières années, mais des témoins ont indiqué qu’il y a beaucoup plus de travail à faire si l’on veut réaliser le potentiel de greffe d’organes du Canada. Ils ont expliqué que l’on pourrait renforcer le système canadien de don d’organes en appuyant l’adoption de pratiques exemplaires dans ce domaine dans l’ensemble des provinces et des territoires du Canada, en sensibilisant davantage la population en vue de favoriser les discussions à ce sujet entre les membres de la famille, en demandant plus souvent aux Canadiens d’inscrire leur décision de faire don de leurs organes, et en finançant à long terme la recherche et la collecte de données pour que la greffe d’organes permette d’améliorer la santé des Canadiens. Toutefois, on ne pourrait atteindre ces objectifs sans leadership des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et sans que la Société canadienne du sang joue un plus grand rôle dans la coordination des dons d’organes à l’échelle du pays. Ces recommandations s’inscrivent également dans le mandat de la ministre fédérale de la Santé, qui est de « favoriser la collaboration en ce qui concerne un système de don et de greffe d’organes et de tissus qui donne aux Canadiens un accès rapide et efficace aux soins dont ils ont besoin[83]. Le Comité recommande donc :

Recommandation 1

Que le gouvernement du Canada fournisse à la Société canadienne du sang un financement durable permettant :

a. de renforcer et d’élargir les programmes interprovinciaux existants de partage de don et de greffe;

b. de mettre au point une campagne nationale multimédia soutenue d’éducation et de sensibilisation du public pour promouvoir les dons d’organes;

c. d’encourager l’adoption de pratiques exemplaires en matière de don et de greffe d’organes à l’échelle du pays.

Recommandation 2

Que le ministre de la Santé mette sur pied un groupe de travail composé de ministres provinciaux et territoriaux de la Santé et chargé d’examiner les pratiques exemplaires en matière de lois relatives au don d’organes au pays, notamment l’obligation de soumettre le nom de tout candidat potentiel au don d’organes, et d’indiquer les obstacles à la mise en œuvre de ces pratiques.

Recommandation 3

Que le gouvernement du Canada examine la faisabilité d’un système de consentement présumé au don d’organes.

Recommandation 4

Que le gouvernement du Canada crée des occasions pour les Canadiens de s’inscrire comme donneurs d’organes grâce à des points d’accès aux programmes et aux services fédéraux, en collaboration avec les responsables des programmes provinciaux et territoriaux de don d’organes.

Recommandation 5

Que le gouvernement du Canada informe et éduque les Canadiens quant au don d’organes dans le cadre de ses efforts visant à favoriser l’inscription aux dons d’organes par l’entremise des points d’accès aux programmes et aux services fédéraux.

Recommandation 6

Que le gouvernement du Canada continue de financer la recherche sur le don et la greffe d’organes au moyen de son programme des Réseaux de centres d’excellence.

Recommandation 7

Que l’Institut canadien d’information sur la santé et la Société canadienne du sang élaborent conjointement un système national de cueillette de données pour assurer un suivi des résultats des dons d’organes, afin de soutenir les travaux de recherche et l’amélioration des systèmes.


[1]              Chambre des communes, Comité permanent de la santé (HESA), Procès-verbal, 1re session, 42e législature, 7 mars 2016.

[2]              Sonya Norris, Dons et transplantations d’organes au Canada, publication no 2018-13-E, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 14 février 2018.

[3]              Ibid.

[4]              HESA, Témoignages, 1re session, 42e législature, 9 mai 2018, 1610 (Mme Elizabeth Myles, directrice générale nationale de la Fondation canadienne du rein).

[5]              Sonya Norris, Dons et transplantations d’organes au Canada, publication no 2018-13-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 14 février 2018.

[6]              HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1605 (Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta).

[7]              Ibid.

[8]              Ibid.

[9]              HESA, Témoignages, 1re session, 42e législature, 9 mai 2018, 1650 (M. David Hartell, directeur général, Programme national de recherche en transplantation du Canada).

[10]            Sonya Norris, Dons et transplantations d’organes au Canada, publication no 2018-13-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 14 février 2018.

[12]            Loi sur les aliments et drogues, L.R.C. 1985, ch. F-27.

[13]            Sonya Norris, Dons et transplantations d’organes au Canada, publication no 2018-13-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 14 février 2018.

[14]            Ibid.

[15]            Cité dans : Sonya Norris, Dons et transplantations d’organes au Canada, publication no 2018-13-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 14 février 2018.

[16]            HESA, Témoignages, 1re session, 42e législature, 9 mai 2018, 1635 (Kneteman).

[17]            Ibid.

[18]            Conférence pour l’harmonisation des lois au Canada [CHLC], Uniform Human Tissue Donation Act (1990), 1990.

[19]                  Il convient de noter que, si l’interdiction d’achat et de vente d’organes et de tissus humains exclut le matériel reproductif, la Loi sur la procréation assistée du Canada, L.C. 2004, ch. 2, interdit expressément la commercialisation des ovules, du sperme et des embryons.

[20]            Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, « Mémoire présenté au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes : Le rôle du gouvernement fédéral dans l’amélioration de l’accès au don d’organes », 9 mai 2018.

[21]            Ibid.

[22]            Ibid.

[23]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1540 (Dr Isra Levy, vice-président, Affaires médicales et innovation, Société canadienne du sang).

[24]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1545 (Levy)

[25]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1630 (Mme Amber Appleby, directrice par intérim, Dons et transplantation, Société canadienne du sang)

[26]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1530 (M. Edward Ferre, directeur provincial des opérations de BC Transplant)

[27]            Ibid.

[28]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1615 (Levy)

[29]            Ibid.

[30].           Veuillez noter que les expressions « taux de donneurs décédés » et « taux de dons d’organes provenant de donneurs décédés », utilisées par les témoins tout au long des témoignages, sont interchangeables. Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, « Mémoire présenté au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes : Le rôle du gouvernement fédéral dans l’amélioration de l’accès au don d’organes », 9 mai 2018.

[31]            Programme national de recherche en transplantation du Canada, « Transplant pour la vie, La transplantation sauve des vies, Faites partie intégrante de ce projet d’envergure exceptionnelle », mémoire, 9 mai 2018.

[32]            Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, « Mémoire présenté au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes : Le rôle du gouvernement fédéral dans l’amélioration de l’accès au don d’organes », 9 mai 2018.

[33]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1605 (Kneteman).

[34]            Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, « Mémoire présenté au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes : Le rôle du gouvernement fédéral dans l’amélioration de l’accès au don d’organes », 9 mai 2018.

[35]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1605 (Kneteman).

[36]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1540 (Levy).

[37]            Ibid.

[38]            Sonya Norris, Dons et transplantations d’organes au Canada, publication no 2018-13-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, Ottawa, 14 février 2018.

[39]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1550 (Dre Lori West, directrice du Programme national de recherche en transplantation du Canada).

[40]            Programme national de recherche en transplantation du Canada, « Transplant pour la vie, La transplantation sauve des vies, Faites partie intégrante de ce projet d’envergure exceptionnelle », mémoire, 9 mai 2018.

[41]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1610 (Myles).

[42]            Ibid.

[43]            Ibid.

[44]            Programme national de recherche en transplantation du Canada, « Transplant pour la vie, La transplantation sauve des vies, Faites partie intégrante de ce projet d’envergure exceptionnelle », mémoire, 9 mai 2018.

[45]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1605 (Kneteman) et Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, « Mémoire présenté au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes : Le rôle du gouvernement fédéral dans l’amélioration de l’accès au don d’organes », 9 mai 2018.

[46]            Ibid.

[47]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1545 (Levy).

[48]            Ibid.

[49]            Ibid.

[50]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1650 (Hartell).

[52]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018 (Hartell, West et Kneteman).

[53]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1640 (Appleby).

[55]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1600 (Mme Ronnie Gavsie, présidente et chef de la direction, Réseau Trillium pour le don de vie).

[56]            Ibid.

[57]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1615 (Gavsie).

[58]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1635 (West).

[59]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1620 (Gavsie).

[60]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1630 (West).

[61]            Ibid.

[62]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1500 (Levy) and HESA, Témoignages, 9 mai 2018 (Kneteman, Myles).

[63]            Société canadienne du sang, « Sommaire des recommandations de la Société canadienne du sang au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes », mémoire, 27 juillet 2018.

[64]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1610 (Kneteman).

[65]            Société canadienne du sang, « Sommaire des recommandations de la Société canadienne du sang au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes », mémoire, 27 juillet 2018 et HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1610 (Myles).

[66]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1630 (Appleby) et HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1630 (Kneteman).

[67]            Ibid.

[68]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1630 (Appleby).

[69]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1530 (Mme Leanne Appleton, directrice générale provinciale et M. Edward Ferre, BC Transplant) et 1550 (Gavsie).

[70]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1550 (Gavsie).

[71]            Ibid.

[72]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1530 (Ferre).

[73]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1550 (Gavsie).

[75]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018 (Appleton, Gavsie, Levy).

[76]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018 (Levy, Gavsie) et HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1610 (Kneteman).

[77]            HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1550 (Gavsie).

[78]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1610 (Kneteman) et HESA, Témoignages, 7 mai 2018, 1530 (Ferre) et Dr Norman Kneteman, professeur et directeur de la Division de chirurgie de transplantation de l’Université de l’Alberta, « Mémoire présenté au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes : Le rôle du gouvernement fédéral dans l’amélioration de l’accès au don d’organes », 9 mai 2018.

[79]            Programme national de recherche en transplantation du Canada, « Transplant pour la vie, La transplantation sauve des vies, Faites partie intégrante de ce projet d’envergure exceptionnelle », mémoire, 9 mai 2018.

[80]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1640 (West)

[82]            HESA, Témoignages, 9 mai 2018, 1620 (Mme Laurie Blackstock, bénévole de la Division nationale de la Fondation canadienne du rein).

[83]            Premier ministre du Canada, Lettre de mandat de la ministre de la Santé, 4 octobre 2017.