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Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi à l'étape de la troisième lecture. Malheureusement, c'est le dernier jour de débat sur une question de sécurité nationale sur laquelle le gouvernement et tous les partis de l'opposition sont partagés.
Les députés ministériels ont mentionné la nature particulière du comité qui est proposé. Ils disent qu'il nous permettrait de rattraper notre retard sur ce qu'on appelle le Groupe des cinq, qu'il donnerait à quelques parlementaires un accès spécial à de l'information classifiée et qu'il aurait un mandat pangouvernemental. Ces allégations sont toutes vraies, mais elles constituent aussi le strict minimum qu'on devrait exiger. Ce sont simplement les caractéristiques essentielles d'un comité de surveillance.
J'espère que les députés ministériels sont un peu ébranlés dans leurs certitudes en constatant que tous les partis de l'opposition et les experts respectés de l'ensemble de l'échiquier politique signalent les mêmes lacunes dans le projet de loi du gouvernement. J'ai parlé de ces lacunes en détail au sein du comité de la sécurité publique et dans cette enceinte. Mes collègues et moi avons consulté des experts non partisans pour rédiger plus d'une dizaine d'amendements afin de combler ces lacunes.
Je vais résumer les lacunes du projet de loi le plus succinctement possible pour les Canadiens.
Le comité aura pour tâche de surveiller le fonctionnement et les opérations classifiées de tous les organismes gouvernementaux liés au renseignement et à la sécurité nationale. Ce comité de 11 membres étudiera les activités de quelque 20 ministères et organismes gouvernementaux — lesquels disposent d'un budget de plusieurs milliards de dollars et dont certains n'ont jamais été assujettis à la surveillance. Lorsque les 11 membres siégeront ensemble pour la première fois, ils disposeront seulement d'un personnel dévoué, d'un budget restreint et des pouvoirs qui leur sont conférés noir sur blanc dans le projet de loi. C'est là qu'ils commenceront à se heurter à des obstacles.
Malgré la cote de sécurité très secret de ces parlementaires, le projet de loi leur interdirait d'accéder à certains renseignements opérationnels. Ils seraient incapables d'assigner des témoins et d'exiger la présentation de documents. Au lieu de cela, ils pourraient seulement demander de l'information aux ministres, qui auraient le droit de la leur cacher.
Bien qu'il coupe les ailes du comité à chaque tournant, le projet de loi confère de vastes pouvoirs au Cabinet et au . Les ministres peuvent mettre un terme aux enquêtes. Le premier ministre peut nommer tous les membres du comité de surveillance et censurer ses rapports.
Les Canadiens pourraient bien poser la question suivante: l'organisme de surveillance peut-il réellement accomplir son travail avec si peu de pouvoir pour le Parlement et tellement de pouvoir pour le Cabinet? C'est justement dans ce contexte que le gouvernement a mis fin au débat, alors qu'à peine le dixième des représentants élus par la population ont pu y participer. Voilà le contexte.
Selon moi, la question essentielle à laquelle les députés doivent répondre est la suivante: les pouvoirs qu'accorde le projet de loi instaurent-ils le droit de regard rigoureux que souhaitent les Canadiens dans la foulée du projet de loi et des pouvoirs extraordinaires qu'on s'apprête à confier aux services de sécurité? Il s'agit d'une question importante parce qu'il ne suffit pas que le comité puisse surveiller des activités qui ne suscitent aucune controverse. Ce qui importe vraiment, c'est que le comité puisse tenir tête à un gouvernement qui violerait la loi, qui ne protégerait pas les intérêts des Canadiens et qui empiéterait sur les droits et libertés qu'ils ont chèrement acquis.
Que ce soit clair: je ne peux pas, dans ce contexte, appuyer la version actuelle du projet de loi. À mon avis, il ne permettrait pas de répondre à cette condition essentielle et il ne servirait pas les intérêts des Canadiens. Dans le contexte actuel, le comité devrait justement être rigoureux, indépendant et efficace, mais ce qui est proposé fait passer la culture du secret avant la transparence, et le pouvoir exécutif avant la reddition de comptes.
Après l'échec des services de renseignement que représentent les attentats du 11 septembre, la commission américaine chargée de ce dossier a formulé la mise en garde suivante: « La culture du secret nuit à la surveillance [...] les mécanismes organisationnels actuels incitent à la surclassification du niveau de sécurité. Il faudrait changer cet équilibre [...] » Elle dit aussi ceci: « Nous estimons que, tant que la surveillance est affaiblie, les Américains ne seront pas protégés comme ils le veulent et comme il le faut. »
C'est cela qui compte: ne pas faire de vaines promesses aux Canadiens, mais au contraire, leur prouver concrètement que leur sécurité est assurée et que leurs droits sont respectés. Le projet de loi respecte-t-il cette exigence en ce qui concerne la surveillance des activités?
Quand le s'est opposé au renforcement des pouvoirs du comité, il l'a comparé aux comités semblables qui existent au Royaume-Uni, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Il a souligné correctement que dans ces pays, le gouvernement avait le droit de ne pas divulguer de renseignements sensibles au comité de surveillance. Toutefois, il a omis un fait important, soit qu'aucun de ces comités n'est un comité de surveillance opérationnelle. Or, celui du Canada le serait, et il ne serait que le deuxième de la sorte au sein du Groupe des cinq.
Comment ses pouvoirs se compareraient-ils à ceux des comités du Congrès américain? Qu'exigent les Américains de leurs comités pour le travail que l'on demanderait à notre comité de faire ici? Aux États-Unis, les comités spéciaux de la Chambre des représentants et du Sénat sont tenus informés en temps réel de toutes les activités de renseignement. Ils peuvent réduire le financement et même passer outre les décisions de la Maison-Blanche afin d'exiger la divulgation de renseignements déjà classifiés, si cela sert l'intérêt national. Cela va bien au-delà de ce que les partis d'opposition proposent que l'on fasse au Canada.
Si nous adoptons ce projet de loi sans l'amender, nous confierons un mandat au comité de surveillance sans lui fournir les outils nécessaires pour s'en acquitter. Pourtant, le gouvernement refuse de doter le comité de ces outils, même si l'opposition et les experts non partisans le lui demandent, ce qui nous amène à parler de la question fondamentale de la confiance.
Pour justifier les vastes pouvoirs dont disposerait le Cabinet pour faire obstruction à la surveillance, le gouvernement invoque comme prétexte le seul cas où tout le monde est d'accord, soit la nécessité de protéger les personnes visées par le Programme de protection des témoins. Nous en avons tous entendu parler aujourd'hui. Un député ministériel a dit qu'il était nécessaire de faire une distinction dans le cas de l'information particulièrement sensible. En tout respect, je dois lui répondre qu'il passe à côté de la question. Tous les dossiers sur lesquels le comité se pencherait seraient par définition particulièrement sensibles. Il ne devra pas y avoir de fuites, et je suis certain qu'il n'y en aura pas, tout comme il n'y en a pas eu au Royaume-Uni, au fil des 22 années où un comité semblable a existé.
Si l'identité des témoins protégés était la seule information à laquelle le comité n'avait pas accès, j'en serais fort aise, mais comme ce n'est pas le cas, nous constatons que le gouvernement manifeste un manque de confiance flagrant envers le comité. Il n'y aucune distinction de prévue entre l'identité des témoins protégés et le reste de l'information qui pourrait être comprise dans le mandat du comité. Toute cette information est susceptible de mettre en péril la sécurité nationale ou la sécurité des personnes. Nous nous demandons donc pourquoi le gouvernement remettrait au comité des détails sur les activités à surveiller s'il n'est pas capable de lui faire assez confiance pour lui révéler les noms des témoins. Je crains fort qu'en fait, le gouvernement refuse de fournir ces détails. Si nous adoptons le projet de loi dans sa forme actuelle, nous donnerons au gouvernement le pouvoir de cacher de l'information à tout bout de champ. Nous lui permettrons de refuser aux Canadiens la surveillance des activités qu'il leur a promise et nous minerons gravement la confiance des Canadiens envers cette nouvelle institution. Si le Cabinet ne peut pas faire confiance au comité, pourquoi les Canadiens lui feraient-ils confiance?
Bien entendu, le gouvernement soutient que ces pouvoirs ne seraient exercés que rarement et avec les meilleures intentions. La foi des libéraux en leurs bonnes intentions est sincère, selon moi, mais je crois qu'elle les empêche de voir le véritable contenu du projet de loi. Prenons, par exemple, l'article 21. Il y est question du pouvoir qu'a le Cabinet de filtrer les informations produites par le comité qui seront rendues publiques. Cet article a fait l'objet de plusieurs amendements. Pas moins de six députés ministériels ont affirmé que ce pouvoir vise uniquement le filtrage des renseignements classifiés. Encore une fois, si c'était vrai, je serais d'accord, mais ce n'est tout simplement pas le cas. En effet, le paragraphe concerné ne renferme même pas le mot « classifié ». En réalité, il autorise le premier ministre à censurer toute information dont la communication pourrait, selon lui, porter atteinte à la sécurité, à la défense nationale, ou même aux relations internationales. La conviction du premier ministre suffit pour qu'il en soit ainsi et que les renseignements ne soient pas divulgués.
Selon une autre affirmation, soutenue par cinq députés ministériels, le pouvoir de révision ne s'applique pas aux conclusions du comité. Encore une fois, j'appuierais une telle disposition si elle faisait partie du projet de loi, mais ce n'est pas le cas.
C'est devenu une habitude. Trop souvent, les députés du gouvernement nous assurent des bonnes intentions des auteurs d'un projet de loi et oublient qu'il faut rédiger une loi en tenant compte du fait qu'elle demeurera en vigueur après le départ de ses auteurs. Nous ne légiférons pas seulement pour le régime actuel, mais aussi pour l'avenir.
Il est possible que le actuel n'ait pas l'intention d'utiliser ses pouvoirs pour supprimer des conclusions embarrassantes de comités, mais un autre le pourrait. Le cabinet actuel ne prévoit peut-être pas user de ses pouvoirs pour annuler des enquêtes ou camoufler une mauvaise gestion ou un scandale, mais nous ignorons ce que nous réserve l'avenir. Le gouvernement actuel n'a peut-être pas l'intention d'exclure l'opposition officielle d'un comité, d'utiliser des nominations pour contrôler l'ordre du jour ou de camoufler une surveillance illégale en refusant de révéler des détails opérationnels pour des raisons de sécurité, mais un futur gouvernement pourrait l'envisager.
Prenons, par exemple, les enquêtes qui ont lieu en ce moment au sud de la frontière, à propos des liens entre le président Trump et la Russie et des allégations d'écoute électronique du président. Si le projet de loi s'appliquait aux États-Unis, le président Trump pourrait lire les rapports des comités de surveillance des activités de renseignement du Congrès et supprimer l'information qu'il jugerait nuisible aux relations étrangères. Son cabinet pourrait restreindre les enquêtes, ou même y mettre fin, simplement en exerçant le privilège lié à la sécurité nationale.
Voilà pourquoi les Canadiens exigent que le comité respecte des normes élevées en matière de pouvoirs et d'autonomie. Le temps venu, il pourra servir de contrepoids véritable à la mainmise de l'exécutif et mettre fin aux opérations qui violent les droits des Canadiens ou à une mauvaise gestion qui nuit à leur sécurité. Dans sa forme actuelle, il n'atteint tout simplement pas ces normes.
Je tiens cependant à reconnaître les progrès qui ont été réalisés et à souligner l'excellent travail qui a été accompli par des membres du public et le comité de la sécurité publique. En raison d'un amendement proposé par le NPD, le nouveau comité de surveillance aurait maintenant l'obligation légale de signaler toute activité illégale potentielle au sein de l'appareil de la sécurité nationale au procureur général du Canada.
Les futurs premiers ministres conserveraient le droit de censurer les rapports en raison de motifs généraux, mais les Canadiens pourraient maintenant voir exactement quelles corrections ont été apportées au texte d'un rapport et les raisons pour lesquelles ces corrections ont été effectuées. De plus, bien que les ministres conserveraient malheureusement le pouvoir de cacher des renseignements et même de mettre fin à des enquêtes, les Canadiens auraient maintenant l'occasion de surveiller l'utilisation de ces pouvoirs chaque année.
Je tiens à saluer le travail acharné de tous les membres du comité de la sécurité publique. Ils ont prouvé qu'il est possible de réaliser des progrès lorsque le gouvernement accepte de travailler avec les partis de l'opposition. Le gouvernement peut toutefois attendre avant de se targuer d'avoir accepté une poignée d'idées des autres partis: on doit d'abord expliquer clairement tout ce qu'il a refusé.
Le plan que nous avons proposé donnait au comité de surveillance l'accès complet à l'information, ainsi que le pouvoir d'assigner des témoins et d'ordonner la production de documents. Notre plan leur donnait également le droit de mener une enquête sur n'importe quel enjeu sans l'intervention des ministres. Il accordait également au comité le droit de choisir son propre président parmi les membres, et sa composition concorderait avec l'équilibre entre les partis à la Chambre. De plus, notre plan permettait le libre échange d'idées entre les organismes d'examen spécialisés existants. Le gouvernement a rejeté chacune de ces propositions.
Des progrès ont été réalisés dans la marge, mais le gouvernement demande maintenant au Parlement d'approuver la création d'un comité de surveillance qui ne disposerait que d'un accès partiel à l'information dont il a besoin pour bien effectuer son travail pour les Canadiens: un comité qui ne pourrait que demander de l'information au Cabinet et non l'ordonner directement, et un comité dont les membres sont tous choisis par le premier ministre, sans aucune exigence d'inclure des membres provenant des plus importants partis de l'opposition. Ce comité aurait sa place en Australie, en Nouvelle-Zélande ou même en France, là où on ne s'attend à aucune surveillance des activités, mais ce genre de comité est tout à fait inapproprié au Canada.
Je ne peux pas accepter le modèle établi par le gouvernement, pour deux raisons fondamentales: premièrement, il fait pencher l'équilibre un peu trop vers le pouvoir exécutif, aux dépens de la responsabilité parlementaire; deuxièmement, il ne satisfait pas à la norme élevée de surveillance opérationnelle que les libéraux ont rendue nécessaire lorsqu'ils se sont joints aux conservateurs pour accroître considérablement les pouvoirs en matière de sécurité au moyen du projet de loi .
Lorsqu'on pense à ces deux raisons, l'attitude du gouvernement à l'égard de cette mesure législative est très décevante. En ce qui concerne la surveillance parlementaire, le gouvernement a adopté l'approche « c'est mieux que rien », selon laquelle il faut se réjouir du peu que l'on a. Cela laisse à penser que la sécurité nationale relève de la compétence exclusive de l'exécutif et que le Parlement est en quelque sorte un invité ingrat à la table du gouvernement. C'est tout simplement inacceptable.
Les députés se rappelleront que le Président Milliken avait été saisi de pareille question en 2010. Il s'était prononcé sur la tentative du gouvernement de refuser de produire des documents à l'intention du Parlement concernant l'affaire des prisonniers afghans. Refusant que le Parlement joue un rôle de surveillance dans l'intérêt des Canadiens, l'exécutif alléguait que le droit général d'enquêter du Parlement était limité par la nécessité de l'exécutif d'assurer la sécurité nationale. Selon le gouvernement, le Parlement allait trop loin en demandant des renseignements sur des questions de sécurité et menaçait la séparation constitutionnelle des pouvoirs. Les parallèles avec le débat actuel sont manifestes.
Quel a été le dénouement? Après une analyse exhaustive, le Président Milliken a statué que le droit d'accès à l'information accordé au Parlement, pour lui permettre de faire son travail, est « absolu ». En fait, en essayant de censurer les renseignements fournis au Parlement, c'est l'exécutif qui mettait en péril la séparation appropriée des pouvoirs.
Dans notre système, les représentants élus au Parlement doivent être le dernier rempart en matière de surveillance. Cela doit être convenu de façon unanime à la Chambre. Comme le Président Milliken, nous reconnaissons tous que des mesures de protection spéciales doivent être en place afin de permettre au Parlement d'exercer ce rôle de surveillance dans les domaines de nature délicate comme la sécurité nationale et le renseignement.
Voilà pourquoi les néo-démocrates ont appuyé nombre de mesures proposées afin de protéger les renseignements confidentiels. Par exemple, nous avons accepté que tous les membres se soumettent à une enquête de sécurité. C'est une mesure qui a été rejetée par le Parlement britannique, mais nous sommes d'accord. Par ailleurs, nous estimons raisonnable que les députés renoncent à leur immunité parlementaire contre les risques de poursuite en cas de fuite d'information. Nous croyons que c'est tout à fait raisonnable, alors que cette mesure a été rejetée par la Nouvelle-Zélande, un autre de nos alliés du Groupe des cinq.
Ces mesures de protection supplémentaires devraient servir à faciliter l'échange de renseignements classifiés nécessaire à la surveillance des activités. Or, le projet de loi transforme ces remparts en barrages. Il demande au Parlement d'accepter que la surveillance s'exerce par l'entremise non pas d'un comité parlementaire, mais d'un adjoint de l'exécutif, c'est-à-dire du Cabinet du . Il demande au Parlement de permettre à l'exécutif d'imposer son veto pour restreindre l'accès à l'information, allant ainsi à l'encontre non seulement de l'avis des spécialistes, mais aussi de l'interprétation du Président au sujet de la procédure parlementaire. Il demande au Parlement de limiter par voie législative les pouvoirs qui lui permettent de faire enquête afin de déterminer dans quelle mesure le gouvernement en place protège les intérêts des Canadiens en ce qui concerne la sécurité et la protection des libertés civiles.
Puisque nous croyons que le Parlement doit demeurer le dernier rempart en matière de surveillance, et parce que nous ne pouvons pas accepter une surveillance inadéquate de la façon dont sont exercés les pouvoirs que les libéraux et les conservateurs ont accordés aux organismes de sécurité canadiens, notamment au titre du projet de loi , malgré les protestations de nombreux Canadiens, le Nouveau Parti démocratique ne peut pas appuyer le projet de loi sous sa forme actuelle.
Nous avons cependant tout ce qu'il faut pour le rendre acceptable. Les partis ont trouvé un consensus et ils sont tous prêts à collaborer afin de trouver un compromis. Tous les outils dont nous avons besoin sont là. Il ne manque que le temps.
Je demande aux députés de faire ce que les membres du comité seront bientôt appelés à faire, c'est-à-dire mettre de côté leurs intérêts partisans et se demander si le projet de loi, avec tous les défauts que lui ont trouvés les nombreux spécialistes de la sécurité, répond aux normes de surveillance opérationnelle auxquelles les Canadiens sont en droit de s'attendre après le projet de loi . S'ils soupçonnent le moindrement qu'il risque de ne pas répondre aux attentes des Canadiens, je les invite alors à appuyer l'amendement que voici. Je propose:
Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots suivant le mot « Que », de ce qui suit:
« le projet de loi C-22, Loi constituant le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et modifiant certaines lois en conséquence, ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu’il soit renvoyé au Comité permanent de la sécurité publique et nationale pour que ce dernier réexamine les articles 8, 14 et 16 afin de déterminer si les pouvoirs d’enquête et les restrictions qui y sont prévus permettent une surveillance suffisamment solide des activités de renseignement et de sécurité nationale. »
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Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député d'.
Je suis ravi d'intervenir à la Chambre aujourd'hui pour appuyer le projet de loi , Loi constituant le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et modifiant certaines lois en conséquence. Le projet de loi C-22 vise à remplir l'engagement pris par le gouvernement envers les Canadiens qui consiste à présenter un projet de loi destiné à créer le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, le CPSNR.
Au cours de mon discours, je soulignerai trois questions clés qui montrent à quel point il est important de créer le CPSNR, soit: premièrement, renforcer la reddition de comptes et la transparence du gouvernement; deuxièmement, mettre sur pied un cadre de sécurité complet et réactif, doté d'un mandat ayant une vaste portée; troisièmement, assurer un accès exceptionnel aux renseignements classifiés afin d'examiner de près les opérations de renseignement et de sécurité.
Le projet de loi est un élément essentiel des efforts déployés par le gouvernement du Canada pour veiller à ce que les opérations en matière de sécurité nationale du pays ne soient pas soustraites à la surveillance du Parlement, tout en respectant les droits et les libertés des Canadiens. Je crois qu'il s'agit là d'une des fonctions fondamentales les plus importantes du gouvernement.
De nombreuses démocraties occidentales, dont nos alliés du Groupe des cinq — les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande —, disposent d'une entité de surveillance parlementaire du milieu de la sécurité nationale semblable à celle proposée dans le projet de loi. Comme dans le cas de ces organes parlementaires, le projet de loi vise à permettre l'examen du travail des ministères et organismes fédéraux en matière de sécurité nationale et à les obliger à rendre des comptes quant à leurs actions et à leurs responsabilités.
À l'heure actuelle, le Canada a plusieurs organismes de surveillance qui examinent les activités des agences et des organisations gouvernementales touchant aux opérations de sécurité nationale. Bien que chacun d'eux effectue du travail important, ils sont propres à une organisation et leurs examens ne nécessitent pas la participation directe des parlementaires.
La création du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement renforcerait la transparence et la reddition des comptes, prévoirait la possibilité d'examens pangouvernementaux et justifierait l'amélioration de l'efficacité et de l'efficience du vaste cadre d'examen. De plus, elle permettrait à un organisme parlementaire de jouir d'une indépendance complète lorsqu'il examine des dossiers sans pour autant nuire à la sécurité nationale.
Je tiens aussi à souligner que le gouvernement demeure résolu à régler les aspects problématiques du projet de loi , qui a été présenté par le gouvernement précédent, et les préoccupations qu'il suscite chez les Canadiens. Il présentera un nouveau projet de loi établissant un meilleur équilibre entre la sécurité collective et nos droits et libertés. Le projet de loi offre un début de solution à la question.
Premier élément clé: il est important de former le comité parce qu'il répondrait au besoin de reddition de comptes souligné depuis plus de 10 ans par des experts du secteur privé, des commissions d'enquête et le vérificateur général en raison de l'absence d'un organisme parlementaire indépendant chargé d'examiner les activités liées à la sécurité et au renseignement.
Pour donner au comité le temps et la possibilité d'assimiler ses importantes fonctions et de bien connaître et comprendre le contexte national et international en matière de sécurité et de renseignement, le gouvernement prévoit des dispositions instaurant l'examen automatique, après cinq ans, du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, afin qu'il puisse tirer parti adéquatement et rapidement des leçons qu'il aura apprises. On peut donc constater que le gouvernement libéral est conscient de l'évolution constante des menaces à la sécurité. On voit aussi qu'il reste vigilant, qu'il s'adapte et qu'il rend des comptes concernant le cadre de sécurité du Canada.
Le gouvernement a présenté le projet de loi dont nous sommes saisis. Le comité l'a étudié et a proposé des amendements. Après mûre réflexion, le gouvernement a accepté la majorité des propositions du comité permanent.
L'un de ces amendements consiste à ajouter une disposition sur les dénonciateurs. En vertu de l'article 31.1, le comité doit désormais informer le ministre compétent et le procureur général du Canada de toute activité qui, à son avis, pourrait ne pas être conforme à la loi. Selon moi, cet amendement améliore encore plus l'excellent projet de loi , car il garantit aux Canadiens que nous chercherons toujours à accroître nos responsabilités et les exigences en matière de reddition de comptes afin de mieux les protéger.
Le deuxième élément clé est que le comité aurait un mandat pangouvernemental et se pencherait sur toute question de sécurité nationale.
Le comité serait habilité à effectuer des examens des opérations de sécurité nationale et relatives au renseignement, notamment en ce qui a trait aux opérations en cours, ainsi que des examens stratégiques et systémiques des cadres en matière de législation, de réglementation, de politiques, de dépenses et de fonctions administratives en vertu desquels ces opérations sont menées.
Il serait également habilité à examiner les questions transmises par un ministre.
Du fait de ce vaste mandat à examiner quelque opération que ce soit, y compris une opération en cours, le ministre aurait le pouvoir de mettre fin à un tel examen s'il était déterminé qu'il porterait atteinte à la sécurité nationale.
Il est important de noter que le ministre aurait le pouvoir discrétionnaire de refuser de divulguer des renseignements opérationnels spéciaux au cas par cas, lorsque leur divulgation porterait atteinte à la sécurité nationale.
Même si ces pouvoirs ministériels sont raisonnables, je souhaite souligner que les ministres ne seraient pas en mesure de refuser de divulguer n'importe quelle information. Cela serait permis dans des situations spéciales et précises seulement, qui concernent des catégories définies par la loi ou des renseignements sensibles relatifs à sécurité nationale et dont la divulgation aurait des conséquences en matière de sécurité nationale pour le Canada.
Le gouvernement a convenu il y a peu de temps d'adopter l'amendement proposé par le comité de la sécurité publique pour restreindre l'autorité du ministre d'établir qu'un examen du CPSNR porterait atteinte à la sécurité nationale, qui ne s'applique qu'aux opérations en cours. Le ministre serait tenu d'expliquer sa décision au CPSNR et de prévenir ce dernier sans délai de tout changement de la décision ou de la fin de l'opération en question.
Enfin, le gouvernement appuie également des amendements à l'article 14, soit celui qui énumère les types de renseignements auxquels le CPSNR n'aurait pas accès. Le CPSNR aura ainsi un plus grand accès aux différents types de renseignements à sa disposition. Nous avons retiré de la liste d'exclusions les renseignements touchant les activités de renseignement de défense en cours à l'appui d'opérations militaires, les renseignements confidentiels selon la Loi sur Investissement Canada et les renseignements recueillis par le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada.
Je pense que le projet de loi s'en trouve renforcé et je remercie les membres du comité de la sécurité publique d'avoir proposé ces changements.
Il reviendra en outre au CPSNR de décider des questions de sécurité nationale et de renseignement sur lesquelles il se penchera. Le gouvernement pourra aussi lui soumettre des questions pour étude.
Le gouvernement est déterminé à protéger les Canadiens contre les menaces à la sécurité nationale. Le projet de loi veillerait à l'efficacité du cadre de sécurité nationale pour ce qui est de protéger les Canadiens sans passer outre à la Charte des droits et libertés.
Un tel mécanisme de reddition de comptes est crucial pour le Canada et c'est ce que les Canadiens ont demandé. C'est exactement ce que le gouvernement met sur pied. Le Canada va de l'avant pour que les Canadiens puissent constater des résultats concrets et positifs entourant le grave enjeu de la sécurité nationale.
Le projet de loi donnerait aux parlementaires un accès extraordinaire à des renseignements classifiés. Le Canada serait doté d'un organe de surveillance parlementaire semblable à ceux qui existent dans les pays qui sont nos alliés en matière de sécurité nationale.
Le projet de loi est une promesse que nous avons faite et que nous avons tenue.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole à l'étape de la troisième lecture du projet de loi , qui établira un comité de parlementaires pour surveiller les organismes de sécurité canadiens.
Le système de sécurité du Canada et son mécanisme de surveillance doivent être conçus de façon à protéger les droits et les libertés des Canadiens. Le Canada, dans toute sa force et sa liberté, est le meilleur pays du monde, et ce sont ces qualités synergiques qui font de lui le pays qu'il est. Les attentats terroristes récemment survenus à Québec, à Strathroy, et ici même, sur la Colline du Parlement, en 2014, nous rappellent qu'aucun pays n'est à l'abri des actes de personnes cherchant à remettre en cause cette liberté et cette sécurité. Bien que nos relations mondiales solides, nos plans d'intervention en cas de crise et nos réseaux interreliés d'organismes d’application de la loi soient parmi les meilleurs au monde et sachent s'adapter à l'évolution rapide des menaces mondiales, nous devons assurer une surveillance parlementaire indépendante afin de protéger les droits et les libertés de tous les Canadiens.
Le Canada fait figure de traînard à cet égard par rapport à nos alliés depuis bien trop longtemps. Le projet de loi nous aidera à les rattraper, à mieux informer le public au sujet d'importants enjeux de sécurité nationale, et à éliminer un maillon faible dans la chaîne de responsabilité en matière de sécurité nationale. En fait, la version du projet de loi présentée en juin dernier nous aurait déjà permis de devancer bien des pays en matière de surveillance parlementaire sur le plan de la sécurité nationale. Grâce aux amendements adoptés à la Chambre plus tôt cette semaine, le Canada est sur le point de devenir un chef de file mondial dans le domaine de la reddition de comptes en matière de sécurité nationale.
Il vaut la peine de rappeler tout le parcours qui a accompagné la création de ce comité de parlementaires et l'esprit du débat qui nous a permis d'en arriver à cette étape de sa création. Ce parcours a été bien long. Il y a 30 ans, la Commission McDonald avait proposé de créer un comité indépendant d'examen de la sécurité, en partie en raison de la demande populaire, qui souhaitait des mécanismes de surveillance des organismes d'application de la loi. La population craignait de plus en plus que les activités d'application de la loi effectuées en secret, mais sans surveillance, finissent par avoir pour effet que nos organisations paramilitaires, policières et de sécurité se considèrent au-dessus des lois et versent dans l'illégalité. Par contre, le public ne voulait pas non plus d'un organisme parlementaire ou gouvernemental aux pouvoirs trop vastes.
Passons rapidement à 2005, quelques années seulement après la tragédie du 11 septembre. Dans ce contexte incertain et changeant, la population exigeait une protection accrue et un renforcement des mesures de sécurité. Le gouvernement du premier ministre Paul Martin a présenté une mesure législative visant à créer un comité parlementaire sur la sécurité nationale et le renseignement, conformément aux exigences nouvelles de la population, qui souhaitait une surveillance plus étroite. Comme nous le savons, ce projet de loi est mort au Feuilleton.
Au cours de la dernière décennie, le débat public et parlementaire dans ce domaine a pris de l'ampleur; la façon d'assurer notre sécurité et de protéger nos droits est devenue un point d'intérêt majeur et est maintenant un élément déterminant de la politique publique. Ces dernières années, nous avons discuté et débattu d'un accroissement de la responsabilité des organismes chargés de la sécurité nationale et du renseignement, dans la foulée des enquêtes judiciaires et des événements entourant l'affaire Maher Arar.
Nous avons été saisis de divers projets de loi au fil du temps, dont celui qui a été présenté par la députée de Vancouver Quadra et qui a été rejeté par le gouvernement conservateur du moment, quelques mois à peine avant que le projet de loi soit présenté.